Sommaire

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet

Secrétaires :

MM. Christian Cambon, M. Claude Dilain.

1. Procès-verbal

2. Décès d’un ancien sénateur

3. Désignation d’un sénateur en mission temporaire

4. Dépôt d’un document

5. Nouvelle organisation territoriale de la République. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Demande de réserve

Demande de réserve des amendements nos 186 rectifié à 635, portant articles additionnels après l’article 17 bis, après l’article 23. – Mme Marylise Lebranchu, ministre ; M. le président ; M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. – La réserve est ordonnée.

Articles additionnels après l'article 9

Amendement n° 212 de M. Jean-Claude Leroy. – Rejet.

Amendement n° 320 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rejet.

Amendement n° 223 de M. Hervé Maurey, repris par la commission sous le n° 1149. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 10

Amendements identiques nos 54 rectifié de M. Claude Kern, 86 de M. Jacques Bigot, 629 de M. Marc Daunis et 993 de M. André Reichardt. – Retrait de l’amendement 54 rectifié, les amendements nos 86, 629 et 993 n'étant pas soutenus.

Adoption de l’article.

Article 11 (supprimé)

Amendement n° 450 de Mme Odette Herviaux. – Retrait.

Amendement n° 766 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 955 de M. Ronan Dantec. – Retrait.

L’article demeure supprimé.

Article 12 (supprimé)

Amendement n° 608 de M. François Patriat. – Retrait.

Amendement n° 767 du Gouvernement. – Retrait.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication

L’article demeure supprimé.

Articles additionnels après l'article 12

Amendement n° 1102 rectifié de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 399 rectifié bis de Mme Dominique Gillot et sous-amendé par n° 1040 rectifié bis de M. Bruno Retailleau, repris par la commission sous le n° 1152, rectifié en amendement n° 1152 rectifié. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 12 bis (nouveau)

Amendement n° 239 de M. Louis Nègre. – Non soutenu.

Amendements identiques nos 165 de M. Jean-Pierre Grand et 240 de M. Louis Nègre. – Non soutenus.

Amendement n° 869 de M. Christian Favier. – Rejet.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 12 bis

Amendement n° 78 rectifié bis de Mme Odette Herviaux. – Rejet.

Amendement n° 948 de M. Jean-René Lecerf. – Non soutenu.

Amendement n° 1056 rectifié du Gouvernement et sous-amendement n° 1150 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Adoption du sous-amendement et de l’amendement modifié insérant un article additionnel.

Amendement n° 1057 rectifié du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 13

Amendements identiques nos 768 du Gouvernement et 870 de M. Christian Favier. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels avant l'article 14

Amendement n° 224 de M. Hervé Maurey. – Non soutenu.

Amendement n° 690 de M. Michel Mercier. – Retrait.

Article 14

M. Joël Guerriau

6. Décision du Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

7. Modification de l’ordre du jour

8. Nouvelle organisation territoriale de la République. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Article 14 (suite)

Amendements identiques nos 556 de M. Philippe Adnot, 691 de M. Michel Mercier, et 871 de M. Christian Favier. – Rejet des amendements nos 691 et 871, l’amendement n° 556 n’étant pas soutenu.

Amendement n° 1105 du Gouvernement et sous-amendement n° 1180 de M. François Marc – Rejet du sous-amendement et de l’amendement.

Amendement n° 600 de M. Alain Marc.

Amendement n° 76 de M. Roland Courteau.

Amendement n° 410 de M. Franck Montaugé. – Non soutenu.

Amendement n° 137 rectifié de M. Alain Bertrand. – Non soutenu.

Amendement n° 937 de M. Michel Delebarre.

Renvoi de la suite de la discussion.

9. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Pierre Caffet

vice-président

Secrétaires :

M. Christian Cambon,

M. Claude Dilain.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à seize heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Décès d’un ancien sénateur

M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Yves Rispat, qui fut sénateur du Gers de 1998 à 2008.

3

Désignation d’un sénateur en mission temporaire

M. le président. Par courrier en date du 16 janvier 2015, M. le Premier ministre a fait part de sa décision de placer, en application de l’article L.O. 297 du code électoral, M. Jean Germain, sénateur d’Indre-et-Loire, en mission temporaire auprès de Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique, de M. André Vallini, secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, et de M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget.

Cette mission portera sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement.

Acte est donné de cette communication.

4

Dépôt d’un document

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre l’avenant n° 1 à la convention du 27 juillet 2010 entre l’État et l’Agence nationale de la recherche relative au programme d’investissements d’avenir, action «Valorisation, constitution de campus d’innovation technologique de dimension mondiale, instituts de recherche technologique ».

Acte est donné du dépôt de ce document.

Il a été transmis à la commission des finances et à la commission des affaires économiques.

5

Article 9 (supprimé) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Demande de réserve

Nouvelle organisation territoriale de la République

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Articles additionnels après l'article 9

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (projet n° 636 [2013 2014], texte de la commission n° 175, rapport n° 174, avis nos 140, 150, 154, 157 et 184).

Demande de réserve

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le président, le Gouvernement ayant déposé tardivement ses amendements concernant le Grand Paris, et sachant que d’autres amendements portant sur le même sujet continuent d’être déposés, il nous paraît préférable, après en avoir discuté avec M. le président de la commission des lois, de décaler quelque peu l’examen de ces amendements, ce qui permettra à chacun de les étudier de manière approfondie.

C’est ce qui conduit le Gouvernement à demander la réserve, jusqu’à la fin du titre II, des amendements nos 186 rectifié à 635 tendant à insérer des articles additionnels après l’article 17 bis.

M. le président. En application de l’article 44, alinéa 6, du règlement, le Gouvernement demande la réserve jusqu’à la fin du titre II des amendements nos 186 rectifié à 635 tendant à insérer des articles additionnels après l’article 17 bis.

Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission est favorable à cette demande raisonnable.

M. le président. Il n’y a pas d’opposition ?...

La réserve est ordonnée.

TITRE Ier (suite)

Des régions renforcées

Chapitre unique (suite)

Le renforcement des responsabilités régionales

M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier, à l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 9.

Demande de réserve
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 10

Articles additionnels après l'article 9

M. le président. L'amendement n° 212, présenté par MM. J.C. Leroy, Miquel, Filleul, Aubey et Camani, Mmes Jean et Herviaux, M. Roux et Mme Tocqueville, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 1212-3 du code des transports est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le schéma mentionné à l’article L. 1213-1 détermine, en concertation avec les départements concernés, les itinéraires routiers d’intérêt économique régional.

« Sans préjudice des compétences attribuées au département en vertu des articles L. 131-1 à L. 131-8 du code de la voirie routière, la région peut, par convention passée avec le département, contribuer à la gestion des itinéraires routiers définis à l’alinéa précédent. »

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Vendredi soir, nous avons eu à choisir entre la proposition de Mme la ministre, qui, s’agissant du transfert de la gestion de la voirie à la région, tendait à revenir au texte initial du Gouvernement, et celle de la commission, qui consistait à conserver au département sa compétence en la matière.

Avec cet amendement, nous cherchons à trouver un juste milieu entre les propositions des uns et des autres.

Il s’agit de reconnaître le rôle de chef de file de la région en matière de mobilité et de développement économique, tout en permettant à la région et au département de se mettre d’accord pour déterminer les voiries représentant un intérêt économique ou stratégique pour la région et dont la gestion pourrait lui être dévolue, les autres routes continuant à relever du département.

J’espère que cette proposition, qui répond aux suggestions émises par différents intervenants vendredi soir, nous permettra d’avancer sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Sujet compliqué !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En effet !

Je pense que l’idée n’est pas à rejeter. J’avais moi-même envisagé une intervention de la région sur les grands axes. Il ne s’agit d’ailleurs pas forcément, madame Herviaux, des axes « d’intérêt économique ». J’ajoute que, en matière de mobilité, la région remplit déjà un rôle de chef de file.

S’il s’agit certainement d’une piste à explorer, cette solution reste assez compliquée à mettre en œuvre. D’autant que les auteurs de l’amendement semblent avoir cherché à concilier la compétence de la région en matière de développement économique, visée à l’article 2, et celle du département en matière de voirie…

Pour l’heure, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous avions souhaité que la région ait une compétence, mais, au fil de la discussion, on a vu surgir un certain nombre de questions.

La clause de compétence générale permettait à beaucoup de régions d’intervenir sur des axes départementaux pour aider les communes. (M. le rapporteur acquiesce.) Elles pourront toujours le faire dans le cadre du contrat de plan État-région. Hors contrat de plan, ce n’est pas certain ; en fait, si l’on applique strictement la règle de droit, elles ne pourront plus le faire.

Un département comptant beaucoup de kilomètres de routes et peu d’habitants, donc peu d’assiette fiscale, peut être en grave difficulté si la région ne peut venir le soutenir sur un projet, même modeste.

Vendredi soir, j’ai clairement indiqué qu’il ne s’agissait pas, pour le Gouvernement, de faire en sorte d’enlever une ressource au département.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En enlever ou en donner…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je crois avoir montré, à travers quelques exemples, que certains départements pourront faire face à ces dépenses routières sans problème majeur, mais que d’autres sont dans une situation telle qu’ils ne le pourront pas – malgré les 900 millions d’euros que nous avons pu débloquer cette année – parce qu’ils disposent d’une assiette fiscale réduite et de faibles recettes au titre des DMTO. Notre proposition devait donc être vue aussi comme un geste de solidarité.

Je ne suis pas contre le dispositif qui est maintenant présenté puisqu’il fait partie des hypothèses que j’avais avancées vendredi soir. On voit certaines routes départementales traverser trois, quatre départements et s’arrêter à la frontière du suivant. J’en connais une qui est, à cet égard, un véritable cas d’école et que j’ai déjà évoquée : une portion a été réaménagée sur le territoire d’un département, mais la route redevient en mauvais état à la frontière du département voisin, dont le conseil général a considéré qu’il ne s’agissait pas d’une priorité. Cela signifie que de la dépense publique a été engagée en pure perte dans le département qui a réalisé des travaux.

En attendant qu’une bonne réponse soit trouvée à ce vrai problème, je demande le retrait de cet amendement, auquel je ne suis pas a priori défavorable. Nous sommes tous embarrassés sur ce sujet, mais, pour ma part, je souhaite profondément que la meilleure des solutions soit apportée. Ma demande de retrait se double donc d’un appel à la sagesse du Sénat : je fais confiance au vote des sénateurs.

Je comprends bien les arguments du rapporteur. Cependant, ne perdons pas de vue qu’en l’absence de clause de compétence générale, les régions ne peuvent plus aider les départements en dehors du contrat de plan.

M. le président. Madame Herviaux, l'amendement n° 212 est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. Oui, monsieur le président.

Le dispositif ne me paraît pas particulièrement compliqué.

Si vous le souhaitez, monsieur le rapporteur, je peux retirer le terme « économique », pour ne plus faire référence qu’à l’« intérêt régional ».

À nos yeux, il s’agit de bien souligner l’importance de la vision stratégique de la région, mais aussi et surtout d’apporter une garantie financière aux départements, qui auront vraisemblablement, comme le soulignait Mme la ministre, beaucoup de soucis pour entretenir toutes les routes restant sous leur responsabilité.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.

M. Christian Favier. Pour leur part, les sénateurs du groupe CRC partagent l’avis du rapporteur.

Certes, on peut considérer que certaines routes sont d’intérêt régional. Néanmoins, sur la répartition entre région et département, les choses ne sont pas encore bien fixées. On a notamment pu constater que, en raison d’accords politiques passés pour constituer des majorités, les crédits routiers ne représentaient plus du tout une priorité, du fait de l’hostilité de certains au « tout routier ».

On en arrive ainsi à des situations de blocage, préjudiciables au développement économique de certaines régions, de certains départements, des aménagements routiers étant parfois retardés, voire complètement abandonnés.

Nous devons continuer de travailler sur cette question. La deuxième lecture nous permettra peut-être d’avancer et de préciser ce qui doit – éventuellement – relever de la compétence régionale et ce qui doit rester de celle du département.

En tout état de cause, la question du réseau routier national conservé par l’État reste posée. Relativement modeste en nombre de kilomètres, cette partie du réseau est particulièrement mal entretenue. En Île-de-France, par exemple, c’est une véritable catastrophe ! Il suffit de voir les sorties de l’A 86 ! Peut-être vaudrait-il mieux transférer ce réseau national aux régions et laisser les départements continuer de gérer des routes qui leur avaient été en grande partie transférées par l’État il y a quelques années.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 212.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 320 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Castelli, Collin, Collombat, Esnol et Fortassin, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 6311-2 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les départements peuvent concourir au développement du transport aérien de passagers, lorsque celui-ci a lieu dans le cadre d'une ligne d'aménagement du territoire cofinancée par l'État et d'autres collectivités territoriales. »

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à reconnaître le rôle du département dans le développement du transport aérien de passagers et à préciser qu’il peut participer à son financement.

Rien n’a été prévu, dans le cadre de la clarification des compétences que tend à opérer ce projet de loi, pour faciliter les financements du transport aérien de passagers par les diverses collectivités

La clarification des compétences feint d’ignorer la complexité de la réalité de l’action des collectivités territoriales, ce qui se traduit par un véritable enchevêtrement. Elle promeut une vision certes séduisante, mais simpliste, de compétences complètement étanches.

Dans le domaine du transport, et particulièrement des lignes d’aménagement du territoire, ce biais dans la réforme proposée est criant.

MM. Mézard et Pointereau l’ont souligné dans le rapport qu’ils ont consacré aux transports : en la matière, « l’équité a été abandonnée au profit de la compétitivité, dans un contexte de renoncement à la politique d’aménagement du territoire " dissoute " dans celle de décentralisation. »

Certains territoires comme le Cantal, cher à Jacques Mézard, souffrent aujourd’hui d’un enclavement particulièrement préjudiciable à leur aménagement et à leur développement économique. La ligne aérienne Paris-Aurillac est une ligne d’aménagement du territoire. Elle bénéficie d’un financement du fonds d’intervention pour les aéroports et le transport aérien, le FIATA, ainsi que de subventions des collectivités à hauteur de 1,5 million d’euros, soit 45 % du déficit.

Le financement est partagé entre l’État, le conseil général du Cantal, la communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac, la chambre de commerce et d’industrie, le conseil régional d’Auvergne et l’interconsulaire.

De même, pour l’aéroport de Brive–Vallée de la Dordogne, interviennent les conseils généraux de Corrèze et du Lot, la communauté d’agglomération de Brive, les chambres de commerce du Lot et de la Dordogne et le conseil régional du Limousin.

Madame la ministre, cet amendement tend à préserver cette possibilité salutaire de cofinancement. En d’autres termes, nous demandons que les départements puissent continuer à payer ! Sans doute verrez-vous là un paradoxe, mais nous tenons absolument à ce que ces lignes aériennes puissent perdurer, et c’est ce qui nous conduit à proposer l’introduction de cette disposition dans la loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les auteurs de cet amendement soulèvent une question majeure pour les territoires enclavés, en particulier pour certains territoires de montagne. Les départements, chefs de file dans le domaine de la solidarité territoriale, ont un rôle à jouer en la matière.

Étant donné la nature des enjeux soulevés, la commission préfère s’en remettre à la sagesse du Sénat. Monsieur Requier, vous comprenez bien ce que cela signifie… Cela étant, les éléments que le Gouvernement fournira sur cette question seront naturellement les bienvenus.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Après examen de la situation, il apparaît que le problème dont il s’agit concerne essentiellement Aurillac. À l’heure actuelle, cette ville est située à environ six heures de Paris et à près de trois heures de son chef-lieu de région. Elle ne dispose ni du train à grande vitesse ni d’une voie rapide. Elle est ainsi placée dans une situation de complet enclavement, ce qui n’est plus très fréquent en France.

À la suite des entretiens menés entre le Gouvernement et les élus, le Premier ministre a accepté que soient mis en place des groupes de travail placés sous l’autorité de l’État, représenté par les préfets et les sous-préfets. Ces groupes seront appelés à analyser la dizaine de situations qui, en France, se révèlent à cet égard tout à fait singulières, et qui, partant, ne peuvent être traitées a priori. Aurillac est l’un de ces cas, que nous devons examiner avec la plus grande attention.

Même s’il est en mesure d’agir, le département du Cantal ne pourra assumer seul une charge aussi lourde. M. Mézard a déjà rappelé combien, sur de tels sujets, l’absence d’ingénierie pouvait poser problème à un certain nombre de territoires enclavés ou hyper-ruraux.

Monsieur Requier, deux hypothèses s’offrent à nous, et je comprends que la commission des lois, en s’en remettant à la sagesse du Sénat, n’ait pas adopté une position tranchée.

Répondre oui sans autre forme de débat, c’est permettre aux départements d’intervenir en faveur de tous les aéroports ou aérodromes. Ce n’est pas souhaitable, eu égard à notre objectif de clarification des compétences.

Le recours à la compétence de solidarité territoriale peut-il permettre de répondre au problème posé ? Peut-être. Toutefois, une difficulté majeure demeure pour les départements : les sommes en jeu sont loin d’être négligeables. Qui plus est, il s’agit de soutenir non seulement un aéroport, mais aussi une compagnie aérienne.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il faut que cette compagnie accepte de desservir cette ville malgré le nombre limité de passagers.

Les missions confiées au groupe de travail qui doit se pencher sur le cas d’Aurillac doivent encore être définies. Il faut que nous examinions ce cas précis d’« hyperenclavement » – le mot n’est pas très français, mais il décrit bien la réalité de ce territoire.

On ne peut pas créer une compétence dans le seul but de résoudre un cas particulier, si digne d’intérêt soit-il.

J’ajoute que l’aéroport d’Aurillac n’est pas placé sous un statut entièrement privé. Il est soutenu par le département et dispose, à l’heure actuelle, d’une aide de la région.

Vous le constatez, ce sujet est complexe, mais il a toute sa place dans ce débat et des questions similaires peuvent se poser pour d’autres types d’équipements. Nous les aborderons dans la suite de nos débats. Vendredi soir, nous avons déjà évoqué les routes. Les départements déclarent qu’ils conserveront leurs compétences routières avec plaisir, mais ils précisent qu’ils ne seront pas en mesure de les assumer aussi bien qu’ils le souhaiteraient…

Aussi, au stade de cette première lecture, je vous demande, monsieur Requier, de bien vouloir retirer votre amendement. Si vous le maintenez, il reviendra à la Haute Assemblée de trancher, dans sa sagesse.

M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 223 est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Une fois de plus, j’ai un peu de mal à comprendre la position du Gouvernement…

Les collectivités en question se proposent de payer. Je n’en connais pas beaucoup qui y soient prêtes ! Elles participent déjà au financement des aéroports d’Aurillac et de Brive, de presque toutes les villes que la compagnie aérienne Hop dessert avec ses petits avions à hélices – il n’est pas question ici des gros avions qui atterrissent à Toulouse, Paris ou Nice.

Madame la ministre, il s’agit bel et bien de zones rurales,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et enclavées !

M. Jean-Claude Requier. … et non de grandes villes. Si les collectivités territoriales ne s’engagent pas pour financer ces lignes, ces dernières disparaîtront purement et simplement. Brive n’est pas enclavée, et pourtant le chemin de fer la relie difficilement à Paris. Le Capitole est mort depuis longtemps ! Actuellement, le trajet en train dure cinq heures, et les retards sont fréquents…

Voilà pourquoi je maintiens mon amendement. Je suis prêt à le rectifier, pour préciser que la possibilité de financement est réservée aux départements ruraux. Quoi qu’il en soit, ces derniers doivent garder la possibilité de participer au financement des aéroports.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour explication de vote.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Mes chers collègues, je représente un territoire tout à fait rural et je suis à la tête d’une collectivité qui, depuis très longtemps, concourt au financement d’un aéroport, celui de Limoges. Or je ne souscris pas du tout au présent amendement.

M. Requier a cité l’aéroport de Brive. Cette infrastructure bénéficie d’une obligation de service public, ou OSP, ce qui n’est pas le cas de l’aéroport de Limoges. En résulte, au sein d’une seule et même région, une très grande distorsion de concurrence, qui se traduit au niveau de l’appel de fonds lancé à destination des collectivités.

Nous débattons d’un texte de clarification des compétences, et Mme la ministre a été très précise : l’économie et les transports relèveront, à l’avenir, des régions, et les moyens y afférents seront transférés des conseils généraux vers les conseils régionaux. Dès lors, adopter cet amendement, ce serait soumettre les départements à une double peine : ils vont transférer les moyens et, parallèlement, ils devront continuer à payer !

La proposition de Mme la ministre me semble donc aller dans le bon sens, et je souscris tout à fait à son analyse.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 320 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 223, présenté par M. Maurey, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 131-7 du code de la voirie routière, il est inséré un article L. 131-7-… ainsi rédigé :

« Art. L. 131-7-… - En dehors des agglomérations, le président du conseil général exerce, en matière d’entretien des plantations privées pouvant constituer des menaces pour les voies départementales, les compétences attribuées au maire par l’article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président !

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 1149, présenté par M. Jean-Jacques Hyest, au nom de la commission des lois, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 223.

Veuillez le défendre, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement tend à attribuer aux présidents de conseils généraux le même pouvoir d’exécution d’office des travaux aux abords de la voirie départementale hors agglomération que celui dont disposent les maires pour la voirie communale.

Mes chers collègues, je vous rappelle que nous avons déjà adopté cette disposition dans le cadre de la proposition de loi de M. Doligé, relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales ; il s’agit de l’article 27 ter de ce texte.

En la matière, les départements se heurtent à de véritables problèmes.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Lorsque les plantations empiètent sur la voirie, il faut se tourner vers les propriétaires. Pour éviter la lourdeur des procédures, il serait cohérent de donner un tel pouvoir d’exécution au président du conseil général.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1149.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

Articles additionnels après l'article 9
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 11 (supprimé)

Article 10

I. – L’article L. 6311-1 du code des transports est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Nonobstant l’article L. 3641-7 et le VII de l’article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, tout aérodrome appartenant à l’État qui n’est pas inscrit sur la liste mentionnée au premier alinéa ou qui n’est plus nécessaire à l’exercice des missions de l’État est transféré à une collectivité territoriale ou à un groupement de collectivités territoriales qui en a fait la demande, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Ce décret détermine notamment les modalités de présentation et d’instruction de la demande et, en cas de pluralité de demandes, les procédures de concertation avec les candidats et de désignation du bénéficiaire du transfert.

« Sont exclues du transfert les emprises et installations nécessaires pour les besoins de la défense nationale, de la sécurité de la circulation aérienne, de la météorologie et de la sécurité civile.

« Lorsque l’aérodrome est exploité par une société concessionnaire, le transfert de l’aérodrome ne peut être prononcé tant que l’État possède une part du capital de la société concessionnaire.

« Le transfert des biens de l’aérodrome est réalisé à titre gratuit et ne donne lieu au versement d’aucuns droits ou honoraires, ni d’aucune indemnité ou taxe, ni de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts.

« La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert succède à l’État dans l’ensemble des droits et obligations à l’égard des tiers. »

II. – Les transferts de compétences prévus au I sont applicables sous réserve de l’entrée en vigueur des dispositions relevant de la loi de finances prévue à l’article 37.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 54 rectifié est présenté par MM. Kern et Médevielle, Mme Goy-Chavent, M. Guerriau, Mme Joissains et M. Canevet.

L'amendement n° 86 est présenté par M. Bigot.

L'amendement n° 629 est présenté par MM. Daunis, Durain, Cabanel, Patriat et Vincent, Mme Claireaux, MM. Roux et Cornano, Mme Lienemann et M. Leconte.

L'amendement n° 993 est présenté par M. Reichardt.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

missions

insérer les mots :

nationales et internationales

La parole est à M. Claude Kern, pour défendre l’amendement n° 54 rectifié.

M. Claude Kern. L’article 10 du présent texte insère dans le code des transports une disposition pérenne de décentralisation des aéroports d’intérêt local, qui n’ont pas été visés par la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004.

Jusqu’en 2004, l’État était propriétaire d’un grand nombre d’aérodromes d’intérêt purement local ou régional souvent gérés par un concessionnaire, alors même que les collectivités territoriales finançaient la majeure partie des investissements nécessaires.

La loi du 13 août 2004 a permis de transférer la propriété, l’aménagement, l’entretien et la gestion de 150 aérodromes aux collectivités territoriales ou à leurs groupements. Elle a encadré ces transferts en précisant que les aérodromes d’intérêt national ou international, ainsi que les aérodromes nécessaires à l’exercice des missions de l’État, ne pouvaient être concernés par cette procédure.

Or cet article 10 n’apporte pas de précisions suffisantes quant aux aérodromes pouvant faire l’objet d’un transfert et, par conséquent, de ceux qui, pour d’évidentes raisons d’aménagement du territoire, de desserte internationale ou de sûreté nationale, doivent rester la propriété de l’État.

Cependant, selon l’exposé des motifs et l’étude d’impact du présent projet de loi, l’aéroport de Strasbourg-Entzheim aurait vocation à être transféré. Il semble dès lors nécessaire de préciser qu’un tel transfert serait incompatible avec l’exercice des obligations internationales contractées par la France aux termes des traités fixant à Strasbourg le siège de plusieurs institutions européennes.

L’État ne saurait se dessaisir, au profit d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités, de la mission d’assurer les conditions d’une bonne accessibilité aérienne d’une ville comme Strasbourg, eu égard aux fonctions européennes que la France doit exercer et dont elle a investi cette cité.

Voilà pourquoi cet amendement tend à préciser que les missions de l’État sont à la fois nationales et internationales.

M. le président. Les amendements nos 86, 629 et 993 ne sont pas soutenus.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission des lois considère que la précision dont il s’agit est inutile.

Ce n’est pas tant la nature ou l’origine des missions exercées par l’État au titre d’un aéroport qui empêchent la décentralisation de cet équipement que son intérêt national. Or un aéroport d’intérêt international est, par définition, un aéroport d’intérêt national, et non local.

La précision que vise à apporter cet amendement est d’autant plus inutile qu’un décret du 24 août 2005 fixe la liste des aéroports exclus du transfert aux collectivités territoriales. L’aéroport de Strasbourg-Entzheim y figure explicitement. Veillons à ce que la loi ne soit pas redondante, voire bégayante !

Sous réserve que le Gouvernement donne la même interprétation que la commission, vous pouvez, monsieur Kern, retirer votre amendement sans hésitation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement a effectivement la même interprétation que la commission.

Les possibilités de transfert ouvertes par le présent article sont assorties de plusieurs sauvegardes. La principale d’entre elles rompt d’ailleurs avec les mécanismes impératifs de la loi de 2004, qui ont permis le transfert des aérodromes d’intérêt local non nécessaires aux intérêts et aux missions de l’État.

En outre, ce transfert ne peut être engagé que par une démarche volontaire des collectivités territoriales.

Plus précisément, aux yeux du Gouvernement, il est évident que Strasbourg a besoin d’un aéroport. Chacun, dans cet hémicycle, sait parfaitement pourquoi une telle infrastructure est nécessaire, et il serait tout à fait aberrant que l’État ne soutienne pas cet outil : Strasbourg abrite un Parlement dont les membres viennent des quatre coins de l’Europe !

L’État est parfaitement conscient de l’intérêt que représente cet aéroport. À ce titre. Du reste, pour la bonne information des élus, le secrétaire d’État chargé des transports, Alain Vidalies, confirmera prochainement l’engagement de l’État à cet égard par courrier adressé au maire de Strasbourg, Roland Ries, ainsi qu’au président de la métropole ; vous en recevrez également une copie, monsieur Kern.

M. Philippe Kaltenbach. Et qu’en est-il de l’aéroport Nice-Côte d’Azur ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il n’y a aucun problème de ce type avec l’aéroport Nice-Côte d’Azur, monsieur le sénateur ; le cas de l’aéroport de Strasbourg est particulier.

Dès lors, monsieur Kern, je vous demande de retirer cet amendement. Nous n’allons pas modifier le droit existant pour un seul aéroport !

M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° 54 rectifié est-il maintenu ?

M. Claude Kern. Nous avions déposé cet amendement parce que, à la lecture de l’exposé des motifs, s’agissant de l’article 10, il apparaissait que les aérodromes ayant vocation à être transférés étaient ceux, par exemple, de « Dijon – après le retrait programmé des activités militaires –, Montpellier, Nîmes ou Strasbourg ».

Néanmoins, vos explications et le courrier dont vous faites mention nous satisfont, madame la ministre. C’est pourquoi je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 54 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 10.

(L’article 10 est adopté.)

Article 10
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 12 (supprimé)

Article 11

Ports maritimes et intérieurs

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 450, présenté par Mme Herviaux, M. Poher, Mmes S. Robert et Claireaux, M. Cornano, Mme Espagnac et M. Botrel, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – La propriété, l’aménagement, l’entretien et la gestion des ports relevant du département sont transférés, au plus tard au 1er janvier 2017 et dans les conditions fixées au présent article, aux autres collectivités territoriales ou à leurs groupements dans le ressort géographique desquels sont situées ces infrastructures.

Le département ou le groupement dont il est membre communique avant le 1er novembre 2015 au représentant de l’État dans la région toutes les informations permettant le transfert du port en connaissance de cause. Il transmet ces informations, dès réception d’une demande de transfert, à la collectivité ou au groupement pétitionnaire.

Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales peut demander au département ou au groupement dont il est membre, jusqu’au 31 mars 2016, à exercer les compétences mentionnées au premier alinéa pour chacun des ports situés dans son ressort géographique. La demande peut porter seulement sur une partie du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire à la sécurité de la navigation. La demande est notifiée simultanément à l’État et aux autres collectivités et groupements intéressés. 

Au cas où, pour un port déterminé, aucune autre demande n’a été présentée, la collectivité ou le groupement pétitionnaire est le bénéficiaire du transfert.

Si plusieurs demandes sont présentées pour le même port, le représentant de l’État dans la région organise entre les collectivités et groupements intéressés une concertation, dont il fixe la durée, en s’efforçant d’aboutir à la présentation d’une candidature unique. Si la concertation aboutit à une candidature unique, il désigne la collectivité ou le groupement candidat unique comme bénéficiaire du transfert. En l’absence d’accord au terme de la concertation, le représentant de l’État dans la région désigne une collectivité ou un groupement comme bénéficiaire du transfert. Il peut désigner un bénéficiaire pour le transfert d’une partie seulement du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire aux nécessités de la sécurité de la navigation.

En l’absence de demande de transfert à la date du 31 mars 2016, le représentant de l’État dans la région :

- transfère à la région sur le territoire de laquelle ils sont situés, les ports ou les parties individualisables des ports, dont l’activité dominante est le commerce ou la pêche ;

- désigne la collectivité, ou groupement, qui bénéficiera du transfert des ports ou parties individualisables de ports dont l’activité dominante est la plaisance.

II. – Pour chaque port transféré, un diagnostic de l’état du port, les modalités de transfert et la date d’entrée en vigueur du transfert sont fixés par une convention conclue entre le département et la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire du transfert, ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, par un arrêté du représentant de l’État dans la région.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert succède au département dans l’ensemble de ses droits et obligations à l’égard des tiers.

Les dépendances du port qui appartiennent au domaine public du département sont transférées à titre gratuit à la collectivité territoriale ou au groupement bénéficiaire du transfert et ne donnent lieu ni à versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ni à perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit.

Dans le cas où le département est membre d’un syndicat mixte avant le transfert, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert se substitue au département dans ses droits et obligations au sein du syndicat.

Toutefois, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut, par délibération de son organe délibérant pris dans un délai de trois mois suivant la date effective du transfert, choisir de se retirer du syndicat dans les conditions prévues à l’article L. 5721-6-2 du code général des collectivités territoriales.

III. – Une convention conclue entre le bénéficiaire du transfert et le représentant de l’État dans la région ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, un arrêté du représentant de l’État dans la région précise les conditions dans lesquelles le bénéficiaire met gratuitement à la disposition de l’État les installations et aménagements nécessaires au fonctionnement des services chargés de la police et de la sécurité.

Dans les ports où les dépendances du domaine public portuaire de l’État sont mises à la disposition du département, ces dépendances sont mises de plein droit et à titre gratuit à la disposition du bénéficiaire du transfert de compétence.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut demander ultérieurement à l’État le transfert en pleine propriété et à titre gratuit des dépendances du domaine public portuaire qui sont mis à sa disposition. 

IV. – Les délégations de service public portant sur les ports faisant l’objet des transferts prévus au présent article sont prorogées dans les conditions suivantes :

1° Les délégations de service public venant à échéance avant le transfert sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’à la nouvelle échéance du 31 décembre 2017 ;

2° Les délégations de service public venant à échéance au cours de l’année suivant le transfert mais avant sa première date anniversaire sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’au 31 décembre 2017.

V. – Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 5314-1 est complété par les mots : « et de pêche » et le second alinéa est supprimé ;

2° L’article L. 5314-2 est abrogé ;

3° L’article L. 5314-3 est abrogé ;

4° Au quatrième alinéa de l’article L. 5314-4, les mots : « Le département ou un » sont remplacés par le mot : « Un » ;

5° Aux articles L. 5314-8 et L. 5314-11, la référence : « L. 5314-2 » est supprimée ;

6° Le chapitre IV du titre Ier du livre III de la cinquième partie est complété par un article L. 5314-13 ainsi rédigé :

« Art. L. 5314-13. – Les collectivités territoriales et leurs regroupements peuvent concourir aux dépenses de fonctionnement et d’investissement liées aux activités de secours et de sauvetage en mer assurées par des fondations ou des associations reconnues d’utilité publique. » ;

7° À l’article L. 5723-1, la référence « L. 5314-3 » est supprimée ;

VI. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le 10° de l’article L. 2321-2 est ainsi rétabli :

« 10° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés ; »

2° Le 15° de l’article L. 3321-1 est abrogé ;

3° L’article L. 3542-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche. » ;

4° L’article L. 4321-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés. »

VII. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :

1° À l’article L. 2122-17, le mot : « départements » est remplacé par le mot : « régions » et les mots : « président du conseil général » sont remplacés par les mots : « président du conseil régional » ;

2° L’article L. 2122-18 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « compétence des communes », sont insérés les mots : « ou de groupements de collectivités territoriales » ;

b) Après les mots : « mis à disposition de ces communes » sont insérés les mots : « ou de ces groupements » ;

c) Après les mots : « par le maire » sont insérés les mots : « ou par le président de l’organe délibérant ».

VIII. – L’article L. 341-5 du code du tourisme est ainsi rédigé :

« Art. L. 341-5. – Les règles relatives aux compétences des communes, communautés de communes, communautés urbaines, métropoles et communautés d’agglomération pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes dont l’activité principale est la plaisance sont fixées à l’article L. 5314-4 du code des transports. »

IX. – À titre transitoire et par dérogation aux dispositions du 2° du V, du 2° du VI et du 1° du VII, le département continue à entretenir et exploiter chacun des ports relevant de sa compétence jusqu’à la date de son transfert.

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. S’il est un amendement sur lequel je veux insister, c’est bien celui-ci.

Je n’ai pas compris pourquoi la commission des lois avait supprimé l’article 11 : celui-ci donnait en effet suite aux propositions formulées en juin 2014 dans un rapport dont la rédaction m’avait été confiée, à la fin 2013, par le Premier ministre Jean-Marc-Ayrault. Ce rapport devait tracer des perspectives pour la compétitivité et l’amélioration de la politique maritime intégrée, au sein de laquelle les ports décentralisés devaient prendre toute leur place.

Ce n’est pas si souvent qu’un membre du Gouvernement accepte de prendre en compte les conclusions d’un rapport rédigé par un parlementaire ; je tenais donc à vous remercier très sincèrement, madame la ministre, de les avoir examinées de près. Elles semblent en effet totalement s’inscrire dans la continuité des dispositions de la loi de janvier 2014, notamment celles qui portent sur les compétences transférées aux régions.

Cette mission m’a donné l’occasion de faire, en six mois, le tour de France des ports autrefois appelés « secondaires », c’est-à-dire les ports régionaux et départementaux, de commerce ou de pêche. J’ai pu constater qu’il existait une vraie demande : l’ensemble des collectivités – et non pas seulement certaines –, mais aussi et surtout les personnes chargées de l’animation de ces ports, veulent pouvoir enfin travailler ensemble.

S’il constituait un pas en avant, le transfert des ports, autorisé par la loi de 2004, n’allait pourtant pas au bout de cette logique ; il fallait donc à tout prix en compléter les dispositions. C’est pourquoi il me paraît important de rétablir les dispositions de l’article 11.

Ainsi, cet amendement vise à optimiser l’organisation et le développement portuaire de notre pays, en donnant aux ports la possibilité de s’intégrer dans un schéma beaucoup plus global.

Le texte proposé étant très long – il faut tout prévoir ! –, j’insisterai seulement sur celle des dispositions prévues qui tend à insérer, dans le code des transports, un nouvel article L. 5314-13 aux termes duquel « les collectivités territoriales et leurs regroupements peuvent concourir aux dépenses de fonctionnement et d’investissement liées aux activités de secours et de sauvetage en mer ». Il s’agit de trouver une solution pour pérenniser l’activité, sur toutes nos côtes, de la Société nationale de sauvetage en mer, la SNSM, à laquelle vous savez, mes chers collègues, combien nous sommes attachés.

M. le président. L’amendement n° 766, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – La propriété, l’aménagement, l’entretien et la gestion des ports relevant du département sont transférés, au plus tard au 1er janvier 2017 et dans les conditions fixées au présent article, aux autres collectivités territoriales ou à leurs groupements dans le ressort géographique desquels sont situées ces infrastructures.

Le département communique avant le 1er novembre 2015 au représentant de l’État dans la région toutes les informations permettant le transfert du port en connaissance de cause. Il transmet ces informations, dès réception d’une demande de transfert, à la collectivité ou au groupement pétitionnaire.

Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales peut demander au département, jusqu’au 31 mars 2016, à exercer les compétences mentionnées au premier alinéa pour chacun des ports situés dans son ressort géographique. La demande peut porter seulement sur une partie du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire à la sécurité de la navigation. La demande est notifiée simultanément à l’État et aux autres collectivités et groupements intéressés.

Au cas où, pour un port déterminé, aucune autre demande n’a été présentée, la collectivité ou le groupement pétitionnaire est le bénéficiaire du transfert.

Si plusieurs demandes sont présentées pour le même port, le représentant de l’État dans la région organise entre les collectivités et groupements intéressés une concertation, dont il fixe la durée, en s’efforçant d’aboutir à la présentation d’une candidature unique. Si la concertation aboutit à une candidature unique, il désigne la collectivité ou le groupement candidat unique comme bénéficiaire du transfert. En l’absence d’accord au terme de la concertation, le représentant de l’État dans la région désigne une collectivité ou un groupement comme bénéficiaire du transfert. Il peut désigner un bénéficiaire pour le transfert d’une partie seulement du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire aux nécessités de la sécurité de la navigation.

En l’absence de demande de transfert à la date du 31 mars 2016, la région sur le territoire de laquelle sont situés les ports ou les parties individualisables des ports restant à transférer est désignée bénéficiaire du transfert par le représentant de l’État dans la région.

II. – Pour chaque port transféré, un diagnostic de l’état du port, les modalités de transfert et la date d’entrée en vigueur du transfert sont fixés par une convention conclue entre le département et la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire du transfert, ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, par un arrêté du représentant de l’État dans la région.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert succède au département dans l’ensemble de ses droits et obligations à l’égard des tiers.

Les dépendances du port qui appartiennent au domaine public du département sont transférées à titre gratuit à la collectivité territoriale ou au groupement bénéficiaire du transfert et ne donnent lieu ni à versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ni à perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit.

Dans le cas où le département est membre d’un syndicat mixte avant le transfert, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert se substitue au département dans ses droits et obligations au sein du syndicat.

Toutefois, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut, par délibération de son organe délibérant pris dans un délai de trois mois suivant la date effective du transfert, choisir de se retirer du syndicat dans les conditions prévues à l’article L. 5721-6-2 du code général des collectivités territoriales.

III. – Une convention conclue entre le bénéficiaire du transfert et le représentant de l’État dans la région ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, un arrêté du représentant de l’État dans la région précise les conditions dans lesquelles le bénéficiaire met gratuitement à la disposition de l’État les installations et aménagements nécessaires au fonctionnement des services chargés de la police et de la sécurité.

Dans les ports où les dépendances du domaine public portuaire de l’État sont mises à la disposition du département, ces dépendances sont mises de plein droit et à titre gratuit à la disposition du bénéficiaire du transfert de compétence.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut demander ultérieurement à l’État le transfert en pleine propriété et à titre gratuit des dépendances du domaine public portuaire qui sont mis à sa disposition.

IV. – Les délégations de service public portant sur les ports faisant l’objet des transferts prévus au présent article sont prorogées dans les conditions suivantes :

1° Les délégations de service public venant à échéance avant le transfert sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’à la nouvelle échéance du 31 décembre 2017 ;

2° Les délégations de service public venant à échéance au cours de l’année suivant le transfert mais avant sa première date anniversaire sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’au 31 décembre 2017.

V. – Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 5314-1 est complété par les mots : « et de pêche » et le second alinéa est supprimé ;

2° L’article L. 5314-2 est abrogé ;

3° L’article L. 5314-3 est abrogé ;

4° Au quatrième alinéa de l’article L. 5314-4, les mots : « Le département ou un » sont remplacés par le mot : « Un » ;

5° Aux articles L. 5314-8 et L. 5314-11, la référence à l’article L. 5314-2 est supprimée ;

6° Après l’article L. 5314-12, il est inséré un article L. 5314-13 ainsi rédigé :

« Art L. 5314-13. – Les collectivités territoriales visées aux articles L. 5314-1 et L. 5314-4, et leurs groupements, peuvent concourir au financement des activités des organismes visés à l’article L. 742-9 du code de la sécurité intérieure. »

7° Aux articles L. 5723-1 et L. 5753-2, la référence à l’article L. 5314-3 est supprimée.

VI. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À l’article L. 2321-2, après le 9° il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 10° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés ; »

2° Le 15° de l’article L. 3321-1 est abrogé ;

3° L’article L. 3542-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 5° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche. » ;

4° L’article L. 4321-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 13° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés. » ;

5° A la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 4424-22, le mot : « relèvent » est remplacé par le mot : « relevaient ».

VII. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :

1° À l’article L. 2122-17, le mot : « départements » est remplacé par le mot : « régions » et les mots : « président du conseil général » par les mots : « président du conseil régional » ;

2° L’article L. 2122-18 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « compétence des communes » sont insérés les mots : « ou de groupements de collectivités territoriales » ;

b) Après les mots : « mis à disposition de ces communes » sont insérés les mots : « ou de ces groupements » ;

c) Après les mots : « par le maire » sont insérés les mots : « ou par le président de l’organe délibérant ».

VIII. – L’article L. 341-5 du code du tourisme est ainsi rédigé :

« Art. L. 341-5. – Les règles relatives aux compétences des communes, communautés de communes, communautés urbaines, métropoles et communautés d’agglomération pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes dont l’activité principale est la plaisance sont fixées à l’article L. 5314-4 du code des transports. »

IX. – À titre transitoire et par dérogation aux dispositions du 2° du V, du 2° du VI et du 1° du VII, le département continue à entretenir et exploiter chacun des ports relevant de sa compétence jusqu’à la date de son transfert.

X. – A titre transitoire, jusqu’au 31 décembre 2016, les régions et par dérogation aux dispositions du 2° du V, du 2° du VI et du 1° du VII, les départements peuvent concourir au financement des activités des organismes visés à l’article L. 742-9 du code de la sécurité intérieure.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Cet amendement est très proche de celui que vient de présenter Mme Herviaux. Il vise à rétablir l’article 11, qui concerne le transfert des ports maritimes et intérieurs relevant du département aux autres collectivités territoriales, dans la rédaction initiale du Gouvernement.

La mesure proposée a pour objet de clarifier la répartition des compétences exercées en matière de gestion des ports décentralisés – maritimes, bien sûr, mais aussi intérieurs, c’est-à-dire situés sur le bord des grands fleuves de France –, en retenant deux échelons de collectivités territoriales compétentes : la région ou les communes et leurs groupements.

Dans cette optique, elle met en œuvre le transfert des ports relevant du département aux autres échelons de collectivités territoriales, idée soutenue depuis longtemps par divers acteurs. Certains départements ont ainsi demandé à la région de participer au financement des équipements, toujours lourd, et à leur entretien, qui représente également une charge importante.

On rejoint ici la préoccupation exprimée par M. le président de la commission des lois, qui s’inquiétait de la situation des ports desservant les principales îles Anglo-Normandes.

Par ailleurs, l’amendement tend à préciser la rédaction de l’article L. 4424-22 du code général des collectivités territoriales, relatif à la Corse, dont la formulation actuelle, assez ambiguë, pourrait laisser penser qu’il empêche la pleine application des dispositions du projet de loi. C’est pourquoi, madame Herviaux, je serai amenée à vous demander de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de celui du Gouvernement.

M. le président. L’amendement n° 955, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – La propriété, l’aménagement, l’entretien et la gestion des ports relevant du département sont transférés, au plus tard au 1er janvier 2017 et dans les conditions fixées au présent article, aux autres collectivités territoriales ou à leurs groupements dans le ressort géographique desquels sont situées ces infrastructures.

Le département communique avant le 1er novembre 2015 au représentant de l’État dans la région toutes les informations permettant le transfert du port en connaissance de cause. Il transmet ces informations, dès réception d’une demande de transfert, à la collectivité ou au groupement pétitionnaire.

Toute collectivité territoriale ou groupement de collectivités territoriales peut demander au département, jusqu’au 31 mars 2016, à exercer les compétences mentionnées au premier alinéa pour chacun des ports situés dans son ressort géographique. La demande peut porter seulement sur une partie du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire à la sécurité de la navigation. La demande est notifiée simultanément à l’État et aux autres collectivités et groupements intéressés.

Au cas où, pour un port déterminé, aucune autre demande n’a été présentée, la collectivité ou le groupement pétitionnaire est le bénéficiaire du transfert.

Si plusieurs demandes sont présentées pour le même port, le représentant de l’État dans la région organise entre les collectivités et groupements intéressés une concertation, dont il fixe la durée, en s’efforçant d’aboutir à la présentation d’une candidature unique. Si la concertation aboutit à une candidature unique, il désigne la collectivité ou le groupement candidat unique comme bénéficiaire du transfert. En l’absence d’accord au terme de la concertation, le représentant de l’État dans la région désigne une collectivité ou un groupement comme bénéficiaire du transfert. Il peut désigner un bénéficiaire pour le transfert d’une partie seulement du port dès lors qu’elle est individualisable, d’un seul tenant et sans enclave et que cette partition n’est pas de nature à nuire aux nécessités de la sécurité de la navigation.

En l’absence de demande de transfert à la date du 31 mars 2016, la région sur le territoire de laquelle sont situés les ports ou les parties individualisables des ports restant à transférer est désignée bénéficiaire du transfert par le représentant de l’État dans la région.

II. – Pour chaque port transféré, un diagnostic de l’état du port, les modalités de transfert et la date d’entrée en vigueur du transfert sont fixés par une convention conclue entre le département et la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire du transfert, ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, par un arrêté du représentant de l’État dans la région.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert succède au département dans l’ensemble de ses droits et obligations à l’égard des tiers.

Les dépendances du port qui appartiennent au domaine public du département sont transférées à titre gratuit à la collectivité territoriale ou au groupement bénéficiaire du transfert et ne donnent lieu ni à versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ni à perception d’impôts, de droits ou de taxes de quelque nature que ce soit.

Dans le cas où le département est membre d’un syndicat mixte avant le transfert, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert se substitue au département dans ses droits et obligations au sein du syndicat.

Toutefois, la collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut, par délibération de son organe délibérant pris dans un délai de trois mois suivant la date effective du transfert, choisir de se retirer du syndicat dans les conditions prévues à l’article L. 5721-6-2 du code général des collectivités territoriales.

III. – Une convention conclue entre le bénéficiaire du transfert et le représentant de l’État dans la région ou, à défaut de conclusion de cette convention au plus tard le 30 novembre 2016, un arrêté du représentant de l’État dans la région précise les conditions dans lesquelles le bénéficiaire met gratuitement à la disposition de l’État les installations et aménagements nécessaires au fonctionnement des services chargés de la police et de la sécurité.

Dans les ports où les dépendances du domaine public portuaire de l’État sont mises à la disposition du département, ces dépendances sont mises de plein droit et à titre gratuit à la disposition du bénéficiaire du transfert de compétence.

La collectivité ou le groupement bénéficiaire du transfert peut demander ultérieurement à l’État le transfert en pleine propriété et à titre gratuit des dépendances du domaine public portuaire qui sont mis à sa disposition.

IV. – Les délégations de service public portant sur les ports faisant l’objet des transferts prévus au présent article sont prorogées dans les conditions suivantes :

1° Les délégations de service public venant à échéance avant le transfert sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’à la nouvelle échéance du 31 décembre 2017 ;

2° Les délégations de service public venant à échéance au cours de l’année suivant le transfert mais avant sa première date anniversaire sont, sauf opposition du délégataire, prorogées jusqu’au 31 décembre 2017.

V. – Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 5314-1 est complété par les mots : « et de pêche » et le second alinéa est supprimé ;

2° L’article L. 5314-2 est abrogé ;

3° L’article L. 5314-3 est abrogé ;

4° Au quatrième alinéa de l’article L. 5314-4, les mots : « Le département ou un » sont remplacés par le mot : « Un » ;

5° Aux articles L. 5314-8 et L. 5314-11, la référence : « , L. 5314-2 » est supprimée ;

6° À l’article L. 5723-1, la référence : « L. 5314-3 » est supprimée.

VI. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Après le 9°de l’article L. 2321-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 10° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés ; »

2° Le 15° de l’article L. 3321-1 est abrogé ;

3° L’article L. 3542-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche. » ;

4° L’article L. 4321-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les dépenses d’entretien et construction des ports maritimes de commerce et de pêche qui lui sont transférés. »

VII. – Le code général de la propriété des personnes publiques est ainsi modifié :

1° À l’article L. 2122-17, le mot : « départements » est remplacé par le mot : « régions » et les mots : « président du conseil général » sont remplacés par les mots : « président du conseil régional » ;

2° L’article L. 2122-18 est ainsi modifié :

a) Après les mots : « compétence des communes » sont insérés les mots : « ou de groupements de collectivités territoriales » ;

b) Après les mots : « mis à disposition de ces communes », sont insérés les mots : « ou de ces groupements » ;

c) Après les mots : « par le maire », sont insérés les mots : « ou par le président de l’organe délibérant ».

VIII. – L’article L. 341-5 du code du tourisme est ainsi rédigé :

« Art. L. 341-5. – Les règles relatives aux compétences des communes, communautés de communes, communautés urbaines, métropoles et communautés d’agglomération pour créer, aménager et exploiter les ports maritimes dont l’activité principale est la plaisance sont fixées à l’article L. 5314-4 du code des transports. »

La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Dans la rédaction initiale de cet article, le Gouvernement avait tenté de clarifier les compétences en matière de transport pour créer une coordination à l’échelle régionale. Les régions, déjà chargées des transports régionaux, sont prêtes à assumer ces nouvelles compétences, si tant est qu’elles s’accompagnent très prochainement de transferts des moyens leur permettant de les exercer de manière satisfaisante. Ronan Dantec a d’ailleurs défendu une série d’amendements en ce sens vendredi soir : versement transport régional, taxe poids lourds régionalisée, augmentation de la part de TICPE reversée aux régions.

Tout le monde est plus ou moins conscient qu’un problème de financement du transport par les régions se pose ; il faudra bien avancer sur ce point, même si ce n’est pas le sujet qui nous occupe en ce moment.

Les écologistes sont convaincus de la nécessité d’une coordination régionale des transports. Ils demandent donc le rétablissement des transferts des compétences transport des départements vers les régions. Tel est l’objet de cet amendement, qui tend à confier les ports départementaux aux autres collectivités et groupements du territoire, soit principalement aux régions et aux intercommunalités.

Ce transfert se justifie par l’objectif de clarification et de rationalisation de la répartition des compétences entre les différentes collectivités territoriales en matière de transport en général et de gestion des ports en particulier, telle qu’elle résulte de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, qui permet une « décentralisation à la demande » des ports non autonomes relevant de l’État.

La souplesse du dispositif « à la demande » a toutefois eu pour effet de multiplier les interlocuteurs compétents en matière de gestion des ports. Quant au département, qui devient par le présent projet de loi une collectivité spécialisée dans l’exercice des solidarités sociales territoriales, il ne saurait conserver une compétence sur les transports.

Le transfert de la propriété, de l’aménagement, de l’entretien et de la gestion des ports départementaux est d’autant plus cohérent que le présent projet de loi vient d’attribuer une forte compétence en matière de développement économique aux régions, chargées d’en définir les orientations sur leur territoire. Dans un pays doté d’une très grande façade maritime comme le nôtre, les ports sont en effet un incontestable vecteur de développement économique ; il est donc logique de les transférer aux collectivités jouant un rôle prépondérant en matière économique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission est sensible à l’intérêt porté par les auteurs de ces amendements à l’avenir de la SNSM. Elle s’en est d’ailleurs également préoccupée en déposant des amendements spécifiques, qui tendent à permettre aux régions et aux départements de la subventionner.

Je signale au passage que l’action de la SNSM n’est pas vraiment liée à l’activité des ports.

J’ajoute que les départements assurent aussi la sécurité des personnes ; ils ont notamment une compétence exclusive en matière de lutte contre les incendies.

En tout cas, je me dois de souligner que, même si aucun des présents amendements n’est adopté, le Sénat sera amené à se pencher sur l’avenir de la SNSM lorsque viendront en discussion les amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 24.

En dehors de la question de la SNSM, qui n’est d’ailleurs pas abordée dans l’amendement du groupe écologiste, ces trois amendements tendent tous à revenir, peu ou prou, au texte initial du Gouvernement et, ainsi, à transférer aux régions des ports qui relèvent actuellement des départements.

Cependant, ils sont loin de répondre véritablement à l’objectif affiché de clarification des compétences. Il ne s’agit que d’une suppression d’un échelon d’action territoriale, sans réagencement des autres compétences : ils ne mettent nullement fin à l’enchevêtrement des compétences en identifiant un échelon de collectivité territoriale à une activité dominante. Un article 11 rédigé comme cela nous est proposé par ces trois amendements laisserait perdurer la triple compétence en matière de ports de plaisance – régions, communes et groupements, syndicats mixtes –, en se contentant de supprimer l’échelon départemental. Cette suppression reviendrait sur les acquis permis par l’article 30 de la loi du 13 août 2004, qui avait confié ces ports à nombre de départements. Or, en dix ans, les départements y ont massivement investi.

Dès lors, on peut se demander pourquoi il faudrait supprimer les ports départementaux et non pas les ports relevant des communes ou des syndicats mixtes, par exemple. Il pourrait être tout à fait légitime de réserver les infrastructures portuaires aux collectivités territoriales ayant le plus large ressort territorial, à savoir les régions et les départements.

Enfin, je le rappelle, l’idée de confier moins de compétences aux départements répondait surtout, initialement, à la volonté de les faire disparaître aussi vite que possible. (Mme la ministre et M. le secrétaire d’État manifestent leur désaccord.) C’est en tout cas, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, ce que la radiographie du projet de loi initial pouvait laisser apparaître !

Dans ces conditions, et même si certains défenseurs des ports seraient beaucoup plus compétents que moi pour le dire, la suppression de cet article paraît nécessaire. La commission a donc émis un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il va de soi que le Gouvernement ne partage pas l’analyse du rapporteur.

La CTAP permet de déléguer la gestion des petits ports aux départements, s’ils le souhaitent, mais aussi aux agglomérations, et le rapport réalisé par Odette Herviaux, que nous avons étudié dans le détail, fait bien ressortir le rôle très intéressant que celles-ci peuvent jouer à cet égard.

Je demande à Mme Herviaux et à M. Placé de bien vouloir retirer leurs amendements au profit de celui présenté par le Gouvernement, qui ajoute au dispositif initial des dispositions relatives aux problèmes insulaires rencontrés par la Corse et traite également de la SNSM.

Nous avons beaucoup travaillé depuis le mois de juin dernier sur ce dernier sujet, la fin de la clause de compétence générale ayant créé un vrai trouble dans les équipes, surtout composées de bénévoles, de la SNSM.

M. le président. Madame Herviaux, l’amendement n° 450 est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. Non, je le retire, monsieur le président, au profit de l’amendement n° 766.

Je souhaite toutefois formuler quelques remarques.

En faisant, pour préparer mon rapport, le tour de l’ensemble des ports décentralisés, j’ai pu constater, monsieur le rapporteur, une très forte volonté de clarification en ce qui concerne les ports. Dans le cas d’un port départemental, si la commune ou l’intercommunalité n’est pas partie prenante à la gestion, des problèmes ne manquent pas de se poser. Ainsi, le territoire portuaire peut faire l’objet de conflits, liés aux orientations décidées quant à l’usage de cette zone par la collectivité compétente. Par exemple, dans un port de commerce, s’il y a également du trafic de passagers, la vitrine touristique peut être privilégiée au détriment des activités commerciales ou industrielles, jusqu’à disparition de celles-ci.

C’est pourquoi il me paraît nécessaire que toutes les collectivités concernées travaillent ensemble. Dans la mesure où les transports relèvent essentiellement, me semble-t-il, de la compétence de la région, c’est à elle d’organiser la concertation avec les autres niveaux de collectivités.

M. le président. L'amendement n° 450 est retiré.

Monsieur Placé, l'amendement n° 955 est-il maintenu ?

M. Jean-Vincent Placé. Non, monsieur le président, je le retire au profit de l’amendement du Gouvernement, qui est effectivement plus complet, notamment en ce qui concerne la SNSM.

Je salue également les propos de ma collègue Odette Herviaux, élue du Morbihan, qui est très compétente sur le sujet.

M. le président. L'amendement n° 955 est retiré.

La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote sur l’amendement n° 766.

M. Michel Magras. Je m’interroge sur la cohérence entre certaines dispositions.

Le Sénat a adopté vendredi soir un amendement, n° 936 rectifié, en vertu duquel la région « organise les transports maritimes réguliers publics de personnes et de biens pour la desserte des îles ».

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Des îles « françaises » !

M. Michel Magras. Sauf erreur de ma part, comme les collectivités polynésiennes ont un statut particulier, seule la Guadeloupe est concernée.

Nous avons ainsi attribué aux régions le droit de décider du transport des passagers et des marchandises, alors que les ports relevaient jusqu’à présent des départements. En clair, et je caricature à peine, ce sont les régions qui décident et les départements qui paient ! Soyons cohérents : soit on transfère tout aux régions, soit on laisse les départements assumer leurs compétences. En tant qu’élu d’outre-mer, je suis partisan d’une gestion et d’une exploitation au plus près du territoire.

Arrêtons de présenter les ports ultra-marins des îles comme un fardeau. Ce sont des poumons économiques qui, avec une bonne politique, favorisent incontestablement le développement !

Dans une commune-île, c’est à la commune de gérer le port. Et la logique voudrait que le département gère les ports situés sur son territoire, sauf si la commune exerce cette compétence par convention avec l’autorité propriétaire, comme je l’avais toujours demandé pour la Guadeloupe.

Quoi qu’il en soit, il me paraît incohérent de voter un amendement tendant à transférer la compétence aux régions le vendredi et de réclamer le maintien des prérogatives des départements le lundi suivant ! Pour ma part, comme je souhaite que la compétence reste aux départements, j’aurais préféré que l’amendement n° 936 rectifié soit rejeté. Là, nous aurions eu un dispositif cohérent !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mon cher collègue, il n’y a aucune incohérence.

L’amendement que nous avons adopté vendredi soir a simplement pour objet de permettre aux régions de continuer à participer au financement des liaisons entre les îles françaises et le continent, compte tenu de la disparition de la clause de compétence générale. Vous en conviendrez, ce n’est pas le même sujet.

Les collectivités d’outre-mer ont des régimes spécifiques, adaptés à leurs caractéristiques propres ; vous êtes bien placé pour le savoir, monsieur Magras. Certaines, dont la vôtre, ont des compétences extrêmement larges. On ne peut donc pas faire de comparaison avec les collectivités de métropole.

L’amendement adopté vendredi concernait les îles « françaises ». N’est-ce pas, monsieur le président de la commission des lois ? (Sourires.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Oui, françaises !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela ne remet évidemment pas en cause l’utilité des liaisons avec les îles étrangères.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Et néanmoins amies ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

M. Jérôme Bignon. Je suivrai l’avis de la commission. Toutefois, je donne acte au Gouvernement d’avoir tenu l’engagement que M. Vidalies avait pris en séance lors de l’examen des dispositions du projet de loi de finances relatives à la SNSM. Une disposition en ce sens figure dans l’amendement du Gouvernement, de même que dans l’amendement de Mme Herviaux.

Je n’ai pas déposé d’amendement sur le sujet puisque M. le rapporteur s’en est chargé. Nous aurions déjà dû examiner son amendement, qui, dans un premier temps, portait article additionnel après l’article 3. Toutefois, pour des raisons de légistique, il a été reporté après l’article 24.

En réalité, tout le monde a de bonnes intentions à l’égard de la SNSM. Je m’en réjouis. Vous vous en souvenez, nous avions eu l’occasion de faire part de nos préoccupations quant à l’avenir de cet organisme lors d’un débat en séance.

Nous verrons bien ce qu’il adviendra de l’article 11. Quoi qu’il en soit, et même si j’ai beaucoup d’estime pour notre collègue Odette Herviaux, la rédaction proposée par le Gouvernement me paraît plus rigoureuse.

Mme Odette Herviaux. C’est bien pour cela que j’ai retiré mon amendement au profit de celui du Gouvernement !

M. Jérôme Bignon. L’amendement du Gouvernement renvoie au code de la sécurité intérieure. C’est l’autorité administrative qui donne l’agrément en matière de sécurité en mer. Toute personne obtenant cet agrément peut bénéficier de l’aide prévue. Cela me paraît légitime.

Cependant, il y a un souci. Dans l’amendement du Gouvernement, il est aussi fait référence à l’article L. 5314-4 du code des transports, dont le quatrième alinéa prévoit la possibilité pour un département ou un syndicat mixte d’intervenir à nouveau, à la demande d’une commune. Autrement dit, le Gouvernement mentionne le département alors que notre collègue Odette Herviaux évoquait les collectivités en général. Or, sauf erreur de ma part – mais peut-être la Constitution a-t-elle été subrepticement modifiée ! (Sourires.) –, les départements sont encore des collectivités de la République. À en juger par les déclarations de Mme la ministre, le Gouvernement semble ne pas vouloir que les départements interviennent en la matière. Pourtant, ils en ont la possibilité s’ils sont sollicités par une commune ou une communauté des communes. Je pense donc qu’une clarification s’impose.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je tiens à le souligner, la commission accorde beaucoup d’importance à la position qu’elle a adoptée sur les ports.

Tant qu’il y avait une perspective de disparition de l’échelon départemental, il fallait bien redistribuer les compétences départementales. Cela a pu être déterminant pour le Gouvernement dans la version initiale de son projet de loi, quand il a inscrit le transfert des ports départementaux vers d’autres collectivités.

À partir du moment où le Gouvernement lui-même ne s’inscrit plus dans la perspective de disparition du département, il n’a plus besoin de redistribuer les compétences départementales vers d’autres collectivités. Car, à la vérité, il n’y a aucun autre motif raisonnable de mettre en œuvre une procédure de transfert de la gestion des ports.

En effet, plusieurs types de ports sont actuellement gérés par les départements, qui délèguent d’ailleurs souvent cette compétence ou l’exercent en commun avec d’autres.

L’entretien et la maintenance des tout petits ports doivent être mutualisés. Dans certains départements, il y a parfois une douzaine de ports qui sont entretenus par un service composé de deux personnes. On voit mal comment la mutualisation pourrait être aussi efficace si ces ports relevaient de communes ou de communautés de communes. Symétriquement, on voit mal l’intérêt qu’il y aurait à constituer des services régionaux pour l’entretien de ces petits ports ; de tels services seraient tout à fait à l’écart des compétences stratégiques que nous avons voulu confier à la région en matière d’économie et d’emploi.

En outre, le dispositif envisagé par le Gouvernement, dans son texte initial et dans l’amendement présenté par Mme la ministre, pour les ports gérés par les départements – ce sont souvent des ports de taille intermédiaire – aurait des effets extrêmement préoccupants. Il s’agit en quelque sorte de créer un mécanisme d’enchères pour savoir qui récupérera cette compétence. Or ces ports ont bien un intérêt départemental et, désormais, le département subsiste.

De plus, le projet gouvernemental ouvre la voie à un démembrement des ports par activité : la plaisance, le commerce, le transport des voyageurs, la pêche… Par exemple, certaines collectivités pourraient récupérer le commerce et d’autres la plaisance. Nous aurions alors un système éclaté.

Pour préserver l’investissement dans les ports, nous avons intérêt à ce qu’une collectivité ou un syndicat mixte puissent assumer la totalité des responsabilités, car certaines activités portuaires sont déficitaires, tandis que d’autres sont excédentaires. C’est le regroupement de toutes ces activités, même quand il y a concession, qui permet à l’activité portuaire de se développer avec les investissements et les moyens nécessaires.

Dès lors que les départements subsistent, nous n’avons aucune raison de leur retirer les compétences que leur disparition aurait conduit à devoir répartir entre d’autres collectivités.

La commission espère que sa position sera partagée sur l’ensemble des travées de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. M. le président de la commission des lois vient de rappeler la diversité des situations. Une telle diversité a appelé des solutions adaptées à ce qui se passait sur le terrain et aux obligations des uns et des autres. Que je sache, cela n’a pas créé de graves problèmes !

L’article 11, qui a été supprimé et que certains voudraient rétablir, est un vestige de la théorie initiale selon laquelle il fallait faire disparaître le département et répartir ses compétences entre deux entités : la région et les intercommunalités.

La commission a adopté une solution empreinte de sagesse en maintenant la situation actuelle. Je soutiendrai sa position.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 766.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 11 demeure supprimé.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. La SNSM est morte !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non, puisque nous proposons un article additionnel après l’article 24 à son sujet.

Article 11 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Articles additionnels après l'article 12

Article 12

Transfert des collèges et des autres compétences scolaires du département vers la région

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 608, présenté par M. Patriat et Mmes Herviaux, Espagnac et Ghali, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° a) Le chapitre III du titre Ier du livre II de la première partie législative est abrogé ;

b) La section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la première partie législative du code de l’éducation est intitulée : « Lycées, établissements d’éducation spéciale, lycées professionnels maritimes, établissements d’enseignement agricole et collèges » ;

2° L’article L. 214-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 214-5. – Le conseil régional établit, après accord de chacune des collectivités concernées ou, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale concernés par les projets situés sur leur territoire, les programmes prévisionnels des investissements relatifs aux collèges, aux lycées, aux établissements d’éducation spéciale, aux lycées professionnels maritimes et aux établissements d’enseignement agricole visés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime, qui résultent du schéma prévisionnel des formations mentionné à l’article L. 214-1 du présent code.

« Le conseil régional arrête la localisation des collèges, leur capacité d’accueil, leur secteur de recrutement et le mode d’hébergement des élèves, en tenant compte des critères d’équilibre démographique, économique et social, après avis des conseils départementaux de l’éducation nationale des départements concernés. Lorsque cela favorise la mixité sociale, un même secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains. Toutefois, les autorités compétentes de l’État affectent les élèves dans les collèges publics après avis de la région sur les principes, les modalités d’affectation des élèves et les capacités d’accueil des établissements.

« Le conseil régional définit la localisation des lycées, leur capacité d’accueil et le mode d’hébergement des élèves. Il arrête, en tenant compte des critères d’équilibre démographique, économique et social, les districts de recrutement des élèves pour les lycées de la région après avis du conseil académique de l’éducation nationale et avec l’accord du recteur. Toutefois, les autorités compétentes de l’État affectent les élèves dans les lycées publics après avis de la région sur les principes, les modalités d’affectation des élèves et les capacités d’accueil des établissements. » ;

2° bis Après l’article L. 214-5, il est inséré un article L. 214-5-... ainsi rédigé :

« Art. L. 214-5-... – La délégation prévue au titre des dispositions de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales ne peut avoir pour effet de dissocier l’exercice des missions d’accueil, de restauration, d’hébergement et d’entretien général et technique mentionnées à l’article L. 214-6 du présent code. » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 214-6, après les mots : « la charge » sont insérés les mots : « des collèges, » ;

4° À l’article L. 214-6-1, après les mots : « leurs missions » sont insérés les mots : « dans les collèges et » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 214-6-2, après les mots : « accord de la collectivité territoriale » sont insérés les mots : « ou du groupement », et après les mots : « de locaux et d’équipements scolaires », sont insérés les mots : « des collèges, » ;

6° L’article L. 214-7 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les biens immobiliers des établissements visés à l’article L. 214-6 appartenant aux départements à la date d’entrée en vigueur de la loi n° ... du... portant nouvelle organisation territoriale de la République sont transférés en pleine propriété à titre gratuit à la région. Ce transfert ne donne lieu au versement d’aucun droit, taxe, contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ou honoraires. » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « un département, » sont supprimés ;

7° L’article L. 214-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 214-8. – I. – Sont applicables aux constructions existantes des collèges, lycées, établissements d’éducation spéciale, lycées professionnels maritimes et établissements agricoles visés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime, les articles L. 1321-1 à L. 1321-6 du code général des collectivités territoriales, relatifs à l’exercice des compétences et à la mise à disposition des biens utilisés pour l’exercice des compétences transférées, sous réserve des dispositions ci-après.

« Par dérogation au dernier alinéa de l’article L. 1321-1 et aux articles L. 1321-4 et L. 1321-5 du code général des collectivités territoriales, les règles prévues au présent article ainsi qu’aux articles L. 214-8-1 à L. 214-8-2 du présent code sont applicables à l’exercice des compétences et à la mise à disposition de la région des collèges existants à la date du transfert de compétences en matière d’enseignement public et dont l’État n’est pas propriétaire.

« II. – Les biens meubles et immeubles sont de plein droit, à compter de la date du transfert de compétences, mis à la disposition de la région à titre gratuit.

« La région assume l’ensemble des obligations du propriétaire. Elle possède tous pouvoirs de gestion. Elle assure le renouvellement des biens mobiliers ; sous réserve des articles L. 216-1 et L. 212-15, elle peut autoriser l’occupation des biens remis. Elle agit en justice au lieu et place du propriétaire.

« La région peut procéder à tous travaux de grosses réparations, de reconstruction, de démolition, de surélévation ou d’addition de constructions qui ne remettent pas en cause l’affectation des biens.

« Sous réserve du III ci-dessous en ce qui concerne les emprunts affectés, la région est substituée à la collectivité territoriale ou au groupement propriétaire dans ses droits et obligations découlant des marchés et contrats que la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire a pu conclure. La collectivité territoriale ou le groupement propriétaire constate la substitution et la notifie à ses cocontractants.

« Le procès-verbal constatant la mise à disposition prévu à l’article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales est établi contradictoirement entre les représentants de l’État, de la région et de la collectivité territoriale ou du groupement propriétaire.

« Les opérations en cours à la date du transfert de compétences sont achevées selon le régime juridique et financier sous lequel elles ont été commencées.

« III. – La collectivité territoriale ou le groupement propriétaire conserve la charge du remboursement des emprunts qu’elle avait contractés avant le transfert de compétences, au titre des biens mis à disposition. » ;

8° Après l’article L. 214-8, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 214-8-... – Une convention entre la région et la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire précise le devenir des moyens matériels utilisés pour l’entretien et les grosses réparations des biens mis à disposition. Elle prévoit la mise à disposition de la région des moyens matériels et la possibilité de leur transfert à terme par accord des parties.

« Elle fixe également les modalités financières de la mise à disposition ou du transfert. À défaut de convention dans un délai d’un an à compter du transfert de compétences, il est procédé à la mise à disposition des moyens matériels par le représentant de l’État dans le département dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Jusqu’à l’intervention de la convention ou, à défaut, de la décision du représentant de l’État dans le département, ces moyens sont mis à disposition de la région. » ;

« Art. L. 214-8-… – I. – L’article L. 1321-3 du code général des collectivités territoriales relatives au sort des biens en cas de désaffectation totale ou partielle est applicable aux biens mis à disposition de la région.

« II. – Par accord entre la région et la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire, les biens mis à disposition de la région peuvent être transférés à ce dernier en pleine propriété.

« Une convention fixe les modalités du transfert de propriété.

« Ce transfert ne donne pas lieu à la perception de droit, taxe ou honoraire.

« III. – La région est également substituée à l’État dans les droits et obligations que celui-ci détenait en tant qu’utilisateur des biens mis à disposition.

« La région est substituée à l’État dans les contrats de toute nature que celui-ci avait conclus pour l’aménagement, l’entretien et la conservation des biens ainsi que pour le fonctionnement des services. L’État constate cette substitution et la notifie à ses cocontractants.

« IV. – Lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale a reçu compétence au lieu et place de la collectivité territoriale propriétaire, ce groupement exerce la compétence dévolue à la collectivité territoriale propriétaire. » ;

9° Au premier alinéa de l’article L. 214-10, après les mots : « des élèves », sont insérés les mots : « d’un collège, » ;

10° La première phrase de l’article L. 216-4 est ainsi rédigée :

« Pour le département de Paris et la métropole de Lyon, lorsqu’un même ensemble immobilier comporte à la fois un collège et un lycée, une convention intervient entre la collectivité concernée et la région pour déterminer celle des deux collectivités qui assure le recrutement et la gestion des personnels autres que ceux mentionnés à l’article L. 211-8, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble ; cette convention précise la répartition des charges entre les deux collectivités. » ;

11° a) À l’article L. 212-9, aux premier, deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article L. 216-5 et aux premier, deuxième et troisième alinéas de l’article L. 216-6 les mots : « le département ou » sont supprimés ;

b) Aux premier, troisième et cinquième alinéas de l’article L. 216-5 et aux premier et cinquième alinéas de l’article L. 216-6 les mots : « du département ou » sont supprimés ;

c) Au deuxième alinéa de l’article L. 216-5 et au deuxième alinéa de l’article L. 216-6, les mots : « ou le département » sont supprimés ;

12° L’article L. 442-9 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « les départements pour les classes des collèges, les régions pour les classes des lycées, et, en Corse, la collectivité territoriale » sont remplacés par les mots : « Les régions et, en Corse, la collectivité territoriale » ;

b) À la deuxième phrase du troisième alinéa, après les mots : « en application », les mots : « des dispositions des articles L. 213-2-1 et » sont remplacés par les mots : « de l’article ».

II. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À l’article L. 3321-1, les 7° et 14° sont abrogés ;

2° L’article L. 3411-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le département de Paris exerce de plein droit les compétences résultant du transfert des collèges des départements aux régions par la loi n° ... du... portant nouvelle organisation territoriale de la République, codifiées à la section 2 du chapitre IV du titre I du livre II de la première partie législative du code de l’éducation ainsi qu’à l’article L. 442-9 du même code. » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 3542-1, les références : « aux 7° , 8° , 10° bis, 11° et 14° » sont remplacées par les références : « aux 8° , 10° bis et 11° » ;

4° L’article L. 3641-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La métropole de Lyon exerce de plein droit les compétences résultant du transfert des collèges des départements aux régions par la loi n° ... du... portant nouvelle organisation territoriale de la République, codifiées à la section 2 du chapitre IV du titre I du livre II de la première partie législative du code de l’éducation ainsi qu’à l’article L. 442-9 du même code. » ; 

5° L’article L. 4221-1-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « de fonctionnement », sont insérés les mots : « des collèges et » ;

b) À la deuxième phrase, après les mots : « surveillance des élèves, dans » sont insérés les mots : « les collèges et ».

III. – Au deuxième alinéa du II de l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, après les mots : « qui les fréquentent » sont insérés les mots : « et les conditions de scolarisation des enfants ».

IV. – À compter du transfert des compétences prévu par le présent article, les régions sont substituées aux départements qui se sont affiliés aux centres de gestion, en application de l’article 15 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, pour les seuls agents relevant des cadres d’emplois constitués pour l’application de l’article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales en vue de l’accueil des personnels ouvriers et de service exerçant leurs missions dans les collèges, jusqu’à l’expiration de la période d’affiliation en cours.

V. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er septembre 2017.

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 608 est retiré.

L'amendement n° 767, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° a) Le chapitre III du titre Ier du livre II de la première partie législative est abrogé ;

b) La section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la première partie législative du code de l’éducation est intitulée : « Lycées, établissements d’éducation spéciale, lycées professionnels maritimes, établissements d’enseignement agricole et collèges » ;

2° L’article L. 214-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 214-5. – Le conseil régional établit, après accord de chacune des collectivités concernées ou, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale concernés par les projets situés sur leur territoire, les programmes prévisionnels des investissements relatifs aux collèges, aux lycées, aux établissements d’éducation spéciale, aux lycées professionnels maritimes et aux établissements d’enseignement agricole visés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime, qui résultent du schéma prévisionnel des formations mentionné à l’article L. 214-1 du présent code.

« Le conseil régional arrête la localisation des collèges, leur capacité d’accueil, leur secteur de recrutement et le mode d’hébergement des élèves, en tenant compte des critères d’équilibre démographique, économique et social, après avis des conseils départementaux de l’éducation nationale des départements concernés. Lorsque cela favorise la mixité sociale, un même secteur de recrutement peut être partagé par plusieurs collèges publics situés à l’intérieur d’un même périmètre de transports urbains. Toutefois, les autorités compétentes de l’État affectent les élèves dans les collèges publics.

« Le conseil régional définit la localisation des lycées, leur capacité d’accueil et le mode d’hébergement des élèves. » ;

2° bis Après l’article L. 214-5, il est inséré un article L. 214-5-... ainsi rédigé :

« Art. L. 214-5-.... La délégation prévue au titre des dispositions de l’article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales ne peut avoir pour effet de dissocier l’exercice des missions d’accueil, de restauration, d’hébergement et d’entretien général et technique mentionnées à l’article L. 214-6 du présent code. »

3° Au premier alinéa de l’article L. 214-6, après les mots : « la charge » sont insérés les mots : « des collèges, » ;

4° À l’article L. 214-6-1, après les mots : « leurs missions » sont insérés les mots : « dans les collèges et » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 214-6-2, après les mots : « accord de la collectivité territoriale » sont insérés les mots : « ou du groupement », et après les mots : « de locaux et d’équipements scolaires », sont insérés les mots : « des collèges, » ;

6° L’article L. 214-7 est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les biens immobiliers des établissements visés à l’article L. 214-6 appartenant aux départements à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … portant nouvelle organisation territoriale de la République sont transférés en pleine propriété à titre gratuit à la région. Ce transfert ne donne lieu au versement d’aucun droit, taxe, contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ou honoraires. » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « un département, » sont supprimés ;

7° L’article L. 214-8 est ainsi rédigé :

« Art. L. 214-8. – I. – Sont applicables aux constructions existantes des collèges, lycées, établissements d’éducation spéciale, lycées professionnels maritimes et établissements agricoles visés à l’article L. 811-8 du code rural et de la pêche maritime, les articles L. 1321-1 à L. 1321-6 du code général des collectivités territoriales, relatifs à l’exercice des compétences et à la mise à disposition des biens utilisés pour l’exercice des compétences transférées, sous réserve des dispositions ci-après.

« Par dérogation au dernier alinéa de l’article L. 1321-1 et aux articles L. 1321-4 et L. 1321-5 du code général des collectivités territoriales, les règles prévues au présent article ainsi qu’aux articles L. 214-8-1 à L. 214-8-2 du présent code sont applicables à l’exercice des compétences et à la mise à disposition de la région des collèges existants à la date du transfert de compétences en matière d’enseignement public et dont l’État n’est pas propriétaire.

« II. – Les biens meubles et immeubles sont de plein droit, à compter de la date du transfert de compétences, mis à la disposition de la région à titre gratuit.

« La région assume l’ensemble des obligations du propriétaire. Elle possède tous pouvoirs de gestion. Elle assure le renouvellement des biens mobiliers ; sous réserve des articles L. 216-1 et L. 212-15, elle peut autoriser l’occupation des biens remis. Elle agit en justice au lieu et place du propriétaire.

« La région peut procéder à tous travaux de grosses réparations, de reconstruction, de démolition, de surélévation ou d’addition de constructions qui ne remettent pas en cause l’affectation des biens.

« Sous réserve du III ci-dessous en ce qui concerne les emprunts affectés, la région est substituée à la collectivité territoriale ou au groupement propriétaire dans ses droits et obligations découlant des marchés et contrats que la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire a pu conclure. La collectivité territoriale ou le groupement propriétaire constate la substitution et la notifie à ses cocontractants.

« Le procès-verbal constatant la mise à disposition prévu à l’article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales est établi contradictoirement entre les représentants de l’État, de la région et de la collectivité territoriale ou du groupement propriétaire.

« Les opérations en cours à la date du transfert de compétences sont achevées selon le régime juridique et financier sous lequel elles ont été commencées.

« III. – La collectivité territoriale ou le groupement propriétaire conserve la charge du remboursement des emprunts qu’elle avait contractés avant le transfert de compétences, au titre des biens mis à disposition. » ;

8° Après l'article L. 214-8, sont insérés deux articles ainsi rédigés :

« Art. L. 214-8-... – Une convention entre la région et la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire précise le devenir des moyens matériels utilisés pour l’entretien et les grosses réparations des biens mis à disposition. Elle prévoit la mise à disposition de la région des moyens matériels et la possibilité de leur transfert à terme par accord des parties. Elle fixe également les modalités financières de la mise à disposition ou du transfert. À défaut de convention dans un délai d’un an à compter du transfert de compétences, il est procédé à la mise à disposition des moyens matériels par le représentant de l’État dans le département dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

« Jusqu’à l’intervention de la convention ou, à défaut, de la décision du représentant de l’État dans le département, ces moyens sont mis à disposition de la région. » ;

« Art. L. 214-8-... – I. – L’article L. 1321-3 du code général des collectivités territoriales relatives au sort des biens en cas de désaffectation totale ou partielle est applicable aux biens mis à disposition de la région.

« II. – Par accord entre la région et la collectivité territoriale ou le groupement propriétaire, les biens mis à disposition de la région peuvent être transférés à ce dernier en pleine propriété.

« Une convention fixe les modalités du transfert de propriété.

« Ce transfert ne donne pas lieu à la perception de droit, taxe ou honoraire.

« III. – La région est également substituée à l’État dans les droits et obligations que celui-ci détenait en tant qu’utilisateur des biens mis à disposition.

« La région est substituée à l’État dans les contrats de toute nature que celui-ci avait conclus pour l’aménagement, l’entretien et la conservation des biens ainsi que pour le fonctionnement des services. L’État constate cette substitution et la notifie à ses cocontractants.

« IV. – Lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale a reçu compétence au lieu et place de la collectivité territoriale propriétaire, ce groupement exerce la compétence dévolue à la collectivité territoriale propriétaire. » ;

9° Au premier alinéa de l’article L. 214-10, après les mots : « des élèves », sont insérés les mots : « d’un collège, » ;

10° La première phrase de l’article L. 216-4 est ainsi rédigée :

« Pour le département de Paris et la métropole de Lyon, lorsqu’un même ensemble immobilier comporte à la fois un collège et un lycée, une convention intervient entre la collectivité concernée et la région pour déterminer celle des deux collectivités qui assure le recrutement et la gestion des personnels autres que ceux mentionnés à l’article L. 211-8, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement de l’ensemble ; cette convention précise la répartition des charges entre les deux collectivités. » ;

11° a) À l’article L. 212-9, aux premier, deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article L. 216-5 et aux premier, deuxième et troisième alinéas de l’article L. 216-6 les mots : « le département ou » sont supprimés ;

b) Aux premier, troisième et cinquième alinéas de l’article L. 216-5 et aux premier et cinquième alinéas de l’article L. 216-6 les mots : « du département ou » sont supprimés ;

c) Au deuxième alinéa de l’article L. 216-5 et au deuxième alinéa de l’article L. 216-6, les mots : « ou le département » sont supprimés ;

12° L'article L. 442-9 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du troisième alinéa, les mots : « les départements pour les classes des collèges, les régions pour les classes des lycées, et, en Corse, la collectivité territoriale » sont remplacés par les mots : « Les régions et, en Corse, la collectivité territoriale » ;

b) À la deuxième phrase du troisième alinéa, après les mots : « en application », les mots : « des dispositions des articles L. 213-2-1 et » sont remplacés par les mots : « de l’article ».

II. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À l’article L. 3321-1, les 7° et 14° sont abrogés ;

2° L’article L. 3411-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le département de Paris exerce de plein droit les compétences résultant du transfert des collèges des départements aux régions par la loi n° … du … portant nouvelle organisation territoriale de la République, codifiées à la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la première partie législative du code de l’éducation ainsi qu’à l’article L. 442-9 du même code. » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 3542-1, les références : « aux 7° , 8° , 10° bis, 11° et 14° » sont remplacées par les références : « aux 8° , 10° bis et 11° » ;

4° L’article L. 3641-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La métropole de Lyon exerce de plein droit les compétences résultant du transfert des collèges des départements aux régions par la loi n° … du … portant nouvelle organisation territoriale de la République, codifiées à la section 2 du chapitre IV du titre Ier du livre II de la première partie législative du code de l’éducation ainsi qu’à l’article L. 442-9 du même code. » ;

5° L’article L. 4221-1-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après les mots : « de fonctionnement », sont insérés les mots : « des collèges et » ;

b) À la deuxième phrase, après les mots : « surveillance des élèves, dans » sont insérés les mots : « les collèges et ».

III. – Au deuxième alinéa du II de l’article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, après les mots : « qui les fréquentent » sont insérés les mots : « et les conditions de scolarisation des enfants ».

IV. – À compter du transfert des compétences prévu par le présent article, les régions sont substituées aux départements qui se sont affiliés aux centres de gestion, en application de l’article 15 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, pour les seuls agents relevant des cadres d’emplois constitués pour l’application de l’article 109 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales en vue de l’accueil des personnels ouvriers et de service exerçant leurs missions dans les collèges, jusqu’à l’expiration de la période d’affiliation en cours.

V. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er septembre 2017.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Nous en venons au transfert des collèges et des autres compétences scolaires du département vers la région, qui a fait l’objet de maintes discussions au cours des derniers mois.

Dans l’esprit du Gouvernement, former un bloc de compétences rassemblant lycées et collèges paraît utile et de nature à rationnaliser la dépense publique, à mutualiser des dépenses de même nature, qu’il s’agisse d’un lycée ou d’un collège. Je pense aux dépenses de fonctionnement, à la gestion des personnels techniques, ouvriers et de service, les fameux TOS, qui sont si utiles dans tous les aspects de la vie quotidienne d’un l’établissement.

Telles sont les raisons qui ont conduit le Gouvernement à proposer le transfert des collèges aux régions.

Nous savons que ce transfert pose problème à certains d’entre vous. Beaucoup s’inquiètent, de surcroît, du nombre d’établissements scolaires, lycées et collèges, dans lesquels devront siéger les futurs conseillers régionaux : ceux-ci auront sans doute beaucoup de mal à concilier leurs différentes missions dans leur emploi du temps.

Il faut avoir présent à l’esprit ce fait que Marylise Lebranchu et moi-même ne cessons de rappeler : le Parlement a décidé la création des conférences territoriales de l’action publique. Même si cette création a suscité à l’époque beaucoup de réticences, notamment au Sénat - je m’en souviens, j’étais sénateur (Sourires.) -, force est de reconnaître que la CTAP y fait maintenant l’unanimité.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comme quoi tout le monde évolue !

M. André Vallini, secrétaire d'État. Comme quoi le Sénat a compris à quel point Marylise Lebranchu avait eu raison de proposer la création de cette CTAP dans chaque région ; elle permettra aux différents niveaux de collectivités d’exercer au mieux les compétences, de la façon la plus pragmatique qui soit.

Tel est le sens de cet amendement, qui vise à transférer les collèges au niveau régional. Certes, nous aurions pu également envisager l’inverse, à savoir le transfert des lycées aux départements.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui !

M. Dominique de Legge. Cela aurait été mieux !

M. André Vallini, secrétaire d'État. Ce qui compte, c’est d’être pragmatique !

Dans mon département, l’Isère, nous n’avons pas attendu ce projet de loi pour envisager la mutualisation avec la région Rhône-Alpes des dépenses de fonctionnement, des dépenses courantes de gestion des personnels qui s’occupent des lycées et des collèges, à partir des maisons du département implantées par le conseil général sur tout son territoire. Nous allons la mettre en pratique dès cette année.

C’est le pragmatisme qui doit nous guider. Nous savons que les sénatrices et les sénateurs en sont, tout autant que le Gouvernement, pleinement convaincus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous nous sommes évidemment appuyés, pour déterminer notre position, sur les travaux de la commission de la culture, saisie pour avis sur ce qui relève de son domaine. Ces travaux nous ont permis d’affiner les raisons pour lesquelles nous ne sommes pas favorables au transfert des collèges aux régions.

Comme il y a plus de collèges que de lycées, je pense depuis longtemps, monsieur le secrétaire d'État, que les lycées pourraient être transférés aux départements.

Mme Catherine Procaccia. C’est la logique !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Deux régions vont le faire.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il n’y a pas de raison que ce soit dans un sens plutôt que dans l’autre !

Cependant, certains lycées, notamment les lycées professionnels, comportent de nombreuses sections post-baccalauréat. C’est pour cette raison, je vous le dis franchement, que je me suis abstenu de déposer un amendement en ce sens. Sinon, les départements sont bien plus à même de gérer un grand nombre de personnels. C’est bien pour cela que les conseils généraux ont réussi à absorber le transfert des TOS, qui dépendaient auparavant de l’État.

Les régions ne savent pas très bien gérer de grandes masses d’agents, essentiellement de catégorie C. Les régions gèrent du personnel de conception plutôt que du personnel d’exécution ; c’est leur vocation. En Île-de-France, par exemple, pas moins de 800 collèges viendront s’ajouter aux près de 470 lycées : on mesure la masse de personnels à gérer !

En outre, certains ont considéré que le collège devait tisser un lien très fort avec l’enseignement primaire.

Pour toutes ces raisons, la commission souhaite maintenir la compétence des départements en matière de collèges et est donc défavorable, madame la ministre, à votre amendement n° 767.

Vous nous reprochez de ne rien céder, mais vous ne cédez rien non plus ! Depuis le début, vous nous dites que l’on peut discuter de tout, mais vous demandez le rétablissement de toutes les dispositions que nous entendons supprimer ! Comme si les travaux de l’ensemble des commissions du Sénat qui se sont penchées sur ce texte, et pas seulement ceux de la commission des lois, n’avaient aucun intérêt ! C’est tout de même dommage, vous en conviendrez !

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de culture.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Chacun s’en doute, je ne suis pas d’accord avec le choix du Gouvernement de rétablir l’article 12 dans sa rédaction initiale.

À vrai dire, sur le papier, l’idée de transférer les collèges aux régions paraît séduisante. Pour ma part, je suis plutôt régionaliste que départementaliste et j’avais songé que, sur un plan théorique, un tel transfert pourrait se justifier. Toutefois, lorsque les commissions étudient les projets de loi, elles s’efforcent de vérifier avec rigueur le bien-fondé des décisions que le Parlement s’apprête à prendre. Je rappellerai donc les quelques raisons objectives qui ont conduit notre commission de la culture, de l’éducation et de la communication à s’opposer à ce transfert des collèges aux régions.

En premier lieu, je m’appuierai sur les propos tenus par le président de la commission des lois, Philippe Bas, qui a souligné tout à l'heure que nous avions choisi, in fine, le maintien des départements.

Dès lors que les départements perdurent, il faut considérer que c’est l’échelon le plus adapté à l’exercice des compétences dites de proximité, dont fait partie, selon moi, la gestion des établissements scolaires que sont les collèges.

Je me permets de rappeler que nous parlons là du transfert du fonctionnement quotidien de 5 271 collèges publics, qui viendront s’ajouter aux 2 513 lycées. Cela présente-t-il un véritable intérêt pour des régions stratèges, chargées d’une compétence économique renforcée, de l’emploi, de la planification des formations, d’assurer parallèlement un fonctionnement au quotidien ? Au sein de notre commission, nous ne le pensons pas.

J’ai interrogé mon président de conseil régional, Nicolas Mayer-Rossignol, et mon président de conseil départemental, Nicolas Rouly. Vous nous avez d’ailleurs réunis voilà quelques semaines, à Rouen, dans le cadre d’un débat républicain, pour connaître vous-même nos interrogations au sujet de ce projet de loi. Or l’un et l’autre sont défavorables à ce transfert, pour les raisons que j’ai commencé à évoquer.

Il faut savoir que ce transfert constituerait un véritable changement d’échelle pour les conseils régionaux, qui seraient contraints de mettre en place, de leur côté, de manière parallèle, une administration régionale de l’éducation ; ce serait source et de coûts et de complexité.

Permettez-moi de citer quelques chiffres, mes chers collègues. La région issue de la fusion de l’Aquitaine, du Limousin et de Poitou-Charentes devrait assurer la gestion de 751 établissements publics du second degré. Le nombre atteint même 757 pour la nouvelle région issue de la fusion du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie.

Vous en êtes bien conscient, monsieur le secrétaire d’État, puisque vous l’avez vous-même souligné, un tel transfert aboutirait inévitablement à une distension très importante des liens entre les élus locaux, c'est-à-dire désormais les élus régionaux, et les établissements dont ils ont la charge. On voit mal comment les conseils régionaux pourront assurer un réel suivi par la présence de leurs membres dans les conseils d’administration des établissements.

Vous évoquez la CTAP, monsieur le secrétaire d'État, mais je ne relève pas de proposition concrète qui permette de voir comment elle pourrait jouer un rôle en la matière.

D’aucuns arguent de la possibilité que détient désormais le président de l’assemblée délibérante de désigner, pour siéger dans un conseil d’établissement, par exemple, une personne qui n’est pas membre de ladite assemblée. Nonobstant le respect que je porte aux fonctionnaires de l’éducation nationale ou de nos collectivités territoriales, cela revient en somme à envoyer des fonctionnaires à la place des élus ! Voulons-nous vraiment nous dessaisir de nos compétences, de ce pour quoi nous avons été choisis dans nos collectivités pour traiter des sujets qui les concernent ? Je ne le pense pas. Si les élus commencent à déserter les lieux de décision, de partage, de réflexion, autant qu’ils restent chez eux !

Les économies d’échelle qui ont été évoquées semblent pour l’instant incertaines. Le Gouvernement, je suis au regret de le dire, n’a jamais fourni d’estimation fiable des économies qui pourraient résulter de la mutualisation des moyens. Notre commission a auditionné Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'éducation nationale, ainsi que la direction générale des collectivités locales : personne n’a été capable de nous donner le moindre chiffre !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est sûr, on n’en sait rien !

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. En revanche, les coûts d’un tel transfert seraient, dans un premier temps, importants.

Il faut en avoir conscience, le transfert des personnels adjoints techniques territoriaux des établissements d’enseignement, les ATTEE, gérés par les départements, aboutirait à une hausse de plus de 50 % des effectifs gérés par les conseils régionaux. Ce transfert entraînera, comme après la loi de 2004, des surcoûts importants liés à l’alignement des régimes indemnitaires, ainsi que des dépenses d’administration et d’encadrement supplémentaires.

Sur le plan pédagogique – et cet aspect ne saurait être négligé –, le transfert méconnaît totalement les orientations fixées par la loi pour la refondation de l’école de la République, dont nous avons débattu ici il y a un peu plus d’un an. Je rappelle que cette loi assure le continuum entre l’enseignement primaire et le collège, notamment par la création d’un cycle de consolidation CM1, CM2, sixième, et d’un conseil école-collège.

Ces comités de pilotage sont en train de se mettre en place. Dans mon département, ceux qui travaillent sur ces sujets au niveau de l’inspection académique me mettent en garde : la mise en place des nouveaux rythmes scolaires est déjà compliquée, me disent-ils, et le transfert des collèges aux régions au même moment provoquerait un véritable imbroglio. C’est encore un point qui mérite qu’on y réfléchisse.

En conclusion, la commission de la culture a estimé que le transfert des collèges aux conseils régionaux présentait plus d’inconvénients que d’avantages, compte tenu de l’expérience acquise par les collectivités comme de la nécessité de maintenir une gestion de proximité et de garantir l’efficacité de la dépense publique.

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Mme Colette Mélot. Je voudrais insister, à la suite de Mme la présidente Morin-Desailly, sur le fait que les collèges sont vraiment des établissements de proximité, en milieu rural comme dans les villes, en particulier dans les zones d’éducation prioritaire et dans les quartiers en rénovation urbaine, où un travail de proximité, précisément, est mené avec les partenaires sociaux.

Déconnecter les collèges des départements aboutirait à éloigner ces établissements des populations locales : ce serait vraiment une grave erreur.

Je veux souligner le continuum existant entre les établissements primaires et le collège, c'est-à-dire entre le CM1, le CM2 et la sixième. Des comités de pilotage ont été mis en place. Il semble qu’on veuille mettre à bas la loi pour la refondation de l’école de la République, qui a été votée en 2013. Tout cela n’est vraiment pas raisonnable !

J’illustrerai mon propos en prenant l’exemple de la Seine-et-Marne, qui est, au sein de la très grande région d’Île-de-France, un très grand département, dans lequel les collèges sont nécessairement disséminés. Dans un tel contexte, le rattachement des collèges à la région apparaît comme une très mauvaise idée. Mieux vaudrait d’ailleurs faire l’inverse : dès lors que l’on souhaite, à juste titre, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mutualiser les moyens, pourquoi ne pas placer les lycées sous la tutelle des départements ?

Quoi qu’il en soit, les collèges sont des établissements de proximité et ils doivent le rester.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bonne intervention !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour explication de vote.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Nous avons voté sans état d’âme, et même avec enthousiasme, la loi qui a permis de revoir la carte des régions. Pour ma part, je l’ai fait parce que je pensais qu’elle permettait de créer des régions atteignant la masse critique leur conférant une plus grande efficience sur le plan économique et les dotant de plus de force pour se battre dans le grand concert de la compétition européenne et mondiale.

En quoi leur transférer les collèges leur permettra-t-elle d’être encore plus efficientes ?

J’observe d’abord que le président de l’Association des régions de France a déclaré publiquement ne pas être demandeur à ce sujet.

On évoque les économies et la mutualisation qui pourraient être réalisées. Mais la mutualisation existe déjà – je pense aux ensembles mixtes.

Au demeurant, il faut être circonspect quant aux avantages de la mutualisation. Dans mon département, j’ai voulu mettre en place des groupements d’achats. Or cela peut aussi conduire à obliger les collèges à cesser de se fournir chez le boucher du coin. Finalement, cela peut nuire aux intérêts locaux et à la ruralité. Nous devons donc faire très attention quand nous prenons certaines décisions.

La décision de transférer les collèges aux régions a été prise lorsqu’il a été envisagé de supprimer les départements. Je me félicite que le Gouvernement ait manifesté sa capacité d’écoute et su entendre les remarques que nous avions émises, sur toutes les travées.

Les départements ont finalement été confortés dans leur rôle de collectivités chargées des solidarités territoriales et des solidarités entre les hommes. Ce sont eux qui doivent assumer les missions de proximité. Or, s’il est un domaine où il est impératif d’agir dans la proximité, c’est bien celui des établissements scolaires.

Quitte à opérer un transfert en matière d’enseignement, c’est plutôt celui des lycées aux départements qu’il aurait fallu envisager, surtout avec régions très élargies, de manière à assurer à ces établissements une gestion de proximité.

Pour ma part, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, je ne suis pas favorable à votre amendement et je regrette que le Gouvernement ait souhaité rétablir l’article 12. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Si l’on cherchait un exemple des méfaits de l’esprit de système, nous en aurions là un excellent !

On nous parle de mutualisation, mais il y a une forme de mutualisation qu’on ignore, c’est celle qui pratiquée entre les collèges, au travers des équipements qu’ils abritent, et les communes ou les intercommunalités.

Dans le département du Var, que je représente, nous avons mis en place une politique qui me semble assez intéressante : les équipements sportifs et culturels – gymnases, salles de théâtre, auditoriums, etc. – des collèges sont considérés comme des équipements de proximité, qui peuvent servir aux communes. Je rappelle en effet que les collèges ne fonctionnent, pour leur destination première, qu’une centaine de jours par an…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Davantage, tout de même !

M. Pierre-Yves Collombat. Disons que, entre les vacances scolaires, les week-ends et les soirées, ces équipements sont largement disponibles pour d’autres usages que l’usage scolaire.

Nous avons donc réussi à faire en sorte que les équipements du collège implanté dans ma commune fonctionnent tout le temps, au bénéfice de toutes les collectivités du canton. Grâce à des conventions, chacun a pu trouver ses marques.

Négocier des conventions – dans mon cas, entre les enseignants, le département et les collectivités locales – est déjà un sport de haut niveau, chacun cherchant à tirer la couverture à lui. Si on doit le faire avec la région, je pense que rien ne se fera !

Plutôt que de parler abstraitement de mutualisation, il serait préférable de considérer les collèges comme des équipements qui peuvent servir à l’ensemble du territoire où ils sont implantés. Cela évitera que des communes construisent des salles qui ne serviront qu’une fois de temps en temps !

La mutualisation des moyens est le premier argument qui me conduit à penser que le transfert des collèges à la région ne ferait que compliquer les choses.

On nous a aussi expliqué que le transfert à la région permettrait de faire des économies en ce qui concerne la gestion des personnels. J’en doute ! Peut-être aurait-ce été le cas si l’on y avait pensé dès le début, mais, maintenant, les départements ont pris leurs marques en matière de gestion des personnels, tout comme les régions ; et cela a été suffisamment compliqué ! Dans ma région, il a fallu, paraît-il, trois ans pour qu’on s’y retrouve entre les différents statuts…

Je ne vois pas bien ce que le transfert des collèges à la région entraînerait en termes d’améliorations et d’économies. D’ailleurs, comme l’a dit une collègue, on n’a jamais vu le commencement du début de ces économies, qu’on ne sait évidemment pas chiffrer pour la bonne raison qu’on n’en fera pas !

Enfin, le transfert des lycées aux régions a considérablement alourdi la gestion de ces dernières. En effet, auparavant, elles ne géraient ni personnels ni dépenses de fonctionnement. Ces collectivités servaient à structurer l’ensemble d’un territoire, pour y faire des investissements et l’animer économiquement. On veut transférer les collèges à la région, mais on refuse de lui donner la compétence en matière d’emploi. Comprenne qui pourra !

La solution adoptée par la commission des lois me semble donc satisfaisante.

M. le président. La parole est à M. Christian Favier, pour explication de vote.

M. Christian Favier. Je partage beaucoup des observations qui viennent d’être formulées.

Dans ce projet de loi, le transfert des collèges aux régions est sans doute l’une des mesures les plus négatives et l’une de celles qui inquiètent le plus nos concitoyens. En tout cas, elle inquiète énormément la communauté éducative.

Les collèges sont avant tout des établissements de proximité. L’éloignement qu’engendrerait leur transfert, demain, aux grandes régions préoccupe beaucoup les enseignants, les parents d’élèves et les élus locaux. Dans un collège, on a souvent besoin d’être réactif : il faut trouver des remplaçants du jour au lendemain pour les personnels absents, décider des travaux en urgence, etc. Les départements se sont organisés pour répondre rapidement.

Nous avons hérité des personnels techniques, qui avaient été laissés dans un incroyable état d’abandon par l’État. Il faut se rappeler le niveau de formation, souvent très faible, de ces personnels, les problèmes de santé auxquels ils étaient parfois confrontés, à quoi s’ajoutaient des différenciations extrêmement importantes en matière de régime indemnitaire. Ce travail a été pris à bras-le-corps par les conseils généraux. Les départements ont fait de la politique qu’ils menaient à l’égard des collèges leur cœur de métier, avec des résultats tout à fait remarquables, quelles que soient d’ailleurs les majorités politiques.

Des investissements considérables ont été consentis pour la modernisation des collèges existants, qu’il fallait parfois quasiment reconstruire, et pour la construction de nouveaux collèges. Aujourd’hui, on veut revenir sur tout cela : c’est évidemment un recul.

Il s’agit aussi d’un recul de la démocratie. Si l’on confie demain les collèges aux régions, il est clair que les élus seront très rarement en mesure de siéger effectivement aux conseils d’établissement. En Île-de-France, il faudra gérer 1 300 établissements avec 200 élus ! Et cette région présente en outre la particularité de ne faire siéger dans les conseils d’établissement que les élus de la majorité, et non tous les élus, comme c’est le cas dans mon conseil général. Il n’y aura donc plus d’élus de la collectivité responsable dans les conseils des collèges. Nous finirons par le payer, car cette distance avec l’institution finira par engendrer du mécontentement.

Je souhaite également aborder la question du lien avec les politiques départementales.

Notre collègue Collombat a déjà évoqué la mutualisation des équipements abrités par les collèges. En effet, les collèges construits maintenant incluent une salle de sport, qui est utilisée le soir par les clubs sportifs locaux. C'est la proximité avec la vie associative locale qui permet cela. Si, demain, tout est géré à l’échelon des très grandes régions, on perdra cette proximité.

Mais il y a plus important encore, et je pense là aux jeunes qui, dans nos quartiers, sont en difficulté. Par exemple, les départements gèrent les équipes d’éducateurs de rue, les clubs de prévention. Ainsi, nous essayons de faire en sorte qu’il y ait un lien étroit entre les éducateurs et les établissements scolaires, notamment pour lutter contre l’absentéisme scolaire et être attentifs aux jeunes qui décrochent. On sait combien il importe que ces jeunes puissent rester dans le milieu scolaire ; les événements que nous venons de vivre nous le rappellent, malheureusement. Cela nécessite une intervention des enseignants et des parents, mais aussi, parfois, des travailleurs sociaux – éducateurs et assistantes sociales –, qui sont gérés par les départements.

Il serait néfaste de déstabiliser cette organisation, qui fonctionne plutôt bien. C'est la raison pour laquelle il faut soutenir la proposition de la commission, et conserver cette compétence aux départements.

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.

M. Philippe Kaltenbach. La question de la gestion des collèges est essentielle dans notre pays, qui compte plus de 5 000 collèges publics. Nous avons commencé à en débattre en juin dernier, quand le texte du Gouvernement prévoyait la disparition, à terme, des départements. Se posait donc alors, évidemment, la question de la réaffectation des compétences départementales. À l’époque, le projet de loi prévoyait que les régions seraient chargées de la gestion des collèges.

Depuis, cela n’a échappé à personne, les termes du débat ont sensiblement évolué. Le Gouvernement a été réellement à l’écoute des sénateurs de tous les groupes, qui ont unanimement réclamé le maintien du département, au moins dans les zones rurales. C’est ainsi que, après une discussion très approfondie, le choix a été fait de maintenir et même de renforcer le département sur tout le territoire national, sauf dans les zones où il y aura, demain, des métropoles.

Cela crée, à l’évidence, une nouvelle situation.

On peut comprendre que, par cohérence, on confie à la région les compétences liées à l’économie, à tout ce qui concerne le transport, la mobilité en général, même s’il y a peut-être encore quelques ajustements à trouver, notamment en matière de transports scolaires ou de voirie départementale ayant un intérêt stratégique. Sur ces derniers sujets, nous n’avons pas encore épuisé le débat et nous aurons sûrement l’occasion d’affiner le découpage des compétences d’ici à la fin de l’examen du texte.

Cependant, à partir du moment où le département est maintenu, on peut vraiment s’interroger sur l’opportunité de transférer les collèges aux régions. Bon nombre d’arguments ont été avancés par nos collègues. Les membres du groupe socialiste ont beaucoup réfléchi sur cette question et sont majoritairement parvenus à la conclusion selon laquelle ce transfert ne présentait pas un grand intérêt aujourd'hui : puisque les départements sont pérennisés, autant qu’ils continuent à assumer cette compétence ! Bien sûr, cela n’empêchera pas les mutualisations, qui, d'ailleurs, existent déjà.

L’Île-de-France, où je suis élu, compte de nombreuses cités scolaires, dont les bâtiments abritent à la fois un collège et un lycée. Toutes ces cités sont d'ores et déjà gérées par une même entité, les départements et la région s’étant organisés en ce sens. Nous pourrons continuer à développer ce type d’organisation.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Philippe Kaltenbach. Pourquoi décider aujourd'hui d’un transfert aux conséquences importantes, comportant beaucoup de contraintes, nécessitant beaucoup de travail, et au coût financier élevé, au moins dans un premier temps ? En l’état du débat, la raison voudrait que les collèges continuent à être gérés par le département.

M. Philippe Kaltenbach. Les écoles aux communes, les collèges aux départements et les régions aux lycées : nos concitoyens se sont habitués à ce partage des rôles.

En revanche, le transfert des lycées vers les départements ne me semble pas devoir être envisagé dans la mesure où les lycées recrutent souvent leurs élèves au-delà des frontières du département où ils sont implantés, notamment dans le cadre des formations professionnelles ou post-bac.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Philippe Kaltenbach. Sans doute convient-il de ne pas bouleverser l’équilibre auquel nous sommes parvenus.

Ce projet de loi entraîne déjà des changements importants. Je pense, en particulier, au transfert de l’intégralité de la compétence économique aux nouvelles régions, au renforcement de leurs compétences en matière de transport… Autrement dit, les élus locaux ont déjà pas mal de pain sur la planche ! Ne chargeons pas la mule !

Le groupe socialiste souhaite donc que les départements puissent conserver la gestion des collèges.

Ce geste à l’intention de M. Hyest et des membres de la commission montre d’ailleurs que nous sommes à l’écoute et que nous souhaitons trouver des solutions consensuelles. Je suis sûr que cela ne manquera pas d’entraîner un geste en retour de la part de M. Hyest, afin de trouver un équilibre sur la compétence large en matière de transport et de mobilité. (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne suis pas marchand de tapis ! (Nouveaux sourires.)

M. Philippe Kaltenbach. Quoi qu’il en soit, je le répète, le groupe socialiste souhaite vraiment que la gestion des collèges reste du ressort de l’échelon départemental. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour explication de vote.

M. Jérôme Bignon. Madame le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je souhaite vous faire part de trois réflexions qui me paraissent importantes.

Premièrement, pour avoir connu les collèges avant la décentralisation – je suis élu depuis 1980 –, je peux témoigner du changement qui est intervenu à la suite du transfert de leur gestion aux départements.

En effet, je me souviens de l’époque où il fallait en référer à la rue de Grenelle pour rénover une cage d’escalier ou pour transformer un local de cuisine : cela prenait des années ! La proximité qui a résulté du transfert de la gestion aux départements a été absolument décisive. Il en a d'ailleurs été de même pour les lycées après que leur gestion a été confiée aux régions.

Dans ces conditions, je pense que le transfert de la gestion des collèges aux régions aboutirait à une recentralisation pénalisante, ayant pour effet d’éloigner les collèges du centre de décision. C’est d’autant plus vrai que, avec la carte régionale, certaines régions verront leur chef-lieu régional s’éloigner encore ! Ainsi, le siège de la future grande région englobant la Picardie, où je suis élu, sera Lille, qui, pour nous, est plus loin que Paris.

Deuxièmement, je veux revenir sur la dimension sociale, qui semble faire l’objet d’un consensus parmi les intervenants. On consacre le département comme acteur principal du social. Or le collège est un lieu où l’on voit émerger un certain nombre de difficultés sociales. On ne les perçoit pas d’ailleurs toujours suffisamment, comme viennent de le montrer certains événements… Les services sociaux du département sont, la plupart du temps, installés dans les chefs-lieux de canton, où sont aussi implantés les collèges, avec lesquels ils travaillent en symbiose, que ce soit sur les bourses, sur la malnutrition, sur les violences ou sur la santé.

Ce n’est pas à Lille que l’on résoudra les problèmes du collège d’Oisemont ! À moins que l’on ne maintienne, au nom de la proximité, un établissement régional au chef-lieu du département… Mais à quoi sert-il, alors, de confier cette compétence aux régions ?

Troisièmement, enfin, comme certains de mes collègues l’ont très bien dit, le transfert de la gestion des collèges aux régions conduira à un déficit démocratique.

Le fait qu'il n'y ait plus d’élu qui soit à l’écoute des difficultés de tel établissement, qui les relaie, qui prenne contact avec le rectorat, le directeur académique des services de l'éducation nationale ou avec le conseil général, constituera une perte pour l’établissement. Ce sera aussi une perte pour les élus : si l’on nous confie le soin de voter des budgets sans jamais nous permettre d’aller sur le terrain pour discuter de la façon dont l’argent est utilisé, comment pourrons-nous soutenir que nous sommes responsables, que nous ne sommes pas des élus hors-sol ?

Ce déficit démocratique est un vrai problème et me conforte dans l’idée que, compte tenu du maintien des départements, les collèges doivent rester aux départements, en privilégiant, bien évidemment, toutes les mutualisations, toutes les économies, tout le travail en commun qu’il est possible de réaliser.

Pour cette raison, je suivrai le très sage avis de la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, faut-il transférer les collèges aux régions ? (Non ! sur plusieurs travées.) Pourquoi pas ? D’expérience, je peux vous dire que les cités scolaires permettent à un même professeur d’enseigner à la fois en sixième et en première.

Permettez-moi, toutefois, une petite réflexion.

Je suis élu dans le nord de la région Midi-Pyrénées, à la limite du Limousin. Comme vous le savez, Midi-Pyrénées va fusionner avec Languedoc-Roussillon. Imaginons que la direction des collèges de la future grande région soit établie à Montpellier – Toulouse sera sûrement la capitale, mais Montpellier ne sera probablement pas déshabillée de tout service. Malheureusement, pour aller de Martel, où je suis élu, à Montpellier, il faut quatre heures de route. Qu’ils passent par Toulouse ou le Larzac, par l’autoroute ou le viaduc de Millau, la route sera longue pour les agents qui s’occuperont des collèges du nord de la région Midi-Pyrénées ! Ces agents devront donc diriger ces collèges à 400 kilomètres de distance. À moins qu’ils ne réclament la création d’une nouvelle antenne locale de la région pour s’occuper des collèges…

Mes chers collègues, vous voyez les nombreuses complications qui découleraient du transfert des collèges aux régions. Pour ma part, je n’y suis pas favorable. Je serai même plutôt, à l’instar de ma collègue de Haute-Vienne, pour que la gestion des lycées soit, un jour, transférée aux départements.

Je ne voterai donc pas cet amendement.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, et M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.

Mme Jacqueline Gourault. Je veux, à ce stade de la discussion, exprimer un regret : en écoutant tous mes collègues – je n’en ai pas entendu beaucoup défendre le transfert des collèges aux régions –, je me suis dit que nous n’avions peut-être pas assez exactement défini quelles étaient les missions actuelles des départements et des régions.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. On les connaît !

Mme Jacqueline Gourault. Pour certains, le collège, c’est la continuité de l’école primaire. Pour d’autres, le lycée ne saurait être détaché de l’enseignement supérieur, qui relève de la région.

Au fond, il aurait peut-être été nécessaire de préciser ce que l’on entendait exactement par « transfert des lycées et des collèges ».

Mme Marylise Lebranchu, ministre. C’est juste !

Mme Jacqueline Gourault. Je pense, plus précisément, à la construction des bâtiments. C’est une mission essentielle, et chacun a rappelé ici l’évolution qu’avaient permise les lois de décentralisation en confiant la construction des collèges aux départements. Jérôme Bignon l’a répété à l’instant, et je l’en remercie. Rappelons-nous l’état des CES Pailleron ! Au reste, le même constat vaut pour la construction des lycées par les régions, même si on le dit moins souvent.

Franchement, on n’a pas besoin de deux administrations, employant chacune des architectes et des ingénieurs-béton, pour construire les collèges et les lycées ! En la matière, un seul niveau de collectivité territoriale peut faire tout le travail. Comme le secrétaire d'État l’a dit tout à l'heure, il faudra bien, sur ces sujets, engager des mutualisations. Je suis sûre qu’il pourrait en résulter des économies.

Cela dit, la construction de bâtiments est une chose, la pédagogie, qui relève de l’éducation nationale, en est une autre. À cet égard, j’ai été sensible à l’intervention de M. Favier, qui a expliqué tout à l'heure comment le département, qui est en charge d’un certain nombre de politiques sociales, pouvait intervenir dans l’accompagnement des jeunes au collège.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh oui !

Mme Jacqueline Gourault. Nous n’avons pas assez défini les métiers des uns et des autres.

Je reconnais que ma vision est influencée par les caractéristiques de ma région, qui compte six départements, présente une assez grande cohérence et n’est pas concernée par la réforme de la carte. Si je puis dire, la région n’est pas, pour nous, quelque chose de très éloigné, contrairement à celle que vient d’évoquer M. Requier ou, par exemple, à l’Aquitaine, où les distances sont considérables.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il en va de même en Île-de-France !

Mme Jacqueline Gourault. Bien sûr !

Cependant, je le répète, nous n’avons pas assez réfléchi à « qui fait quoi ». (Mme la ministre applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. J’avoue que je ne comprends pas la position du Gouvernement.

Monsieur Vallini, vous nous avez dit qu’il fallait, au nom de la cohérence et de la mutualisation, mettre les lycées et les collèges sous la responsabilité du même niveau de collectivité territoriale. Jusque-là, je vous suis.

Madame la ministre, j’ai eu le plaisir de siéger à vos côtés pendant de nombreuses années au conseil régional de Bretagne. Vous souvenez-vous des propos que vous avez tenus au moment du transfert des personnels techniciens, ouvriers et de service aux régions ? (Mme la ministre opine.) Vous vous y étiez alors absolument opposée, en nous expliquant que les régions avaient une fonction stratégique, et non une fonction de gestion.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je persiste !

M. Dominique de Legge. Et voilà qu’aujourd'hui vous nous dites que les régions doivent aussi gérer les collèges ! J’avoue que je n’arrive pas à comprendre votre logique.

Par ailleurs, vous nous assurez vouloir être à l’écoute du Sénat. Mais, dans le même temps, vous essayez de réintroduire, par voie d’amendement, les dispositions que la commission du Sénat a supprimées.

Après avoir entendu mes collègues, je me pose une question : après tout, pourquoi le Gouvernement ne dépose-t-il pas un amendement pour transférer les lycées aux départements ? (Sourires sur les travées de l'UMP.) Monsieur le secrétaire d'État, je crois que l’on atteindrait ainsi l’objectif que vous avez fixé tout à l'heure. En effet, comme quelques-uns de nos collègues l’ont rappelé, le lien entre l’enseignement et le département est très direct. Les assistantes sociales des services sociaux départementaux travaillent en parallèle avec celles des lycées et des collèges.

Autre exemple : la lutte contre l’absentéisme scolaire. Que fait un responsable d’établissement scolaire lorsqu’il constate un cas d’absentéisme ? Il le signale au département et ce sont les services de l’aide sociale à l’enfance qui interviennent !

On le voit bien, il existe un lien direct entre le département et les établissements scolaires. Par conséquent, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, la logique de votre discours aurait dû vous conduire à déposer un amendement exactement inverse à cet amendement n° 767, dont l’objet aurait été de confier la responsabilité des lycées aux départements, d’autant que vous semblez enfin vous rallier à l’idée que les départements n’ont pas vocation à disparaître !

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. Je crois me souvenir qu’au moment où la décentralisation a été engagée, au début des années quatre-vingt, notre pays comptait encore vingt et un collèges de type Pailleron, dont sept dans le département de la Haute-Marne. Les effets positifs de la décentralisation sont donc indéniables puisque, aujourd'hui, ces sept collèges ont disparu, grâce à un « Plan collèges » destiné à « revisiter » et, éventuellement, reconstruire tous nos collèges.

La régionalisation envisagée de la gestion de ces établissements m’apparaît comme une sorte de « mini-recentralisation ». Confier cette gestion à un échelon supérieur, et beaucoup plus éloigné du terrain, nous fera retomber dans la même ornière !

Si encore on n’avait pas prévu, dans une précédente loi, de créer des « méga-régions »… Une telle organisation avait peut-être un sens dans une région comptant quatre départements, comme Champagne-Ardenne, voire six, comme la région Centre. Mais dans un ensemble comme la future région Grand Est – je ne sais pas comment on l’appellera –, les collèges ne s’y retrouveront pas, pas plus, d’ailleurs, que les lycées ! Cela a été largement souligné, les régions ont vocation à intervenir sur le plan stratégique, non à gérer, mission dévolue aux départements.

Mais, au-delà de cette remarque, madame la ministre, je souhaiterais savoir si vous avez interrogé les inspecteurs d’académie…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Oui !

M. Bruno Sido. Eh bien, ceux que j’ai rencontrés m’ont dit : « Monsieur le président du conseil général, si vous pouvez non seulement conserver les collèges, mais également prendre les lycées, faites-le ! » Cela m’a conduit à déposer un amendement sur les lycées.

En définitive, les départements offrent beaucoup de souplesse et savent intervenir très promptement. Du reste, l’éducation nationale est très heureuse d’obtenir des réponses dans des délais très courts. Les départements sont à l’écoute. En revanche, comme Christian Favier l’expliquait à juste titre, compte tenu du nombre de collèges et de lycées dans la région d’Île-de-France, lorsqu’il s’agira d’assister à tous les conseils d’administration, les conseillers régionaux n’y suffiront évidemment pas.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Déjà maintenant, on ne les voit jamais !

M. Bruno Sido. C’est pourquoi j’ai proposé le transfert de la gestion des lycées aux départements. Les nouvelles grandes régions seront éloignées du terrain, ce qui, j’y insiste, entraînera une sorte de « mini-recentralisation ».

De même, j’avais demandé le transfert des gestionnaires des collèges aux départements. Cette proposition, importante pour la vie quotidienne des établissements, a été repoussée au titre de l’article 40. Il faudra d’ailleurs revenir sur l’utilisation de cet article de la Constitution, qui, selon moi, en l’occurrence, a été poussée un peu loin…

Pour toutes ces raisons, je ne voterai pas l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

M. Roland Courteau. Ce débat fait remonter certains souvenirs. Dans les années soixante-dix et au début des années quatre-vingt, nous avions, à Narbonne, un collège particulièrement vétuste et dangereux. C’était une véritable boîte d’allumettes ! Depuis des années, nous demandions à l’État la construction d’un établissement neuf et, depuis des années, l’État faisait la sourde oreille. Il a suffi de l’entrée en vigueur des lois de décentralisation, que j’avais votées ici-même – à la différence de nos collègues de droite -, pour que, quinze jours plus tard, le conseil général de l’Aude décide la construction d’un collège neuf !

Voilà l’un des mérites de la décentralisation : elle rapproche les élus des citoyens et les citoyens des élus. La proximité a payé !

Dès lors, mes chers collègues, n’enlevons pas cette compétence « collèges » aux départements ! Ne cassons pas ce qui fonctionne ! Conservons cette proximité !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Je partage les arguments de mes collègues, qui se sont déjà largement exprimés sur le sujet, mais je tiens à insister sur un point : quand j’étais maire-adjoint en charge de l’enseignement, je siégeais dans les conseils d’administration des collèges et des lycées ; autant, dans les collèges, je voyais les conseillers généraux, autant, dans les lycées, je ne voyais jamais les conseillers régionaux ! Je doute que cela change à l’avenir si la région a en charge les collèges plus les lycées, et je me demande si, dans des régions aussi gigantesques que la région Île-de-France, cela ne traduit pas une volonté d’exclure les représentants élus.

Par ailleurs, je suis étonnée, madame la ministre, car je vous ai toujours entendue, ici, soutenir et défendre les fonctionnaires. Or les fonctionnaires qui ont été transférés il n’y a pas très longtemps aux départements ont rencontré beaucoup de difficultés d’adaptation. Les avez-vous écoutés ? Pour ma part – je représente le même département que M. Christian Favier -, je n’ai pas entendu qu’ils souhaitaient une nouvelle fois changer de statut et dépendre d’une administration complètement différente.

Enfin, jeudi dernier, lors de la séance des questions d’actualité au Gouvernement, une question très précise a été posée par un de nos collègues au Premier ministre. En réponse, M. Valls a dit souhaiter que, sur ce sujet, l’Assemblée nationale et le Sénat parviennent à un consensus. Ce n’est pas en procédant comme vous le faites, c'est-à-dire en cherchant à rétablir votre texte initial, que vous témoignez de votre volonté de vous conformer à ce souhait du Premier ministre.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Ce qui inspire le Gouvernement depuis le début de cette réforme territoriale - avec, d’abord, la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la loi MAPTAM, portée par Marylise Lebranchu, puis la nouvelle carte des régions et, aujourd'hui, ce projet de loi NOTRe, traitant des compétences -, c’est de faire des régions de grandes collectivités. Et elles ne le seront pas seulement par la taille - certaines ne subiront d’ailleurs aucune modification à cet égard. C’est surtout par leurs compétences qu’il s’agira d’en faire de grandes collectivités, moteurs du développement économique.

À ce premier fil directeur, s’en ajoute un deuxième : le maintien de la proximité dans la gestion territoriale, avec les départements pour l’action sociale et les intercommunalités et le bloc communal pour les services publics de la vie quotidienne.

Dès lors que nous entendons faire des régions les futures grandes collectivités en matière économique, la question se pose de savoir si les collèges s’inscrivent dans cette logique. À première vue, non. À deuxième vue, pas davantage… Les collèges n’ont pas vraiment à voir avec la compétitivité des territoires.

Si le Gouvernement a été conduit à proposer l’idée d’un transfert des collèges aux régions, c’était pour disposer d’un bloc de compétences homogène entre lycées et collèges et, comme je l’expliquais précédemment, pour rationaliser la dépense publique, la rendre plus efficiente, en réalisant des économies d’échelle. En effet, nonobstant le scepticisme de M. Collombat, nous sommes nombreux, ici, à penser que ce transfert engendrera des économies d’échelle.

Mme Catherine Morin-Desailly, président de la commission de la culture. Où sont les études ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Je pourrais vous en fournir, madame la sénatrice.

M. Pierre-Yves Collombat. Nous n’avons rien vu !

M. André Vallini, secrétaire d'État. On obtient déjà des économies d’échelle dans de nombreux domaines. Lorsqu’on rassemble ou fusionne des structures, que ce soit dans le secteur privé ou dans le secteur public, on dégage, par un principe de mutualisation, des économies d’échelle. Or, comme de nombreux intervenants l’ont indiqué - M. Philippe Kaltenbach, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, entre autres -, la mutualisation est d’ores et déjà mise en pratique et nous partageons tous cet objectif de rationalisation de la dépense publique.

Mais alors, pourquoi n’avons-nous pas envisagé de transférer les lycées aux départements ? M. Sido a posé la question.

Je me souviens des débats que nous avions eus à l’occasion des travaux du comité pour la réforme des collectivités locales, le comité Balladur, en 2008. Cette option avait été longuement évoquée et donné lieu à de nombreuses auditions. Gérard Longuet a un jour expliqué que le collège, c’est la continuation de l’école primaire, ce qu’on appelait autrefois l’école communale, et cela paraît d’ailleurs assez évident. Autrement dit, le collège, c’est aujourd'hui le creuset de la République. Le lycée, lui, marque le temps des orientations différentes. Il ouvre sur le cursus universitaire et la vie professionnelle. C’est autre chose !

Collèges et lycées ne sont donc pas forcément à placer sur le même plan.

En revanche, j’y reviens, certains personnels techniques ou certaines activités, comme la restauration, peuvent être gérés conjointement. Cela se fait déjà dans des départements et des régions.

Ainsi, dans la mesure où cet objectif est en passe d’être atteint par différentes collectivités, l’attente du Gouvernement peut être considérée comme satisfaite.

J’ai déjà indiqué que les collèges n’étaient pas forcément des éléments clés pour faire des régions les futures grandes collectivités en matière économique.

S’ajoute à cela le fait que, comme Marylise Lebranchu l’a dit à de nombreuses reprises depuis le début de notre discussion, le Gouvernement se veut très à l’écoute des propos des sénateurs, et notamment des vôtres, monsieur le rapporteur.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Tant mieux !

M. André Vallini, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous connaissez tous le sens de l’écoute de Marylise Lebranchu ! Elle en a notamment fait preuve lors de l’examen de la loi MAPTAM !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Elle ne se lasse pas d’écouter ! (Sourires.)

M. André Vallini, secrétaire d'État. Effectivement, elle ne se lasse pas de vous écouter, avec toute la patience qui la caractérise ! (Nouveaux sourires.)

Après en avoir discuté avec elle, et en accord avec le Premier ministre, je vous informe donc que le Gouvernement décide de retirer l’amendement n° 767. (Applaudissements sur de nombreuses travées.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. C’est avec plaisir que nous faisons ce geste.

Je souhaite ajouter quelques mots, ayant été mise en cause personnellement, et de manière très sympathique, par M. Dominique de Legge.

L’idée est effectivement la même, monsieur de Legge ! Quand les personnels TOS ont été transférés aux régions, la nôtre a dû passer de 4 500 à 7 500 collaborateurs, c'est-à-dire évoluer d’une administration de projet à une administration de gestion. Cela a engendré de réelles difficultés dans de nombreuses régions de France et nous aurions dû, me semble-t-il, nous poser un certain nombre de questions à ce moment-là, notamment, et bien évidemment, celle des cités scolaires.

En tout cas, le transfert des personnels TOS a posé de nombreux problèmes et changé la nature de nos régions.

Mme Odette Herviaux. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 767 est retiré.

En conséquence, l’article 12 demeure supprimé.

Article 12 (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 12 bis (nouveau)

Articles additionnels après l'article 12

M. le président. L'amendement n° 1102, présenté par MM. Hyest et Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Enseignement supérieur et recherche

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 214-2 est ainsi modifié :

a) La première phrase du troisième alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :

« Dans le respect des stratégies nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche, la région élabore un schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Ce schéma définit les orientations de la région et les priorités de ses interventions. Il est pris en compte dans l’élaboration du contrat pluriannuel d’établissement mentionné aux articles L. 711-1 et L. 718-5, dans la définition de la coordination territoriale de l’offre de formations supérieures et de recherche mentionnée à l’article L. 718-2 et dans l’accréditation des établissements mentionnée à l’article L. 613-1. » ;

b) La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée ;

2° L’article L. 614-3 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « après », la fin de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « consultation des établissements et du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche et approbation par la région, pour ses aspects concernant le territoire régional. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Elle prend en compte le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation mentionné à l’article L. 214-2. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission des lois, en lien avec la commission des affaires culturelles, a pensé que la région, ayant une vocation stratégique, devait bien entendu disposer de compétences dans le domaine économique – dans ce cadre, nous avons été aussi loin que nous le pouvions, et ce n’était pas si facile -, mais qu’elle devait aussi être associée à la politique d’accompagnement vers l’emploi. Personne ne nous a objecté que l’idée était mauvaise ! Seulement, dès que l’on envisage de prendre un peu de pouvoir à certains, c’est fini ! (Sourires. – M. Philippe Kaltenbach s’exclame.)

Même si l’on peut discuter ensuite pour trouver les meilleures formules législatives garantissant une cohérence des politiques, dès lors que l’on confie aux régions le champ de la formation professionnelle et la responsabilité de tout ce qui concerne l’économie, nous estimons logique d’y ajouter l’accompagnement vers l’emploi, mais également d’impliquer la collectivité régionale dans le secteur de l’enseignement supérieur.

C’est ce que, très modestement, nous proposons ici.

Nous n’avons pas totalement innové puisque, je le rappelle, le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et la carte des formations supérieures et de la recherche existent déjà. Simplement, nous impliquons plus la région : jusqu’à présent, on lui demandait seulement un avis ; désormais, il faudra qu’elle participe !

Nous présenterons ensuite un autre amendement visant à préserver la possibilité, pour les régions et les départements, de contribuer au financement de l’enseignement supérieur. En effet, il nous a été dit que ce ne serait théoriquement plus possible après la suppression de la clause de compétence générale.

Notre objectif est que la région dispose d’un vrai bloc de compétences. Il me semble que cela correspond à la volonté de l’Association des régions de France. Il s’agit non pas de remettre en cause l’autonomie des universités ni la responsabilité de l’État en matière de politique universitaire, mais d’associer véritablement la région à la politique de l’enseignement supérieur, comme nous souhaitons qu’elle soit associée à la politique d’accompagnement vers l’emploi et comme elle l’est déjà à la politique économique et à la politique de formation professionnelle.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Cet amendement vise à imposer la prise en compte du schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation à trois niveaux.

Tout d’abord, le quatrième alinéa de l’article L. 718-5 du code de l’éducation, qui a été créé par la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, prévoit déjà l’association au contrat pluriannuel d’établissement de la région et des autres collectivités territoriales accueillant des sites universitaires ou des établissements de recherche, ainsi que la prise en compte des orientations fixées par les schémas régionaux. L’amendement est donc satisfait sur ce point.

Ensuite, la coordination territoriale de l’offre de formations supérieures et de recherche mentionnée à l’article L. 718-2 du même code peut revêtir trois formes différentes : la création d’un nouvel établissement par fusion, la création de communautés d’universités ou la conclusion d’une convention d’association entre les établissements. Le choix du type de coordination territoriale appartient aux seuls établissements d’enseignement supérieur, en vertu du principe d’autonomie des universités. Ce principe s’oppose à la proposition de la commission.

Toutefois, la coordination territoriale se faisant sur la base d’un projet partagé, qui peut être intégré dans le contrat pluriannuel d’établissement, prenant lui-même en compte le schéma régional de l’enseignement supérieur, l’amendement apparaît déjà satisfait sur ce point également, grâce au plan de coordination territoriale des établissements. Initialement, nous avions prévu que cette coordination territoriale soit une compétence complémentaire des régions. Cette question a elle aussi été examinée lors des débats sur le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche.

Enfin, l’accréditation des établissements mentionnée à l’article L. 613-1 du code de l’éducation prend en compte la carte territoriale des formations et elle est délivrée pour la durée du contrat pluriannuel conclu avec l’État. Autrement dit, l’accréditation découle du contrat pluriannuel, lequel prévoit déjà la prise en compte du schéma régional.

L’amendement vise également, en ce qui concerne le processus d’élaboration de la carte des formations supérieures et de la recherche prévue à l’article L. 614-3 du code de l’éducation, à remplacer la consultation de la région par une approbation et une prise en compte du schéma régional de l’enseignement supérieur.

L’article L. 614-3 prévoit déjà la consultation des régions. Le Gouvernement souhaite que l’État conserve la compétence d’arrêter la carte des formations supérieures et de la recherche. Cette carte l’engage en effet au plus haut point, puisqu’il finance les postes. Lors de nos discussions avec les présidents d’université, nous parlons beaucoup de ces derniers, ainsi que des laboratoires de recherche, qui dépendent à la fois de l’État et d’un certain nombre d’opérateurs, dont, en particulier, le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS, l’enseignement étant aussi assuré par les enseignants-chercheurs.

Il y a donc une vraie difficulté. S’il s’agit simplement de prendre en compte l’avis de la région, l’amendement est satisfait. En revanche, s’il s’agit d’aller au-delà, en instaurant une sorte d’opposabilité de l’avis de la région, c’est autre chose.

J’ai tenu à citer les articles du code de l’éducation concernés par notre débat afin que chacun puisse s’y référer et constater que le rôle des régions a été réaffirmé par la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. À l’époque, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, avait souhaité que l’on accélère la prise en compte de l’avis des régions via le schéma régional. Le Gouvernement s’en tient à cette prise en compte. Je pense donc que la commission des lois a déjà satisfaction. À la lecture de l’amendement, il ne me semble pas que celui-ci tende à instituer une forme d’opposabilité, mais, si tel est le cas, il faut l’expliciter davantage.

Je me trouvais à Grenoble quand le projet de loi relatif à l’enseignement supérieur et à la recherche a été discuté. Les enseignants et enseignants-chercheurs exprimaient une certaine inquiétude quant à la prise en compte du schéma régional. Ils craignaient que, pour des raisons de concurrence avec la recherche privée ou d’autres formes d’enseignement, la région ne se désintéresse de leur laboratoire de recherche alors même qu’il dispense un enseignement de qualité. C'est pourquoi Mme Fioraso avait été extrêmement précise sur la prise en compte du schéma régional, qui s’arrête là où commence le droit de l’État : l’avis de la région n’est pas opposable.

J’aimerais que M. le rapporteur précise l’objectif visé au travers de l’amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous proposons de récrire en partie certains articles du code de l’éducation, en reprenant des dispositions en vigueur. La question est de savoir si la carte des formations supérieures et de la recherche doit être ou non soumise à l’approbation de la région. Pour le reste, l’amendement ne prévoit pas de modification substantielle.

Il existe des formations en alternance post-bac ; certains établissements délivrent même des diplômes d’ingénieur. La filière de l’apprentissage ne se limite donc pas aujourd’hui au certificat d’aptitude professionnelle et au brevet d’études professionnelles. (M. Jean-Pierre Raffarin approuve.)

M. Bruno Sido. Absolument !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Certaines écoles dépendant d’une chambre de commerce et d’industrie délivrent, au terme d’une formation en alternance, des diplômes de niveau bac + 5. La région est impliquée dans l’organisation de ces filières. En revanche, pour ce qui est des formations universitaires, elle est simplement admise à émettre un avis. Il me paraissait souhaitable que les deux types de formation post-bac soient coordonnés.

Madame la ministre, nous n’avons pas du tout été frileux. Nous pensons que certaines compétences de gestion ne devraient pas être confiées à la région, mais que les compétences stratégiques, qui dépassent la gestion quotidienne et la proximité, devraient lui revenir. Je ne sais pas ce qu’en pense la présidente de la commission de la culture, mais il nous a paru souhaitable d’associer davantage la région à l’enseignement universitaire. Aujourd'hui, elle ne l’est pas suffisamment.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. On vient de l’y associer !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui, mais il s’agit simplement de prendre son avis, dont on ne sera pas obligé de tenir compte !

Ce qui nous a inspirés, c’est l’expérience des Länder allemands. Il me semblerait préférable de confier davantage de responsabilités aux régions. Cela permettrait une meilleure harmonisation entre formation professionnelle et formation universitaire. Tel est notre objectif.

Je suis disposé à rectifier mon amendement en supprimant, au septième alinéa, la phrase suivante : « Il est pris en compte dans l’élaboration du contrat pluriannuel d’établissement mentionné aux articles L. 711-1 et L. 718-5, dans la définition de la coordination territoriale de l’offre de formations supérieures et de recherche mentionnée à l’article L. 718-2 et dans l’accréditation des établissements mentionnée à l’article L. 613-1. »

En revanche, je conserve le principe d’une approbation de la carte des formations supérieures et de la recherche par la région ; autrement, on ne changerait rien ! C’est sur ce point que nous ne sommes pas d'accord, madame la ministre.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Effectivement, monsieur le rapporteur, la phrase que vous proposez de supprimer pose problème.

Ce ne sont pas seulement les universités qui définissent des modules de formation supérieure ; comme vous l’avez rappelé, les chambres de commerce et d’industrie peuvent le faire elles aussi. Dans une région, une chambre de commerce et d’industrie avait créé une école supérieure de commerce de très grande qualité, qui n’était pas située dans la capitale régionale. Une autre chambre de commerce et d’industrie de la même région a voulu créer une deuxième école supérieure de commerce, faisant concurrence à la première. La région ne pouvait pas s’y opposer. Elle peut ne pas participer au financement, mais les établissements publics conservent leur libre arbitre, si j’ose dire, en matière de création de telles structures.

Nous avons rencontré une difficulté similaire avec une école supérieure des arts techniques formant notamment aux métiers du cinéma, ou encore avec Imaginove, à Lyon. La région aurait souhaité que les opérateurs – dans le premier cas, la chambre de commerce et d’industrie, qui est, on l’oublie souvent, un établissement public de l’État, et, dans le cas d’Imaginove, la chambre de métiers et de l’artisanat, associée à un groupement – prennent en compte son avis, mais cela n’a pas été possible.

Si vous rectifiez l’amendement dans le sens que vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, le Gouvernement pourra s’en remettre à la sagesse du Sénat. Nous voulons tous renforcer la place de la région.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission rectifie son amendement ainsi que je l’ai indiqué, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 1102 rectifié, présenté par MM. Hyest et Vandierendonck, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Enseignement supérieur et recherche

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 214-2 est ainsi modifié :

a) La première phrase du troisième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Dans le respect des stratégies nationales de l’enseignement supérieur et de la recherche, la région élabore un schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Ce schéma définit les orientations de la région et les priorités de ses interventions. » ;

b) La dernière phrase du dernier alinéa est supprimée ;

2° L’article L. 614-3 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « après », la fin de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « consultation des établissements et du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche et approbation par la région, pour ses aspects concernant le territoire régional. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Elle prend en compte le schéma régional de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation mentionné à l’article L. 214-2. »

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Raffarin. Je voudrais appuyer l’argumentation de M. Hyest.

Sur le fond, il s’agit de responsabiliser la région sur le sujet de l’emploi.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Raffarin. Les exécutifs régionaux doivent se sentir comptables de la situation de l’emploi sur leur territoire. Cela est très nouveau.

Je ne vois pas pourquoi l’État, sous tous les gouvernements successifs, a toujours été jaloux de ses prérogatives en matière de politique de l’emploi. En définitive, l’État est tenu pour responsable du niveau du chômage, tandis que, sur le terrain, ceux qui disposent des outils pour s’attaquer au problème sont plutôt à l’abri.

Ce n’est pourtant pas l’intérêt du Gouvernement que le Président de la République reçoive tous les mois une mauvaise note, lors de la présentation des chiffres du chômage. La formation, l’insertion, la politique économique, les entreprises relevant de l’échelon régional, il faut responsabiliser cet échelon en matière d’emploi.

Madame la ministre, je suis bien d’accord, les universités ne doivent pas être enfermées dans les frontières régionales, mais ne soyons tout de même pas hypocrites : aujourd’hui, les universités seraient extraordinairement fragiles si elles ne bénéficiaient pas de l’appui des régions, notamment depuis la mise en œuvre du plan Université 2000, qui a permis beaucoup d’avancées.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Raffarin. Ce plan a amené les régions à travailler sur la stratégie. Certes, il leur a été demandé de financer davantage de bâtiments que d’ouvertures de formations, mais un travail en commun constructif a néanmoins été accompli.

À mon sens, il importe que la région soit responsable de la situation de l’emploi sur son territoire et, partant, qu’elle puisse coordonner l’offre de formations supérieures.

Madame la ministre, la concurrence entre écoles de commerce n’est pas un problème. En effet, le classement mondial de ces établissements fait apparaître que la quinzième école française est déjà très bonne. Si deux chambres de commerce et d’industrie de la même région créent chacune leur école de commerce, cela peut répondre à un besoin. Cela relève de leur responsabilité. Ainsi, voilà deux siècles, l’École supérieure de commerce de Paris a été créée par les commerçants et les artisans, qui l’ont financée sur leurs propres deniers, en dehors de toute intervention de l’État. Cette intervention en responsabilité des milieux économiques est tout à fait positive. Faisons confiance aux entrepreneurs pour financer la formation des cadres et des dirigeants dont ils ont besoin.

En résumé, je suis favorable à l’implication de la région dans l’enseignement supérieur en matière de coordination. En ce qui me concerne, j’aurais voté plus volontiers la version initiale de l’amendement, mais je me rallie à cette rédaction tempérée.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Franchement, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je n’avais déjà pas compris pourquoi vous vouliez donner aux régions la compétence en matière de collèges.

Mme Marylise Lebranchu, ministre, et Mme Jacqueline Gourault. C’est fini !

M. Bruno Sido. Pour l’instant ! (Sourires.)

M. Roger Karoutchi. C’est plutôt l’enseignement supérieur qui doit relever de cet échelon. Je serais même favorable à ce que les lycées soient transférés aux départements, au nom de la proximité.

M. Bruno Sido. Voilà !

M. Roger Karoutchi. Madame la ministre, si les chambres de commerce et d’industrie créent parfois des écoles concurrentes, c’est justement parce que la région n’a pas de pouvoir d’intervention. Elle n’a pas la capacité de leur imposer ses vues ni d’orienter l’offre de formation.

Pourtant, à l’heure actuelle, presque toutes les régions interviennent massivement pour financer l’enseignement supérieur, ne serait-ce qu’au travers des contrats de plan État-région. En Île-de-France, par exemple, nous intervenons depuis une vingtaine d’années.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est exact !

M. Roger Karoutchi. Nous avons financé les bibliothèques universitaires, les restaurants universitaires, la rénovation des bâtiments historiques, etc. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi on n’autorise pas les régions à conclure de véritables conventions avec les universités.

Il y a eu, voilà une dizaine d’années, des états généraux de l’enseignement supérieur en Île-de-France. Les universitaires nous disaient, en gros, que tant que la loi n’attribuait pas d’autres compétences à la région, son seul rôle était de financer massivement les infrastructures, sans se mêler, de près ou de loin, de la définition de l’offre de formations. Il ne s’agit surtout pas, pour nous, de remettre en cause l’autonomie des universités, mais il existe tout de même un lien entre l’emploi et l’enseignement supérieur ! On ne peut pas donner à la région la responsabilité en matière de formation, d’emploi, et lui dénier en même temps tout droit d’intervenir dans le domaine de l’enseignement supérieur et de la recherche, sinon pour financer le patrimoine.

Je pense donc que cet amendement va dans le bon sens. Je ne dis pas qu’il sera facile à appliquer s’il est voté, car nous connaissons tous la volonté d’autonomie des universités, mais il nous faut avancer.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Ayant été interpellée, en tant que présidente de la commission de la culture, par M. le rapporteur, j’indique que je suis très favorable à cet amendement.

Ceux d’entre nous qui siègent dans les conseils régionaux savent combien il est important de rapprocher les établissements d’enseignement supérieur, qu’ils soient publics ou privés, du monde du travail et, surtout, de l’entreprise, pour favoriser la mise en place de synergies, d’une dynamique et d’une réflexion collective sur le potentiel et les atouts du territoire en matière de croissance et de développement.

Selon moi, cet amendement va vraiment dans le bon sens. Il s’appuie sur des constats objectifs et des expériences menées sur le terrain. Il faut faire confiance à l’intelligence des territoires, l’objectif de ce projet de loi étant aussi de créer une nouvelle dynamique de croissance.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1102 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.

L'amendement n° 399 rectifié bis, présenté par Mmes D. Gillot, S. Robert et Blondin, MM. Assouline et Carrère, Mme Cartron, M. Frécon, Mmes Ghali et Lepage, MM. Magner et Manable et Mmes D. Michel et Monier, est ainsi libellé :

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’avant-dernier alinéa de l’article L. 718-5 du code de l’éducation est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Dans le cadre de leurs schémas de développement universitaire et scientifique propres et en cohérence avec les contrats pluriannuels d’établissement, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent contribuer au financement des sites universitaires et des établissements de recherche implantés sur leur territoire ainsi qu'aux œuvres universitaires et scolaires. »

Le sous-amendement n° 1040 rectifié bis, présenté par MM. Retailleau, Mandelli, de Legge, Sido et Doligé, est ainsi libellé :

Amendement n° 399 rectifié bis

Alinéa 4

Remplacer les mots :

sites universitaires et des établissements de recherche

par les mots :

sites et établissements d'enseignement supérieur et de recherche

L’amendement n° 399 rectifié bis n’est pas soutenu.

En conséquence, le sous-amendement n° 1040 rectifié bis n’a plus d’objet

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je reprends le texte de l’amendement et du sous-amendement, au nom de la commission, monsieur le président !

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 1152, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :

Après l'article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre VI du titre Ier du livre II de la première partie du code de l'éducation est complété par un article L. 216-11 ainsi rédigé :

« Art. L. 216-11. - Dans le cadre de leurs schémas de développement universitaire et scientifique propres et en cohérence avec les contrats pluriannuels d’établissement, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent contribuer au financement des sites et établissements d'enseignement supérieur et de recherche implantés sur leur territoire ainsi qu'aux œuvres universitaires et scolaires. »

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. À partir du moment où la clause de compétence générale des régions et des départements disparaît, il faut s’assurer que la possibilité, pour ces collectivités, de contribuer au financement des sites universitaires et des établissements de recherche implantés sur leur territoire, ainsi qu’aux œuvres universitaires et scolaires, demeure.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement était favorable au dispositif de l’amendement n° 399 rectifié bis, dans une logique de prudence.

En revanche, alors que cet amendement visait les sites universitaires et les établissements de recherche, l’amendement n° 1152 vise, quant à lui, les sites et établissements d’enseignement supérieur et de recherche. La première formulation permet de couvrir aussi bien les universités que les établissements publics de coopération scientifique intervenant en matière de recherche, alors que la seconde est à la fois plus restrictive et redondante.

Cette différence de rédaction est peut-être volontaire, la commission souhaitant que la région n’intervienne qu’à l’échelon des universités en tant que telles. En revanche, il ne serait plus possible d’intervenir dans le cadre d’une coopération entre le CNRS et un autre laboratoire, par exemple. J’ignore si cette formulation relève d’un choix délibéré ou d’une erreur de rédaction. En tout état de cause, eu égard à la volonté d’associer les régions à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation qui s’est exprimée dans cet hémicycle, il me paraîtrait plus logique de retenir la formulation de l’amendement n° 399 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Je comprends bien votre interrogation, madame la ministre, mais il est bien précisé, dans l’objet de l’amendement n° 399 rectifié bis, qu’il s’agit de permettre le financement des établissements d’enseignement supérieur ou de recherche. Par conséquent, le sous-amendement que nous avions déposé visait à mettre la rédaction du dispositif en cohérence avec cet objet.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. L’intérêt du dispositif de cet amendement est de permettre aux départements et aux régions, notamment, de continuer à financer ce qu’il peut rester de l’enseignement supérieur dans certains départements, comme les anciens IUFM, qui jouent un rôle tout à fait essentiel dans de tels territoires. C’est pourquoi il faut retenir la définition la plus large possible, sinon nous courrons au désastre !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Le sous-amendement n° 1040 rectifié bis avait justement pour objet d’éviter que certains établissements qui sont aidés aujourd’hui par la région ne puissent plus l’être demain. Il existe d’autres cas que celui des anciens IUFM : je pense notamment à certains établissements d’enseignement supérieur de l’ouest de la France, qui sont d’ailleurs sous contrat avec l’État…

J’invite donc mes collègues à suivre la commission.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’y insiste, il n’y a pas de divergence de fond entre la commission et le Gouvernement concernant ces dispositions, puisque nous acceptons tout à fait qu’elles soient reprises. En revanche, notre désaccord porte sur leur interprétation.

Nous souhaiterions rester le plus près possible de la rédaction actuelle de l’article L. 718-5 du code de l’éducation qui mentionne bien les sites universitaires et les établissements de recherche.

Le sous-amendement n° 1040 rectifié bis visait à remplacer les mots : « sites universitaires et des établissements de recherche », ces derniers n’étant pas forcément des établissements universitaires et d’enseignement supérieur, par les mots : « sites et établissements d’enseignement supérieur et de recherche ».

Cette rédaction est plus restrictive, dans la mesure où ne sont plus visés que les établissements d’enseignement supérieur. Or il existe des établissements de recherche qui ne sont pas des établissements d’enseignement supérieur, par exemple ceux qui accueillent des doctorants amenés à soutenir leur thèse devant une université : ces établissements devraient pouvoir être traités de la même façon.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Madame la ministre, vous avez raison. Il faudrait donc rectifier notre amendement en indiquant que les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent contribuer au financement des « sites et établissements d’enseignement supérieur et établissements de recherche ».

Même si la formule peut paraître redondante, il n’y a plus d’ambiguïté quant à l’interprétation.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 1152 rectifié, présenté par M. Hyest au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre VI du titre Ier du livre II de la première partie du code de l’éducation est complété par un article L. 216-11 ainsi rédigé :

« Art. L. 216-11. - Dans le cadre de leurs schémas de développement universitaire et scientifique propres et en cohérence avec les contrats pluriannuels d’établissement, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent contribuer au financement des sites et établissements d’enseignement supérieur et établissements de recherche implantés sur leur territoire ainsi qu’aux œuvres universitaires et scolaires. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Voilà quelques années, j’aurais préféré qu’un département de l’ouest parisien investisse massivement dans la rénovation de l’université de Nanterre plutôt que de créer le pôle universitaire Léonard de Vinci, dont l’accès était soumis à des frais d’inscription très élevés.

Cela dit, nous allons voter cet amendement ainsi rectifié. Sans remettre une pièce dans la machine, je ne peux m’empêcher de sourire en lisant l’objet de l’amendement n° 399 rectifié bis repris par la commission, signé par ceux qui, la semaine dernière, ont voté la suppression de la clause de compétence générale. Ils expliquent en effet que, « compte tenu de la suppression de la clause de compétence générale par le présent projet de loi, il convient de préserver la possibilité des financements croisés provenant des différents niveaux de collectivités territoriales… » ! (Rires ironiques sur certaines travées du RDSE.)

M. Pierre-Yves Collombat. Vous êtes cruelle !

Mme Cécile Cukierman. Je souris également à la lecture du sous-amendement n° 1040 rectifié bis, dont les signataires avaient également voté la suppression de la clause de compétence générale, et qui tendait malgré tout à élargir la possibilité, pour les conseils départementaux, de contribuer aux financements des établissements d’enseignement supérieur ou de recherche.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1152 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12.

Articles additionnels après l'article 12
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Articles additionnels après l’article 12 bis

Article 12 bis (nouveau)

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

1° Après l’article L. 2223-40, il est inséré un article L. 2223-40-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2223-40-1. – I. – Un schéma régional des crématoriums est établi dans chaque région. Il a pour objet d’organiser la répartition des crématoriums sur le territoire concerné, afin de répondre aux besoins de la population, dans le respect des exigences environnementales. Il précise à ce titre, par zones géographiques, en tenant compte des équipements funéraires existants, le nombre et la dimension des crématoriums nécessaires.

« L’évaluation des besoins de la population tient compte, le cas échéant, de ceux des populations immédiatement limitrophes sur le territoire national ou à l’étranger.

« II. – Le schéma est élaboré par le représentant de l’État dans la région, en collaboration avec les représentants de l’État dans les départements qui la composent.

« Le projet de schéma est adressé pour avis au conseil régional, au conseil national des opérations funéraires, ainsi qu’aux organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et aux communes de plus de 2 000 habitants compétents en matière de crématoriums. Ceux-ci se prononcent dans un délai de trois mois après la notification du projet de schéma. À défaut, leur avis est réputé favorable.

« Le schéma est arrêté par décision du représentant de l’État dans la région. Il est publié.

« III. – Le schéma est révisé tous les six ans. »

2° Le dernier alinéa de l’article L. 2223-40 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« L’autorisation ne peut être délivrée que si la création ou l’extension envisagée est compatible avec les dispositions du schéma régional des crématoriums mentionné à l’article L. 2223-40-1. »

II. – Dans chaque région, le premier schéma régional des crématoriums est arrêté dans un délai de deux ans après la promulgation de la présente loi. Par exception au III de l’article L. 2223-40-1 du code général des collectivités territoriales, il est révisé au bout de trois ans.

M. le président. L’amendement n° 239, présenté par M. Nègre, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Cet amendement n’est pas soutenu.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 165 est présenté par M. Grand.

L’amendement n° 240 est présenté par M. Nègre.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 3, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

II. – Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

et les communes et groupements compétents

Ces deux amendements ne sont pas soutenus.

L’amendement n° 869, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 6, première phrase

Après le mot :

régional,

insérer les mots :

au conseil départemental,

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. En déposant cet amendement, nous avons souhaité rouvrir un débat entamé en mai 2014, lors de l’examen de la proposition de loi de Jean-Pierre Sueur visant à instaurer un schéma régional des crématoriums. J’avais alors indiqué que la consultation du conseil régional devait impliquer la saisine d’autres collectivités, car il me semblait que la région n’était pas forcément la collectivité pertinente dans ce domaine.

S’agissant d’un schéma régional qui, cette fois, ne relève pas de la région, mais des représentants de l’État dans la région, il nous semble que la concertation et les consultations les plus larges doivent être prévues dans le cadre du processus d’élaboration d’un tel schéma qui vise à encadrer une compétence relevant actuellement d’une collectivité territoriale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les départements n’exerçant pas de compétence en la matière, la commission n’est pas très favorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d’État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 869.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 12 bis.

(L'article 12 bis est adopté.)

Article 12 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 13

Articles additionnels après l’article 12 bis

M. le président. L’amendement n° 78 rectifié bis, présenté par Mmes Herviaux et S. Robert et MM. Tourenne et Botrel, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le I bis de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … - Lorsque l’état des eaux de surface ou des eaux souterraines présente des enjeux sanitaires et environnementaux justifiant une gestion cohérente des différents sous-bassins hydrographiques de la région, le conseil régional peut se voir attribuer tout ou partie des missions d’animation et de concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques visées au 12° du I du présent article, par décret, à sa demande et après avis de la conférence territoriale de l’action publique mentionnée à l’article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales.

« La région exerce ces attributions en coordination avec le comité de bassin, sans préjudice des compétences des autres collectivités, de leurs groupements et des syndicats mixtes, et sans préjudice des missions des personnes morales de droit public auxquelles la commission locale de l’eau a confié son secrétariat, ainsi que, le cas échéant, les études et analyses nécessaires à l’élaboration du schéma d’aménagement et de gestion des eaux et au suivi de sa mise en œuvre. »

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Cet amendement tend à permettre à une région en particulier, mais peut-être aussi à d’autres qui seraient volontaires, de bénéficier d’un droit à l’expérimentation dans un domaine particulier, à savoir la préservation de la qualité de l’eau.

Dans cette région, de nombreuses activités économiques relevant des compétences du conseil régional, comme la conchyliculture, le tourisme, les sports et loisirs sur le littoral, etc. dépendent directement de la qualité de l’eau. Gérer l’eau dans sa dimension quantitative et qualitative deviendrait donc un enjeu majeur. Des efforts ont d’ailleurs déjà été consentis dans de nombreux domaines.

J’ai été élue locale dans cette région à partir de 1998, mais je ne le suis plus maintenant. Pendant toutes ces années de mandat, avec mes collègues, nous avons entendu parler de l’attribution à la région de cette compétence et, en 2004, une demande a été présentée pour qu’elle puisse bénéficier d’un droit à l’expérimentation concernant la gestion de la qualité de l’eau.

Depuis plus de vingt ans, des programmes successifs de restauration de la qualité de l’eau ont été engagés, notamment le programme « Bretagne eau pure ». Les résultats sont très encourageants, mais ils sont encore très en retrait par rapport à ce que l’on pourrait souhaiter et, surtout, eu égard aux exigences de la directive-cadre européenne sur l’eau.

Cet amendement vise à entamer une nouvelle étape dans ce processus, en accordant un droit à l’expérimentation pour redonner de la cohérence aux différents programmes d’action actuellement développés à l’échelon local et optimiser la gestion d’une ressource dont l’importance économique, écologique et sanitaire justifie qu’elle puisse être confiée à la région.

J’insiste sur le dernier alinéa de cet amendement, car il y est bien spécifié que la région exercerait ces attributions « sans préjudice des compétences des autres collectivités, de leurs groupements et des syndicats mixtes, et sans préjudice des missions des personnes morales de droit public auxquelles la commission locale de l’eau a confié son secrétariat… »

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Si l’’expérience que vous décrivez, ma chère collègue, est très positive, elle n’est pas transposable partout. La commission n’est donc pas favorable à ce que la région exerce une compétence exclusive dans ce domaine.

L’article L. 211-7 du code de l’environnement a d’ailleurs permis aux régions de mener à bien tous leurs projets jusqu’à présent, à savoir « l’animation et la concertation dans le domaine de la gestion et de la protection de l’eau et des milieux aquatiques dans un sous-bassin ou dans un groupement de sous-bassins. »

La commission a donc estimé qu’il n’était pas pertinent de prévoir la possibilité d’attribuer à la région une compétence exclusive en matière. Nous aborderons cette question d’une manière plus générale lorsque nous traiterons de la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations », plus communément appelée GEMAPI.

Compte tenu des caractéristiques géographiques de votre région, l’exercice de cette compétence est aisément compréhensible pour elle, mais tel n’est pas nécessairement le cas ailleurs, surtout dans les très grandes régions, car les bassins versants ne correspondent pas nécessairement aux limites administratives.

D’ailleurs, la Bretagne a une agence de bassin…

Mme Odette Herviaux. C’est l’agence Loire-Bretagne !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Vous voyez bien que le bassin ne se limite pas à la Bretagne !

Madame Herviaux, votre région pourra continuer à œuvrer comme elle l’a fait jusqu’à présent, sans qu’il soit besoin de modifier les textes, mais la commission n’est pas favorable à ce que toutes les régions exercent une compétence exclusive dans ce domaine. L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d’État. Le Gouvernement est favorable à l’attribution de cette compétence aux régions qui le souhaitent, comme vous le proposez, madame la sénatrice, afin de tenir compte de la spécificité de certaines d’entre elles, et notamment de la vôtre.

La qualité des eaux de surface ou des eaux souterraines peut en effet présenter des enjeux sanitaires et environnementaux particuliers et nécessiter une gestion cohérente des différents sous-bassins hydrographiques de cette région. Tel est le cas de la région Bretagne qui est au cœur du pacte d’avenir pour la Bretagne de décembre 2013. L’identification d’un pilote à l’échelle régionale vise à faire converger les politiques locales de l’eau pour les rendre plus efficaces à l’échelle régionale et, à terme, favoriser l’amélioration de la qualité de l’eau.

M. le président. Madame Herviaux, l’amendement n°78 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Odette Herviaux. Je suis désolée d’insister, mais j’ai bien pris la précaution de préciser dans mon amendement les conditions particulières qui devaient être réunies pour engager cette expérimentation. Ainsi, il faut que la qualité des eaux de surface et des eaux souterraines « présente des enjeux sanitaires et environnementaux justifiant une gestion cohérente des différents sous-bassins hydrographiques de la région ». Ensuite, dans ce cas seulement, le conseil régional peut se voir attribuer « tout ou partie » des missions d’animation et de concertation dans ce domaine.

Notre région fait en effet partie d’un grand bassin, le bassin Loire-Bretagne – depuis la source de la Loire au Mont Gerbier de Jonc –, mais elle a peu de liaisons avec lui, puisqu’elle est essentiellement constituée de petits sous-bassins versants. Ce particularisme justifie ce droit à l’expérimentation pour coordonner l’action de l’ensemble des collectivités.

Je maintiens donc mon amendement et je remercie le Gouvernement de son soutien.

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Il s’agit clairement d’un amendement breton…

M. Bruno Sido. C’est pour cela que nous sommes contre ! (Sourires.)

M. Dominique de Legge. Ses auteurs poursuivent un combat que nous menons depuis longtemps. Cela dit, je ne suis pas certain que la rédaction de cet amendement permette de relever l’ensemble des enjeux.

Tout d’abord, nous parlons d’un bassin versant. Jusqu’à preuve du contraire, l’eau coule d’un point haut vers un point bas, même en Bretagne. Lorsque l’on examine la carte du bassin, on constate que les quatre départements bretons – nous n’avons même pas été capables de réunifier la Bretagne ! – pèsent très peu dans la collecte des redevances, mais beaucoup plus dans les dépenses de l’agence.

Si, demain, nous prenons cette compétence, la rédaction de cet amendement ne nous permet pas de savoir comment on réglera ce problème du financement. S’agira-t-il d’une dépense nouvelle pour la région ? Cela signifie-t-il qu’à l’intérieur de l’agence Loire-Bretagne, on va préempter une somme – si oui, sur quelle base ? – et la déléguer à la région ? Je ne vois pas comment cela va se passer.

Deuxième élément de réflexion, la compétence : on prend tout ou on ne prend rien. Quid de la responsabilité au regard des injonctions de l’Europe et des pénalités encourues ? J’ai été pendant un temps assez favorable à l’idée qu’il fallait sans doute moins d’intervenants sur cette question, mais je ne suis pas pour autant convaincu que, tel qu’il est rédigé, cet amendement apporte une réponse opérante et opérationnelle aux questions qui sont posées en Bretagne, et ce, pour les deux raisons que je viens d’exposer.

Par conséquent, peut-être n’est-ce pas très courageux, mais, par solidarité bretonne, je ne m’opposerai pas à cet amendement. Il n’en demeure pas moins que le rôle qui nous revient ici est de faire la loi pour toute la France. Or je ne suis pas certain que le texte que vous nous proposez soit de nature à répondre aux questions qui nous sont effectivement posées.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 78 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 948, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement présente au Parlement, dans l’année qui suit la promulgation de la présente loi, un rapport exposant les avantages et les inconvénients de toutes natures d’un transfert des lycées des régions aux départements et d’un transfert des universités de l’État aux régions.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 1056 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code du sport est ainsi rédigé :

« Chapitre IV – Répartition des missions et des compétences entre l’État et les régions dans l’organisation et le fonctionnement des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive

« Section 1 : Répartition des missions et des compétences entre l’État et les régions

« Art. L. 114-1. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive sont des établissements publics locaux de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire. Sous réserve des dispositions de la section 2, les dispositions relatives au contrôle administratif visé au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales leur sont applicables.

« Ces établissements sont créés ou fermés par arrêté du ministre chargé des sports sur proposition de la région.

« Art. L. 114-2. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive ont pour missions, au nom de l’État :

« 1° D’assurer, en liaison avec les fédérations sportives, la formation et la préparation des sportifs figurant sur les listes mentionnées à l’article L. 221-2 ;

« 2° De participer au réseau national du sport de haut niveau et d’assurer le fonctionnement des pôles nationaux de ressources et d’expertise dans les champs du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire ;

« 3° De mettre en œuvre des formations initiales et continues dans les domaines des activités physiques ou sportives conformément à l’article L. 211-1 et dans les domaines de la jeunesse et de l’éducation populaire conformément aux objectifs nationaux et en lien avec le schéma régional des formations de la région concernée ;

« 4° D’assurer la formation initiale et continue des agents de l’État exerçant leurs missions dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire.

« Art. L. 114-3. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive peuvent, au nom de la région, exercer les missions suivantes :

« 1° Assurer l’accueil et l’accompagnement de sportifs régionaux, le cas échéant par le biais de conventions entre régions fixant leurs modalités de prise en charge ;

« 2° Promouvoir des actions en faveur du sport au service de la santé et du sport pour tous ;

« 3° Développer des activités en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire ;

« 4° Mettre en œuvre des offres de formation aux métiers du sport et de l’animation conformément aux besoins identifiés par le schéma régional des formations.

« Art. L. 114-4. – L’État a la charge :

« 1° De la rémunération des agents de l’État exerçant dans les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive, sous réserve des dispositions de l’article L. 114-6 ;

« 2° Des dépenses de fonctionnement directement liées à la pédagogie, à la recherche et au transfert d’expériences et de pratiques dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire ;

« 3° De l’acquisition et de la maintenance des matériels informatiques et les logiciels prévus pour leur mise en service et pour l’exercice des missions de l’État mentionnées à l’article L. 114-2.

« Le financement de ces dépenses est assuré par les crédits prévus à cet effet par le budget de l’État et par les ressources propres de chaque établissement.

« Art. L. 114-5. – La région a la charge des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive. Elle en assure la construction, la reconstruction, l’extension, les grosses réparations, l’équipement et le fonctionnement, à l’exception des dépenses mentionnées à l’article L. 114-4. À ce titre, l’acquisition et la maintenance des infrastructures et des équipements sont à la charge de la région, à l’exception des matériels mentionnés au 3° de l’article L. 114-4.

« La région assure l’accueil, la restauration, l’hébergement ainsi que l’entretien général et technique, à l’exception des missions d’encadrement et de surveillance des sportifs et des stagiaires.

« La région bénéficie du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses d’investissement qu’elle consacre aux centres de ressources, d’expertise et de performance sportive, en vue de la construction, la reconstruction, l’extension et les grosses réparations de ces établissements.

« Art. L. 114-6. – La région assure le recrutement, la gestion et la rémunération des personnels des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive exerçant les compétences qui lui sont confiés en application des deux premiers alinéas de l’article L. 114-5. Ceux-ci exercent leurs missions dans les conditions définies à l’article L. 114-16.

« Art. L. 114-7. – I. – La région est propriétaire des locaux dont elle assure la construction et la reconstruction.

« II. – Les biens immobiliers des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive appartenant à l’État à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … portant nouvelle organisation territoriale de la République sont transférés en pleine propriété à titre gratuit à la région. Celle-ci est substituée à l’État dans les droits et obligations liés aux biens transférés. Ce transfert ne donne lieu au versement d’aucun droit, taxe, salaire ou honoraire. Dans le cas où l’État a délégué à une personne privée l’exécution de tout ou partie des compétences liées au fonctionnement et à l’équipement des bâtiments, la région peut résilier ces contrats et elle supporte les charges financières résultant de cette résiliation anticipée.

« III. – Les biens immobiliers des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive appartenant à un département, une commune ou un groupement de communes peuvent être transférés en pleine propriété à la région à titre gratuit et sous réserve de l’accord des parties. Lorsque la région effectue sur ces biens des travaux de construction, de reconstruction ou d’extension, ce transfert est de droit, à sa demande, et ne donne lieu au versement d’aucun droit, taxe, salaire ou honoraire.

« Art. L. 114-8. – Les articles L. 1321-1 à L. 1321-6 du code général des collectivités territoriales relatives à l’exercice des compétences et à la mise à disposition des biens utilisés pour l’exercice des compétences transférées s’appliquent aux constructions existantes transférées en application de l’article L. 114-7.

« Art. L. 114-9. – Les conditions dans lesquelles le maintien des concessions de logement et des prestations accessoires est assuré à certaines catégories de personnel de l’État dans les établissements relevant de la compétence des régions sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Section 2

« Organisation des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive

« Sous-section 1

« Organisation administrative

« Art. L. 114-10. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive sont administrés par un conseil d’administration composé, selon l’importance ou la spécificité de l’établissement, de vingt ou de vingt-cinq membres.

« Le conseil d’administration est présidé par l’une des personnalités qualifiées désignées par le président du conseil régional mentionnées au 3°.

« Le conseil d’administration comprend :

« 1° Selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt ou de vingt-cinq membres, six ou sept représentants de la région et d’autres collectivités territoriales, désignés par les organes délibérants des collectivités concernées ;

« 2° Selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt ou de vingt-cinq membres, trois ou quatre représentants du mouvement sportif, d’associations de jeunesse et d’éducation populaire ou d’organismes partenaires du centre, nommés par arrêté du ministre chargé des sports ;

« 3° Selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt ou de vingt-cinq membres, deux ou trois personnalités qualifiées désignées par le président du conseil régional ;

« 4° Selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt ou de vingt-cinq membres, cinq ou six représentants du personnel, des sportifs et des stagiaires élus à cette fin ;

« 5° Selon que l’effectif du conseil d’administration est de vingt ou de vingt-cinq membres, quatre ou cinq représentants de l’État, nommés par arrêté du ministre chargé des sports.

« Art. L. 114-11. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive sont dirigés par un directeur.

« Le directeur et son ou ses adjoints sont nommés par arrêté du ministre chargé des sports. La nomination du directeur est soumise pour avis préalable au président de la région concernée.

« Le directeur représente l’État au sein de l’établissement.

« En cas de difficultés graves dans le fonctionnement du centre de ressources, d’expertise et de performance sportive, le directeur peut prendre toutes dispositions nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du service public. Le directeur expose, dans les meilleurs délais, au conseil d’administration les décisions prises et en rend compte au ministre chargé des sports et au président du conseil régional.

« Art. L. 114-12. – Les centres de ressources, d’expertise et de performance sportive disposent, pour l’accomplissement de leurs missions, des équipements, personnels et crédits qui leur sont attribués par l’État et la région. Ils peuvent disposer des ressources provenant notamment de la vente des biens, des legs, des rémunérations de services, des droits d’inscription, de l’hébergement, de la restauration, de subventions diverses ainsi que de toutes autres recettes autorisées par les lois et règlements.

« Sous-section 2

« Organisation financière

« Art. L. 114-13. – Les actes des centres de ressources, d’expertise et de performance sportive relatifs au budget, à ses modifications et au compte financier sont soumis au contrôle budgétaire dans les conditions définies à l’article L. 421-13 du code de l’éducation, à l’exception du second alinéa du II.

« Art. L. 114-14. – I. – Les actes de l’établissement donnant lieu à délibération du conseil d’administration et correspondant aux missions définies à l’article L. 114-2 sont transmis au ministre chargé des sports. Ils deviennent exécutoires quinze jours après leur transmission. Dans ce délai, le ministre chargé des sports peut prononcer le retrait de ces actes lorsqu’ils sont contraires aux lois et règlements ou de nature à porter atteinte au fonctionnement du service public du sport. La décision motivée est communiquée sans délai à l’auteur de l’acte.

« II. – Sous réserve des dispositions particulières applicables au budget et aux décisions le modifiant, les actes de l’établissement relatifs à la passation des conventions, et notamment des marchés, et les actes relatifs au fonctionnement de l’établissement, correspondant aux compétences dévolues à la région, peuvent, dans les conditions prévues à l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, être déférés au tribunal administratif par le représentant de l’État dans la région.

« Un décret en Conseil d’État fixe la liste des actes mentionnés au premier alinéa du présent II qui sont transmis au représentant de l’État dans la région. Il précise ceux qui sont exécutoires dès leur transmission et ceux qui sont exécutoires quinze jours après leur transmission. 

« Sous-section 3

« Dispositions applicables au patrimoine mobilier

« Art. L. 114-15. – Les articles L. 421-17 et L. 421-19 du code de l’éducation relatifs aux biens meubles des établissements publics locaux d’enseignement sont applicables aux centres de ressources, d’expertise et de performance sportive.

« Sous-section 4

« Dispositions diverses

« Art. L. 114-16. – I. – Par dérogation aux dispositions des lois n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État et n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les agents de l’État ou de la région affectés dans un centre de ressources, d’expertise et de performance sportive conservent leur statut, sont administrés par la collectivité dont ils relèvent et sont placés sous l’autorité du directeur de l’établissement. Ils sont représentés au sein des instances relatives au dialogue social et aux conditions de travail de l’établissement.

« II. – Pour l’exercice des missions et des compétences relevant de l’État, le ministre chargé des sports assigne au directeur du centre de ressources, d’expertise et de performance sportive des objectifs nationaux. Ceux-ci et les indicateurs associés sont définis dans un contrat pluriannuel de performance.

« III. – Pour l’exercice des missions et des compétences incombant à la région, le président du conseil régional s’adresse directement au directeur du centre de ressources, d’expertise et de performance sportive.

« Il lui fait connaître les objectifs fixés par la région et les moyens que celle-ci alloue à cet effet à l’établissement. Le directeur du centre de ressources, d’expertise et de performance sportive est chargé de mettre en œuvre ces objectifs et de rendre compte de l’utilisation de ces moyens.

« Le directeur du centre de ressources, d’expertise et de performance sportive encadre et organise le travail des personnels désignés à l’article L. 114-6 placés sous son autorité.

« Une convention passée entre le centre de ressources, d’expertise et de performance sportive et le conseil régional précise les modalités d’exercice de leurs compétences respectives.

« Art. L. 114-17. – Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent chapitre.

« Il précise notamment le régime financier et comptable de ces établissements.

« Il détermine également le régime de droit public applicable à leurs comités techniques et à leurs comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. »

II. – Au premier alinéa de l’article L. 211-1 du même code, après les mots : « de l’État », sont insérés les mots : « et les établissements publics locaux de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire ».

III. – L’article L. 4321-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … Les dépenses dont elle a la charge en matière de sport, de jeunesse et d’éducation populaire en application de l’article L. 114-5 du code du sport. »

IV. – Au deuxième alinéa de l’article 21 de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990 relative à la fonction publique territoriale et portant modification de certains articles du code des communes, après les mots : « d’enseignement », sont insérés les mots : « ou un établissement public local de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire ».

V. – Le présent article est applicable à compter du 1er janvier 2016.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Cet amendement tend à organiser le transfert aux régions des centres de ressources d’expertise et de performance sportives, qui sont de formidables lieux d’éducation de la jeunesse sportive de notre pays et des opérateurs de formation professionnelle aux métiers du sport et de l’animation.

Les CREPS sont l’un des éléments essentiels de la politique sportive de notre pays. Ils permettent à nos jeunes sportifs inscrits sur la liste des sportifs de haut niveau – France, France Jeunes et Espoirs – de s’aguerrir au sport de haut niveau tout en continuant de suivre un parcours scolaire et universitaire adapté mais exigeant.

Les CREPS sont des internats d’excellence pour jeunes sportifs de haut niveau en devenir. Grâce aux formations qu’ils organisent, ces centres permettent aussi de développer et de structurer la pratique sportive en France sous toutes ses formes. L’essentiel des éducateurs, animateurs ou responsables de structures associatives sont formés dans les CREPS, qui placent la sécurité et l’intégrité physique des pratiquants au cœur de leur formation.

La réforme que nous proposons par cet amendement est concertée et largement consensuelle. Les synergies entre les compétences des régions et les missions des centres de ressources d’expertise et de performance sportives, qui sont évidentes, ont conduit le ministère chargé des sports à engager une réflexion depuis près de deux ans avec les régions sur l’évolution des missions des CREPS et le renforcement de leur ancrage territorial.

Ces concertations ont permis d’aboutir à un projet équilibré très largement partagé par les présidents de conseils régionaux.

Cette réforme placera les régions en tant qu’acteurs majeurs des politiques sportives conduites sur leur territoire. Si la formation et la préparation des sportifs de haut niveau, en lien avec les fédérations, relèvent par essence du niveau national, les régions ont naturellement vocation à développer sur le plan local – à travers les CREPS – des politiques en matière de formation et d’apprentissage aux métiers du sport et de l’animation et à soutenir le mouvement sportif régional pour lequel le CREPS constitue un lieu d’accueil et d’animation privilégié sur chaque territoire.

L’amendement du Gouvernement a ainsi pour objet de créer une nouvelle catégorie d’établissement public – les établissements publics locaux de formation du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire. Ces établissements seront chargés de mettre en œuvre des missions nationales en matière de sport de haut niveau, d’expertise et de formation à l’encadrement des activités sportives les plus dangereuses ou rares, et des missions régionales répondant aux besoins des territoires en matière de formation et d’animation sportive régionale.

Les charges seront partagées entre l’État et les régions. L’État conservera les dépenses des personnels pédagogiques et administratifs, ainsi que celles qui sont liées au fonctionnement pédagogique et informatique. Les régions auront en charge les dépenses d’investissement, de maintenance et de fonctionnement courant, ainsi que celles des agences chargées des missions d’accueil, d’hébergement et de restauration.

Les modalités de gouvernance sont adaptées pour renforcer le poids des régions au sein des conseils d’administration dont elles désigneront le président parmi les personnalités qualifiées.

Vous le savez, l’État se veut exemplaire en matière de compensation financière. Cette réforme ne traduit pas un désengagement de l’État à l’égard des CREPS et des politiques nationales dont ils assurent la mise en œuvre. Au contraire, l’ambition du ministère chargé des sports est de renforcer ce réseau d’établissements. Le transfert du patrimoine immobilier des CREPS aux régions permet ainsi de sanctuariser, via les compensations constitutionnelles dues, les moyens consacrés par l’État, qui sont constants : 9,5 millions d'euros sont encore prévus cette année.

Par ailleurs, les moyens des CREPS ont été préservés puisqu’aucune réduction d’effectifs n’est programmée sur la durée triennale et que les crédits de fonctionnement alloués par l’État sont reconduits. En outre, au-delà de ses obligations constitutionnelles de compensation, l’État accompagnera les régions dans le financement des opérations d’investissement dans les CREPS après leur décentralisation à travers les aides du Centre national pour le développement du sport, le CNDS.

Ce transfert porte donc sur les dix-sept CREPS existants et concerne douze régions, dont dix régions métropolitaines sur les quatorze nouvelles. En effet, les régions Bretagne, Normandie et la collectivité territoriale de Corse ne comportent pas de CREPS – la Guyane et la Martinique non plus, mais le rayonnement du CREPS de Pointe-à-Pitre, à vocation interrégionale, leur sera profitable.

Je souligne que les trois régions métropolitaines qui ne comportent pas aujourd'hui de centre de ressources d’expertise et de performance sportives vont bénéficier du transfert à titre gratuit du patrimoine immobilier des ex-CREPS de Dinard, Houlgate et Ajaccio, fermés en 2009 et 2010. Tel est l’objet de l’amendement n° 1057 rectifié, qui sera discuté juste après celui-ci.

Ces établissements sont toujours affectés au sport et l’État continue à y injecter des moyens. Ainsi, le CNDS a accordé une subvention de 2,2 millions d'euros pour des travaux de construction portés par la région Bretagne au groupement d’intérêt public, GIP, de Dinard auquel le ministère chargé des sports verse par ailleurs une subvention de fonctionnement et met à disposition huit agents.

De même, l’État met dix agents à disposition du centre du sport et de la jeunesse de Corse – une société d’économie mixte qui exploite l’ex-CREPS.

L’implantation actuelle des CREPS résulte de l’histoire et des besoins nationaux, ceux des fédérations sportives pour le sport de haut niveau en particulier.

Il est possible, si les régions concernées en font la demande, que ces ex-CREPS soient à nouveau érigés en CREPS de plein exercice. En effet, les dispositions proposées prévoient la possibilité d’ouvrir des CREPS par arrêté du ministère chargé des sports, sur proposition de la région concernée.

M. le président. Le sous-amendement n° 1150, présenté par Mme Morin-Desailly, est ainsi libellé :

Amendement n°1056 rectifié, alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

, chaque région métropolitaine ayant vocation à accueillir au moins un de ces établissements sur son territoire.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Avant de présenter le sous-amendement, je voudrais m’exprimer sur les deux amendements du Gouvernement qui concernent le transfert des CREPS aux régions.

La commission de la culture n’a pas eu l’occasion de les examiner, puisqu’elle a achevé l’examen du texte avant leur dépôt. À titre personnel, je le regrette, car je pense que l’ensemble des commissions du Sénat auraient pu opportunément s’emparer en amont de ces amendements afin d’expertiser ce transfert.

Si je m’exprime en mon nom propre, je m’inscris dans le droit-fil de la réflexion de la commission, qui a publié un rapport d’information en décembre 2010 sur l’avenir des CREPS. Je m’exprimerai également avec la force de l’expertise que j’ai obtenue par anticipation sur le sujet, expertise qui figure dans le rapport pour avis de la commission.

Ces amendements marquent une inflexion stratégique bienvenue concernant ces structures. En effet, vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, faute de moyens techniques et financiers, l’État a commencé un désengagement des centres visés depuis 2009, qui s’est traduit par la fermeture de plusieurs établissements.

Au lieu de poursuivre dans cette voie, vous proposez aujourd'hui un transfert des structures aux régions avec une compensation des moyens à l’euro près. On pouvait certes légitimement s’interroger, à la suite de nombre de nos collègues, sur la réalité de la compensation de ces moyens compte tenu des expériences passées dans ce domaine. Or, selon les indications dont nous disposons, après avoir interrogé la direction des sports et les acteurs concernés, nous savons que l’État a apporté des garanties concernant le transfert de ces infrastructures et des personnels.

Les régions sont également nombreuses à voir dans ce transfert l’occasion de développer une politique favorable au sport de haut niveau en lien avec leur compétence en matière de formation professionnelle, à travers notamment la création de centres de formations d’apprentis, ou CFA, dédiés aux métiers du sport.

L’État conserverait un rôle pour assurer la cohérence nationale du réseau et continuerait à assumer la charge de la rémunération des agents chargés de la gestion administrative, du sport de haut niveau et des formations, ainsi que les dépenses de fonctionnement liées à la pédagogie, à la recherche et à l’expertise.

Il conserverait en outre la responsabilité de l’encadrement et de la surveillance des sportifs et stagiaires. Nous avons donc la garantie que les moyens des CREPS seraient maintenus sur la période 2015-2017, tandis que les investissements des régions bénéficieraient également d’un soutien du CNDS, comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État.

La principale remarque que l’on peut formuler aujourd'hui tient donc, selon moi, non pas au transfert des CREPS – qui semble positif et entouré de garanties –, mais à l’inégalité territoriale qu’il est susceptible d’entériner compte tenu des suppressions d’établissements déjà intervenues – vous les avez rappelées, monsieur le secrétaire d’État.

Je vous propose donc sur ce point un sous-amendement qui vise à rétablir l’égalité territoriale en prévoyant la présence d’un CREPS au moins par région.

À la suite de la réforme de la carte des régions, plusieurs grandes régions bénéficieront de plus d’un CREPS sur leur territoire. À titre d’exemple, la grande région Est devrait en compter trois – Lorraine, Reims et Strasbourg –, tandis que trois autres régions devraient en comporter deux : ainsi, la grande Aquitaine devrait disposer d’un CREPS pour Bordeaux Aquitaine et d’un second pour le Poitou-Charentes ; la région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon en aurait un à Toulouse et l’autre à Montpellier ; enfin, la région Rhône-Alpes- Auvergne bénéficierait d’un centre pour le secteur Rhône-Alpes et du CREPS de Vichy Auvergne.

A contrario, cela a été également rappelé par M. le secrétaire d'État, ni la Bretagne, ni la Normandie, ni la Corse ne disposeraient de CREPS dans le cadre de cette nouvelle organisation, notamment en raison des suppressions intervenues ces dernières années.

L’amendement n° 1057 rectifié que nous examinerons ultérieurement tire les conséquences de ces suppressions en tendant à sécuriser la situation patrimoniale de ces structures, en particulier afin de substituer un transfert de propriété à titre gratuit aux collectivités régionales à une mise à disposition temporaire des locaux.

Ces dispositions sont positives. Toutefois, elles ne reviennent pas sur le mauvais signal envoyé par la suppression des trois CREPS d’Ajaccio, de Dinard et d’Houlgate, alors même que les régions ont, depuis, montré leur attachement à ces structures en les pérennisant sous la forme soit d’un syndicat mixte, soit d’une association, soit d’un groupement d’intérêt public.

Au nom de l’équité, il apparaît donc nécessaire d’affirmer la vocation de chaque grande région à accueillir au moins un CREPS. C’est le sens de la rédaction de ce sous-amendement à l’amendement n° 1056 rectifié, qui fixe un objectif tout en laissant à l’État le temps de mettre en œuvre les mesures nécessaires et de trouver la meilleure formule possible avec les régions concernées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Je dois le dire, cet amendement est un peu un cas d’école ! Il est pour nous l’exemple même de ce qu’il ne faut pas faire au cours du travail législatif ! (M. Jean Desessard s’exclame.)

M. André Vallini, secrétaire d'État. Cela commence mal !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Nous avons trouvé, je vous le dis, madame le ministre, ne le prenez pas en mauvaise part, je vous en prie…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je ne prends plus rien en mauvaise part !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Nous avons trouvé, disais-je, non pas seulement désagréable, mais véritablement contre-productif et peu respectueux du travail parlementaire de recevoir, mardi dernier à dix-neuf heures trente, dix-neuf amendements, qui ne se limitent pas à un ou deux paragraphes. Ces amendements sont tombés du ciel ou, plus exactement, venus du Gouvernement. Celui que nous examinons comporte cinq pages de dispositions législatives !

À la commission des lois, comme dans les autres commissions, nous ne demandons pas de disposer d’un temps exorbitant. Cependant, entre le mardi à dix-neuf heures trente et la réunion de la commission des lois le lendemain matin à huit heures trente, nos rapporteurs n’ont disposé, pour pouvoir examiner ce type d’amendement, que de peu de temps, au demeurant pris sur leur sommeil – je tiens à leur rendre hommage à cet égard.

Quand on voit qu’en plus, ces amendements portent sur les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives, établissements extrêmement importants pour la formation de nos futurs enseignants dans le domaine sportif, mais qui n’ont qu’un rapport éloigné avec les compétences si nombreuses et diverses acquises par les membres de la commission des lois dans le domaine des collectivités territoriales qui est l’objet même de ce texte, on se dit que vous nous avez réellement mis devant une tâche impossible !

Ce n’est pas que nous soyons familiers des mouvements d’humeur, mais je dois dire que ce mercredi matin, lorsque nous avons découvert cet amendement et beaucoup d’autres, nous n’étions pas spécialement bien disposés à leur égard !

Vous nous demandez souvent, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’être davantage à l’écoute des propositions du Gouvernement.

Je voudrais vous donner un exemple de notre bonne volonté, alors qu’en l’occurrence, je dois vous le dire, vous ne la méritez pas !

Catherine Morin-Desailly ayant noté l’absence de centre de ressources, d’expertise et de performance sportives dans sa région, la Normandie – une région que je connais bien ! –, elle a déposé ce sous-amendement, qui intéresse en particulier les régions où ces centres font défaut. Il serait vraiment dommage, alors que nous créons de grandes régions, que certaines demeurent déshéritées du point de vue de l’équipement en CREPS.

C’est la raison pour laquelle je m’orienterai, malgré l’avis défavorable de la commission des lois, vers un avis de sagesse sur l’amendement n° 1056 rectifié, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 1150. Je pense que mes collègues de la commission des lois ne m’en voudront pas de cette concession improvisée !

Mme Jacqueline Gourault. Nous allons réfléchir ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. M. le président de la commission des lois a tout à fait raison. Il est vrai que, dans le texte initial, nous n’avions pas pris en compte les CREPS. Ce sont certaines régions de France – pas toutes – qui ont fait remarquer les très grandes difficultés qu’elles rencontraient à cet égard.

Ainsi, pour relancer le CREPS de Dinard, qui comptait plusieurs spécialités bien connues dans la région Bretagne, et redonner à ce centre le rang que cette dernière souhaitait lui assigner, il a fallu créer un groupement d’intérêt public, dispositif complexe et très long à mettre en œuvre.

Une fois ce constat établi, une autre région, puis l’Association des régions de France, ont souhaité discuter avec le Gouvernement de la possibilité de transférer les CREPS. Nous aurions pu refuser, car nous nous apprêtions à déposer le projet de loi ; vous n’auriez pas eu, alors, à traiter cette difficulté. Toutefois, le Gouvernement a estimé, par la voix de Thierry Braillard, qu’il fallait absolument débattre avec les régions.

Les discussions avec les régions, mais aussi avec les autres collectivités locales, notamment les communautés d’agglomérations qui étaient intéressées par ces véritables parcs que constituent les CREPS, ont été longues. En outre, deux départements auraient bien pris en charge une partie de ces aires d’exercice, espaces verts potentiels pour leurs habitants, et souhaitaient obtenir la mise à disposition des terrains.

Je vous le dis, monsieur le président de la commission, tout en vous priant de bien vouloir nous excuser pour la brièveté du délai dont vous avez disposé pour examiner ces amendements, discuter avec l’ARF a été très compliqué !

Sans insister trop lourdement sur ce sujet, je tiens à dire que la dernière réunion interministérielle, nécessaire pour « bleuir » l’amendement, n’a pu se tenir comme prévu, pour les raisons que vous connaissez... Nous avons donc perdu quelques jours.

Je ne serai pas du tout choquée que vous nous demandiez de surseoir à cette discussion jusqu’à la deuxième lecture. Je le comprendrais très bien, car je partage votre avis sur la complexité de cette question qui mérite réflexion. Je sais que cet amendement n’est pas simple, car j’ai assisté à certains échanges qui ont précédé sa rédaction voilà sept mois ! On peut comprendre que le délai imparti ne vous ait pas permis de vous prononcer en toute connaissance de cause.

C’est maintenant au Sénat de trancher et de décider, s’il le souhaite, de réexaminer cette question au cours de la navette. Peut-être serait-il plus simple de laisser d’abord l’Assemblée nationale l’affiner, avant son retour ici, afin que le texte final soit le mieux construit possible.

Quoi qu’il en soit, monsieur le président de la commission des lois, votre analyse de la méthode retenue est pertinente.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Je vous remercie, madame la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Par conséquent, j’émets un avis favorable sur le sous-amendement n° 1150.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. J’avais demandé la parole avant de connaître la position du Gouvernement, dont je me réjouis bien entendu.

Je viens, d’un seul élan, à la rescousse de notre « avocate », Catherine Morin-Desailly (Sourires.), qui occupe aujourd’hui une position éminente puisqu’elle est la représentante de la Haute-Normandie.

Je suis en effet Bas-Normand, tout comme le président de la commission des lois ; en réalité, nous ne le sommes plus, puisque la région Normandie est désormais créée.

Mme Jacqueline Gourault. Vous êtes Normands !

M. Jean-Claude Lenoir. Nous allons donc pouvoir, dans peu de temps, unir nos forces !

Madame la ministre, ainsi décrit-on les armoiries du duché de Normandie : « De gueules aux deux léopards d’or, armés et lampassés d’azur ». Je m’apprêtais à faire rugir ces deux fauves qui ornent le drapeau normand, mais ils sont finalement trois, le président de la commission des lois ayant exprimé sa solidarité avec la cause normande !

Sans trop prolonger ce propos, je veux vous féliciter, madame la ministre, d’avoir adopté cette position. L’émotion fut en effet vive en Normandie…

M. Jean-Claude Lenoir. … lorsque nous avons constaté que l’effectif des sportifs, confirmés ou en herbe, y était jugé insuffisant, au point de nous priver d’un CREPS que d’autres régions revendiquaient en toute légitimité !

Nous sommes pourtant de grands sportifs, et les représentants de la Normandie au Sénat le prouvent tous les jours ! (Nouveaux sourires.) À ce titre, nous méritons la plus grande attention de la part de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Dans sa sagesse, le groupe écologiste votera le sous-amendement n°1150 ainsi que l’amendement du Gouvernement. Ceux d’entre nous qui siègent à la commission de la culture y sont particulièrement favorables.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour explication de vote.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Je me félicite de l’esprit d’ouverture dont vient de faire preuve Mme la ministre.

Je voudrais faire un peu d’histoire, car elle est parfois assez succulente.

Souvenez-vous : entre 1997 et 2002, Marie-George Buffet, qui était alors ministre des sports dans le gouvernement de Lionel Jospin, avait engagé une réflexion sur la nécessité de doter chaque région de France d’un CREPS, dans un cadre maîtrisé. Elle avait ainsi créé en Limousin un projet assez innovant, notamment pour contenir les coûts : un CREPS « hors-sol » qui n’avait ni emprise foncière, ni jolis locaux, ni immobilier, et à la création duquel elle avait demandé aux collectivités territoriales de s’associer.

Le CREPS du Limousin rendait de grands services, avec un coût de fonctionnement très maîtrisé et un hébergement assuré pour une partie par le département de la Haute-Vienne, pour une autre par la Corrèze, et pour une troisième par la Creuse. C’est avec beaucoup de regrets que j’ai vu, en 2009, un gouvernement de droite revenir sur ces implantations. (Quelques exclamations sur les travées de l'UMP.)

Je me félicite donc que nous soyons tous attachés, aujourd’hui, à la présence d’un CREPS dans chaque région. On en revient ainsi à l’esprit de ce qu’avait voulu Mme Buffet.

M. le président. La parole est à M. Félix Desplan, pour explication de vote.

M. Félix Desplan. M. le secrétaire d’État signalait fort justement que la Guyane et la Martinique ne comptaient aucun CREPS, contrairement au centre Antilles-Guyane installé en Guadeloupe.

Jusqu’alors, les frais de fonctionnement des CREPS étaient supportés par l’État. Compte tenu des nouvelles propositions, il serait bon de préciser que ces frais sont supportés, dans le cadre d’une convention, par la région Guadeloupe et les deux nouvelles collectivités qui seront créées, respectivement, en Guyane et en Martinique.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Requier. J’ai beaucoup apprécié l’analyse de la commission, de même que la réponse du Gouvernement. Ces propos constructifs sont tout à l’honneur du Sénat.

Nous voterons l’amendement n°1150 et l’amendement n°1056 rectifié, car il est bon que chaque région dispose d’un CREPS. Ce n’est pas le rural que je suis qui s’y opposera !

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1150.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1056 rectifié, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12 bis.

L’amendement n° 1057 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le titre Ier du livre Ier du code du sport est complété par un chapitre V ainsi rédigé :

« Chapitre V – DISPOSITIONS PARTICULIÈRES RELATIVES À CERTAINES STRUCTURES DE GESTION DE SERVICES PUBLICS SPORTIFS

« Art. L. 115-1. - I. - Sous réserve du maintien de leur affectation au service public du sport et de l’élaboration par les collectivités bénéficiaires d’un projet d’établissement, sont transférés en pleine propriété :

« 1° Les biens immobiliers de l'État mis à la disposition du syndicat mixte "Centre du sport et de la jeunesse de Corse" à la collectivité territoriale de Corse ;

« 2° Les biens immobiliers de l'État mis à la disposition de l’association "Centre sportif de Normandie" à la région Basse-Normandie ;

« 3° Les biens immobiliers de l'État mis à la disposition du groupement d’intérêt public "Campus de l’excellence sportive de Bretagne" à la région Bretagne.

« Les biens transférés sont identifiés par arrêté conjoint du ministre chargé des sports et du ministre chargé du domaine. L'arrêté indique la valeur des immeubles domaniaux estimée par l'administration chargée des domaines.

« Le transfert de propriété se réalise au jour de la signature de l’acte authentique constatant le transfert. La collectivité bénéficiaire du transfert est substituée à l'État pour les droits et obligations liés aux biens qu’elle reçoit en l’état.

« II. - Ces transferts de propriété sont gratuits et ne donnent lieu à paiement d’aucune indemnité ou perception de droits ou taxes, ni à aucun versement de la contribution prévue à l’article 879 du code général des impôts ou d’honoraires au profit d’agents de l'État.

« III. - En cas de désaffection des biens transférés au service public du sport avant l’expiration du délai de vingt ans à compter du transfert, l'État peut convenir avec la collectivité du retour du bien dans le patrimoine de l'État. À défaut, la collectivité verse à l'État la somme correspondant à la valeur vénale des biens fixée par l'administration chargée des domaines.

« Si la désaffectation des biens est justifiée par la création d’une autre structure dédiée exclusivement au service public du sport d’une dimension au moins équivalente, se substituant au bien transféré, l'alinéa précédent ne s'applique pas. Dans ce cas, l'affectation de la nouvelle structure au service public du sport doit être maintenue jusqu'au terme du délai de vingt ans mentionné à l'alinéa précédent. À défaut, la collectivité verse à l'État la somme correspondant à la valeur vénale du bien fixée par l'administration chargée des domaines. »

II. – L’article L. 211-1 du code du sport est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les établissements publics de formation mentionnés au premier alinéa peuvent recruter des assistants d’éducation dans les conditions fixées à l’article L. 916-1 du code de l’éducation. »

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Cet amendement a été défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à tirer les conséquences de l’amendement n° 1056 rectifié. La commission, quant à elle, avait émis un avis défavorable sur le présent amendement, tout comme sur le précédent. Toutefois, ce dernier ayant été adopté à l’instant, il faudrait, par cohérence, voter également le second.

La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1057 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 12 bis.

Articles additionnels après l’article 12 bis
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Articles additionnels avant l'article 14

Article 13

Dispositions spécifiques à la collectivité territoriale de Corse

I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° La seconde phrase de l’article L. 4421-1 est ainsi modifiée :

a) La première occurrence du mot : « et » est supprimée ;

b) Sont ajoutés les mots : « , et les autres dispositions législatives non contraires relatives aux régions » ;

2° Après l’article L. 4422-9-1, il est inséré un article L. 4422-9-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 4422-9-2. – Le président du conseil exécutif assiste de droit, sans voix délibérative, aux réunions de la commission permanente.

« Au cours de son mandat, l’Assemblée de Corse peut modifier la liste des compétences qu’elle a déléguées à la commission permanente en application de l’article L. 4133-6-1. » ;

3° Après le deuxième alinéa de l’article L. 4422-10, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le président procède à l’inscription d’une question à l’ordre du jour dès lors qu’un cinquième des conseillers à l’Assemblée l’a demandé. » ;

4° L’article L. 4422-18 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « pour », la fin de la première phrase du sixième alinéa est ainsi rédigée : « opter entre son mandat de conseiller à l’Assemblée de Corse et sa fonction de conseiller exécutif » ;

b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « il est réputé démissionnaire de son mandat ; cette démission est constatée » sont remplacés par les mots : « il est réputé avoir opté pour la fonction de conseiller exécutif ; cette situation est constatée » ;

c) À la première phrase du dernier alinéa, les mots : « démissionnaire pour cause d’acceptation de » sont remplacés par les mots : « ayant opté pour » ;

d) (Supprimé)

5° L’article L. 4422-31 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque conseiller à l’Assemblée de Corse ne peut signer, par année civile, plus d’une motion de défiance. » ;

6° Le premier alinéa de l’article L. 4423-1 est ainsi rédigé :

« Les délibérations de l’Assemblée de Corse, les actes du président de l’Assemblée de Corse ainsi que les délibérations du conseil exécutif, les arrêtés du président du conseil exécutif délibérés au sein du conseil exécutif et les actes du président du conseil exécutif sont soumis au contrôle de légalité dans les conditions fixées par les dispositions du chapitre II du titre IV du livre Ier de la présente partie. » ;

7° Au I de l’article L. 4425-9, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « dix-sept ».

II. – (Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 768 est présenté par le Gouvernement.

L’amendement n° 870 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 14

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

d) Il est ajouté par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’est adoptée une motion de défiance dans les conditions fixées à l’article L. 4422-31 ou lorsque le président et les membres du conseil exécutif démissionnent collectivement, ces derniers reprennent l’exercice de leur mandat de conseiller à l’Assemblée de Corse à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la fin de leurs fonctions, au lieu et place des derniers candidats devenus conseillers à l’Assemblée de Corse sur les mêmes listes qu’eux conformément à l’ordre de ces listes. Ceux-ci sont replacés en tête des candidats non élus de leurs listes respectives. » ;

II. – Alinéa 20

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. – Le quatrième alinéa de l’article L. 380 du code électoral est complété par les mots : « , sauf dans le cas prévu au dernier alinéa de l’article L. 4422-18 du code général des collectivités territoriales ».

La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 768.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Lors de notre première rencontre avec la commission, nous avions convenu de rétablir la disposition, prévue dans le projet de loi initial, qui met en place le retour collectif des membres du Conseil exécutif de Corse en cas de démission collective ou de vote d’une motion de défiance, afin de résoudre les difficultés qui se poseraient. Je vous invite donc fortement à adopter cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 870.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement a été défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ces amendements traduisent des suggestions de l’Assemblée de Corse. Nous avons accepté, il faut le dire, toutes les dispositions qui nous ont été proposées, mais celle-là me paraît curieuse et risque d’avoir des effets pervers.

À ce propos, je regrette que M. Dantec ne soit pas présent, car il est très attaché à la présence d’un pouvoir exécutif et d’un pouvoir délibératif. Une motion de défiance implique forcément un changement de majorité ; l’exécutif ne peut pas tomber puis revenir ! Avec ce dispositif, ceux qui ont été mis en minorité pourront agir ainsi avec les suivants... Ces dispositions sont surtout source d’instabilité.

La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je souhaiterais vous apporter quelques explications supplémentaires.

Je le disais, nous vous proposons de rétablir la disposition prévue dans le texte initial qui met en place le retour collectif des membres du Conseil exécutif en cas de démission collective. Ce faisant, le Gouvernement ne fait qu’étendre une règle déjà existante pour d’autres assemblées délibérantes de collectivités où les membres de l’exécutif peuvent retrouver leur siège au sein de l’organe délibérant.

Si cette possibilité est supprimée, et en l’absence de suppléants, une nouvelle élection sera nécessaire.

En métropole, je le rappelle, un ministre ayant quitté le Gouvernement – même s’il n’existe pas de parallélisme des formes ni des droits – retrouve son siège au Parlement.

En Polynésie française, l’article 78 de la loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française prévoit que les membres du Gouvernement de la Polynésie française ayant fait l’objet d’une motion de défiance dans les conditions prévues à l’article 156 de cette même loi organique retrouvent leur siège à l’assemblée de la Polynésie française. Vous avez trouvé, mesdames, messieurs les sénateurs, que cette disposition était tout à fait logique pour la Polynésie française.

Le dispositif proposé vise donc à garantir tant la stabilité de l’exécutif que la solidarité entre ses membres, puisque le retour des membres de l’exécutif au sein de l’assemblée ne peut en effet être que collectif, y compris pour le président, ce qui assure la cohérence de son action et évite d’éventuelles manœuvres de déstabilisation.

Par ailleurs, le retour au sein de l’assemblée de Corse de neuf membres du conseil exécutif sur cinquante et un membres de l’assemblée n’apparaît pas de nature à déstabiliser celle-ci. Si la motion de défiance vise à remettre en cause l’action du conseil exécutif, elle n’a pas vocation, en revanche, à mettre en discussion la majorité au sein de l’assemblée de Corse et la désignation parmi les membres de celle-ci d’un nouveau conseil exécutif.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’exemple de la Polynésie française est de nature à nous rassurer ! (Sourires.) C’est en effet le meilleur exemple que l’on puisse donner…

Certes, le dispositif qui nous est proposé existe dans d’autres assemblées d’outre-mer, mais certaines affaires nous dépassent…

M. Bruno Sido. En Corse ou en Polynésie ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous ne feindrons pas d’en être les organisateurs ! (Nouveaux sourires.)

C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur ces amendements, car ils lui ont paru un peu biscornus.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Le groupe écologiste votera ces amendements, mais il tenait à faire part de sa déception s’agissant des propositions concernant la Corse. Il aurait aimé une véritable évolution sur les compétences et la gouvernance des différents échelons existants.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 768 et 870.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

TITRE II

Des intercommunalités renforcées

Chapitre Ier

Des regroupements communaux

Article 13
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Article 14 (début)

Articles additionnels avant l'article 14

M. le président. L'amendement n° 224, présenté par M. Maurey, est ainsi libellé :

Avant l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au troisième alinéa de l’article L. 273-10 du code électoral, les mots : « le siège de conseiller communautaire reste vacant jusqu'au prochain renouvellement du conseil municipal de la commune » sont remplacés par les mots : « est pourvu par un conseiller municipal, n’exerçant pas ou plus de mandat de conseiller communautaire, désigné par le conseil municipal dans les conditions fixées à l’article L. 2122-7 du code général des collectivités territoriales ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 690, présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Avant l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les deuxième et troisième phrases du II de l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales sont ainsi rédigées :

« Cet accord doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux de toutes les communes incluses dans le projet de périmètre représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par un tiers au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population. Ces majorités doivent nécessairement comprendre au moins un quart des conseils municipaux des communes qui sont regroupées dans chacun des établissements publics de coopération intercommunale dont la fusion est envisagée. »

La parole est à Mme Jacqueline Gourault.

Mme Jacqueline Gourault. M. Mercier propose au travers du présent amendement que l’accord sur un nouveau périmètre d’EPCI issu d’une fusion soit exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux représentant plus de la moitié de la population totale, ou par un tiers au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population. Cet accord doit émaner des conseils municipaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Des règles de majorité ont été fixées depuis longtemps et permettent déjà les fusions. À trop vouloir les assouplir, nous risquerions de créer des problèmes, d’autant qu’il est important de vérifier l’existence d’un réel consensus en la matière. Les majorités proposées dans cet amendement paraissant insuffisantes, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de M. le rapporteur et s’en remet à la sagesse de l’assemblée.

M. le président. Madame Gourault, l'amendement n° 690 est-il maintenu ?

Mme Jacqueline Gourault. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 690 est retiré.

Articles additionnels avant l'article 14
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Article 14 (interruption de la discussion)

Article 14

I. – L’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le III est ainsi modifié :

a) (Supprimé)

a bis) (nouveau) Au 2°, les mots : « Une amélioration de la cohérence » sont remplacés par les mots : « La cohérence » ;

b) Le 4° est ainsi rédigé :

« 4° La réduction du nombre de syndicats de communes et de syndicats mixtes, en particulier par la suppression des doubles emplois entre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou entre ceux-ci et des syndicats mixtes ; »

2° Le dernier alinéa du IV est ainsi rédigé :

« Le schéma ainsi élaboré est révisé selon la même procédure tous les six ans. » ;

3° Au V, les mots : « sur le territoire des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que » sont supprimés ;

4° Le premier alinéa du VI est supprimé.

II. – À l’exception des départements composant la région d’Île-de-France, les schémas départementaux de coopération intercommunale révisés selon les modalités prévues à l’article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales sont arrêtés avant le 31 décembre 2016.

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, sur l'article.

M. Joël Guerriau. Voilà déjà sept mois – c’était le 18 juin 2014 – que le conseil des ministres a adopté le projet de loi NOTRe. Depuis cette date, les commissions départementales de coopération intercommunale, les CDCI, dont il sera beaucoup question dans le chapitre du texte dont nous abordons l’examen, ont eu le temps d’anticiper son application et d’analyser sa faisabilité.

En tant que maire, je siège comme assesseur au sein de la CDCI de mon département. Ce cumul des mandats, je tiens à le signaler, permet à chaque parlementaire concerné de se confronter à la réalité du terrain.

En accord avec le préfet, nous avons décidé de rencontrer en priorité les élus communautaires des huit communautés de communes de moins de 20 000 habitants. L’objectif est de faciliter le rapprochement des EPCI directement visés par ce projet de loi avec les intercommunalités voisines, dans la perspective de la révision du schéma départemental de coopération intercommunale au 1er janvier 2016.

Il est communément admis que les facteurs à prendre en considération pour justifier au mieux les rapprochements sont les bassins de vie et l’activité économique. Or ce n’est pas si simple.

Pour illustrer concrètement mon propos, permettez-moi d’évoquer trois situations différentes. Dans les trois cas, il s’agit d’intercommunalités qui s’inscrivent dans l’esprit du projet de loi, mais qui rencontrent des difficultés pour s’y conformer.

La première situation est celle de quatre communautés dont les bassins de vie sont interdépendants. Ces communautés sont réunies au sein d’un même schéma de cohérence territoriale, ce qui a favorisé l’émergence d’un projet de fusion. Cette perspective apparaît d’ailleurs dans le schéma départemental adopté dès 2006. Toutefois, les conditions de majorité n’ayant pas été atteintes, le projet a échoué en 2013.

Aujourd’hui, seule l’une de ces quatre intercommunalités se situe en dessous du seuil de 20 000 habitants : la communauté de communes de Sèvre, Maine et Goulaine, qui compte 14 255 habitants. Les maires de cet EPCI se sont exprimés à l’unanimité en faveur d’un regroupement avec une ou plusieurs autres intercommunalités. Or, si aucun des trois autres EPCI ne décide clairement de fusionner, que se passera-t-il ? Comment le préfet pourrait-il imposer une solution ?

Il est à noter que ces quatre communautés sont très différentes eu égard à leur niveau d’endettement, mais également aux compétences qu’elles se sont attribuées.

De l’étude de ce premier cas, il ressort que ce n’est pas parce que l’on souhaite se marier que l’on trouve l’âme sœur. Devons-nous obliger des intercommunalités à contracter une union non consentie ? Quel en serait le résultat ?

La deuxième situation est celle de deux communautés de communes, celle de la région de Nozay, qui compte 15 000 habitants, et celle de Blain, qui en recense 15 500. Ces deux intercommunalités ont fait connaître leur intention de se rapprocher, mais elles appartiennent à des schémas de cohérence territoriale différents. Avant de conclure une fusion, les deux EPCI doivent se mettre d’accord sur le SCOT de rattachement. Le cinquième alinéa de l’article L. 122-5 du code de l’urbanisme prévoit une adhésion de plein droit au SCOT du territoire dont la population est la plus nombreuse. Or dans ce cas, l’écart de population est très faible et peut évoluer dans un sens ou un autre.

C’est là l’autre écueil d’une loi qui manquerait de souplesse. Il convient en effet dans cet exemple de veiller à la cohérence globale des rapprochements en étudiant leur incidence au niveau des périmètres supra-communautaires.

Dans les deux cas que je viens d’évoquer, la mise en œuvre d’études par les collectivités est nécessaire pour nourrir la réflexion des élus. Je suis persuadé qu’il ne faut pas précipiter les choses. Il faut laisser du temps à la concertation.

À cet égard, permettez-moi de citer Jean-Paul Delevoye : « Aucune politique ne peut être acceptée et appliquée telle la parole divine et infaillible : le temps de l’explication et de l’acceptation de la décision est bien plus important que le temps de la décision elle-même. »

Ces deux situations montrent à quel point il est difficile d’appliquer la loi, malgré la volonté réelle des élus d’aller dans le sens du texte.

Ce n’est pas en fixant la barre à 20 000 habitants que nous apportons une réponse aux exemples que je viens de citer, alors que certains maires s’y sont déjà engagés. Nous tombons dans les mêmes travers que pour le seuil de 25 % de logements sociaux, lequel n’apporte pas de solution.

Pourquoi définir un seuil au lieu de faire confiance au bon sens des élus locaux qui ont en charge l’équilibre des territoires et qui connaissent leurs spécificités ?

Enfin, la troisième situation que je tiens à évoquer est celle de la communauté de communes de Pornic.

Les articles 18, 19 et 20 du projet de loi ont pour objet de compléter le champ des compétences nécessaires et optionnelles des communautés de communes et des communautés d’agglomération pour qu’elles soient éligibles à une bonification de la dotation globale de fonctionnement. Trois nouvelles obligations sont ajoutées : la création d’un office du tourisme, l’aménagement, l’entretien et la gestion des aires d’accueil des gens du voyage, enfin, la création et la gestion de maisons de services au public.

Pour être éligible à la DGF bonifiée, une communauté de communes devra donc exercer six compétences dans la liste des onze qui sont prévues. L’ajout d’un seuil de population me paraît regrettable alors que ces obligations sont parfois déjà satisfaites en raison de l’activité ou du dynamisme des communes.

Aussi, je souhaite soulever un élément de bon sens concernant les communautés d’agglomération et les communes littorales.

Il me semble pertinent que la population DGF des communes littorales, dites « centres », disposant d’un classement en station de tourisme puisse être prise en compte pour l’appréciation du seuil des 15 000 habitants.

En effet, les communes classées stations de tourisme disposent d’infrastructures et de services d’envergure, bien souvent surdimensionnés et suréquipés par rapport aux besoins de la population des résidences principales. Ils doivent prendre en compte une grande partie de l’année les besoins de la population des résidences secondaires, mais aussi la fréquentation touristique.

Le classement en station de tourisme est le signe d’un engagement fort de la commune. Elle s’engage à proposer des services publics de qualité, et ce dans des domaines très larges, qui vont bien au-delà des services offerts sur des territoires non touristiques. La prise en compte de la population DGF pour la commune-centre classée en station de tourisme est donc pertinente.

Pour conclure, dans un contexte de montée en puissance de l’échelon régional, de raréfaction des deniers publics, de clarté et d’efficacité de l’action publique, les élus communautaires ont déjà engagé des réflexions afin d’agrandir les communautés de communes, voire de créer des communautés d’agglomérations. Leur volonté est de répondre efficacement aux besoins en services de leur population. Ils sont déjà dans une logique de coconstruction.

Il ne saurait y avoir de bonne loi territoriale sans souplesse. D’ailleurs, les pôles d’équilibre territoriaux et ruraux qui ont été créés au 1er janvier 2015 favorisent les échanges sur des sujets intercommunautaires. Pour autant, il est essentiel que les rapprochements ne résultent pas d’une simple volonté administrative.

Article 14 (début)
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Discussion générale

6

Décision du Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité

M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat le 19 janvier 2015 que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 91 de la loi sur les finances du 28 avril 1816 (Greffe des tribunaux de commerce) (2015-459 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.)

PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

7

Modification de l’ordre du jour

M. le président. Mes chers collègues, pour finir, comme prévu, la discussion des articles du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République cette semaine, il paraît préférable, en accord avec la commission des lois et le Gouvernement, d’ouvrir, éventuellement, la nuit du vendredi 23 janvier et de siéger, éventuellement, le samedi 24 janvier, le matin et l’après-midi.

En conséquence, l’ordre du jour des séances du vendredi 23 et, éventuellement, du samedi 24 janvier s’établirait comme suit :

vendredi 23 janvier 2015

À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :

- Suite du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République

Éventuellement, samedi 24 janvier 2015

À 9 heures 30 et à 14 heures 30 :

- Suite du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République

Il n’y a pas d’observation ?...

Il en est ainsi décidé.

8

Article 14 (interruption de la discussion)
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Article 14 (début)

Nouvelle organisation territoriale de la République

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

Nous poursuivons la discussion des articles.

Discussion générale
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Article 14 (interruption de la discussion)

Article 14 (suite)

M. le président. Nous en sommes parvenus à l’examen des amendements déposés à l’article 14.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 556 est présenté par M. Adnot.

L'amendement n° 691 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° 871 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

L’amendement n° 556 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour présenter l’amendement n° 691.

Mme Jacqueline Gourault. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article, car nous sommes opposés au fait que de nouveaux schémas départementaux de coopération intercommunale soient arrêtés avant le 31 décembre 2016.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° 871.

Mme Cécile Cukierman. Personne ne sera étonné que nous demandions également, au travers de notre amendement, la suppression de l’article 14.

D’une part, dès la loi de réforme des collectivités territoriales de 2010, nous avons condamné l’autoritarisme de cette procédure qui contraignait les communes à se regrouper au sein d’intercommunalités ne correspondant pas, le plus souvent, au développement de projets communs et ne s’appuyant sur aucune volonté d’action commune.

Cette disposition est, en fait, un outil d’intégration communale et non la mise en œuvre d’un outil de coopération entre les communes, auquel nous restons attachés. Cela pose une nouvelle fois la question de l’avenir de nos communes… ou de leur évaporation !

D’autre part, nous contestons la volonté exprimée par ce texte de développer de nouvelles intercommunalités, regroupant un plus grand nombre de communes et renforçant encore leurs compétences. Si, en 2010, nous étions opposés au seuil minimum de 5 000 habitants, nous ne pouvons, comme la commission des lois, qu’être en désaccord avec son relèvement à 20 000 habitants.

Autre argument qui milite à ce jour en faveur de la suppression de cet article tel qu’il résulte de la rédaction de la commission : les intercommunalités en place aujourd’hui viennent seulement d’être installées. Elles disposent de compétences nouvelles qu’elles n’ont pas encore eu le temps de mettre en œuvre, dans la mesure où les élus sont en train d’apprendre à travailler ensemble et vont, dans les jours qui viennent, adopter leur premier budget.

En ouvrant dans les prochains mois une nouvelle procédure de concentration, nous allons bloquer leur activité et aucun projet ne pourra être envisagé. Nous craignons d’organiser l’attentisme, la gestion des affaires courantes, alors que la situation économique et sociale de notre pays appelle au contraire une mobilisation publique renforcée.

Enfin, les conditions de modification de la carte intercommunale sont déjà codifiées dans notre législation, il n’est nul besoin d’y revenir. Notre loi est suffisante, puisque, si des intercommunalités souhaitent se regrouper sur la base de projets partagés, elles peuvent d’ores et déjà le faire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. J’incite tous nos collègues à suivre Jacqueline Gourault dans la brièveté de ses interventions. Sa concision n’a pas empêché la clarté de son propos.

Il ne faudrait pas non plus multiplier les interventions, car toutes ces déclarations, certes intéressantes, finiront par nous obliger à modifier profondément nos méthodes de travail : le Sénat débat, contrairement à l’Assemblée nationale ; le temps programmé n’est pas, à mon avis, une bonne chose pour le débat parlementaire, encore faut-il que chacun fasse preuve d’un peu de discipline. Or, monsieur le président, depuis votre déclaration concernant la modification de notre ordre de jour, il est prévu que nous siégions vendredi dans la nuit et éventuellement samedi prochain ; et si cela ne suffisait pas, le lundi pourrait encore s’ajouter !

J’en reviens à l’article 14. Je rappelle que le projet du Gouvernement consistait à refondre complètement la carte territoriale pour tenir compte du nouveau seuil. Je rappelle également que la loi de 2010 prévoyait une clause dite de « revoyure », même si je n’apprécie guère ce terme. Considérant que l’effort n’a pas été consenti partout, cet article vise aussi à regrouper les syndicats faisant double emploi, car il y a encore beaucoup à faire en la matière.

La commission des lois qui, vous le savez, a estimé que le seuil de 20 000 habitants n’était pas pertinent, souhaite que l’on examine ce point, car presque toutes les communes de France font aujourd’hui partie d’intercommunalités. Nous aurons l’occasion de développer ce point lorsque nous examinerons l’amendement du Gouvernement. L’intercommunalité, je le souligne, n’est pas la « supracommunalité » Je vous renvoie au rapport de nos excellents collègues Jean-Pierre Raffarin et Yves Krattinger sur le sujet.

Nous sommes d’accord pour examiner la situation : certaines intercommunalités sont jeunes, d’autres plus anciennes, et des regroupements restent sans doute à faire dans des départements. Nous souhaitons donc conserver cette possibilité, sans pour autant nous livrer à un véritable remue-ménage et tout remettre en cause si rapidement.

La carte de l’intercommunalité étant récente et n’ayant pas été facile à établir dans certains départements, il convient d’y apporter des améliorations. C’est pourquoi nous sommes hostiles à la suppression de l’article ; mais, de grâce, comparez l’article voté par la commission des lois et le projet de Gouvernement !

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Nous maintenons cet amendement et tenons ensuite à rappeler à notre excellent rapporteur que la menace de séances qui se poursuivraient jusqu’à samedi ne suffirait pas à remettre en cause l’expression des groupes. Je ne pense pas que nous en abusions,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n’est pas vous qui étiez en cause.

Mme Cécile Cukierman. … d’autant que, sur certains articles importants, il est nécessaire de se positionner – d’où ces amendements de suppression.

Je le dis à l’ensemble de cette assemblée : nos débats ne doivent nullement être calqués sur ceux de l’Assemblée nationale, sauf à ce que notre pays perde en démocratie.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je l’ai dit aussi.

Mme Cécile Cukierman. Je vous rejoins sur ce point, monsieur le rapporteur.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 691 et 871.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 1105, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 2 à 4

Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :

1° Le I est complété par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Ces établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupent au moins 20 000 habitants.

« Il est toutefois possible d’adapter ce seuil de population, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la densité de population est inférieure à la moitié de la densité moyenne du département où se trouve le siège ou dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

« Il est également possible d’adapter ce seuil de population, pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont le périmètre a évolué entre le 1er janvier 2012 et la date de la publication de la loi n° … du …. portant nouvelle organisation territoriale de la République.

« Il est également possible d’adapter ce seuil pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant toutes les communes d’un territoire insulaire. » ;

1° bis Au début du premier alinéa du II, les mots : « Ce schéma » sont remplacés par les mots : « Le schéma départemental de coopération intercommunale » ;

1° ter Le III est ainsi modifié :

a) Le 1° est abrogé ;

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Dans le texte initial refondu par la commission des lois, nous avions envisagé, en utilisant la clause de revoyure de la dernière loi sur laquelle nous nous sommes alignés concernant les dates, de réintroduire un seuil de 20 000 habitants pour nos intercommunalités, estimant que, pour sauver les communes, rien ne vaut bien souvent l’intercommunalité ; encore faut-il que des bases fiscales importantes lui permettent d’agir.

Nous avons attentivement relu l’excellent travail réalisé, département par département, par le Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, qui a bien montré que ce seuil était un objectif largement atteignable ; nous avons entendu les uns et les autres, en considérant les remarques des élus au cours de nos nombreux déplacements, notamment à Caen, monsieur le président de la commission des lois, mais aussi les observations des associations départementales des maires de France ou des préfets : nous en avons retenu qu’il fallait envisager, non pas des dérogations, car ce mot choque les élus de montagne, mais des adaptations.

Le Premier ministre s’est engagé en ce sens lorsque la densité démographique et/ou la géographie ne permettent pas de constituer des intercommunalités de 20 000 habitants qui fonctionnent dans de bonnes conditions pour les élus, et donc pour les populations.

Face à cette évidence, nous avons envisagé une première adaptation pour les intercommunalités dont la densité démographique est inférieure de moitié à la densité moyenne du département.

D’autres critères, dont nous nous étions ouverts auprès de M. Larcher, ont été testés, comme celui de la distance entre le siège de l’intercommunalité et la commune la plus éloignée de ce dernier. Nous nous sommes toutefois aperçus que le critère de la densité démographique recouvrait tous les autres. Les résultats des simulations sont en effet les mêmes, que l’on retienne la densité démographique, la distance ou le nombre de communes.

Le critère de la densité permet donc de régler nombre de cas, en zones de montagne ou ailleurs. Cette première adaptation tient compte à la fois des observations des élus de montagne sur la nécessité de retenir un seuil différent et des remarques formulées par beaucoup de maires, de présidents de conseils généraux et de parlementaires qui connaissent dans leurs départements des zones de faible densité démographique.

Nous proposons une autre adaptation qui, pour sa part, devient dérogation, car elle n’est pas de la même nature.

En effet, si certaines intercommunalités qui viennent de se constituer depuis le 1er janvier 2012 ne comptent que 17 000 habitants, nous n’allons pas leur demander de tout recommencer.

Le cas est le même lorsque, dans une zone donnée, on peut constituer deux ou trois intercommunalités de 20 000 habitants, puis qu’il reste 17 000 habitants à regrouper.

Si le critère de la densité démographique permet de régler la très grande majorité des problèmes, nous devons aussi prendre en compte le cas des intercommunalités récemment créées – on ne peut pas leur demander de revoir leur copie pour trouver 3 000 ou 4 000 habitants supplémentaires –, et celui des zones frontalières ou littorales qui ne comptent pas suffisamment d’habitants pour atteindre le seuil de 20 000 habitants.

J’en viens aux territoires insulaires. Très peu sont concernés, mais une demande est intervenue de Belle-Île-en-Mer, qui compte plusieurs communes et peut donc constituer une intercommunalité. À l’inverse, d’autres îles appartiennent depuis longtemps à des communautés de communes qui, bien qu’elles soient rurales et dirigées par une majorité de même sensibilité politique que la majorité actuelle du Sénat, estiment que le seuil de 20 000 habitants constitue, pour un territoire rural, le minimum requis pour pouvoir se développer. Ainsi, l’île de Batz, que le président Larcher connaît bien pour avoir eu l’honneur de la visiter, a rejoint la communauté de communes du Pays Léonard.

Il convient de prendre en compte les questions posées, essentiellement, par Belle-Île-en-Mer et l’île de Ré, dont les communes abritent suffisamment d’habitants pour qu’elles puissent travailler ensemble et progresser en s’appuyant sur des outils de développement non négligeables comme le tourisme et l’agriculture.

Des adaptations d’une part, des dérogations d’autre part et, je l’espère, une façon d’avancer qui se traduira par une instruction aux préfets pour leur demander de prendre en compte ces différents critères, en premier lieu celui d’une densité démographique inférieure de moitié à la densité moyenne du département : telle est, monsieur le rapporteur, exposée aussi sommairement que possible, la nouvelle proposition du Gouvernement, issue des multiples discussions que nous avons eues avec les acteurs concernés.

Il faut avoir un horizon, mais aussi faire preuve de bon sens et développer une capacité d’adaptation ou de dérogation pour pouvoir prendre en compte toutes les situations.

Pour conclure, on voit bien que ce sujet suscite des doutes sur la façon de travailler en intercommunalités.

Nous avons discuté tout à l’heure du risque de perte d’identité, mais celui-ci peut être écarté, me semble-il, tant que la commune subsiste. En revanche, que confie-t-on à l’intercommunalité, que peut-on faire ensemble pour lutter contre les violentes inégalités entre les territoires ?

Il me semble qu’une petite intercommunalité perdue au milieu d’une zone de densité démographique moyenne à l’échelle de la France n’a pas beaucoup de chance de résister à une nouvelle concurrence entre les territoires. Aujourd’hui, l’association des maires ruraux s’inquiète notamment du fait que les intercommunalités rurales affichent souvent un faible taux d’emprunt et une pression fiscale très basse, car la base fiscale est tout simplement insuffisante pour mobiliser une population sur des projets structurants.

Au nom de l’intérêt général que nous devons défendre – c’est la mission d’un exécutif –, nous devons être lucides sur les difficultés de ces intercommunalités, dont certaines ne sont même plus en mesure de faire face aux dépenses liées à leur école primaire.

Je ne sais pas si l’on rendrait service à ces intercommunalités en les empêchant de disposer de moyens supplémentaires. En effet, le monde est difficile, et ceux de nos concitoyens qui partent vivre en milieu rural, s’ils acceptent d’avoir peu de services au début, ne l’acceptent souvent pas longtemps, quitte à devenir parfois un peu « difficiles », selon les termes des ruraux.

De la même façon, nous devons gagner dans nos territoires ruraux la bataille du maintien de la terre agricole et du développement de l’agroalimentaire, qui est en danger aujourd’hui, et qui le sera demain si l’on n’y prend garde. J’ai souvent insisté sur ce point, non pas pour défendre absolument nos territoires ruraux, mais pour les porter, car ils nous sont vraiment indispensables.

Quand on parle de densification, de prise en compte de tous ces mètres carrés précieux qui sont ceux de l’agriculture ou des espaces naturels qui nous protègent, il faut que l’intercommunalité en charge de ces terres dispose de quelques moyens. Or ceux-ci sont très limités quand on regroupe trop peu d’habitants.

C’est pourquoi le Gouvernement a ouvert le débat avec cet amendement, qui prévoit ces adaptations et ces dérogations.

Mme Catherine Procaccia. C’est compliqué !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. C’est au contraire relativement simple, me semble-t-il :…

M. Jean-François Husson. Vos propos sont très compliqués, madame la ministre !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … un horizon ; une adaptation pour les zones de montagne et, plus généralement, pour les zones où la densité de population est faible ; enfin, une dérogation pour les intercommunalités de 16 000 ou 17 000 habitants qui viennent de se constituer, et une autre pour les îles.

M. le président. Le sous-amendement n° 1180, présenté par M. F. Marc, est ainsi libellé :

Amendement n° 1105, alinéa 7

Compléter cet alinéa par les mots :

ou d'une presqu'île

La parole est à M. François Marc.

M. François Marc. J’ai entendu avec intérêt les arguments développés à l’instant par Mme la ministre sur la nécessité de proposer des adaptations.

Je partage l’idée selon laquelle il convient aujourd’hui de développer une logique globale de l’intercommunalité dans le cadre de cette législation nouvelle.

J’approuve aussi ce qu’elle a dit sur la nécessité d’avoir une ambition. Si l’on veut une intercommunalité qui réussit, qui apporte des services à nos concitoyens, qui sert l’intérêt général, il faut qu’elle dispose de ressources, et donc de bases fiscales suffisamment larges et significatives.

Dès lors, il me semble légitime de viser une taille minimum pour disposer de cette capacité d’agir et pour apporter ainsi du sens aux prestations assurées pour satisfaire l’intérêt général.

Des adaptations s’avèrent toutefois nécessaires.

Je souscris parfaitement aux évolutions suggérées s’agissant de la densité de population dans les territoires ruraux et de montagne. Il s’agit, me semble-t-il, d’une adaptation significative par rapport à la taille d’intercommunalité recherchée, qui permettra aussi, comme l’a souligné Mme la ministre, de répondre aux préoccupations de nombre d’élus de ces secteurs.

Je propose simplement que, parmi ces adaptations qui portent, pour l’une d’entre elles, sur les territoires insulaires, l’on tienne également compte des presqu’îles.

Lorsque vous êtes sur une île, que vous regardiez au Nord, au Sud, à l’Est ou à l’Ouest, vous voyez…. de l’eau ! (Sourires.) En revanche, sur une presqu’île, vous voyez de l’eau devant vous, à gauche, à droite, et un peu de territoire derrière vous. Pourtant, il est parfois difficile de créer des liens avec ce territoire qui peut être relativement éloigné géographiquement, et cette particularité peut être à l’origine de difficultés importantes en matière d’organisation territoriale pour faciliter l’accès des services aux habitants.

Je propose donc, à travers ce sous-amendement, que la dérogation prévue pour les îles soit étendue aux presqu’îles.

M. le président. L'amendement n° 600, présenté par M. A. Marc, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

...) Au 1° , les mots : « le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « la commission départementale de coopération intercommunale » ;

La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Je me réjouis de vos propos, madame la ministre. Il me semble qu’à travers cet amendement, avec cette possibilité d’adaptation, vous venez tout simplement de découvrir ce qu’est la France ! (Sourires.)

Mon amendement, qui vient en complément du vôtre, vise à faire en sorte que les préfets ne soient pas tout-puissants. J’ai bien entendu que vous alliez leur envoyer une circulaire. Toutefois, aujourd’hui, leur comportement est très éloigné de vos propositions. En effet, alors que nous sommes en train de discuter de ce projet de loi, les préfets, notamment celui de l’Aveyron, accompagnés des sous-préfets, sont en train de réunir les présidents d’intercommunalités, dont je fais partie, pour envisager les adaptations et les évolutions possibles de ces dernières.

Madame la ministre, si vous pouviez faire cesser ce hiatus administratif, lequel va à l’encontre de votre volonté d’adaptation qui me semble très positive, je retirerais mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Courteau, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

a) Le 1° est ainsi rédigé :

« La constitution d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 20 000 habitants ; toutefois ce seuil de population n'est pas applicable aux établissements publics dont le territoire comprend des zones de montagne délimitées conformément à l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne ;

« Par ailleurs, ce seuil peut être abaissé soit par le représentant de l'État dans le département soit à la demande de la commission départementale de coopération intercommunale à la majorité des deux tiers des membres présents pour tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces, des bassins de vie, des schémas de cohérence territoriale et du territoire vécu au regard des compétences exercées par les établissements publics de coopération intercommunale du département.

« Afin de préserver des espaces de cohérence, de proximité, d’accessibilité aux services, les établissements publics de coopération intercommunale doivent comporter au maximum cinquante communes. Le représentant de l'État dans le département peut déroger à cette règle notamment pour les périmètres issus de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. »

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Par cet amendement, nous vous proposons que le seuil fixé dans le projet de loi initial puisse être abaissé soit par le représentant de l’État dans le département, soit à la demande de la commission départementale de coopération intercommunale, à la majorité des deux tiers des membres présents.

Il s’agit de tenir compte des caractéristiques géographiques particulières de certains espaces, des bassins de vie, des schémas de cohérence territoriale et du territoire vécu au regard des compétences exercées par les établissements publics de coopération intercommunale du département.

Par ailleurs, cet amendement tend à permettre au représentant de l’État de limiter le nombre maximum de communes d’un EPCI afin de préserver la proximité, les espaces de cohérence et d’accessibilité aux services.

M. le président. L'amendement n° 410, présenté par M. Montaugé et Mme Claireaux, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

a) Au 1°, les mots : « au moins 5 000 » sont remplacés par les mots : « un multiple de 5 000 habitants, en fonction de la densité d’habitat du territoire concerné, les seuils sont définis par décret » ;

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 137 rectifié, présenté par MM. Bertrand et Barbier, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

a) Au 1° , le nombre : « 5 000 » est remplacé par le nombre : « 20 000 ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 937, présenté par M. Delebarre, Mmes Bonnefoy, Herviaux, Guillemot et S. Robert, MM. Germain, Haut, Botrel, Courteau et Montaugé, Mme Jourda et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

a) Au 1°, le nombre : « 5 000 » est remplacé par le nombre : « 15 000 » ;

… ) au 1°, après le mot : « département », sont insérés les mots : « sur demande motivée de la commission départementale de coopération intercommunale à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés de ses membres, »

La parole est à M. Philippe Kaltenbach.

M. Philippe Kaltenbach. Cet amendement a été déposé par l’ensemble du groupe socialiste.

Alors que le Gouvernement est entré dans le débat avec la volonté de fixer un seuil à 20 000 habitants, la commission des lois a supprimé ce seuil, pour en revenir à celui qui est actuellement en vigueur de 5 000 habitants.

Les membres du groupe socialiste estiment quant à eux qu’il serait utile de fixer un objectif de façon à inciter les intercommunalités à se regrouper, tout en jugeant le seuil de 20 000 habitants trop élevé. Nous proposons donc de le fixer à 15 000 habitants, ce qui apporterait plus de souplesse à ce dispositif.

Pourquoi regrouper les EPCI ? Cela ne répond pas à une simple volonté de disposer d’établissements toujours plus gros. Toutefois, nous le savons, il existe encore sur nos territoires trop de petits EPCI qui n’auront pas les capacités de faire face aux dépenses ni de rendre les services attendus par la population.

Nous prévoyons en outre des adaptations pour les territoires insulaires et les zones de montagne, délimitées conformément à l’article 3 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

Nous avons par ailleurs souhaité donner aux commissions départementales de coopération intercommunale, à une majorité qualifiée, la possibilité de saisir le préfet pour obtenir une dérogation à ce seuil.

La solution de facilité serait de ne toucher à rien, de laisser les choses en l’état. Nous estimons au contraire qu’il convient de permettre aux EPCI de se regrouper et d’atteindre une taille et une force suffisantes. Cet enjeu est important.

Il en est de même de ce projet de loi, qui est essentiel pour nos collectivités, nous ne cessons de le répéter depuis le début de cette discussion. Nous allons non seulement renforcer la compétence des régions en matière économique et conforter les départements, mais encore construire des intercommunalités d’une taille suffisante (Ce n’est pas une question de taille ! sur les travées de l’UMP.) et dotées de pouvoirs et de moyens d’action plus étendus.

C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste, au lieu de rester dans le statu quo, fait un pas en proposant d’abaisser le seuil de 20 000 à 15 000 habitants.

M. Alain Marc. Pourquoi pas 16 000 ? Ils ne savent pas compter.

M. Philippe Kaltenbach. Nous proposons de tenir compte des adaptations et aménagements présentés par la ministre, parmi lesquels la densité est une bonne idée en ce qu’elle permet non seulement de bien cibler les dérogations, mais aussi de donner la possibilité à la commission départementale de coopération intercommunale – c’est-à-dire aux élus locaux – de formuler une proposition au préfet si elle estime que, dans un coin du département et en dépit de ces adaptations, ce seuil de 15 000 habitants n’est pas adapté.

Cette solution équilibrée pourrait peut-être satisfaire tout le monde. Beaucoup ont déclaré au cours des débats qu’il fallait, pour arriver à un consensus, trouver un point d’équilibre. Le statu quo n’en est pas un et ferait courir au Sénat le risque d’être prochainement désavoué par l’Assemblée nationale et de voir le seuil remonter à 20 000 habitants. Le dispositif proposé, qui est raisonnable et peut faire l’objet de dérogations, va au contraire dans le sens de l’intérêt général. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste a déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je me permets de rappeler que l’Association des maires de France, dont le congrès s’est tenu il n’y a pas si longtemps, dans sa très grande majorité, s’est opposée à ce seuil. Elle n’en veut pas ! Certes, rien ne nous oblige à tenir compte de cet avis… (Marques d’approbation sur les travées de l’UDI-UC.)

Quelles que soient les études retenues, madame la ministre, je reconnais l’effort de compréhension du Gouvernement sur les problèmes que rencontrent les collectivités en matière d’intercommunalité.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela dit, vous nous promettez monts et merveilles en la matière, mais hormis la création d’une mission obligatoire pour les offices de tourisme ou la prise en charge des gens du voyage, permettez-moi de douter des nouvelles compétences des intercommunalités ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) C’est pourtant bien ce qui les attend, je peux vous le dire ! Ce ne sont pas des arguments recevables.

Le Gouvernement propose de maintenir le seuil de 20 000 habitants tout en suggérant des adaptations. Je tiens tout d’abord à vous rappeler, s’agissant des communes de montagne, que la loi de 2010 n’avait prévu aucun seuil pour ces dernières. Telle est la loi actuellement en vigueur.

M. Roland Courteau. C’est vrai !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En effet, les conditions géographiques sont telles que même un seuil de 5 000 habitants ne pouvait pas coller !

M. Rémy Pointereau. Il a raison !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Toujours est-il que revenir au seuil de 20 000 habitants serait une régression pour les communes de montagne.

Les possibilités d’adaptation seront de la responsabilité du préfet, dont j’ai toujours reconnu la force de proposition, sans préjudice des pouvoirs de la CDCI. D’ailleurs, en 2010 déjà, je défendais déjà les représentants de l’État, et ceux qui leur étaient opposés sont ceux-là mêmes qui les défendent aujourd’hui ! J’espère que, de l’autre côté de l’hémicycle, on ne va pas se mettre à les attaquer ! (Sourires.)

J’ai beau avoir bien lu l’étude d’impact, madame la ministre, je ne sais toujours pas à quoi correspond ce seuil de 20 000 habitants. On aurait tout aussi bien pu inscrire 25 000 que 15 000…

Selon moi, tout dépend des territoires. Le critère de densité moyenne auquel vous faites référence ne fonctionne pas pour un département très rural, où les dérogations et adaptations ne seront de toute façon pas possibles. (Oui ! sur les travées de l’UMP.) C’est de l’arithmétique simple.

M. Rémy Pointereau. C’est de la physique !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne sais pas quel technocrate a encore inventé cela, mais c’est bête conne chou ; ou alors je n’y comprends plus rien ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Rémy Pointereau. Il a raison !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Laissons vivre les quelques intercommunalités mises en place sur des territoires insulaires. S’agissant des presqu’îles, la question est plus compliquée. Tout dépend de leur taille : si tout le Cotentin doit faire l’objet de dérogations – je sais que M. le président de la commission des lois est d’accord (Sourires.) –, cela risque tout de même de poser problème.

M. Rémy Pointereau. C’est le comble de l’absurde !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Alain Marc, si c’est bien à la CDCI de délibérer, je crois que, dans notre beau pays, c’est le représentant de l’État qui propose.

Monsieur Courteau, vous êtes également favorable au seuil de 20 000 habitants,…

M. Roland Courteau. Avec des adaptations !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … ce qui est contraire à la position de la commission.

Les dérogations que vous proposez ne sont pas suffisantes. Je pense notamment à la limitation du nombre de communes membres d’un EPCI à cinquante et à la possibilité de dérogation pour tenir compte des périmètres issus de la loi du 16 décembre 2010 portant réforme des collectivités locales.

Monsieur Kaltenbach, vous avez défendu l’amendement du groupe socialiste visant à abaisser ce seuil à 15 000 habitants. Nous pouvons jouer aux enchères descendantes, si vous le souhaitez. (Rires sur les travées de l'UMP.)

Mme Catherine Procaccia. Il a de l’humour !

M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le rapporteur, vous ne faites pas d’ouverture !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. J’ai moi-même fait une enchère descendante, puisque la commission souhaite en rester au seuil de 5 000 habitants, monsieur Kaltenbach.

Certains semblent ne pas comprendre que la mise en œuvre de la loi de 2010 a été difficile. Il a fallu convaincre toutes les collectivités…

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Pas partout !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Dans certains départements, si ! Globalement, je dois reconnaître que les choses se sont plutôt bien passées dans mon département, mais le problème, monsieur le secrétaire d’État, c’est que la loi MAPTAM est en train de tout bouleverser. De grandes intercommunalités de 500 000 habitants ! Certains – les préfets, pour ne pas les citer – sont tombés sur la tête ! Pourvu que ce ne soit pas monté encore plus haut ! (Sourires.)

Par ailleurs, certaines intercommunalités viennent tout juste de voir le jour. Plutôt que de leur proposer des adaptations, il faudrait les dispenser de seuil. Comment comptez-vous distinguer celles qui pourront y déroger des autres ?

Mme Jacqueline Gourault. C’est du temps qu’il faut leur donner !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pour toutes ces raisons, la commission, qui reste soucieuse de la recherche d’un consensus…

Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas une vente aux enchères !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … et qui a conservé le principe d’une révision de la carte et de la mise en place d’un nouveau schéma,…

M. René-Paul Savary. Tout à fait !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … est défavorable à tous ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. La proposition de François Marc pour les presqu’îles s’inscrit dans le cadre du projet de circulaire adressé aux préfets concernant les zones frontalières, la mer ou la montagne. Là aussi, nous sommes face à une impossibilité physique.

Le Gouvernement est également défavorable aux autres amendements que le sien. Je voudrais toutefois apporter quelques précisions.

On a beaucoup parlé des départements de Savoie et de Haute-Savoie, par exemple, qui présenteraient des difficultés. Or le texte ne conduirait aujourd’hui aucune des intercommunalités de ces deux départements à bouger. Aucune !

En Lozère, qui compte 24 intercommunalités…

M. Rémy Pointereau. Pour combien d’habitants ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … en dessous du seuil fixé, compte tenu de l’ensemble des adaptations, nous accepterions aussi qu’elles ne bougent point. Vous voyez là un exemple typique d’adaptation.

Vous dites que le dispositif est compliqué, mais la France est compliquée ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Je continue mon énumération.

Prenez le territoire de Belfort, l’Essonne, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne, le Val-d’Oise, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion, le Var, le Tarn, les Yvelines, la Seine-et-Marne, la Haute-Savoie, la Savoie, le Rhône, les Pyrénées orientales, le Nord, la Moselle, et la Lozère : dans ces départements, une seule intercommunalité, dans le pire des cas, serait susceptible de bouger ! En réalité, peu de départements sont concernés, puisque 29 % des EPCI s’interrogent.

Je tiens à souligner par là que les adaptations, et non pas les dérogations qui ont été demandées, sont nombreuses. Elles sont codifiées, seront inscrites de façon explicite dans la circulaire envoyée aux préfets, et la commission départementale de la coopération intercommunale aura naturellement pour mission de contrôler les projets.

On l’observe depuis quelque temps dans de nombreuses zones que l’on connaît bien, ceux d’entre vous, comme François Marc, qui ont assisté à des anniversaires d’intercommunalités rurales, ont rapporté que le président, contre toute attente, acceptait et encourageait les avancées, au risque de ne bénéficier d’aucun seuil critique d’action.

C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ces amendements et que je continue à défendre le nôtre. Toutefois, le Gouvernement n’est pas plus républicain que la République, et si notre proposition n’était pas acceptée, nous pourrions nous orienter vers une position de repli.

M. Rémy Pointereau. C’est mieux !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Dans ce cas, je vous demanderais sans doute une suspension de séance afin d’éviter que ne se reproduise ce qui s’est passé dernièrement avec les routes et pour que le Gouvernement ait le temps de proposer un sous-amendement à l’un des amendements. (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Jean-Claude Lenoir. C’est une ouverture intéressante !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. L’ironie ne fait pas la France !

M. Jean-Claude Lenoir. Ce n’est pas de l’ironie…

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous sommes face à un vrai problème d’intérêt général,…

M. Rémy Pointereau. On peut rire de tout !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. … puisque nous sommes le seul pays d’Europe à compter 36 000 communes et à avoir pris la décision de garder nos communes. (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Jean-François Husson. Un peu de cohérence !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Seulement, nous constatons tous ensemble que le sentiment d’abandon monte dans ces territoires ruraux, alors que nous avons des communes, des intercommunalités à taille modulable, des départements, et des régions.

L’intérêt général conduit l’exécutif à s’interroger sur le fait que, dans des zones très urbaines, l’hyper-richesse côtoie l’hyper-pauvreté, ce qui provoque parfois l’indignation chez les habitants et conduit à des événements dramatiques tels ceux que l’on a connus en Bretagne et qui pourraient se reproduire.

Ensemble, sans ironie et sans querelle, on peut se demander pourquoi, dans certaines communautés rurales, les habitants sont à ce point dépourvus de ressources. Face à ces très grandes difficultés, nous devons nous poser cette question fondamentale et tout faire pour y apporter des solutions !

En France, il existe une profonde inégalité entre les territoires, et voilà sans doute vingt ans que ces inégalités augmentent progressivement ! Pouvons-nous nous contenter d’être spectateurs ou devons-nous essayer d’agir ? C’est le fond de la question.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. S’agissant de l’étude d’impact, Mme la ministre a brandi un tableau. Or la commission n’a jamais reçu ces informations ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Jean-François Husson. C’est la démocratie !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Comment voulez-vous que l’on discute sérieusement si nous n’avons pas tous les éléments ? Dans la mesure où l’étude d’impact initiale était complètement nulle, même si le Conseil constitutionnel a jugé que cela répondait aux critères…

M. Claude Bérit-Débat. Il y en a eu d’autres depuis !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je vous signale que l’étude d’impact portait non sur ce texte, mais sur le précédent.

Comment voulez-vous que l’on soit en mesure d’apprécier la situation sans avoir tous les éléments ? Ce n’est pas du tout convenable ! De même, lorsque des amendements sont déposés au dernier moment sans que nous puissions les discuter, nous ne pouvons pas travailler correctement. Je vous le dis, ce n’est pas ce soir, en séance, que nous trouverons un compromis, même si, personnellement, je le regrette.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1180.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote sur l'amendement n° 1105.

M. Rémy Pointereau. Je partage entièrement les arguments de M. le rapporteur à propos du seuil de 20 000 habitants. Pourquoi pas 15 000, 25 000 ou 30 000 ? Pourquoi introduire une nouvelle norme à gérer, alors que nous tentons justement de les diminuer.

La commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire avait été saisie pour avis sur l’article 14, et nous avions déposé un amendement de suppression de ce seuil de 20 000 habitants.

Nous avions alors proposé, comme M. Marc, que ce soit la commission départementale de la coopération intercommunale qui décide du seuil requis selon les départements. Cependant, dans la mesure où la commission des lois a abaissé le seuil à 5 000 habitants, notre amendement n’avait plus d’objet, ce qui n’empêche pas qu’il ait été voté en commission à la quasi-unanimité.

Le fait de vouloir imposer ce seuil de 20 000 habitants est une absurdité qui soulève une profonde inquiétude chez les élus ruraux, puisque dans certains territoires il faudrait entre 80 et 100 communes pour atteindre ce seuil. À cela s’ajoute un problème de distance avec le siège de l’intercommunalité qui engagera évidemment des frais supplémentaires.

L’Association des maires de France, qui représente principalement les intérêts des maires ruraux, est opposée, me semble-t-il, au seuil des 20 000 habitants. L’intercommunalité doit être au service des communes, et non l’inverse.

L’intercommunalité doit pouvoir gérer dans un territoire ce que la commune ne peut assumer. Elle ne pourra néanmoins pas tout régler. En associant vingt, trente ou quarante communes pauvres, on ne créera jamais une intercommunalité riche, et même en multipliant le nombre d’habitants.

Dans les communautés de communes rurales où les décisions ne sont pas prises librement, les choses ne peuvent pas fonctionner. Même si l’intercommunalité dispose des moyens nécessaires, il faut aussi un projet commun, fédérateur.

On parle de 20 000 habitants en milieu rural, mais en milieu urbain, c’est peu. Il serait peut-être préférable d’augmenter ce seuil à 50 000 habitants en ville. On voit bien qu’il est difficile d’imposer un seuil global.

Notre territoire, comme le disait Mme la ministre, est divers et varié : nous avons des montagnes, des zones de plaine peu peuplées. Nous devons sortir d’une logique purement quantitative pour privilégier une logique qualitative qui serait plus adaptée aux réalités territoriales.

Nous devons faire confiance aux élus locaux et les laisser gérer leurs territoires ; ils sont suffisamment expérimentés pour savoir qu’un territoire de 8 500 habitants fonctionne correctement en intercommunalité. Laissons-les en paix !

Il faut aussi veiller à maintenir de la stabilité dans nos périmètres de communautés de communes. Certaines d’entre elles ont changé de périmètre trois fois : comment peuvent-elles mener à bien des projets et favoriser la croissance ? C’est impossible !

Pour toutes ces raisons, je suis tout à fait opposé à l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. Je voudrais féliciter M. le rapporteur, qui est un bon orateur, de nous avoir expliqué ce qu’était la mosaïque de la France. Bien qu’il soit parisien, M. Hyest a les pieds sur terre ! En effet, il est maire d’un village de 300 habitants, en Île-de-France. J’espère qu’à la fin de la soirée nous pourrons dire : Hyest, we can ! (Rires admiratifs sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Mme Catherine Procaccia. Personne n’y avait songé !

M. Alain Houpert. J’ai le sentiment, chers collègues, que l’on oppose l’ambition à la raison.

L’ambition du Gouvernement est de fixer le seuil à 20 000 habitants, seulement il s’agit là simplement d’un chiffre, d’une limite. C’est envisageable en milieu urbain, mais c’est autre chose du point de vue de la raison. Nous avons parlé des presqu’îles et des îles : une île, pour moi, est un endroit difficile d’accès, et les territoires ruraux sont parfois assimilables à des îles ou à des presqu’îles, en raison de leur éloignement.

Je viens du département de la Côte-d’Or, où il a fallu, pour créer une intercommunalité avec 20 000 habitants, réunir six cantons, tous pauvres. Seulement, on ne marie pas la misère à la misère !

Lors de l’examen de la dernière loi où cette fameuse limite à 5 000 habitants a été retenue, nous nous étions battus tous ensemble, et nous avions réussi à en créer deux dans le département de la Côte-d’Or. Toutefois, comme nous avions marié une intercommunalité riche avec une intercommunalité pauvre, le résultat est que, depuis deux ans, elles se battent pour des bases fiscales.

La conclusion de tout cela est que maintenant les ruraux disent que l’intercommunalité coûte trop cher !

M. Alain Houpert. Madame la ministre, les élus ruraux sont des gens qui ont du bon sens.

M. Philippe Kaltenbach. Les élus en milieu urbain aussi ont du bon sens !

M. Alain Houpert. Je crois qu’il faut les laisser faire.

La ruralité, c’est une chance pour la France. La France est une mosaïque de 36 000 communes, dont 80 % ont moins de 500 habitants.

Comme l’a dit M. Marc, il faut avancer ; cependant, cela nécessite un rééquilibrage, qui peut parfois prendre du temps, et il faut donner du temps au temps. Un Président de la République a dit, mais il l’a emprunté à un saint bourguignon qui s’appelait Saint Bernard : « Aimer, c’est donner ». Alors donnons !

M. le président. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.

M. Claude Kern. Je voudrais commencer par saluer la sagesse de la commission des lois, de son président, et naturellement de son rapporteur.

Pour appuyer mon propos, je prendrai pour exemple le département dont je suis l’élu, le Bas-Rhin. Celui-ci compte trente-quatre intercommunalités, qui couvrent l’ensemble de son territoire. Quelques-unes d’entre elles comptent de 10 000 à 18 000 habitants. Leur fonctionnement est salué par tous, surtout par la population, qui commence enfin à identifier ses EPCI, voir à s’y identifier.

Dès lors, pourquoi casser ce qui fonctionne ? Nous le savons tous très bien, un mariage forcé ne marchera jamais. Pardonnez-moi, mais je trouve franchement stupide de remettre tout cela en cause ! Tout le travail mené par les commissions départementales de la coopération intercommunale, les CDCI, en totale concertation avec les collectivités concernées, et avec leur accord, aurait été fait pour rien ?

Laissons faire les élus ; ce sont des gens responsables, qui savent ce qu’ils font et ce qu’il faut à leur collectivité. En tant que président d’une association départementale des maires en contact régulier avec les EPCI et l’ensemble des élus, je puis vous assurer, mes chers collègues, que les élus concernés par des EPCI fragiles sont également conscients de leurs difficultés. Ils sont déjà en train de travailler pour fusionner, sans qu’on les y oblige.

Ce n’est pas le nombre d’habitants qui fera qu’une intercommunalité sera forte ou non ; prenez plutôt en compte les bassins de vie, ainsi que le dynamisme et les projets des territoires !

M. Claude Kern. Je prendrai l’exemple de la communauté de communes dont j’étais président avant d’être élu sénateur. Composée de sept communes, elle comprend 17 000 habitants. Elle est aujourd’hui considérée comme une communauté de communes forte du département du Bas-Rhin.

Une autre communauté de communes regroupe 15 000 habitants répartis sur dix communes, dont le bourg-centre, qui compte plus de 10 000 habitants. Fusionnez ces deux communautés et, vous verrez, cela ne marchera plus : leurs projets, leurs compétences, leurs orientations ne sont pas les mêmes !

Enfin, une troisième communauté de communes, qui compte 33 000 habitants, ne fonctionne pas bien. Pourquoi, dès lors, casser la communauté de communes de 17 000 habitants qui, aujourd'hui, marche ?

Il n’est nul besoin de légiférer sur ce sujet, madame la ministre. Ayez un peu de bon sens, faites confiance, pour une fois, aux élus locaux, et retirez votre amendement. (Mme Sophie Joissains applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

M. Joël Guerriau. Les dispositions de l’amendement déposé par le Gouvernement constituent, à mes yeux, une belle avancée : il s’agit manifestement d’introduire de la souplesse pour la fixation du seuil à 20 000 habitants. Ce faisant, on reconnaît en réalité que ce seuil ne peut pas tenir, car aucun critère objectif ne permet de le défendre.

Notons d’ailleurs, cela a été souligné par Claude Kern, que certaines intercommunalités de moins de 20 000 habitants fonctionnent parfaitement bien. Elles ne se plaignent pas de leur sort et n’ont pas nécessairement envie d’évoluer, parce que la loi les y obligerait.

Le dispositif de cet amendement prévoit des outils devant permettre d’adapter le seuil pour les territoires insulaires ou les zones montagneuses. Mais la liste est-elle vraiment complète ? N’y a-t-il pas d’autres situations, non prévues par le présent amendement ? Et que faire, dans ce cas ?

En outre, la rédaction de l’amendement ne précise pas qui réalisera les adaptations de seuil. Il s’agira probablement de la CDCI, où siègent les élus eux-mêmes. Dès lors, s’ils ont l’intention d’adapter le seuil, ils n’ont pas besoin, pour ce faire, d’une règle supplémentaire, fixée par la loi. Cela se fera naturellement.

Il se peut aussi que le préfet soit chargé de ces adaptations. Si c’est le cas, cela irait à l’encontre même des intérêts des maires. J’ai sous les yeux un compte rendu faisant état des réactions de maires siégeant à la CDCI. Ils expriment très largement des réserves quant à la modification des périmètres de leurs communautés et craignent de voir leurs intercommunalités intégrées dans une fusion contre leur gré.

Toute décision en ce sens émanant de la préfecture s’opposerait à l’avis d’élus communautaires qui sont issus du suffrage universel et qui, rappelons-le, ont été fléchés lors du dernier scrutin municipal. À ce titre, ils revendiquent s’être engagés sur un programme communautaire et entendent le mettre en œuvre. Il serait donc incohérent de revenir sur une situation qui est le fruit d’une élection tenue il y a encore peu de temps !

À l’appui de votre amendement, madame la ministre, vous faites valoir que les intercommunalités éprouvent des difficultés. Les élus sont conscients de la raréfaction des deniers publics – ils ont parfaitement reçu le message de la diminution de 11 milliards d’euros des dotations aux collectivités territoriales – ; ils sont également conscients que leurs actions publiques doivent être plus efficaces.

Je crois qu’on peut leur faire confiance, et ce pour deux raisons.

Tout d’abord, les débats sur ce sujet au sein des CDCI sont largement engagés. Je ne crois pas que les élus fassent preuve de mauvaise volonté en la matière. Passer par la loi, ce serait donc leur donner le sentiment qu’on les oblige à évoluer. Ils sont plus proches des réalités du terrain : s’il y a souffrance, ils sauront réagir et prendre les décisions qui conviennent.

Ensuite, depuis le 1er janvier 2015, ont été créés, je le rappelle, des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux. Donnons-leur la possibilité d’échanger sur les questions intercommunales et de prendre leur destin en main ; ils en sont tout à fait capables. En tout cas, cela ne se fera pas par des mesures jacobines, sans véritable logique, qui tomberaient d’en haut.

Pour terminer, nous venons de décider que de nouveaux schémas départementaux devront être adoptés pour le 1er janvier prochain. Les discussions sont bien engagées, car, pour respecter l’échéance, tout devra être bouclé pour le mois de juin prochain. Dès lors, laissons-les se concerter !

M. Claude Kern. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Je voudrais à mon tour louer la sagesse des propositions de la commission des lois. Je ne comprends pas l’entêtement du Gouvernement à vouloir maintenir un seuil.

Nous n’avons déjà pas retiré beaucoup de satisfaction de l’examen du projet de loi sur le redécoupage des régions, où l’on a imposé un nouveau schéma à l’ensemble des élus, lesquels, pour la plupart, y étaient opposés... Avec le présent texte, on veut procéder de la même façon, à un moment où, pourtant, on parle beaucoup de liberté.

J’ai interrogé les maires du département que je représente. Je n’en ai guère trouvé qui soutient l’idée d’instituer un seuil pour l’intercommunalité.

Pourquoi vouloir casser ce qui marche ? Dans le département que je représente et que vous connaissez parfaitement, madame la ministre, l’intercommunalité s’est organisée et fonctionne plutôt bien. La communauté de communes que je préside doit être la plus intégrée du département ; pourtant, elle ne compte pas 20 000 habitants. Cela ne veut pas dire qu’elle ne marche pas bien : au contraire, elle a des leçons à donner à beaucoup d’intercommunalités plus peuplées. C’est dire que ce seuil n’a pas de légitimité pour ce qui concerne l’opportunité de l’exercice des responsabilités.

Je ne comprends pas ce que veut le Gouvernement, et en tout cas je le regrette. Il vaudrait mieux instituer des notions plus réalistes, comme celle du bassin de vie, par exemple, qui semble beaucoup plus logique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Mais c’est de cela qu’il s’agit !

M. Michel Canevet. Pour les départements comme le mien, dont le territoire, restreint, est bordé par la mer d’un côté et par les grosses intercommunalités de l’autre, il n’est pas aisé de créer des intercommunalités comptant plus de 20 000 habitants.

J’espère que la raison prévaudra et que l’on s’en remettra à la grande sagesse des élus locaux, qui ont su montrer leur capacité à s’organiser. Ce n’est pas en mettant en cause les 36 000 communes de France que l’on apportera une réponse adaptée à la situation.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. Comme beaucoup ici, j’assiste depuis quelques jours à des cérémonies de vœux. Or le sujet qui anime notre débat est régulièrement évoqué par les élus que l’on rencontre en ces circonstances et il revient dans toutes les prises de parole des présidents.

Comme M. Canevet, je suis d’une région où l’intercommunalité est désormais chose ancienne. Elle a émergé dès le début des années 1990 ; dès que la loi, en somme, s’est appliquée. C’est une région, en effet, où l’intercommunalité se pratique avec conviction.

Le premier argument mis en avant par les élus pour s’opposer à la mesure dont nous discutons tient à la remise en cause du travail conduit il y a seulement deux ans. C’est une réaction que l’on pouvait attendre et que l’on peut entendre.

Toutefois, j’entends aussi d’autres arguments, mes chers collègues, exprimés de façon dépassionnée, car nous avons une certaine expérience de ces questions. Une idée ressort principalement : nous avons besoin d’intercommunalités ayant une masse critique suffisante, pour des raisons que j’ai notées et que je partage évidemment.

Nous en avons besoin, par exemple, pour pratiquer les solidarités territoriales. J’étais hier sur le territoire de Lannion-Trégor, une grosse communauté, si l’on peut dire, qui compte 80 000 habitants, répartis sur un territoire dont une zone est très rurale et l’autre est spécialisée dans l’industrie de pointe. Dans cette intercommunalité, la richesse est partagée : 700 000 euros sont répartis entre les communes, dont beaucoup sont petites.

Un autre élément revient souvent dans la bouche des élus : certaines communes doivent trouver les moyens en ingénierie pour venir en appui des conseils municipaux et des maires. Or cela ne pourra se faire que dans des intercommunalités de dimension suffisante.

M. Canevet a indiqué que les 36 000 communes pourraient être remises en cause. Au contraire, mes chers collègues, dans des intercommunalités de dimension suffisante, les communes, pour des raisons de subsidiarité, ont encore plus de raisons d’exister. Elles en ont d’autant plus que les transferts de certaines de leurs compétences aux intercommunalités ont été opérés il y a quelques années, sans que leurs ressources aient vraiment baissé, ce qui leur a permis de continuer à vivre dans des conditions tout à fait acceptables, me semble-t-il.

On peut toujours débattre du seuil d’habitants. J’ai entendu les arguments exposés par Mme la ministre ; je considère qu’il y a là, manifestement, une avancée. Elle aurait d’ailleurs été encore plus grande si le sous-amendement de M. François Marc, qui visait à prendre en compte les presqu’îles, avait été adopté !

L’amendement n° 937, qui a été défendu à l’instant par Philippe Kaltenbach, tend à fixer le seuil à 15 000 habitants, ce qui représente, à mon sens, une masse critique significative. On peut bien sûr trouver des accommodements en fonction des situations locales, qui sont nombreuses. Elles sont tellement nombreuses, d’ailleurs, que l’on pourrait aisément retomber aujourd’hui dans le débat qui nous a animés lors de l’examen du texte relatif à la délimitation des régions et qui a vu la présentation d’un projet différent par orateur, ou presque !

Porter le seuil à 15 000 habitants, en donnant une large marge d’appréciation et de manœuvre aux CDCI, me semble tout le contraire de l’approche jacobine dénoncée tout à l’heure ; il s’agit bien plutôt d’une approche girondine, qui prend en compte les particularités des territoires.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le texte de cet amendement. J’ai même, sur sa base, réalisé une simulation pour le département de la Marne, qui compte 566 000 habitants, soit une densité moyenne de 74 habitants au kilomètre carré. Si l’on retire Reims, ses 217 000 habitants et sa densité de 1 250 habitants au kilomètre carré, le calcul est bien entendu différent ! Or quinze intercommunalités, sur les trente que compte le département, connaissent une densité de population inférieure à moitié de la densité moyenne du département.

Sur cette base, j’ai également élaboré un « pré-schéma », pour voir ce que cela donnerait. Je peux vous le dire, madame la ministre, la mesure que vous défendez conduit à un résultat inverse de ce que vous recherchez. En effet, les intercommunalités dont la densité est supérieure à la moitié de la densité moyenne du département, contraintes de s’unir, se situent dans le territoire périurbain. Elles vont donc faire front pour empêcher les agglomérations de grossir,…

M. René-Paul Savary. … une évolution déjà difficile dans le milieu rural, qui n’y est pas naturellement enclin.

Avec les seuils et les regroupements obligatoires, des zones entières bloqueront le développement des agglomérations pendant des années ! De même, forcer au regroupement d’intercommunalités d’une densité deux fois moindre que la moyenne, notamment autour de bourgs-centres éloignés des agglomérations, créera des « poches », qui entraveront aussi le développement de ces dernières. Le système est totalement contreproductif ; je tenais à le souligner.

Nous venons de vivre le regroupement des communes au 1er janvier dernier, avec les contraintes fiscales. Une commune de mon département rend de l’argent aux contribuables compte tenu de son adhésion par obligation à l’intercommunalité ! En effet, l’harmonie fiscale a été impossible à trouver avec les directions des impôts : la seule solution, c’est de rendre de l’argent. C’est tout de même extraordinaire ! Nous avons là un cas d’espèce illustrant la complexité du dispositif.

En ces temps de vœux, les élus que nous rencontrons nous font part de leurs craintes sur la proximité, sur les disparités des compétences – telle communauté n’a pas la compétence scolaire, par exemple – et sur les différences de fiscalité, comme sur la taxe des ordures ménagères.

Ma communauté de communes de 10 000 habitants n’a pas de siège ; c’est la mairie de la commune-centre qui en tient lieu. Les services sont mutualisés. Elle n’a pas non plus de fonctionnaires ; ce sont ceux de la commune qui sont mis à sa disposition. Le seuil des 20 000 habitants nous obligera à avoir un siège. Surtout, avec plus de cent communes, il n’y aura plus ni proximité ni représentation. La meilleure manière d’abandonner les habitants du monde rural – un phénomène contre lequel vous prétendez lutter –, c’est d’éloigner encore les centres de décisions ! J’insiste sur la gravité de la situation.

À chaque équipement correspond une taille critique de population. Un seul d’environ 5 000 habitants correspond à une structuration des communautés de communes autour des collèges. Si l’on veut une structuration autour des lycées, il faut 40 000 habitants ou 50 000 habitants. Là, on obtient la taille critique pour rationaliser les services et faire des économies. Ces dernières, on peut aussi en réaliser dans les petites intercommunalités, de 5 000 habitants ou 10 000 habitants, qui sont à taille humaine. Mais le seuil intermédiaire que vous proposez ne fera que complexifier la situation !

Le plus sage serait de faire confiance aux commissions départementales de coopération intercommunale et de favoriser par des dotations les intercommunalités qui mutualisent leurs moyens pour des équipements ou de services précis. Là, il y aurait une vraie politique incitative, en fonction des contraintes propres des territoires ! (MM. Alain Houpert et Jean-Claude Lenoir applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour explication de vote.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Madame la ministre, même si cela ne saute peut-être pas aux yeux, nous avançons. (Marques d’ironie sur diverses travées.)

M. Jean-Claude Lenoir. Vous êtes bien optimiste !

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. En effet, l’amendement du Gouvernement ne nous satisfait pas entièrement, mais il a au moins le mérite de faire bouger les lignes.

M. le rapporteur a indiqué que la commission souhaitait un compromis. Cela suppose que chacun fasse un bout de chemin. D’ailleurs, en France, nous n’avons peut-être pas suffisamment la culture du compromis, ce qui pose un certain nombre de problèmes.

Le Gouvernement a proposé des avancées extrêmement importantes sur les possibilités d’adaptation ou de dérogation, ainsi que sur les pouvoirs des commissions départementales de coopération intercommunale, sous l’autorité des préfets. Tout cela va dans le bon sens, mais ce n’est sans doute pas suffisant.

Nous le savons, les seuils posent toujours problème. Celui qui se fait verbaliser à 93 ou 94 kilomètres-heure sur une route départementale où la vitesse est limitée à 90 kilomètres-heure se dit que le seuil devrait être à 95 kilomètres-heure !

Le seuil des 20 000 habitants pose peut-être en plus un problème psychologique. À mon avis, l’amendement du groupe socialiste tend à permettre de garder une taille critique pour les intercommunalités. En effet, le Gouvernement a raison de vouloir une taille critique : il faut que des dynamiques puissent se créer.

En ce début d’année, je forme le vœu que nous cessions d’opposer le rural et l’urbain. Il n’y a pas, d’un côté, les élus ruraux, dont je fais partie, qui auraient du bon sens et détiendraient la vérité révélée, et, de l’autre, les élus urbains, qui auraient nécessairement toujours tort !

Pour un élu départemental et, plus encore, pour le président d’un exécutif départemental, c’est la quadrature du cercle au quotidien. Il faut faire cohabiter des élus de territoires extrêmement ruraux et des élus de territoires extrêmement urbains, qui ont tous une légitimité et qui doivent tous être animés par le souci de l’intérêt général départemental. Avançons donc aujourd'hui et cessons de les opposer !

Madame la ministre, votre proposition de seuil peut-elle évoluer encore un peu ? Essayons d’arriver à une taille convenable tout en tenant compte des spécificités locales ; ce sera d’ailleurs le rôle de la commission départementale de coopération intercommunale. Nous le savons, il existe certaines absurdités. Il est parfois impossible de faire travailler ensemble deux communes, d’ailleurs moins pour des raisons politiques, les deux maires pouvant être de la même sensibilité, qu’en raison de rivalités de clocher remontant à des temps immémoriaux.

À mon avis, les commissions départementales de coopération intercommunale permettront de prendre en compte de telles réalités. Cela devrait nous permettre de retenir votre idée d’un seuil sans pour autant violer les consciences ! (Exclamations.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je profite du débat sur le seuil des 20 000 habitants pour interroger Mme la ministre sur les instructions qui ont été données aux préfectures au cours des derniers mois.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Il n’y en a eu aucune !

Mme Catherine Morin-Desailly. Au lendemain des élections municipales, lors d’une réunion organisée à la préfecture de Haute-Normandie, en présence des 245 maires nouvellement élus, venus s’informer du fonctionnement de services auxquels ils pourraient avoir recours, j’ai eu la surprise d’entendre le secrétaire général considérer le seuil des 20 000 habitants comme acquis et inciter les édiles à s’organiser en ce sens.

J’ai dû intervenir pour lui signaler que le Parlement n’avait encore rien voté de tel, et il m’a répondu qu’il suffisait de lire la presse pour savoir que ce seuil serait retenu ! (Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.) Assez choquée, il m’a fallu rappeler à nos collègues élus que nous étions encore en démocratie et que leurs représentants au Sénat ne s’étaient pas prononcés à ce stade.

Voilà qui explique pourquoi les élus se sentent sous pression et manifestent à juste titre leur étonnement, voire leur désaccord, en s’interrogeant sur l’opportunité d’élargir les intercommunalités avant même d’en avoir parlé ! Ils se sont rebellés contre les seuils, car ils veulent être acteurs de la stratégie de développement de leur territoire. Pour eux, un territoire, c’est aussi un bassin de vie, de projet et de développement ; ils en ont la responsabilité.

J’attire donc l’attention du Gouvernement sur les pressions exercées sur les élus avant même que les dispositions ne soient votées démocratiquement au Parlement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. L’heure est à la recherche de la synthèse ! (M. Bruno Sido s’exclame.)

Je partage totalement l’analyse de notre collègue René-Paul Savary, pour qui le seuil des 40 000 habitants, c'est-à-dire celui d’une structuration autour des lycées, correspond à l’échelle de rationalisation de l’action publique. Je pense qu’il faut entendre ses propos, qui sont importants.

M. Bruno Sido. Ces compliments sont louches ! (Sourires.)

M. Ronan Dantec. En même temps, je rejoins notre collègue Michel Canevet sur la pertinence du raisonnement en termes de bassins de vie. Il faut que les citoyens s’identifient à un véritable territoire. Certes, il y a sans doute un travail de définition à mener. Faut-il reprendre celle de l’Institut national de la statistique et des études économiques ? Une définition culturelle est-elle préférable ? S’agit-il des pays ? Nous ne trancherons sans doute pas ce soir, mais je pense que, de toute manière, il faut creuser l’idée des bassins de vie.

Nombre de nos collègues, cela m’a particulièrement frappé, ont souligné que beaucoup d’intercommunalités fonctionnaient mal. Mme Catherine Morin-Desailly nous a apporté un début d’explication : il arrive que les habitants, voire les maires de deux communes ne s’entendent pas ! Certes, il existe également des intercommunalités où une belle dynamique se crée, par exemple autour d’un président consensuel. Néanmoins, ce n’est pas le cas partout, beaucoup d’intervenants ont insisté sur ce point.

Madame la ministre, les débats de ce soir nous offrent une solution : il faut des intercommunalités avec un seuil de 40 000 habitants, conçues autour des bassins de vie et des pays ! (Exclamations amusées.) Surtout, pour résoudre le problème des maires qui ne parviennent pas à se mettre d'accord, élisons les présidents des intercommunalités au suffrage universel direct ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Rémy Pointereau. Et supprimons les maires, tant que nous y sommes !

M. Ronan Dantec. Je vois que vous comprenez bien le raisonnement, mon cher collègue ! Et nous pourrions même élire demain les conseillers départementaux à la proportionnelle dans ces grands territoires.

Je pense donc avoir trouvé la solution qui permet d’avancer. Bien entendu, des esprits doivent encore mûrir sur certaines travées, mais vous ne me remercierez jamais assez d’avoir opéré la synthèse entre vous ! (Sourires sur les travées du groupe écologiste.)

Cela dit, ceux qui veulent ne toucher à rien, ou seulement à la marge, délivrent une nouvelle fois un message extrêmement problématique. Comme l’a souligné Mme la ministre, et nous en faisons tous le constat, les fractures s’aggravent. Certains territoires n’ont rien, tandis que d’autres bénéficient d’une manne, liée par exemple à une centrale thermique ou, dans certains cas, à une centrale nucléaire. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) L’absence de répartition des richesses et de solidarité produit un climat anxiogène.

La synthèse que je viens d’esquisser ne sera peut-être pas retenue dès ce soir. Mais elle correspond à ce que ce sera un jour la réalité de notre pays, dans un avenir pas si lointain.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé, pour explication de vote.

Mme Catherine Troendlé. Dans un article, un ancien directeur général des collectivités locales, dont je ne me puis me rappeler le nom, a redessiné notre pays autour de douze à treize régions, de métropoles et de 4 500 intercommunalités, ce qui correspond d’ailleurs, si l’on fait le calcul, au fameux seuil des 20 000 habitants.

La suite de son propos était beaucoup plus grave ; j’espère que Mme la ministre nous rassurera à cet égard. Pour lui, les établissements publics de coopération intercommunale devaient, à terme, être dotés de compétences obligatoires. Or nous défendons tous le principe de la coopérative.

M. Ronan Dantec. Non ! Pas tous ! (Sourires.)

Mme Catherine Troendlé. En tout cas, cher collègue, nous sommes une majorité à défendre le principe selon lequel les transferts de compétences des communes vers les intercommunalités doivent s’effectuer sur la base du volontariat. Les compétences obligatoires signifient donc, à terme, la disparition de nos communes. J’aimerais que Mme la ministre nous rassure et nous convainque que nous ne sommes pas sur cette pente glissante.

Madame la ministre, vous avez évoqué avec maints arguments les nombreux petits EPCI, ruraux, qui n’ont pas les moyens, dont la population est mécontente, etc. Je conclurai simplement sur quelques maîtres mots : il faut avoir confiance dans les élus locaux ; ce sont des gens responsables, des gens de bon sens. (Mme la ministre acquiesce.)

On affirme que certains EPCI n’ont plus les moyens de fonctionner, mais il faut se demander pourquoi ! La baisse des dotations y contribue tout de même.

M. Claude Kern. Exactement !

Mme Catherine Troendlé. Lorsque des EPCI n’ont plus les moyens de fonctionner, par conséquent, il faut faire confiance aux élus pour nouer des rapprochements volontaires. On a parlé de « mariages forcés », qui ne fonctionnent pas. Cela s’est justement produit avec les EPCI qui ont été mis en place récemment. Certains ont été créés dans la douleur. Aujourd'hui, les élus ont besoin de s’apprivoiser, de prendre le temps de souffler un peu.

Madame la ministre, vous aviez annoncé un seuil de 20 000 habitants. Vous proposez aujourd'hui des assouplissements, des dérogations, ce qui prouve bien que, là encore, nous ne pouvons pas avancer à marche forcée.

Par conséquent, moi non plus, je ne pourrai voter votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

M. Gérard Miquel. J’ai une certaine expérience personnelle – une vingtaine d’années ! – en matière d’intercommunalité, comme un bon nombre d’entre nous, mes chers collègues. J’ai beaucoup poussé, dans mon département, au regroupement intercommunal, et il n’est pas trop mal réussi. Cependant, nous nous trouvons aujourd'hui avec de très grandes communautés, en nombre de communes : il faut parfois quatre-vingts communes pour rassembler 40 000 habitants.

Les conseils communautaires comptent plus de cent membres !

M. Bruno Retailleau. Ils sont pléthoriques !

M. Christophe Béchu. Exactement !

M. Gérard Miquel. S’il y a un leader fort sur ce territoire, la communauté fonctionne. Si tel n’est pas le cas, elle devient difficilement gérable ; c’est l’administration qui prend le pas sur les élus et le conseil communautaire devient une chambre d’enregistrement.

J’en viens aux seuils : 20 000 habitants, 15 000 habitants… La France est diverse et les situations sont très différentes. Le seuil de 20 000 habitants ne pose pas trop de difficulté à notre collègue Savary, puisque sa circonscription comprend une grande ville et des zones rurales. Dans certains départements, une densité de population de la moitié de la moyenne nous amènera à créer des communautés relativement grandes et l’on ne pourra pas aller au-dessous de 20 000 habitants. Toutefois, 20 000 habitants, dans mon département, c’est beaucoup. Dans d’autres départements, c’est peu !

Comment trouver une adaptation ? Il me semble que l’on devrait tenir compte de la densité de population d’un territoire départemental. Cependant, la notion de la moitié de la moyenne peut poser des problèmes. Je pense donc que ramener le seuil à 15 000 habitants serait sage.

M. Gérard Miquel. Certains départements rencontreront des difficultés. Je le dis d’autant plus facilement que, dans celui dont je suis l’élu, nous avons réalisé de grandes communautés ; ce n’est pas sans poser quelques problèmes, mais je crois que nous arriverons à les surmonter.

La situation est d’autant plus difficile que nous avons de très petites communes. Sur ce point, une réflexion doit être conduite. Je sais que, sur toutes les travées, on évoque la commune nouvelle, avec le regroupement de deux ou trois petites communes pour mutualiser un certain nombre de moyens. En effet, comment voulez-vous avoir les compétences pour faire fonctionner un secrétariat de mairie dans une commune de cinquante, voire de quatre-vingts habitants ? Cette situation suscite des dépenses qui devraient être mutualisées à une autre échelle.

Pour en revenir au seuil, j’aimerais que l’on trouve une solution médiane qui nous permette de maintenir quelques communautés en territoire rural à un niveau de population qui convienne à l’échelle d’un territoire, en s’adossant tout de même à une commune un peu importante. En effet, si quatre-vingts petites communes se rassemblent sans moyens,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il faut un bassin de vie !

M. Gérard Miquel. … il faut un bassin de vie, en effet.

M. le président. La parole est à M. Alain Joyandet, pour explication de vote.

M. Alain Joyandet. Lorsque la réforme nous a été présentée, j’avais cru comprendre que le seuil de 20 000 habitants avait été défini en corrélation avec le projet de suppression des départements. (Mme la ministre le conteste.) Il s’agissait d’offrir aux communautés de communes un certain nombre de compétences qui étaient auparavant dévolues aux départements.

M. Bruno Sido. Ce n’est pas faux !

M. Alain Joyandet. Puisque la suppression des départements ne semble plus de mise, il n’y a pas de raison de maintenir un tel seuil.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Cela n’a rien à voir !

M. Alain Joyandet. Par ailleurs, madame la ministre, sans reprendre tout ce qui a été dit, nous peinons encore à digérer la fusion des communautés. Dans un certain nombre de territoires se posent des problèmes majeurs ; certaines communautés veulent même « défusionner ». Dans mon département, la Haute-Saône, trois communautés de communes se sont regroupées, rassemblant des personnes qui ne vivent pas du tout ensemble et qui ne partagent pas les mêmes projets. Nous nous retrouvons dans des situations financières très complexes. Nous ne nous en sortons pas !

Je salue néanmoins le fait que vous recherchiez une solution, madame la ministre. Vous avez donc constaté que cela ne fonctionnait pas. Hélas, je crois que la solution que vous nous proposez ne marchera pas non plus !

Vous avez cité des chiffres pour démontrer que ce seuil était pertinent. Dans mon département, sur vingt intercommunalités, seules trois regroupent plus de 20 000 habitants sans difficulté et fonctionnent relativement bien ; cinq pourront bénéficier de la mesure que vous proposez et douze en seront exclues. La raison est très simple : dans un département qui ne compte pas d’importante communauté urbaine, il n’existe quasiment pas d’écart de densité de population. Or il est difficile d’adapter le seuil pour les EPCI dont la densité de population est inférieure à la moitié de la densité moyenne en l’absence d’écart…

Cela signifie que votre « pas en avant », madame la ministre, ne s’appliquera quasiment pas dans mon département, sauf qu’il créera encore plus de confusion au sein des intercommunalités qui s’interrogent et ne vont pas bien, puisque cinq pourront adapter ce seuil et douze n’en auront pas le droit.

Vous ne pouvez pas dire que votre système fonctionne, madame la ministre, alors que tel ne sera pas le cas ! Si vous voulez vraiment instaurer des seuils en corrélation avec la densité de population, il faudrait partir d’une densité de population nationale et prévoir une flexibilité par rapport à la règle générale sur l’ensemble des départements qui se situent en dessous d’un certain seuil de densité.

La sagesse, à partir du moment où les départements sont maintenus, où rien ne vous oblige à créer des intercommunalités de 20 000 habitants et où nous peinons déjà à absorber les dernières fusions serait de laisser les élus locaux un peu tranquilles. Il n’y a aucune urgence à légiférer sur ce seuil !

Il faudrait d'ailleurs nous donner des arguments convaincants sur ce seuil de population, ou sur un autre. Je ne suis nullement convaincu du bien-fondé des 20 000 habitants. Je connais des intercommunalités de 8 000 habitants qui fonctionnent très bien, où la fiscalité n’est pas trop élevée et le nombre d’emplois publics mesuré ; laissons-les tranquilles !

Je suis effaré de constater que certaines intercommunalités de 15 000, 16 000 ou 17 000 habitants qui ont fusionné à partir de petites unités éditent cent cinquante bulletins de salaire par mois ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Je puis vous assurer que, si celles-ci grossissent, il faudra plus de cadres et les salaires augmenteront encore, alors que nous sommes dans une démarche de baisse de la dépense publique.

Je vous remercie d’avoir engagé la réflexion avec nous. De ce point de vue, les dispositions de votre amendement constituent un pas en avant. Cependant, la solution que vous nous proposez n’étant, à mon avis, guère applicable, il est urgent d’attendre et, surtout, de faire confiance aux élus locaux.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Notre collègue Ronan Dantec a une idée absolument géniale…

M. Ronan Dantec. C’est ce qui me semblait aussi ! (Sourires.)

M. Pierre-Yves Collombat. … pour régler le problème des communes : il suffit de les supprimer !

M. Ronan Dantec. Je n’ai pas dit cela !

M. Pierre-Yves Collombat. Ce qu’il oublie et que notre collègue Joyandet rappelle indirectement, c’est que dans les petites collectivités se manifestent un volontariat et une mobilisation citoyenne – les écologistes les adorent par ailleurs –, qui ne se retrouvent pas dans les grandes communes, encore moins dans les intercommunalités, où ce sont des fonctionnaires qui accomplissent le travail. Il suffit de regarder les dépenses de fonctionnement des communes en fonction de leur taille : vous saurez tout de suite où l’on peut faire des économies.

Madame la ministre, vous posez une bonne question. Vous vous demandez pourquoi certains territoires ont l’impression d’être abandonnés. La réponse est simple : c’est parce qu’ils sont effectivement abandonnés ! Ils sont abandonnés par le service public. Je pourrais vous parler de La Poste, du personnel des sous-préfectures, de bien des choses… Ils doivent payer pour recevoir la télévision numérique terrestre quand ils ont fini de payer l’installation des relais de la télévision analogique. Il a fallu qu’ils payent les relais pour le téléphone, et je ne vous parle pas du haut débit ! Oui, ils sont abandonnés !

Vous vous préoccupez de la montée des inégalités. Certes, mais l’inégalité est organisée structurellement pour les petites collectivités. Comment se fait-il que, dans la dotation globale de fonctionnement, un habitant d’une commune de moins de 500 habitants rapporte deux fois moins qu’un habitant d’une commune de 200 000 habitants ?

M. Jean-François Husson. C’est logique !

M. Pierre-Yves Collombat. Certes, ils auraient des charges de centralité.

M. Bruno Sido. Ce n’est pas vrai !

M. Pierre-Yves Collombat. Nous, nous avons des charges de ruralité !

Comment se fait-il que, pour la répartition du fonds de péréquation intercommunale, on ait inventé de magnifiques coefficients logarithmiques, parfaitement inégalitaires pour les petites collectivités ? C’est par une mobilisation de l’État que l’on pourra répondre à cette déshérence progressive de nos intercommunalités.

Vous avez une méthode qui ne coûte pas cher, madame la ministre, c’est de les regrouper, parce que le problème de fond, c’est qu’il faut donner l’impression de faire des réformes, mais sans que cela coûte quoi que ce soit… Est-ce que 20 000 habitants répartis sur 400 kilomètres carrés géreront mieux, seront plus riches, plus efficaces, mieux organisés que 5 000 habitants sur 100 kilomètres carrés ? Permettez-moi d’en douter !

Vous nous avez expliqué qu’il existait une taille critique pour les régions, et vous nous dites qu’il en va de même pour qu’une intercommunalité puisse vivre. (Mme la ministre proteste.) Toutefois, une intercommunalité vit sur un territoire ; elle vit avec des communautés !

Des seuils de 20 000 habitants, de 15 000 habitants ou de 5 000 habitants, ce sont bien des tailles critiques ; ce sont des tailles à partir desquelles il devient intéressant de fonctionner. Donc, le pari, c’est que plus c’est gros, plus c’est efficace. Eh bien, c’est absolument faux.

Quant à miser sur l’intuition préfectorale, qui saura juger, dans chaque cas, s’il y a bien une péninsule ou une altitude moyenne qui correspond à ce que dit le texte… Vous me permettrez de penser, pour avoir vécu l’épisode précédent, que ce n’est pas ainsi que cela se passe !

Un certain nombre de préfets – pas tous ! – veulent créer des intercommunalités les plus larges possible, car ils pensent qu’ainsi ils récolteront des bons points… Plus ces intercommunalités seront larges, moins elles seront nombreuses, et plus ils seront bien vus.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. C’est faux !

M. Pierre-Yves Collombat. Peut-être, madame la ministre, mais c'est comme cela que c’est ressenti ! De grâce, laissez les communes agir en fonction des besoins, et certaines intercommunalités deviendront forcément plus importantes. On le voit bien, le mouvement, lancé dans les années 2000, s’accélère. Ce n’est pas avec les mesures que vous proposez que l’on ira plus vite ; il faut laisser le mouvement se déployer.

Les communes existent depuis 1789 ; donnez-leur le temps de se moderniser pour s’adapter complètement à notre époque.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Lenoir. Je soutiens sans réserve la position de la commission des lois, qui a supprimé tout seuil. Je me permets d'ailleurs de rappeler que la seule fois où la référence à un seuil est apparue, c'est dans la loi de 2010, avec une limite de 5 000 habitants. Même la loi Chevènement, contrairement à tout ce qui a pu être dit, ne fixait pas de seuil à 3 500 habitants. Aujourd'hui, il faut absolument renoncer à toute idée de seuil, contrairement à ce que prévoit le projet de loi du Gouvernement.

Au préalable, je tiens à dire combien je suis consterné de lire sur certains visages un sentiment de commisération quand on parle d’intercommunalités dans le monde rural.

Historiquement, après le vote de la loi de 1992, c’est dans le monde rural que la coopération s’est développée sous toutes ses formes, notamment dans le domaine économique et, partant, agricole. (Mme Catherine Troendlé approuve.) Je pense à l’ouest et à l’est de la France. Il aura fallu attendre 2010 pour contraindre les communes des grandes agglomérations, notamment en Île-de-France, à se regrouper en intercommunalités. Le monde rural n’a donc aucune leçon à recevoir !

Ensuite, je ne voudrais pas être désagréable, madame la ministre, mais le tableau imprimé sur une feuille recto verso en partie manuscrite qui circule depuis tout à l'heure et que l’on pourrait appeler « étude d’impact » me laisse quelque peu songeur. Sur ce sujet essentiel, dont nous débattons depuis des mois, il eût été convenable de fournir à la représentation nationale un document étayé, qui aurait exposé les attendus de votre projet.

Pour l’Orne, un département que je connais bien puisque je le représente depuis longtemps, hier à l'Assemblée nationale, aujourd’hui au Sénat, je conteste vos chiffres. Actuellement, nous avons 29 intercommunalités. Les trois principales représentent pratiquement la moitié de la population du département, qui compte un peu moins de 300 000 habitants. En appliquant le seuil de 20 000 habitants, il y aurait sept intercommunalités supplémentaires, ce qui porterait leur nombre total à 10, au lieu de 29.

J’aimerais vous rappeler, mes chers collègues, un souvenir récent. Il y a trois ans – j’étais alors jeune, ou plutôt nouveau, sénateur (Sourires.) –, nous avons eu un débat qui fut meurtrier pour nos rangs. La loi ne prévoyait pourtant l’organisation de nouvelles intercommunalités qu’à partir d’un seuil de 5 000 habitants. Les dégâts ont été considérables. Avez-vous oublié les propos que vous avez tenus non seulement dans cet hémicycle, mais aussi lors des campagnes électorales auxquelles vous avez participé et au sein des commissions départementales de coopération intercommunale ? Vous aviez dénoncé les dispositions de la loi de 2010 ; aujourd’hui, vous faites bien pire, en faisant fi de tout bon sens !

En effet, le bon sens commande de ne pas fixer de seuil. Il faut faire confiance à l’intelligence des territoires. Nous, les élus, connaissons la taille de nos bassins de vie ; nous savons sur quels territoires nous pouvons travailler de façon efficace. Nous n’avons pas besoin de loi qui nous dicte notre façon de nous organiser.

Il y aura des différences, parce que la France est diverse. Respectons cette diversité ! Va-t-on aujourd'hui définir le périmètre des zones qui auront le droit de produire des fromages, pour faire référence à un illustre propos du général de Gaulle sur la spécificité française ? Non ! Faites confiance aux territoires et changez le regard que vous portez sur eux.

Je conclurai avec Honoré de Balzac, à qui j’ai fait référence au début de mon propos : « Un sentiment de commisération se peignit sur sa figure, et il jeta un regard de bienveillance sur les deux filles ».

Mme Marylise Lebranchu, ministre. En plus, ils sont machos !

M. Jean-Claude Lenoir. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, il serait bon que cette disposition d’esprit inspire votre action, pour le bonheur de nos territoires ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. La question des intercommunalités soulève beaucoup de passions, probablement à juste titre.

Madame la ministre, les alinéas 2, 3 et 4 du I de votre amendement me conviennent parfaitement, puisqu’ils reprennent exactement la loi de 2010 ; seul le premier alinéa pose problème. C’est en effet cette loi qui a, pour la première fois, introduit un seuil de 5 000 habitants. Avant, il n’y en avait aucun. Un premier pas a été fait. Faut-il maintenant passer de 5 000 à 20 000 habitants ? La marche est haute !

Dans le département qui m’a élu, j’ai participé à de nombreuses réformes, qui m’ont fait perdre – c'est tout à fait normal ! – beaucoup de voix.

M. Bruno Sido. Vous avez été toujours réélu !

M. Michel Mercier. J’ai bien vu que mes concurrents voulaient eux aussi traiter de ces sujets. J’ai pensé qu’il valait mieux que je m’en occupe moi-même, pour obtenir de meilleurs résultats !

J’ai appliqué la loi de 2010 à peu près partout dans le Rhône. Sur le territoire où j’habite, nous avons fait une communauté de commune de 53 000 habitants, en milieu rural, qui couvre 579 kilomètres carrés, soit une superficie plus vaste que la métropole de Lyon !

Nous ne savions pas si cela allait marcher. Puisqu’il n’y avait pas de seuil, rien ne nous obligeait de faire une communauté de communes aussi large. Il importe peu de fixer un seuil, qu’il soit de 5 000, de 10 000 ou de 12 000 habitants. Ce qui compte, c'est que nous avons nous-mêmes pris la décision.

Madame la ministre, votre amendement est sensationnel : il ne s’appliquerait à aucun EPCI du département du Rhône, puisqu’ils sont tous situés en zone de montagne. Je pourrais donc le voter sans problème, puisqu’il serait sans conséquence pour mon département.

Néanmoins, permettez-moi de vous dire que le seuil de 20 000 habitants est devenu un chiffon rouge. Il faut trouver d’autres critères que la simple fixation d’un nombre d’habitants. Notre assemblée n’acceptera pas de relever le seuil de 5 000 à 20 000 habitants. C'est certain, une loi sera votée, peut-être pas ici, mais à l'Assemblée nationale. Toutefois, il faut aussi que les choses se passent bien sur le terrain. On ne peut pas en permanence changer les règles, mettre à feu et à sang les élus locaux, qui ne voudront jamais appliquer ce seuil de 20 000 habitants – certains voudront faire plus, d’autres moins.

Madame la ministre, vous avez commencé à faire de sages propositions. On ne trouvera probablement pas de solution ce soir, mais il faut continuer à travailler à cette question. Je le redis, le seuil de 20 000 habitants est devenu le symbole d’une gestion technocratique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Ce n’est pas exact !

M. Michel Mercier. Je ne vous dis pas que c'est exact, mais que c'est ressenti ainsi !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Pas partout !

M. Michel Mercier. Certes, puisque ma communauté de communes compte 53 000 habitants. Laissez donc les collectivités s’organiser, et vous verrez qu’elles feront plus.

M. Michel Mercier. Toutefois, ne les obligez pas à appliquer un seuil.

Dans mon département, nous avons fait notre communauté de communes parce que nous l’avons voulu, et c’est la seule qui fonctionne. Nous ne sommes ni en avance ni en retard, nous nous sommes simplement mis d’accord.

Je pense très honnêtement qu’il n’est pas possible de faire des réformes territoriales en fixant des seuils. Si les intercommunalités récupéraient une nouvelle délégation de compétence, même de moindre importance, on pourrait peut-être dire qu’il est nécessaire d’atteindre le seuil de 20 000 habitants pour l’exercer. Néanmoins, nous n’avons rien de plus, à part les aires d’accueil des gens du voyage, qui ne suffisent pas à justifier un nouveau seuil. À un moment donné, quand on a écouté tout le monde et que l’on voit que le seuil de 20 000 habitants ne passe pas, il faut chercher une autre solution !

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour explication de vote.

M. Alain Néri. On ne fait pas de la coopération intercommunale pour le plaisir ! Les élus locaux font des intercommunalités, car ils se rendent compte qu’ils doivent se regrouper pour faire ce qu’ils ne peuvent réaliser seuls. C’est aussi simple que cela. Dans un premier temps, on se regroupe à trois ou quatre communes. Dans mon territoire, nous avions besoin d’une crèche, ce que ne pouvait faire une commune de 1 500 ou 2 000 habitants à elle seule. Nous avons donc créé une intercommunalité de 7 000 habitants pour pouvoir la construire.

Pour que nos communes se développent, elles doivent répondre aux besoins de nos concitoyens, qui ont des attentes. Qu’avons-nous à leur offrir quand ils viennent s’installer dans nos communes ? Nous avions une école, un collège à proximité, une crèche. Ils voulaient une piscine, ce qui n’est pas rien. Pour la créer, nous avons dû fusionner trois communautés de communes, ce qui n’est pas allé sans poser certaines difficultés, car elles n’avaient pas toutes les mêmes compétences. Cette nouvelle communauté représente un bassin de vie.

Madame la ministre, l’amendement défendu par notre collègue Kaltenbach ne vise pas à remettre en cause fondamentalement la notion de taille critique, indispensable pour mener à bien un certain nombre de réalisations. Cet amendement, dont les dispositions reposent sur une base de 15 000 habitants, est de bon sens.

M. Bruno Sido. Ça ne change rien !

M. Alain Néri. Nous avons également proposé, ce qui devrait satisfaire nos collègues qui ne veulent aucun seuil, que ce nombre puisse être abaissé par le préfet, sur demande motivée de la commission départementale de coopération intercommunale, c’est-à-dire sur proposition des élus. On redonnerait ainsi de la force de proposition aux élus, ce qui renforcerait la démocratie.

L’amendement a également pour objet de prévoir que les conditions climatiques et géographiques et la dispersion de l’habitat soient prises en compte. Nous pourrions, me semble-t-il, trouver un consensus sur les propositions qui figurent dans cet amendement.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, je vous demande de faire un geste, d’écouter ce que les uns et les autres ont dit tout au long de ce débat, avec des nuances : réalisons ensemble, dans l’intérêt de nos populations, ce que nous ne pouvons pas faire seuls.

Nous nous rendons bien compte qu’il faut une taille critique. Toutefois, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, puisque le seuil de 20 000 habitants semble cristalliser les oppositions, pour des raisons diverses et variées – pas toujours pour des motifs de fond, du reste –, faites un geste ! Soutenez l’amendement présenté par M. Kaltenbach, qui vise à accorder un rôle important à la commission départementale de la coopération intercommunale, la CDCI, et à prendre en compte les réalités du terrain, notamment les conditions climatiques et géographiques.

Je suis sûr que vous permettriez ainsi à cet amendement, qui va dans l’intérêt des communes, d’être adopté. (M. le secrétaire d'État manifeste son scepticisme.)

M. François Marc. Sûrement ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Néri. Monsieur le secrétaire d'État, essayons avant de nous avouer vaincus ! Dès lors, je vous demande, ce soir, de faire ce geste en direction de la représentation nationale et d’écouter la voix du Sénat, qui est celle des communes de France. (Bravo ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. Alain Houpert. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. J’interviens à un moment où tout ou presque a déjà été dit. De l’exposé de Mme la ministre, il ressort beaucoup d’habileté et, d'ailleurs, beaucoup de conviction.

M. Jean-Claude Lenoir. C’est vrai !

M. Bruno Sido. Cependant, je voudrais lui adresser quelques remarques que personne ne lui a encore faites. Ce sera ma valeur ajoutée… (Sourires.)

Je me méfie des dérogations et des adaptations. J’en veux pour preuve celles qui étaient prévues pour la création des nouveaux cantons : vous vous souvenez des zones de montagne, des zones peu denses, des obstacles géographiques, du « plus ou moins 20 % »… Finalement, il se trouve que, dans mon département, et il n’est pas le seul à être dans ce cas, le plus petit canton est urbain et le plus grand rural.

M. René-Paul Savary. Chez moi aussi !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Ainsi que chez moi !

M. Bruno Sido. J’ai déposé un recours devant le Conseil d'État, qui m’a donné tort. Depuis lors, je me méfie beaucoup de la parole ministérielle prononcée dans l’hémicycle, ce qui est grave.

En effet, il nous avait été dit, assuré, répété que la population pouvait être inférieure de 20 % à la moyenne nationale dans les cantons ruraux, et supérieure de 20 % à cette moyenne dans les cantons urbains. (Philippe Kaltenbach s’exclame.) Monsieur Kaltenbach, vous ne pouvez pas le nier ! Or il se trouve que, dans mon département, c’est le contraire. Du reste, tout dépend du degré d’appréciation de la CDCI, du préfet et du Conseil d’État…

On nous cite les zones de montagne, mais celles-ci sont définies par la loi et ne posent donc pas de problème ! En revanche, les zones intermédiaires ne sont pas définies par la loi, et les zones hyper-rurales ne le sont pas davantage.

Comme M. Joyandet, j’ai examiné le tableau de Mme la ministre, qui est très intéressant et très instructif.

Dans les départements hyper-ruraux, la densité de population inférieure à la moitié de la densité moyenne du département ne constitue pas un critère pertinent. En Haute-Marne, une seule communauté de communes remplirait ce critère ! Et, sur nos seize communautés de communes, qui regroupent toutes plus de 5 000 habitants, puisqu’elles ne sont ni en zone de montagne, ni en zone intermédiaire, ni en zone hyper-rurale, celles-ci n’étant pas définies, dix devront fusionner pour atteindre le seuil de 20 000 habitants et neuf, soit une de moins, pour arriver à 15 000 habitants ! Autant dire que l’adoption de l’amendement présenté par M. Kaltenbach ne changerait rien.

L’amendement du Gouvernement tendrait à répondre à un certain nombre de problèmes si son dispositif était appliqué avec beaucoup de souplesse, avec beaucoup de flexibilité et sur la base d’instructions aux préfets adéquates. Je ne doute pas que cela sera le cas, mais nous savons désormais que le Conseil d'État est extrêmement rigoureux en la matière – je le dis sans porter de jugement de valeur.

Madame la ministre, la conclusion de votre propos était, de mon point de vue, très pertinente : il existe des zones riches, qui connaissent une dynamique, et des zones pauvres, qui sont en déshérence et qui n’arrivent pas à se ressaisir. Au fond, vous le savez bien, la dynamisation des zones pauvres est une question de moyens. Allons les chercher là où ils sont, quitte à les prendre à assiette constante, là où il y a une vraie dynamique, là où ils sont trop importants.

Madame la ministre, je partage votre point de vue. Si vous promettez une incitation financière aux intercommunalités situées dans des zones en déshérence, croyez bien qu’elles se regrouperont !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote. (M. François Marc s’exclame.)

M. Jean-Pierre Grand. Les dispositions de cet amendement nous permettent au moins de nous expliquer longuement. On le constate, sujet après sujet, ce projet de loi pose plus de problèmes qu’il n’en résout.

Madame la ministre, je veux vous communiquer une information qui date de ce matin. J’ai participé à une réunion des maires de la métropole de Montpellier, consacrée à l’élaboration de notre budget pour 2015. Il est apparu qu’une petite commune comme la mienne, qui compte 18 000 habitants, ne pourra plus investir que 900 000 euros dans la voirie, contre 2,7 millions d’euros par an jusqu’à présent – et uniquement dans le traitement de surface. Naturellement, cela aura des conséquences dramatiques sur l’emploi et les entreprises ! (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)

Vous le savez, j’ai été favorable à la transformation de Montpellier en métropole. J’ai été un ardent défenseur de la belle connexion entre les futures grandes régions et la métropole, notamment sur le plan économique ; M. le président de la commission s’en souvient.

Toutefois, aujourd'hui, nous sommes confrontés à la réalité de textes flous, peu connus des élus et peut-être même du Gouvernement, mais parfaitement maîtrisés par l’administration centrale, qui en est, en fait, l’auteur. Je l’ai très clairement dit au président de la métropole de Montpellier, qui est mon ami et que je soutiens : nous allons porter un fardeau qui n’est pas le nôtre.

J’en reviens à l’amendement du Gouvernement, qui vise à fixer un seuil minimal de 20 000 habitants pour la création des EPCI. Il se trouve que ma commune – toujours elle ! – fait partie d’une intercommunalité depuis cinquante ans. Un demi-siècle, ce n’est pas rien ! Nous avons donc de l’expérience. Pour présider cet EPCI depuis trente-deux ans, je sais ce qu’est l’intercommunalité.

Comme vous le savez, j’ai été élu sénateur en septembre dernier. Lors de ma campagne, quelque chose m’a interpellé : les maires ruraux, avec qui je n’avais jamais abordé le fond du sujet, ne cessaient de me parler de ce seuil de 20 000 habitants pour les intercommunalités, ce qui m’a rendu curieux.

Mon département de l’Hérault compte vingt-deux intercommunalités, dont dix regroupent moins de 20 000 habitants. J’ai compris, en étudiant le territoire, en parcourant ses différentes parties, ses vallons et ses monts, que l’addition nécessaire pour parvenir à 20 000 habitants impliquerait des choix d’une incohérence absolue.

Il est bien beau, lorsque l’on passe à la télévision, de présenter les élus municipaux comme des personnes formidables, avec des trémolos dans la voix ! Ce qu’il faut, c’est véritablement respecter les élus municipaux et traduire cette considération dans les textes. Pour ma part, je garde à l’esprit le discours qu’a prononcé le Président de la République, l’an dernier, devant les maires de France. Sauf que ses propos n’ont pas été suivis d’effet… Madame la ministre, comme d’aucuns l’ont dit avant moi, vous devez aujourd'hui faire confiance aux maires de France.

Certains problèmes nous viennent à l’esprit. Notre collègue de la Marne a ainsi expliqué que l’intégration, dans une agglomération ou une métropole, d’une commune située à la limite de celle-ci, parce que le préfet l’appelle de ses vœux, pourrait faire s’effondrer le château de cartes. J’ai eu l’occasion d’observer cette même difficulté dans mon propre département.

Très franchement, madame la ministre, ne consacrons pas ce seuil de 20 000 habitants ! Cela ne bouleversera ni votre politique ni la France – ce seuil pourrait faire plaisir à la Cour des comptes, mais ce n’est pas le sujet qui nous préoccupe en priorité… (M. François Marc s’exclame.)

Laissons aux communes la liberté de s’organiser, conformément à la loi municipale de 1884, que nous pouvons, ce soir, faire respecter ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Charles Guené, pour explication de vote.

M. Charles Guené. Je veux tout d'abord saluer la volonté de Mme la ministre de résoudre en quelque sorte la quadrature du cercle. En réalité, nous le voyons bien, nous hésitons entre ne pas forcer les élus à aller au-delà du raisonnable et ne pas bloquer l’évolution de l’intercommunalité. En fait, entre ces deux options, il faudrait que nous trouvions une solution médiane.

Madame la ministre, j’ai examiné avec attention votre proposition, qui dénote votre souci de vous rapprocher de nous. Malheureusement, je n’arrive pas à y trouver ce que j’y cherche.

Je pense, tout d'abord, à l’adaptation du critère de densité. Comme Bruno Sido vient de vous le dire, dans notre département de la Haute-Marne, ce critère ne fonctionne pas. Dans mon secteur, la densité est de quinze ou vingt habitants au kilomètre carré.

Mon intercommunalité regroupe d'ores et déjà cinquante-quatre communes. Comme l’évoquait notre collègue Gérard Miquel, le président d’un tel EPCI doit avoir un minimum de charisme ! Or, avec la loi sur le non-cumul, les parlementaires ne pourront plus occuper cette fonction. Qu’en sera-t-il quand, pour réunir 20 000 habitants, notre intercommunalité comptera quelque 110 communes ?

M. Bruno Sido. Voilà !

M. Charles Guené. Pis, j’avais anticipé bien en amont l’application du seuil de 5 000 habitants, en réunissant trois intercommunalités dès 2011. Nous avions alors pu choisir nos partenaires, et nous avions abouti à un coefficient d’intégration fiscale de 0,8, ce qui est considérable. Or ce coefficient n’est que de 0,2 dans la commune voisine, avec laquelle mon intercommunalité pourrait avoir à se marier.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh oui !

M. Charles Guené. On va donc casser vingt ans d’efforts et de rationalisation, sur lesquels on ne devrait pas revenir !

J’en viens maintenant à la possibilité d’adaptation du seuil que comporte le dispositif de votre amendement, madame la ministre. Comme notre rapporteur général, je ne comprends pas très bien sur quoi porte cette possibilité : s’agit-il d’adapter le chiffre ou d’adapter dans le temps ? En tout état de cause, au regard de l’article 60 de la loi de réforme des collectivités territoriales, il paraît difficile de prévoir une adaptation temporaire. Au bout d’un moment, le préfet nous dira que la fête est finie et qu’il faut nous lancer ! On voit bien qu’il y a là un problème.

Comme je vous l’ai dit, je pensais passer par la petite porte, mais, précisément parce que j’ai fait preuve d’anticipation, je me retrouve coincé, sans porte de sortie.

On pourrait trouver d’autres solutions, comme celle de nos amis socialistes. Pourtant, honnêtement, un seuil à 15 000 habitants n’est pas meilleur ! Si j’étais méchant, je dirais même qu’il témoigne d’une certaine méconnaissance du sujet… En effet, à certains endroits, 20 000 habitants, ce n’est pas assez et, à d’autres, 15 000 habitants, c’est encore trop ! Qu’on se le dise.

En réalité, c’est de temps que nous avons besoin. En effet, comme l’a déclaré notre collègue Alain Houpert, nous avions déjà réalisé une révolution, il faut tout de même le dire, avec la fixation d’un seuil à 5 000 habitants. Madame la ministre, je pense que votre intention est bonne, mais que, à vouloir aller trop vite, on risque de courir à l’échec.

En outre, je veux vous rappeler le sort des municipalités cantonales, créées par la Constitution de l’an III : les difficultés à se déplacer ayant entraîné leur échec, elles ont dû être supprimées en l’an VIII. Mais comme, à l’époque, il n’y avait pas de fiscalité, ce recul n’était pas très grave. Il n’en irait pas de même aujourd'hui.

Pour conclure, la seule façon, me semble-t-il, de régler le problème, qui ne se pose, en réalité, que dans les zones rurales et hyper-rurales, c’est la commune nouvelle (M. le rapporteur et M. Bruno Sido approuvent.), et non l’intercommunalité forcée.

Entre-temps, on peut même se servir des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, les PETR et, progressivement, territorialiser la fiscalité – M. Savary en a parlé – et les financements. Au demeurant, je suis sûr que M. Morvan ne manque pas d’idées sur ces questions… (Sourires.)

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, et tant que vous n’aurez pas trouvé la martingale – je reconnais qu’elle est difficile à imaginer –, je suivrai la voie de la commission des lois, c'est-à-dire celle de la confiance dans les élus. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

M. Jean-François Husson. En un peu plus de deux ans, nous sommes allés de renoncements en reniements ! Nous l’avons déjà souligné dans le cadre de la discussion générale, mais nous le voyons encore aujourd'hui : nous sommes en plein dans ce bouleversement permanent, d’où nul cap, nulle vision n’émergent. Ainsi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous nous proposez ce soir des orientations différentes de celles que vous portiez vous-mêmes voilà quelques mois.

Néanmoins, je vais profiter de ces quelques instants pour vous proposer de prendre connaissance d’une démarche et peut-être, demain, de la soutenir.

Il s’agit d’une démarche inédite, qui est menée de manière exemplaire, dans la collégialité, au sein d’un département français ayant choisi, au début des années deux mille, de se doter de deux schémas de cohérence territoriale, ou SCOT. L’un d’entre eux regroupait 30 intercommunalités et 462 communes ; il compte aujourd'hui 476 communes au travers de 20 intercommunalités et a été adopté à l’unanimité des territoires.

Je serais tenté de vous proposer de vous inspirer de cette démarche émanant des territoires, de la France d’en bas ! Elle vous est apportée, non pas comme une dot, mais comme un objet méritant, selon moi, intérêt et considération, mais aussi, peut-être, soutien de votre part.

Pourquoi tenir de tels propos ? Comme bon nombre de mes collègues, je ne partage pas l’idée de fixer un seuil. En revanche, je suis convaincu que nous avons l’obligation de permettre aux territoires qui souhaitent s’engager dans cette voie, et cela indépendamment de leur taille ou de leur organisation, de coopérer dans un certain nombre de domaines, en refondant les dispositifs de dotation, de soutien, d’incitation et d’intéressement.

J’irai encore un peu plus loin. Toujours dans notre département, qui regroupe près de 600 000 habitants, nous travaillons actuellement, à raison d’un euro par habitant, réparti de manière équitable sur le territoire – hyper-ruralité, ruralité, secteurs péri-urbains ou cœurs d’agglomération –, sur le développement économique ou la question des mobilités et des déplacements, que ce soit au travers d’études ou de stratégies foncières. Nous allons notamment engager des travaux sur les ressources et la fiscalité, ou encore sur un schéma d’organisation des services publics et marchands.

Nous entendons livrer ce travail à la commission départementale de coopération intercommunale, car l’organisation des territoires en intercommunalités ou en bassins de vie nous apparaît comme un moyen – peut-être pas le seul, certes – de travailler en articulation avec ces territoires, notamment en mettant à disposition des moyens humains et financiers. Ainsi, nous demeurons dans des échelles pertinentes pour mener à bien un travail de coopération et de proximité !

En définitive, vous l’avez compris, j’en appelle au bon sens et à la reconnaissance des actions menées par les élus sur le territoire.

Selon un adage, on ne fait pas le bonheur des gens malgré eux ! Étant Nancéen et Lorrain, j’y ajouterai cette devise du roi Stanislas : « Le vrai bonheur consiste à faire des heureux ». C’est pourquoi, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, je vous invite à écouter le peuple et les élus, à prendre en compte leurs demandes et avis. Dès lors, peut-être nous aiderez-vous à construire un bonheur territorial !

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Morisset. Beaucoup a déjà été dit. Toutefois, je voulais attirer votre attention sur un point, madame la ministre, vous qui connaissez bien les départements, en particulier les ruraux, ainsi, me semble-t-il, que l’histoire écrite par chaque territoire, chacun à sa façon, dans le cadre des premières lois sur l’intercommunalité.

Il ne faut pas l’oublier, seulement deux ans se sont écoulés, pendant lesquels un travail important a été effectué et de nombreuses réunions se sont tenues. Les élus gardent en mémoire l’investissement qui a été le leur à cette occasion et, à titre personnel, je ne parviens pas à comprendre pourquoi vous voulez, par la loi, mettre tous les territoires sur un pied d’égalité en imposant ce seuil de 20 000 habitants.

Pour tenter de vous convaincre, je mettrai en avant l’exemple de mon département, celui des Deux-Sèvres, qui compte 400 000 habitants. Le nombre des intercommunalités y est passé de 26 à 13, et, pour cela, les élus n’ont pris en compte aucun seuil. En effet, s’ils s’étaient tenus au seuil de 5 000 habitants, ils auraient tout aussi bien pu conserver les 26 intercommunalités ! Il faut donc déjà se rappeler combien ils sont nombreux à s’être investis.

Sur les treize intercommunalités restantes, cinq sont des groupements de taille importante, correspondant à des agglomérations autour des grandes villes, et huit sont, au contraire, situées en territoire rural, sur des distances atteignant parfois 110 kilomètres et avec un nombre de communes significatif, compris entre quarante et cinquante.

On ne peut pas ignorer qu’une intercommunalité a vocation à répondre à des besoins de proximité, à permettre une écoute de la population, à mettre à sa disposition un certain nombre de services. Si nous devions retenir ce seuil de 20 000 habitants, les huit intercommunalités précédemment citées seraient tenues de rejoindre des communautés d’agglomération importantes.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez montré une étude d’impact. Je crois qu’il en faudrait une par département ! Cela vous permettrait de faire un certain nombre de découvertes. Vous constateriez par exemple, dans le cas du département des Deux-Sèvres, que l’application du seuil contraindrait des intercommunalités de 16 000 habitants à rejoindre de grandes intercommunalités de 110 000 habitants. Vraiment, nous faisons fausse route en maintenant ce seuil !

Nous vivons l’intercommunalité chacun à notre façon. Les élus se sont beaucoup investis. Il me semble donc que vous devez les écouter, et cela, quelle que soit leur couleur politique. Des élections auront lieu dans deux mois et, dans de nombreux territoires, on se plaint déjà de ne pas comprendre grand-chose aux nouveaux cantons, dont le découpage ne respecte souvent pas les intercommunalités. Les maires ont besoin d’être rassurés. Il ne faut donc pas trop les traumatiser en les obligeant à organiser de nouvelles réunions.

Enfin, face au message permanent selon lequel il faut être dans de grandes structures pour réaliser de grands projets, je prendrai de nouveau l’exemple du département des Deux-Sèvres. Quelles communautés de communes y ont le plus fort coefficient d’intégration fiscal ? Ce sont souvent, non pas les intercommunalités importantes, mais les intercommunalités des zones rurales ! En effet, elles mettent de plus en plus de moyens en commun et, surtout, elles instaurent des offres de services correspondant aux souhaits des habitants. Leur regroupement dans de grandes structures entraînerait donc une forte déperdition d’énergie.

Par conséquent, madame la ministre, écoutez les élus, notamment ceux des zones rurales. Écoutez toutes les structures qui vous ont lancé ce message. Quant à moi, je partage le point de vue de la commission, consistant à ne pas maintenir de seuil dans le présent projet de loi.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Compte tenu des explications fournies par les uns et les autres, nous pourrions peut-être passer au vote ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Mme la ministre a exprimé l’avis du Gouvernement de manière très claire et convaincante, en tout cas à mes yeux. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.) Plusieurs d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont reconnu la conviction dont elle a fait preuve, et que je partage avec elle.

M. Jean-François Husson. Vous êtes donc deux !

M. André Vallini, secrétaire d'État. Nous sommes un peu plus nombreux que cela en France, monsieur le sénateur !

M. Pierre-Yves Collombat. Cela, nous le verrons lors des élections !

M. André Vallini, secrétaire d'État. Marylise Lebranchu et moi-même rencontrons aussi de nombreux élus. D’ailleurs, comme vous, nous assistons en ce moment à des cérémonies de vœux dans nos départements. Je puis vous assurer que, dans le mien en Isère, de nombreux élus jugent nécessaire d’aller au-delà du seuil actuel de 5 000 habitants.

En réaction aux différents propos tenus, je tiens simplement à lire quelques extraits d’un document dont je ne suis pas l’auteur : « La faible densité de population dans l’hyper-ruralité impose des efforts plus conséquents qu’ailleurs pour constituer des intercommunalités disposant d’une masse critique suffisante, tant en matière d’ingénierie que de capacités d’action, de représentation de l’hyper-ruralité et d’arbitrage. […] Sauf exception, les EPCI de l’hyper-ruralité ne disposent pas aujourd’hui de la taille critique nécessaire, et il revient à l’État […] de mettre ses interlocuteurs en capacité. »

Ce constat est celui d’Alain Bertrand (Exclamations.), sénateur de la Lozère et auteur d’un rapport remarquable et remarqué sur l’hyper-ruralité,…

M. Jean-François Husson. Dont nous avons débattu !

M. André Vallini, secrétaire d'État. … qui, dans ce même document, propose de fixer par la loi, au moins pour les territoires hyper-ruraux, un seuil minimal de 20 000 habitants.

Par ailleurs, j’ai beaucoup apprécié les propos du sénateur Yannick Botrel et je me contenterai donc de les reprendre. Mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRC, vous qui êtes si attachés à l’existence des communes nées de la Révolution française – mais nous sommes toutes et tous, ici, très attachés aux communes, qui font partie de l’ADN de la République –,…

Mme Cécile Cukierman. Elles sont surtout le lieu de la démocratie !

M. André Vallini, secrétaire d'État. … sachez que la meilleure façon de les sauvegarder, de justifier leur existence dans les années et les décennies à venir, c’est, comme l’a indiqué Yannick Botrel, de disposer d’intercommunalités assez puissantes.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Plus les intercommunalités seront fortes et grandes, plus les communes, notamment les plus petites, auront leur raison d’être ! (Marques de scepticisme sur les travées de l’UMP et du groupe CRC.)

Mme Cécile Cukierman. L’argument ne suffira pas, monsieur le secrétaire d’État !

M. le président. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il est presque minuit. Je vous propose de prolonger nos travaux jusqu’au vote sur l’amendement n° 1105, puis de lever la séance.

Il n’y a pas d’observation ?...

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le Sénat ne s’engagera pas avec vous dans une sorte de discussion de marchands de tapis. Vous avez bien compris que, pour nous, le problème réside, non pas dans la quotité du seuil, mais dans le principe même consistant à jouer sur ce dernier pour enclencher un nouveau processus de regroupement des intercommunalités existantes. Notre débat est politique ; il n’est pas arithmétique !

Nous comprenons tous vos objectifs. Vous les avez rappelés en citant le rapport de notre collègue Alain Bertrand. Il est vrai que, dans l’absolu, il faut atteindre une certaine dimension pour disposer d’une masse fiscale suffisante, permettant de mettre en œuvre des services à la population, ainsi que d’une administration suffisamment étoffée, avec, à sa tête, une direction faisant le poids. Nous le comprenons bien. Dans nos départements, nous avons nous-mêmes animé le processus de regroupement des intercommunalités ou nous y avons participé.

Néanmoins, à côté de cet objectif, tout à fait estimable, que vous cherchez à atteindre, d’autres éléments sont dignes d’être pris en compte. D’ailleurs, je le constate, vous-mêmes avez compris, depuis l’adoption de ce projet de loi par le conseil des ministres le 18 juin dernier, que le caractère contraignant du dispositif que vous aviez envisagé était excessif, puisque vous nous proposez aujourd'hui des correctifs.

Je salue cet effort que vous faites dans notre direction, mais vous restez en quelque sorte prisonnier de votre raisonnement initial, selon lequel il faudrait relancer le processus de regroupement des intercommunalités à partir d’un seuil de population plus élevé. C’est cela que nous contestons, sur de nombreuses travées.

L’effort que vous réalisez vise à ne pas déstabiliser les groupements de communes récemment constitués ; la plupart d’entre eux se sont constitués cette année, en réaction à la nouvelle direction prise après les élections municipales d’avril dernier. Donner dès 2015 un coup de boutoir latéral à ces groupements de communes en adoptant une nouvelle carte départementale de l’intercommunalité serait de nature à perturber profondément leur fonctionnement et à leur faire renoncer aux projets qu’ils pourraient être en train de concevoir sur la lancée de leur constitution. Vous avez raison de vouloir éviter cet impact négatif.

Par ailleurs, dans le monde rural, il faut être très attentif à ne pas forcer la constitution d’intercommunalités réunissant des territoires si vastes que le sentiment d’appartenance à une communauté ne pourrait pas s’y développer, ou en tout cas pas avant longtemps, faute d’homogénéité et de cohésion. Bien sûr, dans l’absolu, il est bon que les intercommunalités soient suffisamment peuplées, mais, si le résultat est la constitution de groupements sans cohérence ni cohésion, le bénéfice est plus que compensé par les inconvénients.

Je voudrais aussi vous signaler que, dans nos départements – plusieurs de nos collègues l’ont souligné –, nous avons tout de même réussi à constituer des intercommunalités rurales de 35 000, 45 000 ou 55 000 habitants. Bien souvent, nous les avons constituées à partir d’intercommunalités anciennes qui dépassaient le seuil de 5 000 habitants et n’étaient donc nullement tenues de se regrouper dans de plus grandes intercommunalités. Elles l’ont fait parce qu’elles ont estimé que c’était possible sur leur territoire. Elles n’ont pas eu besoin d’être forcées. Elles ne se sont pas regroupées à reculons.

Si, à côté de ces regroupements d’intercommunalités constitués sur une base très volontaire par les élus, d’autres intercommunalités ont préféré en rester à 5 000, 6 000 ou 8 000 habitants, elles l’ont fait elles aussi pour des raisons qu’elles estimaient valables. Pourquoi voudriez-vous que des raisons qui leur paraissaient fondées il y a de cela deux ans aient disparu comme par enchantement aujourd'hui ? Vouloir forcer le passage, c’est avoir l’assurance de créer des difficultés plutôt que d’atteindre les objectifs que vous vous êtes assignés.

Or l’impact de votre critère de densité, qui m’a séduit au premier abord, est en réalité – vous avez eu la loyauté de nous faire connaître votre tableau – très faible ; cela aussi a été souligné par plusieurs de nos collègues.

Puisque la France compte cent départements, prenons par exemple, et au hasard, le cinquantième ; il s’agit de la Manche. (Sourires.)

M. Jean-François Husson. Cela ne nous avait pas échappé !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il existe vingt-sept établissements publics de coopération intercommunale, ou EPCI, dans ce département. Parmi eux, vingt ont moins de 20 000 habitants. Avec votre critère de densité, dix-sept seraient obligés de se regrouper ; ils ne seraient donc que trois à être exonérés de cette obligation. Tel qu’il a été conçu, votre critère de densité ne fonctionne pas.

Je voudrais enfin vous dire que nous observons, dans nos territoires, un phénomène nouveau, qui se propage rapidement : nous constatons un réel engouement pour la commune nouvelle, alors même que la proposition de loi relative à l’amélioration de son régime n’a pas encore été définitivement adoptée. Ce mouvement signifie que nos communes rurales souhaitent conserver des services de proximité.

Quand les communautés de communes étaient des communautés de proximité, puisqu’elles étaient petites, les communes n’éprouvaient pas le besoin de se regrouper, parce qu’elles arrivaient à s’entendre dans un cadre qui leur était familier pour assurer des services en commun. Maintenant qu’il y a de plus en plus de grandes intercommunalités, nos petites communes, qui ont envie de vivre, considèrent que, pour pouvoir continuer à vivre, il est préférable de se regrouper à plusieurs dans un cadre territorial limité. C’est donc la crainte des grandes intercommunalités qui pousse à la constitution de communes nouvelles, afin de gérer dans une bonne entente des services communs, tels que l’école ou la voirie.

Madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, il faut absolument – je vous demande par avance de me pardonner cette cuistrerie – changer de paradigme. (Sourires et exclamations.) Voilà une expression moderne ! Au lieu de rester dans la seringue avec nos histoires de seuil et de nombre d’habitants, en s’imaginant qu’on pourra terminer à 12 500 habitants après avoir commencé à 20 000 habitants, nous devons parvenir à nous engager dans un processus qui fasse davantage confiance aux élus, mais aussi aux préfets.

La loi du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale prévoit déjà une clause de rendez-vous en 2015. Et de toute façon, un processus doit avoir lieu, avec ou sans loi nouvelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'amendement n° 1105.

(L'amendement n'est pas adopté.) – (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. Jean-François Husson. À une majorité écrasante !

M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 37 amendements au cours de cette séance ; il en reste 594 à examiner.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article 14 (début)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Discussion générale

9

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, à dix heures trente, à quinze heures et le soir :

- À dix heures trente :

1. Dix-neuf questions orales.

- À quinze heures et le soir :

2. Suite du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Procédure accélérée, n° 636, 2013–2014) ;

Rapport de MM. Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, fait au nom de la commission des lois (n° 174, 2014-2015) ;

Texte de la commission (n° 175, 2014-2015) ;

Avis de M. Rémy Pointereau, fait au nom de la commission du développement durable (n° 140, 2014-2015) ;

Avis de Mme Catherine Morin-Desailly, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 150, 2014-2015) ;

Avis de M. René-Paul Savary, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 154, 2014-2015) ;

Avis de Mme Valérie Létard, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 157, 2014-2015) ;

Avis de M. Charles Guené, fait au nom de la commission des finances (n° 184, 2014-2015).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 20 janvier 2015, à zéro heure dix.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART