Mme la présidente. La parole est à Mme Caroline Cayeux, sur l’article.

Mme Caroline Cayeux. Mes chers collègues, en votant il y a quelques instants l’article 2 du projet de loi, nous avons entériné l’attribution du pouvoir économique aux régions. Au moment de commencer l’examen de l’article 3, qui traite en particulier des aides aux entreprises, je tiens à vous alerter sur le risque que la décision dans ce domaine soit éloignée du terrain, surtout dans le cadre des futures grandes régions.

Je le fais aussi en tant que présidente de Villes de France, dont l’attention a été attirée sur ce problème par plusieurs centaines d’élus et plusieurs milliers de PME, de PMI et de TPE – des entreprises dont je vous rappelle qu’elles se situent à 60 % dans les villes et les agglomérations inframétropolitaines.

En vérité, nous sommes inquiets que seule la région puisse disposer d’un pouvoir d’initiative en matière d’aides aux entreprises, comme le prévoit l’article 3 du projet de loi. L’intervention des autres collectivités territoriales serait possible, mais dans un cadre défini par la région et dans le respect du schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, un schéma à valeur prescriptive.

Quand une entreprise frappe à la porte des collectivités territoriales, le plus souvent en s’adressant en premier lieu à la communauté d’agglomération, c’est généralement parce qu’elle rencontre des difficultés.

Les entreprises qui sont dans cette situation, de plus en plus nombreuses dans la période que nous traversons, viennent souvent à nous alors qu’il est déjà tard – parfois, hélas, un peu trop tard –, de sorte qu’il faut agir vite pour préserver leur existence et celle des emplois qui en dépendent. En effet, nous le savons tous, le problème de l’emploi est devenu aujourd’hui encore plus crucial que par le passé.

Dans ces conditions, la proximité et la rapidité peuvent être déterminantes pour l’efficacité de l’aide aux entreprises défaillantes. C’est pourquoi il faudrait permettre aux communautés d’agglomération, au même titre qu’aux régions et aux métropoles, d’apporter une aide rapide aux entreprises qui en ont besoin.

Mme la présidente. L'amendement n° 194 rectifié, présenté par MM. Collombat et Bertrand, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Il résulte de l’adoption de l’article 1er et de l’article 2 du projet de loi, ainsi que de la nouvelle rédaction qui sera proposée pour l’article 3 par l’amendement n° 1026 rectifié ter, que le présent amendement est sans objet.

En conséquence, je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 194 rectifié est retiré.

L'amendement n° 836 rectifié ter, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

1° AB. – Après le quatrième alinéa de l’article L. 1511-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Ce rapport donne lieu à un débat devant le conseil régional. » ;

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Comme la Cour des comptes le souligne dans un récent rapport, la compétence d’accorder des aides aux entreprises a été considérée jusqu’à aujourd’hui comme inhérente au droit légitime de chaque collectivité territoriale de maîtriser le développement économique et social de son territoire.

Sur les plans qualitatif et quantitatif, l’importance que revêtent pour les entreprises les interventions des collectivités territoriales n’est plus à démontrer.

La mission commune d’information du Sénat sur la désindustrialisation des territoires, dans le rapport Réindustrialisons nos territoires, qu’elle a adopté en 2011, a rappelé que, malgré les critiques formulées par la Cour des comptes dans son rapport de 2007 sur les aides des collectivités territoriales au développement économique, ces aides, « sous des formes très diverses, ont été précieuses depuis 2008 et ont contribué à maintenir des activités industrielles et à accompagner leur mutation ».

L’article L. 1511-1 du code général des collectivités territoriales assigne aux régions la responsabilité d’élaborer un rapport sur les aides mises en œuvre sur leur territoire par l’ensemble des collectivités territoriales.

Ce rapport a pour objectif d’assurer un respect des règles prévues par le droit communautaire et de repérer les éventuelles atteintes à l’équilibre économique de tout ou partie de la région. Il doit permettre à la région non seulement de vérifier la cohérence des dispositifs d’aide au développement économique dans l’espace régional, mais également de recenser les catégories et formes d’aide auxquelles ont recours les autres collectivités territoriales et acteurs.

C’est pourquoi on a pu dire que la région était un véritable observatoire des politiques locales de développement économique mises en œuvre sur son territoire. C’est dire si ce document est essentiel !

Or, aujourd’hui, ce rapport n’est communiqué qu’au préfet. Dans un souci de transparence, nous estimons impératif qu’il donne lieu à un débat contradictoire devant le conseil régional, afin qu’un réel contrôle démocratique soit exercé sur l’utilisation de fonds publics sur le territoire régional. L’organisation d’un tel débat nous paraît d’autant plus indispensable que les régions vont voir leur compétence économique renforcée et que leur territoire a été redécoupé comme on sait.

Cette situation rend nécessaire un contrôle des plus vigilants, sous la forme d’un élargissement et d’une systématisation de la possibilité, prévue par le droit en vigueur, qu’un débat se tienne devant le conseil régional en cas d’atteinte à l’équilibre économique de tout ou partie de son territoire.

C’est pourquoi nous proposons de revenir sur une décision prise en commission en prévoyant que le rapport établi par la région donnera lieu à un débat devant le conseil régional.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il paraît intéressant de permettre aux élus régionaux d’avoir une vision d’ensemble des aides versées aux entreprises sur le territoire régional, dans le cadre de la compétence économique renforcée reconnue aux régions.

C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable sur cet amendement, après qu’il eut été rectifié sur sa demande.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Nous avions l’intention d’émettre un avis de sagesse, mais, compte tenu de la position de la commission, je donne un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 836 rectifié ter.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de vingt et un amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 1026 rectifié ter, présenté par MM. Hyest et Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 1511-2. - I. - Sans préjudice des articles L. 1511-3 et L. 1511-8, du titre V du livre II de la deuxième partie, du titre III du livre II de la troisième partie et des articles L. 3641-1, L. 5214-16, L. 5214-23-1, L. 5215-20, L. 5216-5, L. 5217-2, L. 5218-2 et L. 5219-1, le conseil régional définit les régimes d'aides aux entreprises sur le territoire de la région et octroie ces aides.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s’agit presque d’un amendement de coordination, puisqu’il vise à remplacer l’expression « sous réserve », qui figure dans le texte initial, par l’expression « sans préjudice », compte tenu de la décision prise par le Sénat.

M. Pierre Jarlier. Très bien !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Permettez-moi de signaler à Mme Cayeux que, jusqu’à présent, il est totalement interdit aux intercommunalités d’accorder des aides aux entreprises en difficulté. De fait, les aides aux entreprises sont largement encadrées ; à juste titre, reconnaissons-le, car des problèmes d’expertise se posent pour les collectivités territoriales, et il ne s’agit pas de se fourvoyer.

En revanche, des conventionnements et des délégations sont possibles. Sans compter que le conseil départemental pourra continuer, au nom de la solidarité territoriale, à aider les très petites entreprises et les artisans, ainsi que nous l’avons prévu à l’article 2 ; ces interventions ne sont peut-être pas considérables, mais à travers elles le conseil départemental joue, avec l’appui de l’État lorsque le fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, a des moyens à sa disposition, un rôle dont nous connaissons l’importance, notamment dans le monde rural.

Des politiques continueront donc de pouvoir être menées au niveau des départements et des intercommunalités.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 1042 rectifié bis, présenté par MM. Collomb et Mercier, Mme Guillemot et M. Sueur, est ainsi libellé :

Amendement n° 1026 rectifié ter, alinéa 3

Après la référence :

L. 3641-1

insérer la référence :

, L. 3641-2

La parole est à M. Gérard Collomb.

M. Gérard Collomb. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 759, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Après la référence :

L. 1511-3

insérer la référence :

L. 1511-7

et remplacer les mots :

de ces aides

par les mots :

des aides

II. – Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre d’une convention passée avec la région, les autres collectivités territoriales et leurs groupements peuvent participer au financement des aides et régimes d’aides mis en place par la région.

III. – Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales et leurs groupements disposant de moyens adaptés à la conduite de ces actions peuvent participer au financement des aides dans le cadre d’une convention passée avec la région.

IV. – Alinéa 11

Remplacer les mots :

de ces aides

par les mots :

des aides

V. – Alinéa 13

Remplacer les mots :

des régimes d’aides mentionnés

par les mots :

des aides mentionnées

VI. – Alinéa 17

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

3° Le premier alinéa de l’article L. 1511-7 est ainsi rédigé :

« La région, les métropoles et la métropole de Lyon peuvent verser des subventions aux organismes visés au 4 de l’article 238 bis du code général des impôts ayant pour objet exclusif de participer à la création ou à la reprise d’entreprises et aux organismes visés au 1 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier qui participent à la création d’entreprises. Les autres collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également verser des subventions à ces organismes dans le cadre d’une convention passée avec la région et dans le respect des orientations du schéma régional prévu à l’article L. 4251-12 du code général des collectivités territoriales. » ;

VII. – Alinéa 21

Supprimer la référence :

L. 3231-2,

VIII. – Après l’alinéa 30

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Sous réserve des dispositions des articles L. 3641-1 et L. 5217-2 du présent code, les autres collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent intervenir qu’en complément de la région et dans le cadre d’une convention signée avec celle-ci. » ;

IX. – Alinéa 34

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

e) Après le premier alinéa du 9°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent intervenir en complément de la région dans le cadre d’une convention signée avec celle-ci. » ;

X. – Alinéa 39

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

i) Le 9° est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les autres collectivités territoriales et leurs groupements intervenant pour compléter la souscription régionale sont également signataires de cette convention ; »

XI. – Alinéas 42 et 43

Supprimer ces alinéas.

XII. – Alinéa 47

Après les mots :

à compter du

insérer les mots :

1er janvier qui suit le

La parole est à Mme la ministre.

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Le Gouvernement est désormais dubitatif à l’égard de son propre amendement… Le fait étant inédit, je préfère le reconnaître ! (Sourires.)

M. Michel Delebarre. Cela nous arrive aussi ! (Nouveaux sourires.)

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Notre intention était de rétablir plusieurs dispositions de l’article 3 dans leur rédaction initiale, mais un certain nombre de dispositions adoptées tout à l’heure au terme du débat relatif au schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation satisfont en partie le présent amendement ; d’ailleurs, le Gouvernement s’est déclaré favorable aux amendements dont ces dispositions sont issues.

Dans ces conditions, le Gouvernement va retirer l’amendement n° 759 et faire vérifier de façon très précise que les dispositions adoptées cet après-midi satisfont ses préoccupations. Il lui semble que les amendements identiques nos 172 rectifié, 230 et 747, inspirés par les mêmes intentions que le sien, pourraient également être retirés.

S’il se révèle, après un examen attentif des dispositions adoptées tout à l’heure, que certaines mesures restent à prendre, nous déposerons un nouvel amendement, dont je ne doute pas que le Sénat l’adoptera.

Je retire donc mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 759 est retiré.

Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 172 rectifié est présenté par MM. Grand et Lemoyne.

L'amendement n° 230 est présenté par M. Nègre.

L'amendement n° 742 est présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cadre d’une convention passée avec la région, les autres collectivités territoriales et leurs groupements peuvent participer au financement des aides et régimes d’aides mis en place par la région.

Les amendements nos 172 rectifié et 230 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Ronan Dantec, pour défendre l’amendement n° 742.

M. Ronan Dantec. Devrais-je partager le trouble de Mme la ministre ? Sur les aspects techniques, on verra, mais sur le fond politique, avec ce que nous avons voté à l’article 2, avec l’idée qu’il pourrait y avoir – j’emploie bien le conditionnel – des conventionnements entre les EPCI et les régions, je crois qu’il nous faut aussi disposer d’un mécanisme permettant une participation des autres collectivités territoriales et de leurs groupements.

Chacun le voit, ma boussole, c'est l’égalité territoriale… Pour donner aux régions la capacité financière d’intervenir sur tous les territoires, j’estime que leur participation doit pouvoir être un peu plus faible dans les territoires où se trouvent de réels moyens financiers, et plus forte dans les territoires qui, eux, n’auront pas les moyens de participer au conventionnement.

Je crois donc que cet amendement tend véritablement à assurer l’égalité territoriale et la solidarité financière territoriale pour le développement économique. Et je ne désespère pas de convaincre Jacques Mézard avant la fin de notre discussion que c'est bien ainsi qu’il faut s'y prendre, et non pas en conservant en l’état un système administratif qui ne marche plus !

Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont également identiques.

L'amendement n° 173 rectifié est présenté par MM. Grand et Lemoyne.

L'amendement n° 231 est présenté par M. Nègre.

L'amendement n° 657 est présenté par M. Collomb.

L'amendement n° 743 est présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les autres collectivités territoriales et leurs groupements disposant de moyens adaptés à la conduite de ces actions peuvent participer au financement des aides dans le cadre d’une convention passée avec la région.

Les amendements nos 173 rectifié et 231 ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Gérard Collomb, pour défendre l’amendement n° 657.

M. Gérard Collomb. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour défendre l’amendement n° 743.

M. Ronan Dantec. Il est également défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 658, présenté par M. Collomb, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

3° Le premier alinéa de l’article L. 1511-7 est ainsi rédigé :

« La région, les métropoles et la métropole de Lyon peuvent verser des subventions aux organismes visés au 4 de l’article 238 bis du code général des impôts ayant pour objet exclusif de participer à la création ou à la reprise d’entreprises et aux organismes visés au 1 de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier qui participent à la création d’entreprises. Les autres collectivités territoriales et leurs groupements peuvent également verser des subventions à ces organismes dans le cadre d’une convention passée avec la région et dans le respect des orientations définies par le schéma prévu à l’article L. 1511-1. » ;

La parole est à M. Gérard Collomb.

M. Gérard Collomb. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1079, présenté par MM. Hyest et Vandierendonck, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

3° L’article L. 1511-7 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, les mots : « Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent » sont remplacés par les mots : « La région peut » ;

b) À la fin du dernier alinéa, les mots : « des collectivités territoriales » sont remplacés par les mots : « de la région » ;

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s'agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. L'amendement n° 840, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 21 et 22

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. S’il y a bien une chose essentielle à rappeler dans notre débat, c’est que notre organisation territoriale, largement héritée de la Révolution française, comprenait d’abord et avant tout, à l’origine, les communes de plein exercice et les départements.

Ces structures territoriales, constituées sur les ruines des domaines féodaux, sont accusées de longue date de présenter bien des défauts. La vérité commande de dire que leur visée portait loin, au-delà de la période historique de leur création.

Il s’agissait, dans un premier temps, de placer l’ensemble des territoires de la nation sous le même type d’administration et de droit, ainsi que de fixer les mêmes règles de représentation politique. Dans un second temps, la pratique devait renforcer quasi naturellement l’attachement des Français aux nouveaux principes de gouvernement.

On notera que le passage de la monarchie à la République s’est produit sans bouleversement de la carte administrative du pays, et, depuis lors, il n’est jamais venu à l’idée de quiconque de remettre en cause la viabilité de l’institution départementale.

Évidemment, personne ne nie que l’histoire a depuis profondément changé la donne. De même, les données démographiques et économiques ne sont plus du tout les mêmes.

Pour autant, le concept de département, notamment pour ce qui concerne l’action économique, a-t-il perdu de sa pertinence ? Nous ne le pensons pas.

Le département n’est-il pas cet espace de solidarité, d’action commune et partagée qui répond de manière globalement satisfaisante aux problèmes de solidarité entre les générations, d’action sociale auprès des populations les plus fragiles, tout en conduisant des politiques éducatives, d’aménagement du territoire et de transport dont l’utilité n’est plus à prouver ?

Avec les régions, les intercommunalités et les communes, dans le cadre de coopérations aux avantages partagés, les départements interviennent également dans le champ de l’action économique, dont les enjeux, non négligeables, dépassent largement les questions de primauté ou de compétence.

C'est pourquoi nous présentons cet amendement, qui tend à conserver aux départements leurs prérogatives.

Mme la présidente. L'amendement n° 842, présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 34

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

e) Après le premier alinéa du 9°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent intervenir en complément de la région dans le cadre d’une convention signée avec celle-ci. » ;

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement de notre groupe vise à poser les conditions de la coopération interinstitutionnelle entre les différentes collectivités locales et leurs groupements en matière d’action économique.

Comme nous l’avons vu, ce texte prévoit expressément de faire jouer aux régions un rôle moteur en matière d’action économique. Or cela peut paraître pour le moins surprenant à l’examen des données.

Les régions consacrent aujourd’hui environ 31 euros par habitant à l’action économique. Certes, c'est positif, mais cela ne correspond qu’à environ 35 % de la dépense publique en la matière. Il serait donc opportun de mettre en œuvre une démarche de coopération entre collectivités pour que l’ensemble des compétences soit mobilisé dans le cadre de l’action économique.

Prenons le cas de la région d’Île-de-France. Si l’on confie au conseil régional la politique d’action économique, il faut d’emblée prévoir qu’elle pourra travailler sur certains bassins d’emploi avec, par exemple, la région Nord-Picardie ; je pense au bassin d’emploi de Roissy-Sud Picardie, qui regroupe aujourd’hui plus de 800 000 habitants sur la région d’Île-de-France et plus de 300 000 sur le sud de l'Oise. Et cette région Nord-Picardie aura tout intérêt, pour ce qui la concerne, à mutualiser son action avec la région Normandie et les établissements publics de coopération ou les départements de la Somme et de la Seine-Maritime.

On pourrait ainsi multiplier les exemples et finir par faire le tour de France de l’ensemble des coopérations souhaitables, montrant que la diversité des intervenants est assurément la meilleure garantie de la mobilisation des compétences disponibles.

Cette démarche vaut singulièrement pour la région capitale, où la mise en œuvre du Grand Paris fait l’objet d’une coopération entre les communes, les structures intercommunales, les départements et la région. Une synergie des moyens et des compétences est ainsi convoquée pour la réussite de l’ensemble des aménagements.

Au bénéfice de ces observations, nous ne pouvons que vous inviter à adopter cet amendement qui, au fond, tend à rétablir le texte du Gouvernement.

Mme la présidente. Les quatre amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 174 est présenté par M. Grand.

L'amendement n° 232 est présenté par M. Nègre.

L'amendement n° 843 est présenté par M. Favier, Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 1005 est présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 39

Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :

i ) Le 9° est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les autres collectivités territoriales et leurs groupements intervenant pour compléter la souscription régionale sont également signataires de cette convention. » ; 

Les amendements nos 174 et 232 ne sont pas soutenus.

La parole est à Mme Gonthier-Maurin, pour défendre l’amendement n° 843.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. En termes d’intervention régionale participative, l’article 3 du projet de loi permet à la région de souscrire des parts dans un fonds commun de placement à risques à vocation régionale ou interrégionale ayant pour objet d’apporter des fonds propres à des entreprises.

Pour ce faire, la région passe avec la société gestionnaire du fonds une convention déterminant notamment l’objet, le montant et le fonctionnement de ce dernier, ainsi que les conditions de restitution des souscriptions versées en cas de modification ou de cessation d’activité de ce fonds.

Le projet de loi initial prévoyait que les autres collectivités, en particulier le département, souhaitant intervenir en complément des actions de la région soient signataires de cette convention, disposition purement et simplement supprimée dans le texte de la commission.

Or il nous semble essentiel – cela constitue le fil directeur de nombre de nos amendements – de préserver la logique d’intervention commune concertée et contractualisée.

La région ne saurait avoir le monopole de l’intervention économique. On doit peut-être renforcer la compétence d’orientation stratégique des régions, mais il ne s’agit pas de dessaisir totalement les autres intervenants. C’est pourquoi nous souhaitons revenir à la rédaction originale, qui nous semble plus réaliste.

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour défendre l’amendement n° 1005.

M. Joël Labbé. Je m’inscris dans la logique qui vient d’inspirer mon collègue Ronan Dantec. L’article L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales définit les différents types d’interventions de la région en matière de développement économique. Il prévoit notamment que la région peut souscrire des parts dans un fonds commun de placement à vocation régionale ou interrégionale. La région passe alors avec la société gestionnaire du fonds une convention déterminant les modalités de cette souscription.

Le projet de loi initial permettait aux autres collectivités territoriales et à leurs groupements d’intervenir en complément de la région en matière de développement économique.

Le présent amendement vise à préserver cette possibilité en cohérence avec le rôle fondamental joué par le bloc local, toujours bénéficiaire de la clause générale de compétence.