M. Ronan Dantec. Je ne désespère pas que l’un de mes amendements soit adopté !

Le présent amendement, beaucoup plus modeste que le précédent, tend à s’inscrire dans la dynamique du débat au sein des assemblées régionales et à rejoindre les propos de M. Kaltenbach.

Il s’agit simplement d’affirmer que l’assemblée régionale établit en son sein une mission d’information et d’évaluation, chargée de recueillir des éléments sur une question d’intérêt régional ou de procéder à l’évaluation d’un service public régional. Un même conseiller régional ne peut s’associer à une telle demande plus d’une fois par an.

Mme Cécile Cukierman. On peut choisir son service public !

M. Ronan Dantec. Ces dispositions ne seraient pas lourdes à instaurer, puisque nous les mettons régulièrement en œuvre au Sénat.

À cet égard, nous savons tous l’importance de nos missions parlementaires, y compris pour construire des consensus destinés à faciliter l’action publique et à sortir du débat politicien. Grâce au renforcement du rôle des régions et à leur agrandissement, ce droit d’information au profit des élus régionaux permet aussi à l’opposition d’intervenir dans le débat.

Eu égard à l’objet très modeste de cet amendement, nous pourrions aisément trouver un consensus en la matière, me semble-t-il.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ces missions d’information relèvent du règlement des assemblées. Nous n’allons pas tout inscrire dans la loi.

M. Gérard Longuet. Parfaitement !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Par ailleurs, assez curieusement, monsieur Dantec, vous n’avez pas prévu les mêmes dispositions pour les départements. C’est étonnant ! (Sourires.)

M. Gérard Longuet. C’est suspect !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ne voudriez-vous plus des départements ?…

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. J’étais prête à demander la rectification de cet amendement pour que les départements soient également concernés.

M. Alain Fouché. Et pourquoi pas les communes, aussi ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Toutefois, je préfère m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

M. Yves Détraigne. Je ne comprends pas pourquoi il faudrait inscrire dans la loi que le conseil régional a le droit d’évaluer un service dont il s’occupe. On ne ferait rien d’autre que ce qui est écrit dans le code général des collectivités territoriales.

Mme Cécile Cukierman. Il n’y a plus de compétence générale, mais la liberté d’administration subsiste !

M. Yves Détraigne. La région se gère par ses propres moyens. Si elle estime devoir réexaminer telle politique ou la façon dont est géré tel service, elle le fait en interne et personne ne l’en empêchera. Il n’est nul besoin de le prévoir dans la loi. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.

M. Philippe Kaltenbach. Je ne saisis pas l’intérêt de cet amendement.

Aujourd’hui, si une collectivité, une région ou un département veut créer une commission sur un problème particulier, elle peut évidemment le faire. (M. Michel Delebarre acquiesce.) Un droit est conféré à l’opposition, à la minorité du conseil régional, puisque les décisions sont prises par une majorité qui peut parfois se montrer agressive à l’égard de sa minorité et l’écraser quelque peu.

Aux termes de cet amendement, quelque 20 % des membres du conseil régional peuvent solliciter la création d’une commission et l’obtenir.

Si, dans toutes les assemblées régionales et départementales, la majorité était ouverte et donnait spontanément des droits à l’opposition, on n’aurait pas besoin de créer des règles. Tel n’est malheureusement pas le cas.

Certes, l’Île-de-France a accordé la présidence de la commission des finances à l’opposition sans qu’une loi l’impose. Néanmoins, si l’on veut généraliser ce type de pratiques et faire en sorte que l’opposition soit mieux associée aux décisions prises et puisse se prévaloir des mêmes droits, il faut passer par la loi.

Il en a été de même pour les communes : tous les droits de l’opposition y ont été actés par des lois, parce que, hélas, peu de communes ont donné des droits à leur opposition de manière spontanée, sans y être contraintes.

M. Pierre-Yves Collombat. Et il y a encore beaucoup à faire !

M. Philippe Kaltenbach. Ce pas supplémentaire, nous avons l’occasion de le faire. En rectifiant cet amendement afin d’ouvrir ses dispositions aux départements, nous avancerions vers un fonctionnement plus démocratique de ces assemblées.

Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Les arguments évoqués contre mon amendement ne correspondent pas tout à fait à ma proposition, et je remercie Philippe Kaltenbach de son intervention.

Les droits de l’opposition sont importants. Tous, nous avons intérêt à ce que celle-ci soit en mesure de participer davantage au débat démocratique régional.

Toutefois, outre le problème des droits de l’opposition, il convient d’évoquer aussi l’apparition de très grandes régions.

M. Jacques Mézard. Elles seront énormes !

M. Ronan Dantec. Certains sous-territoires de ces régions ne vont-ils pas apparaître, qui auront des questions à poser ? Accorder un droit à 20 % des conseils régionaux, cela permet à un ensemble territorial au sein d’une région de s’exprimer.

Mme Cécile Cukierman. Si l’on voulait conserver la proximité, il ne fallait pas faire de grandes régions ! On tricote à Noël et l’on détricote après le Nouvel An ! (Exclamations.)

M. Jacques Mézard. Exactement !

M. Ronan Dantec. Non, ma chère collègue. Il y aura, dans ces grandes régions, des élus différents. Que ceux-ci puissent mettre à l’ordre du jour des travaux spécifiques constituerait une avancée démocratique, qui pourrait servir à tout le monde.

Sur ce point, je le répète, nous devrions pouvoir trouver un consensus.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Mes chers collègues, je tiens à vous le dire sans énervement : l’argument qui vient d’être avancé ne me laisse pas sans voix – vous l’avez constaté… (Exclamations amusées.) Pour le coup, l’expression habituelle n’est pas pertinente !

Cette justification me surprend. On nous a répété qu’il fallait de grandes régions. Un certain nombre d’entre nous ont dit : faisons attention à la proximité, aux spécificités locales,…

Mme Cécile Cukierman. … aux particularités que cette réforme va gommer. On nous a répondu qu’il n’y avait pas de souci.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez déclaré : « Il y a des problèmes, on les examinera après. »

Mme Françoise Laborde. Mais après, c’est maintenant !

Mme Cécile Cukierman. C’est peut-être la manière de les traiter.

Quoi qu’il en soit, j’entends aujourd’hui qu’il faut garantir les spécificités locales au sein des grandes régions, notamment en permettant à 20 % des membres d’un conseil régional d’obtenir la création d’une mission d’information et d’évaluation. Honnêtement, je suis tentée de répondre qu’il ne fallait pas créer de très grandes régions. (M. Jacques Mézard acquiesce.) Ces ensembles susciteront des problèmes, c’est certain !

Par ailleurs, même si la clause de compétence générale est supprimée pour les départements et les régions, ces collectivités territoriales conserveront, me semble-t-il, leur liberté réglementaire.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Exactement !

Mme Cécile Cukierman. Monsieur Dantec, vous proposez une proportion d’un cinquième : pourquoi pas un sixième ou un quart ? Les collectivités territoriales doivent être libres de s’organiser, par le biais de leur règlement intérieur.

Les membres du groupe auquel j’appartiens s’accordent à dire que les droits de l’opposition, la représentativité des élus doivent être garantis et confortés dans le fonctionnement interne des assemblées locales, notamment grâce aux règlements intérieurs. Mais décider à la place des collectivités territoriales la manière dont elles doivent fonctionner pour ainsi dire au quotidien, via des dispositions de cette nature, c’est autre chose. Sur ce plan, personnellement, je ne vous suis plus !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1002.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 739, présenté par M. Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article L. 4134–1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Il a pour mission d’éclairer le conseil régional sur les enjeux et les conséquences économiques, sociales et environnementales des politiques régionales. Il porte une attention particulière à leur impact sur le long terme et à leur inscription sur une trajectoire de transition écologique de l’économie. Il peut être saisi de toute question relevant des compétences du conseil régional par le président de l’assemblée régionale, par tout groupe politique constitué en son sein en vertu de l’article L. 4133–23. Il peut également demander l’inscription d’une communication à l’ordre du jour de l’assemblée régionale, qui donne lieu à un débat sans vote. » ;

La parole est à M. Ronan Dantec.

M. Ronan Dantec. Cet amendement tend, lui aussi, quoique sur un autre sujet, à animer le débat régional.

Mes chers collègues, au cours des discussions que j’ai eues avec tel ou tel d’entre vous, j’ai constaté avec une certaine surprise que les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, les CESER, ont aujourd’hui une image assez négative. J’entends beaucoup de choses à leur sujet.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Quelle est leur utilité ?

M. Ronan Dantec. Malgré tout, il me semble que, dans ces grandes régions, il est nécessaire de maintenir une instance regroupant l’ensemble des acteurs pour débattre et éclairer la décision publique. C’est l’évolution normale de la démocratie : il faut que les acteurs souhaitant prendre part au débat puissent s’exprimer.

À ce titre, cet amendement vise à redéfinir les CESER. Ses dispositions concordent parfaitement avec les dispositions votées au titre de la loi précédente.

Le CESER a pour mission d’éclairer le conseil régional sur les enjeux et les conséquences économiques, sociales et environnementales des politiques régionales. Il porte une attention particulière à leur impact à long terme – c’est un élément clef du débat démocratique – et notamment sur les enjeux écologiques. Il peut être saisi de toute question relevant des compétences du conseil régional par le président de cette assemblée – celui-ci peut ainsi s’appuyer sur cette instance – et par tout groupe politique constitué en son sein. Il peut également demander l’inscription d’une communication à l’ordre du jour du conseil régional, laquelle donne lieu à un débat sans vote. Ainsi, le CESER ne s’immisce pas dans la décision politique du conseil régional.

De nombreux éléments sont remontés des territoires, et nos précédents débats ont mis au jour nombre de frustrations. Je songe par exemple aux conseils de développement, qui ont failli être oubliés par les lois précédentes. Les structures les réunissant n’ont pas manqué de le relever.

La manière dont nous avons débattu a, elle-même, suscité des frustrations : elle donnait l’impression d’un monde où seul l’élu, quelque peu enfermé dans sa tour d’ivoire, décidait de tout.

Il est plus que temps d’émettre des signaux contraires. Bien sûr, la décision publique reste du ressort de l’élu. Cet amendement ne tend nullement à remettre en cause ce principe. Toutefois, il faut assurer un débat avec l’ensemble des acteurs du territoire. Voilà pourquoi il convient de s’appuyer, à l’échelle régionale, sur les CESER, en leur donnant des missions plus claires, en leur confiant plus de capacités d’intervenir dans le débat, et en affirmant qu’ils sont là pour éclairer les décisions publiques à moyen et long termes face aux impératifs politiques qui, parfois, se limitent au court terme.

M. Alain Fouché. Les moyens existent déjà !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les CESER tels qu’ils existent nous paraissent fonctionner normalement. D’aucuns trouvent même que l’on accorde un rôle bien important à ces instances au regard de leur utilité.

M. Henri de Raincourt. C’est gentiment dit !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. La commission n’entend ni étendre ni réduire les attributions de ces instances de dialogue et de conseil.

Monsieur Dantec, vous souhaitez imposer la remise d’avis, de communications. Vous allez de nouveau dans le sens d’une réglementation excessive.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Des rapports sont établis. Ils sont demandés par les collectivités, très bien. Mais, pour votre part, – c’est extraordinaire ! – vous êtes un réglementariste absolu.

M. Éric Doligé. Il fallait le dire !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Vous voulez tout réglementer. C’est épatant ! Laissons vivre les structures telles qu’elles existent. Si certaines ne fonctionnent pas, tant pis. Si d’autres fonctionnent très bien, tant mieux.

Vous l’aurez compris, je suis défavorable à cet amendement.

MM. Bruno Sido et Alain Fouché. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Le Gouvernement émet lui aussi un avis défavorable. Aujourd’hui, les CESER fonctionnent bien. Ils ont trouvé leur place au sein des institutions régionales. Laissons les nouvelles régions se mettre en place, les nouveaux conseils régionaux être élus. Après 2016, nous verrons s’il y a lieu de modifier l’organisation, le fonctionnement et le rôle des CESER.

M. Alain Fouché. Cessons d’alourdir le système !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Cet amendement tend à renforcer les pouvoirs et missions des CESER…

M. Ronan Dantec. Des missions, pas des pouvoirs !

M. Bruno Sido. Attention !

M. Jacques Mézard. Monsieur Dantec, je me permets de citer textuellement l’objet de votre amendement : « Cet amendement vise à renforcer les pouvoirs et missions des CESER ». (M. Henri de Raincourt rit. – M. Ronan Dantec opine.)

M. Jacques Mézard. Nous savons tous ce que sont les CESER. (M. Bruno Sido rit.) Le problème de ces conseils, c’est d’abord leur composition, la nomination de leurs membres. Il faut le dire, même si cela ne fait pas plaisir dans nos régions : ces instances sont essentiellement – pas toujours – un moyen de faire plaisir, dans tel ou tel domaine, à ceux qui disposent du pouvoir de nomination. (M. Alain Fouché s’exclame.)

Qu’en résulte-t-il ? Des rapports, qui sont certainement lus par l’immense majorité de nos concitoyens… (Sourires sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. Henri de Raincourt. Minimum ! (Nouveaux sourires sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Mouiller. Personne ne les lit !

M. Jacques Mézard. En contrepartie, ces CESER représentent un coût, correspondant aux indemnités de leurs membres, aux divers frais de fonctionnement.

Si c’est cela, la représentation ultime de ce que vous appelez « la société civile », sans être, pour ma part, le représentant de la société militaire (M. Gérard Longuet s’exclame.), je voterai avec conviction contre cet amendement. Cette mesure ne fera pas avancer la démocratie.

M. Jacques Mézard. Je note par ailleurs que vous souhaitez presque, à travers d’autres amendements, créer des sortes de sénats dans les régions.

M. Michel Vaspart. Exactement !

M. Jacques Mézard. Or on sait l’affection que vous avez pour la Haute Assemblée… (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. Michel Mercier. Ça va mieux !

Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le secrétaire d’État, en réponse à vos propos, je me permets de vous poser cette question, qui me semble importante : a-t-on prévu de reconfigurer les CESER à l’échelle des nouvelles régions ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Oui !

M. Jacques Mézard. Ainsi, ce sera encore mieux qu’avant !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. André Vallini, secrétaire d'État. Madame Gourault, la réponse est oui.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous aurons donc des grands CESER…

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 739.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 403, présenté par MM. Husson, Calvet, Houpert, Danesi, Gremillet, D. Laurent, Houel et Cardoux, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Après le mot :

habitat

insérer les mots :

, la gestion équilibrée et durable des ressources en eau par bassin versant

La parole est à M. Jean-François Husson.

M. Jean-François Husson. Mes chers collègues, la loi MAPTAM a créé une nouvelle compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, que je désignerai dans la suite de mon intervention par le sigle GEMAPI. (Sourires et exclamations amusées sur diverses travées.)

Cette compétence est confiée aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Néanmoins – nous le savons tous –, une large part des actions de gestion de l’eau et de prévention des inondations reste en dehors du bloc de compétence GEMAPI et nécessite de ce fait une maîtrise d’ouvrage appropriée qui, au total, est largement « supra locale ». Je songe à la gestion des grands ouvrages, à l’animation territoriale des schémas d’aménagement et de gestion des eaux, les SAGE, aux stratégies locales de gestion des risques d’inondation ou encore aux programmes d’action de prévention contre les inondations, les PAPI.

Manifestement, ces actions de bassin nécessitent l’implication de tous les niveaux de collectivités – des communes aux intercommunalités à fiscalité propre en passant par les départements et les régions – au regard des enjeux multiples de la transversalité, des échelles de bassin qui dépassent largement les limites administratives et de la nécessité de créer des synergies entre les diverses politiques publiques, qu’elles touchent à l’aménagement du territoire, aux solidarités et à l’équité entre les territoires, à l’énergie, à la biodiversité, au tourisme, à la culture, etc.

Or le présent projet de loi supprime la clause de compétence générale pour les départements et les régions.

Par ailleurs, vous l’avez compris, une gestion équilibrée et durable dans le domaine de l’eau et des inondations implique une complémentarité entre les actions conduites et menées par les communes sur leur territoire et les intercommunalités au titre de leurs compétences propres et celles qui sont menées à l’échelle des différents bassins versants. Ces dernières permettent d’assurer la cohérence globale de l’action sur le bassin versant, un accompagnement approprié des collectivités territoriales et de leurs groupements par la mise en place d’une ingénierie qualifiée, et la mise en œuvre des bons outils de programmation et de planification à diverses échelles.

Enfin, j’attire l’attention de la Haute Assemblée sur le fait qu’un certain nombre de dispositifs sont déjà en cours de mise en place, depuis un certain temps – je reviendrai sur ce point dans quelques instants, en explication de vote.

Mes chers collègues, je vous demande de voter cet amendement, pour que la gestion équilibrée et durable des ressources en eau par bassin versant soit portée au nombre des compétences régionales.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. J’ai l’impression que nous allons beaucoup débattre de la GEMAPI… (Sourires.)

M. André Vallini, secrétaire d'État. À ne pas confondre avec le génépi ! (Nouveaux sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Auparavant, on parlait de lutte contre les inondations. C’était français, par conséquent c’était plus simple. (Même mouvement.)

M. Bruno Sido. Oh oui !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est peu ou prou de cela qu’il s’agit !

Cela étant dit, cette mesure laisse la commission assez perplexe. Des dispositions législatives établies sur l’initiative de deux de nos collègues et votées récemment…

M. Jean-François Husson. C’est bien le problème !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … plus précisément au titre de la loi MAPTAM du 27 janvier 2014, portent sur la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations.

Depuis quelque temps, certaines collectivités se posent des questions en la matière. Elles agissent notamment par le biais d’établissements publics.

C’est une chose d’attribuer aux régions la promotion des actions menées en la matière. C’en est une autre de leur confier la compétence de gestion proprement dite par bassin versant. (Mme Françoise Laborde acquiesce.)

Mes chers collègues, en la matière, la France a connu des systèmes très divers, au rang desquels les syndicats de rivière. Pour ma part, je me permets de rappeler que j’ai pris part à la création de l’Entente Marne,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … qui couvre cinq départements, jusqu’à la Meuse,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … et réunit ainsi tout un pan du Bassin parisien.

Pendant vingt-cinq ans, l’Entente Marne a mené des actions coordonnées, entre les départements de la Marne, de la Haute-Marne, de la Meuse, de Seine-et-Marne, etc., au titre de la Marne, bien sûr, mais aussi des rivières adjacentes. Nous avons accompli un travail formidable. Voilà pourquoi j’ai eu tendance à dire aux autres territoires : faites comme nous,…

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. … il n’est pas nécessaire de voter encore de nouvelles lois !

À mon sens, ces attributions peuvent être englobées dans la compétence d’aménagement du territoire. (M. Jean-François Husson manifeste sa circonspection.) C’est possible, cher collègue ! Dès lors, les régions pourront contribuer au financement des initiatives menées.

Le département peut-il, en outre, être indifférent au sujet ? Rien ne l’interdit, mais, franchement, commencer à attribuer des compétences qui appartiennent à d’autres collectivités… Ce n’est pas possible ! La situation deviendrait incompréhensible : sans action de la région, les établissements publics ne pourraient se mettre en place !

Un véritable problème se pose aussi au niveau des ressources et de la redevance, dont nous savons très bien par qui elle est versée. Des amendements seront présentés sur le sujet.

Pour ma part, je souhaiterais donc que nous en restions là pour l’instant et que nous différions la discussion. Nous aurons d’autres occasions d’évoquer les questions de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations.

Ainsi, à ce stade, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Sur l’initiative du Sénat, nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet, voilà maintenant quelques mois, et l’ouverture du champ de cette compétence aux régions ne semble pas aller dans le sens de la simplification.

Nous avons effectivement permis aux régions de conserver une possibilité d’intervention en matière de gestion de l’eau dans les différents domaines listés au I de l’article L. 211-7 du code de l’environnement, à l’exclusion des missions constituant la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, qui, en conséquence, constituera une compétence exclusive du bloc communal. Cette disposition est le fruit d’un long débat, précis, construit, que nous avons conduit dans cette enceinte, un débat de clarification sur lequel, bien évidemment, le Gouvernement ne souhaite pas revenir.

En revanche, lors de cette même discussion concernant les demandes de délégation de compétences des régions – peut-être le sujet sera-t-il à nouveau discuté au cours de l’examen du présent projet de loi –, il a été acté qu’une région de France souhaite aujourd'hui disposer d’une compétence spécifique en matière de gestion de l’eau. Mais cette demande porte sur un transfert de compétences détenues par un organisme de niveau supérieur, et non inférieur, dans le but d’intervenir plus efficacement sur d’importants dossiers de pollution tellurique affectant le littoral.

Je suis donc quelque peu gênée. Je comprends l’argument développé, mais nous sommes allés tellement dans le détail de cette compétence par le passé qu’il me semble nécessaire, aujourd'hui, de la laisser s’établir.

Ainsi, c’est au titre des travaux que nous avons menés ensemble, sur l’initiative, je le rappelle, de plusieurs groupes du Sénat, que je demande aux auteurs de l’amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Il me semble que, face à ce problème particulièrement important, une certaine confusion demeure… La fameuse compétence GEMAPI, compétence de gestion des milieux aquatiques – ils devaient bien être pris en compte – et, surtout, de prévention des inondations, appartient bien au bloc communal, qui peut l’exercer dans le cadre de syndicats mixtes. Mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit ici : l’amendement traite de l’approvisionnement en eau !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Est-ce bien cela ?

M. Pierre-Yves Collombat. Oui ! La compétence GEMAPI n’est pas concernée. Le niveau régional, que je ne défends pas souvent, m’apparaît tout de même comme le bon niveau pour veiller à la gestion équilibrée et durable des ressources en eau.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et les bassins ?

M. Pierre-Yves Collombat. L’amendement fait référence à la « gestion équilibrée et durable des ressources en eau » !

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les agences de l’eau s’occupent de ces sujets !

M. Pierre-Yves Collombat. Elles ne sont pas, à elles seules, le bras armé ! Elles interviennent concurremment avec d’autres collectivités !

Je reconnais néanmoins l’existence d’un petit problème annexe : des établissements publics de bassin sont, de fait, déjà actifs dans le domaine de la prévention des inondations et dans le domaine de l’approvisionnement en eau et certains m’ont expliqué qu’ils commençaient à rencontrer quelques difficultés. Le préfet leur oppose que telle action n’est pas de leur ressort, car entrant dans le cadre de la compétence GEMAPI, que telle autre est du domaine de l’approvisionnement en eau ; le bassin est considéré comme appartenant à des catégories différentes selon les aspects considérés. Bref, c’est un bazar ! (M. Jean-François Husson acquiesce.)

Donc, si nous pouvions dire clairement qui peut faire quoi dans cette affaire, cela présenterait au moins l’avantage de ne pas paralyser des dispositifs existants, et qui fonctionnent. D’après ce qui m’a été rapporté – je ne l’ai pas vérifié –, ceux-ci font l’objet d’interprétations diverses de la part de l’administration et, de ce fait, voient leurs actions entravées.