Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, pour explication de vote.

M. Alain Fouché. Je comprends très bien les aspects de santé qui ont été évoqués par M. Desessard, mais la mesure qu’il propose est un peu brutale. Les choses doivent pouvoir se faire plus doucement, en respectant les normes européennes.

Comme l’expliquait le rapporteur général, en termes d’offre de véhicules électriques ou hybrides, l’industrie automobile française n’est pas prête. On a poussé le diesel d’une manière forcenée dans ce pays depuis des années. Maintenant, on fait marche arrière,…

M. Jean Desessard. Non, on n’en est pas là !

M. Alain Fouché. … on veut tuer le véhicule diesel, ce qui n’est pas sans conséquences.

Les véhicules diesel, ce sont des milliers d’emplois en France.

M. Jean Desessard. Les véhicules hybrides aussi !

M. Alain Fouché. Laissez-moi parler, cher ami !

À Châtellerault, dans la Vienne, et dans bien d’autres endroits en France, est implanté Federal Mogul, une grosse entreprise à capitaux américains. Actuellement, les Américains se retirent, ferment les sites parce que plusieurs ministres écologistes, à différents moments, ont envoyé le message que la France allait arrêter la production de véhicules diesel et se tourner vers d’autres véhicules. Dans mon département, près de Poitiers, 300 emplois viennent d’être supprimés.

Donc, j’y insiste, cette évolution doit se faire d’une manière coordonnée et moins rapidement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Nos collègues Chantal Jouanno et Michel Canevet avaient déposé un amendement qui allait dans le même sens que l'amendement n°I-125 rectifié concernant les flottes d’entreprise dont on comprend bien l’intérêt. Mais on comprend aussi les contraintes auxquelles doivent faire face la commission des finances, le Gouvernement et notre industrie, notamment automobile.

Cela étant, en écoutant M. Fouché, je me disais qu’à force d’attendre on n’est jamais prêt. Tel est le cas également en matière de drones, entre autres.

La fiscalité est tout de même un moyen d’incitation à évoluer un peu plus vite. Je comprends bien qu’on ne puisse pas faire marche arrière, compte tenu de la situation budgétaire de notre pays, mais il n’empêche qu’il faut trouver des mesures incitatives permettant d’obtenir des résultats dans un délai raisonnable. Cette question se pose et va continuer à se poser à chaque exercice budgétaire.

On ne peut pas pénaliser les entreprises, on ne peut pas revoir les taux de fiscalité parce que notre budget est trop contraint. Or, pendant ce temps-là, on ne progresse pas dans une voie qui soit plus écologique, ou plus technique, qu’il s’agisse des véhicules électriques ou hybrides.

Quoi qu’il en soit, le problème demeure. Il faut donc trouver un moyen, même si ce n’est pas au travers d’une mesure d’incitation fiscale, de faire progresser la situation. C’était l’objectif de Chantal Jouanno et de Michel Canevet.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Je ne veux pas prolonger trop longtemps ce débat, que nous avons déjà eu la semaine dernière. Malgré tout, chers collègues, j’aimerais revenir sur vos propos.

Vous nous avez dit qu’on ne pouvait pas prendre cette mesure aujourd'hui, car il fallait laisser aux industriels le temps de s’adapter. Cela fait un moment qu’on en parle et les Américains ont, semble-t-il, compris le message. Peut-être certains pensent-ils pouvoir gagner parce que les politiques ne feront rien. Pourtant, cela fait longtemps qu’on dit qu’il n’est pas normal que le diesel soit favorisé fiscalement par rapport à l’essence. Pourquoi, comme les Américains, les Français n’entendent-ils pas le message ? C’est la vraie question.

Par ailleurs, nous sommes tous pour l’emploi dans cet hémicycle. Mais quelles filières faut-il défendre ? Celles qui portent atteinte à la santé, celles qui sont condamnées, à l’instar du secteur du diesel qui ne s’exporte pas ? Si ce sont ces filières-là que vous avez envie de défendre, allez-y ! Nous, nous préférons soutenir la filière des véhicules hybrides, qui sont fabriqués dans des usines implantées en France, monsieur le rapporteur général. À l’inverse, on n’est pas sûr que tous les véhicules diesel seront produits en France puisque, aujourd'hui, même les constructeurs français se délocalisent. Et l’on pourrait parler aussi de la délocalisation des bénéfices…

Donc, on pourrait discuter longtemps de cette question, mais les véhicules hybrides sont déjà fabriqués en France et on souhaiterait justement que les constructeurs français adaptent leur offre au lieu de mettre toute leur énergie à bloquer l’évolution inéluctable des voitures économes et des voitures qui ne fonctionnent pas au diesel.

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit que notre proposition contredisait la réglementation européenne et peut-être faut-il y réfléchir davantage. En tout cas, il n’est pas normal – et vous pouvez, si vous le préférez, rendre déductible la TVA pour l’essence – qu’une fiscalité différente soit appliquée à l’essence et au diesel. À chaque fois qu’on a ce débat, c’est la même chose, qu’il ait eu lieu l’année dernière ou voilà deux ou trois ans ! Mais les constructeurs ont eu le temps de se préparer ! Vous avez, monsieur Fouché, parlé d’un ministre écologiste chargé de l’énergie, cela remonte donc vraiment à très loin !

M. Alain Fouché. Non, c’est récent !

M. Jean Desessard. C’est un choix politique : veut-on que le secteur automobile soit une filière d’avenir ? Veut-on se préoccuper de la santé des gens quitte à réfléchir aux normes fiscales qu’il faut mettre en place ?

Quand il est question de sécurité routière, on ne lésine pas sur les moyens nécessaires. Le chiffre des morts dû au diesel n’est pas remis en cause. Or on favorise le diesel qui est à l’origine de morts. On pourrait lui appliquer la même fiscalité qu’aux autres carburants, or on le favorise !

M. Alain Fouché. Il faut que les choses se fassent progressivement !

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je voudrais préciser deux points.

D’abord, je n’ai évoqué aucun élément de politique industrielle ; j’ai mis en avant le droit à déduction de la TVA et les règles communautaires.

Par ailleurs, je rappelle que le Gouvernement propose de mettre en place un bonus important pour l’acquisition de véhicules propres en remplacement de véhicules diesel anciens. J’ose espérer que vous apporterez votre soutien à cette proposition. Il me semble de mémoire qu’on va jusqu’à 10 000 euros…

M. Alain Fouché. Avec les régions, 15 000 euros !

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En tout cas, quand un effort important est consenti pour le remplacement des véhicules diesel anciens – qui sont les plus polluants – par l’intermédiaire du système du bonus-malus, on ne peut pas dire que rien n’est fait ni que la seule réponse soit systématiquement qu’il faut attendre. Mais la TVA n’est pas l’outil pertinent sur ce dossier, comme je m’en suis expliqué tout à l’heure.

Je maintiens donc l’avis défavorable du Gouvernement sur ces amendements.

M. Alain Fouché. Bonne réponse !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-225 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe écologiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 34 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 336
Pour l’adoption 30
Contre 306

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° I-226 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

II. – RESSOURCES AFFECTÉES

A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales

Articles additionnels après l’article 8 bis (suite)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2015
Articles additionnels après l'article 9

Article 9

I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2015, ce montant est égal à 36 607 053 000 €. »

II. – A. – Les articles L. 2335-3 et L. 3334-17 du même code sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de 2015, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, sont minorées par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

B. – Les articles 1384 B et 1586 B du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de 2015, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, est minorée par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

C. – Le septième alinéa du II de l’article 21 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 30 décembre 1991) est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, est minorée par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

D. – 1. Le dernier alinéa du A du IV de l’article 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances et du A du III de l’article 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, est minorée par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

2. L’avant-dernier alinéa du III de l’article 7 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, à l’exception des communes mentionnées au 1° de l’article L. 2334-18-4 du code général des collectivités territoriales, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, sont minorées par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

E. – Le dernier alinéa du IV de l’article 6 de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d’orientation sur la forêt, du II de l’article 137 et du B de l’article 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, est minorée par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

F. – Le dernier alinéa du IV bis de l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2008, est minorée par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

G. – Le dernier alinéa du B de l’article 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville, du III de l’article 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement des territoires et du B du III de l’article 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, le huitième alinéa du III de l’article 95 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997) et le neuvième alinéa du B du IV de l’article 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances sont complétés par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2009, sont minorées par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

H. – Le dernier alinéa du 2.1.2 et du III du 5.3.2 de l’article 2 de la loi n° 2009–1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, ces mêmes compensations, calculées selon les modalités prévues à l’alinéa précédent, sont minorées par application des taux d’évolution fixés depuis 2009 et du taux de minoration prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

I. – Le dernier alinéa du I du III de l’article 51 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, le montant de la même dotation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés depuis 2011, est minoré par application du taux prévu au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

J. – 1. Le 8 de l’article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 précitée est ainsi modifié :

a) Le dernier alinéa du XVIII est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, cette minoration s’effectue par application à chacun de ces éléments, avant leur agrégation pour former la dotation au profit des départements, des taux d’évolution fixés depuis 2011 et du taux de minoration prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. » ;

b) Le dernier alinéa du XIX est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2015, cette minoration s’effectue par application à chacun de ces éléments, avant leur agrégation pour former la dotation au profit des régions et de la collectivité territoriale de Corse, des taux d’évolution fixés depuis 2011 et du taux de minoration prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015. »

K. – Le II de l’article 154 de la loi n° 2004–809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est complété par un J ainsi rédigé :

« J. – Au titre de 2015, les compensations calculées selon les A, B et C du présent II, mentionnées au II de l’article 9 de la loi n° … du … de finances pour 2015, et auxquelles sont appliqués, conformément au même article 9, le taux d’évolution résultant de la mise en œuvre du II de l’article 36 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008 et les taux d’évolution fixés par le D du présent II au titre de 2009, le E au titre de 2010, le F au titre de 2011, le G au titre de 2012, le H au titre de 2013 et le I au titre de 2014 sont minorées par application du taux prévu pour 2015 au III de l’article 9 de la loi n° … du … précitée. »

III. – Le taux d’évolution en 2015 des compensations mentionnées au II est celui qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2014 pour l’ensemble de ces compensations en application des dispositions ci-dessus, aboutit à un montant total pour 2015 de 556 019 137 €.

IV. – (Supprimé)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Germain, sur l'article.

M. Jean Germain. Je souhaite présenter la position de mon groupe sur l’article 9 et le raisonnement qui la sous-tend.

Depuis deux jours, nous avons adopté des amendements tendant à sanctuariser un certain nombre de taxes locales. L’objectif était non pas de nous opposer à la simplification ou à la modernisation, mais d’indiquer que les collectivités territoriales, dans le cadre de la Constitution – et nous ne confondons pas la libre administration de ces collectivités avec tout autre principe –, doivent conserver leur autonomie fiscale.

Pour le reste, nous allons dans le même sens, en ce qui concerne tant la lutte contre le déficit budgétaire et la dette, qui est trop importante, que le soutien à la politique économique du Gouvernement et à la croissance.

Sur le premier point – la politique budgétaire –, nous ne contestons pas la nécessité de réaliser des économies. Nous nous inscrivons dans la trajectoire qui a été présentée par le Gouvernement et qui va en ce sens. Nous n’allons pas au-delà comme d’autres, car nous estimons que 50 milliards d’euros d’économies, c'est déjà un montant suffisant et qu’il faut réussir à les faire !

Nous pensons aussi que, malgré certaines remarques faites par la Cour des comptes dans son rapport, les collectivités locales sont globalement bien gérées. La plupart de nos collègues qui sont aux responsabilités font honneur à la confiance que leur accordent leurs concitoyens. Nous souhaitions le faire observer.

Dans le même temps, je le répète, nous approuvons la nécessité de faire des économies. Et nous ne sommes pas les seuls. Je lisais ce matin une interview du président du Sénat Gérard Larcher relatée dans le journal La Montagne daté du 17 novembre. Il annonçait : « La commission des finances travaille sur une réduction des dotations aux collectivités locales, parce qu’il faut qu’elles participent à l’effort budgétaire. » Il ajoutait qu’elle « devrait faire des propositions de lissage […], car il n’est pas question de dégrader […] le solde budgétaire ». Nous le verrons, c’est effectivement ce que propose la grande majorité de la commission des finances.

Nous allons donc dans ce sens. En revanche, nous demandons au Gouvernement de tenir compte du fait que la baisse de la dotation ajoutée à la péréquation, telles qu’elles sont menées actuellement, aboutiront à mettre un certain nombre de collectivités dans une situation intenable cette année ou l’année prochaine.

M. Philippe Dallier. Nous sommes d’accord !

M. Jean Germain. Il faut en tenir compte dès maintenant !

M. Alain Gournac. Absolument !

M. Jean Germain. C'est la première raison pour laquelle nous avons déposé un amendement visant à un lissage de la réduction de la dotation.

M. Philippe Dallier. Un petit lissage !

M. Jean Germain. La deuxième raison pour laquelle nous faisons cette proposition, c’est que l’on ne peut pas traiter séparément le déficit et la croissance. Pour simplifier, il ne faut pas que le malade meure guéri ! Tout le monde le sait, les collectivités locales jouent un rôle extrêmement majeur dans le domaine de l’investissement public civil. Nous sommes convaincus qu’un certain nombre d’entre elles seront amenées, pour des raisons soit réelles soit psychologiques, à diminuer de façon très importante leurs investissements cette année ou l’année prochaine.

Ce n’est pas une bonne chose, car nous avons besoin d’une croissance plus importante. Cela dépasse les analyses macro-économiques, mais chacun sait bien, ici ou là et dans chaque département, que c’est aussi grâce aux investissements des collectivités locales que telle petite ou moyenne entreprise ou tel artisan peut conserver certains de ses employés ou de ses ouvriers.

Monsieur le secrétaire d’État, ne voyez aucune autre motivation derrière notre position. Nous savons bien que des réponses ne nous seront peut-être pas apportées immédiatement, mais nous souhaitions présenter la philosophie du groupe socialiste sur l’ensemble des questions qui vont être abordées. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fouché, sur l'article.

M. Alain Fouché. Le projet de budget pour 2015 est synonyme d’impasse budgétaire pour bon nombre de collectivités, comme l’a souligné mon collègue Jean Germain.

D’une part, monsieur le secrétaire d'État, vous augmentez les charges des communes – on évoquera notamment la réforme des rythmes scolaires – et, d’autre part, vous diminuez de façon drastique leurs dotations, à commencer par la dotation globale de fonctionnement, la DGF.

Prenez la mesure de l’effet d’un tel projet de budget sur la situation économique de notre pays, déjà en perte de vitesse. La baisse cumulée de ces dotations de 28 milliards d’euros d’ici à 2017 est inacceptable pour les collectivités. Elle l’est encore plus quand on sait les conséquences dramatiques sur l’investissement et sur l’emploi et donc sur les entreprises et sur l’artisanat. Je le rappelle, les collectivités représentent 70 % de l’investissement public.

Pour ma part, je me réjouis de l’adoption par la commission des finances d’un amendement tendant à la suppression de l’article 9 ter relatif aux fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, amendement qui a recueilli un consensus. En effet, créer une nouvelle dotation de soutien à l’investissement local avec des crédits déjà affectés à une autre était un non-sens. J’ajoute qu’on ne connaît ni la destination ni les modalités exactes de répartition qui ont été envisagées.

Je prendrai l’exemple des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle relatifs aux centrales nucléaires, qui concernent plus de 20 % des départements, notamment le mien, la Vienne.

Dans mon département, près de 20 millions d’euros versés par la centrale nucléaire de Civaux au fonds de péréquation étaient auparavant entièrement répartis par le conseil général. Aujourd’hui, ce sont 11,5 millions d’euros qui sont distribués par le département aux 266 communes défavorisées et de l’intercommunalité, l’État répartissant depuis 2011 la part réservée aux communes d’accueil. Mais, cette année-là, il avait fallu que les élus, tous horizons confondus là aussi, soient très vigilants.

Ainsi, pour la commune de Joussé, commune rurale d’un peu plus de 300 habitants – mais on pourrait prendre de nombreux autres exemples ! –, cela représente 24 000 euros par an sur un budget de 250 000 euros, soit près de 10 %. Chaque année, cette somme est intégrée au budget communal, le tout étant basé sur la dotation de 2009. Les communes auront donc des difficultés supplémentaires à boucler leur budget, car les projets programmés ont pris en compte ces dotations.

La réforme des rythmes scolaires, la baisse des dotations, la suppression des fonds de péréquation vont mettre les communes à terre. C'est dramatique !

Pour finir, je rappellerai que l’installation d’une centrale nucléaire avait pour objectifs prioritaires de répondre à la demande énergétique et de jouer un rôle dans le cadre de l’aménagement du territoire ; de créer des emplois ; d’apporter une richesse humaine et financière aux territoires concernés. Ce fut, dans les années 1980-1981, pour beaucoup d’élus de ma sensibilité, un dossier difficile à porter compte tenu du contexte politique. Naturellement, les socialistes sont ensuite quelque peu revenus sur tout cela…

Des engagements avaient été pris par l’État à l’époque à l’égard des collectivités, s’agissant notamment de la répartition de la taxe professionnelle. Ils doivent être tenus ! S’ils ne l’étaient pas, eu égard à tous les financements qui sont retirés aux collectivités, je me pose la question de savoir si on ne veut pas en arriver, de façon plus ou moins déguisée, à faire disparaître les communes… (MM. Michel Bouvard et Alain Gournac applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard, sur l'article.

M. Michel Bouvard. Personne ne conteste dans cet hémicycle le fait que, comme l’État, les collectivités locales doivent faire des économies et contribuer à l’effort de redressement des comptes publics, même si leur gestion est moins dispendieuse que celle de l’État.

On peut débattre du montant de la réfaction de la DGF, mais la conséquence indirecte de cette réduction des dotations est la montée en puissance de la péréquation. Ces deux phénomènes se conjuguent, ce qui est nouveau puisque, avant cette année, la DGF ne diminuait pas.

Je sais que le discours que je vais tenir sur la péréquation n’est pas correct parce qu’il donne le sentiment que je refuse la solidarité entre les territoires. Monsieur le secrétaire d’État, la péréquation est évidemment nécessaire et doit être appliquée, mais elle ne doit pas l’être aveuglément ! Elle ne peut pas ne pas prendre en compte la spécificité des charges des communes et des départements qui ne peuvent être les seuls chargés de l’action sociale.

La péréquation ne peut pas, ne doit pas, ignorer que certaines collectivités ont laissé filer les dépenses de fonctionnement, alors que d’autres les maîtrisaient pour investir et se voient aujourd’hui pénalisées.

La péréquation ne peut pas non plus ne pas tenir compte du fait que certaines collectivités ont maîtrisé leur fiscalité, alors que d’autres ne l’ont pas fait, et pas toujours en raison de charges incontournables.

La péréquation doit donc être révisée, non pas dans son principe, mais dans ses composantes. Le revenu moyen par habitant ne peut pas être considéré comme un facteur représentatif des charges des collectivités.

M. Philippe Dallier. Ce n’est pas si mal !

Mme Marie-France Beaufils. C’est mieux que rien !

M. Michel Bouvard. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en même temps que nous devons engager une réflexion sur la reconstruction de la DGF, nous devons nous interroger sur la péréquation.

La territorialisation de la péréquation des communes, telle qu’elle existait pour la fiscalité économique, au travers des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, qui viennent d’être évoqués, permettait de rendre cette péréquation admissible par tous, mais aussi d’en adapter les critères à la réalité territoriale. La péréquation, telle qu’elle s’exerce aujourd'hui, au travers du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, ne tient pas compte de ces différences. En outre, la progression linéaire de ce fonds, conjuguée à la baisse de la DGF, pénalise lourdement certaines communes.

Il n’est pas normal, monsieur le secrétaire d'État, que, toutes les collectivités ne soient considérées comme riches que dans quatre départements français, dont trois de montagne. Je connais des communes classées défavorisées – à juste titre – qui se voient prélever des fonds au titre du FPIC. Telle est la réalité.

La péréquation ne peut pas non plus ne pas prendre en compte la réalité des départements. Ces derniers subissent aujourd'hui, en la matière, un phénomène de triple peine. Je comprends la péréquation « en plein », sur les recettes, au travers des prélèvements sur les droits de mutation à titre onéreux, les DMTO. La péréquation « en creux », via la réfaction de la DGF, retire plus à certains départements qu’à d’autres, sur les seuls critères de richesse fiscale et de potentiel financier. On oublie qu’il fut un temps où la compensation d’un certain nombre de charges transférées aux départements, comme l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, était moindre dans les départements les mieux dotés sur la base de ces deux critères… Or, aujourd'hui, ce surplus n’existe plus, puisqu’il est prélevé au titre de la péréquation « en plein ». Enfin, aucune péréquation n’existe pour un certain nombre de dépenses spécifiques – par exemple, pour l’entretien des réseaux routiers par les collectivités de montagne.

Ainsi, je ne bénéficie d’aucune péréquation pour l’entretien des voiries d’altitude. Il n’existe pas davantage de péréquation pour ce qui concerne les dépenses des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS. Or plus les risques technologiques et naturels sont élevés, plus la population saisonnière est nombreuse, plus les schémas que les préfets imposent aux SDIS, dont ils restent l’autorité décisionnaire, sont coûteux. Au final, les dépenses par habitant en matière de SDIS sont très différentes d’un département à l’autre.

Mes chers collègues, c'est la raison pour laquelle je vous propose une pause dans le domaine de la progression de la péréquation. Je souhaite que, dans le débat qui va s’ouvrir sur les composantes de la DGF, nous discutions également de la péréquation, des différences de charges et de la réalité de la situation financière de chaque collectivité.