Sommaire

Présidence de M. Jean-Léonce Dupont

Secrétaires :

Mme Odette Herviaux, M. Jean-François Humbert.

1. Procès-verbal

2. Prise d’effet de nominations à deux commissions mixtes paritaires

3. Dépôt de rapports

4. Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité

5. Orientation des finances publiques et règlement du budget de l’année 2013. – Débat et discussion puis rejet d’un projet de loi en procédure accélérée

Discussion générale : MM. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics ; François Marc, rapporteur général de la commission des finances ; Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales.

MM. Aymeri de Montesquiou, Thierry Foucaud, François Fortassin, Jean-Vincent Placé, Mmes Fabienne Keller, Michèle André, M. Vincent Delahaye, Mme Nicole Bricq, MM. Serge Dassault, Jean-Yves Leconte.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances ; Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.

M. Michel Sapin, ministre.

Clôture de la discussion générale.

PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené

projet de loi

Article liminaire. – Adoption

Article 1er

Amendement n° 1 de M. Vincent Delahaye. – MM. Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général ; Michel Sapin, ministre. – Retrait.

Adoption de l'article.

Articles 2 à 8. – Adoption

Article additionnel après l'article 8

Amendement n° 2 de M. Vincent Delahaye. – MM. Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général ; Michel Sapin, ministre. – Retrait.

Rejet, par scrutin public, de l’ensemble du projet de loi.

6. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

7. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. – Discussion d'un projet de loi

Discussion générale : Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé ; Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales ; Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances.

MM. Dominique Watrin, Gilbert Barbier.

8. Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont

9. Hommage à un soldat français mort au Mali

10. Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale (suite) : MM. Jean Desessard, Jean-Noël Cardoux, Gérard Roche, Mme Christiane Demontès, M. Ronan Kerdraon, Mme Aline Archimbaud, M. Georges Labazée.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.

Clôture de la discussion générale.

Question préalable

Motion n° 66 de Mme Isabelle Pasquet. – Mmes Isabelle Pasquet, Jacqueline Alquier, M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales ; Mme Marisol Touraine, ministre. – Rejet par scrutin public.

Renvoi de la suite de la discussion.

11. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Léonce Dupont

vice-président

Secrétaires :

Mme Odette Herviaux,

M. Jean-François Humbert.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente-cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 10 juillet 2014 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Prise d’effet de nominations à deux commissions mixtes paritaires

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution des commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant réforme ferroviaire et de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de la SNCF.

En conséquence, les nominations intervenues lors de notre séance du jeudi 10 juillet prennent effet.

3

Dépôt de rapports

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations sur la situation de cet établissement en 2013.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des finances.

M. le président du Sénat a reçu le rapport 2013 de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer, l’IEDOM.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des finances, ainsi que, pour information, à la délégation sénatoriale à l’outre-mer.

4

Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 11 juillet 2014, deux décisions du Conseil relatives à des questions prioritaires de constitutionnalité portant sur l’article 721 du code de procédure pénale, procédure d’exécution des peines privatives de liberté, n° 2014-408 QPC, et sur l’article L. 443-15 du code de la construction et de l’habitation, dispositions applicables aux cessions, aux transformations d’usage et aux démolitions d’éléments du patrimoine immobilier, n° 2014-409 QPC.

Acte est donné de ces communications.

5

 
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Discussion générale (suite)

Orientation des finances publiques et Règlement du budget de l'année 2013

Débat et discussion puis rejet d’un projet de loi en procédure accélérée

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article liminaire
Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article liminaire

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur l’orientation des finances publiques et la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013 (rapport d’information n° 717, projet n° 715, rapport n° 716).

La conférence des présidents a décidé de joindre la discussion générale de ce projet de loi au débat sur l’orientation des finances publiques.

Dans le débat commun, la parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, il me revient d’ouvrir le débat sur l’exécution du budget de 2013 et sur les perspectives des finances publiques pour 2015.

Le Gouvernement mène depuis 2012 une politique de redressement économique, budgétaire et social. La crise financière de 2008 et son rebond, puis celle de l’euro en 2011 ont laissé des traces, des blessures profondes dans notre économie.

La France a connu quasiment six années de stagnation économique, avec une croissance nulle entre 2008 et 2012, puis limitée à 0,3 % en 2013. Elle a également subi une très forte hausse du chômage.

Face à une telle situation, nous avons dû adopter en urgence des mesures pour rééquilibrer nos finances publiques en 2012. Car, nul ne peut le nier, la dette publique brute avait augmenté de 26,2 % du produit intérieur brut entre 2007 et 2012, le déficit public atteignant 5,2 % du PIB en 2011, soit plus de 100 milliards d’euros. Sans ces mesures, le déficit aurait dépassé 5 % du PIB en 2012.

En 2013 et 2014, nous avons continué les efforts de redressement des finances publiques. Dans un contexte économique difficile, nous nous fixons d’abord comme objectif pour 2015, et au-delà, le retour durable à plus de croissance, donc à plus d’emploi, avec, d’une part, le pacte de responsabilité et de solidarité et, d’autre part, l’assainissement de nos comptes publics.

Cette politique vise à sortir le pays de la crise économique dans laquelle il s’est enfoncé depuis plusieurs années et à restaurer les finances publiques, dont la dégradation est sans précédent en temps de paix.

Le débat d’aujourd’hui nous conduit d’abord à examiner l’exécution budgétaire constatée en 2013. Vous en connaissez les données ; j’en rappellerai simplement les grandes lignes.

La dépense publique a été tenue. La dépense de l’État, sous norme « en valeur », a été sous-exécutée à hauteur de 144 millions d’euros. L’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, a été sous-exécuté d’environ 1,4 milliard d’euros. La dépense publique dans son ensemble a progressé au rythme le plus faible que la France ait connu depuis 1998, à 2 % en valeur.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est exceptionnel !

M. Michel Sapin, ministre. Le Gouvernement dispose de plusieurs leviers pour tenir la dépense, à la fois en budgétisation et en gestion. Leur mobilisation a contribué à ce que l’on ne peut qualifier que de « bons et exceptionnels » résultats.

En revanche, l’évolution des recettes publiques est, elle, beaucoup plus dépendante de la conjoncture économique.

En 2013, la croissance a été positive, dans un contexte où beaucoup prédisaient voilà encore un an une récession et où la zone euro dans son ensemble a connu un recul de son activité. Toutefois, cette croissance est restée beaucoup trop faible.

En 2013, le Gouvernement a fait le choix de ne pas compenser les conséquences de cette situation. Si l’effort budgétaire a été considérable, à près de 1,5 point de PIB, comme l’a reconnu la Cour des comptes, la réduction du déficit public a été moindre, compte tenu des effets du cycle économique.

Les effets de la conjoncture économique sur les recettes publiques expliquent la plus grande part de l’écart entre la prévision des déficits publics et l’exécution. Le déficit public, prévu à 3 % du PIB, a été exécuté à 4,3 %, soit un décalage de 1,3 point, dont plus de la moitié, en l’occurrence 0,7 point, tient à des recettes moindres. En effet, la dégradation de la conjoncture économique a entraîné non seulement une faible croissance de l’activité, mais également une élasticité des recettes à la croissance très inférieure à l’unité.

L’exécution pour 2013 est d’abord un rappel de l’humilité que l’on doit conserver en matière budgétaire. Les pouvoirs publics disposent de moyens pour agir sur la dépense de l’État et sur la santé. En les mobilisant, nous sommes en mesure de tenir la dépense publique. En revanche, l’évolution des recettes publiques est soumise à l’aléa conjoncturel.

En loi de finances pour 2013, nous avons adopté un ensemble de dispositions en recettes appelant les ménages les plus aisés à un effort particulier. Ces mesures ont globalement eu l’effet budgétaire escompté. Elles ont permis de réduire le déficit public de 1,4 % du PIB, soit un niveau proche de la prévision de 1,6 %.

Toutefois, en parallèle, les évolutions économiques sous-jacentes aux recettes publiques n’ont pas été bonnes. En particulier, le bénéfice fiscal des sociétés financières a chuté de l’ordre de 7 % en 2013, ce qui a pesé sur le rendement de l’impôt sur les sociétés. En outre, la construction immobilière a également fortement diminué, d’où une baisse des recettes de TVA.

Nous jugeons l’exécution 2013 globalement satisfaisante, même si tous les objectifs budgétaires n’ont pas été atteints. Les dépenses de l’État et de santé ont été tenues. Le déficit public a été réduit de 4,9 % en 2012 à 4,2 %. Le déficit structurel, c’est-à-dire corrigé du cycle économique, a été de 3,1 %. C’est quasiment son plus bas niveau depuis 2002.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Bref, tout va bien !

M. Michel Sapin, ministre. Mais les recettes ont été moindres que prévu. C’est la conséquence directe de la situation économique. Cela renvoie à ce que les économistes appellent les « stabilisateurs automatiques » : les prélèvements se réduisent lorsque l’économie va mal, atténuant le ralentissement, et augmentent lorsqu’elle va bien.

J’en viens aux perspectives de nos finances publiques.

Comme je l’ai indiqué, la politique du Gouvernement vise à sortir notre pays de la crise économique qui le frappe depuis de trop nombreuses années et à poursuivre l’assainissement de nos finances publiques. Nous proposons donc de mobiliser de nouveaux moyens pour renouer avec l’emploi et soutenir durablement le pouvoir d’achat des ménages, tout en commençant dès à présent à réduire la pression fiscale sur les foyers aux revenus modestes et moyens. C’est l’objet du pacte de responsabilité et de solidarité, dont la Haute Assemblée a eu l’occasion de débattre lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative ; je n’y reviens pas.

Pour financer le pacte et poursuivre l’assainissement budgétaire, le Gouvernement propose de freiner la dépense publique, afin de dégager 50 milliards d’euros d’économies à l’horizon 2017.

La part de la dépense publique dans la richesse nationale n’a eu de cesse d’augmenter depuis des décennies, passant de 35 % du PIB en 1960 à 57 % du PIB en 2013.

Il faut rompre avec l’idée selon laquelle un bon budget serait un budget en hausse ! Il faut rompre avec l’idée selon laquelle augmentation des moyens rimerait nécessairement avec amélioration de la qualité des services rendus aux usagers !

M. Aymeri de Montesquiou. On a déjà entendu ça…

M. Michel Sapin, ministre. Force est de le constater, la hausse de la dépense publique n’est pas nécessairement gage de croissance.

Vous connaissez la répartition des 50 milliards d’euros d’économies, qui est déterminée en fonction de la part de chaque administration dans les dépenses publiques totales. L’État assumera 18 milliards d’euros d’économies, contre 11 milliards d’euros pour les collectivités territoriales – j’imagine que nous aurons l’occasion d’en débattre –, 10 milliards d’euros pour l’assurance maladie et 11 milliards d’euros pour les autres organismes de protection sociale.

Les plafonds des missions du budget de l’État, qui vous ont été transmis mercredi dernier, permettront de dégager les 18 milliards d’euros d’économies prévus au titre des dépenses des administrations centrales, entre 2015 et 2017.

Tous les ministères, tous les opérateurs de l’État prendront part à un tel effort. Pour autant, les secteurs prioritaires, à savoir l’éducation nationale, la justice et la sécurité, bénéficieront de moyens supplémentaires, et les créations d’emplois au sein des administrations concernées seront assurées comme prévu. Certes, tous les ministères seront concernés par les économies. Mais nos priorités sont maintenues.

C’est d’abord la priorité accordée à la jeunesse, avec la sanctuarisation des créations d’emplois annoncées dans l’éducation nationale et l’enseignement supérieur – j’y ai fait référence – et la hausse des crédits de 1,8 milliard d’euros au cours des trois prochaines années.

C’est ensuite la préservation de l’avenir et le renforcement de la croissance, via le budget de la recherche et les dépenses en faveur de l’innovation. L’exécution du programme d’investissements d’avenir sera également poursuivie.

C’est aussi la priorité donnée aux créations d’emplois au sein du ministère de la justice, 1 800 en trois ans, ou dans la police et la gendarmerie, 1 400 en trois ans, qui seront elles aussi assurées.

C’est encore une approche fine de chaque mission. Par exemple, les crédits de la mission « Culture » seront en légère hausse, notamment pour la création, le patrimoine et l’enseignement supérieur artistique, grâce aux efforts d’économies demandés au secteur de l’audiovisuel. Les moyens financiers seront ajustés aux besoins réels des organismes concernés, en cohérence avec les contrats d’objectifs et de moyens.

C’est enfin un financement garanti des dépenses résultant des minima sociaux financés par l’État, qu’il s’agisse de l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, du revenu de solidarité active, le RSA, du moins en grande partie, ou des allocations de logement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, les orientations de la politique économique et budgétaire que vous propose le Gouvernement jusqu’en 2017 sont claires et cohérentes. Elles visent à poursuivre et même à amplifier le mouvement engagé dès 2012 pour répondre à la profonde crise économique et budgétaire qui entrave la marche de notre pays depuis plusieurs années.

Vous le savez, l’emploi est une priorité incontournable du Gouvernement. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, et le pacte de responsabilité conduiront à un allégement du coût du travail de 30 milliards d’euros. C’est un nouveau levier que nous actionnons pour assurer un retour durable à plus de croissance et d’emploi, en complément des contrats de génération, des emplois d’avenir et de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.

L’assainissement des finances publiques sera poursuivi. À la fin de l’année 2013, nous avions apuré la quasi-totalité des déséquilibres budgétaires accumulés entre 2002 et 2012. Pour les années à venir, le Gouvernement vous propose de prolonger ces efforts par des économies en dépenses, tout en nous donnant les moyens d’une croissance plus forte et durable.

À cette fin, nous rendrons à nos entreprises leurs capacités d’embauche et d’investissement, et nous commencerons à réduire la pression fiscale sur les ménages.

Les économies n’ont pas pour seul objet de réduire les déficits. Elles permettront également de pérenniser notre modèle social, qui ne peut pas être indéfiniment financé à crédit, et d’assurer une gestion exemplaire du service public, seul patrimoine des plus modestes des Français.

Répondre à la plus grave crise économique et budgétaire que notre pays ait eu à connaître depuis la Libération est une responsabilité historique. Nous l’assumons pleinement, en restant fidèles à nos valeurs, à nos priorités, à la justice et à la solidarité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat commun est une étape importante, avant l’examen à l’automne prochain non seulement des traditionnels textes budgétaires annuels, mais également d’un nouveau projet de loi de programmation des finances publiques.

Mme Nicole Bricq. Cela promet d’être intéressant !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ce futur texte devrait inscrire dans la loi les plafonds de crédits des différentes missions pour les trois prochaines années figurant dans le document « tiré à part » que le Gouvernement a transmis la semaine dernière. Il devrait également préciser un certain nombre de règles de gouvernance de nos finances publiques, en matière par exemple de maîtrise des dépenses fiscales et des taxes affectées. Il permettra surtout de redéfinir la trajectoire de nos finances publiques.

Il s’agira notamment d’arrêter pour les années à venir les hypothèses de PIB et de croissance potentiels, qui, nous le savons, ont de fortes conséquences sur une trajectoire de solde structurel.

Dans notre débat commun, j’aimerais aborder trois questions.

Premièrement, le Gouvernement a-t-il opéré les bons arbitrages et pris les décisions sur les recettes et les dépenses de nature à redresser nos finances publiques ?

Deuxièmement, la trajectoire dans laquelle ces différentes mesures s’inscriront suit-elle une logique d’équilibre susceptible de préserver l’emploi tout en assurant une bonne répartition des efforts ?

Troisièmement, comment allons-nous aborder l’avenir sous l’angle de l’investissement public et de la redistribution ?

Mes chers collègues, j’évoquerai ces différents sujets en donnant acte au Gouvernement de la qualité des arbitrages rendus, espérant ainsi vous convaincre d’adopter le texte sur lequel nous sommes invités à nous prononcer.

Comme M. le ministre l’a rappelé, le déficit structurel des administrations publiques s’est établi à 3,1 % du PIB en 2013, contre un objectif de 1,6 % fixé par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017. C’est ce différentiel qui a conduit au déclenchement du mécanisme de correction budgétaire, après que le Haut Conseil des finances publiques a constaté, dans son avis du mois de mai dernier, l’écart important entre le solde structurel et la prévision fixée.

Dès lors, le Gouvernement était dans l’obligation d’exposer dans le projet de loi de règlement les raisons des écarts identifiés, puis de proposer des mesures de corrections dans le rapport sur l’évolution de l’économie nationale et sur les orientations des finances publiques, préalable à notre débat. Cela a été fait.

Un tel chaînage justifie pleinement à lui seul que nous débattions aujourd’hui simultanément des résultats de l’an passé et des orientations pour les années à venir.

Revenons très brièvement sur les raisons de cet écart important.

Le différentiel résulte d’abord, nous le savons, des révisions apportées aux exercices antérieurs ; nous avons déjà eu l’occasion d’en débattre lors de l’examen de l’article liminaire du projet de loi de finances rectificative. Il s’explique également, pour un tiers, par la faible élasticité des prélèvements obligatoires au PIB. Et il découle pour le reste d’un rendement plus faible qu’attendu des mesures nouvelles en recettes et d’un effort structurel en dépenses lui aussi inférieur à la prévision, du fait de la faiblesse de l’inflation.

Ainsi l’écart tient-il majoritairement à la situation macroéconomique dégradée, alors même que la Cour des comptes a qualifié l’effort structurel accompli en 2013 de « considérable ».

De même, le déficit effectif des administrations s’est élevé à 4,3 %, ou à 4,2 % selon le référentiel de comptabilité nationale que l’on retient. Cela traduit une amélioration de l’ordre de 0,6 point par rapport à 2012, même s’il s’agit d’un niveau sensiblement moins favorable que le retour aux fameux 3 % de déficit public prévu pour 2013 en loi de programmation des finances publiques.

Un tel objectif correspondait aux orientations fixées par le Conseil de l’Union européenne dans le cadre de la procédure de déficit excessif engagée à l’encontre de la France en 2009. Toutefois, compte tenu de la situation économique et budgétaire, notre pays, avec d’ailleurs d’autres États de la zone euro, a obtenu au mois juin 2013 le report à 2015 de l’échéance pour corriger le déficit excessif.

En tout état de cause, vouloir atteindre coûte que coûte le niveau de 3 % de déficit effectif dès 2013 aurait contraint le Gouvernement à engager une politique budgétaire très restrictive, et d’ailleurs procyclique, en procédant à des ajustements considérables en cours d’année. Un tel choix n’aurait été souhaitable ni économiquement ni budgétairement.

Le déficit de l’État a été réduit de 12,3 milliards d’euros par rapport à 2012, mais il a excédé de 12,6 milliards d’euros les prévisions de la loi de finances initiale. Ce résultat contrasté s’explique exclusivement par des recettes fiscales inférieures aux prévisions, compte tenu d’une croissance plus faible qu’attendu, et surtout d’une élasticité des recettes au PIB exceptionnellement négative de 1,6, ce qui ne pouvait pas être anticipé.

Ainsi les recettes fiscales ont-elles augmenté de 15,6 milliards d’euros par rapport à 2012, mais elles ont été inférieures de 14,6 milliards d’euros au niveau prévu.

M. Philippe Dallier. Trop d’impôt tue l’impôt !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cher collègue, vous nous exposerez tout à l’heure vos considérations à cet égard !

M. Michel Sapin, ministre. En particulier sur les crédits de la défense !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les dépenses ont été pleinement maîtrisées. Comme M. le ministre l’a rappelé, elles ont été réduites de 140 millions d’euros sur le champ de la norme « zéro valeur » et de près de 3,5 milliards d’euros sur le champ de la norme « zéro volume ». L’ampleur de ce dernier écart s’explique par la faiblesse, d’une part, des taux d’intérêt de notre dette par rapport aux prévisions initiales et, d’autre part, de l’inflation, qui a réduit le coût de la charge de la dette liée aux titres indexés, ainsi que celui des pensions.

Cette maîtrise des dépenses est pleinement reconnue par la Cour des comptes, même si celle-ci attire l’attention, et c’est sa mission, sur les risques pour l’avenir. Car, chaque année, c’est un nouveau défi.

Pour l’année 2015, le débat d’orientation des finances publiques confirme notre trajectoire, ainsi que les engagements pris ce printemps dans le cadre du programme de stabilité et du pacte de responsabilité et de solidarité.

Ainsi, l’objectif d’un retour du déficit effectif sous les 3 % dès 2015, la diminution des prélèvements obligatoires, sous les effets de la montée en charge du CICE et du pacte de responsabilité et de solidarité, et le plan d’économies de 50 milliards d’euros pour l’ensemble des administrations publiques sur la période 2015-2017 sont confirmés.

Le plan est précisé, pour ce qui concerne l’État, dans le « tiré à part » transmis par le Gouvernement. Ce document présente les plafonds de crédits des différentes missions et montre le respect, sur la période de programmation, des normes de dépense.

Des choix ont été effectués pour permettre de financer nos priorités, notamment en faveur de la jeunesse. Ils sont exigeants, pour l’État comme pour la sécurité sociale ou les collectivités territoriales. Ils impliquent de revisiter en profondeur nos politiques publiques, en nous interrogeant systématiquement sur le champ de l’action publique, ainsi que sur ses modalités de mise en œuvre.

Un tel effort doit être l’occasion de moderniser nos services publics et d’améliorer nos procédures. C’est la condition du maintien de la qualité du service rendu à nos concitoyens. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement doit poursuivre ses travaux en faveur de la simplification et de la rationalisation des normes, par exemple dans le secteur de la construction. De telles initiatives sont des facteurs de réduction des dépenses publiques et de stimulation de la croissance.

J’en viens aux 11 milliards d’euros de réduction des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales. (Ah ! sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.) Ils appelleront des réorganisations profondes de l’action locale,…

M. Philippe Dallier. Comme c’est bien dit ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … notamment via des fusions et des mutualisations.

M. Philippe Dallier. C’est bien parti !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Nous le savons, l’exercice sera difficile pour tout le monde. Les collectivités ne disposent pas de l’ensemble des leviers de maîtrise de leurs dépenses. Il sera indispensable de poursuivre les travaux engagés pour réduire l’effet des normes sur les budgets locaux.

En tout état de cause, il convient d’infirmer les idées fausses qui sont parfois propagées ici ou ailleurs. L’objectif n’est pas d’améliorer la situation budgétaire de l’État au détriment de celle des collectivités. (M. Philippe Dallier s’exclame ironiquement.)

M. Vincent Delahaye. Il suffit de regarder les tableaux !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit bien de trouver des leviers pour maîtriser les dépenses publiques dans leur ensemble, y compris les dépenses locales.

La réduction des concours financiers de l’État aux collectivités doit permettre à ces dernières de réduire leurs dépenses et d’infléchir la tendance actuelle.

M. Jean-François Husson. C’est l’inversion de la courbe ? (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Nous nous inscrivons désormais, et j’y insiste, dans une trajectoire pleinement crédible. Cela tient aux efforts de maîtrise des dépenses de l’État et des organismes de sécurité sociale de ces deux dernières années et aux réformes qui ont été engagées et continueront à l’être. En outre, la trajectoire donne de la visibilité sur plusieurs années quant à l’évolution des prélèvements obligatoires.

M. Jean-François Husson. Vous expliquerez cela aux Français !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les taux d’intérêt de notre dette sont très faibles, et l’écart avec ceux de la dette allemande a été ramené au niveau antérieur au printemps 2011. Personne ne peut donc douter de la crédibilité de notre politique !

M. Jean-François Husson. Si, si ! Étonnamment, certains en doutent… (Sourires sur les travées de l'UMP.)

Mme Michèle André. Mais non ! Nous n’en doutons pas !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. De telles orientations doivent également redonner de la confiance aux acteurs économiques et relancer l’investissement, afin de concilier la nécessité de poursuivre notre ajustement budgétaire, tout en renouant avec une croissance plus forte et durable.

Nous le savons, l’exercice est difficile. Dans les pays les plus en difficulté de la zone euro, les ajustements ont parfois été trop violents, avec des effets sur la croissance qui ont nui à leur efficacité.

M. Philippe Dallier. C’est un début d’aveu !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. En particulier, ces mesures ont été prises au détriment de l’investissement public,…

Mme Nicole Bricq. Exactement ! Très bien !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … qui a fortement diminué, de près de 20 % dans la zone euro depuis 2009, surtout dans les pays du sud de l’Europe.

M. Philippe Dallier. Et ce sera pareil chez nous !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Une telle insuffisance de l’investissement public se constate également en Allemagne, où elle est sensiblement inférieure à la moyenne de la zone euro et où l’équilibre budgétaire prévu pour 2015 est atteint en partie au détriment de l’investissement.

Ces évolutions doivent être regardées avec attention. L’investissement public joue un rôle essentiel dans l’activité économique, la croissance potentielle et l’attractivité du pays.

L’ensemble des pays de la zone euro doivent donc non seulement veiller à faire en sorte que les choix réalisés dans le cadre du redressement des comptes évitent de peser sur l’investissement, mais également prendre des initiatives supplémentaires au niveau communautaire. De nombreuses pistes existent : développer le financement de projets par la Banque européenne d’investissement, créer une capacité budgétaire propre à la zone euro ou encore faire financer des programmes d’investissement public par l’épargne privée, dans un contexte de faibles taux d’intérêt.

À ce jour, la France a conservé un niveau d’investissement public relativement stable et élevé. Il faut s’en réjouir. Bien entendu, il est indispensable d’évaluer les investissements au regard de leur intérêt socio-économique ; le Gouvernement a mis en place des procédures utiles à cet égard. Mais prenons garde à ne pas faire des dépenses d’investissement une variable d’ajustement de notre contrainte budgétaire, qu’il s’agisse de l’État ou des collectivités territoriales.

M. Philippe Dallier. Ce sera pourtant le cas !

M. Vincent Delahaye. Pour l’État, c’est déjà fait !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit non pas de préconiser une relance budgétaire par l’investissement public – au demeurant, toute dépense d’investissement n’est pas forcément vertueuse ou utile –, mais bien d’éviter que notre ajustement ne s’effectue au détriment des investissements nécessaires à la croissance de demain.

Nous le savons, les collectivités territoriales représentent la plus grosse part de l’investissement public en France.

M. Jean-François Husson. Mais cela va changer…

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La diminution des concours financiers de l’État aura sans doute des conséquences sur leurs dépenses, ne serait-ce qu’en invitant à une sélectivité accrue des projets d’investissement. Il faudra cependant définir des mécanismes pour encourager la préservation des dépenses d’investissement, afin d’inciter les collectivités à procéder à des réformes de fonctionnement au lieu de concentrer les économies sur les projets d’investissement.

M. Philippe Dallier. Comment cela se passera-t-il ?

M. Vincent Delahaye. On peut aussi fermer des écoles et des collèges !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Nous devons également veiller à ce que la crise économique, conjuguée aux ajustements budgétaires, ne conduise pas à la poursuite du creusement des inégalités constaté au cours de ces dernières années dans l’ensemble des pays développés et dans la zone euro. Il s’agit là d’un sujet majeur.

Cela passe d’abord par une diminution du chômage,…

M. Philippe Dallier. Qui n’arrivera pas !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … que doivent permettre le retour de la croissance, la montée en puissance du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ainsi que l’allégement des cotisations sociales patronales sur les bas salaires prévu dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Le Président de la République a rappelé hier sa détermination à agir et son engagement total au service de l’emploi.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il faut aussi nous assurer du maintien de la dimension redistributive de notre système de prélèvements obligatoires et de prestations. À cet égard, les mesures prises dès cette année en faveur du bas de barème de l’impôt sur le revenu, qui devraient être pérennisées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, et les allégements de cotisations sociales salariales, qui entreront en vigueur dès le début de l’année 2015, vont indéniablement dans le bon sens. Il en va de même des réformes déjà engagées, par exemple en matière de politique familiale.

M. Jean-François Husson. Cela fait deux ans que vous nous dites cela !

M. Philippe Dallier. Mais non ! Ils ont changé d’avis entre-temps. (Sourires sur les travées de l'UMP.)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le souci de l’égalité doit nous guider dans les choix que nous devrons faire prochainement en matière de finances locales. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) D’abord, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, il nous faudra maintenir la progression de la péréquation, tant verticale qu’horizontale. Ensuite, dans la perspective du projet de loi de finances pour 2016, nous serons invités à repenser en profondeur la dotation globale de fonctionnement,…

M. Philippe Dallier. Oh ! Chiche !

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. … qui repose, vous le savez bien, mon cher collègue, sur des critères obsolètes et tient compte de variables figées et parfois anciennes. Enfin, nous serons appelés à mettre en œuvre la révision des valeurs locatives, dont le processus se poursuit avec un calendrier ajusté et exigeant.

À la lumière de tous ces arguments, je vous invite à voter en faveur du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013. Ayons à l’esprit que les engagements pris aujourd’hui pour l’avenir en matière de redressement des comptes publics ou d’action en faveur de l’investissement, de l’emploi et de la redistribution démontrent incontestablement la volonté du Gouvernement de promouvoir une stratégie équilibrée.

En outre, des réformes ambitieuses sont annoncées pour la santé – le Président de la République l’a rappelé hier - la dépendance ou la transition énergétique. Nul ne peut en douter, l’action conduite doit être à même de redonner confiance à notre pays et de lui permettre de réussir sa traversée, malgré les récifs et la mer parfois tempétueuse qui vient battre les côtes de notre vieille Europe ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-François Husson. Comme c’est mignon…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, chaque année, la commission des affaires sociales apporte son éclairage sur la situation des finances sociales dans le débat d’orientation des finances publiques.

En revanche, elle s’en remet à l’analyse de la commission des finances pour le cadrage macroéconomique et des hypothèses qui le fondent, dont l’effet est évidemment décisif pour les finances sociales, mais pas fondamentalement différent de ce qu’il représente pour les autres administrations publiques.

Cette année, le contexte dans lequel s’inscrit un tel éclairage est singulier, à plus d’un titre.

D’abord, le débat est commun avec la discussion du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, qui concerne le budget de l’État.

Ensuite, le Gouvernement a annoncé le dépôt à l’automne d’une loi de programmation des finances publiques qui devrait réviser la trajectoire de nos finances publiques à la suite du programme de stabilité 2014-2017.

Enfin, deux textes rectificatifs, l’un pour le budget de l’État et l’autre pour le financement de la sécurité sociale, sont en cours d’examen par le Parlement. Ils appellent – cela vaut en particulier pour le projet de loi de finances rectificative pour la sécurité sociale – des compensations à prévoir dans les textes financiers de l’automne.

L’information du Parlement sur l’évolution des finances publiques se situe donc un peu dans un entre-deux. La voie est tracée, elle est claire ; mais les moyens pour y parvenir, eux, ne le sont pas encore complètement.

Au sein des finances publiques, les finances sociales sont un enjeu majeur. Certes, elles représentent une part inférieure à celle des finances de l’État dans la dette et les déficits, qui sont aujourd'hui au cœur de nos préoccupations. Mais leur volume global et leur importance dans les prélèvements obligatoires en font un élément décisif dans la stratégie de redressement de nos comptes publics et de soutien à la croissance. En 2013, le montant des dépenses liées aux administrations de sécurité sociale était de 563 milliards d’euros, ce qui correspond à 27,5 % de notre richesse nationale et à 53 % des prélèvements obligatoires.

Piloter une telle masse de dépenses, c’est maîtriser un paramètre décisif des équilibres financiers de notre pays. C’est aussi une exigence de solidarité intergénérationnelle.

La dette sociale est une dette insupportable, une traite tirée sur nos enfants, alors que notre responsabilité est de préparer leur avenir.

Mme Nicole Bricq. C’est une évidence !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les comptes sociaux sont convalescents. Leur état s’améliore moins fortement que ce que nous avions programmé, et sur un rythme plus lent que ce que l’ampleur des efforts déployés aurait pu laisser espérer.

En 2013, comme les deux années précédentes, le solde des administrations de sécurité sociale a été négatif, à hauteur de 12,5 milliards d’euros, soit 0,6 % du PIB. Hors Caisse d’amortissement de la dette sociale, instance dont la vocation est d’être excédentaire, le besoin de financement est proche de 25 milliards d’euros.

Dans cet ensemble, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse s’est élevé à 15,4 milliards d’euros, soit 2,1 milliards d’euros de moins qu’en 2012, mais 1,2 milliard d’euros de plus que prévu.

Les objectifs de dépenses, en particulier l’ONDAM, ont été tenus pour la quatrième année consécutive, mais les recettes ont stagné en dépit de plus de 5 milliards d’euros de mesures nouvelles.

Comme le souligne le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, hors mesures nouvelles, l’évolution des recettes de 2013 affiche un résultat négatif, à hauteur de 8,5 %.

Une croissance atone, une masse salariale en faible progression et, surtout, un chômage élevé sont les responsables d’une telle situation.

Pour les mêmes raisons, nous ne renouerons pas avec l’équilibre des comptes sociaux en 2014, comme le prévoyait la programmation en cours. Les efforts soutenus de ces deux dernières années portent leurs fruits et créent un effet de base favorable en dépenses. Toutefois, avec une croissance en berne, les prévisions de recettes se dégradent. Au total, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, qui s’établit à 13,4 milliards d’euros, est dégradé de 400 millions d’euros par rapport aux prévisions de la loi de financement initiale.

Examinons les différentes branches du régime général de sécurité sociale.

La branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui a renoué avec l’équilibre, est le principal contributeur à la réduction du déficit. La branche vieillesse, qui a bénéficié de recettes nouvelles, améliore son solde par rapport à 2013. Le déficit de la branche famille se creuse de façon préoccupante. La branche maladie, en dépit de la sous-exécution de l’ONDAM, stabilise son solde toujours négatif.

La crise et le chômage ne sont pas seuls responsables. Nous continuons aussi à porter le poids d’un déficit structurel, cumulé année après année, qui est aujourd’hui bien difficile à résorber, alors que notre système de protection sociale doit jouer son rôle d’amortisseur et de garant de la cohésion sociale. Conséquence du déficit, la dette sociale a atteint 10,3 % du PIB en 2013.

Que faire devant ce tableau, qui, je le concède, peut paraître bien sombre ?

Trois axes de réponse peuvent être dégagés. D’abord, prenons acte du fait que nous sommes allés au bout de la logique de remise à niveau des recettes. Ensuite, poursuivons et intensifions les efforts engagés, qui portent leurs premiers fruits en matière de dépenses. Enfin, agissons sur la croissance pour desserrer l’étau du chômage.

Les mesures qui nous sont soumises dans le cadre de la traduction législative du pacte de responsabilité et de solidarité concilient trois objectifs : préserver, voire intensifier notre niveau de protection sociale au bénéfice des plus fragiles, soutenir la croissance et poursuivre résolument la réduction du déficit.

J’invite celles et ceux d’entre nous qui s’inquiètent des efforts de maîtrise des dépenses de protection sociale à y voir une garantie de pérennité de notre système.

M. Michel Sapin, ministre. Très bien !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Les efforts s’effectuent sans dégradation de la qualité du service rendu. Au contraire ! Non seulement les publics les plus fragiles sont épargnés, mais la solidarité à leur égard s’accroît.

Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des mesures prises depuis deux ans, en particulier dans le cadre du « plan pauvreté ».

Pas plus que la maîtrise des dépenses, l’augmentation des dépenses n’est une fin en soi ; c’est la juste dépense que nous devons renforcer !

Le pacte de responsabilité et de solidarité prévoit une contribution des dépenses sociales à hauteur de leur niveau dans notre richesse nationale, soit 21 milliards d’euros sur trois ans. Ce montant, loin d’être négligeable, représente environ 1 % des quelque 550 milliards d’euros de dépenses des administrations sociales chaque année. Hors assurance maladie, les économies prévues s’élèvent à 11 milliards d’euros.

Il s’agit d’abord d’agir sur la qualité de la dépense dans un processus déjà engagé, qui a vocation à se poursuivre. La rationalisation et la modernisation de la gestion de la sécurité sociale sont un impératif ; elles permettent de réduire la dépense sans affecter le niveau des prestations servies. Le programme table sur 1,2 milliard d’euros d’économies en la matière. C’est tout l’enjeu des conventions d’objectifs et de gestion des différentes branches.

Par ailleurs, 2,9 milliards d’euros sont prévus au titre des mesures déjà engagées pour les retraites et la politique familiale, cette dernière étant sollicitée à hauteur de 0,8 milliard d’euros, afin de renforcer ses effets redistributifs en direction des familles les plus fragiles.

L’assurance chômage et les régimes complémentaires de retraite contribuent à hauteur de 4 milliards d’euros au titre des mesures déjà prises ou à prendre.

Au total, l’effort de redressement fait appel au report de la revalorisation des prestations sociales à hauteur de 1,5 milliard d’euros, dont 1 milliard d’euros sur les retraites de base.

Il est également nécessaire d’agir en profondeur sur les causes des dépenses d’assurance maladie. Ce sont 10 milliards d’euros d’économies qui sont attendus au cours des trois prochaines années.

Au-delà de la poursuite d’actions déjà engagées, comme la diminution du prix des produits de santé, notamment des médicaments génériques, des mesures plus structurelles sont envisagées.

De toutes les réflexions conduites ces derniers temps, un très large consensus se dégage sur le renforcement de la pertinence et de l’efficience des parcours de soins et des séjours hospitaliers, dans un double objectif d’amélioration de la qualité des prises en charge et d’optimisation dans l’utilisation des ressources.

C’est l’enjeu de la stratégie nationale de santé qui sera prochainement soumise à notre examen.

Parallèlement aux mesures d’économies, il convient de soutenir la croissance et le développement de nos entreprises via un mode de financement de la protection sociale qui préserve leur compétitivité.

Je ne détaillerai pas les mesures visant à alléger les cotisations prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je me bornerai à formuler une observation.

Je ne partage pas les appréciations des uns ou des autres sur les « chèques en blanc » ou les « cadeaux » au patronat. Nous sommes aux côtés des entreprises pour agir en faveur du redressement du pays. Celles-ci comprennent des dirigeants et des salariés. Ce sont elles qui créent des emplois. Il nous faut imaginer l’avenir ensemble, en confiance.

Dans la période actuelle, nos entreprises ont besoin d’un soutien. Nous nous plaçons dans une perspective dynamique, avec l’objectif de parvenir à équilibrer les allégements de cotisations, grâce à une reprise de la croissance, et le rétablissement des recettes fiscales et sociales.

À ce stade, j’aimerais citer deux phrases relatives au pacte de responsabilité et de solidarité que le Président de la République a prononcées lors de son entretien télévisé du 14 juillet. Il a d’abord déclaré : « Tout est maintenant sur la table, et rien ne sera modifié ». Puis, il s’est adressé aux chefs d’entreprise en ces termes : « Maintenant, c’est à vous aussi de marquer votre confiance. » (M. Vincent Delahaye s’exclame.)

La préoccupation immédiate de la commission des affaires sociales, c’est ce que j’appellerai la « marche de 2015 » : le demi-point de PIB de redressement du solde que prévoit le programme de stabilité.

En 2015, les administrations de sécurité sociale devront être excédentaires de 0,3 point de PIB, avec un effort de moindres recettes de l’ordre de 9 milliards d’euros, et des mesures d’économies qui, à l’exception de la non-revalorisation de certaines prestations, ne se feront pas encore pleinement sentir. Le retour de la croissance n’y suffira peut-être pas : un point de croissance de plus, c’est 2 milliards d’euros de cotisations qui entrent dans les caisses de la sécurité sociale.

La compensation de l’État à la sécurité sociale est un véritable sujet pour le budget de l’État.

Autre préoccupation, le pilotage et la programmation des finances sociales. En effet, 20 % des économies prévues dépendent d’organismes comme l’UNEDIC et les régimes de retraite complémentaires, dont les finances échappent de fait à tout pilotage.

Nous avions suggéré qu’une loi de financement de la protection sociale puisse inclure ces éléments dans une loi de programmation. Au vu du contexte, cette proposition nous paraît plus que jamais d’actualité.

Tels sont les éléments que je souhaitais verser, au nom de la commission des affaires sociales, au débat sur l’orientation des finances publiques, prélude à bien d’autres rendez-vous. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’année 2015 a été décrétée année internationale de la lumière par l’UNESCO. Le sera-t-elle pour la France ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Oui !

M. Aymeri de Montesquiou. Ce sera l’amorce de la deuxième partie du quinquennat, ainsi que la première année d’application du budget triennal et de mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité.

Notre débat d’aujourd’hui doit être un moment d’échange et de vérité, et non une liturgie où les fidèles des diverses sectes politiques psalmodient dans l’indifférence. (M. Philippe Dallier s’exclame.)

Avec le pacte de responsabilité et de solidarité, le Président de la République a été le dernier exécutif socialiste à réaliser son « Bad Godesberg ». Le Gouvernement le mettra-t-il en œuvre ? Paraphrasant Churchill à propos des Américains, je dirais avec espoir que nous pouvons toujours compter sur les socialistes pour faire le bon choix, après avoir essayé toutes les autres possibilités.

Que de temps perdu ! Vous réalisez enfin que nos préconisations n’étaient pas dénuées de bon sens ! Vous découvrez que la baisse des dépenses est moins récessive que la hausse des impôts, après avoir martelé le contraire pendant les deux premières années du quinquennat.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Vous avez eu dix ans, avant !

M. Aymeri de Montesquiou. Le groupe UDI-UC a toujours soutenu une politique économique volontariste d’assainissement des finances publiques par une forte baisse de la dépense et de libération de l’investissement et de la croissance.

Les 50 milliards d’euros d’économies sur cinq ans que vous annoncez sont-ils une réalité ? Depuis deux ans, nous ne parlons plus la même langue : vous voulez une « maîtrise » des dépenses publiques quand nous prônons leur « réduction ».

Notre pays ne peut pas vivre en consacrant plus de 57 % de son PIB à la dépense publique. C’est une proportion effarante ! De fait, les 43 % de la richesse produite qui sont concédés au secteur privé n’ont pas la force d’entraînement suffisante pour stimuler la croissance indispensable.

Les salaires constituent la part la plus importante des dépenses de fonctionnement. Par conséquent, notre seule option est de baisser non pas les salaires, mais la masse salariale de l’ensemble des services de l’État. La modernisation de la fonction publique est devenue incontournable, car vitale. La Suède, la Belgique, le Canada et la Nouvelle-Zélande, entre autres, l’ont menée à bien ; pourquoi ne pourrions-nous pas en faire autant ?

Notre préoccupation à tous, c’est ce chômage qui frappe tant de Français. L’emploi et, partant, la compétitivité de la France nous obsèdent. Il s’agit de savoir comment nous pouvons gagner une compétition internationale aussi difficile, ne serait-ce qu’avec nos partenaires et concurrents européens, avec lesquels nous réalisons 60 % de notre déficit commercial.

Or comment la France pourrait-elle être compétitive en travaillant moins ? Elle ne peut pas l’être. Il ne peut y avoir de croissance que si nous travaillons autant que les autres pays de l’Union européenne. Alignons-nous donc sur la moyenne des autres pays européens, où les salariés travaillent 2 000 heures de plus que nous dans leur carrière.

La Commission européenne nous enjoint aussi d’aligner le secteur public sur le secteur privé, ce qui entraînerait 12 milliards d’euros d’économies, et de faire sauter le verrou des 35 heures. À cet égard, songeons que nous versons annuellement 22 milliards d’euros pour compenser le passage de 39 heures à 35 heures sans perte de salaire. Pourquoi l’État paie-t-il pour que les Français travaillent moins ? C’est un système totalement incohérent !

La compétitivité, c’est aussi la formation. Or, après avoir supprimé, d’une manière incompréhensible, 500 millions d’euros consacrés à l’apprentissage, alors que 350 000 offres d’emploi ne trouvent pas preneur, vous rétablissez aujourd’hui 200 millions d’euros ! Il faudrait plus de cohérence dans l’utilisation des 3,7 milliards d’euros que l’État consacre à la formation professionnelle.

Par ailleurs, alors que le bâtiment est un secteur majeur pour l’emploi, la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové a eu des conséquences dramatiques. Les permis de construire ont chuté de 20 %, alors que notre politique du logement absorbe près de 40 milliards d’euros, dont 16 milliards d’euros pour les seules aides. Quel gâchis !

Au-delà des réformes de bon sens que je viens de prôner, il faut avoir à l’esprit que l’emploi est le fruit de l’investissement. Or, pour qu’il y ait investissement, il faut qu’il y ait confiance.

Monsieur le ministre, votre nouvelle politique peut contribuer à en créer les conditions. Pour cela, affirmez votre conversion à la social-démocratie, comme l’ont fait tant de pays développés, en mettant en place une politique différente de celle qui a été menée au cours des deux premières années du quinquennat. Pourquoi vouloir prouver que vous aviez raison d’avoir tort ? C’est en adoptant une position claire que vous pourrez restaurer la confiance, sans laquelle rien ne pourra se faire ; alors qu’elle est essentielle, elle a, hélas ! trop souvent disparu de notre pays.

Aujourd’hui, l’investissement est quasiment réduit à une variable d’ajustement, en raison du coût du fonctionnement de l’État et des charges des entreprises.

Notre fiscalité doit constituer un outil, et non un frein à notre compétitivité. C’est pourquoi vous devez diligenter un audit sur le rendement des impôts et sur leurs conséquences parfois négatives pour l’économie. Je pense, entre autres, à l’impôt ringard qu’est l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, auquel, je le rappelle, tous les pays développés ont renoncé. Et la taxe confiscatoire de 75 %, qui touche peu de contribuables, rapportée à son impact symbolique répulsif, induit des effets nationaux et internationaux désastreux, avec 77 % d’investissements étrangers en moins et une véritable incitation à l’exil des jeunes diplômés, des cadres et des entrepreneurs. Il est temps de réaliser que, dans une économie mondialisée, l’impôt ne saurait sanctionner le travail et le talent !

Notre système fiscal décourage, alors qu’il devrait être juste et incitatif pour tous. De surcroît, avec 46 % du PIB de prélèvements obligatoires, nous avons dépassé les sommets du « tout fiscal ». Aujourd’hui, les Français ont conscience que notre système fiscal, issu d’un empilement d’impôts et non d’une stratégie, est devenu caduc. Ils veulent savoir comment sont optimisés les prélèvements qu’ils subissent.

L’ancien Premier ministre britannique Tony Blair avait très justement affirmé : « La gestion de l’économie n’est ni de gauche ni de droite. Elle est bonne ou mauvaise. Ce qui compte, c’est ce qui marche. »

Lors de la campagne pour les primaires socialistes de 2011, le candidat Manuel Valls avait eu la prémonition, l’aplomb et même le panache de prendre le contre-pied des dogmes socialistes en défendant des positions audacieuses et courageuses. Ainsi, il avait prôné la remise en cause des 35 heures, ainsi que celle de l’ISF. (M. le rapporteur général de la commission des finances le nie.) Il avait également souligné le rôle capital des entreprises et soutenu le principe de la règle d’or.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Caricature !

M. Aymeri de Montesquiou. C’est cet esprit pugnace, l’esprit lucide et volontariste, que l’ancien ministre Hubert Védrine appelle de ses vœux dans La France au défi, qui doit nous animer ! Soulignant nos forces et nos atouts, il s’oppose au pessimisme et à l’inclination au masochisme !

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous devons insuffler à nos finances publiques audace et courage pour redonner à notre pays la place qu’il avait su gagner par ses vertus ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors du débat sur le projet de loi de finances rectificative, notre collègue Didier Guillaume avait déclaré ceci : « La cohérence de notre projet, c’est de faire en sorte que les efforts de redressement des finances soient le mieux répartis possible. Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, quelles que soient les positions des uns et des autres, toutes respectables, il faut regarder les choses en face. Il y a ceux qui assument le fait que tout le monde, y compris les collectivités, doive participer, le fait que l’effort doive être réparti, même s’il peut sembler lourd, et ceux qui ne veulent pas ″mettre les mains dans le cambouis″. Pour notre part, nous les y mettons, parce qu’il est important que le redressement du pays se fasse dans la justice. »

La discussion de cet après-midi porte à la fois sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013 et sur la mise en œuvre de la loi d’orientation sur les finances publiques, par le truchement du débat d’orientation. À la lumière des propos tenus par notre collègue, il est intéressant d’examiner si chacun est bien sollicité en fonction de ses capacités, comme le prévoit notre Constitution, pour répondre aux obligations d’intérêt général.

Le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes est un ensemble d’articles de récapitulation comptable des faits constatés dans le cadre de l’exécution de la loi de finances pour 2013, qui, je le rappelle, a été rejetée par le Sénat.

En 2013, le déficit a connu une baisse supplémentaire, mais moindre que l’année précédente. Ce ralentissement de la baisse du déficit budgétaire résulte d’une insuffisance de recettes, et non d’une augmentation de la dépense publique.

Dans ce contexte, certains s’empressent, comme cela vient d’être fait, d’invoquer le théorème de Laffer,…

Mme Nicole Bricq. Pas nous !

M. Thierry Foucaud. … selon lequel : « Trop d’impôt tue l’impôt ».

M. Philippe Dallier. C’est la réalité !

M. Thierry Foucaud. Il convient plutôt d’établir une évidente causalité entre ralentissement de l’activité économique et dynamisme modéré des recettes fiscales, alors que la croissance du PIB s’est élevée à 0,3 % en 2013. Le décalage croissant entre les recettes fiscales prévues et constatées persiste en 2014 a conduit le Gouvernement à présenter un projet de loi de finances rectificative comportant plusieurs milliards d’euros de contraction des recettes fiscales.

Vous le savez, nous ne voterons pas le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013.

J’en viens aux éléments de langage utilisés pour justifier les choix proposés. On nous parle d’efforts « partagés ».

En plus de réduire ses propres dépenses, l’État continuera en parallèle à transférer des charges aux collectivités territoriales – je pense à la réforme des rythmes scolaires, pour évoquer l’exemple le plus récent – et à leur serrer la vis, en baissant de 22 milliards d’euros sur trois ans le montant des concours budgétaires qui leur sont attribués ; au total, la diminution aura atteint 28 milliards d’euros en quatre ans.

En outre, l’avenir des collectivités territoriales est suspendu à l’adoption ou au rejet d’une réforme territoriale qui n’est, à mes yeux, ni faite ni à faire. En vérité, elle n’est que la copie française d’une orientation européenne ayant déjà donné de remarquables résultats dans des pays aussi divers que le Portugal, la Grèce ou l’Italie…

Dans les faits, une telle incertitude institutionnelle vise à soumettre le premier échelon de pouvoir démocratique, la commune, à la double domination du président du conseil régional et de l’État, devenu prescripteur de politiques définies « en haut » pour s’appliquer coûte que coûte « en bas ».

Dans ce schéma, la décentralisation disparaît, comme en témoigne le fameux droit d’option des départements, qui évite, comme par hasard, le recours à la consultation populaire ; sans doute un mauvais souvenir de la démarche infructueuse engagée en 2013 en Alsace… (Sourires sur les travées du groupe CRC.)

Le Président de la République et le Gouvernement attendent beaucoup de la réforme territoriale en termes de réduction du déficit budgétaire. Mais, nous le savons tous, une telle évolution aboutira à une dégradation de la vie de nos habitants, qui perdront peu à peu les services publics, dont tout le monde a loué le rôle déterminant dans la réduction des inégalités et l’amortissement de la crise financière.

Il en va de même pour la sécurité sociale. Pensez-vous vraiment qu’il soit conforme à la justice et à l’équité de geler les retraites, de réduire les dotations des hôpitaux et de rogner les prestations familiales ? Encore ne sont-ce là que quelques-unes des mesures prévues. Devoir se priver d’une sécurité sociale de haut niveau dans une économie nationale qui n’a jamais été aussi riche et productive, voilà en vérité une étrange conception de la justice et de l’équité !

La politique menée par le Gouvernement en matière de sécurité sociale est la parfaite illustration du risque dénoncé dès l’origine par son créateur, le ministre communiste Ambroise Croizat : « Faire appel au budget de l’État, c’est inévitablement subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières qui risqueraient de paralyser les efforts accomplis. »

Il faut bien le reconnaître, nous faisons face, dans le domaine de la sécurité sociale, à quelques enjeux majeurs.

D’une part, on constate une persistance des déficits sociaux combinée à la prégnance toute particulière de la prise en charge par l’État des cotisations sociales des entreprises.

Au cours de sa conférence de presse de ce midi, notre collègue Michelle Demessine a souligné la dangereuse accoutumance du monde économique aux exonérations de cotisations sociales, qui représentent plus de 10 % du montant des cotisations normalement dues. Elle a rappelé que 210 milliards d’euros d’exonérations avaient été distribués depuis 1993. L’emploi s’en porte-t-il mieux qualitativement et quantitativement ? Pas du tout : il y avait 3 millions de chômeurs en 1993 et qu’il y en a 5,6 millions aujourd’hui ! Voilà la réalité, mes chers collègues !

D’autre part, alors que la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, supporte plus de 130 milliards d’euros de passif à apurer, la situation des comptes sociaux n’a connu aucune évolution sensible du point de vue des ressources.

Le taux de cotisation des entreprises pour la branche famille, qui était de 5,40 % au mois de juillet 1993, vient d’être ramené à 5,25 %. En revanche, le taux de cotisations sur les salaires prévu pour l’assurance vieillesse jusqu’au plafond de la sécurité sociale, qui était de 8,20 % en 1993, a été porté à 8,30 % en janvier 2006, et il atteint 8,45 % depuis le mois de janvier dernier.

Dans un article paru dans la revue de l’Institut de recherches économiques et sociales, l’économiste Michel Husson fait apparaître que le niveau des cotisations sociales en 2012 est équivalent à celui des années soixante-dix, mais avec un taux employeur global de 24 % du total des rémunérations. De ce point de vue, la chute est de plus de 3 % sur le début des années quatre-vingt-dix.

En d’autres termes, c’est un problème d’insuffisance de recettes qui est à la base des difficultés de la sécurité sociale, comme de celles de l’État.

L’insuffisance des recettes est largement encouragée par une politique publique de l’emploi parfaitement inepte dans le contexte actuel. La stratégie de Lisbonne devait conduire la France sur la route de l’effort pour l’innovation, la recherche, la qualification et la création de valeur ajoutée par la matière grise. Qu’en est-il ? En assurant la rentabilité de la grande distribution et la solvabilité des entreprises de services à la personne, de nettoyage, de gardiennage et d’entretien, nous avons favorisé le développement de l’emploi précaire et de l’intérim.

En 1982, notre pays comptait un peu plus de 6 % de salariés en contrat à durée déterminée et un peu plus de 8 % de salariés à temps partiel.

En 2009, nous comptons plus de 12 % de salariés en contrat à durée déterminée et près de 18 % de salariés à temps partiel, chiffres plus actuels. Et il y a encore de belles âmes pour nous expliquer que le code du travail ne serait pas suffisamment « souple » ou « flexible », ou qu’il faudrait le « simplifier » parce qu’il compterait « trop de pages » !

M. Vincent Delahaye. C’est l’évidence !

M. Thierry Foucaud. Tout cela est réalisé et encouragé avec de l’argent public qui ne sert pas à maintenir notre équipement industriel en l’état. Notre déficit commercial extérieur le montre à l’envi.

Toujours est-il que ces politiques publiques, qui maintiennent dans la précarité des millions de salariés et leurs familles, ont des surcoûts évidents en matière d’allégements fiscaux, d’action sociale, de moins-values de recettes. Cela pèse sur les comptes publics et participe des déficits constatés.

Le budget de l’État, les comptes de la sécurité sociale et les finances locales n’ont pas vocation à prendre éternellement à leur seule charge l’ensemble des désordres économiques et sociaux que provoque l’économie libérale dans laquelle nous vivons.

Au groupe CRC, nous sommes partisans depuis toujours de la réduction des déficits publics et, par voie de conséquence, de l’évolution maîtrisée de la dette publique. Le problème, c’est que le discours sur « l’effort » reste un élément de langage. Je me suis ainsi reporté au rapport de notre éminent collègue François Marc sur le collectif budgétaire de 2014, que nous avons examiné voilà peu.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bonne référence !

M. Thierry Foucaud. On trouve dans ce document un intéressant tableau sur la stratégie fiscale des années à venir. Sont retracées de manière synthétique les mesures prévues par le fameux pacte de responsabilité et de solidarité sur les années 2014 à 2017. Le total atteint, en coût et en « mesures nouvelles », la somme de 25,3 milliards d’euros, étant par ailleurs précisé que ce montant n’est pas inclus dans le coût du CICE.

Le problème, c’est que le chiffrage n’est pas juste. En réalité, les allégements de cotisations sociales supplémentaires initiés en 2015 pour 4,5 milliards d’euros vont atteindre 13,5 milliards d’euros à la fin de l’année 2017 pour les salaires compris entre 1 et 1,6 SMIC, tandis que ceux qui concernent les salaires supérieurs vont coûter 9 milliards d’euros sur deux ans.

De même, la mesure d’allégement de cotisations sociales des travailleurs indépendants, précédant l’intégration du régime social des indépendants, le RSI, dans le régime général, va coûter deux milliards d’euros supplémentaires.

Sur le plan des cotisations sociales, ce sont donc 24,5 milliards d’euros de plus qui vont être accordés en allégements aux entreprises.

Pour la « modernisation du système fiscal des entreprises », la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, dite C3S, va coûter 7,2 milliards d’euros en trois ans au budget de l’État, tandis que la disparition de la surtaxe de l’impôt sur les sociétés, ou IS, représentative de la contribution du monde économique au redressement des comptes publics, va coûter 5,2 milliards d’euros de plus.

Aux 24,5 milliards d'euros d’allégements sociaux payés sans doute in fine par la contribution sociale généralisée, la CSG, la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, et la CADES, nous ajoutons donc 12,4 milliards d'euros d’allégements fiscaux, soit un total de 36,9 milliards d'euros.

Pour faire bonne mesure, cerise sur le gâteau, on envisage de réduire le « taux facial » de l’impôt sur les sociétés de 33,33 % – vous savez très bien que le taux est, en moyenne, bien inférieur – à 32 %, voire à 28 % si l’on veut que les fruits de la croissance attendue puissent correctement alimenter les dividendes versés. Cela fera, nous dit-on, 1,5 milliard d’euros d’efforts supplémentaires pour tout le monde, sauf pour les entreprises et la finance, qui vont donc, pendant que l’on rationne les collectivités locales, se partager près de 40 milliards d'euros de nouveaux allégements sociaux et fiscaux !

Au demeurant, pour dissuader parfaitement les employeurs d’accroître les salaires de manière inconsidérée, le Premier ministre vient d’annoncer la couleur sur la seule mesure destinée aux ménages dans le cadre du pacte : un dispositif pérenne sur l’impôt sur le revenu d’un coût estimé compris entre 2,5 milliards et 2,7 milliards d’euros.

Il s’agit non d’une revalorisation du barème, comme nous avons eu l’imprudence de le proposer dans le cadre du collectif 2014, mais d’une nouvelle ristourne sur la contribution des redevables percevant un revenu inférieur à deux SMIC. Cela conduira à rembourser 400 euros payés « en trop » lors du dernier tiers provisionnel ou de la dernière mensualité de l’impôt sur le revenu ! Manuel Valls sera ensuite autorisé à remercier les généreux contribuables concernés d’avoir prêté gratuitement à l’État pendant neuf mois les sommes qui leur seront remboursées.

Il y a aussi l’allégement des cotisations sociales, destiné à augmenter le salaire net perçu par les salariés. Là encore, le MEDEF remercie le Gouvernement de creuser ainsi un peu plus le déficit de la sécurité sociale sans contraindre les entreprises à augmenter les salaires bruts. Les 7,5 milliards d'euros que devrait coûter cette mesure sont un cadeau empoisonné au monde du travail.

Pour augmenter les salaires et le pouvoir d’achat des ménages en France, il y a deux outils : il faut un décret de revalorisation du SMIC et un autre de dégel du point d’indice de la fonction publique. Les efforts ne sont donc pas si équitablement partagés que certains veulent le laisser penser.

Et ceux qui, par pure posture politique, contestent cette politique en l’ayant eux-mêmes mise en œuvre dans un passé récent ne sont pas plus qualifiés que l’actuel Gouvernement pour donner des leçons, surtout après avoir ratifié avec les parlementaires socialistes le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG, dont le pacte de responsabilité est une forme d’avatar.

Au mois de mai 2012, un peu plus de 18 millions de Français, partagés entre espoir, volonté et détermination, votaient en faveur du changement. Le 25 mai dernier, moins de 19 millions votaient lors du scrutin européen, dont seulement 2,65 millions en faveur du parti de l’actuel Président de la République.

Pour retrouver les autres, je ne vois décidément qu’une solution : abandonnez les illusions libérales ! Une fois, une fois seulement, menez une politique de gauche ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on considère souvent qu’il y a deux moteurs principaux pour relancer la croissance : la consommation des ménages et les investissements des entreprises. En réalité, pour que ces deux moteurs démarrent, il faut en plus un élément fondamental, qui a d’ailleurs souvent été évoqué : la confiance.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !

M. François Fortassin. Sans confiance et sans prévisibilité pour l’avenir, ni la consommation ni les investissements ne pourront repartir, et la croissance et les emplois resteront en berne.

Des mesures ont été prises pour favoriser le retour de cette confiance, qui, faut-il le rappeler, ne se décrète pas. Aussi, grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le taux de marge des entreprises s’est redressé de plus d’un point en seulement un an. Et des taux de marges qui augmentent, ce sont des investissements qui reprennent. C’est plus d’innovation, plus de compétitivité et donc, in fine, plus d’emplois créés.

La création de la Banque publique d’investissement a également permis de faciliter l’accès au financement, en particulier pour les TPE et les PME en croissance, qui sont les « championnes » de l’économie de demain.

Enfin, le pacte de responsabilité et de solidarité, avec la baisse massive des charges patronales et salariales dès 2015, puis, à terme, la réduction du taux facial de l’impôt sur les sociétés, constitue un signal très fort en direction des entreprises et des ménages – je parle des ménages modestes et des classes moyennes –, pour qui la pression fiscale devra nécessairement être allégée dans les prochaines années.

Les récentes déclarations du ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique au cours de la présentation de sa feuille de route nous semblent également aller dans le bon sens. Toutefois, elles suscitent également des interrogations.

Non pas que nous soyons opposés à la remise en question des monopoles détenus par certaines professions réglementées, qui tirent à n’en pas douter les prix de nombre de services vers le haut. Bien au contraire ! Mais quand M. Arnaud Montebourg annonce que leur remise en cause conduira à redistribuer 6 milliards d’euros de pouvoir d’achat aux Français, nous aimerions avoir le détail de son calcul pour savoir comment il parvient à un tel résultat, d’autant plus que le projet de loi pour la croissance et le pouvoir d’achat n’est pas finalisé, le ministre ayant annoncé qu’il y travaillerait tout l’été avec ses collaborateurs de Bercy !

Monsieur le ministre, pourquoi ne pas publier immédiatement le rapport de l’inspection générale des finances qui porte sur ces professions réglementées et qui a visiblement inspiré le projet, au lieu de le retenir comme une « bombe à retardement » ? Nous aimerions en effet connaître le détail des professions et secteurs concernés par ce projet, d’autant plus que les exemples mentionnés pour l’instant ne paraissent pas constituer les plus grandes sources d’économies pour les ménages.

Que Bercy espère réellement relancer le pouvoir d’achat et la croissance en faisant baisser les tarifs des prestations d’huissiers de justice ou le prix des prothèses dentaires, cela laisse un peu rêveur ! En effet, seule une minorité de nos concitoyens y ont recours. Et encore, de façon souvent irrégulière, hélas ! Cela ne signifie pas qu’il ne soit pas souhaitable de faire baisser les prix dans ces secteurs, mais nous nous interrogeons simplement sur le gain massif de pouvoir d’achat escompté.

En revanche, en tant que force de propositions, nous soulignons qu’il existe dans notre pays des monopoles profondément ancrés avec des effets négatifs évidents sur le pouvoir d’achat de millions de nos concitoyens, en particulier les plus vulnérables. Ainsi, le groupe RDSE se bat depuis plusieurs années, et nous avons défendu régulièrement des amendements en ce sens, pour que soit remis en cause le monopole des constructeurs automobiles sur le marché des pièces détachées.

Monsieur le ministre, le Gouvernement est-il prêt à libéraliser ce marché ? Cela se traduirait par des gains de pouvoir d’achat tout à fait significatifs pour les consommateurs, comme le montrent de nombreux exemples étrangers. Je pense en particulier aux foyers les plus modestes des zones rurales ; ceux qui sont obligés de se déplacer en voiture sont, en quelque sorte, prisonniers des prix exorbitants des pièces détachées.

Nous attendons donc avec impatience les détails quant à la piste de relance annoncée par M. le ministre de l’économie. Nous sommes par ailleurs en parfait accord avec la seconde piste évoquée, celle de la relance des investissements dans les grandes infrastructures, comme dans le domaine de l’énergie. Je pense notamment aux barrages hydroélectriques. Contrairement à d’autres, nous souhaitons non pas les raser, mais plutôt les rehausser pour produire davantage. Nous pourrions nous inspirer de l’exemple de la Suisse, où l’expérience a été menée avec un certain succès.

En ce sens, nous ne pouvons que regretter que les documents accompagnant ce débat d’orientation des finances publiques ne démontrent pas la volonté du Gouvernement de relancer les investissements. En effet, les économies de dépenses réalisées jusqu’à présent et celles qui sont prévues dans le cadre du plan de 50 milliards d’euros annoncé entre 2015 et 2017 s’effectueront malheureusement au détriment des dépenses d’investissement.

Comment préparer l’avenir, la compétitivité et la croissance de demain sans investir dans la recherche, le développement des infrastructures énergétiques, numériques ou le transport ? La situation des collectivités territoriales et les efforts sans précédent que celles-ci doivent réaliser, s’additionnant aux effets de la crise économique, conduisent déjà à la réduction des investissements, alors que les collectivités, faut-il le rappeler, réalisent 70 % des investissements publics de notre pays.

Monsieur le ministre, au-delà des décisions qui peuvent être prises, il faudrait que vous interveniez fermement auprès de l’administration française. C’est une administration de grande qualité, mais elle tire son pouvoir de sa puissance à dire « non » en permanence,…

Mme Michèle André. Il n’y a pas qu’elle !

M. François Fortassin. … quand elle pourrait dire « oui » et faciliter les investissements !

À titre d’exemple, voilà un an, mon département, les Hautes-Pyrénées, a été très touché par des crues massives qui ont détruit un certain nombre d’investissements dans les vallées. À l’époque, nous avons considéré, en particulier le président du conseil général, que la loi sur l’eau et les milieux aquatiques et les règles sur les marchés publics devaient être transgressées en période de difficultés et qu’il fallait aller vite. Aujourd'hui, tous les travaux ont été réalisés, alors qu’un département voisin, pourtant beaucoup plus riche, qui a observé les règles de façon stricte, n’a encore rien fait ! Voilà un exemple dont vous pourriez vous inspirer ! Il pourrait d’ailleurs servir dans de nombreux domaines.

M. Michel Sapin, ministre. Qui vote les lois ?

M. François Fortassin. Il s’agit non pas de transgresser les règles de manière systématique, mais bien de faciliter la relance de l’investissement pour les collectivités territoriales.

M. François Fortassin. C’est, me semble-t-il, tout à fait possible. Priorité doit donc être accordée aux mesures permettant de relancer la croissance, sans pour autant abandonner totalement, ce qui serait irresponsable, la trajectoire de redressement des finances publiques.

Je ne reprendrai pas à mon compte le lyrisme accusateur du ministre de l’économie, pour qui l’Union européenne confondrait morale et économie. Selon ses termes, il serait « moralement juste » mais « économiquement stupide » de rembourser ses dettes. Il est tout de même permis d’en douter.

Selon nous, dans le contexte actuel de très faible croissance, il existe des marges de manœuvre, même avec les règles européennes, qui peuvent sembler très contraignantes à première vue.

Peut-être faudrait-il suivre la piste esquissée par le président du Conseil italien, Matteo Renzi, c’est-à-dire utiliser la « flexibilité » du pacte de stabilité et de croissance, pacte qui nous impose la fameuse règle du déficit nominal inférieur à 3 % du PIB.

Il nous semblerait nécessaire de ne pas comptabiliser dans le calcul du déficit les dépenses d’investissement qui servent à préparer l’avenir ou celles qui financent des réformes structurelles favorables au redressement et à la croissance durable. (M. Jean-Vincent Placé s’exclame.) Mon collègue Jean-Vincent Placé n’est visiblement pas d’accord avec moi.

M. Jean-Vincent Placé. Au contraire, mon cher collègue ! Je me réjouis qu’une telle idée progresse !

M. François Fortassin. Parmi les annonces du Gouvernement pour les années à venir, il manque encore des réformes structurelles ambitieuses et courageuses pour redresser durablement nos finances publiques et éviter l’emballement de la dette, qui pèserait sur les générations futures.

Comme l’écrivent les économistes Philippe Aghion, Gilbert Cette et Elie Cohen, « la méthode des petites réformes a échoué : malgré l’urgence, la France n’a toujours pas restructuré ni même maîtrisé fondamentalement sa dépense publique, ni réformé le marché du travail ou le marché des biens et services de façon significative, ni modernisé son école ou ses universités ou son système de formation professionnelle pour les rendre plus efficaces. »

De ce point de vue, la réforme territoriale n’est qu’un leurre ; nous le savons tous. Les économies attendues sont largement surestimées.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est vrai !

M. François Fortassin. D’ailleurs, leur réalité reste à démontrer.

M. François Fortassin. Enfin, alors que nous discutons de l’orientation de nos finances publiques, je ne peux pas conclure mon intervention sans évoquer une notion chère aux membres du groupe RDSE, celle de la justice sociale.

Outre les comportements de fraude ou d’optimisation de la part des particuliers comme des entreprises, qui ne sont pas sans lien avec le taux de prélèvements obligatoires exceptionnellement élevé de notre pays, la justice fiscale est aujourd’hui menacée par la multiplication de ce que l’on appelle communément les « niches fiscales »,…

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ah, les niches !

M. François Fortassin. … dont on ne sait pas toujours bien comment elles sont comptabilisées. Dépenses ? Dépenses fiscales ? Moindres recettes ? Tout cela est particulièrement opaque. Arrêtons d’ailleurs avec ce galimatias financier qui nous est asséné à longueur de journée !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Absolument !

M. François Fortassin. Monsieur le président de la commission des finances, vous êtes en première ligne pour faire en sorte que le langage des membres de votre commission puisse enfin être compréhensible par tous ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je m’y efforce, mais c’est difficile ! (Nouveaux sourires.)

M. François Fortassin. Alors que nous fêtons le centenaire du vote de l’impôt sur le revenu, dont la mise en œuvre a été retardée par l’éclatement du premier conflit mondial, il est indispensable de revenir à l’esprit de cet impôt : un impôt personnel, progressif sur le revenu, marquant l’égalité non pas « devant » l’impôt, mais « par » l’impôt !

Il est urgent de revenir à la préoccupation principale de son fondateur, le sénateur radical Joseph Caillaux, celle de la justice fiscale ! C’est la raison pour laquelle les radicaux de gauche en appellent aujourd’hui à une grande réforme fiscale, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu ou de celui sur les sociétés, afin de retrouver lisibilité et justice, deux notions elles aussi indispensables au rétablissement de la confiance, à laquelle j’ai fait allusion tout à l’heure.

Monsieur le ministre, vous nous trouverez à vos côtés chaque fois que ces différents éléments seront au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. Éric Doligé. Ce n’est pas pour demain !

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est désormais la troisième fois sous cette mandature que nous nous réunissons pour débattre de l’orientation de nos finances publiques. Cette année, faute de temps et en raison d’un calendrier législatif particulièrement intense, nous discutons en même temps du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année écoulée, en l’occurrence 2013.

Prévu à 3,1 % dans la dernière loi de programmation des finances publiques, le déficit public pour 2013 s’établit finalement à 4,3 % du PIB. Un tel écart s’explique d’abord par une mauvaise hypothèse de croissance. Alors que le consensus des économistes s’opérait à l’automne 2012 sur une prévision de croissance de 0,3 %, ce qui s’est vérifié, le Gouvernement a préféré bâtir son budget sur une hypothèse de 0,8 %. Nous verrons à l’avenir si la création du Haut Conseil des finances publiques, qui n’était pas encore en place à l’automne 2012, aura un effet bénéfique sur le réalisme des hypothèses de croissance retenues par les futurs gouvernements, quel que soit leur bord politique.

Le déficit plus important que prévu s’explique aussi et surtout par la faiblesse de la recette fiscale. Ce ne sont pas moins de 14,6 milliards de recettes qui manquent à l’exercice 2013 par rapport à la prévision de la loi de finances initiale. Le Gouvernement n’apporte pas d’explication probante à cet énorme manque à gagner. Il s’agit simplement de la réaction d’une économie en tension à un traitement de choc qu’elle n’est manifestement pas en mesure de supporter.

Si la prévision est à ce point délicate à réaliser et admet des marges d’erreur aussi importantes, il y a de quoi relativiser fortement la méticulosité du mécanisme de planification et de contrôle du TSCG. En effet, l’année 2013 constitue le premier exercice budgétaire intégralement géré sous cette mandature et sous le régime du pacte budgétaire européen. L’écart à la prévision du déficit structurel étant supérieur à 0,5 point, il va donc falloir que la France déclenche le mécanisme dit de « correction automatique », supervisé par le Haut Conseil, qui conduira probablement à supprimer encore davantage de dépenses publiques.

Après 4 milliards d’euros de réductions de dépenses cet été, dans le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, ce ne sont pas moins de 21 milliards d’euros d’économies qui sont planifiés pour le projet de loi de finances pour 2015, constituant ainsi un effort inédit. Sans parler des conséquences directes de ces coupes claires, notamment sur l’investissement public, il est difficile de se convaincre que ce qui n’a pas fonctionné en 2012 et en 2013 pourra fonctionner les années suivantes.

Mme Fabienne Keller. Très juste !

M. Jean-Vincent Placé. Pour les écologistes, de telles réductions de dépenses sont d’autant moins justifiées qu’elles contribuent à financer une aide inconditionnelle – l’adjectif est important – aux entreprises de 41 milliards d’euros sur la mandature.

Ces énormes dépenses fiscales et sociales, qui consomment une très large part de la marge de manœuvre budgétaire du quinquennat, ont été jusqu’alors hasardeuses et inefficaces. Hasardeuses, car, en l’absence de contreparties fermes – vous savez, ces fameuses « contreparties », dont on ne parle d’ailleurs même plus ! –, les plus gros doutes planent quant au nombre d’emplois qui seront effectivement créés. Inefficaces, car les dispositifs retenus – ce point est extrêmement important – ne permettent pas de sélectionner les entreprises qui ont besoin d’aides car elles servent une vision écologique, sociale ou même libérale de l’économie. C’est toute la question de la conditionnalité des aides. Nous en avons beaucoup parlé dans cet hémicycle.

Cette politique repose sur une double impasse, que le groupe écologiste pointe du doigt depuis trois ans.

D’une part, elle reste fondamentalement productiviste, attendant avec une foi à toute épreuve le retour hypothétique d’une croissance salvatrice. Non seulement nous ne croyons pas au retour durable de la croissance, mais quand bien même celle-ci reviendrait, force est de constater qu’elle est de moins en moins corrélée à l’emploi. En plus, en l’absence de politique économique sélective – il faut conditionnaliser et sélectionner –, la croissance est destructrice pour l’environnement, pour notre santé et pour l’économie.

D’autre part, cette politique se fonde sur une vision excessivement libérale de l’Europe. Je me suis permis d’intervenir lorsque François Fortassin a très justement soulevé la question du déficit structurel, sur laquelle je reviendrai, car les idées progressent, y compris en Europe, sous l’impulsion de Matteo Renzi, comme cela a été souligné. J’ai entendu également les propos du ministre de l’économie, M. Arnaud Montebourg. Si nous, écologistes, avons souvent des points de friction avec lui, nous constatons qu’un mouvement s’opère aujourd'hui dans les idées. Il y a un refus de la pensée unique. Voilà qui me semble extrêmement positif !

Il faut sortir du modèle de l’Europe qui soumet l’économie à l’austérité et impose aux États une compétition fiscale et sociale néfaste. Engageons la conversion écologique de l’économie pour préserver l’environnement et la santé de tous ! Non seulement c’est en cela que réside le vrai progrès, mais, en plus, cette révolution verte de l’économie nous permettra d’atteindre des objectifs sur lesquels nous nous accordons tous dans cet hémicycle, quelles que soient nos sensibilités. Je pense non seulement au mieux vivre, mais aussi aux économies. Nous, écologistes, sommes partisans des économies !

Mme Nicole Bricq. On en fait !

M. Jean-Vincent Placé. D’ailleurs, nous vous avons régulièrement présenté de nombreuses pistes lors des débats budgétaires. Nos propositions de lois sur le diesel, les ondes électromagnétiques ou encore les pesticides ont pour point commun de conduire à des économies importantes, tout en préservant la santé de nos concitoyens.

Oui, mes chers collègues, la pollution, qu’elle soit alimentaire, atmosphérique, aquatique,…

Mme Fabienne Keller. Politique !

M. Jean-Vincent Placé. … coûte cher, car elle occasionne des dépenses de santé massives. Selon les études, le coût du traitement des conséquences sanitaires de la pollution de l’air atteint 20 milliards d’euros ou à 30 milliards d’euros par an.

Un modèle de production et de consommation plus vertueux serait donc bénéfique non seulement pour notre environnement et pour notre santé, mais également pour les finances publiques.

Il le serait également pour l’emploi. Les modes de production écologiques, parce qu’ils utilisent moins les ressources naturelles et l’environnement, sont généralement plus intensifs en emplois. En plus, il s’agit souvent d’emplois en lien avec les territoires, donc non délocalisables.

Enfin, ce serait bénéfique pour l’équilibre de notre balance commerciale, aujourd’hui grevée par les importations énergétiques, qui nous contraignent de surcroît dans nos relations diplomatiques.

Évidemment, et cela a été souligné, ce nouveau modèle ne se réalisera pas contre les entreprises. En ce sens, le message que le Gouvernement adresse à ces dernières est positif, car ce sont des acteurs essentiels pour l’avenir de notre pays.

Ce que nous contestons dans le CICE et le pacte de responsabilité, c’est l’absence de sélectivité et de contreparties. Une étude approfondie des problèmes de compétitivité hors coût – c’était l’un des éléments les plus intéressants du rapport Gallois ; malheureusement, cela a disparu de la discussion – prône le fléchage des aides vers les entreprises qui embauchent ou qui investissent dans des filières écoresponsables et durables. Voilà qui aurait du sens ! Arrêtons de subventionner toute une économie du gaspillage, de la surconsommation et de la pollution !

Bien entendu, la transition ne se s’effectuera pas non plus contre les ménages. L’incitation à des changements de comportements n’est pas nécessairement punitive. Ainsi, la réduction du taux de TVA dans les transports publics, que nous réclamons avec constance, bénéficierait à de très nombreux voyageurs. D’ailleurs, le Sénat a adopté un amendement, défendu sur plusieurs travées, en ce sens ; nous voyons le peu de cas qui est fait du Parlement dans la discussion budgétaire…

Plus généralement, comme l’a récemment montré Thomas Piketty, une croissance faible amplifie le phénomène de concentration des richesses entre les mains de quelques-uns. Il importe donc de compenser cela par une fiscalité encore plus progressive – je pense par exemple à la fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG – et d’éviter tout gel de prestations sociales.

Enfin, et tous les économistes en conviennent, l’avènement d’une économie plus verte passe nécessairement par un investissement public massif, en particulier au niveau européen, pour créer de grands champions industriels, notamment dans l’énergie et les transports. À cet égard, je me réjouis de la volonté de Mme Ségolène Royal de mettre l’accent sur la politique de l’Agence européenne pour l’environnement.

Lors du débat au Sénat sur la mise en œuvre des dispositions du TSCG, les écologistes avaient notamment plaidé pour que les investissements productifs soient retirés du calcul du déficit. Aujourd’hui, suite aux politiques d’austérité, nous constatons que l’investissement public constitue la seule grande sous-catégorie de la dépense publique dont la part dans le PIB a reculé dans la zone euro, à 2,8 % du PIB en 2009 contre 2,1 % en 2013.

Je terminerai toutefois sur une note un peu plus optimiste. Un début de prise de conscience semble commencer à poindre, comme je l’indiquais tout à l’heure en évoquant l’intervention de notre collègue François Fortassin.

Ainsi, au mois de juin dernier, le Fonds monétaire international, le FMI, a déclaré que le TSCG pourrait inhiber l’investissement public.

Dans la foulée, et suite aux prises de position de Matteo Renzi, le Conseil européen a indiqué à la fin du mois de juin que les États étaient désormais invités à utiliser « au mieux la flexibilité qu’offrent les règles actuelles » du TSCG. Même si le propos n’est pas très clair, nous avons là un signe, outre la politique monétaire plus expansionniste de la BCE, que les bonnes questions commencent à être posées !

De bonne mémoire, les vacances des ministres avaient été réduites l’année dernière, le Président de la République voulant un gouvernement de combat, actif même pendant l’été. Pour ma part, je pense que le Gouvernement doit prendre des vacances. (Exclamations amusées.) Il lui faut non seulement se reposer, mais aussi réfléchir. Après tout, Mme Merkel s’accorde bien trois semaines de vacances ; je n’ai pas l’impression que cela influe négativement sur ses capacités ou sur les orientations stratégiques de son gouvernement. (Mêmes mouvements.)

Le groupe écologiste est très critique sur les deux années qui viennent de s’écouler. Beaucoup de choses n’ont pas été faites. Mais nous gardons l’espoir que les réformes dont le pays a besoin, et elles sont nombreuses, seront menées à bien. Je pense à la réforme de l’État, à la réforme territoriale, qui est en cours, à la réforme fiscale, qui n’est pas achevée – je vous renvoie aux déclarations d’un ancien ministre du budget –, ainsi qu’à la nécessaire inflexion vers une politique plus sociale et écologiste.

Puisse le gouvernement de la France, dans les mois et les années à venir, et pas seulement les trois prochaines années, être au rendez-vous du développement économique, de la solidarité, de la justice, de l’écologie et, tout simplement, de la défense des intérêts de notre beau pays, la France !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Belle chute !

M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller.

Mme Fabienne Keller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le traditionnel débat d’orientation des finances publiques, que nous abordons conjointement avec le projet de loi de règlement, doit nous présenter pour 2015 les grands équilibres de nos comptes publics et la stratégie macroéconomique du Gouvernement, avant l’examen de la loi de finances de cet automne.

Vous le savez, à ce stade, nous ne pouvons qu’être très préoccupés par l’équation budgétaire de l’an prochain. Notre pays est confronté à un véritable risque, celui que notre économie décroche et que la croissance y soit plus faible que chez nos partenaires européens.

Dès lors, l’année 2015 apparaît comme celle de tous les dangers si la France veut véritablement rééquilibrer la trajectoire de ses finances publiques et respecter son engagement : ne pas dépasser les 3 % de PIB de déficit.

En disant cela, je n’entends pas dramatiser à outrance. Je ne fais que m’appuyer sur plusieurs rapports convergents. Je pourrais mentionner les bilans approfondis sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques publiés par la Commission européenne le 5 mars dernier et ses analyses par pays du 2 juin dans le cadre du semestre européen, les trois avis du Haut Conseil des finances publiques sur le programme de stabilité, sur la loi de règlement 2012 et sur les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2014, ou encore les avis de la Cour des comptes, tant sur l’exécution budgétaire 2013 que sur le dernier collectif. Enfin, je le rappelle, dans son dernier rapport sur la France, le FMI revoit ses projections macroéconomiques à la baisse.

Ces analyses ne peuvent pas nous laisser indifférents. Elles vont toutes dans le même sens, celle d’une projection de croissance pour 2015 et les années suivantes inférieure à ce qui est envisagé par le Gouvernement.

Vous connaissez le consensus ; pour 2014 et 2015, tous les observateurs économiques, INSEE et FMI compris, évoquent respectivement de 0,7 % et de 1,4 % de croissance, contre 1 % et 1,7 % selon le Gouvernement. Pour les années suivantes, nous savons tous que la France atteindra difficilement le seuil de 1,5 % de croissance, à partir duquel il est possible d’espérer un recul du chômage.

Certes, la conjoncture économique s’améliore en Europe. Mais la reprise est modeste et fragile, et notre pays est confronté à plusieurs risques : celui d’une dette élevée, celui des marchés émergents et celui des zones de tensions géopolitiques.

Surtout, la France ne participe pas pleinement à la reprise. Notre situation se dégrade par rapport à la moyenne européenne. Pourtant, l’environnement économique est le même pour tous !

Je vous épargne les détails sur la comparaison avec l’Allemagne, mais j’aimerais rappeler un élément, d’ailleurs souligné par la Cour des comptes : c’est bien la trajectoire de la baisse de la dépense publique qui est à l’origine du différentiel entre nos deux pays.

Par ailleurs, les institutions françaises, en particulier la Cour des comptes, soulignent un phénomène nouveau et relativement inquiétant : la faiblesse du rendement de l’impôt, qui a des conséquences négatives sur les recettes. Je le rappelle, sur les 25 milliards d’euros de recettes supplémentaires prévus en 2013, seulement 12,5 milliards ont été effectivement perçus. Le Gouvernement est entré dans ce cercle, que je qualifierais d’infernal, où l’augmentation des taux entraîne l’effritement de la base fiscale.

Enfin, l’année 2015 ne commencera pas sur une page blanche. Elle sera contaminée par les écarts d’exécution de 2013 et de 2014. D’une part, comme cela a été rappelé, le déficit s’est élevé en 2013 à 4,3 % du PIB, contre un objectif initial de 3 %. D’autre part, il faudra gérer les conséquences du dérapage des comptes publics de 2014. Ainsi, lors de l’examen du collectif budgétaire, au début du mois de juillet, vous avez concédé 3,8 % de déficit, au lieu de 3,6 %, pour 2014. La Cour des comptes, elle, prévoit 4 % de déficit.

Nous le voyons, les indicateurs macroéconomiques préfigurant la conjoncture en 2015 sont, à eux seuls, préoccupants.

Or, si la faiblesse de la croissance n’assure pas le redémarrage de notre économie, la résorption des déficits publics sera encore plus difficile. Cette situation de croissance faible oblige à mener une action déterminée en matière de baisse de la dépense publique et de réformes structurelles pour construire un nouveau modèle de croissance.

J’en viens à la baisse de la dépense. Nous nous interrogeons sur le volume des économies projetées, sur la méthode et sur le calendrier du Gouvernement.

Premièrement, les 50 milliards d’euros d’économies prévus en trois ans nous semblent insuffisants, pour deux raisons. D’une part, vous avez ajusté la hausse tendancielle des dépenses à cet objectif ; c’est la Cour des comptes elle-même qui le souligne. D’autre part, vous annoncez de nouvelles dépenses, notamment des réductions d’impôts, qui devront être financées.

Je le rappelle, jusqu’à présent, les 50 milliards d’euros d’économies annoncées étaient destinés au rétablissement des comptes, et non à la compensation de la baisse de la fiscalité.

En conséquence, la cible devrait plutôt se situer aux alentours de 60 milliards d’euros.

Deuxièmement, la méthode retenue est contestable.

D’abord, des pans entiers d’économies pour 2015 ne sont pas précisés. Le « tiré à part » présentant les grandes lignes du volet dépenses du budget 2015 n’a été mis en ligne que le 9 juillet. Peut-être vouliez-vous rendre notre week-end du 14 juillet très studieux, monsieur le ministre ?

M. Michel Sapin, ministre. Il fut surtout pluvieux !

Mme Fabienne Keller. Certes, cela n’a pas étant le cas, étant donné que les sept pages du document ne contenaient aucune information nouvelle.

Techniquement, faire jouer la réserve de précaution et le gel des crédits, c’est une gestion au jour le jour. C’est la méthode dite du « rabot », qui a désormais trouvé ses limites. On ne peut pas demander aux administrations d’État, à structures et à missions constantes, d’assurer leurs missions avec toujours moins de moyens ! Et le maintien du gel du point d’indice des fonctionnaires ne constitue pas non plus une politique salariale motivante.

Notre pays aurait au contraire besoin d’ajuster le périmètre d’intervention de l’État, d’assurer une meilleure efficacité de la dépense publique et de réfléchir à la modernisation de ses services publics.

J’ai d’ailleurs écouté hier avec attention le Président de la République, qui a parlé à plusieurs reprises de « réformes », mais sans jamais en décrire les modalités de mise en œuvre. Ce sont justement les précisions de ce type qui font défaut dans les documents qui nous sont présentés.

J’aimerais revenir sur la baisse de 11 milliards d’euros de dotations de l’État aux collectivités locales. Sur le papier, elle est claire. Mais les effets en sont à tout le moins aléatoires.

Comme l’a souligné la Cour des comptes, vous allez une nouvelle fois couper brutalement une partie des ressources des collectivités territoriales tout en continuant d’augmenter leurs charges. Très concrètement, je pense par exemple à la réforme des rythmes scolaires, qui s’imposera à toutes les communes à la rentrée prochaine,…

Mme Fabienne Keller. … ou à l’imposition de normes toujours plus contraignantes.

En agissant ainsi, vous n’anticipez nullement la réaction des collectivités, qui, en vertu du principe de libre administration, pourront choisir de réduire leurs dépenses de fonctionnement, d’augmenter les impôts ou leur dette ou, comme c’est vraisemblable, de limiter leurs investissements. Or, et cela a été rappelé tout à l’heure, elles réalisent 70 % de l’investissement public.

Les conséquences de votre décision pourront donc être particulièrement sensibles sur le volume des passations de marchés publics, donc sur l’emploi, sur les rentrées fiscales, mais également sur la perception des cotisations sociales. Cet effet « boomerang » pour le budget de l’État n’a pas été réellement anticipé, alors que la baisse du volume des investissements et des passations de marchés pourra avoir des conséquences directes.

Troisièmement, il y a un problème de calendrier.

Votre plan d’économies devra être effectif très rapidement l’an prochain si vous espérez pouvoir financer la baisse des charges et réduire le déficit à 3 % du PIB. Or on sait combien le chemin est long et difficile pour concrétiser une telle baisse, a fortiori en l’absence d’un véritable outil de pilotage global. Vous nous promettez des mesures de renforcement de la gouvernance des finances publiques à l’automne prochain. N’est-ce pas un peu court ?

Surtout, vous concentrez les efforts de baisse de la dépense publique sur l’année 2015 et tablez sur une croissance de 2,25 % en 2016 et en 2017. Cela laisse penser que vous misez tout sur le retour de la croissance et ne croyez pas aux réformes structurelles.

Or la croissance ne reviendra pas d’elle-même. Son retour implique de mener la politique que le Président de la République invoque à juste titre, mais que vous ne conduisez pourtant pas : une politique de l’offre, avec tout ce que cela implique, c’est-à-dire un marché du travail adapté, une fiscalité soutenant les entreprises, notamment les PME et les entreprises de taille intermédiaire, l’encouragement clair à l’innovation et la valorisation de la prise de risques pour ceux qui créent de l’emploi.

En fait, vous espérez un effet rapide des dispositions du pacte de responsabilité tout en en doutant vous-même. Les réductions d’impôts pour les entreprises n’interviendront, pour l’essentiel, qu’en 2017.

Avouez-le, ce n’est pas le meilleur moyen de rétablir la confiance des acteurs économiques, qui est pourtant un facteur clé du redémarrage de notre économie.

Par ailleurs, nous souhaiterions connaître clairement la stratégie du Gouvernement s’agissant du respect des engagements européens. Au printemps dernier, il avait déjà eu la tentation de les renégocier auprès de nos partenaires. Aujourd’hui, il semble renoncer implicitement à l’objectif des 3 % de déficit en 2015.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Tout à fait !

Mme Fabienne Keller. Pouvez-vous en informer explicitement la représentation nationale, monsieur le ministre ? Ce serait la moindre des choses !

Pour notre part, nous pensons que vous n’atteindrez pas cet objectif, pour des raisons strictement franco-françaises.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Oui !

Mme Fabienne Keller. Vous avez décidé en début de quinquennat de fortes hausses d’impôts, à contre-courant de l’action de nos partenaires. Cela a eu un effet récessif et assombri durablement la confiance des acteurs économiques.

De surcroît, c’est seulement aujourd’hui que vous vous attaquez à la réduction des dépenses. Et vous avez tardé à donner de réels objectifs financiers à la politique de la modernisation de l’action publique, ou MAP, qui fait suite à la révision générale des politiques publiques, la RGPP ; en l’espèce, le nouveau nom change tout !

Les réformes structurelles sur le marché du travail, sur celui des biens et des services ou encore sur la fiscalité se font attendre.

Dès lors, la seule solution que vous ayez trouvée est de rendre les autres responsables. C’est ainsi que vous contestez le pacte de stabilité et de croissance sous prétexte qu’il manquerait de flexibilité.

Mais vous semblez oublier que ce pacte est intrinsèquement souple et que la France a déjà bénéficié de cette souplesse.

Ce pacte est souple en termes de critères et de délai. Pour ce qui concerne les critères, il prend en considération le déficit structurel pour tenir compte du cycle économique – ce point a été évoqué notamment par M. le rapporteur général. Quant au calendrier, des délais supplémentaires ont pu être accordés, en toute légalité, à plusieurs pays. C’est d’ailleurs à ce titre que la France a déjà bénéficié d’un délai de deux ans – soit désormais jusqu’en 2015 – pour stabiliser sa trajectoire des finances publiques.

Plus particulièrement, dans leurs analyses, le Conseil et la Commission tiennent compte des réformes économiques structurelles majeures qui ont une incidence vérifiable sur la trajectoire d’ajustement en vue de la réalisation des objectifs de moyen terme. Les pays concernés – je pense notamment à l’Espagne – doivent être crédibles et prouver que le délai supplémentaire est utilisé pour rétablir la croissance. Monsieur le ministre, c’est ce à quoi vous devez vous employer aujourd’hui.

C’est pourquoi nous pensons que le débat austérité contre croissance est un faux débat ; la priorité est de sortir de la spirale de l’endettement. Or je rappelle que la dette de notre pays a augmenté de 3,1 points en 2013 pour atteindre 94,1 % du PIB, que désormais le niveau de dette de la France dépasse l’endettement moyen de la zone et que ce taux dépassera 100 % l’an prochain.

Ne nous leurrons pas, parce que nous sommes comme anesthésiés par des taux d’intérêt historiquement bas qui nous assurent un financement facile.

Monsieur le ministre, vous l’aurez compris, il ne s’agit aucunement de notre part d’un quelconque fétichisme de l’équilibre budgétaire ; il s’agit bien d’une question de souveraineté, de compétitivité et de cohésion sociale, de crédibilité sur les marchés pour notre pays.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !

Mme Fabienne Keller. La France représente 20 % du PIB de la zone euro ; sa situation économique est, de ce seul fait, un enjeu pour l’Union européenne tout entière. Il est donc extrêmement important que vous puissiez respecter la trajectoire d’équilibre de nos finances publiques telle qu’elle est prévue.

Pour ces raisons, les membres du groupe UMP ne pourront voter en faveur du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013 tel que vous nous le présentez…

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Malheureusement !

Mme Fabienne Keller. … et émettent toutes leurs réserves sur la faisabilité de votre programme économique pour l’année 2015. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Michèle André.

Mme Michèle André. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le présent débat sur l’orientation des finances publiques constitue, en application de la LOLF, désormais bien entrée dans nos mœurs parlementaires, le rendez-vous budgétaire du début de l’été.

S’inscrivant, pour la quatrième fois déjà, dans le cadre du semestre européen, qui instaure une procédure de surveillance de la préparation des budgets nationaux par les autorités communautaires, il fait suite à six mois de débats qui ont commencé avec l’allocution du Président de la République du 31 décembre 2013 et sa conférence de presse du 14 janvier dernier.

En débattant de l’orientation des finances publiques, il s’agit en fait de débattre de l’orientation de la politique économique de la France au cours des trois années à venir, de savoir où nous en sommes et ce que nous allons faire, de montrer comment vont être consolidées les orientations du Gouvernement, en en présentant les perspectives et la cohérence.

Les choix et les orientations du gouvernement français auront déjà été affirmés cette année devant le Parlement à quatre occasions : lors du débat sur la déclaration de politique générale du Gouvernement, lors du débat sur le programme de stabilité, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2014 et, tout à l’heure, lors de l’examen du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

L’année 2014 constitue le deuxième exercice de la nouvelle gouvernance budgétaire de la zone euro depuis l’entrée en vigueur, le 1er janvier 2013, du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.

Notre débat d’aujourd’hui est donc un débat préparatoire à une nouvelle loi de programmation des finances publiques, dont on connaît déjà l’architecture : c’est celle du programme de stabilité que le Gouvernement a transmis à la Commission européenne.

Je ne peux, à ce stade, que souligner la cohérence et la constance de l’action du Gouvernement en matière de finances publiques. La trajectoire que nous avons fixée va être confirmée. Le débat sur la maîtrise de la dépense publique, nous l’avons et nous l’aurons encore plus précisément au moment de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.

Depuis deux ans, les mesures de consolidation des finances publiques prises par le Gouvernement ont, dans un premier temps, répondu à une double logique d’efficacité économique et de justice sociale : demander plus à ceux qui ont davantage pour aider au redressement des finances publiques. Mais dès 2013, des mesures ciblées ont permis de soutenir le pouvoir d’achat des plus modestes : ainsi, la loi de finances initiale pour 2013 prévoyait une revalorisation importante de la décote ; en 2014, le Gouvernement a procédé à la réindexation du barème de l’impôt sur le revenu sur le coût de la vie, après deux années de gel, ainsi qu’à une nouvelle revalorisation de 5 % de la décote au-delà de l’inflation et à un relèvement du plafond du revenu fiscal de référence, ouvrant droit à des exonérations et allégements de fiscalité directe locale et de contributions sociales.

Le projet de loi de finances rectificative pour 2014, en cours de discussion parlementaire, comprend des réductions d’impôt pour les ménages aux revenus les plus modestes tout en confirmant le redressement des comptes publics, avec une baisse du déficit public, une baisse des dépenses publiques et, en ligne de mire, la baisse de l’endettement de notre pays.

Amplifiées par la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, les mesures de solidarité favorables au pouvoir d’achat des plus modestes doivent représenter 5 milliards d’euros d’ici à 2017, dont 1,2 milliard d’euros dès 2014. Ces mesures vont bénéficier à 3,7 millions de ménages, dont 1,9 million seront exonérés d’impôt sur le revenu dès cette année.

Parallèlement à ces dispositions favorables au pouvoir d’achat des Français, la période 2015-2017 doit être l’occasion d’un effort structurel en dépenses pour les administrations publiques de 50 milliards d’euros.

Entre 2015 et 2017, la poursuite du ralentissement de la dépense publique devrait résulter de la montée en charge des mesures déjà votées et de celles qui ont été présentées dans le programme de stabilité du mois d’avril 2014 qui porte le montant des économies supplémentaires sur cette période aux 50 milliards d’euros que je viens d’évoquer.

Les économies réalisées sur les dépenses de l’État et de ses agences devraient assurer un gain total de 18 milliards d’euros. Les collectivités locales devraient y participer à hauteur de 11 milliards d’euros sur trois ans.

Alors même que les comptes des organismes de sécurité sociale se sont redressés en 2013, la sphère sociale devrait également contribuer fortement aux économies, au-delà des mesures prévues pour 2014 sur les dépenses d’assurance maladie. La progression de l’ONDAM devrait être limitée à 2 % en moyenne sur les trois années considérées, pour une économie totale de 10 milliards d’euros.

Les économies réalisées sur les prestations et les charges de fonctionnement devraient représenter 11 milliards d’euros sur le reste de la sphère sociale.

En 2015, la mise en œuvre d’une part importante de ces 50 milliards d’euros d’économies en dépenses devrait induire un effort structurel de 0,9 point de PIB, ce qui permettra de financer, dans le cadre d’une réduction des déficits publics, une première baisse des prélèvements obligatoires prévue dans le pacte de responsabilité et de solidarité.

Le budget pluriannuel 2015-2017, qui sera soumis au Parlement au mois de septembre prochain, déclinera la trajectoire établie dans le cadre du programme de stabilité. Compte tenu de l’évolution tendancielle de la dépense de l’État et des objectifs de rétablissement des comptes publics, cette trajectoire implique de dégager 18 milliards d’euros d’économies d’ici à 2017. Le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014-2017 fixe donc des objectifs d’évolution des dépenses de l’État plus ambitieux que ceux qui avaient été définis par la précédente loi de programmation pour la période 2012-2017.

Cette dernière prévoyait en effet que les dépenses totales de l’État – dépenses des ministères, prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne et des collectivités locales, taxes affectées plafonnées – seraient stables en volume et, hors charge de la dette et des pensions, seraient, au plus, stables en valeur par rapport à la loi de finances initiale pour 2012.

Dès 2014, le Gouvernement est allé au-delà des objectifs fixés dans cette loi de programmation en diminuant les dépenses de 1,7 milliard d’euros. C’était la première fois qu’un budget de l’État était construit sur une telle baisse nette des dépenses,…

M. Michel Sapin, ministre. Absolument !

Mme Michèle André. … alors que l’objectif retenu dans la loi de programmation des finances publiques prévoyait une stabilité en valeur. Et cette diminution a porté sur l’ensemble des composantes de la dépense : de la réduction des coûts de fonctionnement de l’État à la rationalisation des dépenses d’intervention et d’investissement de l’État.

Le respect de la trajectoire des dépenses de l’État par le Gouvernement repose, en grande partie, sur des réformes de fond de l’action publique, les économies étant réparties entre toutes les composantes de la norme de dépenses.

Les ministères, d’abord, connaîtront une diminution de leurs crédits en valeur sur la période 2015-2017, par rapport à la loi de finances initiale pour 2014. Les économies sur les dépenses de fonctionnement et les opérations d’investissement seront poursuivies par le biais de la modernisation des fonctions et de la réduction du train de vie de l’État, sans compter les résultats de plus en plus performants de la lutte contre la fraude fiscale.

Les agences et les opérateurs de l’État, dont les dépenses ont sensiblement augmenté sous le précédent quinquennat, prendront leur part à ces économies, les opérateurs, notamment, eu égard à l’abaissement des plafonds des recettes affectées et à la baisse des subventions qui leur sont versées.

Au-delà de la diminution des concours de l’État, des mesures de simplification du paysage des agences seront prises pour rationaliser leurs interventions et renforcer la lisibilité et l’efficacité de l’action publique.

En matière d’emploi, le budget triennal 2015-2017 continuera de mettre en œuvre les priorités du quinquennat en faveur de l’éducation, de la justice et de la sécurité. L’objectif de la création de 60 000 postes dans le secteur de l’éducation et de 5 000 postes dans celui de la sécurité et de la justice affiché depuis le début du quinquennat est maintenu. Globalement, l’emploi dans la fonction publique d’État n’augmentera pas, certains effectifs étant redéployés vers d’autres missions.

Je ne saurais finir de brosser ce tableau à grands traits de l’orientation de notre politique économique sans préciser que, dans son volet relatif aux entreprises, le pacte de responsabilité et de solidarité comprend un ensemble de dispositions destinées à favoriser l’emploi et à soutenir la capacité d’investissement productif de l’économie : déjà engagé avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, l’allégement du coût du travail est accéléré, notamment avec les mesures proposées dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, l’ensemble des mesures du pacte devant permettre de gagner plus de 0,5 point de PIB en croissance.

Celle-ci devrait être favorisée par la montée en charge du CICE, dont les effets devraient s’ajouter à ceux des dispositions du pacte de responsabilité et de solidarité, devant permettre aux entreprises de réduire le coût du travail de 30 milliards d’euros et leur fiscalité de 10 milliards d’euros à l’horizon 2017. L’investissement des entreprises devrait s’accélérer, favorisé par le maintien de conditions de financement très favorables dues au sérieux de la gestion gouvernementale : le taux de marge des entreprises devrait se rapprocher de son niveau antérieur à la crise, permettant à celles-ci de maintenir un taux d’investissement élevé sans obérer leur situation financière.

Je ne m’étendrai pas sur les programmes d’investissement d’avenir qui, n’ayant jusqu’à présent fait l’objet que de 6 milliards d’euros de dépenses, laissent encore une quarantaine de milliards d’euros pouvant être investis.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tous ces choix du Gouvernement, cohérents avec tant les préconisations de la Cour des comptes que les recommandations de la Commission européenne, incitent les membres du groupe socialiste à soutenir fermement la politique du Gouvernement, plus particulièrement aujourd’hui les orientations qu’il nous a présentées en matière de finances publiques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au début de cette intervention sur le présent projet de loi de règlement, j’ai envie de dire : tout ça pour ça ! Autant d’efforts pour si peu de réconfort !

Depuis trois ans, les gouvernements successifs ont usé de l’arme fiscale : 18 milliards d’euros en 2011, 22 milliards d’euros en 2012, 29 milliards d’euros en 2013, soit 69 milliards d’euros en trois ans ! La Cour des comptes a souligné à raison les limites d’une telle stratégie exclusivement tournée vers l’augmentation des impôts. Elle a relevé que l’effort notable et d’ampleur engagé en 2013 n’a eu malheureusement que peu d’effet sur le déficit. Pour ma part, je pense depuis longtemps que l’augmentation des impôts a un effet plus récessif qu’une véritable politique de diminution de la dépense publique, politique que nous aurions déjà dû engager depuis pas mal d’années.

Le présent projet de loi de règlement soulève selon moi trois problèmes : d’abord un problème de prévision, ensuite un problème de communication, enfin un problème de présentation.

Pour ce qui concerne le premier de ces problèmes, il est clair, monsieur le ministre, que, comme vos prédécesseurs, vous vous êtes montré trop optimiste. On l’a encore vu en 2013, avec les hypothèses de croissance. Voilà deux ans, dans cette enceinte même, j’avais proposé au ministre de l’époque, pour faire preuve de prudence, de prendre comme hypothèse de croissance le consensus auquel avaient abouti les économistes diminué de 0,5 %. De fait, 0,8 % moins 0,5 %, cela fait 0,3 %, soit le taux observé en 2013.

Pour 2014, vous avez retenu 1 % de croissance. On verra bien à combien ce taux s'établira, sachant qu’il faudrait toujours infléchir la prévision de 0,5 point. Pour l’instant, l’INSEE prévoit 0,7 % de croissance, tout comme le FMI…

Je pense qu’il est urgent de se baser sur des hypothèses plus prudentes que celles qui ont été retenues jusqu’à présent, en matière non seulement de croissance, mais aussi de recettes. Ainsi, en 2013, on a constaté une moins-value sur les recettes de 14,6 milliards d’euros – excusez du peu –, cela sans explication véritablement convaincante.

Alors, monsieur le ministre, je m'interroge. Vous n'êtes peut-être pas responsable de tout, et il est vrai qu’une succession de trois ministres chargés du budget en deux ans ne favorise pas une bonne organisation à Bercy… Mais il s'y trouve de nombreuses têtes bien faites, et je ne comprends pas pourquoi l’on n’arrive pas à nous expliquer un petit peu plus clairement cette différence entre prévision et réalisation.

Mme Nicole Bricq. L’économie n’est pas une science exacte !

M. Vincent Delahaye. J’aimerais que l’on se penche sur cette question, que nous jugeons importante.

Il existe aussi un problème de communication. Le Gouvernement et les médias communiquent beaucoup sur les budgets et peu sur la loi de règlement. Les budgets, ce sont des déclarations d’intention qui, assez souvent, sont éloignées de la réalité. La loi de règlement dit la réalité des chiffres, et il serait donc préférable que l’on en parle un peu plus.

Mme Nicole Bricq. Ça, c'est vrai.

M. Vincent Delahaye. Mais je peux comprendre que l’on en parle relativement peu, dès lors que le déficit s'établit finalement à 75 milliards d’euros, soit environ 12 milliards d’euros de plus que la prévision initiale ! Ce déficit représente 4,3 % du PIB, taux nettement supérieur à ceux des pays de l'Union européenne ou de la zone euro, dans laquelle le déficit s’élève à 3 %. Par ailleurs, ce déficit de 75 milliards d’euros s'avère supérieur aux recettes annuelles de l’impôt sur le revenu – 67 milliards d’euros –, et même aux dépenses enregistrées au titre des cinq missions régaliennes de l’État que sont la sécurité, la justice, la défense, l’action extérieure de l’État et l'administration générale et l'organisation territoriale, qui s’élèvent à 70 milliards d’euros !

Face à ce niveau de déficit, je pense qu’il est temps de réagir pour s'attaquer vraiment à la dépense, de sorte qu’elle diminue franchement.

J’en viens maintenant au troisième problème soulevé par le projet de loi de règlement que nous étudions, à savoir la présentation. Pour ma part, monsieur le ministre, je souhaiterais que, au-delà des obligations légales, la présentation d’un texte de cette nature suive la même logique qu’un budget…

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Voilà !

M. Vincent Delahaye. … et qu’elle fasse ainsi apparaître les missions, l’aide aux collectivités, le soutien aux opérateurs… Je souhaiterais que nous disposions d’un comparatif qui provienne non seulement de la Cour des comptes – actuellement la seule à le faire –, mais aussi des services de l’État, ce qui nous permettrait d’y voir un petit peu plus clair.

Quand on examine de façon détaillée les dépenses, on s'aperçoit qu’elles ont été maîtrisées, certes. Depuis le début de la discussion générale, j’ai beaucoup entendu parler de « maîtrise de la dépense publique ».

Mme Nicole Bricq. La maîtrise des dépenses, c'est déjà pas mal !

M. Vincent Delahaye. Pour ma part, j’aimerais entendre parler de réduction de cette dépense. (M. le président de la commission des finances acquiesce.)

La maîtrise, c'est peut-être une bonne chose dans des circonstances plus favorables. Mais aujourd'hui, pour parvenir à une réelle diminution de nos déficits, ce qui importe, c'est la réduction de la dépense.

Finalement, on s'aperçoit que la « maîtrise » de la dépense publique que vous présentez au titre de 2013 a été obtenue grâce à la réserve de précaution – à hauteur de 6 milliards d’euros – (M. le rapporteur général de la commission des finances le conteste.), à la réduction du coût de la dette – heureusement, les marchés ont maintenu les taux d'intérêt à un niveau très bas, ce qui nous a permis de nous en sortir – et aux pensions de retraite, grâce à une inflation moins forte que celle qui avait été initialement prévue.

Malheureusement, cette maîtrise de la dépense publique pèse sur les mêmes. D'abord, sur les collectivités territoriales. La diminution des dépenses de l’État en 2013 a correspondu approximativement – à quelques centaines de millions d’euros près – à la réduction de l’aide aux collectivités territoriales. Et, monsieur le ministre, vous nous annoncez pour les trois prochaines années – jusqu'en 2017 – une diminution des dépenses de l’État de 11,5 milliards d’euros, avec 11 milliards d’euros de baisse au titre des collectivités territoriales.

L’effort demandé aux collectivités territoriales n’est clairement pas équitable au regard de celui que consentent les services de l’État. Je vous demande de bien vouloir en prendre note afin de procéder aux modifications qui s'imposent, sans quoi nombre de collectivités connaîtront de grandes difficultés…

Outre les collectivités territoriales, le ministère de la défense est largement sollicité, les réductions d’effectifs et de moyens pesant fortement sur celui-ci.

Enfin, selon moi, les opérateurs ne sont pas tellement mis à contribution – la Cour des comptes l’a d’ailleurs relevé –, en termes ni d’effectifs ni de dépenses de fonctionnement.

En conclusion, je voudrais profiter de l’examen du présent projet de loi de règlement pour tirer quelques leçons qui soient utiles pour l’avenir. D'abord, il est clair, monsieur le ministre, que l’option du matraquage fiscale est une voie sans issue. (M. le président de la commission des finances acquiesce.) On l’a vu, 69 milliards d’euros de prélèvements supplémentaires en trois ans n'ont permis qu’une réduction mineure du déficit. Ensuite, la croissance est au point mort, et il est donc temps de prendre des dispositions vraiment efficaces pour améliorer la compétitivité des entreprises et permettre ainsi de relancer cette croissance qui, seule, nous permettra de sortir d’affaire. Enfin, la dette constitue une préoccupation majeure pour nous tous.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C'est la préoccupation principale !

M. Vincent Delahaye. Je l’ai entendu dire à cette tribune et je le répète : notre dette représente sept années pleines de recettes de l’État !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Voilà !

M. Vincent Delahaye. Ce n’est plus supportable ! Tous les foyers fiscaux qui peuvent faire la comparaison avec leur revenu annuel comprendront qu’il n’est pas possible d'être endetté à hauteur de sept fois ce revenu. Il est donc grand temps de prendre des dispositions sérieuses pour réduire notre déficit en diminuant nos dépenses. Cela permettra de limiter l'augmentation de la dette et nous autorisera à repartir dans de bonnes conditions, avec la perspective, pour nos enfants, d’une économie plus favorable. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq. (M. Jean Besson applaudit.)

Mme Nicole Bricq. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Vincent Delahaye a raison : hors de cet hémicycle et de celui de l’Assemblée nationale, la loi de règlement est un peu le parent pauvre des lois de finances, alors qu’elle sonne l’heure de la réalité. Je partirai donc du contenu du présent projet de loi, pour en tirer quelques leçons générales.

Je ne sais pas si le bon remède est celui que préconisait le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, devant la commission des finances du Sénat : changer le nom de la loi de règlement – cette expression est, il est vrai, un peu barbare – pour la dénommer « loi de résultat », ce qu’elle est. Je ne sais pas si un tel changement de dénomination permettrait d’atteindre la mobilisation à laquelle on parvient, à force de commentaires publics, avec la loi de finances initiale, alors que cette dernière ne constitue qu’une prévision, appelée à être actualisée par des lois de finances rectificatives puis à être constatée en exécution budgétaire.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il y a eu le rapport de gestion, le compte rendu de gestion…

Mme Nicole Bricq. Cela étant, je note que si le taux de couverture des dépenses par les recettes s'améliore, il n’est pas revenu au niveau de 2007, avant la crise financière. Je remarque également un effort très important d’amélioration du solde primaire, celui qui est calculé hors charge de la dette : il passe de 40,8 milliards d’euros à 30 milliards d’euros, même si cette somme reste considérable.

Mes chers collègues siégeant sur les travées du groupe CRC, on ne peut pas dire que la France pratique l’austérité, et les chiffres le démontrent. On peut employer ce mot à l’égard de pays voisins, qui posent un problème d’équilibre dans la zone euro et qui souffrent : le Portugal, l’Espagne et l’Irlande. Mais, j’y insiste, ce n’est pas le cas de la France.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C'est un propos honnête !

Mme Nicole Bricq. En général, je m'efforce de l’être, monsieur Marini, et vous avez pu apprécier quelques fois ce trait de ma personnalité.

En cet instant, je voudrais adresser un satisfecit au Gouvernement, qui a anticipé l’enclenchement du mécanisme de correction des écarts – cela a été dit au moment de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

Il est vrai – M. le rapporteur général l’a rappelé tout à l'heure – qu’un rendez-vous extrêmement important nous attend à l’automne, puisque nous devrons discuter d’une nouvelle trajectoire des finances publiques qui prendra acte du changement de rythme décidé à l’occasion du programme de stabilité, ce qui rendra le mécanisme de correction inopérant.

Pour ce qui concerne la trajectoire budgétaire, j’ai relu les propos du rapporteur général de la commission des finances lors de l’envoi, au mois d’avril, du programme de stabilité. Lui aussi avait bien anticipé les difficultés que nous rencontrerions. Il notait, parmi les aléas, la faiblesse des élasticités fiscales – que l’on constate –, la faiblesse de l’inflation – celle-ci est encore plus faible que prévu – et la majoration du prélèvement européen, dont il faudra supporter le poids au cours des années qui viennent, et dont nous serons donc appelés à reparler.

François Fortassin a évoqué tout à l'heure Joseph Caillaux. Pour ma part, je voudrais attirer l’attention sur les recettes et les dépenses.

Certains collègues ont parlé de la réforme fiscale, mais une recette, que Thierry Foucaud visait tout à l'heure à la tribune, suscite de nombreux commentaires : l’impôt sur le revenu. Nous en fêtons aujourd'hui le centième anniversaire, puisque sa naissance officielle résulte d’une loi promulguée le 15 juillet 1914 – elle est donc antérieure à la guerre de 1914-1918 –, même si, on le sait, il a fallu attendre encore quelques années pour l’appliquer.

Je voudrais maintenant citer les travaux de l’OCDE. Conduits sur une période de trente ans, ils ont montré que l’État-providence n’était pas mort en France, puisque notre pays est celui où les inégalités ont été les moindres. Quand on compare l’évolution des revenus des 20 % les plus riches et des 20 % les plus pauvres de nos concitoyens, on voit que le multiplicateur est de sept avant impôts et prélèvements sociaux, alors qu’il n’est plus que de quatre après impôts et prélèvements sociaux. On peut considérer que c'est encore trop, mais notre système fiscal et social est assurément redistributif. (M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général de la commission des finances acquiescent.)

Je l’indique à l’attention de ceux qui soutiennent que l’on n’a pas fait de réforme fiscale suffisante, j’ai regardé les travaux de la mission sur la fiscalité des ménages conduite par Dominique Lefebvre et François Auvigne, inspecteur général des finances. Ils ont démontré que la progressivité de l’imposition des revenus est réelle, la CSG disposant elle-même de propriétés redistributives puisque, bien que proportionnelle, elle s'applique à des taux minorés sur les revenus de remplacement, et à des taux majorés sur les revenus du capital.

J’y insiste donc : notre système est progressif, même s'il peut toujours être amélioré en suivant les propositions du rapport Lefebvre-Auvigne, et ce sans qu’il soit besoin d’une révolution. On le sait, il peut y avoir de grands soirs, auxquels succèdent de petits matins…

Les dépenses de l’État, quant à elles, ont été maîtrisées, ainsi qu’il apparaît à la lecture du projet de loi de règlement. Les dépenses nettes du budget général ont légèrement diminué, avec une baisse de 900 millions d’euros. Un tel recul n’a pas été observé depuis le début de la crise économique de 2008. (M. le ministre acquiesce.) Certes, ce recul doit beaucoup à la diminution de la charge de la dette.

À ce sujet, s'il est vrai que les taux sont bas, je voudrais, monsieur le ministre, saluer votre gouvernance et celle de votre prédécesseur, ainsi que le travail de l'administration du Trésor. La dette est bien gérée. Les émissions se font au bon moment, et sur les bonnes durées.

Toutefois, un point reste tout à fait critiquable : une fois de plus, les dépenses d’investissement de l’État qui ne représentent que 3,4 % du budget national connaissent une baisse, à hauteur de 1,4 milliard d’euros. Elles sont donc la variable d’ajustement. Parallèlement, si la masse salariale est tenue, les charges de fonctionnement, elles, ne cessent d’augmenter, au détriment, ainsi, des dépenses d’investissement.

Mme Nicole Bricq. Et je rappelle le ratio retenu lors de l’élaboration du programme d’investissement d’avenir, suivant lequel, lorsque l’État dépense un euro, on peut en espérer en réalité trois, avec un euro provenant du secteur privé et un euro des collectivités territoriales. Il faut donc faire attention…

Je voudrais maintenant dire quelques mots des dépenses fiscales. Elles ont été stabilisées – le projet de loi de règlement montre qu’elles s'élèvent à 70,7 milliards d’euros, soit un niveau inférieur au plafond de la loi de programmation –, mais il avait été prévu qu’elles diminueraient de 3,6 milliards d’euros.

Nous avons peu progressé dans le domaine des dépenses fiscales – appelées plus trivialement des « niches » –, puisque, en trois ans, elles sont passées de 464 à 460. Je regrette surtout que, depuis le rapport Guillaume, l’obligation d’évaluation ne soit pas respectée. Les dépenses fiscales sont utiles, mais il faut les évaluer régulièrement, tous les trois ans, pour mesurer leur efficacité réelle. C’est un chantier qu’il faut reprendre.

À partir de 2014, le crédit d’impôt compétitivité emploi et le crédit d’impôt recherche – une forme particulière de dépenses fiscales – seront traités en comptabilité nationale comme des dépenses, et non comme de moindres recettes. Ce sera une bonne chose, car, en plus des décisions prises dans différentes lois, cela permettra vraiment de les évaluer. Si je cite ces deux mesures, c’est qu’elles suscitent de nombreux commentaires et que, compte tenu de leur ampleur, il paraît bien normal que la représentation nationale s’y intéresse.

Je conclurai sur un mouvement engagé de façon assez nette : le rapatriement des bases fiscales. Depuis la crise et le sommet du G20 de Pittsburgh de 2009, tous les États veulent rapatrier leurs bases fiscales. Nous étudierons la semaine prochaine le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre la France et les États-Unis en vue de mettre en œuvre la loi FATCA. Je me réjouis par avance de son adoption. J’ai été l’une des pionnières dans cette enceinte à évoquer la transparence, alors que mes collègues siégeant sur la droite de cet hémicycle refusaient d’en entendre parler. C’était pour eux un sujet tabou.

J’évoquerais également la lutte engagée contre l’optimisation fiscale. Peut-être nous en direz-vous plus sur ce point, monsieur le ministre, mais lors du Conseil Ecofin du 20 juin dernier, il a été question de durcir la directive relative à ce sujet. J’ai constaté que la Commission sortante avait engagé un vigoureux travail d’enquête sur trois pays européens, à savoir l’Irlande, les Pays-Bas…

M. Michel Sapin, ministre. Le Luxembourg.

Mme Nicole Bricq. … et le Luxembourg, j’allais l’oublier, pourtant objet de toute notre attention !

J’ai pris note que la directive dite « mère-filiales » était appelée à évoluer. Le Congrès américain a été contrarié de constater que 48 % des plus grandes entreprises américaines étaient installées aux Pays-Bas.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Eh oui !

Mme Nicole Bricq. Un problème se pose au sein même de la zone euro. Je vous encourage donc à aller dans ce sens. Nous reparlerons de tous ces mécanismes d’intégration fiscale lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative.

Par ailleurs, nous devons absolument adopter des dispositions allant dans le sens d’une harmonisation de l’assiette de l’impôt sur les sociétés – c’est l’un de mes dadas, que j’enfourche volontiers –, car l’Union européenne ne peut pas continuer ainsi.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela demande l’unanimité !

Mme Nicole Bricq. À partir du moment où l’on consolide une assiette de l’impôt sur les sociétés, je ne dis pas que le problème du taux devient secondaire. En tout cas, il devient second.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Mais il faut l’unanimité !

Mme Nicole Bricq. Des coopérations renforcées sont possibles, monsieur le président, et vous le savez très bien ! Nous pouvons commencer par là. Cela me paraît essentiel.

À cet égard, une proposition, signée par trois éminents membres du Conseil d’analyse économique, dont la présidente Mme Agnès Bénassy-Quéré, vise à prolonger l’union bancaire au travers d’une fusion des taxes bancaires au sein de l’Union européenne.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce sera excellent pour la compétitivité !

Mme Nicole Bricq. C’est aussi, me semble-t-il, une bonne piste pour l’avenir. Car, franchement, et c’est la leçon que je tire de mon expérience, mais aussi de la lecture des lois de finances, nous ne pouvons pas continuer ainsi à nous faire la guerre au détriment du rapport de force avec les États-Unis. Je pense notamment au principe d’extraterritorialité. Rien ne sert de pleurer sur le lait renversé, dotons-nous d’une législation européenne qui nous permette d’entretenir un rapport de force avec les États-Unis. Il reste encore beaucoup à faire en la matière. Je sais que vous en avez la volonté, monsieur le ministre. Vous allez nous le dire... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Serge Dassault.

M. Serge Dassault. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, mon propos ne concerne que les orientations budgétaires pour 2015. Il sera très différent de ceux que j’ai entendus jusqu’à présent ; je formulerai non pas une critique, mais des propositions. Car la situation est grave et le Gouvernement n’arrivera jamais à un déficit budgétaire de 3 % en 2015.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Vous êtes trop critique, mon cher collègue !

M. Serge Dassault. La croissance restera à un niveau très bas – et je vous dirai pourquoi par la suite.

Si notre déficit n’atteint pas les 3 % en 2015, toutes les menaces financières se réaliseront. Nous aurons droit à la perte de confiance de nos investisseurs et à l’augmentation de nos taux d’intérêt. Nous ne trouverons plus personne pour nous prêter les 180 milliards d’euros par an, à moins ce que soit à des taux prohibitifs, et la France se retrouvera en cessation de paiement. Tout cela parce que la politique que mène le Gouvernement – il n’est pas le premier, il en allait de même auparavant – supprime toute possibilité de croissance et de réduction du chômage. Pourquoi ?

Nous n’aurons pas de croissance, parce que toutes les actions mises en œuvre reposant sur des impôts excessifs sur les revenus et le patrimoine ont fait partir nos investisseurs. Ils ont investi et créé des emplois ailleurs, plus en France. Cela a commencé en 1982 lorsque François Mitterrand a créé l’impôt de solidarité sur la fortune, responsable de notre absence de croissance, car la croissance naît des investisseurs. Or nos investisseurs sont quasiment tous partis. Et cela continue !

Déjà, des quartiers entiers de Français ont été créés à Londres et à Bruxelles. D’autres concitoyens partent en Suisse et au Canada au lieu de rester en France.

Quant au chômage, il perdurera tant que le Gouvernement et les syndicats n’auront pas compris que les entreprises n’embaucheront que quand elles recevront des commandes, et ce à condition que, une fois la commande livrée et si aucune autre ne vient la remplacer, elles puissent licencier le personnel surabondant. Sans cela, elles n’embaucheront pas !

C’est ce qui s’appelle la flexibilité de l’emploi, ou la flexisécurité. Contrairement à la rigidité de l’emploi que toutes les entreprises françaises supportent depuis longtemps, cette flexibilité se pratique couramment aux États-Unis et ailleurs ; elle a permis de sauver nombre d’entreprises de la faillite. L’emploi est bien mieux assuré par la flexibilité que par la rigidité, contrairement à ce que croient les syndicats.

Par ailleurs, les 35 heures de Martine Aubry ont été catastrophiques pour toutes nos activités.

M. Gérard Longuet. C’est vrai !

M. Serge Dassault. Elles sont l’une des causes du manque de compétitivité de notre pays, fait qui est donc lié à un coût du travail trop élevé et à un travail insuffisant.

Mme Annie David. Et le capital ?

M. Serge Dassault. De plus, elles coûtent chaque année à notre budget 21 milliards d’euros d’allégement de charges sociales, car l’horaire réduit à 35 heures, mais payé 39 heures, a accru d’un coup les charges des entreprises.

Revenir à 39 heures,…

M. Gérard Longuet. Évidemment !

M. Serge Dassault. … ce qu’il faudrait faire et que l’on ne veut pas faire,…

M. Dominique Bailly. Pourquoi pas 50 heures payées 35 ?

M. Serge Dassault. … permettrait de supprimer ces allégements et accorderait au budget 21 milliards d’euros supplémentaires, ce qui n’est tout de même pas négligeable.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !

M. Serge Dassault. Tant qu’aucun gouvernement, de gauche comme de droite, n’aura pas supprimé l’impôt sur le patrimoine et les hauts revenus, les 35 heures et la rigidité du travail, il est inutile de croire au père Noël et de penser qu’un jour la croissance augmentera et le chômage diminuera.

D’ailleurs, je vous rappelle que si Nicolas Sarkozy, pourtant de droite, n’a pas réussi à faire redémarrer notre économie, c’est bien parce qu’il n’a supprimé ni l’ISF, ni les 35 heures, ni la rigidité du travail. Il a fait comme vous, il n’a pas réussi. Donc, vous ne ferez pas mieux : la France continuera à accumuler les déficits et à assister à la décadence de son économie.

En réalité, les lois de l’économie sont immuables. Mieux vaut s’y conformer, car elles n’ont rien à voir avec l’idéologie politique. Le moteur de l’économie est la motivation, la recherche de l’augmentation des responsabilités et des rémunérations. Les Chinois l’ont bien compris. Après des années de communisme et de pauvreté, leur dirigeant Deng Xiaopin leur a dit « enrichissez-vous ! », sans limitation, et c’est parti : ils ont compris, eux, qu’il valait mieux que les pauvres deviennent riches plutôt que les riches deviennent pauvres.

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Karl Marx avait raison !

M. Serge Dassault. Aujourd’hui,…

Mme Annie David. Aujourd’hui, les riches deviennent plus riches et les pauvres plus pauvres ! Ce n’est pas bien non plus !

M. Serge Dassault. … les Chinois enrichis et travailleurs investissent dans le monde entier. Ils ont créé des entreprises de haute technologie.

Pour en revenir au budget de 2015, rappelons que celui de 2014 a prévu 300 milliards d’euros de recettes mais avec 380 milliards d’euros de dépenses, donc 80 milliards d’euros de déficit, soit 4 % de PIB, augmentant d’autant la dette. Pour arriver à 3 % de PIB en 2015, il faudrait trouver 20 milliards d’euros d’économies en 2015, et, pour atteindre l’équilibre, il en faudrait 80.

Alors, mes chers collègues, je voudrais vous proposer un joker, si je puis dire, dont je vous ai déjà parlé voilà une huitaine de jours : la flat tax. La CSG est déjà payée par le biais d’une flat tax. Il suffirait de prévoir une flat tax globale, qui associerait la CSG et l’impôt sur le revenu. À elle seule, la CSG avec sa flat tax rapporte 90 milliards d’euros, alors que l’impôt sur le revenu représente 70 milliards d’euros. Nous supprimerions l’impôt progressif mis en place par Joseph Caillaux voilà cent ans qui réduit l’investissement et la croissance, et la retenue pourrait être effectuée à la source, puisque ce sont les entreprises qui paient. Cela présenterait un immense intérêt : le salaire net deviendrait non imposable. Cela changerait tout !

De plus, des niches fiscales personnelles pourraient être supprimées, ce qui rapporterait plus de 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires à l’État.

Il n’est pas question pour moi de proposer aujourd'hui des taux, mais je pense qu’il serait utile d’étudier cette proposition, d’en tirer profit, si possible, lors de l’élaboration du prochain budget et ainsi de sauver notre pays de la faillite. Les recettes attendues d’une telle disposition seraient bien supérieures à ce que rapportent la CSG et l’impôt sur le revenu, ce qui résoudrait bien des problèmes.

La flat tax est appliquée avec succès en Russie, ancien pays communiste, qui a de l’expérience, à un taux unique de 13 %. En raison de l’absence de fraude fiscale – tout le monde paie –, ce pays enregistre des revenus supérieurs.

Vingt-quatre autres pays appliquent une telle taxe d’un montant de 15 % à 20 %, dont l’Estonie, la Roumanie, la Géorgie, la Slovaquie. Partout, la flat tax maximalise l’efficacité économique.

Ce beau pays qu’est la France, comme l’a dit Jean-Vincent Placé, est bien mal en point ! Aussi, je vous propose, monsieur le ministre, de faire étudier par une mission parlementaire, en lien avec Bercy, une flat tax unique en France pour financer à la fois la CSG, les impôts, les déficits, afin de connaître son utilité, au lieu de la refuser par principe, et de l’appliquer le plus tôt possible pour éviter une catastrophe financière et la faillite de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat que nous avons cet après-midi porte à la fois sur l’orientation des finances publiques et sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013. Je commencerai par évoquer ce second volet du débat.

De 2013, je dirais que nous faisons mieux que jamais, mais que la vigilance reste de mise.

Mieux que jamais, car le déficit s’établit à 74,9 milliards d’euros, c’est-à-dire 4,3 % du PIB, alors qu’il atteignait 87 milliards d’euros en 2012 et 149 milliards d’euros en 2010.

Le déficit structurel, à 3,1 %, est à son plus bas niveau depuis 2002 : il s’élevait à 5 % en 2011, et à 4,2 % en 2012. La croissance de la dépense publique, quant à elle, a été seulement de 2 %, soit son plus bas niveau depuis 1998. Elle reste malheureusement supérieure à la croissance du PIB, mais il a fallu financer des dépenses exceptionnelles. Je songe en particulier aux contributions de 6,5 milliards d’euros au mécanisme européen de stabilité et de 1,6 milliard d’euros à la Banque européenne d’investissement.

Toutefois, je le répète, la vigilance est de mise. D’abord, parce que l’objectif initial de déficit de 3,1 % du PIB, fixé au mois de décembre 2012, n’a pas été atteint. Le déficit, supérieur au produit de l’impôt sur le revenu, représente 25 % des recettes et 33 % des dépenses de l’État. Nous constatons également un gros dérapage du crédit d’impôt recherche. Enfin, la dette publique dépasse maintenant 90 % du PIB. Je rappelle pour mémoire qu’elle s’élevait à 58 % en 2002 et à 89 % en 2012.

Les recettes du budget sont en augmentation de 15 milliards d’euros, grâce à de nouvelles recettes. Cependant, cela a été déjà souligné, nous comptions sur 12 milliards d’euros supplémentaires. Or il est impossible d’imputer l’intégralité de ces non-recettes à la conjoncture : le fait que la croissance n’atteigne que 0,3 % au lieu des 0,8 % attendus s’est traduit par une perte de PIB de 10 milliards d’euros –, mais cela ne peut suffire à expliquer ces 12 milliards d’euros de non-recettes. Le manque à gagner le plus significatif est celui de l’impôt sur les sociétés qui atteint 8,5 %.

Au regard de ces recettes moins fortes que prévu, nous pourrions dire, si nous parlions d’une entreprise, que le business model est à bout de souffle.

Par ailleurs, nous disposons de peu d’informations sur le hors-bilan : plus de 80 milliards d’euros de garantie ont été donnés en deux ans, en particulier à l’UNEDIC, au Crédit immobilier de France et à la Banque PSA Finance.

Enfin, cela a été indiqué, le service de la dette a été moins lourd que prévu, alors qu’il a fallu placer plus de 168 milliards d’euros d’emprunts. La charge de la dette a atteint 45 milliards d’euros, soit 1,4 milliard d’euros de moins qu’en 2012.

Quoi qu’il en soit, nous devons rester très vigilants, car ces résultats ont été enregistrés grâce aux taux d’intérêt très faibles que nous constatons aujourd’hui. En cas de perte de confiance dans la signature de la France, la charge deviendrait immédiatement insupportable pour le budget. De même, lorsque la croissance sera de retour, notre économie devra courir avec des semelles de plomb en raison de la remontée probable des taux d’intérêt, ce qui aura un effet sur la charge de la dette et empêchera notre économie de profiter complètement de ce rebond. La stabilisation de la dette doit donc demeurer notre objectif prioritaire.

À cet égard, je me dois de saluer largement les efforts du Gouvernement.

Tout d’abord, à l’échelon national : dans sa certification des comptes de l’État, la Cour des comptes a émis deux réserves de moins qu’en 2012. Or, contrairement à nombre de nos partenaires européens, cette démarche de certification vise également les comptes de la sécurité sociale.

Ensuite, au plan européen : la ratification du TSCG, la mise en place du mécanisme de pilotage des finances publiques et du semestre européen ont permis de crédibiliser l’action à la fois de la France et de la zone euro. La mise en place de l’Union bancaire a parachevé ce mouvement.

D’autres orateurs, notamment Nicole Bricq, ont signalé qu’énormément de choses restaient encore à faire en matière de convergence des fiscalités. Aujourd’hui, en zone euro, la fiscalité est un élément non pas d’harmonie, mais bien plutôt de dumping et de différenciation. Il est temps d’y mettre fin.

S’agissant plus spécifiquement de la France, la croissance du commerce mondial de 2,8 % en 2013 n’a profité à notre pays qu’à hauteur de 1,8 %. Cela signifie que celui-ci n’est pas équipé pour répondre à la demande. De même, nous constatons que pour 6 euros de dette, l’activité ne progresse que de 25 %, soit de 1,5 euro. Nous avons donc besoin de réformes de structure pour mieux répondre aux besoins du monde et accompagner la croissance de l’ensemble de la planète. Si nous ne produisons pas les biens qui sont au cœur des besoins mondiaux, nous nous déclasserons progressivement et perdrons nos compétences.

On parle beaucoup de ceux qui quittent la France. D’ailleurs, l’un des titres du Nouvel Économiste fut même Les expatriotes. Toutefois, les Français établis à l’étranger sont toujours mobilisables et constituent un atout. La France n’a pas un solde des talents négatif. En revanche, la fuite des sièges sociaux hors de France, elle, est préoccupante. Il faut rétablir l’intérêt d’une implantation en France, de l’investissement en France.

M. Jean-Yves Leconte. Il s’agit de la condition nécessaire du retour de la croissance et de l’emploi. D’où le CICE, puis le pacte de responsabilité pour remettre l’industrie et l’innovation au cœur de l’économie, ce qui correspond à un effort de plus de 30 milliards d’euros. D’où la réforme de l’État et des collectivités territoriales, pour leur donner plus de responsabilité, de lisibilité et d’efficacité.

Cette politique aura des effets sur le long terme si elle est menée avec détermination et cohérence. Pour qu’elle puisse être enclenchée, il faut réussir à construire ce cercle vertueux de la confiance dans l’ensemble de la société. C’est là tout l’intérêt du pacte de solidarité pour les ménages : redonner du pouvoir d’achat et soutenir la consommation. Sur ce point, il faudrait non seulement viser les foyers venant de franchir le seuil au-delà duquel ils deviennent redevables de l’impôt sur le revenu, mais aussi se poser la question de la progressivité de la CSG pour ceux qui ne sont pas imposables.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Nous sommes loin de la flat tax ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Leconte. Le programme d’économies de 50 milliards d’euros sur trois ans souligne la détermination du Gouvernement en la matière. S’agissant des comptes sociaux, il est important de le savoir, c’est la bataille de l’emploi qui permettra de les équilibrer.

On ne peut plus faire d’économies avec les vieilles méthodes. La RGPP n’a pas permis de limiter la croissance de la dépense publique. Parfois – cela a été souligné –, la limitation du nombre d’équivalents temps plein a provoqué l’augmentation des frais de fonctionnement en raison de l’externalisation des fonctions. Là où deux fonctionnaires travaillaient, il n’en reste plus qu’un qui passe des marchés.

Par ailleurs, l’une des réserves de la Cour des comptes porte sur le manque de système d’information financière intégré de l’État. Toutefois, la mise en place des systèmes CHORUS et Louvois s’est traduite par un certain nombre de dysfonctionnements et de coûts complémentaires. Une vision comptable ne permet pas de tout comprendre…

Enfin, il faudrait que cessent ces guerres entre administrations. Pourquoi la réduction du personnel dans une administration conduit-elle parfois un département ministériel à compenser ? De même, la modification des organigrammes gouvernementaux à chaque remaniement est tout aussi problématique et constitue un vecteur de changement.

Mme Nicole Bricq. C’est vrai !

M. Jean-Yves Leconte. Je pense en particulier aux promenades entre le ministère des affaires étrangères et Bercy d’un certain nombre de fonctions…

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Le tourisme fait du tourisme ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Leconte. J’ajouterai que les opérateurs ne doivent pas être limités dans leur croissance s’ils disposent de ressources propres, à moins que cela ne pose un problème d’intérêt général.

Pour conclure, j’évoquerai quelques-unes des questions qui me préoccupent. Tout d’abord celle de l’investissement des collectivités locales et de l’État, mais aussi celle du besoin d’accompagner ces économies par un réel budget de la zone euro et des fonds de cohésion spécifiques à destination des collectivités territoriales. Il nous faut également mobiliser le logement, qui doit être un outil de pouvoir d’achat (M. le ministre opine.) et de compétitivité pour nos entreprises. Nous devons encore favoriser la mobilité du capital en posant la question des droits de mutation. De même, comment favoriser plus encore la fiscalité de l’investissement et la création en France de start-up, vecteurs majeurs de l’innovation ? Comment réorienter l’épargne des Français vers le financement du risque, de l’innovation ou de la création de richesse plutôt que vers le financement des besoins du service de la dette ? Si ce dernier aspect est important, nous devons néanmoins nous efforcer de sortir de cette dépendance.

Eu égard au sérieux budgétaire – les comptes de 2013 en portent témoignage –, au diagnostic porté par le Gouvernement et aux propositions à la hauteur des enjeux, les membres du groupe socialiste voteront ce projet de loi de règlement avec, …

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Avec enthousiasme ! (Sourires.)

M. Jean-Yves Leconte. … à l’esprit, les questions que je viens de vous poser, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est la loi organique de décembre 2012 qui prévoit que les écarts par rapport à la trajectoire de solde structurel sont constatés en loi de règlement et que les mesures correctrices éventuelles sont présentées dans le cadre du débat sur l’orientation des finances publiques.

Il est donc logique de joindre aujourd'hui la discussion du présent projet de loi de règlement et le débat sur l’orientation des finances publiques. Toutefois, monsieur le ministre, cela peut conduire les parlementaires à s’interroger sur le sens du vote qu’ils vont devoir émettre. En effet, le Gouvernement dépose un rapport sur les orientations des finances publiques sur lequel il ne demande pas de vote. En revanche, sur le projet de loi de règlement qu’il dépose également et qui n’est, à la vérité, qu’un arrêté des comptes et un rapport de gestion de l’exercice précédent, cette fois, il demande un vote.

Dès lors, s’agissant des membres de l’opposition, il est assez naturel, comme l’ont fait mes collègues qui se sont succédé à cette tribune, qu’ils aient tendance à raisonner de manière consolidée et à exprimer vis-à-vis du projet de loi de règlement, qui est le seul support sur lequel nous pouvons voter, les désaccords que, à juste titre, selon moi, ils peuvent avoir avec les orientations des finances publiques.

Quoi qu’il en soit, la commission des finances a, comme chaque année, joué le jeu. Les rapporteurs spéciaux ont effectué un travail important relatif à l’exécution des crédits des missions qu’ils suivent.

Comme toujours, mes chers collègues, il convient de lire avec attention le rapport du rapporteur général particulièrement riche d’enseignements.

J’ajouterai que nous avons auditionné quatre ministres « dépensiers » auxquels nous avons demandé de bien vouloir répondre à des questions précises sur leur gestion.

En quelques mots, je voudrais d’abord revenir sur le budget de l’État de 2013. J’espère que Mme Bricq ne me désavouera pas sur ces chiffres : le déficit est supérieur de 13 milliards d’euros à la prévision ; les dépenses sont mieux tenues que prévu, mais augmentent en valeur absolue par rapport à 2012 ; quant aux dépenses de personnel, si elles diminuent, c’est surtout sous l’effet des suppressions de postes décidées par l’horrible majorité précédente. (Sourires.)

M. Alain Gournac. Affreuse ! (Mêmes mouvements.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. En tout état de cause, la première leçon à tirer du présent projet de loi de règlement, c’est qu’il faut agir sur les effectifs pour réduire de manière pérenne les dépenses des administrations.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Regardons maintenant l’ensemble du secteur public en 2013. Ce devait être, je le rappelle, l’année du retour du déficit sous la barre des 3 %. On s’y préparait de longue date, on protestait de la volonté du pays d’y parvenir, jusqu’à ce que l’on obtienne, avec soulagement, un report de deux ans de la part de nos partenaires.

Mme Fabienne Keller. Absolument !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il s’agit en outre de la première année d’application des nouvelles règles de gouvernance : 2013 voit apparaître dans la plénitude de ses fonctions le Haut Conseil des finances publiques, lequel a constaté un écart de 1,5 point de produit intérieur brut par rapport à la trajectoire de solde structurel figurant dans les précédentes lois de programmation budgétaire.

En pareil cas, monsieur le ministre, le Gouvernement doit exposer les mesures de correction dans le cadre du présent rapport en vue du débat sur l’orientation des finances publiques. Or j’observe que le Gouvernement ne présente aucune disposition nouvelle pour corriger cet écart. Sur ce 1,5 point d’écart, les différentes annonces, qui incluent les 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur les crédits de 2014, conduisent à corriger uniquement – Vincent Delahaye en faisait la démonstration tout à l'heure – 0,3 point.

Cette remarque me conduit, monsieur le ministre, à vous poser tout d’abord une question de méthode : peut-on ne corriger que partiellement un « écart important » au sens de la loi organique et de la gouvernance européenne ?

Lorsque j’ai posé cette question au secrétaire d’État chargé du budget, Christian Eckert, lors d’une réunion de la commission, le 2 juin dernier, il m’a fait une réponse ingénieuse, mais difficile à interpréter,…

Mme Nicole Bricq. C’est donc qu’il aura été très bon ! (Sourires.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … alors que la loi organique ne semble pas, selon moi, laisser place à interprétation.

Dès lors, à quoi allons-nous assister cet automne, mes chers collègues, lorsque le Sénat siégera dans sa nouvelle composition ? Le Gouvernement prendra-t-il des mesures supplémentaires pour rattraper l’intégralité du dérapage de 2013 ?

Mme Fabienne Keller. Bonne question !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Profitera-t-il, au contraire, de l’examen du nouveau projet de loi de programmation des finances publiques pour présenter opportunément, de son point de vue, une nouvelle trajectoire, fondée sur une nouvelle estimation du PIB potentiel, cela lui permettant de remettre, pour ainsi dire, les compteurs à zéro et de repartir pour deux ans, sans risque d’être inquiété ni par le Haut Conseil des finances publiques ni par la Commission de Bruxelles ? Vous le comprenez, mes chers collègues, c’est ce que je suppute, voire suspecte, en cet instant !

M. Éric Doligé. Vous n’êtes pas le seul !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce serait, à la vérité, un détournement de procédure, voire une manipulation tout à fait comparable, à mes yeux, à celle que les députés de la majorité ont voulu réaliser en votant un amendement tendant à rectifier le solde structurel.

Mme Fabienne Keller. Absolument !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Pour éviter toute tentation de cette nature, il faudrait considérer que la mesure des écarts par rapport à la trajectoire doit être effectuée à partir des mêmes références sur l’ensemble d’une législature et s’interdire de changer les règles du jeu, l’étalonnage des compteurs, au cours de celle-ci.

Mme Nicole Bricq. Vous ne vous êtes pas privés de le faire quand vous étiez aux responsabilités ! Vous avez la mémoire courte ! (Mme Michèle André approuve.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, je vous donne bien volontiers rendez-vous cet automne : nous pourrons ainsi apprécier ce qu’il en sera du projet de loi de programmation des finances publiques.

Mais allons au-delà de l’année 2014, mes chers collègues, et interrogeons-nous sur ce que peuvent être les orientations réelles du Gouvernement. Je lis, dans le rapport préparatoire au débat sur l’orientation des finances publiques remis par le Gouvernement – j’en suis un instant rassuré –, que l’objectif de retour du déficit à 3 % du PIB en 2015 est confirmé. Mais je constate aussi, toujours à la lecture de ce même rapport, que cette cible ne fait l’objet d’aucun commentaire. Bien au contraire, « les incertitudes sur la trajectoire nominale » y sont soulignées !

Par ailleurs, je remarque que, lors du débat sur l’orientation des finances publiques à l’Assemblée nationale, aucun des deux représentants du Gouvernement présents n’a cité l’objectif de 3 % dans son intervention. Je remarque surtout que, au lendemain même de ce débat, le ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique, ministre très médiatique, pour ne pas dire omniprésent dans les médias,…

M. Éric Doligé. Qui est-ce ? (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … a qualifié les partisans de la réduction du déficit, c’est-à-dire vous-même, monsieur le ministre des finances, de « comptables moralistes » (Exclamations amusées sur les mêmes travées.) et de « tournant du quinquennat » le propos du Premier ministre, qui, lors de sa déclaration de politique générale, rappelait que l’exigence de rétablissement des comptes publics ne devait pas casser la croissance.

Dès lors, mes chers collègues, après avoir rappelé, la semaine dernière, les reculs successifs de la majorité depuis 2012 en matière de finances publiques, je m’interroge sur la signification de ces chiffres magiques : 50 milliards d’euros d’économies de dépenses entre 2015 et 2017 et 25 milliards d’euros d’allégements de prélèvements obligatoires prévus par les différents pactes, sans que l’on puisse nous dire, jusqu’à présent, si la combinaison des deux permet de respecter les objectifs de solde auxquels nous nous sommes engagés.

Nous ne savons pas, par exemple, quelles sont les conséquences sur la trajectoire des finances publiques de l’anticipation des baisses de recettes par rapport à ce qui nous avait été dit initialement. Les économies, quant à elles, seront faites au fil du temps, jusqu’en 2017. Si j’étais à Bruxelles ou dans une salle de marché, permettez-moi de le dire, monsieur le ministre, je m’inquiéterais de cette inversion des facteurs.

Je voudrais que le Gouvernement français clarifie sa position : soutient-il vraiment le camp de la prudence, c’est-à-dire celui des fameux « comptables moralistes » évoqués par votre sympathique collègue ? A-t-il réellement l’intention de tenir les engagements pris à l’égard de l’Union européenne et de l’ensemble de notre environnement financier ? À ce titre, pouvez-vous commenter les propos du ministre de l’économie, selon lesquels – c’est ainsi, du moins, que je le comprends – les programmes de stabilité, même s’ils sont votés par l’Assemblée nationale, n’engagent plus véritablement la France ?

Telles sont, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles nous ne pouvons qu’être inquiets sur l’orientation des finances publiques. Quels que soient nos débats, quelles que soient les différences qui peuvent exister dans la communication gouvernementale, il n’en est pas moins vrai qu’un compteur continue à tourner : non pas celui indiquant mon temps de parole, que j’ai dépassé (Sourires sur les travées de l’UMP.), mais celui de la dette publique !

Mme Bricq a eu raison de le dire, le Trésor est extrêmement professionnel ; il fait tout ce qu’il faut pour alléger ce fardeau. Mais cette technicité, un jour, ne suffira peut-être plus et sera impuissante à maintenir notre indépendance.

C’est donc au bénéfice de tous ces éléments que les membres du groupe UMP s’apprêtent à voter contre le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

M. Michel Sapin, ministre. Je crains que la conclusion ne soit la même !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dernière intervenante de ce débat traditionnel du mois de juillet, je voudrais tout d’abord souligner le caractère très particulier qu’il revêt cette année.

Un débat sur l’orientation des finances publiques est censé porter sur des perspectives présentées par le Gouvernement, avant que celui-ci n’arrête définitivement ses choix et ne les traduise dans les textes financiers à venir. Or les décisions en la matière ont été prises dès le début du mois d’avril, avec l’annonce du pacte de responsabilité, et elles sont déjà très largement en cours de discussion au Parlement, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances rectificative et du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. Certaines de ces mesures ne produiront pas d’effet avant 2015 et auraient donc parfaitement pu trouver leur place dans la discussion budgétaire de l’automne prochain. C’est le cas, par exemple, des allégements de cotisations sociales patronales, votés la semaine dernière par l’Assemblée nationale, et sur lesquels le Sénat va se prononcer dans quelques heures.

À mes yeux, la méthode suivie par le Gouvernement vide très largement notre débat de ce jour d’une grande partie de son intérêt, même si ce débat nous permet, au moins, d’exprimer et de réaffirmer notre opinion. À ce titre, je vous ferai part, mes chers collègues, de quelques réflexions plus spécifiquement axées sur le domaine social, cœur des compétences de la commission des affaires sociales, qui occupe une place majeure dans les finances publiques et donc dans les orientations présentées au Sénat aujourd’hui.

Tout d’abord, je constate que les choix arrêtés par le Gouvernement confirment, en les accentuant, ceux qu’il a opérés depuis 2012. La priorité absolue est donnée à la réduction à court terme des déficits publics ; c’est l’objectif premier, auquel sont subordonnés les autres volets de sa politique. Il en découle un freinage sans précédent des dépenses publiques, notamment des dépenses sociales, à un moment où nombre de nos concitoyens sont confrontés à des situations extrêmement difficiles.

Pourtant, dans le même temps, mois après mois, tous les indicateurs de croissance, d’emploi ou d’investissement publiés par les instances qualifiées montrent que les résultats ne sont pas au rendez-vous. J’évoquerai seulement la note de conjoncture de l’INSEE du mois dernier, qui prévoit, après deux années de quasi-stagnation, une croissance limitée à 0,7 % en 2014, au lieu du 1 % retenu par le Gouvernement. Elle souligne une absence de redémarrage de la demande qui dissuade les entreprises d’investir.

Tout aussi inquiétantes sont les prévisions de l’UNEDIC, qui table sur une hausse continue du chômage jusqu’à la fin de l’année 2015, avec 120 000 demandeurs d’emploi indemnisés supplémentaires en 2014 et 134 000 autres en 2015.

Je ne reviendrai pas sur la note de la direction générale du Trésor, obtenue par la rapporteure générale du budget de l’Assemblée nationale, ni sur les effets récessifs potentiels du plan d’économies de 50 milliards d’euros, lequel, selon les évaluations, pourrait entraîner la suppression de 250 000 emplois à l’horizon 2017.

Certes, monsieur le ministre, vous avez qualifié ces analyses de « calculs en chambre » extrêmement théoriques. Certes, la rapporteure générale du budget de l’Assemblée nationale a fini par soutenir cette politique. Il n’en reste pas moins vrai qu’il existe malheureusement de nombreux éléments objectifs justifiant l’inquiétude suscitée par les options que vous avez arrêtées.

Pour m’en tenir au champ des finances sociales, je ne conteste pas la nécessité du retour à l’équilibre. Le rapporteur général de la commission des affaires sociales souligne toujours, et à juste titre, qu’il n’est pas acceptable de reporter sur les générations futures nos dépenses de soins ou le paiement des pensions de retraite.

M. Michel Sapin, ministre. Eh oui !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. J’ajoute qu’une situation de déficit chronique ne peut que menacer la pérennité de notre système de protection sociale et servir de prétexte à sa remise en cause. Mais encore faut-il lui assurer un financement suffisant ! C’est là notre point de divergence majeur, monsieur le ministre.

Je rappelle, par exemple, que le déficit de la branche famille de la sécurité sociale apparu ces dernières années résulte exclusivement de décisions prises par le précédent gouvernement, lequel avait retiré à cette branche certaines recettes, tout en lui imposant des charges nouvelles liées à la réforme des retraites adoptée alors.

De même, et de façon tout à fait anormale, la branche accidents du travail et maladies professionnelles, dite « branche AT-MP », a connu un déficit durant plusieurs années, faute de volonté politique suffisante pour appliquer le principe spécifique à cette branche : l’équilibre des comptes par la cotisation des entreprises.

Pourtant, vous persistez dans la même voie, monsieur le ministre, puisque vous supprimez encore des cotisations sociales patronales, sans donner d’indication sur leur compensation. Figurera-t-elle dans le projet de loi de finances initiale ou dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ? Seule la lecture de la LOLF nous apprend que l’exonération de cotisations sociales doit être compensée. Mais cette compensation doit-elle être intégrale ? Nul ne le sait. Il semble donc important que vous nous apportiez des réponses sur ce point.

Plus globalement, nous devrions nous interroger sur les raisons pour lesquelles, malgré une augmentation récente des prélèvements, le déficit des comptes sociaux se résorbe aussi lentement. N’est-ce pas la conséquence directe du chômage massif et de la stagnation des salaires ? Les comptes publiés au mois de juin dernier montrent que les ressources des régimes de sécurité sociale sont loin de suivre la trajectoire prévue dans les lois de financement successives. Est-ce en persistant dans la voie de l’austérité, j’insiste sur ce terme, que l’on pourra enrayer une telle spirale dépressive ?

Les entreprises, quant à elles, vont bénéficier de 10 milliards d’euros d’allégements de cotisations supplémentaires, qui s’ajoutent aux 20 milliards d’euros d’exonérations en vigueur, sans parler du CICE. Cette politique d’exonération de cotisations sociales n’est pas nouvelle ; or l’expérience montre qu’elle n’a en rien enrayé la montée du chômage. Accordée sans contrepartie, sans ciblage des entreprises ou des secteurs bénéficiaires, au risque de créer de véritables effets d’aubaine, l’amplification du mouvement des allégements généraux va s’avérer coûteuse et rien ne garantit qu’elle aura la moindre incidence sur l’emploi.

La présentation par Michelle Demessine, ce matin, des conclusions de la mission commune d’information sur le coût des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises confirme que personne n’est en mesure de corroborer l’effet positif de cette politique sur l’emploi.

En outre, nous ignorons toujours comment des ressources équivalentes pourront être affectées à la sécurité sociale. Le Gouvernement va-t-il diriger une part supplémentaire de la TVA vers la sécurité sociale, ce qui reviendrait à rétablir, sans le dire, la TVA sociale que nous avons supprimée voilà deux ans ? Il serait bienvenu, dans un débat sur l’orientation des finances publiques, de répondre à cette question essentielle des compensations, monsieur le ministre.

Au reste, ces allégements supplémentaires vont infléchir le mode de financement de notre protection sociale. Un nouveau pas est franchi dans le désengagement progressif des entreprises, pour ce qui concerne tant leur contribution au financement de la politique familiale – politique dont elles profitent pourtant, qui permet de concilier vie familiale et vie professionnelle –, que l’ensemble de notre système de santé, en particulier la branche AT-MP, qu’elles financent aujourd’hui entièrement.

Qu’en sera-t-il demain ? Votre réponse sur les compensations nous intéresse grandement.

Si nous pouvons douter de la légitimité et de l’utilité de ces nouveaux allégements de cotisations patronales, il me paraît en revanche assez certain que le plan d’économies de 50 milliards d’euros ne restera pas sans effet sur le pouvoir d’achat et l’emploi.

Je rappelle que la sécurité sociale représente à elle seule 21 milliards d’euros de ce plan d’économies.

Après avoir décidé, dans un premier temps, de reporter du 1er avril au 1er octobre la revalorisation des pensions de retraite, il est désormais prévu d’y renoncer purement et simplement pour celles qui sont supérieures à 1 200 euros mensuels. Cette mesure affectera un grand nombre de foyers modestes, dont le pouvoir d’achat est déjà réduit par l’instauration de la contribution de solidarité pour l’autonomie, ou CASA, et le gel des retraites complémentaires.

Il en ira de même du gel des rentes versées au titre des accidents du travail et des prestations familiales, qui, bien que ne figurant pas dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, reste prévu pour 2015.

Selon les documents qui nous sont présentés, la réduction du taux de l’ONDAM à moins de 2 % d’ici à 2017, soit environ 10 milliards d’euros d’économies, pourrait résulter de la seule réorganisation des soins. Je crains malheureusement qu’elle ne se traduise par une dégradation du fonctionnement de notre système de santé, à l’heure où les difficultés d’accès aux soins s’accentuent, où nos hôpitaux font face à des contraintes de plus en plus fortes, alors qu’il faut répondre aux besoins de santé liés au vieillissement de la population.

Je pourrais également évoquer les inquiétudes suscitées par la réduction des dotations aux collectivités locales qui ne sera pas sans conséquence sur les politiques de solidarité relevant de la responsabilité des départements, préoccupation très régulièrement abordée au sein de la commission des affaires sociales et partagée par l’ensemble de ses membres, quelle que soit leur appartenance politique.

Enfin, compte tenu des perspectives d’évolution du chômage que j’ai mentionnées, il me paraît difficile de justifier la diminution de 15 % en trois ans du budget du ministère du travail et de l’emploi et du dialogue social qui nous est annoncée par le Gouvernement.

En résumé, au moment où nombre de nos concitoyennes et concitoyens voient leurs difficultés s’aggraver et attendent de réelles perspectives en matière d’emploi et d’amélioration du pouvoir d’achat, je redoute les conséquences des options choisies par le Gouvernement.

Telles sont les observations dont je tenais à vous faire part, mes chers collègues, à l’occasion de ce débat, même si je suis consciente qu’elles ont peu de chance d’infléchir des décisions figurant déjà en partie dans les textes financiers inscrits à l’ordre du jour de la présente session extraordinaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, nombre d’entre vous ont tenu à prendre la parole et, parfois, à me poser des questions. Il me paraît donc non seulement courtois, mais aussi nécessaire de vous apporter quelques éléments de réponse dans le cadre de ce débat.

Vous avez en effet à examiner en l’espace de quelques jours plusieurs textes rassemblant toutes les questions posées. Celui dont nous débattons aujourd'hui relève du constat : il s’agit du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013. D’autres textes – vous en avez examiné un la semaine dernière, vous discuterez d’un autre dans quelques heures – portent sur les décisions prises pour 2014, induites en partie, d’ailleurs, par le constat établi pour 2013. Enfin, le présent débat sur l’orientation budgétaire nous permet de nous projeter, pour ce qui concerne les finances publiques, en 2015 et au-delà.

Ce condensé de textes est l’occasion de formuler un certain nombre de constats et de propositions, mais aussi de critiques, ce qui est bien normal dans un hémicycle tel que le vôtre, mesdames, messieurs les sénateurs. Pour ce qui me concerne, j’établirai des constats et vous ferai part de mes convictions.

Premier constat, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, madame Bricq, les débats sur les budgets à venir nous obligent à une grande modestie. En effet, en matière de prévisions, tout le monde s’est trompé ! Vous, pendant des années ; nous, depuis quelques années !

M. Thierry Foucaud. C’est vrai !

M. Michel Sapin, ministre. Même lorsque Lionel Jospin était Premier ministre, on se trompait aussi. Je veux dire par là que les résultats étaient meilleurs que les prévisions. (Sourires.)

M. Alain Néri. C’était la cagnotte !

M. Michel Sapin, ministre. Quelqu’un a inventé à ce moment-là – grave erreur ! – le concept de cagnotte. Peut-être n’aurions-nous pas dû le traiter comme nous l’avons fait à l’époque !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est vrai !

M. Michel Sapin, ministre. Pour résumer ma pensée, les prévisions sont un art extrêmement difficile, surtout quand elles concernent l’avenir ! (Nouveaux sourires.)

Dans une période de grave crise économique, comme jamais la France n’en a connu depuis la guerre, puis une période de sortie de crise extrêmement progressive, trop timide, accompagnée de toutes les incertitudes que ce type de situation inédite engendre, dans notre pays comme sur l’ensemble du continent européen, comment les prévisions pourraient-elles être intégralement respectées ? C’est impossible !

Ce n’est pas uniquement la modestie qui me fait parler ainsi. Vous avez en effet eu l’aimable cruauté – nous avions eu la même auparavant ! – de nous dire que, nos prévisions ne s’étant pas réalisées, nous nous étions donc trompés. Non, le contexte lui-même veut qu’il en soit ainsi ! Nous ne pouvons agir, construire des politiques, avec le soutien de notre majorité, sans faire de prévisions et nous fixer des objectifs : tous les gouvernements, de droite comme de gauche, doivent en passer par là ! Ensuite, il faut confronter ces prévisions avec la réalité, et constater les différences.

C’est à ce moment, monsieur Marini, que les rectifications nécessaires peuvent être apportées. Certes, vous avez posé des questions éminemment légitimes. Toutefois, je ne suis pas favorable à une application notariale, quand bien même celle-ci serait morale, de toutes les règles comptables possibles et imaginables.

Je suis pour un pragmatisme efficace, qui nous permettra, selon moi, de mieux nous retrouver les uns et les autres.

Cela étant, les résultats de l’année 2013 ne correspondant pas aux prévisions établies, il convient de prendre un certain nombre de décisions, qui sont d’ailleurs mises en œuvre dès 2014. Vous me demandiez ce que nous avions prévu pour 2015. J’y répondrai ! Je tiens auparavant à préciser que, dès 2014, avec la loi de financement rectificative de la sécurité sociale et la loi de finances rectificative – même si vous ne les adoptez pas, il y a une majorité à l’Assemblée nationale pour le faire –, nous vous proposons des mesures permettant de réaliser les économies nécessaires – soit 4 milliards d’euros supplémentaires – pour compenser une partie du décalage constaté par rapport aux prévisions pour 2013. C’est un pas sur le chemin que nous nous étions fixé.

Il en va de même pour 2015 – j’y reviendrai plus attentivement s’agissant de l’évolution des dépenses –, puisque le plus « gros morceau » affectera cette année-là. En effet, le rattrapage qui devra être effectué en 2015 sera un peu plus important, ce qui rend nécessaire des économies plus substantielles qu’en 2016 et 2017.

Deuxième constat – ou conviction –, en tant que membre du Gouvernement ou du Parlement, il faut examiner ce qu’il est possible de faire, et ce que l’on porte soit un jugement positif – merci à tous ceux et toutes celles ici qui ont apporté leur soutien à l’action gouvernementale –, soit un regard critique – merci également à tous ceux, qu’il s’agisse de Mme David ou des sénateurs siégeant sur le côté droit de cet hémicycle qui ont expliqué les raisons de leur désapprobation concernant certaines décisions.

On agit tout d’abord sur les recettes. C’est ce qui fut fait pendant plusieurs années successives : un peu en 2010, beaucoup en 2011, avant de mettre une double couche en 2012 avec la loi de finances initiale, que vous avez votée à la fin de l’année 2011, puis la loi de finances rectificative, que certains d’entre vous ont d’ailleurs rejetée, et enfin une nouvelle couche en 2013. Au total, nous avons décidé d’une bonne soixantaine de milliards d’euros d’impôts supplémentaires, produisant des effets sur les entreprises et les ménages, dont le pouvoir d’achat a diminué, et je ne parle pas seulement des ménages les plus aisés. Pourtant, nous avions fait très attention, contrairement aux pratiques de la période précédente, à ce que cet effort soit mieux réparti et supporté davantage par les ménages les plus aisés. Il n’empêche que l’ensemble des ménages français a apporté sa contribution au rééquilibrage des finances publiques.

Quels ont été les effets de ces mesures ? Elles ont permis, vous l’avez constaté avec une grande honnêteté, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, de diminuer notre déficit.

On nous dit toujours que celui-ci a baissé moins vite que prévu. J’entends même parfois parler d’une augmentation du déficit par rapport à la prévision ! Pour ma part, j’essaie de faire des comptes simples. Le déficit de 2013 est-il inférieur à celui de 2012 ? Oui, il a baissé ! Le déficit de 2012 est-il inférieur à celui de 2011 grâce aux mesures que nous avons prises? Oui ! Le déficit de 2014 doit-il être inférieur à celui de 2013 ? La réponse est également « oui » ! Nous diminuons le déficit de la France, grâce aux efforts fournis.

Mme Fabienne Keller. Un tout petit peu !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Pas assez !

M. Michel Sapin, ministre. Je comprends tout à fait que l’on dise que cela ne va pas assez vite ni assez loin. Je remarque toutefois que, durant plusieurs années successives, le déficit n’a pas cessé d’augmenter.

M. Alain Néri. Plus de 800 milliards d’euros en cinq ans !

M. Michel Sapin, ministre. Or, depuis quelques années, il ne cesse de diminuer. À ceux qui réclament une baisse toujours plus importante, je demande quelles dépenses, précisément, ils ont à l’esprit.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Toutes les dépenses !

M. Michel Sapin, ministre. Il est extraordinairement facile d’enfiler des chiffres supplémentaires, mais extrêmement difficile, pour les uns comme pour les autres, de définir exactement les dépenses qu’il conviendrait de diminuer.

J’en reviens à ma double conviction. S’agissant des recettes, les impôts ont augmenté, trop aux yeux de certains, mais c’est terminé ! On ne va pas continuer à diminuer le déficit et à financer des politiques nouvelles par ce biais ! D’ailleurs, dès cette année, vous le savez, bien que vous ayez refusé de voter une telle mesure, nous commençons à baisser l’impôt sur le revenu des ménages les plus modestes.

M. Alain Néri. C’est très bien !

M. Michel Sapin, ministre. Il faudra continuer, et c’est ce que nous avons l’intention de faire.

Par conséquent, pour ce qui concerne les recettes, il ne nous reste qu’une seule chose à faire : lutter contre la fraude fiscale et l’optimisation fiscale, et plusieurs d’entre vous ont fait allusion à cette question. À cet égard, nous comptons énormément sur vous tous, mais surtout sur notre majorité. C’est un chemin qu’il faut parcourir jusqu’au bout. Je ne reviens pas sur les mesures que nous avons prises ni sur l’efficacité de celles-ci s’agissant des comptes considérés comme anonymes à l’étranger, particulièrement dans un pays vallonné et parfois montagneux. Ainsi, aujourd'hui, chaque contribuable français, quand bien même son capital serait détenu à l’étranger, a intérêt à déclarer ses revenus, quitte à payer les impôts qui correspondent à sa situation en termes de revenus et de capital.

C’est donc en agissant sur les dépenses que nous pouvons aujourd'hui mettre en œuvre des mesures nouvelles en faveur, d’une part, des entreprises, afin de rétablir marges, investissement et emploi, et, d’autre part, du pouvoir d’achat des ménages.

Plusieurs questions m’ont été posées. D’abord, monsieur le président de la commission des finances, vous vous demandez à quoi correspond le chiffre magique de 50 milliards d’euros. Il n’a pas été inventé par je ne sais quel polytechnicien, énarque, ou normalien littéraire, sans faire allusion à quiconque ! Il est le résultat d’un calcul extrêmement simple, qui fait toute la différence entre, d’un côté, l’austérité et, de l’autre, la rigueur ou le sérieux budgétaire.

Dans la plupart des pays confrontés à des situations extrêmement graves – Portugal, Espagne, Irlande ou Grèce –, c’est une diminution en valeur absolue des dépenses publiques qui a été imposée ou, parfois, voulue. Là où il y avait 100 hier, il y a 90 aujourd'hui. Cela, c’est l’austérité, qui entraîne la récession, comme nous avons pu le constater dans plusieurs pays, qui sont entrés dans cette spirale.

Pour notre part, nous proposons une maîtrise, et non une baisse, j’en conviens, des dépenses : là où il y a 100 aujourd'hui, il y aura 100 en 2017. Tel est le sens de ces 50 milliards d’euros. Mais il s’agit déjà d’un effort sans précédent. Citez-moi une seule année – il faut remonter, me semble-t-il, jusqu’en 1998 – où un tel principe a été respecté. Cela ne s’est jamais produit !

M. Vincent Delahaye. Malheureusement !

M. Michel Sapin, ministre. Et ce n’est pas l’austérité, c’est justement la rigueur, le maintien du niveau actuel.

Ensuite, deuxième question, la répartition est-elle équitable ? Certains ont dit que nous demandions plus d’efforts aux collectivités territoriales qu’à l’État. C’est inexact !

Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de revenir très brièvement sur ce que nous vous proposons.

Quelle va être l’évolution de la principale dépense publique, qui concerne non pas l’État ou les collectivités locales, mais la sécurité sociale d’une manière générale ? Elle sera à la hausse. Pour 100 aujourd'hui – je ne donne pas de chiffres précis, car j’ai peur que la corrélation ne soit pas exacte du point de vue mathématique –, il y aura plus de 100 en 2017. La raison en est très simple : même en faisant des efforts importants de maîtrise des dépenses de la sécurité sociale, nous devons faire face à une démographie positive. De façon presque mathématique, si j’ose dire, nous devons faire en sorte que notre sécurité sociale vise une population grandissante, que ce soit en nombre d’enfants, en nombre de foyers, notamment de jeunes foyers, ou encore en nombre de personnes retraitées, auxquelles il faut pouvoir apporter les solidarités nécessaires de la nation.

Donc, l’effort demandé à la sécurité sociale est légitimement inférieur en proportion à la part que celle-ci représente dans la dépense publique.

L’effort demandé aux collectivités locales est-il supérieur à ce que représentent leurs dépenses dans la dépense publique ? Non, il est exactement comparable. Pour 100 aujourd'hui, les collectivités territoriales auront 100 en 2017. Il n’y a pas, pour employer des termes simples, de baisse du pouvoir d’achat des collectivités territoriales.

Mme Fabienne Keller et M. Vincent Delahaye. C’est faux !

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Elle est bien bonne ! Il y a quand même une baisse des dotations !

M. Alain Gournac. C’est la meilleure !

M. Michel Sapin, ministre. Regardez les chiffres avec attention !

J’ai, au cours de ma vie d’élu, exercé quasiment toutes les responsabilités locales imaginables. Sous l’autorité du président Pinton, j’ai été conseiller général et j’ai donc pu comprendre ce qu’était un budget de département. J’ai été président de région et j’ai été maire pendant presque vingt ans ou adjoint au maire dans les périodes où la loi ne me permettait pas d’être maire. Je sais donc exactement ce qu’est le budget d’une collectivité locale, quelle qu’en soit la nature. (M. Alain Gournac s’exclame.)

Et même si nous nous sommes habitués les uns et les autres, au cours de l’exercice de nos responsabilités à la tête des collectivités territoriales, à avoir des recettes qui augmentaient fortement et naturellement, aujourd'hui, l’effort que nous vous demandons est exactement équivalent à ce que représentent les dépenses des collectivités territoriales par rapport à la dépense publique.

M. Michel Sapin, ministre. C’est l’État qui va faire l’effort principal,…

M. Michel Sapin, ministre. … celui qui va permettre une augmentation de la dépense de la sécurité sociale plus rapide que ce que représente cette dépense dans le budget et les finances publiques.

Telles sont les réalités. Elles peuvent être contestées…

M. Alain Gournac. Qui va financer la réforme des rythmes scolaires !

M. Michel Sapin, ministre. On peut bien sûr m’opposer tout un tas de sujets, mais, au-delà des polémiques – elles font aussi partie du débat –, regardez les choses objectivement : vous verrez que l’effort qui est demandé est justement partagé par l’ensemble des acteurs de la dépense publique.

M. René-Paul Savary. C’est faux !

M. Michel Sapin, ministre. Tels sont les éléments du débat d’aujourd'hui. On peut être pour, on peut être contre, on peut vouloir plus, mais nous, nous faisons cet effort, y compris dans le budget de l’État, en respectant les priorités fondamentales qui sont les nôtres.

Nous le faisons en respectant la priorité donnée à la jeunesse, c'est-à-dire à l’éducation nationale, en respectant la priorité donnée à la sécurité, c'est-à-dire à la justice, à la police, à la gendarmerie, en respectant donc les grandes priorités qui sont les nôtres, notamment en termes de présence et de capacité d’engagement de la France et de son armée là où il est nécessaire qu’elle soit présente. Voilà les réalités.

Certes, cela demande plus d’efforts à certains ministères qu’à d’autres. Mais c’est cela aussi gouverner : c’est faire des choix, vous les présenter, en vous demandant de bien vouloir les adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur quelques travées du RDSE.)

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. le président. Le débat commun est clos.

(M. Charles Guené remplace M. Jean-Léonce Dupont au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Charles Guené

vice-président

M. le président. Nous passons à la discussion des articles du projet de loi.

projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 1er

Article liminaire

Le solde structurel et le solde effectif de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de l’année 2013 s’établissent comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut)

Exécution 2013

Soldes prévus par la loi de programmation des finances publiques

Écart avec les soldes prévus par la loi de programmation des finances publiques

Solde structurel (1)

-3,1

-1,6

-1,5

Solde conjoncturel (2)

-1,2

-1,2

0,0

Mesures ponctuelles et temporaires (3)

0,0

-0,2

0,2

Solde effectif (1+2+3)

-4,3

-3,0

-1,3

 

M. le président. Je mets aux voix l'article liminaire.

(L'article liminaire est adopté.)

Article liminaire
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 2

Article 1er

I. – Le résultat budgétaire de l’État en 2013, hors opérations avec le Fonds monétaire international, est arrêté à la somme de -74 867 967 950,14 €.

II – Le montant définitif des recettes et des dépenses du budget de l’année 2013 est arrêté aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après :

(En euros)

Dépenses

Recettes

Soldes

Budget général

Recettes

 

 

Recettes fiscales brutes

 

370 220 024 415,29

À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts

 

86 214 808 056,90

Recettes fiscales nettes (a)

 

284 005 216 358,39

Recettes non fiscales (b)

 

13 712 881 533,50

Montant net des recettes, hors fonds de concours (c) = (a) + (b)

 

297 718 097 891,89

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne (d)

 

78 020 598 663,74

Total net des recettes, hors prélèvements sur recettes (e) = (c) - (d)

 

219 697 499 228,15

Fonds de concours (f)

 

3 521 630 095,83

Montant net des recettes, y compris fonds de concours (g) = (e) + (f)

 

223 219 129 323,98

 

Dépenses

 

 

Dépenses brutes, hors fonds de concours

381 341 233 767,49

 

À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts

86 214 808 056,90

 

Montant net des dépenses (h)

295 126 425 710,59

 

Fonds de concours (i)

3 521 630 095,83

 

Montant net des dépenses, y compris fonds de concours (j) = (h) + (i)

298 648 055 806,42

 

 

Total du budget général, y compris fonds de concours

298 648 055 806,42

223 219 129 323,98

-75 428 926 482,44

Budgets annexes

Contrôle et exploitation aériens

2 076 040 809,86

2 076 040 809,86

Publications officielles et information administrative

201 643 917,34

201 643 917,34

 

Montant des budgets annexes, hors fonds de concours

2 277 684 727,20

2 277 684 727,20

Fonds de concours

18 635 234,40

18 635 234,40

Total des budgets annexes, y compris fonds de concours

2 296 319 961,60

2 296 319 961,60

 

Comptes spéciaux

Comptes d’affectation spéciale

70 887 034 311,59

71 471 303 808,23

584 269 496,64

Comptes de concours financiers

110 942 192 987,04

110 732 737 402,42

-209 455 584,62

Comptes de commerce (solde)

-136 845 982,00

 

136 845 982,00

Comptes d’opérations monétaires, hors opérations avec le Fonds monétaire international (solde)

-49 298 638,28

 

49 298 638,28

Total des comptes spéciaux, hors opérations avec le Fonds monétaire international

181 643 082 678,35

182 204 041 210,65

560 958 532,30

Résultat budgétaire de l’État, hors opérations avec le Fonds monétaire international

 

 

-74 867 967 950,14

 

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le résultat budgétaire de l'État en 2013, hors opérations avec le Fonds monétaire international, est arrêté à la somme de -77 067 967 950,14 €.

II - Le montant définitif des recettes et des dépenses du budget de l'année 2013 est arrêté aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après :

 

 

 

 

(En euros)

 

Dépenses

Recettes

Soldes

Budget général

 

 

Recettes

 

 

Recettes fiscales brutes

370 220 024 415,29

 

À déduire : Remboursements et dégrèvements d'impôts

86 214 808 056,90

 

Recettes fiscales nettes (a)

284 005 216 358,39

 

Recettes non fiscales (b)

11 512 881 533,50

 

Montant net des recettes, hors fonds de concours (c) = (a) + (b)

295 518 097 891,89

 

À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne (d)

78 020 598 663,74

 

Total net des recettes, hors prélèvements sur recettes (e) = (c) - (d)

217 497 499 228,15

 

Fonds de concours (f)

 

3 521 630 095,83

 

Montant net des recettes, y compris fonds de concours (g) = (e) + (f)

 

221 019 129 323,98

 

Dépenses

 

 

 

Dépenses brutes, hors fonds de concours

381 341 233 767,49

 

 

À déduire : Remboursements et dégrèvements d'impôts

86 214 808 056,90

 

 

Montant net des dépenses (h)

295 126 425 710,59

 

 

Fonds de concours (i)

3 521 630 095,83

 

 

Montant net des dépenses, y compris fonds de concours (j) = (h) + (i)

298 648 055 806,42

 

 

Total du budget général, y compris fonds de concours

298 648 055 806,42

221 019 129 323,98

-77 628 926 482,44

Budgets annexes

 

 

 

Contrôle et exploitation aériens

2 076 040 809,86

3, 276 040 809,86

 

Publications officielles et information administrative

201 643 917,34

201 643 917,34

 

Montant des budgets annexes, hors fonds de concours

2 277 684 727,20

2 277 684 727,20

 

Fonds de concours

18 635 234,40

18 635 234,40

 

Total des budgets annexes, y compris fonds de concours

2 296 319 961,60

3 496 319 961,60

 

Comptes spéciaux

 

 

 

Comptes d'affectation spéciale

70 887 034 311,59

71 471 303 808,23

584 269 496,64

Comptes de concours financiers

110 942 192 987,04

109 52 737 402,42

-210 655 584,62

Comptes de commerce (solde)

-136 845 982,00

 

136 845 982,00

Comptes d'opérations monétaires, hors opérations avec le Fonds monétaire international (solde)

-49 298 638,28

 

49 298 638,28

Total des comptes spéciaux, hors opérations avec le Fonds monétaire international

181 643 082 678,35

181 004 041 210,65

562 158 532,30

Résultat budgétaire de l'État, hors opérations avec le Fonds monétaire international

 

 

-77 067 967 950,14

 

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Je voudrais profiter de la présentation de cet amendement pour vous apporter quelques réponses, monsieur le ministre.

Vous nous avez dit que les collectivités locales qui ont 100 à l’heure actuelle auront 100 en 2017. Aujourd'hui, les dotations qui leur sont données s’établissent à 56 807 000 000 euros. Or je lis sur le tableau qui figure dans le rapport préparatoire au débat sur l’orientation des finances publiques qui nous a été transmis par le Gouvernement que, en 2017, ces dotations s’élèveront à 45 807 000 000 euros. Donc, ce n’est pas 100 et 100, c’est 56 et 45, soit moins 11.

Il faut rétablir la vérité. Un effort considérable est demandé aux collectivités locales. Ce n’est pas le cas de l’État pour lequel on considère qu’aller moins vite que prévu constitue déjà un effort.

Je ne veux pas que les collectivités locales soient les dindons de la farce. L’effort qui leur est demandé doit être équivalent à celui qui est demandé à l’État. Voilà tout ce que je réclame. Je ne dis pas que les collectivités locales ne doivent pas faire d’effort, mais je considère que celui qui leur est demandé n’est pas aujourd'hui équitable.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je vous ai entendu parler de fraude et d’optimisation. Pour moi, il s’agit de deux notions très différentes. La fraude est condamnable et son auteur doit être poursuivi. L’optimisation est dans l’ordre des choses, tout le monde cherche à optimiser, à être intelligent. En France, la fiscalité est aujourd'hui si compliquée qu’elle permet l’optimisation. Par conséquent, si l’on veut réduire l’optimisation, simplifions la fiscalité !

Par l’amendement n° 1, j’ai souhaité attirer votre attention sur la comptabilisation dans les recettes de l’État de recettes qui ne sont pas définitives. Dans toute entreprise, on constituerait des provisions pour risques.

Cet amendement vise à déduire des recettes non fiscales de l’État les 2,2 milliards d’euros liés à un redressement fiscal de la société Orange. En effet, cette société a fait appel. Je ne sais pas ce qu’il en résultera, mais, en tout cas, selon moi, un risque pèse sur cette recette. Évidemment, l’entreprise en cause n’aurait pas fait appel si elle ne considérait pas ce redressement comme abusif. Il n’est donc pas prudent de considérer cette recette comme définitive.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, la commission des finances est défavorable à cet amendement.

En effet, il paraît en contradiction totale avec les règles de la comptabilité budgétaire qui s’appliquent à la présentation des lois de finances, en particulier l’article d’équilibre, et au calcul du solde, car les recettes fiscales issues du contentieux auquel vous faites référence ont bien été versées au budget de l’État. Elles ont été encaissées et doivent donc être retracées à l’article d’équilibre de la loi de règlement conformément aux principes, je le rappelle, de la comptabilité budgétaire.

Au surplus, s’agissant du non-remboursement des avances de l’État au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », cet amendement soulève la question du financement de celui-ci, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir. En tout état de cause, poser comme principe le remboursement immédiat du stock d’avances ne résoudrait pas la question du déséquilibre financier structurel de ce budget annexe. Je ne vois pas très bien quelles seraient les ressources mobilisées à cette fin. En outre, il s’agirait d’une opération neutre au sein de l’ensemble du budget de l’État dont font partie les budgets annexes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Monsieur le sénateur, vous demandez une modification du tableau figurant à l’article 1er sans pour autant modifier les règles de la comptabilité. Vous vous mettez donc en infraction avec ces règles, ce qui serait considéré par le Conseil constitutionnel comme parfaitement inconstitutionnel.

Je veux bien qu’on ait un débat sur la modification des règles de comptabilité mais, en l’occurrence, l’adoption de cet amendement ferait peser un risque d’inconstitutionnalité sur le projet de loi soumis à votre vote. Dans la mesure où je ne souhaite pas que ce texte rencontre un obstacle de nature constitutionnelle, je ne peux que souscrire à l’argumentation parfaitement étayée du rapporteur général et donner un avis défavorable. Mais peut-être, après avoir tiré cette petite sonnette d’alarme, accepterez-vous, monsieur Delahaye, de retirer votre amendement.

M. le président. Monsieur Delahaye, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?

M. Vincent Delahaye. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, j’ai bien entendu les arguments qui ont été avancés, y compris lors des travaux de la commission des finances. Il aurait effectivement été plus juste de présenter une provision pour risques plutôt qu’une réduction de la recette, et la façon dont j’ai présenté ma proposition n’est pas la bonne.

En revanche, je reste convaincu que, sur le fond, un risque pèse sur la recette concernée et je ne vois pas pour quelles raisons l’État, dans ses comptes, prendrait plus de risques que ne pourraient en prendre les sociétés.

Je vais néanmoins retirer mon amendement, afin de tenir compte de la remarque qui a été formulée et que je trouve juste. En revanche, j’aimerais que l’on réfléchisse à la constitution de provisions dans les comptes de l’État – il est possible d’en constituer – pour les contentieux fiscaux qui ne sont pas résolus ou pas achevés, ce qui implique que les recettes ne sont pas définitives. Je considère qu’il faut alors provisionner à cet effet.

M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.

Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 3

Article 2

Le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l’équilibre financier de l’année 2013 est arrêté aux sommes présentées dans le tableau de financement ci-après :

 

(En milliards d’euros)

Exécution 2013

Besoin de financement

Amortissement de la dette à long terme

60,6

Amortissement de la dette à moyen terme

46,1

Amortissement de dettes reprises par l’État

6,1

Variation des dépôts de garantie

+0,2

Impact en trésorerie du solde de la gestion 2013

73,3

Total du besoin de financement

186,3

Ressources de financement

Émissions à moyen et long termes (obligations assimilables du Trésor et bons du Trésor à taux fixe et intérêts annuels), nettes des rachats

168,8

Variation des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés

+7,2

Variation des dépôts des correspondants

-5,3

Autres ressources de trésorerie

7,7

Variation du solde du compte du Trésor et assimilé

+7,9

Total des ressources de financement

186,3

 – (Adopté.)

Article 2
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Article 4

Article 3

I. – Le compte de résultat de l’exercice 2013 est approuvé tel que présenté dans le tableau ci-après. Le résultat comptable de l’exercice 2013 s’établit à -59 564 024 359,00 €.

Charges nettes

(En millions d’euros)

2013

Charges de fonctionnement nettes

Charges de personnel

135 467

Achats, variations de stocks et prestations externes

20 844

Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations

49 777

Autres charges de fonctionnement

8 587

Total des charges de fonctionnement direct (I)

214 675

Subventions pour charges de service public

27 710

Dotations aux provisions

0

Total des charges de fonctionnement indirect (II)

27 710

Total des charges de fonctionnement (III = I + II)

242 385

Ventes de produits et prestations de service

3 199

Production stockée et immobilisée

113

Reprises sur provisions et sur dépréciations

35 371

Autres produits de fonctionnement

27 024

Total des produits de fonctionnement (IV)

65 707

Total des charges de fonctionnement nettes (V = III - IV) 

176 678

Charges d’intervention nettes

Transferts aux ménages

36 521

Transferts aux entreprises

11 895

Transferts aux collectivités territoriales

75 235

Transferts aux autres collectivités

24 111

Charges résultant de la mise en jeu de garanties

8

Dotations aux provisions et aux dépréciations

8 925

Total des charges d’intervention (VI)

156 695

Contributions reçues de tiers

1 985

Reprises sur provisions et sur dépréciations

16 105

Total des produits d’intervention (VII)

18 090

Total des charges d’intervention nettes (VIII = VI - VII) 

138 605

Charges financières nettes

Intérêts

42 327

Pertes de change liées aux opérations financières

113

Dotations aux amortissements, aux provisions et aux dépréciations

3 268

Autres charges financières

15 958

Total des charges financières (IX)

61 666

Produits des immobilisations financières

15 896

Gains de change liés aux opérations financières

82

Reprises sur provisions et sur dépréciations

18 053

Autres intérêts et produits assimilés

3 219

Total des produits financiers (X)

37 250

Total des charges financières nettes (XI = IX - X)

24 416

Total des charges nettes (XII = V + VIII + XI)

339 699

 

Produits régaliens nets

(En millions d’euros)

2013

Impôt sur le revenu

65 844

Impôt sur les sociétés

42 010

Taxe intérieure sur les produits pétroliers *

12 932

Taxe sur la valeur ajoutée

138 131

Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes

15 654

Autres produits de nature fiscale et assimilés

20 975

Total des produits fiscaux nets (XIII)

295 545

Amendes, prélèvements divers et autres pénalités

6 464

Total des autres produits régaliens nets (XIV)

6 464

Ressource propre de l’Union européenne basée sur le revenu national brut

-17 833

Ressource propre de l’Union européenne basée sur la taxe sur la valeur ajoutée

-4 041

Total ressources propres du budget de l’Union européenne basées sur le revenu national brut et la taxe sur la valeur ajoutée (XV)

-21 874

Total des produits régaliens nets (XVI = XIII + XIV - XV)

280 135

* Le terme de TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers) a été remplacé par la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques.

 

Solde des opérations de l’exercice

 

(En millions d’euros)

2013

Charges de fonctionnement nettes (V)

176 678

Charges d’intervention nettes (VIII)

138 605

Charges financières nettes (XI)

24 416

Charges nettes (XII)

339 699

Produits fiscaux nets (XIII)

295 545

Autres produits régaliens nets (XIV)

6 464

Ressources propres de l’Union européenne basées sur le revenu national brut et la taxe sur la valeur ajoutée (XV)

-21 874

Produits régaliens nets (XVI)

280 135

Solde des opérations de l’exercice (XVI - XII)

-59 564

 

II. – Le résultat comptable de l’exercice 2013 est affecté au bilan à la ligne « Report des exercices antérieurs ».

III. – Le bilan, après affectation du résultat comptable, s’établit comme suit :

 

(En millions d’euros)

31 décembre 2013

Brut

Amortissements,dépréciations

Net

Actif immobilisé

Immobilisations incorporelles

43 045

15 316

27 729

Immobilisations corporelles

538 143

66 247

471 897

Immobilisations financières

348 451

26 153

322 298

Total actif immobilisé

929 640

107 716

821 924

Actif circulant (hors trésorerie)

Stocks

36 836

5 492

31 344

Créances

110 423

27 890

82 533

Redevables

84 997

27 075

57 923

Clients

9 638

717

8 921

Autres créances

15 788

98

15 690

Charges constatées d’avance

122

122

Total actif circulant (hors trésorerie)

147 381

33 382

113 999

Trésorerie

Fonds bancaires et fonds en caisse

2 513

2 513

Valeurs escomptées, en cours d’encaissement et de décaissement

-1 799

-1 799

Autres composantes de trésorerie

15 857

15 857

Équivalents de trésorerie

5 233

5 233

Total trésorerie

21 805

21 805

Comptes de régularisation

11 348

11 348

Total actif (I)

1 110 174

141 098

969 075

Dettes financières

Titres négociables

1 476 203

Titres non négociables

Dettes financières et autres emprunts

5 135

Total dettes financières

1 481 338

Dettes non financières (hors trésorerie)

Dettes de fonctionnement

6 721

Dettes d’intervention

8 457

Produits constatés d’avance

14 003

Autres dettes non financières

101 576

Total dettes non financières

130 758

Provisions pour risques et charges

Provisions pour risques

19 945

Provisions pour charges

103 082

Total provisions pour risques et charges

123 026

Autres passifs (hors trésorerie)

26 698

Trésorerie

Correspondants du Trésor et personnes habilitées

95 368

Autres

Total trésorerie

95 368

Comptes de régularisation

49 601

Total passif (hors situation nette) (II)

1 906 790

Report des exercices antérieurs

-1 313 744

Écarts de réévaluation et d’intégration

376 029

Solde des opérations de l’exercice

Situation nette (III = I - II)

-937 715

 

IV. – L’annexe du compte général de l’État de l’exercice 2013 est approuvée. – (Adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 5

Article 4

I. – Le montant des autorisations d’engagement consommées sur le budget général au titre de l’année 2013 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.

 

(En euros)

Désignation des missions et des programmes

Autorisations d’engagement consommées

Ajustements de la loi de règlement

Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires

Annulations d’autorisations d’engagement non consommées et non reportées

Action extérieure de l’État

2 989 714 090,47

38 874 395,74

– Action de la France en Europe et dans le monde

1 923 875 950,28

34 796 371,20

– Diplomatie culturelle et d’influence

716 603 024,90

 

1 271 894,46

– Français à l’étranger et affaires consulaires

349 235 115,29

 

2 806 130,08

Administration générale et territoriale de l’État

2 577 522 499,35

14 539 215,06

– Administration territoriale

1 751 487 582,69

 

4 225 071,65

– Vie politique, cultuelle et associative

151 802 342,11

 

6 445 876,16

– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

674 232 574,55

 

3 868 267,25

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3 066 069 081,73

221 197 128,37

– Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires

1 568 770 400,58

 

218 483 905,19

– Forêt

271 296 062,36

 

218 888,29

– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

505 792 660,87

 

1 431 292,35

– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

720 209 957,92

 

1 063 042,54

Aide publique au développement

2 235 668 598,46

8 089 359,54

– Aide économique et financière au développement

383 547 241,78

 

12 999,22

– Solidarité à l’égard des pays en développement

1 852 121 356,68

 

8 076 360,32

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

3 002 899 696,85

15 283 505,06

– Liens entre la Nation et son armée

105 727 716,55

 

6 387 272,45

– Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

2 802 629 841,71

 

202 839,20

– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale

94 542 138,59

 

8 693 393,41

Conseil et contrôle de l’État

630 710 434,20

10 115 473,00

– Conseil d’État et autres juridictions administratives

384 801 654,27

 

6 238 873,39

– Conseil économique, social et environnemental

40 272 745,00

 

30 000,00

– Cour des comptes et autres juridictions financières

205 277 223,63

 

3 595 391,91

– Haut conseil des finances publiques

358 811,30

251 207,70

Culture

2 552 363 147,60

 

34 203 748,04

– Patrimoines

777 589 503,18

 

29 714 148,62

– Création

738 655 112,24

 

1 313 379,28

– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

1 036 118 532,18

 

3 176 220,14

Défense

38 332 621 632,12

 

3 089 154 131,88

– Environnement et prospective de la politique de défense

1 819 731 255,86

 

63 470 963,23

– Préparation et emploi des forces

23 342 332 642,44

 

991 076 502,79

– Soutien de la politique de la défense

2 588 867 941,43

 

641 088 791,73

– Équipement des forces

10 581 689 792,39

 

1 393 517 874,13

Direction de l’action du Gouvernement

1 449 862 390,30

 

33 178 121,05

– Coordination du travail gouvernemental

850 461 272,39

 

6 378 338,58

– Protection des droits et libertés

74 804 719,30

 

2 459 417,66

– Moyens mutualisés des administrations déconcentrées

524 596 398,61

 

24 340 364,81

Écologie, développement et aménagement durables

10 799 643 516,90

 

80 084 598,17

– Infrastructures et services de transports

5 746 993 815,50

 

4 708 617,61

– Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture

190 608 017,74

 

4 715 989,24

– Météorologie

211 349 171,00

 

– Paysages, eau et biodiversité

232 088 488,26

 

12 436 670,30

– Information géographique et cartographique

94 235 460,14

 

0,86

– Prévention des risques

223 935 592,28

 

41 270 480,68

– Énergie, climat et après-mines

660 443 282,25

 

5 127 051,98

– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer

3 439 989 689,73

 

11 825 787,50

Économie

2 320 080 825,77

 

22 722 404,49

– Développement des entreprises et du tourisme

1 373 526 605,98

 

12 625 108,55

– Statistiques et études économiques

458 626 238,91

 

3 478 741,38

– Stratégie économique et fiscale

487 927 980,88

 

6 618 554,56

Égalité des territoires, logement et ville

5 949 285 532,20

 

1 785 668 495,51

– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 414 643 066,86

 

352 554,44

– Aide à l’accès au logement

5 161 083 428,02

 

0,98

– Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

547 533 417,40

 

145 288 275,01

– Politique de la ville

-1 173 974 380,08

 

1 640 027 665,08

– Conduite et pilotage des politiques de l’égalité des territoires, du logement et de la ville

 

 

Engagements financiers de l’État

57 157 611 543,05

 

171 875 860,95

– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

44 885 787 998,05

 

77 212 001,95

– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

114 516 141,70

 

93 383 858,30

– Épargne

575 888 341,34

 

0,66

– Majoration de rentes

179 184 061,96

 

0,04

– Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité

9 785 232 000,00

 

1 280 000,00

– Augmentation en capital de la Banque européenne d’investissement

1 617 003 000,00

 

 

Enseignement scolaire

63 483 871 054,69

 

58 406 596,35

– Enseignement scolaire public du premier degré

18 748 277 623,20

 

3 371 796,11

– Enseignement scolaire public du second degré

29 880 952 779,42

 

26 845 427,46

– Vie de l’élève

4 227 769 692,03

 

3 033 584,53

– Enseignement privé du premier et du second degrés

7 084 574 670,32

 

1 554 831,68

– Soutien de la politique de l’éducation nationale

2 226 355 273,71

 

10 292 448,58

– Enseignement technique agricole

1 315 941 016,01

 

13 308 507,99

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11 338 726 040,12

 

115 142 372,98

– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

8 328 762 970,43

 

65 928 865,38

– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État

178 416 110,68

 

5 465 236,11

– Conduite et pilotage des politiques économique et financière

850 980 450,44

 

36 485 976,89

– Facilitation et sécurisation des échanges

1 606 891 980,70

 

3 087 790,61

– Entretien des bâtiments de l’État

176 669 280,63

 

1 366 693,77

– Fonction publique

197 005 247,24

 

2 807 810,22

Immigration, asile et intégration

715 266 177,60

 

259 153,23

– Immigration et asile

635 790 434,42

 

258 163,90

– Intégration et accès à la nationalité française

79 475 743,18

 

989,33

Justice

7 043 227 603,03

 

98 375 128,08

– Justice judiciaire

2 811 029 802,76

 

64 327 384,45

– Administration pénitentiaire

2 813 260 653,92

 

32 290 611,02

– Protection judiciaire de la jeunesse

783 990 606,86

 

868 006,12

– Accès au droit et à la justice

337 782 185,04

 

16,96

– Conduite et pilotage de la politique de la justice

290 596 294,14

 

540 817,84

– Conseil supérieur de la magistrature

6 568 060,31

 

348 291,69

Médias, livre et industries culturelles

1 190 817 648,36

 

6 118 656,64

– Presse

510 061 734,06

 

6 118 655,94

– Livre et industries culturelles

254 723 938,78

 

0,22

– Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique

277 814 148,52

 

0,48

– Action audiovisuelle extérieure

148 217 827,00

 

 

Outre-mer

2 178 404 258,53

 

32 352 605,23

– Emploi outre-mer

1 458 677 761,11

 

1 827 871,82

– Conditions de vie outre-mer

719 726 497,42

 

30 524 733,41

Politique des territoires

301 904 447,03

 

46 141 321,45

– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

245 851 347,57

 

39 622 256,97

– Interventions territoriales de l’État

56 053 099,46

 

6 519 064,48

Pouvoirs publics

989 015 739,00

 

 

– Présidence de la République

101 233 252,00

 

 

– Assemblée nationale

517 890 000,00

 

 

– Sénat

323 584 600,00

 

 

– La Chaîne parlementaire

34 498 162,00

 

 

– Indemnités des représentants français au Parlement européen

 

 

 

– Conseil constitutionnel

10 888 000,00

 

 

– Haute Cour

 

 

 

– Cour de justice de la République

921 725,00

 

 

Provisions

 

 

324 184 749,00

– Provision relative aux rémunérations publiques

 

 

 

– Dépenses accidentelles et imprévisibles

 

 

324 184 749,00

Recherche et enseignement supérieur

25 851 199 514,59

 

34 028 696,78

– Formations supérieures et recherche universitaire

12 754 592 979,42

 

7 439 350,35

– Vie étudiante

2 320 357 221,64

 

0,47

– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

5 010 354 958,24

 

5 868 920,76

– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

1 273 427 732,00

 

 

– Recherche spatiale

1 398 152 218,00

 

 

– Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables

1 536 924 166,95

 

3 127 408,65

– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

967 252 239,26

 

17 362 747,13

– Recherche duale (civile et militaire)

177 440 728,00

 

 

– Recherche culturelle et culture scientifique

110 282 187,47

 

2 425,03

– Enseignement supérieur et recherche agricoles

302 415 083,61

 

227 844,39

Régimes sociaux et de retraite

6 437 918 596,03

 

79 691,97

– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 108 304 665,03

 

16 691,97

– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

840 000 000,00

 

 

– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 489 613 931,00

 

63 000,00

Relations avec les collectivités territoriales

2 709 697 092,38

 

71 889 969,78

– Concours financiers aux communes et groupements de communes

789 992 348,12

 

50 877 395,88

– Concours financiers aux départements

480 796 448,59

 

1 064 083,41

– Concours financiers aux régions

906 973 600,00

 

70 937,00

– Concours spécifiques et administration

531 934 695,67

 

19 877 553,49

Remboursements et dégrèvements

86 178 558 058,74

 

1 767 640 941,26

– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

74 542 568 775,74

 

1 521 956 224,26

– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

11 635 989 283,00

 

245 684 717,00

Santé

1 378 494 751,49

 

357 176,51

– Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

634 514 347,28

 

337 580,72

– Protection maladie

743 980 404,21

 

19 595,79

Sécurité

17 660 954 040,94

 

224 094 621,45

– Police nationale

9 554 255 086,73

 

37 741 215,36

– Gendarmerie nationale

7 984 565 334,61

 

185 135 292,69

– Sécurité et éducation routières

122 133 619,60

 

1 218 113,40

Sécurité civile

417 396 847,78

 

1 146 594,61

– Intervention des services opérationnels

267 161 506,07

 

901 118,68

– Coordination des moyens de secours

150 235 341,71

 

245 475,93

Solidarité, insertion et égalité des chances

13 356 253 210,64

 

29 789 749,71

– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

397 194 155,06

 

2 953 000,94

– Actions en faveur des familles vulnérables

245 282 458,63

 

4 373,37

– Handicap et dépendance

11 203 684 221,92

 

17 633 633,08

– Égalité entre les hommes et les femmes

23 279 199,71

 

262 230,29

– Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

1 486 813 175,32

 

8 936 512,03

Sport, jeunesse et vie associative

487 012 594,54

 

855 617,34

– Sport

242 523 773,67

 

719 686,21

– Jeunesse et vie associative

244 488 820,87

 

135 931,13

Travail et emploi

12 494 595 524,29

 

84 277 340,54

– Accès et retour à l’emploi

7 878 028 061,13

 

31 610 476,98

– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

3 811 086 121,60

 

19 601 212,17

– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

37 570 928,89

 

25 702 635,06

– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

767 910 412,67

 

7 363 016,33

Total

387 277 366 188,78

 

8 420 127 419,77

 

II. – Le montant des dépenses relatives au budget général au titre de l’année 2013 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les crédits de paiement ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce même tableau.

 

(En euros)

Désignation des missions et des programmes

Dépenses

Ajustements de la loi de règlement

Ouvertures de crédits complémentaires

Annulations de crédits non consommés et non reportés

Action extérieure de l’État

2 987 383 093,24

27 559 668,79

– Action de la France en Europe et dans le monde

1 921 729 798,96

 

22 916 519,53

– Diplomatie culturelle et d’influence

716 263 212,94

 

1 888 751,42

– Français à l’étranger et affaires consulaires

349 390 081,34

 

2 754 397,84

Administration générale et territoriale de l’État

2 607 150 092,76

10 536 774,78

– Administration territoriale

1 751 945 664,21

 

3 388 176,50

– Vie politique, cultuelle et associative

150 691 601,23

 

6 654 918,77

– Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

704 512 827,32

 

493 679,51

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3 315 246 055,52

 

2 282 461,33

– Économie et développement durable de l’agriculture et des territoires

1 782 347 865,34

 

0,96

– Forêt

295 886 854,41

 

1,46

– Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation

504 694 217,22

 

1 298 543,00

– Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

732 317 118,55

 

983 915,91

Aide publique au développement

2 966 795 714,05

 

280 548,95

– Aide économique et financière au développement

1 094 111 585,27

 

0,73

– Solidarité à l’égard des pays en développement

1 872 684 128,78

 

280 548,22

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

3 013 978 996,51

 

8 687 574,40

– Liens entre la Nation et son armée

112 924 876,55

 

3 594 320,45

– Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

2 802 629 841,36

 

0,55

– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale

98 424 278,60

 

5 093 253,40

Conseil et contrôle de l’État

610 495 739,73

 

6 140 045,92

– Conseil d’État et autres juridictions administratives

363 813 600,98

 

2 295 695,18

– Conseil économique, social et environnemental

40 272 745,00

 

30 000,00

– Cour des comptes et autres juridictions financières

206 054 658,60

 

3 559 066,89

– Haut conseil des finances publiques

354 735,15

 

255 283,85

Culture

2 618 121 636,51

 

4,78

– Patrimoines

797 990 538,46

 

1,50

– Création

761 553 260,21

 

0,96

– Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

1 058 577 837,84

 

2,32

Défense

38 959 928 836,05

0,52

14 787 713,14

– Environnement et prospective de la politique de défense

1 858 822 038,35

 

2 995 554,62

– Préparation et emploi des forces

23 836 476 090,71

 

60 467,84

– Soutien de la politique de la défense

2 844 435 877,42

0,52

11 553 263,70

– Équipement des forces

10 420 194 829,57

 

178 426,98

Direction de l’action du Gouvernement

1 128 246 492,37

 

6 405 519,31

– Coordination du travail gouvernemental

495 066 662,75

 

1 030 244,60

– Protection des droits et libertés

86 748 594,04

 

740 342,52

– Moyens mutualisés des administrations déconcentrées

546 431 235,58

 

4 634 932,19

Écologie, développement et aménagement durables

10 280 044 814,93

 

13 973 215,74

– Infrastructures et services de transports

5 143 245 303,89

 

0,99

– Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture

182 286 412,90

 

2 220 819,42

– Météorologie

211 349 171,00

 

– Paysages, eau et biodiversité

244 635 812,54

 

0,79

– Information géographique et cartographique

94 260 631,55

 

0,45

– Prévention des risques

241 886 601,78

 

130 676,94

– Énergie, climat et après-mines

664 485 003,80

 

4 610 240,20

– Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer

3 497 895 877,47

 

7 011 476,95

Économie

2 210 685 585,81

 

8 720 908,07

– Développement des entreprises et du tourisme

1 262 925 703,23

 

275 720,73

– Statistiques et études économiques

458 826 607,95

 

3 444 508,62

– Stratégie économique et fiscale

488 933 274,63

 

5 000 678,72

Égalité des territoires, logement et ville

7 617 971 632,42

 

58 185,04

– Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables

1 397 555 274,33

 

0,97

– Aide à l’accès au logement

5 161 083 428,02

 

0,98

– Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat

588 769 610,58

 

58 182,58

– Politique de la ville

470 563 319,49

 

0,51

– Conduite et pilotage des politiques de l’égalité des territoires, du logement et de la ville

Engagements financiers de l’État

53 895 867 543,05

 

170 595 860,95

– Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)

44 885 787 998,05

 

77 212 001,95

– Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)

114 516 141,70

 

93 383 858,30

– Épargne

575 888 341,34

 

0,66

– Majoration de rentes

179 184 061,96

 

0,04

– Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité

6 523 488 000,00

 

– Augmentation en capital de la Banque européenne d’investissement

1 617 003 000,00

 

Enseignement scolaire

63 436 250 681,63

 

38 609 583,24

– Enseignement scolaire public du premier degré

18 748 405 806,21

 

3 093 259,10

– Enseignement scolaire public du second degré

29 880 938 705,59

 

26 849 382,29

– Vie de l’élève

4 245 542 304,02

 

3 033 584,54

– Enseignement privé du premier et du second degrés

7 084 561 434,14

 

1 555 019,86

– Soutien de la politique de l’éducation nationale

2 148 268 184,65

 

3 510 398,47

– Enseignement technique agricole

1 328 534 247,02

 

567 938,98

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

11 395 558 188,25

 

31 291 758,82

– Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local

8 348 630 877,94

 

16 235 237,38

– Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État

201 385 918,83

 

5 093 217,17

– Conduite et pilotage des politiques économique et financière

874 872 313,52

 

4 561 529,52

– Facilitation et sécurisation des échanges

1 597 543 932,76

 

2 621 806,49

– Entretien des bâtiments de l’État

169 811 422,02

 

2 778 620,43

– Fonction publique

203 313 723,18

 

1 347,83

Immigration, asile et intégration

704 987 903,13

 

2,02

– Immigration et asile

629 895 762,11

 

0,53

– Intégration et accès à la nationalité française

75 092 141,02

 

1,49

Justice

7 574 284 237,54

 

3 745 997,51

– Justice judiciaire

3 034 797 393,26

 

1 207 520,43

– Administration pénitentiaire

3 130 175 870,60

 

1 301 305,24

– Protection judiciaire de la jeunesse

765 884 104,97

 

854 864,86

– Accès au droit et à la justice

337 947 982,07

 

0,93

– Conduite et pilotage de la politique de la justice

301 937 609,02

 

34 014,67

– Conseil supérieur de la magistrature

3 541 277,62

 

348 291,38

Médias, livre et industries culturelles

1 197 727 742,29

 

1,71

– Presse

512 968 525,50

 

0,50

– Livre et industries culturelles

258 727 241,27

 

0,73

– Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique

277 814 148,52

 

0,48

– Action audiovisuelle extérieure

148 217 827,00

 

 

Outre-mer

2 102 469 474,21

 

1 138 233,47

– Emploi outre-mer

1 453 015 139,73

 

993 058,95

– Conditions de vie outre-mer

649 454 334,48

 

145 174,52

Politique des territoires

302 112 694,23

 

96 632,31

– Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire

243 930 116,25

 

96 632,29

– Interventions territoriales de l’État

58 182 577,98

 

0,02

Pouvoirs publics

989 015 739,00

 

 

– Présidence de la République

101 233 252,00

 

 

– Assemblée nationale

517 890 000,00

 

 

– Sénat

323 584 600,00

 

 

– La Chaîne parlementaire

34 498 162,00

 

 

– Indemnités des représentants français au Parlement européen

 

 

– Conseil constitutionnel

10 888 000,00

 

 

– Haute Cour

 

– Cour de justice de la République

921 725,00

 

 

Provisions

 

 

24 184 749,00

– Provision relative aux rémunérations publiques

 

 

 

– Dépenses accidentelles et imprévisibles

 

 

24 184 749,00

Recherche et enseignement supérieur

25 795 529 028,87

 

842 950,80

– Formations supérieures et recherche universitaire

12 788 079 005,72

 

46,35

– Vie étudiante

2 329 271 107,75

 

0,40

– Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

4 908 348 946,06

 

0,94

– Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources

1 273 427 732,00

 

 

– Recherche spatiale

1 398 152 218,00

 

 

– Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables

1 498 729 787,67

 

0,28

– Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

1 003 376 670,86

 

790 357,14

– Recherche duale (civile et militaire)

177 440 728,00

 

 

– Recherche culturelle et culture scientifique

114 512 449,80

 

0,70

– Enseignement supérieur et recherche agricoles

304 190 383,01

 

52 544,99

Régimes sociaux et de retraite

6 438 182 226,03

 

0,97

– Régimes sociaux et de retraite des transports terrestres

4 108 505 295,03

0,97

– Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins

840 000 000,00

 

 

– Régime de retraite des mines, de la SEITA et divers

1 489 676 931,00

 

 

Relations avec les collectivités territoriales

2 720 602 293,35

 

1 544 069,53

– Concours financiers aux communes et groupements de communes

767 164 135,43

 

383 145,57

– Concours financiers aux départements

481 613 528,17

 

1 089 986,83

– Concours financiers aux régions

906 973 600,00

 

70 937,00

– Concours spécifiques et administration

564 851 029,75

 

0,13

Remboursements et dégrèvements

86 214 808 056,90

 

1 731 390 943,10

– Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)

74 570 162 439,36

 

1 494 362 560,64

– Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)

11 644 645 617,54

 

237 028 382,46

Santé

1 378 984 800,65

 

1 250 812,35

– Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins

635 004 396,44

 

1 231 216,56

– Protection maladie

743 980 404,21

 

19 595,79

Sécurité

17 518 989 146,58

 

11 034 688,86

– Police nationale

9 345 468 939,22

 

10 463 484,41

– Gendarmerie nationale

8 050 024 762,86

 

30 536,87

– Sécurité et éducation routières

123 495 444,50

 

540 667,58

Sécurité civile

432 542 576,41

 

690 211,80

– Intervention des services opérationnels

271 239 729,04

 

690 210,94

– Coordination des moyens de secours

161 302 847,37

 

0,86

Solidarité, insertion et égalité des chances

13 422 603 566,49

 

3 575 678,48

– Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales

400 153 774,31

 

6 375,69

– Actions en faveur des familles vulnérables

245 267 124,14

 

0,86

– Handicap et dépendance

11 247 124 622,27

 

115 085,73

– Égalité entre les hommes et les femmes

23 186 970,14

 

77 641,86

– Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative

1 506 871 075,63

 

3 376 574,34

Sport, jeunesse et vie associative

499 177 001,16

 

118 991,24

– Sport

254 625 124,44

 

1 202,96

– Jeunesse et vie associative

244 551 876,72

 

117 788,28

Travail et emploi

10 527 122 273,65

 

15 161 707,23

– Accès et retour à l’emploi

5 973 595 147,11

 

73 002,00

– Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

3 708 980 565,57

 

1,20

– Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

66 099 524,13

 

6 247 054,87

– Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

778 447 036,84

 

8 841 649,16

Total

384 862 863 863,32

0,52

2 134 705 493,64

 – (Adopté.)

Article 4
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 6

Article 5

I. – Le montant des autorisations d’engagement consommées sur les budgets annexes au titre de l’année 2013 est arrêté par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.

 

(En euros)

Désignation des budgets annexes

Autorisations d’engagement consommées

Ajustements de la loi de règlement

Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires

Annulations d’autorisations d’engagement non engagées et non reportées

Contrôle et exploitation aériens

2 024 525 141,66

 

113 261 937,21

– Soutien aux prestations de l’aviation civile

1 507 102 481,21

 

30 865 730,61

– Navigation aérienne

465 621 479,71

 

73 220 818,36

– Transports aériens, surveillance et certification

51 801 180,74

 

9 175 388,24

– Formation aéronautique

 

 

 

Publications officielles et information administrative

184 695 893,37

 

18 527 613,43

– Edition et diffusion

90 938 689,93

 

13 179 724,07

– Pilotage et activités de développement des publications

93 757 203,44

 

5 347 889,36

Total

2 209 221 035,03

 

131 789 550,64

 

II. – Les résultats relatifs aux budgets annexes au titre de l’année 2013 sont arrêtés par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les crédits ouverts sont modifiés comme indiqué dans ce même tableau.

 

(En euros)

Désignation des budgets annexes

Opérations de l’année

Ajustements de la loi de règlement

Dépenses

Recettes

Ouvertures de crédits complémentaires

Annulations des crédits non consommés et non reportés

Contrôle et exploitation aériens

2 094 676 044,26

2 094 676 044,26

56 390 642,82

65 689 441,07

– Soutien aux prestations de l’aviation civile

1 504 230 881,70

 

 

32 372 307,50

– Navigation aérienne

481 930 909,72

 

 

25 376 948,72

– Transports aériens, surveillance et certification

52 123 610,02

 

 

7 940 184,85

Augmentation du fonds de roulement

56 390 642,82

 

56 390 642,82

Publications officielles et information administrative

201 643 917,34

201 643 917,34

26 734 423,35

36 947 582,01

– Édition et diffusion

90 225 467,35

 

 

17 617 733,65

– Pilotage et activités de développement des publications

84 684 026,64

 

 

19 329 848,36

Augmentation du fonds de roulement

26 734 423,35

 

26 734 423,35

 

Total

2 296 319 961,60

2 296 319 961,60

83 125 066,17

102 637 023,08

 – (Adopté.)

Article 5
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 7

Article 6

I. – Le montant des autorisations d’engagement consommées sur les comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2014 est arrêté, au 31 décembre 2013, par mission et programme aux sommes mentionnées dans le tableau ci-après. Les autorisations d’engagement ouvertes sont modifiées comme indiqué dans ce même tableau.

 

(En euros)

Désignation des comptes spéciaux

Autorisations d’engagement consommées

Ajustements de la loi de règlement

Ouvertures d’autorisations d’engagement complémentaires

Annulations d’autorisations d’engagement non consommées et non reportées

Comptes d’affectation spéciale

 

 

Aides à l’acquisition de véhicules propres

281 538 073,58

 

121 132 457,42

– Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres

280 932 190,70

 

119 251 189,30

– Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants

605 882,88

 

1 881 268,12

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

1 306 001 796,45

24 535 073,57

– Radars

211 263 853,52

 

0,50

– Fichier national du permis de conduire

21 046 627,62

 

0,38

– Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

29 003 467,00

 

3 000 000,00

– Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

598 118 500,31

 

14 610 956,69

– Désendettement de l’État

446 569 348,00

 

6 924 116,00

Développement agricole et rural

111 276 327,23

 

0,77

– Développement et transfert en agriculture

54 820 869,87

 

0,13

– Recherche appliquée et innovation en agriculture

56 455 457,36

 

0,64

Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

403 900 753,59

 

2 681 274,41

– Électrification rurale

401 785 073,59

 

0,41

– Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries

2 115 680,00

 

2 681 274,00

Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

812 755 748,40

 

45 212 379,60

– Péréquation entre régions et compensation au titre du transfert du versement de l’indemnité compensatrice forfaitaire

450 000 000,00

 

– Contractualisation pour le développement et la modernisation de l’apprentissage

354 577 209,00

 

43 212 380,00

– Incitations financières en direction des entreprises respectant les quotas en alternance

8 178 539,40

 

1 999 999,60

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

551 041 369,48

 

235 473 807,52

– Contribution au désendettement de l’État

76 106 405,02

 

12 529 121,98

– Contributions aux dépenses immobilières

474 934 964,46

 

222 944 685,54

Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État

705 321 255,47

 

364 808 477,53

– Désendettement de l’État

 

 

– Optimisation de l’usage du spectre hertzien et interception et traitement des émissions électromagnétiques (ministère de la défense)

705 321 255,47

 

364 808 477,53

– Optimisation de l’usage du spectre hertzien et des infrastructures du réseau physique de télécommunications du ministère de l’intérieur

 

 

Participation de la France au désendettement de la Grèce

1 005 600 000,00

 

– Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre

1 005 600 000,00

 

– Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

 

 

Participations financières de l’État

9 871 822 759,48

 

148 829 548,52

– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

9 871 822 759,48

 

148 829 548,52

– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

 

 

Pensions

55 602 374 893,00

 

2 298,00

– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité

51 335 497 818,57

 

2 295,43

– Ouvriers des établissements industriels de l’État

1 898 495 043,34

 

1,66

– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

2 368 382 031,09

 

0,91

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

324 996 947,21

 

0,79

– Exploitation des services nationaux de transport conventionnés

217 396 947,21

 

0,79

– Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

107 600 000,00

 

Total des comptes d’affectation spéciale

70 976 629 923,89

 

942 675 318,13

Comptes de concours financiers

 

 

 

Accords monétaires internationaux

 

 

 

– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

 

 

 

– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

 

 

 

– Relations avec l’Union des Comores

 

 

 

Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

6 633 792 669,15

 

691 656 634,85

– Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides européennes de la politique agricole commune

6 579 417 588,15

 

620 582 411,85

– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

-193 574 223,00

 

56 074 223,00

– Avances à des services de l’État

247 949 304,00

 

– Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

 

 

15 000 000,00

Avances à l’audiovisuel public

3 447 678 602,00

 

 

– France Télévisions

2 300 364 073,00

 

– ARTE France

268 123 901,00

 

– Radio France

618 174 660,00

 

– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure

169 243 179,00

 

– Institut national de l’audiovisuel

91 772 789,00

 

Avances aux collectivités territoriales

91 072 514 013,22

 

2 288 942 341,78

– Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

41 900 001,00

 

6 000 000,00

– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

91 030 614 012,22

 

2 282 942 341,78

Avances aux organismes de sécurité sociale

9 214 156 406,92

 

279 183 593,08

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale

8 551 757 521,89

 

251 582 478,11

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires

480 447 080,33

 

19 552 919,67

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation de l’exonération de cotisations sociales sur les services à la personne

181 951 804,70

 

8 048 195,30

Prêts à des États étrangers

856 360 150,27

 

237 849 849,73

– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures

379 500 000,00

 

500 000,00

– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

13 569 062,51

 

236 640 937,49

– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers

447 000 000,00

 

– Prêts aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro

16 291 087,76

 

708 912,24

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

14 286 195,28

 

74 257 284,72

– Prêts et avances pour le logement des agents de l’État

325 295,12

 

3 701,88

– Prêts pour le développement économique et social

13 960 900,16

 

74 253 582,84

– Prêts à la filière automobile

 

 

Total des comptes de concours financiers

111 238 788 036,84

 

3 571 889 704,16

Total général

182 215 417 960,73

 

4 514 565 022,29

 

II. – Les résultats des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2014 sont arrêtés, au 31 décembre 2013, par mission et programme aux sommes mentionnées dans les tableaux ci-après. Les crédits de paiement ouverts et les découverts autorisés sont modifiés comme indiqué dans ces mêmes tableaux.

 

(En euros)

Désignation des comptes spéciaux

Opérations de l’année

Ajustements de la loi de règlement

Dépenses

Recettes

Ouvertures de crédits complémentaires

Annulations de crédits non consommés et non reportés

Comptes d’affectation spéciale

 

 

 

 

Aides à l’acquisition de véhicules propres

281 538 073,58

276 612 762,17

 

121 132 457,42

– Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres

280 932 190,70

 

119 251 189,30

– Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants

605 882,88

 

 

1 881 268,12

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

1 315 124 251,78

1 382 921 521,99

 

24 535 072,22

– Radars

218 662 018,75

 

 

0,25

– Fichier national du permis de conduire

22 767 465,72

 

 

0,28

– Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

29 003 467,00

 

 

2 999 999,00

– Contribution à l’équipement des collectivités territoriales pour l’amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

598 121 952,31

 

 

14 610 956,69

– Désendettement de l’État

446 569 348,00

 

 

6 924 116,00

Développement agricole et rural

106 977 167,50

120 579 836,72

 

1,50

– Développement et transfert en agriculture

54 853 069,26

 

 

0,74

– Recherche appliquée et innovation en agriculture

52 124 098,24

 

 

0,76

Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

347 744 929,50

374 318 725,56

 

1 007 608,50

– Électrification rurale

346 352 133,08

 

 

0,92

– Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries

1 392 796,42

 

 

1 007 607,58

Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

813 707 288,21

675 742 003,39

 

45 212 379,79

– Péréquation entre régions et compensation au titre du transfert du versement de l’indemnité compensatrice forfaitaire

450 000 000,00

 

 

 

– Contractualisation pour le développement et la modernisation de l’apprentissage1

355 647 209,00

 

 

43 212 380,00

– Incitations financières en direction des entreprises respectant les quotas en alternance

8 060 079,21

 

 

1 999 999,79

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

570 454 422,45

406 382 568,57

 

207 605 530,90

– Contribution au désendettement de l’État

76 106 405,02

 

 

12 529 121,98

– Contributions aux dépenses immobilières

494 348 017,43

 

 

195 076 408,92

Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État

1 066 243 429,09

11 980,08

 

627 950,91

– Désendettement de l’État

 

 

 

 

– Optimisation de l’usage du spectre hertzien et interception et traitement des émissions électromagnétiques (ministère de la défense)

1 066 243 429,09

 

 

627 950,91

– Optimisation de l’usage du spectre hertzien et des infrastructures du réseau physique de télécommunications du ministère de l’intérieur

 

 

 

 

Participation de la France au désendettement de la Grèce

599 000 000,00

1 005 600 000,00

 

 

– Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre

599 000 000,00

 

 

 

– Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France

 

 

 

 

Participations financières de l’État

9 871 822 759,48

11 091 661 451,42

 

148 829 548,52

– Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État

9 871 822 759,48

 

 

148 829 548,52

– Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État

 

 

 

 

Pensions

55 602 377 187,00

55 812 453 843,33

 

4,00

– Pensions civiles et militaires de retraite et allocations temporaires d’invalidité

51 335 497 818,57

 

 

1,43

– Ouvriers des établissements industriels de l’État

1 898 495 043,34

 

 

1,66

– Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et autres pensions

2 368 384 325,09

 

 

0,91

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

312 044 803,00

325 019 115,00

 

 

– Exploitation des services nationaux de transport conventionnés

204 444 803,00

 

 

 

– Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

107 600 000,00

 

 

 

Total des comptes d’affectation spéciale

70 887 034 311,59

71 471 303 808,23

 

548 950 553,76

Comptes de concours financiers

 

 

 

 

Accords monétaires internationaux

 

 

 

 

– Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine

 

 

 

 

– Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale

 

 

 

 

– Relations avec l’Union des Comores

 

 

 

 

Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

6 633 792 669,15

6 768 797 541,21

 

691 656 634,85

– Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides européennes de la politique agricole commune

6 579 417 588,15

 

 

620 582 411,85

– Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics

-193 574 223,00

 

 

56 074 223,00

– Avances à des services de l’État

247 949 304,00

 

 

 

– Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex

 

 

 

15 000 000,00

Avances à l’audiovisuel public

3 447 678 602,00

3 448 313 108,51

 

 

– France Télévisions

2 300 364 073,00

 

 

 

– ARTE France

268 123 901,00

 

 

 

– Radio France

618 174 660,00

 

 

 

– Contribution au financement de l’action audiovisuelle extérieure

169 243 179,00

 

 

 

– Institut national de l’audiovisuel

91 772 789,00

 

 

 

Avances aux collectivités territoriales

91 072 027 969,22

90 697 358 737,69

 

2 289 428 385,78

– Avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie

41 900 001,00

 

 

6 000 000,00

– Avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes

91 030 127 968,22

 

 

2 283 428 385,78

Avances aux organismes de sécurité sociale

9 214 156 406,92

9 219 596 494,46

 

279 183 593,08

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3° de l’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale

8 551 757 521,89

 

 

251 582 478,11

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires

480 447 080,33

 

 

19 552 919,67

– Avance à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux organismes de sécurité sociale en compensation de l’exonération de cotisations sociales sur les services à la personne

181 951 804,70

 

 

8 048 195,30

Prêts à des États étrangers

541 275 203,21

592 764 890,71

 

502 934 796,79

– Prêts à des États étrangers, de la réserve pays émergents, en vue de faciliter la réalisation de projets d’infrastructures

273 313 467,27

 

 

173 686 532,73

– Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France

13 670 648,18

 

 

236 539 351,82

– Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers

238 000 000,00

 

 

92 000 000,00

– Prêts aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro

16 291 087,76

 

 

708 912,24

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

33 262 136,54

5 906 629,84

 

360,46

– Prêts et avances pour le logement des agents de l’État

329 136,54

 

 

360,46

– Prêts pour le développement économique et social

32 933 000,00

 

 

– Prêts à la filière automobile

 

 

 

Total des comptes de concours financiers

110 942 192 987,04

110 732 737 402,42

 

3 763 203 770,96

 

 

(En euros)

Désignation des comptes spéciaux

Opérations de l’année

Ajustements de la loi de règlement

Dépenses

Recettes

Majorations du découvert

Comptes de commerce

 

 

Approvisionnement des armées en produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires

768 076 382,01

815 319 823,28

Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire

162 992 724,79

160 261 374,90

Couverture des risques financiers de l’État

2 149 934 836,64

2 149 934 836,64

Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État

606 046 220,72

595 823 528,95

Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État

46 900 799 291,42

47 109 027 197,01

Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes

9 060 000,00

8 831 576,50

Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses

2 994,00

 

Opérations commerciales des domaines

44 957 129,19

70 716 406,42

Régie industrielle des établissements pénitentiaires

27 697 663,44

26 032 036,38

Renouvellement des concessions hydroélectriques

941 156,57

 

Total des comptes de commerce

50 670 508 398,78

50 935 946 780,08

 

Comptes d’opérations monétaires

Émission des monnaies métalliques

191 561 271,30

249 180 348,56

Opérations avec le Fonds monétaire international

2 062 387 314,39

1 629 699 067,65

8 470 147 271,92

Pertes et bénéfices de change

24 229 262,24

15 908 823,26

Total des comptes d’opérations monétaires

2 278 177 847,93

1 894 788 239,47

8 470 147 271,92

 

III. – Les soldes des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2014 sont arrêtés, à la date du 31 décembre 2013, aux sommes ci-après :

 

(En euros)

Désignation des comptes spéciaux

Soldes au 31 décembre 2013

Débiteurs

Créditeurs

Comptes d’affectation spéciale

 

6 081 135 834,93

Aide à l’acquisition de véhicules propres

 

1 816 620,45

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

 

772 428 412,86

Développement agricole et rural

 

65 672 648,49

Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

 

152 686 362,89

Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage

 

115 639 747,13

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

 

738 455 703,14

Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État

 

128 619,89

Participation de la France au désendettement de la Grèce

 

406 600 000,00

Participations financières de l’État

 

2 786 918 083,19

Pensions

 

987 005 960,32

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

 

53 783 676,57

Comptes de concours financiers

29 000 339 099,04

8 458 912,49

Accords monétaires internationaux

 

 

Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

2 240 482 871,16

 

Avances à l’audiovisuel public

 

3 018 824,95

Avances aux collectivités territoriales

2 884 024 695,65

 

Avances aux organismes de sécurité sociale

 

5 440 087,54

Prêts à des États étrangers

22 553 957 902,23

Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

1 321 873 630,00

 

Comptes de commerce

65 694 362,24

3 829 020 307,25

Approvisionnement des armées en produits pétroliers, autres fluides et produits complémentaires

50 839 247,26

 

Cantine et travail des détenus dans le cadre pénitentiaire

12 941 018,39

 

Couverture des risques financiers de l’État

0,02

 

Exploitations industrielles des ateliers aéronautiques de l’État

 

57 866 116,99

Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État

 

3 474 856 596,02

Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes

 

99 763 434,38

Liquidation d’établissements publics de l’État et liquidations diverses

 

17 462 802,94

Opérations commerciales des domaines

 

157 679 003,15

Régie industrielle des établissements pénitentiaires

 

21 392 353,77

Renouvellement des concessions hydroélectriques

1 914 096,57

 

Comptes d’opérations monétaires

8 478 467 710,90

2 734 677 843,76

Émission des monnaies métalliques

 

2 734 677 843,76

Opérations avec le Fonds monétaire international

8 470 147 271,92

 

Pertes et bénéfices de change

8 320 438,98

 

Totaux

37 544 501 172,18

12 653 292 898,43

 

IV. – Les soldes arrêtés au III sont reportés à la gestion 2014 à l’exception :

1° D’un solde débiteur global de 429 018 518,82 € concernant les comptes de concours financiers suivants : « Prêts à des états étrangers » (126 861 597,01 €), « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » (12 732 973,19 €) et « Avances aux collectivités territoriales » (289 423 948,62 €) ;

2° D’un solde débiteur de 2 658 871,31 € relatif au compte de commerce « Lancement de certains matériels aéronautiques et de certains matériels d’armement complexes » ;

3° D’un solde débiteur de 8 320 438,98 € afférent au compte d’opérations monétaires « Pertes et bénéfices de change ». – (Adopté.)

Article 6
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article 8

Article 7

Le solde créditeur du compte spécial « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique », clos au 1er janvier 2013, est arrêté au montant de 415 821,84 €. – (Adopté.)

Article 7
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article additionnel après l'article 8 (début)

Article 8

Le solde débiteur du compte spécial « Gestion des actifs carbone de l’État », clos au 1er juin 2013, est arrêté au montant de 200 101 888,16 € – (Adopté.)

Article 8
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
Article additionnel après l'article 8 (fin)

Article additionnel après l'article 8

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement avant le 1er octobre 2014 un rapport faisant état des avances du Trésor au profit des budgets annexes, de l'état du remboursement de ces avances et des possibilités de les limiter à l'avenir.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Cet amendement a pour objet de préciser la politique menée en matière d’avances du Trésor au profit des budgets annexes. On a parlé tout à l'heure du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Le cumul d’avances s’élève aujourd'hui à environ 1,2 milliard d’euros, qui ne sont pas couverts a priori par des recettes à venir, comme l’a d'ailleurs souligné le rapporteur général. Or, en face, il y a quand même des dépenses à assumer.

La loi interdit au Trésor de consentir des prêts à long terme. Or j’ai l’impression que la pratique susvisée s’assimile à de tels prêts. C’est pourquoi j’aimerais, au travers de cette demande de rapport, que le Gouvernement nous expose sa politique et ses principes en matière d’avances du Trésor sur ces budgets annexes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le présent amendement soulève une question intéressante sur laquelle il y aura lieu de réfléchir.

Il s’agit, d’une part, de proposer de retracer le stock des avances de l’État restant à rembourser pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et, d’autre part, d’envisager un autre mode de financement.

Je ne reviens pas sur le premier point qui a déjà été évoqué.

Sur le second point, il est légitime de s’interroger aujourd’hui – ce qu’a d'ailleurs fait la commission des finances – sur le mode de financement du budget annexe précité, qui connaît un déséquilibre financier structurel.

On pourrait imaginer une alternative.

La première option serait d’augmenter les recettes, ce qui supposerait de relever de manière importante les taxes et redevances dont bénéficie le budget annexe.

Une telle décision pèserait toutefois lourdement sur le transport aérien et l’attractivité de nos aéroports, alors même que ceux-ci sont soumis à une forte concurrence internationale.

Nous savons en particulier que le développement des hubs dans les pays du golfe Persique tient pour partie à la quasi-absence de taxes aéroportuaires.

La seconde option serait de supprimer le budget annexe et de réintégrer les dépenses correspondantes dans le budget général de l’État. Cette solution, qui me semble plus réaliste, mettrait certes fin au versement des avances, mais pas au déséquilibre structurel du financement de cette politique, et présenterait, par ailleurs, d’autres inconvénients.

Au final, mon cher collègue, je ne sais pas laquelle de ces deux solutions aurait votre préférence ou celle de votre groupe politique. Tout en relevant l’anormalité de la situation actuelle, il ne me semble pas que les options que je viens d’évoquer seraient nécessairement beaucoup plus satisfaisantes.

En tout état de cause, je ne suis pas convaincu que l’alternative que je vous ai présentée rende nécessaire la remise d’un rapport. Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Monsieur le sénateur, j’apporterai quelques éléments supplémentaires plaidant en faveur du retrait de votre amendement.

Vous proposez que le Gouvernement remette au Parlement un rapport faisant état des avances du Trésor au profit des budgets annexes, de l’état du remboursement de ces avances et des possibilités de les limiter à l’avenir.

Le budget annexe peut recourir à l’emprunt pour financer des investissements. Des avances lui sont accordées via un compte de concours financiers, et il bénéficie ainsi des conditions de financement de l’État sur les marchés, c'est-à-dire des meilleures conditions, ce qui n’est pas sans intérêt.

Cette situation n’est pas nouvelle, mais elle s’est considérablement aggravée depuis 2008 avec la crise du secteur aérien qui a érodé les recettes, alors que les investissements, notamment ceux qui sont nécessaires pour assurer la sécurité, ont été maintenus.

À l’avenir, il est prévu une trajectoire de désendettement sur une période triennale, de 2015 à 2017, notamment par une meilleure maîtrise des dépenses, afin d’apurer les avances consenties.

Je note que ce mécanisme de financement par des avances du Trésor a été mis en œuvre à partir de 2006, à la suite – vous pardonnerez l’ironie de mon propos ! – des recommandations du Sénat dans son rapport d’information intitulé Pour une gestion consolidée des dettes de l’État.

Par ailleurs, ces avances sont décrites dans les documents budgétaires, qui portent les jolis acronymes de « PAP » et de « RAP », c'est-à-dire dans le projet annuel de performances et dans le rapport annuel de performances, se rapportant au budget annexe et au compte de concours financiers. Les éléments que vous souhaitez voir figurer dans un rapport me semblent donc être déjà disponibles dans des documents existants.

Je vous ai également décrit les décisions que nous avions prises pour un retour à zéro des avances de l’État au budget annexe de l’aviation civile.

Au bénéfice de mes explications et de celles qu’a apportées le rapporteur général, je vous suggère de retirer votre amendement, monsieur le sénateur.

M. le président. Monsieur Delahaye, l'amendement n° 2 est-il maintenu ?

M. Vincent Delahaye. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 223 :

Nombre de votants 323
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l’adoption 155
Contre 165

Le Sénat n'a pas adopté.

Article additionnel après l'article 8 (début)
Dossier législatif : projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2013
 

6

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission des finances a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, actuellement en cours d’examen.

Cette liste a été publiée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.

7

 
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Discussion générale (suite)

Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014

Discussion d'un projet de loi

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (projet n° 689, rapport n° 703, avis n° 701).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, la discussion que nous entamons aujourd’hui est quelque peu exceptionnelle : c’est en effet seulement la deuxième fois, depuis que les lois de financement de la sécurité sociale existent, que vous est présenté un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

Ces conditions exceptionnelles me conduisent à saluer tout particulièrement, et plus que de coutume, le travail accompli, malgré un calendrier chargé, par la commission des affaires sociales du Sénat, et à remercier sa présidente.

Au-delà des enjeux de calendrier et de la novation historique qu’il représente, ce projet de loi revêt une importance particulière, non pas par sa longueur – c'est un texte court, de seize articles dans le projet initial, contre vingt et un dans le texte adopté par l’Assemblée nationale en première lecture –, mais parce qu’il constitue, avec le projet de loi de finances rectificative qui a été examiné la semaine dernière par la Haute Assemblée, la première mise en œuvre de la mobilisation exceptionnelle en faveur de l’emploi que représente le pacte de responsabilité et de solidarité.

Je le rappelle, le Président de la République a conforté et renforcé la priorité donnée à l’emploi le 14 janvier dernier. Cet objectif se traduit par des allégements de cotisations sociales non seulement pour les employeurs et les travailleurs indépendants, mais aussi – je le souligne, car cela n’est pas souvent le cas – pour les salariés. Ces derniers bénéficieront d’une augmentation d’environ 500 euros de leur pouvoir d’achat dès l’année 2015.

Le présent texte constitue également une première étape vers la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés.

Pour ce qui est des cotisations employeurs, la baisse des cotisations concernera, en 2015, les revenus s’élevant jusqu’à 1,6 SMIC. Très concrètement, l’employeur d’un salarié percevant le SMIC ne payera aucune cotisation, ce qui se traduira de façon simplifiée sur la feuille de paie dès la fin du mois de janvier 2015.

Néanmoins, le texte qui vous est présenté ne porte que sur les allégements de cotisations pour les entreprises en 2015. Le respect des engagements pris par les entreprises dans le cadre du pacte précité nous permettra de franchir l’année prochaine une nouvelle étape pour renforcer encore la compétitivité de ces dernières. Comme l’a indiqué le Président de la République de manière claire et ferme lors de la dernière conférence sociale, la trajectoire est inscrite dans une durée de trois ans, ce qui permet aux entreprises françaises, mais aussi – je veux le souligner – aux investisseurs étrangers, de disposer de toute la lisibilité nécessaire pour les années à venir.

Il appartient désormais aux entreprises, grâce à la lisibilité qui leur est offerte, de se saisir de l’atout que constitue le pacte. Ainsi, nous pourrons progresser ensemble.

Les mesures proposées entraîneront évidemment des pertes de recettes pour la sécurité sociale. Je veux ici rassurer les parlementaires qui ont interrogé de façon récurrente le Gouvernement sur ce sujet : ces pertes seront compensées dans leur intégralité dans les lois financières pour 2015, vecteurs juridiques qui garantiront l’équilibre de la sécurité sociale, puisque la loi organique relative aux lois de finances ne permet pas d’inscrire dans une loi rectificative des dispositions qui, en termes de rééquilibrage, n’auront d’impact qu’à partir de l’année suivante – en l’occurrence, 2015.

S’agissant plus particulièrement du régime social des indépendants, le RSI, qui est l’objet d’une attention particulière de la part des parlementaires et qui est directement concerné par la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, je veux indiquer que son équilibre sera bien assuré de façon pérenne. En effet, les branches maladie et vieillesse de base du régime social des indépendants, aujourd’hui financées par la C3S, seront adossées aux branches maladie et vieillesse du régime général sur un plan strictement financier, ce qui permettra d’en garantir l’équilibre.

Ce dispositif de solidarité financière prévaut depuis cinquante ans pour le régime des salariés agricoles. Il est aussi à l’œuvre, depuis 2009, pour le régime maladie des exploitants agricoles. Mesdames, messieurs les sénateurs, le financement pérenne de ces deux régimes est garanti, et ni leur gestion autonome ni le niveau des cotisations ou des prestations n’ont été remis en cause. Il en ira de même du régime social des indépendants.

Dans le même temps, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale accélère les efforts d’économies engagés par le Gouvernement.

Tout d’abord, ce texte prévoit de ne pas revaloriser les retraites pendant un an. Je veux rappeler fortement que, conformément aux engagements du Premier ministre, les petites retraites ne seront pas concernées par cette absence de revalorisation. Ainsi, la retraite de base des personnes dont le total des pensions mensuelles ne dépasse pas 1 200 euros sera bien revalorisée. Très concrètement, cela signifie que près de la moitié des retraités ne seront pas touchés par la mesure de report de la revalorisation inscrite dans le présent texte.

Je ne veux pas sous-estimer l’effort que cette mesure peut représenter pour les retraités concernés, même si le contexte de très faible inflation en limite la portée. Néanmoins, je veux indiquer que l’ensemble du pays consent aujourd'hui à un effort pour l’emploi, en particulier pour l’emploi des plus jeunes. Cet effort est limité mais significatif, de sorte que seuls les retraités dont la pension globale est supérieure à 1 200 euros seront mis à contribution.

Au demeurant, je veux rappeler que le Gouvernement a pris des mesures fortes en faveur du pouvoir d’achat des retraités, en particulier des retraités modestes. Je pense à la double revalorisation, en 2014, du minimum vieillesse. Je pense également à la revalorisation de 50 euros de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé pour les plus de 60 ans ou encore au plan de revalorisation des petites retraites agricoles qui résulte de la réforme des retraites de janvier 2014.

Au cours de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, le gel de l’allocation de logement familiale qui figurait dans le texte initial a été supprimé, à la suite de l’adoption d’amendements déposés par les députés socialistes. Ce report de revalorisation ne figure pas dans le texte soumis aujourd’hui à votre examen, le Gouvernement ayant accepté ces amendements.

Les efforts d’économies engagés par le Gouvernement concernent également l’assurance maladie. Sur ce plan, le présent projet de loi tire les conséquences de la sous-exécution de l’ONDAM 2013, en revoyant l’ONDAM 2014, qui s’établira donc à 178,3 milliards d’euros. J’y insiste, cette mesure ne remet pas en cause le taux de progression de 2,4 % de l’ONDAM – l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – qui avait été voté lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a adopté un amendement permettant de sécuriser les conditions dans lesquelles une recommandation temporaire d’utilisation peut être utilisée pour permettre la prescription d’une spécialité pharmaceutique en dehors de son autorisation de mise sur le marché.

Mme Marisol Touraine, ministre. Tout en garantissant la sécurité sanitaire, l’adoption de cet amendement permettra de réaliser des économies, puisque des spécialités moins coûteuses mais présentant la même efficacité pourront être prescrites – par exemple, l’Avastin dans le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge, la DMLA.

M. Gilbert Barbier. Deux ans de retard !

Mme Marisol Touraine, ministre. S’agissant de cet exemple précis, le Gouvernement avait proposé une disposition en ce sens dès le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, soit dès la fin de l’année 2012. Toutefois, nous avions été amenés à retirer cette mesure du texte, pour des raisons de sécurité juridique. De nouvelles contraintes juridiques fixées depuis lors nous amènent à proposer un nouveau dispositif dans le présent projet de loi.

L’amendement adopté par l’Assemblée nationale, qui avait été présenté par le Gouvernement, illustre la politique qui est la nôtre : des économies en matière d’assurance maladie, réalisées par des réformes structurelles, mais qui ne remettent pas en cause la couverture sociale de nos concitoyens. Je veux insister sur ce point. En effet, l’accès aux soins est au cœur de la politique de santé que je défends et de la stratégie nationale de santé qui se met en place.

À cet égard, l’Assemblée nationale a également adopté plusieurs amendements tendant à consolider la mise en œuvre de deux réformes votées l’an dernier dans le cadre de la généralisation de l’accès à une complémentaire santé de qualité : la redéfinition des contrats responsables et solidaires et la sélection des contrats éligibles à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé.

Un de ces amendements vise à valoriser le dispositif de maîtrise des dépassements d’honoraires que nous avons mis en place, en fournissant une meilleure prise en charge lorsque les dépassements mesurés sont réalisés par des médecins qui s’étaient engagés à la modération en signant un contrat d’accès aux soins.

D’autres amendements ont pour objet de remanier les conditions d’éligibilité à l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, en l’étendant aux contrats collectifs à adhésion facultative, en écartant les contrats qui pratiquent des discriminations et en facilitant les conditions de passage vers les contrats sélectionnés pour les nouveaux bénéficiaires de l’aide.

Les efforts demandés sont réels ; ne les sous-estimons pas. Ils sont mis au service d’un objectif qui doit nous rassembler : la pérennité de notre modèle social et le financement de nouveaux droits.

Nous assurons la pérennité de notre modèle social en poursuivant, avec ce projet de loi, le rétablissement de l’équilibre de la sécurité sociale engagé depuis deux ans.

En 2013, année pour laquelle, je veux le souligner, la Cour des comptes a, pour la première fois, certifié l’intégralité des branches du régime général, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse a atteint son plus bas niveau depuis le début de la crise, soit 15,4 milliards d’euros. C’est mieux que ce qui était prévu dans la loi de financement initiale ! Au total, entre 2011 et 2013, le déficit du régime général a diminué de près de 30 %.

Ce résultat est le fruit d’une volonté politique. En 2010 – je veux le rappeler solennellement –, alors que la croissance atteignait 1,6 %, le déficit avait progressé de 4,5 milliards d’euros, pour s’élever à 28 milliards d’euros.

Mme Marisol Touraine, ministre. En 2013, alors que la croissance ne s’est établie qu’à 0,1 %, nous avons réduit le déficit de plus de 2 milliards d’euros. C’est l’effet des réformes structurelles qui ont été engagées.

Mme Isabelle Debré. Il y avait juste une crise !

Mme Marisol Touraine, ministre. Les mesures que nous vous présentons aujourd’hui, dont, je le répète, je ne sous-estime ni l’effort qu’elles représentent ni la portée, permettront de poursuivre l’amélioration des comptes de la sécurité sociale au-delà de 2014, et donc de garantir dans la durée les droits dont peuvent se prévaloir nos concitoyens.

En effet, la question des comptes de la sécurité sociale n’est pas simplement une question d’équilibre budgétaire et financier : il y va également de la garantie des droits assurés par la sécurité sociale envers l’ensemble de nos concitoyens. À cet égard, la politique du Gouvernement consiste à redresser les comptes sociaux sans remettre en cause la qualité ni le niveau de la protection sociale des Français, et même à renforcer certains droits.

Je pense, par exemple, pour les femmes, au renforcement du droit à l’interruption volontaire de grossesse ou encore à l’amélioration de la prise en charge de la contraception pour les mineures. Je pense également, pour ce qui concerne les familles à bas revenus ou monoparentales, à la revalorisation de l’allocation de rentrée scolaire, du complément familial et de l’allocation de soutien familial. Je pense encore à la possibilité, pour celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes, de partir plus tôt en retraite, avant même la mise en place du compte personnel de prévention de la pénibilité, lequel bénéficiera, à partir de l’année 2015, aux travailleurs ayant été confrontés à des situations de pénibilité. Je pense aussi à l’extension du champ de la couverture maladie universelle complémentaire et de l’aide à la complémentaire santé, qui permettent à plusieurs centaines de milliers de nos concitoyens de bénéficier d’une complémentaire gratuite ou aidée.

Je le répète, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que nous vous proposons d’adopter est important. En effet, il marque la mobilisation de l’ensemble du Gouvernement – rappelée hier par le Président de la République – pour l’emploi et la croissance, au bénéfice, en particulier, des plus jeunes de nos concitoyens. Ce texte est important car il marque une politique de gauche. La différence entre une politique de progrès et une politique d’austérité, c’est que la première n’oppose jamais le rétablissement des comptes à la progression des droits. (M. René-Paul Savary fait mine de jouer du violon.) Et c’est pour faire progresser les droits de l’ensemble de nos concitoyens, en particulier des plus modestes, que nous sommes tenaces et, même, têtus dans notre volonté de rétablir l’équilibre de la sécurité sociale. Il y va de l’avenir de ces droits !

Être têtu permet d’améliorer la solidarité. Être têtu permet de la revendiquer. En effet, être têtu, c’est être exigeant, socialement et financièrement ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jacky Le Menn. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est la seconde fois, dans l’histoire des lois de financement de la sécurité sociale – après 2011 –, que le Parlement examine une loi de financement rectificative.

Alors que le texte de 2011 portait sur une mesure unique, la prime de partage de la valeur ajoutée, le texte qui est aujourd’hui soumis à notre examen traduit un programme d’action complet pour le redressement de notre économie, au service de l’emploi et de la cohésion sociale.

Comme les lois de financement initiales, il comporte un certain nombre d’articles obligatoires, notamment l’article liminaire, relatif au solde des administrations publiques, et rectifie les prévisions de recettes et le tableau d’équilibre, ainsi que les objectifs de dépenses des différentes branches.

Après son passage à l’Assemblée nationale, le projet de loi compte vingt et un articles, cinq articles additionnels étant venus compléter les seize articles du texte initial.

Ainsi que nous y invite l’article liminaire, qui retrace les soldes de l’ensemble de nos comptes publics, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale doit être replacé dans le contexte plus global dans lequel il s’inscrit.

Au demeurant, quand les dépenses de sécurité sociale représentent 44 % des dépenses publiques, il n’est plus question de les considérer isolément. Elles font partie intégrante d’une stratégie plus globale.

Le contexte, c’est une croissance économique atone, un chômage dramatiquement élevé et des comptes publics structurellement déséquilibrés.

Pour y apporter une réponse, le projet de loi tend à traduire des engagements pris par le Président de la République dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité, engagements que nous connaissons depuis plusieurs mois, dont nous avons déjà eu l’occasion de débattre, notamment lors du discours de politique générale du Premier ministre et qui figurent pour partie dans le présent projet de loi, dans le collectif budgétaire, mais qui s’inscriront aussi dans les textes financiers à venir.

Le mot d’ordre du pacte de responsabilité, c’est la confiance. C’est l’idée de travailler ensemble, de conjuguer les efforts de l’État, des ménages et des entreprises pour trouver un nouvel élan et redonner des perspectives à notre économie et peut-être au-delà, à notre société.

Notre société est gagnée par la morosité, et même parfois par le fatalisme, alors qu’elle dispose de vrais atouts que nous devons conforter.

J’ai bien sûr à l’esprit la situation de grande précarité que connaissent nombre de nos concitoyens : 8 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté, notamment des femmes seules, des jeunes et des enfants, ce qui pèse sur leur avenir et sur notre cohésion sociale. Soutenir le pouvoir d’achat et développer l’emploi, c’est lutter contre cette réalité.

Le projet de loi se décline donc dans un triptyque qui forme un tout cohérent : le soutien à la consommation des ménages modestes, le soutien à la compétitivité des entreprises et une trajectoire de redressement des comptes publics.

Je commencerai par le soutien aux ménages.

C’est l’engagement pris, après les efforts récents, de ne plus augmenter les prélèvements des classes moyennes, de soutenir le pouvoir d’achat des bas salaires et d’accroître la solidarité envers les plus fragiles.

Je rappelle ainsi que les minima sociaux ne sont pas concernés par le gel de prestations, bien au contraire : dans le cadre du plan pauvreté, l’allocation de soutien familial et le complément familial viennent d’être revalorisés, après l’allocation de rentrée scolaire en 2012 et le recentrage des prestations familiales sur les personnes modestes et sur les familles monoparentales.

Le coup de pouce aux prestations relevant du minimum vieillesse est maintenu, le revenu de solidarité active, le RSA, comme en 2013, sera revalorisé de 2 % de plus au 1er septembre prochain, avec l’objectif de l’augmenter de 10 % sur cinq ans.

Rappelons aussi que, le 1er juillet 2013, le plafond de ressources de la couverture maladie universelle complémentaire a été revalorisé, de même que celui de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, avec plus de 500 000 bénéficiaires supplémentaires. Dans un contexte difficile, l’effort envers les plus fragiles n’est pas seulement préservé, il est accru.

L’article 1er du projet de loi, via la baisse des cotisations salariales, introduit une progressivité des prélèvements salariaux et redonnera du salaire net aux salariés mais aussi aux fonctionnaires dont le montant du revenu est proche du SMIC. Cet effort, qui représente 2,5 milliards d’euros injectés dans le pouvoir d’achat des ménages, se combine avec l’aménagement du barème de l’impôt sur le revenu porté par le collectif budgétaire.

J’évoquerai ensuite le soutien à la compétitivité des entreprises.

Dans un climat économique difficile, le pacte vise à soutenir l’investissement des entreprises, à améliorer leur compétitivité à l’export, au moment précis où nous attendons la reprise de la croissance, portée par la demande mondiale.

Ce volet central du pacte passe par une amplification du mécanisme de la réduction dégressive de cotisations patronales sur les bas salaires, afin de parvenir à un niveau de « zéro charge URSSAF » pour le SMIC à compter du 1er janvier 2015. Il instaure également un taux réduit de cotisations d’allocations familiales sur les bas salaires. Il prévoit enfin de réduire les cotisations d’allocations familiales des travailleurs indépendants, agricoles et non agricoles, pour les bas revenus. Ces mesures seront complétées à compter de 2016 par l’extension du taux réduit de cotisations d’allocations familiales à l’ensemble des salaires inférieurs à 3,5 SMIC. L’allégement des charges des entreprises passe aussi par la suppression progressive, d’ici à 2017, de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S – une première étape est franchie en 2015, avec un abattement d’assiette à hauteur de 3,25 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Au total, les articles 2 et 3 du projet de loi représentent un effort de 6,5 milliards d’euros en 2015.

Sans modifier la portée du texte, l’Assemblée nationale a adopté des amendements destinés à réaffirmer certains principes. Elle a ainsi souhaité inclure dans la négociation annuelle de branche un suivi spécifique de l’effet sur l’emploi et sur les salaires de l’ensemble des avantages fiscaux et sociaux dont bénéficient les entreprises de la branche, afin de disposer, ainsi que les représentants des salariés, des outils de suivi en interne des effets du pacte. Considérant l’accentuation des allégements, elle a souhaité supprimer la neutralisation, dans le calcul des rémunérations éligibles, des temps de pause d’habillage et de déshabillage qui permet d’aller au-delà du seuil de 1,6 SMIC. Sur ce point, sur lequel nous avons été alertés par de nombreux représentants de divers secteurs d’activité, nous souhaiterions avoir plus de précisions de la part du Gouvernement.

Elle a également réaffirmé le principe de l’autonomie de gestion du régime social des indépendants, le RSI, afin de garantir que l’intégration financière de ses branches à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, et à la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, se passe dans les meilleures conditions d’indépendance de gestion, comme cela a été le cas pour la mutualité sociale agricole.

Elle a aussi souhaité sortir dès 2015 l’ensemble des coopératives agricoles du champ de la C3S et non plus seulement, comme c’est le cas actuellement, celles « qui ont pour objet exclusif d’assurer l’approvisionnement de leurs associés coopérateurs ».

Sur l’initiative de sa commission de finances, l’Assemblée nationale a aussi demandé un rapport sur les conséquences pour le RSI de la suppression de la C3S et de l’intégration des indépendants au régime général que la commission des affaires sociales du Sénat vous suggère de bien vouloir reformuler.

L’Assemblée nationale a enfin réaffirmé le principe de compensation financière à la sécurité sociale des pertes de recettes créées par ce projet de loi, en rappelant que cette compensation serait bien annuelle et qu’elle interviendrait dès 2015, autrement dit dans le cadre du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’automne. Rappelons que cette compensation financière est garantie par le code de la sécurité sociale et que c’est donc a priori sur le budget de l’État qu’elle devrait peser.

J’en terminerai avec la trajectoire globale de redressement des finances publiques.

Dans le cadre fixé par le programme de stabilité 2014–2017, le pacte programme une réduction ambitieuse de notre déficit, avec un plan d’économies de 50 milliards d’euros sur la période.

Ainsi que je l’ai rappelé en commission, il s’agit non pas de consentir 50 milliards d’euros d’économies par rapport à ce que nous dépensons actuellement, mais bien de dépenser 50 milliards d’euros de moins que ce que serait notre dépense supplémentaire si nous restions sur la même trajectoire tendancielle. En d’autres termes, si nous poursuivions sur la tendance actuelle, nous serions conduits, toutes administrations publiques confondues, à dépenser 120 milliards d’euros de plus sur les trois prochaines années. Le pacte de responsabilité consiste à ne dépenser « que » 70 milliards d’euros supplémentaires. (M. Jean-François Husson s’exclame.)

Notre système de protection sociale devra prendre sa part, soit 21 milliards d’euros, c’est-à-dire 42 %, à hauteur de son poids dans les dépenses publiques.

Mes chers collègues, l’augmentation de la dépense n’est pas un objectif en soi ni une garantie de qualité du service rendu. Il s’agit de réformer sans dégrader le service rendu aux assurés afin de préserver la pérennité de notre système. Si nous parlons de justice et de solidarité, il n’est ni juste ni solidaire de reporter sur les générations à venir le poids de nos remboursements de médicaments, de nos séjours hospitaliers ou encore de nos indemnités journalières.

Pour garantir l’avenir de ce système, qui a bien joué son rôle dans la crise, il faut en redresser les équilibres financiers dont je voudrais vous dire un mot.

Je rappelle tout d’abord que, d’après la loi de programmation en cours votée à la fin de l’année 2012, le retour à l’équilibre des comptes sociaux, toutes administrations de sécurité sociale confondues, était prévu en 2014. Nous avons consenti pour cela un effort de maîtrise des dépenses et de remise à niveau des recettes. Or, si les objectifs de dépenses ont été tenus, notamment l’ONDAM, pour la quatrième année consécutive, les recettes, en raison d’une croissance faible, n’ont pas été au rendez-vous, les déficits sociaux s’élevant à 12,5 milliards d’euros pour 2014.

Le projet de loi dégrade par conséquent la prévision de solde des régimes obligatoires de base à - 10,1 milliards d’euros, contre - 9,8 milliards prévus en loi de financement pour 2014. Le solde du régime général, avec - 9,9 milliards d’euros, passe sous la barre symbolique de 10 milliards d’euros.

Le solde des régimes obligatoires est la double conséquence de 1,7 milliard d’euros de moins en volume sur les recettes et de 1,4 milliard de moins en volume sur les dépenses. Cette révision de l’objectif de dépenses est due, pour l’essentiel, au rebasage de l’ONDAM.

Je souligne que, en dépit de ces ajustements, les dépenses des régimes obligatoires de base devraient progresser de 7,8 milliards d’euros entre 2013 et 2014. Il ne s’agit donc pas, là encore, d’une baisse des dépenses, mais d’une progression moins dynamique que ce qui avait été prévu.

Le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale présente pour l’exercice 2014 des mesures destinées à corriger l’équilibre des comptes sociaux, telles que la rectification du montant de l’ONDAM.

L’article 9 prévoyait le gel du montant des pensions de retraite de base et de l’allocation de logement familiale, qui doivent normalement faire l’objet d’une revalorisation au 1er octobre prochain.

L’Assemblée nationale a supprimé le gel de l’allocation de logement familiale, comme elle l’avait déjà fait pour l’aide personnalisée au logement et pour l’allocation de logement social lors de l’examen du collectif budgétaire.

Elle a en revanche adopté le gel des pensions de base, lorsque le montant total de la pension est supérieur à 1 200 euros bruts par mois. Le montant des économies réalisées représenterait en année pleine près de 1 milliard d’euros, soit en moyenne onze euros par mois et par retraité.

Je rappelle que près de la moitié des retraités, soit 6,5 millions de personnes, ne seront pas concernés par ce gel, dans la mesure où leur pension est inférieure à 1 200 euros bruts par mois.

J’en conviens, le gel des prestations peut bien sûr être discuté, mais il est la moins mauvaise des solutions, par rapport à des coupes dans les prestations. Dans une période de faible inflation, un effort est certes demandé aux bénéficiaires, mais il ne porte que sur la moitié de la population concernée.

Sur le périmètre des ménages et pour le seul projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, les 935 millions d’euros de gel des pensions en 2015 sont à comparer avec les 2,5 milliards d’euros de pouvoir d’achat rendus aux actifs les plus modestes. Une lecture complète impliquerait de prendre en compte les mesures fiscales inscrites dans le collectif budgétaire en faveur des ménages les plus modestes.

Au titre des amendements adoptés par l’Assemblée nationale, outre ceux que j’ai déjà évoqués, je voudrais citer ceux qui portaient articles additionnels.

Inséré à la suite de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, l’article 9 bis prévoit d’élargir le champ de la recommandation temporaire d’utilisation, la RTU, en autorisant l’usage de médicaments hors de leur autorisation de mise sur le marché dès lors qu’il n’existe pas de spécialité possédant la même substance active, le même dosage et la même forme pharmaceutique.

Les articles 9 ter à 9 sexies comportent diverses mesures relatives aux complémentaires santé. Il s’agit notamment d’étendre l’aide à la complémentaire santé aux contrats collectifs à adhésion facultative, de permettre aux personnes susceptibles de bénéficier de l’ACS de résilier par anticipation leur contrat actuel au bénéfice d’un contrat éligible à l’ACS, de préciser les critères d’éligibilité à l’ACS en excluant les contrats qui opéreraient une sélection sur l’âge des assurés, enfin de moduler les plafonds de prise en charge des dépassements d’honoraires par les contrats complémentaires dits « responsables » en fonction de l’adhésion du médecin à un contrat d’accès aux soins par lequel il s’engage à modérer ses dépassements, l’entrée en vigueur du nouveau dispositif étant reportée au 1er avril 2015.

Pour l’essentiel, mes chers collègues, les mesures portées par ce texte sont bien connues et sont discutées depuis plus de six mois. Le temps est venu de les concrétiser et de traduire dans le droit ces orientations. La commission des affaires sociales les a complétées, à l’article 2, par un amendement relatif aux cotisations sociales des particuliers employeurs que j’exposerai au cours de la discussion.

La commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l’adoption du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, nous entamons aujourd’hui l’examen d’un texte particulièrement important.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. En effet, ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 concourt à la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, annoncé par le Président de la République le 14 janvier dernier et détaillé par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale. Il forme un tout cohérent avec le projet de loi de finances rectificative examiné la semaine passée dans cet hémicycle.

Ensemble, ces deux textes répondent aux trois défis que le pays doit relever.

Le premier défi, c’est la réduction de nos déficits et de notre dette, qui, chacun en conviendra, obèrent notre croissance. Telle est au demeurant la condition de la pérennité de notre modèle social : qui pourrait croire que nous sommes en mesure d’ouvrir de nouveaux droits à nos concitoyens si nous nous révélons incapables d’honorer financièrement les droits existants ?

Le deuxième défi, c’est le rétablissement de la compétitivité de nos entreprises, sans laquelle il n’y aura ni croissance ni création d’emplois durables.

Le troisième défi, c’est le soutien au pouvoir d’achat des ménages et tout particulièrement de nos concitoyens les plus défavorisés.

Toute la complexité de la situation réside dans le fait que ces trois objectifs ne sont pas spontanément compatibles. Soutenir le pouvoir d’achat par des baisses d’impôts ou de cotisations sociales acquittées par les ménages, améliorer la compétitivité par des diminutions de charges sur les entreprises impliquent autant de mesures pesant sur les déficits publics. C’est pourquoi a été décidé un plan de 50 milliards d’euros d’économies sur trois ans, dont l’objectif est à la fois de compenser ces baisses de prélèvements et de réduire nos déficits.

On pourra contester telle ou telle mesure, privilégier telle ou telle autre, comme cela a été le cas à l’Assemblée nationale. Mais on ne pourra pas nier la cohérence de ce plan, qui, par son ampleur, est sans précédent depuis très longtemps, et qui est tendu vers un objectif central : la création d’emplois dont notre pays a tant besoin.

Ce projet de loi de financement rectificative, comme le collectif budgétaire examiné la semaine dernière, permet au premier chef de répondre aux impératifs d’amélioration du solde public pour l’année 2014 tout en donnant aux entreprises et aux salariés une vision claire de la baisse des prélèvements sociaux dont ils bénéficieront en 2015.

Concernant cette année 2014, le présent texte contribue à ramener le déficit public effectif de 4,3 % du PIB enregistrés en 2013 à 3,8 %. Il prévoit en effet 1,1 milliard d’euros sur les 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires programmées pour 2014, dont 800 millions d’euros sur l’objectif national des dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, et près de 300 millions d’euros dans le champ du risque vieillesse, en raison pour l’essentiel de la non-revalorisation des retraites de base au 1er octobre 2014 et de moindres dépenses du fonds d’action sociale de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV.

Toutefois, l’effort proposé au titre des dépenses via ce projet de loi de financement rectificative tient compte de l’impératif de justice sociale : seuls les retraités dont le montant total des pensions excède 1 200 euros seront concernés par la non-revalorisation. Mme la ministre et M. le rapporteur général l’ont dit : en tout, 6,5 millions de retraités, soit la moitié d’entre eux, seront exonérés de ce gel temporaire.

Au total, les mesures d’économies supplémentaires proposées pour 2014 permettent de contenir les déficits prévisionnels de la sécurité sociale au titre de cette année et, au-delà, de confirmer la trajectoire de redressement des comptes sociaux sur laquelle le Gouvernement s’est engagé : le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base devrait diminuer de 3,2 milliards d’euros par rapport à 2013, ou de 2,6 milliards d’euros si l’on tient compte du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV.

Mes chers collègues, les déficits diminuent incontestablement. On pourra toujours débattre du rythme de ce mouvement ou de la cadence qu’il convient de suivre. Mais nul ne peut nier que les déficits de nos régimes sociaux se réduisent !

Pour l’année 2015, le présent texte traduit cinq mesures essentielles du pacte de responsabilité et de solidarité. Si je ne reviendrai pas sur le détail de ces mesures – nous en débattrons très largement lors de l’examen des articles –, je souhaite d’emblée en souligner l’ampleur.

Au total, les prélèvements sociaux diminueront de près de 9 milliards d’euros en 2015. C’est là une baisse sans précédent pour une seule année. Cette somme se décompose en 2,5 milliards d’euros pour les salariés, 1 milliard d’euros pour les travailleurs indépendants et 5,5 milliards d’euros pour les entreprises.

Cette réduction des prélèvements sociaux touchera directement plus de 1,5 million d’employeurs, 1,8 million de travailleurs indépendants, 5,2 millions de salariés du secteur privé et 2,2 millions de fonctionnaires.

Surtout, l’ensemble de ces mesures traduit un choix clair en faveur de l’emploi, le ciblage des baisses de charges aux alentours du salaire minimum devant permettre de maximiser les effets sur l’emploi. De fait, ce sont environ 45 000 nouveaux emplois supplémentaires qui sont attendus dès 2015 grâce à ces mesures.

J’ajoute qu’aucun type d’entreprise n’est négligé : le dispositif « zéro charge URSSAF » permettra de gommer l’effet de seuil, qui existait avec les exonérations dites « Fillon » à partir du vingtième salarié. Parallèlement, l’abattement de contribution sociale de solidarité des sociétés, la fameuse C3S, bénéficiera en priorité aux petites et moyennes entreprises.

Reste la question suivante : comment ces baisses de prélèvements sociaux seront-elles financées ? Ce sujet a évidemment animé les débats de notre commission des finances.

Si les modalités précises de compensation des pertes de recettes entraînées par les différentes mesures du pacte ne sont pas définies avec précision dans le présent projet de loi, c’est essentiellement pour des raisons juridiques tenant à la distinction entre les dispositions qui sont permanentes et celles qui ne le sont pas. Mais nous savons tous qu’un plan de réduction des dépenses publiques de 50 milliards d’euros au titre des années 2015 à 2017 va être mis en place. Nous en connaissons d’ailleurs les grandes lignes.

En effet, le Premier ministre a indiqué en avril dernier que la sphère sociale représenterait près de 40 % de cet effort en dépenses, soit 21 milliards d’euros, ce qui correspond peu ou prou au poids de ce secteur dans les finances publiques.

Sur ces 21 milliards d’euros d’économies, 2,9 milliards d’euros résulteront des réformes des retraites et de la politique familiale, qui ont déjà été adoptées. De plus, 10 milliards d’euros de baisses de dépenses seront dégagés dans le champ de l’ONDAM, 2 milliards d’euros à la suite du report de la revalorisation de certaines prestations sociales, 800 millions d’euros grâce à la poursuite de la réforme de la politique familiale et 1,2 milliard d’euros au titre du fonctionnement des organismes de protection sociale. Quant au régime d’assurance chômage et aux régimes de retraite complémentaire, ils contribueront à cet effort à hauteur de 4 milliards d’euros.

Il est donc faux de prétendre, comme on a pu l’entendre ici ou là – et nous l’avons beaucoup entendu au sein de la commission des finances ! –, que les baisses de charges proposées ne sont pas financées. Il existe bien un plan cohérent, qu’il convient d’adopter dans son ensemble. En tout état de cause, les modalités précises de compensation par le budget de l’État seront définies d’ici à quelques mois par les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Mes chers collègues, ce double pacte est de nature à restaurer la confiance nécessaire à la croissance. Il est également de nature à répondre à la question qui prime aujourd’hui sur toutes les autres : comment recréer de l’emploi dans notre pays et y faire diminuer le chômage ?

C’est pour ces raisons que, dans sa majorité, la commission des finances s’est prononcée pour l’adoption du présent projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 survient peu après la troisième conférence sociale, qui, c’est le moins que l’on puisse dire, n’a pas satisfait les organisations syndicales de salariés.

Mêmes les syndicats soutenant encore, du bout des lèvres, le pacte de responsabilité, que le présent texte est censé transposer, ont légitimement protesté contre les nouveaux cadeaux accordés au MEDEF à la veille même de la conférence sociale.

Quant aux représentants des organisations syndicales administrateurs de la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, ils se sont tous prononcés, y compris la CFTC, la CGC et la CFDT, contre ce projet de loi de financement rectificative pour 2014. Leur avis défavorable porte non seulement sur le gel des prestations familiales initialement prévu, mais aussi sur le cœur même du pacte de responsabilité, à savoir l’instauration de nouvelles exonérations de cotisations sociales, qui constitue selon eux « une mauvaise décision en termes économiques et sociaux ».

Or cela, le Gouvernement ne l’entend pas. Il préfère écouter le MEDEF et les institutions européennes, le Conseil de l’Europe en tête, lequel considérait en 2013 que le CICE ne faisait que la moitié du chemin à ses yeux nécessaire pour réduire le coût du travail.

Au reste, si les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s’opposent au présent texte, ce n’est pas pour des raisons dogmatiques ou par anti-européanisme, mais sur la base des échecs constatés des politiques d’exonérations massives de cotisations sociales menées en France depuis vingt ans.

Madame la ministre, en l’occurrence, le dogmatisme est de votre côté. En effet, les études statistiques montrent qu’en réalité cette politique échoue à créer des emplois. Elle est également lourde de conséquences pour les comptes sociaux et, en général, pour les comptes publics.

Chaque année, ce sont en effet près de 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales qui sont accordées aux employeurs, non seulement sans contreparties, mais aussi sans impact réellement positif sur l’emploi.

Au contraire, une étude du Centre d’étude des politiques économiques de l’université d’Évry montre que les mesures d’exonération de cotisations sociales, singulièrement les allégements généraux sur les bas salaires, similaires à ceux qui sont contenus dans l’article 2 de ce projet de loi, ont tendance à détruire plus d’emplois qu’ils n’en créent, et à détruire principalement des emplois rémunérateurs et de qualité. Ainsi, selon cette étude, « les mesures d’allégement du coût du travail auraient réduit de 41 000 à 76 000 les emplois qualifiés en 1997 ».

D’ailleurs, le rapport du projet de loi de finances rectificative présenté à l’Assemblée nationale reconnaît clairement que les mesures du projet de loi de finances rectificative et du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 vont avoir pour effet un ralentissement de la croissance et la suppression de 250 000 emplois.

Ainsi, d’après le ministère des finances, les baisses de charges et d’impôts prévues dans le pacte devraient créer environ 190 000 emplois à la fin de l’année 2017. Cependant, les réductions de dépenses qui contribuent à son financement en supprimeront 250 000 dans le même temps. Le solde est donc négatif, avec la suppression de 60 000 emplois ! Tout porte à penser que le pacte de responsabilité va accroître le déficit de la sécurité sociale au lieu de le réduire.

De plus, l’effet « trappe à bas salaires » apparaît lui aussi indéniable. Le rapport Cotis de 2009 montre d’ailleurs que sous l’effet de la « smicardisation » et de l’explosion des contrats précaires, le salaire moyen par salarié a peu évolué depuis vingt ans. Or c’est bien dans la déformation de la richesse créée par les entreprises que se trouve la cause profonde des déséquilibres.

Depuis trente ans, les dividendes extorqués au travail ont augmenté de 200 %. Sur la même période, en euros constants, les salaires n’ont progressé que de 20 %. Malgré les dizaines de milliards d’euros d’aides aux chefs d’entreprise, le chômage de masse bat aujourd’hui tous les records. Les seuls gagnants de cette politique sont en réalité les actionnaires.

Conscients sans doute que cette posture risquait de fragiliser votre majorité à l’Assemblée nationale, et que nos concitoyens ne supportent plus cette politique qui demande toujours plus de sacrifices aux ouvriers, aux employés, aux couches modestes et moyennes, vous avez pris la décision de réduire une partie des cotisations salariales.

Depuis, comme vous l’avez fait aujourd’hui, le Gouvernement communique à l’envi sur l’idée que l’article 2 aurait pour effet d’augmenter de 500 euros le salaire net annuel de certains des salariés les moins bien rémunérés. Il ne s’agit là toutefois que d’un artifice, puisque ce que vous donnez d’une main aux plus précaires des salariés, vous le reprenez de l’autre, par exemple en appauvrissant leurs parents retraités. Vous étiez mêmes prêts, initialement, à réduire le pouvoir d’achat des personnes bénéficiant d’une rente accident du travail ou maladie professionnelle et vous envisagez toujours, il me semble, de geler les prestations sociales liées au logement.

Très clairement, plutôt que de faire le choix de renforcer le pouvoir d’achat des salariés en augmentant les salaires, c’est-à-dire en opérant un nouveau partage des richesses entre capital et travail en faveur de ce dernier, vous faites le choix de réduire les cotisations sociales. Or cela conduira nécessairement, tôt ou tard, à une hausse des taxes ou des impôts affectés pour compenser ces moindres recettes. Cela conduit d’ailleurs déjà à une diminution des prestations et des services rendus à la population.

Je pense ici au gel des pensions de retraite à partir de 1 200 euros par mois, qui, couplé à l’inflation et cumulé avec des dispositions antérieures – contribution pour l’autonomie, gel des retraites complémentaires –, entraîne mécaniquement une perte du pouvoir d’achat des retraités modestes. Contrairement à ce que j’entends parfois sur certaines travées, on n’appartient en effet pas à la classe moyenne avec une retraite médiane de 1 200 euros bruts par mois. Ces retraités sont légitimes à pointer votre responsabilité, alors que nous venons encore d’apprendre, au conseil d’administration de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, que la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, continuerait à être détournée de son objet – l’accompagnement de la perte d’autonomie – au moins jusqu’au 1er juillet 2015, et que 42 millions d’euros de crédits destinés à l’accompagnement médicosocial des personnes âgées sont supprimés dans le budget rectificatif.

Je pense également au rapprochement que l’on peut faire, par exemple, entre la baisse sensible du subventionnement par les caisses d’allocations familiales des projets de crèches publiques ou à portage associatif et la baisse des cotisations employeurs à la branche famille.

Je pense encore à la diète supplémentaire que vous prescrivez aux établissements de santé, en particulier aux hôpitaux publics déjà en grande difficulté, que vous allez encore ponctionner de plusieurs centaines de millions d’euros, alors que leurs budgets sont déjà difficiles.

Jusqu’où irez-vous dans les reculs sociaux ? Vous parlez de sacrifices, mais pour qui et pour quels résultats ? Avec quelle efficacité ? Car, vous l’avez compris, ce que nous contestons c’est non pas la nécessité de réduire les déficits publics, y compris ceux de la sécurité sociale, mais le chemin que vous avez choisi.

En effet, malgré les vingt années durant lesquelles cette politique de réduction du coût du travail a été menée, la compétitivité des entreprises a clairement continué à fléchir. Preuve, s’il en est, que le coût du travail est sans doute moins important que d’autres, comme celui de l’énergie ou du capital.

Le coût du capital imposé aux entreprises et à leurs salariés représentait en 2012 pas moins de 299 milliards d’euros, plus de deux fois ce qu’elles ont acquitté au titre des cotisations à la sécurité sociale. C’est là qu’il faudrait agir pour réorienter l’argent vers l’économie réelle, pour relancer l’investissement productif, pour conforter l’emploi et les salaires et, au final, pour regonfler les recettes de la sécurité sociale quand vous les faites régresser avec votre politique « austéritaire ».

Oui, c’est vous qui vous livrez au dogmatisme, puisque vous poursuivez comme si de rien n’était, que dis-je ? vous amplifiez même une politique qui échoue lamentablement depuis vingt ans !

Résultat : non content d’avoir obtenu un nouveau paquet cadeau de 8 milliards d’euros d’allégements et d’exonérations de cotisations sociales, le MEDEF obtient encore plus dans ce projet de loi, à savoir la suppression progressive de la C3S, qui avait pourtant pour vocation d’organiser une forme de solidarité entre les grandes entreprises, notamment les grandes enseignes de commerce, et les petits artisans et commerçants.

Cette mesure, qui, en 2016, représentera à elle seule une perte de recette de l’ordre de 6 milliards d’euros, va fragiliser plus encore l’équilibre économique du régime général, lequel se voit adosser le RSI. Cet adossement s’apparente en fait à une reprise de dettes, qui risque de devoir être supportée encore en plus par les salariés eux-mêmes.

Toutefois, je dois le reconnaître, madame la ministre, votre projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 est, d’une certaine manière, cohérent. Votre volonté de réduire massivement les ressources de la sécurité sociale vous oblige à mettre en œuvre une politique d’austérité. N’ergotons pas : comment appeler autrement une politique économique qui consiste à réduire les dépenses publiques et sociales, à geler les pensions et traitements des fonctionnaires, quitte à ce que cela se traduise au final par une perte de pouvoir d’achat ?

Une alternative existe pourtant. De nombreux économistes le disent : la solution à la crise se trouve non pas du côté du capital, qu’il faudrait choyer, mais du côté du travail, qu’il faut soutenir, encourager et mieux rémunérer.

Le groupe CRC porte un projet, sans doute ambitieux, tendant à réformer notre assiette de cotisations sociales. Il consiste à faire cotiser les entreprises en fonction de règles simples : plus les entreprises sont vertueuses, plus elles favorisent l’emploi, mieux elles rémunèrent leurs salariés, moins leurs parts de cotisations sociales sont grandes ; plus elles spéculent, plus elles rémunèrent le capital et le finance, plus elles cotisent.

Michel Sapin disait être devenu l’ami de la bonne finance. À votre tour, madame la ministre, devenez le soutien du bon financement de la sécurité sociale : un financement juste et solidaire. Ce basculement de logique en faveur du travail pourrait vous permettre de mener une tout autre politique qui recueillerait le soutien populaire et mobiliserait toutes les forces de gauche derrière le Gouvernement.

Elle vous permettrait de supprimer les franchises médicales, ou d’accroître la part des remboursements par l’assurance maladie, qui constituent autant d’obstacles dans l’accès aux soins. Elle vous permettrait de développer massivement les places et les structures d’accueil des jeunes enfants au sein d’un service public de la petite enfance. Elle vous permettrait de veiller à la qualité de l’organisation et de l’offre de soins hospitaliers et à tarifs opposables sur tout le territoire.

Elle vous permettrait, en fait, et ce sera ma conclusion, de mener la politique pour laquelle vous avez été élus, et non celle pour laquelle vous serez inévitablement sanctionnés. C’est à ce changement de cap que nous vous invitons en exprimant une opposition de fond à votre projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, ce projet de loi, avec le collectif budgétaire, constitue le premier vecteur législatif des mesures annoncées par le Président de la République à l’occasion de ses vœux aux Français, dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité. Le but est de soutenir l’investissement des entreprises, la création d’emplois et le pouvoir d’achat des ménages. Nous ne pouvons, bien évidemment, que souscrire à cet objectif !

Le Président de la République a admis que l’année 2013 avait été difficile pour beaucoup de nos concitoyens et a enfin reconnu que la crise s’était révélée plus longue et plus profonde qu’il ne l’avait prévu. Il était temps ! La situation sociale et économique de la France est extrêmement préoccupante, je n’y reviendrai pas.

Vous promettez depuis deux ans d’inverser la courbe du chômage, or celui-ci ne cesse d’augmenter. Le nombre de demandeurs d’emploi vient en effet d’atteindre, toutes catégories confondues, le seuil symbolique de cinq millions. Triste record ! Personne n’est épargné : les jeunes, les seniors, comme les chômeurs de longue durée, sont concernés, et l’INSEE ne prévoit malheureusement pas d’amélioration pour la fin de cette année.

De la même façon, la consommation des ménages a fortement reculé et l’investissement des entreprises s’est effondré. Il faut dire que les mesures que vous avez mises en place depuis maintenant deux ans ont conduit à un véritable matraquage fiscal des ménages et des entreprises. Le Premier ministre a lui-même souligné le 13 mai dernier, à l’Assemblée nationale, que la hausse de la fiscalité de ces dernières années était devenue insupportable. Le Président de la République l’a aussi, me semble-t-il, reconnu implicitement hier.

Résultat : moins d’un Français sur trois aurait confiance en l’avenir économique du pays, selon un récent sondage !

Il y a bien urgence à intervenir.

Pourtant, madame la ministre, alors que le pacte a été annoncé le 31 décembre dernier, il ne prendra effet qu’en 2015. C’est très regrettable. Pourquoi attendre autant alors que la situation économique et sociale nous impose d’agir vite ?

Je me demande, en outre, pourquoi nous avons recours à un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale. À l’évidence, si j’en crois ce projet, ce n’est pas pour réviser vos prévisions de croissance trop optimistes !

Ce texte repose toujours sur une hypothèse de croissance de 1 %, alors que les dernières estimations publiées en mai par l’INSEE tablent sur une progression de 0,7%. Lors de votre audition par la commission des affaires sociales le 25 juin dernier, vous avez déclaré, madame la ministre, que cet objectif de 1 % était atteignable – cela relève un peu de la foi du charbonnier ! Nous savons bien que ce n’est pas le cas !

Dans son avis du 5 juin dernier, le Haut Conseil des finances publiques a rappelé qu’avec une croissance nulle au premier trimestre, la prévision de 1 % supposait une forte accélération de l’activité au deuxième trimestre. Et cette accélération n’apparaît cependant pas dans les indicateurs conjoncturels. La Cour des comptes l’a d’ailleurs récemment rappelé en ces termes « dépenses sous-évaluées et recettes surévaluées ».

Relancer la croissance et l’emploi nécessite de mettre en place de véritables mesures structurelles, que vous refusez pourtant systématiquement. J’ai déjà eu l’occasion de le dire à maintes reprises à cette tribune : nous devons absolument engager une réforme globale et pérenne. Nous ne pouvons plus nous contenter de mesures conjoncturelles.

Comme le souligne très justement et avec une grande franchise le rapporteur général, « Il ne s’agit pas de 50 milliards d’économies sur nos dépenses actuelles, mais de 50 milliards de moins que l’évolution spontanée de la dépense. Si nous restions sur la même trajectoire tendancielle, nous dépenserions 120 milliards de plus sur les trois prochaines années. » N’est-ce pas, monsieur le rapporteur ? (M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales opine.) « Le pacte de responsabilité consiste à ne dépenser ″que″ 70 milliards supplémentaires. » Les déficits vont donc continuer de se former.

Concernant la protection sociale, le travail d’analyse élaboré par la mission commune d’information sur la réalité de l’impact sur l’emploi des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises, qui s’est réunie ce matin, souligne en effet une nécessité – même si je n’approuve pas ses conclusions – : celle de revoir le financement de la protection sociale, qui, selon moi, ne peut plus être supporté par le monde du travail et doit être reporté pour partie sur la fiscalité.

À plusieurs reprises, j’ai soulevé, avec mon ancien collègue Alain Vasselle, cette orientation nécessaire, en prévoyant, par exemple, une augmentation de la CSG ou de la TVA.

Nous ne pourrons pas éternellement faire peser sur la médecine de ville, la biologie médicale et les dépenses de médicaments les économies nécessaires, même si, j’en conviens, il existe encore des distorsions inacceptables.

Il faudra aussi, par exemple, admettre que l’égal accès de tous aux soins basé sur la proximité est une tromperie. Je le dis sans détour : qualité ne rime plus aujourd'hui avec proximité. L’hospitalisation publique est en souffrance. Pour avoir voulu conserver un trop grand nombre de centres hospitaliers, la qualité des soins s’est délitée, spécialité par spécialité. Quand allez-vous vous attaquer, madame la ministre, à ce chantier, qui est, j’en conviens, difficile ?

Nous sommes tous responsables, mais, je le répète, il y a urgence.

M. Gilbert Barbier. Pour le reste, si l’exercice est exceptionnel, le contenu de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ne l’est pas ! Celui-ci semble n’être qu’un texte d’affichage. Les allégements de cotisations salariales pour les salariés les moins rémunérés, ainsi que la baisse des cotisations sociales des employeurs et des travailleurs indépendants ne s’appliqueront qu’en 2015, c’est-à-dire un an après les annonces du Président de la République. Certes, ces mesures vont dans le bon sens, mais je crains qu’elles ne soient pas suffisantes.

S’agissant des allégements de cotisations salariales, je m’étonne des inégalités flagrantes entre les salariés du secteur privé et ceux du secteur public. Pouvez-vous nous éclairer, madame la ministre, sur ce point précis ? Surtout, malgré les propos du rapporteur pour avis de la commission des finances, nous ignorons totalement comment ces mesures seront compensées.

Vous avez des intentions, vous envisagez certaines directions. Mais s’agira-t-il d’une hausse de la TVA, d’une augmentation de la CSG ? Nous n’avons aucune visibilité en la matière. Le rapporteur général lui-même reconnaît manquer d’éclairage sur ce point : « Nos questions sont restées sans réponse à cet égard, nous en saurons plus à l’automne, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances. Il ne s’agira sans doute pas de nouvelles mesures fiscales mais d’une tuyauterie complexe entre l’État et la sécurité sociale – reste à savoir comment elle sera alimentée. » Nous ne savons pas non plus, madame la ministre, comment vous comptez compenser la disparition progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés.

J’espère que vous pourrez nous apporter des réponses, que je n’ai malheureusement pas entendues dans votre intervention liminaire.

Je m’inquiète également, comme beaucoup, du gel de la revalorisation des retraites. Certes, les retraités les plus modestes ne seront pas touchés par cette mesure qui ne concernera pas les pensions inférieures à 1 200 euros. Pour autant, elle affectera une nouvelle fois les classes moyennes, qui, après le report de six mois de la revalorisation des pensions, seront à nouveau les sacrifiées de votre politique. Dans les faits, cela revient à un gel des retraites de dix-huit mois, ce qui n’est pas supportable pour beaucoup de nos concitoyens. C’est la raison pour laquelle je vous proposerai des amendements.

En revanche, je me réjouis que l’Assemblée nationale ait supprimé le gel de l’allocation de logement familiale et se soit opposée à un futur gel des pensions d’invalidité et des rentes AT–MP, ce qui est la moindre des choses.

Madame la ministre, vous avez fait adopter, par l’Assemblée nationale, un amendement visant à redéfinir le cadre de la recommandation temporaire d’utilisation, la RTU, pour les médicaments nouveaux, ce qui devrait permettre, par exemple, de substituer le Lucentis par l’Avastin dans le traitement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge. C’est une excellente initiative, qui mérite d’être saluée !

Actuellement, seul le Lucentis a une autorisation de mise sur le marché sur cette indication pour un coût mensuel d’environ 900 euros, alors que de nombreux pays et beaucoup de services hautement qualifiés de notre pays observent les mêmes résultats avec l’Avastin, pour un coût vingt fois moindre, ce qui pourrait engendrer une économie de 400 millions d’euros pour la sécurité sociale. À plusieurs reprises, avec un certain nombre de collègues députés, j’avais demandé que l’on se penche sur le bien-fondé de l’interdiction de l’Avastin. C’est chose faite, et je vous en félicite, madame la ministre. Cette disposition nous permettra peut-être d’ailleurs de franchir une étape dans le domaine des RTU pour ce qui concerne d’autres médicaments.

Je tenais également à soutenir la proposition du rapporteur général d’augmenter la réduction forfaitaire par heure déclarée accordée aux particuliers employeurs. C’est une excellente mesure, que la commission a d’ailleurs adoptée à l’unanimité.

En juin dernier, le ministre des finances avait jugé nécessaire une aide fiscale pour enrayer la crise qui frappe l’emploi à domicile. J’espère que le Gouvernement restera sur cette position, alors la Cour des comptes vient de présenter un rapport dans lequel elle préconise de réviser la niche fiscale des emplois à domicile et de réduire la liste des services éligibles. Les sages de la rue Cambon semblent penser que le système coûte cher et que son impact sur l’emploi se révèle limité.

Pourtant, nous le savons bien, la suppression de la déclaration au forfait a porté un mauvais coup aux emplois à domicile. Selon la Fédération des particuliers employeurs de France, le volume d’heures déclarées a reculé, en 2013, de 7,8 %, et le nombre d’employeurs a baissé de 3,1 %. Sur ce point précis, pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, la position du Gouvernement ?

Dans un autre document récemment publié, la Cour des comptes a certes certifié les comptes de 2013, mais tout en soulignant que, concernant la branche maladie, les prestations injustifiées versées représenteraient en fait le double de celles qui sont évaluées par la CNAM, soit 900 millions d’euros au lieu de 430 millions d’euros. Cette question mérite, à mon avis, d’être approfondie.

Enfin, je souhaite profiter de ce débat pour aborder la situation catastrophique des laboratoires de biologie médicale indépendants.

Lors de l’examen du texte qui est devenu la loi du 30 mai 2013, le groupe RDSE vous avait alertée sur les dangers de cette réforme : elle impose des normes industrielles particulièrement lourdes et inadaptées aux petites structures indépendantes, qui les mettent en grande difficulté financière. Aujourd’hui, les laboratoires de proximité sont contraints de vendre à des groupes financiers qui licencient le personnel et suppriment les machines. Ils sont devenus de simples centres de prélèvements. Franchement, cette réforme qui soumet les laboratoires de biologie encore indépendants aux ukases du COFRAC, le Comité français d’accréditation, est une erreur. Il serait, à mon avis, temps de revenir sur ces mesures (M. Jacques Mézard opine.), qui portent atteinte au maintien d’un tissu sanitaire local de qualité, notamment en milieu rural. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées de l'UMP.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Discussion générale (suite)

8

Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2013, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été publiée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée, et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : MM. Philippe Marini, Jean Germain, François Marc, Mmes Michèle André, Marie-France Beaufils, MM. Francis Delattre et Vincent Delahaye ;

Suppléants : MM. Michel Berson, Yannick Botrel, Philippe Dallier, Éric Doligé, François Fortassin, Roger Karoutchi et Richard Yung.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

9

Hommage à un soldat français mort au Mali

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, c’est avec une grande émotion que nous avons appris la mort hier, dans le nord du Mali, de l’adjudant-chef Dejvid Nikolic, sous-officier du 1er régiment étranger de génie de Landun-l’Ardoise, dans le Gard.

Ce décès, intervenu dans le cadre d’une mission de reconnaissance, nous rappelle à la fois l’exemplarité de l’engagement et du courage de nos forces armées dans la lutte contre les groupes terroristes qui sévissent au Mali et, plus généralement, au Sahel et le prix très lourd qu’elles ont à payer pour assurer la sécurité de nos concitoyens.

Comme le président Jean-Pierre Bel l’a exprimé cet après-midi et au nom du Sénat tout entier, je voudrais faire part de notre profonde sympathie à sa famille et à ses compagnons d’armes.

À sa demande, je vous propose de respecter un moment de recueillement en observant une minute de silence. (Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence.)

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Discussion générale (suite)

Loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Question préalable (début)

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 est une traduction du pacte de responsabilité, qui formalise l’objectif économique voulu par le Gouvernement : alléger le coût du travail pour relancer l’activité – l’intention est sans doute louable, mais il faut encore la réaliser.

Avec les 20 milliards d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, 41 milliards d’euros au total seront accordés aux entreprises ; le Gouvernement estime que cette manne financière nouvelle permettra aux entreprises de créer 190 000 postes supplémentaires.

Comme M. le rapporteur général l’a souligné cet après-midi, le pacte de responsabilité, c’est la confiance. Seulement, la confiance, ce n’est pas un pari : elle se construit et elle se vérifie.

Or, aujourd’hui, rien ne garantit que les entreprises utiliseront ces nouvelles marges de manœuvre pour créer des emplois. En effet, l’histoire prouve que, jusqu’à maintenant, les allégements de charges ont toujours profité au capital plutôt qu’au travail. Ainsi, entre 1993, date à laquelle les premiers allégements de charges ont été accordés, et 2013, la part de la valeur ajoutée des entreprises allouée aux salaires est restée quasiment stable, puisqu’elle s’est établie respectivement à 48 % et 51 %, tandis que la part allouée aux dividendes a plus que doublé, passant de 6 % à plus de 14 %. L’effet de ces allégements sur l’emploi est donc peu évident.

Pour financer ces allégements de charges, le Gouvernement fait le choix de réduire la dépense publique de 50 milliards d’euros à l’horizon de 2017. Madame la ministre, il y a là un paradoxe : comment peut-on reconnaître que la santé, la justice, l’action sociale et la prise en charge de la dépendance ont besoin de moyens et de postes supplémentaires et annoncer en même temps un plan d’économies sans précédent sur la dépense publique ?

Du reste, nous, écologistes, ne sommes pas les seuls à faire cette analyse ; elle est partagée par les communistes, bien sûr, mais aussi par d’autres. En effet, selon la direction du Trésor, si les mesures du pacte devraient susciter 190 000 emplois et 0,6 point de croissance cumulée à horizon de 2017, les 50 milliards d’euros d’économies devraient provoquer, à la même échéance, la suppression de 250 000 emplois et une baisse de croissance cumulée de 1,4 point. Autrement dit, on croit gagner quelque chose d’un côté, mais on perd davantage de l’autre, y compris sur le plan de l’emploi.

Par ailleurs, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 manque d’équité, dans la mesure où il prévoit le gel de certaines prestations.

Le projet initial prévoyait un gel des aides personnalisées au logement, mais un amendement du rapporteur de l’Assemblée nationale a supprimé cette mesure, ce dont nous nous félicitons.

Reste que le gel des pensions de retraite supérieures à 1 205 euros pendant un an est maintenu, ce que nous déplorons. Il faut se souvenir que la loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites a déjà repoussé la revalorisation de six mois. Si ce gel est adopté, on atteindra donc, au total, dix-huit mois sans revalorisation.

Ainsi, ce collectif budgétaire est inspiré par le choix de pratiquer une politique de l’offre indifférenciée, et il fragilise les retraités ; nous ne le cautionnons pas.

Les écologistes proposent un autre modèle, que je n’ai pas le temps d’exposer en détail : soutenir les secteurs porteurs d’avenir, comme la transition énergétique et écologique, et encourager les comportements vertueux des entreprises par des incitations ciblées et responsables, tout en garantissant la justice sociale par des contributions progressives.

Dans ses communications, le Gouvernement annonce vouloir soutenir les plus modestes. Pour vraiment agir en leur faveur, nous vous proposons une solution plus juste et plus efficace, dont le premier élément est l’instauration d’une CSG progressive.

Quant aux allégements de charges sur les bas salaires, nous n’y croyons pas. D’ailleurs, le rapport de la mission commune d’information sur la réalité de l’impact sur l’emploi des exonérations de cotisations sociales accordées aux entreprises, qui n’a pas été adopté ce matin, confirme qu’il n’y a aucune certitude que cette politique crée des emplois.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Absolument !

M. Jean Desessard. Opposés aux allégements de charges sur les bas salaires, nous présenterons des amendements destinés à réduire les inconvénients de ces mesures ; en particulier, nous proposerons d’instaurer une conditionnalité en réservant les allégements aux postes en CDI ou à temps complet.

Nous défendrons également une réduction des cotisations sociales de 500 euros par mois et par apprenti pour développer l’apprentissage, ainsi que l’ouverture des emplois d’avenir aux chômeurs de longue durée. Ces mesures, temporaires, puisque nous proposons de les mettre en place jusqu’en décembre 2015, permettront de donner un coup de pouce supplémentaire à la création d’emplois, par le biais d’aides financières qui, elles, auront des effets rapides et mesurables.

Pour l’exonération de contribution sociale de solidarité des sociétés, nous proposerons que l’allégement bénéficie aux entreprises qui communiquent sur leur politique de salaires, de dividendes et d’optimisation fiscale.

Enfin, nous proposerons la suppression du gel des retraites, car il n’est pas acceptable que les seules économies prévues par le projet de loi soient réalisées avec les pensions des retraités !

Madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 accorde aux entreprises des faveurs et peut-être même des cadeaux – l’avenir le dira –, de surcroît sans contrôle ni conditionnalité, fragilise les retraités et réduit notre protection sociale ; dans sa rédaction actuelle, il ne correspond pas aux attentes des écologistes ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux. (Mme Marie-Thérèse Bruguière applaudit.)

M. Jean-Noël Cardoux. Vous ne serez pas surpris, cher monsieur Desessard, que mon propos diverge radicalement du vôtre. J’incline à commencer par ce mot : enfin. Oui, enfin ! Après tant de déclarations du Président de la République et des Premiers ministres successifs sur le pacte de responsabilité et après un an de valse-hésitation, une ébauche de mesures nous est enfin présentée ; mais à quel prix ?

En vérité, comme les précédentes interventions l’ont bien montré, les mesures proposées par le Gouvernement ménagent la chèvre et le chou, le MEDEF et l’aile gauche de la majorité. Bien entendu, un tel dispositif ne peut satisfaire personne !

Madame le ministre, vous proposez des exonérations de charges sociales sur les bas salaires, jusqu’à 1,6 fois le SMIC. En somme, il ne s’agit que de compléter bien modestement le dispositif Fillon, puisque seules disparaissent la cotisation au fonds national d’aide au logement et la cotisation accidents du travail.

Vous entendez réduire de 1,8 point la cotisation allocations familiales, mais sans ouvrir le chantier d’une véritable réforme du financement de la politique familiale qui laisserait aux entreprises la seule charge du salaire de substitution, comme Gérard Longuet l’a proposé au nom de notre groupe lors du débat sur la proposition de résolution, présentée par Serge Dassault, relative au financement de la protection sociale et à l’allégement des charges des entreprises.

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis de la commission des finances. Vous avez eu dix ans pour le faire !

M. Jean-Noël Cardoux. Vous comptez supprimer la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, qui finance à hauteur de 5 milliards d’euros le régime social des indépendants et le Fonds de solidarité vieillesse, en vous bornant à transférer cette somme vers le régime général et après avoir déplafonné, il y a deux ans, les cotisations retraite et maladie des travailleurs indépendants.

Vous voulez rendre un peu de pouvoir d’achat aux salariés les plus modestes, ceux qui gagnent entre 1 et 1,3 fois le SMIC, en réduisant leurs cotisations sociales, mais vous oubliez que vous avez supprimé la défiscalisation des heures supplémentaires et considérablement alourdi leur charge d’impôt !

Sans compter que vous ne prévoyez de mettre en œuvre toutes ces mesures qu’en 2015 – toujours plus tard ! –, bien que notre économie soit exsangue, et que vous ne donnez aucune indication sur leur financement, alors même que la suppression de la C3S représente à elle seule 5 milliards d’euros.

M. le rapporteur général lui-même a reconnu qu’il disposait de peu de précisions sur le financement des mesures. Sans doute, Mme le ministre nous a assurés qu’on trouverait la solution en 2015, de sorte que nous pouvions être tranquilles, et M. le rapporteur pour avis de la commission des finances nous a affirmé qu’il y avait un plan ; mais convenez que ce sont des éclaircissements assez peu concrets. En vérité, c’est encore une fois la même logique : plus tard, on verra plus tard !

Pourtant, malgré la baisse du rythme des dépenses de santé, que je salue, vous êtes dans l’obligation, madame le ministre, d’augmenter de 100 millions d’euros votre prévision de déficit du régime général, en raison du ralentissement de l’économie qui est la conséquence de votre politique.

À vrai dire, on peut se demander pourquoi le Gouvernement présente un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale à cette époque. De fait, comme les précédents orateurs l’ont parfaitement souligné, c’est une démarche exceptionnelle, puisqu’on n’en recense que deux exemples en près de vingt ans ; on pourrait donc imaginer que c’est à la suite d’un événement considérable qu’il convient de présenter aux parlementaires un tel texte avant l’été.

Aussi bien, madame le ministre, votre démarche fait « pschitt » – pardonnez-moi d’employer cette expression un peu familière –, puisqu’on nous annonce en juillet 2014 des mesures qui ne s’appliqueront qu’à partir de 2015, et sans nous expliquer comment elles seront financées.

Je pense donc que nous aurions pu faire l’économie de ce débat à ce moment de l’année ; en effet, il aurait été beaucoup plus logique qu’il ait lieu à l’automne, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Madame le ministre, les seules données financières claires que vous présentez dès 2014 ne sont pas des économies, mais un ralentissement des dépenses,…

M. Jacky Le Menn. C’est déjà pas mal !

M. Jean-Noël Cardoux. … rendu possible par le gel d’un certain nombre de prestations sociales, qui du reste est fortement contesté par votre aile gauche, comme certaines interventions précédentes l’ont montré. Le gel vise en particulier la retraite des classes moyennes, ce qui est à nos yeux inacceptable.

Vous prévoyez, de surcroît, de priver de 160 millions d’euros le Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, ce qui à notre sens ne s’imposait pas.

Sans parler de votre fameux plan pour la dépendance, d’abord prévu à l’automne 2014 et désormais annoncé pour 2015, dont on ne sait pas comment il sera financé. Je crains que nous ne soyons encore confrontés à des impasses !

Au total, madame le ministre, nous sommes loin du choc de compétitivité si nécessaire à la France.

Dans notre esprit, la seule solution serait de lancer des signes forts aux secteurs qui en ont le plus besoin. Je pense d’abord aux services à la personne et aux emplois à domicile. À cet égard, M. Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, a récemment déclaré que la réduction de cotisations devait être fixée par décret et qu’il envisageait une modulation d’abattement pour revenir sur la suppression du calcul au forfait intervenue il y a quelques mois ; cet abattement pourrait être compris entre 0,75 euro et 2 euros.

Je me réjouis que la commission des affaires sociales ait adopté à l’unanimité un amendement, présenté par M. le rapporteur général, visant à instaurer un abattement de 1,50 euro. Pour notre part, nous voudrions aller plus loin, au moins jusqu’à 2 euros, et peut-être même rétablir en partie le système du calcul au forfait.

Il faudrait aussi étendre les exonérations de charges des entreprises, en particulier de cotisations familiales, aux revenus représentant 3 ou 4 fois le SMIC, ce qui donnerait un coup de fouet salutaire aux entreprises innovantes et aux start-up. En effet, la limitation des exonérations au bas de l’échelle des salaires pénalise considérablement ces entreprises qui exportent et font preuve d’une grande imagination, alors qu’elles sont déjà défavorisées dans la compétition mondiale. Madame le ministre, en commission, vous nous avez dit que ce serait fait en 2016 ou en 2017. Bref, plus tard, toujours plus tard, encore plus tard.

Il faudra aussi réviser le CICE – ce n’est pas tout à fait le débat du jour, mais cela en fait partie – pour qu’il soit accessible aux catégories d’entreprises que je viens de mentionner – start-up, entreprises innovantes –, alors que, à l’heure actuelle, il bénéficie essentiellement, nous le savons, à de grandes entreprises non délocalisables comme les grandes surfaces, La Poste. Or ce sont les entreprises qui exportent qui auraient besoin de ce coup de pouce.

Pour financer ces mesures, nous préconisons la TVA anti-délocalisation, que vous avez supprimée, mais qui refait son chemin progressivement dans les esprits. Notre rapporteur général de la commission des affaires sociales n’en a d'ailleurs pas complètement écarté l’idée. En la matière, il faudrait vraiment réaliser des études approfondies. Il ne suffit pas d’augmenter la TVA de deux ou trois points ; il convient de prévoir des augmentations ciblées, des augmentations substantielles sur certains produits importés de haut niveau, je pense aux véhicules 4x4. On pourrait également envisager une TVA favorisant la fiscalité écologique.

Chacun sait que c’est la solution. J’en veux d'ailleurs pour preuve que les ministres des finances de la zone euro ont recommandé, le 7 juillet dernier, l’allégement de la fiscalité sur le travail, qui serait compensée par des « sources de revenus fiscaux moins préjudiciables à la croissance, comme des taxes sur la consommation ». C’est une phrase que j’aurais pu reprendre à mon compte.

Pour terminer, mes chers collègues, sans méchanceté mais avec un certain réalisme, j’aimerais vous livrer la définition que j’ai trouvée, parmi d’autres, de l’autodestruction : « Le comportement autodestructeur est une sorte d’autopunition en réponse à un échec personnel. Il est souvent motivé par un besoin d’attention. » (Mme Christiane Demontès et M. le rapporteur pour avis s’exclament.)

Avec ce texte, comme avec les textes passés et à venir, nous sommes au cœur du problème. En effet, les textes que vous nous soumettez, qui relèvent bien souvent de l’affichage, reviennent sur des mesures que vous aviez vous-mêmes votées quelque temps auparavant. Après avoir minutieusement et laborieusement détricoté tout ce qu’avait fait le précédent gouvernement, vous commencez à détricoter ce que vous avez vous-mêmes enclenché. C’est tout de même le comble !

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. C’est une obsession !

M. Jean-Noël Cardoux. Je vous en donne quelques exemples.

Les emplois d’avenir, nous en avons déjà parlé, vont timidement s’ouvrir au monde de l’entreprise. Le temps partiel pose d’énormes problèmes ; nous l’avions souligné lors de la loi sur la sécurisation de l’emploi. La pénibilité a été récemment une pomme de discorde avec les partenaires sociaux : Dieu sait si, au moment de la réforme des retraites, nous avions multiplié les mises en garde contre l’usine à gaz que constituait le compte pénibilité ! Vous êtes en train de revenir tout doucement en arrière. Sans parler de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, qui est un frein considérable à la construction de logements ! (M. le rapporteur pour avis s’exclame.)

Enfin, le Président de la République vient de l’annoncer, on va revenir sur les mesures néfastes à l’égard de l’apprentissage que vous aviez prises. Lors du débat sur la loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, nous vous avions fortement mis en garde en vous signifiant que vous étiez en train de sacrifier l’apprentissage !

Mme Catherine Deroche. C’est vrai !

M. Jean-Noël Cardoux. Bien sûr, vous revenez tout doucement sur ces points. Pourtant, nous avions tiré la sonnette d’alarme. Nous n’avions pas été entendus et nous le regrettons.

Pour conclure, vous commencez à réagir, c’est bien, mais pas assez vite ni assez vigoureusement ! Bien sûr, nous ne sommes pas d’accord avec une partie de votre majorité. Nous croyons qu’il faut aller encore plus loin et créer le véritable choc dont la France a tellement besoin.

Voilà pourquoi le groupe UMP s’abstiendra sur la partie recettes de ce texte qui, malgré ses insuffisances, est un timide premier pas dans la bonne direction. Nous souhaitons que le débat aille à son terme. Nous verrons ensuite quelle sera notre position sur le texte final, bien que je craigne que nous ne soyons malheureusement contraints de nous y opposer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)

M. Jacky Le Menn. Il ne faut pas être défaitiste !

M. le président. La parole est à M. Gérard Roche.

M. Gérard Roche. Monsieur le président, madame le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, pourquoi présenter une loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 alors qu’elle ne s’appliquera qu’en 2015 ? (M. le rapporteur pour avis s’exclame.) Nous attendions une réforme structurelle et nous avons un chèque en blanc. Oui, c’est bien à cela que peut s’apparenter le présent texte. Je dirais même un double chèque en blanc fait, d’une part, par le Parlement au Gouvernement et, d’autre part, par le Gouvernement aux entreprises.

Premier volet de ce chèque en blanc, celui que l’on nous demande de signer aujourd’hui, nous, parlementaires. En effet, ce PLFRSS dépense sans compenser. Il met en œuvre l’essentiel des mesures de relance du pacte de responsabilité et de solidarité mais sans que nous ayons une quelconque idée de la manière dont les pertes de recettes engendrées pour la protection sociale seront financées.

Seules les mesures relatives à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur le revenu relèvent du champ des lois de finances. Autrement dit, 70 % des dépenses nouvelles du pacte relèvent du champ des lois de financement de la sécurité sociale, donc du présent projet de loi, d’où son importance politique mais aussi symbolique pour le Gouvernement.

De notre point de vue de parlementaires, comment voter ce texte sans avoir une vision d’ensemble du dispositif envisagé ?

Pour 2014 et 2015, le PLFRSS programme 9 milliards d’euros de recettes en moins pour seulement 1,3 milliard d’euros d’économies. Ce ne sont donc pas moins de 7,7 milliards d’euros de recettes en moins que nous sommes censés accepter sans savoir comment elles seront financées. J’ai bien entendu notre collègue Jean-Pierre Caffet nous détailler des mesures que nous connaissions déjà en partie…

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Et bien alors ?

M. Gérard Roche. Madame le ministre, pouvez-vous nous confirmer ce qui vient d’être dit, car vous vous étiez plutôt repliée, dans votre propos, sur la loi organique et la loi ordinaire de 2015.

Madame le ministre, nous ne doutons pas une seule seconde que les pertes de recettes pour la protection sociale seront compensées par le budget de l’État, y compris les pertes de recettes liées à l’extinction progressive de la C3S, mais c’est repousser le problème. C’est reculer pour mieux sauter ! (M. Jacky Le Menn s’exclame.)

Ces dépenses vont donc peser sur le budget de l’État. Comment y seront-elles compensées ? Économies ou recettes nouvelles ? Quel mélange des deux ? Pour l’heure, nous ne le savons pas. D’où notre sentiment de passer à côté de la réforme majeure dont notre pays a tant besoin, et depuis si longtemps.

Cette réforme consisterait à profiter de l’allégement des charges sur le travail pour les compenser de deux manières : d’une part, par des économies budgétaires structurelles ; d’autre part, par la fiscalisation du financement de la protection sociale.

Nous ne pouvons donc qu’approuver les allégements, que nous appelons de nos vœux de longue date. En effet, ce n’est un secret pour personne, le financement de la protection sociale pèse aujourd’hui bien trop lourdement sur la production.

Le dernier rapport annuel de la Commission sur l’évolution de la fiscalité dans l’Union européenne l’a encore rappelé.

Il faut donc décharger le travail, ce que font les deux premiers articles du PLFRSS, qui, même s’ils le font encore, selon nous, de manière insuffisante, vont dans le bon sens.

À terme, nous pensons que la totalité des cotisations famille a vocation à disparaître, et certains d’entre nous s’interrogent même sur le devenir des cotisations maladie dans les décennies à venir.

Toutefois, cela suppose de réaliser des économies budgétaires structurelles. Où sont-elles ? Pour l’heure, la seule qui nous a été proposée est la réforme territoriale, avec la suppression de l’assemblée départementale. Or, quand on sait que ce qui coûte cher, ce ne sont pas les structures du conseil général, mais les missions dont il est investi, on s’interroge sur le gain budgétaire. Pendant ce temps, sur le terrain, on s’étonne d’apprendre qu’un sous-préfet est peut-être plus important qu’un président de conseil général ! (M. René-Paul Savary applaudit.) Je vous prie de m’excuser : je suis hors sujet, mais c’est obsessionnel chez moi ! (Sourires. – Exclamations sur plusieurs travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Ça se voit !

M. Gérard Roche. Pour financer structurellement la baisse des charges, il faut également fiscaliser le financement de la protection sociale, tout en évitant des impôts de production qui ne feraient que reproduire le problème posé par les charges sociales. C'est la raison pour laquelle nous soutenons aussi la suppression de la C3S. Cependant, sur la masse des besoins de financement, la suppression de cette contribution demeure anecdotique.

Alors, madame le ministre, le Gouvernement va-t-il mener à bien cette réforme fiscale ? Sans doute au moins en partie, mais il faut nous le dire, parce que, pour l’heure, la seule mesure de financement figurant dans le présent texte est le gel des pensions de retraite de l’article 9.

Heureusement, vous avez renoncé au gel des aides au logement ; cela aurait été très choquant. Heureusement encore, vous semblez avoir renoncé au gel des pensions d’invalidité et des rentes AT-MP. D’ailleurs, madame le ministre, y avez-vous vraiment renoncé ? Notre Haute Assemblée attend d’être éclairée et rassurée sur ce point très important. Mais, malheureusement, vous n’avez pas renoncé au gel des pensions de retraite, puis, en 2015, au gel des allocations familiales.

Ces mesures sont en totale disproportion financière par rapport aux besoins, je n’y reviens pas ; elles sont également inacceptables sur le plan de l’équité et sur le plan humain.

Vous nous dites qu’il est juste de ne pas revaloriser des pensions de 1 200 euros bruts et plus. Madame le ministre, je vous connais un peu. Vous ne pouvez dire qu’il est juste de ne pas revaloriser les pensions à partir de 1 200 euros bruts. Comme nous, vous savez bien que 1 200 euros bruts ne permettent pas de faire vivre décemment une famille ou des gens qui sont dans la peine. (Enfin ! sur les travées du groupe CRC.)

Pourtant, le Gouvernement avait donné des exemples. On peut approuver la réduction dégressive des cotisations salariales pour des revenus inférieurs ou égaux à 1,3 SMIC dans le privé. Nous avions cependant été quelque peu choqués de constater une certaine disparité avec la fonction publique puisque ce dégrèvement touchait les revenus inférieurs ou égaux à 1,5 SMIC. Depuis, j’ai lu attentivement le rapport de la commission des finances et j’ai eu la réponse.

Des mesures fiscales courageuses et de bon sens sont envisageables. Ainsi, 1,5 point de TVA ou trois quarts de point de CSG couvriraient les 9 milliards d’euros de dépenses du pacte de responsabilité et de solidarité pour 2014 et 2015.

La CSG présente l’avantage d’être un impôt au taux bas et à l’assiette large.

La TVA offre l’avantage de taxer les importations, qui représentent tout de même 30 % du PIB. Elle ferait donc participer l’étranger au financement de la protection sociale française. De plus, traditionnellement présentée comme un impôt injuste, elle l’est aujourd’hui beaucoup moins dans la mesure où les produits de première nécessité – dont on sait qu’ils représentent une part bien plus importante du panier de consommation des ménages pauvres que des ménages aisés – sont assujettis au taux réduit.

M. Jean Desessard. Absolument !

M. Gérard Roche. Pour l’heure, le Gouvernement y semble pourtant toujours réfractaire.

Le second volet du chèque en blanc que j’évoquais, c’est celui que le Gouvernement signe au bénéfice des entreprises. En effet, les baisses de charges patronales, qui représentent l’essentiel du dispositif, ne sont conditionnées à rien, alors qu’au départ la parole présidentielle semblait indiquer le contraire. C’est pourquoi nous nous posons la question, qui est sans doute la plus importante : les baisses de charges auraient-elles dû être conditionnées à des embauches ? Historiquement, elles ne l’ont jamais été. Fallait-il le faire aujourd’hui ? Peut-être. À vrai dire, nous sommes assez réservés sur ce point, car l’aspect « chèque en blanc » est inévitable.

Attention, il ne s’agit pas d’un problème technique. L’octroi des allégements serait conditionné à l’évolution de l’effectif des entreprises, ce qui est facile à déterminer. Sur le fond, il serait toutefois impossible, dans ces conditions, de distinguer les effets d’aubaine des véritables embauches liées au bénéfice des allégements, un effet d’autant plus probable que les entreprises françaises sont aujourd’hui en surcapacité d’emploi.

Le système ne résoudrait donc rien puisque les entreprises renonceraient aux allégements de charge ou créeraient des emplois non productifs, ce qui n’améliorerait en rien leur compétitivité. (M. le rapporteur pour avis s’exclame.)

Au contraire, le véritable objet des allégements de charges est de créer une dynamique vertueuse véritablement économique.

Il s’agit de restaurer les marges des entreprises pour qu’elles développent leur activité et créent de l’emploi directement ou indirectement par leur consommation.

Mais alors, ne mentons pas aux Français : il ne peut s’agir d’emplois immédiats, il s’agit d’emplois futurs !

Pour que cet effet l’emporte, il faut que les gains engendrés par les allégements aillent principalement à la rémunération du facteur travail, c’est-à-dire à la masse salariale, soit sous forme d’augmentations de salaire…

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Non !

M. Gérard Roche. … soit sous forme d’embauches, ou à l’investissement de l’entreprise pour améliorer son outil de production.

Ils ne doivent pas être destinés à la rémunération du capital, c’est-à-dire des actionnaires, sauf dans les cas spécifiques d’ouverture du capital. En effet, dans ces derniers cas, les perspectives d’amélioration de la rémunération du capital peuvent avoir un effet de levier vertueux pour faciliter les levées de fonds et permettre ainsi à l’entreprise d’investir.

Dans ces conditions, plutôt qu’un mécanisme de sanction consistant à lier les baisses de charges à de l’embauche, ne pourrait-on imaginer et mettre en place un mécanisme consistant à supprimer les allégements de charges ou à créer des amendes correspondantes pour les entreprises qui n’auront pas joué le jeu, c’est-à-dire celles qui auront principalement employé le gain des allégements à rémunérer les actionnaires ? Madame le ministre, que pensez-vous d’une telle piste ? Est-elle à l’étude ?

Par ailleurs, même dans l’hypothèse où le gain des allégements de charges serait correctement employé à la rémunération du facteur travail ou à de l’investissement, il ne produira le maximum de ses effets de relance que si cela se traduit par une baisse de l’importation. C’est là que je veux en venir pour terminer mon intervention, à savoir à la TVA sociale, qui seule peut limiter cet effet. La boucle est alors bouclée. Le binôme allégements de charges et TVA sociale est donc bien, à nos yeux, un tout indissociable. Sincèrement, je crois, madame le ministre, que c’est une erreur de persister à les dissocier. Je n’ai bien sûr pas la prétention de vous avoir convaincue…

M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Il aurait fallu être convaincant !

M. Gérard Roche. … et d’avoir changé vos orientations. Néanmoins notre vote en dépendra naturellement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général Yves Daudigny, monsieur le rapporteur pour avis Jean-Pierre Caffet, mes chers collègues, le ton va changer ! Les membres du groupe socialiste vont effet soutenir ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014.

Il est vrai que la situation dans laquelle s’inscrit ce texte est difficile, nous le savons tous et nous le constatons tous chaque jour.

Ce projet de loi s’inscrit dans la logique de redressement dans la justice de notre pays initiée depuis 2012. Joint à la loi de finances rectificative, il constitue la première étape de mise en œuvre du « pacte de responsabilité et de solidarité », lequel répond à l’engagement pris par le Président de la République le 14 janvier dernier, à l’exigence de trouver de nouveaux moyens dédiés à l’emploi, à l’investissement, au renforcement de la compétitivité de nos entreprises et, bien sûr, à la croissance.

Ce texte revêt donc une importance toute particulière. Rationnel, il prend le possible en considération, notamment au regard de la situation de nos comptes publics ainsi que du déficit structurel de compétitivité dont souffre notre économie, depuis de nombreuses années, d’ailleurs, et bien avant 2012. Il est l’expression de ce pacte de responsabilité et de solidarité qui repose sur un triptyque alliant compétitivité, avec la politique de la fiscalité sur les entreprises qui abaissera le coût du travail, responsabilité, avec un plan d’économies de 50 milliards d’euros sur trois ans, ce qui nous permettra de respecter la trajectoire budgétaire des finances publiques, et solidarité, avec les dispositions soutenant le pouvoir d’achat de nos concitoyens.

Sur la forme, vous l’avez d’ailleurs souligné, madame la ministre, j’observe que le 24 juin dernier la Cour des comptes a certifié la sincérité et l’exactitude des comptes de chacune des branches du régime général de sécurité sociale et de chacune des caisses nationales qui les pilotent, ce qui, mes chers collègues, est sans précédent.

C’est l’illustration du fait que la politique engagée depuis 2012 donne des résultats positifs. Cette politique a engendré la baisse des déficits sociaux. Je vous rappelle, mes chers collègues, vous qui siégez à droite de l’hémicycle, que ces déficits s’élevaient à 17,4 milliards d’euros en 2011. Ils sont de 12,5 milliards d’euros en 2013. En 2010, alors que la croissance atteignait 1,6 %, le déficit des comptes sociaux avait progressé de 4,5 milliards d’euros, pour atteindre 28 milliards. En 2013, avec une croissance d’à peine 0,1 %, le déficit recule de 2 milliards d’euros.

M. Jean Desessard. M. Cardoux n’en a pas parlé !

Mme Christiane Demontès. En outre, ce sérieux budgétaire s’est accompagné d’un souci de justice, car il n’y a pas eu de remise en cause de la protection sociale de nos concitoyens : aucun nouveau déremboursement n’est intervenu depuis 2012, aucune création de forfait supplémentaire...

À titre de comparaison, en 2010, la dette de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, était étalée alors que l’autorisation de découvert de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, passait, comme vous vous en souvenez, mes chers collègues, de 70 milliards à 130 milliards d’euros. Le système de retraites est pérennisé et des avancées notables ont été réalisées. J’en rappellerai trois. La première c’est les carrières longues – mesure de justice s’il en est ! Nous avons rencontré il y a quelques semaines, sur l’invitation de Mme la ministre, des retraités de soixante ans ayant commencé à travailler à l’âge de quinze, seize ou dix-sept ans. Il était bien normal que ces personnes puissent prendre leur retraite avec toutes leurs années de cotisation ! (MM. Jacky Le Menn et Alain Néri applaudissent.)

Les deux autres avancées notables sont la reconnaissance de la pénibilité – qui l’avait fait avant nous ? – et la prise en compte des durées de maternité pour les femmes. Cette dernière mesure est extrêmement importante, car en matière de retraite l’inégalité entre les hommes et les femmes est toujours réelle.

De même, des progrès ont été faits et ils étaient attendus : ainsi, pour de nombreuses familles modestes, la revalorisation de 25 % de l’allocation de rentrée scolaire, celle du complément familial et de l’allocation de soutien familial, l’extension de la CMU-C et de l’aide à la complémentaire santé. Je rappelle que 750 000 personnes auront une complémentaire gratuite ou aidée.

Ce sérieux budgétaire, ce sens des responsabilités nous permettra de donner naissance à une véritable politique de santé publique, telle que vous nous l’avez annoncé, madame la ministre.

Sur le fond, ce texte financier entend renforcer la compétitivité de nos entreprises et, par extension, l’emploi, première des priorités. Pour ce faire, et alors que nous assistons à la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, une série de dispositions sont prises. Il s’agit de l’augmentation des allégements généraux, pour 4,5 milliards d’euros en 2015. La mesure prévue à l’article 2 inscrit l’exonération de cotisations pour les salariés entre 1 SMIC et 1,6 SMIC, et bénéficiera avant tout aux PME, qui sont les moteurs de l’emploi et de la croissance.

Ainsi, dès le 1er janvier 2015, au niveau du SMIC, le « zéro cotisation patronale URSAFF » sera effectif. À cela s’ajoute la baisse du taux des cotisations familiales de 5 % à 2,25 % en faveur des travailleurs indépendants pour près de 1 milliard d’euros. Enfin, est actée la première étape de suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, sous la forme d’un abattement exonérant nombre de PME.

Le second pan de ce texte consacre la volonté de conforter la justice sociale et le pouvoir d’achat. Ainsi, dès janvier prochain sera mis en œuvre un allégement dégressif des cotisations salariales pour les salaires inférieurs à 1,3 SMIC. Je suis très étonnée d’entendre aujourd’hui que certains sur ces travées (L’orateur regarde la droite de l’hémicycle.) souhaitent que l’on aille plus loin alors qu’ils n’avaient rien fait au moment où ils étaient au pouvoir !

Cette mesure de l’article 1er concerne 5,2 millions de salariés du privé qui verront leur pouvoir d’achat augmenter de plus de 500 euros par an. S’ajoute une disposition identique qui sera prise pour les différentes fonctions publiques sur la base du traitement indiciaire brut, et ce jusqu’à 1,5 SMIC. Ce seront ainsi 2,2 millions de fonctionnaires civils et militaires qui seront concernés pour un coût évalué à 1,5 milliard d’euros. Ces mesures complètent la disposition de la loi de finances rectificative visant à réduire l’impôt sur le revenu pour 3,7 millions de nos concitoyens, pour un montant de plus de 1 milliard d’euros, soit une baisse de 350 euros pour un célibataire.

Dans cette logique de soutien au pouvoir d’achat, et en cohérence avec les revalorisations de l’aide personnalisée au logement, l’APL, et de l’allocation de logement social, l’ALS, votées dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, l’allocation de logement familiale, l’ALF, est aussi revalorisée. Par ailleurs, les retraites d’un montant inférieur à 1 200 euros bénéficieront, elles aussi, de cette réévaluation alors que les autres seront bloquées pendant un an. La mesure concerne 50 % des retraités de notre pays.

Ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale contient aussi les premières mesures du plan d’économies. Ces dispositions viennent compléter les efforts réalisés par nos administrations afin d’offrir le meilleur service tout en en contrôlant le coût. Le volume d’économies visé est important et le concours des prestations sociales y participe. Néanmoins, l’effort demandé est progressif et l’absence exceptionnelle de revalorisation des prestations ne concernera ni les ménages modestes ni, comme nous l’avons vu, la moitié des retraités.

Avant de conclure, madame la ministre, je souhaite vous faire part de mes craintes, mais je sais que vous les partagez.

La première d’entre elles concerne la branche vieillesse, plus particulièrement l’évolution du Fonds de solidarité vieillesse. Ce fonds est le miroir de la pauvreté et de la précarité de celles et de ceux qui sont définitivement sortis du marché de l’emploi. Ils sont effectivement nombreux. Par conséquent, le volume financier du Fonds de solidarité vieillesse progresse, ce qui doit mobiliser toute notre vigilance.

La deuxième crainte que j’évoquerai est liée à la politique de baisse de cotisations sociales sur les bas salaires pour favoriser l’accès à l’emploi et le recrutement par les entreprises. Nous savons bien qu’il existe un risque de création d’une trappe à bas salaires. Il nous faudra, sur ce point également, être vigilants. Il est donc heureux que l’alinéa 48 de l’article 2 prévoie la mise en place, au sein de la négociation annuelle de branche sur les salaires, d’une évaluation de l’effet du pacte de responsabilité, en particulier des exonérations de cotisations patronales, mais également du CICE, sur l’emploi et les salaires.

Pour conclure, les membres du groupe socialiste considèrent que ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est un texte responsable économiquement, socialement et politiquement. Marqué du sceau de la justice, il s’inscrit dans la logique et l’exigence du redressement de notre pays, et apporte des réponses complémentaires et appropriées à la question centrale de l’emploi. Madame la ministre, je l’ai signalé au début de mon intervention, le groupe socialiste votera ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, et le votera avec fierté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.

M. Ronan Kerdraon. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale est la première étape de la mise en œuvre du pacte de responsabilité et de solidarité, qui était l’une des priorités voulue par le Président François Hollande et confirmée par le Premier ministre.

La vocation de ce pacte est de proposer des mesures ciblées comme des baisses de prélèvements, des exonérations en faveur des plus modestes, mais également en faveur des entreprises. À ce sujet, je tiens à saluer les premiers résultats de la politique de réduction des déficits sociaux menée depuis maintenant deux ans par votre gouvernement.

Néanmoins, la réduction du déficit public ne doit nullement nous faire revoir à la baisse notre politique de protection sociale. Nous devons offrir à l’ensemble de la population, tout en prenant en compte les contraintes économiques du moment, une politique ambitieuse, solidaire et responsable, ainsi que vient de le souligner Christiane Demontès.

Cette politique est plus que nécessaire, car les personnes touchées par la pauvreté sont de plus en plus nombreuses et, surtout, de plus en plus pauvres. Or les prestations sociales constituent une protection irremplaçable.

L’emploi, nous le savons tous ici, est la priorité des Français. Aussi, la première étape du pacte est dirigée vers les entreprises au travers des articles 2 et 3 du présent projet de loi. L’ambition est de redonner aux entreprises la capacité de faire face à la concurrence grâce à l’allégement du coût du travail, mais aussi par la simplification des procédures administratives.

L’allégement des cotisations et la baisse du coût du travail devraient effectivement inciter à la création d’emplois, mais je reste intimement convaincu que ces mesures importantes prises en faveur des entreprises doivent être accompagnées de garanties confirmant la création d’emplois !

Le second engagement est, bien entendu, le plan d’économies de 50 milliards d’euros, qui s’appliquera aux finances de l’État, aux collectivités et à la sécurité sociale. Ainsi, le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale prévoit des mesures destinées à corriger l’équilibre des comptes sociaux.

Je tiens d’ailleurs à saluer l’initiative de nos collègues de l’Assemblée nationale concernant l’article 9, qui prévoyait le gel des aides au logement. En effet, aujourd’hui, ce sont les dépenses de logement qui pèsent le plus sur le budget des ménages. C’est pourquoi, au regard des conditions de vie précaires des bénéficiaires de ces aides, nos collègues députés ont décidé de supprimer le gel de l’allocation logement, ce dont je me félicite.

Les inégalités s’accroissent, ce qui entraîne parfois des conséquences sociales dramatiques. Il est donc de notre devoir de promouvoir une politique solidaire, garante de notre système de protection sociale.

Les Français consentent depuis des années à de très lourds efforts, aussi devons-nous, mes chers collègues, trouver un juste équilibre entre la réduction des déficits et le maintien d’un haut niveau de protection.

François Mitterrand le disait, l’égalité n’est jamais acquise, c’est toujours un combat. Et ce combat, madame la ministre, nous savons que vous le menez.

Les dispositifs respectifs du projet de loi de finances rectificative et du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale doivent être analysés de façon simultanée et cohérente, ainsi que Jean-Pierre Caffet l’a excellemment dit tout à l’heure à cette tribune.

M. Jacky Le Menn. Il est excellent !

M. Ronan Kerdraon. J’aimerais à cet égard évoquer, même si cela peut apparaître hors sujet, l’amendement que j’avais déjà défendu, mais sans succès, lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative et qui avait pour objet l’exonération de versement transport. Je le présenterai à nouveau ici sous la forme d’un amendement tendant à insérer un article additionnel.

Le système d’exonérations de versement transport fait actuellement l’objet d’amendements dans deux projets de loi distincts, le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire. Ces modifications sont source de risques financiers et juridiques pour les autorités organisatrices de transport, les AOT, risques qui pourraient être évités si le contenu des amendements était clarifié.

En effet, pour bénéficier d’une exonération, une association ou une fondation doit en faire la demande à l’AOT : celle-ci contrôle que l’organisme remplit bien trois conditions – être un organisme reconnu d’utilité publique, à but non lucratif et ayant une activité à caractère social – et, si tel est le cas, elle accorde obligatoirement l’exonération au terme d’une délibération.

Deux amendements ont été adoptés, mais dans le cadre de projets de loi distincts. Leur adoption a eu pour effet de supprimer la phrase figurant à l’article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales, qui est à l’origine du régime actuel, et de la remplacer par deux dispositions qui se contredisent.

L’amendement adopté lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, j’insiste sur ce point, est d’un impact financier très aléatoire, voire risqué. En effet, du fait des multiples conditions prévues, il pourrait s’appliquer à un grand nombre d’organismes, étant donné que les conditions de fonctionnement des structures ne sont pas cumulatives.

Pour prendre un exemple, mes chers collègues, il est possible que les hôpitaux ou cliniques privés entrent dans le champ d’application de cet amendement, ce qui représenterait un coût énorme pour les AOT, ainsi qu’une distorsion de traitement au détriment des hôpitaux publics.

Pour vous donner une idée plus précise, sur le territoire de Saint-Brieuc Agglomération, l’impact de cette mesure est estimé à 1,4 million d’euros, soit 10,4 % du produit du versement transport !

Afin d’assurer la cohérence de la loi, la contradiction entre les deux amendements adoptés nous oblige à choisir : l’un tend à réserver l’exonération aux entreprises solidaires d’utilité sociale, tandis que l’autre vise à élargir l’exonération actuelle. Dans ce dernier cas, une sécurisation des conditions d’application est indispensable pour limiter le nombre de recours.

Aussi, l’amendement que je présente se fonde sur la proposition formulée dans le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, qui vise à exonérer les associations et fondations lorsque celles-ci bénéficient de l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » actualisé à l’article 7 du même projet de loi.

Il s’applique également aux centres de lutte contre le cancer, qui ne sont pas couverts par les dispositions du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire.

Cette solution permettrait d’éteindre les risques de contentieux entre associations et AOT, puisque seule l’existence de l’agrément donnerait à l’association le droit de se prévaloir d’une exonération.

Par ailleurs, grâce aux conditions à réunir pour obtenir l’agrément, cette solution permettrait de concilier le soutien au secteur de l’économie sociale et solidaire et la préservation de la situation financière des AOT, dans un contexte financier très tendu pour une grande partie de ces autorités organisatrices.

En conclusion, ce projet de loi marque le point de départ du pacte de responsabilité et de solidarité, en étant fondé sur la compétitivité, sur la responsabilité et, surtout, sur la solidarité. L’équilibre est délicat, car il nous faut veiller à soutenir autant que possible les personnes les plus précaires. Mais nous savons, au sein du groupe socialiste, que tel est votre objectif, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Madame la ministre, je vous le dis d’emblée : le groupe écologiste partage votre volonté de diminuer la dette de la sécurité sociale afin d’assurer la pérennité de notre système de solidarité nationale.

Pour autant, nous nous séparons sur la méthode à suivre pour parvenir à réduire ces dépenses publiques. Selon nous, cette réduction devrait passer par d’autres priorités de santé publique.

Nous craignons en effet que les mesures proposées dans ce texte n’hypothèquent l’avenir de la sécurité sociale et voudrions relayer auprès de vous, madame la ministre, l’inquiétude des professionnels de la santé publique et des travailleurs sociaux, qui se demandent où les coupes seront opérées.

Les allégements de cotisations salariales proposés dans ce projet de loi diminueront les recettes de la sécurité sociale de 2,5 milliards d’euros, les allégements des cotisations patronales et celles des travailleurs indépendants les réduiront de 5,5 milliards d’euros et le rétrécissement de l’assiette de la contribution sociale de solidarité des sociétés privera la sécurité sociale de 1 milliard d’euros, soit, au total, 9 milliards d’euros !

Or toutes ces mesures constituent autant de diminutions pérennes des recettes de la sécurité sociale, sans que nous soient donnés clairement les moyens pérennes qui seront parallèlement mis en œuvre.

Car, madame la ministre, je n’ose imaginer que le gel de certaines prestations sociales que vous proposez cette année - il ne compense d’ailleurs que très partiellement les réductions de recettes en jeu – soit reconduit d’année en année aux fins d’équilibrer nos comptes publics !

Je crains donc que les mesures proposées ici ne soient de mauvaises solutions qui mettent en péril l’équilibre financier de notre système de solidarité nationale.

Oui, nous pensons qu’une autre vision des questions de santé publique pourrait conduire à des économies de même ampleur, et à des économies durables.

Pour réaliser des économies, nous, écologistes, proposons de dépenser autrement, en augmentant beaucoup plus les dépenses d’investissement visant à permettre l’accès du plus grand nombre à la santé, donc des dépenses qui à court, à moyen et à long terme, permettent ces économies.

Forte de cette logique, je ne comprends pas, par exemple, pourquoi l’adoption de mesures durables pour lutter contre la pollution de l’air prend tant de temps, alors que, chaque année, cette pollution coûte à la sécurité sociale entre 30 milliards d’euros et 50 milliards d’euros, selon les chiffres fournis en 2012 par le Commissariat général au développement durable.

Je ne comprends pas non plus pourquoi, bientôt un an après la remise du rapport que j’ai signé sur l’accès aux soins des plus démunis, la mise en œuvre des mesures de simplification de l’accès aux droits est si lente, alors même que, selon le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique, le SGMAP, conçu pour tenir le rôle de conseil auprès du Gouvernement dans l’élaboration, la conduite et le suivi du programme global de réforme, en s’attaquant aux obstacles qui font de l’accès aux soins un véritable parcours du combattant, on améliorerait l’état de santé global de la population et on dégagerait un gisement d’économies – que le SGMAP appelle d’ailleurs « le gisement moins de maladies ».

Pour mémoire, un certain nombre de propositions ont été formulées. J’en citerai deux : attribuer automatiquement la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-C, aux bénéficiaires du revenu de solidarité active, le RSA ; fonder l’attribution de la CMU-C et de l’assurance complémentaire santé, l’ACS, sur le dernier revenu fiscal de référence, ce qui reviendrait à simplifier considérablement l’accès à ces droits.

Du coup, en permettant un accès plus facile à la santé, on réaliserait un investissement qui déboucherait sur des économies très importantes. Beaucoup le disent !

Je ne comprends pas plus pourquoi vous continuez à refuser les mesures de santé environnementales que nous vous proposons, à chaque projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, surtout lorsque l’on sait le poids sur le budget de la sécurité sociale d’un certain nombre d’épidémies qui, comme le cancer, sont dues en partie à des facteurs environnementaux.

Pourquoi, par ailleurs, a-t-on perdu autant de temps sur la question épineuse des refus de soins, qui éloignent durablement de notre système de santé des personnes précaires ou gravement malades que l’on finit par retrouver, plus tard, dans un état très aggravé, au sein de nos services d’urgences encombrés et dont la prise en charge coûtera en conséquence, au final, beaucoup plus cher ?

Pourquoi prévoir, dans l’axe 13.1 du plan cancer, de dépenser dès maintenant des centaines de millions d’euros supplémentaires pour le Gardasil, alors que ce vaccin est de plus en plus contesté ? Ne faudrait-il pas au minimum un moratoire sur toute mesure nouvelle d’incitation à l’utilisation de ce vaccin, au moins le temps de mener une étude indépendante sur le sujet ?

En lieu et place de tout cela, comme Jean Desessard le relevait tout à l’heure, vous proposez des mesures qui, en l’état, apparaissent comme un véritable chèque en blanc signé aux entreprises, parce qu’elles ne sont pas assorties des garanties nécessaires en matière de créations d’emplois.

Faute d’une telle conditionnalité, ces mesures sont donc tout à fait déséquilibrées, raison pour laquelle nous défendrons un certain nombre d’amendements sur ce texte. En l’état actuel, nous ne pourrions pas le voter ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC. – Mme la présidente de la commission des affaires sociales et Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Georges Labazée.

M. Georges Labazée. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos sera bref, puisque je souhaite simplement compléter l’intervention de mon collègue Ronan Kerdraon, en adoptant un angle plus « médico-social ».

Ronan Kerdraon nous l’a rappelé à l’instant, lorsque nous avons examiné le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, nous avons, avec l’Assemblée nationale, adopté une mesure permettant de préserver l’exonération de versement transport dont les associations et fondations bénéficiaient depuis plus de cinquante ans.

Le projet de loi de finances rectificative a supprimé cette exonération, ce qui aura de lourdes conséquences pour le secteur médico-social. C’est pourquoi je me permets de soulever le problème à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

En effet, si la suppression était maintenue, les associations et autres fondations du secteur sanitaire, social et médico-social qui accompagnent au quotidien les citoyens les plus vulnérables – personnes handicapées, exclues ou âgées – devraient payer à présent cette taxe. Cela représente plusieurs dizaines de millions d’euros, soit l’équivalent de milliers d’emplois…

Je rappelle que ces mêmes associations ont déjà été exclues du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

Venir alourdir leurs charges à l’heure actuelle, et qui plus est sans concertation aucune, c’est tout simplement dramatique !

Je vous rappelle également, mes chers collègues, que l’engagement associatif a été déclaré « grande cause nationale » pour 2014.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Eh bien, c’est raté !

M. Georges Labazée. C’est pourquoi, madame la ministre, je vous demande de permettre aux associations agréées « entreprises solidaires d’utilité sociale », ou ESUS, de continuer à bénéficier de l’exonération de la taxe versement transport.

M. Ronan Kerdraon. Très bien !

M. Georges Labazée. Comme nombre de collègues, j’ai souhaité signer l’amendement déposé par Ronan Kerdraon, qui, comme il l’a précédemment exposé, reprend la proposition formulée dans le projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire visant à exonérer les associations et fondations lorsque celles-ci bénéficient de cet agrément actualisé à l’article 7 du même projet de loi

Revenir sur cette exonération mettrait en péril non seulement ce qui constitue le dernier filet de protection pour les personnes les plus fragiles, mais aussi la survie de milliers d’emplois dans le secteur associatif.

Je sais bien, madame la ministre, que ce n’est pas forcément dans ce texte que nous pourrons trouver la solution, mais il nous reste encore quelques mois, puisque le Parlement examinera à l’automne le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.

Je souhaite donc que nous profitions de l’examen du présent texte pour revenir sur la suppression de cette exonération.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous remercier de la qualité de vos interventions. Vous êtes face à un texte extrêmement important, important pour l’action du Gouvernement, important en raison des engagements qui sont pris, important pour l’avenir de notre pays.

À cette occasion, je veux rebondir sur un certain nombre de points que vous avez développés.

M. Caffet a bien mis en perspective les engagements qui sont les nôtres et les choix faits par le Gouvernement en montrant que nous cherchons à relever les trois grands défis qui se posent à notre pays : la réduction de la dette et des déficits publics, la restauration des marges et de la compétitivité de nos entreprises, le soutien au pouvoir d’achat des salariés et des ménages modestes.

Or ces trois défis ont trop souvent tendance à être présentés comme contradictoires, comme si nous ne pouvions pas à la fois assumer une politique de compétitivité en direction des entreprises, une politique de réduction des déficits, lesquels minent la crédibilité de nos systèmes sociaux, et une politique en faveur de l’emploi et des ménages.

C’est cette cohérence d’ensemble que Mme Demontès a particulièrement mise en évidence en rappelant notre engagement depuis deux ans en faveur de notre modèle social, de notre système de protection sociale, sans oublier les droits nouveaux. Elle a particulièrement insisté – je la remercie – sur les droits nouveaux en faveur des femmes, s’agissant, par exemple, de la prise en compte de façon plus globale et plus cohérente des congés de maternité pour la détermination de l’âge de départ à la retraite.

C’est un choix qu’a fait le Gouvernement et il ne s’agit pas là, comme je l’entends parfois dire, d’une pétition de principe : c’est une réalité, puisque ces droits sont mis en œuvre et que, dans notre pays, des femmes et des hommes bénéficient désormais de droits dont ils ne bénéficiaient pas voilà deux ans.

Je le dis à toutes celles et à tous ceux qui prétendent que, au fond, nous n’aurions que pour seule perspective le soutien aux entreprises ou, comme le dit M. Watrin, au MEDEF. Mesdames, messieurs les sénateurs, ce n’est pas le MEDEF qui me préoccupe, ce n’est pas le MEDEF qui dicte sa politique au Gouvernement, c’est la volonté de faire en sorte que, dans notre pays, les droits progressent, que la situation des salariés progresse.

Monsieur Watrin, le principal droit auquel les Français peuvent prétendre, c’est le droit au travail et à l’emploi. Aujourd’hui, notre pays connaît un déficit d’emplois. J’ai le regret de vous le dire – nous avons là une divergence –, mais ce n’est pas en claquant des doigts et en appelant à plus de dépenses et à l’alourdissement des déficits que l’on va, comme par miracle, comme par prestidigitation, créer des emplois dans notre pays !

Ce sont les entreprises qui créent les emplois (Très bien ! sur les travées de l'UMP.), même si nous pouvons aussi créer des emplois publics lorsque c’est nécessaire. Nous avons besoin des entreprises, nous avons besoin qu’elles s’engagent pour la création d’emploi. Sinon, tous les droits que vous pouvez mettre en avant ne seront que mirage, parce que viendra un jour où nous devrons constater que nous ne sommes plus capables de les financer.

Nous sommes donc dans une logique d’équilibre, mesdames, messieurs les sénateurs.

Mais je me tourne vers M. Roche : monsieur le sénateur, vous me donnez du « madame le ministre » à longueur d’intervention. Nous nous connaissons bien, nous travaillons ensemble, en toute amitié et avec plaisir : que diriez-vous si je vous appelais « monsieur la sénateur » ? Alors, de grâce, concédez-moi un petit « madame la ministre » ! Cela me fera plaisir et vous en serez content. (Sourires.)

J’en reviens au point fort de votre propos, M. Cardoux étant intervenu dans le même sens : pourquoi donc attendre pour mettre en œuvre les réductions de cotisations dont doivent s’acquitter les entreprises ?

Notre pays est confronté à un enjeu, celui de la confiance, non seulement des entreprises françaises, mais également des acteurs économiques de façon plus large. La France dispose d’atouts, et tous les ingrédients de la croissance sont là. Ce qu’il faut, c’est offrir un cadre stable, visible, lisible. Ce qui compte pour les entreprises, ce n’est pas que, dans quinze jours ou trois mois interviennent enfin les baisses de cotisations, c’est que les engagements soient pris, votés et tenus !

L’enjeu de ce texte de loi, c’est de donner une perspective et une lisibilité aux entreprises. En échange de quoi, il appartiendra à ces mêmes entreprises, sachant ce à quoi elles peuvent s’attendre, de s’engager à leur tour, de s’impliquer : comme tout pacte, le pacte de responsabilité engage les deux parties !

Monsieur Desessard, vous disiez que tout cela ne se décrète pas et qu’il faut pouvoir mesurer les contreparties. Voilà quelques jours – cela a été rendu public aujourd’hui même –, une grande fédération professionnelle, celle de la chimie, s’est engagée, dans le cadre du pacte de responsabilité, à créer plusieurs dizaines de milliers d’emplois – 47 000, selon ses évaluations – au cours des années à venir.

Ces engagements pris par les entreprises, il nous appartiendra évidemment d’en vérifier le respect. Dans d’autres secteurs, ce seront peut-être d’autres types d’engagements qui seront pris outre ceux qui portent sur le nombre des créations d’emplois : la qualité des emplois, la formation, l’accueil d’apprentis et de futurs salariés sont autant d’enjeux qui comptent. Comme l’a dit Mme Demontès, il est important que la négociation collective se saisisse de ces questions et permette d’évaluer les engagements pris.

L’exigence de compétitivité nous amène aujourd’hui à proposer un plan de contribution à l’effort collectif, mais dans un souci de justice. Je remercie M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales d’avoir indiqué – je ne l’ai sans doute pas suffisamment souligné – que nous avons fait le choix assumé de ne pas mettre à contribution les Français les plus modestes, et non pas simplement ceux qui sont en situation de précarité : non seulement le plan pauvreté sera maintenu, mais les Français modestes ne seront pas concernés par les efforts demandés.

Même si je ne conteste pas que les retraités de notre pays seront mis à contribution, je me dois d’insister sur le fait que les plus modestes d’entre eux ne sont pas concernés. Comme l’a dit Mme Demontès, notre pays compte des retraités en situation de fragilité – en particulier les bénéficiaires du Fonds de solidarité vieillesse – et nous y sommes attentifs. M. Daudigny a, lui aussi, mis l’accent sur les mesures qui ont été prises dans cette direction.

Si nous demandons des efforts à l’ensemble des Français, y compris aux retraités, même si les plus modestes d’entre eux ne sont pas concernés, c’est parce qu’il est normal de demander à l’ensemble de la communauté nationale, à l’ensemble des Français de participer à ce nécessaire effort en direction des plus jeunes, en faveur de l’emploi des catégories actives.

On ne peut pas tout à la fois s’accorder à voir dans l’emploi, notamment l’emploi des jeunes, la priorité numéro 1 et souhaiter que les personnes retraitées soient exonérées de l’effort demandé au pays !

La solidarité intergénérationnelle à laquelle nous faisons en permanence référence lorsque nous discutons des textes sur l’avenir de notre système de protection sociale ne doit pas simplement être un slogan pour ceux qui défendent notre protection sociale, ce doit être une réalité. La solidarité entre les générations suppose que les unes et les autres se mettent ensemble pour favoriser le retour de l’emploi, le retour de la croissance et offrir des perspectives à nos concitoyens les plus modestes.

Madame Archimbaud, sans doute aurons-nous l’occasion de discuter des perspectives de long terme en matière de santé. Ces perspectives de long terme, je les défends et j’aurai l’occasion d’en débattre avec vous lors de l’examen de la future loi de santé. Mais, par définition, des réformes de long terme ne débouchent pas sur des économies immédiates. Nous devons donc réfléchir à la manière d’organiser notre système de santé différemment pour obtenir des résultats assez rapidement. Vous serez d’accord, je le sais, pour considérer avec moi que certaines des mesures qui seront proposées dans les textes à venir ces prochaines années – l’évaluation des actes médicaux, par exemple – doivent être défendues.

Alors, madame la sénatrice, autant je souscris à ce que vous dites sur l’accès aux droits, sur la lutte contre les refus de soins, autant je ne peux pas approuver vos propos sur la vaccination. Il existe énormément d’études sur les vaccins et tenir des propos de défiance à l’égard de la vaccination peut être risqué – j’y insiste –, alors que trop d’hommes et trop de femmes aujourd’hui renoncent à se faire vacciner au nom de considérations générales, par parti pris. Ce faisant, ils mettent en danger non seulement leur santé, mais aussi celle de leur entourage. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du RDSE, de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Enfin, je veux indiquer à MM. Kerdraon et Labazée que j’entends leur préoccupation s’agissant de l’économie sociale et solidaire en général et des établissements de santé relevant du secteur privé à but non lucratif en particulier. Je suis extrêmement attentive à la situation de ces établissements de santé, au rôle qu’ils jouent dans notre système de soins. Mais vous avez vous-mêmes reconnu que certains des amendements que vous défendrez sont des cavaliers par rapport au présent texte : nous serons donc obligés de les considérer comme tels…

Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un texte de mobilisation qui vous est proposé. Vient un moment où il est nécessaire de faire appel à l’ensemble des forces du pays pour aller de l’avant. Il nous faut faire preuve de cohérence et de constance. Il n’est pas temps de reculer ; il est temps au contraire d’aller de l’avant et d’offrir une perspective, en particulier aux plus jeunes générations. C’est la responsabilité à laquelle je vous appelle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Question préalable

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Question préalable (interruption de la discussion)

M. le président. Je suis saisi, par Mme Pasquet, M. Watrin, Mmes David et Cohen, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n°66.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (n° 689, 2013-2014).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour la motion.

Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, pour la seconde fois depuis l’adoption de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, Assemblée nationale et Sénat sont appelés à examiner un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale.

L’exercice est singulier, chacun en conviendra, puisqu’il ne s’agit pas uniquement de modifier des tableaux adoptés en loi de financement initiale afin de tenir compte d’évolutions économiques et budgétaires ; il s’agit en réalité d’acter dans la loi une évolution politique, un renversement de doctrine.

Si l’on peut débattre du bien-fondé des mesures proposées dans ce PLFRSS pour 2014, personne ne peut raisonnablement soutenir que le prétendu pacte de responsabilité est conforme aux engagements pris devant le peuple de France par le candidat socialiste à la présidence de la République.

Singulier, ce PLFRSS l’est également pour une autre raison : quoique présenté par le Gouvernement, il puise selon nous son inspiration dans les dogmes libéraux défendus depuis plus de vingt ans par la partie du patronat français la plus hostile aux notions de « mutualisation » et de « partage des richesses », pourtant au cœur de notre pacte social depuis 1945.

Incontestablement, si le Gouvernement a fourni le papier, c’est bien l’encre du MEDEF qui est imprimée sur ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale !

La genèse du « pacte de responsabilité », imaginé par Pierre Gattaz et appelé par lui « pacte de confiance », suffit à confirmer mes propos. Cela à tel point, mes chers collègues, que le Premier ministre lui-même, en visite à Berlin, a assuré que « la France a engagé des réformes importantes, des réformes de structure », parlant à cet égard du « pacte de confiance et de solidarité [pour] soutenir la croissance ». Il n’a même pas pris la précaution oratoire imaginée par les communicants du Gouvernement, qui pensaient qu’en rebaptisant le « pacte de confiance » du MEDEF « pacte de responsabilité » du Gouvernement, l’assimilation entre les deux projets ne serait plus possible.

Malheureusement pour le Premier ministre, les efforts du Gouvernement pour dissimuler la paternité de ce projet sont gâchés par son initiateur. Le « patron des patrons », à la suite de cet incident, a en effet immédiatement déclaré à la presse : « Nous avons salué le pacte de responsabilité que nous a servi le Président de la République le 31 décembre et qui était inspiré, je ne le dis pas trop fort, du pacte de confiance que nous lui avons apporté sur un plateau ».

Tout est dit, du moins sur le processus de co-élaboration législative entre le Gouvernement et le MEDEF. Même les organisations syndicales qui soutiennent le pacte ont publiquement regretté de n’avoir pas été associées à la construction du projet et de l’avoir appris, comme nous tous, par voie de presse. C'est là une curieuse conception du dialogue social !

Pour autant, cette méthodologie très contestable n’est pas la seule raison qui justifie notre opposition au pacte de responsabilité et à ce PLFRSS pour 2014.

Ce sont bien le contenu de ce texte et les régressions qu’il comporte, l’appauvrissement et l’affaiblissement programmés de la sécurité sociale, qui nous conduisent, notamment, à considérer que l’adoption de ce PLFRSS serait un nouveau coup porté à notre modèle social, sans que soit pour autant garantie la sortie de crise économique et sociale que nos concitoyens attendent impatiemment.

Si j’insiste sur la notion de « crise sociale », c’est que les observateurs, les journalistes, les économistes et, d’une certaine manière, le Gouvernement lui-même ont tendance à ne parler que de la crise économique, oubliant trop vite combien celle-ci pénalise et frappe les plus modestes, les précaires, les retraités, les jeunes et les malades.

En effet, le dernier rapport de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale fait apparaître un accroissement spectaculaire de ces inégalités depuis le tournant du siècle. Au point que, sous l’impulsion d’une crise économique sans précédent – elle s’apparente à un épisode nouveau dans la crise du capitalisme financiarisé –, le revenu moyen des 20 % des Français les plus riches, qui équivalait à 4,1 fois celui des 20 % les plus pauvres en 2000, représentait 4,6 fois ce revenu en 2011. En dix ans, l’écart s’est donc creusé de 12 %.

Ce mouvement d’accroissement extraordinaire des richesses de certains et d’appauvrissement radical pour d’autres est la conséquence des mesures prises en faveur des plus riches par Nicolas Sarkozy…

Mme Catherine Procaccia. Cela nous manquait !

Mme Isabelle Pasquet. … et de l’absence de décisions courageuses contre le capital et la finance depuis l’élection de François Hollande. Ces mesures, nous les avions ensemble – socialistes, écologistes, radicaux et communistes – condamnées au Sénat, lorsque la Haute Assemblée était majoritairement à gauche et que le Gouvernement et l’Assemblée nationale étaient encore à droite.

Depuis, si les aspirations de nos concitoyennes et de nos concitoyens n’ont pas changé, conduisant à l’élection de François Hollande à la présidence de la République, les réponses que le Gouvernement leur apporte, elles, ont bien changé.

Plutôt que de sécuriser l’emploi en interdisant les licenciements boursiers, le Gouvernement a transposé l’ANI – l’accord national interprofessionnel – qui autorise les employeurs à licencier pour motifs économiques, même en l’absence de réelles difficultés économiques.

Quant à la formation professionnelle, levier indispensable pour permettre aux salariés d’anticiper les évolutions technologiques, vous avez permis aux entreprises les plus grandes de réduire leur part de financement aux plans de formation, et vous avez supprimé une partie de la mutualisation du financement, qui profitait aux salariés des petites entreprises.

Plutôt que d’assurer une réforme solidaire de l’impôt en instaurant une plus grande progressivité, vous avez maintenu durant un an le gel du barème de l’impôt sur le revenu.

Mme Isabelle Pasquet. Vous avez imposé une taxe aux retraités, censée financer la perte d’autonomie, mais dont les fruits sont en réalité détournés de sa mission première depuis sa création.

Vous avez augmenté la TVA et soumis à l’impôt sur le revenu des salariés la participation des employeurs au financement des contrats d’assurance santé complémentaire.

Plutôt que de garantir le droit à la retraite pour toutes et tous dès soixante ans, vous avez allongé la durée de cotisation en repoussant l’âge effectif de départ à la retraite à taux plein, tandis que vous réduisiez dans le même temps – déjà, serais-je tentée de dire ! – les cotisations patronales.

Vous avez repoussé une première fois – d’avril à octobre – la date de la revalorisation des retraites pour décider finalement, aujourd'hui, de les geler.

Chacune des mesures que vous avez consenties aux employeurs, chacun de vos renoncements au profit du monde de la finance, les salariés, les familles et les retraités en ont supporté les conséquences.

Et vous voudriez aujourd’hui, à travers ce projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, que soit amplifié ce mouvement ! Mais dans quelle voie, si ce n’est l’impasse libérale dans laquelle la droite, le baron Seillière, Laurence Parisot et les Gattaz père et fils ont conduit notre pays depuis plus de vingt ans ?

Le pacte de responsabilité dont il est question ici s’inscrit dans la lignée des mesures d’allégement de cotisations sociales consenties aux employeurs sur les bas salaires, que la loi Fillon a étendues. Et, comme il y a vingt ans, patronat et Gouvernement promettent que ces mesures, censées répondre à la question de la nécessaire réduction du coût du travail, seront accompagnées de contreparties. Là encore, la technique est rodée.

Souvenez-vous, dans les années quatre-vingt, Philippe Séguin – alors ministre de l’emploi – et Yvon Gattaz décidaient ensemble de supprimer l’autorisation administrative de licenciement. L’ancien président du CNPF affirmait alors, en échange : « Je m’engage à échéance de trois ans à créer 540 000 emplois. » Trois ans plus tard, la France comptait 200 000 chômeurs de plus…

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Et voilà !

Mme Isabelle Pasquet. Pour se justifier, le patronat se réfugiait alors derrière la crise économique et une demande atone.

L’histoire se répète et, comme dans les années quatre-vingt, les victimes sont du côté des travailleurs.

La technique proposée ici, à savoir la réduction d’une partie des cotisations patronales, n’est pas nouvelle et, au regard de la courbe du chômage depuis vingt ans, force est de constater qu’elle n’a pas fait la preuve de son utilité –, tout du moins pour ce qui est de favoriser l’emploi et donc de relancer l’économie, objectifs dont se recommandent gouvernements et patrons. Cette politique a toutefois réussi à réduire considérablement la part du financement des employeurs à la sécurité sociale !

Contrairement au discours erroné du MEDEF en la matière, le coût du travail, et notamment du financement de la sécurité sociale, ne tend pas à croître. Le poids des cotisations sociales des employeurs dans la valeur ajoutée a en effet baissé : il s'établissait à 18,2 % en 1992, mais à 16 % en 2006. Sans compter les 22 milliards d’euros d’exonérations de cotisations employeurs consenties chaque année, les 6 milliards d’euros du crédit impôt-recherche, les 6 milliards d’euros de baisse de la taxe professionnelle, les 20 milliards d’euros accordés au titre du CICE...

Et pour quels résultats, si ce n’est un tassement généralisé des salaires, une paupérisation grandissante des salariés et un chômage record, jamais atteint, même au plus fort de la crise économique ?

Parce qu’il reprend les dogmes du passé, critiqués par tous les observateurs sérieux, y compris la Cour des comptes, le pacte de responsabilité produira mécaniquement les mêmes effets.

Il conduira probablement les employeurs à continuer à verser aux travailleurs des salaires de misère afin de conserver le bénéfice des exonérations de cotisations sociales, et participera même à détruire des emplois qualifiés et rémunérateurs.

À l’occasion de la discussion du projet de loi de finances rectificative, la rapporteure générale à l’Assemblée nationale explique même, ce que confirme une étude des services de Bercy, que le pacte de responsabilité aura un effet récessif qui se traduira par la suppression de 60 000 emplois, ni plus ni moins ! Or, 60 000 emplois en moins, ce sont autant de salariés privés d’emplois à indemniser et de prestations sociales à servir, en échange d’une réduction des recettes sociales de l’ordre de 8 milliards d’euros, rien que pour l’année 2015.

Là encore, nous disposons en la matière d’un recul suffisant pour bien voir que les mesures d’allégement, d’exonération ou de suppression de cotisations sociales sont, dans les faits, inefficaces pour réduire le chômage. Les Économistes atterrés ont récemment rendu public une analyse du pacte de responsabilité évaluant le rapport entre l’efficacité et le coût des allégements Fillon, qui inspirent le pacte de responsabilité.

Pour eux, « en rapportant ces dépenses au volume d’emplois créés ou sauvegardés, on peut estimer le coût annuel pour les finances publiques de chacun de ces emplois à près de 75 000 euros, un coût exorbitant pour des emplois souvent à bas salaire, de qualité incertaine, et mis à la disposition des entreprises privées ». Cette somme astronomique est à rapprocher du budget consacré aux contrats aidés. En 2010, ils ont coûté 5 milliards d’euros pour 520 000 contrats conclus, ce qui porte le coût du contrat pour la collectivité publique et les comptes sociaux à tout juste 10 000 euros.

On peut faire la même démonstration avec le CICE. L’Observatoire français des conjonctures économiques a estimé l’effet de ce dispositif sur cinq ans à 150 000 emplois créés pour un coût annuel estimé à 20 milliards d’euros à partir de 2014.

Alors que notre pays connaît une situation économique douloureuse et que chaque dépense est comptée au point même d’imposer des dispositions injustes et antisociales comme le gel des retraites, il nous semble, au groupe CRC, qu’aucune mesure ne doit être prise dès lors qu’elle fragilise la sécurité sociale, le seul outil qui sert encore d’amortisseur social.

À moins que l’emploi et la baisse du coût du travail ne servent en réalité à dissimuler le projet réel du MEDEF, validé par le Gouvernement, d’une suppression totale du financement de la branche famille par les cotisations sociales…

La satisfaction de cette exigence ancienne du patronat, qui voit dans la suppression de la branche famille de la sécurité sociale une première étape de l’explosion du système tout entier, est déjà en bonne voie. Les gouvernements de Jean-Marc Ayrault et Manuel Valls y auront contribué en réduisant par deux fois le taux des cotisations alimentant cette branche – une première fois à l’occasion de la réforme des retraites de 2013 et une seconde fois dans ce PLFRSS pour 2014.

Pour justifier cette rupture majeure avec les avancées contenues dans le programme du Conseil national de la Résistance, qui constitue notre pacte social, le patronat avance l’idée que les prestations familiales seraient sans lien avec le travail.

Cet argument a été entendu et même assimilé par Michel Sapin, puisque ce dernier affirmait, lorsqu’il était ministre du travail : « Le fait que vous ayez des enfants n’est pas en lien avec votre travail, donc il n’y a pas de raison que ce soit financé par les entreprises. Tout le monde bénéficie de la politique familiale […] le seul critère est d’avoir des enfants. Il n’y a pas de raison qu’elle soit financée principalement par le travail ».

Et pourtant, lorsque l’on se penche sur les mécanismes de compensations des allégements consentis aux employeurs sur la branche famille, on s’aperçoit qu’ils pèsent majoritairement sur les salariés et reposent sur des ressources qui sont précisément en lien avec le travail et les salaires. On y trouve la CSG – elle représente 18 % de ces ressources – tandis que, parmi les autres impôts et taxes affectés, la plus grosse ressource – pour près d’un tiers en 2010 – se trouve provenir de la taxe sur les salaires, c’est-à-dire une taxe qui porte sur le travail, mais qui est acquittée par les salariés !

Comme le soulignent les Économistes atterrés, avec cette taxe sur les salaires, « une taxe qui porte sur le travail se [substitue] donc à des cotisations sociales employeurs au motif affiché que les prestations familiales ne devraient pas être financées par des prélèvements portant sur le travail ».

Cette politique de substitution du financement des salariés au financement des employeurs s’accompagne, dans le même temps, d’une remise en cause des prestations servies par la branche famille. Je pense naturellement aux modifications que vous avez apportées au quotient familial et aux tentations de certains de remettre en cause l’universalité des prestations familiales, pilier de notre politique familiale.

Et ce qui se joue aujourd’hui avec la branche famille n’est que le préambule de ce qui se passera demain !

L’application totale du pacte de responsabilité, qui permettra aux employeurs de réduire leur participation au financement de la sécurité sociale, s’accompagne d’un corollaire : la réduction des dépenses sociales de plus de 11 milliards d’euros.

Cette réduction conduira de fait à des mécanismes d’exclusion et de renoncement aux soins. Nos concitoyens seront poussés à opter pour des mécanismes de type assurantiel et commercial venant se substituer à la sécurité sociale, tant sur la santé ou l’assurance chômage que les retraites. Enfin, cette réduction accroîtra les inégalités sociales, alors même que les mesures d’exonération de cotisations sociales conduiront à la généralisation des « trappes à bas salaires », donc de la précarité.

La voie dans laquelle le Gouvernement et le MEDEF veulent nous conduire avec l’adoption de ce PLFRSS pour 2014 pourrait bien être irréversible : elle acte la priorité donnée au capital sur l’humain et contre l’humain ; elle substitue à notre pacte social un pacte d’irresponsabilité.

C’est pour toutes ces raisons, et non pour couper court au débat ou pour l’éviter, que nous avons choisi, mes chers collègues, de déposer cette motion tendant à opposer la question préalable, que je vous invite à adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Alquier, contre la motion.

Mme Jacqueline Alquier. Je veux dès l’abord annoncer que nous ne voterons pas cette motion, mais cela ne vous étonnera pas, chers collègues du groupe CRC : vous ne nous avez pas convaincus. À l’avalanche d’arguments contraires et critiques, nous aurions préféré des propositions soutenables.

Le texte que nous présente le Gouvernement est, de notre point de vue, un texte responsable. Car la responsabilité, c’est d’engager notre pays sur la voie de l’avenir et de préserver notre modèle social ; la responsabilité, c’est de l’engager sur la voie du redressement économique tout en privilégiant l’emploi et la cohésion sociale.

Nous connaissons les faits : en dépit des efforts déjà consentis, nous sommes confrontés à une situation très difficile de nos finances publiques et à une perte de compétitivité de nos entreprises qui pénalise l’emploi ainsi que notre redressement économique et budgétaire. Depuis 2002, le creusement des déficits budgétaires a entraîné une croissance ininterrompue de la dette. Nous héritons aujourd’hui de cette situation et l’Europe impose ses critères. Alors, nous n’avons pas le choix !

La stratégie économique courageuse du Gouvernement vise à inverser cette tendance. Un pacte de stabilité, assorti de la mise en œuvre d’un pacte de responsabilité et de solidarité et doublé d’un plan d’économies, s’impose à nous si nous voulons notamment assurer l’avenir de notre jeunesse et redonner confiance à nos concitoyens.

Baisse du coût du travail, baisse des impôts, justice dans les économies, tels sont les trois piliers de ce texte. Je n’y reviendrai pas, ils ont été développés par notre rapporteur général, mais permettez-moi de réaffirmer que la reprise économique et le retour de la croissance sont, en effet, la clé d’une baisse durable du chômage.

Afin de renouer avec la croissance, ce projet ambitionne de redonner à notre tissu économique la capacité de mieux affronter la concurrence grâce à l’allégement du coût du travail et à la relance de la consommation populaire. Ne nous en privons pas ! Cette démarche marque une véritable rupture avec la période précédente, qui a vu l’accroissement des déficits tout au long du quinquennat, des déremboursements massifs pour les assurés ainsi que le démembrement et la fragilisation de notre système de santé en général et de l’hôpital public en particulier.

Pour toutes ces raisons, nous rejetons cette motion tendant à opposer la question préalable. Nous voulons débattre de ce texte qui engage notre avenir. Ces échanges nécessaires nous permettront de préciser certains points et d’améliorer les dispositifs. Je pense notamment à l’amendement déposé par notre rapporteur général sur le régime de cotisations applicable aux particuliers employeurs.

En conclusion, face à une crise qui perdure et à un chômage de masse qui s’ancre, il nous faut soutenir le Gouvernement, qui se veut combatif et, comme Mme la ministre l’a dit en introduction, tenace et têtu. Pour réussir, nous avons besoin que l’ensemble des forces vives se mette en mouvement. Nul ne détient la vérité, mais notre jeunesse n’attend qu’une seule chose, qu’on lui fasse confiance pour créer, innover et faire avancer la France !

Mme Laurence Cohen. Encore faut-il en créer les conditions !

Mme Jacqueline Alquier. Aussi, en conformité avec la position de la commission des affaires sociales, nous ne pouvons que nous prononcer contre votre motion. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, mes chers collègues, la commission des affaires sociales a, bien entendu, émis un avis défavorable à l’adoption de cette motion tendant à opposer la question préalable. Je dis « bien entendu », parce que la commission des affaires sociales avait approuvé le rapport présenté sur le projet de loi.

M. Daniel Raoul. Parfait !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. La position du Gouvernement est identique, cela ne vous étonnera pas. J’ai indiqué, en répondant aux orateurs à l’issue de la discussion générale, qu’il ne s’agissait pas pour le Gouvernement d’opposer le progrès social, le soutien aux salariés et la prise en compte des enjeux de pouvoir d’achat à la compétitivité et au dynamisme de notre économie. Nous sommes là, je pense, face à un choix majeur pour l’avenir de notre pays.

Pour toutes les raisons que j’ai déjà évoquées, j’appelle à ne pas voter la motion présentée.

M. le président. Personne ne demande la parole ?...

Je mets aux voix la motion n° 66, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

J’indique que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n°224 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 208
Pour l’adoption 21
Contre 187

Le Sénat n’a pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Question préalable (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014
Discussion générale

11

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 16 juillet 2014, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 (n° 689, 2013-2014) ;

Rapport de M. Yves Daudigny, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 703, 2013-2014) ;

Avis de M. Jean-Pierre Caffet, fait au nom de la commission des finances (n° 701, 2013-2014).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures vingt-cinq.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART