M. Vincent Peillon, ministre. C’est une responsabilité particulière pour tous.

L’une des responsabilités du Gouvernement, comme l’a dit Bernard Cazeneuve, est de préparer l’avenir, après tant d’années où il a été sacrifié…

M. Alain Gournac. Encore la faute à Sarkozy ?

M. Vincent Peillon, ministre. … du fait de l’accroissement de la dette, mais aussi de l’abandon de l’école de la République. (Exclamations sur les travées de l'UMP. – Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. Vous êtes mauvais !

M. Vincent Peillon, ministre. L’école a toujours eu trois missions.

La première de ses missions est d’instruire. Or, en dix ans, la France a plongé dans toutes les évaluations internationales. Aujourd'hui, 25 % de nos élèves sont en difficulté. Des professeurs ne sont même plus remplacés. Ils ne sont pas formés. C’est le résultat des dix ans d’action de l’ancienne majorité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Vives protestations sur les travées de l'UMP.)

C'est la raison pour laquelle nous avons décidé non seulement de créer des postes – 60 000 en cinq ans –, mais également de former les enseignants et de revoir les programmes.

La deuxième mission de l’école est également importante : l’insertion professionnelle des jeunes. Lorsque la gauche a quitté le pouvoir en 2002, 10 % des jeunes étaient au chômage. C’est le cas de 25 % d’entre eux aujourd'hui, soit le taux que nous avions trouvé en 1997 ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) C’est pour cela que nous allons revoir la formation professionnelle, ainsi que le parcours d’orientation, d’information et de rapprochement avec les entreprises. Au mois de juin prochain, le Premier ministre et moi-même installerons le conseil éducation-entreprise.

Enfin, la troisième mission de l’école est de transmettre les valeurs qui nous permettent de vivre ensemble. Dans la tradition républicaine, politique et morale sont inséparables. Il faut obéir à la loi non pas uniquement par crainte du châtiment et sous la contrainte, mais mû par une obligation intérieure. Cette tradition commune a été perdue, oubliée. Or la morale laïque incarne précisément cela.

J’ai bien noté les craintes que suscitait l’instauration de ce nouvel enseignement.

En premier lieu, la morale laïque serait contraire aux orientations religieuses et aux choix de certains. C’est l’inverse ! Celui qui fut, il y a longtemps, président de cette assemblée, le grand républicain Jules Ferry, que ne quittait jamais L’Enseignement du peuple d’Edgar Quinet, avait dit de la laïcité qu’elle était la seule qui permettrait à toutes les convictions de vivre pacifiquement dans l’espace commun de la République. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du RDSE.)

Notre laïcité n’est pas antireligieuse. Elle est au contraire la garantie de la liberté de chacun. C’est celle-ci qui est en question aujourd'hui.

En second lieu, certains craignent l’instauration d’une morale d’État. Or notre tradition, c’est celle de l’individualisme républicain. Il n’y a pas de morale d’État. C’est précisément parce qu’il y a eu une morale laïque que nous avons été capables, ensemble, république sociale et république libérale, de nous lever au moment de l’affaire Dreyfus, quand la liberté et la justice se sont conjuguées.

Voilà ce que nous devons offrir aux enfants de la République. Le redressement économique que nous conduirons devra s’accompagner d’un redressement intellectuel et moral. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur la plupart des travées du RDSE.)

choix de vie des personnes en fin de vie

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Ma question s'adresse à tous et à toutes puisqu’elle concerne les modalités de la fin de vie. Nous y serons tous confrontés un jour !

M. Gérard Longuet. C’est vrai, nous y passerons tous !

Mme Corinne Bouchoux. Certains font le choix de finir leurs jours à domicile. Ceux qui en ont les moyens s’installent dans des résidences plutôt confortables. Mais beaucoup vont dans les EPHAD, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Or, nous le savons tous, même si les personnels des EPHAD font de leur mieux pour que la fin de vie se passe dans la dignité, ces établissements sont de qualité inégale.

Madame la ministre, comment envisagez-vous les choix de mode de vie possibles pour ceux qui ne peuvent plus rester seuls chez eux ? Que pensez-vous des projets du type Maison des Babayagas, à Montreuil, qui permettent, grâce à un projet construit en amont, de choisir une fin de vie digne, fondée sur la cohabitation entre générations ?

Ma question comporte un second volet, qui, malheureusement, concerne également tout le monde : nos proches comme nous-mêmes, un jour.

Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est de la mise en œuvre de la proposition 21 du programme de François Hollande de permettre à chacun de choisir une fin de vie digne ? Chacun sait que la loi Leonetti, qui a représenté un progrès pour certains, est insuffisante, comme l’a montré le rapport Sicard. Est-il possible d’organiser un débat serein sur la fin de vie assistée ? Quid de la demande de certains d’un droit au suicide assisté ?

Quel calendrier envisagez-vous, madame la ministre, sur cette question, qui nous touche au plus profond de nous-mêmes ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Mme Touraine, actuellement retenue à l’Assemblée nationale, où est examinée la proposition de loi de M. Leonetti visant à renforcer les droits des patients en fin de vie. Elle m’a priée de vous transmettre sa réponse.

Le Président de la République a confié une mission sur ce sujet, ô combien difficile, vous le savez, au professeur Sicard, lequel lui a remis son rapport au mois de décembre. La mission s’est appuyée sur dix débats citoyens, des auditions, des enquêtes, afin de recueillir la diversité des points de vue. Elle a fait une série de constats et formulé différentes propositions.

À la suite de la remise de ce rapport, le Président de la République a pris acte du constat établi sur l’organisation de la prise en charge de la fin de vie dans notre pays : formation insuffisante des médecins, faible développement de la prise en charge palliative des malades, problèmes de leur prise en charge à domicile.

Le Président de la République a indiqué que la ministre des affaires sociales et de la santé ainsi que la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche annonceraient des mesures visant à améliorer cette prise en charge.

Il a également pris acte de ce que, en dépit des apports indéniables de la loi Leonetti, la législation en vigueur ne permettait pas de répondre à l’ensemble des préoccupations.

Il a donc été décidé de saisir le Comité consultatif national d’éthique (Exclamations sur les travées de l'UMP. – M. Gérard Longuet s’esclaffe.), afin que celui-ci puisse se prononcer sur les trois pistes d’évolution de la législation qui ont été ouvertes : comment et dans quelles conditions recueillir et appliquer les directives anticipées émises par une personne en pleine santé ou à l’annonce d’une maladie grave ? Selon quelles modalités et conditions strictes permettre à un malade conscient et autonome atteint d’une maladie grave d’être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre un terme à sa vie ? Comment rendre plus dignes les derniers moments d’un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d’une décision prise à la demande de la personne ou de sa famille ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur quelques travées du groupe écologiste.)

politique du gouvernement

Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre. (Il est parti ! sur les travées de l’UMP.)

Par calcul politique et pour calmer une majorité incertaine, notamment au Sénat, le Gouvernement était prêt à amnistier les violences commises lors de conflits sociaux, en donnant pratiquement un « permis de casser ». (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Éliane Assassi. Les patrons, c’est l’emploi qu’ils cassent !

M. Rémy Pointereau. Dans cet hémicycle, il y a quelques semaines, Mme Taubira, garde des sceaux, n’avait pas hésité à dire, lors de l’examen de la proposition de loi portant amnistie des faits commis à l’occasion de conflits sociaux : « Nous sommes inspirés par le souci d’accomplir un acte politique, républicain, de concorde sociale. » Le Sénat avait adopté ce texte avec des voix socialistes.

Dans le même temps, vous cassez le droit de manifester (Mme Éliane Assassi s’exclame.), qui est l’un des droits fondamentaux dans toute démocratie, quand vous réprimez avec violence des manifestations pacifiques (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), comme celles qui ont permis à plusieurs millions de Français d’exprimer leur opposition au mariage pour tous et à ses conséquences.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Rémy Pointereau. Rappelez-vous les propos du candidat Hollande, qui promettait d’être « à l’écoute des Français » et avait dit : « Moi président, j’engagerai de grands débats citoyens ! » Il y aurait ainsi deux poids deux mesures dans l’écoute de la contestation : d’un côté, l’amnistie pour les casseurs…

Mme Éliane Assassi. Arrêtez avec cette caricature ! Vous, pendant des années, vous avez cassé des milliers d’emplois !

M. Rémy Pointereau. … et, de l’autre, la répression pour les manifestants pacifiques !

Hier matin, on a appris que, finalement, le Gouvernement ne soutenait plus cette proposition de loi communiste adoptée par le Sénat. Nous nous en réjouissons, mais vous désavouez ainsi votre propre majorité au Sénat !

C’est aussi hier matin qu’a été présenté en conseil des ministres le projet de loi dit « de moralisation politique ». Quel bel écran de fumée entre une réalité que vous ne voulez pas voir – ceux qui, parmi vous, ont failli ! – et l’opinion !

Et quelle coïncidence malheureuse entre votre projet d’amnistie sociale pour des casseurs et le projet de loi de moralisation politique ! Je vous rappelle, entre autres, l’affaire DSK (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), puis le mensonge éhonté de M. Cahuzac !

Or, dans le même temps, vous osez annoncer aux élèves qu’ils auront de nouveau des cours de morale ! (M. Marcel-Pierre Cléach applaudit.)

Quelle exemplarité ! Vous appliquez, comme toujours, le principe : « Faites ce que je dis, mais ne faites pas ce que je fais » !

Toutes ces contradictions, ces manipulations de l’opinion, ces mensonges ne peuvent asseoir un pouvoir ! (M. Roger Karoutchi acquiesce.) Au contraire, vous le discréditez ! Et, pour cacher vos erreurs, vous discréditez du même coup toute la classe politique, qui, dans sa grande majorité, fait son travail avec conscience.

M. André Reichardt. Très bien !

M. Rémy Pointereau. Les Français ne sont pas dupes. Ils veulent que vous vous attaquiez aux vrais problèmes économiques et sociaux,…

M. François Rebsamen. Que vous avez laissés !

M. Rémy Pointereau. … le chômage, le pouvoir d’achat, l’insécurité.

Mme la présidente. Je vous demande de conclure, mon cher collègue.

Mme Annie David. Le temps est dépassé !

M. Rémy Pointereau. Vous êtes au pouvoir depuis près d’un an. Quand allez-vous redonner de la consistance au mot « gouverner » ?

M. David Assouline. Coupez le micro, madame la présidente !

M. Rémy Pointereau. Quand allez-vous prendre vos responsabilités et arrêter de rejeter la faute sur les autres ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – Mme Sylvie Goy-Chavent applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, le Gouvernement n’a jamais été favorable à la proposition de loi portant amnistie des faits commis à l’occasion de conflits sociaux. (Ah ? sur les travées de l'UMP.)

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas vrai !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Et cela pour une raison précise : par construction, nous estimons que l’amnistie remet en cause les décisions de justice. Or nous ne sommes pas favorables à une telle remise en cause.

M. Alain Gournac. Ils ont changé d’avis !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Nous considérons au contraire – et vous feriez bien d’en prendre de la graine ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) – que seul le respect de la loi, le respect de la décision démocratiquement adoptée, doit s’imposer, quel que soit le sujet en cause. Ce respect de la loi républicaine est sans doute la meilleure façon de sortir notre pays de l’ornière dans laquelle vous l’avez mis à bien des égards ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Nouvelles protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Mais bien sûr !

M. Christian Cambon. Donneuse de leçons !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. S’agissant de la cohérence de l’action du Gouvernement, sachez, monsieur le sénateur, que le temps du bilan n’est pas venu. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Gérard Longuet. C’est une chance !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Et pourtant, je me prêterai de bonne grâce à cet exercice, tant il est vrai que je suis fière d’appartenir à un gouvernement qui a d’ores et déjà, onze mois à peine après son arrivée aux responsabilités, respecté la quasi-totalité des soixante engagements du candidat à la Présidence de la République François Hollande. (Mêmes mouvements.)

Non seulement ce gouvernement s’est fait un devoir de respecter les engagements pris, mais il fait front ! Car, en ce moment, gouverner, c’est faire front.

Monsieur le sénateur, je veux vous le redire, la cohérence de notre action, c’est celle qui consiste à redresser le pays dans la justice et dans l’égalité (Exclamations sur les travées de l'UMP.),…

M. Alain Gournac. Et dans la moralité…

M. André Reichardt. C’est mal parti !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … en lui donnant à la fois des perspectives et ce souffle qui lui a cruellement manqué au cours de ces dernières années, afin qu’il puisse se projeter à nouveau dans l’avenir avec confiance.

Sachez qu’il faut pour cela du courage,…

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. … ce courage qui vous a fait défaut ces dernières années ! (Mêmes mouvements.)

Oui, notre gouvernement a eu le courage de faire preuve de sérieux budgétaire.

M. Alain Gournac. Ouvrez les yeux !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Le premier poste budgétaire de l’État n’est plus le remboursement des intérêts de la dette : c’est l’éducation, c’est la justice, c’est la santé. Nous en sommes fiers ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Alain Gournac. Tout va bien, alors ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Oui, nous avons eu le courage de mener, contrairement à vous, la grande bataille de l’emploi (Vives protestations sur les travées de l'UMP.), en faisant confiance au dialogue social, que vous aviez piétiné.

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Des mots !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Nous sommes même allés plus loin, en adoptant un pacte de compétitivité très ambitieux – dont vous n’auriez même pas osé rêver ! –, en sécurisant les parcours professionnels, qui étaient devenus un serpent de mer (Exclamations sur les mêmes travées.) et en apportant des réponses à une jeunesse qui, sous votre gouvernance, se désespérait dans ce pays. (Protestations sur les mêmes travées de l'UMP.) De cela aussi nous sommes très fiers !

Enfin, le gouvernement auquel j’appartiens, mesdames, messieurs les sénateurs, a eu le courage de faire avancer la société, en adoptant des réformes d’égalité, de faire grandir la devise de la République : « Liberté, égalité, fraternité ».

Pour conclure mon propos, je vous poserai une question, monsieur le sénateur.

M. Éric Doligé. Ce sont les questions d’actualité au Gouvernement !

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Pour ce qui vous concerne, quelle est votre cohérence ? Aurez-vous le courage d’adopter les textes visant à intensifier la lutte contre la fraude fiscale, ceux qui imposeront les principes de probité et de transparence de la vie publique, ceux qui garantiront l’indépendance du Conseil supérieur de la magistrature ? Les électeurs vous attendent ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Vives exclamations sur les travées de l'UMP.)

filière de la « silver économie » à l'égard des personnes âgées

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Madame la ministre, votre ministère est celui des bonnes nouvelles.

M. Éric Doligé. Brosse à reluire !

M. Yves Daudigny. Très concrètement, vous avez annoncé hier, en marge de la réunion du Conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, des crédits nouveaux pour la médicalisation des établissements pour personnes âgées à hauteur de 100 millions d’euros, dont 15 millions qui viendront abonder les 147 millions votés et 85 millions sous forme d’anticipation d’engagement, ainsi qu’une enveloppe de 120 millions d’euros pour les plans d’aide à l’investissement 2013, soit, au total, 220 millions d’euros supplémentaires,…

M. Gérard Longuet. Qui paiera ?

M. Yves Daudigny. … qui contribueront également à réduire le reste à charge des personnes âgées séjournant dans ces établissements.

La deuxième bonne nouvelle, c’est le résultat effectif de votre action pour réduire la sous-consommation des crédits.

Ces deux bonnes nouvelles traduisent le changement radical de perspective et d’appréhension du vieillissement impulsé par votre ministère.

Le changement est en effet frappant entre le catastrophisme du gouvernement précédent (Encore ! sur les travées de l'UMP.), annonçant des coûts insupportables à la charge de la collectivité – on évoquait jusqu’à 34 milliards d’euros ! –, sans rien prévoir pour autant, et la vision d’avenir que vous portez aujourd’hui.

Madame la ministre, vous avez su voir les potentialités de croissance qui découlent de l’avancée en âge, de la prévention et de l’accompagnement de la perte d’autonomie,…

M. Alain Gournac. Formidable !

M. Yves Daudigny. … ainsi que le moteur économique que constituent ces secteurs, avec la création d’emplois non délocalisables dans les services à la personne, le développement des technologies et du numérique et leurs répercussions bénéfiques sur tous les secteurs d’activité.

M. Alain Gournac. C’est tout bon !

M. Yves Daudigny. Il est vrai que le secteur de la prise en charge de la perte d’autonomie ne connaît pas la crise, comme en témoignent les principaux groupes gestionnaires de maisons de retraite, qui connaissent une progression de 7 % à 20 % de leurs bénéfices.

M. Alain Gournac. Tout va bien !

M. Yves Daudigny. Madame la ministre, je vous remercie de bien vouloir nous préciser votre programme et nous dire en plus sur ce formidable challenge que représente la « silver économie »…

M. Alain Gournac. Magnifique !

M. Yves Daudigny. … pour l’avenir économique de la France et pour le bien-être de la population. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, vous avez raison, mon ministère est porteur d’avenir, d’innovation et de bonnes nouvelles.

Les 162 millions d’euros dégagés pour cette seule année 2013 en faveur de la médicalisation permettront non seulement de placer plus de personnels auprès des personnes âgées résidant dans des maisons de retraite,…

M. Gérard Longuet. Il n’y a pas d’argent !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. … mais aussi de créer plusieurs milliers d’emplois, ce dont vous pouvez vous réjouir, chers amis de l’opposition !

Cette bonne nouvelle n’est évidemment pas la seule. Nous devons faire en sorte que ce qui a été le plus grand progrès du XXe siècle, à savoir l’allongement de l’espérance de vie, soit aujourd'hui une chance pour notre pays et pour nos entreprises. Nous avons tous les atouts pour cela.

Des territoires sont déjà très engagés sur ce sujet, et ils sauront se saisir des nouvelles technologies. Le Gouvernement, pour qui la question de l’âge constitue une priorité, prépare, vous le savez, un projet de loi comportant un volet d’anticipation dont les entreprises seront, bien sûr, les partenaires. Par ailleurs, nous disposons d’un tissu industriel déjà très performant, avec plusieurs leaders mondiaux, en particulier dans le domaine de la domotique.

À cet égard, j’irai, au cours de mes déplacements, à la rencontre des dirigeants de toutes les start-up qui foisonnent et qui sont autant de monitrices d’innovation, portant un changement radical de la vision que nous pouvons avoir du vieillissement.

Pourtant, tout cela n’est pas suffisant. Il convient d’organiser ce secteur, en définissant des priorités, en impliquant tous les acteurs concernés et en trouvant des financements d’amorçage. C’est ce que nous avons fait hier, avec Arnaud Montebourg, en rencontrant à Bercy 700 partenaires de la « silver économie », cette économie liée à l’âge : les plus grandes entreprises, les experts, les décideurs, les représentants des territoires et les chercheurs universitaires.

Mme la présidente. Il vous faut conclure, madame la ministre.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Tout est en marche et, avec le concours de tous, je crois pouvoir le dire, nous avons aujourd'hui les moyens de faire de la « silver économie », qui connaît une croissance de 15 % aux États-Unis, un atout pour notre pays.

Oui, monsieur le sénateur, la révolution de l’âge est en marche, et nous la porterons tous ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

actions de groupe

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Fauconnier.

M. Alain Fauconnier. Madame la présidente, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il y a deux ans, sous le précédent gouvernement, la majorité de gauche du Sénat a adopté un amendement introduisant l’action de groupe dans le projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs. Cet amendement s’inspirait du rapport d’information des sénateurs Béteille et Yung, qui avait fait apparaître une grande lacune du droit français : l’absence de moyens de recours collectif à la disposition des consommateurs lésés.

Cette lacune autorise la persistance d’un déséquilibre entre le simple consommateur victime et l’entreprise coupable. Pourtant, dans divers pays, en Europe et ailleurs, les législateurs ont permis aux consommateurs victimes d’un même préjudice d’obtenir, par une mutualisation des moyens, un juste dédommagement. Bien sûr, lorsqu’il existe, un tel dispositif peut donner lieu à des dérives : c’est notamment le cas aux États-Unis, où l’application du principe du triple dédommagement entraîne parfois la faillite de l’entreprise responsable.

Quoi qu'il en soit, le précédent gouvernement s’est opposé avec la plus grande véhémence à cette disposition si nécessaire à la protection des consommateurs. De la sorte, il donnait satisfaction à ceux qui ont intérêt à ce que le consommateur reste sans défense face à des préjudices de plus en plus nombreux.

François Hollande, candidat à l’élection présidentielle,…

M. Alain Gournac. Le sauveur !

M. Alain Fauconnier. … avait exprimé sa volonté de mettre la justice « au service du droit, de la République et des Français »…

M. Alain Gournac. Une République exemplaire !

M. Alain Fauconnier. … par l’instauration d’une action de groupe telle que les citoyens victimes d’un même préjudice puissent obtenir réparation.

Le 14 novembre dernier, le Gouvernement a décidé en conseil des ministres la création d’une action de groupe à la française. Monsieur le ministre chargé de la consommation, je sais qu’après avoir saisi le Conseil national de la consommation, lancé une large consultation publique et étudié les nombreux rapports et avis publiés sur le sujet, vous vous apprêtez à présenter au Parlement un projet de loi introduisant l’action de groupe dans notre droit.

Mes deux questions portent sur la forme que vous entendez donner à cette action de groupe à la française.

Comment pensez-vous ouvrir la possibilité aux consommateurs ayant subi des dommages individuels de se coordonner pour obtenir une juste réparation ?

Comment, dans le contexte difficile que nous connaissons, répondre aux inquiétudes des entreprises à propos des excès des recours collectifs observés dans d’autres pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. – Mme Annie David applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Fauconnier, permettez-moi de prendre deux exemples significatifs.

Le 19 septembre 2000, le Conseil de la concurrence, devenu aujourd’hui l’Autorité de la concurrence, a sanctionné plusieurs banques pour une entente anticoncurrentielle dans le secteur du crédit immobilier ; ces banques ont été condamnées à hauteur de 1 milliard de francs, soit 160 millions d’euros. Le 1er décembre 2005, le Conseil constitutionnel a sanctionné trois opérateurs de la téléphonie mobile, cette fois aussi pour une entente anticoncurrentielle ; ces entreprises ont dû acquitter 534 millions d’euros. Ces deux pénalités ayant été versées directement dans les caisses de l’État, les seuls qui n’ont jamais été indemnisés pour le préjudice qu’ils ont subi, ce sont les consommateurs !

C’est la raison pour laquelle, des années durant, de nombreux responsables politiques ont souhaité combler cette lacune du droit français en créant une action de groupe à la française. C’est d’abord Jacques Chirac, candidat à l’élection présidentielle, qui a promis de la mettre en œuvre ; pour des raisons qu’il ne m’appartient pas de commenter, cela n’a pas été possible. C’est ensuite Nicolas Sarkozy qui a exprimé la même intention ; pour des raisons qu’il ne m’appartient pas de commenter, et qui étaient sans doute les mêmes que celles qui ont fait renoncer Jacques Chirac, il a choisi de ne pas agir…

Pour notre part, nous avons voulu inscrire la création des actions de groupe dans le projet de loi sur la consommation, qui sera présenté le 2 mai.