compte rendu intégral

Présidence de Mme Bariza Khiari

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Marie-Noëlle Lienemann,

Mme Catherine Procaccia.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour un rappel au règlement.

M. Jean Louis Masson. La conférence des présidents a fixé au 12 décembre la suite de la discussion de la proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités locales, déposée par notre collègue Éric Doligé.

Mme Nathalie Goulet. J’ai dû retirer mes amendements sur ce texte !

M. Jean Louis Masson. Il est de tradition au Sénat, lorsque l’examen d’un texte en séance publique est reporté de plus d’un mois, pour ne pas dire deux, de rouvrir le délai limite pour le dépôt des amendements. En deux mois, il peut en effet se passer bien des choses – la présentation du rapport Jospin en est une illustration récente –, et cet usage nous permet d’actualiser nos amendements.

Or, pour une raison que je n’arrive pas à comprendre, la conférence des présidents n’a pas accepté, cette fois-ci, de rouvrir ce délai. Tout en regrettant très vivement cette décision, je souhaite que ce point puisse être réexaminé lors de la prochaine réunion de la conférence des présidents.

Mme la présidente. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Sachez qu’une conférence des présidents se tiendra le 21 novembre et que le problème que vous venez de soulever lui sera soumis.

3

Mise au point au sujet d'un vote (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Troisième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2013

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion générale
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Article 14 (supprimé) (précédemment réservé)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013 (projet n° 103, rapport n° 107, avis n° 104).

Nous poursuivons l’examen des articles de la troisième partie concernant les dispositions relatives aux recettes et à l’équilibre général pour l’exercice 2013.

TROISIÈME PARTIE (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR L’EXERCICE 2013

Section 1 (suite)

Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement

Mme la présidente. Nous en sommes parvenus à l’examen des articles 14 à 15 ter et de l’article 20, ainsi que des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l’article 20, précédemment réservés à la demande du Gouvernement.

Troisième partie
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Articles additionnels après l'article 14 (précédemment réservés)

Article 14 (précédemment réservé)

(Supprimé)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 1 est présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales.

L’amendement n° 64 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le II de l’article L. 136-2 est complété par un 8° ainsi rédigé :

« 8° Les distributions ou les gains nets afférents à des parts de fonds communs de placement à risques, des actions de sociétés de capital-risque ou des droits représentatifs d’un placement financier dans une entité, constituée dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et dont l’objet principal est d’investir dans des sociétés dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché d’instruments financiers français ou étranger, ou d’une société qui réalise des prestations de services liées à la gestion de cette entité, donnant lieu à des droits différents sur l’actif net ou les produits du fonds, de la société ou de l’entité, et attribués en fonction de la qualité de la personne ; »

2° L’article L. 136-5 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phrase du premier alinéa du I est ainsi rédigé :

« Sous réserve des dispositions particulières mentionnées au présent article, la contribution portant sur les revenus mentionnés aux articles L. 136-1, L. 136-2, L. 136-3 et L. 136-4 est recouvrée (le reste sans changement) » ;

b) Au II bis, les mots : « , est établie, recouvrée et contrôlée » sont remplacés par les mots : « et la contribution portant sur les revenus mentionnés au 8° du II de l’article L. 136-2 sont établies, recouvrées et contrôlées » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 137-15, après les mots : « à la charge de l’employeur », sont insérés les mots : « ou de toute autre personne débitrice des sommes en cause » ;

4° Après le douzième alinéa de l’article L. 242-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Sont également exclues de l’assiette des cotisations mentionnées au premier alinéa les distributions et les gains nets mentionnés au 8° du II de l’article L. 136-2. » ;

5° La section 10 du chapitre 7 du titre III du livre Ier est abrogée.

II. – Les dispositions du I s’appliquent aux sommes versées à compter du 1er janvier 2013.

La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° 1.

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à rétablir l’article relatif à l’assujettissement au forfait social des plus-values des gestionnaires de fonds de capital-risque. Le régime social de ces revenus est indépendant de leur traitement en matière d’impôt sur le revenu.

Les Français ne comprendraient pas que certains revenus échappent au financement de la protection sociale, en proportion de leurs capacités contributives. S’il n’est pas douteux que les carried interests constituent une prise de risque des gestionnaires salariés des fonds communs de placement à risques sur leur épargne, il n’est pas moins contestable que cet intéressement à la performance est indissociable de leur contrat de travail. Les gestionnaires salariés ont potentiellement un accès aux plus-values de leurs fonds beaucoup plus favorable que celui des investisseurs externes. Il s’agit donc bien d’un dividende du travail.

Soumettre ces revenus aux cotisations sociales ne serait pas totalement justifié. Pour les revenus réalisés dans un cadre professionnel, mais non soumis à cotisations sociales, le régime applicable est celui du forfait social.

On voit mal comment l’intéressement, la participation ou la protection sociale complémentaire pourraient être soumis au forfait social, et non les carried interests, dont les gains sont sans commune mesure avec ces dispositifs. Le rétablissement de cet article permettrait donc d’inscrire au crédit du budget de la sécurité sociale 80 millions d’euros de recettes supplémentaires par rapport au texte adopté par l’Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 64.

M. Dominique Watrin. Le présent amendement, dont nous nous félicitons que le texte ait été repris par le rapporteur général, tend à rétablir l’article 14, malheureusement supprimé sur l’initiative du Gouvernement lors du débat à l’Assemblée nationale.

Mes chers collègues, je tiens à appeler votre attention sur l’importance de cet amendement. Si le Sénat décidait de l’approuver, l’article 14 aurait pour effet de soumettre au forfait social ce qu’il est convenu d’appeler les carried interests. Concrètement, il permettrait d’imposer à hauteur de 20 % les rémunérations versées aux gestionnaires de fonds communs de capital-risque, qui prennent généralement la forme d’un reversement aux dirigeants de la plus-value réalisée par le fonds d’investissement, sous la condition que l’investissement ait atteint un certain niveau de rendement défini au préalable.

En réalité, ces mécanismes ne constituent ni plus ni moins qu’une forme de rémunération indirecte du travail accompli par ces gestionnaires. Comment accepter, dès lors, que ces éléments de rémunération, qui s’apparentent peu ou prou à de l’intéressement, ne soient pas soumis au même taux de prélèvements sociaux que les quelques centaines d’euros que peuvent gagner les salariés au titre de la participation ou de l’intéressement ?

Ne pas rétablir cet article reviendrait à entériner le fait que, d’un côté, l’ensemble des rémunérations des salariés doit être soumis à contribution, ce que nous trouvons d’ailleurs légitime, et que, de l’autre, une part non négligeable des rémunérations des dirigeants, qui sont bien plus élevées, peut y échapper.

Les prétendus et autoproclamés « pigeons » ont déclaré que cette mesure était injuste, au motif que les carried interests interviendront au 1er janvier 2013 et seront donc imposables au titre de l’impôt sur le revenu. Pour ces privilégiés, l’acquittement de cet impôt vaudrait solde de tout compte. Les salariés qui, eux, payent l’impôt sur le revenu tout en s’acquittant de leurs cotisations sociales apprécieront !

Nous considérons que, quoi qu’il advienne, le Sénat doit aider le Gouvernement à porter cette mesure jusqu’à son terme, c’est-à-dire l’adoption définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Il y va de la justice sociale. Cette disposition permettra, en outre, d’inscrire 80 millions d’euros de recettes supplémentaires au crédit du financement de la sécurité sociale. Qui peut prétendre, au regard du déficit de nos comptes sociaux, que nous pourrions nous priver d’une telle mesure ?

Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter en faveur du rétablissement de cet article. Nous ferons ainsi la démonstration de la détermination de la majorité de gauche.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Il s’agit d’un sujet délicat.

Dans un premier temps, il nous avait semblé possible de demander à celles et ceux qui bénéficient de ce dispositif de contribuer davantage. Après avoir écouté – au passage, je n’ai pas le souvenir que le mouvement dit des « pigeons » ait porté ce sujet –, consulté, en particulier les conseillers économiques de nos ambassades en Europe, le Gouvernement s’est résolu à supprimer cet article, face aux risques, à notre avis toujours majeurs, de délocalisation de nos entreprises hors de nos frontières et, par voie de conséquence, de perte d’activité et de baisse de nos recettes, que celles-ci soient escomptées ou d’ores et déjà acquises.

Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que l’amendement de suppression de cet article que nous avons déposé lors du débat à l’Assemblée nationale se situe dans la droite ligne des dispositions qui avaient été adoptées dans le cadre du projet de loi de finances.

Dans un souci de cohérence, je ne peux donc qu’appeler, au nom du Gouvernement, la Haute Assemblée à rejeter ces deux amendements identiques, même si je comprends parfaitement les intentions légitimes de leurs auteurs et des partisans du dispositif qu’ils préconisent.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 et 64.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 28 :

Nombre de votants 346
Nombre de suffrages exprimés 346
Majorité absolue des suffrages exprimés 174
Pour l’adoption 175
Contre 171

Le Sénat a adopté.

En conséquence, l’article 14 est rétabli dans cette rédaction.

Article 14 (supprimé) (précédemment réservé)
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Article 15 (précédemment réservé)

Articles additionnels après l'article 14 (précédemment réservés)

Mme la présidente. L'amendement n° 67, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre 6 du titre 3 du livre 1er du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« De la contribution sociale sur les revenus financiers

« Art. L. 136-9. – L’ensemble des revenus financiers des personnes physiques et des personnes morales provenant des titres émis en France sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est égal à la somme du taux défini à l’article L. 136-8 applicable à la contribution sociale mentionnée à l’article L. 136-1, additionné aux taux des cotisations, à la charge de l’employeur et du salarié, prévues à l’article L. 241-1 et aux deuxième et quatrième alinéas de l’article L. 241-3, et du taux de la cotisation, à la charge de l’employeur et du salarié sous le plafond du régime complémentaire conventionnel rendu obligatoire par la loi.

« Sont exonérés de cette contribution sociale les livrets d’épargne populaire, les livrets A, livrets bleus, livrets et comptes d’épargne logement. Les plans épargne populaire courants, avant promulgation de la présente loi, en sont également exonérés pendant cinq ans. Les revenus des biens immobiliers autres que ceux utilisés pour l’usage personnel du propriétaire et de sa famille directe sont assujettis à la même cotisation que les revenus financiers.

« La contribution est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement mentionné à l’article 125 A du code général des impôts. Le produit de cette contribution est versé à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d’une retenue pour frais d’assiette et de perception. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.

« Les ressources des assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, décès et vieillesse) sont abondées par le produit de cette contribution. Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes assurances sociales de la sécurité sociale. »

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Nous proposons de corriger une injustice flagrante.

Si les revenus financiers qui bénéficient aux personnes physiques sont taxés – et il me semble que leur taxation a même été augmentée dans le projet de loi de finances rectificative que nous avons voté cet été –, ce n’est toujours pas le cas pour les revenus financiers liés aux placements des entreprises. Or ces placements n’ont cessé d’occuper une place de plus en plus importante dans les bilans financiers des entreprises. Plus de 107 % en dix ans ! Cela représente deux fois le montant du produit intérieur brut. Comme on pourrait le dire trivialement, il y a donc de la marge.

Cette logique de financiarisation de l’économie « sans entraves » doit être, si ce n’est stoppée, du moins découragée et donc taxée.

L’économie virtuelle, qui se nourrit elle-même de la spéculation, est de plus en plus détachée de l’économie réelle. C’est un danger. Nous avons tous pu le constater puisque c’est une des raisons de la crise de 2008. Ce sont en effet les choix spéculatifs des banques qui gèrent les produits financiers des entreprises qui sont, en partie, la cause de cette dernière.

Cette gangrène empêche le développement de l’économie réelle, dont les deux éléments principaux devraient rester l’investissement productif et les salaires. Ce ne sont pas ces choix qui ont été faits, notamment par les grandes entreprises, et nous en payons aujourd'hui les conséquences, y compris en termes de perte de compétitivité. Quand on investit deux fois moins dans la modernisation de l’outil de travail, dans la formation et les salaires que dans la spéculation, on sait où cela mène, et on le voit aujourd'hui.

Nous comprenons que la logique qui sous-tend cet amendement percute de plein fouet les récentes réorientations du Gouvernement en matière de compétitivité, mais, puisque certains cherchent des contreparties aux avantages octroyés aux entreprises, en voilà une !

Notre amendement est un premier pas pour réorienter les profits vers la solidarité. En soumettant ces actifs à une contribution importante, mais en rien confiscatoire, nous entendons contraindre les entreprises à sortir de la logique qui nous a conduits dans le mur. Nous souhaitons aussi les inciter à réinvestir la richesse produite dans l’entreprise elle-même.

Comment ne pas imaginer les effets que l’application immédiate de notre amendement aurait sur la vie économique ? Il serait une arme dissuasive pour conduire les entreprises à faire d’autres choix de placements et à cesser d’investir dans les revenus financiers plutôt que dans l’investissement productif. De plus, il rapporterait des sommes importantes qui permettraient de contribuer à l’équilibre de nos comptes sociaux, et cela sans avoir besoin de recourir à une taxation supplémentaire, sur les retraites par exemple.

Selon un vieux slogan de la prévention routière, « boire ou conduire, il faut choisir ». Eh bien, nous sommes à un carrefour : continuer de spéculer ou contribuer à la solidarité nationale, il faut choisir ! Notre groupe fait ce dernier choix, et nous espérons que nos collègues de gauche nous suivrons dans ce juste combat pour une juste répartition des richesses.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement, qui vise à instituer une CSG sur les revenus de placement des personnes morales, ouvre une réflexion utile sur le financement de la protection sociale.

Cela étant, nous avons déjà eu l’occasion de signaler que nous attendions le rapport du Haut Conseil du financement de la protection sociale et que nous étions encore dans l’appréciation de divers éléments. La commission souhaite donc connaître l’avis du Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable, non parce qu’il condamne l’intention qui a conduit au dépôt de cet amendement ou le fond de celui-ci, mais parce qu’une mission a été confiée au Haut Conseil du financement de la protection sociale, dont les conclusions sont attendues pour la fin de l’année ; il ne nous paraîtrait pas loyal à l’égard de sa présidente, Mme Elbaum, et de celles et de ceux qui travaillent à ses côtés, de contraindre par la loi, car cela reviendrait à cela, sa réflexion.

Lorsque ce rapport aura été remis et les préconisations faites, le Gouvernement comme le Parlement retrouveront leur entière liberté d’action à l’égard desdites préconisations. Mais, dans l’attente, il serait sage que les membres du Haut Conseil n’aient pas le sentiment qu’il leur est demandé de travailler inutilement, sentiment contre lequel je vous mets assez vigoureusement en garde, mesdames, messieurs les sénateurs, car, selon toute probabilité, il pourrait entraîner l’arrêt des travaux, la démission, voire la dissolution de cette instance.

Parce qu’il souhaite éviter de telles issues, le Gouvernement demande donc le retrait de l’amendement et, à défaut, son rejet.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 66, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen et David, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 14

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières

« Art. L. 245-17. – Les revenus financiers des prestataires de service visés au livre V du code monétaire et financier entendus comme la somme des dividendes bruts et des intérêts nets reçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26,8 %.

« Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, à l’exclusion des prestataires visés au premier alinéa, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution sociale dont le taux est fixé à 26,8 %.

« Les contributions prévues au présent article ne sont pas déductibles de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

« Un décret fixe les taux de répartition de ces ressources entre les différentes branches de la sécurité sociale. »

II. – L’article L. 213-1 du même code est ainsi modifié :

1° Après le 5° bis, il est inséré un 5° ter ainsi rédigé :

« 5° ter Le recouvrement de la contribution mentionnée à l’article L. 245-17 ; » ;

2° Au 6°, après la référence : « 3° », les mots : « et 5° » sont remplacées par les mots : « , 5° et 5° ter ».

III. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Cet amendement constitue, avec celui visant à instaurer une modulation des cotisations sociales que nous avons déjà examiné, le socle de nos propositions en matière de financement de la protection sociale.

Il s’agit pour nous de mettre un terme aux errements provoqués par la financiarisation de l’économie, laquelle conduit à ce qu’une part toujours grandissante des richesses créées par les entreprises n’est destinée ni à l’économie réelle, ni aux salaires, ni à l’investissement des entreprises, mais à la rémunération de la rente et à l’acquisition par les sociétés elles-mêmes de revenus financiers, de nature souvent spéculative. Conscients donc des risques que ces dérives font peser sur l’emploi et la sécurité sociale, nous proposons d’instaurer une nouvelle cotisation sociale sur les revenus financiers des entreprises et des institutions financières – en fait, d’aller chercher l’argent là où il est.

Faut-il préciser que ces revenus échappent aujourd’hui à toute forme de contribution sociale ? Il s’agit pourtant de sommes colossales, comme l’attestent les comptes de la nation en 2010 publiés par l’INSEE, qui évalue à 317,9 milliards d’euros les revenus financiers des entreprises et des banques.

Pour être plus précis, cette somme se décompose ainsi : 218,4 milliards d’euros au titre des produits financiers des sociétés non financières, c’est-à-dire les dividendes reçus et les intérêts perçus par les sociétés non financières, et 99,5 milliards d’euros de revenus financiers des sociétés financières, qui correspondent quant à eux aux dividendes reçus et au solde des intérêts versé et perçus.

Démonstration est faite qu’en réalité, contrairement à ce que certains voudraient nous faire croire, l’économie n’est pas atone, en tout cas pas atone pour tout le monde ! Les entreprises ont d’importantes ressources financières, dont l’utilité sociale est cependant toute relative aujourd'hui.

L’instauration de cette cotisation, sur la base du taux commun des cotisations sociales, c'est-à-dire du taux appliqué aux revenus du travail, dégagerait d’importantes ressources, soit plus de 41 milliards d’euros pour la branche maladie, plus de 26 milliards d’euros pour la branche retraite et plus de 17 milliards d’euros pour la branche famille.

Ces nouvelles ressources, dont on s’est jusqu’à présent privé, seraient certainement les bienvenues dans la période actuelle non seulement pour lutter contre le déficit de la sécurité sociale, mais surtout pour animer une politique sociale dynamique répondant aux besoins sociaux. Elles contribueraient probablement aussi à réorienter l’activité économique vers un autre type de développement social et écologique.

Il s’agit donc d’un amendement de fond majeur, que l’on pourrait qualifier aussi d’amendement structurel radical, dont nous pensons qu’il apporte une réponse pertinente, qui devrait au moins être étudiée comme piste et appeler de premiers engagements pour viser un nouveau type de croissance réelle.

Le développement des ressources humaines constitue selon nous un type de développement économique et social qu’il est urgent de mettre en place.

En conclusion, je me référerai à Jean-Paul Delevoye – on voit que mes références ne sont pas exclusives –, qui fut, comme je le suis moi-même, conseiller général du Pas-de-Calais, et qui disait : à une époque où la richesse était agricole, on a créé la taxe foncière ; ensuite, il y a eu la révolution industrielle, et on a créé une taxe professionnelle ; aujourd'hui, on voit bien que la richesse est d’abord financière ; eh bien, taxons cette richesse pour la rendre utile à toute la société !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Comme vient de l’indiquer M. Watrin, cet amendement est lourd de conséquences puisqu’il a pour objet d’assujettir les revenus et produits financiers des entreprises aux cotisations sociales patronales, ce qui représenterait 41,645 milliards d’euros pour la branche maladie, soit 13,1 %, 26,386 milliards d’euros pour la branche retraite, soit 8,3 %, et 17,167 milliards d’euros pour la branche famille, soit 5,4 %. Les recettes envisagées sont, de toute évidence, à la hauteur de l’augmentation des prélèvements obligatoires que propose le groupe CRC dans ses différents amendements.

Compte tenu du poids de la pression fiscale induite, la commission souhaite le retrait de l’amendement, contre lequel elle émettra à défaut un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 66.

(L'amendement n'est pas adopté.)

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Articles additionnels après l'article 15 (précédemment réservés)

Article 15 (précédemment réservé)

I. – L’article L. 133-7 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Les quatre premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« L’ensemble des cotisations et contributions sociales dues au titre des rémunérations versées aux salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail et aux personnes mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime sont recouvrées sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations assises sur les salaires, respectivement, du régime général de sécurité sociale et du régime de protection sociale des personnes salariées des professions agricoles. » ;

2° Au cinquième alinéa, la référence : « et à l’article L. 351-21 du code du travail » est supprimée et les mots : « desdites cotisations et contributions sociales » sont remplacés par les mots : « des cotisations d’origine légale ou conventionnelle qui leur sont dues » ;

3° Les trois derniers alinéas sont supprimés.

bis (nouveau). – Après le I de l’article L. 241-10 du même code, il est inséré un I bis ainsi rédigé :

« I bis. – Chaque heure de travail effectuée par les salariés mentionnés à l’article L. 7221-1 du code du travail ouvre droit à une déduction forfaitaire de la cotisation patronale due au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès dont le montant est fixé par décret. Cette déduction n’est cumulable ni avec aucune exonération de cotisations sociales, ni avec l’application de taux ou d’assiettes spécifiques ou de montants forfaitaires de cotisations. »

ter (nouveau). – L’article L. 741-27 du code rural et de la pêche maritime est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Les I et I bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale sont applicables aux rémunérations versées aux personnes mentionnées au 2° de l’article L. 722-20 du présent code, employées par des particuliers pour la mise en état et l’entretien des jardins, et au 3° du même article. »

II. – Le I s’applique aux modalités de calcul des cotisations et contributions sociales dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2013.

III (nouveau). – Un an après la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’impact de cette mesure sur l’emploi auprès des particuliers employeurs.