M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, comme l’a souligné le Premier ministre le 7 novembre dernier, dans le contexte économique et financier difficile que nous connaissons, chacun, j’y insiste, doit être au rendez-vous de la responsabilité. Le redressement des finances publiques est plus que jamais une priorité pour le Gouvernement, et pas seulement pour lui.

Le budget que je présente au titre de la mission « Travail et emploi » s’inscrit dans cette logique. D’une part, il participe à l’effort de réduction des finances publiques, et, d’autre part, il nous donne les moyens nécessaires de soutenir les priorités de notre politique de l’emploi.

Les moyens pour agir, les outils de notre politique de l’emploi sont intégralement préservés. Je le répète, nous avons les mêmes moyens d’agir en 2012 qu’en 2011.

Bien sûr, on peut s’évertuer à dire du mal de ce budget avant même que ne s’engage le débat : j’ai eu vent des critiques – je lis les dépêches AFP – du parti socialiste. Comme vous connaissez tout, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité, vous avez le droit de tout dire !

Les crédits de la mission semblent diminuer. Toutefois, si l’on prend la peine d’examiner d’où nous sommes partis et à quoi correspond la disparition des crédits, cette baisse s’explique par la fin du plan de relance et la suppression de certaines niches fiscales.

D’un côté, vous nous demandez de supprimer des niches fiscales, et de l’autre, lorsque nous le faisons, vous nous dites, l’année d’après, que notre budget baisse. Il faudrait savoir ! Je revendique la cohérence de nos choix, je les assume et je les explique. Je demande simplement à la majorité sénatoriale de faire preuve de la même cohérence.

M. François Patriat, rapporteur spécial. Ce ne sont pas les bonnes niches !

M. Xavier Bertrand, ministre. Vous le savez, la très forte augmentation des crédits de 2009 et de 2010 était liée à la mise en place d’un plan de relance qui était, par définition, temporaire, avec des moyens exceptionnels.

Les mesures mises en place n’avaient pas vocation à être pérennes. D’ailleurs, qu’on soit de gauche, de droite ou du centre, on sait ce que sont des crédits exceptionnels.

Ces mesures ont été arrêtées dans la LFI pour 2011, alors que nous avions encore près de 700 millions d’euros de dépenses liées à la relance. Ces dernières ne seront évidemment plus réalisées l’an prochain.

Ensuite, nous engrangeons, sans mesure supplémentaire, les économies liées aux décisions – pas toujours faciles à prendre – que nous avons assumées l’an dernier : la suppression des niches sur les services à la personne et des exonérations de charges pour les plateaux-repas restaurateurs.

J’ai entendu tout à l’heure M. Patriat nous reprocher de les avoir supprimées : je ne suis pas sûr qu’il les ait votées à l’époque. Vous ne les votez pas, on les supprime, et vous nous en faites le reproche ? Ah non !

M. François Patriat, rapporteur spécial. Ce n’est pas ce que nous avons dit !

M. Xavier Bertrand, ministre. Un peu de cohérence faciliterait votre lecture de ce budget.

Cela permet en tout cas près de 300 millions d’euros d’économies cette année. La suppression de ces seules exonérations a permis de réaliser une économie sur le budget de l’emploi de près de 750 millions d’euros en deux ans ! Ces mesures sont la preuve que la réduction de la dépense publique est possible.

Que certains nous reprochent ensuite d’avoir fait ce qu’ils nous demandaient, j’ai du mal à le comprendre. Pour ma part, en tout cas, j’assume mes choix.

Enfin, nous enregistrons également les gains liés à des dispositifs en extension, comme les préretraites publiques, l’allocation équivalent retraite ou l’allocation de fin de formation. Cela explique environ 250 millions d’euros de baisse.

La diminution des crédits est donc de 1,2 milliard d’euros, mais elle est uniquement liée à des décisions du passé. J’ai pour 2012 les moyens d’agir comme en 2011.

Nous mettons donc l’accent sur nos priorités. Lorsqu’on prend en compte la réalité du budget, qu’on en a une bonne lecture, on constate que, non seulement nous maintenons les moyens, mais nous nous donnons la possibilité de les augmenter.

Nous avons tout d’abord voulu donner à tout le monde la chance d’intégrer le marché du travail, en donnant une priorité aux chômeurs de longue durée et aux jeunes.

Avec Nadine Morano, j’ai souhaité augmenter la proportion de jeunes en alternance que l’entreprise doit obligatoirement former : elle passe, dès cette année, de 3 % à 4 % dans les entreprises de plus de 250 salariés.

Nous avons signé cet été des contrats d’objectifs et de moyens avec les régions pour développer l’apprentissage. En effet, quand on travaille ensemble, on peut être plus efficace.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Combien a mis l’État ? Combien ont mis les régions ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous avons mis 1,7 milliard d’euros sur la table et nous avons demandé aux régions d’en faire autant. Au moment où je vous parle, quinze contrats d’objectifs et de moyens ont été signés, la totalité de ces contrats devant l’être d’ici à la fin de l’année.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Avec quels moyens vont-ils être financés ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Nous avons aussi permis aux jeunes de commencer une formation en CFA alors même qu’ils n’auront pas trouvé tout de suite leur employeur. Depuis le début de l’année, les contrats en alternance sont en progression de 7,3 % ; cela fait 15 000 jeunes supplémentaires qui, plutôt que de connaître le chômage, suivent une formation par alternance. Il s'agit d’un véritable succès.

Le nombre de demandeurs d’emploi de moins de 25 ans a reculé de 2 % en un an. Je ne vais pas crier victoire, mais je préfère une baisse de 2 % à une augmentation de 2 % ou de 20 %. Je suis un pragmatique, je l’assume.

Nous avons aussi stabilisé les moyens des missions locales – 178 millions d’euros –, du fonds pour l’insertion professionnelle des jeunes et des écoles de la deuxième chance. Certains redoutaient que nous supprimions ces moyens. Non, ils sont bel et bien maintenus !

Le deuxième axe d’effort, c’est de permettre à ceux qui perdent leur emploi de rester en activité grâce aux contrats aidés. Cela a toujours été ma position, peut-être parce que je suis élu local. Nous avons en tout cas budgété 340 000 contrats aidés pour 2012, c'est-à-dire que nous avons reconduit ce qui était prévu dans la loi de finances pour 2011.

Nous comptons, cette année encore, sur les conseils généraux pour mobiliser les contrats aidés au profit de bénéficiaires du RSA. Le principe est très simple : plutôt que de verser au bénéficiaire du RSA sa seule indemnisation, il vaut mieux que celui-ci bénéficie d’un contrat aidé, cofinancé par l’État. En effet, cela coûte moins cher au conseil général et cela ramène vers l’emploi le bénéficiaire du RSA.

Le troisième axe de notre action est de permettre aux personnes les plus fragiles de s’insérer dans l’emploi.

Nous avons poursuivi nos efforts pour favoriser l’insertion dans le monde du travail des personnes handicapées en budgétant 1 000 aides au poste supplémentaires, dans les entreprises adaptées. Cette enveloppe, qui est en progression, permettra de prendre en charge 20 535 travailleurs handicapés en 2012.

Enfin, dans la situation actuelle, nous avons besoin du service public de l’emploi le plus efficace possible. Cela passe par des moyens, comme je l’ai dit lors de mon audition devant la mission sénatoriale qui a travaillé sur ces questions – je salue son président et son rapporteur ici présents. D'ailleurs, si nous nous retrouvons sur cette idée, c’est que la feuille de route qui a été tracée est de bon sens. Elle permet de rapprocher le service public du terrain et de déconcentrer davantage les moyens d’agir. Nous allons maintenir notre effort financier de 1,36 milliard d’euros par an sur les trois ans qui viennent.

Cet effort passe aussi par la qualité du service en donnant de nouvelles orientations stratégiques à Pôle emploi. J’ai rencontré le 25 octobre dernier les membres du conseil d’administration de cette structure et nous partageons l’essentiel des orientations qui doivent être arrêtées.

Ce que j’attends de la part de Pôle emploi, c’est un accompagnement personnalisé et de la réactivité. Je souhaite que l’on donne plus de marge de manœuvre aux équipes de terrain ; cela implique plus de souplesse dans l’organisation et dans la prise de décision, pour que les agences puissent répondre plus rapidement et plus facilement aux besoins qu’elles détectent chez les demandeurs d’emplois ou les entrepreneurs.

Surtout, je veux que le service public de l’emploi fasse plus pour ceux qui en ont le plus besoin. Disons les choses clairement : on n’a pas besoin du même accompagnement selon que l’on est un chômeur de longue durée, que l’on est au chômage depuis un an et demi ou que l’on est à la recherche de son premier emploi ou encore au chômage depuis un mois et demi. Il faut mettre en place un accompagnement personnalisé, une certaine forme de sur-mesure. C’est ce que je revendique, et cela s’appelle la souplesse.

Avec ce budget, nous avons voulu tenir compte des conséquences de la crise. Celle-ci n’est pas finie, loin de là, mais nous voulons nous donner les moyens de lutter contre le chômage même si ce n’est pas facile.

Mesdames, messieurs les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles vous siégez, vous le savez pertinemment, pour recevoir dans vos permanences des élus, des maires, qui vous interrogent aujourd’hui sur l’emploi : personne n’a de baguette magique, mais nous avons réussi, dans notre pays, à maîtriser l’augmentation du chômage, qui reste bien inférieure à celle des autres pays.

Lorsque l’on s’ausculte – permettez au ministre de la santé de s’exprimer en cet instant ! –, on voit ce qui ne va pas, mais lorsque l’on se compare, on constate que la France a mieux résisté que la plupart de ses voisins. Il ne s’agit pas de se décerner un quelconque satisfecit, mais il ne faut pas non plus sombrer dans le pessimisme.

Je répondrai brièvement aux différents orateurs qui se sont exprimés.

Monsieur Jean-Pierre Godefroy, vous verrez que les moyens pour financer les 340 000 contrats aidés sont pleinement détaillés dans les documents budgétaires. (M. Jean-Pierre Godefroy manifeste son scepticisme.) Ils sont bel et bien là. Il n’y a pas de subterfuge qui viserait à déporter les dépenses de l’État vers les collectivités locales.

L’idée que j’ai exposée aux conseils généraux, notamment, cet été, au président de l’Assemblée des départements de France et à Yves Daudigny, qui est membre du bureau de l’ADF, c’est qu’il est plus intéressant pour les conseils généraux de cofinancer un contrat aidé que de payer un RSA. Ils supportent une dépense obligatoire pour les bénéficiaires du RSA qui leur revient aujourd’hui à 467 euros par mois. S’ils cofinançaient un contrat aidé avec l’État, cela leur reviendrait à 411 euros par mois. Vérifiez, c’est la réalité ! Les départements de droite comme de gauche en sont convenus.

Cela étant, des conventions ont été signées. Il est préférable qu’elles soient appliquées ! Je demande aux départements qui ont signé des conventions de les honorer, non pour me faire plaisir mais parce que cela constitue un enjeu pour l’emploi. Aujourd’hui, un certain nombre de départements – nous sommes pourtant à moins d’un mois et demi de la fin de l’année – n’ont pas encore engagé tous les efforts en la matière. Je vous le dis très franchement, ces départements sont de sensibilités politiques diverses, même si, je dois le reconnaître, une tendance est plus représentée que les autres…

Madame Caroline Cayeux, vous l’avez signalé, l’IAE, l’insertion par l’activité économique, est pour nous une priorité. Je tiens aussi à dire que, en tant que maire, vous êtes régulièrement engagée sur ces questions. Les moyens de l’IAE ont été intégralement préservés.

Nous avons aussi préservé la majoration pour les chantiers d’insertion, et nous le faisons cette fois de manière durable.

S’agissant des maisons de l’emploi, que nous aurons l’occasion d’évoquer de nouveau au moment de l’examen des amendements, une évaluation aura bien lieu l’an prochain. Un autre sénateur picard, Pierre André, est très en pointe sur ces questions, qui, je le sais, vous tiennent également à cœur. Je crois d'ailleurs savoir que vous avez invité le ministre du travail et de l’emploi à venir visiter la maison de l’emploi de votre ville.

Madame Laborde, s’il y a une baisse historique des crédits de la mission pour 2012, c’est parce qu’il y avait eu précédemment une hausse historique due au plan de relance. Ce n’est pas un subterfuge, ni un artifice, c’est tout simplement la réalité de ce qui était prévu, de mesures qui devraient prendre fin.

Nous avions l’an dernier, c’est vrai, un budget plus important, mais cela ne veut pas dire que les crédits engagés en 2011 ne peuvent pas être reconduits en 2012. Et si l’on parle de l’un, il faut aussi parler de l’autre, de la façon dont on adapte ce budget. Quand nous supprimons des niches sociales, comme nous l’avons fait l’an dernier, monsieur Patriat, nous sommes cohérents par rapport aux mesures qui avaient été décidées.

Vous parlez de sous-budgétisation en ce qui concerne les contrats aidés. Permettez-moi de vous rappeler que le montant des crédits inscrits est le même que l’an dernier et que nous avons même obtenu davantage, notamment avec les contrats d’accompagnement dans l’emploi, qui sont cofinancés.

J’y insiste, nous pouvons prévoir pour l’année prochaine une politique d’accroissement de ces dispositifs, comme nous en avons connu une en 2011. Vous le savez, le contrat aidé est non pas la panacée, mais un moyen de remettre le pied à l’étrier. Aujourd'hui, nous donnons la priorité à ces contrats, car il est difficile d’espérer qu’une personne ayant été au chômage pendant très longtemps puisse retrouver seule, sans ce dispositif, du travail. Simplement, dans le cadre de ce contrat, la formation doit être une obsession, et cela dès le premier jour.

Messieurs Patriat et Jeannerot, je vous invite à lire plus attentivement les documents budgétaires. Cela vous évitera de faire des raccourcis malencontreux, auxquels je dois ensuite longuement répondre.

Le fonds de solidarité ne contient pas seulement les moyens de l’allocation de solidarité spécifique, l’ASS ; il concerne aussi l’allocation équivalent retraite, l’AER, l’allocation de fin de formation, l’AFF, et l’allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation, l’AFDEF, issues notamment du plan de relance.

En 2011, les dépenses de ce fonds représentent 3 milliards d’euros, répartis entre 2,2 milliards d’euros pour l’ASS et 800 millions d’euros pour les anciennes cohortes d’AER, d’AFF et d’AFDEF. Les dépenses d’ASS sont toujours budgétées à 2,2 milliards d’euros pour 388 000 bénéficiaires. Mesdames, messieurs les sénateurs, si l’un d’entre vous doutait de ma parole, qu’il aille vérifier à la page 45 du bleu budgétaire !

Monsieur Dassault, je vous cherchais du regard à droite de l’hémicycle. Je vous trouve à gauche, car vous siégez au banc de la commission, en tant que rapporteur spécial. Il est vrai que vous êtes beaucoup plus inclassable qu’on peut le penser ! (Sourires.)

M. Jean Desessard. Il siégera bientôt chez les communistes !

M. Xavier Bertrand, ministre. Je sais que vous n’êtes pas un fanatique des allégements de charges. Toutefois, une politique de suppression de ces derniers entraînerait aujourd'hui la disparition de centaines de milliers d’emplois. Je ne pense pas que nous ne puissions prendre de telles mesures dans la situation actuelle.

Selon moi, le problème vient du coût du travail dans notre pays. Voilà pourquoi je prône le changement de l’assiette d’une partie du financement de la protection sociale, car, si nous voulons produire davantage en France, nous devrons – j’en suis persuadé – continuer à réduire le poids des charges pesant sur le travail.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Très bien !

M. Xavier Bertrand, ministre. J’aimerais que vous me citiez, monsieur Jeannerot, les agences qui ont vu leur budget augmenter. Pour ma part, je n’en connais qu’une : l’AFSSAPS, pour des raisons particulières. Les budgets de toutes les autres sont en baisse, excepté Pôle emploi, dont les crédits et les personnels restent stables. Nous pouvons essayer de faire mieux avec les mêmes moyens, dans le cadre de la déconcentration souhaitée par les uns et les autres.

Madame Laborde et monsieur Vanlerenberghe, comme le Premier ministre et Éric Woerth s’y étaient engagés, le Gouvernement a souhaité prendre en compte la situation particulière des demandeurs d’emploi qui auraient pu être concernés par l’AER si ce dispositif n’avait pas été supprimé avec la réforme des retraites. Nous avons décidé de mettre en place, à titre dérogatoire, une allocation transitoire de solidarité, ou ATS. Institué par un décret publié le 3 novembre dernier, ce dispositif nous permet de couvrir 11 000 personnes. Certes, cette mesure a un coût, qui devrait s’élever à environ 40 millions d’euros, mais elle permet d’éviter une injustice.

À M. Watrin, je voudrais dire qu’il n’y a pas de plan d’austérité pour la mission « Travail et emploi ». Je l’ai dit et je pourrais le démontrer de nouveau lors de la discussion des amendements, il s’agit simplement de la fin d’un plan de relance, dont nous avions assez répété qu’il était bien évidemment provisoire.

Je veux également lui dire que l’AFPA, l’Association pour la formation professionnelle des adultes, n’est pas démantelée. Les relations entre l’État et l’AFPA évoluent pour prendre en compte le transfert vers les régions de la compétence en matière de formation professionnelle des demandeurs d’emploi. Ainsi, les régions sont devenues les premières collectivités publiques dans l’achat des formations organisées par l’association.

L’activité de certification continuera à être assurée par l’AFPA, qui touche, à ce titre, une contribution du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels, le FPSPP, de l’ordre de 50 millions d’euros en 2011, laquelle sera reconduite en 2012.

Monsieur Desessard, je respecte les propos de chacun. Si je vous ai bien compris, vous avez dit que les radiations étaient le fruit d’une politique délibérée ou qu’elles intervenaient dans un cadre illégal. Par là, c’est non pas le Gouvernement que vous mettez en cause, mais la façon dont les agents travaillent. Vos propos ne leur feront certainement pas plaisir, car ils ne correspondent pas à la réalité.

Si vous examiniez l’évolution du nombre de radiations sur ces derniers mois, vous verriez que les chiffres sont stables. On ne peut pas faire n’importe quoi ; il y a des règles. Les partenaires sociaux connaissent par cœur le fonctionnement de Pôle emploi ; si ce que vous disiez était vrai, ils n’auraient pas manqué de le dénoncer.

Enfin, madame Laborde, en ce qui concerne le taux d’emploi des 55-64 ans, alors que nous partions de très bas, nous avons progressé de 5,5 points depuis la fin de 2007. La France est désormais au-dessus de la moyenne européenne, avec un taux d’emploi de 63,4 %. Bien sûr, il reste beaucoup à faire, mais le cumul emploi-retraite et l’interdiction des mises à la retraite d’office nous permettent de mener une politique véritablement cohérente, d’éviter un gâchis économique et social et de permettre à chacun de trouver sa place sur le marché du travail.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce projet de budget témoigne de notre esprit de responsabilité dans un domaine qui représente un enjeu crucial et prioritaire pour nos concitoyens : l’emploi. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

travail et emploi

Travail et emploi - Compte d'affectation spéciale : Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2012
Article 34 et état D

M. le président. Nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi », figurant à l’état B.

État B

(En euros)

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Travail et emploi

10 070 726 925

10 102 745 270

Accès et retour à l’emploi

5 421 962 408

5 373 450 753

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

3 847 151 480

3 906 651 480

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

63 304 949

80 584 949

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail

738 308 088

742 058 088

Dont titre 2

599 766 214

599 766 214

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-65 rectifié quater, présenté par Mme Cayeux, M. Marini, Mme Keller, MM. Gilles, Cardoux, Lorrain, Fontaine, Doublet, Laurent, Belot, Milon et J.P. Fournier, Mme Sittler, M. Couderc, Mme Bruguière, M. Pintat, Mme Bouchart, M. Lefèvre, Mmes Troendle et Des Esgaulx et M. Chauveau, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

7 000 000

 

7 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

 

 

 

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travailDont Titre 2

 

7 000 000

 

7 000 000

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Caroline Cayeux.

Mme Caroline Cayeux. Dans mon intervention générale, j’ai fait allusion au budget en baisse des maisons de l’emploi. Ces dernières, je le rappelle, ont fait la preuve de leur capacité à mettre en place de véritables stratégies d’action locale partagées, en particulier au travers des PLIE, les plans locaux pour l’insertion et l’emploi. Elles permettent en effet la mise en place d’initiatives coordonnées en matière d’emploi, de formation et d’insertion, grâce, notamment, à leur ancrage dans les territoires. Bref, les maisons de l’emploi sont des outils de la politique territoriale de l’emploi, en relais des politiques nationales menées en la matière.

Nos collègues députés ont voté un amendement abondant les crédits des maisons de l’emploi de 15 millions d’euros. Toutefois, le compte n’y est pas si l’on veut revenir au niveau de 2011.

Notre amendement a pour objet d’accroître ces crédits de 7 millions d’euros au moyen d’un transfert de crédits de l’action n° 5, Soutien du programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail », vers l’action n° 1, Amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi, du programme 102 « Accès et retour à l'emploi ».

Ce transfert de crédits permettrait de limiter la réduction des moyens des maisons de l’emploi.

M. le président. L'amendement n° II-121, présenté par MM. Vanlerenberghe et Pignard et Mme Létard, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

7 000 000

 

7 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

7 000 000

 

7 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travailDont Titre 2

 

 

 

 

TOTAL

7 000 000

7 000 000

7 000 000

7 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Mon amendement, qui est similaire à celui de Mme Cayeux, m’a été inspiré par l’Alliance villes emploi, qui est une association présidée par Jean Le Garrec et soutenue par de nombreux maires, de toutes tendances politiques.

Nous sommes tous convaincus de l’intérêt des maisons de l’emploi. Je présidais ce matin le conseil d’administration de la maison de l’emploi du pays d’Artois. Nous sommes, depuis le début, très impliqués dans notre mission, qui est complémentaire de celle de Pôle emploi. Nous avons restructuré la maison de l’emploi, qui a été fusionnée avec le plan local d’insertion. Nous nous sommes particulièrement investis pour atteindre l’objectif fixé, il y a quelques années, par le ministre du travail.

L’an dernier, nous avons vu diminuer les crédits des maisons de l’emploi de 21 % ; cette année, la baisse est de nouveau importante. Le vote de notre amendement, qui tend à augmenter les crédits des maisons de l’emploi de 7 millions d’euros, permettrait de limiter cette baisse à 10 %, ce qui représente en quelque sorte l’effort que nous pourrions supporter grâce aux économies d’échelle réalisées avec le recentrage des maisons de l’emploi.

Monsieur le ministre, je souhaite que vous puissiez émettre un avis favorable sur mon amendement et sur celui de Mme Cayeux, qui sont, je le sais, soutenus par un certain nombre de nos collègues de gauche.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur spécial. Les dispositions de ces deux amendements me font penser à celles qui ont été votées par l'Assemblée nationale : les députés ont abondé, à juste titre, de 15 millions d’euros le budget des maisons de l’emploi, dont la plupart réalisent un excellent travail, les autres devant faire l’objet d’une évaluation.

Toutefois, mes chers collègues, je vous rappelle que la commission des finances a proposé le rejet global des crédits destinés à l’emploi.

Pour ces amendements, elle s’en remet donc à la sagesse de l’assemblée. À titre personnel, j’y suis favorable, même si, pour être tout à fait franc, il me semble qu’ils visent surtout à permettre à leurs auteurs de se donner bonne conscience, puisque les deux gages proposés ponctionnent des crédits nécessaires sur des dotations placées elles-mêmes sous tension.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Claude Jeannerot, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, vous l’avez compris, en cohérence avec notre volonté de rejeter ce projet de budget, nous n’avons pas déposé d’amendement, notamment sur les maisons de l’emploi.

Bien évidemment, sur le fond, nous approuvons les propositions de Mme Cayeux et M. Vanlerenberghe. En tant que président de la mission sénatoriale d’information sur Pôle emploi, j’ai vu fonctionner, en particulier dans le Nord-Pas-de-Calais, des maisons de l’emploi. Beaucoup d’entre elles s’attachent à intervenir en toute complémentarité avec Pôle emploi, au service d’un territoire.

Je le répète, pour être parfaitement cohérents, nous ne devrions pas prendre part à ce vote, mais, sur le fond, nous soutenons la démarche qui sous-tend ces deux amendements. À titre personnel, j’adopterai la même position que le rapporteur spécial de la commission des finances et m’en remettrai donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Pour le Gouvernement, la sagesse serait que ces deux amendements, auxquels nous ne pouvons donner un avis favorable, soient retirés par leurs auteurs.

L’an dernier, nous avons eu, dans cet hémicycle, un débat passionné sur la question des maisons de l’emploi à propos d’un amendement déposé par Jean-Paul Alduy. Je pense sincèrement qu’il est possible de réduire légèrement leur budget. En effet, quand elles ont été créées, Pôle emploi n’était pas pleinement opérationnel.

Pour évoquer mon expérience à Saint-Quentin, je peux vous dire que, à l’origine, les élus voulaient avoir davantage d’informations et de moyens d’action sur la politique de l’emploi. Nous avons donc mis en place ces maisons de l’emploi car, à l’époque, Pôle emploi n’avait pas été créé ; il n’existait que les anciennes ANPE, avec lesquelles nous ne travaillions pas bien. Nous avons réalisé des investissements importants : nous avons loué, parfois acheté, des locaux, que nous avons équipés en matériels et dotés en personnels.

Aujourd'hui, Pôle emploi a atteint sa vitesse de croisière. Dans ce contexte, nous nous apercevons que le format que nous avions prévu pour les maisons de l’emploi n’exige plus aujourd'hui le même budget, même si les relations avec les élus restent un enjeu d’avenir. Nous sommes en train d’amortir les investissements que nous avons consentis au départ ; il n’est pas nécessaire d’en faire d’autres pour le moment. Les équipements que nous avons acquis voilà deux ans n’étant pas déjà obsolètes, il n’est pas besoin de prévoir des crédits pour réaliser de nouveaux investissements. Nous avons donc sincèrement pensé qu’il était possible de réduire ce budget.

Au demeurant, une évaluation des besoins a été réalisée, et pas seulement par mon ministère : nous avons demandé aux préfets d’engager des discussions, d’observer comment les choses se passaient sur le terrain et de rectifier les crédits quand c’était nécessaire. En effet, comme j’ai eu l’occasion de le dire à Jean Legarrec voilà quelques mois, je n’hésite jamais à faire du sur-mesure. Nous ne pouvons pas faire passer tout le monde sous la même toise : dans certains endroits, les moyens ne sont pas adaptés. C’est aussi le rôle du ministre et des préfets de région que de prendre en compte les disparités et de consentir les efforts nécessaires.

C'est la raison pour laquelle un amendement a été adopté en ce sens à l’Assemblée nationale. Toutefois, si les mesures que vous proposez étaient mises en œuvre, mesdames, messieurs les sénateurs, je pense sincèrement que nous disposerions de plus de crédits que nécessaire. Or, autant les crédits d’intervention doivent être maintenus, autant les crédits de fonctionnement peuvent voir leur montant réduit.

Monsieur Vanlerenberghe, vous évoquez un désengagement de l’État. Je vous rappelle que les maisons de l’emploi sont tout de même financées par ce dernier à hauteur de 70 % !

Je le répète, dès lors que nous y voyons plus clair sur la politique de l’emploi, nous n’avons plus besoin des mêmes niveaux d’investissement, me semble-t-il. Au demeurant, si un problème criant devait se poser à un endroit précis, nous serions en mesure de le régler ou de réparer l’inégalité constatée. Nous pouvons trouver de bons équilibres en procédant de la sorte ; j’ai en tête des exemples très précis.

Enfin, en ce qui concerne les gages, je puis vous assurer que le ministère dont j’ai la responsabilité a déjà réalisé des économies importantes sur son fonctionnement, sur son « train de vie », comme disent certains. Si l’on gage vos amendements via une baisse supplémentaire de 5 % des crédits du ministère – soit une diminution totale de 12,4 % sur la période récente –, je ne suis pas certain que l’on pourra payer les loyers !

Cet argument vaut ce qu’il vaut, mais vous devez vous rendre compte que, derrière les pourcentages, il y a une réalité : celle des dépenses que l’on supprime. Je tiens à la disposition de chacun le recensement des efforts qui ont été entrepris, non seulement au cabinet du ministre, mais aussi dans l’ensemble du ministère, mais le gage prévu dans vos amendements pose un réel problème.

J’entends tout à fait les remarques de fond qui ont été formulées. Toutefois, je le dis sincèrement, je pense que l’on peut diminuer les autorisations d’engagement ; en revanche, je ne crois pas que rétablir les crédits à leur niveau de 2011 permettrait de gagner en efficacité.

C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait des amendements nos II-65 rectifié quater et II-121, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.