compte rendu intégral

Présidence de Mme Monique Papon

vice-présidente

Secrétaires :

M. Alain Dufaut,

M. Daniel Raoul.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures quarante.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Organisme extraparlementaire

Mme la présidente. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation des sénateurs, un titulaire et un suppléant, appelés à siéger au sein de la Commission nationale de l’admission exceptionnelle au séjour, en application de l’article R.313-33 du code de l’entrée et du séjour des étrangers.

Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale à présenter des candidatures.

La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

3

 
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2011
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2011

Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixte paritaire

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (texte de la commission n° 122, rapport n° 121).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2011
Article 9

M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi initial de financement de la sécurité sociale, ou PLFSS, pour 2011 comprenait 60 articles. Il en comporte aujourd’hui 126, soit plus du double ! Il a donné lieu à des débats d’une très grande richesse, notamment au sein de notre assemblée. Comme chaque année, le Sénat a contribué à améliorer significativement le texte en adoptant pas moins de 127 amendements, dont 53 sur l’initiative de notre commission des affaires sociales.

Au total, le déficit prévisionnel du régime général pour 2011 est légèrement amélioré – de 400 millions d’euros –, puisqu’il s’établit désormais à 20,9 milliards d’euros au lieu de 21,3 milliards d’euros dans le projet de loi initial. Je pense donc que nous avons fait œuvre utile !

L’annexe B prévoit la réduction progressive de ce déficit au cours des trois années suivantes, mais celui-ci s’établirait tout de même encore à plus de 16 milliards d’euros en 2014. Nous avons suffisamment manifesté, au cours des débats au Sénat, notre inquiétude sur ces montants et leurs conséquences en termes d’accumulation de déficits pour que je n’y revienne pas à cet instant.

L’organisation de nos travaux a été, cette année, particulière et difficile. Nous avons, en effet, dû nous interrompre à deux reprises, d’abord pour la lecture des conclusions et le vote final sur la réforme des collectivités territoriale, puis à l’occasion du changement de Gouvernement. Certes, il s’agissait de circonstances particulières, mais je tiens à renouveler ici notre souhait, exprimé chaque année à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, que ce texte puisse être examiné en séance publique pendant une semaine entière et d’un seul bloc, sans des interruptions qui perturbent nos débats.

J’en viens maintenant à nos travaux.

À l’issue de l’examen du PLFSS par le Sénat, plus de 80 articles restaient en discussion. La commission mixte paritaire, réunie la semaine dernière, est parvenue à un accord sur l’ensemble de ces dispositions.

Elle a maintenu la suppression de 5 articles par le Sénat, adopté 51 articles dans le texte du Sénat, 3 articles dans le texte de l’Assemblée nationale, supprimé 8 articles introduits par le Sénat et élaboré un nouveau texte pour 16 articles.

Nous sommes ainsi, je crois, parvenus à un compromis acceptable, dont je me contenterai de mentionner les principaux éléments.

Parmi les trois articles pour lesquels nous sommes revenus à la rédaction de l’Assemblée nationale, je citerai l’article 36 septies, qui complète le dispositif adopté en 2008 sur les quasi-génériques en leur étendant les mesures incitant à la substitution des génériques.

Cette mesure, comme je l’avais dit lors du débat, présente malgré tout un risque. Elle peut servir de prétexte à de nouvelles campagnes de dénigrement des génériques au moment où leur progression, qui marque le pas, doit être relancée pour faciliter le respect de l’ONDAM. Elle peut aussi, nous en étions conscients, permettre de réaliser des économies – leur importance reste à déterminer – et, comme l’a rappelé le rapporteur pour l’Assemblée nationale, de contrer les stratégies de contournement de certains laboratoires. C’est pourquoi nous avons fini par nous rallier à la proposition de l’Assemblée nationale.

S’agissant des points sur lesquels l’Assemblée nationale a rejoint les positions du Sénat, je citerai tout d’abord l’article 9 sur le transfert de déficits à la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale. L’Assemblée nationale nous a suivis pour exclure de cette reprise de dette les déficits de la branche AT-MP de 2009 et de 2010.

À l’article 12 bis, concernant l’affectation définitive à la sécurité sociale du fameux panier de recettes destinées à la compensation des allégements généraux de charges sociales, l’Assemblée nationale a approuvé que nous affections l’excédent de ce panier prioritairement à la branche famille, à hauteur de la perte de recettes qu’elle va subir du fait de la substitution de trois recettes d’une qualité incertaine à 0,28 point de CSG. Les députés se sont d’ailleurs félicités que les droits de consommation sur les tabacs soient désormais, comme nous le souhaitions depuis longtemps, une recette de la loi de financement de la sécurité sociale.

J’ai relevé que, dans le cadre de la première partie de la loi de finances, la commission des finances a jugé bon de revenir partiellement sur ce point en organisant un rééquilibrage entre la TVA qui alimentait le panier affecté à nos différentes branches et les droits de consommation sur les tabacs. J’en parlerai à nouveau dans un instant mais j’aimerais qu’à l’avenir une meilleure coordination soit mise en place entre la commission des finances et la commission des affaires sociales, au moins pour tout ce qui concerne la partie financière.

Concernant l’article 16 bis sur l’activité de loueur de chambres d’hôtes, la CMP a maintenu le seuil de chiffre d’affaires introduit par le Sénat.

En adoptant des amendements semblables de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, le Sénat avait, à l’article 45 qui prévoit les dotations pour 2011 de l’assurance maladie à divers organismes, supprimé la dotation de 20 millions d’euros à l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, ou EPRUS. Cette dernière, après la dotation de 170 millions d’euros prévue pour 2010, nous semblait en effet recréer les conditions d’un sur-financement de l’EPRUS au détriment de l’assurance maladie et d’un déséquilibre analogue à celui qui avait été constaté sur la période allant de 2007 à 2009. J’ai dû insister lourdement en CMP pour que nos collègues députés nous suivent. Ils l’ont fait et ont donné raison à la commission des affaires sociales du Sénat, ce dont je me félicite. Le Gouvernement, à l’avenir, pourra savoir à quoi s’en tenir chaque fois qu’il sera tenté de mettre à la charge de l’assurance maladie des dépenses qui ne lui reviennent pas, alors que lui-même ne fait pas l’effort nécessaire pour assurer l’équilibre du fond.

Je citerai également l’article 45 bis A. En confirmant le texte du Sénat, la CMP a prévu que le Parlement devra voter chaque année, en PLFSS, le montant des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation, les fameuses MIGAC. C’est une première tout à fait intéressante. Je me permets de saluer la décision du Gouvernement, en particulier celle du nouveau ministre en charge de la santé, M. Xavier Bertrand, de ne pas revenir sur cette disposition, qui va dans le sens d’une meilleure transparence et d’une meilleure information du Parlement. J’en attends d’ailleurs beaucoup, car il existe à mon sens de réelles marges de progrès et d’efficience dans la gestion des crédits destinés aux établissements de santé.

S’agissant de l’article 63, qui concerne l’obligation de déclaration de revenus pour les auto-entrepreneurs – je m’en suis entretenu hier en aparté avec le nouveau ministre en charge de ce dossier, M. Frédéric Lefebvre –, l’Assemblée nationale a suivi l’initiative que Mme Dini, présidente de la commission des affaires sociales, et moi-même avions prise quant à la fixation d’une limite à deux ans au lieu de trois ans de la durée pendant laquelle il est possible de bénéficier du régime de l’auto-entrepreneur sans réaliser de recettes ou de chiffre d’affaires. Il me semble que nous devrons compléter ce dispositif en loi de finances, d’une part, pour en assurer l’effectivité en matière de recouvrement – je porterai un amendement en loi de finances pour améliorer ces modalités de recouvrement, et je me suis entendu sur ce point avec M. Frédéric Lefebvre – et, d’autre part, pour instaurer un mécanisme de formation des auto-entrepreneurs qui serait financé, comme pour les entrepreneurs individuels, par un prélèvement assis sur leur activité – je porterai également un amendement sur ce point.

Parmi les articles ayant fait l’objet d’une nouvelle rédaction par la CMP, cinq méritent d’être mentionnés.

Concernant l’article 10 sur les retraites chapeaux, la CMP est parvenue à un compromis sur les seuils des rentes soumises à la nouvelle contribution sociale : 400 euros pour l’assujettissement à un taux de 7 % et 600 euros pour le taux de 14 %. Ce résultat nous a semblé à tous équilibré et raisonnable, tenant compte en particulier des positions exprimées par le Gouvernement, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

Or, pour une raison qui m’échappe, le Gouvernement a changé d’avis au cours des derniers jours. Quand je dis « le Gouvernement », monsieur le ministre, je ne vous vise pas en particulier ; il semble en effet que l’initiative vienne de Bercy, même pas du ministre des comptes publics mais peut-être du ministre de l’économie, Mme Lagarde. Le Gouvernement a ainsi accepté en projet de loi de finances un amendement de la commission des finances du Sénat qui relève très significativement le seuil des rentes soumises à la nouvelle contribution sociale, en le portant à 1 000 euros.

Où est la cohérence du Gouvernement dans le financement de la réforme des retraites à venir ? Veut-il empêcher celle-ci d’aboutir alors qu’elle vient à peine d’être votée ?

M. Guy Fischer. Et oui !

M. Alain Vasselle, rapporteur. L’encre est à peine sèche qu’on modifie déjà le dispositif du financement ! Cette nuit encore, je m’attendais à ce que le Gouvernement, par une seconde délibération, revienne sur cette initiative de la commission des finances. Il n’en a rien été !

M. Guy Fischer. Déception !

M. Alain Vasselle, rapporteur. On me dit que ce sera éventuellement rectifié en CMP.

M. Guy Fischer. Mensonge !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Cela signifie qu’un député devra accepter de porter un amendement que le Gouvernement voudra faire voter lors de la CMP sur le projet de loi de finances pour faire disparaître le dispositif adopté ici.

M. Guy Fischer. Vous y croyez ?

M. Alain Vasselle, rapporteur. Cette incohérence m’interpelle. Je ne vais pas accuser nos collègues de la commission des finances qui en reviennent sans doute à leurs vieux démons, à savoir leur volonté d’avoir la maîtrise totale des recettes. Ils ont toujours mal vécu le fait que la commission des affaires sociales puisse se mêler d’un domaine qu’ils considèrent comme leur pré carré. Mais, pour ma part, je m’oppose à ce que l’on puisse réduire le rôle de la commission des affaires sociales à une simple gestion des dépenses sans l’autoriser à donner son avis sur les recettes alimentant le budget de la sécurité sociale.

M. Guy Fischer. On est d’accord !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Tant que je serai rapporteur général de la loi de financement, je tiendrai toujours le même langage !

M. Guy Fischer. La révolution est en route !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Si je tiens ces propos, c’est non pas pour contrarier le ministre ici présent, Xavier Bertrand, mais pour qu’il soit dit à Mme Lagarde qu’il ne suffit pas de laisser notre ami François Baroin venir au charbon ici pour faire ensuite le contraire de ce que le Gouvernement a porté par sa voix en séance publique à l’occasion de l’examen de la loi de finances ! Il faudrait mettre une fois pour toutes de l’ordre dans tout ça ! Il y a une loi de financement de la sécurité sociale, il y a une loi de finances, et il faut respecter les compétences de chacun.

M. Guy Fischer. C’est un double langage !

M. Alain Vasselle, rapporteur. De la même façon, un autre amendement de la commission des finances, accepté aussi à ma grande surprise par le Gouvernement, a modifié la taxe sur les réserves de capitalisation qui doit alimenter les ressources de la branche famille. Le Gouvernement est-il en train de donner raison en définitive à la Mutualité française, à la Fédération française des sociétés d’assurance, ou FFSA, et à la Prévoyance, qui dénonçaient le fait que l’on prélevait à hauteur de 3,2 milliards d’euros une partie de leurs ressources pour financer au départ la CADES, et maintenant la branche famille ?

J’ai encore en mémoire l’argumentation développée en commission des affaires sociales et ici, en séance, pour démontrer que cette somme est tout à fait légitime et ne justifierait pas de la part de la FFSA et de la Mutualité française une augmentation des contrats. Je finis par y perdre mon latin ! Je ne sais plus qui je dois suivre. Dois-je m’en tenir à la position que nous avions adoptée, ou le Gouvernement a t-il eu, depuis l’examen de la loi de financement de la sécurité sociale, des éléments nouveaux lui permettant de justifier un changement d’attitude et de comportement pour prendre des dispositions qui ne sont pas du tout dans la ligne de celles que nous avons votées ici à une très grande majorité, au-delà des travées de l’UMP ? (M. Jean-Louis Carrère acquiesce.) Nos collègues du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste nous avaient en effet suivis, au moins en ce qui concerne le sujet des retraites chapeaux.

J’aimerais donc, monsieur le ministre – peut-être disposez-vous d’éléments à cet égard ou Mme Lagarde a t-elle bien voulu vous en donner ?–, que vous nous expliquiez la raison de ce changement de pied qui va affaiblir le financement de la branche famille, ce que nous avions dénoncé les uns et les autres. J’ai l’impression qu’on est en train d’en revenir à certains errements du passé, lorsque la sécurité sociale servait de variable d’ajustement pour la loi de finances.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité ! C’est une variable d’ajustement !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Mes chers collègues, soyons vigilants, car cela me préoccupe au plus grand point.

J’en arrive à l’article 11 sur le relèvement des taux des contributions sur les stock-options. La CMP a finalement relevé au même niveau les taux des contributions applicables aux attributions gratuites d’actions, mais seulement pour les attributions qui dépassent la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale. Ce faisant, nous avons à mon avis fait preuve d’harmonie, et je considère cela comme une bonne initiative de la CMP.

L’article 13 ter soumet les indemnités de rupture à cotisations sociales dès lors qu’elles dépassent trois fois le plafond annuel de la sécurité sociale. Une exception est prévue pour les indemnités versées dans le cadre des plans sociaux en cours de négociation : elles seront soumises à cotisations lorsqu’elles dépassent six fois le plafond.

L’article 40 a provoqué en CMP, comme en première lecture dans chacune de nos deux assemblées, un débat nourri. Il concerne l’expérimentation des maisons de naissance qui doivent offrir de nouveaux modes de prise en charge pour les femmes qui le souhaiteraient. La CMP a finalement repris le texte de l’Assemblée nationale et a adopté, sur mon initiative, un amendement tendant à sécuriser encore le dispositif, en donnant un rôle important à la Haute Autorité de santé. Celle-ci devra notamment édicter un cahier des charges pour organiser le fonctionnement de ces nouvelles structures. J’espère que cette disposition sera de nature à apaiser l’inquiétude de nos collègues sénateurs qui avaient voulu la suppression pure et simple de l’article 40. Il faudra, bien entendu, que nous procédions à l’évaluation, aussi rapidement que possible, du fonctionnement de ces maisons de naissance pour constater les éventuels effets pervers de ce dispositif.

L’article 45 ter a été adopté dans une rédaction constituant un compromis équilibré entre les positions prises par les deux assemblées. Nous avons accepté de rétablir les dispositions permettant la fongibilité des parts régionales du Fonds d’intervention pour la qualité et le contrôle des soins, le FIQCS, et du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP. On peut d’ailleurs se demander si une telle disposition a bien sa place dans une loi de financement. C’était une concession importante de notre part, car cette fongibilité, chère au président Pierre Méhaignerie, ne facilitera pas, à mon sens, le suivi et le contrôle de l’action des fonds. Elle ne favorisera pas non plus l’optimisation de l’utilisation de leurs dotations, qui sont entièrement financées par les régimes d’assurance maladie obligatoires et ne sont pas toujours dépensées de la manière la plus productive.

Mais l’Assemblée nationale a fait aussi un pas vers nous en reconnaissant que la restitution à l’assurance maladie, afin de réduire son déficit, des crédits déchus du Fonds de modernisation des établissements de santé constituait une mesure de bonne gestion. C’est également, à mon avis, une mesure de bon sens.

Je m’en félicite, car cette restitution, décidée par le Sénat sur proposition conjointe des commissions des affaires sociales et des finances, me semble constituer un aboutissement du dispositif de déchéance des crédits non utilisés, adopté l’an dernier sur l’initiative de Jean-Jacques Jégou.

Dans la situation actuelle des finances sociales, il semble en effet préférable d’augmenter les disponibilités de l’assurance maladie en lui restituant des crédits déchus plutôt que de prévoir le retour des sommes correspondantes à un fonds qui n’arrive déjà pas à consommer ses dotations et n’en fait pas toujours le meilleur usage. J’ajoute d’ailleurs que le financement de la modernisation des hôpitaux a peu de rapport – c’est le moins que l’on puisse dire – avec la couverture du risque maladie. On est vraiment dans une situation qui n’est pas en complète cohérence avec ce qu’elle devrait être au regard de la gestion du risque et du financement de celui-ci et de ce qui devrait être à la charge du budget de l’État lui-même. Nous verrons à travers l’amendement du Gouvernement, tout à l’heure, que l’engagement pris par Mme Nora Berra devant nous ne pourra pas être tenu. Il a en effet été considéré qu’il s’agissait d’une mesure nouvelle non examinée au cours de la discussion du texte. Nous en dirons deux mots dans quelques instants.

Monsieur le ministre, vous allez nous proposer de revenir sur certains points de cet accord, et, tout d’abord, sur la suppression du coefficient correcteur en faveur de certains établissements de santé.

La CMP a confirmé l’article 41 bis adopté par le Sénat qui tire la conséquence du différentiel de charges entre catégories d’établissements sur le processus de convergence et sur les tarifs des prestations. Moult rapports sur le sujet ont confirmé le différentiel de charges de 4 %. Le sénateur Jean-Pierre Fourcade était intervenu pendant le débat sur ce sujet. Ce n’est d’ailleurs peut-être ni la première ni la dernière fois qu’il aura à le faire. Le Gouvernement – et je tiens à saluer cette initiative de notre nouveau ministre, M. Xavier Bertrand, sur ce sujet – a accepté de faire un pas dans la direction que nous souhaitions. Le différentiel était chiffré à hauteur d’une centaine de millions d’euros. Le Gouvernement, à travers un amendement, propose une disposition qui permettra de faire un premier pas, à concurrence de trente millions d’euros. Cela va dans la bonne direction. Nous ferons le point au moment de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, afin de franchir éventuellement une nouvelle étape dans cette direction. Il faudra absolument que nous intégrions non seulement les mesures de différentiel de charges liées aux cotisations sociales mais également celles qui résultent de mesures règlementaires en matière fiscale.

Nous vous remercions de le faire, monsieur le ministre.

Vous souhaitez que le bilan annuel qui nous est transmis sur les MIGAC rende compte du montant des mesures d’accompagnement dont auront bénéficié les établissements de santé privés anciennement sous dotation globale.

Je regrette que la seule réponse à un vrai problème, à même de déstabiliser des établissements qui sont pourtant au cœur de notre système de santé, soit une information supplémentaire dans un rapport au Parlement.

Plus généralement, ce sujet pose la question de la convergence. Vous le savez, le Sénat avait adopté le principe d’une avancée progressive, mais régulière, vers l’objectif de 2018. À une voix près, la commission mixte paritaire ne nous a pas suivis. Je souhaite donc, monsieur le ministre, vous sensibiliser au fait que la convergence, qui est inscrite dans la loi, doit être préparée et programmée. C’est le seul moyen de parvenir au résultat recherché.

Nous ne pouvons plus nous contenter d’attendre le résultat d’études sans cesse remises à plus tard. Au rythme où nous allons s’agissant de la convergence ciblée, je suis prêt à parier que, lorsque nous approcherons l’échéance de 2018, il y aura plus de 2 000 groupes homogènes de malades, les GHM.

M. Gilbert Barbier. On reportera !

M. Alain Vasselle, rapporteur. L’objectif de la convergence sera alors reporté à 2020 ou à 2025, car on ne sera plus à quelques années près... Cela n’est pas très sérieux ! Je n’ai pas pu faire prévaloir mon point de vue en commission mixte paritaire, mais j’y reviendrai l’année prochaine ; et si ce n’est moi, ce sera mon successeur. En tout cas, sachez, monsieur le ministre, que nous sommes déterminés à avancer sur ce point.

Deuxièmement, le Gouvernement nous présente un amendement à l’article 43 bis, qui concerne les plans d’aide à l’investissement, par lesquels la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, aide les établissements médico-sociaux à se moderniser.

Compte tenu de la nouvelle méthode de construction de l’Objectif national d’évolution des dépenses de l’assurance maladie, l’ONDAM, les crédits médico-sociaux ne devraient plus connaître d’excédents au cours des années à venir. Dans ces conditions, le Sénat a souhaité prévoir une pérennisation des plans d’aide à l’investissement, dossier sur lequel Sylvie Desmarescaux s’est beaucoup investie. Jusqu’à présent, ces plans étaient financés grâce aux excédents. Or, au travers d’un amendement, nous avons sanctuarisé 4 % de la contribution solidarité autonomie à cette fin, et la commission mixte paritaire nous a suivis.

Le Gouvernement accepte cette démarche – merci, monsieur le ministre ! –, mais seulement pour l’année 2011, considérant que la question devra être revue dans le cadre du grand chantier de la dépendance. Nous lui en donnons acte et partageons son point de vue. Nous pouvons donc nous rallier à cette démarche, qui permettra de financer les investissements de l’année à venir, mais nous reviendrons à la charge sur ce sujet l’année prochaine – je fais confiance sur ce point à Sylvie Desmarescaux ! –, car l’aide à l’investissement est absolument nécessaire pour les établissements sociaux et médico-sociaux. Il n’appartient pas à la CNSA de la financer : une ligne dans le budget du ministère de la santé devrait y être consacrée. C’était le cas, autrefois, au travers des contrats de plan État-région ; nous devons adopter le même mode de financement en la matière.

Vous nous proposez enfin, à l’article 45 ter, un amendement qui remet totalement en cause le dispositif équilibré auquel était parvenue la commission mixte paritaire. Nous avions en effet opté – je le rappelais tout à l’heure – pour le retour à l’assurance maladie des crédits déchus du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP. C’était un choix de bonne gestion.

Mais pour vous, cette bonne gestion a un défaut majeur : elle ne se traduirait pas dans les chiffres de l’ONDAM.

Vous faites donc le choix de l’affichage d’une diminution des dépenses, en nous proposant de renoncer à la restitution des crédits non consommés au profit d’un « pacte sur réduction future » de la dotation de l’assurance maladie. Mais ce n’est pas du tout la même chose !

Nous proposions de rendre à l’assurance maladie des ressources permettant de réduire son déficit. Ce que le Gouvernement prévoit revient simplement à ne pas demander à l’assurance maladie de verser une deuxième fois des crédits qui n’ont pas été utilisés. De plus, ce n’est pas diminuer une dépense que de prendre acte d’une absence de dépense.

J’ajouterai que, dans ce dispositif, rien ne garantit que l’on diminuera réellement les dotations demandées à l’assurance maladie. Nous avons toute confiance, cela va sans dire, dans les budgétaires, mais ne sera-t-il pas aisé de gonfler un peu ces dotations pour qu’elles demeurent, après soustraction des crédits déchus, au niveau souhaité ?

N’est-ce pas d’ailleurs ce qui est fait dès cette année, puisque la dotation pour 2011 du FMESPP a été relevée à près de 348 millions d’euros pour anticiper un gel de crédits de 100 millions d’euros ? Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous avons ainsi annulé 100 millions d’euros sur l’exercice 2010, conséquence du gel décidé par le Gouvernement en vue de respecter l’ONDAM de l’année 2010.

Évidemment, lorsqu’on agit ainsi, c’est facile : on prévoit un ONDAM en 2009 et on augmente le Fonds en sachant qu’on n’utilisera pas les crédits. Ainsi, au moment de rectifier l’exercice 2011, il suffit d’opérer une diminution de 100 millions d’euros. Ainsi, le tour est joué et on aura respecté l’ONDAM ! Nous ne sommes pas dupes de l’exercice auquel vous voulez nous plier...

Pourtant, on pourrait parfaitement diminuer les dépenses de l’ONDAM en ayant une gestion plus rigoureuse du FMESPP et une appréciation plus réaliste de ses dotations.

La Caisse nationale d’assurance maladie, la CNAM, ne verse qu’en fonction des besoins sa quote-part de la dotation du Fonds. Elle est en cela mieux traitée que les autres régimes, dont la contribution est évidemment bien moindre, mais immédiatement exigible.

Savez-vous, monsieur le ministre, mes chers collègues, que, à l’heure actuelle, la CNAM vient seulement d’achever le versement de sa contribution pour l’année 2007 ? Elle n’a pas encore versé un seul euro de sa contribution pour les années 2008, 2009 et 2010, ce qui représente quelque 510 millions d’euros de ressources à venir pour le FMESPP !

Par ailleurs, le même FMESPP, géré par la Caisse des dépôts et consignations, a perçu pendant l’année 2009 près de 633 000 euros de produits financiers.

Je vous le demande, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ces temps de déficit qui contraignent l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, à emprunter auprès de la Caisse des dépôts et consignations, est-il de bonne gestion qu’un fonds financé par l’assurance maladie et géré par la Caisse des dépôts et consignations réalise des plus-values financières sur ses excédents de crédits ?

N’est-il vraiment pas possible, dans ces conditions, de prévoir à la fois la restitution à l’assurance maladie des crédits déchus et une diminution des dotations du FMESPP ? (M. Jean-Louis Carrère applaudit.)

Pour conclure sur une note plus positive, tout en m’excusant d’avoir abordé des sujets qui fâchent,...