M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. L’amendement n° 245 vise à supprimer la possibilité d’expérimentation pour l’enseignement et la formation professionnelle agricoles, qu’ils soient publics ou privés.

Ma chère collègue, cette possibilité constitue un atout important pour développer l’innovation dans l’enseignement et la formation professionnelle agricoles, et il convient de la conserver. C’est pourquoi je ne souscris pas à votre proposition, qui conduirait à un nivellement par le bas.

Par ailleurs, le recours à l’expérimentation est encadré par l’article 1er quater.

Aussi, la commission émet un avis défavorable, sauf si vous décidiez- on ne sait jamais - de retirer l’amendement.

S’agissant de l’amendement n° 246, l’article 1er quater encadre le recours aux expérimentations : l’autorisation de l’autorité académique est nécessaire, l’expérimentation est limitée à cinq ans, une évaluation annuelle est réalisée.

Cet encadrement est suffisant et le présent amendement ne paraît donc pas opportun ; c’est pourquoi la commission émet un avis défavorable.

L’amendement n° 249 est équivalent au précédent, mais il porte sur l’enseignement agricole privé. La commission émet là encore un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces trois amendements.

Notre philosophie politique est différente, madame Gonthier-Maurin : nous estimons que l’expérimentation est utile, d’autant qu’elle est encadrée et qu’elle est validée par l’autorité académique avant d’être mise en œuvre. Par conséquent, les étudiants ne courent aucun risque.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 245.

M. Thierry Repentin. Le groupe socialiste s’abstient sur ces amendements !

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 246.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 249.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 247, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 19 et 20

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous sommes opposés à la création du conseil de l’éducation et de la formation dans les EPLEFPA.

Tout d’abord, l’utilité d’un conseil spécifique propre à l’élaboration de la partie pédagogique du projet d’établissement n’est pas avérée. En effet, ces missions sont déjà assurées par les conseils propres à chaque centre membre d’un EPLEFPA. La coordination entre ceux-ci se fait via le conseil d’administration, qui valide le projet d’établissement. La cohérence pédagogique entre les différents projets est ainsi déjà mise en œuvre.

De plus, chaque conseil d’administration peut, s’il le souhaite, créer des groupes de réflexion pédagogique dédiés à cette question.

Les instruments de coordination existent donc bel et bien. Cette nouvelle structure ne fera qu’ajouter à la complexité administrative et alourdir le fonctionnement des établissements.

En outre, l’article est totalement muet sur la composition de ce conseil, dont on sait seulement qu’il sera présidé par le chef d’établissement.

Pourquoi, de plus, vouloir imposer une structure qui connaît aujourd’hui un échec complet dans l’éducation nationale ? En effet, cinq ans après son lancement, la moitié seulement des lycées ont effectivement mis en place ce conseil pédagogique.

En fait d’harmonisation de projets pédagogiques, il ne s’agit, là encore, que de l’application de la RGPP, dans le but de réduire le nombre des fonctionnaires en mélangeant les publics accueillis.

La volonté de créer un projet pédagogique commun à tous les lycées et centres composant l’EPLEFPA marque en fait la volonté de regrouper des enseignements similaires, sans tenir compte de la spécificité des voies de formation et des différences de publics entre les formations initiale et continue.

On peut imaginer que certains cours seront fusionnés pour réduire le nombre de professeurs titulaires de l’établissement, dans le seul but de réaliser des économies, au lieu de réfléchir à un véritable projet pédagogique.

Cette fusion aura également pour effet de transférer les charges financières qui incombent à l’État vers des financements locaux. En effet, les financements de la région pour la formation professionnelle pourront être captés au profit de ces établissements, permettant ainsi à l’État de se défausser financièrement.

M. le président. L'amendement n° 248, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 20, première phrase

après les mots :

conseil de l'éducation et de la formation

insérer les mots :

élu parmi le personnel de l'établissement et

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il s’agit d’un amendement de repli.

Si ce conseil pédagogique devait être mis en place, nous souhaitons alors qu’il soit créé dans le respect des garanties démocratiques.

Notre amendement prévoit de lever le voile sur sa composition, pour l’heure très opaque.

Nous proposons en effet que ses membres, dont rien n’est dit dans le projet de loi, soient élus parmi le personnel de l’établissement, qui est le plus à même de proposer des expérimentations et des orientations pédagogiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 247, la création des conseils de l’éducation et de la formation doit permettre le partage d’expériences au sein des établissements. Il s’agit de l’une des conclusions des assises de l’enseignement agricole public, qui se sont tenues entre septembre et décembre 2009, donc très récemment.

Par ailleurs des structures équivalentes existent aujourd’hui dans l’éducation nationale.

Aussi, la commission émet un avis défavorable.

De même, la précision apportée par l’amendement n° 248, amendement de repli, ne paraît pas utile. Le conseil comprendra bien entendu des représentants du personnel, et je précise, du personnel local.

La commission émet donc également un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements.

Il est défavorable au premier, car le fait que les professeurs des lycées et les formateurs participent au conseil de l’éducation et de la formation sera un atout pédagogique pour les établissements d’enseignement agricole.

Il est défavorable au second, car la composition de ce conseil, définie par décret, tiendra compte de la représentativité des enseignants de l’établissement et fera l’objet d’une discussion avec les organisations représentatives du personnel.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 247.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement no 248.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er quater.

(L'article 1er quater est adopté.)

Article 1er quater (Nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Article 2

Article additionnel après l’article 1er quater

M. le président. L'amendement n° 482, présenté par MM. S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Lise et Tuheiava, Mme Herviaux et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement étudie la mise en place, dans les douze mois qui suivent la publication de la présente loi, d'un plan de développement des réseaux de formation adaptés aux enjeux actuels de l'agriculture et de la pêche dans les départements d'outre-mer.

Ce plan comprend un dispositif de formation continue et de mis à niveau permanent des professionnels permettant de renforcer la professionnalisation de ces secteurs.

Il permet également d'amplifier les réseaux d'appui technique et de transferts technologiques.

Il met en place des dispositifs spécifiques de développement et de soutien à la recherche outre-mer.

La parole est à Mme Odette Herviaux.

Mme Odette Herviaux. Permettez-moi de présenter cet amendement au nom de mes collègues ultramarins.

Comme l’a souligné le conseil interministériel de l’outre-mer, les régions ultramarines disposent, en matière de formation initiale agricole, d’un réseau assez développé.

Cependant, pour le secteur de la pêche, la formation de base n’est pas adaptée aux enjeux actuels. Ainsi, la majorité des navigants ne possède que le capacitaire.

Le conseil interministériel souligne également que la faiblesse des structures intermédiaires entre recherche et développement ne permet pas d’assurer une formation continue, pourtant nécessaire à la mise à niveau permanente des professionnels des secteurs de la pêche et de l’agriculture.

Or il est vital pour la santé des économies ultramarines de mettre en œuvre des dispositifs permettant d’améliorer la professionnalisation et le savoir-faire des acteurs de ces deux domaines d’activités, dont le poids social est indéniable.

Ainsi, la population active agricole représente 7,2 % de la population totale en Martinique, 5,8 % en Guadeloupe, contre seulement 3,4 % dans l’Hexagone, et le nombre de marins pêcheurs actifs est en moyenne deux fois plus important outre-mer. De plus, ces secteurs continuent à attirer des jeunes.

J’ajoute, monsieur le ministre, que l’outre-mer, c’est une flore vingt-six fois plus importante qu’en métropole et 97 % de la surface maritime française. Le potentiel est donc immense.

C’est pour toutes ces raisons que nous vous demandons avec nos collègues ultramarins la mise en place d’un plan de développement des réseaux de formation, assorti d’un dispositif de formation continue, de réseaux d’appui technique performants, de transferts de technologie, ainsi que d’un soutien à la recherche, afin de donner à l’agriculture et à la pêche outre-mer les moyens de leur développement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Le conseil interministériel de l’outre-mer de novembre 2009 a annoncé certaines mesures qui recoupent cet amendement, notamment en matière de recherche et d’innovation.

Par ailleurs, si la mission commune d’information sur les départements d’outre-mer, présidée par M. Serge Larcher et dont le rapporteur était M. Éric Doligé, avait mis en avant des lacunes en matière de formation dans ce secteur, elle avait également souligné la nécessité pour les acteurs locaux, les chambres d’agriculture en particulier, de prendre des initiatives en la matière.

En conséquence, le présent amendement ne paraît pas opportun et la commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement a la volonté de mieux structurer les réseaux en outre-mer. Or l’ensemble de ces évolutions ne relèvent pas du champ législatif et renvoient aux conclusions des états généraux du sanitaire. Je ne puis donc qu’être défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 482.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l’article 1er quater
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Articles additionnels après l'article 2

Article 2

I. – Dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnances les dispositions législatives nécessaires afin de :

1° Redéfinir, en clarifiant la situation juridique des intervenants, les conditions dans lesquelles sont réalisées les missions entrant, à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, dans le champ du mandat sanitaire prévu à l’article L. 221-11 du code rural ainsi que celles dans lesquelles est réalisée la certification vétérinaire prévue à l’article L. 221-13 du même code en distinguant selon que ces missions sont effectuées au bénéfice de l’éleveur ou pour le compte de l'État modifier les conditions dans lesquelles certaines tâches particulières liées aux contrôles peuvent être déléguées à des tiers ; compléter les missions ainsi confiées à des vétérinaires libéraux ;

2° Modifier les dispositions des articles L. 243-1 et L. 243-2 du code rural relatives aux conditions dans lesquelles certains actes peuvent être réalisés par des personnes n'ayant pas la qualité de vétérinaire et, si nécessaire, la liste de ces actes ;

3° Mettre en conformité avec le droit communautaire les dispositions du code rural relatives à la protection des végétaux en ce qui concerne notamment les conditions de leur mise sur le marché et d’utilisation des produits phytopharmaceutiques ;

4° Modifier l'article L. 234-2 du code rural et adapter les références et renvois faits dans le code rural et le code de la santé publique à la réglementation communautaire dans le domaine du médicament vétérinaire à l'évolution de cette réglementation ;

5° Définir et catégoriser les dangers sanitaires, déterminer les conditions dans lesquelles des organismes à vocation sanitaire peuvent s'organiser, au sein de structures pouvant s'inspirer du statut d'association syndicale de détenteurs de végétaux ou d'animaux, pour concourir aux actions de surveillance, de prévention et de lutte, étendre le champ d'application de l'article L. 201-1 du code rural à la lutte contre les maladies animales et les organismes nuisibles de végétaux, définir une organisation de l’épidémiosurveillance animale et végétale, déterminer les modalités de financement des actions menées contre ces dangers, procéder aux modifications du code rural nécessaires à son adaptation à ce dispositif et prendre toutes les mesures de simplification qui pourraient en découler ;

6° Procéder aux modifications de numérotation et à la rectification des intitulés au sein du Livre II du code rural rendus nécessaires en application du présent article.

II. – Les ordonnances mentionnées au I sont prises dans un délai de douze mois suivant la publication de la présente loi. Pour chaque ordonnance, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de sa publication.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, sur l'article.

M. Yannick Botrel. L’article 2 est doublement représentatif de l’esprit de ce texte.

En premier lieu, de nombreuses mesures essentielles pour la sécurité sanitaire de notre pays vont être prises par ordonnances. Les décisions seront donc soumises au contrôle étroit de l’exécutif et du ministre, ce qui revient à relativiser la portée du travail législatif, et c’est, à nos yeux, inacceptable.

En second lieu, cet article manifeste l’orientation libérale de la politique du Gouvernement, s’agissant en particulier de sa politique sanitaire.

Pour ce qui est du mandat sanitaire et de la réalisation de certains actes vétérinaires, de nombreux agriculteurs, voire des fédérations départementales de défense sanitaire du cheptel, réclament la possibilité, pour les éleveurs, de vacciner eux-mêmes leur bétail.

Cette opération peu complexe, autant dire de routine pour les éleveurs, ne requiert en effet ni la compétence ni la technicité du vétérinaire. Réalisée par l’agriculteur lui-même, elle présente de surcroît l’avantage de limiter le stress du bétail, donc les accidents dont peuvent être victimes les intervenants ou les animaux.

Je souhaite également évoquer, car c’est un sujet important, la situation des laboratoires publics départementaux.

En l’espace de deux années, plus de vingt d’entre eux ont cessé leur activité et sur tout le territoire. Certes, ils sont d’importance très inégale, puisque le nombre des agents, qui est d’une vingtaine dans certains départements, dépasse deux cents dans les Côtes-d’Armor et en Loire-Atlantique.

Alors que l’État attend d’eux qu’ils maintiennent en veille les équipements et des personnels capables de répondre à des situations de crise sanitaire majeure – on se souvient de l’épidémie de fièvre aphteuse, voilà quelques années, ou encore du risque de propagation de la grippe aviaire, en 2006 –, ce même État ne prend pas en compte le coût financier que cela induit. Pire, après avoir ouvert le marché d’analyse de l’eau à la concurrence, il retire aujourd’hui aux laboratoires publics la gestion des plans de surveillance et de contrôle des denrées alimentaires.

Or il faut savoir que les laboratoires publics sont reconnus non seulement pour leurs compétences – celui des Côtes-d’Armor, que je connais le mieux, a recueilli dix-neuf accréditations –, mais également pour leur indépendance, ce qui n’est pas le cas de tous les laboratoires d’analyses privés. Ces derniers, sans leur faire de procès d’intention, sont parfois adossés à des laboratoires pharmaceutiques vétérinaires…

Les laboratoires publics départementaux offrent donc toutes les garanties à leur clientèle, particulièrement aux éleveurs qui, en cas de litige, peuvent avoir recours à leur expertise et profiter de leur neutralité.

Dans ces conditions, il est incompréhensible que ce projet de loi ne reconnaisse pas le rôle des laboratoires publics départementaux et qu’il n’intègre pas ces structures dans les différents dispositifs d’épidémiosurveillance, en tant qu’élément essentiel du service public sanitaire.

Il est important pour les citoyens et les consommateurs de disposer d’organismes fiables et indépendants, qui contribuent à leur sécurité alimentaire, qui n’ont pas pour objectif la maximalisation du profit.

Les laboratoires publics ne sont pas aujourd’hui dans une situation favorable, et l’État ne paraît pas disposé à conforter ce secteur public d’excellence. C’est pourquoi il faut réaffirmer l’importance du rôle qu’ils jouent dans la collecte d’informations épidémiologiques et dire qu’avec le risque de voir se propager des crises sanitaires majeures, ils ont plus que jamais un rôle à tenir et des missions à remplir.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 112 est présenté par Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, Fauconnier, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 250 est présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yannick Botrel, pour présenter l’amendement no 112.

M. Yannick Botrel. Cet amendement vise à supprimer l’article 2, qui permet au Gouvernement de légiférer par ordonnances dans plusieurs domaines relevant normalement de la loi.

C’est une véritable remise en cause du rôle dévolu au Parlement ; c’est une négation de ses pouvoirs. Malgré les précisions apportées en commission, nous ne pouvons accepter de signer un chèque en blanc.

L’article 2 est d’autant plus important qu’il concerne les questions sanitaires, c'est-à-dire notre santé, sujet épineux.

Or le champ des ordonnances n’est pas clair. Des pans entiers de la gestion sanitaire restent vagues, ne permettant pas vraiment de savoir où le Gouvernement souhaite nous conduire. Et, lorsque ses desseins se font clairs, nos craintes n’en sont que ravivées.

Adopter l’article 2 signifierait que les états généraux du sanitaire, ouverts depuis le 19 janvier 2010, n’ont servi à rien, pire, que leurs conclusions ne sont même pas attendues et que les modifications positives qui pourraient être proposées seront balayées d’un revers de la main.

Pourtant, les états généraux du sanitaire réunissaient des professionnels agricoles, des experts du monde vétérinaire et des scientifiques dont l’expertise ne serait pas inutile dans la discussion de ce projet de loi.

La majorité va sans doute arguer que des expressions telles que « certains actes », « si nécessaire » et « déléguées à des tiers », figurant dans les deux premiers alinéas de l’article 2, sont d’une précision inattaquable. Soit ! Néanmoins, des craintes existent qu’un pas de plus ne soit franchi sur le chemin de la privatisation des contrôles sanitaires.

À l’heure où les besoins en contrôles sanitaires augmentent, puisque les crises d’origine animale se multiplient, nous constatons une réduction drastique des moyens publics d’intervention dans nos territoires. Nous craignons donc que l’État, via cette habilitation, ne cherche encore à faire des économies qui seraient, à terme, néfastes pour notre sécurité sanitaire.

Mes chers collègues, notre groupe considère que les problématiques évoquées dans cet article sont trop sensibles pour que nous puissions faire l’impasse d’un examen approfondi en séance publique. C’est pourquoi nous vous demandons d’adopter notre amendement de suppression de l’article 2.

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour présenter l'amendement n° 250.

M. Gérard Le Cam. Nous souhaitons, nous aussi, la suppression de l’article 2, qui habilite le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances – conformément à l’article 38 de la Constitution – dans les domaines de la sécurité sanitaire des aliments, de la santé des animaux, de la protection des végétaux ou encore des indications géographiques.

Le Gouvernement pourra ainsi, dans un champ d’habilitation particulièrement large, sans aucun garde-fou, tirer les conséquences des états généraux du sanitaire, organisés au début de 2010, dont le champ est lui aussi particulièrement étendu et les enjeux importants.

Ces ordonnances lui permettront également de légiférer sur la délégation de certaines tâches liées au contrôle phytosanitaire.

Il s’agit donc clairement de reconnaître par la loi l’externalisation de missions par essence publiques, ce que nous ne pouvons accepter.

Plus grave encore, ces ordonnances permettront une mise en conformité générale du droit national avec le droit communautaire sans qu’aucune information précise ne soit donnée aux parlementaires.

Pourtant, cette mise en conformité est à spectre très large puisqu’elle concerne, après passage en commission, les conditions de mise sur le marché et d’utilisation durable des produits phytopharmaceutiques.

Vous le savez, nous sommes très circonspects quant au recours, par ce gouvernement, à l’article 38 de la Constitution et aux possibilités qu’il offre. Il s’agit pour nous, même si les ordonnances doivent être ratifiées par le Parlement, d’une confusion des responsabilités respectives du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demandons la suppression de l’article 2.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à supprimer l’article 2, qui renvoie à des ordonnances le soin de tirer les conséquences des états généraux du sanitaire.

Tout d’abord, la commission a déjà réduit le nombre des ordonnances prévues par l’article 2.

Ensuite, les quatre groupes de travail des états généraux viennent tout juste de rendre leur rapport, ce qui ne permet pas d’en tirer les conséquences dans le présent projet de loi.

Enfin, et ce serait dommage, en adoptant ces amendements, nous nous priverions de la possibilité de modifier les articles du code rural concernant le mandat sanitaire ou encore les actes pouvant être effectués par les éleveurs sur leurs animaux, alors qu’un accord a été trouvé dans le cadre des états généraux.

Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à ces amendements de suppression de l’article 2.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements.

En proposant la suppression pure et simple de l’article, M. Botrel et M. Le Cam n’y vont pas avec le dos de la cuillère, si vous me permettez l’expression. (Sourires.)

Quatre groupes de travail, trente-huit réunions, deux cents participants, c’est dire si ces états généraux du sanitaire correspondaient à une vraie attente sur le terrain, aussi bien chez les vétérinaires que chez les agriculteurs, sans oublier le monde du végétal, également concerné.

Vous savez que j’ai décidé d’organiser des états généraux du sanitaire après avoir constaté les multiples réactions, parfois courroucées, que suscitait de la part des agriculteurs et des éleveurs ma décision de rendre obligatoire la vaccination contre la fièvre catarrhale ovine. Les professionnels estimaient qu’on leur imposait une nouvelle charge, et une charge insupportable si on ne leur donnait pas la possibilité de participer à la vaccination des bêtes.

Je considère qu’un travail de fond a été réalisé et que nous sommes parvenus à un accord entre les différents acteurs. Ne détruisons pas tout le travail accompli. Les ordonnances permettront de prendre ces décisions sur la base du consensus. Le Gouvernement ne se dote pas de pouvoirs exceptionnels, il va simplement tirer les conséquences du travail qui a été fait par les acteurs concernés.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, pour explication de vote.

M. Yannick Botrel. Nous venons d’entendre les explications de M. le ministre sur le sujet. À titre personnel, je n’ai pas complètement connaissance des conclusions des travaux qui ont été conduits dans le cadre des états généraux du sanitaire. Aussi n’est-ce pas ce qui est en cause ici. Non, ce qui suscite notre amendement de suppression, c’est davantage la méthode des ordonnances dont on ne sait, par nature, quelle sera la portée. Nous ne savons pas non plus quels seront les moyens qui seront mis en œuvre dans le cadre des politiques qu’il faudra bien développer dans ce domaine.

Sur ce point-là, bien évidemment, nous exprimons notre scepticisme et, au-delà, notre désaccord.

Sur l’autre point que vous avez soulevé dans votre réponse, monsieur le ministre, concernant le mandat sanitaire et la possibilité pour les éleveurs de procéder par eux-mêmes à la vaccination de leur cheptel, il va de soi que nous n’avons pas d’objection à formuler.

D’ailleurs, dans mon intervention initiale, chacun l’aura compris, ce n’est pas le point que j’ai mis en avant, bien au contraire. Je considère en effet que des actes de ce genre s’apparentent à des interventions de routine. Après tout, quelle différence y a-t-il entre une vaccination et une injection de sérum ? Aucune.

Donc, sur ces questions-là, nous ne sommes pas en opposition avec un accord éventuel trouvé entre les différents partenaires.

Indépendamment de cet aspect des choses, c’est bien sur un autre point que nous nous opposons : je parle de cette façon de tout ramener à des ordonnances, et donc de laisser singulièrement au pouvoir exécutif et au ministre la possibilité d’interpréter ensuite les textes votés par notre assemblée.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 112 et 250.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 251, présenté par MM. Le Cam et Danglot, Mmes Didier, Schurch, Terrade, Labarre et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Gérard Le Cam.