Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

Secrétaires :

MM. François Fortassin, Bernard Saugey.

1. Procès-verbal

2. Rappels au règlement

MM. François Fortassin, le président.

MM. Jean-Pierre Sueur, le président.

3. Renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux. – Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi en procédure accélérée (Texte de la commission)

Article 1er

MM. Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Yves Krattinger, Claude Bérit-Débat, Yannick Bodin, Yves Daudigny, Mmes Nicole Bonnefoy, MM. François Rebsamen, Jean-Jacques Mirassou, Mmes Odette Terrade, Josiane Mathon-Poinat, Mireille Schurch, M. Yannick Botrel, Mme Bernadette Bourzai, MM. Philippe Adnot, Gérard Miquel, Pierre-Yves Collombat, Charles Gautier, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Amendements identiques nos 28 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et  47 rectifié de M. Yvon Collin. – Mme Éliane Assassi, MM. Jacques Mézard, Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois ; Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales ; Jean-Jacques Mirassou, Mmes Éliane Assassi, Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. François Fortassin, Michel Charasse, Jean-Pierre Leleux. – Rejet, par scrutin public, des deux amendements.

Amendement n° 34 rectifié de M. Jean-Léonce Dupont. – MM. Jean-Léonce Dupont, le rapporteur, le secrétaire d'État, Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois ; M. Dominique Braye, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. François Fortassin, François-Noël Buffet, Jean-René Lecerf, Michel Charasse. – Rejet.

Amendement n° 11 de M. Yves Krattinger. – MM. Yves Daudigny, le rapporteur, le secrétaire d'État, Pierre-Yves Collombat, Yves Daudigny, François Fortassin. – Rejet.

Amendement n° 29 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 30 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le secrétaire d'État, Mmes Bernadette Bourzai, Christiane Hummel. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l’article 1er

Amendement no 12 de M. Jean-Claude Peyronnet. – Retrait.

Amendements nos 42, 43, 46, 41, 44, 45 et 35 à 40 de M. Yves Krattinger. – MM. Pierre-Yves Collombat, René-Pierre Signé, Mme Bernadette Bourzai, MM. François Fortassin, Yves Daudigny, Jacques Mézard, Jean-Claude Peyronnet, le rapporteur, le secrétaire d'État, Claude Bérit-Débat. – Rejet des douze amendements.

Article 2

MM. Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Claude Bérit-Débat, Yannick Bodin, Yves Daudigny, Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Josiane Mathon-Poinat, Bernadette Bourzai.

Amendements identiques nos 13 de M. Jean-Claude Peyronnet, 31 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 48 rectifié de M. Yvon Collin. – M. Jean-Claude Peyronnet, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Michel Charasse, le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet des trois amendements.

Amendements nos 14 de M. Jean-Claude Peyronnet. – MM. le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 32 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. – MM. le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 2

Amendement n° 15 de M. Pierre-Yves Collombat. – MM. Pierre-Yves Collombat, le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendement n° 16 de M. Jean-Claude Peyronnet. – MM. Jean-Claude Peyronnet, le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet.

Amendements nos 20 rectifié, 19 rectifié, 18 rectifié et 17 de M. Jean-Claude Peyronnet. – MM. Jean-Claude Peyronnet, le rapporteur, le secrétaire d'État. – Rejet des quatre amendements.

Amendement n° 33 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le secrétaire d'État, Michel Charasse. – Rejet.

Vote sur l'ensemble

M. Jean-Claude Peyronnet, Mme Éliane Assassi, MM. Pierre-Yves Collombat, Jean-Pierre Fourcade, François-Noël Buffet, François Fortassin.

Adoption du projet de loi.

4. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

M. François Fortassin,

M. Bernard Saugey.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures quarante.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour un rappel au règlement.

M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon rappel au règlement porte sur la décision prise par la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2010, qui a balayé une disposition importante adoptée par le Sénat. Je ne pense pas que du bien de la suppression de la taxe professionnelle. Toutefois, dans sa sagesse, la commission des finances du Sénat avait établi quelques règles permettant une véritable péréquation, notamment la prise en compte de la longueur de la voierie ou du nombre de personnes démunies dans les départements.

En définitive, cette péréquation est indispensable pour assurer un aménagement du territoire équilibré et harmonieux. Or, à ma grande surprise, les députés, quelle que soit leur sensibilité politique, se sont en quelque sorte ligués pour abandonner une telle mesure. Je respecte leur choix, mais nous allons nous retrouver dans une situation dramatique. En 2010, les collectivités ne perdront pas grand-chose par rapport à ce qu’elles ont perçu en 2009. Mais, les années suivantes, avec la taxe sur la valeur ajoutée et la contribution économique territoriale, les recettes des départements ou des collectivités les plus riches, comme les Hauts-de-Seine, vont augmenter considérablement, alors que celles des plus pauvres vont baisser.

M. Yannick Bodin. C’est devenu une habitude !

M. François Fortassin. Cette évolution me semble intolérable, et même contraire à l’esprit de notre République, qui est tout de même fondée sur le développement des territoires. N’oublions pas les apports des IIIet IVRépubliques en ce domaine ! Une telle décision revient à faire prendre un tournant historique à notre politique d’aménagement du territoire.

Dans ces conditions, je demande solennellement au Gouvernement, seul habilité à le faire, de déposer un amendement pour que la France, qui s’honore d’avoir une solidarité sociale bien meilleure que celle d’autres pays, fasse preuve, dans le même temps, d’une véritable solidarité territoriale, fondée sur un principe fondamental : donner un peu plus à ceux qui ont moins !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons appris, ce matin, que neuf personnes de nationalité afghane avaient été expulsées, alors que nous sommes conviés, demain, dans les préfectures, à un débat sur l’identité nationale par le ministre qui a pris cette décision. Il va sans dire que nous ne participerons pas à ce débat. Mais puisque vous représentez le Gouvernement, et singulièrement le ministère de l’intérieur, je voulais vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur les raisons qui peuvent justifier une telle décision.

M. Josselin de Rohan. Entrer en France sans papiers !

M. Jean-Pierre Sueur. En quoi l’identité nationale suppose-t-elle de renvoyer neuf personnes en situation de détresse dans un pays où règne une très grande insécurité ? Je vous le rappelle, mes chers collègues, l’un des Afghans concernés a déclaré à l’AFP : « J’avais beaucoup de problèmes en Afghanistan avec les talibans, […] je ne peux pas rentrer. » J’insiste : est-il réellement conforme à l’identité nationale telle qu’elle s’est constituée au fil du temps dans notre République de renvoyer cette personne dans un pays en guerre ?

M. Christian Cambon. Ils sont six millions dans cette situation !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. N’exagérez pas !

Mme Éliane Assassi. Allez leur dire que c’est démago !

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur Cambon, vous pouvez dire ce que vous voulez ! Pour notre part, nous tenons à défendre nos convictions.

M. Josselin de Rohan. Nous exprimons les nôtres !

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le secrétaire d’État, l’une de vos collègues, Mme Fadela Amara, a affirmé : « ce n’est pas la France que j’aime ».

Mme Éliane Assassi. Elle est tout de même entrée au Gouvernement !

M. Jean-Pierre Sueur. En outre, le Haut commissariat aux réfugiés a demandé de ne pas reconduire en Afghanistan les personnes qui se trouveront dans des situations extrêmement difficiles.

M. Josselin de Rohan. Et M. Frêche ?

M. Christian Cambon. Envoyez-les en Languedoc, M. Frêche les accueillera, c’est un expert !

M. Jean-Pierre Sueur. Dès lors, pensez-vous vraiment que le « courage et la détermination » – je cite une haute autorité de la République – dont ferait preuve M. Éric Besson honorent l’identité nationale telle que tous les républicains, quels que soient leurs choix politiques, la conçoivent ?

Cette décision est d’abord préjudiciable aux personnes concernées. Mais elle est également préjudiciable à l’idée que nous nous faisons de la France. C’est pourquoi je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire part aux plus hautes autorités de l’État de la position de notre groupe, qui procède d’une très forte conviction. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je vous donne acte de vos rappels au règlement, mes chers collègues.

3

Articles additionnels avant l'article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Article 1er (Texte non modifié par la commission)

Renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi en procédure accélérée

(Texte de la commission)

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion en procédure accélérée du projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux (nos 63, 131 et 132).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 1er.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Articles additionnels après l’article 1er

Article 1er

(Non modifié)

Par dérogation aux dispositions de l’article L. 192 du code électoral, le mandat des conseillers généraux élus en mars 2011 expirera en mars 2014.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, sur l'article.

M. Jean-Claude Peyronnet. Cet article a trait aux conseils généraux. Nous pourrions le voter s’il ne s’agissait que de prévoir leur renouvellement en une fois, comme le revendique, désormais de façon unanime, l’Assemblée des départements de France. Une telle mesure pourrait en effet faire l’objet d’un grand consensus entre nous.

Reste que nous aurions quand même quelques réserves. C’est pourquoi nous demanderions une étude d’impact approfondie afin de connaître le résultat du regroupement des élections. Car organiser quatre ou cinq élections en 2014 – leur nombre dépend de la façon dont on compte – n’irait pas sans poser des difficultés !

L’étude d’impact pourrait ainsi mesurer l’effet réel du regroupement sur la participation. Il n’est d’ailleurs pas évident qu’il la favorise. Si l’on tient compte des exemples antérieurs, on s’aperçoit que des interférences politiques, le rejet du Gouvernement par exemple, ont pu expliquer une participation plus élevée.

Quoi qu’il en soit, il existe des difficultés matérielles pour l’organisation de l’élection non seulement dans les mairies, mais aussi avant le scrutin ; je pense en particulier à des points qui n’ont pas été évoqués tels que la constitution des comptes de campagne ou la publicité électorale. Il y a donc des temps qui vont se chevaucher.

De toute façon, nous ne voterons pas cet article, car derrière le conseiller général et le conseiller régional, qui sont les seuls à être cités dans le projet de loi, se profile l’arlésienne du conseiller territorial. Or on sait bien que le fond de la question est là et nous sommes fondamentalement contre la création de ce personnage.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l'article.

M. Jean-Pierre Sueur. J’ai beaucoup réfléchi à ce qui a été dit dans le débat passionné et passionnant que nous avons eu au sein de cet hémicycle hier après-midi et hier soir.

J’avoue que j’ai été frappé par la faiblesse, voire l’inanité des arguments qui ont été employés pour défendre ce texte. Je me réjouis donc que nous ayons encore tout l’après-midi, et peut-être même la soirée, pour en discuter.

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Et même demain, et ce week-end…

M. Jean-Pierre Sueur. Après avoir tout entendu, je ne comprends toujours pas pourquoi il faut créer ces conseillers territoriaux. Peut-être quelqu’un l’a-t-il compris… En tout cas, vous semblez penser, monsieur le secrétaire d’État, que c’est une bonne chose. Reste que je vous ai connu plus convaincant.

Quant à la majorité sénatoriale, j’ai senti beaucoup de gêne sur ses travées.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois. Pas du tout !

M. Jean-Pierre Fourcade. Pas de la gêne, de la lassitude !

M. Jean-Pierre Sueur. M. Longuet nous a lui-même invités à réfléchir et beaucoup de nos collègues ont indiqué que cette question méritait d’être nuancée. On mesure donc bien à quel point vous êtes embarrassés, mes chers collègues.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Non !

M. Jean-Pierre Sueur. Vos dénégations illustrent d’ailleurs votre embarras.

Vous le savez, aucune association d’élus n’a demandé la création du conseiller territorial. (Exclamations sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C’est faux !

M. Jean-Pierre Sueur. Personne n’a proposé, dans un passé récent ou lointain, cette incongruité qui consisterait à instaurer le cumul, à institutionnaliser la tutelle et à faire que le même individu soit le défenseur à la fois du département et de la région, dans une confusion générale.

Les débats sont étranges ! Certains sont forts : on y sent une conviction, on entend des orateurs qui veulent défendre les idées qui leur tiennent à cœur. En l’occurrence, les discours en faveur du conseiller territorial étaient faiblards : vous donnez l’impression de le défendre à marche forcée ; il suffit de vous compter cet après-midi pour s’en apercevoir. (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) Vous êtes là parce que vous êtes de permanence.

M. Christian Cambon. On est obligés de vous écouter !

M. Jean-Pierre Sueur. Vous êtes de garde !

M. Jean-Pierre Fourcade. Si c’est pour se faire injurier, je préfère partir ! (M. Jean-Pierre Fourcade se lève.)

M. Jean-Pierre Sueur. Je ne vous ai pas mis en cause, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Fourcade. Je n’ai pas l’habitude de me faire injurier dans cet hémicycle ! (M. Jean-Pierre Fourcade quitte l’hémicycle.)

M. Jean-Pierre Sueur. Ai-je proféré une injure ?

Plusieurs sénateurs socialistes. Absolument pas !

M. Jean-Pierre Sueur. En aucun cas, et je regrette vraiment ce départ.

M. Christian Cambon. Parlez-nous plutôt de votre bilan quand vous étiez secrétaire d’État aux collectivités locales !

M. Jean-Pierre Sueur. On peut en parler, si vous voulez !

M. Christian Cambon. Cela m’intéresserait !

M. Jean-Pierre Sueur. Quant au scrutin à un tour, j’ai également été très étonné que vous ne le défendiez pas, mes chers collègues. Disons la vérité : ce texte vous est tombé dessus, et vous n’êtes pas enthousiastes.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Mais si !

M. Jean-Pierre Sueur. Rappelez-vous ce qui a été dit hier. D’ailleurs, monsieur le président de la commission, vous étiez présent. Vous ne vous êtes pas senti injurié, et vous avez eu raison.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. J’entends tellement d’incongruités … 

M. Jean-Pierre Sueur. Vous êtes en effet habitué ! Vous voyez que le climat est bon, mes chers collègues. (Sourires.)

Pour conclure, car je n’ai plus que vingt secondes, et je sais que vous êtes vigilant, monsieur le président,…

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Vous avez déjà dépassé votre temps de parole de dix-neuf secondes !

M. Jean-Pierre Sueur. … je voudrais dire que l’on sent très bien que cette réforme ne vous convient pas. Par conséquent, il serait sage de remettre l’ouvrage sur le métier, et je sais que vous en êtes conscients. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yves Krattinger, sur l’article.

M. Yves Krattinger. Monsieur le secrétaire d’État, au travers de cette intervention, je souhaiterais engager le dialogue avec vous sur un point.

Imaginons que nous sommes en 2014. Les conseillers territoriaux, dont vous nous proposez la création, sont élus. Siègent donc au sein de cette nouvelle assemblée régionale des élus de la majorité et de l’opposition, qui sont eux-mêmes des élus départementaux. Parmi eux figurent des présidents d’assemblées départementales, vraisemblablement de la même sensibilité politique que le président de l’assemblée régionale. Mais certains peuvent ne pas être de la même sensibilité politique et ils ont alors à leurs côtés leurs propres opposants, qui sont les amis du président de l’assemblée régionale. À ce moment-là se déroulent des jeux subtils au sein de l’assemblée régionale, que la presse qualifie de « politiciens ».

M. Jean-Claude Peyronnet. De « florentins » !

M. Yves Krattinger. La création du conseiller territorial aboutit à cette perversité.

À votre tour de me décrire la situation telle que vous l’imaginez. Pour ma part, je crains qu’elle ne soit difficile à vivre pour l’ensemble des acteurs de ces assemblées. En effet, on ne pourra pas empêcher que les présidents de départements appartenant à la minorité régionale soient doublés en permanence par leurs opposants, le président de la région leur communicant en priorité les informations.

Le système que vous avez imaginé en théorie, à savoir une meilleure articulation entre régions et départements, aboutira fatalement à l’inverse de ce que vous souhaitez. Comme je vous le disais hier, vous jouez à l’apprenti sorcier. Démontrez-moi le contraire !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils auront du mal !

M. Yves Krattinger. Vous improvisez un dispositif ; il n’est pas suffisamment réfléchi. Faute d’une démonstration pertinente de votre part, je reste extrêmement réservé par rapport à votre proposition.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l'article.

M. Claude Bérit-Débat. Depuis hier, on assiste à un dialogue de sourds.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mais non !

M. Claude Bérit-Débat. Le débat est même surréaliste.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. À cause de vous !

M. Claude Bérit-Débat. Nous ne cessons de vous le dire : on débat d’un projet de loi qui va tout à fait à l’encontre de ce que nous souhaiterions faire. On commence par décider de raccourcir le mandat des conseillers régionaux et celui des conseillers généraux.

Or, quand nous faisons référence à ce nouvel élu hybride, virtuel qu’est le conseiller territorial, vous nous répondez que c’est hors sujet et que nous en débattrons ultérieurement.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Exactement !

M. Claude Bérit-Débat. Pourtant, le conseiller territorial est mentionné dès la première page de l’étude d’impact et il est au cœur du débat que nous avons aujourd'hui.

Parmi les questions qui vous sont posées, monsieur le secrétaire d’État, celle qui a été soulevée par notre collègue Yves Krattinger touche au mode de fonctionnement des futures assemblées. Si les conseillers territoriaux doivent désormais faire partie de notre paysage institutionnel, ils auront à défendre une dimension territoriale à la fois à l’échelle d’un département et à celle d’une région. On peut effectivement imaginer des situations dans lesquelles la majorité à l’échelon régional s’oppose à des conseillers territoriaux défendant un territoire tout à fait différent.

Le fait que, demain, des candidats puissent être élus sans s’être présentés devant le suffrage des électeurs, grâce aux voix des battus en quelque sorte, relève tout de même d’une conception de la démocratie particulièrement révolutionnaire, …

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Contre-révolutionnaire !

M. Claude Bérit-Débat. … puisqu’ils représenteront des gens qui n’auront pas voté pour eux ! Ce point suscite de vives réactions.

Je voudrais également revenir sur le nombre de conseillers territoriaux, en prenant l’exemple de la région Aquitaine,…

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Évidemment !

M. Claude Bérit-Débat. … qui est constituée de cinq départements. Si j’en crois l’étude d’impact, mon département, la Dordogne, ne comptera plus que vingt et un conseillers territoriaux, contre cinquante conseillers généraux et treize conseillers régionaux actuellement. Nous aimerions obtenir quelques précisions, monsieur le secrétaire d’État, car comment feront ces futurs conseillers territoriaux, si leur nombre est plus que divisé par deux, pour demeurer des élus de proximité ?

Je vous signale, à cet égard, que la Dordogne est le troisième département de France par sa superficie ; elle compte 420 000 habitants, soit 43 habitants au kilomètre carré. Comment les élus pourront-ils, sur de telles distances – il faut plus d’une heure et demie pour aller d’un bout à l’autre du département –, être efficaces sur le plan de la proximité, mais également à l’échelon de la région, qui est également l’une des plus vastes ?

J’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous apportiez des éclaircissements sur ces questions. Je pourrais ainsi répondre aux uns et aux autres, élus de droite comme de gauche, lorsqu’ils me demandent, à chaque réunion que j’organise, comment sera représenté notre département dans cette future assemblée.

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, sur l'article.

M. Yannick Bodin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi de revenir sur un sujet qui a été largement évoqué hier : la parité en politique.

Je vous le dis d’emblée, monsieur le secrétaire d’État, tant que le Gouvernement ne nous aura pas donné des assurances concernant le strict respect de la parité dans son projet de modification des modes de scrutin en 2014, nous refuserons de voter cet article modifiant le calendrier électoral.

M. Christian Cambon. Ce n’est pas grave !

M. Yannick Bodin. Tout d’abord, nous nous interrogeons sur les risques d’inconstitutionnalité de la création des conseillers territoriaux. Il est bien spécifié à l’article 1er de la Constitution que : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux […] ». En d’autres termes, ou bien votre projet de loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes, et il n’y a pas de problème, ou bien il le défavorise, et sa conformité à la Constitution se pose.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il le défavorise !

M. Yannick Bodin. Aujourd'hui, on compte 47 % de femmes dans les conseils régionaux. Le mode de scrutin que vous nous proposez laisse espérer tout au plus 20 % de conseillères territoriales. Il s’agit donc d’un recul.

Ensuite, j’attire votre attention sur le fait que la loi de 2007, qui fut une petite avancée, a institué la parité dans les exécutifs des conseils régionaux. Comment allez-vous demain assurer son application avec 20 % de femmes dans les conseils régionaux ? Ce sera impossible, inapplicable !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela va vous poser des problèmes ! Elles assureront toutes des fonctions exécutives !

M. Yannick Bodin. J’aborderai, par ailleurs, la question des remplaçants, ou plutôt des remplaçantes, institués par cette même loi de 2007. À l’occasion du vote de cette disposition, plusieurs d’entre nous avaient même parlé de « canton en viager » !

M. Alain Lambert. On peut faire mieux !

M. Yannick Bodin. Depuis que cette loi est entrée en application, c'est-à-dire depuis le renouvellement de la moitié des conseils généraux voilà vingt et un mois, combien de remplaçantes sont-elles devenues conseillères titulaires ?

Mme Odette Terrade. Bonne question !

M. Yannick Bodin. Il serait intéressant d’avoir cette donnée dans l’étude d’impact, monsieur le secrétaire d’État, car nous avons besoin de savoir de manière objective si, depuis cette loi, il y a eu, ou non, une avancée réelle. Elle nous permettrait également de faire des projections pour l’avenir.

Votre silence sur cette question laisse supposer que la réponse n’est guère favorable aux femmes et à la progression de la parité…

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, je vous en supplie, cessez de présenter votre projet de parité pour les élections municipales comme un lot de consolation pour nos collègues féminines ! (Bien sûr ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.) C’est un homme qui vous le dit, personne n’oserait tenir de tels propos, vexants, voire insultants pour les femmes ! Nous ne sommes pas en train de débattre du projet concernant les élections municipales, nous examinons votre projet concernant les élections des conseillers territoriaux que vous voulez créer : c’est sur cette question qu’il faut répondre !

La parité étant manifestement en danger, comme votre silence sur la question le laisse supposer, nous voterons contre l’article 1er, et je tiendrai les mêmes propos sur l’article 2 ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l'article.

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais vous inviter à Dolignon, une petite commune de Thiérache, peuplée de cinquante-huit habitants, nichée dans un magnifique paysage de bocage.

Samedi dernier, une centaine de personnes, comprenant des habitants, des élus et des invités, y célébrait la réception des travaux de l’église Saint-Michel, joyau patrimonial et historique de la commune. Les travaux, qui ont coûté 140 000 euros, ont donné lieu à des financements croisés : 70 % de subventions, dont 46 % du conseil général de l’Aisne et une part de réserve parlementaire sénatoriale. La température, ce samedi, était glaciale, mais les échanges, chaleureux.

Ainsi vit – vous le savez, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues – une unité de base de notre organisation territoriale, avec un conseil municipal motivé autour de son maire. C’est un exemple d’une démocratie simple, d’un lien social solide.

Oui, Dolignon vit parce que la commune est partie d’une communauté de communes, intercommunalité bâtie sur un territoire rural, active au travers d’ambitieux programmes d’assainissement, fortement novatrice en matière de développement de la filière bois, notamment.

Dolignon vit parce que son maire, ses élus, ses habitants sont en contact régulier avec le conseiller général du canton, proche d’eux, au-delà des tendances politiques, connaissant leurs difficultés, attentif à leurs aspirations. Ainsi est l’élu de proximité, représentant de son territoire au sein de l’assemblée départementale.

Dolignon et l’intercommunalité gardent un sens et une efficacité parce que le conseil général joue son rôle de partenaire financier, dans une contractualisation des projets, d’animateur des solidarités humaines, de porteur de développement du haut-débit ou des espaces numériques de travail, parce que l’échelon départemental s’affirme comme le premier niveau de péréquation entre les territoires.

Monsieur le secrétaire d’État, c’est cette France de la réalité rurale, une France sans complexe et sans nostalgie, tournée vers l’avenir, que vous voulez aujourd'hui anesthésier en réduisant et en affaiblissant son tissu démocratique et social !

La réduction du mandat de conseiller général est bien la première étape d’une mort lente – et je pèse mes mots – pour l’échelon départemental en tant qu’acteur essentiel d’actions publiques de proximité.

M. René-Pierre Signé. Il a raison !

M. Yves Daudigny. Puisque le Gouvernement aime s’appuyer sur des sondages pour justifier sa démarche, je citerai celui qui a été réalisé par Ipsos Public Affairs, en novembre 2009, selon lequel 82 % des Français sont attachés à leur département, 78 % sont satisfaits de l’action de leur département, 83 % estiment que le département est une institution qui fait partie de l’identité de la France et qu’il faut préserver, 76 % considèrent la réforme des collectivités locales confuse et incompréhensible et 54 % la jugent électoraliste.

M. Christian Cambon. Ne changeons rien !

M. Yves Daudigny. L’article 1er qui est aujourd'hui soumis à notre suffrage ouvre la voie à des assemblées départementales réduites, sinon squelettiques. Quelle ignorance, ce que je ne crois pas, quel mépris alors pour le travail réalisé par les conseillers généraux, de toutes sensibilités politiques, sur l’ensemble de notre territoire !

Cet article ouvre la voie à un nouveau type de conseil général, simple opérateur territorial de politiques définies par l’État et financées pour partie par l’échelon départemental dans le domaine social.

Je n’insisterai pas sur le caractère incongru d’une réforme que l’on nous demande d’approuver, alors que les conseillers territoriaux n’existent pas encore et n’existeront peut-être jamais. Je n’insisterai pas non plus sur l’étude d’impact, qui ne prend aucunement en compte la multitude des rendez-vous électoraux de l’année 2014.

Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voterons contre l’article 1er du projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, sur l'article.

Mme Nicole Bonnefoy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis hier, nous abordons officiellement le premier acte de la réforme des collectivités territoriales. Je précise « officiellement », car cette réforme a bel et bien déjà démarré avec le projet de loi de finances pour 2010 et la suppression de la taxe professionnelle.

Vous nous demandez dès maintenant de nous prononcer sur la concomitance du renouvellement des conseillers régionaux et des conseillers généraux, s’inscrivant dans votre projet de création du conseiller territorial.

Comme beaucoup l’ont déjà dit, cette réforme avance masquée. L’ordre d’examen des textes que vous nous proposez est totalement illogique et se fait volontairement à l’envers. Vous nous obligez à anticiper les réformes futures en mettant en place un calendrier sur l’existence d’une loi qui n’est pas encore votée.

Vous voulez passer en force, comme vous avez pris l’habitude de le faire depuis quelques mois, en actant dès le mois de décembre la création des conseillers territoriaux, sans que nous ayons discuté de l’opportunité de cette mesure sur le fond !

L’objectif de votre réforme est non pas d’améliorer le fonctionnement de notre pays, mais de revenir sur la décentralisation en redonnant les pleins pouvoirs à Bercy.

Vous mettez les collectivités sous tutelle financière avec la suppression de la taxe professionnelle et vous créez un système féodal avec des collectivités totalement dépendantes de l’État, financièrement et politiquement.

Tout cela est une vaste opération de démantèlement de la décentralisation !

Pour justifier votre réforme, vous montrez du doigt les collectivités territoriales en nous précisant qu’elles sont mal gérées, qu’elles coûtent cher et en remettant en cause le travail des élus.

Vous oubliez cependant de préciser que ces mêmes collectivités réalisent 73 % des investissements publics, qu’elles ont investi 54 milliards d’euros pour la relance, contre seulement 24 milliards d’euros pour l’État, et enfin qu’elles représentent moins de 10 % de la dette publique, contre 90% pour l’État.

Les collectivités créent de l’activité, de l’emploi et des infrastructures, aménagent le territoire, soutiennent le monde associatif et, surtout, génèrent du lien social. En somme, elles remplissent leur rôle en mettant en place un véritable service public de proximité, en lien direct avec nos concitoyens.

C’est peut-être cette proximité et, sans doute, ces lieux de contre-pouvoir qui vous gênent, monsieur le secrétaire d’État, pour que vous vouliez ainsi remettre en cause leur existence.

Le projet de loi que vous nous présentez est donc une aberration d’un point de vue formel, car il suppose que le principe même du conseiller territorial, qui doit être débattu plus tard, soit déjà entériné.

En outre, sur le fond, ce projet de loi impose la convergence entre les régions et les départements, alors que seules six pour cent de leurs actions sont communes.

Votre conseiller territorial, lui, verra sa charge de travail doubler. Il devra faire face à la fois aux problématiques départementales et régionales ! Je ne vois pas comment il pourra ne pas être coupé des réalités locales, de la vie professionnelle et tout simplement du « terrain » : que va devenir la démocratie locale, celle de proximité, à laquelle tiennent tant les Français ?

De plus, nous ignorons totalement le nombre et le principe de répartition de ces conseillers territoriaux. Vous évoquez, en débat, un plancher fixé à quinze conseillers, mais rien n’est inscrit dans la loi. Les collectivités ne savent donc pas où elles vont !

Comment voulez-vous, dans ces conditions, que nous votions la concomitance, qui crée tacitement un « super-élu » bicéphale, dont nous savons si peu, en dehors du fait qu’il portera atteinte à la représentativité politique locale ?

Cette réforme est tout simplement illisible, imprécise et totalement précipitée.

Quant au mode de scrutin proposé, en dehors du fait qu’il est taillé sur mesure pour l’UMP, il porte un coup fatal à la parité.

Vous nous annoncez que le nouveau mode de scrutin devrait déboucher sur 45 000 nouvelles élues. Mais, dans le même temps, vous nous précisez que le taux de femmes élues stagnerait à hauteur de 22 %, comme c’est déjà le cas pour l’ensemble des élues départementales et régionales. Aucun progrès ne serait donc réalisé !

Pis, cette réforme comporte le risque que la sociologie des conseillers territoriaux soit dangereusement similaire à celle des actuels conseillers généraux, c’est-à-dire que la parité soit inexistante !

Il ne faut pas s’y tromper : l’instauration de ce mode de scrutin aboutira, très certainement, à faire bénéficier les hommes du statut de titulaire, alors que les femmes se verront attribuer celui de suppléante.

Interpellé sur le sujet de la parité le 2 décembre dernier au Sénat, monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué : « Dans le projet, il n’y a pas d’amélioration ni de régression, mais nous sommes ouverts à toute proposition par le biais d’amendements », avant d’ajouter : « Nous sommes conscients de la nécessité de le faire, et le Gouvernement veut améliorer sa copie ».

C’est bien de reconnaître les lacunes dans ce domaine, mais il faudra concrétiser ces propos et, le moment venu, ne pas refuser de voter des propositions allant en ce sens... même si elles tendent à modifier le mode de scrutin des conseillers territoriaux !

En conclusion, il me semble impossible, idéologiquement et politiquement, de voter ce projet de loi.

Se prononcer sur une nouvelle catégorie d’élus locaux, dont le cadre et le contenu du mandat, ainsi que le mode de scrutin n’existent pas encore, va à l’encontre de toute logique.

Qui plus est, ce projet de loi s’intègre dans une réforme globale précipitée, dont les impacts s’annoncent dangereux pour nos collectivités et notre démocratie locale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, sur l’article.

M. François Rebsamen. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous allons examiner un texte qui cache tant de choses qu’il nous laisse pour le moins perplexes.

En même temps, et c’est bien la contradiction, vous êtes obligé de les évoquer, monsieur le secrétaire d’État, pour des raisons constitutionnelles, car, dans le cas contraire, les juges ne comprendraient pas que vous ayez aujourd’hui opté pour le rassemblement d’une élection en deux temps, que vous ayez supprimé le cumul des mandats pour le remplacer par le cumul des fonctions, sans en donner l’explication profonde.

Celle-ci est dans les non-dits. Ils touchent à la création de ces « super-élus » conseillers territoriaux qui, d’après les textes, devront se réunir le même jour, c’est-à-dire cinq jours après l’élection, en pleine campagne municipale, pour élire tout à la fois le président du conseil général et le président du conseil régional. Il est difficile, dans ces conditions, de se couper en deux.

Dans la longue liste de tous les non-dits que comporte ce texte, je retiendrai bien évidemment le mode de scrutin.

Vous nous dites, monsieur le secrétaire d’État, que, par la suite, dans les autres textes qui seront présentés par le Gouvernement, tout sera négociable.

D’abord, cette affirmation n’est pas prouvée. À en croire la presse, les propos du Président de la République en la matière démontrent que la capacité de négociation qu’il laisse au Gouvernement sur ces textes est égale à zéro, ce qui laisse peu de marge, vous l’avouerez, à une vraie discussion.

Ce qui a fait la force des élections locales jusqu’à présent – je pense notamment à ces élections majeures pour l’organisation territoriale de la République que sont les élections municipales – c’est la simplicité du mode de scrutin aux yeux des électeurs, malgré les entorses que vous y avez apportées en supprimant le renouvellement en une seule fois des conseillers généraux, qui était prévu à l’époque par l’ancien ministre de l’intérieur. Là où les électeurs ont besoin de clarté, vous apportez de la confusion.

Comment imaginer que nos concitoyens, dans leur ville, dans leur commune, soient appelés à se prononcer, le même jour, en même temps pour le premier tour d’une élection municipale et pour un tour, qui serait décisif, des élections cantonales et régionales. En réalité, vous êtes en train de démembrer la région pour la « cantonaliser ». Vous le faites dans les zones rurales, mais également en zones urbaines, alors que vous-même critiquiez récemment le faible impact de l’existence des cantons dans ces dernières.

Imaginez un peu la confusion qui naîtrait si le mode de scrutin prévu dans vos textes était voté !

Mais je ne crois pas qu’il le sera, car nombre de nos collègues pensent que ce mode de scrutin est inique et contraire à la tradition de nos républiques qui se sont succédé depuis une bonne centaine d’années.

Mélanger les scrutins à un tour et à deux tours, fixer l’élection de nouveaux conseillers territoriaux dans des cantons urbains en même temps que les élections municipales, c’est tout sauf clair pour les électeurs !

Prétendre que le regroupement des élections permettra une plus grande participation n’est donc qu’un argument fallacieux. Les électeurs se mobilisent quand ils savent pour qui ils vont voter et dans quelles conditions.

En réalité, au travers des textes que vous proposez, par le manque de visibilité, par la confusion qui en résulte, vous organisez d’ores et déjà vous-même l’abstention, dont vous serez seuls responsables ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, sur l’article.

M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, de nombreux orateurs, au cours de la soirée d’hier, ont eu l’occasion d’expliquer que notre pays, notre République, pouvait s’enorgueillir de son système électoral, qui fait d’ailleurs référence à l’échelon quasi planétaire.

Pourtant, au moment où nous tous qui siégeons au Sénat, toutes travées confondues, sommes appelés à faire ce constat, vous nous proposez au travers de ce projet de loi un dévoiement du système électoral. Comme il a également été annoncé hier, ce texte précède paradoxalement la réforme des collectivités territoriales, alors que la logique simple aurait voulu qu’on procède exactement à l’inverse.

La seule finalité de ce texte consiste à s’attaquer aux acquis de la décentralisation et, d’une manière plus directe, aux collectivités territoriales, dont chacun ici sait qu’elles représentent un contre-pouvoir devenu insupportable au plus haut sommet de l’État.

Nous aurons d’ailleurs le loisir, dans les semaines à venir, de dénoncer le mode d’élection proposé. En vérité, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui constitue le premier étage d’une fusée imaginée par le Gouvernement pour atteindre le but que je viens d’évoquer.

Nous sommes d’autant plus indignés que l’on nous demande aujourd’hui, dans la précipitation, de valider une loi, de six lignes, sans nous permettre d’en débattre sérieusement ou de l’amender, pour la simple et bonne raison que pas une once d’information ne nous était parvenue à son sujet, notamment au cours de la soirée d’hier.

D’ailleurs, les textes qui sont présentés dans le cadre de la réforme des collectivités territoriales sont soumis au Parlement dans un ordre défiant le plus simple bon sens.

La seule logique apparente est celle d’une précipitation fébrile destinée à permettre l’adoption dans les temps d’un projet de réforme, proposé par un exécutif qui cherche moins à satisfaire l’intérêt général ou à parfaire un système électoral qu’à privilégier l’intérêt du pouvoir ou de sa majorité.

Il en résulte une conséquence ubuesque : nous examinons aujourd’hui un texte destiné à permettre l’application pratique d’une loi dont nous n’avons pas encore débattu, et pour cause !

Cette manière de faire est d’ailleurs quasiment élevée au rang de système de la part d’un gouvernement qui finit par témoigner une forme de mépris à l’égard du Parlement.

Faut-il rappeler que le Sénat a été saisi et a débattu en séance publique de la réforme de la taxe professionnelle avant même que ne soient définies les futures compétences des collectivités territoriales ? Il y a bien d’autres exemples de ce type.

Nous sommes donc face à un système qui se voudrait coproductif de la loi, mais qui est rendu hémiplégique par un gouvernement et sa majorité. Le Parlement est quasi dépouillé, au profit de l’exécutif, d’un pouvoir législatif dont il est, ou devrait être, normalement dépositaire.

Le fait que la majorité recourt trop souvent au scrutin public, parce que le nombre de ses membres présents dans l’hémicycle est trop faible, vient encore aggraver la situation.

En vérité, les conditions d’examen de ce projet de loi sont celles d’un bateau ivre où il est très difficile de savoir qui est le capitaine et comment est constitué l’équipage.

L’objet de l’article 1er est donc d’interrompre en 2014 le mandat des conseillers généraux qui auront été élus en 2011 pour assurer la promotion d’un élu fantôme, le « conseiller territorial », qui s’installe progressivement, prend d’ores et déjà ses aises et est appelé à remplacer de manière mécanique le conseiller général.

Au sein de notre Haute Assemblée, où les conseillers généraux sont nombreux, chacun le comprendra facilement : à un moment où l’on critique de plus en plus souvent l’« éloignement » entre les élus locaux et la population, le conseiller général est, du fait de son mode d’élection et de ses compétences, un acteur irremplaçable de notre organisation territoriale.

Par conséquent, le présent article 1er porte un mauvais coup à une institution qui a fait ses preuves. C’est pourquoi nous voterons contre cet article et, au-delà, contre le projet de loi, qui n’apporte aucun élément positif par rapport aux objectifs affichés ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Odette Terrade, sur l’article.

Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été soulignées par les nombreux intervenants précédents.

Je centrerai mon intervention sur le mode d’élection des futurs conseillers territoriaux que prévoit le projet de réforme des collectivités territoriales, du moins tel que nous en avons connaissance, c'est-à-dire le scrutin uninominal majoritaire à un tour. J’aborderai, en particulier, la question de la parité entre les femmes et les hommes parmi les futurs conseillers territoriaux.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans cet hémicycle, je suis de celles qui ont voté avec enthousiasme les lois sur la parité en 1999 et en 2000 ! J’espérais qu’elles seraient un levier pour d’autres avancées dans toutes les sphères de la société, politique, économique, privée.

Hélas, le projet de loi que vous nous proposez constitue non pas une avancée, mais un recul considérable !

Pourtant, la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes et la modification qu’elle a introduite dans notre norme fondamentale faisaient suite à de nombreuses luttes des femmes pour conquérir leurs droits et parvenir à l’égalité. Je pense notamment au droit de vote, au droit à l’interruption volontaire de grossesse, l’IVG, à l’accès à la contraception ou aux luttes pour l’emploi et pour l’égalité professionnelle.

Or, d’après les informations dont nous disposons actuellement, rien n’est prévu aujourd'hui pour garantir la parité parmi les conseillers territoriaux et pour assurer le respect de notre Constitution.

Monsieur le secrétaire d’État, pensez-vous un seul instant que les femmes vont accepter cette marche arrière radicale ? En proposant le mode de scrutin uninominal à un tour, qui n’a plus été utilisé depuis 1852, comment avez-vous pu imaginer que les femmes allaient se laisser faire et se résoudre à voir remis en cause les progrès durement acquis pour l’égale représentation des femmes dans nos institutions ?

Faut-il vous rappeler que les femmes représentent la moitié de l’humanité, qu’elles constituent 51 % de la population de notre pays et 53 % du corps électoral ? Il est donc tout à fait normal de penser à leur juste représentation parmi les élus de la nation et des collectivités.

Une fois de plus, sous prétexte de « simplification » ou de « modernisation », vous proposez un texte qui réduit ce qu’il pouvait y avoir de bon et de démocratique dans le système actuel, certes imparfait, au profit d’une machine anti-démocratique, centraliste, voire monarchique.

Quel argument allez-vous utiliser pour justifier le scrutin uninominal, qui oriente plus vers un choix de personne que vers un choix de programme, au lieu du scrutin de liste ? En effet, comment faire avancer la parité avec un tel mode de scrutin, alors qu’il est déjà si difficile de la garantir sur des listes, même lorsqu’elle est imposée par la loi ?

Monsieur le secrétaire d’État, vous avez habilement répondu aux précédentes interrogations sur le sujet en évoquant uniquement les élus des communes de 500 à 3 500 habitants, alors que les questions portent bien sur les conseillers territoriaux !

Je le rappelle, la loi constitutionnelle du 8 juillet 1999 relative à l’égalité entre les femmes et les hommes a inséré, à l’article 3 de notre Constitution, un alinéa ainsi rédigé « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives » et a complété son article 4 en précisant que les partis et groupements politiques contribuaient à la mise en œuvre de ce principe.

Comme je l’ai indiqué, cette loi fut le résultat de plusieurs années de combat des femmes de tous les bords politiques contre une situation où la « non-place » dans la vie publique relève de la responsabilité des partis politiques. Il a fallu de longs débats, à plusieurs reprises, en particulier au sein de cette assemblée, pour que la loi devienne un peu contraignante et que des résultats tangibles voient le jour.

Grâce à cela, les conseils régionaux sont aujourd’hui l’une des institutions où le principe de parité est le moins mal respecté, puisque 47,6 % des conseillers régionaux sont des femmes, et ce grâce au scrutin de liste.

Selon une étude réalisée par l’Observatoire de la parité au mois d’octobre, le nouveau mode de scrutin envisagé – 80 % des conseillers territoriaux seraient élus au scrutin uninominal majoritaire à un seul tour et les 20 % restants au scrutin proportionnel –, ferait passer le nombre de conseillères territoriales de 23 % à 19,6 %. Sur ce plan au moins, ce n’est pas un progrès !

Je le rappelle également, avant la révision constitutionnelle de 1999, il n’y avait aucune femme dans vingt-trois conseils généraux. Aujourd'hui, une telle situation ne concerne plus que trois départements. Certes, c’est toujours trois de trop, mais nous avons bien la preuve que le fait d’imposer par la loi la parité dans les scrutins de liste, notamment pour les élections régionales, a bel et bien eu une influence non négligeable sur les autres scrutins.

Certes, le fait que le principe de parité soit mieux respecté dans les conseils municipaux des villes ayant entre 500 et 3 500 habitants constitue un progrès, et c’est un argument à retenir. Mais qu’en sera-t-il réellement lorsque les communes seront regroupées, comme c’est le souhait du Gouvernement, en intercommunalités, ce qui aura pour résultat de supprimer, de fait, l’échelon communal ?

Présenter une démarche très volontariste pour la parité dans des instances appelées à disparaître pourrait être interprété comme une habile manipulation, voire l’expression d’un certain cynisme.

Je veux le réaffirmer ici, malgré les progrès obtenus, qui disparaîtraient avec cette réforme, la représentation des femmes dans notre société et dans les institutions de la République est, aujourd’hui encore, très en dessous de ce qu’elle devrait être.

Alors que les femmes représentent un peu plus de la moitié de nos concitoyens, elles restent minoritaires, voire très minoritaires, dans les rangs des élus. En outre, leur représentation a bizarrement tendance à diminuer à mesure qu’on s’éloigne de l’échelon local.

De plus, compte tenu des circonstances, il semble qu’il faille encore rappeler à quel point la parité est un véritable enjeu de société. C’est un point essentiel dans la démocratie et dans l’implication de toute la société en politique. Cet aspect prend toute sa valeur si l’on considère la progression de l’abstention au cours de ces dernières années.

En d’autres termes, notre attachement à la parité vise non pas à remplacer une élite masculine par une élite féminine, mais à permettre à un plus grand nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens de participer à la vie politique et d’investir les lieux de décisions.

À ceux de nos collègues tentés de me répondre que la parité n’a pas besoin d’incitation légale ou que le mode de scrutin n’y fait rien, je rappelle une phrase prononcée par ma collègue Nicole Borvo Cohen-Seat lors du débat de 1999 : « Si l’égale capacité des femmes est une réalité aussi ancienne que le partage de l’Humanité entre hommes et femmes, c’est la volonté politique et la loi qui ont fait que les études, les grandes écoles, les corps de l’État leur sont peu à peu ouverts. »

Mes chers collègues, ne soyons pas en 2009 en-deçà de ce qui a été fait en 2000 ! Ne décidons pas, à partir d’une vision technocratique de notre territoire, d’une réforme des collectivités qui complique nos institutions et éloigne un peu plus les élus de terrain de leurs électeurs !

Comme vous l’avez compris, en l’état actuel, je ne peux pas accepter l’article préparant une réforme qui n’amène rien de bon pour les femmes. C’est pourquoi je voterai contre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l’article.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 1er du présent projet de loi tend à réduire de moitié la durée du mandat des conseillers généraux qui seront élus en 2011.

Notons d’abord que cette décision n’a, de fait, aucun caractère d’urgence. On se demande d’ailleurs pourquoi ce texte a été soumis à la procédure accélérée, alors qu’elle n’était nullement nécessaire.

En fait, l’intention de réduire de moitié la durée d’un mandat électif marque la volonté de tronquer toute possibilité d’action réelle des futurs élus. Compte tenu des réformes en cours ou annoncées et de la date prévue pour leur mise en œuvre, les quatre années seront peut-être quatre années perdues, du fait d’une déstabilisation des ressources des conseils généraux et de l’insécurité juridique instaurée durant cette période de transition.

Les exécutifs des conseils généraux auront du mal à se projeter dans un avenir aussi incertain, ce qui sera dommageable pour l’investissement et le développement des services publics.

Cette réforme réduira d’ailleurs les actions de solidarité de nos départements, qui sont pourtant – il faut bien l’avouer – de très efficaces amortisseurs des difficultés sociales rencontrées par nos concitoyens. Notre pays attend des réformes, certes, mais bien différentes de celles que vous nous proposez : nous avons besoin de plus de justice sociale et fiscale !

M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, sur l'article.

Mme Mireille Schurch. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui vise à supprimer dès 2014 les conseillers généraux ou, plutôt, à les dissoudre et à les faire disparaître en changeant leur nom, leur territoire et leur mode d’élection.

Comme vous n’avez pas pu supprimer purement et simplement les départements d’un coup, vous avez décidé de les agresser jusqu’à mort s’ensuive. Ces agressions, petites ou grandes, n’ont en réalité qu’un seul objectif : faire disparaître les départements.

Le premier signe visible et symbolique fut sans aucun doute la suppression de la référence départementale dans les plaques minéralogiques des véhicules français. Puis, vous avez alourdi les charges des départements, et ce sans compenser à l’euro près, comme vous vous y étiez engagé.

Monsieur le secrétaire d’État, dans l’Allier, département que vous allez très bientôt apprendre à connaître, le montant qui n’a pas été compensé pour honorer les dépenses s’élève à 73 millions d’euros !

En outre, vous avez dit pis que pendre de tous ces élus, trop nombreux et qui coûtent trop cher…

Avec ce projet de loi, qui est l’un des volets de la réforme territoriale, vous vous attaquez cette fois à ceux qui représentent cette institution : les conseillers généraux. Ils sont 4 182 élus sur tout le territoire, représentant chacun leur canton au sein des conseils généraux.

Si votre réforme était demain adoptée, ils disparaîtraient au profit d’élus hybrides, à la fois conseillers pour la région et le département. En réalité, ils disparaîtront parce qu’ils vous dérangent.

Élus d’un petit territoire, ils connaissent celui-ci très bien. Proches des habitants, élus de terrain, ils rencontrent la population, ainsi que les maires, ces maires dont le tour viendra sans doute un peu plus tard, lentement mais sûrement, avec l’émergence des communes nouvelles !

De votre point de vue, cette proximité, voire cette complicité, entre élus et citoyens amène à une trop grande attention aux besoins des populations et, de ce fait, crée des dépenses que vous jugez anormales, excessives et, pour tout dire, inutiles.

Ce sont pourtant des dépenses publiques pour l’intérêt général. Elles ne créent pas de profits, mais elles bénéficient aux populations. C’est cela que vous jugez inadmissible, car le marché est encore absent de ces services de proximité !

Les conseillers généraux sont, par vocation, des élus sensibles aux difficultés de nos concitoyens. La compétence sociale du département les conduit à s’intéresser en priorité aux plus modestes d’entre eux. Vous avez donc décidé la suppression de ces élus.

Demain, de nouveaux représentants de territoires plus vastes devront gérer de nombreux domaines. De représentants du peuple, ils deviendront définitivement des gestionnaires moins disponibles, moins présents et sans doute moins sensibles aux problèmes des gens.

Monsieur le secrétaire d’État, cette réforme nous apparaît dangereuse, pour les plus pauvres, pour l’intérêt général et pour la démocratie.

C’est la raison pour laquelle je voterai contre cet article et contre ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, sur l'article.

M. Yannick Botrel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte qu’on nous présente aujourd’hui suscite, à l’évidence, de nombreuses questions.

Il pose d’abord un problème de cohérence, puisque le Gouvernement veut nous faire voter une loi anticipant la création du conseiller territorial avant que cette proposition n’ait été elle-même débattue sur le fond par le Parlement. Cela montre une nouvelle fois l’absence de rigueur qui est imposée au travail législatif.

De surcroît, les échanges que nous avons eus depuis l’ouverture du débat laissent perplexe, aucune réponse n’ayant été apportée à des questions fondamentales. Combien y aura-t-il de conseillers territoriaux par département ? Avec quels ratios ? Quelles seront les modalités retenues pour en déterminer le nombre ? Quelle sera la représentation des territoires ? Quelle parité ?

À chaque fois que ces questions ont été posées, le secrétaire d'État a invariablement répondu que ce n’était pas le sujet ou que ce point serait examiné plus tard.

Ainsi, vous attendez des sénateurs qu’ils se prononcent sur la concomitance des élections des conseils régionaux et des conseils généraux, alors qu’il n’échappe à personne que ce n’est pas véritablement le sujet.

Pour apercevoir le vrai sujet, il faut regarder au-delà du décor planté avec ce projet de loi sur la concomitance, qui n’est somme toute qu’un trompe-l’œil.

En réalité, l’objectif est de changer radicalement le mode de désignation des élus du peuple dans les deux assemblées, régionale et départementale, de modifier de la même manière la nature de l’exercice des mandats de conseiller général et de conseiller régional refondus dans un mandat de conseiller territorial et, enfin, de modifier la nature des compétences des collectivités territoriales.

En somme, avec ce projet de loi sur la concomitance, vous nous demandez, contre toute logique politique ou de chronologie calendaire, d’anticiper sur un débat fondamental relatif à la réforme de notre organisation territoriale.

Le conseiller territorial que ce texte vise à instituer siégera à la fois au conseil général de son département et au conseil régional. C’est un moyen pour le Gouvernement de supprimer le quart des cantons, c’est-à-dire un millier de cantons ruraux, et ce dans des territoires où le contact effectif avec les élus est essentiel pour nos concitoyens.

Dans ces nouveaux cantons, les conseillers territoriaux seraient élus au scrutin uninominal à un tour, mode de scrutin qui présente des risques démocratiques indéniables. Ainsi, si ce scrutin avait été mis en place en 2008, 10 % des résultats des élections auraient été inversés et ce taux aurait été porté au double en 2009. Comment, dès lors, ne pas y voir une manœuvre purement politique et électoraliste de la majorité ?

En représentant à la fois les régions et les départements, le conseiller territorial cumulera les fonctions de conseiller régional et de conseiller général, qui sont éloignées, car il y a peu de chevauchements de compétences entre les départements et les régions. Il en résultera un risque de confusion des genres et de conflits d’intérêts quant à la gestion respective des deux collectivités concernées.

Le conseiller territorial parviendra-t-il à se départir du tropisme départemental lorsqu’il siégera à la région, et inversement ? Quel objectif vise-t-on ? S’agit-il d’affaiblir le département, de balkaniser la région ? Je ne crois pas qu’il soit possible de trouver un point d’équilibre dans la situation que l’on va créer.

Nous voudrions être sûrs que, au-delà de la réforme annoncée en 2014, ne se profile pas une autre étape qui mènera, à terme, à la suppression d’un échelon de collectivités, lesquelles auront été préalablement réduites à l’impuissance budgétaire et politique.

Ce projet de loi est donc un véritable chèque en blanc qui est demandé aux parlementaires au profit de l’exécutif. Il marque un recul indéniable de la liberté de gestion des collectivités territoriales et signifie, sans conteste, le grand retour des centralisateurs.

Telles sont les raisons qui justifient notre opposition résolue à cette grande manipulation.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, sur l'article.

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 1er de ce projet de loi vise à réduire à trois ans la durée du mandat des conseillers généraux qui seront élus en mars 2011, au nom de l’application d’une réforme à venir sur les collectivités territoriales et d’un projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux à partir de 2014.

Nous nous interrogeons, à juste titre, sur la démarche qui consiste à anticiper cette échéance.

Que se passerait-il si, à l’issue des futurs débats parlementaires, la réforme des collectivités territoriales, la création des conseillers territoriaux et leur mode de désignation n’étaient pas votés dans un sens qui rende utile le texte que nous sommes en train d’examiner ? Au nom de quoi le Gouvernement préjuge-t-il l’adhésion d’une majorité du Parlement à des réformes qui suscitent beaucoup de remous en son sein, si ce n’est au nom de l’esprit supposé « godillot » de sa majorité ? Un scrutin récent prouve pourtant qu’il peut y avoir des surprises !

Le Parlement a-t-il déjà été plus méprisé ? N’y siégeant que depuis un peu plus d’un an, j’ai sans doute moins de recul que d’autres parlementaires pour en juger. Je sais, en revanche, qu’une telle attitude méprisante serait inacceptable dans la vie courante. Qu’elle soit appliquée au Parlement, institution la plus représentative de la République, me choque profondément !

Voilà un an et demi, une réforme constitutionnelle a été votée à une voix de majorité, le groupe socialiste auquel j’adhère s’y étant opposé. Le Gouvernement avait pris à parti l’opinion en proclamant que cette réforme constitutionnelle améliorerait les conditions de travail du Parlement et revaloriserait son rôle.

Quelle tartuferie ! Chaque semaine, depuis la mise en œuvre de cette réforme au printemps dernier, on voit nos conditions de travail se dégrader. Combien de week-ends les sénateurs ont-ils siégé depuis deux mois ? Combien de week-ends les fonctionnaires des services ont-ils été à la peine pendant le même temps ?

Par ailleurs, tous les projets de loi sont examinés désormais sous le régime de la procédure accélérée, avec une seule lecture dans chaque chambre. La deuxième lecture est devenue une curiosité juridique, qui ne demeurera bientôt plus dans les textes qu’à titre de témoignage historique ! Voilà pour l’amélioration des conditions du travail parlementaire !

Il y a gros à parier que la simplification induite par la réforme des collectivités territoriales ne sera pas plus efficace.

Il en est de même du renforcement de la démocratie locale auquel fait pourtant référence l’intitulé du projet de loi à venir relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale.

Selon le projet de loi, les élus qui rempliront le mandat de conseiller général, c’est-à-dire qui représenteront un canton redécoupé, seront automatiquement conseillers régionaux. Certains, il est vrai, cumulent déjà les deux mandats, d’autres souhaitent les cumuler, d’autres encore ne le souhaitent pas. Mais voilà que le Gouvernement rend désormais le cumul obligatoire. C’est original !

Mme Bernadette Bourzai. Il ne faut pas jouer sur les mots ! Le conseiller territorial, qui sera rarement une conseillère en raison du mode de scrutin, aura à siéger dans deux assemblées, à voter deux budgets et à représenter deux assemblées auprès de tous les organismes représentatifs. Il s’agit donc bien d’institutionnaliser le cumul des mandats, sans apporter aucune réponse à la question du statut indispensable de l’élu local et territorial.

Vous nous dites que le suppléant, la suppléante devrais-je dire, qui remplacera l’élu dans ses fonctions sera défrayé, mais non indemnisé. C’est une fable ! Où trouverez-vous des volontaires non élus pour faire le travail que l’élu ne pourra pas lui-même assurer ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ne voudront pas !

Mme Bernadette Bourzai. Nous craignons que l’identité forte de la représentation ne disparaisse dans les territoires ruraux, et tout particulièrement dans les zones de montagne, dont je suis la porte-parole, où les conseillers territoriaux ne seront ni assez nombreux ni suffisamment enracinés.

En effet, le nombre de conseillers généraux sera considérablement réduit dans les départements ruraux et le mode de scrutin mixte, pour 80 % au scrutin majoritaire et 20 % au scrutin proportionnel de liste, ne garantira plus le maillage de proximité assuré par les conseillers généraux siégeant actuellement dans les assemblées départementales.

Or les départements sont et souhaitent demeurer les garants de la cohésion sociale et territoriale. L’élection de conseillers territoriaux « hors sol » signerait ainsi la disparition de la proximité entre le citoyen et l’élu.

Mme Bernadette Bourzai. C’est pourquoi je ne voterai pas cet article qui devrait, logiquement, parachever une réforme qui nous est présentée comme visant à simplifier un système complexe, mais qui préfigure, en réalité, une grave régression de la démocratie dans notre pays ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. Et c’est la Corrèze qui le dit !

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, sur l'article.

M. Philippe Adnot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je pourrais me contenter d’indiquer que je ne voterai pas ce texte, puisqu’il préfigure une réforme que je n’approuve pas : la création des conseillers territoriaux.

J’ajoute néanmoins que si j’avais été présent lundi, je n’aurais pas non plus voté le découpage des circonscriptions législatives.

À ce sujet, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de vous faire part d’une petite anecdote. Vous avez affirmé hier que vous prendriez l’attache des élus de manière à ce qu’il y ait un peu de concertation concernant le nouveau découpage des cantons.

Or, comme vous ne l’aviez pas fait auparavant, j’ai essayé de joindre votre directeur de cabinet pour m’en étonner. Ce dernier n’étant pas disponible, on m’a promis de me rappeler. De retour dans ma province, j’ai effectivement reçu un appel qui émanait, non pas du ministère de l’intérieur, mais du responsable des élections de l’UMP ! (Rires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Yannick Bodin. C’est pareil !

M. Philippe Adnot. Inutile de dire que votre collaborateur a pris un petit savon, monsieur le secrétaire d'État !

M. René-Pierre Signé. Il faut mieux choisir ses collaborateurs !

M. Philippe Adnot. Monsieur le secrétaire d'État, en cet instant, je veux surtout souligner la faiblesse des arguments avancés pour justifier la réforme actuelle.

Hier, vous avez repris un argument que vous aviez déjà développé le jour de la prestation du Président de la République à Saint-Dizier, selon lequel le chevauchement entre les régions et les départements était à l’origine d’un gaspillage de 20 milliards d’euros, dixit la Cour des comptes !

Or je n’ai trouvé ce chiffre dans aucun document, …

M. René-Pierre Signé. C’est l’avion du Président ! (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. Philippe Adnot. … et ce pour la simple raison que ce n’est pas possible ! Sachant que le total de l’investissement de l’ensemble des collectivités locales représente 70 milliards d’euros, comment pourraient-elles gaspiller 20 milliards d’euros ?

L’association des régions et des départements n’engendre pas nécessairement des dépenses inutiles. Par exemple, j’ai récemment engagé une coopération sur le patrimoine du xvie siècle, financée à parts égales par l’État, le département, la région et l’agglomération troyenne, qui nous a permis de réunir 2 millions d’euros pour restaurer une église, sa statuaire et organiser une exposition. Si cette opération n’avait eu qu’une seule source de financement, elle n’aurait pas coûté un centime d’euro de moins !

Je vous mets donc au défi, monsieur le secrétaire d'État, de justifier ne serait-ce qu’un million d’euros de gaspillage du fait d’une association entre région et département sur un projet.

M. René-Pierre Signé. C’est un défi !

M. Philippe Adnot. Lorsque ces deux collectivités s’associent, par exemple pour créer un groupe scolaire, le but n’est pas de gaspiller de l’argent public ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Si vous en êtes réduit à utiliser des arguments d’une si grande faiblesse, voire de si gros mensonges, c’est que vous n’êtes pas à même de justifier l’intérêt de la réforme qui nous est proposée.

Il n’y aurait pas de honte, monsieur le secrétaire d'État, à retirer ce texte. Si vous n’y arrivez pas vous-même, je propose que nous vous y aidions ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. René-Pierre Signé. Quelle philippique !

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, sur l'article.

M. Gérard Miquel. Monsieur le secrétaire d'État, vous avez salué dans votre intervention liminaire le travail effectué par la mission sénatoriale et vous avez reconnu l’intérêt du rapport Belot. Dans ce cas, pourquoi n’en avez-vous pas tenu compte ?

Le texte que vous nous présentez aujourd'hui s’inspire davantage des propositions qui vous ont été faites par des hommes comme M. Attali et quelques autres, …

M. Gérard Miquel. … plutôt que du travail de parlementaires expérimentés connaissant bien les collectivités locales.

Pourquoi tant de précipitation ?

Vous nous dites qu’il faut du courage politique pour réformer. Certes ! Mais le courage politique est ailleurs. Nous l’avons trouvé chez des hommes qui ont voulu la décentralisation et qui l’ont mise en œuvre contre la technostructure, laquelle ne l’a jamais acceptée !

M. Gérard Miquel. Si le devoir de réserve n’interdisait pas à M. Raffarin de me répondre, je lui demanderais si, lorsqu’il a mené la deuxième vague de décentralisation, le ministère de l’équipement a facilement accepté de se départir de certains pouvoirs et de se séparer d’un grand nombre de personnes qui y travaillaient ? Je ne crois pas que cela ait été le cas.

Lorsque nous avons voulu transférer les personnels techniciens, ouvriers et de service des collèges et des lycées aux départements et aux régions, quel combat n’avons-nous pas dû mener ! La technostructure n’a jamais accepté la décentralisation, et aujourd’hui, monsieur le secrétaire d’État, si ce texte était voté, vous lui donneriez la possibilité de reprendre la main.

Quel est le véritable problème de fond ? Nous parlons beaucoup de la clause de compétence générale : pour faire plaisir aux maires, le Gouvernement maintient celle de la commune. Or, mes chers collègues, pour avoir été, pendant trente-trois ans, maire d’une commune qui compte aujourd’hui 350 habitants, je connais les limites de l’exercice : il est clair qu’une petite commune est dans l’incapacité d’exercer un grand nombre de compétences !

M. Gérard Miquel. Recherchons donc ensemble le niveau pertinent d’exercice de telle ou telle compétence : c’est ainsi que nous ferons du bon travail !

La région Midi-Pyrénées, qui est plus grande que la Belgique et regroupe huit départements, devrait compter à l’avenir, d’après mes calculs, entre 160 et 170 conseillers territoriaux. Vous avez affirmé que votre réforme serait source d’économies, monsieur le secrétaire d’État, mais il faudra commencer par construire un nouvel hémicycle, celui de l’actuel conseil régional, conçu pour accueillir quatre-vingt-dix élus, étant trop petit !

En revanche, je pourrai revendre l’hôtel du département du Lot, dont je préside le conseil général, puisque l’hémicycle compte quatre-vingts places alors que nous ne serons plus que quinze conseillers territoriaux. Comment voulez-vous gérer dans de bonnes conditions un département, sachant les compétences qui lui ont été transférées, avec quinze conseillers territoriaux seulement ? C’est mission impossible !

Vous allez ajouter la confusion à la confusion, car la région, elle aussi, sera difficilement gérable. En effet, cette collectivité est censée s’occuper des grands enjeux : le développement économique, les transports, les infrastructures, la planification. J’aurais préféré que l’on nous propose de créer un couple constitué par la région et l’Union européenne tout en conservant le couple formé par le département et les communautés de communes ou les communes. Une telle organisation serait beaucoup plus efficace, car les départements exercent les compétences tenant à la solidarité, à la proximité et à l’aménagement du territoire départemental.

Les dispositions de ces quatre projets de loi m’inquiètent très fortement. En effet, j’en suis intimement convaincu, nous allons mettre à mal vingt-cinq ans de décentralisation. D’un trait de plume, vous allez réduire à néant tout le travail effectué par les hommes courageux qui ont voulu cette décentralisation, ainsi que la formidable expansion que nous avons donnée à nos territoires : nous avons aménagé, nous avons construit, nous avons bâti grâce à la possibilité de décider, à l’échelon local, pour répondre aux besoins de nos collectivités et de nos concitoyens.

Mme Catherine Procaccia. Le temps de parole est épuisé !

M. Gérard Miquel. Vous avez voulu jouer l’opinion contre les élus, en accusant ceux-ci de trop dépenser. Or cette réforme ne sera pas source d’économies, comme l’ont déjà montré d’autres orateurs. Au contraire, elle entraînera immanquablement des dépenses supplémentaires.

Vous vous trompez donc en voulant jouer l’opinion contre les élus, car l’opinion se retourne ! Nos concitoyens sont très sensibles au travail effectué dans le cadre de nos collectivités de base : la commune, la communauté de communes, le département. En matière de solidarité, notre champ d’intervention est aujourd’hui très large. Or la disparition des départements est programmée à terme, même si vous ne l’avouerez pas… (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. René-Pierre Signé. M. Copé l’a dit !

M. Gérard Miquel. C’est ce qui va se produire, parce que les départements, notamment les plus petits d’entre eux, ne pourront plus faire face aux dépenses qui leur sont imposées et ne seront pas en mesure d’exercer leurs compétences dans de bonnes conditions.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues de la majorité, il est encore temps de changer de voie. N’oubliez pas qu’il s’agit d’un sujet essentiel : le destin de nos territoires est en jeu ! Je vous invite à bien réfléchir avant de prendre une position définitive sur un thème aussi important ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Patrice Gélard. Vous exagérez !

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, sur l’article.

Mme Catherine Procaccia. Il faut respecter le temps de parole !

M. Pierre-Yves Collombat. En écoutant notre collègue Philippe Adnot, j’ai repensé à un célèbre discours d’un non moins célèbre sénateur du Var, Georges Clemenceau : « Où sont les milliards ? »

En effet, où sont les milliards d’économies à attendre de la création des conseillers territoriaux ? Le Gouvernement, s’appuyant sur un rapport de la Cour des comptes, prétend que ces économies potentielles s’élèvent à 20 milliards d’euros. Or il se trouve que la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, que préside notre collègue Alain Lambert, a reçu M. Descheemaeker, président de la septième chambre de la Cour des comptes, M. Barbé, conseiller-maître, et Mme Esparre, conseillère référendaire. Je leur ai alors demandé s’il était vrai que l’instauration des conseillers territoriaux permettrait une économie de 20 milliards d’euros. Nos interlocuteurs ont marqué un temps d’arrêt, comme si le ciel leur était tombé sur la tête. Quand je leur ai précisé que ce chiffre circulait, ils n’ont pas osé rire, car les membres de la Cour des comptes sont des gens bien élevés, mais ce n’était pas l’envie qui leur manquait…

Très franchement, il va falloir changer d’argument, monsieur le secrétaire d’État, si vous voulez que votre réforme soit crédible ! (M. Yves Krattinger applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, sur l’article.

M. Charles Gautier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici donc parvenus à l’examen de cette réforme des collectivités territoriales dont nous parlons depuis des mois !

En tant que représentants des collectivités locales, nous nous devons de combattre ce projet de régression territoriale du Gouvernement.

Alors que les années de gouvernement socialiste sont synonymes de décentralisation – notre collègue Pierre Mauroy en est le symbole dans cette assemblée –, l’ère Sarkozy restera emblématique de la recentralisation de l’État et de la fin de l’autonomie des collectivités locales.

Le Gouvernement applique aux collectivités territoriales le même traitement qu’au Parlement. J’en veux pour preuve le fait que nous discutions ici d’un texte d’application d’une réforme majeure qui n’a pas encore été examinée par les assemblées. Cela devient une habitude : ce fut déjà le cas pour la réforme de la gendarmerie, puis, plus récemment, pour les crédits de la mission « Sécurité » pour 2009 et 2010, décidés en fonction de l’application d’une deuxième loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, la LOPPSI II, non encore débattue, donc non votée.

Voici donc que la majorité tente de faire de même s’agissant de la réforme des collectivités territoriales ! Les textes qui composent cette réforme illustrent dans leur ensemble la reprise en main des collectivités locales par l’État, alors que, depuis 2007, elles pallient quotidiennement les conséquences de son désengagement financier et sont accusées par le Gouvernement de dépenser à outrance !

À cet égard, je prendrai l’exemple de la baisse des effectifs de la police et de la gendarmerie : si, en 2008, l’État a supprimé 6 000 emplois dans les forces de l’ordre, les collectivités territoriales ont créé, dans le même temps, 6 000 emplois dans le secteur de la sécurité. La réforme des collectivités territoriales ne fait que traduire la réaction du Gouvernement à la résistance de ces collectivités, qui tentent de sauver leurs services publics de proximité. Nous devons donc démontrer aux Français, par de tels exemples frappants, en quoi cette réforme les touchera directement dans leur vie quotidienne. Elle reflète une volonté de reprise en main des collectivités locales par l’État dont les ménages devront payer la facture, c’est pourquoi nous combattrons ce projet de toutes nos forces. (Mme Gisèle Printz applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l’article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nos collègues de la majorité nous écoutent avec patience depuis un certain temps, cela est vrai, mais ils ne nous répondent pas !

M. Patrice Gélard. Nous n’avons pas à vous répondre !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela dit, certains d’entre vous s’expriment dans la presse de manière assez explicite, du moins si l’on sait lire entre les lignes !

Ainsi, M. Longuet a déclaré que le mode d’élection des futurs conseillers territoriaux prévu par la réforme territoriale, qui est très contesté, y compris dans la majorité, « est un sujet ouvert ». Pour l’instant, vous n’êtes donc pas vraiment assurés de votre affaire, c’est le moins que l’on puisse dire !

Mme Catherine Procaccia. Cela n’a rien à voir avec le texte !

M. Gérard César. C’est la réforme de l’année prochaine !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. « Ce mode de scrutin ne me choque pas, ajoute M. Longuet, mais il ne faut se fermer aucune possibilité. Que voulons-nous ? Un ensemble nouveau, département-région, chaque collectivité aurait sa spécialité, chaque élu aurait la double préoccupation du local et du régional. […] Si on a un système qui aboutit à multiplier les féodalités individuelles, cela pose des problèmes. »

Ensuite, M. Copé (Exclamations sur les travées de lUMP)

M. Gérard César. Bon auteur !

Un sénateur de l’UMP. Il n’est pas là !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … a fait la déclaration suivante : « Les choses sont claires, le débat sur le mode de scrutin est ouvert, il n’est pas clos, on n’est pas dans un produit fini et je crois que cette position n’est pas que la mienne. »

Enfin, M. Xavier Bertrand affirme que « les conseillers territoriaux sont le cœur nucléaire de la réforme ».

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ces déclarations rejoignent évidemment nos préoccupations. Le Gouvernement veut avancer à grands pas dans une affaire qui, selon ses propres amis, n’est pas vraiment bien engagée et, en tout cas, mérite discussion !

Nous en sommes à l’article 1er, relatif au report de la date d’élection des conseillers généraux, qui sont voués à disparaître purement et simplement. Nous ne connaissons rien du nombre, par département, des futurs conseillers territoriaux, nous ne connaissons pas non plus les règles de calcul, etc. Je vous fais grâce de tout ce que nous vous avons déjà dit depuis hier !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce qui est certain, c’est que les conseillers généraux seront élus en 2011. Il est donc inutile de statuer dans la précipitation sur le report de cette élection, qui pourra tout à fait, le cas échéant, être décidé ultérieurement ! Il n’y a aucune urgence ! Avant d’envisager une telle mesure, commencez par vous demander si vous voulez vraiment vous engager dans la voie de la suppression des conseillers généraux et, dans l’affirmative, par vous déterminer sur le mode de scrutin !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 28 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 47 rectifié est présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Alfonsi, Mézard, Baylet, Charasse, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 28.

Mme Éliane Assassi. L’article 1er de ce projet de loi vise à réduire de six ans à trois ans le mandat des conseillers généraux qui seront élus en 2011, afin de permettre la mise en place en 2014 des conseillers territoriaux. Or, comme nous avons pu le constater hier lors de la discussion générale, il n’est pas certain qu’une majorité existe, au Sénat, en faveur de la création de ces derniers.

Nous proposons donc la suppression de cet article pour deux raisons.

Sur la forme, tout d’abord, on nous demande de voter une modification du calendrier électoral, ce qui n’est tout de même pas rien, sans garantie aucune que sa justification soit validée ensuite par le Parlement. M. Courtois, dans son rapport, indique que la concomitance des renouvellements des conseillers généraux et régionaux est un préalable nécessaire à la création des conseillers territoriaux. Soit dit sans vous offenser, monsieur le rapporteur, j’estime que vous nous proposez tout simplement de marcher sur la tête… La logique juridique, politique et intellectuelle veut que l’on adapte la durée des mandats une fois les conseillers territoriaux créés, et non l’inverse. Recourir à la méthode Coué ne changera rien à cette évidence !

La seconde raison qui fonde notre proposition de suppression de l’article 1er est plus fondamentale. Cet article symbolise, à nos yeux, la lourde menace qui pèse sur l’avenir des départements.

En effet, comment ne pas percevoir que la suppression des conseillers généraux, dans un contexte de modification structurelle des compétences départementales, vise à terme à la suppression des départements ? Le Conseil économique, social et environnemental a récemment souligné que si aucun échelon n’était pour l’heure supprimé, cela n’excluait pas la possibilité d’évolutions ultérieures.

La question clé de la répartition des compétences entre départements et régions, alors que la clause de compétence générale est supprimée pour ces deux échelons, ne sera pas réglée par le projet de loi dont nous débattrons en janvier et encore moins par celui que nous examinons aujourd’hui.

Nous refusons donc la disparition de la clause de compétence générale pour le département, qui constitue à l’évidence un pilier de la République en tant que structure de proximité et de solidarité. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l'amendement n° 47 rectifié.

M. Jacques Mézard. Monsieur le secrétaire d’État, il n’est pas anormal que le fond de la réforme des collectivités territoriales soit abordé à l’occasion de la discussion de l’article 1er de ce projet de loi.

Vous avez recouru à la procédure accélérée pour ce texte, or il n’y a aucune urgence en ce qui concerne les dispositions de l’article 1er. De surcroît, la chronologie proposée est totalement illogique, comme nous l’avons souligné hier. Il est donc normal que le débat de fond soit abordé, car c’est vous-même qui l’avez placé au cœur du projet de loi, comme en témoignent l’exposé des motifs et l’étude d’impact.

La concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux est le premier étage de la fusée que constitue le projet de création des conseillers territoriaux, assorti d’un mode d’élection particulier. Pour notre part, nous souhaitons que cette fusée fasse long feu, alors que nous étions ouverts à de fortes évolutions sur un certain nombre de questions de fond, dont celle des compétences.

De nombreux arguments, souvent de pur bon sens, ont été échangés depuis hier. Permettez-moi, monsieur le secrétaire d’État, de revenir sur la forme. Vous avez écarté les avis de toutes les associations d’élus et fait peu de cas des conclusions du rapport de M. Belot sur l’intelligence territoriale, ni les uns ni les autres n’étant favorables à la création du conseiller territorial. Pourquoi vous acharnez-vous ? Tout simplement parce que l’institution des conseillers territoriaux constitue le cœur politique de la réforme, autour duquel tout s’articule : le nouveau système électoral, mais aussi les évolutions futures. En effet, dans chacun des deux couples que vous entendez constituer – communes et intercommunalités ; départements et régions –, l’un des conjoints prendra forcément le pouvoir sur l’autre. Les communes nouvelles et métropoles ont en outre vocation à troubler ces deux liens conjugaux… (Sourires.)

Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, dans un article intéressant de La Gazette des communes, vous avez indiqué qu’au cœur de la réforme se trouvait une recherche d’économies. C’est parfaitement normal, et nous pouvons l’entendre, mais n’est-il pas contradictoire d’affirmer en même temps que les collectivités territoriales n’enregistreront aucune perte de revenus ?

Enfin, il serait normal que des réponses, même approximatives, nous soient apportées sur le nombre de conseillers territoriaux ou le découpage des cantons.

Monsieur le secrétaire d’État, votre volonté d’aller vite, en suivant un calendrier illogique, nous a conduits à présenter cet amendement de suppression de l’article 1er.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Ce projet de loi vise à instaurer la concomitance des élections régionales et cantonales en 2014, rien de plus ! Je le répète, cette concomitance est une condition nécessaire, mais non suffisante, de la création des conseillers territoriaux.

Que se passerait-il si ce projet de loi était adopté sans que les conseillers territoriaux soient finalement jamais créés ? Les élections des conseillers généraux et régionaux auraient tout simplement lieu en 2014 selon le mode de scrutin actuel.

La question est donc de savoir si nous sommes d’accord pour franchir la première étape en adoptant le présent texte afin d’instaurer la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux, condition nécessaire de la création des conseillers territoriaux. Il convient, dans cette optique, de réduire le mandat des conseillers régionaux à quatre ans, pour que celui-ci prenne fin en 2014, et de fixer à trois ans celui des conseillers généraux qui seront élus en 2011.

La commission des lois, dans cette logique, a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales. Il est également défavorable, et ce pour des raisons tout à fait similaires à celles que M. le rapporteur vient d’exposer.

Les projets du Gouvernement sont parfaitement clairs et je suis conduit à répéter des propos que j’ai déjà tenus hier à deux reprises.

La mise en place des conseillers territoriaux ne pourra intervenir sans une modification de la durée des mandats des conseillers généraux et régionaux, afin de faire coïncider leurs renouvellements. La même démarche a d’ailleurs été suivie par la gauche, notamment par M. Pierre Joxe, pour la dernière fois en 1990. À l’époque, tout le monde avait trouvé cela parfaitement normal…

Le Gouvernement, qui en a fait une des clés de la réforme, estime que l’instauration du conseiller territorial est davantage susceptible de permettre une meilleure articulation entre les départements et les régions que le conseil régional des exécutifs dont la création est préconisée par les auteurs de l’amendement n° 47 rectifié.

Comme l’a souligné M. le rapporteur, rejeter le présent projet de loi reviendrait à préjuger d’un vote défavorable à la mise en place des conseillers territoriaux.

De surcroît, la concomitance des renouvellements des mandats en 2014 est justifiée par d’autres considérations que celles qui sont relatives à la réforme des collectivités territoriales et, par respect pour le vote de nos concitoyens, il convient d’adopter le présent projet de loi avant les élections régionales de mars prochain.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Mirassou. Comme je l’ai fait remarquer tout à l’heure, plus on avance dans le débat, et moins on comprend !

M. le rapporteur vient de nous expliquer que l’adoption de l’article 1er n’entraînerait pas fatalement la création des conseillers territoriaux, juste avant que M. le secrétaire d’État ne dise pratiquement le contraire… (M. le rapporteur proteste.)

Comprenne qui peut ! Nous voterons bien sûr ces amendements de suppression de l’article 1er, car nous entendons empêcher la suppression des conseillers généraux, qui remplissent pleinement leur rôle d’élus de proximité.

Parallèlement, nous nous interrogeons sur les modalités d’exercice du mandat de conseiller territorial, s’il venait à être créé. Cet exercice étant écartelé entre des lieux et des responsabilités différents, le conseiller territorial, faute d’avoir le don d’ubiquité, finira par n’être nulle part.

Nous voulons épargner à nos concitoyens une telle mésaventure. C’est pourquoi nous nous prononçons résolument en faveur de la suppression de l’article 1er. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Beaucoup a déjà été dit, mais je voudrais insister sur le fait que cet article ne concerne que les conseillers généraux ; par conséquent, il n’y a pas d’urgence à l’adopter.

En outre, sa suppression ne préjugerait nullement de la suite : il resterait possible de mettre en œuvre les réformes annoncées. Cet article pourrait même être inséré dans le texte relatif à la création des conseillers territoriaux et être voté à l’occasion de l’examen de celui-ci, ce qui aurait la vertu de la cohérence.

Tout resterait donc encore possible si nous rejetions aujourd’hui cet article, y compris son adoption future. Un tel rejet aurait une forte portée symbolique, marquant nos inquiétudes et notre volonté politique de défendre nos départements et nos régions.

En ces temps incertains et troublés, après les critiques injustes subies par nos collectivités territoriales, après des mises en cause insupportables des élus locaux, la suppression de l’article 1er permettrait d’affirmer, avec force et dignité, le respect de notre assemblée pour ces collectivités et l’ensemble de leurs élus.

Pour conclure, je tiens à préciser que ce projet de loi est d’autant plus dangereux que les conseillers généraux qui seront élus en 2011 sauront pertinemment que ce mandat sera leur dernier. Ils se trouveront donc dans une situation plus que délicate, et nous risquons de voir des assemblées ne rien mettre en œuvre, compte tenu de leur disparition prochaine. Le Gouvernement prend aussi le risque de paralyser la vie des collectivités territoriales.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote. (Protestations sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le problème, chers collègues de la majorité, c’est que vous ne nous répondez pas !

M. Dominique Braye. Vous êtes hors sujet !

M. Jean-Pierre Raffarin. Cela rallongerait encore les débats !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous ne sommes pas idiots, monsieur le secrétaire d’État : il est logique que vous soyez pressé de réduire le mandat des conseillers régionaux qui seront élus en 2010, même si c’est pour de mauvaises raisons, car le scrutin approche.

La situation est tout à fait différente pour les conseillers généraux, qui sont particulièrement visés puisqu’ils vont, de fait, être supprimés à terme. Vous proposez, pour l’heure, de réduire de trois ans, donc de moitié, le mandat de ceux qui seront élus en 2011. Vous établissez des comparaisons avec de précédentes réductions de mandats, mais comparaison n’est pas raison : si depuis 1958 le législateur a effectivement modifié à neuf reprises la durée de certains mandats, cela se limitait, dans six cas, à un report de quelques mois de dates d’élections, dans deux à une prorogation d’un an de mandats, tandis que la loi du 11 décembre 1990 avait écourté de deux ans le mandat des futurs conseillers généraux, celui des conseillers en exercice ayant été prolongé d’un an.

Selon le rapport de la commission des lois, il incombe au Parlement de modifier la durée des mandats électoraux lorsque cela est rendu nécessaire par des considérations d’intérêt général. Où est l’intérêt général avec la création des conseillers territoriaux et la suppression des conseillers généraux, qui ne sont, l’une et l’autre, pas encore intervenues ? Il ne réside ni dans de prétendues économies, ni dans la réduction des compétences des régions ou des départements, ni dans une quelconque progression de la démocratie locale, bien au contraire !

La commission ajoute que le Parlement doit respecter les principes de sincérité du suffrage et d’égalité des citoyens et des candidats devant le suffrage, ainsi que celui de libre administration des collectivités territoriales. Nous sommes d’accord sur ces points, bien entendu, mais la sincérité d’une élection ne se résume pas à une simple information des électeurs, vous en conviendrez. Où est l’égalité des citoyens lorsque la moitié d’un conseil général sera élue pour trois ans, l’autre moitié pour six ans ? Où est la libre administration des collectivités locales quand les actuels conseillers généraux et les candidats potentiels ne savent pas ce qu’il adviendra des départements, de la clause de compétence générale, des financements croisés, etc., toutes choses qui intéressent au plus haut point les élus ?

On voit donc bien que, tout particulièrement en ce qui concerne les conseillers généraux, les choses ne sont absolument pas claires. Qui plus est, vous n’êtes pas obligés de modifier maintenant la durée du mandat des conseillers généraux. S’il vous plaît, répondez à nos questions !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Je voterai bien entendu ces amendements de suppression de l’article, en me fondant sur quelques principes qui battent en brèche certains arguments développés par la majorité.

Hier, j’ai indiqué qu’il ne me semblait pas y avoir une harmonie totale entre la position de M. le ministre Henri de Raincourt et celle de M. le rapporteur. Ils m’ont fait penser à ces attelages des hauts plateaux d’Afghanistan associant un cheval et un autre animal de trait : la terre est certes labourée, mais le sillon n’est jamais droit ! (Sourires.)

Où est la cohérence de cet article ? On nous dit que nous pouvons ne pas être d’accord, mais que cela ne doit pas nous empêcher de le voter, que fondre en quelque sorte les conseillers généraux et les conseillers régionaux permettra de supprimer les doublons.

Mais que se passera-t-il pour les métropoles, par exemple celle qui est constituée par Toulouse et sa proche banlieue ?

M. Dominique Braye. Hors sujet !

M. Pierre-Yves Collombat. Non, là est le problème !

M. François Fortassin. Il y aura, dans un même département, deux types de collèges et de lycées : ceux qui relèveront du département ou de la région, et ceux qui dépendront de la métropole. Où sera la cohérence ?

Enfin, un autre problème me gêne beaucoup : celui du respect du citoyen candidat. Être candidat à une élection, c’est un engagement personnel. Un citoyen peut très bien souhaiter s’engager dans un mandat de conseiller général tout en conservant sa profession, au motif que, au terme des six années de son mandat, il ne sera peut-être pas réélu ou n’aura pas envie de se représenter. Ce sera possible s’il est simplement conseiller général ou conseiller régional, mais s’il est les deux à la fois, il ne pourra, à l’évidence, exercer son mandat de façon satisfaisante que s’il abandonne sa profession. Il y sera obligé, faute de temps !

Enfin, avec cette proportionnelle que l’on a inventée, au rebours d’ailleurs des traditions républicaines de notre pays, on va fabriquer des élus qui n’auront aucun électeur. C’est tout de même assez extraordinaire ! À l’évidence, ces élus seront des apparatchiks, comme il s’en trouve d'ailleurs dans toutes les formations politiques, des sortes de commissaires politiques qui pollueront la vie des assemblées.

M. Pierre-Yves Collombat. Ce n’est pas sûr !

M. François Fortassin. C’est du moins mon sentiment, mon cher collègue ! De toute façon, l’opinion publique admettra très difficilement qu’il puisse y avoir des élus pour lesquels personne n’ait voté et qui risquent néanmoins de jouer un rôle important.

Voilà les raisons pour lesquelles j’estime que ce texte pose problème, même si nous pourrions être d’accord sur certains points. J’observe d’ailleurs que la majorité va certainement voter ce projet de loi, ce que je peux comprendre, mais en faisant preuve d’un enthousiasme que je qualifierai d’extrêmement mesuré…

M. Charles Pasqua. La vraie question est de savoir s’il y aura encore des candidats. Et la réponse est oui ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’ai suivi ce débat avec beaucoup d’attention, mais je persiste à penser que nous sommes dans la plus grande confusion. En effet, on y parle peu ou pas du tout du texte en discussion ; il est surtout question de textes à venir dont on ignore le contenu et le sort final.

Mes chers collègues, je rappellerai que la durée des mandats locaux en cours ne peut être réduite par la loi que pour un motif d’intérêt général – cela ressort de nombreuses décisions du Conseil constitutionnel –, mais ce n’est pas l’objet du texte qui nous est soumis.

M. Adrien Gouteyron. Tout à fait !

M. Michel Charasse. La durée des mandats des futurs élus régionaux et départementaux est du domaine de la loi et le législateur fait ce qu’il veut sans aucune contrainte en la matière : c’est l’unique objet de ce projet de loi.

Reste à savoir quel est le motif de la loi, car c’est un élément essentiel. Je rappelle que, lors de la révision constitutionnelle de 2008, il a été beaucoup insisté sur les motivations de la loi, et en particulier sur ce que l’on a appelé les études d’impact, leur nécessité et désormais leur obligation. Or, ici, le motif de la loi, ce sont des textes à venir, dont on ignore ce qu’ils seront puisqu’ils ne sont pas encore votés.

Mes chers collègues, peut-on régler la durée d’un futur mandat en fonction de textes qui ne sont pas encore votés ? Cela peut être une question constitutionnelle, notamment au regard du statut d’autonomie des collectivités territoriales dans la Constitution et de l’élection de leurs assemblées au suffrage universel direct. Je ne suis pas certain que l’instabilité soit considérée comme une notion parfaitement conforme à la Constitution en ce qui concerne l’avenir des collectivités territoriales : la continuité de l’État, principe constitutionnel, s’applique à l’évidence aux collectivités locales, qui agissent dans de nombreux cas au nom de l’État.

Monsieur le secrétaire d’État, cher Alain Marleix, cher compatriote auvergnat – et j’éprouve une certaine tendresse de ce point de vue –, je ne comprends pas pourquoi vous vous êtes embarqué dans cette affaire. Il vaudrait mieux laisser les choses en l’état, quitte à tirer plus tard les conséquences des futures lois, en se fondant sur le motif d’intérêt général constitué par le vote d’un nouveau statut des collectivités territoriales et des élus départementaux et régionaux. Le Conseil constitutionnel n’y trouverait alors rien à redire, puisque le motif d’intérêt général serait évident : à partir du moment où le législateur a réformé le régime électoral des assemblées locales, il faut bien en tirer les conséquences sur les mandats et raccourcir s’il le faut les mandats en cours pour installer les nouvelles assemblées.

Mes chers collègues, nous sommes quand même dans une situation absolument incroyable. Je ne sais pas – monsieur le président, vous qui êtes un orfèvre en la matière, peut-être le savez-vous – s’il y a des précédents depuis 1870-1871, c'est-à-dire depuis que la République est la République, mais ce débat m’évoque la formule latine : Ave Caesar, morituri te salutant. (Sourires.) Nous organisons l’élection de futurs morts !

Certes, je le sais et tout le monde le sait, nous sommes tous de futurs morts,…

M. Dominique Braye. Personne n’y échappe !

M. Michel Charasse. … seulement, dans ce cas, nous connaissons la date de la mort, pouvoir dont la nature humaine a rêvé de disposer depuis l’origine de l’humanité, sans jamais y parvenir !

M. René-Pierre Signé. C’est la mort romaine !

M. Michel Charasse. Ce projet de loi, monsieur le secrétaire d’État, préjuge un vote futur qui reste encore – et le rapporteur l’a souligné avec insistance – aléatoire, hypothétique, éventuel. Ce n’est pas une bonne façon de faire la loi, surtout lorsqu’elle touche à cette chose si essentielle et si fragile – et compte tenu des débats de société que nous avons aujourd’hui je me permets d’appeler l’attention du Sénat sur ce point – qu’est le suffrage universel, sur lequel reposent la France, la démocratie, la République depuis ses origines.

On ne joue pas, monsieur le secrétaire d’État, avec le vote des électeurs. Décidément, mettre la charrue avant les bœufs devient une règle, les ressources avant les compétences – c’était hier et cela sera demain avec le vote du projet de loi de finances –, les mandats avant la loi statutaire et électorale. Mes chers collègues, je considère que tout cela n’est pas du bon travail législatif. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Leleux. À ce stade du débat et après avoir entendu un grand nombre d’arguments avancés par nos collègues de l’opposition, je crois utile d’exposer quel est l’état d’esprit de la majorité.

Malgré de multiples redondances et répétitions, l’opposition a abordé des sujets fort intéressants, tels le mode de scrutin, la taille des circonscriptions, les compétences des collectivités locales, la parité : de tout cela, nous devons débattre, et ce n’est pas parce que nous réagissons peu aux propos de nos collègues que nous n’avons rien à dire.

Cependant, nous entendons respecter l’ordre du jour et nous en tenir au contenu du présent projet de loi. Or ce texte a trait à la concomitance des renouvellements des conseillers généraux et des conseillers régionaux et ne porte nullement sur les sujets évoqués au fil des multiples interventions des orateurs de l’opposition. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP.) Nous aurions beaucoup à dire sur ces sujets, mais nous ne voudrions pas nous répéter dans quelques semaines, lorsque nous les aborderons à l’occasion de l’examen des textes qui leur seront consacrés.

En effet, cela a déjà été dit, quand le texte que nous sommes en train d’examiner aura été adopté, rien n’aura changé pour les conseillers généraux et régionaux, ni pour le mode de scrutin, ni pour la parité, ni pour toutes les autres questions évoquées. Tout restera encore à faire au travers des textes à venir. On tente de nous culpabiliser, mais si nous ne participons pas au débat, c’est parce que nous estimons que c’est alors qu’il faudra intervenir ! Il n’y a pas lieu de dramatiser la situation et d’annoncer la destruction de la démocratie ou la mort des départements !

M. Yves Daudigny. Mais si, ce qui est en jeu, c’est la mort des départements !

M. Gérard Miquel. Vous en porterez la responsabilité !

M. Jean-Pierre Leleux. Je ferai une proposition extrêmement simple à nos collègues de l’opposition : que les amendements qu’ils auront présentés au cours de cette discussion ne soient pas redéposés dans quelques semaines, lorsque nous aborderons l’examen de la réforme de fond des collectivités territoriales. Il faut choisir ! (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les parlementaires sont libres !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 28 et 47 rectifié.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC-SPG.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 112 :

Nombre de votants 332
Nombre de suffrages exprimés 330
Majorité absolue des suffrages exprimés 166
Pour l’adoption 153
Contre 177

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 34 rectifié, présenté par M. J.L. Dupont, Mmes Férat et N. Goulet et MM. Détraigne, Amoudry, Deneux et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Remplacer l'année :

2011

par l'année :

2004

La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. Le présent amendement vise à prolonger jusqu'en mars 2014 le mandat des conseillers généraux renouvelables en 2011.

Une telle modification permettrait, dans un contexte de déficits publics croissants, d'épargner à l'État la charge financière importante que constitue l'organisation d'élections nationales, puisque celle-ci représente une dépense de près de 80 millions d'euros pour le budget général.

Par ailleurs, le renouvellement prévu en 2011 ne constitue pas une simplification au regard des évolutions fondamentales introduites par le projet de réforme des collectivités territoriales, notamment en ce qui concerne la réduction du nombre des élus locaux.

En effet, les jeunes conseillers désignés pour la première fois en 2011 auront légitimement à l'esprit de continuer leur parcours d’élu. Ils seront en particulier confrontés aux difficultés liées à la réduction du nombre d'élus, résultant de la création des conseillers territoriaux, ainsi qu’à l’extrême concurrence à venir en 2014 entre les conseillers régionaux et les conseillers généraux sortants.

Ce constat dressé, nous pouvons en conclure que le calendrier découlant du présent projet de loi ne fera qu'accentuer les difficultés liées à la réduction annoncée du nombre d’élus siégeant au conseil général.

Par ailleurs, cette réforme, qui constitue non pas un simple aménagement, mais un véritable changement de paradigme électoral, justifie une telle mesure dérogatoire, qui ne serait pas plus illégitime qu'une réduction exceptionnelle du mandat à trois ans.

Rappelons que lors du passage à six ans de la durée du mandat sénatorial, une partie de nos collègues furent élus pour un mandat de « six ans plus trois ans » qui, au final, durera dix ans.

M. Dominique Braye. Pas du tout ! Et nous les avons tirés au sort !

M. Jean-Léonce Dupont. Comment pourrions-nous comprendre que ce que le Sénat a voté hier pour une partie de ses membres, il ne puisse le voter, aujourd'hui, pour une fraction des conseillers généraux ?

Le présent amendement vise donc à préparer au mieux la transition importante qui interviendra lors de l'entrée en vigueur du projet de réforme des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées de lUnion centriste.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à proroger les fonctions des conseillers généraux qui ont été élus en 2004, plutôt que de réduire les mandats de ceux qui seront désignés en 2011.

Si cet amendement était adopté, certains conseillers généraux bénéficieraient donc d’un mandat de dix ans, ce qui méconnaîtrait le principe constitutionnel selon lequel le législateur doit permettre au citoyen de s’exprimer avec une « périodicité raisonnable ».

Monsieur Dupont, je comprends tout à fait vos motivations. Toutefois, si nous vous suivions, nous augmenterions de plus de 50 % la durée du mandat de conseillers qui sont aujourd'hui en place. Le risque d’inconstitutionnalité d’une telle mesure serait extrêmement élevé…

Une telle prolongation ne me semble donc pas possible. Je rappelle d'ailleurs que le mandat des sénateurs que vous évoquiez à l’instant, mon cher collègue, a été augmenté d’une année seulement, puisqu’il a été porté de neuf ans à dix ans.

La commission des lois sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Je comprends les préoccupations des auteurs de cet amendement.

Compte tenu de l’objectif à atteindre, la solution du prolongement jusqu’en 2014 du mandat des conseillers généraux élus en 2004 paraît a priori logique. Elle éviterait d’ailleurs, comme vous l’avez souligné, monsieur Dupont, une élection pour trois ans de la série des conseillers généraux renouvelables en 2011.

Toutefois, adopter cette solution reviendrait à porter à dix ans, au lieu de six ans, la durée du mandat des conseillers généraux de la série élue en 2004. Une telle prolongation, de plus de 60 %, serait inédite pour un mandat local et serait contraire aux décisions du Conseil constitutionnel qui ont été citées à plusieurs reprises au cours de nos débats. En 1990, notamment, le Conseil constitutionnel a jugé que la compétence du législateur pour fixer le régime électoral des assemblées locales ne lui permet pas de prolonger dans de telles proportions le mandat d’élus en place.

Le même raisonnement peut être appliqué aujourd'hui. Monsieur le sénateur, prolonger à ce point les fonctions de conseillers généraux serait d’autant plus contradictoire avec l’objectif visé que la durée normale du mandat dans une démocratie parlementaire moderne est précisément de quatre ans. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Il en est ainsi, par exemple, au Canada, au Royaume-Uni ou aux États-Unis, le mandat des représentants étant même encore plus court dans ce dernier pays !

La solution qui a été choisie dans le présent projet de loi afin d’atteindre l’objectif de renouvellement concomitant des conseils généraux et régionaux en 2014 n’encourt pas un tel reproche. Monsieur le sénateur, comme la commission, le Gouvernement vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Jean-Léonce Dupont, l'amendement n° 34 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Léonce Dupont. Les arguments qui m’ont été opposés ne m’ont pas vraiment convaincu.

Naturellement, l’allongement dont il est ici question serait exceptionnel, mais la réduction du mandat à trois ans proposée par le Gouvernement l’est tout autant !

Par ailleurs, je souligne que le raccourcissement du mandat sénatorial peut donner lieu à deux interprétations. On peut en effet considérer soit que la durée du mandat est passée de neuf ans pour tous à neuf ans pour certains et à six ans pour d’autres, soit que nous avons ramené la durée du mandat de neuf ans à six ans, une partie de ceux qui étaient rééligibles bénéficiant cependant finalement d’un mandat de dix ans… (Protestations sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Pas du tout !

M. Dominique Braye. C’est faux !

M. Jean-Léonce Dupont. Mes chers collègues, nous avons donc des interprétations différentes de cette réforme !

Je maintiens cet amendement, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Mon cher collègue, nous avons prolongé le mandat des sénateurs d’un an seulement, que sa durée initiale, fixée auparavant par tirage au sort, ait été de neuf ans ou de six ans.

En effet, la réduction de neuf ans à six ans du mandat sénatorial devant s’appliquer ensuite à tous les membres de notre assemblée, nous devions passer d’un renouvellement par tiers à un renouvellement par moitié.

En outre, si nous n’avions pas prolongé le mandat d’un an, les élections municipales auraient été organisées juste après les élections sénatoriales, or il fallait logiquement que ce fût l’inverse.

Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs donné raison au Sénat. Quoi qu’il en soit, la prolongation du mandat de sénateur n’a été que d’un an dans tous les cas, contrairement à ce que vous affirmez, mon cher collègue : le mandat n’a jamais été porté de six à dix ans !

M. Jean-Léonce Dupont. On peut interpréter cette réforme autrement !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Mon cher collègue, j’admire votre souplesse d’esprit, mais on ne peut pas dire que le mandat est passé de six à dix ans : il a été porté de neuf à dix ans ou de six à sept ans ! La prolongation n’a été que d’une année. La réalité est donc complètement différente de l’interprétation que vous en donnez. En outre, je le rappelle, cette réforme consistait à réduire globalement la durée de notre mandat ! N’en tirez donc pas argument ! La prolongation que vous proposez serait manifestement anticonstitutionnelle.

M. le président. La parole est à M. Dominique Braye, pour explication de vote.

M. Dominique Braye. M. le président de la commission des lois a exposé bien mieux que je ne saurais le faire les tenants et les aboutissants de la réduction à six ans du mandat sénatorial.

Je me souviens très bien de nos débats d’alors : pour permettre au Sénat de se renouveler par moitié tous les trois ans, il convenait d’aménager une période transitoire en prolongeant d’un an la durée initiale du mandat, maintenue pour certains à neuf ans avant que la réduction à six ans ne s’applique à tous. À l’époque, j’avais demandé si une prolongation d’un an était constitutionnelle : il m’avait été répondu qu’une telle durée étant faible par rapport à celle du mandat initial, cela ne posait pas de problème. Je vous invite à vous reporter au compte rendu de nos débats, mon cher collègue !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Notre débat ne porte pas sur le mandat sénatorial.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous répondons aux arguments qu’on nous oppose !

Mme Éliane Assassi. À certains seulement !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En tout cas, je partage tout à fait l’analyse de la commission des lois sur ce sujet.

Cela étant, la question qui nous occupe est différente. Je ne préjugerai pas de la position du Conseil constitutionnel, mais je m’interroge : est-il normal de réduire de moitié un mandat ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C’est déjà arrivé !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est rarissime !

M. Dominique Braye. Ils ne sont pas encore élus, leur mandat n’est donc pas réduit !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La situation étant exceptionnelle, le Conseil constitutionnel pourrait en avoir une interprétation différente de celle que vous supposez. C’est pourquoi je pense que la proposition de notre collègue Jean-Léonce Dupont se défend.

Les conseillers généraux élus en 2011 exerceront leurs fonctions pendant trois ans, avant de disparaître. Il y a fort à parier, compte tenu de nos habitudes – je nous mets tous dans le même sac ! – en la matière, que ceux qui sont actuellement en place seront proposés pour une prolongation. Mais, en cas de renouvellement, les nouveaux conseillers généraux seront élus pour trois ans seulement sans avoir guère de chances d’être ensuite désignés conseillers territoriaux, compte tenu de la concurrence des anciens conseillers régionaux. La démarche est donc tout de même tirée par les cheveux !

Je le répète, la situation est exceptionnelle. Si la réforme est adoptée, les conseillers généraux disparaîtront. Dans ces conditions, autant prolonger de trois ans le mandat de ceux qui sont déjà en place.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Certains affirment qu’il n’y a pas de mandats de trois ans. Or, dans mon département, la croissance démographique a été telle qu’il a fallu créer, au fil du temps, de nouveaux cantons : aujourd'hui, on en compte quarante-trois, contre vingt-neuf en 1968, la population étant passée entre-temps de 600 000 habitants à 1,3 million d’habitants.

M. René-Pierre Signé. Vous avez de la chance !

M. Michel Charasse. Quel tempérament ! (Rires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. On a parfois l’impression que certains sont venus chez nous après avoir été chassés de Paris…

M. Pierre-Yves Collombat. C’est à cause de Chirac !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je ne ferai pas de commentaires sur ce point, mais chaque fois que des cantons ont été créés, on a tiré au sort : certains conseillers ont effectué un mandat de trois ans, d’autres ont exercé leurs fonctions pendant six ans. Cela se pratique depuis très longtemps.

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. C’est vieux comme le monde !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela étant, dans le cas qui nous occupe, madame Borvo Cohen-Seat, puisque les intéressés ne sont pas encore élus, on ne réduit pas leur mandat ! On fixe la règle pour l’avenir, ce qui est tout à fait légitime : il faut le faire a priori, sinon ce serait effectivement contestable.

M. Michel Charasse. Ce n’est pas un mandat en cours !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Absolument ! De même, nous devons fixer maintenant la règle pour les élections régionales de 2010.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Cet amendement soulève tout de même une authentique question.

On peut certes considérer qu’un mandat de dix ans est trop long, encore que certains soient élus depuis bien plus longtemps que cela !

M. Michel Charasse. Le mandat du pape n’est pas limité !

M. René-Pierre Signé. On était sénateur à vie, dans le temps !

M. Charles Pasqua. C’était le bon temps ! (Sourires.)

M. François Fortassin. Cela étant, si réduire à trois ans le mandat de conseiller général n’est pas inconstitutionnel, c’est le priver de tout intérêt : il s’agirait d’un « mandat croupion », pour des élus destinés à disparaître.

Je souhaiterais donc déposer un sous-amendement visant à porter à quatre ans le mandat des conseillers généraux qui seront élus en 2011, et à cinq ans celui des conseillers régionaux qui seront élus en 2010 : ainsi, les deux mandats arriveraient à échéance en 2015 et cela permettrait d’éviter le chevauchement des élections locales, tout en donnant un sens au dernier mandat des conseillers régionaux et généraux.

M. le président. Monsieur le sénateur, ce serait non pas un sous-amendement, mais un « sur-amendement ». Par conséquent, à mon grand regret, je ne puis l’accepter ! (Sourires.)

La parole est à M. François-Noël Buffet, pour explication de vote.

M. François-Noël Buffet. Je n’entends pas faire de surenchère. Il convient à mon sens d’en rester à des choses simples, par souci de lisibilité. Les propos de M. le rapporteur et de M. le président de la commission des lois sont frappés au coin du bon sens.

Certes, l’idée de M. Dupont peut paraître séduisante, mais nous faisons ici la loi, or il est clairement établi que cette proposition est anticonstitutionnelle.

Dans ces conditions, le groupe UMP votera contre cet amendement.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

M. Jean-René Lecerf. Sur le plan juridique, je n’ai rien à ajouter : M. le président de la commission des lois a tout dit.

J’invoquerai un argument politique, auquel nous devons tous être sensibles, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons dans cet hémicycle : si nous votons cet amendement, imaginez ce que seront les réactions de l’opinion publique ! Nous ferons la première page du Canard enchaîné, qui titrera sur ces élus se croyant autorisés à prolonger pendant des années le mandat qui leur a été confié !

Mes chers collègues, si vous voulez creuser un peu plus encore le fossé entre les électeurs et les élus, vous n’avez qu’à voter cet amendement !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Monsieur le président, le débat est un peu confus et il faut donc que les choses soient claires ! Nous pouvons sans inconvénient prolonger un mandat. Nous l’avons déjà fait dans le passé. En procédant ainsi, d’ailleurs, nous remontons aux origines de la République : jusqu’à ce que fût voté l'amendement Wallon, le mandat de Thiers avait été prolongé d’année en année, à plusieurs reprises.

M. René-Pierre Signé. Jusqu’en 1873 !

M. Michel Charasse. Oui, car ensuite, l'amendement Wallon avait été voté !

Faut-il déranger les électeurs pour un mandat réduit ? C’est au fond la question que pose Jean-Léonce Dupont.

M. Henri de Raincourt, ministre. On l’a déjà fait !

M. Michel Charasse. Cet amendement traduit un certain respect à l’égard des électeurs : plutôt que de leur imposer d’élire des futurs morts à trois ans près, autant prolonger de trois ans le mandat de ceux qui sont déjà en place ! (Rires.) Le Morituri te salutant ne s’applique pas dans ce cas-là !

Je rappelle également que l’expérience des mandats courts, que M. le président de la commission des lois vient d’évoquer, n’est pas le meilleur souvenir de la République.

Monsieur le président, sous la Révolution française, vous auriez présidé cette assemblée pour un mois, puisque, tous les mois, on changeait le président de l'Assemblée nationale.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Quand on ne lui coupait pas la tête avant ! (Sourires.)

M. Michel Charasse. C’est cette instabilité dramatique qui a conduit aux excès : la guillotine fonctionnait tous les jours, quelquefois même pour ceux qui occupaient le fauteuil présidentiel et qui, du jour au lendemain, se retrouvaient « raccourcis ».

Mes chers collègues, la loi fixe la durée des mandats. Dans ce domaine, le Parlement a toute liberté : c’est l’une de ses prérogatives. Jean-Léonce Dupont ne fait que tirer les conséquences de ce principe, qui est aussi vieux que la République. Par conséquent, nous pouvons faire ce que nous voulons.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Non !

M. Michel Charasse. Mais si ! Si nous ne fixons pas nous-mêmes un terme à un mandat, celui-ci se poursuit indéfiniment. Je ne vois pas sur quel fondement le Conseil constitutionnel pourrait affirmer que c’est inconstitutionnel.

Quoi que l’on en pense par ailleurs, je trouve que cet amendement témoigne d’une grande considération à l’égard des électeurs et, de ce point de vue, il ne me déplaît pas du tout.

M. le président. Sans m’imaginer en Fouquier-Tinville, qui est l’un de ceux qui ont été « raccourcis »,…

M. Michel Charasse. Il n’a jamais été président de l’Assemblée !

M. le président. … je mets aux voix l'amendement n° 34 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. - Remplacer l'année :

2014

par l'année :

2015

II. - Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Le mandat des conseillers généraux élus en 2008 expire en 2015.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Les conseillers généraux et les conseillers régionaux sont actuellement élus selon des modes de scrutin fortement différenciés, afin de favoriser la constitution d’un lien fort entre les électeurs et les élus à l’échelon du département, d’une part, et de concilier l’objectif de représentation des minorités au sein du conseil régional avec la nécessité de constituer des majorités de gestion stables et pérennes tout en respectant la parité, d’autre part.

Leurs élections respectives ne sont pas simultanées, ce qui permet sans doute de renforcer à la fois leur légitimité et leur visibilité, chaque échelon ayant des compétences et des caractéristiques propres.

Nous l’avons déjà répété maintes fois depuis le début de ce débat, la concomitance ne permet pas de rendre compréhensibles les enjeux d’une élection et de clarifier les fonctions des élus. Elle peut avoir des effets pervers, par exemple susciter la confusion dans l’esprit des électeurs ou provoquer des interférences entre les campagnes électorales.

Qui plus est, dans les pays où l’on vote le même jour et un peu sur tout – le cas des États-Unis a déjà été cité –, la participation est en général plus basse qu’ailleurs. Rien n’est pire, pour la démocratie, que de diluer les enjeux entre des scrutins multiples.

Ce qui nous est proposé aujourd'hui, c’est de faire de l’année 2014 une année charnière pour tout : élections municipales, élections européennes, élections sénatoriales. L’organisation des élections des conseillers généraux et régionaux, du fait de leur concomitance, ne fera qu’alourdir ce calendrier et ne manquera pas de créer de graves difficultés.

Monsieur Courtois, vous avez reconnu, à la page seize de votre rapport, que, en 2004, la simultanéité de quatre scrutins – cantonal, régional, européen et sénatorial – avait engendré des perturbations.

Les pouvoirs publics chargés de l’organisation ou du contrôle des opérations électorales voient nécessairement leur activité alourdie en un tel cas.

En 2004, il n’était cependant pas question des élections locales, comme ce serait le cas en 2014. Nous le savons, les élections municipales sont suivies de l’installation des conseils communautaires. Or, vous prévoyez aussi, dans un autre texte, une réforme de l’élection des conseillers municipaux dans les communes de moins de 3 500 habitants, d’une part, et une réforme de la désignation des conseillers communautaires, d’autre part !

Nous proposons une mesure de sagesse : si réformes il doit y avoir, digérons-les petit à petit. Donnons le temps à nos concitoyens de prendre la mesure de ces réformes, pour que le vote demeure l’acte civique qu’il a toujours été, attendu et respecté !

Pour toutes ces raisons, nous proposons de repousser la concomitance à 2015, afin que soit respecté pleinement le principe de la sincérité des suffrages, sans que soit compromise la bonne organisation de tous les scrutins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement prévoit que les mandats des conseillers généraux élus en 2011 et les mandats des conseillers régionaux élus en 2010 expireront en mars 2015, afin d’éviter que l’année 2014 ne soit une année électorale excessivement dense.

Si la commission comprend cette préoccupation, elle relève toutefois que si les conseillers régionaux et généraux étaient élus en 2015, cela entraînerait une déconnexion entre les échéances locales et les échéances sénatoriales.

M. Henri de Raincourt, ministre. Eh oui !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les sénateurs seraient donc élus par des conseillers « en fin de vie », si j’ose dire. Or la commission s’y est toujours opposée. Je vous renvoie d’ailleurs aux débats sur la loi du 15 décembre 2005 prorogeant la durée des mandats des conseillers municipaux et des conseillers généraux renouvelables en 2007.

Cette situation serait, en outre, inédite sous la Ve République.

En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Il est également défavorable, monsieur le président.

Cet amendement vise à repousser la mise en œuvre de la réforme à 2015. Nous avons bien compris les arrière-pensées qui motivent cette proposition.

L’ADF, l’Assemblée des départements de France, présidée par M. Claudy Lebreton, président socialiste du conseil général des Côtes-d’Armor, a voté une résolution en décembre 2008, signée par les 102 présidents de conseil général, aux termes de laquelle « tous les présidents sont favorables au renouvellement en une seule fois du conseil général » et proposent « que les conseillers généraux élus en 2011 le soient pour trois ans, et qu’en 2014 intervienne un renouvellement intégral sur la base de cantons redécoupés ».

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.

M. Pierre-Yves Collombat. Les arguments avancés contre cet amendement m’étonnent quelque peu. En effet, repousser la concomitance à 2015 aurait permis de répondre à de nombreuses objections.

Monsieur le rapporteur, le renouvellement des conseils municipaux interviendra en 2014, par conséquent avant l’élection sénatoriale de 2015. Je ne comprends donc pas votre argument.

Par ailleurs, comme cela a déjà été souligné, un grand nombre d’élections se tiendront en 2014. C’est un gros inconvénient, mais je n’y reviens pas.

Si la concomitance intervient en 2015, le dernier mandat des conseillers régionaux aura été de cinq ans, celui des conseillers généraux élus en 2008 de sept ans – soit une prolongation d’une année –, tandis que leurs pairs élus en 2011 auront exercé leurs fonctions pendant quatre ans – soit une durée de mandat décente et digne des grandes démocraties, comme l’a dit M. le secrétaire d'État.

L’année 2015 présente donc tous les avantages : si la création des conseillers territoriaux est adoptée, la réforme votée pourra être mise en place ; sinon, les mandats locaux concernés auront été d’une durée décente. Très franchement, le fait que cette échéance n’ait pas été retenue tendrait à prouver, s’il en était encore besoin, que cette réforme est vraiment bâclée !

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

M. Yves Daudigny. Monsieur le secrétaire d'État, je ne peux pas vous laisser vous appuyer sur l’ADF pour justifier ce projet de loi.

Certes, il est vrai que l’Assemblée des départements de France demande depuis très longtemps que les conseillers généraux soient renouvelés en une seule fois tous les six ans. Des dispositions législatives en ce sens avaient été prises par un gouvernement de gauche, mais elles ont été annulées lorsque la droite est revenue au pouvoir.

Cependant, vous ne pouvez pas vous fonder sur l’ADF pour justifier aujourd'hui la concomitance. L’Assemblée des départements de France, dans sa très grande majorité, est totalement et fermement opposée à la mise en place des conseillers territoriaux.

M. Josselin de Rohan. Ce n’est pas la question !

M. Yves Daudigny. C’est vrai des présidents de conseil général de gauche, mais c’est vrai aussi de nombreux présidents de conseil général appartenant à la majorité présidentielle –nous en avons eu un exemple déclaré aujourd'hui dans cet hémicycle.

Ne prenons pas prétexte d’une position de l’Assemblée des départements de France pour justifier aujourd'hui un projet totalement contraire au maintien de l’échelon départemental comme échelon d’action publique !

M. Josselin de Rohan. Mais ce n’est pas le problème !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Je peux accepter certains arguments, mais pas s’ils sont spécieux…

Mon département compte 850 grands électeurs, dont 35 seulement seront « en fin de vie » en 2015, pour reprendre l’expression utilisée par M. le rapporteur : ce n’est pas eux qui fausseront le scrutin sénatorial !

Par ailleurs, repousser la concomitance à 2015 présenterait au moins l’avantage de donner du sens aux mandats des futurs conseillers généraux et régionaux, en les portant respectivement à quatre ans et à cinq ans. Cela permettrait surtout d’éviter un écueil : face aux élections des conseils municipaux et des conseils communautaires, celle des conseillers territoriaux, que vous le vouliez ou non, risque de passer à la trappe. Elle sera en effet en quelque sorte anéantie par l’élection municipale, qui intéresse par-dessus tout nos concitoyens.

Puisqu’il s’agit de créer de nouveaux élus, donnons-leur le plus de relief et de dignité possible !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - L'article L. 210-1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les partis politiques percevant un financement public doivent assurer la présentation à parité homme, femme de leur candidat titulaire sous peine de sanction financière dont le montant est fixé par décret en Conseil d'État. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Nous n’avons de cesse de le rappeler, seul le scrutin proportionnel peut garantir la parité. Mais, devant votre refus persistant de l’instituer, nous proposons de prévoir au moins quelques contraintes.

La loi sur la parité de janvier 2007 tendant à promouvoir l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives a prévu que chaque conseiller général aura un suppléant de sexe opposé, qui le remplacera en cas de vacance par décès ou par démission.

Cela ne change rien au problème : les conseils généraux demeureront les assemblées où la parité reste le plus à la traîne, avec 12,3 % d’élues en 2008. L’obligation pour les candidats d’avoir un suppléant de sexe opposé a très peu fait évoluer les choses, rien n’imposant un nombre égal de candidats titulaires des deux sexes.

L’expérience le montre, il est illusoire de spéculer sur la bonne volonté des partis politiques pour faire progresser la parité. Il faut donc prendre des mesures un peu plus contraignantes.

Le triste bilan des deux élections législatives qui ont suivi la loi de juin 2000 montre bien que les pénalités financières prévues à l’encontre des partis ne respectant pas la parité sont loin d’être la solution. Ces pénalités sont certes quelque peu modestes et insuffisamment dissuasives : les partis, notamment les plus riches d’entre eux, ont préféré payer les amendes plutôt que de promouvoir la parité.

Vous affirmez, monsieur le secrétaire d’État, que la création des conseillers territoriaux fera progresser la parité, puisqu’elle prévaudra, dans les communes, dès le seuil de 500 habitants.

En fait, quand il s’agit de questions stratégiques, il faut laisser la place aux hommes ! Les femmes devraient s’en tenir au quotidien, à la définition des options locales, les grandes instances étant réservées aux hommes…

Grâce à la nouvelle loi, monsieur le secrétaire d’État, des femmes seront systématiquement présentes dans les conseils généraux. Certes, mais à hauteur de 19,3 % des sièges, comme le montrent les calculs de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes, contre 12,3 % aujourd’hui ! Il s’agira en réalité d’une très faible progression, d’autant que, dans le même temps, la place des femmes dans les conseils régionaux passera de 47,6 % des sièges aujourd’hui à seulement 19,3 % !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir des sanctions financières à l’encontre des partis qui ne présenteraient pas, dans le cadre d’élections au scrutin uninominal, autant d’hommes que de femmes en tant que candidats titulaires.

Cette question, qui est effectivement importante, a vocation à être traitée non pas dans ce projet de loi, mais dans le projet de loi n° 61, relatif à l’élection des conseillers territoriaux.

En conséquence, si cet amendement n’est pas retiré, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les exécutifs des conseils généraux respectent le principe de parité.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à assurer la parité entre les hommes et les femmes au sein des exécutifs départementaux.

Cette proposition est parfaitement conforme à la Constitution, dont l’article 1er dispose que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ».

Notre amendement permettrait cependant une avancée significative dans cette lutte en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. Depuis des décennies, l’égalité en politique est certes formellement acquise, mais nous savons combien sa mise en pratique est encore entravée par le poids des mentalités et des traditions.

Toute avancée de la parité est un pas vers plus de justice et fait reculer la discrimination. Certes, nous n’ignorons pas que cette parité, au sein des exécutifs départementaux, ne peut être mise en place sans un changement du mode de scrutin et l’instauration de la proportionnelle, assortie de l’obligation, pour les partis, de présenter un nombre égal d’hommes et de femmes en tant que candidats titulaires. Sans la proportionnelle, obtenir la parité sera difficile, mais il faudra bien un jour que les partis respectent leurs obligations en la matière !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission comprend les motivations des auteurs de cet amendement, mais cette question relève elle aussi du projet de loi n° 61.

Si cet amendement n’est pas retiré, la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Même avis.

Effectivement, la question de la parité sera abordée à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale. Nous avons d’ailleurs des réunions de travail très fréquentes sur ce thème avec les responsables des délégations compétentes du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Afin de parfaire le texte qui vous sera présenté, trois réunions ont d’ores et déjà eu lieu, et une quatrième est programmée pour le mois de janvier prochain.

En outre, madame le sénateur, à compter de 2010, la parité sera étendue pour la première fois au sein des exécutifs des conseils régionaux, et ce en application de la loi du 31 janvier 2007 que M. Nicolas Sarkozy a fait voter alors qu’il était ministre de l’intérieur. Autre conséquence de cette loi, les postes d’adjoints sont répartis à égalité entre les hommes et les femmes dans les municipalités de plus de 3 500 habitants, seuil abaissé à 500 habitants dans le projet du Gouvernement, ce qui devrait permettre l’élection de plus de 40 000 conseillères municipales, ainsi que de plusieurs milliers de maires.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, pour explication de vote.

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le secrétaire d’État, je ne peux pas laisser passer vos propos sans réagir. Vous n’en serez d’ailleurs pas surpris, tant Michèle André et moi-même sommes très sensibles à la question de la parité.

Il est tout de même caricatural d’utiliser comme argument l’abaissement du seuil à 500 habitants et l'augmentation du nombre de femmes élues dans les communes et les communautés de communes pour justifier l’absence de réelles mesures en faveur de la parité dans le cadre de l’élection des conseillers territoriaux. Pourquoi ne pas utiliser le même argument pour justifier le faible nombre de députées et de sénatrices ?

En réalité, vous nous proposez de revenir trente ans en arrière !

M. René-Pierre Signé. C’est la recentralisation !

Mme Bernadette Bourzai. Cela revient à nous dire : commencez donc à faire vos preuves dans les conseils municipaux; on verra bien, par la suite, si vous êtes capables d’être conseillère générale, conseillère territoriale, députée ou sénatrice !

Monsieur le secrétaire d'État, ce genre de discours, nous commençons à en avoir assez !

Mme Bernadette Bourzai. Il faut vous rendre à l’évidence, une bonne fois pour toutes : vous ne nous ferez pas rentrer à la maison…

Mme Bernadette Bourzai. … et revenir à une situation dont nous ne voulons plus !

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai commencé ma carrière politique en 1978, quand j’ai entendu le député de la Haute-Corrèze de l’époque, un dénommé Jacques Chirac, déclarer ceci : « Pour moi, la femme idéale, c’est la femme corrézienne, celle de l’ancien temps, dure à la peine, qui sert les hommes à table, ne s’assied jamais avec eux et ne parle pas. »

Eh bien, nous ne nous tairons plus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Jean-Pierre Fourcade applaudit également.)

M. le président. Il semble que M. Chirac n’ait pas réussi à imposer ses désidératas à son épouse ! (Sourires.)

La parole est à Mme Christiane Hummel, pour explication de vote.

Mme Christiane Hummel. Je voudrais m’adresser à mes collègues femmes dans cet hémicycle : quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégions, sachez que nous avons toutes les mêmes préoccupations sur ces questions. Cependant, les élues membres du groupe UMP estiment que ce n’est ni le lieu ni le moment pour les aborder.

Mme Éliane Assassi et M. Charles Gautier. Ce n’est jamais le moment !

Mme Christiane Hummel. C'est la raison pour laquelle, madame Mathon-Poinat, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. (Mme Catherine Procaccia, MM. René Beaumont et Michel Guerry applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour explication de vote.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Chères collègues de la majorité, je suis ravie de constater que vous partagez nos préoccupations !

Je ne retirerai pas cet amendement, car le moment est venu de faire pression, de défendre la parité et de la faire vivre. Ayez au moins un peu de courage pour voter cet amendement, qui, de toute façon, a peu de chances de passer !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 30.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(L’article 1er est adopté.)

Article 1er (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Article 2 (Texte non modifié par la commission)

Articles additionnels après l’article 1er

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 4, présenté par Mmes Voynet et Boumediene-Thiery, MM. Desessard et Muller et Mme Blandin, est ainsi libellé :

Après l’article 1er, insérer un article additionnel rédigé ainsi :

I. - Le code électoral est ainsi modifié :

1° L’article L. 193 est ainsi rédigé :

« Art. L. 193. - Les conseillers généraux sont élus dans chaque département au scrutin de liste à deux tours sans adjonction ni suppression de noms et sans modification de l’ordre de présentation.

« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l’entier supérieur. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l’application du quatrième alinéa ci-après.

« Si aucune liste n’a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un second tour. Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l’entier supérieur. En cas d’égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d’âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l’application du quatrième alinéa ci-après.

« Les listes qui n’ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à la répartition des sièges.

« Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d’être proclamés élus. »

2° Le premier alinéa de l’article L. 192 est ainsi rédigé :

« Les conseillers généraux sont élus pour six ans. »

II. - En conséquence, l’article L. 191 du même code est abrogé.

Cet amendement n’est pas soutenu.

L'amendement n° 12, présenté par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 192 du code électoral est ainsi rédigé :

« Art. L. 192. - Les conseillers départementaux sont élus pour six ans ; les conseils départementaux sont renouvelés intégralement. »

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 12 est retiré.

Mes chers collègues, j’appelle en discussion les douze amendements suivants, qui traitent du même sujet, mais appliqué à des départements différents. Je donnerai la parole à ceux qui le désirent.

L'amendement n° 42, présenté par MM. Krattinger, Collombat, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département des Alpes-de-Haute-Provence ne peut être inférieur à 30.

L'amendement n° 43, présenté par MM. Krattinger, Collombat, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département des Hautes-Alpes ne peut être inférieur à 30.

L'amendement n° 46, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département du Cantal ne peut être inférieur à 27.

L'amendement n° 41, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département du Tarn-et-Garonne ne peut être inférieur à 30.

L'amendement n° 44, présenté par MM. Krattinger, Teulade, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Corrèze ne peut être inférieur à 37.

L'amendement n° 45, présenté par M. Krattinger, Mmes Bourzai et Nicoux, MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mme Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Creuse ne peut être inférieur à 27.

L'amendement n° 35, présenté par MM. Krattinger, Frécon, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Haute-Loire ne peut être inférieur à 35.

L'amendement n° 36, présenté par MM. Krattinger, Miquel, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département du Lot ne peut être inférieur à 31.

L'amendement n° 37, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Meuse ne peut être inférieur à 31.

L'amendement n° 38, présenté par MM. Krattinger, Signé, Boulaud, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen et Sergent, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Nièvre ne peut être inférieur à 32.

L'amendement n° 39, présenté par M. Krattinger, Mme Durrieu, MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département des Hautes-Pyrénées ne peut être inférieur à 34.

L'amendement n° 40, présenté par MM. Krattinger, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le nombre de conseillers généraux du département de la Haute-Saône ne peut être inférieur à 32.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, nous en revenons toujours au même problème : comment séparer l'examen de ce texte des réformes qui nous sont annoncées ? Nous aimerions tout de même avoir quelques informations sur ce qui va se passer, en particulier dans les petits départements – démographiquement parlant, car ils sont souvent assez étendus !

Par l’amendement n° 42, nous proposons que le nombre de conseillers généraux du département des Alpes-de-Haute-Provence ne puisse être inférieur à trente. Si la réforme est votée, celui-ci ne comptera plus que vingt-quatre cantons.

Dans ce département, la population n’est pas très nombreuse – un peu plus de 150 000 habitants –, mais se concentre sur les deux pôles que sont Digne-les-Bains et Manosque. Imaginez ce qui va advenir des autres territoires si des cantons sont supprimés !

Monsieur le secrétaire d'État, voilà pourquoi nous souhaitons dès à présent inscrire dans la loi un nombre minimal de conseillers généraux. Apparemment, comme vous nous l’avez vous-même laissé entendre, les petits départements démographiquement parlant auront toutes les garanties pour disposer d’une représentation suffisante. Nous attendons des actes !

M. le président. Monsieur Collombat, le département du Vaucluse compte un million d’habitants, mais seulement vingt-quatre conseillers généraux.

M. Pierre-Yves Collombat. Certes, monsieur le président, mais vous aurez remarqué comme moi qu’il n’a ni le même relief ni la même étendue. En l’espèce, il s’agit d’institutions chargées de la gestion d’un territoire. En ce sens, le territoire de Belfort fait encore mieux, puisqu’il ne compte que quinze cantons, avec une population d’une importance sensiblement identique à celle des Alpes-de-Haute-Provence

M. le président. Ce n’était qu’un exemple !

La parole est à M. René-Pierre Signé.

M. René-Pierre Signé. Monsieur le secrétaire d'État, je reprendrai à mon compte les arguments de M. Collombat pour les appliquer au département de la Nièvre, dans lequel le nombre de conseillers généraux ne saurait être inférieur à trente-deux, comme c’est le cas actuellement. Tel est l’objet de l’amendement n° 38.

Pour Fernand Braudel, la France est diversité. Je pourrais en dire autant de la Nièvre, tant chaque conseiller général représente un territoire différent de ses voisins et s’efforce de le valoriser, qu’il s’agisse du Morvan, du Val-de-Loire, de la Bourgogne nivernaise, de la Sologne bourbonnaise ou du Bazois.

Notre département de la Nièvre n’a été créé qu’in extremis. Il devait d’abord y avoir un département du Morvan, de petite taille, avec Autun comme préfecture, Nevers étant alors une sous-préfecture du Cher. Mais cela ne s’est pas fait, car une partie des habitants du Morvan ne tenait pas à être rattachée à la Saône-et-Loire.

À l’origine, voilà deux cents ans, il y avait beaucoup plus de districts, mais leur nombre a été réduit à la suite de la création des cantons. Depuis lors, le département est devenu une réalité historique, culturelle, économique et sociale. La réunion de territoires si différents, à la manière d’un puzzle, est apparue au fil du temps comme un facteur stimulant pour le développement du département.

À mon sens, le véritable motif de ce projet de loi nous est caché. Le Gouvernement, voyant le pouvoir local lui échapper, essaie de reprendre la main en le réduisant autant que possible. On invoque le besoin de faire des économies alors que tout le monde sait que les niches fiscales représentent plus de 73 milliards d’euros. D’ailleurs, comment parler d’économies quand le coût des élus ne représente en moyenne que 0,28 % du budget de fonctionnement d’un département ?

Monsieur le secrétaire d'État, voilà une raison qui n’en est pas une ! Il ne s’agit en fait que d’une recentralisation, d’une reprise en main d’un pouvoir local qui échappe à l’emprise du Gouvernement.

Mais il y a plus grave encore. M. Copé a annoncé à la télévision la disparition, à terme, des conseillers généraux. Le poids démographique des centres urbains, même dans la Nièvre où leur importance est somme toute relative, va aboutir à ce que l'ensemble des élus du département en sera originaire. Faute de conseillers généraux pour les représenter, tous les territoires alentours se transformeront en friches industrielles, économiques, culturelles et sociales.

C’est aussi vrai pour les communes. Actuellement, il n’est plus question que de bloc communal, de communauté de communes. A terme, les communes disparaîtront, et, dans les intercommunalités, les élus seront tous issus de la ville-centre, les communes périphériques n’ayant plus de représentants.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela n’a rien à voir avec la réforme !

M. René-Pierre Signé. Or chacun sait l’importance du rôle joué par les élus locaux. Ce sont eux qui suppléent les personnels communaux en leur absence. Il leur arrive ainsi de monter à l’échelle pour réparer une gouttière sur le toit de la mairie !

À l’évidence, la réduction du nombre des élus locaux aboutira à une désertification préjudiciable à nos départements. C’est donc une mauvaise mesure. La Nièvre sera particulièrement touchée : elle a eu son heure de gloire mais, aujourd'hui, c’est un département pauvre. Je le répète, on ne peut réduire le nombre des élus sans risquer de créer autant de friches économiques, industrielles et sociales.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela n’a rien à voir !

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai !

Mme Bernadette Bourzai. Monsieur le président, en l’absence d’élus creusois, je parlerai à la fois de la Creuse et de la Corrèze. Ce sont deux départements que je connais bien, pour avoir été élue régionale pendant quinze ans et conseillère générale pendant onze ans. J’ai cessé de cumuler ces deux fonctions lorsque je suis devenue maire, ce qui était plus raisonnable !

M. Rémy Pointereau. Vous étiez conseillère territoriale avant l’heure !

Mme Bernadette Bourzai. Justement, mon cher collègue, j’ai pu mesurer combien il pouvait être difficile d’être présente, et surtout efficace, sur les deux terrains ! Par conséquent, je peux vous parler d’expérience.

En Creuse comme en Corrèze, ce sont les espaces ruraux, très faiblement peuplés mais importants par leur étendue, qui posent évidemment le plus de problèmes. Je pense en particulier au plateau de Millevaches. Les conseillers généraux sont en nombre suffisant à la fois pour représenter la population qui y vit et pour être des promoteurs et des animateurs de ce territoire, qui, bien qu’en grande difficulté, est doté, avec le statut de parc naturel régional, d’un outil intéressant en termes de développement. Ce serait une très mauvaise décision que de faire disparaître ces élus de proximité, dont le rôle est si important sur le plan local.

Monsieur le secrétaire d'État, j’ai déjà évoqué ce sujet avec vous, ici même, le 30 juin dernier, au cours du débat sur l'organisation des collectivités territoriales. Il est prévu d’instaurer un conseiller territorial pour la partie corrézienne du plateau de Millevaches, qui remplacera une quinzaine d’élus actuels. La circonscription ainsi créée comportera six cantons, comptera un peu moins de 18 000 habitants et s’étendra sur 80 kilomètres, du nord au sud et d’est en ouest. Et je ne parle pas du relief ni même du climat ! Il se trouve que, aujourd'hui, il neige sur le plateau de Millevaches !

Autrement dit, en éloignant les élus de proximité du terrain, on prive les populations de facteurs de développement. De mon point de vue, ce n’est pas acceptable !

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Le département des Hautes-Pyrénées compte trente-quatre conseillers généraux. Je ne sais pas, au fond, combien il faut en conserver. Mais ce que je peux vous dire, c’est qu’il est une constante : aujourd’hui, personne ne considère qu’il y a trop de conseillers généraux !

Par ailleurs, il y a des considérations de relief. Les vallées pyrénéennes sont perpendiculaires à la chaîne et constituent des mondes à part.

Je citerai un exemple, d’ailleurs bien connu de M. le secrétaire d’État, le canton de Bordères-Louron.

Ce canton, peuplé de 1 200 habitants, devrait théoriquement être regroupé avec un autre. Or, qu’observe-t-on ? Avec ses deux stations de ski et son centre de thermoludisme, il compte plus de travailleurs salariés que d’habitants !

Ce dont je suis certain, c’est que, si ce canton avait été rattaché à un autre, jamais le développement de cette zone n’aurait pu se faire d’une façon aussi harmonieuse. C’est un véritable laboratoire du développement local qui mérite, ne serait-ce qu’à ce titre, d’être conservé ainsi.

Je souhaite donc que l’on prenne en compte les spécificités des territoires. Sans doute y-a-t-il, en France, des cantons qui ont perdu la taille critique pour pouvoir se développer harmonieusement ; mais il en est d’autres qui, hors de toute considération démographique, méritent qu’on s’y attarde.

Sachez aussi que, lorsque les services publics ont disparu ou sont trop atones pour jouer un rôle réel, il est bon qu’un représentant, connu sous le vocable de conseiller général, aille faire savoir aux autorités, qu’elles soient départementales ou nationales, que de 2 000 à 3 000 personnes vivent là et méritent d’être défendues. Cette autorité, le conseiller général l’a ! Or la création de territoires beaucoup plus vastes entraînera automatiquement une dilution.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. C’est beaucoup de plaisir et d’honneur pour moi que de porter dans cette assemblée la parole de nos collègues Gérard Miquel et Yves Krattinger en vue de défendre deux amendements concernant, l’un le département du Lot, l’autre, le département de la Haute-Saône.

Ces amendements tendent à ce que le nombre de conseillers généraux ne puisse être inférieur, pour le département du Lot, à 31, et, pour le département de la Haute-Saône, à 32. Juste après le vote de l’article 1er, qui a ouvert la voie de la disparition de 2 000 conseillers généraux aujourd’hui porteurs des projets cantonaux dans les départements, il est important de pouvoir marquer, par ces amendements, l’importance du travail de terrain que ces élus réalisent.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. L’un de ces amendements concerne le département du Cantal, cher au cœur de M. le secrétaire d’État.

Nous allons voter sur la concomitance des élections, et donc sur un nouveau mandat pour les conseillers généraux. Il serait donc tout à fait normal que nous puissions disposer de quelques explications sur ce que pourrait donner l’application de cette réforme dans l’avenir. Nous serions ainsi en mesure de fournir à nos électeurs et à nos collègues une information qui les intéresse beaucoup, à savoir le nombre approximatif de défunts politiques dans les futures assemblées ! J’ai cru comprendre que, sur vingt-sept, il en tomberait environ un tiers. Mais, monsieur le secrétaire d'État, nous avons besoin de connaître cette indication dans les plus brefs délais, si possible avant les élections régionales.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, les autres amendements du même type sont défendus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les douze amendements ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Tous ces amendements visent à définir le nombre minimum de conseillers territoriaux sur les territoires qu’ils visent.

Nous sommes confrontés à un double problème : il faudra tout d’abord définir un nombre minimum de conseillers territoriaux par département.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Par ailleurs, il faudra pondérer ce seuil avec un coefficient de territoire : si chaque conseiller territorial a vocation à représenter une population, il faut également tenir compte du territoire concerné. Il est évidemment plus facile de trouver 10 000 habitants en zone urbaine que sur le plateau de Millevaches !

Il faudra donc pondérer le nombre d’habitants représentés par conseiller territorial par un coefficient de territoire lui-même susceptible de pondération en fonction de certaines variables, tel l’aspect montagneux de la zone, par exemple. Sur cet élément important, nous sommes tous d’accord.

Mais force est de constater que ces amendements n’ont pas leur place dans le texte qui nous intéresse aujourd’hui, consacré à la concomitance du renouvellement des conseils généraux et des conseils régionaux.

Certes, la commission reconnaît le bien-fondé des questions soulevées par ces amendements, questions importantes qui devront être abordées, car elles intéressent tous les élus.

Elle a néanmoins émis un avis défavorable sur ces douze amendements, d’autant que le découpage des circonscriptions en vue des élections législatives n’a pas encore été voté. Or c’est par là qu’il faut commencer. Monsieur le secrétaire d’État, j’attends des réponses.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement est également défavorable aux douze amendements.

Je reviens sur cette question récurrente des effectifs dans les futurs conseils territoriaux qui vous préoccupe légitimement. Je me suis exprimé à plusieurs reprises sur le sujet, notamment devant la commission des lois élargie et, hier, lors de la discussion générale.

Il faut une cohérence entre le découpage des circonscriptions législatives et la délimitation de nos cantons. C’est obligatoire, comme l’ont rappelé le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État.

Il y a deux préalables.

Le premier préalable tient à la validation du découpage des circonscriptions législatives, qui est précisément fondé sur les cantons. Cela suppose un vote du Parlement. Si ce vote n’a pu intervenir hier, c’est parce que vous l’avez retardé. Dans ces conditions, ne vous plaignez pas d’attendre encore un peu ! Il vous faudra probablement attendre, à l’issue de la seconde lecture à l’Assemblée nationale et au Sénat, la décision du Conseil constitutionnel, que vous ne manquerez pas de saisir !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Si vous ne le saisissez pas….

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le second préalable tient à la publication, fin décembre, des résultats du recensement de la population. Nous avons besoin de ces chiffres, car ils sont réputés valables au 1er janvier 2007. Le fameux « recensement glissant », produit de la loi Vaillant de 2002, ne nous facilite pas la tâche. La nouvelle méthodologie du recensement des populations et des cantons nous a fait prendre beaucoup de retard.

Une fois ces deux préalables levés, nous pourrons travailler ensemble sur le tableau des effectifs. Je vous confirme que nous donnerons en priorité toutes les indications souhaitées à la commission des lois du Sénat et à son président lorsque la Haute Assemblée examinera le projet de loi électoral. Mais nous n’en sommes pas là.

Qu’en est-il de la situation des départements ruraux ? Pour le découpage des circonscriptions législatives, un seul critère est pris en compte, celui de la population.

S’agissant du découpage des cantons, deux critères sont traditionnellement pris en compte : le critère démographique – cela va de soi –, mais aussi le critère territorial. C’est une obligation légale. Elle a été, depuis toujours, validée par le Conseil d’État et par le Conseil constitutionnel quand ils se prononçaient sur des recours, et nous allons procéder de même.

Nous avons également prévu un seuil minimum d’une quinzaine de conseillers territoriaux pour les départements ruraux, faiblement ou moyennement peuplés. Nous avons retenu ce chiffre en nous référant au plus petit de nos départements – en l’occurrence, le territoire de Belfort.

À partir de ce seuil, il y aura, certes, une baisse des effectifs, mais qui sera pondérée en fonction des deux critères liés tant au territoire qu’à la population. Cela ne se fera évidemment pas au détriment du tissu rural auquel nous sommes tous profondément attachés. Dans les prochaines semaines, nous serons en mesure de commencer ces travaux et de vous apporter les précisions que vous souhaitez.

Il y aura bien entendu une concertation avec les présidents de conseil général qui seront tenus informés – cela va de soi – de nos travaux.

Il a été donné quantité d’exemples : le Lot, les Alpes-de-Haute-Provence… Sans passer en revue ces différents départements, ce que je me réserve de faire, si vous le voulez, le moment venu, je m’arrêterai aux Hautes-Pyrénées. Monsieur Fortassin, ce département est actuellement représenté par trente-quatre conseillers généraux et neuf conseillers régionaux. Avec la réforme, vous devriez obtenir une vingtaine de conseillers territoriaux. Cela signifie que la ville de Toulouse sera pratiquement trois fois mieux représentée qu’auparavant. Actuellement, avec neuf conseillers régionaux sur quatre-vingt-onze, votre taux de représentativité est voisin de 10 % !

M. Jean-Pierre Sueur. L’argument se retourne !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Comme tous les départements ruraux, les Hautes-Pyrénées sont sous-représentées au chef-lieu de région. La remarque vaut pour le Cantal, qui n’a que cinq conseillers régionaux, un chiffre très faible par rapport aux effectifs de la région. Il en va de même pour les autres départements qui ont été cités. La création des conseillers territoriaux donnera une chance aux départements ruraux d’avoir une représentation beaucoup plus forte au sein des conseils régionaux. Or c’est là que se décident bien des choses, notamment les investissements.

Mesdames, messieurs les sénateurs, quand vous regardez où se nichent les investissements des conseils régionaux, il apparaît que les départements ruraux ne sont pas les plus gâtés actuellement. Ils sont plutôt mal traités dans l’ensemble, même s’il peut y avoir des exceptions. C’est un vrai sujet de débat. Il est préoccupant, et j’espère que nous saisirons l’occasion de l’ouvrir.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d’État, peut-être pourriez-vous cesser de nous prendre pour des demeurés ?

À notre légitime demande de savoir à peu près combien il y aura de conseillers territoriaux par département, vous nous répondez invariablement deux choses.

Tout d’abord, vous nous rappelez les principes : la représentativité essentiellement démographique, la prise en compte des territoires, avec un seuil minimum, la réduction de moitié du nombre des élus et les dangers de conseils régionaux pléthoriques.

Pris séparément, ces principes sont parfaits. Simplement, comment arrivez-vous à les combiner ? Comment parvenez-vous à concilier l’exigence d’une représentation minimale sans arriver à des conseils régionaux de 300 ou 400 membres ? C’est cela le problème ! Cessez donc de nous répéter la même chose !

Par ailleurs, vous invoquez le recensement glissant, le retard, pris de notre fait, dans le découpage des circonscriptions… Tout cela n’est pas sérieux ! Si nous concevons que vous ne puissiez pas nous donner des chiffres à l’unité près pour tel ou tel endroit, il est difficilement compréhensible que vous ne puissiez le faire à deux ou trois près : ce n’est en effet pas le recensement qui changera à ce point les choses ! Souffrez donc que nous n’aimions pas que vous vous moquiez de nous ! C’est tout !

Par conséquent, tant que vous n’aurez pas donné des chiffres à peu près vraisemblables, nous vous poserons inévitablement la question !

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.

M. Claude Bérit-Débat. En complément de ce que vient de dire M. Collombat, je souhaiterai relever une petite contradiction.

Jusqu’à présent, le débat était un véritable dialogue de sourds – quelque peu surréaliste, comme je l’ai dit tout à l’heure –, dans lequel il nous était systématiquement répondu que nos questions portaient non pas sur le présent texte mais sur un prochain projet de loi.

Dans la réponse que vous venez d’apporter, monsieur le secrétaire d'État, vous esquissez cependant quelques perspectives et, à mon avis, vos propos devraient amener mes collègues à méditer.

Ainsi, vous avez dit que, dans les départements à caractéristique rurale, les petits départements, le nombre de conseillers ne devrait pas descendre au-dessous de la quinzaine et que le nouveau système leur assurerait une meilleure représentation à l’échelon du conseil territorial ou – j’ignore quel nom lui sera donné demain – de l’assemblée territoriale.

À voir les simulations présentées dans l’étude d’impact qui accompagne le projet de loi, il apparaît néanmoins que les représentants de ces petits départements – même si, en fin de compte, la proportionnalité est un peu « trafiquée » – se noieront dans la masse régionale ; je ne suis donc pas sûr qu’ils seront mieux entendus qu’ils ne le sont aujourd'hui !

Je me demande par ailleurs si, derrière les arguments que vous avez développés tout à fait au début, à l’instigation du Président de la République, en faveur de la division par deux du nombre des élus, qui seraient trop nombreux et trop coûteux, il ne s’agissait pas plutôt – cela n’a jamais été dit mais on l’a souvent sous-entendu – de mettre au pas certaines collectivités territoriales, conseils généraux ou conseils régionaux, dirigées par des majorités qui ne conviennent pas au pouvoir aujourd'hui en place.

Bien que le Gouvernement reste dans le flou, se dévoile ainsi petit à petit la volonté qui anime véritablement la réforme dont nous débattrons demain. Mes chers collègues, il faut nous y préparer !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles additionnels après l’article 1er
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Articles additionnels après l'article 2

Article 2

(Non modifié)

Par dérogation aux dispositions de l’article L. 336 du code électoral et du troisième alinéa de l’article L. 364 du même code, le mandat des conseillers régionaux et celui des membres de l’Assemblée de Corse élus en mars 2010 expireront en mars 2014.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, sur l'article.

M. Jean-Claude Peyronnet. Les arguments qui nous ont été opposés ne valent pas vraiment.

Tout le monde aura en effet noté comme moi que ce texte, qui organise la simultanéité des élections, s’est vu adjoindre une étude d’impact identique à celle qui accompagne deux des autres textes. Voilà pourquoi un premier argument tenant au fait que, en évoquant d’autres textes, nous sortons du cadre spécifique du présent projet de loi, ne tient pas.

Le second argument, selon lequel nos amendements n’auraient pas de valeur normative, ne tient pas davantage.

Je vous le rappelle, en effet, cette étude d’impact extrêmement large, qui porte notamment sur les questions électorales, est visée par le Conseil constitutionnel. Elle a donc une pleine valeur juridique.

Monsieur le secrétaire d'État, plus on cherche, plus on trouve sur cette affaire des conseillers territoriaux...  J’ai découvert ce matin dans Le Figaro un argument que je regrette de n’avoir pas trouvé moi-même et à propos duquel je souhaiterais connaître votre avis.

Lorsque, dans un département, il y aura invalidation d’une élection au suffrage uninominal à un tour, puisque tel est le mode de scrutin que vous souhaitez introduire, que se passera-t-il, puisque les comptes seront à refaire, pour les 20 % d’élus au scrutin de liste ? Tous ces élus seront-ils invalidés ou y aura-t-il un nouveau décompte ?

Y avez-vous réfléchi ? J’aimerais en tout cas vraiment que le Gouvernement réponde à cette question pour que nous puissions mieux comprendre un dispositif aujourd'hui encore assez flou.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l’article.

M. Jean-Pierre Sueur. Pour notre part, nous souhaitons des régions fortes : à l’heure européenne, il faut que les régions soient porteuses de projets, d’outils de structuration du territoire, qu’elles aient des ambitions et les moyens de leurs ambitions.

Or il y a quelque fatalité dans les lois sur les régions. Je me souviens tout à fait de la loi dite Raffarin que notre collègue alors Premier ministre était venu nous présenter comme un projet clairement régionaliste, en nous annonçant que l’heure de la régionalisation était arrivée.

Toujours est-il qu’au terme du débat, après diverses péripéties,…

M. Bernard Frimat. Des élections régionales !

M. Jean-Pierre Sueur. … notamment, en effet, des élections régionales, nous avions constaté que ladite loi, si elle était certainement départementaliste, était fort peu régionaliste.

Nous avons gardé, quant à nous, cette idée de régions fortes, car c’est très important pour notre pays.

Puisque nous arrivons au second article de ce projet de loi, qui traite justement des élections régionales, je pose la question : le dispositif que le Gouvernement nous propose dans ce projet de loi et dans ceux qui suivront est-il de nature à renforcer les régions ?

Je ne le crois pas.

Ce que met en place le Gouvernement est confus. Je connais d’ailleurs un président de conseil général qui a dit que cette réforme allait se traduire par une départementalisation des régions. C’est en effet une lecture possible de la réforme, quoique, symétriquement, on puisse aussi, me direz-vous, la lire comme une régionalisation des départements.

En somme, la seule chose qui est claire, c’est que c’est confus ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Et personne ne s’est risqué à tenter de me prouver le contraire...

Lorsque l’on se penche de surcroît sur les modalités électorales, on peut certes en conclure que les futurs conseillers territoriaux seront les grands défenseurs de la région, mais on peut soutenir tout autant qu’ils seront fort logiquement les défenseurs de leur département au sein de la région.

Voilà pourquoi je ne crois pas que l’idée régionale gagnera à cette réforme.

À l’instant, monsieur le secrétaire d'État, mon collègue Jean-Claude Peyronnet vient de vous poser une question de droit électoral qui n’est pas du tout anodine ; elle ne souligne que l’un des nombreux paradoxes, l’une des nombreuses incohérences qui découleront de ce scrutin totalement incompréhensible, totalement injuste et totalement injustifié que vous nous proposez.

Je rappelle en effet que les représentants à l’échelon de la région seront pour une part élus, on ne sait trop comment, grâce aux voix des candidats qui auront été battus, ou non élus. Ce seront donc les élus des non-élus, et ces élus pourront même, ce qui est finalement assez confortable, présider leur assemblée !

S’il n’y a aucune clarté quant au statut de ces élus-là, il y a également confusion quant à leur mode de désignation, et je crains que l’on ne donne pas plus de pouvoirs, plus de prérogatives, plus de lisibilité, plus de transparence aux régions et que l’on ne s’engage dans une voie contraire à celle dans laquelle nous pensons qu’il faut aller, celle de régions fortes.

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, sur l'article.

M. Claude Bérit-Débat. Les arguments que je développerai à propos de l’article 2 seront naturellement en partie les mêmes que ceux que j’ai développés à propos de l’article 1er.

Derrière cet article 2, qui vise donc à raccourcir le mandat des conseillers régionaux, se profile la création, on l’a dit, d’un nouveau type d’élu : le conseiller territorial.

Aurons-nous vingt et un conseillers territoriaux en Dordogne ? Les élus de terrain s’inquiètent beaucoup de savoir comment ils seront représentés au niveau régional, mais je ne m’attarde pas sur cette question.

Je ne reviens pas davantage sur la source d’insécurité juridique que viennent de pointer les deux orateurs qui m’ont précédé, bien que l’insécurité soit réelle, puisque, comme nos collègues l’ont dit, les candidats de liste pourront être élus avec les voix des battus.

Mon intervention portera plutôt sur deux autres points, et d’abord sur le fonctionnement de l’assemblée régionale – ou territoriale -, avec des élus territoriaux qui auront la charge de représenter tout à la fois un territoire départemental et un territoire régional.

Comme l’a bien précisé Jean-Pierre Sueur, ces élus devront remplir une double fonction : non seulement ils auront à déployer, pour la région, une vision d’avenir, une vision stratégique de développement, et ce non seulement à l’échelon national mais aussi à l’échelon européen – on voit ce que cela implique en termes de projets économiques, d’infrastructures, d’initiatives en matière de formation, notamment – mais aussi, ils devront, sur le terrain, régler les problèmes locaux, notamment de voirie, de pont, d’aménagement divers…

Je ne vois pas comment ces deux fonctions peuvent être menées de front et je pense que l’une en pâtira.

Il y aura donc un conflit de fonction qui se doublera, de surcroît, comme l’a souligné Yves Krattinger, d’un conflit d’intérêt, notamment lorsqu’un président d’assemblée régionale et un président d’assemblée départementale de couleurs politiques différentes devront siéger et travailler ensemble. Je me demande comment certains dossiers un peu complexes pourront avancer…

Ensuite, le nouveau mode de scrutin pose également un certain nombre de problèmes, à commencer par la parité, qui, bien qu’étant un principe constitutionnel, ne peut plus être assurée - de nombreuses collègues se sont d’ailleurs exprimées à cet égard – auquel j’ajoute le problème de la place faite à la diversité.

Dans un département comme la Dordogne, sur vingt ou vingt-cinq conseillers territoriaux, cinq seulement seront élus à la proportionnelle, et les autres seront rattachés à un canton voué à être redécoupé. Comment, dans ces conditions, préserver au sein des listes à la fois parité et diversité ?

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cet article 2, qui ne nous satisfait pas. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, sur l’article.

M. Yannick Bodin. Nous refusons cet article 2 pour les mêmes raisons que celles qui nous ont conduits à refuser l’article 1er.

M. Jean-Pierre Sueur. Quelle constance !

M. Yannick Bodin. Je m’exprimerai, à propos de cet article 2, comme je l’ai fait à l’occasion de l’examen de l’article 1er, sur la question de la parité.

Oui, j’enfonce le clou, et je répète, pour la vingtième fois peut-être – sans doute faudra-t-il y revenir encore à de nombreuses reprises –, que le projet de réforme des collectivités territoriales constitue une atteinte au principe de parité en politique.

Tout d’abord, ce projet ne s’inscrit pas dans l’article 1er de la Constitution, dont je rappelle les termes du second alinéa : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

On peut donc s’interroger sur la constitutionnalité d’un projet de loi qui entraîne un recul de la parité.

De fait, les rapports et les études d’impact de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes montrent que, avec le mode de scrutin uninominal, non soumis à des règles de parité, les femmes sont toujours sacrifiées.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes.

L’Assemblée nationale compte aujourd’hui 81,5 % d’hommes contre 18,5 % de femmes.

En mars 2008, lors des élections cantonales, avec un mode de scrutin uninominal, il y avait 79,1 % de candidats contre donc seulement 20,9 % de candidates.

De même, en termes d’élus et non plus de candidats cette fois, on compte 86,9 % de conseillers généraux contre 13,1 % de conseillères générales.

En 2004, en revanche, lors des dernières élections régionales, grâce à la loi relative à la parité qui s’imposait dans toute sa force obligatoire, 47,6 % des conseillers régionaux élus étaient des femmes. C’était donc un grand pas vers la parité.

En proposant, pour l’élection des conseillers territoriaux, un mode de scrutin qui s’apparente à celui qui est retenu pour l’élection des conseillers généraux, vous cassez la dynamique qui avait été engagée grâce à la réforme du mode d’élection des conseillers régionaux.

Comme le démontrent toutes les simulations, si ce projet de loi était adopté, les femmes ne représenteraient encore que 20 % environ des conseillers territoriaux, ce qui est non seulement inadmissible mais franchement contraire au sens de l’histoire.

Où sont donc la modernité et l’équité dans cette réforme ?

Je rappelle, en outre, que la loi du 31 janvier 2007 rend obligatoire le respect de la parité dans la composition des exécutifs. Or l’adoption du projet de loi relatif aux conseillers territoriaux rendrait inapplicable cette loi, pourtant récente.

Il s’agit d’un recul pour le droit des femmes, donc pour la démocratie. Sans réponse définitive et positive de votre part sur cette question essentielle, nous ne pourrons que voter contre cet article 2.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.

M. Yves Daudigny. À ce stade du débat, nous avons perdu l’ambition, les uns comme les autres, de nous convaincre mutuellement. Je veux cependant verser au débat la contribution suivante, relative au mode d’élection des conseillers territoriaux.

Ce mode d’élection prend, je cite, « de plus en plus le tour d’un accident industriel qui menace l’ensemble du projet. Ces nouveaux élus doivent remplacer en 2014 les conseillers généraux et régionaux. Objectif : en réduire le nombre par deux et permettre de mieux coordonner les politiques locales.

« Ceci posé, restait à trouver un mode de scrutin. Or le cahier des charges relève de la quadrature du cercle. Le scrutin doit tout à la fois conserver une part de scrutin uninominal sur la base d’une circonscription cantonale et introduire une dose de proportionnelle. Il doit également assurer une juste représentation des territoires ruraux tout en conservant un normal respect de la démographie. [...] La solution proposée est celle d’un “ scrutin uninominal compensé ”, inédit en France. [...] Au passage, ce mode de scrutin complexe réduit la parité à la portion congrue, alors qu’elle est aujourd’hui la règle dans les régions. Il ne dégage pas non plus à coup sûr de majorité.

« Voici pour la théorie. Mais, dans la pratique, ce mode de scrutin pose d’importants problèmes. Si l’élection d’un conseiller territorial dans un canton venait à être annulée, l’élection de ses collègues élus à la proportionnelle et procédant du même vote serait également frappée d’annulation. Substituer les suffrages issus de la partielle pour les réintroduire dans le pot commun proportionnel est constitutionnellement douteux et politiquement hasardeux. Une annulation dans un canton pourrait donc obliger à organiser un nouveau scrutin dans tous les cantons du département ! [...] À cet écueil pratique – et peut-être fatal – s’ajoutent d’importantes difficultés politiques. La gauche, aujourd’hui à la tête d’une majorité de départements et de régions, rejette catégoriquement ce mode de scrutin [...] ». Nous l’avons suffisamment montré ici !

Mais je poursuis :

« On n’est d’ailleurs pas forcément davantage convaincus à droite. [...] À l’UMP, Jean-François Copé, Bernard Accoyer, Alain Juppé, Nadine Morano, entre autres, ont fait part de leurs réserves, qui sur le choix du tour unique, qui sur l’abandon de la parité. “ Le scrutin à un tour signe un constat d’échec pour la majorité et pour les principes qui ont présidé à la création de l’UMP ”, déplore François Baroin. “ Nous serons accusés – est-ce à tort ? – de manipulation, et je crains l’effet boomerang ”, ajoute Christian Jacob. En France, la tradition des élections à deux tours est très forte. Au moins aussi forte que celle qui voit une majorité sanctionnée dans les urnes quand elle modifie un mode de scrutin ».

L’article que je viens de citer n’est pas extrait de Libération ou du Canard enchaîné, mais du Figaro daté du 16 décembre 2009, c’est-à-dire de ce matin ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Sueur. J’applaudis Le Figaro !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l’article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cela fait déjà un bon moment que nous répétons la même chose,... (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. C’est vrai !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Tout à fait !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ... mais il le faut !

À l’occasion de mon intervention sur l’article 1er, je vous ai dit que vous n’étiez pas obligés de modifier dès à présent la durée du mandat des conseillers généraux. S’agissant du mandat des conseillers régionaux, j’ai bien compris que vous vouliez le réformer dès maintenant.

Outre qu’il nous semble tout à fait anormal de préjuger d’une réforme qui n’est pas encore votée, nous sommes absolument défavorables au regroupement des élections locales, argument avancé au soutien de la présente réforme.

Vouloir constituer deux blocs électoraux, l’un pour les élections nationales, l’autre pour les élections locales, sans oublier les élections européennes, ne me paraît ni pertinent ni bon pour la démocratie. En effet, en regroupant toutes les élections locales, concernant donc les communes, les départements, du moins jusqu’à leur disparition, et les régions, vous donnerez inévitablement à ces scrutins un caractère national. Il s’agira en quelque sorte d’élections globales au plan local.

Vous allez d’ailleurs dans le même sens que le Président de la République, qui veut d’ores et déjà donner un caractère national aux élections régionales de 2010.

Nous y sommes opposés car, si les élections locales sont bel et bien politiques, elles sont différentes des autres. J’en veux pour preuve que, dans les communes, les départements et les régions, les candidats aux élections présentent des programmes adaptés aux réalités locales, avec des objectifs locaux qui correspondent aux attentes locales de la population locale.

Il sera beaucoup plus difficile de présenter de tels programmes lorsque toutes les élections seront regroupées, car la plus grande confusion régnera : on ne saura plus pour quel candidat ni pour quel programme voter.

Ce regroupement va de pair avec la suppression de la compétence générale des départements, qui vont d’ailleurs disparaître, et des régions. Or une collectivité territoriale sans compétence générale n’est plus en mesure de s’administrer librement : c’est simplement un rouage de l’État qui met en œuvre la politique de l’État.

On le voit, la nationalisation des scrutins locaux va de pair avec l’étatisation des choix et des décisions. Bien évidemment, nous y sommes opposés.

S’agissant précisément des conseillers régionaux, l’adoption de l’article 2 nous engagerait d’ores et déjà dans une voie inacceptable. Cet article est en effet contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales qui, inscrit dans la Constitution, est le b.a.-ba de la décentralisation. Sans libre administration des collectivités territoriales, la décentralisation n’existe pas.

Au sujet de la parité, je me contenterai de vous raconter une anecdote destinée à vous faire réfléchir à d’éventuelles solutions.

Entre 1996 et 1997, avant donc le vote de la loi rendant la parité obligatoire, l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes avait auditionné les partis politiques pour leur demander comment ils comptaient renforcer la place des femmes dans la vie politique, notamment lors des prochaines élections législatives. À cette question, le secrétaire général du RPR de l’époque répondit qu’il entendait présenter à ces élections des « tickets » où le titulaire et le suppléant seraient de sexe différent. Cela signifiait alors forcément, compte tenu du nombre de femmes élues à l’Assemblée nationale – et il le reconnut bien volontiers ! –, que, dans 95 % des cas, l’homme serait titulaire et la femme, suppléante. Et le secrétaire général du RPR d’expliquer de bonne foi, car il était sans doute honnête et convaincu, que les femmes pourraient ainsi apprendre sur le terrain, pendant cinq ans, leur futur métier de député, pour peut-être se présenter comme titulaires à l’élection suivante.

Cette réponse, je dois le dire, avait déclenché une certaine hilarité au sein de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes...

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Pourquoi ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J’ai observé que vous n’aviez pas réitéré de tels propos. Vous avez bien tenté de nous proposer à nouveau cette idée de « ticket » entre un homme titulaire et une femme suppléante pour les élections législatives, mais vous ne l’avez pas justifiée de cette manière. Soutenir que les femmes doivent arpenter, ou plutôt labourer le terrain pour pouvoir – un jour, un jour peut-être –, se présenter comme candidates titulaires à des élections, posait sans doute un léger problème !

Alors, je vous en prie, épargnez-nous l’argument de la pédagogie pour tenter de nous faire croire que vous œuvrez pour la parité, alors que, en réalité, vous organisez son recul.

Nous avons beaucoup bataillé pour voir la parité inscrite dans la Constitution. Vous y étiez opposés. Aujourd'hui, oserez-vous mettre en cause ce principe ?

Nous demandons la suppression de l’article 2 et, s’il devait ne pas être supprimé, nous voterions contre !

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l'article.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Puisque nous nous apprêtons à réduire la durée du mandat des conseillers régionaux qui vont être élus dans quelques semaines, évoquons la future composition des conseils régionaux au regard du projet de loi instituant les conseillers territoriaux qui seront appelés à siéger dans ces conseils. C’est un peu compliqué, mais ce n’est pas de mon fait !

Au cours de plusieurs mois d’auditions, de réunions de commissions diverses et après de nombreux rapports sur l’éventualité d’une réforme des collectivités territoriales, de très nombreuses voix se sont élevées pour décrire l’urbanisation de notre société comme un phénomène contemporain majeur.

Dans les premiers textes mis en débat sur les réformes à venir, il a même été question de créer une nouvelle collectivité de plein exercice : la métropole. Sans aller vers cette extrémité, le projet de loi dont nous débattrons crée de nouveaux EPIC dénommés « métropoles » et des « pôles métropolitains ». C’est dire l’importance que le Gouvernement semble attribuer à ces sphères géographiques regroupant des centaines de milliers d’habitants.

Sans vouloir entamer d’ores et déjà un débat sur ces enjeux, je tiens à dire mon étonnement devant la future composition des conseils régionaux dans lesquels siégeront les conseillers territoriaux que le Gouvernement s’apprête à créer. En effet, d’après les dernières déclarations de M. Marleix, ici présent, il semble que les zones rurales et les départements ruraux seraient privilégiés en raison du nombre de leurs élus, au détriment des zones et des départements très urbanisés.

Les équilibres actuels entre départements au sein des conseils régionaux vont être fortement bouleversés, au seul profit des départements à faible population.

Comment justifier un tel choix, contraire à la reconnaissance du fait urbain ? Et pourquoi minimiser la représentation des populations vivant dans les villes ?

N’est-ce pas en totale contradiction avec des enjeux que vous semblez pourtant faire vôtres ? Mais sans doute n’ai-je pas compris qu’il s’agit, en fait, de deux questions distinctes : l’une relative à la concentration, au sein des métropoles, de compétences plus larges que celles qui sont réservées aux communes, l’autre relative, pour dans trois ans, aux pouvoirs politiques futurs des conseils régionaux.

En fait, le charcutage électoral que prépare le Gouvernement ira jusqu’à tenter de favoriser la reprise des régions par sa majorité.

Scrutin majoritaire à un tour, redécoupage des cantons, primauté aux zones rurales, déséquilibre des représentations départementales au sein des conseils régionaux : tout est fait pour vous permettre de reprendre les départements et les régions, qui semblent vous échapper.

Pour toutes ces raisons, les membres du groupe CRC-SPG voteront contre l’article 2.

M. le président. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, sur l'article.

Mme Bernadette Bourzai. Je me suis déjà exprimée sur la parité, je serai donc assez brève. Je veux cependant interroger le Gouvernement.

J’ai lu avec intérêt l’étude d’impact annexée au présent projet de loi, notamment la page 25, où il est écrit, à propos du scrutin mixte : « Il s’agit d’une formule reprise des règles actuelles régissant soit les élections régionales, soit les élections cantonales, mais leur effet va maintenant se faire sentir tant dans les conseils régionaux que dans les conseils généraux. »

Cette affirmation est doublement fausse, puisque les élections régionales ont lieu au scrutin de liste pour la totalité des candidats et que les élections cantonales se déroulent au scrutin nominal avec un titulaire et un remplaçant.

Surtout, je ne comprends absolument pas ce que signifient les mots : « leur effet va maintenant se faire sentir ».

La démonstration a été faite que, lors de l’élection des conseillers territoriaux, nous allons perdre un certain nombre d’élues, et ce dans des proportions qui ne sont pas acceptables.

Je ne m’attarderai pas sur cette pseudo-parité qui a été trouvée sans doute pour calmer les ardeurs féministes, mais la réalité est tout entière dans un pourcentage, mes chers collègues, et il se passe de commentaires : on ne compte aujourd'hui que 13 % d’élues dans les conseils généraux !

Alors, oui, il ne peut s’agir que d’une pseudo-parité qui consistera, en fait, à généraliser, dans les cantons, la suppléance féminine de candidats titulaires masculins.

Monsieur le secrétaire d'État, lors de la réunion de la commission des lois, élargie à tous les sénateurs qui le souhaitaient, vous nous avez dit que le remplaçant, c’est-à-dire, dans la majorité des cas, la remplaçante, aurait vocation à suppléer le conseiller territorial lors de représentations qu’il ne pourrait pas lui-même assurer. Pouvez-vous le confirmer ?

Pensez-vous trouver des volontaires pour être élues sans être élues mais chargées de remplacer des élus pour aller, bénévolement, siéger dans les conseils d’administration de collèges ou de lycées, au sein de tel organisme social ou bien encore dans telle institution ou structure environnementale ?

M. Charles Revet. Il y en a déjà !

Mme Bernadette Bourzai. Croyez-vous vraiment que vous trouverez assez de bécasses pour accepter un tel rôle ? Pour ma part, je ne le pense pas : nous ne nous tairons plus !

Le mode de scrutin à un tour pour l’élection des conseillers territoriaux n’est pas davantage acceptable. D’abord, il n’est pas français, au sens où il n’est pas adapté à la vie politique française. Ensuite et surtout, il tend soit à museler une majorité plurielle qui veut garder une majorité de régions soit à permettre à une minorité rassemblée de conquérir de nouvelles régions.

Enfin, il y a des limites à l’indécence dans le débat politique. Personnellement, je n’ai pas été abusée par les discours de M. Sarkozy évoquant Jean Jaurès, Léon Blum, Guy Môquet et maintenant Albert Camus.

Aujourd'hui, le Gouvernement se réfère à une proposition de loi déposée par Léon Blum en 1926 et à des réflexions menées sous la IVe République pour justifier ce mode de scrutin – il me paraît du reste encore dans les limbes -, mais il se trompe d’époque. Depuis, ont été adoptées les lois de décentralisation. Depuis, des élus ont assumé leurs responsabilités dans les collectivités territoriales, qu’il s’agisse des départements ou des régions.

Le Gouvernement ferait mieux de s’inspirer de la politique conduite par Léon Blum en 1936, lui qui est face à une crise économique et sociale loin d’être anodine !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 13 est présenté par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 31 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche.

L'amendement n° 48 rectifié est présenté par M. Collin, Mme Escoffier, MM. Alfonsi, Mézard, Baylet, Charasse, Chevènement et Fortassin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour présenter l’amendement n° 13.

M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement est défendu, puisque MM. Daudigny et Bérit-Débat ont largement développé les arguments qui ont justifié son dépôt.

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l'amendement n° 31.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement est également défendu.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour présenter l'amendement n° 48 rectifié.

M. Michel Charasse. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Ces trois amendements identiques visent à supprimer l’article 2, au motif que le Parlement ne connaît pas encore les conditions de l’élection des conseillers territoriaux et ne peut donc donner un blanc-seing au Gouvernement en adoptant une loi qui permettrait la création de cette nouvelle catégorie d’élus.

Je rappelle que l’objet du projet de loi aujourd'hui en discussion est d’assurer la concomitance des élections cantonales et régionales en 2014. Restons-en au présent texte.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Avis défavorable, monsieur le président, pour les mêmes raisons.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13, 31 et 48 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 14, présenté par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Remplacer l'année :

2014

par l'année :

2015

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Défavorable !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Également défavorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 32, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les exécutifs des conseils régionaux respectent le principe de parité.

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Articles additionnels après l'article 2

M. le président. L'amendement n° 15, présenté par MM. Collombat, Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au sein d'une même région, le nombre de représentants au conseil régional du département le moins peuplé rapporté à la population ne peut être supérieur à deux fois et demie celui du département le plus peuplé.

Les assemblées départementales comptent au moins vingt membres.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d'État, je viens à votre aide. (Sourires.)

Cet amendement a pour objet de fixer des règles pour ce qui concerne le nombre de représentants des départements au conseil régional, en tenant compte du critère de population. Et même si vous le sous-amendiez pour fixer à quinze le nombre plancher des membres des assemblées départementales, nous serions satisfaits.

L’amendement n° 15 a le mérite d’établir une règle suffisamment claire pour savoir où nous allons, mais suffisamment peu contraignante aussi, dans la mesure où nous convenons que des ajustements doivent intervenir ultérieurement, ajustements que le Gouvernement ne peut pas encore nous proposer à l’heure où nous parlons.

Si le Gouvernement émettait un avis favorable sur cet amendement, nous serions satisfaits et nous n’aurions pas à attendre le prochain recensement glissant. De surcroît, nombre de nos craintes seraient dissipées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission comprend les motivations des auteurs de cet amendement, qui souhaitent fixer un nombre minimal de conseillers territoriaux par département. Cependant, tel n’est pas l’objet du présent projet de loi.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. J’ai examiné avec intérêt et bienveillance cette proposition, mais nous aurons l’occasion de parler de ce sujet lors de prochains débats.

M. Dominique Braye. Cette proposition est hors sujet !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Pour l’instant, le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Collombat, l’amendement est-il maintenu ?

M. Pierre-Yves Collombat. Votre bienveillance défavorable me va droit au cœur, monsieur le secrétaire d’État (Rires sur les travées du groupe socialiste), mais votre position renforce mes doutes sur la clarté de votre vision des choses !

Aussi je maintiens mon amendement, monsieur le président !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 16, présenté par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 337 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les conseils régionaux ne peuvent comprendre plus de 209 membres. »

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Cet amendement est le pendant du précédent, à l’autre bout de la chaîne, monsieur le président.

À mon avis, la future loi électorale comporte des contradictions et recèle des difficultés de mise en œuvre en raison de l’obligation qui vous est faite, et vous l’avez reconnu, monsieur le secrétaire d’État, de fixer un nombre plancher de conseillers, mais aussi un nombre plafond, pour éviter des assemblées pléthoriques.

Nous proposons de limiter le nombre de conseillers régionaux à 209, soit l’effectif de conseillers régionaux de la région qui en compte le plus, l’Île-de-France.

À partir de là, vous pourriez établir un décompte qui nous permettrait de nous faire une idée plus précise du nombre des conseillers territoriaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission comprend la philosophie de cet amendement. Toutefois, là encore, ce dernier est sans rapport avec l’objet du projet de loi.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. Dominique Braye. Hors sujet !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 20 rectifié, présenté par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un même département, l'écart entre la population du canton le plus peuplé et celle du canton le moins peuplé ne peut excéder 15 %.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, si vous me le permettez, je défendrai également les amendements nos 19 rectifié, 18 rectifié et 17.

M. le président. J’appelle donc en discussion les trois amendements suivants, également présentés par MM. Peyronnet, Sueur et Anziani, Mme Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat, C. Gautier, Krattinger, Mauroy, Povinelli et Collomb, Mme Alquier, MM. Bérit-Débat, Berthou, Bodin, Botrel et Boutant, Mmes Bourzai et Bricq, MM. Caffet, Chastan, Courteau, Daunis, Daudigny et Fichet, Mme Ghali, MM. Guérini, Guillaume et Jeannerot, Mmes Khiari et Klès, MM. Le Menn, Lozach, Madec, Mazuir, Patriat, Percheron, Rebsamen, Sergent et Signé, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 19 rectifié, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un même département, l'écart entre la population du canton le plus peuplé et celle du canton le moins peuplé ne peut excéder 20 %.

L'amendement n° 18 rectifié est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un même département, l'écart entre la population du canton le plus peuplé et celle du canton le moins peuplé ne peut excéder 25 %.

L'amendement n° 17 est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un même département, l'écart entre la population du canton le plus peuplé et celle du canton le moins peuplé ne peut excéder 30 %.

Veillez poursuivre, monsieur Peyronnet.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le secrétaire d’État, ces quatre amendements visent à garantir le respect des règles qui vous sont imposées lors du redécoupage : la cohérence géographique, les équilibres démographiques entre les différents « cantons » d’une région – si tel est bien le nom qui sera donné à la future circonscription –, les principes d’égalité et de proximité de la circonscription cantonale.

Toutefois, un écart de population entre « cantons » est envisageable. Comme nous sommes très bons, nous vous offrons donc le choix, avec nos différents amendements, entre 15 %, 20 %, 25 % et 30 % !

Nous vous saurions gré de bien vouloir nous signaler celui qui vous agrée le plus, et, sans vous arrêter en si bon chemin, de bien vouloir aussi nous dire pourquoi...

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Là encore, nous partageons les objectifs de M. Peyronnet, mais une telle proposition ne relève pas du présent texte.

Certes, je l’ai déjà indiqué, il faudra prévoir un nombre plancher de conseillers territoriaux par département et un taux d’écart pour tenir compte des différences entre territoires. Mais ces points seront discutés dans un autre projet de loi.

M. Dominique Braye. Hors sujet !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Nous en rediscuterons en effet à l’occasion de l’examen d’un autre texte.

Le Gouvernement a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 33, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La présente loi ne peut entrer en application avant l'adoption des projets de loi de réforme des collectivités territoriales (n° 60, 2009-2010), relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale (n° 61, 2009-2010) et organique relatif à l'élection des membres des conseils des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale (n° 62, 2009-2010).

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. « Les choses sont claires. Le débat sur le mode de scrutin est ouvert, il n’est pas clos. Nous ne sommes pas dans un produit fini et je crois que cette position n’est pas que la mienne. »

Chers collègues, si vous avez bien suivi les débats relatifs à ce projet de loi, vous devriez reconnaître l’auteur de ce propos ! Il s’agit de M. Copé, que Mme Borvo Cohen-Seat a d’ailleurs déjà cité. Par ces mots, le président du groupe UMP de l'Assemblée nationale a souligné l’absurdité et l’incohérence des modalités de discussion de différents textes relatifs à la réforme des collectivités territoriales proposée par le Gouvernement.

Avant de conclure notre intéressante discussion, pendant laquelle mon groupe aura clairement démontré ce qu’il pensait de la viabilité de la réforme proposée, nous souhaitons ajouter une précaution élémentaire en subordonnant l’application de ce projet de loi que, contrairement à la droite, nous n’allons pas voter, à l’adoption des trois autres textes qui forment le corps de la réforme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que la présente loi ne peut pas entrer en application si l’ensemble de la réforme territoriale n’a pas été votée par le Parlement.

Il va à l’encontre de la philosophie de la commission des lois, qui a toujours considéré que la concomitance des renouvellements des conseils généraux et régionaux était, en soi, une avancée pour la démocratie locale et qu’elle présentait de nombreux avantages, quand bien même les conseillers territoriaux ne seraient pas créés.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.

M. Michel Charasse. Au départ, je voulais voter cet amendement. Mais, si les textes visés par Mme Borvo Cohen-Seat ne sont pas adoptés avant les élections régionales, comment va-t-on appliquer la disposition ? On va dire après aux électeurs que, bien qu’ils aient cru voter pour six ans, en réalité, ce n’était que pour quatre ans !

C'est la raison pour laquelle je ne vais pas voter cet amendement, et je le regrette.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Monsieur About, au nom du Sénat tout entier, je vous présente nos condoléances attristées pour le décès de votre mère, intervenu ce matin même.

Vote sur l'ensemble

Articles additionnels après l'article 2
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à dire vrai, au terme d’un tel débat, il est assez facile pour les membres de l’opposition de faire une explication de vote finale : aucun de nos amendements n’étant jamais retenu,…

M. René-Pierre Signé. C’est lassant !

M. Jean-Claude Peyronnet. … nous pourrions en l’occurrence nous contenter de reprendre quasi intégralement notre intervention liminaire en regrettant presque d’avoir été, par certains aspects, trop synthétiques.

Cela dit, permettez-moi tout de même quelques remarques.

Monsieur le secrétaire d'État, contrairement à ce que vous nous avez dit, ce projet de loi n’est pas uniquement relatif au regroupement de plusieurs scrutins. En effet, la lecture de l’étude d’impact, qui a une réelle valeur juridique et qui est identique pour trois des textes relatifs à la réforme des collectivités territoriales, nous a autorisés à parler d’autre chose : nous l’avons fait, et nous ne le regrettons pas.

Nous le confirmons, nous reprochons à ce texte de tout prendre à l’envers, notamment de traiter des conseillers territoriaux sans les nommer, de ne pas fixer leur nombre, de ne pas en déterminer précisément le mode électoral.

Loin de clarifier et de simplifier, le projet de loi introduit au contraire beaucoup d’incohérences et de complexités supplémentaires, avec notamment la création des « métropoles » et des « pôles métropolitains ».

Par ailleurs, nous l’avons dénoncé, il fait reculer la parité. Cette attaque est tout à fait inadmissible et nous devrons, d’une façon ou d’une autre, revenir sur le sujet.

Restent les questions institutionnelles, qui nous semblent tout aussi fondamentales.

Ainsi, la réapparition de la centralisation marque un bond en arrière de trente ans, avec un contexte plus difficile que celui de 1982 en raison de l’incurie financière de l’État, qui sera très certainement durable.

Nous dénonçons aussi l’institutionnalisation du cumul des mandats opérée par cette réforme avec la création des conseillers territoriaux, qui seront des professionnels, c’est-à-dire des élus locaux mais privés de tout contact direct avec le terrain, contrairement aux élus actuels, lesquels peuvent encore exercer parallèlement une activité professionnelle et donc être à l’écoute plus quotidiennement de leurs concitoyens.

De surcroît, ces conseillers susciteront des coûts, non seulement du fait du défraiement des suppléants appelés à les remplacer, mais également en raison même du statut de l’élu qu’il va bien falloir mettre en place.

Nous dénonçons également le dépérissement communal, conséquence inéluctable, à nos yeux, de la réforme. Même si ce n’est pas écrit noir sur blanc dans le projet de loi, cette évolution découle de l’esprit même du texte. Le dépérissement financier entraîné par l’absence d’aide des conseils généraux et des conseils régionaux risque de conduire les conseils municipaux à se saborder.

En revanche, la disparition de l’institution départementale est, elle, programmée dans les textes, bien que le département soit, avec la commune, l’échelon assurant la plus grande proximité, notion défendue sur toutes les travées de cette assemblée.

Quant au mode de scrutin, il est le plus détestable qui soit. Mes chers collègues, il n’est pas nécessaire que je reprenne toute l’argumentation, je vous renvoie à nos débats. Outre qu’il est difficile à mettre en place, il est contraire à la tradition française et tout à fait injuste. Mais nous pensons que, faute d’être opérationnel, un tel mode de scrutin ne pourra pas être mis en place. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’avoue que, comme mon collègue Jean-Claude Peyronnet, j’ai été tentée de vous renvoyer à nos interventions générales, notamment la défense la motion que nous avions déposée, et de m’abstenir de faire une explication de vote finale.

Tout compte fait, je vais reprendre quelques points.

M. Dominique Braye. Il ne faut surtout pas vous en priver !

Mme Éliane Assassi. Je suis heureuse de voir que vous suivez !

Quoi qu’en disent M. le secrétaire d'État, M. le rapporteur et M. le président de la commission des lois, ce texte pose bel et bien les fondements de la création de conseillers territoriaux et anticipe donc les discussions que nous aurons en 2010.

La presse rapporte quotidiennement les contestations que ce projet de loi suscite dans les rangs de la majorité. Je regrette de ne pas en avoir entendu l’écho dans notre hémicycle.

Tout comme les autres textes relatifs à la réforme des collectivités territoriales, celui-ci participe au bouleversement de nos institutions et à une reprise en main des collectivités par l’État, c'est-à-dire à une recentralisation, comme nous l’avons largement démontré lors des débats.

Ce projet de loi pose les fondements de la mort annoncée des départements et de la création de ce que nous avons appelé un élu bicéphale, professionnel de la politique, au risque de distendre les liens avec la population et, in fine, de favoriser l’abstention.

Quant au scrutin uninominal, puisque c’est celui qui a été choisi, il va bien évidemment favoriser le parti majoritaire. Nous nous doutons bien que cette invention n’est pas sortie d’un chapeau, mais qu’elle a été bien travaillée pour aboutir à ce résultat. Le plus grave, c’est que ce mode de scrutin va remettre en cause la place et le rôle des minorités et, bien évidemment, le pluralisme. Et ce n’est pas la « dosette » de proportionnelle qui modifiera la donne. Là aussi, nous vous faisons confiance pour qu’il en soit bien ainsi...

Je ne reviens pas sur la remise en cause de la parité. Beaucoup de nos collègues, d’ailleurs, sont intervenus sur le sujet. J’aurais cependant souhaité que, sur ce point, sénateurs et sénatrices de l’UMP actent par un vote, et non par une petite déclaration sibylline, leur préoccupation qu’ils et elles disent partager avec les sénateurs et les sénatrices de gauche. Je regrette que nos collègues n’aient pas fait preuve du courage que surent manifester, sur d’autres textes et en d’autres temps, certains de leurs prédécesseurs.

Ainsi, ce projet de loi illustre la volonté du Gouvernement non pas de réduire la complexité des institutions, mais bien de détruire tous les cadres démocratiques décentralisés, lesquels sont, me semble-t-il, aujourd'hui autant d’obstacles à l’application généralisée de ses choix politiques.

Chers collègues, vous comprendrez que notre groupe réaffirme aujourd'hui sa totale opposition à ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le secrétaire d’État, obtenir de votre majorité un vote « conforme » sur les conditions d’application d’un texte qui n’existe pas, voilà qui est vraiment très fort. Résultat ? Tout le débat reste à faire. Peut-être aurait-il fallu commencer par le début, et non par la fin. Nous aurions probablement gagné du temps.

Mais si cette façon de procéder convient à la majorité sénatoriale, grand bien lui fasse !

Quoi qu’il en soit, les moments que nous venons de vivre dans cet hémicycle ne figureront certainement pas dans les grandes pages de l’histoire du Parlement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade.

M. Jean-Pierre Fourcade. Nous constatons tous à chaque élection, à l’exception de l’élection présidentielle, le désintérêt des électeurs pour le scrutin. Nos concitoyens estiment en effet qu’ils votent trop souvent. C’est en ce sens que le texte a une grande valeur. Je regrette qu’aucun des vingt-quatre ou vingt-cinq intervenants n’ait relevé cet argument.

Le fait de jumeler enfin l’élection des conseillers généraux et celle des conseillers régionaux avec l’instauration des conseillers territoriaux est une bonne chose.

M. René-Pierre Signé. Il n’y aura plus de conseillers généraux !

M. Jean-Pierre Fourcade. Je souhaite que cette concomitance encourage les électeurs à se déplacer. Car, ne l’oublions pas, quand l’abstention dépasse 50 %, voire 75 % pour une élection partielle, c’est la démocratie qui en prend un coup !

Par conséquent, nous devons tous nous atteler à la tâche pour remobiliser les électeurs. Et le dispositif technique que nous propose le Gouvernement nous le permettra. C’est pourquoi nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet.

M. François-Noël Buffet. Le groupe UMP votera bien évidemment ce texte, qui a pour objet, je le rappelle, d’établir la concomitance de l’élection des conseillers régionaux et de celle des conseillers généraux pour 2014. Il s’agit donc de l’acte I de la réforme de nos collectivités territoriales.

D’autres textes seront soumis au Sénat pour permettre à cette réforme de s’appliquer dans les meilleures conditions possibles en 2014.

M. René-Pierre Signé. Vous ne serez plus au pouvoir !

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Vous n’en savez rien !

M. François-Noël Buffet. Néanmoins, comme M. le rapporteur l’a dit à plusieurs reprises, ce projet de loi a son dispositif propre et doit être considéré de manière autonome. Réclamé par les associations d’élus et proposé par notre collègue Claude Belot dans son rapport, il permettra d’améliorer le fonctionnement de notre système démocratique en augmentant la participation de nos concitoyens aux élections locales.

En dehors de ces objectifs aussi simples que précis, beaucoup de choses ont été dites dans ce débat. Des problèmes – réels ou supposés – ont été soulevés, des procès d’intention ont été engagés, et ce avant même que la date de la bonne audience ne soit fixée...

Il y a des arguments que nous pouvons entendre et d’autres sur lesquels nous sommes en profond désaccord. Nous nous expliquerons le moment venu, mais, à la différence de nos collègues de gauche – nous avons bien compris quel était l’enjeu pour eux –, nous savons que tel n’était pas l’objet du présent projet de loi. Qu’ils se rassurent, l’occasion se présentera rapidement de répondre sur chacun des points soulevés, quand nous serons en situation de débattre avec eux cette fois-ci sur le bon texte, sur le fond du texte, avec la volonté de faire aboutir cette réforme dans les meilleures conditions possibles. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. L’intervention de M. Fourcade m’oblige à m’exprimer.

Vous estimez, mon cher collègue, que combiner les élections devrait conduire beaucoup plus d’électeurs aux urnes. À première vue, votre raisonnement a une certaine logique.

M. Michel Charasse. Il est séduisant !

M. François Fortassin. Mais je m’étonne alors que votre majorité ait pu considérer, en 2007, que l’on ne pouvait pas organiser la même année la présidentielle, les législatives, les municipales et les cantonales, ces deux dernières élections ayant dû être repoussées en 2008.

Je cherche vainement la cohérence entre votre raisonnement et votre action ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux
 

4

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 17 décembre 2009 :

À neuf heures trente :

- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2009 (n° 157, 2009-2010).

Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances (n° 158, 2009-2010).

À quinze heures et le soir :

1. Questions d’actualité au Gouvernement.

Délai limite d’inscription des auteurs de questions : jeudi 17 décembre 2009, à onze heures.

2. Suite de l’ordre du jour du matin.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinq.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD