M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Pourquoi le projet de loi ne traite-t-il pas du cumul des mandats ? Parce qu’il y est créé un mandat de conseiller territorial. (Vives protestations et brouhaha sur les mêmes travées.) Celui-ci siégera à la fois au conseil général du département dans lequel il est élu et au conseil régional dont fait partie son département.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Ces deux fonctions sont donc cumulées en un seul mandat. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour la réplique.

M. Yves Détraigne. Je serai bref, monsieur le président, puisque M. le secrétaire d’État a pris beaucoup de temps pour sa réponse.

Monsieur le secrétaire d’État, nous avons bien noté que la réforme des collectivités territoriales se ferait à leur profit et au profit des élus locaux. C’est très bien ! Dès lors, nous ne comprenons pas pourquoi il a été décidé de déterminer les moyens des collectivités avant de décider du contenu de leur réforme ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Aussi, je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire part de la réponse que vous venez de nous apporter à Éric Woerth, ministre du budget, avec qui nous débattrons à fin de la semaine de la réforme des finances locales. Les élus locaux, que nous représentons ici, demandent que celle-ci tienne compte de leurs souhaits pour l’avenir des collectivités locales. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement.

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai lu le projet de loi de réforme des collectivités territoriales : une disposition m’a particulièrement interpellé, celle qui prévoit la création de « communes nouvelles ». (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Monsieur le secrétaire d’État, dès lors que l’intercommunalité a mis en commun les compétences stratégiques et les ressources de la taxe professionnelle des communes, il n’y a pas lieu de fusionner les compétences de proximité, qui restent l’apanage de ces communes. Pourquoi, dans ces conditions, vouloir en revenir à l’esprit de la loi Marcellin de 1971, dont on ne peut pas dire qu’elle ait rencontré un éclatant succès ?

M. Jean-Pierre Sueur. Loi funeste !

M. Jean-Pierre Chevènement. Est-ce une prédisposition génétique ?

L’intercommunalité, avec ses 2 600 établissements publics de coopération intercommunale, a largement remédié à l’émiettement communal qui caractérise la France des 36 600 communes.

Vous alléguez le volontariat des communes. Ce n’est pas vrai s’agissant des EPCI existants, qui couvrent 90 % du territoire et pour lesquels il existe des règles de majorité qualifiée : deux tiers des communes pesant plus de deux tiers de la population. Mais le tiers restant ? Quelle protection lui accordez-vous ?

La population, dites-vous, sera appelée à se prononcer en cas de désaccord des conseils municipaux. Mais il suffira de la majorité absolue des suffrages du quart des inscrits ! Par conséquent, cette règle ne protège pas les communes petites et moyennes dès lors que la ville centre et les communes de sa première couronne auront décidé d’absorber la deuxième couronne.

M. le président. Il vous reste vingt secondes, mon cher collègue.

M. Jean-Pierre Chevènement. La loi de 1999 avait prévu une solution simple et pratique. Votre réforme est donc non seulement inutile, monsieur le secrétaire d’État, mais encore dangereuse. Elle laisse penser que la démocratie communale est un luxe et que 2 600 communes nouvelles doivent, à terme, remplacer les 36 600 communes existantes.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean-Pierre Chevènement. Ce serait un coup très grave porté au bénévolat de 500 000 conseillers municipaux et à la disponibilité de dizaines de milliers de maires et de maires adjoints dont l’esprit de solidarité maille encore le pays.

Pourquoi donc, monsieur le secrétaire d’État, avoir voulu inciter, par des dispositions fiscales, à la transformation de ces EPCI en « communes nouvelles » ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG ainsi que sur certaines travées de l’Union centriste.)

M. le président. Je rappelle que chacun peut s’aider des afficheurs chronomètres pour respecter son temps de parole.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Monsieur Chevènement, vous m’interrogez sur les communes nouvelles.

Le projet de loi vise notamment à créer un nouveau dispositif de fusion des communes, plus simple, plus souple et plus incitatif que le système issu de la loi dite Marcellin du 16 juillet 1971. Je crois que tout le monde en convient : ce dernier s’est révélé peu efficace, c’est le moins que l’on puisse dire.

Ce nouveau dispositif repose exclusivement sur le volontariat. Il s’applique à des communes contiguës – j’insiste sur ce mot – appartenant, mais pas obligatoirement, à un EPCI à fiscalité propre, qui pourront fusionner et devenir une commune nouvelle. La commune nouvelle sera une commune comme une autre, soumise aux mêmes règles de droit.

Le dispositif permettra aux communes qui ont atteint un degré d’intégration suffisamment fort dans le cadre de l’intercommunalité – cadre qui vous est si cher, monsieur le sénateur, et je tiens à vous rendre hommage à cet égard –, d’aller plus loin et de fusionner, si elles le souhaitent.

La démarche sera donc facultative et reposera, je le répète, sur le volontariat. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce point pendant les débats sur la partie institutionnelle de la réforme. (MM. Courtois et Hyest applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Chevènement. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez mal lu votre projet de loi ! (Sourires sur certaines travées du RDSE ainsi que sur les travées du groupe socialiste.) Il ne s’applique pas seulement aux communes contiguës puisqu’il concerne également les établissements publics de coopération intercommunale en obéissant, je le rappelle, à des règles de majorité qualifiée.

M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !

M. Jean-Pierre Chevènement. La consultation qui sera organisée – un référendum, en quelque sorte ! – n’est absolument pas protectrice puisqu’il suffira qu’un quart des inscrits votent pour entériner la fusion, c’est-à-dire l’absorption des communes petites et moyennes par la grande. (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

M. Roland Courteau. Et voilà !

M. Jean-Pierre Chevènement. J’ajoute que la création de communes déléguées sera laissée à la discrétion des conseils municipaux des communes nouvelles.

Cette réforme ne sera donc absolument pas protectrice et nous laisse entendre que vous voulez aller vers une France des 2 600 communes ! (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Alain Lambert.

M. Alain Lambert. Je vais tenter de poser une question consensuelle. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur le secrétaire d’État, selon moi, la réforme territoriale doit être l’occasion de lever la plupart des malentendus qui s’accumulent depuis tant d’années et qui altèrent la sincérité de la relation entre l’État et les collectivités territoriales.

Reprocher aux collectivités d’être trop dépensières n’est pas juste.

M. Roland Courteau. Absolument !

M. Alain Lambert. Ce n’est certainement pas ainsi que l’on pourra renouer la confiance,…

M. Roland Courteau. Très juste !

M. Alain Lambert. … alors même que nous savons qu’elles réalisent les trois quarts de l’investissement public civil et participent – à votre demande, monsieur le secrétaire d’État – au plan de relance.

À la lecture des « bleus » budgétaires, on s’aperçoit que le Gouvernement a fourni comme indicateur de performance pour mesurer l’efficacité du service déconcentré le concept d’« effet de levier de la dépense étatique ». C’est donc bien que l’État sollicite en permanence les collectivités territoriales !

M. Jean-Pierre Sueur. Très juste !

M. Alain Lambert. Je crois en la volonté sincère du Gouvernement de clarifier les relations et de rétablir la confiance entre l’État et les collectivités locales, car il y va de l’efficacité de l’action publique au service des Français.

Dès lors, monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous prêt à dessaisir – j’insiste sur le terme – les administrations centrales des compétences transférées ? Êtes-vous prêt à faire confiance aux collectivités comme partenaires de l’État à part entière pour mener l’action publique sur le territoire ?

Quand j’aurai obtenu une réponse à ces questions, c’est que bien des malentendus sur l’enchevêtrement auront été levés ! (Applaudissements sur de nombreuses travées.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, vous êtes bien placé pour le savoir, le Gouvernement est particulièrement attentif à un principe simple : associer le plus possible les collectivités territoriales aux décisions qui les concernent et qui ont des conséquences sur leurs dépenses.

M. Jean-Pierre Michel. De la haute couture pour le fils Guéant dans le Morbihan ! Il y a toujours un fils quelque part…

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. La meilleure illustration en est bien entendu le travail que vous avez accompli depuis un an en tant que président de la Commission consultative d’évaluation des normes, la CCEN. Au 1er octobre dernier, elle avait examiné, en seize réunions, pas moins de 183 textes réglementaires. C’est un résultat tout à fait remarquable.

Force est de constater que, grâce à la CCEN, les administrations centrales ont désormais l’obligation de justifier chacun de leurs textes à l’aune de leurs conséquences pour les collectivités territoriales.

Pour ma part, je souhaite que l’effort soit poursuivi dans deux directions.

Tout d’abord, le Premier ministre a donné une réponse favorable à votre demande de voir la CCEN traiter non seulement le flux, mais aussi le stock des normes, qui est considérable. Il a chargé mes services de proposer une méthode pour cette démarche ; ils y travaillent en ce moment même.

M. Bernard Frimat. Quelle spontanéité dans la réponse !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Ensuite, je partage votre appréciation sur la tendance encore trop marquée des administrations centrales à intervenir comme prescripteurs sur les dépenses des collectivités territoriales. Comme vous, j’ai lu attentivement l’article 72 de la Constitution, qui, depuis 2003, prévoit que les collectivités puissent disposer d’un pouvoir réglementaire pour l’exercice de leurs compétences. J’ai également pris note des observations les plus récentes de la Cour des comptes sur la décentralisation. Toutefois, j’observe aussi que, dans de nombreux domaines, les collectivités restent demandeuses de normes édictées par le législateur ou par le pouvoir réglementaire national.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Bernard Frimat. Il faut faire rédiger des réponses plus courtes !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Je souhaite donc que le travail que nous devrons accomplir sur les compétences des collectivités s’accompagne d’une réflexion sur la gouvernance de ces compétences.

M. le président. La parole est à M. Alain Lambert, pour la réplique.

M. Alain Lambert. J’aurais souhaité être plus bref, mais ce débat nous engage tous, car c’est notre conception de la République qui est en question.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous ai demandé si le Gouvernement était prêt à dessaisir les administrations centrales des missions transférées. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Marc Daunis. Eh oui, c’était la question !

M. Alain Lambert. C’est une obligation ! Si nous ne le faisons pas, les administrations centrales continueront de prescrire et les collectivités locales de payer, et le malentendu demeurera. (Vifs applaudissements sur de nombreuses travées.)

M. Didier Guillaume. C’est toujours comme ça !

M. Alain Lambert. Ayez le courage de dessaisir les administrations centrales, et vous serez suivi par tout le monde. Voilà la révolution copernicienne de la République nouvelle !  (Applaudissements sur plusieurs travées.)

M. le président. La parole est à M. Michel Boutant.

M. Michel Boutant. Je veux avant tout déplorer le départ du ministre de l’intérieur. Le Sénat est tout de même le représentant des collectivités locales ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste – Exclamations sur les travées de l’UMP.)

Un sénateur socialiste. Oui, mais il n’y a pas la télé !

M. Michel Boutant. Je voudrais rebondir sur un lapsus commis hier par notre collègue Bruno Sido devant les 2 500 conseillers généraux réunis au Palais des congrès à Paris.

M. Jean-Jacques Hyest. Ils n’étaient pas 2 500 !

M. Michel Boutant. Au lieu de réforme territoriale, il a parlé de « déforme territoriale ». (Sourires.) De déforme à déformation, il n’y a qu’un pas…

Quel avenir la déformation de l’organisation territoriale que vous nous proposez réserve-t-elle aux régions, aux départements et aux communes ? Puisque à l’UMP on aime tant les sondages, sachez, mes chers collègues, que 82 % des Français se déclarent attachés au département.

Ces territoires font en effet partie intégrante de notre identité nationale. Ils constituent des repères au même titre que d’autres que nous aimons à citer, tels le drapeau, l’hymne national, la devise de la République « Liberté, égalité, fraternité », ou certains grands hommes comme Victor Hugo ou Pasteur.

M. Adrien Gouteyron. N’importe quoi !

M. Michel Boutant. Monsieur le secrétaire d’État, vous considérez que cette organisation territoriale est archaïque et dépassée dans son essence et son fonctionnement. Cela signifie-t-il que les autres repères fondant notre identité nationale sont également archaïques et dépassés ? ou bien que l’identité nationale est figée et que l’on ne saurait y toucher ?

M. le président. Il vous reste vingt secondes, mon cher collègue !

M. Michel Boutant. Ne trouvez-vous pas contradictoire de proposer dans le même temps un débat sur l’identité nationale et une réforme des collectivités territoriales ?

Que répondez-vous aux conseillers généraux, peut-être futurs conseillers territoriaux, qui s’inquiètent de la réduction de leurs effectifs et de l’augmentation de leur charge de travail ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, il me paraît difficile de reprocher au ministre de l’intérieur, qui était venu spécialement au Sénat, d’avoir été contraint de repartir rapidement parce que votre propre famille politique a choisi de faire porter la totalité des questions d’actualité qui ont lieu en ce moment même à l’Assemblée nationale sur la réforme des collectivités territoriales ! (M. Jean-Jacques Hyest applaudit.)

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. M. Hortefeux n’a pas le don d’ubiquité, et votre reproche est excessif. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Godefroy. C’est révélateur !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, vous avez mélangé beaucoup de thèmes : l’identité nationale, la démocratie…

En fait, la réforme s’articule autour de quatre axes majeurs.

Premièrement, la rénovation de l’exercice de la démocratie passe tout d’abord par la création des conseillers territoriaux et par l’élection au suffrage universel direct – c’est une première – des délégués communautaires, grâce au système du « fléchage ». C’était là un vœu de toutes les collectivités territoriales et de toutes les assemblées générales auxquelles j’ai participé.

M. François Rebsamen. C’est vrai !

Mme Odette Herviaux. Et la parité, dans tout ça ?

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Deuxièmement, les structures seront adaptées à la diversité des territoires. Le projet du Gouvernement tend à doter les aires métropolitaines de nouveaux outils de gouvernance, à savoir la métropole et le pôle métropolitain. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Bel. Ce n’était pas exactement la question !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Le Gouvernement a également souhaité remplacer le système de fusion de communes issu de la loi Marcellin. (Mêmes mouvements.)

M. Bernard Frimat. Ça n’a rien à voir avec la question !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Troisièmement, cette réforme permettra de développer l’intercommunalité, dont l’achèvement et la rationalisation constituent une mesure majeure de ce projet de loi. (Mêmes mouvements.)

M. Daniel Raoul. Ça n’a rien à voir !

M. Jean-Pierre Godefroy. Vous vous êtes trompé de fiche !

M. Alain Fouché. Laissez-le parler !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Quatrièmement, les compétences des collectivités territoriales seront clarifiées. À cette fin, le Gouvernement propose de lancer une démarche de spécialisation des compétences des départements et des régions. 

M. Jean-Pierre Godefroy. Ce n’était pas la question !

M. Alain Marleix, secrétaire d'État. Ce n’était peut-être pas la question, mais c’est ma réponse ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP – Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour la réplique.

M. Yves Daudigny. Monsieur le secrétaire d’État, il y a dans votre argumentation et vos propositions beaucoup plus qu’une nuance de mépris envers les élus dont vous voulez réduire le nombre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Protestations sur les travées de l’UMP.) Elles comportent une part de caricature, sinon d’ignorance de ce que ces élus représentent aujourd’hui en matière d’engagement personnel, de travail quotidien, d’écoute, d’initiatives, de connaissance fine de leur territoire. (Nouveaux applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Vous créez un nouvel élu, l’EGM, l’élu génétiquement modifié, quatre jambes, deux cerveaux, qui n’apportera rien à notre pays en matière de démocratie, de proximité, de parité, d’efficacité et de cohérence de l’action publique. (Rires et applaudissements sur les mêmes travées.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Monsieur le secrétaire d’État, j’appelle votre attention sur une question relative à l’intercommunalité, volet important de la réforme des collectivités territoriales à venir.

J’ai bien compris qu’il ne s’agissait pas de toucher aux communes, qui conserveront notamment leur clause de compétence générale.

M. Roland Courteau. Heureusement !

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Je souhaite néanmoins obtenir des éclaircissements sur la place de la commune dans la future carte de l’intercommunalité, qui, et c’est le but que vise la réforme en cours, nécessite plus de simplicité et d’efficacité et aussi, pour nous, élus, de visibilité.

Il s’agit essentiellement de connaître quelles seront les marges de manœuvre dont une commune disposera pour rejoindre ou non une intercommunalité.

Pour le succès de cette réforme, il est à mon sens absolument indispensable de pérenniser l’autonomie des communes. C’est un gage de démocratie locale important, la commune étant l’échelon administratif le plus proche et le plus à l’écoute de la population.

Pour ma part, je suis très vivement opposée à ce qu’une commune puisse être absorbée contre son gré par une communauté d’agglomération ou une communauté urbaine. Le principe du volontariat doit rester de mise en toutes circonstances, conformément au principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales. (M. Jean-Pierre Michel applaudit.)

Je souhaiterais également que la population touristique soit prise en compte dans l’appréciation des seuils de création ou de transformation en communauté d’agglomération qui servent de base au calcul de la dotation globale de fonctionnement.

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de me rassurer sur ces points. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Madame le sénateur, la réforme vise à achever…

Plusieurs sénateurs socialistes. C’est le mot ! (Rires.)

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. … la couverture de la carte de l’intercommunalité par des EPCI à fiscalité propre et à rationaliser le périmètre de ces derniers pour la fin de l’année 2013. Ces deux objectifs recueillent d’ailleurs le consensus.

Toutefois, l’extension des pouvoirs du préfet en matière d’intercommunalité ne sera pas utilisée si les regroupements s’organisent sur l’initiative des communes et de leurs EPCI. Elle est en outre temporaire, puisqu’elle portera essentiellement sur les années 2012 et 2013. Elle est de surcroît strictement encadrée.

Enfin, madame le sénateur, je vous rappellerai que l’intégration d’une commune contre son gré dans un EPCI à fiscalité propre est déjà autorisée par le code général des collectivités territoriales.

Les communes conserveront donc leur autonomie, je le dis très clairement, et les mécanismes exceptionnels mis en place, respectueux du principe de la libre administration, n’ont vocation à intervenir qu’en dernier recours.

Pour ce qui est de la prise en compte de la population touristique pour la DGF, à ce stade, il n’est pas prévu dans le projet de réforme de modifier le seuil démographique de création d’une communauté d’agglomération, qui reste fixé à 50 000 habitants. Je précise cependant que la DGF prend déjà en considération le nombre de résidences secondaires. Les charges spécifiques aux intercommunalités touristiques sont donc déjà prises en compte financièrement.

M. Yannick Bodin. À d’autres !

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. De plus, l’INSEE est en train d’actualiser le recensement des résidences secondaires. La DGF répartie en 2010 tiendra compte de cette actualisation, dont bénéficieront en particulier les collectivités où le nombre de résidences secondaires a fortement progressé, comme c’est le cas notamment dans votre département.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière, pour la réplique.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. Je vous remercie de ces informations, monsieur le secrétaire d’État. Néanmoins, elles ne me rassurent pas totalement. (Rires et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Les orientations de la commission départementale de coopération intercommunale, la CDCI, dépendent également de sa composition. Il est certain que, pour avoir vécu une intégration forcée dans une communauté d’agglomération, nos populations et leurs élus ne sont pas prêts à revivre une telle situation !

La CDCI émet un avis, mais je ne pense pas que celui-ci lie le préfet. Monsieur le secrétaire d’État, c’est vous qui donnerez les instructions !

Je compte sur les nouvelles statistiques de l’INSEE pour atteindre le seuil de 50 000 habitants qui nous permettra de vivre dans notre communauté de communes et de la développer en communauté d’agglomération. (Vifs applaudissements sur les mêmes travées.)

M. le président. La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Mme Christine Lagarde, après avoir vilipendé les élus locaux, vilipende les collectivités territoriales en les qualifiant, c’était dimanche dernier, de « féodalités » que l’État n’a plus lieu de financer !

M. Jean-Pierre Sueur. C’est scandaleux !

M. François Patriat. Vos deux projets de loi, monsieur le secrétaire d’État, sont placés sous le triple signe de l’improvisation, de la précipitation et de la recentralisation punitive. (Protestations sur les travées de l’UMP. – Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

Un sénateur socialiste. Ils sont mal placés !

M. François Patriat. J’ai parlé d’improvisation, mes chers collègues. Imagineriez-vous construire une maison sans avoir au préalable défini son utilité et les moyens de la financer ?

Plusieurs sénateurs socialistes. Mais non !

M. François Patriat. Iriez-vous construire la carrosserie d’une voiture sans en avoir prévu le moteur et le périmètre ?

Plusieurs sénateurs socialistes. Mais non ! Jamais !

M. François Patriat. Comme nous y a invités M. Raffarin, définissons d’abord les compétences, définissons le périmètre et, ensuite seulement, définissons les moyens !

Un sénateur socialiste. Bien sûr !

M. François Patriat. Votre réforme, monsieur le secrétaire d’État, est également placée sous le signe de la précipitation.

Comment remplacer des impôts par d’autres impôts, aujourd’hui ? Vous proposez par exemple que les entreprises de réseaux participent, demain, au financement des collectivités locales. Cela signifie que la région Bourgogne, qui finance aujourd’hui le TER, le train express régional, va devoir demander une contribution supplémentaire à la SNCF, qui ne manquera pas de la lui réclamer par ailleurs. Cela signifie surtout que nous allons nous automutiler d’une ressource qui n’existera pas !

Enfin, j’ai évoqué le caractère de « recentralisation punitive » de ces projets de loi. Demain, les régions seront dépourvues d’autonomie fiscale ; elles percevront une dotation de l’État, une part de la valeur ajoutée votée par le Parlement et une dotation hypothétique des entreprises de réseaux. Quelle sera leur autonomie ? Le ministre chargé des relations avec le Parlement l’a reconnu en privé le week-end dernier : nulle.

M. François Patriat. Demain, elles n’auront plus qu’un budget affecté. Dans ces conditions, nul besoin d’élus, le préfet pourra affecter lui-même les crédits !

M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Patriat.

M. François Patriat. Il me reste dix secondes, monsieur le président !

Avec ce budget affecté, c’est la fin de la décentralisation, c’est l’an I de ce que j’appelle « la recentralisation punitive » ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Marleix, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, c’est maintenant, et vous le savez bien, qu’il faut supprimer la taxe professionnelle pour les entreprises, car cette mesure va consolider la reprise économique. (Protestations sur les mêmes travées.)