sommaire

présidence de M. Jean-Claude Gaudin

1. Procès-verbal

2. Questions orales

appartements de coordination thérapeutique

Question de M. Francis Grignon. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Francis Grignon.

situation de la greffe et du don de moelle osseuse

Question de Mme Marie-Thérèse Hermange. - M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Mme Marie-Thérèse Hermange.

publicité et lutte contre l'obésité infantile

Question de Mme Christiane Kammermann. - M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Mme Christiane Kammermann.

prise en compte des besoins liés au vieillissement de la population française

Question de M. Thierry Foucaud. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Thierry Foucaud.

instauration d'une prime de vie chère au profit des salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux de la guadeloupe

Question de M. Jacques Gillot. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Jacques Gillot.

souches embryonnaires

Question de M. Alain Milon. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Alain Milon.

aide publique à la forêt française

Question de M. Georges Mouly. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Georges Mouly.

réorganisation de l'office national des forêts dans le sud-ouest

Question de M. Bertrand Auban. - MM. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille ; Bertrand Auban.

connexion réseau haut débit en milieu urbain

Question de M. Michel Billout. - MM. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement ; Michel Billout.

taxe sur les jeux traditionnels dans les cafés et bars-tabacs

Question de M. Robert Tropeano. - MM. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement ; Robert Tropeano.

impôts locaux : compensations en faveur des collectivités territoriales

Question de M. Jean Boyer. - MM. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement ; Jean Boyer.

conditions de résorption des sites de stockage des pneumatiques usagés

Question de M. Bernard Dussaut. - Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Bernard Dussaut.

réforme du financement des activités prud'homales

Question de Mme Éliane Assassi. - Mmes Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; Éliane Assassi.

retraite des agents de l'état transférés aux collectivités locales

Question de M. Éric Doligé. - Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Éric Doligé.

nécessité de considérer le bessin comme un bassin d'emploi autonome

Question de M. Jean-Léonce Dupont. - Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Jean-Léonce Dupont.

emploi des forces de l'ordre

Question de M. Louis Souvet. - Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Louis Souvet.

déviation de barcelonne-du-gers

Question de M. Aymeri de Montesquiou. - Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable ; M. Aymeri de Montesquiou.

Suspension et reprise de la séance

présidence de M. Philippe Richert

3. Communication relative à une commission mixte paritaire

4. Diffusion audiovisuelle et télévision du futur. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Article 5 (priorité) (suite)

Amendements identiques nos 7 de la commission et 27 de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. - MM. Louis de Broissia, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. - Adoption des deux amendements.

Amendement no  47 de M.  Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no  130 de Mme  Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no  28 de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. - MM. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendements identiques nos 8 de la commission et 29 de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis ; amendements nos 97 de M.  Jack Ralite, 48, 49 de M.  Serge Lagauche, 100 de M.  Jack Ralite et 131 de Mme  Marie-Christine Blandin. - MM. le rapporteur, Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; le ministre, Ivan Renar, Serge Lagauche, Mmes Annie David, Marie-Christine Blandin. - Adoption des amendements nos 8 et 29, les autres amendements devenant sans objet.

Amendements nos 9 de la commission, 50 de M.  Serge Lagauche et 51 de M.  Jean-Marie Bockel. - M. le rapporteur, Mme Catherine Tasca, M. le ministre. - Retrait des amendements nos 50 et 51 ; adoption de l'amendement no 9.

Amendement n° 101 de M.  Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no  30 rectifié de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, et sous-amendement no 117 rectifié bis de M.  Jean-Claude Carle ; amendements nos 10 de la commission, 52, 53 de M.  Serge Lagauche, 102 de M.  Jack Ralite et 132 de Mme  Marie-Christine Blandin. - MM. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; Jean-Claude Carle, le rapporteur, Serge Lagauche, Mmes Annie David, Marie-Christine Blandin, M. le ministre. - Retrait des amendements nos 10 et 52 ; adoption du sous-amendement no 117 rectifié bis et de l'amendement no 30 rectifié modifié, les autres amendements devenant sans objet.

Amendements identiques nos 54 de M.  Serge Lagauche, 78 rectifié de M. Michel Mercier et 103 de M.  Jack Ralite ; amendements nos 133 de Mme  Marie-Christine Blandin, 11 de la commission, 148 rectifié de Mme  Catherine Morin-Desailly et 104 de M. Jack Ralite ; amendements identiques nos 12 (priorité) de la commission et 120 rectifié de M.  Roger Karoutchi ; amendements nos 55 de M.  Serge Lagauche et 134 de Mme  Marie-Christine Blandin. - Mme Catherine Tasca, MM. Philippe Nogrix, Ivan Renar, Mme Marie-Christine Blandin, M. le rapporteur, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Roger Karoutchi, Serge Lagauche, le ministre, Michel Mercier, Mme Catherine Tasca, MM. Jack Ralite, Jacques Valade, le président de la commission des affaires culturelles. - Rejet, par scrutin public, des amendements nos 54, 78 rectifié et 103 ; rejet de l'amendement no 133 ; adoption de l'amendement no 11 ; demande de priorité des amendements nos 12 et 120 rectifié ; adoption des amendements nos 12 et 120 rectifié, les amendements nos 148 rectifié, 104 et 55 devenant sans objet ; rejet de l'amendement no 134.

Amendement no 150 rectifié bis de M. Daniel Marsin. - MM. Daniel Marsin, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Demande de réserve

Demande de réserve de l'article 1er. - MM. le président de la commission, le ministre. - La priorité est ordonnée.

Article 2

Amendements nos 44 de M.  Serge Lagauche, 91 de M.  Jack Ralite, 1 de la commission, 21 rectifié de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, et sous-amendement no 84 rectifié ter de Mme  Catherine Morin-Desailly. - MM. Serge Lagauche, Ivan Renar, le rapporteur, Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; Mme Catherine Morin-Desailly, M. le ministre. - Retrait de l'amendement no 1 ; rejet des amendements nos 44, 91, Adoption du sous-amendement no 84 rectifié ter et de l'amendement no 21 rectifié modifié.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 2

Amendement no  92 de M.  Jack Ralite. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article 3

Amendement no 2 de la commission. - Retrait.

Amendement no 45 de M.  Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 93 de M.  Jack Ralite. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Adoption de l'article.

Suspension et reprise de la séance

Article additionnel après l'article 3 ou après l'article 15

Amendements nos 88 de Mme  Catherine Morin-Desailly et 124 de M. Roland du Luart. - M. Philippe Nogrix, Mme Colette Mélot, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement no 124 ; rejet de l'amendement no 88.

Articles additionnels après l'article 3

Amendement no 141 rectifié bis de M. Francis Grignon. - MM. Francis Grignon, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Reprise de l'amendement no 141 rectifié ter par M. Philippe Nogrix. - M. Philippe Nogrix. - Rejet.

Article 4. - Adoption

Article 5 (déjà examiné en priorité)

Article additionnel après l'article 5

Amendement no 143 rectifié bis de M. Ambroise Dupont et sous-amendement no 158 de M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. - Mme Colette Mélot, MM. le rapporteur, le ministre, Jean Louis Masson, Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié insérant un article additionnel.

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7

Amendement no 42 rectifié bis de M. Jean Louis Masson. - MM. Jean Louis Masson, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7 ou après l'article 16

Amendements nos 67 de M.  Serge Lagauche, 89, 90 de Mme  Catherine Morin-Desailly, 106 de M.  Jack Ralite et 140 de Mme  Marie-Christine Blandin. - M. Serge Lagauche, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Ivan Renar, Mme Marie-Christine Blandin, MM. le rapporteur, le ministre, Jack Ralite. - Rejet des cinq amendements.

Articles additionnels après l'article 5

Amendement no 83 de Mme  Catherine Morin-Desailly. - Mme Catherine Morin-Desailly, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 126 de Mme Colette Mélot. - Mme Colette Mélot, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements nos 74 de Mme  Catherine Morin-Desailly et 156 du Gouvernement. - Mme Catherine Morin-Desailly, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Annie David, M. Philippe Nogrix. - Retrait de l'amendement no 74 ; adoption de l'amendement no 156 insérant un article additionnel.

Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 8 ou après l'article 16

Amendements nos 16 de la commission, 32 rectifié de M.  Pierre Hérisson, rapporteur pour avis, et 71 de Mme  Catherine Morin-Desailly. - MM. le rapporteur, Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; Philippe Nogrix, le ministre. - Adoption de l'amendement no 16 insérant un article additionnel après l'article 16, l'amendement no 32 rectifié devenant sans objet ; retrait de l'amendement no 71.

Article additionnel après l'article 5

Amendement no 105 de M.  Jack Ralite. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre, Jack Ralite. - Rejet.

Amendement no 152 rectifié de M. Pierre Laffitte. - MM. Aymeri de Montesquiou, le rapporteur, le ministre, Philippe Nogrix. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article additionnel avant l'article 6

Amendement no 145 de M. Ladislas Poniatowski. - MM. Bruno Sido, le rapporteur, Bruno Retailleau, rapporteur pour avis ; le ministre. - Retrait.

Article 6. - Adoption

Article additionnel après l'article 6

Amendement no 144 de M. Ladislas Poniatowski. - Mme Catherine Morin-Desailly. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 7. - Adoption

Article additionnel après l'article 7

Amendements nos 79 et 80 de Mme  Catherine Morin-Desailly. - Mme Catherine Morin-Desailly, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement no 79 ; rejet de l'amendement no 80

Amendement no 122 rectifié ter de Mme Colette Mélot. - Mme Colette Mélot, MM. le rapporteur, le ministre, Daniel Raoul, Philippe Nogrix. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Renvoi de la suite de la discussion.

5. Dépôt d'un rapport

6. Ordre du jour

compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Questions orales

M. le président. L'ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

appartements de coordination thérapeutique

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon, auteur de la question n° 1120, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Francis Grignon. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur les besoins en matière d'appartements de coordination thérapeutique, en particulier en Alsace. Ces structures proposent un accompagnement médico-psycho-social à toute personne en situation de précarité sociale touchée par une pathologie chronique grave.

En 2006, votre gouvernement a déjà fait beaucoup d'efforts en proposant 150 nouvelles places. Néanmoins, les besoins sont énormes pour l'accueil d'une population de plus en plus désocialisée et d'une population migrante de plus en plus importante. C'est pourquoi j'aimerais savoir si vous allez poursuivre l'augmentation des capacités d'accueil, notamment en Alsace.

Je voudrais attirer votre attention sur le cas particulier de l'association GALA - gestion d'appartements locatifs associatifs -, qui sollicite depuis trois ans une extension de cinq places accordées par le comité régional de l'organisation sanitaire et sociale, le CROSS. Cette association dispose actuellement de onze places et il semblerait que l'Alsace soit suffisamment pourvue en appartements de coordination thérapeutique avec ces onze places pour le grand Est, sachant que la structure suivante la plus proche se trouve à Dijon.

Or, dans cette région comme ailleurs, bien sûr, nous sommes particulièrement sollicités par les travailleurs sociaux de la ville, du département, des hôpitaux universitaires et des différentes associations pour l'accueil d'une population de plus en plus désocialisée, notamment d'une population migrante de plus en plus importante, surtout avec des femmes et des enfants, et souffrant du sida, de l'hépatite, et d'autres pathologies.

Dans ces conditions, monsieur le ministre, pourriez-vous m'indiquer si un effort particulier pourrait être fait pour notre région ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est, bien sûr, très favorable au développement de cette formule des appartements de coordination thérapeutique qui permettent à des patients atteints d'affections graves de pouvoir maintenir un mode de vie proche de leurs habitudes antérieures, en évitant des hospitalisations trop prolongées, tout en bénéficiant d'un suivi médical de grande qualité.

Comme tous les établissements sanitaires ou médico-sociaux, ces appartements de coordination thérapeutique sont soumis au régime des autorisations pour leur développement. C'est la raison pour laquelle vous vous tournez vers l'État pour obtenir le développement de ces structures.

Les projets de création ou d'extension visent à répondre à l'évolution des besoins, qui sont réels, tout en tenant compte des données épidémiologiques relatives notamment au virus du SIDA collectées par l'Institut national de veille sanitaire, ainsi que du taux d'équipement régional constaté.

L'Alsace compte d'ores et déjà onze places en appartements de coordination thérapeutique, gérées notamment par l'association GALA, qui jouit d'une excellente réputation et qui fait un remarquable travail de terrain.

Au titre de 2006, sur les cinq places demandées par cette association, trois places supplémentaires sont accordées à l'Alsace, qui devient ainsi la région la mieux dotée de France avec 4,96 places pour cent malades du sida, la moyenne nationale étant de 3,56. Cela étant, ces chiffres restent relativement faibles, même s'ils sont meilleurs que dans d'autres régions.

C'est la raison pour laquelle l'effort sera poursuivi en 2007 et 150 nouvelles places seront ouvertes sur l'ensemble du territoire, portant à 1 050 le nombre total de places en France.

Je souhaite que, dès le début de l'année prochaine, nous puissions apporter une réponse positive aux demandes qui sont formulées par l'association GALA et compléter ainsi les trois places déjà accordées en 2006.

M. le président. La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. Monsieur le ministre, je vous remercie de prendre en compte tous ces besoins sur le plan national d'abord, bien sûr, et sur le plan local, ensuite.

situation de la greffe et du don de moelle osseuse

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 1124, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le problème de la greffe et du don de moelle osseuse.

Il y a, chaque année, en France, moins de 10 000 nouveaux donneurs recrutés et 311 malades greffés avec donneur de fichier. De surcroît, inscrire 10 000 donneurs par an pendant dix ans n'augmentera pas le fichier de 100 000 donneurs, d'une part, parce que la classe d'âge qui a servi de base au fichier de 1986 à 1992 arrive maintenant massivement à l'âge de la radiation et, d'autre part, parce qu'un certain nombre de donneurs, perdus de vue ou malades, sont sortis du fichier.

Or, en Allemagne, le nombre de donneurs recrutés, en quatre mois, s'élève à 100 000. Quant au nombre de malades allemands greffés avec un donneur de fichier, il est de 797 par an, soit plus de 156 % qu'en France.

Dans notre pays, des donneurs sont refoulés et des volontaires refusés. Les centres donneurs connaissent une telle désorganisation qu'ils ne sont pas à même de faire face à un flux important de donneurs. Quant aux centres chargés de l'accueil et de l'inscription des volontaires, ils n'ont pas toujours les budgets adaptés, le coût des typages en France demeurant encore très élevé. Enfin, il ne semble pas exister de communication officielle auprès du grand public sur le don de moelle osseuse.

En conséquence, monsieur le ministre, je vous demande si vous envisagez de parfaire la mission de santé publique des pouvoirs publics que représentent la greffe et le don de moelle osseuse, en concertation avec les associations concernées.

D'ailleurs, je m'étonne qu'il n'y ait pas de communication dans ce domaine, compte tenu du débat que nous connaissons aujourd'hui sur l'éventuelle commercialisation des cellules souches embryonnaires, alors que nous ne savons pas aujourd'hui si elles peuvent entrer dans le traitement de certaines maladies. Même si de nombreux travaux sont menés à l'échelon mondial, leurs résultats sont encore attendus. Or là, nous travaillons sur des cellules souches humaines - des cellules souches sanguines ou des cellules souches adultes - dont l'efficacité a été démontrée dans le traitement de maladies comme le cancer.

Par conséquent, monsieur le ministre il serait important de mettre en place une véritable communication sur ce sujet pour faire en sorte que la politique du don de moelle osseuse se développe dans notre pays.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame le sénateur, vous soulevez une question très importante. Aujourd'hui, de nombreux malades en instance de greffe de moelle osseuse n'ont pas trouvé un donneur compatible avec leurs propres génotypes. Par conséquent, le développement du don de moelle osseuse et du fichier des donneurs ainsi qu'une communication efficace pour que davantage de Françaises et de Français, en dehors de la famille du bénéficiaire du don de moelle osseuse, s'inscrivent longtemps à l'avance sur le fichier, constituent pour nous un enjeu majeur.

Pour répondre aux besoins des patients, l'État a engagé un plan d'action sur dix années visant à rendre accessible l'allogreffe de moelle osseuse à davantage de malades. Le recrutement de 100 00 nouveaux donneurs pour le fichier français a été programmé pour une durée de dix ans, c'est-à-dire un recrutement de 10 000 donneurs par an, soit un recrutement d'environ 12 500 donneurs pour en avoir 10 000 qui soient parfaitement compatibles. Il faut savoir que de nombreux donneurs sortent chaque année du fichier parce que, lorsque l'on atteint l'âge de soixante ans, on ne peut plus donner sa moelle osseuse.

Actuellement, le fichier compte 134 578 donneurs, mais il est insuffisant. Le plan d'action tient compte à la fois des recommandations d'un groupe d'experts de très haut niveau et du souhait des associations de voir s'étendre le fichier français.

Il faut également que la France puisse participer à l'effort mondial de recrutement de nouveaux donneurs pour être en mesure de proposer aux patients étrangers les ressources du fichier français, de même que nous faisons appel, pour les patients français, aux ressources du fichier mondial.

Ce recrutement devrait conduire à augmenter de 25 % à 50 % le taux d'allogreffes non apparentées réalisées à partir du fichier français. Tel est l'objectif de ce plan.

En 2005, 71 % des allogreffes de cellules souches hématopoïétiques non apparentées ont été réalisées à partir de donneurs issus du fichier mondial, contre 75 % en 2003. Les centres donneurs s'organisent de mieux en mieux pour assurer la prise en charge des personnes qui se portent volontaires pour un don de cellules souches hématopoïétiques, que ce soit par un don de moelle osseuse ou de sang périphérique.

Le fait de planifier, pendant dix ans, un recrutement contrôlé permet aussi une réévaluation régulière du recrutement, qui est utile pour le fichier, c'est-à-dire pour les patients. Aujourd'hui, l'innovation thérapeutique peut conduire à prendre en charge différemment certains patients pour qui la greffe de moelle osseuse faisait d'emblée partie, jusqu'à maintenant, du projet de traitement. Il est possible d'améliorer l'actuel fichier de donneurs volontaires, dans l'espoir que les patients trouvent, avec une fréquence accrue, un donneur.

Un certain déséquilibre a été constaté au sein du fichier français : il contient plus de femmes que d'hommes, 60 % contre 40 %. Par ailleurs, 60 % des hommes avaient plus de quarante ans.

En outre, la France a la chance de disposer d'une population qui s'est enrichie au fil des siècles des apports des populations migrantes. Les antigènes HLA constituent une véritable richesse, et c'est cette diversité qui doit être représentée au sein du fichier français. Aussi, le recrutement cherche à intégrer plus volontiers dans le fichier français des hommes âgés de moins de quarante ans d'origine géographique diverse, sans pour autant décourager les autres donneurs qui se portent spontanément volontaires.

En matière de constitution de fichiers, vous avez cité, madame le sénateur, les stratégies mises en place par d'autres pays.

En Italie, par exemple, la stratégie de recrutement va uniquement chercher à remplacer les donneurs sortant du fichier du fait de leur âge par de jeunes hommes âgés de moins de quarante ans. Le fichier italien comporte actuellement 300 000 donneurs.

En Allemagne, pays que vous avez cité, le recrutement mené est massif et non ciblé. La stratégie thérapeutique allemande offre volontiers la greffe en première intention, contrairement à la France. S'élevant à plus de 2 millions de donneurs, ce fichier comprend de nombreux phénotypes identiques dont la fréquence n'apporte que peu de gain thérapeutique. La richesse et l'efficacité d'un fichier se mesurent au nombre de donneurs inscrits, mais aussi à la diversité des donneurs.

En matière de greffe, on constate que la méthode de sélection du donneur est différente en Allemagne et en France. En Allemagne, la greffe est pratiquée avec une exigence de compatibilité moins importante que dans notre pays. À ce jour, il n'existe pas d'étude comparative sur les résultats des greffes dans les deux pays.

Enfin, des efforts sont actuellement engagés pour faire connaître le don de moelle et inciter nos concitoyens à se porter volontaire. Vous avez tout à fait raison, madame le sénateur, d'insister sur ce point, car il est essentiel. Ainsi, le ministre de la santé, M. Xavier Bertrand a décidé de lancer, ce mois-ci, une action de sensibilisation dans laquelle le don de moelle a toute sa place.

Dans le même esprit, l'Agence de la biomédecine, dont l'une des missions est d'assurer la promotion du don, a commencé, le 16 novembre dernier, sa campagne nationale sur le don de moelle osseuse, qui sera la première de cette envergure. Ces actions de communication grand public ont été bien sûr organisées avec la coopération des associations de promotion du don et des associations de malades.

Notre volonté est d'accélérer le recrutement des volontaires inscrits sur le fichier français des donneurs de greffe de moelle osseuse, tout en respectant une même exigence qualitative et un impératif de diversité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je vous remercie, monsieur le ministre, de l'impulsion que vous pourrez donner à la politique des greffes de moelle osseuse. Nous connaissons tous des malades, enfants ou adultes, qui attendent des dons, et des professeurs de médecine de l'Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, de Paris ou d'ailleurs qui recherchent de tels dons.

publicité et lutte contre l'obésité infantile

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann, auteur de la question n° 1142, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le ministre, bien que certaines mesures aient été mises en place en France, telles que la création du « programme national nutrition-santé », l'intégration du fait nutritionnel dans les programmes scolaires ou encore l'insertion prochaine d'un message sanitaire dans les campagnes publicitaires, l'obésité est loin de s'arrêter. Elle continue même sa progression à raison de 5,7 % par an, suivant une courbe comparable à celle qu'ont connue les États-Unis dans les années soixante-dix !

Alors que le surpoids et l'obésité infantile progressent en Europe de manière exponentielle, avec 14 millions d'enfants européens en surpoids et 3 millions d'obèses, notamment en France, comme l'ont souligné, en 2005, la CNAM, la Caisse nationale de l'assurance maladie, et, en 2006, l'enquête ObEpi, selon lesquelles 5,9 millions de Français et 19 % des enfants âgés de huit ans sont obèses, il importe de lutter contre ce fléau sanitaire, en éradiquant l'ensemble de ses sources.

Parmi les différents facteurs identifiés - manque d'activité physique, offre alimentaire déséquilibrée, consommations alimentaires excessives, hérédité, notamment - le rôle de la publicité télévisée, fréquemment débattu, n'avait, jusqu'à présent, jamais pu être clairement démontré.

Au mois de septembre dernier, l'association de consommateurs UFC-Que Choisir a rendu publique une étude soulignant que 89 % des 217 spots alimentaires visant les enfants, qui ont été relevés pendant quinze jours sur les plus grandes chaînes de télévision à l'heure des émissions enfantines, concernent des produits très sucrés ou gras. Cette même étude démontre que, contrairement à ce qu'affirment certains professionnels, les publicités influencent bel et bien les préférences des enfants en matière alimentaire, et les incitent également à réclamer à leurs parents, lors de leurs achats, les produits qu'ils ont vus à la télévision.

Plus encore, à l'image des préférences alimentaires des enfants qui sont modelées par la politique publicitaire des professionnels, on retrouve, dans les placards et réfrigérateurs des familles françaises, 47 % de produits déséquilibrés.

La pyramide alimentaire est une représentation schématique d'une alimentation équilibrée. À la base se trouvent les aliments dont la consommation en grande quantité est recommandée, les catégories les moins intéressantes du point de vue nutritionnel étant placées vers le haut.

La comparaison entre le relevé de l'étude de l'UFC-Que Choisir et les recommandations officielles montre que les produits présentés dans les spots publicitaires pour enfants sont en proportion inverse des recommandations retenues dans la pyramide alimentaire : une écrasante majorité de sucreries et de céréales trop sucrées, trop de produits laitiers sucrés ou gras, une quasi-absence de fruits ou de céréales complètes.

Face à ce constat, de nombreux pays européens, comme la Suède, l'Italie, le Luxembourg ou le Danemark, ont interdit ou restreint très strictement la publicité à destination des enfants.

Comment expliquer alors que la France, confrontée au même problème, reste passive et ne puisse pas admettre que les professionnels soient empêchés de promouvoir, par le biais de la télévision, des produits déséquilibrés pour les enfants ?

Alors même que le projet de directive « Télévision sans frontières », actuellement en discussion à l'échelle européenne, vise à élargir prochainement la présence publicitaire sur les écrans, la France doit impérativement agir, dans un souci de santé publique, afin d'encadrer plus strictement, voire, comme le font certains de nos partenaires européens, de restreindre la publicité durant les émissions enfantines, en interdisant celles qui concernent des produits déséquilibrés.

Monsieur le ministre, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre, notamment dans le cadre de la directive « Télévision sans frontières », pour lutter contre les publicités montrant des produits déséquilibrés à destination des enfants, et, par là même, pour limiter la hausse exponentielle de l'obésité dans notre pays ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame le sénateur, le Gouvernement partage totalement votre préoccupation à l'égard de l'alimentation de nos enfants et de la prévention de l'obésité. Le ministre de santé et des solidarités, Xavier Bertrand, a d'ailleurs récemment annoncé des mesures très importantes en la matière.

Je ne peux donc pas vous laisser dire que le Gouvernement est passif puisque, au contraire, il met en place une voie originale. Certes, nous n'avons pas choisi la voie adoptée par le Québec ou certains pays scandinaves, qui prévoient l'interdiction absolue, mais nous nous sommes engagés dans la voie du dialogue et de la concertation avec ceux qui représentent les intérêts de la santé publique, avec une exigence d'autant plus grande qu'il s'agit de nos enfants, et ceux qui représentent la production agroalimentaire et qui, dans leur intérêt, doivent promouvoir, dans le temps, des produits de consommation n'étant pas nocifs pour la santé. Nous attendons des résultats significatifs de cette voie étroite, qui est celle de la responsabilité.

Comme le relève une enquête récente de l'UFC-Que Choisir, près de 90 % des publicités diffusées aux heures d'écoute des enfants concernent encore aujourd'hui des produits gras et sucrés.

Le Gouvernement est particulièrement conscient de l'impact de la publicité sur les comportements alimentaires. C'est pourquoi la loi d'août 2004 relative à la politique de santé publique a prévu une mesure originale destinée à faire rentrer les préoccupations de santé publique dans les publicités elles-mêmes : les messages publicitaires doivent désormais « contenir une information à caractère sanitaire ». À défaut, les annonceurs doivent verser une contribution financière se montant à 1,5 % du prix de la publicité, destinée à financer des campagnes nutritionnelles.

Cette mesure totalement novatrice que lance la France constitue une troisième voie entre l'interdiction de toute publicité alimentaire à la télévision aux heures d'écoute des enfants, une voie retenue, comme je l'ai indiqué, par le Québec et les pays scandinaves, et le laisser-faire actuel de la plupart des autres pays, que la France avait d'ailleurs connu jusqu'en 2004.

Cette voie pourrait faire école, puisque l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, a marqué son intérêt pour la diffusion de cette bonne pratique, à condition bien sûr que nous fassions la preuve des bons résultats qu'elle peut apporter, mais nous sommes actuellement dans la phase du lancement et non dans celle du bilan.

Le rôle du ministère de la santé est désormais de mettre en oeuvre cette mesure et de la rendre efficace. Comme le prévoit la loi, les messages sanitaires deviendront obligatoires sur les publicités alimentaires, dès le mois de février prochain, à la télévision, à la radio, dans la presse, sur les affiches publicitaires et aussi dans les brochures de la grande distribution. Le décret, actuellement en cours d'examen par le Conseil d'État, sera publié très prochainement.

Pour préparer cette mesure, nous avons fait le choix, je le répète, de la concertation et avons obtenu l'adhésion de l'immense majorité des acteurs concernés, qu'ils appartiennent à la société civile, à l'industrie agroalimentaire ou au monde de la publicité. Tous se sont déclarés prêts à faire passer ces messages.

Pour le choix des messages, nous avons pris l'engagement d'être fermes sur les objectifs de santé publique et de retenir les recommandations sanitaires du « programme national nutrition-santé » : « Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour ». « Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière ». « Pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé ». « Pour votre santé, évitez de grignoter entre les repas. »

Les industriels pourront choisir d'apposer ces messages sur les produits ou de payer une taxe de 1,5 % du prix de la publicité. Mais notre objectif est bien entendu que les industriels s'engagent en faveur de la nutrition en apposant ces messages éducatifs.

Toutefois, cette mesure ne saurait être efficace isolément. C'est pourquoi nous avons souhaité l'inscrire dans une politique d'ensemble de prévention nutritionnelle.

Avec le deuxième « programme national nutrition-santé », que M. Xavier Bertrand a eu l'occasion de présenter le 6 septembre dernier, ce sont notamment 10 millions d'euros par an que l'Institut national d'éducation à la santé consacrera à des campagnes de communication orientées vers les enfants, les personnes âgées, les professionnels de santé et les professionnels du monde médico-social.

Vous avez également évoqué le projet de directive « Télévision sans frontières », qui sera prochainement examiné par le Parlement européen.

Cette directive modifie l'organisation de la publicité à la télévision. Le conseil des ministres de la culture a adopté, le 16 novembre dernier, un texte de compromis. Même s'il n'apporte pas toute satisfaction à la France, il permet de poser une nouvelle règle qui aura pour effet d'instituer, dans tous les autres pays européens, un niveau d'exigence qui, malheureusement, ne sera pas identique à celui que nous avons atteint.

Ce projet de directive permet également aux législations nationales d'être plus rigoureuses que le texte européen. Le ministère de la santé a souhaité qu'une attention particulière soit portée, sur le plan européen, à la publicité alimentaire, au titre de la protection des enfants. Des amendements allant dans ce sens pourront d'ailleurs être examinés au cours de la discussion du texte par le Parlement européen.

M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann.

Mme Christiane Kammermann. Monsieur le ministre, loin de moi l'idée que le Gouvernement soit passif sur ce sujet. Vous savez combien j'admire votre action et celle de M. Xavier Bertrand. Je souhaitais simplement obtenir quelques précisions sur l'action que vous avez engagée et dont je vous félicite.

prise en compte des besoins liés au vieillissement de la population française

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, auteur de la question n° 1161, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, dans le préambule de la présentation du plan Solidarité-grand âge, vous déclariez à juste titre : « Nous vivons une révolution, celle de la longévité. Chaque année, l'espérance de vie s'accroît d'un trimestre. Elle dépasse désormais quatre-vingts ans. C'est une chance pour chacun d'entre nous et un enrichissement pour toute la société. Mais la longévité, c'est aussi un défi collectif pour notre pays, pour notre système de soins, pour l'ensemble de la solidarité nationale. Nous avons une capacité médicale et sociale à prévenir et à prendre en charge la dépendance liée au grand âge qui est sans précédent dans notre histoire, elle doit être renforcée et adaptée aux attentes des Français. »

Ce sont des propos que je partage pleinement. Pourtant, dans les faits, il y a des obstacles dont médecins, associations, collectivités locales, populations ne comprennent pas la signification.

Ainsi, dans mon département, le maire de Saint-Étienne-du-Rouvray, qui est également conseiller général, a décidé, avec son conseil municipal et avec le concours de la mutuelle du Bien Vieillir, de créer, sur le territoire de sa commune, un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes destiné aux habitants de la commune, du canton et de toute l'agglomération de Rouen

Ce projet répond pleinement aux besoins dont font état les diagnostics établis, sur le plan local, aussi bien par la caisse régionale d'assurance maladie que par le conseil général, par l'association France Alzheimer ou encore par le schéma régional d'organisation sanitaire 2006-2011.

Il est prévu d'y accueillir quatre-vingt-six personnes, dont 45 % atteintes de la maladie d'Alzheimer ou d'une affection apparentée.

L'édification de cette structure se situe dans la perspective des prévisions sur lesquelles repose le plan Solidarité-grand âge.

Cet établissement pourrait être opérationnel en 2009. Il répondrait aux demandes formulées par l'État et par le conseil général à l'occasion de l'élaboration du schéma gérontologique.

Il présente donc des atouts considérables. Pourtant, par notification préfectorale en date du 27 avril 2006, l'État a marqué son opposition à la création de cet établissement.

Le motif invoqué est un taux d'équipement en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, EHPAD, trop élevé sur le canton concerné.

Or, cet établissement a vocation à rayonner sur toute l'agglomération de Rouen, qui souffre cruellement d'un manque de places disponibles pour accueillir les malades atteints des affections qui sont visées. En outre, si l'on en croit les propos du chef de service de gériatrie du CHU de Rouen, parus dans la presse régionale : « Il manque des places médicalisées. De ce point de vue, nous sommes très en dessous de la moyenne nationale. »

Permettez-moi également de vous rapporter les propos du directeur de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, la DDASS, parus dans le quotidien régional Paris-Normandie du 2 novembre : « C'est un très bon dossier, je le dis vraiment. Il se trouve que j'ai assisté par hasard à sa présentation et je l'ai trouvé très intéressant. C'est un projet pertinent à tout point de vue et imaginé par de vrais professionnels, c'est évident. Et ce ne sont pas que des mots. Le maire de la commune sait d'ailleurs ce que j'en pense. »

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, pourriez-vous m'indiquer quelles mesures vous envisagez de prendre afin que, selon les souhaits des élus, des associations, de la population et des familles concernées, ce projet se concrétise dans les délais prévus ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur Foucaud, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir rappelé les objectifs du plan Solidarité-grand âge, que j'ai eu l'honneur de présenter en juin dernier.

Force est de constater que la France avait un retard important dans ce domaine et qu'elle était mal équipée pour faire face à cette véritable lame de fond que constitue le vieillissement de la population. En effet, dans les dix années qui viennent, le nombre de personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans va pratiquement doubler, passant de 1,1 million à près de 2 millions de personnes !

C'est dire l'ampleur de l'effort national que nous avons à accomplir pour offrir aux personnes vieillissantes frappées par les maladies du grand âge et par la perte d'autonomie les services dont elles ont besoin. Nous pourrons ainsi, après avoir ajouté des années à la vie, ajouter de la vie aux années.

Tel est l'engagement du Gouvernement avec le plan Solidarité-grand âge, qui suit les recommandations de l'ancien Commissariat général au Plan, avec une priorité politique : assurer le libre choix de la personne âgée afin qu'elle ne soit pas condamnée à la solution unique de la résidence en maison de retraite médicalisée.

Il faut parallèlement, bien entendu, augmenter le nombre de places en maison de retraite médicalisée. Déjà, le plan Vieillesse solidarité avait proposé en 2003, après la canicule, un effort, sans précédent, de création de 2 500 places en établissement pour personnes âgées par an. Or ce plan a vu son rythme d'exécution doubler ! Et nous avons confirmé ce doublement avec le plan Solidarité-grand âge puisque l'État a décidé de créer 5 000 nouvelles places en maison de retraite médicalisée par an. Cet effort n'est possible que grâce à la journée de solidarité ainsi qu'à la réforme de l'assurance maladie, qui nous permet de réaliser des économies et d'en redéployer une partie vers les besoins d'aujourd'hui et de demain, qui évoluent avec le vieillissement de la population.

Cet effort se traduit par la création de 5 000 places par an en maison de retraite, à partir de cette année et pendant cinq ans ; par la création de 6 000 places de services infirmiers à domicile par an pendant cinq ans ; par la création de 2 500 places par an pour l'accueil de jour, notamment pour les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, qui restent chez elles, mais peuvent ainsi être prises en charge dans la journée ; par la création de 1 250 places par an d'hébergement temporaire pour permettre aux familles d'avoir une sorte de droit au répit et aussi pour permettre aux personnes âgées qui envisagent avec une certaine appréhension leur éventuelle entrée dans une maison de retraite médicalisée de se familiariser avec ces institutions et de voir si ce mode de vie peut leur convenir.

Cet effort sans précédent devrait nous permettre de rattraper un retard dû à l'inertie des politiques conduites au cours des années précédentes. Il ne nous permettra pas pour autant de tout faire aujourd'hui ! Il faut inscrire notre action dans une logique de planification et procéder par ordre, en commençant par servir les populations les plus déshéritées. Il est impératif, et c'est même un devoir national, de ne pas saupoudrer nos moyens, mais de les concentrer là où les besoins sont les plus urgents et les plus forts.

Monsieur Foucaud, comme vous l'avez souligné, le besoin est bien réel dans la commune de Saint-Étienne-du-Rouvray, mais il est plus fort encore au Havre, à Dieppe et dans d'autres communes de la Seine-Maritime. C'est la raison pour laquelle la construction de la maison de retraite proposée par la mutuelle du Bien Vieillir ne figure qu'au troisième rang dans le programme régional qui fixe l'ordre de priorité des financements d'établissements.

Vous comprendrez, monsieur Foucaud, que mes fonctions ne consistent pas à placer en première position, et ce au détriment d'autres établissements, un projet qui figure au troisième rang d'un programme régional.

Il n'en reste pas moins, monsieur le sénateur, et je vous le confirme, que le projet de Saint-Étienne-du-Rouvray est un projet de qualité, bien conçu. Sa troisième place nous permet de penser qu'à l'horizon 2009, que vous avez évoqué, il puisse faire l'objet des financements que vous espérez. Ainsi, après que l'on aura créé les établissements qui sont considérés prioritaires, on pourra, enfin, financer l'établissement de Saint-Étienne-du-Rouvray.

Monsieur le sénateur, sachez que nous faisons un effort sans précédent, je le répète, et par ailleurs sans beaucoup d'équivalents dans les autres pays européens, mais nous voulons respecter l'ordre des priorités.

M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Monsieur le ministre, ce projet, qui pourrait être opérationnel en 2009, répondrait aux demandes formulées par l'État et par le conseil général lors de l'élaboration du schéma gérontologique. C'est pourquoi je vous demande d'étudier rapidement les problèmes de financement.

Ce projet est soutenu par la population, les élus et les spécialistes en gérontologie de la Seine-Maritime notamment.

Les habitants de cette partie du territoire connaissent déjà une crise morale et des difficultés économiques. J'en veux pour preuve un taux de chômage plus important que la moyenne nationale, un potentiel fiscal très faible, un nombre très élevé de personnes exonérées de l'impôt sur le revenu. Il est inutile de rajouter le problème de l'hébergement des personnes âgées dépendantes.

Après avoir ajouté des années à la vie, ajoutons de la vie aux années, avez-vous dit, monsieur le ministre. Alors, en nous fondant sur cette philosophie, efforçons-nous de trouver une solution pour que cet établissement tant attendu par la population de cette agglomération puisse être réalisé en 2009.

instauration d'une prime de vie chère au profit des salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux de la guadeloupe

M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot, auteur de la question n° 1168, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Jacques Gillot. Monsieur le ministre, les accords collectifs entre salariés et employeurs portant sur les conventions collectives nationales de travail du 15 mars 1966 et du 31 octobre 1951 ont été agréées et ont fait l'objet de deux arrêtés, datés respectivement du 24 juillet et du 23 octobre 2006.

Ces accords collectifs instituent une majoration salariale dite « prime de vie chère » représentant 20 % du salaire brut conventionnel applicable à l'ensemble des personnels des établissements sociaux et médico-sociaux de la Guadeloupe régis par les deux conventions précitées.

Je rappelle que cette revendication trouve son origine dans la disparité salariale issue de l'institution, dans les années soixante-dix, d'une prime dite « de technicité incitative », majorant de 30 % le salaire conventionnel issu de la convention de 1966, afin de faire face à la pénurie de personnel spécialisé dans le secteur de l'éducation surveillée.

L'objectif de ce rattrapage ayant été atteint dans les années quatre-vingt-dix, l'État et le département avaient conjointement décidé la non-application de ladite prime aux nouveaux contrats de travail.

Par ailleurs, dans le cadre de la procédure d'agrément des négociations entre employeurs et salariés, le conseil général de la Guadeloupe, consulté sur les dispositions salariales, avait rendu un avis défavorable.

La mise en oeuvre de ces accords se traduira, monsieur le ministre, par une progression importante des dépenses sociales de la collectivité départementale, car ces majorations de salaires, on peut légitimement le prévoir, entraîneront une hausse mécanique du budget des établissements sociaux et médico-sociaux.

Or, dans un contexte d'accroissement considérable des dépenses sociales, le conseil général a gelé, depuis 2001, l'objectif annuel d'évolution des dépenses prévues pour ces établissements et il ne sera donc pas en mesure de financer cette nouvelle charge.

Aussi, sans progression de leur budget, les établissements sociaux et médico-sociaux seront dans l'obligation de financer, à enveloppe constante, les augmentations de salaires, ce qui affectera la capacité d'amélioration de l'existant et de financement de mesures nouvelles.

En outre, la mise en oeuvre de ces accords est aujourd'hui source d'une situation sociale tendue dans ce secteur.

En vertu du principe de la décentralisation selon lequel toute augmentation de charges des collectivités territoriales décentralisées décidée par l'État doit s'accompagner du transfert de ressources correspondant, je souhaiterais connaître le niveau de compensation que vous entendez allouer au conseil général de la Guadeloupe, pour tenir compte de cette nouvelle charge imposée.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, le Gouvernement a décidé de prendre en compte les spécificités économiques et sociales liées à la cherté de la vie dans les trois départements d'outre-mer des Antilles et de la Guyane, dans le cadre des procédures d'agrément des conventions collectives.

Ainsi, deux arrêtés d'agrément des accords de travail concernant les salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux du secteur privé à but non lucratif de Guadeloupe ont été pris en 2006.

Il s'agit, tout d'abord, de l'arrêté du 24 juillet 2006 portant agrément de l'accord collectif du 3 novembre 2005, qui a pour objet l'instauration d'une prime de vie chère aux salariés des établissements sociaux et médico-sociaux de la Guadeloupe couverts par la convention collective nationale du 15 mars 1966.

Il s'agit ensuite de l'arrêté du 23 octobre 2006 relatif à l'agrément de l'accord du 30 mai 2006 ayant pour objet la prime de vie chère des salariés de la Guadeloupe travaillant dans ce secteur et couverts par la convention collective du 31 octobre 1951.

La reconnaissance d'une majoration des salaires de 20 % pour l'ensemble du secteur social et médico-social a ainsi mis fin à une situation d'inégalité de traitement avec d'autres salariés du secteur privé ou ceux de la fonction publique hospitalière.

Compte tenu des situations comparables constatées en Martinique et en Guyane, où les conseils généraux ont pris acte des demandes d'agrément, le Gouvernement, à l'issue d'une consultation approfondie avec l'ensemble des parties concernées, a pris ces décisions.

La compensation au département de la charge financière engendrée par la mise en oeuvre de ces accords n'entre pas dans le champ des dispositions prévues à l'article 72-2 de la Constitution, qui résulte de la révision constitutionnelle de 2003. En effet, seuls les transferts de compétences de l'État aux collectivités territoriales font l'objet d'une compensation.

Au demeurant, afin que ces dispositions n'affectent ni les capacités d'accueil et de prise en charge de ces établissements, dont les charges ont été augmentées, ni les services tarifés par le département, et pour prendre en considération l'ensemble des besoins sociaux et médico-sociaux en Guadeloupe, le Gouvernement a mobilisé des crédits du plan d'aide à la modernisation des établissements pour personnes âgées et pour personnes handicapées, lequel est conduit par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.

Enfin, des discussions entre l'État et les collectivités territoriales de Guadeloupe sont actuellement en cours, afin que le prochain volet territorial du contrat de projet État-région prévu pour la période 2007-2013 permette de poursuivre l'effort de création de places et d'amélioration des établissements accueillant des personnes handicapées et âgées.

M. le président. La parole est à M. Jacques Gillot.

M. Jacques Gillot. Monsieur le ministre, une telle compensation est-elle prévue dans l'immédiat ? Contrairement à ce que vous venez de dire, il s'agit bien d'un transfert de compétences, puisque c'est l'État qui a institué une prime de technicité dans les années soixante-dix. Alors que dois-je dire aux agents que je rencontrerai la semaine prochaine et qui attendent une réponse ?

souches embryonnaires

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, auteur de la question n° 1165, adressée à M. le ministre de la santé et des solidarités.

M. Alain Milon. Monsieur le ministre, à l'heure où certains pays voisins - je pense notamment à la décision récente de l'Écosse - décident de la création de centres de production de souches embryonnaires destinées à l'homme, il semble que la position des autorités françaises nous fasse prendre un retard que beaucoup de chercheurs, spécialistes dans ce domaine, regrettent.

La fabrication de cellules souches embryonnaires, lorsqu'elle respecte les conditions de bonnes pratiques, peut constituer une avancée considérable dans la recherche de traitements médicamenteux.

En France, beaucoup de temps a été perdu, car le décret d'application permettant d'établir de nouvelles lignées pluripotentes a été promulgué plus d'un an après le vote, en 2004, de la loi relative à la bioéthique. Une année supplémentaire a ensuite été nécessaire pour que l'Agence de la biomédecine accorde ses premières autorisations.

En Europe, la législation sur les cellules souches embryonnaires est différente d'un pays à l'autre, puisque, dans certains États, la recherche et la production sont interdites. En France, seule est autorisée la recherche sur des cellules produites uniquement à partir d'embryons surnuméraires, c'est-à-dire d'embryons issus d'une fécondation in vitro, mais non implantés et sans projet parental.

Face à la pénurie d'organes à greffer, les cellules souches embryonnaires, qui permettraient de fabriquer toutes les sortes de tissus, pourraient être une solution pour réparer les organes malades. Depuis plusieurs années, les essais se sont multipliés chez l'animal, mais aussi, parfois, chez l'homme, pour explorer cette nouvelle voie de recherche, appelée thérapie cellulaire, qui consiste à remplacer des cellules anormales ou disparues par des cellules saines.

Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur la production de cellules souches embryonnaires, puisque nous savons que de telles productions sont encadrées par de nombreuses directives européennes, qui limitent tout risque de déviance.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, nous sommes dans un domaine qui est en pleine expansion et porteur de nombreux espoirs. Mais, comme dans tout domaine scientifique, il n'y aura de progrès sans bonnes pratiques d'utilisation : « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme. »

La thérapie cellulaire, dont les promesses sont nombreuses, consiste à utiliser des cellules souches, c'est-à-dire des cellules indifférenciées pouvant se transformer en n'importe quel tissu, pour « réparer » des tissus lésés. Elle pourrait donc permettre de guérir des maladies jusqu'alors incurables, telles que la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson ou le diabète. Pour le moment, il s'agit plus d'une espérance que d'une certitude. Mais si elle doit être encadrée, elle doit également être explorée.

Ces cellules souches peuvent être obtenues, théoriquement et pratiquement, par plusieurs méthodes.

Tout d'abord, il est possible de transformer des cellules déjà différenciées, prélevées sur des sujets adultes ou, par exemple, dans le sang du cordon ombilical. La transformation a pour objectif d'en faire des cellules souches adultes. L'utilisation de ces cellules ne pose pas de problèmes d'éthique, mais cette méthode peut se révéler moins efficace que d'autres.

Ensuite, des embryons surnuméraires congelés ne faisant plus l'objet d'un projet parental peuvent être utilisés. En effet, en matière d'assistance médicale à la procréation, vous le savez, il est créé plus d'embryons qu'il n'est nécessaire, puisque, avant de réussir, le processus peut faire l'objet de plusieurs échecs. À partir du moment où le couple ayant recouru à l'assistance médicale à la procréation ne demande plus l'utilisation de ces embryons surnuméraires congelés et qu'il autorise des recherches, l'Agence de la biomédecine peut, à partir d'un projet de recherche bien identifié et disposant d'une équipe qualifiée, permettre l'utilisation de ces embryons surnuméraires.

Ces dispositions, qui ont été prévues dans les lois de bioéthique de 1994 et de 2004, n'autorisent l'expérimentation que sur les cellules embryonnaires issues d'embryons surnuméraires, à l'exclusion de tout autre procédé.

Or il est justement possible de produire des cellules souches à partir de cellules « fabriquées », en transférant dans un ovule vidé de son noyau le noyau d'une cellule adulte. Cette opération est parfois improprement appelée clonage thérapeutique ou scientifique parce que l'embryon issu de cette manipulation est génétiquement identique à celui qui a donné le noyau de la cellule adulte. La loi interdit ce type de manipulation, qui devrait plutôt être appelé « transfert nucléaire ».

Cette loi, qui est récente, puisque vous l'avez adoptée en 2004, interdit donc toute forme de clonage. Mais elle permet, à titre dérogatoire et pour une période de cinq ans, la recherche sur les cellules souches embryonnaires provenant d'embryons issus de fécondation in vitro et ne faisant plus l'objet d'un projet parental.

La loi relative à la bioéthique devra être révisée après cinq années d'application. Pour préparer cette révision, M. le Premier ministre a demandé à M. François Goulard et à M. Xavier Bertrand de faire des propositions pour compléter l'information et mûrir la réflexion, afin de bien préparer ce rendez-vous, prévu pour 2009.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon.

M. Alain Milon. Monsieur le ministre, votre réponse est porteuse d'espoir, tout comme la thérapie cellulaire l'est dans le domaine médical.

L'embryon surnuméraire est appelé à être détruit après cinq ans de congélation. Il vaut donc mieux qu'il soit utilisé pour la recherche. Le transfert nucléaire est aussi une technique médicale très prometteuse ; nous devrons l'étudier très précisément dans le cadre de la future loi relative à la bioéthique.

aide publique à la forêt française

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 1130, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Georges Mouly. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, mais je salue avec plaisir votre présence au banc du gouvernement, monsieur le ministre, vous remerciant par avance de répondre à ma question sur la forêt.

Conséquence d'une donnée tout à la fois historique, géographique et économique, la forêt française couvre 27 % du territoire national. C'est dire l'importance de ce secteur dans le domaine, notamment, de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Or les deux tiers des forêts de France sont composés de forêts privées, intéressant quelque quatre millions de nos compatriotes. On ne saurait donc, selon moi, décider de l'avenir de ce secteur sans tenir compte de l'avis de ceux qui ont la charge de la gestion, de la reconstitution, de la conservation et de l'exploitation de la forêt.

Depuis plusieurs années, après la traumatisante tempête qui a ouvert le nouveau siècle, ce secteur connaît un développement important, comme je peux le constater dans ma région, le Limousin.

Ce développement concerne la production de bois d'oeuvre, de bois d'énergie, de bois de trituration, de bois de feu, l'hébergement de gibier, la production de produits de consommation, le maintien de l'équilibre des paysages, la protection des eaux pures, la protection des sols, le maintien de la biodiversité, le stockage de carbone et, naturellement, les activités de loisirs et de tourisme, sans compter les 500 000 emplois de la filière bois.

Ce sujet est des plus consensuel, puisque, je le rappelle, la loi d'orientation sur la forêt du 9 juillet 2001 avait été votée à l'unanimité par l'Assemblée nationale et le Sénat. Depuis lors, le plan chablis a été poursuivi, le taux de subvention pour les opérations de nettoiement, ainsi que le plan des aides ont été maintenus, ce qui a été apprécié.

Les propriétaires de forêts s'inquiètent au sujet de la poursuite de l'intervention financière de l'État, notamment par l'intermédiaire des fonds communautaires, indispensables à l'amélioration et au développement de la forêt française.

Les propositions formulées par l'État en matière de Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, pour la période 2007-2012, sont considérées comme insuffisantes en proportion de l'enjeu et, surtout, de la durée d'application prévue, qui est de cinq ans !

Il faudrait envisager, monsieur le ministre, de « placer la barre plus haut », en augmentant la part du FEADER consacrée à la forêt, et d'ouvrir une large négociation - je suis persuadé que M. le ministre y est tout disposé - avec les gestionnaires de la forêt privée française, les élus et les représentants des personnels qui y travaillent, afin d'« optimiser » l'utilisation de ce fonds et d'améliorer ainsi, d'une part, la production, et, d'autre part, la reconstitution d'une ressource forestière massive et pérenne.

Il est en effet certain que l'affaiblissement du soutien public à l'investissement forestier entraînerait les conséquences les plus fâcheuses, non seulement pour la forêt elle-même, mais pour l'ensemble du monde rural. De surcroît, si l'on considère que, dans ce secteur, le retour sur investissement est à très long terme, il est évident que, sans soutien public suffisant, l'investissement forestier pourrait finalement apparaître comme économiquement irrationnel et ne plus intéresser les investisseurs. Il faut donc plus que jamais l'encourager et l'aider.

Dans quelle mesure la part du FEADER consacrée à la forêt peut-elle être augmentée ? Est-ce seulement encore possible ? Naturellement, je n'ignore pas combien il peut être difficile d'obtenir de l'Europe une telle augmentation. À défaut, de quelles autres aides publiques la forêt peut-elle bénéficier à l'horizon de la fin du plan chablis, d'ici à deux ou trois ans ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, le programme forestier national est en cours d'application, avec deux priorités : la mobilisation du bois et la défense de la biodiversité.

Les aides aux propriétaires forestiers et aux professionnels sont maintenues pour la reconstitution des forêts sinistrées par les tempêtes de 1999. À la fin de 2006, ce sont déjà 756 millions d'euros qui auront été consacrés à ce plan. En 2007, les moyens financiers seront reconduits au niveau de ceux de 2005 et 2006.

Les aides aux investissements sylvicoles, hors plan chablis, seront maintenues dans le budget du ministère de l'agriculture et de la pêche. M. Dominique Bussereau vient d'ailleurs de décider que ces aides bénéficieront aussi des cofinancements européens pour la période 2007-2013. Il s'agit d'utiliser une partie des marges de manoeuvre qui se dégageront avec la fin du plan chablis. Ces mesures s'ajoutent à l'incitation fiscale qui a été mise en place par la loi d'orientation agricole et qui s'appliquera aux revenus de 2006.

Par ailleurs, toute une série de dispositions a été mise en place pour favoriser le développement du bois-énergie, avec un taux de TVA réduit pour la livraison de bois de chauffage à usage non domestique et pour les réseaux de chaleur produite à partir de biomasse.

C'est dire que le Gouvernement attache une importance primordiale au rôle de la forêt : sont concernés 450 000 emplois directs et indirects, sur 28 % du territoire ! C'est dire si l'effort consenti en faveur de la forêt française mérite d'être poursuivi.

M. le président. La parole est à M. Georges Mouly.

M. Georges Mouly. Je remercie M. le ministre de la réponse qu'il vient de m'apporter. Les chiffres qu'il a cités sont riches d'information et je m'attacherai à les examiner de plus près.

réorganisation de l'office national des forêts dans le sud-ouest

M. le président. La parole est à M. Bertrand Auban, auteur de la question n° 1158, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

M. Bertrand Auban. La Direction territoriale Sud-Ouest de l'Office national des forêts entreprend une réorganisation qui suscite une très forte opposition des personnels et des collectivités locales de la Haute-Garonne. Le conseil général et près de la moitié des communes forestières - cent dix, pour être précis - ont délibéré contre ce projet. Je tenais à alerter le ministre de l'agriculture sur ses conséquences de cette réorganisation pour le pays Comminges-Pyrénées et toute la Haute-Garonne.

Malgré les précédentes réductions d'effectif, le personnel a toujours rempli ses missions. Avec ce projet, le personnel et les élus s'inquiètent du devenir du service de proximité. Comment sera-t-il compatible avec un centre décisionnel basé à Foix, dans l'Ariège, ou à Castres, dans le Tarn, selon les activités ?

Je partage aussi les inquiétudes sur la qualité du service public rendu, en particulier en matière de gestion durable. La structure spécialisée en développement local se trouvera rattachée à Castres avec, comme territoire d'action, six départements. Cette mise à distance amoindrira la réactivité, éloignera le gestionnaire des travaux et affaiblira l'adéquation actuelle avec les unités polyvalentes de proximité. Quelles seront les conséquences pour les fournisseurs et entreprises locales travaillant actuellement avec l'ONF ?

L'accueil du public est également l'objet de préoccupations. La forêt de Bouconne, poumon vert de Toulouse, entre la Haute-Garonne et le Gers, dépendrait de Foix ou de Tarbes. Que deviendront l'accueil du public et la police environnementale de ce site à préserver ?

Enfin, les collectivités locales sont inquiètes pour les activités d'aménagement du territoire et de développement local : selon l'endroit, l'agent patrimonial dépendra d'un directeur situé dans le Tarn, l'Ariège ou les Hautes-Pyrénées. Comment envisager une même qualité du service forestier public, alors que des postes sont supprimés ou transférés ?

Les élus et les collectivités veulent garder une agence départementale ou interdépartementale sur la Haute-Garonne, avec une véritable direction à Saint-Gaudens. Le conseil général de la Haute-Garonne a demandé que ce projet soit suspendu, de façon que soient menées, sous l'égide de M. le préfet, à travers l'organisation d'une table ronde, la concertation indispensable entre la direction de l'ONF, les personnels et une délégation d'élus nationaux et locaux de la Haute-Garonne.

Monsieur le ministre délégué, je voudrais connaître la position du Gouvernement sur cette réorganisation de l'ONF préjudiciable au service public forestier et sur la suite qu'il entend réserver à la demande de suspension du projet avec organisation d'une table ronde.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, M. Bussereau m'a chargé de vous dire que nous n'abandonnerions pas le site de Saint-Gaudens. Cela n'est d'ailleurs nullement prévu dans le projet de réorganisation territoriale des agences de l'ONF sur le Sud-Ouest.

Le directeur général de l'ONF a proposé de mettre en place une structure rénovée à Saint-Gaudens. Son responsable sera, bien sûr, l'interlocuteur du Conseil général et des maires pour l'ensemble des questions touchant aux forêts communales, ainsi qu'à l'aménagement du territoire et au développement local.

Il disposera à Saint-Gaudens des services et du personnel technique, notamment pour la commercialisation des bois, les travaux, les aménagements et les questions d'environnement. Seules les fonctions de soutien administratif seront mutualisées au sein d'une agence interdépartementale Haute-Garonne - Ariège.

Le projet permettra aussi de renforcer le site de Saint-Gaudens par l'implantation de deux directions interrégionales nouvelles, l'une dédiée aux travaux et l'autre à la commercialisation des bois, toutes deux compétentes pour l'ensemble du Sud-Ouest.

L'implantation de ces deux directions à Saint-Gaudens au service de l'ensemble de la direction territoriale est bien le signe de l'intérêt soutenu que l'ONF porte à ce site. Ces mesures ont fait l'objet d'une concertation avec les représentants locaux de l'association des communes forestières.

Le projet de réorganisation territoriale ne vise donc nullement à affaiblir la représentation de l'ONF à Saint-Gaudens.

M. le président. La parole est à M. Bertrand Auban.

M. Bertrand Auban. Monsieur le ministre délégué, je vous remercie de ces précisions. Toutefois, elles ne sont de nature à rassurer ni les personnels de l'ONF ni les collectivités locales.

Le conseil général de la Haute-Garonne et la très grande majorité des communes forestières du département estiment que cette réorganisation, d'abord non concertée - il n'y a pas eu, en effet, la moindre concertation dans un premier temps -, mal concertée ensuite, sera dommageable pour la qualité du service public forestier.

Il faut ajouter à cela les effets négatifs sur le bassin d'emploi de Saint-Gaudens, capitale d'un Comminges qui souffre d'une activité économique inférieure aux zones plus urbaines du département.

Les réorganisations des services publics, à supposer qu'elles s'avèrent nécessaires, ne doivent plus se faire au détriment des zones les plus fragiles. Déshabiller Pierre pour habiller Paul, surtout si Paul est plus riche, n'a jamais constitué une politique équilibrée et équitable !

J'espère, monsieur le ministre, que l'ONF gardera son organisation actuelle en Haute-Garonne, notamment en Comminges et plus particulièrement à Saint-Gaudens.

M. le président. Monsieur Auban, Hippolyte Ducos n'était-il pas député de Saint-Gaudens ?

M. Bertrand Auban. Cela fait quelques années !

M. le président. Le ministre chargé des relations avec le Parlement se rappelle sans doute que ce député est mort à la tribune de l'Assemblée nationale en défendant le latin !

M. Bertrand Auban. Et le grec !

M. le président. C'est un petit clin d'oeil à Hippolyte Ducos ! (Sourires.)

connexion réseau haut débit en milieu urbain

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 1151, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre délégué, je souhaite attirer votre attention sur les insuffisances en termes d'aménagement numérique du territoire. En effet, en secteur rural, mais également au coeur même du milieu urbain - cela est moins connu -, subsistent de nombreuses zones blanches, ce qui pénalise des milliers de familles.

Dans le département de Seine-et-Marne, l'exemple de la commune de Champs-sur-Marne est, à ce titre, très significatif. Située en milieu urbain, en fait à quelques kilomètres d'ici, cette commune attend depuis plusieurs années le raccordement d'un quartier où plus de 700 foyers sont privés d'accès au haut débit.

Ville dynamique, accueillant sur son territoire de nombreux étudiants qui fréquentent l'université de Marne-la-Vallée et de grandes écoles prestigieuses, Champs-sur-Marne est en discussion depuis plus de trois ans avec France Télécom pour remédier à cette carence, sans succès à ce jour. Pour justifier ce refus, l'opérateur historique renvoie la commune vers le conseil général de Seine-et-Marne, qui a lancé une politique de développement du haut débit sur le territoire départemental.

France Télécom, aujourd'hui privatisée, ainsi que l'ensemble des fournisseurs d'accès à Internet, n'ont, en effet, aucune obligation d'investir dans ce type d'infrastructure et évaluent l'opportunité de leur intervention à l'aune de la rentabilité de l'opération.

Si les communes disposent, depuis la loi sur l'économie numérique, des compétences dans ce domaine, elles n'ont pas, dans les faits, les capacités techniques, et encore moins les moyens financiers pour intervenir.

Cette loi dispose en effet que « les collectivités territoriales et leurs groupements ne peuvent fournir des services de télécommunications aux utilisateurs finals qu'après avoir constaté une insuffisance d'initiatives privées propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finals ». Or, dans ce cas particulier, le quartier concerné étant déjà câblé par un opérateur privé, cette collectivité n'est pas autorisée à devenir opérateur, car la défaillance totale du marché n'est pas avérée. Les élus, comme les citoyens de cette commune, se retrouvent ainsi devant une véritable impasse.

De plus, il convient d'être prudent : le risque existe, en effet, de réaliser des investissements lourds à partir des deniers publics, alors même que la technologie évolue très vite et qu'elle peut rapidement devenir obsolète.

C'est ainsi que, sur ces principes, le tribunal administratif de Montpellier a, le 1er avril 2005, suspendu la délibération du conseil général de l'Hérault du 17 décembre 2004 portant sur des investissements consacrés à des infrastructures de haut débit. Il a jugé que cette décision était « de nature à créer une situation irréversible à cause des lourdes charges financières de remboursement d'emprunt aux contribuables locaux sous forme d'impôts locaux ».

Comment justifier, en effet, que les communes, et finalement les contribuables, pallient les carences du privé en créant les infrastructures, alors que les profits reviendront aux opérateurs ?

Ce constat démontre, s'il le fallait, combien il serait pertinent de confier à France Télécom, dans le cadre de ses missions de service public, l'obligation de couvrir la totalité du territoire, tout en faisant contribuer l'ensemble des opérateurs privés au financement.

L'aménagement équilibré du territoire est une mission de service public permettant l'égal accès aux nouvelles technologies. La redéfinition du périmètre du service universel des télécommunications, prévue par la directive adoptée en mars 2002, reste donc d'une très grande actualité.

Tous les Français se souviennent de l'effort national déployé, voilà quelques décennies, pour permettre l'électrification de toutes les communes. Une même dynamique est indispensable pour le numérique.

Par conséquent, je souhaite connaître les mesures qui vont être prises pour assurer un même accès à Internet à haut débit à l'ensemble des citoyens des zones urbaines comme des zones rurales.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, face à l'enjeu de la diffusion du haut débit, le Gouvernement a pris des mesures afin de porter la couverture du territoire à près de 98 % de la population à la fin de 2006 et à 99 % de la population, avec un minimum de 90 % par département, d'ici à la fin de 2007.

Ces actions créent un cadre favorable à l'investissement des opérateurs et facilitent le développement des technologies alternatives.

Le Gouvernement a donné mandat à la Caisse des dépôts et consignations d'aider les projets territoriaux, en particulier par le soutien aux études et l'accompagnement en capital lorsque les projets se concrétisent. En outre, il a décidé, sur la période 2004-2007, la création d'un fonds national de soutien au déploiement du haut débit sur les territoires, représentant une enveloppe de 100 millions d'euros.

Par ailleurs, le Gouvernement a annoncé, lors du comité interministériel de juillet 2006, un plan de couverture en haut débit pour les zones rurales, afin d'aider, dès 2007, les communes non couvertes à acquérir l'équipement nécessaire pour déployer le haut débit sur leur territoire. Est prévu un soutien financier de l'État, représentant 50 % à 80 % de l'investissement.

Pour remédier aux difficultés de couverture de la commune de Champs-sur-Marne, des solutions de remplacement semblent pouvoir être envisagées : câble, boucle locale radio - BLR -, courants porteurs en ligne - CPL -, satellite. En outre, les nouvelles fréquences de boucle locale radio Wimax - Worldwide Interoperability for Microwave Access -, attribuées en juillet 2006, en Île-de-France, à la Société du Haut Débit et à Bolloré Télécom, devraient permettre de couvrir une partie des zones blanches de la région.

La Société du Haut Débit a indiqué qu'elle ciblerait prioritairement les zones non couvertes ou mal desservies et prévoit de couvrir celles-ci à hauteur de 99 %.

Elle s'est par ailleurs engagée à examiner toute demande émanant de collectivités pour des projets de couverture du territoire.

En outre, monsieur le sénateur, elle envisage de mettre à disposition, par le biais de cessions ou de sous-locations, des fréquences qu'elle ne prévoirait pas d'utiliser.

Enfin, s'agissant du périmètre du service universel des télécommunications, le Gouvernement a proposé à nos partenaires européens de le réexaminer au regard des évolutions technologiques, afin d'assurer pour tous, sur l'ensemble du territoire, connectivité à haut débit et connectivité en situation de mobilité.

La Commission européenne a annoncé son intention de publier en 2007 un Livre vert sur la question.

Le Gouvernement, monsieur le sénateur, souhaite mener une réflexion ambitieuse sur le service universel, réflexion qu'il intégrera dans le processus général de réexamen du cadre réglementaire des communications électroniques qui sera mis en place à partir de 2010.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Je serai particulièrement attentif à l'évolution du périmètre du service universel, car c'est seulement de là que peut venir la réponse adaptée à la situation que j'ai décrite, que l'on rencontre parfois en milieu urbain, mais qui est aussi, très souvent, observée en milieu rural.

taxe sur les jeux traditionnels dans les cafés et bars-tabacs

M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano, auteur de la question n° 1155, adressée à M. le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État.

M. Robert Tropeano. Monsieur le ministre, le 16 octobre, le ministre délégué au budget avait annoncé des mesures en faveur des jeux traditionnels que sont le baby-foot, le flipper, le billard, les fléchettes, etc. dans les cafés et bars-tabacs.

Au regard des enjeux du projet de loi de finances pour 2007, nous avons l'impression que « la montagne accouche d'une souris ». M. Copé a affirmé que « cette mesure en faveur des jeux traditionnels [serait] gagnant-gagnant pour l'ensemble des acteurs » puisqu'elle permettrait la réinstallation de 40 000 jeux et la création de 600 emplois.

Il a ajouté que la fréquentation de ces établissements augmenterait et que l'offre de convivialité en serait accrue. C'est un pari aventureux sur lequel je ne le suivrai pas !

Quant au financement de cette mesure, l'annonce d'une compensation qualifiée d'« avantageuse pour les communes » me fait craindre un nouveau manque à gagner pour les collectivités territoriales.

En effet, l'acte II de la décentralisation, dont le gouvernement de M. Raffarin a pris l'initiative, a engendré un surcroît de charges pour les collectivités, qui se voient dans l'obligation d'augmenter leurs taux d'imposition.

Qu'il s'agisse du transfert des routes nationales aux départements ou des dépenses sociales, l'inégalité territoriale demeure et s'accentue. Nous sommes loin des promesses d'une compensation financière à l'euro près de ces nouvelles compétences.

De fait, ce sont plusieurs dizaines de millions d'euros qui n'ont pas fait l'objet d'une compensation.

Jusqu'à présent, la taxe annuelle sur les jeux automatiques variait selon la taille de la commune. Les conseils municipaux avaient d'ailleurs la possibilité de l'augmenter suivant un coefficient allant de 2 à 4. Aujourd'hui, il est prévu d'instaurer à compter du 1er janvier 2007 une taxe unique de 5 euros par appareil et par an. De ce fait, le budget des communes se trouvera amputé d'une partie des ressources qu'elles étaient en droit d'attendre.

Pour mémoire, je rappelle que cette taxe a rapporté aux collectivités 16 millions d'euros en 1999, 9,7 millions en 2005 et qu'elle n'en rapportera que 9 millions en 2006. Or le Gouvernement entend prendre comme base d'indemnisation, pour compenser aux communes leurs pertes de recettes, le montant estimé de celles-ci pour l'année 2006. L'État espère probablement - et secrètement - que la TVA sur les machines lui rapportera davantage avec l'augmentation du parc des jeux automatiques.

Le « gagnant-gagnant » annoncé ressemble fort à un marché de dupes !

Au fil des années, 50 % des jeux automatiques ont disparu. Après tout, pourquoi, en effet, ne pas réinstaller flippers, baby-foot et autres juke-box ? Mais les raisons qui ont conduit à la disparition progressive de ces jeux dans les établissements sont multiples et ne sont pas toutes imputables à la fiscalité pesant sur ces appareils.

Ces jeux traditionnels ont distrait plus d'une génération. Force est de constater aujourd'hui qu'ils subissent une désaffection du public. L'attrait pour les consoles de jeux ou les jeux en ligne sur Internet témoigne de l'appropriation des nouvelles technologies par les particuliers. Cette évolution a incontestablement contribué à la diminution du parc des jeux automatiques.

Je doute que la baisse de fréquentation des cafés et des bars-tabacs qui pourrait résulter de l'interdiction de fumer dans ces lieux à compter du 1er janvier 2008 soit compensée par la mise en place d'un flipper, d'un baby-foot ou d'un jeu de fléchettes.

Tout en étant conscient de l'importance des enjeux de santé publique et des conséquences néfastes du tabagisme, je persiste à penser que la mise en place de cette fiscalité en faveur des jeux, qui a été qualifiée d'« attractive », n'est qu'un pis-aller pour les débitants de tabac.

Souhaitons néanmoins que ceux-ci, qui ont sensibilisé le ministre délégué au budget sur la question du flipper, « touchent le jackpot » avec cette mesure.

Monsieur le ministre, comment le Gouvernement entend-il compenser le manque à gagner pour les collectivités qu'engendrera la baisse de la taxe sur les jeux traditionnels ? Sur quelles bases et de quelle manière cette compensation va-t-elle s'opérer ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, la décision de réformer profondément la taxe pesant sur les jeux traditionnels - baby-foot, flippers, billards, fléchettes, juke-box, etc. - se fonde sur un constat implacable : ces vecteurs de convivialité quittaient massivement les cafés ou bars-tabacs depuis quelques années.

Ces jeux traditionnels, qui n'entrent pas dans la catégorie des jeux d'argent puisqu'ils n'offrent pas de gains aux joueurs, rendaient leur exploitant redevable d'une taxe communale annuelle dont vous-même avez souligné la complexité.

Cette taxe annuelle pouvait parfois atteindre 368 euros par jeu, montant dissuasif puisqu'il représentait la recette de plusieurs mois. Cette imposition excessive a entraîné un cercle vicieux, dont les conséquences sont celles que vous connaissez : sur les 265 000 jeux qui étaient installés en 1999, 125 000 ont été retirés en cinq ans. À ce rythme, l'ensemble des jeux auraient disparu des bistrots et cafés en sept ou huit ans.

Cette disparition des jeux a, à son tour, entraîné une baisse de la clientèle et donc une baisse du chiffre d'affaires des établissements concernés, des suppressions d'emplois chez les installateurs de jeux - 1 200 depuis avril 2004 - et, enfin, la baisse des recettes perçues par les communes, qui sont passées de 16 millions à 9,7 millions d'euros entre 1999 et 2005.

Sur la base de ce diagnostic, que vous partagez, monsieur le sénateur, Jean-François Copé a tenu à simplifier et à alléger fortement la taxe pesant sur les jeux traditionnels.

Cette réforme entrera en vigueur le 1er janvier 2007. Chaque appareil sera désormais frappé d'une taxe annuelle de 5 euros. En outre, celle-ci sera simplifiée puisqu'un taux unique se substituera à un système devenu trop complexe.

En revanche, les formalités déclaratives nécessaires au suivi de cette activité seront maintenues.

Vous soulignez à juste titre, monsieur le sénateur, qu'on passe ainsi d'une taxe municipale à une taxe nationale. À cet égard, je vous confirme que le Gouvernement a bien prévu de compenser les pertes de recettes des communes au niveau du produit de la taxe en 2006. C'est une bonne affaire pour celles-ci puisque le rendement de cette taxe baissait continuellement. Entre 1999 et 2006, le produit moyen collecté par commune est passé de 420 à moins de 280 euros. Cette mesure va donc sécuriser les ressources des communes.

Au total, cette mesure « gagnant-gagnant » pour l'ensemble des acteurs se traduira, nous l'espérons, par la réinstallation rapide de 40 000 appareils et le maintien de 20 000 d'entre eux, actuellement menacés, par la création d'un nouveau flux de clientèle dans les bars, par l'accroissement de l'offre et de la convivialité des établissements, situés parfois dans des zones rurales ou des zones urbaines sensibles, et par la création de 600 emplois directs dans les forces commerciales et dans la maintenance de ces jeux.

Enfin, cette mesure sera autofinancée par le surcroît d'activité prévu, qui donnera lieu, grâce aux jeux maintenus ou aux nouvelles installations, à des rentrées accrues de TVA.

M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.

M. Robert Tropeano. Monsieur le ministre, vous annoncez une compensation pour le manque à gagner pour le budget des communes. Je vous en remercie. Néanmoins, j'espère que vos promesses seront suivies d'effet et que vous respecterez votre engagement à ce que les collectivités locales ne soient pas lésées par ces nouvelles mesures.

impôts locaux : compensations en faveur des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 1156, adressée à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, on parle beaucoup d'autonomie des collectivités locales, mais, en la matière, il faut distinguer le « vouloir » et le « pouvoir ».

C'est pourquoi j'attire votre attention sur les interrogations nées de la multiplication des exonérations visant les quatre impôts directs locaux.

Certes, l'État a mis en place des dispositifs de compensation pour chacune de ces exonérations, mais les collectivités locales sont très souvent confrontées à l'opacité de leur mode de calcul.

Ainsi, ont été recensées une dizaine d'exonérations possibles : cinq pour la taxe professionnelle, deux pour la taxe foncière sur les propriétés bâties, deux également pour la taxe foncière sur les propriétés non bâties et une pour la taxe d'habitation.

Dès lors, l'Association des maires de France n'a-t-elle pas eu raison de rappeler avec une certaine énergie, dans le numéro de janvier 2006 de sa Lettre, que « d'aménagements en replâtrages, de dégrèvements en exonérations, le lien avec les contribuables locaux est de plus en plus ténu, l'État étant devenu le premier d'entre eux » ? L'auteur de l'article ajoutait à juste titre que les bases des quatre taxes étaient souvent injustes et inadaptées aux réalités et donc aux besoins des collectivités locales.

En effet, exemple parmi d'autres, la loi du 30 juillet 1990 relative à la révision générale des évaluations des immeubles retenus pour la détermination des bases des impôts directs locaux a posé notamment le principe d'une révision générale des évaluations cadastrales et renvoyé à une loi ultérieure le soin de déterminer la date d'entrée en vigueur de cette révision.

Nous sommes en 2006 et la révision des bases des impôts directs locaux est toujours en suspens. Certes, de nombreux gouvernements ont précédé celui auquel vous appartenez, monsieur le ministre, mais il semble vraiment indispensable que l'État, pour obtenir l'adhésion de l'ensemble des collectivités locales à l'acte II de la décentralisation marquant leur autonomie financière, désormais garantie par la Constitution, clarifie sa position sur les mécanismes de compensation des exonérations visant les impôts locaux.

Ainsi, il est essentiel que les mesures prises soient de nature à compenser intégralement et de manière pérenne le manque à gagner pour les collectivités locales.

Quelles mesures pourraient être adoptées pour rassurer les élus locaux sur ce point ? Ils ont besoin de disposer d'une information claire et objective, afin de connaître précisément, par type d'exonération, la compensation allouée chaque année. La décentralisation doit être transparente et apporter aux élus locaux les éléments nécessaires à l'établissement de leur budget.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, la multiplication des mécanismes d'exonérations compensées les rend parfois peu lisibles pour les élus et les contribuables locaux. Il en va de même des bases des impôts directs, toujours fixées par référence aux travaux de la révision de 1970.

S'agissant du vieillissement des bases, les travaux menés à la suite de la loi du 30 juillet 1990 ont mis en évidence que cette révision aboutissait à des transferts importants entre contribuables, dans des conditions inéquitables.

Si le principe d'une révision générale paraît aujourd'hui écarté, des pistes de travail sont à l'étude pour l'amélioration des outils de connaissance et de mise à jour de la matière imposable.

Dans ce contexte, les diverses exonérations, compensées par l'État, instituées au cours des dernières années ont pour objectif légitime de limiter la pression fiscale tout en préservant les ressources des collectivités locales.

Les élus bénéficient d'un dispositif complet d'information sur les modalités de calcul de ces compensations.

Premièrement, des commentaires sont apportés par les instructions de la direction générale des impôts, les circulaires de la direction générale des collectivités territoriales et sur le site Internet du ministère de l'économie.

Deuxièmement, le montant annuel de ces compensations et leurs modalités de calcul figurent sur les états de notification prévisionnels n°1259 communiqués chaque année aux collectivités.

Troisièmement, les élus locaux peuvent interroger les pôles de fiscalité directe locale de la direction générale de la comptabilité publique.

Enfin, monsieur le sénateur, je tiens à vous rassurer également sur l'autonomie financière des collectivités locales.

Les réformes successives ont conduit à de nombreux allégements et les compensations ont renforcé, c'est vrai, le poids de l'État dans la fiscalité directe locale. Toutefois, le Gouvernement a souhaité garantir aux collectivités territoriales le respect de leur autonomie financière. La maîtrise de leurs ressources est reconnue par l'article 72-2 de la Constitution, et la loi organique du 29 juillet 2004 garantit aux collectivités locales le maintien des ressources propres au niveau constaté au titre de 2003.

À cet égard, les allocations compensatrices ne s'analysent pas comme des ressources propres.

Les conclusions de l'audit demandé par le ministre délégué au budget et à la réforme de l'État sur les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux viennent d'être mises en ligne sur le site du forum de la performance.

On y trouve un certain nombre de propositions, notamment la création d'un tableau de bord départemental permettant d'analyser les opérations de dégrèvements et de calculer le taux de recouvrement des indemnités compensatrices, l'investissement dans la dématérialisation, en particulier par la création d'un compte fiscal des collectivités, et, enfin, l'information des contribuables dont le montant d'impôt à payer devient nul.

Les suites de ces propositions seront discutées dans le cadre de la Conférence nationale des finances publiques.

L'amélioration de l'information doit ainsi permettre de mieux éclairer les choix politiques, de responsabiliser chaque collectivité et de rendre perceptible par le contribuable la politique d'allégement fiscal menée par l'État.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Je tiens à vous remercier, monsieur le ministre - et ce n'est pas un merci convenu, c'est un merci vrai -, car vous avez été complet, précis et objectif.

Les élus sont des généralistes, et la technologie d'aujourd'hui, qui permet d'accéder à toutes les informations, n'a peut-être pas encore pénétré la France profonde. Mais j'ai beaucoup apprécié votre volonté de ne pas créer un fossé avec les collectivités locales et de leur donner toute la possibilité d'obtenir les éléments qui leur permettront d'établir leur budget.

conditions de résorption des sites de stockage des pneumatiques usagés

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut, auteur de la question n° 1149, adressée à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable.

M. Bernard Dussaut. Madame la ministre, je veux d'abord vous remercier de votre présence.

La circulaire du 8 novembre 2005 relative au traitement des stocks abandonnés de pneumatiques usagés a précisé le décret du 24 décembre 2002 relatif à l'élimination des pneumatiques usagés.

L'objectif, vous l'avez vous-même défini, madame la ministre : c'est la résorption de l'ensemble des dépôts de pneumatiques à responsable défaillant d'ici à la fin de l'année 2007.

La circulaire établit que, si l'exploitant est insolvable, cas de figure très fréquent, la responsabilité des clients est alors avérée et ceux-ci sont recherchés.

C'est ainsi que, selon la réglementation en vigueur, tant que le stock n'a pas été recyclé, les pneus entreposés demeurent la propriété des personnes qui les ont apportés et, s'il y a des difficultés pour retrouver les derniers détenteurs, « le procureur de la République pourra être saisi afin qu'il diligente une enquête de gendarmerie pour les rechercher ». Le cadre réglementaire est clair et les préfectures disposent des moyens de le faire appliquer.

Avec près de 8 000 tonnes de pneumatiques usagés, le site d'Espiet, en Gironde, recensé en annexe de la circulaire, est l'un des 114 dépôts de pneumatiques dont le responsable est défaillant.

Sur ce site, ancienne friche industrielle, outre les nuisances olfactives, les risques sanitaires et les menaces d'incendie sont considérables, et le précédent du sinistre qui a eu lieu en octobre 2002 à Cérons, dans le département de la Gironde, avec ses conséquences environnementales et écologiques, est dans toutes les mémoires.

L'exploitant de l'installation classée d'Espiet, légalement tenu de remettre le site en état, a été mis en liquidation et l'État a désigné, il y a plus d'un an, un mandataire judiciaire.

Les habitants comme les élus, aux côtés de l'association EDEN - Espiet Dépollué Espace Nature -, souhaitent savoir où en est la procédure d'identification des propriétaires de pneus et obtenir des précisions, madame la ministre, sur les délais envisagés avant le nettoyage du site et sa dépollution complète.

Les mêmes interrogations s'appliquent au site recensé de Saint-Cricq, à Cérons, dont M. le maire, Yves Fourthon, vous a rappelé dans un courrier récent, reprenant les conclusions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, que « seule une évacuation totale de ce dépôt garantirait que les événements de l'automne 2002 ne se reproduiront pas ».

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, le problème des dépôts de pneumatiques usagés dans votre région est un sujet que je suis, vous le savez, avec la plus grande attention.

Le démarrage, au début de l'année 2004, de la filière d'élimination des pneumatiques usagés a permis d'assurer, dans de bonnes conditions, l'élimination des pneumatiques usagés nouvellement produits. Mais restait à assurer, vous l'avez dit, l'évacuation des dépôts qui se sont constitués par le passé. C'est pour moi, je tiens à vous l'assurer, une priorité.

Dès ma prise de fonctions, j'ai souhaité que les actions visant à les faire disparaître soient fortement intensifiées, car de tels dépôts représentent des nuisances inacceptables pour les riverains. Il faut également tenir compte des problèmes de salubrité publique et de risques d'incendie.

J'ai donc donné des instructions aux préfets pour les 114 sites qui étaient alors recensés, soit un total estimé de 242 000 tonnes de pneumatiques usagés. J'ai fait de la résorption de ces dépôts une priorité de l'action de l'inspection des installations classées pour 2006, et je vous confirme, monsieur le sénateur, que cette priorité sera reconduite en 2007.

Un an après, 41 sites - représentant 56 000 tonnes - ont été évacués, 18 sites - représentant 23 000 tonnes - sont toujours exploités et des actions sont engagées pour que le dépôt disparaisse.

Pour 55 sites, l'entreprise qui exploitait le dépôt a disparu ou n'est plus solvable. Comme vous le soulignez, ce sont alors les clients de cette société défaillante qui demeurent responsables de leurs pneumatiques. Il leur appartient de les reprendre. Je suis fermement attachée à ce principe, car une solution ne pourra être trouvée que si chacun assume effectivement ses responsabilités.

Il restera cependant toujours des pneumatiques usagés pour lesquels aucun responsable ne peut être identifié et au sujet desquels il nous faut trouver une solution.

Parallèlement aux nombreuses actions menées par les services de l'État, les manufacturiers ont créé la société Aliapur pour remplir collectivement les obligations qui leur incombent en matière d'élimination des pneumatiques usagés.

Ils ont décidé de prendre en charge, en plus de leurs obligations réglementaires, 30 000 tonnes de pneumatiques sur ces vieux dépôts abandonnés. Ce programme est en cours de réalisation et je tiens à remercier les manufacturiers pour cet engagement citoyen.

S'agissant plus particulièrement de votre région, monsieur le sénateur, l'Aquitaine, le dépôt de Thenon, en Dordogne, est en cours d'évacuation et le dépôt d'Arthez-de-Béarn, dans les Pyrénées-Atlantiques, sera prochainement vidé, quand les dernières démarches vis-à-vis des clients de la société défaillante seront achevées.

En ce qui concerne le dépôt d'Espiet, la société exploitante est défaillante. Le préfet a engagé les démarches pour identifier les auteurs des dépôts et leur demander de reprendre les pneumatiques usagés. Conformément à ce que j'ai indiqué à M. Garraud, député, ainsi qu'à votre collègue M. César, je vous confirme que la société Aliapur prendra en charge le reliquat des pneumatiques usagés présents sur le site quand ces démarches auront été menées à leur terme, c'est-à-dire assez prochainement, je n'en doute pas.

De manière générale, il faut trouver une solution pérenne pour l'élimination de ces dépôts, ce qui ne peut passer que par un effort de chacun.

Il convient d'abord que les derniers clients des sociétés défaillantes acceptent toujours de reprendre leurs pneumatiques, ce qui accélérerait considérablement les démarches. Je regrette - je le dis haut et fort - que certaines enseignes de la distribution spécialisée n'aient pas encore adopté une attitude plus constructive, alors même que le Conseil d'État a confirmé le bien-fondé des démarches engagées par l'administration.

Il convient ensuite que l'ensemble des acteurs concernés fasse un effort supplémentaire pour prendre en charge les pneumatiques sans responsables identifiés. Les manufacturiers ont montré leur volonté d'agir alors qu'ils n'avaient aucune obligation, mais il ne serait pas normal à mes yeux - je pense que vous partagerez cette opinion - qu'ils soient seuls à le faire alors que de nombreuses autres personnes sont aussi concernées qu'eux. Mes services ont engagé des discussions à cette fin, et je compte sur chacun de ces acteurs - outre les manufacturiers, les professionnels de la distribution, du déchet, les constructeurs et réparateurs automobiles... - pour trouver une solution durable à cette question.

En un peu plus d'un an, nous avons beaucoup avancé. Il reste encore du chemin à faire, mais, dans votre région, particulièrement concernée, nous faisons des efforts importants pour que les choses s'améliorent rapidement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Dussaut.

M. Bernard Dussaut. Madame la ministre, je ne mets en doute ni votre bonne foi ni votre volonté d'éliminer le plus rapidement possible ces sites de pneumatiques usagés, mais je n'ai pas obtenu de réponse très précise sur le délai dans lequel sera entrepris le nettoyage du site d'Aspiet.

À quelques kilomètres, à Cérons, la situation a un peu évolué depuis 2002, puisque le site a été clôturé et en partie sécurisé, mais les pneumatiques sont toujours là en dépit des mises en garde de l'ADEME contre un nouvel incendie qui pourrait se produire : dans la mesure où l'on n'est pas loin du Sauternais, je vous laisse imaginer ce qui pourrait en résulter !

En Aquitaine, quelques sites ont été dépollués ; je souhaite que ceux d'Espiet et de Cérons le soient à leur tour le plus rapidement possible.

réforme du financement des activités prud'homales

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, auteur de la question n° 1157, adressée à M. le ministre de la justice.

Mme Éliane Assassi. Madame la ministre, j'ai souhaité appeler une nouvelle fois l'attention du garde des sceaux sur la réforme du financement des activités prud'homales que le Gouvernement veut faire adopter.

À la suite des vives critiques exprimées par l'ensemble des organisations syndicales dès la présentation de cette réforme au Conseil supérieur de la prud'homie le 5 mai 2006, j'avais interpellé M. le garde des sceaux au moyen d'une question écrite.

En dépit de sa réponse rapide, dans des termes qui se voulaient de surcroît rassurants, j'estime que ce projet de réforme, rejeté par les juges concernés au premier chef, demeure toutefois marqué par la volonté du Gouvernement de remettre en cause purement et simplement l'existence des conseils de prud'hommes.

Sous prétexte d'« encadrer » l'activité prud'homale, ce projet vise en réalité à limiter les moyens d'indemnisation des juges prud'homaux et, par là même, le temps que pourront consacrer les conseillers prud'homaux à chaque dossier.

Contrairement aux affirmations du Gouvernement et malgré les artifices sémantiques employés, la réforme en question revient à imposer la forfaitisation de l'indemnisation des conseillers prud'homaux, qui se verront contraints de rédiger les jugements en trois heures, les ordonnances en une heure et les rapports et procès-verbaux en trente minutes, quelles que soient la nature et la complexité des dossiers à traiter.

Il va sans dire que cette réforme va diminuer de façon drastique les moyens matériels et humains de la juridiction prud'homale, déjà très insuffisants, et porter atteinte aux droits des justiciables, à la fonction de magistrat.

Au-delà, j'y vois une attaque contre les droits des travailleurs et les conventions collectives. J'estime, pour ma part, que l'on ne doit pas sacrifier la justice prud'homale de notre pays sur l'autel de considérations budgétaires, a fortiori si elles tiennent à des présupposés idéologiques.

En revanche, compte tenu de leur spécificité, il convient de donner à ces juges, qui ne sont pas des professionnels, le temps nécessaire à la rédaction de jugements de qualité, temps qui varie en fonction de la complexité du dossier à traiter, de l'expérience, de l'ancienneté ou de la formation du rédacteur.

Les conseillers prud'homaux sont très inquiets quant à l'avenir de la justice prud'homale, d'autant plus que, selon une méthode pour le moins singulière, le Gouvernement et sa majorité soufflent le chaud et le froid en la matière.

Quelle est, en effet, cette méthode qui consiste à inscrire une réforme de la prud'homie dans le projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, puis à la faire supprimer dès son passage à l'Assemblée nationale, avec l'appui de la majorité parlementaire de droite, par la voix de M. Ollier, au motif qu'elle aurait vocation à figurer dans le projet de loi de finances, pour la faire réapparaître ensuite au Sénat, grâce à un amendement déposé par M. Hyest et les membres du groupe UMP ? À quoi jouent donc le Gouvernement et sa majorité parlementaire ?

Ils voudraient étouffer la mobilisation des conseillers prud'homaux, qui ont manifesté contre ce projet de réforme à plusieurs reprises, qu'ils ne s'y prendraient pas autrement !

Madame la ministre, le garde des sceaux va-t-il prendre, aujourd'hui même, l'engagement de revenir sur cette réforme figurant désormais à l'article 30 A du texte pour le développement de la participation et l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social, texte qui doit encore être examiné par une commission mixte paritaire avant son adoption définitive ?

Va-t-il s'engager à rouvrir les discussions avec les partenaires sociaux, qui ont des propositions concrètes à formuler pour l'amélioration du fonctionnement et du financement des conseils de prud'hommes, en vue de parvenir enfin à un accord sur cette importante question ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Madame le sénateur, vous avez bien voulu appeler l'attention de M. le garde des sceaux sur l'indemnisation des conseillers prud'hommes.

Le régime juridique actuellement applicable repose sur des textes anciens, dont l'interprétation a conduit, au fil des années, à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire.

Dans le prolongement du rapport qui a été remis par le procureur général honoraire Henri Desclaux, le 5 octobre 2005, et qui a été bien accueilli par les organisations syndicales, un projet de loi et deux projets de décret ont été rédigés après avoir recueilli les observations du Conseil supérieur de la prud'homie.

Le projet de réforme exclut toute forfaitisation et retient un système d'indemnisation reposant sur l'activité réelle des conseillers.

Un des projets de décret détermine les durées moyennes de rédaction des décisions rendues par les conseillers prud'hommes : trente minutes pour un procès-verbal, une heure pour une ordonnance et trois heures pour un jugement.

Il prévoit également que ces durées pourront être dépassées, sur autorisation de la formation de jugement, lorsque la complexité du dossier, le nombre de parties à l'instance et la multiplicité des chefs de demande le justifient.

Par ailleurs, les projets de texte visent à augmenter le nombre d'activités indemnisables, à améliorer la prise en charge des frais de déplacement des conseillers prud'hommes et à majorer de 15 % le taux de vacation.

Dès lors, pour le bon fonctionnement de la justice prud'homale, il semble indispensable de finaliser cette réforme assurant une meilleure indemnisation des conseillers prud'hommes, afin de prévoir un dédommagement qui soit le juste reflet de leur activité pour le service public de la justice.

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la ministre, je vous remercie des éléments de réponse que vous venez de nous apporter.

Toutefois, je me permets d'insister sur le fait que les juges consulaires sont très inquiets quant à l'avenir de leur activité, et ils ont raison de l'être, sachant qu'aucun consensus n'a été trouvé, ni même recherché, semble-t-il.

Le Gouvernement pousse ainsi les juges consulaires, mobilisés pour défendre le service public de la justice prud'homale, à suspendre des audiences, à titre de protestation. Le Gouvernement prend donc toute la responsabilité des conséquences de ces actions revendicatives.

Or la question de la prud'homie est très importante, puisqu'elle touche au droit du travail. On a bien vu le rôle qu'ont joué ces juridictions, notamment au regard du « contrat nouvelles embauches », ou CNE.

Il n'est pas étonnant que le Gouvernement, aiguillonné par le patronat, souhaite remettre en cause l'activité de ces juges, qui se permettent de remettre en cause le dispositif du CNE !

À cet égard, je tiens à rappeler la circulaire du 8 mars 2006 par laquelle le ministre de la justice ordonne aux procureurs généraux d'intervenir systématiquement dans les procédures prud'homales concernant le CNE et de faire appel des décisions visant à le remettre en cause.

Ces textes sont sous-tendus par une logique, politique et patronale, qui entend « casser » le code du travail et toutes les garanties qu'il apporte aux salariés.

La juridiction prud'homale joue un rôle essentiel, je le répète, dans la défense du droit du travail, notamment pour les salariés les plus exposés, et elle fonctionne, comme vous l'avez rappelé, grâce aux compétences et à l'engagement de femmes et d'hommes qui méritent de la considération.

Telles sont les raisons pour lesquelles je tenais à interpeller M. le garde des sceaux sur ce thème. J'ajoute que la réponse ministérielle de ce jour est très attendue par les juges prud'homaux.

retraite des agents de l'état transférés aux collectivités locales

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, auteur de la question n° 1145, adressée à M. le ministre délégué aux collectivités territoriales.

M. Éric Doligé. Madame le ministre de l'écologie et du développement durable, ma question s'adresse à votre collègue ministre délégué aux collectivités territoriales, mais votre connaissance des collectivités territoriales vous facilitera les choses pour me répondre sur ce sujet très technique.

Je souhaite vous faire part de diverses inquiétudes, fort légitimes, des collectivités locales quant à l'avenir des comptes de la CNRACL, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, avenir qui aura certainement une incidence, à moyen et long terme, sur les finances des collectivités territoriales, ainsi que sur celles des établissements de soins et de santé.

Le fonctionnaire de l'État ayant opté pour le statut de fonctionnaire territorial relèvera, pour sa retraite, de la CNRACL, laquelle devra lui verser une pension pour l'ensemble de sa carrière dans la fonction publique.

En clair, ces fonctionnaires - probablement plus de 100 000, selon les données actuelles - auront cotisé durant la première partie de leur carrière au titre des pensions civiles et militaires.

Cependant, le régime de l'État, qui aura perçu ces cotisations, ne servira pas les prestations correspondantes, lesquelles seront servies par la CNRACL, alors même qu'elle n'aura pas reçu les cotisations pour la période considérée.

La somme en jeu représente probablement plus de 10 milliards d'euros, que les collectivités locales auront à payer par le biais de leurs cotisations. Une compensation est-elle prévue sur ce point ?

Ensuite, avec quels moyens la Caisse pourra-t-elle garantir aux agents transférés l'instruction de leur dossier de retraite ? En effet, cette dernière est tenue de communiquer à ses cotisants des informations précises sur leur retraite, à partir de relevés de carrière dont les éléments lui sont transmis par les employeurs. Les collectivités locales disposeront d'un délai de six mois pour faire remonter à la Caisse les données relatives à leurs agents, ce qui représentera un surcroît de tâches considérable pour leurs services.

Par ailleurs, s'agissant des agents en détachement de l'État, contrairement à la position administrative actuelle, la nouvelle bonification indiciaire sera-t-elle finalement prise en compte dans l'assiette de calcul de la pension de retraite ?

D'autre part, est-il dans les intentions du Gouvernement de garantir, dans le calcul des pensions, la prise en compte des années de non-titulaire qui auraient précédé la période de stage des agents de l'État ? Il semble que les agents ayant opté pour la fonction publique territoriale régularisent leurs cotisations pour la période où ils étaient agents contractuels en les versant au régime de l'État, alors que c'est la CNRACL qui servira la retraite correspondante.

Je souligne également que l'intégration de la population décentralisée, dont l'âge moyen est légèrement plus élevé que celui des cotisants actuels de la CNRACL, aura pour conséquence d'augmenter rapidement le montant des prestations versées, qui dépassera celui des cotisations au cours des années 2015 à 2020 et donnera lieu à un appel de cotisations complémentaires.

La Caisse anticipe également des dépenses supplémentaires d'allocations, en particulier pour les allocations temporaires d'invalidité et les arrêts de travail. Selon les premières études, l'accroissement des prestations avoisinerait 10 %.

Enfin, selon quelles modalités la Caisse nationale est-elle en mesure de garantir pour les personnels relevant de la catégorie active - pénibilité, métiers à risque -, le bénéfice de la limite d'âge appliquée dans leur corps d'origine ?

Telles sont, madame le ministre, les questions quelque peu complexes que je souhaite vous poser.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, les agents transférés dans le cadre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales et qui opteront pour l'intégration dans la fonction publique territoriale seront affiliés à la Caisse nationale de retraites des collectivités locales.

En 2005, la Caisse dénombrait 1 849 182 cotisants. À supposer que les 125 000 fonctionnaires transférés optent pour l'intégration dans la fonction publique territoriale, cela se traduirait par une augmentation d'environ 7 % des affiliés de la Caisse. En réalité, nous n'atteindrons pas ce chiffre. Tout porte à croire que les personnels en fin de carrière opteront plutôt pour le détachement et que les personnels plus jeunes demanderont leur intégration.

Comme vous le savez, l'exercice du droit d'option s'échelonnera, respectivement, jusqu'au 31 décembre 2007 pour les fonctionnaires du ministère de l'Éducation nationale et jusqu'au 31 décembre 2008 pour les personnels du ministère de l'équipement. Les affiliations à la CNRACL, pour ceux qui opteront pour l'intégration, s'échelonneront jusqu'au 1er janvier 2009.

La gestion de la Caisse de retraite est assurée par la Caisse des dépôts et consignations. De par le mandat qui lui est confié, cette dernière doit mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la gestion du régime de retraite, tant en personnel qu'en matériel.

S'agissant des agents qui opteront pour le détachement, conformément à l'article 71 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, la retenue pour pension sera calculée sur le traitement afférent à l'emploi de détachement. Pour tirer toutes les conséquences de cette disposition, un projet de décret sera prochainement soumis au Conseil d'État, décret tendant à préciser, dans le code des pensions, que le traitement à prendre en compte pour la liquidation de la retraite est celui afférent à l'emploi de détachement.

En ce qui concerne la nouvelle bonification indiciaire, la NBI, qui est prise en compte pour le calcul de la pension de retraite, l'article 3 du décret du 3 juillet 2006 portant attribution de la NBI à certains personnels de la fonction publique territoriale, précise qu'elle continue à être versée aux fonctionnaires de l'État détachés qui ne peuvent bénéficier, à la date de leur détachement, d'une NBI équivalente dans la fonction publique territoriale.

La retraite des fonctionnaires de l'État ayant opté pour le statut de fonctionnaire territorial sera liquidée par la CNRACL, qui leur versera une pension pour l'ensemble de leur carrière dans la fonction publique, État et collectivité territoriale confondus. Seront pris en compte les services effectués en tant que titulaire, en tant que stagiaire, ainsi que les services de non-titulaire qui auront été validés.

Je vous rappelle que, depuis la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, la validation des services de non-titulaire doit être demandée dans les deux années qui suivent la date de la notification de la titularisation. Toutefois, à titre transitoire, les fonctionnaires titularisés avant le 1er janvier 2004 ont jusqu'au 31 décembre 2008 pour demander la validation de leurs services.

Cette règle est applicable à tous les fonctionnaires des trois fonctions publiques.

Il n'apparaît pas que des dispositions particulières soient à prendre pour les agents transférés, cette règle s'appliquant aussi bien à ceux qui choisiront d'être intégrés dans la fonction publique territoriale qu'à ceux qui opteront pour la conservation du statut de fonctionnaire de l'État.

La loi du 13 août 2004 a évidemment pris en compte la situation particulière des personnels transférés, dont les emplois sont classés en catégorie active. L'article 111 prévoit que ceux d'entre eux qui opteront pour l'intégration conserveront le bénéfice de ce classement et pourront même compléter la durée des services effectifs exigée au sein de la fonction publique territoriale s'ils exercent des fonctions de même nature. Ils conserveront donc la possibilité de partir en retraite à cinquante-cinq ans.

Selon l'instruction commune du 7 juillet 2006 que les ministères de tutelle ont adressée à la CNRACL, cette dernière devra s'assurer que les fonctionnaires concernés sont détenteurs d'un justificatif de la direction des ressources humaines de leur ministère d'origine, attestant leur appartenance à la catégorie active, ainsi que la durée des services effectués dans cette catégorie. Le cas échéant, la Caisse pourra demander aux employeurs territoriaux une attestation certifiant que les agents concernés ont exercé, pendant le temps requis dans la fonction publique territoriale, des fonctions de même nature que celle qu'ils exerçaient antérieurement dans la fonction publique d'État.

Dès lors que ces pièces auront été produites, les fonctionnaires concernés conserveront le bénéfice de la limite d'âge appliquée dans leur corps d'origine.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. Madame le ministre, j'ai obtenu les réponses que je souhaitais entendre sur la quasi-totalité de mes questions.

Toutefois, je pense que l'on sous-estime actuellement le nombre de fonctionnaires de l'État qui passeront au service des collectivités locales. En effet, le premier transfert, qui a été décidé au 31 août, montre que 80 % des agents ont fait jouer leur droit d'option, soit plus de 100 000 fonctionnaires.

À l'évidence, ce résultat est source de satisfaction pour les collectivités locales, qui constatent que les fonctionnaires sont heureux de les rejoindre. En revanche, un problème se pose au regard de l'équilibre entre les régimes.

En effet, précédemment, un équilibrage naturel s'opérait entre la CNRACL et le régime des pensions civiles et militaires, quelques milliers de fonctionnaires passant tous les ans de l'un à l'autre.

Désormais, nous devons nous préparer à affronter un déséquilibre considérable, puisque 100 000 fonctionnaires vont probablement intégrer la fonction publique territoriale : on estime que, dans une dizaine d'années, la CNRACL sera potentiellement en déficit de plus de 10 milliards d'euros, ce qui la conduira à augmenter prochainement les taux de cotisation applicables aux collectivités locales, de même, sans doute aussi, d'ailleurs, que les taux applicables au personnel hospitalier.

En fin de compte, ce sont les collectivités locales qui seront obligées d'apporter la somme nécessaire pour équilibrer les régimes. Il me semble donc indispensable, dans le cadre de la décentralisation, de mener une réflexion sur cette question.

nécessité de considérer le bessin comme un bassin d'emploi autonome

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, auteur de la question n° 1146, adressée à M. le ministre délégué à l'aménagement du territoire.

M. Jean-Léonce Dupont. Madame la ministre, déjà en 2003, les données économiques, juridiques, sanitaires et sociales, scolaires, associatives, démontraient que le bassin d'emploi du Bessin devait être distingué de celui de Caen, chacun correspondant globalement à des régions naturelles et à des pôles de vie. Malgré ce constat, la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, la DRTEFP, ainsi que la direction régionale de l'INSEE ont maintenu la présentation de leurs données statistiques, sans remettre en cause la pertinence d'un unique bassin de Caen-Bayeux.

Or, le Bessin, région clairement identifiée, est constitué en schéma de cohérence territoriale, ou SCOT, avec les cantons de Balleroy, Isigny, Trévières, Ryes, Bayeux, Creully et la communauté de communes du Val de Seulles dans le canton de Tilly. Il compte près de 70 000 habitants, soit un peu plus que les bassins autonomes de Vire - 56 000 habitants - et de Coutances - 60 000 habitants.

En outre, associer le Bessin au bassin de Caen masque les difficultés rencontrées par ce seul territoire et ne lui permet pas de bénéficier, comme Caen et son agglomération, des aides telles que la prime d'aménagement du territoire, la PAT, dont il a été privé pendant de si nombreuses années, ou de mesures exceptionnelles comme les zones franches, qui sont de nature à attirer l'activité économique et à stimuler, notamment, l'offre d'emplois.

Avec le désengagement progressif du Crédit Lyonnais, qui représente une perte de 1 200 emplois, la fermeture de Moulinex, qui a fait disparaître 450 emplois en comptant les sous-traitants, la fermeture de l'usine locale du groupe belge Ontex, qui a touché 106 emplois, et la suppression annoncée de 21 emplois à l'usine Prodis, la situation économique s'est fortement dégradée dans le Bessin. Les statistiques sur le bassin d'emploi Caen-Bayeux ne mettent absolument pas en relief ces spécificités du Bessin et n'offrent ni information précise ni visibilité aux élus et autres acteurs locaux.

Attache ayant été prise avec l'INSEE et la DRTEFP, il semble que les critères à réunir pour être constitué en bassin autonome ne soient pas très clairs et varient d'une institution à l'autre. Ainsi, l'INSEE considère que les zones d'emploi, sauf exception - mais il semble que les exceptions soient nombreuses -, doivent comprendre un minimum de 40 000 actifs, tandis que la DRTEFP rappelle qu'une circulaire de du 23 septembre 1992 précise que les nouvelles zones doivent compter 25 000 actifs. En outre, la DRTEFP souligne que, pour une éventuelle révision du découpage, la mise en oeuvre attendue des contrats de pays est un préalable, ajoutant que, en toute hypothèse, elle ne pourrait que se faire sur la base d'un SCOT.

Aussi, avec la création effective du pays « du Bessin au Virois », dans l'ouest du département, et celle du SCOT du Bessin, le Bessin remplit pleinement aujourd'hui les conditions nécessaires pour être reconnu comme bassin d'emploi autonome, ainsi que le souhaite la majorité des élus de ce territoire. Interrogés sur le sujet, plus d'une centaine de conseils municipaux, sur les 132 que compte le Bessin, ont adopté des délibérations en ce sens.

C'est pourquoi je demande au Gouvernement d'actualiser le périmètre des zones d'emploi et d'intervenir auprès de l'INSEE, de la DARES et de la DATAR pour que le Bessin soit enfin considéré comme un bassin d'emploi autonome.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la nécessité de considérer le Bessin comme un bassin d'emploi autonome. Plus précisément, vous souhaitez que la zone d'emploi de Caen-Bayeux soit subdivisée de façon que les spécificités de ce territoire soient analysées systématiquement lors de la production des statistiques élaborées à l'échelle des zones d'emploi.

Le ministre délégué à l'aménagement du territoire souhaite en premier lieu vous rappeler que les zones d'emploi ont été créées en 1983. Le découpage des vingt-deux régions en 365 zones d'emploi a été effectué conjointement par l'INSEE et les services statistiques du ministère du travail, puis proposé aux institutions publiques régionales et départementales.

Le périmètre des zones d'emploi a été actualisé en 1994 pour prendre en compte les résultats du recensement de 1990, ce qui a abouti à un découpage en 348 zones.

J'ajoute que ces zones d'emploi devaient théoriquement regrouper au minimum 40 000 actifs. Toutefois, cette dernière contrainte n'a pu être respectée dans certaines régions, comme en Basse-Normandie, notamment dans les zones d'habitat dispersé.

En 1991, les directions régionales du travail et de l'emploi et celle de l'INSEE ont étudié, dans le cadre de la révision des zones d'emploi, la possibilité de subdiviser les zones de Caen-Bayeux et d'Alençon-Argentan. Cependant, cette demande n'avait pu être prise en compte. Aucun redécoupage des zones d'emploi n'a été opéré depuis 1994.

Ainsi, dans le Bessin tel que vous l'identifiez, monsieur le sénateur, on dénombrait en 1999 près de 24 000 emplois au lieu de résidence. On ne dispose pas aujourd'hui du nombre d'actifs résidant et travaillant dans le périmètre pressenti. Toutefois, on dénombrerait environ 18 000 postes de travail dans les établissements localisés dans ce périmètre en 2004.

On peut penser que la révision de ce zonage d'étude ne pourra être engagée à l'échelon national que lorsque les nouveaux résultats issus du cycle des cinq enquêtes de recensement seront disponibles, vraisemblablement pas avant 2009 ou 2010.

Cependant, l'INSEE utilise localement la notion de bassin d'emploi correspondant à des découpages un peu plus fins des zones d'emploi ; c'est le cas pour l'INSEE de Basse-Normandie. Certaines zones d'emploi sont ainsi découpées en deux bassins d'emploi : Caen et Bayeux, Avranches et Granville, Alençon et Argentan, Mortagne-au-Perche et L'Aigle. Les autres bassins d'emploi coïncident en revanche avec une zone d'emploi entière : c'est le cas de Lisieux, Vire, Flers, Saint-Lô, Coutances et Cherbourg.

Cette notion de bassin d'emploi est souvent utilisée, de manière générique, pour définir l'aire d'influence d'un pôle économique particulier.

Pour programmer les aides de l'État au logement, les directions régionales et départementales de l'équipement utilisent les bassins d'habitat, qui coïncident en Basse-Normandie avec les bassins d'emploi tels que les a définis l'INSEE. Toutefois, ces découpages et cette convergence de périmètres ne sont pas généralisés à tout le territoire.

Vous redoutez, monsieur le sénateur, que l'entité de la zone d'emploi Caen-Bayeux ne masque par son ampleur les difficultés rencontrées par ce seul territoire et que des aides telles que la PAT ou le dispositif des zones franches, que vous avez cités, ne lui échappent. En réalité, le zonage de ces aides n'est pas défini selon les critères des zones d'emploi : ainsi, pour la PAT, par exemple, ce sont ceux du bassin d'emploi qui avaient été utilisés pour la Basse-Normandie.

Pour ce qui est du futur zonage des aides à finalité régionale, qui est d'ailleurs en cours d'examen à Bruxelles, vous savez certainement qu'il est proposé que des communes du Bessin entrent dans le zonage de la Basse-Normandie. Cette proposition s'est appuyée sur le constat de la dégradation de l'activité économique du Bessin - vous l'avez largement soulignée, monsieur le sénateur -, sans qu'il ait été besoin d'ériger celui-ci en zone d'emploi spécifique, du fait, hélas ! de la baisse de l'activité tertiaire sur ce territoire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. Madame le ministre, la réalité est très simple : quand vous n'êtes pas un bassin d'emploi autonome, vous n'êtes pas identifié par l'ensemble des décideurs lorsqu'il s'agit de mettre en place certaines politiques.

Nous avons vécu dans le passé le problème des zonages FEDER, le fonds européen de développement régional ; nous avons vécu dans le passé le problème des zonages PAT : quinze ans, madame le ministre, pour obtenir à l'arraché, et après quelles difficultés, une modification !

Nous sommes en train de préparer les contrats de projet et, de la même manière, nous constatons que, pour certaines problématiques, notre territoire ne sera pas pris en considération parce qu'il n'est pas clairement identifié. Même revisité, le découpage, qui date de 1983, est ancien ; il est indispensable de prendre effectivement en compte les données contemporaines.

Aujourd'hui, il existe une injustice territoriale qui se traduit, concrètement, par une concurrence déloyale entre les territoires. Il me semble donc tout à fait nécessaire que, dans les années qui viennent, nous revoyions le découpage actuel.

Pourquoi nous demande-t-on de créer une maison de l'emploi autonome alors que nous ne sommes pas un bassin d'emploi autonome ?

emploi des forces de l'ordre

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, auteur de la question n° 1148, adressée à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

M. Louis Souvet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer l'action des forces de l'ordre, qui, tous les jours, sont confrontées dans les cités ou les quartiers dits « sensibles » aux situations les plus dangereuses, à des traquenards prémédités aux conséquences dramatiques que l'on connaît.

L'excuse de minorité permet encore aux incendiaires de voir leurs peines divisées par deux ; hélas, elle ne réduira pas de moitié les brûlures de la victime marseillaise du bus n° 32 du 28 octobre - monsieur le président, je vous rappelle là un bien mauvais souvenir dans votre fonction de maire !

Quant à la soixantaine de personnes interpellées après des dégradations de véhicules, puis relâchées, je sais gré au ministre de l'intérieur d'avoir demandé un rapport circonstancié, renforçant par là même la crédibilité de sa détermination.

Tous les citoyens qui se reconnaissent dans les valeurs de la République française - j'en fais partie - soutiennent son action. Mon propos n'est donc pas de mettre en doute sa détermination : celle-ci est nécessaire pour un retour de l'état de droit partout et en tout lieu. Mais je me dois de relayer l'étonnement des responsables d'associations, notamment sportives, quant à l'encadrement et à la sécurisation, par exemple, des courses cyclistes, qu'on semble leur refuser de plus en plus fréquemment.

Ces responsables bénévoles sont bien conscients que les missions que j'ai évoquées au début de mon propos doivent être prioritaires quant aux moyens et aux effectifs à opposer à quelques groupuscules en mal de reconnaissance, groupuscules, faut-il le rappeler, utiles à d'autres trafiquants de grande envergure...

Mais là où les responsables associatifs s'interrogent - tout comme moi, d'ailleurs -, c'est quand on leur refuse assistance pour une compétition organisée régulièrement depuis des années. De telles compétitions mettent en valeur l'effort d'une belle jeunesse sportive et la disponibilité des bénévoles qui les encadrent ; ce sont des manifestations qui suscitent un engouement populaire de bon aloi, une adhésion fédératrice.

Dans le même temps, la puissance publique va procéder, par exemple, à la réquisition de plates-formes aéroportuaires pour permettre le déroulement de rassemblements d'un nouveau genre, rassemblements qui nécessiteront une surveillance médicale constante, se solderont au mieux par des malaises et des hospitalisations pour les causes que l'on sait, et au pire par des décès par overdose : osons appeler un chat un chat !

Je ne m'étendrai pas sur les moyens que les communes concernées, qui, comme beaucoup en milieu rural, sont généralement de taille modeste, doivent mettre en oeuvre pour dépolluer ensuite les sites en question et pouvoir les rendre à leurs usagers habituels sans risque de piqûres qui ne seraient pas dues, hélas ! à la flore ou à la faune sauvage.

Le citoyen de base s'interroge quant à l'ambiguïté de tels comportements, bien éloignés d'un quelconque concept d'effort, de fête ou de convivialité. En clair, on réprime fort logiquement le tapage nocturne, mais on tolère ce phénomène à la puissance mille, ou plus, qui s'accompagne de bien d'autres nuisances, puisque, généralement, la police ou la gendarmerie encadrent ces rassemblements et que, bien souvent, le représentant de l'État négocie avec leurs « organisateurs ».

Mes interlocuteurs, réels organisateurs dévoués de manifestations sportives coutumières - j'insiste sur ce caractère coutumier - se demandent, et je les rejoins sur ce point, si n'est pas en train de se vérifier la théorie de l'évolution développée par Platon : « Lorsque, finalement, les jeunes méprisent les lois parce qu'ils ne reconnaissent plus au-dessus d'eux l'autorité de rien et de personne, alors, c'est le début de la tyrannie. »

Par conséquent, madame la ministre, j'ai l'honneur de vous demander quelles sont les raisons dont procède cette différence de traitement. La France, c'est une majorité de citoyens qui aspirent au calme et à la tranquillité : ils comptent sur vous, ne les décevez pas ! Le sujet est terre à terre, sans aucun doute. Mais, croyez-en mon bon sens jurassien, pour ne pas dire paysan : nos concitoyens n'ont que faire de discussions et autres surenchères à propos du sexe des anges.

Les organisateurs de manifestations sportives ou culturelles sont des bénévoles. Le bénévolat constitue le squelette de la société dans laquelle nous vivons et nous épanouissons en dehors de nos activités professionnelles. Ces bénévoles ont besoin de nous, ont besoin de vous, madame la ministre.

Les maires ne leur comptent ni leur soutien ni leurs aides, car les bénévoles, les associations, les clubs animent leurs collectivités, grandes ou petites. Mais les maires ne disposent pas toujours de l'autorité légale, des droits et des moyens permettant de réguler, par exemple, la circulation sur des dizaines de communes traversées, voire sur plusieurs départements.

Par ma voix, ils vous lancent un appel. Sachez les écouter, sachez les entendre ! La voix des maires, unie à celle des volontaires, des bénévoles, représente la France des responsables, la France de ceux qui bougent, de ceux qui animent, de ceux qui forment et qui gagnent. Ils rendent notre pays plus vivant, plus attractif, plus touristique. Ils occupent bénévolement notre jeunesse. Ils comptent sur vous, ils attendent votre réponse.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur les modalités d'utilisation des forces de l'ordre suivant l'objet des événements à encadrer.

Vous faites allusion à des « rassemblements festifs », en fait des rave parties, qui bénéficieraient d'un encadrement renforcé, avec « des moyens en hommes considérables », au détriment de manifestations plus traditionnelles et plus classiques.

Le ministre d'État, ministre de l'intérieur, tient tout d'abord à souligner qu'aucune manifestation de ce type n'a eu lieu dans la circonscription de Montbéliard ni même dans le département du Doubs.

L'histoire récente a démontré le bien-fondé de l'important investissement des pouvoirs publics dans la préparation des services d'ordre mis en place à l'occasion des rave parties.

Il ne s'agit d'ailleurs pas pour l'État d'encadrer un rassemblement autorisé, encore moins de l'organiser, mais de prendre les dispositions de sauvegarde nécessaires pour limiter, autant que faire se peut, les risques aux personnes et aux biens et les troubles à l'ordre public.

En effet, l'accompagnement par les services de l'État de plusieurs « teknivals » démontre qu'il est préférable d'être associé le plus en amont possible à ces rassemblements, afin de prendre les mesures qui s'imposent pour réduire grandement les troubles à l'ordre public, renforcer la sécurité des participants et rassurer totalement les riverains. Cette présence permet aussi, chacun s'accorde à le reconnaître, de mener une lutte énergique contre les trafics et usages de produits stupéfiants.

Pour autant, monsieur le sénateur, les manifestations sportives traditionnelles et de grande ampleur qui se déroulent sur votre circonscription ne sont pas négligées. Elles font toujours l'objet de la plus grande attention de la part des services de police et de gendarmerie, qui mettent en place des services d'ordre à la hauteur de ces événements.

C'est le cas des rencontres du Football club de Sochaux-Montbéliard, qui bénéficie à chacun de ses matchs de la présence d'une unité de force mobile - escadron de gendarmerie mobile ou compagnie républicaine de sécurité -, des courses cyclistes ou du semi-marathon du Lion, par exemple.

Afin de vous répondre avec la plus grande précision, le ministre de l'intérieur tient à mentionner le refus d'autorisation administrative d'une épreuve cycliste organisée par le Vélo club de Montbéliard. Cette épreuve, certes appréciée, mais de dimension locale, a effectivement reçu un avis défavorable de la gendarmerie, car elle coupait plusieurs voies à grande circulation, notamment la RN 83 et la RN 463.

Les organisateurs ayant refusé d'en modifier l'itinéraire, comme le leur demandait la préfecture du Doubs, l'autorisation n'a donc pas été accordée.

Il s'agit plutôt là, monsieur le sénateur, d'un problème administratif, qui n'est sans doute pas unique, mais qui ne relève d'aucune différence de traitement entre les événements nécessitant un service de sécurité et les autres.

M. le président. La parole est à M. Louis Souvet.

M. Louis Souvet. Madame la ministre, je vous remercie de la réponse que vous m'avez apportée.

Elle appelle cependant de ma part, puisque je me fais ici le porte-parole des organisateurs de ces manifestations sportives, quelques commentaires.

D'abord, vous avez dit qu'aucune manifestation de ce type n'avait eu lieu à Montbéliard. Je n'ai pas spécialement plaidé la cause de Montbéliard. La France est une et indivisible, du moins, je l'espère. Il reste que, à Montbéliard, des moyens de gendarmerie ont été refusés, ce qui nous a obligés à annuler plusieurs courses cyclistes très appréciées et auxquelles le Vélo club de Montbéliard était très attaché.

Vous avez également souligné qu'il n'y avait pas eu à Montbéliard de manifestations s'accompagnant d'usage de stupéfiants et autres « teknivals ». C'est vrai, mais il y en a eu non loin de Montbéliard.

On ne peut valablement prétendre que, parce qu'on a mis une fois les moyens, on les a mis à chaque fois. Cela n'a pas été le cas. Je peux vous assurer que les responsables d'associations ont été extrêmement peinés de devoir mettre fin à des manifestations très anciennes, et l'on se demande si elles pourront être organisées l'an prochain.

déviation de barcelonne-du-gers

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, auteur de la question n° 1163, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

M. Aymeri de Montesquiou. Ma question porte sur la déviation de Barcelonne-du-Gers reliant la future autoroute Bordeaux-Pau à la RN 124.

En tant que président de l'Association des maires du Gers, je me fais le porte-parole des maires de mon département.

Le Gers n'est traversé par aucune voie de chemin de fer, par aucune autoroute, n'est desservi par aucune ligne aérienne. Totalement enclavé, contourné par de grands axes routiers, il possède, hélas, la particularité d'être l'un des départements les moins bien pourvus en matière de routes : il ne compte que 24 kilomètres de routes à deux fois deux voies, situés dans l'est du département.

De plus, l'est et l'ouest du Gers connaissent un développement inégal : l'est est proche de l'agglomération toulousaine et bénéficiera pour ses infrastructures de la croissance de cette zone périurbaine, alors qu'aucun projet important ne se dessine à l'ouest. C'est pourquoi le raccordement du Gers à la future autoroute Bordeaux-Pau par la bretelle de Barcelonne-du-Gers est vital pour le développement économique de l'Ouest et pour réduire les inégalités entre les deux parties du département.

L'aménagement du territoire, priorité déclarée du Gouvernement, impose qu'une autoroute passant à proximité d'un département le desserve. En 1995, M. Bernard Pons, alors ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports, précisait : « Sur la liaison Bordeaux-Langon-Pau, une bretelle de raccordement à la route nationale 124 et à la route départementale 935 sera effectivement réalisée. » Le gouvernement Jospin avait annulé ce projet d'autoroute, aujourd'hui repris.

Il apparaît à tous que la réalisation de cette bretelle, demandée par les élus, les citoyens et le monde économique, est le seul moyen de désenclaver et donc de développer l'ouest du département. Il est temps que cette partie du Gers bénéficie enfin de liaisons dignes de notre époque.

M. Dominique Perben avait déclaré que la clé de financement de la bretelle serait décidée par le prochain contrat de plan.

Madame le ministre, quand et comment le Gouvernement honorera-t-il ses engagements ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable. Monsieur le sénateur, en annonçant, dans son courrier en date du 7 septembre 1995, la réalisation, au niveau de Barcelonne-du-Gers, d'une liaison entre la RD 935, la RN 124 et l'autoroute A 65, M. Bernard Pons, ne pouvait anticiper la décentralisation d'une partie du réseau routier national consécutive à la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales du 13 août 2004.

Comme vous le savez, depuis le 1er janvier 2006, la section de la RN 124 située sur la commune de Barcelonne-du-Gers fait partie du patrimoine routier du département du Gers. Le bénéfice des emplacements réservés de la déviation de Barcelonne-du-Gers a été attribué, en décembre dernier, aux départements du Gers et des Landes et la déclaration d'utilité publique de ce projet vient récemment d'être prorogée pour cinq ans.

Cette déviation remplit des objectifs principalement d'intérêt local. En effet, outre le raccordement de l'ex-RN 124 à l'A 65, cette déviation vise essentiellement à améliorer la sécurité dans les traversées de Barcelonne-du-Gers et d'Aire-sur-l'Adour.

Par ailleurs, la déviation de Barcelonne-du-Gers ne peut être considérée, au regard du code de la voirie routière, comme une bretelle autoroutière de l'A 65 puisqu'elle comporte notamment des giratoires.

Pour toutes ces raisons, son intégration dans le périmètre de la concession ne peut pas être envisagée. Il appartient donc aux deux départements concernés, s'ils le souhaitent, de la réaliser. La règle qui prévaut désormais à la suite de la décentralisation est celle du décroisement des financements : l'État et le département ont vocation à ne financer que leur propre réseau.

Sensible à vos arguments dans le domaine de l'aménagement du territoire et du développement économique de l'ouest du département, M. Dominique Perben a pris bonne note de l'intérêt que vous portez à cette opération et à sa réalisation rapide. Vous êtes d'ailleurs intervenu à plusieurs reprises pour le sensibiliser sur ce dossier et il connaît le vif intérêt que vous y portez. Cette question fait l'objet, soyez-en assuré, d'un examen approfondi, et les services du ministère des transports étudient actuellement avec une grande attention les suites qui peuvent y être apportées.

M. le président. La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Madame la ministre, la décentralisation, qui a été présentée comme favorisant un meilleur équilibre du territoire et, donc, un meilleur aménagement du territoire, ne peut pas être utilisée comme prétexte pour ne pas réaliser cette bretelle.

Je comprends qu'il y a un nouveau contexte légal, mais je souhaite très vivement que l'on prenne en compte les faiblesses financières du département du Gers, qui n'est pas à même de financer un tel projet. De M. Bernard Pons à M. Dominique Perben, la continuité républicaine doit s'exercer, de manière que cette route, qui est vraiment vitale pour l'ouest du département, soit enfin réalisée.

M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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communication relative à une COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au financement de la sécurité sociale pour 2007 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

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Article 5 (priorité) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article 5 (priorité)

Diffusion audiovisuelle et télévision du futur

Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, après déclaration d'urgence, relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur (n° 467, 2005-2006 ; nos 69 et 70).

Je rappelle que, hier, le Sénat a commencé l'examen de l'article 5, appelé en priorité.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Demande de réserve

Article 5 (priorité) (suite)

Les articles 96 à 105-1 sont remplacés par les dispositions suivantes :

« Art. 96. - I. - Sous réserve du respect des dispositions des articles 1er, 3-1 et 26, le Conseil supérieur de l'audiovisuel autorise, le cas échéant hors appel aux candidatures, la reprise intégrale et simultanée par voie hertzienne terrestre en mode numérique des services de télévision à vocation locale autorisés en mode analogique lorsqu'un éditeur lui en fait la demande, dès lors que cette reprise s'effectue selon un principe identique en ce qui concerne le recours ou non à une rémunération de la part des usagers et qu'elle n'a pas pour effet de faire passer la population de la zone desservie en mode numérique par le service à vocation locale à plus de dix millions d'habitants. La reprise intégrale et simultanée s'entend indépendamment des caractéristiques techniques en matière notamment de format des programmes.

« II. - L'autorisation de diffusion intégrale et simultanée en mode numérique d'un service local ou national de télévision préalablement diffusé en mode analogique est assimilée à l'autorisation initiale dont elle ne constitue qu'une extension, sans que la cessation totale ou partielle de la diffusion du service en mode analogique remette en cause la diffusion du service en mode numérique.

« Elle est toutefois regardée comme distincte de l'autorisation initiale pour l'application des articles 97 à 101.

« CHAPITRE IER

« EXTENSION DE LA COUVERTURE DE LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE TERRESTRE

« Art. 97. - Par dérogation au I de l'article 28-1, les autorisations de diffusion des services nationaux de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique peuvent, dans la limite de cinq ans, être prorogées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en contrepartie des engagements complémentaires souscrits par ces éditeurs en matière de couverture du territoire en diffusion hertzienne terrestre. Les autorisations et les assignations délivrées en application des articles 30-1 et 30-2 sont le cas échéant modifiées en vue de regrouper les éditeurs de services sur la ressource radioélectrique en fonction de ces engagements. Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article.

« Art. 98. - Afin d'améliorer la couverture du territoire par la télévision hertzienne terrestre en mode numérique et lorsque la ressource radioélectrique n'est pas suffisante pour permettre, dans certaines zones géographiques, la diffusion de l'ensemble des services de télévision préalablement autorisés par application des articles 26 et 30-1, le Conseil supérieur de l'audiovisuel peut retirer, dans des zones géographiques limitées et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État, la ressource radioélectrique en mode analogique assignée à un ou plusieurs services de télévision nationale préalablement autorisés, à la condition de leur accorder, sans interruption du service, le droit d'usage de la ressource radioélectrique en mode numérique permettant une couverture au moins équivalente.

« CHAPITRE II

« EXTINCTION DE LA DIFFUSION HERTZIENNE TERRESTRE ANALOGIQUE

« Art. 99. - Sous réserve des engagements internationaux souscrits par la France, la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique prend fin au plus tard le 30 novembre 2011.

« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel procède à l'arrêt de la diffusion analogique selon les orientations générales fixées dans le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique prévu à l'article 101.

« Par dérogation au I de l'article 28-1, les autorisations de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique des services nationaux de télévision préalablement diffusés sur l'ensemble du territoire métropolitain par voie hertzienne terrestre en mode analogique, accordées aux éditeurs de ces services sont prorogées de cinq ans, à la condition que ces éditeurs soient et demeurent membres du groupement d'intérêt public institué à l'article 102 et aient satisfait aux prescriptions de l'article 100.

« Le terme des autorisations de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique des services locaux de télévision est celui prévu dans leur autorisation analogique en cours à la date de promulgation de la loi n° ........... du ............... relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Toutefois, lorsque ce terme est antérieur au 31 mars 2015, il est prorogé jusqu'à cette date.

« Art. 100. - Afin de garantir aux téléspectateurs la continuité de la réception des services de télévision nationaux en clair après l'extinction totale ou partielle de leur diffusion analogique, les éditeurs de ces services diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique mettent leur offre de programmes à disposition par voie satellitaire en mode numérique, pour une couverture au moins équivalente à celle de leur diffusion analogique terrestre, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de loi n° ........... du ............... relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.

« L'offre de mise à disposition des services diffusés par voie satellitaire ne prend en compte que le coût et les frais d'installation du terminal de réception et n'est pas conditionnée à la location de ce terminal ni à la souscription d'un abonnement. L'offre propose ces chaînes avec la même numérotation que celle utilisée pour la diffusion par voie hertzienne terrestre.

« Art. 101. - À compter du 31 mars 2008, il est procédé à l'extinction progressive, par zone géographique, de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique, selon un calendrier établi dans le respect des orientations fixées par un schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique soumis à une consultation publique et approuvé par arrêté du premier ministre.

« Ce calendrier est rendu public neuf mois à l'avance par le Conseil supérieur de l'audiovisuel après une consultation publique et avis du groupement d'intérêt public institué à l'article 102. Il fixe, service par service et émetteur par émetteur, une date d'arrêt de la diffusion analogique pour chaque zone géographique, en tenant compte notamment de l'équipement des foyers pour la réception de la télévision numérique terrestre et de la disponibilité effective en mode numérique des services de télévision en cause. Le Conseil supérieur de l'audiovisuel modifie ou retire en conséquence les autorisations préalablement accordées.

« Art. 102. - Il est créé un groupement d'intérêt public doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière ayant pour objet, dans le respect des orientations définies par le Premier ministre et des décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel, de mettre en oeuvre les mesures d'accompagnement propres à permettre l'extinction de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique et la continuité de la réception de ces services par les téléspectateurs. Il gère le fonds institué à l'article 103.

« Ce groupement est constitué entre l'État et les éditeurs de services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Les dispositions des articles L. 341-2 à L. 341-4 du code de la recherche lui sont applicables.

« Art. 103. - Afin de garantir l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle, il est institué au bénéfice des téléspectateurs attributaires d'allocations consenties sous conditions de ressources, membres d'un foyer exonéré de redevance audiovisuelle et ne recevant les services de télévision que par la voie hertzienne terrestre en mode analogique, un fonds d'aide destiné à contribuer à la continuité de la réception de ces services après l'extinction de leur diffusion en mode analogique. Cette aide est modulée en fonction des capacités contributives des bénéficiaires.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article et prévoit notamment l'adaptation des conditions d'éligibilité à l'aide dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.

« Art. 104. - À l'extinction complète de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique d'un service national de télévision préalablement autorisé sur le fondement de l'article 30, le Conseil supérieur de l'audiovisuel accorde à l'éditeur de ce service qui lui en fait la demande, sous réserve du respect des dispositions des articles 1er, 3-1, 26, 39 à 41-4, un droit d'usage de la ressource radioélectrique pour la diffusion d'un autre service de télévision à vocation nationale à condition que ce service remplisse les conditions et critères énoncés aux deuxième et troisième alinéas du III de l'article 30-1 et soit édité par une personne morale distincte, contrôlée par cet éditeur au sens du 2° de l'article 41-3.

« Art. 105. - La mise en oeuvre des dispositions du présent titre n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation.

« Art. 105-1 : Avant le 1er juillet 2007, le Gouvernement déposera devant le Parlement un rapport sur les modalités de développement de la télévision numérique dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie en vue de l'extinction de la diffusion analogique sur l'ensemble du territoire national. 

« Au plus tard le 1er janvier 2010, le Gouvernement déposera devant le Parlement un rapport sur la mise en oeuvre du I de l'article 96 et proposera, en tant que de besoin, un aménagement des conditions d'extinction de la diffusion analogique des services de télévision à vocation locale. »

M. le président. Au sein de l'article 5, nous en sommes parvenus à deux amendements identiques.

L'amendement n° 7 est présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles.

L'amendement n° 27 est présenté par MM. Hérisson et Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

À la fin du troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 99 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, remplacer la référence :

100

par la référence :

98-1

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.

M. Louis de Broissia, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Il s'agit d'un amendement de coordination.

En effet, monsieur le ministre, suite à notre discussion de cette nuit, cet amendement vise à tenir compte de l'introduction dans le dispositif de l'article 5 d'un article additionnel après l'article 98 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 27.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Cet amendement est identique à l'amendement n° 7.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication. Le Gouvernement, qui ne saurait s'opposer à un tel esprit de coordination, émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 7 et 27.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 47, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

  Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 99 de la loi n° 86-1067 par les mots :

et qu'ils souscrivent à des obligations complémentaires en matière de diffusion d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et françaises, en particulier aux heures de grande écoute et en matière de contribution au développement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, notamment de la production  indépendante à leur égard.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Que Mme Tasca et M. Lagauche ne m'en veuillent point, mais la commission émet un avis défavorable.

En effet, cet amendement a pour objet de conditionner l'octroi de cinq ans de prorogation à des obligations supplémentaires en matière de diffusion et de production. Or, je le rappelle, nous avons beaucoup insisté cette nuit sur les obligations de production, qui seront maintenues, précisées et confirmées pour l'ensemble des chaînes de l'audiovisuel, notamment public.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Comme vous le savez, dans le cadre de l'élaboration du présent projet de loi, le Gouvernement a préalablement recueilli l'avis du Conseil d'État.

Celui-ci nous a notamment confirmé que l'interruption anticipée par une décision unilatérale de l'État de la diffusion des services de télévision constituait une atteinte au droit octroyé par une décision administrative du Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA.

Certes, le législateur peut, pour un motif d'intérêt général, revenir sur des droits octroyés à des entreprises. C'est d'ailleurs ce que le Gouvernement vous propose de faire. Cependant, d'un point de vue juridique, il est impératif de compenser le préjudice économique subi par ces entreprises.

Le Gouvernement, qui a exclu l'hypothèse d'une compensation financière au profit de TF1, de M6 et de Canal Plus, préfère vous proposer deux compensations juridiques.

La première semble aller de soi. Il s'agit d'aligner la durée des autorisations de ces trois chaînes sur celle qui s'applique aux autres chaînes de la télévision numérique terrestre, la TNT. S'agissant des chaînes nationales, les termes des autorisations de Canal Plus, TF1 et M6 sont ainsi respectivement portés de 2010 à 2015 et de 2012 à 2017.

La seconde, et nous aurons l'occasion d'y revenir, concerne l'octroi d'une autorisation supplémentaire sous le contrôle du CSA après, et seulement après, la fin de la diffusion analogique.

Votre amendement concerne la première de ces compensations. Qu'il me soit permis ici de procéder à un rappel. C'est la loi du 1er août 2000 modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication qui a accordé à TF1, Canal Plus et M6 une prorogation de cinq ans de leur autorisation analogique. C'est sur cette prorogation que nous revenons partiellement aujourd'hui.

Vous nous proposez de faire prendre à ces éditeurs des engagements supplémentaires en matière de production et de diffusion d'oeuvres. Certes, s'il s'agissait de contrebalancer un avantage que nous leur consentions, nous pourrions éventuellement réfléchir à une telle suggestion. Mais, et je le redis, tel n'est pas le cas. En effet, nous n'accordons aucun avantage aux opérateurs concernés ; nous réparons simplement un préjudice que nous leur causons.

Je tiens à le rappeler, nous adoptons également la même démarche pour les télévisions locales.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement, car la mesure que celui-ci tend à mettre en place fragiliserait juridiquement notre dispositif législatif, ce qui ne me semble pas opportun.

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.

M. Serge Lagauche. L'amendement s'inscrit dans la même logique que notre précédent amendement portant sur l'article 97 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.

En effet, le troisième alinéa du texte proposé pour l'article 99 de cette loi tend à proroger de cinq ans les autorisations des opérateurs nationaux historiques en mode analogique hertzien qui ont basculé en numérique à deux conditions. D'une part, ces opérateurs doivent adhérer au groupement d'intérêt public, le GIP, chargé de coordonner l'extinction de l'analogique. D'autre part, ils doivent compenser l'absence de réception dans certaines zones liée au passage au numérique en mettant leurs chaînes de télévision à disposition du public via le service d'antenne par satellite.

On peut se réjouir que le texte ait quelque peu évolué depuis sa première version.

En effet, l'avant-projet de loi n'assortissait d'aucune des deux conditions la prorogation d'autorisation. À l'occasion de la présentation d'un précédent amendement, je rappelais les réserves du Conseil constitutionnel sur le principe même de telles prorogations d'autorisation.

Laissez-moi vous rappeler les règles du CSA. Dans son avis sur le présent projet de loi, celui-ci, se référant d'ailleurs à la jurisprudence constitutionnelle, s'est montré extrêmement sceptique quant au bien-fondé d'un tel avantage dérogatoire au droit commun de l'audiovisuel.

L'attribution des fréquences après appel à candidatures est l'un des principes fondamentaux du droit de l'audiovisuel, qui trouve sa justification non seulement dans l'appartenance des fréquences radioélectriques au domaine public d'État, mais surtout dans le respect des principes constitutionnels du pluralisme et de l'égalité de traitement, qui supposent que les autorisations soient délivrées à l'issue d'un appel aux candidatures, et ce pour une durée illimitée.

Compte tenu des possibilités successives de reconduction automatique des autorisations, TF1 aura bénéficié d'une autorisation d'usage de la ressource hors appel à candidatures de trente ans. Cette chaîne a obtenu sa première autorisation le 15 avril 1987, suite à sa privatisation, tandis que M6 a bénéficié d'une autorisation initiale le 28 février 1987. Quant à Canal Plus, la concession de service public octroyée pour douze ans au groupe Havas le 6 décembre 1983 est entrée dans le régime d'autorisation de droit commun de l'audiovisuel avec l'entrée en vigueur de la loi du 1er février 1994 modifiant la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; sa durée d'autorisation hors appel à candidatures aura été portée à trente-deux ans.

Ainsi, le caractère limité de la durée hors appel à candidatures garantissant le pluralisme semble désormais compromis, même si la ressource hertzienne a quintuplé, voire sextuplé, avec l'avènement de la technologie numérique.

Au final, une telle disposition porte ainsi le terme potentiel des autorisations au mois de février 2017 pour M6 et TF1, dont le renouvellement des autorisations date de l'année 2002, et au mois de décembre 2005 pour Canal Plus, dont le renouvellement de l'autorisation date du mois de décembre 2000.

Vous le comprendrez donc, les garanties apportées par le présent article, qui consistent à demander aux chaînes de faire montre de bonne volonté en faveur du développement du numérique, nous paraissent totalement insuffisantes.

Aussi souhaitons-nous ajouter deux nouvelles obligations en termes de contenus des programmes et de participation à l'industrie des programmes, notamment en faveur de la production indépendante, et de diffusion de ceux-ci.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 130, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

  Compléter le troisième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 99 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par les mots :

et si l'extinction complète de leur diffusion par voie hertzienne en mode analogique intervient avant le 30 novembre 2011

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L'argumentation en faveur de la prorogation de cinq ans de l'autorisation donnée par le CSA repose principalement sur l'idée de créer une incitation susceptible de pousser les chaînes privées historiques à réaliser en temps et en heure les investissements nécessaires au basculement vers la télévision numérique.

La conditionnalité de l'obligation de résultat doit être mieux affirmée et la loi doit être plus claire qu'implicite. Un éditeur qui ne tiendrait pas ses délais doit savoir qu'il perdrait le bénéfice annoncé des cinq années de prorogation.

Cet amendement vise donc à apporter une précision rédactionnelle, qui est motivée par le ton de certaines auditions des éditeurs concernés. En effet, à cette occasion, il nous a été affirmé ceci : « Le terme est précoce [...] vous verrez qu'il ne sera pas tenu ». Ces déclarations faisaient suite à un préambule tonique autour de la thématique suivante : « Les cinq ans sont un dû, c'est bien le moins que l'on puisse nous accorder comme prolongation. »

Il s'agit donc d'un amendement de précaution et de précision.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, pour les raisons que j'ai déjà indiquées à propos de l'amendement n° 47.

Je voudrais toutefois revenir sur l'argumentation de Mme Blandin, qui est d'ailleurs identique à celle de M. Lagauche.

Ne laissons pas dire au Sénat que les obligations qui sont données aux chaînes actuelles et à venir, c'est-à-dire celles qui font partie du paysage audiovisuel français, sont des obligations molles ; ce sont des obligations dures et contraignantes, qui sont vérifiées par le CSA. D'ailleurs, nous les durcissons encore à travers la définition de l'oeuvre audiovisuelle. Qu'il s'agisse des créateurs, des réalisateurs ou des producteurs, l'ensemble de la chaîne de la production en est déjà bien consciente.

C'est pourquoi, et je ne m'en cache pas, cet amendement ne me paraît pas intéressant. Il devrait, me semble-t-il, être retiré et n'aurait sans doute pratiquement pas dû être défendu.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Comme je l'ai souligné lors de la discussion générale, la prorogation de cinq ans de l'autorisation analogique est soumise à une double condition.

D'abord, les opérateurs concernés devront adhérer et demeurer membres du groupement d'intérêt public principalement chargé de mettre en oeuvre les mesures techniques d'accompagnement de l'extinction. Ensuite, ils devront mettre gratuitement par satellite à la disposition de l'ensemble des Français leurs programmes pour les chaînes nationales en clair. C'est essentiel ; nous en avons largement débattu hier. C'est ce qui permettra qu'il s'agisse d'un progrès pour tous.

Par ailleurs, l'ensemble des opérateurs concernés ont apporté leur soutien au dispositif d'extinction, et je m'en réjouis.

Par sa précision et l'ensemble des mécanismes sur lesquels il repose, le processus d'extinction en lui-même sera inéluctable une fois que vous l'aurez adopté. À mon sens, il s'agit d'un point très important tant pour les entreprises et les opérateurs que pour nos concitoyens.

Le législateur introduira une certitude. Il appartiendra à chacun de prendre ses dispositions et nous devrons adopter des mesures concrètes pour que l'égalité soit une réalité.

Dans l'hypothèse où l'échéance de 2011 ne serait pas respectée, - ce qui ne se réalisera pas, j'en suis sûr, si vous votez le projet de loi qui vous est présenté - cela ne pourrait résulter que de décisions du Gouvernement, du CSA ou, le cas échéant, d'une nouvelle intervention du législateur. En aucun cas, ce retard ne pourrait résulter des décisions de TF1, de M6 ou de Canal Plus.

Dans ces conditions, je ne vois pas l'intérêt de la précision que vous apportez, dont je constate par ailleurs qu'elle ne vise que les chaînes nationales et non les chaînes locales.

Je suis par conséquent défavorable à l'adoption de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. La fermeté affichée par le ministre comme par le rapporteur ne me semble pas contradictoire avec le fait d'inscrire la date dans la loi.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 130.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par MM. Hérisson et Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 99 de la loi n°86-1067, après les mots :

autorisation

insérer les mots :

de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode

La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement de pure précision.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 8 est présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles.

L'amendement n° 29 est présenté par MM. Hérisson et Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 8.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer le texte proposé par l'article 5 pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, non pas parce que nous n'en voulons pas, mais parce que les contours du bouquet satellitaire gratuit composé des chaînes nationales diffusées en analogique seront redéfinis à un article additionnel après l'article 98.

Cet article 100 deviendra donc sans objet. Sa suppression améliorera la lisibilité du texte.

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 29.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 97, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, après les mots :

leur diffusion analogique,

insérer les mots :

ainsi qu'une égalité de traitement quelle que soit leur zone de résidence,

II - Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication par un alinéa ainsi rédigé :

« Les chaînes diffusées en clair par voie hertzienne terrestre numérique ne peuvent s'opposer à la reprise de leur offre de programmes par les opérateurs de réseaux ADSL et de réseaux câblés qui leur en feraient la demande. »

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement a pour objet d'assurer la reprise des chaînes publiques sur l'ensemble des supports, de manière intégrale et simultanée. L'exemple le plus parlant est celui de la chaîne France 3 à laquelle de plus en plus de foyers n'ont plus accès.

L'article 34-2 de la loi du 30 septembre 1986 prévoit l'obligation de reprendre les chaînes publiques sur l'ensemble des réseaux.

Cette obligation devrait pouvoir s'appliquer pleinement, nous semble-t-il, sans que les opérateurs ayant acquis à titre exclusif pour leur réseau les droits du même programme que celui qui est diffusé par les chaînes publiques aient la faculté d'exiger l'occultation de ce programme sur les chaînes publiques.

Certains opérateurs de téléphonie mobile demandent en effet aux chaînes publiques d'occulter leur signal quand ils proposent le même programme, acquis à titre exclusif pour leur réseau.

La commission des affaires culturelles a adopté un amendement n° 16 qui prévoit des dispositions en apparence équivalentes à celles qu'introduit notre amendement, mais limitées aux seuls événements d'importance majeure. La liste de ces événements est fixée par décret et concerne essentiellement des événements sportifs.

La difficulté qui existe aujourd'hui pour le sport pourrait en effet, dans un très proche avenir, concerner tout autre programme. Les opérateurs de réseaux constituent, ou constitueront à l'avenir, des catalogues de programmes, qu'ils proposeront à leurs abonnés en service à la demande. La pratique de l'occultation du signal pourrait ainsi s'étendre à tous les programmes diffusés par les chaînes publiques que les opérateurs privés proposent à la demande à leurs abonnés.

L'amendement n° 16 sur la diffusion des événements d'importance majeure revient donc à légitimer l'occultation des programmes des chaînes publiques pour tout programme autre que la retransmission d'un événement d'importance majeure.

Il traduit, à notre avis, un grand désordre dans la hiérarchie de la diffusion des oeuvres et des exclusivités contractuelles négociées avec les producteurs et les vendeurs de programmes. Ce désordre tient en particulier à ce que les catalogues d'oeuvres et de programmes de télévision sont traités comme des « marchandises comme les autres » par les « nouveaux entrants ».

Nous oublions que la communication constitue deux vecteurs essentiels de l'évolution de la société : le vecteur technique, économique, qui bouscule nos modèles de production et nos relations, et surtout le vecteur politique et culturel.

La question qui ne cesse de se poser dans ce débat est celle des moyens accordés à tous les foyers de France pour s'approprier des savoirs, des connaissances, en un mot, des « lumières ».

M. le président. L'amendement n° 48, présenté par MM. Lagauche et Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel, Dauge et Guérini, Mme Tasca, MM. Teston, Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

voie hertzienne terrestre en mode

remplacer le mot :

analogique

par le mot :

numérique

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Cet article organise un « miniservice antenne » satellite pour les seules chaînes hertziennes analogiques. Au nom de la continuité du service de télévision nationale, les opérateurs nationaux diffusant en mode analogique avant son extinction devront diffuser par voie satellitaire leurs programmes disponibles en numérique terrestre, gratuitement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.

Nous souhaitons, toujours pour des motifs de continuité du service public, étendre ce « service antenne » à l'ensemble des chaînes de la TNT gratuite. Notre amendement répond à une préoccupation du CSA qui, dans son avis du 11 juillet 2006 sur le projet de loi, a émis le souhait d'étendre l'obligation de « service antenne » par satellite à l'ensemble des chaînes nationales de la TNT en clair, soit l'équivalent de l'offre actuellement proposée par AB3. Cette extension de la couverture satellitaire est logique, compte tenu de l'évolution des technologies et de la nécessité de montée en puissance des « nouveaux entrants » de la TNT gratuite.

Le groupement TNT a d'ailleurs d'ores et déjà engagé des négociations avec Eutelsat pour la mise en service d'un tel « service antenne ».

M. le président. L'amendement n° 49, présenté par MM. Lagauche et Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel, Dauge et Guérini, Mme Tasca, MM. Teston, Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les moyens techniques et financiers sont mis en oeuvre pour assurer, dans chaque zone concernée, la réception des déclinaisons régionales des programmes de la société nationale de programme mentionnée au 2° du I de l'article 44.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Cet amendement répond à la préoccupation de nombre de nos concitoyens qui, partout en France, attendent chaque jour les émissions de proximité et, plus particulièrement, les deux décrochages régionaux de France 3.

Néanmoins, dans les « zones blanches », où le hertzien terrestre ne passe pas, les téléspectateurs sont privés de ces émissions de proximité. Le « service antenne » se doit de prendre le relais. L'article que nous examinons l'organise par voie satellitaire.

Le problème de la reprise satellitaire des décrochages régionaux de France 3 se pose néanmoins à un double titre. Sur le plan économique, cette reprise imposerait de monopoliser simultanément vingt-quatre canaux, ce qui est ingérable pour les opérateurs satellitaires. Sur le plan juridique, bien que le problème dépasse le strict cadre du « service antenne » satellite, le renvoi à l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 qui, au 2° du paragraphe I, ne définit que succinctement la mission de France 3 et ne mentionne pas sa vocation à effectuer des décrochages régionaux, laisse la porte ouverte à toutes les interprétations possibles de l'étendue du must carry s'appliquant aux opérateurs des réseaux non assignés par le CSA en vertu de l'article 34-2.

Aussi souhaitons-nous préciser, dans le cadre du basculement vers le numérique et de l'extinction de l'analogique, que les décrochages régionaux de France 3 devront être assurés par tous moyens, au moins pour assurer la couverture numérique au moyen du « service antenne » par satellite.

Il s'agit de plus d'assurer la continuité du service public dans chaque zone concernée. Outre la garantie d'une information pluraliste en région, les décrochages régionaux de France 3 assurent en région une mission de service public que nul autre média n'offre actuellement. L'absence de reprise des programmes des bureaux d'information de France 3 par le « service antenne » du satellite en numérique priverait de nombreux foyers du bénéfice des émissions de service public que la loi confie à France 3.

M. le président. L'amendement n° 100, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la seconde phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du  30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

L'offre propose ces chaînes avec une numérotation prioritaire pour les chaînes publiques nationales et locales.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Cet amendement vise à revoir la numérotation des chaînes publiques nationales et locales sur l'ensemble des réseaux de la TNT.

La numérotation n'est pas une décision anodine et vous avez tous en mémoire les enjeux financiers qu'elle a dévoilés en 2004, sans parler de l'époque de la privatisation de la première chaîne. Elle est d'autant moins anodine qu'elle détermine la programmation des téléviseurs et des appareils de diffusion quels qu'ils soient.

La numérotation des chaînes de la TNT devait, pour le CSA, concilier deux objectifs principaux : l'équité entre les chaînes et la satisfaction des téléspectateurs.

Dans cette optique, le CSA a proposé de positionner en premier et dans leur ordre actuel les chaînes historiques, TF1, France 2, France 3, Canal Plus, France 5, M6, et Arte, afin de ne pas perturber les habitudes des téléspectateurs. Or, la considération qui veut que la numérotation est avant tout destinée à permettre l'initialisation des téléviseurs lors de leur première mise en service n'a pas été soulignée.

Nous retournerons donc les arguments invoqués par le CSA en demandant si, compte tenu du nouveau paysage audiovisuel à venir et des nouvelles habitudes à prendre face à ces nouveaux outils médiatiques, il ne serait pas opportun, au contraire, de protéger un service public malmené par la concurrence des grands groupes de ce secteur.

S'il est utile de faciliter l'initialisation des téléviseurs en permettant au téléspectateur de vérifier rapidement que toutes les anciennes chaînes auxquelles il est habitué sont présentes sur la TNT et que « rien ne s'oppose à ce que, par la suite, [il] modifie selon son gré cet ordre de présentation » comme l'écrit le CSA, TF1 ne saurait souffrir de cette décision.

Tel est le sens du présent amendement.

M. le président. L'amendement n° 131, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 100 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par un alinéa ainsi rédigé :

« Les services de télévision diffusés en clair par voie hertzienne terrestre numérique ne peuvent s'opposer à la reprise de leur offre de programmes par les opérateurs de réseaux ADSL et de réseaux câblés qui leur en feraient la demande.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Nous nous sommes engagés hier à couvrir 95 % du territoire par la TNT. Afin de respecter cet engagement, il paraît pertinent de prendre en considération toutes les solutions de rechange à la diffusion hertzienne.

Le projet de loi, quant à lui, ne prévoit pas de solution de substitution à la diffusion hertzienne terrestre pour l'ensemble des chaînes aujourd'hui présentes sur la TNT, puisque seuls les éditeurs de services de télévision nationaux diffusés par voie hertzienne en mode analogique ont l'obligation de mettre à disposition leur offre de programmes par voie satellitaire en mode numérique. Même si cette obligation était étendue à l'ensemble des chaînes de la TNT, la couverture de l'ensemble du territoire ne pourrait pas être assurée.

Dans ce cadre, il est important que les téléspectateurs qui ne pourront accéder ni à la télédiffusion numérique hertzienne ni à la diffusion satellitaire puissent au moins avoir la garantie d'accès à une solution de remplacement comme l'ADSL. Hier, un amendement de M. Carle, me semble-t-il, a attiré notre attention sur les zones de montagne, qui seront probablement servies par le satellite. Des amendements venant d'Alsace ont aussi mis en avant les particularités des zones frontalières.

L'ADSL pourrait être la bonne réponse pour démêler l'écheveau des croisements hertziens. Bien entendu, l'adoption de cette solution est liée à l'assujettissement des distributeurs de télévision par ADSL au compte de soutien financier de l'État à l'industrie cinématographique et à l'industrie des programmes audiovisuels, le COSIP, dont nous parlerons ultérieurement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 97, 48, 49, 100 et 131 ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je me permets de rappeler à mes collègues que la commission des affaires culturelles demande, avec l'amendement n° 8, la suppression du texte proposé par l'article 5 pour l'article 100 de la loi du 30 septembre 1986.

Si j'étais purement logique, je devrais émettre un simple avis défavorable sur tous les amendements qui se rattachent à l'article 100. Mais ce serait désobligeant à l'égard des auteurs de ces amendements !

M. Ivan Renar. Merci de votre obligeance, monsieur le rapporteur !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je pense cependant qu'il est important d'évoquer ces amendements, si vous m'y autorisez, monsieur le président.

S'agissant de l'amendement n° 97 du groupe CRC, je tiens à faire observer, après notre collègue Marie-Christine Blandin, que la couverture numérique terrestre et satellitaire - dont nous avons parlé cette nuit et sur laquelle nous reviendrons lors de l'examen d'un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 98 - vise 100 % des foyers français sauf un nombre infinitésimal.

Pour couvrir ce faible nombre de foyers, faudra-t-il braver la directive européenne « service universel » aux termes de laquelle un gouvernement peut imposer des obligations « en considération d'intérêts publics légitimes et uniquement lorsque cela est nécessaire pour atteindre des objectifs d'intérêt général clairement définis ». Je suis sûr que la Commission européenne nous dirait que l'objectif recherché est déjà atteint par la couverture satellitaire et numérique de terre telle qu'elle est prévue.

L'amendement n° 48 est satisfait par l'amendement n° 5 de la commission des affaires culturelles.

En ce qui concerne les décrochages locaux de France 3, qui font l'objet de l'amendement n° 49, je crois comprendre que le Gouvernement nous fera des propositions allant dans le sens que vous souhaitez.

Il en va de même pour la question de la numérotation des chaînes de la TNT, abordée par l'amendement n° 100, sur laquelle nous avons été très nombreux à recevoir du courrier. Cette question est très épineuse et n'est pas aussi simple que ce que l'on prétend.

Lorsqu'on crée un bouquet satellitaire, il est difficile d'expliquer à une société candidate que ses propres chaînes se trouveront en fin de liste ! Pensez aux chaînes dites « premium », par exemple.

Certains pensent qu'il faut laisser au CSA la possibilité d'offrir des regroupements par thème. Quand la commission des affaires culturelles a un doute, elle se tourne vers le téléspectateur de base, par exemple son rapporteur : si je veux voir du sport ou obtenir des informations locales, je dois pouvoir accéder facilement aux chaînes spécialisées correspondantes.

Autrement dit, la numérotation, telle qu'elle a été établie par le CSA, correspond au paysage audiovisuel actuel, pas forcément au paysage audiovisuel futur.

Puisque le Gouvernement doit nous faire des propositions sur ce point, je souhaiterais que ces amendements ne soient pas retenus à ce stade du débat.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je suis favorable aux amendements identiques nos 8 et 29 présentés par les commissions.

En ce qui concerne l'amendement n° 97, il pose plusieurs problèmes importants. La première notion introduite, tenant à l'égalité de traitement quelle que soit la zone de résidence, me semble source de débats quant à sa portée précise.

Quant à l'obligation de reprise qu'il est proposé d'instaurer ensuite, il y a atteinte au principe de neutralité technologique. Pourquoi les chaînes de la TNT ne pourraient-elles pas s'opposer à leur reprise en ADSL et sur le câble, mais pourraient le faire s'agissant d'autres offres satellitaires ou de l'UMTS ? Rien ne permet de justifier une telle discrimination.

Par-delà les efforts que nous déployons pour améliorer la couverture de la TNT, nous mettons ici en place une offre satellitaire gratuite qui sera accessible à tous les Français. Les obligations supplémentaires qu'il est proposé d'instituer ne sont donc pas nécessaires. Par conséquent, je suis défavorable à cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 48, je pense qu'il n'a plus d'objet, dès lors qu'il est satisfait par les amendements nos 5 et 26.

Concernant l'amendement n° 49, le Gouvernement y est favorable sur le fond. Il tend à prévoir que le bouquet satellitaire des chaînes diffusées en clair de la TNT qui sera accessible gratuitement pour l'ensemble des Français permette à chacun d'accéder au décrochage de France 3 de sa région.

Ce point est très important, parce que cela clôt un certain nombre de débats sur le préjudice que l'évolution de la technologie pourrait faire subir à l'information de proximité assurée par France 3. Cependant, dans la mesure où il se rapporte au texte présenté dans le projet de loi pour l'article 100 de la loi du 30 septembre 1986, cet amendement n'a plus d'objet.

Or cette initiative me paraît tout à fait légitime, et je me réjouis de cette convergence de vues au-delà des différences politiques. La numérisation des signaux ainsi que les progrès permis par les nouvelles normes de compression rendent cette option réaliste sur les plans tant économique que technique, en réduisant la capacité nécessaire.

Dans ces conditions, le Gouvernement dépose un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 5, qui reprend en fait les termes de l'amendement n° 49 et satisfait celui que Mme Catherine Morin-Desailly a déposé sur ce thème. Il garantit en effet l'accès de tous les Français aux programmes régionaux de France 3, sans pour autant aboutir à faire peser sur tous les distributeurs de services français cette obligation, ce qui serait juridiquement très délicat.

En ce qui concerne l'amendement n° 100, l'amendement relatif au bouquet satellitaire que nous avons adopté prévoit, comme le faisait le projet de loi, que l'offre présente les services selon la même numérotation que celle qui est utilisée pour la diffusion par voie hertzienne terrestre.

Par conséquent, je ne vois pas quel est l'objet de l'amendement n° 100. France 2 sera diffusée sur le canal 2 et France 5 sur le canal 5, par exemple. Je pense donc que vous pourriez retirer cet amendement, madame David. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 131, il est presque identique à l'amendement n° 97. J'y suis donc défavorable pour les mêmes raisons.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 et 29.

M. Ivan Renar. Le groupe CRC s'abstient.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 97, 48, 49, 100 et 131 n'ont plus d'objet.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 9, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

 

Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article 101 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. La nuit dernière, nous avons regroupé au sein de l'article 99 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication l'ensemble des dispositions concernant le calendrier de l'extinction de la diffusion analogique.

À ce propos, je déplore que la presse présente toujours ce calendrier sous un jour négatif. Ainsi, dans la presse de ce matin, il est écrit que le Sénat signe l'arrêt de mort de l'analogique ! C'est voir le côté extrêmement sombre des choses : le Sénat signe en fait l'avènement au 1er décembre 2011 du numérique pour tous.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Oui !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Ce n'est pas une menace, c'est une promesse !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Il faudrait nous habituer, dans ce pays, à ne pas présenter de telles dispositions législatives comme des condamnations, mais plutôt comme des redéploiements. Je ne citerai pas mes sources, mais les Français qui ont lu l'article auquel je fais allusion ont dû croire qu'on allait bientôt supprimer toutes les chaînes de télévision ! (M. le ministre opine.)

Je m'inscris en faux contre de telles informations : c'est de l'avènement du tout-numérique qu'il s'agit. Nous en avons débattu à propos de l'article 99 de la loi relative à la liberté de communication. Le texte de l'article 101 de cette même loi doit donc être supprimé.

M. le président. L'amendement n° 50, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 101 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par une phrase ainsi rédigée :

Ce schéma fixe les perspectives de développement, par voie hertzienne terrestre en mode numérique, des différents services de communication audiovisuelle, et notamment de ceux de télévision ayant conclu une convention en application de l'article 33-1.

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. Il existe actuellement quelque 105 chaînes thématiques françaises conventionnées par le CSA, ce qui représente une audience potentielle de 16 millions de téléspectateurs, soit près d'un tiers des foyers.

Par leur diversité et celle des programmes qu'elles proposent, elles jouent un grand rôle en faveur du développement du pluralisme au sein des médias et de la diversité de l'offre.

Ces chaînes, qui représentent 37 % de l'audience pour le câble et le satellite, se trouvent largement exclues de la diffusion hertzienne.

Au moment où le législateur établit un cadre pour le basculement de la télévision hertzienne du mode analogique vers le tout-numérique et que, pour ce faire, il s'en remet aux orientations qui seront définies par un schéma national, il convient de prévoir que ce schéma tiendra compte des perspectives de développement de l'ensemble des services de communication audiovisuelle, et plus particulièrement des chaînes thématiques, peu présentes sur le réseau hertzien.

Ces chaînes ont besoin de connaître un essor grâce au mode numérique. Je rappellerai la situation particulière de la France, où seuls 30 % des foyers bénéficient d'une offre télévisuelle complémentaire à celle du réseau hertzien leur ouvrant accès à une large offre de chaînes thématiques, alors que ce chiffre est de 95 % en Allemagne, grâce à un fort taux de pénétration du câble, de 65 % au Royaume-Uni et de 50 % en Italie.

Sur le plan économique, les chaînes thématiques constituent un secteur d'activité non négligeable, avec 1 milliard d'euros de chiffre d'affaires, soit 13 % de celui de la télévision française. Elles emploient environ 4 000 salariés permanents, hors intermittents, et financent environ un millier d'oeuvres aidées par le COSIP.

Ainsi, pour maintenir une situation économique viable et continuer de participer, le cas échéant, aux industries de programmes, ces chaînes doivent trouver leur place sur le réseau numérique hertzien. Il convient donc de réfléchir à cette question dans le cadre du schéma national.

M. le président. L'amendement n° 51, présenté par MM. Bockel,  Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 101 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par une phrase ainsi rédigée :

Dans les zones frontalières, le calendrier est établi en coordination avec les autorités compétentes des états limitrophes et après consultation des collectivités territoriales concernées.

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Mme Catherine Tasca. L'exposé des motifs figurant en préambule du projet de loi met en évidence la problématique des régions frontalières, à savoir le partage du spectre radioélectrique, c'est-à-dire des fréquences hertziennes, avec les pays limitrophes.

Cette perméabilité des frontières aux ondes électriques permet la réception des chaînes françaises dans des zones frontalières des pays limitrophes et, réciproquement, celle des chaînes des pays limitrophes dans les zones concernées de l'Hexagone.

Toutefois, le projet de loi, dans sa rédaction actuelle, ne prévoit pas la mise en place ni n'autorise la nécessaire coordination avec les pays limitrophes pour le basculement vers la télévision numérique terrestre hertzienne.

À défaut d'une telle coordination, les téléspectateurs des zones frontalières qui, jusqu'à présent, recevaient les chaînes des pays limitrophes en mode analogique risquent d'être privés de cette diffusion en mode numérique.

Afin d'éviter d'en arriver à cette situation pénalisante pour nos concitoyens des zones frontalières, souvent bilingues ou de double culture du fait de la proximité géographique d'un autre pays, nous proposons, par cet amendement, d'organiser une coordination avec les pays limitrophes, leurs autorités compétentes en matière d'attribution de la ressource et les conseils régionaux et généraux français concernés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 50 et 51 ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je m'exprimerai sur les deux amendements simultanément.

Je comprends très bien la position de nos collègues du groupe socialiste, mais je tiens néanmoins à rappeler que, la nuit dernière, une longue discussion sur ce thème a débouché sur une unanimité, chose suffisamment fragile et recherchée, particulièrement au Sénat, pour que l'on ne la mette pas trop en péril.

Je rappelle que nous avons prévu qu'un schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique incluant un calendrier sera approuvé par arrêté du Premier ministre après consultation publique organisée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Cette consultation publique concernera notamment les collectivités locales, puisqu'il est précisé que, à compter du 31 mars 2008, il sera procédé à l'extinction progressive, par zone géographique, de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique.

Certes, il n'est pas indiqué de quel niveau de collectivités locales il s'agira, mais la consultation publique est de droit.

Enfin, il a été prévu de tenir compte de la spécificité des zones de montagne et des zones frontalières : je le dis à l'intention de M. Carle, qui est intervenu à propos des premières, et de mes collègues alsaciens, notamment, qui ont évoqué les secondes.

Dans ces conditions, les amendements présentés n'ajoutent rien au texte. Ils risquent même de l'alourdir, c'est pourquoi je n'y suis pas favorable, la loi devant être claire et concise.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je suis favorable à l'amendement n° 9.

En ce qui concerne l'amendement n° 50, vouloir imposer au schéma national de l'arrêt de la diffusion analogique et du basculement vers le numérique de fixer les perspectives de développement des chaînes diffusées par le câble, le satellite ou l'ADSL me paraît très curieux.

Je suis bien évidemment à l'écoute des responsables de ces chaînes pour tenir compte des difficultés que celles-ci peuvent rencontrer. Ils m'ont d'ailleurs demandé, voilà quelques semaines, d'atténuer les obligations que vous leur aviez imposées, mesdames, messieurs les sénateurs, et que nous avions stipulées par décret en 2001. Nous y travaillons en étroite concertation avec leurs représentants, ainsi que ceux des producteurs et des auteurs. Toutefois, ce dialogue normal n'a pas sa place dans le cadre d'un schéma relatif à l'utilisation des fréquences terrestres, que ces chaînes n'utilisent pas. Je suis donc défavorable à cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 51, je partage tout à fait la préoccupation exprimée par ses auteurs, mais il ne me paraît pas nécessaire. Nous avons longuement évoqué le sujet des zones frontalières hier soir, avec le souci de prendre en compte la volonté parfois exprimée par certains de nos concitoyens de pouvoir continuer à voir et à entendre les émissions diffusées par des chaînes de télévision transfrontalières.

La coordination avec les États limitrophes s'impose déjà à nous aux termes de nos engagements internationaux et eu égard à la nature même des fréquences hertziennes. Elle est donc déjà largement engagée avec l'ensemble de nos voisins. Le lancement de la TNT dans les zones frontalières doit en effet être précédé d'un accord formel avec les États concernés.

La consultation des collectivités territoriales est également légitime. Nous avons répondu de plusieurs manières à cette question, par les procédures de consultation publique et d'information que nous mettons en place au travers du projet de loi : schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique, concertation et consultations assurées par le CSA.

Si vous souhaitez aller plus loin, madame Tasca, il me paraît préférable d'étendre à ces questions la compétence de la commission sur le dividende numérique que propose d'instituer la commission des affaires économiques.

Je pense donc que vous pourriez retirer cet amendement, car il me semble satisfait. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Madame Tasca, les amendements nos 50 et 51 sont-ils maintenus ?

Mme Catherine Tasca. Nous vous donnons volontiers acte, monsieur le ministre, que les problèmes posés à travers ces amendements ont trouvé une heureuse solution au cours de nos travaux de la nuit dernière.

Nous tenions simplement à les évoquer à ce moment de la discussion pour confirmer notre adhésion à la solution adoptée et pour avoir la satisfaction d'entendre réitérés les engagements qui ont été pris sur l'élaboration du schéma national.

En conséquence, nous retirons ces amendements.

M. le président. Les amendements nos 50 et 51 sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 9.

M. Ivan Renar. Le groupe CRC s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 101, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la première phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 102 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

Ce groupement est constitué entre l'État, les éditeurs de services publics et privés de télévision locales, régionales et nationales, les associations d'usagers de services audiovisuels et les représentants des personnels du secteur audiovisuel.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement a pour objet d'accroître, dans le même esprit qui celui qui a inspiré notre amendement sur la composition du Conseil supérieur de l'audiovisuel, la représentativité du groupement d'intérêt public que le texte prévoit de créer. Nous proposons d'élargir sa composition aux chaînes locales, aux téléspectateurs ainsi qu'aux techniciens et professionnels du secteur audiovisuel.

Nous regrettons de constater une fois de plus que le groupement, ainsi que le note M. le rapporteur, est une association des éditeurs nationaux historiques et de l'État, sans représentation des chaînes locales indépendantes et du tiers secteur. Comme le précise le texte lui-même, la « continuité de la réception des services par les téléspectateurs » doit être préservée, et il en va ainsi de la liberté de communication audiovisuelle et de l'égal droit d'accès à l'information. Les téléspectateurs sont les témoins des défaillances du maillage télévisuel et de la difficulté technique ou pécuniaire d'être relié aux différents accès à ces services. Il nous paraît donc nécessaire de les associer à toute consultation.

Par ailleurs, les techniciens et professionnels du secteur audiovisuel sont un étonnant vivier de réflexion et de solutions pour répondre aux questions soulevées par la diffusion des services de télévision. Leur représentation est certainement nécessaire. Il y a là une forme de démocratie représentative, sujet dont on parle tant actuellement.

Voilà pourquoi nous vous demandons de voter en faveur de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Nous le savons tous, un GIP n'est ni un conseil d'administration, ni une association, c'est un groupement opérationnel destiné à mettre en oeuvre une politique, en l'occurrence l'extinction de la diffusion analogique et l'arrivée du numérique.

Il est donc logique que le Gouvernement propose un GIP comprenant uniquement les opérateurs du système, et pas les usagers.

M. Ivan Renar. Il faut entendre les usagers !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Depuis vingt ans, nous essayons de trouver le représentant des associations de téléspectateurs. Est-ce « Que choisir ? » ou « Les pieds dans le PAF » ? J'en cite deux au hasard, mais nous cherchons toujours ! Il en est de même en ce qui concerne les représentants des personnels.

Nous avions anticipé votre remarque : un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 17 prévoit une campagne d'information et de communication auprès du grand public à laquelle doivent être associés l'ensemble des opérateurs, des usagers et - pourquoi pas ? - des techniciens. Vous pourriez donc utilement formuler cette remarque au moment où nous examinerons cet amendement présenté par le Gouvernement et sur lequel notre commission émettra un avis favorable.

Selon moi, le GIP ne doit pas être alourdi, il doit au contraire rester centré sur les opérateurs et sur eux seuls.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il ne faut pas confondre deux objectifs.

D'abord, et c'est un point auquel nous sommes tous particulièrement attachés, ce progrès que constitue l'arrivée du numérique doit être perceptible, compréhensible et accessible à chacun, tous les efforts d'information devant être faits pour qu'aucun de nos concitoyens n'en ait peur.

Ensuite, la structure opérationnelle doit être apte à prendre des décisions. Le rôle du groupement d'intérêt public est avant tout technique et industriel : il aura pour mission de mener les opérations techniques nécessaires à l'extinction de la diffusion analogique et de gérer l'ensemble des problèmes que cette opération pourra soulever auprès des particuliers. C'est un dispositif quelque peu comparable à celui qui a été mis en place pour le réaménagement des fréquences nécessaire au lancement de la TNT et qui a parfaitement fonctionné. L'État doit être présent compte tenu de la mission de service public poursuivie et de la gestion du fonds d'aide destiné aux téléspectateurs les plus démunis.

Faire participer à ce dispositif - essentiellement technique - les associations d'usagers de services audiovisuels et les représentants des personnels du secteur audiovisuel n'est pas une bonne chose. Cette collaboration me paraît relever d'autres mécanismes que nous mettons en place dans le projet de loi, afin d'assurer la meilleure information des Français - M. Louis de Broissia vient de le rappeler à l'instant. Je pense en particulier aux différentes consultations ou campagnes d'information que nous avons prévues dans le projet de loi ou que d'autres amendements tendent à renforcer. Par ailleurs, la campagne d'information que propose d'instituer la commission des affaires culturelles avec l'amendement n° 19 tendant à insérer un article additionnel après l'article 17, à laquelle le président Valade est très attaché, répond également à cet objectif. Le Gouvernement y souscrit pleinement.

Dans ces conditions, je suis défavorable à l'amendement n° 101.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Monsieur le rapporteur, j'ai craint un instant que vous n'alliez nous reprocher de vouloir constituer un soviet ! (Oh ! sur les travées de l'UMP.) La question est sérieuse : il faut prévoir une participation, et pas seulement une simple information des personnes concernées. Dans notre pays où la technocratie est souvent dénoncée, nous nous privons trop souvent, pour reprendre l'expression de Jack Ralite, de « l'expertise du quotidien », c'est-à-dire de ceux qui, dans leur pratique, sont aux premières loges. En l'occurrence, ce sont les téléspectateurs - on les trouve dans les organisations de consommateurs, dans la vie citoyenne, même s'il ne s'agit pas bien sûr de prévoir la présence de cinquante personnes -, et les techniciens, qui eux aussi ont des remarques à faire mais ont également une vision générale des choses. C'est une erreur de se priver des talents que recèle notre pays !

La campagne de communication est uniquement tournée vers l'information du public. Or, il ne s'agit pas seulement d'informer, il faut aussi consulter, voire associer, un nombre plus important de personnes pour être efficace.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Que M. Ivan Renar se rassure : je sais que les soviets sont loin derrière lui et derrière nous, Dieu merci ! allais-je dire.

M. Jack Ralite. À l'avenir, on ne sait pas...

M. Ivan Renar. En ce qui concerne l'autoritarisme d'État, on voit, en France, des choses qui rappellent à certains égards le centralisme démocratique !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Il ne reste plus que quelques républiques soviétiques éparses dans certains pays de l'Est, mais elles sont une survivance de l'URSS.

Je ne voulais pas aborder une question historique...

M. Ivan Renar. Alors, ne l'abordez pas !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Revenons-en à notre texte.

M. Jack Ralite a soutenu la rédaction proposée pour l'article 99, et je l'en remercie de nouveau. La consultation publique du CSA n'est pas de pure forme : il est habilité à associer les représentants des usagers, les techniciens des chaînes de télévision, les représentants des opérateurs de télécommunications, c'est-à-dire à solliciter toutes les expertises possibles et imaginables.

La loi ne doit pas trop entrer dans les détails. Je fais confiance à cette autorité administrative indépendante qu'est le CSA, dont on a voulu renforcer le pouvoir de régulation, et non pas de « régularisation », pour qu'il fasse bien son travail.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 101.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Ivan Renar. C'est bien dommage !

M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Hérisson et  Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n°86-1067 précitée :

« Art. 103.- Il est institué au bénéfice des téléspectateurs exonérés de redevance audiovisuelle et ne recevant les services de télévision en clair que par la voie hertzienne en mode analogique un fonds d'aide, sous condition de ressources du foyer fiscal, destiné à contribuer à la continuité de la réception gratuite de ces services après l'extinction de leur diffusion en mode analogique. Cette aide est modulée en fonction des capacités contributives des bénéficiaires.

« Un décret en Conseil d'État fixe le plafond de ressources applicable et les modalités d'application du présent article, dans le respect du principe de neutralité technologique. »

La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Le Gouvernement a été très bien inspiré de prévoir un fonds d'aide, qui présente une symétrie avec le dispositif que nous avons adopté à l'unanimité hier soir en matière de couverture. En effet, le basculement vers le tout-numérique ne pourra être effectif qu'à deux conditions : le territoire doit être parfaitement couvert - et notre objectif c'est 100 % de couverture - et les foyers doivent être bien équipés.

Le fonds a pour objet de faire en sorte que les foyers les plus fragiles et les plus démunis puissent être aidés pour acquérir le matériel de réception permettant de capter le signal numérique.

La commission des affaires économiques saisie pour avis a souhaité mieux cibler cette aide en direction des démunis, notamment en visant seulement les foyers exonérés de redevance audiovisuelle - puisque c'est la preuve que le foyer fiscal possède une télévision - et en la mettant sous conditions de ressources.

En revanche, nous n'avons pas souhaité associer cette aide au statut de la personne, pour trois raisons.

La première tient au nombre important de statuts en France : RMI, allocation de parent isolé, allocation de veuvage, minimum vieillesse, etc.

Deuxième raison, les plafonds de ressources sont très variés : 430 euros pour le RMI, plus de 2000 euros pour le complément familial.

Troisième raison, l'excellent rapport sur les minima sociaux fait par notre collègue Valérie Létard montre bien qu'associer un certain nombre d'avantages au seul statut n'est pas une incitation à la reprise d'activité.

Enfin, nous avons signalé que cet amendement devait être conforme au principe de neutralité technologique reconnu par les directives communautaires. Cela signifie que pourront être concernés non seulement les adaptateurs mais aussi les décodeurs et même les paraboles pour les personnes situées dans des zones de montagne ou des zones frontalières qui nécessitent l'utilisation de moyens satellitaires. En effet, pourquoi le fonds n'aiderait-il pas aussi à l'acquisition des paraboles ?

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, qui renvoie à un décret notamment le soin de déterminer le plafond de ressources pour l'éligibilité à ce fonds.

M. le président. Le sous-amendement n° 117 rectifié bis, présenté par MM. Carle,  J. Blanc,  Alduy et  P. Blanc, Mme Mélot et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

 

Compléter le deuxième alinéa de l'amendement n° 30 par les mots :

et des solutions techniques de réception disponibles sur la zone.

La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, le texte que vous nous présentez aujourd'hui est extrêmement important car il concerne nos concitoyens dans leur quotidien. Chacun connaît l'importance que nos compatriotes accordent à la télévision, notamment au choix qui leur est offert. Or ils ne sont pas tous égaux devant ce service.

Je me réjouis de votre souci de permettre, par le biais d'un fonds d'aide, l'accès au bouquet TNT des foyers les plus défavorisés. Notre rapporteur vient de le rappeler et le groupe UMP et moi-même y souscrivons totalement.

Mais il existe également d'autres populations défavorisées en la matière, nos compatriotes qui sont situés en zones de montagne ou en zones frontalières : ils n'auront accès à la TNT que très tardivement, voire pour certains jamais. Ils sont donc particulièrement pénalisés car ce n'est pas la première fois, mais la deuxième, voire la troisième fois pour certains : ils ont d'abord attendu longtemps pour avoir les trois chaînes nationales, puis ont pu capter M6 ou France 5 uniquement grâce à l'effort des collectivités, communes, départements et régions. Les mêmes attendent maintenant l'ADSL ou la téléphonie mobile. Ils sont, pour reprendre le titre d'un grand quotidien régional, « Les derniers comme d'habitude ».

Le progrès technologique dans le domaine de la télévision et notamment la diffusion par satellite peuvent permettre qu'ils ne soient effectivement pas les derniers servis. En effet, le 30 juin prochain, la TNT via le satellite sera disponible et accessible de manière plus large dans des zones qui, pour des raisons physiques ou économiques, sont difficilement accessibles par voie hertzienne. En revanche, l'investissement pour ces foyers sera bien sûr plus élevé.

C'est l'objet de mon sous-amendement, qui permettra aux téléspectateurs des zones de montagne et des zones frontalières, souvent les plus défavorisés, d'être servis non pas les derniers mais comme les autres citoyens de notre territoire, à partir du 30 juin 2007, puisqu'ils pourront disposer de la TNT via le satellite.

Mon sous-amendement conjugue donc solidarité sociale - c'est l'objet de votre proposition - et solidarité territoriale, et vient compléter l'amendement n° 30 rectifié ainsi que l'amendement que nous avons adopté hier sur l'initiative de nos deux excellents rapporteurs, dont je tenais à saluer le travail.

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Au début du texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, supprimer les mots :

Afin de garantir l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle,

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.

L'amendement n° 52, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, remplacer les mots :

, membres d'un foyer exonéré de redevance audiovisuelle et

par les mots :

ou membres d'un foyer exonéré de redevance audiovisuelle,

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Nous retirons cet amendement au profit de celui qui est présenté par la commission.

M. le président. L'amendement n° 52 est retiré.

L'amendement n° 102, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, remplacer les mots :

exonéré de redevance audiovisuelle

par les mots :

exonéré de redevance audiovisuelle ou exonéré d'impôts

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Le présent amendement a pour objet d'accroître le nombre de foyers à revenus modestes pouvant être éligibles au fonds d'aide institué par le texte proposé pour l'article 103 de la loi du 30 septembre 1986.

La création de ce fonds destiné à « doper » l'adhésion des foyers à la TNT nous paraît masquer un fait préoccupant : avec la fracture numérique, c'est bien l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle qui est mis en péril.

Le téléspectateur devient un usager, qui devient un client, lequel devient un consommateur, pris en otage par les fabricants d'équipements audiovisuels, et ce à la veille des fêtes de fin d'année.

Le renouvellement du parc de téléviseurs constitue un enjeu industriel et commercial représentant un chiffre d'affaires d'une vingtaine de milliards d'euros.

Or le choix technologique qui a été fait n'est pas probant et le succès de la campagne de marketing mise en place pour la vente des décodeurs de la TNT n'a pas été démontré. Aujourd'hui, le consommateur confond écrans plats, télévision numérique et haute définition. Ainsi, alors que les écrans haute définition sont commercialisés depuis 2004, seuls 4% des Français savent ce que c'est ; seulement 15% en ont entendu parler.

De toute façon, la nouvelle génération de téléviseurs sera périmée dès que les technologies se développeront. Que feront donc les foyers fragilisés par le chômage et la précarité quand la manne du fonds d'aide disparaîtra ?

En attendant une solution à cette autre fracture, nous vous demandons de voter le présent amendement.

M. Ivan Renar. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 53, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter la première phrase du premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par les mots :

et à financer l'équipement et les systèmes d'accès conditionnels à ces services en haute définition.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Cet amendement a pour objet de préciser le type de dépenses qui seront prises en charge par le fonds d'aide aux téléspectateurs les plus démunis.

L'acquisition d'un matériel permettant la réception des nouveaux services, pour lesquels le projet de loi pose aujourd'hui un cadre juridique, sera coûteuse pour les téléspectateurs.

Le Gouvernement a arbitré en faveur du développement, à terme, de la TNT en MPEG4. Aussi les téléviseurs actuellement équipés pour recevoir la norme MPEG2, initialement retenue pour la diffusion des services gratuits de la TNT afin de ne pas retarder le démarrage de celle-ci, ne permettront-ils pas de recevoir les émissions en MPEG4, ces équipements étant le plus souvent incompatibles entre eux.

Les décodeurs MPEG4 devraient être mis sur le marché dans le courant de l'année 2008. D'après les indications qui nous ont été fournies par les industriels, le coût de ces nouveaux décodeurs ne sera pas négligeable au départ puisqu'il s'élèvera à quelque 100 euros, les décodeurs MPEG2 coûtant moitié moins cher actuellement. Et encore faudra-t-il ensuite que l'équipement des foyers soit compatible avec la norme MPEG4.

Dans les zones blanches de diffusion de la TNT, où le service antenne se fera par satellite, le recours à la norme MPEG4 sera requis pour tous les opérateurs.

Il me semble donc utile de prévoir que le fonds d'aide prendra en charge ce type d'acquisition pour les ménages défavorisés.

M. le président. L'amendement n° 132, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 103 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 par une phrase ainsi rédigée :

Le fonds d'aide est abondé à part égale par l'Etat et les éditeurs de services de télévision membres du groupement d'intérêt public prévu par l'article 102.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à compléter le texte proposé pour l'article 103 de la loi du 30 septembre 1986, quelle que soit par ailleurs la rédaction choisie pour cet article.

Cet article institue au bénéfice de certains téléspectateurs un fonds d'aide destiné à contribuer à la continuité de la réception des services télévisés « après l'extinction de leur diffusion en mode analogique ». Monsieur de Broissia, vous qui déplorez le vocabulaire utilisé par la presse, vous auriez pu écrire dans vos amendements « après l'heureux événement de la diffusion en mode numérique », au lieu de parler de cette triste « extinction » ! (Sourires.)

L'amendement n° 132 porte sur le mode de financement de ce fonds. En effet, le projet de loi ne précise pas l'origine des sommes destinées à l'alimenter. Nous proposons donc que celui-ci puisse être abondé à parts égales par l'État et par les chaînes de télévision membres du groupement d'intérêt public chargé de mettre en oeuvre la mutation.

Il apparaît en effet anormal que seul le contribuable soit sollicité alors même que le passage à la télévision numérique ouvre aux opérateurs de télévision, en particulier aux opérateurs privés, des perspectives nouvelles et positives en matière de développement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur cette série d'amendements ainsi que sur le sous-amendement n° 117 rectifié bis ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Ce qui me gêne, c'est non pas le mot « extinction », mais l'expression « arrêt de mort ». Je ne l'aime pas ! L'article que j'ai sous les yeux dit que le Sénat signe l'arrêt de mort de l'analogique, comme si, avec ce texte sur la télévision du futur, la Haute Assemblée rétablissait la peine de mort ! C'est une vision très négative du présent projet de loi. J'espère que ses vertus positives apparaîtront aux yeux de tous.

La commission des affaires culturelles émet un avis très favorable sur la rédaction proposée par la commission des affaires économiques, qui cible très précisément le fonds d'aide et élargit sa portée.

La commission des affaires économiques et la commission des affaires culturelles souhaitent en effet qu'aucun Français ne se sente victime d'une décision - législative, technologique et internationale - qui leur a échappé. Au contraire, elles souhaitent que la promesse numérique soit faite à 100 % des Français.

C'est la raison pour laquelle la commission émet également un avis très favorable sur le sous-amendement n° 117 rectifié bis, qui tend à prévoir que le fonds sera modulé en fonction des solutions techniques de réception. Nous vous avions fait part d'emblée de cette volonté, monsieur le ministre.

En revanche, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 52. Nous pensons en effet - nous le disons très clairement - que la rédaction proposée par la commission des affaires économiques, complétée par le sous-amendement n° 117 rectifié bis, est plus appropriée et plus favorable.

Cet argument vaut également pour l'amendement n° 102 de nos collègues du groupe CRC et pour l'amendement n° 53, présenté par M. Lagauche.

Enfin, concernant l'amendement n° 132, madame Blandin, nous nous interrogeons. Je ne vous cache pas que j'ai un a priori défavorable sur votre amendement.

Il est en effet faux de dire que les chaînes historiques se voient offrir des cadeaux, comme ne manqueront pas encore de le dire certains tout à l'heure lorsque nous évoquerons la chaîne supplémentaire qui leur est octroyée.

Rappelons les faits de façon très simple. Aujourd'hui, une chaîne dite « historique » est installée dans un paysage analogique, mais également numérique et elle doit payer à la fois les frais de distribution analogique et numérique, de même qu'elle est obligée de s'acquitter des frais de production analogique et numérique. En disant cela, j'anticipe sur la présentation de la chaîne supplémentaire. Quant aux nouveaux entrants de la TNT, ils ne font que du numérique. Or les frais de diffusion du numérique sont cinq fois inférieurs à ceux de l'analogique. Quant aux frais de production, ils sont uniques.

Une certaine idéologie, qu'il faut combattre, car elle est fausse, entoure ce texte. À terme, les chaînes historiques pourraient faire...

M. Michel Mercier. Des économies !

M. Louis de Broissia, rapporteur. ...des économies, mais, monsieur Mercier, jusqu'au basculement vers le tout-numérique et jusqu'à l'extinction de la diffusion analogique, elles seront obligées de maintenir les deux modes de diffusion, ce qui représente un coût important.

L'amendement de Mme Blandin me semble donc mal fondé, mais le fait de prévoir une source de financement supplémentaire pour alimenter le fonds pourrait nous intéresser. Je me rallierai donc à l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'amendement n° 30 rectifié concerne une disposition essentielle du dispositif d'extinction, à savoir la garantie d'un soutien financier de l'État aux plus démunis de nos concitoyens.

Ni le Gouvernement ni le législateur ne sont dans le virtuel. Ils ne sont pas déconnectés de la réalité quotidienne. Ils souhaitent que cette évolution technologique soit accessible à chacune et à chacun de nos concitoyens, sans aucune barrière financière. Nous veillons à l'égalité géographique et financière. Aucun Français ne doit être exclu du bénéfice de la télévision numérique, en particulier pour des raisons économiques.

Dans ce but, l'article 103 vise à instaurer au bénéfice de nos concitoyens les plus démunis un dispositif d'aide leur permettant de continuer à recevoir les services de télévision.

Vous souhaitez préciser dans le projet de loi que l'aide sera accordée en fonction du principe de neutralité technologique. La France s'y est engagée vis-à-vis de la Commission européenne lors de la notification de cette aide d'État, qui doit faire l'objet d'une approbation expresse avant sa mise en oeuvre effective.

Les discussions sont très avancées et les informations dont je dispose me permettent de penser que le principe de cette aide d'État sera approuvé avant la fin de l'année. J'étais d'ailleurs voilà quelques jours à Londres, à l'Office of communication, l'OFCOM, afin d'étudier la mise en place de ce système en Grande-Bretagne. Chaque pays européen se préoccupe aujourd'hui des plus démunis de ses citoyens afin que cette évolution soit accessible à chacun. Je ne vois donc pas un seul instant Bruxelles récuser cette aide.

Le fonds d'aide pourra ainsi contribuer au financement de la fourniture d'un adaptateur spécifique pour la télévision numérique terrestre, mais une aide équivalente pourra être accordée si les personnes concernées préfèrent un autre mode de réception, comme le câble, le satellite ou l'ADSL.

La rédaction que propose la commission des affaires économiques est également plus simple et renvoie plus largement au pouvoir réglementaire. Je suis donc favorable à l'amendement n° 30 rectifié.

Le sous-amendement n° 117 rectifié bis présenté par M. Carle vise à compléter utilement l'amendement n° 30 rectifié. Votre préoccupation, monsieur le sénateur, est tout à fait légitime et rejoint celle du Gouvernement. En effet, les citoyens ne sont pas placés dans les mêmes conditions selon qu'ils habitent, par exemple, dans des zones montagneuses ou en ville. Je suis donc favorable à votre sous-amendement.

Il est important que chacun sache, sur l'ensemble du territoire métropolitain, mais également outre-mer, qu'il pourra accéder à ce progrès quelles que soient les contraintes techniques du lieu où il réside. Cet accès se fera par le hertzien terrestre pour la quasi-intégralité de nos concitoyens et par la voie satellitaire gratuite pour les autres.

Mme Annie David. C'est le principe d'égalité !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Oui, je l'ai dit hier soir, madame David. Chacun a d'ailleurs considéré que c'était là le véritable principe d'égalité.

Mme Annie David. Tant mieux !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le fonds d'aide prévu par le projet de loi a pour objet d'accompagner les plus démunis de nos concitoyens dans le basculement vers le numérique. Je rappelle que le coût pour un foyer d'un adaptateur TNT est aujourd'hui compris entre 40 euros et 100 euros, soit le prix d'un plein d'essence pour une voiture, par exemple.

Aujourd'hui, seize millions de personnes ne sont pas imposables. Le surcoût résultant de l'adoption de l'amendement n° 102 serait de l'ordre de 1 milliard d'euros pour le budget de l'État. Dès lors, vous l'aurez compris, le Gouvernement ne peut qu'émettre un avis défavorable sur cet amendement, qui alourdirait donc considérablement les charges de l'État.

L'amendement n° 53 vise à étendre à la télévision haute définition le bénéfice du fonds d'aide institué par le projet de loi pour assurer la continuité de la réception des services télévisés. Cela me paraît très contestable. Un tel dispositif répondrait à un autre objectif. La diffusion des chaînes en haute définition n'a jamais existé et n'existera jamais en analogique : il n'y a donc pas lieu de garantir la continuité de la réception à nos concitoyens.

C'est une chose de garantir la continuité d'un avantage existant, c'en est une autre de permettre à tous de bénéficier de toutes les sophistications du progrès. Vous connaissez mon attachement à la haute définition, mais je ne pense pas que le rôle de l'État soit de financer les équipements permettant de la recevoir, même pour une partie restreinte de la population. Je suis donc défavorable à cet amendement.

En ce qui concerne l'amendement n° 132, je ne partage pas l'idée selon laquelle les chaînes membres du groupement d'intérêt public sont les principales bénéficiaires du basculement vers le tout-numérique. Je m'étonne même que vous puissiez le penser !

L'extinction de la diffusion analogique est au contraire l'aboutissement du processus de lancement de la télévision numérique de terre, initié en 2000 ici même. Que je sache, les principaux bénéficiaires en sont d'abord les Français, pas les chaînes analogiques historiques.

En outre, c'est l'État qui impose aujourd'hui à ces chaînes, si vous votez le présent projet de loi, d'organiser de manière anticipée cette extinction. Il est légitime que les garanties prises en faveur des citoyens les plus démunis soient entièrement financées sur le budget de l'État ; il en est de même pour les exonérations de redevance audiovisuelle, qui sont « remboursées » à l'audiovisuel public.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 117 rectifié bis.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 30 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 102, 53 et 132 n'ont plus d'objet.

Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L'amendement n° 54 est présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 78 rectifié est présenté par M. Mercier, Mme Morin-Desailly, M. Nogrix et les membres du groupe Union centriste-UDF.

L'amendement n° 103 est présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986.

La parole est à Mme Catherine Tasca, pour présenter l'amendement n° 54.

Mme Catherine Tasca. Nous en arrivons à un point « chaud » du projet de loi.

Notre amendement vise à supprimer l'octroi de la chaîne « bonus » aux opérateurs « historiques ». Nous tenons à rappeler que ces chaînes ont déjà obtenu des mesures très favorables en 2004, visant d'ailleurs à les convaincre de surmonter le peu d'allant qu'elles manifestaient pour la mise en route de la TNT.

Nous avons bien entendu votre raisonnement, monsieur le ministre, nous rappelant les contraintes juridiques dans lesquelles vous avez élaboré ce texte et les conséquences du changement de calendrier imposé à ces chaînes. Vous en avez tiré la conclusion juridique qu'il fallait leur donner une forme de compensation.

Nous estimons que le projet de loi opère déjà une compensation par la prorogation de l'autorisation, mais également par le « droit de tirage » qui leur est accordé pour la télévision haute définition et pour la télévision mobile personnelle. Dès lors, nous considérons que l'octroi de cette chaîne « bonus » n'est pas une nécessité juridique, la compensation nous paraissant tout à fait à la hauteur du préjudice potentiel.

Le CSA comme l'ARCEP, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, dans leurs avis respectifs sur le projet de loi, ont émis les plus grandes réserves sur l'octroi de cette nouvelle chaîne bonus : le CSA en soulignant le risque de déséquilibre de l'offre de TNT et de mise en péril du pluralisme au regard du libre choix quant au format éditorial de la nouvelle chaîne et la fragilisation de la situation des nouveaux entrants ; l'ARCEP allant jusqu'à demander la suppression pure et simple de la disposition consistant à « préempter encore un peu plus le dividende numérique » au profit des seuls éditeurs de « chaînes historiques ».

Vous devriez, monsieur le ministre, entendre l'appréciation portée par ces deux instances.

Nous considérons donc qu'il faut supprimer la chaîne « bonus », étant entendu que l'attente d'une compensation nous paraît déjà satisfaite.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour présenter l'amendement n° 78 rectifié.

M. Philippe Nogrix. Le groupe UC-UDF présente également un amendement de suppression.

M. Philippe Nogrix. D'abord, ce texte nous semble entraîner une disparité de traitement entre les différentes chaînes et donc favoriser certaines d'entre elles. Ensuite, il est absolument contraire au droit communautaire. Enfin, il ne respecte pas le principe d'égalité.

Finalement, vous nous proposez d'attribuer une chaîne gratuite aux groupes historiques, que vous appelez « canal bonus ».

M. Louis de Broissia, rapporteur. Mais non !

M. Philippe Nogrix. Tout est bon pour ces opérateurs : après le bonus octroyé par la première loi, voici que l'on ajoute un « bonus bis » ! Cette attribution entraîne, quoi que l'on en dise, une restriction au préjudice des autres postulants éventuels.

La volonté d'apporter une contrepartie aux groupes dits « historiques » à l'occasion de l'extinction de la diffusion analogique en les autorisant à bénéficier d'une nouvelle chaîne « bonus bis », cette faculté s'exerçant au préjudice des autres chaînes garantes du pluralisme sur la TNT, est-elle conforme aux « critères objectifs, non discriminatoires, proportionnés » exigés par la directive européenne ? Je ne le pense pas.

Enfin, si les dispositions permettant d'octroyer les chaînes « bonus bis » aux trois groupes historiques devaient véritablement relever du domaine législatif, on peut s'interroger sur les voies de recours dont disposeraient des candidats potentiels à l'exploitation de ces fréquences qui se considéreraient lésés.

Or l'article 2 de la directive 2002/77/CE de la Commission du 16 septembre 2002 énonce que « toute partie lésée doit disposer d'une possibilité de recours contre une telle décision devant un organe indépendant des parties en cause et, en dernier ressort, devant une juridiction ». Si l'octroi d'une chaîne « bonus bis » devait relever de la loi, on peut légitimement s'interroger sur l'existence de telles voies de recours.

En outre, je me référerai aux observations que le Conseil supérieur de l'audiovisuel avait émises au mois de juillet 2006 : « L'élaboration de cet avis a été principalement guidée par le souci du respect du pluralisme, principe de valeur constitutionnelle qui s'impose tant au législateur qu'à l'instance de régulation, et qui suppose notamment que soient recherchés tout à la fois la diversification des opérateurs et le développement de modes de diffusion propres à accroître l'offre télévisuelle proposée aux téléspectateurs ; un équilibre doit donc être trouvé afin que les mesures tendant à favoriser le développement de la TNT n'aboutissent pas à renforcer la position des acteurs les plus puissants. »

Les deux principaux écueils soulignés par le CSA sont les suivants.

D'une part, la mesure prévue dans le projet de loi laisse totalement libres les chaînes concernées par cet avantage de décider du format éditorial, ce qui risque de perturber l'équilibre global de l'offre de la TNT et, surtout, ne répond pas aux exigences de pluralisme des contenus auquel nous sommes tous attachés.

D'autre part, cette disposition aura aussi des conséquences sur l'équilibre économique des nouveaux entrants, qui sont déjà dans une situation fragile. Pour eux, elle s'apparente à une distorsion de concurrence qui vient renforcer la position dominante des opérateurs historiques sur le marché publicitaire, déjà monopolisé à 75 % par TF 1 et M6. Elle affaiblit de fait les nouveaux entrants, mais également le service public, comme je l'ai déjà dit lors de la discussion générale, en réduisant leurs ressources publicitaires respectives.

Cet article déroge par ailleurs au principe d'égalité.

Pourquoi prévoir la réparation d'un préjudice alors que nous savons tous que ni les dispositions et principes à valeur constitutionnelle ni les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ne paraissent faire obstacle à ce que, dans le respect du principe d'égalité, la loi remette en cause des autorisations en cours en mettant à la charge de leurs titulaires les éventuels réaménagements de fréquences et les coûts induits résultant des relations contractuelles de ceux-ci avec les distributeurs de service ?

Pourquoi, dans ces conditions, serions-nous dans l'obligation de compenser un préjudice ? Existe-t-il véritablement ? Qui l'a évalué ? La compensation correspond-elle exactement à sa valeur ? Personne ne nous a démontré que le préjudice méritait ce « bonus bis » !

Enfin, s'il s'agissait vraiment de la réparation d'un préjudice, il conviendrait plutôt d'attribuer à ces chaînes historiques, dont le but est de dégager des bénéfices, des moyens supplémentaires pour acheter des programmes rentables. Est-ce véritablement ce que nous voulons défendre ici ? À mon avis, c'est l'inverse. Nous ne voulons pas être envahis par des programmes américains, chinois ou autres qui mettent trop souvent en avant la violence, l'illégalité, le sensationnel, au détriment du fond, de la culture et de l'intérêt général.

M. Michel Mercier. Très bien !

M. Philippe Nogrix. Pourquoi donner des moyens supplémentaires à des gens qui en ont déjà ?

À plusieurs reprises au cours des débats, vous avez insisté, à juste titre, sur le fait que le passage au numérique est un investissement porteur d'avenir, donc de retour sur investissement. Faut-il donc, après le « bonus bis » que vous nous proposez d'adopter, oublier le « bonus ter » que vous leur offrez en encourageant leur mise à niveau dans le domaine numérique ?

Décidément, il faut supprimer cet article qui n'apporte qu'injustice et traitements préférentiels !

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour présenter l'amendement n° 103.

M. Ivan Renar. Dans le cadre d'une réforme qui dessine de façon irrémédiable le paysage audiovisuel français, nous ne pouvons souscrire à l'octroi d'une chaîne supplémentaire aux éditeurs nationaux de services de télévision analogique.

Nous avons bien pris note des arguments du rapporteur et de la présentation par la commission d'un amendement encadrant les obligations spécifiques à cette chaîne en matière de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne, mais nous en contestons le bien-fondé.

Il nous paraît déplacé, choquant, que cette chaîne soit une compensation financière, un bonus, un cadeau nécessaire en échange de services somme toute normaux pour une entreprise de télévision, à savoir toucher tous les foyers sur le territoire et participer au développement d'un patrimoine national rapportant des dividendes à l'exportation.

De plus, comme nous l'indiquons dans l'objet de notre amendement, cet avantage place ses bénéficiaires hors de toute concurrence pour le développement de nouvelles chaînes et constitue une entrave à l'arrivée de nouveaux éditeurs sur le « dividende numérique ».

Nous ne reviendrons pas sur la nécessité du principe de l'appel à candidatures et sur l'intérêt de freiner la standardisation des programmes ainsi que la concentration des médias en répondant aux impératifs du pluralisme, de la diversification des entreprises et des associations télévisuelles.

Pour toutes ces raisons brièvement résumées, nous vous demandons de supprimer le texte proposé pour l'article 104 de la loi du 30 septembre 1986. Nous demandons un scrutin public, monsieur le président.

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission demande également un scrutin public !

M. le président. L'amendement n° 133, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début du texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :

Si l'extinction complète de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique d'un service national de télévision préalablement autorisé sur le fondement de l'article 30 intervient avant le 30 novembre 2011, le Conseil supérieur de l'audiovisuel...

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cette rédaction fait perdre le canal compensatoire à qui ne respecterait pas les délais.

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

à condition que ce service

insérer les mots :

ne soit lancé qu'à compter du 30 novembre 2011 et qu'il

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. J'apporte une voix discordante dans cette belle unanimité qui m'inquiète. Je n'aurai aucun mal à démonter des arguments rationnels, mais il me sera difficile, je le dis clairement, de m'opposer à des arguments idéologiques.

Cher collègue Nogrix, le mot « bonus » n'est mentionné nulle part dans le texte. Il est vrai que qui veut noyer son chien l'accuse de la rage ou l'affuble d'un vilain nom. Restons-en donc aux termes du projet de loi : il s'agit d'une chaîne supplémentaire ! Ce dispositif figurait déjà, mon cher collègue, dans la loi d'août 2000. Au reste, il serait intéressant de savoir si, à l'époque, il existait une aussi forte opposition à l'attribution de chaînes supplémentaires, mais j'y reviendrai.

L'amendement n° 11 vise à préciser que les chaînes supplémentaires, si cette mesure était adoptée par le Sénat, ne pourraient être lancées par les opérateurs « historiques » qu'à compter du 30 novembre 2011. En effet, le paysage audiovisuel français est extraordinairement complexe. Il a été chahuté par l'arrivée de technologies nouvelles, par l'apparition d'autres types de consommation et par un usage différent de la publicité. À cet égard, comme je l'ai longuement expliqué hier soir, et je le répéterai encore, cette dernière permet le financement du tout-gratuit.

Pour ne pas compromettre un équilibre économique instable - un équilibre flottant, comme disait Jack Ralite -, il faut instaurer pour les chaînes « historiques » la possibilité d'user de ce canal optionnel après le 30 novembre 2011, et pas avant. Ayant longuement auditionné les responsables des « nouveaux entrants » de la TNT, je sais qu'il faut leur assurer dans l'intervalle un paysage économique, technologique et télévisuel stable. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 148 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

à condition que ce service

insérer les mots :

respecte les engagements de diffusion et d'investissement fixés à l'article 27, remplisse les conditions et critères énoncés aux deuxième et troisième alinéas du III de l'article 30-1, souscrive à des engagements particuliers en matière de diffusion et de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne fixés par décret en Conseil d'État,

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Avant de présenter cet amendement, je voudrais dire à quel point il est important d'être juste s'agissant de la question de la chaîne supplémentaire. En effet, je ne vois pas pourquoi on devrait favoriser de grands groupes sous prétexte qu'ils subiront une rude concurrence. Certes, ils vont devoir s'adapter, mais comme devront s'adapter les « nouveaux entrants » ou les chaînes du service public, qui auront par définition une mission culturelle accrue à concevoir à l'occasion de la mise en oeuvre de la haute définition ou de la TNT.

Il est vrai que le gâteau des recettes publicitaires sera à partager avec plus de chaînes. Nous aurons donc certainement une réflexion à conduire dans le cadre du projet de loi de finances pour 2007 sur l'évolution des recettes de la télévision, notamment de la redevance.

Soulignons tout de même que TF1 et M6 monopolisent déjà 75 % du marché publicitaire. Avant de leur octroyer un canal supplémentaire, assorti d'une contrepartie qu'on nous annonce comme étant extraordinaire, puisque la création s'en trouverait renforcée, j'aimerais que l'on fasse un bilan des productions de M6 ou de Canal Plus. J'en cite quelques exemples avec des émissions du style Super Nanny, C'est du propre ou J'ai décidé de maigrir.

Notre amendement de repli vise à encadrer un minimum l'attribution d'un canal supplémentaire aux chaînes privées « historiques » lors de l'extinction de la diffusion en mode analogique en leur imposant des obligations de production et de diffusion cinématographique et audiovisuelle particulières. Cette proposition va dans le sens préconisé par l'avis du CSA, qui demandait qu'on impose à ces nouvelles chaînes des conditions en termes de contenu.

Nous souhaitons que les chaînes supplémentaires respectent les obligations de diffusion d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d'expression originale française et la contribution que les éditeurs de service doivent assurer au développement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, telle que prescrite par l'article 27 de la loi de 1986.

Par ailleurs, notre amendement reprend les conditions et critères énoncés aux deuxième et troisième alinéas du paragraphe III de l'article 30-1 et rejoint la proposition de la commission, qui vise à ajouter des obligations spécifiques en matière de diffusion et de production française et européenne.

En adoptant ces dispositions, nous serions certains que les nouvelles chaînes de la TNT issues des opérateurs « historiques » privés ne feront pas dans le moins-disant culturel, mais pourront, le cas échéant, enrichir l'oeuvre de programme de la TNT. Ce dispositif se situe dans le droit-fil des autres amendements que nous avons déposés sur la création culturelle et le mieux-disant culturel numérique. Il nous paraît en effet normal de poser cette condition à l'octroi d'une nouvelle chaîne aux opérateurs « historiques » privés. (M. Philippe Nogrix applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 104, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après les mots :

à condition que ce service remplisse

rédiger comme suit la fin du texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 :

des engagements particuliers en matière de diffusion et de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne en sus de ses engagements issus de l'article 27 de la présente loi. Un décret fixe la majoration de ces engagements. Il comporte notamment une clause de diversité.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Nous considérons que si cette chaîne supplémentaire est octroyée aux opérateurs « historiques » de télévision, le seul choix qui nous reste est d'exiger des engagements spécifiques de la part de ces opérateurs en matière de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne et de diffusion de ces oeuvres. En effet, la situation réelle en matière de production française n'est pas satisfaisante : les « délocalisations » des tournages mettent en jeu aussi bien la pérennisation et le développement des savoir-faire que le patrimoine culturel.

Nous ne parlerons pas ici de la situation des professionnels aguerris pris dans la tourmente d'un plan de restructuration industrielle et technologique sans obtenir de garantie de reconversion et de moyens suffisants pour la mener individuellement, tandis que les nouveaux professionnels précarisés entrent presque sans mémoire dans la sphère des nouveaux médias.

Les anciens comme les nouveaux supports ou modes d'expression cohabitent et les oeuvres très différentes qu'ils inspirent doivent être soutenues au stade tant de leur production que de leur diffusion. Les chaînes sont coproductrices et perçoivent des dividendes à ce titre.

En acceptant la « chaîne bonus », elles doivent s'engager, pour celle-ci, à un cahier des charges particulier relatif à la production et à la programmation d'oeuvres françaises récentes. Tel est le sens du présent amendement.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 12 est présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles.

L'amendement n° 120 rectifié est présenté par M. Karoutchi et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

de l'article 30-1

insérer les mots :

, souscrive à des engagements particuliers en matière de diffusion et de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne fixés par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je vais faire preuve d'une certaine originalité dans ce débat : je suis le seul à défendre à la fois la chaîne supplémentaire et les obligations spécifiques.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Comme le Gouvernement !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Après avoir déposé un amendement visant à préciser que les opérateurs « historiques » ne pourraient lancer les chaînes supplémentaires qu'à compter du 30 novembre 2011, la commission présente cet amendement pour des raisons de cohérence. Je remercie d'ailleurs ses membres de l'avoir adopté. J'espère que le Sénat nous soutiendra.

La commission est favorable au maintien du texte proposé pour l'article 104 de la loi du 30 septembre 1986 assorti de règles contraignantes, et je reviendrai tout à l'heure sur les amendements de suppression. En attendant, je dis à nos collègues qu'ils devront répondre de leur vote, puisqu'il y aura un scrutin public, devant les créateurs, les auteurs et les producteurs.

Je tiens à le rappeler : nous sommes pour l'offre audiovisuelle et télévisuelle la plus large possible et la promesse numérique pour tous les Français. C'est ce qui m'anime depuis le début de l'examen du projet de loi.

M. Alain Gournac. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l'amendement n° 120 rectifié.

M. Roger Karoutchi. Cet amendement n'appelle pas de développement supplémentaire, car il est identique à celui de la commission.

Cela étant, comme vient de le dire M. de Broissia, il est important de manifester notre souhait qu'il y ait des engagements particuliers en matière de diffusion et de production cinématographique et audiovisuelle d'expression originale française et européenne. En tout état de cause, les débats l'ont prouvé, cette évolution est rendue nécessaire non seulement par les progrès techniques, mais aussi par le besoin de défendre la culture française, la francophonie et le poids de nos organismes.

M. le président. L'amendement n° 55, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

de l'article 30-1

insérer les mots :

, des obligations complémentaires en matière de diffusion d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et françaises, en particulier aux heures de grande écoute et en matière de contribution au développement de la production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, notamment de la production indépendante, à leur égard

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Il s'agit d'un amendement de repli par rapport à l'amendement n° 54, qui vise à supprimer purement et simplement le canal « bonus ». Je constate avec satisfaction que cette position de repli semble être grandement partagée sur les travées de notre hémicycle, si j'en juge par le nombre d'amendements de teneur proche du nôtre.

J'ai fait part de toutes les réserves que je nourrissais à l'encontre du nouveau canal « bonus » octroyé aux chaînes privées de l'analogique hertzien terrestre. Ce nouveau cadeau doit au minimum s'accompagner de nouvelles obligations.

Les opérateurs privés destinataires de ce « bonus » trouvent la justification de ce cadeau dans le fait qu'ils participent et ont participé, depuis des années, au financement et au développement de l'industrie des programmes. Il nous semble donc logique que le renforcement de leur présence dans le paysage audiovisuel aille de pair avec le renforcement de leur participation dans cette industrie. Sur ce point, je rejoins M. le rapporteur.

Ces obligations porteront tant sur la diffusion que sur la production d'oeuvres, notamment issues de producteurs indépendants à l'égard des « opérateurs » concernés. Je souligne ce point, car il n'est abordé par aucun des autres amendements prévoyant des contreparties au bonus. Bien entendu, nous souhaitons que soient visées les oeuvres cinématographiques et audiovisuelles françaises et européennes et que les obligations de diffusion prennent en compte les heures de grande écoute.

M. le président. L'amendement n° 134, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

  Dans le texte proposé par cet article pour l'article 104 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots :

article 30-1,

insérer les mots :

s'engage à ne pas diffuser de publicités

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Je soutiens les propositions de suppression du canal dit « compensatoire », car « TF1 + TF1 » ou « M6 + M6 » ne représentent pas un élargissement du paysage audiovisuel. Dans ces conditions, si le canal « bonus » était maintenu, cet amendement de repli créerait des obligations nouvelles.

Aujourd'hui, nous parlons des tuyaux et nous rêvons des contenus. Le titre du projet de loi avec ses termes de « modernisation » et de « télévision du futur » nous invite à l'audace.

Le canal que vous appelez « compensatoire », monsieur le ministre, est un espace neuf permettant toutes les innovations. Je vous propose d'y insérer un espace inédit, ou plutôt oublié depuis longtemps, pour les téléspectateurs, à savoir un espace sans publicité. Ce ne serait pas pour autant un espace gratuit, sans redevance ni apport des marques. Ce serait un canal annexe d'une chaîne à haute densité publicitaire, dont les bénéfices pourraient supporter ce coût.

Je rappelle que TF1, par exemple, avec ses 30 % d'audience capte 50 % des ressources publicitaires. Voulons-nous renforcer encore cette position, et au passage rendre difficile le chemin des nouveaux entrants de la TNT, ou bien oserons-nous tenter une expérience économiquement viable et culturellement originale ? Cela n'entamerait pas les 485 millions d'aide à la création que vous évoquiez, mais ouvrirait la porte à une programmation libérée des contraintes de l'audimat et du nivellement par le bas que génèrent les liens douteux du choix des oeuvres, émissions et informations diffusées avec les intérêts des marques à promouvoir.

Se préoccuper de la culture, c'est organiser et financer la création ainsi que la diffusion de la musique, du livre, du cinéma, du théâtre. C'est également garantir des formations, des lieux, des droits d'auteur et des revenus aux artistes et aux techniciens. Mais n'est-ce pas aussi limiter le formatage des esprits, le matraquage publicitaire ?

Créer des désirs à l'infini, générer de la surconsommation chez les plus riches, de la frustration chez les plus pauvres, c'est construire une société de gâchis des uns et de colère des autres. N'avons-nous pas une responsabilité d'éducation en la matière ?

L'idéal serait que les chaînes publiques soient exemptes de publicité et financées par une taxe sur la publicité des chaînes privées et une redevance accrue. Tel n'est pas le propos de ce texte. En revanche, la définition du canal compensatoire offre cette opportunité.

La dérive exacerbée de l'incitation à la consommation transgresse le bon sens et la responsabilité : à l'heure du désordre climatique, les 4 x 4 et grosses cylindrées envahissent les écrans. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Caricature !

Mme Marie-Christine Blandin. À l'heure de l'obésité, les incitations aux sucreries et aux plats cuisinés caloriques occupent les programmes pour enfants. À l'heure du malaise de toute une génération, la perspective offerte pour se sentir mieux s'incarne dans les chaussures N, les survêtements A ou les téléphones S. Au passage, les annonceurs font peser sur les chaînes le virus de l'autocensure, et il devient malséant que la société s'interroge sur le commerce éthique ou les dégâts de l'agroalimentaire. Quant au Darfour au milieu de cette gabegie, il n'a même plus sa place ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Il y a une dérive !

Mme Marie-Christine Blandin. Mes chers collègues, je vous propose d'ouvrir la fenêtre, de desserrer l'étau et de saisir cette opportunité très rare d'éradiquer la publicité de nos cerveaux durant quelques heures grâce à un canal qui ne s'appellerait plus « compensatoire » ou « bonus », mais simplement « refuge » ou « épanouissement humain ». (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 54, 78 rectifié et 103.

Je veux dire un mot sur la suppression de la chaîne dite « bonus », chaîne « supplémentaire » ou chaîne « optionnelle ». Je rappelle que la commission défend le principe d'assortir la création de cette nouvelle chaîne de conditions très précises : elle sera lancée à partir du 1er décembre 2011 et encadrée par des obligations de production - ce sont les amendements nos 11 et 12.

Les uns et les autres, mes chers collègues, vous avez dit avec une belle constance et en employant des expressions différentes que cette chaîne n'est pas un dû et qu'elle est un cadeau.

Or la commission rappelle dans son rapport que la loi du 1er août 2000, et Mme Tasca le sait bien, a déjà permis la création de chaînes supplémentaires.

Je serais intéressé de savoir comment ceux qui étaient déjà parlementaires à cette époque ont perçu l'attribution à TF1 d'une chaîne supplémentaire - LCI -, certes payante, et à M6 d'une chaîne musicale.

À l'époque y étions-nous défavorables ? Non, nous pensions tous que les Français méritaient un paysage audiovisuel plus ouvert.

La France était, il y a encore deux ans, l'un des pays au monde les plus fermés sur le plan de l'offre télévisuelle. Je parle, bien entendu, de l'offre télévisuelle gratuite, car les « bobos » pouvaient s'offrir l'accès à des chaînes payantes depuis très longtemps !

Comme nous sommes favorables à la démocratie télévisuelle, nous avons été favorables, au Sénat, depuis 1999, à la télévision numérique de terre. Par ailleurs, l'ensemble des textes que nous avons votés témoignent que nous sommes également favorables à une offre télévisuelle supplémentaire.

Dans ce paysage, il est important de souligner que l'attribution d'une chaîne supplémentaire est un dû pour deux raisons, et sur ce point, je réponds en particulier à mon collègue et ami Philippe Nogrix.

Il existe, en effet, un double préjudice. Le rapport est d'ailleurs extrêmement bien fourni à cet égard, et je vous invite à vous y reporter.

Le premier préjudice est lié à la remise en cause d'un droit acquis. Est-il nécessaire de rappeler que le droit d'être diffusé sur le spectre hertzien, analogique ou numérique, est assorti non pas de paiement, comme pour les télécommunications, mais d'obligations de production, de création et, cher collègue Nogrix, de diffusion ? Cela fait qu'aujourd'hui TF1 est accessible par 99 % des foyers français en mode analogique, contre 85 % pour M6 et France 5.

Nous avons voulu, avec la commission des affaires économiques, imposer aux chaînes une obligation de couverture numérique de 95 % de la population. Or la remise en cause de leur diffusion en mode analogique est prévue à partir du 31 mars 2008, zone par zone.

Le second préjudice est lié à un bouleversement dans le paysage audiovisuel : avec l'arrivée de la TNT, on passe de six à dix-huit chaînes.

Je rappelle qu'aucune chaîne de la TNT ne subit de préjudice puisqu'elles viennent toutes d'être retenues par le CSA, au détriment de très nombreuses chaînes indépendantes qui auraient aimé être elles-mêmes retenues. Quel est donc le préjudice ? Il n'y en a pas !

En revanche, le préjudice des chaînes historiques est évident,...

M. Louis de Broissia, rapporteur. ...et l'attribution de cette chaîne supplémentaire est une compensation dont le Conseil d'État souligne le caractère nécessaire.

M. Louis de Broissia, rapporteur. C'est un solide argument juridique.

Quelles sont maintenant les conditions de l'octroi de cette chaîne ?

Il est vrai que nous trouvions insuffisant le texte proposé par le Gouvernement. C'est pourquoi nous l'avons renforcé en déposant les amendements nos 11 et 12.

Nous avons également renforcé ce texte par la création d'une obligation de couverture à 95% par voie hertzienne terrestre et nous souhaitons - nous l'avons dit et nous le dirons de nouveau à plusieurs reprises - que des obligations de production et de création soient très fermement rappelées.

Cependant, je souligne que ces chaînes historiques ont contribué et contribuent encore aujourd'hui de façon notoire à la vitalité de l'expression originale d'oeuvres françaises et européennes.

Sans les chaînes historiques, il n'y aurait pas aujourd'hui, on peut le dire très simplement, de création française, voire de cinéma français - de nombreux rapports l'ont montré.

Il faut donc simplement considérer cette chaîne supplémentaire comme un dû juridique, comme une nécessité absolue pour la couverture géographique et l'accessibilité de ce nouveau mode de diffusion.

Cela imposera à ces chaînes historiques des engagements lourds. Nous avons évoqué avec le rapporteur pour avis M. Bruno Retailleau les 115 émetteurs hertziens déjà planifiés par le CSA. Nous passerons, en raison de la mesure prise cette nuit - 85 % à 95 %  -, de 115 sites à 2 000 sites.

J'ai entendu nos collègues des zones de montagne ou des zones frontalières émettre des doutes importants sur ce sujet. Je veux leur dire qu'il s'agira peut-être non pas de 2 000 sites, mais de 2 200 sites ou de 2 300 sites !

Je rappelle qu'aujourd'hui TF1 utilise près de 3 000 émetteurs et réémetteurs pour la diffusion analogique de ses programmes.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. 3 300 !

M. Louis de Broissia, rapporteur. J'ai en tête le chiffre de 3 368.

Quoi qu'il en soit, c'est dire que l'enjeu est extraordinairement important.

En conséquence, je souhaite que nos collègues qui ont défendu leurs amendements avec des arguments qui reposent sur une vision différente de celle de la commission des affaires culturelles acceptent de bien vouloir les retirer. En tout état de cause, j'émets un avis défavorable sur ces amendements.

Pour ce qui concerne l'amendement n° 133 de Mme Blandin, je dois avouer que je n'en ai pas très bien compris le sens. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable. Si l'extinction est prévue à partir du 30 novembre 2011, les éditeurs de service auront un intérêt évident à supprimer le plus tôt possible leur réseau analogique. Je vous le dis très simplement, madame Blandin : je ne vois pas l'intérêt de cet amendement.

S'agissant des amendements nos 148 rectifié, 104, 120 rectifié et 55, ils sont satisfaits par l'amendement n° 12 de la commission.

Enfin, je dois dire que les considérations de Mme Blandin sur la suppression de la publicité ont fait souffler un air frais, celui du monde, sur cette assemblée.

Néanmoins, madame Blandin, la publicité, nous en avons parlé lors de la discussion générale, offre la possibilité au téléspectateur d'accéder à un produit culturel de façon gratuite. Je le dis de nouveau : seule la publicité permet aux téléspectateurs qui peuvent recevoir dix-huit chaînes de les recevoir gratuitement. Les autres chaînes sont payantes et elles sont accessibles par abonnement.

Nous avons privilégié, jusqu'à présent, une offre gratuite qui soit la plus large possible. C'est une offre large, c'est une offre généreuse, c'est une offre qui change tous les mois, comme en témoignent les rapports de Médiamétrie.

Des chaînes nouvelles apparaissent. On l'a vu, en particulier, avec la chaîne Gulli  - c'est très frais, c'est plus frais, madame Blandin, que les chaînes auxquelles vous faisiez référence ! -, chaîne « jeunesse » liée au secteur public, qui est l'un des premiers points de l'audience de la TNT.

Cela signifie qu'une chaîne en direction de la jeunesse manquait en France - le CSA et nous tous ici, au Sénat, avions soulevé ce problème.

Gulli réalise donc quatre points immédiatement après son entrée sur la TNT. C'est pourtant une chaîne qui a de gros progrès à faire sur le plan de son contenu culturel puisqu'elle diffuse quasiment plus de mangas que de productions et de dessins animés français -  le CSA l'a déjà souligné.

En tout état de cause, madame Blandin, je suis défavorable à votre amendement, qui est à mon avis en contradiction avec l'objectif que vous vous fixez.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je veux le dire aux auteurs des amendements nos 54, 78 rectifié et 103, il n'y a pas là de cadeau, pas de bonus ; il y a droit et équité. Nous sommes non pas dans le rêve mais dans la réalité.

C'est la raison pour laquelle j'assume, comme l'ont indiqué à juste titre la commission des affaires culturelles et son rapporteur, le fait que les chaînes de télévision soient des chances pour la politique culturelle de notre pays.

La stratégie de contenu est absolument essentielle. C'est pourquoi, face à l'augmentation du nombre de chaînes accessibles à nos concitoyens sur l'ensemble du territoire national en qualité numérique, nous bénéficions du soutien du monde de la création, qui y voit des occasions de rayonnement, d'activités supplémentaires.

Le rêve aurait été de ne pas tenir compte des contenus. La réalité c'est d'avoir le courage, dans la France d'aujourd'hui, de dire qu'un métier, qu'une réalisation, qu'un contenu coûtent de l'argent. Ça ne se fait pas comme ça, de manière irréelle, même si le talent repose avant tout sur la liberté de l'esprit. Il faut financer les contenus ; il faut les mettre en oeuvre ; il faut qu'ils soient diffusés.

Ce n'est pas une sorte de fait du prince,...

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. ...de privilège dont on bénéficierait pour des raisons occultes. C'est tout simplement l'expression du principe du droit, de celui de l'équité.

Pour l'élaboration de ce projet de loi, comme il est normal de le faire, le Gouvernement a préalablement recueilli l'avis du Conseil d'État. Cet avis nous a notamment confirmé que l'interruption anticipée par une décision unilatérale de l'État de la diffusion des services de télévision constituait une atteinte aux droits octroyés par une décision administrative du CSA.

Le législateur peut, pour un motif d'intérêt général, revenir sur des droits octroyés à des entreprises. C'est ce que le Gouvernement vous propose de faire.

Il est cependant impératif sur le plan juridique de compenser le préjudice économique subi par ces entreprises. Ces compensations figuraient, bien évidemment, dans le projet de loi soumis à l'avis du Conseil d'État et pour lequel nous avons reçu un avis favorable.

Le Gouvernement a exclu l'hypothèse d'une compensation financière au profit de TF1, de M6 et de Canal Plus. Nous avons préféré vous proposer deux compensations juridiques.

La première compensation semble aller de soi puisqu'il s'agit d'aligner la durée des autorisations de TF1, de M6 et de Canal Plus sur celles dont bénéficient les autres chaînes de la TNT.

La seconde compensation concerne l'octroi d'une autorisation supplémentaire sous le contrôle du CSA, après, et seulement après, la fin de la diffusion analogique, c'est-à-dire à compter du 30 novembre 2011.

Dès l'entrée en vigueur du projet de loi, le CSA pourra ponctuellement mettre fin à la diffusion analogique de ces opérateurs, puis il procédera à cette extinction par zones géographiques entières à compter du mois de mars 2008 - nous en avons déjà débattu.

Nous revenons donc sur le droit acquis par ces chaînes à diffuser leurs programmes en mode analogique jusqu'au terme normal de leur autorisation. Plus précisément, nous revenons sur le bénéfice qui leur avait été consenti dans la loi de 2000 et qui avait été confirmé dans la loi de 2004.

Ces opérateurs ont, en effet, bénéficié d'une prorogation de cinq ans de leur autorisation analogique s'ils acceptaient de diffuser leur programme en TNT. Je rappelle que c'était l'objet de l'article 82 de la loi du 1er août 2000. À défaut, les autorisations analogiques de TF1, Canal Plus et M6 auraient pris fin en 2005 et en 2007.

Nous revenons également sur un deuxième bénéfice que la loi de 2000 leur avait consenti, celui d'un droit à double diffusion de leur programme en mode analogique et en mode numérique pour une durée équivalente. Ce que l'on a appelé le droit au simulcast est également issu de la loi du 1er août 2000, ne l'oublions pas.

Par-delà ces raisons juridiques qui s'imposent à nous, le canal supplémentaire est également un choix de politique culturelle que j'assume, ainsi que j'ai eu l'occasion de le préciser dans mon discours de présentation générale.

À côté des chaînes du service public - j'y reviendrai plus précisément pour qu'il n'y ait ni ambiguïté ni sentiment de déséquilibre - la création audiovisuelle et cinématographique est, aujourd'hui, intégralement financée par TF1, M6 et Canal Plus.

Ces trois chaînes ont investi, en 2005, plus de 485 millions d'euros, alors que les nouveaux entrants de la télévision numérique terrestre consacrent, dans leur ensemble, moins de 16 millions d'euros au financement de la production française.

Cette dissymétrie des chiffres doit être rappelée et, d'ailleurs, chaque fois que je rencontre un réalisateur, il me dit non sans parfois un peu d'inquiétude, à quel point le financement de la production cinématographique et audiovisuelle par les chaînes de télévision est essentiel.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui avez voté les crédits d'impôts pour le cinéma et pour l'audiovisuel, vous pouvez être fiers d'avoir permis un renforcement de notre capacité ! Il y a des menaces et nous devons avoir le courage de parler de ces réalités.

D'ailleurs, ne soyons pas injustes envers les nouvelles chaînes d'information qui sont aujourd'hui diffusées par la TNT et qui ne participent pas au soutien financier de la production cinématographique et audiovisuelle : chaque fois qu'elles évoquent un spectacle ou une création culturelle dans leurs journaux, elles donnent une chance supplémentaire à la création culturelle et artistique.

Bref, l'audiovisuel, dans sa stratégie, doit être une chance pour la création culturelle et certains assument plus que d'autres cette responsabilité.

La commission des affaires culturelles propose que ces nouveaux services soient soumis à une contribution renforcée en matière de production et de diffusion d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques. Je suis particulièrement favorable à cette disposition, très attendue du secteur de la création.

Certains d'entre vous ont fait part de leurs préoccupations sur l'absence de compensation dans la loi pour l'extinction des émissions analogiques du service public.

Je tiens à réaffirmer ici toute l'importance que j'attache au service public de l'audiovisuel et à préciser que le régime juridique différent du service public ne remet pas en cause sa place sur la télévision numérique. Je le rappelle, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a la responsabilité des décisions concernant les chaînes privées, notamment en matière d'attribution, tandis que le Gouvernement a la responsabilité de la préemption chaque fois qu'il s'agit de l'audiovisuel public.

En effet, la place du service public relève des choix conjoints du législateur, au travers du vote de son budget, et du Gouvernement, dans l'exercice de son droit de préemption des fréquences en faveur du service public.

Le service public occupe une place importante sur la télévision numérique terrestre, lancée en 2005. Il est passé de trois canaux analogiques à sept canaux numériques, avec la diffusion en plein canal de France 5 et d'Arte, la diffusion d'une nouvelle chaîne, France 4, ainsi que les chaînes parlementaires. Il faut aussi ajouter la chaîne pour enfants, Gulli, à laquelle prend part France Télévisions.

Enfin, conformément à ce que le Président de la République a annoncé, France Ô sera très rapidement diffusée en Île-de-France et pourra profiter des fréquences libérées pour être diffusée sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, je confirme ce que j'ai dit hier à Mme Tasca concernant l'accessibilité de l'information régionale de France 3 dans chaque région et sa diffusion par la TNT.

J'ai également annoncé hier mon intention - c'est très important - de préempter un des deux ou trois canaux qui seront proposés pour des chaînes gratuites en haute définition, puis d'en préempter deux quand il y aura quatre canaux proposés.

Bref, l'audiovisuel public ne sera pas le laissé-pour-compte de cette révolution technologique.

Tous les choix sont ouverts pour que, lorsque le gain numérique sera connu, le Parlement et le Gouvernement puissent alors décider de préempter les fréquences libérées pour de nouvelles chaînes du service public. Ce sont des choix pour 2011 qui ne pourraient, aujourd'hui, prendre une autre forme qu'une pétition de principe. Certes, j'espère me succéder à moi-même et être en mesure de prendre cette décision en 2011, mais nous n'en sommes pas sûrs. (Sourires.) Ce sera au peuple de décider le moment venu !

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.

En ce qui concerne l'amendement n° 133, pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.

S'agissant de l'amendement n° 11, le Conseil d'État, dans son avis, nous a notamment confirmé que l'interruption anticipée, par une décision unilatérale de l'État, de la diffusion des services de télévision constituait une atteinte au droit octroyé par une décision administrative du CSA.

Par conséquent, pour les raisons évoquées précédemment, je comprends, bien évidemment, votre démarche. Cette compensation est le premier objet du texte proposé pour l'article 104 de la loi du 30 septembre 1986.

Mais le texte a dans le même temps un autre but : il incite les opérateurs privés concernés à arrêter leur diffusion analogique pour bénéficier de ce droit à une chaîne compensatoire. Il s'agit ici de la reprise du mécanisme prévu par la loi de 2000 pour inciter ces mêmes opérateurs à diffuser leurs programmes en télévision numérique terrestre.

Vous proposez que ces trois nouveaux services ne puissent pas être lancés avant le 30 novembre 2011, date commune à l'ensemble des trois opérateurs.

Je comprends certes vos motivations, mais ce faisant vous réduisez toute incitation pour Canal Plus à interrompre sa diffusion analogique de manière anticipée.

En effet, à la différence des chaînes gratuites qui sont reçues par tous les Français, les abonnés à la chaîne analogique Canal Plus - plus de 2 millions - sont des clients connus de cette dernière. C'est Canal Plus qui les a équipés avec son décodeur analogique et qui peut leur offrir de migrer de manière anticipée sur la TNT, en mettant à leur disposition un décodeur TNT MPEG-4 haute définition. Cela représente pour la chaîne un coût de plus de 200 millions d'euros.

Il est souhaitable que cette migration de Canal Plus analogique vers Canal Plus numérique intervienne bien avant novembre 2011. Les abonnés recevront ainsi Canal Plus en numérique, mais également les dix-huit chaînes gratuites de la TNT.

Ce scénario accélérerait sensiblement le calendrier d'équipement des Français. Il permettrait également de libérer de manière anticipée, sur tout le territoire, la fréquence analogique de Canal Plus. Cette dernière serait alors immédiatement disponible pour le gain numérique. La libération de cette bande de fréquences, dite « bande III », permettrait en particulier de déployer sur l'ensemble du territoire les services de radio numérique pour lesquels le CSA s'apprête à lancer un appel à candidatures.

En effet, en raison de la pénurie de fréquences due au nécessaire partage avec nos voisins, ces services ne pourront être déployés dans certaines zones frontalières qu'après l'extinction du réseau de Canal Plus.

Je crains que l'amendement proposé par la commission des affaires culturelles ne soit susceptible de retarder ces investissements de Canal Plus, l'équipement des Français et la libération du gain numérique, notamment au profit de la radio numérique. Toutefois, je comprends également la recherche d'équilibre qui a conduit la commission à adopter cet amendement. Le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.

Quant aux amendements nos 148 rectifié et 104, le Gouvernement considère qu'ils sont satisfaits et il demande à leurs auteurs de les retirer.

En ce qui concerne les amendements nos°12 et 120 rectifié, qui prévoient de subordonner le droit à la chaîne compensatoire à des engagements renforcés par ces nouveaux services en faveur de la création audiovisuelle et cinématographique, le ministre de la culture et de la communication émet sans réserve un avis favorable.

M. Philippe Nogrix. C'est formidable !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. L'amendement n° 55 me semble satisfait par les amendements que vous venez d'adopter, avec une rédaction si large qu'elle englobe l'ensemble des engagements que vous mentionnez. Par conséquent, le Gouvernement en demande le retrait. À défaut, il émettra un avis défavorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 134,...

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. ...ce n'est pas le choix de la France de financer à 100 % la télévision publique par le budget de l'État et le concours des contribuables, mais c'est une formule qui a été adoptée dans d'autres pays.

Toutes les chaînes diffusent de la publicité. Nous venons, en outre, de faire prendre aux éditeurs des engagements complémentaires en faveur du secteur de la création. La publicité participe du financement de la création et des investissements que celle-ci suppose.

Si le Sénat adoptait cet amendement, nous aurions alors trois chaînes payantes, car l'abonnement est le mode de financement alternatif à la publicité. Est-ce vraiment ce que vous voulez ? À moins que vous ne préfériez un financement par la redevance audiovisuelle, mais j'en doute. Le Gouvernement est fermement opposé à cette solution et émet un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 54, 78 rectifié et 103.

M. Michel Mercier. Ces amendements de suppression portent sur une question importante qui mérite un débat, c'est la raison pour laquelle je prends la parole, bien que n'étant pas spécialiste du droit audiovisuel.

Monsieur le rapporteur, vous vous êtes exprimé à plusieurs reprises sur ces amendements.

Tout d'abord, sur l'amendement n° 103, vous avez indiqué qu'il était nécessaire de prévoir une compensation pour les sociétés dites « historiques ». Ensuite, lorsque vous avez présenté vos amendements nos 11 et 12, vous avez dit à Mme Morin-Desailly qu'elle manquait de cohérence...

M. Louis de Broissia, rapporteur. Non !

M. Michel Mercier. ...parce qu'elle défendait un amendement qui mettait des obligations supplémentaires à la charge des sociétés historiques pour encadrer la compensation prévue en leur faveur après avoir défendu un amendement de suppression de ladite compensation.

Je voudrais poser le problème correctement, et je remercie M. le ministre d'avoir su brillamment modifier en cours de route ses explications et la justification de sa position.

Quel est le problème ? Deux logiques incompatibles à mon sens sont en l'occurrence mêlées.

Soit il existe un préjudice pour les sociétés historiques qui émettaient en analogique avec une autorisation de l'État et qui doivent passer au numérique et, dans ce cas, il faut le réparer, ce que vous avez vous-même reconnu, monsieur le ministre. Soit il n'y a pas préjudice et le canal supplémentaire s'analyse comme un avantage dont l'octroi doit être assorti d'obligations nouvelles. Mais il faut choisir sa logique, car on ne peut pas dire qu'il y a un préjudice pour justifier une compensation et dans le même temps instaurer des obligations nouvelles, ce qui renvoie à la thèse de l'avantage.

C'est un vieil adage de notre droit, monsieur le ministre : donner et retenir ne vaut.

Encore une fois, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut choisir : soit il n'y a pas de préjudice et il n'y a donc pas lieu d'accorder une compensation ; soit il y a un préjudice et l'on accorde ces nouvelles chaînes à titre de compensation, mais sans obligations nouvelles.

S'agissant du préjudice, je citerai l'avis du Conseil d'État, pour qui, « en l'état de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui ne confère pas en lui-même au principe de sécurité juridique une valeur constitutionnelle, et en l'absence de détention de droits réels immobiliers sur le domaine public de l'État, ni les dispositions et principes à valeur constitutionnelle ni les stipulations de l'article Ier du premier protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme, ne paraissent faire obstacle à ce que, dans le respect du principe d'égalité, la loi remette en cause des autorisations en cours en mettant à la charge de leurs titulaires les éventuels réaménagements des fréquences et les coûts induits résultant des relations contractuelles de ceux-ci avec les distributeurs de services ».

Tel est l'état de notre droit. Il est ce qu'il est, c'est le droit administratif classique. Il y a une autorisation ; on revient sur l'autorisation ; il n'y a pas de sécurité juridique garantie ; il n'y a pas préjudice et donc pas droit à compensation.

Dès lors qu'il n'y a pas de préjudice à réparer, nous déposons un amendement de suppression. Mais, comme nous sommes aussi conduits par le principe de réalité et que nous savons bien qu'en dépit de nos efforts les sociétés historiques bénéficieront bel et bien de cet octroi de chaîne supplémentaire, dès lors nous prévoyons des obligations nouvelles et renforcées à la charge de ces mêmes sociétés.

Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir rappelé que vous étiez aussi ministre de la culture.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. C'est sûr !

M. Michel Mercier. Vous n'êtes pas, dans cette affaire, que le ministre « des câbles et des tuyaux ».

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Tout à fait !

M. Michel Mercier. Vous auriez donc pu nous dire, et c'eût été une position bien différente : je n'ai pas de moyens, je reconnais que ces chaînes ont consenti de gros efforts pour la création cinématographique - ce qui est vrai - et j'ai fait un choix de politique culturelle. Libre alors à chacun de nous d'être ou non favorable à cette option.

Mais là, vous octroyez des canaux supplémentaires afin de réparer un préjudice, ce qui n'est pas conforme à notre droit. Nous ne pouvons donc pas voter pour l'octroi de ces chaînes.

Vous auriez pu opter pour une politique culturelle différente, imposer des obligations plus précises. Nous en aurions débattu avec vous. Mais pourquoi les règles ont-elles été posées par la commission, pourquoi n'ont-elles pas été fixées dans le projet de loi ? Était-ce si difficile ?

Tout ce qui précède nous montre qu'il subsiste de nombreuses hésitations et qu'un débat est nécessaire. Je regrette beaucoup que l'urgence ait été déclarée sur ce texte.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est ainsi !

M. Michel Mercier. Je suis persuadé que vous le regrettez autant que moi, monsieur Valade. Si nous avions pris le temps du débat, nous aurions peut-être trouvé des solutions conformes au droit et qui, sans être exorbitantes, auraient pu soutenir une politique culturelle de qualité. Nous nous sommes à mon sens trop occupés des moyens de diffusion et pas assez du contenu.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous maintenons notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous dire en toute amitié qu'il n'y a pas d'incohérence entre les dispositions que nous avons votées en août 2000 et la position que nous adoptons aujourd'hui.

Lorsqu'une technologie apparaît, il appartient au législateur de lui donner un coup de pouce. C'est ce que nous avons fait au mois d'août 2000 pour TF 1, avec la création de LCI, et pour M6, avec le lancement de M6 Music.

C'était un exemple que nous donnions pour encourager une technologie qui était amenée à remplacer progressivement la diffusion analogique. Ce n'était pas incohérent !

Par ailleurs doit-on adhérer à un système parce que c'est la mode ? On entend dire un peu partout que plus il y a de chaînes et plus on favorise les diffusions de qualité. Pour ma part, je ne suis pas enclin à suivre la mode. Je préfère analyser la situation, prendre ce qui me paraît bien et laisser le reste.

Permettez-moi d'insister tout particulièrement sur la notion de préjudice. Monsieur le ministre, pourriez-vous me dire ce qui vous a conduit à estimer que le préjudice créé par l'obligation nouvelle faite aux chaînes historiques de s'ouvrir plus rapidement au numérique devait être compensé par l'octroi d'une chaîne gratuite ? Qui a estimé ce préjudice ?

Lorsque l'on veut réparer un préjudice, on commence par en mesurer l'importance avant d'évaluer toute compensation. Or, en l'occurrence, on agit à l'estime, au pifomètre, pourrait-on dire. Sans doute a-t-on été un peu loin en affirmant qu'il y avait un double préjudice.

Monsieur le rapporteur, votre rapport est en effet excellent, mais nous commençons seulement à nous en apercevoir, car il n'a été mis en distribution que lundi matin et nous sommes mardi après-midi. La préparation des amendements a été très difficile. Nous reprocher de ne pas avoir lu un document aussi fouillé et si riche d'arguments, de ne pas nous en être imprégnés, alors que nous disposions d'un temps si court, c'est un peu dur !

Enfin, monsieur le ministre, vous vous réjouissez, à juste titre d'ailleurs, du fait que les créateurs vous félicitent de multiplier les chaînes. Oui, « les » chaînes, et non pas « des » chaînes particulières, monsieur le ministre, contrairement à ce que vous nous proposez, puisque vous voulez donner des moyens supplémentaires à des chaînes, et non pas aux chaînes. Nous estimons que ce choix n'est pas équitable.

Il est vrai que l'audiovisuel est une chance. Il est non moins vrai que la France a abordé les questions de l'audiovisuel sous un angle particulier et que nous sommes sans doute parvenus à préserver certaines choses.

Cela étant, monsieur le ministre, quand vous maniez les chiffres, vous ne m'impressionnez pas du tout ! Vous avez déclaré que TF 1, M6 et Canal Plus ont investi 485 millions d'euros, alors que d'autres chaînes n'ont investi que 12 millions d'euros. Certes, mais je ne vois pas ce que cela démontre ni ce que cela ajoute à votre argumentation.

Ce qui m'intéresserait, c'est de savoir, à l'heure du bilan, quelles sont les réserves et quelle part du bénéfice est distribuée. C'est cela qui m'intéresse et non pas le fait de savoir que telle chaîne a investi 485 millions d'euros et telle autre 12 millions d'euros. Tout cela ne me donne pas envie de souscrire à l'argumentaire que vous venez de développer.

Mes chers collègues, chacun de nous doit bien mesurer les conséquences de son vote. Voter pour le texte proposé par l'article 5 pour l'article 104, c'est voter pour la préférence, pour le choix donné aux plus forts. En revanche, en supprimant ce texte, on donne aux plus petits, aux plus créatifs, on accorde à ceux qui ont envie de faire évoluer le système audiovisuel la même chance qu'aux autres.

Tel est l'enjeu de ce vote, mes chers collègues !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote.

Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, vous avez plaidé avec tant de passion que nous nous devons de vous répondre, sinon avec la même passion, du moins avec conviction.

Tout d'abord, votre argumentation juridique ne nous a pas convaincus. En effet, je le répète, rien dans l'analyse du Conseil d'État n'imposait que la compensation fût celle que vous avez décidée.

Si certaines mesures constituent bien une compensation, l'octroi d'une chaîne supplémentaire n'était pas inscrit naturellement dans ce dispositif et, en tout cas, elle ne répond à aucune contrainte juridique.

Par ailleurs, et c'est bien normal, vous avez évoqué votre responsabilité de ministre, donc des arguments d'opportunité. C'est précisément en opportunité que nous contestons l'octroi d'une chaîne supplémentaire aux chaînes historiques.

Vous invoquez à l'appui de votre décision le bienfait à en attendre pour les secteurs de la production et de la création.

Permettez-moi un rappel historique. D'abord, si la TNT a été lancée, c'est bien parce que le gouvernement de Lionel Jospin l'a voulu, et elle ne suscitait guère d'enthousiasme au sein de votre famille politique, ni d'ailleurs, chez les chaînes historiques.

Et, comme si vous vouliez nous culpabiliser, ou en tout cas diminuer la légitimité de notre opposition à la chaîne bonus, vous avez rappelé à plusieurs reprises depuis le début de ce débat que la loi de 2000 avait donné à ces chaînes un certain nombre d'avantages. Mais il s'agissait précisément, en opportunité, d'un choix politique, car nous connaissions leur extrême réticence à s'engager dans cette voie. Et, en 2004, cette réticence n'était pas encore totalement surmontée. Oui, c'est bien nous qui avons donné le coup de pouce indispensable au démarrage de la TNT.

Vous soulignez aujourd'hui que les créateurs sont en profond accord avec l'octroi d'une chaîne supplémentaire. Nous n'en doutons pas, car nous connaissons les difficultés économiques qui frappent ce secteur. Toute perspective de financement accru est donc nécessairement bien accueillie par les professionnels.

Notre groupe avait rédigé des amendements qui, dans l'hypothèse de son maintien, créeraient pour la chaîne supplémentaire l'obligation de contribuer à la production.

Je tiens donc à dire avec force que, de ce point de vue, votre préoccupation est aussi la nôtre. Mais j'ajoute immédiatement que, pour nous, il s'agit d'une veille tradition, car depuis la fin des années quatre-vingt, nous sommes ceux qui ont porté avec la plus grande conviction la nécessité d'obliger les diffuseurs à contribuer à la production dans ce pays.

Sur ce point, s'il n'y a pas de différence entre nous, je crois néanmoins pouvoir dire que notre volonté de faire contribuer les chaînes à la production de l'ensemble du secteur est nettement antérieure à la vôtre.

Monsieur le ministre, en termes d'opportunité, nous maintenons que vous pouviez mettre en oeuvre votre projet de loi sans octroyer une chaîne bonus. Vous en avez décidé autrement, mais, ce faisant, si vous servez, certes, l'objectif de la création, c'est au détriment d'un autre objectif sur lequel nous nous sommes tous beaucoup exprimés, je veux parler du pluralisme, de la diversité et de l'ouverture du paysage audiovisuel à de nouveaux acteurs. On ne peut pas préjuger de ce que serait leur contribution à la qualité du paysage audiovisuel puisque l'on maintient la porte si rigoureusement fermée.

Monsieur le ministre, je vous demande de considérer que les objectifs d'ouverture, de diversification, de pluralisme, n'ont pas moins de valeur que ceux que vous cherchez à atteindre.

C'est la raison pour laquelle, maintenant notre appréciation, nous continuons à refuser la chaîne supplémentaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Permettez-moi d'ajouter, à l'appui des propos de mes collègues, que je perçois une sorte de menace dans les déclarations de M. le rapporteur, pour qui le refus de créer un canal bonus reviendrait à pénaliser le soutien à la création.

Voilà maintenant deux ans que je siège au Sénat. Je crois avoir eu l'occasion de montrer, lors des discussions qui ont eu lieu sur le budget de la culture ou sur le projet de loi relatif au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information, et aujourd'hui encore dans les amendements que j'ai déposés sur le présent projet de loi, combien notre groupe est soucieux du financement de la création.

L'amendement n° 148 rectifié vise à encadrer l'octroi des chaînes supplémentaires. Certes, monsieur le ministre, il sera satisfait si le Sénat adopte l'amendement n° 11 qui, pour l'heure, a fait l'objet d'un avis de sagesse. Permettez-moi donc, avant un éventuel retrait, d'attendre le vote de la Haute Assemblée sur l'amendement n° 11.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Hier, dans mon intervention liminaire, j'ai déclaré que la première caractéristique de ce texte était le renforcement des puissants. On m'a répondu qu'il s'agissait d'un argument idéologique. Toutes les interventions que je viens d'entendre me confirment dans ma conviction que c'est tout le contraire : il s'agit non pas d'un argument idéologique, mais d'un argument politique, d'un argument réaliste.

Nous entrons dans une nouvelle ère de l'audiovisuel. Quelle chance avions-nous d'établir, enfin - je dis bien, enfin ! -, à partir de toute l'expérience que nous avons accumulée, une véritable responsabilité publique et sociale en matière d'audiovisuel, qui vaille pour le secteur public comme pour le secteur privé !

Or, la présente loi - ce sera encore plus vrai si l'amendement n° 54 n'est pas adopté - ignore totalement le secteur public.

M. le ministre a dit : je vais préempter.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Tout à fait !

M. Jack Ralite. Mais inscrivez-le dans la loi, monsieur le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Cela relève du pouvoir réglementaire !

M. Jack Ralite. Et pourquoi ne pas l'avoir indiqué dans l'exposé des motifs ? C'était si facile ! Mais non ! Pas un mot !

M. René Garrec. Cela figurera dans les travaux parlementaires !

M. Jack Ralite. La loi est muette sur l'éventail des libertés nouvelles que l'on aurait pu offrir aux télévisions de proximité, aux télévisions locales et à toutes les petites télévisions. On n'en dit rien, pas un mot ! C'est une loi essentiellement normative qui va dans le sens du renforcement du droit des grands groupes privés. Voilà la vérité !

Pourtant, nous avons de l'expérience. En 1986, lors du vote de la loi qui a fait de TF 1 ce qu'est devenue TF 1, avait été élaborée une grande définition, celle du « mieux-disant culturel ». Et ce « mieux-disant » s'est transformé en « temps de cerveau disponible » !

Ces chaînes, nous dit-on, contribueront à la création. Ma réaction est identique à celle de Catherine Tasca : de quelle création s'agira-t-il ? Car la création, on le voit bien, est en péril. L'« incident » qui vient de se produire à propos d'une exposition organisée en 2000 au Centre d'arts plastiques contemporain de Bordeaux reflète le sentiment ambiant selon lequel les artistes, bien qu'ils soient nécessaires, doivent faire attention à ce qu'ils font. Or les artistes, selon moi, incarnent la liberté.

L'un d'entre nous a demandé - sa question est très pertinente - pour quelles raisons cette disposition, au lieu de figurer dans le projet de loi, était introduite par le biais d'un amendement de la commission des affaires culturelles. Il s'agit donc bien d'une instrumentalisation de la culture et de l'art, pour faire « passer » le cadeau - car c'est bien un cadeau - consenti aux grands intérêts privés !

En effet, il est tout de même curieux que le CSA, dont les membres sont nommés par le président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale - autant de personnalités qui ce ne sont pas de farouches opposants, que je sache ! -, se range aux côtés des défenseurs de notre proposition, qu'ils soient, ou non, dans l'opposition. Il faut quand même réfléchir ! Voulons-nous faire société ? Voulons-nous une véritable télévision pluraliste ? Si oui, alors, frottons-nous, alors, disputons-nous, mais écoutons !

Monsieur de Broissia, vous nous dites qu'il s'agit d'une « économie flottante ». Mais j'ai l'impression que ce texte comporte de sacrés flotteurs pour ceux qui avaient déjà de gros bateaux et qu'on laisse les autres se noyer ! Il n'est donc pas possible d'être d'accord avec la création de ces trois chaînes. Je discerne là une espèce d'exigence acharnée d'un sens unique et dominateur.

Nous sommes en train de définir un nouveau droit d'affaires. Vous me répondrez que ma position est idéologique ! Mais je sais ce qu'est une entreprise, je suis capable de comprendre son intérêt, j'ai été maire suffisamment longtemps ! Il s'agit donc là d'une sorte de luxe supplémentaire accordé aux gros, alors que rien n'est donné aux autres, notamment aux petits, cela dit sans commisération, mais par solidarité. Oui, c'est un droit d'affaires ; c'est une régularisation, et pas du tout une régulation !

J'évoquerai rapidement la responsabilité publique. À une certaine époque, un mouvement très fort, dont j'ai d'ailleurs été l'un des animateurs, a été à l'origine d'une déclaration des droits de la culture, laquelle affirmait qu'un peuple se condamne à des libertés précaires quand il abandonne son imaginaire aux grandes affaires. Or nous y sommes !

Premièrement, nous affirmions qu'une responsabilité publique, que nous nommions « audace de la création », était nécessaire. Les artistes sont premiers, les marchands venant ensuite, s'ils viennent.

Deuxièmement, nous défendions l'élan du pluralisme. Cette société est plurielle, le domaine de la culture doit donc également être pluriel.

Troisièmement, nous mettions en avant une obligation de production. À quoi servirait en effet de reconnaître le pluralisme et l'audace de la création, s'il n'y a pas de production ?

Quatrièmement, nous plaidions pour la maîtrise de la diffusion. Il faut pouvoir en effet diffuser de façon plurielle toutes les oeuvres résultant d'une création.

Cinquièmement, nous misions sur l'atout d'un large public.

Sixièmement, nous nous intéressions à la coopération internationale.

Ces questions, sur lesquelles nous devons émettre très franchement notre avis, sont aujourd'hui posées.

Je pense profondément que ce pays est confronté à une dérive d'affaires. Veillons donc à ce qu'elle ne condamne pas le grand bateau de l'audiovisuel à s'échouer, ce qui serait tragique et pour les artistes et pour le peuple !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. J'interviendrai brièvement, car je pense que tout a été dit. Néanmoins, il m'appartient, en tant que rapporteur de la commission des affaires culturelles, d'essayer d'expliquer ce qui visiblement n'apparaît pas aux yeux de tous, à savoir la cohérence de notre position. Cette cohérence, qui a constitué le fil conducteur de notre travail, est d'une simplicité biblique, monsieur Ralite.

Il s'agit en effet de rechercher l'intérêt du téléspectateur français, quels que soient son lieu de résidence et la catégorie socioprofessionnelle à laquelle il appartient. Il ne s'agit pas de puissants ou de misérables, mais d'un besoin de télévision à satisfaire, trois heures à quatre heures par jour, 365 jours par an. Nous avons eu de longues discussions avec M. Ivan Renar sur cet « opium du peuple » ou cette « première religion païenne ». Ceux qui n'étaient pas là cette nuit n'ont pas pu profiter de ces échanges, mais ils pourront heureusement en lire le compte rendu !

Quoi qu'il en soit, nous savons que la télévision fait partie de la vie de tous les Français.

Je ne voudrais pas que le texte proposé pour l'article 104 soit l'arbre qui cache la forêt dans laquelle nous souhaitons que les Français s'engagent. Cette forêt, pleine de clairières, c'est la promesse numérique pour tous. Le texte en question répond à une nécessité non seulement juridique, mais également culturelle. En tant que rapporteur, je vous propose, mes chers collègues, ces deux amendements, sur lesquels le Gouvernement a émis un avis favorable.

Madame Tasca, c'est notre majorité qui a fait passer l'offre télévisuelle de six chaînes à dix-huit chaînes. Et c'est sans doute le Sénat qui a favorisé le plus la TNT, en particulier à l'occasion des discussions sur le « paquet télécoms », l'ouverture de tous les secteurs, et la convergence numérique. Pas une occasion n'a été perdue dans cette assemblée, et ce quelle que soit la couleur politique des intervenants.

Que le texte proposé pour l'article 104 ne cache pas la forêt de la promesse numérique pour tous, qui correspond à l'engagement pris par le Président de la République, auquel le Sénat souscrit !

Je défends ce texte, monsieur Ralite, dans un souci cohérence et afin de préserver l'équilibre de l'audiovisuel français. Cet équilibre a été en permanence perturbé, nous l'avons dit lors de la discussion générale. Aujourd'hui, je le rappelle, ce sont les rois du progiciel qui règnent sur le monde de la communication. En comparaison, les géants des télécoms sont des nains. Et les groupes français, si inquiétants selon vous, sont, en Europe, des fourmis de l'audiovisuel.

Nous souhaitons donc préserver l'équilibre de l'audiovisuel français, entre les chaînes historiques privées et publiques et les nouveaux entrants de la TNT. Ces derniers ne subiront aucun préjudice, puisqu'ils viennent d'intégrer le paysage audiovisuel et qu'ils disposent d'un canal sur lequel ils peuvent émettre.

Nous pensons donc que cette chaîne supplémentaire est un dû juridique reposant sur des bases solides, que le Conseil d'État a retenues.

M. Philippe Nogrix. Cela fait deux fois que vous citez le Conseil d'État, alors que ce n'est pas ce qu'il a dit !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Permettez-moi de m'exprimer, monsieur Nogrix ! Et, si vous n'avez pas eu le temps de lire le rapport de la commission, offrez-le ! Il n'est pas trop tard pour en faire profiter votre entourage, car c'est un document passionnant et agrémenté de cartes et de tableaux !

Par souci de cohérence, nous souhaitons compléter le texte proposé pour l'article 104, tout d'abord en précisant que la nouvelle chaîne optionnelle numérique ne pourra être lancée qu'à compter de l'extinction complète du signal analogique, ensuite en instaurant des obligations de production d'oeuvres d'expression originale française et européenne.

Certains n'ont pas compris la cohérence de ma position. Au demeurant, le porte-parole de la commission que je suis n'avait pas l'intention d'être désobligeant, mais bien au contraire de vous inciter à entrer dans sa cohérence.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54, 78 rectifié et 103.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 55 :

Nombre de votants 329
Nombre de suffrages exprimés 326
Majorité absolue des suffrages exprimés 164
Pour l'adoption 157
Contre 169

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 133.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148 rectifié.

(L'épreuve à main levée est déclarée douteuse par le bureau.)

M. Michel Mercier. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier.

M. Michel Mercier. Monsieur le président, il serait plus judicieux que M. le rapporteur demande la priorité de l'amendement n° 12.

Je trouve en effet ridicule d'obliger les collègues du groupe UMP à voter contre notre amendement, alors qu'ils vont adopter ensuite, avec l'amendement n° 12, un texte similaire ! Ce serait un exercice intellectuel dégradant auquel je ne voudrais pas que mes collègues, que j'apprécie, se livrent. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je souscris tout à fait aux propos qui viennent d'être tenus par M. Mercier et je demande la priorité de l'amendement n° 12 ainsi que de l'amendement n° 120 rectifié, qui est identique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Favorable.

M. le président. La priorité est ordonnée.

Je mets donc aux voix par priorité les amendements identiques nos 12 et 120 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, les amendements nos 148 rectifié, 104 et 55 n'ont plus d'objet.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 134.

Mme Marie-Christine Blandin. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, j'ai bien entendu vos arguments relatifs à la réalité économique et le rappel du choix français jusqu'à ce jour de privilégier la recette publicitaire pour le public comme pour le privé.

Mon amendement vise seulement à préciser que l'espace sans publicité que je vous propose ne concerne que le canal dit « bonus » et qu'il existe, pour le soutenir, des marges de manoeuvre dans les excès de dépenses et les bénéfices des chaînes évoquées, version « canal historique ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 150 rectifié bis, présenté par MM. Marsin, Pelletier et de Montesquiou, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 105-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication, après les mots :

et en Nouvelle-Calédonie

insérer les mots :

, garantissant des conditions de réception identiques à la métropole,

La parole est à M. Daniel Marsin.

M. Daniel Marsin. Depuis le début de la discussion de ce projet de loi, presque tous les orateurs ont insisté sur le progrès considérable que constitue la télévision du futur et sur la nécessité que ce progrès profite à tous les Français, où qu'ils se trouvent.

Le premier alinéa du texte proposé pour l'article 105-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 dispose que, avant le 1er juillet 2007, « le Gouvernement déposera devant le Parlement un rapport sur les modalités de développement de la télévision numérique dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie en vue de l'extinction de la diffusion analogique sur l'ensemble du territoire national ».

Cet amendement vise à garantir que la télévision du futur sera mise en place outre-mer selon les mêmes principes et dans les mêmes conditions qu'en métropole. En effet, les téléspectateurs ultramarins doivent, comme en métropole, bénéficier pleinement des progrès considérables qu'apporte la TNT et donc disposer d'offres équivalentes, tant pour les chaînes historiques que pour les nouvelles chaînes thématiques, comme France Ô.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Mon cher collègue, la commission des affaires culturelles est favorable à cet amendement et vous remercie de l'avoir déposé à cet endroit du texte.

Il lui semble en effet important que le Gouvernement donne cette assurance à tous les Français, ceux de l'Hexagone comme ceux de l'outre-mer, et que la TNT soit donc mise en place outre-mer dans des conditions semblables à celles qui prévalent en métropole.

Le rapport prévu dans le texte de loi sur les modalités de développement de la télévision numérique dans les départements, régions et collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie devra donc garantir des conditions de réception identiques à celles de la métropole.

Votre initiative est donc bienvenue, monsieur Marsin. Si la promesse numérique ne concernait que les départements métropolitains, elle ne correspondrait pas à l'engagement pris par le président de la République d'une « télévision numérique pour tous ».

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. C'est une question très importante.

L'égalité doit être constatée partout sur le territoire de la République ; c'est la raison pour laquelle, avec mon collègue François Baroin, ministre de l'outre-mer, nous avons confié au président délégué du Comité stratégique pour le numérique, M. Jean-Michel Hubert, une mission d'évaluation, d'analyse et de proposition sur les modalités du déploiement et du développement de la télévision numérique dans les départements et collectivités d'outre-mer, afin que nos concitoyens ultramarins bénéficient de cette révolution technologique.

Le Gouvernement entend vous remettre un rapport avant le 1er juillet 2007 sur les modalités de développement de la TNT outre-mer et il est tout à fait favorable au fait que ce rapport précise également les conditions d'une réception identique entre la métropole et l'outre-mer.

Lors d'un voyage en Martinique et en Guadeloupe, ayant eu l'occasion de visiter les studios de RFO, j'ai été heureux de constater que leurs équipements numériques leur permettaient d'envisager favorablement toutes les évolutions à venir.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Demande de réserve

Article 5 (priorité)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article 2

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, en application de l'article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, la commission demande la réserve de l'article 1er jusqu'à la fin du projet de loi, afin de pouvoir effectuer les coordinations rendues nécessaires du fait des amendements adoptés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Favorable.

M. le président. La réserve est ordonnée.

En conséquence, poursuivant l'examen des dispositions du titre Ier entamé avec la discussion par priorité de l'article 5, nous en parvenons à l'article 2.

TITRE IER

MODERNISATION DE LA DIFFUSION AUDIOVISUELLE (suite)

Demande de réserve
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article additionnel après l'article 2

Article 2

À l'article 21, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions qui précèdent, les fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique d'un service de télévision par voie hertzienne terrestre autres que celles résultant de la mise en oeuvre de l'article 98 font l'objet d'une réaffectation par le Premier ministre aux administrations, au conseil ou à l'autorité susmentionnés, dans le respect des orientations générales de réutilisation des fréquences fixées dans le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique institué à l'article 99. »

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 44, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 91, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I Au début du second alinéa de cet article, supprimer les mots :

Par dérogation aux dispositions qui précèdent,

II Dans le même texte, après les mots :

font l'objet d'une réaffectation

insérer les mots :

, après avis du Conseil Supérieur de l'audiovisuel et de l'Autorité de Régulation des communications électroniques et des postes,

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Il nous paraît incontestable que l'intervention du Premier ministre dans la répartition des ressources est légitime, dans la mesure où la ressource numérique, comme la ressource radioélectrique, appartient au domaine public de l'État et fait l'objet d'utilisations non seulement dans le champ audiovisuel et des télécommunications - défense nationale et aviation civile -, mais aussi dans d'autres champs d'intérêt national.

Toutefois, il nous apparaît nécessaire et conforme à l'esprit qui a présidé à la création du Conseil supérieur de l'audiovisuel, et à l'importance de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, d'inscrire dans la loi que le Premier ministre travaille de concert avec ces autorités pour des prises de décisions équitables et transparentes.

La ressource numérique étant un bien public, donc commun, il nous faut insister sur le fait que les décisions ne sauraient être prises que dans l'intérêt général, à savoir dans l'esprit de la diversité et du pluralisme qui caractérisent le paysage audiovisuel français.

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

À la fin du texte proposé par cet article pour compléter l'article 21 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, supprimer les mots :

, dans le respect des orientations générales de réutilisation des fréquences fixées dans le schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique institué à l'article 99

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.

L'amendement n° 21 rectifié, présenté par MM. Hérisson et  Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Après le mot :

susmentionnés

rédiger ainsi la fin du texte proposé par cet article pour compléter l'article 21 de la loi n° 86-1067 précitée :

, dans le respect des orientations générales du schéma national de réutilisation des fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique et le basculement vers le numérique. Ce schéma est élaboré par le Premier Ministre, après consultation de la commission instituée à l'alinéa suivant. Il vise à favoriser la diversification de l'offre de services, améliorer la couverture numérique du territoire et optimiser la gestion par l'État du domaine public hertzien.

La commission du dividende numérique comprend quatre députés et quatre sénateurs, désignés par leurs assemblées respectives à parité parmi les membres des deux commissions permanentes compétentes, ainsi que le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et le directeur général de l'Agence nationale des fréquences. Elle est présidée par un parlementaire élu en son sein. Elle se prononce sur le projet de schéma national de réutilisation des fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique et le basculement vers le numérique que lui soumet le Premier Ministre. Elle peut, en outre, faire connaître, à tout moment, ses observations et ses recommandations. Les moyens nécessaires au fonctionnement de la commission et à l'accomplissement de ses missions sont inscrits au budget du Premier Ministre. La mission de la commission ainsi que les fonctions des membres qui la composent prennent fin le 30 novembre 2011.

La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Cet amendement porte sur le « dividende numérique ». Chacun le sait, c'est une meilleure efficacité spectrale - une fréquence pour plusieurs chaînes - qui permettra de réutiliser un certain nombre de fréquences pour de nouveaux usages.

Nous l'avons bien vu lors de la discussion générale, il pèse sur ce dividende numérique, que vous qualifiez de « gain numérique », monsieur le ministre, un certain nombre d'incertitudes, notamment quant à la quantification et à la définition des nouveaux usages. Il est donc apparu nécessaire à la commission des affaires économiques, saisie pour avis, d'une part, de fixer un cadre et, d'autre part, de poser un certain nombre d'objectifs.

Nous avons souhaité que la réaffectation de ce « dividende numérique », c'est-à-dire les fréquences libérées par l'extinction de la diffusion audiovisuelle en mode analogique et par le basculement en numérique, respecte les orientations générales fixées dans un schéma national défini par le Premier ministre. Les fréquences appartenant au domaine public de l'État, il nous paraît tout à fait naturel, en effet, que l'exécutif, le Gouvernement représenté par le Premier ministre, procède à cette réaffectation.

Voilà pour le cadre ; j'en viens aux objectifs.

La commission des affaires économiques a souligné la nécessité de déterminer trois objectifs pour la réutilisation de ces fréquences.

Le premier est de favoriser la diversification des offres de services. La réaffectation peut légitimement bénéficier à de nombreux services. Des services télévisuels, bien sûr, comme les télévisions locales, qui ont été au centre de la discussion d'hier soir, mais aussi des nouveaux services de communications électroniques, par exemple l'accès, en mobilité, à l'internet à haut débit, auquel faisait allusion le président de la République, le 4 mai 2006, dans son allocution à l'occasion de l'installation du Comité stratégique pour le numérique.

Le deuxième objectif est d'améliorer la couverture numérique du territoire, puisqu'il existe une relation entre le dividende et la couverture, que ce soit pour des services télévisuels ou des services de radiocommunication.

Le troisième objectif est d'optimiser la gestion par l'État du domaine public hertzien, son propre domaine, puisque l'État « consomme » lui-même un certain nombre de fréquences pour remplir ses fonctions régaliennes de défense, de transport et de sécurité, par exemple.

Il est apparu tout à fait légitime à la commission des affaires économiques que le Parlement soit consulté sur le schéma national, afin que des parlementaires puissent délibérer sur un certain nombre de propositions ou formuler des recommandations. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu une commission du dividende numérique, composée de quatre députés et de quatre sénateurs, désignés par leurs assemblées respectives à parité parmi les membres des deux commissions permanentes compétentes, ainsi que de trois personnalités qualifiées : le président de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, ARCEP, le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, CSA, et le directeur général de l'Agence nationale des fréquences, ANFR.

Tel est le dispositif souhaité par la commission des affaires économiques, à qui il paraissait important, s'agissant d'un bien appartenant au domaine public, de définir un cadre et de poser des principes, afin de gérer ce dividende numérique au mieux de l'intérêt général.

M. le président. Le sous-amendement n° 84 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 21 rectifié par une phrase ainsi rédigée :

Il prévoit que la majorité des fréquences ainsi libérées restent affectées aux services audiovisuels

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Comme l'a souligné M. Retailleau, rapporteur pour avis, la question de l'affectation du dividende numérique est très importante.

L'amendement n° 21 rectifié est intéressant dans la mesure où il tend à définir une procédure plus encadrée de réaffectation du spectre hertzien, d'une part, et vise à créer à cette fin une commission du dividende numérique, d'autre part. En outre, il indique quels doivent être les objectifs du Premier ministre dans l'affectation de ce dividende numérique.

Notre sous-amendement vise à préciser que les fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique doivent être majoritairement affectées au secteur de l'audiovisuel.

Les fréquences sont une ressource rare. En outre, celles qui seront libérées sont particulièrement intéressantes car elles sont assez basses sur le spectre : en raison d'une longueur d'onde importante, elles peuvent se diffuser sans relais sur une distance assez grande. C'est pourquoi le secteur audiovisuel doit pouvoir en bénéficier largement.

Toutefois, de nombreux services tels que la radio analogique ou numérique, les télévisions numériques terrestres, haute définition, mobiles, locales, mais également les communications électroniques, dont les usages ne cesseront de se diversifier, pourraient tout aussi légitimement bénéficier de la réaffectation des fréquences.

Aussi, il nous semble important de préciser qu'une partie du dividende numérique doit être obligatoirement allouée aux services audiovisuels.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos  44, 91 et 21 rectifié, ainsi que sur le sous-amendement n° 84 rectifié ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. À l'ensemble de nos collègues qui sont intervenus sur cette importante question du dividende numérique, je dirai qu'il ne faut pas confondre le gain numérique avec la promesse numérique - qui engage tous les Français -, voire avec « l'eldorado numérique », si je me réfère à certains propos. Or il n'y a pas d'eldorado numérique. Le passage au numérique offre un gain de place par rapport à l'analogique, gain qui se réduira lors du passage à la haute définition. Ne faisons pas comme Perrette et son pot de lait : ne partageons pas le dividende numérique trop tôt !

La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 44. Le fait que le CSA ait estimé qu'il était indispensable de réaffecter à l'audiovisuel l'essentiel du spectre des fréquences libérées par l'arrêt de l'analogique ne saurait justifier la suppression de l'article 2.

Pareillement, elle émet un avis défavorable sur l'amendement n° 91, qui est satisfait par l'amendement n° 21 rectifié de la commission des affaires économiques, sur lequel elle émet en revanche un avis favorable.

Je rappelle que nous devons nous prononcer sur l'autorité procédant aux affectations de fréquences. Lors de l'examen, la nuit dernière, de la nouvelle rédaction proposée à l'article 5 du projet pour l'article 99 de la loi du 30 septembre 1986, qui institue un schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique, nous avons dit que la décision de réaffecter les fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique devait échoir au Premier ministre. En revanche, ainsi que le propose la commission des affaires économiques, nous pensons qu'il est utile d'associer le Parlement, le CSA, l'ARCEP et l'ANFR par un avis consultatif. Il faudra trouver une voie médiane dans la façon de faire vivre ce schéma-là, monsieur le ministre, et trouver un schéma de cohabitation avec l'autre schéma. (Sourires.)

S'agissant de la répartition du dividende numérique, je suis favorable à ce qu'il soit précisé qu'une majorité - et non l'essentiel, raison pour laquelle la commission était défavorable à l'amendement n° 44 - des fréquences libérées soit réaffectée à l'audiovisuel. Aussi, la commission émet un avis de sagesse favorable sur le sous-amendement n° 84 rectifié.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ainsi que sur le sous-amendement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur Lagauche, vous faites dire au projet de loi ce qu'il ne dit pas et vous préjugez les choix qui seront faits par le Premier ministre, quel qu'il soit. En effet, l'article 2 du projet de loi ne prévoit aucunement que le bénéfice numérique sera affecté à d'autres services que ceux de la communication audiovisuelle. Il permet uniquement que l'usage des fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique fasse l'objet d'une réflexion nationale en vue de l'optimisation de l'usage du spectre hertzien.

Cette disposition est très attendue par l'ensemble des opérateurs, mais également par le Parlement, si j'en juge aux amendements tendant à ce que la représentation nationale soit consultée sur les choix qui devront être faits. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 44.

En ce qui concerne votre amendement n° 91, monsieur Renar, je partage votre souhait de transparence et puis vous assurer que ce principe sera l'un de ceux qui régiront la réaffectation du gain numérique. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le projet de loi prévoit que l'usage des fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique sera déterminé par le Premier ministre dans le cadre d'un schéma national qui sera élaboré à l'issue d'une large consultation publique. Ce dispositif a recueilli l'unanimité des suffrages hier soir.

Par ailleurs, le projet de loi n'entend pas revenir sur les dispositions de l'article 21 de la loi relative à la liberté de communication, qui prévoit que le Premier ministre recueille l'avis du Conseil supérieur de l'audiovisuel et de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes avant de définir le partage des fréquences entre affectataires.

La précision que vous proposez d'apporter me semble donc superfétatoire. Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement.

L'amendement n° 21 rectifié, quant à lui, porte en bandoulière un très beau slogan : Vive le Parlement ! Et j'ajoute : Vive l'Assemblée nationale ! Vive le Sénat ! (Sourires.)

Pour autant, la question demeure de savoir comment organiser ce partenariat entre l'Assemblée nationale et le Sénat. À cet égard, je me demande si la modalité de consultation que vous avez retenue est la plus appropriée. Il me paraîtrait plus simple de prévoir une saisine obligatoire des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat préalablement à toute décision du Premier ministre. Dès lors que leur président respectif en serait avisé, cette saisine donnerait lieu à un débat au sein de ces commissions.

Parce que je suis attaché au rôle des commissions parlementaires, parce que j'apprécie leur travail - la commission des affaires économiques ne m'en voudra pas que je précise ici que je vise avant tout la commission des affaires culturelles du Sénat, devant laquelle je m'exprime plus souvent -, je préfère la solution que je viens de vous proposer. Si vous deviez de ne pas retenir ma suggestion, j'émettrais un avis de sagesse sur ces deux amendements.

S'agissant du sous-amendement n° 84 rectifié, je veux vous dire, madame Morin-Desailly, que même animé des meilleures intentions du monde, on peut faire prendre des risques à ceux que l'on souhaite favoriser.

Vous demandez que les fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique soient majoritairement affectées aux services audiovisuels. Mais il est tout à fait possible que cette proportion soit largement supérieure à 50 %.

Or je ne pense pas que votre objectif soit de limiter le nombre de services audiovisuels potentiellement affectataires des fréquences libérées.

Par votre sous-amendement, vous proposez d'affecter la majorité du gain numérique aux services audiovisuels. La large consultation publique a montré que l'ensemble des professionnels attendaient instamment qu'une attention particulière soit portée au devenir des fréquences. En tant que ministre de la culture et de la communication, je suis « Monsieur contenu ». Et je puis attester qu'une demande existe d'ores et déjà pour le développement de services de télévision en haute définition et de services de télévision en mobilité ainsi que pour de nouveaux services.

En outre, les fréquences libérées pourraient servir au développement de services de communication électronique sur tout le territoire, y compris dans les zones les moins denses, et au développement des services à haut débit, tant en mobilité qu'en fixe.

Aussi, je suis particulièrement attaché à ce que le gain numérique serve la diversité culturelle et la création. Chacun des acteurs des programmes audiovisuels doit y avoir sa juste part. Toutefois, une réflexion d'ensemble doit être menée dans la plus grande transparence pour décider de la meilleure utilisation de ce bonus.

Vous-même, madame la sénatrice, avez rappelé tout à l'heure avec raison qu'il s'agissait d'une ressource rare. À un moment, il faudra faire des choix, auxquels le Parlement souhaite être associé, ce qui est évidemment une très bonne chose. Mais, encore une fois, faites attention, madame la sénatrice : en fixant un seuil minimal de 50 % des fréquences libérées pour l'audiovisuel, vous prenez le risque que les opérateurs de communication électronique se voient attribuer jusqu'à la moitié desdites fréquences. Ainsi, avec la meilleure intention du monde, vous risquez de porter préjudice à ceux que vous voulez soutenir.

Même si nous ne disposons à ce jour d'aucune information, je suis certain personnellement que la diffusion de toutes les chaînes de la TNT en haute définition et en simple définition, localement et nationalement, en réception fixe comme en mobilité, utilisera une part importante des ressources libérées par la fin de la diffusion analogique. Pour cette raison, je suis défavorable à votre sous-amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 84 rectifié.

Mme Catherine Morin-Desailly. Comme j'ai tenté de l'expliquer, j'ai bien conscience que la fixation d'un seuil à 50 % est problématique et source de difficultés.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Eh oui !

Mme Catherine Morin-Desailly. Aussi, après avoir entendu les arguments de M. le ministre, je rectifie mon sous-amendement en remplaçant les mots « la majorité des fréquences » par les mots « une part importante des fréquences ». Cette rédaction, tout en étant plus neutre, oriente néanmoins la redistribution des fréquences en faveur de l'audiovisuel, ce à quoi je suis très attachée. Je considère que cette mesure constitue un soutien à cette fameuse diversité culturelle dont il est question depuis le début de nos débats.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 84 rectifié bis, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernier alinéa de l'amendement n° 21 rectifié par une phrase ainsi rédigée :

Il prévoit qu'une part importante des fréquences ainsi libérées reste affectée aux services audiovisuels

Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission avait émis un avis de sagesse favorable sur le sous-amendement n° 84 rectifié, lequel faisait référence à « la majorité des fréquences ainsi libérées ». Autant la notion de majorité est claire -la moitié plus un -, autant celle de « part importante » ne l'est pas. Cette rectification n'apporte rien et risque même de diminuer la portée de ce sous-amendement. Aussi, la commission ne peut qu'émettre un avis de sagesse défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Le Gouvernement maintient son avis défavorable sur ce sous-amendement. Je tiens à accorder toute leur place aux services audiovisuels et ne veux pas prendre le moindre risque d'en limiter le nombre potentiel d'affectataires.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. En rectifiant mon sous-amendement, j'avais pour objectif de parvenir à une rédaction consensuelle. Puisque je n'y suis pas parvenue, et après avoir entendu les propos de M. le rapporteur, je le rectifie de nouveau pour en revenir à sa rédaction initiale.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 84 rectifié ter, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernier alinéa de l'amendement n° 21 rectifié par une phrase ainsi rédigée :

Il prévoit que la majorité des fréquences ainsi libérées reste affectée aux services audiovisuels

Je le mets aux voix.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. M. le ministre nous a suggéré tout à l'heure une rectification de notre amendement, mais, après consultation du rapporteur ainsi que du président de la commission des affaires culturelles, nous préférons nous en tenir à composition initiale de la commission telle qu'elle a été prévue dans l'amendement n° 21 rectifié.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié, modifié.

M. Ivan Renar. Le groupe CRC s'abstient !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2
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Article 3

Article additionnel après l'article 2

M. le président. L'amendement n° 92, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 4 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel comprend onze membres. Six de ces membres sont issus de la représentation nationale, deux du Conseil économique et social et trois émanent de la société civile selon la répartition suivante : deux membres sont désignés par le Président de la République, deux membres sont désignés par le président de l'Assemblée Nationale, deux membres sont désignés par le président du Sénat, deux membres sont désignés par le président le Conseil économique et social, un membre représente les associations d'usagers des médias, un les syndicats du secteur audiovisuel et enfin un membre représente le secteur associatif audiovisuel. Le mode de désignation des trois derniers membres est fixé par décret. »;

2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Le président est élu par les membres du conseil pour la durée de ses fonctions en tant que membre du conseil. »

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement fait écho, en quelque sorte, à celui que nous défendions précédemment.

Dans un rapport d'information de juin 2004 fait au nom de la commission des finances, M. François Marc souligne que le CSA est confronté à des défis qui impliquent une évolution de son organisation : la préparation du passage à la TNT, la mise en place d'un cadre réglementaire européen et des attentes croissantes de nos citoyens en matière de contenu des programmes.

Il ajoute : « Pour répondre à l'ambition ayant présidé à sa création, le CSA s'est vu doter par le législateur, dès sa création en 1989, d'un statut d'autorité administrative indépendante, de pouvoirs étendus et de moyens spécifiques. L'analyse des missions et des moyens du CSA a consisté à apprécier sa capacité à faire face à une activité croissante, du fait de l'augmentation du nombre de chaînes et de missions plus nombreuses. »

La doctrine qui a présidé à la création du CSA doit donc être revue en ce qui concerne la procédure de nomination de ses membres et l'inévitable dimension politique qu'elle revêt. Le recrutement forcément politique des membres du CSA ne doit pas entraver l'indépendance qui sied à tout juge dans l'exercice de sa fonction. Le paradoxe est manifeste, mais pas insoluble. En ce sens, pour reprendre les propos du doyen Vedel, « la fonction saisit l'homme quand c'est un honnête homme ». Et il nous semble que la problématique de la nomination des membres doit s'inscrire dans une perspective plus large de légitimation du CSA et de son action.

La dialectique est la suivante : minimiser les effets de la politisation de la nomination - par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l'Assemblée nationale -, afin de consolider la légitimité de l'institution et, par là même, de la renforcer.

Pour ce faire, nous proposons de rendre la composition du CSA représentative de la pluralité des acteurs de l'audiovisuel et de la société civile.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Nous connaissons la proposition du groupe CRC, puisque nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer la composition de ce fameux Conseil supérieur de l'audiovisuel.

M. Ivan Renar. Tout à fait !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Au nom de la commission des affaires culturelles - à titre personnel aussi - j'émets un avis défavorable sur cet amendement, car la loi a voulu que le régulateur soit composé des plus hauts représentants. Et le régulateur suprême reste le législateur, sous l'autorité du Président de la République. Comment nier au Président de la République élu au suffrage universel direct par tous les Français, aux sénateurs et aux députés représentant le peuple en vertu de la Constitution, le droit, et le devoir, de représenter le peuple français ?

Les neuf membres du Conseil ont montré leur indépendance dans l'exercice de leur mission. D'ailleurs, vous l'aurez noté, monsieur Renar, d'une alternance à l'autre, nous n'avons jamais touché au Conseil supérieur de l'audiovisuel ! Il a fonctionné, je le crois, de façon publiquement transparente et techniquement efficace. Je ne pense pas que le fait d'ajouter des membres du Conseil économique et social - si méritants soient-ils - et des représentants de la société civile, selon une procédure de désignation au demeurant extrêmement complexe, renforcera le CSA. En tant que parlementaire, je suis favorable au maintien de la composition actuelle du CSA. Son élargissement aboutirait, à mon avis, à son affaiblissement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur Renar, vous proposez de revenir sur la composition de l'instance de régulation du secteur audiovisuel et d'élargir le mode de désignation de ses membres.

Le CSA est une jeune institution, puisqu'elle est née en 1989 de par la loi ; elle a pris son envol et assume avec autorité ses responsabilités. Les membres nommés selon la procédure en vigueur peuvent déjà être issus de la société civile et du secteur audiovisuel, et vous savez que tel est le cas. Faire procéder à ces désignations par des instances non élues, et donc non représentatives du peuple français, ne m'apparaît pas de nature à renforcer la légitimité de l'instance de régulation. Or, vous le savez, ce qui importe, c'est son indépendance et son autorité. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Je veux être clair : je n'ai pas critiqué l'activité des membres du CSA, bien au contraire. Mais je crois que les missions nouvelles qui vont lui être dévolues, ainsi que l'importance, entre autres, du public et de la télévision méritent un renforcement du CSA. Et celui-ci peut venir des profondeurs directes de notre peuple et tenir à la présence de nombreuses personnalités qui, dans ce pays, peuvent exercer ces responsabilités.

Cet amendement vise donc à renforcer le CSA et, surtout, à lui donner plus d'efficacité. Son objet n'est pas de « criticailler » ce qui existe. Le débat ne sera pas clos avec le rejet de cet amendement. En effet, compte tenu de la nouveauté des situations et, notamment, de la mondialisation, le Conseil supérieur de l'audiovisuel doit prendre une tout autre forme. Et cela n'enlève rien au mérite de celui qui existe actuellement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 2
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Article additionnel après l'article 3 ou après l'article 15

Article 3

L'article 26 est modifié comme suit :

1° Au début du troisième alinéa du I est insérée une phrase ainsi rédigée : « À la demande du Gouvernement, il leur retire l'usage de la ressource radioélectrique lorsque cela s'avère nécessaire à la mise en oeuvre du schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique institué à l'article 99. » ;

2° Au début du premier alinéa du II sont insérés les mots : « À la demande du Gouvernement, » ;

3° Au troisième alinéa du II, les mots : « Dans les mêmes conditions, » sont supprimés.

M. le président. L'amendement n° 2, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Dans le deuxième alinéa (1°) de cet article, remplacer les mots :

à la mise en oeuvre du schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique institué à l'article 99

par les mots :

à l'extinction progressive de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.

L'amendement n° 45, présenté par MM. Lagauche et  Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel,  Dauge et  Guérini, Mme Tasca, MM. Teston,  Tropeano et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le deuxième alinéa (1°) de cet article par un membre de phrase ainsi rédigée :

; le Conseil supérieur de l'audiovisuel s'assure que la continuité du service public est assurée sur l'ensemble de la zone concernée par le retrait de la ressource radioélectrique.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. L'article 26 de la loi du 30 septembre 1986 rend les chaînes publiques - y compris Arte - titulaires de leur droit d'usage de la ressource hertzienne assignée pour la diffusion de leurs programmes.

L'article 3 du projet de loi que nous examinons permettra au Gouvernement de revenir sur ce droit acquis des chaînes publiques et de leur retirer l'usage de leurs fréquences pour les besoins du basculement en numérique et de l'extinction de l'analogique.

Ce droit acquis comporte un fondement ; il est lié à l'exercice d'une mission de service public au profit de l'ensemble des téléspectateurs-usagers. Il convient donc d'être extrêmement vigilant afin de ne pas porter atteinte à la continuité du service public de l'audiovisuel.

On le sait, quelques problèmes risquent d'apparaître au moment du basculement. Les opérateurs eux-mêmes craignent l'apparition de « zones blanches » lors de ce basculement, du fait d'une couverture non optimale en numérique, au moment de l'extinction de l'analogique.

Notre amendement tend donc à proposer que le CSA puisse contrôler le bien-fondé des éventuels retraits de ressources auxquels le Gouvernement pourra lui demander de procéder dans le cadre du basculement, en appréciant si le critère de continuité du service public pour les chaînes concernées par ce retrait est satisfait.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. L'objet de cet amendement, c'est-à-dire la continuité du service public, est tout à fait louable dans l'hypothèse où un retrait temporaire de la ressource radioélectrique permettrait l'extinction de la diffusion analogique. La commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques partagent donc cette préoccupation.

Néanmoins, et nous l'avons dit à l'occasion de la discussion du texte proposé pour l'article 99, nous estimons que c'est au Premier ministre qu'il incombe d'instaurer ce dialogue sur l'aménagement de zones géographiques. C'est lui - quelle que soit son appartenance politique - qui pourra le plus vite « rectifier le tir », et non le CSA, solution qui risquerait de ralentir l'efficacité de l'extinction de l'analogique. Le Gouvernement est déjà impliqué par des amendements précédents qui ont été adoptés. Par conséquent, la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, à chacun son rôle ! À la différence des chaînes privées, qui se voient attribuer leurs autorisations par le CSA à l'issue d'un appel à candidatures, c'est au Gouvernement qu'il revient de fixer, comme vient de le rappeler M. le rapporteur, après discussion avec les entreprises concernées, le nombre et la nature des chaînes du service public, lesquelles se voient conférer un droit d'usage de la ressource radioélectrique.

Le projet de loi prévoit l'extinction généralisée de la diffusion analogique à compter du 30 novembre 2011. L'article 3 permet au Gouvernement de retirer aux chaînes publiques les fréquences qui seront nécessaires à l'extinction de l'analogique et au développement du numérique en France.

La continuité du service public sera naturellement garantie, puisqu'il s'agit d'un principe de valeur constitutionnelle auquel le projet de loi ne saurait porter atteinte. Mais, contrairement à ce que vous proposez, monsieur Lagauche, ce n'est pas au CSA que le projet de loi confie le soin de l'assurer ; c'est au Gouvernement, auquel il appartient d'effectuer les demandes d'attribution prioritaire de fréquences au CSA en vue de la couverture numérique du territoire.

Comme je l'ai indiqué lors de la discussion générale, le Gouvernement prendra les décisions de nature à permettre aux chaînes du service public d'atteindre rapidement l'objectif que nous visons : couvrir 95 % de la population en numérique. Ce faisant, la continuité du service public sera garantie. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Monsieur Lagauche, l'amendement n° 45 est-il maintenu ?

M. Serge Lagauche. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 45 est retiré.

L'amendement n° 93, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer les 2° et 3° de cet article.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Le présent amendement s'inscrit dans la logique du renforcement des prérogatives de l'autorité administrative indépendante qu'est le CSA.

Après avoir entendu les propos tenus par la commission et par le Gouvernement sur notre amendement précédent, nous ne nous attendons malheureusement pas à ce que notre présente argumentation trouve une oreille attentive dans cet hémicycle.

Il convient donc de considérer cet amendement comme un amendement d'alerte concernant les questions anciennes et nouvelles de l'aménagement du territoire dans ce domaine, sachant que nous sommes au coeur même du sujet.

La commission a d'ailleurs envisagé cet aspect, puisqu'elle propose une modification de prudence concernant une extinction « progressive » et « par zone géographique » de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique.

Le schéma proposé n'apporte pas aux législateurs que nous sommes les assurances suffisantes de préservation et de continuité du service public de la télévision sur l'ensemble du territoire.

Or, bousculé par la concurrence commerciale, d'un côté, et par les diktats de la LOLF, de l'autre, le service public de la télévision pas plus que la chaîne culturelle européenne Arte ne doivent pâtir des imprévus, tant technologiques qu'humains.

C'est pourquoi nous demandons que, dans ce domaine également, le CSA soit consulté par nos gouvernants et que son travail d'interface vigilante entre les responsables politiques et les exécutants de ce projet s'accomplisse au mieux des moyens qui lui sont consacrés.

Cet amendement vise donc bien un objectif double : le renforcement du CSA, mais en vue d'un aménagement harmonieux de notre territoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je suis sensible aux arguments développés par notre collègue.

Cependant, certaines intentions louables sont parfois trahies par les propositions qui sont censées les concrétiser. Ainsi, la suppression proposée des 2° et 3°de l'article 3 me paraîtrait contre-productive après un examen attentif des dispositions visées.

En effet, en pratique, il ressort du 2°que le CSA, dont vous voulez renforcer les attributions, sera l'opérateur important dans le domaine de la ressource radioélectrique des chaînes publiques.

Mais dire que l'audiovisuel public relève avant tout de la compétence du CSA est en contradiction avec la vision du Gouvernement, comme d'ailleurs de tous les gouvernements. Le Sénat sera appelé à voter la semaine prochaine les crédits consacrés à l'audiovisuel public.

Il en est de même pour le 3°, qui prévoit une nouvelle répartition des compétences, souhaitable à mes yeux, entre le Gouvernement et le CSA.

En outre, sans revenir sur le texte proposé pour l'article 99 de la loi du 30 septembre 1986, que nous avons longuement évoqué hier soir, je rappelle qu'il consacre le rôle éminent du CSA par rapport au Premier ministre.

Ces arguments devraient pouvoir vous convaincre que votre amendement est contre-productif.

Aussi, je souhaite que vous le retiriez, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Sur ces sujets complexes, il faut une répartition claire des responsabilités.

S'agissant de l'audiovisuel public, le projet de loi vise à clarifier les responsabilités respectives du Gouvernement et du Conseil supérieur de l'audiovisuel.

Le 2° et le 3° que vous proposez de supprimer, au sein de l'article 3, n'ont pas pour objet de diminuer les prérogatives aujourd'hui dévolues au CSA.

Le 2°précise que c'est le Gouvernement qui effectue auprès du CSA les demandes d'attribution prioritaire de fréquences nécessaires aux chaînes du service public pour l'accomplissement de leur mission. Nous l'avons fait et nous poursuivrons dans cette voie.

Ce 2° lève une ambiguïté de l'article 26 de la loi du 30 septembre 1986, qui ne précise pas clairement qui des sociétés de l'audiovisuel public ou du Gouvernement est habilité à effectuer de telles demandes.

Or il revient bien au Gouvernement de déterminer le nombre et la nature des chaînes de service public et non pas aux entreprises de l'audiovisuel public de s'autodésigner comme bénéficiaires de fréquences audiovisuelles.

La rédaction proposée par le Gouvernement est d'ailleurs conforme à la pratique constante de tous les gouvernements depuis la création du CSA, en 1989.

Le 3°prévoit, toutefois, que cette précision ne concerne bien évidemment pas la chaîne parlementaire. Loin de restreindre les pouvoirs du CSA, au contraire, il clarifie son action, en lui désignant un interlocuteur unique pour les demandes de préemption de fréquences pour le compte du service public.

En outre, s'il n'est pas satisfait de la manière dont le Gouvernement assume cette responsabilité, le Parlement dispose de tous les moyens pour l'interpeller et le contrôler.

Telle est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Madame David, l'amendement n° 93 est-il maintenu ?

Mme Annie David. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je le mets aux voix.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi, après déclaration d'urgence, relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements nos 88 et 124 tendant à insérer un article additionnel après l'article 3 ou après l'article 15.

Article 3
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Article additionnel après l'article 3

Article additionnel après l'article 3 ou après l'article 15

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 88, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 5° de l'article 41-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est complété par les mots : «, sauf si sa programmation comporte une obligation de 50 % de programmes locaux en première diffusion. »

La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Une chaîne de télévision locale se définit avant tout par le seuil de population desservie, fixé à dix millions d'habitants, seuil dont le dépassement entraîne des obligations de production et la restriction des possibilités de diffusion publicitaire.

Or les chaînes locales sont de plus en plus souvent reprises par la télévision sur ADSL ou sur câble. Sur ces nouveaux supports, les distributeurs diffusent généralement tous les programmes à l'échelon national, donc sur l'ensemble du territoire. Les télévisions souhaitant être diffusées le plus largement possible sur leur bassin de population et, par voie de conséquence, être présentes sur tous les supports proposés aux téléspectateurs, le seuil des dix millions d'habitants peut être dépassé pour des raisons techniques et économiques indépendantes de l'éditeur de la chaîne, sans pour autant que l'audience de celle-ci soit modifiée : on voit mal un auditeur de Marseille regarder ce qui se passe à Rouen ou en Ille-et-Vilaine ! De fait, les programmes locaux ne peuvent qu'avoir une audience extra-locale tout à fait marginale.

C'est pourquoi il est proposé que la diffusion par l'ADSL ne soit pas prise en compte pour la définition de la zone de diffusion de chaque chaîne, de façon que les chaînes locales ne soient pas immédiatement considérées comme des chaînes nationales.

M. le président. L'amendement n° 124, présenté par M. du Luart, Mme Mélot et M. Béteille, est ainsi libellé :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 5° de l'article 41-3 est complété par les mots : «, sauf si sa programmation comporte une obligation de 50 % de programmes locaux en première diffusion. »

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Cet amendement étant quasiment identique à celui que vient de présenter M. Nogrix, je considère qu'il est défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Les auteurs de ces amendements me permettront d'observer que le dispositif auquel se rattache leur proposition est, dans la loi, réservé à la diffusion hertzienne. Or, me semble-t-il - mais je progresse chaque jour ! -, ni la diffusion sur l'ADSL ni celle par le câble ne relèvent de cette catégorie. Les amendements posent donc un problème de rattachement, ce qui est en soi une erreur technique qui devrait leur faire perdre tout leur objet.

J'ajouterai cependant une remarque qui me paraît relever du bon sens. Le CSA aura effectivement à appliquer, et donc à interpréter les textes législatifs. Je connais par ailleurs la bonne foi des auteurs de ces deux amendements. Néanmoins, la frontière entre les chaînes nationales et les chaînes locales me semble suffisamment claire pour que les membres du CSA soient en mesure de distinguer ce qui relève des moyens de diffusion principaux des chaînes locales - hertzien et câble - de ce qui relève des moyens complémentaires - ADSL et satellite.

Je comprends fort bien l'intérêt que les auteurs des amendements portent aux chaînes locales ; nous en avons longuement discuté, et nous avons introduit de nombreux dispositifs. Mais celui qui nous est ici proposé, d'abord, est inopérant sur le plan du rattachement et, ensuite, me semble souligner que le CSA doit procéder à une distinction que, de toute évidence, il aurait faite.

La commission des affaires culturelles a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je partage l'intention qui sous-tend ces deux amendements : que les télévisions locales ne perdent pas leur statut lorsqu'elles sont disponibles nationalement, par le satellite ou l'ADSL notamment.

Cependant, la législation actuelle nous prémunit déjà contre ce risque : la loi du 30 septembre 1986 prévoit pour l'application du dispositif anti-concentration que les services de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre sur une zone de moins de dix millions d'habitants sont considérés comme locaux.

Les amendements proposés tendent à préciser que, si une télévision locale hertzienne, du fait de sa reprise sur un autre réseau de communication électronique, dépasse une couverture de dix millions d'habitants, elle n'en demeure pas moins une chaîne locale au regard du dispositif anti-concentration. Cette précision est toutefois inutile puisqu'il résulte du texte même de la loi que le seuil de dix millions d'habitants ne s'apprécie que par rapport à la couverture hertzienne terrestre de la chaîne. Sa reprise sur un réseau de communication électronique est donc sans incidence sur l'application du dispositif légal anti-concentration.

C'est la raison pour laquelle, si je comprends votre souci, je considère qu'il n'est pas nécessaire de prévoir de disposition supplémentaire.

J'espère que, munis de ces informations, qui s'inscrivent pleinement dans votre perspective, vous serez en mesure de retirer vos amendements. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Nogrix, l'amendement n° 88 est-il maintenu ?

M. Philippe Nogrix. Je me méfie toujours des technologies et de leur définition. Je ne suis pas persuadé qu'une transmission sur Internet ne s'effectue pas, dans certains cas, par voie hertzienne : la preuve en est que, lorsqu'une carte PCMCIA relie directement votre ordinateur au réseau téléphonique, c'est bien une liaison hertzienne qui vous permet de vous connecter à Internet. (M. le rapporteur fait un signe de dénégation.)

Je veux bien admettre que ce ne soit pas vrai, mais, de fait, cette petite carte nous permet de recevoir Internet sur n'importe quel point du territoire si celui-ci est desservi par voie hertzienne !

Je ne suis donc pas du tout persuadé que la mention de la seule diffusion hertzienne terrestre dans la loi nous permette d'exclure l'ADSL et Internet au motif que ce sont des supports électroniques, et j'aimerais qu'un technicien fasse le point sur cette question.

Je comprends bien l'argument qui m'est opposé, et je retirerais mon amendement si j'étais convaincu de sa validité. Mais ce n'est pas le cas.

M. le président. Madame Mélot, l'amendement n° 124 est-il maintenu ?

Mme Colette Mélot. Monsieur le président, je n'ai aucune notion en matière technique, et j'ai confiance dans la parole du ministre. Je retire donc mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 124 est retiré.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je ne prétends en aucun cas, et je crois que c'est ce qui fait ma force, être un spécialiste.

Le wifi passe par les ondes, certes. Est-ce pour autant de la radiodiffusion ? Non : c'est de la communication électronique ! Ce n'est pas du broadcast ! Nous devons être très vigilants dans nos débats et ne pas confondre les types de réglementation.

La loi à laquelle vous vous rattachez concernant la diffusion de services de télévision par voie hertzienne terrestre, monsieur Nogrix, sur le plan procédural, votre amendement ne peut pas se défendre. Cela étant, je n'ai pas d'opinion défavorable, car je comprends les sentiments qui vous animent.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Je parlais non pas du wifi, mais de la transmission par ondes, exactement comme avec les téléphones portables. Si vous retirez la carte SIM de votre mobile pour l'insérer dans la carte PCMCIA de votre ordinateur, vous recevez les ondes de la même manière qu'avec votre téléphone.

Je veux bien admettre, si on me l'affirme, que le téléphone est uniquement électronique,...

M. Louis de Broissia, rapporteur. Il s'agit de communication électronique !

M. Philippe Nogrix...., mais il me semblait que la diffusion sur nos mobiles passait par la voie hertzienne. Si ce n'est pas le cas, je ne me battrai pas plus longuement sur ce point, mais je voudrais que l'on m'en assure. Il y a bien quelqu'un dans cet hémicycle pour renseigner le ministre sur ce point !

Sans cela, nous prendrions le risque que, à l'occasion d'une attaque contre une télévision locale, on puisse opposer à celle-ci qu'elle doit être considérée non pas comme locale, mais comme nationale, et donc être soumise aux mêmes obligations que les télévisions nationales. Elle n'aurait plus qu'à déposer le bilan et à mettre la clef sous la porte.

Mon but est seulement d'éviter une telle situation, et je ne vois pas quel inconvénient pourrait comporter l'introduction dans la loi de ces mesures permettant de reconnaître une télévision comme locale.

Je veux bien retirer mon amendement, monsieur le ministre, si l'on me donne la réponse que je demande !...

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 3 ou après l'article 15
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Article 4

Article additionnel après l'article 3

M. le président. L'amendement n° 141 rectifié bis, présenté par MM. Grignon et Richert, Mmes Sittler et Troendle, M. Haenel et Mme Keller, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La dernière phrase du 2° du I de l'article 44 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication est remplacée par deux alinéas ainsi rédigés :

« Au travers de ses stations régionales, la société France 3 assure par ses programmes la mise en valeur de la richesse de la vie des régions françaises. Elle contribue également au travers de ces programmes à l'expression, s'il y a lieu, des langues régionales.

« Elle conçoit et diffuse à travers des décrochages spécifiques à chaque région, aux heures de grande écoute, des émissions et des programmes reflétant la diversité de la vie économique, sociale et culturelle régionale, ainsi que l'information de proximité. »

La parole est à M. Francis Grignon.

M. Francis Grignon. On pourrait résumer l'objet de cet amendement en une phrase : faire de France 3 la télévision publique de proximité par excellence.

Les signataires de l'amendement n° 141 rectifié bis sont convaincus que c'est à cette chaîne que, de toute évidence, revient une telle mission. Créer une télévision coûte si cher qu'il faut profiter des outils existants !

Si France 3 remplit déjà de nombreuses missions de proximité au travers des informations régionales, des documentaires, des émissions à caractère régional, elle pourrait faire beaucoup plus pour tenir compte de l'actualité et des réalités à la fois sociales, économiques, et parfois linguistiques d'une même région.

Le développement harmonieux d'une région implique de mettre en oeuvre une communication, une pédagogie permanente entre les acteurs de cette région, qu'ils soient politiques, économiques ou associatifs, qu'ils relèvent ou non des services de l'État, et les consommateurs. Or nous pensons que France 3 pourrait faire beaucoup plus.

J'ai bien conscience que cela peut poser des problèmes dans la mesure où donner plus d'objectifs à France 3 dans le cadre du service public, c'est lui donner plus de moyens. Mais, à titre d'exemple, France 3 pourrait agir davantage au niveau régional en s'attachant plus aux réalités d'une région ; dans le domaine de la recherche d'emploi, notamment, certaines actions sont menées, mais elles sont insuffisantes.

Bref, France 3 pourrait être une véritable télévision de proximité en servant d'interface transversale entre tous les acteurs d'une région. Tel est l'objectif de cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Le problème très réel qui est soulevé dans cet amendement, que je trouve au demeurant fort sympathique, ne peut néanmoins trouver de solution dans le cadre de ce projet de loi de modernisation de la diffusion audiovisuelle et de la télévision du futur.

Je partage totalement vos propos, monsieur Grignon, que je relaye, pour ma part, au conseil d'administration de France Télévisions où j'ai l'honneur de représenter le Sénat, comme vous le faites également, si j'ai bien compris, monsieur le président Richert, au conseil d'administration de France 3.

France 3 doit revenir à une information de proximité et - vous auriez pu le rajouter - de service. Vous avez fait allusion à l'offre d'emplois ; on pourrait parler de l'insertion, des services à la personne, de la manière dont la télévision régionale, à côté des télévisions locales, doit contribuer à l'information du téléspectateur de la région. Vous auriez pu également souligner que, pour le moment, France 3 est dans beaucoup de régions où il n'y a pas de télévision locale le seul média télévisuel régional.

La Haute Assemblée qui est très sensible aux préoccupations exprimées souhaite, monsieur le ministre, qu'elles puissent être retenues dans le cahier des charges de France 3.

C'est pourquoi, monsieur Grignon, tout en m'associant à votre démarche, sous le bénéfice des explications que va certainement nous apporter M. le ministre, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. La barre est très haute, et le sujet beau et complexe !

Je vous rends attentifs à la dualité de la mission de France 3. C'est une grande chaîne nationale de proximité, qui a donc une double vocation : d'une part, éditer des programmes nationaux qui ont d'ailleurs un vrai retentissement et recueillent une large audience et, d'autre part, être un échelon de proximité qui permet à nos concitoyens de savoir ce qui se passe dans leur propre ville, leur propre département ou leur propre région.

Il y a donc une sorte d'ambiguïté dans la rédaction de votre amendement, monsieur Grignon. En effet, je ne voudrais pas que l'ensemble des équipes de France 3 se sentent dépossédées de leurs responsabilités nationales. Responsabilités nationales et locales doivent s'articuler. C'est la raison pour laquelle, étant particulièrement attentif en tant qu'élu local à cette dualité des responsabilités de France 3, je veillerai, dans le contrat d'objectifs et de moyens que nous sommes en train de négocier avec France Télévisions, à ce que cet impératif de proximité se marie harmonieusement avec l'audience nationale de France 3.

France 3 n'est ni une chaîne nationale comme les autres ni une chaîne locale ; c'est une télévision nationale de proximité. Je crains que votre proposition ne lui fasse perdre cette identité. C'est la raison pour laquelle j'y suis défavorable, même si j'ai, comme vous, pour objectif de conforter France 3 comme élément de la proximité nécessaire à la vie démocratique. Il n'y a pas besoin de jury populaire pour que cette démocratie de proximité soit une réalité ! Le pluralisme de l'information, le respect de la déontologie et de la liberté de nos concitoyens importent bien davantage.

M. le président. Monsieur Grignon, l'amendement est-il maintenu ?

M. Francis Grignon. J'avais un sombre pressentiment ! (Sourires.) J'espère toutefois que ce débat permettra de faire avancer les choses et que, dans le cahier des charges et dans le contrat d'objectifs et de moyens, les moyens permettant à France 3 de remplir encore mieux cette mission de proximité lui seront donnés.

Je retire donc cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 141 rectifié bis est retiré.

M. Philippe Nogrix. Je le reprends, monsieur le président.

M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 141 rectifié ter.

La parole est à M. Michel Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Cet amendement soulève, en effet, un problème intéressant.

M. le ministre nous a parlé de dualité concernant France 3. Certes, cette dualité existe. Mais je ne vois pas très bien comment il va réussir, en assurant l'harmonie des programmes et dans le respect du contrat assigné à France 3, à faire comprendre à la chaîne que le niveau national devra quand même diffuser des informations régionales.

On se trouve effectivement devant un véritable problème technique. Diffuser en Bretagne des informations concernant la Bretagne, en Lorraine ou en Alsace des informations concernant la Lorraine ou l'Alsace, ce n'est pas sans doute pas facile, mais notre degré d'avancement technologique devrait quand même nous permettre d'y arriver !

Cet amendement me paraît intéressant De toute façon, j'allais le présenter à un autre article. L'opportunité que je viens de saisir ne nous empêchera d'ailleurs pas d'en discuter deux fois.

Monsieur le ministre, il faut que vous nous expliquiez comment vous entendez réussir à harmoniser ces missions. J'aimerais avoir des éclaircissements sur ce point. Comment va réagir France 3 quand vous lui direz : vous devez à la fois garder votre service régional, mais vous ne pourrez pas faire de décrochage, et votre service national, tout en préservant le régional ?

En tant que simple sénateur, j'essaie de comprendre vos motivations et la façon dont vous allez vous en sortir.

France 3 réalise un travail excellent et je ne vois pas pourquoi les journalistes de cette chaîne nationale seraient tout à coup démotivés sous prétexte qu'on leur dira qu'il va y avoir des décrochages régionaux. J'aimerais donc avoir des explications sur ce point avant, éventuellement, de retirer cet amendement.

M. le président. La commission et le Gouvernement se sont exprimés.

Je mets aux voix l'amendement n° 141 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 3
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Article 5

Article 4

Le titre VIII est intitulé : « Dispositions relatives à la modernisation audiovisuelle » et comprend les articles 96 à 105-1. - (Adopté.)

Article 4
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Articles additionnels après l'article 5

Article 5

M. le président. Je rappelle que l'article 5 a été examiné en priorité.

Article 5
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Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7

Article additionnel après l'article 5

M. le président. L'amendement n° 143 rectifié bis, présenté par M. A. Dupont, Mme Mélot et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 134 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les trois mois à compter de la promulgation de la loi n° du, le Gouvernement déposera devant le Parlement un rapport sur l'application du présent article. »

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. L'article 134 de la loi du 9 juillet 2004 imposait une mise en conformité des conventions conclues avec les communes ou leurs groupements pour l'établissement et l'exploitation des réseaux câblés, dans un délai d'un an à compter de la publication du décret pris pour l'application de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques.

Ce délai a expiré en juillet 2006 sans qu'un accord soit intervenu entre les parties pour modifier les conventions, dans un très grand nombre de cas.

Pour une part, ce dépassement de délai pouvait venir d'analyses juridiques opposées quant à la nature des contrats en cours, ou bien de la difficulté de passer d'un cadre ayant trait à l'audiovisuel à un autre qui concerne principalement les communications électroniques.

Cette situation ne semble pas porter atteinte aux droits des tiers, dans la mesure où les éventuelles clauses relatives à l'exclusivité d'établissement de réseaux sur le territoire de la collectivité ne sont pas opposables.

Néanmoins il serait préjudiciable de laisser en l'état une disposition inappliquée, et de voir les contentieux se multiplier.

Par ailleurs, la perspective du très haut débit nécessite d'avoir une vision plus claire de l'avenir des réseaux câblés.

Il serait donc utile que le Gouvernement réunisse les représentants des opérateurs et des collectivités, avec l'appui éventuel de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et du Conseil supérieur de l'audiovisuel, afin d'identifier les blocages, d'évaluer leurs conséquences, de rappeler les règles de droit et les pistes de solutions, voire d'envisager des modifications législatives si elles s'avéraient indispensables.

Il s'agit donc non pas d'interférer avec les négociations locales et la liberté de choix des acteurs, mais de mieux en préciser le cadre pour en faciliter la conclusion.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui est une réponse à l'absence d'accord intervenu dans le délai prévu par loi du 9 juillet 2004.

Cette loi prévoyait en effet que la mise en conformité des conventions conclues avec les communes ou leurs groupements pour l'établissement et l'exploitation des réseaux câblés devait intervenir dans un délai d'un an à compter de la publication du décret pris pour l'application de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques. Or, comme vous l'avez justement souligné, ma chère collègue, ce délai a expiré en juillet 2006 sans qu'aucun accord soit intervenu entre les parties.

Votre demande d'un rapport paraît donc tout à fait opportune, afin de permettre l'établissement d'un point précis sur les négociations. Les deux commissions sont, à cet égard, sur la même longueur d'onde.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Madame la sénatrice, Bismarck disait : « Dans un système à trois puissances, il faut être l'une des deux. » (Sourires.) Eh bien ! rejoignant la puissance de la commission des affaires économiques et celle de la commission des affaires culturelles, le Gouvernement donne un avis favorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

M. Jean Louis Masson. Le problème soulevé dans cet amendement est fondamental. Ayant moi-même été confronté à cette difficulté, j'ai déposé un amendement que nous examinerons après l'article 7. Je propose de régler la question de manière plus contraignante puisque ledit amendement prévoit de donner aux conventions le caractère de délégations de service public. Il vise donc à accorder un pouvoir d'action directe aux communes ou aux délégataires de service public.

Un réseau câblé possède une situation de monopole de fait et, par conséquent, les gestionnaires des réseaux câblés peuvent finalement faire ce qu'ils veulent. La situation est en passe de devenir dramatique dans la mesure où le groupe TDF a liquidé l'ensemble des réseaux câblés qu'il gérait soit directement, soit par le biais de ses filiales. Ce sont donc des capitaux privés, des fonds de pension, etc., qui ont repris ces sociétés et leur seul but est de réaliser des profits.

Je n'ai rien contre les profits ! Mais lorsqu'une société se trouve en situation de monopole, elle augmente abusivement les tarifs et elle diminue les efforts de maintenance. Le problème s'est notamment posé avec Numericable qui a repris la moitié des réseaux de TDF, se trouvant ainsi, un peu partout en France, dans une situation de quasi-monopole. Les tarifs ont parfois augmenté de 50 %, alors même que la gestion s'est dégradée.

J'approuve la philosophie qui sous-tend l'amendement de Mme Mélot, mais la mesure proposée me semble tout à fait inadaptée : un rapport du Gouvernement déposé devant le Parlement ! Élu depuis quatre ans, je sais que les rapports ne sont que des enterrements de première classe. Tout le monde sait que, si l'on veut noyer le poisson, on fait un rapport ! Le nombre de cas dans lesquels une réelle difficulté a été enterrée par un rapport est tout à fait extraordinaire.

C'est une sombre plaisanterie, surtout lorsqu'on connaît les échéances politiques. Déjà, lorsque l'on a trois ou quatre ans devant nous, on ne voit jamais la couleur des rapports !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il ne faut pas exagérer !

M. Jean Louis Masson. Je vous citerai l'exemple de la fiscalité des petites voitures : tout le monde a fait semblant de se réjouir du dépôt d'un rapport. En réalité, tout le monde s'en moque !

En fait, nous nous donnons bonne conscience ! Ainsi, nous pouvons dire à nos administrés que nous avons pris en compte leurs préoccupations : nous avons obtenu le dépôt d'un rapport ! Or non seulement rien n'est fait, mais, en plus, aucun rapport n'est déposé

Par conséquent, je ne m'opposerai pas à cet amendement, mais ne soyons pas dupes : c'est bien un enterrement de première classe !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Le problème que viennent de soulever M. Masson et Mme Mélot est bien réel.

Les dispositions relatives au « paquet télécoms » avaient prévu un délai au terme duquel les parties contractantes, en général les communes, leurs groupements ou les câblo-opérateurs - mais il n'en reste plus qu'un seul aujourd'hui -, devaient éclaircir leurs relations contractuelles.

Le câble concerne aujourd'hui neuf millions de personnes réparties dans les grandes villes. Mme Mélot demande un rapport. M. Masson nous propose, dans son amendement n° 41 rectifié, une solution plus brutale, qui consiste à requalifier systématiquement les conventions conclues entre les communes ou leurs groupements et les câblo-opérateurs de délégations de service public.

Or, aujourd'hui, un tiers de ces conventions sont de vraies délégations de service public, un tiers est constitué de conventions d'occupation du domaine public, et l'on ne sait pas trop comment qualifier le dernier tiers.

Monsieur Masson, si nous faisions droit à votre amendement dès ce soir, le risque de spoliation serait très important. Le Parlement ne peut pas, sans étude préalable, requalifier toutes les conventions en délégations de service public. Cela reviendrait à considérer que l'ensemble des collectivités deviennent propriétaires des réseaux sans connaître la situation particulière de tel ou tel réseau dans telle ou telle ville. Ce ne serait ni très prudent ni très sage.

Pour toutes ces raisons, monsieur le président, nous souhaitons sous-amender l'amendement n° 143 rectifié bis de Mme Mélot en ajoutant la phrase suivante : « Ce rapport précise en particulier les droits et obligations des parties aux contrats de délégation de service public et les dispositions susceptibles de contribuer au respect du pluralisme culturel. »

En outre, je souhaiterais, monsieur le ministre, qu'entre cette lecture au Sénat et celle qui interviendra en début d'année à l'Assemblée nationale nous réglions ce problème. Le très haut débit impliquerait que la délégation de service public soit effectivement la solution. Mais il s'agit d'un moyen un peu coercitif, qui mérite une réflexion approfondie.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 158, présenté par MM. Hérisson et Retailleau, et qui est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par l'amendement n° 143 rectifié bis pour insérer un article additionnel après l'article 7 complétant l'article 134 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 par une phrase ainsi rédigée :

"Ce rapport précise en particulier les droits et obligations des parties aux contrats de délégation de service public et les dispositions susceptibles de contribuer au respect du pluralisme culturel."

Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Favorable.

M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 158.

Mme Colette Mélot. L'amendement n° 143 rectifié bis a pour objet de soulever un problème réel. Je remercie la commission des affaires économiques de proposer un sous-amendement tendant à apporter une précision. En conséquence, je voterai ce sous-amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.

M. Jean Louis Masson. Ce sous-amendement constitue une avancée qui prend en compte une partie de mes préoccupations. C'est pourquoi je le voterai.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 158.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 143 rectifié bis, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7 ou après l'article 16

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 42 rectifié bis, présenté par MM. Masson, Alduy, Balarello, Baudot, Beaumont et Besse, Mme Bout, MM. J. Boyer, Cointat, Darniche et Esneu, Mmes Garriaud - Maylam et G. Gautier, M. Gerbaud, Mme Gousseau, M. Milon, Mmes Payet et Sittler et M. Virapoullé, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans une logique de respect du pluralisme culturel, les opérateurs de télédistribution par câble ayant conclu avec des collectivités territoriales ou leurs groupements une convention pour le passage des réseaux câblés de télévision sur le domaine public ou pour leur établissement et leur exploitation, doivent recueillir l'accord de leurs cocontractants sur le choix des chaînes de télévision retransmises. Ils leur soumettent, par la suite, toute modification. »

La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. J'ai déjà évoqué le problème tout à l'heure : les réseaux câblés sont en situation de monopole dans les villes. Certes, il est possible d'installer des paraboles, mais le service rendu n'est pas le même. En outre, dans de nombreuses villes, il est interdit d'installer des paraboles dans le périmètre des monuments historiques.

Auparavant, TDF et ses filiales géraient les réseaux câblés, avec une certaine logique de service public. Ces réseaux câblés ont été rétrocédés à des sociétés, notamment à des fonds de pension étrangers, dont le seul but est de réaliser des profits.

Dans une situation de concurrence, il est légitime de tout mettre en oeuvre pour réaliser le maximum de profits. Mais dans une situation de monopole, les dérives sont très importantes, et ce partout en France.

À l'heure actuelle, la société Numericable a récupéré les trois quarts des réseaux câblés en France. Partout en France, on a pu observer une levée de boucliers de la part des abonnés, qui sont confrontés à des augmentations tarifaires de l'ordre de 30 % à 50 %, que ce soit de façon directe ou par le biais de modification des contrats.

Le service après-vente a totalement disparu : les abonnés qui rencontrent un problème attendent dix minutes au téléphone, pour finalement ne pas obtenir de réponse ; pourtant, ils devront payer les dix minutes de communication ! Ce matin, j'ai pris le train avec le député-maire de Sarreguemines, qui a souhaité en faire l'expérience : il a dépensé l'équivalent de 20 euros en frais de communication sans obtenir aucune réponse. Il a ainsi pu constater à quel point les dérives étaient importantes.

Cette situation est inadmissible ! Si l'on augmente les tarifs, que l'on maintienne au moins les emplois et la qualité du service !

Mon collègue député-maire de Sarreguemines m'a expliqué que son fils et lui avaient chacun un abonnement. Son fils, partant à l'étranger, a souhaité faire résilier le sien. En fait, c'est l'abonnement du père qui a été résilié et trois semaines ont été nécessaires à son rétablissement. Il ne s'agit pas là d'une anecdote ! En qualité d'élu de la région messine, je connais plusieurs dizaines d'administrés qui sont confrontés à ce problème.

Comme des économies absolument invraisemblables ont été réalisées en matière de gestion, il n'y a plus personne aujourd'hui pour remplir cette fonction. Je citerai l'exemple d'un Messin qui demanderait la résiliation de son abonnement : l'opérateur procéderait bien à une résiliation, mais ce ne serait pas nécessairement le bon abonnement. La situation est véritablement surréaliste !

Le plus grave c'est que, pour justifier les augmentations que je viens de mentionner, on nous affirme que nous bénéficierons désormais de la TNT, avec de nouvelles chaînes. Dans le département de la Moselle, qui est un département frontalier et bilingue d'Alsace-Lorraine, les tarifs augmentent de 20 % et, pour justifier ces hausses, on nous promet que nous disposerons désormais de quatre-vingts chaînes.

Effectivement, nous avons bien quatre-vingts chaînes. Mais, parmi celles-ci, sept sont en arabe, cinq sont en turc et deux sont en ourdou. Je me demande combien de Messins parlent l'ourdou ! Pis encore, alors que nous sommes dans un département frontalier, on nous supprime les trois chaînes allemandes et les deux chaînes belges !

Certes, à force de protestations, nous avons obtenu le rétablissement d'une partie du panel. Mais de telles pratiques constituent de véritables abus de position dominante. S'agissant de la diffusion des chaînes, il est indispensable que les maires, les communes et les collectivités locales puissent avoir leur mot à dire.

M. le président. L'amendement n° 125 rectifié, présenté par MM. Vinçon et Pointereau, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans une logique de respect du pluralisme culturel, les opérateurs de télédistribution par câble ayant conclu avec des collectivités territoriales ou leurs groupements une convention pour le passage des réseaux câblés de télévision sur le domaine public, doivent recueillir l'accord de leurs cocontractants sur le choix, ou la modification, des chaînes de télévision retransmises. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 42 rectifié bis ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Monsieur le sénateur, je comprends les raisons parfaitement légitimes qui vous incitent à solliciter une intervention de la puissance publique face à de tels abus de position dominante. Mais nous sommes en train d'élaborer une loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur.

À cet égard, je vous rappellerai au passage que les termes « télédistribution par câble » ne sont plus employés. (M. Jean Louis Masson s'exclame.) Monsieur le sénateur, lorsqu'on rédige des amendements tendant à modifier un projet de loi, on ne peut pas utiliser des concepts qui n'existent plus !

Cela dit, je voudrais en venir au fond de votre amendement.

Bien entendu, je ne conteste pas les excellentes raisons qui justifient votre intervention. Moi-même, si j'étais député-maire de Sarreguemines ou de Dijon, je pourrais exprimer des plaintes similaires.

Mais, selon les termes de votre amendement, les opérateurs concernés « doivent recueillir l'accord de leurs cocontractants sur le choix des chaînes de télévision retransmises. Ils leur soumettent, par la suite, toute modification. »

Ainsi, tout conseil municipal ou tout groupement intercommunal serait en pratique soumis à des modifications permanentes. Je le rappelle, la numérisation du câble est une offre d'un bouquet qui évolue en permanence.

Je souhaite évoquer un point de droit, monsieur Masson. Dans cet hémicycle, nous faisons tout de même du droit ; nous en sommes même à l'origine ! Or la règle que votre amendement tend à établir serait, hélas ! en contradiction directe avec les dispositions des directives communautaires du « paquet télécoms » et la loi du 9 juillet 2004. En effet, cela remettrait en cause le principe de non-discrimination entre les différents réseaux de communication électronique, puisque nous nous limiterions au cas du câble. Dès lors, les opérateurs que vous auriez voulu sanctionner pourraient invoquer la réglementation communautaire. Je suppose que ce n'est pas ce que vous recherchez.

Par conséquent, je souhaite que vous retiriez cet amendement, faute de quoi la commission serait contrainte d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur le sénateur, je comprends très bien votre démarche : vous souhaitez que la Haute Assemblée exprime une exaspération unanime face à l'impossibilité de faire évoluer, dans votre ville ou dans votre département, le fonctionnement de ce système. Vous le notez d'ailleurs, une telle situation peut très bien se produire également dans d'autres villes. Vous soulignez le fait que, face à un tel monopole, les usagers peuvent difficilement obtenir les renseignements qu'ils souhaitent.

Je souscris d'autant mieux à votre démarche que, pour l'avènement du numérique, nous souhaitons que nos concitoyens soient informés en temps réel.

Vous suggérez donc de mettre en place un dispositif spécifique lié à la distribution de l'offre télévisuelle par le câble, alors que celle-ci est aujourd'hui distribuée de manière multiforme, ce qui constitue d'ailleurs un progrès, puisque cela permet à chacune et à chacun de recevoir la télévision, indépendamment de la ville de résidence.

C'est la raison pour laquelle, même si les difficultés des usagers sont réelles, nous ne pouvons pas construire un système particulier concernant la diffusion par le câble.

Il existe, me semble-t-il, des moyens non pas juridiques, mais politiques, pour exprimer votre insatisfaction au câblo-opérateur.

Je ne veux pas anticiper sur des problèmes locaux qui ne relèvent pas de ma compétence, mais les villes de Metz, de Sarreguemines et les autres peuvent parfaitement mettre en demeure leur câblo-opérateur et faire jouer un certain nombre de dispositions contractuelles pour exprimer leur mécontentement.

En tout cas, nous ne pouvons pas établir de discrimination légale d'un mode de distribution par rapport à un autre.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Articles additionnels après l'article 5

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7 ou après l'article 16

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 67, présenté par MM. Lagauche et Assouline, Mme Blandin, MM. Bockel, Dauge et Guérini, Mme Tasca, MM. Teston, Tropeano et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 80 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art.... - Les services de télévision dont les ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radio et de télévision.

« La rémunération perçue par les services de télévision lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d'intérêt général n'est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé au premier alinéa. »

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Depuis sa création en 1984, le fonds de soutien à l'expression radiophonique a permis à un très grand nombre de radios de se développer malgré de faibles ressources commerciales.

Aujourd'hui, quelque 550 radios en bénéficient. Dans les faits, seulement 10 % environ de celles-ci perçoivent des recettes publicitaires, qui représentent en moyenne à peine 10 % de leurs ressources.

L'aide fournie par le fonds de soutien prend la forme d'une subvention de fonctionnement, d'équipement ou à l'installation. Elle est octroyée en complément d'autres aides, notamment celles des collectivités territoriales ou les aides à l'emploi de l'État.

Il nous semble urgent d'envisager la création d'un mécanisme similaire de soutien aux télévisions à faibles ressources commerciales. La mise en place de ce nouveau dispositif ne ponctionnerait pas les recettes abondant le fonds de soutien à l'expression radiophonique, car il s'agirait d'un fonds autonome bénéficiant d'un financement ad hoc, qui pourrait être assuré de deux manières.

Il y aurait d'abord les recettes supplémentaires - elles sont estimées à 200 millions d'euros -, liées à l'ouverture du marché publicitaire des chaînes nationales au secteur de la distribution en 2007. Ces recettes sont à mettre en parallèle avec le montant du fonds de soutien à l'expression radiophonique, qui bénéficie chaque année d'un peu moins de 25 millions d'euros.

Ensuite, une taxation supplémentaire de la publicité télévisée - elle serait quasiment insensible pour les chaînes concernées - pourrait éventuellement être instaurée.

La mise en place d'un tel fonds permettrait à de nombreuses chaînes de conforter leur place au sein du paysage audiovisuel. Je pense plus particulièrement aux chaînes de télévision d'initiative locale, auxquelles le marché publicitaire local, qui est très étroit, ne permet pas d'apporter des recettes suffisantes.

M. le président. L'amendement n° 89, présenté par Mme Morin - Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art.... - Les services de télévision, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total, bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision.

« La rémunération perçue par les services de télévision lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d'intérêt général n'est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé au premier alinéa. »

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai en même temps les amendements nos 89 et 90, qui s'inscrivent tous les deux dans la même perspective, c'est-à-dire le soutien aux télévisions locales.

Ces deux amendements visent à instaurer un fonds de soutien et un fonds d'amorçage permettant aux nouvelles chaînes de passer le cap toujours difficile des trois premières années d'existence.

Nous avons eu l'occasion de l'évoquer à plusieurs reprises, les télévisions locales répondent à des objectifs de pluralisme des médias et de proximité comparables à ceux qui justifient aujourd'hui le soutien aux radios locales.

Il est donc important de profiter du présent projet de loi pour permettre l'émergence de projets de chaînes locales dans l'ensemble de notre pays, y compris dans les territoires peu peuplés ou les zones urbaines défavorisées, où les ressources publicitaires ne permettraient jamais à des télévisions locales de s'implanter.

La France accuse un important retard par rapport à nos pays voisins. Ainsi, il existe 600 chaînes locales au Royaume-Uni, plus de 1 000 en Espagne et 900 en Italie, contre seulement 130 en France.

C'est pourquoi, comme l'a fait notre collègue Claude Belot dans son rapport d'information intitulé Pour le développement des télévisions de proximité en France, nous proposons un élargissement du fonds de soutien à l'expression radiophonique locale.

Ce fonds de soutien, qui aurait un caractère pérenne, est justifié par un souci d'équité : quel que soit leur lieu de résidence, tous les citoyens doivent pouvoir accéder à un service d'information de proximité.

En revanche, comme son nom l'indique, le fonds d'amorçage aurait bien entendu une durée limitée. Il pourrait prendre la forme d'une aide initiale à la création, et ce jusqu'à ce que les chaînes locales parviennent à l'équilibre financier.

Ces fonds seraient autofinancés grâce à l'amélioration du recouvrement des taxes sur le « hors-médias » et la publicité télévisée.

M. le président. L'amendement n° 90, présenté par Mme Morin - Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art.... - Les services de télévision, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total, bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Un service de télévision ne peut bénéficier d'une aide pendant une durée supérieure à trois années.

« Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision.

« La rémunération perçue par les services de télévision lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d'intérêt général n'est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé au premier alinéa. »

Cet amendement est défendu.

L'amendement n° 106, présenté par MM. Ralite, Renar et Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article nouveau ainsi rédigé :

Après l'article 80 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art.... - Les services de télévision, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total, bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision.

« La rémunération perçue par les services de télévision lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d'intérêt général n'est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé à l'alinéa premier du présent article. »

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement vise à encourager l'essor du média télévisuel associatif et de proximité, en particulier dans les territoires peu peuplés ou les zones urbaines défavorisées.

L'exigence des télévisions associatives d'être partie prenante au banquet audiovisuel mérite d'être considérée avec sérieux.

L'apport original des télévisions associatives réside dans le fait qu'elles s'adressent de manière spécifique à un public restreint. Elles se donnent pour mission de se mêler à ceux et de ceux qui les regardent et de constituer un forum de la citoyenneté et un espace d'interactivité. C'est toute leur originalité. Pour qu'elles puissent assumer ce rôle actif au sein de la communauté des téléspectateurs, il faut qu'elles remplissent de manière complémentaire aux chaînes nationales et régionales une fonction de service public, de lien entre les citoyens d'une même localité.

Les usagers de ces télévisions apprécient les émissions spécifiques qui les concernent de près. Ils savent que d'autres médias sont disponibles pour être informés plus largement. Ils attendent des émissions de proximité, de l'information, du pédagogique, de la vulgarisation, des programmes éducatifs en rapport avec la vie quotidienne, les institutions, l'histoire et la culture locales. Ils souhaitent également, bien sûr, du divertissement.

Si la loi permet de changer la situation dans laquelle seules les sociétés commerciales souhaitant créer une chaîne de télévision peuvent répondre à l'appel à candidatures organisé par le CSA pour l'attribution d'une fréquence, il reste à transformer l'essai en rendant cet accès associatif à l'antenne télévisuelle économiquement viable.

Un autre débat à propos d'un fonds de soutien, qui avait été amorcé lors de l'examen de la loi du 1er août 2000, devra être approfondi. Il s'agit de veiller aux critères de répartition des revenus de la publicité, afin que les médias de proximité ne soient pas défavorisés, mais voient leurs moyens renforcés en vue de poursuivre leur travail original et d'enrichir leurs prestations.

M. le président. L'amendement n° 140, présenté par Mmes Blandin, Boumediene - Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 80 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 est inséré un article additionnel ainsi rédigé :

« Art.... - Les services de télévision, lorsque leurs ressources commerciales provenant de messages diffusés à l'antenne et présentant le caractère de publicité de marque ou de parrainage sont inférieures à 20 p. 100 de leur chiffre d'affaires total, bénéficient d'une aide selon des modalités fixées par décret en Conseil d'État.

« Un service de télévision ne peut bénéficier d'une aide pendant une durée supérieure à trois années.

« Le financement de cette aide est assuré par un prélèvement sur les ressources provenant de la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision.

« La rémunération perçue par les services de télévision lors de la diffusion de messages destinés à soutenir des actions collectives ou d'intérêt général n'est pas prise en compte pour la détermination du seuil visé au premier alinéa du présent article. »

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement a le même objet que les amendements qui viennent d'être présentés par mes collègues.

Il s'agit d'un amendement de repli, puisque la durée de l'aide dont pourrait bénéficier un service de télévision serait limitée à trois ans.

La logique économique d'appui sur la publicité que vous avez décrite pour les grandes chaînes se heurte à la rareté de la ressource pour les chaînes locales. Peu de marques publicitaires voient en effet un intérêt à promouvoir leurs produits sur une jeune chaîne ou sur un service diffusant dans un territoire à faible densité de population, aux rares grandes surfaces de distribution et aux consommateurs peu nombreux.

Pourtant, ces jeunes chaînes locales jouent un rôle fondamental en matière de lien social et de diversité. Nous proposons donc de les soutenir, pendant leurs trois premières années d'existence, par une aide sous condition, dont le coût serait compensé par une taxe sur les recettes de publicité audiovisuelle, qui ne vont pas manquer de s'accroître avec l'ouverture du secteur à la grande distribution.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Tous les auteurs de ces amendements se rejoignent sur une préoccupation légitime : donner aux télévisions locales les moyens de se développer. La commission est animée du même souci, je ne cesse de le répéter depuis vingt-quatre heures. Cependant, la méthode proposée ne lui paraît pas la meilleure.

Le paysage de la publicité va évoluer considérablement, au détriment, nous dit-on, de la presse quotidienne régionale plutôt que des autres médias. Nous le verrons la semaine prochaine, lors de la discussion du projet de loi de finances, la vitalité de la presse quotidienne régionale et nationale est affaiblie par la fin des « secteurs interdits », c'est-à-dire l'arrivée officielle de la publicité pour la grande distribution à la télévision.

Je pense que les auteurs des amendements me rejoindront aussi sur le constat que l'ouverture de la publicité télévisée locale à la grande distribution est l'un des facteurs importants du lancement des télévisions locales. Pour suivre de près, comme vous, ce qui se passe sur le terrain, je remarque que le paysage économique de la publicité locale, en particulier grâce à la syndication, permet une offre considérée comme importante par les annonceurs. Le marché est donc en train de s'ouvrir.

Les amendements dont nous discutons actuellement visent à créer un fonds « d'amorçage ». Évidemment, il est toujours séduisant de créer de tels fonds ! Cette idée est évoquée depuis très longtemps ; notre collègue Danièle Pourtaud l'avait d'ailleurs longuement défendue.

Nous avons toujours considéré que cette proposition séduisante souffrait néanmoins d'une imprécision : que se passe-t-il au terme des trois ans ? Nous avons vécu l'expérience du fonds d'aide aux radios associatives. Qui prendra le relais pour les télévisions locales qui n'auraient pas trouvé leur équilibre économique au bout de trois ans ? Le contribuable, local ou national !

L'ouverture de la TNT va bénéficier, avec le numérique, de conditions de diffusion moins onéreuses qu'en mode analogique ; cette observation avait d'ailleurs fondé ma demande de retrait de plusieurs amendements, la nuit dernière. Les conditions économiques d'un développement viable de la télévision locale existent donc ; celle-ci ne doit pas être mise tout de suite sous perfusion, comme si nous doutions de la validité de son modèle économique.

C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cette série d'amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Pour le Gouvernement, la question du développement des télévisions locales ne se pose pas de la même manière que pour les radios associatives.

Tout d'abord, l'équilibre économique des radios associatives a été fondé sur l'exclusion du recours à la publicité dans leur financement. C'est ce qui définit leur esprit et leur mode de fonctionnement.

En revanche, nous acceptons la perspective du financement des télévisions locales par la publicité. Je rappelle d'ailleurs que les modes de fonctionnement de ces deux médias et les ordres de grandeur financiers ne sont absolument pas comparables : le budget moyen d'une télévision locale est au moins dix fois plus important que celui d'une radio associative standard. Aujourd'hui, le budget de l'État consacre un peu plus de 20 millions d'euros au financement des radios associatives ; vous imaginez les sommes qu'exigerait ce financement de substitution s'il était institué en faveur des télévisions locales !

Les chaînes de télévision locales diffusées en mode hertzien terrestre ont donc vocation à être financées par le recours à la publicité. Ces chaînes sont en train de s'organiser pour créer des structures de gestion communes leur permettant de drainer les recettes de publicité des annonceurs nationaux, ce qui devrait contribuer à leur essor rapide.

Le déploiement des chaînes locales sur la TNT, essentiel à leur développement, est une priorité du Gouvernement. J'ai eu l'occasion de rappeler hier, dans cet hémicycle, la manière dont nous allons procéder. J'ai écrit à ce sujet au CSA, dès le 19 janvier 2006, pour permettre l'accès des chaînes locales à la TNT, et j'ai confirmé récemment la mise en oeuvre de ce support pour les chaînes du service public.

Radios locales et télévisions locales répondent à un même souci de proximité, mais ont des modes de fonctionnement et de financement différents. Je tenais à rappeler ces enjeux ; c'est la raison pour laquelle je n'ai pas évoqué l'article 40 de la Constitution, alors que j'aurais pu le faire d'emblée.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

M. Serge Lagauche. M. le ministre a parlé de l'article 40 de la Constitution !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je n'ai fait que l'évoquer !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 89.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote sur l'amendement n° 90.

Mme Marie-Christine Blandin. Je souhaite juste préciser à nos collègues que cet amendement n'engagerait que pour trois ans. C'est un amorçage !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote sur l'amendement n° 106.

M. Jack Ralite. Je voudrais saisir cette occasion pour poser une question à M. le ministre. J'ai reçu un courrier du proviseur du lycée Léonard-de-Vinci de Monistrol-sur-Loire, petite ville située non loin de Saint-Étienne, mais dans une région qui ne bénéficie pas d'une très bonne couverture télévisuelle.

Ce lycée a créé une télévision, dont on me dit d'ailleurs que c'est la première et, pour le moment, la seule télévision de lycée en France. Son budget annuel s'élève à 23 564 euros ; les financements sont soit publicitaires, soit assurés par des aides de la communauté de communes, de l'éducation nationale ou de la mission lycées.

L'établissement a obtenu une autorisation d'émettre dont le renouvellement a été refusé brutalement, à la rentrée 2006. Les arguments invoqués auraient été, d'une part, l'élection présidentielle, « alors que nous ne sommes pas une chaîne généraliste », m'écrit le proviseur, même si l'audience va bien au-delà du lycée puisque 30 000 personnes sont touchées. D'autre part, arguant de l'arrivée de la TNT, le CSA a précisé qu'il n'attribuerait aucune fréquence temporaire analogique à partir du mois de mars 2007.

C'est ainsi qu'une très belle aventure se termine, et que l'ensemble des élèves et de la communauté scolaire sont très déçus, selon les dires du proviseur, avec lequel je me suis entretenu au téléphone.

Il ne s'agit même pas d'un problème de financement ! Je vous soumets ce cas particulier, bien que le moment soit peut-être mal choisi, monsieur le ministre, mais je voulais attirer votre attention. Il serait bon que l'on puisse répondre à ce proviseur.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 106.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 140.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 5 ou après l'article 7 ou après l'article 16
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 8 ou après l'article 16

Articles additionnels après l'article 5

M. le président. L'amendement n° 83, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste-UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le deuxième alinéa de l'article 3-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, après les mots : « il veille à favoriser la libre concurrence et l'établissement de relations non discriminatoires entre éditeurs et distributeurs de services ; » est inséré un membre de phrase ainsi rédigé : « il fixe les conditions dans lesquelles les services qui ne font pas appel à une rémunération de la part des usagers diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique en application de l'article 30-1, les sociétés nationales de programme et la chaîne Arte, sont numérotés sur toutes les offres des distributeurs de services ; ».

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement vise à favoriser l'accès de l'ensemble du public aux chaînes de la TNT, en proposant une numérotation homogène des chaînes publiques et privées gratuites sur l'ensemble des réseaux de distribution, câble et satellite, afin que les téléspectateurs identifient rapidement ces programmes.

La plupart des chaînes de télévision de la TNT gratuite sont victimes d'une numérotation discriminatoire au sein des plans de services des distributeurs par câble et satellite qui privilégient les chaînes dont ils sont propriétaires, au mépris de la logique de la numérotation attribuée par le CSA pour la diffusion des chaînes en numérique hertzien : à titre d'exemple, TPS propose ainsi TPS Star au n° 4, numéro attribué à Canal + en diffusion hertzienne.

Or l'absence d'une numérotation homogène sur l'ensemble des réseaux de distribution est un frein à l'accès du plus grand nombre aux chaînes de la TNT.

Je pourrais prendre encore quelques exemples pour illustrer mon propos. Pour le service public, dont les chaînes, selon leur cahier des charges, « constituent la télévision de tous les citoyens [...] » et « aspirent à rassembler le public le plus large pris dans toutes ses composantes [...] », France 4 et France 5 ne bénéficient pas aujourd'hui d'une numérotation unique sur l'ensemble des supports de distribution.

Ainsi, France 4 est la chaîne numéro 14 sur la TNT, mais numéro 24 sur Numericable, numéro 34 sur Noos dans la série « séries TV et cinéma », numéro 34 sur TPS dans la série « divertissement », numéro 11 sur CanalSat, etc. ; France 5 est la chaîne numéro 5 sur la TNT, mais numéro 8 sur Noos, numéro 16 sur TPS et numéro 9 sur CanalSat. Et l'on pourrait multiplier les exemples !

J'indiquerai également, sachant que les parlementaires y sont attachés, que les chaînes LCP-AN et Public Sénat ne sont pas mieux loties sur ces distributeurs, ce qui ne facilite pas la diffusion d'une information politique et civique pourtant primordiale.

Pour les autres chaînes gratuites de la TNT, BFM TV se voit attribuer le numéro 52 dans la rubrique « culture et société » de la plateforme TPS, qui accueille les chaînes d'information similaires LCI au numéro 10 et I > Télé au numéro 12 ; sur CanalSat, cette chaîne se voit affecter le numéro 36, etc.

Ces services de télévision doivent remplir un certain nombre d'obligations d'intérêt public spécifiques : obligations de couverture de territoire, obligations plus fortes en matière de contribution à la production cinématographique...

Cet amendement tend donc à donner compétence au Conseil supérieur de l'audiovisuel pour garantir aux chaînes gratuites de la TNT d'être référencées dans des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires. Nous voyons avec satisfaction que le Gouvernement va présenter un amendement allant dans le même sens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La question de la numérotation des chaînes a été abordée à plusieurs reprises dans cet hémicycle. C'est un vrai sujet, mais je ne suis pas sûr, chère collègue, que votre façon de le traiter soit la bonne. Les mesures que vous proposez sont en effet insuffisantes.

Est-il nécessaire qu'il y ait la même numérotation, ou est-il préférable qu'il y ait une offre de services ? Si je m'intéresse aux sports ou aux informations locales, je voudrai sélectionner les chaînes spécialisées correspondantes ; si je souhaite suivre l'information en continu, je dois pouvoir faire une comparaison entre i > Télé et France 24.

Quoi qu'il en soit, le Gouvernement a réfléchi à ce problème. Si je ne désapprouve pas l'amendement de Mme Morin-Desailly, je souhaite qu'il soit réservé jusqu'à l'examen de l'amendement n° 154 que le Gouvernement a déposé tardivement, tendant à insérer un article additionnel après l'article 16. C'est là une question importante, que la commission des affaires culturelles ne souhaite pas esquiver.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Si vous le permettez, monsieur le président, j'évoquerai dès maintenant l'amendement du Gouvernement, dont le dépôt motive mon avis défavorable sur l'amendement n° 83. En même temps, Mme Morin-Desailly verra que j'attache du prix à la logique qu'elle a exposée, puisque les deux amendements s'inscrivent dans une même perspective.

Cela étant, sa proposition se heurte à mes yeux à de multiples objections.

Tout d'abord, la numérotation des chaînes au sein de l'offre fait partie intégrante de la liberté éditoriale et commerciale de l'éditeur du bouquet. Sa détermination par une autorité administrative serait manifestement contraire à la liberté du commerce, au regard du cadre juridique tant français qu'européen.

Au-delà, il ne faut pas oublier que ces bouquets existent déjà et que les usagers ont développé des habitudes de consommation à l'égard des chaînes diffusées sur les bouquets payants auxquelles ils sont attachés.

Il ne faut pas oublier non plus que les modes de consommation en matière de télévision payante sont très différents de ce qu'ils sont en matière de télévision gratuite. Les chaînes sont rassemblées en groupes homogènes selon des thématiques.

J'ajoute que les offres payantes comprennent de très nombreuses chaînes, dont certaines ont obtenu le droit d'être diffusées par la TNT, et d'autres non. Pourquoi privilégier les unes par rapport aux autres ? N'oubliez pas que ce qui renforcera les uns affaiblira les autres.

Cette question de la numérotation des chaînes est cependant importante. Je propose plutôt de conforter les missions générales du CSA dans ce domaine. À cet égard, le Gouvernement a donc déposé un amendement n° 154, qui prévoit que le CSA « veille au caractère équitable, transparent, homogène et non discriminatoire de la numérotation des services de télévision dans les offres de programmes des distributeurs de services ».

Par conséquent, je suis défavorable à votre amendement, madame Morin-Desailly, et je vous invite à vous rallier à celui du Gouvernement.

Vous avez le souci, que nous partageons d'ailleurs, du respect des téléspectateurs et des usagers. Il s'agit de faire en sorte que cette révolution technologique permette le vrai pluralisme, c'est-à-dire la comparaison, la possibilité, si l'on a envie de se focaliser sur l'information, sur le sport, sur la culture ou sur le cinéma, de passer aisément d'une chaîne thématique à une autre en pouvant étudier les différences.

J'ai rappelé à l'instant les raisons qui s'opposent à ce que la numérotation des chaînes soit imposée aux distributeurs, mais, afin de répondre aux préoccupations que vous avez exprimées, le Gouvernement a élaboré un amendement qui me semble permettre d'opérer une synthèse.

Il a pour objet non pas de fixer unilatéralement la numérotation des chaînes proposées par les distributeurs de services, mais de renforcer le rôle du CSA en matière de régulation, en lui confiant le soin de veiller à ce que la numérotation des chaînes dans les offres de programmes soit équitable, transparente, homogène et non discriminatoire.

Il m'apparaît en effet légitime que l'instance de régulation de l'audiovisuel soit dotée de cette mission renforcée. C'est la raison pour laquelle l'amendement du Gouvernement tend à inscrire cette mission à l'article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986, qui définit précisément les missions du CSA.

Nul doute, messieurs les rapporteurs, que cette référence au Conseil supérieur de l'audiovisuel trouvera un écho favorable à votre banc !

M. le président. Madame Morin-Desailly, l'amendement est-il maintenu ?

Mme Catherine Morin-Desailly. Nous ne disposons pas encore du texte de l'amendement du Gouvernement, et il m'est donc difficile de prendre position maintenant. Serait-il possible d'y revenir plus tard ?....

Je relève que, de toute manière, les termes des deux amendements sont assez proches. Nous partageons en tout cas le même souci, celui du respect de l'usager. Comme nous n'avons cessé de le dire lors de la discussion générale, c'est là le point important.

Il me semble que d'autres groupes politiques se sont exprimés sur la question de la numérotation des chaînes. Ce qui me pose problème, c'est la numérotation par thémes, qui est parfois difficile à définir pour une chaîne à vocation généraliste. Je ne prendrai, à cet égard, que l'exemple de France 2, qui diffuse à la fois du sport, de la culture, des informations. Comment répondre à cette question ? Cela étant, il est évident que l'avènement d'un nouveau paysage audiovisuel peut aussi être l'occasion de réfléchir à une façon d'aborder différemment la télévision.

Cela étant précisé, j'accepterai de retirer l'amendement n° 83 au profit de celui du Gouvernement, pour autant que l'on m'aura donné des garanties sur le fait que c'est bien l'intérêt de l'usager qui sera pris en compte.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je vous le garantis !

Mme Catherine Morin-Desailly. Dans ces conditions, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 83 est retiré.

L'amendement n° 126, présenté par Mme Mélot, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa du II de l'article 33-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par une phrase ainsi rédigée : « En outre, cette dérogation ne peut bénéficier à une société qui éditerait un ou plusieurs autres services faisant l'objet d'une convention au titre de l'article 28 ou du I du présent article. »

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. La loi du 9 juillet 2004 a modifié l'article 33-1 de la loi du 30 septembre 1986, afin de soumettre à un simple régime déclaratif les services de radiodiffusion et de télévision dont le budget annuel est inférieur, respectivement, à 75 000 euros et à 150 000 euros.

Or, lorsqu'un nouveau service est créé par une société qui en édite d'autres par ailleurs, l'appréciation du budget annuel est très difficile à établir, le service nouvellement créé bénéficiant des infrastructures préexistantes.

C'est pourquoi il est proposé d'écarter ces sociétés du bénéfice du régime déclaratif.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je me rallierai à l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 126.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 74, présenté par Mme Morin - Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du I de l'article 34 - 2 est ainsi rédigé :

« Sur le territoire métropolitain, tout distributeur de services sur un réseau n'utilisant pas de fréquences terrestres assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel met gratuitement à disposition de ses abonnés les services des sociétés mentionnées au I de l'article 44, y compris, de manière simultanée, ceux à caractère régional reçus dans la zone par voie hertzienne terrestre, et la chaîne Arte, diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique ainsi que la chaîne TV 5, et les services spécifiquement destinés au public métropolitain édités par la société mentionnée au 4° du I de l'article 44, sauf si ces éditeurs estiment que l'offre de services est manifestement incompatible avec le respect de leurs missions de service public. Lorsqu'il propose une offre de services en mode numérique, il met également gratuitement à disposition des abonnés à cette offre les services de ces sociétés qui sont diffusés par voie hertzienne terrestre en mode numérique. »

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Un nombre croissant de téléspectateurs accèdent à la télévision au travers d'une offre autre que la diffusion hertzienne : le satellite, pour 6,4 millions de foyers, le câble, pour 3,9 millions de foyers, l'ADSL, pour 1,1 million de foyers.

La plupart de ces supports de diffusion alternatifs ne proposent que la reprise du programme national de France 3. Sur le satellite - TPS et CanalSat -, seule la sélection de programmes régionaux proposée par France 3 Sat est accessible ; sur le câble, la reprise des programmes régionaux n'est assurée que sur les réseaux analogiques, les réseaux numériques n'offrant, à l'instar des bouquets satellitaires, que la sélection de programmes régionaux de France 3 Sat ; sur les réseaux ADSL, enfin, seul le bouquet Free propose la quasi-totalité des programmes régionaux.

Si l'on ne prend en compte que les seuls foyers équipés d'une antenne satellitaire et dépourvus d'antenne hertzienne complémentaire, ce sont plus de 3,1 millions de foyers qui sont privés de l'accès aux programmes régionaux de France 3.

Les moyennes nationales de taux d'équipement cachent de fortes disparités régionales. Les régions les plus équipées sont celles qui ont le moins accès aux programmes régionaux : pour le satellite, qui concerne 26,2 % des foyers métropolitains, le niveau d'équipement atteint 55 % des foyers en Corse, 46 % en Franche-Comté et 42 % en Picardie ; pour le câble, qui dessert 15,9 % des foyers métropolitains, le niveau d'équipement atteint 47 % des foyers en Alsace, 41 % en Lorraine ; pour l'ADSL, dont bénéficient 4,4 % des foyers métropolitains, le niveau d'équipement atteint 10 % des foyers en Île-de-France, 6 % en Alsace, 6 % en Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Conformément au I de l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986, France 3 se doit « de concevoir et de programmer des émissions de télévision à caractère national, régional et local, destinées à être diffusées sur tout ou partie du territoire métropolitain » et de proposer « une programmation généraliste et diversifiée. Elle assure en particulier une information de proximité et rend compte des événements régionaux et locaux. »

L'absence de reprise des programmes des bureaux d'information de France 3 sur certains réseaux prive plusieurs millions de foyers du bénéfice des missions de service public que la loi a confiées à France 3. Or, outre la garantie d'une information pluraliste dans les régions, les décrochages régionaux de France 3 remplissent une mission de service public à laquelle nous sommes attachés, en tant qu'élus locaux, et que nul autre média ne permet, à ce jour, d'offrir.

Le dispositif d'alerte à la canicule a ainsi été enclenché indépendamment dans plusieurs régions de métropole entre le 20 juin et le 2 août 2006. Un dispositif d'alerte régional similaire pourrait être prochainement mis en place, en cas de pandémie de grippe aviaire.

C'est pourquoi nous proposons que les nouveaux réseaux reprennent les programmes régionaux de France 3.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La question de l'obligation de véhiculer l'ensemble des décrochages régionaux de France 3 - je voudrais éviter de parler de must carry - a été longuement évoquée depuis le début de la discussion. M. Patrice de Carolis n'a pas manqué de l'aborder à chacune de ses interventions publiques, ou devant la commission des affaires culturelles, voilà encore quelques semaines.

Je tiens à rappeler que les deux commissions saisies ont déjà adopté le principe important selon lequel 100 % des foyers français pourront recevoir gratuitement, par voie satellitaire, l'intégralité des décrochages locaux de France 3, ce qui satisfait, je puis vous l'assurer, le président de France Télévisions, même si on peut lui accorder plus encore que ce qu'il demande !

Je voudrais en outre faire remarquer que si l'objectif visé au travers de cet amendement était d'exonérer de frais de transport les programmes diffusés via la plateforme CanalSat, cela nous entraînerait très loin, puisqu'il s'agirait d'intervenir dans le domaine de la négociation contractuelle. Je ne souhaite pas que ce soit le cas, car on pourrait nous reprocher d'entraver la liberté de la négociation.

Enfin - c'est une raison connexe qu'il me paraît néanmoins important de souligner -, quand une obligation de transport existe, elle s'applique dans l'intérêt général, sinon elle ne se justifie pas. Nous avons tous l'ambition d'offrir à nos concitoyens un accès à tous les décrochages de France 3. Pour ma part, curieusement, selon la direction du vent (Sourires.), je capte France 3 Champagne-Ardennes...

M. Bruno Sido. C'est très bien ! (Sourires.)

M. Louis de Broissia, rapporteur.... ou France 3 Franche-Comté. Cela me permet en tout cas de suivre ce qui se passe chez mes collègues !

M. Michel Mercier. C'est un bon moyen de surveillance !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Dans votre amendement, vous réservez cet accès aux téléspectateurs qui disposent d'un abonnement à un service de distribution par un réseau autre que hertzien. Cette limitation est quelque peu contradictoire avec le must carry.

Pour cette raison, et bien que je comprenne l'intérêt de votre démarche, sur laquelle nous avons d'ailleurs déjà beaucoup avancé, je souhaiterais que vous preniez en compte les explications - je l'espère satisfaisantes - que je vous ai données et que vous retiriez votre amendement. J'émettrai, sinon, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Il n'aura échappé à personne que, cette semaine, se tient à Paris la fête de la démocratie locale. Les maires et les élus municipaux sont, d'ailleurs, nombreux dans les tribunes du Sénat ; ils méritent d'être salués et reconnus.

Disant cela, je ne m'éloigne pas de notre débat, qui tourne autour d'une question : la technologie la plus sophistiquée constituera-t-elle un progrès de proximité ? Le Gouvernement et sa majorité se sont engagés, s'agissant des chaînes nationales, non seulement à rendre la télévision numérique accessible à tous, mais aussi à ne priver aucun de nos concitoyens de ce progrès technologique pour des raisons financières.

L'information de proximité éditée et diffusée par France 3 sera-t-elle accessible sur l'ensemble du territoire ? Bien évidemment, ma réponse est positive ; il ne peut qu'en être ainsi ! Sur cette question, nos perspectives et nos objectifs sont communs. Mais il y a deux façons différentes d'y parvenir.

Je suis défavorable à votre amendement n° 74, madame Morin-Desailly. Cela étant, le Gouvernement a déposé un amendement n° 156, que je vais maintenant vous présenter, qui a le même objet que le vôtre.

La loi de 1986 impose aujourd'hui aux distributeurs de services de reprendre l'ensemble des chaînes publiques diffusées par voie hertzienne terrestre : France 2, France 3, France 4, France 5, RFO, ARTE, ainsi que TV5 et La Chaîne Parlementaire. Je cite, d'ailleurs, avec une certaine gourmandise cette liste, car, pour certains, la révolution technologique que représente la TNT n'a fait que le jeu du secteur privé et n'a pas été un moyen de diffusion d'un grand nombre de chaînes publiques.

La diffusion nouvelle des vingt-quatre décrochages régionaux de France 3 soulève deux questions différentes. Premièrement, doivent-ils être diffusés sur les offres gratuites par satellite et intégrés dans les offres des distributeurs de télévision payante ? Je réponds sans hésitation : oui. Je souhaite que toutes les rédactions locales de France 3 mesurent que cette évolution est pour elles une chance et un défi.

Les vingt-quatre décrochages de France 3 seront ainsi diffusés sur l'offre satellitaire du bouquet que vous avez proposé à l'article 5 du projet de loi. C'est l'objet de l'amendement que le Gouvernement a déposé et qui s'inspire d'une proposition du groupe socialiste. J'espère que nous obtiendrons sur ce point l'unanimité que nous avons constatée hier soir.

Deuxièmement, qui doit payer les coûts techniques de la reprise des chaînes de service public sur les bouquets satellitaires ? Cela représente plusieurs millions d'euros par an pour les trois bouquets satellitaires payants AB SAT, Canal SAT et TPS, pour l'ensemble des câblo-opérateurs ainsi que pour les opérateurs ADSL et les trois opérateurs mobiles. Aujourd'hui, ces distributeurs assument ce coût pour huit chaînes de service public ; il serait quadruplé avec votre amendement.

Dans tous les cas, il serait préférable, avant de voter une telle disposition, de s'assurer qu'elle ne pose pas de problèmes juridiques majeurs.

Au regard de la Constitution, l'intérêt général permet-il de faire supporter par les distributeurs la mise à disposition, auprès des téléspectateurs d'une région, des programmes de service public que France Télévisions n'a pas l'obligation de diffuser par voie hertzienne terrestre dans toutes les régions ? Au regard du cadre communautaire, une telle obligation de reprise est-elle raisonnable et proportionnée, ainsi que l'impose la directive « service universel » ?

Le Gouvernement a donc souhaité reprendre l'amendement n° 49 déposé - ô miracle de la démocratie sénatoriale ! - par le sénateur Serge Lagauche et les membres du groupe socialiste. Cet amendement prévoyait que le bouquet satellite des chaînes en clair de la TNT, qui sera accessible gratuitement pour l'ensemble des Français, permettra à chacun d'accéder aux décrochages de France 3 de sa région. Dans la mesure où il se rapportait au texte proposé pour l'article 100 de la loi du 30 septembre 1986, qui a été supprimé, cet amendement était devenu sans objet.

Or, cette initiative me semble tout à fait légitime et je me réjouis de notre convergence de vue, au-delà de nos différences politiques. La numérisation des signaux ainsi que les progrès permis par les nouvelles normes de compression rendent, en réduisant la capacité nécessaire pour ce faire, cette option réaliste sur les plans tant économique que technique.

Madame Morin-Desailly, le présent amendement répond au vôtre. Il garantit, en effet, la disponibilité auprès de l'ensemble des Français des programmes régionaux de France 3, sans pour autant aboutir à faire peser sur tous les distributeurs de services français cette obligation, ce qui est juridiquement très délicat.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement et de soutenir celui du Gouvernement. J'aimerais que la Haute Assemblée, qui représente l'ensemble des collectivités territoriales, accepte d'aller au-delà des clivages politiques pour voter à l'unanimité l'amendement n° 156, qui porte sur le pluralisme et la démocratie de proximité.

M. le président. Madame Morin-Desailly, votre amendement n° 74 est-il maintenu ?

Mme Catherine Morin-Desailly. J'ai pris bonne note de la préoccupation exprimée par M. rapporteur et par M. le ministre de garantir une information de proximité. En tant qu'administrateur de France Télévisions, M. Louis de Broissia y est particulièrement sensible. Quant à M. le ministre, il s'y est engagé de façon très ferme et définitive devant des tribunes remplies d'élus locaux, que nous saluons.

Aussi, dans un oecuménisme de bon aloi, j'accepte de me rallier à l'amendement du Gouvernement. Je compte sur son engagement pour que les programmes régionaux de France 3 puissent être vraiment accessibles - à 100 %, comme on l'a évoqué - à tous nos concitoyens, quelle que soit la région où ils habitent.

M. le président. L'amendement n° 74 est retiré.

L'amendement n° 156, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 98-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, il est inséré un article 98-2 ainsi rédigé :

« Art. 98-2. - Pour l'application de l'article 98-1, les moyens techniques et financiers sont mis en oeuvre pour assurer, dans chaque zone concernée, la réception des déclinaisons régionales des programmes de la société nationale de programme mentionnée au 2° du I de l'article 44. »

Cet amendement a déjà été défendu. Je me réjouis que M. le ministre se soit exprimé en la présence, dans nos tribunes, de nombreux maires, dont beaucoup viennent du Bas-Rhin et que je salue !

Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je suis très favorable à cet amendement. Notre collègue Catherine Morin-Desailly a bien voulu se rallier au principe que nous défendons : une offre numérique à 100% proposée sur l'ensemble du territoire grâce à un procédé non discriminant, le satellite.

L'amendement de Mme Catherine Morin-Desailly prévoyait une offre plus limitée. Quant à l'amendement de notre collègue Serge Lagauche, il n'a pu être adopté, le texte proposé pour l'article 100 de la loi du 30 septembre 1986 ayant été supprimé. Sinon, nous aurions donné favorable.

Cette unanimité sur un sujet qui est important, contrairement à ce que certains pensent, montre bien l'intérêt que nous portons à ce que France 3 soit diffusée partout. Les zones d'ombre sont encore trop nombreuses. Les maires présents ce soir dans nos tribunes vivent dans un département fortement gâté, non seulement parce qu'ils ont de puissants élus qui siègent ici, mais aussi parce qu'ils bénéficient d'une bonne couverture. D'autres connaissent des zones d'ombre qui perdurent depuis vingt ans, comme en Côte-d'Or.

M. Bruno Sido. En Haute-Marne aussi !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Des enquêtes l'ont démontré, y compris en matière de téléphonie mobile.

Cette question de la couverture à 100% rejoint notre préoccupation sur le contrat d'objectifs et de moyens que nous fixerons à France 3.

Il faut favoriser les échanges entre régions. Une personne qui doit effectuer un déplacement peut vouloir connaître à l'avance les nouvelles de la région dans laquelle elle va se rendre. Il est bon de tisser ce réseau de démocratie locale auquel nous sommes très fortement attachés.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Devant toute cette assemblée d'élus locaux, je ne voudrais pas être le trublion de la fête ni perturber cette belle unanimité. Monsieur le ministre, je m'interroge, cependant, sur la diffusion des programmes régionaux de France 3 par le satellite gratuit, sur différents bouquets, dont vous nous avez parlé à plusieurs reprises.

Je ne suis pas encore parfaitement au point - je l'avoue ! - sur les questions techniques, bien qu'ayant assisté à un certain nombre d'auditions sur ce texte. J'aimerais donc savoir si chaque bouquet sera payant : sera-t-il nécessaire de s'abonner ? Il me semble que l'on ne pourra pas faire autrement que d'avoir au moins une parabole pour pouvoir recevoir ces émissions de télévision diffusées par satellite. Or, aujourd'hui, certains foyers n'en ont pas parce qu'ils reçoivent, par exemple, la télévision par le câble : comment pourront-ils continuer à recevoir les programmes régionaux de France 3 ?

Je comprends donc mal la notion de satellite gratuit.

Par ailleurs, nous avons évoqué les territoires mal desservis : dans certaines zones montagneuses du département de l'Isère, il est d'ores et déjà très difficile de recevoir la télévision. Qu'en sera-t-il demain pour les petits villages au sommet des montagnes qui n'auront pas forcément de réception par satellite ?

Si vous nous garantissez qu'effectivement tout le monde pourra, à l'avenir, recevoir gratuitement France 3 et tous ses programmes régionaux comme aujourd'hui, nous soutiendrons votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Nous pouvons être satisfaits de notre débat. Il montre aux élus locaux ici présents que le Sénat est bien là pour enrichir le projet de loi qui nous est présenté par le Gouvernement.

Les membres de la commission des affaires culturelles comme ceux de la commission des affaires économiques se sont fortement inquiétés de la diffusion régionale de France 3.

Nous avions eu l'impression, jusqu'au dépôt de l'amendement n° 156, qu'il n'existait aucune possibilité - c'est ce qui nous avait été dit - de diffuser les programmes régionaux de France 3 dans chacune des régions. Et soudainement, c'est possible ! Tout le monde est donc satisfait.

Le seul problème, c'est que pour regarder les décrochages régionaux, il faudra changer de chaîne, car les programmes régionaux et nationaux de France 3 ne seront pas diffusés sur le même canal. Cela signifie que 90 % des Français ne le sauront pas, car ils n'auront pas assisté à notre débat. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Je vous en prie, essayez de me suivre ; ce serait sympathique ! (Rires.)

M. Daniel Raoul. On a du mal, on n'a pas la même arithmétique !

M. Philippe Nogrix. Mon arithmétique est celle des gens de chez moi !

On m'a déjà fait des réflexions sur ce sujet et c'est pour cela que je suis monté au créneau l'année dernière quand France 3 a essayé de modifier sa grille de programmes et de supprimer les décrochements régionaux. Vous étiez tous avec moi alors, quel que soit le groupe politique auquel vous appartenez, pour demander à Mme Geneviève Giard, la directrice générale de France 3, de faire attention à la modification des programmes.

Et tout à coup, aujourd'hui, tout le monde se laisse séduire par l'amendement n° 156, qui fait l'unanimité !

J'essaie de vous faire comprendre que les Français que, comme moi, vous côtoyez tous les jours viendront vous voir pour vous dire qu'ils ne reçoivent pas les programmes régionaux de France 3, que le décrochage n'a pas lieu.

Monsieur le ministre, est-il possible de prévoir dans le décret d'application que les chaînes payantes devront annoncer le décrochement régional, afin que les téléspectateurs sachent qu'ils doivent changer de chaîne à ce moment-là ? Nos concitoyens n'aiment pas ce qui est compliqué ; ils préfèrent ce qui est simple !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Eh bien, je vais vous dire des choses simples !

M. Philippe Nogrix. Vous n'aviez aucune raison de vous énerver, mes chers collègues ! Je pense que ma réflexion permettra de donner satisfaction à de nombreux Français. Il me fallait juste un tout petit peu de temps pour m'expliquer. Je suis, certes, beaucoup moins clair que M. Donnedieu de Vabres, mais sans doute est-ce pour cela que je ne suis pas ministre ! (Rires et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je vais prendre un engagement clair, en espérant être en mesure de le mettre en oeuvre !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Ce qui est important, c'est que la révolution technologique que constitue l'avènement du numérique ait des conséquences concrètes pour les Français.

Nous sommes donc en train de garantir à l'ensemble de nos concitoyens métropolitains - je n'oublie pas l'outre-mer, pour qui le calendrier est différent - que, à compter du 1er décembre 2011, ils pourront disposer, partout sur le territoire - je dis bien « partout sur le territoire » - de dix-huit chaînes gratuites, plus deux chaînes supplémentaires, elles-mêmes gratuites, soit au moins vingt chaînes, plus les vingt-quatre décrochages régionaux.

Ces chaînes seront diffusées par voie hertzienne terrestre, partout où cela sera possible. Comme vous l'avez souhaité - je l'ai approuvé -, cela concernera 95 % de la population. Pour le reste du territoire - dans les zones d'ombre, les zones frontalières ou là où se posent des difficultés techniques -, cette diffusion se fera par voie satellitaire gratuite. Je ne peux être ni plus clair ni plus précis.

Par ailleurs, qu'on ne me parle pas du câble pour la télévision dans les zones de montagne ! À part peut-être dans quelques stations très sophistiquées, on ne trouve en montagne que les câbles des téléphériques et des téléskis ! (Sourires.)

Il sera possible dans les zones qui sont traditionnellement des laissées-pour-compte ou des retardataires, notamment les zones de montagne, d'accéder à la TNT grâce au satellite, et ce dans un délai de six mois, d'ici au milieu de l'année 2007, peut-être même avant.

Voilà ce que je suis en mesure de vous garantir. N'y voyez là aucune autosatisfaction de ma part. D'ailleurs, à cette occasion, peut-être pourrions-nous, tous ensemble, rendre hommage aux scientifiques, aux techniciens et à celles et ceux qui rendent possible ce progrès. Notre mission politique est de rendre la TNT accessible, d'organiser les règles du jeu et de veiller aux équilibres financiers. C'est ce que nous sommes en train de faire.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 156.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Articles additionnels après l'article 5

Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 8 ou après l'article 16

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 16, présenté par M. de Broissia, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l'article 20-2 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lors de la diffusion des événements d'importance majeure par un service de télévision à accès libre, aucun contrat d'exclusivité ne peut faire obstacle à la reprise intégrale et simultanée de ce service sur un autre réseau de communications électroniques. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Cet amendement, dont l'objet est semblable à celui de l'amendement de la commission des affaires économiques, vise, mes chers collègues, à éviter la multiplication des écrans noirs, qui pourrait être désagréable pour les téléspectateurs.

À cette fin, la commission des affaires culturelles suggère qu'aucun contrat d'exclusivité ne puisse faire obstacle à la reprise intégrale et simultanée des événements d'importance majeure sur un autre réseau de communication électronique.

Cette disposition est importante. Elle concerne de nombreux détenteurs de droits, en particulier de droits de manifestations sportives. Le fait de céder ces droits sous forme exclusive pourrait mettre en difficulté les chaînes de télévision dont les programmes sont repris par les opérateurs de téléphonie mobile.

Cet amendement n'a d'autre objet que de défendre les intérêts du téléspectateur.

M. le président. L'amendement n° 32, présenté par MM. Hérisson et  Retailleau, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :

Avant l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 20-2 de la loi n°86-1067 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée:

« Lorsque de tels évènements sont diffusés sur un service de télévision à accès libre ou dans le cadre d'une retransmission intégrale et simultanée, aucun contrat d'exclusivité ne peut faire obstacle à ce que le public puisse les suivre, quel que soit le support utilisé. »

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. Il est défendu.

M. le président. L'amendement n° 71, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 48-1-A est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« A compter de la promulgation de loi n°.... du..... relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, l'exercice de droits acquis à titre exclusif sur des oeuvres et documents audiovisuels ainsi que sur des retransmissions sportives ne peut avoir pour effet de faire obstacle à la mise à disposition du public, par les distributeurs de services sur un réseau n'utilisant pas de fréquences terrestres assignées par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, de tout ou partie des services mentionnés à l'article 34-2. »

La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. Les chaînes du service public rencontrent des difficultés pour la reprise intégrale et simultanée de certains de leurs programmes sur les réseaux de téléphonie mobile, en particulier lorsqu'il s'agit de programmes sportifs sponsorisés, et ce en dépit des dispositions législatives organisant l'obligation de reprise des programmes de ces sociétés.

En effet, la loi du 30 septembre 1986, dans son article 34-2, prévoit l'obligation de reprendre les chaînes publiques sur l'ensemble des réseaux. Cette obligation devrait s'appliquer pleinement sans que les opérateurs qui ont acquis à titre exclusif pour leur réseau les droits sur le même programme que celui qui est diffusé par les chaînes publiques aient la faculté d'exiger l'occultation de ce programme sur ces mêmes chaînes publiques.

Certains opérateurs de téléphonie mobile qui ont acquis les droits de diffusion à titre exclusif des images de ces événements d'importance majeure sur les réseaux mobiles exigent, en effet, des chaînes publiques qu'elles occultent leur propre signal de l'événement concerné sur l'ensemble des réseaux mobiles. Les chaînes publiques ont des obligations spécifiques, qui répondent à des objectifs d'intérêt général. Elles doivent donc pouvoir être reçues sans occultation par l'ensemble des téléspectateurs, sur l'ensemble des réseaux de distribution et sur l'ensemble des récepteurs.

L'amendement n° 71 vise à interdire cette pratique, qu'elle concerne des événements sportifs ou tout autre programme.

Or ce problème, qui se pose aujourd'hui pour le sport, pourrait, dans un très proche avenir, concerner n'importe quel autre programme. Les opérateurs de réseaux constituent ou constitueront dans l'avenir des catalogues de programmes, qu'ils proposeront à leurs abonnés en service à la demande. La pratique de l'occultation du signal pourrait ainsi s'étendre à tous les programmes diffusés par les chaînes que les opérateurs proposent à leurs abonnés.

Il me semble donc que l'amendement portant sur la diffusion des événements d'importance majeure risque de légitimer l'occultation de tous les programmes des chaînes autres que les événements d'importance majeure.

Par exemple, un abonné pourrait ne pas être en mesure de suivre le tournoi de Roland Garros sur son portable simplement parce qu'il n'a pas pris le bon abonnement, alors que le problème ne se pose pas avec la télévision, les chaînes publiques ayant l'obligation de le diffuser.

Nous demandons donc qu'il soit possible d'accéder, via un réseau de téléphonie mobile, à tous les programmes diffusés par les chaînes nationales, et ce quel que soit l'opérateur de télévision mobile.

Tel est l'objet de notre amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. L'amendement présenté par M. Nogrix va plus loin que celui de la commission. Nous pensons que la disposition qu'il tend à introduire pourrait susciter un nombre important de contentieux.

La commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques préfèrent s'en tenir à la liste très précise des événements d'importance majeure qui figure dans le rapport. Vous n'avez peut-être pas eu le temps de lire ; il est disponible sur Internet depuis vendredi.

La commission demande donc à M. Nogrix de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. J'émets un avis favorable sur les amendements nos 16 et 32 rectifié.

En revanche, n'en prenez pas ombrage, monsieur Nogrix, je suis défavorable à l'amendement n° 71. En spécialisant votre intervention sur les chaînes publiques, vous avez oublié qu'un certain nombre de chaînes nationales peuvent connaître le même problème. Or les événements d'importance majeure doivent être accessibles sur toutes les chaînes nationales. S'il était adopté, votre amendement pourrait donc poser quelques difficultés.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16, et l'amendement n° 32 rectifié n'a plus d'objet.

Monsieur Nogrix, l'amendement n° 71 est-il maintenu ?

M. Philippe Nogrix. En tant qu'élu, je sais que j'aurai à faire face à des contentieux, même s'ils ne seront pas les mêmes que ceux que vous évoquez, les gens ne comprenant pas du tout pourquoi ils ne reçoivent pas sur leur téléphone mobile les programmes qu'ils peuvent voir chez eux à la télévision.

Cela signifie que ce que l'on a exigé et obtenu des diffuseurs de télévision à domicile, on ne peut pas l'obtenir des opérateurs de télévision mobile. Je me demande pour quelles raisons !

Finalement, on va imposer aux gens d'avoir trois ou quatre téléphones portables pour pouvoir suivre les différents programmes des opérateurs. Ils devront savoir que Roland Garros est retransmis par tel opérateur, que le football l'est par tel autre et le rugby par un autre encore !

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Pourquoi introduire un trouble là où les choses sont simples ?

M. Philippe Nogrix. Cela me paraît illogique d'avoir demandé une mutualisation pour la télévision à domicile et de ne pas l'étendre aux téléviseurs mobiles. C'est tout !

Notre rôle serait de faire de la politique, or on nous a refusé le débat politique pour nous enfermer dans un débat technologique ! Dès lors, je retire notre amendement. (Exclamations sur plusieurs travée du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. L'amendement n° 71 est retiré.

Article additionnel après l'article 5 ou avant l'article 8 ou après l'article 16
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article additionnel avant l'article 6

Articles additionnels après l'article 5

M. le président. L'amendement n° 105, présenté par MM. Ralite,  Renar et  Voguet, Mme David et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

10 % de la ressource électrique libérée par l'extinction de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique sont consacrés à la diffusion de programmes ayant pour origine des éditeurs associatifs.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Par cet amendement, nous voulons encourager l'essor nécessaire des médias associatifs, pour assurer l'expression de la diversité sociale, politique et culturelle de notre pays.

Le milieu associatif souffre, en effet, des difficultés qu'engendre pour lui le « tout service », introduit notamment par l'OMC et par l'Accord général sur le commerce des services, l'AGCS, pour lequel il n'existe pas de « secteur à but non lucratif ». Or, nous estimons que la société des savoirs et des connaissances passe par une communication exercée à tous les échelons de la société civile.

Si nous considérons que la démocratie s'appuie sur le principe de la souveraineté populaire, notre système doit garantir le niveau le plus approprié de l'exercice des libertés individuelles et sociales.

Aussi, les moyens de communication sont-ils des instruments fondamentaux de l'exercice de cette souveraineté, mais nous savons, dans le même temps, qu'ils sont qualifiés de « quatrième pouvoir » qui oriente et même fabrique l'opinion publique.

C'est pourquoi nous pensons que la pluralité des médias garantit un flux libre, permanent, documenté et argumenté d'informations de toute nature. Elle donne aux citoyens les éléments nécessaires et suffisants à son jugement pour une participation consciente à la sphère publique et à son développement individuel.

Le droit de chaque citoyen à l'accès à l'information et à la culture est conditionné par le régime de la propriété et du contrôle des médias, et la concentration des groupes est un danger dont nous avons tous conscience. Le développement des médias sous forme de PME locales, d'associations à but non lucratif est donc une alternative intéressante et indispensable à notre démocratie.

C'est pourquoi il nous paraît essentiel de favoriser une action volontariste en augmentant la réserve nécessaire à la diffusion des chaînes de ce tiers secteur. C'est le sens de l'amendement que nous vous présentons.

Par ailleurs, monsieur le ministre, je voudrais vous faire remarquer que, dans le département de l'Isère, il n'y a pas que les câbles des remontées mécaniques des stations de haute montagne, il y a aussi des villes et des villages en plaine, parfois au coeur des massifs, qui, pour certains, sont câblés.

J'ai pris à plusieurs reprises la parole, monsieur le ministre, et à chaque fois vous avez eu des propos pour le moins désagréables. J'espère que, cette fois-ci, vous répondrez sur l'amendement que je défends !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je n'aurai, pour ma part, que des mots aimables à l'égard de ma collègue. (Sourires.) Elle nous propose de réserver 10 % de la ressource radioélectrique libérée par l'extinction de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique à la diffusion de programmes ayant pour origine des éditeurs associatifs.

La commission a toujours été très claire sur la question des quotas d'attribution. Elle n'a pas souhaité qu'ils soient réservés de façon indicative. Nous avons déjà eu cette discussion avec Mme Catherine Morin-Desailly à propos de « la majorité », qui a été préférée à « une part importante » ; nous avons ajouté « très »... Nous avons réadmis le principe d'un schéma national d'extinction, puis d'attribution des fréquences.

Notre assemblée, dans son ensemble, a souhaité rappeler le rôle majeur que le CSA devait jouer en matière d'attribution des fréquences. Nous ne pouvons pas, dans le même temps, décider l'attribution d'une part importante à tel ou tel, de 10 % ou de 50 % à tel autre.

Le CSA a pour mission de veiller à l'équilibre du directoire, mais aussi à l'équilibre des formes d'expression. Votre intervention en séance vient rappeler à l'autorité administrative indépendante qu'elle doit tenir compte des télévisions associatives, comme des télévisions locales.

Quoi qu'il en soit, la commission est défavorable à une quelconque notion de quota d'attribution, et c'est pourquoi j'émettrai un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Madame la sénatrice, la place du secteur associatif dans le domaine audiovisuel est tout à fait primordiale. Il participe de sa diversité et du pluralisme des courants d'expression socioculturels.

Ainsi, dans le secteur radiophonique, les quelque 600 radios associatives que compte notre paysage audiovisuel lui confèrent une richesse que les auditeurs européens nous envient. Par les mesures que vous votez régulièrement dans le budget de l'État pour le fonds de soutien à l'expression radiophonique locale, nous sommes des partenaires attentifs et vigilants, en sachant parfois faire évoluer les critères ou les modalités d'intervention.

Toutefois, je partage l'avis du rapporteur de la commission des affaires culturelles ; nous souhaitons, s'agissant de l'avenir du dividende numérique, ne préjuger de rien et réfléchir ensemble, en toute liberté, à ce qu'il conviendra de faire quand l'étendue précise de cette ressource sera connue.

Il ne m'apparaît donc pas opportun de réserver dès à présent une partie quelconque de cette ressource ; c'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jack Ralite, pour explication de vote.

M. Jack Ralite. Je voudrais soutenir vivement l'amendement qu'a défendu ma collègue, même si, j'en conviens, les quotas ne sont pas, d'une manière générale, une bonne solution.

Ceci dit, quand un secteur n'arrive pas à se développer, qu'il est laissé pour compte depuis des années, que, malgré toutes les énergies, il est devenu une pensée habituée - on donne un coup de chapeau, on laisse passer, c'est-à-dire qu'on laisse tomber... - il serait intéressant, pour une période déterminée, de prévoir un quota. Et, tant que l'objectif ne sera pas atteint, on ne considérera pas que seule la conviction peut gagner.

Il devient nécessaire, à un moment, de faire passer concrètement une pensée dans les actes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 105.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 152 rectifié, présenté par MM. Laffitte,  Pelletier,  de Montesquiou,  Othily, Mouly et Marsin, est ainsi libellé :

Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa du II de l'article 29-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Par ailleurs, sous réserve du respect des dispositions des articles 1er, 3-1 et 26, le Conseil supérieur de l'audiovisuel autorise, le cas échéant hors appel aux candidatures, la reprise intégrale et simultanée par voie hertzienne terrestre en mode numérique des services de radio autorisés en mode analogique lorsqu'un éditeur lui en fait la demande. La reprise intégrale et simultanée s'entend indépendamment des caractéristiques techniques en matière notamment de format des programmes. Ces reprises s'effectuent dans des conditions techniques et financières équitables, raisonnables et non discriminatoires.

« L'autorisation de diffusion intégrale et simultanée en mode numérique d'un service local ou national de radio préalablement diffusé en mode analogique est assimilée à l'autorisation initiale dont elle ne constitue qu'une extension, sans que la cessation totale ou partielle de la diffusion du service en mode analogique remette en cause la diffusion du service en mode numérique. »

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.

M. Aymeri de Montesquiou. Cet amendement tend à réparer une inégalité de traitement entre la radio et la télévision qui pourrait résulter de l'adoption en l'état du texte dont nous débattons.

Rien ne justifie que la télévision fasse l'objet d'un traitement différencié par rapport à la radio, média de la mobilité par définition. C'est pourquoi le principe de reprise en numérique des télévisions nationales doit également être appliqué pour les radios nationales.

Je rappelle que, par radio nationale, on entend un réseau qui dessert une zone dont la population recensée est supérieure à 30 millions d'habitants, comme le dispose la loi de 1986 relative à la liberté de communication.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Monsieur de Montesquiou, vous défendez le principe de la reprise en numérique des radios nationales. La commission estime que l'idée est intéressante. Je suis toutefois en désaccord avec vous concernant le traitement différencié, qui est une nécessité absolue.

En effet, les récepteurs numériques ne sont pas les mêmes que pour la télévision, et la généralisation, la banalisation, la « marchandisation », dirait notre collègue Jack Ralite, n'est pas pour aujourd'hui, puisque aucun récepteur mobile numérique n'est encore vraiment accessible. Je puis vous assurer que ceux que l'on m'a montrés n'ont rien de transistors que l'on transporte d'une pièce à l'autre... Il s'agit donc d'un mode différencié.

Monsieur le ministre, le principe de la reprise en numérique des radios nationales au même titre que les télévisions nationales a retenu l'attention de la commission, mais pas dans les mêmes délais ni dans les mêmes conditions. Nous avons donc souhaité entendre le Gouvernement avant de nous prononcer.

M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur le sénateur, vous proposez d'introduire, à l'instar du dispositif mis en place pour la télévision numérique terrestre, un droit au simulcast  pour les services de radio actuelle au lancement de la radio numérique.

Ce dispositif a fait ses preuves en télévision, comme vous le soulignez à juste titre. Une disposition de la loi prévoit que le CSA favorise la reprise des services de radio analogique dans les appels aux candidatures pour l'édition de services de radio en numérique.

Votre amendement va plus loin et apporte à cet égard une visibilité souhaitable à l'ensemble des radios analogiques nationales, locales, indépendantes et associatives. En subordonnant le bénéfice de ces nouvelles dispositions au respect des prescriptions des articles 1er, 3-1 et 26 de la loi, vous apportez des précisions utiles tant sur le plan juridique que technique. J'émets donc un avis favorable.

M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. Je suis stupéfait par ce que j'entends ! Au début de la discussion, j'ai demandé que l'on intègre la radio dans le projet de loi : on m'a répondu que c'était impossible et qu'une loi spécifique y serait consacrée.

Or voilà que le ministre est d'accord pour intégrer un amendement se rapportant à la radio dans le projet de loi ! Je ne comprends plus !

J'ai donc retiré mon amendement et renoncé à ma volonté d'élargir le débat, limité à la seule télévision, à la radio. Voilà qui est fait, mais nous aurions pu avoir un débat enrichissant qui nous a été refusé ! Notre rôle de parlementaire n'est-il pas d'enrichir continuellement les projets de loi qui nous sont soumis ?

Monsieur le président, est-il possible d'amender cet amendement, qui a reçu un avis favorable du Gouvernement, afin d'étendre les mesures que nous avons prévues pour la télévision à la radio ? Mais il faudrait une suspension de séance afin que nous puissions formuler nos propositions.

M. le président. Monsieur le sénateur, vous avez la possibilité de déposer un sous-amendement à un amendement en séance, à la condition toutefois que ce dernier n'ait pas encore été mis aux voix. L'auteur de l'amendement peut, pour sa part, le rectifier.

Cela étant, vous avez demandé des explications à M. le ministre qui a fait savoir qu'il souhaitait vous répondre.

La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur Nogrix, ne renoncez surtout pas à la fierté d'exercer votre rôle de législateur !

En 2004, le Parlement a défini le cadre applicable aux radios. Sachez que les consultations sont en cours. Une nouvelle loi-cadre n'a donc pas de raison d'être. (M. Nogrix proteste.)

Vous ne m'avez pas écouté hier, monsieur le sénateur. J'ai précisé que cette loi existait, qu'elle avait été votée en 2004 et que nous en sommes aujourd'hui à la phase opérationnelle et de consultation. Qu'il faille modifier un certain nombre de dispositions, c'est toujours possible ! Mais, je le répète, une nouvelle loi-cadre n'est pas nécessaire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. À l'occasion de la discussion du « paquet télécoms », la commission des affaires culturelles du Sénat avait présenté des amendements visant à mentionner que la radio serait concernée par l'évolution de la numérisation.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Absolument !

M. Louis de Broissia, rapporteur. Depuis lors, le débat est ouvert. MM. de Montesquiou et Laffitte manifestent un attachement particulier et de longue date aux médias de la radio. Aujourd'hui, ils saisissent l'occasion de présenter cet amendement, ce qui m'apparaît tout à fait naturel.

Par ailleurs, j'ai assisté de bout en bout à l'examen de ce projet de loi. Or il ne me semble pas avoir émis d'avis défavorable sur un amendement concernant la radio, à moins que je ne me sois endormi en séance, ce qui me surprendrait !

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.

M. Philippe Nogrix. On nous demande un travail impossible. Nous avions commencé à réfléchir sur la possibilité d'intégrer dans ce texte une réforme ayant trait à la radio. Nous avions des propositions à faire. Malheureusement, je ne suis pas capable de présenter au pied levé des amendements dont la rédaction soit rigoureuse.

M. Bruno Sido. Vous êtes trop modeste !

M. Philippe Nogrix. Je suis très satisfait que l'amendement présenté par M. de Montesquiou ait reçu un avis favorable de la part de M. le ministre. D'ailleurs, je félicite notre collègue d'avoir sans doute une meilleure pratique que la nôtre du règlement du Sénat et d'avoir réussi à séduire le Gouvernement, que j'avais pourtant bien écouté.

Il est vraiment dommage que tout à coup, au détour d'un amendement, on remette sur le métier un thème que l'on avait décidé d'abandonner. Je suis certain que les uns et les autres avions des choses à dire, y compris à l'UMP et sans doute au groupe socialiste et au groupe communiste républicain et citoyen.

M. Serge Lagauche. Laissez-nous en dehors de ça !

M. Philippe Nogrix. J'ai dit « sans doute », mon cher collègue.

Maintenant, il est trop tard. Je vais donc avoir le plaisir de voter l'amendement n° 152 rectifié, mais je regrette que nous soyons obligés de travailler dans de telles conditions.

M. le président. Je signale à notre honorable collègue que cet amendement a été déposé vendredi dernier.

Je le répète, on peut toujours déposer des sous-amendements en séance, mais il n'est pas nécessaire d'attendre jusque-là : il est également possible de les préparer à l'avance.

Cela étant, j'ai compris que sa demande était plus large et qu'il aurait souhaité qu'un débat porte sur ce sujet.

Je mets donc aux voix l'amendement n° 152 rectifié.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Articles additionnels après l'article 5
Dossier législatif : projet de loi relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Article 6

Article additionnel avant l'article 6

M. le président. L'amendement n° 145, présenté par MM. Poniatowski et  Sido, est ainsi libellé :

  Avant l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase du troisième alinéa de l'article 4 est complétée par les mots : « , après avis des commissions du Parlement compétentes en matière de communication audiovisuelle »

La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 145 et 144, qui ont un objet sensiblement identique.

Par ces amendements, je souhaite poursuivre, dans le cadre du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui, un débat que nous avons eu récemment, lors de l'examen du projet de loi relatif au secteur de l'énergie.

Sans vouloir être trop long, je rappellerai que, lors de la discussion de ce dernier texte, nous avions débattu de la composition et des pouvoirs des autorités administratives indépendantes, en général, et de la Commission de régulation de l'énergie, la CRE, en particulier. Il s'agit là d'un sujet qui revient régulièrement à l'occasion de nos travaux, puisque, ces dernières années, nous avons créé au moins une autorité indépendante par session parlementaire, l'une des dernières en date étant l'Autorité de sûreté nucléaire.

De plus, cette question a fait l'objet d'un nouvel éclairage grâce au travail remarquable de Patrice Gélard.

Avec le projet de loi relatif au secteur de l'énergie, nos collègues députés ont souhaité renforcer le contrôle parlementaire sur le fonctionnement de la CRE au motif que les membres du collège avaient pu sortir, à plusieurs reprises, du strict champ de leurs missions. Les députés avaient, pour ce faire, retenu une solution qui n'était pas apparue pertinente aux yeux du Sénat et qui tendait à prévoir la présence de quatre parlementaires au sein du collège de la CRE.

Notre Haute Assemblée, tout en partageant les objectifs de renforcement du contrôle démocratique promus par l'Assemblée nationale, avait néanmoins jugé que la présence de députés et de sénateurs au sein d'une autorité administrative indépendante était problématique sur le plan tant de la conception traditionnelle de séparation des pouvoirs que de la disponibilité des parlementaires pour participer aux travaux d'une telle autorité.

En définitive, la commission mixte paritaire a arrêté une position de compromis en vertu de laquelle les parlementaires ne seraient pas membres de la CRE. Toutefois, nous inspirant de l'exemple anglo-saxon, et sans aller aussi loin que le Congrès des États-Unis, nous avons décidé de faire précéder la nomination du président de la CRE, qui serait toujours désigné par décret, d'un avis des commissions parlementaires compétentes en matière d'énergie.

La solution à laquelle nous sommes parvenus constitue un bon compromis. D'un côté, elle ne remet pas en cause l'indépendance de notre régulateur énergétique et, de l'autre, elle permet au Parlement, par l'intermédiaire de ses commissions permanentes, d'être associé au choix du président de l'instance. Autant il me semble logique que les fonctions de régulation soient détachées de l'État, car ce dernier peut souvent, dans ce type de dossiers économiques, être juge et partie, autant il m'apparaît inacceptable de donner des pouvoirs étendus à des instances qui n'ont de comptes à rendre à personne, en particulier aux représentants du peuple que nous sommes.

Le texte que nous examinons aujourd'hui me donne l'occasion de porter ce débat sur un autre terrain.

Comme le souligne avec beaucoup de pertinence dans son rapport notre éminent collègue Louis de Broissia, le projet de loi que nous examinons est non pas un texte purement technique, mais un vrai texte politique. Les débats que nous avons depuis hier le démontrent, s'il en était besoin.

Or, les secteurs des communications électroniques et de la télévision sont aujourd'hui régulés par deux autorités distinctes : le Conseil supérieur de l'audiovisuel, le CSA, et l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP. Il s'agit de deux autorités administratives indépendantes du Gouvernement. Composées chacune de membres nommés par décret ou par les présidents de nos assemblées parlementaires, elles ne font pas l'objet d'un contrôle approfondi du Parlement. Les problématiques sont, par conséquent, les mêmes que pour la Commission de régulation de l'énergie.

Dans ces domaines, il me semble donc logique que le Parlement soit, là aussi, associé au choix du président de ces deux autorités. Je précise d'ailleurs que les deux amendements que je présente, le premier s'attachant au CSA et le second à l'ARCEP, ne prévoient qu'un avis simple des commissions permanentes concernées ; le Gouvernement conserve sa liberté d'appréciation en la matière.

Il me semble que l'adoption de ces deux amendements, sans remettre nullement en cause l'équilibre des pouvoirs entre le Gouvernement et le Parlement, permettrait de redonner une certaine légitimité au fonctionnement des autorités indépendantes. C'est pourquoi je forme le voeu que le principe qui a été retenu dans le projet de loi relatif au secteur de l'énergie puisse être progressivement étendu à d'autres secteurs. Nous pouvons nous saisir dès aujourd'hui de l'occasion qui nous est donnée avec ce texte.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 145 ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La commission des affaires culturelles estime que notre distingué collègue Bruno Sido présente une proposition intéressante et séduisante, qui s'inspire du régime juridique adopté récemment pour la CRE. Les commissions compétentes du Parlement pourraient ainsi donner leur avis sur la nomination du président du CSA.

Nous voulons que les pouvoirs du CSA soient renforcés, qu'il joue un rôle important, mais nous n'avons pas souhaité changer sa composition. Nous considérons cependant que le Parlement est qualifié pour donner un avis, ce qui favorisera la nomination, comme cela a toujours été le cas jusqu'à présent, de personnalités extrêmement qualifiées.

La commission a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis de la commission des affaires économiques sur l'amendement n° 144 ?

M. Bruno Retailleau, rapporteur pour avis. La commission des affaires économiques a émis un avis très favorable sur l'amendement n° 144.

L'ARCEP, comme toutes les autorités administratives indépendantes, doit être encadrée. En l'occurrence, la nomination de son président ferait l'objet d'un simple avis consultatif des commissions compétentes du Parlement.

Le grand débat sur les AAI a, notamment, été ouvert ici par l'excellent rapport de M. Gélard. En cette matière, plusieurs questions se posent concernant les nominations, le degré d'indépendance de ces autorités, la reconnaissance de la personnalité juridique pour ester en justice, l'autonomie financière, etc.

Bref, c'est une page qui s'ouvre, et je suis très heureux que nos collègues aient pu soulever la question de la nomination du président de ces autorités. Par conséquent, en ce qui concerne l'ARCEP, le dispositif prévu par l'amendement se justifie pleinement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Monsieur le sénateur, je comprends les raisons qui vous ont conduit à déposer l'amendement n° 145 par analogie au dispositif qui vient d'être voté dans le cadre du projet de loi relatif au secteur de l'énergie, adopté par le Sénat le 8 octobre 2006, et qui est actuellement devant le Conseil constitutionnel. Cependant, je ne suis pas en mesure de soutenir votre amendement pour deux raisons principales.

Tout d'abord, le Parlement est déjà très largement associé à la nomination des membres du CSA. En effet, le Sénat et l'Assemblée nationale désignent, par une décision de leurs présidents, deux tiers des neuf membres du collège de cet organisme.

Son président, qui joue le rôle de primus inter pares, est l'un de ces neuf membres. Les membres du CSA désignés par le Sénat et l'Assemblée nationale sont donc très largement majoritaires au sein du collège du CSA.

Ensuite, les missions assignées par le législateur au CSA et à la CRE sont d'une nature différente.

La CRE joue un rôle primordial dans les conditions de mise en oeuvre du service public de l'énergie, sujet essentiel pour la représentation nationale. Elle intervient directement dans la définition du programme d'investissement du réseau public de transport d'électricité et dans la fixation de certains prix, ce qui peut justifier un rôle accru du Parlement dans le processus de nomination de son président.

Le CSA est certes le régulateur sectoriel de l'audiovisuel, mais il ne dispose pas, sur le plan juridique, de compétence en matière de définition du service public audiovisuel. Surtout, il garantit la liberté de communication audiovisuelle et assure le respect de l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion. À ce titre, il définit les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives aux campagnes électorales. Il contrôle le temps de parole des formations politiques à la radio et à la télévision.

Enfin, mais ce n'est pas le plus important, en dépit de l'urgence déclarée, le projet de loi que nous examinons ne devrait pas être promulgué avant que n'intervienne la nomination par le Président de la République du prochain président du CSA, qui succèdera à Dominique Baudis au début de l'année prochaine, pour six ans.

Peut-être faudra-t-il, un jour, modifier le mode de désignation des membres de l'instance de régulation, mais c'est une réforme qui mérite mieux qu'une demi-mesure.

Le Conseil supérieur de l'audiovisuel est l'héritier d'une longue lignée d'instances indépendantes, la Haute Autorité de la communication audiovisuelle, la Commission nationale de la communication et des libertés, qui ont mis du temps à trouver leur place et leur légitimité.

Une équilibre a été atteint, ne le perturbons pas ! Cette institution est récente, puisqu'elle date de 1989.

C'est la raison pour laquelle je suis très défavorable à cet amendement.

En ce qui concerne l'amendement n° 144, j'y suis également défavorable pour deux raisons principales.

La première raison est que le Parlement est déjà très largement associé à la nomination des membres de l'ARCEP.

En effet, le Sénat et l'Assemblée nationale désignent, par une décision de leurs présidents, quatre des sept membres que compte l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.

Son Président, qui joue le rôle de primus inter pares, est l'un de ces sept membres.

Les membres de l'ARCEP désignés par le Sénat et l'Assemblée nationale sont donc majoritaires au sein du collège de l'ARCEP.

La seconde raison est que les moyens de contrôle du Parlement sur l'activité de l'ARCEP ont été sensiblement renforcés par la loi du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle.

Cette loi a en effet prévu, d'une part, que le rapport annuel de la Commission supérieure des postes et des communications électroniques comporte une évaluation de l'action de l'ARCEP dans le domaine du service public et, d'autre part, que l'ARCEP rend compte de ses activités devant les commissions compétentes du Parlement, à leur demande.

Enfin, il faut souligner que les missions de l'ARCEP et de la CRE présentent des différences importantes.

L'ARCEP est le régulateur de la concurrence sur les marchés des postes et communications électroniques. La CRE a également ce rôle, mais elle intervient aussi directement dans la définition du programme d'investissement du réseau public de transport d'électricité et dans la fixation de certains prix, ce qui peut justifier un rôle accru du Parlement dans le processus de nomination de son président.

Néanmoins, je veux bien reconnaître que ces missions industrielles, celles de la CRE comme celles de l'ARCEP, présentent plus d'analogies entre elles que les missions spécifiques du CSA que j'ai eu l'occasion de rappeler précédemment.

Pour cette raison, je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. J'ai écouté très attentivement les explications de M. le ministre.

Je dois dire qu'elles m'ont paru très pertinentes sur l'amendement n° 145 qui concerne le CSA. Je ne méconnais pas, effectivement, que le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel est nommé par le Président de la République, et non par le Gouvernement, ce qui change tout de même la nature des choses.

Je retire donc l'amendement n° 145.

En revanche, vos explications, monsieur le ministre, m'ont paru moins pertinentes, excusez-moi de vous le dire, sur l'amendement n° 144, qui concerne l'ARCEP.

J'ai, d'ailleurs, noté que l'opposition de M. le ministre était moins forte sur cet amendement que sur le précédent.

Par conséquent, je maintiens l'amendement n° 144.

M. le président. L'amendement n° 145 est retiré.

Article additionnel avant l'article 6
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Article additionnel après l'article 6

Article 6

Il est créé un titre IX intitulé : « Dispositions transitoires et finales » qui comprend les articles 106 et 108. Les articles 107, 109 et 110 sont abrogés. - (Adopté.)

Article 6
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Article 7

Article additionnel après l'article 6

M. le président. L'amendement n° 144, présenté par MM. Poniatowski et  Sido, est ainsi libellé :

  Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 130 du code des postes et des communications électroniques est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :

« Le président est nommé par décret, après avis des commissions du Parlement compétentes en matière de postes et de communications électroniques. Deux membres sont nommés par décret. »

Cet amendement a été défendu.

La commission et le Gouvernement se sont exprimés.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement, dont nous avons eu l'occasion de débattre au sein de la commission des affaires culturelles, et qui a recueilli l'avis favorable du rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, nous semblait aller dans le bon sens, c'est-à-dire dans celui de la transparence et du renforcement du rôle du Parlement.

C'est pourquoi nous le voterons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 144.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.

Article additionnel après l'article 6
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Articles additionnels après l'article 7 (début)

Article 7

L'article 127 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle est abrogé. - (Adopté.)

Article 7
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Articles additionnels après l'article 7 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 7

M. le président. L'amendement n° 41 rectifié, présenté par MM. Masson,  Alduy,  Balarello,  Baudot,  Beaumont et  Besse, Mme Bout, MM. J. Boyer,  Cointat,  Darniche et  Esneu, Mmes Garriaud-Maylam et  G. Gautier, M. Gerbaud, Mme Gousseau, M. Milon, Mmes Payet et  Sittler et M. Virapoullé, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À compter du 1er janvier 2009, l'article 134 de la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Elles ont le caractère de délégations de service public. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 79, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, tous les téléviseurs vendus sur le territoire national doivent intégrer un adaptateur de télévision numérique terrestre (TNT)

L'amendement n° 80, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, tous les adaptateurs de télévision numérique terrestre (TNT) sur le territoire national doivent être compatibles Mpeg-4.

La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Ces deux amendements sont des amendements de bon sens, tout comme le sera la vaste campagne de communication que nous appelons de nos voeux pour avertir l'usager des changements qui vont s'opérer dans les années à venir.

Ils visent tous deux à protéger le consommateur en lui assurant que seuls des matériels adaptés à la révolution numérique seront désormais commercialisés. C'est pourquoi nous proposons que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, seuls des téléviseurs compatibles avec la TNT puissent être mis sur le marché.

En effet, à l'heure actuelle, les enseignes spécialisées et la grande distribution continuent à commercialiser des téléviseurs analogiques, alors que nous sommes en train de préparer l'extinction de ce mode de diffusion.

Comme ce projet de loi fixe une date à l'arrêt de la diffusion analogique, il nous semble indispensable de garantir au consommateur qui achète un nouveau téléviseur qu'il pourra continuer à l'utiliser sans avoir besoin d'acheter un adaptateur au-delà de 2011.

Parallèlement, nous souhaitons que les adaptateurs TNT commercialisés soient tous compatibles avec la norme MPEG4. Tel est l'objet de l'amendement n° 80. En effet, il est prévisible que, à moyen terme, la norme MPEG4 devienne la norme unique de la TNT.

Ainsi, le 23 décembre 2004, le Gouvernement a décidé que le recours à la norme MPEG4 serait rendu obligatoire pour les chaînes payantes de la télévision numérique terrestre et les futurs services en haute définition, qu'ils soient gratuits ou payants.

La norme MPEG4, plus économe dans l'utilisation des fréquences hertziennes, permet de dégager sur les fréquences planifiées pour la télévision numérique terrestre les ressources nécessaires au lancement de services de télévision haute définition.

Les textes réglementaires traduisant ces décisions ont été définitivement adoptés le 26 mai 2005.

Il est donc important que nos concitoyens qui s'équipent aujourd'hui en téléviseurs n'aient pas à changer leur matériel rapidement sous prétexte que nous n'avons su anticiper une évolution pourtant prévisible.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Louis de Broissia, rapporteur. La proposition de Mme Morin-Desailly a été longuement étudiée par la commission des affaires culturelles et par la commission des affaires économiques.

Avec M. Valade, nous avons cherché à trouver la meilleure formule. Il est vrai qu'aujourd'hui nous sommes confrontés à une pratique aberrante qui consiste à vendre du matériel au téléspectateur sans que ce dernier sache ce qu'il achète.

Nous nous rallierons plutôt à une formule moins contraignante, qui est celle qui est proposée par l'amendement n° 122 rectifié ter de Mme Mélot. Elle paraît être, en effet, indispensable, incontournable, puisqu'elle concerne l'information sur tout le matériel.

Je signale, par ailleurs, à Mme Morin-Desailly qu'elle n'y va pas de main morte ! Aux États-Unis, pays hautement libéral, un délai de deux ans est accordé ; elle propose six mois. Il faut faire attention, madame Morin-Desailly : la liberté du commerce et de la concurrence existe encore, même si elle ne doit pas s'exercer au détriment de l'acheteur ou du téléspectateur.

C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 79, au bénéfice de l'amendement n° 122 rectifié ter.

L'amendement n° 80 sur le MPEG4 procède d'une très bonne intention.

Cependant, il existe une différence de prix forte entre le MPEG2 et le MPEG4. Aujourd'hui, obliger à acheter en MPEG4, c'est obliger à acheter cher. Le délai proposé, là aussi, est de six mois. Il me semble qu'il faut laisser le marché se faire.

Nous avons eu - je le répète - une discussion avec le Gouvernement, et le président de la commission des affaires culturelles ne partageait pas mon point de vue. Nous souhaitions une arrivée du numérique de terre à bon marché, facile, accessible, avec des adaptateurs MPEG2 à 30 euros afin d'habituer le téléspectateur au numérique de terre et aux dix-huit chaînes.

Nous avons beaucoup à faire pour que la bascule et l'extinction puissent se produire. Je pense qu'il ne faut pas adopter de tels amendements, qui procèdent d'excellentes intentions, mais qui risquent de perturber singulièrement le marché. Je préfère une mesure plus pratique, à savoir celle qui sera proposée au travers de l'amendement n° 122 rectifié ter que je soutiendrai.

Je ne suis donc pas défavorable aux motifs qui sous-tendent ces amendements, mais je le suis aux mécanismes qui sont proposés.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je partage l'opinion de la commission. J'émets un avis défavorable sur les amendements nos 79 et 80, et, par anticipation, un avis favorable sur l'amendement n° 122 rectifié ter.

Il est, en effet, important, - et j'ai, bien entendu, moi aussi le souci de transparence, d'information et d'évolution du marché de manière concrète - que les téléspectateurs qui achèteront prochainement un téléviseur ou un adaptateur ne s'équipent pas d'un récepteur qui serait d'ores et déjà obsolète ou qui le deviendrait rapidement.

Toutefois, les obligations que ces amendements tendent à imposer ne sont pas compatibles avec le droit communautaire. En effet, elles seraient considérées comme une entrave à la libre circulation des marchandises. Elles doivent donc, pour être légales, faire l'objet d'une décision à l'échelon européen.

Le Gouvernement a, d'ailleurs, demandé à la Commission européenne que tous les téléviseurs vendus au sein de l'Union européenne soient conçus, à partir de l'année 2009, pour recevoir les signaux numériques.

Dans l'immédiat, Mme Mélot nous suggère une autre solution et propose de faire peser sur les équipementiers et les distributeurs d'équipements électroniques pour le grand public une obligation d'information des consommateurs. Cette solution me semble répondre aux objectifs que vous vous êtes fixés, madame Morin-Desailly, sans faire courir de risques juridiques.

Je vous propose donc, madame la sénatrice, de vous rallier à cette solution, sachant que, même si le devoir d'information reposera sur les industriels, l'État ne sera pas exonéré de sa propre responsabilité pour que l'information de nos concitoyens soit la plus large possible.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.

Mme Catherine Morin-Desailly. Je constate avec plaisir que ce débat a avancé depuis que le projet de loi a été déposé, puisque aucune de ces dispositions, y compris la campagne de communication, n'était prévue.

Au fur et à mesure des discussions, chacun prend conscience que l'usager doit être protégé.

Découvrant aujourd'hui l'amendement n° 122 rectifié ter de Mme Mélot, monsieur le ministre, je m'y rallie bien volontiers, comme vous me le demandez.

L'adoption d'un tel amendement permettra enfin que soit affiché un avertissement particulier et visible pour le consommateur. Il lui sera très clairement spécifié, s'il achète un appareil analogique, qu'il ne pourra l'utiliser pour d'autres fonctions.

En conséquence, j'accepte de retirer l'amendement n° 79.

Je suis plus réservée sur l'amendement n° 80. Comme l'a dit mon collègue Philippe Nogrix, nous n'avons pas eu le temps d'avoir les discussions techniques qui s'imposaient, et ceux qui maîtrisent la technologie ont forcément une longueur d'avance sur nous dans le débat.

Nous avons pris connaissance très tard du rapport. Je sais qu'en ce qui concerne la norme MPEG4, comme l'a souligné M. le rapporteur, les avis sont partagés au sein de la commission des affaires culturelles. C'est la raison pour laquelle, dans le doute, je préfère maintenir mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 79 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 80.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 122 rectifié ter, présenté par Mme Mélot et M. P. Blanc est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article 12 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les industriels et les distributeurs d'équipement électronique grand public sont tenus d'informer de façon détaillée et visible les consommateurs des capacités des récepteurs de télévision à recevoir des signaux numériques, notamment en haute définition. »

La parole est à Mme Colette Mélot.

Mme Colette Mélot. Le basculement de l'analogique vers le numérique sera un événement sans précédent. Dans ces circonstances, il paraît indispensable d'envisager une disposition qui prenne en compte la défense des consommateurs.

Le projet de loi organise l'extinction généralisée de la diffusion terrestre analogique à compter du 31 mars 2008. Il importe que les consommateurs n'achètent par des téléviseurs qui seront très rapidement obsolètes.

En conséquence, le présent amendement a pour objet d'imposer aux industriels et aux distributeurs d'électronique d'informer précisément les consommateurs des caractéristiques techniques des téléviseurs, notamment de leur capacité à recevoir des signaux numériques en haute définition.

Cet amendement vise à protéger l'intérêt de tous nos concitoyens, en particulier les plus fragiles ou les moins bien informés.

M. le président. La commission et le Gouvernement se sont déjà exprimés.

La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je constate, dans la déclaration de M. le ministre, les bonnes intentions dont il fait preuve concernant les campagnes d'information.

Je rappellerai, à titre personnel, qu'un décret avait été pris concernant l'obligation pour les vendeurs de téléphones mobiles d'afficher le débit d'absorption spécifique, autrement dit la puissance émise par un téléphone mobile au niveau de l'oreille. Cette disposition n'a jamais été respectée, comme vous pouvez le constater dans les grandes surfaces et dans les différents espaces de vente.

Monsieur le ministre, j'espère que vous aurez les moyens de faire respecter cette intention louable à laquelle je me rallie. Je souhaite que la disposition proposée ait plus d'impact que le décret concernant les téléphones mobiles.

M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix, pour explication de vote.

M. Philippe Nogrix. L'amendement n°  122 rectifié ter, présenté par Mme Mélot, est certainement plus compatible avec le commerce que le nôtre.

Cependant, je regrette que l'amendement n° 80 n'ait pas été adopté. En effet, nos concurrents au niveau mondial savent très bien se protéger par des normes. Nous n'avons pas eu le temps de le vérifier, mais peut-être que, en imposant à nos constructeurs de télévision la mise en place dès maintenant de la norme MPEG4, on aurait évité des importations massives de Chine ou de Corée du Sud, à coût nul pour nous, et nous permettant, au contraire, de préserver quelques emplois.

Il faudrait apprendre à protéger nos entreprises en prenant de telles décisions, comme le font les Américains et les Anglo-Saxons.

En France, on veut toujours être plus blanc que blanc et faire mieux que tous les autres pays de la Communauté européenne. Mais attendons que cette dernière nous envoie un signal et soyons plus intelligents, comme ceux qui savent protéger leur industrie nationale.

Je pense que tous les constructeurs français de télévision auraient été satisfaits de l'adoption de l'amendement n° 80 par notre Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Louis de Broissia, rapporteur. Je ne veux pas, à cette heure avancée, engager un débat technique, politique, idéologique ou commercial avec M. Nogrix. Sa position s'apparente à une pétition de principe ; ce n'est pas forcément celle de nos commissions ni du groupe de travail « Nouvelles technologies, médias et société » que je préside, qui se réunit au Sénat depuis deux ans et auquel vous êtes très cordialement invité. Il a envoyé à l'étranger cinq groupes officiels, reconnus par le bureau du Sénat. Il est ouvert à toutes les formations politiques et aux membres de toutes les commissions.

Avec les normes MPEG2 et MPEG4, le Gouvernement a fait un choix politique. Vous dites que c'est un mauvais choix, mais il a permis l'explosion du numérique terrestre avec une offre à des conditions avantageuses pour les personnes modestes.

Nous souhaitons que cette campagne d'information - la commission des affaires culturelles le proposera dans un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 17 - porte, bien sûr, sur l'extinction de la diffusion terrestre analogique et, par conséquent, sur la durée de vie limitée des équipements de réception analogique, mais aussi sur l'extension de la couverture de diffusion des services télévisés, la mise à disposition du bouquet satellitaire et la télévision du futur, c'est-à-dire les conséquences de la haute définition ainsi que la manière dont seront lancés les nouveaux services de télévision mobile personnelle.

C'est donc bien en fin de parcours que cette campagne de communication doit être lancée, afin d'ouvrir une discussion plus générale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre. Je partage totalement le sentiment de M. le rapporteur, mais je voudrais rappeler la réalité.

Il y a dix-huit mois - ce n'est pas avant-guerre ! - 80 % de nos concitoyens ne recevaient que six chaînes gratuites. L'objectif politique a été de rendre accessible à chacun, au moindre coût, cette révolution numérique qu'a été la multiplication par trois des chaînes gratuites. Pour ce faire, nous avons choisi la norme MPEG2, comme d'autres pays de l'Union européenne.

Je suis fier du résultat ! J'avais proposé au Premier ministre et au Président de la République d'engager cette action. Ils ont accepté et cela nous a permis de faire de cette révolution numérique un succès populaire. Nous sommes en train d'agir afin que l'ensemble du territoire national soit concerné.

À l'époque, nous avons pris la décision de réserver la norme MPEG4 aux chaînes payantes. Les adaptateurs ont des coûts très différents et notre choix était de faire bénéficier de cette révolution le plus grand nombre, à un coût réduit, et je pense que nous ne nous sommes pas trompés.

Je suis allé à Londres avec le président du Conseil supérieur de l'audiovisuel pour rencontrer les représentants de l'OFCOM et un certain nombre de responsables politiques. En effet, les Britanniques, dans un premier temps, n'avaient pas réussi le lancement de la TNT ; ils y sont parvenus, ensuite.

Bref, nous ne nous sommes pas trompés de norme. Les choses doivent évoluer, mais l'objectif politique visant à permettre à l'ensemble de nos concitoyens de bénéficier au meilleur prix de la multiplication par trois des offres gratuites est sur le point d'être atteint.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122 rectifié ter.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Articles additionnels après l'article 7 (début)
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Discussion générale

5

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Le rapport sera imprimé sous le n° 75 et distribué.

6

ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mercredi 22 novembre 2006 :

À quinze heures :

1. Suite du projet de loi (n° 467, 2005-2006) relatif à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur (urgence déclarée) ;

Rapport (n° 69, 2006-2007) de M. Louis de Broissia, fait au nom de la commission des affaires culturelles ;

Avis (n° 70, 2006-2007) présenté par MM. Pierre Hérisson et Bruno Retailleau au nom de la commission des affaires économiques.

Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.

Le soir :

2. Suite éventuelle de l'ordre du jour de l'après-midi.

3. Débat de contrôle budgétaire sur le rapport d'information (n° 432, 2005-2006) de M. Joël Bourdin et de Mme Nicole Bricq sur l'enquête de la Cour des comptes relative au fonctionnement du service public de l'équarrissage.

Aucune inscription de parole dans le débat n'est plus recevable.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 22 novembre 2006, à zéro heure trente-cinq.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD