sommaire

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

1. Procès-verbal

2. Allocution de M. le président du Sénat

MM. le président, François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche.

3. Mise au point au sujet d'un vote

MM. Philippe Adnot, le président.

4. Loi de programme pour la recherche. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

Article additionnel avant l'article 3 ou après l'article 22 (réservé)

Demande de réserve des amendements nos 114 et 116. - MM. Jacques Valade, président de la commission spéciale sur la recherche ; François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. - La priorité est ordonnée.

Article 3

Amendements nos 131 rectifié de M. Ivan Renar, 88 et sous-amendement no 161 de M. Yannick Bodin ; amendement no 89 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin. - Mmes Annie David, Marie-Christine Blandin, MM. Jacques Valade, rapporteur de la commission spéciale sur la recherche ; Ivan Renar, le ministre délégué, Daniel Raoul, François Fortassin, Yannick Bodin. - Retrait de l'amendement no 131 rectifié ; rejet du sous-amendement no 161 et de l'amendement no 88 ; adoption de l'amendement no 89 rectifié.

Amendement no 87 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Retrait.

Amendement no 104 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Daniel Raoul. - Rejet.

Adoption de l'article modifié.

Intitulé du chapitre II

Amendement no 19 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Serge Lagauche. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.

Article 4

M. Ivan Renar.

Amendement no 20 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Amendement no 132 de M. Ivan Renar. - MM. Michel Billout, Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Amendement no 90 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Ivan Renar, Daniel Raoul. - Adoption.

Amendement no 107 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Amendement no 91 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Amendement no 122 de M. Ivan Renar ; amendements identiques nos 21 de la commission et 105 rectifié de M. Serge Lagauche ; amendements nos 133 à 141 de M. Ivan Renar, 22 à 28 de la commission, 92 rectifié, 93 rectifié de Mme Marie-Christine Blandin et 106 rectifié de M. Serge Lagauche. - MM. Ivan Renar, Jacques Valade, rapporteur ; Serge Lagauche, Mmes Annie David, Marie-Christine Blandin, MM. Michel Billout, Yves Fréville, Daniel Raoul le ministre délégué, Pierre Laffitte, Jean-Pierre Sueur. - Rejet des amendements nos 122, 133 à 135 et 137 à 141 ; adoption des amendements nos 21, 105 rectifié, 22 à 24, 92 rectifié, 25, 93 rectifié, 26, 27, 106 rectifié et 28, l'amendement no 136 devenant sans objet.

Adoption de l'article modifié.

présidence de M. Roland du Luart

Article 5

Amendements nos 29 à 31 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption des trois amendements.

Adoption de l'article modifié.

Article 6

Amendement no 151 de la commission et sous-amendement no 94 rectifié ter de Mme Marie-Christine Blandin. - M. Henri Revol, rapporteur de la commission spéciale sur la recherche ; Mme Marie-Christine Blandin, MM. le ministre délégué, Yves Fréville, Hugues Portelli. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles additionnels après l'article 6

Amendement no 32 rectifié de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement no 33 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Article 7

Amendements nos 108, 110 rectifié de M. Serge Lagauche, 96 rectifié et 109 de Mme Marie-Christine Blandin. - M. Yannick Bodin, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué, Jean-Pierre Sueur, Pierre Laffitte, Daniel Raoul. - Adoption de l'amendement no 108 rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 7

Amendements nos 95 de Mme Marie-Christine Blandin et 112 de M. Daniel Raoul. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Daniel Raoul, Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet de l'amendement no 95 ; Retrait de l'amendement no 112.

Amendement no 111 de M. Daniel Raoul. - MM. Daniel Raoul, Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué, Pierre Laffitte. - Retrait.

Amendement no 34 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Retrait.

Article 8

M. Michel Billout.

Amendement no 35 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 8

Amendement no 59 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, Jacques Valade, rapporteur ; Daniel Raoul, Pierre Laffitte. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 9

M. Michel Billout

Amendement no 36 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Amendement no 37 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 9

Amendement no 38 rectifié de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué, Mme Marie-Christine Blandin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 10

Amendement no 39 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 10

Amendement no 40 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué, Daniel Raoul. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 11

Amendement no 41 rectifié de la commission. - MM. Maurice Blin, rapporteur de la commission spéciale sur la recherche ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 11

Amendement no 64 rectifié bis de M. Hugues Portelli. - MM. Hugues Portelli, Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Retrait.

Articles 12 et 13. - Adoption

Article 14

Amendement no 160 rectifié de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 15

Amendement no 144 de M. Ivan Renar. - Mme Annie David, MM. Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 15

Amendement no 113 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Marie-Christine Blandin, MM. Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Retrait.

Amendement no 56 rectifié bis de M. Gérard Dériot. - MM. Alain Milon, Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Retrait.

Amendement no 145 de M. Ivan Renar. - MM. Michel Billout, Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Rejet.

Article 16

Amendement no 150 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 16

Amendement no 45 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué, le président de la commission. - Retrait.

Amendement no 115 de M. Philippe Adnot. - MM. Philippe Adnot, Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 17

Amendement no 46 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Mme Marie-Christine Blandin. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 18

Amendement no 47 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Article 19

Amendement no 48 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles additionnels après l'article 19

Amendement no 1 du Gouvernement et sous-amendement no 149 de la commission. - MM. le ministre délégué, Henri Revol, rapporteur ; Patrice Gélard, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Claude Domeizel, Michel Billout, Daniel Raoul, Ivan Renar. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié, insérant un article additionnel.

Amendement no 147 de M. Jean-Léonce Dupont. - MM. Jean-Léonce Dupont, Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Yves Fréville, Patrice Gélard, Hugues Portelli, Pierre Laffitte. - Retrait.

Amendement no 49 de la commission. - MM. Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Daniel Raoul. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 20 - Adoption.

Article 21

Amendement no 50 de la commission. - MM. Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption.

Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 21

Amendement no 51 de la commission. - MM. Henri Revol, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement no 52 de la commission. - MM. Maurice Blin, rapporteur ; le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 22 - Adoption.

Suspension et reprise de la séance

Article additionnel avant l'article 3 ou après l'article 22 (précédemment réservés)

Amendements identiques nos 114 de M. Jean-Pierre Bel et 116 de M. Guy Fischer. - MM. Jean-Pierre Bel, Guy Fischer, Josselin de Rohan, Jacques Valade, rapporteur ; le ministre délégué, Daniel Marsin, Jacques Legendre, Jacques Pelletier, Claude Domeizel, Mmes Marie-Christine Blandin, Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Ivan Renar. - Rejet, par scrutin public, des deux amendements.

Vote sur l'ensemble

MM. président de la commission spéciale, Ivan Renar, Mme Marie-Christine Blandin, MM. Pierre Laffitte, Serge Lagauche, Philippe Adnot, Jean-François Humbert.

Adoption, par scrutin public, du projet de loi.

M. le ministre délégué.

5. Communication relative à une commission mixte paritaire

6. Dépôt de projets de loi

7. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution

8. Dépôt de rapports

9. Dépôt d'un rapport d'information

10. Ordre du jour

compte rendu intégral

PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

AllocUtion de M. le président du sénat

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons, enfin, au terme de ce trimestre législatif, budgétaire et financier, particulièrement éprouvant.

M. le président. Nous avons siégé cinquante jours, soit huit jours de plus que l'an dernier et soixante-dix heures de plus. (Exclamations.)

Nous avons passé près du tiers de ce temps en séance de nuit. (Nouvelles exclamations.)

M. Jacques Valade. C'est vrai !

M. le président. Nous sommes incontestablement confrontés à un véritable dérèglement de nos travaux : les plus anciens d'entre nous se sont même demandés si nous n'étions pas revenus au temps de l'ancienne session budgétaire. (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.) Beaucoup d'entre eux regrettent d'ailleurs cette période !

Il y a là une évolution sur laquelle j'appellerai l'ensemble du Sénat à se pencher, selon des procédures à déterminer avec le bureau et les membres de la conférence des présidents.

Je souhaite surtout insister sur les aspects positifs du travail accompli. Deux textes particulièrement importants ont été déposés en premier sur le bureau du Sénat : le projet de loi portant engagement national pour le logement et le projet de loi de programme pour la recherche. Il s'agit de deux textes très urgents, que nous avons tenu à examiner malgré les contraintes d'emploi du temps qu'ils ont entraînées. Au total, près de 3 000 amendements ont été examinés.

Pour l'heure, je n'aurai d'autre préoccupation que de vous témoigner ma fierté de présider une si belle assemblée et de vous dire la conscience que j'ai du travail considérable accompli par toutes et par tous, sénatrices et sénateurs, Gouvernement, fonctionnaires et collaborateurs.

Merci à tous : à Mmes et MM. les ministres, en particulier au premier d'entre eux, qui est venu à plusieurs reprises devant nous ; à Mme et MM. les vice-présidents, dont je salue l'extrême disponibilité et la compétence dans la conduite, parfois difficile, des débats ; à MM. les présidents de commission, qui veillent à la production législative ; aux groupes politiques et à leurs présidents ; à vous toutes et à vous tous, mes chers collègues.

Merci aux administrateurs, aux services des comptes rendus, lesquels ont fait face avec sérénité et un extrême dévouement à une tâche particulièrement lourde - vous en êtes toutes et tous les témoins -, aux assistants et collaborateurs des groupes, qui savent l'attention que MM. les questeurs et le bureau portent à leurs préoccupations.

Merci à la presse, qui a rendu compte également de nos travaux législatifs.

M. Henri de Raincourt. Pas souvent !

M. le président. Merci à Public Sénat, dont le président vient d'être renouvelé brillamment dans ses fonctions par le bureau.

En cet instant, permettez-moi d'avoir une pensée toute particulière pour Alain Méar, mon directeur de cabinet pendant un septennat et fonctionnaire du Sénat depuis trente ans.

Ses compétences, son exceptionnel dévouement à l'ensemble des sénatrices et des sénateurs, ainsi que son action au service de l'institution sénatoriale ont conduit M. le Président de la République à le nommer conseiller d'État. (Applaudissements.)

C'est avec une profonde émotion que je vois ce fidèle serviteur de notre assemblée quitter le Sénat pour s'installer au Palais-Royal et passer, ainsi, d'une haute assemblée à l'autre.

Mes chers amis, je vous souhaite à toutes et à tous d'excellentes fêtes de famille et je vous donne rendez-vous l'année prochaine, avec la volonté de toujours mieux servir cette institution que nous aimons et à laquelle nous sommes particulièrement attachés. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, puisque j'ai l'honneur d'être présent aujourd'hui, je tiens à vous dire à quel point le Gouvernement a été sensible à l'importance et à la qualité du travail parlementaire accompli par la Haute Assemblée au cours de ce trimestre.

Je puis d'ailleurs en témoigner à propos de l'examen du projet de loi de programme pour la recherche. Sur ce texte important, que le Gouvernement a décidé de faire examiner d'abord par le Sénat, un travail absolument exceptionnel de préparation a en effet été réalisé sous l'égide du président de la commission spéciale sur la recherche, M. Jacques Valade, et avec le concours des rapporteurs, MM. Maurice Blin et Henri Revol.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je rends également hommage à votre assemblée pour la qualité du débat que nous avons entamé la semaine dernière et que nous allons poursuivre cet après-midi. C'est un exemple de travail parlementaire de haute qualité qui est donné. Le Gouvernement y est particulièrement sensible.

Je souhaite associer à ces remerciements l'ensemble des fonctionnaires du Sénat et des collaborateurs des groupes, qui permettent à chacune et à chacun d'entre vous de mieux accomplir sa tâche.

Enfin, à votre suite, monsieur le président du Sénat, je souhaite, au nom du Gouvernement, à tous les membres de la Haute Assemblée ainsi qu'à tous leurs collaborateurs de très heureuses fêtes de fin d'année. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et certaines travées du groupe socialiste.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre, des propos aimables que vous adressez à la Haute Assemblée, à laquelle, comme je l'ai dit, nous sommes très attachés. Si, d'aventure, vous entendiez des propos inélégants sur cette institution, ne manquez pas d'être son avocat ! (Sourires.)

3

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Monsieur le président, je vous transmets la demande de rectification formulée par notre collègue M. Bruno Retailleau, qui, lors du scrutin n° 67 sur la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2005, a été comptabilisé comme ayant voté pour, alors qu'il souhaitait s'abstenir.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue.

4

Art. 2 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. additionnel avant l'art. 3 ou après l'art. 22 (réservé)

Loi de programme pour la recherche

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi de programme pour la recherche (nos 91, 121).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements tendant à insérer un article additionnel avant l'article 3 ou après l'article 22.

Article additionnel avant l'article 3 ou après l'article 22 (réservé)

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 3

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jacques Valade, président de la commission spéciale sur la recherche, rapporteur. Monsieur le président, la commission spéciale sur la recherche demande la réserve des amendements nos 114 et 116 jusqu'après l'examen de l'article 22. Ainsi pourrons-nous étudier auparavant la totalité du texte, qui constitue l'ossature du volet législatif du Pacte pour la recherche.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?

M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Avis favorable.

M. Charles Gautier. Évidemment !

M. Jean-Pierre Sueur. Que des avantages !

M. Jean-Pierre Michel. Cela se fait dans la clandestinité !

M. le président. Des exemples nous confirment que cette méthode a déjà été utilisée par le passé !

M. Yannick Bodin. L'embarras est confirmé !

Un sénateur socialiste. Sabotage !

M. Jean-Pierre Sueur. Nous serons là ce soir !

M. le président. La réserve est de droit.

Art. additionnel avant l'art. 3 ou après l'art. 22 (réservé)
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Intitulé du chapitre II

Article 3

Le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche est remplacé par les dispositions suivantes :

« Afin de faciliter l'accès à la formation par la recherche, des allocations individuelles spécifiques sont attribuées, sur des critères de qualité scientifique ou technique, par l'État, les établissements publics d'enseignement supérieur, les établissements publics et organismes publics et privés de recherche. »

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 131 rectifié, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour le premier alinéa de L. 412-2 du code de la recherche, après les mots :

« des allocations individuelles spécifiques »

insérer les mots :

« d'un montant équivaut à 1,5 le SMIC en vigueur. »

 

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L'attractivité des métiers de la recherche est de plus en plus mise à mal. Il nous faut anticiper la pénurie de docteurs qui se profile. Cela suppose de prendre des mesures pour attirer des doctorants et, par la suite, de conserver nos jeunes docteurs. À cette fin, il est dès maintenant indispensable d'afficher et de mettre en place un plan pluriannuel de l'emploi scientifique, mesure importante pour renforcer l'activité de recherche des enseignants-chercheurs et pour stopper la précarisation des jeunes. Les doctorants pourraient ainsi bénéficier d'un statut de salarié.

Quant au montant des allocations, tant celles dont bénéficieraient les doctorants salariés que celles qui sont visées par l'article 3, il doit immédiatement être porté à 1 500 euros bruts par mois, soit 1,5 fois le SMIC en vigueur.

M. le président. L'amendement n° 88, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour remplacer le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche par un alinéa ainsi rédigé :

« Les allocations de recherche sont fixées à 1,5 SMIC »

 

L'amendement n° 89 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour remplacer le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche par un alinéa ainsi rédigé :

« Les allocations de recherche sont indexées sur l'évolution des rémunérations de la fonction publique. »

 

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L'amendement n° 88 a le même objet que celui qui vient d'être présenté. Il tend à fixer l'allocation de recherche à un montant digne, soit 1,5 fois le SMIC, par référence à la situation qui existait voilà une trentaine d'années. A cette époque, en effet, un professeur certifié gagnait 341 euros alors qu'aujourd'hui il perçoit 1 558 euros. Un sénateur recevait une indemnité de 1 949 euros alors que cette dernière s'élève à 5 326 euros de nos jours. Les doctorants, qui travaillent à part entière, dont beaucoup ont dépassé la trentaine et qui sont considérés avec admiration et estime par l'opinion publique, sont maltraités en raison du montant érodé de leur allocation, qu'il est temps de revaloriser. Tel est l'objet de cet amendement.

L'amendement n° 89 rectifié ne fixe pas de montant. Il vise l'existant, c'est-à-dire une allocation proche du SMIC. L'objectif est que l'allocation de recherche ne soit pas livrée aux aléas de l'inflation. C'est pourquoi je vous propose de garantir son évolution en l'indexant sur l'évolution des rémunérations de la fonction publique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission est favorable au principe qui a été évoqué par les deux orateurs précédents.

Cependant, elle ne souscrit pas à la formulation de l'amendement n° 131 rectifié. Elle préférerait que soit retenu l'amendement n° 89 rectifié, auquel elle émet un avis favorable.

Mes chers collègues du groupe CRC, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement n° 131 rectifié, faute de quoi la commission émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Renar, l'amendement n° 131 rectifié est-il maintenu ?

M. Ivan Renar. Une fois rectifié, il coïncidait avec celui de Mme Blandin. Toutefois, nous acceptons de le retirer dans la mesure où le principe de l'indexation sur le SMIC est retenu.

M. le président. L'amendement n° 131 rectifié est retiré.

Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Préférant l'amendement n° 89 rectifié, la commission demande à Mme Blandin de bien vouloir retirer l'amendement n°88, faute de quoi elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Blandin, l'amendement n° 88 est-il maintenu ?

Mme Marie-Christine Blandin. Je le maintiens, monsieur le président, car l'objet des deux amendements n'est pas le même. Je souhaite que notre assemblée se prononce sur les deux amendements que j'ai déposés.

M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. L'amendement n° 89 rectifié prévoit l'indexation des allocations de recherche sur l'évolution des rémunérations de la fonction publique. Il est de nature à renforcer l'attractivité des carrières scientifiques à l'égard des jeunes. Par conséquent, comme je l'ai déjà dit, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° 88 et 89 rectifié.

M. François Goulard, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, à la suite de ces différentes interventions, je veux tout d'abord indiquer que le Gouvernement propose, dans ce Pacte pour la recherche, des mesures de nature à attirer des jeunes talentueux vers les métiers de la recherche.

En ce qui concerne la recherche publique, jamais n'auront été créés autant d'emplois. De ce fait, des perspectives s'ouvrent pour les jeunes chercheurs, notamment pour ceux qui préparent une thèse.

En ce qui concerne la recherche privée, la politique des conventions industrielles de formation par la recherche, les CIFRE, et la création des contrats d'insertion des post-doctorants pour la recherche en entreprise, les CIPRE, que propose le Gouvernement, favorisera l'embauche de jeunes docteurs dans les entreprises.

Pour ce qui est des allocations de recherche, qu'il me soit permis de rappeler que pendant dix années, de 1992 à 2002, leur montant n'a pas été revu à la hausse. Or, depuis 2002, les gouvernements ont augmenté de façon sensible ces allocations. C'est ainsi qu'ont été consenties des revalorisations de 5,5 % en 2002 et au 1er octobre 2003, puis de 4 % au 1er mai 2004. Au 1er janvier 2006, une nouvelle revalorisation de 8 % va intervenir. Il en sera de même au 1er janvier 2007, selon l'engagement pris par le Gouvernement.

De ce fait, l'allocation de recherche, qui s'élevait en 2002 à 1,11 fois le SMIC, représentera, malgré la forte augmentation du SMIC pendant toute la période, 25 % de plus que le SMIC. C'est dire si le Gouvernement est attaché à l'augmentation sensible des allocations de recherche !

Si les amendements nos 88 et 89 rectifié étaient adoptés, en réalité, l'augmentation serait plus faible. L'indexation sur le point de la fonction publique ne donnerait pas les mêmes résultats et l'indexation sur le SMIC serait très en retrait par rapport à ce qu'a décidé le Gouvernement.

Par conséquent, mesdames et messieurs les sénateurs, je vous propose que nous continuions cette action de revalorisation nécessaire, largement entamée aujourd'hui. Il conviendra ensuite de choisir un mécanisme d'indexation, d'augmentation régulière. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. M. le ministre a répondu avec astuce que, si les mesures proposées par le biais des amendements nos 88 et 89 rectifié étaient adoptées, la hausse des allocations de recherche serait inférieure à ce qu'elle sera grâce à l'effort que le Gouvernement est prêt à consentir ou a commencé à faire.

Mais, monsieur le ministre, l'amendement n° 89 rectifié indique non pas que l'augmentation des allocations de recherche est indexée sur l'évolution des rémunérations, mais que « les allocations de recherche sont indexées sur l'évolution des rémunérations de la fonction publique ».

Monsieur le ministre, si vous souhaitez augmenter ces allocations, rien ne vous en empêche. Mais, à partir du moment où leur montant est fixé, elles suivent, sans que vous interveniez, l'évolution des rémunérations de la fonction publique.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. J'ai bien entendu les arguments de M. le ministre. Mais il me semblait que nous examinions un projet de loi de programme. Certes, je reconnais les avancées qui ont été faites en matière d'allocations de recherche. Mais pourquoi ne pas se fixer comme objectif d'arriver à 1,5 SMIC au terme des cinq ans ? Cette mesure aurait été au moins aussi claire que de prévoir des revalorisations pour les mois de janvier 2006 et 2007. Elle aurait eu l'avantage de fixer un horizon.

Mes chers collègues, voici la phrase cynique que j'ai entendu prononcer au MIT à Boston au sujet de nos doctorants et de nos post-doctorants : « Vous formez les meilleurs docteurs et nous, nous avons les moyens de vous les acheter » !

Si la mesure que nous proposons était retenue, cela reviendrait à adresser un message d'espoir aux jeunes qui s'engagent dans la recherche, au moment où se manifeste une désaffection à l'égard des études scientifiques, en particulier à l'égard des études doctorales.

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.

M. François Fortassin. Mes chers collègues, comme vous tous, j'ai bien entendu l'explication de M. le ministre. Personnellement, je considère qu'il est très regrettable que l'amendement n° 89 rectifié ne soit pas adopté. En effet, comme vient de le dire M. Raoul, il s'agit plus de symbole que de chiffre.

Que se passe-t-il aujourd'hui ? Un certain nombre de postulants chercheurs sont peu intéressés car l'idée court dans l'opinion publique que les chercheurs sont très mal payés et, a contrario, qu'un certain nombre de pays, notamment les États-Unis, les rémunèrent bien mieux.

Le Sénat va donner l'impression négative qu'il chipote sur les chiffres et, dans l'opinion publique, restera l'image catastrophique du Gouvernement et de la Haute Assemblée ayant fait preuve de pingrerie.

L'indexation souhaitée par les auteurs de l'amendement n° 89 rectifié est relativement équilibrée. Envoyons un signal fort à la recherche en donnant le petit coup de pouce demandé !

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Chacun connaît la situation difficile de nombreux chercheurs, en particulier des plus jeunes d'entre eux. S'il en était autrement, pourquoi les chercheurs se seraient-ils mobilisés, pourquoi auraient-ils réussi à sensibiliser la population, à organiser et enrichir les assises de Grenoble ?

Selon le discours qui nous est tenu, tout va bien ! Mais les promesses ne valent que pour ceux qui veulent bien les écouter...

M. François Goulard, ministre délégué. Ce ne sont pas des promesses, ce sont des actes !

M. Ivan Renar. Je suis prêt à prendre acte de ce qui a été fait, mais chacun sait bien que la route est encore longue avant que les chercheurs de notre pays soient reconnus et rémunérés à la hauteur de cette reconnaissance.

Cocteau disait : en amour, ce ne sont pas les déclarations qui comptent, ce sont les preuves. Que le Gouvernement manifeste jusqu'au bout son affection, son amour et son respect pour les chercheurs, nous pourrons alors examiner et voter tous les textes de la terre, voire le budget ! Pour l'instant, nous voterons en faveur des amendements nos 88 et 89 rectifié, malgré la déclaration du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.

M. Yannick Bodin. À l'évidence, un effort important reste à faire ; c'est le sentiment qu'ont exprimé tous les intervenants.

Il est vrai qu'à la lecture de cet amendement - « Les allocations de recherche sont fixées à 1,5 SMIC » - on peut craindre qu'il ne faille appliquer la mesure immédiatement. Or il est bien évident qu'elle ne devra être mise en oeuvre que conformément au programme fixé par la loi.

Les choses seraient plus claires si nous précisions par un sous-amendement que les allocations de recherche seront fixées à 1,5 SMIC avant la fin de la programmation prévue dans la présente loi.

Avouez, monsieur le rapporteur, que c'est raisonnable !

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 161, présenté par M. Bodin, et ainsi libellé :

Compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 88 pour remplacer le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche par les mots :

avant la fin de la programmation prévue par la présente loi.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Je confirme l'avis que j'ai donné tout à l'heure : si l'amendement n° 88 n'est pas retiré au profit de l'amendement n° 89 rectifié, la commission engagera le Sénat à voter contre le sous-amendement et l'amendement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 161.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur l'amendement n° 89 rectifié.

M. Daniel Raoul. M. le ministre vient de s'engager à augmenter les allocations de recherche aux mois de janvier 2006 et janvier 2007. Comment cela est-il compatible avec l'avis favorable que la commission vient de donner ? Je me pose des questions sur l'enclenchement de la mécanique qui va se mettre en place.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement maintient son engagement d'augmenter les allocations de recherche de 8 % au 1er janvier 2006 et de 8 % au 1er janvier 2007, quel que soit, au demeurant, le vote du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 89 rectifié.

M. Ivan Renar. Le désordre règne à droite !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 87 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche par une phrase ainsi rédigée :

La formation des thèses peut aussi se faire dans des associations.

La parole est à Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Les possibles partenaires fondateurs ou associés des PRES, les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, ont été énumérés, au sein de l'article 2, précisément au texte proposé pour le deuxième alinéa de l'article L. 343-1 du code de la recherche.

Vous vous étiez appuyé, monsieur le ministre, sur la phrase : « D'autres partenaires, en particulier des entreprises et des collectivités territoriales, peuvent y être associés. » pour repousser l'amendement n° 100, par lequel nous proposions d'insérer les mots « ou des associations », afin que les associations puissent, elles aussi, compter au nombre des partenaires pouvant être associés aux membres fondateurs des PRES. Cet ajout était selon vous inutile, puisque satisfait. J'en prends acte.

Les associations pouvant donc participer à un PRES, il est nécessaire de préciser que des étudiants en thèse peuvent s'y former et y travailler. Cette mention figurait, d'ailleurs, dans la rédaction initiale du projet de loi, conformément à ce qu'avaient proposé les états généraux de la recherche.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission ressent quelque embarras à la lecture de cet amendement. Bien qu'il lui semble sympathique qu'un étudiant puisse se former ou rédiger sa thèse au sein d'une association, elle lui donne toutefois un avis défavorable, dans la mesure où il n'est pas précisé de quelles associations il s'agit.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Selon la rédaction de l'article L. 412-2 du code de la recherche, les associations ne sont pas exclues - associations qui sont, d'ailleurs, mentionnées dans l'article L. 343-1 du même code - dès lors, bien entendu, qu'elles ont une activité de recherche proprement dite ou dans le domaine de la recherche. Or la rédaction proposée laisse entendre que toutes les associations sont susceptibles d'accueillir des doctorants, ce qui ne peut être.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Étant satisfaite par la réponse de M. le ministre, je retire cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 87 rectifié est retiré.

L'amendement n° 104, présenté par Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Bricq, MM. Raoul,  Bodin,  Michel,  Piras,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour le premier alinéa de l'article L. 412-2 du code de la recherche par une phrase ainsi rédigée :

Ces allocations peuvent être attribuées à des jeunes chercheurs spécialisés dans une discipline différente de celle du laboratoire dans lequel ils exercent.

 

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Chacun sait que, de plus en plus, les recherches croisent leurs disciplines, qu'elles soient fondamentales ou appliquées. Ainsi, l'apport des mathématiques et de l'informatique, notamment, est déterminant pour la génétique.

Or les laboratoires ont des difficultés à associer à leur équipe de jeunes doctorants d'autres disciplines. Lors d'une visite organisée par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui mène actuellement une étude intitulée « Les recherches sur le fonctionnement des cellules vivantes », à l'unité INSERM 571, « Génétique moléculaire, évolutive et médicale » à la faculté de médecine de Necker-Enfants malades, nous avons entendu les doléances du professeur Miroslav Radman, directeur de cette unité, à ce sujet.

Cet amendement a pour simple objet de lever toutes difficultés en la matière et de favoriser la mise en place d'équipes pluridisciplinaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Cet amendement est plein de bon sens.

En effet, il serait paradoxal de ne pas pouvoir utiliser des doctorants de différentes disciplines au sein d'un laboratoire très spécialisé.

Nous souhaiterions connaître l'avis du Gouvernement, car ce qui est peut-être évident pour quelques spécialistes, voire quelques parlementaires, ne va peut-être pas de soi dans les faits. Peut-être M. le ministre va-t-il pouvoir nous rassurer en nous indiquant qu'il n'y a pas d'ostracisme par rapport à des disciplines extérieures au thème général de recherche développé par un laboratoire ou par un institut. La complémentarité des disciplines est, bien entendu, indispensable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Mme Blandin a évidemment raison : l'interdisciplinarité est aujourd'hui une règle dans la recherche contemporaine. Ainsi, dans le domaine de la recherche sur le cancer, des disciplines différentes sont mises à contribution : à l'Institut Curie, par exemple, une centaine de physiciens travaillent.

Aujourd'hui, il peut se faire que des habitudes empêchent l'attribution d'allocations de recherche à un chercheur d'une spécialité différente de celle du laboratoire dans lequel il travaille, mais aucun texte n'y fait obstacle. Par ailleurs, l'amendement proposé touche l'article L. 412-2 du code de la recherche, qui fixe le régime des allocataires au regard du droit du travail et de leur couverture sociale mais ne règle pas des questions comme celle que vous évoquez, madame la sénatrice.

Je prends acte de vos remarques et vous donne l'assurance que, pour le Gouvernement, il est évidemment possible d'attribuer des allocations de recherche à des chercheurs d'une spécialité différente de celle du laboratoire dans lequel ils exercent.

L'avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je comprends que rattacher la mesure proposée à l'article 3 puisse poser un problème, mais il s'agit de donner un signe aux allocataires de recherche, en particulier aux patrons de laboratoires qui veulent favoriser la pluridisciplinarité.

Ainsi, les nanotechnologies, qui sont des disciplines émergentes, demanderont une pluridisciplinarité de plus en plus importante. Il vous faut faire passer un message fort, à l'intérieur de votre ministère, monsieur le ministre, au sein des commissions des EPST qui sont très frileux, chacun défendant sa propre discipline, mais aussi au sein de l'ANR elle-même, pour que chacun comprenne que la pluridisciplinarité doit prévaloir et qu'il n'existe plus de disciplines cloisonnées.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Le doute ayant été semé sur l'opportunité de rattacher cette mesure à l'article 3, je tiens à citer la phrase à laquelle elle se rattache : « Afin de faciliter l'accès à la formation par la recherche, des allocations individuelles spécifiques sont attribuées, sur des critères de qualité scientifique ou technique, par l'État, les établissements publics d'enseignement supérieur, les établissements publics et organismes publics et privés de recherche. »

Je ne vois pas pourquoi ce serait inconvenant d'ajouter : « Ces allocations peuvent être attribuées à des jeunes chercheurs spécialisés dans une discipline différente de celle du laboratoire dans lequel ils exercent. »

M. François Goulard, ministre délégué. Je n'ai pas dit que c'était inconvenant !

M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Il est difficile de donner un avis défavorable à cet amendement, mais la commission va s'abstenir.

Les explications de M. le ministre nous ont convaincus qu'il n'y avait aucun ostracisme par rapport à une quelconque discipline : la pluridisciplinarité, pour laquelle a plaidé M. Raoul, est de règle.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

CHAPITRE II

L'ÉVALUATION DES ACTIVITÉS DE RECHERCHE

Art. 3
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 4

M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter l'intitulé de cette division par les mots :

et d'enseignement supérieur

La parole est à M. Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Dans l'avant-projet de loi, il était seulement question de l'évaluation des activités de recherche. Or le texte qui nous est soumis a évolué. Par ailleurs, nous avons complété d'une façon significative les rôles de chacun, notamment celui de l'Agence nationale pour l'évaluation.

Par conséquent, dans un souci de cohérence, nous souhaitons compléter l'intitulé de ce chapitre en y ajoutant l'enseignement supérieur.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je soulignais tout à l'heure la qualité du travail du Sénat. Nous en avons là une illustration.

En effet, le texte du Gouvernement comportait une lacune, que le Conseil d'État n'a d'ailleurs pas relevée. C'est donc à bon droit que la commission spéciale propose de modifier l'intitulé du chapitre II.

Le Gouvernement est très favorable à cet amendement.

M. Ivan Renar. Chacun sa lacune !

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.

M. Serge Lagauche. Nous avions, pour notre part, déposé un amendement similaire. Mon groupe votera donc pour cet amendement de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre II est ainsi complété.

Intitulé du chapitre II
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 5

Article 4

I. - L'article L. 114-1 du code de la recherche est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. L. 114-1. - Les établissements publics, organismes publics et services de l'État dans lesquels sont réalisées des activités de recherche ainsi que les programmes et projets de recherche et de développement technologique financés en tout ou partie sur fonds publics sont évalués sur la base de critères objectifs adaptés à chacun d'eux.

II. - Après l'article L. 114-1 du même code, il est inséré un article L. 114-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 114-1-1. - Les procédures et résultats de l'évaluation d'une activité de recherche financée en tout ou partie sur fonds publics sont rendus publics dans des conditions assurant le respect des secrets protégés par la loi et des clauses de confidentialité figurant dans un contrat avec un tiers. La convention conclue avec le bénéficiaire du financement public précise les conditions dans lesquelles l'autorité publique contrôle les résultats de l'évaluation. »

III. - Après l'article L. 114-3 du même code, sont ajoutés les articles L. 114-3-1 à L. 114-3-5 ainsi rédigés :

« Art. L. 114-3-1. - L'Agence d'évaluation de la recherche est une autorité administrative indépendante.

« L'Agence est chargée :

« 1° D'évaluer les établissements d'enseignement supérieur et de recherche ainsi que les établissements et les fondations de coopération scientifique en tenant compte de l'ensemble de leurs missions ;

« 2° D'évaluer les activités de recherche conduites par les établissements et organismes mentionnés au 1° ainsi que leurs unités de recherche ;

« 3° De donner son avis sur les procédures mises en place pour évaluer les personnels des établissements et organismes mentionnés au 1° et sur les conditions dans lesquelles elles sont mises en oeuvre.

« Elle peut également participer, dans le cadre de programmes de coopération européens ou internationaux, ou à la demande des autorités compétentes, à l'évaluation d'organismes étrangers de recherche et d'enseignement supérieur.

« Art. L. 114-3-2. - L'Agence est administrée par un conseil.

« Son président, nommé parmi ses membres, dirige l'Agence et a autorité sur ses personnels.

« Le conseil est composé de vingt-quatre membres français ou étrangers nommés par décret. Il comprend :

« 1° Dix personnalités qualifiées ;

« 2° Sept membres ayant la qualité de chercheurs ou d'enseignants-chercheurs, sur proposition des directeurs ou présidents des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche et des organismes de recherche ;

 

« 3° Sept membres ayant la qualité de chercheurs ou d'enseignants-chercheurs, sur proposition des instances d'évaluation compétentes en matière d'enseignement supérieur et de recherche, notamment celles mentionnées à l'article L. 952-6 du code de l'éducation et à l'article L. 321-2 du code de la recherche.

«  Art. L. 114-3-3. - L'Agence est composée de sections dirigées par des personnalités justifiant d'une expérience en matière d'évaluation scientifique, nommées par le conseil de l'Agence, sur proposition du président.

« Art. L. 114-3-4. - Les établissements ou unités faisant l'objet d'une évaluation communiquent à celle-ci, sur sa demande motivée, toutes informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission. L'Agence dispose d'un pouvoir d'investigation sur pièces et sur place.

« Art. L. 114-3-5. - Un décret en Conseil d'État précise l'organisation et le fonctionnement de l'Agence d'évaluation de la recherche. »

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, sur l'article.

M. Ivan Renar. Si l'on sort du schéma « évaluation = sanction », il faut s'accorder sur le fait qu'il est nécessaire, dans une pratique où la liberté thématique est, à juste titre, revendiquée, de recevoir l'approbation ou la critique constructive par les pairs, ne serait-ce qu'à titre de repère.

L'argument selon lequel le fractionnement de la science serait tel que les candidats ne pourraient être évalués que par des pairs de leur discipline n'est pas recevable. L'évaluation, en termes d'activités de recherche et d'enseignement, doit être menée à l'échelle nationale, selon des critères homogénéisés issus des critères existants.

Ces critères doivent être rendus publics. La transparence de ces processus est en effet essentielle, non seulement pour l'équité, mais aussi dans la perspective du débat sur le métier de chercheur qui ne manquera pas de s'ouvrir.

Le rôle des paramètres, comme la nécessité du post-doc, l'importance des publications, les activités de vulgarisation, les encadrements d'étudiants, l'animation de la recherche, la participation à la société civile, doit être débattu au regard de ce que l'on attend de la recherche et des chercheurs.

Mettre les métiers de la recherche sur la place publique est un des éléments d'appropriation des processus qui conduisent aux choix des thématiques et donc un facteur essentiel de démocratisation des choix stratégiques. Il faudra d'ailleurs que nous ayons, un jour, un débat sur la démocratie dans le domaine de la recherche, sans tomber pour autant dans le référendum permanent.

Ces questions préoccupent nombre de chercheurs, de savants mais aussi d'élus. En effet, eu égard au nombre d'amendements déposés sur l'article 4, il paraît nécessaire de modifier cette partie de la loi consacrée à l'évaluation.

M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Avant le I de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :

I. A - Au début de la première phrase de  l'article L. 311-2 du code de la recherche, après les mots : « établissement public de recherche »,  les mots : « peut conclure » sont remplacés par le mot : « conclut ».

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. La procédure et la pratique contractuelles développées entre l'État et les universités, avec les contrats quadriennaux, d'une part, et entre l'État et les organismes publics de recherche, avec les contrats d'objectifs et de moyens, d'autre part, ont contribué à améliorer sensiblement l'évaluation des établissements concernés puisque, à défaut d'évaluation favorable, il ne pouvait pas y avoir de contrats. Cette pratique s'est d'ailleurs fort heureusement généralisée.

Tandis qu'aux termes du code de la recherche, cette pratique n'est que facultative, le présent amendement tient compte de la situation actuelle et vise à donner un caractère obligatoire à la conclusion de ces contrats pluriannuels. Il s'agit ainsi de traduire pleinement la réforme de l'évaluation dans le code de la recherche.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. M. Valade a tout à fait raison : la politique contractuelle étant devenue de droit, la modification proposée est parfaitement justifiée.

Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 132, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 114-1 du code de la recherche par les dispositions :

et en adéquation avec les critères et la méthodologie définis et pratiqués par eux. L'évaluation doit obéir aux principes d'indépendance, de transparence et de collégialité. Elle doit être menée par les pairs.

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Jusqu'à ce jour, le socle démocratique des établissements publics scientifiques et technologiques, les EPST, est constitué des conseils de laboratoire ou d'unité. Leur rôle consiste notamment à donner des avis dont le poids peut être considérable lors du renouvellement des structures.

Or plusieurs questions relatives aux rapports entre expertise collective et démocratie émergent actuellement.

Ainsi, la cooptation et la sélection des experts excluent de fait les débats contradictoires et posent le problème de la responsabilité scientifique, ainsi que celui de la mise en jeu de toutes les compétences ou expériences par rapport à un thème donné. Ce système confère souvent la légitimité maximale à la logique dominante.

Un chercheur est pourtant un citoyen parmi les autres, et non un « expert » dont le savoir fait loi et qui confère une légitimité du fait même qu'il parle en tant qu'expert.

Le chercheur doit assumer ses résultats non seulement par rapport à la communauté scientifique, mais aussi par rapport à la société : c'est un élément versé au débat démocratique. Évaluer, en effet, ce n'est pas uniquement porter un jugement de valeur : c'est se donner les moyens de corriger, d'évoluer et de prendre en compte les besoins.

L'évaluation mettant souvent en jeu des équipes et entraînant des conséquences importantes sur les carrières des participants, l'exigence de transparence suppose que l'on puisse recourir à des procédures d'appel.

En outre, l'évaluation doit être nationale et portée par l'ensemble de la communauté concernée.

La faisabilité d'un projet scientifique dépend en effet autant de l'évaluation de l'incertitude du but poursuivi que des moyens nécessaires à sa réalisation, notamment des moyens en individus - chercheurs, équipes techniques - et de la capacité du responsable de projet à diriger son équipe. La question de la représentativité des évaluateurs est donc primordiale.

Afin d'éviter autant que possible les situations de dépendance de l'évaluateur à l'intérieur de sa propre discipline ou, parfois, par rapport à des intérêts industriels directs ou indirects, c'est la multiplicité des approches de l'évaluation dans ses différentes composantes qui garantit le mieux la « qualité » de l'expertise.

Dans un contexte où l'expertise scientifique serait prise en charge par une hiérarchie de comités ad hoc émanant, par effet de chaîne, du ministre et chargés d'évaluer pour le compte de celui-ci, les effets pervers pourraient être bien plus importants que ceux que l'on peut observer dans le système actuel. L'avis des mêmes scientifiques étant requis, des positions redondantes seraient ainsi exprimées dans des lieux divers, où devraient pourtant s'exprimer des points de vue différents.

Nous assisterions alors à un subtil processus d'homogénéisation, « obstruant la voie » pour certaines thèses et autres travaux de recherches, qui se trouveraient ainsi marginalisés.

C'est pourquoi nous sommes résolument favorables à une évaluation par les pairs, à laquelle participeraient de façon prépondérante des élus représentatifs.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Nous considérons que cet amendement complique un peu le système.

Vous venez de dire en conclusion de votre propos, monsieur Billout, que vous étiez favorable à l'évaluation par les pairs. Nous sommes également favorables à ce type d'évaluation, car il n'y a pas d'autre solution possible.

En effet, à qui peut-on imaginer de confier une évaluation, si ce n'est aux personnes compétentes, qui se prononcent en toute indépendance et en toute liberté ?

M. Michel Billout. Il faut le dire clairement !

M. Jacques Valade, rapporteur. Cela étant, nous entendrons avec intérêt l'avis de M. le ministre. Si celui-ci va dans le même sens que nous, la commission émettra un avis défavorable sur cet amendement, sinon elle s'en remettra à la sagesse du Sénat.

M. Ivan Renar. À la chambre des Pairs ! (Sourires.)

M. le président. Monsieur Renar, vous n'avez pas la parole !

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Il n'a échappé à personne que nous examinons un article extrêmement important du projet de loi.

L'évaluation existe et est pratiquée au sein de nombreux organismes de recherche dans notre pays, mais elle souffre aujourd'hui de deux défauts.

Premièrement, l'évaluation n'est pas universelle. Certaines équipes de recherche et certains laboratoires ne sont pas évalués, ce qui est dommage. Il est en effet évident qu'une recherche conduite grâce à des crédits publics doit faire l'objet d'une évaluation.

Deuxièmement, et c'est en cela que je suis en désaccord avec les auteurs de l'amendement n° 132, l'évaluation n'est pas conduite de manière homogène. Il existe en effet autant de systèmes d'évaluation que d'organismes de recherche. Or nous savons que, dans notre pays, des recherches portant sur des thèmes tout à fait comparables sont conduites par différents organismes, notamment au sein des universités.

Afin de disposer d'une évaluation exacte des moyens, il convient que la puissance publique possède une vision d'ensemble, homogène, de la qualité des recherches menées dans notre pays.

Ce projet de loi affirme donc deux principes : l'universalité et l'unité de l'évaluation, principes que l'Agence d'évaluation de la recherche aura pour rôle fondamental de faire respecter.

Il est également précisé dans le texte que cette agence ne bouleversera pas ce qui existe : ses travaux s'appuieront sur les systèmes d'évaluation existants dans nos organismes de recherche. Il s'agit non pas de nier la valeur de la pratique actuelle en la matière, mais de faire prévaloir une vision d'ensemble, une homogénéité, à défaut de laquelle l'évaluation, dans son ensemble, n'a pas de sens.

Le présent amendement, qui pose le principe de l'indépendance de l'évaluation, nous paraît donc inopportun, voire inutile.

Les commissions d'évaluation sont en effet composées de femmes et d'hommes de science. Dire que les hommes et femmes de science ne sont pas indépendants, c'est un péché contre l'esprit, car ils le sont par nature, par vocation et par principe !

De même, l'argument selon lequel l'évaluation ne serait pas transparente est tout à fait inadéquat dans la mesure où la loi affirme le principe de la publicité, sauf en cas de secret industriel ou de secret défense.

Enfin, le principe de l'évaluation par les pairs est non seulement reconnu dans notre pays mais a également une valeur universelle à l'intérieur du monde scientifique.

M. le président. Monsieur Billout, l'amendement n° 132 est-il maintenu ?

M. Michel Billout. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Compte tenu des propos de M. le ministre, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 132.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 90 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 114-1 du code de la recherche par un alinéa ainsi rédigé :

« Parmi ces critères, le partage du savoir scientifique avec la société sera  pris en compte.

 

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Le travail quotidien du chercheur est tendu vers la production de réponses satisfaisantes par rapport à son hypothèse de départ. À cette fin, il soigne ses protocoles, consulte ses pairs, étudie la documentation et prend le temps d'argumenter pour défendre la pertinence de son travail, afin d'obtenir les moyens nécessaires à cette recherche.

L'évaluation tiendra sans doute compte de la rigueur de son travail, de son efficacité à s'entourer, à créer les conditions de sa recherche et de sa reconnaissance publique, souvent internationale, validée par les publications. Mais, dans un monde de compétitivité, voire de rivalité, chaque heure est précieuse, et celui qui n'est pas devant sa paillasse ou son ordinateur risque d'être pénalisé. Aussi la mission de pédagogie est-elle souvent négligée.

Afin de rappeler que la diffusion de la culture scientifique n'est pas facultative et doit être valorisée au cours de la carrière, donc au travers de l'évaluation du laboratoire et de la validation du mode d'évaluation des personnels, cet amendement reprend une des préconisations de la mission de la commission des affaires culturelles, présidée par M. Laffitte.

J'ajoute que le partage du savoir et des questionnements est utile à plus d'un titre. Il permet d'informer et de sensibiliser la société, élevant la qualification de chacun, son autonomie et sa capacité à se saisir des problèmes. Il permet également de diminuer la distance qui existe entre les chercheurs et la société, d'apaiser le soupçon a priori et de donner aux jeunes des perspectives professionnelles.

Enfin, le partage du savoir qualifie la démarche du chercheur lui-même en l'obligeant à formuler de façon simple, mais cohérente et logique, la démarche scientifique qu'il met en oeuvre. Même les plus renommés reconnaissent que le travail d'explication devant un public novice ou des étudiants est utile pour la clarification et l'identification des points de confusion, et permet de lever des incertitudes.

Nous proposons donc d'inscrire en toutes lettres, parmi les critères de l'évaluation, le partage du savoir scientifique avec la société.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Le partage des savoirs est partie intégrante du rôle du chercheur, mais également de l'enseignant-chercheur.

La commission des affaires culturelles, comme la commission spéciale ont réfléchi à la contribution des chercheurs, au sens large, à l'évolution des connaissances et, partant, au partage des connaissances. Nous sommes, par conséquent, extrêmement favorables à ce que ce point soit évoqué. Vous avez pour votre part, madame Blandin, largement contribué aux travaux dirigés par M. Pierre Laffitte, auxquels vous avez fait allusion.

Il doit cependant être entendu que la limite du partage des connaissances consisterait en conventions particulières, dans les cas très précis où la recherche serait liée à des entreprises qui, non seulement, financeraient éventuellement ces recherches, mais auraient également intérêt à ne pas en voir les résultats immédiatement publiés.

La commission spéciale émet donc un avis favorable sur l'amendement n° 90 rectifié, afin de montrer son attachement non seulement à la diffusion de la culture scientifique, notamment sur le plan national, mais également au rôle que doivent jouer les chercheurs, dans le contexte général, pour assurer l'équilibre entre recherche et enseignement supérieur.

Il n'y a pas d'enseignement supérieur moderne possible sans un apport des résultats des avancées scientifique au fur et à mesure de ces avancées.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je partage et l'opinion de M. le rapporteur sur le fond, et les motivations qui ont conduit Mme Blandin et ses collègues à déposer cet amendement.

La diffusion de la culture et du savoir scientifiques constitue en effet une mission d'intérêt général et, ajouterai-je, d'intérêt national. C'est la mission de tous nos organismes de recherche, c'est la mission plus spécifique de certains d'entre eux, qui sont orientés vers cet objectif.

Dans le statut des chercheurs et des enseignants-chercheurs, participer à la diffusion du savoir scientifique constitue une obligation.

Néanmoins, vous noterez que, dans les missions confiées à l'évaluation, nous n'avons pas précisé, parce que c'est à peu près impossible de le faire, les critères sur lesquels une évaluation doit se fonder. Ces critères, d'ailleurs, varient d'une discipline l'autre, ils varient selon que l'on parle d'un organisme ou d'une équipe de recherche.

C'est pourquoi il me paraît inapproprié de mentionner le partage du savoir scientifique au sein des éléments d'évaluation. C'est une mission générale qui s'impose à tous. Elle n'est pas spécifiquement présente dans l'évaluation, qui a avant tout un caractère scientifique.

C'est pourquoi, tout en partageant les intentions exprimées par les deux orateurs précédents, nous émettons un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Une mission qui n'est pas évaluée est souvent une mission qui s'étiole et finit par être condamnée.

Certes, dans l'évaluation, la diffusion ne représente qu'un critère parmi d'autres. Mais, si nous avons souhaité que ce critère figure dans la loi, c'est parce qu'il est négligé.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Nous voterons en faveur de cet amendement : la culture scientifique est effectivement un élément important de constitution de la personnalité, de la citoyenneté, surtout dans un pays comme le nôtre.

Le problème, c'est que si les chercheurs et enseignants-chercheurs ne sont pas évalués, ils sont dévalués. Il faut savoir que les chercheurs et enseignants-chercheurs, quand ils deviennent présidents d'université voient leur carrière bloquée pendant toute la période correspondante. Ils ne peuvent bien évidemment pas être évalués sur le plan scientifique à partir de ces activités au service de la collectivité. Celles-ci devraient donc être retenues dans l'évolution des carrières des personnels concernés. Il faudra un jour prendre en compte le temps passé au service de la collectivité.

Cette situation est profondément anormale : celui qui se consacre, en plus de ses heures de travail, à la culture scientifique ou à l'administration de son université perd une partie de sa carrière.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je rappelle à M. le ministre les termes du projet de loi : « Les établissements publics, organismes publics et services de l'État dans lesquels sont réalisées des activités de recherche ainsi que les programmes et projets de recherche et de développement technologique financés en tout ou partie sur fonds publics sont évalués sur la base de critères objectifs adaptés à chacun d'eux. » Les critères doivent donc effectivement être « adaptés », comme vous le disiez.

L'amendement n° 90 rectifié prévoit que, « parmi ces critères, le partage du savoir scientifique avec la société sera  pris en compte ». Alors que l'on assiste à la montée de ceux qui combattent le progrès scientifique, à des démarches et des réactions parfaitement irrationnelles, il me semble que l'attitude de partage du savoir scientifique devrait être réellement prise en compte, faute de quoi nous risquons d'aller dans le mur.

Je ne parlerai pas des antennes relais ni d'autres sujets qui risqueraient de nous fâcher...

M. Jacques Valade, rapporteur. J'ai des noms.

M. Daniel Raoul. Moi aussi, j'ai des noms. En tout cas, je le répète, le partage du savoir scientifique devrait être une mission primordiale des chercheurs. Si ce n'était pas le cas, il n'y aurait plus d'acceptabilité sociale du progrès scientifique.

M. François Goulard, ministre délégué. Je suis entièrement d'accord.

M. le président. La parole est à M. Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Monsieur le ministre, le partage des savoirs n'est pas spontané : il doit faire l'objet d'une obligation. Que l'on fasse figurer cette obligation dans cet article ou ailleurs, peu importe, mais il est bon de l'affirmer comme telle, même si la capacité à diffuser des découvertes n'est pas forcément jugée dans le cadre d'une évaluation.

Aux États-unis, dans les universités qui ont la chance de compter des lauréats du prix Nobel, ceux-ci enseignent aux étudiants de première année. En effet, parce qu'ils ont trouvé quelque chose, parce qu'ils ont une compétence particulière dans un domaine d'excellence, ils sont à même d'attirer de jeunes gens et d'augmenter leur ardeur scientifique.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Après avoir entendu ces divers arguments, je m'en remets, au nom du Gouvernement, à la sagesse de la Haute assemblée.

M. Daniel Raoul. Très bien ! Merci, monsieur le ministre !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 107, présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi la seconde phrase du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-1-1 du code de la recherche :

Un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles l'autorité publique contrôle les résultats de l'évaluation.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. L'article 4 du projet de loi vise à l'uniformisation de l'évaluation de la recherche, à partir du moment où celle-ci fait appel à des financements publics.

Nous souscrivons à ce principe : il est temps de mettre un terme à la multiplicité des systèmes d'évaluation existants, source de disparités de traitement entre les chercheurs selon qu'ils exercent à l'université, dans tel établissement public à caractère scientifique et technologique ou dans tel établissement public à caractère industriel ou commercial.

Encore faut-il s'assurer que l'on ne puisse déroger à ce principe d'uniformisation de l'évaluation de la recherche.

Il ne nous semble donc pas opportun que le projet de loi renvoie au conventionnement le soin de fixer les modalités de l'évaluation.

Dans les faits, cette mesure risquerait de maintenir des disparités de traitement, puisque les conventions traiteront au cas par cas les modalités de contrôle de l'évaluation lors de l'attribution du financement public à l'équipe, au laboratoire, à l'organisme ou à l'établissement concerné.

Aussi proposons-nous de donner au pouvoir réglementaire le soin de définir de manière générale les modalités de contrôle des résultats de l'évaluation.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission n'est pas favorable à l'idée de fixer dans un décret pris en Conseil d'État plutôt que dans une convention les conditions dans lesquelles l'autorité publique contrôlera les résultats d'évaluation. Elle émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 91, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 114-1-1 du code de la recherche par un alinéa ainsi rédigé :

Toutefois, dans le respect de la Convention d'Aarhus, les évaluations portant sur des recherches concernant la santé publique ou l'environnement ne peuvent être tenues secrètes.

 

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à préciser qu'il y a des domaines où les évaluations des modes de recherche ne peuvent être tenues secrètes : la santé publique et l'environnement.

La course aux prix Nobel, la perspective de déposer un brevet, le lien avec une PME dans la mise au point d'une innovation, la simple qualité d'un protocole susceptible d'être reconnue par un comité d'expert et donc de donner lieu à une subvention, sont autant de raisons qui plaident en faveur de la confidentialité et du secret, je ne le nie pas.

L'évaluation des modes de recherche et des travaux de recherche eux-mêmes s'inscrit dans ce contexte.

Cependant, la France est signataire de la convention d'Aarhus, qui porte qu'il ne saurait y avoir de secret en matière de santé publique et d'environnement. Il y va en effet de l'intégrité des organismes humains ou d'un avenir compromis.

Cet amendement tend à transposer cette exigence en droit français, afin que la qualité des modes opératoires des protocoles mis en oeuvre des partenaires associés soit connue des citoyens. Ceux-ci sont en effet concernés au premier chef. Ils ont le droit de savoir, par exemple, si telle ou telle étude épidémiologique a été bien menée. Acteurs contribuables, bailleurs d'argent public pour ces recherches, ils ont le droit de savoir si leur argent à été bien utilisé.

L'adoption de cet amendement ne fragiliserait ni l'innovation ni la compétitivité mais permettrait une connaissance publique du niveau de qualité des travaux donnant lieu à des conclusions en matière de santé ou d'environnement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission émet un avis défavorable : elle souhaite éviter toute confusion entre la confidentialité des résultats et la nature même de ces résultats.

Dans le domaine de la santé publique et de l'environnement, il est des cas où la plus grande confidentialité est souhaitable, notamment quand les recherches touchent à l'intimité des personnes ou à leur intégrité physique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.

La convention d'Aarhus a été transposée en droit français : elle est donc tout à fait opposable. Par ailleurs, sa rédaction est beaucoup plus précise que celle que vous proposez, madame la sénatrice, qui pourrait être pénalisante.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de 22 amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 122, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le III de cet article :

III. - L'Agence d'Évaluation de la Recherche (AER) a pour mission d'établir un système transparent d'évaluation homogène, réunissant les critères d'évaluation de toutes les instances existantes chargées de l'évaluation et de contrôler la bonne application de ces règles générales définies a priori et rendues publiques.

Elle reprendra les missions précédemment exercées par le Conseil national d'évaluation (CNE) et le Comité National d'Évaluation de la Recherche (CNER).

L'Agence est une autorité indépendante. Une partie majoritaire de ses membres procède du Comité national de la recherche scientifique (CoNRS) et du Conseil national des universités (CNU), des instances d'évaluation des autres établissements publics à caractère scientifique et technique (EPST) choisis par élection en leur sein.

Des comités de visite, constitués par des représentants proposés par les différentes catégories de personnels de la recherche seront organisés ou accrédités par l'Agence qui établiront des rapports publics d'évaluation, en prenant en compte l'intégralité des missions assignée aux unités de recherche.

L'AER établit un rapport annuel d'activité rendu public qui est remis au Président de la République et au Parlement.

Il peut publier des recommandations sur les sujets relevant de sa compétence.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Tout le monde s'accorde sur l'importance de l'évaluation. Encore faut-il que celle-ci soit suivie de remarques constructives et de solutions.

L'évaluation des personnels, des équipes et des laboratoires repose sur un réel besoin de transparence, lié au mode électif, lien de confiance entre évaluateurs et évalués, et sur des moyens de fonctionnement.

Les états de généraux de la recherche de Grenoble ont permis d'insister sur trois principes de l'évaluation.

Premièrement, toutes les équipes universitaires doivent être évaluées par une même instance.

Deuxièmement, il est nécessaire d'élargir l'évaluation et le suivi à toutes les activités des personnels.

Troisièmement, les personnels et les équipes dans lesquelles ils travaillent doivent évaluer ensemble leurs activités de recherche.

Le projet de loi tend à faire procéder l'évaluation du sommet. Si l'évaluation « redescend », c'est en découplant l'évaluation des équipes et celle des personnes.

L'amendement n° 122 vise précisément à renverser cette pyramide. Il faut exploiter ce qui existe et qui fonctionne, le Comité national d'évaluation de la recherche par exemple, pour prendre en compte cette évaluation des équipes.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 21 est présenté par M. Valade, au nom de la commission.

L'amendement n° 105 rectifié est présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. - Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche :

L'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur est une autorité administrative indépendante.

II.  - En conséquence, dans l'ensemble du texte, remplacer les mots :

Agence d'évaluation de la recherche

par les mots :

Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 21.

M. Jacques Valade, rapporteur. Puisque l'agence qui a pour mission d'évaluer les établissements doit tenir compte de l'ensemble de leurs missions et non exclusivement de leurs activités de recherche, il nous parait pertinent de compléter son titre. Elle deviendrait l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, ou AERES.

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour présenter l'amendement n° 105 rectifié.

M. Serge Lagauche. Comme nous l'avons annoncé, nous partageons le souhait de la commission spéciale de rebaptiser l'autorité administrative indépendante : « Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur ».

Ce changement d'appellation est motivé par notre souhait de voir l'enseignement supérieur évalué au même titre que la recherche. Dans les établissements d'enseignement supérieur, ces deux activités ne vont pas l'une sans l'autre : les jeunes chercheurs sont tenus de donner 192 heures de cours par an.

Il existe d'excellents chercheurs mauvais pédagogues et, a contrario, de piètres chercheurs très bons enseignants. Dès lors qu'elle est uniformisée, l'évaluation doit concerner également l'enseignement supérieur.

M. le président. L'amendement n° 133, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche par la phrase suivante :

Elle veillera à ce que les procédures préservent un lien fort entre l'évaluation des personnels et celui des laboratoires et fassent appel à une majorité de deux tiers d'élus de la communauté scientifique, où toutes catégories de personnels soient représentées.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement a déjà été défendu.

M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le troisième alinéa (1°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche :

« 1° D'évaluer les établissements d'enseignement supérieur et de recherche, les établissements et les fondations de coopération scientifique ainsi que l'Agence nationale de la recherche, en tenant compte de l'ensemble de leurs missions et de leurs activités ;

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Cet amendement vise à apporter une précision importante : l'Agence dont nous venons de définir les contours, qui engloberont donc la recherche mais aussi l'enseignement supérieur, devra évaluer les travaux de l'Agence nationale de la recherche, car il serait paradoxal qu'elle ne le fasse pas. Il ne s'agit pas du tout de mettre en cause le sérieux de l'ANR, mais, tant qu'à évaluer la recherche au sommet, faisons-le vraiment !

Par ailleurs, nous visons, outre les missions des établissements concernés, l'ensemble de leurs activités, ce qui permet de lever l'ambiguïté résultant de la rédaction de l'alinéa suivant, qui englobait l'évaluation des activités de recherche des établissements. Il paraît plus logique que tout ce qui concerne l'évaluation des établissements figure dans le même alinéa.

Cette rédaction permet de surcroît de viser non seulement les activités de recherche mais aussi les activités d'enseignement. L'Agence devra, en effet, évaluer les formations dispensées, le cas échéant, par les établissements.

Je rappelle enfin, monsieur le ministre, que, au-delà de l'enseignement formel, nous souhaitons la diffusion maximale des résultats scientifiques.

M. le président. L'amendement n° 134, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche.

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Dans son rapport, la commission analyse de façon très pertinente les dispositions de l'article 4 relatives à l'Agence d'évaluation de la recherche. Dans la mesure où M. le rapporteur signale lui-même l'ambiguïté de la rédaction du 2° du III de cet article et où nous tenons à ce qu'en effet ne soit pas visée l'activité des unités de recherche, nous proposons la suppression pure et simple de ce 2°.

M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche :

« 2° D'évaluer les activités de recherche conduites par les unités de recherche des établissements et organismes mentionnés au 1°; ».

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Il s'agit de clarifier la rédaction du projet de loi, qui entretenait une ambiguïté sur le niveau de l'évaluation. Il ne ressortait pas clairement s'il s'agissait des activités des établissements et organismes, désormais explicitement visées à l'alinéa précédent, ou de leurs unités de recherche. C'est bien de l'évaluation des unités de recherche qu'il est question à ce stade.

M. le président. L'amendement n° 136, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le quatrième alinéa (2°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche, supprimer les mots :

ainsi que leurs unités de recherche

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Dans la suite de la réflexion entamée au travers des amendements que nous avons déposés sur cet article, nous estimons que l'évaluation doit être indépendante des opérateurs, qu'elle doit être fondée sur les bases de chaque discipline et effectuée à l'échelle nationale, qu'elle doit intégrer l'ensemble des missions des personnels concernés et se traduire pour eux par des conséquences concrètes, et, évidemment, qu'elle doit porter conjointement sur les individus et sur les structures de recherche auxquelles ils appartiennent.

Si toutes ces qualités de fonctionnement n'étaient pas réunies, l'évaluation serait nécessairement chaotique.

M. le président. L'amendement n° 137, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le cinquième alinéa (3°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche, après les mots :

des établissements et organismes mentionnés au 1°

insérer les mots :

ainsi que leurs unités de recherche

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Il est nécessaire que l'évaluation des personnes ne soit pas dissociée de l'évaluation des équipes dans lesquelles elles travaillent dans la mesure où le contexte dans lequel les personnes exercent leur compétence est aussi important que leur compétence elle-même.

M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche, après les mots :

l'évaluation d'organismes étrangers

insérer les mots :

ou internationaux

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision destiné à permettre à l'Agence de participer à l'évaluation non seulement d'organismes étrangers mais aussi d'organismes internationaux, tels l'OCDE ou l'ONU.

M. le président. L'amendement n° 92 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-1 du code de la recherche par un alinéa ainsi rédigé :

« Des documents élaborés par les structures privées sur l'utilisation des aides publiques à la recherche lui sont communiqués.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Il s'agit de donner à l'Agence d'évaluation un regard sur ce qui se passe dans les structures privées.

Certes, on imagine mal notre Agence d'évaluation, institution publique, frapper à la porte des laboratoires des entreprises, faire l'inventaire de leurs procédures, du management de leurs ingénieurs chercheurs et publier leurs classifications dans un palmarès comparatif. Mais nous imaginons aussi mal comment peut se justifier l'attribution répétée de moyens à l'aveugle, moyens publics dont nous avons à rendre compte, à des structures privées qui ont toujours été en demande de moyens mais qui, pour beaucoup d'entre elles en France, n'ont jamais manifesté un grand enthousiasme pour les activités de recherche.

Ne nous voilons pas la face, les effets d'aubaine peuvent exister partout ! Regardons ce qui se passe dans les zones franches : aux côtés d'entreprises procédant à de réelles créations d'emploi, on voit aussi arriver des PME de la ville voisine qui ne font que translater leur activité et leurs quelques salariés.

Dans le cadre du programme agricole de maîtrise des pollutions organiques, j'ai connu dans le Nord-Pas-de-Calais des entrepreneurs indélicats qui empochaient la subvention et qui, loin de mettre aux normes les effluents de leur porcherie, agrandissaient leur élevage. Minoritaires, marginaux, ils étaient ensuite sanctionnés et sommés de s'exécuter, mais cela existe !

C'est pourquoi l'amendement n° 92 rectifié, tout en respectant l'aspect sphère privée de ces structures, leurs recherches, leurs méthodes et leur organisation, prévoit qu'elles devront fournir à l'Agence d'évaluation des documents qu'elles élaboreront elles-mêmes et dans lesquels elles rendront compte de la bonne utilisation qu'elles font de l'argent public.

M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-2 du code de la recherche, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le conseil définit les mesures propres à garantir la transparence et la publicité des procédures d'évaluation.

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Nous insistons beaucoup sur l'importance de la diffusion de la culture et des résultats scientifiques. Dans cet amendement, la commission spéciale insiste sur l'importance qu'elle attache à la transparence de l'évaluation, laquelle passe par la transparence et la publicité des procédures, dont le conseil devra s'assurer.

M. le président. L'amendement n° 138, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Au deuxième alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-2 du code de la recherche, remplacer les mots :

Son président, nommé parmi ses membres

par les mots :

Son président, élu par ses membres

La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. On retrouve dans cet amendement les préoccupations qui sous-tendent l'ensemble de nos amendements. Nous insistons ici sur deux aspects importants : d'une part, l'élection des responsables des instances de la recherche par les acteurs de la recherche eux-mêmes et la garantie que la majorité d'entre eux soient bien issus de la société scientifique et de ses différentes catégories professionnelles ; d'autre part, la transparence des critères d'évaluation pour assurer la nécessaire relation de confiance entre tous les partenaires de l'évaluation.

Il s'agit ainsi de préserver l'instance d'évaluation des enjeux politiques et économiques et de lui conférer une véritable indépendance.

M. le président. L'amendement n° 93 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

A- Dans le quatrième alinéa (1°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-2 du code de la recherche, remplacer le chiffre :

dix

par le chiffre :

huit

B- En conséquence, compléter le même texte par un alinéa ainsi rédigé :

« 4° deux parlementaires membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a fêté ses vingt ans. Il rassemble des parlementaires des deux assemblées, ce qui n'est pas courant, parlementaires appuyés par des administrateurs de grande compétence. Ses rapports sont reconnus, et l'anticipation de certains révèle une vision à long terme nécessaire à la décision publique.

Je crois que le temps est venu de lui trouver une place officielle dans la nouvelle architecture de la recherche. On pouvait penser au Haut Conseil, mais le présent projet de loi renvoie sa composition à un décret. On pouvait également penser à l'ANR, mais est-il judicieux de placer des parlementaires dans le cercle de ceux qui attribuent des moyens à des destinataires fléchés ? En revanche, deux sièges à l'Agence d'évaluation permettraient une interface entre la recherche et l'office, donc le Parlement, dans un cadre où la visibilité sur ce qui se fait, sur les points faibles comme sur les points forts, serait bonne et sans interférence avec les arbitrages qui reviennent aux experts ou avec l'évaluation par les pairs.

C'est le but de ce modeste amendement, dont l'adoption serait un geste fort en direction de ceux qui effectuent une énorme somme de travail dans l'office.

M. le président. L'amendement n° 140, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Compléter le troisième alinéa (1°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-2 du code de la recherche par les mots :

élues par quatorze membres mentionnés aux 2° et 3°

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Cet amendement est déjà défendu.

M. le président. L'amendement n° 139, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans les deux derniers alinéas (2° et 3°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-2 du code de la recherche, remplacer les mots :

chercheurs ou d'enseignants-chercheurs

par les mots :

chercheurs, d'enseignants-chercheurs, d'ingénieurs, de techniciens et d'ingénieurs administratifs

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Les ingénieurs, hommes et femmes, les techniciens et techniciennes, les ingénieurs administratifs, hommes et femmes, sont des acteurs et des actrices à part entière de la recherche. Aussi, comme tout projet de recherche est développé dans un cadre collectif, il nous paraît normal de faire apparaître concrètement dans le présent projet de loi l'ensemble des catégories de personnel qui interviennent.

M. le président. L'amendement n° 141, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le dernier alinéa (3°) du texte proposé par le III de cet article pour l'article L.114-3-2 du code de la recherche, remplacer les mots :

sur proposition des instances d'évaluation compétentes en matière d'

par les mots :

élus au sein des instances compétentes en matière d'évaluation de l'

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. Dans l'exposé des motifs, sous le titre « Un pacte de la nation avec sa recherche », on peut lire : « La recherche exige des moyens significatifs et une liberté propre à la créativité des scientifiques, deux constituants que la présente loi garantit. Cette marque d'estime et de confiance de la nation envers ses chercheurs a pour contrepoint une responsabilité et une objectivité sans faille dans l'évaluation des travaux de recherche menés... »

Monsieur le ministre, je peux approuver vos intentions, mais, après avoir dit tout à l'heure, après Cocteau, que la confiance avait comme l'amour besoin de preuves, c'est Prévert, dont vous connaissez l'insolence et la pertinence, deux valeurs de la démocratie par ailleurs, que j'irai maintenant chercher.

Regardant la femme aimée à qui elle vient d'offrir un superbe bouquet apprêter les fleurs pour les mettre dans un vase, un homme s'adresse ainsi à elle : « Tu dis que tu aimes les fleurs,

« et tu leur coupes la queue, [...]

« Alors quand tu dis que tu m'aimes,

« j'ai un peu peur ! » (Sourires.)

Eh bien, je partage un peu à l'égard du Gouvernement la perplexité de cet homme devant la femme aimée... (Nouveaux sourires.)

Cela étant dit, je souhaite que le Gouvernement transforme « cette marque d'estime » envers les chercheurs en marques très concrètes, en particulier en permettant l'implication des acteurs de la recherche dans les décisions des instances de l'ensemble du front de la recherche.

M. le président. L'amendement n° 135, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-3 du code de la recherche, remplacer les mots :

sections dirigées

par les mots :

sections présidées

et les mots :

nommées par le Conseil de l'agence, sur proposition du président

par les mots :

élues par les membres des sections

La parole est à M. Ivan Renar.

M. Ivan Renar. La légitimité des avis rendus par chaque section doit être portée par un président dont la désignation est définie par la loi. Quant aux fonctions de direction, associées à l'organisation et au fonctionnement de la section, elles peuvent être précisées par un décret.

Cet amendement peut sembler de pure précision, mais les précisions qu'il apporte sont très importantes pour les acteurs de la recherche.

M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-3 du code de la recherche par trois alinéas ainsi rédigés :

« La section de l'évaluation des établissements et organismes mentionnés au 1° de l'article L. 114-3-1 est chargée de l'évaluation des activités de recherche ainsi que des formations dispensées dans ces établissements et organismes. Elle prépare les rapports d'évaluation soumis à l'adoption du conseil.

« La section de l'évaluation des unités de recherche prend en compte l'ensemble des missions qui leur sont assignées. Elle désigne des comités de visite ou accrédite, le cas échéant, des comités proposés par ces établissements ou organismes. Des commissions spécialisées, dont les membres sont nommés par le conseil sur proposition des instances compétentes en matière d'évaluation des personnels, établissent une synthèse des rapports d'évaluation établis par les comités de visite et proposent à l'adoption du conseil une notation des unités évaluées. Ces synthèses et ces notations sont transmises aux unités ainsi qu'aux établissements auxquels elles sont rattachées.

« La section des procédures d'évaluation des personnels prépare les avis de l'Agence sur les procédures d'évaluation mises en oeuvre dans les établissements et les organismes ainsi que les projets de recommandations soumis à l'adoption du conseil. »

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Cet amendement tend à préciser les missions et les modalités de fonctionnement des sections de l'Agence d'évaluation chargées d'évaluer respectivement les établissements, les unités de recherche et les personnels.

Il s'agit, pour l'essentiel, de réintroduire dans le texte les dispositions prévues dans l'avant-projet de loi, en tenant compte, cependant, du fait que l'évaluation des établissements prendra en compte l'ensemble de leurs missions et activités.

La commission spéciale a, en effet, estimé que les interrogations et préoccupations exprimées par un certain nombre des personnes auditionnées quant aux modalités de la réforme de l'évaluation justifiaient que les principales d'entre elles soient fixées par le législateur.

Naturellement, on peut nous dire que cela ressortit au domaine réglementaire, mais, s'agissant de la mise en place d'un nouveau dispositif, une précision quant à un mode d'emploi clair ne nous paraît pas inutile.

M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-5 du code de la recherche par les mots :

ainsi que les modalités de publicité des recommandations de l'Agence et des résultats des évaluations

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Le projet de loi renvoie à un décret en conseil d'État le soin de préciser l'organisation et le fonctionnement de l'Agence d'évaluation.

Le présent amendement propose que le décret précise également les modalités de publicité des recommandations de l'Agence et des résultats des évaluations. Cela répond au principe de transparence auquel souscrit la commission spéciale.

M. le président. L'amendement n° 106, présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L.114-3-5 du code de la recherche par les mots :

ainsi que les règles de déontologie s'appliquant à ses membres afin de garantir leur indépendance et leur impartialité.

La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Nous souhaitons que le décret qui précisera l'organisation et le fonctionnement de l'AER définisse bien les règles de déontologie devant s'appliquer à ses membres.

Nous savons que l'AER comportera des membres désignés au sein des organismes et des établissements qui devront être évalués. Les projets portés par les équipes de ces membres seront eux-mêmes évalués.

Il convient donc de s'assurer que, lorsque les projets portés par ces chercheurs membres de l'AER seront soumis à l'ordre du jour de cette agence, ceux-ci ne siégeront pas et seront dessaisis de droit - à titre provisoire - de leurs fonctions.

Il revient donc au pouvoir réglementaire de fixer ce type de règles de déontologie qui s'appliqueront aux membres de l'AER.

M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le texte proposé par le III de cet article pour l'article L. 114-3-5 du code de la recherche, ajouter un article ainsi rédigé :

« Art. L. 114-3-6. - L'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur remet chaque année au Gouvernement un rapport sur ses travaux ainsi que sur l'application des dispositions de la présente loi en matière d'évaluation. Ce rapport est transmis au Haut conseil de la science et de la technologie, à l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques ainsi qu'aux commissions parlementaires compétentes en matière de recherche. »

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Toujours dans le but d'assurer la publicité et la transparence des travaux d'évaluation, la commission spéciale souhaite que l'Agence d'évaluation, l'AERES, établisse un rapport annuel sur ses travaux et sur l'application des nouvelles dispositions en matière d'évaluation.

Ce rapport serait remis au Gouvernement et transmis au Haut conseil de la recherche et de la technologie, ainsi qu'au Parlement, par le biais à la fois de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques - nous avons la chance d'avoir son président comme rapporteur - et des commissions parlementaires compétentes en matière de recherche, la commission des finances, la commission des affaires économiques et la commission des affaires culturelles.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 122 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, qui tend à décrire les missions, la composition et le fonctionnement de l'Agence et qui vient donc en concurrence avec ses propres propositions.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 122.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements nos 21 et 105 rectifié ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. Quand on parle d'enseignement supérieur, on peut comprendre également les sections de techniciens supérieurs ou les classes préparatoires. Il est bien clair qu'en l'occurrence ne sont concernés que les établissements d'enseignement supérieur ayant une composante « recherche ». Le compte rendu des débats en fera foi.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 21 et 105 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 133 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. Nous ne souhaitons pas que les élus représentent les deux tiers des évaluateurs. Il est bien évident que l'évaluation doit être fondée plus sur la compétence que sur la représentativité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 133.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cette excellente suggestion.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je suis tout à fait favorable à cet amendement, mais je regrette qu'on n'ait pas cité, à côté de l'ANR, l'AII, l'Agence industrielle de l'innovation.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 134 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 134.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 23 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 136 n'a plus d'objet.

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 137 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 92 rectifié ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement très intéressant.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement ne partage pas l'avis de la commission.

Lorsque des aides publiques à la recherche sont accordées à des entreprises, on peut se trouver dans deux cas de figure : soit il s'agit de dispositifs fiscaux et c'est le dispositif dans son ensemble qui doit faire l'objet d'évaluations périodiques, d'études d'impact ; soit il s'agit de subventions portant sur des recherches spécifiques et, dès lors, il y a contrat et contrôle de l'exécution des prestations.

Par conséquent, il ne me paraît pas que les recherches conduites dans le secteur privé, même si elles font l'objet d'un soutien de la part des pouvoirs publics, doivent être soumises à une évaluation par l'Agence au sens prévu par la loi.

Certes, il doit y avoir évaluation, mais elle n'est pas de même nature.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 25 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 138 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 138.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 93 rectifié ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Il est proposé de réduire de10 à 8 le nombre de personnalités qualifiées, ce qui libère deux sièges pour des parlementaires membres de l'Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques. Cette proposition nous paraît tout à fait justifiée. La commission y est favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Cette proposition semble intéressante, même si ce n'est pas le dispositif qu'avait initialement prévu le Gouvernement. Le Gouvernement y est favorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Cet amendement s'impose dans la mesure où les travaux menés par l'Office sont d'une qualité exceptionnelle. Tout le monde est d'accord sur ce point.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 93 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 140 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement. En effet, des personnalités qualifiées n'ont pas à être élues. Elles siègent en raison de leurs compétences.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 140.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 139 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission souhaiterait entendre l'avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. L'ensemble des personnels sont représentés dans certaines instances. Il n'y a pas lieu qu'ils le soient dans ce conseil.

M. le président. Quel est donc l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Monsieur Renar, maintenez-vous l'amendement ?

M. Ivan Renar. Les équipes de recherche ne comprennent pas que les chercheurs, elles comprennent aussi tous ceux qui concourent au travail de recherche, des ingénieurs aux femmes de ménage... Tous ces personnels devraient être représentés. Il faudra bien un jour sortir du Moyen-Âge !

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. Je suis assez réservé sur cet amendement, comme je l'étais tout à l'heure à propos de la présence de parlementaires dans une instance d'évaluation.

Nous avons parlé d'évaluation par les pairs : allons jusqu'au bout de cette logique ! Autant je suis partisan de faire siéger dans les conseils d'administration des parlementaires, en tant que personnalités qualifiées, autant j'estime que les représentants élus doivent être des chercheurs ou des enseignants-chercheurs. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Monsieur Fréville, il ne s'agit pas de la même chose ! L'évaluation doit être conduite par les pairs, certes, mais cet amendement vise la composition du conseil d'administration.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Lorsque l'on est évalué, on doit aussi être évaluateur ! Je souhaite que les évaluateurs soient évalués. Si nous voulons qu'il y ait des allers-retours, que l'ascenseur fonctionne, tout le monde doit pouvoir accéder également à ce type de responsabilités. Une évaluation est un travail collectif.

Bien sûr, si le conseil d'administration n'était composé que d'ingénieurs ou d'administrateurs cela poserait un problème, mais il s'agit d'un groupe, qui doit être appréhendé comme tel.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 141 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Pour des raisons que j'ai déjà évoquées, la commission est défavorable à la désignation par voie élective de membres du conseil d'administration de l'Agence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Il est défavorable, pour les mêmes raisons.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 141.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 135 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 135.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 26 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 27 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Cet amendement introduisant une précision très utile, le Gouvernement y est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 106 ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Cet amendement tend à confier à un décret en Conseil d'État le soin de préciser les règles de déontologie qui s'appliquent aux membres de l'agence d'évaluation, afin de garantir leur indépendance et leur impartialité.

Cette disposition est intéressante, mais la commission spéciale avait suggéré à ses auteurs de la transformer en sous-amendement à l'amendement n° 27, faute de quoi les deux textes seraient incompatibles.

Dès lors que l'amendement n° 27 a été adopté, cette incompatibilité devient évidente. La commission donne donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Pour les mêmes raisons techniques, le Gouvernement est défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. J'interviens car l'argument invoqué pour rejeter l'amendement n° 106 me surprend extrêmement.

En effet, monsieur le rapporteur, vous nous dites que, si cette disposition avait été présentée sous la forme d'un sous-amendement à l'amendement n° 27, qui évoque « les modalités de publicité des recommandations de l'agence et des résultats des évaluations », elle aurait pu être acceptée. Or chacun voit bien que cette question est totalement distincte de celle des règles de déontologie ! Je ne comprends pas, monsieur le rapporteur, comment vous pouvez affirmer que l'amendement n° 106 ne peut être accepté parce qu'il ne sous-amende pas une disposition qui est dépourvue de lien avec lui !

En revanche, comme vous l'avez souligné vous-même, il est tout à fait sage de doter de règles de déontologie une instance d'évaluation. Dans le monde de l'université et de la recherche, il arrive très fréquemment qu'un membre d'une instance d'évaluation soit en même temps partie prenante à une recherche, parce que tel étudiant ou chercheur a travaillé avec lui ou dans son laboratoire. Certaines relations de proximité ne favorisant pas une évaluation indépendante, il est sage de prévoir des règles de déontologie.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Je voterai en faveur de cet amendement, qui me semble très important.

Les pratiques européennes ou internationales nous montrent d'ailleurs la voie à suivre, qui passe par des techniques très simples, comme la publication par les chercheurs de leurs curriculum vitae et de la liste des laboratoires auxquels ils ont appartenu, des programmes de recherche dans lesquels ils sont engagés ou l'ont été au cours de l'année qui précède, ou encore des partenariats qu'ils vont conclure l'année suivante. Toutes ces méthodes garantissent le respect de la déontologie et permettent d'éviter que les évaluations ne soient influencées par des liens trop intimes entre les programmes de recherche.

M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Je comprends parfaitement l'argumentation de nos collègues, mais mes objections ne portent pas sur le fond ! Nous sommes tous d'accord sur la nécessité de rappeler les règles de déontologie.

Toutefois, lors des travaux de la commission spéciale, nous avons souhaité que le contenu de l'amendement n° 106 soit intégré à l'amendement n° 27. Il eût suffi de compléter le texte proposé par les deux dispositions évoquées, en les juxtaposant !

M. Jean-Pierre Sueur. Puisque ce n'est pas un problème de fond, pourquoi ne pas le faire ?

M. le président. Dans ces conditions, pourquoi ne pas rectifier l'amendement ?

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Vous avez raison, monsieur le président : je rectifie donc l'amendement n° 106 dans le sens indiqué par M. Valade.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 106 rectifié, présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin, Michel, Picheral, Saunier, Sueur, Todeschini, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le III de cet article pour l'article L.114-3-5 du code de la recherche par les mots :

et les règles de déontologie s'appliquant à ses membres afin de garantir leur indépendance et leur impartialité.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 106 rectifié ?

M. François Goulard, ministre délégué. J'y suis favorable.

Je préciserai seulement que ces règles de déontologie sont aujourd'hui très largement appliquées par le monde scientifique. Pour prendre un seul exemple, les curriculums des membres des commissions scientifiques chargées de l'évaluation des projets lancés par l'agence nationale de la recherche - mise en place en février dernier - sont accessibles sur Internet, de telle sorte que les liens éventuels des évaluateurs avec les porteurs de projet sautent aux yeux de tous. En pareil cas, les membres de la commission se récusent naturellement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 106 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 28 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

(M. Roland du Luart remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart

vice-président

Art. 4
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Art. 6

Article 5

Le code de l'éducation est modifié ainsi qu'il suit :

« 1° Au titre IV du livre II, le chapitre II est remplacé par les dispositions suivantes :

« CHAPITRE II

« L'ÉVALUATION DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS À CARACTÈRE SCIENTIFIQUE, CULTUREL ET PROFESSIONNEL

« Art. L. 242-1. - L'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel est assurée par l'Agence de l'évaluation de la recherche mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche.

« 2° Au cinquième alinéa de l'article L. 711-1, les mots : « au Comité national d'évaluation » sont remplacés par les mots : « à l'Agence d'évaluation de la recherche mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche » ;

« 3° Aux deux derniers alinéas de l'article L. 711-4, les mots : « le Comité national d'évaluation de la recherche » sont remplacés par les mots : « l'Agence d'évaluation de la recherche mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche » ;

« 4° Au troisième alinéa de l'article L. 721-1, les mots : « Le Comité national d'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel » sont remplacés par les mots : « L'Agence d'évaluation de la recherche ».

M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 2° de cet article :

2° Au cinquième alinéa de l'article L. 711-1, les mots : « au Comité national d'évaluation prévu à l'article L. 242-2 » sont remplacés par les mots : « à  l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche ».

 

 

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence rédactionnelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 3° de cet article :

3° Au troisième alinéa du II de l'article L. 711-4, les mots : « le Comité national d'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel. Le comité », sont remplacés par les mots : « l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche. L'Agence ».

 

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Monsieur le président, si vous le permettez je présenterai ensemble les amendements nos 30 et 31.

Il s'agit d'amendements de rectification.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement y est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le 3° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :

bis Au dernier alinéa de l'article L. 711-4, les mots : « le Comité national d'évaluation ; ce dernier » sont remplacés par les mots : « l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche ; cette dernière » et  les mots : « il émet » sont remplacés par les mots : « elle émet ».

Le Gouvernement s'est exprimé sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS D'ADAPTATION ET DE SIMPLIFICATION EN MATIERE DE RECHERCHE

Art. 5
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Art. additionnels après l'art. 6

Article 6

À l'article L. 112-1 du code de la recherche, le d devient le e et il est ajouté un d ainsi rédigé :

« d) Le développement d'une capacité d'expertise ; »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 151, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

L'article L. 112-1 du code de la recherche est ainsi modifié :

1° Après le quatrième alinéa (c), il est inséré un c) bis ainsi rédigé :

"c) bis Le développement d'une capacité d'expertise ;"

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur de la commission spéciale sur la recherche. Il s'agit d'un amendement de cohérence rédactionnelle.

M. le président. L'amendement n° 94 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour le d de l'article L. 112-1 du code de la recherche par les mots :

, en vue d'éclairer les politiques publiques et l'opinion publique

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement propose de compléter la définition de la mission d'expertise confiée à la recherche.

Inscrire dans la loi cette mission constitue un élément très positif. D'ailleurs, elle existe de fait dans les laboratoires et les organismes. Elle est commandée et financée par des entreprises, qui ne disposent pas de cette capacité, avant la mise sur le marché de certains produits, voire parfois après, si un doute apparaît. Quand la directive Reach s'appliquera enfin, si la Commission de Bruxelles ne l'érode pas trop sous la pression des lobbys, les laboratoires seront très sollicités.

L'expertise est aussi commandée par les agences qui disposent en leur sein de chercheurs aptes à formuler les questions des pouvoirs publics et à piloter des expertises collectives. Ces agences ont besoin de ressources humaines. Cet amendement tend à préciser que l'expertise ne se limite pas à la consultance privée et qu'elle a vocation aussi - et principalement -, à éclairer les politiques publiques et l'opinion publique.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement qui se propose de préciser la définition de l'expertise scientifique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 151 de la commission.

En revanche, tout en comprenant les arguments de Mme Blandin, il nous semble que la rédaction de l'amendement n° 94 rectifié n'est pas pertinente, car trop limitative. Ainsi, contrairement, sans doute à son intention première, Mme Blandin exclut l'expertise au profit d'entreprises privées, qui est pourtant une réalité.

En effet, l'expertise est au profit, bien sûr, de la puissance publique et l'opinion publique, mais également de l'entreprise privée. Ces deux fonctions existent et doivent naturellement continuer d'exister. C'est la raison pour laquelle, dans l'état actuel du texte proposé, nous ne pouvons pas être favorables à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Monsieur le président, compte tenu de la position que vient d'exprimer le Gouvernement, je suggère à Mme Blandin de transformer son amendement n° 94 rectifié en un sous-amendement n° 94 rectifié bis à l'amendement n° 151 de la commission.

M. le président. Madame Blandin, acceptez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?

Mme Marie-Christine Blandin. J'étais un peu déconcertée par la tâche, mais cette solution me semble satisfaisante. Je souhaite en effet donner des gages à M. le ministre, car il ne s'agit pas d'être limitatif. Bien entendu, comme je l'ai dit dans mon exposé, la consultance privée existe et est fondamentale, mais il est également nécessaire que la loi reconnaisse à la science cette mission d'expertise publique, en complément, et non en remplacement, de la consultance privée.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 94 rectifié bis, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par l'amendement n° 151 pour modifier l'article L. 112-1 du code de la recherche, par les mots :

, en vue d'éclairer les politiques publiques et l'opinion publique

Mme Marie-Christine Blandin. Pour répondre à la demande de M. le ministre, il conviendrait de compléter ce sous-amendement, pour prévoir explicitement la consultance.

M. le président. Tout cela est un peu compliqué !

Quel est l'avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je suggère d'améliorer encore la rédaction du sous-amendement n° 94 rectifié bis. Le texte de l'amendement n° 151 devrait être complété ainsi : « en vue notamment d'éclairer les politiques publiques et l'opinion publique ». Ce faisant, toute ambiguïté serait levée, puisque l'emploi de l'adverbe « notamment » écarte le risque d'exclusivité.

M. le président. Madame Blandin, acceptez-vous de rectifier votre sous-amendement dans le sens suggéré par M. le ministre délégué ?

Mme Marie-Christine Blandin. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement - de synthèse ! - n° 94 rectifié ter, présenté par Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par l'amendement n° 151 pour modifier l'article L. 112-1 du code de la recherche, par les mots :

, en vue notamment d'éclairer les politiques publiques et l'opinion publique

Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est quelque peu délicat de procéder à des rectifications rédactionnelles en séance. Il ne faudrait pas trop s'y habituer !

La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. Monsieur le président, la loi n'a pas à être bavarde et les débats parlementaires font foi. Nous souhaitons que l'expertise scientifique ait deux objectifs : la consultance, d'une part, et l'éclairage des politiques publiques, d'autre part.

Cela a d'ailleurs été clairement précisé. Par conséquent, ceux qui voudront comprendre la pensée du législateur se référeront à nos débats et verront très bien que nous avons voulu placer ces deux objectifs à égalité. Voilà pourquoi, monsieur le ministre, je n'aime pas le terme « notamment ».

M. le président. Monsieur Fréville, vous avez au moins le mérité de la constance et de la clarté !

La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

M. Hugues Portelli. Je suis assez réticent à voir l'expression « l'opinion publique » figurer dans un texte de loi, fût-elle de programme.

Il s'agit en effet d'un concept extrêmement flou et subjectif. Personnellement, je sais ce que recouvrent la communauté scientifique et les experts, mais je ne vois pas du tout à quoi correspond l'opinion publique.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 94 rectifié ter.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 151.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.

Art. 6
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 7

Articles additionnels après l'article 6

M. le président. L'amendement n° 32 rectifié, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 411-1 du code de la recherche est complété par un alinéa f) ainsi rédigé :

« f) L'expertise scientifique. »

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Le fait de reconnaître l'expertise parmi les missions générales de la recherche publique est positif. Toutefois, pour que cette précision ait des effets réels, il convient de reconnaître aussi l'expertise au niveau des missions individuelles des personnels de recherche. Il en sera ainsi tenu compte dans leur évaluation.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.

L'amendement n° 33, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 411-3 du code de la recherche, il est inséré un article L. 411-3-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 411-3-1. - Les statuts des établissements publics de recherche déterminent les conditions dans lesquelles les actions d'expertise engagent la responsabilité de ces établissements. »

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Nous souhaitons compléter le dispositif, car il est important que les personnels puissent accomplir leurs missions d'expertise dans des conditions de sécurité juridique satisfaisantes. Or, depuis quelques années, en particulier avec le développement de l'« expertise collective », des doutes sont apparus quant au partage des responsabilités en matière civile entre, d'une part, les chercheurs qui ont rendu l'expertise, et, d'autre part, les organismes qui les emploient.

Il faut mettre fin à ce flou. Certains établissements ont déjà montré l'exemple, en précisant clairement dans leur règlement les différents types d'expertise et de responsabilité.

Le présent amendement vise à étendre ce type de réglementation à l'ensemble des établissements de recherche.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Tout en reconnaissant l'existence de ce problème, qui a d'ailleurs été souligné par la Cour des comptes dans un rapport récent, je ne pense pas que la solution proposée réponde exactement à ce qui est souhaité. En effet, des statuts, qui sont d'ordre réglementaire, ne peuvent pas traiter de questions de responsabilité, lesquelles sont, pour l'essentiel, d'ordre législatif.

Par conséquent, nous ne pouvons pas être favorables à cet amendement, même si nous devrons, assurément, nous attaquer à ce problème.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnels après l'art. 6
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. additionnels après l'art. 7

Article 7

À compter de la création de l'établissement public « Agence nationale de la recherche », l'ensemble des biens, droits et obligations du groupement d'intérêt public « Agence nationale de la recherche » lui sont dévolus suivant des conditions précisées par décret.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 108, présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral, Saunier, Sueur, Todeschini, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Il est créé un établissement public nommé « Agence nationale de la recherche ». L'ensemble des biens, droits et obligations du groupement d'intérêt public « Agence nationale de la recherche » lui sont dévolus suivant des conditions précisées par décret.

La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. L'Agence nationale de la recherche a été créée le 7 février 2005, sous la forme d'un GIP regroupant plusieurs établissements publics de recherche et l'Association de la conférence des présidents d'université pour la recherche.

Créée pour se substituer à deux anciens fonds, le Fonds national de la science, le FNS, et le Fonds de la recherche technologique, le FTR, dont elle a repris les périmètres d'intervention, l'ANR constitue une agence de moyens supplémentaire. Ses missions premières sont le financement de projets à court terme et le renforcement des partenariats.

Or, comment ces missions s'articuleront-elles avec celles des autres agences de financement, telles que l'Agence de l'innovation industrielle et Oséo-ANVAR ?

Le champ d'intervention actuelle de l'ANR, qui devrait être élargi, reprend donc celui du FNS et du FTR : recherche biomédicale, sciences du vivant, sciences et technologies de l'information et de la communication, énergie et développement durable.

En 2005, plus de 5 300 auraient été déjà déposés à l'ANR. Mais quelle est la part de projets « blancs », permettant de financer la recherche fondamentale ?

M. François Goulard, ministre délégué. 30 % !

M. Yannick Bodin. Je vous remercie de cette précision, monsieur le ministre !

En 2005, l'ANR a bénéficié d'une subvention de 310 millions d'euros, alors que le Gouvernement avait initialement promis de lui affecter 500 millions d'euros et qu'il revendique un apport de 350 millions d'euros. En 2006, l'ANR bénéficierait de 280 millions d'euros supplémentaires, mais même l'affectation des fonds est entourée des plus grandes imprécisions.

Ce sont autant d'interrogations qui laissent planer de nombreuses inquiétudes quant au bien-fondé et à l'utilité effective de cette nouvelle structure, à l'heure où l'on parle de rationaliser la recherche française.

Aussi, afin de ne pas laisser en suspens d'autres questions, nous souhaitons, par cet amendement, que soit tout de suite clarifié le statut juridique de cette agence et que l'actuel GIP devienne, aux termes du présent projet de loi, un établissement public, plutôt que de renvoyer cette transformation à une hypothétique disposition réglementaire.

M. le président. L'amendement n° 96 rectifié, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Les priorités, orientations et fonctionnement de l'Agence nationale de la recherche font l'objet d'un rapport déposé chaque année sur le bureau du Parlement. Ce rapport comprend le détail des financements qu'elle attribue.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. L'ANR est un outil récent, qui a fonctionné avec des statuts provisoires, sans avoir fait l'objet d'autres débats que celui qui a eu lieu lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2005. Le compte rendu de son activité nous est parvenu très tardivement, alors que la commission des affaires culturelles achevait les auditions organisées dans le cadre de la préparation du présent projet de loi.

Cela dit, nous souhaitons qu'un rapport concernant les financements de l'ANR soit officiellement déposé chaque année sur le bureau du Parlement. Il nous semble indispensable de connaître comment l'agence répartit ses subventions, par thèmes, par types d'acteurs et par volumes budgétaires.

M. le président. L'amendement n° 109, présenté par Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Bricq, MM. Raoul, Bodin, Michel, Piras, Saunier, Sueur, Todeschini, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'Agence nationale de la recherche est dotée d'un conseil scientifique. Un décret en Conseil d'État précise sa composition, ses attributions et ses modalités de fonctionnement.

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement a pour objet de prévoir l'instauration d'un conseil scientifique au sein de l'ANR, ce qui suscite un vrai débat : certains plaident en faveur de ce conseil, d'autres contre.

Ainsi, une structure comme l'ANR, qui a une mission en rapport avec la recherche, a besoin d'un tel conseil scientifique, pour garantir qu'elle ne se fourvoie pas.

En revanche, aux dires de certains, l'ANR serait un « opérateur », le « bras armé de l'État stratège », l'« exécutant du Haut conseil ». Ceux-ci voient un risque de doublon entre un Haut conseil extérieur et un conseil scientifique interne.

Or ce risque est facilement gérable. Il suffit que le conseil scientifique soit clairement mandaté sur la déclinaison interne des orientations scientifiques, en cohérence avec les recommandations extérieures. C'est une mission à part entière, et ce n'est pas le Haut conseil qui l'assurera.

Au-delà de la cohérence, le conseil scientifique pourra jouer un rôle d'arbitrage sur les projets « blancs ».

Enfin, en l'état du texte en préparation, malgré la réintroduction tardive du Haut conseil par le biais d'un amendement du Gouvernement, nous n'avons aucune garantie sur sa composition et la densité de son activité.

M. le président. L'amendement n° 110 rectifié, présenté par M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin, Michel, Picheral, Saunier, Sueur, Todeschini, Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

L'Agence nationale de la recherche est dotée d'un collège d'experts. Un décret en Conseil d'État précise sa composition, ses attributions et ses modalités de fonctionnement.

La parole est à M. Yannick Bodin.

M. Yannick Bodin. Nous sommes quelque peu réticents à présenter cet amendement maintenant, dans la mesure où nous aurions souhaité connaître d'abord la position de la commission et du Gouvernement sur l'amendement n° 108.

En effet, l'amendement n° 110 rectifié est un amendement de repli. Nous proposons que, à défaut d'un conseil scientifique, l'ANR bénéficie de l'éclairage d'un conseil d'experts qui serait placé en son sein.

En 2005, l'ANR a examiné quelque 5 300 dossiers et en a sélectionné 1 400, soit un peu plus du quart. Compte tenu du nombre important de dossiers et de projets sélectionnés, il est fondamental que les choix de cette nouvelle agence de moyens, et donc les financements attribués, soient établis selon des critères scientifiques et après expertise.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. L'actuel article 7 évoque la transformation du groupement d'intérêt public « Agence nationale de la recherche » en établissement public, mais sans la réaliser.

Il est vrai que celle-ci est d'ordre réglementaire, dans la mesure où l'agence ne constitue pas à elle seule une catégorie d'établissement public. Toutefois, le décret de transformation n'ayant toujours pas été pris, la commission spéciale a considéré que cette création par la loi était une bonne idée et a donc émis un avis favorable sur l'amendement n° 108.

S'agissant de l'amendement n° 96 rectifié, je suggère à Mme Blandin de le transformer en sous-amendement à l'amendement n° 108. En effet, l'adoption de celui-ci ferait tomber celui-là.

La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 109, qui vise à doter l'ANR d'un conseil scientifique dont la composition, les attributions et les modalités de fonctionnement seraient fixées par décret en Conseil d'État.

La question d'une telle création pourrait se poser si l'agence avait besoin qu'une instance interne propre détermine ses priorités scientifiques. Mais tel n'est pas le cas dans la mesure où, comme nous l'avons décidé, le Haut Conseil sera réintroduit dans le texte de loi. C'est à ce Haut Conseil qu'il reviendra de proposer les orientations scientifiques qui, après décision du Gouvernement, traceront le cadre dans lequel l'ANR sélectionnera les projets via des comités thématiques. Privé d'une telle faculté et, par conséquent, d'un espace d'expression propre, le conseil scientifique de l'ANR risquerait alors d'être un doublon ou un concurrent du Haut Conseil. C'est ce qu'il nous faut éviter.

La commission a aussi émis un avis défavorable sur l'amendement n° 110 rectifié, dont l'objet est très voisin et qui appelle les mêmes objections.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Avant d'apporter quelques précisions d'ordre général, j'indique que le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

Les chiffres sont parfaitement clairs : en 2005, nous avons doté l'ANR de 700 millions d'euros en autorisations d'engagement ; en 2006, ce montant sera porté à 800 millions d'euros.

Les crédits de paiement, pour leur part, étaient de 350 millions d'euros en 2005. Ils seront en 2006 de 590 millions d'euros, soit une progression de 240 millions d'euros.

L'écart avec les chiffres que vous avez cités s'explique par la différence entre les crédits de paiement dont est dotée la nouvelle agence et ceux dont était doté l'ancien fonds national de la science, lesquels incluaient des opérations qui n'étaient pas conclues au moment de la création de l'ANR. Néanmoins, je confirme les chiffres qui ont été publiés.

Par ailleurs, l'activité de l'ANR est entièrement publique. L'ensemble de ses appels à projets sont publiés. Les résultats des travaux des commissions scientifiques qui choisissent les projets sont publics.

L'agence, qui ne fonctionne que depuis quelques mois - et c'était une gageure que de faire fonctionner aussi rapidement un tel organisme, qui compte seulement quarante collaborateurs permanents -, a réussi non seulement à lancer des appels à projets, mais encore, après avoir dépouillé 5 400 réponses, à arrêter son choix sur environ le quart d'entre eux, en constituant pour ce faire des commissions ad hoc. C'est une performance tout à fait remarquable.

L'agence a déjà publié un rapport d'activité et a présenté une information complète sur ses activités. C'est, à mes yeux, un véritable modèle en matière de mise en oeuvre d'une politique nouvelle que je vous demande aujourd'hui de confirmer par votre vote.

Pourquoi le Gouvernement s'oppose-t-il à l'amendement visant à ériger l'ANR en établissement public, son point de vue divergeant en cela de celui de la commission ? Tout simplement parce qu'une telle disposition n'est pas du domaine de la loi. En effet, l'article 34 de la Constitution dispose que la loi fixe les règles concernant « la création de catégories d'établissements publics ». Or le Conseil d'État a estimé - et nous partageons cette analyse - qu'il ne s'agissait pas d'une nouvelle catégorie d'établissements publics. C'est pourquoi nous considérons que la transformation de l'ANR en établissement public relève d'un décret et non d'une loi.

S'agissant du conseil scientifique ou du collège d'experts dont, respectivement, Mme Blandin et M. Bodin proposent de doter l'ANR, je tiens à rappeler que les grands établissements scientifiques français mènent des politiques en fonction de leurs spécialités dans les branches de la science qui font l'objet de leurs travaux. Dans le cas du CNRS, toutes les disciplines sont concernées.

L'ANR procédant par appels à projets, il ne faudrait pas que sa politique, dans tel ou tel champ, soit contraire à la politique conduite par un grand organisme de recherche. Prenons l'exemple de l'INRA, l'Institut national de la recherche agronomique. Imaginons que l'ANR lance des appels à projets qui ne soient pas conformes, voire qui soient contraires à la politique qui est suivie par cet établissement : vous seriez les premiers, mesdames, messieurs les sénateurs, à dénoncer l'incurie de l'État et son incapacité à assurer la cohérence des différents moyens d'action publique dont il dispose !

C'est pourquoi nous pensons que le Haut Conseil de la science et de la technologie doit apporter un éclairage général permettant au Gouvernement d'arrêter ses grandes priorités en matière de recherche. Des priorités plus précises seront ultérieurement définies, à la suite d'une discussion réunissant les organismes de recherche et les pouvoirs publics, sous le contrôle du Parlement.

Donner à l'ANR la possibilité de définir sa propre politique scientifique, ce serait vraiment prendre le risque d'une grave incohérence de la politique de recherche. L'État ne peut se le permettre s'agissant d'une politique aussi importante.

Nous considérons que l'ANR est une agence de gestion de procédures et qu'elle est en cela extrêmement utile. L'appel à projets tel qu'il est formalisé à l'ANR représente un progrès pour la recherche française. Il sera pour nous l'occasion de nous conformer aux standards internationaux, de nous rapprocher des procédures européennes et, partant, d'augmenter les chances de succès de nos équipes dans les appels à projets européens.

Aucune instance, quelle qu'elle soit, ne peut définir sa propre politique scientifique. Notre conception diffère donc totalement de celle qui est exprimée dans les amendements nos 109 et 110 rectifié.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. En dépit de l'attention que nous avons portée à vos propos, monsieur le ministre, le dispositif que vous proposez de mettre en place demeure pour nous d'une grande complexité. Ce point a été souligné au cours de la discussion générale, tant par M. Raoul que par M. Lagauche et Mme Blandin. Néanmoins, vous n'en avez tiré aucune conséquence.

Vous vous obstinez à faire de cette agence une structure de moyens, une structure technique, en quelque sorte. Or, vu les sommes qui sont en jeu, elle jouera un rôle déterminant dans les choix de recherches, nonobstant le Haut Conseil et nonobstant la politique de recherche conduite par le ministre, qui est d'ailleurs là pour cela.

M. François Goulard, ministre délégué. Il est payé pour cela !

M. Jacques Valade, rapporteur. Mal payé, certes, mais payé ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Sueur. Les décisions scientifiques prises par cette institution ont et auront nécessairement un certain poids. En fait, de la complexité qu'introduit ce projet de loi il résultera nécessairement que les moyens attribués à l'ANR seront autant de moyens qui n'iront plus aux différents organismes, aux universités, aux laboratoires.

M. Jacques Valade, rapporteur. Pourquoi donc ?

M. François Goulard, ministre délégué. Il n'y a pas d'évaporation !

M. Jean-Pierre Sueur. Tout simplement parce que, dans votre dispositif, la logique financière passe très clairement et essentiellement par l'ANR.

Vous ne souhaitez pas en faire un établissement public...

M. François Goulard, ministre délégué. Mais si !

M. Jean-Pierre Sueur. ... au motif qu'il n'appartient pas à la loi de créer des établissements publics, mais seulement des catégories d'établissements publics. Mais, dès lors que l'ANR est seul dans sa catégorie, il serait parfaitement possible d'adopter l'amendement de M. Lagauche.

Enfin, cette opiniâtreté à refuser toute présence d'un conseil scientifique auprès d'une agence qui disposera d'un tel montant de crédits en matière de recherche et, quoi qu'on dise, de telles capacités de décision, est assez surprenante. Ce ne sont pas les orientations générales données par le Haut Conseil qui détermineront strictement les choix de l'ANR ! Par conséquent, il y a là une volonté de privilégier financièrement cette instance, au détriment des instances qui disposent d'un conseil scientifique et qui, malheureusement, n'auront pas les moyens de mener les activités qu'elles souhaiteront mener.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Je m'aperçois que nous n'avons pas été totalement compris sur ce sujet qui est très important.

L'ANR sera-t-il un établissement public ? La réponse est évidemment oui. Je me suis borné tout à l'heure à indiquer que, au regard de l'article 34 de la Constitution, la création d'un établissement public était un acte de nature réglementaire. Le Gouvernement dotera l'ANR d'un statut d'établissement public dans les plus brefs délais, sans que cela affecte grandement son mode de fonctionnement.

Vous affirmez par ailleurs, monsieur Sueur, que l'argent qui ira à l'ANR sera autant d'argent qui n'ira pas aux organismes de recherche.

Situons d'abord les ordres de grandeur. Les programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur », la MIRES, pour ce qui concerne la recherche, représentent environ 10 milliards d'euros. S'agissant de l'ANR, il est question, annuellement, de 700 millions ou 800 millions d'euros en autorisations d'engagement. Autrement dit, ce n'est pas là que se trouve l'essentiel des moyens. Les budgets principaux sont inscrits au budget de l'État. Aujourd'hui, l'État, avec l'autorisation du Parlement, affecte des crédits à des organismes de recherche, à la recherche universitaire, en fonction de critères qui lui sont propres. S'il est décidé d'augmenter la dotation de tel organisme, c'est bien parce que l'on souhaite privilégier les recherches qui sont menées dans tel domaine par cet organisme.

Il y a donc bien une politique de la recherche, mais elle n'est pas toujours suffisamment explicite. Eh bien, nous proposons qu'elle soit demain plus explicite et plus claire pour l'ensemble de nos concitoyens et pour le Parlement.

Les sommes inscrites au budget de l'ANR sont distribuées selon des modalités qui sont différentes de celles que nous connaissons. Il ne s'agit pas de budgets classiques, étant précisé au passage que lesdits budgets classiques sont en augmentation. Il s'agit de crédits supplémentaires qui sont distribués à la suite d'appels à projets. Nous pensons en effet que l'appel à projets est stimulant pour les équipes de recherche et qu'il laisse une place à l'initiative. C'est tout l'intérêt des projets blancs, sur lesquels nous reviendrons à l'occasion de l'examen d'autres amendements.

L'ANR répartit ensuite ces crédits entre les organismes de recherche, tels que le CNRS, l'INSERM, l'INRA, ou les universités. Cela est d'ailleurs aisément vérifiable puisque l'ANR a d'ores et déjà attribué l'intégralité des crédits dont elle dispose pour l'exercice 2005. Si vous examinez la liste des destinataires de ces crédits, vous pourrez constater que, pour 80 % d'entre eux, ce sont des organismes publics de recherche, y compris les universités, et pour 20 %, des organismes privés, ce qui est au demeurant tout à fait légitime. Cet argent va donc à la recherche, et très majoritairement à la recherche publique.

Il n'y a pas d'évaporation des fonds. Ce sont des crédits supplémentaires qui participent de l'effort que nous consentons en faveur de la recherche.

J'espère avoir réussi à vous convaincre, monsieur Sueur, que, loin d'introduire de la complexité, nous clarifions les choses, nous fixons des orientations et aidons à identifier des priorités. À cet égard, le Haut Conseil sera utile et, grâce au Sénat, il figurera dans la loi. C'est donc un véritable progrès dans la lisibilité de la politique de recherche de notre pays que nous vous proposons.

M. le président. Madame Blandin, acceptez-vous de transformer votre amendement n° 96 rectifié en sous-amendement à l'amendement n° 108 ?

Mme Marie-Christine Blandin. C'est ce que M. le rapporteur Revol m'a effectivement suggéré de faire.

Cependant, M. le ministre ayant émis un avis défavorable sur l'amendement de M. Bodin, je maintiens mon amendement n° 96 rectifié en l'état afin qu'il ne soit pas d'emblée condamné.

M. le président. La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Nous avions émis un avis favorable sur l'amendement n° 108 dans la mesure où le décret portant création de l'établissement public n'a pas encore été pris. Cependant, après avoir entendu les explications et l'engagement formel de M. le ministre, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Je voudrais rappeler que les actions concertées de la délégation générale de la recherche scientifique et technique n'ont, à ma connaissance, jamais fait l'objet, de la part de la communauté scientifique, des critiques que nous avons entendues tout à l'heure à propos de décisions qui vont être beaucoup plus transparentes que lesdites actions.

Il me semble qu'il y a là un véritable progrès dans la gestion de projets qui ont toujours donné satisfaction aux équipes de recherche les plus performantes.

Nous voulons tous que la recherche française soit performante. En étant dans un environnement plus performant, les jeunes chercheurs auront moins tendance à quitter la France. Nous aurons même, au contraire, la possibilité d'en rapatrier un certain nombre.

Je m'étonne donc de cette hargne à l'encontre d'une agence qui n'a pas encore véritablement « fait son trou », mais qui a d'ores et déjà posé un certain nombre de jalons. Même ceux qui s'opposaient le plus à cette agence bénéficient d'ores et déjà de contrats spécifiques passés avec elle.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. L'amendement n° 108, qui avait au départ reçu un avis favorable de la commission, n'a finalement d'autre objet que d'aider M. le ministre.

Tout le monde est d'accord sur l'objectif. En quoi cela vous gêne-t-il, monsieur le ministre, que la création de l'établissement public soit inscrite dans la loi et que l'on connaisse dès maintenant les règles du jeu concernant cet établissement ? Franchement, je ne comprends pas ! Nous vous aidons ; pour une fois, aidez-nous ! (M. le ministre s'esclaffe.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 108.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)

M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé et les amendements nos 96 rectifié, 109 et 110 rectifié n'ont plus d'objet.

Art. 7
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 8

Articles additionnels après l'article 7

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 95, présenté par Mmes Blandin,  Boumediene-Thiery et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au moins 30 % des financements de l'Agence permettent le soutien à des « projets blancs ».

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. En matière de recherche, on peut souhaiter, on peut orienter, on peut décréter, mais la découverte ne se programme pas ! Elle fait irruption au détour d'une anomalie, d'un détail nouveau, d'une paillasse souillée, d'un environnement modifié.

Gageons que, si Pasteur n'avait pas trouvé de financement pour explorer la fermentation des boissons alcoolisées, il n'aurait pas découvert les germes, la stérilisation, l'asepsie, et l'on aurait persisté à mettre de la boue et de la charpie sur les plaies !

Pourtant, s'il avait existé à l'époque un Haut Conseil et une ANR, ne serait-il pas passé à côté de cette orientation marginale qu'est le perfectionnement de la bière ?

En garantissant le soutien à des « projets blancs », nous nous donnons les moyens de ne négliger ni les thématiques rares ni les pistes incertaines. Car c'est de la diversité que peut venir le savoir, que peuvent naître les innovations de demain. Pensons aux applications multiples, hier encore insoupçonnées, de la lumière cohérente et du laser.

M. le président. L'amendement n° 112, présenté par MM. Raoul et  Lagauche, Mmes Bricq et  Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'Agence nationale de la recherche consacre plus de 50 % de son budget au financement de projets blancs.

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Pour une fois, j'irai plus loin que ma collègue Marie-Christine Blandin.

D'après le bilan établi par l'ANR, il y a 30 % de programmes blancs. Tout le monde a constaté leur intérêt, en particulier pour la recherche fondamentale.

Je ne reviendrai pas sur les thèmes que nous avons abordés lors de la discussion générale. Je reprendrai simplement ce qui a été par l'un de nos rapporteurs : la lampe à incandescence n'a pas été découverte en étudiant la bougie. Les mêmes arguments peuvent être avancés concernant les découvertes de Pasteur, la diode d'Esaki et tous les progrès enregistrés sur les semi-conducteurs. Ce n'est pas en améliorant les matériaux conducteurs que l'on a pu mettre au point les technologies de l'information et de la communication qui régissent désormais notre vie quotidienne.

Ce sont souvent des démarches iconoclastes qui aboutissent à des avancées. Or de telles démarches ne peuvent pas être programmées par l'ANR si l'on s'en tient à la conception de cette agence qui ressort du texte dans son état actuel. C'est pourquoi une place plus grande doit être accordée aux projets blancs.

Si l'ANR consacrait plus de 50 % de son budget au financement de tels projets, on créerait un appel d'air tout à fait bénéfique pour la recherche fondamentale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. Nous sommes tous d'accord sur la nécessité, pour l'ANR, de consacrer une part importante de ses financements à des projets proposés par les chercheurs eux-mêmes, en particulier les jeunes chercheurs, dont les idées ne trouvent pas toujours la place qu'elles méritent dans l'organisation actuelle des laboratoires. C'est d'ailleurs l'une des raisons d'être de l'ANR.

Toutefois, la détermination chiffrée de la part réservée à ces projets relève de la gestion de l'agence et non pas de la loi. Fixer un chiffre dans la loi pourrait même s'avérer imprudent dans la mesure où la montée en puissance de l'agence devrait conduire au triplement de ses moyens annuels : 1,5 milliard d'euros en 2010, contre 500 millions d'euros en 2005.

Certes, l'ANR a consacré 30 % de ses financements aux projets blancs en 2005, mais qui peut dire ce qu'il en sera en 2010 ? Les projets répondant aux mêmes critères de créativité pourront effectivement représenter 30 % - ou plus, ou moins - du milliard et demi d'euros, nous n'en savons rien. Mais nous savons que le soutien à ces projets blancs est une vraie nécessité.

La commission souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement avant de se prononcer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Nous avons instauré les programmes blancs au moment où l'ANR a été créée et pour les raisons que vous avez, les uns et les autres, exposées.

On sait bien que, pour un certain nombre de projets, il convient de fixer un cadre afin que des réponses soient apportées aux attentes de la science et, de manière plus large, aux attentes ou aux besoins de la société. Cependant, il faut aussi, par ailleurs, laisser aux équipes une certaine liberté d'initiative. Il est donc nécessaire que des financements soient réservés à des projets de recherche qui ne font a priori l'objet d'aucune espèce d'encadrement. Nous l'avons fait en décidant, pour la première année, de consacrer 30 % du budget au financement des programmes blancs. Nous allons reproduire ce schéma en 2006.

Toutefois, comme l'a dit excellemment M. le rapporteur Henri Revol, ce n'est pas à la loi de fixer pareille proportion.

Et n'oublions pas que l'ANR n'est pas le seul moyen de financement de la recherche dans notre pays. Les organismes scientifiques, qui disposent de moyens ô combien supérieurs à ceux de l'ANR, ont aussi, d'une certaine manière, leurs projets blancs. Quand un directeur de département du CNRS attribue des crédits à une équipe de recherche, il ne le fait pas exclusivement sur un programme de recherche ; il laisse aussi de la liberté aux chercheurs.

Par conséquent, il est nécessaire de trouver un juste équilibre : d'un côté, donner une part de souplesse au dispositif et, de l'autre, encadrer les projets. En tout cas, laissez une certaine liberté aux personnes chargées de l'application des grands principes que vous arrêtez.

Voilà pourquoi je ne peux qu'être défavorable aux amendements nos 95 et 112.

M. le président. Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. Nous avions longuement discuté de ces propositions au sein de la commission spéciale, et notre position est en fait la même que celle de M. le ministre. Mais nous souhaitions l'entendre pour obtenir la confirmation qu'il serait aberrant de fixer une telle proportion de 30 %, et a fortiori de 50 %.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements nos 95 et 112.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Daniel Raoul. Je retire l'amendement n° 112.

M. le président. L'amendement n° 112 est retiré.

L'amendement n° 111, présenté par MM. Raoul et  Lagauche, Mmes Bricq et  Blandin, MM. Bodin,  Michel,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Lorsque l'Agence nationale de la recherche finance un projet conduit par un laboratoire faisant partie d'un établissement ou d'un organisme de recherche ou d'enseignement supérieur public ou privé, l'établissement ou l'organisme est destinataire de 20 % de la subvention accordée par l'agence.

La parole est à M. Daniel Raoul.

M. Daniel Raoul. Les EPST et les EPIC se trouvent quelquefois dans une situation telle qu'ils sont incapables de fournir des moyens de fonctionnement aux projets retenus par l'ANR. C'est un comble !

Il faudrait donc recourir à une méthode qui est utilisée dans d'autres instances, en tout cas à l'étranger : l'octroi d'une prime aux établissements qui hébergent les projets retenus par l'ANR.

Nous vous proposons, par cet amendement, que 20 % des crédits accordés à un projet soient affectés au fonctionnement de l'établissement qui héberge ce projet.

Au-delà de son caractère immédiatement pratique pour le budget des établissements concernés, cette mesure inciterait ces derniers à favoriser des équipes susceptibles d'être « élues » par l'ANR.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement vise à apporter une solution au problème rencontré par certains laboratoires. Mais il met sur le même plan les laboratoires publics et les laboratoires privés. Or la situation est très différente selon qu'il s'agit d'une entreprise privée, d'un EPIC, d'un EPST ou d'une université. Dans ce dernier cas, le contribuable a déjà financé, en principe, l'ensemble de la structure et son personnel. Il serait curieux que l'État finance deux fois le même établissement.

De plus, au sein d'un même EPIC, certaines unités s'apparentent à celles d'un EPST en ce qu'elles sont presque exclusivement financées par une subvention de l'État, alors que d'autres unités financent leurs frais de structures par des ressources propres.

Il est donc difficile de définir un taux général de financement. D'ailleurs, l'ANR applique aujourd'hui des règles différenciées de prise en charge de ces frais de structures selon qu'il s'agit d'une structure privée, d'un EPIC ou d'un établissement public administratif.

Toutefois, dans ce dernier cas, le taux de 4 % actuellement pratiqué est probablement insuffisant. Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous nous disiez comment cette part pourrait être relevée dans le règlement de l'ANR. C'est en effet à ce niveau que les choses pourraient être améliorées.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Tout en étant défavorable à cet amendement, comme je l'ai été à l'amendement n° 112, je me réjouis néanmoins que l'un et l'autre aient été présentés. En effet, ils me permettent de donner des explications qui me paraissent utiles, tant il est vrai que l'ANR est une nouveauté dans le paysage de la recherche en France et que ses règles de fonctionnement ne sont pas encore parfaitement connues.

Ce fameux préciput, qu'on appelle overhead dans les pays anglo-saxons, est en réalité une idée que, soit dit très modestement, j'ai avancée l'été dernier pour répondre au souci dont vous vous êtes fait l'écho, monsieur Raoul, celui des organismes de recherche qui doivent supporter un certain nombre de dépenses du fait de l'accroissement de l'activité de laboratoires dont les projets ont été retenus par l'ANR.

Rappelons qu'il n'existe pas d'équipes de recherche ou de chercheurs qui ne soient intégrés au sein d'un organisme qui supporte des frais généraux à leur profit. Il est donc légitime, utile et justifié qu'une part des sommes attribuées à un projet de recherche par l'ANR alimente le budget général de l'organisme auquel appartient l'auteur du projet.

C'est un principe que j'ai mis en avant, qui a été accepté, et qui figurera dans les règles de fonctionnement de l'ANR pour l'exercice 2006, car ce n'était pas le cas en 2005.

Je puis donc vous dire, monsieur Raoul, que vous avez été entendu par avance.

Il reste que, comme Henri Revol l'a souligné, un tel taux ne se fixe pas dans la loi. En effet, il peut varier d'une situation à une autre, en fonction de considérations très diverses. Suivant les disciplines scientifiques, on le comprend bien, l'utilisation de moyens communs est plus ou moins grande.

C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement, tout en étant d'accord avec le principe que vous défendez.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Je me range à l'avis exprimé par M. le ministre.

Cela étant, le taux de 4 % est ridiculement bas, car il ne correspond pas aux frais de gestion que supporte l'organisme de recherche. Il sera nécessaire, à mon avis, que les versements de l'ANR aboutissent plutôt à des taux de l'ordre de 10 % ou 12 %, qui correspondent normalement aux frais de gestion dans des cas comparables.

Pour autant, il me paraîtrait malsain d'inscrire le taux de 20 % dans la loi, en particulier parce qu'il pourrait en résulter des avantages excessifs, par exemple au profit de sociétés privées qui auraient des frais généraux disproportionnés.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. J'ai bien entendu les propos de M. le ministre et j'ai pris note de l'orientation qu'il souhaite donner concernant la prise en charge du surcoût de fonctionnement par les EPST, les EPIC ou les universités.

À cet égard, permettez-moi d'apporter un témoignage. Un projet élaboré par un laboratoire de l'université de ma ville a été retenu. Malheureusement, ce laboratoire me dit qu'il est incapable d'en assumer financièrement la mise en oeuvre, et l'université n'en a pas plus la possibilité. Ils nous demandent donc à nous, collectivités locales, de quelle manière nous comptons financer les projets retenus par l'ANR. C'est tout de même incroyable ! Le projet aurait dû être pris en compte en amont, de telle manière que l'université soit dotée des moyens lui permettant d'assumer les frais de gestion y afférents.

Cela étant, monsieur le ministre, compte tenu de ce que je considère comme un engagement de votre part concernant l'affectation des moyens dans le cadre de l'ANR, je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 111 est retiré.

L'amendement n° 34, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 7, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. A compter du 1er septembre 2011, le conseil de surveillance de l'Agence de l'innovation industrielle est composé comme suit :

1° Sept représentants de l'Etat :

- un représentant du ministre chargé de l'économie ;

- un représentant du ministre chargé de l'industrie ;

- un représentant du ministre chargé du budget ;

- un représentant du ministre chargé de la recherche ;

- un représentant du ministre chargé de la défense ;

- un représentant du ministre chargé des transports ;

- un représentant du ministre chargé de la santé.

2° Quinze personnalités qualifiées

- trois députés désignés par le président de l'Assemblée nationale au sein des commissions compétentes ;

- trois sénateurs désignés par le président du Sénat au sein des commissions compétentes ;

- deux proposées par le Premier ministre ;

- deux proposées par le ministre chargé de la recherche ;

- cinq proposées conjointement par le ministre chargé de l'économie et le ministre chargé de l'industrie dont trois représentants d'organisations syndicales ou professionnelles ;

Le président du conseil d'administration de l'Agence nationale pour la recherche et le président du conseil d'administration de l'établissement public OSEO, ou leurs représentants, assistent aux séances du conseil de surveillance ; il ont voix consultative.

II. Les représentants de l'Etat sont nommés par arrêté du ministre qu'ils représentent.

Les personnalités qualifiées autres que les parlementaires sont nommées pour une durée de six ans renouvelable par décret pris sur le rapport des ministres de tutelle.

En cas de vacance pour quelque cause que ce soit du siège d'un membre du conseil de surveillance, il est pourvu à son remplacement dans les conditions prévues pour sa désignation, dans un délai de deux mois à compter de cette vacance, pour la durée du mandat restant à courir.

La parole est à M Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol. Il s'agit d'assurer une meilleure représentation parlementaire au sein du conseil de surveillance de l'Agence de l'innovation industrielle, et cela à compter du prochain renouvellement de ce conseil.

Compte tenu des enjeux financiers que recouvre cette agence, il paraît nécessaire que soient représentés des parlementaires issus des commissions compétentes, notamment dans les domaines du budget, de l'enseignement supérieur et des affaires économiques.

C'est pourquoi cet amendement vise à porter de deux à trois le nombre de sénateurs et le nombre de députés, membres du conseil de surveillance de cette agence.

Faisant partie du Pacte pour la recherche, l'AII a bien sa place dans ce texte, tout autant que le projet ITER.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je suis défavorable à cet amendement, et ce pour une raison d'ordre constitutionnel. En effet, c'est le règlement qui fixe la composition du conseil de surveillance de l'AII. Dès lors, je ne peux accepter que la loi vienne modifier un décret qui, au demeurant, est extrêmement récent.

En outre, même s'il y a un lien évident entre la recherche et l'AII, cette dernière n'est pas visée directement par le présent projet de loi.

M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 34 est-il maintenu ?

M. Henri Revol, rapporteur. Je comprends bien l'argumentation de M. le ministre et je suis prêt, au nom de la commission, à retirer cet amendement.

Toutefois, je souhaite que nous soyons entendus et que, dans l'avenir, la composition de ce conseil de surveillance les évolue dans le sens que nous appelons de nos voeux.

Par exemple, il serait bon que les trois commissions compétentes du Sénat y soient représentées.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, pour être tout à fait honnête, je ne peux prendre un tel engagement ce soir. En effet, ce point, qui relève de plusieurs ministères, n'a pas été arbitré.

Cela étant, j'ai bien entendu votre préoccupation et j'en ferai état auprès de mes collègues.

M. Ivan Renar. Il faut voter l'amendement, c'est tout !

M. Henri Revol, rapporteur. Je retire l'amendement, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° 34 est retiré.

Art. additionnels après l'art. 7
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Art. additionnel après l'art. 8

Article 8

Le chapitre III du titre Ier du livre IV du code de la recherche est modifié ainsi qu'il suit :

1° L'article L. 413-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat mentionné à l'alinéa précédent est conclu dans un délai fixé par décret. A défaut, l'autorisation donnée à l'agent devient caduque.

2° À l'article L. 413-6, les mots : « dans la limite de 15 % » sont remplacés par les mots : « dans la limite de 30 % du capital donnant droit au maximum à 30 % des droits de vote » ;

3° Après le premier alinéa de l'article L. 413-8, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le contrat mentionné à l'alinéa précédent est conclu dans un délai fixé par décret. À défaut, l'autorisation donnée à l'agent devient caduque. »

4° À l'article L. 413-9, les mots : « dans la limite de 15 % » sont remplacés par les mots : « lors de la création de celle-ci ou ultérieurement, dans la limite de 30 % du capital donnant droit au maximum à 30 % des droits de vote » ;

5° Les deux premières phrases de l'article L. 413-11 sont remplacées par les dispositions suivantes :

« L'autorisation est délivrée par l'autorité dont relève le fonctionnaire après avis de la commission mentionnée au premier alinéa de l'article L. 413-3 dans les conditions prévues par ce même article. Le renouvellement intervient après avis de la même commission si les conditions établies au moment de la délivrance de l'autorisation ont évolué lors du renouvellement. L'autorisation est retirée ou non renouvelée si les conditions qui avaient permis sa délivrance ne sont plus réunies ou si le fonctionnaire méconnaît les dispositions de la présente section. »

6° La deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 413-12 est remplacée par la phrase suivante :

« Leur participation dans le capital social de l'entreprise ne peut excéder 20 % de celui-ci ni donner droit à plus de 20 % des droits de vote. »

7° Les deux premières phrases de l'article L. 413-14 sont remplacées par les dispositions suivantes :

« L'autorisation est accordée par l'autorité dont relève le fonctionnaire après avis de la commission mentionnée au premier alinéa de l'article L. 413-3 dans les conditions prévues à ce même article. Le renouvellement intervient après avis de la même commission si les conditions établies au moment de la délivrance de l'autorisation ont évolué lors du renouvellement. L'autorisation est retirée ou non renouvelée si les conditions qui avaient permis sa délivrance ne sont plus réunies ou si le fonctionnaire méconnaît les dispositions de la présente section. »

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, sur l'article.

M. Michel Billout. L'article 8 du projet de loi de programme pour la recherche assouplit les conditions dans lesquelles les chercheurs peuvent créer une entreprise de valorisation des résultats de la recherche ou participer à la création d'une telle entreprise.

S'il peut paraître important de permettre aux chercheurs de participer à la valorisation de leurs recherches, il faut cependant rester très prudent sur les conflits d'intérêts qui peuvent naître à cette occasion.

Il nous semble nécessaire d'éviter que les chercheurs ne s'investissent dans les activités de valorisation au détriment de leur activité de recherche fondamentale, ou encore que cette faculté n'oriente leur domaine d'activité vers la recherche finalisée.

À ce titre, le contrôle de la commission de déontologie est très important. En particulier, c'est elle qui vérifie que le contrat de valorisation ne porte pas atteinte aux intérêts matériels et moraux du service public.

De ce point de vue, le 1° de l'article 8, qui prévoit que le délai de communication du contrat sera fixé par décret, constitue un progrès dans la mesure où il est facteur de sécurité juridique dans la procédure.

Cependant, il serait opportun que le décret tienne compte de l'expérience de la commission de déontologie et retienne le délai de neuf mois.

Venons-en maintenant à l'augmentation de 15 % à 30 % du pourcentage maximum de participation du chercheur au capital social de l'entreprise.

Cette mesure nous paraît assez discutable. Le Gouvernement y voit un remède à la dispersion du capital familial au sein de l'entreprise, mais, en réalité, cette disposition va permettre au chercheur d'augmenter sa participation, sans interdire à sa famille de participer au capital de l'entreprise. Par conséquent, on renforce ici le danger d'une prise de contrôle de l'entreprise par le chercheur.

Au-delà de ces remarques sur l'article 8, qui compte au nombre des mesures particulières permettant à certains chercheurs seulement de tirer profit de leurs recherches, nous considérons que le développement des activités de recherche ne peut se faire sans une revalorisation générale des missions et des métiers de la recherche.

Encourager la recherche suppose, en effet, des mesures d'amélioration des conditions de travail, de carrière et de rémunération de l'ensemble des chercheurs. Or force est de constater que le projet de programme pour la recherche reste insuffisant en la matière.

M. le président. L'amendement n° 35, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

A la fin de la deuxième phrase du texte proposé par le 5° de cet article pour remplacer les deux premières phrases de l'article L. 413-11 du code de la recherche et à la fin de la deuxième phrase du texte proposé par le 7° de cet article pour remplacer les deux premières phrases de l'article L. 413-14 du code de la recherche, remplacer les mots :

lors du renouvellement

par les mots :

depuis la date de l'autorisation

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Art. 8
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Art. 9

Article additionnel après l'article 8

M. le président. L'amendement n° 59, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le e) de l'article L. 421-3 du code de la recherche est complété par les dispositions suivantes :

« Dans le respect des dispositions de l'article 432-12 du code pénal, et par dérogation à l'interdiction d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative fixée au premier alinéa du I de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations  des fonctionnaires, les personnels de recherche mentionnés aux articles L. 421-1 et L. 421-2 autorisés à accomplir une période de service à temps partiel peuvent être autorisés à exercer, en sus de leurs fonctions, une activité dans une entreprise exerçant une ou plusieurs des missions définies à l'article L. 411-1. »

II. - Après l'article L. 952-14 du code de l'éducation, il est inséré un article L. 952-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 952-14-1. - Dans le respect des dispositions de l'article 432-12 du code pénal, et par dérogation à l'interdiction d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative fixée au premier alinéa du I de l'article 25 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les enseignants-chercheurs autorisés à accomplir une période de service à temps partiel peuvent être autorisés à exercer, en sus de leurs fonctions, une activité dans une entreprise exerçant une ou plusieurs des missions définies à l'article L. 952-3 ».

La parole est à M. le ministre.

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement souhaite vivement favoriser la mobilité entre le monde de la recherche et celui de l'entreprise.

Toutes les expériences démontrent, s'il en était besoin, à quel point la mobilité est génératrice d'emplois et d'activités. Certaines réussites sont, à cet égard, tout à fait remarquables. Les chercheurs et les enseignants-chercheurs qui créent des entreprises ou participent à la création d'entreprises ou encore ceux qui exercent une activité professionnelle au sein d'une entreprise nous disent que ces échanges sont profitables pour leur recherche, pour leur enseignement.

Il convient donc d'encourager de tels échanges.

A cet effet, le présent amendement prévoit d'assouplir les conditions de mobilité à temps partiel des scientifiques vers le secteur privé. Jusqu'à présent, la mobilité à temps partiel n'était permise que dans le cadre d'une mise à disposition ou d'une délégation. La disposition proposée vise à élargir cette possibilité, afin de répondre à l'attente des uns et des autres.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Monsieur le ministre, cet amendement est très intéressant.

Il importe, en effet, d'articuler au mieux l'activité des chercheurs dans les établissements, les instituts et à l'université avec l'exercice de certaines fonctions dans les entreprises.

Je formulerai une seule observation : ces entreprises doivent avoir une mission d'intérêt national.

A cette réserve près, la commission émet un avis très favorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Si l'on veut que l'innovation se développe, à partir d'équipes très créatives, si l'on veut, pour employer le jargon, qu'il y ait des spin off pour créer des start up, il faut absolument donner cette liberté de mobilité aux enseignants-chercheurs et assouplir les textes existants.

Certes, la loi sur l'innovation et la recherche, dite « loi Allègre », constituait déjà un progrès.

M. Jacques Valade, rapporteur. C'est le même esprit !

M. Daniel Raoul. Mais nous devons poursuivre dans cette voie. La disposition qui est proposée va dans le bon sens et devrait nous permettre de développer notre rayonnement international, en particulier dans le domaine des biotechnologies.

M. Jacques Valade, rapporteur. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. Je rappelle que le texte sur l'innovation et la recherche a été en grande partie amendé par le Sénat, qui a beaucoup appuyé ce mouvement, à double sens d'ailleurs, entre le monde académique et le monde industriel.

Cet amendement du Gouvernement vient à point nommé, car les chercheurs hésitent très souvent à sauter tout à fait le pas. S'il est adopté, ils auront le sentiment que les industriels leur réserveront un accueil très favorable et leurs contacts s'en trouveront multipliés.

D'ores et déjà, les pôles de compétitivité ont démontré une volonté très forte, tant des universités que des centres de recherche et des industries, grandes et petites, avec l'appui des collectivités locales, d'impulser cette dynamique qui est, à mes yeux, l'un des phénomènes les plus passionnants que connaît actuellement le monde de la recherche et de l'entreprise, particulièrement sensible dans les PME.

Il faut remercier le Gouvernement d'avoir proposé cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.

Art. additionnel après l'art. 8
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. additionnel après l'art. 9

Article 9

Au chapitre Ier du titre II du livre III du code de la recherche, il est ajouté après l'article L. 321-5 un article L. 321-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 321-6. - Les établissements publics à caractère scientifique et technologique peuvent également confier par convention les activités mentionnées à l'article L. 321-5 à des personnes morales de droit privé. Ces conventions sont approuvées par l'autorité administrative.

« Il est tenu compte notamment de la capacité financière et des moyens de gestion de la personne morale, de l'adéquation de son action avec la politique de l'établissement public, et de l'équilibre des droits et des obligations entre l'établissement public et la personne morale.

« La convention mentionnée au premier alinéa peut prévoir l'attribution ou la mise à disposition de moyens matériels et financiers par l'une à l'autre des parties.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions et critères d'approbation de ces conventions et la nature des clauses qu'elles doivent comporter. »

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, sur l'article.

M. Michel Billout. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera également sur l'article 10.

En effet, les articles 9 et 10 du projet de loi de programme pour la recherche visent à contrôler la possibilité, qui existe de fait, pour les établissements à caractère scientifique et technologique et les établissements publics d'enseignement supérieur, de confier leurs activités de valorisation à des personnes morales de droit privé.

Pendant des années, les modalités de la valorisation de la recherche par les établissements publics de recherche sont restées floues. À titre d'exemple, les universités ont souvent eu recours aux formes associatives, et l'absence de réglementation a parfois entraîné des dérives plus ou moins graves, allant de la gestion de fait au détournement de fonds.

Pour pallier ces difficultés, la loi sur l'innovation et la recherche de 1999 a instauré la possibilité de créer un service des activités industrielles et commerciales. Mais nous savons que, malgré cela, le recours à des structures externes de droit privé est resté la voie la plus utilisée.

La proposition du Gouvernement vise à soumettre les conventions passées dans ce cadre à l'approbation de l'autorité administrative et constitue une avancée dans la mesure où elle introduit une réglementation dans une zone de non-droit.

Cependant, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen restent inquiets quant au principe même de ces partenariats publics privés. Il leur paraît en effet nécessaire de transférer les connaissances et les méthodes de la recherche fondamentale vers les domaines appliqués, de façon que l'effort public de recherche se trouve valorisé.

Toutefois, ce processus ne doit pas être guidé par la recherche d'une rentabilité à court terme ni par le bon vouloir des seules entreprises. Or les relations entre secteur public et secteur privé ne sont pas clarifiées.

Les laboratoires publics ne peuvent être cantonnés à une mission de simples exécutants des industries et des laboratoires privés sans risque pour la qualité de la recherche. Le contrôle de l'État sur les conventions ne constitue pas, de ce point de vue, une garantie suffisante pour lutter contre une telle dérive. C'est pourquoi il est urgent d'augmenter le soutien financier à la recherche publique et de mettre les organismes publics de recherche en mesure de négocier d'égal à égal avec le privé.

De plus, la possibilité de prévoir dans les conventions l'attribution ou la mise à disposition de moyens matériels et financiers par l'une des parties à l'autre n'est pas sans présenter certains dangers. Nous avons certes entendu l'argument selon lequel de telles pratiques existent déjà et que le projet de loi ne cherche qu'à les encadrer. Mais cela n'enlève rien à leur caractère critiquable.

En effet, la mise à disposition de moyens financiers attribués à la recherche fondamentale pour des opérations de valorisation risque de se faire au détriment de la première, surtout si la logique de rentabilité à court terme devait être retenue.

Vous comprendrez dès lors que nous émettions les plus grandes réserves sur les articles 9 et 10, et ce malgré les efforts de réglementation entrepris.

M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 321-6 du code de la recherche, après le mot :

technologique

insérer les mots :

ainsi, le cas échéant, que les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les réseaux thématiques de recherche avancée

L'amendement n° 37, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 321-6 du code de la recherche par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Il est tenu compte notamment :

« - de la capacité financière et des moyens de gestion de la personne morale ;

« - de l'adéquation de l'action de la personne morale avec la politique de l'établissement public, ou le cas échéant, du pôle de recherche et d'enseignement supérieur ou du réseau thématique de recherche avancée ;

« - de l'équilibre des droits et obligations entre la personne morale et l'établissement public ou, le cas échéant, le pôle de recherche et d'enseignement supérieur et le réseau thématique de recherche avancée.

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Les amendements nos 36 et 37 ont pour objet d'étendre aux pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES, et aux réseaux thématiques de recherche avancée, anciennement appelés « campus », la possibilité de faire appel à des structures externes de valorisation dans les mêmes conditions que les EPST qui en sont membres.

Je rappelle que ces structures partenariales de valorisation prennent souvent la forme d'associations, de sociétés, sur l'initiative des établissements ou sur l'initiative conjointe des organismes publics ou des acteurs socioéconomiques. C'est ainsi le cas des associations de développement, d'enseignement et de recherche.

Il est important que les PRES et les réseaux puissent recourir à ces structures, car la valorisation est certainement le domaine dans lequel la coopération entre organismes peut apporter la plus grande valeur ajoutée. Tel est l'objet de l'amendement n° 36.

L'amendement n° 37 est un amendement de conséquence du précédent : il faut que ces nouvelles structures puissent procéder à la valorisation dans les mêmes conditions que les EPST qui en sont membres, c'est-à-dire dans le cadre juridique rénové et clarifié proposé à l'article 9 du projet de loi.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je suis favorable à ces deux amendements, qui apportent de très utiles améliorations au projet de loi.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 37.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Art. 9
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Art. 10

Article additionnel après l'article 9

M. le président. L'amendement n° 38 rectifié, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 9, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le titre IV du livre III du code de la recherche, il est inséré un titre IV bis ainsi rédigé :

« Titre IV bis - L'Académie des technologies

« Chapitre unique - L'Académie des technologies

« Art. L. 344-1. - L'Académie des technologies est un établissement public national à caractère administratif.

« Art. L. 344-2. - L'Académie des technologies a pour mission de conduire des réflexions, formuler des propositions et émettre des avis sur les questions relatives aux technologies et à leur interaction avec la société.

« À cette fin, elle mène des actions d'expertise, de prospective et d'animation en faisant appel, le cas échéant, aux compétences de personnalités extérieures qualifiées.

« L'Académie des technologies examine les questions qui lui sont soumises par les membres du Gouvernement. Elle peut elle-même se saisir de tout thème relevant de ses missions.

« Art. L. 344-3. - Un décret en Conseil d'État fixe la composition et les règles de fonctionnement de l'Académie des technologies. »

II. - L'ensemble des biens, droits et obligations de l'association « Académie des technologies » sont dévolus à l'établissement public administratif « Académie des technologies » dans les conditions fixées par le décret mentionné à l'article L. 344-3 du code de la recherche. Les personnels de l'association sont repris par l'établissement public, avec prise en compte totale de l'ancienneté acquise dans l'association.

III. - Les membres de l'association « Académie des technologies » sont membres de l'établissement public Académie des technologies à compter de sa création.

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement a pour objet de transformer l'Académie des technologies en établissement public.

Créée en 2000 sous forme associative comme instance de réflexion et comme embryon d'académie des sciences, l'Académie des technologies a su s'imposer aussi bien sur le plan national que sur le plan international, notamment dans le réseau des académies des technologies qui existe depuis longtemps chez nos partenaires européens.

Pour poursuivre son développement, l'Académie des technologies a besoin d'un cadre juridique et financier consolidé, ce qui nous a conduits à proposer de le transformer en établissement public administratif sans pour autant modifier son mode d'action actuel, qui a largement fait ses preuves.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement, dans la rédaction initiale du projet de loi, avait prévu d'ériger l'Académie des technologies en établissement public. Le Conseil d'État a cependant estimé que cela relevait du pouvoir réglementaire, et nous avons modifié le projet de loi en conséquence.

Il n'empêche que je ne peux que rejoindre l'opinion de la commission spéciale telle que vient de l'exprimer le rapporteur. Il nous paraît en effet utile de donner, par la solennité de la loi, une existence juridique plus forte à l'Académie des technologies, qui est une institution extraordinairement utile : ses travaux sont remarquables, elle réunit des femmes et des hommes de grand talent, de grande compétence, et elle établit le lien entre la recherche, y compris la recherche fondamentale, et l'activité économique.

Je suis donc très favorable à l'adoption de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Il nous est proposé d'inscrire l'Académie des technologies dans la loi. C'est une grande reconnaissance !

Pour ma part, et au seul nom de mes amis Verts, je tiens à exprimer nos exigences.

M. Josselin de Rohan. Holà ! Des exigences !

Mme Marie-Christine Blandin. Cette académie doit prendre une plus grande distance vis-à-vis des lobbies et tenir davantage compte de tous les prérequis que suppose l'établissement d'un rapport de qualité. Or, je le répète, ce ne fut pas le cas de rapports précédents, notamment du plus récent, qui portait sur les nanotechnologies, dont une étude de l'intercommunalité grenobloise a révélé le faible contenu comparé à celui d'autres études internationales sur le même sujet.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Je m'inscris en faux contre les propos de Mme Blandin mettant en cause l'Académie des technologies et ses éventuels liens avec tel ou tel lobby.

Elle réunit des femmes et des hommes qui s'expriment en conscience. Que les opinions émises ne soient pas celles de Mme Blandin, je veux bien l'admettre, mais je tiens à souligner toute la considération que nous avons pour les travaux remarquables de cette institution.

M. Josselin de Rohan. Ils font de la science, pas de la politique !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 38 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

Art. additionnel après l'art. 9
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Art. additionnel après l'art. 10

Article 10

Après l'article L. 762-2 du code de l'éducation, il est ajouté un article L. 762-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 762-3. - Dans les conditions prévues à l'article L. 321-6 du code de la recherche, les établissements publics d'enseignement supérieur peuvent confier par convention à des personnes morales de droit privé les activités mentionnées à l'article L. 321-5 du même code. »

M. le président. L'amendement n° 39, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par cet article pour l'article L. 762-3 du code de l'éducation, après le mot :

supérieur

insérer les mots :

ainsi, le cas échéant, que les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les réseaux thématiques de recherche avancée

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement se situe dans le droit fil de l'amendement n° 36, que nous avons adopté tout à l'heure et qui visait à assurer la continuité entre le recours à la valorisation des structures de coopération et celui qui existe déjà pour les EPST.

Il s'agit ici non plus des EPST, mais des universités : l'amendement tend à préciser clairement que les PRES et les réseaux pourront faire appel à des structures externes de valorisation dans les mêmes conditions que les universités qui en sont membres.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Art. 10
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Art. 11

Article additionnel après l'article 10

M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa de l'article L. 321-5 du code de la recherche, après le mot : « technologique » sont insérés les mots : «, les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les réseaux thématiques de recherche avancée »

II. - Dans la première phrase du sixième alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'éducation, après le mot : « établissements » sont insérés les mots : «, pôles de recherche et d'enseignement supérieur et réseaux thématiques de recherche avancée »

III. - Dans la seconde phrase du septième alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'éducation, après le mot : « établissements », sont insérés les mots : «, pôles de recherche et d'enseignement supérieur et réseaux thématiques de recherche avancée »

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Les amendements nos 36, 37 et 39, que le Sénat vient d'adopter, visaient à permettre aux nouvelles structures de recourir à des partenaires externes en matière de valorisation. Il s'agit maintenant de leur permettre de créer des services internes de valorisation sous la forme de services d'activités industrielles et commerciales, ou SAIC, dans les mêmes conditions que les organismes et les universités.

Ainsi, en matière de valorisation, les PRES et les réseaux auront la même « boîte à outils » que leurs propres membres.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable, monsieur le président. La précision apportée est utile.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je suis bien sûr favorable à ce qu'une telle possibilité soit ouverte, mais il faut néanmoins veiller à éviter toute redondance : il ne s'agit pas de créer des services dont dispose déjà l'un des membres du PRES et qu'il pourrait mettre à la disposition de l'ensemble ! (M. le ministre délégué acquiesce.) Je ne voudrais pas que se constitue une usine à gaz parce que serait recréé à un échelon supérieur ce que chacun des membres peut faire.

M. François Goulard, ministre délégué. Il ne s'agit que d'ouvrir une possibilité !

M. Daniel Raoul. Qu'il y ait coordination, oui ! Mais attention au danger de superposition de structures identiques !

M. Yves Fréville. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.

Art. additionnel après l'art. 10
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Art. additionnel après l'art. 11

Article 11

L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 27° Les fonctionnaires et agents publics autorisés à faire des expertises ou à donner des consultations au titre du décret du 29 octobre 1936, dans le cadre d'activités de recherche et d'innovation, ainsi que ceux qui sont autorisés à apporter leur concours scientifique à une entreprise qui assure la valorisation de leurs travaux au titre de l'article L. 413-8 du code de la recherche. »

M. le président. L'amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Blin, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par cet article pour le 27° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale par une phrase ainsi rédigée :

Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables, sur leur demande, aux personnes inscrites auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales en qualité de travailleurs indépendants lorsque l'existence d'un lien de subordination avec le donneur d'ouvrage ne peut être établie.

La parole est à M. Maurice Blin, rapporteur.

M. Maurice Blin, rapporteur de la commission spéciale sur la recherche. Le point que vise cet amendement peut paraître secondaire. Il est cependant important.

L'amendement tend en effet à introduire une plus grande souplesse dans le statut social des chercheurs du secteur public susceptibles d'assumer des fonctions de consultance en rendant optionnelle leur inscription au régime général de la sécurité sociale, alors que les dispositions initiales de l'article 11 la rendaient obligatoire.

Or la commission spéciale est arrivée à la conclusion selon laquelle, si cette inscription simplifie les démarches administratives des chercheurs concernés, elle pourrait emporter des conséquences - notamment un surcoût - allant à l'encontre du but visé, qui est de favoriser le développement de ce type d'activités. J'incline à penser que c'est également l'analyse du Gouvernement.

La référence à l'article L. 120-3 du code du travail introduira plus de souplesse puisque tout chercheur qui aura fait le choix de s'inscrire comme travailleur indépendant auprès des URSSAF continuera de cotiser dans le cadre actuel, les autres cotisant au régime général de la sécurité sociale. Cela nous paraît de bonne méthode et susceptible d'une efficacité réelle.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je suis tout à fait d'accord avec M. Blin et la commission spéciale : il n'y a aucune raison de limiter les possibilités d'inscription à un seul régime et il convient de laisser à l'appréciation du chercheur le choix du régime qui lui convient le mieux.

Le Gouvernement a donc émis un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié.

(L'article 11 est adopté.)

Art. 11
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Art. 12

Article additionnel après l'article 11

M. le président. L'amendement n° 64 rectifié bis, présenté par MM. Portelli, Cambon, Seillier, Zocchetto et Laffitte et Mme Debré, est ainsi libellé :

Après l'article 11, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 952-2 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les membres du personnel enseignant, technique ou scientifique des établissements d'enseignement public peuvent exercer les professions libérales qui découlent de la nature de leurs fonctions. Il leur est toutefois interdit de donner des consultations, de procéder à des expertises et de plaider en justice dans des litiges intéressant une personne publique, à moins qu'ils n'exercent leurs fonctions à son profit. »

La parole est à M. Hugues Portelli.

M. Hugues Portelli. Cet amendement reprend purement et simplement des dispositions du décret-loi du 29 octobre 1936 accordant aux membres du personnel enseignant, technique ou scientifique des établissements d'enseignement public la possibilité d'exercer les activités libérales dans le prolongement de leurs fonctions. Il concerne donc une liberté traditionnelle reconnue depuis fort longtemps aux membres de l'éducation nationale et qui est pratiquée dans tous les États européens.

Nous avons déposé cet amendement parce que nous avons été avertis que le ministère de la fonction publique préparait un texte visant à remettre en cause cette liberté traditionnelle. Notre objectif est de ne pas laisser une telle décision aux bons soins du ministère et de faire figurer cette liberté au sein d'un texte de nature législative - car il s'agit bien d'une disposition de nature législative, et non pas réglementaire, comme je l'ai parfois entendu affirmer, assurément par erreur -, en l'occurrence la partie législative du code de l'éducation nationale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission spéciale a examiné avec beaucoup d'attention cet amendement et le trouve plein de bon sens. En effet, toute ambiguïté dans ce domaine est fatale et la réintégration de cette possibilité dans la loi, comme M. Portelli vient de le dire, nous paraît souhaitable.

Il serait anormal que certains membres de la communauté scientifique ne puissent exercer une activité libérale à l'extérieur. Par conséquent, la commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. La vigilance de M. Portelli est tout à fait justifiée. Il y avait en effet - mais cela ne résultait pas d'une intention du Gouvernement - dans le texte initial sur la fonction publique, qui est encore à l'état de projet, une maladresse de rédaction qui était susceptible réduire les possibilités, pour un certain nombre de fonctionnaires - pas seulement des universitaires, des chercheurs ou des enseignants-chercheurs -, d'exercer à titre libéral des activités de conseil.

M. Portelli l'a rappelé, ces possibilités résultent d'un décret- loi de 1936 qui est d'application assez large.

Monsieur le sénateur, je puis vous donner l'assurance qu'au stade de l'examen par le Conseil d'État le Gouvernement s'attachera à donner toute la clarté nécessaire au texte en préparation pour qu'il ne remette nullement en cause, sur aucun aspect, cette liberté traditionnelle, qui est d'ailleurs extrêmement utile, car les experts issus de la fonction publique, notamment du monde universitaire, sont évidemment tout à fait précieux pour l'économie, pour l'activité nationale.

Par conséquent, nous corrigerons le futur projet de loi sur la fonction publique pour vous donner totalement satisfaction. Telle est la raison pour laquelle, après l'engagement que je viens de prendre au nom du Gouvernement, je vous demande de retirer cet amendement.

M. le président. Monsieur Portelli, l'amendement n° 64 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Hugues Portelli. Je remercie M. le ministre de ses explications. Elles me satisfont et je retire mon amendement.

M. le président. L'amendement n° 64 rectifié bis est retiré.

M. Ivan Renar. Si tout le monde se met à défendre les acquis du Front populaire, c'est très bien ! (Sourires.)

M. Hugues Portelli. Je tiens à préciser à M. Renar que je n'ai jamais été concerné par l'amendement que j'ai défendu.

M. le président. Je crois qu'il s'agissait simplement d'un trait d'humour de la part de M. Renar !

Art. additionnel après l'art. 11
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Art. 13

Article 12

L'intitulé de la section V-2 du chapitre II du titre II du livre Ier du code du travail est remplacé par l'intitulé suivant :

« Congé et période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d'entreprise ou l'exercice de responsabilité de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante et congé sabbatique ». - (Adopté.)

Art. 12
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Art. 14

Article 13

I. - L'intitulé de la sous-section 1 de la section V-2 du chapitre II du titre II du livre Ier du code du travail est remplacé par l'intitulé suivant :

« Dispositions relatives au congé et à la période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d'entreprise ou l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante ».

II. - La sous-section 1 est modifiée ainsi qu'il suit :

 1° Au premier alinéa de l'article L. 122-32-12, après les mots : « Le salarié qui crée ou reprend une entreprise » sont insérés les mots : « ou qui exerce des responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant, au moment où il sollicite son congé, aux critères de jeune entreprise innovante définie par l'article 44 sexies 0A du code général des impôts » ;

2° L'article L. 122-32-13 est modifié ainsi qu'il suit :

 a) Au premier alinéa, après les mots : « pour création ou reprise d'entreprise » sont insérés les mots : « ou pour exercer des responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante » ;

 b) Le second alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :

« Ce droit ne pourra être exercé moins de trois ans après la précédente création ou reprise d'entreprise ou après le début de l'exercice de précédentes responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante. »

 3° Au deuxième alinéa de l'article L. 122-32-14 sont ajoutés les mots : « ou de l'entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante dans laquelle il prévoit d'exercer des responsabilités de direction. » ;

 4° Au troisième alinéa de l'article L. 122-32-16, les mots : « du congé pour création d'entreprise » sont remplacés par les mots : « de leur congé ». - (Adopté.)

Art. 13
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Art. 15

Article 14

I. - L'intitulé de la sous-section 3 de la section V-2 du chapitre II du titre II du livre Ier du code du travail est remplacé par l'intitulé suivant :

« Dispositions communes au congé pour la création d'entreprise ou l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante et au congé sabbatique ».

II. - La sous-section 3 est modifiée ainsi qu'il suit :

 1° Au premier alinéa de l'article L. 122-32-22, après les mots : « pour la création d'entreprise » sont insérés les mots : « et pour l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante et au titre du congé sabbatique » ;

 2° Au premier alinéa de l'article L. 122-32-23, après les mots : « pour la création d'entreprise » sont insérés les mots : «, pour l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante » ;

 3° Aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article L. 122-32-25, après les mots : « pour la création d'entreprise » sont insérés les mots : «, pour l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante » ;

 4° À l'article L. 122-32-27, après les mots : « pour création d'entreprise », sont insérés les mots : «, l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante ».

M. le président. L'amendement n° 160 rectifié, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le 1° du II de cet article :

1° Au premier alinéa de l'article L. 122-32-22, les mots : « et sabbatique » sont remplacés par les mots : «, pour l'exercice de responsabilités de direction au sein d'une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante et au titre du congé sabbatique ».

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit de la rectification d'une erreur de référence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 160 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Art. 14
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Art. additionnels après l'art. 15

Article 15

Après le 8° du 1 de l'article 207 du code général des impôts, sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :

« 9° Les établissements publics de recherche et les établissements publics d'enseignement supérieur ;

« 10° Les personnes morales créées pour la gestion d'un pôle de recherche et d'enseignement supérieur ;

« 11° Les fondations d'utilité publique du secteur de la recherche.

« Les exonérations dont bénéficient les personnes morales visées aux 9°, 10° et 11° s'appliquent aux revenus tirés des activités conduites dans le cadre des missions du service public de l'enseignement supérieur et de la recherche définies aux articles L. 123-3 du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche. »

M. le président. L'amendement n° 144, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

I. - Supprimer le troisième alinéa (11°) du texte proposé par cet article pour ajouter quatre alinéas après le 8° du 1 de l'article 207 du code général des impôts.

II. - En conséquence :

a) dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :

quatre alinéas

par les mots :

trois alinéas

b) dans le dernier alinéa du texte proposé par cet article pour ajouter quatre alinéas après le 8° du 1 de l'article 207 du code général des impôts, remplacer les mots :

aux 9°, 10° et 11°

par les mots :

aux 9° et 10°

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L'article 15 étend l'exonération de l'impôt sur les sociétés aux établissements publics de recherche ou d'enseignement supérieur, aux personnes morales chargées de la gestion d'un pôle de recherche et d'enseignement supérieur et aux fondations d'utilité publique du secteur de la recherche.

En effet, les revenus tirés de leur activité de valorisation de la recherche ne seraient pas imposables au titre de l'impôt sur les sociétés.

Il est certes nécessaire d'encourager la valorisation de la recherche, notamment à travers des partenariats publics-privés équilibrés. A ce titre, nous sommes d'accord avec le rapporteur de la commission spéciale pour estimer que les risques de redressement que pourraient subir les établissements publics de recherche et d'enseignement, du fait d'un changement éventuel de la doctrine fiscale, constituent un frein au développement de leurs activités de valorisation.

L'exonération fiscale se justifie dans la mesure où la recherche publique est présente dans de telles structures et où il est important de lui permettre de valoriser au mieux les applications de ses travaux.

En revanche, nous estimons qu'il en va différemment pour des structures privées, qui peuvent relever à 100 % du secteur privé. C'est en particulier le cas des fondations. Or, pour encourager les entreprises à participer au financement des fondations, les versements que les entreprises leur consentent sont déjà déductibles à hauteur de 60 %.

Bien sûr, théoriquement, les fondations poursuivent des objectifs d'intérêt général dissociés des intérêts propres de leurs fondateurs. Cependant, on comprend mal pourquoi les fondations, déjà aidées dans leur création, se verraient en plus accorder des exonérations fiscales pour la partie relative à la valorisation de la recherche alors même qu'il s'agit d'une activité rentable pour elles.

Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d'adopter cet amendement visant à exclure les fondations d'utilité publique du secteur de la recherche de l'application de l'article 207 du code général des impôts.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Maurice Blin, rapporteur. Pour toutes les raisons qui ont été répétées tout au long de ce débat, il nous paraît inopportun de priver les fondations d'avantages que leurs homologues reçoivent en abondance à l'étranger.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je suis particulièrement défavorable à cet amendement.

Nous parlons là de fondations dont l'utilité publique est reconnue par décret et qui sont par définition à but non lucratif. Si l'État incite en effet des donateurs privés à apporter des fonds, c'est en vue de favoriser des recherches qui vont dans le sens de l'intérêt général.

Parmi les fondations qui sont visées par votre amendement, madame David, il y a par exemple l'Institut Pasteur et l'Institut Curie. Et vous voudriez réduire les possibilités de telles fondations d'utiliser les produits de la valorisation de leurs recherches au service de la lutte contre le cancer ? C'est tout à fait absurde !

Il faut donc maintenir cette disposition, qui est favorable aux institutions de recherche en général et aux fondations en particulier.

Je saisis d'ailleurs cette occasion pour souligner le rôle tout à fait éminent des grandes fondations de recherche dans notre pays. J'en ai cité deux qui sont absolument remarquables, mais il y en a d'autres. Elles sont indispensables, elles attirent d'excellents chercheurs et elles ont un fonctionnement extrêmement souple. Par conséquent, nous devons tout faire pour les aider.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 144.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Art. 15
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. 16

Articles additionnels après l'article 15

M. le président. L'amendement n° 113, présenté par Mme Blandin, M. Lagauche, Mme Bricq, MM. Raoul,  Bodin,  Michel,  Piras,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du I de l'article 224 quater B du code général des impôts, après les mots : « qui exposent des dépenses de recherche » sont insérés les mots : « et qui ont procédé, dans l'année, à l'embauche d'au moins un docteur ayant soutenu sa thèse depuis moins de cinq ans ».

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement vise à favoriser l'embauche des jeunes doctorants.

Si crédit d'impôt il doit y avoir, il faut réellement qu'il dynamise la recherche privée, laquelle est, en France, insuffisante, à de rares exceptions près.

Nous attendons des entreprises un engagement et non l'utilisation d'un effet d'aubaine parmi d'autres.

Au-delà du peu d'appétit de certains pour les activités de recherche, les entreprises sont très frileuses vis-à-vis de nos jeunes doctorants. Elles s'appuient souvent exclusivement sur des ingénieurs, des développeurs et se privent d'une autre approche et d'autres savoirs, ceux que l'on trouve rassemblés à l'université.

Cet amendement conditionne donc l'accès au crédit d'impôt à l'embauche d'au moins un jeune doctorant, ce qui se plaide, car c'est d'argent public qu'il s'agit et les doctorants manquent de débouchés.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Maurice Blin, rapporteur. Les intentions que traduit cet amendement sont parfaitement compréhensibles. Il est bien évident que, quand une société, quelle qu'elle soit, bénéficie d'un soutien de l'argent public, on peut espérer qu'il en résultera l'embauche de tel ou tel salarié supplémentaire.

Cependant, transformer ce principe en une espèce de règle selon laquelle, lorsqu'il y a eu soutien public, on devrait automatiquement embaucher, me paraît de très mauvaise politique : l'embauche apparaîtrait alors comme une sorte de sanction.

Répétons-le inlassablement, la recherche est, par nature, un univers affecté par l'incertitude, l'aléa, le risque. Il arrive qu'elle réussisse, et c'est ce que nous souhaitons tous : de jeunes chercheurs trouvent alors des emplois. Mais si elle réussit moins, ne demandez pas à une entreprise de se charger en main-d'oeuvre, fût-elle de haute qualité, simplement pour satisfaire un besoin de régulation intellectuelle.

La recherche n'est pas une affaire idéologique. C'est une affaire de volonté, de moyens et de ténacité. Inscrivons-nous dans cette optique et tout deviendra simple.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Après la démonstration de M. le rapporteur, que puis-je ajouter ? Sinon, madame le sénateur, que le crédit d'impôt recherche a pour assiette, à 90 %, l'augmentation des dépenses de recherche de l'entreprise.

Qui prend des mesures en faveur de l'embauche des jeunes docteurs dans les entreprises ? C'est nous qui avons créé les contrats d'insertion des post-doctorants pour la recherche en entreprise, les CIPRE, lesquels sont un encouragement à l'embauche des jeunes docteurs dans les entreprises. Cela n'existait pas auparavant.

La mesure que vous proposez n'est pas de bon aloi. Imaginons le cas d'une entreprise qui augmente ses dépenses de recherche par sous-traitance, en faisant appel, par exemple, à une jeune entreprise innovante ; je parle là de cas que je connais. Elle n'embauchera pas directement de jeunes docteurs, mais elle sous-traitera ses recherches à une jeune entreprise innovante qui, elle, en embauchera.

Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Madame Blandin, l'amendement n° 113 est-il maintenu ?

Mme Marie-Christine Blandin. J'ai bien entendu les arguments de M. le ministre, mais je souhaite insister sur le fait qu'il y a une trop grande uniformité d'origine des chercheurs dans l'entreprise...

M. François Goulard, ministre délégué. C'est vrai !

Mme Marie-Christine Blandin. ... et que nos doctorants peinent à se faire reconnaître. Or tous ceux qui ont franchi le pas s'en félicitent.

Je retire mon amendement, mais il faudra que des efforts soient vraiment faits en la matière.

M. François Goulard, ministre délégué. Merci, madame le sénateur.

M. le président. L'amendement n° 113 est retiré.

L'amendement n° 56 rectifié bis, présenté par MM. Dériot,  Trucy,  Milon et  Del Picchia, est ainsi libellé :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article 238 bis 0A du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Les entreprises imposées à l'impôt sur les sociétés d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt égale à 90 % des versements effectués en faveur de la recherche biomédicale par le biais d'une fondation ou d'une association reconnue d'utilité publique ».

« Cette réduction d'impôt est applicable, après avis motivé d'une commission rattachée au ministère de la recherche composée de représentants de l'État et de personnes qualifiées nommées par décret.

« Les versements ne sont pas déductibles pour la détermination du bénéfice imposable. Les versements doivent faire l'objet d'une acceptation par les ministres de la recherche et du budget.

« La réduction d'impôt s'applique sur l'impôt sur les société dû au titre de l'exercice au cours duquel les versements sont acceptés.

« Toutefois, la réduction d'impôt ne peut être supérieure à 50 % du montant de l'impôt dû par l'entreprise au titre de cet exercice conformément au I de l'article 219.

« Pour les sociétés membres d'un groupe au sens de l'article 223 A, la limite de 50 % s'applique pour l'ensemble du groupe par référence à l'impôt dû par la société mère du groupe. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État de la création d'une réduction de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises effectuant des versements en faveur de la recherche biomédicale sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Alain Milon

M. Alain Milon. Cet amendement transpose pour la recherche biomédicale la disposition prévue pour les trésors nationaux telle qu'elle résulte de l'article 238 bis OA du code général des impôts, modifié par la loi du 1er août 2003.

Selon cet article, les entreprises bénéficient d'une réduction d'impôt égale à 90 % des versements effectués en faveur de l'achat de biens culturels présentant le caractère de trésors nationaux.

Le présent amendement prévoit en outre que les versements effectués par l'entreprise doivent faire l'objet d'une acceptation par le ministre chargé du budget et le ministre de la recherche.

De même, il convient de légèrement modifier la rédaction de l'article 238 bis OA du code général des impôts pour que la réduction d'impôt ne soit applicable qu'après un avis motivé d'une commission rattachée au ministère de la recherche, composée de représentants de l'État et de personnes qualifiées dans le domaine des sciences de la vie. Elle est présidée par un membre du Conseil d'État nommé par décret.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Maurice Blin, rapporteur. Là encore, on peut considérer d'un oeil favorable l'intention qui anime les auteurs de cet amendement.

En France, il est vrai, la recherche biomédicale a pris un grave retard, pour des raisons qui dépassent d'ailleurs de loin le débat de ce soir, et il serait souhaitable que nous le comblions le plus rapidement possible.

L'idée est donc venue à M. Dériot, premier signataire de cet amendement, de suggérer que l'on donne aux entreprises qui travaillent dans le domaine biomédical des avantages similaires à ceux dont bénéficient les biens nationaux.

Je ferai deux observations.

En premier lieu, on ne peut guère comparer les dépenses d'entretien d'un bien national, un château par exemple, et les dépenses de recherche en matière biomédicale.

En second lieu, il ne faudrait pas que cet amendement soit l'occasion de créer, non pas une niche, mais une sorte de compartiment original, ce que nous serions tous susceptibles de regretter. Si le Sénat adopte cet amendement, d'autres besoins s'exprimeront et nous verrons se généraliser un système qui est certes digne d'intérêt, mais que l'on ne peut pas ce soir traiter aussi simplement.

C'est donc à regret que la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je considère, comme les auteurs de l'amendement, que nous devons faire des efforts en matière de recherche biomédicale.

Monsieur Milon, si vous consultez les programmes de l'Agence nationale de la recherche, vous pourrez constater que nous avons considérablement accentué notre effort à cet égard et que plusieurs thématiques de recherche recevront des crédits supplémentaires par rapport aux dotations, par exemple, de l'INSERM, du CNRS ou du CEA, pour son département des sciences du vivant.

Le dispositif que vous proposez présente un certain nombre d'inconvénients.

Tout d'abord, vous le savez, une réduction d'impôt existe, à hauteur de 60 %, en application de la loi sur le mécénat. L'État consent donc déjà un effort considérable en termes de dépense fiscale.

Porter cette réduction à 90 % aurait deux conséquences.

Dans un premier temps, une forme de concurrence s'établirait au détriment d'autres causes, pourtant tout aussi respectables, qui font l'objet du mécénat des entreprises. On ne peut pas ne pas considérer cet aspect.

Dans un second temps, nous serions confrontés à la demande, sans doute fondée, d'autres secteurs de relever le taux de la réduction à 90 %. Cela se traduirait évidemment, à terme, par une annulation de l'effet que recherchent les auteurs de l'amendement.

Cet amendement est utile en ce qu'il constitue un signal d'alarme sur la nécessité absolue d'augmenter nos efforts en matière biomédicale. Toutefois, pour les raisons que j'ai évoquées, monsieur Milon, je vous demande de bien vouloir le retirer. A défaut, je serai contraint d'émettre un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Milon, l'amendement n° 56 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Alain Milon. Non, je le retire, monsieur le président. Nous préférons de très loin convaincre par la persuasion plutôt que par le conflit. (Exclamations admiratives sur plusieurs travées.)

M. le président. L'amendement n° 56 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 145, présenté par MM. Renar et  Billout, Mme David, MM. Ralite,  Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l'examen de la loi de finances de 2008, le Gouvernement adresse au Parlement un rapport d'évaluation sur les effets et destinations du crédit d'impôt recherche, mesurant son effet incitatif sur l'effort de recherche des entreprises. Les critères d'évaluation fixés par décret en Conseil d'État seront rendus publics.

La parole est à M. Michel Billout

M. Michel Billout. Nous proposons que l'effet d'encouragement du crédit impôt recherche au sein des entreprises fasse l'objet d'une évaluation.

Alors que la loi de programme pour la recherche insiste sur la nécessité d'une évaluation de la recherche, il serait étonnant que les entreprises échappent à tout contrôle de leur action en ce domaine, d'autant que la dépense liée à ce dispositif fiscal incitatif pour les entreprises ne cesse d'augmenter.

Ainsi, dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2006, le rapporteur général de la commission des finances, M. Marini, rappelait que les sommes désormais consacrées au crédit d'impôt recherche allaient dépasser un milliard d'euros. En effet, la réforme de la loi de finances pour 2004 devait porter la dépense fiscale liée au crédit d'impôt recherche de 500 millions d'euros en 2004 à 730 millions en 2005 et à 960 millions en 2008, la montée en charge du nouveau dispositif étant de quatre ans. Or la modification prévue dans la loi de finances pour 2006 porterait la dépense fiscale à 1,2 milliard d'euros en 2010.

Force est de constater que le crédit d'impôt recherche a un coût non négligeable pour l'État. Compte tenu de l'importance des sommes engagées, il semble donc essentiel de mesurer l'effet de levier pour la recherche industrielle d'une telle mesure.

Cette évaluation est d'autant plus nécessaire que le crédit d'impôt recherche suscite des critiques, notamment de la part des chercheurs. Ainsi, le développement des dispositifs d'incitation fiscale au détriment d'aides directes présente un certain nombre de dangers qu'il est nécessaire de prendre en compte.

Parmi ceux-ci, il existe le risque d'un recentrage des modes de financement de la recherche en faveur du secteur privé. À titre d'exemple, les chercheurs ont rappelé, lors des états généraux de la recherche, que le projet de loi de finances pour 2004 avait marqué une préférence pour le développement de la recherche dans le secteur privé - institutions sans but lucratif et entreprises - en visant à multiplier par sept le nombre d'entreprises bénéficiaires d'un crédit d'impôt recherche, tout en prônant la « flexibilité de l'emploi » pour le secteur public par la suppression de postes statutaires.

De plus, l'utilisation du crédit impôt recherche pour des dépenses de recherche déjà existantes peut constituer une aubaine sans effet incitateur sur la recherche des entreprises.

D'autres pistes pour financer la recherche pourraient être explorées. Ainsi, dans le rapport issu des états généraux de Grenoble, il est notamment proposé de remplacer le crédit d'impôt recherche par un impôt libératoire appelé « crédit d'impôt flottant ». L'idée est que les entreprises qui réalisent des bénéfices et consacrent moins d'un certain pourcentage à la recherche devront verser une participation pour alimenter le budget des programmes sectoriels.

L'évaluation que nous demandons aurait le mérite de lever un certain nombre de doutes.

A ce titre, monsieur le ministre, nous avons cru comprendre que le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie devaient lancer une enquête afin d'évaluer la satisfaction des entreprises, d'une part, et l'impact économique du crédit d'impôt recherche, d'autre part, aussi bien sur le plan macro-économique que sur le plan micro-économique. L'enquête de satisfaction serait disponible dès le début de l'année prochaine, alors que la date des résultats de l'analyse économique n'a pas encore été fixée.

Monsieur le ministre, nous vous demandons de bien vouloir confirmer ou infirmer ces informations.

Dans la première hypothèse, nous serions heureux que vous nous fournissiez de plus amples informations sur la notion d'« impact économique », notion retenue pour guider l'enquête, et ce notamment afin de savoir si vous envisagez de mesurer l'effet d'encouragement du crédit d'impôt recherche sur l'effort de recherche des entreprises, mais aussi au regard du nombre de postes créés en recherche-développement par les entreprises.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Maurice Blin, rapporteur. Au premier regard, cet amendement paraît correspondre très exactement au souci qui a donné naissance, dans notre assemblée et dans d'autres instances, au principe de la LOLF.

En effet, il s'agit de s'assurer qu'une disposition, qu'elle soit ou non nouvelle, a produit l'effet qu'on en attendait. Sur le principe, on ne peut donc qu'approuver cette disposition.

Toutefois, elle appelle deux objections.

Premièrement, une disposition analogue est déjà prévue dans le projet de loi que le Sénat va, je l'espère, voter. Faut-il, par conséquent, ajouter ici une prescription qui figure déjà clairement par ailleurs ?

Deuxièmement, en fin d'année, lors de l'examen du projet de loi de règlement du budget de l'exercice précédent, on vérifie que telle ou telle disposition a bien produit l'effet qu'on en attendait.

J'ajoute, à demi-mot, que tous ces amendements de contrôle de législation, de rigueur pointilleuse, me paraissent habités d'un esprit de suspicion que je supporte mal.

Laissez donc à ceux qui cherchent, surtout lorsqu'ils trouvent - ce qui n'est pas toujours le cas -, toute latitude pour prendre les risques qu'ils ont choisis. Si vous entourez la recherche à la française de règlements, de méfiance, de contrôles, de suspicion, vous la stérilisez !

Ce qui manque à la recherche française, on ne le trouvera pas dans la loi ni dans les assemblées : on le trouvera dans l'esprit de chacun. La recherche est une aventure : qu'on s'y engouffre carrément ! Nous verrons ensuite si l'aventure réussit. Au demeurant, lorsqu'on y croit, elle a plus de chance de réussir.

M. Henri de Raincourt. Bravo ! Quel talent !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Les propos de M. Maurice Blin sont empreints d'une grande sagesse.

Nous avons en effet besoin d'un esprit de confiance, en matière de recherche comme en d'autres. On doit faire confiance d'abord et, bien évidemment, contrôler ensuite.

En l'occurrence, le dispositif du crédit d'impôt recherche est très rassurant, de par sa construction même : l'aide est dirigée vers l'augmentation des dépenses de recherche et non pas vers la dépense de recherche proprement dite, ce qui, à l'évidence, limite considérablement les effets d'aubaine.

Le dispositif monte en puissance. L'année prochaine, nous atteindrons sans doute une dépense fiscale de plus d'un milliard d'euros, avec une augmentation de l'ordre de 200 millions d'euros par rapport à cette année.

Je rappelle que l'entreprise doit justifier de la réalité de ses dépenses de recherche auprès des services fiscaux. S'il y a doute, les délégations régionales de la recherche et de la technologie sont interrogées. Ce sont donc des spécialistes qui donnent leur avis aux services fiscaux sur la réalité des dépenses de recherche engagées par l'entreprise.

Monsieur Billout, j'en viens plus précisément à votre question. Oui, le Gouvernement a lancé une étude afin de mesurer les effets du crédit d'impôt recherche, qui a de nouveau été modifié dans la loi de finances pour 2006.

Le crédit d'impôt recherche présente un double intérêt.

D'une part, il permet d'aider chaque entreprise à engager des programmes de recherche. Et on sait combien il est important pour une entreprise de pouvoir développer sa capacité d'innovation.

D'autre part, il présente aussi un intérêt pour l'ensemble de notre pays. Si nous voulons que nos dépenses de recherche-développement représentent 3 % de notre richesse nationale, conformément à l'objectif qui a été défini à Lisbonne, nous savons que l'effort doit venir, aussi et surtout, des entreprises elles-mêmes.

J'ajoute que l'aide publique à la recherche privée est en France, proportionnellement plus faible que dans la plupart des grands pays de recherche. Si notre dispositif pèche, ce n'est donc pas par excès de générosité à l'égard de la recherche privée.

Nous sommes nombreux à souhaiter que la recherche privée se développe et nous sommes persuadés que des dispositifs fiscaux adaptés sont de nature à y contribuer fortement.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Monsieur le rapporteur, le souci de l'utilisation des fonds publics ne peut pas s'assimiler à de la suspicion. Nous ne sommes pas comme Blanche Neige, qui voit des nains partout ! (Sourires.) Nous ne voyons pas des effets d'aubaine partout. Mais l'expérience est là : la vie est dure, hélas, et « le marché n'a ni conscience ni miséricorde ».

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 145.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Art. additionnels après l'art. 15
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Art. additionnels après l'art. 16

Article 16

Au I de l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics, il est ajouté un 5° ainsi rédigé :

« 5° Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, les établissements publics de coopération scientifique et les établissements publics à caractère scientifique et technologique, pour les achats de fournitures et de services destinés à la conduite de leurs activités de recherche. »

M. le président. L'amendement n° 150, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Remplacer le texte proposé par cet article pour le 5° du I de l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 par deux alinéas ainsi rédigés :

« 5° Tous les établissements publics à caractère administratif ayant dans leur statut une mission de recherche, parmi lesquels les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel, les établissements publics de coopération scientifique et les établissements publics à caractère scientifique et technologique, pour les achats de fournitures, de services et de travaux destinés à la conduite de leurs activités de recherche.

« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de cette disposition et, notamment, les conditions dans lesquelles lesdits établissements fixent, en tant que pouvoir adjudicateurs, les modalités de passation des marchés pour leurs achats scientifiques. »

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Cet amendement vise à remplacer le 5° de l'actuel article 16 du projet de loi de programme par trois nouveaux alinéas.

Premièrement, il s'agit d'étendre la dérogation au code des marchés publics aux marchés de travaux nécessaires pour l'activité de recherche, et non plus seulement aux achats de fournitures et de services.

Deuxièmement, il s'agit d'appliquer cette disposition à l'ensemble des établissements publics ayant dans leur statut une mission de recherche, c'est-à-dire aux établissements publics de recherche, aux nouveaux établissements publics de coopération scientifique et aux écoles d'ingénieurs.

Troisièmement, nous prévoyons qu'un décret en Conseil d'État fixera les modalités particulières selon lesquelles les établissements pourront aménager des procédures d'achat public.

Cet amendement répond à une revendication que nous avons entendu s'exprimer de manière itérative lorsque nous avons visité des laboratoires.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Il est en effet essentiel de simplifier la vie des chercheurs. Or l'application du code des marchés publics entraîne une complexité qui, d'une manière générale, ne contribue pas à diminuer le coût des produits que l'on achète.

En conséquence, il est utile d'insérer dans le présent projet de loi de programme des dispositions d'allégement. Les dispositions prévues dans l'amendement de la commission spéciale vont plus loin : je ne puis donc qu'y être très favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 150.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.

(L'article 16 est adopté.)

Art. 16
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Art. 17

Articles additionnels après l'article 16

M. le président. L'amendement n° 45, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le d) du cinquième alinéa de l'article L. 431-1 du code de la recherche est ainsi rédigé :

« d) Les titulaires d'un doctorat n'ayant pas la qualité de fonctionnaire titulaire, sous réserve, pour les docteurs en médecine, en pharmacie ou en odontologie, d'avoir terminé leur internat de spécialité. »

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Depuis une loi de 1985, l'article L. 431-1 du code de la recherche autorise les personnels ayant eu une activité professionnelle et appartenant à un certain nombre de catégories à exercer leurs fonctions par contrat à temps complet ou à temps partiel dans des services de recherche des administrations, dans les établissements publics de recherche et dans les établissements publics d'enseignement supérieur.

Ces contrats sont conclus dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État et ne peuvent, en aucun cas, excéder trois ans renouvelables une fois.

Les personnels concernés répondent à trois caractéristiques principales : le fait d'être déjà employés par certaines structures, la nationalité, le fait d'avoir suivi certaines formations. C'est ainsi le cas des docteurs en médecine, en pharmacie ou en odontologie ayant terminé leur internat de spécialité et n'ayant pas la qualité de fonctionnaire titulaire, tout en restant dans le cadre des conditions posées par l'article L. 431-1 du code de la recherche, notamment quant à l'obligation d'avoir exercé une activité professionnelle antérieure.

La commission spéciale approuve le dispositif introduit en 1985, qui est de nature à favoriser la mobilité entre les personnels de la recherche et à élargir ainsi les opportunités de carrière.

Aussi estimons-nous juste et nécessaire que les dispositions prévues jusqu'à présent pour les seuls docteurs en médecine, pharmacie et odontologie soit étendues aux titulaires de doctorat dans d'autres disciplines.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, une fois n'est pas coutume, je suis en complet désaccord avec votre commission.

Je me permets d'attirer tout spécialement votre attention sur les risques qui pourraient résulter d'une mauvaise interprétation de cet amendement.

Vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, il existe une disposition dérogatoire en faveur des docteurs en médecine, ou relevant de disciplines voisines, qui tient à l'organisation très particulière de ces professions. À l'issue de l'internat de spécialité, pendant la période de clinicat et avant, le cas échéant, d'être admis dans un corps de praticiens universitaires, les intéressés ont effectivement cette possibilité de conclure un contrat de trois ans renouvelables une fois.

Mais la situation des autres docteurs, dans d'autres disciplines, n'a rien de comparable. Les possibilités de trouver un emploi à l'issue d'un tel contrat sont, à l'évidence, beaucoup moins élevées pour des disciplines autres que la médecine, la pharmacie ou l'odontologie.

Par conséquent, l'adoption de cet amendement aurait pour effet d'introduire une dérogation très notable et inopportune à notre droit du travail. Ce serait une sorte d'incitation à la précarisation des chercheurs qui ne correspond pas du tout au souhait du Gouvernement.

Notre souhaitons que les jeunes chercheurs et les jeunes docteurs trouvent un emploi dans l'entreprise ou dans la recherche privée, notamment grâce au nouveau dispositif des CIPRE ou bien, s'ils font le choix de la recherche publique, qu'ils trouvent un emploi public stable, grâce aux emplois nouveaux ou aux créations d'emplois dans les organismes de recherche et les universités.

Nous ne souhaitons pas nous voir reprocher la précarisation des jeunes chercheurs. Je sais qu'une telle précarisation ne correspond évidemment pas à votre intention, mais je pense que c'est l'interprétation qui risquerait fort d'être faite de cette mesure si elle était introduite dans la loi.

C'est pourquoi, je vous le dis avec une certaine solennité, le Gouvernement ne peut pas être favorable à cet amendement créant une dérogation considérable au droit du travail pour la catégorie particulière des chercheurs. À notre sens, ce n'est pas dans cette voie que l'on peut trouver des solutions facilitant cette transition spécifique à la vie du chercheur, entre le moment où il a soutenu sa thèse et celui où il trouve un emploi définitif, qu'il s'agisse d'un contrat à durée indéterminée dans une entreprise ou d'un emploi statutaire dans un organisme de recherche.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.

M. Jacques Valade, président de la commission spéciale. Monsieur le ministre, le fait que vous reconnaissiez, en tant que ministre de la recherche, l'existence d'un problème spécifique représente déjà un pas vers une tentative de solution beaucoup plus générale.

Je comprends parfaitement que l'amendement défendu par Henri Revol, au nom de la commission spéciale, vous contrarie. Mais, d'une part, la perspective de la précarisation n'est pas du tout dans notre esprit - et je vous remercie de nous en avoir fait crédit - et, d'autre part, vous semblez considérer comme particulier le cas de ceux qui ne sont pas docteurs en médecine, en pharmacie ou en odontologie, alors que nous considérons, nous, que ce sont ces derniers qui constituent un cas particulier.

Nous comprenons parfaitement que, pour favoriser la carrière de ces jeunes gens qui, après des études longues et difficiles, rencontrent des difficultés à s'insérer dans la vie professionnelle, on envisage des solutions particulières. Mais convenons que le problème est pratiquement le même dans toutes les disciplines après beaucoup d'années d'études - un docteur ès sciences physiques, de bon niveau, est opérationnel à trente ans, après avoir connu toutes les situations intermédiaires que sont les stages ou les bourses, notamment celles qu'accorde parfois le CNRS.

Nous rencontrons par conséquent un vrai problème. Nous apprécions le fait que vous l'ayez vous-même pris en considération et nous vous faisons toute confiance pour trouver une solution, dans les mois qui viennent, afin d'améliorer la situation des jeunes chercheurs, sans pour autant généraliser la dérogation dont bénéficient les jeunes docteurs en médecine, en pharmacie ou en odontologie.

Dans cet esprit, nous retirons notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 45 est retiré.

L'amendement n° 115, présenté par MM. Adnot et Grignon, est ainsi libellé :

Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - L'article L. 6212-4 du code de la santé publique est complété in fine par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Les sociétés qui exploitent un laboratoire n'ayant aucune relation directe avec les patients, non ouvert au public, ne réalisant pas de prélèvements, exécutant des analyses pour d'autres laboratoires ou recevant des prélèvements non sanguins de tout autre établissement habilité à en effectuer et rendant, sauf pour les actes de prélèvement, les services médicaux d'un laboratoire, incluse la remise d'un compte rendu d'analyses signé par un ou des directeurs du laboratoire, ne sont pas soumises aux règles mentionnées aux 1° à 4°, ni à l'interdiction prévue à la première phase de l'alinéa précédent.

« Ces sociétés doivent être inscrites en tant que telles à l'ordre professionnel compétent, sous l'appellation de « Laboratoire d'analyses de biologie médicale de référence ».

 « Dans ces sociétés, au moins quinze pour cent du capital et des droits de vote doivent être détenus directement ou indirectement par des biologistes diplômés en exercice.

« Ces sociétés ne peuvent prendre aucune participation directe ou indirecte, ni par personne interposée, dans des sociétés exploitant des laboratoires d'analyses de biologie médicale autres que de référence.

« Elles doivent respecter des conditions d'autorisation, qui seront précisées par un décret, propres aux laboratoires d'analyses de biologie médicale de référence ».

II - Dans le troisième alinéa de l'article L. 6212-2 du code de la santé publique, après les mots : « ou une société à responsabilité limitée », sont insérés les mots : « à l'exception du cas des sociétés visées aux cinq derniers alinéas de l'article L. 6212-4, ».

III - Après le troisième alinéa de l'article L. 6212-2 du code de la santé publique, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le laboratoire est exploité par une société inscrite en qualité de « société de laboratoire d'analyses de biologie médicale de référence », visée aux cinq derniers alinéas de l'article L. 6212-4 du présent code, le directeur général, s'il s'agit d'une société à conseil d'administration, le président du directoire ou le directeur général unique et l'un des gérants, ainsi que la majorité au moins des membres du conseil d'administration ou du directoire et du conseil de surveillance, doivent être des directeurs ou directeurs adjoints de laboratoire d'analyses de biologie médicale.

« Ceux qui sont membres d'un directoire ne peuvent être révoqués que par le conseil de surveillance ».

La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Cet amendement vise à modifier les articles L. 6212-4 et L. 6212-2 du code de la santé publique pour permettre aux laboratoires de référence de faire appel à des capitaux extérieurs, tout en maintenant le contrôle de l'activité biologique par des biologistes et en préservant l'indépendance professionnelle des directeurs de laboratoire.

L'objet de cet amendement est de permettre à des laboratoires de second rang, qui ne sont pas directement en relation avec le public, de se développer à l'étranger et d'être en position d'affronter la concurrence internationale. Si nous n'adoptions pas cet amendement, ces laboratoires seraient soit obligés de se délocaliser, soit privés de la capacité de s'insérer dans la compétition internationale. Or nous avons besoin de maintenir la qualité de ces laboratoires pour rester présents dans ce secteur.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Henri Revol, rapporteur. La commission spéciale émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Pour toutes les raisons excellemment exposées par l'auteur de l'amendement, je suis favorable à son adoption.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 115.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.

TITRE IV

DISPOSITIONS RELATIVES À L'INSTITUT DE FRANCE ET AUX ACADÉMIES

Art. additionnels après l'art. 16
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Art. 18

Article 17

L'Institut de France ainsi que l'Académie française, l'Académie des inscriptions et belles-lettres, l'Académie des sciences, l'Académie des beaux-arts et l'Académie des sciences morales et politiques qui le composent sont des personnes morales de droit public à statut particulier.

Ils ont pour mission de contribuer à titre non lucratif au perfectionnement des lettres, des sciences et des arts.

Leurs membres sont élus par leurs pairs. Toutes les fonctions y sont électives.

M. le président. L'amendement n° 46, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter le premier alinéa de cet article par les mots :

, placées sous la protection du Président de la République.

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission spéciale approuve le fait que le projet de loi donne une consécration législative au statut de l'Institut de France et des Académies. Elle propose toutefois de préciser que l'Institut et les Académies « sont placés sous la protection du président de la République », cette spécificité lui semblant mériter de figurer dans la loi, car elle fait partie des garanties fixées dès l'origine.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Je dois reconnaître que les dispositions de l'ordonnance du 21 mars 1816, qui n'ont pas été abrogées, prévoyant que « les Académies sont placées sous la protection directe et spéciale du Roi », ne sont pas aujourd'hui d'une application facile... (Sourires.)

En conséquence, cet amendement, qui place l'Institut et ses Académies sous la protection du Président de la République et me paraît réaliser une actualisation tout à fait utile de notre droit. (Nouveaux sourires.)

M. le président. Monsieur Valade, vous êtes digne de la Chambre des Pairs ! (Nouveaux sourires.)

La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, contre l'amendement.

Mme Marie-Christine Blandin. Les Académies concernées ont notamment pour mission d'encourager la vie scientifique. L'Académie des sciences, par exemple, réunit savants français et étrangers, organise conférences et débats, conserve la mémoire de la science et des scientifiques, promeut l'enseignement des sciences, mais surtout elle dit « favoriser le développement des sciences pour le bénéfice de la société ».

Eh bien, ce n'est pas pour le bénéfice de la société que l'Académie de médecine a dit que l'amiante ne présentait pas de danger. Vous trouverez cette affirmation au n° 4 du tome 180 du Bulletin de l'Académie nationale de médecine, paru en 1996, alors que tous les travaux scientifiques internationaux concordaient sur les risques liés à l'inhalation de fibres d'amiante.

Ce n'est pas, non plus, pour le bénéfice de la société que l'Académie des sciences s'est déclarée hostile au principe de précaution, en arguant, dans une rédaction d'ailleurs bien peu élégante, qu'« il pourrait induire des effets pervers susceptibles d'avoir des effets désastreux sur les progrès futurs de notre bien-être, de notre santé et de notre environnement ».

C'est faire preuve d'une bien courte vue que de craindre la précaution. Loin de freiner la recherche, elle fournit l'occasion d'approfondissements, de commandes d'expertises nouvelles, voire d'innovations de substitution, si un danger était avéré.

Aujourd'hui, la commission spéciale nous propose de placer les Académies sous la protection du Président de la République. N'est-ce pas d'un autre âge ? Qui peut prétendre ainsi à un statut hors de portée de tout contrôle, voire de tout questionnement des citoyens ? Cela ne s'inscrit-il pas dans la droite ligne de la fondation, par Colbert, de l'Académie des sciences ? Il y regroupa des savants avec mission d'explorer et de rapporter les richesses du monde. De ces expéditions naquirent : la Compagnie des Indes orientales, la Compagnie des Indes occidentales, la Compagnie du Levant, la Compagnie du Sénégal, toutes dédiées au commerce triangulaire, les unes par le commerce des épices, les autres par celui des esclaves.

Ne ranimons donc pas de vieilles notions protocolaires, qui portent la marque d'une culture dont nous subissons encore les séquelles.

À titre personnel, je voterai contre cet amendement qui ne se justifie pas au xxie siècle et qui, du fait de l'expression « sous la protection », risque fort de plonger les victimes de l'amiante dans l'incompréhension totale.

M. Yves Fréville. L'Académie de médecine ne fait pas partie de l'Institut et n'est donc pas visée par cet article !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Art. 17
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Art. 19

Article 18

L'Institut et les Académies s'administrent librement. Leurs décisions entrent en vigueur sans autorisation préalable. Ils bénéficient de l'autonomie financière sous le contrôle de la Cour des comptes.

L'administration de l'Institut est assurée par la commission administrative centrale, qui élit parmi ses membres le chancelier de l'Institut, et par l'assemblée générale. Chaque académie est administrée par ses membres, qui désignent leurs secrétaires perpétuels et leur commission administrative.

M. le président. L'amendement n° 47, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la dernière phrase du premier alinéa de cet article, après les mots :

sous le

insérer le mot :

seul

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Je suis désolé de contrarier Marie-Christine Blandin, car cet amendement tend à préciser que le contrôle de la Cour des comptes, qui est essentiel pour garantir la régularité des comptes et de la gestion de l'Institut et des Académies, est exclusif de tout autre contrôle externe.

M. Yves Fréville. Sauf pour les rapporteurs spéciaux des assemblées !

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. On ne peut pas, d'un côté, réclamer l'indépendance des commissions scientifiques et, de l'autre, vouloir que l'Institut et ses Académies soient sous le contrôle de je ne sais quel organisme. Il est en effet tout à fait légitime que seule la Cour des comptes soit admise à contrôler l'Institut.

Je souhaite également répondre à Mme Blandin. Il peut arriver qu'une erreur se glisse dans un rapport émis par telle ou telle institution ...

Mme Marie-Christine Blandin. Cent mille morts du fait de l'amiante !

M. François Goulard, ministre délégué. Pas d'amalgame, si vous le voulez bien, madame !

Comment ne pas reconnaître que l'Institut, par son mode de d'élection et par les compétences qu'il rassemble, constitue pour notre pays une autorité scientifique de très haut niveau ? La protection traditionnelle du Président de la République s'exerce sur des institutions qui sont au service de notre pays et de notre société. Il faut le dire, les Académies réunissent des femmes et des hommes de lettres ou de science de premier plan, reconnus comme tels.

Par conséquent, je ne voudrais pas que l'on retienne de ces débats des critiques aussi sommaires - pardonnez-moi de le dire, madame la sénatrice - à l'encontre d'institutions qui ont prouvé leur valeur au fil de plusieurs siècles. Bien sûr, quand on remonte à l'origine, cette valeur doit s'entendre dans le contexte de l'époque, mais, pour aujourd'hui, elle est absolument incontestable, sur le plan tant scientifique que moral.

MM. Josselin de Rohan et Alain Gournac. Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.

(L'article 18 est adopté.)

Art. 18
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Art. additionnels après l'art. 19

Article 19

Les statuts de l'Institut et de chaque académie et les conditions particulières de leur gestion administrative et financière sont fixés par décret en Conseil d'État après avis de l'Institut.

Lorsque les dons et legs faits à l'Institut et à chaque académie sont grevés de charges, de conditions ou d'affectation immobilière, leur acceptation ou leur refus est autorisé par décret en Conseil d'État.

M. le président. L'amendement n° 48, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les statuts et règlements de l'Institut et des Académies sont approuvés par décret en Conseil d'État.

Les dons et legs avec charges dont bénéficient l'Institut ou les Académies sont autorisés par décret en Conseil d'État.

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur spécial. La commission spéciale vous propose une nouvelle rédaction de l'article 19, afin que soient mieux respectés les principes d'indépendance et d'autonomie de gestion dont l'Institut et les Académies ont toujours pu se prévaloir au cours de leur longue histoire.

Depuis l'origine, les textes et règlements qui s'appliquent à eux sont pris sur leur proposition et sont approuvés par décret en Conseil d'État. Dans ces conditions, on voit mal pourquoi le présent projet de loi confierait au Gouvernement le soin de fixer désormais leurs statuts et règlements, en les soumettant au simple avis de l'Institut. Il s'agit donc de prévoir seulement un contrôle de légalité par le Conseil d'État.

De même, l'autonomie de gestion, reconnue à l'Institut et aux Académies, tant pour leurs fonds propres que pour ceux des fondations, conduit à tirer les conséquences du fait qu'ils ne peuvent être assimilés à des établissements publics.

La rédaction proposée tend à soumettre à autorisation, par décret en Conseil d'État, les dons et legs avec charges, sans viser, en revanche, les dons et legs grevés de conditions ou d'affectation immobilière - ces précisions paraissant superfétatoires - ni les décisions de refus de dons et legs par l'Institut et les Académies.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 19 est ainsi rédigé.

Je note que cet amendement a été adopté à l'unanimité des présents.

Art. 19
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Art. 20

Articles additionnels après l'article 19

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 19, insérer un article ainsi rédigé :

I - L'article L. 332-6 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour la prise en charge d'activités nécessitant des modalités particulières de gestion, le Commissariat à l'énergie atomique peut être autorisé, par décret en Conseil d'État, à créer en son sein des services dotés de l'autonomie administrative et budgétaire dirigés par un directeur nommé par arrêté des ministres intéressés et placé sous l'autorité de l'administrateur général. Le décret d'autorisation précise, le cas échéant, les modalités particulières du contrôle de l'État sur les décisions intéressant les services et les activités concernés. »

II - 1° La procédure prévue à l'article L. 15-9 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique pourra être appliquée en vue de la prise de possession immédiate des terrains bâtis ou non bâtis dont l'acquisition est nécessaire à l'exécution des travaux de réalisation de l'itinéraire desservant le projet international de réacteur expérimental de fusion thermonucléaire dénommé projet ITER localisé sur le site de Cadarache, commune de Saint-Paul-lez-Durance.

2° Les décrets sur avis conforme du Conseil d'État prévus à l'article L. 15-9 du code précité devront être pris avant le 31 décembre 2010.

3° Les dispositions des articles L. 314-1 à L. 314-8 du code de l'urbanisme s'appliquent, le cas échéant, aux opérations réalisées en application du I du présent article.

III - L'établissement public mentionné à l'article L. 332-1 du code de la recherche est autorisé à défricher les terrains nécessaires à la réalisation du projet ITER, situés sur le territoire de la commune de Saint-Paul-lez-Durance (Bouches-du-Rhône), sous réserve de l'approbation par le ministre chargé des forêts des modalités de ce défrichement.

IV - Au quatrième alinéa (b) de l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme, les mots : « 1er janvier 2006 » sont remplacés par les mots : « 1er janvier 2010 sous réserve, lorsque le plan répond aux conditions définies par le 4° de l'article L. 121-10, de l'application de la procédure prévue aux articles L. 121-11 et suivants ».

V - En conséquence, faire précéder cet article par une division additionnelle ainsi rédigée :

Titre...

Dispositions relatives à l'implantation du projet ITER en France

La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Cet amendement porte sur la grande affaire de l'implantation en France du réacteur de recherche ITER, d'une importance considérable en ce qui concerne la fusion nucléaire.

Il s'agit, on le sait, de recherches à très long terme, car il faudra probablement plusieurs décennies avant de pouvoir, sur un plan pratique, utiliser la fusion nucléaire comme source d'énergie. Mais chacun d'entre nous mesure à quel point ces recherches sont essentielles pour notre avenir, la fusion nucléaire étant une source d'énergie quasiment inépuisable et produisant très peu de déchets nucléaires, ceux-ci ayant de surcroît une durée de vie beaucoup plus courte que les déchets qu'occasionnent les réactions de fission.

Les effets induits de ces recherches sur la fusion seront également considérables. La science des matériaux, notamment leur résistance à grande température, les technologies telles que l'induction magnétique ou la supraconductivité vont progresser grâce aux recherches qui seront conduites sur notre sol.

Il s'agit donc d'une affaire d'importance internationale, d'importance européenne aussi - on connaît le rôle joué par l'Union européenne dans l'obtention de l'implantation d'ITER sur notre territoire - et, bien évidemment, d'importance pour la France.

Toutefois, pour que le projet ITER se déroule dans de bonnes conditions, nous avons besoin de dispositions législatives particulières.

La première de ces dispositions est la création de ce que l'on appelle l'agence ITER France. Cette création résulte directement des accords internationaux signés par notre pays. Il est prévu qu'une structure particulière au sein du CEA sera le correspondant d'ITER sur le plan international et pour contribuer à la réalisation de l'équipement lui-même.

La deuxième disposition vise, selon des procédures plus faciles que les procédures habituelles, mais non moins protectrices des intérêts de la population, à réaliser la route à grand gabarit nécessaire pour le transport des éléments qui constitueront l'équipement ITER.

La troisième disposition tend à permettre un défrichement rapide, mais présentant toutes garanties, de l'espace sur lequel sera construit ITER. En effet, nos procédures habituelles, très protectrices, ne sont pas adaptées à la réalisation d'un équipement aussi exceptionnel, on le comprend, mais elles ne sont nullement menacées par une application qui est, par définition, extrêmement limitée.

Enfin, la dernière disposition a pour objet, là encore dans des conditions plus rapides que ne le permet la procédure en usage, de modifier le plan d'occupation des sols de la commune de Saint-Paul-lez-Durance, qui accueillera l'équipement.

Notre objectif est de répondre rapidement à une exigence internationale et de démontrer la capacité de notre pays, qui a demandé à accueillir ce projet, à réaliser ce grand équipement ITER non seulement dans les meilleures conditions possibles, mais aussi dans les délais prévus. Il y va véritablement de la réputation internationale de notre pays !

M. le président. Le sous-amendement n° 149, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Modifier ainsi l'amendement n° 1 :

A. - Rédiger ainsi le texte proposé par le I pour compléter l'article L. 332-6 du code de la recherche :

« Afin de prendre en charge des activités nécessitant des modalités particulières de gestion, un décret en Conseil d'État peut autoriser le commissariat à créer en son sein des services dotés de l'autonomie administrative et budgétaire, dirigés par un directeur nommé par arrêté des ministres intéressés et placé sous l'autorité de l'administrateur général. Ce décret précise, le cas échéant, les modalités particulières du contrôle de l'État sur les décisions intéressant les services et les activités concernés. »

B. - Modifier ainsi le 1° du  II :

a) Remplacer les mots :

pourra être appliquée

par les mots :

est applicable

b) Après les mots :

de l'itinéraire

insérer le mot :

routier

c) Compléter cet alinéa par les mots :

(Bouches-du-Rhône)

C. - Au 2° du II, remplacer les mots :

devront être pris

par les mots :

doivent être publiés

D. - Au 3° du II, remplacer les mots :

Du I du présent article

par les mots :

du 1° du présent II

E. - Au début du III, remplacer les mots :

L'établissement public mentionné à l'article L. 332-1 du code de la recherche

par les mots :

Le Commissariat à l'énergie atomique

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur spécial, pour présenter le sous-amendement n° 149 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n°1.

M. Henri Revol, rapporteur spécial. Nous avons souvent entendu, y compris quelquefois dans cet hémicycle, que nous manquions de grands projets. Le projet ITER en est un. Il est même fondamental pour l'avenir dans le domaine de l'énergie, domaine pour lequel une récente loi de programmation nous a mobilisés, au Parlement et dans tout le pays.

Nous sommes maintenant face à la nécessité de respecter des engagements internationaux, vous l'avez fort bien dit, monsieur le ministre. Je sais quelle part vous avez prise à la décision d'implanter ITER en France, à la suite de vos prédécesseurs, Mme Claudie Haigneré et M. François d'Aubert, qui ont su concentrer autour d'eux toutes les forces de notre pays, parmi lesquelles les chercheurs, en particulier ceux du Commissariat à l'énergie atomique, qui, de longue date, oeuvrent dans le domaine de la fusion thermonucléaire.

Pour respecter nos engagements de la meilleure façon, vous nous proposez, dans l'amendement n° 1, des dispositions pratiques permettant de mettre en oeuvre le plus rapidement possible, dans la région de Cadarache, l'accueil de ces structures. La commission spéciale est bien entendu très favorable à cet amendement.

J'en viens maintenant au sous-amendement n° 149.

Monsieur le ministre, nous avons rougi de plaisir lorsque, tout à l'heure, vous avez loué la Haute Assemblée pour ses travaux. Sans rougir, de confusion cette fois, je vous prie toutefois de nous pardonner ces quelques corrections de forme que nous apportons à votre amendement.

Le sous-amendement n° 146 a en effet pour objet de préciser certaines notions et de corriger une petite erreur de référence.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n°149 ?

M. François Goulard, ministre délégué. Comme l'Institut, le Gouvernement n'est pas infaillible ! Nous avions en effet commis quelques erreurs de rédaction. Je remercie la commission spéciale d'avoir corrigé, modestement mais utilement, la copie du Gouvernement avec ce sous-amendement auquel le Gouvernement est favorable.

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.

M. Patrice Gélard. Je voudrais faire deux remarques sur l'amendement du Gouvernement.

Il est dommage que ce soit sous la forme d'un amendement déposé au cours de la discussion que le Gouvernement montre tout son intérêt à l'égard du projet ITER, auquel nous sommes tous attachés.

L'ajout, à chaque projet de loi, de dispositions sous forme d'amendements est une mauvaise pratique. Et encore devons-nous estimer heureux que cet amendement ait été déposé par le Gouvernement lui-même et non inspiré par ce dernier à un parlementaire ! Il reste que cette méthode n'est pas bonne : il est préférable que des dispositions de cet ordre figurent dans le texte initial.

Par ailleurs, monsieur le ministre, l'essentiel de votre amendement relève malheureusement du domaine réglementaire et non du domaine législatif. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Je mesure l'importance du projet et je comprends vos intentions. Vous voulez que les choses aillent vite. Mais il ne faudrait pas que nous nous engagions systématiquement dans cette voie qui nous conduit, de plus en plus souvent, à nous prononcer sur des amendements présentant des dispositions de caractère réglementaire.

Cela dit, nous voterons malgré tout cet amendement, compte tenu de l'intérêt qu'il représente et que vous avez souligné dans votre intervention. (Marques d'approbations sur les travées de l'UMP.)

Mme Annie David. Il s'agit quand même de dispositions d'ordre réglementaire !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Quand il s'agit du nucléaire, il est toujours fait appel à des dispositions dérogatoires, et cet amendement ne déroge pas à cette règle-là ! Il a été déposé de façon impromptue et contient des mesures qui, comme l'a dit le doyen Gélard, auraient tout à fait pu être prises d'une autre manière.

Pour le nucléaire, on recourt toujours à des moyens exceptionnels, on invoque toujours des secrets particuliers, y compris le secret-défense. C'est ainsi que les trains de déchets traversent vos communes la nuit, passent devant les gares et au ras des maisons !

Dans l'amendement, il est ainsi question d'expropriation, de prise de possession immédiate des terrains, de défrichement d'environ 50 hectares boisés, de levée d'obstacles pour révisions simplifiées des POS sans mise en forme de PLU !

Heureusement, le rapporteur nous a rassurés : il n'est pas question, nous a-t-il expliqué, de remettre en cause les acquis démocratiques !

Personnellement, je trouve que le compte n'y est pas ; c'est pourquoi je voterai contre cet amendement.

MM. Alain Gournac et Robert Del Picchia. On s'en doutait !

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.

M. Claude Domeizel. M. Gélard a mis l'accent sur le fait que cet amendement comportait des dispositions relevant du domaine réglementaire. Mais il en est d'autres qui relèvent bien du domaine législatif.

Je pense en particulier au paragraphe IV de cet amendement, qui vise à proroger le délai permettant à la commune de Saint-Paul-lez-Durance d'utiliser la procédure simplifiée de révision des POS afin d'éviter le PLU et donc une procédure lourde.

Ce paragraphe, qui vise non pas la fusion nucléaire, mais la fusion de plusieurs textes, est un vrai jeu de piste ! A ce propos, on y gagnerait en lisibilité si, au lieu de procéder à des renvois, il était possible de lire la totalité des dispositions concernées.

Cela dit, après m'être plié à ce jeu de piste, j'ai constaté que le paragraphe IV tendait à repousser la date limite du 1er janvier 2006 au 1er janvier 2010, et j'imagine que cette disposition concerne tout le territoire concerné et non la seule ville de Saint-Paul-lez-Durance. J'aimerais donc avoir confirmation qu'elle concerne la zone située autour de Cadarache et dite « isochrone vingt minutes », car, du fait de l'installation d'ITER sur le site de Cadarache, des révisions devront également être effectuées dans certaines autres communes.

Sans doute cet amendement aurait-il dû être déposé plus tôt, mais, en tout état de cause, il ne pouvait pas l'être avant que soit prise la décision d'implantation d'ITER !

Personnellement, pour des raisons que vous comprendrez, je le voterai.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, pour explication de vote.

M. Michel Billout. Au nom de l'urgence, le Gouvernement a choisi, pour l'examen des mesures relatives à l'implantation du projet ITER, de procéder par voie d'amendement plutôt que de déposer un projet de loi spécifique. Nous le regrettons.

Il est effectivement important d'aller vite si l'on veut que la construction des infrastructures et de la machine elle-même commence en 2007 et en 2009 ; je rappelle d'ailleurs que le groupe CRC est tout à fait favorable au développement de ce projet. On peut donc comprendre que, pour des projets d'une telle envergure, il soit nécessaire d'assouplir les règles en matière d'urbanisme. Cela dit, le sujet aurait nécessité un débat plus important.

Toutefois, le paragraphe I de l'amendement n° 1, qui prévoit la possibilité pour le Commissariat à l'énergie atomique de « créer en son sein des services dotés de l'autorité administrative et budgétaire », suscite quelques inquiétudes de notre part.

Tout d'abord, on peut s'interroger sur la pertinence d'une telle mesure, même limitée au projet ITER, et même si vous évoquez une décision internationale, monsieur le ministre. En effet, on le sait, au sein du CEA, ont récemment été mis en place deux fonds dédiés, le fonds Civil et le fonds Défense, pour financer le démantèlement et l'assainissement des installations nucléaires. Ces fonds sont certes intégrés dans le budget du CEA, mais bénéficient d'une étanchéité par rapport à ce dernier.

Dès lors que de telles opérations sont possibles, on se demande quel est l'intérêt de créer une structure administrative et budgétaire indépendante ; l'utilité d'une telle mesure doit peut-être être recherchée ailleurs. Ainsi, pour ce qui concerne le financement du projet ITER par l'État, des inquiétudes se sont fait entendre. Le risque est en effet grand que le financement soit pris sur la part consacrée à la recherche dans le domaine de la fusion magnétique, part dédiée au CEA. Hélas ! si telle est la volonté du Gouvernement, la création d'un service autonome au sein du CEA n'écartera absolument pas ce danger. Vous voyez donc, monsieur le ministre, qu'une autonomie budgétaire n'est pas vraiment nécessaire en la matière.

Enfin, alors que les autres mesures proposées par l'amendement du Gouvernement sont limitées au projet ITER, les dispositions prévues dans le paragraphe I dépassent la simple mise en oeuvre de ce projet.

Ainsi, il deviendrait possible pour chaque projet de créer une agence ou une structure indépendante et séparée du CEA. De plus, on ne peut écarter, à l'avenir, la généralisation de la logique que le Gouvernement défend ici : on fragiliserait les organismes de recherche importants en permettant leur démantèlement au profit de structures et projets ciblés.

Face au risque réel et sérieux que constitue l'éclatement d'un organisme de recherche aussi essentiel que le Commissariat à l'énergie atomique, et pour toutes les raisons que je viens de développer, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre cet amendement.

M. Jacques Valade, rapporteur. Contre ?

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je rejoins, sur la forme, les propos de M. Gélard.

En effet, je me demande pourquoi, dans le cadre de l'examen du projet de loi d'orientation sur l'énergie, à l'occasion duquel nous avons pratiquement tous défendu le projet ITER, nous n'avons pas lancé une procédure, ce qui nous aurait permis d'éviter de traiter ce problème dans l'urgence. En l'espèce, vous me l'accorderez, monsieur le ministre, cet amendement constitue un cavalier !

M. François Goulard, ministre délégué. Pas du tout !

M. Daniel Raoul. Je comprends certes l'urgence de la situation, mais c'est uniquement eu égard à l'intérêt et à l'enjeu tant national qu'international de ce projet que nous acceptons de voter cet amendement. Mais franchement, n'y revenez pas, monsieur le ministre ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Je veux rebondir sur les propos de M. Raoul : je serai au contraire très heureux de revenir devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, avec un projet d'une aussi grande ampleur et qui nous apporte autant ! (Nouveaux sourires.)

S'agissant de l'examen de ces dispositions dans le cadre du projet de loi de programme pour la recherche, je veux dire qu'il est bien ici question de recherche à moyen terme et à long terme ; personne ne peut en disconvenir.

La décision d'implanter le projet ITER en France a été prise à Moscou au mois de juillet dernier. Les conditions dans lesquelles cette implantation s'opérera ont fait l'objet de discussions entre tous les pays concernés. Nous n'avons donc su que très tardivement quelles dispositions nous devions prendre pour accueillir ce programme.

Ainsi, monsieur Billout, l'exigence de créer une agence ITER France ne vient pas de nous ; elle est prévue dans l'accord international. Ne pas le faire reviendrait à nier la valeur d'un accord international que notre pays a signé ; la Constitution ne nous le permet évidemment pas, pas plus que l'intérêt supérieur de notre pays.

Monsieur Gélard, on peut toujours dire que telle ou telle disposition aurait pu être traitée de manière réglementaire. Nous avons d'ailleurs eu, au cours de ce débat, de nombreuses discussions sur ce point, et j'ai souvent plaidé en faveur du respect de l'article 34 de la Constitution. En l'occurrence, nous avons procédé à des modifications du droit de l'urbanisme et du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, sujets de nature profondément législative. L'intervention de la loi était donc absolument nécessaire. En outre, la création d'une agence dotée d'un caractère particulier au sein même du CEA relève également, à notre avis, de la loi. C'est la raison pour laquelle nous avons préféré opter pour cette voie, qui nous semble plus conforme à l'article 34 de la Constitution.

Madame Blandin, vous comparez les convois de déchets nucléaires à ce qui se fera dans le cadre du projet ITER ; cela n'a strictement rien à voir ! Vous faites un amalgame entre la fission, que vous critiquez et qui est au demeurant fort utile aujourd'hui dans notre pays, et la fusion ; or ces deux réactions n'ont là encore rien à voir ! En matière de risques, les deux phénomènes ne sont absolument pas comparables.

Quant au prétendu culte du secret du nucléaire, que l'on peut d'ailleurs comprendre pour des raisons tant industrielles que militaires, le programme ITER est, au contraire, une opération internationale menée au profit de l'ensemble des habitants de notre planète. Il est possible que, dans cinq ans ou dans cent ans, tous les pays du monde, quels qu'ils soient, et même les moins développés aujourd'hui, profitent de ces recherches qui sont réalisées par les grandes puissances, y compris par la Chine ou par l'Inde, qui vient de décider de rejoindre le programme. Ce projet est donc tout le contraire d'un projet secret et protégé ; il est conduit au profit de l'ensemble de l'humanité, pour l'avenir énergétique de cette dernière. Permettez-moi de vous dire, madame la sénatrice, que vos propos étaient donc parfaitement déplacés.

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Je veux dire clairement que nous sommes résolument favorables au projet ITER.

M. François Goulard, ministre délégué. Ah !

M. Ivan Renar. Vous noterez d'ailleurs, monsieur le ministre, que nous n'avons pas mis en cause les projets liés à l'aménagement du territoire ni la rapidité d'exécution que demande la mise en oeuvre de ce projet. Mais l'annonce du démantèlement du CEA suscite chez nous une profonde inquiétude, que nous avons le droit de manifester. (M. le ministre lève les bras au ciel.)

M. François Goulard, ministre délégué. Mais non !

M. Ivan Renar. Vous pouvez lever les bras au ciel, monsieur le ministre, mais, vous le savez bien, les personnels sont inquiets ! Le monde scientifique - ne nous le cachons pas - est préoccupé par le démantèlement de structures menacées telles que le CNRS. Et prévoir une exception ouvre la voie à toute possibilité. Nous manifestons par conséquent nos inquiétudes ; et nous ne levons pas les bras au ciel pour ne pas avoir à tendre le poing vers le ciel, monsieur le ministre !

C'est pourquoi nous voterons contre cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 149.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1, modifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19.

L'amendement n° 147, présenté par M. J.L. Dupont et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa et les deux premières phrases du deuxième alinéa de l'article L. 233-1 du code de l'éducation sont remplacés par un alinéa et une phrase ainsi rédigés :

« La Conférence des présidents d'université est composée des présidents d'université, des directeurs des instituts et des écoles extérieurs aux universités, des responsables des grands établissements, des écoles normales supérieures et des écoles françaises à l'étranger. Elle constitue un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de l'enseignement supérieur. Elle élit en son sein un président et un bureau.

« Elle a pour mission de représenter les intérêts collectifs de ses membres. »

La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.

M. Jean-Léonce Dupont. La conférence des présidents d'université, la CPU, composée de 102 membres, regroupe les universités et différents établissements d'enseignement supérieur dont elle est chargée de représenter et de défendre les intérêts.

Elle est de plus en plus souvent amenée à représenter ses membres au niveau national, européen et international, et elle est l'interlocuteur de nombreux partenaires. Son statut actuel ne lui permet pas toujours d'assumer facilement cette responsabilité.

C'est pourquoi, afin de faciliter l'exercice de ses missions, cet amendement a pour objet de lui octroyer le statut plus adéquat d'établissement public administratif.

Je tiens à préciser que la création de ce statut ne doit pas entraîner la création d'une ligne budgétaire supplémentaire ; l'ensemble de ces établissements doivent avoir la capacité d'alimenter cet établissement public administratif sur leurs ressources propres.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. Dans le cadre de nos auditions, nous avons entendu des présidents d'université. Par cet amendement, M. Dupont traduit une revendication formulée à la fois par le vice-président de la CPU et par le bureau de cette dernière. Ce faisant, ces membres de la CPU n'expriment pas là le souci de vouloir se libérer de la tutelle, indispensable, du ministre chargé de l'enseignement supérieur, mais veulent simplement être dotés d'une forme juridique qui leur permettrait de mieux conforter leur existence ; il leur est, par exemple, difficile d'intégrer certains organismes ou certaines organisations.

En outre, je rappelle que Jean-Léonce Dupont est, dans le cadre de la commission des affaires culturelles que j'ai l'honneur de présider, rapporteur pour avis de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. J'ai le sentiment que de grandes voix universitaires vont s'exprimer sur ce sujet, après moi ! (Sourires.)

Je veux tout d'abord dire que le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement. En effet, doter la conférence des présidents d'université d'un statut d'établissement public administratif ne nous paraît pas la solution adaptée.

La CPU rassemble les présidents d'université et de quelques établissements ayant un statut comparable. C'est un organe d'expression et de concertation. Les contacts sont naturellement fréquents avec le ou les ministres concernés, soit en assemblée générale, soit par l'intermédiaire d'un bureau. Il s'agit là d'un format assez classique en matière de représentation de grands établissements ou d'organismes divers, que l'on retrouve dans d'autres secteurs de l'administration.

Le statut d'établissement public nous paraît en l'espèce disproportionné. En adoptant une telle disposition, on introduirait une lourdeur.

La CPU ressent le besoin d'être reconnue, mais son existence est déjà traduite dans les textes. Elle veut établir des relations étroites avec les interlocuteurs des pouvoirs publics, mais c'est déjà le cas. Elle souhaite disposer de moyens matériels pour son fonctionnement ; le ministère de l'éducation nationale y pourvoit. Mais peut-être faudrait-il mieux préciser ses moyens, lui donner une plus grande souplesse en matière de gestion et une plus grande liberté d'autonomie ? Toutefois, le statut d'établissement public administratif n'est absolument pas l'instrument adapté pour ce faire.

Monsieur Dupont, je rends hommage à votre connaissance du monde universitaire mais, en l'occurrence, je ne peux pas être d'accord avec vous. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 147.

M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.

M. Yves Fréville. En réalité, M. le ministre vient excellemment de présenter mes arguments.

Je ne comprends pas pourquoi la conférence des présidents d'université demande une transformation de son statut en établissement public administratif.

Je ferai un bref rappel historique. En 1968, lorsque les universités sont devenues autonomes, a été créée une première institution, le CNESER, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. Parallèlement, la conférence des présidents d'université a été mise en place, de façon coutumière d'abord, puis par les textes. Tel est l'équilibre qui a été établi.

La CPU a un rôle de concertation entre des établissements indépendants les uns des autres. La transformer en établissement public administratif autonome reviendrait à recréer les fameux problèmes de tutelle par rapport aux universités, ce qui ne correspond manifestement pas à l'esprit du fonctionnement actuel et passé de la CPU.

Par ailleurs, la conférence des présidents d'université est présidée par le ministre. C'est d'ailleurs lui, et personne d'autre, qui est en charge des établissements d'enseignement supérieur. Qu'à ses côtés siège un premier vice-président chargé de la représentation, doté d'une très grande autonomie et d'une totale liberté vis-à-vis de lui, est parfait. Je n'ai jamais entendu le vice-président du Conseil d'État demander à devenir président de l'institution !

Monsieur Gélard, veuillez excuser un économiste de parler de matières qu'il connaît mal d'un point de vue juridique. Je dis peut-être des énormités. Mais il n'a jamais été demandé de transformer le Conseil d'État en établissement public autonome !

M. Ivan Renar. Comparaison n'est pas raison !

M. Yves Fréville. Mes chers collègues, il faut raison garder ! La conférence des présidents d'université a su prendre la place qui lui revenait pour ce qui concerne la concertation, nécessaire, avec le ministère. Je ne vois pas du tout comment on pourrait l'ériger en établissement public autonome. Lui reconnaître ce statut serait d'ailleurs la meilleure façon de l'affaiblir. Le jour où elle serait autonome et indépendante et où elle ne serait plus « dans le ministère », elle perdrait alors tout le pouvoir de concertation qui a été souligné tout à l'heure.

Pour toutes ces raisons, je suis opposé à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.

M. Patrice Gélard. Je voudrais ajouter deux remarques aux propos de M. le ministre et de M. Fréville

Tout d'abord, la conférence des présidents d'université n'est pas seule en cause.

M. François Goulard, ministre délégué. Exactement !

M. Patrice Gélard. D'autres organes similaires existent et demanderont, dans la foulée, la même chose. Citons la conférence des directeurs d'IUT, la conférence des directeurs de grandes écoles, ...

M. Patrice Gélard. ...la conférence des doyens des facultés de droit (Exclamations sur les travées de l'UMP), la conférence des doyens des facultés des sciences, etc.

M. Ivan Renar. La conférence des présidents du Sénat ! (Rires.)

M. Patrice Gélard. On ouvre une boîte de Pandore qui risque de révéler de nombreuses surprises.

À cela s'ajoute un second élément. Il est erroné de demander le statut d'établissement public administratif pour cette instance. Il s'agirait d'une nouvelle catégorie d'établissement public. Or, dans ce cas, les règles de fonctionnement et d'administration de l'établissement public devraient être définies. De telles dispositions ne figurant pas dans l'amendement n° 147, ce texte n'est pas conforme à la Constitution et, au moindre recours, le Conseil constitutionnel balayerait cette proposition.

Certes, l'état d'esprit des auteurs de cet amendement est compréhensible : la conférence des présidents d'université veut obtenir de la notoriété, ses membres pensant - à tort, selon moi - que le statut d'établissement public la leur conférerait.

En réalité, ce n'est pas du tout l'objet d'un établissement public administratif. La conférence des présidents est une structure de concertation, alors qu'un établissement public administratif a pour objet de faire non pas de la concertation mais de la gestion administrative d'un service public. Son statut juridique ne correspond pas à celui que les membres de la conférence des présidents désireraient. Il faut donc trouver autre chose !

M. le président. La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote.

M. Hugues Portelli. Les présidents d'université ne sont pas des organes indépendants au sein des universités. Ce sont simplement les organes exécutifs des établissements.

M. Hugues Portelli. Ils représentent trois conseils de ces établissements et n'ont pas d'autonomie particulière. Ils sont mandatés par leur conseil et n'ont pas de pouvoir propre.

Le fait de donner à la conférence des présidents le statut d'établissement public transformerait la nature du fonctionnement des universités et mettrait en place une sorte de séparation oligarchique des pouvoirs, ce à quoi les universités ne sont pas tout à fait prêtes. Il faut rester fidèle à la conception traditionnelle des universités françaises.

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.

M. Pierre Laffitte. L'amendement n° 147 comporte deux points différents.

Tout d'abord, serait octroyé à la conférence des présidents le statut d'établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de l'enseignement supérieur, ce qui est vivement contesté par M. le ministre et par un certain nombre de juristes.

Par ailleurs, pour une fois, seraient rassemblés dans une même entité les présidents d'université, les directeurs des instituts et des écoles extérieurs aux universités, les responsables des grands établissements, des écoles normales supérieures et des écoles françaises à l'étranger. Ce point est très important et pourrait donner lieu, à mon avis, à la constitution d'une association loi 1901.

La conférence des grandes écoles, que j'ai créée voilà trente ans, fonctionne parfaitement bien. Elle peut passer des conventions avec des pays étrangers. Il faut donc une structure juridique. La commission ou le Gouvernement pourrait peut-être déposer un amendement sur ce point précis.

M. le président. Monsieur Dupont, l'amendement n° 147 est-il maintenu ?

M. Jean-Léonce Dupont. Je ne peux que prendre en compte l'avalanche d'arguments avancés et la qualité de ceux de M. Gélard notamment, qui pourrait presque me pousser au vice de demander la création d'une conférence spécifique pour les doyens de droit ! Quoi qu'il en soit, il existe un problème d'organisation, de représentation et de dialogue avec un certain nombre d'organismes extérieurs, notamment internationaux. Il y a lieu de réfléchir au moyen de structurer au mieux le système. Faut-il passer par le biais d'une association ? Le problème est posé. Il faut que nous y réfléchissions. Cela étant, il me semble sage de retirer l'amendement n° 147.

M. le président. L'amendement n° 147 est retiré.

L'amendement n° 49, présenté par M. Valade, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans le premier alinéa de l'article L. 711-7 du code de l'éducation, les mots : « par délibérations statutaires prises à la majorité des deux tiers des membres en exercice du conseil d'administration » sont remplacés par les mots : « par délibérations statutaires du conseil d'administration prises à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés, celle-ci représentant au moins la moitié des membres en exercice ».

La parole est à M. Jacques Valade, rapporteur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Cet amendement tend à régler une difficulté qui pourrait exister. En effet, la gouvernance des établissements d'enseignement supérieur, notamment en matière de politique scientifique, nécessite un mécanisme de prise de décision efficace. Or la règle de majorité actuellement requise pour la détermination des statuts ou des structures internes est trop contraignante. En effet, une majorité des deux tiers des membres en exercice du conseil est imposée, et il n'est pas rare que des décisions ne puissent être prises en raison simplement de l'absence physique des membres du conseil.

La commission vous propose, sans modifier la règle de la majorité, de réviser la règle du quorum de façon que la détermination des statuts et des structures internes puisse être adoptée à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés, à condition qu'ils représentent au moins la moitié des membres en exercice.

C'est une modification très importante pour la mise en place des PRES, éventuellement pour l'approbation des réseaux thématiques. C'est aussi une réflexion qui doit être poursuivie, sans doute avec toutes les concertations possibles, vers une évolution de la gouvernance des universités, évoquée par certains de nos collègues. Effectivement, à partir du moment où les universités vont entrer dans les PRES, la situation sera telle qu'il faudra faire évoluer le système. Mais nous en parlerons sans doute dans quelques mois.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. La proposition de la commission est de bon sens. Quiconque connaît le fonctionnement des conseils d'université sait que les présidents, notamment, se heurtent à un absentéisme qui empêche de réunir des majorités qualifiées, et donc de prendre des décisions, pourtant nécessaires à la bonne marche de ces établissements.

L'amendement n° 49 ne modifie pas les principes de la loi de 1984, qui régit le fonctionnement de nos universités. Il ne touche à aucun point essentiel.

En revanche, la disposition proposée peut être d'un grand intérêt d'un point de vue pratique. C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Cette mesure est tout à fait souhaitable. Pour avoir vécu de telles situations « de l'intérieur », je sais quels blocages peuvent se produire, volontairement ou involontairement, en raison des contraintes des uns et des autres.

Cela étant, monsieur le ministre, je ne résiste pas au plaisir de vous répéter que la gouvernance des universités aurait tout à fait trouvé sa place dans un projet de loi relatif à la recherche. (M. le ministre délégué sourit.)

M. Ivan Renar. Tout à fait !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.

(L'amendement est adopté à l'unanimité.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19.

TITRE V

DISPOSITIONS FINALES

Art. additionnels après l'art. 19
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Art. 21

Article 20

Les dispositions des articles 4, 5 et 8 de la présente loi sont applicables à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises.  - (Adopté.)

Art. 20
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Art. additionnels après l'art. 21

Article 21

Aux articles L. 141-1, L. 142-1, L. 143-1, L. 144-1 et L. 145-1 du code de la recherche, les mots : « de l'article L. 113-3 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 113-3, L. 114-1, L. 114-1-1, L. 114-2, L. 114-3, L. 114-3-1, L. 114-3-2, L. 114-3-3, L. 114-3-4, L. 114-3-5 ».

Aux articles L. 261-1, L. 262-1, L. 263-1 et L. 264-1 du code de l'éducation, la référence à l'article L. 242-2 est supprimée à compter de l'entrée en vigueur de l'article 5 de la présente loi.

M. le président. L'amendement n° 50, présenté par M. Blin, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans le premier alinéa de cet article, supprimer les références :

L. 114-2, L. 114-3,

La parole est à M. Maurice Blin, rapporteur.

M. Maurice Blin, rapporteur. Il s'agit d'un amendement tendant à une rectification.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.

(L'article 21 est adopté.)

Art. 21
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Art. 22

Articles additionnels après l'article 21

M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. Revol, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du second alinéa de l'article L. 113-1 du code de la recherche, les mots : « Le plan » sont remplacés par les mots : « La politique ».

La parole est à M. Henri Revol, rapporteur.

M. Henri Revol, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel tendant à remplacer les mots : « le plan de la nation » par les mots : « la politique de la nation », puisque le plan n'existe plus.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.

L'amendement n° 52, présenté par M. Blin, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début du premier alinéa de l'article L. 113-2 du code de la recherche, les mots : « le budget civil de recherche et de développement technologique » sont remplacés par les mots : « La mission interministérielle  Recherche et enseignement supérieur »

La parole est à M. Maurice Blin, rapporteur.

M. Maurice Blin, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel tenant compte de la disparition du « budget civil de recherche et de développement technologique » et visant à remplacer cette expression par les mots : « la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur », appelée aussi « MIRES ».

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.

Art. additionnels après l'art. 21
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Art. additionnel avant l'art. 3 ou après l'art. 22 (précédemment réservé)

Article 22

L'article 5 de la présente loi entre en vigueur à la date d'installation du conseil de l'Agence d'évaluation de la recherche mentionnée à l'article L. 114-3-1 du code de la recherche.  - (Adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à dix-neuf heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Art. 22
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article additionnel avant l'article 3 ou après l'article 22 (précédemment réservé)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements tendant à insérer dans le projet de loi un article additionnel identique.

L'amendement n° 114, présenté par MM. Bel et  Michel, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Bricq, M. Raoul, Mme Blandin, MM. Bodin,  Picheral,  Saunier,  Sueur,  Todeschini,  Trémel,  Lise,  Gillot,  S. Larcher et les membres du groupe Socialiste et rattachés, tend à insérer cet article additionnel après l'article 22.

L'amendement n° 116, présenté par M. Fischer, Mme Borvo Cohen-Seat, M. Renar et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, vise à insérer le même article additionnel avant l'article 3.

L'article additionnel proposé est ainsi rédigé :

L'article 4 de la loi n° 2005-258 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés est abrogé.

La parole est à M. Jean-Pierre Bel, pour défendre l'amendement n° 114.

M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout au long de nos débats, qui ont été de grande qualité et au cours desquels chacun a essayé de jouer un rôle constructif, a été mise en avant l'importance des travaux des enseignants, des chercheurs, ainsi, d'ailleurs, que leur nécessaire indépendance.

Il s'agit là d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République et par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 janvier 1984.

Par cet amendement que j'ai l'honneur de présenter, nous demandons l'application de ce principe, et il nous paraît de ce fait totalement adapté à la loi de programme pour la recherche que nous examinons.

Nul, ici, n'ignore que, le 23 février dernier était promulguée une loi portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

À l'issue de nos travaux, mon groupe s'était prononcé contre ce texte. Je veux, en ma qualité de président du groupe socialiste, exprimer solennellement notre opposition pleine et entière à l'article 4 de cette loi et confirmer que nous ne nous reconnaissons dans aucun autre commentaire, aucune intervention qui aurait pu être formulé à ce sujet.

Cet article 4 institue en effet une obligation aux programmes scolaires de reconnaître « en particulier le rôle positif de la présence française d'outre-mer, notamment en Afrique du Nord ».

Comment une loi censée apaiser les douloureuses séquelles de la guerre d'Algérie a-t-elle pu susciter tant d'émoi ? Comment expliquer non seulement l'émoi, mais aussi la mobilisation provoquée par cette disposition malencontreuse, qui a conduit de très nombreuses personnalités, jusqu'aux plus hautes autorités de la République, à vouloir revenir dessus ?

En effet, l'insertion dans la loi d'une telle injonction a été interprétée comme la volonté d'écrire une « histoire officielle ».

Une telle démarche s'inscrit en totale contradiction avec les exigences de neutralité et de laïcité qui s'imposent à notre République et à son service public d'enseignement, lequel bénéficie de l'autonomie pédagogique reconnue dans le code de l'éducation, tant par l'article L. 711-1, pour l'enseignement supérieur, que par l'article L. 311-2, pour les établissements d'enseignement, à savoir les écoles, les collèges et les lycées.

Nous regrettons cette intrusion du pouvoir politique, qui tente d'imposer un sens à donner à des événements historiques. Cette interprétation partisane de la législation constitue un déni d'histoire. Nous souhaitons que les recherches sur la période concernée puissent se poursuivre dans la sérénité et de manière scientifique et objective.

Cet article a, je l'ai dit, provoqué un tollé légitime. Il importe de rétablir la sérénité.

Tel est l'objectif que nous recherchons par cet amendement, qui reprend de nombreuses initiatives du groupe socialiste : dès le 27 juin, en effet, mes collègues M. Jean-Pierre Michel et Mme Bariza Khiari demandaient, dans un article paru dans la presse nationale, l'abrogation de cet article ; dès le 4 juillet, j'ai saisi le Premier ministre, et notre groupe a déposé une proposition de loi allant dans ce sens.

Je regrette, incidemment, que ma demande, réitérée, d'inscrire cette initiative à l'ordre du jour d'une séance mensuelle réservée à l'initiative parlementaire ait été rejetée à deux reprises.

Je regrette également que la majorité n'ait pas saisi l'occasion donnée par les députés socialistes, le 29 novembre dernier, de réparer cette erreur parlementaire. Dès lors, parce qu'elle a persisté dans l'erreur manifeste, ce refus d'autocritique est devenu une faute.

À l'Assemblée nationale, on a entendu des propos s'abandonnant à la caricature, au mépris d'une sensibilité forte d'une partie de nos compatriotes, des prises de position qui nous mettent en difficulté dans notre volonté de rapprochement avec des pays comme l'Algérie, des invectives qui stigmatisaient certains membres du Gouvernement en fonction de leur origine.

C'est surtout aux Antilles que cet entêtement a le plus choqué, à tel point que le numéro 2 du Gouvernement a dû annuler un déplacement.

Mes collègues Claude Lise, Serge Larcher et Jacques Gillot m'ont ainsi demandé de réitérer cette demande d'abrogation de l'article 4 de la loi du 23 février 2005.

Comment, en effet, construire une identité sur ce déni de mémoire ? Comment ne pas comprendre que cet article blesse ceux qui, de nationalité française depuis des générations mais descendants d'esclaves ou de peuples colonisés, se sentent trop souvent, notamment lorsqu'ils vivent en métropole, ostracisés, discriminés, « ghettoïsés » ?

L'intervention du Parlement dans le champ de la mémoire n'est légitime qu'à la condition qu'il existe un consensus national. La loi doit construire une mémoire partagée. La communauté nationale ne peut se retrouver divisée autour de sa propre histoire. La loi n'a pas non plus vocation à trancher les rapports entre l'histoire et la mémoire.

Les lois mémorielles, qui apaisent les mémoires blessées, ne peuvent conduire à écrire une histoire officielle. La limite, si elle est parfois difficile à saisir, a manifestement été dépassée. Dans un souci d'apaisement tant des anciennes populations autrefois colonisées que de la communauté scientifique et éducative et de tous ceux qui se sont sentis blessés, nous souhaitons aujourd'hui que le Sénat accède à notre demande de supprimer l'article 4 de la loi du 23 février 2005.

Le Sénat confirmerait ainsi qu'il est, comme il se présente souvent, la sagesse de la République. Cette abrogation apporterait la démonstration de la volonté du Parlement de réfléchir avec sérénité à son rôle dans le domaine de la mémoire et de l'histoire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour défendre l'amendement n° 116.

M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, m'étant largement exprimé sur le contexte dans lequel fut élaboré cet article 4 de la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés et ayant largement participé, depuis pratiquement une année, aux débats concernant la demande d'abrogation de cet article 4, je m'attacherai aujourd'hui exclusivement aux conséquences qui m'amènent à réclamer, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, l'abrogation de l'article 4, qui dispose en particulier ceci : « Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer ».

Il me paraît urgent, ici, de clarifier le rôle respectif bien compris des politiques et des historiens.

En tant que parlementaire, je pense avoir légitimement milité et voté en faveur de la reconnaissance du génocide arménien et de la reconnaissance de l'état de guerre en Algérie. Cela ne m'empêche pas de reconnaître, avec de nombreux historiens, qu'il n'appartient pas aux politiques d'écrire ou de réécrire l'histoire. Celle-ci est trop complexe, comme l'écrivaient récemment MM. Claude Liauzu et Gilbert Meynier, professeurs émérites, pour être jugée en termes d'aspects positifs et/ou négatifs.

C'est ainsi que les accords de Nouméa mentionnaient à la fois des « lumières » et des « zones d'ombre ».

Dans les deux textes dont je viens de parler, nous avons aidé à qualifier, à clarifier des faits. Nous n'avons pas interprété. Il en va de même pour la loi Taubira-Delanon, condamnant l'esclavage comme crime contre l'humanité, et la loi Gayssot, qui a pour objet de lutter contre le négationnisme de la Shoah.

Je ne peux souscrire à ce qu'a écrit Mme Françoise Chandernagor dans le Monde du 17 décembre.

M. Alain Gournac. Quelle erreur !

M. Guy Fischer. Je ne crois pas que le Parlement ait « ouvert la boîte de Pandore » en votant des « lois mémorielles » sacralisant le malheur de chaque fraction de la population.

Je crois sincèrement, en revanche, que l'historien, pour mener à bien sa mission, a parfois besoin de l'apport du politique lorsque celui-ci légifère sur des valeurs républicaines.

M. Patrice Gélard. Oh là là !

M. Guy Fischer. Je demeure cependant très modeste.

Nous sommes là sur une ligne de crête délicate. Peut-être m'arrivera-t-il un jour de me demander si je dois légiférer ou non ? J'en accepte l'augure.

En attendant, je réclame, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, l'abrogation de l'article 4 de la loi du 23 février 2005, et ce pour un certain nombre de raisons.

En effet, cet article impose une histoire officielle, ce qui est contraire à la mission des chercheurs et des enseignants ; il impose un « positif » et un « négatif » qui n'existent pas en histoire.

Il est de nature à provoquer des réactions de violence dans les départements et territoires d'outre-mer, où le souvenir de l'esclavage, qui fait partie du passé colonial, demeure vivace car non encore assumé, y compris au sein des jeunes générations.

Enfin, il encourage tous ceux qui cherchent aujourd'hui à réactiver les réflexes nationalistes, communautaristes, au détriment de la place que les jeunes générations issues de l'immigration récente sont en droit de se constituer.

Il ne s'agit, aujourd'hui, ni de sublimer certains aspects du passé ni de favoriser des antagonismes, mais bien de laisser aux historiens leur espace de recherche et d'enseignement qui rende compte de la complexité des phénomènes. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan.

M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les deux orateurs qui viennent de s'exprimer.

Nous faisons nôtre la constatation que je lis dans l'exposé des motifs de l'amendement déposé par M. Bel : « Il importe de laisser le débat sur l'histoire de la présence française outre-mer se poursuivre afin de permettre aux universitaires et aux historiens de dégager progressivement, à travers les documents disponibles et les témoignages, les éléments de faits qui permettront d'établir la vérité historique. »

Nous y sommes invités par un grand nombre d'historiens, qui ont écrit aux présidents des groupes parlementaires de la Haute Assemblée pour demander l'abrogation non seulement de l'article 4 de la loi susmentionnée, mais aussi des dispositions de la loi Taubira-Delanon, de la loi Gayssot...

M. Josselin de Rohan. ...et de la reconnaissance du génocide arménien, car les lois en question ont été des lois mémorielles votées par nos assemblées souvent à l'unanimité.

Si je considère, comme M. Bel, qu'on ne peut pas laisser à la loi le soin de qualifier des faits historiques, j'estime qu'on ne peut pas davantage accepter que l'histoire soit instrumentalisée par les partis politiques...

M. Alain Gournac. Absolument !

M. Josselin de Rohan. ...pour le besoin de leurs conceptions.

Or, par rapport à l'analyse de M. Bel, que je pourrais faire mienne, l'exposé des motifs de l'amendement déposé par nos collègues du groupe CRC est, lui, d'une tout autre inspiration.

Les auteurs de l'amendement n° 116 estiment en effet que l'article 4 de la loi du 23 février 2005, que nous avons voté dans une rédaction dont je conviens volontiers qu'elle était plutôt maladroite, « conduit à passer sous silence les horreurs de l'époque coloniale, et que cette présentation partiale de l'histoire compromet le devoir de mémoire qui oblige à la lucidité. »

Je poursuis la lecture de l'exposé des motifs, et tout est dans la dernière phrase : « Cette disposition est primordiale pour l'élaboration future des programmes de recherche historique » !

Alors que M. Bel nous dit qu'il ne faut pas donner d'injonction à ceux qui enseignent l'histoire, mais qu'il importe au contraire de les laisser qualifier eux-mêmes les faits, l'amendement du groupe communiste républicain et citoyen vise à imposer l'enseignement d' « un politiquement correct » dans les établissements scolaires. Nous récusons cette manière de voir ! C'est pourquoi nous faisons nôtre la proposition du Président de la République de créer une commission composée de parlementaires et d'universitaires, qui devra réfléchir sur les événements survenus après le vote de la loi Gayssot et des lois relatives au génocide arménien ou à la reconnaissance du rôle des rapatriés en Afrique du Nord, et devra envisager des solutions pour que, à l'avenir, les sensibilités des uns et des autres soient respectées.

Nous ne devons pas, dans ce contexte passionnel, prendre de décisions hâtives, et nous souhaitons que cette commission puisse faire son travail. Dans le délai de trois mois dont celle-ci dispose, elle ne manquera pas de rendre un rapport et de faire des propositions.

Dans l'immédiat, je ne souhaite pas, mes chers collègues, que nous allions plus loin. En effet, monsieur Bel, si nous abrogions cet article 4, la totalité de l'hommage que nous avons voulu rendre aux rapatriés serait supprimée.

M. Josselin de Rohan. Mais si !

En effet, les premières phrases de l'article 4, qui n'étaient pas modifiées par le sous-amendement de M. Vanneste, constituaient un hommage au rôle des rapatriés d'Algérie. Or si nous abrogeons purement et simplement cet article, nos compatriotes harkis, qui ont souffert dans leur chair des événements d'Algérie, et les rapatriés d'Algérie, qui ont connu des événements profondément douloureux, seront heurtés dans leur sensibilité, comme l'ont d'ailleurs été nos compatriotes antillais.

Je demande donc instamment qu'au lieu de légiférer sous l'effet de l'émotion, nous donnions à cette commission le temps de faire des propositions et de réfléchir, afin que plus personne, à l'avenir, ne soit plus heurté dans sa sensibilité et dans ses croyances par le contenu d'un texte législatif.

Enfin, je souhaite que nous cessions de voter, comme nous l'avons fait, des lois mémorielles, car il s'agit d'un dévoiement de la loi ! La loi est faite pour prescrire ou pour interdire, et non pour qualifier des faits historiques, quels que soient les bons sentiments qui l'inspirent.

On peut faire, mes chers collègues, de la mauvaise politique avec de bons sentiments ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jacques Valade, rapporteur. La commission spéciale, qui a étudié ce projet de loi de programme pour la recherche, s'est naturellement penchée aussi sur les amendements nos 114 et 116.

La majorité des membres de la commission considère que ces amendements sont sans rapport avec l'objet du présent projet de loi, qui concerne l'organisation de notre système de recherche et non pas le contenu des programmes de recherche, surtout pas, a fortiori, celui des programmes scolaires, évoqués dans l'article précité.

En outre, l'article 4 de la loi du 23 février 2005, dont il est proposé l'abrogation, a suscité, comme vient de le dire M. de Rohan, des réactions d'une passion telle que M. le Président de la République est intervenu, le 9 décembre dernier, afin d'apaiser les débats. Il a confirmé qu'il n'était pas question d'imposer une histoire officielle et qu'il appartenait bien aux historiens d'écrire l'histoire.

Il a été proposé au président de l'Assemblée nationale de conduire une mission chargée d'évaluer l'action du Parlement dans les domaines de la mémoire et de l'histoire.

Alors que les députés qui sont à l'origine de cette disposition controversée ont rejeté, le 29 novembre dernier, une proposition de loi tendant à abroger cet article, il semble plus sage, monsieur Bel, d'attendre les conclusions de cette mission confiée à M. Debré, qui devraient être rendues dans un délai de trois mois. Celles-ci s'appuieront sur une réflexion à laquelle seront associés, entre autres, des historiens.

La commission spéciale a donc considéré qu'il était inopportun de proposer dans la précipitation, au détour du présent projet de loi, de revenir sur cet article de loi, dont la portée dépasse largement l'objet du texte que le Sénat examine aujourd'hui.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Goulard, ministre délégué. Si une vérité peut nous rassembler, c'est bien celle selon laquelle l'histoire, qu'elle s'écrive dans les travaux de recherche ou universitaires, ou dans les manuels scolaires, est l'oeuvre des historiens, et non des pouvoirs publics, ou des femmes et des hommes politiques.

Je tiens également à dire que nous comprenons l'émotion d'un certain nombre de nos compatriotes. Cette émotion est profondément respectable, comme a pu l'être, dans d'autres circonstances, celle de nos compatriotes rapatriés.

Le Premier ministre s'est exprimé avec beaucoup de clarté. Le Président de la République, quant à lui, s'est adressé aux Françaises et aux Français et a proposé, afin de répondre de manière adéquate à cette situation, la création d'une mission pluraliste, dont la présidence a été confiée au président de l'Assemblée nationale.

Cette commission dispose d'un délai bref pour rendre ses conclusions, et ses travaux permettront de gagner en sérénité et d'éviter, sans doute, d'éventuelles réactions intempestives, de telle sorte que nous ne soyons plus confrontés à une situation comparable à celle que nous connaissons aujourd'hui.

La sagesse la plus élémentaire consiste à attendre que cette commission ait conduit ses travaux à leur terme, à écouter les recommandations qui seront faites et à prendre le temps d'examiner attentivement les dispositions éventuellement retenues.

C'est la raison pour laquelle, comme M. le rapporteur, j'émets un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Daniel Marsin, pour explication de vote.

M. Daniel Marsin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au-delà des arrière-pensées et des maladresses des uns et des autres, pourquoi nous faut-il abroger sans attendre l'article 4 de la loi du 23 février 2005 ?

La réponse est toute simple : parce que cet article est tout aussi inutile et maladroit qu'il est inopportun et perturbateur.

Ce texte est d'abord inutile dans la mesure où ses préconisations ne peuvent en aucune manière s'imposer aux autorités compétentes en matière de définition des programmes scolaires.

Cet article est ensuite maladroit, car la période de colonisation couvrant celle de la traite négrière et de l'esclavage, il ouvre la voie à l'amalgame et, tant qu'à faire, à une reconnaissance éventuelle du « rôle positif de l'esclavage », ce qui serait contraire aux dispositions déjà adoptées par le Parlement.

Cet article est également inopportun, car il intervient précisément au moment où la communauté nationale évolue dans le sens d'une lecture plus apaisée de notre histoire partagée, en particulier dans sa composante ultramarine. Je veux ici rappeler que, en érigeant le 27 mai en jour férié en Guadeloupe, la France a reconnu la lutte héroïque de Louis Delgrès, de Joseph Ignace, entre autres, contre le retour de l'esclavage. D'aucuns pensent d'ailleurs que leur démarche était dans la logique des idéaux humanistes de la Révolution.

Enfin, cet article est profondément perturbateur pour le climat social en France métropolitaine, et on le comprend aisément, mais encore davantage dans les régions d'outre-mer où il va jusqu'à apparaître comme une provocation.

Mais, me direz-vous, pourquoi faut-il abroger cet article 4 de la loi du 23 février 2005 alors même que le Président de la République a missionné le président de l'Assemblée nationale « pour évaluer l'action du Parlement dans les domaines de la mémoire et de l'histoire » ?

Sur la forme, on connaît l'usage qui est fait du recours aux commissions d'études, en particulier lorsque l'on veut éviter de décider.

Sur le fond, la mission confiée au président de l'Assemblée nationale est plus globale, en ce qu'elle a trait à l'action du Parlement. L'objet des deux amendements en discussion est autre, et tous les éléments sont réunis pour revenir à la situation antérieure au 23 février 2005.

En effet, si l'on peut comprendre la position du Gouvernement, hésitant à déjuger une erreur manifeste d'appréciation d'une partie de sa majorité, qui pourrait sérieusement soutenir que l'article 4 de la loi du 23 février 2005 manquait à l'arsenal législatif français ou au dispositif de réflexion sur l'éducation nationale ? Personne !

Personne n'aurait songé à se plaindre de l'inexistence de ce sous-amendement, déposé à l'Assemblée nationale, qui « pollue », voire pervertit cet article 4. Il n'y aurait donc aucun dommage à le faire disparaître et à revenir au statu quo ante bellum c'est-à-dire à l'état de fait et de droit tel qu'il existait avant les « hostilités ».

Dès lors que la suppression de cet article apparaît nécessaire et non dommageable à quiconque, il reste à justifier le choix du moment.

En respectant en quelque sorte le parallélisme des formes, cet article peut tout à fait être supprimé dans les conditions qui ont prévalu à son adoption, c'est-à-dire par un amendement. Nous sommes bien, en effet, dans une thématique adjacente : il est justifié que l'amendement qui vise à supprimer l'article 4 soit introduit à l'occasion de l'examen du projet de loi de programme sur la recherche puisque, à l'évidence, le domaine que nous sommes en train d'étudier couvre la recherche de la vérité historique.

Mes chers collègues, le feu est parti de l'Assemblée nationale et caresse désormais l'ensemble du Parlement et de la communauté nationale. Le Président de la République, avec la mission confiée au président de l'Assemblée nationale, a installé un couvre-feu. Il revient à la Haute Assemblée, constante dans sa sagesse, d'éteindre définitivement ce feu qui ne s'est que trop propagé.

Notre assemblée peut et doit saisir l'occasion du présent amendement pour mettre un terme à cette affaire dans le plus bref délai.

Mes chers collègues, sachez que, dans la France de par-delà les océans, les populations sont extrêmement attentives. Elles attendent, et elles espèrent en particulier que la France, à laquelle elles sont tellement attachées - attachement qui n'a d'égal que les souffrances endurées tant du fait de l'esclavage et de la colonisation que dans la défense de la patrie, notamment au cours des deux guerres mondiales -, à travers son Parlement et son Gouvernement, ne persistera pas à répondre par des procédures dilatoires, des atermoiements, et encore moins par un entêtement qui pourrait être interprété comme de l'indifférence, sinon du dédain, voire du mépris. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne voterai pas ces amendements, car il est bien clair, tout d'abord, qu'ils ont peu à voir avec le texte que nous examinons aujourd'hui.

Mais je voudrais aller bien au-delà.

En tant qu'historien et ancien professeur d'histoire, ce débat m'interpelle tout particulièrement. J'ai toujours pensé que le Parlement n'avait pas à prendre de positions sur les questions de mémoire.

Dans le passé, cette opinion m'a par exemple amené à ne pas prendre part au vote sur la question du génocide arménien, alors même que je suis convaincu, en tant qu'historien, que le peuple arménien a été victime d'horreurs sur son territoire en 1915, et que je suis par ailleurs membre du groupe d'amitié avec l'Arménie. À mon avis, nos sentiments et nos sympathies ne nous autorisent pas à inscrire dans la loi nos jugements, voire nos passions.

MM. Josselin de Rohan et Henri de Raincourt. Tout à fait !

M. Jacques Legendre. Nous payons aujourd'hui le fait d'avoir voulu à certains moments répondre à l'émotion par une inscription dans des textes. Quand ces émotions deviennent contradictoires, nous sommes embarrassés.

Je crois que certains, à l'Assemblée nationale, ont voulu répondre à l'émotion d'une partie de l'opinion publique par une disposition qui semble enjoindre aux enseignants de donner tel ou tel éclairage sur ce qui s'est passé.

Quant à moi, je me pose simplement la question : si j'avais à nouveau à enseigner l'histoire, que ferais-je quand il s'agit de parler d'un moment de l'histoire de la France, à savoir de la période pendant laquelle la France a eu des colonies ?

L'histoire de la France est un tout. Je crois qu'un enseignant se doit de dire à ses élèves ce qu'il sait des errements, des erreurs, des horreurs mêmes, qui parfois ont été commises.

Je n'aurais pas hésité à rappeler que certaines colonnes françaises, conduites par deux officiers français dévoyés, ont ravagé vers 1900 la vallée du Niger.

Je n'aurais pas non plus hésité à rappeler que les restes de ces mêmes troupes, aux côtés de troupes venues d'Algérie, ont écrasé à Kousseri le marchand d'esclaves Rabah, mettant ainsi un terme à certains trafics d'esclaves qui persistaient en Afrique centrale.

Je n'aurais pas hésité à parler du Code noir et de toutes les horreurs commises pendant la période de l'esclavage.

Nos élèves doivent savoir tout cela, et savoir même que, au XVIIIe, une partie de la France des Lumières que nous aimons par ailleurs tant et dont nous sommes très fiers n'était pas choquée par ces faits.

J'aurais aussi sans doute rappelé que si Victor Schoelcher, au souvenir duquel nous sommes tant attachés dans cet hémicycle, a effectivement mis un terme à l'esclavage, il était aussi sous-secrétaire d'État à la marine et aux colonies.

Le devoir des enseignants est donc de montrer ces différents aspects, ainsi que l'ambiguïté et la complexité de ces époques.

Il est bon que nous en parlions, qu'une commission se réunisse pour voir comment, d'une manière apaisée, nous pouvons, dans ce pays, faire notre devoir.

Transmettre aux générations actuelles le récit des faits et de ce que nous en savons, dans leur totalité, sans céder à l'émotion, sans vouloir nourrir telle ou telle idéologie, tel ou tel engagement, voilà, à mon avis, le devoir des enseignants.

Et si, pour ma part, je devais à nouveau enseigner l'histoire, c'est à ce devoir que je m'en tiendrais, quels que soient les articles adoptés au hasard des lois, que l'article 4 existe ou non.

Mes chers collègues, plutôt que de nous prononcer au détour d'un texte sans rapport avec la question, essayons de nous retrouver autour de l'essentiel. Faisons en sorte que, dans ce pays, soit respecté d'abord l'esprit des jeunes Français : ces derniers doivent savoir la vérité sur le passé et l'histoire de leur pays, sans que rien ne soit omis ni des moments d'ombre ni des moments de lumière. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour explication de vote.

M. Jacques Pelletier. Il me semble que nous n'aurions pas dû voter l'article 4, ou du moins une partie de cet article de la loi portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.

J'avoue que personnellement, comme un certain nombre de nos collègues, je n'ai pas prêté attention à cet article, ajouté à l'Assemblée nationale.

Je pense que le rythme auquel nous sommes soumis depuis quelques mois en est un peu la cause : il ne nous permet pas d'étudier suffisamment tous les textes qui nous arrivent « en rafale ».

Si je suis d'accord pour dire que la colonisation a apporté des bienfaits aux populations des pays concernés, notamment dans le domaine des infrastructures, de la santé, de l'éducation, je considère cependant qu'on ne peut passer sous silence les méfaits.

Si nous voulions un texte de loi, il aurait fallu qu ce dernier soit équilibré entre les bienfaits et les méfaits de la colonisation.

Toutefois, comme l'ont dit de nombreux orateurs avant moi, c'est non pas aux politiques mais aux historiens d'écrire l'histoire : à chacun son travail !

En revanche, il ne me paraît pas du tout approprié d'adopter des amendements de suppression de cet article 4 dans le cadre de l'examen du projet de loi de programme sur la recherche. En effet, et même si je suis favorable à l'esprit de ces textes, je trouve qu'ils n'ont pas leur place ici.

C'est pourquoi, comme plusieurs de mes collègues, je ne prendrai pas part au vote. Je crois qu'il faut laisser travailler la commission ad hoc qui vient d'être formée. Trois mois constitue un délai rapide.

Je souhaite que nous puissions ensuite examiner la proposition de loi de nos collègues socialistes. Il faut tout faire pour qu'elle vienne en discussion en séance publique, afin que nous ayons un débat sur le fond et que nous réglions enfin ce problème difficile.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.

M. Claude Domeizel. Monsieur de Rohan, si nous proposons d'abroger l'article 4, c'est parce qu'il prévoit l'obligation faite aux programmes de reconnaître le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord.

M. Josselin de Rohan. Et l'hommage aux rapatriés ?

M. Claude Domeizel. Je vous invite à lire la loi, et vous verrez !

M. Alain Gournac. J'étais rapporteur !

M. Claude Domeizel. Alors, relisez-la !

Je souhaiterais apporter ma contribution à ce débat, non pas en battant ma coulpe - mon intervention ne s'apparente pas à un acte de repentance à l'égard du passé colonial de la France -, mais plutôt en exprimant un regret. Je regrette pour ma part de ne pas avoir fait preuve de suffisamment de vigilance au moment du débat sur le projet de loi portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés, plus particulièrement lors de l'examen de l'article 4, dont le groupe socialiste et le groupe CRC demandent aujourd'hui l'abrogation.

Oui, je pense qu'il faut avoir l'honnêteté de dire les choses. Je rappelle que mes collègues du groupe socialiste et moi-même n'avons pas approuvé ce projet de loi, mais j'avoue qu'en décembre dernier, au moment de la discussion de cet article, comme bien d'autres, je n'ai pas mesuré l'émoi que pouvait légitimement susciter cet article, non seulement dans la communauté des historiens, à qui l'on demandait en quelque sorte d'enseigner une histoire officielle, mais également dans les départements et territoires qui furent d'anciennes colonies.

Pour avoir effectué un déplacement en Algérie en mai dernier en ma qualité de président du groupe d'amitié France-Algérie, j'ai pu constater l'incompréhension qu'a provoquée là-bas la loi n° 2005-158 du 23 février 2005.

Trois mois après l'adoption de la loi, alors que le débat commençait à peine en France, l'article 4 n'avait pas échappé à nos amis algériens, observateurs très attentifs de la vie politique française.

Les interlocuteurs que j'ai rencontrés ne comprenaient pas pourquoi, à la veille de la signature d'un traité d'amitié entre la France et l'Algérie, le législateur français se risquait à une telle provocation à l'encontre du peuple algérien, d'autant que les Algériens, ainsi que j'ai pu le constater, témoignent d'un attachement manifeste à l'égard de la France, que ce soit en réintroduisant l'enseignement du Français au cours élémentaire, en prenant un soin particulier des cimetières français ou en favorisant les échanges économiques.

Les conséquences ne se sont d'ailleurs pas fait attendre. Ce traité d'amitié, dont personne ne doutait qu'il serait signé avant la fin de l'année et qui aurait dû être le prélude à des relations enfin apaisées entre la France et l'Algérie, a été suspendu sine die.

C'est d'autant plus regrettable que ce traité, souhaité, rappelons-le, par le Président de la République, est appelé à devenir demain le moteur de la coopération euro-méditerranéenne, comme l'a été - et la comparaison n'est pas trop forte - le couple franco-allemand dans la construction européenne.

Je crains que les efforts de rapprochement développés dans nos deux pays ne soient mis à mal si la France n'envoie pas très vite un signe positif à l'Algérie.

Je songe aussi à la blessure que l'article 4 a infligée à nos concitoyens français issus de l'immigration. Je doute fort que la colonisation française soit considérée par beaucoup d'entre eux comme une époque positive. Bien au contraire, elle n'inspire sans doute à leurs aînés que des souvenirs douloureux. Je ne crois pas, de surcroît, qu'elle reflète à leurs yeux les valeurs de la République telles qu'on les leur enseigne ou qu'on les leur a enseignées.

Je doute enfin que ce texte vienne apporter un apaisement, après les graves événements qu'ont connus nos banlieues. Il est primordial de faire en sorte que tous les enfants de la République se sentent aimés et reconnus, dans leur diversité, comme appartenant à la communauté nationale. N'oublions pas que notre pays est pluriel.

En maintenant envers et contre tout l'article 4, nous risquons d'entretenir les rancoeurs et d'alimenter les haines.

Que de nombreuses analyses développent l'idée que la présence française ait permis des avancées en matière d'équipement, d'éducation et d'action sanitaire pour les peuples assujettis, soit. Mais rien ne saurait justifier l'essence même de la colonisation, système de domination d'un peuple sur un autre, en contradiction avec les grandes valeurs démocratiques et humanistes de la République.

Laissons se poursuivre le débat sur notre histoire coloniale. Laissons aux universitaires et aux historiens le soin de dégager progressivement, à travers les documents disponibles et les témoignages, les éléments et les faits qui permettront de nous éclairer, pour nous rapprocher de la vérité historique.

Monsieur le ministre, vous avez longuement parlé de sagesse. Pour ce qui nous concerne, à la place que nous occupons dans cet hémicycle, nous devons reconnaître nos erreurs et les corriger. Nous en sortirons collectivement grandis. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Le Parlement est familier des « cavaliers ». L'enjeu de ce vote, qui est de donner acte de l'erreur qu'a constituée l'adoption de l'article 4 de la loi n° 2005-158 du 23 février 2005, mérite bien que notre dernière heure de délibération sur le projet de loi de programme pour la recherche soit le moment d'une juste rectification.

L'article 4 de la loi du 23 février 2005 fut une initiative très dommageable pour les conditions indispensables à une société pacifiée et apaisée, et notamment pour la mémoire collective, qui respecte quant à elle la diversité des parcours de chacun.

Ce respect, nous pouvons le reconquérir en adoptant l'amendement n° 114.

Parce que nous avons plus besoin de lien que de distance et de défiance, parce qu'une société multiculturelle se tisse au rythme de chaque message de ses élus, parce qu'il est choquant d'entendre, par rebond, la proposition de revenir sur la loi Taubira tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité, les sénateurs et sénatrices Verts soutiennent solennellement et chaleureusement l'amendement de réparation qu'a présenté M. Bel.(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.- Mme Annie David applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les propos de M. Legendre sur les responsabilités des enseignants - et je sais qu'il est bien placé pour en parler - ne font que conforter notre conviction quant à la nécessité d'abroger l'article 4 de la loi du 23 février 2005. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Je suis désolée, monsieur Legendre, que votre intervention, qui était au demeurant fort intéressante, ait en quelque sorte débouché sur un contresens puisque, après avoir défendu la liberté des enseignants, vous avez accepté en conclusion que le législateur leur donne des instructions.

M. Josselin de Rohan. Vous aussi !

M. Josselin de Rohan. Et la loi Taubira ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je ne m'attarderai pas sur l'accusation relative au caractère de « cavaliers » de ces amendements, car, outre que la majorité et le Gouvernement sont eux-mêmes coutumiers de ce type d'amendements, nous examinons aujourd'hui un texte relatif à la recherche. Or c'est au contraire le refus d'adopter ces amendements qui ne contribue pas à restituer aux historiens leur liberté de chercher et, surtout, aux enseignants leur liberté d'enseigner une histoire récente, telle l'histoire du colonialisme, qui mérite, c'est vrai, un cadre de débat serein.

M. Josselin de Rohan. Comme le communisme !

M. Guy Fischer. Celle-là, on l'attendait !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'article 4 n'est en effet rien d'autre qu'une instruction donnée aux enseignants - je ne parle même pas des chercheurs - et, de ce point de vue, il ne peut être assimilé à d'autres lois mémorielles. C'est justement là que le bât blesse.

Il s'agit d'une atteinte profonde à la liberté d'enseignement, dont Jaurès disait qu'« en éveillant dans les esprits le besoin de la réflexion et du contrôle, en écartant de l'éducation toute contrainte intellectuelle, en soumettant aux esprits des objets sur lesquels la conscience et la raison s'exercent librement, elle donne à la personne humaine le sentiment de son droit et de sa valeur ».

On le sait, les parlementaires ont soulevé une tempête en votant cet article qu'ils n'auraient pas dû voter. Mon groupe s'honore de ce que Guy Fischer ait alors été le seul parlementaire à avoir, à juste raison, fait preuve de vigilance et à s'être élevé contre le contenu dudit article 4. Aujourd'hui, les parlementaires, plus précisément les sénateurs, ont l'occasion de reconnaître leur erreur.

M. Jacques Valade, rapporteur. Cela n'a rien à voir !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas à une commission, aussi bien composée soit-elle, qu'il doit appartenir de donner des instructions aux parlementaires : ces derniers ont commis une erreur, et il leur appartient de la rectifier.

Mes chers collègues, vous avez l'occasion ce soir de rectifier vos propres erreurs ; il serait dommage que vous renonciez à jouer ce rôle, qui est aussi le vôtre. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

M. Josselin de Rohan. Vous-mêmes ne vous repentez jamais de rien !

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Mes chers collègues, il est urgent de voter ces amendements. Je ne reviendrai pas sur l'ingérence du politique dans la définition des programmes scolaires, non plus que sur les dangers de l'enseignement d'une histoire officielle aux élèves, sujets sur lesquels, me semble-t-il, tout a été dit, mais je veux rappeler une histoire complexe et douloureuse, surtout pour les peuples concernés, qui sont devenus des peuples amis.

Le gamin que j'étais a été nourri des manuels d'histoire d'avant 1940, manuels qui ont été en vigueur jusqu'en 1946, et a été frappé, à la Libération, de découvrir que la colonisation ne répondait pas à des considérations philanthropiques...

M. Alain Gournac. Le communisme non plus !

M. Henri de Raincourt. Quatre-vingts millions de morts !

M. Ivan Renar. Il s'agissait d'aller éduquer, évangéliser, civiliser les indigènes, les sauvages... J'ai découvert qu'en fait la France cherchait à étendre sa puissance économique et militaire hors de ses frontières, et le jeune militant que je suis devenu ensuite aspirait à cette création de l'Union française qui aurait rassemblé les peuples demandant leur indépendance.

Mes chers collègues, il nous faudrait réfléchir à ce que dit le philosophe Mohamed Barkat : « L'édifice colonial a été construit sur l'idée que les colonisés étaient incapables de transformer un territoire en pays. »

Quand je dis qu'il y a urgence, mes chers collègues, je pense à nos compatriotes des Antilles. Vous savez que la loi du 23 février 2005, en particulier à cause de son inacceptable article 4, a été rebaptisée « loi de la honte » en Martinique, parce qu'elle blesse un très grand nombre de nos concitoyens, bien au-delà des Antilles.

Et comment ignorer les conséquences de cette loi dans notre propre pays ? Au sein des établissements scolaires, l'enseignement d'une histoire officielle de la colonisation contribuera à alimenter le sentiment d'exclusion et d'humiliation des enfants dont les parents ou les grands-parents ont souffert de la colonisation.

Cher Jacques Legendre, j'ai écouté avec intérêt ce que, comme enseignant, vous disiez, et j'ai même été ému ; mais vous débouchez en effet, peut-être pas sur un contresens, mais presque sur un barbarisme, au sens latin du terme. Sur le plan international, il ne fait aucun doute que, si la France réhabilite la mémoire de son passé expansionniste et des velléités de domination de l'époque, nos relations avec les pays francophones amis d'Afrique et d'Asie risquent de se dégrader considérablement.

Je voudrais terminer en citant l'historien Benjamin Stora : « Le vote de 2005 brise le consensus des années soixante, tourne le dos à la politique du général de Gaulle... »

M. Henri de Raincourt. Vous êtes bien placé pour le dire !

M. Dominique Braye. Vous l'avez combattu !

M. Ivan Renar. Oui, mes chers collègues, parce que nous avions une certaine idée de la France, que, pour ma part, j'ai conservée !

Benjamin Stora poursuit : « En valorisant l'oeuvre coloniale, il ne reconnaît pas les aspirations des peuples colonisés qui s'étaient exprimés sur les principes du passage aux indépendances politiques. Cette régression est dangereuse, elle choisit de privilégier une mémoire contre une autre. Ce morcellement de la mémoire nationale ouvre sur de nouvelles guerres mémorielles pouvant conduire aux pires débordements. »

Si nous voulons éviter de tels débordements, nous devons voter ces deux amendements dans le cadre du présent projet de loi de programme pour la recherche. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 114 et 116.

Je suis saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC et, l'autre, du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 71 :

Nombre de votants 300
Nombre de suffrages exprimés 300
Majorité absolue des suffrages exprimés 151
Pour l'adoption 135
Contre 165

Le Sénat n'a pas adopté.

Vote sur l'ensemble

Art. additionnel avant l'art. 3 ou après l'art. 22 (précédemment réservé)
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jacques Valade, président de la commission spéciale.

M. Jacques Valade, président de la commission spéciale. Monsieur le ministre, lorsque le président du Sénat a demandé que ce projet de loi nous soit présenté en première lecture, nous avons été très satisfaits, d'abord qu'il fasse cette demande, ensuite que le Gouvernement, en particulier vous-même, monsieur le ministre, l'accepte.

Cependant, force est de reconnaître que les conditions dans lesquelles nous avons été amenés à travailler - et je parle sous le contrôle de ceux qui, sans relâche, nous ont aidés dans cette tâche, que ce soient les parlementaires des différentes commissions permanentes qui ont fait partie de la commission spéciale ainsi que des ministres concernés et de leurs collaborateurs - ont été difficiles.

Compte tenu de la nature même de ce projet de loi de programme, il a en effet fallu consulter le Conseil économique et social et attendre son avis, qui nous a été présenté par M. Ailleret, avant de déposer nos conclusions définitives.

Le Conseil d'État a, naturellement, également donné son avis.

Nous avons constitué quant à nous cette commission spéciale aux travaux de laquelle nous avons, les uns et les autres, beaucoup participé. Après avoir auditionné une cinquantaine de personnes, soit une trentaine d'heures d'auditions, nous avons élaboré un certain nombre d'amendements dont vous avez bien voulu, monsieur le ministre, accepter la plus grande partie, amendements qui émanaient d'ailleurs de diverses travées, puisque Mme Blandin a enregistré une série de succès, ce que nous pouvons mettre sur le compte de la pertinence de ses propositions mais aussi sur celui de sa légendaire obstination !

Nous avons vécu avec vous, monsieur le président du Sénat, des affres tenant essentiellement au temps qui passait, et il est bien clair que nous souhaitions que ce texte soit discuté dans des conditions convenables : nous y avons consacré les séances de vendredi après-midi et de vendredi soir, jusqu'à une heure un peu avancée de la nuit - je tiens d'ailleurs à remercier celles et ceux qui nous ont alors soutenus -, et cette séance, avec une participation non négligeable de nos collègues.

J'espère que « le peuple des chercheurs » pour utiliser une terminologie à la mode dans ce domaine, saura reconnaître à la fois nos efforts, mais aussi ceux du Gouvernement.

En effet, nous présentons un modèle nouveau de l'organisation de la recherche française avec un pilotage par le haut, avec ce Haut conseil de la science et de la technologie placé auprès du Président de la République et dont la composition sera définie ultérieurement. Nous vous faisons toute confiance, monsieur le ministre, ainsi qu'au Président de la République, pour trouver la meilleure solution possible.

Ce modèle comporte deux agences nationales : la première, l'Agence nationale de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, constitue une nouveauté ; la seconde, l'Agence nationale pour la recherche, est dotée de moyens considérables, à la disposition, monsieur Daniel Raoul, de la totalité de la communauté des chercheurs. Ce n'est en effet pas parce que l'on va travailler désormais par projets que tels ou tels organismes, universités, instituts de recherche, grandes écoles ne pourront pas avoir un droit de tirage sur ces crédits.

S'agissant de l'Université, je dois reconnaître, mes chers collègues, la grande satisfaction qui est la mienne de voir réhabilité l'aspect de la recherche universitaire qui, depuis un certain nombre d'années, était relégué un peu au second plan.

Il me paraît bon de réaffirmer qu'il n'y a pas d'enseignement supérieur de haute qualité sans une recherche de haute qualité et des résultats immédiatement transposés au niveau des enseignements, qu'ils soient purement universitaires ou développés dans les grandes écoles d'ingénieurs.

Il faut - c'est l'un des amendements de Mme Blandin -que les chercheurs participent à l'évolution et à l'amélioration de la connaissance, et que cela passe le plus rapidement possible dans le circuit de l'enseignement.

Sur ce plan, je voudrais réaffirmer aussi combien nous comptons sur les universitaires - ils ne demandent d'ailleurs que cela, je crois - pour établir ces pôles de recherche d'enseignement supérieur et pour définir ensemble ces réseaux thématiques de recherche avancée auxquels nous attachons la plus grande importance.

Monsieur le ministre, nous avons été très heureux de travailler avec vous. Ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche depuis juin dernier, il ne vous a pas fallu beaucoup de temps pour mesurer et pour évaluer la difficulté de l'exercice, mais aussi pour définir les meilleures mesures qu'il convenait d'adopter. Mes collègues et moi-même avons beaucoup apprécié la qualité des relations que nous avons nouées non seulement avec vous-même, mais aussi avec vos collaborateurs.

Je voudrais également remercier toutes celles et tous ceux qui ont été associés à nos travaux, qu'ils appartiennent à l'opposition ou à la majorité du Sénat. J'ai d'ailleurs un peu l'orgueil d'attribuer le nombre relativement faible des amendements à l'excellent travail que nous avons réalisé en commun, travail qui nous a permis de préciser les choses et, sans doute, de déminer les éventuelles difficultés.

Par conséquent, la communauté des chercheurs devrait nous être reconnaissante, aux uns et aux autres, et, en premier lieu à vous, monsieur le ministre, du travail qui a été effectué. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.

M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, arrivés au terme de notre débat concernant le projet de loi de programme pour la recherche, nous restons déçus malgré le travail attentif de la commission des affaires culturelles et celui de la commission spéciale, présidée par notre collègue Jacques Valade.

En effet, si nous percevons bien l'intention de piloter la recherche par l'intermédiaire du pouvoir politique en privilégiant l'articulation avec le secteur privé, nous ne voyons pas ici de projet de renforcement d'un secteur public dont les grands laboratoires de recherche sont reconnus internationalement aujourd'hui afin que la recherche privée s'y adosse.

La croissance des dépenses publiques rapportées au PIB n'est pas à la hauteur des besoins de notre recherche, ni des exigences de Lisbonne.

L'absence de plan pluriannuel sur cinq ans fait de ce texte plus une loi d'orientation qu'une loi de programmation.

C'est d'autant plus vrai que les six milliards d'euros en trois ans que vous avancez ne seront pas consacrés à la recherche publique et se divisent entre déductions fiscales, Agence nationale pour la recherche et crédits récurrents.

En privilégiant le financement sur projet, vous faites courir un autre risque à la recherche publique puisque vous orientez l'investissement de l'État vers le secteur privé.

Quant aux pôles de recherche et d'enseignement supérieur, comme la mise en place des campus de recherche, nous n'y retrouvons pas ce que les états généraux proposaient, à savoir la création de structures de coopération pluridisciplinaires pour permettre une réelle mise en réseau d'équipes de recherche et de laboratoires.

Les recherches fondamentales de long terme qui devraient être financées par l'État dans le cadre de cette harmonisation public-privé proposée ne sont pas mises en évidence.

L'université, élément important d'une recherche bien organisée et efficace dans la chaîne de la connaissance et de la recherche, est laissée en dehors du texte ou presque ; j'ai en effet envie de dire que vous ne touchez pas à la loi de 1984 sur l'organisation de l'enseignement supérieur ; vous la contournez... pour l'instant !

Quant au secteur privé, il est encouragé à renforcer ses positions technologiques et incité à augmenter ses dépenses de recherche ; mais, là encore, la loi reste déclamatoire, comme les choeurs de l'Opéra qui chantent : «  Marchons, marchons ... » tout en restant sur place !

Les nouvelles instances créées devront s'articuler avec le système déjà existant et soulèveront des problèmes que nous ne voulons pas préjuger ; mais l'empilement de structures ne résoudra pas les difficultés de concertation horizontale entre structures publiques, ou structures publique et privée, concertation qui existe et qu'il fallait certainement encourager à travers les organismes existants.

La question de l'emploi, dans l'ensemble de la recherche, dans le public comme dans le privé, la question du statut des enseignants-chercheurs, la question du développement des carrières, toutes ces questions sont abordées sans engagement clair.

Les normes européennes évaluent à 44 000 emplois le déficit d'emplois en France. Et alors que des plans pluriannuels de créations d'emplois ont été décidés pour l'armée et la justice, vous proposez à la recherche 3 000 emplois en 2006, des CDD et des ATER, qui précarisent le statut de chercheur associé. Je ne parlerai pas des 70 000 jeunes doctorants, tant vos décisions n'ont aucune commune mesure avec l'urgence de la situation de notre recherche.

Je ne m'étendrai pas sur le projet européen de la recherche que notre pays doit intégrer ni sur les enjeux mondiaux pour l'espèce humaine d'une politique avisée de la recherche, sauf à citer à ce sujet le Premier ministre de l'Inde indépendante, M. Nehru : «  Seule la science peut résoudre les problèmes que posent la faim et la pauvreté, l'insalubrité et l'analphabétisme, la superstition et les coutumes et traditions paralysantes, le gaspillage des ressources, le peuplement d'un pays riche par des hommes qui meurent de faim... Qui donc pourrait se permettre d'ignorer la science d'aujourd'hui ? À chaque instant, nous devons rechercher son aide ... L'avenir appartient à la science et à ceux qui s'en veulent les amis ! »

Je terminerai en rappelant ce que le Conseil économique et social souligne de façon insistante dans son appréciation : « la mise en oeuvre sera cruciale ... il convient d'avancer à un rythme soutenu, tant le retard accumulé sur certains pays est important ... ».

Croyez bien, monsieur le ministre, que mes amis du groupe CRC et moi-même resterons vigilants. En attendant, nous ne pourrons pas voter ce texte.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.

Mme Marie-Christine Blandin. Je veux d'abord remercier les rapporteurs et le président Valade, en particulier pour la diversité et la qualité des auditions qui nous ont éclairés. Je tiens aussi à remercier les collaborateurs de la commission spéciale.

Après ce débat, je ne boude pas les modifications obtenues : l'indexation des allocations de recherche sur les rémunérations de la fonction publique, la prise en compte des actions de culture scientifique dans l'évaluation, la reconnaissance de la place de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques auprès de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, le rôle de l'expertise pour les politiques publiques et le devoir pour les structures privées d'au moins informer l'Agence d'évaluation de l'utilisation des fonds publics.

Certains amendements ont donc été retenus par le Parlement, dont un malgré l'avis défavorable du ministre. C'est si rare que nous pourrions croire à une moisson satisfaisante.

Hélas ! malgré nos propositions, ni l'emploi ni la programmation des moyens ne sont à la hauteur pour parvenir à la société de la connaissance.

Le Haut conseil de la science et de la technologie, instance nécessaire, est renvoyé au décret sans cadrage de diversité, de parité ou d'activité.

Les moyens durables des organismes et de l'université sont plus fragiles que ceux des projets, dont les projets privés. Et ceux qui mènent ces projets privés ne sont que rarement tenus de rendre des comptes puisque cela relève souvent du code des impôts.

Enfin, si la coopération est au rendez-vous, la simplification ne l'est pas. Après la discussion générale, monsieur le ministre, vous m'avez dit : « Quand on n'aime pas la complexité, il vaut mieux ne pas s'occuper de recherche. »

Pour ma part, j'aime la simplification, mais je persisterai à m'occuper de recherche. Considérant que le compte n'y est pas, je voterai contre ce projet de loi en vous remerciant néanmoins de votre écoute. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte.

M. Pierre Laffitte. Malgré des circonstances économiques difficiles, nous avons enfin une priorité pour la recherche et pour l'innovation.

L'état des lieux est évidemment plutôt sombre : une recherche privée très nettement insuffisante, beaucoup plus faible que dans d'autres pays, malgré l'existence d'un certain nombre de grands groupes et de compétences fortes dans des domaines modernes ; une recherche publique mieux financée qu'ailleurs mais, à mon sens, moins efficace et surtout assez cloisonnée encore, et ce malgré une première loi en 1999, examinée d'abord par le Sénat et fortement modifiée par ce dernier, loi faisant suite à une initiative de ma part, reprise ensuite par la commission des affaires culturelles.

Nous disposons maintenant d'un certain nombre de points beaucoup plus positifs, même si la recherche privée ne peut pas se développer du jour au lendemain.

Les régions françaises se mobilisent en faveur des pôles de compétitivité qui associent enfin, à partir de la base, les grandes et petites entreprises, les centres de recherche, les universités, les collectivités locales, et qui proposent déjà toute une série d'importants projets innovants.

La loi apporte des outils considérables que l'ensemble des chercheurs, l'ensemble des industriels devront utiliser de façon intelligente, car c'est à partir d'eux que le mouvement doit se développer. Sans résoudre instantanément les problèmes, ce qu'une loi n'a jamais fait, le texte qui résulte de nos travaux diminue les rigidités bureaucratiques et libère donc les énergies ; il crée par ailleurs des structures permettant une combinaison entre les différents aspects de la recherche publique et de la recherche privée : les PRES, les réseaux thématiques, qui associeront public et privé, les fondations, qui sont largement développées.

Il s'agit désormais de nous mettre au travail et de faire en sorte que les nouveaux outils se développent, se concrétisent, trouvent leur équilibre exact.

C'est une procédure démocratique qui permettra à tous les partenaires de la recherche de faire de ce texte une bonne loi, afin que la France joue pleinement en Europe un rôle mobilisateur.

En effet, nous sommes probablement déjà observés par tous les pays européens, et nous le serons toujours plus. Les voyages que nous pouvons faire à l'étranger révèlent, d'ailleurs, qu'en Allemagne, en Italie ou en Angleterre le développement de nos pôles de compétitivité, qui trouvent des partenaires, est observé avec un grand intérêt.

Moi-même, j'ai rencontré au Sénat des représentants des entreprises Siemens et Cisco qui souhaitent d'ores et déjà développer leurs activités en France, plutôt qu'ailleurs. Le mouvement est lancé, et nous avons aujourd'hui un beau cadeau de Noël à offrir aux communautés économiques et scientifiques françaises ! (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.

M. Serge Lagauche. Périmètre trop restreint, focalisation sur le court terme, vision utilitariste de la recherche, complexification du système par la superposition des structures : telles sont les grandes orientations de ce projet de loi. Cette analyse, que nous avions déjà développée pendant la discussion générale, demeure d'actualité, puisque les amendements adoptés ne modifient pas l'économie générale du texte.

J'émets cependant un souhait, celui que les quelques amendements parmi ceux que nous avons proposés qui ont reçu un vote favorable ne soient remis en cause ni à l'Assemblée nationale ni en commission mixte paritaire. Je pense à l'inscription dans la loi de l'ANR comme établissement public, aux règles de déontologie des membres de l'Agence nationale de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, ou à l'indexation de l'allocation de recherche sur l'évolution des salaires de la fonction publique.

Toutefois, ces mesures ne représentent qu'une goutte d'eau par rapport à l'océan de nos besoins en termes de programmation pluriannuelle de l'emploi scientifique et d'attractivité des carrières. Nous n'avons pu, en effet, que modifier le texte à la marge.

Quant à la programmation financière, déjà obsolète dans sa partie rétroactive, elle n'est que poudre aux yeux. Au mieux permettra-t-elle de maintenir les moyens de la recherche. De fait, vous accentuez le décrochage déjà à l'oeuvre par rapport aux objectifs de Lisbonne.

Tout comme l'Europe, l'université est la grande absente de cette réforme, alors que son rôle et sa part dans la recherche française sont essentiels. Elle se trouve au coeur de l'excellence de notre recherche. Or, vous ne lui donnez même pas les moyens de la gouvernance des nouvelles structures de coopération que vous créez ! Les dotations financières risquent également de se concentrer sur quelques pôles insérés dans le tissu économique, au détriment des autres universités.

Parce que vous ne lui garantissez pas des moyens pérennes, vous fragilisez encore davantage la recherche publique. Il est périlleux de tout orienter vers l'innovation et le court terme. Il est dangereux pour notre recherche à moyen et long terme de tout miser sur la recherche par projets, à travers le financement de l'ANR, aux dépens des moyens de base des laboratoires.

D'ores et déjà, le CNRS fait les frais de cette logique. Ses crédits récurrents baissent, sa politique scientifique est fragilisée par la progression des financements indirects, par le biais de l'ANR, parce que les projets sélectionnés ne correspondent pas forcément à ses orientations.

Ce projet de loi constitue avant tout un alibi, pour ne pas démentir, sur la forme, les promesses du Président de la République. En réalité, non seulement votre texte ne répond pas aux enjeux de la recherche pour notre avenir, mais il torpille littéralement l'élan et l'espoir suscités par la mobilisation de la communauté scientifique.

Nous ne pouvons cautionner cette démarche et  - vous n'en serez pas surpris - nous voterons donc contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste - Mme Annie David applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Monsieur le ministre, je voudrais vous exprimer ma satisfaction et mes remerciements, même si ce texte n'est pas parfait, naturellement, et si nous aurions aimé, en particulier, que l'organisation de la recherche compte moins de strates et permette plus d'initiatives.

L'essentiel reste tout de même que vous ayez placé la recherche au coeur de la politique de notre pays. Il s'agit d'un aspect essentiel, compte tenu de la compétition mondiale qui s'annonce et sera de plus en plus féroce, car les autres pays, eux aussi, engageront toujours plus de moyens pour développer leur recherche, leur savoir, leur innovation.

L'avenir des entreprises et de l'emploi dans notre pays dépendra non pas des politiques sociales mises en oeuvre mais de notre capacité à gagner des parts de marché, c'est-à-dire à faire en sorte que la recherche produise de l'innovation, que les entreprises s'en saisissent et que nous permettions ainsi à nos compatriotes de trouver un emploi.

Grâce à votre texte, la recherche sera, à l'avenir, au coeur de nos préoccupations, et je voudrais vous en remercier, vous approuver, vous féliciter, vous encourager. Monsieur le ministre, vous devez dire à tous vos collègues que vous êtes en charge du ministère le plus important pour l'avenir de notre pays ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Humbert.

M. Jean-François Humbert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis, à mon tour, que le projet de loi de programme pour la recherche ait pu être examiné en première lecture par la Haute Assemblée.

Les auditions qui se sont déroulées devant la commission spéciale, sous l'autorité toujours bienveillante de Jacques Valade, ont permis des échanges particulièrement fructueux et concouru à l'information complète des acteurs de la recherche s'agissant des dispositions proposées.

Par ailleurs, les interventions des différentes parties prenantes ont conduit à enrichir le texte sur de nombreux points. Ces échanges se sont inscrits dans la démarche qui anime le Gouvernement depuis le début de l'élaboration de ce projet de loi et qui vise à rénover le système national de recherche et d'innovation, en étroite collaboration avec tous les acteurs.

Ce projet de loi définit le cadre d'une réforme ambitieuse et offre de nombreux outils aux acteurs de la recherche, parmi lesquels les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les réseaux thématiques de recherche avancée constituent, à mon sens, les innovations essentielles. Ces nouvelles formes de coopération ont toutes les chances de se développer, car elles reposent sur le volontariat et offrent un cadre à des pratiques naissantes. S'agissant de ces regroupements, nos débats ont permis de préciser plusieurs éléments.

La Commission a souhaité, notamment, que les centres hospitaliers universitaires et les centres de lutte contre le cancer puissent être les membres fondateurs d'un PRES.

M. Jacques Valade, président de la commission spéciale. Absolument ! C'est très important !

M. Jean-François Humbert. Elle a également prévu explicitement que les établissements ou organismes participant à la création d'un PRES pourraient être français ou européens, car le projet de loi s'inscrit dans la construction de l'espace européen de la recherche et de l'enseignement supérieur. Cette mesure permettra, en particulier, de développer des coopérations transfrontalières.

Nos débats ont également permis de souligner qu'il était nécessaire pour l'avenir de notre recherche de renforcer les liens avec les entreprises privées. À cette occasion, il a été précisé que les fondations de coopération scientifique pourraient compter des représentants du monde économique parmi les membres de leur conseil d'administration.

Enfin, au nombre des dispositions positives issues de nos débats, l'inscription dans le projet de loi de la création du Haut conseil de la science et de la technologie, qui deviendra un élément essentiel du pilotage de notre politique de recherche, mérite d'être soulignée. Il était important que le Gouvernement indique sa volonté de définir des priorités pour notre recherche. Face à la concurrence internationale, en effet, il sera primordial de réaliser les bons choix et d'identifier les domaines de recherche qui joueront un grand rôle dans les années à venir.

Ce projet de loi fait partie d'un ensemble, le Pacte pour la recherche. Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, pour mener à bien cette réforme dans sa totalité. Ce ne sera pas une surprise pour vous : le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 72 :

Nombre de votants 328
Nombre de suffrages exprimés 325
Majorité absolue des suffrages exprimés 163
Pour l'adoption 201
Contre 124

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

La parole est à M. le ministre délégué.

M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le président, monsieur le président du Sénat, monsieur le président de la commission spéciale, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous exprimer mes sincères remerciements à l'issue de l'examen de ce projet de loi de programme pour la recherche.

J'ai conscience que les conditions dans lesquelles vous avez travaillé n'ont pas toujours été optimales. Mais le Gouvernement attachait du prix à tenir son engagement à l'égard de la communauté scientifique : le Parlement devait donc commencer l'examen de ce texte avant la fin de l'année. Nous avons, ensemble, respecté cet engagement, et nous pouvons donc tous nous en réjouir.

Les conditions difficiles que vous avez connues ne vous ont pourtant pas empêché de faire un travail absolument remarquable. Vous avez procédé à un nombre d'auditions rarement atteint en pareilles circonstances.

Je n'hésite pas à le dire : le texte que vous venez d'adopter est sensiblement meilleur que celui qui avait été proposé par le Gouvernement. Les débats se sont toujours déroulés dans une parfaite courtoisie. Comme l'adoption d'un certain nombre d'amendements en témoigne, nous avons travaillé dans un esprit constructif, y compris avec l'opposition. Je voudrais donc rendre hommage à tous ceux qui ont participé à cette discussion, notamment MM. Valade, Revol et Blin.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce texte est d'une très grande importance.

Il procède à une rénovation du paysage de la recherche en France. Certes, ce n'est pas un bouleversement : nous respectons l'organisation, parfois spécifique, de la recherche et de l'université dans notre pays, pour nous appuyer sur des points forts et corriger un certain nombre de points faibles.

Ce faisant, nous renforçons considérablement la recherche française, et ce à plusieurs titres.

Tout d'abord, nous lui donnons, nul ne peut le contester, les moyens nécessaires pour être au rendez-vous des années à venir.

Ensuite, comme l'a justement souligné M. Valade, nous permettons aux universités de jouer un rôle accru dans la recherche. En effet, il n'y a pas d'enseignement supérieur de qualité sans une recherche présente dans les lieux où se dispense un tel enseignement.

Par ailleurs, nous ouvrons de nouvelles voies à la coopération et au décloisonnement, en améliorant, sur plusieurs points, le statut des chercheurs et l'attractivité de la carrière de chercheur, tant il est vrai que l'attractivité est déterminante pour favoriser les vocations scientifiques et soutenir l'effort scientifique de notre pays.

En outre, nous donnons de la visibilité à la recherche, en contribuant à la définition des grandes priorités, qui sont essentielles pour que nos compatriotes connaissent la politique de recherche. Nous lançons aussi une « opération vérité » en termes d'évaluation, car il est essentiel que les Françaises et les Français sachent à quoi leurs impôts servent, dans le domaine de la recherche comme ailleurs.

Cette politique nouvelle de la recherche est importante parce qu'elle est cohérente avec la politique d'ensemble du Gouvernement. Dans la compétition internationale en cours, nous pourrons tenir notre rang, et même l'améliorer, si nous savons nous rénover, nous réformer et mobiliser toutes nos forces, au service de notre économie, et donc de l'emploi.

De ce point de vue, la recherche a un rôle considérable à jouer. Il faut accroître son efficacité et mieux l'articuler avec le monde économique et les entreprises. C'est tout le sens de la politique des pôles de compétitivité, laquelle est directement liée à ce qui est proposé en matière de recherche. Ainsi, dans cette compétition internationale, nous saurons donner des chances nouvelles à notre pays, notamment à nos entreprises.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous travaillons au service de l'emploi, au service de l'ensemble des Françaises et des Français. Par l'adoption de ce projet de loi, au Sénat, ce soir, nous avons franchi une étape importante dans le grand combat qui est engagé au service de notre pays. Soyez-en tous remerciés ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre, des propos aimables que vous avez tenus à l'endroit du Sénat.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi de programme pour la recherche
 

5

COMMUNICATION relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de finances rectificative pour 2005 est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

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DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1278 du 13 octobre 2005 définissant le régime juridique des organismes de placement collectif immobilier et les modalités de transformation des sociétés civiles de placement immobilier en organismes de placement collectif immobilier.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 149, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation du protocole n° 2 à la convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales relatif à la coopération interterritoriale.

Le projet de loi sera imprimé sous le n° 150, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

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TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution:

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 89/552/CE du Conseil visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3038 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution:

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I).

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3039 et distribué.

J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :

- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 2223/96 du Conseil en ce qui concerne la transmission des données de comptabilité nationale.

Ce texte sera imprimé sous le n° E-3040 et distribué.

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DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de Mme Esther Sittler un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes (n° 124, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 145 et distribué.

J'ai reçu de M. Gérard Roujas un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif à certaines questions immobilières (n° 127, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 146 et distribué.

J'ai reçu de Mme Monique Cerisier-ben Guiga un rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord sur l'Office franco-allemand pour la jeunesse (n° 128, 2005-2006).

Le rapport sera imprimé sous le n° 147 et distribué.

J'ai reçu de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi de finances rectificative pour 2005.

Le rapport sera imprimé sous le n° 151 et distribué.

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DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Marc Massion, secrétaire rapporteur, un rapport d'information fait au nom de la commission spéciale chargée de vérifier et d'apurer les comptes, présidée par M. Paul Girod, sur les comptes du Sénat de l'exercice 2004.

Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 148 et distribué.

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ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 22 décembre 2005, à neuf heures trente et à quinze heures :

1. Désignation des membres de la mission commune d'information sur le bilan et les perspectives d'avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté depuis une quinzaine d'années ;

2. Discussion des conclusions du rapport (n° 141, 2005-2006) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité et au développement des transports.

M. Charles Revet, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

3. Discussion des conclusions du rapport (n° 143, 2005-2006) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

4. Discussion des conclusions du rapport (n° 122, 2005-2006) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation agricole.

M. Gérard César, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

5. Discussion des conclusions du rapport (n° 151, 2005-2006) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2005.

M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble du texte.

Personne ne demande la parole ?...

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt et une heures vingt.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD