SEANCE DU 30 NOVEMBRE 2001


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 2002. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Economie, finances et industrie

SERVICES FINANCIERS (ET CONSOMMATION) (p. 2 )

M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour la consommation et la concurrence ; M. Yves Coquelle.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Vote des crédits réservé.

Articles 66 et 67. - Adoption (p. 3 )

Suspension et reprise de la séance
(p. 4 )

industrie (et poste) (p. 5 )

MM. Jean Clouet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour l'industrie ; Jean Besson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour l'énergie ; Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour les technologies de l'information et La Poste ; Pierre Laffitte, Max Marest, Yves Coquelle, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Raffarin, Gérard Delfau, Roger Rinchet, Ladislas Poniatowski.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.

Crédits du titre III. - Vote réservé (p. 6 )

Crédits du titre IV (p. 7 )

MM. Yves Coquelle, le secrétaire d'Etat.
Vote des crédits réservé.

Crédits des titres V et VI. - Vote réservé (p. 8 )

Article 67 quater (p. 9 )

M. Yves Coquelle,
Adoption de l'article.

Suspension et reprise de la séance (p. 10 )

PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS

PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT (p. 11 )

MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Joseph Ostermann, Mme Odette Terrade, MM. Bernard Dussaut, Serge Mathieu, Christian Demuynck, Pierre-Yvon Trémel.

Suspension et reprise de la séance (p. 12 )

M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation.
Vote des crédits réservé.

Article additionnel avant l'article 67 bis (p. 13 )

Amendement n° II-35 rectifié bis de M. Michel Bécot. - MM. Michel Bécot, le rapporteur spécial, le secrétaire d'Etat, Gérard Cornu, Jean-Philippe Lachenaud, Yves Fréville. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 67 bis. - Adoption (p. 14 )

Article 67 ter (p. 15 )

Amendements n°s II-24 de la commission et II-9 rectifié bis de M. Georges Mouly. - MM. le rapporteur spécial, Gérard Delfau, le secrétaire d'Etat, Mme Odette Terrade, MM. Jean Chérioux, Gérard Delfau, Yves Fréville, Gérard Cornu. - Adoption de l'amendement n° II-24 rédigeant l'article, l'amendement n° II-9 rectifié bis devenant sans objet.

Suspension et reprise de la séance (p. 16 )

COMMERCE EXTÉRIEUR (p. 17 )

MM. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Odette Terrade, M. François Marc.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur.

Crédits du titre III (p. 18 )

M. Auguste Cazalet, au nom de la commission des finances.
Rejet des crédits par scrutin public.

Crédits des titres IV à VI. - Rejet (p. 19 )

CHARGES COMMUNES
ET COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p. 20 )

MM. Yves Fréville, rapporteur spécial de la commission des finances pour les charges communes ; Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des finances pour les comptes spéciaux du Trésor ; Thierry Foucaud, François Marc.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

CHARGES COMMUNES (p. 21 )

Crédits du titre Ier (p. 22 )

Amendement n° II-36 du Gouvernement. - Mme le secrétaire d'Etat, M. Yves Fréville, rapporteur spécial. - Adoption.
Rejet des crédits.

Crédits du titre II. - Adoption (p. 23 )

Crédits du titre III. - Rejet (p. 24 )

Crédits du titre IV (p. 25 )

Amendement n° II-37 du Gouvernement. - Adoption.
Rejet des crédits.

Article 64 ter (p. 26 )

Amendement n° II-23 de la commission. - M. Yves Fréville, rapporteur spécial ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p. 27 )

Article 35 - Adoption (p. 28 )

Article 36 (p. 29 )

Amendement n° II-39 du Gouvernement. - Mme le secrétaire d'Etat, M. Paul Loridant, rapporteur spécial. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 37 à 41. - Adoption (p. 30 )

Article 41 bis (p. 31 )

Amendement n° II-38 du Gouvernement. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 42 - Adoption (p. 32 )

Services du Premier ministre


I. - SERVICES GÉNÉRAUX (p. 33 )

MM. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances ; Thierry Foucaud, Yann Gaillard.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Vote des crédits réservé.

Article 77 (p. 34 )

Amendements n°s II-41 à II-46 de la commission. - M. le rapporteur spécial, Mme le secrétaire d'Etat, MM. Jean-Philippe Lachenaud, Maurice Blin. - Adoption des six amendements.
Adoption de l'article modifié.

II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE (p. 35 )

MM. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gérard Delfau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

Crédits des titres III et V. - Adoption (p. 36 )

Suspension et reprise de la séance
(p. 37 )

III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL (p. 38 )

M. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

Crédits des titres III et V. - Adoption (p. 39 )

IV. - PLAN (p. 40 )

MM. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Paul Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme Evelyne Didier.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.

Crédits des titres III, IV et VI. - Adoption (p. 41 )

Budget annexe des monnaies et médailles
(p. 42 )

M. Bertrand Auban, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Adoption des crédits figurant aux articles 33 et 34.

Budget annexe des Journaux officiels (p. 43 )

M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Adoption des crédits figurant aux articles 33 et 34.

3. Transmission de propositions de loi (p. 44 ).

4. Ordre du jour (p. 45 ).




COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 2002

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2002 (n° 86, 2001-2002), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 87 (2001-2002).]

Economie, finances et industrie

SERVICES FINANCIERS (ET CONSOMMATION)

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les services financiers (et la consommation.)
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits des services financiers, dont l'identification est difficile dans le bleu budgétaire, restent relativement stables, à 10,5 milliards d'euros.
Je tiens à saluer l'effort de sincérité budgétaire réalisé par le ministère sur ses crédits. Je constate que mes remarques pour l'appeler à davantage d'orthodoxie budgétaire ont été prises en compte, ce dont je me réjouis, bien entendu. Plusieurs milliards d'euros, tant en dépenses qu'en recettes, ont été rebudgétisés en trois ans.
Quelques points mineurs restent à souligner. Tout d'abord, je fais miennes les observations de la Cour des comptes qui, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, relève un nombre important de fonds de concours modestes ou inactifs et se prononce pour la budgétisation totale des dépenses et recettes des hypothèques. J'appelle d'ailleurs à la nécessaire réforme du régime archaïque de rémunération des conservateurs des hypothèques.
Je m'interroge ensuite sur la pertinence de l'inscription des dépenses informatiques les plus lourdes, correspondant à des projets pluriannuels, en fonctionnement plutôt qu'en investissement.
Dans un contexte où chacun déplore la baisse des investissements de l'Etat, l'inscription des programmes informatiques les plus lourds en investissement, conformément aux règles du plan comptable général, permettrait à chacun de prendre en compte une définition rénovée de ce qu'est aujourd'hui un investissement.
Je m'interroge également sur la nécessité de maintenir sur le budget des charges communes plutôt que sur celui du ministère les frais de poursuite et de contentieux des administrations fiscales. Les réponses que j'ai reçues à ce sujet ne m'ont pas entièrement convaincu.
Enfin, je crois qu'une réelle individualisation des missions du ministère est nécessaire. En effet, la pratique actuelle consistant à fondre les moyens de fonctionnement de l'industrie, des PME et de certaines services financiers dans une enveloppe commune n'est pas acceptable.
S'agissant des grands chantiers engagés par Bercy, le ministère de l'économie et des finances sera le maître d'oeuvre de la nouvelle gestion publique induite par la loi organique du 1er août 2001, qu'il s'essaie d'ores et déjà à traduire dans son fascicule budgétaire pour 2002. J'y insiste, c'est une très bonne chose.
Un certain nombre d'agrégats, qui ne sont pas tous, loin de là, des missions et des programmes au sens de la loi organique, présentent des objectifs et des indicateurs souvent chiffrés.
Si les résultats sont inégaux et doivent être nuancés, je note que les directions qui réussissent le mieux l'exercice sont celles qui ont signé des contrats d'objectifs moyens avec, au premier rang, la direction générale des impôts. Elles ont, en effet, davantage réfléchi à la définition de leurs missions et aux moyens de les évaluer, et je regrette que les directions chargées du recouvrement de l'impôt n'aient pas adopté les mêmes objectifs et indicateurs de résultats.
Participant pleinement de la nouvelle gestion publique, la réforme du ministère de l'économie et des finances ne mérite pas - je tiens à le souligner - l'opprobre dont on l'accable trop souvent.
Je résumerai, pour ma part, la situation ainsi : malgré une volonté affirmée de réforme, celle-ci peine à trouver son chemin. Le programme de modernisation affiche un pragmatisme mesuré, mais 92,5 millions d'euros y seront tout de même consacrés en 2002. Le catalogue de mesures prises et à prendre est impressionnant, comme le montre le relevé de décision du dernier comité technique paritaire du 18 octobre.
Je terminerai mon propos en dressant quelques constats.
Premier constat, les conditions de la réforme sont réunies. Le grand ministère de Bercy, qui a absorbé l'industrie mais aussi les PME, peut faire jouer les synergies entre les différentes directions. De la même manière, le rôle et l'action d'un « M. Réforme » en la personne de M. Pêcheur, secrétaire général du ministère, disposant de véritables leviers sur les moyens à la fois budgétaires et humains, se révèlent essentiels.
Deuxième constat, les nouvelles technologies n'ont pas encore suffisamment pénétré le fonctionnement des services du ministère.
Certes, son site Internet est un succès. Il a renforcé la communication du ministère ainsi que sa culture de service avec la mise en ligne de 540 formulaires touchant aux formalités des entreprises, ou avec le lancement de téléprocédures pour lesquelles le ministère de l'économie et des finances est en pointe par rapport aux autres administrations.
J'ajouterai cependant quelques bémols : ces services, y compris lorsqu'ils s'adressent à de grandes entreprises, n'ont pas encore trouvé leur public.
En ce qui concerne l'usage des nouvelles technologies, seuls 60 000 agents sont connectés et le plan qui prévoit d'en connecter 180 000 d'ici à juin 2002 me semble ambitieux.
Enfin, si le projet d'informatique commune aux directions a pris quelque retard, il n'en demeure pas moins indispensable.
Troisième constat, le ministère de l'économie et des finances doit mieux maîtriser sa sous-traitance. Un récent rapport de l'inspection générale des finances a montré que ce n'était pas le cas à la direction de la communication. De même, l'incident survenu en septembre dernier lors de l'envoi des feuilles d'imposition aux contribuables mensualisés me conduit à penser que la sous-traitance doit faire l'objet d'une attention plus importante de la part des gestionnaires de contrats.
Quatrième et dernier constat, je regrette que les très nombreuses expérimentations initiées par Bercy n'aient pas toutes abouti à des mesures concrètes. On peut saluer la création, le 1er janvier 2002, d'une direction des grandes entreprises au sein de la direction générale des impôts, ainsi que le projet de fusion des services financiers à l'étranger.
Pour le reste, seul un petit nombre d'expérimentations, au demeurant fort intéressantes, ont jusqu'à présent donné lieu à évaluation, bilan, et surtout décision.
En conclusion, la réforme du ministère me paraît au coeur de la modernisation de l'Etat. S'agissant en effet du ministère de l'économie et des finances, compte tenu des compétences exceptionnelles dont il dispose, sa gestion doit être exemplaire et montrer le chemin aux autres administrations.
Cette exemplarité doit également se manifester dans l'application de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances. Conformément à l'article 57 de ce texte, et un mois seulement avant la date d'application de cette disposition, il serait bon, me semble-t-il, que le ministère me transmette les rapports de l'inspection générale des finances que j'ai demandés.
Au vu de tous les points largement positifs de votre budget, madame le secrétaire d'Etat, à titre personnel, j'invite le Sénat à l'adopter.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour la consommation et la concurrence. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est avec le souci permanent d'assurer la protection du consommateur que la commission des affaires économiques et du Plan a examiné les crédits consacrés à la consommation et à la concurrence. Ces derniers atteignent 192 millions d'euros, au service d'un champ de responsabilité que vous savez très large.
L'augmentation de 2,2 % des crédits - après une hausse de 5 % l'an passé - manifeste la volonté du Gouvernement de préserver les moyens de contrôle de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, et d'accroître les moyens de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, ce dont je me félicite car la priorité accordée à la sécurité sanitaire y gagne en crédibilité.
Ces crédits doivent également servir à soutenir l'action du mouvement consumériste et celle de l'Institut national de la consommation, l'INC.
Je tiens à souligner, à ce propos, le rôle déterminant des associations de consommateurs, qui leur fournissent information et soutien et qui les représentent auprès des pouvoirs publics dans des instances sans cesse plus nombreuses.
Madame la secrétaire d'Etat, je sais que vous comptez de plus en plus sur elles pour accompagner votre politique, notamment le passage à l'euro, et pour couvrir un champ d'intervention en pleine expansion. C'est pourquoi je déplore que la subvention qui leur est accordée reste la même en 2002, pour la troisième année consécutive, et ne représente que les trois quarts de son niveau de 1990.
De surcroît, je regrette que les centres techniques régionaux de la consommation, les CTRC, aient subi en 2001 une régulation budgétaire compromettant leur précieuse présence de proximité auprès des consom-mateurs.
J'attire également l'attention du Gouvernement sur la nécessité de donner à l'INC les moyens de son redressement.
En effet, l'INC ne peut assurer efficacement ses missions, confirmées dans le décret d'avril dernier, avec une subvention stabilisée à un niveau moitié moindre que voilà dix ans !
Il lui faut sortir d'une crise qui a commencé en 1994, qui se traduit encore par un déficit avéré en 2000 et annoncé en 2001 et dont le cumul épuisera quasiment les réserves de l'établissement. Une dynamique est engagée, madame la secrétaire d'Etat. Je demande au Gouvernement de la concrétiser. Un complément annuel de subvention de plus de 1 million d'euros s'impose dès lors que le contrat d'objectifs doit être respecté par l'INC.
En outre, aux dires de l'INC, seule une subvention exceptionnelle significative peut lui permettre de développer son lectorat et d'équilibrer ainsi durablement son activité éditoriale. Je compte sur vous, madame la secrétaire d'Etat, pour aider cet établissement public industriel et commercial, à l'occasion du vote du projet de loi de finances pour 2002 ou de la loi de finances rectificative de 2001, car je connais les engagements du Gouvernement en faveur des mouvements de consommateurs.
Permettez-moi maintenant de formuler quelques réflexions sur la politique de protection des consom-mateurs.
La protection physique du consommateur passe par la nécessité de garantir la sécurité des produits et des aliments. Il s'agit aujourd'hui d'une préoccupation majeure pour nos concitoyens, dont la confiance a été ébranlée par la multiplication des crises - je pense notamment à l'ESB, l'encéphalopathie spongiforme bovine et le développement des biotechnologies.
En réponse, la mobilisation des pouvoirs publics est restée forte en 2000, avec l'intensification des contrôles tant nationaux que communautaires et l'élaboration de nouvelles normes communautaires en matière de sécurité et de traçabilité.
Je me félicite notamment de la nouvelle directive relative à la sécurité générale des produits, mais je rappelle qu'il est urgent de créer une autorité alimentaire européenne et d'harmoniser les réglementations relatives à la sécurité alimentaire.
Au sujet de la traçabilité, je m'inquiète de son caractère très partiel, souligné par le Conseil national de l'alimentation dans un récent avis. Il conviendrait, madame la secrétaire d'Etat, d'établir, en concertation avec les filières, les principes mêmes de la traçabilité et de préciser sa finalité, informative ou sanitaire.
Pour ce qui est de la protection économique du consommateur, j'attire votre attention sur trois aspects.
D'abord, il est impératif de renforcer la prévention du surendettement, notamment par une meilleure information des consommateurs sur les dangers des crédits renouvelables.
Ensuite, au titre de la protection des cyberconsommateurs, le chiffre d'affaires du commerce électronique a encore triplé en France l'an passé, mais la sécurisation des paiements et la protection des données personnelles sur le réseau sont loin d'être assurées.
Enfin, l'introduction de l'euro sous la forme fiduciaire appelle une vigilance particulière. Pour que cet événement ne signifie pas l'exclusion de consommateurs parmi les plus vulnérables, il faut poursuivre l'effort de pédagogie et surveiller les prix, afin d'éviter absolument une perte de pouvoir d'achat.
Mes chers collègues, je serai plus brève sur la politique de la concurrence. Je soulignerai surtout le rôle croissant et convergent des autorités nationales et communautaires en amont et en aval du mouvement de concentration qui s'est poursuivi en 2000. Je tiens à ce que les règles de concurrence soient respectées dans la mesure où elles garantissent les intérêts des consommateurs.
En conclusion, mes chers collègues, prenant acte de la volonté dont fait preuve ce budget de préserver les moyens de la politique de la concurrence et de la consommation, à titre personnel, je voterai ces crédits.
La commission des affaires économiques a, quant à elle, émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés à la concurrence et la consommation dans le projet de loi de finances pour 2002.
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ce projet de budget des services financiers pour 2002 présente deux caractéristiques essentielles.
Pour la première fois depuis de longues années, les effectifs budgétaires du ministère ne sont pas en réduction. Malheureusement, il n'y a pas eu non plus de création, malgré les besoins.
Cela paraît trancher quelque peu avec la situation des années antérieures. En fait, ce n'est pas tout à fait le cas.
Quoi qu'il en soit, ce gel des effectifs budgétaires, à l'exception de ceux de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ne constitue pas réellement une avancée dans le fonctionnement des services financiers de l'Etat.
Concernant l'Institut national de la consommation, l'INC, son conseil d'administration unanime manifeste son inquiétude et souhaite un complément de subvention au titre de l'année 2002 afin d'accomplir sa mission de service public.
Ce budget s'inscrit pleinement dans le cadre d'une modernisation et d'une restructuration de nos administrations financières qui ne peut manquer de nous poser quelques questions, c'est la seconde caractéristique de ce budget.

La mise en oeuvre du dispositif Copernic, est au coeur de la conception du budget 2002 des services financiers. Il s'agit ainsi de réduire quelque peu l'implantation des différents services financiers sur le territoire sous prétexte de rationaliser la définition des objectifs et des moyens d'intervention.
Va-t-on assister à la disparition de certaines perceptions, notamment en milieu rural, avec toutes les conséquences que cela implique sur la vie de nos concitoyens dans la France profonde ?
Les enjeux ne sont pas secondaires : le réseau des centres des impôts, l'implantation des services du Trésor public sont à la base des mouvements économiques dans le pays ; par ailleurs, une bonne part de la gestion des collectivités locales et des grands services publics dépend de l'efficacité des services de la comptabilité publique, notamment dans leurs missions de conseil et d'aide à la décision.
Nous étions très circonspects sur les attendus de la défunte « mission 2001 », nous sommes aujourd'hui très interrogatifs sur la portée des orientations qui seront prises dans le cadre du programme Copernic.
Ce programme ne reçoit d'ailleurs pas l'adhésion des personnels, qui sont pourtant un élément indispensable à la réussite de tout changement.
Nous ne sommes pas convaincus, madame la secrétaire d'Etat, que le devenir des services publics réside dans une réduction de leur implantation ou de leurs compétences de proximité, comme cela semble être la règle avec la montée en charge du programme Copernic.
La France est, en effet, un pays où l'aménagement du territoire présente des caractéristiques suffisamment particulières pour nécessiter des dispositions spécifiques.
Cet enjeu d'aménagement du territoire, auquel sont très sensibles les élus locaux - nombre de mes collègues en font quotidiennent l'expérience - couplé à l'enjeu de l'action syndicale des personnels, soucieux de promouvoir un service public de proximité pleinement efficace, nous amène naturellement à ne pas voter les crédits des services financiers pour 2002.
Nous sommes contre ce budget, malgré les quelques efforts réalisés en matière de réduction de la précarité du travail et de reclassement des agents, efforts qui ne font cependant pas oublier l'essentiel, c'est-à-dire que les administrations financières doivent être présentes sur le terrain et disposer des moyens matériels et humains nécessaires à leur intervention.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Tout d'abord, je tiens à remercier le rapporteur spécial, M. Angels, de sa contribution à l'étude du budget des services financiers que nous examinons ce matin.
Ce budget s'articule autour de quelques orientations essentielles : le souci de transparence, de lisibilité du budget et de simplification, la réforme de l'Etat au service des citoyens, et le passage à l'euro.
M. le rapporteur spécial a beaucoup insisté dans son rapport sur la difficulté de cerner, d'une année sur l'autre, le périmètre de ce que nous avons coutume d'appeler les services financiers.
J'avoue que les calculs sont en effet souvent complexes. Je crois au demeurant que les chiffres que vous présentez, et surtout les tendances qu'ils dessinent, ne sont pas en contradiction avec ceux qui figurent dans le bleu budgétaire.
En tout cas, je partage votre souhait que la présentation budgétaire, issue de la nouvelle loi organique, nous dispense, à l'avenir, d'établir des passerelles aussi multiples qu'éphémères.
Toutefois, vous l'avez dit, notre effort de lisibilité est réel. Nous avons regroupé, cette année, dans un nouvel agrégat « service de l'action régionale pour la sécurité et la compétitivité industrielles » les moyens du réseau des directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, ainsi que sa structure de pilotage, la direction de l'action régionale et de la petite et moyenne industrie, la DARPMI, afin d'assurer une meilleure connaissance du couple missions-moyens de ce service.
Un autre effort de sécurité budgétaire, en quelque sorte, que vous avez vous-même souligné a été réalisé avec l'achèvement de la rebudgétisation entreprise depuis quelques années, en particulier dans le budget de 2001.
Il reste, certes, encore quelques fonds de concours. Treize d'entre eux ont été supprimés en 2000 et 2001, et ceux qui demeurent ne sont pas, sur le fond, contestés par la Cour des comptes.
Vous avez également insisté sur les conséquences de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances, y compris pour le budget même du ministère des finances. Il va de soi que le ministère des finances s'impliquera totalement dans cette démarche, à la fois comme maître d'oeuvre et également comme point d'application, en quelque sorte, de cette réforme.
Nous avons déjà engagé cette réforme, comme en témoigne la création de l'Agence « France-Trésor » et la présentation dans le budget des charges communes de la préfiguration du programme de la dette publique.
J'en viens maintenant à la modernisation du ministère. Pour ne rien vous cacher, je vous ai trouvé un peu pessimiste, monsieur le rapporteur spécial, et ce pour plusieurs raisons.
D'abord, le lancement de la démarche vers la constitution de « l'e-ministère », c'est-à-dire l'utilisation accrue des nouvelles technologies, constitue pour notre ministère un objectif tout à fait essentiel au cours des prochains mois et des prochaines années. Evidemment, tous les objectifs ne sont pas atteints, mais je crois que beaucoup a déjà été fait.
Il va de soi qu'il s'agit, pour nous, d'offrir des services supplémentaires aux citoyens sans faire disparaître les autres modalités de contact avec eux. Par ailleurs, conformément à votre souhait, monsieur le rapporteur spécial, tous les agents du ministère de l'économie et des finances auront accès, en 2002, au réseau Intranet du ministère.
D'une manière générale, vous limitez l'aspect concret de la réforme et de la modernisation. Je crois que c'est injustifié, d'autant que les orientations qui ont été définies lors du comité technique paritaire ministériel du 18 octobre en ont encore élargi l'impact.
Je voudrais à ce titre préciser quelques points.
D'abord, nous avons tiré, je crois, les conclusions des expérimentations que nous avons engagées, et nous avons retenu le principe de plusieurs généralisations : d'abord, MININFO, le réseau d'information destiné aux entreprises ; ensuite, l'accueil coopératif interdirectionnel, avec des intranets communs et, à chaque fois que cela est possible sur le plan immobilier, des accueils communs ; enfin, un rapprochement entre les centres des impôts et les recettes des impôts, ce qui facilite la vie des entreprises.
Il en est de même avec la direction des grandes entreprises, installée à Pantin, qui est d'ores et déjà opérationnelle mais qui ne fonctionnera à plein régime qu'à partir du 1er janvier 2002. Il s'agit, là encore, de la préfiguration de l'interlocuteur fiscal unique pour les 22 000 plus grandes entreprises nationales.
Par ailleurs, seront mis en place de nouveaux centres d'appel téléphonique pour la direction générale des impôts, la DGI, après celui qui a été ouvert à Lille cette année. Il en sera de même pour les centres d'encaissement de la direction générale de la comptabilité publique, la DGCP. Le premier a été ouvert à Créteil, et d'autres centres devraient se développer dans les mois qui viennent.
Plus important encore, le système Copernic, projet d'informatique fiscale, est bien avancé, monsieur Coquelle. Il permettra aux contribuables de bénéficier d'un certain nombre de réalisations concrètes telles que le portail fiscal d'information ou le système d'accès au dossier fiscal. Ce projet, je tiens à le souligner, a été bâti en étroite concertation avec les personnels et leurs représentants, et, d'après les indications qui me sont parvenues, les agents du ministère des finances y adhèrent très fortement : engagés dans la réforme de modernisation, ils savent que l'outil informatique est un outil structurant et qu'il constitue le point nodal de la réforme.
Tout cela devrait permettre de résoudre et de faire oublier rapidement les difficultés rencontrées en matière tant d'impôt sur le revenu que de taxe d'habitation. Pour toutes ces modernisations, nous avons délibérément choisi une démarche qui se veut progressive, fondée sur le dialogue et sur la concertation. Nous continuerons de progresser rapidement, en gardant toujours comme objectif l'amélioration du service rendu à nos concitoyens.
Je serai brève s'agissant de l'aménagement et de la réduction du temps de travail. Je soulignerai seulement que, là aussi, nous avons choisi une démarche participative et un dialogue approfondi sur les plans tant national que local. Nous avons procédé par expérimentations, et nous avons beaucoup appris. Nous pouvons nous féliciter aujourd'hui du fait que plus de 80 % des agents du ministère des finances bénéficient de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, sans que le ministère ait dérogé au décret fondateur de l'ARTT du 25 août 2000. Nous sommes en effet restés strictement dans les limites de ce texte, mais nous avons intégré les difficultés propres à certains métiers, ce qui est normal, ainsi que les astreintes d'horaires qu'ils comportent. C'est le cas, par exemple, de certains informaticiens et de certains personnels des douanes.
Mme Terrade s'est notamment consacrée, dans son rapport, à la politique de la consommation et elle a insisté sur l'évolution des moyens affectés aux associations de consommateurs. Je voudrais la rassurer : la stabilité des crédits, qu'elle a soulignée, ne doit pas faire perdre de vue que les moyens disponibles pour les associations de consommation doivent également tenir compte des reports de crédits non consommés apparus dès l'année 2000, qui ont également joué positivement sur les moyens disponibles de ces associations au cours de l'année 2001.
S'agissant des difficultés rencontrées par les centres techniques régionaux de la consommation, sur lesquelles vous avez insisté, vingt et un centres techniques ont pu être financés en 2000 contre vingt en 1999. Le centre technique régional de la région Centre n'a en effet été relancé qu'au cours de l'année 2000. Il ne bénéficiait d'aucun financement depuis 1997 en raison d'une activité trop réduite.
J'insiste sur le fait qu'il n'y a pas eu de reports de crédits sauf dans des cas très particuliers, à savoir quand leur fonctionnement interne ne permettait pas de mettre en oeuvre les financements qui, pour autant, avaient été prévus dans le budget. Quoi qu'il en soit, je remercie Mme Terrade de l'avis positif qu'elle a bien voulu donner sur ce budget des services financiers, comme M. le rapporteur spécial.
Au-delà du projet Copernic, M. Coquelle s'est interrogé sur la question du « gel de l'emploi public au ministère des finances », pour reprendre son expression. Il faut regarder la réalité de l'évolution des emplois.
Comme chacun le sait, il y a, d'une part, les créations et les suppressions d'emplois telles qu'elles figurent dans le budget. Nous allons, en 2002 comme l'année dernière, procéder à des redéploiements d'effectifs pour les missions que nous avons jugées prioritaires, et notamment vers la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.
Monsieur le sénateur, en termes de gestion des effectifs au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, nous procédons à 6 600 recrutements, au sein desquels, je tiens à le souligner, près de 1 700 recrutements seront destinés à réduire le taux de nos vacances d'emploi. Il s'agit vraiment d'une montée en puissance de nos effectifs en 2002 afin, d'une part, de remplacer les personnels qui partiront à la retraite et, d'autre part, de pourvoir les emplois vacants qui n'étaient pas pourvus. Ainsi, sur le plan humain, les moyens croîtront en 2002 par rapport à cette année.
J'ai omis de dire que nous avons redéployé des emplois au profit non seulement de la DGCCRF, ce qui est bien légitime compte tenu des tâches de surveillance et de sécurité sanitaire et alimentaire qu'elle mène, mais aussi des centres techniques de contrôle des véhicules, la mise en oeuvre de l'aménagement du temps de travail ayant conduit à affecter des effectifs supplémentaires au contrôle des poids lourds. Il s'agissait également d'une priorité en matière de sécurité.
Je tiens à remercier les intervenants des jugements qu'ils ont bien voulu porter sur ce projet de budget. Au sein du ministère des finances, nous considérons que la réforme de l'Etat est, certes, un objectif en soi, mais, ce qui est important, c'est de l'appliquer au quotidien, de la faire vivre. Au-delà des grands mots et des grands principes, nous pensons que la réforme de modernisation est bien engagée et que les agents du ministère y adhèrent. Nous espérons que nos concitoyens pourront très vite en prendre la mesure, y compris dans leur vie et leurs relations quotidiennes avec nos services. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'économie, les finances et l'industrie seront mis aux voix aujourd'hui même à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : moins 16 419 950 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 66 et 67, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits affectés aux services financiers.

Articles 66 et 67



M. le président.
« Art. 66. - Les périodes de scolarité passées par les fonctionnaires civils, avant le 1er janvier 2001, en qualité d'élève fonctionnaire d'un établissement de formation avant leur nomination en qualité de fonctionnaire stagiaire sont prises en compte dans la constitution du droit et la liquidation de la pension attribuée au titre du code des pensions civiles et militaires de retraite, si elles ont donné lieu lors de leur accomplissement au prélèvement de retenues pour pension.
« Les pensions des personnels retraités placés dans la même situation, ou celles de leurs ayants cause, sont révisées, sous réserve que les intéressés en fassent la demande dans le délai d'un an à compter de la publication de la présente loi. La révision prend effet au plus tôt au 1er janvier 2001. » - (Adopté.)
« Art. 67. - Il est créé un Comité des normes de comptabilité publique, chargé d'émettre un avis préalable sur les règles applicables à la comptabilité générale de l'Etat. Ce comité consultatif est placé auprès du ministre chargé du budget. Son président est nommé par le ministre chargé du budget.
« Le Comité des normes de comptabilité publique est composé de représentants de l'administration, de professionnels comptables et de personnalités qualifiées.
« Le Comité des normes de comptabilité publique traite de toutes questions d'ordre comptable relevant de l'Etat ou de ses établissements publics de type administratif et organismes assimilés. Il a pour missions :
« - d'émettre un avis préalable sur les projets de normes de comptabilité publique qui lui sont présentés par les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ;
« - de proposer toutes mesures relatives à la présentation et à l'exploitation des comptes publics visant à donner une image sincère et fidèle de la situation patrimoniale et financière des organismes publics, à faciliter l'analyse des coûts des politiques publiques, et à assurer la cohérence avec les règles de la comptabilité nationale concernant les administrations publiques.
« Il peut être consulté sur toute autre question intéressant la comptabilité publique, en particulier sur les projets de normes élaborés par des organismes internationaux.
« Le Comité des normes de comptabilité publique élabore un rapport d'activité annuel qui est déposé sur le bureau des assemblées parlementaires. » - (Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les services financiers (et la consommation).
Mes chers collègues, en attendant l'arrivée de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

INDUSTRIE (ET POSTE)

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant l'industrie (et La Poste).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Clouet, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite commencer mon propos comme un conte de fée : « Il était une fois... » Il était une fois, dans la structure gouvernementale française, un ministère parmi les plus importants. Ce ministère a eu comme ministres des hommes remarquables et il comptait, comme débouché, pour l'un des plus grands corps de l'Etat. Ce ministère, nous le cherchons en vain de nos jours : c'était celui de l'industrie. Mais il a été progressivement phagocyté par le ministère des finances. Il n'a donc plus ni budget ni, en dépit des qualités des hommes qui en ont la charge, le même prestige qu'autrefois. De ce fait, ses services risquent de devenir moins attirants.
J'ai noté cette perte d'expertise, que vous semblez en voie de combler, si mes informations sont exactes, en créant un nombre important de postes d'ingénieurs des mines, qui devraient donc en renforcer la capacité technique. Par ailleurs, un Conseil de développement économique et de stratégie industrielle vient d'être créé - mais il n'a pas encore fait ses premières armes - auprès du secrétaire d'Etat à l'industrie et du secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises. Nous verrons ce qu'il en adviendra !
En l'absence du budget, il est difficile d'avoir un rapporteur du budget : il y a donc des chasseurs d'agrégats.
On va à la chasse aux agrégats dans le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et l'on trouve quatre agrégats spécifiques à l'industrie. Cette année, cependant, un cinquième agrégat apparaît, qui n'est pas spécifiquement industriel puisqu'il est partagé avec les PMI et l'environnement : c'est celui qui finance les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE.
Si je mets de côté ce demi-agrégat, en quelque sorte, par rapport à l'année dernière, les quatre agrégats spécifiques sont en recul d'environ 3,6 %, ce qui en soi n'est pas considérable et, de surcroît, n'a guère de signification, notamment parce que les reports de crédits sont particulièrement importants. Même dans le cas de l'Agence nationale de valorisation de la recherche, l'ANVAR, on a pu constater qu'ils représentaient, avec le produit du remboursement des avances, à peu près autant que les crédits prévus pour cette année.
On constate donc d'importants reports et - vous nous éclairerez sans doute à cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat - des transferts du budget de la défense en cours d'exercice. Ces transferts ne sont pas chiffrés, mais ils atteindraient 150 millions à 160 millions d'euros.
De surcroît, ces agrégats sont extrêmement évolutifs en cours d'année et, par rapport à l'année dernière, ils ont un périmètre « déformable ». On a vu ainsi apparaître un médiateur de La Poste : je n'ai rien contre les médiateurs ni contre La Poste, mais je me demande en quoi c'est un problème industriel.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. C'est à la mode !
M. Jean Clouet, rapporteur spécial. Ensuite, en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, des transferts de crédits ont été opérés en provenance du budget de la défense, et le secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises a reçu des crédits de l'Agence pour la création d'entreprises.
Alors, que reste-t-il dans ces agrégats ? Naturellement, le rapport écrit en donne des tableaux tout à fait complets, mais il est frappant de constater que les crédits sont consacrés plutôt à l'apurement du passé qu'à la construction du futur. En effet, la seule subvention octroyée aux Charbonnages de France atteint un quart du total des crédits, qui s'établit à 16 milliards de francs.
Par ailleurs, certains crédits ne concernent pas vraiment l'industrie : je ne comprends pas pourquoi on s'obstine à vous faire financer les transports de presse pour une somme relativement importante, puisqu'elle doit approcher les 300 millions d'euros.
En conclusion - et ce n'est pas une surprise, nous en avons déjà parlé - les crédits du secrétariat d'Etat à l'industrie m'apparaissent comme une sorte de tirelire d'appoint circonstancielle : on y importe des crédits venus d'ailleurs, par exemple de la défense, et on en exporte d'autres, de sorte qu'il est très difficile, à partir de ces quatre agrégats, de se faire une idée de la politique industrielle de la France et de la façon dont elle est financée. Je me répète d'une année sur l'autre, mais peut-être un jour aurons-nous vraiment connaissance du total de la participation publique à la politique industrielle. C'est une lacune que vous comblerez certainement, monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous en remercie.
M. le président. La parole est à M. Grignon, rapporteur pour avis.
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour l'industrie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, malgré l'optimisme de M. le secrétaire d'Etat, les crédits demandés au titre de l'industrie dans le projet de loi de finances pour 2002, qui s'établissent à 1 958 millions d'euros, sont en baisse de 4,9 %.
Comme l'an dernier, on nous annonce des reports en cours d'exercice pour préserver les capacités d'engagement de l'Etat. Cette argumentation me laisse personnellement sceptique, la présence de ces reports montrant davantage l'incapacité de l'Etat à mettre en oeuvre des politiques efficaces pour consommer les crédits budgétaires que la conduite d'une véritable stratégie industrielle. Pourtant, les sombres perspectives pour 2002 s'agissant de l'industrie manufacturière incitent moins que jamais à baisser les bras.
J'aimerais insister sur l'importance des masses budgétaires dont nous discutons. Parmi celles-ci figurent les crédits « offensifs » de soutien à l'innovation, comme ceux de l'ANVAR, qui voit sa dotation budgétaire stagner ; ou encore les crédits « défensifs » de réindustrialisation, particulièrement vitaux pour les territoires actuellement touchés par les restructurations industrielles : je pense non seulement au cas Moulinex, aux salariés et au département concernés, auxquels je m'associe, mais aussi à l'hémorragie silencieuse de certains secteurs industriels comme le textile, l'habillement et la chaussure.
Avec la mise en oeuvre des accords de Marrakech et l'accord envisagé avec le Pakistan, le phénomène de délocalisation observé dans ce secteur risque de s'amplifier. La commission des affaires économiques s'inquiète d'ailleurs vivement de la perte d'attractivité économique du territoire français, constat désormais partagé dans tous les rangs, des rapports du Sénat au rapport Charzat.
Dans la construction navale, fragilisée par le dumping sud coréen, quelle position défendra le Gouvernement lors du prochain Conseil « industrie » sur le mécanisme défensif temporaire proposé pour la construction navale française et européenne ?
Dans le secteur automobile, à l'échéance de septembre 2002, le système actuel de distribution sera réformé, le règlement européen arrivant à échéance. La Commission européenne entend distendre les liens entre la vente et l'après-vente automobile, car elle estime qu'il en résulte des entraves concurrentielles sur le marché automobile européen. La France est particulièrement concernée, car, sans parler de la construction automobile, la distribution automobile y représente 4 200 concessionnaires et 15 000 agents, soit 230 000 emplois, largement répartis sur le territoire. Le Gouvernement entend-il défendre à Bruxelles le lien entre la vente et l'après-vente automobile ?
Pour conclure, permettez-moi d'évoquer la mise en place du brevet communautaire et la réforme du brevet européen.
La France souffre d'un déficit en matière de brevets, qui est désormais reconnu. La commission des affaires économiques s'est prononcée pour la réforme linguistique du brevet européen et pour la création d'un brevet communautaire. Ces réformes n'auront cependant d'effet que si elles sont accompagnées d'un vaste plan national de sensibilisation des chercheurs, des industriels et des juridictions à l'importance de la propriété industrielle.
Au-delà de la mise en musique technique, qui est du ressort de l'Institut national de la propriété industrielle, l'INPI, de l'ensemble de ces mesures, c'est sur l'élan politique de ce « plan brevets » - un plan que nous appelons de nos voeux - que j'aimerais vous entendre, monsieur le secrétaire d'Etat. Quels sont vos projets et quelle est votre détermination ?
Peu convaincue par ce budget, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'industrie inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Besson, rapporteur pour avis.
M. Jean Besson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour l'énergie. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la commission des affaires économiques du Sénat s'est toujours montrée soucieuse d'une ouverture raisonnée des marchés de l'énergie, dans l'intérêt des consommateurs. C'est compte tenu de cette orientation générale que j'ai, en son nom, examiné le budget qui nous est soumis.
A titre personnel, vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, je l'approuve sans réserve.
Dans cette courte intervention, je souhaite vous faire part de quelques-unes des préoccupations de notre commission qui concernent les principales sources d'énergie consommées par les Français : l'électricité, le gaz, le pétrole et les énergies renouvelables.
S'agissant du secteur électrique, notre attention s'est portée cette année sur la nécessité de voir fonctionner rapidement le fonds du service public de la production d'électricité. Ce fonds doit servir à compenser les surcoûts qui résultent, pour l'opérateur historique, de l'obligation d'achat prévue par la loi de février 2000. Cette question est d'autant plus importante qu'un récent décret a fixé un prix de rachat très favorable pour l'électricité d'origine éolienne.
Notre commission souhaite que ce fonds fonctionne dès que possible. J'ai relevé avec intérêt que, devant la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, vous aviez, monsieur le secrétaire d'Etat, évoqué la possibilité de faire figurer sur les factures adressées aux consommateurs le coût exact qui leur est imputé au titre du développement des énergies renouvelables. Cette innovation pourrait-elle entrer en vigueur prochainement ?
Un autre grand chantier est également ouvert dans le secteur électrique, celui de la « mise à plat » des relations entre les collectivités concédantes et le réseau de transport d'électricité. Comme vous le savez, les autorités concédantes ont quelque peine à obtenir l'inventaire des réseaux qui leur appartiennent puisque Electricité de France considérait jusqu'à récemment encore que les lignes concédées étaient sa propriété. Que comptez-vous faire, monsieur le secrétaire d'Etat, pour soutenir les légitimes revendications des communes et des collectivités concédantes ?
Dans le secteur pétrolier, c'est principalement la desserte de notre pays en carburants qui nous préoccupe. Nous observons, en effet, une diminution du nombre de stations-service. Je vous le demande solennellement, au nom de notre commission, les fonds dont dispose le comité professionnel de la distribution des carburants sont-ils suffisants pour enrayer une évolution que d'aucuns considèrent comme inéluctable ?
Permettez-moi, enfin, d'évoquer le secteur des énergies renouvelables.
Notre attention a été appelée par le rapport d'activité de la Commission de régulation de l'électricité, la CRE, sur l'intérêt du système dit des « certificats verts ». Ces certificats permettent de payer plus cher de l'électricité produite à partir d'énergies renouvelables. Envisagez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, de recourir en France à ce système plus transparent que les mécanismes en vigueur ?
Nous souhaitons également que les pouvoirs publics prennent en compte la nécessité de combler le retard qui commence à se creuser, en France et à l'étranger, dans le secteur de la pile à combustible. L'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a présenté récemment, sur ce point, des conclusions fort éclairantes que nous nous devions d'évoquer à l'occasion de la discussion de ce budget.
Enfin, s'agissant des éoliennes, je tiens à vous faire part d'interrogations exprimées par plusieurs de nos collègues. La construction de fermes éoliennes s'accélère, souvent sans être souhaitée par la population, qui trouve à redire lorsqu'elle se trouve dans leur voisinage. Ces machines seraient bruyantes et dangereuses pour les oiseaux. Ne conviendrait-il pas, en conséquence, de revoir les conditions dans lesquelles il est loisible de les construire, le cas échéant après une enquête publique ?
En conclusion, permettez-moi de préciser, monsieur le secrétaire d'Etat, que, contrairement à la proposition de son rapporteur pour avis, la majorité de la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'énergie inscrits dans le projet de loi de finances pour 2002. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan pour les technologies de l'information et La Poste. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits consacrés à La Poste et aux technologies de l'information s'élèvent à 438 millions d'euros, en hausse de 2,2 %, auxquels il faut ajouter 4 milliards d'euros de prise en charge - en totalité pour France Télécom et en partie pour La Poste - des retraites. On y cherche en vain les 500 millions de francs que l'Etat, lors du comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire qui s'est tenu à Limoges, le 9 juillet dernier, a annoncé vouloir affecter à la couverture du territoire en téléphonie mobile !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Oh !
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Les crédits demandés pour l'Autorité de régulation des télécommunications, l'ART ; soit 16 millions d'euros, classent la France au dernier rang européen. Il en coûte, en France, pour la régulation des télécommunications, 1,75 franc par an et par habitant, contre 2,25 francs en Espagne, 2,95 francs en Italie, et 3,51 francs en Grande-Bretagne, soit deux fois plus.
Je souligne, au passage, monsieur le secrétaire d'Etat, que la question de la retraite des membres du collège de l'ART, maintes fois soulevée auprès de la direction du budget, n'est toujours pas réglée.
Or le besoin de régulation est croissant, qu'il s'agisse du « dégroupage » de la boucle locale, confiné aux grandes villes faute de tarifs attractifs malgré de nombreux effets de manche, ou des forfaits d'accès illimité à Internet, pour ne citer que les deux cas les plus voyants.
Dans le secteur postal, attendons-nous, en 2001 et en 2002, à une forte dégradation des résultats de l'opérateur, à l'image du véritable effondrement du résultat d'exploitation - moins 29 % - et du résultat net - moins 38 % - en 2000. Quelle est la cause de ces résultats ? C'est le coût du passage aux 35 heures !
Il faut aussi noter, en prime, des indicateurs de qualité de distribution du courrier dégradés : 73 % seulement à J + 1, contre un objectif de 80 %.
Quels artifices, quels « événements exceptionnels » allez-vous trouver, en 2001 et en 2002, pour maquiller la déconfiture des comptes postaux ? A coup sûr, vous allez mettre en avant la vente de l'immobilier postal, sur l'air de Tout va très bien, madame la marquise, avec l'objectif d'atteindre les 180 millions d'euros de résultats déclenchant le mécanisme d'intéressement signé avec les personnels. Belle avancée sociale, mais gare aux risques de conflit si le mécanisme venait à s'enrayer !

Sur le même air du « tout va très bien », l'ouverture à la concurrence, que vous auriez si bien négociée à Bruxelles, réduira, au-delà de 2006, le monopole au courrier de 50 grammes, une « étape décisive » de libéralisation étant prévue en 2009, ce qui signifie, pour beaucoup d'Etats membres, une ouverture totale à la concurrence. Il est vrai que, d'ici là, les échéances seront passées... A résister trop obstinément, la France a dû lâcher prise plus qu'il n'aurait été souhaitable. Que cela serve de leçon pour le gaz !
Ma question est simple : qu'avez-vous fait et que comptez-vous faire pour préparer La Poste ?
Je ne cite plus que pour le compte rendu officiel de nos travaux la loi postale « virtuelle », à la discussion de laquelle vous vous étiez, un temps, engagé dans cet hémicycle : c'était en février 1999.
Quant à nous, nous avons pris nos responsabilités et fait nos propres propositions dans plusieurs rapports et propositions de loi. Je rappellerai, notamment, le rapport du sénateur Gérard Larcher, que vous aviez taxé de vouloir privatiser La Poste, monsieur le secrétaire d'Etat, alors qu'il n'en est pas question, en tout cas dans ce rapport.
L'immobilisme condamne La Poste. Les charges de retraites sont une véritable bombe à retardement puisque, à compter de 2010, le rapport retraités sur actifs égalera puis dépassera 1 ; le tabou de la sociétisation et de la filialisation des services financiers condamne l'opérateur à une solitude fatale ; l'aménagement postal du territoire fait peser sur lui et, de plus et plus, sur les communes, 3,5 milliards de francs de surcoût par an, alors que le besoin d'adaptation du réseau est patent : 2 000 bureaux ont moins d'une heure d'activité par jour, alors que les zones urbaines et périurbaines sont mal couvertes par le réseau postal.
Pourquoi refuser obstinément la fixation du prix du timbre à 50 centimes d'euro ? Ce serait une mesure de simplification pour les consommateurs et une bouffée d'oxygène pour La Poste qui en a le plus grand besoin ? Il va de soi que la marge de manoeuvre dégagée devrait, à mon sens, être affectée au financement de l'aménagement postal du territoire.
Quant au secteur des technologies de l'information, il est affecté par l'éclatement de la « bulle Internet ».
Les conditions d'introduction de l'UMTS en Europe ont une lourde responsabilité dans ce marasme. Je ne reviendrai pas sur le prix des licences en France, que nous avons modifié avant hier, dans cet hémicycle, dans une optique d'aménagement du territoire et de solidarité.
L'expérience de la téléphonie mobile de deuxième génération nous montre que des zones d'ombre subsistent, même à maturité du marché, puisque, aujourd'hui, ce sont au moins 1 500 communes, soit 8,2 % du territoire, qui ne sont pas couvertes. Je ne parle pas en termes de population, car nous ne pouvons mettre en parallèle des populations sédentaires et une téléphonie mobile.
Les mesures réelles, réalisées par l'ART, font apparaître, d'ailleurs, un taux inférieur : 20 % environ du territoire ne seraients pas couverts.
Vous avez pris la liberté d'annoncer, le 9 juillet dernier, 500 millions de francs de financement des collectivités locales pour parfaire cette couverture. C'est de la péréquation inversée : les collectivités les plus riches ont eu le GSM immédiatement, et sans débourser un sou ; les départements ruraux devront attendre, et payer !
Vous avez, depuis, précisé, monsieur le secrétaire d'Etat, que les opérateurs s'étaient engagés à payer plus, et à alléger d'autant la facture pour les collectivités. Oui, mais... seuls deux opérateurs sur trois auraient, selon nos informations, pris de tels engagements, et encore s'appliquent-ils, selon eux, non pas exclusivement à la couverture des zones d'ombre, mais bien à l'amélioration du réseau en général. Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, qui a raison, qui a tort ? Où se situe la vérité ? Que contiennent ces fameuses lettres des opérateurs, dont le Gouvernement semble si friand ces derniers temps ?
Vous comprendrez, dans ces conditions, que la commission des affaires économiques et du Plan ait émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de La Poste et des technologies de l'information. (M. le rapporteur spécial applaudit.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 25 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 13 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 6 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 10 minutes.
Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'évoquerai moins les chiffres de ce budget que des préoccupations concernant des aspects de la tutelle du secrétaire d'Etat.
Tout d'abord, le potentiel des écoles qui dépendent de votre département ministériel, monsieur le secrétaire d'Etat, est-il suffisamment connu et reconnu ? Il s'agit, en effet, des écoles des Télécom, réunies dans le cadre du groupe des écoles des télécommunications, le GET, et des écoles des Mines, qui constituent ensemble, probablement, le fleuron de l'enseignement supérieur français et dont la capacité et les qualités sont universellement connues, tant du point de vue pédagogique que du point de vue de la recherche. Leur compétence, dans ce domaine, est probablement plus large que leur nom ne le laisse deviner puisqu'elle s'étend, notamment, à toutes les nouvelles technologies de l'information et de la communication et à des domaines aussi prioritaires que celui des matériaux. Même si cela paraît un petit peu « rétro » de le souligner, ces matériaux sont indispensables : on ne fait rien sans matériaux, en particulier les ordinateurs, les puces et autres.
On peut citer également le domaine de l'environnement, notamment industriel.
Pourtant, et malgré une stratégie de création d'entreprises et de développement de l'innovation largement reconnue, le taux d'augmentation de leur budget est nettement inférieur, d'après ce que nous en savons, à celui, par exemple, qui est consacré, dans le budget pour 2002, à l'enseignement supérieur universitaire au titre de la recherche : le taux d'augmentation serait, là, de l'ordre de 10 %. Il y a là une anomalie.
Peut-être, monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait-on compenser d'une certaine façon cette anomalie en ménageant un lien plus fort, avec, par exemple, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME : ses crédits ont été fortement augmentés, mais les rapporteurs, dans leurs rapports écrits, font part d'une incertitude quant à la capacité de l'Agence à utiliser valablement cette augmentation de crédits. Il y a là une synergie possible, qui pourrait, de surcroît, nous garantir la qualité de l'emploi de ces moyens.
Pour ma part, je me félicite de constater que des organismes oeuvrant dans des domaines aussi essentiels que le développement durable, question qui nous concerne au premier chef, ont les moyens de leur action.
Ma deuxième remarque porte sur la stagnation des crédits de la recherche industrielle et de l'innovation. De ce point de vue, l'évolution du chapitre 66-01 est inquiétante, car ses crédits, qui passent de 279 millions à 282 millions de francs, enregistrent une augmentation bien moindre que l'inflation. C'est d'autant plus préoccupant que l'innovation reste la pierre angulaire de touche du processus qui pourra nous faire rebondir vers une dynamique industrielle, donc vers des créations d'emplois.
M. Jean Clouet, rapporteur spécial. Nous en avons vraiment besoin !
M. Pierre Laffitte. Or celle-ci est actuellement fort menacée, cela a été rappelé tout à l'heure, par l'éclatement de la « bulle Internet » et par la timidité d'un certain nombre de fonds de capital-risque.
L'innovation en France a donc besoin d'être soutenue. A cet égard, monsieur le secrétaire d'Etat, je m'inquiète de constater que les crédits de l'ANVAR, eux aussi, restent stables.
Or, grâce notamment à la loi sur l'innovation et la recherche, pour laquelle le Sénat a beaucoup fait - nous avions même arrêté la pendule en fin de session pour pouvoir l'adopter conforme, malgré nos réserves sur des points comme le manque de percée dans le domaine des stock-options - nous assistons actuellement, Dieu merci ! à un indiscutable changement de climat, et c'est très important !
Nous observons désormais, dans les milieux de la recherche et de l'innovation, un mouvement assez fort. Les jeunes générations manifestent la volonté de créer des entreprises et, par conséquent, ont le besoin d'être appuyées, y compris du point de vue de la recherche industrielle. C'est là une préoccupation majeure ! Or l'ANVAR - entreprise publique que la plupart des pays européens nous envient et commencent à imiter - est fondamentale dans le système mis en place.
C'est donc avec plaisir que je constate que vous êtes favorable à la création de bons de souscription en actions de l'ANVAR, qui permettront à cet organisme d'assurer une forme de « capital-amorçage ». Et c'est bien ce qui manque le plus cruellement aux jeunes entreprises. Comme l'ANVAR a des compétences d'ordre beaucoup plus scientifique, technique et industriel que financier, cette forme de structure financière d'appui aux entreprises nous engage, j'en suis convaincu, dans la bonne voie.
Cependant, le budget reste en stagnation. Je sais bien que des avances remboursables arrivent à échéance, et c'est tant mieux, mais il me paraît positif que celles-ci puissent également devenir des sources de profits considérables pour l'Agence : cela incitera ses cadres à se montrer plus incisifs, et probablement à prendre davantage de risques lorsque se dessinera la perspective de recettes élevées. C'est donc une très bonne formule.
J'en viens à la gestion des licences UMTS. Je tiens tout d'abord à féliciter le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie d'avoir largement étalé dans le temps les prélèvements en matière d'UMTS, contre lesquels, à cette même tribune, je m'élevais voilà exactement un an. Il a eu raison de faire marche arrière - perseverare diabolicum, même si errare humanum est - et le Sénat, notamment par la voix de M. Hérisson, est d'accord sur ce point.
Pourtant, il faudrait aller plus loin encore dans la gestion des fréquences. J'avais souhaité que nous ayons une vision globale dans ce domaine et que cette question fasse l'objet d'un débat.
Je n'ignore pas que nous ferons pousser des cris d'orfraie à certains si nous leur expliquons que, pour utiliser la télévision numérique hertzienne terrestre, il faudra payer les fréquences, surtout si l'on ajoute que les prix varieront selon qu'il s'agira de consacrer ces fréquences aux télécommunications ou à de nouvelles chaînes destinées éventuellement à faire s'exprimer davantage de baladins. Il ne me paraîtrait pas normal, en tout cas, de ne pas demander un paiement ; ce point mérite réflexion.
Dans cette perspective, j'organise à Sophia-Antipolis, le 17 décembre prochain, une grande réunion internationale sur le spectre. Il sera bon que l'ensemble des régulateurs réfléchissent, à l'échelon européen, aux solutions que l'on peut apporter à ce problème des fréquences.
Je conclus, parce que mon temps est limité, mais je voudrais tout de même insister sur le fait que les points que j'ai évoqués, même s'ils sont relativement mineurs en termes budgétaires, ne sont pas négligeables. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)
M. le président. La parole est à M. Marest.
M. Max Marest. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, quelle est notre ambition industrielle ? Telle est la question qui se pose tout naturellement à travers le projet de loi de finances pour 2002.
L'industrie est l'un des piliers majeurs de notre économie. En effet, ce secteur représente une part importante du produit intérieur et, en termes d'emplois directs, occupe 18 % de la population active.
Le budget que vous nous présentez aujourd'hui, en baisse pour la première fois depuis quatre ans, manque d'ambition et reflète le caractère essentiellement défensif de la politique industrielle française, alors même que notre industrie est désormais entrée dans une zone d'incertitude liée au ralentissement économique.
Ce ralentissement a été illustré récemment par les difficultés d'entreprises appartenant à de grands groupes, tels Danone et Bata, mais aussi de bien d'autres entreprises plus modestes ; il est lié au prix de la main-d'oeuvre non qualifiée.
Sur ce point précis, le commissaire européen chargé des affaires économiques reconnaît que la période actuelle « est l'une des plus incertaines que l'on ait connue au cours des trente dernières années ». Or la France affronte le ralentissement économique sans aucune réserve ni aucun degré de liberté.
Pour 2002, le Gouvernement a retenu trois priorités pour le secteur de l'industrie : la préparation de l'avenir par le soutien des programmes de recherche ; la modernisation dans l'accompagnement des mutations industrielles et de la formation des PMI ; la mise en oeuvre d'une politique énergétique indépendante, équilibrée et transparente.
Mais ces priorités affichées, louables sur le fond, sont dotées de moyens budgétaires en diminution. On notera par exemple que, en matière de recherche et d'innovation, véritables moteurs de la compétitivité de notre industrie, l'effort consenti est très insuffisant. En effet, il semble que, au motif d'une sous-utilisation des crédits de 2001 - due à la non-utilisation des crédits destinés à l'innovation et au développement industriel local, non-utilisation dont il serait intéressant de connaître les raisons - la dotation en crédits de paiement diminue de 9,68 %.
Par ailleurs, au-delà de l'effort réel en faveur de la formation des nouveaux ingénieurs dont la France manque cruellement - effort que nous ne pouvons que saluer, monsieur le secrétaire d'Etat -, les crédits de l'industrie semblent plus généreusement tournés vers l'accompagnement des conséquences des mutations industrielles.
Plus particulièrement, dans le domaine énergétique, malgré la priorité affichée, les objectifs du Gouvernement sont de moins en moins lisibles : alors qu'il est primordial de mener et de développer une politique cohérente dans ce domaine, l'attentisme du Gouvernement apparaît de plus en plus irresponsable.
En effet, dans le contexte actuel d'accroissement des coûts énergétiques, la politique énergétique de la France doit permettre aux entreprises et aux citoyens d'accéder à l'énergie la plus sûre et la plus compétitive possible.
Cet objectif peut être en partie atteint - nous le savons - grâce au recours à l'énergie nucléaire, véritable pilier de l'indépendance énergétique de la France, qui respecte les impératifs de l'écologie en permettant notamment de réduire chaque année, en Europe, les émissions de gaz à effet de serre de quelque 700 millions de tonnes.
Dans ce contexte, l'attentisme du Gouvernement, accentué par les réticences affichées au sein de sa majorité sur ce dossier, est plus que contestable. En effet, aucune action n'a été menée pour exporter notre savoir-faire dans ce domaine, et aucune mesure n'a été prise pour le lancement du prototype de l'EPR - European Pressurized Reactor -, plus sûr et produisant moins de déchets, et ce malgré les perspectives favorables en Europe du Nord ou en Asie.
De plus, les ambiguïtés, les contradictions du Gouvernement fragilisent la position française sur les questions énergétiques au sein de l'Union européenne, notamment en raison du retard pris par notre pays pour libéraliser le marché du gaz.
Or la France ne peut continuer à faire cavalier seul dans un marché mondial énergétique en pleine ébullition, marqué par de fortes évolutions structurelles et commerciales chez les acteurs du secteur, lesquelles rendent indispensables les fusions-acquisitions et, éventuellement, les extensions d'activités.
Vous me permettrez également de dire quelques mots sur l'industrie textile, qu'a évoquée M. Grignon tout à l'heure et qui est vitale en termes d'emplois et particulièrement fragilisée par la concurrence de pays bénéficiant d'un moindre coût du travail. En effet, un grand nombre d'entreprises de la filière ont disparu du territoire français depuis 1998, et ce phénomène de délocalisation, dénoncé par le Sénat depuis plusieurs années, s'est poursuivi ces derniers mois par le recours à une production située au Maghreb, en Europe de l'Est et en Turquie.
Ces difficultés sont aujourd'hui accentuées par les évolutions parfois inquiétantes de la conjoncture internationale. Ainsi, la conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce, qui s'est déroulée à Doha du 9 au 13 novembre, a vu la conclusion d'un accord textile, certes spécifique, avec le Pakistan - accord qui s'inscrit dans le contexte géopolitique actuel - et l'adhésion formelle de la Chine à l'OMC. Ces deux éléments vont renforcer la concurrence internationale de manière significative.
Face à de telles évolutions, il est primordial que notre pays rétablisse la compétitivité et l'attractivité du site « France ». En effet, depuis ces deux dernières années, certaines analyses ont pu montrer une dégradation de la compétitivité relative du territoire français pour l'accueil des investissements, notamment industriels.
Cette dégradation de l'attractivité du territoire français a également été mise en lumière par un sondage effectué l'année dernière pour le MEDEF auprès d'un échantillon de 350 dirigeants de filiales françaises de groupes internationaux, représentant tous les types d'entreprises.
Les atouts de la France tiennent aux caractéristiques structurelles du marché français. Mais, en termes d'image, la France recueille un solde d'opinions négatives plus important que celui des opinions positives, contrairement à ses voisins européens. Ainsi, les principaux handicaps identifiés sont le poids des prélèvements obligatoires, les rigidités sociales et les 35 heures, cités par plus de 85 % des personnes interrogées.
Cette étude montre que les deux tiers des chefs d'entreprise ne choisiraient pas la France si leur entreprise avait à faire aujourd'hui le choix d'une implantation en Europe, et que 44 % des personnes interrogées envisagent une délocalisation d'une partie des activités françaises de leur groupe.
Cette analyse a été également reprise dans de nombreux travaux du Sénat, non seulement dans le rapport sur « la fuite des cerveaux, mythe ou réalité » ou dans le rapport d'information sur la mondialisation, mais aussi et surtout dans le rapport sur l'attractivité du territoire français de Michel Charzat,...
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Excellent rapport !
M. Max Marest. ... parlementaire socialiste, qui liste les faiblesses de la France, en particulier en matière d'attractivité économique, et propose quelques solutions pour y remédier, solutions auxquelles nous adhérons.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Moi aussi ! Je suis d'ailleurs le seul membre du Gouvernement à y adhérer !
M. Max Marest. Hélas, monsieur le secrétaire d'Etat !
Que chacun d'entre nous se reporte ne serait-ce qu'au résumé de ce rapport !
Tous ces travaux ont permis d'élaborer une multitude de propositions, dont la plupart sont restées lettre morte.
Force est de constater qu'il est aujourd'hui devenu essentiel de tenir compte de toutes ces évolutions et de les anticiper en améliorant notre environnement juridique, fiscal et économique.
En effet, aucune mesure fiscale n'est prise pour renforcer la compétitivité de la France. Pourtant, le ministre des finances lui-même a rappelé ces derniers temps, à juste titre, que « ce sont les entreprises qui créent les emplois et qu'il faut donc, dans notre politique générale, les inciter et non les dissuader ».
Le projet de budget de votre secrétariat d'Etat ne retranscrit pas les recommandations préconisées et dissuade en quelque sorte les entreprises, que ce soient les grands groupes ou les PMI.
Les dépenses publiques s'accélèrent et le déficit s'accroît. Les dernières informations diffusées ce matin par la presse et la radio le confirment, le chômage progresse. Les moteurs de la croissance sont éteints et le recul des investissements est patent.
En conclusion, votre ambition pour l'industrie nous paraît plus que modeste : vous n'incitez pas, monsieur le secrétaire d'Etat.
Quelle ambition industrielle pour la France ? « D'une part, consolider l'enracinement national de nos entreprises. D'autre part, renforcer la vocation mondiale de la France ; cela signifie en faire un lieu d'accueil attractif pour les investisseurs étrangers à la recherche d'une implantation durable, créatrice d'emplois et de richesses. » Je viens de citer M. Charzat, monsieur le secrétaire d'Etat : c'est lui qui, dans son rapport, écrit ces lignes sous le titre « Améliorer notre image et la promouvoir ».
Vous n'incitez pas : c'est une des raisons essentielles pour lesquelles le groupe du RPR ne votera pas ce budget. (M. le rapporteur spécial et M. Chérioux applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget de l'industrie pour 2002, hors La Poste et les télécommunications, enregistre une baisse de 3,6 % par rapport à celui de 2001. Ce repli accuse le caractère restrictif des crédits consacrés à un secteur d'activités qui représente, pourtant, 17 % de la population active et 21 % de la valeur ajoutée brute.
Cette faiblesse des moyens, qui vous contraint, monsieur le secrétaire d'Etat, à vous limiter à quelques priorités, réduit le champ d'intervention de la politique de l'Etat.
Soulignons à cet égard la hausse de 3,7 % des autorisations de programme en faveur de la reconversion des bassins miniers et sidérurgiques à travers le fonds d'industrialisation des bassins miniers et le comité de pilotage de l'industrie, qui favorisent l'implantation de nouvelles industries, la création de centres de transferts technologiques et la promotion de programmes de formation dans les zones fortement sinistrées.
Toutefois, on ne peut que regretter la diminution du soutien public en direction de la construction navale, conséquence de l'interdiction des aides à la commande à l'intérieur de l'Union européenne.
En matière de construction navale, la France et d'autres pays européens disposent de capacités de production importantes et d'une main-d'oeuvre qualifiée, capable de concevoir, comme sur les chantiers de Saint-Nazaire, des pétroliers et des chimiquiers de type E3, c'est-à-dire économiques, écologiques et européens.
Ces pays sont soumis à une concurrence déloyale des Etats-Unis, du Japon, de la Corée, voire de la Norvège, qui continuent à financer directement leurs propres chantiers navals et, ainsi, à soutenir l'emploi.
Seule une véritable politique industrielle menée en collaboration avec d'autres pays européens permettrait de faire face à cette concurrence. C'est d'autant plus nécessaire qu'il est urgent de renouveler une partie de la flotte afin de sécuriser nos océans et d'éviter de nouvelles catastrophes maritimes ainsi que de nouveaux drames écologiques, comme ceux qui ont été causés par le naufrage de l' Erika .
Au rang des priorités - et nous nous en félicitons -, figurent la formation ainsi que la recherche industrielle, l'innovation et les nouvelles technologies de communication. Ce sont autant d'actions de nature à améliorer la compétitivité des entreprises et, indirectement, à favoriser l'emploi.
Il n'en demeure pas moins que ces mesures principalement incitatives ne peuvent se substituer à une véritable politique industrielle capable, par les moyens de régulation appropriés, de conforter notre industrie. Le secteur de l'énergie, comme celui de La Poste et des télécommunications, est révélateur d'une orientation politique qui, loin d'être contrainte par le mouvement actuel de libéralisation des économies, semble, au contraire, en épouser la logique.
La loi de modernisation et de développement du service public de l'électricité du 10 février 2000 ne laisse pas au seul marché le soin de réguler un secteur aussi stratégique, mais elle n'est pas respectée. Elle nous donne pourtant, dans un contexte dominé par l'idéologie libérale, quelques moyens permettant, aussi limités soient-ils, de préserver un service public de l'électricité. Nous attendons ainsi toujours la mise en place d'une tarification spéciale à destination des foyers les plus modestes.
L'échec californien de la libéralisation du secteur de l'électricité devrait pourtant nous inciter à plus de prudence et à reconnaître la nécessité de préserver le statut public d'EDF.
Nous ne nions pas que, dans le contexte actuel, le développement international d'EDF soit une nécessité. Encore faut-il que l'ouverture du marché de l'électricité ne débouche pas sur une impitoyable guerre des prix ! Or, malgré les baisses de tarifs qu'elle leur a consenties, EDF a encore perdu de nombreux gros clients industriels cette année.
Les conséquences en termes de diminution des recettes de cette situation ne doivent pas être négligées : entrave à la programmation des investissements et accroissement de la facture d'électricité des petits consommateurs.
Ces remarques resteraient également pertinentes appliquées à d'autres secteurs comme celui du gaz ou de La Poste et des télécommunications. Je n'ai malheureusement pas le temps de m'y attarder aujourd'hui.
Nous attendons toujours que soit entrepris le programme de construction de l'EPR, le réacteur de nouvelle génération, qui conforterait notre indépendance énergétique. Ce serait là une mesure forte et concrète !
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans la mesure où la conjoncture économique donne des signes d'essoufflement inquiétant, où les plans sociaux se multiplient, où l'emploi industriel se détériore, où les industriels révisent à la baisse leurs investissements pour 2002, nous aurions besoin d'un réel volontarisme politique s'appuyant sur un budget suffisant pour soutenir la croissance et développer l'emploi. Le présent projet de budget n'est pas suffisant, et le groupe communiste républicain et citoyen s'abstiendra donc. (Mme Terrade applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous abordons l'examen du dernier projet de budget de l'industrie, de La Poste et des télécommunications de la légistature. C'est la raison pour laquelle il ne m'apparaît pas pertinent de nous limiter à discuter des crédits qui leurs sont affectés pour l'exercice 2002.
D'une part, ceux-ci témoignent, en réalité, du maintien des capacités du secrétariat d'Etat à poursuivre les orientations prioritaires d'une politique industrielle ambitieuse pour la France ; d'autre part, à l'heure du bilan, il convient de mettre toute évaluation en perspective sur l'ensemble des cinq années de ce gouvernement.
A ce titre, monsieur le secrétaire d'Etat, je l'affirme, votre bilan est bon.
De 1997 à 2002, les crédits consacrés à l'industrie ont augmenté de plus de 3,5 % sur la période quand, à périmètre comparable, ils diminuaient de plus de 5 % lors de la législature précédente. D'ailleurs, le résultat est là : la courbe de l'emploi industriel, après plusieurs années de déstructuration, s'est inversée à partir de 1999. Elle demeure positive avec, par exemple, un solde de plus de 70 000 emplois salariés en 2000, hors BTP et agroalimentaire, ce qui est sans précédent depuis 1974.
Pour autant, nous déplorons encore récurremment de grandes restructurations industrielles. Leur traitement social autant qu'économique doit retenir toute notre attention.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quatre axes ont constitué l'armature de votre politique : l'économie et l'innovation, qui orientent résolument l'industrie française vers l'avenir et la mettent en situation de relever les défis de la modernité et d'une compétition internationale toujours plus vive ; un Etat plus proche, comme en témoignent les contrats de plan Etat-régions ; une énergie moins chère et plus diversifiée ; des services publics pour tous, et je tiens à dire que vous avez assuré avec énergie leur défense et leur adaptation au niveau européen, dans le sens d'un véritable ressourcement des principes qui les animent
Nous notons avec satisfaction que votre projet de budget pour 2002 comporte 33 millions d'euros de mesures nouvelles en dotations ordinaires et crédits de paiement, correspondant à vos quatre priorités pour cette année : la formation, l'innovation, la restructuration et la sécurité.
La croissance et l'emploi sont les priorités affirmées du gouvernement de Lionel Jospin depuis 1997.
A ce titre, l'innovation a constitué et constitue encore le fer de lance de votre politique industrielle. Vous parlez à cet égard, avec raison, de « bataille de l'innovation ». Seule l'innovation, en effet, permet de créer l'environnement le plus favorable à l'initiative, à l'investissement, au développement des compétences et des qualifications de ceux et de celles qui entreprennent et réussissent, de ceux et de celles qui contribuent à l'avènement d'une « société de l'intelligence ».
Nous ne pouvons qu'approuver une telle politique, tournée vers l'avenir et qui intègre une réflexion stratégique globale, notamment sur les technologies clés de demain, en se préoccupant de leur transposition aux niveaux régional et microéconomique.
Dans le projet de budget pour 2002, je me félicite donc que le soutien à l'innovation soit maintenu, particulièrement en ce qui concerne les PME et les PMI. Les crédits publics représentent 12 % de l'effort d'innovation de notre pays et se situent largement en « amont », c'est-à-dire là où les financements externes sont plus difficilement mobilisables. L'ANVAR, dont on parle beaucoup ce matin, disposera à cet égard d'une capacité d'engagement accrue.
Peut-être serait-il néanmoins opportun de reprendre la réflexion sur la possibilité d'instituer un crédit d'impôt innovation, sur le modèle du crédit d'impôt recherche, qui existe depuis 1982 et dont nous connaissons le succès.
M. Pierre Laffitte. Tout à fait !
M. Pierre-Yvon Trémel. La formation des ingénieurs, qui est une autre de vos priorités, participe naturellement du soutien à l'innovation. La hausse de 12,5 % des subventions à Supélec, celle de 13 % au groupement des écoles de télécommunications comme l'augmentation des bourses dans les écoles des mines vont dans le bon sens.
Votre politique énergétique, monsieur le secrétaire d'Etat, pourrait être qualifiée de « complète ». Elle est basée sur la diversification et la maîtrise de l'énergie, ce qui constitue une stratégie sage, même si les cours mondiaux ont retrouvé un niveau supportable. Le nucléaire conserve une place importante dans notre production électrique.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Tant mieux !
M. Pierre-Yvon Trémel. A ce titre, nous nous devons de saluer la restructuration intervenue avec la naissance, cette année, d'un pôle français à dimension mondiale, AREVA, regroupant Framatome, la Gogema et CEA-Industrie.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Pierre-Yvon Trémel. Il n'en demeure pas moins que l'accent doit être mis sur les énergies renouvelables afin d'atteindre l'objectif de 12 % de la consommation énergétique totale de l'Union européenne. Nous n'en sommes encore qu'à 2 % en France !
Je veux soulever deux questions relatives au gaz, et tout d'abord celle de la desserte gazière.
L'amélioration de la desserte gazière est un enjeu d'aménagement du territoire, notamment pour les communes rurales. La loi du 2 juillet 1998 a institué un plan triennal visant à parfaire le raccordement en gaz naturel des communes non encore desservies et qui en font la demande.
Lors de l'examen de ce texte, notre groupe avait fait adopter un amendement invitant le Gouvernement à remettre chaque année au Parlement un rapport sur l'état de la desserte du territoire en gaz. A défaut de rapport, pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous dresser un premier bilan sur ce point ?
Le Gouvernement a préparé un projet de loi relatif à la modernisation du service public du gaz naturel dont l'objectif est de transposer la directive gazière. Ce texte traduit bien l'ambition de conjuguer une ouverture maîtrisée à la concurrence et un service public performant et de qualité. Toutefois, le Gouvernement a choisi d'introduire d'ores et déjà certaines dispositions de ce texte concernant la cession du réseau de transport dans le projet de loi de finances rectificative. Pourriez-vous nous indiquer l'architecture qui vous semble devoir être retenue à ce stade ?
J'en viens à présent au budget de La Poste et des télécommunications, dont les dotations augmentent de 2,2 %, nouvelle hausse qui intervient, rappelons-le, après celles qui avaient été décidées en 2000 et en 2001 et qui atteignaient respectivement 4,6 % et 1,6 %.
Je saluerai tout d'abord l'accord politique intervenu lors du Conseil européen des ministres du 15 octobre dernier sur la directive postale, qui constitue un compromis au regard des impératifs croisés que nous avons de progresser raisonnablement sur le volet de la libéralisation, afin de faire face aux contraintes internationales tout en maintenant un service universel et un service public de qualité. Nous devons pour une grande part à votre pugnacité, monsieur le secrétaire d'Etat, que la programmation du « tout libéral » dans le secteur postal ait été écartée, de même que la libéralisation totale et immédiate des nouveaux services.
M. Jean-Pierre Raffarin. C'est pourtant plus libéral !
M. Pierre-Yvon Trémel. A la place, nous avons obtenu une ouverture progressive et maîtrisée du marché postal, qui permet le maintien d'un service de qualité en termes tant de prestations fournies aux usagers que de présence territoriale. Ainsi ont été préservés un niveau et un périmètre de services réservés compatibles avec le maintien d'une péréquation tarifaire suffisante pour assurer la sauvegarde du service public.
La position commune adoptée à Bruxelles doit maintenant être soumise au Conseil de l'Union européenne, puis au Parlement européen. Je suis certain que vous tiendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, à nous fournir ce matin des éléments sur les suites à attendre, à court et à moyen termes, de cette donne nouvelle.
Bien entendu, l'accord obtenu ne saurait nous faire oublier la nécessité de chercher à améliorer toujours davantage la qualité de notre service public. C'est l'une de vos préoccupations constantes.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. En effet ! (Sourires.)
M. Pierre-Yvon Trémel. L'été dernier, certains dysfonctionnements locaux ont été constatés,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Oh oui !
M. Pierre-Yvon Trémel. ... mais ils restent fort heureusement ponctuels au regard de l'ensemble.
Or que nous révèle cet ensemble ? La Poste, qui couvre trois métiers - courrier, colis et logistique, services financiers - a réalisé d'importants efforts d'adaptation et d'innovation. Elle est devenue le premier opérateur postal européen pour le trafic et le deuxième pour le chiffre d'affaires, ce dernier ayant augmenté de 5 % par an entre 1996 et 2000.
Par ailleurs, depuis 1997, La Poste n'a pas, fait rarissime ! relevé ses tarifs de base.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Vous laissez cette initiative à d'autres !
M. Pierre-Yvon Trémel. Sous votre tutelle, monsieur le secrétaire d'Etat, le prix du timbre est resté inchangé, quand il avait augmenté de 7 % entre 1993 et 1996.
En outre, La Poste a embauché 4 000 agents supplémentaires, elle résorbe l'emploi précaire, elle a assuré l'instauration de la réduction du temps de travail sans aide de l'Etat, elle entretient sur notre territoire un maillage exceptionnel de 17 000 points de contact, elle a ouvert de nouveaux bureaux dans les zones urbaines sensibles et, enfin, elle apporte ses services à deux millions de titulaires de revenus sociaux.
Au total, le contrat d'objectifs et de progrès 1998-2001 passé entre La Poste et l'Etat, dont l'exécution arrive maintenant à son terme, débouche sur un bilan positif.
Certes, et je suis d'accord sur ce point avec M. le rapporteur pour avis, la situation financière de La Poste appelle la vigilance et la contrainte extérieure est très prégnante.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Absolument !
M. Pierre-Yvon Trémel. Le rôle de l'Etat est donc bien de continuer à veiller à ce que La Poste reste à la pointe de l'innovation dans un climat international qui restera difficile.
Nous devrons aussi nous interroger sur la nouvelle relation qui s'établira entre l'Etat et La Poste dans l'optique du contrat d'objectifs et de progrès qui est actuellement en préparation. Je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous avez souhaité procéder à une large consultation à propos de ce futur contrat, mais j'aimerais que vous nous présentiez d'ores et déjà quelques grandes orientations, tant les questions touchant aux retraites, à l'aide à la presse ou à la présence territoriale méritent de faire l'objet d'un débat.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Bonne remarque !
M. Pierre-Yvon Trémel. En ce qui concerne les télécommunications, monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais vous dire tout l'intérêt que nous portons au problème de l'égalité des territoires devant l'internet à haut débit et la couverture en relais de téléphonie mobile. Le thème a déjà été évoqué ici à de nombreuses reprises : pourriez-vous nous dire, à la suite des annonces faites par deux des opérateurs concernés, de quelle manière l'Etat entend prendre en considération la donne nouvelle et répartir le financement, s'agissant notamment des collectivités locales ?
En ce qui concerne le développement commercial de l'internet à haut débit pour les particuliers, celui-ci passe par l'accès forfaitaire illimité, qui fait l'objet d'une demande insistante. Pouvons-nous espérer apporter très bientôt une solution à cette question, monsieur le secrétaire d'Etat ? Ne serait-il pas possible, par exemple, d'envisager de mettre en place un forfait d'un coût inférieur à deux cents francs ?
Je conclurai mon intervention en évoquant les équipementiers. Ces derniers se trouvent actuellement dans une situation très difficile. Ainsi, hier encore, de nouvelles suppressions d'emplois ont été annoncées dans le département des Côtes-d'Armor. Vous avez organisé une table ronde sur ce sujet voilà quelques jours, monsieur le secrétaire d'Etat : pourriez-vous nous en présenter les conclusions ?
Enfin, j'aimerais que vous m'indiquiez si vous entendez rechercher une solution pour remédier à la situation de blocage que connaissent certains fonctionnaires de France Télécom ayant choisi de conserver leur grade de reclassement en 1993. Ce problème ne peut perdurer et je souhaiterais donc que nous puissions le résoudre.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous portons un jugement positif sur le projet de budget que vous nous présentez. Le groupe socialiste le votera, car les orientations que vous avez défendues au cours de ces dernières années et que vous défendrez encore en 2002 permettront, nous en sommes convaincus, de conclure la législature sur un bon bilan pour l'industrie, La Poste et les télécommunications françaises. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Raffarin.
M. Jean-Pierre Raffarin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais indiquer en préambule que j'approuve entièrement le travail de qualité qui a été présenté par nos rapporteurs, MM. Clouet, Grignon et Hérisson.
MM. Francis Grignon, Jean Clouet, rapporteur spécial et Pierre Hérisson, rapporteurs pour avis. Merci !
M. Jean-Pierre Raffarin. J'estime que deux mots sont insuffisamment pris en compte dans votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat : « territoire » et « création ».
En ce qui concerne le territoire, je voudrais dire que, en tant qu'élu de terrain, je vois évoluer notre économie de manière préoccupante.
Voilà quelques années, quand je souhaitais me pencher sur les perspectives de l'emploi en Poitou-Charentes, je demandais aux responsables des grands groupes quelle était leur stratégie pour leurs établissements situés dans ma région.
Aujourd'hui, de très grandes unités y sont implantées, mais je n'en connais pas les actionnaires. Certaines d'entre elles sont à vendre et cherchent à rejoindre un autre groupe ; nous rencontrons beaucoup de difficultés pour enraciner dans notre région un certain nombre d'activités économiques, sociales et industrielles.
Cette nouvelle donne fait qu'il est de plus en plus nécessaire de construire des réseaux territoriaux autour de nos grosses PMI, lesquelles sont, en réalité, le moteur de notre croissance régionale. Or, de ce point de vue, je crois que l'on sous-estime le rôle des chambres de commerce et d'industrie. Il conviendrait, à mon sens, d'orienter leur action et de les aider à se développer, afin qu'elles puissent être des têtes de réseau pour nos PME, tant il est vrai que leur vocation et leur enracinement territoriaux sont plus affirmés que ceux des organisations professionnelles.
De plus, le réseau des chambres de commerce et d'industrie est performant quand il s'agit d'aider les PME à se tourner vers l'international, à se moderniser et à former leur personnel. Nous devons donc lui permettre de se renforcer et de s'adapter aux évolutions.
Or, pour la cinquième année consécutive, l'encadrement du budget des chambres de commerce et d'industrie aboutira, par la stabilisation du niveau de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle, à une réduction de leurs moyens d'action. Comment peut-on leur demander de jouer leur rôle quand elles ont à supporter les conséquences du passage aux 35 heures et l'augmentation de leurs charges ?
En effet, leurs recettes stagnent mais leurs charges sont de plus en plus lourdes ! Cela entraîne une asphyxie, et je crains beaucoup que les PME ne perdent le bénéfice d'un réseau de compétences important et bien ancré dans la région. Je tenais, monsieur le secrétaire d'Etat, à attirer votre attention sur ce sujet.
S'agissant encore du territoire, je voudrais, à la suite de l'un des orateurs qui m'ont précédé à cette tribune, demander que La Poste prenne davantage en considération les élus locaux. Trop souvent, des maires ne sont informés d'un changement dans les activités postales exercées sur le territoire de leur commune que le jour même où celui-ci intervient. Que l'on respecte ces représentants de la République, qui se trouvent en première ligne ! Certes, je comprends que la modernisation ait ses exigences, mais adopter une attitude d'ouverture et de concertation s'impose.
En ce qui concerne maintenant la création, ce point a été fort bien développé par M. Laffitte tout à l'heure. Dans ce domaine, on voit bien quelle peut être aujourd'hui la stratégie de la France dans l'optique de la mondialisation : au rebours de la banalisation, de la standardisation, de la globalisation, du gigantisme auquel la taille de notre marché intérieur ne nous destine pas, nous devons miser sur l'intelligence, l'innovation, la création, la valeur ajoutée. Si l'on veut que la France puisse exister dans cette économie qui est en train de muer, il convient de jouer la carte de l'intelligence, de l'innovation, et de tous nous mobiliser ! (M. Hérisson, rapporteur pour avis, ainsi que M. Pelletier applaudissent.)
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Comment accepter que, en période de croissance, le taux de création d'entreprises baisse dans ce pays ? Les derniers chiffres sont encore catastrophiques à cet égard ! Les créateurs sont démotivés, démobilisés. Nos universités ne sont pas en mesure aujourd'hui d'attirer les créateurs du monde entier qui pourraient choisir la France comme lieu où s'incarne la société de l'intelligence. Dans l'histoire, lorsque notre pays a été rayonnant, cela a toujours tenu à la force des idées, à la promotion de l'intelligence !
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous trouvez au coeur d'une stratégie d'une importance essentielle, qui doit viser à faire en sorte que la création dans le domaine industriel soit, pour la France, un vecteur de développement. Nous pourrons, je le crois, remobiliser les créateurs et les forces vives de l'économie, mais ce sera en offrant un horizon, en fondant, sur ces valeurs de l'humanisme qui rassemblent les habitants de notre pays, un dynamisme plus créateur qui permettra aux individus de se libérer, d'entreprendre !
M. Pierre Laffitte. Très bien !
M. Jean-Pierre Raffarin. Pour cela, la recherche et l'innovation doivent vraiment apparaître comme des priorités pour l'avenir dans notre stratégie nationale.
Par conséquent, le rôle que vous avez à jouer, monsieur le secrétaire d'Etat - même si je souhaite que ce soit pour une durée limitée (Sourires) - est très important. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous examinons pour la dernière fois de cette législature le budget de l'entreprise publique La Poste, et il serait tentant d'esquisser un bilan.
Le résultat serait contrasté. A l'actif figureraient une progression importante du chiffre d'affaires, particulièrement au titre des services financiers, un repositionnement de l'entreprise à l'échelle européenne et mondiale grâce à des rachats, notamment dans le domaine du colis et de l'express, des accords de partenariat commercial noués avec quelques grands opérateurs publics et privés, et pas seulement en Europe du Sud. Bref, La Poste est une entreprise exerçant de nombreux métiers et qui a conquis des parts de marché dans un univers très concurrentiel où le néerlandais TPG et l'allemand Deutsche Post cherchent à évincer leurs rivaux.
Une entreprise, ai-je dit ; mais, s'agissant de l'entreprise publique, celle qui est chargée par la loi de 1990 d'assumer des missions de service public, le bilan est moins flatteur.
Tout se passe comme si la tension entre les deux logiques de cette entreprise « mixte » qu'est La Poste ne cessait de miner l'accomplissement des missions d'aménagement du territoire et de cohésion sociale dont elle demeure chargée. Cela commence à provoquer un véritable malaise non seulement parmi les postiers, mais aussi parmi les élus locaux, sans parler des usagers...
Pour l'heure, contentons-nous d'un rapide constat. Comme je l'avais annoncé au Sénat, la mise en place de la réduction du temps de travail à moyens constants - c'était inique ! - a dégradé les conditions de travail des salariés et amplifié un recul significatif de l'offre de services aux usagers : transformation d'agences postales en agences communales croupions, qui demain seront entièrement à la charge des communes les plus pauvres ; regroupement des bureaux de plein exercice, avec disparition de la fonction de receveur ; réduction drastique de l'amplitude des horaires d'ouverture des bureaux en milieu rural, et même parfois en ville ; fermeture inopinée de bureaux centraux, notamment à Toulouse ; multiplication des tournées « à découvert », c'est-à-dire non effectuées, pour employer un langage plus commun.
Le signe le plus tangible de cette dégradation du service, c'est bien sûr la baisse de qualité inquiétante que subit de façon accélérée l'acheminement du courrier. Durant l'été, un épisode a cristallisé le mécontentement : la fermeture brutale, annoncée le 28 juillet, de plusieurs centaines d'agences postales au mois d'août est apparue aux élus comme la confirmation d'une volonté affichée de désengagement. Il paraît que tel n'était pas le cas. Dont acte, mais rien de concret, depuis, n'a prouvé le contraire...
Simultanément, l'annonce du projet d'alliance entre la Caisse des dépôts et consignations et les caisses d'épargne a obscurci l'avenir de La Poste. Malgré mes demandes et vos paroles rassurantes, monsieur le secrétaire d'Etat, je n'ai, pas plus que mes collègues parlementaires, pu me faire une idée, fût-elle succincte, de ce que veulent vraiment les promoteurs de l'initiative et le Gouvernement.
Tout d'abord, je ne comprends pas comment on peut vouloir renforcer un « pôle financier public » en créant une société privée cotée en bourse qui absorberait une grande partie des avoirs et de l'autonomie des caisses régionales d'épargne. Sans doute mon incompréhension est-elle due au fait que je suis mal informé ! Il est clair, en revanche, que ce projet met La Poste dans une position très délicate. En effet, l'entreprise publique semble n'avoir le choix qu'entre une marginalisation de ses services financiers et une fuite en avant vers la création d'une banque postale, ce que le secteur bancaire n'acceptera pas. Que veut, sur ce point, le Gouvernement ?
Je pensais pouvoir trouver une réponse à cette question dans le contrat qui devait être conclu entre l'Etat et La Poste pour la fin de l'année, mais il semble que cette échéance soit repoussée. Jusqu'à quand ? Vous me le direz sans doute, monsieur le secrétaire d'Etat...
Reste, bien sûr, l'accord que vous avez signé sur le projet de directive européenne et que le Parlement européen doit confirmer avant son adoption définitive. Je me suis exprimé abondamment sur ce sujet au moment de la négociation. Disons, simplement, que mon appréciation sur le résultat est moins optimiste que la vôtre. Mais je prends cette signature comme une donnée de fait, et c'est la raison majeure pour laquelle je dis que, désormais, pour le service public postal, l'échéance et là. Et bien avant 2009, à mon sens !
Je n'en tire d'ailleurs aucune conclusion défaitiste. La Poste est une entreprise en progression, même si elle est fragile, je l'ai dit au début de mon propos. L'attachement que lui porte la nation demeure considérable et constitue un atout décisif dans la préservation par La Poste de son marché intérieur, l'un des plus importants au monde.
Les postiers ont une formidable aptitude à faire évoluer leur métier et à agir dans le secteur concurrentiel, sans perdre leur culture de service public. Mais il appartient aux pouvoirs publics - Gouvernement et Parlement - de prendre le temps d'évaluer la nouvelle donne - je ne suis pas le premier à utiliser cette formule à cette tribune aujourd'hui - et de proposer un autre équilibre pour maintenir un service public postal de proximité dans le contexte européen. Je ne puis, ici, me livrer à cet exercice, car le temps m'est compté. Cependant, je le ferai avant même les échéances électorales et j'espère que vous accepterez alors, monsieur le secrétaire d'Etat, mon invitation à venir éclairer ce débat de façon décisive et avec votre expérience irremplaçable.
Aujourd'hui, je vous écouterai avec une attention soutenue, tant les questions ici évoquées sont celles que se posent les usagers, les postiers et les élus locaux. (Applaudissements sur les travées du RDSE et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Rinchet.
M. Roger Rinchet. Monsieur le secrétaire d'Etat, compte tenu du temps très court qui m'a été imparti, je ne dirai que quelques mots sur l'ensemble de votre projet de budget pour 2002, mais aussi sur votre bilan, que je trouve très bon et inspiré par le modernisme.
Vous avez su soutenir la recherche ainsi que l'innovation et encourager le développement industriel. Jamais, depuis plus de vingt-cinq ans, nous n'avions connu une période aussi riche en création d'entreprises et d'emplois et, même si, aujourd'hui, nous ressentons un léger fléchissement, notre industrie résiste bien. De plus, vous avez eu la volonté de relancer la politique des énergies renouvelables, un moment délaissée, parfois dénigrée, et même traitée de folklorique par certains. C'est ce point que je souhaiterais développer aujourd'hui.
Le sujet des énergies renouvelables étant lui-même très vaste, je me contenterai de faire quelques remarques sur l'une de ces énergies, le solaire, sous ses deux aspects, thermique et photovoltaïque.
Le solaire, il est vrai, n'en est qu'à ses débuts, même si, sur le plan thermique, il est utilisé empiriquement depuis que l'homme existe sur terre. Certes, les résultats en la matière sont encore très modestes, mais il faut savoir que nous ne sommes qu'au début d'une très grande aventure qui, grâce au développement de la technique et à la volonté des hommes, devrait nous conduire vers des résultats bienfaisants pour la planète et infiniment plus intéressants que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
Vous avez eu le mérite, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner des signes forts de votre volonté de faire progresser l'énergie solaire, pour laquelle, il faut bien le reconnaître, nous avons un énorme retard par rapport à tous nos voisins européens, et ce malgré un ensoleillement moyen supérieur aux pays de l'Europe centrale ou septentrionale. Il faut accentuer notre effort, même si cette voie est difficile, car les résultats ne peuvent s'évaluer à l'année à l'intérieur d'un budget qui, bien entendu, est annuel.
Il faut admettre et faire comprendre à tous ceux qui, par intérêt immédiat ou dans un esprit de conservatisme, s'en tiennent aux énergies classiques qu'en matière d'énergie solaire plus qu'ailleurs entre les semailles et la moisson s'écoule un certain temps qui, aux yeux des impatients, peut paraître très long.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut continuer à soutenir l'action de l'ADEME, injustement critiquée dans certains médias et qui est l'élément moteur du développement des énergies renouvelables dans notre pays. C'est, en particulier, grâce à l'aide de l'ADEME que les collectivités locales peuvent bénéficier des aides de l'Union européenne, aides qui, souvent, sont prolongées par les régions.
Pour que le solaire photovoltaïque décolle, il faut s'inspirer de ce qui se fait dans des pays comme l'Allemagne en ce qui concerne l'obligation de rachat par EDF de l'électricité photovoltaïque à des tarifs incitatifs. Cela n'aura pas beaucoup d'incidence sur le budget d'EDF, mais ce sera un très grand encouragement pour tous ceux qui oseront produire de l'électricité solaire.
Les communes et les particuliers qui s'investissent dans le solaire doivent nécessairement être aidés pour s'équiper. Si cette aide est maintenue, les vocations naîtront et l'augmentation sensible des commandes fera rapidement baisser le prix de revient des capteurs et de tous les appareils spécifiques en matière d'énergie solaire, de sorte qu'après un certain temps l'aide ne sera plus nécessaire.
Votre rôle, comme le nôtre, est également de communiquer sur les vraies énergies renouvelables et propres, comme l'est, par excellence, le solaire. Personnellement, je vais de colloque en symposium à travers l'Europe pour expliquer ce que nous pouvons faire dans une petite commune de 4 000 habitants et pour essayer de démontrer que le solaire, tout comme le développement durable, est l'affaire de tous, y compris de ceux qui n'ont pas de gros moyens.
Je ne prendrai que deux exemples. Un toit solaire installé voilà dix-huit ans déjà sur notre centre sportif et nautique nous a permis de réduire de 75 % la note énergétique et d'économiser ainsi plus de 2 millions de francs nets, c'est-à-dire investissements déduits. Dès 2002, l'installation d'un toit solaire photovoltaïque de 250 mètres carrés sur le bâtiment de nos services techniques permettra de fournir l'électricité nécessaire au bâtiment et à l'alimentation de trois véhicules électriques. Tout cela n'est pas du folklore !
J'ai calculé que, si chaque commune de France faisait le même effort, au demeurant très modeste puisque nous comptons bien le doubler ou le tripler dans les années à venir, ce sont au moins 6 milliards de kilowattheures solaires que nous pourrions produire dans notre pays et, annuellement, 1 500 000 tonnes de gaz carbonique que nous ne rejetterions pas dans l'atmosphère, soit plus de 10 % de l'effort national nécessaire pour respecter le protocole de Kyoto.
Je vous remercie de m'avoir permis de chanter mon credo car je suis de ceux qui considèrent que l'avenir de la planète est l'un des sujets les plus préoccupants des décennies futures, mais aussi l'une des tâches les plus nobles des responsables politiques que nous sommes.
Nous devons, pour reprendre un mot de Paul Delouvrier, « voir plus loin pour voir plus juste ». C'est en effet à la planète qu'habiteront nos petits-enfants que nous devons penser.
J'ajouterai, enfin, quelques mots. Le solaire, c'est l'énergie de demain pour de multiples raisons.
Ecologique, d'abord, car, c'est l'énergie la plus propre et la plus pérenne. Le soleil brillera encore pendant un certain nombre de milliers d'années et nous n'avons donc pas lieu d'être inquiets à cet égard.
Economique, ensuite, car, lorsque la technologie, qui évolue chaque jour, aura encore progressé, ce sera une énergie très bon marché, et sera alors créée une véritable industrie du solaire créatrice d'emplois.
Politique, en outre, car plus aucun pays n'aura son destin entre les mains de quelques pays producteurs d'énergie fossile ou nucléaire.
Humaine, car c'est le solaire qui libérera les peuples - je pense à nos amis africains, pourtant comblés par la présence du soleil - qui n'ont pas accès, faute de moyens, aux énergies classiques.
Ma petite commune étant jumelée avec un village tchadien, nous avons envoyé aux habitants de celui-ci quelques mètres carrés de capteurs. C'est la première fois que, dans cette région, l'électricité est produite ainsi. Ce modeste exemple est un symbole ! C'est aussi et surtout pour cela que nous devons mener le combat pour l'énergie solaire. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la discussion du projet de loi de finances pour 2002 nous offre l'occasion de nous intéresser à l'actualité du marché de l'énergie et à la politique que mène le Gouvernement dans ce secteur essentiel pour la compétitivité de notre économie et le bien-être de nos concitoyens.
Au Sénat, nous sommes frappés du manque de réactivité de la politique conduite par la majorité plurielle. Si l'immobilisme peut tenir lieu de volonté politique, alors, monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes dans le vrai. Si l'ambition, le courage et la détermination sont des vertus à cultiver, vous vous trouvez, je le crains, dans l'erreur, et je vais m'efforcer de le démontrer, comme je l'ai fait à plusieurs reprises ici même ainsi que lors de votre audition en commission.
J'illustrerai mon propos avec l'exemple offert par votre incapacité à prendre des décisions qui sont urgentes pour le secteur gazier français. Cette impuissance se manifeste dans deux dossiers clés : d'une part, la transposition de la directive gazière de 1998 et, d'autre part, le dossier de l'adaptation du statut de GDF. Cette impuissance est d'autant moins excusable que ces deux sujets pouvaient être traités séparément et que vous les avez associés afin de justifier, je le crains, grâce au retard pris sur l'un, votre incapacité à résoudre l'autre.
Comme vous le savez, mes chers collègues, la France aurait dû transposer la directive de 1998 portant libéralisation - très progressive ! - du marché gazier avant le mois d'août 2000 : je dis bien « 2000 ». Le Gouvernement a, comme il l'avait fait pour le secteur de l'électricité, choisi de déposer, le 17 mai 2000, un projet de loi sur le bureau de l'Assemblée nationale, à titre de « pierre d'attente ». Ce texte, vous n'en serez pas surpris, est resté sur le bureau de l'Assemblée nationale et il est fort à parier qu'il y demeurera quelque temps et que la « pierre d'attente » ne deviendra pas une clef de voûte de sitôt.
Je crois, pour ma part, que la transposition de cette directive aurait, au contraire, permis de clarifier un certain nombre de questions graves, à l'instar du sort des contrats à long terme dont chacun connaît l'importance sur le marché gazier. Nous assistons bel et bien à une démission de l'exécutif - et je pèse mes mots, monsieur le secrétaire d'Etat -, à qui il revient de procéder à l'inscription de cette transposition à l'ordre du jour du Parlement.
Mais il s'y refuse obstinément, malgré nos appels réitérés. De ce fait, la directive est juridiquement applicable, sans que l'on sache exactement ce qui est d'application directe et ce qui ne l'est pas. On s'en remet à Gaz de France pour établir un tarif provisoire de l'accès au réseau, un « provisoire » qui tend d'ailleurs à s'éterniser, notez-le bien, puisqu'il dure depuis près d'un an et demi. On navigue un peu à vue, en attendant les élections.
Bref, le Gouvernement « fait le mort » et ne souhaite qu'une chose : c'est que la Commission européenne le menace afin de pouvoir dire à sa majorité plurielle, ou tout au moins à certains des membres de celle-ci, qu'il n'y est pour rien et que c'est contraint et forcé qu'il procède à cette transposition.
Certes, la Commission européenne ne dit rien car d'aucuns sont encore plus en retard que nous en Europe : tant mieux, et pourvu que ça dure encore un peu. Mais, je vous le demande, où est le courage politique, où se trouve l'ambition pour la France dans cette attitude où la crainte le dispute à la duplicité ? Au demeurant, cette politique a déjà eu un effet néfaste sur Gaz de France puisque l'Espagne, qui, elle, a procédé à une transposition plus effective, a usé - vous l'avez lu dans la presse - de son pouvoir de rétorsion pour interdire à notre opérateur historique d'étendre ses activités au-delà des Pyrénées.
J'observe en outre que, lorsque le Gouvernement veut, il peut parfaitement ! La meilleure preuve en est que le projet de loi de finances rectificative prévoit le transfert de l'Etat à Gaz de France de la propriété du réseau gazier, moyennant un acompte de 180 millions d'euros. Permettez-moi de considérer, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette réforme tend davantage à permettre au Gouvernement d'empocher une coquette recette supplémentaire en ces temps de baisse des rentrées fiscales qu'à donner les moyens à Gaz de France de mener à bien une stratégie industrielle cohérente. J'observe d'ailleurs que nul ne sait avec précision quel sera le solde de cette opération pour Gaz de France : on verra plus part, sans doute !
Vous vous apprêtez à utiliser ici ce que, lors de l'examen d'un texte portant transposition de diverses directives, j'avais déjà appelé la « législation par appartements » et le tronçonnage des textes. Hélas ! les problèmes demeurent posés dans leur globalité, même si vous tentez d'en résoudre une partie en fonction de l'intérêt du Gouvernement et au détour d'un texte portant diverses dispositions.
J'en termine, mes chers collègues, avec la question de la transposition de la directive de 1998, en soulignant que, du train où vont les choses, les Quinze auront adopté une nouvelle directive de libéralisation avant que celle-ci n'ait été transposée, puisque l'expérience prouve que le Gouvernement est libéral à Bruxelles, tout comme nous, et malthusien à Paris, tout comme sa majorité plurielle ! Qu'y aurons-nous gagné, sinon d'avoir perdu trois, voire quatre ans ?
Venons-en à l'adaptation du capital de Gaz de France aux ambitions qui sont les siennes. Ses ambitions, nous les connaissons : tout comme Electricité de France, Gaz de France souhaite accroître ses activités sur les marchés étrangers. Cette entreprise veut servir 15 millions de clients dans le monde en 2005 et doubler de taille en nouant des partenariats aussi bien en amont qu'en aval de son activité de distribution gazière.
Le personnel de Gaz de France est déjà à pied d'oeuvre. Les prises de participation en Amérique du Sud, - au Mexique, en Argentine et en Uruguay - sont très importantes. En Europe, l'entreprise participera à la privatisation de l'opérateur historique de Lituanie, comme nous venons de l'apprendre par la presse.
Pour mener cette politique, Gaz de France doit réaliser des investissements colossaux. Songez que, sur le 1,9 miliard d'euros investi en 2000, près du quart l'a été en prises de participations à l'étranger et en créations de filiales.
Pour renforcer ses positions, Gaz de France doit accroître ses réserves et sa production et ne plus être quasi exclusivement un vendeur. Bref, Gaz de France doit se diversifier.
C'est précisément pour cette raison que se pose la question des moyens dont l'Etat dotera Gaz de France pour parvenir à ses fins. Lui permettra-t-on d'émettre des quasi-fonds propres tels que des titres participatifs ? Procédera-t-on à sa sociétisation, c'est-à-dire à sa transformation en société à capitaux publics ? Telles sont les questions auxquelles nous souhaiterions obtenir des réponses claires si possible.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Aujourd'hui ?
M. Ladislas Poniatowski. Comme vous le voyez, monsieur le secrétaire d'Etat, notre propos n'est nullement empreint d'idéologie. Nous ne vous demandons pas plus la privatisation de Gaz de France que nous n'avions souhaité, voilà trois ans, la privatisation d'Electricité de France !
Non, le Sénat est parfaitement conscient des enjeux humains et industriels qui conditionnent le développement futur de Gaz de France. C'est ce développement qui permettra, peut-être, demain, de payer les retraites de ses agents ! Le dogmatisme, monsieur le secrétaire d'Etat, n'est pas de ce côté de l'hémicycle, il est chez certains de vos amis pour lesquels le marché et le profit sont, par essence, des mots tabous !
Permettez-moi de conclure mon propos sur une ultime observation.
Lorsque nous interrogeons les dirigeants des grands établissements publics français du secteur de l'énergie, nous les sentons tous prêts à partir à la conquête des marchés étrangers. Monsieur le secrétaire d'Etat, fiez-vous plus à leur sens des affaires qu'aux vieilles lunes qui ont votre oreille et qui ne contribueront à rien d'autre qu'à rendre précaire un avenir qui pourrait être florissant pour cette entreprise nationale et pour notre pays. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat. (Applaudissements sur les travées socialistes.) M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, pour répondre à vos interventions, et en particulier à celles des excellents rapporteurs MM. Clouet et Grignon, mon ami Jean Besson et M. Hérisson, je structurerai mon propos autour de deux points essentiels.
Tout d'abord, ce projet de budget est au service d'une compétitivité économique que la France a déjà conquise et qu'elle doit conforter.
Ensuite, nous menons effectivement une politique de stratégies industrielles, contrairement à ce qu'ont affirmé à cette tribune les détracteurs de cette réalité.
Bref, je crois, pour reprendre l'expression excellente de M. Trémel, que je vous présente un bon bilan, un bilan inspiré par le modernisme, comme l'a souligné M. Rinchet.
Ce budget est au service de la compétitivité économique.
Il intègre tout d'abord des mesures nouvelles importantes qui s'élèvent - ces chiffres n'ont pas été cités à la tribune, et je le regrette - à plus de 33 millions d'euros en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, et qui correspondent à quatre priorités caractérisant notre stratégie industrielle : formation, innovation, reconversion et sécurité.
La première priorité concerne la formation.
Former les ingénieurs qui contribueront de manière décisive à la compétitivité de l'industrie française est une nécessité ; M. Laffitte l'a souligné avec brio, comme à son habitude. La France s'enorgueillit d'un réseau d'écoles d'ingénieurs de très bon niveau. Mais il faut former plus d'ingénieurs, les former aux technologies nouvelles - à celles de l'information et de la communication, et aux biotechnologies, notamment - et les former aussi beaucoup plus clairement à l'entreprenariat et à la prise de risques dans la société économique.
A cet objectif essentiel qui prépare ô combien l'avenir, le projet de budget apporte une réponse d'envergure : les crédits consacrés à la formation des ingénieurs augmenteront de 7,8 % en 2002.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Au total, mesdames, messieurs les sénateurs, les crédits pour la formation des ingénieurs auront augmenté, depuis 1997, soit en cinq ans - écoutez ce chiffre, car il est très significatif -, de 37 %. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
J'en viens à la deuxième priorité qu'est l'innovation.
A l'évidence, l'innovation devient de plus en plus le facteur clé de notre compétitivité industrielle. Les crédits publics représentent 11,2 % du financement de l'innovation des entreprises, soit la deuxième source de financement, la part de l'autofinancement se situant aux alentours de 73 ou 74 %.
Messieurs Grignon, Laffitte et Marest, j'ai pu mesurer le rôle déclencheur et structurant de ces crédits au regard de la concurrence internationale lors de la conférence de presse que j'y ai consacrée cette semaine, conjointement avec les présidents d'un certain nombre d'entreprises concernées. A cette occasion, ces derniers ont pu confirmer le rôle décisif de ces crédits tant dans le passé que pour l'avenir, en vue de les encourager à innover, à se lancer dans une stratégie très offensive de politique industrielle, bref, à vouloir être les meilleurs, les leaders mondiaux dans leurs créneaux.
Le présent projet de budget consolide l'action volontariste entreprise depuis 1997.
La capacité d'engagement de l'ANVAR est accrue à 235 millions d'euros au total. Elle intègre évidemment les remboursements d'avances, remboursables en cas de succès, et la mobilisation des reports.
M. Clouet a souligné combien ce projet de budget était en effet aussi l'expression d'un rattrapage des reports de crédits qui sont indispensables et qui démontrent bien notre action volontaire. En effet, s'il y a report, c'est que nous n'avions pas pu, malgré nos efforts, mettre en oeuvre sur les exercices précédents les crédits abondants d'une politique industrielle d'ensemble forte et ambitieuse.
Les autorisations de programme sur le chapitre essentiel 66-01 sont portées à 282 millions d'euros, soit 1 850 millions de francs. C'est la première fois qu'un tel chiffre est atteint ! Lors de mon arrivée au secrétariat d'Etat à l'industrie, en 1997, elles s'élevaient en effet à 1 500 millions de francs seulement ! On ne peut donc pas donner de leçons à cet égard à ce gouvernement, qui a porté en cinq ans les crédits de l'innovation industrielle et des encouragements à l'innovation industrielle de 1 500 millions de francs à 1 850 millions de francs, et qui a ainsi montré le chemin d'une véritable politique d'avant-garde - une politique d'« en-avant », dirais-je, si je m'exprimais en termes militaires - en ce qui concerne l'encouragement à l'innovation industrielle.
Ces dotations d'un niveau jamais atteint permettront de poursuivre la réforme engagée depuis 1998, d'une part, pour faire émerger de façon collective avec les chercheurs et les entreprises les priorités de l'innovation grâce aux quatorze réseaux nationaux de recherche mis en place - le premier, le réseau national de recherche en télécommunications a été mis en place en mars 1998 - et, d'autre part, pour renouveler les entreprises bénéficiaires en mettant l'accent sur les entreprises petites et médianes. En effet, nous constatons que, par rapport à ce qui se passe chez certains de nos partenaires de l'Union européenne, et notamment chez notre voisin et principal concurrent qu'est l'Allemagne, les entreprises médianes ne sont pas assez nombreuses en France.
Cette démarche porte d'ailleurs ses fruits : en 2000, 200 millions de francs de plus qu'en 1999 ont été engagés sur le chapitre 66-01. Nous engageons donc beaucoup mieux les crédits, par ailleurs beaucoup plus abondants. Dès maintenant, les petites et moyennes industries disposent de 30 % des aides dès notification, ce qui répond à l'une des demandes qui avait été formulée à cette tribune par les sénateurs, monsieur le rapporteur général.
La troisième priorité concerne les restructurations.
Pour 2002, je vous propose d'augmenter la capacité d'intervention au titre des restructurations de 3,7 % et de la porter à 43,5 millions d'euros, au profit des crédits de politique industrielle hors CIRI, le comité interministériel de restructuration industrielle, et du Fonds d'industrialisation des bassins miniers, le FIBM, auquel tant de sénateurs sont à juste titre attachés.
Je viens de mettre en place un nouveau dispositif dédié à la reconversion industrielle qui trouvera sa première application en région Basse-Normandie. Les sociétés chargées de la réindustrialisation rendront compte en toute transparence aux services de l'Etat et aux élus, donc aux sénateurs. Le Gouvernement s'est doté d'une gamme complète de moyens permettant de coordonner les interventions nécessaires à la revitalisation des bassins d'emploi touchés par des fermetures d'établissement, en associant les entreprises concernées.
La quatrième priorité est celle de la sécurité.
Le nouvel inventaire de référence des déchets radioactifs par l'Agence nationale des déchets radioactifs est financé en totalité dans le projet de budget pour 2002. C'était bien nécessaire étant donné la multiplicité des sources radioactives dans l'industrie, le secteur médical, les professions libérales - que sais-je encore ?
Le laboratoire national d'essais regroupera et développera d'ici à 2003 les moyens de la métrologie française, qui est une des priorités du ministère de l'industrie depuis cinq ans.
Le souci de la sécurité s'illustre tout particulièrement - j'en ai discuté hier et ce matin même avec M. Jean-Pierre Masseret, et M. Yves Coquelle l'a évoqué - dans l'accentuation de l'effort engagé depuis trois ans pour accompagner la mise en oeuvre des dispositions nouvelles du code minier, dispositions que je vous avais soumises voilà deux ans et que vous avez votées, à l'unanimité, mesdames, messieurs les sénateurs. Ainsi, les crédits de paiement pour la sécurité dans les mines sont multipliés par deux.
S'agissant de l'ennoyage du bassin ARBED, j'ai tenu, hier, une réunion très positive et productive. Elle a été vécue comme telle par les élus locaux et les élus nationaux concernés, ainsi que par les associations représentant la population. Cette réunion a permis d'avancer, dans la mesure où a été fixé un délai de trois ans avant tout ennoyage pour répondre aux enjeux de sécurité publique et pour étudier la poursuite des pompages par les collectivités.
Je veux réaffirmer ici que c'est la sécurité des personnes et des biens qui, aux yeux du Gouvernement, prime sur toute autre considération, notamment de coût et de budget. La sécurité sous le contrôle des experts est pour nous un absolu ; je le dis tout particulièrement à l'intention des sénateurs concernés.
Naturellement, l'ensemble des recommandations des experts, et notamment celles qui concernent la sécurité des personnes et des biens, seront mises en oeuvre pendant ce délai de trois ans que j'ai décidé d'accorder hier, pour trouver une solution au problème humain et économique grave auquel nous sommes confrontés depuis des années.
Toutes les solutions, y compris le comblement, seront étudiées pour le traitement des zones à risque. Les décisions seront toujours prises, comme je l'ai fait depuis 1997, en concertation permanente avec les élus concernés, sur des bases objectives relevant, la plupart du temps, de l'expertise technique internationale ou nationale, de manière que tout ce que nous ferons soit guidé par l'objectivité et le souci, je le répète, d'assurer la sécurité.
Outre ces mesures nouvelles importantes, mon budget est marqué par une gestion attentive de l'ensemble des crédits. Des baisses de crédits sont ainsi prévues sur cinq chapitres ciblés, en raison de l'existence de reports ou de nouvelles réalités.
Concernant la construction navale, monsieur Grignon, si la réintroduction d'un mécanisme d'aide spécifique devait être décidée à l'échelon communautaire, cette aide devrait concerner également les méthaniers. C'est ce que j'ai fait valoir aux commissaires européens concernés.
Par ailleurs, monsieur Grignon, nous sommes conscients de l'importance du lien entre vente et après-vente pour l'ensemble des acteurs de la filière automobile et pour les questions de sécurité. J'ai clairement indiqué à la Commission européenne que le Gouvernement ne saurait accepter une remise en cause de ce principe. Je l'ai fait en concertation permanente avec les constructeurs automobiles français.
L'une des plus belles industries françaises, toujours en croissance en 2001, l'industrie automobile, mérite que l'on se batte pour elle, et j'attends les propositions qui seront formulées par la Commission au début de 2002. Mais j'ai bien cadré le débat : pour le Gouvernement français, il ne s'agit en aucun cas de renoncer à ce que vous avez, à juste titre, défendu dans votre intervention.
Au total, pour 2002, les crédits de l'industrie s'élèveront à 730 millions d'euros en autorisations de programme ; ils sont donc stables. Ils atteindront 2 295 millions d'euros - moins 3,6 % - en dépenses ordinaires et en crédits de paiement. Ils participent ainsi à la réduction des prélèvements, élément de compétitivité des entreprises, tant demandée dans cette enceinte.
Mesdames, messieurs les sénateurs, notre politique est une politique de stratégie industrielle, structurée autour de quatre axes.
Le premier est l'économie de l'innovation. C'est - je le disais au début de mon propos - la clé de la compétitivité d'aujourd'hui et des emplois de demain dans tous les secteurs.
Dans le textile, par exemple, monsieur Grignon, nous ne surmonterons la concurrence des pays émergents que par un effort accru d'innovation et de montée en gamme. Je vous annonce d'ailleurs que je mettrai en place un quinzième réseau national d'innovation, le réseau d'innovation sur le textile habillement. Je l'installerai officiellement, avec son comité d'orientation, dès le mois de janvier prochain, montrant ainsi que je crois à l'avenir d'un secteur que l'on aurait tort de considérer comme un secteur traditionnel, voire comme un secteur du passé. Au contraire, bien des actions innovantes peuvent être menées dans ce secteur ; nous en discuterons avec ses représentants.
Par ailleurs, comme le Premier ministre vient de le rappeler, nous avons réalisé, en quatre ans, des évolutions décisives, qui doivent être poursuivies, pour faire de la France l'économie numérique la plus dynamique d'Europe.
Dans l'appropriation des technologies de l'information et de la communication par les entreprises, les territoires et les particuliers, nous accusions un retard très important. Ce retard est très largement derrière nous : les technologies de l'information et de la communication représentent aujourd'hui 6 % de notre produit intérieur brut.
Les entreprises se sentent partie prenante dans l'économie numérique. La part de la France dans le commerce électronique a doublé : d'après une étude très récente menée par le SESI, le service statistique du ministère de l'industrie, 50 % des Français se sentent concernés par le numérique dans leur vie quotidienne.
Le projet de loi sur la société de l'information, que j'ai présenté en conseil des ministres le 13 juin dernier, définit un cadre clair et précis, un véritable cadre de confiance du développement des technologies de l'information et de la communication.
Ces évolutions se sont appuyées sur l'action continue et déterminée que j'ai conduite pour faire baisser les tarifs d'accès à Internet, à la téléphonie fixe et mobile.
Nous sommes maintenant parmi les pays les moins chers d'Europe pour l'accès à Internet. Nous allons poursuivre dans cette voie pour que, rapidement, puisse entrer en vigueur un tarif forfaitaire d'accès illimité inférieur à deux cents francs par mois. Nous montrerons ainsi que nous restons le pays le moins cher s'agissant de l'accès massif et populaire à cette forme de diffusion de la culture, et nous ferons de cet accès facile au Net par les petites et moyennes entreprises un instrument offensif de notre vie économique.
A M. Poniatowski, qui s'inquiétait de nos résultats en la matière, je répondrai que la table ronde que j'ai tenue mardi avec les opérateurs a permis de confirmer - de l'avis même des industriels, opérateurs et fabricants de terminaux - les atouts dont la France dispose et d'ouvrir les bases d'une démarche partenariale pour les préserver.
J'ai annoncé ce matin même, mesdames, messieurs les sénateurs, la signature de l'accord que j'ai négocié avec les trois opérateurs mobiles et qui va permettre d'accélérer le programme prévu cet été, à Limoges, lors du comité interministériel d'aménagement du territoire, pour le système GSM.
J'ai, par ailleurs, annoncé ce matin une réduction de la participation publique et des collectivités locales et de l'Etat. Ces derniers n'auront plus désormais, grâce à cet accord scellé depuis quelques heures, qu'à financer les pylônes nécessaires à la diffusion et à l'achèvement de la couverture des 1 480 communes identifiées comme non couvertes lors du comité interministériel d'aménagement du territoire. Ils n'auront donc à débourser qu'une somme de 400 millions à 500 millions de francs au lieu du milliard de francs prévu dans l'esquisse précédente ; j'ai ainsi réduit de moitié la participation publique. Par ailleurs, les opérateurs Orange et SFR se sont engagés à financer les équipements actifs pour 500 millions de francs chacun.
En deux ans - et non pas trois, comme cela avait été envisagé voilà quelques semaines - les 1 480 communes concernées seront ainsi couvertes par au moins un opérateur et, pour la moitié d'entre elles, par deux opérateurs.
Voilà un progrès très significatif, qui témoigne de ce partenariat qui s'est instauré avec les opérateurs et les industriels, partenariat fructueux qui augure bien de l'avenir de toutes ces technologies.
Je suis également très confiant dans l'avenir de l'UMTS. Je crois que, grâce à la politique très sage en matière de prix des licences que nous avons définie M. Fabius et moi-même, la France devrait se placer au premier rang des pays d'Europe qui doteront leurs entreprises - notamment les PME et les PMI - et les particuliers de la capacité d'utiliser ces moyens. La compétitivité des premières s'en trouvera accrue, tandis que les seconds en bénéficieront dans leur vie quotidienne en termes de communication et d'accès à la culture.
Je crois pouvoir dire que, grâce à cette politique, qui contraste avec la position adoptée par certains de nos partenaires européens, nous avons pris les moyens d'être les premiers et les meilleurs, lorsque la technologie le permettra, au cours des toutes prochaines années.
Monsieur Laffitte, sachez que j'ai engagé, depuis près de cinq ans, un effort vigoureux en faveur des biotechnologies, effort qui se traduira, en 2002, conformément à une décision prise par M. Fabius et par moi-même, par un financement supplémentaire de 500 millions d'euros en faveur des entreprises de ce secteur grâce à la mobilisation de 100 millions d'euros par l'Etat. M. Schwartzenberg a évidemment participé à ce mouvement positif en faveur des biotechnologies.
Notre ambition est de placer les biotechnologies françaises à la première place européenne d'ici à cinq ans. Je sais que vous souscrivez à cet objectif.
S'agissant des brevets, monsieur Grignon, je vous répète combien je partage les conclusions de l'excellent rapport que vous m'avez transmis voilà quelques mois. Vous connaissez l'action déterminée que je mène depuis quatre ans dans ce domaine et vous avez approuvé les accords de Londres à cet égard. Il faut maintenant que nous transformions ensemble l'essai à l'échelon européen en renforçant, sans accepter ce que l'on appelle la « nationalisation » du problème par les différents Etats membres, le rôle de l'office européen des brevets et en modernisant son fonctionnement, c'est-à-dire en le rendant plus rapide dans ses décisions.
Il nous faut poursuivre dans cette voie. A titre personnel, je pense, mesdames, messieurs les sénateurs, que le rapport Charzat constitue une excellente feuille de route pour l'action gouvernementale dans les mois et les années à venir, centrée sur une politique favorable à l'initiative entrepreneuriale, à la simplification, aux encouragements fiscaux indispensables et à la reconnaissance des succès des créateurs et des innovateurs.
Cette politique permettra, je le pense, aux entreprises spécialisées dans les technologies nouvelles de trouver la voie de la croissance. Elle permettra également d'encourager les chefs d'entreprise à prendre des risques. Une économie moderne de croissance, favorable à l'emploi, doit aller dans ce sens de manière très claire.
Notre deuxième stratégie, c'est un Etat plus proche.
C'est un Etat à l'écoute des élus, des partenaires sociaux et des entreprises. J'y suis évidemment très attentif.
C'est un Etat plus proche des entreprises en région. Les engagements ambitieux pris dans le cadre des contrats de plan - FDPMI et ATOUT, procédures bien connues - sont entièrement respectés à travers une dotation de près de 110 millions d'euros en autorisations de programme.
Depuis 1997, dans ce domaine, les crédits ont progressé de 6,4 %, et 5 milliards de francs permettront d'assurer la dynamique régionale des technologies clés définies par plus de six cents experts indépendants. Il s'agit, en quelque sorte, de l'armature de la prospective active dans nos entreprises. Cela concerne notamment les régions en mutation.
M. Raffarin a évoqué le rôle des chambres de commerce et d'industrie, que nous essayons de dynamiser. Après quelques vicissitudes, il faut le reconnaître, elles devraient présenter prochainement un projet de portail économique.
Les ressources des CCI sont considérables : 21 milliards de francs par an, dont 6,3 milliards de francs provenant de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle. Ce sont donc 6,3 milliards de francs de charges pesant sur les entreprises. Cette somme doit être réellement mobilisée, utilisée intelligemment. Beaucoup a déjà été fait, mais beaucoup reste à faire, par exemple dans l' e-business , dans l'encouragement à la mise en réseau des entreprises, dans la formation, dans l'organisation de la sous-traitance, que sais-je encore...
Naturellement, je compte sur les chambres de commerce et d'industrie pour aller dans le sens d'un plus grand dynamisme à cet égard, grâce aux fonds importants dont elles disposent. A titre de comparaison, 6 milliards de francs, cela correspond aux crédits publics qui, sous forme de crédit d'impôt ou de crédits budgétaires, sont consacrés à l'innovation en France. Les chambres de commerce disposent donc, en fait, d'une force de frappe qui équivaut à l'action de l'Etat en matière d'innovation. Elles doivent utiliser ces fonds avec toute la conscience que leur importance justifie.
Troisième stratégie : une énergie moins chère et plus respectueuse de l'environnement, thème qu'a brillamment évoqué M. Jean Besson, rapporteur pour avis.
Avec le nucléaire, la France dispose - M. Besson l'a souligné avec une conviction que nous partageons - d'une énergie qui est parmi les moins chères du monde et qui rejette beaucoup moins de gaz à effet de serre. Nous avons conforté cet acquis, et M. Marest l'a reconnu : le CEA bénéficiera d'une subvention globale de 923,6 millions d'euros, consolidant l'effort intervenu en 2001.
Notre avance technologique ne pourra d'ailleurs perdurer que si les Français ont le sentiment qu'il s'agit de sujets pleinement inscrits dans le débat démocratique. Je l'ai dit et je le répète : loin de craindre la transparence, nous l'appelons de nos voeux. C'est en ce sens que le gouvernement de M. Jospin a toujours agi en ce qui concerne le nucléaire.
Dans le même temps, nous avons conduit une politique sans précédent en faveur des énergies renouvelables : elles représenteront, en 2010, 21 % de notre production, chiffre qui traduit bien notre volontarisme en ce domaine.
M. Rinchet, à juste titre, a souligné l'importance de l'énergie solaire. Elle profitera clairement de ces engagements ambitieux, notamment d'un projet de directive que j'ai fait accepter par nos partenaires de l'Union européenne sous présidence française, visant à faire passer le niveau des énergies nouvelles renouvelables en France de 15 % à 21 %.
Grâce aux tarifs d'achat très avantageux consentis par EDF en faveur de l'énergie solaire, notre pays participera à cet effort volontariste.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. C'est un gadget !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Accrue en loi de finances rectificative, la capacité d'intervention de l'ADEME est ainsi consolidée à hauteur de 37 millions d'euros.
Monsieur Besson, concernant l'éolien,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Autre gadget !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... nous travaillons, mon excellent collègue M. Cochet et moi-même, à une simplification et à une amélioration des procédures, avec notamment un objectif : convaincre les populations locales - ce qui est parfois difficile, j'en conviens - de l'utilité d'installer des machines éoliennes, en particulier en les associant plus étroitement aux décisions qui précèdent leur mise en place.
Quatrième stratégie : des services publics de qualité pour tous. Cela signifie le respect de certaines exigences : droit à l'électricité, absence d'augmentation du prix du timbre - j'y reviendrai dans un instant -, tarifs téléphoniques particuliers pour les plus démunis, etc.
Voilà quelques exemples de ce qui a marqué l'action du gouvernement de M. Jospin, une action solidaire, résolument favorable au développement des services publics, conforme aux engagements politiques que nous avons pris dès juin 1997.
Monsieur Besson, monsieur Trémel, en ce qui concerne le gaz, le Gouvernement a choisi de transférer le réseau de transport à Gaz de France, ce qui va conforter cette entreprise publique. Nous aurons prochainement l'occasion de parler de ces sujets ici même.
Monsieur Trémel, le plan de desserte gazière que j'ai arrêté en avril 2000 permettra à 1 600 nouvelles communes d'être raccordées en trois ans. Croyez-moi, les maires qui voient arriver le gaz dans leur commune sont extrêmement satisfaits. Nous recevons d'ailleurs régulièrement des lettres d'élus qui tiennent à nous féliciter de cette bonne décision qu'est la programmation triennale de l'élargissement de la desserte en gaz. Nous avons effectivement doublé le rythme de desserte gazière de nos petites communes rurales.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Reste le problème du prix du gaz !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Il faudra, monsieur Poniatowski, donner le plus vite possible à Gaz de France les moyens d'une entreprise moderne, présente en amont, au niveau de la production.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Et il faudra aussi baisser les tarifs !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le service public est un combat de conviction, et c'est un combat pour des valeurs. Nous le menons, autour du Premier ministre, auprès de nos partenaires européens, pour que l'Europe se construise sur nos valeurs, et ce sont des valeurs élevées.
Monsieur Hérisson, nous venons de franchir une étape avec l'accord du 15 octobre dernier sur la directive postale. La libéralisation totale du secteur, voulue par certains de nos partenaires européens, a été écartée.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Pas voulue par nous !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Vous nous avez peut-être rejoints dans cet objectif tendant à écarter la libéralisation, après avoir été prolixes dans l'autre sens au cours de ces dernières années !
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. C'est exactement l'inverse !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Je vous invite à vous référer aux termes précis de l'accord du 15 octobre. L'adaptabilité du service public postal est reconnue. Au total, dans les huit années qui viennent, nous avons la garantie que moins de 10 % du chiffre d'affaires de La Poste seront mis en concurrence.
Monsieur Trémel, nous veillerons, dans le prochain contrat d'objectifs et de progrès en cours de négociation avec La Poste, à ce que cette entreprise publique qui nous est si chère puisse continuer à se développer dans les conditions actuelles, en s'appuyant sur ce qui a fait son succès, à savoir la qualité et la proximité, auxquelles M. Delfau est particulièrement attaché.
Le Gouvernement est bien évidemment opposé à tout démantèlement de La Poste. Il est favorable au développement de ses activités financières, dans le respect des règles tant nationales qu'européennes de la concurrence. Ce développement ne remettra en cause ni l'unité de La Poste ni celle du réseau.
Dès à présent, nous avons fait le choix de reconduire dans le projet de loi de finances pour 2002 les engagements financiers de l'Etat, qui concernent en particulier la prise en charge par celui-ci de l'évolution de l'excédent du poids des retraites de La Poste.
Les élus nationaux et locaux seront associés, le moment venu, aux discussions du contrat d'objectifs et de progrès de La Poste. Je l'ai dit la semaine dernière devant l'Association des maires de France - vous étiez présent, monsieur Hérisson - et je le répète aujourd'hui devant la Haute Assemblée, ce qui est un honneur pour moi : je tiendrai cet engagement de la manière la plus absolue.
Monsieur Hérisson, je n'ai pas augmenté le prix du timbre depuis 1997...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Vous laissez à d'autres le soin de le faire !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et je n'ai pas l'intention de le faire, contrairement à vous.
Je trouve choquant, permettez-moi de le dire - la confiance qui règne entre nous me permet de m'exprimer très franchement - que la majorité sénatoriale puisse prôner publiquement, officiellement, l'augmentation du prix du timbre, qui pèse sur les ménages,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Non : 90 % des envois postaux concernent les entreprises !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... y compris donc sur les plus démunis, et qui pèse sur le développement de ce moyen de transmission de l'information, de la pensée et de la culture.
Non, il ne faut pas augmenter le prix du timbre si l'on veut être cohérent avec une politique de solidarité à l'égard des ménages, notamment des plus démunis d'entre eux,...
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Démagogie !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et je suis choqué que la majorité sénatoriale formule une telle proposition.
J'indique à MM. Trémel et Delfau, qui m'ont interrogé sur cette question, que le contrat d'objectifs et de progrès - la loi l'appelle « contrat de plan » mais il me semble légitime de montrer qu'il s'agit d'un contrat de progrès - devra répondre à trois objectifs : premièrement, conforter le développement de La Poste sur tous ses métiers ; deuxièmement, faire en sorte que La Poste continue à assurer et à développer les missions de service public sur tout le territoire, évidemment sous des formes modernisées, adaptées à notre époque, car le maintien des principes essentiels du service public sur tout le territoire exige le dynamisme ; troisièmement, garantir - et c'est également important compte tenu des événements de l'été dernier - le dialogue et la concertation avec les élus mais aussi, je le souligne en tant que secrétaire d'Etat, avec le personnel, pour lui assurer que sa situation et ses aspirations sont pleinement prises en compte par la direction de La Poste.
Je dirai, pour conclure, que nous avons accompli un chemin très important, décisif même, pour la compétitivité de l'industrie française au cours des cinq dernières années. Ce chemin doit être poursuivi, car la concurrence internationale et la mondialisation rebattent constamment et sans pitié les cartes de l'industrie dans le monde. Il nous faut donc toujours être à la pointe, en avant, volontaires et modernes.
A périmètre comparable, depuis 1997, et en intégrant les effets du projet de loi de finances pour 2002, les crédits destinés à l'industrie auront progressé de 3,5 % ; ce chiffre mérite bien d'être mentionné. Entre 1994 et 1997, toujours en se référant à des périmètres comparables, les crédits de l'industrie avaient baissé de plus de 5 % ! (Eh oui ! sur les travées socialistes.)
Si l'on procède à des comparaisons, allons jusqu'au bout, de manière à faire ressortir la réalité d'une stratégie industrielle offensive, celle qu'a menée le gouvernement de Lionel Jospin ! (Très bien ! sur les mêmes travées.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, les deux chiffres, très contrastés, que je viens de citer montrent l'importance politique, culturelle, que le Gouvernement attache à l'industrie, et par là même à l'innovation, ainsi qu'au service public. Ce thème tiendra certainement une très grande place dans les débats nationaux que nous aurons l'année prochaine, à l'occasion des deux grandes échéances électorales à venir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous devons être fiers de nos entreprises industrielles : 70 000 emplois industriels supplémentaires ont été créés dans l'industrie en 2000. Ce chiffre est sans précédent depuis 1974 !
Ne soyons pas timorés dans le soutien que nous apportons aux efforts de notre industrie, qui représente 20 % du produit intérieur brut pour l'industrie sticto sensu, et 40 à 45 % si l'on inclut les services à l'industrie. Nous devons être fiers d'être la quatrième puissance industrielle du monde ! Nous devons être fiers du fait qu'entre juin 1997 et juin 2001, pour la première fois depuis vingt-cinq ans, l'industrie française a créé 234 00 emplois nets !
Au cours de la période précédente, c'étaient essentiellement les services qui créaient des emplois. Ils continuent à en créer, bien sûr, mais l'industrie, pour la première fois depuis un quart de siècle, entre à son tour dans la logique de la création d'emplois, sans pourtant obérer sa compétitivité vis-à-vis de ses concurrentes mondiales.
Nous nourrissons une grande ambition pour une grande industrie. C'est pourquoi nous poursuivons notre effort déterminé pour son développement à venir.
Comme cela a été déjà souligné à cette tribune, ces dernières années ont été marquées par un véritable changement de climat, avec une attention très marquée aux besoins des entreprises, à l'innovation, à la création de nouvelles unités, à la créativité globale de notre économie industrielle.
Nous sommes désormais, s'agissant de notre industrie, résolument tournés vers l'avenir, comme certains d'entre vous l'ont reconnu, et comme M. Raffarin aurait pu l'admettre lorsqu'il a évoqué la création d'entreprises puisque, contrairement à ce qu'il a indiqué un peu rapidement, le nombre des créations d'entreprise s'est élevé, en 2000, à 176 700, contre 169 600 en 1999, soit une progression de 4,2 % en un an.
Mesdames, messieurs les sénateurs, oui, nous sommes offensifs, oui, nous sommes confiants, oui, nous mobilisons la nation pour une industrie que nous aimons, oui, nous sommes tournés vers l'avenir ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées socialites et sur certaines travées du RDSE.) M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'industrie seront mis aux voix aujourd'hui même à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »

Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : moins 16 419 950 EUR. »

Sur ces crédits, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai déjà attiré votre attention tout à l'heure sur les dangers que représente la libéralisation du marché de l'énergie.
Quelle n'a pas été ma surprise d'apprendre ce matin que le Gouvernement s'apprête à déposer un amendement au collectif budgétaire pour 2001, tendant à la transposition partielle de la « directive gaz », en l'occurence au transfert des ouvrages de transport de gaz naturel aux opérateurs privés !
Passant outre l'exigence d'un débat sur une question aussi importante, vous court-circuitez le processus démocratique. Vous savez, monsieur le secrétaire d'Etat, que, face à l'hostilité des syndicats de la majorité plurielle, le projet de loi de transposition de la directive n'avait pas pu être inscrit à l'ordre du jour du Parlement !
Il s'agit donc de valider, sans l'accord de la représentation nationale, l'ouverture à la concurrence du marché du gaz. Or, selon les informations dont nous disposons, ce cavalier budgétaire donnerait à l'article relatif au transfert de la propriété gazière au privé une signification que notre groupe politique ne peut accepter.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous avons entendu tout à l'heure, mais nos craintes ne sont pas apaisées pour autant. Pouvez-vous nous confirmer ce cavalier budgétaire et nous donner des précisions sur le contenu de cet amendement ?
M. Christian Pierret. secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je tiens à vous rassurer. L'objectif qui est le nôtre est bien de renforcer l'entreprise Gaz de France, comme nous l'avons fait, il y a quelques années, pour Electricité de France. Le processus est excatement le même.
Le collectif budgétaire pour 2001 ne comprend pas, à ce stade, de dispositions autres que celles qui concernent le transfert de la propriété des réseaux de transport du gaz de l'Etat vers l'entreprise.
Nous restons tout à fait cohérents avec l'idée que je viens d'exprimer : la défense des intérêts de l'entreprise publique Gaz de France, qui va ainsi trouver un moyen nouveau de se renforcer, en possédant ses réseaux en propre, à l'instar d'EDF, par exemple. Il n'y a rien là que de très normal, de très « entrepreneurial » pour une grande entreprise publique qui n'est absolument pas menacée mais, au contraire, renforcée par ce projet.
M. le président. Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;

« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion l'article 67 quater, qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés à l'industrie.

Article 67 quater



M. le président.
« Art. 67 quater . - Le Gouvernement déposera devant le Parlement, dans les six mois à compter de l'adoption de la présente loi, un rapport sur l'état du patrimoine immobilier minier, les moyens disponibles pour son amélioration et sa réhabilitation et les principales orientations retenues dans ce domaine. »
Sur l'article, la parole est à M. Coquelle.
M. Yves Coquelle. Nous souscrivons bien évidemment à la lettre et à l'esprit de l'article 67 quater du présent projet de loi de finances.
Ainsi que je l'avais indiqué lors de la discussion de la première partie, nous sommes particulièrement préoccupés par la situation du patrimoine des Charbonnages de France appelé à devenir celui de l'Etablissement foncier de Nord - Pas-de-Calais, l'EFINORPA, créé en vertu des dispositions des articles 191 et 192 de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains.
Les dispositions concernées avaient consacré le transfert de propriété, en instituant une exemption d'application des droits de mutation et en précisant les missions dévolues à l'EFINORPA.
L'enjeu est d'importance. Ce sont en effet 70 000 logements miniers, abritant 300 000 habitants dans plus de 170 communes du Nord - Pas-de-Calais qui sont au centre de ce transfert de propriété.
Nous pouvons souligner également que l'établissement public est dirigé par un conseil d'administration original, associant notamment les élus, les organisations syndicales de la profession et les occupants du parc.
Mais, au-delà des conditions du transfert de propriété, une question essentielle se pose. Il s'agit du prix auquel les Charbonnages de France entendent vendre ce patrimoine. Ce prix enregistre en effet dans les faits une plus-value non négligeable dans la mesure où les logements concernés sont largement amortis : une part essentielle du parc date de la pleine période d'exploitation du bassin, avant la Seconde Guerre mondiale.
On sait aussi que ce parc nécessitera d'importants travaux de réhabilitation, de rénovation et d'entretien.
Il nous paraît donc nécessaire que le rapport prévu par l'article 67 quater du présent projet de loi de finances prenne en compte l'ensemble des réalités financières liées au transfert du patrimoine et que soit notamment posée la question d'une dévolution gratuite, au demeurant justifiée par l'ancienneté du patrimoine.
M. le président. Je mets aux voix l'article 67 quater .

(L'article 67 quater est adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant l'industrie (et La Poste).
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Bernard Angels.)

PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale.

PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si le Gouvernement a souhaité souligner ses priorités d'action dans ce projet de loi de finances par l'affichage de budgets en hausse, force est de constater dès lors que les PME, le commerce et l'artisanat ne figurent pas parmi ces priorités.
Je ne suis pas de ceux qui considèrent qu'il existe un lien mécanique entre dépense et résultat. Je veux bien admettre qu'un budget sous tension soit synonyme de gains de productivité et d'une meilleure efficacité de la dépense publique. Je pense néanmoins que la baisse du budget du secrétariat d'Etat, à structure constante, de 3,1 % pour des crédits de seulement 61 millions d'euros est critiquable à double titre.
Cette baisse intervient alors que va venir en discussion devant le Parlement le projet de loi d'orientation pour les petites entreprises et les entreprises artisanales. La baisse des crédits du secrétariat d'Etat va ainsi à l'encontre du signal fort que doit représenter ce texte à l'égard des petites entreprises.
La baisse du budget du secrétariat d'Etat doit être rapprochée des mesures proposées par l'article 13 du projet de loi de finances pour 2002, qui institue un prélèvement exceptionnel de 105 millions d'euros sur les excédents de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat. Je me bornerai à remarquer que le montant de ce prélèvement est largement supérieur au total du budget du secrétariat d'Etat, soit 61 millions d'euros.
Dans ce contexte, la baisse des crédits du secrétariat d'Etat est à tout le moins inopportune, d'autant que, au sein de ce budget, les crédits d'action économique baissent de 16,5 %.
Je crois que le secrétariat d'Etat sort aujourd'hui affaibli de la présente législature. Stagnation de ses effectifs et de son budget, marginalisation de ses actions au sein de Bercy, absence de synergies avec les autres directions du ministère, tel est le bilan d'un secrétariat d'Etat qui, depuis 1997, n'a pas su profiter de sa fusion avec le ministère de l'économie et des finances pour devenir le « pôle PME » de référence du Gouvernement.
Témoin de cette incapacité, la faible place qu'occupe le secrétariat d'Etat, seulement 1 % des 5,14 milliards d'euros du jaune budgétaire est consacré à l'effort financier de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises.
Le secrétariat d'Etat reste ainsi cantonné à l'action en direction du petit commerce et de l'artisanat, sans avoir pu étendre son action auprès des autres types de PME.
Je regrette cette césure, au sein même du ministère de l'économie et des finances, entre les PME innovantes, qui bénéficient de toutes les attentions, et les PME qui le seraient moins, celles du commerce et de l'artisanat.
Enfin, j'ajoute que le secrétariat d'Etat ne détient la compétence de principe ni en matière d'apprentissage ni en matière de crédit aux PME. Il y a là une très claire limite à son action, que les titulaires du portefeuille ministériel depuis 1997 n'ont pas pu, ou pas su, lever.
Le secrétariat d'Etat aurait pu, à tout le moins, profiter de son inclusion dans la sphère de Bercy pour faire preuve de davantage de vertu budgétaire. Il n'en est rien. L'action de l'Etat en direction des PME du secteur du commerce et de l'artisanat a pour principale caractéristique la mobilisation d'un certain nombre d'instruments d'intervention extra-budgétaires dont les dépenses sont aujourd'hui bien supérieures au budget du secrétariat d'Etat. Ces dépenses n'étant pas discutées en loi de finances, elles ne bénéficient pas du contrôle du Parlement.
J'invite le secrétariat d'Etat aux petites et moyennes entreprises à faire preuve de davantage d'orthodoxie budgétaire et à se conformer aux règles édictées par son propre ministère de tutelle. J'indique que le transfert d'un certain nombre de fonds sur les crédits du secrétariat d'Etat n'empêche en rien de les gérer en relation avec les élus, locaux ou consulaires, et les chefs d'entreprise !
Je souligne que la souplesse des fonds extra-budgétaires est autant un inconvénient pour les commerçants et les artisans qu'un avantage : c'est cette souplesse qui permet au Gouvernement de prélever 105 millions d'euros sur les excédents de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat !
Je recommande dès lors la suppression des fonds locaux d'adaptation du commerce rural, dont les crédits sont trop modestes pour être dépensés, et l'inscription du financement du Fonds national de promotion et de communication de l'artisanat sur le budget du secrétariat d'Etat, son action étant inséparable de la politique générale du Gouvernement.
Je recommande également la sanctuarisation du FISAC, le Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, en l'érigeant en compte d'affectation spéciale et en définissant mieux son objet autour d'une mission d'aménagement du territoire et de solidarité.
Je recommande enfin l'évaluation des actions de l'EPARECA, l'établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les petites et moyennes entreprises ne sont vraiment pas une priorité pour le Gouvernement. Vous affichez, monsieur le secrétaire d'Etat, des crédits en hausse de 2,4 %. Mais, à périmètre constant, comme l'a très justement rappelé notre collègue M. Cazalet, c'est une baisse de 3,1 % qui nous est en fait proposée.
Ce budget, fort modeste au demeurant puisqu'il dépasse à peine 60 millions d'euros, s'articule autour de quatre orientations que vous privilégiez.
Tout d'abord, 40 % de cette modeste enveloppe sont destinés à faciliter l'accès au crédit des PME. Vous avez choisi de redéployer votre intervention en direction de la garantie d'emprunt, dont vous jugez l'effet de levier supérieur. C'est votre choix. Je regrette néanmoins l'abandon des prêts bonifiés, à mon avis plus accessibles et plus adaptés aux besoins des artisans. J'espère que l'avenir vous donnera raison, car l'accès au financement est, à mes yeux, une clef du développement et de la pérennité des petites entreprises.
Vous présentez ensuite l'appui aux actions d'animation économique comme votre deuxième priorité, mais les crédits correspondants baissent de 16,5 %. Ce budget, en recul depuis trois ans, atteint en 2002 un niveau notoirement insuffisant. Je le déplore, au regard du besoin tout particulier des petites entreprises d'actions collectives menées par les organisations professionnelles et les chambres des métiers.
Ces structures sont irremplaçables : vous le savez, elles accompagnent les politiques publiques, notamment le passage à l'euro et la sécurité sanitaire. A cet égard, le prélèvement de 105 millions d'euros sur l'excédent de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, est particulièrement choquant. Le Sénat en a voté l'annulation, et je m'en félicite.
J'estime que ces sommes devraient, au moins en partie, revenir à l'animation économique du secteur ou à d'autres priorités. Nous le verrons peut-être ultérieurement lors de l'examen des amendements qui ont été déposés sur l'article 67 ter .
Vous consacrez par ailleurs à la formation professionnelle - votre troisième priorité - plus du quart du budget, ce qui prend toute son importance dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Il s'agit d'une initiative heureuse.
Enfin, votre quatrième priorité budgétaire concerne les contrats de plan Etat-région. A ce sujet, je relève qu'à peine plus de la moitié des 94,5 millions d'euros prévus sur la durée du XIIe plan - 2000-2006 - ont fait l'objet d'une programmation budgétaire.
Je dirai également quelques mots du FISAC, ce fonds doté de ressources extra-budgétaires d'un montant supérieur au budget propre du secrétariat d'Etat. Cet instrument précieux de développement local, en milieu urbain comme en milieu rural, est d'une efficacité largement reconnue, c'est pourquoi je tiens à en assurer la pérennité.
Dans l'esprit de la nouvelle loi organique de 2001, il serait bon de permettre le contrôle de ce fonds par le Parlement, tout en le « sanctuarisant ». Ainsi, la commission des affaires économiques soutient la proposition de la commission des finances de transformer le FISAC en compte d'affectation spéciale.
Mais, plutôt que des crédits budgétaires, la bonne santé des artisans et des commerçants dépend de leur environnement économique, fiscal et administratif. A cet égard, je m'inquiète du ralentissement conjoncturel, et je me dois aussi de souligner trois motifs de mécontentement.
D'abord, le projet de loi d'orientation des petites entreprises et de l'artisanat, que vous annoncez tant, n'est toujours pas déposé. Sa discussion ne pourra donc aboutir avant les élections. Il est pourtant urgent de moderniser la petite entreprise et de favoriser sa pérennité et son développement.
Ensuite, l'application imminente des 35 heures aux petites et moyennes entreprises me préoccupe également. Malgré l'assouplissement récent du plafond d'heures supplémentaires, les 35 heures pèseront lourdement sur leur compétitivité. Au nom de bien hypothétiques créations d'emplois, vous sous-estimez gravement les grandes difficultés d'organisation et les surcoûts qu'impliquent nécessairement l'indivisibilité de l'emploi, les difficultés de recrutement et l'appartenance à des secteurs à faible potentiel de gains de productivité.
Enfin, simultanément, les petites entreprises vont devoir passer à l'euro. Le retrait du franc et l'introduction de l'euro sont des opérations lourdes, qui méritent compensation. Je compte sur vous, monsieur le secrétaire d'Etat, pour négocier rapidement avec les banques, fort du soutien des deux assemblées, un allégement des commissions perçues sur les paiements par carte, qu'il faut encourager, vous l'avez souvent dit.
Je vous demande aussi d'exonérer de droits d'enregistrement la conversion du capital à l'euro, qui permet d'arrondir la nouvelle valeur des parts en euros, et d'octroyer un délai supplémentaire pour les déclarations fiscales et sociales durant ces premiers mois chargés de 2002.
Partageant toutes ces préoccupations, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur les crédits consacrés aux PME, au commerce et à l'artisanat dans le projet de loi de finances pour 2002. (M. le rapporteur spécial et M. Ostermann applaudissent.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 24 minutes ;
Groupe socialiste, 21 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 7 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 6 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes. Je serai intransigeant !
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de budget du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce et à l'artisanat que nous examinons aujourd'hui subit, contrairement aux apparences et quoi qu'on en dise, une baisse de 3,1 %. M. le rapporteur pour avis vient de le rappeler.
Ces crédits et les actions correspondantes sont, en outre, disséminés sur plusieurs lignes budgétaires, ce qui révèle un manque évident de cohérence de cette politique.
En effet, force est malheureusement de constater qu'elle est loin d'avoir l'envergure nécessaire.
Ainsi, comme le souligne notre collègue M. Auguste Cazalet dans son excellent rapport, les crédits stagnent, alors que le ministère s'est vu attribuer de nouvelles missions en novembre 2000. Cet élargissement, voire cet éparpillement des attributions nuit à l'efficacité de la politique menée. Notre collègue M. Cornu a abondé dans ce sens.
Ce manque de cohérence se retrouve à plusieurs niveaux.
En ce qui concerne, tout d'abord, la création-reprise d'entreprise, et plus précisément la question de son financement, le Gouvernement analyse correctement le problème, mais y apporte des réponses contradictoires ou beaucoup trop timorées.
Ainsi, constatant que la véritable difficulté réside dans l'accès au crédit, rendu difficile du fait de la frilosité des banques, le Gouvernement propose de recentrer les crédits sur la dotation affectée au fonds de garantie d'emprunts.
C'est une mesure positive, tout le monde en conviendra. Il est toutefois dommage que vous vous soyez arrêté en si bon chemin, monsieur le secrétaire d'Etat. Votre projet de loi d'orientation en faveur de l'artisanat se fait toujours attendre, ainsi qu'un certain nombre de mesures simples et efficaces telles que la réévaluation de la quotité insaisissable prévue par la loi de 1909 à un niveau permettant de protéger l'habitation principale et son indexation sur l'indice du coût de la construction ou encore la limitation des possibilités de recours au cautionnement du conjoint.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous indiquer l'état d'avancement de ce projet de loi ainsi qu'éventuellement le calendrier de son examen par le Parlement ?
Pour compenser ce retard, vous auriez pu adresser un signe fort aux chefs de petites entreprises en proposant, dans le cadre du présent texte, un certain nombre de dispositions fiscales simples, afin notamment de faciliter les transmissions. Ainsi, pourquoi ne pas, d'une part, harmoniser le régime des sessions de droits sociaux et, d'autre part, permettre le fractionnement du paiement des droits d'enregistrement ?
Je souhaite maintenant évoquer la politique de simplification des formalités administratives, monstre du loch Ness !
Là encore, un certain nombre de signes encourageants ont été adressés aux petites entreprises. On peut citer, par exemple, le relèvement du seuil d'application du régime fiscal de la micro-entreprise.
En revanche, je ne vois que signes verbaux dans ce que vous présentez comme une mesure phare, à savoir la dématérialisation des formalités administratives. Je reste d'autant plus circonspect qu'il ne s'agit nullement de simplification ; les formalités sont en effet non pas supprimées, mais facilitées. En outre, avant de mettre en oeuvre une telle mesure, ne conviendrait-il pas de favoriser l'accès des petites entreprises, des commerçants et des artisans aux outils informatiques et de les aider à se former ? Il me semble qu'il faut procéder par ordre.
Qu'en est-il aussi de l'état d'avancement du chèque emploi-service dans les PME, régulièrement évoqué ?
Enfin, pour en terminer avec le thème de l'allégement des contraintes pesant sur les entreprises, je souhaite aborder les difficultés que pose aux petites entreprises, et plus particulièrement aux commerçants, le passage à l'euro, que Gérard Cornu vient d'évoquer : ces derniers se voient, de fait, confier une mission de service public, mais sans aucune contrepartie financière.
Ne conviendrait-il pas de compenser cette charge supplémentaire en créant un crédit d'impôt exceptionnel ? Cette mesure serait d'un grand secours pour les commerçants et, en outre, elle serait peu coûteuse, puisqu'elle ne serait applicable qu'entre le 1er janvier et le 19 février.
Il est important que les petits commerçants ne soient pas pénalisés. Or, selon des études réalisées récemment, cela ne semble nullement être le cas. En effet, des tests grandeur nature réalisés au sein de certaines enseignes ont mis en avant des taux d'erreur très importants. A ma connaissance, chez McDonald's ce taux est de 5 % du chiffre d'affaires journalier. Je n'ose imaginer ce qui va se passer chez les petits commerçants individuels, sachant que le personnel de ces grandes enseignes a bénéficié d'une formation ! Il conviendrait, par conséquent, là encore, d'accompagner par un crédit d'impôt exceptionnel la formation du personnel au passage à l'euro.
Permettez-moi d'évoquer maintenant un autre passage douloureux pour les petites entreprises, à savoir les 35 heures.
Il s'agit d'une véritable aberration, d'un coup porté à l'économie française en général et à l'artisanat en particulier. Monsieur le secrétaire d'Etat, je pense que vous avez bien reçu le message des boulangers ! A entendre ce message, il m'est revenu à l'esprit un vieil adage : « Le boulanger et l'artisan travaillent huit heures pour devenir patron. » Vous, vous le faites travailler seize heures pour qu'ils puissent le rester !
Là encore, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement semble avoir conscience de l'ampleur et de la gravité du problème, mais la façon dont il veut le résoudre est tout à fait incohérente.
En relevant par décret à 180 le contingent d'heures supplémentaires - ce qui est un pas positif - vous effectuez un grand écart. En effet, vous reconnaissez, d'un côté, le caractère inapplicable de la loi - un tel contingent revenant à rester aux 39 heures - et, de l'autre, vous vous entêtez à maintenir une loi inadaptée et vous repoussez le problème à 2004, laissant ainsi à vos successeurs le soin de le régler à votre place.
Je pense qu'il est temps pour le Gouvernement de faire face à ses responsabilités avant de casser nos PME car, en s'obstinant ainsi et en refusant d'admettre ses erreurs, il risque, je l'affirme, de porter gravement atteinte au dynamisme de notre tissu de petites entreprises.
Rappelons, en effet, que l'artisanat à lui seul représente 10 % de la population active, soit 2 500 000 personnes, et qu'il a créé, au cours des dix dernières années, quelque 500 000 emplois stables et très souvent qualifiés.
Enfin, je souhaite le souligner, en dehors du coût, l'une des principales raisons pour lesquelles les petites entreprises ne peuvent appliquer les 35 heures est qu'elles éprouvent des difficultés à recruter du personnel qualifié, surtout à temps partiel.
Or, là encore, la politique gouvernementale se révèle incohérente. D'un côté, on oblige les petites entreprises et les artisans à recruter pour compenser les 35 heures et, de l'autre, on ne porte nullement l'effort sur l'apprentissage.
En effet, un certain nombre de mécanismes incitatifs ont été récemment remis en cause. Il en va ainsi de la prime à l'embauche, qui, dans un premier temps, a été recentrée sur les publics non titulaires du baccalauréat, puis, dans un second temps, aux entreprises de moins de vingt salariés.
Ces dispositions ont pour conséquence de réduire l'attrait des contrats d'apprentissage pour les entreprises qui doivent consacrer beaucoup de temps à la formation de leurs apprentis, temps qui devrait tout naturellement être compensé financièrement.
Il est vraiment regrettable que le Gouvernement enraye ainsi la dynamique enclenchée depuis plusieurs années, puisque nous sommes passés de 120 000 apprentis en 1993 à 160 000 en 1999. Le niveau de qualification est lui aussi en hausse : les niveaux IV et supérieurs sont ainsi passés de 5 % en 1991 à 15 % en 1999. Cependant, plus de 100 000 offres d'emplois qualifiés restent non satisfaites.
En conclusion, cet ensemble d'incohérences difficilement acceptables montre, une fois de plus, que les PME, le commerce et l'artisanat ne constituent nullement la priorité du Gouvernement, alors que ce secteur forme le socle du dynamisme de notre économie. Cette orientation est d'autant plus dommageable que les chiffres de la croissance n'incitent nullement à l'optimisme et que, par conséquent, ce secteur aurait plus que jamais besoin d'être soutenu.
C'est pourquoi le groupe du RPR et moi-même ne pourrons voter les crédits qui nous sont proposés par le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget que nous examinons aujourd'hui met en évidence le poids des entreprises, du commerce et de l'artisanat sur le terrain de l'emploi.
Ce secteur concerne 1,6 million d'entreprises réparties sur l'ensemble du pays, participant du tissu économique de nos régions et contribuant ainsi avec vivacité à l'aménagement du territoire.
C'est également dans le cadre du développement local que s'inscrit le FISAC. Le groupe communiste républicain et citoyen est particulièrement attaché à la pérennisation du financement de ses actions.
Destiné à rétablir les activités commerciales et artisanales dans les zones urbaines et à les revitaliser dans les zones rurales, en partenariat avec les collectivités locales, les chambres de métier, les organisations professionnelles et le secteur associatif, le FISAC a aussi permis de répondre à des situations d'urgence, par exemple, lors de l'accident récent de l'usine AZF de Toulouse, ou bien lors des inondations dans la Somme ou en Bretagne.
Nous notons la progression de 3,5 % de sa dotation pour 2002. Votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, intègre mieux la question du développement de nos territoires et esquisse un choix, qu'il convient de poursuivre et d'amplifier, d'aide aux petites entreprises, jusqu'à présent trop souvent négligées au profit des grosses entreprises.
Par ailleurs, nous soutenons l'action de votre secrétariat d'Etat concernant la formation et la promotion des métiers auprès des jeunes, et nous vous engageons, monsieur le secrétaire d'Etat, à poursuivre la simplification des procédures administratives.
Partant de cela, le budget du commerce et de l'artisanat, comme d'ailleurs les sommes engagées en direction des petites et moyennes entreprises, ne constitue qu'une partie seulement de l'intervention publique dans ces domaines.
Les 61,03 millions d'euros de ce budget, par exemple, pèsent peu par rapport aux dépenses fiscales mises en oeuvre pour les secteurs du commerce et de l'artisanat, qu'il s'agisse des allégements d'impôt sur le revenu ou du remboursement accéléré des crédits de TVA.
Dans les faits, on peut observer, dans un premier temps, que ces crédits engagés par l'Etat en dépenses directes n'ont qu'une portée relativement incitative, même si nous pouvons fort bien approuver les sommes affectées à l'assistance et au conseil des commerçants et artisans ou à la bonification des crédits bancaires.
De ce point de vue, je me permettrai de rappeler que nous avons défendu, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un amendement visant à relever le plafond des livrets CODEVI et à créer une ligne spécifique de prêts bonifiés.
Nous estimons, en effet, que l'un des obstacles au développement du secteur commercial et artisanal est l'inégalité d'accès au crédit, que la banalisation des établissements financiers ces dernières années n'a pas vraiment permis de réduire.
C'est d'ailleurs à la lumière de cette situation qu'il faut analyser l'une des questions les plus directement liées à l'actualité : celle de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail à compter du 1er janvier 2002 pour les entreprises de moins de vingt salariés.
Si le rapport sur les petites entreprises et les entreprises artisanales, présenté par deux de nos collègues députés et remis au Premier ministre le 18 octobre dernier, précise que cinquante-deux accords de branche ont d'ores et déjà été signés dans les secteurs de l'artisanat et du commerce et concernent 2,5 millions de salariés, force est de constater, pourtant, que cette réforme sociale ne répond pas toujours aux attentes des employés.
Ainsi, dans la grande distribution et les grands magasins, secteurs employant 600 000 salariés, souvent à temps partiel « non choisi », l'application des 35 heures rime trop souvent avec flexibilité et annualisation. J'en veux pour preuve le nombre important de petits contrats horaires imposés.
La réduction du temps de travail ne peut donc laisser de côté l'aspiration légitime à moins et à mieux travailler des salariés des petites et moyennes entreprises des secteurs du commerce et de l'artisanat.
Plus généralement, cela pose deux questions : premièrement, l'aide la plus adaptée consiste-t-elle à alléger les cotisations sociales ? Deuxièmement, combien d'emplois seront créés dans ce cadre ?
Car, au-delà de la controverse sur la réduction du temps de travail, l'efficacité de l'action publique en direction du commerce, de l'artisanat et des PME se mesure aussi en entreprises maintenues en activité ou développées, en emplois créés et en investissements réussis.
Un véritable bilan d'efficacité peut ainsi être dressé et recouvrir, dès lors, une plus juste mesure de l'action publique.
Pour nous, l'ordre des priorités doit donc évoluer et quitter, en quelque sorte, la primauté affirmée de nouveau ce jour à l'allégement des obligations fiscales ou sociales.
Ces questions sont au centre du futur projet de loi relatif au commerce et à l'artisanat que l'on nous annonce pour le début de l'an prochain, et qui a été précédé par un large appel à contribution, appel entendu notamment par les organisations consulaires.
Nous souhaitons, pour notre part, que ce texte soit l'occasion de sortir des solutions habituelles sur ces questions, une bonne partie des difficultés de nos activités commerciales et artisanales trouvant réellement leur origine dans l'environnement financier dans lequel elles se déroulent.
Par ailleurs, le volet des conditions de travail et du niveau des salaires devra figurer dans ce futur projet de loi, car ces questions participent d'une revalorisation des métiers dans les PME, le commerce et l'artisanat.
Le dernier point sur lequel je souhaite intervenir est celui de l'introduction de l'euro sous sa forme fiduciaire.
La période de double circulation du franc et de l'euro, du 1er janvier au 17 février 2002, est redoutée par les professionnels du commerce de proximité, car ils seront en première ligne, si je puis dire, du passage à l'euro, d'autant que, selon une enquête « Cap euro », menée en septembre 2001 par la chambre de commerce et d'industrie de Paris, 30 % des PME et 53 % des commerçants interrogés n'avaient pas envisagé de basculer leur comptabilité à l'euro avant le 31 décembre 2001, et 20 % des PME pourraient n'être prêtes à passer à l'euro qu'au deuxième trimestre 2002.
En outre, comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner dans mon rapport pour avis sur les crédits de la consommation, pour que cet événement ne signifie pas l'exclusion de certains consommateurs, il faut poursuivre l'effort de pédagogie et surveiller les prix, afin d'éviter leur dérapage et une perte de pouvoir d'achat, particulièrement préjudiciable pour les consommateurs les plus vulnérables.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sous le bénéfice de ces quelques observations, le groupe communiste républicain et citoyen adoptera les crédits que vous nous présentez. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Dussaut.
M. Bernard Dussaut. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les PME, le commerce et l'artisanat sont au coeur d'une actualité particulièrement riche : la réduction du temps de travail, le passage à l'euro, l'annonce d'un projet de loi d'orientation attendu depuis près de vingt ans.
Ces entreprises sont des moteurs économiques et sociaux désormais pris en compte et qui ont leur mot à dire à l'heure des grandes mutations de notre société. On ne peut plus se contenter de dialoguer seulement avec les grandes entreprises.
J'aborderai d'abord la question des 35 heures.
On connaît les inquiétudes et la difficulté que suscite la mise en place des 35 heures dans les petites entreprises. Un accord avec le Gouvernement a été trouvé. Il est le signe du haut degré de responsabilité de ces chefs d'entreprise, qui ont compris qu'ils ne pouvaient aller à l'encontre d'une des grandes évolutions de notre société et que, pour demeurer, voire redevenir attractives, les entreprises devaient s'engager dans cette voie. Ils ont ainsi montré que les petites et moyennes entreprises étaient incontournables dans les négociations du dialogue social, qu'elles y avaient toute leur place et qu'il faudrait désormais compter avec elles.
Le président de l'Union professionnelle artisanale, M. Robert Buguet, l'a lui-même souligné lors du congrès de l'UPA, auquel vous assistiez, monsieur le secrétaire d'Etat : « L'ouverture des 35 heures a donné lieu à un dialogue social qui a permis de mettre sur la table tout un tas de problèmes qui ont pu être solutionnés » ; il a même ajouté que l'instauration d'un vrai dialogue avait été « une découverte très importante pour nos entreprises ».
Certes, la mise en place des 35 heures engendre des difficultés, mais elle permet aussi et surtout une prise de conscience réelle du fonctionnement de l'entreprise : ces entreprises, souvent familiales, se sentent désormais des entreprises à part entière, avec tout l'engagement social que cela implique, et c'est une dimension essentielle pour le développement de ce secteur d'activité.
Elles sont aussi au centre de l'actualité avec le passage à l'euro. Les commerçants, les artisans ont conscience que l'euro est une chance pour relancer la croissance, une chance pour élargir leurs commandes et leurs débouchés, mais ils s'inquiètent vivement du rôle central qu'ils vont avoir à jouer, faisant office, en quelque sorte, de bureau de change : ce sont eux qui, pendant la double circulation, vont introduire les pièces et les billets en euros et retirer les francs.
Un amendement adopté à l'Assemblée nationale, dans le cadre de la discussion des articles non rattachés au projet de loi de finances pour 2002, prévoit que le montant des commissions payées aux banques par les commerçants sur les paiements par carte bancaire n'augmentera pas d'une année sur l'autre. Mais ce n'est pas satisfaisant. L'amendement présenté par M. Migaud, qui proposait la suppression, pendant la période transitoire, de toute commission ou rémunération sur les paiements par carte inférieurs à 30 euros aurait été préférable.
C'est dans ce contexte très particulier que s'inscrit le budget pour 2002, un budget en lui-même modeste, complété par des crédits extra-budgétaires dont les montants cumulés sont supérieurs aux crédits budgétisés ; je vous fais grâce des chiffres, qui ont déjà été plusieurs fois exposés.
C'est un budget qui a des orientations bien marquées et qui permettra d'intervenir favorablement sur la vie quotidienne des petites et moyennes entreprises.
Tout d'abord, avec la facilité d'accès au crédit, les crédits du fonds de garantie d'emprunts accordés aux PME vont presque tripler pour 2002. Quant à l'enveloppe en matière de bonification d'intérêt, elle est normalement en baisse, les taux d'intérêt se maintenant à un niveau plutôt bas.
L'intervention est également forte en matière de création de petites et moyennes entreprises : le transfert des crédits de l'Agence pour la création d'entreprise dans ce budget en est l'illustration la plus frappante.
La mise en place de ce prêt l'année dernière a été une excellente initiative, car offrir la possibilité d'obtenir un prêt sans garantie ni caution est d'une réelle pertinence. En effet, l'obstacle majeur au financement réside moins dans les taux d'intérêt, qui demeurent bas actuellement, que dans le cautionnement, surtout pour un jeune créateur d'entreprise, ainsi que l'ont constaté avec justesse Didier Chouat et Jean-Claude Daniel dans leur rapport remis au Premier ministre le 18 octobre dernier.
Ainsi, au 30 septembre dernier, un peu plus de cinq mille prêts avaient été octroyés pour un montant de 6 500 euros et, pour 2002, des crédits supplémentaires seront dégagés.
Toutefois, le nombre de reprises d'entreprise continue de fléchir : elles affichent un recul de 3 % en 2000, et de 30 % en treize ans. Parallèlement, cent vingt mille chefs d'entreprise sont âgés de plus de soixante ans et sept cent mille ont plus de cinquante ans. Nous risquons donc d'être confrontés sous peu à un nombre important de cessations d'activités.
Monsieur le secrétaire d'Etat, peut-on espérer voir ce prêt étendu à la transmission et à la reprise d'entreprise, qui sont généralement moins bien aidées que la création et qui, pourtant, ont de réels atouts, que l'on se place du point de vue du chef d'entreprise ou de celui de la clientèle ou des élus, toujours soucieux de se situer dans une perspective de dynamique du territoire ?
L'autre point central dans la vie des petites et moyennes entreprises concerne l'apprentissage et la formation. A cet égard, il me paraît utile de rappeler quelques données.
Si la formation profite à un nombre croissant de salariés - 29 % y ont eu accès en 1999, contre 19 % en 1992 -, des inégalités demeurent. Ainsi, un ouvrier non qualifié sur huit a reçu une formation, contre un sur deux pour les cadres ; et les salariés d'entreprises supérieures à cinq cents personnes ont trois fois plus de chance de suivre une formation que ceux qui travaillent dans une entreprise de moins de dix salariés.
Des dispositions ont déjà été prises, par exemple la signature, en janvier 2001, d'un accord pour le développement de la formation des salariés et des chefs d'entreprise de l'artisanat du bâtiment. Le ministère de l'emploi y consacrera 33 millions de francs sur quatre ans. Mme Guigou a rappelé devant les artisans, au congrès de l'UPA, que cet accord permettrait de « soutenir la formation et le développement des compétences dans plus de trois mille entreprises artisanales et devrait concerner au moins cinq mille salariés, chefs d'entreprise et conjoints d'artisans ».
Il serait nécessaire d'étendre ce type d'accord à l'ensemble de l'artisanat.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, face à la difficulté de recrutement d'une main-d'oeuvre qualifiée, peut-on envisager l'ouverture de l'apprentissage aux plus de vingt-six ans, offrant ainsi une sorte de deuxième chance aux jeunes qui auraient eu un parcours un peu difficile ? Pouvez-vous nous dire où en est votre réflexion sur ce point ?
Je le répète chaque année, le rôle des petites entreprises, de nos commerçants, de nos artisans, est essentiel pour la vie économique de nos territoires ruraux. C'est pourquoi je comprends l'inquiétude des organisations professionnelles qui, à la lecture des chiffres, ont pu constater que les crédits d'animation économique étaient en baisse.
Fort heureusement, le FISAC, dont le succès n'est plus à démontrer, est en forte progression cette année encore, ce qui porte l'augmentation sur ces quatre dernières années à 46 %.
Dans le domaine fiscal, les politiques amorcées se poursuivent. Nous ne pouvons pas laisser dire que rien n'a été fait quand a été supprimée la part salariale de la taxe professionnelle, quand la TVA a baissé dans le bâtiment, quand ont été réduits les droits de mutation sur les cessions de fonds de commerce, quand l'impôt sur les sociétés a diminué de 15 % pour les PME dont le chiffre d'affaires est inférieur à 7,63 millions d'euros, quand la vignette automobile a été supprimée, quand les droits de création d'entreprise ont disparu.
Les prélèvements obligatoires sur les entreprises ont ainsi considérablement diminué depuis deux ans.
Par ailleurs, en ce qui concerne la protection sociale, le Gouvernement a pris des dispositions essentielles, saluées par les organisations professionnelles, que ce soit en matière de simplification et de clarification des démarches ou en matière de couverture sociale, avec le souci constant d'assurer un accès à une qualité de soins égale pour tous les Français.
Le régime des indemnités journalières des artisans a progressé et a été étendu aux commerçants et aux industriels. La loi de financement de la sécurité sociale de 2001 a aligné le niveau des prestations des artisans, commerçants et industriels sur celui des salariés du secteur privé. Enfin, des dispositions allant dans le sens de la simplification des formalités sociales des entreprises figurent dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.
Depuis quatre ans, le Parlement a également travaillé avec le Gouvernement à un meilleur accès au marché pour les petites et moyennes entreprises, notamment avec la loi sur les nouvelles régulations économiques : elle permet un meilleur équilibre des relations entre les différents acteurs et une protection des intérêts des petites et moyennes entreprises face aux grands groupes.
Le nouveau code permet d'ouvrir plus largement l'accès des marchés publics aux PME, de réduire les délais de paiement et de mieux protéger les sous-traitants.
Enfin, les simplifications administratives se poursuivent. Ainsi, un nombre important de déclarations annuelles ont été supprimées, et ce sont autant de facteurs de temps perdu et de tracasseries paralysantes qui ont disparu.
Toutes ces dispositions fiscales, sociales, économiques et administratives étaient des revendications fortes auxquelles le Gouvernement a répondu.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ces entreprises, petites par leur taille mais grandes par leur secteur économique, contribuent à l'emploi, à la croissance et à la confiance.
Le travail du Gouvernement, tout au long de cette législature, a permis leur essor et leur développement, en n'omettant jamais de prendre en compte le retard inquiétant qui avait été pris dans le domaine social. Les avancées sont plus que significatives.
Monsieur le secrétaire d'Etat, alors qu'il était attendu depuis bientôt vingt ans, vous avez été le premier à parler, dès votre arrivée au secrétariat d'Etat, d'un projet de loi d'orientation pour les petites et moyennes entreprises. Il sera soumis au Parlement très prochainement. Après un bon bilan, vous ouvrez ainsi d'autres perspectives pour une amélioration de leurs conditions de développement ; mon collègue et ami Pierre-Yvon Trémel s'exprimera plus particulièrement sur ce sujet.
Sachez seulement que nous nous félicitons de cette initiative et des efforts constants du Gouvernement pour aller de l'avant. Le groupe socialiste votera donc ce budget. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Mathieu.
M. Serge Mathieu. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, après trois années de baisse et deux années de stagnation, les crédits pour 2002 du secrétariat d'Etat diminuent de 3,1 % à structure constante.
Aux financements du secrétariat d'Etat s'ajoutent ceux du Fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC, qui devraient se maintenir par rapport à l'an passé, avec 410 millions de francs.
La réalité des chiffres est cruelle, monsieur le secrétaire d'Etat. Elle nous oblige à vous interroger sur le réel intérêt du Gouvernement pour le secteur des PME, du commerce et de l'artisanat.
Ce secteur, je tiens à le rappeler, occupe une place fondamentale dans notre économie et dans notre société.
Il se caractérise par son dynamisme et sa vitalité, dans le respect de la variété des métiers. Ainsi, en près de vingt ans, les entreprises de plus de deux cents salariés ont perdu plus de 800 000 emplois. Parallèlement, les entreprises de moins de vingt salariés créaient plus de 1,2 million d'emplois, et elles occupent aujourd'hui 37 % de l'effectif salarié, contre 11 % pour les entreprises de plus de cinq cents salariés.
Plus que cette force économique, l'artisanat et les PME, c'est un savoir-faire qui sait allier tradition et modernité ; c'est un ensemble de valeurs auxquelles nous sommes attachés, fait d'indépendance, d'esprit d'entreprise, de sens de l'effort et d'un souci d'adaptation constant.
Enfin, ce secteur joue un rôle indispensable dans notre société, car les PME renforcent les liens sociaux et participent de l'aménagement du territoire.
Malgré cela, votre politique économique n'est pas adaptée aux spécificités du secteur. Elle ne l'était pas les années passées, en période de croissance, et elle l'est encore moins dans ce budget qui ne veut pas tenir compte du retournement de conjoncture.
Nos artisans et nos entrepreneurs paient cher des choix aussi dogmatiques que les 35 heures. Ils sont, en effet, confrontés à un véritable dilemme : appliquer la loi coûte très cher et pose d'importants problèmes d'organisation ; mais la refuser rendra les recrutements encore plus difficiles, sachant que les PME ont déjà beaucoup de mal à recruter, en raison de salaires plus faibles que dans les grandes entreprises.
Face à la pression des entreprises, vous avez assoupli, mais insuffisamment, le dispositif des 35 heures.
Nos commerçants devront assumer seuls les conséquences du passage à l'euro, notamment la gestion d'un double fonds de caisse. Et c'est grâce à une initiative sénatoriale, prise lors de la discussion de la loi portant mesures urgentes de réforme à caractère économique et financier, la loi MURCEF, qu'a été mis en place un amortissement exceptionnel des matériels servant à l'encaissement en euros.
Quant aux dispositions de la première partie de ce projet de loi de finances, je retiendrai seulement l'article 13, qui instaure, au profit du budget général, un prélèvement de 105 millions d'euros sur l'ORGANIC, l'Organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce. Certes, cet organisme dégage un excédent structurel, mais pourquoi ne pas l'utiliser pour des programmes ciblés d'aide à l'artisanat ou au petit commerce ?
Plus grave, sur le moyen terme et sur le long terme, de nombreuses difficultés restent en suspens sans que vous cherchiez à y apporter un début de solution.
A quand, par exemple, la modernisation du statut de l'entreprise individuelle ? A quand la protection du patrimoine du commerçant ou de l'artisan et la préservation des droits de son conjoint ? A quand la mobilisation de l'épargne de proximité ? A quand des conditions de transmission adaptées ? A quand la fin du saupoudrage des réductions d'impôt ? A quand une réforme structurelle de notre fiscalité ? A quand une véritable baisse des charges sociales ? A quand la refonte des aides économiques des collectivités locales ?
A quand une politique dynamique d'aide aux PME pour conquérir des marchés à l'exportation, comme le préconise notre collègue André Ferrand dans son récent rapport sur l'expatriation ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Tout un programme ! (Sourires.)
M. Serge Mathieu. En résumé, une fois encore, ce budget est sans ambition et ne répond pas aux préoccupations de nos artisans, commerçants et entrepreneurs.
En effet, alors que, pendant quatre ans, le Gouvernement ne s'est pas particulièrement soucié des PME et du secteur artisanal, vous avez annoncé un projet de loi d'orientation pour l'année prochaine. Nous attendons ce texte avec impatience. Mais, pour l'heure, nous ne pouvons que nous étonner : pourquoi, dans la perspective d'un projet de loi d'orientation, les crédits budgétaires sont-ils en baisse ? Doit-on en conclure que certaines dispositions du projet de loi ne seront pas financées en 2002 ?
Trop de questions restent en suspens, monsieur le secrétaire d'Etat. C'est pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants ne votera pas le budget des PME, du commerce, de l'artisanat et de la consommation pour 2002. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, aborder la question des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat dans le cadre de ce projet de loi de finances, c'est nécessairement pointer du doigt une contradiction structurelle dont nous ne devons pas minimiser les enjeux.
En effet, comment ce secteur de l'économie française, dont personne ne saurait remettre en question le rôle moteur dans notre croissance, peut-il ne bénéficier que d'une demi-politique de soutien budgétaire ?
Les excellents rapports de nos collègues MM. Auguste Cazalet et Gérard Cornu ont clairement mis en évidence que ce n'est qu'en recourant à une modification comptable que le secrétariat d'Etat a pu se targuer d'une hausse de 2,4 % des crédits consacrés aux PME, au commerce et à l'artisanat. En réalité, plusieurs orateurs l'ont signalé, le budget de 2002 va connaître une baisse significative, précisément de 3,1 %, puisqu'il passe de 59,6 millions d'euros à 57,75 millions d'euros, ce qui n'est pas le reflet de l'importance stratégique de ce secteur d'activité.
Il ne s'agit pas pour autant de pratiquer un dénigrement systématique des mesures proposées.
Un certain nombre de points sont satisfaisants et répondent en partie aux doléances des artisans et des chefs d'entreprise. Je pense, notamment, à la simplification des formalités administratives ou au renforcement du soutien à l'innovation. On espère simplement que ces décisions se traduiront concrètement dans les faits et sur le terrain.
Néanmoins, ces mesures ne sont pas à la hauteur des difficultés rencontrées par les PME aujourd'hui et restent insuffisantes pour insuffler le dynamisme nécessaire à ce secteur essentiel pour l'emploi. Inutile, en effet, de se réjouir d'une tendance générale à l'augmentation de la création d'entreprises remarquée depuis 1999, dès lors que cet accroissement de 1,2 % seulement reste très en deçà de ce que l'on aurait pu attendre avec une croissance de 4 % du produit intérieur brut.
Face à ces indicateurs, et compte tenu du nouveau contexte économique international, dont nous subissons de plein fouet les effets, quelles mesures budgétaires avez-vous adoptées ?
Les crédits pour la formation professionnelle stagnent, alors que tous les acteurs socioprofessionnels s'accordent à dire que c'est là que réside l'une des clefs du développement à venir de ces entreprises.
De même, les crédits d'actions économiques sont en forte baisse - de 22,6 % -, passant de 15 millions d'euros à 12,2 millions d'euros.
Le budget pour l'animation économique, déjà en repli au cours des trois années antérieures, se révèle désormais insuffisant pour accompagner les PME dans les actions collectives menées par les organisations professionnelles et les chambres de métiers.
Enfin, les actions destinées spécifiquement aux PME ont subi une diminution sensible des aides budgétaires directes dans plusieurs domaines essentiels : l'agriculture et la pêche, alors que l'on sait à quel point les petits producteurs et les artisans ont été atteints par les crises sanitaires de ces dernières années, mais aussi le commerce extérieur, alors que l'implantation des entreprises françaises à l'étranger est soumise à de lourds handicaps.
Et c'est encore bien pire pour l'éducation nationale, la recherche et la technologie, dont les crédits aux PME sont passés de 1,43 million d'euros à 0,82 million d'euros, alors que la France connaît d'importants retards sur ses concurrents en matière d'innovation technologique et de formation professionnelle.
Face à cette stagnation du budget du secrétariat d'Etat, je m'interroge : où sont passées les promesses du Gouvernement de constituer un grand pôle budgétaire et administratif des petites et moyennes entreprises et de l'artisanat ?
Alors que la création d'une direction des entreprises commerciales, artisanales et de services, issue de la fusion entre la direction de l'artisanat, la direction du commerce extérieur et la mission pour les services, devait permettre la mise en place d'une politique ambitieuse d'aide aux PME, elle n'a abouti finalement qu'à des mesures parcellaires ou expérimentales qui n'ont pas apporté de réponses définitives aux difficultés rencontrées sur le terrain.
D'une part, la pression fiscale et la lourdeur des charges pénalisent les PME, qu'une série de mesures extrêmement simples permettraient pourtant de soulager. Je citerai l'application du taux de TVA réduit à 5,5 % pour les activités d'hôtellerie et de restauration traditionnelle, la réduction de la marge financière que représente la double immatriculation, à la fois au répertoire des métiers et au registre du commerce et des sociétés, la réduction de la base de la taxe professionnelle pour les professions libérales et la simplification globale des formalités administratives.
D'autre part, les PME doivent être accompagnées plus efficacement dans leur passage difficile aux 35 heures.
Tandis que les petites et moyennes entreprises revendiquaient plus de simplicité et de flexibilité, la loi d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail du 13 juin 1998 les a amenées à davantage de rigidité dans leur gestion et dans leur mode de recrutement, ce qui a nettement freiné l'emploi.
Il est donc indispensable que le conseil aux entreprises soit développé et que le Gouvernement accepte le principe d'une augmentation du contingent d'heures supplémentaires au-delà de ce qui a été fixé par le décret du 15 octobre 2001.
Enfin, et je sais que cette question occupe au premier chef cette assemblée, les fonds du FISAC doivent être augmentés et étendus au financement d'initiatives locales privées, sans lesquelles de nombreux artisans de communes rurales seraient totalement dépourvus de soutien.
Pour conclure, je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences que pourrait avoir sur le moral des entrepreneurs, des dirigeants de PME, des commerçants et des artisans un projet de loi de finances qui leur donnerait l'impression qu'ils sont les parents pauvres de l'économie française, alors que, en réalité, ils représentent un facteur fondamental de notre croissance et de notre emploi.
Au moment où les indications économiques montrent des signes forts du ralentissement de l'activité, il est du devoir du Gouvernement de donner des moyens suffisants à nos forces vives, afin que s'amorce le plus tôt possible le mécanisme de la relance. Votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, ne le permet pas ; je ne le voterai donc pas. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en abordant l'examen du dernier budget des PME, du commerce, de l'artisanat et de la consommation de la législature, comment ne pas souligner que ce budget concerne un pan essentiel, à tous égards, de notre économie et de notre organisation sociale ?
Il faut rappeler, en effet, que 99 % de nos entreprises comptent moins de cinquante salariés : elles sont 2 378 000, hors secteur agricole, elles réalisent 36 % de la valeur ajoutée et emploient la moitié des salariés de l'économie marchande, participant largement à la puissance économique de notre pays.
L'artisanat, lui, représente 2,5 millions d'emplois et se veut la « première entreprise de France ».
Ainsi, l'artisanat et les petites entreprises constituent un tissu de microstructures commerciales et de services qui sont au coeur de la vie et du développement local et façonnent le visage de la France du quotidien.
Rappelons également qu'au regard de la conjoncture qui se profile pour l'année à venir, avec le double passage à l'euro et aux 35 heures, il est avéré que la croissance sera, en 2002, principalement tirée par deux moteurs : la consommation intérieure et le dynamisme des PME.
Au vu de ces éléments, on peut dire, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'en dépit de la modestie de vos moyens vous agissez au coeur de la réussite économique et sociale de notre pays et que votre action se situe en pleine cohérence avec les priorités accordées, depuis 1997, à la croissance et à l'emploi par le gouvernement de Lionel Jospin.
C'est pourquoi il serait assez peu pertinent de nous cantonner à discuter des crédits qui vous sont affectés pour 2002, soit 61 millions d'euros.
En effet, vous nous présentez un budget d'intervention qui possède un effet de levier considérable allant bien au-delà de l'enveloppe qui lui est allouée, à laquelle il faut adjoindre d'importants moyens extra-budgétaires.
Par ailleurs, à l'heure du bilan, il convient de mettre toute évaluation en perspective sur les cinq années de la mandature, au regard, notamment, de la politique économique d'ensemble du Gouvernement en faveur des entreprises.
Vos crédits pour 2002 sont appelés à financer essentiellement quatre types d'actions : la formation dans l'artisanat et le commerce, l'amélioration de la compétitivité des PME, le financement des bonifications d'intérêt, la participation à un fonds de garantie.
Deux priorités - l'aide à la formation et les aides à la création - retiennent notre attention.
L'aide à la formation menée par votre secrétariat d'Etat recouvre des actions très diverses : analyse des besoins, sensibilisation aux métiers de l'artisanat, formations de longue durée, formation à la création d'entreprise. L'effort financier est maintenu à 15,5 millions d'euros, mais il faut savoir que les crédits consacrés par l'Etat à l'apprentissage sont principalement inscrits au budget du ministère de l'emploi.
A cet égard - je me plais à le rappeler -, l'un des titres d'excellence de l'artisanat tient à sa contribution déterminante à la formation professionnelle par le moyen de l'apprentissage. Faisant fi du cliché de « voie de rattrapage » qu'on s'obstine à lui accoler, plus de 300 000 jeunes ont choisi cette voie moderne et exigeante par laquelle, y compris pour les métiers traditionnels, ils sont formés aussi aux technologies les plus performantes.
L'apprentissage représente le « coeur nucléaire » de ce secteur : un artisan sur deux est un ancien apprenti, un apprenti sur deux créera sa propre entreprise. Comment, dès lors, contester que l'apprentissage est une « grande école », celle des entrepreneurs, et qu'il mérite tout notre soutien ?
Pourtant le problème du financement de l'apprentissage reste un sujet de préoccupation, monsieur le secrétaire d'Etat ; j'aimerais recueillir votre sentiment sur ce point et, tout particulièrement, connaître les suites qui seront données aux mesures adoptées dans la loi de modernisation sociale.
Concernant les aides à la création d'entreprise, celles-ci offrent désormais un panel assez complet de mesures : création de l'Agence des petites et moyennes entreprises, l'ADPME ; accès au crédit, avec les bonifications d'intérêt, les fonds de garantie d'emprunts de la SOFARIS, la Société française pour l'assurance du capital-risque et les prêts à la création d'entreprise, les PCE ; recours à l'APCE, l'agence pour la création d'entreprise ; allégement des charges...
L'année 2000 a été une bonne année pour la création d'entreprises. Auriez-vous des informations sur les tendances observées pour l'année 2001, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Comme l'a dit mon ami Bernard Dussaut, il nous faut aussi accorder beaucoup d'importance à la transmission des entreprises. Trop d'entre elles meurent faute de repreneurs, et des « savoir-faire » disparaissent dans nos villes et dans nos communes. Or 40 % des chefs d'entreprise ont plus de cinquante ans.
Vous êtes très sensible à cette situation, monsieur le secrétaire d'Etat, nous le savons. Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait d'accentuer les efforts en faveur de la transmission ? Je souscris sur ce point à la suggestion, qui a été formulée ailleurs, de faire renaître, par exemple, des centres interprofessionnels de formation des apprentis, des CIFA, dans une « nouvelle version ».
Je m'arrêterai brièvement sur quelques points d'actualités qui ont déjà été évoqués à cette tribune.
Le premier concerne l'aide au passage à l'euro. Le secteur du petit commerce et de l'artisanat nous sollicite fortement afin qu'un certain nombre de mesures de facilitation soient prises.
Je sais que certaines de ces demandes ne sont pas recevables, mais je connais aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, l'extrême attention que vous portez à ce dossier et votre capacité d'influence pour que des solutions adaptées aux petits commerçants et artisans puissent être mises en place par le réseau bancaire et par l'Etat. Peut-être pourrez-vous nous en dire plus à cet égard ?
Autre domaine très sensible : le passage aux 35 heures pour les entreprises de moins de vingt salariés. De très nombreux accords de branche sont d'ores et déjà passés. Des mesures d'assouplissement ont été prévues par le décret du 15 octobre dernier. Elles étaient nécessaires au regard, notamment, des difficultés de recrutement que des entreprises connaissent déjà dans certaines activités et dans certains bassins d'emplois ; mais nous ne devons pas nous tromper de siècle. Nous devons aussi être très conscients que le passage aux 35 heures peut être un facteur d'attractivité, de dynamisme pour les PME. C'est ainsi que nombre d'entre elles l'interprètent.
Des difficultés subsistent dans certaines branches, et nous connaissons votre volonté de travailler branche par branche, secteur par secteur. De nouveaux assouplissements qui concerneraient certains métiers de bouche ont été annoncés. Pourriez-vous nous apporter des informations à ce sujet ?
Le FISAC est régulièrement évoqué à l'occasion de la discussion de votre budget. L'augmentation de ses crédits depuis quatre ans va de pair avec un recentrage de leur utilisation sur la politique des territoires. C'est une bonne chose, et cette politique est un succès ; mais cela se traduit parfois par des délais d'attente trop longs dans l'attribution des crédits. Ne pensez-vous pas, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'une gestion déconcentrée, accompagnée d'un renforcement des moyens humains des délégations régionales au commerce et à l'artisanat, les DRCA, atténuerait cet inconvénient ?
Enfin, la discussion budgétaire offre l'occasion de ranimer le débat autour des ressources des chambres de métiers. L'Assemblée nationale a porté le droit fixe à 99 euros ; nous allons discuter dans un instant un amendement qui vise à le relever à 107 euros. Peut-être pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, prendre l'initiative d'un bon compromis ?
Mes amis et collègues députés, Didier Chouat et Jean-Claude Daniel, ont remis le 18 octobre dernier au Premier ministre un très bon rapport en introduction à la réflexion sur le futur projet de loi d'orientation. Ce rapport ambitionne de remettre « l'homme au coeur de l'économie » et appelle à une volonté politique forte à l'égard des entreprises artisanales et des petites entreprises. Il formule plusieurs propositions : former, accompagner, financer, informer, mais aussi simplifier, faciliter, mutualiser et territorialiser. Ce rapport a été très bien reçu par la profession et a fait naître de grands espoirs.
Vous pourrez certainement nous éclairer, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la date de la présentation en conseil des ministres du projet de loi d'orientation et sur celle de son dépôt au Parlement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes arrivé à votre poste voilà un peu plus d'un an. Vous avez beaucoup visité, beaucoup observé, beaucoup écouté. Vous vous êtes beaucoup engagé pour améliorer certains dispositifs, comme ceux qui concernent l'animation économique, et pour apporter les assouplissements nécessaires dans le passage aux 35 heures.
En raison même de ce volontarisme, dont nous vous savons gré, il faut que vous puissiez présenter devant le Parlement le projet de loi d'orientation que vous avez voulu.
Le dynamisme des PME est celui de la France. Pour elles, nous savons pouvoir compter sur votre dynamisme, comme vous pouvez compter sur nous pour voter les crédits que vous nous présentez. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. A la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat et à la consommation. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, brièvement mais de façon argumentée, revenir sur certains aspects de cette discussion budgétaire.
Il est des points, mesdames, messieurs les sénateurs, sur lesquels nous pouvons être d'accord. Il s'agit de l'importance de ce secteur du commerce et de l'artisanat, il s'agit de son implication territoriale, des créations d'emploi qu'il a su susciter, de son effet sur la croissance et, plus globalement, sur l'ensemble de l'économie, mais aussi de son rôle dans l'aménagement du territoire et dans la création des richesses nationales.
Sur tous ces points, les analyses de chacune et chacun des intervenants, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, étaient pertinentes, et le secrétaire d'Etat ne peut qu'y souscrire.
Je voudrais d'abord remercier les rapporteurs de leur travail. Même si nous partageons un grand nombre de points de vue, nos analyses divergent cependant sur les crédits. Mais mon expérience de plus de quinze ans au Parlement et de quelques mois au secrétariat d'Etat m'a appris qu'un budget n'est jamais ni tout noir ni tout blanc, ni complètement mauvais ni parfaitement bon. Il comporte ses forces et ses faiblesses, permet des avancées, dont j'essaierai de vous convaincre. Je vous démontrerai ensuite que les carences soulignées par certains d'entre vous ne correspondent pas à la réalité.
Je souhaite également souligner l'importance du travail accompli cette année encore par Mme Terrade, particulièrement sur les crédits de la consommation, et je l'en remercie.
Je remercie aussi chacun des parlementaires qui, tout en défendant leurs propres analyses, ont fait preuve de modération. J'ai apprécié à la fois le ton et la façon dont ils ont exprimé leurs arguments.
Le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter est, certes, modeste, mais il faut convenir qu'il est, malgré tout, en augmentation, et ce sans artifice. Les crédits consacrés à l'animation économique, au développement des territoires comme à l'accompagnement des différentes actions du secrétariat d'Etat passent en effet de 124,4 millions d'euros en 2001 à 128,1 millions d'euros en 2002 puisque, aux moyens budgétaires, il faut ajouter les moyens du FISAC.
Ce projet de budget ne sacrifie aucune des priorités du secrétariat d'Etat, qu'il s'agisse du développement économique, des contrats de plan Etat-région ou de la formation, dont plusieurs d'entre vous ont parlé avec beaucoup de tonicité.
Les crédits de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, passent de 187 millions d'euros à 191 millions d'euros ; les moyens de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments sont augmentés : 2,7 millions d'euros en 2001, 3,12 millions d'euros en 2002.
Je souhaitais que l'examen du projet de budget de mon secrétariat d'Etat soit l'occasion pour nous de discuter ensemble de la politique du Gouvernement en faveur des PME, de l'artisanat, du commerce et de la consommation. MM. Cazalet et Cornu, comme les orateurs qui leur ont succédé, ont répondu à ce souhait.
Ce projet de budget vise donc trois objectifs : soutenir et amplifier la politique du Gouvernement en faveur des PME, renforcer la création des entreprises sur les territoires, améliorer la sécurité et l'information des consommateurs.
A ce stade de mon propos, je rappelerai quelques chiffres relatifs à l'environnement économique des entreprises, sujet sur lequel votre rapporteur spécial est intervenu pour regretter que l'intégration du secrétariat d'Etat dans le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie n'ait pas produit la synergie financière que l'on pouvait en attendre. Je rappelle que, depuis cinq ans, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a pris des mesures fiscales dont l'effet sur l'environnement financier des entreprises est sans précédent.
M. Gérard Delfau. C'est vrai !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. La baisse de la taxe professionnelle a ainsi représenté, monsieur le rapporteur spécial, près de 13 milliards d'euros entre 1999 et 2002. La suppression de la surprime de l'impôt sur les sociétés a valu aux entreprises un gain de 3 milliards d'euros alors que la réduction du taux de l'impôt sur les sociétés a représenté pour les PME un gain de 1,5 milliard d'euros. On peut ajouter à ces mesures la baisse du taux de la TVA pour les entreprises du bâtiment.
Je me suis rendu ce matin dans un département où j'ai rencontré des artisans et des commerçants : ils ont souligné l'importance de l'environnement financier et se sont à ce propos félicités de la réforme des droits sur les donations et de la suppression de la vignette automobile, qui, désormais, grâce au Parlement, profitera aussi aux artisans jusqu'à trois véhicules de moins de 3,5 tonnes.
Ces chiffres démontrent que les artisans, les commerçants et les PME ont bénéficié, au cours de ces cinq années, - surtout des trois dernières -, d'allégements fiscaux et de crédits supplémentaires.
Je poursuis la liste : les crédits récemment dégagés en faveur des biotechnologies par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui a annoncé qu'une importante somme de 100 millions d'euros y serait consacrée ; les exonérations fiscales ; les prêts consentis par l'agence pour la création d'entreprises, l'APCE, dont le budget de 3,28 millions d'euros s'insère depuis deux ans dans les dotations du secrétariat d'Etat ; les garanties de la SOFARIS, la société française pour l'assurance du capital-risque ; le taux de la TVA.
Voilà autant de mesures financières par le biais desquelles le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a pleinement participé à l'expansion et au développement des entreprises. Le rapport de M. Cornu, que j'ai lu avec attention, montre qu'elles se portent mieux et génèrent plus d'emplois ; même si des interrogations demeurent, force est de constater qu'elles ont créé et développé des richesses au cours des trois dernières années.
Je vous rappelle par ailleurs que le budget du commerce et de l'artisanat était, sous d'autres gouvernements, lorsqu'il avait à sa tête M. Madelin ou M. Raffarini, en constante diminution. Je reconnais qu'il n'a pas augmenté beaucoup depuis 1997, mais Mme Lebranchu avait réussi d'abord à stabiliser les crédits, ensuite à inverser la tendance. Le FISAC a ainsi vu ses crédits passer de 100 millions de francs à 440 millions de francs.
M. Pierre-Yvon Trémel. Eh oui !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Vous voulez « sanctuariser » ces fonds. Je suis d'accord pour les inscrire sur un compte aujourd'hui. Voilà qui devrait prouver que nous avons avancé dans ce domaine !
MM. les rapporteurs et quelques intervenants, parmi lesquels MM. Ostermann et Demuynck, ont également évoqué, pour nous le reprocher, le prélèvement sur les fonds provenant de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA.
Je n'ai de leçon à donner à personne et je ne jette pas d'anathème, mais ceux qui, eux, donnent des leçons devraient vérifier les chiffres ! Quels ont été les montants prélevés ? En 1997, rien ! En 1998, rien ! En 1999, rien ! En 2000, rien ! En 2001, dans le projet de budget pour 2002 - vous l'avez compris, les conditions sont plus difficiles -, 105 millions de francs. C'est ce prélèvement que vous voulez annuler.
Je rappellerai simplement, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les parlementaires, que le Gouvernement avait prélevé au profit du budget de l'Etat 103,7 millions de francs sur la TACA en 1995 et 45,7 millions de francs en 1996. En deux ans, vous avez donc prélevé deux tiers de plus que nous en cinq ans !
M. Pierre-Yvon Trémel. Voilà !
M. Bernard Dussaut. C'est la vérité !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. On peut donc dire que nous avons su être modérés, d'autant que les sommes prélevées seront utilisées au bénéfice des artisans et des commerçants.
M. Yves Fréville. Le plus gros prélèvement a été fait en 1991, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je ne suis remonté que sur cinq années, je n'ai pas voulu être manichéen...
M. Yves Fréville. C'est vous qui avez commencé en 1991 !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. ... et aller jusqu'en 1993, car la différence entre vous et nous aurait été trop flagrante. C'est pourquoi je me suis arrêté en 1995.
M. Yves Fréville. En 1991, c'est vous qui avez donné le mauvais exemple !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Soutenir le développement des PME, et particulièrement de l'artisanat, tel est l'objet de ce projet de budget.
Vous avez beaucoup parlé de l'animation économique du secteur de l'artisanat. Nous avons redressé la situation de deux façons.
D'abord, nous avons distingué les financements de fonctionnement des financements de projets. Après une période de rodage, plus de 300 conventions ont été signées. On peut considérer que c'est un premier succès.
Ensuite, nous avons apporté des moyens financiers aux acteurs de l'artisanat. Cela a été possible grâce à l'augmentation de la dotation du FISAC, dont j'ai déjà parlé.
Au total, les aides au développement économique des entreprises n'ont pas diminué. Elles ont même augmenté : 151 millions de francs en 1999, 154 millions de fancs en 2000 et 2001, et elles atteindront 156 millions de francs en 2002, soit près de 24 millions d'euros.
Nous avons donc là une base solide pour l'action économique sur les territoires.
Quant aux ressources des chambres de métiers, en première lecture, l'Assemblée nationale a voté une augmentation de 3,07 %, mais un amendement a été déposé sur ce point et nous l'examinerons tout à l'heure.
Je garde avec vous la conviction que le développement économique et l'augmentation du droit fixe vont dans le bon sens.
Vous l'avez compris, je recherche les points d'équilibre, mais je reste dans le même temps ouvert au débat en vue de faire bouger les lignes et, notamment, d'avancer dans la direction d'un financement pérenne des chambres de métiers.
C'est la même démarche volontaire que nous avons entreprise pour la revalorisation des contrats Etat-région, volet fondamental de l'action du secrétariat d'Etat.
Pour le XIIe Plan, grâce aux élus, grâce aux choix faits en région et arbitrés par le volet Etat, pour le Premier ministre, nous sommes passés à 602 millions de francs programmés pour la période 2001-2006, contre 269 millions de francs pour la période précédente.
Je m'étais engagé l'an dernier devant vous à obtenir une revalorisation des crédits Etat-région pour cette année. Cette année marquera une première étape du rattrapage : les crédits de paiement augmentent de 0,54 million d'euros et - plus important en début de contrat de plan - les autorisations de programme sont majorées de 1,8 million d'euros.
Ce projet de budget traduit un plan véritable pour faciliter la création et la transmission des petites entreprises sur nos territoires. Je ne rappellerai pas, comme je l'avais fait l'année dernière, tout ce qui a déjà été réalisé en faveur de la création d'entreprise, me contentant d'indiquer que le prêt à la création d'entreprise, le PCE, commence à trouver sa vitesse de croisière. Nous avons en effet passé le cap des 6 000.
La politique macroéconomique en faveur de la croissance et de l'emploi reste au coeur de l'action du Gouvernement, telle que le Premier ministre l'avait énoncée dans sa déclaration de politique générale en 1997.
Il me revient plus modestement de travailler sur la microéconomie de la petite entreprise : mesures fiscales, mesures sociales, simplifications administratives, réforme du code des marchés publics.
Le secrétariat d'Etat a vocation à être au centre de l'action du Gouvernement en matière de création d'entreprise. C'est dans cet esprit que le budget de l'APCE, soit 3,28 millions d'euros, s'insère désormais, je l'ai dit, dans la dotation de mon secrétariat d'Etat. Le fait que les moyens de ce dernier soient maintenant regroupés a été salué comme une avancée.
J'ai conscience que notre effort financier en faveur de la création d'entreprise doit s'amplifier. Dans la droite-ligne de ce que nous avons entrepris ces deux dernières années, la dotation de la SOFARIS passe de 3,35 millions d'euros à 9,15 millions d'euros. Les entreprises ont en effet davantage besoin aujourd'hui de garanties que de prêts bonifiés.
Je veux cependant redire ici que cette action ne se fera pas au détriment des encours de prêts bonifiés, dont le volume atteindra 3,5 milliards de francs, soit plus de 530 millions d'euros, en 2002.
Faciliter la création d'entreprise, cela signifie aussi accompagner le développement des PCE, sensibiliser les jeunes aux métiers de l'artisanat - le secrétariat d'Etat y consacrera 2,78 millions d'euros l'an prochain - et former de futurs chefs d'entreprises commerciales, formation à laquelle seront alloués 0,76 million d'euros.
Avec deux millions d'entreprises et 44 % des salariés, ce secteur n'a ni la reconnaissance ni le statut que devrait lui valoir son rôle dans le développement économique des territoires. Nous devons donc poursuivre l'effort en sa faveur.
Vous avez beaucoup parlé, les uns et les autres, du projet de loi de développement des PME. Entré au Gouvernement le 18 octobre 2000, j'ai obtenu, avec les responsables socio-économiques, de disposer d'une loi d'orientation pour les très petites entreprises de l'artisanat et du commerce.
Nous avons commandé un rapport à deux parlementaires, qui nous l'ont remis le 11 septembre dernier. En collaboration avec ces deux élus et des représentants des chambres consulaires, des chambres de métiers et des chambres de commerce, nous avons abouti à la rédaction d'un projet de loi dont la dernière mouture sera achevée à la fin de cette semaine. Il devrait être déposé devant le Conseil d'Etat à la fin de la semaine prochaine et, vraisemblablement, il sera présenté en conseil des ministres au cours de la première quinzaine du mois de janvier. Il pourrait ainsi être inscrit à l'ordre du jour du Parlement à la mi-février, avant la fin de la session.
Nombre d'entre vous m'ont interrogé sur ce projet de loi. Il proposera un statut moderne des hommes et des entreprises, traitera des subsides des familles, de la protection des artisans, du statut des conjoints, de la formation et de la mutualisation sociale. Il visera aussi à faciliter le développement des entreprises grâce à la simplification des statuts pour l'impôt sur les sociétés, à l'étalement des cotisations, à l'accès au crédit, à la prévention des difficultés, à des conditions de transmission permettant la sauvegarde de l'entreprise et, enfin, à des mesures fiscales et financières.
Au passage, j'indique que je ne suis pas opposé à la proposition de plusieurs d'entre vous - MM. Trémel et Dussaut, Mme Terrade... - de transformer le PCE en prêt à la transmission d'entreprise.
Enfin, le troisième chapitre du projet de loi visera à améliorer l'environnement des entreprises.
J'en viens à la politique en faveur de la consommation. Elle a deux objectifs : la sécurité de l'information des consommateurs et la promotion d'une méthode, à savoir la concertation.
J'aborderai en premier lieu la sécurité et l'information des consommateurs.
Notre société a traversé, vous l'avez dit, des crises graves, qui, je m'en rends compte chaque jour dans les départements - j'en ai parcouru, au cours de ces onze mois, près de cinquante - ont laissé des traces.
Je me suis déjà exprimé devant vous sur différents sujets : l'euro, l'étiquetage, les OGM, la viande bovine, le vin de table, le commerce électronique, la téléphonie, les prix, pour ne citer que les plus importants. J'ai souligné chaque fois que la volonté du Gouvernement se situait clairement en faveur d'un haut niveau d'information et de protection du consommateur. Pour réussir, des moyens budgétaires exceptionnels ont été mis en place, notamment pour équiper les laboratoires de la DGCCRF, en 2001. L'an prochain, l'effort d'investissement sera poursuivi et, dans le même temps, le budget de fonctionnement augmentera de 2,2 %.
J'ai aussi exposé notre action au sein de l'Union européenne en faveur d'une agence européenne de sécurité des aliments - la localisation de son siège sera décidée lors du prochain sommet européen - et sur les dossiers de l'étiquetage, des OGM, de la protection des consommateurs ou de l'internet. Sur chacun de ces dossiers, la France a montré qu'elle donnait la priorité aux droits des consommateurs.
La méthode que j'emploie est la concertation. A ce sujet, je souhaite vous dire quelle a été mon approche et comment je souhaite poursuivre mon action dans les mois qui viennent.
Le mouvement consommateur est d'autant plus utile qu'il est fort et organisé, que ses mandants s'engagent lorsqu'ils s'expriment publiquement et que la diversité des sensibilités est respectée. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé, et obtenu, le maintien de l'intégralité des crédits en faveur des associations de consommateurs. J'ai également obtenu que l'Institut national de la consommation, l'INC, voit sa subvention augmentée de 2 millions de francs, inscrits en loi de finances rectificative.
Sur les grands sujets d'actualité, le Gouvernement a souhaité améliorer la qualité de la concertation avec les consommateurs. Ces derniers sont désormais pleinement associés à la réflexion et au débat public qui s'est à nouveau ouvert sur les OGM. Ils ont activement participé aux débats sur la filière bovine.
Dans nos tables rondes, au travers des entretiens trimestriels, lors des travaux du Conseil national de la consommation, ou du Conseil national de l'alimentation, le mouvement consommateur est un acteur impliqué dans les choix du Gouvernement.
Telle est, mesdames, messieurs les sénateurs, l'économie générale du projet de budget que j'ai l'honneur de soumettre à votre approbation.
Je me suis efforcé de montrer la cohérence de nos choix. Au sein du Gouvernement, je suis en charge, sous l'autorité de Laurent Fabius, de l'environnement microéconomique des PME. La cohérence s'exprime dans les engagements que j'ai pris devant vous l'an dernier pour le développement économique sur les territoires, la création des PME, l'évolution du statut de l'artisanat.
Elle apparaît enfin dans la méthode en matière de consommation, méthode qui repose sur des avancées concertées en faveur d'une plus grande sécurité du consommateur et d'une meilleure information.
Il est, bien sûr, de mon devoir de tenir mes engagements et d'atteindre les objectifs que j'ai exposés devant vous.
Vous savez que j'agis aussi par passion, la passion pour nos territoires, que vous avez également évoqués et défendus, ainsi que la conviction que les PME font la réalité de la richesse économique de nos pays, qu'elles doivent être mieux reconnues dans leur rôle et que les chefs d'entreprise doivent être davantage soutenus dans leurs projets.
Je sais aussi, comme vous, que la confiance du consommateur se gagne et se garde par une politique rigoureuse en matière de sécurité et d'information et que cette confiance, on le voit bien aujourd'hui, reste le meilleur moyen de soutenir la croissance. Réussir pour l'emploi, les entreprises, les consommateurs et nos territoires constitue une ambition collective que nous partageons tous.
Je répondrai maintenant à quelques-unes des questions que vous avez soulevées, mesdames, messieurs les sénateurs.
S'agissant des 35 heures, thème que vous avez tous évoqué, la réduction du temps de travail a été présentée par les uns comme un handicap pour les entreprises, pour les autres comme une chance de restructuration et de développement.
Cependant, je me trouvais ce matin encore en présence d'artisans, appartenant notamment aux métiers de bouche, et leur discours n'était pas aussi manichéen. ( M. Trémel approuve. )
En outre, certains d'entre vous, en particulier M. Mathieu, ont relevé que les métiers pour lesquels le passage aux 35 heures se révélait ardu rencontraient parallèlement les plus grandes difficultés de recrutement.
Mme Odette Terrade. Absolument !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je n'y vois pas une relation de cause à effet automatique, mais cela pose le problème de l'attractivité de ces métiers, mesdames, messieurs les sénateurs !
Mme Odette Terrade et M. Pierre-Yvon Trémel. Bien sûr !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Or les jeunes finiront par se détourner d'un secteur qui resterait à l'écart du progrès social et économique !
Mme Odette Terrade. Tout à fait !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Comment voulez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'un jeune choisisse demain d'exercer un métier de bouche ou de rejoindre une petite entreprise du bâtiment où il travaillera 42 ou 43 heures s'il peut prétendre au même salaire, dans un autre secteur, pour 35 heures de travail ? (M. Ostermann proteste. )
M. Pierre-Yvon Trémel. Bien sûr !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Ce progrès a été entériné, mais qu'en est-il des assouplissements ? Je voudrais rappeler qu'ils sont déjà prévus par la loi et que le passage aux 35 heures ne coïncidera pas avec la mise en circulation de l'euro. Personne ne passera aux 35 heures le 1er janvier prochain, même si telle sera la durée légale de travail à cette date : c'est un bien pour les salariés, c'est aussi un accord « gagnant-gagnant » pour les entreprises. (Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.) Ainsi, cet assouplissement fera que le décompte des heures supplémentaires n'interviendra, l'année prochaine, qu'à compter de la trente-huitième heure travaillée.
Par conséquent, pour nombre d'entreprises, les 35 heures ne seront effectivement instaurées qu'en 2004, 2003 étant une année d'observation. De plus, dans les entreprises de moins de onze salariés, un accord d'entreprise peut être négocié entre les salariés et le chef d'entreprise, sans qu'il soit nécessaire d'exercer un quelconque recours par ailleurs.
En outre, j'avais souhaité que le Gouvernement réfléchisse à d'autres assouplissements. Dans son arbitrage, M. le Premier ministre a approuvé des mesures permettant de satisfaire une demande formulée d'abord par la CGPME, puis reprise par la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment, la CAPEB, et l'Union professionnelle artisanale, l'UPA. Je crois donc que le dialogue que nous entretenons directement avec les organisations est beaucoup plus fructueux et positif que cela n'a été dit !
En ce qui concerne la mise en circulation de l'euro, je puis répondre aujourd'hui à ceux qui, au mois d'août encore, agitaient le chiffon rouge de la récession et annonçaient des difficultés, voire une catastrophe, que les engagements du Gouvernement en la matière sont parfaitement tenus et que les problèmes qui peuvent subsister perdront de leur acuité au fil des semaines à venir.
Pour les entreprises, qui ont été défendues ici avec talent, le passage à l'euro est à 92 % déjà réalisé ou sur le point de l'être. Chaque entreprise a consenti l'effort de formation nécessaire, a acheté les matériels, les logiciels de comptabilité et les terminaux pour points de vente indispensables, a préparé son approvisionnement en billets et en pièces : je crois que nous devons d'ailleurs saluer l'effort accompli par les chefs d'entreprise.
Certes, le passage à l'euro a un coût pour les entreprises, mais cela est vrai pour tout le monde et la règle européenne qui prévaut en la matière veut que chacun acquitte les dépenses qui le concernent. Au niveau de l'Etat, il n'existe donc pas de « cagnotte » liée au passage à l'euro. Si le projet de budget fait apparaître que 3,5 milliards de francs de crédits sont inscrits pour la fabrication des pièces, il faut savoir que celle-ci a coûté 3 milliards de francs par an à l'Etat depuis 1998. Il en va de même pour les billets, et le passage à l'euro ne rapportera donc rien à l'Etat, qui devra au surplus accompagner la Banque de France dans cette période de mutation.
Par ailleurs, l'Etat a pris des mesures, au travers du texte portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, du projet de loi relatif à la modernisation sociale ou du projet de loi de finances, afin de financer l'amortissement du matériel, d'accorder des prêts bonifiés et d'aider les entreprises à passer à l'euro.
A ce propos, la question des commissions prélevées sur les règlements par carte bancaire a été évoquée.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Ah !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'était opposé, par ma voix, à un amendement déposé au Sénat visant à les supprimer. Une telle suppression est-elle envisageable sur le plan économique ?
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis. Sur un délai très court, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Qu'est-ce qu'un paiement par carte bancaire ? Il permet d'abord la sécurité et la garantie du paiement. Or pensez-vous qu'aujourd'hui un organisme puisse sécuriser et garantir le paiement pour un coût nul ?
Pour ma part, je ne suis pas en faveur de la coercition, je suis pour la concertation. S'agissant de l'euro, nous avons fait le choix du « ni-ni » : ni obligation, ni interdiction. L'amendement qui a été voté à l'Assemblée nationale me paraît satisfaisant, dans la mesure où il prévoit un écrêtement qui portera sur tous les paiements, quel que soit leur montant. Les commerçants n'acquitteront pas davantage de frais liés aux paiements par carte bancaire qu'en 2001, et cette solution nous permettra d'éviter de demander aux banques de changer leurs logiciels à trente-deux jours du passage à l'euro, ce qui ferait courir des risques réels de bug ou de dérapage.
Cette méthode de l'écrêtement, qui a fait l'objet d'un accord entre le Gouvernement et les députés, me paraît tout à fait judicieuse et elle profitera à tous les commerçants.
En ce qui concerne les soultes des sociétés, je voudrais indiquer à M. Cornu que le problème posé par le passage à l'euro a été réglé.
Enfin, MM. Trémel et Dussaut sont intervenus à propos de l'apprentissage dans l'artisanat. Je pense que la loi d'orientation comportera un volet relatif à l'apprentissage. Nous procéderons non seulement à une péréquation, mais également à un relèvement notable des moyens accordés aux centres de formation des apprentis.
En outre, j'estime moi aussi que l'apprentissage après vingt-six ans n'est pas une voie à écarter, car certains jeunes, après avoir suivi telle ou telle formation, souhaitent apprendre un métier concret. Nous travaillerons donc sur ce dossier.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques éléments de réponse que je souhaitais vous livrer après vous avoir écoutés attentivement. J'espère que mes propos auront pu apaiser vos craintes et que vous voudrez bien voter ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat seront mis aux voix aujourd'hui même, à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.



ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : moins 16 419 950 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.



ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 156 306 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 55 098 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 346 268 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
En accord avec la commission des finances, j'appelle en discussion l'amendement n° II-35 rectifié bis , qui tend à insérer un article additionnel avant l'article 67 bis , et les articles 67 bis et 67 ter , qui sont rattachés pour leur examen aux crédits affectés aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.

Article additionnel avant l'article 67 bis



M. le président.
L'amendement n° II-35 rectifié bis , présenté par M. Bécot et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libéllé :
« Avant l'article 67 bis , insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article 1600 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Il est pourvu aux dépenses ordinaires des chambres de commerce et d'industrie au moyen d'une taxe additionnelle à la taxe professionnelle répartie entre tous les redevables de cette taxe proportionnellement à leur base d'imposition ; le montant national de cette taxe est déterminé chaque année par le Parlement dans le cadre de la loi de finances. »
« II. - Le treizième alinéa du même article est ainsi rédigé :
« Un décret répartit chaque année entre les chambres de commerce et d'industrie le montant national de la taxe destinée à subvenir à leurs dépenses. »
« III. - Afin de permettre aux chambres de commerce et d'industrie de poursuivre leurs missions et de faire face à leurs divers engagements, l'évolution de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle perçue au profit des chambres de commerce et d'industrie est fixée à 3,5 % pour 2002. »
La parole est à M. Bécot.
M. Michel Bécot. Les chambres de commerce et d'industrie, monsieur le secrétaire d'Etat, souffrent aujourd'hui d'un véritable problème de financement. L'application de la réforme des bases de la taxe professionnelle a d'ailleurs entraîné, mécaniquement, une réduction d'environ 50 % du montant de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle, l'IATP, acquitté par les plus petites entreprises.
Afin de permettre aux chambres de commerce et d'industrie de poursuivre l'accomplissement de leurs missions et de faire face à leurs divers engagements, je propose que ce soient désormais les lois de finances qui fixent le montant de l'IATP. La progression de celui-ci pourrait être de 3,5 % en 2002.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. La commission des finances s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, je ne peux croire que vous puissiez souhaiter une augmentation des prélèvements obligatoires ! En effet, cela ne correspond ni à votre éthique politique ni à vos déclarations constantes.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement ne peut être favorable à l'augmentation de 3,5 % du montant de l'IATP que vous proposez. Je rappelle d'ailleurs qu'il a déjà accepté une hausse de 0,3 % de cet impôt, ce qui nous paraît plus raisonnable.
En revanche, je souhaite comme vous que le montant de l'IATP soit déterminé par la loi de finances. Toutefois, j'assortirai cette mesure de plusieurs conditions : une programmation contractualisée des missions et des projets des chambres de commerce et d'industrie, une transparence de gestion appuyée sur une déconcentration de la tutelle, un mandat électif rénové, une solidarité interconsulaire réelle, y compris sur le plan financier.
Le Gouvernement est prêt à travailler sur ce sujet avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous pourrons alors revoir le mode de fixation de l'IATP sur une base pluriannuelle. D'ores et déjà, le projet de loi d'orientation que nous examinerons dans deux mois comportera des avancées, s'agissant en particulier du régime électoral.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-35 rectifié bis .
M. Gérard Cornu. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cornu.
M. Gérard Cornu. Je m'exprimerai à titre personnel sur cet amendement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous venez de dire que vous ne compreniez pas pourquoi nous présentions cet amendement,...
M. Joseph Ostermann. C'est à cause des 35 heures !
M. Gérard Cornu. ... dont l'adoption pourrait entraîner un alourdissement des charges supportées par les entreprises.
Mais, ces charges, vous les avez déjà fortement aggravées, par le biais de l'instauration des 35 heures ! (Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Les coûts engendrés par le passage aux 35 heures sont partiellement compensés pour les entreprises privées, mais, comme vous le savez, mes chers collègues, rien de tel n'est prévu pour les collectivités territoriales ! Or nos budgets locaux devront supporter à ce titre des dépenses supplémentaires liées, par exemple, au fonctionnement des services départementaux d'incendie et de secours ou des maisons de retraite.
Les chambres consulaires subiront elles aussi de plein fouet les effets du passage aux 35 heures, et il n'est donc pas anormal que nous soyons attentifs au niveau de leurs ressources. Sinon, comment voulez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, que ces organismes, qui jouent un rôle grandissant vis-à-vis du commerce, de l'artisanat et de l'ensemble des PME, s'en sortent ?
A titre personnel, je juge cet amendement excellent, et c'est pourquoi je le voterai.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Le groupe des Républicains et Indépendants votera cet amendement, ne serait-ce que pour attirer l'attention du Gouvernement sur la situation réelle, les difficultés et le rôle important des chambres de commerce et d'industrie.
Ce matin même, à l'occasion du débat sur le projet de budget de l'industrie, notre collègue Jean-Pierre Raffarin a bien expliqué combien les chambres de commerce et d'industrie se trouvaient aujourd'hui aux avant-postes, qu'il s'agisse du passage à l'euro, du développement des technologies nouvelles, de la formation professionnelle ou de l'apprentissage, tous domaines qui exigent des moyens d'action supplémentaires.
Bien entendu, nous souhaitons également que la progression des prélèvements reste maîtrisée. Pour cette raison, nous proposons, par cet amendement, que le taux annuel de progression de l'IATP soit fixé par la loi de finances.
A cet égard, il est un peu surprenant d'entendre un gouvernement qui a créé de nouveaux impôts et majoré, notamment cette année, les prélèvements obligatoires nous reprocher d'alourdir les charges supportées par les entreprises ! (Protestations sur les travées socialistes.)
Nous qui connaissons bien la contradiction entre les moyens supplémentaires d'action et la maîtrise des prélèvements, nous essayons de parvenir à un équilibre. Il est normal que la représentation nationale fixe le taux de croissance des dépenses des établissements publics que sont les chambres de commerce et d'industrie, dans une vision très dynamique du développement économique !
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Aux excellents arguments qui viennent d'être avancés par M. Lachenaud, je tiens à en ajouter un. Désormais, un problème de péréquation entre les chambres de commerce et d'industrie se pose. Puisque les bases « salaires » ont été supprimées avec une simple indexation de la compensation de la part qui existait auparavant, il est bien certain que les chambres de commerce et d'industrie dont la base « outillage » augmentera seront favorisées ; en revanche, celles qui avaient de fortes bases « salaires » ne connaîtront pas de progression de leurs moyens, alors que ce sont elles qui, notamment pour la formation des apprentis, auront des frais élevés.
L'amendement de mon collègue M. Bécot a donc l'avantage de faire apparaître la nécessité d'une péréquation à l'échelon national. Cet objectif doit être retenu.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Autant j'ai entendu les arguments de M. Cornu et ceux qui viennent d'être développés sur ces travées, autant, monsieur Lachenaud, je ne peux pas vous laisser dire de contrevérités.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Ah bon ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. En effet, les prélèvements ont baissé de près d'un point, 0,75 % selon les derniers chiffres connus. Par ailleurs, sont intervenus des dégrèvements d'impôts, surtout pour les entreprises. Je pense, bien entendu, à l'impôt sur les sociétés, à la taxe professionnelle et à la vignette. Vous ne pouvez donc pas dire que ce gouvernement a augmenté les impôts pour les entreprises.
Cela étant dit, le Gouvernement reste attaché à une modération s'agissant des droits pour les chambres consulaires, et je m'en suis expliqué. C'est pourquoi je maintiens ma position.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-35 rectifié bis, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 67 bis.

Article 67 bis



M. le président.
« Art. 67 bis . - I. - Il est inséré, après le treizième alinéa de l'article 1600 du code général des impôts, un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe est réduite de moitié pour les artisans régulièrement inscrits au répertoire des métiers et qui restent portés sur la liste électorale de la chambre de commerce et d'industrie de leur circonscription. »
« II. - Les éventuelles pertes de recettes des chambres de commerce et d'industrie sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts. » - (Adopté.)

Article 67 ter



M. le président.
« Art. 67 ter . - A la fin du quatrième alinéa (a) de l'article 1601 du code général des impôts, le montant : "630 F" est remplacé par le montant : "99 EUR". »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-24, présenté par M. Cazalet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 67 ter :
« Dans le quatrième alinéa de l'article 1601 du code général des impôts, le montant : "630 F" est remplacé par les mots : "0,379 % du plafond annuel de sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année d'imposition". »
L'amendement n° II-9 rectifié, présenté par MM. Mouly et Delfau, est ainsi libellé :
« Dans l'article 67 ter, remplacer la somme : "99 EUR" par la somme : "107 EUR". »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° II-24.
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Chaque année est proposé, par le biais d'un article additionnel aux crédits du ministère de l'économie et des finances, le relèvement du droit fixe de la taxe additionnelle pour frais de chambre de métiers. Cet article est bien souvent d'origine parlementaire.
Il est temps de fixer ce droit à un niveau qui permette d'éviter une paupérisation des chambres de métiers. Il est également nécessaire de déterminer un mode d'indexation de ce droit fixe pour éviter chaque année des négociations qui ne satisfont ni les chambres de métiers ni leurs ressortissants.
Le montant du droit fixe a crû de 1,61 % entre 1999 et 2001, passant de 94,52 euros à 96,94 euros. Cette augmentation n'a pas été à la hauteur de la hausse des charges des chambres de métiers, la valeur du « point » des salaires du personnel des chambres ayant progressé de 3 % pendant la même période.
Le montant de 99 euros adopté à l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement n'est clairement pas à la hauteur des enjeux. Les résultats nets des chambres de métiers ont connu une forte diminution, de 41 %, entre 1998 et 1999. Enfin, six des huit classes de chambres de métiers étaient en déficit d'exploitation en 1999.
Dès lors, je propose au Sénat de revenir au montant adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale, à savoir 107 euros.
Je propose, enfin, d'indexer le droit fixe sur le plafond annuel de la sécurité sociale, comme l'ont demandé le rapporteur spécial de la commission des finances de l'Assemblée nationale et l'assemblée permanente des chambres de métiers. Le plafond de la sécurité sociale sera, en 2002, de 28 224 euros. Le montant du droit fixe serait ainsi fixé à 0,379 % du plafond annuel de la sécurité sociale, soit 107 euros.
M. le président. La parole est à M. Delfau, pour défendre l'amendement n° II-9 rectifié.
M. Gérard Delfau. Je ne ferai pas un plaidoyer en faveur des chambres de métiers. Le Sénat connaît bien l'apport irremplaçable de cette structure consulaire regroupant les artisans et les chefs de très petites entreprises, les TPE. Pour ma part, une très ancienne implication dans le développement économique local a fait que j'ai créé des liens confiants avec la chambre de métiers de mon département.
Or je constate que cette chambre consulaire fait l'objet de sollicitations croissantes à mesure que s'affirme la place de l'artisan et de la très petite entreprise dans l'économie de notre pays. Le métier de chef d'entreprise subit une mutation rapide, qui est d'autant plus difficile quand il s'agit de toutes petites structures qui, aujourd'hui, ne sont plus à l'abri d'une concurrence sévère. L'exigence en matière de sécurité, d'environnement et de formation professionnelle, notamment, est sans cesse plus forte. L'artisan se tourne naturellement vers « sa » chambre de métiers pour obtenir une formation, une aide technique, voire un réconfort.
Voilà pourquoi la charge des chambres de métiers s'accroît, alors que les moyens stagnent.
Simultanément, les collectivités locales, à travers les communes, les communautés de communes, les communautés d'agglomération et, bientôt, les « pays », se tournent vers les chambres consulaires et, tout particulièrement, les chambres de métiers. Elles apprennent à travailler avec les agents socio-économiques dans le cadre - et c'est ce qui est important - d'un développement économique territorialisé.
Ce partenariat bénéfique impose de nouvelles missions à la chambre de métiers. C'est pourquoi mon collègue M. Mouly, qui n'a pu être présent aujourd'hui, et moi-même avons déposé un amendement visant à relever le droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers acquittée par les entreprises artisanales.
Nous proposons de faire passer le montant de ce droit de 99 euros à 107 euros. Nous pouvons, si nécessaire, réévaluer notre demande, monsieur le ministre, si vous deviez donner une réponse positive à cette requête légitime. Il est en tout cas indispensable que les chambres de métiers disposent à nouveau des moyens nécessaires pour mener à bien leur mission d'intérêt général.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-9 rectifié ?
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Cet amendement et celui que j'ai présenté sont très proches. En effet, le montant de la taxe pour frais de chambre de métiers qu'ils prévoient pour 2002 serait identique. Cependant, mon amendement paraît meilleur - cela fait prétentieux (Sourires) - car il permet, pour les années à venir, une indexation sur le plafond annuel de la sécurité sociale. Je propose donc à M. Delfau de vous y rallier.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-24 et II-9 rectifié ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. S'agissant de la qualité, le Gouvernement n'a pas à choisir entre ces deux amendements.
Il a entendu les propos de M. Delfau sur le rôle des chambres de métiers. En plus de leur rôle professionnel, elles sont maintenant impliquées dans la démocratie participative à travers les nouveaux territoires, les conseils de développement, les pays. En effet, beaucoup de présidents de chambre de métiers, avec leurs techniciens, avec leurs collaborateurs, s'impliquent au côté d'autres chambres consulaires pour participer, au côté du monde associatif et avec les élus, à l'aménagement et au développement du territoire sur des périmètres pertinents. Nous avons, maintenant, des interlocuteurs capables de participer à la réflexion et à la décision sur les territoires.
S'agissant de la fixation du droit à 107 euros, le Gouvernement ne peut être favorable à une telle hausse.
Monsieur Cazalet, en fin de compte, votre amendement - même si je comprends que vous le trouviez très bon (Sourire) - rigidifie les ressources des chambres de métiers. Ainsi, on peut très bien concevoir une progression plus rapide pour le droit fixe que pour le plafond de la sécurité sociale. Or, parfois, on pourrait aller plus vite. Une progression exceptionnelle peut être nécessaire ! Ainsi, en 1999, cinq francs supplémentaires ont été attribués pour l'organisation des élections.
Il faut plutôt explorer les moyens de manoeuvre du droit additionnel, monsieur le rapporteur spécial, qui reste inutilisé à 75 %.
J'en viens à l'amendement n° II-9 rectifié.
Monsieur Delfau, il ne faut pas demander moins au contribuable et plus à l'impôt ! L'augmentation que vous prévoyez s'élève à 11,5 %. J'entends d'ici les cris d'orfraie de ceux qui diraient que ce gouvernement accorde des hausses de prélèvements obligatoires ! Si l'on ajoute le droit additionnel à votre demande, on atteint presque 18 euros de hausse, soit 118 francs ; nous pensons que c'est déraisonnable.
De plus, il me revient à l'esprit des discussions avec les organismes professionnels, notamment avec l'UPA, l'Union professionnelle artisanale, qu'il faut garder raison et mesure.
Nous avons entendu plusieurs propositions : 99 euros, c'est 3,7 % ; 101 euros, c'est 5,2 %, ce qui pourrait être une position raisonnable à laquelle le Gouvernement ne s'opposerait pas. Mais 107 euros, vous l'avez compris, le Gouvernement ne peut l'accepter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-24.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Le droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers constitue, nous le savons tous, une forme de mutualisation des coûts de recherche, de développement et de formation du secteur artisanal.
Le relèvement de ce droit, tel qu'il a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale, doit donc être interprété comme la prise en compte de la réalité des missions accomplies par les chambres consulaires.
Avec l'amendement n° II-9 rectifié, il s'agit de savoir s'il convient d'aller plus loin, en relevant plus sensiblement encore le montant de ce droit fixe, aux motifs conjugués de l'ancienneté du précédent relèvement et de la montée en charge des missions et des obligations des organismes consulaires concernés.
Permettez-nous simplement de nous interroger sur la situation plus globale des chambes de métiers.
Elles sont aujoud'hui largement dépositaires de fonds publics, qu'il s'agisse du montant des droits fixes, de la collecte de la taxe d'apprentissage ou de la taxe à la formation professionnelle continue.
Nous estimons même qu'avant toute mesure spécifique, qui pourrait d'ailleurs trouver son aboutissement dans le cadre de la discussion du prochain projet de loi sur le commerce et l'artisanat, dont nous avons parlé, il conviendrait de procéder à un état des lieux suffisamment précis des capacités financières comme des missions accomplies par les chambres de métiers.
Une évaluation plus fine et plus précise de leur intervention dans le domaine de la formation est ainsi nécessaire avant même toute autre initiative.
C'est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai l'amendement n° II-24 non pas seulement parce qu'il est présenté par mon collègue Auguste Cazalet, mais aussi et surtout parce qu'il est défendu au nom de la commission des finances, dont je connais le sérieux des travaux. D'ailleurs, dans une certaine mesure, M. le secrétaire d'Etat, qui a bien sûr plutôt mis l'accent sur l'amendement n° II-9 rectifié, présenté par notre collègue Delfau, dont je reconnais aussi les qualités, a bien insisté sur le travail réalisé par les chambres de métiers. Par conséquent, c'est de l'argent qui est bien placé. M. le secrétaire d'Etat aurait d'ailleurs pu aussi insister, s'agissant de l'amendement n° II-35 rectifié, sur les qualités des chambres de commerce, qui, elles aussi, font du bon travail sur le terrain.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Tout à fait !
M. Jean Chérioux. Mais peut-être y a-t-il une différence d'appréciation que je comprendrais très bien, compte tenu des fonctions qui sont dévolues à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Non !
M. Jean Chérioux. Cela dit, il est trop facile, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avancer toujours le souci de l'opposition nationale de refuser des dépenses ! Mais il y a dépenses et dépenses ! On peut quand même avoir une approche sélective ! Pour ma part, je considère qu'il s'agit, avec l'amendement n° II-24, de dépenses bien placées ; elles le sont certainement beaucoup mieux de d'autres, d'une dimension différente, qui ont été évoquées tout à l'heure et dont le moins qu'on puisse dire est que vous avez du mal à les financer ! J'avoue que l'argument que vous et vos collègues nous avancez toujours - « Vous êtes contre les dépenses, mais vous acceptez telle ou telle » - est facile ; il s'apparente d'ailleurs quelque peu aux leçons que la majorité, vous-même,...
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Pas moi !
M. Jean Chérioux. ... et les membres de ce gouvernement passent leur temps à nous donner ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Ça suffit des leçons, vous nous en donnez tout le temps ! Laissez-nous au moins nous exprimer par un vote qui consiste à choisir, parmi les dépenses, celles que nous considérons les plus utiles !
M. Gérard Delfau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai bien écouté ; je vous avouerai que je m'attendais quelque peu à votre objection concernant la progression rapide du droit fixe de la taxe pour frais de chambre de métiers, dans l'amendement que je propose avec mon collègue Georges Mouly.
Mais j'avais fixé ce montant compte tenu des indications fournies lors du débat à l'Assemblée nationale.
Toutefois, ce qui nous importe ici, au Sénat - disant cela, je m'adresse tout particulièrement à notre éminent rapporteur spécial, M. Cazalet, et à la commission des finances -, c'est d'aboutir et qu'un texte, accepté par le Gouvernement soit adopté ; ce qui nous importe, c'est que les chambres de métiers, quand elles prendront connaissance de notre discussion, voient que nous avons fait chacun un pas pour répondre, fût-ce partiellement, à leur demande.
Telle est la raison pour laquelle, monsieur le rapporteur spécial, le mieux étant l'ennemi du bien, je ne voterai pas l'amendement n° II-24 de la commission ; de surcroît, je vous demande de le retirer, afin que nous aboutissions à un vote unanime qui serait deux fois symbolique de l'attachement du Sénat aux chambres de métiers.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Le groupe de l'Union centriste votera l'amendement n° II-24 de la commission des finances, présenté excellemment par notre collègue Auguste Cazalet.
Je ferai trois remarques.
Tout d'abord, il est heureux que la commission des finances ait déposé un amendement, car M. le secrétaire d'Etat, depuis la discussion devant l'Assemblée nationale, où il s'en tenait aux 99 euros, a évolué. Par conséquent, un pas a été fait et, si nous votions conforme le texte de l'Assemblée nationale, le souhait du Gouvernement ne pourrait même pas être respecté !
Par ailleurs, à quel niveau faut-il établir le droit fixe ? Je constate que la commission des finances du Sénat et la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui ont travaillé sur les mêmes bases, sont arrivées l'une et l'autre au même résultat : 107 euros. Pourquoi ne pas retenir cette base ?
Je ne vois pas du tout quel argument susceptible d'invalider le raisonnement pourrait être avancé puisqu'il s'agit non seulement d'augmenter le droit par rapport à l'année dernière, mais aussi d'opérer un rattrapage nécessaire, comme tous les orateurs l'ont montré.
Il reste évidemment un dernier problème : celui de l'indexation. Monsieur le secrétaire d'Etat, il n'y a pas un projet de budget où la question de la revalorisation du droit fixe n'est pas discutée ! La proposition de la commission des finances de définir une indexation définitive me paraît une bonne solution. Mais si vous préfériez un autre type d'indexation - sur les recettes de l'Etat par exemple -, je n'y verrais pas d'inconvénient.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe de l'Union centriste votera l'amendement de la commission des finances.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, avant de vous donner la parole, je vous indique que je viens d'être saisi d'un amendement n° II-9 rectifié bis , présenté par MM. Mouly et Delfau, et ainsi libellé :
« Dans l'article 67 ter, remplacer la somme : "99 EUR" par la somme : "101 EUR". »
Je tenais à l'indiquer dès à présent afin que vous puissiez vous déterminer en toute connaissance de cause.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis. J'avais moi-même proposé, l'année dernière, l'augmentation du droit fixe ; cette question revient encore cette année.
L'année dernière, tous les sénateurs siégeant sur les travées de gauche de cet hémicycle étaient défavorables à mon amendement, et M. Delfau l'avait même brillamment combattu !
M. Gérard Delfau. Il ne faut pas être excessif !
M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis. Je me réjouis de constater que, cette année, il a changé d'avis et a pris conscience de la nécessité de soutenir les chambres de métiers.
Mais, par rapport à cette discussion récurrente, il ne faut à mon avis pas jouer les marchands de tapis : 99 euros, 107 euros, et voilà que M. Delfau propose maintenant un montant intermédiaire. Il faut vraiment en finir !
Si l'amendement n° II-24 n'est pas adopté cette année, cette discussion va encore revenir tous les ans ! Par conséquent, votons la mesure proposée par la commission des finances, et nous n'aurons ainsi plus à évoquer chaque année le droit fixe, que, comme tout le monde le reconnaît aujourd'hui, il convient d'augmenter. L'amendement n° II-24 est excellent.
M. Yves Fréville. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission des finances sur l'amendement n° II-9 rectifié bis ?
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Patriat, secrétaire d'Etat. Il reste le même que tout à l'heure : défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-24, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 67 ter est ainsi rédigé, et l'amendement n° II-9 rectifié bis n'a plus d'objet.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les petites entreprises, le commerce et l'artisanat.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques minutes, en attendant l'arrivée de M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

COMMERCE EXTÉRIEUR

M. le président. Le Sénat va examiner les dipositions du projet de loi de finances concernant le commerce extérieur.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour la huitième année consécutive, notre solde commercial a dégagé un excédent, qui a été, en 2000, inférieur à 1 milliard d'euros. Compte tenu de l'augmentation du coût du pétrole et du cours du dollar, on peut dire que c'est un bon résultat.
Vous nous aviez rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, au moment où notre commerce extérieur obtenait des résultats records, que vous n'étiez pas un « fétichiste du solde ». Il valait sans doute mieux le dire à cette époque qu'aujourd'hui ! Mais vous aviez raison, car le solde de notre commerce extérieur ne reflète en rien la compétitivité de nos entreprises. C'est la part de marché des entreprises françaises qui importe réellement et, de ce point de vue, nous arrivons à préserver notre acquis sans connaître toutefois des progrès significatifs.
Notre solde extérieur n'a plus la même importance que lorsqu'il déterminait la valeur de notre monnaie : avec l'euro, c'est à l'échelle de toute la zone européenne qu'il convient désormais d'apprécier le solde des échanges. D'ailleurs, cela nous amène à nous demander s'il faut toujours considérer que les échanges au sein du marché intérieur européen sont encore des importations et des exportations.
La situation internationale actuelle fait peser des incertitudes sur le commerce mondial. Dans ce contexte, le succès de la conférence de l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce, à Doha, constitue un symbole important à plusieurs titres : d'abord, parce qu'il donne un signal important aux marchés, montrant qu'une volonté politique existe pour faciliter les échanges ; ensuite, parce que l'entrée de la Chine et de Taïwan constitue un événement important, politiquement et économiquement ; enfin, parce que des mesures importantes ont été décidées en faveur des pays en développement, en particulier pour faciliter leur accès aux médicaments.
Ce dernier point est essentiel, car il montre que l'OMC n'est pas uniquement une instance de promotion de la mondialisation, mais également une instance de régulation.
Pour assurer la légitimité de cet organe, il faudra aussi que les pays moins développés puissent mieux faire valoir leur point de vue car, si l'OMC est parfois diabolisée, c'est parce qu'elle est perçue comme un comité de direction du commerce mondial, au service des plus puissants.
Votre projet de budget, monsieur le secrétaire d'Etat, est marqué par la mise en oeuvre d'un contrat d'objectifs et de moyens. Dans ce cadre, les crédits de fonctionnement du commerce extérieur sont, après une période de déclin, d'une remarquable stabilité. En revanche, les dépenses consacrées aux procédures de soutien aux exportations, qui bénéficient généralement de crédits évaluatifs, diminuent. Ces économies peuvent être, pour partie, attribuées à une plus grande sélectivité des dossiers, et il faut prendre garde à ce que cette sélectivité accrue ne devienne pas de la frilosité.
La stabilité de vos crédits de fonctionnement ne relève pas de l'immobilisme puisque le contrat d'objectifs et de moyens est décliné en programmes conclus entre l'administration centrale et les grands réseaux de postes d'expansion économique à l'étranger fixant le montant des dotations annuelles de crédits, précisant leur utilisation et détaillant les réformes de gestion nécessaires pour réduire le coût du réseau et améliorer son efficacité. La DREE, la direction des relations économiques extérieures, prépare également des démarches contractuelles avec les organismes d'appui au commerce extérieur : le Centre français du commerce extérieur et le CFME-ACTIM, dont le nom a changé il y a peu et qui s'appelle désormais Ubifrance.
Enfin, il convient de se féliciter de la fusion des réseaux du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger, qui permettra d'améliorer la lisibilité du dispositif tout en réduisant les frais de gestion.
Dans une même logique de modernisation, la DREE s'est engagée dans une démarche « qualité » qui est tout à fait positive. Mais cette démarche ne doit en aucun cas exonérer les services de l'Etat de l'indispensable écoute des demandes de service exprimées par les entreprises.
Dans le domaine des aides au commerce extérieur, la recherche de la simplicité et de la souplesse des procédures constitue une obligation pour atteindre les entreprises les moins outillées pour se développer à l'international. Sinon, les aides profitent surtout aux filiales des grands groupes, qui disposent de l'expertise nécessaire et ont souvent moins besoin d'être aidées.
Malheureusement, les petites entreprises souffrent encore de la multiplicité des guichets, qui les contraint à contacter plusieurs organismes pour engager une démarche de développement à l'international. De ce point de vue, on peut regretter la lenteur du regroupement du CFCE et d'Ubifrance.
Les actions entreprises depuis quelques années par les directions régionales du commerce extérieur afin de mieux identifier les petites et moyennes entreprises disposant d'un fort potentiel de développement à l'international commencent, en revanche, à porter leurs fruits.
Dans le cadre des plans d'actions régionaux pour le développement international, ces entreprises se verront proposer des aides prévues dans les contrats de plan Etat-région, dont les crédits sont en forte progression. La réforme de l'assurance-prospection semble également recueillir des résultats satisfaisants.
Certains ajustements sont, en revanche, nécessaires pour développer l'utilisation du FASEP-Garantie, fonds d'étude et d'aide au secteur privé dont le coût paraît constituer actuellement un obstacle pour certaines entreprises. D'autres réformes devront être étudiées à l'avenir ; je pense notamment à une nouvelle augmentation des aides accordées aux entreprises françaises pour la participation à des salons à l'étranger, aides qui demeurent largement inférieures à celles qui sont octroyées dans les autres pays de l'Union européenne. Je regrette d'ailleurs que la dotation d'Ubifrance régresse, alors qu'il faudrait, au moins, atténuer le retard pris sur nos partenaires. En tout cas, il faut qu'Ubifrance dépense mieux : les grandes opérations commerciales exclusivement consacrées à la France ont des retombées immédiates faibles pour les entreprises françaises au regard de leur coût.
Je rappelle que la principale ressource d'Ubifrance provenait de la gestion des volontaires du service national en entreprise, qui ont disparu avec le service national. Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que les ressources d'Ubifrance puissent être garanties pour l'année 2002, quel que soit le succès de la nouvelle procédure des volontaires internationaux en entreprise.
Enfin, la réforme du réseau des missions économiques et financières à l'étranger ne doit pas être abandonnée : dans les pays de l'OCDE, en particulier dans des pays de l'Union européenne, les sources d'information sont nombreuses, fiables et directement accessibles grâce au réseau Internet. Il pourrait donc être envisagé de concentrer l'action de ces missions sur les démarches de prospection des PME et sur la recherche de partenariats, une partie des effectifs pouvant être redéployés dans les pays en voie de développement et en transition. Il s'agit de prendre pleinement en compte le développement de l'Union européenne et des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans la réflexion sur l'évolution de votre réseau, qui doit anticiper le développement du commerce international en privilégiant les zones géographiques qui bénéficient de forts taux de croissance.
Pour conclure, je voudrais saluer la modernisation des procédures engagées par le secrétariat d'Etat, qui a le mérite d'être effectuée à coût constant pour le contribuable. Cette réforme s'accompagne d'un effort d'information important en direction du Parlement, ce qui mérite d'être souligné.
Enfin, je souhaite que votre gestion économe - c'est un compliment ! - vous permette néanmoins d'aider d'avantage de PME dans leurs démarches de prospection à l'étranger. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, présentant pour la première fois l'avis de la commission des affaires économiques sur le budget du commerce extérieur, je tiens tout d'abord à rendre hommage à mon prédécesseur, M. Michel Souplet, dont la compétence était unanimement reconnue dans cet hémicycle.
Je souhaite, par cette courte intervention, monsieur le secrétaire d'Etat, manifester le souci de la commission de conforter les performances de nos entreprises à l'exportation, performances dont on connaît l'effet positif sur l'emploi. Une étude à paraître estime ainsi que 5 millions d'emplois, soit 22 % de la population active, sont liés à l'activité exportatrice de la France.
Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, notre inquiétude face à la quasi-disparition de notre excédent commercial en 2000, dans un contexte pourtant exceptionnellement dynamique : une croissance mondiale de 4,5 % et des échanges mondiaux en hausse de 12 %. Le ralentissement conjoncturel auquel nous assistons et les perspectives incertaines pour 2002, assombries par les tragiques événéments de septembre, ne sont pas pour nous rassurer.
Certes, l'an passé, la France a pu stabiliser à 7,6 %, parmi les pays de l'OCDE, sa part du marché mondial en volume. Mais pour combien de temps ? Nous savons en effet désormais que rien n'est jamais acquis en matière de commerce extérieur. Comment la compétitivité de « l'entreprise France » pourra-t-elle résister longtemps aux contraintes que le Gouvernement lui impose, et notamment au renchérissement du coût du travail provoqué par les 35 heures ?
Les pouvoirs publics peuvent pourtant servir de levier à l'ouverture des millions d'entreprises françaises au marché mondial.
De ce point de vue, je veux saluer l'accord auxquels sont parvenus, à Doha, les Etats membres de l'OMC pour accueillir la Chine et ouvrir un nouveau cycle global de négociations commerciales multilatérales. La France peut, en effet, s'estimer satisfaite de cet accord, obtenu dans le respect du mandat confié au négociateur européen : ce dernier a pu sauvegarder la spécificité de l'agriculture dans les échanges internationaux, faire reconnaître un droit d'accès aux médicaments pour les pays en développement, inscrire les préoccupations environnementales - sinon sociales - dans les négociations commerciales, prévoir l'élaboration de règles multilatérales afin de protéger la concurrence et l'investissement.
Mais tout reste à écrire, et notre assemblée, monsieur le secrétaire d'Etat, exercera toute sa vigilance sur le déroulement des négociations proprement dites, qui devront lever certaines ambiguïtés persistantes dans le texte de compromis retenu à Doha.
Les efforts que vous avez engagés dans trois directions méritent également d'être soulignés.
Il s'agit d'abord de l'adaptation et de la modernisation du réseau de l'expansion économique aux besoins des entreprises.
Il s'agit ensuite de la modernisation des organismes d'appui au commerce extérieur ; celui-ci ne trouvera son véritable aboutissement que dans le regroupement géographique et opérationnel du CFCE et d'Ubifrance.
Il s'agit enfin des initiatives en direction des PME exportatrices : développement du portage des moyennes entreprises par les grands groupes ; simplification bienvenue de l'assurance-prospection ; démarche de coordination régionale par la signature de programmes d'actions régionales pour le développement international.
Ces efforts, dont je me félicite, m'apparaissent toutefois timides. Seules 5 % des entreprises françaises participent aux exportations de biens. Ils nous faut accroître l'efficacité du soutien public à l'export, et je voudrais, à cette fin, formuler quelques suggestions.
Il faudrait tout d'abord simplifier encore le dispositif public de promotion des exportations en se calant sur le réflexe premier du chef d'entreprise, qui est de se tourner vers la chambre de commerce et d'industrie. Dirigées par des hommes issus de l'entreprise, en charge d'un service public et fortes de leur réseau à l'étranger, les chambres de commerce et d'industrie devraient naturellement, à l'heure où l'on réfléchit à une meilleure définition de leur mission, s'orienter vers un rôle de « guichet export ».
Il faudrait ensuite repenser les aides financières à l'export. Nombreuses, confuses, mal connues, elles sont mal utilisées, comme l'attestent les reports de crédits sur leur budget. Pourquoi ne pas inciter fiscalement les petites et moyennes entreprises à exporter ?
Si je crois possible de redynamiser l'enveloppe budgétaire modeste allouée au soutien du commerce extérieur, il ne me paraît pas concevable que l'on puisse se satisfaire d'un budget en diminution de 1,9 %, s'élevant à 473 millions d'euros, alors même que l'Etat prélève, cette année encore, 1,68 milliard d'euros sur l'excédent de la Coface, presque autant qu'en 2000. Une somme qui se compterait en millions d'euros permettrait de relancer notre soutien à l'exportation, par exemple en organisant plus de salons spécialisés, au bénéfice des PME.
Puisqu'une enveloppe budgétaire étriquée ne permet pas de déployer, pour nos entreprises, une ambition à l'export qui soit à la dimension de nos performances, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur les crédits consacrés au commerce extérieur dans le projet de loi de finances pour 2002. (M. Fréville applaudit.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe socialiste, 7 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget du commerce extérieur n'est évidemment qu'un élément parmi d'autres pour analyser la place particulière de notre pays dans les échanges internationaux.
Il représente, au sein des crédits du ministère de l'économie et des finances, un ensemble de dépenses d'un montant de plus de 251 millions d'euros au titre des relations économiques extérieures et de plus de 575 millions d'euros au titre de l'action internationale.
Les dépenses liées à l'activité de la direction des relations économiques extérieures portent essentiellement sur les crédits de personnel, l'exercice 2002 étant marqué, de ce point de vue, par une absence de création d'emplois ; la seule évolution concerne un léger mouvement de reclassement de personnels.
Nous ne pouvons manquer de souligner l'importance de la place de notre pays dans le concert commercial international. Nous y occupons en effet une position non négligeable, et notre pays est l'un des principaux exportateurs de la planète.
La compétitivité de la France affiche une bonne tenue tant du point de vue des prix que de celui des coûts. Les performances de la France en qualité des produits ont également contribué au maintien - en volume - de nos parts de marché dans le monde.
Notre pays demeure le quatrième exportateur mondial de marchandises et le troisième exportateur mondial de services marchands.
Quant aux investissements français à l'étranger, ils s'élèvent à 187 milliards d'euros en 2001, en hausse de 65 %, et situent désormais la France en deuxième position des pays de l'OCDE, derrière le Royaume-Uni.
Nous avons noté les efforts accomplis par la direction des relations économiques extérieures pour renforcer nos positions et les possibilités pour nos entreprises d'être plus présentes sur les marchés.
Cette présence se développe désormais grâce à la structure Ubifrance ainsi qu'à un contrat d'objectifs et de moyens qui ne se traduira pas - il est important de le souligner - par une croissance des effectifs des postes consulaires. On observera cependant que la plus grande partie de ces postes sont encore occupés par des contractuels.
Les dépenses afférentes au fonctionnement de ces postes sont évidemment liées, pour partie, aux aléas de la parité de l'euro. Pour autant, le plus important dans ce débat est, bien entendu, le positionnement de notre pays dans le cadre de l'Organisation mondiale du commerce.
La conférence de Seattle, on s'en souvient, avait été marquée par l'émergence d'un puissant courant antimondialiste, multiforme dans ses actions et dans son expression. Ce courant marquait et marque encore le refus d'une construction économique mondiale peu respectueuse de l'environnement, gaspilleuse d'énergie et de potentiels matériels et humains, créatrice d'inégalités de développement entre les territoires.
Nous sommes aux côtés de ceux qui se sont retrouvés dans ces mouvements citoyens. Nous attendons d'ailleurs toujours que tous éclaircissements soient apportés sur les événements qui se sont produits lors du sommet du G8 à Gênes.
Au-delà des sommes que notre pays engage, en particulier, pour favoriser la vente de nos produits industriels ou la connaissance de l'activité de nos PME innovantes dans les pays étrangers, la France devrait, nous semble-t-il, agir plus encore qu'elle ne le fait aujourd'hui pour permettre aux pays en voie de développement de participer au commerce international dans des conditions qui leur seraient plus favorables.
La conférence de Doha a permis, sur certains points, de réaliser quelques avancées, notamment s'agissant de la commercialisation des produits de lutte contre les pandémies actuellement les plus préoccupantes, telles que le sida, la tuberculose, la malaria. Désormais, les pays pauvres pourront accéder à faible prix, de manière très encadrée, aux médicaments nécessaires à la santé publique, même sans l'accord des groupes pharma-ceutiques.
On peut cependant regretter que les Etats-Unis et les pays non signataires de conventions et d'accords mondiaux relatifs aux problèmes d'environnement ne se soient pas engagés à Doha.
Est également dommageable à une évolution saine des échanges internationaux l'échec de l'inscription de la dimension sociale dans les négociations ; cela n'aidera pas à mettre fin au niveau excessivement bas des salaires et à l'exploitation de la main-d'oeuvre dans certains pays. Quelques chiffres, particulièrement éloquents à cet égard, suscitent l'indignation : par exemple, un citoyen moyen d'un pays à faible revenu est 55 fois plus pauvre que le citoyen moyen d'un pays de l'OCDE, et 1,2 milliard de personnes ont moins de 7 francs par jour pour vivre. Autre exemple, qui me tient à coeur compte tenu de mes engagements pour les droits des femmes : 70 % de ces personnes les plus pauvres sont des femmes !
Ces situations dramatiques ont toutes la même origine : des orientations libérales, auxquelles s'ajoute une pression toujours plus forte pour faire disparaître certains des garde-fous dont nous disposons encore en matière de culture ou de produits agricoles.
De la même manière, la péremption prochaine de l'accord multifibres risque de susciter dans les années à venir de nouvelles tensions sur ces domaines sensibles de la production et des échanges internationaux.
Tels sont les points que les membres du groupe communiste républicain et citoyen souhaitaient me voir souligner à l'occasion de la discussion des crédits du commerce extérieur pour 2002, qui feront l'objet, de leur part, d'un vote positif. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Marc.
M. François Marc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme chacun d'entre nous, je ne peux aborder l'examen de ce projet de budget sans évoquer les incertitudes que font peser les événements internationaux sur l'économie mondiale.
Ce changement des données, même s'il intervient dans un contexte déjà fragilisé, ne doit cependant pas nous masquer quelques réalités, à commencer par le fait que la France est et reste un bon élève de l'économie mondiale. En témoignent notamment ses bons résultats en matièere de commerce extérieur au cours des années passées.
Actuellement, notre pays est le quatrième exportateur mondial, et même le troisième pour les services. En 2001, le solde devrait progresser légèrement. Pourtant, l'impact de la crise de l'ESB et de la fièvre aphteuse sur les échanges agroalimentaires ainsi que le niveau élevé des cours du pétrole et du dollar ont pesé sur ces résultats.
Le domaine particulièrement sensible de l'agroalimentaire constituera l'objet essentiel de mon intervention.
Mais je souhaite tout d'abord revenir sur le projet de budget lui-même. Ce projet se situe dans une vraie continuité des actions, particulièrement en direction des PME et des PMI, mais la continuité se trouve aussi dans la volonté du Gouvernement de mettre en cohérence ses paroles et ses actes, afin de réussir à rendre lisibles les outils et les politiques destinés aux entreprises, l'objectif étant de consacrer le principe non du « plus d'Etat » mais du « mieux d'Etat ».
Cette modernisation générale des structures, tant au secrétariat d'Etat que dans les organismes rattachés, se poursuit à travers ce budget avec la priorité donnée à la réforme du réseau international d'intelligence et d'appui économique - mentionnons, notamment, une utilisation à bon escient des nouvelles technologies -, à la stabilité des moyens et à la pérennité des instruments financiers au service des entreprises. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
Je ne puis, dans le temps qui m'est imparti, détailler les mesures envisagées dans le budget, mais je me plais à souligner que le climat d'incertitude économique qui caractérise l'environnement immédiat a été bien intégré par le Gouvernement dans sa perception de l'avenir.
Je regrette, à cet égard, que la majorité sénatoriale, en indiquant son refus de voter ce budget, n'ait pas souhaité donner un signe positif en réponse aux appels au patriotisme économique émis ces dernières semaines par les deux têtes de l'exécutif.
Pour leur part, les membres du groupe socialiste donnent acte au Gouvernement de son action tout à fait réussie en matière de commerce extérieur et lui manifesteront son total soutien en votant ce budget.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, attirer plus particulièrement votre attention sur les ajustements entraînés par la mondialisation accrue des échanges et la prise en compte des accords commerciaux qui régissent ces échanges.
A ce titre, les questions agricoles me semblent revêtir une importance particulière.
En France, le secteur de l'agroalimentaire est celui qui connaît un des meilleurs soldes commerciaux en 2001, et ce malgré un repli général. Au terme des huit premiers mois de l'année 2001, l'excédent des échanges agroalimentaires s'établit en effet à 4,6 milliards d'euros. Les exportations agroalimentaires françaises ont globalement augmenté de 50 % depuis dix ans. Cette performance ne doit cependant pas masquer la fragilisation des parts de marché de la France face à ses principaux concurrents.
Dans ce contexte, le lancement d'un nouveau cycle de négociation dans le cadre de l'OMC constitue un événement déterminant.
A cet égard, les objectifs de l'Union européenne et de la France sont clairs. Ils n'ont d'ailleurs pas changé depuis la conférence de Seattle. Le lancement du nouveau cycle de négociations, acquis lors de la conférence de l'OMC à Doha, devrait être l'occasion de confirmer la spécificité de la négociation agricole et de relancer la discussion, comme le prévoyait l'article 20 de l'accord agricole de Marrakech, signé en 1994.
La mise en oeuvre de l'agenda de développement fixé à Doha ne sera pas une tâche simple. Néanmoins, nous avons aujourd'hui l'assurance que les négociations s'engagent sur des bases équilibrées.
Dans le domaine de l'agriculture, le résultat est conforme au mandat fixé au négociateur communautaire. Les préoccupations traditionnelles sont équilibrées par la prise en compte de préoccupations non commerciales, concernant notamment la sécurité sanitaire, le développement rural, l'environnement et le bien-être des animaux.
Le risque majeur pour la France et ses partenaires européens était de voir que le lancement du cycle s'accompagner de nouvelles contraintes pour la politique agricole commune et entériner le déséquilibre actuel des soutiens publics à l'agriculture. Ce risque a été évité, et l'Union européenne détient aujourd'hui les marges de manoeuvre nécessaires pour conduire cette négociation sans bousculer l'Agenda 2000. Contrairement au texte de Seattle, l'accord de Doha permettra de prévoir une modulation entre les secteurs.
Concernant les subventions à l'exportation, l'Europe a refusé que le dispositif communautaire soit injustement singularisé. A cet égard, il est important de souligner que nous n'avons pas, dans ce domaine, de raisons de nous sentir en position d'accusé. Si l'on observe ce qui s'est passé depuis l' Uruguay round, on ne peut manquer de noter que les Américains ont, ces dernières années, renié en permanence leurs engagements, alors que l'Europe a scrupuleusement respecté les siens, qu'il s'agisse de l'accès au marché, des aides à l'export ou des soutiens aux prix.
A la suite des décisions communautaires relatives à l'Agenda 2000, l'agriculture française est aujourd'hui confrontée à un processus d'adaptation particulièrement exigeant : baisse des prix - avec une diminution de 20 % pour la viande bovine et de 15 % pour les produits laitiers, d'après les chiffres de 1999 -, réduction du soutien global et diminution des restitutions à l'exportation.
A ces évolutions institutionnelles sont venues s'adjoindre des crises sans précédent, qui ont sensibilisé plusieurs secteurs de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire. Certaines régions françaises ont subi de plein fouet des pertes considérables de recettes. Je pense notamment à la Bretagne, compte tenu de sa spécialisation dans la filière de poulet « grand export », qui percevait en 1999, à elle seule, 85 % des restitutions versées par l'Union européenne aux exportateurs avicoles européens.
Qu'il s'agisse de la filière laitière, de l'élevage bovin ou de l'élevage ovin, l'actualité des trois dernières années écoulées démontre, s'il en était besoin, que, faute d'un soutien européen à l'exportation, la production française va se trouver structurellement confrontée à une crise profonde de sa filière agricole agroalimentaire.
Bien entendu, c'est un domaine où nous devons poursuivre l'effort de réorientation qui a été engagé pour éviter de dommageables distorsions de concurrence. Pour autant, l'Europe doit pouvoir garder la maîtrise des évolutions à venir en matière de restitutions. Nous avions demandé à nos partenaires de ne pas s'engager à Doha en faveur d'un principe d'élimination de cette forme de soutien, car cela nous aurait clairement conduits à « verser un acompte » pour la négociation à venir.
Les aides de la PAC sont transparentes et elle évoluent, progressivement, dans une direction qui correspond aux attentes de notre société, qu'il s'agisse des préoccupations liées à l'environnement et à l'aménagement du territoire ou de l'exigence de qualité des produits.
Il importe que, à court terme, le modèle agricole européen soit aidé dans la reconversion de ses pratiques grâce à la préservation d'un dispositif financier susceptible de procurer aux agriculteurs des conditions raisonnables de rémunération.
Parallèlement, on ne peut, bien sûr, ignorer la préoccupation généreuse de rééquilibrage du commerce agricole mondial en faveur des producteurs des pays en développement et des pays les moins avancés. C'est une ambition louable, à laquelle on ne peut que souscrire.
La mise en oeuvre d'un tel rééquilibrage suppose toutefois, au préalable, que l'OMC dispose de moyens réels pour préserver nos pays des appétits sans cesse grandissants des ultralibéraux. C'est la tâche qu'il nous reste à accomplir, à présent que l'agenda de la négociation est fixé.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sachez que le groupe socialiste du Sénat, en votant votre budget, vous fait entièrement confiance pour défendre au mieux les intérêts de la France dans le contexte chahuté qu'il nous est donné de connaître aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, en cet instant d'évaluation du travail accompli et de projection dans l'avenir, je commencerai en évoquant les missions et priorités de mon ministère au cours des deux années écoulées.
De Seattle à Doha, notre première mission a été de favoriser un environnement propice aux échanges internationaux, de créer les conditions d'un commerce stable, équitable et doté de règles claires. Telle est la première raison de notre engagement fort dans les négociations multilatérales.
Notre deuxième mission a été de tout faire pour que l'internationalisation de nos entreprises ne soit pas une aventure trop risquée. Voilà pourquoi, depuis deux ans, la direction des relations économiques extérieures est aux avant-postes de la « réforme-modernisation » menée par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
En vérité, c'est tout le réseau du commerce extérieur qui connaît aujourd'hui une révolution silencieuse pour s'adapter au rythme de la mondialisation. Dans ce cadre, vous avez aussi compris qu'une tâche particulière se dessine, celle de repérer et d'accompagner nos PME-PMI qui ont un fort potentiel de développement à l'interna-tional.
Malgré le contexte économique et les conséquences des attentats du 11 septembre, notre commerce extérieur, je veux le souligner, garde des perspectives solides. C'est ainsi que, en dépit du recul des ventes d'Airbus en septembre, nous avons enregistré un excédent de 228 millions d'euros pour ce mois, excédent d'ailleurs minoré par le changement méthodologique introduit, précisément en septembre, par les douanes.
Compte tenu de ces modifications de calcul, l'excédent cumulé sur les neuf premiers mois de l'année reste de 1,876 milliard d'euros, contre un déficit de 222 millions d'euros pour la même période en 2000.
Je voudrais, pour répondre aux préoccupations de M. Bécot, replacer ces chiffres dans le contexte des échanges internationaux, qui ont connu cette année un très réel coup de frein. Alors qu'ils s'étaient développés en 2000 de plus de 10 %, ils seront, cette année, plus proches d'une croissance de 2 % seulement, ce qui était d'ailleurs prévu avant même les événements du 11 septembre.
Dans ce contexte, je crois que l'accord que nous avons finalement trouvé à Doha pour lancer un cycle de négociations commerciales est un signal de confiance.
Depuis la signature de cet accord, les commentateurs ont eu raison de souligner que ce cycle est ambitieux. Ceux d'entre vous qui étaient à Doha savent la ténacité européenne - et singulièrement française - à faire admettre une régulation de la mondialisation sans pour autant nous laisser dicter de l'extérieur notre politique agricole, comme vous l'avez souligné, monsieur Bécot.
Sur l'agriculture, je partage tout à fait votre constat, monsieur Marc. Le résultat est, en effet, conforme au mandat qui avait été fixé au négociateur communautaire. Le risque de nouvelles contraintes pour la politique agricole commune a été écarté ; l'Union européenne détient bien aujourd'hui les marges de manoeuvre nécessaires pour conduire les négociations agricoles à l'OMC, sans que ces négociations préemptent le rythme de l'agenda européen.
Vous avez noté, madame Terrade, monsieur Massion, monsieur Bécot, les avancées réalisées en faveur des pays en voie de développement. Au-delà de l'accès aux médicaments, le traitement spécial et différencié a été pris en compte dans tous les éléments de la négociation. Des travaux ont été engagés sur des thèmes prioritaires comme les liens entre le commerce et les dettes, le commerce et les transferts de technologies, ainsi que la coopération technique.
En revanche, je partage votre déception, madame Terrade, sur la timidité de la déclaration de Doha pour ce qui est du dialogue entre l'OMC et l'Organisation internationale du travail. Mais je souligne que, parallèlement, l'OIT a décidé d'approfondir ses travaux sur la dimension sociale de la mondialisation.
Nous devons maintenant continuer d'informer et d'accompagner les entreprises, les aider ainsi à se projeter avec confiance dans l'avenir pour ne manquer aucune des opportunités qui se dessinent déjà et que l'entrée officielle de la Chine à l'OMC symbolise à elle seule.
Outre l'engagement multilatéral que je viens de rappeler, je veux mettre en avant nos deux priorités pour y parvenir en 2002, c'est-à-dire la réforme-modernisation de notre réseau international d'intelligence et d'appui économique et la pérennité des instruments financiers au service de nos entreprises, particulièrement de nos PME-PMI.
Le réseau du commerce extérieur est associé très étroitement, vous le savez, au large mouvement de modernisation du ministère de l'économie et des finances. J'enregistre comme un point très positif, madame, messieurs, votre soutien à cet effort. C'est une réforme pragmatique et ambitieuse dont la grande innovation sera, en 2002, la fusion des réseaux internationaux de la direction des relations économiques extérieures et de la direction du Trésor.
Les pouvoirs publics et nos entreprises vont disposer d'un réseau très dense d'intelligence économique, financière, industrielle et commerciale sur l'ensemble de la planète. Cette concentration des moyens et des compétences s'accompagne d'un redéploiement géographique en direction du monde émergent : l'Asie, l'Amérique latine, l'Europe centrale et orientale.
Les organismes d'appui qui dépendent du secrétariat d'Etat au commerce extérieur participent eux aussi pleinement à cet effort décisif de modernisation et de redéploiement.
Effet le plus visible de cette démarche, le CFME-ACTIM, a disparu au profit d'Ubifrance. Le choix de ce patronyme neuf est le signal d'un nouvel élan au service de nos entreprises. Je reviens d'ailleurs de Pékin où, à l'occasion de l'inauguration de l'exposition Chine-France 2001, près de soixante-dix PME-PMI ont été accueillies par Ubifrance, souvent avec le parrainage actif de leur région ou de grands groupes qui apportent leur expérience dans des opérations de portage.
Dans la logique du réseau international unifié du ministère de l'économie et des finances, le rapprochement d'Ubifrance et du Centre français du commerce extérieur est déjà bien engagé, Vous en avez souligné l'importance, monsieur Bécot, et je souhaite comme vous, monsieur Massion, que cette dynamique ne soit pas ralentie mais, au contraire, accélérée.
Cette ambition se traduit également par la démarche de qualité dans laquelle ces deux organismes se sont engagés en s'associant au programme de certification ISO 9001. A terme, l'ensemble de la relation du réseau du commerce extérieur aux entreprises sera soumis à cette norme de qualité.
Cet engagement à se réformer et à s'adapter à l'environnement international est plus que jamais une nécessité pour notre réseau. Avec une enveloppe stable de près de 40 millions d'euros, je suis convaincu que le service proposé par Ubifrance et par le CFCE aux entreprises, tout particulièrement aux PME-PMI, s'en trouvera encore amélioré, notamment pour ce qui est des participations aux salons à l'étranger.
Concernant Ubifrance, comme le souhaite M. Massion, nous serons très attentifs à l'éventuelle incertitude financière liée à la transformation de la procédure des CSNE, les coopérants du service national en entreprise, en un volontariat international qui pourrait peser sur les finances de cet organisme. Mais c'est en même temps un projet exaltant qui mobilise fortement les jeunes, hommes ou femmes, même s'il est encore trop tôt pour évaluer précisément le nouveau dispositif.
J'en viens au dernier point concernant notre réseau d'appui au commerce extérieur, l'utilisation plus massive des nouvelles technologies. L'efficacité d'un réseau comme celui-ci est aussi désormais largement indexée sur sa capacité à intégrer les technologies de l'information et de la communication. Je serai heureux de pouvoir vous présenter, au début de 2002, la grande galerie virtuelle des technologies et savoir-faire français dont Ubifrance sera le webmaster .
J'en viens maintenant aux instruments financiers de ce budget qui, eux aussi, témoignent de nos priorités.
La volonté de consacrer plus de moyens aux PME-PMI s'est traduite dans les contrats de plan Etat-région, les CPER. Leur montant est passé de 36,4 millions d'euros pour le onzième CPER à 63 millions d'euros pour la période en cours. Globalement, nous sommes parvenus à la parité Etat-région, ce dont je me félicite.
De plus, les critères d'éligibilité aux aides ont été élargis et les procédures de traitement de dossier simplifiées.
Les services offerts aux PME étaient à l'évidence trop dispersés. L'enjeu de la politique régionale du commerce extérieur que j'ai lancée il y a deux ans consiste à rationaliser les aides et à fédérer les énergies. Chaque région a défini des secteurs, puis des PME-PMI ayant un potentiel de développement à l'international.
Une telle politique a été menée sous l'impulsion de l'Etat, mais dans la concertation. Vingt-six programmes d'action régionaux pour le développement international, les PARDI, ont déjà été signés. Dix autres le seront dans les toutes prochaines semaines. Par conséquent, nous sommes sur le bon chemin.
Pour ce qui est de l'assurance-prospection de la Coface, qui est réservée aux PME-PMI, la procédure a été profondément remaniée pour devenir plus lisible et, surtout, plus accessible aux entreprises.
Un bilan à mi-parcours le confirme puisque les demandes ont augmenté d'un tiers. Pour ces crédits, très utiles aux PME, la dotation évaluative reste fixée à 27,44 millions d'euros.
Vous avez indiqué, monsieur Bécot, que l'importance des reports était le signe d'une mauvaise utilisation des procédures au profit des PME. Rassurez-vous, les reports concernent non pas les aides spécifiques aux PME que je viens de mentionner, mais plutôt les financements des grands contrats.
J'en viens à l'assurance-crédit. Le résultat technique de l'assurance-crédit gérée par la Coface pour le compte de l'Etat est passé d'un déficit de 9 milliards de francs en 1991 à un excédent de 7,5 milliards de francs en 1998. En 2000, il s'établit à 5,6 milliards de francs.
Pour 2001, les prévisions laissent escompter un résultat financier de l'ordre de 6,9 milliards de francs, ce qui explique l'absence de dotation dans le présent projet de loi de finances. Il en est de même pour la stabilisation des taux et la garantie de change, ces procédures étant gérées de façon à maintenir l'équilibre.
S'agissant de la garantie du risque économique, une baisse de la dotation de 20 % a été jugée possible par le gestionnaire de la procédure, compte tenu des contraintes de gestion et des dépenses prévues.
Les crédits du FASEP-études, Fonds d'études et d'aide au secteur privé, s'élèveront à 7,62 millions d'euros en autorisations de programme. Il n'y avait pas eu de dotation en 2001 compte tenu des reports accumulés. Les crédits de paiement, pour leur part, passent de 15,24 millions à 25,92 millions d'euros.
Globalement, les crédits de paiement sont comparables à ceux de l'année dernière, bien qu'ils connaissent une légère baisse de 1,9 %.
Les autorisations de programmes accusent, il est vrai, un effet d'affichage de moins 32 %. Annoncée de façon abrupte, cette baisse peut paraître paradoxale, mais il s'agit simplement, je le répète, d'un affichage technique. En réalité, les crédits étant adaptés aux besoins réels, il s'agit d'une baisse comptable, qui ne saurait évidemment être surinterprétée.
Au-delà des chiffres, le projet de budget que je vous présente traduit la volonté du Gouvernement, que vous avez saluée, monsieur Marc, d'accompagner efficacement nos entreprises dans un environnement économique international en profonde mutation.
Je viens d'évoquer les grands défis et quelques-uns des grands chantiers ouverts au commerce extérieur. C'est donc bien une révolution silencieuse qui s'accomplit, révélatrice de notre volonté d'épouser le rythme de notre époque.
Ce rythme est celui de la mondialisation, qui impose de s'adapter et d'évoluer en temps réel, quelles que soient les circonstances, et de gérer les deniers publics au plus juste. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste, républicain et citoyen et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et C concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Je rappelle au Sénat que les autres crédits concernant l'économie, les finances et l'industrie ont été examinés aujourd'hui même.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 281 480 691 EUR. »

Je vais mettre aux voix les crédits figurant au titre III.
M. Auguste Cazalet, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet, au nom de la commission des finances. La commission des finances vous invite, mes chers collègues, à rejeter les crédits du ministère de l'économie et des finances. En effet, si le budget est plus sincère, il reste bien éloigné de la nouvelle gestion politique qu'il entend promouvoir. Les agrégats sont peu lisibles, les objectifs de gestion très hétérogènes et les indicateurs de performance peu fiables.
Il convient, de plus, de déplorer ce « réformisme sans la réforme » que manifeste le ministère. En effet, si une volonté de réforme est affichée, peu de réalisations d'envergure peuvent être dénombrées. Il y a beaucoup d'expérimentations, peu d'évaluations et pas de décisions. Le pragmatisme du ministère n'est pas à la hauteur de l'enjeu qui est, je le rappelle, une gestion de l'impôt plus efficace, pour un coût moindre.
Par ailleurs, la création d'un grand ministère de l'économie et des finances s'est faite au détriment des actions en direction des PME et de l'industrie. La fusion des secrétariats d'Etat aux PME et à l'industrie au sein de Bercy n'a débouché sur aucune synergie entre directions. Elle a provoqué la marginalisation et la stagnation des directions de ces secrétariats d'Etat au profit des directions traditionnelles. Je ne vois pas de pôle PME digne de ce nom et je déplore la baisse des capacités d'expertise industrielle du ministère.
Enfin, pour les 35 heures, l'accord conclu à Bercy déroge sur bien des points au décret fixant à 1 600 heures le temps de travail dans la fonction publique. Je considère que cet accord a surtout été destiné à préserver la paix sociale. Certes, il n'y a pas de mouvement massif de créations d'emplois, mais la diminution des sureffectifs du ministère est arrêtée.
Mes chers collègues, il faut sanctionner, par conséquent, la gestion d'un ministère qui devrait être exemplaire et qui, malgré les moyens exceptionnels dont il dispose, ne montre pas assez le chemin aux autres administrations.
Enfin, monsieur le président, la commission des finances demande un scrutin public sur les crédits figurant au titre III.
M. le président. Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 23:

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 112
Contre 201

« Titre IV : moins 16 419 950 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisation de programme : 156 306 000 EUR ;
Crédit de paiement : 55 098 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. « Titre VI. - Autorisations de programme : 1 100 370 000 EUR ;
Crédit de paiement : 346 268 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le commerce extérieur.

CHARGES COMMUNES
ET COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
La parole est à M. Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les charges communes. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des charges des communes est un budget « mammouth » : 117 milliards d'euros en charges brutes, 20 % du budget général en charges nettes. C'est aussi un budget en cure d'amaigrissement, non par réduction de crédits, hélas, mais par diminution de son caractère fourre-tout, par transfert de multiples crédits d'intervention dans d'autres fascicules budgétaires, et les améliorations sont déjà très sensibles pour l'emploi et l'aide au développement.
Il faut poursuivre ce recentrage, madame le secrétaire d'Etat. Est-il logique que les crédits pour les travaux de sécurité dans les lycées et les crédits d'indemnisation des préjudices touristiques dus au naufrage de l' Erika ou de la dotation de l'Etat en faveur du Fonds national de péréquation, malheureusement majorée de 150 millions d'euros, figurent dans le budget ?
En tout cas, le budget des charges communes, c'est d'abord celui de la dette.
En charges nettes, les intérêts s'élèvent à 36,8 milliards d'euros, et y ajoutent les 63 milliards d'euros d'amortissement de la dette, qui s'élève cette année au chiffre rond symbolique de 100 milliards d'euros.
Pourtant, la charge d'intérêt n'augmente en 2002 que de 0,8 %. Cette augmentation modérée peut surprendre, car le stock de la dette ne cesse d'augmenter, de flamber, si je puis dire.
D'après le bulletin de l'Agence France-Trésor, cette charge a augmenté de 26 % depuis la fin de l'année 1996.
Par ailleurs, la dette de l'Etat continue de croître en valeur relative, et ne cesse de progresser en pourcentage du PIB puisque nous sommes passés de 44 % à la fin de 1996 à 48,8 % à la fin de 2000.
Cependant, cette augmentation ne se répercute pas sur la charge, qui est en effet freinée mécaniquement par la baisse des taux d'intérêt qui se poursuit.
En 1992-1993, la France a souscrit des obligations assimilables du Trésor, des OAT, à 8,50 %. Elles arrivent à échéance cette année et on va leur substituer des OAT qui sont approximativement émises, pour les dernières d'entre elles, à 4,40 %. La baisse est progressivement engrangée.
Il faut dire que nous tirons profit de la création de la zone euro, qui élimine les risques de change et permet une politique monétaire moins rigide. Pour mesurer la portée de cette observation, il faut se souvenir de la politique monétaire économiquement absurde - même si elle était politiquement justifiée au point de vue international - des années 1991-1993 et qui visait à maintenir la parité avec le mark. Aujourd'hui, en revanche, nous engrangeons des bénéfices.
Le Gouvernement, madame le secrétaire d'Etat, a bénéficié à plein de cette baisse des taux puisque l'accroissement de la charge nette de la dette, depuis 1997, est de 8,6 % seulement.
Mais cet effet « taux » va disparaître. Progressivement, l'effet d'amortissement de la dette à taux élevé va être amorti et un simple calcul montre que la charge de la dette va à nouveau être gouvernée par la croissance de l'encours. Un déficit de 30 milliards d'euros financé au taux moyen nominal de 5 % engendre en effet mécaniquement une charge supplémentaire chaque année de 1,5 milliard de francs.
Une gestion plus active de la dette pourrait-elle atténuer ce coût ? C'est manifestement l'un des souhaits du ministre des finances !
Je me dois à cet égard de saluer l'apparition dans ce budget des charges communes du premier programme voulu par la loi organique du 1er août intitulé « gestion de la dette et de la trésorerie ».
C'est un progrès, même si des améliorations sensibles pourront être apportées.
Je retiendrai cependant l'un des objectifs, celui de la réduction de la durée moyenne de la dette négociable. C'est un objectif fort, parce qu'il traduit un changement de doctrine du Trésor.
Jusqu'alors, la doctrine classique était : le Trésor emprunte à long terme pour couvrir ses besoins à long terme et il emprunte à court terme pour couvrir ses besoins à court terme.
Evidemment, cela interdisait de jouer sur la courbe des taux. Or vous savez que les taux d'intérêt à court terme sont généralement plus bas que les taux d'intérêt à long terme. Emprunter à court terme permet de faire baisser les coûts en jouant sur la différence des taux. Mais cela comporte un risque, parce que rien n'empêche que les taux à court terme se « tendent », voire passent au dessus des taux à long terme. Le Trésor américain en a fait l'expérience et il a connu des années très difficiles vers 1992-1994.
Un arbitrage entre le risque et le taux doit donc être réalisé. Je sais bien que la création d'un marché européen des dettes souveraines en euros modifie la situation par rapport au début de la décennie, parce que nous ne sommes vraiment plus seuls sur un marché en francs. Nous représentons désormais à peu près 20 % de la dette souveraine, et des risques supérieurs peuvent donc être pris.
Je pense cependant qu'il faudra se lancer dans cette politique avec une grande prudence et sous le contrôle du Parlement. Une expertise de la portée des contrats d'échanges de taux d'intérêt devra être menée. Je n'accepte donc votre objectif n° 3, madame le secrétaire d'Etat, que sous bénéfice d'inventaire et de contrôle.
Le budget des charges communes devrait être également le budget de la dette viagère, des pensions.
Or, depuis 1977, les crédits initiaux des pensions sont, lors du vote du budget, répartis dans les fascicules des différents ministères, prétendument pour donner une idée exacte du coût net de chaque ministère.
Mais cette répartititon n'est réalisée que de façon très approximative. Sachez, par exemple, que les retraites des professeurs d'université émargent à la section scolaire de l'éducation nationale et qu'il n'est pas tenu compte, évidemment, des retenues pour pension pour calculer un coût net.
Cette méthode n'est pas satisfaisante, elle doit être révisée. Nous savons en effet que les dépenses pour pension ont explosé de 1997 à 2002. Toutes corrections faites, elles sont passées de 26 milliards d'euros à presque 32 milliards d'euros, soit 17 % d'augmentation, ce qui est très supérieur à l'augmentation des rémunérations d'activité.
Pour ce qui est des pensions civiles et militaires de l'Etat, à l'heure actuelle, les retenues pour pensions effectuées sur le salaire des agents ne couvrent qu'à peu près 15 % du coût net, qui explose. La subvention implicite de l'Etat est donc de 85 % !
En ce domaine, je note l'inaction du Gouvernement : depuis la déclaration du Premier ministre, aux termes de laquelle un allongement de la durée des cotisations pouvait être envisagé en contrepartie d'une intégration des primes, force est de reconnaître que rien n'a été fait.
Le budget des charges communes, c'est aussi celui des dégrèvements et des remboursements d'impôts.
Dans ce domaine, les masses sont importantes : 62,9 milliards d'euros de dépenses brutes. Or, dans la charte de budgétisation qui figure au début du projet de loi de finances, vous indiquez, madame le secrétaire d'Etat, que les dégrèvements d'impôts sont défalqués à la fois des recettes et des dépenses, ce qui est parfaitement logique et tout à fait juste dans le principe.
Il faut calculer la TVA et l'impôt sur les sociétés en charges nettes, mais il me semble qu'il y a une exception qui n'est pas respectée, celle qui concerne les impôts locaux, et qui intéresse naturellement beaucoup le Sénat.
Est-il logique de défalquer les dégrèvements d'impôts locaux du montant des impôts d'Etat ? Selon moi, il faudrait absolument que les dégrèvements d'impôts locaux apparaissent comme de vraies dépenses, puisque les allégements de fiscalité locale peuvent apparaître soit sous forme d'exonérations, soit sous forme de dégrèvements.
Pendant longtemps, la réponse du ministère fut très simple : « On ne peut pas le faire car la comptabilité publique ne distingue pas, au niveau des contributions directes entre impôts d'Etat et taxes locales. »
Heureusement, cet argument technique ne tient plus aujourd'hui. Des progrès considérables ont été réalisés en matière de comptabilité publique : ce qui était impossible voilà encore trois ou quatre ans est désormais réalisable.
Madame le secrétaire d'Etat, pour la clarté du débat, pour évaluer correctement l'impact de ces dégrèvements, il serait souhaitable qu'ils apparaissent en dépenses et qu'ils ne soient plus défalqués des impôts d'Etat.
Ces dégrèvements de fiscalité locale atteignent actuellement des sommes considérables, mais progressent moins que les exonérations et compensations. Sur les 140 milliards de francs d'allégements de la fiscalité directe, 60 milliards de francs prennent la forme de dégrèvements.
Vous savez que le Sénat a toujours été attaché à ce que les dégrèvements soient favorisés, parce qu'ils permettent une indexation correcte et sont rebasés chaque année pour compenser les pertes de recettes des collectivités locales.
En conclusion, mes chers collègues, la commission pouvait porter deux regards sur cet énorme budget.
Le premier est de nature technique : la plupart des crédits sont évaluatifs ou provisionnels. La commission des finances a considéré qu'ils étaient correctement évalués, même si l'on peut émettre quelques remarques au sujet des crédits de dépenses éventuelles. La commission a également constaté que les taux d'intérêt pour évaluer la charge de la dette étaient basés sur le consensus, méthode proposée par M. Arthuis alors qu'il était ministre. Sous cet angle, malgré tout, le budget est satisfaisant.
Mais la commission des finances a estimé que le volume des crédits demandés, en particulier au titre de la charge de la dette, ne faisait que tirer les conséquences d'une politique de réduction insuffisante du déficit budgétaire en période de croissance, politique qui renvoie sur les générations futures une partie du paiement de nos dépenses de fonctionnement. C'est pour cette raison que la commission des finances vous demande de rejeter ce budget.
La parole est à M. Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, pour les comptes spéciaux du Trésor. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les comptes spéciaux du Trésor apporteront en 2002, comme les années précédentes, une contribution très positive au solde du budget général, puisqu'ils dégageront un excédent de 1,9 milliard d'euros, en hausse de 592 millions d'euros par rapport à celui qui était prévu en loi de finances initiale pour 2001.
Je souhaite développer mes propos autour de quatre points : les incertitudes du compte 902-24 de privatisation, la déception du compte 902-33 concernant les licences UMTS, le bénéfice exceptionnel, lié à l'euro, du compte 906-04 d'émission des monnaies métalliques et le nouvel équilibre du compte d'avances aux collectivités locales.
S'agissant du compte de privatisation, ce sont plus de 44,5 milliards d'euros de recettes qui ont été encaissés entre 1993 et 2001. Ces recettes de privatisation sont exceptionnelles et non reconductibles. Elles sont fragiles, puisqu'elles dépendent, pour beaucoup, de la conjoncture économique et boursière.
Je tiens à souligner que le compte 902-24 connaît, en 2000 et en 2001, un effet de ciseau entre les recettes de privatisation et les besoins de financement du secteur public. Pour ces deux années, les recettes réalisées ont été en effet bien inférieures aux prévisions.
Cette diminution des recettes de privatisation s'explique, d'une part, par la réduction du périmètre des entreprises publiques et, d'autre part, par la conjoncture défavorable des marchés financiers qui peut conduire soit à une cession à moindre coût des entreprises publiques, soit à un report de leur mise sur le marché. La dernière hypothèse est sans doute préférable pour optimiser la gestion patrimoniale de l'Etat. Elle ne résout toutefois pas le problème de financement du secteur public.
Ainsi, la conjoncture défavorable que nous traversons conduit à un double paradoxe. Les entreprises figurant sur la liste des privatisations ne bénéficient pas des financements qu'elles pourraient trouver sur les marchés d'actions, les autres ne peuvent bénéficier de dotations en capital à la hauteur de leurs besoins, en raison notamment de la raréfaction des recettes de privatisation.
Tel sera le cas en 2001. Au mieux, ce seront 2 milliards d'euros sur les 4 milliards d'euros prévus qui seront encaissés sur le compte d'affectation spéciale 902-24. Les dotations en capital des entreprises publiques en souffriront. Une forte proportion devra ainsi être repoussée en 2002, et je le regrette.
Pour 2002, les perspectives sont incertaines. Les 3,9 milliards d'euros de recettes de privatisation prévus au départ dans les documents budgétaires correspondent à des cessions de capital de Renault, du Crédit lyonnais, de la SNECMA et de Dassault Systèmes. S'y ajouteront les 1,5 milliard d'euros liés à l'ouverture en capital, annoncée à l'Assemblée nationale, d'Autoroutes du Sud de la France.
Compte tenu des informations dont je dispose, l'estimation initiale fournie dans les documents budgétaires me semble constituer la fourchette basse des recettes qui peuvent être attendues pour l'Etat, sauf report éventuel d'opérations, évidemment lié, comme je le disais à l'instant, au contexte économique et boursier.
J'aimerais d'ailleurs que le Gouvernement fasse preuve de plus de transparence dans ses estimations : la difficulté de la prévision, qui est réelle, madame la secrétaire d'Etat, n'excuse pas l'absence d'information du Parlement sur les privatisations et les dotations en capital prévues pour 2002 et sur la réalisation du programme de 2001.
S'agissant du compte 902-33, je ne puis qu'exprimer une déception. L'UMTS a suscité - et suscite toujours, mais sans doute de manière plus raisonnable - de grands espoirs industriels. Il a, par ailleurs, nourri de folles espérances budgétaires. A l'issue de la procédure d'attribution des licences, l'UMTS n'a cependant pas été la bonne affaire espérée.
La révision du prix intervenue à la demande des opérateurs de télécommunications confirme cette déception budgétaire. Les gouvernements britannique et allemand ont ainsi recueilli deux à trois fois plus que les recettes prévues pour 2001, donc seize à vingt-quatre fois plus que ce que percevra l'Etat en 2001 et 2002. Compte tenu de la modicité des sommes désormais attendues - 1,24 milliard d'euros tirés de l'UMTS en 2001, soit moins de 1 % des montants attendus pour le fonds de réserve pour les retraites d'ici à 2020 -, je me demande si le compte 902-33 est à la hauteur des enjeux. Dès lors, je pense que les produits issus de l'UMTS devraient abonder le budget général.
J'en viens au compte 906-04 d'émission des monnaies métalliques. Je confirme évidemment le bénéfice exceptionnel de 533 millions d'euros, soit 3,5 milliards de francs, que connaîtra ce compte du fait du passage à l'euro en 2002. Il me paraît inutile de nier cette réalité, comme certains tentent de le faire aujourd'hui.
L'explication de ce « bénéfice » est simple : la Banque de France va émettre massivement des euros ; elle estime par ailleurs qu'un grand nombre de francs ne retourneront pas dans ses caisses et qu'une forte évaporation des pièces et des billets en francs aura donc lieu. La Banque de France devrait reverser en 2002 à l'Etat, sur la ligne 805 « Recettes accidentelles à différents titres », 240 millions d'euros, soit 1,5 milliard de francs, de recettes exceptionnelles, liées au retrait des billets en francs.
Il y a quelque paradoxe à constater qu'au moment où l'Etat abandonne son droit régalien le plus ancien, celui de battre monnaie, et sa souveraineté monétaire il réalise un bénéfice exceptionnel de 5 milliards de francs !
On me répondra que j'oublie les coûts de fabrication ; tel n'est pas le cas ! Si l'Etat pratiquait une comptabilité en coûts complets, il faudrait sans doute déduire de ce bénéfice de 2002 les coûts de fabrication des pièces payées sur les exercices budgétaires 1998, 1999, 2000 et 2001. Il serait également possible de rapprocher ce bénéfice des autres coûts supportés par l'Etat par ailleurs. Ces coûts, hélas ! madame la secrétaire d'Etat, ne sont pas connus dans leur globalité. Je souligne qu'il est très regrettable que l'Etat n'ait pas fait l'effort de mesurer le coût complet du passage à l'euro et qu'il ne l'ait pas, de ce fait, communiqué au Parlement ; ou bien, s'il l'a fait, il eut été pédagogique de le faire parvenir au Parlement.
Quoi qu'il en soit, pour conclure sur cet excédent exceptionnel, nous constatons que l'Etat sera le seul agent économique qui, à côté des inévitables coûts d'adaptation au changement de monnaie, bénéficiera en 2002 de tels profits sur l'euro.
Enfin, s'agissant du compte d'avances 903-54 aux collectivités locales, les spécialistes des finances publiques locales - et ils sont nombreux dans cet hémicycle - expliquaient encore récemment que le compte subissait un effet de profil et un effet de solde. Il n'en est rien aujourd'hui.
L'effet de profil s'est estompé en raison des progrès dus à la mensualisation du paiement de l'impôt. Surtout, le déficit de fin d'année a laissé place, depuis 1996, à des excédents croissants. L'excédent du compte pour 2002 s'élèverait ainsi à 900 millions d'euros ; c'est énorme ! Alors que le compte d'avances a pu fonctionner pendant de nombreuses années au détriment de l'Etat, force est de constater qu'il opère aujourd'hui à son profit. Je remarque dès lors que ce compte est porteur d'un nouvel équilibre des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, et je ne peux que m'en réjouir.
Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais pour conclure vous remercier de votre attention et indiquer que la commission des finances a proposé à la Haute Assemblée de voter le projet de budget des comptes spéciaux du Trésor. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les comptes spéciaux du Trésor recouvrent des opérations financières si diverses qu'il nous est relativement difficile de les analyser.
A y regarder de plus près, on se contentera donc de souligner concrètement que le solde des opérations menées sur les comptes spéciaux participe de l'amélioration du solde budgétaire global.
Pour cette raison, mon bref propos portera essentiellement sur la situation du compte d'avances aux collectivités locales, qui représente à lui seul plus de 54 milliards d'euros et qui devrait dégager, en 2002, un solde positif de 900 millions d'euros, contribuant ainsi à réduire de près de trois points le solde budgétaire global.
Cette situation appelle évidemment plusieurs observations. En effet, deux facteurs semblent motiver cette situation excédentaire du compte d'avances.
Le premier facteur est celui de la baisse des impôts locaux effectivement acquittés par les contribuables, qui accroissent, certes, les charges de dégrèvement et le niveau des prélèvements sur recettes, mais augmentent sensiblement, paradoxalement, les recettes du compte d'avances.
Nous sommes en présence d'une sorte de jeu d'écriture qui consiste à constater, ici, soit un amoindrissement des recettes, soit une augmentation des charges, et là, au contraire, une hausse des produits du compte d'avances.
Le second facteur qui explique cependant la situation du compte d'avances est, lui, plus directement lié à la question du recouvrement des impôts locaux.
Sous le double effet d'une meilleure lisibilité des encaissements et de la mensualisation, les recettes fiscales tant de l'Etat que des collectivités territoriales ont connu, dans la dernière période, une sensible amélioration de leur recouvrement.
Le paradoxe de l'augmentation de la fiscalité locale a été d'inciter de plus en plus de contribuables à opter pour un prélèvement mensuel de leur cotisation.
On notera d'ailleurs que ce choix a été opéré plus souvent par les contribuables de la taxe d'habitation ou de la taxe sur les propriétés foncières bâties que par ceux de la taxe professionnelle.
Toujours est-il que cette situation conduit aujourd'hui à l'amélioration constante du taux de recouvrement, donc à une réduction plus rapide du déficit chronique du compte d'avances au long de l'année.
Demeure donc pleinement posée la question de l'excédent du compte et de son origine. Est-ce un simple jeu d'optique ? Est-ce le produit de l'efficacité des services de la comptabilité publique dépassant, en quelque sorte, les résultats attendus dans la répartition du produit des impôts votés par les collectivités locales ?
Toujours est-il que ce compte d'avances constitue aujourd'hui un moyen bien commode de correction du déficit budgétaire et que la situation laisse un peu l'impression de voir les collectivités territoriales contribuer, sans le savoir, à l'amélioration de la situation des comptes publics.
Ce sont là quelques observations que je comptais formuler sur cette situation, à l'occasion de l'examen des comptes spéciaux du Trésor. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Marc.
M. François Marc. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des charges communes n'est jamais la source de débats animés au sein des hémicycles parlementaires, même s'il touche à des sujets parfois controversés.
Pourtant, ce budget est, du simple point de vue comptable - 117 milliards d'euros - le premier des budgets de l'Etat. Son faible attrait s'explique peut-être par son caractère très contraint, qui en fait plus un budget de constatation qu'un budget de choix politique. En effet, les dépenses de la dette, tout comme les dépenses de dégrèvement, sont des dépenses obligatoires pour l'Etat. La preuve en est que les crédits qui y sont affectés sont bien souvent évaluatifs et non limitatifs. Le titre II, « Pouvoirs publics », n'offre pas plus de marges de manoeuvre. Et je pourrais ainsi décliner un à un tous les titres de ce budget en arrivant au même constat.
Toutefois, mes chers collègues, même lorsque les marges de manoeuvre sont faibles, il y a toujours place pour la volonté politique et la réforme.
Cette année, la présentation du budget des charges communes a été assez substantiellement remaniée. Les crédits du Fonds européen de développement ont été transférés au ministère des affaires étrangères, où ils trouvent plus logiquement leur place. Par ailleurs, un nouvel agrégat isolant les dépenses en atténuation de recettes, à savoir essentiellement les dégrèvements et les remboursements de trop perçus, a été mis en place. Dès lors, ces dépenses sont clairement distinguées des dépenses de charge de la dette. De plus, on notera la logique d'intégration des remboursements induits par la prime à l'emploi à cette catégorie de dépenses.
Mais c'est surtout la présentation d'un programme relatif à la gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat qui est le signe le plus marquant de l'attachement du Gouvernement à la réforme des finances publiques. Certes, cette année, le Parlement ne se prononcera pas sur ce programme, mais celui-ci préfigure, à titre très instructif, l'aspect que pourrait revêtir demain le débat budgétaire sous l'égide de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances.
Ce programme s'appuie sur trois objectifs : limiter le montant du compte du Trésor à la Banque de France, dans une optique de trésorerie « zéro » ; placer au mieux les excédents de trésorerie résultant du premier objectif ; enfin, réduire la durée de la dette négociable. Pour atteindre ces objectifs, deux instruments - l'Agence France Trésor et les portefeuilles swaps - ont été créés.
Mes chers collègues, cette gestion active de la dette et de la trésorerie de l'Etat apporte la preuve, s'il en était besoin, du souci de rigueur de ce gouvernement dans la politique qu'il mène.
Ce budget nous permet aussi, cette année, de constater les résultats des efforts engagés depuis 1997 pour diminuer les déficits et la dette. Ainsi, la charge de la dette progressera modestement de - 0,8 % - en 2002, pour s'établir à 36,9 milliards d'euros.
Certes, l'effet de la baisse des taux sur cette évolution est indéniable, mais l'effet de la baisse des déficits depuis 1997 ne l'est pas moins. Il ne saurait en être autrement, mes chers collègues, avec 100 milliards de francs de déficit en moins par rapport à 1996 il n'y a pas de miracle ! Il s'agit simplement du résultat des efforts entrepris à bon escient.
La dette continue de progresser, mais cette progression est relative si on la compare à celle de la croissance de notre PIB et des recettes de l'Etat. Une dette n'a en effet de signification qu'au regard de la capacité de son titulaire à la rembourser ! Or la croissance économique de ces dernières années, à laquelle les choix du Gouvernement ne sont pas étrangers, permet à notre pays d'envisager plus sereinement la question de sa dette.
Je ne dis pas qu'aucun effort ne doit être accompli pour la réduire ou même pour en limiter la croissance ; je dis simplement qu'il faut, dans un premier temps, l'appréhender dans sa juste proportion et, ensuite, s'y attaquer pour que nos enfants n'aient pas à payer demain nos dépenses d'aujourd'hui.
Mes chers collègues, le groupe socialiste votera ce budget, parce qu'il n'est que le reflet de la politique déterminée et continue menée par le Gouvernement depuis 1997 pour assainir nos finances publiques et les clarifier. (M. Delfau applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, en réponse à M. Fréville, je souhaite revenir sur l'exemple concret de réforme de la gestion publique induite et soutenue par l'adoption de la loi organique du 1er août 2001 et relative à la modernisation de la gestion de notre dette publique.
Cette réforme se manifeste au ministère des finances de deux manières.
En premier lieu, Laurent Fabius a décidé, au début de cette année, la création de l'Agence France Trésor. Celle-ci a pour mission de gérer au meilleur coût et avec une sécurité optimale la trésorerie et la dette de l'Etat.
Le nom donné à cette structure ne doit pas vous induire en erreur. Comme le souligne volontiers le directeur général de l'agence, c'est en quelque sorte un « nom commercial », dont le but est de favoriser une forte visibilité auprès des investisseurs européens, japonais ou américains et, finalement, de faciliter le placement de notre dette sur des marchés qui sont hautement concurrentiels. En réalité, l'agence reste un service de la direction du Trésor, placé sous l'autorité du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Une autre amélioration concrète liée à la nouvelle loi organique est l'adoption dès cette année, donc par anticipation, d'un « programme de gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat » dans le bleu « charges communes » du projet de loi de finances pour 2002. C'est une innovation importante, et je remercie M. Marc d'avoir bien voulu la souligner.
L'objet de ce programme est de clarifier les enjeux liés à la dette, comme votre commission des finances - M. Fréville en particulier le souhaite depuis de nombreuses années. Grâce aux réflexions et aux travaux internes au ministère des finances qui avaient entouré la création de l'agence, nous étions prêts à en débattre devant le Parlement. Aujourd'hui, grâce à ce programme, je puis vous confirmer que la gestion de la charge de la dette n'est pas un simple calcul arithmétique ou des hypothèses de taux d'intérêt ; elle est aussi le résultat de choix opérés lors de la fixation du calendrier d'émission de la dette primaire, puis lors des décisions prises en gestion active de la dette.
Dans cet esprit, le programme « dette » que nous proposons retient trois objectifs.
Le premier objectif fixé à l'agence vise la minimisation du montant du compte de l'Etat à la Banque de France en fin de journée. Il s'agit de mettre en place une gestion de la trésorerie de l'Etat aussi proche que possible de ce que l'on appelle la trésorerie « zéro ». Cet objectif est mesuré concrètement par le solde moyen du compte de l'Etat en fin de journée à la Banque de France, les excédents éventuels étant placés en cours de journée sur le marché interbancaire. L'objectif pour 2002 est de ramener à 200 millions d'euros, contre 500 millions d'euros actuellement, le solde moyen en fin de journée et d'aller encore au-delà par la suite.
Retenir cet objectif suppose que soit améliorée la précision des prévisions de recettes et de dépenses de très nombreux services de l'Etat et de leurs correspondants, à savoir les collectivités locales et les établissements publics. C'est donc un engagement très significatif en termes de rigueur de gestion, en particulier de l'administration des finances mais également de l'ensemble des acteurs publics.
Le deuxième objectif a trait au placement des excédents ponctuels de trésorerie au meilleur prix. Il convient, notamment par l'amélioration continue des méthodes de prévision et d'intervention sur les marchés, d'accroître le niveau moyen de rémunération des placements de liquidités de l'Etat sur le marché interbancaire. L'objectif fixé à l'agence est d'obtenir la meilleure rémunération possible sur le marché du court terme.
Ces politiques de gestion active de la trésorerie s'appuient sur les prévisions à court, moyen et long termes de la trésorerie de l'Etat et sur les émissions hebdomadaires de titres courts.
Le troisième de ces objectifs, M. le rapporteur spécial l'a souligné, est sans doute le plus significatif en termes de gestion de la dette publique. Il s'agit de la réduction de la durée moyenne de la dette négociable. Les travaux réalisés au sein du ministère des finances et soumis aujourd'hui à votre examen montrent que la réduction moyenne de la durée de la dette est de nature à permettre, sur le long terme, une réduction de la charge d'intérêt de cette dette. La contrepartie est évidemment, vous l'avez vous-même souligné, une volatilité accrue de son coût. Il nous faut donc trouver un point d'équilibre qui n'augmente pas trop cette variabilité. Tel est l'objet, aujourd'hui, du programme « gestion de la dette et de la trésorerie de l'Etat. ».
Si le Parlement en est d'accord, l'objectif qui pourrait être fixé à l'Agence France Trésor dans le cadre de ce programme serait de réduire la durée moyenne de la dette à cinq ans et six mois, contre six ans et quatre mois à la mi-2001. Selon nos simulations, l'augmentation de la volatilité des taux restera marginale, alors que le gain budgétaire associé devrait être de l'ordre de 200 millions d'euros dès 2002.
L'agence engagera cette réduction grâce à une structure appropriée des émissions primaires, amplifiée par la constitution d'un portefeuille de contrats d'échanges, dits swaps , de taux.
Cela permettrait de poursuivre, en ce qui concerne les émissions de dette proprement dites, une politique tenant compte de la demande des investisseurs, dont certains préfèrent souscrire des maturités longues ou y sont statutairement contraints.
Pour la première fois dans nos débats parlementaires, je vous propose donc de débattre d'un objectif synthétique de gestion de la dette qui déterminera et encadrera les décisions que nous serons amenés à prendre pour 2002 en ce qui concerne tant la structure du calendrier d'émission de la dette primaire que la gestion active de la dette.
En vous présentant ce programme, j'ai la conviction que nous clarifions les choix publics à effectuer en matière de dette publique. Nous avons également la volonté de montrer la mesure du changement de perspective qu'entraînera progressivement la pleine application de la loi organique à l'ensemble des chapitres budgétaires du budget de l'Etat.
Ce premier programme est un exemple concret de la modernisation du ministère des finances, à laquelle nous sommes très attachés et dont je vous ai détaillé quelques aspects ce matin.
En ce qui concerne les comptes spéciaux du Trésor, M. Loridant a d'abord évoqué le compte 902-24 pour souligner les incertitudes concernant les recettes de ce compte. Il est clair que les événements du 11 septembre dernier nous ont conduits à décaler dans le temps certaines opérations, et je crois que personne ne peut nous reprocher ce choix.
Nous demeurons confiants, cependant, dans notre capacité à financer les opérations prévues sur ce compte - sans sortir de notre logique industrielle de gestion du secteur public - à partir de la mobilisation de titres d'entreprises qui évoluent dans le cadre d'accords industriels qui les renforcent ou dont l'Etat se désengage parce qu'il y est minoritaire et que sa présence n'est pas stratégique.
Nous avons d'ores et déjà annoncé le principe de certaines opérations, comme notre désengagement de Dassault Systèmes ou l'ouverture du capital de la Société nationale d'étude et de construction de moteurs d'aviation, la SNECMA, qui, si elles ont été décalées du fait des turbulences des marchés, ont vocation, parce qu'elles sont souhaitables et nécessaires, à se réaliser.
Enfin, M. Loridant à évoqué la question du coût complet de l'euro au travers de celle du compte des monnaies métalliques. Je rappellerai simplement que, si ce compte des monnaies métalliques affiche aujourd'hui un excédent de 3,5 milliards de francs, soit 0,53 milliard d'euros, il a supporté, dans le passé, les coûts de fabrication des pièces d'euros, qui ont été comptabilisés au moment de la frappe des pièces en 1998, 1999, 2000 et 2001 pour une somme totale de 3 milliards de francs, auxquels s'ajoutent les frais de stockage ou d'ensachage.
Comme M. Loridant l'a souligné, il faut, pour estimer le bilan global que constitue l'introduction des pièces pour l'Etat, commencer par ne pas oublier qu'il a dû frapper 8 milliards de pièces avant le 1er janvier 2002.
Il est un second excédent qui a été évoqué, notamment, par M. Loridant et par M. Foucaud : je veux parler du compte d'avance aux collectivités locales. L'existence d'un solde excédentaire de ce compte doit cependant être mise en regard de plusieurs éléments.
D'abord, le déficit cumulé de ce compte qui, encore supérieur à 100 milliards de francs à la fin de l'année 2000, est représentatif du manque à gagner global pour l'Etat entre les avances qui ont été concédées aux collectivités locales et les recettes qu'ils a recouvrées à ce titre.
Il faut, de plus, prendre en compte la masse des recettes « pour ordre » qui créditent artificiellement ce compte et pèsent donc directement sur les recettes fiscales nettes du budget général par augmentation des dépenses en atténuation de recettes. Ces recettes d'ordre sont constituées des dégrèvements dits « législatifs », connus dès l'émission, des dégrèvements prononcés suite à une demande du contribuable après qu'il a reçu son avis d'imposition, ou encore des admissions en non-valeur pour les créances irrécouvrables.
En 2000, on peut estimer que ces recettes pour ordre ont représenté plus de 85 % des 75 milliards de francs de dégrèvements et admissions en non-valeur sur impôts locaux enregistrés en exécution, soit près de 17,5 % des recettes totales du compte d'avance, élément, monsieur le sénateur, que vous négligez dans votre présentation.
Enfin et surtout, le montant final des ressources qui sont allouées aux collectivités locales n'est en rien affecté par le résultat annuel du compte d'avance en exécution : quoi qu'il advienne, les recettes des collectivités locales sont calées sur le volume effectivement réalisé des émissions des impôts locaux. En revanche, c'est le budget de l'Etat qui absorbe, à travers son déficit, les écarts successifs entre le volume des avances concédées aux collectivités locales et les recouvrements effectivement réalisés sur les impôts directs locaux.
Au terme de cette très brève intervention, je tiens à remercier M. Fréville, rapporteur spécial, d'avoir bien voulu noter qu'en effet le budget des charges communes est en « cure d'amaigrissement ». (Sourires.) Nous avons bien l'intention de poursuivre dans cette voie l'année prochaine, si tout va bien ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

charges communes

M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant à l'état B et concernant les charges communes.

ÉTAT B

M. le président. « Titre Ier : 2 669 760 000 EUR. »

L'amendement n° II-36, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Majorer les crédits du titre Ier de 1 245 000 000 EUR. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il s'agit, avec cet amendement, d'opérer une coordination pour tenir compte des mesures qui ont été adoptées par votre assemblée en première partie.
Je précise d'emblée qu'il en est de même pour l'amendement n° II-37.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Yves Fréville, rapporteur spécial. La commission est favorable à l'amendement n° II-36 ainsi qu'à l'amendement n° II-37, qui tend à majorer de 2,3 milliards d'euros - soit 15 milliards de francs - les crédits du fonds national de péréquation.
Je précise également que la commission est favorable à l'adoption des crédits du titre II, qui sont déterminés suivant des procédures spécifiques, mais défavorable à l'adoption des crédits du titre Ier et des titres III et IV.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-36, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifiés, les crédits figurant au titre Ier, repoussés par la commission.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. « Titre II : 28 756 286 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre II, acceptés par la commission.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre III : moins 52 263 355 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre III, repoussés par la commission.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. « Titre IV : moins 677 972 105 EUR. »

L'amendement n° II-37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Majorer les crédits du titre IV de 2 365 000 EUR.
« En conséquence, porter le montant des mesures nouvelles à moins 675 607 105 EUR. »
Mme le secrétaire d'Etat et M. Fréville, rapporteur spécial, se sont déjà exprimés sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-37, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifiés, les crédits figurant au titre IV, repoussés par la commission.

(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 64 ter, qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés aux charges communes.

Article 64 ter



M. le président.
« Art. 64 ter . - I. - L'article L. 135-1-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.
« II. - Après le 7° de l'article L. 135-2 du même code, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les frais de gestion administrative du fonds correspondant à des opérations de solidarité. »
L'amendement n° II-23, présenté par M. Fréville, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Supprimer l'article 64 ter . »
La parole est à M. Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial. L'article 64 ter , qui résulte d'un amendement déposé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale, vise à transférer au fonds de solidarité vieillesse, le FSV, la prise en charge des frais liés à sa gestion administrative. Il aurait pu participer de la cure d'amaigrissement dont nous parlions tout à l'heure ! (Sourires.)
Cependant, la commission des finances considère que les crédits relatifs au FSV et, par voie de conséquence, au FOREC, auraient dû faire partie intégrante du budget. Elle ne saurait accepter que ces frais de gestion administrative soient transférés en dehors de la loi de finances. De cette manière, elle conserve un droit de regard sur le FSV.
Elle propose donc la suppression de l'article 64 ter .
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-23, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 64 ter est supprimé.

COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

M. le président. Nous allons maintenant examiner les articles 35 à 41, 41 bis et 42 du projet de loi de finances qui concernent les comptes spéciaux du Trésor.

C. - Opérations à caractère définitif
des comptes d'affectation spéciale

Article 35



M. le président.
« Art. 35. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2002, au titre des services votés des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, est fixé à la somme de 3 065 808 000 EUR. » - (Adopté.)

Article 36



M. le président.
« Art. 36. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des opérations définitives des dépenses en capital des comptes d'affectation spéciale, des autorisations de programme s'élevant à la somme de 6 917 334 591 EUR.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, des crédits de paiement s'élevant à la somme de 7 208 178 591 EUR, ainsi répartie :
« Dépenses ordinaires civiles : 290 844 000 EUR ;
« Dépenses civiles en capital : 6 917 334 591 EUR ;
« Total : 7 208 178 591 EUR. »

L'amendement n° II-39, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans l'article 36 :
« Minorer les autorisations de programme du I de 23 065 000 EUR.
« Minorer les dépenses ordinaires civiles du II de 22 110 000 EUR.
« Minorer les dépenses civiles en capital du II de 23 065 000 EUR. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Il s'agit d'un amendement de coordination, comme le suivant, l'amendement n° II-38.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Loridant, rapporteur spécial. La commission accepte cet amendement, ainsi que l'amendement n° II-38 auquel vient de faire allusion Mme la secrétaire d'Etat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-39, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 36, modifié.

(L'article 36 est adopté.)

Articles 37 et 38



M. le président.
« Art. 37. - I. - Dans le II de l'article 60 de la loi de finances pour 1984 (n° 83-1179 du 29 décembre 1983) :
« - au premier alinéa, les mots : "Fonds national des haras et des activités hippiques" sont remplacés par les mots : "Fonds national des courses et de l'élevage" ;
« - le sixième alinéa est ainsi rédigé :
« - les subventions pour le développement de l'élevage et des courses ; » ;
« - le septième alinéa est supprimé.
« II. - Au deuxième alinéa de l'article 51 de la loi n° 47-520 du 21 mars 1947 relative à diverses dispositions d'ordre financier, les mots : "Fonds national des haras et des activités hippiques" sont remplacés par les mots : "Fonds national des courses et de l'élevage". » - (Adopté.)
« Art. 38. - L'article 62 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997) est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, l'intitulé du compte d'affectation spéciale est ainsi rédigé : "Fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale, et à la distribution de la presse quotidienne nationale d'information politique et générale" ;
« 2° Au 2°, les b, c et d deviennent respectivement les c, d et e, et il est inséré un b ainsi rédigé :
« b) Les aides à la distribution des quotidiens nationaux d'information politique et générale, de langue française, paraissant au moins cinq fois par semaine, bénéficiant du certificat d'inscription délivré par la commission paritaire des publications et agences de presse ; » ;
« 3° Le dernier alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les modalités d'attribution des subventions et avances remboursables destinées au financement des projets de modernisation, notamment la composition du comité d'orientation, la définition des types d'actions de modernisation prises en compte et les critères d'éligibilité aux subventions ou avances, sont définies par décret.
« Les modalités d'attribution des aides à la distribution sont définies par décret. » - (Adopté.)

II. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE

Articles 39 à 41

M. le président. « Art. 39. - I. - Le montant des découverts applicables, en 2002, aux services votés des comptes de commerce est fixé à 276 492 290 EUR.
« II. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour 2002, au titre des services votés des comptes d'avances du Trésor, est fixé à la somme de 54 796 890 000 EUR.
« III. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour 2002, au titre des services votés des comptes de prêts, est fixé à la somme de 395 147 404 EUR. » - (Adopté.)
« Art. 40. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des opérations temporaires des comptes d'affectation spéciale, un crédit de paiement de dépenses ordinaires de 4 600 000 EUR. » - (Adopté.)
« Art. 41. - Il est ouvert au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des comptes de prêts, des crédits de paiement s'élevant à 448 202 596 EUR. » - (Adopté.)

Article 41 bis



M. le président.
« Art. 41 bis . - Les mesures nouvelles des comptes d'avances du Trésor sont fixées, pour 2002, à moins 152 000 000 EUR. »
L'amendement n° II-38, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'article 41 bis :
« Les mesures nouvelles des comptes d'avances du Trésor sont fixées, pour 2002, à moins 382 000 000 EUR. »
Mme le secrétaire d'Etat et M. Loridant, rapporteur spécial, se sont déjà exprimés sur cet amendement.
Je mets aux voix l'amendement n° II-38, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 41 bis est ainsi rédigé.

Article 42



M. le président.
« Art. 42. - Il est ouvert aux ministres, pour 2002, au titre des mesures nouvelles des comptes de commerce, une autorisation de découvert s'élevant à 1 700 762 510 EUR. » - (Adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.

Services du Premier ministre

I. - SERVICES GÉNÉRAUX

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les services du Premier ministre : I. - Services généraux (à l'exclusion des crédits relatifs à la fonction publique, à la presse, à l'audiovisuel et au Conseil supérieur de l'audiovisuel).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget des services généraux du Premier ministre n'est pas un petit budget : il atteint en effet, cette année, plus d'un milliard d'euros, soit plus de 6,5 milliards de francs, et il représente un effectif de près de 1 800 personnes. Il pèse donc plus lourd que le budget de l'environnement ou celui de l'aménagement du territoire.
Succinctement, je rappellerai que le budget des services généraux du Premier ministre regroupe les crédits de trois ministres - le Premier ministre, le ministre chargé des relations avec le Parlement et le ministre chargé de la fonction publique et de la réforme de l'Etat - de divers organismes et des fameux « fonds secrets ».
Je rappelle, toutefois, qu'une partie de ces crédits doit être présentée demain par notre collègue Claude Belot, au titre des crédits de la communication audiovisuelle, et qu'une autre partie sera présentée mercredi prochain par notre collègue Gérard Braun, au titre des crédits de la fonction publique.
La croissance de ce budget - 3,8 % cette année - est due essentiellement à l'augmentation des crédits de la dotation en faveur des victimes des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation et des crédits du Médiateur de la République.
Je m'en tiendrai là pour la présentation des crédits - vous en retrouverez le détail dans mon rapport écrit - pour concentrer mon propos sur les principales observations que m'a inspirées l'examen de ce budget.
Compte tenu de l'actualité, je limiterai mes propos à la réforme des fonds secrets.
Permettez-moi, mes chers collègues, de citer Gustave Flaubert. Dans son Dictionnaire des idées reçues, celui-ci définit les fonds secrets comme des « sommes incalculables » contre lesquelles il est de bon ton de « s'indigner ».
On a, en réalité, souvent tendance à exagérer l'importance des fonds secrets. On peut rappeler qu'ils ne s'élèvent qu'à 60 millions d'euros, soit, environ, 400 millions de francs, ce qui correspond à 0,02 % du budget de l'Etat.
Par ailleurs, leur utilisation répond à des besoins essentiels de l'Etat. En effet, la moitié des fonds secrets sert à financer la DGSE, c'est-à-dire les services secrets. Seuls 20 % de ces fonds permettent d'attribuer des primes aux membres des cabinets ministériels. Le reste se répartit entre le fonctionnement de l'Hôtel Matignon, l'Elysée, le ministère des affaires étrangères et les actions en faveur des droits de l'homme.
Les fonds secrets, sous leur forme actuelle, me semblent poser un triple problème.
Tout d'abord, les fonds secrets, que l'on nous présente chaque année en parfaite stabilité dans le projet de loi de finances, sont systématiquement abondés en cours d'année par des décrets pour dépenses accidentelles, lesquels décrets ne sont pas publiés au Journal officiel alors qu'ils portent sur des montants représentant entre 15 % et 40 %, selon les années, des dotations initiales inscrites au titre des fonds secrets.
Dans ces conditions, madame la secrétaire d'Etat, la commission s'est interrogée sur le point de savoir si les crédits prévus pour les fonds spéciaux dans le texte transmis au Sénat au titre du présent exercice budgétaire, à savoir 37 millions d'euros, seront suffisants pour mener les actions définies au titre de l'année 2002.
Les deux autres problèmes posés par les fonds spéciaux, sous leur forme actuelle, sont ceux de leur périmètre et de leur contrôle, problèmes qui ont justifié la démarche réformatrice du Gouvernement.
Tout d'abord, l'idée que le périmètre des fonds secrets est trop large fait l'objet d'un consensus. En effet, si l'on comprend pourquoi les dépenses de la DGSE sont financées par des fonds secrets, ce point de vue est discutable dans le cas, par exemple, des primes de cabinet. Le Gouvernement a donc proposé plusieurs amendements, adoptés par l'Assemblée nationale, qui ne laissent, au sein du chapitre « fonds secrets », qu'un peu plus de la moitié de ces crédits, le reste étant réparti entre d'autres budgets ou redéployé au sein du budget des services généraux du Premier ministre. La commission des finances approuve, bien entendu, cette orientation.
Ensuite, les fonds secrets devront être mieux contrôlés.
Les fonds secrets autres que ceux qui sont affectés à la DGSE ne sont actuellement pas contrôlés du tout, les obligations prévues par la loi n'ayant jamais été appliquées.
Il convient cependant de souligner que les fonds finançant la DGSE sont contrôlés par une commission spéciale, présidée par un membre de la Cour des comptes. Pourtant, ce contrôle est insuffisant. C'est pourquoi le Gouvernement a proposé un amendement, adopté par l'Assemblée nationale, tendant à réformer le dispositif en insérant dans le projet de loi de finances pour 2002 un nouvel article, l'article 77, qui instaurerait une nouvelle commission comportant, notamment, des parlementaires.
La commission des finances approuve ces orientations. Elle estime cependant que le dispositif envisagé pourrait être amélioré et a déposé quelques amendements en ce sens, que je vous présenterai tout à l'heure.
Je souhaiterais cependant demander à Mme la secrétaire d'Etat de préciser un point. L'article 77, sous sa forme actuelle, ne fait aucune référence à un recours éventuel par les membres de la commission de vérification à des collaborateurs extérieurs. Faut-il comprendre, madame la secretaire d'Etat, qu'un membre de la commission qui communiquerait à de proches collaborateurs des informations couvertes par le secret de la défense nationale serait passible de sept ans de prison et de 700 000 francs d'amende ?
C'est en fonction des observations que nous présentera demain prochain notre collègue Claude Belot au sujet des crédits de la communication audiovisuelle et de celles que formulera mercredi prochain notre collègue Gérard Braun sur les crédits de la fonction publique qu'il sera proposé au Sénat de rejeter les crédits des services généraux du Premier ministre pour 2002. Cette position ne résulte donc pas d'une opposition au projet de réforme des fonds spéciaux proposé par le Gouvernement, réforme dont la commission des finances, ainsi que je l'ai indiqué, approuve les grandes orientations. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 10 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 5 minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits dévolus aux services généraux connaissent cette année une évolution caractérisée par deux phénomènes essentiels.
Le premier est fondé sur l'intégration des crédits destinés au financement de la réparation des crimes antisémites commis pendant la Seconde Guerre mondiale. Nous ne manquerons pas de souligner ici qu'il était plus que temps de tirer les conclusions de la mission Mattéoli : la légitime réparation des actes perpétrés à cette époque à l'encontre d'une partie importante de la population n'a que trop tardé.
Nul doute que le travail qui attend ceux qui traiteront ces dossiers complexes doit être salué, car il constitue un travail de mémoire significatif pour l'ensemble de la communauté nationale.
C'est là l'origine de l'essentiel de la progression des crédits du département ministériel.
Le second élément important, c'est évidemment l'article 77 relatif au traitement des fonds spéciaux.
Nous approuvons sans réserve la volonté de clarification qui sous-tend cet article, qui lève un voile sur une partie du mystère qui entoure parfois l'action publique. Cette volonté de transparence n'est pas discutable au fond, et nous la partagerons.
Cependant, au-delà de l'aspect quelque peu conjoncturel du débat, nous sommes tentés d'apporter un élément supplémentaire à la réflexion.
Le terme même de « fonds spéciaux » et le débat que ces fonds ont suscité illustrent bien le rapport que nos concitoyens entretiennent avec le monde politique. C'est pourquoi il s'agit, de notre point de vue, d'une question essentielle.
Tout ce qui peut contribuer à plus de transparence dans les rapports entre les citoyens et les centres du pouvoir doit être encouragé. Nous souffrons en effet suffisamment de l'éloignement du pouvoir et des limites de la démocratie représentative pour que tout soit mis en oeuvre pour faire reculer ces limites, à défaut de les faire totalement disparaître.
Si l'article 77 permet d'atteindre cet objectif, il faut l'adopter et espérer qu'il « survivra » à une quelconque alternance... Il s'agit, finalement, de l'une des formes que peut prendre aujourd'hui la réforme de l'Etat.
Je tenais à présenter ces quelques observations à l'occasion de l'examen des crédits de ce département ministériel. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Permettez-moi, monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, de commencer cette intervention sur les fonds spéciaux par une scène des Mémoires d'outre-tombe .
Le 26 mai 1833, à Prague, Chateaubriand évoquait avec un Charles X en exil l'heureux temps où ils étaient tous deux aux affaires. « Je suis si bête, confiait au roi l'écrivain ancien ministre, qu'en entrant aux affaires étrangères je ne voulus pas prendre les 25 000 francs de frais d'établissements, et qu'en sortant je dédaignai d'escamoter les fonds secrets. »
On le voit, le problème ne date pas d'hier ! Il est probable que bien des ministres n'ont pas eu le désintéressement, ou l'étourderie, de Chateaubriand !
A l'instar de Flaubert, cité par notre rapporteur spécial dans son rapport écrit, bien des bonnes âmes se sont indignées de cette pratique plus ancienne que la République : dans nos débats budgétaires, il était d'usage de dénoncer l'opacité de la gestion des crédits demandés par le Gouvernement sur le chapitre 37-91. Montants insincères, dépassements importants, circulation d'enveloppes que le chef de cabinet du ministre allait chercher à Matignon et dont le ministre faisait ce qu'il voulait, entre sa propre part et celles de ses collaborateurs plus ou moins bien traités qui n'a connu cela avec un peu d'expérience de l'exécutif ?
Mais les sociétés évoluent : ce qui, hier, était admis devient emploi fictif, abus de bien social, évasion fiscale... C'est un processus dérangeant, mais qui, après tout, comporte des aspects positifs.
C'est ainsi que, depuis plusieurs années, nos rapporteurs spéciaux successifs dénonçaient l'opacité de la gestion des crédits demandés par le Gouvernement sur le chapitre 37-91.
A vrai dire, ces critiques portaient plus sur l'article 10 du chapitre, relatif aux fonds spéciaux du Gouvernement, que sur l'article 20, concernant les fonds spéciaux à destination particulière, comprenant, entre autres, des dépenses de la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE : ces fonds spéciaux-là, tout le monde convient qu'ils sont indispensables pour la défense intérieure de l'Etat, donc de notre démocratie.
Sans revenir sur la nature de l'ensemble de ces crédits, qui a été présentée par M. le rapporteur spécial, on peut regretter la façon dont se sont déroulées les différentes étapes qui ont amené la réforme annoncée par le Premier ministre durant l'été. Force est de reconnaître que le Parlement n'y a pas été particulièrement associé, en amont des amendements présentés par le Gouvernement à l'Assemblée nationale.
Ce manque de coopération a d'ailleurs été analysé par M. François Logerot, Premier président de la Cour des comptes, qui a remis au Premier ministre un rapport relatif aux fonds spéciaux. Il était donc particulièrement difficile aux commissions des finances des deux chambres de connaître la ventilation au sein du chapitre 37-91 des autres crédits alloués aux dépenses de fonctionnement courant et à la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat.
Chacun sait qu'une partie de ces crédits servait au financement des cabinets ministériels, les lignes budgétaires « indemnités de cabinets » ne représentant qu'une partie du financement réel de ceux-ci.
Une autre partie de ces crédits complète les crédits des pouvoirs publics. Les informations communiquées au mois de juillet dernier par les services du Premier ministre ont confirmé les dires du Président de la République selon lesquels Matignon reçoit 95 % des fonds spéciaux et l'Elysée moins de 5 % ».
M. Jean Chérioux. Exactement !
M. Yann Gaillard. Il existe désormais un consensus sur les primes versées aux membres des cabinets ministériels, qui, naguère versées en liquide, échappaient à la fois à l'impôt et aux cotisations sociales.
Pourtant, aucune réforme d'ensemble de la nomenclature budgétaire n'est initiée par le Gouvernement. Qu'est-ce qui empêchera le Premier ministre ou un ministre d'utiliser les fonds spéciaux à d'autres fins que celles sur lesquelles le Parlement se sera prononcé en loi de finances initiale ? La seule réforme véritablement identifiable porte sur les modalités de rémunération. Mais l'opacité demeure ailleurs.
A cette réforme souhaitable de la nomenclature, il conviendrait d'en ajouter deux autres.
D'une part, une revalorisation des rémunérations des ministres, car leur montant est inférieur à celui dont bénéficient, indemnités comprises, les plus hauts fonctionnaires ou les dirigeants d'entreprises publiques.
D'autre part, les cabinets ministériels devraient subir une cure d'amaigrissement. N'est-ce pas d'ailleurs un voeu pieux sous tous les gouvernements ? Le nombre des collaborateurs de ces cabinets est difficile à cerner. On peut légitimement s'étonner des différences entre le « jaune » budgétaire annexé au projet de loi de finances et le Bottin administratif ! Pour ce dernier, la source d'information ne pouvant venir, il est vrai, que des ministères eux-mêmes, cela en relativise considérablement la qualité. Il y donc encore des efforts à faire pour atteindre la transparence que nous appelons tous de nos voeux.
Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale apportent un certain nombre de réponses intéressantes aux problèmes posés.
Tout d'abord, les crédits non liés à des opérations de sécurité sont supprimés et réinscrits dans le budget de l'Etat pour chaque ministère : il s'agit de crédits d'indemnité et de crédits de fonctionnement.
Les primes de cabinet seront donc versées, à compter du 1er janvier 2002, par virement et donneront effectivement lieu à une fiche de paie. De ce fait, elles seront soumises à l'impôt et assujetties aux cotisations sociales.
Pour ce qui est du régime des rémunérations des ministres, le Gouvernement a annoncé que le dispositif choisi le sera avant la fin de l'année 2001. Il convient que le Parlement soit totalement informé des modalités finalement retenues.
J'en viens au second volet de cette réforme en devenir, les crédits nécessaires aux activités des services secrets.
La commission de vérification instituée par l'article 77 du projet de loi de finances pour 2002 pose plusieurs problèmes.
Au premier chef, il y a le problème du secret, et même du « très secret », car le contrôle des fonds secrets doit lui-même être suffisamment secret. (Sourires.)
La commission de contrôle des fonds des services secrets instituée en 1947 était composée de deux magistrats et d'un haut fonctionnaire, dont les noms n'étaient jamais publiés. Dans l'instance de contrôle créée par l'Assemblée nationale, les noms de tous les membres parlementaires et des magistrats seront publiés, ce qui ne va pas sans créer un risque majeur de pression sur ces personnes.
Confier la présidence de cette commission de vérification à l'un des membres parlementaires soulève aussi des problèmes de stabilité liés au renouvellement de leur mandat. La commission qui siège depuis 1947 a, pour sa part, connu un nombre assez faible de présidents, ce qui a contribué à sa stabilité.
Le rapporteur de la commission des finances proposera une série d'amendements tendant à renforcer la légitimité de la commission de vérification et à en améliorer le fonctionnement. Cette démarche va dans le bon sens et nous y apporterons notre soutien. La commission des finances y a travaillé hier encore. Le souci de tous ses membres, quelle que soit leur appartenance politique, est, dans un domaine dont dépend la sécurité nationale, de préserver l'autonomie de l'exécutif... et d'éviter les fuites !
Un mot quand même - in cauda venenum - sur les effectifs des services généraux du Premier ministre.
Depuis 1997, les services centraux ont vu le nombre de leurs personnels augmenter de 37 %. Que peut bien justifier une telle progression alors que ces effectifs étaient restés stables lors de la législature précédente ?
De plus, cette augmentation s'accompagne d'une progression des crédits correspondant aux « rémunérations des personnels », « autres rémunérations » et « indemnités et allocations diverses » de 18 millions d'euros durant la législature, ce qui est considérable.
Il n'y a pas eu, à notre connaissance, de modifications substantielles des compétences des services du Premier ministre depuis 1997 pouvant justifier des recrutements aussi pléthoriques. Dans ces conditions, le Gouvernement pourra peut-être éclairer le Sénat sur les raisons pouvant justifier de telles progressions.
Le groupe du Rassemblement pour la République suivra les préconisations de la commission des finances et votera contre les crédits des services généraux du Premier ministre, avec l'appréciation suivante : « pourrait mieux faire » ou, plutôt, « aurait pu mieux faire ».
Puisque j'ai commencé par Chateaubriand, pourquoi, une fois n'est pas coutume, ne pas terminer sur un autre auteur, devenu classique de nos jours, le marquis de Sade. Il s'écriait dans un libelle célèbre : « Français, encore un effort si vous voulez être républicains ! » (Sourires et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux d'abord remercier M. François Marc de la qualité de son rapport. Comme celui-ci est très complet, je ne rappellerai que brièvement les évolutions les plus significatives pour apporter quelques éclaircissements sur les points soulevés par votre commission.
La progression de 3,8 % du budget des services généraux du Premier ministre s'explique, pour l'essentiel, par l'évolution des crédits qui relèvent des agrégats « administration générale » et « autorités administratives indépendantes ».
Les crédits consacrés à l'agrégat « administration générale » passent de 262,8 millions d'euros à 301,1 millions d'euros, ce qui représente une augmentation, à structure constante, de 12 %.
Les crédits du titre III progressent, à structure constante, de 1,96 %.
Cette augmentation permet notamment de financer le renforcement en personnels des services, avec neuf emplois, les autres emplois budgétaires étant destinés, monsieur Gaillard, à remplacer les personnels militaires du contingent affectés dans les services du Premier ministre, ce qui correspond à dix-huit emplois budgétaires et explique, pour l'essentiel, l'évolution, dont vous avez contesté la légitimité, au cours de la législature. En effet, la suppression du service national a nécessairement des conséquences sur les emplois affectés aux services du Premier ministre ; d'autres départements ministériels sont d'ailleurs concernés, mais l'incidence de cette réforme est le plus marquée pour les services du Premier ministre et la présidence de la République.
Par ailleurs, vingt-six emplois sont prévus pour contribuer à la résorption de l'emploi précaire.
Le titre III du budget des services généraux du Premier ministre bénéficie également de plusieurs mesures de transfert de crédits en provenance d'autres départements ministériels, pour 6,6 millions d'euros.
Les crédits du titre III englobent des mesures intéressant la situation du personnel. Je voudrais souligner à cet égard que, dans l'optique de la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, un protocole d'accord a été conclu avec les organisations syndicales le 26 octobre dernier.
La croissance la plus importante concerne cependant le titre IV, dont les crédits progressent de 34,7 millions d'euros, soit d'un peu plus de 108 %. Comme l'a souligné de manière très opportune M. Foucaud, il s'agit avant tout de crédits visant à assurer l'indemnisation des orphelins de la déportation et celle des victimes des spoliations. Cet ajustement à hauteur de 33,5 millions d'euros est rendu nécessaire par le nombre des dossiers instruits au cours de l'année 2001, ainsi que par les projections que l'on peut établir, en termes de dépenses, pour l'année 2002.
En ce qui concerne le titre V, les crédits de paiement alloués pour le gros entretien immobilier des services du Premier ministre sont reconduits à leur niveau de 2001.
S'agissant de l'entretien des cités administratives, je voudrais apaiser une crainte qui est exprimée dans le rapport de la commission des finances : la réduction de 7,2 millions d'euros des crédits de paiement et de 3,2 millions d'euros des autorisations de programme ne traduit nullement un désengagement de l'Etat à l'égard des charges et obligations qui lui sont imparties en sa qualité de propriétaire, elle résulte simplement de l'existence d'un montant de reports de l'ordre de 40 millions à 45 millions d'euros sur l'exercice 2002. Par conséquent, à cette dotation du projet de loi de finances pour 2002 viendra s'ajouter le montant des reports, ce qui implique que des moyens très significatifs seront disponibles pour assurer la poursuite des travaux d'entretien. Une étude visant à établir un diagnostic sur l'état des cités administratives vient d'ailleurs d'être lancée ; les résultats obtenus constitueront un instrument important pour la programmation des investissements de l'Etat.
En ce qui concerne les crédits de l'agrégat « autorités administratives indépendantes », ceux-ci augmentent de 8,01 %.
La croissance la plus significative concerne le Médiateur, avec près de 47 % de hausse. Ces moyens supplémentaires, que le précédent rapporteur de ce projet de budget avait appelés de ses voeux, permettront en particulier le financement de la poursuite de l'exécution du plan de recrutement des délégués du Médiateur et des frais de fonctionnement induits, selon les modalités prévues par le comité interministériel des villes du 14 novembre 1999. Ils permettront aussi d'assurer le financement d'une augmentation programmée des loyers.
J'en viens maintenant, monsieur le rapporteur spécial, à la question, importante cette année, des fonds spéciaux.
Le Parlement a déjà réformé, voilà quelques mois, l'ordonnance de 1959 relative aux lois de finances. Bien entendu, la réforme des fonds spéciaux et celle de l'ordonnance organique de 1959 n'ont pas la même portée. Néanmoins, je leur vois deux points communs.
Tout d'abord, elles sont la manifestation d'un souci de transparence des comptes publics ; ensuite, elles sont aussi le signe du renforcement du contrôle parlementaire sur l'action de l'exécutif. Ces évolutions, dont je me réjouis, sont, à mon sens, la preuve d'une plus grande maturité du débat démocratique.
Je ne rappellerai pas les multiples évocations des pratiques liées aux fonds spéciaux : nous les retrouvons dans la littérature, et M. Gaillard a abordé ce thème dans son propos liminaire, en rappelant la vie des morts illustres. ( Sourires. ) Mais nous connaissons aussi des témoignages plus récents à cet égard.
Ces pratiques critiquables étaient, en quelque sorte, enracinées dans notre histoire, et c'est une conjonction de circonstances et d'interventions qui a amené le Gouvernement à conclure qu'il fallait mettre fin à un système archaïque, peu compatible avec la légitime demande de transparence de nos concitoyens.
La réforme adoptée par l'Assemblée nationale comporte deux volets.
Elle prévoit, en premier lieu, une ventilation des crédits qui ne sont en rien liés au financement des opérations de sécurité. Il s'agit en effet de crédits d'indemnités et de fonctionnement. Par conséquent, il sera mis fin, dès le 1er janvier 2002, à l'archaïsme que constituait le versement de primes en liquide. Les primes de cabinet, dont personne ne conteste qu'elles compensent de réelles contraintes, seront désormais versées par virement et donneront lieu à l'établissement d'une fiche de paie. Elles seront clairement soumises à l'impôt et aux contributions sociales.
Le versement des primes, celles des membres de cabinet et celles des personnels de services administratifs, d'intendance, de sécurité et de logistique directement liés à l'activité ministérielle, sera encadré par un décret qui en constituera le fondement juridique.
Quant aux dépenses de fonctionnement, elles seront inscrites aux chapitres correspondants de chaque ministère, et leur exécution obéira aux règles de droit commun.
Une nouvelle répartition de crédits a donc été opérée par amendement au projet de loi de finances à l'Assemblée nationale. M. le rapporteur spécial en ayant donné le détail dans son rapport, je n'y reviendrai pas.
En second lieu, les dépenses liées aux actions de sécurité, qui doivent conserver un caractère secret, resteront imputées sur le chapitre des fonds spéciaux. A ce propos, monsieur Gaillard, permettez-moi de vous contredire : la nomenclature interne du chapitre a bien été modifiée en conséquence, pour distinguer les crédits de la DGSE de ceux qui seront destinés à financer d'autres actions de sécurité.
M. Jean Chérioux. Tant mieux !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. La loi précise que les services utilisateurs des fonds en tiennent le compte d'emploi, ce qui signifie que la procédure de la dépense n'est pas soumise à la règle de séparation de l'ordonnateur et du comptable.
Le dispositif de contrôle résultant de dispositions législatives de 1946 et de 1947 ainsi que d'un décret de 1947 est également rénové. Au lieu d'une commission purement administrative, est mise en place une commission comportant deux députés, deux sénateurs et deux membres de la Cour des comptes. Ce format permettra de faire place à une représentation de l'opposition parlementaire.
J'indique, pour répondre à la question posée par M. le rapporteur spécial, que, s'agissant de l'article 77, il n'est en effet pas prévu de recourir à des collaborateurs extérieurs. Si une communication d'information était faite, les peines encourues seraient applicables. C'est la raison pour laquelle le dispositif, tel qu'il est soumis au Sénat, prévoit la présence, au sein de cette commission, de deux membres de la Cour des comptes, qui seront astreints au même secret et qui pourront, en quelque sorte, apporter un appui technique et administratif aux quatre parlementaires.
J'en terminerai sur cette question en soulignant que l'ensemble des dépenses qui seront désormais imputées sur le chapitre des fonds spéciaux relèveront d'un contrôle parlementaire qui, je le crois, était souhaitable.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous pourrez dans quelques minutes, par votre vote, contribuer à mettre un terme à une pratique dont on peut dire qu'elle relevait de la coutume. S'ils sont adoptés, les amendements présentés par le Gouvernement et adoptés par l'Assemblée nationale ne remettront pas en cause l'Etat. Ils ne bouleverseront pas non plus la Ve République, ils ne résoudront pas les difficultés que notre pays peut connaître, en certaines circonstances, dans son rapport au politique, mais ils établiront, à mon sens, des règles claires pour tous. J'espère donc que vous confirmerez un choix de transparence et de maturité démocratique. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je rappelle au Sénat que les crédits inscrits à la ligne « Services généraux du Premier ministre » seront mis aux voix le mercredi 5 décembre, à la suite des crédits relatifs à la fonction publique.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 10 540 760 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 99 775 316 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisation de programme : 44 972 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 22 105 000 EUR. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
J'appelle en discussion l'article 77, qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés aux services généraux.

Article 77



M. le président.
« Art. 77. - I. - Les dépenses faites sur les crédits inscrits au chapitre 37-91 du budget des services généraux du Premier ministre sont examinées chaque année par une commission de vérification, chargée de s'assurer que les crédits sont utilisés conformément à la destination qui leur a été assignée par la loi de finances.
« Les services destinataires de ces crédits tiennent le compte d'emploi des fonds ainsi versés.
« II. - La commission est composée ainsi qu'il suit :
« - deux députés, dont le président de la commission, désignés par le président de l'Assemblée nationale ;
« - deux sénateurs désignés par le président du Sénat ;
« - deux membres nommés pour cinq ans, par décret, parmi les membres de la Cour des comptes, sur proposition de son premier président.
« III. - La commission prend connaissance de tous les documents, pièces et rapports susceptibles de justifier les dépenses considérées et l'emploi des fonds correspondants.
« Elle se fait représenter les registres, états, journaux, décisions et toutes pièces justificatives propres à l'éclairer au cours de ses travaux de vérification.
« Elle reçoit communication de l'état des dépenses se rattachant à des opérations en cours.
« Elle peut déléguer un de ses membres pour procéder à toutes enquêtes et investigations en vue de contrôler les faits retracés dans les documents comptables soumis à sa vérification.
« IV. - Les membres de la commission sont astreints au respect du secret de la défense nationale protégé en application des articles 413-9 et suivants du code pénal pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance à raison de leur mandat.
« Les travaux de la commission sont secrets, sous réserve du VI.
« Est puni des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal le fait de divulguer ou publier, dans un délai de trente ans, une information relative aux travaux de la commission.
« V. - La commission doit avoir terminé ses travaux avant le 31 mars de l'année qui suit celle de l'exercice soumis à son contrôle.
« VI. - Les vérifications terminées, la commission établit un rapport sur les conditions d'emploi des crédits.
« Le rapport est remis par le président de la commission au Président de la République, au Premier ministre et aux présidents et rapporteurs généraux des commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances.
« VII. - La commission dresse un procès verbal dans lequel elle constate que les dépenses réalisées sur les crédits visés au I sont couvertes par des pièces justificatives pour un montant égal.
« Le procès-verbal est remis par le président de la commission au Premier ministre et au ministre chargé du budget qui le transmet à la Cour des comptes.
« VIII. - L'article 42 de la loi n° 46-854 du 27 avril 1946 portant ouverture et annulation de crédits sur l'exercice 1946, l'article 6 de la loi n° 47-1496 du 13 août 1947 portant fixation des crédits applicables aux dépenses du budget ordinaire de l'exercice l947 (services civils) et le décret n° 47-2234 du 19 novembre 1947 portant création d'une commission de vérification des dépenses faites sur les crédits affectés au service de documentation extérieure et de contre-espionnage sont abrogés. »
Je suis saisi de six amendements présentés par M. Marc, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-41 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le II de l'article 77 :
« II. - La commission est composée ainsi qu'il suit :
« - deux députés, désignés par le président de l'Assemblée nationale pour la durée de leur mandat ;
« - deux sénateurs, désignés par le président du Sénat après chaque renouvellement triennal ;
« - le Premier président de la Cour des comptes.
« La commission est présidée par le Premier président de la Cour des comptes.
« Sauf démission, il ne peut être mis fin aux fonctions de membre de la commission qu'en cas d'empêchement constaté par celle-ci. Les membres de la commission désignés en remplacement de ceux dont le mandat a pris fin avant son terme normal sont nommés pour la durée restant à courir dudit mandat. »
L'amendement n° II-42 est ainsi libellé :
« Après le II de l'article 77, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II bis. - La désignation ou la nomination au sein de la commission ne sont effectives qu'après l'habilitation des personnes concernées à accéder aux informations classées très secret-défense, selon la procédure définie à l'article 8 du décret n° 98-608 du 17 juillet 1998 relatif à la protection des secrets de la défense nationale.
« Il en est de même pour les membres du secrétariat visé au II ter du présent article.
« Lors de la première réunion de la commission, ses membres prêtent serment de respecter les obligations de secret indiquées au IV du présent article. »
L'amendement n° II-43 est ainsi libellé :
« Après le II de l'article 77, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
« II ter. - La commission établit son règlement intérieur. Elle désigne un secrétariat chargé de l'assister dans ses travaux. »
L'amendement n° II-44 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le troisième alinéa du III de l'article 77 :
« Elle reçoit communication de l'état des dépenses réalisées au titre de chaque exercice budgétaire. »
L'amendement n° II-45 est ainsi libellé :
« Supprimer le dernier alinéa du III de l'article 77. »
L'amendement n° II-46 est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le VI de l'article 77 :
« Les vérifications terminées, le président de la commission se tient à la disposition du Président de la République, du Premier ministre et des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat pour présenter les observations de la commission. »
La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter ces six amendements.
M. François Marc, rapporteur spécial. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, la commission des finances s'est prononcée à l'unanimité en faveur de la réforme des fonds spéciaux. Néanmoins, elle a souhaité compléter cette réforme. Je présenterai à cette fin globalement ces six amendements, qui relèvent de la même logique - puisqu'il s'agit de ne pas mettre en péril l'action de nos services secrets - et qui ont été adoptés hier à l'unanimité par notre commission, laquelle s'était réunie spécialement à cet effet.
Quatre de ces amendements ont pour objet de renforcer la protection du secret.
L'amendement n° II-42 prévoit que les personnes nommées à la commission de vérification des fonds spéciaux devront être habilitées à accéder aux informations classées « très secret-défense » - je vous rappelle, mes chers collègues, que cette habilitation, qui est la plus élevée, est accordée par le Premier ministre - et prêter serment de respecter les obligations de secret prévues par le texte actuel.
Par ailleurs, les amendements n°s II-44 et II-45 tendent à encadrer plus strictement les possibilités de contrôle des dépenses de la commission, ainsi que ses pouvoirs d'enquête ou d'investigation
Enfin, l'amendement n° II-46 prévoit la suppression du rapport écrit sur les conditions d'emploi des crédits.
Le président de la commission se tiendra à la disposition du Président de la République, du Premier ministre et des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat pour leur présenter, le cas échéant et à leur demande, ses observations.
Tels sont les objets des quatre amendements visant à mieux protéger le secret.
L'amendement n° II-41 tend quant à lui à modifier la composition de la commission. Celle-ci comporterait, s'il était adopté, cinq membres au lieu de six, la Cour des comptes étant alors représentée non par deux membres nommés par décret, mais par son Premier président, qui présiderait la commission. Cette dernière étant chargée d'effectuer un contrôle purement comptable, cette solution a semblé préférable à celle qui est prévue par le texte actuel, selon lequel la commission serait présidée, de droit, par l'un des deux députés.
Cet amendement précise, en outre, que les députés seront membres de la commission pour la durée de leur mandat, les sénateurs pour la période comprise entre deux renouvellements triennaux. Il reprend, à cet égard, les dispositions en vigueur s'agissant de la commission consultative du secret de la défense nationale.
Un dernier amendement, l'amendement n° II-43, tend à apporter quelques précisions techniques. Il prévoit que la commission établit son règlement intérieur et est assistée d'un secrétariat. Ce dernier point nous a paru particulièrement important, dans la mesure où le texte actuel ne reconnaît pas la possibilité, pour les membres de la commission, de recourir à des collaborateurs. Il convient de préciser que, aux termes de l'amendement n° II-42, les membres de ce secrétariat devront bien évidemment avoir eux aussi fait l'objet d'une habilitation leur permettant d'accéder à des informations classées « très secret-défense ».
Telles sont, mes chers collègues, les propositions de la commission des finances. Il s'agit de préserver la logique d'un dispositif présenté par le Gouvernement, tout en apportant quelques précisions destinées essentiellement à sauvegarder plus efficacement encore le secret indispensable qui doit entourer les opérations financées par les fonds spéciaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. L'amendement n° II-41 a pour objet à la fois de préciser la durée du mandat et les conditions de remplacement des membres de la commission prévue à l'article 77 et de désigner comme président de la commission le Premier président de la Cour des comptes. Comme je l'ai dit, ce n'est pas le texte qui a été adopté par l'Assemblée nationale, mais, sur ce point, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
L'amendement n° II-42 prévoit les règles d'habilitation au secret-défense. Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, la procédure qui est proposée me paraît plus lourde que celle qui est aujourd'hui prévue. Je ne suis pas sûre qu'il soit souhaitable d'étendre le champ des personnes habilitées. C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° II-43, il émet également un avis défavorable, par coordination avec l'amendement précédent.
En ce qui concerne l'amendement n° II-44, dont l'objet est de rattacher l'état des dépenses à chaque exercice budgétaire, le critère de rattachement étant la réalisation de la dépense plutôt que l'opération en cours, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
S'agissant de l'amendement n° II-45, qui vise à supprimer la procédure d'enquête, et de l'amendement n° II-46, qui supprime l'obligation faite à la commission de produire un rapport, il s'en remet également à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-41.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je suis obligé de m'en tenir à la procédure qui consiste à examiner les amendements un par un. Cependant il faut bien le reconnaître, cette procédure est absurde puisque la commission des finances, dont je suis membre - mais en l'occurrence, j'exprimerai mon sentiment personnel et celui de mon groupe - a examiné globalement les amendements qui ont été présentés sur l'article 77 afin d'aboutir à un dispositif équilibré. Or, après avoir entendu la réponse du Gouvernement, je crains que nous n'aboutissions à un texte déséquilibré.
Lorsque nous avons travaillé sur ce dispositif, nous savions que nos positions risquaient de ne pas être approuvées par l'Assemblée nationale. Néanmoins, lors de la dernière réunion de la commission des finances du Sénat, nous étions parvenus à un accord, à l'unanimité, sur un texte équilibré et nous espérions que le Gouvernement soutiendrait nos propositions.
Or, je le précise d'entrée de jeu, il y a tout de même un bémol important : on ne sait pas ce que va faire l'Assemblée nationale et le Gouvernement vient d'émettre un avis défavorable sur deux des amendements présentés.
J'en reviens à l'amendement n° II-41. Nous avons examiné cette affaire avec beaucoup de réticence et d'hésitation, en raison de son histoire et parce qu'elle a pris un caractère médiatique, qui était loin de nous satisfaire. Cela étant, avec mon collègue François Trucy, nous l'avons examinée dans un double souci. Il s'agissait, d'abord, d'établir un vrai contrôle, qui soit spécifique et pas exclusivement parlementaire. C'est pourquoi nous avons conforté la place de la Cour des comptes au sein de la commission. Il s'agissait, ensuite, de préserver le sens de l'Etat, comme cela a été exprimé très vigoureusement par nombre de membres de la commission des finances, pour assurer la sécurité et le secret des opérations qui sont menées dans l'intérêt de la France. Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons encadré le dispositif.
Nous voterons donc cet amendement tout en sachant que, à la fin du processus législatif, le dispositif sera peut-être dénaturé et complètement déséquilibré.
M. Maurice Blin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Blin.
M. Maurice Blin. Je me félicite que, sur cette matière délicate, le Gouvernement ait adopté une position de sagesse. Il rend ainsi hommage à la qualité des travaux que la commission des finances et son rapporteur spécial ont conduits.
Je rejoins très volontiers la position que vient d'adopter notre collègue M. Lachenaud concernant ce qui me paraît en vérité constituer l'essentiel et devoir l'emporter sur tous les autres amendements que nous avons présentés et qui ont fait l'objet d'un avis unanime de la commission des finances. Je veux parler de l'amendement n° II-42. Madame le secrétaire d'Etat, je suis inquiet que, sur ce point, le Gouvernement semble avoir adopté, pour le moment tout au moins, une position extrêmement réservée.
Parlons clair : la formulation de cet amendement renvoie à quelque chose de très simple. Il s'agit de savoir si le pouvoir exécutif, c'est-à-dire éminemment le Premier ministre, aura, comme il me paraît indispensable, un droit de regard sur la qualité des parlementaires qui participeront à ce travail délicat, complexe et nouveau dans notre législation de contrôle des fonds secrets.
Puisqu'il s'agit d'une prérogative de l'exécutif, il ne faut ni la contester, ni l'entamer, ni la réduire. Il est indispensable que ceux qui, dans cet examen délicat, auront à rencontrer des parlementaires sachent, pour parler simple, qui ils ont en face d'eux. C'est le sens de l'habilitation.
Je reconnais que, en ce qui concerne le troisième alinéa de cet amendement n° II-42, il en est de même pour les membres du secrétariat visés au II ter du présent article. On peut en débattre et je serais tenté de penser qu'il convient que, eux aussi, soient soumis à cet examen préalable. Si cela ne pouvait pas être le cas, qu'au moins on maintienne le principe que les parlementaires qui auront à travailler dans une matière aussi neuve, aussi délicate et aussi grave pour l'intérêt du pays fassent préalablement l'objet d'un assentiment du pouvoir exécutif. J'aimerais, madame, que, sur ce point, vous nous donniez raison.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Effectivement, s'est posée la question de la nature du contrôle qui devait s'exercer sur ces crédits, qui restent des fonds spéciaux. Deux possibilités étaient envisageables : soit l'extension d'un contrôle de nature administrative, qui existe dans un certain nombre de domaines - une loi de 1998 y a pourvu en matière de levée du secret-défense, par exemple -, soit un contrôle de nature très clairement parlementaire, ce qui va dans le sens d'une autre évolution que le Sénat a lui-même encouragée, notamment en réformant l'ordonnance organique de 1959.
C'est la deuxième solution qui a été retenue.
La commission s'est interrogée sur la manière dont ces parlementaires pourront effectivement travailler s'ils sont seuls à siéger au sein de cette commission. C'est la raison pour laquelle l'article 77 prévoit d'ores et déjà que deux membres de la Cour des comptes siégeront également au sein de cette commission, puisqu'il s'agit aussi d'un contrôle de nature comptable.
Dès lors, comment répondre à l'objection de M. Blin ? Comment s'assurer de la qualité des parlementaires qui siégeront au sein de cette commission ? Cette question est délicate pour le représentant de l'exécutif que je suis, parce que nous avons proposé, dans cet article 77, que les présidents des deux assemblées procèdent à ce choix. En effet, à nos yeux, il n'existe pas de meilleur juge de la qualité des parlementaires. Le contrôle de nature parlementaire ayant été retenu, la logique veut que l'exécutif n'exerce pas en aval un contrôle sur le choix du président de l'Assemblée nationale et du président du Sénat.
Je ne suis pas certaine d'avoir répondu à toutes vos interrogations, mais j'espère que ces compléments d'information auront permis de vous éclairer.
M. François Marc, rappporteur spécial. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Marc, rapporteur spécial. Je reconnais que, plus les secrétariats sont développés et plus le risque de fuites existe. Il y a donc un doute sur ce point précis. A titre personnel, je prends en considération les arguments de Mme la secrétaire d'Etat.
Reste que je me dois en l'instant d'être le porte-parole de la commission, qui, je le précise à nouveau, a adopté ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-41, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-42.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Si la procédure qui consiste à examiner les amendements un par un a des inconvénients, elle présente aussi un avantage : en effet, nous pouvons reprendre la parole sur chaque amendement. (Sourires.)
La commission des finances propose un dispositif très encadré, garantissant au maximum le secret des délibérations. C'est une des raisons majeures qui nous ont conduits à supprimer l'impression d'un rapport. Malheureusement, l'histoire montre, tant en France qu'à l'étranger, que lorsqu'il existe un document écrit il est bien rare qu'il n'y ait pas une fuite. En effet, on finit toujours par retrouver ce document entre des mains ou dans des organes de presse où il ne devrait pas se trouver.
Le fait que le dispositif soit équilibré nous conduit à soutenir cet amendement.
Le groupe du RPR le votera, souhaitant qu'il ne soit ni dénaturé ni trahi, et que l'avis unanime de la commission des finances soit suivi.
Madame la secrétaire d'Etat, nous avons considéré que le contrôle des crédits prendrait un caractère quelque peu spécifique, et il nous a semblé que la Cour des comptes apportait des garanties techniques.
Lorsque nous avons réformé l'ordonnance de 1959, nous avons développé le contrôle de la Cour des comptes. Mais étant originaire de ce corps, il est un peu délicat pour moi d'en dire plus.
La composition de la commission prévue dans l'amendement n° II-41 et les dispositions de l'amendement n° II-42 permettraient de disposer du support technique de la Cour des comptes, d'autant que, comme vous l'avez rappelé, madame la secrétaire d'Etat, il s'agit de comptes d'emplois, que nous n'avons pas tellement l'habitude de voir les uns et les autres : ce sont des comptes très spécifiques dans la mesure où la séparation de l'ordonnateur et du comptable n'est pas garantie.
Nous nous sommes dit - mais peut être avons-nous eu tort - que la procédure du secret défense, avec les sanctions, y compris pénales, très lourdes qu'elle induit en cas de non-respect, apporterait une certaine solennité au dispositif et ferait prendre conscience aux participants de la commission du caractère extrêmement délicat d'une matière dont l'efficacité de l'action doit être sauvegardée et dans laquelle les intérêts de la France peuvent être compromis.
Je comprends que le dispositif paraisse lourd ; il ne se veut pas désagréable à l'égard des futurs membres de cette commission ; il vise simplement à bien marquer les risques et les sanctions pour le cas, que je crois effectivement tout à fait rare - toutes les précautions auront en effet été prises - où il y aurait violation du secret.
Telle est la logique de l'amendement n° II-42, auquel nous tenons beaucoup.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-42, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-43, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-44, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-45, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-46, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 77, modifié.

(L'article 77 est adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant les services généraux.

II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE

M. le président. Le Sénat va examiner les dipositions du projet de loi de finances concernant les services du Premier ministre : II. - Secrétariat général de la défense nationale.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le secrétariat général de la défense nationale, ou SGDN, instrument du Premier ministre en matière de direction générale de la défense, en liaison étroite avec la Présidence de la République, est maintenant relancé. Son rôle est conforté par les nouveaux moyens mis à sa disposition et les appels renouvelés à sa compétence.
Les crédits demandés pour 2002 s'établissent à 39,4 millions d'euros, soit 258 millions de francs, en hausse brute de 33 % et, à structure constante, de 12,5 %. Les deux tiers de l'augmentation résultent des nouveaux moyens interministériels pour la sécurité des systèmes d'information, opérations engagées à hauteur de 10 millions d'euros dès la loi de finances rectificative pour 2000, mais reportées sur l'exercice 2001.
Les autres missions du SGDN ne sont pas négligées, à l'instar de la mission de contrôle des matériels de guerre et du programme civil de défense. L'augmentation des effectifs du SGDN sera poursuivie en 2002, avec la création de vingt-trois postes budgétaires, tout en maîtrisant les conséquences de la fin de la conscription.
L'Institut des hautes études de la défense nationale, l'IHEDN, est un fondement essentiel de la culture et de l'esprit de défense. Mais sa dotation propre de 1,5 million d'euros pour 2002, soit cinq années après sa transformation en établissement public administratif, ne semble pas lui assurer une véritable autonomie financière. En effet, avec les moyens mis à sa disposition par d'autres administrations, principalement le ministère de la défense, le coût réel de l'institut s'élève à 7,2 millions d'euros en 2001.
Enfin, l'effort destiné à la défense civile de la nation comprend surtout, je vous le rappelle, les crédits que les ministères civils lui consacrent. Leur montant est récapitulé dans un « jaune budgétaire ». Enregistrant une hausse de 2,6 % pour 2002, il s'établira à près de 1,4 milliard d'euros, dont plus des deux tiers relèveront du ministère de l'intérieur. Je constate d'ailleurs que sa création date de plus de vingt ans et qu'il serait donc nécessaire de revoir son contenu.
Les activités du SGDN sont désormais recentrées sur des tâches de conception et d'impulsion, et son intervention est dynamisée dans les domaines où la coordination interministérielle est nécessaire. Ses agents sont donc sollicités en raison de leurs compétences, le temps d'une crise ou à la suite d'une demande gouvernementale. Je citerai, à titre d'exemple, la gestion du danger présenté par les munitions du site de Vimy.
Si l'importance du rôle du SGDN en matière de synthèse, d'évaluation et de mise en valeur du renseignement dans le processus de décision politique a bel et bien été confirmée, elle est également vérifiée en cette période de crise. L'insécurité internationale plaide d'ailleurs pour des avancées significatives vers une sécurité européenne et une Europe de la défense. Il est permis de souhaiter que l'Union européenne en tire rapidement les conséquences.
Les fonctions du SGDN recouvrent également la coordination de la protection des populations, lesquelles sont exposées à de « nouvelles menaces » : inondations, tempêtes, attentats et catastrophes, telle celle de Toulouse.
Les risques liés à l'entrée de la France dans la société de l'information et à la libération de la cryptologie sont bien appréhendés par le Gouvernement. Mais le médecin que je suis est attentif aux risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique pour lesquels les moyens de protection et d'intervention doivent être assurés. Les nouveaux crédits qui seront proposés dans le prochain projet de loi de finances rectificative pour renforcer cette action méritent une large approbation.
Dans l'attente des comptes rendus concernant l'explosion de Toulouse, il convient d'ores et déjà de s'interroger sur nos procédures d'urgence dans le cas de catastrophe étendue à une grande partie du territoire.
Ainsi, à la lecture du rapport Sanson sur les tempêtes, il apparaît que nos infrastructures doivent être mieux protégées, et les responsabilités redéfinies. Au-delà d'une réforme de nos plans d'urgence, une politique civile de défense assurant encore mieux la protection des populations est tout aussi attendue.
La gestion des crises s'avère de plus en plus complexe, en raison non seulement de la mutation économique et sociale de notre pays, mais aussi - il faut bien le dire - du manque d'implication de la population dans la défense civilo-militaire. Je suggère donc la mise à l'étude d'un dispositif interministériel de gestion des crises et réaffirme que le SGDN, repositionné comme lieu de convergence de la sécurité intérieure et extérieure, s'impose comme un instrument majeur de cette adaptation de notre défense non militaire.
Compte tenu de l'effort en faveur des missions du SGDN, tant traditionnelles que nouvelles, qui ressort à l'évidence de ce budget, la commission des finances, suivant la proposition de son rapporteur spécial, propose au Sénat d'adopter les crédits du secrétariat général de la défense nationale. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l'analyse qu'a faite notre excellent rapporteur spécial, M. Michel Moreigne, sur le budget du SGDN. Je partage les conclusions qu'il tire de l'affectation des sommes à cet organisme dans le projet de loi de finances pour 2002. Comme lui, je pense que le budget proposé traduit la volonté du Gouvernement de renforcer encore la coordination interministérielle en matière de sécurité intérieure et extérieure.
Je partage aussi son appréciation très positive sur le rôle qu'à tenu le secrétariat général de la défense nationale dans une période marquée par des événements internationaux dramatiques.
Oui, nous disposons avec le SGDN d'une instance assez unique dans l'appareil d'Etat par rapport aux modes d'organisation dans tous les autres pays occidentaux. Chargé spécifiquement de la coordination gouvernementale dans les domaines qui conditionnent la sécurité du pays, il est, de surcroît, placé sous la double autorité du Président de la République et du Premier ministre, aux services duquel il appartient.
Transversalité, interdisciplinarité, ouverture au monde et aux surgissements de nouveaux dangers, telles sont quelques-unes des caractéristiques du SGDN. Sans se substituer aux départements ministériels, scrupuleusement attaché à son rôle de « serviteur » du politique, il est atypique, parce qu'il est en avance : au sein d'une société cloisonnée et trop souvent myope, il cherche à « potentialiser » les moyens de la défense et à anticiper les nouvelles menaces. C'est tout notre appareil d'Etat qui, peu à peu, devrait évoluer dans le même sens pour être au rendez-vous de l'Histoire.
Depuis un peu plus de deux mois, cet organisme dont la discrétion est la règle, avec la compétence et la disponibilité des agents qui le servent, est placé, dans une certaine mesure, sous les feux de l'actualité. Jamais, en effet, depuis le 11 septembre 2001, la nécessité absolue, vitale pour notre pays, d'une prise en compte de l'ensemble des éléments qui concourent à sa sécurité n'avait été aussi évidente. Jamais, depuis cette date, la prévision et la prévention des risques qui affectent notre existence même n'avaient été aussi indispensables. Jamais la programmation et la planification, jamais la veille technologique et humaine n'avaient paru aussi déterminantes pour préserver la paix.
C'est ce qui explique que le projet de loi de finances confirme l'augmentation rapide des moyens mis à disposition du SGDN : entre 1999 et 2002, le budget aura doublé si le Parlement valide la proposition du Gouvernement, et quelque 300 agents civils et militaires travaillent aujourd'hui pour la sécurité des Français au sein de cet organisme. C'est à eux que revient, pour une part, les résultats de collecte, de synthèse et de transmission aux autorités politiques des informations et des renseignements qui nous ont aidés à nous situer dans cette période difficile pour notre pays.
Je dois ajouter - je l'avais d'ailleurs déjà indiqué l'an dernier - que le SGDN avait, très en amont, attiré l'attention des plus hautes autorités de l'Etat sur la réalité des menaces terroristes et des réseaux qui la mettent en oeuvre. Surtout - et cela me paraît beaucoup plus important - il avait souligné les dimensions très différentes et, pour une part, nouvelles de ces menaces : nucléaire, biologique, radiologique, chimique...
Dès l'annonce des attentats du 11 septembre, le secrétariat général de la défense nationale a proposé au Premier ministre, en liaison étroite avec la présidence de la République, un nouveau dimensionnement et une dynamisation de nos capacités de réaction face à la menace terroriste.
Des scénarios de menaces ont été définis. Les ministères concernés ont été mobilisés. La planification en matière de sécurité sur le territoire a été adaptée, et ce d'autant plus rapidement que le travail avait été entrepris dès 1999.
Les résultats sont visibles : notre pays, pourtant placé au milieu de risques de toutes sortes, a été épargné. La sécurité de nos concitoyens face au terrorisme a été assurée. Devant toute menace d'une telle ampleur et d'une telle nature, personne ne saurait évoquer une garantie complète. Mais, au moins, ce qui devait être fait aura été fait, et le secrétariat général de la défense nationale a pris dans cette action une place significative que je tenais à souligner en cet instant.
Le travail conduit par le SGDN a réuni aussi bien des experts, des responsables de l'administration, que les grands opérateurs qui concourent à la continuité de la vie nationale. C'est à l'ensemble de ces acteurs, qu'ils soient civils ou militaires, qu'ils appartiennent au secteur public ou à l'entreprise privée, qu'ils soient universitaires ou chercheurs dans un laboratoire, que la représentation nationale rend aujourd'hui hommage.
Mais, mes chers collègues, nous savons bien que la défense de notre pays ne s'arrête pas à ses frontières. Nous savons bien que les intérêts de la France, si l'on veut bien aller à l'essentiel, sont les mêmes que ceux de nos partenaires, en Europe et au-delà de l'Atlantique. Notre pays défend, en fait, non pas un nationalisme étroit, fondé sur des idées d'autrefois, mais un patriotisme ouvert, fondé sur des valeurs universelles. Le secrétariat général de la défense nationale est un instrument efficace et exemplaire de cette vision politique.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite d'abord remercier M. Michel Moreigne de la qualité de son rapport.
Le projet de budget pour 2002 du SGDN s'élève, en crédits de paiement, à 39,36 millions d'euros. Il augmente, à structure constante, de 12 % par rapport à 2001, après une hausse de 16 % l'an dernier. Par ailleurs, le SGDN bénéficiera en 2002 de la création de vingt-quatre postes budgétaires.
Comme M. le rapporteur spécial l'a relevé, la hausse des moyens dévolus au SGDN accompagne un recentrage de ses missions de conception, d'impulsion et de coordination interministérielle. Les efforts correspondent, pour l'essentiel, à deux axes.
Le premier concerne la capacité de prévention et de réaction des pouvoirs publics en matière de risques liés aux accidents ou actes malveillants dans les domaines nucléaire, radiologique, bactériologique ou chimique, dont votre rapporteur se préoccupait déjà l'an dernier à juste titre.
Le second a trait à l'entrée du pays dans la société de l'information dans des conditons de sécurité satisfaisantes.
Permettez-moi d'insister, à cette occasion, sur le fait que les missions confiées au SGDN et l'orientation donnée à ses actes traduisent de manière particulièrement nette l'adaptation de notre politique de sécurité à des enjeux qui ont été amplifiés depuis les attentats du 11 septembre dernier.
Cette adaptation se traduit par une prise en compte accrue des nouvelles menaces, par une souplesse et une réactivité de l'organisation interministérielle dans tous les domaines de la politique de défense et de sécurité, y compris le renseignement, par une modernisation des instruments de l'appareil d'Etat au moyen des nouveaux outils de communication et d'information, ainsi que par un accroissement des capacités de prévention, de détection et de réaction de l'Etat sur le territoire national et pour la protection des populations.
S'agissant d'abord du programme civil de défense, le Gouvernement a souhaité le renforcer : les crédits d'investissement sont portés à 7,62 millions d'euros en autorisations de programme et à 5,4 millions d'euros en crédits de paiement. Ils sont, en grande partie, consacrés à la mise en place de dispositifs et d'équipements destinés à prévenir les risques liés aux domaines nucléaire, radiologique, bactériologique ou chimique ou à réagir à la suite d'accidents ou d'actes malveillants. Parmi les investissements nouveaux, on peut citer également le renforcement du réseau Rimbaud et la mise en place des salles opérationnelles des préfectures de zone de défense.
Le programme civil de défense n'a pas vocation à couvrir tous les besoins en la matière. Il est un outil parmi d'autres à la disposition du Premier ministre pour susciter des programmes interministériels dans le domaine de la défense civile.
Je citerai, par exemple, le renforcement des moyens locaux d'intervention ou la mise en place au niveau national de moyens d'expertise tels que le réseau de laboratoires « Piratox », des stocks d'antidotes ou des équipements de protection pour des unités d'intervention.
L'actualité - et je fais allusion non seulement aux suites du 11 septembre, mais aussi à Toulouse et à Vimy, où des mesures de précaution ont été prises avec succès - conduira le Gouvernement à poursuivre, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001 que vous aurez très prochainement à examiner, l'effort déja entrepris.
De même, en réponse aux préconisations de votre rapporteur sur le dispositif de gestion des crises, je tiens à rappeler que le rapport de la mission interministérielle d'évaluation des conséquences des tempêtes demandé par le Premier ministre est suivi d'effet. Je citerai aussi le prochain dépôt, annoncé par le Premier ministre, d'un projet de loi de modernisation de la sécurité civile.
Moins spectaculaires que la menace terroriste, mais particulièrement insidieuses, les vulnérabilités des systèmes d'information, au moment où la France entre dans la société de l'information, ont été placées au premier rang des préoccupations du Gouvernement.
Le SGDN a été chargé de mettre en place un plan de renforcement des moyens de l'Etat permettant de garantir le volet « sécurité » du programme d'action gouvernementale pour la société de l'information.
Un décret du 31 juillet dernier organise la direction centrale de la sécurité des systèmes d'information, placée sous la responsabilité du secrétaire général de la défense nationale. Ses effectifs seront portés, en 2002, à 91 emplois, essentiellement des ingénieurs et des techniciens.
Cette direction développe son activité dans le domaine du conseil aux services de l'Etat, de l'audit de ses systèmes d'information, de la certification de produits de sécurité et enfin de la recherche en cryptologie.
Au titre du plan de développement des capacités techniques des services de l'Etat, le Premier ministre avait annoncé des mesures de renforcement des moyens à l'issue du comité interministériel pour la société de l'information du 19 janvier 1999. Le projet de budget pour 2002 traduit, en cohérence avec ces décisions, une nouvelle étape dans cette modernisation, avec l'inscription de 22,2 millions d'euros en autorisations de programme et de 6,25 millions d'euros en crédits de paiement, votre rapporteur en a relevé l'importance.
Au total, depuis 1997, le budget du secrétariat général de la défense nationale aura progressé de 63 %, cet effort donnant la mesure de l'ambition du Gouvernement en matière de défense nationale, à la fois dans sa dimension civile et dans celle qui est relative à l'adaptation aux nouvelles technologies de l'information. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, du RDSE et de l'Union centriste.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le secrétariat général de la défense nationale et figurant aux états B et C.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 2 378 458 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Je constate que ces crédits ont été adoptés à l'unanimité.

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 32 930 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 11 585 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le secrétariat général de la défense nationale.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux-heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures dix, est reprise à vingt-deux heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale.

III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les services du Premier ministre : III. - Conseil économique et social.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'an dernier, c'est un budget de renouveau que le Parlement avait voté pour le Conseil économique et social. En accordant une progression de 8,2 % des crédits, il s'agissait de donner au président Jacques Dermagne, élu en septembre 1999, les moyens d'une politique ambitieuse visant à moderniser le Conseil, à l'ouvrir sur l'extérieur, à lui donner un rôle accru.
A ce budget de renouveau succède un budget de continuité. Les crédits du Conseil économique et social s'élèvent à 31,8 millions d'euros. Seuls les crédits liés aux ressources humaines - les membres du Conseil et des sections, d'une part, et le personnel, d'autre part - augmentent, mais par le simple effet de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique.
Les moyens matériels, en fonctionnement ou en investissement, régressent légèrement ou sont quasiment stables.
Au total, l'augmentation, limitée à 1,6 %, comme on était fondé à l'attendre, est suffisante pour assurer la poursuite des réformes engagées.
Donner à la société civile le cadre et les moyens de se faire mieux entendre, tant sur le plan national que sur la scène internationale, tel est l'objectif du président Dermagne.
Ce projet est servi par une politique de communication résolument plus offensive. Le développement des relations publiques, un site Internet plus complet et plus attractif ainsi que l'intensification des relations avec la presse concourent au renforcement de la notoriété du Conseil.
Sur le plan national, le Conseil souffre cependant - je le déplore chaque année - de se voir si peu sollicité par le Gouvernement. Au-delà du nombre de saisines, qui semble d'ailleurs progresser légèrement en 2001, il est très regrettable que, sur des sujets aussi essentiels que la modernisation sociale, la lutte contre les exclusions, la réduction du temps de travail, l'épargne salariale, la couverture maladie universelle ou la loi d'orientation pour l'outre-mer, l'avis du Conseil économique et social n'ait pas été demandé.
Afin de peser davantage dans le débat national, le Conseil réalise des travaux qui se veulent plus percutants, quitte à être l'objet de controverses largement reprises ces derniers temps par la presse. Moins consensuels et plus incisifs, ces travaux permettent des échanges plus riches au sein de l'institution.
Par ailleurs, le Conseil tient à mieux intégrer les évolutions profondes de notre société, telles que le cheminement vers l'égalité entre les femmes et les hommes ou la construction européenne. Ainsi, après la création d'une délégation aux droits des femmes en mars 2000, une délégation pour l'Union européenne a vu le jour en février 2001.
Enfin, le Conseil a pris l'habitude de faire travailler les sections en commun si l'objet d'une étude touche à divers domaines ou, s'il nécessite un éclairage territorial, d'inviter les conseils économiques et sociaux régionaux à apporter leur concours.
A l'échelle internationale et à l'heure de la mondialisation, le président du Conseil milite pour une meilleure représentation de la société civile. Le nombre de CES étrangers ou d'institutions similaires est passé de douze à soixante en dix ans et le concept de Conseil économique et social à la française s'exporte bien.
Par ailleurs, le CES français joue un rôle essentiel au sein de l'Association internationale des conseils économiques et sociaux et institutions similaires, qui vient de se voir accorder un statut spécial par l'Organisation des Nations unies, lui permettant de siéger dans les rangs de celle-ci. J'y vois là une juste consécration de l'action du président Dermagne et un véritable motif de satisfaction, car c'est bien ainsi que la société civile pourra mieux faire entendre ses légitimes inquiétudes et ses attentes, nées en particulier de la mondialisation.
Je conclurai par une question, certes récurrente mais que nous n'avons pas de raison d'éluder, je veux parler de la représentativité du Conseil économique et social.
En réponse aux habituels commentaires que cette question suscite, son président a lui-même reconnu que le Conseil ne représente plus tout à fait la société d'aujourd'hui, que « la photo est jaunie ». N'est-il pas temps d'en tirer les conséquences ?
En attendant la réforme législative que cela impliquerait, le Sénat pourrait utilement apporter sa contribution à la réflexion qui semble devoir s'engager au sein même du Conseil économique et social.
Pour l'heure, la commission des finances vous propose, mes chers collèlgues, d'adopter les crédits de cette institution. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne peux qu'approuver les principales remarques faites par notre rapporteur spécial. Je me contenterai d'insister sur le fait que le Gouvernement sollicite toujours trop peu le Conseil économique et social.
Permettez-moi de rappeler le titre XI de la Constitution qui dispose que le Conseil « donne son avis sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis ». Il peut être également consulté par le Gouvernement sur tout problème de caractère économique ou social.
A juste titre, M. le rapporteur spécial note que le nombre de saisines gouvernementales est passé de quatre en 1999 et en 2000 à cinq au 1er juillet 2001. Entre octobre 2000 et juin 2001, le Conseil économique et social ne semble avoir été consulté sur aucun projet de loi, alors que des dizaines de lois ont été votées.
En 2000, dix-huit études et rapports ont été publiés au Journal officiel , 334 réunions et 18 assemblées plénières se sont tenues. Trois cents personnalités extérieures ont été auditionnées.
Le Conseil économique et social travaille. Ses travaux sont appréciés, si l'on en juge par le nombre d'accès au site Internet : en moyenne près de 400 000 par mois, soit une hausse de 76 % par rapport à 1979.
En outre, son audience progresse sur le plan international, grâce, il faut bien le reconnaître, à une politique de coopération internationale.
Le Conseil économique et social est devenu, avec d'autres institutions - la direction des Journaux officiels, la direction des monnaies et médailles et le Commissariat général du Plan -, un pilier de la République sur lequel s'appuient les gouvernements.
Une question se trouve posée : pourquoi les gouvernements qui se sont succédé depuis 1946 ne lui accordent-ils jamais tout l'intérêt qu'il mérite ?
Son accouchement fut difficile, il est vrai. Les discussions et transactions furent lentes, âpres, au sein de la commission de la Constitution, d'abord, puis au sein de l'Assemblée constituante.
Elles devaient cependant aboutir et faire l'objet du titre III de la Constitution du 13 octobre 1946. C'était alors une consécration constitutionnelle du Comité économique.
On peut l'affirmer avec le recul de l'histoire, le Conseil économique et social a joué le rôle qu'il pouvait jouer, celui d'assemblée consultative et de lieu privilégié pour conduire les représentants de diverses activités économiques et sociales de la nation à chercher ensemble et à collaborer.
Je voudrais également rappeler que le Conseil économique devait, avec la loi organique du 29 décembre 1958, devenir le Conseil économique et social.
Il existe une petite différence : le Conseil économique était placé auprès du Parlement ; le Conseil économique et social est placé auprès du Gouvernement.
A un moment, il avait été envisagé une fusion entre le Conseil économique et social et le Sénat. Le référendum de 1969 a condamné ce projet et, mieux, la loi 1972 a créé des conseils économiques et sociaux régionaux, à l'image du Conseil économique et social.
Le bilan est intéressant, mais il est encore insuffisant.
En votant ce projet de budget, nous émettons le souhait de voir le Gouvernement accorder beaucoup plus d'importance aux avis du Conseil économique et social. Certaines lois seraient peut-être plus équilibrées après un avis des représentants de la société civile, économique, syndicale et sociale !
Je me permets, avant de conclure, de rappeler que l'article 69 de la Constitution du 4 octobre 1958 est formel : « Le Conseil économique et social, saisi par le Gouvernement, donne son avis sur les projets de loi, d'ordonnance ou de décret ainsi que sur les propositions de loi qui lui sont soumis. »
Certes, c'est le Parlement, et lui seul, qui fait la loi ; ce ne doit pas être une autre assemblée consultative qui lui conteste ce pouvoir. D'ailleurs, la loi de finances n'est pas soumise à l'avis du Conseil économique et social.
Je vous rappelle que, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance portant loi organique relative au Conseil économique et social, celui-ci « est obligatoirement saisi pour avis des projets de loi de programme ou de plan à caractère économique ou social [...] Il peut être, au préalable, associé à leur élaboration. »
Madame la secrétaire d'Etat, je n'entends personne faire référence à cet avis, très certainement parce que le Gouvernement, je le crois, le néglige. Je rappelle que la responsabilité de saisine appartient au Gouvernement, et non au Parlement !
Le Parlement, s'il a modifié, par une loi organique de 1984, la composition sociale du Conseil économique et social, n'a modifié ni le rôle ni la nature même de l'assemblée, pas plus d'ailleurs que ne l'a fait le décret de 1989, modifié par le décret de 1991, lequel a modifié le nombre des représentants des collectivités d'outre-mer.
Personne n'a jamais contesté le rôle du Conseil économique et social. Tous les parlements, depuis 1946, en améliorent la composition et les fonctions. Comment se fait-il que les gouvernements, en revanche, ne le sollicitent pas plus ?
En votant ce projet de budget, je souhaite que le Gouvernement prenne l'engagement d'utiliser davantage le Conseil économique et social.
M. François Marc. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite remercier M. Claude Lise, rapporteur spécial, de la qualité de son rapport. Le président M. Jacques Dermagne et le bureau du Conseil économique et social ont engagé, depuis le début de la mandature 1999-2004, une politique de modernisation et d'ouverture sur l'extérieur de cette institution.
Au cours de l'année 2000, le Conseil économique et social a tenu dix-huit assemblées plénières. Ses membres ont participé - Mme Beaudeau rappelait ces chiffres à l'instant - à 334 réunions, au cours desquelles 292 personnalités extérieures ont été auditionnées. A l'issue de ces travaux, une étude ainsi que dix-huit avis et rapports ont été adoptés, dont quatre sur saisine gouvernementale. Au cours du seul premier semestre 2001, treize avis ont été adoptés, dont cinq sur saisine gouvernementale.
Depuis juin 1999, le site internet du Conseil met en ligne le texte intégral des rapports des douze derniers mois, ainsi que les notices des travaux publiés depuis 1947. En 2000, le nombre d'accès moyen mensuel a été de 233 888, en progression de 76 % par rapport à 1999. Et je remercie Mme Beaudeau, qui a fourni des chiffres encore plus récents !
Depuis dix ans, le Conseil économique et social s'est engagé dans des actions de coopération internationale et il assure le secrétariat permanent de l'Association internationale des conseils économiques et sociaux.
Les moyens de cette politique ont été dégagés grâce à une revalorisation significative de 8,71 % sur l'exercice 2001 du budget de fonctionnement. Ces nouveaux crédits ont permis la création d'un service international, d'un service de la communication et la mise en place d'un réseau informatique.
Après la remise à niveau budgétaire intervenue en 2001, l'année 2002 sera, comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur spécial, une période de mise en oeuvre des réformes qui s'inscrira dans une perspective d'action pluriannuelle.
Les mesures nouvelles concernent, tout d'abord, la poursuite de la modernisation du système informatique, et les premières phases de développement d'un intranet pour l'élaboration des rapports, la gestion des bases de données documentaires et l'archivage électronique, soit 243 918 euros.
En termes de dépenses d'investissement, une dotation de 824 000 euros d'autorisations de programme et de crédits de paiement a été prévue, comme l'an passé, afin de poursuivre le programme d'entretien et de rénovation du palais d'Iéna, et particulièrement la création de salles de réunions équipées d'outils de communication moderne.
Au total, le projet de budget pour 2002 s'élève à 31,75 millions d'euros, dont 0,82 million d'euros relevant des crédits du titre V et 30,93 millions d'euros du titre III, en progression de 1,59 % par rapport à l'année 2001.
Au-delà de ces chiffres, il importe de souligner qu'après une année de remise à niveau un nouveau souffle a, en quelque sorte, été donné aux actions du Conseil économique et social. Il reste donc à examiner de quelle manière cette politique dynamique, mise en oeuvre par M. Jacques Dermagne, permettra de donner au Conseil économique et social l'élan que Mme Beaudeau et vous-même souhaitez lui donner. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Conseil économique et social, et figurant aux états B et C.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 408 597 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 824 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 824 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le Conseil économique et social.

IV. - PLAN

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant les services du Premier ministre : IV. - Plan.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, aujourd'hui, pour le débat sur l'avenir du Commissariat général du Plan, le CGP, est enfin clos.
A l'occasion de l'examen de la précédente loi de finances, j'avais conclu, dans le cadre de la présentation de ce même budget, à un nouvau départ, à une nouvelle ambition pour cette administration de mission. Je constate aujourd'hui que la réforme engagée par le Premier ministre a permis de réhabiliter le rôle et la fonction du Commissariat général du Plan.
Je voudrais, dans le temps qui m'est imparti, évoquer dans un premier temps les crédits demandés pour 2002, puis, dans un second temps, faire le point sur les activités du Commissariat général du Plan.
Les crédits demandés en 2002 pour le CGPet les organismes rattachés s'élèvent à 25,8 millions d'euros en dépenses ordinaires et en crédits de paiement, soit une très légère diminution par rapport à l'année dernière, où ils avaient atteint 25,9 millions d'euros.
Les autorisations de programme prévues pour 2002 augmentent de 60 %, passant de 0,5 million d'euros à 0,8 million d'euros.
La stabilité apparente du budget du CGP masque cependant des évolutions importantes.
Tout d'abord, le déménagement d'une partie des services du Commissariat général du Plan ainsi que du conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le CERC, sis au 113, rue de Grenelle, génère une économie nette de 0,30 million d'euros en année pleine.
Ensuite, le Plan fait partie de la première série d'administrations qui utiliseront le nouveau système comptable ACCORD dès le premier trimestre 2002. Cette décision entraîne une augmentation des crédits informatiques de 0,17 million d'euros.
Enfin, la montée en puissance du dispositif national d'évaluation des politiques publiques a amené le CGP à modifier la structure des emplois budgétaires. La création de trois emplois de rapporteurs d'instance nationale d'évaluation est gagée par la suppression de quatre emplois d'adjoint administratif.
Enfin, les crédits de recherche inscrits au budget du Plan pour 2002 sont portés de 530 000 à 656 000 euros.
Concernant les principales activités du Commissariat général du Plan, ses missions ont été réformées voilà deux ans, le Premier ministre ayant alors proposé une nouvelle définition de cette administration particulière : le CGP est conçu comme « animateur de l'analyse prospective et stratégique, lieu privilégié de la concertation socio-professionnelle, programmateur et évaluateur des politiques publiques ».
Les déclarations du Premier ministre ont été suivies par la définition d'un programme de travail pluriannuel établi avec les acteurs économiques et sociaux, dans le cadre d'une commission de concertation installée en 1999 et présidée par le commissaire au Plan.
Le dernier programme de travail du CGP a été fixé voilà un an. Il comprend trois axes : premièrement, le retour au plein emploi et l'encouragement à l'activité ; deuxièmement, le renforcement de la cohésion sociale et la sécurisation des parcours individuels, troisièmement les nouvelles régulations publiques.
Sur les seize chantiers inclus dans ce programme de travail, neuf sont en cours, parmi lesquels ont peut citer « l'économie entrepreneuriale », « le financement de l'économie française, une approche comparative », « immigration, intégration et perspectives démographiques ».
Autre pivot de l'action du CGP, l'évaluation des politiques publiques, domaine dans lequel il a également été renforcé voilà deux ans. En effet, la circulaire du 25 août 2000 relative à la mise en oeuvre de l'évaluation dans les procédures contractuelles redéfinit le rôle du Commissariat général du Plan. Depuis, il assure le secrétariat du Conseil national d'évaluation et gère les crédits du Fonds national de développement de l'évaluation. Par ailleurs, il est chargé de proposer au Premier ministre les suites à donner aux évaluations réalisées.
L'année 2000-2001 a été particulièrement féconde en matière d'évaluation, les difficultés évoquées l'année dernière ne semblant plus être d'actualité, ce dont il faut bien sûr se réjouir. Au total, quinze évaluations ont été mises en route en trois ans : c'est beaucoup plus que les évaluations décidées en huit ans sous l'empire du décret de 1990.
En revanche, on relève plus de difficultés du côté de l'évaluation des contrats de plan Etat-région. Je rappelle que la caractéristique essentielle du nouveau dispositif d'évaluation des contrats de plan Etat-région est la place prépondérante de l'échelon régional, préfet de région et président de conseil régional en particulier. L'évaluation s'organise autour d'un comité de pilotage et de plusieurs instances techniques ad hoc pour chaque évaluation. Au niveau national, le commissaire au Plan préside l'instance nationale d'évaluation.
Deux difficultés sont apparues : la première a concerné les comités de pilotage et leurs instances techniques, dont la formation a été retardée à la fois pour des raisons de fond mais aussi à cause des échéances électorales, ce qui a contraint un certain nombre de régions à adopter des dispositifs transitoires. Par ailleurs, il a été mis en évidence une mauvaise circulation de l'information relative aux évaluations.
Ces difficultés dans la mise en place de l'évaluation des contrats de plan Etat-région sont regrettables, mais le tableau n'est pas complètement noir : un point très positif de la réforme concerne les modalités des délégations de crédits, qui ont été assouplies, puisque les préfets de région peuvent obtenir, en début d'année, 75 % des crédits qui leur sont destinés. En 2001, dix-huit régions ont soumis un programme d'évaluation à l'instance nationale d'évaluation des contrats de plan. Les thèmes récurrents concernent l'environnement, la politique de la ville, l'emploi, etc.
Concernant les organismes rattachés ou subventionnés, je souhaite attirer votre attention sur le tout récent Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale. Composé de sept membres, le CERC a rendu public son premier rapport intitulé : « Accès à l'emploi et protection sociale » et prépare un second rapport qui portera sur les évolutions de l'emploi et des revenus sur une période couvrant les quinze dernières années. Le nouvel organisme semble donc avoir trouvé son rythme, et il y a tout lieu de s'en réjouir.
Certains ont marqué leurs inquiétudes sur le positionnement du Commissariat général du Plan par rapport à d'autres organismes publics, tels que le Conseil économique et social et le Conseil d'analyse économique.
Le Commissariat général du Plan a ses spécificités ; je pense surtout à l'évaluation de nos politiques publiques, mais aussi au rôle essentiel qu'il joue dans l'exercice difficile de la prospective. Si, par ailleurs, certains domaines d'intervention sont partagés avec d'autres organismes - il serait d'ailleurs peut-être souhaitable de mieux les préciser - peut-on se priver de toutes ces expertises ?
De nos jours, et compte tenu de l'évolution très rapide de nos sociétés, il paraît nécessaire de s'entourer du plus grand nombre d'avis et de s'appuyer sur toutes les expertises.
En conclusion, la commission des finances a émis un avis favorable sur les crédits du Plan pour 2002. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'excellent rapport de notre collègue Claude Haut me permettra d'être plus bref, d'autant que je ne n'aboutis pas à la même conclusion.
En effet, c'est à l'aune de l'ambition que notre commission nourrit pour le Plan, entendu comme un outil dynamique de prospective et d'évaluation, que nous avons examiné les crédits qui lui sont consacrés dans ce projet de loi de finances.
Le Commissariat du Plan devrait nous permettre de voir plus loin pour voir plus juste. Or il apparaît que le CGP est « confisqué » par l'exécutif. En outre, quand on examine les mécanismes, on a même l'impression que le Gouvernement se méfie de l'indépendance du Commissariat général du Plan. N'a-t-il pas finalement créé toutes sortes d'instances « supplétives » pour mener des travaux qui relèveraient, en théorie, de la compétence du CGP ? Tel est le premier point que je me propose de développer devant vous. J'aborderai ensuite les modalités de choix des questions soumises aux travaux du Commissariat général du Plan et aux conditions dans lesquelles ses travaux sont diffusés.
S'agissant d'abord de la confiscation du CGP par l'exécutif, je suis d'une génération qui a connu le Plan à la fin des années soixante, avec l'ardente obligation, le rapport sur la ville, qui a été à l'origine des politiques de la ville. Or le programme de travail du CGP est exclusivement fixé par le Premier ministre, qui a décidé - en effet, cela a été rappelé tout à l'heure - que ce programme s'intéresserait, premièrement, au retour au plein emploi et à l'encouragement de l'activité, deuxièmement au renforcement de la cohésion sociale et à la sécurisation des parcours individuels et, troisièmement, aux nouvelles régulations publiques.
Pourquoi le Parlement n'est-il pas consulté sur le programme de travail du Commissariat général du Plan ? Comme vous le savez, le système du vote des « lois de plan » est définitivement tombé en désuétude depuis la loi du 29 juillet 1982 portant réforme de la planification.
Dès lors, il est essentiel que le Parlement participe à l'élaboration de ce programme de travail. A défaut, ses travaux sont totalement « déconnectés » de ceux du CGP.
Je suis persuadé que, si l'Assemblée nationale et le Sénat étaient consultés sur le programme de travail du Commissariat général du Plan, un certain nombre de sujets essentiels ne seraient pas traités simplement de manière incidente. Je citerai l'exemple des politiques territoriales : politique de la ville et politique du développement rural. J'ai lu le rapport d'activité du CGP : le mot « ville » n'est pratiquement pas utilisé. Certes, il y figure au travers des analyses et de l'évaluation des contrats de plan, mais ce n'est pas un axe majeur de l'intervention du commissariat.
De même, c'est dans le Plan que l'on a commencé à expliquer que en 2015, 40 %, 50 %, voire 60 % des fonctionnaires seraient à la retraite et qu'il fallait donc, de manière urgente, engager le débat sur la réforme de l'Etat. Or, les problématiques de la réforme de l'Etat ne font pas partie de la lettre de commande du Premier ministre, et je pense que le Parlement aurait insisté sur de tels sujets.
Dernier exemple : l'évolution des finances locales et les nouveaux modes de gouvernance des territoires. Ne s'agit-il pas aujourd'hui, dans notre France en mutation, d'un sujet essentiel qui mériterait d'être étudié par une instance de prospective comme le Commissariat général du Plan ?
Force est de constater qu'actuellement les relations du Commissariat général du Plan sont plus étroites avec le Conseil économique et social qu'avec l'Assemblée nationale et le Sénat. D'ailleurs, j'ai noté dans un article de presse paru récemment qu'un porte-parole du parti socialiste jugeait que l'on pouvait même « raccrocher » demain le Commissariat général du Plan à l'Assemblée nationale et au Sénat. Pour nous, le CGP doit servir l'Etat dans la diversité des organes qui le représentent, à commencer par les assemblées parlementaires.
Nous retrouvons aussi la multiplication des structures bis , des structures ter , des structures quater , qui, à l'exemple du Conseil d'analyse économique, réunissent des experts qui auraient vocation à se retrouver dans le cadre du Commissariat général du Plan.
Nous constatons enfin que les moyens humains et les crédits affectés à la communication du CGP sont, à l'évidence, inadaptés : il n'existe pas de plan de communication, ni même de service de communication apte à définir, sur chacune de ces études essentielles, des actions spécifiques de communication en direction des relais de la nation, qui devraient précisément être alimentés par les travaux du commissariat pour mieux repérer les grands axes sur lesquels doit s'orienter le pays.
Le deuxième point que je souhaite aborder...
M. le président. Il vous faut conclure, monsieur le rapporteur pour avis !
M. Jean-Paul Alduy, rapporteur pour avis. ... concerne l'évaluation des politiques publiques dans notre pays et ses carences.
Un décret de 1998 a réformé la procédure pour l'abréger, ce dont le Sénat s'est réjoui en son temps. Il était prévu qu'une évaluation dure au minimum un an, voire dix-huit mois dans les cas exceptionnels. Des progrès sont enregistrés, mais il apparaît que les évaluations ne peuvent être réalisées dans un délai inférieur à deux ans.
Mais ce n'est pas le pire ! Actuellement, seuls peuvent proposer l'évaluation d'une politique publique le Premier ministre, les ministres, le Conseil d'Etat, la Cour des comptes, les collectivités territoriales et les associations d'élus représentées au sein du Conseil national de l'évaluation. N'est-il pas regrettable qu'aucun parlementaire ne figure parmi les membres du Conseil national de l'évaluation, qui propose des sujets au Premier ministre, et que ni l'Assemblée nationale ni le Sénat ne puissent actuellement demander la réalisation d'une évaluation dans le cadre de la procédure fixée par le décret de 1998 ?
En conclusion, je résumerai d'une phrase l'analyse du budget et, au travers de ce budget, celle de l'activité du CGP : si l'efficacité technique du Commissariat général du Plan et la qualité de ses travaux ne sont pas en cause - j'y insiste - il convient aujourd'hui de s'interroger sur son efficacité politique, c'est-à-dire sur son influence sur les décisions gouvernementales, sur le rôle des assemblées parlementaires dans la définition de son programme d'action, ou encore sur sa capacité à éclairer le débat de notre société sur les chemins de l'avenir.
Pour ces motifs, et pour marquer la volonté de la commission d'interroger le Gouvernement sur l'utilisation politique qui est faite des travaux du Commissariat général du Plan, nous avons décidé d'émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits correspondants. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Didier.
Mme Evelyne Didier. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec un peu plus de 25 millions d'euros, le budget du Plan s'inscrit dans la continuité des budgets précédents : il demeure le « parent pauvre » de l'ensemble des crédits budgétaires de la loi de finances. Cette médiocrité des crédits témoigne de l'affaiblissement du rôle traditionnellement dévolu au Plan dans une économie ouverte et de plus en plus soumise à la régulation par le marché.
A l'évidence, le contexte de globalisation des économies et de domination de la finance remet en cause la fonction même du Plan en tant qu'instrument de régulation. Ses promoteurs voyaient en lui, selon l'expression de Pierre Massé, « un réducteur d'incertitudes » comblant la défaillance du marché, jugé incapable d'engendrer une information susceptible d'orienter de manière pertinente les choix de la politique économique et sociale comme de guider de manière efficiente les décisions du monde des affaires et du monde politique. La faiblesse de ce budget, que nous regrettons, est donc, dans une certaine mesure, révélatrice d'un certain abandon de ces objectifs.
Comment ne pas reconnaître que, dans le même temps, le retour du marché s'est accompagné d'une plus grande instabilité de l'environnement économique ?
Le mouvement d'ouverture et de libéralisation des économies, l'éclatement du système de Bretton Woods qui assurait une grande stabilité des taux de change et des taux d'intérêt, les bouleversements technologiques d'information et de communication ont été, et sont encore, source d'incertitudes multiples.
Dans une telle période de brouillage du calcul économique, de rétrécissement des horizons d'anticipation et de prévision, l'analyse et la prospective économiques menées dans le cadre du Commissariat général du Plan sont essentielles dans la mesure où elles tentent d'accroître la visibilité à moyen et long terme et de dessiner les grandes tendances économiques et sociales. Du moins permettent-elles qu'au travers de la concertation des différents partenaires sociaux un débat puisse avoir lieu sur des questions aussi essentielles que celles des retraites, des inégalités sociales ou encore de la fiscalité, par exemple.
On ne peut, dès lors, que regretter la diminution des crédits destinés aux différents organismes et instituts rattachés au Plan.
On le regrettera d'autant plus que les perturbations et changements actuels exigent que soit maintenue, dans le domaine de la prospective, la pluralité d'analyses fondées sur des jeux d'hypothèses variés, afin qu'un réel débat soit possible. Si certains jugent inopportune la création du Conseil d'analyse économique, reconnaissons qu'il contribue à la diversité des approches.
La diminution de plus de 16 % des crédits de fontionnement destinés au CERC, la baisse importante des subventions allouées à l'Institut de recherche économique et sociale, la chute de 22 % des subventions destinées à financer la recherche de l'Observatoire français des conjonctures économiques sont particulièrement préoccupantes tant elles risquent de remettre en cause le bon fonctionnement de ces organismes, qui contribuent pourtant à assurer une diversité des analyses. Il est nécessaire d'accroître les moyens de ces instituts de conjoncture et de recherche économique et sociale, dont certains, il est utile de le rappeler, ont été créés au début des années quatre-vingt.
A côté des études d'analyse et de prospective économiques, l'évaluation des politiques publiques constitue l'une des attributions essentielles du Commissariat général du Plan. On peut regretter la sous-consommation des crédits qui y sont affectés. Notons cependant que la mise en place d'une nouvelle procédure n'est sans doute pas indifférente à cette situation.
Un effort particulier doit, de même, être accompli en ce qui concerne l'évaluation des contrats de plan Etat-région. Il reste que, en amont, se pose la question de la relance des politiques publiques dans un contexte de ralentissement inquiétant de la croissance.
Vous comprendrez, madame la secrétaire d'Etat, que, pour les principales raisons que je viens d'exposer ici, le groupe communiste républicain et citoyen s'abstienne sur ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous me permettrez tout d'abord de remercier MM. Haut et Alduy de la qualité de leurs rapports respectifs, quand bien même leurs conclusions ne seraient pas convergentes ; mais j'essaierai de vous convaincre, monsieur le rapporteur pour avis, au cours de mon intervention.
Vous connaissez l'intérêt et l'attachement du Gouvernement pour le rôle essentiel que joue le Commissariat général du Plan dans les domaines de la réflexion prospective, de la concertation et de l'évaluation. Comme l'a noté votre rapporteur spécial, le Commissariat général du Plan a vu son rôle renforcé depuis 1998.
Au cours de ces quatre dernières années, près d'une quarantaine de rapports ont été publiés. Ils ont éclairé utilement le travail du Gouvernement et contribué au débat public et à la réflexion collective dans tous les domaines : économique, social, environnemental et européen.
Parmi les rapports les plus récents, on peut notamment citer - mais je ne veux nullement ici faire de la publicité - le rapport d'Henri Rouilleault sur la réduction du temps de travail, qui a fait clairement ressortir les effets de cette réforme sur l'emploi et introduit utilement le débat sur les PME, ou encore le rapport de Dominique Charvet, intitulé « Jeunesse, le devoir d'avenir », dont la suite va être, dans les prochains jours, l'installation de la commission sur l'autonomie des jeunes souhaitée par votre assemblée.
Par lettre du 27 novembre 2000, le Premier ministre a arrêté un nouveau programme de travail du Commissariat général du Plan qui comprend trois grands axes : le retour au plein emploi et l'encouragement à l'activité ; le renforcement de la cohésion sociale et la sécurisation des parcours individuels ; enfin, les nouvelles régulations publiques.
Sur les seize chantiers inclus dans ce programme de travail, neuf sont déjà en cours.
J'ai bien entendu les deux regrets exprimés à cet égard par M. le rapporteur pour avis. Ils ne me paraissent fondés ni l'un ni l'autre.
Le premier regret tient, si j'ai bien compris, au fait que certains thèmes seraient absents du programme de travail fixé par le Premier ministre au Commissariat général au Plan, thèmes parmi lesquels vous avez cité la réforme de l'Etat. Je crois au contraire que la problématique de la réforme de l'Etat est très présente dans ce programme de travail.
En 2000, un rapport, élaboré par M. Cieutat, s'intitulait sur « La gestion de l'emploi public ». L'année précédente, M. Lasserre avait rédigé un rapport sur les technologies de l'information et de la communication dans la fonction publique. Ces deux rapports ont été suivis d'effet.
En ce moment même, un groupe de travail élabore un rapport sur « la fonction européenne et internationale dans l'administration d'Etat ».
La problématique de la réforme de l'Etat est très présente, de même que celle de la ville. Ainsi, la commission sur les transports urbains est actuellement présidée par M. Roland Ries, ancien maire de Strasbourg.
L'autre regret que j'ai cru déceler dans votre propos tiendrait au fait que le Commissariat général du Plan ne serait pas suffisamment à la disposition du Parlement.
Le Commissariat général du Plan dépend indiscutablement du Premier ministre, mais cela ne l'empêche pas de travailler à la demande du Parlement. C'est notamment arrivé sur la question de l'élargissement communautaire, à la demande de la délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale, ainsi que sur le secteur bancaire et sur celui des assurances, à la demande de la commission des finances de la Haute Assemblée. Ces demandes ont, naturellement, vocation à être adressées d'abord au Premier ministre, mais l'expérience prouve qu'il y donne suite.
Comme M. le rapporteur spécial, je souhaite à mon tour insister sur le souci du Gouvernement de poursuivre la relance du processus d'évaluation, sous l'égide du Commissariat général du Plan et du Conseil national d'évaluation créé par le décret du 18 novembre 1998.
L'évaluation est appelée à jouer un rôle croissant dans la période à venir, à l'appui de la profonde transformation qu'entraînera dans la gestion publique la loi organique du 1er août 2001.
Depuis trois ans, quinze évaluations interministérielles ont été décidées par le Premier ministre : cinq en 1999, trois en 2000, sept cette année. Ces chiffres sont à comparer aux treize évaluations réalisées au cours des dix années précédentes.
Trois instances, installées à la fin de 1999, ont achevé leurs travaux en moins de dix-huit mois. Les responsables des sept évaluations décidées en août dernier ont tous été désignés : trois groupes ont commencé leurs travaux, trois autres seront installées d'ici à la fin de l'année, et le septième en janvier 2002.
Comme le note votre rapporteur spécial, la nouvelle procédure d'évaluation des contrats de plan Etat-région n'a pu véritablement se mettre en place qu'en 2001, une fois les sections spécialisées constituées à l'échelle des régions. Le retard d'engagement des crédits que vous aviez constaté l'année dernière commence à se résorber : au cours de l'année 2001, ont été délégués 113 % des crédits correspondant à une tranche annuelle prévue contractuellement.
Le Commissariat général du Plan compte, au cours de l'année à venir, et en liaison avec les diverses administrations concernées, renforcer le dispositif de sensibilisation et d'appui méthodologique des régions, à la suite de l'enquête qu'il a réalisée sur leurs besoins : création d'un site internet dédié à l'évaluation, élaboration de guides méthodologiques, organisation de journées d'information et de formation.
Sur la base de ces différents éléments, le projet de budget qui vous est proposé apparaît pleinement justifié : il correspond globalement à une reconduction en euros courants des crédits du commissariat et des organismes qui lui sont rattachés. L'existence des reports permettra cependant de développer l'activité du Plan.
Mme Didier s'est interrogée sur les diminutions de certains crédits. Je tiens à lui dire que cela correspond à des faits identifiés.
Ainsi, la diminution des crédits du CERC s'explique par le fait que, étant désormais installé dans un immeuble de l'Etat, il n'a plus de loyer à acquitter, ce qui, évidemment, ne saurait mettre en péril sa fonction prospective. Il s'agit même plutôt d'une donnée de bonne gestion.
Quant à l'OFCE et à l'IRES, pour lesquels vous avez également manifesté votre intérêt, je tiens à préciser que l'Assemblée nationale a souhaité, la semaine dernière, majorer leurs crédits, sans doute pour les mêmes raisons que celles qui vous animent, madame Didier.
Dans la période actuelle, l'Etat est sollicité pour préciser les perspectives à long terme et mettre en place les régulations publiques permettant d'atteindre les objectifs collectifs. En France, c'est au Commissariat général du Plan que revient la fonction d'animation de ce dispositif. Le Gouvernement, par ce projet de budget, lui donne, je le crois, les moyens de cette ambition. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Plan et figurant aux états B et C.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 90 589 EUR. »

Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 812 057 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(Ces crédits sont adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre VI. - Autorisations de programme : 808 000 EUR ;
« Crédits de paiement : 404 000 EUR. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le Plan.

Budget annexe des Monnaies et médailles

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant le budget annexe des monnaies et médailles.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à J - 31 de la naissance de l'euro, le projet de budget que nous examinons cette nuit est celui d'un service public sorti aujourd'hui même d'un conflit social difficile relatif à l'application des 35 heures sur deux sites, l'Hôtel de la Monnaie, à Paris, et l'établissement monétaire de Pessac, en Gironde.
Outre sa mission régalienne de frappe de notre monnaie métallique, la direction des monnaies et médailles produit et vend, notamment, des monnaies étrangères, des monnaies de collection, des médailles et des décorations, recettes qui financent le quart de son budget. C'est à juste titre que ses savoir-faire sont largement reconnus sur les plans tant technique qu'artistique.
Le projet de budget pour 2002, qui reste stable avec 183 millions d'euros, s'inscrit pour la deuxième année consécutive dans un contexte de nette décélération du programme de frappe de l'euro.
Si on les compare aux résultats de 2000, base la plus pertinente, les dépenses d'exploitation prévues pour 2002 diminuent de 4,2 %, alors que l'activité principale devrait chuter de 34 %.
Pourquoi cette rigidité à la baisse ?
Concernant les achats, qui représentent environ la moitié du budget, de fortes augmentations des cours des métaux ainsi qu'une plus grande proportion de coupures onéreuses annihilent en partie l'effet volume des pièces. Par ailleurs, une part non négligeable des achats concerne les productions autres que l'euro, qui, elles, devraient augmenter.
Les frais de personnel, qui représentent environ un quart du budget, diminuent de 2 %. Les départs à la retraite ne sont pas compensés, mais leur effet ne se fera vraiment sentir qu'entre 2005 et 2010. De plus, si le conditionnement et le stockage des pièces d'euros ont été sous-traités, il n'a été fait appel à aucun personnel sous contrat à durée déterminée pour la frappe.
Enfin, la Monnaie de Paris assure des activités patrimoniales et de contrôle dont les coûts sont relativement incompressibles.
En revanche, après les investissements lourds de ces dernières années, les autorisations de programme pour 2002 diminuent de 33 %.
J'en viens aux recettes.
Le produit de la cession des pièces françaises au Trésor, qui représente les deux tiers des recettes, résulte d'un calcul automatique qui ne laisse pas vraiment de marges de manoeuvre à la direction des monnaies et médailles. Les prix unitaires en 2000, année riche en économies d'échelle et gains de productivité, ont été conservés pour 2002 afin de donner à la Monnaie de Paris le maximum de chances de remporter des appels d'offres internationaux. Cette stratégie a été payante en 2001, notamment avec la Grèce.
Les recettes commerciales, quant à elles, progresseraient de 39 % par rapport aux résultats de 2000. Pour la commission des finances - qui ne demande qu'à se tromper (Sourires) - il s'agit là d'une surestimation flagrante.
J'en viens aux observations que m'inspire la situation de la direction des monnaies et médailles.
Tout d'abord, et en dépit d'un climat social troublé ces derniers jours, il y a lieu d'être pleinement satisfait de la manière dont elle s'acquitte, depuis 1998, de sa mission de frappe de l'euro. La quasi-totalité des 8,1 milliards de pièces demandées est déjà disponible. La perturbation momentanée de la chaîne de confection des sachets d'euros, sur laquelle la presse a beaucoup insisté, n'a en aucun cas altéré la qualité des services rendus.
Cependant, le ciel de la Monnaie de Paris n'est pas sans nuages.
L'équilibre budgétaire pour 2002 est fragile, et il est même peu probable qu'il soit respecté. Avec l'inéluctable diminution du programme de frappe de l'euro, le bénéfice d'exploitation de l'établissement de Pessac ne comblera plus guère le déficit structurel de l'établissement parisien.
C'est la raison pour laquelle des économies s'imposent, notamment sur les achats. Un audit externe, réalisé à la fin de l'année 2000, a relevé des dysfonctionnements et a indiqué des voies d'amélioration des performances. Des mesures urgentes et concrètes en vue d'une politique intelligente des achats sont attendues.
Par ailleurs, de moins en moins portée par l'activité dont elle a le monopole, la Monnaie de Paris doit s'ouvrir sur l'extérieur pour rentabiliser ses capacités de production devenues excédentaires et affronter une concurrence vive, car le savoir-faire ne suffit pas : d'autres font au moins aussi bien et à moindre coût.
L'établissement de Pessac, doté d'installations modernes, peut espérer augmenter ses parts de marché dans le secteur des monnaies courantes étrangères.
L'avenir est plus préoccupant pour l'établissement parisien ; les médailles, les décorations, les fontes d'art et autres bijoux, autant de produits concurrencés par les entreprises privées, se vendent difficilement. Le soutien apporté à ces activités permet la conservation d'un précieux savoir-faire qui participe au rayonnement de la France. Il doit cependant rester raisonnable, la direction des monnaies et médailles ne pouvant trop s'éloigner de ses missions d'intérêt public.
A ce propos, et ce sera ma conclusion, on ne peut manquer de s'interroger sur le coeur même de l'activité de la Monnaie de Paris - la frappe de nos pièces de monnaie - totalement conditionné par le devenir de l'euro fiduciaire. Seule une anticipation sereine du possible avènement du porte-monnaie électronique, qui ne relève plus aujourd'hui de la science-fiction, permettra à ce service public, riche d'une longue histoire, de s'adapter sans trop de douleur.
Sous réserve de ces observations, il est proposé au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe des monnaies et médailles. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous souhaitons tout à la fois manifester notre volonté d'accompagner les ambitions que traduisent les crédits qui nous sont présentés et notre inquiétude de constater que ce projet de budget refuse des moyens nouveaux aux installations de l'établissement de Pessac et de l'hôtel du Quai Conti.
Les monnaies et médailles ont une histoire, une culture, un savoir-faire qui font de ce service public et commercial un pilier solide de notre patrimoine, et même de notre République.
Nous ne devons pas oublier ce paramètre en étudiant les crédits qui nous sont soumis ce soir. L'administration des monnaies et médailles détient le monopole de la monnaie métallique française. Elle déploie une importante activité dans un secteur concurrentiel, comme l'a relevé M. le rapporteur spécial : cela lui impose, mes chers collègues, d'être ambitieuse.
Vous reconnaissez, monsieur le rapporteur spécial, une recherche d'adéquation des prévisions aux résultats, et vous avez noté que les résultats de l'activité « décorations » s'annoncent meilleurs que les années précédentes. La frappe de jetons permettra un développement intéressant et la vente de bijoux suscite quelques espoirs.
Vous avez fait remarquer, à juste titre, que le changement de millénaire et de monnaie encourage la Monnaie de Paris à multiplier les heureuses initiatives. Cette confiance dans une réussite possible est un point fort du projet de budget, d'autant que l'apparition des pièces de collection en euros donnera un véritable coup de fouet aux ventes de monnaies de collection.
Le rapport indique également que la production de monnaies concurrentes étrangères pourrait se révéler supérieure à la prévision, comme en 2001. Nous notons, pour notre part, que la nouvelle TVA qui sera appliquée en Polynésie entraînera un besoin accru en pièces de monnaie.
Enfin, le rapport met l'accent sur une demande nouvelle de poinçons, de cachets de douane et de timbres secs, pour des raisons de sécurité.
Toutes ces analyses manifestent une ambition que nous partageons.
En outre, une brochure récemment publiée par la Monnaie de Paris montre la diversité et la richesse des créations artistiques de cet établissement.
En revanche, nous exprimons des réserves importantes en ce qui concerne le devenir de l'institution et la situation des personnels.
Par rapport à 2001, les dépenses de personnel diminuent de 1,9 %. Aucune embauche n'est prévue, ni à court terme ni à long terme, alors que trois cents salariés partiront en retraite d'ici à 2010.
Par ailleurs, une mise en oeuvre de la réduction du temps de travail insuffisante, voire inconséquente, a motivé, la semaine dernière, le déclenchement de toute une série de mouvements de grève, qui viennent de cesser. Nous affirmons à cet égard notre complète solidarité avec les personnels, qui, après avoir beaucoup travaillé, veulent également bénéficier de la réduction du temps de travail.
A ce propos, le groupe communiste républicain et citoyen voudrait protester contre une décision grave prise par Bercy à l'encontre des salariés en grève. Lundi matin, en effet, les forces de l'ordre sont intervenues et ont récupéré par la violence les poinçons mères de frappe de la nouvelle monnaie et les matrices originales qui permettent de fabriquer les coins de frappe monétaires.
Autrement dit, Bercy s'est saisi de l'outil de travail comme un simple chef d'entreprise utilisant des méthodes d'un autre âge. Nous pensons qu'une autre voie était possible, et je crois d'ailleurs savoir que le travail a repris, sans qu'aucun accord sur la réduction du temps de travail soit intervenu. Nous ne pouvons admettre, madame la secrétaire d'Etat, le recours à telle violence. Que deviendrait notre pays si une telle méthode se généralisait ? Nous vous demandons de nous indiquer ce soir qui a donné l'ordre d'intervention aux forces de police.
En outre, la modernisation et l'extension du site de Pessac sont toujours refusées. Vous avez confirmé, madame la secrétaire d'Etat, lors de l'examen de ces crédits par l'Assemblée nationale, que le projet de création d'une fonderie-laminoir était abandonné. Vous comprendrez l'inquiétude, que nous partageons, des neuf cents salariés concernés quant à l'avenir du site où ils travaillent.
De surcroît, la mise en concurrence des institutions monétaires européennes soulève des interrogations s'agissant du maintien de la fabrication de notre monnaie dans le cadre du service public.
Ce sont là des réserves, voire des critiques, que nous émettons. L'investissement diminuera de 44 % en 2002 et il s'agit là, madame la secrétaire d'Etat, d'un manque de confiance en notre service public de production des monnaies et médailles, d'autant moins acceptable que l'équilibre budgétaire sera assuré, pour 2002, sans recours à une nouvelle subvention de l'Etat.
Toutefois, si l'équilibre est assuré pour l'établissement de Pessac, cela est moins vrai pour celui de Paris. En effet, la création artistique n'équilibre jamais ses budgets : on ne peut demander aux monnaies et médailles de faire exception à cette règle.
Cela étant, nous ne voulons pas croire que la plus ancienne des institutions françaises puisse être menacée, ainsi que sa fonction régalienne. Elle bat monnaie depuis plus de 1100 ans. Je rappellerai, à cet égard, l'édit du 24 juin 864 de Charles le Chauve, qui faisait défense de fabriquer des monnaies nulle part ailleurs, en France ou en Europe, qu'au Palais, à Quentoire, à Rouen, à Reims, à Sens, à Paris, à Orléans, à Châlons ou à Narbonne.
Nous avions espéré que vous décideriez bientôt l'aménagement d'un nouveau complexe à Pessac, d'une fonderie-laminoir qui garantirait davantage de fiabilité et d'indépendance et qui nous permettrait de continuer à assurer la fabrication de notre quota de pièces et de billets, gage de souveraineté nationale.
S'il est vrai que, depuis le 24 juin 864, les régimes et les monnaies se sont succédé l'institution, elle, a résisté. Ce sont les ouvriers et les créateurs des monnaies et médailles qui, finalement, ont pris le relais, au-delà du temps, du roi de France. N'est-ce pas là aussi l'expression de notre attachement à notre souveraineté et à nos racines ?
En conclusion, monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous estimons que ce budget est insuffisant, que la méthode de gestion du personnel est contestable et que l'avenir est mal défini.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas les crédits qui nous sont présentés.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercierai tout d'abord M. Bertrand Auban, rapporteur spécial, de sa contribution à l'étude approfondie du projet de budget annexe des monnaies et médailles que vous examinez ce soir. Je souscris à ses conclusions et je reviendrai dans un instant sur les points particuliers soulevés par lui ou par Mme Beaudeau.
A cet instant, je souhaiterais informer le Sénat, d'une façon aussi actuelle que possible, sur la situation à la direction des monnaies et médailles.
Vous savez, mesdames, messieurs les sénateurs, que, à la mi-novembre, les agents des établissements monétaires de Paris et de Pessac se sont mis en grève à l'occasion des discussions sur la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail au sein de la direction. Les discussions sont restées longtemps dans l'impasse - mais je tiens à souligner que jamais le dialogue social n'a été rompu - et la mission régalienne de la frappe de la monnaie par l'Etat, à un moment particulièrement crucial pour le passage à l'euro, ne pouvait plus être assurée normalement.
C'est pourquoi l'accès aux stocks de pièces déjà frappées a été dégagé, afin que celles-ci puissent être chargées. C'est ce qui s'est passé les 26 et 27 novembre, et les forces de l'ordre se sont ensuite retirées.
A ce propos, j'indiquerai à Mme Beaudeau, qui m'a demandé qui a donné l'ordre d'intervenir le 26 novembre à Pessac et à Paris, que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a fait prendre les mesures destinées à garantir la continuité de l'accomplissement des missions de l'Etat à la direction des monnaies et médailles. Je confirme toutefois que, contrairement à ce que vous avez laissé entendre, il n'y a pas eu de violences. L'accès aux chambres fortes était rendu impossible par les piquets de grève, mais l'intervention des forces de l'ordre s'est déroulée sans encombre, et cette opération a fait l'objet d'un communiqué dès le lundi 26 novembre au matin.
A Paris, les poinçons de reproduction des euros ont été remis aux autorités de tutelle. Le dialogue, que le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a toujours souhaité, n'a pas été interrompu et des discussions se sont tenues à Pessac et à Paris pour sortir du conflit. A l'heure où je vous parle, le travail, et donc la frappe des euros, ont repris sur les deux sites.
Je ne peux pas non plus laisser dire que l'aménagement et la réduction du temps de travail ne seraient pas mis en oeuvre à la direction des monnaies et médailles. En effet, la fin du conflit s'est traduite par la conclusion de protocoles d'accord avec les représentants du personnel. L'aménagement et la réduction du temps de travail seront donc appliqués, ce qui constitue à la fois un réel progrès pour tous les salariés de Paris et l'occasion de pérenniser, en quelque sorte, le régime dérogatoire qui existe à Pessac.
S'agissant maintenant du projet de budget pour 2002, l'année qui s'achève a été particulière pour la direction des monnaies et médailles, puisqu'elle a dû faire face à plusieurs modifications de son programme de frappe et, bien entendu, au mouvement de grève de novembre que j'évoquais à l'instant. Cependant, les objectifs seront globalement atteints.
Ainsi, comme vous le soulignez dans votre rapport, monsieur Auban, la direction des monnaies et médailles s'est acquittée de manière pleinement satisfaisante des missions nouvelles qui lui ont été confiées à l'occasion du passage à l'euro, faisant preuve, s'il en était besoin, de sa technicité et de son savoir-faire.
Le projet de budget pour 2002 a été construit en fonction d'une hypothèse de frappe soutenue en euros. Il en sera de même encore en 2003, l'encaisse dite « dormante » destinée à réguler la circulation de monnaie métallique n'étant pas encore constituée. A l'évidence, la frappe continuera dans les années à venir. Toutefois, il est un peu difficile d'en déterminer par avance le volume, en raison de l'absence totale de références sur les flux qui s'établiront au cours des prochains mois. L'acceptation de toutes les pièces de la zone euro ne sera évidemment pas sans conséquences, mais il n'en demeure pas moins que la pérennité de la direction des monnaies et médailles est assurée.
En revanche, il convient de poursuivre sa diversification dans toutes les missions qu'elle assure, particulièrement la frappe de monnaies étrangères.
Vous avez fait remarquer, monsieur le rapporteur spécial, que les prévisions d'activité dans certains secteurs autres que la frappe monétaire seraient trop optimistes. Je dirai plutôt qu'elles l'étaient en effet voilà quelques années, mais que notre approche est désormais beaucoup plus réaliste, et donc accessible. La direction a d'ailleurs pleinement pris en compte cette orientation.
En incidente, je souhaite préciser que si certaines activités de la Monnaie - monnaies de collection, bijoux, fontes - paraissent éloignées de sa mission première de frappe, les monnaies de collection font partie de l'activité traditionnelle de l'administration des monnaies dans la plupart des Etats. Quant aux autres fabrications, il est important de les développer, ce qui implique d'améliorer les conditions de production de ces objets, notamment par une adaptation continue à la demande, y compris la demande étrangère.
La mission de la direction des monnaies et médailles était très difficile. Elle devra à l'avenir relever d'autres défis, mais je ne doute pas qu'elle parvienne à le faire (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget annexe des monnaies et médailles et figurant aux articles 33 et 34 du projet de loi.

Services votés

M. le président. « Crédits : 177 500 387 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33 au titre des services votés.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 3 544 000 EUR ;
« II. - Crédits : 5 320 886 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 34 au titre des mesures nouvelles.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le budget annexe des monnaies et médailles.

Budget annexe des Journaux officiels

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant le budget annexe des Journaux officiels.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, mes chers collègues, si je m'écoutais, je limiterais mon propos à une seule question à l'intention de Mme la secrétaire d'Etat : quel avenir préparez-vous pour les Journaux officiels ? En d'autres termes, comment devrait évoluer cette direction et que deviendrait son personnel ?
A l'Assemblée nationale, madame la secrétaire d'Etat, vous avez indiqué qu'une réflexion était en cours et qu'elle devait se poursuivre dans la concertation. Soit ! Mais qu'en est-il vraiment ? Le Parlement est en droit d'être informé, et je vous sais sensible à cet égard.
Le budget annexe pour 2002 est en baisse de 12 % et s'établit à 169 millions d'euros. Globalement, les crédits destinés aux dépenses d'exploitation augmentent de 4,4 %, tandis que les recettes diminuent de plus de 11 %.
Ce budget m'inspire trois observations.
La première porte sur des éléments qui étaient attendus. En 2002, les recettes retirées des annonces légales régressent. Je rappelle que le Gouvernement a décidé la gratuité des annonces relatives à la création d'entreprise. Par ailleurs, les annonces publiées au Bulletin officiel des marchés publics marquent une baisse particulièrement sensible, pour deux raisons : d'une part, les annonceurs qui saisissent directement leurs annonces via Internet bénéficient d'une remise ; d'autre part, la réforme du code des marchés publics, qui a abouti à un relèvement des seuils, entraînera, ce qui est mathématique, une baisse du nombre des annonces.
La diminution des tarifs semble légitime : la loi oblige les annonceurs à recourir aux services des Journaux officiels. L'Etat n'a pas de raisons objectives d'en retirer un profit sans rapport avec le coût supporté ! Toutefois, afin de compenser la perte de recettes, la direction des Journaux officiels, la DJO, devrait développer sa politique commerciale.
Ma seconde observation est une constatation. La direction des Journaux officiels a mis en oeuvre avec succès le programme d'action gouvernemental pour la société de l'information, annoncé par M. le Premier ministre le 2 octobre 2001.
En effet, en 2002, le citoyen pourra accéder gratuitement aux données publiques via Internet. C'est ainsi que naît un véritable service public gratuit d'accès au droit. La commission des finances, qui avait milité depuis de nombreuses années en faveur de cette avancée démocratique, ne peut que s'en féliciter.
Ma troisième observation est une question d'ordre plus général : dans quel cadre, mes chers collègues, souhaitons-nous voir s'exercer les activités des Journaux officiels ?
Comme cela avait été annnoncé l'an dernier, un audit a été effectué par la Cour des comptes. Celle-ci critique, entre autres éléments, la gestion de la direction des Journaux officiels et les retards dans la mise en place de la saisie à la source. La Cour doit mener à nouveau un contrôle très prochainement.
Une étude, confiée par le Gouvernement à Mme Bergeal, conseillère d'Etat, conclut à la nécessité d'une réorganisation des relations entre la direction des Journaux officiels et la Société anonyme de composition et d'impression des Journaux officiels, entreprise chargée exclusivement des travaux du Journal officiel. L'organisation juridique actuelle serait, selon elle, contraire au droit européen. En complément de mon rapport écrit, je souhaite informer le Sénat que de nouvelles études juridiques effectuées tout récemment par des experts privés n'ont pas confirmé cette analyse. Nous savons que M. Dieudonné Mandelkern, conseiller d'Etat honoraire, s'est vu confier une mission de « facilitateur », pour reprendre la terminologie employée, entre l'Etat, la direction des Journaux officiels et la SACIJO, afin de trouver une solution. Quoi qu'il arrive, nous serons très vigilants quant au sort qui sera réservé au personnel.
De plus, à moyen terme, la nouvelle loi organique relative aux lois de finances devrait vous le savez, entraîner la disparition du budget annexe. A mon sens, quelle que soit la nouvelle entité ou la nouvelle organisation administrative qui sera mise en place, la responsabilité de la publication des actes de l'autorité publique et des débats parlementaires ne doit en aucun cas échapper à la puissance publique. Le Parlement est directement concerné, puisque ses débats sont publiés au Journal officiel , conformément à l'article 33 de la Constitution, qui dispose : « Les séances des deux assemblées sont publiques. Le compte rendu intégral des débats est publié au Journal officiel . »
Madame la secrétaire d'Etat, je réitère ma question : à qui la confection et la diffusion du Journal officiel seront-elles confiées ?
Sous réserve de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d'adopter le budget annexe des Journaux officiels. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais d'abord remercier le rapporteur spécial, M. Thierry Foucaud, de la qualité de son travail, qui nous permet de bien prendre conscience de la situation des Journaux officiels et des incertitudes qui pèsent sur leur avenir.
Pour les salariés des Journaux officiels, l'heure est en effet à l'inquiétude s'agissant de la pérennité de cette entreprise qui est essentielle au bon fonctionnement de la République.
Certes, la rumeur insistante de délocalisation de l'usine située dans le XVe arrondissement de Paris s'est estompée. Mais les salariés, qui savent que la délocalisation serait synonyme de menace pour l'existence même de l'entreprise, attendent toujours un démenti formel et définitif de la part de la direction et du Gouvernement.
Le projet de budget pour 2002 n'apaise pas toutes les inquiétudes.
Il prévoit, par exemple, une chute prévisionnelle des deux tiers du montant de l'excédent brut d'exploitation. M. le rapporteur spécial en a rappelé les raisons principales.
Cette évolution n'en est pas moins préoccupante. Ne risque-t-elle pas de faire apparaître une moindre rentabilité de cette entreprise de service public ? Elle pose en tout cas avec encore plus d'acuité la question de l'opportunité du reversement intégral de cet excédent au budget de l'Etat, comme nous le disons lors de chaque discussion budgétaire. Le développement des activités appelle, en effet, d'importants investissements auxquels pourrait être consacrée cette marge d'autofinancement.
Le niveau de l'investissement prévu pour 2002, en baisse de 70 %, paraît justement en deçà des besoins de financement, qui ne manquent pas.
La diminution tendancielle des abonnements, si elle est logique étant donné le développement d'Internet, devrait toutefois rester modérée et l'activité d'impression n'est en rien condamnée à péricliter. L'excellence du savoir-faire des ouvriers des Journaux officiels est, au contraire, un atout considérable pour étendre les activités papier dans le cadre des missions de service public. La richesse actuelle du catalogue des publications des Journaux officiels donne déjà une idée des possibilités.
La modernisation et le maintien à son niveau d'excellence de l'outil de travail d'impression doit bien être une priorité.
En ce qui concerne l'informatique et Internet, l'augmentation des crédits correspondant au renouvellement de cent postes de travail, nécessaire, reste loin des besoins.
Il est temps que l'accès à toutes les données juridiques devienne gratuit. Ce sera chose faite en 2002. Tant mieux !
Mais pourquoi continuer d'avoir recours à un sous-traitant privé pour ces activités, Or-Télématique, ou ORT ?
L'intérêt du service public est clairement que ce soit le site des Journaux officiels, entièrement réalisé par le personnel de ces derniers, qui reprenne et améliore les sites « Légifrance » et « Jurifrance » pour le moment sous-traités à ORT. Pourquoi ne pas aller dans ce sens alors que les capacités de financement existent ?
Par ailleurs, le projet de budget provisionne 33 millions de francs pour le départ anticipé de 160 salariés qu'il n'est pas prévu de tous remplacés. Cette perspective de réduction des effectifs est de mauvais augure. Elle va dans le sens d'une dégradation des conditions de travail et d'une réduction d'activité.
Ce projet de budget pour 2002 nous apparaît, vous le voyez bien, un peu trop restrictif. Il ne mise pas assez sur le développement des activités des Journaux officiels pour mieux accomplir leurs missions de service public. Il ne réfute pas suffisamment les spéculations autour d'une perspective de démantèlement, voire de privatisation, des activités des Journaux officiels.
C'est regrettable dans un contexte où est de plus en plus évoquée la tranformation du statut de l'entreprise en établissement public à caractère industriel ou commercial, impliquant la fin d'une structure coopérative qui a pourtant fait ses preuves depuis 1945, et où l'adoption de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances risque d'entraîner la fin du budget annexe.
C'est donc conscients des insuffisances et des ambiguïtés du projet de budget qui nous est présenté face aux incertitudes qui pèsent sur l'avenir de ce service public essentiel au bon fonctionnement de notre République et indispensable à notre indépendance nationale que nous voterons les crédits qui nous sont proposés. (Mme Didier applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d'abord de remercier M. Thierry Foucaud de la grande qualité de son rapport.
Ce projet de budget de la Direction des Journaux officiels pour 2002 se fonde sur une diminution, comme cela a été dit, de 11,9 % des recettes et sur une progression de 1,1 % des dépenses totales par rapport aux montants qui figurent dans la loi de finances pour 2001.
L'excédent d'exploitation s'établirait, dans cette hypothèse, à 12,9 millions d'euros, reversés au budget général, à comparer à un excédent de 279,2 millions de francs, soit 42,5 millions d'euros, en 2001.
L'activité des annonces, qui est la principale source de recettes de la Direction des Journaux officiels, reste toujours soutenue, mais la diminution des recettes du Bulletin officiel des annonces des marchés publics est estimée à près de 15 % pour 2002, compte tenu de la réforme, intervenue récemment, du code des marchés publics.
Les Journaux officiels ont aussi pris en compte les conséquences de l'instauration, au cours de cette année, de la gratuité des annonces portant création des entreprises publiées au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales.
Par ailleurs, les Journaux officiels continuent à intégrer les nouvelles technologies de la communication dans tous les secteurs de leur activité afin de les mettre en oeuvre au profit de nos concitoyens.
Le site Internet de la Direction des Journaux officiels, qui a accueilli plus de 1 920 000 visiteurs au cours des neuf premiers mois de 2001, offre un accès gratuit au fichier d'annonces du Bulletin officiel des annonces des marchés publics ainsi qu'au Bulletin des annonces légales obligatoires et Associations . De plus, les personnes publiques peuvent saisir directement en ligne leurs annonces de marchés publics, ce que font dorénavant 6 % d'entre elles.
L'ensemble de ces dispositions, souhaitées par le Gouvernement pour encourager les accès en ligne, a eu un effet sur les recettes de diffusion de la Direction des Journaux officiels qui, de fait, sont en recul de 1 % sur les neuf premiers mois de 2001.
Cette évolution vers la communication électronique conduit la Direction des Journaux officiels à accomplir un effort permanent d'amélioration et de diversification de ses produits sur papier.
Afin de mieux faire connaître ces différents outils d'accès à la norme juridique, la Direction des Journaux officiels conduira d'importantes opérations de communi-cation.
En regard, les dépenses d'exploitation augmentent modérément, de l'ordre de 4,4 %, témoignant de la volonté d'une maîtrise des coûts dans un contexte d'augmentation de la masse salariale due aux accords sur la réduction du temps de travail dans la presse parisienne.
Les dépenses d'investissement traduisent, quant à elles, la préoccupation de moderniser l'outil de production afin de faire face au nouveau contexte dans lequel doivent être associées la production papier et la production électronique, l'amélioration de la qualité des produits constituant la résultante des progrès technologiques et de l'élévation du niveau de compétences des personnels.
Enfin, à travers le budget 2002 est transcrit l'engagement d'un projet important dont la réalisation a été confiée à la Direction des Journaux officiels : la reprise en régie du service public de diffusion des données juridiques. Ce nouveau service sera ouvert au cours de l'été 2002.
J'ai bien noté l'interrogation réitérée à plusieurs reprises par M. le rapporteur spécial sur l'avenir des Journaux officiels. Pour ma part, je n'ai aucune inquiétude à cet égard. Ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur Foucaud, une réflexion est en cours sous l'égide de M. Dieudonné Mandelkern. Elle porte sur une éventuelle évolution de la convention entre l'Etat et la Société de composition et d'impression des Journaux officiels. Cette réflexion se fait en concertation avec l'ensemble des représentants du personnel, dans un climat jusqu'à présent tout à fait constructif et apaisé.
Avant de conclure, je tiens à vous affirmer, madame Beaudeau, que vous n'avez pas d'inquiétude particulière à avoir ni sur le plan de l'évolution des effectifs ni quant à d'éventuelles délocalisations. Je tenais à vous rassurer sur ces deux points.
Ainsi, dans un contexte toujours très évolutif, la Direction des Journaux officiels poursuit son action avec détermination, guidée par le souci d'adapter ses méthodes et sa production aux impératifs d'une politique au service du citoyen, tout en rationalisant sa gestion, ce qui, je crois, est une préoccupation qui nous est commune. Ce qui est certain, c'est que c'est bien à la Direction des Journaux officiels que la mission de diffusion des Journaux officiels restera confiée. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget annexe des Journaux officiels et figurant aux articles 33 et 34 du projet de loi.

Services votés

M. le président. « Crédits : 145 108 290 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33 au titre des services votés.

(Ces crédits sont adoptés. )

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 5 030 000 EUR ;
« II. - Crédits : 24 739 429 EUR. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 34 au titre des mesures nouvelles.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant le budget annexe des Journaux officiels.

3

TRANSMISSION DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le président de l'Assemblée nationale une proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la création d'établissements publics de coopération culturelle.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 104, distribuée et renvoyée à la commission des affaires culturelles.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, une proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 105, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

4

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 1er décembre, à neuf heures trente, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 86 et 87, 2001-2002). (M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation).
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Jeunesse et sports :
M. Michel Sergent, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 30) ;
M. Bernard Murat, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 88, tome IX).
Communication :
(Crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, d'aides à la presse et à l'audiovisuel inscrits au budget des services généraux du Premier ministre ; article 47 et lignes 38 et 39 de l'état E annexé à l'article 43) ;
M. Claude Belot, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexes n°s 9 et 10) ;
M. Louis de Broissia, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (communication audiovisuelle et presse écrite, avis n° 88, tomes X et XI).
CultureProcédure de questions et de réponses avec droit de réplique des sénateurs.

:
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 8) ;
M. Philippe Nachbar, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (avis n° 88, tome I) ;
M. Marcel Vidal, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles (cinéma-théâtre dramatique, avis n° 88, tome II).
Anciens combattants (et articles 61 à 64 et 64 bis ) :
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial (rapport n° 87, annexe n° 6) ;
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 91, tome VII).

Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen
des crédits de chaque ministère

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires
pour le projet de loi de finances pour 2002

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2002 est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux articles de la deuxième partie,
non joints à l'examen des crédits
du projet de loi de finances pour 2002

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la deuxième partie, non joints à l'examen des crédits du projet de loi de finances pour 2002, est fixé au vendredi 7 décembre 2001, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Réorganisation de La Poste

1210. - 28 novembre 2001. - M. Jean-Pierre Demerliat attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les problèmes posés par la mise en place du programme SOFT, qui a précédé la nouvelle déconcentration opérationnelle (NDO), au sein de La Poste. Même si la NDO concerne moins de 4 % des effectifs de La Poste, il reste à craindre qu'elle ne débouche sur une organisation des services complexe, dans laquelle la dilution des responsabilités retardera la prise de décision, pénalisant ainsi les usagers. Par ailleurs, concernant la réorganisation générale de La Poste sur l'ensemble du territoire, certains redéploiements ne doivent pas s'effectuer au détriment des zones rurales. L'ensemble de la population et bien évidemment des élus reste, en effet, très attaché à la présence postale de proximité. Il souhaiterait donc savoir comment la concertation locale pourrait s'organiser et surtout quelles dispositions pourraient être prises afin d'assurer, sur le long terme, une présence postale de qualité, y compris en milieu rural.



ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du vendredi 30 novembre 2001


SCRUTIN (n° 23)



sur le titre III de l'état B du projet de loi de finances pour 2002, adopté par l'Assemblée nationale (budget de l'Economie, des finances et de l'industrie).


Nombre de votants : 312
Nombre de suffrages exprimés : 312
Pour : 111
Contre : 201

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (19) :

Pour : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, Rodolphe Désiré et François Fortassin

Contre : 13.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Contre : 94.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat.

GROUPE SOCIALISTE (83) :

Pour : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Bernard Angels, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (53) :

Contre : 53.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (41) :

Contre : 41.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (6) :

N'ont pas pris part au vote : 6.

Ont voté pour


Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique
Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Evelyne Didier
Claude Domeizel
Michel
Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour


Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Tremel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Ont voté contre


Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles
Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Xavier Darcos
Robert Del Picchia
Jean-Paul Delevoye
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Detraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Alain Joyandet
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christian
de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-François
Le Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
Lucette
Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri
de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich


Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto

N'ont pas pris part au vote


MM. Philippe Adnot, Philippe Darniche, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Hubert Durand-Chastel, Bernard Seillier et Alex Türk.
MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Bernard Angels, qui présidait la séance.



Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants 313
Majorité absolue des suffrages exprimés 157
Contre
201
Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.