SEANCE DU 20 JUIN 2001


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Décision du Conseil constitutionnel (p. 1 ).

3. Dépôt d'un rapport en application d'une loi (p. 2 ).

4. Orientation budgétaire. - Débat sur une déclaration du Gouvernement (suite) (p. 3 ).
MM. Francis Grignon, Michel Moreigne, Jean Bernard, Charles Descours, Jacques Oudin.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

MM. Roland du Luart, Alain Joyandet, Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget.
Clôture du débat.

Suspension et reprise de la séance (p. 4 )

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

5. Allocution de M. le président du Sénat (p. 5 ).
MM. le président, Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement.

Suspension et reprise de la séance (p. 6 )

PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

6. Candidature à un organisme extraparlementaire (p. 7 ).

7. Couverture des non-salariés agricoles. - Discussion d'une proposition de loi déclarée d'urgence (p. 8 ).
Discussion générale : MM. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Guy Fischer, Bernard Cazeau, Daniel Eckenspieller, Michel Souplet, Joël Bourdin, Paul Girod.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche.
Clôture de la discussion générale.

8. Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire (p. 9 ).

9. Couverture des non-salariés agricoles. - Suite de la discussion d'une proposition de loi déclarée d'urgence (p. 10 ).

Article 1er (p. 11 )

Intitulé du chapitre II du titre V

du livre VII du code rural (p. 12 )

Amendements n°s 43 rectifié de M. Jacques Pelletier et 95 de M. Alain Vasselle. - MM. Bernard Joly, Alain Vasselle, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
M. le rapporteur.

Article L. 752-1 du code précité (p. 13 )

Amendements identiques n°s 1 de la commission, 44 rectifié de M. Jacques Pelletier et 91 de M. Michel Souplet. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, Michel Souplet, le ministre, Alain Vasselle, Louis Moinard. - Adoption des trois amendements.
Amendement n° 45 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-2 du code précité (p. 14 )

Amendements n°s 2 de la commission et 46 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 2, l'amendement n° 46 rectifié devenant sans objet.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendements n°s 4 de la commission et 47 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 4, l'amendement n° 47 rectifié devenant sans objet.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-3 du code précité (p. 15 )

Amendements identiques n°s 5 de la commission et 48 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, le ministre, Guy Fischer, Alain Vasselle. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 49 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Bernard Joly, le rapporteur. - Retrait.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-4 du code précité (p. 16 )

Amendement n° 50 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Bernard Joly, le rapporteur. - Retrait.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-5 du code précité (p. 17 )

Amendements n°s 51 rectifié de M. Jacques Pelletier et 6 de la commission. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 51 rectifié ; adoption de l'amendement n° 6.
Amendements identiques n°s 7 de la commission et 52 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, le ministre, Guy Fischer. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-6 du code précité (p. 18 )

Amendements n°s 53 rectifié de M. Jacques Pelletier, 8 de la commission et sous-amendement n° 93 de M. Alain Vasselle ; amendement n° 9 de la commission. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, Alain Vasselle, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 53 rectifié et du sous-amendement n° 93 ; adoption des amendements n°s 8 et 9.
Amendements n°s 55 rectifié de M. Jacques Pelletier, 10 rectifié de la commission et 106 du Gouvernement. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement n° 55 rectifié, les amendements n°s 10 rectifié et 106 devenant sans objet.
Amendements n°s 96 de M. Alain Vasselle, 54 rectifié de M. Jacques Pelletier et 11 de la commission. - MM. Alain Vasselle, Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements n°s 96 et 54 rectifié ; adoption de l'amendement n° 11.
Amendements n°s 12 de la commission et 56 rectifié de M. Jacques Pelletier. - Adoption de l'amendement n° 12, l'amendement n° 56 rectifié devenant sans objet.
Amendements identiques n°s 57 rectifié de M. Jacques Pelletier et 97 de M. Alain Vasselle ; amendement n° 13 de la commission. - MM. Bernard Joly, Alain Vasselle, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements n°s 57 rectifié et 97 ; adoption de l'amendement n° 13.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-7 du code précité (p. 19 )

Amendements n°s 58 rectifié de M. Jacques Pelletier, 14 et 15 de la commission. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 58 rectifié ; adoption des amendements n°s 14 et 15.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-8 du code précité (p. 20 )

Amendements identiques n°s 16 de la commission et 59 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Bernard Joly, le ministre. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article du code.

Article L. 752-9 du code précité (p. 21 )

Amendement n° 60 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-10 du code précité (p. 22 )

Amendement n° 61 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Bernard Joly, le rapporteur. - Retrait.
Adoption de l'article du code.

Division et article additionnels
après l'article L. 752-10 du code précité (p. 23 )

Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant une division additionnelle du code et son intitulé.
Amendement n° 18 de la commission. - M. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article L. 752-11 A du code précité (p. 24 )

Amendements n°s 62 rectifié de M. Jacques Pelletier, 19 à 21 de la commission et 98 de M. Alain Vasselle. - MM. Bernard Joly, le rapporteur, Alain Vasselle, le ministre, Guy Fischer. - Retrait de l'amendement n° 62 rectifié ; adoption des amendements n°s 19 à 21 et 98.
Adoption de l'article du code, modifié.

Suspension et reprise de la séance (p. 25 )

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

10. Communication relative à des commissions mixtes paritaires (p. 26 ).

11. Couverture des non-salariés agricoles. - Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi déclarée d'urgence (p. 27 ).

Article 1er (suite) (p. 28 )

Article L. 752-11 du code précité
(p. 29 )

Amendements identiques n°s 22 de la commission, 63 rectifié de M. Jacques Pelletier et 92 de M. Michel Souplet. - MM. le rapporteur, Paul Girod, le ministre. - Retrait des amendements n°s 63 rectifié et 92 ; adoption de l'amendement n° 22 rédigeant l'article du code.

Article L. 752-12 du code précité (p. 30 )

Amendements n°s 64 rectifié de M. Jacques Pelletier, 23 de la commission et 107 du Gouvernement. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Adoption, après une demande de priorité, de l'amendement n° 23 rédigeant l'article du code, les amendements n°s 64 rectifié et 107 devenant sans objet.

Article L. 752-13 du code précité (p. 31 )

Amendements identiques n°s 24 de la commission et 65 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Paul Girod, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 65 rectifié ; adoption de l'amendement n° 24.
Amendement n° 108 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Rejet.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-13-1 du code précité (p. 32 )

Amendements n°s 66 rectifié bis de M. Jacques Pelletier, 25 et 26 de la commission. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Demande de priorité des amendements n°s 25 et 26 ; retrait de l'amendement n° 66 rectifié bis ; adoption des amendements n°s 25 et 26.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-13-2 du code précité (p. 33 )

Amendements identiques n°s 27 de la commission et 67 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 67 rectifié ; adoption de l'amendement n° 27 supprimant l'article du code.

Article L. 752-13-3 du code précité (p. 34 )

Amendements n°s 28 de la commission et 68 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 68 rectifié ; adoption de l'amendement n° 28 supprimant l'article du code.

Article L. 752-13-4 du code précité (p. 35 )

Amendements n°s 69 rectifié de M. Jacques Pelletier et 29 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 69 rectifié ; adoption de l'amendement n° 29.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-13-5 du code précité (p. 36 )

Amendements n°s 30 de la commission, 70 rectifié de M. Jacques Pelletier et 109 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 70 rectifié ; adoption de l'amendement n° 30 rédigeant l'article du code, l'amendement n° 109 devenant sans objet.

Article L. 752-13-6 du code précité (p. 37 )

Amendement n° 71 rectifié de M. Jacques Pelletier. - Retrait.
Adoption de l'article du code.

Articles L. 752-14 et L. 752-15 du code précité. -
Adoption (p. 38 )

Article L. 752-16 du code précité
(p. 39 )

Amendements n°s 72 rectifié et 73 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-17 du code précité (p. 40 )

Amendement n° 74 rectifié de M. Jacques Pelletier. - Retrait.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-17-1 du code précité (p. 41 )

Amendements n°s 75 rectifié de M. Jacques Pelletier, 31 et 32 de la commission. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Adoption, après une demande de priorité, des amendements n°s 31 et 32, l'amendement n° 75 rectifié devenant sans objet.
Adoption de l'article du code, modifié.

Article L. 752-18 du code précité (p. 42 )

Amendement n° 76 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-19 du code précité (p. 43 )

Amendement n° 77 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article du code.

Article L. 752-20 du code précité (p. 44 )

Amendements n°s 78 rectifié de M. Jacques Pelletier, 33, 34 et 113 de la commission. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre, Alain Vasselle. - Adoption, après une demande de priorité, des amendements n°s 33, 34 et 113, l'amendement n° 78 rectifié devenant sans objet.
Adoption de l'article du code, modifié.

Articles L. 752-21 à L. 752-23 du code précité. -
Adoption (p. 45 )

Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2. - Adoption (p. 46 )

Article 3 (p. 47 )

Amendements identiques n°s 79 rectifié de M. Jacques Pelletier et 99 de M. Alain Vasselle. - MM. Paul Girod, Alain Vasselle. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° 110 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 80 rectifié de M. Jacques Pelletier. - M. Paul Girod. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 bis (p. 48 )

Amendement n° 81 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendements identiques n°s 35 de la commission et 82 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Paul Girod, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 82 rectifié ; adoption de l'amendement n° 35.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 ter (p. 49 )

Amendement n° 83 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 84 rectifié de M. Jacques Pelletier. - Adoption.
Amendements identiques n°s 85 rectifié de M. Jacques Pelletier et 100 de M. Alain Vasselle. - MM. Paul Girod, Alain Vasselle. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 quater (p. 50 )

Amendements n°s 86 rectifié de M. Jacques Pelletier et 101 à 103 de M. Alain Vasselle. - Retrait des quatre amendements.
Adoption de l'article.

Article 3 quinquies (p. 51 )

Amendement n° 36 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 87 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. Paul Girod, le rapporteur. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.

Article 4. - Adoption (p. 52 )

Article 5 (p. 53 )

Amendements identiques n°s 37 de la commission et 88 rectifié de M. Jacques Pelletier. - MM. le rapporteur, Paul Girod, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 88 rectifié ; adoption de l'amendement n° 37.
Adoption de l'article modifié.

Articles 6 et 7. - Adoption (p. 54 )

Article 8 (p. 55 )

Amendements n°s 104 de M. Alain Vasselle et 38 de la commission. - MM. Alain Vasselle, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 104 ; adoption de l'amendement n° 38.
Amendement n° 111 du Gouvernement. - M. le ministre. - Devenu sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 9 (p. 56 )

Amendements n°s 105 rectifié de M. Alain Vasselle, 89 rectifié de M. Jacques Pelletier, 39 de la commission ; amendements identiques n°s 40 de la commission et 90 rectifié de M. Jacques Pelletier ; amendement n° 112 du Gouvernement. - MM. Alain Vasselle, Paul Girod, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements n°s 89 rectifié et 39 ; adoption de l'amendement n° 105 rectifié rédigeant l'article, les amendements n°s 40, 90 rectifié et 112 devenant sans objet.

Article additionnel après l'article 9 (p. 57 )

Amendement n° 41 rectifié bis de M. Jean-Louis Lorrain. - MM. Daniel Hoeffel, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Intitulé de la proposition de loi (p. 58 )

Amendements identiques n°s 42 rectifié de M. Jacques Pelletier et 94 de M. Alain Vasselle. - Retrait des deux amendements.

Seconde délibération (p. 59 )

Demande de seconde délibération. - MM. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales ; le ministre. - Adoption.

Suspension et reprise de la séance (p. 60 )

Article 1er (p. 61 )

Article L. 752-6 du code rural
(p. 62 )

Amendement n° A 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, le président de la commission, Paul Girod. - Adoption par scrutin public.
Adoption de l'article du code, modifié.
Adoption de l'article 1er modifié.

Vote sur l'ensemble (p. 63 )

MM. Jacques Machet, Guy Fischer, Paul Girod, Gilbert Chabroux, Alain Vasselle, le président de la commission.
Adoption de la proposition de loi.
M. le ministre.

12. Dépôt de projets de loi (p. 64 ).

13. Dépôt de propositions de loi (p. 65 ).

14. Dépôt de rapports (p. 66 ).

15. Ordre du jour (p. 67 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par lettre en date du 19 juin 2001, le texte de la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi organique relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.
Acte est donné de cette communication.
Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au Journal officiel, édition des Lois et décrets.

3

DÉPÔT D'UN RAPPORT
EN APPLICATION D'UNE LOI

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations le rapport établi sur les opérations de cet établissement pour l'année 2000, en application de l'article 114 de la loi du 28 avril 1816.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.

4

ORIENTATION BUDGÉTAIRE

Débat sur une déclaration du Gouvernement (suite)

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite du débat d'orientation budgétaire.
Dans la suite du débat, la parole est à M. Grignon.
M. Francis Grignon. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, « maintenir le cap », tel est l'objectif que le Gouvernement se fixe dans le rapport déposé à l'occasion de ce débat. Je sens dans cette formule une inquiétude certaine, celle du navigateur encore vent arrière qui voit venir la bourrasque avant son entrée au port électoral de 2002.
Inquiétude face à la dégradation de la conjoncture américaine, en passe de traverser l'Atlantique.
Inquiétude face à la persistance d'un déficit de l'ordre de 200 milliards de francs, qui limite singulièrement toute possibilité de manoeuvre en cas de retournement conjoncturel.
Inquiétude aussi quant au discours à tenir, après avoir prétendu quatre années durant que la croissance était principalement l'oeuvre du Gouvernement et le résultat de « l'excellence » de sa politique volontariste.
Quoi qu'en dise officiellement le Gouvernement, l'économie française est en position vulnérable face à un risque de retournement de la conjoncture internationale. Tel sera le premier point de mon propos.
Avec l'atterrissage périlleux de l'économie américaine, ce n'est pas une « bulle » financière qui éclate, comme en 1999 ; il s'agit bien, malheureusement, d'un retournement classique de conjoncture qui se produit outre-Atlantique, à la suite d'un surinvestissement et qui risque fort de se propager dans le monde. Le Gouvernement fait le pari d'un maintien du rythme de la consommation ; il s'accélérerait même en 2001, pour atteindre 3,5 %, contre 2,2 % en 1999 et 2,7 % l'an passé.
Il s'agit là du maillon le plus faible du raisonnement de nos gouvernants. On peut craindre, en effet, que le freinage de la croissance de l'emploi qui se profile ne réduise le dynamisme du pouvoir d'achat et de la consommation. A cet égard, une récente enquête de l'INSEE, parue le 1er juin dernier, me paraît particulièrement significative. Elle montre que le moral des ménages français, au zénith à la fin de l'année 2000, est en train de chuter de façon fort inquiétante.
Que ce soit sur leur situation financière, sur leur niveau de vie ou sur l'opportunité d'acheter, les Français sont de plus en plus pessimistes. Cette « déprime » est sans doute accentuée par la prise de conscience, par nos compatriotes, de fragilités économiques nouvelles : je pense aux plans de licenciements annoncés au premier trimestre. C'est un signe que l'euphorie toute relative que notre pays a connue ces dernières années est à présent derrière nous, et que le réveil des Français risque d'être très dur à la veille de certaines échéances électorales !
Ce que montrent notamment les études d'opinion, c'est que la crainte récurrente du chômage reprend le dessus, une crainte que ne sera pas parvenu à dissiper un gouvernement qui, pourtant, se targue d'avoir durablement réduit le chômage. Il suffit d'étudier de façon précise les statistiques de l'emploi pour s'apercevoir que la baisse du nombre des demandeurs d'emploi depuis 1997 est beaucoup plus modeste que ne l'indiquent les chiffres retenus par le ministère du travail.
S'en tenir, comme le fait le Gouvernement, aux seuls chômeurs dits « de catégorie 1 » revient à exclure plus d'un million de Français de la perspective d'un retour à l'emploi, parce qu'ils ne recherchent pas un emploi à durée indéterminée à temps plein ou parce qu'ils sont en activité réduite. Si l'on ajoute les personnes les plus démunies, que ce soient les RMIstes non inscrits à l'ANPE ou les « sans domicile fixe », ce sont plus de quatre millions de Français qui seraient actuellement exclus du marché du travail !
Face à toutes ces incertitudes, il faut malheureusement constater que après les efforts méritoires accomplis par le précédent gouvernement entre 1995 et 1997 en faveur de la qualification de notre pays pour l'euro, nous nous trouvons en présence de finances publiques fragilisées, et ce à quelques mois de la mise en circulation de ce même euro.
Ce sera le deuxième point de mon intervention.
Dans un contexte incertain, le débat d'orientation budgétaire se déroule suivant un rite dépourvu de toute surprise, le rapport d'information est, certes, devenu beaucoup moins prolixe et un peu moins triomphant, mais la doctrine est réaffirmée sur un mode devenu quelque peu incantatoire : la baisse volontariste des impôts sera poursuivie, car elle est nécessaire au soutien de la croissance ; les dépenses seront maîtrisées dans le cadre d'un budget dynamique favorisant certains secteurs prioritaires, et le déficit du secteur public sera réduit, conformément à la discipline imposée par la coordination budgétaire européenne.
Tout cela est bien dit, mais tout l'art est dans l'exécution, et le Gouvernement ne nous dit nullement ce que pourraient être, dans un contexte de croissance incertaine, ses préférences dans la pondération qu'il accordera à ces trois objectifs, évidemment interdépendants.
S'agissant de la maîtrise de la dépense, les résultats du Gouvernement augurent mal du futur. Faute de véritables réformes de structures, le solde structurel du budget de l'Etat reste encore beaucoup trop déficitaire. Conscient de son incapacité à respecter ses objectifs, le Gouvernement n'a-t-il d'ailleurs pas revu à la hausse les perspectives d'évolution des dépenses de 2002 à 2004 ?
S'agissant des prélèvements obligatoires, avec un taux de 45,5 % du produit intérieur brut, la France est l'un des pays les plus imposés d'Europe. Rappelons que cette situation s'est particulièrement accentuée depuis 1997, le taux de prélèvement passant de 44,9 % du produit intérieur brut en 1997 à 45,7 % en 1999. Comme le note très justement dans son rapport notre collègue Philippe Marini, de mai 1997 à juillet 2000, le Gouvernement a réduit le déficit non pas grâce à une maîtrise des dépenses publiques, mais par un relèvement des impôts pesant sur les Français. C'est l'impôt sur les sociétés qui a connu, depuis 1997, la plus forte augmentation, croissant de 72 %. En outre, les recettes fiscales et non fiscales de l'Etat affectées à la sécurité sociale ont plus que doublé pendant la même période.
C'est d'ailleurs ce que reconnaît, entre les lignes, le rapport préparatoire du Gouvernement pour ce débat d'orientation budgétaire : la France se trouve aujourd'hui particulièrement exposée aux effets de la concurrence fiscale. Les récents plans de licenciements en sont, malheureusement, l'un des symptômes. Et le tout récent et excellent rapport de la mission du Sénat présidée par mon collègue et ami Denis Badré sur la mondialisation nous apporte, à cet égard, des éléments d'analyse très instructifs.
J'en viens à la dernière partie de mon intervention : comment peut-on favoriser la création d'emplois durables, en particulier dans le secteur dit de la « nouvelle économie » ? Je centrerai mon propos sur une « nouvelle économie » qui suscite ces derniers mois un certain scepticisme et qui est pourtant plus que jamais indispensable à la vitalité de notre économie et au retour vers le plein emploi.
La fiscalité, à cet égard, peut constituer un levier très efficace, la fiscalité des sociétés, mais aussi celle des ménages, afin d'orienter l'épargne vers la création d'entreprises et la prise de risques.
Parmi les mesures envisageables, certaines figurent dans la proposition de loi que j'ai cosignée avec mon collègue Jean-Pierre Raffarin en faveur de la création et du développement des entreprises sur les territoires.
Au sein du dispositif adopté par le Sénat le 10 février 2000, je citerai trois mesures majeures : la création de fonds communs de placement de proximité, FCPP, dont la détention de parts par les particuliers serait assortie d'avantages fiscaux, sur le modèle des fonds communs de placement dans l'innovation ; l'institution d'une aide aux créateurs d'entreprises, d'un montant de l'ordre de 60 000 francs, remboursable en cinq ans ; enfin, le développement d'incitations fiscales encourageant des particuliers ou business angels à consolider les fonds propres des créateurs et à offrir un accompagnement fondé sur l'expérience et la proximité.
S'agissant d'entreprises à forte valeur ajoutée du secteur de la nouvelle économie, sans doute faut-il songer également à réformer l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF.
Les règles de cet impôt paraissent inadaptées à la situation des associés dirigeants de start-up, dont les parts sont actuellement imposées si elles représentent moins de 25 % du capital.
Une modernisation s'impose également quant aux modalités de taxation des stock-options. Celles-ci doivent être conçues comme une nouvelle façon de voir le partage de la valeur ajoutée. Elles ont vocation à être diffusées le plus largement possible afin de toucher tous les salariés qui exercent une influence sur les performances de l'entreprise.
L'amélioration du régime fiscal des stock-options prévue par la loi sur les nouvelles régulations économiques constitue une avancée réelle, mais encore insuffisante, vers une simplification et un allègement de la fiscalité prônée depuis plusieurs années par la majorité sénatoriale, en particulier par mon groupe parlementaire, l'Union centriste.
La fiscalité des revenus doit être aujourd'hui repensée en fonction du nécessaire développement d'entreprises dont la philosophie est de promouvoir un nouveau partage de la valeur ajoutée, à travers, notamment, les stock-options. Si les taxations des revenus et des plus-values ne sont pas liées et pensées en fonction du développement de projets entreprenariaux fondés sur le risque, ces entreprises risquent de ne pas pouvoir fidéliser leurs salariés en France et, par voie de conséquence, de transférer leurs centres de décision à l'étranger.
Telles sont, brièvement exposées, des propositions qui favoriseraient des créations d'emplois durables dans des secteurs de pointe. Nous aurons sans doute l'occasion de revenir sur ces différents thèmes lors du prochain débat budgétaire.
Madame le secrétaire d'Etat, le groupe de l'Union centriste ne pourra pas cautionner globalement les orientations que vous nous présentez. Cela étant, nous vous remercions par avance des réponses que vous apporterez à nos interrogations et des commentaires que vous ferez sur nos suggestions. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de RPR.)
M. le président. La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ainsi donc le Sénat poursuit la pratique du débat d'orientation budgétaire. Je note les perspectives d'institutionnalisation de cette « bonne habitude » que contient la proposition de loi organique relative aux lois de finances dont la discussion est en cours entre les deux assemblées.
Ce prélude à la préparation du budget pour 2002 nous permet de rappeler que la situation des finances publiques en général et celle des finances des collectivités locales en particulier se sont notablement améliorées depuis 1997.
Nos orientations générales sur le budget pour 2002 ont été largement développées, et de façon fort brillante, par mon ami Bernard Angels. Je veux insister, quant à moi, sur la situation des collectivités locales, qui sont le principal investisseur public et qui, comme d'autres secteurs de la vie nationale, ont tout lieu d'être satisfaites de la politique qui a été menée depuis quatre ans.
En 2000, les finances des collectivités locales ont continué à se redresser. Nous avons bien noté qu'elles sont « au large » ou, plutôt, moins à l'étroit qu'auparavant. Cette situation, jointe à une rigueur de gestion assez bien partagée, a permis le désendettement et l'allégement de la pression fiscale.
Les dépenses des collectivités ont progressé, en raison, notamment, de l'accroissement de la masse salariale et des investissements, qui, après avoir progressé en 1999 et en 2000, devraient se maintenir à un rythme soutenu en 2001 et 2002.
En 2000, les dépenses d'investissement - 220 milliards de francs - ont progressé de 10,5 % par rapport à 1999. Ce phénomène est lié à la montée en puissance des structures intercommunales à fiscalité propre. En effet, ces groupements représentent aujourd'hui 12 % des dépenses des collectivités locales, soit une hausse de 57 % par rapport à 1999. Cette progression de leurs dépenses d'équipement est deux fois supérieure à celle des dépenses des communes, qui sont pourtant déjà élevées.
Certains se sont plaints de la prise en charge par l'Etat d'une trop grande part des ressources fiscales locales. Quelles polémiques sur la vignette automobile de la part de départements « compensés », certes, mais hurlant à l'atteinte à la liberté fiscale ! Que n'avaient-ils augmenté davantage leur produit fiscal : ils auraient été « compensés » à due concurrence ! Et ils oubliaient de dire qu'ils sont désormais assurés d'une recette certaine !
Les recettes des collectivités locales font donc une large part aux concours de l'Etat. Ces concours, qui représentent au moins 40 % de leurs ressources et qui sont composés à plus de 60 % par des prélèvements sur recettes - le reste étant constitué de dotations budgétaires - ont progressé nettement, du fait de l'indexation du contrat de solidarité et de croissance, des abondements exceptionnels, ainsi que des compensations par l'Etat des allégements de fiscalité locale effectués par le Gouvernement depuis 1997.
Depuis cette date, les concours de l'Etat aux collectivités locales ont progressé de 7 % par an en volume. Si, plus précisément, on ne tient compte que de l'effet du contrat de solidarité et de croissance, ainsi que de celui des abondements exceptionnels, ces concours ont augmenté de 1,3 % par an en volume, alors même que les dépenses de l'Etat progressaient, toujours à structure constante, de 0,4 % seulement par an en moyenne. Les concours de l'Etat aux collectivités locales ont donc progressé trois fois plus vite que le budget de l'Etat. La situation ne serait évidemment pas la même si les « bases Juppé » du pacte de stabilité avaient été maintenues !
Il est certain que cette progression joue un rôle déterminant dans la situation financière actuelle des collectivités locales.
Le mandat des élus issus des toutes récentes élections municipales et cantonales débute sur des bases solides, puisque les dépenses de l'Etat en faveur des collectivités locales ont augmenté de plus de 15 % par rapport aux crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2000. Elles progressent de plus de 44 milliards de francs, passant de 293 milliards à 337 milliards de francs, soit une augmentation de 6,4 milliards de francs pour les dotations, de 31,6 milliards de francs pour les compensations et de 6 milliards de francs en faveur des dégrèvements.
Il n'en reste pas moins que le mode de financement des collectivités locales devrait faire l'objet d'une meilleure répartition, tout le monde en convient, et qu'il doit continuer à tenir compte du développement rapide de l'intercommunalité.
Il faut en effet reconnaître que le développement des communautés d'agglomération se traduit par des transferts financiers au détriment des communautés de communes, qui ont enregistré, notamment en milieu rural, une moindre progression de leur dotation globale de fonctionnement. Du fait de l'appel des compensations négatives, chacun sait que la TPU a peu d'attrait pour les petites communes rurales, même au sein des communautés de communes à fiscalité additionnelle.
Enfin, les grands concours de l'Etat pourraient faire l'objet d'une plus grande péréquation, à l'instar de la dotation de fonctionnement minimale des conseils généraux, car la solidarité n'est pas à la charge de l'Etat seul. Les collectivités doivent elles aussi la mettre en pratique. Tel est le rôle des communautés de communes.
C'est dire que les élus locaux attendent de connaître les projets du Gouvernement en matière de réforme des finances locales, projets qui doivent être présentés au Parlement à la fin de cette année. En attendant, nous nous félicitons de la reconduction du contrat de solidarité et de croissance annoncée pour 2002.
Nous croyons à la réforme de l'Etat. Ce n'est pas, de notre part, un acte de foi. Nous considérons qu'il s'agit d'une nécessité. Mais nous croyons aussi qu'elle doit s'accomplir dans la concertation.
Le but du Gouvernement étant de faire en sorte que la croissance soit au service de l'emploi et de la cohésion sociale, les services assurés par les collectivités locales ne doivent pas cesser d'être confortés dans cette optique.
A cette fin, nous souhaitons poursuivre notre action dans les trois axes suivants : instauration d'un nouveau contrat entre l'Etat et les collectivités locales sur les bases du contrat de croissance et de solidarité ; meilleure répartition des ressources locales au sein d'une intercommunalité améliorée ; modernisation des finances locales par une refonte d'ensemble du système, dans la ligne du rapport Mauroy, avec une fiscalité locale plus juste, en simplifiant les dotations et en permettant une péréquation améliorée et plus volontariste, et ce dans l'esprit d'efficacité et de solidarité que M. Laurent Fabius a évoqué hier devant le Sénat.
Vous nous trouverez, madame, à vos côtés, car vous répondez ainsi aux attentes de nos concitoyens et à celles des collectivités locales. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Bernard.
M. Jean Bernard. Monsieur le président, madame « le » secrétaire d'Etat - je ne cède pas à la mode actuelle, ce qui n'enlève rien à la considération et au respect que je vous porte, madame -, mes chers collègues, l'année 2002 est importante, sinon essentielle, pour la défense nationale puisqu'elle correspond à la fin de la loi de programmation militaire pour 1997-2002.
La conjoncture internationale fait naître quelques inquiétudes quant à la pérennité de notre croissance.
Nous sommes d'ores et déjà touchés par le ralentissement de l'économie américaine. Nous n'ignorons pas qu'il affecte déjà l'Allemagne, notre partenaire, dont le marché contribue pour un tiers à la croissance française. Nous pouvons dès lors être inquiets quant à notre taux de croissance en 2002.
Si nous comprenons fort bien que les priorités du Gouvernement soient l'éducation, la sécurité, la justice et l'environnement, nous insistons sur la nécessité que le projet de budget de la défense nationale pour 2002 ne soit pas pénalisé, et nous demandons qu'il soit suffisamment important pour que la réussite de la réforme engagée en 1996 par le Président de la République ne soit pas compromise. Il en va de la crédibilité de notre défense autant que du moral des personnels qui la composent.
Non, madame le secrétaire d'Etat, les dépenses militaires ne sont pas du gaspillage. Elles sont un investissement à court terme pour notre industrie, elles sont un moyen pour les militaires d'exercer leur métier et elles sont un investissement à long terme pour notre sécurité, la défense de nos intérêts vitaux et la participation de notre pays à la défense de l'Union européenne.
Force est de constater, depuis trois ans, que les armées n'ont jamais profité des fruits de la croissance. Leur budget n'a pratiquement pas augmenté, loin s'en faut, et celui de leur équipement a baissé.
La loi de programmation initiale prévoyait que les crédits des titres V et VI devaient s'élever à 90,3 milliards de francs. Quant à l'annuité fixée à l'issue de la modification du programme de 1998, elle était de 86,1 milliards de francs. Or, nous avons pu constater que l'engagement du Gouvernement n'avait été tenu qu'en 1999. En 2000, les crédits d'équipement n'étaient que de 82,9 milliards de francs, accusant une baisse de 4 % par rapport à l'année précédente et, en 2001, ils ne s'élevaient qu'à 83,4 milliards de francs.
Depuis 1996, les personnels de notre défense ont parcouru un chemin gigantesque pour se restructurer, se professionnaliser et, ainsi, mener à bien la réforme engagée.
Cette réforme structurelle importante a exigé une évolution des mentalités en même temps qu'une grande capacité d'adaptation. Les efforts fournis ont été de taille et il ne faudrait pas, madame le secrétaire d'Etat, que les hommes et les femmes qui composent les éléments de notre défense aient le sentiment aujourd'hui que la communauté nationale ne les reconnaît pas.
Ils se sont adaptés sans bruit et sans état d'âme, démontrant ainsi que leur motivation fondamentale restait le service rendu à la nation. Encore faut-il que cette dernière leur donne les moyens d'exercer leur profession et de remplir leurs missions.
Or ils constatent aujourd'hui qu'ils restent pour ainsi dire les parents pauvres des choix budgétaires puisque, systématiquement, les arbitrages financiers du Gouvernement leur sont défavorables, le budget de la défense ne représentant plus que 1,96 % environ du produit intérieur brut de la nation.
Les crédits du titre III doivent donc augmenter en 2002, d'une part, pour améliorer les conditions de vie et de travail des militaires, en particulier dans l'armée de terre, et, d'autre part, pour leur permettre d'exercer leur activité et de poursuivre un entraînement nécessaire.
Nous estimons également qu'une plus grande attention doit être portée aux conditions de vie et au pouvoir d'achat des personnels, à l'heure où se développe, dans la communauté militaire, le sentiment que les efforts considérables de restructuration n'ont pas été récompensés par des avantages comparables à ceux qui ont été accordés à la société civile.
Une revalorisation de la condition militaire est indispensable car celle-ci n'est pas à la hauteur de l'engagement fourni.
Si le titre III a, jusqu'à ce jour, garanti la réussite de la professionnalisation, il n'a, en revanche, pas pris en compte l'effet des 35 heures.
Cette idée gagne les esprits, tant la vie familiale actuelle, sortie des casernes, est immergée dans la société civile. La rémunération, les conditions de logement et de garde des jeunes enfants ne compensent en rien les sujétions qui sont imposées aux militaires. De surcroît, le célibat géographique, qui découle essentiellement de l'absence d'emploi pour les conjointes, ajoute au malaise existant dans l'armée de terre, comme dans la gendarmerie d'ailleurs.
En outre, à l'heure où les contraintes liées aux opérations extérieures n'ont jamais été aussi fortes, j'attire votre attention, madame le secrétaire d'Etat, sur l'impact qu'ont eu certaines mesures, telles que la non-prise en charge d'un accident survenu hors service ou, pire, l'interruption de solde locale lorsque le militaire est en permission. Ces dispositions nous semblent tout à fait vexatoires et injustes.
Les militaires ont exprimé à plusieurs reprises leur inquiétude de voir la professionnalisation banaliser leur métier et, dans une certaine mesure, restreindre leur couverture sociale et leur protection juridique.
Il ne faudrait pas que les personnels des armées, qui côtoient en permanence des civils, qui sont immergés dans la société civile, aient l'impression qu'on leur supprime des avantages sociaux, qu'ils n'ont pas droit, sous prétexte qu'ils sont discrets et pudiques, à vivre et à travailler dans des conditions décentes.
Nous craignons, si ces sentiments perdurent, qu'ils ne contribuent à l'échec de la réforme de nos armées.
Puisque nous estimons que les militaires, en tant que salariés, doivent avoir exactement les mêmes droits que les agents publics, nous demandons que l'effort financier soit accru, de façon à attirer, conserver et renouveler les personnels, pour que les effectifs soient suffisants tant en quantité qu'en qualité.
S'agissant plus particulièrment des militaires de l'armée de terre, le budget 2002 devrait intégrer les exigences imposées par le nouveau système. Outre l'allégement des charges de travail, il est nécessaire de faciliter la vie quotidienne des unités et de leur personnel, et de leur offrir un cadre de vie décent. Faute de cette adaptation, il sera complètement illusoire d'espérer recruter et conserver une ressource de qualité. C'est à ce prix, madame le secrétaire d'Etat, que le modèle d'armée professionnelle sera atteint et consolidé en 2002. Nous craignons déjà la fuite de nos meilleurs éléments vers le secteur civil en même temps que la rupture de la dynamique de l'engagement, et ce d'autant plus que l'attractivité des postes est moindre que celle des emplois civils.
Avant de passer aux crédits d'équipement, il nous paraît important d'insister sur le point suivant : s'il est vrai que, depuis plusieurs années, les dépenses de fonctionnement ont progressé, il n'en demeure pas moins que cette progression est uniquement liée à celle des rémunérations et des charges sociales, tandis que les autres dépenses de fonctionnement ont fortement diminué, essentiellement au détriment de l'entretien programmé des matériels. Ces crédits n'étaient que de 1,1 milliard de francs en 2001.
Afin que le modèle d'armées 2015 prévu par la programmation soit réalisé, il est nécessaire que les crédits d'équipement du titre V se situent au-dessus de la barre des 85,9 milliards de francs fixés en 1998. En conséquence, nous estimons qu'ils doivent atteindre, au minimum, 87 milliards de francs en 2002, notre souhait étant qu'ils s'élèvent à terme à 90 milliards de francs par annuité.
Pour 2002, les autorisations d'engagement doivent augmenter. Il est en effet nécessaire que la dotation permette de couvrir la totalité des commandes globales dès leur passation, ce principe devant en particulier être appliqué aux programmes menés en coopération. Leur niveau doit également être majoré pour permettre, comme nous l'avons déjà signalé à maintes reprises, une croissance nette au bénéfice de deux domaines, généralement sacrifiés en cas de contraintes budgétaires, l'infrastructure et l'entretien programmé des matériels.
Les commandes globales étant le gage d'économies et de baisses de prix significatives, il convient non seulement d'avoir une dotation en autorisations d'engagement suffisante, mais également de mettre fin aux aléas budgétaires qui remettent chaque année en cause les programmes. Sur ce dernier point, nous déplorons que, par l'arrêté du 21 mai dernier, 300 millions de francs aient été ponctionnés sur le budget de la défense, dont 285 millions de francs sur le tite V. Nous ne le dirons jamais assez : l'expérience a bien montré que, pour les programmes majeurs, tout étalement se traduit mécaniquement et inéluctablement par des dépenses supplémentaires, tandis que le saupoudrage des commandes se traduit par des coûts de revient unitaires élevés.
Quant aux crédits de paiement, ils doivent permettre, en 2002, de rattraper les retards enregistrés en début d'exécution de la loi de programmation, en particulier ces trois dernières années.
Sans une hausse significative des crédits du titre V, madame le secrétaire d'Etat, le maintien de la capacité opérationnelle de nos matériels ne sera pas assuré.
En ce qui concerne la marine, nous avons noté, depuis plusieurs années, une décroissance continue des moyens d'investissement, laquelle a influé directement sur les programmes de cohérence opérationnelle et les soutiens. De ce fait, la situation de notre flotte est devenue préoccupante.
En conséquence, le budget pour 2002 devra confirmer le renouvellement des composantes majeures de projection et de dissuasion, qu'il s'agisse des frégates Horizon, du quatrième sous-matin nucléaire lance-engins de nouvelle génération ou du lancement du projet de frégates multifonctions.
En ce qui concerne l'armée de l'air, le budget pour 2002 devra tenir compte des tendances constatées chez nos partenaires européens. Nous le savons, la part des forces aériennes dans les budgets de la défense diffère entre la Grande-Bretagne et la France ; elle représente respectivement 30 % contre 21 % du budget global. La Royal Air Force risque de supplanter à court terme notre aviation de combat. Par ailleurs, le budget pour 2002 doit pouvoir assurer le passage d'une loi de définition à une loi de fabrication et prendre enfin en compte le coût des programmes Rafale et A 400 M.
En ce qui concerne l'armée de terre, il ne faut pas négliger le coût que représentent les entrées en phase de fabrication de l'hélicoptère Tigre et le poids financier du programme Leclerc. Si l'on ajoute l'indispensable prise en compte de la protection du combattant, les crédits du titre V doivent excéder les 16,9 milliards de francs alloués en 2001.
Indispensables au soutien des forces, les infrastructures et l'entretien programmé des matériels devront connaître une augmentation importante de leurs moyens.
S'agissant de l'entretien programmé des matériels, nous avions noté l'année dernière que les armées ne pourraient y faire face en 2001 dans la mesure où les crédits étaient tout à fait insuffisants, en baisse de 4 % par rapport au budget précédent. Ils s'élevaient en 2001 à 14 885 millions de francs seulement.
Les chiffres sont là, madame le secrétaire d'Etat, pour illustrer nos propos. La disponibilité technique opérationnelle des matériels majeurs de l'armée de terre n'est que de 21 % pour les chars AMX 10, de 34 % pour les chars Leclerc et de 66 % pour l'hélicoptère Puma. Quant à la marine, il est regrettable de constater qu'environ 20 % de ses bâtiments restent à quai et que 60 avions de l'armée de l'air sont dans l'impossibilité d'effectuer les entraînements nécessaires.
Par ailleurs, l'armée de terre souffre de grands retards dans la réalisation des infrastructures. Le plan Vivien de modernisation des logements pour les engagés est loin d'être achevé, si bien que ces derniers ont le sentiment que les armées n'ont pas tenu les promesses qui leur avaient été faites. Un effort devra donc être consacré à cette activité pour éviter d'accentuer le malaise existant.
Pour en terminer avec le titre V, sachant que l'inscription de dépenses indues diminue d'autant la réalité des crédits effectivement consacrés à l'équipement militaire, nous nous permettons d'émettre deux souhaits pour 2002.
Nous aimerions vivement, en effet, que les crédits du titre V ne soient pas utilisés pour financer le surcoût important des opérations extérieures, comme c'est le cas depuis trois ans, et ce à concurrence d'une somme non négligeable de 2,5 milliards de francs par an.
Nous souhaitons également que le budget civil de recherche et de développement ne bénéficie plus d'un prélèvement sur le titre VI. Nous n'ignorons pas que, de façon paradoxale et strictement contraire à la loi de programmation, les crédits du BCRD représentent une ponction de 4,15 milliards de francs pour le budget de la défense depuis 1997. Cela n'était pas prévu et ce n'est pas acceptable. En 2001, l'activité « recherche et technologies » disposait d'un budget de 4,4 milliards de francs sur les 5,6 milliards de francs prévus et théoriquement alloués. Nous estimons que la recherche doit pouvoir disposer en 2002 de davantage de moyens financiers si nous voulons garder une avancée que nous assuraient notre recherche et nos techniciens.
Enfin, lors du sommet de Nice, l'identification des forces nationales, susceptibles d'être mobilisées dès 2003 dans le cadre de la force européenne de réaction rapide, a été approuvée. Il faut donc d'ores et déjà prendre en compte les conséquences financières de l'engagement français. Pour avoir une force européenne efficace, il faut en outre que la France dispose de systèmes de commandement, de conduite, de communication et de renseignement adaptés.
Madame le secrétaire d'Etat, nous vous rappelons que le succès de la mise en oeuvre de la force européenne dépend en grande partie de la convergence des choix budgétaires des pays membres. Or, comme nous l'avons constaté, les divergences se font d'année en année plus criantes entre le Royaume-Uni et la France, je termine ce propos par une interrogation. Pourrons-nous, dans ces conditions, garder notre rôle prépondérant en Europe ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je m'exprime aujourd'hui dans ce débat d'orientation budgétaire en qualité de rapporteur de la loi de financement de la sécurité sociale.
L'année dernière, intervenant au même titre, je regrettais l'absence du ministre chargé de la sécurité sociale lors d'un débat d'orientation budgétaire. Considérant que les comptes - si nous réformions l'ordonnance de 1959 - devraient être agrégés, nous estimons que les deux ministres devraient être au banc.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
M. Charles Descours. Je n'exprimerai pas aujourd'hui le même regret, non que la compagnie de Mme Guigou ne nous soit pas agréable,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Au contraire !
M. Charles Descours. ... mais parce que l'actualité de ces dernières semaines a montré que c'était vous, madame le secrétaire d'Etat, qui, avec M. Fabius, étiez les véritables patrons de la sécurité sociale et des comptes sociaux.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est rassurant !
M. Charles Descours. Ça... nous allons voir, monsieur le rapporteur général !
Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances de 2000, la Cour des comptes, constatant que vos marges de manoeuvre budgétaire se réduisaient, s'interroge sur les tentations qui, je la cite, « pour être assez traditionnelles, doivent être évitées ». La Cour des comptes relève ainsi « que l'Etat peut vouloir bénéficier implicitement du potentiel de hausse de la capacité de financement de la sécurité sociale, assise sur des recettes sociales considérées comme plus indolores et en hausse sensible, en débudgétisant des prestations sans dégager sur son budget des moyens correspondants. »
Quand on connaît la prudence avec laquelle la Cour des comptes s'exprime, tout cela explique la suite.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Charles Descours. Or, confronté à l'impossibilité, voire à la non-volonté, de dégager, sur le budget de l'Etat, les moyens nécessaires au financement de la politique du Gouvernement, et, plus particulièrement, des 35 heures, à l'évidence le Gouvernement n'a pas résisté à la tentation ! Les excédents des organismes sociaux fournissent désormais à l'Etat les « recettes de poche » - il me semble tout de même qu'il faut avoir une grande poche ! - qui lui sont nécessaires pour boucler ses fins de mois. Dès lors, on peut s'interroger à juste titre sur la réalité même des comptes budgétaires que vous nous présentez aujourd'hui.
Certes, je vous reconnais, madame le secrétaire d'Etat, ainsi qu'à votre ministère, le mérite de la persévérance.
En 1999, je le rappelle, lorsque s'était posée la question du financement des 35 heures, le projet initial du Gouvernement, sans doute largement inspiré par Bercy, était d'y faire participer la sécurité sociale et l'assurance chômage.
En effet, selon la loi de 1994, que nul n'ignore dans cette enceinte, et donc en l'absence de modifications du cadre légal, la compensation des exonérations de cotisations accordées dans le cadre des 35 heures aurait dû faire l'objet d'une dotation budgétaire, inscrite sur les crédits du ministère de l'emploi. Cette compensation se serait traduite par une augmentation importante des dépenses publiques. Le coût supplémentaire représenté par les 35 heures, en sus de la ristourne bas salaires, dite ristourne Juppé, était ainsi estimé, à l'époque, à quelque 65 milliards de francs.
Mais, bien entendu, comme cela était prévisible, le ministère des finances - où vous n'étiez pas encore en qualité de secrétaire d'Etat, madame - a usé de toute son influence, à l'époque, pour éviter l'inscription de ces dépenses supplémentaires au budget de l'Etat. A l'occasion de mon récent contrôle, sur pièces et sur place, des comptes du Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC, j'ai pris connaissance d'une note de la direction du budget en date du 15 février 1999.
Cette note précise que « le dispositif permanent d'aide à la réduction du temps de travail ne doit pas représenter un surcoût net pour les finances publiques ». Je comprends très bien cette volonté. Invoquant alors la théorie selon laquelle les créations d'emplois résultant des 35 heures génèrent des recettes supplémentaires de cotisations pour la sécurité sociale, le Gouvernement avait donc présenté un premier projet de FOREC qui mettait directement à contribution la sécurité sociale et l'UNEDIC. La commission des comptes de la sécurité sociale avait d'ailleurs, par anticipation, « provisionné » 5,5 milliards de francs au titre de la contribution du régime général pour l'année 2000. Toutefois, face à l'opposition unanime des partenaires sociaux, le Gouvernement avait dû finalement renoncer à ce projet de financement.
Le FOREC « première manière » était enterré, si je puis dire, mais le problème demeurait entier. Pour que les charges supplémentaires résultant des exonérations de cotisations ne viennent pas s'imputer au budget de l'Etat, il fallait trouver une autre solution pour maintenir le volontarisme budgétaire, comme M. Fabius l'a dit hier.
Est alors apparu le FOREC « deuxième manière », créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, sous la forme d'un établissement public. Désormais, la sécurité sociale allait bien participer au financement des 35 heures, mais de manière indirecte et opaque, et par l'intermédiaire d'un système de « tuyauteries » compliqué - je croyais avoir inventé le terme, mais je l'ai lu dans une note que la direction de la sécurité sociale adressait à son ministre.
Le régime général n'a pas récupéré les 5,5 milliards de francs déjà provisionnés par la commission des comptes. En effet, le Gouvernement a réduit les recettes du régime général à due concurrence afin de les affecter en ressources au FOREC nouvellement constitué, si l'on peut dire, parce que nous verrons par la suite qu'il ne l'est toujours pas.
En revanche, l'analyse du dernier rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale permet d'établir que la création du FOREC s'est traduite, en 2000, par une économie de l'ordre de 6 milliards de francs pour le budget de l'Etat, le montant des recettes fiscales affectées étant inférieur au montant des charges transférées.
En 2001, afin de faire face à l'augmentation prévisible des dépenses du FOREC, ce « réseau de tuyauteries » fut perfectionné afin d'augmenter le prélèvement opéré sur les recettes de la sécurité sociale. Toujours selon la commission des comptes, sa mise en place s'est ainsi traduite, pour la seule année 2001, par une perte de 4,4 milliards de francs pour la branche famille, de 1 milliard de francs pour l'assurance maladie du régime général et de 1,7 milliard de francs pour le fonds de solidarité vieillesse.
En d'autres termes, et avant le prélèvement dont je vais parler ensuite, les excédents de la sécurité sociale résultant d'une conjoncture économique exceptionnelle ont été captés pour assurer le financement des 35 heures.
Ce FOREC « deuxième manière », même indirectement financé par la sécurité sociale, présentait toutefois, pour votre ministère, madame, un grave vice de conception. En effet, lors de sa création, le Parlement avait prévu un verrou légistatif afin de garantir, en cas de déficit, la compensation intégrale par le budget de l'Etat, le FOREC ne devant pas être présenté en déficit selon la loi.
Cela explique la « crampe administrative » qui s'ensuivit : pas moins de trente notes furent échangées entre les deux directions, celle du ministère des finances et celle du ministère des affaires sociales, au sujet du décret créant le FOREC. Cela a duré au moins six ou huit mois.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce n'est pas le fait du hasard !
M. Charles Descours. Le décret n'a toujours pas été signé alors que nous étions parvenus, après avis du Conseil d'Etat, à un quasi-accord.
Jusqu'à aujourd'hui, le déficit des 35 heures a été supporté par la trésorerie du régime général. Le président du conseil d'orientation et de surveillance que je suis est bien obligé de le constater. En effet, ce FOREC virtuel reposait sur une fiction, à savoir l'équilibre affecté des dépenses et des recettes. Ce point d'équilibre avait été fixé à 67 milliards de francs pour 2000 et à 85 milliards de francs pour 2001. En réalité, selon la commission des comptes de la sécurité sociale, qui s'est réunie voilà quelques jours, le déficit du FOREC s'établit, malgré la ponction sur la sécurité sociale que j'ai déjà dénoncée, à 13,3 milliards de francs.
Selon les lois en vigueur, ce déficit aurait dû être intégralement compensé à la sécurité sociale par le budget de l'Etat, mais Mme Guigou a indiqué que la sécurité sociale, puisqu'elle était excédentaire, permettait « de prendre en charge l'écart de compensation - c'est joli, tous ces termes - en 2000 tout en maintenant son excédent ». Les partenaires sociaux se sont prononcés contre à l'unanimité et, si cette décision allait jusqu'à son terme, la parité de la gestion de la sécurité sociale, qui existe depuis cinquante-cinq ans, risquerait d'être mise en jeu.
Ainsi, en 2000, le coût total de la création virtuelle du FOREC a été de 18 milliards de francs pour la sécurité sociale ! A la lumière des chiffres que j'ai cités tout à l'heure, nous voyons que l'excédent du régime général aurait été de près de 24 milliards de francs si les 35 heures n'avaient pas été financées par la sécurité sociale.
On nous annonce - mais je ne suis pas d'accord avec ce chiffre - qu'en 2001 le déficit du FOREC s'élèverait « seulement » à 3,3 milliards de francs à la charge de la sécurité sociale. Je n'y crois pas, dans la mesure où les dépenses évaluées à 92 milliards de francs me semblent à nouveau sous-évaluées. Nous verrons bien !
C'est donc un FOREC « troisième manière » que vous allez mettre au point dans le projet de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, puisqu'il faut que désormais la sécurité sociale participe au financement du surcoût des 35 heures, au nom d'une théorie des retours particulièrement discutable.
Ces errements rappellent une situation passée que nous avons essayé de clarifier pour tenter de simplifier les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale. Les termes « charges indues » auraient dû sortir de notre vocabulaire. Malheureusement, je crains qu'ils n'y reviennent.
Je n'engagerai pas de polémique pour savoir combien d'emplois ont été créés grâce aux 35 heures, malgré la publication, intervenue hier de façon pertinente, du rapport du Plan. On peut considérer que, sur plus de 500 000 emplois créés en 2000, 100 000 à 150 000 sont dus aux 35 heures, les autres résultant de la conjoncture.
Je voudrais dénoncer une nouvelle fois ces tours de passe-passe entre le budget de l'Etat et les comptes sociaux qui tendent à devenir systématiques.
J'aurais pu évoquer l'allocation d'autonomie, dont nous avons parlé hier, au sujet de laquelle l'Etat ne fait aucun effort puisque, sur les 17 milliards de francs qu'elle coûtera cette année, 5,5 milliards de francs proviennent de la sécurité sociale, 500 millions de francs des fonds d'action sociale et 11 milliards de francs des départements.
Ces « tuyauteries » deviennent donc de vrais pipelines entre la sécurité sociale et le budget de l'Etat. Tout cela n'est pas sain, tout cela n'est même pas démocratique puisque nous ne pouvons plus expliquer à nos collègues, d'abord, à nos concitoyens, ensuite, ce qu'est aujourd'hui le budget social.
De même, ces excédents auraient pu alimenter le fonds de réserve des retraites. Je n'y reviendrai pas, la commission des affaires sociales du Sénat ayant rédigé des rapports sur tous ces problèmes.
Pour respecter un affichage budgétaire conforme à ses prévisions et en contribuant à l'équilibre des 35 heures par une ponction considérable sur la sécurité sociale, le Gouvernement a placé une véritable bombe à retardement au coeur de nos finances sociales.
Ce cumul explosif des 35 heures, des échéances démographiques de l'assurance vieillesse et donc du déficit des retraites, de la dérive des dépenses maladie est d'ores et déjà en place.
Après avoir écouté, hier, M. Fabius, qui a longuement insisté sur la prudence avec laquelle il fallait considérer les comptes 2001 parce que le freinage de la croissance est plus fort que prévu, je crains que cette machine infernale n'explose bientôt aux yeux de tous. Si cela devait arriver, j'espère que ce sera avant les échéances électorales et que l'opinion s'apercevra ainsi que l'on a masqué la réalité des comptes sociaux.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce sera à la charge des successeurs, comme d'habitude !
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais aborder deux points : le premier, que j'évoquerai en tant que rapporteur spécial du budget des affaires sociales à la commission des finances, concerne les finances sociales - il a déjà été largement traité et fort bien ; le second, que je traiterai en tant que rapporteur de la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire, des schémas de services collectifs de transports de voyageurs et de marchandises, concerne la politique des transports.
Je commence donc par les finances sociales.
Comme cela a été dit, l'examen des comptes fait apparaître un résultat vertueux pour la deuxième année consécutive. Mais, quand on creuse le problème, la réalité apparaît quelque peu différente.
Tout d'abord, on se rend compte que l'avenir n'est pas assuré - M. Descours vient de le montrer ramarquablement. Ensuite, cet excédent excite les convoitises de l'Etat, qui ponctionne nos comptes sociaux pour financer d'autres actions comme les 35 heures ; cela a été déjà souligné par la Cour des comptes.
La capacité de financement dégagée par les administrations de la sécurité sociale est de 54,5 milliards de francs, c'est considérable. Le solde du régime général est de 5,2 milliards de francs, dont acte au Gouvernement. Toutefois, cela résulte essentiellement, d'abord, de facteurs conjoncturels - nous nous en félicitons - mais surtout de la persistance des prélèvements obligatoires pour le domaine social qui sont et qui demeurent exorbitants.
Les prélèvements sociaux atteignent, en 2000, 21,4 % du PIB. Ils ont augmenté d'un point en quatre ans, passant de 20,5 milliards de francs à 21,4 milliards de francs ; rien que pour 2000, l'augmentation est de 6,7 % par rapport à 1999.
Effectivement, avec de tels chiffres, on peut obtenir des résultats intéressants. Mais le plus inquiétant c'est qu'aucune réduction à terme de ces niveaux de prélèvement n'est envisagée.
L'examen des dépenses appelle de ma part cinq observations.
La première de ces observations concerne la dette sociale, qui est toujours préoccupante. Les encours de la caisse d'amortissement de la dette sociale - la CADES - s'élèvent à 200 milliards de francs, auxquels il faut ajouter 100 milliards de francs à rembourser à l'Etat, d'où une question naïve, madame la secrétaire d'Etat : les excédents de la sécurité sociale ne pourraient-ils pas permettre d'accélérer le remboursement de la dette sociale ? C'est une question que je pose depuis longtemps sans avoir, bien entendu, jamais obtenu de réponse.
Deuxième observation : le Gouvernement s'est fait une spécialité de mettre en place des mesures sociales non financées, comme M. le président de la commission, M. le rapporteur général et Charles Descours l'ont souligné. Il doit alors se livrer à des acrobaties budgétaires invraisemblables, que tout le monde d'ailleurs dénonce en vain, telles que le montage d'usines à gaz pour financer les 35 heures ou l'allocation personnalisée d'autonomie.
Ma troisième observation a trait aux retraites.
Nous dénonçons tous l'absence totale d'anticipation du Gouvernement pour faire face au choc financier inéluctable que causeront les retraites.
Le conseil d'orientation des retraites, qui a été mis en place tardivement, l'année dernière, ne dit rien d'autre dans tous ses rapports que ce qui est déjà annoncé depuis dix ans, depuis le premier livre blanc sur les retraites.
Le fonds de réserve des retraites, qui devait être doté de 1 000 milliards de francs ne dispose actuellement que de 20 milliards de francs. Je poserai donc, une fois de plus, une question naïve, madame le secrétaire d'Etat : est-ce que l'Etat est en mesure de nous dire de quelles ressources ce fonds disposera au 31 décembre 2002, et, puisque nous sommes dans un débat d'orientation budgétaire, à la fin de 2003 ou de 2004 ? Là encore, nous sommes certains que, la question étant posée, la réponse ne nous arrivera pas de sitôt.
Ma quatrième observation est relative au déficit structurellement persistant de notre régime d'assurance maladie.
La branche maladie est déficitaire de 6,1 milliards de francs. Les prévisions pour 2001, qui ont été présentées récemment à la commission des comptes de la sécurité sociale, ne sont, en fait, guère crédibles compte tenu de l'absence de réforme.
Ainsi, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, qui doit figurer dans la loi de financement de la sécurité sociale, n'a absolument plus aucune signification. Nous votons des objectifs qui sont calculés de façon biaisée, à partir de réalisations ayant elles-mêmes dépassé les objectifs précédents. Nous avons voté pour 2000 un ONDAM de 658 milliards de francs ; il a été réalisé à 675 milliards de francs, soit un dépassement de 17 milliards de francs !
C'est ainsi chaque année : le taux que l'on demande au Parlement de voter est en fin de compte totalement fictif. Pourquoi ? Parce que les réformes structurelles ne débouchent pas et que les incohérences se multiplient.
Le Gouvernement a présenté un schéma de services sanitaires que la délégation à l'aménagement du territoire a examiné hier. Paradoxalement, ce document n'a fait l'objet d'aucune consultation des principaux opérateurs. Je sais que ce n'est pas forcément de votre responsabilité, madame la secrétaire d'Etat !
La restructuration hospitalière est en panne, la coordination entre les soins de ville et l'hôpital est déficiente. Tout cela augure mal de l'avenir et du rééquilibrage de notre branche maladie.
Ma cinquième observation concerne les excédents des branches accidents du travail et famille, qui sont réels.
Il y a des excédents. Mais que prouvent-ils ?
Le premier excédent, celui de la branche accidents du travail, souligne la surtaxation des entreprises. On n'y peut rien, c'est mathématique !
Le second excédent met en évidence l'insuffisance de la politique familiale, laquelle ne saurait se résumer au seul congé de paternité - projet au demeurant excellent, nous n'en disconvenons pas. Nous aurions souhaité depuis longtemps, nous l'avons souvent dit, une politique familiale d'une autre envergure qui ait une autre ambition pour la France.
Je viens au deuxième point sur lequel je veux insister : le financement de la politique des infrastructures de transports, qui mobilise des montants financiers aussi considérables que la sécurité sociale et suscite un diagnostic tout aussi pessimiste.
J'ai présenté hier devant la délégation du Sénat à l'aménagement et au développement durable du territoire mon rapport sur les schémas de services collectifs de transports collectifs, voyageurs et de marchandises, lequel a été adopté à l'unanimité des membres présents.
J'avais auparavant présenté deux autres rapports, l'un, devant la commission des finances, sur le financement des infrastructures de transport, l'autre, devant la délégation du Sénat pour l'Union européenne, sur la politique européenne des transports, le tout faisant un ensemble relativement cohérent.
Cela m'autorise à vous dire, madame la secrétaire d'Etat, que le budget que vous nous présentez cette année, comme celui que vous nous présenterez l'année prochaine n'anticipent en rien les besoins importants de financement que requiert une politique de transports cohérente, qui corresponde d'abord à l'évolution de la demande, ensuite au rôle que la France doit jouer comme plaque tournante des transports en Europe, notre position géographique nous autorisant, bien sûr, des ambitions dans ce domaine.
Je formulerai trois observations.
D'abord, la demande en matière de transport ne cessera de croître, comme elle croît depuis quarante ans. Je me souviens qu'au Club de Rome, dans les années soixante, soixante-dix, on dissertait sur la « croissance zéro ». Bien entendu, c'était une idée fausse, et la croissance continue de la demande en matière de transport provoque maintenant, un peu partout, des phénomènes de congestion ou de saturation.
Or il y a quelque chose d'inexorable dans la croissance de la demande en matière de transport : son taux est systématiquement à peu près du même niveau que celui de la croissance du PIB, affichant même parfois jusqu'à un point de plus. Cela vaut surtout pour certains modes de transport, comme la route ou la voie aérienne.
Les projections pour 2010 ou 2020 sont connues. La constitution et l'élargissement de l'espace européen sont des facteurs d'accélération de cette croissance, car on ne crée pas un vaste espace économique si ce n'est pas pour développer les échanges, et donc les transports.
Comme je l'ai indiqué, la place de la France est celle d'une plaque tournante et, compte tenu de la croissance plutôt forte que connaissent les pays du Sud, qu'il s'agisse de l'Espagne, du Portugal ou de l'Italie, mais aussi, à terme, des pays du Maghreb, nous aurons encore un rôle majeur à jouer dans les transports européens. Nous devons donc nous y préparer.
Or nous observons actuellement des phénomènes de saturation et de congestion pour tous les modes de transport. En matière autoroutière, j'évoquerai, à titre d'exemples, le sillon rhodanien, la liaison entre Paris et Lille, la région parisienne, la traversée des massifs montagneux : qu'on songe au tunnel du Mont-Blanc. Les capacités de transport de fret par rail sont elles aussi saturés. Le ciel européen est congestionné. Quant à la desserte des ports, ceux d'Europe du Nord - Anvers, Amsterdam ou Rotterdam, qui sont aussi « nos » ports - comme les ports strictement français, elle n'est pas assurée dans des conditions satisfaisantes.
J'en viens à ma deuxième observation. Une des solutions possibles pour conduire une politique des transports plus dynamique consiste à transférer une part du trafic de fret de la route vers la voie ferrée. L'orientation est louable, intéressante, et nous y souscrivons.
Cependant, un tel choix emporte quelques exigences, et d'abord celle de la cohérence avec nos voisins européens. En effet, développer le fret ferroviaire est pertinent pour les grandes distances. Par conséquent, si l'on veut expédier par cette voie, à travers la France, des marchandises de Madrid à Berlin ou même de Marseille à Amsterdam, il faut que nos voisins aient eux-mêmes développé leurs équipements de fret ferroviaire.
Or que constatons-nous ? Le fret ferroviaire diminue dans tous les pays d'Europe ; seule la France s'en tire un peu mieux. Il y a là un obstacle sérieux au développement du fret ferroviaire.
Bien sûr, dans le domaine ferroviaire, le TGV constitue un grand succès et l'inauguration de la ligne Lyon-Marseille a été un couronnement de la politique menée en la matière. Mais le TGV ne transporte pas de marchandises !
La réflexion est d'autant plus urgente que la politique du fret ferroviaire engagée au cours des dernières années a été un échec, et même un échec cinglant. Les grèves de 1995, comme celles du printemps dernier, ont eu des effets dramatiques pour tous les chargeurs et, bien entendu, pour les opérateurs ferroviaires.
Chacun le sait, une politique de développement du fret ferroviaire nécessite des investissements colossaux : des dizaines de milliards. Qui paiera ? Réseau ferré de France est actuellement paralysé par une dette de 150 milliards de francs, dont personne ne sait comment elle peut être remboursée. La SNCF est étranglée par l'effort financier du TGV - lequel est toutefois nécessaire - et par des charges de personnel qui dépassent les recettes commerciales.
La sphère ferroviaire a besoin, pour fonctionner chaque année, d'une somme comprise entre 65 et 70 milliards de francs, à la charge des finances publiques, tant nationales que régionales.
Mais, là encore, les comptes sont opaques et l'avenir est inconnu. Or l'avenir du transport ferroviaire ne doit pas être sacrifié et il ne passe pas par l'étranglement de la route ; il passe par un effort d'investissement.
Ma troisième observation concerne le plan de financement prévisionnel de la politique des transports du Gouvernement. Ayant vainement cherché les chiffres dans le schéma de services collectifs de transport, j'ai été amené à élaborer moi-même ce plan de financement prévisionnel. Un tableau figure dans mon rapport, et il est très inquiétant, madame la secrétaire d'Etat.
Pour l'ensemble des réseaux de transport, la moyenne annuelle des investissements a été, de 1990 à 1994, de 45,3 milliards de francs et, de 1995 à 1998, de 45 milliards de francs. C'était certes insuffisant, mais c'était à peu près étal. Pour la période 2000-2020, la moyenne annuelle, telle qu'elle ressort du schéma de services de transport, est de 30,5 milliards de francs, ce qui représente une diminution d'un tiers par rapport aux périodes précédentes.
Sur quoi porte cette diminution ?
Le réseau routier national - routes et autoroutes -, qui a bénéficié respectivement de 24 milliards de francs et de 27 milliards de francs par an au cours des deux périodes précédentes, chute à 11,5 milliards de francs par an.
Le réseau ferroviaire, qui s'est vu attribuer 16,2 milliards de francs par an, puis 12 milliards de francs, recevrait 13,4 milliards de francs par an entre 2000 et 2020, ce qui est totalement insuffisant par rapport à nos objectifs.
Quant aux voies navigables, elles bénéficient d'une progression, mais les volumes sont marginaux : on passe de 0,7 milliard de francs à 0,9 milliard, puis à 1,7 milliard. On a abandonné Rhin-Rhône, Seine-Est et on a quasiment abandonné Seine-Nord, et les financements sont dramatiquement insuffisants.
M. Philippe Marini, rapporteur général. S'agissant de Seine-Nord, on ne nous a jamais dit qu'on l'avait abandonné ! Mais, dans les faits, c'est vrai !
M. Jacques Oudin. De toute façon, avec 1,7 milliard de francs par an, il est impossible de financer Seine-Nord.
S'agissant des ports maritimes, la baisse des dotations annuelles est constante : 1,6 milliard de francs, puis 1,3 milliard et finalement 0,9 milliard pour la période 2000-2020. C'est absurde !
Quant aux aéroports, les chiffres sont respectivement de 2,7 milliards de francs, 3,1 milliards et 3,3 milliards. Je pense que, si l'on fait un effort en faveur de Roissy et des aéroports de la périphérie, on pourra éventuellement s'en sortir.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La troisième aéroport n'est pas urgent !
M. Jacques Oudin. Quoi qu'il en soit, madame la secrétaire d'Etat, ce plan de financement à long terme est de la même veine que les dépenses civiles en capital, qui ne font que décroître en valeur relative. Quel est le poste qui augmente le moins dans le budget de 2001 ? C'est celui des dépenses civiles en capital, donc les dépenses liées aux transports.
Au total, à l'issue de ce bilan, après de si sévères constats, que faut-il retenir quant à la politique du Gouvernement ? Je note une politique sanitaire mal maîtrisée, une politique familiale déficiente, une politique des retraites irresponsable et une politique des transports irréaliste. Ce n'est pas ainsi, madame le secrétaire d'Etat, que nous préparerons l'avenir de la France ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Roland du Luart. L'alternance risque d'être difficile à gérer !

(M. Jean Faure remplace M. Paul Girod au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette discussion fort intéressante nous permet de mesurer le décalage entre le discours et les actes du Gouvernement.
Voilà moins d'une semaine, nous avons consacré le principe de sincérité des lois de finances dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est pour l'avenir !
M. Roland du Luart. Nous avons également voté une disposition qui institutionnalise le débat d'orientation budgétaire.
Nous avons enfin amélioré l'information du Parlement en enrichissant le contenu du rapport déposé par le Gouvernement au cours du dernier trimestre de la session ordinaire.
M. Philippe Marini, rapporteur. C'est également pour l'avenir !
M. Roland du Luart. Madame la secrétaire d'Etat, vous avez approuvé ces initiatives, soulignant que le Parlement devait disposer, au moment opportun, d'une vision cohérente de l'ensemble des finances publiques et des choix qui les sous-tendent.
Pourtant, la bonne volonté affichée par le Gouvernement ne l'a pas empêché de déposer un rapport d'orientation budgétaire qui, cette année encore, manque cruellement de sincérité.
Ce document se fonde en effet sur des hypothèses économiques auxquelles plus personne ne croit, y compris à Bercy.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Roland du Luart. Surtout, il présente les informations de manière biaisée, voire contestable.
Je ne prendrai qu'un exemple, et je vous invite, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à vous reporter à la page 8 du rapport présenté par le Gouvernement. Y figure en effet un tableau comparatif des taux de croissance du PIB dans les pays du G7. Le Gouvernement l'utilise pour démontrer que la France devrait connaître une croissance plus forte que ses principaux partenaires en 2001 et en 2002.
Ce type de tableau n'a rien de contestable en soi, d'autant que les données comparatives sont fournies par le Fonds monétaire international, institution éminemment respectable.
J'attire néanmoins votre attention sur l'indication qui figure en tout petits caractères sous le tableau des taux de croissance. Il y est en effet discrètement précisé que les prévisions sont celles du FMI, sauf dans le cas de notre pays.
Ainsi, le FMI prévoit 2,6 % de croissance en France en 2001 et 2002, mais ce sont les prévisions gouvernementales de 2,9 % et 3 % qui figurent dans le tableau comparatif !
M. Philippe Marini, rapporteur général. La main dans le sac !
M. Roland du Luart. Or, madame le secrétaire d'Etat, vous savez bien qu'en matière économique on ne peut comparer que des données déterminées selon une même méthode de calcul, selon les mêmes critères. Nous avons tous appris cela à Sciences-Po ou ailleurs !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est la « permanence des méthodes » !
M. Roland du Luart. Vous citez les prévisions du FMI dans le rapport d'orientation budgétaire, ce qui montre que vous les considérez comme fiables. Mais alors, pourquoi seraient-elles fiables pour tous les pays, sauf pour la France ?
Que pensez-vous de cette méthode qui consiste à fausser la comparaison en changeant les chiffres sous prétexte qu'ils sont moins favorables ? Pensez-vous qu'il s'agit là d'une présentation sincère ?
N'aurait-il pas été plus simple de regarder la réalité en face, plutôt que de chercher à la travestir ?
Nous savons tous que le contexte économique s'est fortement dégradé : c'est un fait.
Le prix du pétrole reste, hélas ! à un niveau élevé. L'atterrissage « en douceur » de l'économie américaine se révèle de moins en moins « doux ».
Mais il y a plus inquiétant encore : la croissance des principaux pays de la zone euro marque le pas, surtout en Allemagne.
La France n'est pas épargnée : selon l'INSEE, notre croissance a été nettement plus faible que prévu au premier trimestre de 2001. En outre, de nouvelles inquiétudes ont fait leur apparition en matière d'investissement des entreprises, d'inflation, de création d'emplois et de consommation intérieure.
Nous venons même d'apprendre que notre commerce extérieur avait renoué avec un solde négatif au mois d'avril - 483 millions d'euros - alors même que le poids de la facture énergétique tend à se réduire, mais de manière insuffisante.
Enfin, le taux d'inflation annuel de la zone euro a atteint 3,4 % en mai, et M. Trichet, devant notre commission des finances, s'en est ému. Ce chiffre, rendu public lundi, est en effet particulièrement préoccupant, même si la France fait mieux que la moyenne de ses partenaires et même si ce mauvais résultat s'explique par des facteurs conjoncturels.
Il tombe à un très mauvais moment : l'économie confirme son ralentissement et aurait bien besoin d'une nouvelle baisse des taux d'intérêt.
Le « socle de croissance » évoqué par le Gouvernement est donc en train de se fissurer.
S'il est difficile de dire avec précision quelle sera la situation économique dans ou ou deux ans, nous devons au moins reconnaître que les incertitudes sont nombreuses et en tirer les conséquences.
Mes chers collègues, le débat d'orientation budgétaire est non un débat économique mais un débat politique. Nous devons faire preuve de responsabilité, sans nous voiler la face. Le problème est que le Gouvernement continue à faire comme si de rien n'était.
Certes, madame la secrétaire d'Etat, vous avez admis, avec M. Fabius, que la croissance en 2001 se situerait dans le bas de votre fourchette de prévisions, soit 2,7 %. Cependant, vous n'en avez tiré aucune conséquence budgétaire, c'est-à-dire en termes politiques. Vous considérez que la demande intérieure demeurera suffisamment solide pour soutenir la croissance, grâce aux baisses d'impôts. C'est un peu vite oublier que la pression fiscale en France a atteint des records.
Lors de la dernière discussion budgétaire, notre groupe avait dénoncé la « mystification fiscale » qui consiste à faire croire aux Français que l'on va baisser les impôts alors que ceux-ci ont fortement augmenté depuis 1997.
De surcroît, le programme fiscal du Gouvernement s'apparente plus à un saupoudrage électoraliste qu'à une réforme structurelle de nos prélèvements obligatoires. Il risque donc de ne pas avoir l'effet d'entraînement recherché.
Notre groupe estime qu'il est urgent d'adopter des mesures ciblées, notamment en faveur des familles et de certains secteurs économiques, en particulier celui de la restauration.
Alors que certains semblent remettre en cause les baisses d'impôt, nous pensons qu'il faut au contraire aller plus loin et plus vite en la matière.
Toutefois, cela n'est possible que si nous parvenons véritablement à maîtriser, voire à réduire les dépenses publiques.
Là encore, nous pouvons constater le décalage entre le discours et la réalité de la politique gouvernementale. En théorie, les dépenses de l'Etat progresseraient en volume de 0,3 % en 2001 et de 0,5 % en 2002.
Officiellement, le programme pluriannuel de finances publiques 2002-2004 affiche une réduction progressive du poids des dépenses publiques dans le produit intérieur brut.
En réalité, le Gouvernement ne se donne pas les moyens d'atteindre ses objectifs. Il entretient l'illusion de la rigueur tout en créant les conditions d'un dérapage. La charge de la dette reste considérable, le poids des dépenses de la fonction publique ne cesse de croître, les réformes de structures susceptibles de générer des économies ont été quasiment abandonnées ou différées.
Surtout, les finances publiques sont sous la menace des bombes à retardement que constituent les retraites des fonctionnaires, les emplois-jeunes et les 35 heures.
Je constate, par exemple, que le Gouvernement impose la réduction du temps de travail au secteur privé, alors qu'il est incapable de se l'appliquer à lui-même financièrement à moyens constants. Il suffit, d'ailleurs, d'en parler dans chaque département avec les préfets, qui nous annoncent des tensions extrêmement vives dans ce domaine d'ici à la fin de l'année, tant les choses sont mal préparées.
Le Gouvernement menace la compétitivité des entreprises en augmentant leurs charges et met à contribution la sécurité sociale, ce qui est plus que contestable, mais, surtout, il se garde bien d'expliquer comment sera financé le passage aux 35 heures dans la fonction publique nationale, territoriale et hospitalière.
A l'automne dernier, j'ai eu l'occasion de souligner que les dépenses accrues dans une conjoncture favorable constituaient une espèce de « prion budgétaire », qui demeure invisible en période de hautes eaux économiques, mais qui s'active en cas de coup de tabac. J'ai bien peur que ce coup de tabac ne soit plus très loin !
La rigidité du budget est telle que le Gouvernement ne dispose plus de réelles marges de manoeuvre, à moins d'engager des réformes structurelles ambitieuses, ce qu'il s'est toujours refusé à faire.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ce seront des vaches maigres !
M. Roland du Luart. Il ne faudrait pas qu'il recoure de nouveau à des artifices comptables pour dissimuler les difficultés que notre ami Jacques Oudin évoquait tout à l'heure.
Je ne souhaite pas non plus que certains budgets, comme celui de la défense, soient encore utilisés comme des « variables d'ajustement ».
La politique du Gouvernement nous place en effet dans une situation paradoxale. Les dépenses augmentent beaucoup trop dans leur ensemble mais certains postes essentiels sont sacrifiés. Le fonctionnement continue d'évincer l'investissement et les mesures d'affichage politques se multiplient, au détriment des missions régaliennes de l'Etat.
Je tiens notamment à souligner que le coût des 35 heures devrait s'établir à près de 100 milliards de francs en 2001. A titre de comparaison, les budgets cumulés de la justice et de la sécurité n'atteignent que 62,6 milliards de francs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait !
M. Roland du Luart. On constate le gâchis !
Je cite mes sources : il s'agit du rapport de notre éminent collègue M. Descours sur le coût des 35 heures, dans lequel il précisait que la somme de 96 milliards annoncée passait à plus de 100 milliards de francs. Or, dans le projet de loi de finances pour 2001, le budget de la justice s'élevait à 29 milliards de francs, celui de la sécurité à 33,6 milliards de francs, au total 62,6 milliards de francs, contre, je le répète, 100 milliards de francs pour financer les 35 heures.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lumineuse démonstration ! On voit bien où sont les priorités !
M. Roland du Luart. Je vous remercie, monsieur le rapporteur général !
Cette situation me paraît inacceptable à un moment où nos concitoyens souffrent d'une justice trop lente et d'une insécurité grandissante.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela ne s'arrange pas !
M. Roland du Luart. Un Etat omnipotent est un Etat impotent ! Nous devons recentrer ses missions et lui donner les moyens de sa politique régalienne.
De même, nous devons avoir conscience que la réduction des dépenses militaires a des conséquences directes sur l'activité et le moral des armées.
Si nous voulons réussir la professionnalisation, enjeu essentiel pour l'avenir, nous devons, là encore, nous en donner les moyens.
Je souhaiterais, enfin, vous faire part de mes inquiétudes au sujet de l'équilibre des comptes publics. La réduction du déficit budgétaire a été insuffisante au cours de ces dernières années. Elle est surtout fragile, car essentiellement conjoncturelle.
Le Gouvernement l'avoue lui-même à demi-mot dans son rapport, puisqu'il reconnaît que l'amélioration du solde des administrations publiques entre 1997 et 2002 tient « pour un peu moins des deux tiers au regain de croissance économique et pour un peu moins des deux tiers au regain de croissance économique et pour un peu plus d'un tiers à des facteurs structurels ».
Ce demi-aveu ne dissipe pas les inquiétudes pour l'avenir. En effet, j'ai noté que le Gouvernement restait très flou sur ses engagements pour 2002.
Il ne faudrait pas que le déficit redevienne une variable d'ajustement budgétaire. La France a pris des engagements devant ses partenaires européens. Elle doit les respecter.
Mes chers collègues, le Gouvernement se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins.
Il est encore temps d'éviter une impasse budgétaire grave comme celle de 1992-1993. Bien entendu, les conditions économiques sont différentes, me direz-vous. Mais la politique des gouvernements socialistes est toujours aussi laxiste en ce qui concerne le fonctionnement.
Les semaines à venir seront cruciales pour l'avenir de nos finances publiques.
Je souhaite que le Gouvernement et sa majorité plurielle entendent la voix de la raison et de la responsabilité.
Il est grand temps de faire taire les cigales, avant qu'il ne soit trop tard ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Excellent ! Ce sont des cigales folles ! (Rires.)
M. le président. La parole est à M. Joyandet.
M. Alain Joyandet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le budget de l'Etat est la résultante de la politique que conduit le Gouvernement.
Certains gouvernements déterminent d'abord leurs politiques en fonction des promesses qui sont lancées ou des situations politiques auxquelles ils décident de faire face. Ils constatent ensuite la traduction comptable ou renvoient aux exercices ultérieurs les conséquences ou inconséquences budgétaires.
D'autres gouvernements commencent par mettre au point un cadrage budgétaire volontariste avant d'arbitrer entre le souhaitable et le possible.
Selon que l'on applique telle ou telle méthode, l'exercice est plus ou moins périlleux sur le plan politique, en tout cas à court terme.
J'ai le sentiment que le Gouvernement auquel vous appartenez, madame le secrétaire d'Etat, appartient clairement à la première catégorie, à tel point qu'en pleine période de croissance internationale et de sur-recettes fiscales, il n'a pas été capable de commencer à inverser les tendances lourdes qui hypothèquent l'avenir des finances publiques de notre pays.
Quelles sont ces tendances ? Augmentation préoccupante, parce que structurelle, de l'endettement ; absence de politique d'investissements qui, seuls, préparent l'avenir ; frais de fonctionnement galopants.
Oui, l'endettement de notre pays est préoccupant. En vingt ans, il est passé de quelques centaines de milliards de francs, à peine supérieur au budget de l'Etat, à plus de 5 000 milliards de francs représentant 300 % du budget.
Si mes recherches sont exactes, en 1980, le budget de la France était d'un peu plus de 540 milliards de francs et l'endettement de 420 milliards de francs. Et, en l'an 2000, le budget était d'un peu plus de 1 500 milliards de francs et l'endettement de 5 300 milliards de francs.
M. Bernard Angels. Merci Sarkozy !
M. Alain Joyandet. Ces quatre chiffres à eux seuls en disent long sur la dérive. Quel que soit le ratio utilisé, ils sont édifiants : cette dette est passée de 25 % du PIB à 45 % du PIB entre 1986 et 2001.
Si mes recherches sont toujours exactes, au cours de ces mêmes vingt ans, vous avez exercé, vous-mêmes ou vos amis, la responsabilité du Gouvernement pendant environ quinze ans.
Je souhaiterais, madame la secrétaire d'Etat, que vous nous donniez votre sentiment sur cette dette. J'ajoute immédiatement - cela me paraît évident, mais cela va mieux en le précisant - que votre gouvernement n'est pas le seul responsable de cette situation qui dure depuis bien longtemps.
Qu'y a-t-il en contrepartie dans les actifs susceptibles d'être convertis ? Nous ne le savons pas !
Est-il normal, face à une telle situation, de continuer à emprunter pour fonctionner ?
Va-t-on encore longtemps et d'une manière chronique, emprunter chaque année plus que l'équivalent de notre désendettement ?
A ce rythme, que lirons-nous dans le budget de la France en 2005... en 2010... ? Et comment fait-on pour rembourser, alors qu'en même temps on annonce des baisses d'impôts ?
Cette situation - qui, encore une fois, n'est pas de votre seul fait - n'est-elle pas très préoccupante, tout particulièrement en cas de fléchissement de la croissance ? N'est-il pas temps de l'expliquer aux Français ?
S'agissant des frais de fonctionnement, on voit bien qu'ils sont devenus incontrôlables et que la totalité de la progression annuelle de la charge est absorbée par l'augmentation des coûts de la fonction publique et la charge de la dette.
Il n'y a donc plus aucune marge de manoeuvre. Dans un tel contexte budgétaire, les annonces de politiques nouvelles venant non pas remplacer d'autres politiques, mais s'ajouter à celles qui existent déjà, démontrent une inconséquence dont, il est vrai, M. Fabius et sans doute vous-même, madame la secrétaire d'Etat, vous êtes désolidarisés mais que vous allez pourtant devoir comptabiliser, ruinant du même coup les ambitions de réduction des déficits, donc de l'endettement.
Je ne nie pas l'existence d'une volonté de Bercy de ralentir l'augmentation de la dépense publique. Mais force est de constater qu'une seule fourmi, même entêtée, ne pourra faire face au bataillon de cigales qui siègent autour de la table du conseil des ministres. Si, en plus, le premier d'entre eux se range du côté des plus nombreux, alors, le pire est à venir !
Dans ces conditions, l'objectif de diminution du déficit ne pourra pas être atteint. Du même coup, le recours à l'emprunt sera augmenté d'autant, c'est inéluctable.
La conséquence, madame la secrétaire d'Etat, se lit au chapitre des investissements : l'Etat français n'investit plus. Les transferts de nos capacités d'investissement vers le fonctionnement ne cessent d'augmenter. A peine 80 milliards de francs ont été consacrés aux investissements civils en 2000 et l'ordre de grandeur sera sans doute la même en 2001.
Pour ma part, je ne crois pas à la fongibilité fonctionnement-investissement que certains techniciens s'efforcent de défendre. A part pour quelques lignes budgétaires qui nécessitent sans doute d'être analytiquement réaffectées, pour l'essentiel, l'investissement reste l'investissement et le fonctionnement reste le fonctionnement.
C'est fort de cette conviction, madame le secrétaire d'Etat, que j'ai défendu ici, dans le cadre de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, l'idée de réinscrire ou d'inscrire la règle d'or dans la loi fondamentale.
Si j'ai finalement retiré cet amendement, j'ai le sentiment que cette idée continue son chemin, même si je sais combien il est difficile, lorsque l'on est au Gouvernement, d'avoir les mains liées par des règles trop rigides.
A tout le moins pourrait-on demander au ministre de l'économie et des finances, lorsqu'il est obligé d'emprunter pour fonctionner, de venir s'en expliquer devant la représentation nationale.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est indispensable, et il faudra y venir !
M. Alain Joyandet. Nous ne pouvons donc pas être en accord avec ces orientations budgétaires, qui sont les conséquences de la politique conduite par votre Gouvernement.
En réalité, nous ne discutons d'ailleurs pas d'orientations budgétaires. Nous faisons des commentaires sur la situation financière de notre pays, plus que sur des orientations budgétaires puisque nous ne savons pas encore très bien comment vous avez l'intention de « cadrer » les choses dans l'avenir.
Nous pourrions pourtant utilement avoir ce débat sur les orientations budgétaires, sur les besoins de nos concitoyens et sur les moyens correspondants dans le budget.
Notre collègue Roland du Luart a tout à l'heure illustré d'un exemple ce que pourrait être cette volonté politique et ce que devraient être ces orientations budgétaires, en comparant à juste titre, comme je l'avais fait, les budgets de la défense et de la sécurité au coût du passage aux 35 heures.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est ce que j'appelle les vraies priorités !
M. Alain Joyandet. Voilà l'exemple d'une orientation budgétaire que nous n'approuvons pas.
En tout cas, madame la secrétaire d'Etat, nous sommes confrontés à un mélange dangereux de tendances lourdes.
Je sais très bien, je le répète, que le gouvernement auquel vous appartenez n'est pas seul responsable de ce bilan, puisque c'est le résultat de vingt ans d'exercices budgétaires. Toujours est-il que nous sommes placés devant ce constat en matière de grands équilibres. C'est un mélange dangereux de tendances lourdes que vous confirmez, dans un contexte de fin de cycle vertueux pour l'économie internationale. Et c'est en ce sens que le gouvernement actuel porte une part de responsabilité particulière par rapport à ses prédécesseurs.
Ce mélange dangereux vous conduira inéluctablement soit à constater un déficit plus élevé que ne le permettent les règles européennes, alors que nous sommes déjà le dernier de la classe, ou presque, soit à repousser des baisses d'impôts significatives devenues pourtant urgentes dans un climat de concurrence internationale, soit à renoncer à doter notre territoire des équipements publics nécessaires. On peut d'ailleurs réellement craindre que ce chapitre des investissements publics ne serve de variable d'ajustement à la suite de l'évolution du contexte que nous constaterons.
Voilà donc dans quel état se trouvent les finances de notre pays, et il ne sera pas facile de sortir de cette situation.
Je sais bien, madame la secrétaire d'Etat, qu'aucune politique budgétaire ne peut être fortement modifiée de façon brutale et rapide. Mais ne vous semble-t-il pas urgent de rechercher les voies et moyens pour commencer, ne serait-ce que légèrement, à inverser ces tendances lourdes et très dangereuses à terme ?
M. Jacques Chaumont. Très bien !
M. Alain Joyandet. N'est-il pas venu, le temps du courage, le temps d'expliquer à nos concitoyens que l'Etat vit au-dessus de ses moyens, que la France vit au-dessus de ses moyens,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... Le temps de la transparence !
M. Alain Joyandet. ... qu'elle emprunte sur le marché financier français, ou, pis encore, à l'étranger, pour financer les 35 heures et les emplois jeunes, ou tout simplement, pour partie encore dans le budget actuel, pour financer le salaire des fonctionnaires ?
Je ne suis pas un adepte du catastrophisme ni de la sinistrose. Mais, vous l'avez compris, mon inquiétude, sincère, madame la secrétaire d'Etat, a été encore renforcée par l'analyse des documents que vous avez bien voulu vous-même nous adresser. Peut-être ai-je une lecture budgétaire insuffisamment adaptée à la nature même des fonctions de l'Etat. Je sais bien que celui-ci a des contraintes particulières. Je sais aussi qu'il n'est ni une entreprise ni une collectivité locale et qu'il est soumis à ces contraintes. Cependant, il existe tout de même, madame la secrétaire d'Etat, un certain nombre de fondamentaux de bonne gestion communs à toute collectivité publique ou privée pour assurer son avenir. Force est de constater que l'Etat, qui devrait donner l'exemple, ne respecte plus depuis longtemps ces règles de base.
Certes, le gouvernement auquel vous appartenez n'est pas seul en cause, mais vous auriez pu commencer à redresser la situation pendant les dernières années, grâce à une conjoncture internationale exceptionnelle, qui, hélas ! donne des signes sinon de retournement du moins de fléchissement. Au lieu de cela, il a été question de « cagnotte ». Et je fais le pari que le Gouvernement va continuer encore à sacrifier à la démagogie jusqu'en juin 2002. Je suis cependant persuadé que, après, le Gouvernement, quel qu'il soit, devra se doter de véritables orientations budgétaires, fondées sur la sincérité, la responsabilité et sans doute la rigueur.
Pour préparer son avenir et celui des générations futures, notre pays a besoin d'une toute autre politique budgétaire. Contrairement à ce que disait M. Fabius ici même hier, nous ne demandons pas tout et son contraire, nous ne demandons pas une rigueur budgétaire et des augmentations de crédits partout. Mais il y a d'autres orientations à prendre, et ce sera difficile.
Ceux qui seront contraints de mettre en oeuvre ces nouvelles orientations devront s'armer de patience et faire preuve d'une très grande pédagogie auprès de nos concitoyens. Quels que soient les chemins empruntés, après une période aussi longue de laisser-aller, je crains fort que l'addition ne soit salée pour ceux qui devront la payer. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaite me livrer à un bref commentaire à la suite des échanges de propos intervenus hier soir avec M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous avons beaucoup parlé de dette publique, mais, étant donné l'heure tardive et la documentation nécessitant d'être réexaminée, je n'ai pas réagi sur l'instant et j'ai réservé quelques observations pour la fin de cette matinée, madame le secrétaire d'Etat, en votre présence.
Dans la colonne 115 du compte rendu analytique de la séance d'hier, M. Fabius déclare : « Le poids de la dette publique dans le produit intérieur brut, de 1980 à 1993, soit en treize ans et sous des gouvernements différents, a augmenté de 20 points, ce qui est considérable. De 1993 à 1997, soit en seulement quatre ans et sous des gouvernements qui trouvaient grâce auprès du rapporteur général, il a encore augmenté de 20 points... »
J'ai effectué des recherches dans les documents de l'INSEE, des comptes nationaux, de la Banque de France et de la direction de la prévision. Mes chers collègues, j'ai constaté - je parle de la dette publique au sens du traité de Maastricht - que la dette publique représentait 21 points de produit intérieur brut en 1980 et 45,6 points en 1993 : l'augmentation est donc de 24,6 points, et non de 20 points ! Par ailleurs, elle est passée de 45,6 points en 1993 à 59,3 points en 1997, soit une augmentation de 13,7 points. Ce n'est pas tout à fait 20 points ! Les arrondis sont généreux, madame le secrétaire d'Etat. Espérons que les commerçants, lorsqu'ils passeront à l'euro, n'agiront pas de même. (Sourires.)
Cela étant dit, arrêtons-nous un instant sur la succession des chiffres. Que constatons-nous ? Nous constatons que le saut essentiel a été fait au cours de l'année 1993, monsieur le président de la commission des finances. Or si une telle constatation peut être faite sur l'année 1993, c'est pour une raison tout à fait mécanique, qui tient à l'alternance de 1993.
Souvenez-vous, mes chers collègues : 1993 - première année de récession, l'année record de l'erreur budgétaire ! - le déficit budgétaire initial qui avait été voté par le Parlement - la majorité à l'Assemblée nationale était socialo-communiste, n'est-ce pas ? - ...
M. Roland du Luart. On dit maintenant « plurielle » !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... s'élevait à 165 milliards de francs et le déficit de réalisation assumé par le « pauvre » M. Balladur atteignait 315 milliards de francs. Voilà la réalité ! Et on voudrait travestir les chiffres pour reporter sur de malheureux gouvernements du passé les turpitudes d'aujourd'hui ! Ce n'est absolument pas acceptable !
A contrario, le commentaire que je m'étais permis de faire dans mon rapport, tant écrit qu'oral, était dépourvu de toute intention polémique, il s'inscrivait sur une longue période et appelait à la responsabilité de tous. Je faisais valoir que l'emprunt et la poursuite de la progression de la dette, c'est la facilité générale à laquelle nous sommes enclins, les uns et les autres, et dont il faut nous prémunir. Tout à l'heure, lorsque notre collègue Joyandet disait, comme un certain nombre d'entre nous, qu'il faut faire de la pédagogie en ce domaine et éviter de retomber dans les facilités parce qu'elles se paient très cher, il avait infiniment raison. C'est le message de responsabilité que la commission des finances du Sénat s'efforce de diffuser.
Je voudrais revenir sur un second propos tenu hier par l'excellent ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - je dis « excellent » car nous apprécions toujours ses développements et le ton de nos échanges.
Il a indiqué, colonne 116 du compte rendu analytique de notre séance d'hier : « Enfin, entre 1999 et 2001, soit en seulement deux ans, le poids de cette dette a diminué de trois points ! » De quelle dette parle-t-on ? Il faut faire preuve de transparence, M. Roland du Luart nous y a incités tout à l'heure. Il faut bien lire les tableaux, même ce qui est écrit en petits caractères sous les tableaux, et s'assurer que les chiffres sont homogènes et cohérents, et peuvent donc faire l'objet de commentaires corrects du point de vue méthodologique.
Dans mon commentaire et dans le rapport écrit, je disais que, de 1997 à 2001, la dette négociable de l'Etat, madame le secrétaire d'Etat, avait augmenté en valeur absolue de 1 000 milliards de francs. La dette de l'Etat, ce n'est pas la dette publique. M. le ministre m'a répondu avec des chiffres qui concernent la dette publique. Or la dette publique, c'est la dette de l'ensemble : Etat, sécurité sociale, cher collègue Descours, et collectivités territoriales. Nous savons que, grâce aux prélèvements supplémentaires de ces dernières années, les comptes de la sécurité sociale se sont beaucoup améliorés. Les collectivités territoriales, elles, sont vertueuses. L'Etat, lui, est le mauvais élève dans cette « classe à trois ». C'est ce que nous constatons. D'ailleurs, ce n'est pas moi qui le dis, madame le secrétaire d'Etat, c'est le Livre de Poche.
En effet, dans l'édition en livre de poche de L'Economie française, INSEE, édition 2001-2002, c'est-à-dire dans la publication, pour l'ensemble de nos concitoyens, du rapport sur les comptes de la nation de 2000, on peut lire, à la page 222, premier paragraphe : « La part de la dette de l'Etat dans la dette brute est prépondérante et continue à progresser : elle en représente 79,4 % à la fin de 2000 après 74,6 % à la fin de 1997. » Qui dit cela ? Des théoriciens ultralibéraux à la solde des Américains ? (Sourires sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Des suppôts du baron Seillière ? (Nouveaux sourires sur les mêmes travées.) Pas du tout ! C'est l'INSEE, dans un livre distribué quasiment à tous les Français !
Je poursuis ma citation : « En matière d'endettement, la France occupe une position médiane au sein de l'Union européenne, dont le ratio moyen est passé de... »
Il est bien clair qu'il faut distinguer, d'une part, l'Etat, qui n'est pas vertueux, qui continue à se laisser aller à la facilité, même si la conjoncture a rendu jusqu'à présent toute chose indolore et presque invisible et, d'autre part, la dette publique qui, grâce à la consolidation des comptes des organismes sociaux et des collectivités territoriales, affiche une assez nette amélioration.
Hier soir, M. le ministre a choisi les indicateurs qui l'arrangeaient. Mais la présentation qui avait été faite par la commission, sous votre égide, monsieur le président Lambert, est une présentation globale, objective et, je le répète, non polémique. C'est la réalité des choses ! Notre collègue du Luart parlait d'or voilà quelques instants en indiquant que, dans le cadre qui sera le nôtre avec la nouvelle loi organique, ces jongleries ne seront plus possibles.
M. Roland du Luart. Espérons-le !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quel que soit le gouvernement en place, il faudra respecter une terminologie et des méthodes permanentes, un même référentiel, et lorsqu'on en changera il faudra s'expliquer devant la représentation nationale et l'opinion publique.
M. Roland du Luart. Excellente intervention !
M. Philippe Marini, rapporteur général. En d'autres termes, madame le secrétaire d'Etat, profitez bien des facilités actuelles ! Profitez-en bien pour nous présenter dans quelques mois le budget pour 2002, budget qui, nous sommes nombreux ici à en être persuadés, sera, comme celui de 1993, un budget électoral pour six mois et pour camoufler la réalité ! (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste.)
M. Roland du Luart. Excellente démonstration !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Au terme de ce long débat, entamé hier en présence de M. Fabius, vous comprendrez que je réponde peut-être plus brièvement qu'il ne l'a fait lui-même après avoir entendu les orateurs qui s'étaient exprimés au cours de la soirée.
M. Grignon a souligné que la croissance française est en phase de ralentissement. C'est un fait : elle est affectée par le ralentissement américain et par le ralentissement allemand. Ni M. Fabius ni moi-même ne l'avons nié. Nous avons dit que, par rapport à la fourchette de croissance que nous avons envisagé et qui se situe entre 2,7 % et 3,1 %, nous serions plutôt dans le bas de la fourchette. Mais nous avons dit aussi - j'aurai l'occasion d'y revenir dans un instant pour répondre à M. du Luart - que, cette année, la croissance française sera la plus forte au sein des pays du G7 et la plus forte d'Europe. Sans négliger les évolutions qui sont en cours, nous pensons raisonnablement que la France devrait mieux tirer son épingle du jeu que la plupart de ses partenaires européens.
Je tiens à souligner un autre point : depuis 1997, la croissance est fondée sur la vigueur de la demande intérieure. En 2001, cette demande intérieure restera forte, ce qui n'est pas contradictoire avec les éléments qui ont été cités de l'enquête effectuée par l'INSEE relative au moral des ménages. Par rapport à une période récente, à savoir le début de l'année, le moral des ménages est en baisse, mais il reste malgré tout beaucoup plus élevé qu'il ne l'a jamais été au cours des dix dernières années, puisqu'il demeure encore trente points au-dessus de ce qu'il fut en 1995. En ces matières, il faut se garder des caricatures et regarder les chiffres de près - je reviendrai dans un instant sur l'analyse de M. Marini.
En ce qui concerne le chômage, vous avez indiqué que des manipulations statistiques étaient à l'oeuvre. Je n'ai qu'une seule réponse à vous donner : le taux de chômage, au sens du Bureau international du travail, le BIT, est fondé sur une enquête menée directement auprès des ménages. Cette enquête confirme bien la baisse puisque, au mois d'avril, le taux de chômage, au sens du BIT, s'établit à 8,7 %. Autrement dit, c'est le chiffre le plus bas que nous ayons connu depuis 1983.
M. Grignon s'est inquiété de l'évolution des déficits publics. Il a, par ailleurs, proposé des exonérations fiscales. Il est un peu comme ceux qui, nombreux dans cet hémicycle, ne se considèrent peut-être pas comme des cigales, mais qui, en semaine, demandent des baisses de dépenses et, le dimanche, préconisent de nouvelles dépenses.
M. Grignon a également regretté de ne pas disposer de plus d'informations sur les arbitrages qui devront être effectués entre les trois pôles que constituent les dépenses, les recettes et le déficit. A l'évidence, cela fait partie des arbitrages qui seront rendus dans le courant de l'été et qui vous seront présentés lors de l'examen du projet de loi de finances.
Il a également été fait allusion à la fiscalité relative aux entreprises qui se développent dans le secteur de la nouvelle économie, notamment en ce qui concerne les stock-options. Dans ce domaine, le Gouvernement ne reste pas inactif. J'ai eu moi-même l'occasion d'être entendue par la commission présidée par Denis Badré. Le Gouvernement attend les propositions de Michel Charzat, puisque celui-ci s'est vu confier une mission de réflexion sur les améliorations qui pourraient être apportées à notre dispositif fiscal en faveur de ces entreprises innovantes.
M. Moreigne a souligné l'évolution très favorable des finances des collectivités locales. Il a bien voulu rappeler que celles-ci contribuent en effet fortement à l'excédent de nos comptes publics. Il a également rappelé que, depuis quatre ans, les concours de l'Etat aux collectivités locales avaient été dynamiques : si nous avions été sous le régime du pacte de stabilité du précédent gouvernement, en 2001, les concours des collectivités locales eussent été de 6 milliards de francs inférieurs à ce qu'ils sont. En effet, depuis 1999, nous sommes passés dans un système de contat de croissance et de solidarité, qui permet une indexation plus favorable, notamment en fonction de la croissance.
M. Moreigne a aussi rappelé la nécessaire péréquation entre les collectivités locales. Nous aurons évidemment l'occasion d'en reparler de manière très approfondie non seulement lors du débat sur le projet de loi de finances, mais aussi lors des échanges que nous aurons lorsque le rapport sur la réforme de la fiscalité locale sera présenté au Parlement. Je crois que chacun ici peut partager ce point de vue. Mais nous sommes bien conscients - je pense que M. Fabius a eu l'occasion de le dire hier soir - que cette péréquation ne peut pas reposer uniquement sur l'Etat. Désormais, nous devons rechercher au sein des collectivités locales elles-mêmes des facultés de péréquation accrues.
M. Bernard a longuement évoqué la politique de défense et les budgets qui sont accordés à ce secteur. Si l'on compare l'effort de défense de la France avec celui des Etats-Unis et de Grande-Bretagne depuis 1990, il est évident que nous avons adapté notre appareil de défense de manière beaucoup moins brutale que ces deux pays à la suite de la fin de la guerre froide. C'est le premier constat.
M. Bernard a par ailleurs longuement développé la nécessité de mener à bien le processus de professionnalisation engagé depuis 1996, ce à quoi je souscris tout à fait et ce que le Gouvernement s'est efforcé de faire, je crois, avec succès, budget après budget.
S'agissant de l'équipement, M. Bernard a mis en avant le fait que la loi de programmation militaire n'aurait pas été respectée. Sans être véritablement facétieuse, j'aimerais qu'il me cite une loi de programmation militaire qui l'ait été. Ce que je peux dire, c'est que jamais une loi de programmation militaire n'aura été mieux respectée que celle qui est actuellement en vigueur. Le meilleur exemple est tout récent : nous avons, au-delà même de la loi de programmation militaire, pris de nouveaux engagements, ne serait-ce qu'hier, en signant le contrat portant sur l'A 400 M, le nouvel avion de transport militaire qui a vocation à équiper les armées françaises. Cela montre que le budget de la défense préserve l'avenir de nos armées.
J'ajouterai une dernière information. Le projet de budget allemand pour 2002, qui est en cours d'élaboration et de discussion, prévoit une réduction, en termes nominaux, tant sur les personnels que sur les équipements, des crédits de la défense.
Nous ne sommes donc pas, comme j'ai pu l'entendre au travers des propos de M. Bernard, dans une situation où les intérêts vitaux de la France seraient mis à mal, bien au contraire ! La France entend tenir toute sa place au sein de la défense européenne.
M. Descours nous a fait un savant exposé de la situation des finances sociales, qu'il connaît évidemment parfaitement bien. Il a dit, en tout cas, c'est ce que j'ai cru comprendre - des choses assez contradictoires : d'une part, la sécurité sociale irait très bien si l'Etat ne la ponctionnait pas sans cesse ; d'autre part, bien qu'en excédent, la sécurité sociale irait très mal.
M. Charles Descours. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Vous vous êtes plaint, monsieur le sénateur, du fait que les excédents de la sécurité sociale soient agrégés, de même que les excédents des collectivités locales, au déficit de l'Etat. C'est une règle de présentation comptable qui est habituelle, que tous les pays pratiquent, et c'est ainsi que nous présentons nos comptes à Bruxelles. Nous ne cachons rien, puisque nous « décontractons », si je puis utiliser cette expression, chaque élément du solde entre l'Etat, les collectivités locales et la sécurité sociale.
S'agissant du financement des allégements de charges liés aux 35 heures, vous avez dit beaucoup de choses. Je rappellerai tout d'abord qu'en 2000, sur les 70 milliards de francs d'allégements de charges qui auront été consentis, plus de la moitié correspondent à ce que l'on appelle traditionnellement la « ristourne Juppé ».
M. Charles Descours. Sans oublier les allégements de la loi de Robien !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Absolument !
En 2000, les créations d'emploi liées aux 35 heures ont été de l'ordre de 150 000. Ce chiffre n'est pas d'une précision absolue, mais je pense que personne ne s'engagerait à quelques unités près ; ce n'est qu'un ordre de grandeur.
Ces 150 000 emplois représentent environ 10 milliards de francs de cotisations supplémentaires. C'est cela qu'il faut prendre en compte, sans balayer d'un revers de main, comme j'ai cru que vous le faisiez, monsieur le sénateur, la notion de retour. Car la baisse de la durée du travail et les allègements de charges qui l'ont accompagnée ont créé des emplois, lesquels ont généré eux-mêmes des ressources, qui sont revenues dans les caisses de la sécurité sociale.
M. Charles Descours. Ce n'est pas ce que le Gouvernement avait promis, c'est tout ce que je dis !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. L'Etat, joue tout son rôle puisque, d'ores et déjà, il assure le financement des 35 heures à hauteur de 80 %
Je souhaite insister par ailleurs sur les allégements de charges sociales ; je réponds ainsi, en quelque sorte, par anticipation à M. du Luart.
J'entends souvent que les 35 heures ont un coût élevé. Vous-même, monsieur du Luart, avez dit que ce gouvernement avait accru les charges qui pèsent sur les entreprises. Je me demande véritablement sur quoi reposent de tels propos !
Les 35 heures, ce sont des allégements de charges, plus précisément - disons les choses comme elles sont - des allégements de cotisations patronales, qui, par conséquent, bénéficient aux entreprises. Je ne vois donc pas comment ce gouvernement pourrait être accusé d'accroître les charges sur les entreprises ! J'aimerais qu'au moins l'on reconnaisse que les 35 heures s'accompagnent d'une politique d'allégement substantiel des charges au profit des entreprises.
M. Roland du Luart. C'est le coût que je critique !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Dans ce cas, monsieur du Luart, il ne faut pas dire que ce gouvernement accroît les charges qui pèsent sur les entreprises !
M. Oudin s'est interrogé sur l'augmentation des prélèvements sociaux. Il faut faire attention à ne pas commettre de confusion, car, pour moitié ou à peu près, cette augmentation provient d'un transfert de recettes des droits sur les tabacs, qui ont été affectés par l'Etat à la sécurité sociale. Il s'agit donc, en quelque sorte, d'une augmentation comptable. Pour le reste, effectivement, la hausse des prélèvements sociaux par rapport à la richesse nationale provient bien d'une augmentation de la masse salariale, qui est plus rapide que la croissance du PIB : c'est la résultante des créations d'emplois que nous avons enregistrées au cours de cette période.
Vous vous êtes également interrogé, monsieur le sénateur, sur le remboursement de la dette sociale et sur le fonds de réserve pour les retraites. L'apparition, depuis trois ans, d'excédents importants pour les régimes de sécurité sociale signifie tout simplement que ces régimes accumulent des réserves. En d'autres termes, leurs actifs nets s'améliorent. Par conséquent, sur le plan économique, le fait d'avoir des actifs nets en accroissement est équivalent à un remboursement de la dette. (M. Jacques Oudin s'exclame.)
Que cet excédent soit inscrit dans les comptes des régimes de sécurité sociale ou au fonds de réserve pour les retraites est équivalent sur un plan économique. Je conçois - et je partage ce point de vue - que vous préfériez qu'il figure au fonds de réserve pour les retraites. C'est ce que nous sommes en train de faire !
Par ailleurs, M. Oudin, avec d'autres orateurs, a déploré, dans un certain nombre de domaines - il a cité la politique familiale et les transports - ce qu'il a appelé l'irréalisme du Gouvernement, ce que je traduirai en disant que, au fond, le Gouvernement ne dépense pas assez. Finalement, ce qui est assez surprenant, c'est que, dans cette Haute Assemblée, on entend beaucoup d'appels à dépenser plus.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. J'ai donc bien entendu cet appel à dépenser plus en faveur des familles...
M. Jacques Oudin. Pas à dépenser plus ! A dépenser mieux !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. ... et en faveur des transports, comme je l'avais entendu en matière militaire. Mais je crois aussi - et ce n'est pas la Haute Assemblée qui me contredira - qu'il est important de maîtriser la dépense publique, et tout particulièrement celle de l'Etat. C'est ce que ce Gouvernement s'efforce de faire, monsieur le rapporteur général ! Dans un instant, j'aurai l'occasion de revenir sur la dette.
S'agissant des déficits publics, du déficit de l'Etat et de la dépense de l'Etat, jusqu'à présent, nous nous sommes toujours efforcés de respecter les objectifs que nous nous étions fixés.
Monsieur du Luart, vous m'avez en quelque sorte interpellée sur les hypothèses économiques qui sous-tendent le rapport d'orientation budgétaire.
Monsieur le sénateur, le Gouvernement, de manière officielle, ne prévoit pas mensuellement la croissance. Nous avons deux rendez-vous dans l'année à l'occasion desquels nous produisons un nouveau jeu d'hypothèses économiques, notamment sur la croissance, qui nous permettent également de réviser nos évaluations de recettes fiscales. Si nous n'avons pas procédé à cet exercice, dont j'ai compris que vous auriez souhaité qu'il fût réalisé à l'occasion de ce débat d'orientation budgétaire, c'est tout simplement parce que nous sommes entre ces deux rendez-vous, le prochain se situant à la fin de l'été, comme tous les ans. C'est la raison pour laquelle nous pourrons présenter un projet de loi de finances qui sera fondé sur un nouveau jeu d'hypothèses que nous souhaitons aussi proches de la réalité que possible.
Prendre le risque de refaire une prévision qui n'aurait pas été réalisée dans des conditions de sérieux suffisantes et en tirer des conclusions sur ce que devraient être nos recettes fiscales en 2001 eût été extrêmement hasardeux. Cela étant, cet exercice, qui est nécessaire, aura lieu à bonne date, c'est-à-dire à la fin de l'été prochain.
S'agissant des prévisions du FMI, je vous en donne acte, il s'agit d'une erreur matérielle, la correction n'ayant pas pu être effectuée. Vous avez l'oeil, monsieur du Luart, et je vous en félicite. (Sourires.)
Sur le fond, monsieur du Luart, si nous avions pu rectifier le chiffre et fournir la prévision du FMI de manière homogène, comme nous aurions sans doute dû le faire, cela n'aurait rien changé au sens du tableau qui figure à la page 8 et le classement de la France par rapport aux autres pays n'aurait en rien été modifié. (M. du Luart s'étonne.)
J'ajoute que ce tableau a deux vocations : d'une part, fournir une indication sur l'avenir et, d'autre part, donner une vision rétrospective de ce qu'a été la croissance française depuis quatre ans par rapport à ses principaux voisins ou compétiteurs, croissance dont je répète qu'elle a été non seulement solide mais régulière et à haut niveau.
M. Joyandet a taxé de laxisme la politique budgétaire du Gouvernement. Je ne rappellerai que deux données, en espérant ne pas être soumise à la vindicte de M. le rapporteur général. (Sourires.) Sur toute la période allant de 1997 à 2002, la croissance moyenne des dépenses de l'Etat aura été de 1,8 % ; de 1993 à 1997, cette croissance a été également de 1,8 %, mais par an ! Les laxistes ne sont pas forcément ceux que vous dénoncez sans cesse, tout en réclamant d'ailleurs, sans cesse également, avec d'autres, de nouvelles dépenses.
S'agissant de la dette publique, monsieur le rapporteur général, je reprends les chiffres que vous avez cités et qui sont extraits de l'édition de poche du rapport sur les comptes de la nation : de 1980 à 1993, la dette publique est passée de 21 % à 45,6 % du produit intérieur brut, soit, en effet, plus de 20 points ; de 1993 à 1997, elle est passée de 45,6 % à 59,3 % du PIB, soit près de 14 points. Ce qui compte, c'est la durée respective des périodes considérées : quatorze ans pour 24 points, d'un côté, et quatre ans pour 14 points, de l'autre.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les arrondis généreux !
Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, nous avons eu, ici même, de très longs débats sur la dette publique voilà moins d'une semaine.
Je crois avoir dit que je souscrivais pleinement à l'objectif consistant à enrichir l'information du Parlement s'agissant de la dette publique. Nous n'attendrons pas la mise en oeuvre de la nouvelle loi organique qui, me semble-t-il, est en bonne voie entre les deux assemblées, pour procéder à cette amélioration. Nous le ferons dès le projet de budget pour 2002. Il faudra effectivement attendre que la nouvelle loi organique entre en application pour que le Parlement puisse se prononcer par un vote sur ce sujet extrêmement important.
Quant à la « cagnotte », dont il a été question, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite apaiser vos craintes : il n'y aura pas, en 2002, de nouvelle cagnotte ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Sur ce point, nous sommes parfaitement d'accord ! (Sourires.)
M. le président. Je constate que le débat est clos.
Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le n° 392 et distribuée.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

5

ALLOCUTION DE M. LE PRÉSIDENT DU SÉNAT

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, cette année, ce rituel républicain que constitue le discours de fin de session revêt une signification particulière, puisqu'il intervient à la veille d'échéances électorales aussi variées qu'importantes.
Pour le Sénat, cette session qui s'achève est la dernière de l'une de ces périodes triennales qui rythment et scandent la vie de notre assemblée.
A celles et ceux d'entre nous qui ont choisi de mettre un terme à leur carrière sénatoriale, j'adresse d'emblée mes remerciements et mes félicitations pour la tâche accomplie ainsi que mes voeux les plus chaleureux de plénitude et d'épanouissement dans leur nouvelle vie.
Vous savez, chers amis, que vous serez toujours chez vous dans notre maison commune. La République n'est-elle pas aussi « une grande amitié », pour reprendre la formule de Michelet ?
Le dimanche 23 septembre, date du prochain renouvellement partiel, marquera l'entrée du Sénat dans une ère nouvelle.
En effet, cette élection verra la première application de l'extension de la proportionnelle, qui est aussi le cheval de Troie de la parité sous sa forme la plus radicale, la parité alternée.
Ces réformes de notre mode d'élection ne manqueront pas, dans un avenir plus ou moins proche, de modifier la physionomie du Sénat.
C'est dans la perspective de ces mutations annoncées et annonciatrices d'autres évolutions que le bilan de la présente session prend toute sa signification.
A cet égard, prenons garde d'oublier que, loin de s'apparenter à une quelconque « anomalie », le Sénat de la République participe de l'exception française, car il constitue un modèle unique en Europe.
Le Sénat présente en effet la particularité féconde d'être une assemblée parlementaire à part entière, qui exerce de surcroît - c'est un enrichissement, un « plus », un bonus constitutionnel - une fonction de représentation des collectivités territoriales.
Pour cette session, le bilan de l'activité du Sénat en tant qu'assemblée parlementaire apparaît contrasté : si les conditions dans lesquelles il a dû exercer sa fonction de législateur suscitent une appréciation mitigée, en revanche, ses actions de contrôleur, qui relèvent de sa seule initiative, appellent, elles, un jugement positif.
En effet, cette session parlementaire se caractérise par une certaine dégradation, ou plutôt par une dégradation certaine, du bicamérisme équilibré que la pratique institutionnelle a fait succéder au bicamérisme voulu par les pères de la Constitution, à savoir un bicamérisme égalitaire tant que le Gouvernement n'en décidait pas autrement.
Aujourd'hui, le Gouvernement en décide autrement, de plus en plus souvent. Force est de constater, à cet égard, un nouveau recul du principe d'adoption des textes de loi par les deux assemblées et une banalisation du recours au « dernier mot ».
A preuve, sur les trente-trois lois - hors conventions - adoptées au cours de la présente session, près d'une loi sur deux l'a été au bénéfice du dernier mot donné à l'Assemblée nationale.
Certes, en vertu de la Constitution, la loi adoptée par la seule majorité des députés est juridiquement parfaite ; mais la loi unilatéralement votée par l'Assemblée nationale est « bancale » - si je puis dire - car il lui manque l'expertise du Sénat, gage d'une plus grande longévité de la norme.
Cette banalisation du « dernier mot » est aggravée par la dérive de l'urgence, que je déplore chaque année. Vox clamans in deserto.
Cette année, cette dérive de l'urgence, qui s'est amplifiée, confine désormais à l'abus de l'urgence puisque le Gouvernement a procédé à deux fois plus de déclarations d'urgence qu'au cours de la session précédente. Nous en avons déjà parlé en conférence des présidents, monsieur le ministre.
Comme l'an dernier, l'urgence a frappé les textes les plus importants de la session par leur portée politique.
Cependant, phénomène nouveau, l'urgence concerne désormais des textes de caractère plus technique, comme le projet de loi sur les musées de France.
Bien plus, et il s'agit là d'une innovation tout à fait contestable, la déclaration d'urgence peut ne pas résulter, officiellement, d'une initiative du Gouvernement, mais d'une simple demande formulée par les rapporteurs de l'Assemblée nationale ! Tel fut le cas pour les trois textes mettant en oeuvre la réforme des tribunaux de commerce... qui attendent toujours des jours meilleurs !
En outre, les textes frappés du sceau de l'urgence ont été déposés, à deux exceptions près, sur le bureau de l'Assemblée nationale.
Dès lors, l'examen par l'Assemblée nationale des propositions du Sénat sera cantonné à un débat restreint : seuls les sept députés membres de la commission mixte paritaire peuvent prendre connaissance des modifications apportées par le Sénat en première lecture.
De plus, l'examen de la quasi-totalité des textes soumis à l'urgence s'est soldé, comme l'an dernier, par un échec de la commission mixte paritaire et une adoption « en dernier mot » par l'Assemblée nationale.
Comme je l'ai dit et répété - mais la répétition n'est-elle pas une forme de pédagogie ? - la déclaration d'urgence s'apparente alors en quelque sorte à la « chronique d'un échec annoncé », car elle apparaît comme le signe avant-coureur ou prémonitoire de l'échec de la navette.
Si ce phénomène n'était pas aussi inquiétant pour l'équilibre de nos institutions, le caractère quasi systématique du recours à l'urgence pourrait fait sourire, comme en témoigne le cas du projet de la loi relatif aux nouvelles régulations économiques : déclaré urgent, l'examen de ce texte aura nécessité près de quatorze mois pour aboutir à sa lecture définitive. Festina lente : Hâte-toi lentement ! Il est vrai qu'en cette occurrence, l'utilisation de la procédure d'urgence ne semblait destinée qu'à faire l'économie d'une deuxième lecture.
A ces deux dérives - banalisation du « dernier mot » et abus de l'urgence - dont les effets se conjuguent, se surajoute un phénomène nouveau, celui de la prolifération des textes « fourre-tout » traitant au coup par coup de problèmes importants qui auraient nécessité autant de projets de lois distincts.
On constate aujourd'hui une tendance à revenir à cette pratique condamnable, qui avait cessé pendant une certaine période.
Du projet de loi de modernisation sociale, dont l'intitulé clinquant recouvre une mosaïque de fonds de tiroir des ministères, au projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, dit DDOSEC, en passant par le projet de loi portant mesures urgentes à caractère économique et financier, dit MURCEF, ce recours croissant à une législation que j'ai qualifiée de « législation en miettes » comporte des conséquences néfastes. En effet, cette parcellisation du travail législatif contribue à un accroissement de l'inflation législative, à une désacralisation de la norme juridique et à une aggravation de l'insécurité juridique, nombre de ces nouvelles dispositions touchant, dans la plupart des cas, à des lois récentes dont l'encre est à peine sèche.
En définitive, tous ces dysfonctionnements - banalisation du dernier mot, abus de l'urgence et prolifération de textes hétéroclites - constituent autant d'atteintes et d'entraves au fonctionnement harmonieux d'un bicamérisme équilibré. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Le Gouvernement, monsieur le ministre, aurait été mieux inspiré d'écouter le Sénat lorsque celui-ci a tenté vainement de lui éviter une censure du Conseil constitutionnel en lui suggérant, pour faciliter le retour à l'emploi, de recourir au mécanisme du crédit d'impôt plutôt qu'à un « mitage » de la CSG, à laquelle il est indispensable de conserver son caractère d'impôt universel - c'est ainsi qu'elle fut baptisée à l'époque par son auteur, M. Michel Rocard.
Monsieur le ministre, le respect du bicamérisme équilibré est à l'évidence un gage de bonne législation, et le Gouvernement a tort, croyez-moi, de se priver des apports du Sénat.
Contrepoids démocratique, au sens de Montesquieu, le Sénat ne saurait, j'insiste sur ce point, se dévoyer dans une contestation systématique ou une opposition permanente.
Le Sénat n'est ni une chambre d'enregistrement ni la chambre du refus. C'est une assemblée parlementaire animée par une conception exigeante de son rôle de législateur, au-delà de l'écume des jours, des modes du moment ou des foucades de l'instant.
C'est également une assemblée animée par un sens aigu des responsabilités. Elle vous l'a prouvé, monsieur le ministre, lorsqu'elle a eu le courage d'encadrer l'organisation des rave parties pour assurer une plus grande sécurité aux adeptes de la « techno culture ».
Le Sénat est courageux, il l'a montré lorqu'il a pris l'initiative, sous l'impulsion de notre collègue Nicolas About, de traiter du délicat problème des sectes.
Monsieur le ministre, je sais que nous pouvons compter sur vous pour être notre interprète auprès de M. le Premier ministre.
En cet instant, monsieur le ministre, je voudrais - et je pense traduire le sentiment de tous mes collègues - saluer votre courtoisie, votre disponibilité et votre sérénité républicaines ainsi que votre souci constant de faciliter les rapports entre le Sénat et le Gouvernement. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.) Soyez-en chaleureusement remercié, monsieur le ministre, tout comme vos collaborateurs, qui entretiennent des relations confiantes avec mon cabinet, ce à quoi je suis sensible.
Si le Sénat a rencontré des difficultés avec la production législative du Gouvernement, il n'en va pas de même avec ses propres initiatives législatives.
En effet, l'adoption, au cours de la présente session, de vingt-trois propositions de loi d'origine sénatoriale montre que notre assemblée entend jouer pleinement son rôle d'incubateur, ou d'accélérateur de réformes sur certaines thèmes, comme le statut de l'élu, les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires ou l'indemnisation de l'aléa médical.
Véritable aiguillon, le Sénat a devancé le Gouvernement sur ces différents sujets.
Le Sénat n'est pas seulement « modérateur », il peut aussi prendre les devants dans l'élaboration des réformes qui intéressent la vie quotidienne des Français.
Il y a cependant une ombre à ce tableau : sur les quatorze lois d'initiative parlementaire adoptées définitivement depuis le début de la session, cinq seulement ont une origine sénatoriale. Ce bilan, qui est loin d'être positif, s'explique par le faible nombre des propositions de loi sénatoriales inscrites à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée nationale. Il faudra veiller à réserver à celles-ci un meilleur sort.
Au-delà de son premier métier de législateur, dont les conditions d'exercice appellent une appréciation mitigée, le Sénat a développé, au cours des dernières années, sa mission de contrôleur, qui est en train de devenir, en quelque sorte, sa seconde nature.
C'est ainsi que trois missions d'information consacrées à des thèmes aussi divers que l'expatriation, l'épizootie de fièvre aphteuse ou la lutte contre le cancer ont déposé, ou vont déposer prochainement, leurs conclusions.
Par ailleurs, alors que seulement seize commissions d'enquête stricto sensu avaient été créées par notre assemblée entre 1958 et 1998, cinq commissions d'enquête ont vu le jour depuis cette date, et la création de deux autres commissions d'enquête est envisagée pour la rentrée. Il y a là un net progrès !
Au-delà de leur diversité apparente, ces investigations présentent la caractéristique commune de porter sur des préoccupations majeures de nos concitoyens : la gestion des risques, la sécurité et la santé.
Conformément au souhait que j'avais exprimé dans mon discours-programme d'octobre 1998, le Sénat tend à devenir une assemblée de proximité.
Pour les commissions d'enquête, il m'apparaît désormais indispensable de mieux planifier le calendrier de leurs travaux afin de permettre aux représentants de la minorité de disposer d'un temps suffisant pour prendre connaissance des propositions du rapporteur, par exemple une semaine avant l'adoption définitive du rapport.
De même, il nous appartiendra de veiller à écarter tout risque de « fuite » avant la conférence de presse, tout en assurant, par la suite, une publicité optimale du rapport.
Mais ces améliorations me semblent relever davantage de l'édiction d'un code de bonne conduite que d'une modification du règlement du Sénat.
D'une manière générale, il m'apparaît indispensable que les conclusions et les propositions des missions d'information et des commissions d'enquête fassent l'objet d'un meilleur suivi, grâce à l'organisation, quelques mois après la publication des rapports, de débats en séance publique avec les ministres concernés.
A cet égard, je tiens à saluer la démarche exemplaire qui a été retenue pour le suivi des propositions de la commission d'enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires, animée par nos collègues Guy-Pierre Cabanel et Jean-Jacques Hyest : ils ont pris l'initiative, quatre mois après la publication du rapport, d'organiser un débat en séance publique, par le truchement d'une question orale avec débat - merci, monsieur le ministre, d'avoir fait en sorte que ce débat puisse avoir lieu ! - et, cinq mois après, de faire adopter une proposition de loi. Voilà du bon travail législatif ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Au-delà de ces instances, le contrôle prend également la forme d'opérations ponctuelles menées par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances ou, plus récemment, par les rapporteurs de la commission des affaires sociales.
En l'occurrence, je tiens, sans oublier la commission des finances, à adresser mes plus vives félicitations au président Jean Delaneau et aux rapporteurs concernés, nos collègues Alain Gournac, Charles Descours, Jean-Louis Lorrain et Alain Vasselle, pour ce tir groupé « d'opérations vérité » portant sur le financement des 35 heures, les emplois-jeunes, les fonds sociaux et les fonds médicaux.
Le contrôle, c'est aussi, dans une large mesure, l'examen du projet de loi de finances initiale, qui devrait constituer l'un des temps forts du travail parlementaire, mais auquel s'applique encore trop souvent la célèbre trilogie d'Edgar Faure : litanie, liturgie, léthargie.
Pour le dernier budget rédigé en francs, le budget pour 2001 - la nostalgie n'est plus ce qu'elle était... - nous avons expérimenté avec succès, sur l'initiative du président Alain Lambert, une rénovation de la discussion budgétaire esquissée voilà quelques années. Cette réforme s'est traduite notamment, avec l'accord du Gouvernement, par l'instauration d'un débat sur les recettes des collectivités locales et par l'institution, pour l'examen des fascicules budgétaires, d'une discussion plus resserrée et d'un dialogue plus dynamique et interactif. C'est ainsi qu'il fut qualifié par l'unanimité des membres de notre assemblée, et même des membres du Gouvernement.
Cette dynamisation de l'examen de la loi de finances pour 2001 a représenté un premier pas vers l'indispensable réforme de l'immuable ordonnance organique de 1959 sur les lois de finances, véritable « constitution financière » de la France.
Cette réforme, qui est destinée à accroître le contrôle du Parlement en conférant à la présentation de la loi de finances davantage de lisibilité, de transparence et de sincérité, résulte, certes, d'une initiative de la commission des finances de l'Assemblée nationale, mais elle a été précédée d'une réflexion menée depuis de longs mois sous l'égide de président Alain Lambert et en liaison étroite avec la Cour des comptes.
Pour aboutir, cette réforme suppose un accord entre les deux assemblées, puisque le Conseil d'Etat a estimé, à juste titre, dirai-je, que cette proposition de loi organique était - je tiens à citer l'expression du Conseil d'Etat - « relative au Sénat » au sens de l'article 46 de la Constitution.
Pour ma part, je forme le voeu que cette trente-sixième - la trente-sixième ! - tentative de réforme de l'ordonnance organique de 1959 soit la bonne et que les deux assemblées, dont ce sera l'oeuvre commune, parviennent rapidement à un accord sur le « plus grand dénominateur commun » possible.
Contrôler, c'est enfin assurer une mission de veille et de suivi de l'évolution des politiques communautaires à un moment crucial pour l'avenir de la construction européenne.
Pour ce faire, nous disposons maintenant d'un outil performant d'alerte et de collecte de l'information : il s'agit de l'antenne permanente de Bruxelles, qui est désormais dotée d'un « second étage » dont la mission est d'instruire - à votre demande, mes chers collègues - les dossiers d'accès aux fonds structurels présentés par nos collectivités locales.
Mais, surtout, nous disposons d'une instance, la délégation pour l'Union européenne, qui, sous l'égide de notre dynamique et sympathique collègue le président Hubert Haenel, multiplie les initiatives.
Pour ma part, je retiendrai son combat légitime pour éviter que le Parlement ne soit « mis sur la touche » du débat européen.
M. Jacques Oudin. Très bien !
M. le président. En effet, pour résorber le retard de la France dans la transposition des directives communautaires - je rappelle, pour le regretter, que notre pays occupe le rang de lanterne rouge, avec la Grèce - le Gouvernement peut être tenté de dessaisir le Parlement par un recours encore accru aux ordonnances. Il faut l'éviter, et nous le pouvons.
C'est pourquoi j'approuve l'économie des propositions de loi « Montesquiou-Haenel », qui tendent à instaurer une nouvelle séance mensuelle réservée pour la transposition de directives communautaires.
Je me félicite également de la croisade entreprise par la délégation, sous la plume de Daniel Hoeffel, pour promouvoir l'idée d'un Sénat européen, idée défendue avec constance par les trois présidents successifs du Sénat français, Alain Poher, René Monory et votre serviteur, qui a créé une enceinte, l'Association des Sénats d'Europe, pour notamment favoriser l'émergence de ce concept.
Ce projet, destiné à mieux assurer la démocratie dans l'Union européenne, gagne à l'évidence du terrain, comme en témoigne le récent ralliement à cette cause de personnalités aussi différentes que le président Vaclav Havel, Joschka Fisher, Tony Blair, Gerhard Schröder ou Lionel Jospin.
Assemblée parlementaire à part entière, le Sénat assume, en outre, une mission constitutionnelle de représentation des collectivités territoriales, récemment réaffirmée avec force et solennité par le Conseil constitutionnel.
C'est pourquoi le Sénat s'emploie à devenir la Maison des collectivités locales.
Cette quête de la proximité s'est traduite, tout d'abord, par l'organisation des états généraux des élus locaux, que je tiens dans les régions avec le concours, ô combien précieux ! de tous les sénateurs concernés.
Loin d'être des « grands-messes républicaines » sans lendemain, ces états généraux, dont la septième édition a eu lieu à Marseille le 15 juin dernier, avec le concours actif de notre ami Jean-Claude Gaudin, en présence de tous les parlementaires de la région et avec la participation de 850 élus locaux, donnent naissance à des réponses législatives qui transcendent les clivages politiques, comme la loi Fauchon ou les propositions de loi relatives au statut de l'élu ou à la protection de l'autonomie fiscale des collectivités locales.
Au-delà de la consolidation du socle de la décentralisation - cette réforme bénéfique mais inachevée ! - il s'agit maintenant de dessiner les contours de cette future République territoriale, qui recueille un large consensus.
Par ailleurs, le Sénat met en oeuvre, depuis 1998, une politique volontariste de services offerts aux collectivités locales avec la création, au sein du Sénat, du service des collectivités territoriales, l'ouverture d'un site Internet dédié aux élus locaux et, enfin, la mise à disposition de l'antenne sénatoriale de Bruxelles.
Le symbole éclatant de cette proximité retrouvée avec les élus locaux a été, sans conteste, la fête de la Fédération, ou plutôt la fête des maires, du 14 juillet 2000, qui a réuni autour de nous, mes chers collègues, sur les Champs-Elysées, puis dans les jardins du Sénat, 13 000 maires ceints de leur écharpe tricolore.
Assemblée parlementaire à part entière et, de surcroît, Maison des collectivités locales, tels sont, mes chers collègues, les traits caractéristiques de la spécificité du Sénat, qu'il est indispensable de préserver et même de renforcer, car elle constitue la raison d'être du bicamérisme, auquel nous sommes, les uns et les autres, particulièrement attachés.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de cette session, un constat s'impose : le Sénat n'a pas à rougir de son bilan, car il s'est acquitté, certes à des degrés divers, mais toujours avec compétence et persévérance, de sa triple mission de législateur, de contrôleur et de protecteur de l'autonomie locale.
Ce résultat, globalement positif, nous le devons à tous les acteurs de la vie sénatoriale, à qui j'adresse mes sincères félicitations et mes chaleureux remerciements.
Je pense aux présidents de groupe, à tous les présidents de groupe, ces habiles négociateurs, à qui échoit la redoutable tâche de dégager un consensus au sein de leur groupe, tout en laissant s'exprimer les différences de sensibilité.
A ces remerciements, j'associe les collaborateurs des groupes et les assistants des sénateurs, qui facilitent grandement leurs tâches.
Je pense aussi aux vice-présidents, qui ne ménagent pas leur peine pour conduire, chacun avec son style et son tempérament, mais toujours avec talent et efficacité, nos travaux en séance publique.
Je pense aux présidents des commissions, déjà félicités mais qui méritent un bis, un « rappel », car ils sont sans cesse sur la brèche.
Je pense à nos questeurs, gestionnaires de la vie quotidienne du palais, qui s'efforcent de nous accorder les meilleures conditions de travail possible.
Je pense aux membres du bureau, qui constitue le conseil d'administration de l'entreprise Sénat : ils ne me ménagent pas leur appui dans la mise en oeuvre de la politique de rénovation de notre institution. Je tiens, bien sûr, à les remercier.
Je pense aux fonctionnaires du Sénat, tous grades confondus, sans qui rien ne serait possible. Ils savent combien j'apprécie leur compétence, leur disponibilité et leur dévouement. Ils savent que je serai toujours à leurs côtés lorsqu'ils feront l'objet d'attaques imméritées.
Je pense également aux derniers venus dans notre grande famille sénatoriale, c'est-à-dire à Jean-Pierre Elkabbach et à son équipe de Public Sénat. Qu'ils soient remerciés et félicités pour leur professionnalisme, leur compétence et leur enthousiasme. Le pari de la qualité me semble d'ores et déjà relevé ; il convient maintenant de gagner, grâce au numérique, la bataille de l'audience.
Je pense enfin aux journalistes, que je remercie de suivre nos travaux, même s'il m'arrive parfois d'estimer qu'ils pourraient leur conférer une couverture médiatique tout à la fois plus large et, sur certains points, plus objective !
Mes chers collègues, à celles et à ceux qui vont mettre à profit cet intermède estival pour reconstituer leur force de travail, je souhaite une pause enrichissante... intellectuellement, bien sûr.
A ceux d'entre nous qui seront condamnés à battre la campagne avant d'affronter le verdict des urnes, je souhaite, sans distinction d'appartenance politique, bonne chance.
Sans distinction, car, au-delà de nos différences de sensibilité politique, nous participons tous à une même cause, celle de la défense et illustration du bicamérisme, qui a été consacré par l'histoire avant d'être plébiscité par la géographie, comme en témoigne la floraison de sénats dans le monde.
A la rentrée, il nous faudra prolonger l'oeuvre entreprise ensemble pour préserver la spécificité du Sénat, normaliser son existence, et conforter son rôle de contre-pouvoir - qui ne signifie pas contre le pouvoir ! - indispensable à notre démocratie. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe communiste républicain et citoyen.) M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le 29 juin, nous achèverons la quatrième session ordinaire de la législature grâce à une dernière semaine de cinq jours de séance que la conférence des présidents, sur la proposition du Gouvernement, a décidé d'organiser. Le Sénat, comme l'Assemblée nationale, pourra poursuivre l'examen de textes importants : dans le domaine européen, le projet de loi autorisant la ratification du traité de Nice, dans le domaine social et rural, le projet de loi d'orientation sur la forêt, dans le domaine financier, la proposition de loi organique relative aux lois de finances.
Depuis 1997, le Gouvernement a eu le souci de respecter le rythme de travail du Parlement. Le Sénat ne peut l'ignorer puisqu'il a pris près de quatre semaines pour débattre, en première lecture, de la proposition de loi organique modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale. (Murmures sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Jean Delaneau. Il fallait bien ça !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. En définitive, ce texte a été adopté en avril et n'a encouru aucune censure du Conseil constitutionnel. Le 29 juin, le Sénat aura siégé quatre-vingt-seize jours, soit onze jours de moins que lors de la précédente session et très loin du plafond constitutionnel de cent-vingt jours de session. Il est vrai que, cette année, la campagne pour les élections cantonales et municipales a conduit à une interruption entre le 8 février et le 27 mars.
Quel bilan pouvons-nous dresser de cette session à quelques jours de sa clôture ?
Sur le plan législatif, cette session, plus brève que les précédentes, a été très productive.
Dans le domaine économique et social, je relève tout d'abord la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Je retiens aussi l'adoption du projet de loi relatif aux nouvelles régulations économiques, même si, monsieur le président, son examen a été un peu plus long,...
M. Jean-Jacques Hyest. Laborieux ! M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... la création de la prime pour l'emploi, la loi relative à l'épargne salariale ainsi que l'avancement de la navette du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.
Quant à la loi de modernisation sociale, le Sénat commencera son examen en deuxième lecture la semaine prochaine. Ce texte comprend de nombreuses dispositions dans les domaines de la formation professionnelle, de la santé et du droit du travail. Le Premier ministre invitait hier les deux assemblées à faire diligence pour que soient rapidement levées les incertitudes qui pourraient affecter les avancées sociales qu'il contient.
Le Parlement a beaucoup légiféré dans le domaine de l'environnement, avec la création d'une agence française de sécurité sanitaire et environnementale. Il a aussi renforcé la sécurité du transport maritime et la lutte contre les pollutions marines.
La loi d'orientation sur la forêt sera, je l'espère, adoptée avant la fin de la session si la commission mixte paritaire, réunie en ce moment, réussit. Elle permettra de développer une politique de gestion durable de la forêt française.
Je souligne également l'adoption de la proposition de loi, déposée sur l'initiative du sénateur Paul Vergès, qui confère à la lutte contre l'effet de serre la qualité de priorité nationale et crée un observatoire national. Après la remise en cause des acquis de Kyoto, notamment par le président américain, il s'agit là d'une initiative très opportune.
A l'automne sera poursuivie la navette de la proposition de loi sur les accidents du travail en matière agricole, que vous allez examiner dans quelques instants.
La politique de réformes s'est aussi traduite dans d'autres textes qui prennent en compte les évolutions de notre société.
Je pense, tout d'abord, aux droits des femmes avec la loi relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, la proposition de loi sur la contraception d'urgence, la loi d'origine parlementaire relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.
J'évoquerai aussi le projet de loi instituant une allocation personnalisée d'autonomie pour les personnes âgées, disposition très attendue qui devrait être adoptée avant la fin de la session et qui sera appliquée dès le 1er janvier 2002.
Pour sa part, la proposition de loi relative à l'adoption internationale devrait sécuriser la situation juridique du lien adoptif.
Je tiens à saluer tout particulièrement le travail, mené conjointement dans les deux assemblées, par M. le sénateur About et Mme la députée Catherine Picard en faveur de la prévention et de la répression des groupements sectaires.
Ce texte a fait l'objet de nombreux échanges afin de parvenir à des dispositions adaptées pour éviter des excès graves allant à l'encontre du principe même de la liberté de pensée.
Enfin, la France, à qui revenait entre juillet et décembre la présidence de l'Union européenne, a poursuivi l'adaptation de son droit aux obligations communautaires. Cela reste encore insuffisant, je partage votre point de vue, monsieur le président. Nous en avons discuté la semaine dernière sur la base des propositions de loi de MM. Haenel et de Montesquiou. Je souhaite que nous puissions améliorer notre capacité à intégrer les normes européennes dans notre droit. Pour résorber le retard, le Parlement a habilité le Gouvernement à transposer, par ordonnances, plus de cinquante directives communautaires.
Il a aussi adopté diverses mesures d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports et en matière de santé des animaux et de qualité sanitaire des denrées d'origine animale.
Enfin, la discussion, jeudi prochain, du projet de loi autorisant la ratification du traité de Nice devrait permettre à notre pays d'être parmi les premiers - le deuxième en principe après le Danemark - à s'engager dans cette nouvelle étape de la construction européenne.
La modernisation de la vie publique s'est poursuivie puisque, vingt-sept ans après une première tentative, la Constitution a été révisée pour instaurer le quinquennat.
Le Parlement a adopté le projet de loi organique modifiant certaines modalités d'organisation de l'élection du Président de la République. Il a aussi, malgré l'opposition de la majorité sénatoriale, rétabli le calendrier électoral du printemps prochain en renvoyant les élections législatives après l'élection présidentielle.
Le Sénat sera saisi en octobre de la proposition de loi constitutionnelle que l'Assemblée nationale vient d'adopter réformant l'article 68 de la Constitution, sur le statut pénal du chef de l'Etat.
M. Alain Gournac. C'est une combine politique !
M. Jean Chérioux. Encore une opération politicienne !
M. Josselin de Rohan. Vous n'aurez pas à vous en vanter !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. La proposition de loi organique relative aux lois de finances a été longuement débattue dans cet hémicycle, après un excellent travail mené par la commission des finances du Sénat et son président, M. Alain Lambert. Je note que ce travail a été fait en concertation avec l'Assemblée nationale et en relation avec le Gouvernement, qui a tenu à ce que la discussion parlementaire soit menée dans le plus large esprit de dialogue.
M. Dominique Braye. Sûrement pas !
M. Josselin de Rohan. Il n'y a pas eu de dialogue !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Eh bien, monsieur de Rohan, à mes yeux, il y a bien eu dialogue sur ce texte, qui reviendra jeudi prochain devant votre assemblée et qui pourrait être adopté définitivement avant la fin de la session. Nous serons alors dotés d'une constitution financière rénovée sur l'initiative du Parlement, ce qui contribuera aussi, monsieur le président, à ce vaste chantier que constitue la réforme de l'Etat.
Par ailleurs, sur l'initiative du Sénat et de son vice-président M. Gaudin, les conseillers d'arrondissement de Marseille et de Lyon peuvent maintenant siéger au conseil de leur communauté urbaine.
Nos compatriotes d'outre-mer n'ont pas été oubliés puisque la loi d'orientation pour les départements d'outre-mer, que j'avais moi-même eu l'honneur de présenter en première lecture devant les deux assemblées, a été définitivement adoptée.
Le nouveau statut de Mayotte devrait, lui aussi, être adopté d'ici au 30 juin.
Les dispositions concernant la Polynésie française ont, tout comme celles qui avaient trait à Mayotte, fait l'objet d'un consensus entre les deux assemblées, qui ont voté la proposition de loi organique sur la répartition des sièges à l'assemblée territoriale : les élections viennent de se dérouler au début du mois de mai.
Enfin, la proposition de loi de Mme Taubira-Delannon sur la reconnaissance de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité a, elle aussi, bénéficié du consensus des deux assemblées.
Je n'oublie pas la poursuite de la réforme de l'administration. Le projet de loi relatif à la lutte contre la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi que le projet de loi organique relatif au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature ont été adoptés.
Sur l'initiative de votre collègue M. Dreyfus-Schmidt, l'amélioration de l'indemnisation des condamnés reconnus innocents a été réalisée.
M. Simon Sutour. Très bien !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, vous avez regretté dans votre intervention la prolifération de textes « fourre-tout ». (Avec raison ! sur les travées du RPR.)
Je veux vous faire remarquer, mesdames, messieurs les sénateurs, que ces textes, qui regroupent des dossiers relevant parfois de plusieurs départements ministériels, sont inhérents aux fins de législature : ils complètent le projet politique du Gouvernement ou adaptent la législation aux faits nouveaux apparus depuis quatre ans.
Si le Gouvernement a, en cours de débat, la tentation de compléter ces textes par des amendements, les parlemenaires ne sont pas en reste ! Cela étant, le pouvoir d'amendement est un principe constitutif de notre droit parlementaire.
Je tiens à souligner qu'au cours de cette session l'initiative parlemenatire a été très importante : sur les quelque quarante lois qui devraient être adoptées d'ici au 30 juin, plus d'un texte sur trois était d'origine parlementaire, onze propositions de loi émanant de l'Assemblée nationale et cinq du Sénat. Ce mouvement devrait se poursuivre lors de la prochaine session. Le Gouvernement a d'ores et déjà décidé d'inscrire dès les premières semaines de la prochaine session à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale la proposition de loi relative aux établissements publics de coopération culturelle, ...
M. Ivan Renar. Très bien !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... qui est due à l'initiative de votre collègue M. Ivan Renar et qui a été adoptée ici même à l'unanimité.
Le dialogue entre les deux assemblées a fonctionné au cours de cette session. Vous avez évoqué, monsieur le président, la banalisation du « dernier mot », mais il y a eu, en définitive, vingt-quatre accords entre l'Assemblée et le Sénat, ...
M. Dominique Braye. Sur combien de textes ?
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... se répartissent comme suit : six commissions paritaires aboutissant à un texte commun, sept votes conformes dès la première lecture, dix en deuxième lecture et un en troisième lecture. Ainsi, les deux assemblées ont trouvé un accord sur plus de la moitié des textes qui leur étaient soumis.
Vous avez aussi déploré, monsieur le président, le fait que le Gouvernement utilise la procédure de l'urgence,...
M. Josselin de Rohan. Et il l'a fait à juste titre !
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... privant ainsi le Sénat d'une lecture et de la possibilité de rechercher un accord avec l'Assemblée nationale.
M. Dominique Braye. C'est la négation des droits du Parlement !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Pourtant, depuis 1997, le Gouvernement a fait un usage plutôt modéré de cette procédure. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Dominique Braye. On vous a prouvé le contraire !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Elle a été utilisée douze fois lors de la session 1997-1998, neuf fois lors de la session suivante, dix fois lors de la session 1999-2000. Certes, pour cette session, l'urgence a été déclarée sur vingt et un textes. (Ah ! quand même ! sur les mêmes travées.)
M. Dominique Braye. Voilà la vérité !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Mais nous sommes en fin de législature et tous les gouvernements recourent plus fréquemment à la déclaration d'urgence à l'approche de la fin d'une législature.
M. Alain Gournac. C'est faux !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Je vous rassure, cependant, mesdames, messieurs les sénateurs : ce taux demeure encore inférieur à celui des précédentes législatures.
M. Alain Gournac. Faux !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, l'esprit de nos institutions donne au Sénat un rôle constructif de chambre d'expérience et de réflexion,...
M. Josselin de Rohan. Alors, il n'est pas une anomalie ?...
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... lui permettant d'améliorer les textes qui lui sont soumis,...
M. Louis de Broissia. Il faut donc en profiter !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. ... en s'inscrivant dans la logique de la navette parlementaire, qui, en application de l'article 45 de la Constitution, réserve, selon la volonté gouvernementale, à l'Assemblée nationale le « dernier mot ».
Dans mon esprit, cette logique majoritaire, qui est celle du constituant de 1958, laisse ouvert un important espace de discussion pour conduire une concertation entre les deux chambres, à la recherche d'un accord.
Même si sa majorité n'est pas en concordance avec celle de l'Assemblée nationale, qui a été élue au suffrage universel direct, le Sénat ne peut, en aucune manière, se transformer en une chambre d'opposition systématique - vous avez dit « permanente », monsieur le président -, voire d'obstruction.
Sa vocation n'est pas non plus de produire des contre-projets aux textes gouvernementaux qui lui sont soumis, ces initiatives étant au demeurant vouées à l'échec du fait de la prédominance conférée à l'Assemblée nationale.
Toutefois, l'apport législatif du Sénat est incontestable lorsqu'il s'inscrit dans une logique constructive. Ainsi, je veux le souligner, un amendement sénatorial sur deux est repris par le Gouvernement dans l'examen des projets de loi.
Quant aux commissions d'enquête et aux missions d'information, elles peuvent enrichir la réflexion et l'information du Parlement, et donc de l'opinion, comme vos travaux récents sur le cancer l'ont montré, ou servir à remédier aux dysfonctionnements administratifs, dès lors qu'elles excluent tout dénigrement ou polémique.
Permettez-moi, en conclusion, monsieur le président, de m'associer aux remerciements que vous avez adressés au personnel du Sénat.
Je tiens à souligner également la qualité des relations de travail entre nos deux cabinets ainsi qu'entre mon cabinet et les fonctionnaires du sénat.
Je veux aussi insister sur la qualité des relations personnelles que nous entretenons, qualité qui caractérise également mes relations avec les présidents des groupes et les présidents des commissions, et qui se concrétise lors de la conférence des présidents.
Je profite de cette occasion pour saluer le travail des journalistes qui suivent les travaux du Parlement, en souhaitant que les journaux, nonobstant leur liberté, leur accordent parfois une plus grande place.
M. le président. Merci !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Aux sénateurs qui ont choisi de ne pas se représenter, je veux adresser les remerciements du Gouvernement pour le travail qu'ils ont accompli au sein de la Haute Assemblée. Aux sénateurs qui vont entrer en campagne électorale, je souhaite bonne chance. Nous devrions nous retrouver au mois d'octobre avec un Sénat où la présence féminine sera plus importante, grâce à la mise en oeuvre de la parité et à l'extension du scrutin proportionnel.
M. Alain Lambert. Ce sera le choix des électeurs !
M. Paul Loridant. La parité mériterait des applaudissements !
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Jean-Jack Queyranne, ministre des relations avec le Parlement. Les élections municipales qui viennent de se dérouler montrent que cette évolution s'inscrit naturellement dans notre univers politique, avec l'approbation de nos concitoyens. C'est, en vérité, une révolution tranquille qui s'est produite en ce qui concerne les communes, lors des élections de mars dernier.
Je voudrais enfin vous remercier, monsieur le président, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, du dialogue républicain qui s'établit entre le Gouvernement et le Sénat. Je sais que nous ne sommes pas toujours d'accord, mais nous travaillons dans la franchise, et je pense que nous sommes tous avant tout soucieux, avec nos engagements politiques respectifs, de l'intérêt général et de la défense de la République. C'est ce qui nous rassemble au-delà de nos divergences. Je vous remercie du travail accompli au cours de cette session. (Applaudissements sur l'ensemble des travées.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux durant quelques instants.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Jacques Valade.)



PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

CANDIDATURE À UN ORGANISME
EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein de la commission permanente pour la protection sociale des Français à l'étranger.
La commission des affaires sociales a fait connaître qu'elle propose la candidature de M. Jean-Pierre Cantegrit pour siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.

Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9 du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.7

COUVERTURE
DES NON-SALARIÉS AGRICOLES
Discussion d'une proposition de loi
déclarée d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 303, 2000-2001) adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. [Rapport n° 372 (2000-2001).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, j'interviendrai plutôt à la fin de la discussion générale.
M. le président. Comme il vous convient, monsieur le ministre !
Dans ces conditions, la parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles dispose d'une « histoire parlementaire » déjà riche.
En effet, ce texte figurait dans l'avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, communiqué en septembre 2000 aux partenaires sociaux. Le Conseil d'Etat a souhaité disjoindre cette disposition.
Contrairement à ce que certains commentaires ont pu laisser supposer, il n'a pas considéré qu'il s'agissait d'un « cavalier ». Un tel jugement aurait, du reste, été difficile à justifier, cette mesure d'organisation ayant une incidence financière directe sur les comptes de la sécurité sociale. Il a estimé que la réforme méritait un examen approfondi, peu compatible avec la discussion d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale, soumise à des délais constitutionnels d'examen très resserrés.
Une première proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale par M. Jacques Rebillard, député de Saône-et-Loire, et plusieurs de ses collègues membres du groupe Radical, Citoyen et Vert.
A la suite de l'intervention de M. Charles de Courson, député de la Marne et rapporteur spécial du budget annexe des prestations sociales agricoles, invoquant l'article 40 de la Constitution, cette proposition de loi - manifestement irrecevable - a été retirée.
M. Jacques Rebillard et ses collègues ont déposé une seconde « mouture », respectant la figure imposée à l'article 40, tout en appelant explicitement le Gouvernement à l'amender en séance publique. Ce dernier - ô surprise ! - s'est exécuté sans difficulté, le 3 mai dernier.
Certains députés ont pu dénoncer un détournement de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution. Pour ma part, je ne souhaite pas entrer dans ce débat, qui concerne une autre assemblée parlementaire. En revanche, je regrette profondément que le Gouvernement ait cru bon de déclarer l'urgence sur un sujet aussi important.
Un consensus se dessine sur le constat de départ : le système d'assurance obligatoire des exploitants agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles est aujourd'hui déficient.
La loi du 22 décembre 1966 a institué le principe de l'assurance obligatoire pour couvrir les accidents, quelle que soit leur nature : accidents de la vie privée ou du travail et les maladies professionnelles agricoles ; c'est ce que l'on appelle l'AAEXA, l'assurance accidents des exploitants agricoles.
Son financement, y compris le service des rentes et leur revalorisation, est supporté par les seules cotisations mises à la charge des intéressés par les organismes assureurs ; l'Etat n'y participe pas.
Les exploitants agricoles sont tenus de souscrire un contrat d'assurance auprès de l'organisme de leur choix - société d'assurance, mutuelle, caisse de mutualité sociale agricole. Moyennant le paiement de primes librement négociées, cette assurance obligatoire garantit le remboursement des soins sans ticket modérateur et le versement d'une pension d'invalidité lorsque l'assuré se voit reconnaître un taux d'inaptitude d'au moins 66 % à l'exercice de la profession agricole.
La loi de 1966, complétée par la loi du 25 octobre 1972, a institué un régime complémentaire facultatif, qui permet au chef d'exploitation et aux membres de sa famille de bénéficier, moyennant une prime supplémentaire, d'indemnités journalières, de rentes et de prestations en cas de décès pour les seuls accidents du travail et maladies professionnelles.
En raison de la surtaxation de ces contrats complémentaires, leur nombre est en chute libre. Mais le déclin des contrats de type « loi de 1972 » ne signifie pas pour autant que les exploitants ne recourent pas à une protection complémentaire : les assureurs leur proposent des garanties globales « assurances de personnes ».
La société d'assurance mutuelle Groupama représente les deux tiers du marché. La partie obligatoire, pour le « groupe familial », représente un coût annuel de l'ordre de 1 525 francs par an. Cette société propose des couvertures complémentaires comprises entre 2 000 et 2 500 francs, qui sont systématiquement choisies par les exploitants. En fonction de leur souhait de bénéficier ou non d'indemnités journalières, par exemple, ils s'acquittent ainsi, pour l'ensemble du « groupe familial », d'une charge totale de l'ordre de 3 500 francs à 4 000 francs par an.
Tout le monde s'accorde à reconnaître les insuffisances de la situation actuelle.
Tout d'abord, première insuffisance, de nombreuses prestations ne sont pas prévues dans le cadre de l'assurance obligatoire de base : je pense aux rentes en cas d'incapacité du travail inférieure aux deux tiers ou en cas de décès, aux frais funéraires et aux indemnités journalières.
Le montant des pensions d'invalidité servies est très faible : il est de 24 300 francs par an en cas d'inaptitude totale et de 18 000 francs en cas d'inaptitude partielle, c'est-à-dire une incapacité des deux tiers.
Ensuite, deuxième insuffisance, il n'est pas procédé au contrôle de l'obligation d'assurance. La loi de 1966 laissait ce soin aux services départementaux de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole. En raison d'une absence de moyens, et plus encore de volonté, ces dispositions sont restées lettre morte.
Cette absence de contrôle de l'obligation d'assurance a deux conséquences.
En premier lieu, la connaissance du risque est particulièrement imprécise. En second lieu, un certain nombre d'exploitants agricoles ne sont pas assurés. Le chiffre de 20 %, avancé lors du débat à l'Assemblée nationale, ne repose toutefois sur aucune étude scientifique. Il est d'ailleurs certainement très variable selon les départements.
Enfin, troisième insuffisance du régime actuel, les exploitants agricoles ne bénéficient pas d'une politique de prévention. Or il importe de sensibiliser les exploitants aux risques professionnels, afin de diminuer le nombre d'accidents. L'implication de la Mutualité sociale agricole, la MSA, sur cette question est ancienne.
La journée nationale, le 3 octobre 1997 à Poitiers, avait pour thème « la santé et la sécurité au travail en agriculture ». La question de la mise en place de la politique de prévention spécialement destinée aux non-salariés agricoles a fait l'objet de projets et d'expériences de terrain dans un certain nombre de caisses régionales de la MSA depuis le début des années quatre-vingt-dix. C'est en avril 1998 que la MSA a souhaité prendre en charge cette gestion.
Du côté des organisations professionnelles agricoles, un rapport présenté au congrès de mars 1999 de la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles, la FNSEA, avait fortement critiqué le régime actuel de l'AAEXA.
La proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale faisant le choix d'améliorer la couverture sociale des exploitants agricoles contre le risque accidents du travail par la disparition du régime concurrentiel actuel, doit être examinée attentivement.
Ce texte distingue de manière claire les accidents de la vie privée et les accidents du travail : les accidents de la vie privée ressortiront, comme dans tous les autres régimes de sécurité sociale, de l'assurance maladie.
Par ailleurs, les prestations servies seront améliorées dans des conditions fixées par décret. Des indemnités journalières sont créées. Le niveau des rentes est augmenté : par exemple, en cas d'incapacité totale, la rente sera triplée, passant de 24 300 francs à 70 000 francs. Une rente sera versée aux ayants droit de la victime en cas de décès du chef d'exploitation. De même, des frais funéraires sont prévus à hauteur de 7 500 francs.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale fait le choix de créer une quatrième branche « accidents du travail et maladie professionnelles » au sein du régime de sécurité sociale des exploitants agricoles.
Si la proposition de loi maintient le principe du libre choix de l'organisme assureur, les cotisations seront désormais fixées de manière réglementaire : les assureurs joueraient ainsi un rôle de simples « prestataires de services ».
Dans le même temps, les caisses de mutualité sociale agricole joueront un rôle pivot dans la gestion du nouveau régime. Elles devront certifier l'immatriculation des assurés, contrôler le respect de l'obligation d'assurance, centraliser et répartir les ressources du régime entre les différents organismes assureurs, classer les exploitations agricoles par catégorie de risques, recueillir les informations nécessaires au bon fonctionnement du régime et mener des actions de prévention des risques professionnels.
Les praticiens conseils des caisses de MSA exerceront la plénitude du contrôle médical sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations.
Le texte souffre de quelques imperfections. Il passe sous silence quelques spécificités du monde agricole en adoptant le mécanisme de l'incapacité permanente retenue pour les salariés du régime général ou le tableau des maladies professionnelles du code de la sécurité sociale, en lieu et place du tableau des maladies professionnelles agricoles.
Mais c'est surtout le financement de cette réforme qui apparaît bien fragile.
Elle est en principe « autofinancée » par des cotisations des exploitants agricoles, calculées sur une assiette forfaitaire et modulées en fonction des catégories de risques propres à chaque exploitation. Les dépenses d'AAEXA devront être intégralement couvertes par les cotisations.
Selon les calculs du ministère de l'agriculture, le montant des cotisations forfaitaires annuelles moyennes par exploitation serait de l'ordre de 1 730 francs. La comparaison avec les 1 525 francs aujourd'hui nécessaires chez Groupama peut apparaître flatteuse : le « surcoût » ne serait que de 215 francs pour des prestations bien supérieures.
Pour le Gouvernement, il n'y aurait pas, en fait, de surcoût pour les agriculteurs, puisque les contrats d'assurance complémentaire seront renégociés à la baisse du fait de l'amélioration de leur protection sociale.
Il reste que ces calculs ont toutefois été effectués à partir des éléments de tarification applicables pour les salariés agricoles, alors même que les risques professionnels sont plus importants pour les exploitants.
La transformation de cotisations librement définies en cotisations fixées par arrêté du ministre de l'agriculture a mécaniquement pour effet d'augmenter le volume des prélèvements obligatoires.
La création, dans ces conditions, d'une quatrième branche a également pour effet d'augmenter les dépenses publiques.
Certes, des dépenses prises aujourd'hui à la charge de l'AMEXA, l'assurance maladie des exploitants agricoles, sont en fait du ressort de l'AAEXA.
Ce « déport » s'explique, d'abord, par la couverture très insuffisante du risque accidents du travail et par l'existence d'exploitants non couverts, que la MSA prend en charge pour des raisons d'équité.
En se fondant sur une analyse opérée sur un trimestre d'hospitalisations d'exploitants agricoles de la région des pays de la Loire, le rapporteur spécial du BAPSA à l'Assemblée nationale a « extrapolé » à l'ensemble de la France et a mentionné un chiffre de « 2 milliards de francs ».
Ce chiffre apparaît naturellement exagéré. Toutefois, selon les responsables de la caisse centrale de la MSA que j'ai auditionnés, la poursuite du dépouillement de l'enquête confirmerait un transfert important de l'AAEXA vers l'AMEXA, peut-être supérieur à 1 milliard de francs.
Les compagnies d'assurances ne contestent pas l'existence d'un tel transfert. Elles estiment, cependant, qu'il est limité aux dépenses hospitalières et de nature transitoire, un certain temps s'écoulant entre le moment où les frais d'hospitalisation sont effectivement engagés et celui où la MSA présente sa demande de remboursement à l'assureur AAEXA.
En sens inverse, les accidents de la vie privée, aujourd'hui pris en charge par l'AAEXA, seront désormais du ressort de l'AMEXA : le Gouvernement estime ce transfert de charges entre 220 et 320 millions de francs, à partir d'une transposition du coût des accidents de la vie courante dans le total des prestations maladie du régime général.
Dans le cas où serait vérifié a posteriori un « équilibre » entre les différents transferts entre l'AAEXA et l'AMEXA, il n'en reste pas moins certain qu'une pression « à la hausse » s'exercera sur les prestations de l'AMEXA en raison de la présence, dans cette assurance, d'un ticket modérateur et de l'absence d'indemnités journalières.
Il sera difficile de maintenir en AMEXA des pensions d'invalidité aussi faibles - moins de 24 000 francs par an -, alors que les pensions AAEXA auront été fortement revalorisées. Le coût d'un alignement des pensions invalidité sur le niveau des prestations accidents du travail s'élèverait à 500 millions de francs en coût « brut » et à 400 millions de francs en coût « net », compte tenu des économies réalisées par le Fonds spécial invalidité, le FSI.
Cette tendance à la hausse des prestations AMEXA aura pour conséquence inéluctable une augmentation des charges publiques, le régime de protection sociale des exploitants agricoles étant, compte tenu de sa situation démographique particulière, pris en charge par la solidarité nationale à hauteur de 80 %.
Le financement des rentes, dans un contexte de diminution des actifs cotisants, posera inévitablement problème à long terme, même si le texte prévoit un « fonds de réserve » bénéficiant de provisions. De ce point de vue, la « technique assurancielle » apparaît incontestablement mieux armée que la logique « sécurité sociale » pour répondre à ce déficit prévisionnel.
La commission des affaires sociales propose un scénario partenarial entre la mutualité sociale agricole et les acteurs de la protection complémentaire.
Elle constate en effet que la nécessité d'améliorer la couverture sociale des exploitants agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles fait l'unanimité autour de trois principes. Il s'agit, d'abord, de l'universalité de l'assurance : aucun exploitant agricole ne doit plus échapper à cette obligation. Il s'agit, ensuite, de l'amélioration des garanties proposées : les rentes d'inaptitude à la profession agricole doivent être relevées. Il s'agit, enfin, de la définition d'une politique de prévention : une telle politique est seule susceptible de diminuer le nombre d'accidents du travail en agriculture.
Cette politique de prévention nécessite une connaissance statistique approfondie du risque « accidents du travail » : en conséquence, il est nécessaire de séparer les accidents de la vie privée des accidents du travail.
Pour autant, la disparition du régime concurrentiel n'est pas la seule voie pour améliorer la couverture sociale des exploitants agricoles pour le risque des accidents du travail et des maladies professionnelles.
En effet, deux techniques s'opposent : soit la création d'une « branche » classique de la sécurité sociale dans laquelle les cotisations seraient fixées par arrêté ministériel et les prestations définies par la loi ; soit le maintien d'un régime concurrentiel, dans lequel les prestations minimales seraient strictement définies par la loi, mais dans lequel la liberté de cotisation serait préservée.
La création d'une « branche » accidents du travail et maladies professionnelles pour les exploitants agricoles, dans les mêmes conditions que les branches existantes, est incontestablement cohérente avec l'organisation de notre protection sociale.
Mais est-ce le meilleur moyen d'assurer l'intérêt général et l'intérêt des exploitants agricoles ?
Les longs débats parlementaires qui ont permis le vote de la loi de 1966 avaient été marqués par deux soucis qui expliquent le choix finalement retenu, à l'époque, d'un mécanisme d'assurance : d'une part, le souci de ne pas grever les charge pubiques et, d'autre part, le souci de ne pas augmenter les charges des exploitants agricoles.
Les termes du débat d'aujourd'hui sont strictement identiques.
La commission des affaires sociales propose de maintenir un régime concurrentiel pour une raison principale : il ne semble pas opportun d'augmenter le montant des charges publiques et des prélèvements obligatoires.
En conséquence, les primes ou cotisations versées par les assurés doivent être fixées librement par les organismes assureurs, ce qui permettra une véritable concurrence entre les différents acteurs. Deux garde-fous pourront être posés à cette liberté de tarification : d'une part, les cotisations correspondant aux garanties minimales obligatoires ne pourront pas excéder un plafond fixé par arrêté du ministre de l'agriculture ; d'autre part, elles seront modulées par le classement des exploitations dans des catégories de risques définies par la caisse centrale de mutualité sociale agricole. Ce mécanisme, déjà présent dans le texte adopté par l'Assemblée nationale, me paraît tout à fait pertinent.
La commission des affaires sociales propose de maintenir un régime concurrentiel pour une raison supplémentaire : il importe que les charges des agriculteurs restent à un niveau modéré.
Le sytème proposé par l'Assemblée nationale présente, pour les agriculteurs, l'inconvénient d'être un « carcan », en prévoyant l'intégralité des garanties prévues dans le régime général.
Si le relèvement des pensions d'invalidité et l'inclusion d'indemnités journalières dans le régime obligatoire sont souhaitables, il n'en va pas de même des rentes servies aux ayants droit. Naturellement, un tel dispositif est généreux, mais il risque de peser d'un « poids » de plus en plus grand sur le régime.
Le maintien d'un régime concurrentiel n'est pas incompatible avec la plupart des nouvelles missions confiées à la mutualité sociale agricole.
Je suis favorable à ce qu'elle joue un rôle clé dans trois domaines : d'abord, le contrôle de l'obligation d'assurance, ensuite, l'animation et la coordination de la prévention, enfin, le contrôle médical.
Au-delà des principes législatifs, un tel scénario partenarial entre la mutualité sociale agricole et les compagnies d'assurances - et je vous prie d'excuser cette formule quelque peu tautologique - ne peut réellement fonctionner que si un modus vivendi entre les différents acteurs est trouvé. Les organismes assureurs qui oeuvrent depuis de longues années dans le domaine agricole doivent bénéficier d'un cadre pérenne, leur pemettant de développer leurs activités concurrentielles complémentaires. La mutualité sociale agricole devra se concentrer sur ses nouvelles missions, qui seront importantes.
L'enjeu, qui est avant tout de faire bénéficier les exploitants agricoles d'une meilleure protection sociale, au meilleur coût, et de diminuer le nombre d'accidents du travail, en vaut la peine.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les principales observations qu'appelle de la part de la commission des affaires sociales, dont je suis ici le rapporteur, cette proposition de loi votée en première lecture à l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste : 25 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 19 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 17 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 11 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 10 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi soumise aujourd'hui à l'examen du Sénat vise, comme son intitulé l'indique, à améliorer la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
La réforme du régime actuel d'AAEXA, issu de la loi du 22 décembre 1966 et qui ne permet plus de couvrir de manière satisfaisante le risque « accidents du travail » en agriculture, est attendue par le monde rural, voulue par les syndicats, portée par le Gouvernement.
Nous nous accordons tous sur l'objectif, sur la nécessité de faire évoluer un système qualifié à juste titre de déficient par le rapporteur de la commission des affaires sociales, et ce pour trois raisons principales.
Il s'agit, tout d'abord, de la faiblesse des pensions d'invalidité servies, voire de l'absence de prestations - indemnités journalières, rente en cas d'incapacité de travail inférieure aux deux tiers ou en cas de décès, frais funéraires - au regard du niveau relativement élevé des primes acquitées par des exploitants qui sont plus de 42 % à dégager un revenu inférieur au SMIC, le salaire minimum de croissance.
l s'agit, ensuite, du caractère non universel de l'assurance. Faute de contrôle efficace de l'obligation d'adhésion à la couverture contre les accidents du travail, 20 % des exploitants ne seraient pas assurés. Ce chiffre est sujet à caution, mais il semble important, alors même que l'activité agricole est un secteur à risques relativement élevés.
Enfin, à la différence de la politique conduite par la MSA à l'égard des salariés agricoles, aucune politique de prévention des risques professionnels n'est organisée en faveur des exploitants agricoles.
Si un large consensus se dégage sur le constat, il y a débat, pour ne pas dire de fortes divergences, quant aux moyens à mettre en oeuvre pour parvenir à garantir aux exploitants agricoles une meilleure couverture sociale. Le trajet parlementaire de la présente proposition de loi en témoigne.
Dans sa version initiale, telle qu'elle a été déposée par le groupe RCV - Radical, Citoyen et Vert - la proposition de loi avait pour ambition de transformer le régime assuranciel d'AAEXA en une véritable branche de la sécurité sociale.
Cela semblait un choix inconcevable pour certains députés de droite soucieux, semble-t-il, de défendre les intérêts des détenteurs du marché de l'assurance ou du Groupama.
C'est sur la base d'une proposition de loi se contentant de revaloriser les prestations, réécrite a minima après le retrait de la version initiale, menacée par l'article 40, que la discussion s'est ouverte au Palais-Bourbon.
Fort justement, et là je tiens à saluer la volonté du Gouvernement, vous avez permis, monsieur le ministre, en étant à l'initiative d'amendements substantiels qui ont été adoptés, de réécrire le texte en permettant au dispositif d'évoluer vers la constitution d'un véritable régime de base de sécurité sociale, géré tout naturellement par la MSA, dans lequel les cotisations et prestations sont définies, sont identiques pour tous les exploitants, à l'instar des autres catégories socioprofessionnelles, dans lequel les accidents de la vie privée sont différenciés des accidents du travail. C'est un choix opportun au regard de l'incapacité dont a fait preuve le système concurrentiel à proposer aux exploitants agricoles des contrats garantissant des prestations de haut niveau. C'est également un choix opportun au regard de l'incurie, oserais-je dire, du système concurrentiel en matière de prévention, voire au regard du refus de différents groupes d'assurances de rendre publiques les études sur le nombre d'accidents du travail, les causes de ces derniers et le nombre de jours d'arrêt de travail.
Ce choix est légitime, dès lors que l'on recherche davantage de justice sociale dans le financement, afin d'assurer l'égalité de traitement des exploitants.
« Choix incontestablement cohérent avec l'organisation de notre protection sociale ; logique, à partir du moment où l'on considère que la réalisation de profits par les compagnies d'assurances, sur ce type de risques, est contestable. » Je me contente de vous citer, monsieur le rapporteur !
Pour autant, soucieux d'éviter une augmentation des prélèvements obligatoires et d'assurer l'équilibre des finances publiques, vous proposez, messieurs, le maintien d'un régime concurrentiel avec liberté des primes soit disant régulé par l'existence d'un plafond pour les primes correspondant aux garanties minimales. Le dispositif comporte une garantie obligatoire de base, dont vous réduisez au passage le champ, le versement des rentes servies aux ayants droit devenant une simple faculté. Dans ce scénario partenarial, la MSA n'a plus le même rôle pivot, même si elle garde la maîtrise du contrôle de l'obligation d'assurance ainsi que du contrôle médical, et assume l'animation et la coordination de la prévention.
Vous n'allez pas jusqu'à dénoncer ouvertement la « nationalisation » de l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles des exploitants agricoles, comme l'ont fait certains de vos collègues à l'Assemblée nationale.
Toutefois, nous ne sommes pas dupes. Votre démarche s'inscrit dans une conception plus générale, mainte fois formulée par les élus de la majorité sénatoriale à l'occasion du débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'une gestion privée des risques de l'assurance maladie, notamment.
A ce titre, la lecture du rapport de M. Seillier est fort intéresante. En effet, à la page vingt-cinq, les raisons qui motivent la préférence donnée au régime assuranciel apparaissent clairement. Vous les avez en outre rappelées, monsieur le rapporteur.
Vous ne pensez pas « souhaitable, au moment où certains états européens privatisent la gestion de cette branche pour les salariés, d'accomplir une démarche en sens inverse pour les exploitants agricoles ». Surtout, vous rejetez la suppression du régime concurrentiel car vous craignez, qu'à terme, cela ne « conduise à fixer des cotisations proportionnelles en fonction des revenus ».
L'atout majeur du texte que vous vous emploierez, amendement après amendement, à défaire, puisque vous nous proposez un contre-projet complet, réside dans la mutualisation du risque et de son financement.
Pourquoi ne pas rechercher un système qui prenne en compte les disparités de revenus et fasse par conséquent jouer pleinement la solidarité ?
Monsieur le ministre, la proposition de loi retient le principe de cotisation forfaitaire par exploitation. Ne pensez-vous pas qu'il est profondément injuste que cette cotisation soit la même pour une exploitation dégageant un revenu égal à trois fois le SMIC que pour une petite exploitation qui dégage, avec difficulté, l'équivalent d'un SMIC ?
Indiscutablement, le remplacement du régime assurantiel par un dispositif de droit commun, en matière de protection sociale, sa gestion par la MSA, le service de prestations les plus proches possible de celles qui sont en vigueur dans les régimes de sécurité sociale sont autant d'avancées que nous soutenons. En conséquence, nous ne pouvons adhérer aux propositions de M. le rapporteur tendant à construire un dispositif de tout autre nature.
M. Alain Vasselle. Vous avez tort !
M. Guy Fischer. On en reparlera !
M. le président. La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui fait aujourd'hui l'objet de nos discussions procède d'une intention forte : intégrer les non-salariés agricoles au progrès que constituent les garanties collectives contre les risques professionnels.
Le risque accidentel lié à l'activité professionnelle menace chaque année 10 % des agriculteurs alors que, selon les estimations - cela vient d'être dit -, plus de 20 % d'entre eux ne disposent pas de couverture contre les accidents du travail, couverture qui est pourtant obligatoire.
Il était donc de la responsabilité du Gouvernement d'agir contre cet état de fait. L'occasion lui en a été offerte par le député Jacques Rebillard à travers sa proposition d'instauration d'un régime de sécurité sociale pour les non-salariés agricoles, votée en première lecture à l'Assemblée nationale et d'ailleurs amendée de manière importante et judicieuse par le Gouvernement.
Il nous est aujourd'hui demandé de procéder à une correction historique des lois de 1966 et de 1972, la première instaurant une assurance obligatoire privée pour couvrir les accidents domestiques et les accidents du travail, la seconde autorisant l'exploitant et sa famille à souscrire à un régime complémentaire facultatif, lois qui montrent aujourd'hui leurs insuffisances.
Quelles sont les déficiences de la couverture sociale actuelle des non-salariés agricoles contre les risques professionnels ? La question appelle plusieurs réponses.
On ne peut tout d'abord qu'être frappé par l'absence de dissociation entre les accidents de la vie privée et les accidents du travail qui caractérise les contrats d'assurance protégeant les exploitants et leurs familles et qui équivaut à négliger la compensation des dangers professionnels et à oublier la prévention.
M. Alain Vasselle. C'est la réalité du terrain !
M. Bernard Cazeau. On ne peut ensuite que constater la disproportion entre le coût de l'assurance obligatoire de base et le niveau des indemnisations. Pour ne donner qu'un chiffre, songeons qu'une invalidité totale se voit compensée par 24 300 francs annuels seulement !
On ne peut enfin que s'inquiéter de la faiblesse du taux de couverture sociale des non-salariés agricoles, faute de souscriptions suffisantes au régime obligatoire de base AAEXA, d'autant plus que les souscriptions de contrats d'assurance complémentaire tendent à diminuer en nombre. Cette situation oblige de plus en plus souvent la MSA à porter secours aux non-assurés victimes d'accidents.
Ces quelques éléments sont - nous en convenons tous - alarmants. Inutile dans un tel contexte d'oser envisager une quelconque politique globale de prévention des risques, dont la nécessité n'est pourtant pas à prouver.
Des objectifs ambitieux de réforme doivent, par conséquent, être formulés et réalisés, et, de notre point de vue, c'est dans la voie d'une réforme de fond, comme le prévoit le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale, que nous devons nous engager.
La volonté de garantir à chaque exploitant agricole non salarié une protection sociale de qualité face aux risques professionnels passe par la formulation des orientations suivantes : premièrement, dissocier l'activité privée de l'activité professionnelle dans le partage de la couverture du risque accidentel ; deuxièmement, permettre aux assurés d'obtenir, en cas d'accident, une indemnisation importante ; troisièmement, intégrer la totalité des non-salariés du secteur agricole à un dispositif de couverture contre les accidents du travail.
S'agissant de la séparation de l'activité privée et de l'activité professionnelle, il nous faut admettre que la profession agricole est indéniablement une profession à risques et que, même si ces risques sont variés dans leur nature, ils n'en restent pas moins indépendants des risques rencontrés dans la vie courante et doivent, par conséquent, faire l'objet d'une couverture spécifique.
La loi prévoit, à cet effet, que les dangers privés relèvent de la seule AMEXA, alors que les risques liés à l'activité professionnelle seraient pris en charge par une organisation spécifique. Ils pourraient ainsi faire enfin l'objet de politiques publiques de prévention.
Concernant l'objectif de revalorisation des indemnisations en cas d'accidents, plusieurs améliorations doivent être apportées au système actuel. Celui-ci, par exemple, ne s'attaque pas suffisamment à la question de l'incapacité pour laquelle il n'offre qu'une rente dérisoire. Il présente un mauvais rapport entre les niveaux de cotisations et de prestations. A titre d'exemple, selon une simulation réalisée par la MSA, le cumul de l'assurance de base et de l'assurance complémentaire pour le chef d'exploitation s'échelonne entre 4 000 et 5 000 francs et permet en cas d'incapacité un gain de 82 francs par jour. Dans le système, envisagé pour une cotisation de 1 620 francs annuels, le même chef d'exploitation se voit indemnisé de 115 francs journaliers le premier mois de son incapacité et de 150 francs à compter du deuxième.
Concernant enfin la volonté d'intégrer en totalité les non-salariés à la couverture contre les accidents du travail, un effort de recensement des personnes non couvertes doit être opéré, par souci non de contraindre mais de protéger.
L'égalité de traitement, l'obtention d'un niveau décent de ressources en situation d'incapacité, l'amélioration du rapport entre cotisations versées et prestations reçues, ainsi que les efforts en faveur de la prévention des dangers professionnels ne verront le jour qu'à condition que s'instaure un système inspiré d'un modèle de sécurité sociale. C'est bien là l'innovation majeure de la proposition de loi que nous examinons : « à objectifs nouveaux, organisation nouvelle », nous dit le texte, et je dirais plus exactement, « à objectifs de justice, organisation plus juste et plus cohérente ».
Il est difficilement concevable, en effet, comme l'estiment pourtant certains d'entre nous, que les résultats changent du tout au tout, tout en préservant des méthodes identiques. Comment, alors qu'il ne permet d'assurer ni une protection décente pour tous ni une prévention, vouloir fonder l'essentiel du dispositif de protection contre les accidents du travail sur un système assurantiel basé sur le seul volontariat ?
L'idée de créer une nouvelle branche du régime agricole intégrée aux comptes de la sécurité sociale me paraît au contraire de nature à pallier les déficiences d'un système purement concurrentiel. Un tel procédé permet d'atteindre le difficile équilibre entre liberté de choix et garanties collectives.
Les composantes institutionnelles d'un tel système sont d'ores et déjà disponibles, si l'on en juge par l'immensité de la tâche qu'accomplit la MSA en matière de protection sociale dans les cas d'accidents. Placer la MSA au centre de l'organisation en gestation présenterait, en outre, l'avantage de pouvoir contrôler l'adhésion de tous à la branche couverture contre les risques du travail, par un simple croisement avec les fichiers de la branche assurance maladie dont elle dispose.
Pour qu'un tel système de sécurité sociale soit viable, celui-ci doit adopter un principe d'équilibre des recettes et des dépenses, c'est-à-dire équilibrer les cotisations et les prestations. Pas question, comme c'est aujourd'hui le cas, de faire de la prévention du risque et de la peur qui lui est afférente une occasion de réaliser des profits !
Le système envisagé par la proposition de loi tâchera pour sa part de garantir les mêmes prestations pour tous et s'assurera des recettes par la fixation d'un taux de cotisation uniforme pour les individus d'une même catégorie de production. Si elles augmentent, comme le proclament faussement les adversaires de la proposition, les cotisations n'iront pas nourrir de quelconques intérêts privés mais profiteront bel et bien aux destinataires des prestations.
L'ampleur de la transformation défendue par le texte est à la juste mesure des retards accumulés. Plusieurs acteurs parties prenantes du système ne s'y sont pas trompés et soutiennent ce projet de réorganisation.
Aucune catégorie sociale ou professionnelle ne doit rester à l'écart des mécanismes collectifs de couverture sociale qui sont parmi les éléments fondateurs du pacte républicain.
Si elle aboutit en sa forme actuelle, la proposition de loi permettra d'offrir une protection sociale décente à un monde agricole déjà bien à la peine. Elle amoindrira une partie des charges financières pesant sur lui que sont les assurances complémentaires rendues obligatoires par la médiocrité du régime de base privé et permettra - du moins, je l'espère - plus d'équité dans un secteur où les publics sont fortement hétérogènes. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre excellent collègue Joseph Ostermann avait souhaité s'exprimer dans le cadre de ce débat, mais, ayant été empêché, il m'a demandé de reprendre, pour l'essentiel, la trame de ses réflexions.
La couverture sociale des non-salariés agricoles nécessite incontestablement des améliorations. Tout le monde en convient, tant il est vrai que le régime actuel présente de multiples lacunes.
Tout d'abord, malgré l'obligation d'assurance, un nombre trop important d'exploitants n'est pas, effectivement, inclus dans le dispositif de protection.
Ensuite, l'effort de prévention est très largement insuffisant et les prestations servies par le régime de base sont dérisoires par rapport aux risques encourus et à leurs conséquences potentielles.
Enfin, certaines prestations qui paraissent pourtant légitimes ne sont pas prévues par le régime de base. Il en est ainsi, par exemple, des frais funéraires.
Le système a par conséquent besoin d'être amélioré. Il ne doit toutefois l'être ni dans n'importe quelles conditions ni en s'engageant sur des voies aventureuses. C'est là que se situent nos divergences et nos préoccupations.
La solution qu'il nous est proposé d'adopter constituerait une atteinte à la liberté d'entreprendre et risquerait d'alourdir exagérément le coût de protection sociale pour les exploitants, ou encore de grever d'une manière importante les finances publiques, remettant ainsi en cause l'équilibre déjà précaire des comptes de la sécurité sociale.
Une fois de plus, l'impact budgétaire de mesures d'apparence généreuse n'a pas été pris en compte avec suffisamment de rigueur. Il y a là une constante dans la politique gouvernementale qui ne peut manquer d'inquiéter pour les années à venir.
Il nous est proposé de passer d'un système concurrentiel à un régime public redistributif.
Cette option, qui ne semble fondée sur aucune étude économique et financière approfondie, risque de porter préjudice aux assureurs travaillant sur le segment de clientèle concerné.
Ainsi, même si ces professionnels ne sont pas exempts de toute responsabilité dans les défaillances du système existant, il n'en demeure pas moins que le projet dont nous débattons porte atteinte de façon démesurée à la liberté d'entreprendre.
Par ailleurs, outre le fait que l'on ampute un secteur économique d'une branche d'activité importante, il n'est prévu aucune rémunération des assureurs pour leur activité administrative d'appel à cotisations et de service de prestations. Est-ce bien logique ? Il est permis d'en douter.
Les assureurs se trouveraient ainsi doublement pénalisés.
Cela est d'autant plus inacceptable que les principales organisations professionnelles représentatives des exploitants que sont la FNSEA et le Centre national des jeunes agriculteurs ne sont nullement favorables à une remise en cause du régime existant et étaient parvenues à un accord satisfaisant avec les assureurs. On semble, par conséquent, vouloir régler les problèmes des exploitants sans les avoir consultés suffisamment, voire en allant contre leur volonté.
Ce qui est plus inquiétant encore, c'est que les dispositions de la proposition de loi risquent tout à la fois d'alourdir les cotisations des exploitants et de peser d'une manière excessive sur nos finances publiques.
L'exemple du transfert des accidents de la vie privée et de certaines catégories de personnes vers l'AMEXA semble, à cet égard, significatif.
L'AMEXA étant essentiellement financée par le BAPSA au travers d'une subvention budgétaire, il en résultera mécaniquement une augmentation de la dépense publique, augmentation qui n'a pas été évaluée et dont on ne sait pas comment elle sera compensée.
Par ailleurs, est-il logique, quand on connaît les difficultés actuelles en matière de financement des retraites, de créer une quatrième branche d'assurance sociale dans un contexte de déclin démographique des exploitants agricoles ? Le simple bon sens laisse apparaître que cela conduira immanquablement à une hausse des cotisations et à un déséquilibre du régime.
Enfin, le nouveau mode de calcul des cotisations qui est proposé apparaît totalement inapproprié. En effet, les éléments de tarification se réfèrent à ceux des salariés agricoles, alors même que les risques encourus par les exploitants sont, en moyenne, sensiblement supérieurs à ceux des salariés.
Au regard de l'ensemble de ces éléments, vous comprendrez, monsieur le ministre, qu'il ne nous sera pas possible de voter en l'état la proposition de loi qui nous est soumise.
Il convient de féliciter ici, pour son excellent travail, le rapporteur, M. Seillier. Les propositions de la commission des affaires sociales semblent, en effet, particulièrement équilibrées et réalistes. Elles visent à améliorer la couverture sociale des non-salariés agricoles, sans alourdir les cotisations et sans tirer des traites aléatoires sur nos finances publiques.
Il est ainsi proposé de conserver le système concurrentiel, en lui imposant toutefois deux garde-fous en matière de liberté de tarification. Quant à la MSA, dont l'excellent travail doit être salué,...
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Quand même !
M. Daniel Eckenspieller. ... elle verrait son rôle conforté et renforcé, notamment en matière de contrôle de l'obligation d'assurance, de prévention et de contrôle médical.
C'est pourquoi le groupe du Rassemblement pour la République votera le texte, enrichi par les amendements de la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Souplet.
M. Michel Souplet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi en préambule d'exprimer plusieurs réserves quant à la méthode adoptée par le Gouvernement et sa majorité à l'Assemblée nationale en ce qui concerne l'un des aspects particulièrement importants de la protection sociale des agriculteurs.
La profession agricole est unanime pour reconnaître la nécessité d'une amélioration de sa couverture accidents du travail et maladies professionnelles telle qu'elle est régie par la loi du 22 décembre 1966, loi applicable en fait depuis 1969.
Monsieur le ministre, j'ai participé, en 1966, à la discussion relative à la mise en place de cette loi et je peux vous assurer qu'un débat passionnant s'est engagé à cet égard. En fin de compte, il s'est dégagé une majorité très forte non seulement pour l'obligation d'assurance, mais également pour le libre choix de l'organisme assureur. C'était pour nous un aspect fondamental de cette loi. Or il semble qu'aujourd'hui près d'un exploitant sur cinq ne serait pas assuré, malgré l'obligation prévue par la loi, et c'est bien dommage.
A cet égard, le système de contrôle paraît inadapté. En outre, les prestations sont notoirement insuffisantes, d'où le développement de couvertures complémentaires. Enfin, il n'existe pas de volet « prévention » dans la loi actuelle. Or le seul moyen de réduire le nombre des accidents est la mise en place d'une politique de prévention, dont le coût est évalué à 30 millions de francs environ.
Partant de ce constat, le Gouvernement aurait dû adopter une autre méthode : au lieu de politiser le débat, mieux aurait valu, en effet, engager une véritable concertation avec les différentes organisations représentatives, afin de dégager une forme de compromis. La loi est appliquée depuis trente-deux ans ! Pourquoi bâcler un texte en quelques jours, sans avoir consulté les personnes directement intéressées ?
M. Alain Vasselle. Cela devient une fâcheuse habitude !
M. Michel Souplet. Au Sénat, nous allons essayer de trouver le compromis auquel n'ont pu aboutir les pouvoirs publics et les organisations professionnelles.
Le Gouvernement aurait pu présenter au Parlement un projet de loi spécifique, solidement construit et répondant aux véritables aspirations de la profession. Au lieu de cela, il a tenté, dans un premier temps, d'introduire à l'improviste son projet dans des textes sans lien direct avec la réforme, puis il a directement inspiré une proposition de loi présentée par un groupe de la gauche plurielle à l'Assemblée nationale. Je n'insisterai pas sur les différentes péripéties, qui ont été très bien décrites par M. le rapporteur.
Au-delà de ces cafouillages et autres tergiversations, il est dommage d'avoir déclaré l'urgence sur un tel texte. Le Sénat se trouve saisi, en cette fin de session déjà très chargée, d'une proposition de loi qui représente un enjeu non négligeable sur le plan social et financier pour une profession agricole par ailleurs durement éprouvée ces derniers mois.
Dans des conditions aussi difficiles, la commission des affaires sociales et son rapporteur Bernard Seillier, au côté de la commission des affaires économiques, ont réalisé un travail remarquable et présenté des propositions sur lesquelles je reviendrai tout à l'heure.
Sur la proposition de loi elle-même, j'exprimerai, au nom de mon groupe, trois critiques majeures : elle ignore certaines spécificités de l'agriculture ; elle risque de provoquer une forte aggravation des charges des agriculteurs ; enfin, ce texte reste très flou quant à ses modalités d'application.
Faute sans doute de ne pas avoir entendu l'avis de la « base », c'est-à-dire des premiers concernés, les exploitants agricoles, la proposition de loi ne tient pas compte, en effet, des spécificités de la profession. La préférence de celle-ci pour une autonomie en matière de gestion des accidents du travail dans un cadre concurrentiel est ainsi ignorée, le texte prévoyant la création d'un nouveau risque de sécurité sociale. Il en est ainsi, également, de l'exclusion de la couverture du nouveau régime de certains membres de la famille comme les retraités, par exemple, et de l'obligation pour les agricultures d'apporter la preuve en cas d'accidents de trajet.
Le transfert à l'AMEXA de la couverture des retraités constitue un véritable recul par rapport à la situation présente.
Par ailleurs, comme le note très justement M. le rapporteur, le fait de se référer au tableau des maladies professionnelles défini dans le code de la sécurité sociale semble totalement inadapté.
La deuxième grande critique, relayée par les principales organisations syndicales agricoles, est le risque d'une augmentation très sensible des cotisations. Il est vrai, comme l'a dit également M. le rapporteur, que le recours à une proposition de loi semble avoir dispensé le Gouvernement de toute étude sérieuse s'agissant de l'effet de la réforme sur les charges des agriculteurs. Les chiffres cités par le Gouvernement étant fondés sur la tarification applicable aux salariés agricoles, on peut craindre, en effet, un alourdissement des prélèvements obligatoires pour les exploitants et ce dans un contexte économique de plus en plus difficile.
Parallèlement, et cela nous préoccupe aussi en tant que groupe parlementaire de l'opposition, la réforme risque d'entraîner une augmentation des dépenses publiques. Le transfert de trois cent mille personnes et du risque accidents de la vie privée vers l'AMEXA augmentera sensiblement les dépenses du régime d'assurance maladie des exploitants.
Ce régime étant financé en très grande partie par le BAPSA, en l'état actuel du texte, nous devrions donc connaître une aggravation des charges publiques, comme l'a dénoncé très justement notre collègue et ami Charles de Courson à l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs ce qui explique l'application de l'article 40 lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale. On parle de plus de 1 milliard de francs de transfert de charges vers l'AMEXA, chiffre que citait tout à l'heure Bernard Sellier.
La dernière critique que j'émettrai à l'égard de ce texte concerne le caractère très flou des modalités d'application de la réforme. Ainsi en est-il du contenu des prestations et des contours du fonds de réserve des rentes, un fonds indispensable du fait de la diminution des actifs cotisants. Pour les prestations en nature et les rentes d'ayants droit, la proposition de loi renvoie, en effet, à des décrets d'application, dont la teneur n'est toujours pas connue.
La proposition de loi accorde, par ailleurs, une liberté de choix à l'assuré entre la MSA et un assureur pour le paiement des cotisations et le service des prestations. Sur ce point non plus le texte n'est pas clair. Les modalités de l'habilitation des assureurs par le ministère de l'agriculture, le rôle du groupement auquel les assureurs sont tenus d'appartenir, la teneur de leur cahier des charges et leur éventuelle rémunération restent totalement ignorés par la proposition de loi.
Les incertitudes d'ordre juridique et financier sont donc trop nombreuses dans ce texte pour l'accepter dans sa version votée à l'Assemblée nationale. Malgré l'urgence déclarée, que nous regrettons, le Sénat, ses commissions et les groupes de la majorité sénatoriale entendent jouer leur rôle afin de proposer une version plus acceptable par le monde agricole. Ce sera l'objet du dernier volet de mon intervention.
Le groupe parlementaire de l'Union centriste et moi-même approuvons totalement les trois principes cités tout à l'heure par M. le rapporteur : l'universalité de l'assurance ; l'amélioration importante de la couverture, en particulier en ce qui concerne les rentes d'inaptitude ; enfin, la mise en place d'une politique de prévention. Et tout cela sans faire entrer les agriculteurs dans un carcan, qui risque d'être, une fois encore, inopérant.
Nous sommes évidemment favorables au maintien d'un régime concurrentiel. Telle est la volonté d'une très grande majorité des exploitants agricoles français, attachés à leur espace de liberté dans ce domaine. La création d'un nouveau risque serait facteur de plus de contraintes pour les agriculteurs et, comme nous l'avons vu, d'une augmentation des charges et des dépenses publiques, ce en totale contradiction avec la politique de nos partenaires européens.
Par ailleurs, il me paraît souhaitable, comme le propose M. le rapporteur, de confier à la Mutualité sociale agricole la gestion du contrôle de l'obligation d'assurance, l'animation de la prévention et le contrôle médical.
Le dispositif proposé par la commission des affaires sociales semble équilibré. Par ailleurs, il suscite apparemment l'accord d'un très grand nombre de responsables de caisses de MSA avec lesquels mes collègues de l'Union centriste et moi-même sommes régulièrement en contact.
Lors de l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée nationale, vous avez cherché, monsieur le ministre, à opposer un peu artificiellement, d'un côté, les partisans d'un maintien du système concurrentiel et qui refusent tout monopole et, de l'autre, ceux qui souhaitent un régime de sécurité sociale. Il faut souhaiter que ces débats vous convaincront qu'il existe une solution médiane plus conforme aux souhaits de la profession agricole. Mon groupe parlementaire soutiendra donc les amendements de la commission.
Nous savons d'expérience récente, monsieur le ministre, que l'on peut difficilement faire le bonheur des gens contre leur gré et que c'est rarement quand ils sont hostiles que l'on peut faire avancer les choses.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je vous répondrai sur ce point !
M. Michel Souplet. Je conclurai mon propos en félicitant le rapporteur Bernard Seillier, ainsi que la commission des affaires sociales, et en confirmant que le groupe de l'Union centriste votera la proposition de loi telle qu'elle sera modifiée par le Sénat. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui est d'une importance primordiale pour le monde agricole : elle doit permettre de répondre à des attentes depuis trop longtemps repoussées.
En tant que rapporteur spécial du budget annexe des prestations sociales agricoles, j'ai souhaité intervenir sur cette question afin de souligner les grands enjeux de la réforme de la couverture des exploitants agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Le constat est en effet aujourd'hui unanime : la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail est largement insuffisante, voire, dans certaines situations, dangereusement défaillante.
Mise en place par la loi du 22 décembre 1966, l'assurance accidents des exploitants agricoles, l'AAEXA, couvre l'ensemble du groupe familial non salarié au titre des accidents, quelle que soit leur nature - de la vie privée ou du travail - ainsi que des maladies professionnelles. Pour bénéficier de cette couverture, les exploitants agricoles doivent souscrire un contrat d'assurance auprès de l'organisme assureur de leur choix : société d'assurance, mutuelle ou caisse de Mutualité sociale agricole. Le financement de cette couverture est donc supporté par les seules cotisations mises à la charge des intéressés par les organismes assureurs.
La loi du 25 octobre 1972 a, par la suite, institué un régime complémentaire facultatif permettant au chef d'exploitation et aux membres de sa famille de bénéficier, moyennant primes, d'indemnités journalières, de rentes et de prestations en cas de décès, pour les seuls accidents du travail et les maladies professionnelles.
Aujourd'hui, force est de constater l'échec patent de cette couverture : cet échec se mesure à l'aune de la faiblesse des prestations versées aux exploitants agricoles, du non-respect de l'obligation d'assurance - 20 % des exploitants ne seraient pas couverts - des lacunes de la politique de prévention des risques professionnels, mais aussi de la forte diminution du nombre des contrats complémentaires, surtaxés et souvent désavantageux.
Une réforme de l'AAEXA s'imposait donc. Elle nous est parvenue sous forme d'une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale, mais largement remaniée par le Gouvernement au moment de sa discussion par nos collègues députés.
A cet égard, je tiens, monsieur le ministre, à vous faire part de ma désapprobation quant à la procédure qui a été suivie jusqu'à présent.
Tout d'abord, et je le regrette vivement, le Gouvernement a décidé de déclarer l'urgence sur ce texte, alors même que la proposition de loi aurait nécessité un examen approfondi en raison, le Conseil d'Etat l'a rappelé, des conséquences considérables que cette réforme pourrait entraîner pour les exploitants agricoles et les entreprises d'assurance.
Par ailleurs, au moment de la discussion à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a choisi de modifier profondément l'économie du texte initial en déposant toute une série d'amendements, à tel point que l'on peut aujourd'hui parler d'un projet de loi plutôt que d'une proposition de loi.
Outre ces questions de procédure, je souhaite vous donner mon avis sur le fond de la réforme.
Comme je l'ai déjà souligné, cette proposition de loi a le mérite de s'attaquer de front à un problème unanimement dénoncé : l'insuffisance de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Elle contient, en outre, de vraies avancées, telles que la distinction entre les accidents de la vie privée et les accidents du travail, la revalorisation des prestations servies ainsi que le rôle central dévolu à la Mutualité sociale agricole en matière de prévention.
Toutefois, le choix, d'ailleurs introduit par le Gouvernement, de transformer le régime actuel, géré dans une logique assurantielle et concurrentielle, en un véritable régime de sécurité sociale, ne me paraît pas opportun.
En effet, la création d'une quatrième branche « accidents du travail et maladies professionnelles » au sein du régime de sécurité sociale des exploitants agricoles entraînerait la fixation réglementaire du montant des cotisations versées par les non-salariés agricoles et, de fait, la transformation des organismes assureurs en simples prestataires de services.
En outre, en tant que membre de la commission des finances de la Haute Assemblée, je me dois de souligner l'incidence financière d'une telle réforme. C'est le principe de cotisations forfaitaires, modulées en fonction des catégories de risques propres à chaque exploitation, qui a été proposé par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale. Malgré les projections effectuées par le Gouvernement, il semble que la transformation de cotisations librement définies en cotisations fixées par voie réglementaire aura inévitablement une incidence en termes de prélèvements obligatoires.
Notre collègue député Charles de Courson, lui-même rapporteur du BAPSA à l'Assemblée nationale, a, en outre, estimé qu'une telle réforme entraînerait une augmentation de l'ordre de 30 % des cotisations des exploitants agricoles.
En tout état de cause, et comme le conclut lui-même notre excellent rapporteur, Bernard Seillier, il semble bien que la réforme contenue dans cette proposition de loi entraînera inéluctablement une augmentation des charges publiques.
C'est pourquoi je partage entièrement l'analyse qu'il a faite et les propositions qui en ont découlé. Les trois principes qu'il a rappelés comme devant constituer l'ossature de la réforme de la couverture sociale des exploitants agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles me semble en effet incontournables.
Universalité de l'assurance afin de couvrir l'ensemble des exploitants agricoles, amélioration des garanties offertes et revalorisation des prestations servies, enfin, mise en oeuvre d'une réelle politique de prévention, tels sont les axes qui doivent guider notre approche de cette réforme.
Le choix, formulé par le rapporteur de la commission des affaires sociales, du maintien d'un régime concurrentiel dans lequel les prestations minimales seraient revalorisées et strictement définies par la loi, mais dans lequel aussi la liberté de cotisation serait préservée me semble un excellent compromis.
En outre, le maintien du rôle central de la mutualité sociale agricole dans la définition d'une politique de prévention ambitieuse en direction des exploitants agricoles est également un point très positif.
C'est pourquoi j'estime aujourd'hui, compte tenu du peu de temps qui était imparti au Sénat pour traiter de cette question délicate, que les propositions formulées par la commission des affaires sociales constituent incontestablement un pas dans la bonne direction.
J'espère également que les échanges que nous allons avoir avec vous, monsieur le ministre, permettront d'éclaircir quelques points encore obscurs, dont certains ont d'ailleurs été soulignés précédemment, s'agissant des réelles intentions du Gouvernement en matière de réforme de l'AAEXA.
Le groupe des Républicains et Indépendants, en parfaite harmonie avec le rapporteur de la commission des affaires sociales, soutiendra les amendements que celui-ci a déposés et votera la proposition de loi ainsi modifiée. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous allons examiner aujourd'hui me semble critiquable à plus d'un titre, et ce alors qu'elle émane du Parlement.
Elle est critiquable tout d'abord sur la forme. Je ne suis pas le premier, mais je serai le dernier ce soir dans la discussion générale, à m'étonner devant vous de la méthode suivie.
Ce texte a été examiné à l'Assemblée nationale à l'occasion d'une « niche parlementaire » réservée au groupe RCV, c'est-à-dire Radical...
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. ... Citoyen et Vert !
M. Paul Girod. Je ne savais pas qu'on pouvait être radical ou vert sans être citoyen !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Vous ironisez, mais le RDSE, c'est quoi ? (Sourires.)
M. Paul Girod. Nous le savons tous, il s'agit en réalité d'un dispositif d'origine gouvernementale prévu initialement dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, mais retiré à la demande du Conseil d'Etat.
Ce dispositif, du coup, a fait l'objet d'une première proposition de loi de M. Rebillard. Ce texte ayant été également retiré, M. Rebillard en a rédigé un second, beaucoup plus souple. Or, au cours des débats à l'Assemblée nationale, tous les amendements déposés par le Gouvernement ont été adoptés, ce qui a permis le retour au projet gouvernemental issu des services du ministère de l'agriculture. Ainsi sommes-nous revenus à la case départ par le biais d'une petite niche... une niche faite à la procédure parlementaire, si j'ose dire !
J'émets donc quelques réserves sur cette méthode, et ce d'autant plus, monsieur le ministre, que j'ai entendu, il y a quelques instants à peine, un échange fort intéressant entre M. le président du Sénat et M. le ministre des relations avec le Parlement. Se faisant le thuriféraire du Gouvernement, le ministre a considéré l'acceptation de nombre de propositions de loi comme le témoignage de l'ouverture en direction du Parlement. Si l'ouverture consiste à se servir de la niche parlementaire pour faire passer des textes gouvernementaux préalablement sanctionnés, au moins dans leur principe, par le Conseil d'Etat, c'est une percée intellectuelle qui mérite d'être notée, mais je ne suis pas sûr qu'elle suscite l'adhésion totale de nos collègues !
S'agissant, de surcroît, d'un texte important pour une partie de la population particulièrement sensible en ce moment, était-il très raisonnable de déclarer l'urgence ? Là encore, vous me permettrez de répondre par la négative, monsieur le ministre.
Tout à l'heure, M. le ministre des relations avec le Parlement a justifié l'emploi de l'urgence à tout va en ce moment au motif que nous serions en fin de législature. En somme, on racle les fonds de tiroir ! Mais ce texte méritait mieux, monsieur le ministre, il méritait un débat approfondi entre les deux assemblées. Encore une fois, nous légiférons pour un milieu professionnel très sensibilisé, et il y a lieu d'y réfléchir à deux fois pour ne pas aller trop vite.
Mais le texte est également critiquable sur le fond en ce qu'il nous propose une véritable novation : la transformation du risque accident du travail des non-salariés agricoles en un risque de sécurité sociale géré par la MSA.
Je sais bien que la mode est à la multiplication des risques : on parle du troisième risque, du quatrième risque, du cinquième risque... Gageons que nous en serons bientôt au quatorzième !
Nul ne conteste la déficience de la loi du 22 décembre 1966 et du régime de l'AAEXA appliqué depuis 1969. Il était nécessaire de l'améliorer, chacun en convient. Toutefois, la solution envisagée ne semble pas franchement la plus adéquate. Je crois savoir, d'ailleurs, que le monde agricole dans son immense majorité y est farouchement opposé.
En effet, cette création va entraîner une très forte augmentation des cotisations que versent les exploitants agricoles et, on le dit peu, au titre d'un mode de perception lui-même assez critiquable par rapport à la nature du risque que l'on entend intégrer à la MSA.
Cette création va séparer les accidents privés des accidents professionnels et exclura les conjoints qui ne participent pas à l'exploitation, les enfants de moins de seize ans et les retraités. Est-ce bien raisonnable ? Nous n'en avons pas le sentiment.
Cette création risque d'entraîner, à court terme, outre les dysfonctionnements liés à la mise en oeuvre d'une nouvelle réglementation et des surcoûts de fonctionnement qui n'ont pas été mesurés, une augmentation sensible des charges des exploitants agricoles, qui, vous en conviendrez, n'ont vraiment pas besoin de ce cadeau supplémentaire en ce moment.
La profession souhaite, certes, réformer le régime des accidents de travail des exploitants agricoles, mais elle désire avant tout conserver le régime assuranciel et concurrentiel existant. Je sais bien que le terme de « concurrence », qui évoque la compétition entre entreprises, le plus souvent privées de surcroît - horresco referens - ne fait pas partie des concepts philosophiques du Gouvernement. C'est pourtant le meilleur moyen de faire baisser les prix, d'arriver à une gestion qui soit la plus saine et la plus sérieuse possible, et, en l'occurrence, de donner aux exploitants agricoles la possibilité de s'assurer en fonction de leurs besoins réels et non pas sur une seule catégorie de risques arrêtés de manière arbitraire.
En concertation avec la profession agricole, la fédération française des sociétés d'assurance a formulé toute une série de propositions qui me paraissent satisfaisantes, puisqu'elles réforment le système actuel en améliorant les prestations, le contrôle de l'obligation d'assurance et la prévention.
Je suis tout à fait navré que le Gouvernement reste insensible à ces propositions, mais tout à fait réjoui de constater que la commission des affaires sociales les a, en revanche, intégrées dans ses réflexions.
Elles consistent, notamment, en une revalorisation du montant des rentes d'inaptitude au travail en cas d'accident et en l'ajout de deux nouvelles garanties, à savoir le versement d'indemnités journalières pour les chefs d'exploitation et l'assurance-décès pour les non-salariés inscrits au contrat AAEXA.
A mon avis, ces propositions vont dans le bon sens, car elles permettent une évolution rapide de l'AAEXA sans surcoût de fonctionnement imprévu.
En revanche, il ne me paraît pas judicieux de basculer dans un régime de sécurité sociale. Honnêtement, monsieur le ministre, je dis non !
L'AAEXA doit rester une couverture obligatoire de base, avec la liberté laissée aux exploitants agricoles de souscrire à l'assurance complémentaire, encadrée par le code rural, en faisant appel aux assureurs de leur choix.
Nous sommes totalement en phase avec la commission des affaires sociales sur ce point.
Aussi, vous comprendrez, monsieur le ministre, que je ne puisse, aujourd'hui, souscrire au texte que vous nous proposez ou, plus exactement, que vous nous transmettez de l'Assemblée nationale, après l'avoir tellement « enrichi » que c'est maintenant bien plus votre texte que celui de notre honorable collègue M. Rebillard.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Maintenant, oui, je le reconnais !
M. Paul Girod. Avec Jacques Pelletier et plusieurs de nos collègues, j'ai déposé un certain nombre d'amendements qui vont pour la plupart dans le sens de la commission des affaires sociales. Cependant, je suis navré de dire à notre rapporteur, dont je salue le travail considérable, que, sur un point, celui de la distinction entre accidents du travail et accidents « familiaux », pour faire court, il fait preuve d'angélisme en pensant - pour l'instant ! - que la seule déclaration suffira à faire preuve. Je crains, surtout si l'on bascule vers un système intégré dans la MSA, que l'on ne rencontre des difficultés d'application, ne serait-ce que par méconnaissance totale de ce qu'est la vie de l'agriculteur. De quelle catégorie relèvera, par exemple, l'accident survenu sur le trajet au cours duquel on accompagne les enfants à l'école pour ensuite aller chercher une pièce chez le réparateur ? Cela fait partie des inconnues lourdes de conséquences ! (M. le ministre fait un signe dubitatif.) Monsieur le ministre, beaucoup d'accidents ont lieu à ces moments-là !
C'est la raison pour laquelle je défendrai mes amendements, malgré l'incompréhension de la commission, soucieux, en tout cas, de me démarquer nettement de vos propositions. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous examinez aujourd'hui la proposition de loi relative à la couverture des exploitants agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale.
Permettez-moi, tout d'abord, de me réjouir du caractère constructif et dépassionné du travail réalisé par votre rapporteur, M. Seillier, que je salue, et, plus largement, par la commission dans son ensemble. La réforme que nous sommes en train d'élaborer est importante et notre travail approfondi permettra de mieux répondre à des situations consécutives à des accidents du travail parfois dramatiques.
Une telle réforme mérite donc mieux que la polémique.
De ce point de vue, je veux d'entrée de jeu balayer deux ou trois arguments évoqués dans la discussion générale, à commencer par la procédure.
Tout d'abord, je voudrais corriger certaines informations que vous avez cru pouvoir évoquer à propos du Conseil d'Etat.
Le Conseil d'Etat n'a pas du tout indiqué que ce texte n'avait rien à voir avec celui qui devait le porter à l'origine, c'est-à-dire le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il faudrait d'ailleurs m'expliquer en quoi un texte qui instaure un régime de sécurité sociale nouveau n'aurait rien à voir avec la loi de financement de la sécurité sociale. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela avait à voir.
En fait, le Conseil d'Etat a considéré que ce texte constituait une réforme à lui tout seul et que cela ne pouvait pas se résumer à un article, ou à un amendement, ce en quoi je crois qu'il avait parfaitement raison.
M. Alain Vasselle. C'est ce que l'on avait dit !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Non ! Ce n'est pas ce que vous avez tous dit, monsieur le sénateur !
Quant à la procédure suivre à l'Assemblée nationale - je vois que vous êtes aussi soucieux, voire parfois plus soucieux, de la procédure suivie à l'Assemblée nationale que dans votre Haute Assemblée, ce qui me fait sourire - je vais vous dire exactement ce qui s'est passé, pour corriger certains propos.
Le Gouvernement n'a pas « tripatouillé » la procédure. Ce qui est arrivé à l'Assemblée nationale, et qui n'était jamais arrivé dans l'histoire du Parlement, c'est qu'un parlementaire, M. de Courson, que vous avez salué, s'est cru autorisé à invoquer un article figurant, certes, dans le règlement - il était donc parfaitement dans son droit - mais qui faisait l'objet d'un accord tacite de non-utilisation depuis le début des discussions dans le cadre des « niches parlementaires », je veux parler de la procédure de l'article 40.
Jamais aucun parlementaire n'y avait eu recours pour la raison simple que, ce faisant, on crée un précédent qui bride l'initiative du Parlement. Au fond, ce parlementaire a amputé les droits du Parlement avec des arguments de procédure et pour des raisons politiciennes, alors que, jusqu'à maintenant, par accord tacite entre les groupes, jamais cet article n'avait été évoqué, de façon que l'initiative parlementaire soit la plus libre possible dans le cadre des niches parlementaires.
Voilà exactement ce qui s'est passé, et rien d'autre.
M. Rebillard, qui avait déposé cette proposition de loi et qui voulait la porter jusqu'au bout, a donc été obligé de corriger son dispositif de façon à tourner l'opposition de l'article 40 et que le débat puisse avoir lieu.
Ce n'est donc pas du tout ce que vous avez indiqué. Ce n'est pas le Gouvernement qui a foulé au pied les droits du Parlement, c'est un parlementaire qui, rompant avec une tradition parlementaire, a lui-même mutilé les droits du Parlement. Je pense que cela méritait d'être précisé.
Le deuxième argument évoqué par plusieurs d'entre vous - à l'instant par M. Paul Girod, mais également, auparavent, par M. Michel Souplet - consiste à affirmer que la base de la profession agricole réclame les assurances et qu'on ne peut pas faire le bonheur des gens contre leur gré !
Mais la MSA, monsieur Souplet, qui représente-elle ? Les enseignants de l'enseignement privé ? de l'éducation nationale ? Les chauffeurs de taxi ? Les commerçants ou les artisans ? Non ! elle est gérée par les agriculteurs ! (M. Souplet s'exclame.)
Monsieur Souplet, voulez-vous que je vous amène devant des agriculteurs qui vous diront : « Nous voulons ce régime géré par la MSA » ? Je peux vous en présenter, j'en ai rencontré.
M. Alain Vasselle. Ils sont minoritaires !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Minoritaires ? Monsieur le sénateur, méfiez-vous ! (M. Souplet proteste.)
Je reçois en effet des motions signées par de nombreux agriculteurs, qui me disent : « Vous avez raison ! Tenez bon ! »
Cela étant, entendons-nous sur un compromis et disons que les points de vue sont partagés !...
Mais vous ne pouvez pas invoquer la base de la profession agricole.
A cet égard, je vous invite à lire, si vous ne l'avez déjà fait, les argumentaires de la MSA : leurs intitulés, leur contenu sont explicites.
La MSA, ce sont les agriculteurs. Ce qui fait la force de ce régime, c'est qu'il est démocratique. C'est pour cela qu'il fonctionne si bien et c'est pour cela que je lui rends systématiquement hommage. Il est géré par les agriculteurs, avec des taux de participation aux élections qui sont très importants.
On ferait bien de s'en inspirer pour d'autres régimes de sécurité sociale !
Méfiez-vous donc, parce que la MSA, c'est le régime des agriculteurs, géré par eux ; ils le plébiscitent ; ils se battent pour lui.
Par conséquent, votre argument selon lequel la base souhaiterait autre chose mérite pour le moins d'être quelque peu amendé, plus équilibré. (MM. Souplet et Vasselle réagissent.)
Nous reviendrons sur tout cela, monsieur Souplet, lors de l'examen des amendements.
En ce qui concerne enfin l'urgence, ce serait un crime de lèse-majesté, ou de lèse-droits du Parlement que de l'avoir déclarée. Mais alors, que fallait-il faire, monsieur le sénateur ? Fallait-il encore attendre un an ou deux (M. Souplet fait un signe de dénégation) que l'on s'enferre dans des discussions très longues, et accepter que cette réforme que vous demandez tous - j'y reviendrai tout à l'heure - soit reportée d'autant ? Pour ma part, je pense qu'il fallait assumer tout cela.
Je voulais balayer ces deux ou trois arguments qui ont été avancés avant d'en venir au fond.
Je me félicite de ce que M. le rapporteur ait reconnu la légitimité et la qualité de l'action de la MSA - je l'ai dit à l'instant - en matière d'accidents du travail, qu'il conserve à cette institution, dans sa proposition, un rôle éminent en matière de prévention, de vérification de l'obligation d'adhésion au régime de couverture des accidents du travail et de contrôle médical.
Je me félicite aussi que votre commission reconnaisse la validité et la nécessité d'une séparation, comme dans tous les autres régimes de protection sociale, entre accidents du travail et accidents de la vie privée. Nous répondrons tout à l'heure, dans le cadre de la discussion des articles, aux arguments de M. Paul Girod.
Pour autant, je crois que l'esprit constructif qui a présidé à vos travaux, auquel je rends hommage, n'a pas encore permis d'aboutir à un consensus car le texte que propose votre commission est sensiblement éloigné de celui qui résulte des travaux de l'Assemblée nationale.
En effet, même si sur des aspects importants, comme la prévention ou le respect de l'obligation de l'assurance, votre commission maintient certaines dispositions adoptées à l'Assemblée nationale, elle n'en propose pas moins un certain nombre d'amendements qui, sans revenir à la loi de 1966, que l'Assemblée nationale souhaitait réformer, visent à rétablir un régime concurrentiel sans rapport avec un régime de sécurité sociale.
La réforme prévue par la proposition de loi poursuit quatre grands objectifs.
Le premier porte sur la forte revalorisation des prestations offertes aux exploitants agricoles et aux membres de leur famille. Le deuxième prévoit la création d'un véritable volet de prévention à l'initiative de la MSA. Le troisième traite du contrôle du respect de l'obligation d'assurance grâce au rôle de la MSA. Le quatrième, enfin, correspond à la mise en place d'une véritable branche de sécurité sociale permettant le passage d'un système de primes d'assurance fixées en fonction des entreprises à un dispositif de droit commun fondé sur des cotisations sociales égales pour tous, à un prix coûtant par rapport au coût des prestations et dont la mutualisation sera assurée par la MSA, jouant le rôle de caisse-pivot.
Cette nouvelle branche assurera la protection contre les accidents du travail, les accidents de la vie privée étant transférés dans le champ de l'assurance maladie.
La protection est fondée sur une notion de droit commun en matière de sécurité sociale : l'incapacité, beaucoup plus protectrice, qui remplace la notion d'inaptitude, vague et interprétée de façon restrictive.
C'est pourquoi je veux vous dire que je ne peux pas admettre le retour à un système assuranciel que traduit le rétablissement de la notion d'inaptitude, l'abandon d'une partie des nouvelles prestations proposées et, surtout, le refus d'un système de financement par des cotisations égales pour tous.
Sur ce point, je rappellerai que l'Assemblée nationale, non seulement avec l'accord mais encore pour répondre au désir du Gouvernement - vous avez tout compris ! - qui a déposé un certain nombre d'amendements en ce sens, a souhaité passer d'un régime purement assuranciel à une véritable branche de la sécurité sociale des agriculteurs. Un régime dominé par les compagnies d'assurance, qui versent des prestations modestes en contrepartie de primes variables selon les entreprises et sur lesquelles elles réalisent, comme l'indique très bien M. le rapporteur, un bénéfice important, laissera ainsi la place à un régime dans lequel les exploitants agricoles paieront les mêmes cotisations, fixées au seul regard du montant des prestations - revalorisées au demeurant - auxquelles ils pourront prétendre en cas d'accidents.
Sur la notion d'incapacité, j'ai déjà dit que celle-ci renvoie à une notion réellement médicale et donc objectivement appréciée, alors que la notion d'inaptitude, aujourd'hui utilisée en AAEXA, l'est de façon systématiquement restrictive par les assureurs.
Le rapport de la commission du Sénat le reconnaît d'ailleurs, et le seul argument qu'il avance pour maintenir la vieille notion d'inaptitude est la souplesse qu'elle offre. Mais à qui cette souplesse est-elle offerte ? Aux exploitants ou aux assureurs ? Pour ma part, je souhaite que la réforme engagée bénéficie aux premiers.
Peut-être, dans certains cas exceptionnels, comme celui des allergies au bois, cité par le rapporteur, la notion d'incapacité peut-elle être moins favorable que celle d'inaptitude - encore que la jurisprudence restrictive de la Cour de cassation ferait probablement obstacle à une indemnisation. Mais, pour parer à ce risque, je présenterai un amendement offrant à une commission des rentes, associant MSA et assureurs, la possibilité de revoir à la hausse le barème d'indemnisation par rapport au taux d'incapacité médical.
S'agissant des prestations, votre commission propose de supprimer les rentes pour les ayants droit et de ne fixer qu'un minimum pour le montant des indemnités journalières, partant du principe que l'assurance complémentaire facultative complétera ces prestations. Or, la proposition de loi, telle qu'elle a été adoptée par l'Assemblée nationale, ménage déjà un espace consistant pour les assurances complémentaires, et je suis opposé à un retour en arrière concernant les prestations du régime de base votées par les députés alors que la profession unanime - je pense que nous serons d'accord sur ce point - réclame, je le rappelle, une revalorisation de celles-ci.
Quant au financement du régime, votre rapporteur vous propose, certes, de fixer, par arrêté ministériel, un plafond au montant des primes par rapport au coût des prestations. Ce moyen devrait permettre de limiter la marge aujourd'hui considérable que réalisent les assurances sur ces primes. Mais sur quelles informations les pouvoirs publics pourront-ils s'appuyer pour fixer ce plafond en l'absence de toute centralisation des informations et des financements par la MSA ? L'expérience de l'actuelle AAEXA a montré que les informations transmises par les entreprises d'assurance sur ce marché sont soit inconnues, soit disparates, en tout cas imprécises et contradictoires, comme le reconnaît honnêtement M. Seillier dans son rapport. Il est donc relativement illusoire de croire que le ministère disposera des moyens réels de plafonner les primes au niveau pertinent.
En outre et surtout, vous plaidez pour une liberté de fixation de ces primes au double motif qu'un dispositif concurrentiel serait moins coûteux aux exploitants et qu'en tout état de cause les prestations qu'il est prévu de financer induiront à terme un surcoût.
En l'occurrence, l'actuelle AAEXA, en principe soumise aux lois du marché, constitue un système non pas de concurrence, mais d'oligopole. Peut-on parler de concurrence quand une seule entreprise domine les deux tiers du marché ? Peut-on parler de vertu économique de la concurrence quand tout le monde s'accorde sur le fait que 40 % des primes viennent alimenter le bénéfice des sociétés qui les recouvrent ?
Enfin, la notion de coût doit s'apprécier en fonction des prestations procurées : je veux souligner que l'agriculteur, pour obtenir des prestations comparables à celles que prévoit la réforme, doit aujourd'hui payer, en assurance de base et en complémentaire, un montant bien supérieur à celui des futures cotisations.
Vous citez, dans votre rapport, l'exemple des pays étrangers, indiquant qu'il serait paradoxal de supprimer, en France, un système concurrentiel alors que les pays étrangers privatisent. Mais croyez-vous que le système américain, où la part du PIB absorbée par des dépenses de santé est de loin la plus importante au monde, soit vraiment un exemple à suivre ? Croyez-vous que le démantèlement du service public de santé britannique ait engendré quelque vertu que ce soit ?
Pour ma part, je suis partisan de l'égalité devant les risques liés à la santé et devant les charges publiques couvrant ces risques ; je donnerai donc un avis défavorable sur les amendements rompant avec cette logique.
Quant à l'augmentation prétendument inéluctable, à terme, des cotisations, personne n'en a jusqu'à présent administré la démonstration. Et pour cause !
M. Alain Vasselle. On peut faire des simulations !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, les simulations effectuées incluent un provisionnement mathématique des rentes à verser à terme et par référence à l'espérance de vie des personnes potentiellement concernées par un accident ultérieur. Il est faux de dire que ce mécanisme de fonds de réserve et de provisionnement des rentes serait inadapté à un système de sécurité sociale, sauf à méconnaître que ce mécanisme fonctionne depuis plus d'un demi-siècle dans la branche accidents du travail des salariés.
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas le même risque !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je ne peux admettre non plus la remise en cause du rôle de caisse-pivot joué par la MSA dans la réforme proposée. Car, là encore, comment assurer l'égalité entre les exploitants adhérant à des organismes différents, ou dans des départements différents, sans une mutualisation intégrale des financements et des dépenses ? Sans mutualisation, que se passe-t-il lorsque, dans un lieu donné, une entreprise doit supporter une dépense exceptionnelle si ce n'est une hausse des primes à due proportion, et ce alors même que l'entreprise concurrente pourra réaliser un profit au seul motif que, cette année-là, les dépenses auront été inférieures aux recettes prélevées ?
Pour autant, le texte issu de l'Assemblée nationale n'induit pas un monopole de la MSA, et tant le Gouvernement que les députés ont souhaité maintenir la pluralité d'assureurs, donc la liberté de choix, mais en établissant une égalité de traitement, dont la règle, en France, dans un régime de sécurité sociale, est qu'elle s'applique entre adhérents à une même branche.
Je voudrais pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, revenir sur deux idées simples, en réponse à vos arguments.
Vous dites d'abord qu'il faut un régime assuranciel et concurrentiel. Mais c'est ce qui existe depuis quarante-cinq ans, et cela ne marche pas !
M. Alain Vasselle. Il suffit de l'améliorer !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Ou plutôt, cela marche mal, à coups d'inégalités choquantes et de couvertures insuffisantes.
Vous dites aussi que le système que nous proposons ne peut pas marcher. Ce n'est pas vrai ! Il fonctionne déjà, avec l'AMEXA pour l'assurance maladie, régime à propos duquel je n'ai entendu aucune critique et dont nous nous sommes, bien sûr, inspirés pour cette réforme.
Voilà pourquoi le texte qui est issu des travaux de l'Assemblée nationale est un bon texte, un texte équilibré. Il répond à une véritable demande des agriculteurs, et, j'en suis persuadé, le Sénat apportera sa contribution à l'élaboration de cette réponse.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

8

NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires sociales a proposé une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Jean-Pierre Cantegrit membre de la commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger.

9

COUVERTURE
DES NON-SALARIÉS AGRICOLES

Suite de la discussion
d'une proposition de loi déclarée d'urgence

M. le président. Nous reprenons l'examen de la proposition de loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Le chapitre II du titre V du livre VII du code rural est ainsi rédigé :

« Chapitre II


« Assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés agricoles

« Section I

« Champ d'application

« Art. L. 752-1. - Sont obligatoirement assurés contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, lorsqu'ils sont occupés dans les exploitations, entreprises ou établissements énumérés aux 1° à 5° de l'article L. 722-1 :
« 1° Les personnes mentionnées au premier alinéa du 1° et aux 2° et 5° de l'article L. 722-10 ;
« 2° Les conjoints mentionnés au a du 4° du même article participant à la mise en valeur de l'exploitation ou de l'entreprise, qu'ils soient ou non couverts à titre personnel par un régime obligatoire d'assurance maladie maternité, à l'exception des conjoints des personnes visées au 3° dudit article ;
« 3° Les enfants mentionnés au b du 4° du même article participant occasionnellement aux travaux de l'exploitation, sous réserve qu'ils soient âgés d'au moins quatorze ans.
« Le respect de l'obligation d'assurance prévue au présent chapitre incombe au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole pour lui-même et les autres personnes mentionnées au présent article. Le chef d'exploitation ou d'entreprise doit être en mesure de présenter un document attestant que l'obligation d'assurance a bien été satisfaite tant pour lui-même que pour ces personnes.
« Les bénéficiaires de l'assurance prévue au présent chapitre peuvent contracter librement toutes assurances complémentaires ou supplémentaires.
« Art. L. 752-2. - Est considéré comme accident du travail l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail sur le lieu de l'exploitation, de l'entreprise, de l'établissement ou du chantier ou dans les conditions prévues à l'article L. 325-1, à toute personne visée à l'article L. 752-1. Est également considéré comme accident du travail tout accident dont l'assuré apporte la preuve qu'il est survenu pendant le trajet d'aller et retour entre son domicile, son lieu de travail et tout lieu où il est susceptible de se rendre dans l'exercice direct de son activité.
« Sont considérées comme maladies professionnelles les maladies définies au titre VI du livre IV du code de la sécurité sociale.

« Section 2

« Prestations

« Sous-section 1

« Dispositions générales

« Art. L. 752-3. - En cas d'accidents du travail ou en cas de maladies professionnelles, les prestations accordées aux bénéficiaires de l'assurance prévue au présent chapitre comprennent, dans les conditions fixées aux articles suivants :
« 1° La couverture :
« - des frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation ;
« - des frais de fourniture, de réparation et de renouvellement des appareils de prothèse et d'orthopédie ;
« - des frais de réadaptation fonctionnelle, de rééducation professionnelle et de reclassement professionnel ;
« - des frais de transport de la victime à sa résidence habituelle ou à l'établissement hospitalier et, d'une façon générale, des frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle et la rééducation professionnelle ;
« 2° Une indemnité journalière pour le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole pendant la période d'incapacité temporaire de travail ;
« 3° Une rente en cas d'incapacité permanente de l'assuré et, en cas de mort du chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, une rente à ses ayants droit ;
« 4° La couverture des frais funéraires de la victime.
« Pour l'application du présent chapitre, les exploitants et les membres non salariés de toute société mentionnés au 5° de l'article L. 722-10 sont considérés comme des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole.

« Sous-section 2

« Prestations en nature

« Art. L. 752-4. - Les dispositions des articles L. 432-1 à L. 432-10 et L. 442-8 du code de la sécurité sociale sont applicables aux prestations prévues à la présente section sous les réserves suivantes :
« - pour l'application de l'article L. 432-1, la référence aux 1° et 3° de l'article L. 431-1 est remplacée par la référence aux 1° et 4° de l'article L. 752-3 du présent code ; pour l'application des articles L. 432-7 et L. 432-9, la référence à l'article L. 433-1 est remplacée par la référence à l'article L. 752-5 du présent code ;
« - la feuille d'accident mentionnée à l'article L. 432-3 s'entend de celle prévue à l'article L. 752-16 du présent code ;
« - les organismes assureurs exercent les fonctions dévolues aux caisses primaires d'assurance maladie.
« Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret.

« Sous-section 3

« Prestations en espèces

« Art. L. 752-5. - Une indemnité journalière est attribuée au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, à l'expiration d'un délai déterminé par décret suivant le point de départ de l'incapacité de travail et pendant toute la période d'incapacité de travail qui précède soit la guérison complète, soit la consolidation de la blessure ou le décès, ainsi que dans le cas de rechute prévu aux articles L. 443-1 et L. 443-2 du code de la sécurité sociale.
« L'indemnité journalière prévue au premier alinéa est égale à une fraction du gain forfaitaire annuel fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture. Elle est majorée à l'issue d'une période d'incapacité fixée par décret. Elle est incessible et insaisissable.
« Art. L. 752-6. - Une rente est attribuée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle :
« - au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole lorsque le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à un taux fixé par décret ;
« - aux autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1 en cas d'incapacité permanente totale.
« Le taux de l'incapacité permanente est déterminé par le service du contrôle médical de la mutualité sociale agricole et notifié par l'organisme assureur d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu du barème indicatif d'invalidité mentionné à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.
« La rente due à la victime atteinte d'une incapacité permanente partielle ou totale est égale au gain forfaitaire annuel mentionné à l'article L. 752-5 du présent code, multiplié par le taux d'incapacité qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci. La rente est revalorisée selon les coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
« Dans le cas où l'incapacité permanente est totale et oblige la victime à avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie, le montant de la rente est majoré. La majoration ne peut être inférieure au montant minimum prévu au troisième alinéa de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.
« En cas d'accidents successifs, le taux ou la somme des taux d'incapacité permanente antérieurement reconnue constitue le point de départ de la réduction ou de l'augmentation prévue au cinquième alinéa du présent article pour le calcul de la rente afférente au dernier accident.
« Les rentes servies en vertu de l'assurance prévue au présent chapitre sont viagères, incessibles et insaisissables.
« Art. L. 752-7. - Lorsque le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole est décédé des suites de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle, le conjoint survivant et les enfants bénéficient de rentes dans les conditions prévues aux articles L. 434-8 à L. 434-12 du code de la sécurité sociale. Les rentes prévues au présent article sont déterminées suivant des modalités fixées par décret sur la base du gain forfaitaire annuel mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 752-6 du présent code et revalorisées selon les coefficients mentionnés audit alinéa.
« Art. L. 752-8. - Les dispositions de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale sont applicables à l'assurance prévue au présent chapitre, à l'exception de la référence à la clôture de l'enquête et du dernier alinéa.

« Sous-section 4

« Révision-Rechute

« Art. L. 752-9. - Les dispositions des articles L. 443-1 et L. 443-2 du code de la sécurité sociale sont applicables aux prestations prévues à la présente section sous les réserves suivantes :
« - pour l'application des troisième et quatrième alinéas de l'article L. 443-1, les références au troisième alinéa de l'article L. 434-2 et aux articles L. 434-7 et suivants sont remplacées respectivement par les références au sixième alinéa de l'article L. 752-6 et à l'article L. 752-7 du présent code ;
« - les organismes assureurs exercent les fonctions dévolues aux caisses primaires d'assurance maladie.

« Sous-section 5

« Frais funéraires

« Art. L. 752-10. - En cas d'accident suivi de mort, les frais funéraires sont payés par l'organisme assureur dans la limite des frais exposés, sans que leur montant puisse excéder le montant maximum fixé en application de l'article L. 435-1 du code de la sécurité sociale.

« Section 3

« Organisation et financement

« Sous-section 1

« Organisation

« Art. L. 752-11 A. - Les organismes de mutualité sociale agricole sont chargés :
« - de certifier l'immatriculation des assurés auprès d'un des organismes mentionnés à l'article L. 752-11 ;
« - de contrôler le respect de l'obligation d'assurance en liaison avec l'autorité administrative ;
« - d'assurer le contrôle médical selon les modalités prévues aux articles L. 315-1 à L. 315-3 du code de la sécurité sociale ;
« - de mener les actions de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles dans les conditions prévues à la section 6 du présent chapitre ;
« - de classer les exploitations ou entreprises agricoles dans les différentes catégories de risques dont la liste est établie par arrêté du ministre chargé de l'agriculture ;
« - de centraliser les ressources du régime et de les répartir entre les organismes assureurs, en fonction des prestations à servir et des frais de gestion ;
« - de centraliser les informations nécessaires au fonctionnement du régime, notamment à partir des données fournies par les autres organismes habilités à participer à la gestion du régime, et de les transmettre au ministre chargé de l'agriculture et en tant que de besoin aux organismes susmentionnés.
« La Caisse centrale de la mutualité sociale agricole gère le fonds de réserve prévu à l'article L. 752-13-3 et le fonds de prévention prévu à l'article L. 752-20.
« Art. L. 752-11 . - Les personnes mentionnées à l'article L. 752-1 peuvent, pour le paiement des cotisations et le service des prestations, choisir entre la caisse de mutualité sociale agricole dont elles relèvent ou tout organisme régi par le code des assurances ou le code de la mutualité répondant aux conditions prévues à l'article L. 752-12.
« Les assurés expriment leur choix entre ces organismes ou, à défaut, sont affiliés d'office à l'un d'entre eux par le chef du service départemental de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole. Ces affiliations d'office sont réparties proportionnellement aux effectifs recueillis dans le département par chacun des organismes.
« Art. L. 752-12 . - Pour participer à la gestion du régime, les organismes assureurs autres que les caisses de mutualité sociale agricole doivent être habilités par le ministre chargé de l'agriculture et adhérer à un groupement constitué par eux, doté de la personnalité morale et assurant, vis-à-vis des organismes de mutualité sociale agricole et des ressortissants du régime, leur représentation et la coordination des opérations leur incombant.
« La Caisse centrale de la mutualité sociale agricole conclut, au nom des caisses de mutualité sociale agricole, une convention avec le groupement mentionné à l'alinéa précédent qui précise les relations entre les caisses et ledit groupement pour organiser la gestion du régime.
« Cette convention, dont les clauses doivent respecter un cahier des charges fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, ainsi que ses avenants sont approuvés par arrêté du ministre chargé de l'agriculture dans les trois mois suivant leur conclusion. A défaut de conclusion de cette convention avant le 30 juin 2002 ou d'approbation selon les modalités précitées, ces relations sont précisées par arrêté du ministre chargé de l'agriculture.
« Art. L. 752-13 . - Est entachée de nullité d'ordre public toute clause ou convention conclue par tout organisme d'assurance non habilité à couvrir les risques régis par le présent chapitre ; un décret en Conseil d'Etat précise les peines encourues par l'organisme d'assurance proposant ou faisant souscrire et tout assuré souscrivant une telle clause ou convention.
« Tout organisme assureur refusant l'inscription volontaire ou l'affiliation d'office d'un assuré prévues à l'article L. 752-11 se voit retirer l'autorisation de garantir les risques régis par le présent chapitre.

« Sous-section 2

« Financement

« Art. L. 752-13-1 . - Le régime institué par le présent chapitre est financé par les cotisations des non-salariés agricoles.
« Ces cotisations sont à la charge des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole. Elle comprennent :
« a) Une cotisation due par les chefs d'exploitation ou d'entreprise pour eux-mêmes, calculée sur la base d'une assiette forfaitaire fixée par arrêté du ministre chargé de l'agriculture et modulée en fonction des taux de risques applicables aux diverses catégories dans lesquelles les exploitations ou les entreprises ont été classées ;
« b) Une cotisation due pour les personnes mentionnées aux 2° et a) du 4° de l'article L. 722-10, calculée en pourcentage des cotisations dues pour eux-mêmes par les chefs d'exploitation ou d'entreprise ; ce pourcentage est fixé par l'arrêté prévu à l'alinéa précédent.
« Art. L. 752-13-2 . - Les ressources du régime doivent couvrir intégralement ses charges, ci-après énumérées :
« - prestations prévues à la section 2 du présent chapitre ;
« - dépenses de prévention ;
« - frais de gestion et de contrôle médical.
« Un arrêté du ministre chargé de l'agriculture fixe, pour chacune des catégories d'exploitation ou d'entreprise mentionnées au a) de l'article L. 752-13-1, le taux de la cotisation due par les chefs d'exploitation ou d'entreprise, après avis d'une section spécialisée du Conseil supérieur des prestations sociales agricoles comprenant des représentants de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, du groupement mentionné à l'article L. 752-12 et des organisations représentatives des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole.
« Art. L. 752-13-3 . - Il est institué, dans les conditions fixées par le dernier alinéa de l'article L. 752-11 A, un fonds de réserve alimenté par une fraction des cotisations et destiné à financer les rentes servies au titre de l'assurance prévue par le présent chapitre. Les décisions relatives à la gestion de ce fonds sont prises par un comité de gestion comprenant des représentants de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole et du groupement mentionné à l'article L. 752-12.
« Art. L. 752-13-4 . - Le classement des exploitations ou des entreprises agricoles dans les différentes catégories prévues à l'article L. 752-11 A peut être contesté par le chef d'exploitation ou d'entreprise ou par l'autorité administrative devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail mentionnée à l'article L. 143-3 du code de la sécurité sociale.
« Art. L. 752-13-5 . - Les dispositions des articles L. 725-2 à L. 725-8, de la première phrase de l'article L. 725-9 et les articles L. 725-10 et L. 725-12 à L. 725-16 sont applicables au régime institué par le présent chapitre.
« Pour l'application des articles L. 725-4, L. 725-7, L. 725-8 et L. 725-12, la référence à l'article L. 731-30 est remplacée par la référence à l'article L. 752-12 et la référence aux articles L. 731-35 à L. 731-38 est remplacée par la référence à l'article L. 752-13-1.
« Art. L. 752-13-6 . - Les modalités d'application de la présente sous-section sont déterminées par décret.

« Section 4

« Faute de l'assuré ou d'un tiers

« Art. L. 752-14 . - L'assurance ne garantit pas les conséquences d'une faute intentionnelle de la victime.
« Art. L. 752-15 . - Lorsque la lésion dont l'assuré est atteint est imputable à un tiers, la victime ou ses ayants droit conservent contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent chapitre. L'organisme assureur est tenu de servir à l'assuré les prestations prévues par le présent chapitre, sauf recours de sa part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions prévues au deuxième alinéa.
« Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, l'organisme assureur est admis à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité incombant, au tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques et morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément. De même, en cas d'accident suivi de mort, la part d'indemnité correspondant au préjudice moral des ayants droit leur demeure acquise.
« La victime ou ses ayants droit sont admis à faire valoir les droits résultant pour eux de l'action en indemnité formée en application des dispositions du premier alinéa par priorité sur ceux de l'organisme assureur en ce qui concerne son action en remboursement.
« La victime ou ses ayants droit doivent appeler l'organisme assureur en déclaration de jugement commun ; à défaut, la nullité du jugement sur le fond peut être demandée pendant deux ans à compter de la date à partir de laquelle ledit jugement est devenu définitif, soit à la requête du ministère public, soit à la demande de l'organisme assureur ou du tiers responsable lorsque ces derniers y ont intérêt.
« Ne sont pas regardés comme des tiers pour l'application du présent article, sauf dans le cas où le dommage résulte d'une faute intentionnelle commise par eux, le conjoint, les enfants, ascendants, descendants, alliés en ligne directe, salariés du chef d'entreprise ou d'exploitation, ainsi que toute personne vivant habituellement au foyer de celui-ci.

« Section 5

« Formalités, procédure et contentieux

« Art. L. 752-16 . - Tout accident du travail et toute maladie professionnelle dont est victime le chef d'exploitation ou les autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1 doit être déclaré à l'organisme assureur dans un délai et des conditions fixés par décret. Il appartient à l'organisme assureur saisi d'une déclaration d'accident d'apporter la preuve de son caractère non professionnel.
« En vue de son indemnisation, la victime remet au praticien consulté la feuille d'accident délivrée par l'organisme assureur auprès duquel elle est assurée.
« La date de guérison ou de consolidation de la blessure est fixée par l'organisme assureur sur avis du service du contrôle médical de la mutualité sociale agricole, connaissance prise du certificat médical du praticien consulté.
« Art. L. 752-17 . - Suivant la présomption établie par le praticien consulté, l'organisme assureur au titre des accidents ou l'organisme assureur au titre de la maladie auprès duquel la victime dépose sa demande de prise en charge est tenu de servir la totalité des prestations jusqu'au règlement amiable ou judiciaire du dossier.
« Il appartient à celui des deux organismes assureurs qui contesterait la nature du risque d'en faire part à l'assuré et à l'autre organisme assureur et, faute d'accord amiable avec ce dernier, de saisir le tribunal des affaires de sécurité sociale mentionné à l'article L. 142-2 du code de la sécurité sociale. L'organisme assureur qui saisit le tribunal est tenu d'appeler l'assuré en intervention forcée dans l'instance, faute de quoi la décision judiciaire à intervenir n'est pas opposable à ce dernier.
« Art. L. 752-17-1 . - Lorsque le chef d'exploitation ou d'entreprise agricole n'a pas acquitté à la date de l'accident du travail l'intégralité des cotisations d'accidents du travail, dues pour lui-même et pour les autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1, l'organisme assureur est fondé à poursuivre auprès du chef d'exploitation ou d'entreprise, dans les conditions fixées aux alinéas suivants, le remboursement des prestations d'accidents du travail dont il bénéficie ou dont bénéficient les autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1, et ce indépendamment des majorations de retard dues pour les cotisations qui n'ont pas été acquittées dans le délai réglementaire.
« Cette sanction est limitée au remboursement des prestations effectivement servies entre la date de l'accident du travail et la date d'exigibilité des cotisations impayées dues au titre de l'assurance prévue par le présent chapitre.
« Ce remboursement ne peut être supérieur au montant des cotisations dues à la date de l'accident du travail. L'organisme assureur peut réclamer le remboursement de la totalité des dépenses faites par lui à la suite d'un accident du chef d'exploitation ou d'entreprise ou d'une autre personne mentionnée à l'article L. 752-1, dès lors que le chef d'exploitation ou d'entreprise ne s'est pas conformé aux dispositions de l'article L. 752-16.
« Art. L. 752-18 . - Sous réserve des dispositions de l'article L. 752-13-4, les litiges relatifs à l'application du présent chapitre relèvent de la compétence exclusive du contentieux général de la sécurité sociale.
« Art. L. 752-19 . - Les pénalités prévues aux articles L. 471-2, à l'exception du 2°, L. 471-3 et L. 471-4 ainsi que les dispositions de l'article L. 482-4 du code de la sécurité sociale sont applicables à l'assurance prévue au présent chapitre.

« Section 6

« Prévention

« Art. L. 752-20 . - La Caisse centrale de la mutualité sociale agricole anime et coordonne les actions susceptibles de prévenir les risques liés aux accidents du travail et aux maladies professionnelles dont peuvent être victimes les personnes mentionnées à l'article L. 752-1. Elle gère un fond de prévention alimenté par une fraction des cotisations fixée par arrêté du ministre chargé de l'agriculture.
« Une commission de la prévention des accidents du travail des non-salariés agricoles, composée de représentants de l'Etat, de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, des organismes assureurs et des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, est chargée de définir les mesures de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, comprenant notamment des actions de formation aux risques et des expertises des installations.

« Section 7

« Dispositions diverses

« Art. L. 752-21 . - Les personnes ayant adhéré volontairement à la législation sur les accidents du travail applicable aux salariés agricoles antérieurement au 1er juillet 1973 ont droit aux allocations et majorations prévues aux articles L. 751-43 et L. 751-44.
« Art. L. 752-22 . - Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux personnes mentionnées à l'article L. 761-19.
« Art. L. 752-23 . - Sauf disposition contraire, les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »

INTITULÉ DU CHAPITRE II DU TITRE V DU LIVRE VII
DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 43 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent :
I. - Dans l'intitulé du texte présenté par cet article pour le chapitre II du titre V du livre VII du code rural, après les mots : "accidents du travail", d'insérer les mots : "et de la vie privée".
II. - En conséquence, de procéder à la même insertion dans le texte présenté par l'article 1er pour les articles L. 752-1, L. 752-3, L. 752-6, L. 752-7 et L. 752-16 du code du rural.
Par amendement n° 95, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont proposent :
I. - Dans l'intitulé du texte présenté par l'article 1er pour le chapitre II du titre V du livre VII du code rural, après les mots : "accidents du travail", d'insérer les mots : "et de la vie privée".
II. - En conséquence, de procéder à la même insertion dans le texte présenté par l'article 1er pour les articles L. 752-1, L. 752-3, L. 752-6, L. 752-7, L. 752-16 et L. 752-17-1 du code rural.
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 43 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement vise à modifier le chapitre II du titre V du livre VII du code rural et les articles L. 752-1, L. 752-3, L. 752-6, L. 752-7 et L. 752-16 du code rural, afin de maintenir les accidents de la vie privée dans le champ de l'AAEXA.
La distinction entre vie privée et vie professionnelle étant impossible pour les exploitants agricoles, nous le savons, il n'est pas opportun de prévoir une indemnisation différenciée.
Le maintien des accidents de la vie privée dans le champ de l'AAEXA permet une meilleure indemnisation des assurés que celle qui est prévue dans le cadre de l'assurance maladie des exploitants agricoles, l'AMEXA : prise en charge à 100 % des frais de soins au lieu de l'application d'un ticket modérateur, rentes d'un montant supérieur servies de façon viagère et non jusqu'à la liquidation de la retraite.
Ce maintien évite enfin une majoration à terme, pour les assurés, des cotisations d'AMEXA, conséquence de l'augmentation des dépenses du régime maladie, ainsi qu'une augmentation des charges publiques.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 95.
M. Alain Vasselle. Cet amendement ayant le même objet, j'ajouterai seulement quelques éléments pour plaider en faveur d'une telle disposition.
Comme l'ont très justement souligné MM. Paul Girod et Michel Souplet à l'occasion de la discussion générale, il est difficile de faire une distinction nette entre les activités liées à la vie privée et celles qui sont liées à la vie professionnelle, en l'occurrence à l'agriculture. Plusieurs exemples peuvent en faire foi.
M. Paul Girod a cité le cas d'un accident de la route survenu alors qu'un agriculteur ou une agricultrice emmène ses enfants à l'école et en profite pour acheter une pièce détachée pour un engin agricole.
Qu'en sera-t-il de l'accident survenu à l'exploitant qui scie du bois pour chauffer son habitation ou débiter des piquets pour réaliser une clôture de pâture ?
Lorsqu'un exploitant a un accident de la circulation en se rendant à une foire, va-t-on considérer qu'il s'agissait d'un déplacement récréatif ou d'un déplacement lié à son activité professionnelle ?
Qu'en sera-t-il pour un accident de chasse, activité destinée autant à se distraire qu'à détruire les nuisibles s'attaquant aux récoltes de l'exploitant ?
Ces exemples, que l'on pourrait multiplier à l'infini, montrent bien qu'il est difficile de faire la distinction. Or, monsieur le ministre - permettez-moi de relever votre propos - vous avez dit que l'on ne pouvait pas mesurer le risque de la même manière pour les salariés agricoles et pour les salariés non agricoles.
Sa résidence étant située sur le site de son exploitation et l'agriculteur commençant son activité très tôt le matin et la terminant très tard le soir, ses activités privées et ses activités professionnelles sont intimement liées.
Je ne vois donc pas pourquoi on ne joindrait pas les deux risques, d'autant qu'un salarié est dans son entreprise de huit heures du matin jusqu'à dix-huit heures le soir, y compris pendant le temps du déjeuner ou lorsqu'il se rend aux toilettes, et que, d'après la jurisprudence, quand un accident se produit pendant de telles coupures ou à l'occasion de ce type de déplacement, on entre dans le champ de l'accident du travail. Pourquoi en irait-il différemment pour les non-salariés agricoles ? Voilà pourquoi je considère qu'il faut adopter cet amendement.
Quant à l'argument selon lequel cette distinction est nécessaire car, actuellement, l'AMEXA ne mène pas d'action de prévention en faveur des agriculteurs, je suis désolé de vous dire, monsieur le ministre, que ce que vous proposez n'apportera rien de plus !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Bien sûr que si !
M. Alain Vasselle. Prenons l'exemple de la société d'assurance mutuelle Groupama, que vous avez citée, et qui représente les deux tiers du marché. Ce groupe consacre 30 millions de francs par an aux actions de prévention. S'il couvrait l'ensemble de la profession, cela représenterait un fonds de 90 millions de francs. Vous ne ferez pas plus dans le cadre de la MSA.
Quant à la prévention, je vous signale que la société Groupama mène des actions liées aux maladies professionnelles, aux engins agricoles, notamment pour ce qui concerne les arceaux de sécurité et les gaz d'échappement, à la contention et la manipulation des animaux, au maniement des produits phytosanitaires et, également, aux vêtements de sécurité.
Ne faisons donc pas de faux procès d'intention à l'égard des assurances privées, qui mènent déjà des actions de prévention et pour des sommes très importantes ! Il s'agit de faux arguments avancés pour demander la séparation entre les activités liées à la vie privée et celles qui sont liées à l'activité professionnelle.
Mes chers collègues, je vous demande par conséquent d'adopter l'amendement n° 95 ou l'amendement n° 43 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Ces deux amendements tendent à réintégrer les accidents de la vie privée dans le champ de l'assurance accident. J'ai bien entendu les arguments de nos collègues. Mais il convient de ne pas exagérer les inconvénients résultant d'une séparation.
Le maintien des accidents de la vie privée dans le champ de l'assurance accidents des exploitants agricoles permet incontestablement une meilleure indemnisation que celle qui est prévue dans le cadre de l'assurance maladie, du fait de l'existence d'un ticket modérateur. Toutefois, ce dernier ne s'applique qu'aux soins légers.
Par ailleurs, certaines dépenses sont déjà prises en charge en assurance maladie des exploitants agricoles alors qu'elles devraient relever de l'assurance accident. Si elles n'atteignent pas le montant de 2 milliards de francs, peut être imprudemment annoncé, elles représentent un montant non négligeable, et ce transfert montre bien que la prise en charge assurance maladie des exploitants agricoles n'est pas aussi pénalisante pour les agriculteurs que ne le prétendent les auteurs de ces amendements.
Dans un sens inverse, le transfert des accidents de la vie privée en assurance maladie des exploitants agricoles a été chiffré à environ 300 millions de francs ; les deux types de transfert devraient ainsi au moins s'équilibrer.
L'existence de rentes inférieures à 24 000 francs annuels en assurance maladie pose, de toute façon, un problème, indépendamment de la réforme de l'assurance accident.
La situation des exploitants agricoles a changé depuis les années soixante : il y a de plus en plus dissociation du domicile privé et du lieu de travail. Je sais que cette réalité diffère, comme toujours, selon les régions et les professions agricoles exercées. Il s'agit tout de même d'une tendance de fond, pour au moins deux raisons majeures : premièrement, de plus en plus de femmes d'agriculteurs travaillent en dehors de l'exploitation ; deuxièmement, la pluriactivité est un phénomène croissant.
La distinction entre les accidents du travail et les accidents de la vie privée sera, dans la plupart des cas, aisée à faire. Vous conviendrez avec moi que la situation d'un exploitant agricole qui se brûle avec une machine à café dans sa cuisine n'est pas celle d'un exploitant dont le tracteur se retourne ! En cas de doute, des dispositions sont prévues pour éviter que l'exploitant ne soit pénalisé.
J'indique qu'un accident de la vie privée n'arrive pas tous les jours : ce serait tous les dix-huit ans, si l'on en croit les statistiques disponibles pour les assurés du régime général.
J'ajoute enfin que cette distinction existe dans tous les régimes de sécurité sociale.
Je voudrais insister sur l'avantage décisif de la séparation des risques. Elle permettra, comme pour les autres régimes de sécurité sociale, de mieux connaître le risque accidents du travail et maladies professionnelles. Cette meilleure connaissance du risque, qui fait aujourd'hui cruellement défaut, est le seul moyen de développer une véritable politique de prévention, ce qui est l'un des objectifs, affirmé, depuis de nombreuses années, objectif central de la réforme.
Depuis trente-deux ans existe ce mélange entre accidents de la vie privée et accidents du travail. A partir du moment où nous avons un consensus sur la situation actuelle, peu satisfaisante, du régime d'assurance accidents, nous devons prendre des décisions pour faire évoluer ce régime. Il est illusoire de croire qu'il évoluera tout seul, puisqu'il ne l'a pas fait depuis trente-deux ans.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Très bien !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Pour cette raison, je souhaite vivement, parce que c'est un point central du dispositif de cette proposition de loi, le retrait de ces deux amendements.
J'indique par avance que les amendements n°s 2 et 3 permettront de préciser et de simplifier les déclarations concernant les accidents de trajet, et ma proposition est peut-être perfectible. J'insiste donc pour que ces amendements soient retirés.
Dans le cas contraire, je serais obligé d'émettre un avis défavorable, d'autant qu'ils constituent pour la commission des affaires sociales, qui s'est prononcée à leur sujet par un vote, un point de rupture. Autant décider de refuser dans son intégralité le texte en provenance de l'Assemblée nationale !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 43 rectifié et 95 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. La position de M. le rapporteur est celle de la sagesse, et il a parfaitement saisi l'essence même de la réforme, qui impose en effet, si l'on veut être efficace, de faire la distinction entre accidents de la vie privée et accidents du travail, pour les raisons qu'il a exposées.
Selon M. Vasselle, il faut tenir compte de la spécificité de la situation des agriculteurs. A l'appui de son argumentation, il a donné l'exemple de l'agriculteur qui, le matin, dépose les enfants à l'école en allant acheter une pièce pour son tracteur. Ne croyez-vous pas, monsieur Vasselle, que les millions de salariés qui déposent leurs enfants en se rendant à leur travail sont exactement dans la même situation ? Les assureurs tranchent, si nécessaire, les tribunaux interviennent et une jurisprudence s'établit.
N'amplifions pas la spécificité des agriculteurs au-delà de ce qui est raisonnable.
Je ne dis pas qu'il n'y aura pas de problème. Il faudra du temps, sans doute, avant que la frontière soit délimitée et que la jurisprudence s'éclaircisse, mais c'est le lot de tous les projets de ce type !
Je suis donc défavorable à ces amendements et je souhaite, moi aussi, qu'ils soient retirés.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement n° 43 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 43 rectifié est retiré.
Monsieur Vasselle, l'amendement n° 95 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. J'ai bien entendu les arguments développés par notre rapporteur et par M. le ministre sur ces amendements. Permettez-moi de relever dans leurs argumentations deux ou trois points.
D'abord M. le ministre a touché du doigt un point sensible, puisqu'il reconnaît lui-même que nous risquons d'aller vers des contentieux qui, à mon avis, ne seront pas négligeables du fait de la nouvelle situation dans laquelle nous allons nous trouver.
Ensuite, je me permets d'insister sur la nature des risques dont on a déjà parlé dans la discussion générale. Les risques auxquels sont confrontés les non-salariés agricoles n'ont rien à voir avec ceux auxquels sont confrontés les salariés agricoles ou les salariés d'une autre entreprise ! Ils sont d'une nature très différente. En effet, les exploitants agricoles sont beaucoup plus exposés, de par leur activité, que les salariés agricoles eux-mêmes, d'autant que leurs activités privées et professionnelles sont étroitement liées.
Je regrette, monsieur le ministre, que les reproches qui vous ont été faits tant par M. le rapporteur que par un certain nombre de membres de la Haute Assemblée n'aient pas été pris en compte en amont. Si vous aviez en effet procédé à des simulations de ce qu'aurait représenté à terme ces risques, cela nous aurait donné une idée du montant, à terme, des cotisations.
Je crains que ce transfert ne se traduise inévitablement pour les exploitants agricoles par une augmentation très importante des cotisations qui viendront de la MSA et de l'AMEXA. Vous n'y échapperez pas. Si l'on arrivait au même résultat, cela voudrait dire que le risque des agriculteurs est identique à celui des salariés agricoles, et chacun sait que ce n'est pas le cas.
Enfin, je terminerai mon argumentation par la séparation qui doit être faite, quant au risque, entre la vie privée et la vie professionnelle.
M. le rapporteur nous dit que cette distinction va permettre de mieux déterminer ce qui est du ressort de la maladie professionnelle, d'une part, des accidents du travail, d'autre part. Permettez-moi d'en douter : je ne suis pas persuadé que nous arrivions à ce résultat, surtout, monsieur le rapporteur, lorsque vous faites valoir comme argument qu'un accident dans la vie privée ne se produit qu'une fois tous les dix-huit ans.
En fait, ce serait un élément supplémentaire en faveur de cet amendement.
Au demeurant, j'ai bien entendu que M. le rapporteur souhaite demeurer dans l'économie générale du texte qu'il a élaboré. Je suis donc prêt, au nom de mes collègues cosignataires, à retirer cet amendement, mais nous attendons avec impatience de voir ce que donnera la deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Nous nous réservons la possibilité de revenir à la charge si besoin est, et j'encourage M. le rapporteur et M. le ministre à procéder à une approche beaucoup plus fine des conséquences de ce choix en termes de cotisations.
M. le président. L'amendement n° 95 est retiré.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je remercie mes deux collègues d'avoir retiré leurs amendements, car il s'agissait vraiment d'un point central. A l'occasion de l'examen des autres amendements, je pense que je pourrai confirmer la cohérence du dispositif présenté par la commission.

ARTICLE L. 752-1 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 44 rectifié est déposé parMM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 91 est présenté par MM. Souplet, Deneux, Huriet et les membres du groupe de l'Union centriste :
Tous trois tendent à insérer, après le quatrième alinéa (3°) du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-1 du code rural, un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« ... ° Les retraités mentionnés au 3° du même article participant occasionnellement à la mise en valeur de l'exploitation. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à maintenir dans le champ de l'assurance accidents des exploitants les retraités anciens non-salariés agricoles qui continuent de participer de manière occasionnelle aux travaux de l'exploitation et s'exposent ainsi à un risque d'accident du travail.
Le Gouvernement m'objectera probablement que, à partir du moment où ces personnes sont retraitées, elles n'ont pas à être couvertes par l'assurance accidents. Certes, mais je crois qu'il s'agit là - hélas ou tant mieux, parce que c'est aussi une souplesse - d'une réalité du monde rural qu'il convient de prendre en compte, comme cela est souhaité par les agriculteurs eux-mêmes.
Nous ne pouvons pas avoir, aujourd'hui, la garantie que les retraités donnant un coup de main seront aussi bien traités en assurance maladie qu'en assurance accidents. Je connais dans ma commune des cas où, le fils qui a pris la succession sur l'exploitation étant mobilisé sur une autre tâche, le père est allé donner un coup de main et s'est trouvé dans une situation qu'il nous faut prendre en compte même si, légalement, elle apparaît contestable.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 44 rectifié.
M. Bernard Joly. Le régime actuel assure quelque 841 000 personnes, dont 124 000 retraités. Si nous adoptons ce texte, ces 124 000 retraités, qui participent ponctuellement aux travaux de certaines exploitations agricoles seront exclus du régime AAEXA, pour être basculés sur le régime AMEXA. Or ces retraités participent de fait aux activités et s'exposent donc aux risques d'accident du travail. Il me paraît donc normal de maintenir les retraités dans le régime de l'AAEXA.
Nous savons bien qu'une pension d'invalidité ou une indemnité journalière versées en cas d'accidents sont considérablement moins importantes dans le régime AMEXA que dans le régime AAEXA. Si nous permettons ce basculement, nous dissuaderons un grand nombre de retraités de donner un coup de main dans les exploitations de taille modeste. Nous priverons ces exploitations d'un apport de main-d'oeuvre indispensable à l'occasion des récoltes. Pis, nous accentuerons les risques d'accidents chez les exploitants, qui seront contraints, faute de pouvoir embaucher, de se dédoubler pour pallier le manque de main-d'oeuvre.
Nous savons tous que, dans les exploitations modestes, pendant la période des récoltes deux chauffeurs sont nécessaires : l'un pour conduire l'engin qui récolte, l'autre pour conduire le tracteur qui réceptionne. Imaginez un instant la perte de temps pour l'agriculteur contraint de descendre de sa moissonneuse pour conduire sa remorque à la coopérative, et vous savez que les contraintes climatiques obligent à faire les récoltes de plus en plus vite pour éviter la pluie. C'est dans la précipitation et le stress que les accidents sont les plus nombreux. Ne retirons pas aux agriculteurs le droit de se doter d'une main-d'oeuvre ponctuelle expérimentée et maintenons les retraités dans le régime AAEXA !
M. le président. La parole est à M. Souplet, pour défendre l'amendement n° 91.
M. Michel Souplet. Au sujet de cet amendement, identique aux deux précédents, je rappelle à M. le ministre que, dans 80 % des cas, lorsque l'exploitation est transmise du père au fils, le père continue de travailler avec son fils. Aussi, la protection complémentaire assurée au retraité qui travaille sur l'exploitation nous paraît tout à fait raisonnable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 1, 44 rectifié et 91 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. J'ai des scrupules à intervenir puisque M. le rapporteur a déjà indiqué ce que j'avais à dire !
Il faut dire le droit aussi simplement que possible. Quand on est retraité, c'est que l'on a cessé son activité et, si l'on cesse son activité, on ne peut pas être couvert pour un risque lié à l'activité. Certes, il est des cas où, effectivement, le cumul entre la retraite et la poursuite d'une activité est autorisé. Dans ce cas-là, l'agriculteur garde le statut de chef d'exploitation et il bénéficie alors de la couverture contre les accidents du travail.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements identiques qui risquent de créer une confusion, même si je comprends le souci qu'ils traduisent de prendre en compte une réalité de la vie agricole.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 1, 44 rectifié et 91.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le ministre, vous n'auriez pas eu à vous interroger sur la confusion du dispositif si vous aviez accepté le premier amendement que nous avons défendu sur la vie privée et la vie professionnelle. Par cette attitude, vous vous créez des difficultés et vous en créez à la profession.
Lorsque nous avons discuté du projet de loi d'orientation agricole, Dieu sait combien vous avez cherché, par la modulation, à opposer les petites structures aux grandes structures. Or, en refusant d'accepter l'amendement de nos collègues, vous pénalisez les exploitants de petites structures, qui ne peuvent s'en sortir qu'avec le concours de leurs parents qui gardent un peu d'activité. C'est ainsi que la transition peut se faire. Si vous n'accordez pas à ces personnes la couverture du risque dans des conditions acceptables, vous aggravez encore la situation financière de ces petites exploitations. C'est la raison pour laquelle j'encourage nos collègues à adopter les amendements qui sont soumis à notre vote.
M. Louis Moinard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Moinard.
M. Louis Moinard. En fait, on confond le travail du retraité et le coup de main occasionnel. Je prends un exemple : un éleveur appelle un vétérinaire et il a besoin d'un coup de main pour attraper un animal. Pensez-vous que son père refusera de l'aider sous prétexte qu'il est retraité ? Dans un cas comme celui-là, il faut qu'une couverture soit prévue.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 1, 44 rectifié et 91, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 45 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-1 du code rural : « Il incombe au chef d'exploitation de souscrire et de maintenir en vigueur l'assurance prévue au présent chapitre pour lui-même et les autres personnes mentionnées au présent article. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. La modification proposée a pour objet de préciser que l'obligation d'assurance incombant au chef d'exploitation implique la souscription et le maintien en vigueur d'un contrat d'assurance régi par les dispositions spécifiques du présent chapitre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement s'inspire de la rédaction actuelle de l'article L. 752-2 du code rural, qui précise que l'obligation d'assurance résulte de la souscription et du maintien en vigueur de l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles.
La rédaction actuellement proposée pour cet alinéa n'était pas incompatible avec le maintien d'un régime concurrentiel. Aussi ne l'avions-nous pas modifié dans le souci de ne bouleverser qu'au minimum le texte adopté par l'Assemblée nationale. C'est pourquoi je m'en remets à la sagesse de notre assemblée sur cet amendement, qui, par ailleurs, ne soulève pas d'objection fondamentale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement s'inscrit dans une logique assurancielle et concurrentielle, donc très différente de la logique de protection sociale et d'instauration d'un nouveau régime de sécurité sociale qui sous-tend le texte qui vous est proposé. Je suis donc évidemment défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 45 rectifié, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-1 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-2 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 2, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-2 du code rural, de remplacer les mots : « dont l'assuré apporte la preuve qu'il est survenu pendant le trajet d'aller et retour entre son domicile, » par les mots : « survenu pendant le trajet d'aller et retour entre le domicile de l'assuré, ».
Par amendement n° 46 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-2 du code rural, de supprimer les mots : « dont l'assuré apporte la preuve qu'il est ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet article prévoit que l'assuré doit apporter la preuve que l'accident est survenu entre son lieu de travail, son domicile et tout lieu où il est susceptible de se rendre pour l'exercice de son activité.
Il s'agit d'une formalité administrative inutile. Soit l'accident du trajet répond aux conditions fixées par la loi et, dans ce cas, il doit être considéré comme un accident du travail, soit il ne répond pas aux conditions fixées par la loi.
Il convient de rappeler enfin que tout accident du travail ou toute maladie professionnelle fait, par définition, l'objet d'une déclaration, qui est prévue à l'article L. 752-16 du code rural. C'est pourquoi je propose de modifier la rédaction de la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 752-2 du code rural.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 46 rectifié.
M. Bernard Joly. Le texte qui nous est soumis propose que soit considéré comme accident du travail tout accident pour lequel l'assuré apporte la preuve qu'il est survenu entre le trajet de son domicile et son lieu de travail ou tout lieu où celui-ci est susceptible de se rendre dans le cadre de son activité.
Cet amendement a pour objet de modifier la charge de la preuve en supprimant l'obligation pour l'assuré de prouver que l'accident est un accident de trajet dès lors que cette preuve ne peut pas avoir d'incidence sur l'indemnisation. Si l'assuré n'apporte pas cette preuve, il s'agit d'un accident de la vie privée, qui sera pris en charge dans les mêmes conditions qu'un accident du travail dès lors que les accidents de la vie privée sont réintégrés dans le champ de l'AAEXA.
Comment un agriculteur peut-il prouver qu'il s'agit d'un accident de trajet et non d'un accident de la vie privée, monsieur Vasselle ? Le Gouvernement souhaite - tel est le principe de la proposition de loi - séparer la vie professionnelle de la vie privée, ce que je conteste étant donné le caractère spécifique du métier d'agriculteur. Le fossé entre la vie professionnelle et la vie privée est extrêmement mince pour cette profession. S'agit-il d'un accident de la vie privée ou d'un accident du trajet lorsque l'assuré, en revenant du supermarché, passe à sa coopérative pour chercher un produit de traitement ? La différence entre les salariés et les agriculteurs est, sur ce point, très nette.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 46 rectifié ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Dans la mesure où cet amendement a le même objet que celui de la commission, nous ne pouvons qu'y être favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 2 et 46 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
Tout ce qui a été dit est très pertinent mais nous nous situons dans une certaine logique : nous voulons instituer, pour les exploitants agricoles, un régime de sécurité sociale se rapprochant du régime général applicable aux salariés. Or, quand un salarié est victime d'un accident de trajet, il lui revient de faire la preuve que celui-ci est lié à son activité professionnelle. Eh bien, selon nous, il devra en être de même pour les exploitants agricoles. Je ne vois pas pourquoi ces derniers n'auraient pas, le cas échéant, à faire la preuve que l'accident de trajet est lié à son activité. S'il passe par sa coopérative, il pourra apporter cette preuve.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je me permets de souligner la différence entre l'accident de trajet du salarié et celui du non-salarié. Le salarié agit dans une situation de sujétion : il exécute un travail dont il a été chargé. Le non-salarié, lui, est libre de sa décision : il ne peut donc pas apporter la preuve qu'il a exécuté un ordre.
De toute façon, une déclaration est faite. Il existe, par conséquent, des éléments pour que la vérification puisse être effectuée sans difficulté. C'est pourquoi l'amendement déposé par la commission me semble indispensable.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 46 rectifié n'a plus d'objet.
Par amendement n° 3, M. Seillier, au nom de la commission, propose, à la fin de la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-2 du code rural, de supprimer le mot : « direct ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La formulation retenue par le texte proposé pour l'article L. 752-2 du code rural laisse trop de latitude au juge et risque d'engendrer un certain nombre de conflits juridiques inutiles.
Sont, en effet, considérés comme accidents du travail les accidents survenus pendant les allers et retours entre le domicile, le lieu de travail et tout lieu où l'assuré est susceptible de se rendre dans l'exercice direct de son activité.
De deux choses l'une : soit le lieu où se rend l'assuré est lié à l'exercice de son activité, soit il ne l'est pas. Dans ces conditions, la commission propose de supprimer l'adjectif « direct », qui ne peut qu'être source de contentieux.
Je crois que les amendements n°s 2 et 3 sont de nature à apaiser les craintes de ceux qui estiment que la distinction entre accident du travail et accident de la vie privée était difficile à opérer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 4, M. Seillier, au nom de la commission, propose, à la fin du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-2 du code rural, de remplacer les mots : « les maladies définies au titre VI du livre IV du code de la sécurité sociale » par les mots : « les maladies inscrites aux tableaux des maladies professionnelles agricoles ».
Par amendement n° 47 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, après les mots : « maladies professionnelles », de rédiger ainsi la fin du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-2 du code rural : « les maladies inscrites aux tableaux des maladies professionnelles agricoles, annexés au décret modifié du 17 juin 1955 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il est préférable de viser les tableaux des maladies professionnelles agricoles annexés au décret modifié du 17 juin 1955 plutôt que les maladies professionnelles inscrites aux tableaux applicables aux ressortissants du régime général de sécurité sociale. Si notre amendement ne précise pas qu'il s'agit du décret modifié du 17 juin 1955, c'est parce qu'il est délicat de faire référence à un décret dans une loi.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 47 rectifié.
M. Bernard Joly. Il s'agit, par cet amendement, de rétablir la reconnaissance de maladies professionnelles différentes entre les salariés et les exploitants agricoles. La définition du décret de 1955 s'adapte aux réalités agricoles, car elle évolue en fonction de l'apparition de nouvelles maladies professionnelles agricoles. Tous les régimes spéciaux ont leurs propres tableaux, chaque activité exposant à des risques particuliers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 47 rectifié ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement est quasiment identique à celui de la commission, qui, lui, ne fait pas expressément référence au décret, pour la raison que j'ai indiquée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4 et 47 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. La seule définition légale de la notion de maladie professionnelle se trouve dans les dispositions du code de la sécurité sociale, auquel le texte actuel de la proposition de loi se réfère. Cette définition est nécessaire. Elle est d'ailleurs utilisée dans le régime accident du travail des salariés agricoles sans que cela soulève la moindre difficulté.
Quant aux tableaux eux-mêmes, ils font l'objet, pour les professions agricoles, de décrets spécifiques, et cela depuis 1955. Ce sont évidemment ces tableaux qui sont utilisés tant pour les salariés agricoles que pour les exploitants agricoles. Cela, j'en prends l'engagement, sera précisé dans le décret d'application relatif aux prestations.
C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 47 rectifié n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-2 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-3 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 48 rectifié, est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à rédiger ainsi l'antépénultième alinéa (3°) du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-3 du code rural :
« 3° Une rente en cas d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole ; ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 5.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Le texte recourt à la notion d'incapacité permanente. Or celle-ci ne nous paraît pas adaptée au monde agricole et nous lui préférons la notion d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole, qui permet de prendre en compte la pénibilité de l'activité exercée.
En effet, l'incapacité fonctionnelle, jugée en considération de critères exclusivement médicaux, peut être minime alors que l'exploitant sera pourtant inapte à exercer sa profession ; on évoque souvent l'exemple des allergies au bois.
Par ailleurs, l'inclusion dans la garantie obligatoire de base de rentes servies aux ayants droit risque de placer les cotisations ou les primes à des niveaux très élevés. Cette garantie doit rester facultative. L'objectif est, ici, de ne pas alourdir les charges des exploitants agricoles.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 48 rectifié.
M. Bernard Joly. Je n'ai rien à ajouter aux arguments qui viennent d'être énoncés par M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 5 et 48 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Nous sommes, de nouveau, dans un débat de fond ; tout à l'heure, il s'agissait de la séparation entre vie privée et vie professionnelle ; cette fois, il s'agit du choix entre la notion d'incapacité et celle d'inaptitude.
Je regrette que la commission n'ait pas rejoint la position de l'Assemblée nationale. En effet, je considère que cette notion d'inaptitude, qui est déjà utilisée aujourd'hui en AAEXA, est beaucoup plus restrictive, selon la jurisprudence même de la Cour de cassation, que la notion d'incapacité, actuellement prévue par le texte et utilisée par le régime accidents du travail des salariés.
La notion d'inaptitude à l'exercice de la profession a conduit à de nombreux rejets, car elle est interprétée de telle façon qu'un exploitant physiquement inapte à poursuivre une activité mais intellectuellement apte à la concevoir se voit écarté du bénéfice de tout revenu de remplacement.
Au contraire, la notion d'incapacité est objectivée par un barème médical. Néanmoins, certaines affections réellement pénalisantes peuvent être insuffisamment prises en compte par le barème. Il en est ainsi des allergies au bois, affection que la jurisprudence de la Cour de cassation ne permettait d'ailleurs pas non plus de retenir au titre de l'inaptitude totale à l'exercice de la profession agricole. C'est pourquoi, comme je l'ai dit tout à l'heure, j'ai déposé un amendement aménageant dans le sens d'une plus grande souplesse la fixation du taux d'incapacité.
Par ailleurs, la suppression de la rente versée aux ayants droit en cas de décès du chef d'exploitation constituerait une régression sociale par rapport à la proposition de loi.
Je souhaite donc que l'on en reste à cette notion d'incapacité, qui me semble - comme à la Cour de cassation, au demeurant - beaucoup plus large et plus protectrice que la notion d'inaptitude.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je ferai deux observations.
D'abord, monsieur le ministre, on ne peut pas, aujourd'hui, parler de « régression sociale », puisqu'il s'agit, avec ce texte, de créer quelque chose là où, pour le moment, il n'y a rien. Pour qu'il y ait régression, il faudrait que l'on revienne sur un dispositif antérieur jugé plus protecteur.
Ensuite, sur le fond, il est vrai que nous avons une approche fondamentalement différente de l'ensemble des références « incapacité » de la sécurité sociale et des tableaux des maladies professionnelles. Je crois précisément que l'examen de cette proposition de loi nous donne la possibilité - c'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles je regrette que l'urgence ait été déclarée - de faire préciser la spécificité de l'inaptitude de la profession agricole.
S'agissant tout particulièrement du régime accidents du travail des exploitants agricoles, qui sont des chefs d'entreprise, il existe une spécificité qu'il faut cerner de manière très fine.
La cohérence du texte adopté par la commission des affaires sociales tient à ce que nous proposons un système innovant, partant de l'affirmation d'une inaptitude à l'exercice de la profession agricole, notion dont il conviendra sans doute, j'en conviens, de préciser le contenu dans d'autres textes, mais qui m'apparaît comme une voie féconde pour l'avenir.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 5 et 48 rectifié.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. L'objet de ces amendements est double.
Ils visent d'abord à substituer à la notion d'incapacité permanente, notion retenue pour les salariés du régime général et renvoyant à l'état physique de la personne, celle d'inaptitude, actuellement utilisée en matière d'assurance contre les accidents des exploitants agricoles. Pour notre part, nous considérons qu'il faut s'en tenir au texte adopté par l'Assemblée nationale.
En outre, ces amendements tendent à réduire le champ de la couverture obligatoire de base en supprimant les rentes servies aux ayants droit. Deux philosophies totalement différentes s'opposent donc. Arguant de la nécessité de limiter au maximum les charges des exploitants agricoles, M. le rapporteur propose de laisser cette garantie à la charge de la protection complémentaire.
Je persiste à considérer qu'il s'agit d'amendements de régression sociale. Quel progrès en effet ! Ne vous paraît-il pas souhaitable, chers collègues de la majorité sénatoriale, de passer d'un extrême à l'autre, c'est-à-dire de basculer d'un régime où très peu de garanties minimales étaient offertes à un nouveau régime offrant l'intégralité des prestations ?
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront donc contre ces deux amendements.
M. Michel Souplet. Ce que vous voulez, c'est du dirigisme !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Monsieur Fischer, je précise que, tout à l'heure, lorsque M. le ministre a parlé de régression, il ne pouvait que se situer par rapport au texte de la proposition de loi tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale puisqu'il s'agit de créer un nouveau régime. Autrement dit, il n'y a pas de régression sociale dans l'absolu. S'il y a régression, elle ne peut être que par rapport à un dispositif qui est encore virtuel.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. D'accord !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Par ailleurs, je ne refuse pas la création d'une rente aux ayants droit, mais je considère que nous sommes en face d'une situation où, pour l'instant, il n'existe rien puisque le texte de l'Assemblée nationale crée un régime de but en blanc. Je crois préférable d'observer pendant quelques années les effets produits par la mise en oeuvre de la rente directe aux bénéficiaires avant d'ouvrir, dans le régime de base obligatoire, la rente aux ayants droit.
Notre option est donc celle de la prudence ; celle-ci nous paraît de mise durant la montée en puissance d'un régime de base au demeurant également très protecteur pour les ayants droit. Ce n'est pas une opposition à la perspective du versement de telles rentes aux ayants droit.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Puisque nous recherchons le consensus, je vais rejoindre M. le rapporteur au moins sur la portée de l'expression de « régression sociale » que j'ai employée.
C'est vrai, ce n'est pas une régression sociale par rapport à la situation antérieure ; c'est seulement, à mes yeux, une régression par rapport à ce que prévoit actuellement le texte.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. En ce qui concerne la question du versement d'une rente aux ayants droit, je crois, monsieur le ministre, que vous jouez sur les mots. J'entends bien qu'il s'agit d'un débat public et qu'il est important, pour le Gouvernement, comme pour M. Fischer, d'afficher nettement, vis-à-vis de l'opinion publique, que c'est la majorité, et seulement elle, qui défend le progrès social. D'où l'emploi des termes de « régression sociale », alors même que ceux-ci sont, en l'occurrence, tout à fait injustifiés, d'autant que, dans d'autres amendements, il sera proposé de substituer un capital-décès à la rente.
M. le rapporteur nous donne rendez-vous dans quelques années, mais peut-être notre dispositif pourra-t-il être amélioré en commission mixte paritaire. Je crois que la notion de rente ou celle de capital-décès est à prendre en considération. Il reste à définir les modalités de sa mise en oeuvre. Il ne me paraît pas souhaitable de l'abandonner pour les non-salariés agricoles et, de ce point de vue, je suis prêt à vous rejoindre, monsieur le ministre.
Mais, de grâce, n'agitez pas le chiffon rouge de la régression sociale ! En procédant ainsi, vous donnez à penser que vous voulez réaliser une opération politicienne à l'occasion de ce débat devant la Haute Assemblée.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Oh !
M. Alain Vasselle. Mais cette attitude n'est pas forcément étonnante de la part de M. Fischer ou du Gouvernement...
Enfin, je pense que la notion d'inaptitude est beaucoup mieux adaptée à la profession agricole que celle d'incapacité, à la fois pour les maladies professionnelles et pour une partie des accidents du travail.
En effet, à la différence du métier de salarié, le métier d'agriculteur est polyvalent ; l'agriculteur doit être en mesure de faire face à toutes les tâches, très variées, liées à son entreprise. Il suffit d'un accident pour le rendre complètement inapte à la totalité de l'activité de son entreprise agricole.
La notion d'incapacité est donc trop limitée par rapport à celle d'inaptitude, qui permet d'appréhender dans sa globalité la situation de l'agriculteur.
C'est la raison pour laquelle je pense que M. le rapporteur a eu raison de substituer à la notion d'incapacité la notion d'inaptitude, d'autant plus que nous examinerons un peu plus tard un article qui fait référence à un certain nombre de données sur lesquelles pourra s'appuyer la commission pour définir ce niveau d'aptitude.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5 et 48 rectifié, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 49 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi l'avant-dernier aliéna (4°) du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-3 du code rural :
« 4° Un capital, en cas de décès d'un assuré. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Cet amendement prévoit, pour les exploitants agricoles, une rente en cas d'inaptitude à l'exercice de leur profession et un capital en cas de décès.
Il s'agit de substituer la rente d'incapacité permanente, d'ordre essentiellement médical et qui est définie en fonction de la nature de l'infirmité, à une rente d'inaptitude à l'exercice de son activité professionnelle, même si l'incapacité permanente est minime.
En effet, si l'on se réfère au texte proposé, l'exploitant atteint d'une incapacité permanente inférieure à 50 % ne percevrait aucune rente, alors que, dans le système actuel, ce même exploitant peut être reconnu inapte à la profession.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je salue l'intention généreuse de cet amendement, qui vise à remplacer la couverture des frais funéraires de la victime par l'obtention d'un capital décès.
Toutefois, je rappelle qu'en supprimant l'inclusion des rentes pour les ayants droit dans la garantie obligatoire, j'ai incité le Sénat à limiter au minimum la charge des exploitants agricoles dans la mise en place de ce nouveau régime.
Or, la disposition proposée, en apportant un supplément de prestations, somme toute limité, aurait pour effet de renchérir inutilement le montant des cotisations ou des primes.
C'est pourquoi, dans un souci de cohérence avec le dispositif que j'ai présenté, je suis au regret d'émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur Joly, votre amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 49 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-3 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-4 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 50 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-4 du code rural :
« Art. L. 752-4. - Les conditions de prise en charge des prestations en nature dues au titre de l'assurance prévue au présent chapitre sont fixées par décret. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. La modification proposée a pour objet d'organiser la prise en charge des prestations en nature de l'AAEXA par décrets spécifiques à l'AAEXA, compte tenu du cadre assuranciel dans lequel elles sont servies et non par référence aux dispositions du code de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La référence au code de la sécurité sociale pour l'organisation de la prise en charge des prestations en nature dues au titre de l'assurance accident du travail me paraît plus protectrice que le renvoi à un décret.
Il ne m'apparaît pas du tout incompatible de maintenir un cadre concurrentiel faisant référence au système assurantiel et, simultanément, s'agissant des prestations, au code de la sécurité sociale.
Cette préoccupation relève de la cohérence de l'ensemble du dispositif présenté et imaginé par la commission des affaires sociales.
C'est pourquoi je regrette de devoir donner à nouveau un avis défavorable.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Joly ?
M. Bernard Joly. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 50 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-4 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-5 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 51 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, après les mots : « au premier alinéa, », de rédiger ainsi la fin de la première phrase du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-5 du code rural : « est fixée par décret ».
Par amendement n° 6, MM. Seillier, au nom de la commission, propose dans la première phrase du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-5 du code rural, de remplacer les mots : « est égale à », par les mots : « est au moins égale à ».
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 51 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement a pour objet de fixer par décret la détermination du montant des indemnités journalières qui devraient s'établir à 150 francs.
Passé le délai de carence de sept jours, il serait préférable de remplacer les deux tranches par un taux unique fixé à 150 francs.
La situation des professions agricoles est différente de celle des autres salariés, car les agriculteurs, nous le savons, ont tendance à reprendre leur activité au plus tôt.
Il serait donc plus légitime, et plus conforme à la réalité du monde agricole, d'instituer dès le huitième jour une indemnité journalière à taux unique d'un montant de 150 francs.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 51 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 6 vise à préciser que le montant des indemnités journalières fixées par décret du ministre de l'agriculture doit être un plancher. Rien ne doit empêcher un exploitant agricole de bénéficier d'indemnités journalières supérieures s'il accepte de s'acquitter de cotisations ou de primes supplémentaires. C'est sur ce plancher qu'est fondée la proposition de construction d'un régime de base de protection contre les accidents du travail.
Par ailleurs, je n'ai identifié, dans l'amendement n° 51 rectifié, qu'une différence de recours juridique à un décret au lieu d'un arrêté. Me gardant bien de trancher entre les deux références, j'émettrai donc un avis de sagesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 51 rectifié et 6 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Comme M. le rapporteur, je pense que la fixation du montant des indemnités journalières par la loi donne plus de garanties que ne le ferait le renvoi à un arrêté ou à un décret. Je suis donc plutôt défavorable à l'amendement 51 rectifié.
L'amendement n° 6 s'inscrit clairement dans une logique assurancielle, à l'opposé de la logique de sécurité sociale que le Gouvernement veut instaurer en prévoyant les mêmes prestations pour tous les assurés. Je ne peux donc qu'y être défavorable.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Monsieur le président, je réalise à l'instant que l'adoption de l'amendement n° 51 rectifié, ferait tomber l'amendement n° 6 de la commission. Je souhaiterais donc vivement que celui-ci soit retiré.
M. le président. Votre remarque est tout à fait pertinente, monsieur le rapporteur.
Dans ces conditions, monsieur Joly, maintenez-vous l'amendement n° 51 rectifié ?
M. Bernard Joly. Sensible au souhait de M. le rapporteur, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 51 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 7, est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
Le second, n° 52 rectifié, est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer la deuxième phrase du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-5 du code rural.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 7.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Dans le cadre du dispositif concurrentiel souple et pragmatique que vous propose la commission, il n'y a pas lieu de prévoir la majoration du montant des indemnités journalières à l'issue d'une période de vingt-huit jours.
Cette disposition ne semble pas nécessairement adaptée aux besoins de l'ensemble des exploitants agricoles. Ceux qui seront intéressés par une telle majoration la solliciteront auprès de l'organisme assureur.
C'est toujours dans le souci de limiter le coût du régime de base que je propose de maintenir le système de base des indemnités journalières, sans prévoir cette augmentation automatique.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 52 rectifié.
M. Bernard Joly. L'argumentation est la même que pour l'amendement n° 51 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 7 et 52 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. La majoration de l'indemnité journalière dans un régime d'accidents du travail vise à mieux indemniser les arrêts prolongés pour prendre en compte la gravité de l'accident. Or, l'amendement supprime cette disposition pour placer cette majoration dans le cadre de garanties complémentaires librement contractées par les assurés.
Il y a, certes, place pour une assurance complémentaire, mais pas au détriment des prestations de base qui - je l'ai dit tout à l'heure -, doivent rester identiques pour tous les assurés, en particulier pour les plus démunis, qui n'ont pas forcément les moyens d'avoir recours à ce type d'assurance. C'est pourquoi je suis défavorable à ces amendements.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je tenais à dire que cette disposition peut sans doute être perfectionnée au cours des discussions. Cela fait partie des possibilités d'ouverture de la commission.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 7 et 52 rectifié.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Ce sont toujours les mêmes motifs qui sont invoqués : pour limiter au minimum les charges pesant sur les agriculteurs, la commission des affaires sociales envisage de supprimer la majoration du montant des indemnités journalières à l'issue d'une période de vingt-huit jours.
« Si les exploitants agricoles souhaitent cette majoration, ils la solliciteront auprès de leur organisme assureur, sous la forme d'une garantie supplémentaire ». Telle est la solution préconisée par M. le rapporteur,
Fidèles à notre logique, nous estimons que cette solution est peu satisfaisante en termes d'égalité de traitement des exploitants agricoles, car ils continueront à pâtir d'une protection accident du travail à plusieurs vitesses.
Certains pourront y avoir accès, d'autres non. Les choix, me direz-vous, seront laissés aux exploitants agricoles, qui se détermineront en fonction de leur expérience. Je crois pourtant que la solution médiane proposée était intéressante.
Nous ne pouvons qu'être contre de tels amendements qui n'améliorent nullement la garantie et les prestations offertes par le régime d'AAEXA, et ce d'autant plus que bien que la création d'indemnité journalière constitue, selon nous, une réelle avancée, nous estimons que le montant de ces dernières - 115 francs par jour au premier niveau et 150 francs par jour au second niveau - est relativement bas au regard des coûts journaliers des services et remplacements, qui s'élèvent, quant à eux, à 300 ou 400 francs.
Sur ce point, monsieur le ministre, nous attendons que vous preniez la mesure du décalage existant et que vous vous engagiez à garantir des prestations effectivement à la hauteur des exigences. Il y a matière à discussion.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 7 et 52 rectifié, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-5 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-6 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 53 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi les deuxième et troisième alinéas du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural :
« - au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole présentant une inaptitude réduisant au moins des deux tiers sa capacité de travail ;
« - aux autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1 du présent code présentant une inaptitude totale à l'exercice de la profession agricole. »
Par amendement n° 8, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural de remplacer les mots : « lorsque le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à un taux fixé par décret » par les mots : « présentant une inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole selon un taux fixé par décret ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 93, présenté par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont et tendant, à la fin du texte proposé par l'amendement n° 8, à supprimer les mots : « selon un taux fixé par décret ».
Par amendement n° 9, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans le troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, de remplacer les mots : « en cas d'incapacité permanente totale » par les mots : « présentant une inaptitude totale à l'exercice de la profession agricole ».
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 53 rectifié.
M. Bernard Joly. Le texte qui nous est proposé pour l'article L. 752-6 du code rural tend à instaurer un concept d'invalidité permanente partielle au détriment du concept d'inaptitude à l'exercice de la profession, ce qui me semble être une erreur.
Ce texte dispose que toute personne ayant une invalidité permanente partielle inférieure à 50 % ne touchera aucune rente, alors que, dans le système actuel, cette personne peut être reconnue inapte à l'exercice de sa profession.
Je crains que les personnes qui bénéficient d'une rente en raison de leur inaptitude ne puissent plus en profiter parce que leur taux d'invalidité permanente partielle sera inférieur à 50 %.
En agriculture, surviennent souvent de petits accidents qui, dans le système proposé, ne donneraient pas lieu au versement d'une rente. Satisfaisant pour les accidents graves qui donnaient droit à une invalidité permanente à 100 %, dont les rentes seront plus élevées, le dispositif est défaillant pour les petits accidents courants de la profession.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 8.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement tend à remplacer la notion d'incapacité permanente ou partielle par celle d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole.
La commission souhaite conserver la référence à un taux fixé par décret et non le maintien des simples règles existantes : rente pour le chef d'exploitation à partir d'une inaptitude des deux tiers de l'incapacité de travail et rente pour les conjoints et ayants droit si l'inaptitude est totale. Ce taux pourrait être de 50 % afin d'améliorer la couverture des risques.
Autrement dit, en remplaçant la référence à l'incapacité par la notion d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole et en précisant que l'on se réfère tout de même à des taux, j'ouvre la perspective de cette innovation que constitue la définition complète, avec des taux, du régime d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole.
J'ai bien mesuré que, en l'état, les deux références, qu'il s'agisse de l'incapacité dans le régime de la sécurité sociale et le régime général ou de l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole, peuvent présenter à la fois des avantages et des inconvénients. C'est pourquoi il faut améliorer le dispositif et aller jusqu'au bout de la logique en retenant une définition complète, fondée sur des taux, de l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre le sous-amendement n° 93.
M. Alain Vasselle. Monsieur le rapporteur, votre amendement serait parfait s'il ne faisait pas référence à un taux fixé par décret. Aussi, les auteurs du sous-amendement que je défends en l'instant souhaitent supprimer cette référence.
Mes chers collègues, en état actuel, l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole s'apprécie au regard de trois aspects. D'abord, des éléments qui sont purement médicaux : l'incapacité permanente partielle ou totale physiologique. Ensuite, des éléments qui sont purement professionnels : le retentissement des conséquences de l'accident sur l'exercice de l'activité agricole spécifique à la victime. Enfin, des éléments qui sont purement personnels et qui sont liés à l'âge, à l'état de santé avant l'accident, à la formation professionnelle initiale et aux capacités de reclassement.
La prise en compte des deux aspects principaux, à savoir les éléments médicaux et les éléments professionnels - qui justifient d'ailleurs une double expertise médicale et économique - permet d'attribuer une pension d'inaptitude partielle ou totale dans des cas où il n'y a pas de corrélation entre le taux d'incapacité et l'aptitude professionnelle restante.
La notion d'inaptitude à l'exercice de la profession, qui est une notion médico-administrative, est particulièrement bien adaptée à la réalité puisqu'elle permet le service d'une rente quel que soit le taux d'incapacité fonctionnelle et quand bien même l'atteinte à l'intégration physique de l'assuré est minime, dès lors que celui-ci ne peut plus exercer sa profession agricole antérieure.
Ainsi un forestier atteint d'une maladie professionnelle telle l'allergie au bois peut-il bénéficier d'une pension d'inaptitude totale dès lors qu'il ne peut plus exercer sa profession en raison de cette allergie, alors même que le taux d'incapacité fonctionnelle correspondant à cette pathologie aura été estimé à 25 %. Il en est de même pour un céréalier, travailleur unique sur son exploitation, qui, atteint d'un traumatisme lombaire dont l'incapacité fonctionnelle est évaluée à 30 %, ne peut plus, à la suite de ce traumatisme, poursuivre la mise en valeur de son exploitation.
L'intérêt de la notion d'inaptitude est donc de permettre l'attribution d'une pension sans qu'un taux minimal d'incapacité fonctionnelle soit atteint.
L'introduction d'un taux qui rend exclusivement compte du préjudice corporel sans prendre en considération son effet sur l'activité professionnelle priverait la notion d'inaptitude de son intérêt principal puisque, en toute logique, la pension d'inaptitude partielle ne serait servie qu'à partir d'un taux minimal et la pension d'inaptitude totale qu'en cas d'incapacité permanente totale de 100 %. C'est à la solution retenue dans le cadre de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale le 3 mai 2001 que nous aboutirions.
Il est renvoyé à un décret, comme c'est le cas dans le dispositif actuel, pour la détermination du montant des rentes, leur revalorisation et la fixation des règles applicables en cas d'accidents successifs.
Certes, M. le rapporteur fait un effort dans la direction que nous souhaitons en avançant des pourcentages et des taux ; mais, pour le moment, nous n'avons pas l'assurance que ceux-ci seront retenus par le Gouvernement. Celui-ci, dans sa logique de quatrième branche de la sécurité sociale et de MSA, va, à mon avis, en rester à sa notion, ce qui interdira aux agriculteurs se trouvant en situation d'inaptitude au travail de pouvoir bénéficier d'un niveau d'indemnités correspondant à la situation dans laquelle ils se retrouveraient à la suite d'une maladie professionnelle ou d'un accident du travail.
C'est la raison pour laquelle il me paraît souhaitable que le sous-amendement que je présente, qui va dans le même sens que l'amendement de M. le rapporteur mais plus loin, soit adopté par la Haute Assemblée.
M. Philippe Richert. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 9 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 53 ainsi que sur le sous-amendement n° 93.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a présenté un système original, permettant de maintenir le principe de l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole, qui semble mieux adapté, tout en confirmant le mécanisme retenu par la proposition de loi d'un taux qui serait non pas le taux d'incapacité, mais un taux d'inaptitude. J'insiste sur ce point puisque le sous-amendement n° 93 vise à supprimer la référence à ce taux. Dans l'esprit de la commission, il ne s'agit pas du taux d'incapacité permanente, il s'agit d'une nouvelle forme de taux. Ce taux ne rendrait pas compte seulement du préjudice corporel, il prendrait aussi en compte son effet sur l'activité professionnelle.
Je concède que ce concept de taux d'inaptitude est pour l'instant novateur.
Revenons à l'objectif visé par la commission, à savoir concilier les avantages des deux systèmes, la rigueur de la référence du système d'incapacité et l'avantage du système spécifique pour les exploitants agricoles.
En effet, dans la législation actuelle, comme le rappelle l'amendement n° 53 rectifié, la rente d'inaptitude n'est accordée au chef d'exploitation que si sa capacité de travail est réduite d'au moins deux tiers et aux conjoints et aides familiaux que s'ils sont reconnus totalement inaptes à l'exercice de la profession agricole.
Cette législation permet de ne pas se fonder uniquement sur des critères médicaux, ce qui peut être une bonne chose, comme le montre l'exemple déjà cité des allergies au bois, mais elle paraît tout de même restrictive. La navette permettra peut-être d'améliorer le dispositif, soit à l'Assemblée nationale, soit au Sénat.
C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 53 rectifié et sur le sous-amendement n° 93.
Quant à l'amendement n° 9, il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement n° 53 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Me rangeant aux arguments de M. le rapporteur, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 53 rectifié est retiré.
Monsieur Vasselle, le sous-amendement n° 93 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. J'ai tant de plaisir à entendre M. le ministre que je souhaite connaître l'avis du Gouvernement. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 93 et sur l'amendement n° 8, ainsi que sur l'amendement n° 9 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je m'exprimerai sur le « paquet » : je suis défavorable à ces amendements et à ce sous-amendement, car ils s'inscrivent dans cette logique d'inaptitude alors que je défends la logique d'incapacité. Je voudrais m'y arrêter un instant.
Le critère de l'inaptitude, c'est mieux, dites-vous, monsieur Vasselle. Le problème, c'est que la Cour de cassation dit le contraire. Vous pouvez donc faire tous les raisonnements que vous voulez en disant que le critère de l'inaptitude permet une meilleure couverture, la Cour dit le contraire, et c'est pourquoi je défends la notion d'incapacité.
Je reviens sur l'exemple de l'agriculteur qui a perdu les deux jambes et qui est quasiment grabataire : s'il est lucide, on considère qu'il peut diriger son exploitation. La notion de l'inaptitude ne permet pas de prendre en compte ce genre de situation.
Je ne dis pas que vous êtes les porte-parole des assureurs. (Sourires sur les travées socialistes.)
M. Guy Fischer. Moi, je n'ai rien dit ! (Sourires.)
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cependant, je comprends bien la raison pour laquelle les assureurs se retranchent derrière cette notion d'inaptitude : ils peuvent rejeter nombre de dossiers.
M. Guy Fischer. En effet !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Ils peuvent ainsi réaliser des profits.
Puisque vous voulez une meilleure couverture pour les agriculteurs, je ne comprends pas pourquoi vous défendez cette notion d'inaptitude. En effet, entre le dispositif fondé sur la jurisprudence de la Cour de cassation et celui que vous proposez, il n'y a pas photo, si je puis m'exprimer ainsi !
Je maintiens que se figer sur cette notion d'inaptitude est une erreur pour la couverture sociale des agriculteurs.
C'est pourquoi j'émets systématiquement un avis défavorable sur tous les amendements et sous-amendements qui font référence à la notion d'inaptitude.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il est vrai que la Cour de cassation a pris position en fonction de la législation en vigueur. Mais dans la mesure où je propose de construire un nouveau dispositif complet, spécifique à l'agriculture,...
M. Alain Vasselle. C'est le rôle du législateur !
M. Bernard Seillier, rapporteur. ... d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole, avec un système de taux que je détaillerai lors de la présentation des amendements suivants, la Cour de cassation tiendra compte, demain, de la nouvelle législation.
Je ne dis pas autre chose. Je reconnais la jurisprudence actuelle. Cependant, je peux prendre le pari que la jurisprudence changera avec le nouveau système, si celui-ci est adopté.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 93.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je remercie M. le rapporteur d'avoir répondu à M. le ministre à propos de la Cour de cassation. Notre Constitution évoluera peut-être dans l'avenir, mais à l'heure actuelle, il appartient au législateur, autant que je sache, d'élaborer la loi, et non à la Cour de cassation de faire en sorte que le Parlement s'adapte à la jurisprudence. C'est plutôt l'inverse qui doit prévaloir, et c'est donc à nous qu'il revient de faire évoluer la loi pour que la jurisprudence change.
Je remercie M. le rapporteur de l'avoir souligné et je suis surpris qu'un membre du Gouvernement prenne pour référence la jurisprudence de la Cour de cassation pour s'opposer à des amendements d'origine parlementaire qui tendent justement à faire évoluer une situation critiquée.
Monsieur le ministre, si vous examinez la disposition d'une manière isolée, sans la replacer dans le contexte général du dispositif que souhaite le Sénat, votre argument prend bien sûr toute sa force et il vous permet d'émettre un avis défavorable. Mais si vous replaciez cet amendement dans son contexte, si nous l'examinions simultanément avec d'autres dispositions dont nous débattrons lors de l'examen d'autres articles, vous constateriez que la notion d'inaptitude telle que nous entendons l'appliquer permettra d'éviter des situations comme celles que vous avez évoquées, je pense notamment à cet agriculteur cul-de-jatte qui, parce qu'il est lucide, ne pourrait pas bénéficier de la rente au motif qu'il est considéré comme étant encore capable d'exercer une partie de son activité.
C'est la raison pour laquelle j'ai fait valoir un certain nombre d'éléments sur lesquels pourrait s'appuyer la commission. En effet, M. le rapporteur propose, dans un amendement que nous examinerons tout à l'heure, de créer une commission pilotée par la MSA, qui prendrait une décision quant à l'inaptitude partielle ou totale et fixerait le niveau d'incapacité. Voilà pourquoi ce sous-amendement me paraissait intéressant.
Cela étant dit, M. le rapporteur considère que la navette permettra peut-être de parvenir à une position commune. Aussi, compte tenu de la volonté qui est la sienne de faire évoluer le dispositif dans un sens répondant au souci que nous exprimions, je retire ce sous-amendement.
M. le président. Le sous-amendement n° 93 est retiré.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je souhaite reprendre ce débat sur l'inaptitude et l'incapacité.
Monsieur Vasselle, l'argument concernant la Cour de cassation ne me paraît pas recevable. Je ne suis pas un défenseur à tous crins du pouvoir des juges et je suis un parlementariste convaincu, d'ailleurs sans doute plus que vous : ainsi, je n'ai pas voté une constitution qui visait à rationaliser le parlementarisme, pour reprendre l'expression utilisée à l'époque !
Monsieur le rapporteur, une législation nouvelle imposera une nouvelle jurisprudence. Sauf que vous ne changez pas la définition de l'inaptitude. Par conséquent, à chaque fois qu'il y aura un trou dans votre dispositif - et j'ai bien compris que vous le vouliez très sophistiqué, avec notamment des taux et des encadrements -, la jurisprudence restera la même que précédemment, car la définition de l'inaptitude n'aura pas été modifiée.
Par ailleurs, pourquoi ne pas faire simple ? Vous ne m'avez toujours pas expliqué pourquoi vous refusiez la notion d'incapacité dont je vous dis qu'elle est plus protectrice. Pourquoi monter un système sophistiqué alors que l'on peut faire simple ? Je n'ai toujours pas compris, et je continue à penser que c'est une erreur.
Par conséquent, je suis toujours défavorable, en l'occurrence, à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Bernard Joly. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Cet amendement vise à remplacer la notion d'incapacité permanente ou partielle par celle d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole.
M. le ministre nous dit que, pour lui, il n'y a aucune différence. Je croyais lui avoir fait part tout à l'heure d'une crainte, que je réitère : je crains en effet que les personnes bénéficiant d'une rente, parce que inaptes, ne puissent plus en profiter parce que leur taux d'invalidité permanente ou partielle sera inférieur à 50 %. Et ce ne sont pas les arguments que M. le ministre vient d'avancer qui me convainquent. Je voterai donc l'amendement de la commission.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 55 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural.
Par amendement n° 10 rectifié, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural :
« L'inaptitude partielle ou totale à la profession agricole est déterminée et notifiée à l'assuré par l'organisme assureur, après avis d'une commission dont la composition est fixée par décret, d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et morales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle. »
Par amendement n° 106, le Gouvernement propose :
I. Dans le quatrième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, de supprimer les mots : « par le service du contrôle médical de la mutualité sociale agricole ».
II. Dans le même alinéa, de remplacer les mots : « par l'organisme assureur » par les mots : « à la victime par l'organisme assureur, après avis d'une commission dont la composition est fixée par décret, ».
La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 55 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement vise à supprimer les dispositions relatives à la détermination du taux d'incapacité pour le calcul des rentes d'incapacité.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 10 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 106 ainsi que sur l'amendement n° 55 rectifié, dont l'adoption, monsieur le rapporteur, ferait tomber votre propre amendement.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je le regretterais profondément, monsieur le président, puisque cet amendement est l'une des pièces de l'innovation proposée par la commission. Je souhaite que, grâce à la navette, puis à des perfectionnements législatifs ultérieurs, il n'y ait pas de trous dans le dispositif que nous proposons. Ce dernier, je le répète, concerne non pas des salariés, mais des chefs d'entreprise. C'est la raison pour laquelle je maintiens que la référence à la notion d'incapacité n'a pas fait la preuve de sa pertinence par rapport non pas aux salariés agricoles, mais aux chefs d'entreprise.
L'amendement n° 10 rectifié constitue une synthèse novatrice entre le système de l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole et le mécanisme de l'incapacité, qui est déterminée par un taux.
Ce dispositif, centré autour du nouveau concept de « taux d'inaptitude », permet, selon la commission des affaires sociales, de bénéficier des avantages des deux mécanismes précités. Ce taux d'inaptitude sera déterminé et notifié à l'assuré par l'organisme assureur, après intervention d'une « commission des rentes », où seront présents la Mutualité sociale agricole et les organismes assureurs. Nous avons repris, dans cet amendement n° 10 rectifié, l'idée avancée par le Gouvernement dans son amendement n° 106.
Le taux d'inaptitude prendra en compte à la fois la situation médicale et la profession exercée par la victime : ce sera ainsi un taux « pragmatique ».
A ce stade de la discussion, je ne doute pas de la capacité novatrice du Parlement.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Par ailleurs, la commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s 55 rectifié et 106.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 106 et pour donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 55 rectifié et 10 rectifié.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement n° 106 a un titre : c'est l'amendement « allergie au bois ». Il vise en effet à répondre à une préoccupation fort légitime, exprimée par M. Seillier dans son rapport.
Le Gouvernement se propose donc d'étendre la procédure qui est en place actuellement pour les salariés agricoles aux non-salariés agricoles afin d'introduire une marge d'appréciation dans la fixation des taux d'incapacité.
Un décret prévoira que la commission est composée de représentants à la fois de la Mutualité sociale agricole et du groupement des assureurs.
C'est grâce à ce mécanisme que les très rares cas où le barème d'invalidité prend insuffisamment en compte le préjudice réel - c'est le cas des allergies au bois cité par M. le rapporteur - pourront donner lieu à l'attribution d'une rente.
Par ailleurs, il est inutile de rappeler le rôle du service du contrôle médical de la Mutualité sociale agricole qui est défini à l'article L. 752-11-A par référence au code de la sécurité sociale.
Avec cet amendement, le Gouvernement veut répondre à la préoccupation légitime que M. le rapporteur a exprimée à plusieurs reprises.
J'ajoute que le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 55 rectifié et 10 rectifié.
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que l'adoption de l'amendement n° 55 rectifié rendrait sans objet l'amendement n° 10 rectifié de la commission et l'amendement n° 106 du Gouvernement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 55 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 10 rectifié et 106 n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 96, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont, proposent de rédier ainsi le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural :
« La rente due à la victime, en cas d'inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole, est fixée et revalorisée dans des conditions fixées par décret. Les conditions spécifiques, en cas d'accidents successifs, sont également fixées par décret. »
Par amendement n° 54 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural :
« La rente due à la victime, en cas d'inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole, est fixée et revalorisée dans les conditions fixées par décret. »
Par amendement n° 11, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la première phrase du cinquième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural :
« La rente due à la victime atteinte d'une inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole est au moins égale au gain forfaitaire annuel mentionné à l'article L. 752-5 du présent code, multiplié par le taux d'inaptitude qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci. »
La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 96.
M. Alain Vasselle. C'est un amendement de conséquence du sous-amendement n° 93 à l'amendement n° 8, présenté par la commission. A partir du moment où nous avons retiré le sous-amendement n° 93, l'amendement n° 96 n'a plus de raison d'être maintenu. Je le retire donc, toujours compte tenu de l'engagement de M. le rapporteur à faire évoluer le texte dans le sens que nous souhaitons.
M. le président. L'amendement n° 96 est retiré.
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 54 rectifié.
M. Bernard Joly. Les pensions d'inaptitude partielle et totale devront être fixées et revalorisées suivant des modalités précisées par décret. Il conviendrait que la pension d'inaptitude totale s'établisse à 70 000 francs et la pension d'inaptitude partielle à 50 000 francs, soit un triplement du montant des rentes par rapport à leur niveau actuel.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 54 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 11 est un amendement de conséquence, qui tend à remplacer la notion d'incapacité par celle d'inaptitude.
Quant à l'amendement n° 54 rectifié, il prévoit de préciser par décret les modalités de fixation et de revalorisation des pensions d'inaptitude partielle ou totale. Le texte de la proposition de loi, tel qu'il a été amendé par la commission, me paraît plus protecteur pour les assurés. Le système médiant proposé par la commission repose sur un équilibre, les prestations définies assez largement par la loi avec des cotisations ou des primes relevant de mécanismes concurrentiels. C'est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 54 rectifié.
Je souligne que l'adoption de l'amendement n° 54 rectifié rendrait sans objet l'amendement n° 11.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 54 rectifié et 11 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Tout ce qui se réfère à l'inaptitude est pour moi restrictif. Prenons le cas de M. Jacques Pelletier, ici présent, qui éprouve actuellement des difficultés à se déplacer : il souffre d'incapacité et non d'inaptitude, puisqu'il a toute sa tête. Son cas serait donc rejeté par les assureurs.
Je suis donc systématiquement défavorable à toute référence à l'inaptitude.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement n° 54 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 54 rectifié est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. A ce stade de l'examen des amendements, nous sommes plusieurs à considérer que la notion d'inaptitude est beaucoup moins restrictive que celle d'incapacité, qui renvoie à des taux la fixation du niveau d'indemnisation. La notion d'inaptitude, par le biais de la commission proposée par M. le rapporteur, permet une approche beaucoup plus globale et plus réelle de la situation dans laquelle se trouve l'exploitant.
Ainsi, pour reprendre l'exemple de notre ami Jacques Pelletier, on ne peut comparer sa situation en qualité de sénateur et la situation dans laquelle il se trouverait s'il reprenait sa casquette d'agriculteur, qu'il n'est plus, sauf peut-être encore de temps en temps, en tant que retraité, pour aider ses enfants. Dans ce dernier cas, on pourrait en effet considérer qu'il est aujourd'hui dans un état d'inaptitude pour exercer la profession d'agriculteur. Aussi, monsieur le ministre, la situation de M. Jacques Pelletier dément complètement les affirmations que vous venez de faire !
J'observe que, en ayant adopté l'amendement n° 55 rectifié de notre collègue M. Joly, nous avons donné un coup de canif sérieux à l'ensemble du dispositif,...
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est clair !
M. Alain Vasselle. ... notamment à la référence à la commission qui permettait justement de donner toute son efficacité à la notion d'inaptitude telle que nous l'avions imaginée en commission des affaires sociales.
Je me permets de le souligner à ce stade du débat, car il faudra bien, lors de la navette, que nous essayions de nous coordonner afin de redonner une certaine cohérence à notre texte.
M. le président. C'est bien pourquoi, monsieur Vasselle, je m'efforce, à chaque vote d'amendement, de rappeler que, compte tenu de l'ordre qui a été fixé, l'adoption du premier amendement rend sans objet les suivants.
Effectivement, en l'occurrence, le Sénat a fait preuve d'incohérence.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 12, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du sixième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, de remplacer les mots : « l'incapacité permanente » par les mots : « l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole ».
Par amendement n° 56 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, dans la première phrase de l'antépénultième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, de remplacer les mots : « l'incapacité permanente » par les mots : « l'inaptitude à la profession agricole ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 12.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 56 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement est presque identique à celui de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 12 et 56 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Toujours défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 56 rectifié n'a plus d'objet.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 57 rectifié est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 97 est déposé par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont.
Tous deux tendent à supprimer l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural.
Par amendement n° 13, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, de remplacer les mots : « d'incapacité permanente » par les mots : « d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole ».
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 57 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement a pour objet de supprimer les dispositions relatives à la détermination du taux d'incapacité pour le calcul des rentes d'incapacité.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 97.
M. Alain Vasselle. C'est un amendement de conséquence au sous-amendement n° 93 et à l'amendement n° 96. Etant donné que j'ai accepté de retirer ce sous-amendement et cet amendement, celui dont nous discutons à présent n'a plus de raison d'être si je veux rester cohérent avec la démarche de la commission, que j'ai accepté de suivre.
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 97 est retiré.
Monsieur Joly, l'amendement identique n° 57 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 57 rectifié est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Bernard Seillier, rapporteur. C'est aussi un amendement de conséquence se situant dans la logique qui a été enclenchée par la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-6 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-7 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 58 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-7 du code rural.
Par amendement n° 14, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-7 du code rural, de remplacer le mot : « bénéficient » par les mots : « peuvent bénéficier ».
Par amendement n° 15, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer la seconde phrase du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-7 du code rural.
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 58 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement tend à supprimer l'article L. 752-7 du code rural, qui prévoit l'attribution de rentes aux ayants droit en cas de décès du chef d'exploitation. Il est préférable, en effet, pour maintenir les cotisations de l'AAEXA à un niveau modéré, de prévoir un capital-décès d'un montant de 50 000 francs.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre les amendements n°s 14 et 15 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 58 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 14 de la commission est sous-tendu par le même objectif que l'amendement présenté par M. Joly, mais il offre plus de souplesse : les ayants droit qui le souhaitent pourront bénéficier du versement de rentes, mais ce bénéfice n'est plus automatique comme le prévoit le texte de l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 15 est un amendement de conséquence.
Pour ce qui est de l'amendement n° 58 rectifié, la commission émet un avis défavorable puisqu'il est satisfait par l'amendement n° 14 de la commission, qui offre en outre, je le répète, davantage de souplesse.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 58 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 14 et 15 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le versement de rentes d'ayants droit au conjoint et aux enfants en cas de décès du chef d'exploitation constitue une véritable avancée sociale. Les rentes facultatives représentent une régression sociale par rapport non pas à la situation actuelle, mais à ce que le texte propose. Je ne peux donc pas être favorable à ces amendements.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je ne conteste pas qu'il s'agisse d'une avancée, mais je souhaite qu'elle soit compatible avec les charges que sont en mesure de supporter les agriculteurs. C'est pourquoi je maintiens que la sagesse commande aujourd'hui d'offrir une possibilité mais pas de créer une obligation.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-7 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-8 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 16 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 59 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-8 du code rural :
« Art. L. 752-8. - L'action de l'assuré pour le paiement des prestations prévues par la présente section se prescrit par deux ans à compter de la date de l'accident ou de la constatation médicale, soit de la maladie professionnelle, soit de l'aggravation de l'état de l'assuré entraînant l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole.
« Sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment versées se prescrit également par deux ans à compter du paiement desdites prestations entre les mains du bénéficiaire. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a estimé qu'il était préférable de maintenir la prescription spécifique à ce contrat d'assurance particulier plutôt que de faire référence à la prescription de deux ans prévue par le code de la sécurité sociale pour les accidents du travail du régime général de sécurité sociale.
M. le président. La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 59 rectifié.
M. Bernard Joly. Cet amendement est identique à celui que vient de défendre M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 16 et 59 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-8 du code rural est ainsi rédigé.

ARTICLE L. 752-9 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 60 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-9 du code rural :
« Art. L. 752-9. - Les conditions de prise en charge de la révision ou de la rechute au titre de l'assurance prévue au présent chapitre sont fixées par décret. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. La rédaction proposée tire les conséquences du maintien de l'AAEXA dans un système assurantiel. Les conditions de prise en charge de la révision et de la rechute sont déterminées non pas par référence aux dispositions du code de la sécurité sociale, mais par des dispositions réglementaires spécifiques à l'AAEXA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. En effet, faire référence aux dispositions du code de la sécurité sociale pour les conditions de prise en charge de la révision et de la rechute n'est en aucun cas incompatible avec le maintien de l'assurance accident dans un système assurantiel concurrentiel. C'est cette originalité que nous essayons de démontrer au travers de nos propositions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Egalement défavorable.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 60 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-9 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-10 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 61 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-10 du code rural :
« Art. L. 752-10. - En cas de décès d'un assuré, un capital-décès dont le montant est fixé par décret, est versé par l'organisme assureur. »
La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. La modification proposée a pour objet de créer une nouvelle prestation légale, le capital-décès, dont le montant, fixé par décret, serait au moins égal à 50 000 francs. Cette nouvelle garantie serait versée en cas de décès à la suite d'un accident - du travail ou de la vie privée - ou d'une maladie professionnelle de l'un des non-salariés agricoles - chef d'exploitation, conjoint, aide familial, associé d'exploitation ou retraité - inscrits sur le contrat AAEXA.
Cette prestation se substitue à la prestation frais funéraires, dont le montant est plafonné à 7 350 francs.
Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Par coordination, la commission avait émis un avis défavorable. Toutefois, l'amendement relatif à la création du capital-décès n'ayant pas été adopté tout à l'heure, je me demande si le présent amendement, qui est de conséquence, n'est pas désormais sans objet.
M. Bernard Joly. Dans ces conditions, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 61 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-10 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

DIVISION ET ARTICLE ADDITIONNELS,
APRÈS L'ARTICLE L. 752-10 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 17, M. Seillier, au nom de la commission, propose d'insérer, après le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-10 du code rural, une division additionnelle ainsi rédigée : « Sous-section 6. - Dispositions diverses ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet amendement vise à insérer une division additionnelle au sein de la sous-section relative aux prestations intitulée « Dispositions diverses ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est une très bonne idée !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans la proposition de loi, après le texte proposé pour l'article L. 752-10 du code rural.
Par amendement n° 18, M. Seillier, au nom de la commission, propose d'insérer, après le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-10 du code rural, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. 752-10-1. - Les modalités d'application de la présente section sont déterminées par décret. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'application de certaines dispositions relatives aux prestations nécessitera des précisions d'ordre réglementaire. C'est la raison pour laquelle la commission vous propose d'adopter cet article additionnel prévoyant un renvoi à un décret d'application.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Très favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après le texte proposé pour l'article L. 752-10 du code rural.

ARTICLE L. 752-11 A DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 62 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-11 A du code rural :
« Art. L. 752-11 A - Les organismes de Mutualité sociale agricole sont chargés de :
« - contrôler le respect de l'obligation d'assurance,
« - participer aux actions de prévention prévues à la section 6 du présent chapitre.
« Une convention conclue entre un groupement doté de la personnalité morale représentant les organismes assureurs et la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole définit les modalités selon lesquelles il est vérifié que toute personne affiliée à l'assurance obligatoire maladie maternité et invalidité des personnes non salariées des professions agricoles est également couverte contre les accidents du travail, de la vie privée et les maladies professionnelles. »
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 19 tend, au début du cinquième alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-11 A du code rural, à remplacer les mots : « de mener » par les mots : « d'animer et de coordonner ».
L'amendement n° 20 vise à supprimer le septième alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-11 A du code rural.
Par amendement n° 98, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller et de Richemont proposent, dans l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-11 A du code rural, de remplacer les mots : « par les autres organismes habilités à participer à la gestion du régime » par les mots : « par les organismes assureurs autorisés à garantir les risques régis par le présent chapitre ».
Par amendement n° 21, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-11-A du code rural par l'alinéa ainsi rédigé :
« Une convention conclue entre un ou plusieurs groupements dotés de la personnalité morale représentant les organismes assureurs et la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole définit les modalités selon lesquelles il est vérifié que toute personne affiliée à l'assurance obligatoire maladie maternité et invalidité des personnes non salariées des professions agricoles est également couverte contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. »
La parole est à M. Joly, pour défendre l'amendement n° 62 rectifié.
M. Bernard Joly. L'objet de cette modification est de confier à la Mutualité sociale agricole le contrôle de l'obligation d'assurance à l'exclusion de toute autre mission et de rappeler sa participation aux actions de prévention.
Le maintien de l'AAEXA dans un cadre assuranciel et concurrentiel se traduit par la libre détermination des cotisations par les organismes assureurs et une prise en charge des prestations par leurs soins dans le respect de la réglementation. Dans ce cadre, la MSA ne peut évidemment jouer le rôle de caisse pivot tel que celui-ci est prévu par la proposition de loi, à savoir : centraliser les ressources du régime, car alors les assureurs seraient tenus de restituer à la MSA les cotisations encaissées, répartir les ressources entre les différents assureurs pour le service des prestations et, enfin, assurer le contrôle médical, car les décisions d'attribution des rentes seraient prises par la MSA et non par les assureurs.
Par ailleurs, le texte proposé renvoie, pour la détermination des modalités du contrôle de l'obligation d'assurance, à une convention conclue entre un organisme regroupant tous les assureurs et la caisse centrale de la MSA.
Le contrôle de l'obligation d'assurance devant s'effectuer, en pratique, par rapprochement du fichier d'assurance maladie des exploitants agricoles avec les fichiers d'assurance accidents des exploitants agricoles, la convention contiendra une clause ayant pour objet d'éviter que la MSA n'utilise les informations qui lui seront transmises à des fins concurrentielles.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 19 et 20 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 62 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 19 est d'ordre sémantique. La commission souhaite que les organismes de la Mutualité sociale agricole jouent un rôle central dans les actions de prévention. Cependant, il serait tout à fait contre-productif que les assureurs se désintéressent de la prévention.
Pour ces raisons, il est préférable de préciser que les organismes de la Mutualité sociale agricole animeront et coordonneront les actions de prévention plutôt que de prévoir qu'ils les mèneront.
En ce qui concerne l'amendement n° 20, la commission souhaite le maintien de l'assurance accident des exploitants agricoles dans un cadre concurrentiel. Chacun des organismes assureurs doit conserver la libre détermination du montant des primes, dans le cadre du régime régulé que la commission propose.
Le maintien de ce régime concurrentiel est incompatible avec le rôle de caisse pivot de la Mutualité sociale agricole lui permettant, notamment, de centraliser les ressources du régime, ce qui implique que les assureurs sont tenus de restituer à la Mutualité sociale agricole les cotisations qu'ils ont recueillies et de répartir les ressources entre les différents assureurs pour le service des prestations. Un tel dispositif nécessitant, dans un premier temps, une remontée des cotisations, lesquelles redescendent, dans un second temps, aux organismes assureurs, apparaît d'ailleurs extrêmement lourd à gérer.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 62 rectifié. Je soulignerai une fois de plus que, selon le règlement de notre assemblée, les amendements présentés par nos collègues du groupe RDSE étant beaucoup plus importants en matière de réorganisation du dispositif proposé par l'Assemblée nationale, ils sont défendus en priorité. Mais, s'ils venaient à être adoptés, le système présenté par la commission n'aurait plus d'objet.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 98.
M. Alain Vasselle. Il s'agit d'un amendement de conséquence de la modification de l'article L. 752-12 du code rural. En effet, la commission des affaires sociales substituant à la procédure d'habilitation des organismes assureurs une autorisation générale des assureurs à garantir l'AAEXA, il convient, pour être complètement cohérent, de supprimer de l'article L. 752-11-A la référence à l'habilitation des assureurs. Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 21 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 98.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 98. Ainsi que l'a expliqué notre collègue Alain Vasselle, il s'agit d'un amendement de cohérence eu égard au dispositif présenté par la commission.
L'amendement n° 21 vise à proposer une nouvelle rédaction du dernier alinéa de l'article L. 752-11-A du code rural. Ce faisant, il supprime la gestion du fonds de réserve et la gestion du fonds de prévention par la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole.
Il convient d'observer que, pour l'instant, cette suppression ne porte pas à conséquence, puisque deux articles postérieurs, l'article L. 752-13-3 pour le fonds de réserve, et l'article L. 752-20 pour le fonds de prévention, sont relatifs auxdits fonds. De ce point de vue, la proposition de loi est d'ailleurs quelque peu redondante.
L'amendement proposé renvoie, pour la détermination des modalités du contrôle de l'obligation d'assurance, à une convention conclue entre un ou plusieurs organismes regroupant les assureurs et la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole. Chacun s'accorde à reconnaître que l'un des trois défauts majeurs du système actuel est l'absence d'universalité de l'assurance accident. Il importe ainsi, dans le nouveau système qui sera le fruit des travaux du Parlement, de veiller à ce que cette obligation d'assurance soit scrupuleusement respectée.
M. le président. Monsieur Joly, l'amendement n° 62 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Joly. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 62 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 19, 20, 98 et 21 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement, cela n'étonnera personne, est défavorable à tous ces amendements, qui visent directement ou indirectement à priver la caisse centrale de la MSA de son rôle de caisse-pivot dans le dispositif de sécurité sociale que le Gouvernement propose, pour lui substituer le régime assuranciel.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 19.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Mon explication de vote, bien que portant particulièrement sur l'amendement n° 20, vaut pour tous les amendements en discussion.
La commission des affaires sociale, entend tirer toutes les conséquences du choix retenu pour faire évoluer le régime d'AAEXA. Dans un cadre concurrentiel et assurantiel, les organismes assureurs gèrent librement en décidant des montants des primes ; le rôle pivot dévolu à la MSA est donc vidé de son sens et il n'a plus lieu d'être.
Il s'agit donc ici de supprimer les dispositions conférant à la MSA, à juste titre, selon nous, la gestion centralisée de l'AAEXA, qu'il s'agisse des ressources du régime ou de leur répartition entre les différents assureurs afin de servir les prestations.
Dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, le nouveau rôle des organismes de mutualité agricole nous convenait. Aussi, parce que nous sommes attachés à la mutualisation du risque et des ressources, de nature à assurer à tous les salariés le même niveau de protection, nous voterons contre tous ces amendements.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 98, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-11 A du code rural.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

10

COMMUNICATION RELATIVE
À DES COMMISSIONS MIXTES PARITAIRES

M. le président. J'informe le Sénat :
- que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier n'est pas parvenue à l'adoption d'un texte commun ;
- et que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
M. Alain Vasselle. Miracle !
M. le président. Une soirée de bonheur pour le ministre !

11

COUVERTURE
DES NON-SALARIÉS AGRICOLES

Suite de la discussion et adoption
d'une proposition de loi déclarée d'urgence

M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

Article 1er (suite)



M. le président.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de l'article 1er, à l'article L. 752-11 du code rural.

ARTICLE L. 752-11 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 22 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 63 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 92 est présenté par MM. Souplet, Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous trois tendent à rédiger ainsi le texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-11 du code rural :
« Art. L. 752-11. - Les personnes mentionnées à l'article L. 752-1 peuvent souscrire l'assurance prévue au présent chapitre auprès de la caisse de mutualité sociale agricole dont elles relèvent ou de tout organisme régi par le code des assurances ou le code de la mutualité.
« Les organismes assureurs fixent librement le montant des primes ou cotisations.
« En cas de non-souscription ou de non-maintien en vigueur de l'assurance prévue au présent chapitre, le chef d'exploitation est mis en demeure de s'assurer auprès de l'assureur de son choix, dans un délai de quinze jours. A défaut, il est affilié d'office auprès de l'assureur désigné par la mutualité sociale agricole. Ces affiliations d'office sont réparties proportionnellement aux effectifs recueillis dans le département par chacun des organismes assureurs. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 22.
M. Bernard Seillier, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet, tout d'abord, d'énumérer les organismes auprès desquels l'assurance accidents des exploitants agricoles peut être souscrite : caisse de mutualité sociale agricole, assureurs régis par le code des assurances, mutuelles régies par le code de la mutualité.
Il vise également à poser le principe de la liberté tarifaire pour l'assurance accidents des exploitants agricoles, la possibilité pour chacun des organismes assureurs de fixer le montant des primes ou cotisations. Le jeu de la concurrence sera la meilleure garantie pour les assurés exploitants du maintien des primes à un niveau compatible avec leur capacité contributive.
Je ne reviendrai pas sur notre choix en faveur d'un régime concurrentiel, nous nous sommes largement expliqués sur ce point lors de la discussion générale.
Cet amendement tend aussi à organiser une procédure d'affiliation d'office pour les personnes qui, par suite du rapprochement des fichiers maladie et accidents ont été identifiées par la mutualité sociale agricole comme non couvertes par l'AAEXA. En ce cas, le chef d'exploitation responsable de la souscription de l'assurance accidents des exploitants agricoles est mis en demeure de s'assurer dans un bref délai auprès de l'assureur de son choix.
La commission des affaires sociales propose qu'il soit alors assuré d'office auprès de l'assureur désigné par la MSA s'il ne s'assure pas directement. Celle-ci se voit ainsi confortée dans un rôle majeur de coordonnateur de l'ensemble du système de base de la couverture des non-salariés agricoles en cas d'accident du travail.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 63 rectifié.
M. Paul Girod. Cet amendement a pour objet de poser le principe de la liberté tarifaire pour l'AAEXA et d'organiser une procédure d'affiliation d'office pour les personnes non couvertes par cette assurance.
La commission des affaires sociales a présenté un amendement identique ; je retire donc le mien et je me rallie à l'amendement n° 22.
M. le président. L'amendement n° 63 rectifié est retiré.
La parole est à M. Souplet, pour défendre l'amendement n° 92.
M. Michel Souplet. Cet amendement est, lui aussi, identique à l'amendement de la commission, et je le retire.
M. le président. L'amendement n° 92 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Mon avis est défavorable, c'est évident, compte tenu de toutes les discussions que nous avons eues jusqu'à maintenant.
Le Gouvernement, à travers le texte issu de l'Assemblée nationale, a opté pour un système de protection sociale qui s'apparente à un régime nouveau de sécurité sociale fondé sur la mutualisation des ressources, il est donc aux antipodes de l'idée de libre fixation du montant des cotisations par les assurances.
J'ajoute que je ne comprends pas très bien la logique de la deuxième partie de l'amendement qui, pour les affiliations d'office, tend à se référer au rôle pilote de la mutualité sociale agricole alors que celle-ci est l'un des assureurs possibles. Dans notre système, nous considérons qu'il vaut mieux confier cette tâche à un fonctionnaire.
Vous refusez le rôle pivot de la MSA, mais vous lui donnez un rôle d'orientateur de l'affiliation d'office, alors, je le répète, qu'elle est l'un des assureurs possibles. C'est incohérent !
Mais mon opposition porte sur le fond et non sur ce détail, car je suis contre la liberté de choix, je veux vraiment un régime de sécurité sociale fondé sur l'égalité, et c'est incompatible avec votre amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-11 du code rural est ainsi rédigé.

ARTICLE L. 752-12 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 64 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard, proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-12 du code rural.
Par amendement n° 23, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-12 du code du rural :
« Art. L. 752-12. - Les organismes assureurs sont autorisés à garantir les risques régis par le présent chapitre, sous réserve des dispositions de l'article L. 752-13. »
Par amendement n° 107, le Gouvernement propose de rédiger comme suit le premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article 752-12 du code rural :
« Pour participer à la gestion du régime, les organismes assureurs autres que les caisses de mutualité sociale agricole doivent être habilités par le ministre chargé de l'agriculture et déléguer à un groupement constitué par eux et doté de la personnalité morale toutes les opérations relatives au fonctionnement du régime et, notamment, celles relatives au recouvrement des cotisations et au versement des prestations. Il assure la représentation de ses adhérents et des ressortissants du régime vis-à-vis de l'Etat et des organismes de mutalité sociale agricole. »
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 64 rectifié.
M. Paul Girod. Du fait du maintien de l'AAEXA dans un cadre assuranciel et concurrentiel, la disposition prévoyant l'habilitation des assureurs autres que la MSA par le ministère de l'agriculture et leur regroupement en un organisme unique pour participer à la gestion du régime est supprimée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 23.
M. Bernard Seillier, rapporteur. En conséquence du maintien de l'AAEXA dans le secteur assuranciel et concurrentiel, les organismes assureurs gèrent l'AAEXA de manière libre et indépendante.
La disposition prévoyant l'habilitation des assureurs autres que la MSA par le ministère de l'agriculture et leur regroupement en un organisme unique pour participer à la gestion du régime, dans le cadre d'une convention conclue entre ce groupement et la caisse centrale de MSA, doit être remplacée par une disposition prévoyant que les organismes assureurs sont autorisés à garantir les risques, sous réserve de la non-sélection des exploitants agricoles, précision apportée par l'article L. 752-13 du code rural, que nous allons examiner dans un instant.
Je tiens à souligner la lourdeur administrative que présenterait cette procédure d'habilitation, le ministère de l'agriculture ne me paraissant pas à ce jour armé pour ce type d'exercice.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 107.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement a pour objet de préciser les missions du groupement auquel doivent adhérer les organismes assureurs autres que les caisses de MSA.
Tel qu'il ressort des travaux de l'Assemblée nationale, le texte, en prévoyant seulement que ce groupement représente les organismes d'assurance et en coordonne l'action, ne donne pas la base juridique suffisante à ce groupement pour gérer le régime, notamment en ce qui concerne le recouvrement des cotisations et la liquidation des prestations. Cet amendement vise à lui assurer cette base juridique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 64 rectifié et 107 ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement de la commission est en contradiction aussi bien avec l'amendement n° 64 rectifié qu'avec l'amendement n° 107.
S'agissant de l'amendement défendu par M. Paul Girod, nous nous trouvons dans la même configuration que celle que nous avons souvent rencontrée au cours de la séance de cet après-midi et que nous retrouverons une vingtaine de fois encore. Ces amendements, dont le dispositif est plus substantiel que celui des amendements de la commission, rendraient ces derniers sans objet s'ils étaient adoptés. Comme ils sont en contradiction avec le dispositif de la commission, j'en demanderai systématiquement le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 64 rectifié et 23 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable, par effet de miroir.
M. le président. L'amendement n° 64 rectifié est-il maintenu ?
M. Paul Girod. Je suis un peu perplexe parce que j'ai déjà expliqué à M. le rapporteur pendant la discussion générale que, sur un certain nombre de points, j'étais en désaccord avec la commission. Si la scissure entre nos points de vue est tellement profonde, libre à lui de demander la priorité pour l'amendement de la commission ! Mais, en l'état actuel des choses, je maintiens mon amendement n° 64 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la priorité pour l'amendement n° 23.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de priorité formulée par la commission ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. La courtoisie m'impose de donner un avis favorable.
M. le président. La priorité est donc ordonnée.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.
M. Paul Girod. Le groupe du RDSE s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-12 du code rural est ainsi rédigé et les amendements n° 64 rectifié et 107 n'ont plus d'objet.

ARTICLE L. 752-13 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 24 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 65 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer le premier alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13 du code rural.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 24.
M. Bernard Seillier, rapporteur. C'est un amendement de conséquence de l'amendement précédent.
La suppression de l'habilitation préalable des assureurs AAEXA par le ministère de l'agriculture a pour suite logique la suppression de la sanction encourue par les assureurs non habilités.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 65 rectifié.
M. Paul Girod. La commission n'aura pas besoin, cette fois-ci, de me passer sur le corps : je retire mon amendement au bénéfice du sien ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 65 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement, qui présente, avec l'amendement n° 108, un amendement de cohérence, émet sur l'amendement n° 24 un avis défavorable, pour les raisons déjà cent fois expliquées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 108, le Gouvernement propose, dans le second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13 du code rural, de remplacer les mots : « l'autorisation » par les mots : « l'habilitation ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Il s'agit d'un amendement de cohérence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 108 par « jeu de miroirs », selon l'expression de M. le ministre.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix amendement n° 108, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-13 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-13-1 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 66 rectifié bis, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-1 du code rural :
« Art. L. 752-13-1. - Le régime prévu par le présent chapitre est financé par les cotisations des non-salariés agricoles librement fixées par les organismes assureurs. Ces cotisations sont à la charge des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole. »
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 25 vise, dans le premier alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13-1 du code rural, après les mots : « les cotisations », à insérer les mots : « ou les primes ».
L'amendement n° 26 tend :
A. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13-1 du code rural, à remplacer les mots : « Elles comprennent : » par la phrase : « Elles sont librement fixées par les organismes assureurs, après modulation en fonction des taux des risques applicables aux diverses catégories dans lesquelles les exploitations ou entreprises ont été classées, et dans la limite d'un plafond fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture correspondant aux garanties minimales de l'assurance régie par le présent chapitre. »
B. - En conséquence, à supprimer les troisième ( a ) et quatrième ( v ) alinéas du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13-1 du code rural.
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 66 rectifié bis.
M. Paul Girod. Les modifications et les suppressions proposées ont pour objet de tirer les conséquences du maintien de l'AAEXA dans un cadre assuranciel et concurrentiel.
Sur le fond, peut-être avons-nous des convergences avec la commission, sur le détail, quelques divergences, mais il revient à M. le rapporteur d'en exprimer les subtilités !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre les amendements n°s 25 et 26.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 25, dont je demanderai qu'il soit voté en priorité, est un amendement de conséquence du maintien d'un régime concurrentiel.
Avec l'amendement n° 26, la commission souhaite que l'assurance accidents conserve un caractère concurrentiel. Aussi, les cotisations ou primes doivent-elles être fixées librement par les organismes assureurs, mais dans la limite d'un plafond fixé par arrêté du ministre chargé de l'agriculture.
La commission propose, enfin, de conserver le mécanisme de modulation en fonction des taux de risques applicables aux diverses catégories dans lesquelles seront classées les exploitations et les entreprises.
Deux garde-fous seront donc prévus dans le nouveau régime régulé d'assurance accidents, afin d'encadrer la liberté de tarification : le plancher concernant la définition des prestations et le plafond relatif au maximum pour les cotisations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 66 rectifié bis, 25 et 26 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. Paul Girod. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je retire l'amendement n° 66 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 66 rectifié bis est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-13-1 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-13-2 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 27 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 67 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux visent à supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-2 du code rural.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 27.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Avec cet amendement, la commission propose de supprimer l'article relatif à l'équilibre du régime entre ressources et charges.
Dès lors que l'on maintient un régime concurrentiel, le texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13-2 devient inutile.
M. le président. La parole est à M. Girod, pour défendre l'amendement n° 67 rectifié.
M. Paul Girod. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 67 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 27 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Comme je m'en suis expliqué avant la suspension de séance, le fait que cette série d'amendements de la commission s'inscrive dans une logique assurancielle et concurrentielle, alors que le texte soutenu par le Gouvernement s'inscrit dans une logique de sécurité sociale avec mutualisation des ressources et des dépenses, explique mon avis défavorable systématique, et je ne vais pas me répéter à chaque fois.
M. Hilaire Flandre. On l'a compris !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-13-2 du code rural est supprimé.

ARTICLE L. 752-13-3 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 28 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 68 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer le texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-13-3 du code rural.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 28.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Maintenant un régime concurrentiel - pour les mêmes arguments que j'ai développés à l'occasion de l'examen de l'amendement précédent - qui permettra, par construction, le provisionnement des rentes, la commission des affaires sociales propose la suppression du texte présenté pour l'article L. 752-13-3, qui institue un fonds de réserve destiné à financer ces rentes.
Je fais au passage remarquer que la gestion d'un tel fonds ne fait pas partie des compétences traditionnelles, en tout cas de l'exercice de gestion, de la Mutualité sociale agricole.
En outre - mais dois-je m'avancer sur ce terrain ? - connaissant l'appétit de tous les gouvernements à l'égard des sommes « dormantes », je nourris des inquiétudes sur la pérennité d'un tel fonds...
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Oh !
M. Hilaire Flandre. Elles ne dormiront pas longtemps !
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 68 rectifié.
M. Paul Girod. Je le retire au profit de l'amendement n° 28, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 68 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 28 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-13-3 du code rural est supprimé.

ARTICLE L. 752-13-4 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 69 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-4 du code rural.
Par amendement n° 29, M. Seillier, au nom de la commission, propose, dans le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-4 du code rural, après les mots : « le chef d'exploitation ou d'entreprise », d'insérer les mots : « , par l'organisme assureur ».
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 69 rectifié.
M. Paul Girod. Je le retire par cohérence, l'amendement n° 66 rectifié bis ayant été lui-même retiré.
M. le président. L'amendement n° 69 rectifié est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 29.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission souhaite conserver, même dans le cadre concurrentiel qu'elle préfère, la possibilité de classer les exploitations ou les entreprises agricoles dans les différentes catégories à risque. Cet amendement n° 29 vise à offrir la possibilité à l'organisme assureur de contester un tel classement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-13-4 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-13-5 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 30, M. Seillier, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-5 du code rural :
« Art. L. 752-13-5 - Les conséquences du non-paiement de la prime ou de la cotisation due au titre de l'assurance prévue par le présent chapitre sont fixées par décret, sous réserve des dispositions fixées par l'article L. 752-17-1. »
Par amendement n° 70 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-5 du code rural :
« Art. L. 752-13-5 - Les conséquences du non paiement de la prime ou de la cotisation due au titre de l'assurance prévue par le présent chapitre sont fixées par décret. »
Par amendement n° 109, le Gouvernement propose de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-5 du code rural :
« Art. L. 752-13-5 - Les cotisations dues au titre du régime institué par le présent chapitre sont recouvrées et contrôlées par les caisses de Mutualité sociale agricole et le groupement visé à l'article L. 752-12, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues aux régimes de la sécurité sociale des non-salariés des professions agricoles, sous réserve des dispositions spécifiques applicables au régime institué par le présent chapitre.
« Les cotisations dues au titre du régime institué par le présent chapitre, sont, pour une année donnée, calculées au prorata de la durée d'affiliation audit régime pendant l'année considérée. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence du maintien d'un régime concurrentiel.
Les effets du non-paiement des primes doivent être fixés par décret spécifique de l'assurance accidents des exploitants agricoles et non par référence aux dispositions du code rural applicables aux cotisations dues au titre de la protection sociale des non-salariés agricoles.
Dans l'actuelle assurance accidents des exploitants, c'est le décret n° 69-120 du 1er février 1969 qui organise les conséquences du non-paiement de la prime d'assurance accidents des exploitants agricoles, c'est-à-dire la suspension de la garantie de trente jours après la réception d'une mise en demeure, puis la résiliation à l'issue d'un délai de dix jours après l'expiration de ce premier délai de trente jours.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour présenter l'amendement n° 70 rectifié.
M. Paul Girod. Il est retiré, avec résignation, en raison de la cohérence imposée par l'amendement de M. le rapporteur !
M. le président. C'est de la cohérence résignée ! (Sourires.)
L'amendement n° 70 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 109.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Cet amendement vise à préciser les modalités de recouvrement des cotisations dues au titre de l'assurance accidents du travail pour les non-salariés agricoles, en renvoyant à une disposition générale qui rend applicables l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires en matière de recouvrement des cotisations de sécurité sociale des non-salariés agricoles, sous réserve des dispositions spécifiques applicables au nouveau régime.
Cette rédaction prévoit en outre une proratisation des cotisations dues au titre de l'assurance accidents du travail lorsque la durée d'affiliation est inférieure à une année donnée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 109 ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Défavorable par cohérence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 30 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable par cohérence !
M. le président. Nous sommes donc pris entre deux cohérences ! (Sourires.)
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article L. 752-13-5 du code rural est ainsi rédigé et l'amendement n° 109 n'a plus d'objet.

ARTICLE L. 752-13-6 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 71 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-13-6 du code rural.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je retire cet amendement... par cohérence... toujours aussi résignée !
M. le président. L'amendement n° 71 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-13-6 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLES L. 752-14 ET L. 572-15 DU CODE RURAL

M. le président. Sur les textes proposés pour les articles L. 752-14 et L. 752-15 du code rural, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je les mets aux voix.

(Ces textes sont adoptés.)

ARTICLE L. 752-16 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 72 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-16 du code rural.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Les signataires de cet amendement et moi-même pensons qu'il n'est techniquement pas possible de distinguer dans le texte les accidents qui relèvent de la vie privée. C'est la raison pour laquelle nous proposons cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La question de savoir s'il faut faire ou non une distinction a été tranchée cet après-midi. La commission ne peut donc être que défavorable, par cohérence avec les votes antérieurs, à la position défendue par M. Paul Girod et donc à l'amendement n° 72 rectifié.
M. Paul Girod. La résignation m'accable ! (Sourires.)
Je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 72 rectifié est retiré.
Par amendement n° 73 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, dans le dernier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-16 du code rural, de supprimer les mots : « sur avis du service du contrôle médical de la Mutualité sociale agricole ».
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. J'ai l'impression qu'on n'est pas très loin du même problème !
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-16 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-17 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 74 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, à la fin de la première phrase du second alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-17 du code rural, de remplacer les mots : « le tribunal des affaires de sécurité sociale mentionné à l'article L. 142-2 du code de la sécurité sociale » par les mots : « le tribunal de grande instance ».
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 74 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-17 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-17-1 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement, n° 75 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-17-1 du code rural.
Les deux amendements suivants sont présentés par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 31 vise, dans le premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-17-1 du code rural, à remplacer les mots : « des cotisations d'accidents du travail » par les mots : « des cotisations ou des primes ».
L'amendement n° 32 tend, à la fin du premier alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-17-1, à supprimer les mots : « et ce indépendamment des majorations de retard dues pour les cotisations qui n'ont pas été acquittées dans le délai réglementaire ».
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 75 rectifié.
M. Paul Girod. Je sens poindre une demande de priorité pour l'amendement n° 31 ! (Sourires.) Mais cela ne m'empêchera pas de défendre l'amendement n° 75 rectifié !
Conformément à l'article L. 752-13-5 modifié du code rural, les conséquences du non-paiement de la cotisation sont fixées par décret. Par suite, l'article L. 752-17-1, qui prévoit la possibilité pour l'assureur en cas de non-paiement des cotisations de poursuivre le remboursement des prestations, devient sans objet.
En outre, cette disposition ne paraît pas compatible avec le principe d'insaisissabilité et d'incessibilité des rentes et des indemnités journalières posé par les articles L. 752-5 et L. 752-7 du code rural.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 31 et 32, et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 75 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 31 est un amendement de conséquence avec l'ensemble du dispositif. Nous préconisons, en effet, de retenir les prestations conformes pour l'organisme qui prendra en charge l'assurance accident du travail, qu'il s'agisse donc, selon les cas, de cotisations ou de primes.
L'amendement n° 32 est un amendement de conséquence du maintien d'un régime concurrentiel.
La commission est défavorable à l'amendement n° 75 rectifié, toujours pour cette même raison de cohérence avec l'ensemble du dispositif.
Je demande que soient mis aux voix, par priorité, les amendements n°s 31 et 32.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 75 rectifié, 31 et 32 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de priorité formulée par la commission ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement ne peut pas trancher ; il ne peut que donner un avis. Or, au point où nous en sommes, si je prenais le risque d'instiller une dose d'incohérence dans le texte, ce serait le pompon ! (Sourires.)
Par cohérence avec le travail accompli, je ne peux qu'accepter la demande de priorité de la commission !
M. le président. La priorité est ordonnée.
M. Paul Girod. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Mon rappel au règlement se fonde sur l'article 44, alinéa 6.
Je voudrais faire remarquer à M. le ministre que, si le Gouvernement s'oppose à une demande de priorité formulée par la commission saisie au fond, la demande est alors soumise au vote au Sénat, et c'est ce dernier qui tranche !
M. le président. C'est exact !
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 32, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 75 rectifié n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-17-1 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-18 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 76 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-18 du code rural :
« Art. L. 752-18 - Les litiges relatifs à l'application du présent chapitre relèvent de la compétence des juridictions de droit commun. »
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Dans un cadre assuranciel, il est normal que les litiges relèvent des juridictions de droit commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Défavorable, par cohérence avec notre système de concurrence régulée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
Toutefois, je ne comprends pas bien la position de la commission. En effet, s'il me semble logique qu'un conflit né de l'application d'un régime de sécurité sociale soit tranché par les juridictions de la sécurité sociale, à partir du moment où l'on se situe dans un régime concurrentiel - que je réprouve - la position de M. Paul Girod me paraît cohérente.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'expression « concurrence régulée », que j'ai retenue pour qualifier notre dispositif n'implique pas que nous ne puissions innover. La cohérence sera donnée par la loi. Rien ne s'oppose à ce que des conflits soient traités dans le cadre du contentieux de la sécurité sociale dès lors qu'il s'agit d'un accident du travail défini par la loi.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 76 rectifié.
M. Paul Girod. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Girod.
M. Paul Girod. Je suis navré de maintenir l'amendement, mais je suis plus convaincu par l'approbation de cohérence, sinon de fond, de M. le ministre que par la désapprobation, qui me semble un peu incohérente, de la commission.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-18 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-19 DU CODE RURAL

M. le président. Par amendement n° 77 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de supprimer le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-19 du code rural.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Cet amendement est la conséquence de l'amendement n° 76 rectifié. Je vais toutefois le maintenir pour la forme en sachant très bien comment cela va se terminer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'avis de la commission est défavorable.
Puisque nous sommes dans un système concurrentiel, dans lequel la mutualité sociale agricole peut assurer au titre des accidents du travail, il est normal que les contentieux relevant également de la MSA soient traités par le contentieux de la sécurité sociale. Nous sommes bien dans un système qui nous oblige à innover dans tous les cas de figure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Monsieur Paul Girod, l'amendement est-il maintenu ?
M. Paul Girod. Je ne crois pas qu'on puisse suivre deux logiques en même temps. On ne peut pas transmettre aux tribunaux spécialisés dans l'action sociale le soin de trancher des litiges qui sont, de par la définition de la doctrine actuellement suivie par le Sénat, du secteur privé. Je maintiens donc l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L. 752-19 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L. 752-20 DU CODE RURAL

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 78 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-20 du code rural :
« Art. L. 752-20. - Les organismes assureurs mènent, en concertation avec les organisations professionnelles agricoles, les actions susceptibles de prévenir les risques liés aux accidents du travail, de la vie privée et aux maladies professionnelles dont peuvent être victimes les personnes mentionnées à l'article L. 752-1. »
Les trois amendements suivants sont présentés par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 33 vise, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-20 du code rural, après les mots : « des cotisations », à insérer les mots : « ou des primes ».
L'amendement n° 34 tend, dans le deuxième alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-20 du code rural, à remplacer les mots : « des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole », par les mots : « des organisations représentatives des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole ».
L'amendement n° 113 a pour objet, à la fin du second alinéa du texte proposé par l'article 1er pour l'article L. 752-20 du code rural, de remplacer les mots : « des expertises des installations », par les mots : « des expertises médicales et techniques réalisées lors de l'installation des jeunes agriculteurs ».
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 78 rectifié.
M. Paul Girod. La modification que nous proposons a pour objet de mettre à la charge des organismes assureurs une obligation de prévention.
Dans un souci de transparence, de proximité et afin de faire participer les assurés exploitants à leur propre prévention, nous prévoyons d'associer les organisations professionnelles agricoles aux actions de prévention.
Monsieur le ministre, j'ai le sentiment que le Gouvernement met une certaine obstination à ne pas écouter la voix des agriculteurs telle qu'elle s'exprime par le biais des organisations représentatives.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre les amendements n°s 33, 34 et 113 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 78 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 33 est un amendement de conséquence et les amendements n°s 34 et 113 des amendements de précision.
Quant à l'amendement n° 78 rectifié, la commisssion y est défavorable, toujours par cohérence.
Je souligne que nous innovons dans la mesure où, dans la logique qu'elle a suivie, la commission propose de créer un régime de sécurité sociale privé fonctionnant selon une organisation...
M. Guy Fischer. C'est une première !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Non ! Nous suivons la même logique depuis le début.
Nous défendons la création, dans le cadre d'une organisation législative, d'un régime d'assurance accidents du travail qui peut s'appuyer sur la MSA ou, si les exploitants le préfèrent, sur des organismes d'assurance classiques.
Bien évidemment, monsieur le président, je demande que les amendements n°s 33, 34 et 113 soient votés par priorité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. La priorité est ordonnée.
Quel est maintenant l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 33, 34, 113 et 78 rectifié ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je suis défavorable à ces amendements, à l'exception de l'amendement n° 34, sur lequel j'émets un avis favorable pour montrer que je ne suis pas systématique dans mon opposition. (Sourires.)
Je voudrais dire à M. Girod qui était absent tout à l'heure, retenu sans doute par d'autres obligations, que ce débat sur les organisations professionnelles agricoles me fait sourire. En effet, qu'est-ce donc que la MSA si ce n'est une organisation professionnelle agricole, une OPA, puisque ses responsables sont élus par les agriculteurs ? Or, toutes les caisses locales de MSA approuvent ce texte et en réclament l'application.
M. Hilaire Flandre. Non !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Comment non ? Mais si, à une ou deux exceptions près ; vous avez bien lu les communiqués de la MSA ! Si vous voulez, je vous emmènerai devant des assemblées d'agriculteurs qui approuvent le texte gouvernemental, et vous verrez !
Dans un souci de compromis, disons que l'opinion est partagée.
Par conséquent, se référer à la base qui réclamerait à cor et à cri la concurrence assurancielle, dont on sait ce qu'elle a donné depuis quarante ans, est un faux argument. Bien des agriculteurs demandent l'instauration du régime de sécurité sociale. Je peux donc dire que c'est aussi une organisation professionnelle agricole qui soutient le texte du Gouvernement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 33.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'aurais préféré expliquer mon vote sur l'amendement n° 78 rectifié de M. Paul Girod, mais, comme il va, fort probablement, devenir sans objet, je m'exprime maintenant pour faire toucher du doigt une certaine incohérence dans la démarche que nous adoptons concernant les actions de prévention.
On ne peut pas, à la fois, reprocher aux assurances de ne pas avoir mené suffissamment d'actions de prévention en faveur des non-salariés agricoles et, à l'occasion d'un amendement qui tend justement à prévoir un dispositif engageant le système assurantiel à mener de telles actions, s'y opposer.
Je profite de l'occasion pour ajouter que c'est un mauvais procès qui a été fait aux systèmes d'assurance. Permettez-moi de citer encore une fois Groupama, qui a consacré plus de 30 millions de francs chaque année aux actions de prévention. Aussi, prétendre que le système d'assurance n'a jamais mené d'actions de prévention et que c'est la raison pour laquelle le Gouvernement a prévu le dispositif qui nous est présenté me semble tout à fait infondé.
En tout cas, il y aurait eu quelque cohérence à prévoir un dispositif qui permette au système d'assurance de s'impliquer dans la prévention, au minimum en liaison avec la MSA.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 33, repoussé par le Gouvernement.
M. Paul Girod. Le groupe du RDSE s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 34, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 113, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 78 rectifié n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-20 du code rural.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLES L. 752-21 À L. 752-23 DU CODE RURAL

M. le président. Sur les textes proposés pour les articles L. 752-21 à L. 752-23 du code rural, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Je les mets aux voix.

(Ces textes sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Au premier alinéa de l'article L. 761-20 du même code, les mots : "mentionnés à la section 1 du chapitre II du titre V du présent livre" sont supprimés. » - (Adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - I. - La section 5 du chapitre II du titre VI du livre VII du même code est ainsi rédigée :

« Section 5

« Accidents du travail et maladies professionnelles

« Art. L. 762-34 . - Les dispositions du chapitre II du titre V sont applicables aux personnes non salariées des professions agricoles exerçant leur activité dans les départements d'outre-mer, sous réserve des adaptations nécessaires à leur mise en oeuvre qui sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.
« Pour l'application de ces dispositions, les caisses générales de sécurité sociale exercent les fonctions dévolues aux caisses de mutualité sociale agricole. »
« II. - Dans le cinquième alinéa (2°) de l'article L. 762-18 du même code, les mots : "titulaires d'une pension d'invalidité obtenue en application de l'article L. 752-4" sont remplacés par les mots : "titulaires d'une pension d'invalidité versée aux victimes d'accidents de la vie privée et d'accidents du travail survenus ou de maladies professionnelles constatées avant le 1er janvier 2002 ou d'une rente visée à l'article L. 752-6".
« Au même alinéa, les mots : ", lorsque les uns et les autres n'exercent pas d'activité professionnelle" sont supprimés. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 79 rectifié est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 99 est déposé par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont.
Tous deux tendent, dans l'intitulé du texte proposé par cet article pour la section 5 du chapitre II du titre VI du livre VII du code rural, après les mots : « Accidents du travail », à insérer les mots : « et de la vie privée ».
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 79 rectifié.
M. Paul Girod. Avec une obstination digne du mulet,...
M. Hilaire Flandre. Non ! C'est de la persévérance !
M. Paul Girod. ... - s'agissant d'accidents qui peuvent être des accidents de trajet, cela n'étonnera personne (sourires) -, je réaffirme le souci que nous avons de voir supprimer cette distinction, qui sera impossible à gérer dans la réalité.
M. Hilaire Flandre. Bien sûr ! Il n'y a que les fonctionnaires pour penser que c'est possible !
M. le président. La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 99.
M. Alain Vasselle. Cet amendement obéit toujours à la même logique, logique que nous avons explicité lors de la discussion du premier amendement.
Sous le bénéfice des engagements pris par M. le rapporteur, j'ai accepté, au nom de mes cosignataires, de retirer cet amendement en annonçant dès maintenant qu'en fonction du texte qui résultera de la discussion menée à l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, nous reviendrons à la charge si nous l'estimons nécessaire.
M. le président. L'amendement n° 99 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 79 rectifié ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je pensais que ces deux amendements étaient devenus sans objet du fait des votes antérieurs.
M. le président. L'amendement n° 79 rectifié est-il maintenu, monsieur Girod.
M. Paul Girod. Je le retire, en indiquant à M. Alain Vasselle qu'il n'y aura pas de deuxième lecture. Il y aura une nouvelle lecture si la commission mixte paritaire échoue, ce qui n'est pas improbable d'ailleurs. Dans ce cas, nous reviendrons - et comment ! - sur le sujet.
M. le président. L'amendement n° 79 rectifié est retiré.
Par amendement n° 110, le Gouvernement propose de compléter le second alinéa du texte présenté par l'article 3 pour l'article L. 762-34 du code rural par une phrase ainsi rédigée : « Les directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales exercent les missions dévolues aux chefs des services départementaux de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricoles. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Les départements d'outre-mer ne comportant pas de services de l'ITEPSA, il appartient à la loi de désigner les services qui assureront leurs missions, en particulier en ce qui concerne l'affiliation d'office.
Ce seront donc les directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales qui exerceront ces missions dans les départements d'outre-mer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 110, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 80 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, après les mots : « sont remplacés par les mots : », de rédiger ainsi la fin du premier alinéa du II de l'article 3 : « titulaires d'une pension d'inaptitude versée en application de la législation relative à l'assurance obligatoire accidents du travail, de la vie privée et maladies professionnelles des non-salariés agricoles, ainsi que leur conjoint lorsque les uns et les autres n'exercent pas d'activité professionnelle ».
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Il s'agit d'un amendement de conséquence du maintien de la notion de pension d'inaptitude. J'imagine que M. le rapporteur va m'expliquer que tout cela est devenu obsolète ; mais, là encore, je donne rendez-vous en nouvelle lecture.
En attendant, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 80 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis. - I. - L'article L. 722-8 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Le régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles comprend quatre branches : » ;
« 2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.
« II. - Dans le premier alinéa de l'article L. 724-7 du même code, les mots : "aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 722-8 et à l'article L. 722-27" sont remplacés par les mots : "aux articles L. 722-8 et L. 722-27". »
Par amendement n° 81 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent :
I. - Dans le texte présenté par le 1° du I de cet article pour l'article L. 722-8 du code rural, de remplacer le mot : « quatre » par le mot : « trois ».
II. - En conséquence, de supprimer les deux derniers alinéas du I de l'article 3 bis .
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Il s'agissait d'un amendement d'arithmétique.
Mais j'imagine que M. le rapporteur va m'expliquer que mon arithmétique est, elle aussi, obsolète. Cela dit, j'aimerais quand même l'entendre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Cet article transforme le régime de protection sociale des non-salariés agricoles en créant une quatrième branche. Cette création n'est pas incompatible avec le mécanisme concurrentiel et assuranciel souhaité par la commission et son rapporteur. C'est ce que j'ai appelé tout à l'heure un système de sécurité sociale privée ou, plus exactement, un système de sécurité sociale pluraliste.
M. Guy Fischer. Maintenez « privée », je préfère !
M. Bernard Seillier, rapporteur. Moi, je préfère pluraliste, parce que j'ai senti le piège ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Ce n'est pas incompatible...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. On peut aussi dire plurielle ! (Nouveaux sourires.)
M. Bernard Seillier, rapporteur. La rédaction actuelle de l'article L. 722-8 montre d'ailleurs que l'assurance accidents des exploitants fait d'ores et déjà partie du régime de protection sociale des exploitants agricoles.
En revanche, et comme cet amendement vise à supprimer les deux derniers alinéas du I de cet article qui confie le pouvoir de contrôle aux agents des caisses de mutualité sociale agricole, la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. Paul Girod. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je retire l'amendement n° 81 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 81 rectifié est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 35 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 82 rectifié est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer le II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 35.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je ne répéterai pas les explications que j'ai exposées pour justifier l'avis défavorable sur l'amendement n° 81 rectifié et qui, a contrario, justifient la défense de cet amendement n° 35.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 82 rectifié.
M. Paul Girod. La commission adopte la ligne courbe... (Sourires.) Je me rallie à elle.
M. le président. L'amendement n° 82 rectifié est retiré. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 35 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35 repoussé par le Gouvernement.
M. Guy Fischer. Le groupe communiste vote contre.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 bis , ainsi modifié.

(L'article 3 bis est adopté.)

Article 3 ter



M. le président.
« Art. 3 ter . - I. - L'article L. 722-10 du même code est ainsi modifié :
« 1° Aux a et b du 4°, les mots : "et 6°" sont remplacés par les mots : "6° et 7°" ;
« 2° Au début du deuxième alinéa du b du 4°, les mots : "Pour l'application du présent paragraphe 2" sont supprimés ;
« 3° Le 6° est ainsi rédigé :
« Aux titulaires des pensions d'invalidité versées aux victimes d'accidents de la vie privée et d'accidents du travail survenus ou de maladies professionnelles constatées avant le 1er janvier 2002 ;
« 4° Après le 6°, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« Aux titulaires des rentes visées à l'article L. 752-6. »
« II. - La première phrase de l'article L. 731-38 du même code est ainsi rédigée :
« Les cotisations dues pour les personnes mentionnées aux 6° et 7° de l'article L. 722-10, pour la couverture des risques assurés et des dépenses complémentaires y afférentes, sont intégralement à la charge des organismes assureurs débiteurs des rentes visées à l'article L. 752-6 et des pensions d'invalidité versées aux victimes d'accidents de la vie privée et d'accidents du travail survenus ou de maladies professionnelles constatées avant le 1er janvier 2002. »
« III. - Le 1° de l'article L. 732-3 du même code est ainsi rédigé :
« 1° Au c , les mots : ", lorsque les uns et les autres n'exercent pas d'activité professionnelle" sont supprimés :
« 2° Il est inséré, après le h , un i ainsi rédigé :
« i) Accidents survenus aux personnes visées aux 1°, 2°, 4°, 5°, 6° et 7° de l'article L. 722-10, lorsque ces accidents ne sont pas pris en charge en application du chapitre II du titre V du présent livre. »
« IV. - Le dernier alinéa de l'article L. 732-4 du même code est supprimé. »
Par amendement n° 83 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent :
I. - De rédiger comme suit le texte présenté par le 3° du I de cet article pour le 6° de l'article L. 722-10 du code rural :
« 6° aux titulaires des pensions d'inaptitude versées en application de la législation relative à l'assurance obligatoire accidents du travail, de la vie privée et maladies professionnelles des non-salariés agricoles. »
II. - En conséquence, de supprimer les deux derniers alinés du I de cet article.
III. - En conséquence, de supprimer le 1° du I de cet article.
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Je ne peux qu'attendre que la commission m'explique qu'il est obsolète. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a émis un avis de sagesse. (M. Paul Girod manifeste sa satisfaction.) En effet, cet amendement n'est pas fondamentalement incompatible avec l'ensemble du dispositif mis en place par la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Avis défavorable.
M. le président. Monsieur Paul Girod, votre amendement est-il maintenu ?
M. Paul Girod. L'espoir renaît, monsieur le président ! Je le maintiens donc.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 83 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 84 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger ainsi le texte présenté par le II de l'article 3 ter pour la première phrase de l'article L. 731-38 du code rural :
« Les cotisations dues pour les personnes mentionnées au 6° de l'article L. 722-10, pour la couverture des risques assurés et des dépenses complémentaires sont intégralement à la charge des organismes débiteurs des pensions d'inaptitude versées en application de la législation relative à l'assurance obligatoire accidents du travail, de la vie privée et maladies professionnelles des non-salariés agricoles ».
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Au train où nous allons, monsieur le président, je vais plutôt demander l'avis de la commission avant de défendre mes amendements. Ce sera peut-être plus simple, sachant qu'elle exprime la sagesse !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Sagesse, en effet !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Avis défavorable !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 85 rectifié est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 100 est présenté par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont.
Tous deux tendent à supprimer les deux derniers alinéas du III de l'article 3 ter .
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 85 rectifié.
M. Paul Girod. M. Vasselle a expliqué tout à l'heure pourquoi il retirait son amendement n° 99. Il va probablement, du moins je le suppose, retirer son amendement n° 100.
Je vais également retirer le mien, en prenant rendez-vous pour la nouvelle lecture car, encore une fois, je ne suis absolument pas persuadé que les confusions que nous sommes en train de mettre en place soient vivables.
M. le président. L'amendement n° 85 rectifié est retiré.
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 100.
M. Alain Vasselle. Même attitude, monsieur le président : je le retire.
M. le président. L'amendement n° 100 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 ter , modifié.

(L'article 3 ter est adopté.)

Article 3 quater



M. le président.
« Art. 3 quater - I. - Le paragraphe 5 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre VII du même code est ainsi rédigé :

« Paragraphe 5

« Accidents du travail et maladies professionnelles

« Art. L. 722-19 . - Le régime d'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des non-salariés des professions agricoles s'applique aux personnes mentionnées à l'article L. 752-1, dans les conditions définies au chapitre II du titre V. »
« II. - L'intitulé du titre V du livre VII du même code est ainsi rédigé : "Accidents du travail et maladies professionnelles". »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 86 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent :
I. - Dans l'intitulé du texte présenté par le I de cet article pour le paragraphe 5 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre VII du code rural, après les mots : « Accidents du travail », d'insérer les mots « et de la vie privée ».
II. - En conséquence, de procéder à la même insertion dans le texte proposé par le I de l'article 3 quater par l'article L. 722-19 du code rural.
III. - En conséquence, de compléter in fine le II de l'article 3 quater par les mots : « et accidents de la vie privée ».
Par amendement n° 101, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller et de Richemont proposent, dans l'intitulé du texte présenté par le I de l'article 3 quater pour le paragraphe 5 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre VII du code rural, après les mots : « accidents du travail », d'insérer les mots : « , de la vie privée ».
Par amendement n° 102, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller et de Richemont proposent dans le texte présenté par le I de l'article 3 quater pour l'article L. 722-19 du code rural, après les mots : « accidents du travail », d'insérer les mots : « , de la vie privée ».
Par amendement n° 103, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont proposent de supprimer le II de l'article 3 quater .
La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 86 rectifié.
M. Paul Girod. Même situation, donc, même rendez-vous pour la nouvelle lecture.
Je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 86 rectifié est retiré.
La parole est à M. Vasselle, pour présenter les amendements n°s 101, 102 et 103.
M. Alain Vasselle. Je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s 101, 102 et 103 sont retirés.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 quater .

(L'article 3 quater est adopté.)

Article 3 quinquies



M. le président.
« Art. 3 quinquies. - I. - Après le neuvième alinéa (6°) de l'article L. 723-3 du même code, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis Assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles des personnes non salariées mentionnées à l'article L. 752-1 ; »
« II. - L'article L. 723-11 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 8° - De promouvoir la prévention des accidents du travail des personnes non salariées mentionnées à l'article L. 752-1. »
Par amendement n° 36, M. Seillier, au nom de la commission, propose de supprimer le I de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission des affaires sociales ne juge pas nécessaire d'obliger les caisses de mutualité sociale agricole à comprendre de manière obligatoire une section accidents du travail et maladies professionnelles des exploitants agricoles. Elles peuvent d'ores et déjà le faire après autorisation de l'autorité administrative. C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression du I de cet article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 87 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent, dans le texte présenté par le II de l'article 3 quinquies pour le 8° de l'article L. 723-11 du code rural, de remplacer le mot : « promouvoir » par les mots : « participer à ».
La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. C'est un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Défavorable, puisque c'est un amendement de concordance avec un article que nous n'avons pas adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Paul Girod ?
M. Paul Girod. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 87 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3 quinquies, modifié.

(L'article 3 quinquies est adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 724-11 du même code, les mots : "deuxième alinéa de l'article L. 752-2" sont remplacés par les mots : "5° de l'article L. 722-10". » - (Adopté.)

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 725-1 du même code, après les mots "à l'exception des prestations familiales" sont insérés les mots : "et des rentes visées à l'article L. 752-6".
« II. - Dans le I de l'article L. 725-7 du même code, les mots : "à l'exception de celles qui concernent l'assurance accident des personnes non salariées de l'agriculture" sont supprimés. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 37 est présenté par M. Seillier au nom de la commission.
L'amendement n° 88 rectifié, est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer le II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 37.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Les cotisations ou les primes d'un régime concurrentiel n'ont pas à être prescrites selon les règles de droit applicables aux cotisations sociales.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 88 rectifié.
M. Paul Girod. J'aurais tellement aimé que la commission donne la priorité à l'amendement n° 88 rectifié... (Sourires.)
Mais je me rallie à l'amendement n° 37.
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 37 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 37, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Articles 6 et 7



M. le président.
« Art. 6. - I. - Aux articles L. 753-1 et L. 753-20 du même code, la référence : "L. 752-27" est remplacée par la référence : "L. 752-21".
« II. - Le dernier alinéa du 4° de l'article L.753-8 du même code est supprimé. ». - (Adopté.)
« Art. 7. - Le dernier alinéa de l'article L. 325-3 du même code est ainsi rédigé :
« Le prestataire doit en conséquence contracter une assurance couvrant tous les risques entraînés par l'exécution d'un service rendu au titre de l'entraide agricole, en particulier les risques d'accidents du travail de ses ouvriers agricoles, à l'exception des risques régis par le chapitre II du titre V du livre VII du présent code. » - (Adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur le 1er janvier 2002. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 104, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont proposent, dans cet article, de remplacer la date : « 1er janvier 2002 » par la date : « 1er septembre 2002 ».
Par amendement n° 38, M. Seillier au nom de la commission, propose dans cet article, de remplacer la date : « 1er janvier 2002 », par la date : « 1er avril 2002 ».
La parole est à M. Vasselle, pour défendre l'amendement n° 104.
M. Alain Vasselle. La sagesse commanderait que nous reportions l'application du dispositif au 1er septembre 2002, plutôt que de conserver la date du 1er janvier 2002.
Je sais que la commission des affaires sociales propose une position intermédiaire : le 1er avril 2002. Si la Haute Assemblée, dans sa sagesse, se ralliait à la position de M. le rapporteur, je la suivrais bien entendu.
Mais il nous semble qu'en raison des délais qui sont nécessaires à la publication des nombreux décrets d'application annoncés, à l'adaptation des assureurs aux nouvelles règles, à l'adaptation des contrats en cours, il serait beaucoup plus raisonnable d'attendre la date du 1er septembre 2002.
Après une longue discussion en commission, M. le rapporteur en est convenu, mais il a voulu laisser une marge de manoeuvre à la discussion parlementaire.
Je laisse le Sénat apprécier...
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 38 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 104.
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission, tout en suivant le même raisonnement que M. Vasselle, préfère, à ce stade de la discussion, fixer au 1er avril 2002 l'entrée en application de ce texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 104 et 38 ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Défavorable.
M. le président. Monsieur Vasselle, l'amendement n° 104 est-il maintenu ?
M. Alain Vasselle. Je m'en remets à M. le rapporteur.
M. le président. Monsieur le rapporteur, que conseillez-vous à M. Vasselle ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Dans la mesure où cet amendement anticipe sur une nouvelle lecture, je suggère à son auteur de le retirer.
M. Alain Vasselle. Je le retire !
M. le président. L'amendement n° 104 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 111, le Gouvernement propose de compléter l'article 8 par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les organismes assureurs disposent, à compter du 1er janvier 2002, d'une période transitoire de trois mois au plus afin de se conformer aux dispositions de la présente loi, notamment la sous-section 1 de la section 2 du chapitre 2 du titre V du livre VII du code rural et d'être en mesure de recevoir l'affiliation des personnes assujetties au régime. Les affiliations enregistrées au cours de cette période transitoire prennent effet au 1er avril 2002. Les contrats d'assurance souscrits en application des articles L. 752-1 et L. 752-22 du code rural, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi, continuent à produire leurs effets jusqu'au 31 mars 2002 inclus. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. D'après moi, cet amendement n'a plus d'objet, compte tenu de l'adoption de l'amendement n° 38, sur lequel je n'avais aucun désaccord de fond.
Le report de date est en effet souhaitable puisqu'il permet de ménager le temps nécessaire non seulement au déroulement de la navette parlementaire, mais aussi à la mise au point des nombreux textes d'application, dont plusieurs décrets en Conseil d'Etat.
Toutefois, l'amendement n° 38 ne permetant pas d'atteindre cette fin, le Gouvernement présente un amendement visant à prévoir une période transitoire suivant la date d'entrée en vigueur de la présente proposition de loi. La date d'entrée en vigueur au 1er janvier est maintenue, mais avec une période transitoire de trois mois, jusqu'au 1er avril.
Pour moi, cet amendement est incompatible avec l'amendement n° 38, qui a été adopté.
M. le président. Manifestement, monsieur le ministre, l'amendement n° 111 n'a en effet plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - I. - Les contrats d'assurance souscrits en application des articles L. 752-1 et L. 752-22 du code rural, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi, sont résiliés de plein droit à compter du 1er janvier 2002 et cessent, en conséquence, de produire effet pour les accidents survenus ou les maladies professionnelles constatées après cette date.
« Les prestations dues au titre des accidents survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er janvier 2002 restent régies par les dispositions du paragraphe 2 de la sous-section 1, de la sous-section 2 et de la sous-section 3 de la section 1 et par celles de la section 2 du chapitre II du titre V du livre VII du même code, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
« II. - Les primes et fractions de primes devant être émises en vertu des contrats d'assurances en cours à une date antérieure au 1er janvier 2002, pour une période prenant fin après cette date, sont limitées à la période comprise entre la dernière date d'échéance et le 1er janvier 2002.
« Les primes ou fractions de primes émises avant le 1er janvier 2002 pour une période allant au-delà de cette date sont remboursées au prorata de la durée restant à courir après cette date.
« III. - Par dérogation à l'article L. 752-13-2 du code rural, pour les trois premières années suivant la date d'entrée en vigueur du régime institué au chapitre II du titre V du livre VII du même code, un arrêté du ministre chargé de l'agriculture fixe le montant des cotisations prévues à l'article L. 752-13-1 du même code dues au titre de l'assurance contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, sans que ces cotisations soient modulées en fonction des taux applicables aux différentes catégories de risques dans lesquelles elles ont été classées. »
Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 105, MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont proposent de rédiger comme suit cet article :
« I. - Les contrats d'assurance souscrits en application de l'article L. 752-1 du code rural dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont adaptés par voie d'avenant suivant les dispositions de la présente loi à compter du 1er septembre 2002. Les primes et cotisations relatives à ces contrats sont modifiées, en conséquence, à compter de cette même date.
« Les prestations dues au titre des accidents survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er septembre 2002 restent régies par les dispositions du paragraphe 2 de la sous-section 1, de la sous-section 2 et de la sous-section 3 de la section 1 du chapitre II du titre V du livre VII du même code, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
« II. - Les contrats d'assurance complémentaire facultative souscrits en application de l'article L. 752-22 du code rural dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont résiliés de plein droit à compter du 1er avril 2002 et cessent en conséquence de produire effet pour les accidents survenus ou les maladies professionnelles constatées après cette date.
« Les prestations dues au titre des accidents du travail survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er avril 2002 restent régies par les dispositions de la section 2 du chapitre II du titre V du livre VII du code rural, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
« Les primes et fractions de primes devant être émises en vertu des contrats d'assurance en cours à une date antérieure au 1er avril 2002, pour une période prenant fin après cette date, sont limitées à la période comprise entre la dernière date d'échéance et le 1er avril 2002.
« Les primes ou fractions de primes émises avant le 1er avril 2002 pour une période allant au-delà de cette date sont remboursées au prorata de la durée restant à courir après cette date.
Par amendement n° 89 rectifié, MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard proposent de rédiger comme suit le I de l'article 9 :
« I. - Les contrats d'assurance complémentaire facultative souscrits en application de l'article L. 752-22 du code rural sont résiliés de plein droit à compter du 1er janvier 2002 et cessent, en conséquence, de produire effet pour les accidents survenus ou les maladies professionnelles constatées après cette date.
« Les prestations dues au titre des accidents survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er janvier 2002 restent régies par les dispositons de la section 2 du chapitre II du titre V du livre VII du code rural, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi. »
Par amendement n° 39, M. Seillier, au nom de la commission, propose :
A. - Dans les premier et second alinéas du I de l'article 9, de remplacer la date : « 1er janvier 2002 » par la date : « 1er avril 2002 » ;
B. - Dans le premier alinéa (deux fois) et le second alinéa du II de l'article 9, de remplacer la date : « 1er janvier 2002 » par la date : « 1er avril 2002. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par M. Seillier, au nom de la commission.
L'amendement n° 90 rectifié est déposé par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
Tous deux tendent à supprimer le III de l'article 9.
Par amendement n° 112, le Gouvernement propose, dans le III de l'article 9, de remplacer les mots : « pour les trois premières années suivant la date d'entrée en vigueur du régime institué au chapitre II du titre V du livre VII du même code » par les mots : « pour l'année d'entrée en vigueur de la présente loi et les deux années civiles suivantes ».
La parole est à M. Vasselle, pour présenter l'amendement n° 105.
M. Alain Vasselle. Une résiliation de plein droit des contrats d'AAEXA au 1er septembre 2002 étant inutile et génératrice d'invalidité contractuelle, il lui est substitué le principe d'une adaptation obligatoire par voie d'avenant à compter de cette date sans tenir compte des modifications législatives intervenues. Les primes relatives à ces contrats adaptés sont modifiées en conséquence à compter de cette même date.
En revanche, le principe d'une résiliation de plein droit à compter du 1er avril 2002 des contrats d'assurance complémentaire facultative à l'AAEXA est sans inconvénient, puisqu'aucun dispositif ne vient s'y substituer.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 89 rectifié.
M. Paul Girod. Nos motivations sont très voisines de celles de M. Vasselle. Toutefois, son amendement étant plus complet, je retire le mien au profit du sien.
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 39.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence avec le dispositif qui a été proposé par la commission et qui a été en partie voté s'agissant du délai.
Après avoir entendu M. Vasselle, je me rallierai à l'amendement n° 105, sous réserve d'une rectification tendant à remplacer le mois de septembre par le mois d'avril.
M. le président. Monsieur Vasselle, acceptez-vous la rectification proposée par M. le rapporteur ?
M. Alain Vasselle. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 105 rectifié présenté par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont et tendant à rédiger comme suit l'article 9 :
« I - Les contrats d'assurance souscrits en application de l'article L. 752-1 du code rural dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont adaptés par voie d'avenant suivant les dispositions de la présente loi à compter du 1er avril 2002. Les primes et cotisations relatives à ces contrats sont modifiées, en conséquence, à compter de cette même date.
« Les prestations dues au titre des accidents survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er avril 2002 restent régies par les dispositions du paragraphe 2 de la sous-section 1, de la sous-section 2 et de la sous-section 3 de la section 1 du chapitre II du titre V du livre VII du même code, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
« II - Les contrats d'assurance complémentaire facultative souscrits en application de l'article L. 752-22 du code rural dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont résiliés de plein droit à compter du 1er avril 2002 et cessent en conséquence de produire effet pour les accidents survenus ou les maladies professionnelles constatées après cette date.
« Les prestations dues au titre des accidents du travail survenus ou des maladies professionnelles constatées avant le 1er avril 2002 restent régies par les dispositions de la section 2 du chapitre II du titre V du livre VII du code rural, dans leur rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
« Les primes et fractions de primes devant être émises en vertu des contrats d'assurance en cours à une date antérieure au 1er avril 2002, pour une période prenant fin après cette date, sont limitées à la période comprise entre la dernière date d'échéance et le 1er avril 2002.
« Les primes ou fractions de primes émises avant le 1er avril 2002 pour une période allant au-delà de cette date sont remboursées au prorata de la durée restant à courir après cette date. »
Dans ces conditions, l'amendement n° 39 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 40 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 105 rectifié.
M. Bernard Seillier, rapporteur. L'amendement n° 40 n'aurait plus d'objet si l'amendement n° 105 rectifié, sur lequel la commission émet un avis favorable, était adopté.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod, pour défendre l'amendement n° 90 rectifié.
M. Paul Girod. Cet amendement n'aurait lui non plus d'objet si l'amendement n° 105 rectifié était adopté.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 112 et pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 105 rectifié.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. L'amendement n° 112 est un amendement de précision.
Quant à l'amendement n° 105 rectifié, le Gouvernement y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 112 ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 105 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence l'article 9 est ainsi rédigé et les amendements identiques n°s 40 et 90 rectifié ainsi que l'amendement n° 112 n'ont plus d'objet.

Article additionnel après l'article 9



M. le président.
Par amendement n° 41 rectifié, MM. Jean-Louis Lorrain, Grignon, Hoeffel, Richert et les membres du groupe de l'Union centriste, proposent d'ajouter après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 761-13 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles sont également soumises aux dispositions des articles L. 724-8, L. 724-9 et L. 274-10 du présent code. »
La parole est à M. Hoeffel.
M. Daniel Hoeffel. Pour défendre cet amendement, il convient de rappeler que, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, la couverture des risques accidents du travail et maladies prfessionnelles des salariés agricoles relève du code local des assurances sociales de 1911. Les dispositions du chapitre Ier du titre V du livre VII du code rural, notamment celles qui sont relatives à la prévention, ne sont donc pas actuellement applicables dans ces départements.
Les techniciens régionaux de prévention mis à disposition des services d'inspection du travail en agriculture de ces trois départements ne disposent pas des moyens nécessaires pour accomplir leur mission. Ainsi, ils ne peuvent pas consulter les registres relatifs à la santé-sécurité au travail ni effectuer des prélèvements et ils ne bénéficient pas de la protection que leur donnerait un agrément par l'autorité administrative.
En conséquence, pour combler ces lacunes, il est proposé de compléter le code rural pour permettre aux agents chargés du contrôle de la prévention prévus par les articles L. 724-8 et L. 724-9 et affectés dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle de disposer des mêmes moyens et de bénéficier de la même protection que leurs homologues des autres départements.
Mes chers collègues, je suis conscient que l'évocation d'un code local datant du début de ce siècle puisse vous poser un certain nombre de questions ou de problèmes, mais, en l'occurrence, je le dis en mon âme et conscience, il s'agit tout simplement de mettre à jour des dispositions, qui ne sont pas périmées, pour permettre aux salariés agricoles des trois départements concernés de bénéficier des mêmes conditions et des mêmes prestations que leurs homologues des autres départements.
J'ose donc espérer que la commission puis M. le ministre, sachant que cette question a donné lieu à une réelle concertation, émettront un avis favorable et que vous adopterez, mes chers collègues, cet amendement, qui me paraît pleinement justifié.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Seillier, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je suis, moi aussi, très sensible à votre argumentation, monsieur Hoeffel, et j'émets donc un avis favorable.
Toutefois, votre amendement vise l'article L. 274-10 alors qu'il s'agit, en fait, de l'article L. 724-10. Aussi, je vous suggère de rectifier cette erreur matérielle.
M. le président. Monsieur Hoeffel, que pensez-vous de la suggestion de M. le ministre ?
M. Daniel Hoeffel. A compétence inégale, je m'en remets à celle qui, manifestement, prime la mienne ! (Sourires.)
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 41 rectifié bis , présenté par MM. Lorrain, Grignon, Hoeffel, Richert et les membres du groupe de l'Union centriste, et ayant pour objet, après l'article 9, d'ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 761-13 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles sont également soumises aux dispositions des articles L. 724-8, L. 724-9 et L. 724-10 du présent code. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié bis , accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 9.

Intitulé de la proposition de loi



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 42 rectifié, est présenté par MM. Pelletier, Paul Girod, Joly, Mouly, Demilly, Vallet et Guichard.
L'amendement n° 94 rectifié, est déposé par MM. Vasselle, Murat, Cazalet, Flandre, Ostermann, Leclerc, Hugot, Descours, Vial, François, César, Souvet, Eckenspieller, Doublet et de Richemont.
Tous deux tendent, dans l'intitulé de la proposition de loi, après les mots : « accidents du travail », à insérer les mots : « et de la vie privée ».
M. le président. Monsieur Paul Girod, l'amendement n° 42 rectifié est-il maintenu ?
M. Paul Girod. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. Qu'en est-il de l'amendement n° 94 ?
M. Alain Vasselle. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. Les amendements identiques n°s 42 rectifié et 94 sont retirés.

Seconde délibération



M. Jean Delaneau,
président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Monsieur le président, en vertu de l'article 43 du règlement, je demande une seconde délibération portant, au sein de l'article 1er, sur l'article L. 752-6 du code rural.
En effet, avant la suspension, une incompréhension manifeste a conduit à l'adoption de l'amendement n° 55 rectifié, présenté par M. Joly, qui a fait tomber l'amendement n° 10 rectifié de la commission. Or cet amendement porte sur un point important, à savoir l'inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole. L'adoption de cette disposition permettrait de disposer d'un texte parfaitement cohérent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de seconde délibération ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je suis opposé aux deux thèses, j'émets donc un avis défavorable sur les deux.
Toutefois, comme je l'ai dit tout à l'heure à M. le rapporteur pendant la suspension de séance, l'amendement qui a été adopté est totalement incohérent par rapport à la ligne défendue par la commission, et cela donne un résultat global à peine lisible.
Je ne m'oppose donc pas à la demande de seconde délibération.
M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, acceptée par le Gouvernement.
M. Paul Girod. Je vote contre !

(La seconde délibération est décidée.)
M. le président. La commission des affaires sociales souhaite-t-elle une suspension de séance avant de procéder à cette seconde délibération ?
M. Jean Delaneau, président de la commission. Monsieur le président, la commission souhaite en effet une brève suspension de séance.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures dix, est reprise à vingt-trois heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous allons procéder à la seconde délibération.
Je rappelle au Sénat les termes de l'article 43, alinéa 6, du règlement :
« Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d'amendements et sur les sous-amendements s'appliquant à ces amendements. »

Article 1er





ARTICLE L. 752-6 DU CODE RURAL

M. le président. Le Sénat a adopté précédemment le texte proposé pour l'article L. 752-6 du code rural dans la rédaction suivante :
« Art. L. 752-6. - Une rente est attribuée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle :
« - au chef d'exploitation ou d'entreprise agricole présentant une inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole selon un taux fixé par le décret ;
« - aux autres personnes mentionnées à l'article L. 752-1 présentant une inaptitude totale à l'exercice de la profession agricole.
« La rente due à la victime atteinte d'une inaptitude partielle ou totale à l'exercice de la profession agricole est au moins égale au gain forfaitaire annuel mentionné à l'article L. 752-5 du présent code, mutiplié par le taux d'inaptitude qui peut être réduit ou augmenté en fonction de la gravité de celle-ci. La rente est revalorisée selon les coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
« Dans le cas où l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole est totale et oblige la victime à avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie, le montant de la rente est majoré. La majoration ne peut être inférieure au montant minimum prévu au troisième alinéa de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale.
« En cas d'accidents successifs, le taux ou la somme des taux d'inaptitude à l'exercice de la profession agricole antérieurement reconnue constitue le point de départ de la réduction ou de l'augmentation prévue au cinquième alinéa du présent article pour la calcul de la rente afférente au dernier accident.
« Les rentes servies en vertu de l'assurance prévue au présent chapitre sont viagères, incessibles et insaisissables. »
Par amendement n° A-1, M. Seillier, au nom de la commission, propose, après le troisième alinéa du texte présenté par l'article 1er pour l'article L. 752-6 du code rural, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'inaptitude partielle ou totale à la profession agricole est déterminée et notifiée à l'assuré par l'organisme assureur, après avis d'une commission dont la composition est fixée par décret, d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelles. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Seillier, rapporteur. Je rappelle brièvement l'originalité de notre suggestion, qui constitue effectivement une innovation puisque, s'agissant du régime accidents du travail des exploitants agricoles, je propose d'aller jusqu'au bout d'une logique d'inaptitude plutôt que d'incapacité afin de faire en sorte que nous puissions créer un régime spécifique à l'agriculture en matière d'accidents du travail permettant de garder ce qu'il y a de meilleur dans le système actuel et dans celui de l'incapacité et d'éliminer les inconvénients qui pourraient exister dans les deux versions.
Cet amendement constitue une synthèse novatrice entre le système de l'inaptitude à l'exercice de la profession agricole et le mécanisme de l'incapacité traditionnelle dans les régimes de sécurité sociale des salariés, qui est déterminé par un taux.
Ce dispositif, centré autour du nouveau concept de « taux d'inaptitude », permet, selon la commission des affaires sociales, de bénéficier des avantages des deux mécanismes précités. Ce taux d'inaptitude sera déterminé et notifié à l'assuré par l'organisme assureur, après intervention d'une « commission des rentes », où seront présents la Mutualité sociale agricole et les organismes assureurs. Nous avons repris, avec cet amendement n° A-1, l'idée de la commission des rentes avancée par le Gouvernement dans son amendement n° 106.
Le taux d'inaptitude prendra en compte à la fois la situation médicale et la profession exercée par la victime : ce sera ainsi un taux « pragmatique ».
A ce stade de la discussion il nous faut, à mon avis, voter cette innovation, qui devra ensuite être précisée. C'est bien, en effet, un nouveau régime accidents du travail, mais très spécifique aux exploitants agricoles, que nous créons, avec toutes les innovations qui s'imposent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Parlementaire passionné, et suivant la procédure parlementaire avec attention - il m'est même arrivé de présider des séances - je voudrais quand même, mesdames, messieurs les sénateurs, attirer votre attention sur la contradiction face à laquelle vous vous trouvez. Imaginons que cet amendement soit adopté.
M. Philippe Adnot. Eh bien ?
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Vous vous retrouverez avec deux rédactions contradictoires : l'amendement n° 55 rectifié, qui a été voté tout à l'heure, et l'amendement n° A-1, qui dit l'inverse et qui serait adopté en seconde délibération.
M. Philippe Adnot. Ils ne sont pas contradictoires !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Mais si, et clairement ! La preuve, c'est que, quand l'amendement n° 55 rectifié a été adopté, M. le président a dit que l'amendement n° 10 rectifié n'avait plus d'objet. C'est donc que les deux amendements étaient contradictoires.
De toute façon, l'avis du Gouvernement est défavorable. Mais, du point de vue procédural, cette situation m'amuse.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Le texte qui ressort de l'ensemble de nos délibérations ne fait plus état de tel ou tel amendement. Nous considérons simplement qu'il lui manque un élément pour être cohérent.
Une seconde délibération vise soit à corriger le texte, soit à lui ajouter une disposition manquante. En l'occurrence, aucune rectification n'est à apporter puisque l'amendement qui avait été adopté n'avait pas créé de nouveau texte. Il y a simplement un vide à combler. Tel est l'objet de l'amendement n° A-1.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° A-1.
M. Paul Girod. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. J'espère que la commission ne s'offusquera pas du fait que je vote contre l'amendement n° A-1, par fidélité à la pensée exprimée tout à l'heure par mon collègue Bernard Joly, qui avait emporté le vote du Sénat sur l'amendement n° 55 rectifié.
Cela étant dit, je voudrais, à la suite de M. le président de la commission, rassurer M. le ministre : nous sommes en présence d'un texte qui découle de nos délibérations et auquel la commission souhaite ajouter une disposition. Il n'y a donc pas deux amendements adoptés. Et, après la seconde délibération, il n'y aura plus qu'un texte.
M. Alain Vasselle. Voilà !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° A-1, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ? ...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 62:

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 201
Contre 112

M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L. 752-6 du code rural.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, ainsi modifié.
M. Paul Girod. Le groupe du RDSE s'abstient.

(L'article 1er est adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Machet, pour explication de vote.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Haute Assemblée parvient à la fin de l'examen de la proposition de loi sur la couverture du risque accidents du travail et maladies professionnelles des non-salariés agricoles.
Ce texte concerne le monde agricole et rural, auquel j'appartiens, et dont la couverture accidents du travail est encore récente : elle est régie, en effet, par la loi du 22 décembre 1966, qui institue le principe de l'assurance obligatoire, et par celle du 25 octobre 1972, qui instaure un régime complémentaire facultatif.
Aujourd'hui, plus que jamais, au vu des agriculteurs soumis aux épreuves de la fièvre aphteuse, de l'encéphalopathie spongiforme bovine, l'ESB, ou encore de la fièvre de Malte - et c'est un problème que je connais, car le berger qui gardait mes moutons a contracté la fièvre de Malte -, il me semble également indispensable de mettre en place une politique de prévention, afin de diminuer les accidents du travail.
Monsieur le ministre, je regrette une fois encore que le Gouvernement auquel vous appartenez ait déclaré l'urgence sur un texte qui eût nécessité une réflexion approfondie. C'est chose faite grâce au travail de la commission des affaires sociales, et particulièrement à celui de son rapporteur, Bernard Seillier : au nom du groupe de l'Union centriste, je rends hommage au dynamisme et à la justesse des propositions de notre collègue.
Le contrôle de l'obligation d'assurance, l'animation de la prévention et le contrôle médical doivent relever de la MSA sans pour autant diminuer la participation active de l'assurance privée. Il est nécessaire de maintenir un système concurrentiel, et cela dans l'intérêt des agricultrices et des agriculteurs, afin de leur proposer une offre compétitive et diversifiée, accompagnée d'un niveau de charge modéré. C'est pourquoi M. le rapporteur a justement prévu que les cotisations correspondant aux garanties minimales obligatoires ne puissent excéder un plafond arrêté par le ministère de l'agriculture ; ces cotisations seront également modulées en fonction du classement des exploitations, dans des catégories de risques, catégories définies par la caisse centrale de Mutualité sociale agricole.
A la lumière de ces brèves remarques, vous comprendrez, monsieur le ministre, mes chers collègues, que je vote, avec mon groupe, le texte tel qu'il a été amendé par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la Mutualité sociale agricole n'aura pas à assumer un rôle de caisse pivot, la gestion décentralisée de l'AAEXA ayant été supprimée par la Haute Assemblée. Cette gestion lui échappera donc. Après avoir vidé de son sens la proposition de loi et retiré le rôle pivot de la MSA, le Sénat, par un véritable contre-projet, crée ce soir - je cite M. le rapporteur - un véritable « service de sécurité sociale privé ».
Au cours de ce débat sans grande surprise, la majorité sénatoriale, suivant les recommandations du rapporteur de la commission des affaires sociales, a tiré les conséquences de son choix de départ de maintenir l'AAEXA dans un cadre assuranciel et concurrentiel. Ainsi, les organismes assureurs pourront continuer à bénéficier d'une liberté tarifaire, de gestion et, par là-même, de fortes marges bénéficiaires.
Pas une disposition ne fait référence à un réel programme de prévention avec obligation pour les assureurs privés de mettre à disposition de la MSA l'ensemble des données statistiques en leur possession.
Les exploitants agricoles en attente d'une couverture de base accidents du travail-maladies professionnelles à parité avec le régime salarié devront se satisfaire non d'une réelle amélioration des prestations, mais d'un régime avec des garanties minimales, les rentes servies aux ayants droit relevant désormais du champ complémentaire.
M. Hilaire Flandre. N'importe quoi !
M. Guy Fischer. Considérant qu'il était nécessaire non pas de retoucher à la marge mais de réformer l'actuel régime de l'AAEXA afin qu'il réponde aux exigences du xxie siècle, nous avons soutenu la nature du choix retenu par la proposition de loi du groupe radical, citoyen et vert, enrichie à la suite de son examen par l'Assemblée nationale, à savoir la constitution d'un véritable régime de sécurité sociale fondé sur la solidarité.
Par conséquent, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre le texte tel qu'il a été modifié par le Sénat.
M. Gérard Le Cam. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Lors de la discussion générale, j'avais dit tout le mal que je pensais de la procédure suivie pour ce texte « Rebillard-Glavany-Jospin », on ne sait plus très bien qui en est le véritable auteur !
Si j'ai bien compris, le plat qui nous est servi ce soir est une résurgence de celui qui a été proposé au Conseil d'Etat, qui l'avait écarté. Au mieux, l'assiette, en carton, est d'origine parlementaire et le plat d'origine gouvernementale.
C'est une mauvaise méthode, tout comme celle qui consiste à nier l'utilité d'un système assuranciel et concurrentiel tel qu'il découle des délibérations de l'Assemblée nationale, avec cette espèce de monopole donné à la MSA, dont la présence est certainement intéressante, mais dont l'omnipotence est assurément dommageable pour une protection efficace et à coût mesuré.
La commission me semble avoir suivi une logique intermédiaire en n'allant pas jusqu'au bout de l'inspiration concurrentielle et assurancielle qui était la nôtre et qui me paraît être, contrairement à ce qu'a dit M. le ministre, très largement approuvée par les organisations représentatives des agriculteurs.
Je voterai le texte, malgré les réticences que j'ai exprimées sur l'article 1er, dont certaines lors de la seconde délibération, mais surtout en dépit des lacunes que j'ai relevées. J'espère que, grâce au talent de M. le rapporteur, du président de la commission des affaires sociales et des membres de la commission mixte paritaire, cette proposition de loi ainsi modifiée trouvera quelque grâce auprès de nos collègues de l'Assemblée nationale.
En effet, si la commission mixte paritaire échoue, - ce qui n'est pas une hypothèse totalement improbable - il n'y aura non pas une deuxième mais une nouvelle lecture et nos apports se feront dans des conditions de pression externe autrement différentes que pour une deuxième lecture, car vous avez ajouté, monsieur le ministre, à la présentation du plat les piments de la déclaration d'urgence.
Je voterai ce texte en espérant que cette ouverture de la commission des affaires sociales à l'égard du texte de l'Assemblée nationale sera saisie. Je le dis très honnêtement : je n'ai aucune illusion, monsieur le rapporteur ! Si une nouvelle lecture devait avoir lieu au Sénat après l'échec de la commission mixte paritaire, je pense que nous reviendrions avec nos soucis et notre volonté de faire apparaître une logique différente du texte.
Ensuite, rendez-vous sera pris devant les agriculteurs et devant les contribuables, qui seront peut-être aussi, à un moment ou à un autre, mis en cause, pour savoir de quelle manière sera réglé définitivement ce problème douloureux des accidents du travail. Car on ne peut pas, je le répète, opérer une distinction entre la vie professionnelle et la vie privée : les agriculteurs sont des gens isolés dans leur exploitation, dont la vie familiale et la vie professionnelle - j'allais dire la vie tout court, dans tous ses aspects - se confondent en permanence. On ne peut pas se livrer à ce genre d'acrobatie !
M. le président. La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite préciser la position du groupe socialiste sur cette proposition de loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, ou plus exactement sur le texte tel qu'il est issu des débats du Sénat.
Bien évidemment, nous sommes d'accord avec la création au sein de la protection sociale des exploitants agricoles d'une véritable branche accidents du travail, maladies professionnelles, et nous sommes contre le texte tel qu'il est issu des débats du Sénat.
En adoptant les amendements du rapporteur, la majorité sénatoriale vient en effet de rétablir, sans le dire expressément, le système ancien, fondé sur la concurrence entre assureurs.
M. Alain Vasselle. C'est très bien !
M. Gilbert Chabroux. C'est d'ailleurs une véritable performance que de reconnaître les évidentes carences de ce système, d'admettre qu'il est absolument nécessaire d'y mettre un terme et de proposer, finalement, de ne rien changer vraiment sur le fond.
Nous estimons, pour notre part, que la réforme proposée par l'Assemblée nationale et le Gouvernement forme un tout. Pour remettre vraiment en ordre la couverture sociale des exploitants agricoles et placer leur protection sociale au niveau de celle des salariés, y compris de leurs propres employés, il faut non seulement créer une branche accidents du travail et maladies professionnelles, mais également faire en sorte que le nouveau système fonctionne de manière transparente et efficace.
Tel est le choix qui a été opéré par nos collègues de l'Assemblée nationale. Les cotisations seront fixées en fonction du risque inhérent à l'exploitation, les prestations grandement améliorées et le fonctionnement du régime sera coordonné par la caisse centrale de la MSA.
A notre sens, une autre clarification est nécessaire : les accidents du travail et ceux de la vie privée doivent relever de régimes différents. A cet égard, le monde rural n'a pas à être considéré comme un monde à part. La vision de l'agriculteur travaillant en famille et dont l'épouse élève poules et lapins tandis que les enfants participent aux menus travaux est une vision obsolète.
Les ruraux ne veulent plus être traités différemment et ne pas bénéficier des avancées normales de la protection sociale.
Le Sénat s'est souvent présenté comme le défenseur du monde rural. Il est donc paradoxal de le voir aujourd'hui soutenir le maintien d'un régime concurrentiel, dont il reconnaît par ailleurs les défauts. Il est tout aussi paradoxal de le voir s'inquiéter de la tendance haussière du niveau des prestations qui devront être versées, alors que le régime est calculé pour s'autofinancer.
Au demeurant, chacun ici a le souci de ne pas augmenter les charges publiques, mais la préoccupation de mise à niveau des agriculteurs dans le domaine fondamental de la protection en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles doit être prioritaire.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre le texte tel qu'il est issu des travaux du Sénat.
M. Paul Girod. Vous devriez voir une ferme de près, même une grande !
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en entendant les propos qui viennent d'être tenus par M. Chabroux, j'ai véritablement le sentiment que nos collègues socialistes sont complètement aveuglés par des préoccupations politiciennes à la veille d'échéances électorales importantes. (M. le ministre rit.)
M. Gilbert Chabroux. Pas autant que vous !
M. Alain Vasselle. Pour eux, l'essentiel est de faire de l'affichage politique ! J'ai d'ailleurs relevé dans les propos de M. le ministre qu'à chaque fois que l'occasion a pu lui être donnée de faire référence à la régression sociale au travers de l'initiative du Sénat, il n'a pas manqué de s'y employer, trouvant un relais soit chez le groupe communiste, soit chez le groupe socialiste, encore que ce dernier ait été particulièrement absent des débats : il est un peu facile de venir nous donner des leçons au moment des explications de vote, alors qu'une attention portée à nos discussions aurait peut-être permis d'en tirer quelques enseignements au profit de la profession agricole.
M. Gilbert Chabroux. On savait d'avance ce que vous alliez dire ! On connaît la chanson !
M. Alain Vasselle. Malheureusement, celle-ci n'aura qu'à souffrir du nouveau dispositif qui se met en place, et qui représente un coût non négligeable, au travers des cotisations AMEXA, pour l'ensemble de la profession agricole.
Par conséquent, ne venez pas dire une chose et voter des dispositions qui vont tout à fait à l'encontre des objectifs que vous voulez atteindre !
Après cette observation que j'ai tenu à formuler à la suite de l'explication de vote de notre collègue socialiste, je donnerai le sentiment du groupe RPR sur ce texte.
Issue d'une histoire législative riche en péripéties, cette proposition de loi transforme un régime d'assurance peu satisfaisant en une nouvelle branche de sécurité sociale des non-salariés agricoles.
Si l'objectif d'améliorer un système considéré comme défaillant est louable, les modalités apparaissent non acceptables en l'état.
Notre excellent rapporteur a proposé à notre Haute Assemblée d'améliorer la protection sociale des exploitants agricoles, tout en respectant le cadre concurrentiel du régime actuel, auquel nous étions particulièrement attachés, et en évitant de mettre en place un système qui aboutirait à une hausse future des prélèvements, ce que l'on peut craindre du texte qui nous est parvenu de l'Assemblée nationale.
Les représentants de la profession des exploitants agricoles - je me permets d'insister sur ce point - préoccupés par les insuffisances de la couverture sociale des personnes concernées, sont tout à fait favorables au système que propose de mettre en place notre Haute Assemblée.
Lorsque je parle des représentants de la profession, je vise aussi bien les représentants du syndicalisme agricole que ceux qui sont dans les conseils d'administration des sociétés d'assurance, notamment Groupama. Que l'on ne vienne donc pas ici tenter de mettre en opposition les agriculteurs en faisant valoir que ceux qui gèrent la MSA sont plutôt pour le système MSA et que ceux qui sont à Groupama sont plutôt pour Groupama, et qu'il y aurait une division dans le monde agricole.
C'est entièrement faux ! Le monde agricole est complètement uni sur ce dispositif. Il souhaitait non pas une réforme structurelle du type de celle que vous voulez mettre en oeuvre mais des aménagements.
Notre groupe ne peut donc qu'approuver les initiatives de la commission : le remodelage des modalités de cette nouvelle couverture sociale permettra une amélioration nette des prestations, dans un système où le libre choix de l'organisme assureur est préservé et les spécificités du monde agricole prises en compte, tout en améliorant la politique de prévention animée par la MSA, ainsi que le contrôle de l'obligation d'assurance.
Je note cependant - c'est une position qui m'est personnelle - que, sur deux points, à savoir, d'une part, la distinction entre vie privée et vie professionnelle - Paul Girod y a fait allusion - et, d'autre part, la notion d'inaptitude ou d'incapacité au travail, qui renvoie notamment à des décrets pour la fixation des taux, nombre de nos collègues du groupe du Rassemblement pour la République n'ont pas eu satisfaction. Je ne doute pas que si ce texte vient en nouvelle lecture devant la Haute Assemblée nous aurons l'occasion d'avoir de nouveaux échanges à cet égard. D'autant que M. le rapporteur souhaite - et je crois qu'il va militer dans ce sens - que, dans le cadre de la discussion qui va s'engager avec l'Assemblée nationale, des avancées soient faites pour que ce texte soit aussi consensuel que possible. Mais si je m'en tiens aux déclarations du groupe socialiste, du groupe communiste républicain et citoyen et de M. le ministre tout au long de la discussion, il nous est permis d'en douter.
Cela étant, nous attendrons avec intérêt les résultats de la commission mixte paritaire, qui devraient théoriquement traduire les bonnes intentions de l'Assemblée nationale et du Gouvernement.
Nous voterons donc le texte tel qu'il est issu des travaux de la Haute Assemblée.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. On a entendu beaucoup de choses à propos de ce texte. Imparfait et insatisfaisant lorsqu'il est arrivé de l'Assemblée nationale, il est peut-être encore imparfait et insatisfaisant au départ du Sénat.
Il s'agit d'un dispositif que l'on ne peut pas assimiler complètement à ce qui est devenu, pour beaucoup, une espèce de droit commun dans le régime général ou même dans un certain nombre de régimes particuliers.
On le sait, l'histoire de la couverture sociale dans l'agriculture remonte bien avant 1945, puisque des dispositifs d'assurance existaient déjà. En revanche, il n'y a pas eu d'intégration des différents dispositifs mis en place, le plus souvent de façon parallèle, en un régime général de couverture sociale unique.
J'ai eu l'occasion, récemment, de rencontrer un responsable de la MSA qui m'a dit que le texte élaboré par l'Assemblée nationale le mettait, lui et ses pairs, dans une position délicate vis-à-vis de ses « cousins » de Groupama, pour reprendre son expression.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Enfin, monsieur le président !...
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je rapporte ce qui m'a été dit !
Ce même responsable ajoutait que ce dispositif était diversement apprécié par les milieux professionnels agricoles.
M. Paul Girod. Quelle litote !
M. Hilaire Flandre. Il est peu apprécié, en effet !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Il m'a dit encore un certain nombre d'autre choses sur le texte que la commission avait concocté.
Il est inévitable que, la situation étant assez disparate, le texte ne réponde pas à toutes les questions. Nous franchissons donc une étape. Mais il ne faut pas croire que le milieu professionnel agricole soit figé dans une opinion totalement monolithique. Monsieur le ministre, vous avez peut-être des correspondants particuliers qui vous font passer un certain message, d'autres ont essayé de nous faire passer des messages différents.
La commission a tenté de trouver une voie de sagesse qui ménage l'avenir et qui permette au moins d'avancer dans un certain nombre de domaines, notamment en ce qui concerne la qualité de la couverture des risques et la prévention. Même s'il reste encore, ici ou là, quelques contradictions, je pense que le travail que nous avons accompli n'est pas à jeter, contrairement à ce que l'on voudrait faire croire, même s'il est certainement perfectible.
Il est vrai aussi que cette discussion aurait pu se dérouler dans de meilleures conditions si on nous avait laissé quelques mois supplémentaires. Pour avoir recueilli le témoignage d'un certain nombre de représentants de la MSA, je sais que, pour eux, ce texte est arrivé très vite, trop vite, et qu'ils n'ont pas eu l'occasion d'en discuter avec leurs partenaires.
Nous savons que le choix du Sénat est approuvé par nombre de professionnels de l'agriculture et qu'il peut être désapprouvé par d'autres. Nous verrons bien comment ces dispositions s'appliqueront une fois que les décrets auront été pris.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, je n'ai pas voulu intervenir avant le vote, car telle n'est pas, me semble-t-il, la tradition, mais je tenais à remercier en particulier le rapporteur, M. Seillier, et le président de la commission, M. Delaneau, du travail accompli.
Si des divergences sont apparues entre nous, nos débats n'ont jamais été discourtois ou agressifs, car nous avions, les uns et les autres, la volonté positive de trouver des solutions constructives. Nous avons eu certes des désaccords, mais pas toujours, puisqu'il m'est arrivé d'émettre des avis favorables sur certains amendements. (Sourires.)
Il reste quelques points en débat.
J'aimerais dire à M. Vasselle que je suis tout de même plus proche de M. Delaneau que de lui. « La profession agricole, unanime, est derrière moi », nous a-t-il dit. Franchement, M. Vasselle devrait tout de même prendre conscience de la réalité démocratique du pays, y compris dans le monde agricole. Que des organisations professionnelles se soient prononcées pour le système assuranciel, j'ai cru le remarquer. (Sourires.) N'oublions pas pour autant que d'autres organisations professionnelles agricoles se sont exprimées pour le dispositif que nous proposons. Qu'est-ce que la MSA, sinon un régime d'agriculteurs, pour des agriculteurs ? Tous ses dirigeants sont élus par des agriculteurs.
M. Hilaire Flandre. Non ! la MSA est gérée de manière étatique !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Pas du tout ! Ses dirigeants sont élus par les agriculteurs. Mme Jeannette Gros, présidente de la MSA, est agricultrice dans le Doubs et toute son équipe est composée d'agriculteurs.
Donc, tout n'est pas aussi univoque.
M. Delaneau a rencontré, dit-il, des représentants de la MSA. Pour ma part, j'ai rencontré des salariés de Groupama qui m'ont dit qu'ils étaient tellement choqués que leur entreprise ait engrangé des milliards de francs ces trente ou quarante dernières années avec les accidents du travail des agriculteurs qu'ils étaient bien contents que la balance bascule de l'autre côté.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Ce n'est pas tout blanc ou tout noir.
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le président, nous sommes d'accord ! C'est la réalité démocratique du pays et du monde rural qui s'exprime à travers ces débats.
Vous estimez qu'il faut absolument instaurer un système concurrentiel et assuranciel qui seul, d'après vous, peut fonctionner. Mais ce système existe déjà depuis des décennies, et il ne marche pas, mesdames, messieurs les sénateurs, ou très mal. Il est source de très graves inégalités devant le risque d'accident du travail et de maladie professionnelle, et le taux de couverture du risque est tout à fait insatisfaisant. Quant aux profits qu'il génère - M. le rapporteur lui-même l'a reconnu dans son rapport - ils ne sont pas négligeables et ils ont été engrangés par des assurances privées, sur le dos des agriculteurs.
Encore une fois, ce système-là existe, c'est vrai, mais il ne fonctionne pas.
Vous nous dites que le système que nous proposons ne peut pas marcher. Pourtant, il fonctionne déjà avec l'AMEXA pour ce qui est de la couverture du risque maladie, et c'est exactement de ce type de système que nous nous sommes inspirés pour donner à la MSA un rôle pivot.
Mais, si l'on peut débattre d'une manière aussi détendue que possible, il ne faut pas pour autant négliger l'aspect politique du débat. Il y a ici des représentants de forces politiques favorables à un système libéral, concurrentiel et assuranciel et d'autres qui appellent de leurs voeux un vrai régime de sécurité sociale nouveau.
C'est ce choix-là que nous avons fait, avec la majorité de l'Assemblée nationale. Vous le contestez, et c'est votre droit, mais je souligne qu'il a sa cohérence et que, de ce point de vue, notre débat était profondément politique et, à ce titre, particulièrement intéressant.
Maintenant, attendons l'issue de la commission mixte paritaire. Mais, honnêtement, si elle aboutit à un accord, ce sera un miracle ! (Rires.) Et, bien qu'élu du département de Lourdes, je ne crois pas aux miracles. D'ailleurs, même à Lourdes, et surtout à Lourdes, on n'y croit pas.
C'est que les thèses en présence sont tellement contraires - soit un système assuranciel fondé sur la concurrence des assurances privées, soit un système de sécurité sociale - que nous nous retrouverons sans doute pour une deuxième lecture.
M. Paul Girod. Une nouvelle lecture !
M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche. Vous avez raison de me reprendre. Nous verrons donc, en nouvelle lecture, comment le texte évoluera.
Pour l'heure, je vous remercie de la qualité de vos travaux, qui, de toute façon, éclaireront utilement la suite.

12

DÉPÔT DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'avenant à la convention du 19 décembre 1980 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Norvège en vue d'éviter les doubles impositions, de prévenir l'évasion fiscale et d'établir des règles d'assistance administrative réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ensemble un protocole et un protocole additionnel) modifiée par les avenants du 14 novembre 1984 et du 7 avril 1995.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 401, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi portant ratification des ordonnances de transposition du droit communautaire en matière de sécurité sociale.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 402, distribué et renvoyé à la commission des affaires sociale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

13

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Paul Loridant, Jean-Yves Autexier, Guy Fischer et Roland Muzeau une proposition de loi tendant à limiter les licenciements pour convenance boursière.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 397, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de M. Jacques Oudin une proposition de loi tendant à instaurer le suffrage universel direct pour l'élection des représentants des communes dans les assemblées délibérantes des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 400, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

14

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de MM. Louis Souvet, Alain Vasselle, André Jourdain et Jean-Louis Lorrain, un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (n° 376, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 390 et distribué.
J'ai reçu de M. Louis Souvet un rapport fait au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la lutte contre les discriminations (n° 256, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 391 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant règlement définitif du budget de 1998 (n° 365, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 393 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant règlement définitif du budget de 1999 (n° 366, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 394 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Pierre Raffarin, président, et de Mme Janine Bardou, MM. Claude Belot, Roger Besse, Mme Yolande Boyer, MM. Gérard Larcher, Jacques Oudin, Bernard Piras et Alain Vasselle, rapporteurs, un rapport fait au nom de la délégation à l'aménagement et au développement durable du territoire, portant avis sur le projet de décret approuvant les schémas de services collectifs prévus à l'article 10 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (application de l'article 6 sexies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires).
Le rapport sera imprimé sous le n° 395 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.
Le rapport sera imprimé sous le n° 398 et distribué.
J'ai reçu de M. Pierre Laffitte un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur :
- la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la protection du patrimoine (n° 246, 2000-2001),
- et la proposition de loi de M. Pierre Laffitte tendant à renforcer la protection des biens mobiliers dont la conservation présente un intérêt historique ou artistique (n° 105, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 399 et distribué.

15

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 21 juin 2001.
A neuf heures trente :
1. Discussion de la proposition de loi (n° 224, 2000-2001), adoptée par l'Assemblée nationale, relative aux droits du conjoint survivant.
Rapport (n° 378, 2000-2001) de M. Nicolas About, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Rapport d'information (n° 370, 2000-2001) de M. Philippe Nachbar, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale n'est plus recevable.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
A quinze heures :
2. Eventuellement, suite de l'ordre du jour du matin.
3. Discussion du projet de loi (n° 276, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention relative à l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à la convention relative à l'élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d'entreprises associées.
Rapport (n° 179, 2000-2001) de M. Jacques Chaumont, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
4. Discussion du projet de loi (n° 62 rectifié, 2000-2001) autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Botswana en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu.
Rapport (n° 180, 2000-2001) de M. Jacques Chaumont, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
5. Discussion du projet de loi (n° 99, 2000-2001) autorisant l'approbation de l'avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République arabe d'Egypte en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 19 juin 1980.
Rapport (n° 178, 2000-2001) de M. Jacques Chaumont, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Nouvelle lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel (n° 376, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : vendredi 22 juin 2001, à dix-sept heures.
Deuxième lecture de la proposition de la loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la lutte contre les discriminations (n° 256, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : vendredi 22 juin 2001, à dix-sept heures.
Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, de modernisation sociale (n° 384, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 25 juin 2001, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 25 juin 2001, à dix-sept heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité de Nice modifiant le traité de l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes (n° 373, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 27 juin 2001, à dix-sept heures.
Deuxième lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi organique relative aux lois de finances (AN, n° 3139) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 juin 2001, à dix-sept heures.
Nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale avec modifications en nouvelle lecture, portant règlement définitif du budget 1998 (n° 365, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 juin 2001, à dix-sept heures.
Deuxième lecture du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, portant règlement définitif du budget 1999 (n° 366, 2000-2001) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 27 juin 2001, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
(Commission permanente pour la protection sociale
des Français de l'étranger)

Lors de sa séance du 20 juin 2001, le Sénat a reconduit M. Jean-Pierre Cantegrit dans ses fonctions de membre de la commission permanente pour la protection sociale des Français de l'étranger.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Déclassement de la ligne de chemin de fer
Dontrien-Granpré

1114. - 20 juin 2001. - M. Maurice Blin attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le déclassement de la voie ferrée Dontrien-Granpré. Il sollicite de lui, après que le conseil d'administration de la SNCF eut donné son accord, l'approbation du déclassement de la ligne de chemin de fer comprise entre les communes de Dontrien dans le département de la Marne et de Granpré dans celui des Ardennes. La destination de cette ligne, qui était à l'origine militaire, a aujourd'hui disparu. Les communes dont elle traversait le territoire ont été consultées et ont donné leur agrément à ces deux nouvelles affectations : desserte de terres agricoles dans la Marne, trafic touristique dans les Ardennes. Elle a été en effet l'objet d'un premier échange de courrier avec la direction régionale de la SNCF de Reims en date des 5 décembre 1994 et 17 janvier 1995. Cette dernière confirmait alors que « l'autorité militaire lui avait fait part de sa décision de ne plus maintenir la ligne pour ses services » et qu'elle allait donc solliciter son déclassement. Or, en dépit de six années écoulées et de plusieurs courriers restés sans réponse, l'affaire n'est toujours pas réglée. Il s'interroge sur le retard apporté à la conclusion de cette affaire et lui demande de bien vouloir lui indiquer la décision qu'il compte prendre.



ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 20 juin 2001


SCRUTIN (n° 62)



sur l'amendement n° A1 rectifié, présenté par M. Bernard Seillier au nom de la commission des affaires sociales, à l'article 1er (art. L. 752-6 du code rural) de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles (seconde délibération) (notification de l'inaptitude partielle ou totale à la profession agricole).


Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 201
Contre : 112

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Contre : 18.
N'ont pas pris part au vote : 5. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau et François Fortassin.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 97.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, et M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Contre : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 51.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Roger Karoutchi
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau


Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk

Maurice Ulrich
Jacques Valade
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Marcel Bony
Nicole Borvo
Yolande Boyer
Robert Bret
Guy-Pierre Cabanel
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Thierry Foucaud
Jean-Pierre Fourcade
Jean François-Poncet
Paul Girod
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Pierre Guichard
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Bernard Joly
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Pierre Laffitte
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Aymeri de Montesquiou
Michel Moreigne
Georges Mouly
Roland Muzeau
Georges Othily
Jean-Marc Pastor
Lylian Payet
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
André Vallet
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau et François Fortassin.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.