SEANCE DU 28 MARS 2001


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 1 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 2 )

3. Interruption volontaire de grossesse et contraception. - Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 3 ).

Article additionnel avant le titre I{er (p. 4 )

Amendement n° 1 de la commission et sous-amendement n° 57 de M. Jean-Claude Carle ; amendement n° 43 de Mme Claire-Lise Campion. - MM. Francis Giraud, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Jean-Claude Carle, Mme Claire-Lise Campion, MM. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé ; Lucien Neuwirth, Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Retrait du sous-amendement n° 57 ; adoption de l'amendement n° 1 insérant un article additionnel, l'amendement n° 43 devenant sans objet.

Division et article additionnels avant le titre I{er (p. 5 )

Amendements n°s 56 et 55 de M. Jean-Claude Carle. - MM. Jean-Claude Carle, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 55, l'amendement n° 56 devenant sans objet.

Article 1{er (p. 6 )

MM. Lucien Neuwirth, Jean-Pierre Fourcade.
Amendements identiques n°s 2 de la commission et 58 de M. Jean-Claude Carle ; amendement n° 23 de M. Lucien Neuwirth. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, le ministre délégué, Mmes Hélène Luc, Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Claude Huriet, Charles Descours, Serge Lagauche. - Adoption des amendements n°s 2 et 58 supprimant l'article, l'amendement n° 23 devenant sans objet.

Article additionnel avant l'article 2 (p. 7 )

Amendement n° 44 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.

Article 2 (p. 8 )

MM. Lucien Neuwirth, Jean-Guy Branger.
Amendements identiques n°s 3 de la commission et 59 de M. Jean-Claude Carle ; amendements n°s 27 de M. Lucien Neuwirth et 45 de Mme Claire-Lise Campion. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Lucien Neuwirth, Mme Gisèle Printz, MM. le ministre délégué, Serge Lagauche, Jean-Pierre Fourcade, Michel Caldaguès, Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales ; Jean Chérioux. - Retrait de l'amendement n° 45 ; adoption des amendements n°s 3 et 59 supprimant l'article, l'amendement n° 27 devenant sans objet.

4. Nomination de membres

d'une commission mixte paritaire (p. 9 ).

5. Interruption volontaire de grossesse et contraception. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 10 ).

Article additionnel avant l'article 3 (p. 11 )

Amendement n° 81 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre délégué. - Rejet.

Article 3. - Adoption (p. 12 )

Article additionnel après l'article 3 (p. 13 )

Amendement n° 80 de M. Bernard Seillier. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle ; MM. Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 3 bis (p. 14 )

Amendements n°s 4 de la commission et 60 de M. Jean-Claude Carle. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Mme le secrétaire d'Etat, MM. le président de la commission, JeanChérioux, Mme Claire-Lise Campion, MM. Claude Huriet, Guy Fischer, Hilaire Flandre, Serge Lagauche, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement n° 4 supprimant l'article, l'amendement n° 60 devenant sans objet.

Article 4 (p. 15 )

Mme Odette Terrade.
Amendements n°s 5 de la commission et 42 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, le ministre délégué, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Jean Chérioux, Jean-Louis Lorrain. - Adoption de l'amendement n° 5 rédigeant l'article, l'amendement n° 42 devenant sans objet.

Article 5 (p. 16 )

Amendements n°s 6 de la commission, 61 de M. Jean-Claude Carle, 46 de Mme Claire-Lise Campion et 64 de Mme Odette Terrade. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Carle, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, le ministre délégué, Jean-Louis Lorrain. - Adoption de l'amendement n° 6 supprimant l'article, les amendements n°s 61, 46 et 64 devenant sans objet.

Article 6 (p. 17 )

M. Jean-Guy Branger.
Amendements n°s 82 de M. Serge Lagauche, 7 à 10 de la commission et 41 rectifié de M. Jean Chérioux. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, Jean Chérioux, le ministre délégué, le président de la commission, Claude Huriet, Jean-Guy Branger. - Retrait de l'amendement n° 82 ; adoption des amendements n°s 7 à 10 et 41 rectifié.
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
MM. Claude Huriet, Philippe Richert.
Adoption, par scrutin public, de l'article modifié.

Article 7 (p. 18 )

Mme Marie-Claude Beaudeau.
Amendement n° 47 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué, le président de la commission. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 7 bis. - Adoption (p. 19 )

Article additionnel après l'article 7 bis (p. 20 )

Amendement n° 83 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.

Article 8. - Adoption (p. 21 )

Article 8 bis (p. 22 )

Amendements n°s 30 du Gouvernement, 65 de Mme Odette Terrade, 12 et 13 rectifié de la commission. - MM. le ministre délégué, Roland Muzeau, le rapporteur, Mme Claire-Lise Campion, MM. Patrick Lassourd, le président de la commission, Claude Huriet. - Rejet des amendements n°s 30 et 65 ; adoption des amendements n°s 12 et 13 rectifié.
Adoption de l'article modifié.

Article 9. - Adoption (p. 23 )

Article additionnel après l'article 9 (p. 24 )

Amendement n° 26 de M. Claude Huriet. - MM. Claude Huriet, le rapporteur, le ministre délégué, le président de la commission, Bernard Seillier, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jean Chérioux, Patrick Lassourd. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 10. - Adoption (p. 25 )

Article 11 (p. 26 )

Amendement n° 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 11 bis (p. 27 )

Amendements n°s 15 de la commission, 48 de Mme Claire-Lise Campion et 66 de Mme Odette Terrade. - M. le rapporteur, Mmes Claire-Lise Campion, Danielle Bidard-Reydet, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement n° 15 supprimant l'article, les amendements n°s 48 et 66 devenant sans objet.

Article 12 (p. 28 )

Amendement n° 16 de la commission et sous-amendement n° 40 rectifié de M. Jean Chérioux. - MM. le rapporteur, Jean Chérioux, le ministre délégué. - Adoption du sous-amendement et de l'amendement modifié rédigeant l'article.

Suspension et reprise de la séance (p. 29 )

M. le président.

Article 12 bis. - Adoption (p. 30 )

Article additionnel après l'article 12 bis (p. 31 )

Amendement n° 49 de Mme Claire-Lise Campion. - Mme Claire-Lise Campion, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait.

Article 13 (p. 32 )

Amendements n°s 31 du Gouvernement et 84 de la commission. - MM. le ministre délégué, le rapporteur. - Rejet de l'amendement n° 31 ; adoption de l'amendement n° 84.
Amendements n°s 32 et 33 du Gouvernement. - Devenus sans objet.
Amendement n° 85 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° 34 du Gouvernement. - Devenu sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 14 (p. 33 )

Amendements n°s 35 du Gouvernement, 86, 87 de la commission, 72 et 73 de M. Gaston Flosse. - MM. le ministre délégué, le rapporteur, Lucien Lanier, Claude Huriet, Jean Chérioux, Lucien Neuwirth, Mme Danielle Bidard-Reydet. - Rejet de l'amendement n° 35 ; retrait de l'amendement n° 73 ; adoption des amendements n°s 86, 72 et 87.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 14 (p. 34 )

Amendement n° 63 rectifié de M. Jean-Claude Carle, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 15. - Adoption (p. 35 )

Article 16 (p. 36 )

Mme Hélène Luc.
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué, le président de la commission, Lucien Neuwirth. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 16 bis (p. 37 )

M. Jean-Guy Branger.
Amendement n° 18 de la commission et sous-amendements n°s 29 de M. Jean-Guy Branger, 25 de M. Lucien Neuwirth, 75, 76 rectifié bis de M. Bernard Seillier et 50 de Mme Claire-Lise Campion ; amendement n° 67 de Mme Odette Terrade. - MM. le rapporteur, Jean-Guy Branger, Lucien Neuwirth, Bernard Seillier, Mmes Claire-Lise Campion, Hélène Luc, le secrétaire d'Etat, M. le ministre délégué. - Retrait des sous-amendements n°s 75, 29 et 50 ; adoption des sous-amendements n°s 25, 76 rectifié bis et de l'amendement n° 18 modifié, l'amendement n° 67 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 16 bis (p. 38 )

Amendements n°s 51 de Mme Claire-Lise Campion et 68 de Mme Odette Terrade. - Mmes Marie-MadeleineDieulangard, Odette Terrade, MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 51 ; adoption de l'amendement n° 68 insérant un article additionnel.
Amendement n° 69 de Mme Odette Terrade. - Mme Danielle Bidard-Reydet, M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 17 (p. 39 )

Amendements n°s 19 de la commission, 70 de Mme Odette Terrade, 37 rectifié et 36 du Gouvernement. - M. le rapporteur, Mme Odette Terrade, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement n° 19, les amendements n°s 70, 37 rectifié et 36 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 17
ou après l'article 20 (p. 40 )

Amendements n°s 28 rectifié de M. Lucien Neuwirth, repris par la commission, et 54 de Mme Claire-Lise Campion. - M. le rapporteur, Mme Claire-Lise Campion, M. le ministre délégué. - Adoption de l'amendement n° 28 rectifié insérant un article additionnel après l'article 17, l'amendement n° 54 devenant sans objet.

Article 18 (p. 41 )

Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre délégué. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 19 (p. 42 )

Amendements n°s 77 de M. Bernard Seillier, 21 de la commission et sous-amendements n°s 78 de M. Bernard Seillier et 53 rectifié de Mme Claire-Lise Campion ; amendements n°s 52 rectifié de Mme Claire-Lise Campion et 71 de Mme Odette Terrade. - MM. Bernard Seillier, le rapporteur, Mmes Marie-Madeleine Dieulangard, Claire-Lise Campion, Odette Terrade, M. le ministre délégué. - Retrait de l'amendement n° 77 ; adoption des sous-amendements n°s 78, 53 rectifié et de l'amendement n° 21 modifié, les amendements n°s 52 rectifié et 71 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.

Article 20 (p. 43 )

Amendements identiques n°s 74 de Mme Claire-Lise Campion et 79 de M. Bernard Seillier ; amendement n° 22 de la commission. - Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Bernard Seillier, le rapporteur, le ministre délégué, Mme Odette Terrade. - Rejet des amendements n°s 74 et 79 ; adoption de l'amendement n° 22.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 20 (p. 44 )

Amendements n°s 38 et 39 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, le rapporteur. - Rejet des deux amendements.

Vote sur l'ensemble (p. 45 )

M. Jacques Machet, Mme Claire-Lise Campion, M. Roland Muzeau, Mme Anne Heinis.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.

6. Nomination de membres

d'une commission mixte paritaire (p. 46 ).

7. Dépôt d'un projet de loi (p. 47 ).

8. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 48 ).

9. Dépôt de rapports (p. 49 ).

10. Dépôt d'un rapport d'information (p. 50 ).

11. Ordre du jour (p. 51 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

CANDIDATURES À UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des lois m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.
Mes chers collègues, dans l'attente de l'arrivée d'un représentant du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

3

INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE ET CONTRACEPTION

Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 120, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception. [Rapport n° 210 (2000-2001) et rapport d'information n° 200 (2000-2001).]
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article additionnel avant le titre Ier



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 1, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose d'insérer, avant le titre Ier, un article additionnel ainsi rédigé :
« La réduction du nombre des interruptions volontaires de grossesse est une priorité de santé publique. A cette fin, le Gouvernement mettra en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite d'une véritable politique d'éducation à la sexualité et d'information sur la contraception. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 57, présenté par M. Carle, et tendant à rédiger ainsi la seconde phrase du texte proposé par l'amendement n° 1 : « A cette fin, sont mis en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite d'une véritable politique d'éducation à la sexualité, d'information sur la contraception, et d'accompagnement respectant le libre choix des femmes enceintes que leur état place en situation de détresse. »
Par amendement n° 43, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant le titre Ier, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'éducation à la sexualité et l'information sur la contraception sont une priorité de santé publique.
« Le Gouvernement mettra en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite d'une véritable politique dans ce domaine, notamment par la mise en place de programmes adaptés au sein de l'éducation nationale. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Francis Giraud, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c'est un amendement de principe.
Lors de la discussion générale, j'ai exprimé le regret que ce projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception traite en premier lieu - c'est l'objet du titre Ier - de l'IVG et qu'il relègue en fin de texte, dans le titre II, le volet qui a trait à la contraception.
La commission considère, en toute logique, que l'accent devrait d'abord être mis sur la contraception, dont l'échec éventuel conduit à l'IVG.
M. Lucien Neuwirth. C'est une évidence !
M. Francis Giraud, rapporteur. Elle estime, pour sa part, que la persistance d'un nombre élevé d'IVG résulte des carences des politiques menées depuis trente ans en faveur de l'éducation à la sexualité et de l'information sur la contraception.
M. Lucien Neuwirth. Très juste !
M. Francis Giraud, rapporteur. Si la contraception est aujourd'hui largement répandue dans notre pays, elle n'est pas suffisamment maîtrisée. La méconnaissance des mécanismes élémentaires de la transmission de la vie reste encore grande, en particulier chez les jeunes.
Dans ces conditions, la commission estime qu'il est de la responsabilité du Gouvernement de définir une politique ambitieuse d'éducation responsable à la sexualité et d'information sur la contraception, qui mobilise autant le corps enseignant que le corps médical et ouvre le dialogue au sein des familles.
Elle propose, par conséquent, de rappeler solennellement que la réduction du nombre des interruptions volontaires de grossesse doit constituer une priorité de santé publique et que le Gouvernement doit mettre en oeuvre les moyens nécessaires à la conduite d'une véritable politique d'éducation à la sexualité et d'information sur la contraception.
M. Lucien Neuwirth. C'est parfait !
M. le président. La parole est à M. Carle, pour présenter le sous-amendement n° 57.
M. Jean-Claude Carle. S'il convient d'éduquer à la sexualité et d'informer sur la contraception, il faut aussi prévoir un accompagnement des femmes enceintes respectant leur libre choix de recourir ou non à l'avortement.
Mon sous-amendement vise à compléter l'amendement de la commission en ce sens.
M. le président. La parole est à Mme Campion, pour présenter l'amendement n° 43.
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s'il est un point sur lequel nous semblons tous nous accorder, c'est bien la nécessité d'améliorer notre politique en matière de contraception et d'éducation à la sexualité.
Cependant, nous n'avons pas la même conception de ce qui doit être une priorité de santé publique.
La commission estime que c'est la réduction du nombre des interruptions volontaires de grossesse qui est une priorité de santé publique. Nous considérons, nous, que ce sont l'éducation à la sexualité et l'information à la contraception qui sont, par essence, une priorité de santé publique et qui doivent donc constituer la base de toute politique en la matière, politique qui ne doit pas se limiter à la réduction du nombre des interruptions volontaires de grossesse, qui se doit d'être beaucoup plus large.
En effet, nous estimons que le nombre d'interruptions de grossesse est une conséquence, parmi d'autres, du défaut d'information sur la contraception et la sexualité, qu'elle n'est malheureusement pas la seule.
Il existe - nous le savons bien - d'autres incidences tout aussi dramatiques, sinon plus, qui en découlent directement.
Je pourrais, pour vous en convaincre, mes chers collègues, me contenter de vous signaler, à titre d'exemples, la propagation des maladies sexuellement transmissibles, les MST, ou la triste réalité des abus sexuels.
Refuser ces réalités, lutter contre, nécessite la divulgation d'une information qui soit adéquate et accessible à tous, et ce dès le plus jeune âge.
Seules l'information et l'éducation sont aptes à permettre la connaissance et le respect de son corps et de celui de l'autre, en même temps qu'une appropriation de la contraception.
Cela suppose que l'on mène des politiques innovantes et continues associant en toute logique l'éducation nationale mais aussi la société dans son ensemble, afin de donner les moyens aux femmes, aux couples, aux enfants, de se prémunir et de se protéger.
Il apparaît dès lors évident qu'on ne peut se contenter d'ériger en priorité de santé publique la réduction des interruptions volontaires de grossesse, car cette priorité, c'est bien l'accès à la contraception et l'information sur la sexualité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 57 et sur l'amendement n° 43 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission demande à l'auteur du sous-amendement n° 57 de bien vouloir le retirer, car elle a choisi de mettre l'accent sur l'information et la prévention des grossesses non désirées.
Quant à l'amendement n° 43, qui va dans le même sens que celui de la commission, il deviendra sans objet si ce dernier est adopté.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Mais le nôtre est meilleur !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1, le sous-amendement n° 57 et l'amendement n° 43 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement - je l'ai dit hier, je le répéterai sans doute plusieurs fois aujourd'hui - partage les préoccupations de tous les sénateurs, et la vôtre, madame Campion, qui sont ici exprimées. Cela étant, il ne me paraît pas bon d'inscrire à cet endroit, dans la loi, l'une de ces grandes déclarations dont je me méfie terriblement.
On dit qu'on veut en faire une priorité de santé publique. Mais voilà dix ans qu'on dit vouloir le faire et, hier, nous avons constaté que tous les gouvernements successifs et additionnés n'en avaient pas fait assez !
M. Francis Giraud, rapporteur. Exactement !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Par ailleurs, je relève que l'Assemblée nationale a introduit dans le projet un article 16 bis relatif à l'information et à l'éducation à la sexualité.
J'ai dit, hier, qu'ayant présenté dans ses grandes lignes le projet de santé publique, j'allais oeuvrer. Mais notre échec, c'est celui de la société française, qui n'a pas su, toutes composantes confondues, faire de l'éducation à la sexualité non pas une priorité mais un succès. Nous n'en avons pas fait assez. Il faut y remédier.
M. le président. Le sous-amendement est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle. Compte tenu des explications de M. le rapporteur, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 57 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Lucien Neuwirth. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le ministre, si les choses vont sans dire, elles vont encore mieux en le disant. C'est la raison pour laquelle je voterai cet amendement.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je fais mienne la position de principe de M. Neuwirth, mais, dans ma bouche, cela vaut, bien sûr, pour l'amendement n° 43.
Par ailleurs, je suis très satisfait que la commission se soit opposée au sous-amendement de M. Carle, dont le libellé laisse bien augurer des amendements suivants de M. Carle !
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je voterai l'amendement de la commission.
M. le ministre dit que la responsabilité est collective, qu'elle est celle de tous les gouvernements qui se sont succédé, quelle que soit leur couleur politique, voire de la société.
J'en suis tout à fait d'accord. Raison de plus, après ce constat d'échec, pour inscrire cette déclaration de principe, c'est vrai, au fronton de la loi. Elle donne tout son sens au projet, et je ne comprends donc pas qu'on puisse s'y opposer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant le titre Ier, et l'amendement n° 43 devient sans objet.

Division et article additionnels avant le titre Ier



M. le président.
Par amendement n° 56, M. Carle propose d'ajouter, avant le titre Ier, une division additionnelle ainsi rédigée :
« Titre...
« De l'éducation sexuelle dans les établissements scolaires. »
Par amendement n° 55, M. Carle propose d'ajouter, avant le titre Ier, un article additionnel ainsi rédigé :
« Un enseignement obligatoire d'éducation sexuelle est dispensé au collège et au lycée par un intervenant extérieur.
« Un décret précise les modalités d'application de cet article. »
Monsieur Carle, il m'apparaît qu'il convient d'examiner d'abord l'amendement n° 55.
M. Jean-Claude Carle. En effet, monsieur le président.
M. le président. Vous avez la parole pour le défendre.
M. Jean-Claude Carle. Chacun le reconnaît, l'avortement est l'aboutissement d'une situation d'échec.
La solution passe par une politique d'information, et notamment d'éducation, éducation qui relève, certes, de la responsabilité de la famille, mais aussi de celle de l'école.
Malheureusement, aujourd'hui, les cours d'éducation sexuelle se déroulent dans des conditions qui ne sont sans doute pas les plus favorables. L'élève qui souhaite poser des questions n'osera peut-être pas le faire devant ses camarades, au sein de la classe. Cela explique sans doute que les cours d'éducation sexuelle ne soient guère formateurs et ne jouent donc pas le rôle qui leur est assigné.
L'objet de cet amendement est donc d'instaurer dans les programmes des cours d'éducation sexuelle, au même titre que les autres matières, mais avec une méthode et une déclinaison quelque peu différentes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud , rapporteur. La commission est tout à fait favorable, sur le principe, à l'amendement n° 55. Elle constate toutefois qu'il est satisfait par son amendement n° 18 à l'article 16 bis. Aussi demande-t-elle à son auteur de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Il est identique à celui de la commission.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle. Compte tenu des explications de M. le rapporteur, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 55 est retiré, et l'amendement n° 56 n'a donc plus d'objet.

TITRE Ier

INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - L'intitulé du chapitre II du titre 1er du livre II de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé : "Interruption pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse". »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. En fait, monsieur le président, mes chers collègues, je souhaite présenter mon amendement rédactionnel n° 23, qui traduit ma volonté d'être fidèle à la loi Veil.
L'intitulé du chapitre II du projet de loi est ainsi libellé : « Interruption pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse. » L'intitulé prévu par la loi Veil, apportait une précision : « en cas de situation de détresse ». Mon amendement vise à ajouter ces mots.
M. le président. Je considère que vous avez défendu par avance votre amendement, monsieur Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Tout à fait !
M. le président. Sur l'article, la parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de ce texte me laisse perplexe.
J'étais membre du Gouvernement lorsque Mme Veil a déposé le projet de loi relatif à l'IVG et à la contraception. Il a fait l'objet de très longs débats, et je l'ai soutenu. J'estimais en effet qu'au xxe siècle on ne pouvait pas laisser se perpétuer un système d'avortement aboutissant à tant de détresse et de morts, dans des conditions souvent scandaleuses.
Le texte qui a été adopté par le Parlement à l'époque comportait deux éléments : l'IVG, dans un certain délai, en cas de situation de détresse et l'IVG pour motif thérapeutique.
Par ailleurs, l'IVG était entourée d'un certain nombre de précautions : entretiens préalables, accueil et conseils, qui s'adressaient en particulier aux mineures, car c'est un problème qui intéresse aussi bien les mineures que les majeures. Cet encadrement constituait en quelque sorte la contrepartie de la possibilité de pratiquer une IVG.
A la lecture du projet de loi actuellement en discussion, je me demande ce qui a motivé le Gouvernement. Veut-il céder à la mode et aller de plus en plus loin pour satisfaire ceux qui se désintéressent complètement de la famille, des enfants, de la démographie, et ne se préoccupent que de la jouissance immédiate ? Veut-il réagir parce qu'il n'a pas pu réunir les moyens de mettre en place, dans tous nos établissements hospitaliers, des centres d'IVG qui fonctionnent correctement, afin qu'un certain nombre de jeunes femmes ou de mineures puissent trouver, quand il le faut, la possibilité de recourir à l'avortement ?
Tant que nous n'aurons pas mis en place dans l'ensemble de la chaîne hospitalière - Dieu sait si notre pays compte suffisamment d'hôpitaux, de cliniques et de centres de santé ! - un mécanisme qui permette effectivement de s'assurer qu'une IVG peut être pratiquée avant la dixième semaine, je ne crois pas que le fait d'augmenter de par la loi le délai de dix à douze semaines apporte la moindre solution.
Je considère donc que ce texte est beaucoup plus un texte de circonstance et de mode qu'un texte de fond et je me rallierai aux amendements proposés par la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Francis Giraud, au nom de la commission.
L'amendement n° 58 est déposé par M. Carle.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 23, M. Neuwirth propose de compléter in fine cet article par les mots : « en cas de situation de détresse ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 2.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 1er modifie l'intitulé du chapitre II du titre Ier du livre II du code de la santé publique afin de tenir compte de l'allongement de deux semaines du délai légal de l'IVG. Par coordination avec la position proposée à l'article 2 - mais je reviendrai sur le fond - et dans la mesure où la commission vous propose de refuser l'allongement de ce délai, l'amendement n° 2 vise à rétablir l'intitulé du chapitre dans sa version antérieure au projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 58.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement a le même objet que l'amendement n° 2 de la commission et vise donc à supprimer l'article 1er. Ayant déjà eu l'occasion d'exprimer mon opposition au passage de dix à douze semaines du délai légal de l'IVG, je n'y reviendrai pas.
M. le président. L'amendement n° 23 a déjà été défendu par son auteur.
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Si l'amendement n° 2 était adopté, l'amendement n° 23 n'aurait plus d'objet puisque la commission propose de supprimer l'article 1er.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 2 et 58 ainsi que sur l'amendement n° 23 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° 23, bien que je sois d'habitude d'accord avec M. Neuwirth, il ne me semble pas nécessaire, dans la mesure où nous ne sommes plus en 1975, de stigmatiser les femmes en précisant « en cas de détresse ». Il convient au contraire de considérer qu'elles sont responsables d'elles-mêmes et que, lorsqu'elles demandent une IVG, leur situation est déjà suffisamment difficile pour ne pas la souligner.
Je regrette de devoir vous dire cela parce que je sais que tel n'est pas votre intention. Néanmoins, le Gouvernement demande le rejet de l'amendement n° 23.
Par ailleurs, l'objet même du projet de loi étant d'allonger le délai légal du recours à l'IVG, nous demandons le rejet de l'amendement n° 2, déposé par la commission.
Je profite de cette intervention pour apporter une précision à M. Fourcade. Nous avons eu ce débat hier pendant de longues heures : hélas, il est nécessaire de proposer par le biais d'une loi de porter le délai de l'IVG de dix semaines à douze semaines.
Un sénateur du RPR. Et il faut des moyens !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Les moyens, nous nous efforcerons de les trouver, cette question ne constitue pas une raison pour rejeter le principe de l'allongement du délai.
Un refus de cette mesure relève d'un état d'esprit. Beaucoup de médecins ne veulent pas pratiquer d'IVG, ils font jouer la clause de conscience, ce que je comprends bien. Mais si les moyens ne sont pas donnés, c'est que, souvent, les médecins considèrent, hélas, l'IVG comme une discipline secondaire.
Comme vous, je suis partisan de réduire au maximum le nombre d'avortements, comme chez nos voisins européens. Mais, pour cela, il faudrait pratiquer une politique différente, d'un point de vue général et pas seulement en matière de santé, monsieur Fourcade.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 2 et 58.
Mme Hélène Luc. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après mes amis OdetteTerrade et Guy Fischer, après Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner, qui l'ont fort bien exprimé, je veux redire que, par le biais de cet amendement n° 2 et de ceux qui suivent, la commission des affaires sociales entend procéder à une réécriture complète de ce projet de loi.
Le ton est donné dès le début, puisque cet amendement n'a pour seul objet que de s'opposer à l'allongement du délai légal pour une IVG de dix semaines à douze semaines de grossesse, allongement qui constitue une mesure phare de ce projet de loi.
Pour moi, comme je l'ai dit avec insistance au nom de mon groupe lors de la prorogation de la loi Veil en 1979, grâce, d'ailleurs, à l'appui des parlementaires de gauche, l'IVG doit rester un dernier recours. Ce n'est pas un acte banal et anodin. C'est pourquoi il faut développer de manière significative, et sans commune mesure avec ce qui a été fait jusqu'à maintenant, la contraception.
Il faut bien reconnaître que la pratique d'une IVG est un échec pour notre société, pour nous tous, ainsi que vous venez de le dire, monsieur le ministre. Il n'en demeure pas moins que nous ne pouvons que nous opposer de la manière la plus ferme à ce contre-projet élaboré par certains de nos collègues de la majorité sénatoriale, qui ont du mal à cacher leur opposition idéologique à une quelconque évolution de la législation lorsque l'on aborde la question du droit des femmes à disposer librement de leur corps.
Lorsque, hier soir, nous sommes allés avec OdetteTerrade et Guy Fischer à la rencontre des femmes qui manifestaient devant le Sénat avec leurs associations - elles sont d'ailleurs présentes dans les tribunes aujourd'hui - la CADAC, le planning familial, Ras-le-front, Femmes solidaires, Mix-cité, les Femmes turques, le collectif Femmes libres, toutes ont tenu à ce que nous vous disions qu'en fait vous vous opposez aux droits des femmes à disposer librement de leur corps au moment même où la parité entre en application dans les conseils municipaux des villes.
Prenant le prétexte d'une augmentation des risques médicaux liée à une intervention plus tardive, nos collègues refusent l'allongement du délai et préféreraient qu'au-delà de dix semaines une femme souhaitant avorter ne puisse le faire qu'après avoir été entendue par une commission.
Nous sommes tout autant soucieux que vous de la santé des femmes, mes chers collègues, et je veux redire ici qu'après avoir entendu toutes les personnes qualifiées, l'allongement de deux semaines ne pose pas de problèmes pour la santé des femmes.
Nous ne partageons donc pas votre opposition à la nouvelle législation, car l'idée qui se profile est que les femmes ne seraient pas aptes à décider par elles-mêmes de la maîtrise de leur fécondité et qu'elles auraient forcément besoin d'avoir recours à l'avis et à l'autorisation d'un panel de professionnels pour disposer de leur corps.
Nous tenons à réaffirmer ici que la décision de subir une interruption volontaire de grossesse - qui n'est pas une chose facile, et il ne faut pas culpabiliser les femmes - appartient à la femme, à elle seule et à son couple.
C'était d'ailleurs l'esprit de la loi Veil, qui remettait la décision d'avorter entre les mains de la femme et du couple, et non des médecins.
Je tiens d'ailleurs à réaffirmer ici la capacité de choisir en toute connaissance de cause qui caractérise les femmes autant que les hommes.
De la même façon, nous désapprouvons la position de la commission des affaires sociales visant à maintenir le caractère obligatoire de l'entretien préalable à une IVG. Mais nous aurons l'occasion de revenir sur ce point dans la suite du débat.
Nous estimons fort regrettable l'attitude de la commission des affaires sociales alors que, durant la discussion relative à la contraception d'urgence, elle avait adopté une attitude constructive, que je tiens à souligner.
M. Neuwirth, je veux vous dire que le manque de moyens dans les hôpitaux ne peut servir de prétexte pour refuser le délai de deux semaines supplémentaires.
L'allongement du délai de deux semaines est, à court terme, la solution la plus acceptable car, pour diminuer le nombre des avortements, il ne sert à rien de les rendre plus difficiles réglementairement. Une femme qui désire avorter le fait et le fera toujours, parfois en partant à l'étranger, parfois au risque de sa vie. Il s'agit donc de diminuer le nombre de grossesses non désirées - 3 000 adolescentes dans notre pays ont un enfant sans l'avoir désiré - en privilégiant la contraception, mais en offrant aussi la possibilité aux femmes, en dernier recours, d'avorter, même tardivement, en toute connaissance, en toute liberté et en toute sécurité, en donnant aussi la reconnaissance et les moyens aux médecins qui pratiquent ces avortements.
Le texte issue des travaux de la commission des affaires sociales ne correspond pas du tout à notre vision de l'évolution souhaitable du droit à l'interruption volontaire de grossesse. Aussi, nous nous opposerons à l'ensemble des amendements de nos collègues.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Vous êtes opposés à l'extension du délai de dix à douze semaines. En fait, soyons clairs : sous prétexte que cette mesure ne règle pas tous les cas, vous ne souhaitez pas éviter à deux, trois ou quatre milliers de femmes des moments inutilement douloureux.
Si nous souhaitons, quant à nous, que ce délai soit allongé, c'est parce que nous considérons notamment que, pour les femmes qui subissent une IVG avant la fin du délai légal de dix semaines, les démarches se font dans la bousculade et dans l'urgence. Qui subit cela ? Les femmes d'abord, les médecins ensuite.
Restent les problèmes techniques sur lesquels se cristallisent un certain nombre de réserves, au moins publiquement, de la part de plusieurs médecins. On sait que c'est un peu plus compliqué, un peu moins facile. Après dix semaines, l'IVG nécessite une surveillance plus longue et une autre méthode, sans doute une autre préparation, surtout pour les plus jeunes filles.
N'oublions pas que l'on dénombre des grossesses non désirées chez de très jeunes filles, qui, vous l'avez d'ailleurs souligné, ne comprennent pas toujours très bien ce qui leur arrive. Cela veut dire que l'éducation à l'école, dans la famille, au lycée ne se fait pas. C'est grave ! C'est un problème de santé. C'est un problème politique. Sur ce point, du moins, nous sommes d'accord dans cet hémicycle !
Le texte s'adresse aussi à ces jeunes filles. Souvent, elles sont désemparées et commencent avec retard les démarches pour l'IVG.
Le Comité national consultatif d'éthique récuse la thèse de l'eugénisme, dont le risque est évoqué contre le passage de dix à douze semaines.
Vous n'êtes pas dans une démarche de reconnaissance d'un droit pour la femme. A l'Assemblée nationale, notre collègue Marie-Thérèse Boisseau l'a dit clairement : « C'est une demande antinaturelle qui ne correspond pas à un droit, elle représente une réponse à une triste réalité. » Pourquoi les femmes auraient-elles moins le sens de l'éthique que les hommes, que vous, messieurs ?
M. Hilaire Flandre. Personne n'a jamais dit ça !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Elles n'avortent pas à cause d'un désir d'enfant parfait. Et même si une ou deux le faisaient, on ne fait pas la loi pour un ou deux cas !
A dix semaines, on connaît déjà le sexe. Demain, avant dix semaines, on décèlera des anomalies petites et/ou lourdes. Faudra-t-il alors réduire les délais ? Ceux qui craignent de telles réactions chez les femmes ont-ils accès à leur psychologie lorsqu'elles découvrent des anomalies chez leur foetus ? Il s'agit d'imputations d'intention qui n'ont aucune valeur !
Les femmes sont en droit de protester quand on leur refuse le droit de délibérer, de réfléchir et de prendre des décisions dont les raisons seront jugées à l'échelle de toute leur vie et devant leur conscience.
Le pari de la démocratie moderne est de considérer que les capacités de raisonnement et d'évaluation se développent lorsqu'on leur donne l'occasion de s'exercer et qu'une assez grande diversité de points de vue est garantie. Cela représente un idéal. Si l'on y souscrit, on peut être favorable à la libéralisation de la loi actuelle sur l'avortement. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le ministre, je pense que, contrairement à votre collègue, vous accordez quelque crédibilité au document que je vous ai remis cette nuit. Il fait apparaître des solutions et des attitudes qui, certes, sont contrastées, mais qui devraient éclairer davantage le débat qui s'ouvre maintenant.
Nous ne prétendons pas, mes chers collègues, que l'allongement de la durée légale d'interruption volontaire de grossesse réglera tout. Notre crainte est non seulement qu'il ne réglera rien, mais qu'il aggravera peut-être même la situation actuelle. Je vais m'en expliquer une nouvelle fois.
M. Raymond Courrière. Ah non !
M. Claude Huriet. Vous avez dit à l'instant, monsieur le ministre, qu'il appartiendrait au Gouvernement de mettre en place les moyens nécessaires pour que les interruptions tardives de grossesse puissent intervenir dans des conditions de nature à satisfaire à ces besoins que nous ne contestons pas et qui correspondent à des situations médicales et psychologiques souvent dramatiques.
Le Gouvernement mettra donc, avez-vous dit, en place les moyens nécessaires. Mais, monsieur le ministre, les moyens nécessaires, ce ne sont pas seulement les moyens techniques, le plateau chirurgical, ce sont aussi les moyens humains.
Or ces derniers sont d'ores et déjà insuffisants et chacun, quel que soit son point de vue sur la suite du débat, est d'accord pour reconnaître qu'ils se ressentent de la baisse de motivation des intervenants actuels par rapport aux militants de la première heure en faveur des interruptions volontaires de grossesse.
Ce n'est pas d'un coup de baguette magique que le Gouvernement pourra inverser cette tendance démographique, d'ailleurs gravement préoccupante.
Il apparaît à l'évidence, mes chers collègues, que, pour pratiquer des interrutions tardives, les compétences médicales et techniques ne s'improvisent pas. On aura besoin de plus de gynécologues consentant à pratiquer ces gestes chirurgicaux. On aura besoin de plus d'anesthésistes. Or ces besoins, vous le savez bien, monsieur le ministre, ne pourront pas être immédiatement satisfaits, ce qui signifie que si la loi, comme on peut le redouter, prolonge le délai légal de deux semaines, pendant une période dont personne ne peut préjuger la durée, la situation sera pire puisque des femmes, désormais autorisées par la loi à recourir à des interruptions volontaires tardives, constateront à leur grand regret, et au nôtre, que les moyens suffisants n'ont pas été mis en place.
Nous courons aussi le risque, ce que mon questionnaire illustre maintes fois, de démotiver les équipes actuelles qui, souvent, peinent à exercer cette tâche difficile, ingrate et humainement parfois nécessaire qu'est l'interruption volontaire de grossesse dans les conditions législatives légales actuelles.
Voilà les raisons pour lesquelles nous voterons l'amendement n° 2 de la commission des affaires sociales.
M. Raymond Courrière. Eh voilà ! Cela s'appelle un prétexte !
M. Charles Descours. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers confrères,...
Un sénateur socialiste. Collègues !
M. Charles Descours. Non ! Chers confrères !
M. Lucien Neuwirth. Nous parlons aux médecins.
M. Charles Descours. ... s'il y a quelque chose que la médecine m'a appris, comme à Claude Huriet, à Bernard Kouchner ou à Francis Giraud, c'est de ne pas porter de jugement sur les personnes qui se présentent à nous. Quand nous voyons arriver un malade, nous ne jugeons pas ce qu'il a fait. Nous sommes face à quelqu'un qui est en détresse, qui a des difficultés de santé, psychiques, mentales ou organiques, et nous essayons de le soulager. Dans ce débat, qui est un débat de société, je voudrais que nous adoptions, comme ce fut le cas lorsque nous avons élaboré les lois relatives à la bioéthique, le même point de vue. Certes, nous sommes de droite ou de gauche, mais c'est l'écume des jours, comme aurait dit Boris Vian !
Des hommes et des femmes sont confrontés au problème de la procréation comme ils le sont depuis quelques centaines de milliers d'années. Ce n'est donc pas par une loi ou une modification de la loi que nous allons régler ces problèmes, qui sont des problèmes existentiels beaucoup plus importants que les partis politiques auxquels nous appartenons ! Nous nous efforçons, les uns et les autres, de réfléchir à la façon de répondre aux questions des femmes qui, dans le cas d'une grossesse non désirée, se présentent à des médecins.
Je voudrais rappeler, pour qu'il n'y ait pas d'anathème, que la loi Veil a été discutée puis réexaminée sous des gouvernements de droite. Merci donc à nos collègues de gauche de ne pas nous donner de leçons !
M. Raymond Courrière. Cela vous a été imposé !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Grâce à l'appui de la gauche !
M. Charles Descours. Attendez ! Le Premier ministre, le ministre de la santé étaient de droite ! Dans quelques années, on nous expliquera que c'est nous qui avons fait les 35 heures ! (Rires.)
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Cela ne m'étonnerait pas !
M. Charles Descours. Ecoutez, il y avait un Président de la République, qui était M. Giscard d'Estaing, un Premier ministre, qui était Jacques Chirac, puis Raymond Barre, un ministre de la santé, qui était Mme Veil puisJacques Barrot !
Mme Hélène Luc. Eh oui, c'est vrai ! Mais votre majorité n'a pas voté à l'unanimité ! Vous ne voulez pas l'entendre dire ; c'est pourtant vrai !
M. Charles Descours. Permettez-moi de souligner qu'il s'agit d'hommes et de femmes qui étaient de droite à l'époque, et qui le sont toujours ! Par conséquent, arrêtez de nous donner des leçons ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Aujourd'hui, que constatons-nous ? Plus de 200 000 interruptions volontaires de grossesse ! Nous en sommes tous d'accord.
Nous avons un échec collectif à assumer. Je vous rappelle en effet que, depuis 1981, chers collègues, vous avez été au pouvoir plus souvent que nous ; vous avez donc au moins autant de responsabilités que nous en la matière. Si nous enregistrons aujourd'hui 214 000 IVG, c'est autant la faute de la gauche que de la droite.
Mme Hélène Luc. Tout le monde a sa responsabilité !
M. Charles Descours. Je veux bien que les médecins, dont je suis, portent une responsabilité particulière et que le corps médical n'ait pas fait ce qu'il fallait pour prendre en charge ce problème, pour des raisons diverses et variées, notamment dans les hôpitaux, et j'y étais.
Quant à l'éducation nationale, cela a été l'un de ses multiples échecs, et il n'est pas la peine d'en rajouter. Probablement, nous en sommes tous coupables,...
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Charles Descours. ... notre société est coupable.
Pourquoi avons-nous échoué, en France, là où d'autres pays ont réussi ? Le fait est là. Arrêtons donc au moins de nous jeter des statistiques à la tête comme si nous n'étions pas tous coupables dans cette affaire !
Moi, je crois que ce qu'a dit notre collègue Claude Huriet est absolument capital. Nous nous sommes efforcés, notamment notre rapporteur, le professeur Francis Giraud, et beaucoup d'intervenants dans la discussion générale hier, d'éviter de déraper sur le terrain idéologique. Oui, aujourd'hui, nous constatons un échec de l'IVG et de la contraception. Bien sûr, des mesures ponctuelles pourraient être prises pour améliorer la situation, notamment pour que les contraceptifs soient remboursés convenablement et que les pilules mini-dosées ne soient pas moins remboursées que les pilules maxi-dosées, sauf à créer un véritable déni de soins pour les femmes qui recourent à ces moyens contraceptifs. Mais, comme le révèle l'enquête de Claude Huriet, des personnes qui ont été des militants de l'IVG entre 1968 et 1970, et qui aujourd'hui approchent de l'âge de la retraite sont inquiètes, nous l'avons tous constaté dans nos départements, à l'idée de devoir prendre en charge, avec les moyens médicaux qui sont les leurs, des interruptions volontaires de grossesse à dix semaines parce que, techniquement, l'acte est non seulement plus compliqué, mais aussi plus risqué.
Comment faut-il évaluer les risques supplémentaires ? Sont-ils importants ou faibles ? Chacun dira ce qu'il voudra à ce sujet, mais ce n'est pas rationnel. L'Académie nationale de médecine, dans son avis que je rappelais hier à la tribune, a insisté sur ces risques supplémentaires qui nécessitent un environnement particulier dont les centres d'orthogénie ne disposent pas toujours compte tenu des moyens qui leurs sont offerts.
Dans l'état actuel des choses, je pense sincèrement qu'il est maladroit de qualifier ce projet de loi d'abord d'interruption volontaire de grossesse puis de contraception. L'habileté, en tout cas le bon ordre des choses, aurait été d'inverser ces termes. Je suivrai donc M. le rapporteur et la majorité de mon groupe, mais il ne s'agit pas pour nous de remettre en cause la loi Veil.
M. Raymond Courrière. Arrêtez vos arguties !
M. Charles Descours. Francis Giraud l'a bien dit hier : la loi Veil, c'est la loi. Il ne s'agit pas de la remettre en cause.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous ne pourriez pas le faire, même si vous le vouliez !
M. Raymond Courrière. Heureusement !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Descours.
M. Charles Descours. J'attends que cessent les interruptions.
M. le président. Vos collègues n'ont pas à vous interrompre.
M. Charles Descours. C'est pourtant bien le cas !
Il est facile de faire de l'idéologie ! Je rappelle que les militantes de cette grande cause dont on parle ont, pour la plupart, accès au savoir et à la contraception. Mais nous avons tous connu, dans notre pratique médicale, des femmes qui ont subi trois ou quatre IVG parce qu'elles n'avaient pas eu une information correcte sur la contraception. Qu'un médecin qui siège dans cet hémicycle, sur quelque banc que ce soit, m'explique qu'il n'a jamais vu de femmes subir trois ou quatre IVG parce qu'elles n'avaient pas été prises en charge correctement !
Aussi, lorsque j'entends dire qu'il faut abandonner l'entretien préalable sous je ne sais quel prétexte idéologique, je réponds que c'est un luxe de femmes qui savent, mais qu'il y a des milliers de femmes qui ne savent pas, or c'est à elles aussi qu'il faut penser ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Raymond Courrière. C'est le Moyen Age !
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je voudrais rappeler à M. Descours que si l'on trouvait, à l'époque de l'examen de la loi Veil, de nombreux militants progressistes dans les rues, on comptait aussi beaucoup de gens de droite opposés à ce texte ! Si la discussion avait lieu aujourd'hui, je ne sais pas si M. Carle, ou M. Chérioux feraient partie de ceux qui l'adopteraient avec enthousiasme.
M. Raymond Courrière. Bravo !
M. Charles Descours. Ce sont des procès d'intention !
M. Jean Chérioux. Mais qu'est-ce que cela veut dire ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je voudrais répondre à Mme Luc et à Mme Dieulangard et, si vous me le permettez, revenir strictement au texte qui nous est soumis.
L'article 2 de ce projet de la loi vise à allonger de dix à douze semaines le délai légal pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse. Je me dois de rappeler que, pour justifier cette mesure, le Gouvernement invoque le problème, réel, des femmes qui partent pour l'étranger.
Mme Odette Terrade. Elles sont 5 000 chaque année !
M. Francis Giraud, rapporteur. Si cette proposition est susceptible de diminuer de moitié le nombre de ces femmes, elle ne résout en rien le sort de celles qui ont d'ores et déjà dépassé le stade de douze semaines !
Quand on propose une mesure, autant qu'elle soit efficace et qu'elle s'adresse à tous !
M. Jean Clouet. Très bien!
M. Francis Giraud, rapporteur. Je soulignerai un second point.
La médecine et, j'allais dire, la physiologie, le développement de la vie depuis la conception jusqu'à la mort ne sont soumis à l'heure actuelle ni aux modes, ni aux idéologies, ni aux majorités politiques...
Mme Hélène Luc. Vous en faites, vous, de l'idéologie !
M. Francis Giraud, rapporteur. Dire qu'il y a une différence formelle entre un délai de dix semaines et un délai de douze semaines relève du domaine de l'anatomie, de l'embryologie mais non de la philosophie ou de la morale.
La commission des affaires sociales quant à elle, avec bon sens, fondant sa position sur le souci de protéger la santé des femmes, s'oppose au dépassement de délai de deux semaines qui est proposé.
Premièrement, ce dépassement ne réglera pas la situation des femmes qui auront dépassé ce délai supplémentaire.
Deuxièmement, les conditions changeant, les conséquences seront bien évidemment modifiées : les risques seront accrus. Bien entendu, sur ce point, chacun donne son opinion, maximaliste ou minimaliste. Nous avons tout de même entendu en commission des personnes, y compris des médecins, je dois le dire, nous déclarer qu'il n'y avait aucune différence entre les deux délais ! C'est vraiment nier la réalité des choses.
Notre position se veut raisonnable et présente l'avantage - nous le verrons tout à l'heure - de se préoccuper, certes dans des conditions qui ne peuvent recueillir l'assentiment général, de toutes les femmes qui auront dépassé le délai de dix semaines.
Pour l'ensemble de ces raisons d'ordre essentiellement médical et de bon sens, nous persistons dans notre position et nous proposons au Sénat de supprimer l'article 1er.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout se joue dans ce choix entre dix semaines ou douze.
Je le répète, et M. Blanc l'a dit hier lui-même avec beaucoup de simplicité et de force : y a-t-il un problème moral à allonger le délai de l'interruption volontaire de grossesse de dix à douze semaines ? Non.
M. Francis Giraud, rapporteur. Non.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Hier soir, nous étions tous d'accord sur un point : il n'y en a pas.
Plusieurs sénateurs du RPR. C'est évident !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Y a-t-il un problème médical à allonger ce délai de dix à douze semaines ? Non, il n'y en a pas.
Y a-t-il un problème technique ?
M. Claude Huriet. Oui !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Oui, monsieur Huriet, il y en a un, et j'ai lu avec attention les documents que vous m'avez remis. J'y reviendrai lorsque j'aurai terminé la première partie de mon exposé.
Lorsque le Sénat aura voté le retour à dix semaines, nous accepterons bien sûr de débattre des propositions de la commission mais tout sera dit ; la messe sera dite, si vous me permettez cette expression !
Vous avez fait référence à la loi Veil, messieurs. J'ai parlé récemment avec Simone Veil, qui m'a déclaré qu'en 1975 le débat était le même, entre des personnes de progrès et des partisans de l'immobilisme.
Certes, en l'occurrence, ce progrès ne fait plaisir à personne, et ne croyez pas que nous pensions trouver une solution au malheur des femmes isolées ou au problème plus général de l'éducation sexuelle ou de la contraception en allongeant le délai autorisé pour l'interruption volontaire de grossesse. Ce n'est pas notre propos.
En fait, nous sommes obligés d'agir à cause de la situation de certaines femmes qu'il faut aider et ne pas pousser à aller en Hollande ou en Angleterre.
Certes, il faut continuer à essayer de réduire - nous sommes tout à fait d'accord sur ce point - le nombre des avortements, qui est excessif dans notre pays - 220 000 - on ne comprend pas pourquoi !
Quoi qu'il en soit, voter ou non l'article 1er, c'est soit essayer d'avancer, soit rester stationnaire - je n'ai pas dit reculer.
Monsieur Huriet, j'en viens à ce que vous proposez.
Certes, entre dix et douze semaines, il y a des différences techniques, dont il faut tenir compte. Mais, à l'appui de votre thèse, ne retenez pas l'argument, mauvais aux yeux du Gouvernement, que nous allons accabler un système qui ne fonctionne déjà pas bien.
Il n'y aurait pas assez de volontaires... Mais qui sont ces volontaires ? Des médecins de ville, des militants, ceux qui justement depuis le début accompagnent les progrès, car ce ne sont pas les médecins qui ont « pignon sur hôpital » qui se consacrent à ces activités que l'on néglige un peu.
Considérez les chiffres que nous avons donnés : 5 000 avortements ; cela fait treize avortements par jour, c'est-à-dire 90 par semaine, dont il faut tenir compte en termes de précautions supplémentaires. Ces avortements seront pratiqués entre la dixième et la douzième semaine de grossesse, avec les précautions médicales et chirurgicales nécessaires. Répartis sur les 95 départements, cela fait un avortement par département dont la gravité éventuelle devra être prise en compte !
Croyez-vous vraiment qu'avec le système existant, qui n'est pas parfait, j'en conviens - il est même mauvais - on ne puisse pas assumer cette charge ? Si l'on avait réagi comme vous, au moment du vote de la loi Veil, que serait-il arrivé ? Vous en parlez beaucoup de cette loi, or - et là je m'adresse à Charles Descours en toute amitié - si l'on se remémore un peu les débats de 1975, on se rappelle qu'il y avait bien sûr une majorité dans la majorité pour soutenir Simone Veil, mais je me souviens aussi de cette fameuse photo de Mme Veil, accablée par les sarcasmes, voire les insultes. En tout cas, il n'y a pas eu de conflit à l'intérieur de la gauche, qui, elle, a voté massivement. Oui, c'était déjà un débat de société, entre le conformisme et le progrès. Souvenons-nous en !
En tout cas, monsieur Huriet, à ce moment-là, en 1975, aucun moyen n'était disponible ; il a fallu tout inventer et cela ne vous a pas empêché, vous-même, de voter cette loi.
Aujourd'hui, il faut développer les moyens existants et ne pas, sous le prétexte qu'ils sont insuffisants techniquement, refuser un progrès. Si l'on raisonnait ainsi, on ne ferait plus jamais rien : il faudrait attendre d'avoir construit un système destiné à l'application d'une loi pour faire voter cette dernière !
Je le répète, il s'agit d'un débat entre le progrès et le conformisme.
M. Claude Huriet. La prudence !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. S'il s'agissait de prudence, je pourrais partager ce sentiment ; le conformisme, lui, je ne peux l'approuver. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Principe de précaution !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2 et 58, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
Mme Hélène Luc. Il n'y a pas beaucoup de femmes à droite !
M. Claude Huriet. Cela viendra !
M. Raymond Courrière. Obscurantisme !
M. Jean Chérioux. Réflexion injuste !
M. le président. En conséquence, l'article 1er est supprimé et l'amendement n° 23 n'a plus d'objet.

Article additionnel avant l'article 2



M. le président.
Par amendement n° 44, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposant d'insérer, avant l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« La première phrase de l'article L. 2212-1 du même code est ainsi rédigée : "La femme enceinte peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse". »
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement s'inscrit parfaitement dans la logique du projet de loi, qui vise notamment à rénover la loi de 1975 sur l'interruption volontaire de grossesse. Il est en cohérence avec la volonté affirmée de reconnaître l'interruption volontaire de grossesse comme un droit de toutes les femmes. Ce droit, si nous voulons le confirmer aujourd'hui, ne peut plus être conditionné à une situation de détresse.
Rappelons que déjà, en 1975, Mme Simone Veil avait pris soin de préciser que seule la femme était apte à apprécier sa détresse.
Si la notion, imprégnée de précepte moral, avait été alors inscrite dans la loi pour permettre son adoption, elle ne peut plus être acceptable aujourd'hui.
En effet, les raisons qui incitent une femme à interrompre sa grossesse lui appartiennent. Cette décision personnelle relève de son droit propre et le plus intime, sans que l'on puisse lui demander de fournir des explications. Nul ne peut se poser en juge ni s'arroger le droit de lui rappeler ce qui devrait légitimer sa décision.
En conséquence, toute référence à une situation de détrese en tant que justification d'une IVG se devait d'être supprimée.
L'Assemblée nationale y a procédé en rétablissant l'intitulé du chapitre tel qu'il est issu de la loi de 1975 et en supprimant le rappel fait par le médecin de la « limitation de l'IVG au cas où la femme enceinte se trouve placée par son état dans une situation de détresse ».
Par cet amendement, il ne s'agit donc que de compléter un travail initié en apportant une correction matérielle à ce qui n'est qu'un oubli.
Le groupe socialiste du Sénat, au nom de la reconnaissance d'un droit effectif des femmes dans ce domaine, vous demande de l'adopter. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui tend à supprimer la notion de situation de détresse prévue par la loi Veil.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, je l'ai déjà dit tout à l'heure.
M. Raymond Courrière. Au nom de la liberté.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - Dans la deuxième phrase de l'article L. 2212-1 du même code, les mots : "avant la fin de la dixième semaine de grossesse" sont remplacés par les mots : "avant la fin de la douzième semaine de grossesse". »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers colègues, pour ma part, j'avais choisi une autre voie qui est traduite dans mon amendement n° 27.
En effet, tout au long des travaux préparatoires à l'élaboration de la loi Veil auxquels j'ai participé, il a été considéré que tous les moyens de soutien psychologiques, sociaux et médicaux qui seraient mis en place dès la promulgation de la loi permettraient d'accueillir avec compassion et chaleur les femmes enceintes dans la détresse, qui éprouvent bien souvent une grande solitude.
Or nous savons qu'actuellement un certain nombre de femmes ne parviennent pas, dans les délais qu'elles voudraient respecter, à obtenir rendez-vous et intervention.
Ces femmes ne sont donc pas coupables mais victimes, le dépassement du délai étant dû principalement aux dysfonctionnements reconnus des services de l'Etat, tant en ce qui concerne l'application de la loi de 1976 sur la contraception, sur l'éducation, sur l'information qui est restée pratiquement lettre morte, qu'en ce qui concerne l'application de la loi Veil.
La loi Veil prévoyait son propre réexamen dans un délai de cinq ans. Un amendement prévoyait lui, un délai de trois ans pour que toutes les structures d'accueil nécessaires soient enfin mises en place pour répondre aux demandes.
C'est la raison pour laquelle, dans mon amendement n° 27, je propose que le délai autorisé pour pratiquer l'IVG soit porté à douze semaines de grossesse à titre transitoire, pendant une période de trois ans à compter de la date de promulgation de la loi que nous sommes en train d'élaborer aujourd'hui.
M. le président. La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le principe de l'interruption volontaire de grossesse est aujourd'hui acquis ; nous n'y reviendrons pas.
M. Claude Estier. Tout de même !
M. Jean-Guy Branger. J'ai été un ardent défenseur de la loi Veil, par conséquent, je suis très à l'aise pour en parler.
A ce jour, je pose la question de l'allongement légal du délai permettant de pratiquer l'avortement.
Dans l'article 2 du projet de loi, le Gouvernement a prévu de prolonger ce délai afin que les femmes puissent demander une IVG jusqu'à douze semaines de grossesse au lieu de dix actuellement.
Est-ce un moyen de résoudre le cas des 5 000 femmes - en fait c'est de cela qu'il s'agit - devant se rendre à l'étranger, dans des pays où la législation est plus souple pour y subir une IVG qui serait devenue illégale en France ?
Certes, allonger le délai permettra d'éviter au moins une partie de ces voyages forcés, qui ne font qu'ajouter au coût moral et financier de l'IVG.
Cependant, comme notre rapporteur l'a dit tout à l'heure, cet allongement ne concernera que 3 000 femmes. M. Raymond Courrière. Ce n'est déjà pas mal !
M. Jean-Guy Branger. C'est pourquoi il me semble que le principal aspect du projet du Gouvernement n'apporte qu'une solution partielle, et non une véritable réponse, à la détresse des femmes. Elle ne permettra pas de mettre un véritable terme à leur souffrance.
Tout à l'heure, quelqu'un a parlé d'éthique des femmes, de droit des femmes... Je dirai à nos collègues femmes que nous, les hommes, sommes aussi concernés affectivement et en conscience.
Monsieur le ministre, nous avons siégé longtemps ensemble à l'Assemblée nationale et vous connaissez parfaitement mon point de vue. Moi, je revendique le droit de dire que les hommes sont autant concernés. Bien sûr, nous sommes profondément attachés aux droits des femmes, et celles-ci ont le droit de choisir, elles ont leur éthique. D'ailleurs, la femme, c'est plus grand que l'homme ! C'est vrai !
Mme Hélène Luc. Si, c'est vrai, il faut la laisser choisir !
M. Jean-Guy Branger. Cela étant, nous sommes à même de partager, à la fois sur un plan affectif et du point de vue de l'éthique, les préoccupations des femmes. Cela, je tenais à le dire ici en cet instant.
Le Gouvernement nous propose d'aider certaines femmes, mais son texte ne s'attaque pas au problème de fond, et celui-ci reviendra de manière récurrente devant nos assemblées.
J'ai entendu ce que vous avez répondu tout à l'heure à M. Huriet, monsieur le ministre. A votre place, je dirais certainement la même chose, j'en conviens. Mais convenez qu'à la mienne vous tiendriez exactement les mêmes propos que ceux que je tiens en cet instant.
Il ne fait pas de doute que, dans quelques années, la question d'un allongement de deux semaines supplémentaires - voire plus - se posera à nouveau, et cela selon l'avis même des médecins. (Protestations sur les travées socialistes.)
Mais si, mes chers collègues ! Je sais bien que ce n'est pas facile à accepter, mais c'est la vérité ! En fin de compte, rien, ou presque, n'aura été fait pour réduire le nombre colossal d'avortements pratiqués chaque année en France.
Pourquoi adopter une disposition qui ne révèle qu'une fuite en avant, comme l'a souligné très justement Francis Giraud, notre excellent rapporteur ?
Donnons donc plutôt de réels moyens pour que le dispositif mis en place par la loi Veil soit enfin appliqué ! Sur ce point, nous sommes tous responsables. Je ne critique pas tel gouvernement plutôt que tel autre : tous les gouvernements ont échoué dans l'application de la loi Veil.
La plupart des praticiens entendus par la commission ont mis l'accent sur ce manque évident de moyens, à la fois en matière de structures d'accueil, d'équipement et de personnels pratiquant les IVG.
C'est ainsi qu'un certain nombre d'IVG tardives résultent des difficultés que connaissent divers centres d'orthogénie pour accueillir et prendre en charge rapidement les femmes concernées.
Un autre point est également à souligner. Les médecins s'accordent à dire que la nature de l'intervention change au-delà de dix semaines. Des aménagements techniques et une formation adaptée des personnels médicaux et non médicaux seront donc nécessaires. Mais surtout, l'acte chirurgical deviendra moralement plus éprouvant pour le praticien. Il ne sera pas étonnant, dès lors, de constater une désaffection des jeunes médecins - on l'observe dès à présent monsieur le ministre, vous le savez - pour cette activité déjà peu valorisante, parfois même méprisée, alors qu'elle est pourtant nécessaire pour que la loi soit appliquée.
Que faire si des médecins qui pratiquent aujourd'hui des IVG mettent en avant, demain, la clause de conscience pour refuser d'intervenir sur des grossesses de douze semaines ? Une pénurie de praticiens pourrait créer des difficultés supplémentaires, voire - et je ne le souhaite absolument pas ! - être à l'origine d'avortements tardifs.
M. Raymond Courrière. Comment font-ils, alors, dans les autres pays ?
M. Jean-Guy Branger. Plutôt que de demander aux parlementaires d'adopter ce nouveau délai, il appartient au Gouvernement et aux pouvoirs publics d'une manière générale de renforcer les moyens mis en oeuvre par la loi Veil, afin qu'elle puisse être appliquée dans toute - je dis bien toute - sa dimension.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements pouvant faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par M. Francis Giraud, au nom de la commission.
L'amendement n° 59 est présenté par M. Carle.
Tous deux tendent à supprimer l'article 2.
Par amendement n° 27, M. Neuwirth propose de rédiger comme suit l'article 2 :
« L'article L 2212-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 2212-1. - La femme enceinte que son état placerait dans une situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse, qui ne peut être pratiquée qu'avant la fin de la dixième semaine de grossesse. Le délai pourra être porté à douze semaines de grossesse, à titre transitoire, pendant une période de trois ans à compter de la date de promulgation de la loi n° du relative à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception et de la mise en oeuvre complète des articles L. 2214-2 et L. 2311-3 du présent code. Entre la dixième et la douzième semaine, l'interruption de grossesse ne peut intervenir que dans les services pratiquant des actes de chirurgie gynécologique. »
Par amendement n° 45, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
A. - De compléter l'article 2 par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Le même article est complété par un second alinéa ainsi rédigé :
« L'interruption volontaire d'une grossesse peut être pratiquée au-delà de douze semaines si la femme enceinte en a, pendant le délai légal, déjà formulé la demande auprès du personnel d'un établissement médical, social ou d'information et d'éducation familiale. »
B. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 3.
M. Francis Giraud, rapporteur. Nous nous sommes largement exprimés sur cet article dans le rapport de la commission des affaires sociales et dans la discussion générale. Je n'y reviens donc pas.
Je me permettrai toutefois d'interroger M. le ministre : quelle signification donne-t-il à l'association qu'il a faite entre l'interruption volontaire de grossesse et la notion de progrès ? Si dans son esprit, l'IVG correspond à un progrès, dans le mien, elle correspond plutôt à la nécessité de secourir les femmes en détresse. Autrement dit, si, pour le Gouvernement, l'allongement ne pose pas en soi de problème, pourquoi n'a-t-il pas d'emblée proposé quatorze semaines pour traiter, au moins, les cas de légitime détresse des femmes qui dépassent les délais ?
Pour sa part, la commission des affaires sociales, confrontée à un problème, a essayé de le traiter en termes de santé, de santé publique et surtout de santé de chaque femme concernée. Voilà pourquoi nous proposons de supprimer l'article 2.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 59.
M. Jean-Claude Carle. J'ai eu l'occasion de développer mon argumentation lors de la discussion générale.
Cependant, je souhaite répondre à M. Lagauche, qui, d'une certaine manière, m'a mis en cause.
Certes, en 1975, je n'étais pas parlementaire ; mais, si je l'avais été, j'aurais voté la loi Veil. C'est pourquoi, aujourd'hui, je souhaite, comme M. le rapporteur, qu'elle soit appliquée dans toute sa dimension, ainsi que l'a dit M. Branger.
Notre position s'appuie sur des convictions profondes, que nous manifestons dans un combat permanent visant à concilier l'éthique et la prise en compte de la réalité.
L'éthique veut que toutes les femmes soient égales devant la vie et le droit de la donner ou non.
La réalité, c'est que, en fonction des origines sociales, culturelles ou ethniques, ce droit est très souvent bafoué.
Voilà le fondement de mes convictions, et peu m'importe d'être traité de progressiste ou de conformiste !
M. le président. La parole est à M. Neuwirth, pour défendre l'amendement n° 27.
M. Lucien Neuwirth. Je l'ai pratiquement défendu tout à l'heure en intervenant sur l'article.
Je propose que le délai puisse être porté à douze semaines de grossesse à titre transitoire pendant une période de trois ans à compter de la promulgation de la loi, étant entendu que, entre la dixième et la douzième semaine, l'interruption de grossesse ne peut intervenir que dans les services pratiquant des actes de chirurgie gynécologiques, tant il est vrai que, à partir de la dixième semaine, l'acte médical change de nature, car l'on passe de l'état embryonnaire à l'état foetal.
M. le président. La parole est à Mme Printz, pour défendre l'amendement n° 45.
Mme Gisèle Printz. En exposant cet amendement, je pense à ce que peuvent vivre dans leur tête, dans leur corps et dans leur vie quotidienne certaines femmes lorsqu'elles se dirigent vers une interruption volontaire de grossesse.
Que ceux qui pensent - et ils le disent parfois - qu'il est aisé d'avorter, allant jusqu'à insinuer qu'une femme pourrait abuser de ce droit, prenne la peine, au moins une fois dans leur vie, d'être les témoins silencieux de ce que représente cette démarche.
S'engager dans cette voie pour une femme relève, dans nombre de cas, d'un véritable parcours du combattant, où il faut surmontr les obstacles les uns après les autres et surtout aller vite, car les délais courent. Dans ce parcours, la prise de décision et la demande ne constituent que les toutes premières étapes.
Bien évidemment, plus une femme est fragilisée ou dans une situation socialement défavorisée, plus les difficultés à affronter seront lourdes. Car il existe toute une série d'interrogations et de conditions matérielles qui peuvent rendre malaisé l'accomplissement des démarches obligatoires dans les délais prévus par la loi : où se diriger ? Où se renseigner ? Comment se déplacer ? Comment se libérer de son travail pour se rendre aux consultations ? Comment s'organiser pour que ses enfants soient gardés pendant l'intervention ?
A ces difficultés s'ajoutent les carences et les dysfonctionnements du service public hospitalier : longue attente pour obtenir un rendez-vous, périodes critique de saturation des services...
Pour toutes ces raisons, et pour éviter que des femmes ne soient les victimes d'éléments matériels qui les conduiraient à dépasser le délai légal, nous proposons, par cet amendement, qu'elles soient prises en charge dès lors qu'elles en auront fait la demande pendant ce délai.
Nous avons bien conscience que le texte présenté par le Gouvernement apporterait, s'il était convenablement appliqué, des améliorations remarquables tant au regard de la contraception qu'à celui de l'amélioration de l'accès à l'IVG. Cependant, lorsqu'on entend ce qui se dit sur ces travées et lorsqu'on sait les réticences et les blocages qui persistent, on ne peut s'empêcher d'éprouver quelques appréhensions.
Pour cette raison, nous demandons au Gouvernement qu'il nous rassure sur les points que nous avons évoqués et sur la bonne mise en oeuvre du projet de loi. M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 59, 27 et 45 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est évidemment favorable à l'amendement n° 59.
En ce qui concerne l'amendement n° 27, la commission proposant de supprimer l'article, ce qui revient à maintenir le délai légal à dix semaines, si elle est suivie par le Sénat, cet amendement n'aura plus d'objet.
S'agissant de l'amendement n° 45, nous souhaitons entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 3 et 59 ainsi que sur les amendements n°s 27 et 45 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Sur les amendements n°s 3 et 59, je crois que tout a été dit. La messe est dite ! (Sourires.)
M. Jean Delaneau, président de la commission. Nous en sommes aux vêpres ! (Nouveaux sourires.)
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Plus sérieusement, je voudrais répondre à M. le rapporteur à propos du progrès.
Je me suis mal exprimé. Je pense que l'on peut effectivement considérer comme un progrès social, mais un progrès en quelque sorte malencontreux, le fait d'étendre - temporairement, je l'espère - de dix à douze semaines le délai légal pour pratiquer une IVG. Ce n'est évidemment pas un progrès au sens plein du terme. Le progrès véritable, ce serait une utilisation plus large de la contraception dans notre pays. Ce serait surtout que les femmes n'aient plus à recourir à une intervention qui est très pénible pour elles, mais aussi pour ceux qui la pratiquent, et j'en sais quelque chose, je vous l'ai dit hier soir.
M. Jean-Guy Branger. Très juste !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Cependant, il n'est pas de la seule responsabilité des femmes que ce « progrès » disparaisse. Où sont les hommes dans cette affaire ? Quelle est leur responsabilité dans la grossesse ?
Mmes Hélène Luc et Odette Terrade. Exactement !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Que se passe-t-il lorsqu'ils s'en lavent les mains et qu'ils laissent ces femmes, souvent issues de familles en difficulté, se débrouiller dans la solitude la plus effrayante, avec au mieux, de temps en temps, une amie et aussi, bientôt peut-être, ce fameux adulte pour les aider ? (Mme Printz applaudit.)
Non, ce n'est pas un progrès ! C'est une nécessité en quelque sorte morale, sociale, mais que ce « progrès » disparaisse, et j'en serai le premier satisfait, tout comme vous. Je m'étais donc mal fait comprendre.
Le progrès ne sera pas de prolonger le délai jusqu'à vingt-deux semaines, comme c'est le cas en Hollande ; mais il est vrai, répétons-le, que la politique de contraception est un succès dans ce pays.
Je suis d'accord avec votre amendement n° 27, monsieur Neuwirth. Je vous le dis sincèrement, bien que j'en sois un peu gêné, car, théoriquement, je devrais dire le contraire ! (Sourires.) Simplement, à la dernière phrase de l'amendement : « Entre la dixième et la douzième semaine, l'interruption de grossesse ne peut intervenir que dans les services pratiquant des actes de chirurgie gynécologique », j'avais envie d'ajouter : « à proximité », en prévision d'incidents possibles. Mais ce serait encore une manière d'édulcorer votre texte ! Il est nécessaire, compte tenu des difficultés qui peuvent intervenir entre la dixième et la douzième semaine, de donner véritablement à ces femmes, au moins, toutes les garanties de sécurité.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, en réponse à Claude Huriet, il doit être possible de trouver suffisamment de services comptant la chirurgie gynécologique au nombre de leurs spécialités pour assurer un avortement de ce type par semaine et par département - répartition géographique bien sûr très théorique !
Personnellement, je recommande donc la sagesse dans l'appréciation de l'amendement n° 27.
En revanche, l'amendement n° 45, présenté par Mme Printz, me gêne beaucoup. Certes, je comprends très bien ce que vous voulez dire, madame le sénateur. Si la femme, consciente de l'ensemble du problème, a fait cette démarche dans un délai raisonnable, peut-être même avant dix semaines, alors, effectivement, pourquoi la pénaliser ? Mais il faudrait insister avec force auprès des centres orthogéniques pour que ce type de cas soient traités dans les temps. Le risque de dérive pourrait en effet être terrible : aujourd'hui, on dira douze semaines, demain quatorze, puis seize ou vingt... On risquerait d'aboutir à une situation qui serait contraire à ce que souhaite le Gouvernement.
M. Jean Delaneau, président de la commission. C'est ce que nous nous tuons à dire !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Pardonnez-moi, madame Printz, mais je demande le rejet de l'amendement n° 45.
M. le président. L'amendement n° 45 est-il maintenu, madame Printz ?
Mme Gisèle Printz. Compte tenu des éléments que nous a apportés M. le ministre, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 45 est retiré.
Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 3 et 59.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. M. le ministre a évoqué les difficultés qui se posent lorsqu'on veut allonger le délai de dix à douze semaines ; il a également abordé le problème des hommes, qui ne prennent pas suffisamment leurs responsabilités, celui de l'attitude de l'Etat, qui, depuis tant d'années, ne consacre pas suffisamment de moyens à la contraception et ne propose pas d'accueil adapté aux femmes qui souhaitent subir une interruption volontaire de grossesse.
M. Carle et M. le rapporteur ont insisté sur une autre difficulté : pourquoi faire passer le délai légal de dix à douze semaines alors que certaines femmes continueront de se rendre à l'étranger pour y subir une IVG ? Ce n'est pas juste.
Pour ma part, je vous proposerai une solution - dont les modalités d'application restent à déterminer - pour sortir du débat stérile sur les délais légaux et réfléchir à une différenciation des structures en fonction des différents délais médicaux, afin d'adapter celles-ci à la technique médicale utilisée. Cette logique a commencé d'être introduite dans le texte par la mesure prévoyant dans un futur proche la délivrance du RU 486 en ambulatoire.
Jusqu'à dix semaines de grossesse - j'en reste à dix semaines, puisque l'on a des craintes entre la dixième et la douzième semaine -, les IVG seront pratiquées dans tous les établissements qui les assurent déjà. Au-delà, elles seront effectuées dans des établissements spécialisés, techniquement adaptés, volontaires et limités en nombre, par des équipes pluridisciplinaires formées à cette pratique et également volontaires. Je rejoins là les objectifs formulés par le Gouvernement. L'habilitation à cette pratique d'un centre d'orthogénie par grande région permettrait de répondre à la demande de toutes les femmes hors délais.
Ainsi, les structures répondant à la demande seraient différenciées en fonction des divers délais médicaux. Le cadre serait donc le suivant : l'IVG serait pratiquée en ambulatoire par délivrance du RU 486 avant cinq semaines de grossesse ; l'hospitalisation se ferait dans tout établissement qui pratique des IVG entre six et dix ou douze semaines de grossesse ; enfin, l'hospitalisation aurait lieu dans un établissement spécialisé au-delà de dix ou douze semaines.
L'avortement est un droit pour les femmes : il doit donc être accessible à toutes celles qui en ont besoin. L'objectif est bien de ne plus laisser sur le bord du chemin les plus fragiles d'entre elles, qui, pour des raisons diverses, sont amenées à dépasser le délai légal, qu'il soit fixé à dix ou à douze semaines de grossesse. Il est inadmissible que l'on continue, y compris après le vote du présent projet de loi, à les envoyer à l'étranger en toute hypocrisie et en fermant les yeux sur leurs difficultés ou leur détresse.
M. Jean-Pierre Fourcade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Le débat qui s'est instauré depuis une heure et demie est tout à fait instructif. Tout comme le rapporteur de la commission des affaires sociales, j'ai été choqué par le terme de « progrès » utilisé par M. le ministre délégué à la santé, car, vraiment, ce n'est pas un progrès !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Mais je m'en suis expliqué !
M. Jean-Pierre Fourcade. Alors que le Gouvernement reconnaît lui-même, comme vous venez de le dire, monsieur le ministre, que l'allongement du délai de dix à douze semaines ne règle pas nombre de problèmes et n'apporte que des solutions partielles, tout en augmentant la gravité médicale de l'acte d'IVG, je me demande pourquoi le projet de loi qui nous a été soumis n'a pas opté pour une autre voie qui aurait consisté à élargir ce qui avait déjà été fait dans le cadre de la loi Veil pour l'interruption de grossesse pratiquée pour motif thérapeutique. On s'est contenté d'en changer la dénomination et de la qualifier de « médicale ».
La commission a déposé un excellent amendement qui vise à ajouter aux motifs de l'interruption pour raison médicale la poursuite de la grossesse qui met en péril la santé de la femme, y compris « la santé psychique, appréciée notamment au regard de risques avérés de suicide ou d'un état de détresse consécutif à un viol ou à un inceste ». Ce sont là les cas concrets que nous voyons, nous, les maires, à notre propre consultation - qui n'est pas médicale ! Ce sont les sujets et les problèmes que nous abordons.
Plutôt que d'allonger le délai de deux semaines pour toutes les femmes, avec les risques qui en découlent, il aurait mieux valu travailler sur l'élargissement du champ d'application de l'article 8 bis et sur la possibilité de pratiquer plus d'avortements.
En effet, monsieur le ministre, vous nous présentez un dispositif, que vous défendez avec le talent que l'on vous reconnaît, mais il s'agit d'un texte que vous avez repris « au vol » !
M. Hilaire Flandre. Ce n'est pas son enfant !
M. Jean-Pierre Fourcade. Et son grand défaut, c'est que, avec l'allongement du délai légal, avec la supression de toutes les formalités accessoires, il s'apparente à la transformation de l'IVG en mode normal de contraception.
Mme Hélène Luc. Absolument pas !
M. Jean-Pierre Fourcade. C'est cela qui est insupportable, c'est cela qui ne peut être considéré comme un progrès, qui est au contraire une déviation !
Si vous aviez davantage travaillé l'idée de l'élargissement de l'avortement pour motif médical, vous auriez trouvé beaucoup plus facilement un consensus sur l'ensemble des travées. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste.)
Mme Odette Terrade. Ce sont la commission et le pouvoir médical qui décident !
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. L'observation que je vais faire est sans doute superfétatoire pour expliquer mon vote, car j'avais déjà bien d'autres raisons de voter l'amendement de la commission, mais elle me paraît nécessaire.
Je commencerai, à l'instar de quelques-uns de nos collègues - puisque, sur les bancs de la gauche, il y a parfois des procès en obscurantisme !...
M. Raymond Courrière. Ah oui ! Et on le maintient !
M. Michel Caldaguès. ... par préciser que, si je n'ai pas voté la loi Veil - je n'étais pas parlementaire à l'époque - j'ai néanmoins voté moi aussi, ici même, sa pérennisation.
M. Raymond Courrière. Quel exploit !
M. Michel Caldaguès. Je veux ajouter ceci : quand on a écouté le rapporteur, notre ami Francis Giraud, décrire hier dans des termes médicaux aussi précis que possible dans un pareil débat, mais aussi en homme sensible, la différence entre dix semaines et douze semaines de grossesse, comment ne pas être choqué d'entendre le ministre délégué à la santé qualifier cette même différence de « technique » ! J'ai cru qu'il avait fait un lapsus. Mais pas du tout, il l'a répété !
Monsieur le ministre, je dois vous dire que ce propos m'a particulièrement choqué.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je ne comprends pas pourquoi.
M. Raymond Courrière. Ils ont l'âme et le coeur sensibles !
M. Michel Caldaguès. L'idée que je me fais du ministre délégué à la santé n'est pas celle d'un simple mécanicien du corps, elle est celle d'un homme qui doit aussi se situer au niveau de la morale.
M. Raymond Courrière. Il faut les ménager, ils sont sensibles !
M. Michel Caldaguès. Or, il devrait le faire ici, si l'on songe qu'un débat comme celui que nous menons, quel que soit le sens de notre vote, devrait nous toucher au plus profond de notre sens moral et de notre sensibilité. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière. Tout cela, c'est pour noyer le poisson !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Permettez-moi, monsieur Caldaguès, de ne pas être d'accord avec vous...
M. Michel Caldaguès. Je l'espère bien !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. ... et de vous le dire avec force.
J'ai fait référence à un débat auquel vous n'avez sans doute pas assisté. Si vous l'avez fait, corrigez-moi.
Les paroles que je citais étaient celles qu'a prononcées hier soir l'un de vos collègues, médecin lui-même, M. Paul Blanc. Alors, s'il vous plaît, pour les reproches que vous avez à faire, adressez-vous à lui, et non pas à moi!
M. Michel Caldaguès. Vous avez repris ses propos à votre compte !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Non, monsieur ! Je les ai cités parce que je suis d'accord avec lui, mais il s'agissait d'une citation exacte : « Y a-t-il un problème moral ? Non ! Y a-t-il un problème médical ? Non ! Y a-t-il un problème technique ? Oui ! », a dit ce médecin sur vos travées.
Je vous dirai pourquoi c'est vrai - et pas d'accusation d'indignité morale, s'il vous plaît, ce n'est pas mon genre. J'ai dit suffisamment à quel point il me déplaisait, en effet, d'avoir ainsi à « progresser » - et, monsieur Fourcade, je me suis expliqué sur le mot « progrès ».
M. Michel Caldaguès. On relira le procès-verbal !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Peut-être me suis-je mal fait comprendre. Mais, pour moi, c'est un progrès nécessaire du point de vue social ; sinon, que faire de ces femmes ? Ne me mettez pas en colère !
Mme Odette Terrade. Eh oui !
M. Guy Fischer. Ce sont 5 000 femmes !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Dans toutes vos propositions, qu'est-il prévu pour ces 5 000 femmes ? (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.) Qu'en fait-on ? Où les envoie-t-on ?
C'est très joli d'appliquer les lois. Mais il faut savoir les modifier quand elles ne sont plus adaptées ; il faut savoir revenir un peu en arrière, ou aller de l'avant, je ne sais pas, et prendre en charge ces femmes !
M. Guy Fischer. Ce n'est plus du surplace ! Là, nous reculons d'un quart de siècle !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le mot « technique », monsieur, n'est pas péjoratif dans ma bouche. En aucun cas ! Il vous a peut-être choqué parce que vous n'avez pas compris en quel sens je l'entendais, mais il n'était pas péjoratif.
M. Michel Caldaguès. Je ne suis pas le seul à avoir été choqué !
Mme Hélène Luc. C'est tout le projet qui vous choque, nous sommes bien d'accord !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Eh bien, monsieur, vous êtes choqué, et moi, j'insiste : ce n'est pas choquant.
M. Michel Caldaguès. Cela ne se résume pas à de la technique !
M. Raymond Courrière. C'est de l'obscurantisme !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Non, monsieur ! Ce n'est pas choquant, et je vais vous dire pourquoi : justement, nous entourons cet allongement du délai - et je viens de tomber d'accord avec M. Neuwirth qu'il fallait le faire - des précautions nécessaires sur le plan médical, en termes d'anesthésie et de chirurgie éventuelle. Ce n'est pas choquant ! Il s'agit, en effet, d'un problème technique qu'il faut résoudre et non pas d'un problème moral pour les médecins, qui peuvent toujours faire jouer la clause de conscience. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Raymond Courrière. Très bien ! Continuez, ne vous laissez pas impressionner !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Mon propos sera très bref ; je ne reprendrai pas la discussion.
Je relèverai simplement, monsieur le ministre, votre non-réponse, à l'instant, à la demande formulée par Mmes Campion et Dieulangard, qui s'exprimaient au nom du groupe socialiste, à propos de l'amendement n° 45, sur ce problème de l'interruption volontaire de grossesse.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement a été retiré !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Il l'a été après la réponse ou, plutôt, la non-réponse de M. le ministre !
M. Raymond Courrière. Mais, si elles sont satisfaites de cette réponse ?
M. Jean Delaneau, président de la commission. Cette non-réponse est un terrible aveu : le texte tel qu'il nous vient de l'Assemblée nationale conduit à une impasse. (Protestations sur les travées socialistes.) Et c'est parce que nous avons eu conscience de cette impasse que nous avons cherché le moyen d'en sortir.
Je le répète, la proposition formulée par la commission des affaires sociales est meilleure, même si elle n'est pas parfaite. Notre amendement peut certainement faire l'objet de critiques, mais il a au moins l'avantage d'éviter l'impasse où mène le texte dans son état actuel. (M. Jean-Louis Lorrain applaudit.)
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je ne voterai pas cet amendement. Mais je tiens à dire, monsieur le ministre, que vous vous êtes laissé emporter, ce qui est rare chez vous, et que vous avez prononcé des paroles que vous regrettez certainement.
Vous prétendez que la commission des affaires sociales ne répond pas au problème des 5 000 femmes contraintes, chaque année, de se rendre à l'étranger pour subir une IVG.
Ce n'est pas vrai : il existe une solution médicale, et vous semblez l'oublier. Ce n'est pas parce que nous refusons l'IVG telle que vous l'envisagez et que nous proposons une autre solution que nous rejetons ces personnes dans les ténèbres extérieures ! C'est pourtant ce que vous avez laissé entendre.
Par honnêteté vis-à-vis de notre rapporteur, il était nécessaire que je le souligne.
M. Claude Huriet. Exact !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 3 et 59, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est supprimé et l'amendement n° 27 n'a plus d'objet.
Mme Hélène Luc. La commission des affaires sociales, qui avait montré un visage un peu progressiste, vient de faire un progrès à reculons ! C'est très grave !

4

NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi organique modifiant la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale.
La liste des candidats établie par la commission des lois a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jacques Larché, Christian Bonnet, Patrice Gélard, Pierre Fauchon, Paul Girod, Simon Sutour et Mme Nicole Borvo.
Suppléants : MM. Robert Badinter, Jean-Pierre Bel, Guy-Pierre Cabanel, Jean-Patrick Courtois, Jean-Jacques Hyest, Lucien Lanier et Henri de Richemont.

5

interruption volontaire de grossesse
et contraception

Suite de la discussion et adoption
d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. Dans la discussion du projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception, nous en sommes parvenus à un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 3.

Article additionnel avant l'article 3



M. le président.
Par amendement n° 81, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger proposent d'insérer, avant l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« La seconde phrase de l'article L. 2212-1 du code de la santé publique est complétée in fine par les mots : " dans tout établissement où sont effectuées des interruptions volontaires de grossesse ". »
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Il s'agit de poursuivre la logique de différenciation des structures en fonction des techniques médicales, introduite dans le texte à travers l'article prévoyant des IVG en médecine ambulatoire par une délivrance du RU 486.
Cet amendement précise le type d'établissements dans lesquels ont lieu les IVG, à savoir dans tous établissemens où sont actuellement effectuées des interruptions volontaires de grossesse si l'IVG est pratiquée avant la fin de la douzième semaine de grossesse, afin de permettre au-delà de ce délai la pratique de l'IVG dans des établissements spécialisés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Pour comprendre cet amendement, il faut se référer à l'amendement n° 83, qui vise à insérer un article additionnel après l'article 7 bis. En l'occurrence, la commission émet un avis très défavorable car l'adoption de cet amendement reviendrait à reconnaître le droit à l'avortement sans limite de délai.
M. Serge Lagauche. Oh là là !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Chaque fois que j'exprime mon embarras, on me rabroue. Mieux vaut ne pas être honnête ! (Sourires.)
M. Raymond Courrière. Ils ont le coeur sensible !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Cet amendement ressemble beaucoup au choix des établissements tel qu'il a été proposé par M. Neuwirth. Toutefois, un point me choque : cela signifie-t-il que l'IVG sera pratiqué au-delà des douze semaines ?
M. Hilaire Flandre. Oui, c'est clair !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Si vous me confirmez que tel sera bien le cas, monsieur Lagauche, je ne peux que demander au Sénat de rejeter cet amendement.
M. Hilaire Flandre. C'est écrit en toutes lettres !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 81.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Il ne s'agit pas de permettre la pratique de l'IVG au-delà du délai de douze semaines. Cet amendement vise simplement à introduire une distinction entre établissements afin que l'IVG, qui sera pratiquée au-delà de ce délai ait lieu dans des établissements spécialisés. D'où la précision que nous proposons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - Le deuxième alinéa de l'article L. 2212-2 du même code est complété par les mots : "ou, dans le cadre d'une convention conclue entre le praticien et un tel établissement, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat". » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 3



M. le président.
Par amendement n° 80, M. Seillier propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa (4°) de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans chaque département, il est créé, à l'initiative du service d'aide sociale à l'enfance du conseil général, un répertoire départemental des aides économiques, des lieux d'accueil et d'hébergement, des associations et organismes susceptibles d'apporter une aide morale ou matérielle aux femmes enceintes en difficulté. Il doit être disponible dans tous les établissements dans lesquels sont pratiquées les interruptions volontaires de grossesse, dans les centres de consultation ou de conseil familial, dans les centres de planification ou d'éducation familiale et dans les mairies. »
La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. En supprimant l'article 3 bis, la commission rétablit les dispositions actuellement en vigueur concernant le dossier-guide, qui ont été introduites par la loi de 1975. Néanmoins, s'agissant des responsabilités du conseil général en matière d'aide sociale, il n'est pas tenu compte de l'évolution de la législation qui résulte de la loi du 6 janvier 1986. Cette loi « adaptant la législation sanitaire et sociale aux transferts de compétences en matière d'aide sociale et de santé » comporte une sous-section III intitulée « Entretien et hébergement des mineurs et des mères isolées avec leurs enfants », dont l'article 46, qui dispose que « sont pris en charge par le service d'aide sociale à l'enfance sur décision du président du conseil général » comprend un alinéa 4° ainsi rédigé : « ... Les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique. »
Mon amendement permet de préciser la responsabilité d'information en complément du dossier-guide dans les départements, ce qui est désormais à la charge du président du conseil général, dans le cadre de l'aide sociale à l'enfance.
La rédaction qui pourrait être votée par le Sénat sur proposition de la commission ne vise, comme cela est précisé à la fin de l'article, que les responsabilités des directions départementales des affaires sanitaires et sociales. Je signale au passage que l'article modifié par l'Assemblée nationale vise, lui aussi, dans son dernier alinéa les responsabilités des DDASS, et non pas des présidents de conseil général. C'est pourquoi il me paraît nécessaire de compléter cet article par un alinéa visant les responsabilités du service d'aide sociale à l'enfance du conseil général.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement prévoit des informations sur les droits et les aides dont peut bénéficier la femme enceinte, tels qu'ils sont prévus dans la loi Veil. Aussi, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et à la formation professionnelle. Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
La femme doit recevoir, dès la première visite effectuée en vue d'une IVG, l'ensemble des informations susceptibles de l'aider dans les choix qu'il lui appartient d'effectuer, qu'il s'agisse de la décision quant au devenir de la grossesse, du choix de la méthode d'interruption de la grossesse la plus appropriée à sa situation sur les plans médical et psychologique, ou du choix des organismes et des structures nécessaires à la réalisation de ses démarches, à savoir la possibilité d'entretien préalable à l'IVG et la pratique de l'intervention.
Le contenu actuel du dossier-guide paraît devoir être simplifié. Remis par le médecin à un stade précoce de la procédure - dès la première visite - son contenu doit être clarifié. Afin de faciliter l'accès de la femme à l'IVG, il doit apporter toutes informations sur les dispositions législatives en vigueur et sur les adresses utiles pour l'aboutissement de ses démarches.
Afin de permettre à la femme de prendre sa décision en toute connaissance de cause, le dossier-guide sera complété par un document l'informant de ses droits et des aides susceptibles de lui être attribuées si elle décide de poursuivre sa grossesse.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 80.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Mme la secrétaire d'Etat semble ne pas avoir compris mon intervention. Je ne vois pas comment le dossier-guide établi par l'Etat pourrait préciser les aides et les règlements propres au conseil général, dans chaque département.
M. Hilaire Flandre. Elle veut interdire aux départements de parler !
M. Jean Chérioux. Il s'agit d'une position anti-décentralisation !
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. S'agissant du fond, il s'agit tout de même d'introduire, par cette disposition, les groupes anti-IVG, dont la propagande est, comme nous l'avons fréquemment constaté, contraire aux objectifs du Gouvernement.
M. Bernard Seillier. C'est un procès d'intention !
M. Serge Lagauche. C'est une réalité que nous avons vécue !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Vous méprisez les conseils généraux !
M. Serge Lagauche. Cela vaut n'importe où, pas seulement dans les conseils généraux.
M. Jean Delaneau, président de la commission. C'est sur l'initiative du conseil général ! Que raconte-il ?
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je voterai cet amendement. Souvenez-vous de la discussion générale que nous avons eue hier et qui s'est prolongée jusqu'à environ une heure ce matin : tous les orateurs, quels qu'ils soient, ont dénoncé le manque d'information, d'une façon générale, à l'égard tant des jeunes dans les établissements scolaires que des femmes, qu'elles soient jeunes ou plus âgées. En l'occurrence, ce qui est proposé, c'est non pas la présence de quelqu'un dans un établissement, mais un document dans lequel sont recensées toutes les aides dont peuvent bénéficier les femmes de façon qu'elles puissent prendre leur décision en toute connaissance de cause. Hier, nombreux ont été les orateurs qui ont dit que le libre arbitre ne peut s'exercer qu'avec une information complète. Sans information, il ne peut y avoir de libre arbitre. Il est donc invraisemblable de refuser une telle proposition.
M. Hilaire Flandre. C'est de l'obscurantisme !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas croyable !
M. Patrick Lassourd. C'est une position idéologique à l'état pur !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis. - L'article L. 2212-3 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2212-3 . - Le médecin sollicité par une femme en vue de l'interruption de sa grossesse doit, dès la première visite, informer celle-ci des méthodes médicales et chirurgicales d'interruption de grossesse et des risques et des effets secondaires potentiels.
« Il doit lui remettre un dossier-guide, mis à jour au moins une fois par an, comportant notamment le rappel des dispositions des articles L. 2212-1 et L. 2212-2, la liste et les adresses des organismes mentionnés à l'article L. 2212-4 et des établissements où sont effectuées des interruptions volontaires de la grossesse.
« Les directions départementales des affaires sanitaires et sociales assurent la réalisation et la diffusion des dossiers-guides destinés aux médecins. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 4, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 60, M. Carle propose de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 3 bis pour l'article L. 2212-3 du code de la santé publique :
« Art. L. 2212-3 . - Le médecin sollicité par une femme en vue de l'interruption de sa grossesse doit, dès la première visite :
« 1° Informer celle-ci des risques médicaux qu'elle encourt pour elle-même et pour ses maternités futures, et de la gravité biologique de l'intervention qu'elle sollicite ;
« 2° Expliquer et commenter les éléments du dossier-guide qu'il lui remet, qui est mis à jour au moins une fois par an, et qui comporte notamment :
« a) Le rappel des dispositions de l'article L. 2211-1 ainsi que des dispositions de l'article L. 2212-1 qui limite l'interruption de la grossesse au cas où la femme enceinte se trouve placée par son état dans une situation de détresse ;
« b) L'énumération des droits, aides et avantages garantis par la loi aux familles, aux mères, célibataires ou non, et à leurs enfants, ainsi que des possibilités offertes par l'adoption d'un enfant à naître ;
« c) Le rappel, lorsqu'il s'agit d'une mineure non émancipée désirant garder son enfant, qu'elle bénéficie des aides existantes pour les femmes enceintes en difficulté et les mères isolées, dans des conditions définies par décret ;
« d) La liste et les adresses des organismes mentionnés à l'article L. 2212-4, des lieux d'accueil et d'hébergement ainsi que des associations et organismes d'accompagnement des femmes enceintes en difficulté afin de les aider à mener leur grossesse à terme puis après la naissance de l'enfant ;
« e) La liste et les adresses des établissements où sont effectuées des interruptions volontaires de la grossesse ;
« f) Les méthodes de contraception qu'elle peut utiliser et les moyens d'y recourir ;
« 3° Lui remettre le répertoire départemental des aides économiques, des lieux d'accueil et d'hébergement, des associations et organismes dédiés à l'accompagnement des femmes enceintes en difficulté.
« Dans chaque département, il est créé à l'initiative du service d'aide sociale du conseil général, un répertoire départemental des aides économiques, des lieux d'accueil et d'hébergement, des associations et organismes dédiés à l'accompagnement des grossesses difficiles. Il doit être disponbile dans tous les établissements dans lesquels sont pratiqués les interruptions volontaires de grossesse, dans les centres de consultation ou de conseil familial et dans les centres de planification ou d'éducation familiale.
« Un arrêté précise dans quelles conditions les directions départementales des affaires sanitaires et sociales assurent la réalisation et la diffusion des dossiers-guides destinés à être remis et expliqués aux femmes par les médecins. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 3 bis vise à supprimer, dans le contenu du dossier-guide qui doit être remis à la femme lors de la première consultation médicale pré-IVG, l'énumération des droits et des avantages garantis par la loi aux familles, aux mères et à leurs enfants ainsi que les possibilités offertes par l'adoption d'un enfant et la liste des organismes susceptibles de lui apporter une aide morale ou matérielle.
La commission estime, pour sa part, que les éléments du dossier-guide que l'Assemblée nationale a souhaité supprimer peuvent s'avérer extrêmement utiles pour certaines femmes, notamment pour celles qui sont encore indécises.
Contrairement à ce que semble croire l'Assemblée nationale, ces éléments ont pour vocation non pas de dissuader la femme de recourir à l'IVG, mais simplement de s'assurer qu'elle prend sa décision en toute connaissance de cause et en disposant de l'information la plus complète possible.
Pour ces raisons, la commission propose de revenir au texte de la loi de 1975, qui constituait une position équilibrée, et donc de supprimer l'article 3 bis .
M. le président. La parole est à M. Carle, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement vise à améliorer l'information de la femme enceinte pour qu'elle puisse faire un choix libre et éclairé.
Le médecin doit expliquer et commenter le dossier-guide qui est remis à la femme. Toutes les femmes n'ont pas nécessairement la capacité de lire ou de comprendre le contenu de ce dossier-guide. C'est pourquoi il convient de les accompagner.
Il faut, enfin, insérer dans le dossier-guide une information sur les méthodes de contraception que la femme pourra utiliser par la suite, le but étant d'éviter qu'une femme qui a déjà eu recours à l'avortement ne se retrouve dans la même situation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 60 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission préfère s'en tenir à sa proposition, afin de garder les éléments du dossier-guide tels que la loi Veil les avait prévus.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 4 et 60 ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Par cohérence avec ce que j'ai dit précédemment, le Gouvernement soutient l'article 3 bis. Il ne peut donc accepter ni la suppression de cet article, ni sa réécriture.
M. Hilaire Flandre. Vous êtes prisonnière de votre majorité !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Madame le secrétaire d'Etat, vous avez parlé de cohérence avec ce que vous avez dit tout à l'heure. Si j'ai bien compris, le dossier-guide serait complété par un document qui apportera des renseignements sur les aides dont la femme enceinte peut bénéficier. Pourquoi supprimer ces renseignements du dossier-guide pour les remettre aussitôt dans un document complémentaire ?
M. Hilaire Flandre. C'est pour faire plaisir aux députés !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Je répondrai d'un mot.
M. Hilaire Flandre. Il n'y a pas de réponse !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Cet amendement voté par l'Assemblée nationale vise à dissocier le dossier-guide, qui concerne les droits entourant l'IVG, et le complément apporté dans un autre document, visant des droits propres.
M. Jean Delaneau, président de la commission. On reprend ce qui est supprimé !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. C'est tout de même une approche que nous avons soutenue, et je m'en suis d'ailleurs expliquée tout à l'heure.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Nous voulions vous entendre le dire !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Il s'agit donc non pas d'apporter moins de renseignements, mais de clarifier et de simplifier le dossier-guide tel qu'il se présente actuellement, et d'apporter un autre document en complément.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Si j'ai bien compris la position de Mme le secrétaire d'Etat, elle souhaite faire figurer dans un document complémentaire les éléments qui ont été supprimés à l'article 3 bis. Il y aurait donc un décalage dans le temps entre le moment où l'on remettrait le dossier-guide et celui où l'on donnerait ce document complémentaire. (Mme le secrétaire d'Etat fait un signe de dénégation.) Alors, je n'ai pas compris !
Je ne vois pas pourquoi on refuserait de fournir des éléments d'information essentiels, notamment ceux auxquels a fait allusion tout à l'heure M. le rapporteur. Ils constituent le moyen, pour la collectivité, de montrer sa sollicitude à l'égard de la personne en difficulté et ce qu'elle peut lui apporter pour essayer, dans le domaine qui est le sien, de répondre à son souci et d'éviter peut-être qu'elle ne soit angoissée, prise de panique et contrainte à faire un choix qu'elle regretterait par la suite. Refuser cela - je l'ai dit à la tribune lors de la discussion générale - c'est de la non-assistance à personne en danger ! (Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
La collectivité a des moyens pour essayer, précisément, de répondre aux problèmes des femmes en difficulté. Si l'on ne porte pas à la connaissance de l'intéressée l'existence de ces moyens, on laisse la femme dans sa triste et pénible situation. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Claire-Lise Campion. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Nous nous opposons à la suppression de cet article 3 bis.
M. Hilaire Flandre. Bien sûr !
Mme Claire-Lise Campion. L'amélioration apportée et votée par l'Assemblée nationale a un double objectif.
Il s'agit, d'une part, de permettre que la femme obtienne, lors de l'entretien préalable, une information objective, claire, impartiale...
M. Hilaire Flandre. Vous ne manquez pas de culot !
Mme Claire-Lise Campion. ... ne devant susciter aucune pression à but dissuasif de quelque ordre que ce soit.
Il s'agit, d'autre part, comme l'a dit Mme le secrétaire d'Etat, de la volonté de vider le dossier-guide de tout élément susceptible de culpabiliser la femme,...
M. Hilaire Flandre. Tu parles !
Mme Claire-Lise Campion. ... ce document ne devant contenir que des informations relatives à l'IVG, au cadre législatif, aux établissements et organismes habilités à accompagner et à aider les femmes, si elles en ressentent la nécessité.
N'oublions pas que tant l'entretien préalable que le dossier-guide ont été instaurés en 1975 afin de dissuader la femme d'avorter...
M. Hilaire Flandre. C'est complètement ridicule !
Mme Claire-Lise Campion. ... « en vue notamment de lui permettre de garder l'enfant ».
M. Jean-Louis Lorrain. C'est faux !
Mme Claire-Lise Campion. Il serait regrettable d'opérer un retour en arrière qui, une fois de plus, déjugerait les femmes. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Je n'ai pas bien compris, dans la deuxième réponse de Mme le secrétaire d'Etat, comment on pouvait satisfaire au désir de simplifier un document en formulant des propositions dans deux documents distincts. Sur ce point, j'avoue que votre réponse, madame le secrétaire d'Etat, manque quelque peu de clarté.
Je souhaite également vous signaler, chers collègues, vous qui, voilà quelque temps, vous êtes prévalus d'avoir voté, en 1975, la loi Veil, que vous êtes peu à peu amenés à la remettre profondément en cause. Si nous suivions vos propositions, les fondements mêmes de la loi Veil seraient insidieusement détruits,...
M. Raymond Courrière. Améliorés !
M. Claude Huriet. ... notamment au travers du refus de faire désormais référence aux situations de détresse. C'est pourtant l'un des éléments essentiels qui avait déterminé une majorité à voter la loi de 1975. Vous supprimez cette référence à l'état de détresse des femmes, vous supprimez des mesures importantes et positives qui constituent non pas une sorte de menace de sanction, mais une information proposée aux femmes.
M. Raymond Courrière. Vous revenez en arrière !
M. Claude Huriet. Je voudrais que vous vous exprimiez clairement sur le fait de savoir si, en privilégiant l'intérêt de la femme et son droit à l'avortement, vous ne faites pas totalement l'impasse sur l'enfant à naître. Autrement dit, au travers du refus d'inscrire dans le document des éléments d'information, aussi neutres que possible, vous remettez en cause la possibilité de donner à la femme des éclaircissements sur les possibilités qu'elle a de garder l'enfant, si elle le souhaite, et non pas de se sentir contrainte à l'interruption volontaire de grossesse pour des raisons sociales ou matérielles. (Exclamations sur les travées socialistes.) C'est l'objet même du document d'information que vous remettez en cause,...
M. Raymond Courrière. C'est son enfant !
M. Claude Huriet. ... comme vous remettez en cause, bien sûr - et nous en parlerons tout à l'heure - le caractère obligatoire de l'entretien préalable.
Vous supprimiez la référence à l'état de détresse, vous contestez le contenu du livret d'information, aussi objectif soit-il, et vous supprimez aussi le caractère obligatoire de l'entretien préalable. Mes chers collègues, vous qui avez voté, en 1975, la loi Veil, vous serez incapables, à l'issue du débat, de reconnaître le texte sur lequel vous vous étiez alors prononcés. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière. Il faut tout de même un peu l'améliorer !
M. Hilaire Flandre. Drôle d'amélioration !
M. Claude Huriet. Il fallait y penser, depuis vingt-cinq ans.
M. Patrick Lassourd. Qu'avez-vous amélioré ?
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cette discussion, qui intervient après la suppression de l'article 2, montre bien que nous sommes au coeur d'un débat qui, malheureusement, nous divise.
Il semblerait, et Claude Huriet vient d'y faire allusion, que la loi Veil, adoptée en 1975, soit désormais irréversible et que l'on ne puisse pas admettre que des modifications de comportement et de modes de pensée soient intervenues dans le quart de siècle qui vient de s'écouler,...
Mme Hélène Luc. Exactement !
M. Guy Fischer. ... modifications qui justifient le débat que nous avons aujourd'hui.
Nous nous opposons d'une manière très claire à la suppression de l'article 3 bis. En effet, s'agissant des 320 000 femmes qui, chaque année, décident de recourir à l'interruption volontaire de grossesse, nous sommes convaincus que, la plupart du temps, leur décision est déjà irrévocable.
Mme Hélène Luc. Absolument, et vous le savez bien !
M. Guy Fischer. La question qui se pose aujourd'hui est de savoir quel type d'information vous voulez donner. S'agit-il de culpabiliser la femme ?
M. Jean Chérioux. Il s'agit de l'aider, pas de la culpabiliser !
M. Guy Fischer. Nous devons dépasser cela ! Au travers de l'information - je vais vous faire un procès d'intention - vous voulez, d'une manière ou d'une autre, faire pression sur la femme pour la dissuader d'avorter...
M. Jean Chérioux. Et vous, vous voulez la pousser à avorter ! Vous trouvez que c'est mieux ?
M. Patrick Lassourd. Il faut leur permettre d'exercer leur libre arbitre !
M. Guy Fischer. On ne peut pas, aujourd'hui, contraindre les femmes qui connaisssent des difficultés à poursuivre leur grossesse. Cela risque de les conduire à abandonner leur enfant. Pour notre part, nous prenons nos responsabilités et nous voterons cet article 3 bis. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen et sur les travées socialistes.)
M. Hilaire Flandre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre. Je crois que personne, dans cet hémicycle, ne peut considérer l'interruption de grossesse, fût-elle volontaire, comme étant un progrès. C'est le constat d'un échec de l'éducation sexuelle et de la contraception. (M. Raymond Courrière s'exclame.)
M. Hilaire Flandre. C'est un drame, surtout pour les femmes qui doivent le vivre.
Mme Nicole Borvo. Vous ne pouvez pas le savoir, vous n'êtes pas une femme !
M. Hilaire Flandre. Bien sûr, je ne suis pas une femme !
M. Raymond Courrière. Alors, ne jugez pas à leur place !
M. Hilaire Flandre. Cela étant dit, on ne peut passer sous silence la situation de détresse dans laquelle se trouvent un certain nombre de femmes. La loi Veil a représenté un moyen de mettre fin à cette détresse.
Aujourd'hui, on nous suggère de prolonger le délai légal de l'IVG et de limiter l'information aux femmes aux seuls aspects spécifiques de l'intervention. Il ne leur sera pas donné communication de l'ensemble des éléments qui leur permettraient de prendre leur décision en toute connaissance de cause.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Qu'est-ce qui vous permet de dire cela ?
M. Hilaire Flandre. C'est tout simplement le contenu de vos amendements, madame !
On se range en effet - et cela va faire plaisir à certains de nos collègues - en deux camps : ceux qui considèrent que la vie commence dès la conception et ceux qui estiment que, tant que l'enfant n'est pas né, il est tout simplement un objet. (Protestations sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat, mais dans une société où l'on se soucie plus de la vie des oiseaux, de la disparition d'un certain nombre de mammifères, des animaux en détresse, que de la vie des enfants, on commet un crime contre son propre avenir. (Exclamations sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Nicole Borvo. Comment pouvez-vous dire cela !
M. Hilaire Flandre. J'ajouterai que si la loi, telle que vous la voulez, avait existé à l'époque où vous-mêmes avez été conçus, certains d'entre vous ne seraient peut-être même pas là pour discuter. (Rires et exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Nicole Borvo. Vous non plus !
Mme Hélène Luc. Je peux vous dire que, par rapport à 1975, il n'y a pas beaucoup de progrès dans cette assemblée !
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. On revient toujours à la loi Veil. Vous l'avez dit vous-mêmes, la loi Veil a été votée dans un cadre de majorité conservatrice, ou de droite, si vous préférez. Vous avez eu un apport de voix parce qu'à gauche on a pensé qu'il fallait progresser. Sans cet appui, cette loi n'aurait pas été adoptée. Aujourd'hui, la majorité à l'Assemblée nationale est de gauche et, effectivement, cela vous contrarie. Mais la liberté de la femme doit progresser !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Ce qui vous contrarie, c'est que la majorité du Sénat ne soit pas de gauche !
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Le débat à cet instant me paraît assez curieux car, à mon sens, il ne correspond pas du tout à ce que nous avons dit hier soir. Pardonnez-moi de le répéter, mais hier, dans la discussion générale, nous avons assisté à des interventions très mesurées, où chacun s'est exprimé en conscience. Il me souvient que nous avons beaucoup parlé de la souffrance des femmes, même s'il ne faut pas exagérer, car il y a sans doute des situations où cela ne se passe pas trop mal. Nous avons également beaucoup parlé de l'information et de l'exercice du libre arbitre.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Effectivement !
M. Patrick Lassourd. Le libre arbitre ne peut s'exercer qu'avec une information complète des gens. Comment voulez-vous qu'une femme qui se trouve dans une situation difficile - je pense notamment à l'adolescente dont la famille, culturellement, ne peut pas accepter la situation, et qui est sans doute un peu déprimée - puisse exercer son libre arbitre si nous ne participons pas à l'information dont elle a besoin pour l'exercer ?
Je ne comprends pas cette opposition systématique sur un point qui me paraît fondamental. C'est la première observation que je voulais faire.
J'en viens à la seconde observation, puisque l'on évoque, à ce point de notre débat, des principes généraux. Monsieur le ministre, hier, dans mon intervention, j'ai évoqué la nécessité de créer un statut juridique de l'embryon. Les lois relatives à la bioéthique vont devoir être révisées, notamment en raison des problèmes que pose actuellement le clonage. Il faudra probablement légiférer « à froid », avant l'examen des lois sur la bioéthique, sur la création d'un statut juridique de l'embryon. En effet, tout le monde parle du droit des femmes à donner ou non la vie, mais personne ne défend actuellement l'embryon, son droit de naître et d'exister. J'aimerais bien, monsieur le ministre - vous ne vous êtes pas exprimé sur ce point hier - vous entendre sur ce sujet. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 bis est supprimé et l'amendement n° 60 n'a plus d'objet.

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - Les deux premiers alinéas de l'article L. 2212-4 du même code sont ainsi rédigés :
« Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption volontaire de grossesse, à la femme majeure une consultation avec une personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l'intéressée lui sont apportés.
« Pour la femme mineure non émancipée, cette consultation est obligatoire et l'organisme concerné doit lui délivrer une attestation de consultation. Si elle exprime le désir de garder le secret à l'égard des titulaires de l'autorité parentale, ou de son représentant légal, elle doit être conseillée sur le choix de la personne majeure mentionnée à l'article L. 2212-7 susceptible de l'accompagner dans sa démarche. »
Sur l'article, la parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Le texte proposé par cet article donne à l'entretien préalable à l'interruption volontaire de grossesse un caractère nouveau et, de mon point de vue, renforcé.
En supprimant le caractère obligatoire de cet entretien social, le projet de loi participe d'une logique de responsabilisation des femmes et affirme clairement que la décision d'interrompre leur grossesse leur appartient.
Il était en effet indispensable de passer d'un principe de contrainte à un principe de liberté, car toutes les femmes ayant décidé d'interrompre leur grossesse ne souhaitent pas obligatoirement une assistance, et, fort heureusement, elles sont nombreuses à pouvoir librement décider et assumer leurs actes.
Qu'en est-il aujourd'hui ? Cet entretien est vécu par les femmes comme une remise en cause de leur décision, comme une contrainte, comme une obligation de se justifier, voire comme un passage devant un jury qui ne serait chargé que de les culpabiliser.
Certaines femmes le vivent également comme une expérience infantilisante ; d'autres encore racontent les pressions qu'elles ont subies pour les dissuader d'interrompre leur grossesse.
Enfin, il n'est pas rare de constater que cette démarche contribue à allonger la procédure, au risque de dépasser le délai légal de recours à l'IVG.
Cet entretien peut, bien évidemment, s'avérer utile pour les femmes en demande d'écoute et de parole. Il doit alors constituer un véritable soutien. Dans ce cas, c'est aux structures qu'il incombe de proposer des lieux, des horaires et des personnels compétents et qualifiés pour recevoir les demandes et accompagner les patientes.
De nombreuses conseillères conjugales m'ont raconté qu'elles commençaient, lors de cet entretien, par signer le formulaire permettant à la femme d'interrompre sa grossesse et que, ayant ainsi remis à la patiente l'attestation d'entretien, la parole, alors, se libérait et l'accompagnement psychologique pouvait débuter et être efficace.
Car c'est bien le caractère « obligatoire » de l'entretien préalable qui est vécu par les femmes comme une remise en cause de leur décision, une obligation de se procurer une autorisation.
Sur ce point, nous apprécions que le projet de loi propose une évolution. Comme Mme la ministre l'a rappelé hier soir, il n'est pas question de supprimer tout entretien avec une conseillère conjugale ou une personne qualifiée. L'article 4 précise même : « Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption de grossesse, à la femme majeure une consultation avec une personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal... »
Pour la femme mineure ou non émancipée, cette consultation reste obligatoire et, si elle choisit de garder le secret à l'égard de ses parents, elle doit être conseillée sur le choix de la personne susceptible de l'accompagner dans sa démarche.
Loin d'avoir un caractère dissuasif ou répressif, cet entretien singulier doit devenir un moment privilégié d'écoute, de parole et d'information, car l'intime ne peut se dire que dans la confiance.
Dorénavant, les centres d'IVG auront l'obligation de proposer un entretien avant et après l'intervention aux femmes majeures. Ce moment de parole, d'écoute et d'information pourra alors pleinement jouer son rôle et permettre, dans certains cas, de déceler les difficultés ou les violences auxquelles certaines femmes sont confrontées.
Cependant, je souhaite, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, que vous nous donniez des assurances sur les moyens qui seront accordés à l'organisation de ces entretiens.
Je me permets de relayer ici l'inquiétude des conseillères conjugales, qui font, par ailleurs, un travail remarquable, car il ne faudrait pas saisir le prétexte de la suppression du caractère obligatoire pour les femmes de cette consultation pour diminuer les crédits affectés aux structures chargées de mettre en oeuvre l'IVG et remettre en cause le statut et le nombre de conseillères.
En effet, la question de la formation et du statut des conseillères conjugales, dont l'effectif doit s'accroître et le rôle se préciser, reste posée. Il s'agit, bien évidemment, plus globalement, du problème des moyens, sur les plans tant humain que matériel, que l'on entend donner aux centres d'IVG.
En effet, je suis d'accord avec Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité lorsqu'elle déclare que la pratique des IVG fait partie des missions de service public. Le rôle de l'Etat est donc majeur, il convient de le développer pour que plus de crédits soient affectés à ce secteur et que l'hôpital public joue tout son rôle.
Or, malgré l'enveloppe de 12 millions de francs allouée l'an dernier et celle de 15 millions de francs prévue pour 2001, de sérieux problèmes, liés aux menaces qui pèsent sur les centres d'IVG et au prochain départ en retraite de nombreux médecins acquis à la nécessité de rendre effectif le droit à l'IVG, vont se poser.
Nous sommes donc favorables à la rédaction de cet article, tout en étant vigilants au soutien qu'apporteront les pouvoirs publics aux conseillères familiales et conjugales.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 5, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit l'article 4 :
« L'article L. 2212-4 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Après l'interruption de grossesse, une deuxième consultation, ayant notamment pour but l'information sur la contraception, est systématiquement proposée. »
Par amendement n° 42, le Gouvernement propose de rédiger ainsi le texte présenté par l'article 4 pour les deux premiers alinéas de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique :
« Il est systématiquement proposé, avant et après l'interruption volontaire de grossesse, à la femme majeure une consultation sociale avec une personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé. Cette consultation comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l'intéressée lui sont apportés.
« Pour la femme mineure non émancipée, la consultation sociale préalable à l'intervention est obligatoire et l'organisme concerné doit lui délivrer une attestation d'entretien. Si elle exprime le désir de garder le secret à l'égard des titulaires de l'autorité parentale, ou de son représentant légal, elle doit être conseillée sur le choix de la personne majeure mentionnée à l'article L. 2212-7 susceptible de l'accompagner dans sa démarche. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 4 supprime le caractère obligatoire de la consultation sociale préalable à l'IVG.
A l'évidence, cette disposition, au caractère très idéologique, est inspirée par le même état d'esprit que celui qui a conduit à l'adoption de l'article 3 bis : il s'agit de tout faire pour supprimer les procédures d'information et de dialogue qui auraient pu conduire certaines femmes à changer d'avis et à renoncer à une IVG.
On notera d'ailleurs que cette disposition, comme celle qui est prévue à l'article 3 bis et qui modifie le contenu du dossier-guide, ne figurait pas, monsieur le ministre, dans le texte du Gouvernement, c'est-à-dire dans le projet de loi initial.
Pour la commission, cet entretien social est fondamentalement utile ; il est un temps de dialogue indispensable. Il est aujourd'hui l'occasion pour la femme d'exposer ses difficultés personnelles, conjugales, familiales, d'être informée sur les aides et soutiens dont elle peut bénéficier, de parler de la contraception, de préparer ainsi l'avenir.
Contrairement à ce que semblent croire les députés, ce n'est pas parce qu'un entretien est « obligatoire » qu'il est nécessairement dissuasif ou culpabilisant pour la femme. La commission se demande en quoi cet entretien serait préjudiciable. La femme serait-elle moins libre parce que mieux informée ? L'Assemblée nationale craint-elle que certaines femmes ne renoncent à leur décision d'IVG à la suite de cet entretien ?
Rendre cet entretien facultatif aboutira à ce que bon nombre de femmes n'en bénéficient pas, mais, hélas ! surtout celles pour lesquelles il aurait pu être le plus utile.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission souhaite maintenir le caractère obligatoire de l'entretien social préalable à l'IVG. Elle approuve, par ailleurs, l'idée de proposer systématiquement une consultation après l'IVG.
Elle propose, par conséquent, d'adopter un amendement tendant à maintenir, pour toutes les femmes, le caractère obligatoire de l'entretien social préalable à l'IVG et à prévoir qu'une deuxième consultation, ayant notamment pour objet l'information sur la contraception, est systématiquement proposée après l'interruption de grossesse.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 42 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 5.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. L'amendement n° 42 vise à améliorer la rédaction de l'article 4.
Au cours du débat parlementaire, les députés ont souhaité modifier l'ensemble du dispositif concernant les consultations sociales. La nouvelle rédaction de l'article 4 précisera donc la nature des consultations visées, afin d'éviter toute confusion entre consultations sociales et consultations médicales.
S'agissant des mineures, l'article 4 prévoit le maintien du caractère obligatoire de l'entretien préalable et l'article 6 introduit la proposition d'une deuxième consultation après l'intervention. Le nouveau texte de l'article 4 précise cette distinction.
S'agissant de l'amendement n° 5, j'ai été convaincu - pour autant que je puisse encore l'être puisque je suis d'accord avec le texte du projet - par les propos de Mme Terrade.
Certes, ceux qui, volontairement, parce qu'ils l'ont choisi, sont en mesure de délivrer une consultation médicale à une femme qui a l'intention d'avorter ne sont pas répressifs par essence, monsieur le rapporteur. Mais tous les psychiatres - j'espère qu'il y en a ici - le savent : il faut choisir son conseil, car, si l'on ne participe pas de plein gré à la cure, à la thérapie ou à la prise en charge - veuillez me pardonner, mais c'est l'abc de la médecine ! - il y a un début de contrainte.
Je n'étais pas tellement favorable, lorsque nous avons parlé de ce texte pour la première fois, à la suppression de l'entretien, car je crois qu'il est nécessaire. Mais je le crois d'autant plus nécessaire qu'il sera proposé, et il est vrai que la manière de proposer - en cela, vous avez raison, madame Terrade - est essentielle si l'on veut obtenir le résultat souhaité ; sinon, l'entretien sera subi comme un sermon et, d'avance, ce sera pénible.
Il est vrai qu'il y a là une ambiguïté, mais la formule « systématiquement proposé », comme en bien d'autres domaines de la médecine, me paraît être la meilleure. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'oppose à l'amendement n° 5.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 42 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement ne s'inscrit pas dans la même philosophie que celui de la commission. Par conséquent, nous ne pouvons l'accepter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. La majorité de la commission s'oppose à la suppression du caractère obligatoire de l'entretien qui précède l'IVG.
Cette obligation pose d'abord un problème de principe. En 1975, il s'agissait - chacun le sait - d'une concession faite aux opposants à l'avortement, qui pouvaient croire qu'ils auraient ainsi à leur disposition l'occasion de dissuader les femmes.
Or, les femmes font leur choix en conscience. L'IVG est pour elles un droit qu'elles peuvent utiliser quand bon leur semble au cours de leur vie. Aussi est-il absurde de penser que l'on peut aller contre leur autonomie et leur libre arbitre.
Dès lors, pourquoi maintenir cette obligation, qui est ressentie comme un signal que la société envoie à la femme pour lui signifier qu'on ne lui fait pas a priori confiance, alors qu'il s'agit de la maîtrise de sa procréation ?
Maintenir cette obligation, c'est laisser entendre que la femme ne fait pas bon usage de sa liberté. C'est un jugement inacceptable, c'est une atteinte au principe de liberté. Le Gouvernement a eu raison de vouloir supprimer cette obligation. Nous nous opposons au retour en arrière.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Ce n'était pas dans le texte du Gouvernement !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous nous y opposons d'autant plus que cela ne permettra pas d'atteindre l'objectif prétendument visé, qui est d'aider la femme, et auquel, par principe, personne ne peut être opposé.
En effet, si les femmes qui ne souhaitent pas bénéficier de cet entretien peuvent ne plus y aller, les professionnels pourront mieux se consacrer à celles qui y viennent parce qu'elles en ressentent le besoin ; ces dernières auront en face d'elles des intervenants plus disponibles et plus motivés qui pourront mettre plus efficacement en oeuvre les démarches décrites dans l'amendement et qui correspondent effectivement à ce que propose « un professionnel ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation et de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un service social ou tout autre organisme agréé ».
Nous considérons que c'est faciliter la tâche des professionnels que de les mettre en situation d'assurer des entretiens qui auront été proposés et non imposés.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Tout le débat porte, en fait, sur la situation réelle dans laquelle se trouve la femme qui est confrontée à l'IVG.
S'il s'agit de femmes pour qui cela ne pose aucun problème, on pourrait peut-être vous suivre, madame Dieulangard.
Mais je crois me souvenir que la loi avait précisément pour objet de venir en aide à celles pour qui c'est un véritable problème, voire un problème déchirant, qui sont en situation de détresse. Et ne venez pas nous dire que c'est de gaieté de coeur qu'une femme renonce à la maternité !
Et pourquoi une femme est-elle amenée à renoncer à cette maternité ? Parce qu'elle se trouve dans une situation déterminée, qui fait que, bien souvent, elle n'est pas en état de choisir librement. Elle est souvent paniquée, elle ne sait plus à quel saint se vouer.
Vous dites qu'on lui proposera un entretien. Mais, croyez-vous qu'elle sera vraiment libre de décider si elle demande cet entretien ou non ? Sûrement pas. Elle sera incapable de faire un vrai choix !
Pour employer une image, l'entretien obligatoire c'est un gilet de sauvetage, et vous, vous demandez la suppression du règlement qui impose le port de ce gilet dans les canots de sauvetage ! Ce n'est pas quand on est en train de se noyer que l'on part à la recherche d'un gilet ! Si le gilet sauve beaucoup de vies, c'est précisément parce qu'il est obligatoire de le mettre dès que l'on monte dans un canot.
Voilà l'important ! Ce n'est pas contre la femme concernée que nous voulons agir ; nous voulons qu'à un moment où elle est en difficulté, où elle ne sait plus à quoi se raccrocher, elle ait la possibilité d'être bien informée et de prendre, en tout connaissance de cause, sa décision.
La liberté, il faut pouvoir être en l'état de l'exercer ! Or, trois fois sur quatre, vous le savez très bien, il s'agit de femmes qui ne sont plus en état d'être libres intellectuellement. Elles sont en difficulté, en situation de panique. Or, quand on est en situation de panique, on fait toujours le mauvais choix !
M. Jean-Louis Lorrain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Je crois effectivement, comme notre collègue le disait tout à l'heure, que si la discussion générale, hier, était empreinte d'une grande sérénité, nous entendons aujourd'hui des propos qui me paraissent choquants.
On met en doute les qualités des conseillères conjugales, qui font souvent preuve d'abnégation. Ce ne sont pas du tout des dames-patronesses, elles sont très bien formées. On met en doute leur comportement, mais on est prêt à leur faire jouer un rôle dans un cadre bien défini, bien sûr.
Je peux vous dire qu'elles entretiennent souvent des rapports d'empathie avec les personnes qu'elles reçoivent et qu'elles ne sont pas du tout dissuasives. Dès lors, quand j'entends dire que leur objectif, c'est de retarder l'IVG, je trouve cela parfaitement scandaleux. Celles qui se livreraient à ce type de pratiques seraient d'ailleurs vite dénoncées.
Monsieur le ministre, en tant que médecin et président du conseil d'administration d'un hôpital psychiatrique depuis plus de vingt ans, je peux par ailleurs vous assurer que, lorsque nous disons à un malade ou à une personne qui passe un moment difficile, d'aller voir un psychologue clinicien ou un psychiatre, chaque fois elle refuse en disant : « Mais pour qui me prenez-vous ? Croyez-vous que j'ai besoin de cela ? » Ce n'est qu'après avoir instauré des relations de confiance que l'on peut l'amener à engager une thérapie.
J'ajoute que, en l'occurrence, il s'agit non pas d'un état pathologique, mais d'une situation de détresse.
Je suis surpris que la valeur du travail social ne soit pas reconnue. Le travail social doit être pris en considération ; il ne vise pas à imposer des contraintes légales.
Je suis d'autant plus étonné par cette attitude que, au quotidien, nous subissons bien des contraintes. Nous révoltons-nous contre le code de la route... contre les vaccinations que l'on nous impose... ? Je ne crois pas !
Mme Terrade place la liberté au-dessus de tout. C'est son choix. Mais quand l'exercice de la liberté devient destructeur, nous n'en tirons pas les mêmes conséquences. Nous n'avons vraiment pas les mêmes valeurs !
Mme Odette Terrade. On n'a pas les mêmes valeurs, c'est sûr !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé et l'amendement n° 42 n'a plus d'objet.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - A l'article L. 2212-5 du même code, les mots : "sauf au cas où le terme des dix semaines risquerait d'être dépassé, le médecin étant seul juge de l'opportunité de sa décision" sont remplacés par les mots : "sauf dans le cas où le terme des douze semaines risquerait d'être dépassé". »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 61, M. Carle propose, dans l'article 5, de remplacer les mots : « le terme des douze semaines » par les mots : « le terme des dix semaines ».
Par amendement n° 46, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter l'article 5 par les mots : « ou si la technique proposée le rend nécessaire ».
Par amendement n° 64, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 5 par les mots : « ou si la technique recherchée le rend nécessaire ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 6.
M. Francis Giraud, rapporteur. Par coordination avec l'amendement n° 3 proposé à l'article 2, il s'agit de supprimer la référence au délai de douze semaines de grossesse introduite par l'article 5 à l'article L. 2212-5 du code de la santé publique.
M. le président. La parole est à M. Carle, pour présenter l'amendement n° 61.
M. Jean-Claude Carle. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 46.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Il est certes important de laisser aux femmes un délai de réflexion avant qu'elles ne rendent leur décision définitive, mais il est essentiel qu'elles soient informées des techniques d'interruption volontaire de grossesse dont elles disposent et de leur laisser le choix.
Trop souvent encore, ce choix leur est dénié ou imposé, et cela n'est plus concevable.
Rappelons que la technique médicamenteuse peut être utilisée jusqu'à cinq semaines, soit plus tôt que la méthode par aspiration. Il apparaît alors nécessaire de favoriser son emploi à chaque fois que cela est encore possible, afin de respecter la préférence de la femme lorsqu'elle l'a exprimée en ce sens.
Il va donc de soi que la semaine de réflexion doit être réduite, aussi bien lorsque le délai légal risquerait d'être dépassé que lorsque l'utilisation de la pilule RU 486 le rend nécessaire.
Je voudrais, pour conclure, préciser que le groupe socialiste du Sénat serait extrêmement étonné si cette mesure venait à être rejeté par la majorité sénatoriale.
En effet, en privilégiant une méthode moins « invasive », cet amendement va dans le sens de ce que vous semblez, depuis le début de ce débat, prôner, à savoir la priorité accordée aux raisons de santé pour justifier le refus que vous opposez à nombre de nouvelles dispositions.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 64.
M. Guy Fischer. L'article 5 prend en compte l'allongement à douze semaines de grossesse du délai légal pour pratiquer une IVG et modifie en conséquence l'article L. 2212-5 du code de la santé publique, qui prévoit jusqu'à présent que, lorsqu'une femme désire avorter, le médecin doit lui demander une confirmation écrite qu'il ne peut accepter qu'au terme d'un délai d'une semaine suivant la demande de la femme, sauf dans le cas où le délai légal risquerait d'être dépassé.
Avec notre amendement, nous vous proposons d'étendre la possibilité, pour le médecin, de s'affranchir de ce délai d'une semaine au cas où le strict respect de ce laps de temps entraînerait la nécessité de recourir à une méthode chirurgicale pour pratiquer l'IVG au lieu d'une méthode médicamenteuse.
Comme vous le savez, de nombreuses femmes se trouvent hors des délais légaux car, souvent, les structures chargées de pratiquer les IVG ne peuvent les accueillir à temps, faute de moyens et de personnels.
Or, les méthodes médicamenteuses, qui sont parfaitement adaptées en deçà de cinq semaines de grossesse et susceptibles d'être mises en oeuvre dans le cadre de la médecine ambulatoire, permettraient aux centres d'IVG de mieux fonctionner et de pouvoir accueillir toutes les femmes dans les délais.
Il convient donc, à notre sens, de faciliter et de promouvoir leur utilisation la plus large possible.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 61, 46 et 64 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. L'amendement n° 61 est satisfait par l'amendement de suppression de l'article, présenté par la commission.
Quant aux amendements n°s 46 et 64, ils deviendront sans objet si cet amendement n° 6 est adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 6, 61, 46 et 64 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement demande que les amendements n°s 6 et 61 soient rejetés.
En revanche, le Gouvernement est en accord avec les amendements n°s 46 et 64.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Jean-Louis Lorrain. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Mes chers collègues, je souhaite porter à votre connaissance un certain nombre d'informations à propos de la pilule RU 486.
Il est de pratique courante, dans certains établissements, d'utiliser le RU 486 jusqu'à la dixième semaine, accompagné d'un complément médicamenteux intravaginal. Cette technique permet, dans des conditions correctes, de pratiquer des avortements médicamentaux. Elle pourrait être généralisée, à condition de bien en maîtriser la technique.
Les commentaires pseudo techniques que nous venons d'entendre sont donc dénués de fondement.
Cette méthode ne nécessite ni intervention chirurgicale ni anesthésie. Elle mériterait d'être promue. Les centres de planification doivent en être informés.
Certains s'efforcent de promouvoir la pratique ambulatoire de cette forme d'auto-avortement, à condition, bien sûr, disent-ils, de prendre quelques précautions et d'assurer une surveillance grâce à un contact direct avec les centres. Il faut toutefois savoir que l'utilisation du RU 486 est très douloureuse et qu'elle peut provoquer des hémorragies. Il faut être inconscient pour ne pas en tenir compte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 est supprimé et les amendements n°s 61, 46 et 64 n'ont plus d'objet.

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - L'article L. 2212-7 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2212-7 . - Si la femme est mineure non émancipée, le consentement de l'un des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal est recueilli. Ce consentement est joint à la demande qu'elle présente au médecin en dehors de la présence de toute autre personne.
« Si la femme mineure non émancipée désire garder le secret, le médecin doit s'efforcer, dans son intérêt, d'obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient consultés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4.
« Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarche, ou si le consentement n'est pas obtenu, l'interruption de grossesse ainsi que les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.
« Après l'intervention, une deuxième consultation, ayant notamment pour but une nouvelle information sur la contraception, sera obligatoirement proposée aux mineures. »
Sur l'article, la parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger. Quoi de plus dramatique pour une jeune fille que de débuter sa vie sexuelle par une IVG ? C'est malheureusement le cas de 7 000 d'entre elles chaque année.
La question de l'IVG des adolescentes est évidemment encore plus délicate que celle des majeures. Lorsqu'une femme mineure célibataire souhaite avorter, la loi requiert le consentement de l'une des personnes qui exerce l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal. Or, nous savons tous que la sexualité est un sujet plus ou moins tabou dans nos sociétés, notamment, hélas, au sein de la cellule familiale, particulièrement dans certains milieux défavorisés.
Obtenir le consentement de l'un de ses parents est bien souvent une démarche difficile pour la jeune fille. Ce n'est pas une démarche impossible. Et l'autorisation parentale est, à mon sens, souhaitable car elle implique un dialogue intrafamilial qui, peut-être, n'existait pas auparavant.
Néanmoins, il existe des situations où la jeune fille se trouve dans une impasse. La législation actuelle, en exigeant l'accord d'un des deux parents, présuppose que le soutien familial est acquis. Or, dans certains cas, il n'en est rien. Pour des raisons culturelles, religieuses, voire de violences familiales, la jeune fille ne peut déclencher un dialogue avec ses parents et encore moins obtenir leur consentement.
En conséquence, de nombreux médecins passent outre cette autorisation parentale, se contentant d'un accord à l'authenticité douteuse. Je peux bien sûr comprendre que des médecins agissent de la sorte, afin de répondre à la grande détresse de ces adolescentes. Toutefois, ces professionnels prennent de gros risques et engagent leur responsabilité.
Dans l'article 6 du projet de loi, le Gouvernement propose alors un aménagement de la règle de l'autorisation parentale en permettant à la jeune fille qui ne peut faire autrement que conserver le secret de se faire accompagner par un adulte « référent ». Reste à définir le statut de cet adulte. Comment ce dernier pourra-t-il se substituer à l'autorité parentale ? Qui voudra assumer un tel accompagnement sans savoir ce qu'il engendre juridiquement ?
Le Gouvernement semble mettre de côté ce « détail » qui revêt pourtant une importance fondamentale et, de cette façon, il propose une solution qui n'est pas tenable juridiquement. Je pense évidemment que nous devons nous préoccuper de ces situations particulières, mais il faut le faire en imaginant un solide dispositif dans lequel les devoirs de chacun seront clairement déterminés.
L'article 6 du projet de loi prévoit, outre l'aménagement de l'obligation de l'autorisation parentale, qu'une deuxième consultation soit obligatoirement proposée à la jeune fille après l'intervention, afin d'éviter, à l'avenir, une autre IVG. Pour ma part, je recommanderai vivement que cette consultation ne soit pas juste « obligatoirement proposée », mais obligatoire tout court.
En faisant un tant soit peu preuve d'empathie, sommes-nous capables d'imaginer le choc psychologique et physique que connaît une adolescente venant de vivre une IVG ?
Je ne pense pas qu'une deuxième consultation médicale soit suffisante. Elle est néanmoins nécessaire, mais un accompagnement digne de ce nom mériterait un suivi approfondi sur une durée relativement longue, que j'estime être de l'ordre d'un an.
Durant une année environ, la mineure rencontrerait à plusieurs reprises une conseillère familiale qui l'accompagnerait psychologiquement dans cette période difficile. Un tel suivi donnerait sans doute aux adolescentes les armes nécessaires pour surmonter le choc psychologique, du moins à celles qui sont les plus fragiles.
M. le président. Sur l'article 6, je suis d'abord saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 82, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger proposent de rédiger comme suit les premier, deuxième et troisième alinéas du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique :
« La femme mineure enceinte est considérée comme capable pour toutes les décisions concernant sa contraception ou l'interruption volontaire de grossesse. Si elle prend la décision d'interrompre sa grossesse, elle présente sa demande à un médecin en dehors de la présence de toute autre personne.
« Si la femme mineure désire garder le secret, le médecin doit s'efforcer, dans son intérêt, d'obtenir son consentement pour que le ou les titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, le représentant légal soient informés ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4.
« Si la mineure ne veut pas effectuer cette démarché, l'interruption de grossesse ainsi que les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix. »
Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Giraud, au nom de la commission.
L'amendement n° 7 tend, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à remplacer les mots : « dans son intérêt » par les mots : « dans l'intérêt de celle-ci ».
L'amendement n° 8 vise, à la fin du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à supprimer les mots : « ou doit vérifier que cette démarche a été faite lors de l'entretien mentionné à l'article L. 2212-4 ».
L'amendement n° 9 a pour objet, dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, après les mots : « l'interruption de grossesse ainsi que les », d'insérer les mots : « actes médicaux et ».
L'amendement n° 10 tend, dans la seconde phrase de l'avant-dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à remplacer le mot : « accompagner » par le mot : « assister ».
Par amendement n° 41, M. Chérioux propose, à la fin de la seconde phrase du troisième alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, de remplacer les mots : « par la personne majeure de son choix » par les mots : « par un membre majeur de sa famille ou une personne qualifiée, qu'elle choisit dans des conditions fixées par décret. »
La parole est à M. Lagauche, pour présenter l'amendement n° 82.
M. Serge Lagauche. La loi Veil ne prévoyait pas la possibilité de pallier l'absence de consentement parental, faisant ainsi du droit parental une sorte de droit absolu et aboutissant aux situations de blocage que l'on connaît et qui donnent lieu actuellement à des solutions extralégales, pour ne pas dire illégales.
On peut estimer suffisant de créer une exception au principe de l'autorité parentale. Mais c'est oublier que les mineures peuvent déjà accomplir seules certains actes : accoucher sous X, abandonner ou reconnaître leur enfant. Dans ces trois cas, elles sont considérées comme capables.
Je ne vois pas en vertu de quelle logique notre droit leur accorde une autonomie en cas de poursuite de leur grossesse, mais pas dans le cas d'une interruption volontaire de grossesse. C'est pourquoi nous pouvons estimer que la jeune fille, à partir du moment où elle est enceinte, doit être considérée comme capable pour tout acte concernant l'interruption de grossesse et la contraception.
Le fait de considérer la jeune fille comme capable amène à réfléchir, dans ce nouveau cadre, au rôle des parents et, plus largement, des adultes. Bien sûr, le mieux serait que les parents soient informés. En même temps, les adolescents ne demandent pas la permission à leurs parents pour avoir des relations sexuelles. Cela relève de l'intime et les obliger à reconnaître leur sexualité devant leurs parents peut être une violence symbolique très forte.
Néanmoins, nous ne pouvons pas laisser ces jeunes filles livrées à elles-mêmes. Je propose donc de garder l'obligation, pour la mineure, de se faire accompagner, pour faire pratiquer une IVG, par la personne de son choix. Rien n'empêche, évidemment, que la jeune fille choisisse l'un de ses parents, mais l'important est qu'elle puisse choisir une personne en qui elle a toute confiance.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 7, 8, 9 et 10.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'amendement n° 7 est rédactionnel.
L'amendement n° 8 est un amendement de coordination avec celui de la commission qui a été adopté à l'article 4.
Votre commission n'est, en effet, pas favorable à ce que se multiplient des démarches parallèles de vérification du consentement parental : il revient au seul médecin, qui a in fine la responsabilité médicale de l'acte, de s'efforcer de convaincre la mineure d'obtenir le consentement parental. L'amendement n° 9 vise à préciser que les actes médicaux, notamment anesthésiques, liés à l'interruption de grossesse sont également pratiqués à la demande de la mineure. Ainsi, le médecin pratiquant une anesthésie sur une mineure ne saurait voir sa responsabilité engagée du fait de l'absence de consentement parental.
Enfin, l'amendement n° 10 traite, au fond, du problème de l'autorisation parentale. En effet, si, dans le projet de loi, il est réaffirmé que l'autorisation parentale reste la règle en matière d'interruption volontaire de grossesse des mineures, la possibilité de dérogation à ce principe est cependant ouverte. Si la jeune fille persiste dans son souhait de garder le secret ou si, malgré son souhait, elle ne peut obtenir le consentement de ses parents, elle pourra finalement prendre seule la décision de demander une IVG. Elle choisira alors une personne majeure pour l'accompagner dans sa démarche.
Chacun comprendra que cette disposition législative est symboliquement lourde et que ses conséquences juridiques sont graves. Après avoir longuement réfléchi, la commission vous propose cependant d'en accepter le principe.
En effet, si, dans la très grande majorité des cas, la mineure obtient l'accord de l'un de ses deux parents, il est des situations où le consentement parental paraît impossible à obtenir soit pour des raisons culturelles, soit pour des raisons simplement matérielles. Il est des cas où la simple annonce d'une grossesse mettrait en danger la vie de la jeune fille. Le recours au juge des enfants paraît alors inadapté.
Il est apparu dans ces conditions à votre commission qu'une modification du cadre légal régissant la situation particulière des mineures était souhaitable. Il est important que ces dernières ne soient plus, comme c'est le cas actuellement, dépendantes de la position des professionnels de santé auxquels elles s'adressent et de l'interprétation que font ces derniers des dispositions légales. De même, il est nécessaire que ces professionnels, confrontés à des situations humaines difficiles, puissent répondre aux besoins de ces mineures tout en ayant une connaissance précise des conditions de leur intervention et des cas dans lesquels ils peuvent engager leur responsabilité.
Si la commission propose d'accepter la dérogation au principe de l'autorité parentale, elle souhaite néanmoins entourer cette possibilité d'un certain nombre de garanties : il n'est pas envisageable, en effet, que la mineure puisse être livrée à elle-même ou qu'elle soit, comme il est préconisé dans le projet de loi, simplement « accompagnée » par une personne de son choix qui pourrait être n'importe qui.
Elle propose par conséquent que cette personne ne se limite pas à accompagner cette mineure, concept qui n'a aucune signification juridique, mais l'assiste, par référence aux dispositions du code civil qui prévoient, dans certaines situations, l'assistance d'un mineur par une personne adulte. Cette modification terminologique a naturellement des conséquences juridiques puisqu'elle suppose l'exercice d'une responsabilité à l'égard de la mineure. La responsabilité de la personne référente ne pourrait cependant pas être mise en cause par les parents de la mineure puisque la loi lui confie cette mission.
M. le président. La parole est à M. Chérioux, pour présenter l'amendement n° 41.
M. Jean Chérioux. L'objectif de cet amendement est de suivre la logique de la commission et de prévoir que la personne mineure soit non pas « accompagnée », mais « assistée ».
Il me semble souhaitable de réintroduire dans le dispositif la famille, qui peut jouer un rôle. Il fallait, je le sais bien, éviter que les parents ne bloquent l'affaire mais, dans les faits, il y a toujours un membre de la famille qui se montre compréhensif, à l'image, dans La fille du puisatier , de cette bonne tante qui soutient sa nièce contre la volonté du père. (Sourires.) Pourquoi ne pas faire référence au choix - ce n'est pas une obligation - d'un membre de la famille ?
Si la personne chargée d'assister la mineure n'appartient pas à la famille, elle doit être une personne qualifiée - une conseillère conjugale, une assistante sociale, une psychologue - choisie dans des conditions fixées par décret. En effet, il ne faudrait pas que la personne choisie par la mineure, laquelle peut être extrêmement jeune, ait intérêt à ce que l'IVG soit pratiquée. Le père du futur enfant, par exemple, peut-il être le meilleur assistant ? Il faut donc une garantie que la personne choisie sera une personne d'expérience susceptible d'assister la mineure dans cette démarche difficile.
Je souhaite rectifier mon amendement pour ajouter une virgule après les mots : « un membre majeur de sa famille » et supprimer celle qui figure après les mots : « une personne qualifiée ». Ainsi, « les conditions fixées par décret » s'appliquent à la personne qualifiée et non pas également aux membres de la famille !
M. le président. Voilà une virgule libératrice ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. C'est vous qui l'affirmez !
M. le président. Non, c'est la grammaire !
Je suis donc saisi d'un amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Chérioux et visant, à la fin de la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique, à remplacer les mots : « par la personne majeure de son choix » par les mots : « par un membre majeur de sa famille, ou une personne qualifiée qu'elle choisit dans des conditions fixées par décret ».
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 82 et 41 rectifié ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 82. En effet, si elle a accepté une dérogation exceptionnelle au principe de l'autorité parentale, elle ne peut approuver cet amendement qui va beaucoup plus loin, puisqu'il supprime toute référence à l'autorité parentale.
Elle est en revanche également favorable à l'amendement n° 41 rectifié, la virgule ayant été déplacée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 82, car il n'entend pas déroger, pour le recours à l'IVG des mineures, au principe de l'autorisation parentale qui demeure. Il a aménagé ce principe dans le texte pour tenir compte de situations particulières, lesquelles doivent demeurer des exceptions, et permettre ainsi à des mineures qui désirent garder le secret d'avoir recours à l'IVG accompagnées d'un adulte choisi par elles.
La solution différente qui a été retenue pour la contraception dans le projet de loi va dans le sens préconisé par M. Lagauche. En effet, l'insertion d'un premier alinéa dans l'article L. 5134-1 du code de la santé publique affirme le droit d'accès à la contraception pour des personnes mineures désirant garder le secret. Cette disposition doit permettre de prévenir des grossesses non désirées et la situation de particulière difficulté qui les accompagne.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 7. En revanche, il désapprouve l'amendement n° 8. Il est en accord avec l'amendement n° 9, mais en désaccord avec l'amendement n° 10 et il a le regret de désapprouver l'amendement n° 41 de M. Chérioux.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 82.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Une partie de la réflexion qui accompagne l'amendement n° 82 est loin d'être négligeable. Elle marque - je l'ai dit dans mon intervention hier - qu'il existe une certaine incohérence en ce qui concerne la notion de majorité ou de minorité.
Par exemple, le détournement de mineurs n'existe qu'au-dessous de quinze ans. A quinze ans - et même avant - une fille est en mesure de prendre un certain nombre de décisions concernant une grossesse - par exemple l'accouchement sous X - mais elle n'est plus considérée comme mineure dans le cas d'une agression sexuelle.
On la considère comme une femme pouvant se défendre. J'en ai touché quelques mots hier à Mme Guigou, qui m'a répondu que la Chancellerie était consciente du problème.
Bien sûr, je ne vais pas pour autant voter l'amendement. J'y reste opposé. Mais je conviens qu'il pose un problème, problème qu'a d'ailleurs également soulevé hier Mme Pourtaud. Je crois qu'il faudra le régler dans un avenir proche.
M. le président. L'amendement n° 82 est-il maintenu ?
M. Serge Lagauche. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 82 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 8.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Cette série d'amendements fait intervenir des enjeux considérables qui, à l'évidence, ne remédient pas totalement aux imperfections du texte initial.
Je m'explique : nous sommes tout à fait conscients que l'assouplissement envisagé de l'obligation de soumettre à l'accord parental toute pratique de l'IVG sur une mineure se réfère à des situations souvent graves et d'autant plus dramatiques pour la jeune fille qu'elle sait - ou qu'elle pense - ne pas pouvoir compter sur le soutien et la compréhension de ses parents.
Mais se posent à mon sens deux questions qui ne sont pas bien résolues à l'heure actuelle.
La première concerne « la personne majeure de son choix ». En effet, comme M. Chérioux l'a indiqué à l'instant, en l'absence d'un minimum de garanties, la personne « choisie » par la jeune fille pourra être le père de l'enfant. Dans ce cas, son consentement sera acquis, d'autant qu'il arrive que ce soit lui qui pousse la jeune fille à se faire avorter.
Ma deuxième interrogation porte sur la responsabilité.
J'ai cru comprendre des propos de M. le rapporteur que les dispositions que nous nous apprêtons à adopter levaient les problèmes de responsabilité du médecin, et, en particulier, de l'anesthésiste. J'aimerais avoir confirmation de ce point, car les considérations juridiques qui viennent d'être développées à l'instant montrent que la situation ne peut pas être résolue avec certitude par les amendements que nous allons adopter.
Une troisième interrogation, plus inattendue, procède des entretiens que j'ai eus avec les intervenants d'IVG à Nancy. Ils ont fait observer que la possibilité donnée à la jeune fille mineure de se passer de l'autorité parentale faisait abstraction de l'obligation de fréquentation scolaire.
En effet, en période scolaire, un élève qui manque la classe pendant une demi-journée doit faire l'objet, par le chef d'établissement, d'un signalement immédiat à la famille.
Avez-vous songé aux conséquences de cette notification, monsieur le ministre, mes chers collègues, surtout si, par malheur supplémentaire, l'interruption volontaire de la grossesse étant tardive, elle devait s'opérer dans les conditions sur lesquelles nous sommes d'accord - minimum de précautions, impliquant un repos justifié après un acte particulièrement traumatisant ? Qu'adviendra-t-il alors des nouvelles dispositions de la loi ? Par le signalement scolaire, sur lequel nous ne devons pas transiger, la famille sera immédiatement alertée du fait que la jeune fille, qui se croyait à l'abri des foudres de ses parents, a été absente.
Je ne sais pas si l'on pourra m'apporter une réponse, mais je n'aurais pas été honnête avec moi-même si je n'avais pas évoqué ces questions cruciales.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Certaines mineures ne peuvent pas ou ne veulent pas solliciter l'autorisation parentale - notamment parce qu'elles savent ne pas pouvoir l'obtenir - ou, l'ayant sollicitée, ne l'obtiennent pas.
Il s'agit souvent de jeunes filles en difficulté, appartenant à des familles d'origine étrangère ou mal intégrées, ou encore à des familles au sein desquelles le sujet n'est pas abordé parcer qu'il gêne.
Pour régler ce problème, il était prévu que les mineures se fassent accompagner par une personne majeure de leur choix.
Vous voulez, monsieur le rapporteur, remplacer la notion d'accompagnement par celle d'assistance. C'est très différent, juridiquement et sur le fond.
Juridiquement, qui prendra le risque lié à l'assistance ? Personne, sinon les parents, et nous en renvenons à la situation de départ, dans un contexte où le consentement parental n'est pas accessible pour la jeune fille.
Sur le fond, cette modification pénaliserait doublement les mineures qui sont déjà très défavorisées. Elle accroîtrait les inégalités - ce qui est grave -, alors qu'en fait vous reconnaissez le principe de dérogation par rapport à un consentement parental impossible à obtenir.
Quant à nous, nous préférons résoudre complètement, avec cohérence, le problème soulevé.
M. Jean-Guy Branger. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger. Comme je l'ai dit tout à l'heure et ainsi que viennent de l'évoquer M. Huriet et Mme Dieulangard, il fait établir la responsabilité juridique.
Si l'intervention tourne mal, à qui incombe la responsabilité ? Le médecin ? Je voudrais que l'on me réponde sur ce point, car il faut absolument que nous soyons très concrets dans un domaine aussi grave.
Si une jeune fille de quatorze ou quinze ans veut se faire avorter, en dehors de toute cellule familiale sans le consentement de son père ou de sa mère, ou sans qu'ils le sachent quel adulte va juridiquement porter la responsabilité ?
On dit : elle va aller voir le médecin. Mais quelle est la situation juridique de ce dernier ? Je veux le savoir. Quand on légifère, il faut bien définir les responsabilités.
On me répondra : ce sera fait par décret. Je ne suis pas d'accord : c'est à une assemblée politique de dire à qui appartient la responsabilité dans un domaine comme celui-là. Certes, je suis passionné, mais c'est que la question est grave !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je vais essayer de répondre.
M. Hilaire Flandre. Ça va être difficile !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. La véhémence de M. Branger ne me choque pas. Au contraire, elle me plaît.
M. Jean-Guy Branger. J'espère bien !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je pense qu'il y a deux responsabilités à distinguer.
Il existe tout d'abord celle des praticiens face à l'acte à pratiquer éventuellement sur une mineure qui serait accompagnée d'un adulte. Cette responsabilité des praticiens et des établissements est la même que d'habitude. Puisque la loi prévoit que le médecin peut pratiquer l'intervention si la mineure décide de recourir à l'IVG sans l'autorisation de ses parents, dès lors, nous tombons dans le domaine de responsabilité habituelle des établissements de santé publics ou privés, avec la notion de faute détachable ou non du service.
J'ai compris aussi que vous vous interrogiez, monsieur le sénateur, sur la responsabilité de la personne majeure accompagnant la mineure. Là, le problème est plus difficile.
Voilà ce que je peux répondre : cet article institue une dérogation au principe de l'autorisation parentale si les parents ne peuvent pas être consultés, s'ils ne souhaitent pas participer au processus, ou s'ils sont opposés à l'IVG.
Dans ce cas, il est prévu que l'IVG pourra être réalisée à la seule demande de la mineure non émancipée. Celle-ci se fera accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix.
Le principe est qu'aucune responsabilité civile ou pénale de la personne ainsi désignée ne saurait être engagée par la mineure ou les titulaires de l'autorité parentale pour des faits se rattachant à sa mission ; c'est une mission d'accompagnement consentie par la loi.
Premièrement, la responsabilité ne peut être recherchée en raison de la désignation de l'accompagnant. La mineure dispose, en effet, au regard des textes, d'une liberté totale de choix, qu'elle exerce après avoir été conseillée lors de la consultation préalable à l'IVG.
Permettez-moi de revenir un peu sur ce point.
Quelle que soit l'attitude que l'on peut avoir au regard d'une consultation proposée de façon systématique, ce que disait hier Elisabeth Guigou est tout à fait fondamental : le médecin reçoit la jeune fille en consultation ; de ce fait il a une responsabilité essentielle : c'est lui qui aura le vrai, et peut-être le seul contact avec cette mineure. Il y est habitué car c'est un professionnel de ces pratiques et il pourra demander lui-même à la mineure de désigner quelqu'un.
Deuxièment, la responsabilité civile ou pénale de la personne ne saurait de même être engagée du fait même de sa mission, qui constitue une obligation légale s'imposant à elle du fait de sa désignation par la mineure et de son acceptation. Elle peut refuser mais, si elle l'accepte, sa mission devient une obligation légale.
Troisièmement, aucune faute ne peut lui être reprochée s'agissant du consentement de la mineure à l'IVG ou de la décision qui sera prise d'y procéder. Le consentement à l'IVG appartient à la seule mineure. L'entretien avec le médecin se déroule en dehors de la présence de toute autre personne. C'est pourquoi j'attachais tant d'importance, vous le comprenez, à cet entretien avec le médecin, qui retrouve un rôle absolument essentiel.
Loin de nous l'idée dans cette proposition de diminuer le rôle du médecin et de ce dialogue ou colloque singulier qui va pouvoir se dérouler.
Au terme de l'article 6 du projet, la mission de la personne désignée par la mineure ne débute qu'à partir du moment où celle-ci a notifié au médecin sa volonté de procéder à l'IVG sans en référer à l'un ou l'autre de ses parents ou malgré un refus de ses parents.
Cette analyse résulte de l'expression : « dans ce cas figurant à l'alinéa 3 », qui fait clairement du consentement à l'IVG exprimé par la mineure devant le médecin un préalable au choix et à l'intervention de cette personne. C'est lorsqu'elle aura clairement signifié sa volonté devant le médecin, bien que sa venue devant le médecin témoigne déjà d'une certaine façon de sa volonté, que le rôle de la personne qu'elle désignera sera considéré comme débutant.
Quatrièmement, la personne choisie par la mineure n'intervient pas davantage dans l'organisation de l'acte médical lui-même, ni le choix du lieu ni le choix du médecin. En cas de problème lors de l'intervention, les principes de la responsabilité médicale que j'ai rappelés tout à l'heure trouveront à s'appliquer.
En conclusion, le rôle de la personne désignée par la mineure, tel que défini par le projet que nous vous présentons, est circonscrit à une mission d'accompagnement psychologique, de soutien chaleureux, amical, amoureux - que sais-je - à la mineure dans la décision de pratiquer l'IVG et dans la démarche qui fait suite à cette décision.
En aucun cas, la personne désignée ne se substitue - c'est le point essentiel - aux titulaires de l'autorité parentale dans le pouvoir d'autoriser un acte médical.
Je vais vous épargner les cas dans lesquels la responsabilité de la personne désignée par la mineure pourrait être engagée. Je vous dirai simplement que deux situations doivent être distinguées : soit les modalités d'exécution de sa mission sont critiquées ; soit la faute reprochée à la personne est détachable de sa misson légale. Je n'entrerai pas dans le détail.
Voilà ce que je pouvais vous répondre le plus clairement possible, monsieur le sénateur.
M. Jean-Guy Branger. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Vous avez fait le maximum pour me convaincre mais je ne vous cacherai pas que, malgré vos explications très précises, selon moi, vous n'avez pas résolu le problème. Si un drame survient à l'issue d'une intervention pratiquée sur une mineure, je puis vous assurer qu'il s'ensuivra un contentieux qui sera nécessairement terrible, et je crains fort que, hélas ! l'avenir ne me donne pas tort.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 11, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer le dernier alinéa du texte présenté par l'article 6 pour l'article L. 2212-7 du code de la santé publique.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. C'est un amendement de coordination avec l'amendement proposé par la commission à l'article 4. Il s'agit de supprimer ici la référence à une deuxième consultation, intervenant après l'IVG, dans la mesure où nous avons prévu cette consultation à l'article 4.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. J'ai déjà, fort impoliment, indiqué que je demandais le rejet de cet amendement. Je persiste, bien entendu, dans cette position ; c'est la moindre des politesses...
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 6.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Les hésitations dont j'ai fait part tout à l'heure à l'occasion de la discussion des amendements n'ont pas été levées, à l'évidence, par les interventions du rapporteur et du ministre. Aussi ai-je décidé de m'abstenir sur l'ensemble de l'article 6.
Devant une situation aussi difficile, aux enjeux aussi considérables, nous devons estimer en conscience les risques et les bénéfices.
Les risques me paraissent très grands non seulement en ce qui concerne la jeune fille mineure, mais aussi s'agissant des questions de responsabilité, qui ne sont pas résolues.
Quant aux bénéfices que l'on peut attendre de ces dispositions, la référence que j'ai faite à la nécessité de la déclaration en cas d'absentéisme scolaire montre que, à mes yeux, tout au moins en période scolaire, ils seront probablement nuls. Peut-être même ces dispositions se révéleront être préjudiciables à la jeune fille.
M. Philippe Richert. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Richert.
M. Philippe Richert. Je n'ai pas voté l'amendement concernant la personne qui accompagne la mineure et c'est pourquoi je m'abstiendrai sur l'ensemble de l'article 6. Je pense en effet que nous n'avons pas réussi à trouver une véritable solution.
Très franchement, demander à n'importe quel adulte d'accompagner la mineure, comme le prévoit le texte qui nous vient de l'Assemblée nationale, ne me paraît pas satisfaisant. Bien sûr, la mineure peut trouver quelqu'un qui l'accompagnera sans qu'il y ait d'engagement de sa part. Cependant, à l'inverse, il me paraît pas possible de demander à quelqu'un de s'engager à supporter les conséquences d'un tel acte.
En vérité, aujourd'hui, je n'ai pas de solution à proposer. Je pense, d'ailleurs, que certaines mineures sont même capables de décider seules.
A mon avis, il est beaucoup plus important d'entourer ces mineures d'un groupe de conseils susceptibles de les soutenir psychologiquement que de les soutenir physiquement chez le médecin pour lui dire s'il peut ou non pratiquer l'avortement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 43:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 211
Contre 103

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - L'article L. 2212-8 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Un médecin n'est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2. » ;
« 2° Les deux derniers alinéas sont supprimés. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Au-delà de l'impérieuse nécessité d'impulser une véritable politique d'information et d'éducation à la sexualité et à la contraception, nous devons également nous attacher à permettre aux femmes optant pour une interruption volontaire de grossesse de la subir dans les meilleures conditions possibles.
A cet égard, il est capital de rappeler avec force la nécessité, à la fois, de laisser à un médecin la faculté de faire jouer la clause de conscience lorsqu'il refuse de pratiquer une IVG, et de faire en sorte que l'invocation de cette clause ne fasse jamais obstacle à l'application de la loi. Tout comme nous devons respecter le choix du praticien de se soustraire à l'exercice de cet acte, le médecin doit respecter le choix de la femme d'avoir recours à cette intervention.
Or, à l'heure actuelle, l'article L. 2212-8 du code de la santé publique prévoit qu'un chef de service peut refuser d'organiser cet acte dans son service en invoquant la clause de conscience. L'article 7 du présent projet de loi vise à supprimer les deux derniers alinéas de l'article L. 2212-8, obligeant ainsi tout chef de service d'un hôpital public à assumer l'organisation de la pratique de l'IVG, si cela a été décidé par le conseil d'administration.
Cet article ajoute par ailleurs à l'obligation, pour le médecin, d'informer la femme désirant interrompre sa grossesse de son refus de pratiquer l'IVG, celle de communiquer à l'intéressée le nom de praticiens susceptibles de réaliser l'acte.
Ces dispositions me paraissent tout à fait justifiées en ce qu'elles tendent à réaffirmer le caractère de véritable mission de service public que constitue l'accès à l'IVG, sur les plans tant qualitatif que quantitatif. L'IVG doit être accessible à toutes les femmes, à n'importe quelle période, dans n'importe quelle région du territoire français.
Je le réaffirme hautement, la notion de service public implique un élément essentiel : la continuité. La continuité du service public est, vous le savez, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, un devoir impératif de l'Etat et, pour les citoyens, un droit imprescriptible. Cette continuité est d'autant plus indispensable en ce qui concerne l'IVG, il s'agit de situations d'urgence et de profonde détresse.
Or, ce qui est au premier chef en cause dans la continuité de ce service public, ce sont les critères et le mode de recrutement des médecins qui le mettent en oeuvre. Supprimer la faculté pour un chef de service de faire barrage à toute possibilité d'IVG dans son service est nécessaire ; mais je crois tout aussi nécessaire d'inciter très vivement les hôpitaux publics comme les structures privées à recruter des médecins ne refusant pas a priori de pratiquer des IVG. Une unité, un service, un centre d'IVG ne peuvent fonctionner - et tous les praticiens concernés le reconnaissent très volontiers - qu'avec des personnels animés de la volonté d'y assurer un service et des prestations de qualité. Si l'on ne peut imposer à un médecin, chef de service ou non, la pratique de l'interruption volontaire de grossesse, il faut au moins veiller à ce qu'un nombre suffisant de praticiens acceptent, dans chaque centre d'IVG, de pratiquer cet acte.
Mon propos est d'autant plus pertinent que la situation actuelle révèle précisément, sur ce point comme sur d'autres, des disparités, tout à fait inadmissibles entre les différents services accueillant des femmes ayant choisi d'interrompre une grossesse, notamment selon la localisation de ces services.
Auditionné le 9 jenvier 2001 par la délégation aux droits des femmes, le Dr. Daniel Prévost, praticien hospitalier au centre d'orthogénie de Roubaix, s'est élevé, comme d'ailleurs nombre de ses collègues, contre les profondes inégalités qui existent entre les centres d'IVG selon leur région d'implantation, mais aussi selon leur régime juridique.
En période de vacances - et plus encore en période estivale - et dans certaines régions plus que dans d'autres, le recours à l'IVG peut se transformer en véritable parcours du combattant. Le rapport du Pr Nisand, remis à Mme Martine Aubry au mois de mars 1999, pointe d'ailleurs très clairement la fermeture, l'été, de certaines structures accueillant les femmes souhaitant une interruption volontaire de grossesse. Nul n'ignore qu'un tel état de fait entraîne précisément des grossesses non désirées, des dépassements des délais légaux, des départs à l'étranger, c'est-à-dire de véritables drames !
Bien entendu, je n'ignore pas que, l'an dernier, un abondement budgétaire supplémentaire de 12 millions de francs à permis des recrutements supplémentaires de personnels médicaux, avec, notamment, un accroissement des vacations médicales. Porté à 15 millions de francs pour 2001, cet effort est louable, mais insuffisant. Il doit être poursuivi et accru car, vous ne l'ignorez pas, de nombreux centres d'IVG demeurent en difficulté faute de moyens suffisants en personnels.
Par ailleurs, je regrette l'absence, dans le projet de loi, de toute mention concernant les moyens en appareils médicaux que l'allongement des délais de l'IVGn certes bienvenu, nécessite. Le Pr Michel Tournaire, chef du service de gynécologie obstétrique à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul et président du groupe de travail de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES, sur l'IVG - vous le savez, madame la secrétaire d'Etat - de même que le Dr Clara Pélissier, présidente de la société française de gynécologie, ont souligné, avec d'autres, que les techniques d'IVG pouvaient être différentes selon l'état d'avancement de la grossesse et que la fixation du délai à douze semaines de grossesse devrait nécessairement s'accompagner d'un aménagement technique de la plupart des centres d'IVG et d'une formation adpatée de leurs personnels médicaux et non médicaux.
J'espère vivement, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le ministre, qu'un effort financier réel sera engagé par l'Etat pour que soient appliquées ces nouvelles dispositions. Elles permettront à plusieurs milliers de femmes de ne pas partir à l'étranger pour interrompre une grossesse non désirée.
La clé fixant le tarif d'une IVG - actuellement K 30 - devra également être modifiée, du fait de la nature des IVG réalisés entre dix et douze semaines. Sans augmentation de la clé, c'est évident, le nombre de médecins acceptant de pratiquer des IVG sera réduit à la portion congrue. Emergera alors à coup sûr, dans chaque centre, une politique restrictive de quotas d'IVG.
Cette idée de déterminer un nombre maximum d'IVG afin de ne pas dépasser les budgets menace les droits de celles que le projet de loi se donne justement pour objectif d'aider. Ne laissons pas les suites financières données à cette loi devenir un piège et déboucher sur un contresens !
Enfin - et ce sera le dernier point de mon intervention - je tiens à souligner que, si les moyens du service public de l'IVG sont, notamment de l'avis des praticiens concernés eux-mêmes, très insuffisants, on observe également une crise nette de l'engagement médical au service des interruptions volontaires de grossesse.
Activité éprouvante n'offrant guère de motifs de satisfaction et relativement méprisée par une partie du corps médical, l'IVG fait l'objet de rémunérations on ne peut moins attractives : de 200 à 400 francs, par exemple, par demi-journée de présence dans le service pour les praticiens contractuels !
Les générations de médecins militants qui ont combattu pour la loi Veil ne sont pas remplacées par des praticiens plus jeunes, que rien n'attire dans cette activité.
Un phénomène de démographie médicale, en chute libre, se fait donc jour dans cette branche, menaçant gravement la continuité et la qualité du service public de l'IVG et affectant durement la réalité du droit des femmes à l'interruption volontaire de grossesse.
Monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, le projet de loi répond à une situation pour laquelle une solution doit être trouvée : 7 000 femmes sont obligées d'aller hors de France, dans un autre pays européen, pour interrompre une grossesse. Cela n'est plus tolérable !
M. le président. Veuillez conclure, je vous prie, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. J'en termine, monsieur le président !
Il est donc indispensable que des moyens financiers et en personnels soient alloués à nos centres hospitaliers pour que les femmes, toutes celles qui le souhaitent, puissent exercer leur liberté de choisir l'interruption volontaire de grossesse, avec toutes les garanties médicales auxquelles elles ont droit, et de le faire le plus tôt possible, dès les premières semaines de la grossesse et, en tous les cas, dès qu'elles le désirent.
M. le président. Par amendement n° 47, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de remplacer le dernier alinéa (2°) de l'article 7 par deux alinéas ainsi rédigés :
« 2° Les deux derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les établissements hospitaliers appartenant aux catégories mentionnées à l'alinéa précédent, chaque fois que le nombre d'interruptions de grossesse et le volume de l'activité orthogénique le nécessitent, le responsable du service organise en son sein une unité fonctionnelle. Celle-ci doit comprendre à la fois une activité de planification de contraception et d'interruptions volontaires de grossesse. »
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet amendement vise à assurer l'existence d'unités fonctionnelles et à mieux les identifier.
En effet, il apparaît clairement que, lorsqu'elles existent, ces structures sont celles qui fonctionnent le mieux et réalisent dans de bonnes conditions un nombre d'IVG répondant à la demande.
En effet, les huit cent unités fonctionnelles réparties sur notre territoire jouent, du fait de leur organisation et de leur statut, un rôle extrêmement important.
Rappelons qu'elles sont composées d'équipes plus soudées et plus à l'écoute, car ce sont des personnes volontaires. Rappelons encore qu'elles sont les protagonistes du développement de techniques nouvelles, comme la méthode médicamenteuse, par exemple. Soulignons enfin que ce mode de fonctionnement permet de ne pas mélanger au sein du même service les femmes qui viennent pour une interruption de grossesse et celles qui viennent pour un accouchement.
Pour toutes ces raisons, je voudrais, madame la secrétaire d'Etat, monsieur le ministre, qu'on ne les oublie pas et que le Gouvernement nous assure qu'elles disposeront des moyens nécessaires pour continuer le travail remarquable qu'elles font.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission souhaiterait entendre d'abord l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je me sens extrêmement important. (Sourires.)
M. le président. Mais vous l'êtes !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. M. le président est trop bon ! (Nouveaux sourires.)
Je ne commencerai pas par la réponse. Mais, de vous à moi, madame, je voudrais, moi aussi, pouvoir disposer de l'argent dont j'ai besoin, notamment pour transformer en profondeur notre système de soins !
La difficulté, c'est que, dans notre système, il y a, d'un côté, la dépense et, de l'autre, l'argent, qui vient d'ailleurs.
Mme Hélène Luc. C'est parce que nous voulons vous aider !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je vous demande de continuer, car je ne suis pas au bout de mes peines !
Si j'avais l'argent, je vous le donnerais tout de suite ! Seulement, voilà : l'argent est celui des Français, il circule dans un autre système, il est bloqué dans une enveloppe fermée tous les ans, etc. C'était là un aparté.
J'en viens maintenant à la réponse officielle.
Dans les établissements de pensée publique... Quel lapsus, car je voudrais précisément un établissement de pensée publique pour la santé publique !
Dans les établissements publics de santé, voulais-je dire, qui sont tenus d'assurer une activité d'IVG, le conseil d'administration doit organiser cette activité, comme toute autre activité médicale, conformément aux dispositions du 5e alinéa de l'article L. 6143-1 et des articles L. 6146-1 à L. 6146-8 du code de la santé publique qui fixent l'organisation médicale de droit commun des établissements publics de santé, laquelle est nécessairement constituée en unités fonctionnelles, services ou départements, voire en structures libres.
L'organisation proposée, qui regroupe activités d'orthogénie et activités d'IVG, est logique. Mais, en tout état de cause, il appartient au chef de service ou de département d'assurer la conduite générale du service ou du département et d'organiser son fonctionnement technique, dans le respect de la responsabilité médicale de chaque praticien et des missions dévolues à chaque unité fonctionnelle par le projet de service ou de département, comme le précise l'article L. 6146-5 du code de la santé publique.
Pour ce qui est de l'activité d'orthogénie elle-même, elle est assurée par les organismes de planification, d'éducation et de conseil familial. Les établissements publics de santé qui assurent les IVG doivent obligatoirement comporter un centre d'éducation familiale ou de planification agréé, aux termes de l'article 2 du décret n° 88-59 du 18 janvier 1988 pris en application des articles L. 2212-8 et L. 2212-9 du code de la santé publique.
Afin d'améliorer l'organisation de l'activité des centres d'orthogénie, des crédits d'un montant total de 12 millions de francs, destinés à créer des postes de praticiens dans les établissements publics, ont été accordés à l'ensemble des régions en fin d'année 1999. Cet effort sera poursuivi à hauteur de 15 millions de francs en 2001. Je note au passage que lesdits praticiens sont horriblement mal payés et qu'ils ont vraiment du mérite à continuer d'exercer !
Permettez-moi de rappeler que le budget total alloué cette année à l'ensemble du dispositif de soins et de santé publique dans notre pays est de 900 milliards de francs ; vous pouvez, à cet égard, vous reporter à l'excellent document sur la santé publique que j'ai publié hier. Là, nous en sommes à 15 millions de francs. Vous voyez l'effort...
De surcroît, un groupe national d'accompagnement et d'appui des centres d'IVG sera mis en place dès la publication de la loi. Composé de responsables hospitaliers, de médecins, d'infirmières et de personnalités qualifiées, il sera chargé de proposer les mesures nécessaires à l'amélioration de l'organisation des activités d'IVG.
J'ai donc le regret, madame, de devoir être contre votre amendement, mais, aux termes de la loi, il ne peut en être autrement.
M. Francis Giraud, rapporteur. Très bien !
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Jean Delaneau, président de la commission. La commission a souhaité que M. le ministre donne son avis avant qu'elle n'indique le sien, mais elle aurait pu exprimer celui-ci dans les mêmes termes.
Les unités fonctionnelles peuvent figurer dans les projets que font les chefs de service. Ensuite se déroule une discussion avec les agences régionales de l'hospitalisation, qui disposent éventuellement, dans le cadre de la dotation régionale, d'un certain nombre de crédits supplémentaires - vous avez dit tout à l'heure, monsieur le ministre, que ces 12 millions de francs étaient répartis au niveau régional.
Dès lors, cette question n'est pas du ressort de la loi.
M. le président. Madame Campion, l'amendement n° 47 est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion. Non. Nous le retirons, et nous remercions M. le ministre de ses explications.
M. le président. L'amendement n° 47 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7 bis



M. le président.
« Art. 7 bis. - I. - L'article L. 2322-4 du même code est abrogé.
« II. - L'article L. 2322-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe les installations autorisées dont les établissements de santé privés sont tenus de disposer lorsqu'ils souhaitent pratiquer des interruptions volontaires de grossesse. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 7 bis



M. le président.
Par amendement n° 83, M. Lagauche, Mme Pourtaud, MM. Lagorsse et Bellanger proposent d'insérer, après l'article 7 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le chapitre II du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code de la santé publique, est inséré un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre... Interruption volontaire de grossesse pratiquée après la douzième semaine de grossesse.
« Article L... . - Au-delà de la douzième semaine de grossesse, l'interruption volontaire de grossesse est autorisée uniquement dans des établissements d'hospitalisation habilités et répartis sur l'ensemble du territoire en fonction des besoins.
« Les conditions de fonctionnement, la répartition et le nombre de ces établissements sont fixés par un décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je suppose que cet amendement n'a plus d'objet, dans la mesure où il vise les IVG pratiquées au-delà de douze semaines de grossesse.
Cela étant, mon principal souci est que chaque femme qui en exprime le besoin puisse recourir à l'IVG. Que certaines d'entre elles soient obligées de se rendre à l'étranger pour le faire m'est tout simplement intolérable, et je ne suis pas seul à penser ainsi dans cet hémicycle. Il nous faut donc apporter une solution à toutes les femmes qui, pour des raisons complexes et multiples, ont dépassé le délai de douze semaines. C'est une question de justice sociale.
Comme j'avais demandé tout à l'heure que les établissements déjà existants procèdent aux IVG pratiquées avant douze semaines, je propose maintenant que des établissements spécialisés, implantés dans chaque région et dotés des moyens permettant de faire face aux besoins, soient créés pour les IVG pratiquées au-delà de douze semaines.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. L'avis de la commission est très défavorable. Il n'y aurait plus aucune limite et cela reviendrait à instaurer le droit à l'avortement sans délais, après la douzième semaine ou plus tard.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. J'ai déjà dit qu'il n'était pas dans les intentions du Gouvernement d'aller au-delà de la douzième semaine. Je suis donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Lagauche, maintenez-vous cet amendement ?
M. Serge Lagauche. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 83 est retiré.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Merci, monsieur Lagauche !

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - L'intitulé du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième partie du même code est ainsi rédigé : "Interruption de grossesse pratiquée pour motif médical". » - (Adopté.)

Article 8 bis



M. le président.
« Art. 8 bis . - L'article L. 2213-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-1 . - L'interruption volontaire d'une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ou s'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic. Cette décision ne peut être prise qu'après que la réalité de l'une ou l'autre de ces situations a été appréciée par une commission pluridisciplinaire.
« Cette commission comprend au moins trois personnes qui sont une personne qualifiée, un médecin choisi par la femme concernée et un médecin responsable de service de gynécologie obstétrique. Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic prénatal, le deuxième médecin exerce son activité dans un centre de diagnostic prénatal pluridisciplinaire. Un décret en Conseil d'Etat précise la composition et les modalités de fonctionnement de cette commission.
« La femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par la commission. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 30, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article L. 2213-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-1. - L'interruption volontaire de grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins d'une équipe pluridisciplinaire attestent après concertation que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ou qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic. L'avis de la commission peut être sollicité par un médecin ou par la femme.
« Lorsque l'interruption de grossesse est envisagée au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, la commission de concertation pluridisciplinaire comprend un médecin choisi par l'intéressée, un médecin spécialiste qualifié en gynécologie obstétrique et un médecin spécialiste qualifié pour traiter du problème de santé spécifique de la femme. Ce dernier, ainsi que le médecin spécialiste qualifié en gynécologie obstétrique doivent exercer leur activité dans un établissement public de santé ou dans un établissement de santé privé satisfaisant aux conditions de l'article L. 2322-1.
« Si l'interruption de grossesse est envisagée au motif qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic, la concertation pluridisciplinaire est menée au sein d'un centre de diagnostic prénatal mentionné à l'article L. 2131-1 du présent code en présence d'un médecin choisi par la femme.
« La femme concernée ou le couple peut, à sa demande, être entendu par la commission ou l'un de ses membres. »
Par amendement n° 65, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 8 bis pour l'article L. 2213-1 du code de la santé publique, après les mots : « met en péril grave la santé », d'insérer les mots : « , prise au sens d'un état de bien-être physique, mental et social, ».
Par amendement n° 12, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose dans la première phrase du premier alinéa du texte présenté par l'article 8 bis pour l'article L. 2213 du code de la santé publique, après les mots : « la santé de la femme », d'insérer les mots : « , y compris sa santé psychique, appréciée notamment au regard de risques avérés de suicide ou d'un état de détresse consécutif à un viol ou un inceste, ».
Par amendement n° 13, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose, après les mots : « qui sont », de rédiger comme suit la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte présenté par l'article 8 bis pour l'article L. 2213-1 du code de la santé publique : « un médecin choisi par la femme concernée, un médecin gynécologue-obstétricien et une personne qualifiée n'appartenant pas au corps médical ».
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 30.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le souci de mettre en oeuvre une procédure de concertation collégiale préalablement à la réalisation des interruptions médicales de grossesse envisagées au motif que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ou qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic apparaît légitime ; il est partagé par les professionnels confrontés à ces situations difficiles.
Dans le cadre des dispositifs à mettre en place pour répondre à cet objectif, il convient de s'assurer de la qualité de la concertation menée, d'une part, entre les experts concernés par le problème médical de la femme ou du foetus et, d'autre part, avec la femme, ou le couple touché par un problème majeur de la grossesse.
Le motif médical étant le fait justificatif prévu par la loi pour les interruptions de grossesse de cette nature, il convient de confier son appréciation à des praticiens dans le cadre d'une concertation pluridisciplinaire.
En ce qui concerne les interruptions médicales de grossesse, les IMG, pour anomalie du foetus, il est nécessaire d'inscrire clairement la concertation préalable dans le cadre des centres de diagnostic prénatal pluridisciplinaires, dont les professionnels s'accordent à reconnaître la réelle compétence d'expertise et l'aide véritable qu'ils apportent aux praticiens et aux femmes dans les indications d'interruptions médicales de grossesse.
S'agissant des interventions liées à un problème de santé de la femme, il convient de créer une instance de concertation pluridisciplinaire composée de médecins dont les qualités permettent de procéder à l'expertise de la pathologie touchant la femme.
Le dispositif proposé prévoit dans toutes les situations la réunion d'une instance de concertation unique compte tenu de la nécessité d'aboutir à une décision rapide. La procédure doit en effet tenir compte de la difficulté de l'épreuve que représente, pour la femme concernée, cette période d'expertise.
Par ailleurs, l'introduction d'un médecin choisi par la femme renforce le droit de celle-ci à être entendue dans le cadre de la procédure. Cette disposition est susceptible de faciliter la concertation entre l'instance d'expertise et l'intéressée, ainsi que l'information de cette dernière.
M. le président. La parole est à M. Muzeau, pour défendre l'amendement n° 65.
M. Roland Muzeau. Le texte de cet article 8 bis , qui traite de l'interruption de grossesse pour motif médical, expose les modifications résultant de la requalification de l'interruption thérapeutique de grossesse en interruption médicale de grossesse. Ces modifications ne sont pas seulement d'ordre sémantique puisque les nouvelles dispositions renforcent le caractère collégial de la prise de décision et prévoient que la femme ou le couple concerné pourra être entendu, à sa demande, par une commission pluridisplinaire mise en place dans le cadre de cette évolution des textes en vigueur à ce jour.
Certes, le terme « médical » autorise une prise en compte plus large et une appréciation plus ouverte de l'état de santé de la femme confrontée à une interruption de grossesse que le qualificatif « thérapeutique ».
Cela étant dit, nous pensons qu'il convient de préciser le terme « santé » afin de mieux prendre en considération la globalité de cette notion qui recouvre plusieurs aspects.
C'est pourquoi nous proposons de compléter le texte en y incluant les prescriptions de l'Organisation mondiale de la santé, qui définit la santé comme « un état de bien-être physique, mental et social ».
Selon nous, cette précision permettra de mieux répondre à certaines situations difficiles. Aussi nous vous demandons, mes chers collègues, d'adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter les amendements n°s 12 et 13 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 30 et 65.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'amendement n° 12 témoigne du fait que la commission approuve la réforme de la procédure de l'IMG proposée par l'Assemblée nationale.
Cette nouvelle procédure présente l'avantage d'être véritablement collégiale, puisque la commission comprend au moins trois membres. En outre, la composition de cette commission est pluridisciplinaire, et non plus exclusivement médicale. La présence d'une personne qualifiée, qui pourrait être une conseillère conjugale, une psychologue ou une assistante sociale, permettra sans doute une plus grande diversité d'approche.
Votre commission propose donc d'adapter cet article en le complétant. En effet, si elle vous demande de rejeter l'allongement du délai légal de l'IVG, elle estime néanmoins indispensable d'apporter une réponse à la détresse des femmes qui dépassent le délai légal. Elle propose, par conséquent, que ces situations puissent être prises en charge dans le cadre de la procédure de l'interruption médicale de grossesse telle qu'elle est réformée par le présent article. Cet amendement vise à compléter le texte proposé afin d'ajouter que la référence à la santé de la femme inclut sa santé psychique. Cette précision permettrait la prise en charge des situations les plus douloureuses, qui constituent souvent l'essentiel des cas de dépassement de délai.
En ce qui concerne l'amendement n° 30 nous avons éprouvé quelque difficulté pour comprendre la procédure proposée. Il n'y a rien à redire s'agissant des dispositions qui étaient déjà prévues par la loi Veil, à savoir les anomalies mettant gravement en cause la santé de la femme ou le foetus. En revanche, pour ce qui est des interventions liées à un problème de santé de la femme, notre rédaction, tout en maintenant bien sûr la primauté de la médecine - cela ne vous étonnera pas de la part du rapporteur - prévoit, au sein de cette commission, la présence d'une personne qualifiée. Ainsi, cette commission ne serait plus strictement médicale. C'est pourquoi nous sommes défavorables à l'amendement n° 30.
Quant à l'amendement n° 65, qui vise à préciser, en reprenant la définition de l'Organisation mondiale de la santé, que la santé est un bien-être physique, mental et social, il ne nous paraît pas très adapté à la situation. En tout cas, il est incompatible avec la position de la commission, la définition proposée étant trop large. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 65, 12 et 13 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. S'agissant de l'amendement n° 65, l'élargissement des indications d'intervention médicale à la détresse psychosociale est, selon nous, contraire à l'esprit de la loi de 1975. Aussi, nous sommes défavorables à cette disposition.
Nous sommes également défavorables aux amendements n°s 12 et 13. Le souci de mettre en oeuvre une nouvelle procédure de concertation collégiale préalablement à la réalisation des IMG envisagées au motif que la poursuite de la grossesse met en péril la santé de la femme paraît légitime et partagé par les professionnels. En ce qui concerne les IMG envisagées en raison d'une anomalie embryonnaire ou foetale, il convient d'inscrire clairement l'expertise médicale dans le cadre du fonctionnement des centre multidisciplinaires.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 65.
M. Roland Muzeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Les explications de M. le ministre sont certes intéressantes, mais elles ne correspondent pas à l'appréciation que nous portons sur le terme « médical ». Il convient de retenir la définition donnée par l'Organisation mondiale de la santé. C'est pourquoi nous maintenons notre amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 65, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
Mme Claire-Lise Campion. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Vous nous proposez, par cet amendement, d'élargir le champ de l'interruption médicale de grossesse.
Si a priori on ne peut que souscrire à l'ouverture supplémentaire de l'IMG à la santé psychique de la femme, votre amendement vise en fait à réintroduire au-delà du délai de dix semaines l'obligation pour les femmes de justifier leur demande devant une commission.
Selon nous, ce subterfuge vise à culpabiliser une fois encore la femme et semble attentatoire à sa dignité.
Il s'agit bien d'un subterfuge car vous omettez par ailleurs d'indiquer ce qu'il adviendra des femmes entendues par la commission qui se verront refuser une interruption médicale de grossesse et qui se retrouveront dans le désarroi le plus total, avec, n'en doutons pas, le sentiment d'avoir été trompées. Quelle solution leur proposerez-vous alors ?
Nous ne voterons pas cet amendement.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je souhaiterais obtenir une précision de la part de la commission. La formulation qu'elle propose est-elle restrictive ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Non !
M. Patrick Lassourd. C'est bien ce qui m'avait semblé en vous entendant exposer l'amendement. Vous parliez bien de santé psychique, sans autre précision. Par conséquent, la suite de la rédaction qui nous est proposée figure donc à titre d'illustation.
M. Francis Giraud, rapporteur. En effet !
M. Patrick Lassourd. Cependant, certains juristes ne considéreront-ils pas cette rédaction de manière restrictive ? Je me demande si, à leurs yeux, la mise en péril de la santé psychique de la femme, ce ne seront pas uniquement les risques avérés de suicide ou l'état de détresse consécutif à un viol ou un inceste.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Compte tenu de la présence de l'adverbe « notamment », qu'il n'est d'ailleurs pas bon de faire figurer dans un texte législatif, il s'agit simplement d'exemples. Ce sont les exemples les plus marquants, mais aucune autre situation n'est écartée.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Il était important que cette précision soit apportée et qu'elle figure dans le compte rendu des débats. En effet, ce texte aurait pu être interprété d'une manière différente. En tout cas, au vu des explications de M. le président de la commission, je suis favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Comme je l'ai précisé ce matin en commission, je ne peux voter cet amendement. Nous sommes dans le cadre de la procédure d'interruption médicale de grossesse. Aussi, je ne vois pas les raisons pour lesquelles il conviendrait d'introduire dans cette commission « une personne qualifiée n'appartenant pas au corps médical ». Si la formulation précisait qu'il s'agit d'« une personne appartenant à une profession de santé autre qu'une profession médicale », peut-être y aurais-je souscrit. En l'occurrence, c'est la porte ouverte à des personnes qui n'ont pas à connaître des situations médicales et qui ne sont pas tenues au respect du secret médical. Si M. le rapporteur pouvait citer un exemple de personnes qualifiées auxquelles il a songé, peut-être serai-je amené à voter ce texte. Par cette référence à un tiers n'exerçant pas une profession de santé, n'étant pas médecin, on risque d'introduire une dimension allant au-delà des intentions du rapporteur.
M. Lucien Neuwirth. Cela peut être un psychologue !
M. Francis Giraud, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. La remarque de M. Claude Huriet est justifiée. L'introduction de la référence à une personne qualifiée visait à ne pas médicaliser à outrance la commission pluridisciplinaire. La présence de deux médecins paraissait suffisante. Vous avez raison, la troisième personne doit aussi être tenue au secret médical. Une assistante sociale, par exemple, n'a pas à divulguer partout les propos qui sont tenus devant elle.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Cela lui est même interdit !
M. Francis Giraud, rapporteur. Même si on n'est pas médecin, on peut être tenu au secret.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Monsieur le président, je rectifie l'amendement n° 13, en introduisant, après les mots : « n'appartenant pas au corps médical », les mots : « mais tenue au secret professionnel ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 13 rectifié, et tendant, après les mots : « qui sont », à rédiger comme suit la fin de la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par l'article 8 bis pour l'article L. 2213-1 du code de la santé publique : « un médecin choisi par la femme concernée, un médecin gynécologue-obstétricien et une personne qualifiée n'appartenant pas au corps médical mais tenue au secret professionnel ».
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8 bis , modifié.

(L'article 8 bis est adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - A l'article L. 2213-2 du même code, les mots : "pour motif thérapeutique" sont remplacés par les mots : "pour motif médical". »
Par amendement n° 62, M. Carle propose de compléter cet article par les mots : « et les mots : "interruption volontaire de la grossesse" par les mots : "interruption de la grossesse". »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9.

(L'article 9 est adopté.)

Article additionnel après l'article 9



M. le président.
Par amendement n° 26, M. Huriet propose d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 16 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Nul n'est recevable à demander une indemnisation du seul fait de sa naissance. »
La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Pour la première fois en France, la Cour de cassation s'est déclarée, le 17 novembre dernier, dans l'arrêt « Perruche », favorable à l'indemnisation d'un enfant pour le fait d'être né handicapé. La rubéole de la mère de cet enfant n'ayant pas été diagnostiquée en raison d'une erreur médicale, il n'avait pu être procédé à une interruption de grossesse, selon la volonté des parents.
Cette décision a suscité une émotion très légitime dans l'opinion publique et particulièrement chez les parents d'enfants handicapés. Elle revient, en effet, à considérer que la vie humaine est susceptible de constituer, en elle-même, un préjudice et que l'on peut indemniser un enfant pour le préjudice d'être né. On pourrait dès lors en déduire que certaines vies ne valent pas la peine d'être vécues et que la mort peut être parfois préférable à une vie handicapée.
Les conséquences d'une telle décision, notamment si elle venait à être confirmée par la Cour de cassation, actuellement saisie de trois affaires comparables, sont graves et appellent, à l'évidence, une réponse forte du législateur. Il revient par conséquent au Parlement de réaffirmer la primauté de la vie et l'égalité de toutes les vies en inscrivant dans le code civil que nul n'est recevable à demander une indemnité du seul fait de sa naissance.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Cet amendement fait suite à un amendement soutenu par M. Mattéi, lors de la discussion à l'Assemblée nationale du projet de loi de modernisation sociale. Comme Elisabeth Guigou a eu l'occasion de le dire à l'Assemblée nationale, la Cour de cassation, dans sa décision du 17 novembre 2000, a estimé que l'enfant pouvait obtenir réparation sur le terrain délictuel du préjudice résultant de son handicap et causé directement par les fautes commises dans l'exécution du contrat entre sa mère et le médecin. En l'espèce, il était incontestable qu'il y ait eu faute.
Pour la Cour de cassation, le préjudice de l'enfant est de même nature que celui que l'on a reconnu aux parents, celui qui résulte du handicap. La Cour de cassation n'a en aucun cas évoqué la question du préjudice lié à la naissance. Mais, de fait...
Cependant, il est évident que cet arrêt a soulevé des craintes, celles qui ont été suscitées par les interprétations qui pourraient être données à cette décision. Les enfants se retourneront-ils contre leurs parents ? Les risques de judiciarisation contre les médecins à toute occasion et les dérives eugéniques apparaissent manifestes.
Nous avons appelé à traiter ces questions avec sérieux, sérénité et dignité, en ne légiférant pas dans l'urgence. Tout le monde ici partage ce sentiment, me semble-t-il.
Il est effectivement important de recenser toutes les questions et de recueillir tous les avis. Depuis, d'ailleurs, d'autres questions ont été soulevées. Je pense notamment aux professionnels de l'échographie foetale, qui ont exprimé leur inquiétude, le 6 mars dernier, sur un possible amalgame entre échographie pratique de dépistage et examen diagnostique, ce qui était d'ailleurs une façon de dissimuler de vraies anxiétés.
De même, aux critiques qui se sont multipliées après cette décision, ont succédé dans les revues juridiques des commentaires favorables à cet arrêt : Patrice Jourdain, professeur à Paris-V, et Frédérique Dreifus-Netter, professeur à Paris-V, dans Médecine et droit de janvier-février 2001, se sont exprimés dans ce sens.
Il convient d'ajouter également, come vous l'indiquez, que la Cour de cassation statue aujourd'hui même sur trois affaires traitant de sujets proches. Nous sommes donc dans un embarras profond et le Gouvernement ne souhaite pas prendre partie à ce niveau, d'autant que la Cour de cassation rendra sa décision, si je ne m'abuse, la semaine prochaine.
Et puis, comme Mme Guigou s'y était engagée à l'Assemblée nationale, elle a saisi le comité consultatif national d'éthique, qui rendra son avis le 15 mai prochain.
Telles sont les raisons qui me poussent à vous demander de ne pas maintenir cet amendement pour le moment, monsieur le sénateur, et d'attendre au moins cet avis, ainsi que celui de la Cour de cassation.
Je comprends votre inquiétude et je la partage. Cet arrêt m'a conduit, comme vous tous, à m'interroger. Il nous place, en effet, dans une situation très difficile, les médecins en particulier. Plus les méthodes d'investigation modernes se feront précises et plus nous aurons des problèmes. Mais je crois plus judicieux - je m'en remets donc à votre sagesse - d'attendre avant de prendre position sur ce sujet.
M. Claude Huriet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le président, la question est si grave et si complexe que je souhaite intervenir de nouveau et apporter d'abord une précision en ce qui concerne le calendrier, monsieur le ministre.
Il est vrai que la Cour de cassation a été saisie de trois dossiers assez comparables à l'affaire « Perruche ». Mais, contrairement à l'information que vous avez - et que j'avais moi-même jusqu'à ce matin - la chambre sociale de la Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer en renvoyant à la Cour de cassation siégeant en session plénière ces trois dossiers, la décision devant intervenir à une date que j'ignore.
Cela pose problème au législateur : au fond, la Cour de cassation, dont je ne connais pas les motivations eu égard à cette procédure nouvelle et au calendrier incertain, attend-elle une réponse de la loi, ou bien d'autres raisons l'ont-elle poussée à surseoir ?
En ce qui concerne la saisine du Comité consultatif national d'éthique, dont Mme Guigou avait fait état lors de la discussion à l'Assemblée nationale, celle-ci est intervenue voilà huit jours seulement. Mais j'ai cru comprendre que la démarche de Mme la ministre consistait à interroger le Comité consultatif national d'éthique pour savoir s'il lui paraissait opportun que le législateur intervienne. Si telle est bien sa pensée, bien qu'appartenant à ce comité, je ne peux pas la suivre. Il revient en effet au législateur, et à lui seul, de décider s'il y a matière à légiférer ou non ! Il y a donc là des ambiguïtés qu'il convient de lever.
Monsieur le ministre, si le législateur ne se prononce pas maintenant en toute sérénité, mais dans l'urgence, comme l'y oblige la procédure retenue par le Gouvernement pour ce texte, nous risquons de voir la Cour de cassation créer une jurisprudence qui s'inspire de l'arrêt « Perruche ». Dans un tel cas, si le législateur décide d'intervenir, peut-être sera-t-il trop tard !
C'est la raison pour laquelle je défends avec vigueur l'amendement que je viens de présenter.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Ce problème nous a été soumis aujourd'hui. Evidemment, on a toujours une certaine réticence à vouloir dire le droit sans avoir connaissance de tous les éléments. Mais, comme l'a indiqué Claude Huriet, il y a eu l'arrêt « Perruche », qui, s'il n'est pas discutable, est tout au moins discuté, car il n'a pas de véritable fondement juridique. Les choses paraissent maintenant s'accélérer, cet arrêt suscitant sans doute un phénomène d'imitation chez les justiciables.
C'est le problème de la poule et de l'oeuf : la loi doit-elle suivre la jurisprudence ou bien la jurisprudence doit-elle suivre la loi ? Comme vient de le rappeler M. Huriet, le rôle du législateur est d'intervenir pour faire la loi.
En l'occurrence, on sait bien que, si cet amendement était adopté, comme je le souhaite personnellement, il ne modifierait pas pour autant la loi : il faut que ces mesures soient reprises par l'Assemblée nationale, qu'aucun recours ne soit déposé, que la loi soit promulguée... Bref, l'adoption de cet amendement n'aurait pas d'effet immédiat sur les dispositions en vigueur. Mais cela pourrait nous donner l'occasion de montrer que notre assemblée, notamment sur le plan du droit de haut niveau, est très entendue et respectée. Peut-être ce signal est-il attendu par les personnes de très grande compétence de la Cour de cassation qui cherchent à s'orienter dans un débat qui est complexe à la fois pour nous, pour la Cour de cassation et pour le Gouvernement. Ce signal, nous avons le droit et peut-être aussi le devoir de le donner. Nous verrons ce qu'il en résultera.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je souhaite intervenir, car ce sujet m'intéresse puissamment. Mais je ne reviendrai pas sur mon conseil de sagesse et d'attente.
Cela étant, je comprends bien, à la suite des explications que M. Huriet vient de donner, la motivation qui sous-tend cet amendement : il nous faut nous prononcer à cet égard dans les plus brefs délais. Et puis, la saisine du Comité consultatif national d'éthique ne sera peut-être pas suffisante.
Je crois quand même que, sur un problème aussi important, vous venez de le dire, si nous commençons comme cela, d'abord, la pratique médicale, dont la majorité des habitants de ce pays bénéficient quand même, va devenir extrêmement difficile.
Par ailleurs, encore une fois, la phrase que vous proposez d'insérer dans le code civil m'interpelle personnellement, gravement, si je puis me permettre cette expression : « Nul n'est recevable à demander une indemnisation du seul fait de sa naissance. » En effet, si cela est vrai, où va-t-on ?
Je suis donc très embarrassé. Je vais vous donner lecture d'un extrait de la lettre qu'Elisabeth Guigou a adressée à Didier Sicard.
« Est-il nécessaire d'encadrer, par les voies les mieux appropriées, les bonnes pratiques médicales qui devraient présider tant en diagnostic prénatal ou pré-implantatoire que, le cas échéant, aux conditions de réanimation néonatale, de manière à préciser la portée en ces domaines des obligations imposées aux professionnels de santé et à en circonscrire, par voie de conséquence, les faits de nature à engager leur responsabilité ? »
La formulation est complexe, mais je la comprends ! Ce n'est pas seulement la question : la portée de la phrase que vous proposez est beaucoup plus large, et c'est la raison pour laquelle celle-ci est très forte. Bien sûr, il y a, je le comprends bien, les obligations professionnelles de bonne pratique - on les connaît depuis longtemps - et il y a aussi les difficultés de diagnostic. Tout cela existe ! Et puis, il y a cette interrogation majeure.
Alors, pardonnez-moi, mais je reste sur ma position et je vous demande de surseoir à une prise de position sur ce sujet. Votre amendement marquera profondément les esprits, monsieur Huriet, et cela, je l'admets.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 26.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Je voterai sans aucune hésitation cet amendement parce que, comme beaucoup d'autres certainement, j'ai été stupéfait d'apprendre la décision de la Cour de cassation.
Le principe qui est affirmé par notre collègue Claude Huriet dans cet amendement se situe au-delà du droit : il est « métajuridique ».
Il est même étonnant que l'on soit obligé de le rappeler aujourd'hui dans un texte de loi : il devrait s'imposer au législateur comme à tous les juristes, sans que l'on ait à en débattre ou même à le préciser dans la loi. Il est triste que nous en soyons là. C'est aussi la raison pour laquelle, sans aucune hésitation, je le répète, je voterai cet amendement.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. M. Huriet a soulevé un problème fort complexe qui, tant sur le plan humain que sur celui du respect de la vie ou de la bioéthique mérite, me semble-t-il, un très large débat permettant d'évoquer tous ses aspects. Avec le talent qu'on lui connaît, il a argumenté de façon convaincante sur l'attitude de la Cour de cassation et la responsabilité du législateur.
C'est vrai, le législateur a des droits et des devoirs auxquels il ne peut se dérober. Mais c'est précisément parce qu'il a des droits et des devoirs qu'il doit prendre le temps d'une réflexion sereine.
Or, il serait, à mon avis, préjudiciable à la sérénité de nos débats, le cas souvent mise en avant, de prendre une position aussi rapide à la faveur d'un texte qui ne traite pas à proprement parler du sujet. La sagesse commande que nous prenions le temps de la réflexion.
M. le rapporteur a dit qu'il fallait donner un signal. C'est une notion intéressante. Mais la discussion qui vient de s'instaurer ne peut-elle pas être considérée comme un signal qui nous permettra de revenir sur ce problème à l'occasion de la discussion d'un autre texte ?
Voilà pourquoi je suis le Gouvernement lorsqu'il demande aux collègues qui sont convaincus de la justesse de leur position de surseoir à leur décision.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je dois avouer que, comme notre collègue Bernard Sellier, j'ai été scandalisé par la décision de la Cour de cassation. Que l'on puisse demander une indemnité à un praticien parce qu'il vous a en quelque sorte sauvé la vie est extravagant.
Je sais bien que le sujet mérite réflexion. Mais il ne faudrait pas inverser les rôles : c'est le législateur qui a fait la loi, pas la Cour de cassation. Et si la Cour est amenée à surseoir à statuer, peut-être est-ce aussi parce qu'elle voudrait savoir quelle est la position du législateur. Il est donc du devoir du Sénat de donner un signal.
M. le ministre prétend que c'est quelque peu prématuré. Mme Bidard-Reydet, quant à elle, estime que la tenue même de notre débat constitue un signal. On aurait peut-être pu considérer qu'il n'était pas nécessaire de voter l'amendement aujourd'hui s'il n'y avait pas eu déclaration d'urgence. Mais, comme il n'y aura pas de navette, si nous ne l'adoptons pas aujourd'hui, nous n'aurons plus la possibilité de le réintroduire dans le texte ultérieurement. Notre devoir est donc de le voter.
Si le Gouvernement considère que notre signal ne lui convient pas, il lui appartiendra de prendre ses responsabilités, car il a toujours le droit d'amender. Ce faisant, il prendra ses responsabilités ; nous, nous prenons les nôtres.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je suis favorable à l'adoption de cet amendement, dit « Perruche », qui soulève, c'est vrai, des problèmes considérables.
Trois autres affaires sont en instance, qui peuvent donner lieu à des dérives extraordinaires, où l'on verra éventuellement un enfant reprocher au médecin un Q.I. notoirement inférieur à la normale. Pourquoi pas ?
Pour une fois que les juges demandent au législateur de se prononcer - c'est du moins ce que l'on peut lire entre les lignes ! - pour éviter d'avoir à créer une jurisprudence pouvant donner lieu à quelques errements, il ne faut pas les décevoir, et donc leur envoyer un signal extrêmement fort en légiférant très vite sur le sujet.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - I. - L'article L. 5135-1 du même code est ainsi modifié :
« 1° Les trois premiers alinéas sont supprimés ;
« 2° Au dernier alinéa, les mots : "lesdits appareils" sont remplacés par les mots : "des dispositifs médicaux utilisables pour une interruption volontaire de grossesse" et les mots : "comme commerçants patentés" sont supprimés.
« II. - L'article L. 5435-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5435-1 . - La vente, par les fabricants et négociants en appareils gynécologiques, de dispositifs médicaux utilisables pour une interruption volontaire de grossesse à des personnes n'appartenant pas au corps médical ou ne faisant pas elles-mêmes profession de vendre ces dispositifs est punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende.
« Les personnes morales peuvent être déclarées pénalement responsables des infractions, définies au présent article, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal. Elles encourent la peine d'amende suivant les modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal.
« Les personnes physiques et les personnes morales encourent également les peines suivantes :
« 1° La confiscation des dispositifs médicaux saisis ;
« 2° L'interdiction d'exercer la profession ou l'activité à l'occasion de laquelle le délit a été commis, pour une durée qui ne peut excéder cinq ans. » - (Adopté.)

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - I. - L'article 223-11 du code pénal est abrogé.
« II. - L'article L. 2222-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 2222-2 . - L'interruption de la grossesse d'autrui est punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende lorsqu'elle est pratiquée, en connaissance de cause, dans l'une des circonstances suivantes :
« 1° Après l'expiration du délai dans lequel elle est autorisée par la loi, sauf si elle est pratiquée pour un motif médical ;
« 2° Par une personne n'ayant pas la qualité de médecin ;
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la loi, ou en dehors du cadre d'une convention conclue selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2.
« Cette infraction est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende si le coupable la pratique habituellement.
« La tentative des délits prévus au présent article est punie des mêmes peines. »
Par amendement n° 14, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article 223-11 du code pénal est ainsi modifié :
« a) Au 1°, les mots : "pour un motif thérapeutique" sont remplacés par les mots : "pour un motif médical" ;
« b) Le 3° est complété par les mots : ", ou en dehors du cadre d'une convention conclue selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2 du code de la santé publique". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'Assemblée nationale a adopté un amendement transférant dans le code de la santé publique les dispositions prévues à l'article 223-11 du code pénal. La commission comprend mal l'intérêt de ce jeu de passe-passe législatif, qui ne modifie rien sur le fond puisque les peines et amendes applicables resteront les mêmes, qu'elles figurent dans le code pénal ou dans le code de la santé publique. Elle constate d'ailleurs que la Gouvernement a partagé, en séance publique, cette perplexité.
Elle remarque, en outre, que l'Assemblée nationale a choisi de distinguer, selon des critères qui apparaissent pour le moins aléatoires, l'article qui devait subsister dans le code pénal et ceux qu'il convenait de transférer dans le code de la santé publique. Désormais, les peines applicables à l'interruption illégale de grossesse figureraient, pour certaines, dans le code pénal et, pour d'autres, dans le code de la santé publique. L'accès de nos concitoyens au droit, gage de sa bonne compréhension, serait rendu encore plus malaisé.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission propose d'adopter un amendement tendant à revenir au texte initial du projet de loi et donc à maintenir dans le code pénal les dispositions qui y figuraient.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement qui vise à rétablir le texte initial du Gouvernement (Sourires) et à maintenir dans le code pénal des infractions aux dispositions qui encadrent les interruptions de grossesse.
Le transfert dans le code de la santé publique des dispositions de l'article 223-11 du code pénal relève d'une initiative de l'Assemblée nationale, et nous estimons plus cohérent, comme l'Assemblée nationale, que toutes les dispositions pénales relatives à l'IVG, à l'exception des IVG pratiquées sans le consentement de la femme, bien entendu, soient regroupées dans le code de la santé publique.
Cela nous paraît plus cohérent ; cela ne change en rien la nature des sanctions pénalisant la pratique de l'interruption volontaire de grossesse dans des conditions illégales et cela offre les mêmes garanties en ce qui concerne la protection de la santé de la femme.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 11 est ainsi rédigé.

Article 11 bis



M. le président.
« Art. 11 bis. - I. - L'article 223-12 du code pénal est abrogé.
« II. - Après l'article L. 2222-3 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2222-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 2222-4 . - Le fait de fournir à la femme les moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 francs d'amende. Ces peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 francs d'amende si l'infraction est commise de manière habituelle. En aucun cas, la femme ne peut être considérée comme complice de cet acte. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 15, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 48, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du texte présenté par le II de l'article 11 bis pour l'article L. 2222-4 du code de la santé publique, après les mots : « les moyens matériels », d'insérer les mots : « , à l'exception des médicaments prescrits par un médecin dans le cadre d'une interruption volontaire de grossesse, lui permettant ».
Par amendement n° 66, Mme Terrade, MM Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans la première phrase du texte présenté par le II de l'article 11 bis pour l'article L. 2222-4 du code de la santé publique, après les mots : « moyens matériels », d'insérer les mots : « , à l'exception des remèdes et subtances prescrits par un médecin dans le cadre d'une convention conclue selon les modalités définies à l'article L. 2212-2 du code de la santé publique en vue d'une interruption volontaire de grossesse médicamenteuse, »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 15.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 11 bis , adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, transfère dans le code de la santé publique les dispositions de l'article 223-12 du code pénal relatives au fait de fournir à une femme les moyens matériels de pratiquer une interruption de grossesse sur elle-même.
Pour les raisons que j'ai évoquées à l'article précédent, la commission s'oppose au transfert de ces dispositions du code pénal vers le code de la santé publique.
D'où cet amendement, qui tend à réintroduire les dispositions de l'article 223-12 dans le code pénal.
M. le président. La parole est à Mme Campion, pour présenter l'amendement n° 48.
Mme Claire-Lise Campion. Notre amendement visait à apporter une précision, à notre sens, plus que nécessaire - je dis « visait », car, la commission proposant de supprimer l'article, il n'aura bientôt plus d'objet.
Je veux tout de même l'exposer, car l'intention du législateur s'agissant d'un article qui prévoit des sanctions au fait de fournir aux femmes les moyens matériels de s'auto-avorter doit clairement apparaître dans les débats, faute de pouvoir, dans cette assemblée, traduire par une inscription dans la loi.
Nous voulions éviter qu'une rédaction insuffisamment précise ne puisse susciter des difficultés dans la délivrance de la méthode médicamenteuse en médecine ambulatoire.
En complétant l'article, nous entendions prémunir le personnel amené à distribuer le RU 486 d'actions en justice que certaines associations bien-pensantes se feraient un honneur d'engager.
En rétablissant dans le code pénal toutes les sanctions relatives à l'interruption de grossesse illégale que l'Assemblée nationale avait introduites dans le code de la santé publique, vous nous empêchez, chers collègues de la majorité sénatoriale, de concrétiser notre objectif, qui devrait pourtant être aussi le vôtre.
Mais vous ne vous arrêtez pas là puisque vous supprimez également une disposition importante pour les femmes, qui consistait à spécifier qu'en aucun cas elles ne sauraient être considérées comme complices de l'acte, le seul coupable ne pouvant être que celui qui leur fournit les moyens de pratiquer une IVG sur elles-mêmes.
En conclusion, j'exprime le regret que cet amendement ne soit, sans doute, même pas mis aux voix.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet, pour défendre l'amendement n° 66.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Notre amendement a pour objet de lever une ambiguïté de la rédaction du texte qui risque d'entraîner des poursuites contre des médecins pratiquant une IVG dans le cadre d'une méthode médicamenteuse.
En effet, le texte condamne « le fait de fournir à la femme les moyens matériels de pratiquer une interruption volontaire de grossesse sur elle-même ». Or, dans le cas de l'IVG médicamenteuse réalisée en médecine ambulatoire, le médecin fournit un produit abortif à la femme concernée.
A notre avis, le praticien est donc susceptible d'être attaqué par des associations anti-IVG, qui pourraient utiliser cette ambiguïté du texte, alors que le médecin exerce dans le cadre d'une convention conclue selon les modalités définies par l'article L. 2212-2 du code de la santé publique.
C'est pour empêcher cette éventualité que nous proposons de préciser la rédaction du texte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 48 et 66 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Ces amendements deviendront sans objet si celui de la commission est adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15, 48 et 66 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 15 puisque, sensible aux arguments avancés par l'Assemblée nationale, il a accepté ses propositions pour les raisons qui l'ont conduit à rejeter l'amendement n° 14.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 48, qui vise à éviter que la rédaction actuelle ne puisse engendrer des difficultés dans la délivrance du RU 486, un amendement qu'il préfère à l'amendement n° 66.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 11 bis est supprimé et les amendements n°s 48 et 66 n'ont plus d'objet.

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - Sont abrogés :
« - le chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie du code de la santé publique ;
« - les articles 84 à 86 et l'article 89 du décret du 29 juillet 1939 relatif à la famille et à la natalité françaises. »
Par amendement n° 16, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Le chapitre Ier du titre II du livre II de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Chapitre Ier
« Protection de la femme enceinte

« Art. L. 2221-1 . - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende le fait de contraindre ou de tenter de contraindre une femme à une interruption de grossesse en exerçant sur elle des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation. »
« II. - Les articles 84 à 86 et l'article 89 du décret-loi du 29 juillet 1939 relatif à la famille et à la natalité française sont abrogés. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 40 rectifié, présenté par M. Chérioux, et tendant à compléter le I du texte proposé par l'amendement n° 16 par un alinéa ainsi rédigé
« Art. L. 2221-2 . - La propagande, directe ou indirecte, par un moyen quelconque, concernant soit les établissements dans lesquels sont pratiquées les interruptions de grossesse, soit les médicaments, produits et objets ou méthodes destinés à procurer ou présentés comme de nature à procurer une interruption de grossesse, sauf dans les publications réservées aux médecins et aux pharmaciens, est punie de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 16.
M. Francis Giraud, rapporteur. Votre commission accepte l'abrogation de l'article L. 2221-1 du code de la santé publique dans sa rédaction actuelle. Elle considère en effet que le maintien de ces dispositions, qui n'ont d'ailleurs jamais été appliquées, ne se justifie plus. Cet article était en outre susceptible de constituer un obstacle juridique aux actions d'information en direction des femmes souhaitant accéder à l'IVG.
Pour autant, la suppression des sanctions pour l'incitation à l'IVG ne doit pas avoir pour effet de priver la femme enceinte de toute protection contre les personnes qui souhaiteraient la contraindre à l'IVG.
Votre commission vous propose donc d'adopter un amendement comportant une nouvelle rédaction de l'article L. 2221-1 du code de la santé publique afin de protéger la femme enceinte contre toute forme de pression destinée à la contraindre à une interruption de grossesse.
L'amendement prévoit que serait puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende le fait de contraindre ou de tenter de contraindre une femme à une interruption de grossesse en exerçant sur elle des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation.
La rédaction est directement inspirée de celle qui est prévue par l'article 12 bis ci-après pour le délit d'entrave à la pratique légale des interruptions de grossesse.
M. le président. La parole est à M. Chérioux, pour défendre le sous-amendement n° 40 rectifié.
M. Jean Chérioux. Je comprends le point de vue de M. le rapporteur, c'est la raison pour laquelle je me contente de présenter un sous-amendement visant à compléter l'amendement de la commission. Ce complément tend à reprendre une partie des dispositions supprimées.
Il est vrai que cet article institué par la loi Veil n'a pas été appliqué. On n'a pas eu beaucoup l'occasion de l'appliquer, mais il avait un caractère dissuasif.
Je crains que la suppression ne produise un appel d'air. Je crains que ne fleurisse, notamment dans les médias, qui sont toujours friands de ces questions, la propagande en faveur de certains produits et de certaines méthodes.
J'ai restreint l'objet de mon sous-amendement initial à la demande de la commission. Il porte désormais sur la propagande seulement et non plus sur la propagande et la publicité.
Ce sous-amendement répond à un souci de précaution. Si les dispositions actuelles sont purement et simplement supprimées, il y aura des problèmes. Vous connaissez le goût du sensationnel des médias ! Je suis persuadé que si, par malheur, ce texte n'était pas voté, nous connaîtrions des difficultés. Je prends rendez-vous, monsieur le Ministre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 40 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. Le Gouvernement partage bien sûr la préoccupation de M. Giraud et de la commission des affaires sociales de protéger la femme enceinte d'une interruption de grossesse pratiquée sous la contrainte. L'amendement n° 16 n'est cependant pas nécessaire, puisque cette protection est déjà prévue dans le code pénal à l'article 223-10 qui réprime l'IVG réalisée sans le consentement de la femme.
J'ajoute, monsieur le rapporteur, que les mesures que vous proposez sont largement en deçà de celles qui sont prévues dans le code pénal. L'article 223-10 du code pénal prévoit en effet cinq ans d'emprisonnement et 500 000 francs d'amendes contre deux ans d'emprisonnement et 200 000 francs d'amendes dans l'amendement.
Par ailleurs, malgré la précision qu'il apporte, le Gouvernement s'oppose également au sous-amendement n° 40 rectifié de M. Chérioux.
M. Francis Giraud, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Monsieur le ministre, vous avez évoqué le problème de l'interruption qui serait faite sous la contrainte. Or, dans l'amendement dont nous discutons, il ne s'agit pas exactement de cela : notre texte vise en effet les pressions psychologiques sans qu'elles aillent jusqu'à l'acte. En d'autres termes, vous dites que l'acte qui serait réalisé illégalement est condamnable - ce qui est évident - alors que nous, nous disons que ce sont les pressions exercées avant ou en dehors de l'acte et même si la personne ne subit finalement pas l'IVG qui sont répréhensibles.
En clair, ce dont nous voulons parler, c'est non pas de l'acte réalisé, mais, par exemple, de l'employeur qui fait pression sur une employée en lui disant d'avorter.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 40 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 12 est ainsi rédigé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 12 bis.

Article 12 bis



M. le président.
« Art. 12 bis . - L'article L. 2223-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 2223-2 . - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 200 000 francs d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher une interruption de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8 :
« - soit en perturbant de quelque manière que ce soit l'accès aux établissements mentionnés à l'article L. 2212-2, la libre circulation des personnes à l'intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ;
« - soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans ces établissements, des femmes venues y subir une interruption volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces dernières. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 12 bis



M. le président.
Par amendement n° 49, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 12 bis, un article additionnel.
« Après l'article L. 2223-2 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les responsables d'établissements de santé sont tenus de signaler au procureur de la République les actions ou démonstrations anti-avortement commises aux abords ou à l'intérieur de leur établissement. »
La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Malgré la loi Neiertz sur le délit d'entrave, la majorité des actions menées par les commandos anti-IVG ne sont pas sanctionnées faute de plaintes.
Devant ce constat, il nous semble indispensable que la loi soit respectée et donc de permettre les poursuites, car il est inadmissible de laisser impunies des agressions physiques ou morales sur des femmes se rendant dans un établissement pour une interruption volontaire de grossesse.
Nous considérons par conséquent que les responsables d'établissement doivent être tenus de signaler au procureur de la République les entraves à l'IVG, de la même manière qu'ils sont tenus de signaler tout risque au sein de leur hôpital, que ce soit un risque d'infection ou un danger pour la santé publique.
Pour ces raisons, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Nous ne sommes pas favorables à cet amendement.
Je rappelle que la commission a accepté le durcissement des sanctions du délit d'entrave à l'IVG.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Laissez-moi d'abord saluer une dame qui a pris place à droite au milieu des hommes qui, jusqu'alors, étaient, plus que majoritaires, unanimes d'une certaine façon ! (Sourires.) Merci, madame, d'être là.
M. Jean Chérioux. Quel favoritisme !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Pas mal, mon coup ! (Rires.)
M. le président. Il s'agit, monsieur le ministre, de Mme Olin, pour laquelle nous avons la plus grande considération.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. M. le président s'associe à moi. Merci, monsieur le président.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Nous aurions, nous aussi, aimé être félicitées. (Sourires).
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Oui, mais vous, vous étiez déjà là tout à l'heure. Je vous félicite en permanence ! (Nouveaux sourires.)
Mme Danielle Bidard-Reydet. Ah bon !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Il y avait absence de dames à ma droite.
S'agissant de l'amendement n° 49, j'en comprends tout à fait l'esprit, et je comprends aussi que l'on stigmatise de façon précise les contrevenants, d'autant que le code de procédure pénale prévoit déjà ce type de signalement.
Je comprends donc très bien l'intention. Mais je crois que cette disposition est quelque peu redondante.
Permettez-moi, pour vous convaincre, de relire le second alinéa de l'article 40 du code de procédure pénale : « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
M. Jean Delaneau, président de la commission. Très bien !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 49.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. En théorie, effectivement, les directeurs et les responsables de centres hospitaliers sont tenus de signaler, quand il s'en produit, tout délit d'entrave, mais, en pratique, on sait bien que cela ne se fait pas et que, de ce fait, les procureurs de la République sont bien embarrassés pour déclencher des procédures.
Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous peut-être, quand nous aurons retiré cet amendement, ce que nous ferons volontiers, vous engager, par exemple, à adresser une circulaire à l'ensemble des directeurs d'établissement pour leur rappeler qu'ils sont tenus de signaler tout délit d'entrave au procureur de la République ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Aux abords des établissements, dans la rue, il me semble difficile que le directeur de l'hôpital agisse. Je pense que c'est à l'intérieur des établissements que la procédure doit être immédiatement déclenchée, comme je viens de le rappeler.
Cela dit, je suis tout à fait d'accord, et je m'y engage si vous le souhaitez, pour envoyer une circulaire aux directeurs d'établissement afin de leur demander qu'ils se prémunissent, qu'ils préviennent et qu'ils emploient la force publique en cas de manifestations, en particulier dans les endroits où les femmes se rendent pour faire pratiquer une IVG. Mais je crois vraiment qu'à l'extérieur c'est difficile et que cela relève de la force publique en général.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Nous retirons l'amendement.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je vous en remercie.
M. le président. L'amendement n° 49 est retiré.

Article 13



M. le président.
« Art. 13. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 2412-1 du même code est ainsi rédigé :
« Le titre Ier du livre II de la présente partie, à l'exception du quatrième alinéa de l'article L. 2212-8, est applicable dans la collectivité territoriale de Mayotte, sous réserve des adaptations prévues à l'article L. 2412-2. L'article L. 2222-2 est également applicable. »
« II. - L'article L. 2412-2 du même code est abrogé.
« III. - L'article L. 2412-3 du même code devient l'article L. 2412-2.
« IV. - L'article 723-2 du code pénal est abrogé.
« V. - Les articles 10 et 12 de la présente loi sont applicables à la collectivité territoriale de Mayotte. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 31, le Gouvernement propose, à la fin du texte présenté par le I de cet article pour le premier alinéa de l'article L. 2412-1 du code de la santé publique, de supprimer les dispositions : « , sous réserve des adaptations prévues à l'article L. 2412-2. L'article L. 2222-2 est également applicable ».
Par amendement n° 84, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer la dernière phrase du texte présenté par le I de l'article 13 pour le premier alinéa de l'article L. 2412-1 du code de la santé publique.
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 31.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le présent amendement a pour objet de réaliser complètement l'extension à la collectivité territoriale de Mayotte des dispositions du présent projet de loi relatives à l'interruption volontaire de grossesse. Ainsi, l'ensemble des dispositions des articles 1er à 12 bis du projet de loi trouvera effet à Mayotte dans une rédaction identique à celle qui est prévue pour la métropole.
Le I de l'article modifié par le présent amendement rend applicable à Mayotte l'ensemble des modifications introduites par le présent projet de loi dans le titre Ier du livre II de la partie II du code de la santé publique.
En conséquence, les II, III et IV de l'article modifié par le présent amendement abrogent les articles d'adaptation devenus inutiles et réorganisent la codification des dispositions intéressant les sanctions pénales de la partie II du code de la santé publique applicables à Mayotte.
Le V de l'article modifié par le présent amendement étend à Mayotte les modifications opérées par le projet de loi sur les articles du code pénal ou sur d'autres articles du code de la santé publique non visés au I du présent article.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 84 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 31.
M. Francis Giraud, rapporteur. Faute de mesurer les conséquences de l'amendement n° 31 du Gouvernement, déposé tardivement, et d'avoir pu recueillir l'avis du sénateur de Mayotte sur ces dispositions, la commission a émis un avis défavorable.
Son amendement n° 84 est un amendement de coordiation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 84 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 84, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Le groupe socialiste s'abstient.
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen également.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 32 vise à rédiger comme suit le II de l'article 13 :
« II. - Les articles L. 2412-2, L. 2412-3 et L. 2414-2 du même code sont abrogés. »
L'amendement n° 33 tend à rédiger ainsi le III de l'article 13 :
« III. - A l'article L. 2414-1, les mots : "aux articles L. 2414-2 à L. 2414-9" sont remplacés par les mots : "aux articles L. 2414-2 à L. 2414-8".
« Les articles L. 2414-3 à L.2414-9 deviennent respectivement les articles L. 2414-2 à L. 2414-8. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Ces amendements tombent, par suite du rejet de l'amendement n° 31.
M. le président. Les amendements n°s 32 et 33 n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 85, M. F. Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le IV de l'article 13 :
« IV. - L'article 723-2 du code pénal est ainsi rédigé :
« Art. 723-2. - Le 3° de l'article 223-11 est rédigé comme suit :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la réglementation applicable localement, ou en dehors du cadre d'une convention conclue en application de l'article L. 2212-2 du code de la santé publique. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 34, le Gouvernement propose, dans le V de l'article 13, de remplacer les mots : « 10 et 12 » par les mots : « 1er à 12 bis ».
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Cet amendement tombe également, par suite du rejet de l'amendement n° 31.
M. le président. L'amendement n° 34 n'a plus d'objet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - I. - Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7 et L. 2222-2 du code de la santé publique sont applicables dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
« II. - L'article 713-2 du code pénal est abrogé. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 35, le Gouvernement propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Les articles 223-11, 223-12 et 713-2 du code pénal sont abrogés dans les territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie.
« II. - Les articles L. 2222-2, L. 2222-4 et L. 2223-2 du code de la santé publique sont applicables dans le territoire des îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
« III. - A. - Le chapitre II du titre II du livre IV de la partie II du code de la santé publique devient chapitre III. Les articles L. 2422-1 à L. 2422-9 deviennent les articles L. 2423-1 à L. 2423-9.
« B. - Le chapitre II du titre II du livre IV de la partie II du même code est ainsi rédigé :
« Chapitre II - Interruption volontaire de grossesse.
« Art. L. 2422-1. - Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7 et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables dans le territoire des îles Wallis et Futuna. Pour l'application du premier alinéa de l'article L. 2212-8, les mots : "selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2" ne s'appliquent pas.
« C. - L'article L. 2423-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2423-2. - Pour leur application dans le territoire des îles Wallis et Futuna.
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est ainsi rédigé :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions législatives ou réglementaires applicables localement".
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2" sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation applicable localement".
« IV. - A. - Le chapitre 1er du titre III du livre IV de la partie II du code de la santé publique devient chapitre II. Les articles L. 2431-1 à L. 2431-8 deviennent les articles L. 2432-1 à L. 2432-8.
« B. - Le chapitre 1er du titre III du livre IV de la partie II du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Chapitre 1er - Interruption volontaire de grossesse.
« Art. L. 2431-1. - Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7 et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables dans le territoire des terres Australes et Antarctiques françaises. Pour l'application du premier alinéa de l'article L. 2212-8, les mots : "selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2" ne s'appliquent pas.
« C. - L'article L. 2432-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2432-1. - Les articles L. 2222-2, L. 2222-4, L. 2223-1 et L. 2223-2 sont applicables dans le territoire des terres Australes et Antarctiques françaises. Pour leur application dans le territoire des terres Australes et Antarctiques françaises : »
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est rédigé »
« 3° Dans les lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles L.2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions législatives ou réglementaires applicables localement". »
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2" sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation applicable localement". »
« V. - A. - Le chapitre 1er du titre IV du livre IV de la partie II du code de la santé publique devient chapitre II. Les articles L. 2441-1 à L. 2441-9 deviennent les articles L. 2442-1 à L. 2442-9.
« B. - Le chapitre 1er du titre IV du livre IV de la partie II du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Chapitre 1er - Interruption volontaire de grossesse.
« Art. L. 2441-1. - Les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7 et L. 2212-8 alinéa premier sont applicables en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Pour l'application du premier alinéa de l'article L. 2212-8, les mots : "selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2" ne s'appliquent pas.
« C. - L'article L. 2442-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 2442-2. - Pour leur application en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française :
« I. - Le 3° de l'article L. 2222-2 est ainsi rédigé :
« 3° Dans un lieu autre qu'un établissement d'hospitalisation public ou qu'un établissement d'hospitalisation privé satisfaisant aux conditions prévues par la réglementation applicable localement. »
« II. - Aux articles L. 2223-1 et L. 2223-2, les mots : "par les articles L. 2212-3 à L. 2212-8" sont remplacés par les mots : "par les dispositions législatives ou réglementaires applicables localement". »
« III. - A l'article L. 2223-2, les mots : "mentionnés à l'article L. 2212-2" sont remplacés par les mots : "de santé, publics ou privés, autorisés à pratiquer des interruptions volontaires de grossesse par la réglementation applicable localement". »
Par amendement n° 86 M. F. Giraud, au nom de la commission, propose, dans le I de l'article 14, de remplacer les références : « , L. 2212-7 et L. 2222-2 » par la référence : « et L. 2212-7 ».
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Flosse, Laufoaulu et Lanier.
L'amendement n° 72 tend, dans le I de l'article 14, à supprimer les mots : « dans les territoires d'outre-mer et ».
L'amendement n° 73 vise à supprimer le II de l'article 14.
Par amendement n° 87, présenté par M. F. Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le II de l'article 14.
« II. - A la fin du I de l'article 713-2 du code pénal, le mot : "thérapeutique" est remplacé par le mot : "médical". »
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 85.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Il s'agit ici non plus de Mayotte, mais de la Nouvelle-Calédonie, de Wallis-et-Futuna et de la Polynésie française.
Le présent amendement a pour objet de réaliser l'extension aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie des articles du présent projet de loi relatifs à l'interruption volontaire de grossesse relevant de la compétence de l'Etat, dans le respect des dispositions des lois statutaires régissant la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.
Cette nouvelle rédaction a pour effet de rendre applicables aux territoires d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie les dispositions des articles L. 2212-1, L. 2212-7, L. 2212-8, alinéa premier, L. 2222-2, L. 2222-4 et L. 2223-2 du code de la santé publique. Les articles L. 2222-2, L. 2223-1 et L. 2223-2 sont adaptés pour tenir compte de l'organisation particulière des territoires d'outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 86.
M. Francis Giraud. rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. La parole est à M. Lanier, pour présenter les amendements n° 72 et 73.
M. Lucien Lanier. L'amendement n° 72 a pour objet d'écarter les territoires d'outre-mer, c'est-à-dire Wallis-et-Futuna et la Polynésie française, de l'application de certaines dispositions de l'article 14. En effet, la loi Veil dans son ensemble n'est pas applicable aux territoires d'outre-mer.
Sont cependant applicables, sous réserve de quelques adaptations, les dispositions du code pénal réprimant l'IVG pratiqué illégalement, c'est-à-dire : l'article 223-10, qui sanctionne l'avortement pratiqué sans le consentement de l'intéressée ; l'article 223-11, qui sanctionne l'IVG pratiquée après l'expiration du délai prévu par la loi, par une personne n'ayant pas la qualité de médecin ou dans des établissements ne satisfaisant pas aux conditions prévues par la loi.
En conséquence, l'IVG n'est pas illégale en Polynésie française, non plus qu'à Wallis-et-Futuna, sous réserve d'être pratiquée par un médecin, dans la limite de dix semaines, avec le consentement de l'intéressée.
L'extension de l'article 14 à l'outre-mer, telle que prévue par le projet de loi, soulève de réelles difficultés juridiques.
En effet, si l'on considère que l'IVG est une question de santé publique et que l'organisation médicale de l'accès à l'avortement relève du domaine de la santé publique, la loi organique du 12 avril 1996 portant statut de la Polynésie française, dont nous avons largement débattu dans cette enceinte, exclut la compétence de l'Etat en matière de santé publique, matière qui relève a contrario de la compétence de l'Assemblée de la Polynésie française et des autorités polynésiennes.
Or, le projet de loi énonce dans son exposé des motifs que le principe de l'IVG relève esentiellement du droit des personnes, donc de la compétence de l'Etat.
Le Conseil constitutionnel devra sans aucun doute trancher s'il est saisi d'un recours, et ce d'autant que la validité juridique de la procédure peut être mise en cause. En effet, l'Assemblée territoriale de la Polynésie française a été saisie de textes différents du projet dont nous discutons, qui lui-même a été déposé avant la fin du délai imparti à l'Assemblée de la Polynésie française pour sa réponse.
Nous ne pouvons pas à la fois donner d'une main et retirer de l'autre. A partir du moment où nous avons donné un nouveau statut à la Polynésie française, il faut le respecter et respecter les pouvoirs de l'Assemblée territoriale comme les pouvoirs des autorités polynésiennes.
Il convient de considérer en outre que la situation de la famille en Polynésie, cellule initiale et fondement de la société locale, n'est pas la même qu'en métropole. On ne peut pas parler de la famille dans les Marquises comme on en parle dans le Loiret ! Il s'agit d'un fait psychologique majeur, dont il faut absolument tenir compte.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'application sans nuance de l'article 14 à l'outre-mer paraît pour le moins prématurée.
J'en viens à l'amendement n° 73.
Il convient de maintenir l'article L. 713-2 du code pénal, qui adapte aux territoires d'outre-mer les dispositions de l'article L. 223-11 du code pénal, en prévoyant, notamment, la référence aux réglementations locales pour l'agrément des établissements d'hospitalisation publics ou privés.
En effet, en abrogeant les dispositions figurant dans le code pénal, l'Assemblée nationale n'a pas procédé aux extensions et aux coordinations en découlant.
Il en résulte certaines incohérences juridiques auxquelles il convient de remédier.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 87 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 35, 72 et 73.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'amendement n° 87 est un amendement de coordination.
La commission est défavorable à l'amendement n° 35. Elle s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 72. Elle demande le retrait de l'amendement n° 73, qui est satisfait par l'amendement n° 86.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 86, 72, 73 et 87 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 86.
Il est défavorable aux amendements n°s 72 et 73 car il lui semble préférable de conserver la compétence de l'Etat en matière de santé dans les territoires d'outre-mer.
Il s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 87.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 86, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.) M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 72.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Je ne suis pas certain d'avoir compris les explications données à l'instant par notre collègue. Il s'agit, apparemment, de considérations de nature juridique et non de considérations portant sur le fond. Si tel est bien le cas, je voterai contre l'amendement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Très bien !
M. Lucien Lanier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lanier.
M. Lucien Lanier. Je ne me suis certainement pas bien exprimé car je n'ai pas été tout à fait compris.
Il existe un problème juridique grave. En effet, nous ne pouvons pas à la fois prétendre donner aux territoires d'outre-mer la liberté à laquelle ils ont droit, vers laquelle ils s'acheminent lentement, et, en même temps, la leur refuser lors du vote d'une loi spécifique.
Le présent refus est grave car la conception de la famille en Polynésie française n'est pas du tout identique à celle que nous avons en métropole.
Je ne suis pas hostile à ce que nous nous acheminions vers une application ultérieure de ce dispositif. Mais la précipitation dont vous faites preuve, monsieur le ministre, risque de vous faire commettre une erreur fondamentale. Vous allez appliquer un système qui risque de désorganiser la famille polynésienne. Vous savez très bien comment elle se comporte. Vous connaissez vous-même la Polynésie française.
Mon cher collègue Huriet, cet amendement ne présente pas le moindre caractère politique ; il est exempt de toute arrière-pensée politique. Il vise simplement à ménager du temps au temps pour l'application de dispositions nouvelles dans les territoires d'outre-mer.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je suis très étonné de la réaction du Gouvernement à l'égard de ces amendements.
Monsieur le ministre, nous avons donné un statut évolutif à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie. Et nous reviendrions sur ce que nous avons fait ! Ce n'est pas admissible juridiquement.
Il y a, dans ces territoires d'outre-mer, une forme de vie sociale, de vie familiale, différente de la nôtre. En votant ce texte, nous leur imposerions notre mode de vie et nos coutumes. Ce serait - je le dis comme je le pense - une forme de colonialisme totalement inadmissible !
M. Lucien Neuwirth. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Monsieur le ministre, je resterai sur le plan strictement juridique.
Il ne me semble pas souhaitable que nous votions une loi qui, par la suite, risque d'être remise en question devant les juridictions internationales.
La loi organique portant statut de la Polynésie française que nous avons votée en 1996 a ôté de la compétence de l'Etat un certain nombre de domaines, dont celui de la santé publique. A partir de là, je ne vois pas comment on pourrait les rendre à sa compétence sans accord de la Polynésie elle-même.
Nous avons longuement discuté de la loi du 12 avril 1996. Certains de nos collègues, qui siégeaient d'ailleurs non loin de moi, n'étaient pas du tout d'accord pour exclure dans certains domaines la compétence de l'Etat. Mais, à partir du moment où l'on a franchi le pas, où, dans un mouvement généreux, ou a engagé l'évolution d'un territoire, il me semble difficile de revenir en arrière.
M. Jean Chérioux. Donner et retenir ne vaut !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je suis un peu étonnée de la tournure que prend le débat sur cet amendement.
En effet, d'une part, on nous dit que l'IVG relève du droit des personnes, ce qui me paraît juste, et que l'évolution de la Polynésie appartient aux Polynésiens, ce qui me paraît tout aussi juste. Mais, d'autre part, on nous donne à penser que la femme polynésienne n'aurait pas les mêmes problèmes que la femme française. Je crois malheureusement qu'il y a une stricte égalité entre l'une et l'autre devant un certain nombre de difficultés.
Je suis opposée à l'amendement n° 72 parce que nous souhaitons une égalité de traitement des femmes polynésiennes et des femmes françaises. Que la Polynésie prenne ensuite, quand elle aura cheminé vers un statut plus élaboré, ses propres dispositions, c'est son problème ! Mais, aujourd'hui, ne faisons pas de distinction entre les femmes françaises et les femmes polynésiennes !
M. Lucien Neuwirth. De toute façon, nous n'en avons pas le droit !
M. Jean Chérioux. C'est du néocolonialisme !
M. Claude Huriet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. C'est la référence au néocolonialisme que nous venons d'entendre qui me conduit à intervenir de nouveau, et je vous remercie, monsieur le président, de m'autoriser à le faire.
La notion de néocolonialisme, mes chers collègues, aurait dû inciter les auteurs de l'amendement à traiter de la même façon la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie, dans la mesure où leurs considérants sont susceptibles de s'appliquer de la même manière à la Nouvelle-Calédonie. Or l'amendement n° 72 n'inclut pas la Nouvelle-Calédonie dans le champ de la suppression proposée.
Cela m'amène à m'interroger sur la validité des motifs juridiques qui ont été mis en avant par les auteurs de l'amendement et me conforte dans ma décision de voter contre l'amendement.
M. Lucien Lanier. Les deux assemblées territoriales polynésiennes ont donné un avis défavorable.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Exactement ! Et la Nouvelle-Calédonie a émis un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 73 est-il maintenu ?
M. Lucien Lanier. Il est retiré, monsieur le président, car il est satisfait.
M. le président. L'amendement n° 73 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 87, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14, modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Article additionnel après l'article 14



M. le président.
Par amendement n° 63, M. Carle propose d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement dépose, sur le bureau des assemblées, un rapport présentant les actions conduites par l'Etat, les départements et les organismes de sécurité sociale en matière d'information et de prévention relatives à la sexualité et à la contraception.
« Il étudie les possibilités juridiques et financières d'harmoniser les compétences de l'Etat, des départements et des organismes précités, notamment en matière de protection maternelle et infantile, de santé scolaire et d'éducation sexuelle afin de proposer aux jeunes une information permanente. »
Cet amendement est-il soutenu ? ...
M. Francis Giraud, rapporteur. Je le reprends, monsieur le président !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 63 rectifié.
La parole est à M. le rapporteur, pour le présenter.
M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, et cela pour deux raisons.
Tout d'abord, le code de la santé publique contient déjà, depuis 1975 et 1979, toutes les dispositions nécessaires à un suivi par le Parlement des questions liées à l'avortement et à la contraception.
Ainsi est prévue la publication annuelle d'un rapport présentant la manière dont sont mises en oeuvre les dispositions relatives à l'interruption volontaire de grossesse.
Par ailleurs, une délégation parlementaire, composée de quinze députés et de dix sénateurs, est chargée d'informer les assemblées de l'application des dispositions législatives relatives à l'interruption volontaire de grossesse ainsi qu'à la contraception. Bien entendu, le Gouvernement est prêt à travailler avec cette délégation.
S'agissant du deuxième alinéa, je précise que l'Etat a récemment fait établir par l'inspection générale des affaires sociales un rapport sur la répartition des compétences entre les départements et l'Etat, ainsi qu'un rapport sur le service de santé scolaire, rédigé conjointement par l'IGAS et par l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale.
M. Francis Giraud, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Monsieur le ministre, vous venez de faire état d'un rapport annuel ; or il semble que ce rapport n'ait pas été publié depuis 1992...
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. C'est peut-être vrai, monsieur le rapporteur, mais où sont les dix sénateurs ? (Sourires.)
M. Jean Chérioux. Egalité ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - Le chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° L'intitulé du chapitre est ainsi rédigé : "Prise en charge par l'Etat des dépenses exposées au titre de l'interruption volontaire de grossesse" ;
« 2° L'article L. 132-1 est ainsi modifié :
« a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'intégralité des dépenses exposées à l'occasion des interruptions volontaires de grossesse pratiquées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 2212-7 du code de la santé publique est prise en charge par l'Etat. » ;
« b) Le dernier alinéa est complété par les mots : ", et notamment les conditions permettant, pour les personnes visées à l'alinéa précédent, de respecter l'anonymat dans les procédures de prise en charge". » - (Adopté.)

TITRE II

CONTRACEPTION

Article 16



M. le président.
« Art. 16. - A la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2311-4 du code de la santé publique, les mots : "sur prescription médicale" sont supprimés. »
Sur l'article, la parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Nous sommes convaincus que l'amélioration des résultats en matière de contraception et d'IVG passe nécessairement par la mise en place d'une éducation à la sexualité plus ample et plus pertinente qu'elle ne l'a été jusqu'à maintenant.
Vous le savez tous, ces dernières années, alors que la priorité était donnée à la lutte contre le sida, les campagnes d'information ont surtout porté sur la prévention de cette maladie - et c'était absolument nécessaire - mais elles ont, de ce fait, quelque peu éclipsé les campagnes sur la contraception. Cela contribue sans doute à expliquer qu'on assiste aujourd'hui à une augmentation du nombre des grossesses non désirées chez les mineures, grossesses qui aboutissent deux fois sur trois à un avortement. Joëlle Kauffmann a souvent attiré notre attention sur les drames qui lui étaient racontés dans son cabinet.
Il faut développer considérablement la contraception, et l'action à entreprendre à cet égard est sans commune mesure avec ce qui a été fait jusqu'à présent. Tous les moyens doivent être mobilisés, à commencer par l'école.
Les raisons de l'évolution constatée sont multiples. Outre la méconnaissance par les jeunes de leur corps, celle de la contraception est souvent mise en avant.
Savez-vous, par exemple, que l'information sexuelle, qui a officiellement fait son entrée dans les programmes d'enseignement en 1973, se limite toujours à une heure en classe de biologie au collège ? Savez-vous aussi que 60 % des filles n'utilisent aucune contraception lors de leur premier rapport sexuel ?
Il nous faut donc d'urgence entreprendre des actions d'une tout autre ampleur. Certes, le texte présente des avancées à cet égard, mais nous pensons qu'il faut aller plus loin.
On constate, en effet, que ce sont les pays qui ont le plus accordé de place à l'éducation à la sexualité - je pense en particulier aux Pays-Bas - qui ont les taux d'IVG les plus bas. Cette éducation permet de responsabiliser les jeunes, filles et garçons, sur leur sexualité.
Nous vous proposons donc de mettre en place une éducation sexuelle dès l'école primaire, le message étant évidemment adapté aux différents âges, et d'augmenter le nombre de séances consacrées à ce thème au cours de l'année scolaire.
Dans les collèges, notamment, la maturité sexuelle des élèves est très hétérogène et l'évolution de leur rapport à la sexualité, très rapide. Par conséquent, certains élèves peuvent ne pas se sentir concernés par une séance d'éducation à la sexualité mais ressentir un besoin d'information deux ou trois mois plus tard. C'est pourquoi, dans mon département, le Val-de-Marne, le conseil général a mis en place la quinzaine « santé jeunes ». En cette année 2001, qui est l'an I de la parité, la quinzaine a été organisée sur le thème : « Les jeunes filles et la contraception ».
Pour avoir participé, en tant que conseillère générale de Choisy-le-Roi, à une discussion avec plus de 300 collégiens et lycéens, je peux vous dire qu'ils se sentent très concernés et qu'ils parlent très librement.
J'ajoute, monsieur le ministre, que le préservatif féminin n'a trouvé aucune place dans la campagne télévisée. Se pose d'ailleurs un problème de prix, car il coûte neuf francs. En tout cas, pour les jeunes filles, ce préservatif féminin représente une liberté supplémentaire qu'elles ont à conquérir.
Parler aux jeunes de sexualité et de contraception plus régulièrement au cours de l'année scolaire nous paraît de nature à mieux répondre à la situation. Cela concerne non seulement l'école, mais aussi les centres de loisirs, les centres de vacances, les maisons des jeunes et de la culture.
Nous défendrons tout à l'heure des amendements en ce sens.
M. le président. Par amendement n° 17, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer l'article 16.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 16 supprime l'obligation de prescription médicale pour la délivrance de contraceptifs dans les centres de planification familiale, en application des nouvelles règles de prescription des contraceptifs proposées à l'article 17.
Par coordination avec un amendement que nous avons déposé à l'article 17, le présent amendement rétablit l'obligation d'une prescription médicale pour la délivrance de contraceptifs hormonaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
Après tant d'années de pratique, parfois extrêmement longue pour certaines femmes, si nous voulons que, dans ce pays, la contraception se développe - et tel est bien notre souhait - il nous paraît nécessaire de lever l'obligation de prescription pour des produits qui sont, certes, des produits hormonaux, mais qui sont de plus en plus finement dosés, afin qu'ils soient délivrés sans ordonnance. Je crois que ce serait un progrès au regard de la liberté des femmes.
Je comprends que la question de la première prescription puisse être posée. Il est vrai que la première prescription et le contact avec un médecin seraient très bénéfiques. Mais, pour la suite, je pense que nous devrions supprimer l'obligation de prescription, conformément à ce qui est en usage dans beaucoup d'autres pays.
Voilà pourquoi je considère que le texte qui avait été présenté à l'Assemblée nationale constitue un progrès et je m'oppose à cet amendement.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. C'est sur cette question de la première prescription que je veux intervenir.
Qui d'entre nous accepterait que sa fille ou sa petite-fille puisse s'engager dans une contraception nécessairement régulière et absorber tous les mois ces pilules sans aucun bilan ou examen médical initial ?
Les problèmes hormonaux ne sont pas toujours apparents, et la prise de pilules contraceptives, même faiblement dosées, peut conduire à des déséquilibres graves. Il existe en médecine des phénomènes de sommation qui, peu à peu, provoquent des cumuls.
Vous me permettrez une comparaison. Nous appliquons le principe de précaution pour éviter que nos enfants ne mangent une tranche de foie de veau américain qui a peut-être reçu des hormones,...
M. Jean Chérioux. Peut-être !
M. Jean Delaneau, président de la commission, et nous laisserions notre fille ou notre petite-fille se charger en hormones sans autre forme de précaution !
M. Jean Chérioux. Incroyable !
M. Jean Delaneau, président de la commission. On marche sur la tête !
Si nous avons déposé cet amendement de suppression, monsieur le ministre, ce n'est pas pour que toutes les prises de contraceptifs dépendent d'une ordonnance médicale. Nous voulons créer un vide dans lequel vous pourrez placer au moins la consultation qui permettra la première délivrance de ces progestatifs ou oestroprogestatifs.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Lucien Neuwirth. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Nous sommes confrontés, en ce qui concerne la contraception chez les jeunes filles, à un problème double, car s'ajoute une question de protection et d'hygiène de vie. Je m'explique.
Je crois infiniment souhaitable que les jeunes filles, à un certain moment de leur vie, aient une première visite chez un médecin, pour qu'elles apprennent à connaître leur corps - qu'elles ne connaissent pas toujours - pour qu'elles apprennent à connaître la pratique contraceptive, mais d'un point de vue médical, et, surtout, pour qu'elles prennent l'habitude d'aller voir un gynécologue.
Je vais vous dire pourquoi : pour une question de sécurité, ainsi que je l'ai, dit dans la discussion générale. Nous connaissons les ravages du cancer du sein, du cancer du col de l'utérus. Si les jeunes femmes prennent l'habitude d'aller consulter leur médecin, que ce soit un généraliste ou, mieux encore, un gynécologue, nous avons la garantie, nous avons la certitude qu'elles seront suivies et protégées.
Il faudrait donc trouver une formulation qui amène à une première visite, à une première prise de contact entre la jeune fille et un médecin ou un gynécologue. Par la suite, elle fera ce qu'elle voudra, mais il y aura eu cette « prise de conscience » des réalités auxquelles elle sera confrontée toute sa vie. En même temps, elle aura la certitude d'une protection, d'une sécurité apportée par la visite devenue habituelle, dont elle déterminera elle-même la fréquence.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 16 est supprimé.

Article 16 bis



M. le président.
« Art. 16 bis . - Le chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'éducation est complété par une section 9 ainsi rédigée :

« Section 9

« L'éducation à la santé et à la sexualité

« Art. L. 312-16 . - Une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles. Ces séances pourront associer les personnels contribuant à la mission de santé scolaire et des personnels des établissements mentionnés au premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique ainsi que d'autres intervenants extérieurs conformément à l'article 9 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. »
Sur l'article, la parole est à M. Branger.
M. Jean-Guy Branger. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous arrivons à un point très important de ce projet de loi.
Vingt-six ans après l'adoption de la loi Veil, nous recensons près de 220 000 interruptions de grossesse chaque année en France, dont 7 000 concernent des adolescentes. Une grossesse sur cinq se termine par une IVG. Une femme sur deux, en moyenne, subit une interruption de grossesse dans sa vie.
Ces chiffres, qui sont alarmants puisqu'ils sont similaires à ceux de 1975, sont révélateurs d'un véritable échec des pouvoirs publics, de nous tous en réalité, en matière d'information sur la contraception.
Il est invraisemblable que l'Etat, quels qu'aient été les gouvernements, ait été incapable depuis 1975 de donner en amont les moyens de développer la communication sur la contraception par le biais d'une véritable éducation sexuelle. Ces moyens sont pourtant les seuls qui permettent de préserver les femmes, en particulier les mineures, de l'IVG.
Les pouvoirs publics se doivent de communiquer aux enfants les connaissances de base sur les mécanismes de transmission de la vie, dans la mesure où la cellule familiale ne remplit pas toujours ce rôle.
Nous devrions tirer leçon de l'exemple hollandais. Les Pays-Bas ont l'un des taux les plus faibles d'IVG. Pour parvenir à ce résultat, l'Etat a mis en oeuvre de longue date une politique de prévention et d'éducation sexuelle progressive, dès l'enfance. Ainsi, l'éducation à la contraception fait partie intégrante des programmes pédagogiques, y compris dans le primaire.
C'est à ce moment-là que l'on doit montrer que la contraception est une absolue nécessité si l'on veut éviter de se retrouver face à cette issue souvent dramatique qu'est l'IVG. De cette manière, les générations futures seront en mesure de compléter par le dialogue intrafamilial l'éducation reçue dans le cadre scolaire.
En France, depuis 1996, des cours d'éducation à la sexualité sont prévus dans les programmes des classes de quatrième et de troisième, à raison de deux heures par an. Malheureusement, la réalité est tout autre : à peine plus d'un tiers des collèges auraient mis en place ces séances.
Pour remédier à cette défaillance collective en matière d'éducation scolaire, une véritable politique incitative doit voir le jour. Le Conseil d'Etat, dans une décision du 6 octobre 2000, a d'ailleurs amorcé une prise de conscience en validant tant les campagnes d'information sur la contraception et la sexualité dans les établissements scolaires que la mise en place de modules d'enseignement sur ces thèmes.
L'article 16 bis du projet de loi a pour objet de mettre en place un dispositif d'information à la sexualité et à la contraception dans les collèges et lycées, sans pour autant lui donner des moyens efficaces.
C'est pourquoi je souhaite une mise en place effective des cours d'éducation sexuelle au collège, de même que leur extension à l'école primaire. Je soutiens donc avec force et conviction l'amendement déposé par la commission des affaires sociales, qui vise à étendre ces cours aux écoles et prévoit cinq séances annuelles au lieu des trois initialement envisagées.
A cet égard, il m'a semblé judicieux de proposer un sous-amendement qui tend à préciser le nombre d'heures de cours chaque année. Pourquoi, en effet, resterions-nous dans le flou législatif et le vague réglementaire ? J'estime qu'au moins dix heures annuelles sont nécessaires pour un enseignement de qualité et que celui-ci doit être assuré par des personnes extérieures à l'établissement scolaire, notamment par des conseillères du Planning familial.
La commission des affaires sociales a également pris une initiative remarquable en proposant l'organisation d'une réunion annuelle à l'intention des parents d'élèves. L'implication des parents est en effet fondamentale : par ce biais, ils auront connaissance du contenu et des modalités de ces séances et pourront ainsi nouer plus facilement un dialogue à la maison.
L'information sur la contraception passe aussi par des campagnes nationales, notamment télévisuelles. Je ne peux que déplorer leur nombre insuffisant : trois campagnes en vingt ans ! Le Gouvernement nous dit être sur le point d'en lancer une nouvelle. J'aimerais savoir s'il a pris la peine d'y impliquer les médecins, acteurs essentiels de la contraception.
Je tiens par ailleurs à exprimer ma grande inquiétude quant à la formation lacunaire des médecins en la matière, question qui n'est pas du tout abordée dans le projet de loi.
Alors que l'ensemble de la profession médicale souligne qu'il est humainement impossible de maîtriser une fécondité, qui, dans la vie d'une femme, s'étend sur une période de trente ans en moyenne sans l'aide de médecins compétents, il s'avère que la plupart des jeunes médecins ne connaissent que peu de chose en matière de contraception.
Dans les facultés de médecine, l'enseignement peut ne consacrer que deux heures à la contraception, selon le Bulletin de l'Ordre des médecins de mai 2000. Comment, dès lors, s'étonner que 90 % des généralistes n'exercent aucune activité de gynécologie courante, tels la mise en place des moyens techniques de contraception ou les examens de routine ? Les femmes qui ne recourent pas régulièrement aux services d'un gynécologue sont alors dans un état de sous-information évident.
Enfin, je pense nécessaire d'évoquer à ce sujet l'avenir des gynécologues médicaux. Le déficit de ces professionnels est criant. C'est pourquoi cette filière doit être restaurée au plus vite, même en tenant compte des harmonisations européennes. Sans cela, nous irions à l'encontre des besoins fondamentaux des femmes en matière de santé, plus particulièrement en matière de contraception.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 18, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation :
« Art. L. 312-16. - Une éducation à la sexualité et une information sur la contraception sont dispensées dans les écoles, collèges et lycées à raison d'au moins cinq séances annuelles. Ces séances associent les personnels contribuant à la mission de santé scolaire et des personnels des établissements mentionnés au premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique ainsi que d'autres intervenants extérieurs, notamment des médecins exerçant à titre libéral, conformément à l'article 9 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. Une réunion annuelle est organisée à l'intention des parents d'élèves au cours de laquelle ces derniers sont informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements.
Le sous-amendement n° 29 est présenté par M. Branger.
Il vise à compléter la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par les mots : « représentant dix heures de cours par an ».
Le sous-amendement n° 25 est présenté par M. Neuwirth.
Il a pour objet de rédiger comme suit la dernière phrase du texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation : « Des réunions associant nécessairement les parents d'élèves seront organisées dans ces établissements pour définir une action menée conjointement sur l'information concernant la sexualité et la fécondité. »
Le sous-amendement n° 75 est présenté par M. Seillier.
Il tend à compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée : « En cas de contestation, les parents peuvent faire appel au Conseil supérieur de l'éducation affective et sexuelle selon des modalités définies par décret. »
Le sous-amendement n° 50 est présenté par Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Il vise à compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de leur formation continue, les enseignants se verront proposer des stages destinés à les sensibiliser à une approche pédagogique de l'éducation sexuelle et de la contraception. »
Par amendement n° 67, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit la premier phrase du texte présenté par l'article 16 bis pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation : « Une information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d'au moins six séances annuelles. »
Par amendement n° 76 rectifié, M. Seillier propose de compléter le texte présenté par l'article 16 bis pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est créé un Conseil supérieur de l'éducation sexuelle. Il doit définir le contenu et les modalités de l'éducation sexuelle, dans son environnement affectif, et de l'information contraceptive données dans les écoles, les collèges et les lycées. Sa composition et son fonctionnement sont définis par décret en Conseil d'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Francis Giraud, rapporteur. Cet article additionnel introduit par l'Assemblée nationale en première lecture prévoit l'organisation de séances d'information et d'éducation à la sexualité dans les collèges et lycées. La commission est, naturellement, favorable à cette initiative.
J'ai eu l'occasion de souligner, lors de la présentation de l'amendement n° 1, qu'il était de la responsabilité du Gouvernement de définir une politique ambitieuse d'éducation à la sexualité et d'information sur la contraception qui mobilise autant le corps enseignant que le corps médical et qui ouvre le dialogue au sein des familles.
La commission vous propose d'adopter un amendement tendant à augmenter le nombre minimum de ces séances annuelles, qui passerait de trois à cinq, à les étendre aux écoles primaires - l'information est d'autant plus utile qu'elle est délivrée précocement - et à ouvrir ces séances aux médecins libéraux.
En outre, l'amendement prévoit l'organisation d'une réunion annuelle à l'intention des parents d'élèves, réunion au cours de laquelle ces derniers seront informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances. Il s'agit moins d'instaurer un contrôle des parents sur ces séances d'information destinées à leurs enfants que de leur fournir une information identique, de sorte que les conditions soient réunies pour que s'ouvre un véritable dialogue au sein de la famille.
M. le président. La parole est à M. Branger, pour défendre le sous-amendement n° 29.
M. Jean-Guy Branger. Je maintiens ce que j'ai dit tout à l'heure : le nombre d'heures consacrées à l'éducation de notre jeunesse à la sexualité, tant dans le primaire qu'au collège, est insuffisant, et, je le répète, je pense qu'il ne faut pas laisser ce point dans un flou artistique, législatif ou réglementaire nous devons donc fixer un nombre d'heures.
J'ai la chance d'avoir un fils de quinze ans et de pouvoir parler de ces questions avec lui, et je sais de combien d'heures d'enseignement de la sexualité il a bénéficié. J'ai également parlé avec des jeunes filles, ses camarades, et j'ai pu constater que l'on nous critique là-dessus, que l'on dit : « Mais c'est votre faute ! »
Dès lors, pourquoi rester dans ce flou, dans cette inconsistance ? Je ne veux pas critiquer l'école, c'est trop facile. Critiquer, c'est simple. Mais nous sommes là pour légiférer, pour dire ce que nous voulons, pour dire quel enseignement et quelle formation notre jeunesse doit recevoir. Il faut l'écrire et ne pas se contenter d'en parler, comme cela, pour faire bien, en restant inconsistants.
Je souhaite donc que le sous-amendement n° 29 soit voté par la Haute Assemblée et que le Gouvernement en tienne le plus grand compte.
M. le président. La parole est à M. Neuwirth, pour défendre le sous-amendement n° 25.
M. Lucien Neuwirth. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les définitions qu'a données tout à l'heure Mme Luc des campagnes nécessaires à l'information et à l'éducation ; je crois que nous sommes nombreux à pouvoir en reprendre une grande partie.
Contrairement à mon collègue Branger, je ne pense pas que nous soyons les mieux placés pour déterminer le nombre d'heures nécessaires : il y a des spécialistes pour cela, et je ne crois pas que nous ayons la qualification pour apprécier de telles questions.
Je voudrais cependant insister sur un point particulier, qui fait l'objet du sous-amendement n° 25.
Il est impératif non seulement d'informer, mais d'associer dans le même temps les parents d'élèves aux démarches entreprises par les établissements scolaires, afin d'initier - et cela est important ! - une action conjointe en matière d'éducation et d'information sur la transmission de la vie, sur la sexualité et sur la fécondité.
En effet, beaucoup de parents, retenus par une sorte de pudeur, éprouvent une certaine gêne, voire ne se sentent pas compétents pour apporter une telle information. Pour formaliser les choses et parvenir à une coordination dans les actions d'information et d'éducation, je crois qu'il faut plus d'une réunion annuelle commune entre les parents d'élèves et les établissements scolaires.
Dans un autre domaine, lors d'une mission au Japon dans le cadre de la commission des finances de l'Assemblée nationale, mon collègue Emmanuelli et moi-même avions été très impressionnés par ce que nous avions vu dans une maternelle où on apprenait à lire aux enfants de trois ans - et j'aime autant vous dire que les signes japonais sont autrement plus compliqués que notre alphabet de vingt-six lettres ! En effet, les mamans disponibles étaient présentes et lors de leur retour à la maison, elles pouvaient prolonger cet apprentissage. En matière d'information sur la contraception et d'éducation sexuelle, ce serait une bonne chose.
Monsieur le ministre - et ce n'est pas vous qui êtes visé puisque vous n'étiez pas là - pourquoi a-t-on mis sous le boisseau le conseil supérieur d'éducation sexuelle, qui fonctionnait remarquablement bien ? Y siégeaient les représentants des syndicats, des représentants des enseignants, l'école des parents, toutes les associations familiales, y compris les associations familiales catholiques. Il a rendu de grands services, après le vote de la loi sur la contraception. J'espère que ses activités n'ont pas été interrompues définitivement.
Je reviens au sous-amendement n° 25. Je souhaite vivement que ces réunions associant les parents d'élèves soient organisées dans les établissements pour définir une action menée conjointement sur l'information concernant la sexualité et la fécondité, qui sont les deux domaines naturels qui régissent la transmission de la vie.
M. le président. La parole est à M. Seillier, pour défendre le sous-amendement n° 75.
M. Bernard Seillier. Avec ce sous-amendement, j'ai voulu attirer l'attention sur les difficultés auxquelles nous sommes confrontés, au-delà de la position de principe unanime sur la nécessité de l'éducation et de l'information ici visées.
Ainsi, l'amendement présenté par M. le rapporteur me satisfait pleinement, si ce n'est qu'il se termine par une phrase indiquant que les parents « sont informés du cadre, du contenu et des modalités de ces séances », M. le rapporteur ayant pris le soin de préciser dans sa présentation qu'il ne s'agissait pas de donner aux parents la possibilité de contrôler cette éducation.
Il s'agit là d'une question de fond. Je suis d'accord avec M. le rapporteur s'il s'agit de ne pas autoriser les parents à contrôler, c'est-à-dire à définir, dans chaque établissement, le contenu de cette éducation, à condition toutefois que ce contenu soit précisé pour que des garanties puissent être données aux parents, dont c'est tout de même une responsabilité fondamentale !
La responsabilité éducative appartient d'abord aux parents. Pour toutes les matières scolaires, ils sont obligés de la déléguer car ils sont incompétents. En revanche, s'agissant de l'éducation sexuelle, a priori , ils ne devraient pas avoir à la déléguer - sauf que nous sommes obligés de constater qu'il ne l'assument pas toujours correctement. Nous sommes donc face à une situation qui impose la création d'une institution, d'une autorité supérieure indépendante et incontestable, ayant pour mission de définir, pour l'ensemble des établissements, le contenu de cette formation et ses modalités. Cela nous évitera d'ailleurs de devoir préciser, par des amendements, le nombre d'heures ou les modalités de fonctionnement de chaque réunion.
Je rejoins les propos de mon collègue Lucien Neuwirth, s'agissant en tout cas de l'interrogation sur l'existence et le fonctionnement du Conseil supérieur d'information sexuelle, de régulation des naissances et de l'éducation familiale. J'avais posé récemment une question sur ce sujet au ministre de l'éducation nationale. Si ce conseil a rempli, c'est vrai, un rôle très important, il n'a pas été conçu spécifiquement pour définir un contenu éducatif dans les programmes des écoles et des lycées, même si cela faisait partie indirectement de l'un des aspects de sa mission. Mais j'ai pris soin de relire le texte qui, au sein de la loi de 1973, le créait, ainsi que les différents textes qui ont suivi. Il est vrai qu'aujourd'hui il est au point mort, à cause d'ailleurs d'une erreur de codification qui fait qu'il ne peut pas être activé à l'instant.
Par ce sous-amendement n° 75, je dis, anticipant sur ce que pourrait être cette autorité supérieure - que j'appelle dans le texte de mon sous-amendement « conseil supérieur de l'éducation affective et sexuelle » - que les parents pourront, en cas de contestation sur le contenu de l'éducation donnée à leurs enfants dans l'établissement scolaire au cours de cette réunion prévue par l'amendement n° 18 de la commission, non pas agir directement au niveau de l'établissement pour contrarier l'organisation de cette éducation, mais avoir une possibilité de contrôle authentique, par la voie de l'appel, sur la définition même du contenu de cette éducation.
M. le président. La parole est à Mme Campion, pour défendre le sous-amendement n° 50.
Mme Claire-Lise Campion. Dans l'optique qui est la nôtre de renforcer l'éducation sexuelle et une information adaptée et même éclairée de la contraception, il paraît important de former convenablement les personnes qui ont un rôle prépondérant à jouer dans ce domaine.
En effet, il apparaît clairement que, face à de tels sujets, les enseignants se trouvent trop souvent démunis, faute d'une formation pédagogique. De plus, tous les jours, on constate que des informations inexactes, incompréhensibles, obsolètes, voire un peu délirantes ou trompeuses, circulent et sont véhiculées au sein des établissements, et ce n'est pas acceptable.
Comment accepter, en effet, qu'un professeur de sixième explique la puberté à des jeunes filles en la définissant comme une horloge qui se déclenche dans la tête ? Comment supporter que la méthode Ogino soit encore présentée comme une technique de contraception ? Comment concevoir que, lorsque des séances d'éducation à la sexualité sont mises en place, on sépare les filles des garçons ? Il convient d'agir, et d'agir vite et concrètement.
Je sais bien que le Gouvernement va nous dire que, bien qu'il soit d'accord sur le principe de notre sous-amendement, ce dernier relève non pas du domaine législatif, mais du domaine réglementaire. Nous en convenons, mais il n'en reste pas moins que l'on ne peut plus admettre certaines pratiques ou explications hasardeuses sur des sujets aussi importants. Il est grand temps de prévoir des programmes adaptés, d'organiser des formations pédagogiques et des sensibilisations à l'éducation à la sexualité et à la contraception à destination des enseignants.
M. le président. La parole est à Mme Luc, pour présenter l'amendement n° 67.
Mme Hélène Luc. Comme nous l'avons dit, avec mes amis Odette Terrade et Guy Fischer, dans la discussion générale, l'une des qualités majeures du texte réside dans sa prise en compte globale des questions d'IVG, de contraception et d'éducation sexuelle.
Nous avons insisté, tout au long du débat, sur le fait que, pour une femme qui se retrouve enceinte et qui ne le désire pas, l'avortement constitue en lui-même non pas un moyen de contraception, mais une solution de dernier recours. Nous ne le dirons jamais assez : l'IVG n'est pas un acte banal ou anodin. Il ne s'agit pas de l'encourager. Il s'agit, au contraire, de privilégier la contraception sous toutes ses formes et l'éducation sexuelle, comme moyen pour les femmes de se libérer de la tyrannie des lois de la nature et de la reproduction, ainsi que de l'injustice d'une grossesse non désirée.
Afin de réduire le nombre d'avortements et pour permettre aux femmes de bénéficier de tous les moyens possibles de contraception, il nous semble indispensable de promouvoir une réelle politique de contraception et d'éducation sexuelle, et de se donner les moyens de cette politique.
Sur ce plan, le projet de loi présente des avancées indéniables, notamment en ce qui concerne l'accès des mineurs à la contraception. Ces progrès ont été largement exposés par mes amis du groupe communiste républicain et citoyen et par certains autres collègues. Aussi, je n'y reviendrai pas.
Cela étant dit, notre pays - et, par conséquent, le Gouvernement et nous tous - ne peut faire l'économie d'une réflexion globale sur ses lacunes en matière de contraception.
En premier lieu, je tiens à souligner l'effort à entreprendre afin d'impliquer, plus qu'il ne l'est actuellement, le corps médical dans l'information relative à la contraception et à l'éducation sexuelle.
Une réforme des études de médecine faisant une par plus large à ces questions dans la formation des médecins est en cours. Par ailleurs, le ministre de l'éducation nationale a recommandé l'enseignement de l'éducation sexuelle dans les instituts universitaires de formation des maîtres, les IUFM. Il faudra faire énormément de choses. Cette réforme ne portera pas ses fruits si les médecins, en particulier les médecins généralistes, n'y sont pas très étroitement associés, dans une grande campagne pour relancer la contraception.
Nous n'allons pas rouvrir aujourd'hui le débat sur la gynécologie médicale, mais le fait est que les femmes parlent plus volontiers de leur sexualité et de la contraception à un gynécologue qu'à un médecin généraliste. C'est pourquoi nous soutenons les revendications des gynécologues.
Il faudra bien aussi trouver une solution à un manque d'intérêt certain des laboratoires de recherche pour la contraception. Ce problème est rendu plus aigu encore par l'absence de remboursement qui frappe les pilules les mieux dosées et les plus efficaces. Certes, la mise sur le marché d'une pilule générique de troisième génération, prise en charge par la sécurité sociale, est prévue pour cette année. Quand sera-t-elle commercialisée ? Il semble que ce soit pour très bientôt.
Il nous faut d'ores et déjà réfléchir à une prise en charge intégrale de la contraception par la protection sociale.
M. Jean Delaneau, président de la commission. C'est hors sujet !
Mme Hélène Luc. Cette politique ambitieuse de santé publique permettrait, à terme, de diminuer de façon importante le nombre d'IVG, et, par là même, de réaliser des économies.
Monsieur le ministre, je terminerai mon intervention en vous posant une question. Il est nécessaire de relancer la réunion et par conséquent l'activité du Comité national de pilotage pour la contraception et l'éducation sexuelle. Pouvez-vous nous informer sur ce qui est prévu dans l'immédiat et, je l'espère, très rapidement ?
M. Patrick Lassourd. Assez rapidement !
M. le président. La parole est à M. Seillier, pour défendre l'amendement n° 76 rectifié.
M. Bernard Seillier. Il s'agit de prévoir la création du conseil supérieur de l'éducation sexuelle, que j'ai évoqué quand j'ai présenté le sous-amendements n° 75.
A l'occasion de la présentation de l'amendement n° 76 rectifié, je voudrais insister sur l'environnement affectif de l'éducation sexuelle. En ce domaine, il importe, sauf à commettre un erreur qui aboutirait à des échecs, de concevoir l'éducation à donner comme une véritable éducation, qui ne se limite pas simplement à l'aspect physiologique et génitale. Nous sommes en effet des êtres entièrement sexués. La personne elle-même est sexuée. La sexualité exprime la personne et s'exprime à travers la personne dans sa totalité. C'est pourquoi il est important de spécialiser un conseil supérieur sur cette question du contenu de la formation et de l'éducation à donner aux enfants dans les établissements scolaires, d'une manière indépendante, dans le respect de la liberté de conscience et de la responsabilité des parents. Cette autorité que j'appelle « conseil supérieur de l'éducation sexuelle » doit impérativement dépasser l'aspect purement informatif pour revêtir la dimension d'une véritable éducation.
Cela nécessite une grande exigence, des personnes compétentes, car n'importe qui ne peut pas être compétent en ce domaine.
Un des défauts du conseil supérieur d'information sexuelle, de régulation des naissances et d'éducation familiale, c'était justement d'être un immense forum. Certains de mes amis y ont participé. Un travail intéressant y a effectivement été accompli au départ. Mais, par la suite, c'est devenu un lieu où l'on ne pouvait plus s'entendre et discuter sérieusement. Je crois qu'il faut ramasser les compétences qui étaient les siennes dans une autorité nationale compétente en ce domaine, spécialisée pour définir le contenu et les méthodes d'éducation dans les établissements scolaires.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la secrétaire d'Etat aux droits des femmes fera entendre sa voix particulière aux côtés du ministre délégué à la santé, en restant dans le champ de ses compétences.
Je souhaite répondre à certains d'entre vous, particulièrement sur la contraception, car cela me semble majeur, comme à chacun d'entre vous.
Savez-vous que, lorsque le Premier ministre m'a confié le secrétariat aux droits des femmes en décembre 1998, huit mois après avoir accepté d'assumer des compétences ministérielles en matière de formation professionnelle, j'ai découvert que le budget dévolu aux droits des femmes était un tout petit budget de 80 millions de francs ? Néanmoins, ma conviction sur la contraception était telle que j'ai décidé d'en faire une réelle priorité d'action politique. Nous avons donc mis en place un comité de pilotage dans lequel siégeaient, bien sûr, des médecins, des personnalités qualifiées, des représentants du monde associatif, tous ceux qui pouvaient apporter leur voix et leurs compétences dans la définition de ce qui devait être une grande campagne nationale.
Sur ce budget global de 80 millions de francs, j'ai consacré 20 millions de francs à la traduction de cette priorité politique.
Cette campagne s'est déroulée tout au long de l'année 2000, au travers, à la fois, de spots télévisés, qui coûtent très cher, et de documents d'information : sur les 12 millions de guides de poche, que nous avons appelés « cartes Z », la moitié, soit 6 millions, ont été distribués par l'éducation nationale et l'autre moitié par l'ensemble des acteurs qui touchent la jeunesse, le sport, la culture et les missions locales, pour essayer aussi d'atteindre celles et ceux qui sont les plus éloignés de l'information.
Nous avons demandé - à l'époque, je travaillais auprès de Martine Aubry - à l'institut BVA de procéder à une évaluation de cette campagne. Le résultat a été encourageant, mais les conclusions nous ont démontré que nous devions faire d'une grande campagne nationale d'information sur la contraception un enjeu annuel parce que, chaque année, une nouvelle classe d'âge s'éveille à la sexualité.
Mme Hélène Luc. Tout à fait !
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. On croit que, en 2000, le dialogue familial va de soi. La militante que j'ai été une partie de ma vie dans le cadre du planning familial ne pensait pas que, vingt-cinq ans après, ce dialogue serait encore difficile à instaurer.
Quand je vais dans les lycées ou dans certaines facultés voir comment se déroule ce dialogue, je prends acte qu'à côté des échanges que, heureusement, beaucoup de jeunes peuvent avoir avec leur famille, bien d'autres n'ont pas la chance d'obtenir des informations. La société se doit de suppléer à cette absence d'informations.
J'ai demandé un arbitrage au Premier ministre pour que soient engagés 20 millions de francs. Il a rendu un avis positif : nous lancerons donc à nouveau, à partir de l'automne 2001, une grande campagne d'information sur l'ensemble des moyens de contraception, relayée par des spots télévisés, les radios, la presse locale, les télévisions régionales et les supports écrits.
Je ne parlerai pas de la contraception d'urgence, ni de bien d'autres sujets qui relèvent plus directement de la santé.
En ce qui concerne le Conseil supérieur de l'information sexuelle, le CSIS, quand j'ai pris en charge ce champ de compétence, j'ai, bien sûr, réuni ce conseil. J'ai constaté qu'il comptait beaucoup de membres, et qu'il était permis de s'interroger, non pas sur leur qualité, mais sur l'efficacité de leurs conclusions.
La dernière réunion plénière que j'ai présidée a eu lieu le 31 mai 2000, et nous avons, ensemble, décidé de restreindre la composition de ce conseil pour en faire davantage une assemblée consultative et de propositions. Les quatre groupes de travail qui ont été mis en place fin 1996 m'ont remis leurs rapports respectivement intitulés : Violences à caractère sexuel , Information, éducation des jeunes à la sexualité , Soutien des parents dans leur tâche éducative et Régulation des naissances , autour desquels nous avons débattu en mai dernier.
La prochaine réunion plénière nous permettra de mieux définir encore le rôle du CSIS puisque ses membres devraient être renouvelés. Pour la petite histoire, cette année, le CSIS, qui était traditionnellement placé sous la tutelle du secrétariat d'Etat aux droits des femmes, au travers d'un toilettage du code de la santé publique, a changé de tutelle. Pendant trois ou quatre mois, il y a eu une période de flottement, mais je suis certaine qu'après avoir réétudié cette question, un décret et deux arrêtés seront pris très prochainement afin de remettre de nouveau le CSIS sous l'autorité de la secrétaire d'Etat aux droits des femmes. (Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 29, 25, 75 et 50, ainsi que sur les amendements n°s 67 et 76 rectifié ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission souhaite que le sous-amendement n° 29 de M. Branger soit retiré, car la formule des heures de cours ne lui semble pas forcément la meilleure, d'autant que l'amendement n° 18 de la commission reprend l'idée qui sous-tend cet amendement avec les cinq séances annuelles.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 25 de M. Neuwirth, la commission émet un avis favorable.
Pour ce qui est du sous-amendement n° 75 de M. Seillier, la commission souhaite également qu'il soit retiré, car il semble satisfait par le sous-amendement n° 25.
S'agissant du sous-amendement n° 50, présenté par Mme Campion, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
L'amendement n° 67 est satisfait par l'amendement de la commission.
Enfin, la commission émet un avis favorable sur l'amendement n° 76 rectifié. Toutefois, elle suggère à M. Seillier de transformer cet amendement en sous-amendement à l'amendement n° 18 de la commission.
M. le président. Monsieur Seillier, acceptez-vous les suggestions de M. le rapporteur de retirer votre sous-amendement n° 75 et de transformer votre amendement n° 76 rectifié en un sous-amendement à l'amendement n° 18 de la commission ?
M. Bernard Seillier. Oui, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 75 est retiré.
Je suis saisi, par ailleurs, d'un sous-amendement n° 76 rectifié bis , présenté par M. Seillier, tendant à compléter le texte proposé par l'amendement n° 18 pour l'article L. 312-16 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est créé un Conseil supérieur de l'éducation sexuelle. Il doit définir le contenu et les modalités de l'éducation sexuelle, dans son environnement affectif, et de l'information contraceptive données dans les écoles, les collèges et les lycées. Sa composition et son fonctionnement sont définis par décret en Conseil d'Etat. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 18, sur les sous-amendements n°s 29, 25, 50 et 76 rectifié bis , ainsi que sur l'amendement n° 67 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. S'agissant de la gynécologie médicale, monsieur Branger, nous avons réformé profondément le diplôme d'études spéciales qui permettra, en quatre ans, d'accéder à cette spécialité à laquelle nous tenons autant que vous : nous savons quel rapport entretiennent les femmes avec leur gynécologue, qui est un peu différent de celui qu'elles ont avec leur médecin généraliste.
Cela dit, ce n'est pas facile : il faut des enseignants. Mais nous avons beaucoup travaillé ; Gérard Lévy en particulier suit ce dossier. Je crois que tout le monde est satisfait. Trois ou quatre ans seront nécessaires pour former ces gynécologues, qui devront être en nombre suffisant. Mais n'ayez crainte, la gynécologie médicale - privilège français en Europe, vous le savez, parce que se posait un vrai problème de spécialité - sera maintenue.
La réforme des études médicales, sur laquelle nous avons beaucoup travaillé depuis quatre ans, permettra de dispenser quatre heures d'enseignement sur la sexualité, la contraception, etc., dans le deuxième cycle. Cette disposition est prévue dans un décret qui est paru en septembre 2000.
Dans le troisième cycle de médecine générale, les édudes s'étaleront sur trois ans, avec trois mois de stage obligatoire dans un service de consultation gynécologique et de surveillance de la grossesse.
M. Lucien Neuwirth. Très bien !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. De plus, six heures seront consacrées à l'enseignement théorique sur la contraception et la manière de communiquer avec les femmes et les jeunes filles sur ces questions, au travers d'entretiens dirigés. Je tenais à apporter cette précision, car elle me paraît importante par rapport à ce qui nous préoccupe tous.
J'en viens maintenant à l'avis du Gouvernement sur les différents amendements et sous-amendements.
Sur l'amendement n° 18, je partage entièrement la préoccupation de M. le rapporteur. Simplement, je crois que l'on ne peut pas imposer par la loi un nombre de séances. Par conséquent, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 29, il ne me paraît pas non plus nécessaire d'insister sur ce point, car cela serait très mal pris par l'éducation nationale. Mais le ministre s'est engagé à réaliser votre souhait, monsieur Branger.
S'agissant du sous-amendement n° 25 de M. Neuwirth, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat, pour les mêmes raisons. On ne doit pas imposer l'information, mais agir localement, avec les parents d'élèves et les enseignants, pour décider de ce qui convient à chacun des établissements.
En ce qui concerne le sous-amendement n° 50, le Gouvernement en demande également le rejet, car il s'agit d'une disposition d'ordre réglementaire.
Quant à l'amendement n° 67, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Enfin, pour ce qui est du sous-amendement n° 76 rectifié bis , le Gouvernement y est défavorable. En effet, la loi du 11 juillet 1973 a créé le Conseil supérieur de l'information sexuelle, dont les missions sont définies à l'article 3 : il s'agit d'assurer la liaison entre les associations et les organismes qui contribuent à l'éducation sexuelle, de faire effectuer des recherches en matière d'information sexuelle, de régulation des naissances, d'éducation familiale, de formation, et de proposer aux pouvoirs publics les mesures à prendre en vue de favoriser l'information sur les problèmes d'éducation sexuelle. Cette instance doit être renouvelée, nous l'avons dit. L'amendement proposé est donc inutile.
M. le président. Monsieur Branger, le sous-amendement n° 29 est-il maintenu ?...
M. Jean-Guy Branger. Je souscris à la démarche de la commission et de M. le ministre, et je retire mon sous-amendement.
Si j'ai voulu mentionner un nombre d'heures de cours par an, c'est tout simplement en raison d'une insuffisance notoire. En effet, force est bien de constater que tout ce qui a été entrepris jusqu'à présent s'est soldé par un échec. Je l'ai relevé en déposant ce sous-amendement qui, je le sais bien, peut constituer un trublion dans l'éducation nationale. Mais il faut avoir un engagement ferme, et je remercie M. le ministre des précisions qu'il a bien voulu apporter dans sa réponse sur les moyens qu'on va mettre en oeuvre pour éduquer les jeunes à la contraception.
M. le président. Le sous-amendement n° 29 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 25, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Maintenez-vous le sous-amendement n° 50, madame Campion ?
Mme Claire-Lise Campion. Accédant à la demande de M. le ministre, nous allons le retirer, non sans lui avoir demandé de se rapprocher de son collègue de l'éducation nationale, pour le convaincre de l'importance qu'il y a à entendre tout ce qui a été dit ce soir sur ce sujet.
M. le président. Le sous-amendement n° 50 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 76 rectifié bis.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. J'ai bien entendu ce qu'ont dit M. le ministre et Mme le secrétaire d'Etat sur l'évolution de la composition et des modalités de fonctionnement du conseil supérieur de l'information sexuelle.
J'ai beaucoup insisté, en présentant le sous-amendement, et j'insiste encore à l'occasion de cette explication de vote sur l'importance qu'il y a à ne pas séparer l'éducation, au sens plein, de sa dimension affective, de ne pas scinder la personnalité. Voilà ce qui doit présider à l'évolution du conseil supérieur actuel ! Une évolution législative est nécessaire, ne serait-ce qu'au niveau de la terminologie.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 76 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 18, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 67 n'a plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 16 bis ainsi modifié.

(L'article 16 bis est adopté.)

Articles additionnels après l'article 16 bis



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 51, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 16 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans les établissements médico-sociaux accueillant des personnes handicapées, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales doit s'assurer que les moyens consacrés à la mise en oeuvre d'un projet adapté d'éducation sexuelle et d'information à la contraception sont suffisants. »
Par amendement n° 68, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 16 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'avant-dernier alinéa de l'article L. 6121-6 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : "Une information et une éducation à la sexualité et à la contraception sont notamment dispensées dans toutes les structures accueillant des personnes handicapées". »
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 51.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Un des grands axes de notre politique en faveur des personnes handicapées est l'amélioration de leur intégration dans la vie ordinaire, et donc la reconnaissance du fait qu'elles sont des personnes à part entière, qui doivent, comme l'ensemble des membres de notre population, pouvoir bénéficier des apports de notre société.
En effet, humainement comme socialement, on ne peut plus admettre que ces personnes, déjà défavorisées par leur handicap, se retrouvent marginalisées ou exclues parce que nous ne nous donnons pas les moyens de nous adapter et de prendre en considération leur situation.
Accueillir ces personnes dans notre quotidien, dans la vie ordinaire, passe forcément par un accès facilité au savoir et à l'éducation. Des efforts ont d'ailleurs commencé à être entrepris afin que leur soient ouvertes les portes de nos écoles.
Mais cela suppose aussi, et surtout, que nous continuions d'approfondir notre démarche vers des domaines aussi intimes que l'éducation à la sexualité et l'accès à la contraception.
Il est grand temps de ne plus se voiler la face, de leur reconnaître ouvertement un droit on ne peut plus naturel à l'amour, à la tendresse, à la sexualité, à la parentalité.
Il nous faut donc prendre bien soin de vérifier qu'une information adaptée leur est prodiguée et amorcer la mise en place de projets individualisés allant dans ce sens.
M. le président. La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° 68.
Mme Odette Terrade. Avec cet amendement, nous anticipons quelque peu sur le débat que nous aurons à l'article 20 et qui concernera les personnes handicapées mentales.
Notre collègue Marie-Madeleine Dieulangard disait hier soir que les handicapés mentaux ont droit à une vie sexuelle conforme à la dignité de tout être, c'est-à-dire qui ne soit ni interdite ni forcée. Nous partageons son point de vue.
Nous sommes tout particulièrement attachés au droit à la sexualité pour chacun de nos concitoyens, et donc tout naturellement aussi pour les personnes handicapées, quel que soit leur handicap.
Dans le même état d'esprit, chacun de nos concitoyens devrait pouvoir avoir accès à une information relative au fonctionnement du corps humain, à ses fonctions de reproduction ; chaque jeune devrait bénéficier d'une éducation à la sexualité.
Pourquoi les jeunes handicapés mentaux qui ne sont pas dans un système scolaire intégré à l'éducation nationale n'auraient-ils pas les mêmes droits en la matière que les jeunes collégiens et lycéens de leur âge ?
Il est indispensable qu'une information adaptée au public auquel elle s'adresse soit dispensée dans toutes les structures d'accueil des personnes handicapées.
L'article 20 prévoit qu'en cas de stérilisation à visée contraceptive pour une personne handicapée mentale majeure sous tutelle « une information adaptée à son degré de compréhension » lui soit donnée. C'est une bonne chose. Toutefois, dans un souci préventif, il conviendrait que les personnes handicapées mentales - qualificatifs qui, nous le savons, recouvrent des réalités très différentes d'une personne à l'autre - soient correctement informées, en amont, des risques de grossesse liés à la sexualité et informées sur la contraception.
C'est donc, mes chers collègues, pour qu'une information et une éducation à la sexualité et à la contraception soient dispensées dans toutes les structures accueillant des personnes handicapées que nous vous invitons à adopter notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 51 et 68 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 51, dont la rédaction lui paraît plus précise que celle de l'amendement n° 68, qui, de toute façon, n'aura plus d'objet si l'amendement n° 51 est adopté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement a exactement le même avis que la commission... mais en sens contraire ! En tout cas, sur le fond, ces amendements sont indispensables.
M. Francis Giraud, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission se range à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 51.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je le retire au profit de l'amendement n° 68.
M. le président. L'amendement n° 51 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 69, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 16 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Un service d'accueil téléphonique gratuit est créé par l'Etat. Il concourt à la mission d'information sur la contraception et la sexualité. Il répond aux demandes d'information et de conseil.
« Dans chaque département est mis en place, en liaison avec les services de la caisse primaire d'assurance maladie, un dispositif permettant d'apporter des informations pratiques aux personnes qui le demandent.
« Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'organisation et de fonctionnement du dispositif départemental ainsi que les modalités d'articulation de l'échelon national avec l'échelon départemental.
« II. - Les dépenses résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Nous sommes tous convaincus que nous ne réussirons à faire baisser le nombre d'IVG qu'en délivrant une information sur la sexualité et la contraception la plus pertinente et la plus large possible.
Le texte qui nous est proposé présente, de ce point de vue, un net progrès puisqu'il fait référence à des séances d'éducation à la santé et à la sexualité en milieu scolaire, même si, à notre avis, ce n'est encore là qu'une première étape.
Afin de mettre toutes les chances du côté de la prévention, nous proposons, au travers de notre amendement, de créer un service téléphonique gratuit, un numéro vert en quelque sorte, géré selon un schéma départemental.
Ce numéro vert permettrait de répondre aux interrogations et aux demandes de conseil émanant des adolescents ou des adultes en matière de sexualité sans présenter le côte formel et institutionnel des cours d'éducation sexuelle dispensés dans le cadre scolaire.
Il s'agit, selon nous, d'un moyen supplémentaire d'élargir la source d'information relative à la sexualité, en mettant à la disposition du public un service très facilement accessible.
Il faut d'ailleurs rappeler que, dans d'autres domaines, - je pense, en particulier, à la maltraitance des enfants - la création de numéros verts a fait la preuve de son efficacité en permettant de libérer la parole. Nous pensons qu'il peut en être de même pour les questions de sexualité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Je croyais beaucoup à la nécessité d'une plate-forme téléphonique nationale, dont la mise en place avait été au coeur de la campagne de l'année 2000. Or, à ma grande surprise, nous n'avons enregistré que 10 000 appels, alors que nous nous étions équipés pour un nombre beaucoup plus important.
Prenant acte de cet état de fait, nous avons réfléchi à une autre démarche. Nous avons pensé qu'il valait mieux régionaliser ces plates-formes téléphoniques, de façon que, à travers les réseaux « jeunes », les réseaux « droits des femmes », les réseaux « santé », nous puissions mieux atteindre le citoyen, la citoyenne, le jeune. En juillet 2000, nous avons donc fermé la plate-forme nationale et créé les plates-formes régionales.
Mon budget ne permettait pas de faire face au coût de l'ensemble de ces plates-formes. Aussi, ce sont maintenant les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, les DRASS, qui ont pris la relève.
Je voulais apporter ce témoignage et assurer le Sénat de l'efficacité de la continuation de leur mise en place. Elisabeth Guigou, avec qui je m'en suis entretenue voilà quelques jours, est tout à fait favorable à cette décentralisation et elle a donc décidé de rendre ces dispositions pérennes.
Voilà pourquoi je demande aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le retirer.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Depuis quand fonctionnent ces plates-formes régionales ?
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Depuis juillet 2000.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 69 est-il maintenu, madame Bidard-Reydet ?
Mme Danielle Bidard-Reydet. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'argumentation de Mme le secrétaire d'Etat en faveur de la mise en place des plates-formes régionales. Nous, nous préférerions que l'on descende jusqu'à l'échelon départemental, mais, puisque nous constatons que nous sommes sur la bonne voie, nous retirons l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 69 est retiré.

Article 17



M. le président.
« Art. 17. - L'article L. 5134-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 5134-1 . - I. - Le consentement des titulaires de l'autorité parentale ou, le cas échéant, du représentant légal n'est pas requis pour la prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux personnes mineures.
« II. - Les contraceptifs intra-utérins ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale et uniquement en pharmacie ou dans les centres de planification ou d'éducation familiale mentionnés à l'article L. 2311-4. Les sages-femmes sont habilitées à prescrire les diaphragmes, les capes, ainsi que les contraceptifs locaux. La première pose du diaphragme ou de la cape doit être faite par un médecin ou une sage-femme.
« L'insertion des contraceptifs intra-utérins ne peut être pratiquée que par un médecin. Elle est faite, soit au lieu d'exercice du médecin, soit dans un établissement de santé ou dans un centre de soins agréé. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 19, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose :
A. - De rédiger comme suit le premier alinéa de cet article :
« « I. - Avant le premier alinéa de l'article 5134-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : ».
B. - En conséquence, de supprimer les troisième et quatrième alinéas de cet article.
C. - De compléter cet article par un II et un III ainsi rédigés :
« II. - La première phrase du quatrième alinéa du même article est supprimée.
« III. - Dans l'article 2 de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence, le mot : "cinquième" est remplacé par le mot : "dernier". »
Par amendement n° 70, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter le I du texte présenté par l'article 17 pour l'article L. 5134-1 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette délivrance s'effectue à titre gratuit dans les pharmacies selon des modalités fixées par décret. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Les pertes de recettes résultant de la délivrance à titre gratuit de contraceptif aux personnes mineures sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. - ».
Les deux amendements suivants sont présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 37 rectifié vise, dans la première phase du premier alinéa du II du texte proposé par l'article 17 pour l'article L. 5134-1 du code de la santé publique, après les mots : « intra-utérins » à insérer les mots : « ainsi que les diaphragmes et les capes ».
L'amendement n° 36 tend :
A. - A compléter le texte proposé par l'article 17 pour l'article L. 5134-1 du code de la santé publique par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - La délivrance aux mineures des médicaments ayant pour but la contraception d'urgence et qui ne sont pas soumis à prescription médicale obligatoire s'effectue à titre gratuit dans les pharmacies selon des conditions définies par décret.
« Dans les établissements d'enseignement du second degré, si un médecin ou un centre de planification ou d'éducation familiale n'est pas immédiatement accessible, les infirmières peuvent, à titre exceptionnel et en application d'un protocole national déterminé par décret, dans les cas d'urgence et de détresse caractérisée, administrer aux élèves mineures et majeures une contraception d'urgence. Elles s'assurent de l'accompagnement psychologique de l'élève et veillent à la mise en oeuvre d'un suivi médical. »
B. - En conséquence, de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Dans l'article 2 de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence, les mots : "du cinquième alinéa" sont remplacés par les mots : "des dispositions". »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. - ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 19.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'article 17 tend à supprimer, d'une part, le consentement parental pour la prescription, la délivrance ou l'administration de contraceptifs aux mineures et, d'autre part, l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux.
Favorable à tout ce qui peut développer la contraception, qui est le meilleur garant de la diminution des IVG, la commission s'oppose pourtant à cette disposition, en particulier en ce qui concerne la première prescription.
En effet, une information sur la contraception mieux développée, mieux comprise et mieux acceptée permettrait de diminuer sensiblement le nombre des IVG. Or, la diffusion d'une contraception bien comprise suppose un accompagnement médical. Comme l'a souligné l'Académie nationale de médecine : « A condition d'être l'objet d'un suivi médical, la contraception ne comporte que de très faibles risques pour la santé. »
L'obligation de prescription permet un bilan et un suivi médical de la femme et un dépistage précoce de certaines pathologies. Le dialogue entre le médecin et la femme est indispensable pour assurer une bonne compréhension et un bon usage d'une contraception efficace ; il assure en outre le choix d'une contraception adaptée à la situation de chaque femme.
Au regard des impératifs de santé publique et quand bien même apparaîtraient des contraceptifs hormonaux sans danger pour la santé, il paraît nécessaire à votre commission de maintenir l'obligation de prescription médicale pour ces contraceptifs.
Je vous propose par conséquent d'adopter un amendement maintenant cette obligation et rétablissant, sous réserve des coordinations nécessaires, le texte de la loi du 13 décembre 2000 sur la contraception d'urgence, que le présent article abroge sans doute involontairement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° 70.
Mme Odette Terrade. Nous sommes tous conscients de la nécessité de faciliter l'accès des mineures à la contraception.
L'absence de celle-ci conduit encore à de trop nombreuses interruptions de grossesse, qui ne sont, bien entendu, pas la façon idéale de débuter une vie d'adulte.
Dans cette assemblée, nous avons voté, à l'automne dernier, un amendement prévoyant la délivrance à titre gratuit de la contraception d'urgence dans les pharmacies.
La plupart d'entre nous ont approuvé, quelles que soient leurs orientations politiques, cette mesure allant dans le sens d'un accès plus large des jeunes filles à la contraception.
De la même façon, nous pensons que la contraception régulière doit pouvoir être accessible dans les mêmes conditions.
Il serait en effet assez paradoxal que les produits contraceptifs utilisés dans le cadre d'une contraception régulière soient moins accessibles, notamment d'un point de vue financier, que la contraception d'urgence.
Notre amendement va dans le sens d'une meilleure diffusion de la contraception.
Cette mesure préventive permettrait d'éviter, dans certains cas, le recours à l'interruption volontaire de grossesse, notamment chez les mineures. Aussi, je vous demande, mes chers collègues, de lui réserver un accueil favorable et de le voter.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter les amendements n°s 37 rectifié et 36.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. L'amendement n° 37 rectifié a pour objet d'insérer, après les mots : « intra-utérins », les mots : « ainsi que les diaphragmes et les capes ».
Les diaphragmes et les capes ne sont ni des contraceptifs intra-utérins, soumis à prescription médicale obligatoire et dont la délivrance est réservée aux pharmaciese et aux centres de planification ou d'éducation familiale en vertu du texte initial adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, ni des médicaments, auxquels s'appliquent les règles de droit commun des substances vénéneuses en matière de prescription médicale et du monopole pharmaceutique en matière de délivrance.
Cet amendement vise à imposer la délivrance sur prescription médicale et en pharmacie ou dans les centres de planification ou d'éducation familiale des diaphragmes et capes, ces dispositifs médicaux contraceptifs ne devant être utilisés que dans des cas particuliers nécessitant l'intervention du prescripteur et le conseil du pharmacien.
Cela veut donc dire tout simplement qu'il faut vendre et mettre à la disposition du public ces diaphragmes et ces capes.
Par ailleurs, l'objectif de l'article 17 du projet de loi, dans sa rédaction proposée par le Gouvernement et adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale, est de faciliter l'accès à la contraception et de clarifier les règles relatives aux conditions de prescription et de délivrance de l'ensemble des contraceptifs, et pas seulement des contraceptifs d'urgence, en tenant compte du droit commun applicable aux médicaments en la matière. Une nouvelle rédaction de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique est prévue à cette fin.
L'amendement n° 36 a donc pour objet de réinsérer, à la fin de cet article L. 5134-1 nouveau, les dispositions issues de l'article 1er de la loi du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence concernant, d'une part, la gratuité de la délivrance aux mineures des médicaments ayant pour but la contraception d'urgence et non soumis à prescription médicale obligatoire et, d'autre part, l'administration de ces médicaments aux élèves par les infirmières en milieu scolaire. Ces principes ne sont, en effet, pas repris dans le texte présenté ici. La publication de la loi relative à la contraception d'urgence ayant été postérieure à l'examen du présent projet de loi en première lecture à l'Assemblée nationale, la question de la mise en cohérence des deux textes n'avait pas pu être abordée à ce stade.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 70, 37 rectifié et 36 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Pour l'amendement n° 70, la commission souhaite entendre l'avis du Gouvernement.
Quant aux amendements n°s 37 rectifié et 36, ils seraient satisfaits par l'adoption de l'amendement de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 19 et 70 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je ne comprends pas l'enjeu de l'amendement n° 19, qui vise à rétablir une prescription qui n'a jamais été supprimée. Vous imaginez ma perplexité !
Tout médicament est soumis à une autorisation de mise sur le marché et aux règles fixées par l'Agence du médicament, que votre serviteur a eu l'honneur de créer.
Quand un contraceptif contient de la progestérone, il faut une ordonnance. Je suppose donc que vous faites cette proposition dans l'hypothèse d'une évolution future. Je m'en remets donc à la sagesse du Sénat.
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat. Pour le NorLévo, on a été obligé de changer la loi !
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Certes, mais, en l'occurrence, dans le doute, cela ne me semble pas nécessaire, et je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est désormais l'avis de la commission sur l'amendement n° 70 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Défavorable.
M. Jean Delaneau, président de la commission. La commission suit le Gouvernement !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 70, 37 rectifié et 36 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, ainsi modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Article additionnel après l'article 17 ou après l'article 20



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 28, M. Neuwirth propose d'insérer, après l'article 17, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement, pendant trois ans, un rapport sur le bilan des actions d'information concernant la contraception et sur l'évolution des structures nécessaires à l'accueil des femmes demandant une interruption volontaire de grossesse. »
Par amendement n° 54, Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« Tous les trois ans, à compter de la promulgation de la présente loi, un bilan d'évaluation de son application sera présenté au Parlement. »
L'amendement n° 28 est-il soutenu ?...
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission reprend l'amendement n° 28, auquel elle avait donné un avis favorable.
Toutefois, elle souhaiterait le modifier.
M. Neuwirth l'avait ainsi rédigé : « Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement pendant trois ans,... ». La commission pense qu'il vaut mieux écrire : « tous les trois ans ».
Je suis donc saisi d'un amendement n° 28 rectifié présenté par M. Francis Giraud, au nom de la commission, et tendant à insérer, après l'article 17, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera tous les trois ans au Parlement, un rapport sur le bilan des actions d'information concernant la contraception et sur l'évolution des structures nécessaires à l'accueil des femmes demandant une interruption volontaire de grossesse. »
La parole est à Mme Campion, pour défendre l'amendement n° 54.
Mme Claire-Lise Campion. Je demande à la Haute Assemblée d'adopter cet amendement n° 54, qui est rédigé de façon tout aussi complète.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 54 et 28 rectifié.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Personnellement, je préfère le texte de l'amendement n° 54 à celui de l'amendement n° 28 rectifié. Le Gouvernement est donc favorable au premier et défavorable au second.
M. Francis Giraud, rapporteur. C'est donc l'avis inverse de celui de la commission.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17, et l'amendement n° 54 n'a plus d'objet.

Article 18



M. le président.
« Art. 18. - L'article L. 5434-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5434-2 . - Le fait de délivrer des contraceptifs mentionnés à l'article L. 5134-1 en infraction aux dispositions du premier alinéa du II dudit article et du 1° de l'article L. 5134-3 est puni de six mois d'emprisonnement et de 50 000 francs d'amende. »
Par amendement n° 20, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec le rétablissement de l'obligation de prescription médicale pour les contraceptifs hormonaux.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement entend maintenir un article de caractère répressif concernant les infractions aux conditions de délivrance des contraceptifs intra-utérins, qui sont des dispositifs médicaux et qui ne relèvent pas du droit commun du médicament, ainsi que je l'ai dit tout à l'heure. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement de suppression.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 18 est supprimé.

Article 19



M. le président.
« Art. 19. - Le titre II du livre Ier de la deuxième partie du même code est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Stérilisation à visée contraceptive

« Art. L. 2123-1 . - La ligature des trompes ou des canaux déférents ne peut être pratiquée que si la personne intéressée a exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences.
« Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de santé et après une consultation auprès d'un médecin.
« Ce médecin doit au cours de la première consultation :
« - informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt et des conséquences de l'intervention ;
« - lui remettre un dossier d'information écrit.
« Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de deux mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention.
« Un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive mais il doit informer l'intéressé de son refus dès la première consultation. »
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 77, M. Seillier propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 21, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique :
« Art. L. 2123-1. - La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée que sur une personne âgée de trente ans au moins ou lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement.
« Elle ne peut être pratiquée que sur une personne majeure, ayant exprimé sa volonté libre et délibérée en considération d'une information claire et complète sur les conséquences et les risques de cette intervention et sur le caractère généralement définitif de celle-ci.
« Cet acte chirurgical ne peut être pratiqué que dans un établissement de santé et après une consultation auprès d'un médecin.
« Ce médecin doit au cours de la première consultation :
« - informer la personne des risques médicaux qu'elle encourt, des conséquences et des risques de l'intervention et du caractère généralement définitif de celle-ci ;
« - lui remettre un dossier d'information écrit.
« Il ne peut être procédé à l'intervention qu'à l'issue d'un délai de réflexion de deux mois après la première consultation médicale et après une confirmation écrite par la personne concernée de sa volonté de subir une intervention. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 78, présenté par M. Seillier et tendant à rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 21 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique :
« La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée que sur une personne âgée de trente-cinq ans au moins, ou à un âge tel que le produit de cet âge par le nombre d'enfants mis au monde donne un résultat supérieur à cent, ou lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement. »
Les deux amendements suivants sont présentés par Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 52 rectifié vise, dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, après les mots : "ne peut être pratiqué que", à insérer les mots : "sur une personne majeure et". »
L'amendement n° 53 tend, dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, à remplacer les mots : "deux mois" par les mots : "quatre mois". »
Par amendement n° 71, Mme Terrade, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - De compléter le texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 2123-1 du code de santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« L'intégralité des dépenses liées à cet acte est prise en charge par l'Etat ».
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 19 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la prise en charge par l'Etat de la stérilisation à visée contraceptive sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder l'article 19 de la mention : « I. - ».
La parole est à M. Seillier, pour défendre l'amendement n° 77.
M. Bernard Seillier. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 19, non pas que ce texte ne mérite pas d'être considéré avec attention, ou qu'il ne puisse pas être mis au point ultérieurement, mais parce que, je l'ai dit lors du débat sur la contraception d'urgence lorsque j'ai évoqué la situation de la France, la perspective de légiférer pour légaliser la stérilisation ne semble pas à l'ordre du jour, et, en fin d'année, M. le ministre ne m'a pas démenti.
Pourtant, l'Assemblée nationale, sous la forme d'un amendement, a introduit dans le texte une disposition légalisant la stérilisation à visée contraceptive, cela, à mon avis, de manière précipitée, sans qu'aucune étude complète n'ait été faite sur la situation.
Tous les pays qui se sont déjà engagés dans cette voie, et parfois depuis longtemps, ont constaté des conséquences importantes sur leur situation démographique et sur leur taux de fécondité. Nous avons donc besoin, avant de légiférer dans ce domaine, d'une étude complète sur l'expérience de ces pays. Une telle étude n'a pas pu nous être fournie à l'occasion du présent travail législatif. C'est pourquoi je propose de supprimer l'article 19 dans l'immédiat.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 21.
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission reconnaît la nécessité de donner un cadre légal à la pratique de la stérilisation à visée contraceptive, qui est aujourd'hui largement pratiquée dans notre pays. On enregistre ainsi chaque année en France entre 25 000 et 30 000 actes de stérilisation volontaire à but contraceptif concernant essentiellement des femmes.
Toutefois, si la stérilisation a naturellement une fonction de contraception, elle ne saurait être présentée comme un moyen de contraception équivalent, par exemple, à une pilule contraceptive ou à un stérilet. Elles s'en différencie en effet par son caractère difficilement réversible.
La commission souhaite par conséquent que cette possibilité soit encadrée et que le cheminement soit le plus accompagné possible, pour que cette décision lourde soit mûrement réfléchie. Il convient en effet de protéger la santé des personnes et d'éviter que des excès ne puissent être commis, car il serait dommageable que la loi autorise, par exemple, une stérilisation sur une femme âgée de vingt-cinq ans, sans descendance et ne présentant pas de contre-indication à la contraception.
L'amendement n° 21 de la commission n'autorise la stérilisation à visée contraceptive que dans deux cas : si la personne est âgée de trente ans au moins, ou s'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement. Cette mention vise simplement à protéger les plus jeunes d'une décision qu'ils pourraient ultérieurement regretter.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Seillier, pour présenter le sous-amendement n° 78.
M. Bernard Seillier. Il s'agit, on l'aura compris, d'un texte de repli par rapport à l'amendement de suppression n° 77, que j'ai exposé voilà un instant.
Présenté sous la forme d'un sous-amendement à l'amendement de le commission, il prévoit de porter à trente-cinq ans l'âge minimal pour pouvoir demander une stérilisation, en se référant à la règle dite des « cents » qui est en usage dans certains pays et qui consiste à multiplier l'âge par le nombre d'enfants : dès lors que le produit dépasse cent, la stérilisation est permise. C'est le cas pour une personne de trente-cinq ans ayant trois enfants.
Compte tenu du fait que la stérilisation a une incidence très significative sur le taux de fécondité dans tous les pays qui l'ont introduite, les responsables d'un pays ne peuvent pas, je crois, autoriser la stérilisation, qui peut légitimement correspondre à un désir individuel, sans apprécier à l'avance la portée et les conséquences de la décision qu'ils seront amenés à prendre.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard, pour défendre l'amendement n° 52 rectifié.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Cet amendement d'ordre rédactionnel consiste à transférer à l'article 19 l'interdiction de la sérilisation des mineurs qui avait été posée à l'article 20. Il nous semble en effet plus logique de faire figurer cette interdiction directement dans le texte qui régit la stérilisation volontaire à visée contraceptive.
M. le président. La parole est à Mme Campion, pour défendre l'amendement n° 53.
Mme Claire-Lise Campion. La légalisation de la stérilisation volontaire à visée contraceptive est une demande des femmes, mais aussi des hommes, qui était fort attendue par le corps médical. Voici la chose enfin encadrée et l'on peut s'en féliciter.
Cet amendement est bien modeste, mais nous le pensons important. Il s'agit d'allonger de deux mois le délai de réflexion prévu avant la prise de décision, qui a des conséquences définitives ou, du moins, peu réversibles.
Il est important que le délai soit suffisant, certaines situations vécues par une personne dans une période difficile de sa vie pouvant engendrer des décisions en rapport avec un moment donné, mais pas forcément confirmées par la suite.
Voilà pourquoi un délai de quatre mois nous semblerait tout à fait raisonnable et opportun, et c'est la raison pour laquelle nous vous demandons d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade, pour défendre l'amendement n° 71.
Mme Odette Terrade. Nous approuvons sans réserve l'esprit de cet article qui donne à la stérilisation volontaire à visée contraceptive le cadre légal qui lui faisait défaut jusqu'à aujourd'hui.
La stérilisation peut constituer un substitut efficace à des méthodes contraceptives plus classiques dans le cas où celles-ci sont contre-indiquées ou mal supportées.
La procédure mise en place nous paraît claire et bien encadrée sur le plan juridique.
Afin que cette technique ne soit soumise à aucune discrimination financière, nous pensons qu'il conviendrait que son coût soit pris en charge par la sécurité sociale. Ainsi, elle ne serait pas réservée aux personnes les plus aisées.
L'amendement que nous vous demandons de voter s'inscrit donc dans cette logique et, plus généralement, dans une volonté de voir pris en charge l'ensemble des méthodes contraceptives. Cela constituerait une avancée importante et témoignerait d'une politique ambitieuse en matière de santé publique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 77, 52 rectifié, 71 et sur le sous-amendement n° 78 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est favorable au sous-amendement n° 78, mais elle demande en revanche à M. Seillier de bien vouloir retirer l'amendement n° 77.
M. Bernard Seillier. Dès lors que le sous-amendement n° 78 bénéficie d'un avis favorable, je retire l'amendement n° 77.
M. le président. L'amendement n° 77 est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. L'amendement n° 52 rectifié sera satisfait par l'amendement n° 21 de la commission.
La commission est favorable à l'amendement n° 53, sous réserve qu'il soit transformé en sous-amendement à l'amendement n° 21. Enfin, sur l'amendement n° 71, la commission souhaite connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Madame Campion, acceptez-vous de transformer l'amendement n° 53 en sous-amendement, comme vous le demande la commission ?
Mme Claire-Lise Campion. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 53 rectifié, présenté par Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 21 de la commission pour l'article L. 2123-1 du code de la santé publique, à remplacer les mots : « deux mois », par les mots : « quatre mois ».
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 21, sur les sous-amendements n°s 78 et 53 rectifié, et sur les amendements n°s 52 rectifié et 71 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° 71, car la ligature des trompes est un acte chirurgical qui doit, comme tous les actes chirurgicaux, être remboursé. Nous ne pouvons pas, pour des raisons que vous imaginez - notamment l'extension à d'autres interventions -, commencer à faire des différences, même si cette intervention-là est importante dans le débat qui nous occupe. Cet acte sera donc remboursé.
S'agissant de l'amendement n° 21, le dispositif mis en place en matière d'accès à la stérilisation à visée contraceptive respecte l'esprit du projet de loi au sein duquel l'Assemblée nationale a souhaité l'inscrire. Il prend place parmi les dispositions destinées à rendre la loi cohérente avec l'évolution de la société et le droit des personnes à maîtriser leur fécondité. La position retenue par les députés affirme que les personnes ont le droit de prendre des décisions relatives à leur capacité de procréer, et que ce droit ne contrevient pas au principe d'inviolabilité du corps lorsqu'il s'exerce dans des conditions garantissant une prise de décision libre et éclairée.
Les conditions d'accès à la stérilisation comme méthode contraceptive fixées par l'article 19 du projet de loi permettent d'assurer le respect d'un choix conscient et assumé en matière de maîtrise de la fécondité.
Des garanties sont apportées par le texte pour l'expression d'une volonté libre, motivée et délibérée, en considération d'une information claire et complète sur ses conséquences, notamment le respect d'un délai de réflexion.
Par ailleurs, la possibilité légalement reconnue pour un sujet de demander sa stérilisation pour un motif uniquement contraceptif peut mettre en difficulté des praticiens qui, pour des raisons de conscience, estiment devoir ne pas intervenir. Le texte législatif prévoit donc une clause de conscience assortie d'une obligation d'adresser le patient à un autre praticien.
La rédaction de l'article met la législation française en harmonie avec celle de la plupart des pays européens qui ont mis en oeuvre la résolution du comité des ministres du Conseil de l'Europe, en date, du 14 novembre 1975, qui a été votée par la France et qui recommande de rendre la stérilisation chirurgicale accessible en tant que service médical.
Toutefois, afin que cette décision qui est lourde, car quasi irréversible, sauf dans certains cas, et généralement non urgente, comporte des garanties renforcées d'être mûrement réfléchie, le Gouvernement est favorable à l'allongement du délai de réflexion nécessaire préalable à l'intervention aux quatre mois que vous avez présentés et à ce que l'interdiction pour les mineures figure dans cet article.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 21.
Je suis défavorable, pour les même raisons, au sous-amendement n° 78.
S'agissant de l'amendement n° 52 rectifié, je suis favorable à la rectification proposée.
Je suis également favorable au sous-amendement n° 53 rectifié, qui tend à prolonger de deux à quatre mois le délai de réflexion préalable. Enfin, je suis défavorable à l'amendement n° 71.
M. le président. Monsieur le rapporteur, quel est donc l'avis de la commission sur l'amendement n° 71 ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 78.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. J'attire l'attention de mes collègues sur le fait que tous les pays qui sont entrés - et je ne pense pas que la France évitera de le faire - dans ce que certains auteurs ont appelé la « deuxième révolution contraceptive » ont vu tombé leur taux de fécondité, comme le Québec, oùil est descendu à 1,4. Il faut mesurer l'incidence de cette affaire.
C'est pourquoi, j'ai proposé et je voterai ce sous-amendement, qui a une incidence démographique assez substantielle.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 78, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 53 rectifié, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 21, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 52 rectifié et 71 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, modifié.

(L'article 19 est adopté.)

Article 20



M. le président.
« Art. 20. - Après l'article L. 2123-1 du même code, il est inséré un article L. 2123-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2123-2 . - La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne mineure. Elle ne peut être pratiquée sur une personne handicapée mentale, majeure sous tutelle, que lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement.
« Si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision, son consentement doit être systématiquement recherché et pris en compte après que lui a été donnée une information adaptée à son degré de compréhension.
« L'intervention est subordonnée à une décision du juge des tutelles qui se prononce après avoir entendu les parents ou le représentant légal de la personne concernée ainsi que toute personne dont l'audition lui paraît utile et après avoir recueilli l'avis d'un comité d'experts.
« Ce comité, composé notamment de personnes qualifiées sur le plan médical et de représentants d'associations de handicapés, apprécie la justification médicale de l'intervention, ses risques ainsi que les conséquences normalement prévisibles sur les plans physique et psychologique.
« Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions d'application du présent article. »
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 74 est présenté par Mmes Campion, Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 79 est déposé par M. Seillier.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
Par amendement n° 22, M. Francis Giraud, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article L. 2123-2 du code de la santé publique :
« Art. L. 2123-2. - La ligature des trompes ou des canaux déférents à visée contraceptive ne peut être pratiquée sur une personne majeure sous tutelle que lorsqu'il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de contraception ou une impossibilité avérée de les mettre en oeuvre efficacement.
« Elle ne peut être pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant légal de la personne concernée.
« Si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté, son consentement doit être systématiquement recherché. Il ne peut être passé outre à son refus ou à la révocation de son consentement.
« L'intervention est subordonnée à une décision du juge des tutelles, qui se prononce après avoir entendu les parents ou le représentant légal de la personne concernée ainsi que toute personne dont l'audition lui paraît utile, et après avoir recueilli l'avis d'un comité d'experts.
« Ce comité, composé notamment de personnes qualifiées sur le plan médical et de représentants d'associations de personnes handicapées, apprécie la justification médicale de l'intervention, ses risques ainsi que ses conséquences normalement prévisibles sur les plans physique et psychologique.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article. »
La parole est à Mme Dieulangard, pour présenter l'amendement n° 74.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. L'article 20, qui traite d'un sujet particulièrement délicat, a été introduit dans le texte par l'Assemblée nationale. Il soulève un vrai problème, mais apporte-t-il de bonnes réponses ? Je le crois, au moins particulièrement, car il tend à laisser la personne handicapée mentale dans le droit commun et il légifère sur l'entourage de celle-ci. Il faut en effet veiller aux intérêts de la personne handicapée mentale. Des améliorations peuvent toujours être apportées.
En tout cas, ce texte soulève beaucoup d'inquiétudes. Il est primordial de permettre à toutes celles et à tous ceux qu'il interpelle de se saisir des termes du débat qu'il pose. Ce débat doit être public et le plus large possible.
L'immense mérite de l'article 20 est d'ouvrir ce débat, mais il serait dommage qu'il le referme aussitôt. C'est pourquoi nous souhaitons surseoir à son examen, notamment parce que d'autres questions apparaissent en filigrane, comme celle des moyens matériels et juridiques que la société est capable de fournir à l'entourage de la personne, au sens le plus large du terme, afin que soit accompagnée la sexualité des personnes handicapées mentales et la potientialité de la parentalité.
M. le président. La parole est à M. Seillier, pour présenter l'amendement n° 79.
M. Bernard Seillier. L'article 20, que je propose de supprimer, encadre la pratique de la stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables majeures.
Il s'agit d'un article additionnel, qui résulte d'un amendement présenté par le Gouvernement.
Le motif invoqué à l'Assemblée nationale repose sur le fait que des stérilisations à visée contraceptive sur des personnes handicapées sont déjà pratiquées aujourd'hui en France sans aucun encadrement ni aucune garantie éthique. Il a donc été estimé nécessaire de mettre en place un encadrement permettant de respecter les droits fondamentaux de la personne handicapée.
La commission des affaires sociales du Sénat, compte tenu du fait que cette pratique existe et se déroule hors de tout cadre légal et réglementaire, a jugé nécessaire d'élaborer un cadre législatif adapté, qui permette de protéger efficacement les droits des personnes handicapées concernées. Elle propose, tout en reprenant la procédure prévue par l'Assemblée nationale, de renforcer la protection et les garanties dont bénéficient les personnes majeures incapables.
Cette question demeure toutefois trop grave pour être traitée par la voie d'un amendement introduit dans un projet de loi de manière précitée et sans qu'elle ait fait l'objet d'un débat avec les associations représentatives des personnes handicapées.
La personne handicapée étant un sujet de droit à part entière, elle doit pouvoir s'exprimer préalablement, soit directement, soit par l'intermédiaire des associations qui la représentent, sur une question qui met en jeu des aspects essentiels de son existence. Il est donc indispensable que soit organisé un débat public préalable à la mise en oeuvre de toute disposition législative à ce sujet, qui permette de réunir les conditions d'une confrontation sérieuse autour des enjeux et des risques de dérive qu'elle engendre.
En effet, la stérilisation à visée contraceptive des personnes incapables majeures risque de déboucher sur un processus dont on n'a pas exploré la dynamique propre. Elle peut en effet engendrer dans la société un mouvement incontrôlé, qui soit à l'opposé de l'objectif recherché. Ce dernier vise à encadrer des pratiques qui sont rares, mais risque d'aboutir sans le vouloir expressément à une organisation systématique de la non-fécondité des personnes handicapées, impossible a posteriori à distinguer d'une politique systématiquement et délibérément eugéniste.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 22.
M. Francis Giraud, rapporteur. Dans ce sujet aussi délicat, il nous a semblé que le débat public avait été insuffisant et qu'il était difficile de prendre une décision en l'état.
La commission a fait un travail d'amélioration du texte de l'Assemblée nationale. Mais, si le Gouvernement acceptait les amendements présentés par Mme Dieulangard, d'une part, et par M. Seillier, d'autre part, qui visent tous deux à supprimer l'article, elle retirerait le sien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 74 et 79 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. En effet, cet article a soulevé l'émotion, et une discussion s'est instaurée. Je comprends très bien que les avis sur un sujet aussi délicat soient partagés, et il convient de les présenter avec mesure, comme c'est le cas ce soir.
Je regrette de ne pouvoir être favorable à l'amendement n° 74, présenté par Mmes Campion et Dieulangard. Je suis très sensible à leurs préoccupations, mais, même si le problème de la stérilisation des personnes handicapées mentales pose des problèmes tant éthiques que juridiques, le Gouvernement pense que l'article 20 encadre véritablement les conditions dans lesquelles ces personnes sous tutelle peuvent accéder à la stérilisation à visée contraceptive ; d'ailleurs, la commission a proposé un amendement pour renforcer ces garanties.
De plus, l'intervention du juge des tutelles qui, seul, peut autoriser cet acte permet de s'assurer du consentement de la personne ou au contraire de son refus et de la réalité des conditions d'impossibilité éventuelles.
Cet article, qui reconnaît aux personnes handicapées mentales sous tutelle un droit à la sexualité, doit s'apprécier au regard de l'amendement déposé par vous-mêmes, mesdames, auquel le Gouvernement a souscrit et qui traitait de l'éducation à la sexualité des personnes atteintes de troubles mentaux.
Je sais que le sujet est difficile. Mais, je le répète, j'ai le sentiment - je ne crois pas me tromper - que l'encadrement envisagé est vraiement très solide.
M. le président. Monsieur le rapporteur, vous avez entendu M. le ministre : que décidez-vous ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Monsieur le président, je vais défendre l'amendement n° 22.
L'article 20 traite du douloureux problème de la stérilisation des personnes handicapées mentales.
A l'évidence, et ce serait une hypocrisie de le nier, cette pratique existe et se déroule hors de tout cadre légal et réglementaire. C'est la raison pour laquelle la commission juge nécessaire d'élaborer un cadre législatif adapté qui permette de protéger efficacement les droits des personnes handicapées concernées.
Elle vous propose de reprendre la procédure prévue par l'Assemblée nationale en renforçant cependant la protection et les garanties dont bénéficient les majeures incapable.
Elle vous propose donc d'adopter un amendement visant : premièrement, à supprimer la référence à la personne « handicapée mentale », qui ne fait l'objet d'aucune définition juridique ; deuxièmement, à prévoir que la stérilisation ne peut être pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant légal de la personne concernée, le texte adopté par l'Assemblée nationale ne mentionnant paradoxalement pas qui est à l'origine de la demande de stérilisation ; troisièmement, à préciser que, si la personne concernée est apte à exprimer sa volonté, son consentement doit être systématiquement recherché et qu'il ne peut être passé outre à son refus ou à la révocation de son consentement.
Cette rédaction vise à offrir aux majeurs sous protection des garanties afin de s'assurer que leur volonté, s'ils peuvent l'exprimer, soit respectée et que, à défaut, la décision soit prise en connaissance de cause. Elle est en cela conforme au principe 22-2 de la recommandation du Conseil de l'Europe du 23 février 1999, qui exige que, lorsque des textes autorisent une intervention médicale sur un majeur protégé sans bénéfice direct pour celui-ci, une protection accrue soit prévue pour limiter les risques d'abus et d'irrégularités.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 22 ?
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. Je partage avec la commission le souci de renforcer la protection et les garanties dont doivent bénéficier les majeurs incapables - pardon pour le mot : « incapable ».
Je me souviens d'avoir pris connaissance avec effroi, dans le rapport que j'avais demandé moi-même à Mme Strohl, des conditions dans lesquelles les pratiques de stérilisation se déroulent. Ces conditions ne sont pas acceptables et je rends hommage aux associations avec lesquelles j'ai beaucoup travaillé sur ce point.
En tout cas, il me paraît nécessaire de préciser qui peut saisir le juge qui aura à statuer sur la stérilisation. La limitation aux parents et au représentant légal de la personne concernée me paraît devoir être retenue.
De même, préciser qu'il ne peut être passé outre au refus ou à la révocation du consentement exprimé par la personne protégée me semble constituer une garantie supplémentaire nécessaire.
Ces deux ajouts répondent d'ailleurs également aux préoccupations des magistrats. L'association des juges d'instance s'est exprimée en ce sens après le vote du texte par l'Assemblée nationale. Elle a souhaité, au demeurant, que l'audition de la personne protégée soit explicitement prévue par le texte.
Le Gouvernement est toutefois très réservé quant à la suppression de la notion de handicap mental. Certes, il ne s'agit pas d'une notion juridique, mais il en est fait mention dans certains textes de loi, à propos de l'organisation de la prise en charge des personnes concernées - je pense à la loi de 1975 sur les institutions médico-sociales - ou lorsqu'il s'agit de définir une incapacité ouvrant droit aux prestations sociales.
Le Gouvernement attire toutefois votre attention sur le fait que toutes les personnes majeures placées sous tutelle ne sont pas handicapées mentales et que toutes les personnes handicapées mentales ne sont pas sous tutelle.
En conséquence, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 74 et 79.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Il doit être bien clair que notre proposition de suppression de l'article 20 ne vise qu'à surseoir à l'examen de cette disposition : elle ne signifie aucunement que nous ne souhaitons pas voir intervenir une législation sur la stérilisation des personnes handicapées majeures sous tutelle. Nous pensons même que cet article 20 prévoit un encadrement intéressant, mais qu'il n'est pas suffisant.
Il nous semble préférable d'attendre qu'un débat public ait été organisé sur cette question avant que nous puissions légiférer à son sujet, étant entendu que vont nous être prochainement proposés des textes qui pourraient tout à fait accueillir cette législation sur la stérilisation des personnes handicapées majeures.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Ma position est tout à fait parallèle à celle qui vient d'être exposée.
Le sujet est suffisamment grave pour mériter qu'on y réfléchisse de manière plus approfondie. C'est aussi une question de considération à l'égard des associations de handicapés et de parents de handicapés. Il est vrai qu'elles ne sont pas toutes d'accord entre elles. Il reste que nombre d'entre elles n'ont pas été consultées.
Travaillant actuellement sur d'autres textes à caractère social, notamment le projet de loi de modernisation sociale, je suis amené à rencontrer des associations de handicapés ou de parents de handicapés. Plusieurs d'entre elles m'ont fait part de leur émoi sur cette affaire. C'est pourquoi je pense qu'il convient de différer l'examen de ce sujet, ce qui nous permettra de procéder à des consultations complémentaires avant de légiférer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 74 et 79, repoussés par la commission et par le Gouvernement.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22.
M. Bernard Seillier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Seillier.
M. Bernard Seillier. Le souci d'entendre les parents relève indiscutablement des meilleures intentions, mais je crains que nous ne soyons une fois de plus amenés à constater que le mieux est l'ennemi du bien.
D'après ce que l'on peut observer dans les établissements, les parents sont sans aucun doute ceux qui redoutent le plus la grossesse de leur fille et ils risquent fort d'être les premiers à demander la stérilisation systématique. La réalité est ainsi !
C'est pourquoi je pense qu'il faut vraiment réfléchir plus avant, et je ne peux pas voter cet amendement dans sa forme actuelle.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Nous avons, nous aussi, reçu de nombreux courriers demandant un débat plus large sur cette question éminemment sensible de la stérilisation à visée contraceptive des personnes handicapées mentales majeures.
Cela étant, ce texte a le mérite de poser dès aujourd'hui un cadre juridique, fût-il incomplet et susceptible d'être amélioré. En tout cas, il permet de combler un vide qui laisse actuellement trop souvent le médecin seul face à cette lourde responsabilité. Comme nous l'ont dit certains professionnels que nous avons entendus, ils travaillent en quelque sorte « sans filet ».
C'est pourquoi nous partageons l'avis du Gouvernement.
Nous sommes d'accord sur le fait que cette stérilisation ne puisse être pratiquée qu'à la demande des parents ou du représentant légal de la personne concernée et sur le fait que l'on ne puisse passer outre le refus ou la révocation du consentement de cette dernière.
En revanche, nous sommes réservés quant à l'application de cette mesure aux personnes majeures sous tutelle. Comme je l'ai déjà dit, l'expression « handicapé mental » recouvre une très grande diversité d'états. Il nous faudra veiller à définir de façon plus précise cette notion, afin de rester dans l'esprit du texte et de ne pas ouvrir la voie à une stérilisation concernant tous les handicapés.
Nous voterons néanmoins cet amendement, en souhaitant que la rédaction soit retravaillée, mais en ayant à l'esprit que ce texte a le mérite de poser les premières bases d'un cadrage juridique.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 20, ainsi modifié.

(L'article 20 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 20



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements présentés par le Gouvernement.
L'amendement n° 38 tend à ajouter, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les articles 17, 18, 19 et 20 de la présente loi sont applicables dans la collectivité territoriale de Mayotte.
« II. - A l'article L. 372-1 du code de l'éducation, après la référence : "L. 312-15,", est insérée la référence : "L. 312-16,".
« III. - Le 3° de l'article L. 5511-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« 3° Le titre III, à l'exception du 2° de l'article L. 5134-3. »
« IV. - Les articles L. 5511-12, L. 5511-13 et L. 5514-2 du même code sont abrogés. L'article L. 5511-14 devient l'article L. 5511-13.
« V. - A l'article L. 5514-1 du même code, les mots : "à l'exception de l'article L. 5434-2, et" sont supprimés.
« VI. - Il est inséré dans le même code un article L. 5511-12 ainsi rédigé :
« Art. L. 5511-12. - A l'article L. 5134-1, les mots : "mentionnés à l'article L. 2311-4" ne s'appliquent pas dans la collectivité territoriale de Mayotte.
« VII. - L'article 1er de la loi n° 2000-1209 du 13 décembre 2000 relative à la contraception d'urgence est applicable dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
L'amendement n° 39 a pour objet d'ajouter, après l'article 20, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré au premier alinéa de l'article L. 5521-6 du code de la santé publique, après les mots : "celles du chapitre II du titre III du livre Ier", les mots : ", celles du I de l'article L. 5134-1".
« II. - Il est inséré au premier alinéa de l'article L. 5531-1 du code de la santé publique, après les mots : "du chapitre II du titre III du livre Ier", les mots : "celles du I de l'article L. 5134-1".
« III. - Il est créé au titre IV du livre V de la partie V du code de la santé publique un chapitre Ier ainsi rédigé :
« Chapitre Ier. - Produits pharmaceutiques.
« Art. L. 5541-1. - Le I de l'article L. 5134-1 est applicable en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. »
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué. L'amendement n° 38 a pour objet d'étendre les dispositions des articles 16 bis, 17, 18, 19 et 20 du projet de loi à la collectivité territoriale de Mayotte.
Quant à l'amendement n° 39, il vise à étendre aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie les dispositions du I de l'article L. 5134-1 du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 39, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Machet, pour explication de vote.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, madame la secrétaire d'Etat, au terme de cette première lecture, notre Haute Assemblée peut s'honorer d'avoir adopté des modifications qui conservent l'équilibre et la logique de la loi Veil de 1975.
Pourtant, il nous faut résoudre un véritable cas de conscience : d'une part, on ne peut tolérer que l'avortement soit « banalisé » ; d'autre part, il est impensable de laisser des jeunes filles, qui plus est mineures, en situation de détresse.
C'est pourquoi, compte tenu de l'enjeu éthique majeur de ce texte, il nous semble regrettable de devoir l'examiner au lendemain d'une déclaration d'urgence, quand il eût nécessité une réflexion approfondie.
Par ailleurs, l'expression « IVG et contraception » devrait être inversée afin de présenter l'IVG comme un échec de la contraception et non comme un simple moyen d'interrompre sa grossesse.
Aujourd'hui, faute d'une politique d'information efficace et de structures d'accueil suffisantes, nous sommes au regret de constater que les lois Veil et Neuwirth n'empêchent pas l'existence de 200 000 avortements par an, dont une bonne partie, il faut bien l'avouer, ne se fait pas dans une situation de détresse extrême.
J'ai été, pendant de nombreuses années, personnellement chargé de rapporter les projets et propositions de loi liés à la famille, cellule de base de notre société et valeur qui a motivé tout mon parcours politique. C'est dans la volonté suprême de préserver le statut de la famille que, avec les membres de l'Union centriste et la commission des affaires sociales, nous avons rectifié un certain nombre de points.
Premièrement, il est préférable d'améliorer de façon significative les conditions d'accueil dans les centres d'orthogénie actuels plutôt que de prolonger le délai d'avortement, car cela ne règle pas le problème des 3 000 femmes qui avortent à l'étranger et qui sont enceintes de plus de douze semaines.
Deuxièmement, si nous avons accepté l'aménagement de l'autorisation parentale, c'est uniquement pour remédier aux cas les plus graves, notamment celui des victimes de viol et d'inceste. Le recours à un adulte référent est inutile pour les jeunes filles qui peuvent se confier à leur famille, dialoguer avec elle, sans autre risque que celui d'être aidées ou, au pire, réprimandées. Dans la majorité de ces cas, le recours à un tiers « court-circuite » le lien de famille.
Troisièmement, l'entretien préalable doit être maintenu. S'entretenir avec un médecin, une assistante sociale ou une psychologue est une façon de devenir responsable de ses actes. Soyons honnêtes : ce n'est pas parler qui est traumatisant, c'est être enceinte contre son gré.
Quatrièmement, la possibilité d'avorter ne doit pas occulter celle de garder l'enfant. Ce droit à la vie est menacé lorsqu'on supprime du dossier guide, la possibilité de poursuivre sa grossesse. Les femmes doivent impérativement savoir que l'Etat les soutient dans leur démarche, quelle que soit la forme que celle-ci revêt.
Cinquièmement, enfin, le suivi médical de la contraception semble indispensable pour la protection de la santé des femmes et pour la prévention de l'IVG.
A la lumière de ces différentes réflexions, mes collègues du groupe de l'Union centriste et moi-même allons donc voter le texte amendé par la majorité sénatoriale.
Je tiens à rendre un hommage tout particulier à notre excellent rapporteur, Francis Girard, qui a su, avec beaucoup de lucidité, empreinte par moment de l'espérance si nécessaire à ce débat, proposer à notre Haute Assemblée un texte susceptible à la fois de préserver les valeurs auxquelles nous sommes attachés et d'assurer la protection des femmes en détresse. (Vifs applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. A nos yeux, le projet de loi tel qu'il nous a été transmis par l'Assemblée nationale constitue un texte majeur pour notre société, respectant l'esprit de la loi Veil et prévoyant une extension du droit des femmes à l'IVG.
C'est un texte très attendu par les femmes et par les associations qui les représentent, bien sûr, mais aussi par le milieu médical lui-même. D'où notre regret de constater que la majorité sénatoriale n'a pas entendu ces attentes fortes et qu'elle a profondément modifié ce texte dans un sens restrictif.
Le seul point d'accord que nous puissions relever concerne l'importance à accorder à l'éducation à la sexualité.
Nous comptons maintenant sur nos collègues de l'Assemblée nationale pour rétablir ce texte dans son intégralité.
M. le président. La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, parvenus au terme de nos débats, nous ne pouvons que constater, avec regret, que l'esprit constructif et novateur du texte issu des travaux de l'Assemblée nationale a été très largement dénaturé par la majorité sénatoriale lors de l'examen du projet de loi par la Haute Assemblée.
Nos collègues ont réagi comme si aucun constat social n'avait été dressé, comme si aucune évolution des mentalités ni aucun progrès médical n'était intervenu depuis le vote de la loi Veil en 1975. Un quart de siècle plus tard, les pesanteurs idéologiques sévissent encore.
Nous ne pouvons pas non plus accepter que l'on insinue que l'existence de plus de 200 000 IVG par an soit l'expression d'un échec de la loi, car celle-ci, il faut s'en souvenir, a constitué un immense progrès pour la santé publique et pour les libertés individuelles. Bien entendu, ce n'est pas vraiment une surprise, puisque, sur tous les points essentiels du texte, la presse avait relaté avant même la tenue de nos débat le refus de la majorité sénatoriale de toute amélioration des textes en vigueur.
Ce refus a porté plus particulièrement sur l'allongement du délai légal pour une IVG, qui avait été porté de dix à douze semaines de grossesse, mais aussi sur l'aménagement de l'obligation de l'autorisation parentale pour les mineures demandant une IVG, sur la suppression de l'autorisation parentale pour la délivrance de la contraception aux mineures, enfin sur la suppression pour les femmes majeures, du caractère obligatoire, de l'entretien social préalable à une IVG.
Ainsi, toutes ces avancées ont été combattues par la majorité de la commission des affaires sociales et par notre assemblée.
Celle-ci, en effet, a préféré élaborer un contre-projet certes cohérent, mais qui témoigne d'une vision négative de l'évolution du droit des femmes à la maîtrise de leur fécondité, vision que nous ne partageons pas.
Chaque fois que le projet de loi donnait une plus grande liberté aux femmes et permettait un plus grand respect de leur choix, la majorité sénatoriale a répondu par des mesures visant à augmenter les contraintes, voire à dissuader les femmes de recourir à l'IVG, ou, pis encore, à les culpabiliser.
Les positions de la majorité sénatoriale ne visent qu'à restreindre le libre arbitre des femmes au profit d'un plus grand pouvoir de décision du milieu médical et d'une série de contraintes pesant sur leur liberté de décision.
Nos collègues ont eu bien du mal à cacher leurs réticences d'ordre moral à ce projet de loi, en essayant notamment de s'abriter derrière une prétendue augmentation des risques médicaux qui découlerait de l'allongement du délai légal pour l'IVG.
Ce sont deux logiques, deux conceptions radicalement différentes de la reconnaissance du droit des femmes à maîtriser leur fécondité qui s'opposent.
Pour notre part, nous avons apporté notre contribution au débat en essayant d'améliorer le texte sur des points importants tels que le renforcement de l'éducation et de l'information relatives à la sexualité ou l'exigence d'une meilleure prise en charge de la contraception par la protection sociale.
Nos amendements allaient dans le sens d'une reconnaissance plus large du droit des femmes à disposer de leur coprs et à choisir librement le moment de leur maternité. Ils n'ont malheureusement pas été retenus.
Je ne reviendrai pas sur les divergences qui nous séparent de la majorité sénatoriale à propos de la nécessaire évolution des lois Neuwirth et Veil.
Il me semble que le Sénat a perdu une bonne occasion de prendre la mesure de la détresse de trop nombreuses femmes confrontées à une IVG.
Le projet de loi issu des travaux de l'Assemblée nationale présentait de nombreuses avancées dans la reconnaissance du droit à la contraception et à l'IVG.
L'avancée sociale introduite par l'allongement de délai légal de deux semaines représente une prise en compte des difficultés rencontrées par des milliers de femmes ; M. Kouchner l'a rappelé lors de nos débats quand il a explicité le sens du mot « progrès ». Cette mesure est nécessaire et permet de répondre humainement à la détresse de la majorité des 5 000 femmes qui sont, chaque année, rappelons-le, obligées de se rendre à l'étranger pour une IVG parce que, pour toute une série de raisons, elles ont dépassé le délai légal en vigueur dans notre pays.
Le Sénat a refusé de s'inscrire dans cette démarche, préférant, plutôt que d'opposer des arguments, suspecter le Gouvernement de céder aux pressions féministes. C'est regrettable.
Je pense en effet qu'il est des moments où, dans l'intérêt des femmes et, plus largement, dans l'intérêt de la société, il est nécessaire de passer outre les positions idéologiques qui ont trop largement sous-tendu nombre de propos entendus sur certaines travées de notre assemblée.
Nous ne pouvons donc pas voter ce texte en l'état, et nous comptons sur nos collègues députés pour rétablir dans leur intégralité les avancées proposées par le projet de loi initial, en incorporant les quelques progrès qui ont pu être obtenus au cours du débat au Sénat. En effet, la commission mixte paritaire, prévue le 4 avril prochain, ne nous semble pas pouvoir se conclure par un texte consensuel. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à Mme Heinis.
Mme Anne Heinis. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui soulève des questions délicates et prétend trouver des solutions à des situations humaines douloureuses.
On ne peut donc que s'insurger contre la déclaration d'urgence faite par le Gouvernement sur un sujet de société qui aurait nécessité un dialogue riche et une réflexion nourrie entre les deux assemblées. Cette urgence dont on se sert beaucoup trop est bien fâcheuse pour l'évolution des débats et leur approfondissement, surtout sur un tel sujet.
Cette observation faite, je souhaite apporter mon entier soutien au travail réalisé par notre rapporteur pour amender le texte qui nous est proposé. Il l'a mené avec l'humanité du médecin et le pragmatisme du sage. Cela a évité l'impasse dans laquelle nous conduisait le texte adopté par l'Assemblée nationale.
Pour s'en tenir aux points essentiels, il a parfaitement démontré que l'allongement du délai légal de l'IVG était une fuite en avant qui ne faisait que déplacer les frontières de l'échec, échec qui est de plus en plus douloureux et de plus en plus difficile à assumer au fur et à mesure que le temps passe et qui, de ce fait, laisse de plus en plus de traces. Malheureusement, les femmes qui tardent à prendre cette décision douloureuse risquent d'attendre davantage encore pour le faire, puisque, justement, pour différentes raisons, elles n'y arrivent pas.
Certes, il est beaucoup plus facile de faire voter un texte par une majorité toujours soucieuse d'être à l'avant-garde d'une idéologie libertaire déconnectée des réalités et des contraintes contradictoires de la vie que de mettre en place concrètement les moyens nécessaires au bon fonctionnement du service public de l'IVG et d'assurer la politique d'éducation sexuelle et d'information sur la contraception que nous avons tous réclamée ce soir.
Tous les témoignages concordent pour constater l'insuffisance du nombre de centres de planification familiale et leur inaccessibilité, pour constater également la pénurie de médecins, notamment de spécialistes en gynécologie médicale depuis la disparition de cette formation.
Rien ne sert de voter un nouveau texte si, une fois de plus, les moyens de sa mise en oeuvre font défaut. C'est bien sûr ce qui nous inquiète.
Le rapporteur observe à juste titre que, au-delà de dix semaines, toute situation de détresse peut être prise en charge dans le cadre de l'interruption médicale de grossesse, dont il faudrait sans doute ouvrir davantage les portes.
Le deuxième point capital réside dans le maintien du caractère obligatoire de l'entretien social préalable. La relation humaine, non médicale, entre des conseillers ou des conseillères spécialement formés, un moment d'écoute et de réflexion, ne peuvent constituer une atteinte à la liberté. La véritable liberté suppose l'information, alors que la détresse a le plus souvent pour causes la solitude et l'ignorance.
La solitude n'est pas assez évoquée, alors qu'elle pèse très lourdement dans les drames, dont elle accentue la douleur. Même si nous disposons d'un moyen mécanique pour régler le problème, moyen qu'il faut sans doute utiliser dans un certain nombre de cas, n'oublions pas que, au moins pour certaines personnes, une telle démarche ne supprime pas la profonde détresse dans laquelle elles se trouvent.
Ce n'est pas parce que, en quelques endroits, l'entretien a lieu dans de mauvaises conditions qu'il faut le supprimer. Il vaut mieux accepter le refus de s'exprimer que manifestent certaines femmes et ne pas laisser s'échapper une seule chance d'aider à faire un choix et à passer un cap difficile celles qui en ont le plus besoin ; or, ce sont celles qui le demandent le moins, parce que, précisément, elles ne savent pas comment faire.
Le troisième point posant un grave problème est celui des conditions dans lesquelles les mineures peuvent avoir accès à l'IVG.
La dispense d'autorisation parentale est une dérogation lourde de conséquences. Cependant, la commission en a accepté le principe, puisqu'il s'avère que cette autorisation est parfois impossible à obtenir.
Dans l'intérêt même des jeunes filles, il est évident que de sérieuses garanties doivent entourer cette dérogation, notamment le choix et la responsabilité du « référent ». Comme le rapporteur, j'aurais préféré que ce soit non pas n'importe qui, mais une personne qualifiée.
Enfin, comme le rapporteur, je déplore que l'Assemblée nationale ait introduit dans ce texte, par voie d'amendement, un article relatif à la stérilisation à visée contraceptive. Cet acte, extrêmement grave parce qu'il est irréversible, méritait un véritable débat, nous en sommes convenus. Il est fâcheux que celui-ci n'ait pas eu lieu avant. Le cadre légal donné par la commission constitue un moindre mal. Il permettra de protéger la santé des personnes et d'éviter que des excès ne puissent être commis.
Aussi, sous le bénéfice de ces quelques observations, après avoir voté les amendements de la commission, je voterai le texte issu des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)

M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 44:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 215
Contre 102

6

NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
Il va être procédé immédiatement à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Delaneau, Francis Giraud, Charles Descours, Claude Huriet, Jean-Louis Lorrain, Mme Claire-Lise Campion et M. Guy Fischer.
Suppléants : MM. Jacques Bimbenet, Paul Blanc, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Roland Muzeau, Philippe Nogrix, Mmes Nelly Olin et Odette Terrade.

7

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour relatif à la coopération de défense et au statut de leurs forces.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 238, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

8

TEXTES SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Avant-projet de budget rectificatif et supplémentaire n° 2 au budget 2001, section II, Conseil.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1652, annexe 2, et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à l'adaptation des perspectives financières aux conditions d'exécution.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1704 et distribué.

9

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Fauchon un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de résolution (n° 53, 2000-2001) présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de l'article 73 bis du règlement, par M. Hubert Haenel, sur les propositions de la République fédérale d'Allemagne, d'une part, et du Portugal, de la France, de la Suède et de la Belgique, d'autre part, relatives à la création d'Eurojust (n°s E-1479 et E-1509).
Le rapport sera imprimé sous le n° 235 et distribué.
J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant création d'une prime pour l'emploi (n° 217, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 237 et distribué.

10

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Adnot un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la mission de contrôle qu'il a effectuée à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME).
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 236 et distribué.

11

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, jeudi 29 mars 2001 :
A neuf heures quarante-cinq :
1. Discussion des conclusions du rapport (n° 235, 2000-2001) de M. Pierre Fauchon, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de résolution de M. Hubert Haenel (n° 53, 2000-2001) présentée au nom de la délégation pour l'Union européenne, en application de l'article 73 bis du règlement, sur les propositions de la République fédérale d'Allemagne, d'une part, et du Portugal, de la France, de la Suède et de la Belgique, d'autre part, relatives à la création d'Eurojust (E-1479 et E-1509).
2. Discussion de la question orale européenne avec débat n° QE-12 de M. Pierre Lefebvre à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le doublement du fret ferroviaire d'ici à 2010.
M. Pierre Lefebvre interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'important objectif que ce dernier a fixé de doubler le fret ferroviaire d'ici à 2010.
Cet objectif constitue un enjeu crucial de société pour les décennies à venir.
M. Pierre Lefebvre demande à M. le ministre, pour permettre une évolution significative des parts de marché entre les différents modes de transport et pour favoriser ainsi le rééquilibrage entre le rail et la route, si le Gouvernement envisage un engagement plus fort encore, dans le domaine financier en particulier.
Cet engagement permettrait de soutenir plus efficacement encore les entreprises publiques, la SNCF et RFF, qui s'inscrivent dans cet objectif.
Enfin, M. Pierre Lefebvre interroge M. le ministre sur le bilan de sa présidence européenne du Conseil des ministres des transports et sur les résultats des négociations dites du « paquet ferroviaire ».
3. Discussion de la question orale européenne avec débat n° QE-10 de M. Jacques Oudin à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les objectifs et moyens de la politique de l'Union européenne en matière de transports.
M. Jacques Oudin interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les objectifs et les moyens de la politique de l'Union européenne en matière de transports, à partir du triple constat d'une croissance rapide des besoins, d'une saturation des infrastructures et d'un retard dans la réalisation des réseaux transeuropéens.
Il lui demande quelles sont les perspectives d'une relance de la libéralisation et de l'harmonisation dans le secteur des transports, quels sont les progrès à espérer en matière de sécurité routière et maritime, quel est l'état de la réflexion communautaire sur la tarification des infrastructures de transport et sur l'intermodalité et quelles sont les modalités de financement prévues pour les réseaux transeuropéens de transport.
Il lui demande quels projets français de grandes liaisons routières et ferroviaires sont inscrits au titre des réseaux transeuropéens de transport et quelle aide l'Union européenne peut apporter à la France pour les réaliser.
Le débat sur ces deux questions orales européennes s'effectuera selon les modalités prévues à l'article 83 ter du règlement.
A quinze heures :
4. Questions d'actualité au Gouvernement.
5. Discussion de la question orale avec débat n° 28 de M. Jacques Valade à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur la politique énergétique de la France.
M. Jacques Valade attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur la nécessité de mener et de développer une politique énergétique cohérente. En effet, aujourd'hui, du fait de l'accroissement des coûts énergétiques marqué par la flambée du prix des carburants, du fioul domestique et par la hausse des tarifs du gaz, la politique énergétique de la France doit permettre aux entreprises et aux citoyens d'accéder à l'énergie la plus sûre et la plus compétitive possible.
La politique énergétique de la France reste à définir. Elle doit garantir la sécurité de l'approvisionnement national, éviter une trop forte dépendance énergétique de notre pays et respecter les obligations à l'égard de l'environnement, telles qu'elles ont été définies dans les accords internationaux à partir de Kyoto.
Dans ce contexte, il lui demande quelle place le Gouvernement envisage d'accorder aux différents modes de production d'énergie électrique, sans choix arbitraire ou passionnel, et dans quelle mesure et par quels moyens le Gouvernement entend oeuvrer pour concilier les objectifs de sûreté et de compétitivité.
Aucune inscription de parole dans le débat n'est plus recevable.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, portant création d'une prime pour l'emploi (n° 217, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 2 avril 2001, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 2 avril 2001, à seize heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, d'orientation sur la forêt (n° 408, 1999-2000) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 2 avril 2001, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 3 avril 2001, à douze heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 29 mars 2001, à zéro heure quarante-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE SOCIALISTE
(74 membres au lieu de 73)

Ajouter le nom de M. Jean-Yves Mano.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE
(7 au lieu de 8)

Supprimer le nom de M. Jean-Yves Mano.

NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

M. Paul Blanc a été nommé rapporteur du projet de loi n° 214 rectifié (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, rénovant l'action sociale et médico-sociale.
M. Claude Huriet a été nommé rapporteur de sa proposition de loi n° 221 (2000-2001) relative à l'indemnisation de l'aléa médical et à la responsabilité médicale.
M. Philippe Marini a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 223 (2000-2001) de M. Jean-Claude Carle limitant le recours aux dispositions fiscales de portée rétroactive.
M. Alain Lambert a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 226 (2000-2001), adoptée par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence relative aux lois de finances.

DÉLAI LIMITE POUR LE DÉPÔT D'AMENDEMENTS À UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

En application de l'article 73 bis, alinéa 6, du règlement, la commission des affaires économiques et du Plan examinera le mardi 3 avril 2001, à 16 h 30, le rapport de M. Michel Souplet sur la proposition de résolution n° 84 (2000-2001) de M. Jean Bizet sur la proposition de règlement du Conseil portant organisation des marchés dans le secteur du sucre (n° E 1585), ainsi que les éventuels amendements qui seront présentés sur cette proposition de résolution.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est fixé au lundi 2 avril 2001, à 12 heures. Les amendements devront être déposés directement au secrétariat de la commission.
Il est rappelé que, conformément à l'article 73 bis, alinéa 6, du règlement, les amendements dont aucun des auteurs n'appartient à la commission saisie au fond sont présentés devant celle-ci par leur premier signataire. La présente publication vaut, à leur égard, convocation à la réunion de la commission.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Vaccination contre la variole

1046. - 28 mars 2001. - M. Martial Taugourdeau rappelle à M. le ministre délégué à la santé qu'en 1980, Madame Simone Veil, ministre de la santé, avait supprimé la vaccination anti-variolique chez les enfants. Cette décision était intervenue après plusieurs accidents provoqués par des encéphalites varioliques. On avait alors jugé que le risque causé par la vaccination était plus grand que le risque d'être atteint par la maladie. La crise grave créée par l'épizootie de fièvre aphteuse chez les animaux ne devrait-elle pas nous amener à nous interroger sur notre attitude face à la variole chez l'homme ? En effet, certains vétérinaires avaient très tôt prévu, dès 1990, une réapparition de la fièvre aphteuse, vers 1998-2000, considérant alors qu'il n'y aurait plus d'animaux vaccinés. La durée de vie d'un animal non vacciné est de cinq à six ans. Le nombre de sujets non immunisés tend vers zéro assez rapidement et on arrive au spectacle actuel. De la même manière s'agissant pour l'homme, de la variole, on peut considérer qu'il y a peu de risques chez les adultes de plus de vingt-cinq ans qui ont tous été vaccinés. Il lui demande s'il ne pense pas, en revanche, que d'ici quinze à vingt-cinq ans, s'il existe toujours des foyers endémiques il existera alors un risque de réapparition de la variole chez l'homme, maladie qui est malheureusement mortelle dans un cas sur deux ? Par ailleurs, il avait été indiqué, à l'époque, que quelques centaines de milliers de doses de vaccins seraient conservées à Genève. Il lui demande de confirmer que ces stocks existent bien et sont renouvelés.



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mercredi 28 mars 2001


SCRUTIN (n° 43)



sur l'article 6 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception (aménagement de l'obligation d'autorisation parentale pour les mineurs).


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 314
Pour : 211
Contre : 103

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 17.
Contre : 6. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :
Pour : 94, dont M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.
Contre : 3. _ MM. Jean Bernard, Emmanuel Hamel et Martial Taugourdeau.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Roger Karoutchi.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Contre : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 47.
Abstentions : 4. _ MM. Jean-Guy Branger, Claude Huriet, Marcel Lesbros et Philippe Richert.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac
Gérard Larcher, qui présidait la séance

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernard
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-MadeleineDieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Jacques Pelletier
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé


Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. Jean-Guy Branger, Claude Huriet, Marcel Lesbros et Philippe Richert.

N'a pas pris part au vote


M. Roger Karoutchi.

N'a pas pris part au vote


M. Christian Poncelet, président du Sénat.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 44)



sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception.


Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 213
Contre : 102

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (17) :
Contre : 17.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (23) :

Pour : 17.
Contre : 5. _ MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau et François Fortassin

Abstention : 1. _ M. Jacques Pelletier.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (99) :

Pour : 93.
Contre : 2. _ MM. Jean Bernard et Martial Taugourdeau.
N'ont pas pris part au vote : 4. _ M. Christian Poncelet, président du Sénat, et M. Gérard Larcher, qui présidait la séance, MM. Roger Karoutchi et Paul Natali.

GROUPE SOCIALISTE (77) :

Contre : 77.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (51) :

Pour : 50.
Contre : 1. _ M. Jean Huchon.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (46) :

Pour : 46.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (7) :

Pour : 7.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
José Balarello
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Jean Boyer
Louis Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Guy-Pierre Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Gérard Cornu
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Xavier Darcos
Philippe Darniche
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Robert Del Picchia
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Deriot
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Jacques Donnay
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Pierre Guichard
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Alain Hethener
Daniel Hoeffel
Jean-Paul Hugot
Jean-François Humbert
Claude Huriet
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Patrick Lassourd
Robert Laufoaulu
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Serge Lepeltier
Marcel Lesbros
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Kléber Malécot
André Maman
Max Marest
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeri de Montesquiou
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Lylian Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk

Maurice Ulrich


Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Guy Vissac

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernard
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Yvon Collin
Gérard Collomb
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Claude Domeizel
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Serge Godard
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Roger Hesling
Jean Huchon
Roland Huguet
Alain Journet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
Louis Le Pensec
Pierre Lefebvre
André Lejeune
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Marc Massion
Pierre Mauroy
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Paul Raoult
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé


Simon Sutour
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Michel Teston
Pierre-Yvon Tremel
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstention


M. Jacques Pelletier.

N'ont pas pris part au vote


MM. Roger Karoutchi et Paul Natali.

N'ont pas pris part au vote


MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.



Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 318
Nombre des suffrages exprimés : 318
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour : 215
Contre : 103

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.