SEANCE DU 21 NOVEMBRE 2000


M. le président. « Art. 5. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas d'une société en cours de constitution ou nouvellement créée en vue de gérer le service public objet de la délégation, les garanties professionnelles et financières sont appréciées dans la personne des associés et au vu des qualification professionnelles réunies au sein de la société. »
Par amendement n° 9, le Gouvernement propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul, secrétaire d'Etat. Il s'agit encore d'un amendement de suppression, et croyez que je le regrette profondément, monsieur le président.
L'article 5 institue un régime dérogatoire au code général des collectivités territoriales, qui définit les conditions auxquelles doivent répondre les entreprises pour prétendre à l'attribution d'une délégation de service public.
Ce régime dérogatoire est institué en faveur des sociétés en création ou des sociétés spécialement créées en vue de gérer le service objet de la délégation.
L'objet de l'article - je le rappelle brièvement - est de permettre la recherche de la meilleure offre possible pour satisfaire les besoins de l'usager au moindre coût.
En faisant de la personne des associés l'un des critères de qualification retenus pour l'examen de la candidature de certaines sociétés, l'article renforce et légitime la possibilité d'un choix intuitu personae du délégataire qui est contraire aux principes mêmes de la mise en concurrence.
En opérant une distinction entre les sociétés nouvellement créées et les autres, il me paraît aller, en outre, à l'encontre du principe d'égalité d'accès des candidats aux délégations de service public posé par la loi Sapin. Or, je rappelle que la rupture de l'égalité de traitement entre les différentes catégories de société a été censurée par le Conseil constitutionnel dans une décision de janvier 1993.
Si le Gouvernement propose de supprimer cet article, c'est bien parce qu'il s'exposerait au même risque d'inconstitutionnalité.
Mais, au-delà de ce risque, le Gouvernement n'est pas favorable, dans ce domaine comme dans d'autres, à la remise en cause des principes de transparence et de mise en concurrence qui ont été voulus par le législateur lors de l'adoption de la loi Sapin.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Girod, rapporteur. Monsieur le président, M. le secrétaire d'Etat regrette. Moi aussi ! En effet, la décision de 1993 visait l'exception accordée à des sociétés du fait de leur statut juridique et non pas du tout du fait de leur nature profonde.
Dans cette affaire, de quoi s'agit-il ? De permettre que, dès l'instant où une délégation de service public est offerte au marché d'appel d'offres, une société nouvellement créée puisse au moins se présenter - cela ne veut pas dire qu'elle sera attributaire - si elle réunit en son sein les compétences suffisantes pour pouvoir le faire.
Il est bien évident qu'une société qui vient de se créer - ce peut être une SEM mais aussi toute autre société - ne peut pas présenter les références d'usage antérieures sur la même mission, puisqu'elle vient d'être créée à cet effet. En revanche, ceux qui sont dans la société ont, eux, l'expérience antérieure et peuvent en faire état dans le dossier de présentation. Cela ne va pas plus loin.
Je ne suis pas du tout sûr, monsieur le secrétaire d'Etat, que cela puisse être censuré par le Conseil constitutionnel. En tout cas, la question vaut la peine d'être examinée de près, car c'est une entrave non pas uniquement pour les SEM mais aussi pour beaucoup d'autres sociétés et, à mon avis, cela va à l'encontre du principe de libre entreprise. D'ou l'importance du vote que nous allons émettre.
Encore une fois, les SEM ne seraient pas les seules visées et, de ce point de vue, l'exception d'irrecevabilité constitutionnelle, qui est sous-jacente dans vos propos, ne me semble pas pouvoir être invoquée.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Christian Bonnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. M. le secrétaire d'Etat a évoqué la décision de 1993 du Conseil constitutionnel. Il y a peut-être un aspect constitutionnel ; il y a, en tout cas, un aspect médiatique. Voter une disposition qui tend à interdire des poursuites à l'encontre des élus pour prise illégale d'intérêt peut donner matière à des articles... que je serais capable d'écrire !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

TITRE IV

OBLIGATIONS DE COMMUNICATION
ET DE TRANSPARENCE
DES SOCIÉTÉS D'ÉCONOMIE MIXTE LOCALES

Article 6