SEANCE DU 15 NOVEMBRE 2000


SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Modification de l'ordre du jour (p. 1 ).

3. Candidatures à une commission mixte paritaire (p. 2 ).

4. Organisme extraparlementaire (p. 3 ).

5. Financement de la sécurité sociale pour 2001. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 4 ).
Discussion générale (suite) : Mme Claire-Lise Campion, MM. Robert Calméjane, Claude Huriet.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés.
Clôture de la discussion générale.

6. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire (p. 5 ).

7. Financement de la sécurité sociale pour 2001. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 6 ).

Demande de réserve et demande de priorité (p. 7 )

Demande de réserve de l'article 1er (et rapport annexé) et demande de priorité des amendements n°s 3 et 106. - M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales ; Mme le secrétaire d'Etat. - La réserve et la priorité sont ordonnées.

Article 2 A. - Adoption (p. 8 )

Article 2 (p. 9 )

MM. Dominique Leclerc, Yves Fréville.
Amendements identiques n°s 2 de la commission et 46 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis ; amendements n°s 77 et 78 de M. Guy Fischer. - MM. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie ; Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances ; Guy Fischer, Roland Muzeau, Mme le secrétaire d'Etat, M. Bernard Cazeau. - Adoption des amendements n°s 2 et 46 supprimant l'article, les amendements n°s 77 et 78 devenant sans objet.

Articles additionnels après l'article 3 (priorité) (p. 10 )

Amendements n°s 3 (priorité) de la commission et 106 (priorité) de M. Philippe Adnot. - MM. Charles Descours, rapporteur ; Philippe Adnot, Mme le secrétaire d'Etat, MM. le rapporteur pour avis, Bernard Cazeau, Guy Fischer, Yves Fréville. - Adoption de l'amendement n° 3 insérant un article additionnel, l'amendement n° 106 devenant sans objet.

Article 3 (p. 11 )

M. Dominique Leclerc.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 3 (suite) (p. 12 )

Amendements n°s 79 à 81 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Rejet des trois amendements.

Article 3 bis. - Adoption (p. 13 )

Article 3 ter (p. 14 )

Amendement n° 4 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat, M. Yves Fréville. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 4 (p. 15 )

Amendements identiques n°s 5 de la commission et 47 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Charles Descours, rapporteur ; le rapporteur pour avis, Mme le secrétaire d'Etat, M. Guy Fischer. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 4 bis (p. 16 )

Amendement n° 59 rectifié de M. Louis Boyer. - MM. Louis Boyer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 60 de M. Louis Boyer. - MM. Louis Boyer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 (p. 17 )

Amendements identiques n°s 62 rectifié de M. Philippe Arnaud et 103 de M. Jean Bernard. - MM. Jean-Louis Lorrain, Jean Bernard, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat, MM. Alain Vasselle, Yann Gaillard, Guy Fischer. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 bis. - Adoption (p. 18 )

Article 6 (p. 19 )

Amendements identiques n°s 64 de M. Philippe Arnaud et 104 de M. Jean Bernard. - Adoption des deux amendements.
Amendement n° 6 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 6 (p. 20 )

Amendement n° 63 de M. Denis Badré. - MM. Jean-Jacques Hyest, Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article additionnel avant l'article 7 (p. 21 )

Amendement n° 7 rectifié de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 7 (p. 22 )

Amendement n° 8 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 8. - Adoption (p. 23 )

Article 9 (p. 24 )

Amendement n° 9 de la commission. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le secrétaire d'Etat, MM. Guy Fischer, Alain Vasselle, le rapporteur pour avis. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 10 (p. 25 )

MM. Alain Gournac, Yves Fréville.
Amendements identiques n°s 10 de la commission et 48 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Charles Descours, rapporteur ; le rapporteur pour avis, Mme le secrétaire d'Etat, M. Roland Muzeau. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 11 (p. 26 )

MM. Alain Gournac, Yves Fréville, Serge Franchis, Mme Marie-Madeleine Dieulanguard.
Amendements identiques n°s 11 de la commission et 49 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis ; amendements n°s 82 à 84 de M. Guy Fischer et 53 rectifié bis de M. Gérard César. - MM. Charles Descours, rapporteur ; le rapporteur pour avis, Guy Fischer, Serge Franchis, Mme le secrétaire d'Etat, MM. Alain Vasselle, Yves Fréville. - Retrait de l'amendement n° 53 rectifié bis ; adoption des amendements n°s 11 et 49 supprimant l'article, les amendements n°s 82 à 84 devenant sans objet.

Suspension et reprise de la séance (p. 27 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

M. le président.

Article 12 (p. 28 )

Amendements identiques n°s 12 de la commission et 50 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Charles Descours, rapporteur ; le rapporteur pour avis, Mme Ségolène Royal, ministre délégué à la famille et à l'enfance. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Demande de réserve (p. 29 )

Demande de réserve de l'article 13. - M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué. - La réserve est ordonnée.

Article additionnel après l'article 13 (p. 30 )

Amendement n° 85 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué. - Rejet.
Mme le ministre délégué.

Articles additionnels avant l'article 14 (p. 31 )

Amendements n°s 86 et 87 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué. - Retrait des deux amendements.

Article 14 (p. 32 )

Mme Claire-Lise Campion.
Amendement n° 13 de la commission. - M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour la famille ; Mme le ministre délégué, M. Jean Chérioux. - Retrait.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 14 (p. 33 )

Amendement n° 61 de M. Philippe Nogrix. - MM. Philippe Nogrix, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué, M. Alain Vasselle. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 66 rectifié de Mme Annick Bocandé. - Mme Annick Bocandé, M. Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué, MM. Jean Chérioux, Alain Vasselle, Gilbert Chabroux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 15 (p. 34 )

M. Lucien Neuwirth, Mme Claire-Lise Campion.
Amendement n° 14 de la commission. - M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur ; Mme le ministre délégué, M. Alain Vasselle. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 16 (p. 35 )

Mme Claire-Lise Campion.
Amendement n° 15 de la commission. - M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur ; Mme le ministre délégué, MM. Alain Vasselle, Charles Descours, rapporteur. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 17 (p. 36 )

Mme Claire-Lise Campion.
Amendement n° 88 de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, rapporteur ; Mme le ministre délégué, MM. Charles Descours, rapporteur ; Jean Chérioux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 17 (p. 37 )

Amendement n° 89 rectifié de M. Guy Fischer. - MM. Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre délégué. - Retrait.
M. Charles Descours, rapporteur.

Article 18 (p. 38 )

Mme Claire-Lise Campion.
Amendement n° 16 de la commission. - M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur ; Mme le ministre délégué, MM. Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 19 A (p. 39 )

Amendements identiques n°s 17 de la commission et 51 de M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. - MM. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour l'assurance vieillesse ; le rapporteur pour avis, Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité ; MM. Charles Descours, rapporteur ; Claude Domeizel, Roland Muzeau. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 19 (p. 40 )

Amendements n°s 112 de M. Bernard Joly et 90 de M. Guy Fischer. - MM. Bernard Joly, Guy Fischer, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre, MM. Dominique Leclerc, Claude Domeizel. - Retrait de l'amendement n° 90 ; adoption de l'amendement n° 112.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 19 (p. 41 )

Amendement n° 92 de M. Guy Fischer. - MM. Roland Muzeau, Charles Descours, rapporteur ; Mme le ministre. - Retrait.

Article 19 bis. - Adoption (p. 42 )

Article 20 (p. 43 )

MM. Alain Vasselle, rapporteur ; Charles Descours, rapporteur.
Rejet de l'article.
Renvoi de la suite de la discussion.

8. Dépôt de rapports (p. 44 ).

9. Dépôt d'un rapport d'information (p. 45 ).

10. Dépôt d'un avis (p. 46 ).

11. Ordre du jour (p. 47 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

MODIFICATION
DE L'ORDRE DU JOUR

M. le président. La commission des affaires sociales a fait savoir à M. le président du Sénat que, en application de l'article 29, alinéa 5, de notre règlement, elle demandait que ses conclusions sur la proposition de résolution de MM. Jean Arthuis, Guy-Pierre Cabanel, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions d'utilisation des farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage et les conséquences qui en résultent pour la santé des consommateurs soient inscrites à l'ordre du jour de la séance mensuelle réservée du mardi 21 novembre.
Je consulte le Sénat sur cette demande d'inscription.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Par ailleurs, le bureau du Sénat ne se réunissant plus le mardi 21 novembre, nous pourrions avancer l'heure d'ouverture de la séance du mardi 21 novembre de dix heures trente à dix heures.
L'ordre du jour de la séance du mardi 21 novembre est ainsi modifié.
Sous réserve que le Sénat accepte la création de cette commission d'enquête, nous pourrions prévoir que la nomination de ses membres interviendrait en séance publique le mercredi 22 novembre, à quinze heures.
Il n'y a pas d'opposition ?...
Il en est ainsi décidé.

3

CANDIDATURES À UNE COMMISSION
MIXTE PARITAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a procédé à la désignation des candidats qu'elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence.
Cette liste a été affichée et la nomination des membres de cette commission mixte paritaire aura lieu conformément à l'article 9 du règlement.

4

ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de procéder à la désignation d'un sénateur appelé à siéger, en qualité de suppléant, au sein du Conseil national du bruit.
En conséquence, j'invite la commission des affaires sociales à présenter un candidat appelé à siéger au sein de cet organisme extraparlementaire.
La nomination du sénateur proposé par la commission aura lieu ultérieurement dans les conditions prévues par l'article 9 du règlement.

5

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 2001

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 64, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 67 (2000-2001) et avis n° 68 (2000-2001).]
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je tiens, au nom de mes collègues, à remercier Gilbert Chabroux pour son excellente intervention sur le budget de la branche famille. Je souhaite poursuivre sa réflexion en insistant sur les critères de justice sociale et de solidarité qui émanent des mesures annoncées.
En mettant en place un ministère délégué à la famille et à l'enfance, Lionel Jospin a d'emblée marqué son attachement à cette valeur fondement de notre société.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 se veut dans la continuité de la politique familiale engagée par le Gouvernement, ces trois dernières années, pour une meilleure justice sociale.
De nombreuses avancées ont été faites. Je citerai, entre autres, la pérennisation de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire, l'extension du bénéfice de l'allocation de rentrée scolaire aux familles d'un enfant, l'augmentation de l'aide au logement, le bénéfice des prestations familiales prolongé jusqu'à vingt ans et le versement du complément familial et des aides au logement jusqu'à vingt et un ans.
En effet, ce volet famille pour 2001 recèle des dispositions novatrices à hauteur de 10,5 milliards de francs, dont 6,8 milliards de francs supportés par la branche famille.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale se veut également un projet inscrit « dans son temps », puisqu'il propose une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, en mettant en oeuvre des mesures quantitativement et qualitativement cohérentes. L'ensemble de ce dispositif fait réellement acte de solidarité et répond indéniablement aux besoins des familles. Il met en oeuvre les mesures décidées au cours de la Conférence de la famille de juin dernier, et cela est rendu possible grâce à l'excédent budgétaire enfin retrouvé par la branche famille en 1999-2000.
Pour autant, les mesures adoptées ne sauraient être considérées comme un simple saupoudrage ; elles correspondent, en effet, à la volonté politique affirmée d'assurer une aide concentrée sur la petite enfance.
Ainsi faut-il voir, dans le renforcement de l'aide versée aux familles pour l'emploi d'une assistante maternelle, une plus grande équité dans le choix du mode de garde des enfants. Une plus grande souplesse, plus conforme au mode de vie actuel, est ainsi offerte aux parents.
Dans la même optique, la nécessité de concilier, d'une part, les contraintes quotidiennes, notamment celles des femmes, avec les modes de garde collectifs des jeunes enfants, et, d'autre part, la vie familiale avec la vie professionnelle est favorisée par la création d'un fonds exceptionnel d'investissement pour les structures accueillant les enfants de moins de six ans. Ce fonds permettra aussi d'encourager l'innovation, puisque les subventions majorées iront aux structures multi-accueil ou aux structures répondant à des objectifs prioritaires : souplesse de fonctionnement, accueil d'enfants handicapés, classes passerelles entre la crèche et la maternelle pour les enfants âgés de deux et trois ans. Un financement majoré sera également possible lorsque le projet est intercommunal, et ce afin de favoriser la création de services d'accueil en milieu rural.
Ce dispositif donnera une nouvelle impulsion à l'accueil collectif et permettra, lui aussi, d'adapter le service rendu à la diversité des réalités locales.
Dans le cadre d'une politique de soutien aux parents confrontés à la maladie, à l'accident ou au handicap de leur enfant, nous applaudissons la création d'un congé de présence parentale assorti d'une allocation, et ce d'autant plus que cette nouvelle mesure permet d'encourager le partage équitable des responsabilités parentales dans ces situations où le soutien et l'entraide des parents sont indispensables au bien-être de l'enfant.
Faisant suite au prolongement des mesures incitatives à la reprise d'activité, adoptées dans le cadre de la loi sur la lutte contre les exclusions, nous ne pouvons que saluer l'aide au retour à l'emploi des femmes bénéficiaires de l'allocation parentale d'éducation. Le Gouvernement répond ici à une véritable attente des femmes envisageant de reprendre un emploi. Elles vivront cette situation en termes non plus d'obligation mais de choix, ce qui est foncièrement plus satisfaisant tant pour elles que pour leurs enfants.
Cette mesure vient en complément du nouveau dispositif d'aide à la reprise d'activité des femmes, l'ARAF. Depuis le mois de juillet 2000, en effet, une aide, dont la mise en oeuvre a été confiée à l'ANPE, est versée, lors de la reprise d'une activité, aux femmes demandeurs d'emploi non indemnisées, dont les bénéficiaires des minima sociaux, ayant au moins un enfant de moins de six ans. Ce dispositif vise à faciliter le retour à l'emploi en permettant à des femmes en difficulté d'organiser la garde de leurs enfants par une aide au financement des frais générés.
Enfin, ce serait une erreur de vouloir limiter l'action du Gouvernement en faveur des familles à ces différentes mesures qui doivent être replacées dans un contexte plus général : la réduction de la contribution sociale généralisée, la CSG, et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS, sur les bas salaires, la réforme des aides au logement, mais aussi la revalorisation du quotient familial, la baisse des taux de l'impôt sur les revenus, et ce n'est qu'un bref aperçu.
Saluons, par ailleurs, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, les grandes avancées du Gouvernement reconnaissant l'intérêt des Français pour leur santé et leur système de soins, avec, notamment, la création d'une agence technique de l'information sur l'hospitalisation et d'un fonds de modernisation sociale des établissements de santé, sans oublier - et nous approuvons cette prise en compte - la création d'un fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.
Nous nous félicitons donc que la famille, ou plutôt « les familles » - elles sont en effet multiples : nucléaire, recomposée, étendue... - trouvent dans ce budget un ensemble d'initiatives destinées à leur faciliter la vie au quotidien.
La famille porte en elle les germes de l'avenir de notre société. A l'heure où nous allons effectivement entrer dans le troisième millénaire, cette politique familiale généreuse et moderne amène l'espoir d'un passage heureux. Elle offre le gage d'un avenir meilleur pour tous et trouvera encore un écho favorable avec la réforme, en préparation, du code de la famille. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Calméjane.
M. Robert Calméjane. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, débattre de la loi de financement de la sécurité sociale devrait être l'occasion de fixer des objectifs clairs à l'action publique, dans un domaine où chaque Française, chaque Français est directement concerné.
Mais de transferts en comptes spéciaux, des réaffectations de recettes aux compensations diverses, la loi de financement de la sécurité sociale est devenue une alchimie comptable sans véritables règles. On renfloue ainsi la branche retraite avec les excédents de la branche famille, tandis que 16 milliards de francs de recettes sociales diverses sont affectés au financement des 35 heures. C'est intolérable !
Ce projet a d'ailleurs été sanctionné par l'ensemble des partenaires sociaux, lesquels l'ont unanimement rejeté lors de son examen par les différents conseils d'administration des caisses de sécurité sociale.
La branche retraite demeure sous perfusion, faute d'une véritable politique préservant le principe de la répartition ; et ce n'est pas la création d'un observatoire qui résoudra le double problème de l'accroissement de la durée de vie et du déséquilibre entre actifs et inactifs ! Si, par malheur, la même politique devait être poursuivie, il faudrait procéder d'ici à trois ans à une hausse des cotisations de 3,5 points afin de rétablir l'équilibre. Voilà les lendemains qui chantent que cette politique nous prépare !
La branche maladie manque tout autant du véritable projet qu'attendent les Français.
Les exigences du public atteignent aujourd'hui un niveau élevé de qualité, qualité que la vulgarisation scientifique démocratise et systématise. Il n'est donc pas de réponse uniquement comptable ; il y faut une approche globale et responsable qui prenne en compte tous les paramètres de ce véritable problème de société.
L'accès aux soins ne peut être réduit à un simple bien de consommation. Son coût relatif procède d'un choix éthique entre l'espoir et le renoncement. Pour cela, seule une concertation entre l'Etat et les professions de santé peut répondre à un juste équilibre.
Toute autre démarche, notamment l'autoritarisme déployé par l'actuel gouvernement, s'avère désastreuse. Cet autoritarisme décourage les professionnels et grippe le système au détriment des patients : nous avons tous à l'esprit ces examens impossibles à prescrire parce que le médecin a dépassé son quota annuel, ces opérations retardées parce que l'hôpital a épuisé son budget. La médecine est incompatible avec une comptabilité d'épicerie et ne saurait plus longtemps répondre à des critères de rentabilité.
M. Raymond Courrière. Il faut le dire à Juppé !
M. Robert Calméjane. M. Jacques Chirac, recevant récemment les représentants du Centre national des professionnels de santé, le soulignait : « Les mécanismes de responsabilités collectives ont correspondu à une période de crise financière et de transition, il faut passer aujourd'hui à un système de responsabilité librement consenti, individuel et contractuel, fondé sur la recherche du meilleur soin et sur l'évaluation des pratiques. »
L'absence d'une telle volonté de réforme de la part du Gouvernement conduit à un vide dangereux dans le domaine de la prévention et de l'éducation à la santé ; rien ne vient résoudre les problèmes de démographie médicale, et certaines spécialités, comme les urgences hospitalières, restent sinistrées. Aucun moyen conséquent n'est prévu pour l'hospitalisation privée, qui voit disparaître inexorablement des lits : quant à l'hôpital public, il souffre de manière chronique d'un manque de personnel, accentué par la mise en place des 35 heures, qui, au demeurant, n'est pas financée. Notre retard en matière d'imagerie médicale est regrettable.
S'agissant de l'industrie pharmaceutique, dont le développement doit être apprécié sur le plan international, la sanction confiscatoire qui lui est désormais appliquée ne peut qu'amoindrir sa compétitivité et menace directement sa capacité à investir dans la recherche fondamentale.
Les professions de santé perçoivent comme une atteinte directe, inadmissible et lourde de menaces pour leur déontologie les pénalités collectives qui leur sont appliquées. Les médecins sont contraints à des quotas arbitraires de prestations, sans rapport avec les pathologies auxquelles ils sont confrontés, tandis que, depuis peu, kinésithérapeutes, biologistes et radiologues voient leurs honoraires rognés, sans qu'il soit tenu compte des investissements souvent lourds que nécessite leur profession.
De même, les 500 000 personnes qui, en France, souffrent de la maladie d'Alzheimer réclament en vain la reconnaissance de celle-ci et son inscription sur la liste des trente affections de longue durée de la sécurité sociale. Je regrette que la proposition de loi déposée au Sénat par mon collègue Alain Vasselle, et que j'ai cosignée, n'aboutisse pas.
Permettez-moi un mot également sur l'amendement voté à l'article 36 bis du présent projet de loi à l'Assemblée nationale, autorisant la transmission des prélèvements aux laboratoires par les centres de santé, les médecins et infirmiers. Le souci de qualité et de sécurité des analyses ainsi que la responsabilité totale du biologiste ne permettent pas d'autoriser cette extension.
La limitation des crédits concernant les médicaments nécessaires aux chimiothérapies, comme ceux qui concernent l'asthme, méconnaît gravement les douloureuses réalités sous-tendues par ces traitements, certes longs et coûteux mais dont dépend la survie de nombreux patients.
Il faudrait sûrement poursuivre plus avant cette énumération si l'on voulait être exhaustif, mais ces quelques exemples suffisent à montrer le chemin qui nous reste à parcourir si nous voulons conserver à notre système de santé l'efficacité que nos concitoyens sont en droit d'attendre.
J'en terminerai par la branche famille du projet de loi, lourdement taxée par le transfert de l'allocation de rentrée scolaire comme par la décision unilatérale de transférer à la charge de la caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, le coût de la majoration annoncée des pensions de retraite accordée aux parents ayant élevé au moins trois enfants.
Si l'on peut être satisfait de la plus que nécessaire revalorisation des pensions à hauteur de 2,2 %, il paraît discriminatoire de traiter les familles différemment ; elles ne devraient, en effet, bénéficier que d'une hausse de 1,8 % des allocations familiales. Celles-ci, en dix ans, ont augmenté moins vite que les prix.
Le 6 avril dernier, à Nantes, le Président de la République rappelait les principes qui doivent conduire un nouvel élan de notre politique familiale.
Cet élan nécessite des moyens importants. C'est notre devoir d'aider les familles à réaliser le désir d'un deuxième ou d'un troisième enfant, c'est notre responsabilité d'exiger que les décisions idoines s'élaborent dans la concertation la plus large, avec les représentants des associations concernées au sein de la CNAF.
Pour conclure, le Gouvernement nous a habitués à arbitrer de tout et, profitant de sa majorité à l'Assemblée nationale, à légiférer plutôt que de favoriser la concertation et de développer une politique contractuelle avec les partenaires sociaux. Qu'il prenne garde à ce que son refus d'assumer ses responsabilités dans le grand débat nécessaire et urgent sur les retraites, sur l'assurance maladie et sur la politique familiale, ne conduise rapidement la France au bord du gouffre financier.
M. Claude Domeizel. Il exagère un peu !
M. Robert Calméjane. Il ne sera plus temps, alors, de sauver notre système de protection sociale, dont chaque Français considère qu'il s'agit d'une spécificité à conserver dans l'Europe en marche.
La croissance peut ne pas être durable et, comme le soulignait récemment le Premier président de la Cour des comptes, la situation demeure fragile et par trop liée à la conjoncture. Des réformes de structures sont indispensables, que le Gouvernement ne pourra différer par simple réaction électoraliste. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, bien qu'il s'agisse de la discussion générale d'un projet de loi de financement, dans mon intervention, je parlerai très peu de chiffres, faisant confiance à nos rapporteurs et souscrivant à leurs critiques et à leurs propositions.
En revanche, constatant la crise grave et durable que connaît notre système de santé, crise que traduisent les échecs successifs de l'ONDAM, crise qui nourrit le profond mal-être des professions de santé, j'en analyserai les causes avant de suggérer quelques remèdes.
En outre, je n'aurai garde d'oublier que je préside le conseil de surveillance de la caisse nationale des allocations familiales. A ce titre, sans empiéter sur les prérogatives de notre excellent rapporteur, Jean-Louis Lorrain, je formulerai quelques observations sur la branche famille.
L'échec de l'ONDAM est le signe le plus visible de l'échec du système de santé.
La vanité de notre débat est de plus en plus évidente. L'année 2000 aura confirmé, comme beaucoup d'entre nous l'avaient d'ailleurs annoncé l'an dernier, l'absence de portée réelle de la fixation de l'ONDAM par le Parlement. Dès le mois de mars, en effet, sous la pression des mouvements sociaux déclenchés par les personnels des hôpitaux publics, les mesures que vous avez prises ont rendu tout à fait obsolète le vote émis par le Parlement cinq mois plus tôt !
Malgré les demandes réitérées de notre rapporteur, aucune loi de financement rectificative ne nous a permis de débattre du bien-fondé de ces mesures. Cela signifie à l'évidence que, pour le Gouvernement, le débat annuel sur le financement de la sécurité sociale n'est qu'un simulacre, et que le Parlement est largement dépossédé de son pouvoir.
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse. Très bien !
M. Claude Huriet. A vrai dire, dans les conditions actuelles, l'ONDAM ne peut qu'échouer, pour quatre raisons : c'est une démarche comptable qui ne prend en compte ni les besoins de santé ni les évolutions qu'ils connaissent nécessairement ; il institue une régulation par la contrainte et non par incitation ; la gestion du système de santé est hypercentralisée, hyperadministrée et, par là, déresponsabilisante ; enfin, la mise en place, à travers la CSG, de deux financements de nature et d'assiette différentes a généré un système bicéphale, à double commande et, qui plus est, conflictuel !
Les besoins de santé ne sont pas pris en compte et, par exemple, les priorités retenues par les conférences régionales de santé ou les états généraux n'ont pratiquement aucune traduction financière, si ce n'est très marginale, dans l'affectation des enveloppes.
La Cour des comptes formule d'ailleurs quelques observations critiques à ce sujet !
Les évolutions prévisibles et inéluctables en matière de besoins de santé ne sont même pas prises en considération. J'en donnerai deux exemples : celui des traitements anticancéreux et celui des mesures imposées aux établissements hospitaliers au titre de la sécurité.
Le coût des nouveaux traitements contre le cancer a connu une augmentation de 150 % en cinq ans et l'arrivée de nouvelles molécules, sans compter l'arrivée prochaine de la thérapie génique, va accélérer cette progression, gage de progrès thérapeutique.
Selon les professionnels concernés, on peut, en 2000, estimer à 1,4 milliard de francs l'augmentation des dépenses liées à l'utilisation des taxanes et des nouveaux anticorps monoclonaux. En 2001 et 2002, les taxanes devenant des standards dans le traitement initial du cancer du sein, il faudra prévoir une enveloppe supplémentaire d'un milliard de francs rien que pour cette pathologie.
Pensez-vous, madame le secrétaire d'Etat, qu'une telle évolution, qui ne peut être liée ni à des effets de mode ni à des prescriptions abusives, soit compatible avec le respect d'un ONDAM et d'une enveloppe fermée pour les dépenses de médicaments ?
Les exigences de plus en plus fortes de nos concitoyens en matière de sécurité amènent votre administration à se « couvrir » par des circulaires et divers textes réglementaires dès qu'un incident lui est signalé. Qui vous le reprocherait ?
La question se pose toutefois des moyens financiers que peuvent dégager les établissements, privés de toute élasticité budgétaire, pour répondre en cours d'exercice à vos injonctions. S'agissant, par exemple, de la maternité universitaire de Nancy, que je préside, cet établissement doit faire face à un alourdissement de ses coûts de plus de 5 millions de francs, que sa dotation ne prend pas en charge, pour pouvoir assurer les nouvelles normes de sécurité pour l'utilisation des médicaments, des produits sanguins labiles et des dispositifs médicaux, la stérilisation, la sécurité anesthésique, les bonnes pratiques cliniques et biologiques de l'assistance médicale à la procréation, la gestion des déchets et le repos de sécurité des praticiens hospitaliers.
Si le surcoût ne peut être immédiatement financé pour ces mesures de sécurité, dont je répète qu'elles sont tout à fait justifiées - mais encore faut-il que les établissements aient la possibilité de les mettre en oeuvre - qui portera la responsabilité en cas de survenue d'un incident ou d'un accident ?
La régulation par la contrainte a indiscutablement échoué. Les dépassements de l'ONDAM, malgré les mesures autoritaires successives, en témoignent, et les chiffres ont été évoqués à plusieurs reprises au cours de cette discussion générale : plus 9,8 milliards de francs en 1998, plus 11,3 milliards en 1999, plus 13,2 milliards de francs en 2000, malgré le « rebasage ».
Les sanctions, qu'elles soient collectives ou catégorielles, entraînent des effets pervers qui devraient inciter le Gouvernement à « changer son fusil d'épaule », pour revenir, par exemple, aux références médicales opposables, qui commençaient à porter leurs fruits en 1994 quand le Gouvernement les a pratiquement abandonnées, ou du moins na pas engagé en leur faveur une action faisant preuve de sa détermination. Qui se souvient qu'en 1994, pour un objectif prévisionnel fixé à plus 3,6 %, les dépenses de la médecine libérale n'ont augmenté que de 1,9 % ? Ce n'était pas, à l'époque, le résultat de seules mesures d'autorité !
Un système très centralisé ne peut qu'apporter des réponses globales à des situations disparates. Il ne peut tenir compte des disparités régionales qui, comme chacun peut le constater, loin de disparaître, ont plutôt tendance à s'aggraver.
Toute adaptation est impossible et toute expérimentation interdite : il suffit de constater les résultats décevants de la commission Soubie en matière de développement des réseaux !
Un système très centralisé décourage l'initiative et déresponsabilise les acteurs et les bénéficiaires du système, dont les efforts éventuels en matière de bon usage des soins ne pourront être récompensés faute de pouvoir être reconnus.
C'est un système dont l'inertie a des effets redoutables dans un monde qui bouge vite. Je n'en citerai qu'un exemple, mais il est révélateur : la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail dans les établissements hospitaliers privés a abouti à la création de 7,3 % d'emplois supplémentaires, en particulier d'emplois infirmiers. Une demande forte a été ainsi créée, alors même que les mesures prévues en début d'année ont entraîné un important flux d'infirmiers du privé vers le public et que les quotas d'entrée dans les écoles de formation n'ont été augmentés que pour la rentrée 2000-2001 : 27 000 places ont été offertes pour cette rentrée, contre 18 000 précédemment.
Comment pourrait-on ne pas se réjouir de cette augmentation ? Mais comment ne pas s'interroger aussi sur les conditions d'urgence, voire d'improvisation, qui ont présidé à cette décision, alors que, vous le savez, madame le secrétaire d'Etat, les structures actuelles de formation pour les personnels en soins infirmiers n'ont pas une capacité suffisante ?
M. Charles Descours, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les équilibres financiers généraux et l'assurance maladie. Bien sûr !
M. Claude Huriet. Il en résulte que le personnel qualifié qui sortira des écoles pour les quatre années à venir sera notablement insuffisant pour couvrir les besoins : on estime en effet à plus de 18 000 le déficit global des postes d'infirmier. Gouverner, c'est prévoir... Or aucune prévision des besoins, pourtant relativement facile dans ce domaine, n'a été réalisée. A qui la faute ?
Par ailleurs, la dualité du financement, impôt et cotisation, porte en germe des conflits d'autorité dont les derniers mois ont montré maints exemples. Le partage des tâches entre l'Etat - l'hôpital - et la CNAMTS - les soins de ville -, contre lequel nous avions été nombreux à nous élever l'an passé, a été source de tensions et d'incompréhension.
Conçu voilà plus de cinquante ans, le système s'est avéré incapable de s'adapter aux évolutions économiques et sociales, aux aspirations nouvelles du citoyen, aux possibilités de la médecine. Le bilan est donc, pour l'heure, presque entièrement négatif.
Les relations entre les différents partenaires sont si profondément dégradées qu'aucune amélioration durable ne peut être attendue de simples « rafistolages », tant les fondations sont désormais fragilisées : remise en cause de la gestion paritaire, précarité du régime conventionnel, perte de confiance des partenaires.
Les professionnels de santé sont désabusés ; pris par leur vocation qui les porte à assurer aux malades les meilleurs soins « conformes aux données de la science », ils se sentent déconsidérés, étant de plus en plus souvent la cible des pouvoirs publics, de la sécurité sociale, du juge... et des malades insatisfaits. A l'obligation de moyens, souvent incompatible avec les exigences de la maîtrise comptable, s'ajoute désormais l'obligation de résultat.
Face à une telle dégradation, qui devrait inquiéter tous les responsables, mieux vaut éviter de recourir à des faux remèdes et de se payer de mots tels que « démocratie sanitaire », alors que, comme je l'ai dit précédemment, le Parlement est pratiquement dessaisi de son pouvoir en ce domaine et que les avis des instances consultatives ne sont que très peu suivis d'effet. C'est berner ceux qui, en toute bonne foi, s'impliquent dans les conférences de santé ou les états généraux, comme l'illustre l'exemple du dépistage du cancer recto-colique.
J'avais rappelé, à l'occasion d'une question orale, le 27 juin dernier, que le dépistage de ce cancer avait été retenu comme une priorité de santé publique par la conférence nationale de santé en 1997. En décembre 1998, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, dans son article 20, avait prévu la mise en oeuvre de programmes de dépistage. Deux ans plus tard, le projet de cahier des charges n'a pas encore été validé et la généralisation du dépistage est annoncée pour 2005, alors qu'il s'agissait, je le rappelle, d'une priorité retenue par la conférence nationale de santé.
Cet exemple, qui n'est pas exceptionnel, illustre la portée vraiment insuffisante des propositions faites par la conférence nationale de santé au nom de la démocratie sanitaire.
Vous aviez parlé d'« accélération du calendrier » dans votre réponse à ma question, en juin dernier, madame la secrétaire d'Etat. Pouvez-vous, aujourd'hui, faire le point sur l'accélération intervenue depuis six mois ?
Piège des mots encore, lorsqu'on évoque de plus en plus souvent, désormais, la régionalisation, sans toutefois en définir le contenu. Alors qu'ont été conçus, depuis 1996, les « outils » qui devraient permettre la mise en oeuvre d'une véritable politique régionale de santé à laquelle les conférences de santé pourraient apporter une contribution effective - agences régionales d'hospitalisation, unions régionales des caisses d'assurance maladie, unions régionales des médecins libéraux, conférences régionales de santé, etc. - on s'en tient à une déconcentration qui ne corrige en rien les défauts et les faiblesses du système que j'ai évoqués précédemment.
L'application des quatre « maîtres mots » sur lesquels pourraient se construire une nouvelle organisation et une nouvelle gestion du système, à savoir concertation, contractualisation, évaluation et, le cas échéant, sanction, serait, à l'évidence, plus aisée au niveau régional, où une juste appréhension des besoins de santé pourrait enfin être réalisée.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est vrai !
M. Claude Huriet. Plus le temps passe, plus j'ai la conviction que seul un changement fondamental de notre système permettra d'en éviter la faillite, qui aboutirait soit à une nationalisation de la médecine, soit à la privatisation de l'assurance maladie.
En tant que président du conseil de surveillance de la Caisse nationale des allocations familiales, il m'est impossible de ne pas évoquer la modification du périmètre des charges et des moyens de ladite caisse, point qui a déjà été développé par plusieurs de mes collègues.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 marque bien que le sort des familles et une authentique politique familiale ne constituent pas une préoccupation majeure du Gouvernement.
M. Jacques Oudin. C'est exact !
M. Claude Huriet. Logiquement, les excédents dégagés par la branche auraient dû être réaffectés au financement des mesures favorables aux familles.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Claude Huriet. Faut-il rappeler, après d'autres, madame la secrétaire d'Etat, que, depuis des années, la position constante de la commission des affaires sociales, suivie par notre assemblée, consiste à poser comme principe intangible la séparation des branches ?
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Claude Huriet. Cette séparation a, une nouvelle fois, été mise en cause.
Les familles ne seront pas associées aux fruits de la croissance ; les retraités, jugés comme étant une population électoralement plus « payante », ont été mieux traités. Tant mieux pour eux, tant pis pour les familles !
Notre rapporteur, mon collègue et ami Charles Descours, a raison : cette loi de financement n'a qu'un seul objectif, assurer le financement du FOREC, le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, fût-ce au détriment des familles.
Chacun peut en juger : suppression de la part du prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine qui était affectée à la CNAF, soit une perte de 1,4 milliard de francs ; transfert sur le budget de la CNAF d'une partie du coût des majorations de retraite de base accordées aux parents ayant élevé trois enfants, soit 2,9 milliards de francs ; accélération du transfert de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire, qui devait s'étaler sur trois ou quatre ans, comme annoncé lors de la conférence de la famille, soit une charge de la branche de 6,6 milliards de francs supplémentaires.
Tout ce montage a été fait sans aucune concertation, mettant les responsables de l'institution et les partenaires sociaux devant le fait accompli. C'est la raison pour laquelle le conseil d'administration, saisi du projet de loi de financement dans sa séance du 27 septembre 2000, a émis, comme d'ailleurs tous les conseils des autres organismes de sécurité sociale, un avis défavorable sur ce texte.
Je me félicite des propositions de notre commission, qui visent à redonner à la branche famille les moyens que le Gouvernement lui avait pratiquement confisqués.
Dans ce contexte, je m'inquiète toutefois des conditions dans lesquelles la convention d'objectifs et de gestion, la COG, qui lie l'Etat et la CNAF et qui est l'attribution exclusive des conseils de surveillance, convention actuellement en cours de renégociation, pourra faire l'objet d'un arbitrage qui tienne davantage compte de l'intérêt des familles que des équilibres, laborieux, destinés à assurer la pérennité du financement des 35 heures.
Madame le secrétaire d'Etat, vous assumez, avec Mme le ministre, un bien difficile héritage. Devant l'ampleur des erreurs commises et des maladresses qui se sont accumulées, je regrette que le gouvernement auquel vous appartenez ait choisi de privilégier, pour des raisons d'ordre essentiellement idéologique et politique, la réduction du temps de travail, plutôt que l'intérêt des familles... ou la lutte contre la pollution !
Pour l'ensemble de ces raisons, vous ne serez pas surprise que le groupe de l'Union centriste ait décidé de soutenir les propositions de la commission des affaires sociales et de voter le texte tel qu'il aura été heureusement amendé par notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la richesse du débat depuis hier montre, une fois de plus, que les échanges directs, même s'ils peuvent refléter des divergences fondamentales dans les conceptions politiques, sont l'assise démocratique de notre société.
Je me félicite de la qualité des interventions. Je souhaite maintenant y répondre, pour apporter un certain nombre de précisions, voire pour démentir certains propos qui n'allaient dans le sens ni de la transparence ni de la vérité.
M. Jacques Oudin. Oh !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Joly, vous avez considéré, comme un certain nombre de vos collègues, que nous discutions non pas d'une loi de financement de la sécurité sociale mais d'une loi de financement des 35 heures.
M. Jean Chérioux. On peut effectivement se poser la question.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Eh bien, non ! Nous discutons bien du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
La contribution sociale sur les bénéfices n'est pas relevée, contrairement à ce que j'ai entendu à plusieurs reprises, et la situation est stabilisée.
Le pouvoir d'achat des prestations familiales n'a pas baissé non plus. Au contraire, il a bénéficié d'un coup de pouce de 0,3 % cette année, ce qui tranche avec le gel des bases mensuelles d'allocations familiales qui a prévalu de 1993 à 1997.
En ce qui concerne l'ONDAM, le Gouvernement n'entend pas rationner les soins ; nous appliquons un dispositif global qui a été défini et mis en oeuvre par un gouvernement qui avait, en son temps, le soutien de la majorité sénatoriale. Vous ne pouvez pas, messieurs, avoir approuvé un système à une certaine époque et refuser d'en tirer les conséquences aujourd'hui !
M. Jacques Oudin. Vous déviez du débat !
M. Alain Gournac. Tout évolue !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous avez dit que nous n'avions pas de politique de santé publique. C'est faux ! A plusieurs reprises, aussi bien Mme Guigou que moi-même vous avons précisé - nous aurons l'occasion d'y revenir au cours de l'examen des articles - les programmes que nous avons lancés en ce qui concerne la prévention du cancer, les greffes et les prélèvements, la stérilisation... (Murmures sur les travées du RPR.)
L'enveloppe hospitalière accordée, cette année, à la santé publique n'aura jamais été aussi importante, puisqu'elle atteindra 2 milliards de francs.
Plusieurs d'entre vous, et M. Joly le premier, ont évoqué la démographie médicale. La réflexion sur ce thème est engagée dans un groupe constitué de représentants de la direction générale de la santé, de la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soins, et de l'éducation nationale. Ce groupe devra proposer, dès le début de l'année prochaine, des scénarios que nous aurons à étudier dans la plus grande transparence.
Depuis trois ans, des mesures de première importance ont été prises en matière de démographie médicale pour répondre au constat de déséquilibre que nous n'avons pas manqué d'observer dans certains secteurs.
Les spécialités sensibles ont été fléchées dès 1998, ce qui se traduit par une augmentation du nombre de médecins formés, notamment en anesthésie-réanimation, en gynécologie et en pédiatrie. (M. Dominique Leclerc s'exclame.)
Le numerus clausus a été et continue d'être progressivement relevé, avec une augmentation de 130 places en 1999, de 150 places en 2000 et de 250 places en 2001. (Exclamations sur les travées du RPR.) Le niveau de 4 100 étudiants en médecine a ainsi été atteint pour l'année 2000-2001.
L'attractivité des carrières médicales hospitalières a été renforcée grâce à un effort sans précédent. On constate d'ailleurs, actuellement, une diminution des postes vacants, le taux étant tombé de 8 % en 1998 à 4 % en 1999.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. On a fermé des services dans les hôpitaux généraux !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oui, mais le nombre de postes n'a pas été modifié, monsieur le président !
M. Alain Gournac. Allez sur le terrain ! Allez visiter les hôpitaux !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le nombre de postes de médecins n'a pas été diminué et les postes vacants sont pourvus.
M. Dominique Leclerc. Ce n'est pas vrai ! C'est scandaleux !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Pour la première fois, les pouvoirs publics ont pris des mesures d'une ampleur très importante pour les praticiens hospitaliers : 1,3 milliard de francs sont ainsi consacrés aux médecins des hôpitaux publics.
Certes, on peut toujours estimer que ce n'est pas suffisant, mais c'est la première fois qu'un effort de cette ampleur a été consenti. Les médecins le savent ! (Rires et exclamations sur les travées du RPR.)
M. Charles Descours, rapporteur. Lesquels ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Ils nous en sont reconnaissants.
M. Marcel-Pierre Cléach. Ils en ont l'air !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Comparez avec ce qui été fait dans les années précédentes !
Monsieur Fischer, je tiens à vous remercier du soutien que vous avez apporté à la politique familiale.
M. Charles Descours, rapporteur. Vous n'êtes pas rancunière !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je sais que ce n'est pas nouveau puisque nous avons eu l'occasion de travailler ensemble sur ce sujet.
Vous vous êtes inquiété du contenu du plan « crèches ». Ce plan va se développer en concertation avec le groupe de travail que Mme Ségolène Royal anime à son ministère. Elle aura l'occasion de vous en parler quand elle viendra présenter les articles qui concernent la politique familiale.
Ce que je peux vous dire, c'est que nous avons déjà 1,5 milliard de francs du fonds national d'action sociale de la CNAF et qu'il faut les utiliser au mieux. Avec cette somme, on peut déjà faire beaucoup de choses !
Je sais que la reconnaissance de la famille dès le premier enfant est l'une de vos vieilles renvendications. Il n'a pas encore été possible de vous suivre, mais vous reconnaîtrez que nombre de mesures sont mises en oeuvre, avec des financements élevés, puisque la conférence nationale de la famille a décidé, cette année, de mobiliser dix milliards de francs. Il convient donc de mesurer l'ampleur des efforts déployés pour reconnaître aux familles leur véritable place et leur rôle dans le développement de la cohésion sociale.
Concernant la vieillesse, vous avez justement salué les mesures de revalorisation du pouvoir d'achat des retraités, notamment des plus modestes d'entre eux. C'est effectivement une priorité politique sur laquelle le Gouvernement et sa majorité plurielle ont pu utilement dialoguer à l'Assemblée nationale, où le groupe communiste a été l'un des artisans de son affirmation.
Concernant la prestation dépendance, nous sommes à la veille de la revoir pour la transformer en « allocation pour la vie autonome ».
M. Charles Descours, rapporteur. Toujours « à la veille » ! Jamais les lendemains qui chantent !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous savez que le Premier ministre attache une importance primordiale à ce sujet. Il l'a annoncé le 21 mars dernier : ce sera l'une des priorités de l'action de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Elle-même l'a dit à cette tribune ; elle le redira dans le cours du débat.
M. Alain Gournac. Que de priorités !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. S'agissant des maladies professionnelles, nous partageons, bien sûr, les préoccupations que vous avez exprimées et votre souhait d'une réforme de cette branche. Vous le savez, les choses sont en train d'évoluer en ce sens.
Pour ce qui est du remboursement des soins, nous améliorons certaines prestations, qu'il s'agisse de la lunetterie - la mesure d'extension aux seize - dix-huit ans annoncée à l'Assemblée nationale a été publiée au Journal officiel hier - ou des prothèses auditives, avec - j'ai déjà eu l'occasion de le préciser - la prise en charge à 100 % des prothèses auditives pour les enfants jusqu'à l'âge de vingt ans, soit une prolongation de quatre ans, la prise en charge totale pour les sourds aveugles et le remboursement des embouts pour les jeunes enfants, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
En ce qui concerne les soins dentaires, deux nouveaux actes vont être inscrits à la nomenclature, ce qui représente aussi un progrès notable.
Nous comptons continuer à améliorer la couverture maladie de nos concitoyens, mais sans renoncer à traquer les dépenses inutiles, les gaspillages, qui, vous le savez, menacent l'équilibre et la pérennité du dispositif de solidarité.
Monsieur Cazeau, je vous remercie, bien sûr, du soutien très efficace que vous avez apporté au Gouvernement dans votre intervention. Votre analyse de la situation actuelle de notre protection sociale est très éclairante. Je vous remercie d'avoir approuvé les choix de santé publique qui sont ceux du Gouvernement et je renvoie les participants au débat qui va s'ouvrir dans quelques instants à votre intervention, qui éclaire bien les choix qui sont faits dans notre pays.
Monsieur Leclerc, vous avez critiqué les « tuyauteries » diverses et leur manque de lisibilité, reprenant le vocabulaire de votre rapporteur - je n'ai donc pas été étonnée d'entendre les propos que vous avez tenus.
Certes, nous pouvons ne pas être d'accord, mais il faut faire la distinction entre complexité - je la reconnais - et opacité.
Le financement des 35 heures est transparent, justement grâce au FOREC. Si ce dernier n'existait pas, les flux financiers en cause seraient mélangés au sein des branches. Alors, ce serait de l'opacité.
M. Charles Descours, rapporteur. Si les 35 heures n'existaient pas, il n'y aurait pas de FOREC !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Par ailleurs, nous préférons les transferts de recettes fiscales pérennes, et c'est pourquoi nous affichons les choses avec transparence.
Ce que vous regrettez, en fait, monsieur Leclerc, comme M. Descours, vraisemblablement, c'est que, contrairement à vos prédictions, nous assurons l'équilibre du FOREC et donc le financement de l'ensemble des exonérations de charges sociales, notamment celles qui correspondent à la réduction du temps de travail.
Vous critiquez l'ONDAM, le qualifiant d'objectif comptable. Or, dans une loi de financement, le Gouvernement est comptable des équilibres. Les choix qu'il soumet au Parlement expriment le possible et non pas seulement le souhaitable, qui reste l'apanage de ceux qui ne votent pas les lois ni les budgets. On ne peut pas, comme vous le dites, s'en tenir à la logique des besoins. Nous devons faire des choix, définir des priorités, traquer les gaspillages, je le redis, et utiliser surtout au mieux les ressources mobilisées.
Vous vous êtes inquiété des prélèvements sur l'industrie pharmaceutique. Nous ne partageons pas vos inquiétudes ; il suffit de voir l'évolution des cours de la bourse des valeurs de ce secteur pour être tout à fait rassuré quant à son avenir.
J'en viens à un sujet sensible, notamment ces jours-ci, celui qui concerne les propositions que vous avez formulées, monsieur Leclerc, à propos de la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Je tiens à vous indiquer très précisément que, depuis 1996, contrairement à ce que vous avez affirmé, la maladie de Creutzfelt-Jakob est une maladie à déclaration obligatoire. En revanche, elle n'est pas encore aujourd'hui publiée au bulletin épidémiologique hebdomadaire. Nous travaillons actuellement sur les conditions de cette publication, qui sera bientôt décidée pour cette maladie rare et très grave, et qui permettra d'apporter un éclairage sur les différents cas suspects, probables ou avérés.
Dès 1992, nous avons mis en place un réseau d'étude multidisciplinaire. Le recueil et l'analyse des données épidémiologiques et cliniques fournies par les services hospitaliers susceptibles d'accueillir ces malades sont assurés par l'unité 360 de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale. Un réseau d'unités spécialisées existe, en lien avec l'Institut de veille sanitaire. Ce réseau participe à une action concertée européenne, et vous avez entendu hier que, dans le plan que le Premier ministre a annoncé pour maîtriser les risques de contamination, figure un volet qui concerne la santé publique et qui indique bien le renforcement de la recherche sur les maladies à prion, le développement d'un guide de bonne pratique pour la prise en charge, l'accompagnement et le soutien des malades et des familles victimes de cette maladie, et un triplement des crédits consacrés à la recherche dans ce domaine.
Monsieur Darniche, vous avez critiqué les diverses mesures compensatrices mises en place cette année et vous vous êtes prononcé contre l'allégement de la CSG décidé par le Gouvernement en faveur des ménages à revenus modestes.
Quand on cherche à alléger l'impôt des Français, il faut avoir le souci de la justice fiscale. Or ces ménages ne paient en général ni impôt sur le revenu, ni taxe d'habitation. En revanche, pour eux, la CSG peut être lourde, d'autant qu'ils ne bénéficient pas de la déductibilité. C'est pourquoi nous avons décidé de mettre en place cette ristourne de CSG, qui représentera un treizième mois pour les personnes qui perçoivent le SMIC.
Concernant la famille, vous avez critiqué telle ou telle mesure financière. Vous négligez le succès des conférences de la famille, dont la dernière a décidé d'inscrire 10 milliards de francs de dépenses nouvelles pour les familles. Cette mesure est d'ores et déjà mise en oeuvre. Il ne s'agit donc pas simplement d'un effet d'annonce, mais d'une décision actuellement appliquée par la ministre déléguée à la famille et à l'enfance.
Nous sommes comme vous très attachés, monsieur Muzeau, à la répartition. Toute la politique de ce gouvernement vise à assurer la pérennité de nos régimes de retraite par répartition. Vous avez pu constater que, à plusieurs reprises, le Gouvernement s'est engagé fermement sur cette question malgré un contexte démographique défavorable. C'est pour nous tous, au coeur du pacte social et au nom de la solidarité entre les générations, une nécessité que de préserver les acquis et de maintenir un espoir dans l'avenir. Nous préciserons dans les prochains mois les modalités de fonctionnement et les structures du fonds de réserve. J'en suis certaine, vous serez alors pleinement rassuré et vous verrez que nous tenons nos engagements.
Vous avez, monsieur Chabroux, rappelé les mesures annoncées à plusieurs reprises par le Gouvernement sur la couverture maladie universelle : relèvement du seuil à 3 600 heures et prolongement des droits des anciens bénéficiaires de l'aide médicale jusqu'au 30 juin prochain.
Vous avez également souligné les autres avancées que comporte ce projet de loi de financement de la sécurité sociale en matière de couverture sociale : un objectif national des dépenses d'assurance maladie fixé à 3,5 % cette année, des retraites revalorisées de 2,2 %, des mesures sans précédent en faveur de la petite enfance.
Nous entendons effectivement faire bénéficier tous nos concitoyens de l'amélioration des comptes de la sécurité sociale. Elle nous permet de financer une politique familiale ambitieuse, articulée autour de grandes priorités et financée - contrairement à la politique familiale de 1994, que vous invoquez souvent, messieurs de la majorité, qui, elle, ne l'était pas. Cette politique est adaptée aux attentes des familles en matière de garde des jeunes enfants. Les familles veulent qu'on les aide ; elles veulent que l'Etat participe à l'organisation de la prise en charge des jeunes enfants.
Le Gouvernement est à l'écoute de nos concitoyens. Il apporte des réponses concrètes à leurs problèmes quotidiens, dans un souci de justice sociale.
La réforme des aides au logement s'inscrit parfaitement dans cette logique. Les familles qui en bénéficieront sauront en tirer le meilleur profit et sauront bien à qui elles doivent témoigner leur gratitude.
Vous nous avez fait part, madame Dieulangard, de votre préoccupation quant à la réparation des dommages liés à l'amiante. C'est parce qu'il partage vos analyses que le Gouvernement a mis en place un fonds d'indemnisation permettant la réparation intégrale des préjudices subis.
Cette mesure fait suite à celles qui ont déjà été prises depuis trois ans pour améliorer la reconnaissance et la réparation des accidents du travail et maladies professionnelles, à savoir des délais d'instruction imposés aux caisses, la révision des tableaux des maladies professionnelles. Les choses avancent progressivement. De plus, ces mesures sont révisées régulièrement, en concertation avec les organisations professionnelles, qui nous aident beaucoup dans la précision de ces dispositifs.
Nous entendons aussi les demandes des associations d'aide aux victimes, qui plaident pour que soit étendu à toutes les victimes ce que nous faisons sur l'amiante, parce qu'il y a urgence et que des drames se font jour.
Le professeur Masse, président de la commission des maladies professionnelles du Conseil supérieur de prévention des risques professionnels, a ainsi été récemment chargé d'une mission de réflexion sur l'indemnisation. Elisabeth Guigou et moi-même serons très attentives à ses conclusions, soyez-en assuré. J'ai déjà eu l'occasion de vous répondre sur ce point dans cet hémicycle à l'occasion d'une question orale. Les parlementaires seront associés à l'avancée de ces réflexions.
M. Neuwirth a critiqué l'insuffisance des actions de santé publique que nous menons. Il s'est même interrogé sur l'existence réelle du ministère de la santé. C'est une inquiétude que j'ai souvent entendue de sa part. Je tiens à le rassurer une nouvelle fois : le ministère de la santé existe, preuve en est le projet de loi de financement de la sécurité sociale que je défends devant vous aujourd'hui et au travers duquel nous lançons des actions nouvelles considérables pour lutter contre le cancer, sujet qui a fait l'objet de la quasi-totalité de son intervention.
Je vais m'y attarder quelque peu.
Je tiens à rappeler - cela me permet de répondre à M. Huriet, qui, lui aussi, s'est inquiété de cette question - que, pour la première fois depuis de nombreuses années, nous développons une approche globale de la lutte contre le cancer. Dès 1997, prenant conscience de la situation, le Gouvernement a mobilisé l'ensemble des professionnels concernés : médecins généralistes, cancérologues, médecins des hôpitaux publics, des centres anticancéreux, du secteur privé, tous professionnels à qui je veux avant tout rendre hommage pour leur mobilisation permanente, car c'est grâce à eux que nous avons pu avancer dans le cadre de cette politique coordonnée et globale de lutte contre le cancer.
Notre démarche a d'ailleurs été saluée par ces professionnels, qui, vous le savez, n'ont pas la réputation de se montrer particulièrement indulgents à l'égard des pouvoirs publics.
Ce plan, vous le reconnaissez, embrasse l'ensemble des questions liées au cancer.
Je citerai des actions de prévention, qui bénéficient - la précision a été omise - de plus de 100 millions de francs de mesures nouvelles destinées à lutter en particulier contre les méfaits du tabac et de l'alcool, qui sont responsables d'une grande partie des cancers évitables. Je pense à la généralisation progressive des programmes de dépistage des cancers, en particulier du cancer du sein - je reviendrai sur ce point - à l'organisation des services en cancérologie. J'indique que tous les schémas régionaux d'organisation sanitaire, les SROS, de deuxième génération ont, contrairement à ce qui a été affirmé, prévu d'organiser la prise en charge du cancer dans des réseaux structurés.
Je mentionnerai également l'augmentation du nombre d'appareils d'imagerie à résonance magnétique, les IRM, puisque quatre-vingt-quatorze nouvelles autorisations ont été délivrées. C'est là une décision sans précédent, même si nous avons conscience qu'il ne suffit pas d'autoriser l'achat et la mise en place d'appareils, car il faut aussi permettre leur bon fonctionnement, prévoir le remplacement des appareils devenus caducs ou vétustes.
Je citerai également l'amélioration de l'accès à de nouvelles technologies, comme les tomographies à positons, l'augmentation du nombre d'appareils de radiothérapie ou encore le soutien aux innovations technologiques.
Dès l'année 2001, le programme de médicalisation du système d'information, le PMSI, tiendra mieux compte des médicaments anticancéreux coûteux, et des crédits spécifiques seront dégagées pour le financement du progrès médical à l'hôpital, notamment dans ce domaine qui nous intéresse, à savoir le cancer.
Les malades et leurs familles nous avaient fait part de longue date de leurs difficultés quotidiennes. Elles ont été entendues : cette année, les nutriments oraux indispensables pour améliorer la qualité de vie des personnes vivant avec un cancer sont pris en charge, ce qui représente une enveloppe de 100 millions de francs.
Un programme ambitieux de recrutement de psychologues a également été lancé, et ce dès cette année, car cette maladie est dure pour ceux qui en souffrent, pour leurs proches, mais aussi pour ceux qui la soignent. Notre action résolue de lutte contre la douleur trouve ici tout particulièrement à s'appliquer.
Enfin, bien sûr, parce que cette maladie est encore trop souvent mortelle en dépit des progrès qui ont été enregistrés, nous poursuivons nos efforts en matière de soins palliatifs, afin de développer cette activité partout dans notre pays.
Je sais que M. Neuwirth est particulièrement attaché à la mise en oeuvre définitive de la loi sur les soins palliatifs. Je l'ai déjà rassuré : le décret sur l'intervention des professionnels libéraux dans les soins palliatifs, dont il m'a parlé, est en ce moment soumis à la consultation des professionnels ; il est donc dans sa phase de finalisation et devrait pouvoir être soumis au Conseil d'Etat très prochainement.
Par ailleurs, l'autre décret qui était attendu, concernant la reconnaissance des bénévoles dans l'organisation des soins palliatifs, est paru voilà quelques semaines.
Je terminerai par le dépistage du cancer du sein, en précisant que ce ne sont pas 3 millions de francs qui sont consacrés aux trente-deux programmes mis en place de manière expérimentale, mais 260 millions de francs cette année, et 310 millions de francs l'année prochaine.
Je suis convaincue, et c'est la politique que je mène avec détermination, de l'absolue nécessité de généraliser ce dépistage.
J'aimerais également vous rappeler l'importance, pour le succès de ces programmes, de l'implication des professionnels et de la participation de la population.
C'est pourquoi, là aussi, nous avons mené une large concertation avec les professionnels, mais aussi avec les associations de femmes impliquées dans ce combat, comme les comités de femmes, que j'ai, d'ailleurs, rencontrés ici au Sénat lors de leur première réunion nationale, le mois dernier. Seules des différences de calendrier ne m'ont pas permis de rencontrer à cette occasion les sénateurs qui ont apporté leur soutien à cette fédération d'associations de femmes.
Cette concertation et cette mobilisation nous ont permis, d'ores et déjà, de définir les programmes, de former les radiologues, d'adapter les mammographes.
Nous respecterons les délais annoncés et, progressivement, de nouveaux départements s'engageront dans ces programmes, qui seront évalués. Je compte que, dès l'année prochaine, le dépistage du cancer du sein soit généralisé sur l'ensemble du territoire.
Par ailleurs, monsieur Huriet, vous m'avez interrogée sur le cancer colorectal, dont le dépistage constitue un véritable enjeu de santé publique.
C'est une des priorités du plan gouvernemental contre les cancers.
Pour le dépistage du cancer colorectal, le groupe technique mis en place a établi le cahier des charges. Ses recommandations rejoignent le travail réalisé par la Société française de gastro-entérologie, qui nous a également remis ses propositions en mars dernier.
En nous fondant sur ces travaux, nous avons défini, avec les professionnels, les prochaines étapes, à savoir la mise en place de comités régionaux de pilotage du dépistage et de structures départementales de gestion, et la réalisation du dépistage par test hémoccult 2 tous les deux ans chez les personnes de cinquante à soixante-quatorze ans.
Monsieur Domeizel, vous vous êtes, quant à vous, inquiété spécifiquement de la démographie médicale en milieu rural. Il y a moins de médecins en zone rurale qu'en zone urbaine et l'on constate de fortes disparités géographiques en ce qui concerne la répartition des professionnels sur le territoire. Vous avez raison de le signaler. C'est une difficulté majeure.
Ce constat tient, vous le savez, à des causes multiples. L'une d'entre elles repose sur l'isolement, qui rend l'exercice médical difficile dans une zone à faible densité de population. Cet isolement contribue certainement à dissuader des professionnels de s'installer en zone rurale.
Nous devons surmonter les difficultés réglementaires qui empêchent les médecins de s'associer pour couvrir à plusieurs un territoire géographique donné. Conscient de cette difficulté, que vous soulignez à juste titre et qui me préoccupe pour plus d'une raison, le ministère de l'emploi et de la solidarité a lancé une réflexion interministérielle sur la démographie médicale.
Cette étude a un double objectif. Il s'agit, d'abord, d'adapter les flux de formation des médecins aux besoins, spécialité par spécialité - ce que j'évoquais tout à l'heure et qui a fait sourire certains d'entre vous - et, ensuite, de proposer toutes mesures de nature à permettre qu'en chaque point du territoire une réponse médicale soit disponible.
Un égal accès aux soins constitue en effet l'un des objectifs majeurs du Gouvernement. Le pilotage de la démographie médicale est un outil.
Vous avez souligné à juste titre, monsieur le sénateur, que la situation économique s'est améliorée et permet d'aborder la question des retraites dans un climat très différent de celui qui prévalait avant 1997. Je rends hommage à votre sens des responsabilités. Mais l'embellie économique ne doit pas nous faire oublier que le choc démographique est pour l'avenir, en particulier entre 2020 et 2040.
Les principes que le Gouvernement suivra pour traiter le problème des retraites sont ceux que vous appelez de vos voeux, à savoir le diagnostic, le dialogue, la décision.
Je vous remercie du soutien que vous nous avez manifesté à propos de ce projet de loi, qui, vous le savez, sera, dans les mois qui viennent, l'une des priorités concrètes du Gouvernement.
M. Alain Gournac. Encore une priorité !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Gournac, je crois que vous n'êtes pas tout à fait le mieux placé pour adresser des reproches au Gouvernement, quand on sait comment les deux gouvernements précédents se sont comportés avec les familles...
C'est sous ces deux gouvernements, par exemple, que la base mensuelle des allocations familiales n'a pas été revalorisée, contrairement à ce que prévoyaient les textes applicables dès cette époque. C'est le gouvernement actuel qui a dû rattraper le retard et assumer les dettes que lui avait laissées le précédent gouvernement.
M. Guy Fischer. Voilà la vérité !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Nous avons trouvé la branche famille en déficit, ce qui menaçait la pérennité des prestations versées aux familles. (M. Gournac s'exclame.)
Nous avons donc agi pour renverser la tendance, (M. Gournac s'exclame de nouveau) et, depuis 1997, les ressources de la branche famille ont augmenté plus vite que le produit intérieur brut.
M. Alain Gournac. Eh oui !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous nous reprochez de transformer la politique familiale en politique de lutte contre la pauvreté. La réalité, c'est que nous aidons plus les familles modestes que les autres.
M. Guy Fischer. Voilà une autre vérité ! Voilà de la justice. (M. Gournac s'exclame encore.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Qui nous reprochera d'avoir fait ce choix ? Pour notre part, nous l'assumons devant la représentation nationale et devant nos concitoyens. C'est notre honneur et ce sont les valeurs qui fondent notre engagement politique. (Protestations sur les travées du RPR.)
Ce n'est pas la même chose, en effet, d'élever des enfants quand on gagne le SMIC et quand on gagne plusieurs fois le SMIC !
Ce n'est pas ce choix qui empêche le Gouvernement d'aider toutes les familles, comme en témoignent encore le projet de loi relatif au fonds d'investissement pour les crèches et le retour à l'universalité des allocations familiales.
Madame Campion, vous avez salué les nombreuses avancées réalisées par le Gouvernement dans le domaine de la famille pour 2001. Je vous en remercie.
L'effort porte en priorité sur la petite enfance, comme nous l'avions annoncé. Nous avançons progressivement, après avoir clairement annoncé nos objectifs.
Le Gouvernement s'attache à dégager des priorités et à les satisfaire. Améliorer les modes de garde, c'est, en particulier, aider les femmes qui travaillent à mieux concilier vie familiale et vie professionnelle, comme vous l'avez fort justement souligné.
Aider les femmes à reprendre une activité est important aussi. Vous avez à cet égard rappelé la création du fonds d'aide à la reprise d'activité des femmes. Nous entendons en effet aider les familles, toutes les familles, y compris les familles monoparentales.
M. Calméjane, enfin, a évoqué l'égal accès aux soins pour tous. C'est une priorité du Gouvernement, une priorité qui sous-tend de nombreuses politiques menées : la mise en place de la CMU ou notre politique de réduction des inégalités en matière hospitalière, par exemple.
Par ailleurs, la progression de l'évaluation et de l'accréditation va dans le sens de la responsabilisation des professionnels que vous appelez de vos voeux.
Pour ce qui concerne les autres sujets - la démographie et l'imagerie - je n'y reviens pas, pour abréger mon intervention.
Je m'adresserai maintenant plus particulièrement à M. Huriet.
Monsieur le sénateur, j'ai déjà répondu, indirectement, concernant vos inquiétudes sur le cancer ; je n'y reviens donc pas non plus.
J'ai noté que vous vous faites le censeur d'un dispositif, l'ONDAM, qui est issu, je le répète, excusez-m'en, des ordonnances de 1996.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est ce qu'on en fait qui compte !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement actuel a fixé ce montant pour 2001 à un niveau qui permettra de financer les mesures que vous appelez de vos voeux.
L'hôpital bénéficiera de crédits en augmentation de 3,3 % - les cliniques aussi - pour financer le progrès médical. Il bénéficiera également de crédits importants afin de favoriser la stérilisation et la désinfection des matériels.
Je crois savoir que la commission des affaires sociales propose de supprimer purement et simplement l'ONDAM. Je ne vois guère de cohérence dans tout cela, monsieur le sénateur.
M. Charles Descours, rapporteur. Nous sommes soutenus par les professionnels de santé.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je ne sais pas comment nous pourrons financer les mesures que vous avez appelé de vos voeux si nous n'avons pas des objectifs de dépenses qui permettent de tenir nos engagements.
M. Alain Gournac. Les usines à gaz !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne la médecine de ville, monsieur Huriet, nous avons mis à la disposition des professionnels et des caisses des outils nouveaux qui s'ajoutent aux RMO, à savoir l'évaluation des pratiques, la coordination des soins, les accords de bon usage des soins, les contrats de bonne pratique.
Dans le domaine de la modernisation des pratiques, c'est ce Gouvernement qui a innové, tout en soutenant une information des professionnels bien mal partie en 1996. (Protestations sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Alain Gournac. Ils vous abandonnent !
M. Raymond Courrière. Nous verrons !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Huriet, nous aurons l'occasion de revenir sur la question des réseaux à l'article 29, qui répond à nombre de vos préoccupations.
Le développement des réseaux peut être encouragé par le fonds d'aide à la qualité des soins de ville que nous avons créé et qui sera mobilisé à cet effet.
Vous avez enfin évoqué, monsieur le sénateur, la pénurie des personnels infirmiers et souligné que « gouverner, c'est prévoir ».
Je vous rappelle simplement quelques faits.
En 1997, le nombre des élèves infirmiers avait été diminué. Depuis, reconnaissez-le, nous avons rectifié le tir et, cette année, nous avons créé 8 000 places supplémentaires d'élèves infirmiers.
M. Charles Descours, rapporteur. Il n'y a pas de place dans les écoles !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Ce n'est pas sans soulever des problèmes, monsieur le rapporteur, comme vous le dites vous-même. Cela pose en effet des problèmes en termes d'accueil, d'encadrement des études.
M. Charles Descours, rapporteur. Tout à fait !
M. Alain Gournac. C'est le moins qu'on puisse dire !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Nous discutons avec les syndicats des élèves pour surmonter ces difficultés et être à la hauteur des obligations de l'organisation du système de soins.
M. Charles Descours, rapporteur. Les effectifs n'ont augmenté que sur le papier, vous le savez bien, et il n'y a pas un infirmier de plus dans les hôpitaux !
M. Alain Gournac. Ce ne sont que des paroles ! Je vous invite chez moi, vous verrez !
M. Raymond Courrière. Ils n'étaient pas très contents de vous en 1997 !
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues, laissez Mme le secrétaire d'Etat terminer son exposé, ou demandez à l'interrompre suivant les règles posées par le règlement !
Madame le secrétaire d'Etat, poursuivez.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Huriet, j'apprécie beaucoup votre participation à la réflexion des pouvoirs publics dans le domaine de la santé publique.
M. Alain Gournac. Toujours des mots !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je regrette d'autant plus, monsieur le sénateur, que, dans cette intervention, vous ayez laissé prédominer une tendance quelque peu politicienne pour exprimer votre pensée, que vous ayez usé de slogans réducteurs. (Protestations sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) Je préfère quand vous laissez parler votre vocation et votre fibre médicale, nous offrant ainsi un meilleur mode de coopération et de dialogue.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je note que nombre de vos interventions témoignent d'une volonté de débattre au fond des orientations, des conditions de la définition d'une véritable politique de santé publique. Cet exercice est bien évidemment limité dans le cadre d'une loi de financement de la sécurité sociale, qui traite principalement de l'équilibre des comptes de la sécurité sociale. Je rappelle à ce propos que seul cet équilibre atteint, cet équilibre voulu par nos concitoyens, permet de parler plus sereinement de santé publique.
A cet égard, je voudrais rassurer ceux d'entre vous qui se sont inquiétés à propos de la discussion du projet de loi de modernisation du système de santé, qui nous permettra, lui, d'avoir un débat de fond sur la politique de santé publique.
M. Alain Gournac. Qui permettra...
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. J'ai, certes, employé le futur, monsieur Gournac, mais ce projet de loi est en gestation. Le Gouvernement en sera bientôt saisi, il sera examiné en conseil des ministres et il viendra en discussion devant le Parlement dans le courant de l'année prochaine. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

6

NOMINATION DE MEMBRES
D'UNE COMMISSION MIXTE PARITAIRE

M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la contraception d'urgence.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean Delaneau, Lucien Neuwirth, Francis Giraud, Claude Huriet, Jacques Bimbenet, Bernard Cazeau et Guy Fischer.
Suppléants : Mmes Janine Bardou, Claire-Lise Campion, MM. Charles Descours, Dominique Leclerc, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau et Philippe Nogrix.

7

FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
POUR 2001

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécuité sociale.
Nous passons à la discussion des articles.

Demande de réserve et demande de priorité



M. Jean Delaneau,
président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, je demande que l'article 1er soit réservé jusqu'après la fin l'examen de l'article 47.
En outre, je demande que les amendements n°s 3 et 106 tendant à insérer des articles additionnels après l'article 3 soient examinés en priorité avant l'article 3.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces demandes ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. En conséquence, la réserve et la priorité sont ordonnées.
Nous abordons donc l'examen de l'article 2 A.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
ET AUX TRANSFERTS

Article 2 A



M. le président.
« Art. 2 A. - Après le I de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - La contribution est établie sur l'assiette correspondant aux cotisations forfaitaires applicables aux catégories de salariés ou assimilés visées par les arrêtés pris en application des articles L. 241-2 et L. 241-3 du présent code et L. 741-13 du code rural, dans leur rédaction en vigueur à la date de publication de la dernière loi de financement de la sécurité sociale. »
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2 A.

(L'article 2 A est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - I. - A. - La contribution sociale généralisée et la contribution pour le remboursement de la dette sociale assises sur les revenus d'activité tels que définis au I de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, à l'exception de son deuxième alinéa, ainsi que sur les revenus visés aux 1° , 4° , 5° , 5° bis et 6° du II du même article perçus au cours d'un mois civil, font l'objet d'une réduction lorsque le total de ces revenus est inférieur à un plafond fixé à 169 fois le salaire minimum de croissance majoré de 40 %.
« La réduction est également applicable aux revenus visés au 7° du II de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, les modalités d'application des dispositions de l'avant-dernier alinéa du présent A pour ces revenus et pour le complément de rémunération à la charge de l'employeur étant fixées par décret. »
« La réduction est également applicable, selon des modalités fixées par décret, aux contributions dues par les personnes visées aux articles L. 721-1 et L. 771-1 du code du travail et L. 751-1 du code rural, qui relèvent d'un régime de salariés et dont la rémunération n'est pas déterminée en fonction du nombre d'heures de travail. »
« Dans les professions dans lesquelles le paiement des congés des salariés et des charges sur les indemnités de congés est mutualisé entre les employeurs affiliés aux caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16 du code du travail, la réduction n'est pas applicable aux contributions dues au titre de ces indemnités, sous réserve des dispositions du 3° du B du présent I. »
« Pour le calcul de la réduction applicable aux salariés dont le nombre d'heures rémunérées au cours du mois est inférieur à la durée collective du travail résultant d'une convention ou d'un accord collectif applicable dans l'entreprise ou l'établissement ou, à défaut, de la durée légale du travail, les revenus perçus sont, pour être convertis en équivalent temps plein, divisés par le rapport entre le nombre d'heures effectivement rémunérées au cours du mois et cette durée collective, calculée sur ce mois.
« Pour les agents de l'Etat et de ses établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et les agents des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, travaillant à temps partiel ou non complet et non soumis à une durée du travail résultant d'une convention collective, le rapport mentionné à l'alinéa précédent est égal à leur quotité de temps de travail. Un décret fixe les conditions d'application des dispositions du présent alinéa aux agents ayant commencé ou cessé leur activité au cours du mois. »
« B. - Pour les revenus perçus au cours de l'année 2001, la réduction prévue au A est égale, dans les limites des contributions dues, au tiers du montant déterminé selon la formule suivante :
« 19 % x (169 x salaire minimum de croissance majoré de 40 % - revenus).
« Pour le calcul de la réduction :
« 1° Les revenus sont convertis le cas échéant en équivalent temps plein ;
« 2° Pour les revenus visés au 7° du II de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, le taux de 19 % est réduit à 16,75 % ;
« 3° Dans les professions dans lesquelles le paiement des congés des salariés et des charges sur les indemnités de congés est mutualisé entre les employeurs affiliés aux caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16 du code du travail, la réduction est majorée de 10 % dans la limite des contributions dues ;
« 4° Lorsqu'il est fait application des dispositions de l'avant-dernier alinéa du A du présent I, la différence entre 169 fois le salaire minimum de croissance majoré de 40 % et les revenus ainsi corrigés est elle-même multipliée par le rapport mentionné à cet alinéa. »
« C. - Pour les salariés visés à l'article L. 772-1 du code du travail, la réduction peut être calculée sur une base horaire forfaitaire dans des conditions fixées par décret. »
« Pour les catégories de salariés visées au I bis de l'arti- cle 136-2 du code de la sécurité sociale, la réduction peut être calculée selon des modalités et des taux fixés par décret lorsque l'assiette forfaitaire qui leur est applicable n'excède pas les limites fixées au A du présent I. »
« II. - A. - La contribution sociale généralisée et la contribution pour le remboursement de la dette sociale assises sur les revenus professionnels tels que déterminés par l'application des articles L. 136-3 et L. 136-4 du code de la sécurité sociale font l'objet d'une réduction lorsque ces revenus retenus au titre de la période servant de référence pour le calcul desdites contributions sont inférieurs à un plafond fixé à 2028 fois le salaire minimum de croissance au cours de l'année civile considérée, majoré de 40 %. »
« Lorsque la durée de l'activité donnant lieu à assujettissement à la contribution visée à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale est inférieure à l'année civile, les revenus considérés sont, pour être rapportés à l'année entière, divisés par le rapport entre le nombre de jours d'activité et le nombre de jours de l'année. »
« B. - Pour les revenus professionnels soumis aux contributions dues au titre de l'année 2001, la réduction prévue au A est égale, dans les limites des contributions dues, au tiers du montant déterminé selon la formule suivante :
« 20 % x (2028 x salaire minimum de croissance majoré de 40 % - revenus).
« Pour le calcul de la réduction :
« 1° Lorsque le revenu est inférieur à un montant égal à 2028 fois le salaire minimum de croissance, la réduction est calculée sur la base de ce montant et proratisée par l'application du rapport entre le revenu et ce montant ;
« 2° Lorsqu'il est fait application des dispositions du deuxième alinéa du A du présent II, le montant de la réduction est proratisé par l'application du rapport mentionné à cet alinéa. »
« C. - En cas d'exercice simultané, soit d'une ou plusieurs activités salariées et d'une ou plusieurs activités non salariées, soit de plusieurs activités non salariées, relevant de catégories différentes au regard de l'impôt sur le revenu, les dispositions des A et B du présent II s'appliquent en prenant en compte l'ensemble des revenus soumis aux contributions, selon des modalités fixées par décret. »
« D. - Pour l'application du présent II, le salaire minimum de croissance pris en compte est égal à la valeur annuelle moyenne du salaire minimum de croissance en vigueur au cours de l'année civile.
« III. - Supprimé. »
Sur l'article, la parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Avec l'article 2, le Gouvernement se propose de modifier la nature de la CSG.
On a pu être, à l'origine, contre l'instauration de celle-ci. Désormais, elle existe. Elle est simple et compréhensible. Ainsi, chaque Français cotise en fonction de ses ressources, quelle qu'en soit l'origine, pour bénéficier d'une couverture d'assurance maladie.
Or, madame le secrétaire d'Etat, vous proposez que certaines personnes puissent désormais bénéficier de cette couverture maladie sans cotiser. Si nous partageons votre souci de rendre le travail plus attractif que l'assistance j'ai bien peur que vous n'obteniez, avec ce nouveau dispositif, l'effet inverse.
Cette mesure d'apparence généreuse semble bien dangereuse lorsque l'on prend du recul.
Tout d'abord, vous rompez avec le principe essentiel qui lie les cotisations aux prestations. Comment responsabiliser les gens s'il n'y a que des droits sans obligation, même symbolique ?
Ce prélèvement, parce qu'il est universel, crée un lien de solidarité partagé par chacun de nos concitoyens, socle indispensable à notre protection sociale.
En outre, en brisant ce lien, vous ouvrez grande la porte aux exonérations en tout genre. Vous connaissez l'attachement aigu des Français à un traitement équitable de chacun. Vous n'ignorez pas la nouvelle exaspération qui va naître chez ceux qui vont de nouveau constater une différence de traitement au nom d'une justice sociale qui, visiblement, va rater son objectif.
De plus, vous rompez l'égalité entre les Français. Comme l'ont fort bien exposé nos rapporteurs, dans le dispositif que vous présentez, il est préférable d'être un couple de smicards qui profitera doublement du nouvel abattement plutôt que d'être seul à avoir une activité professionnelle dans le couple avec des revenus équivalents car, dans ce dernier cas, il n'y aura aucun gain.
Je ne peux croire, madame le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement sanctionne ainsi sciemment des conjoints ayant fait le choix de demeurer à la maison pour élever leurs enfants. Une réforme d'une telle importance méritait sans doute plus de préparation.
Nos doutes sur l'opportunité de cette mesure sont d'ailleurs partagés par d'autres puisque j'observe que les conseils d'administration de l'ACOSS et de différentes autres caisses ont émis un avis défavorable sur le présent projet de loi, essentiellement à cause de cet article.
Pour toutes ces raisons, nous émettons de vives réserves sur le dispositif de l'article 2.
Notre groupe soutiendra la proposition conjointement présentée par la commission des affaires sociales et la commission des finances de créer un crédit d'impôt neutre par rapport à la structure des revenus et ne supprimant pas le lien cotisations-prestations.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Cette réforme transforme en profondeur le premier impôt de notre pays, puisque la CSG et la CRDS réunies représentent 400 milliards de francs.
Dans sa « pureté de cristal », la CSG, lorsqu'elle a été instituée, était une taxe générale sur l'ensemble des revenus, proportionnelle et non déductible de l'impôt progressif sur le revenu. En un mot, elle était simple.
Qu'en a-t-on fait ?
Ce n'est plus une taxe générale, puisqu'on a mis en place une taxe cédulaire avec des taux différents pour les retraites, pour les revenus d'activité et pour les revenus de placement.
Ce n'est plus un impôt totalement déductible ou non déductible ; il faut définir des partages subtils.
De plus, aujourd'hui, on touche à la troisième caractéristique de cet impôt, le principe de proportionnalité, par le jeu de la ristourne dégressive. En termes simples, un salarié rémunéré au SMIC ne sera pas imposé, mais un salarié rémunéré à 1,4 fois le SMIC le sera au taux de 7,6 %. La CSG devient progressive !
Il s'agit d'une mauvaise réforme pour trois raisons.
Tout d'abord, madame le secrétaire d'Etat, c'est une réforme techniquement inapplicable. Pour qu'un impôt progressif - et c'en sera un - puisse être mis en place, il faut connaître la totalité des revenus du contribuable. Or, vous l'avez reconnu devant l'Assemblée nationale, c'est impossible en cas de pluriactivité. J'attendais donc que vous nous présentiez aujourd'hui des amendements. Or je m'aperçois que la réforme n'est pas encore au point. En effet, un contribuable percevant de deux employeurs différents deux fois 70 % du SMIC...
M. Alain Gournac. Comment va-t-on faire ?
M. Yves Fréville. ... bénéficiera deux fois de la ristourne et paiera en principe deux fois zéro franc, ...
M. Alain Gournac. Ils n'y ont pas pensé !
M. Yves Fréville. ... alors qu'il n'y aurait pas droit s'il avait perçu un seul revenu égal à 1,4 fois le montant du SMIC imposable au taux de 7,6 %. C'est la première chose.
M. Raymond Courrière. Pourquoi n'avez-vous rien proposé, vous qui êtes si intelligent ?
M. Yves Fréville. Si vous trouvez des solutions, mon cher collègue, vous devriez les proposer !
M. le président. Monsieur Courrière, je n'ai pas davantage de raisons de vous laisser interrompre un collègue que je n'en avais tout à l'heure de laisser interrompre Mme le secrétaire d'Etat !
M. Raymond Courrière. Ils n'ont qu'à proposer des solutions !
M. Yves Fréville. Nous n'avons pas à proposer des améliorations pour une réforme que nous n'approuvons pas !
Ensuite, c'est une réforme profondément injuste. En effet, si l'on rend la CSG progressive, il faut la « familialiser », c'est-à-dire tenir compte, sinon du quotient familial, du moins du quotient conjugal. Suivant la répartition plus ou moins inégale des revenus salariaux, un couple constituant un foyer fiscal qui touchera, par exemple, 2,8 fois le SMIC pourra, selon les cas, bénéficier d'une double ristourne ou payer, à l'inverse, l'impôt « plein pot ». Où est la justice ?
Enfin, cette réforme est, je tiens à le souligner, économiquement inefficace car, en cherchant à réduire les trappes à l'inactivité, on crée des trappes à bas revenus.
En effet, si un salarié payé au SMIC voit son salaire augmenter, il devra verser sous forme de majoration de CSG au terme de la réforme 26,6 % de son augmentation, car le taux marginal de la CSG entre le SMIC et 1,4 fois le SMIC passera bien à 26,6 %. Si vous étiez payé au SMIC et que votre salaire brut augmente de 2 800 francs, vous allez devoir verser 26,6 % de votre augmentation, soit 756 francs à la sécurité sociale. Cela me paraît économiquement tout à fait inefficace pour encourager les gens à travailler plus. En conséquence, mes chers collègues, il nous faut revoir l'ensemble du dispositif.
Mais l'inefficacité économique des réductions de charges sur les bas salaires n'est pas propre à cette mesure. Je pourrais en dire autant de la ristourne dégressive sur la réduction du temps de travail - les lois Aubry - et la réduction Juppé.
Cette mesure, qui coûte 25 milliards de francs, s'ajoutera aux 105 milliards de francs du FOREC. Avec 130 milliards de francs, on pourrait mettre en place une ristourne égale pour tous sur la CSG et les cotisations sociales et aider à revenir à l'activité ceux qui ne travaillent pas.
Je ne suis pas hostile à la progressivité de notre système fiscal, mais je pense que cette progressivité doit être définie au niveau de l'impôt sur le revenu, en tout cas au niveau global. Il me paraît très dangereux de nous lancer dans une politique consistant à modifier tel ou tel impôt, une fois la taxe d'habitation, une autre fois la CSG pour les revenus sociaux et, une autre fois encore, l'impôt sur le revenu, car nous ne saurons absolument pas quel sera le résultat final de ces diverses mesures.
Cette disposition est donc techniquement mauvaise et économiquement inefficace.
En outre, elle est anticonstitutionnelle, car je ne vois pas pourquoi la progressivité serait créée uniquement au niveau des revenus d'activité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants).
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 46 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer l'article 2.
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 77 tend à rédiger comme suit l'article 2 :
« I. - Dans le deuxième alinéa du I de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, le taux : "5 %" est remplacé par le taux : "10 %".
« II. - a) Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
L'amendement n° 78 a pour objet :
I. - A la fin du premier alinéa du A du I de l'article 2, de remplacer le taux : « 40 % » par le taux : « 80 % ».
II. - Dans le deuxième alinéa du B du I de l'article 2, de remplacer le taux : « 40 % » par le taux « 80 % ».
III. - Dans le septième alinéa (4°) du B du I de l'article 2, de remplacer le taux : « 40 % » par le taux : « 80 % ».
IV. - A la fin du premier alinéa du A du II de l'article 2, de remplacer le taux : « 40 % » par le taux : « 80 % ».
V. - Dans le deuxième alinéa du B du II de l'article 2, de remplacer le taux : « 40 % » par le taux : « 80 % ».
VI. - Afin de compenser les pertes de ressources résultant des I à V ci-dessus, de compléter in fine l'article 2 par un paragraphe ainsi rédigé :
« a) Les pertes de ressources résultant de l'élargissement des revenus bénéficiant d'une réduction de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 2.
M. Charles Descours, rapporteur. La commission des affaires sociales propose de réformer quatre points essentiels du projet de loi tel qu'il nous vient de l'Assemblée nationale : d'abord le système de ristourne dégressive sur la CSG, qui est l'objet de cet article 2 ; puis le financement complexe du FOREC ; ensuite l'ONDAM, que nous contestons ; enfin, l'évolution de notre système conventionnel. Les réformes que nous préconisons ont été bien perçues, si j'en juge par les articles que nous avons lus dans la presse tant généraliste que spécialisée.
Je vais insister sur ce que nous préconisons pour réformer le système de ristourne dégressive de la CSG, qui est plus que discutable, comme viennent de le dire les orateurs qui sont intervenus sur l'article 2.
Nous sommes opposés au dispositif proposé par le Gouvernement pour sept raisons, comme il y a sept péchés capitaux, madame le secrétaire d'Etat !
Premièrement, un tel mécanisme remet en cause l'universalité du financement de la protection sociale.
Voilà dix ans que la CSG a été instituée par le Gouvernement de M. Rocard. Même si nous n'avions pas voté la CSG telle qu'elle était alors présentée, nous étions dès cette époque d'accord sur le principe même d'une CSG, évoqué dès 1983 et précisé par le Comité des sages de 1987.
La « politique de la CSG » est devenue, à long terme, une politique nationale conduite pendant dix ans par six gouvernements de sensibilités différentes. Nous croyions qu'elle faisait l'objet d'un consensus politique. Or le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie - je ne vous rends pas responsable, madame le secrétaire d'Etat, mais vous êtes solidaire du Gouvernement -, dans des conditions tout à fait étonnantes, sans concertation avec les partenaires sociaux et les organismes de sécurité sociale, en a jugé autrement le 31 août dernier. Pour ces raisons, les conseils d'administration des caisses du régime général ont massivement rejeté l'avant-projet de loi de financement de la sécurité sociale qui leur était soumis.
Je prends le pari que nous verrons arriver, année après année, des amendements tout à fait justifiés demandant telle ou telle exonération pour tel ou tel cas particulier. Le gouvernement, quel qu'il soit, résistera peut-être une année, mais cédera l'année suivante, car il aura mis « le doigt dans l'engrenage » !
Deuxièmement, ce mécanisme est inéquitable en raison de la nature même de la CSG, qui n'est pas un impôt sur le revenu. En effet, comme vient de le dire M. Fréville et comme je l'ai d'ailleurs souligné au cours de mon intervention liminaire hier, un couple ayant un revenu de deux salaires au SMIC bénéficiera de deux réductions à taux plein, alors qu'un couple avec un seul salaire à 1,4 SMIC ne bénéficiera d'aucune réduction.
Mme Guigou m'a expliqué hier qu'au nom de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes vous preniez en compte « le deuxième salaire, soit le travail féminin ».
Une femme me dit que le deuxième salaire est forcément féminin. Je rêve ! Je croyais qu'un tel discours était l'apanage de la droite ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste).
Le deuxième salaire, c'est le deuxième salaire, et il peut être féminin ou masculin ! Comment un ministre de gauche peut-il tenir de tels propos ?
Mme Guigou m'a dit aussi que je prenais ce prétexte parce que j'étais contre le travail des femmes. Bravo !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. C'était pour vous faire plaisir !
M. Charles Descours, rapporteur. Vous n'arrêtez pas de me faire plaisir ! Ce qu'elles sont gentilles, ces femmes ministres ! (Sourires.)
Les charges de famille ne sont pas prises en compte : un célibataire au SMIC bénéficiera d'une réduction égale à celle d'un smicard père de trois enfants.
Mme la ministre m'a répondu hier soir que cette « inégalité » ne la gênait pas, parce qu'elle était « en rapport avec l'objectif de la loi », qui est de « promouvoir le retour à l'emploi des personnes à revenu modeste ».
Je vous ferai néanmoins observer que la nature de la CSG est bien d'abord de financer la protection sociale. Au regard de cet objectif premier, que l'on oublie un peu, ces inégalités sont-elles acceptables ?
Cette ristourne de CSG et de CRDS sur les revenus d'activité serait justifiée, selon vous, par l'impératif de la « justice fiscale ». Or je rappelle que tout notre système fiscal est construit autour de la notion du « foyer fiscal » et de l'ensemble des revenus du foyer. Cette contradiction majeure ne vous a d'ailleurs pas échappé à propos des « pluriactifs », puisqu'il est nécessaire de prendre en compte l'ensemble des revenus de ces fameux pluriactifs.
Troisièmement, le mécanisme proposé est compensé à la sécurité sociale de manière incertaine à travers une taxe, la taxe sur les conventions d'assurance, dont il n'est pas impossible de penser qu'elle est condamnée à terme, puisqu'elle n'est pas payée par tous les assureurs.
Vous m'avez indiqué également qu'une dotation budgétaire peut être remise en cause chaque année. C'est exact. Mais on ne voit pas pourquoi une taxe affectée serait un gage de pérennité supplémentaire, quand on sait que le Gouvernement, pour ne prendre qu'un exemple, propose de supprimer complètement, dans le présent projet de loi, la fraction du prélèvement social de 2 % qu'il avait attribué à la CNAMTS en compensation du financement de la couverture maladie universelle que nous avons votée au mois de juin dernier !
Vous voyez bien qu'une taxe que nous avons affectée à la CNAMTS à grand renfort de trompettes peut changer d'affectation moins de six mois plus tard ! Chère madame le secrétaire d'Etat, l'affectation d'une taxe n'est donc pas un gage de pérennité !
Quatrièmement, ce mécanisme est complexe et sera difficile à mettre en oeuvre par les entreprises - et, je le crois, par l'ACOSS d'ailleurs - chargées de calculer une « CSG flottante » pour leurs salariés de 1 à 1,4 SMIC. Des mécanismes pervers se feront jour : une entreprise pourra, par exemple, choisir de rémunérer au SMIC un salarié sur onze mois de l'année, ce qui permettra à ce salarié de bénéficier de la réduction dégressive à taux plein, puis de lui verser un douzième mois particulièrement « substantiel », équivalant, par exemple, à deux ou trois mois de salaire. Nous voyons bien que ce système est pervers.
Je rappelle aussi que les particuliers employeurs sont au nombre de 1 200 000 en France. Que deviennent les mécanismes de simplification du « chèque-emploi service », très bonne réforme - je ne sais plus qui l'a mise en place - dont nous demandions tous l'extension ? Je souhaite que l'on m'explique qui s'occupera de la CSG dans les mécanismes de simplification du chèque emploi-service, et comment. Que le chèque emploi-service ne fonctionne plus serait un recul considérable et un encouragement formidable au retour du travail au noir. Enfin, vous prendrez vos responsabilités... (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Cinquièmement, il y a le cas des « pluriactifs », de ceux qui exercent une activité salariée et une activité non salariée ou de ceux qui cumulent deux activités non salariées. Ils pourront maximiser l'avantage de réduction de CSG, alors même que leurs revenus seraient supérieurs à 1,4 SMIC.
Madame le secrétaire d'Etat, les décrets d'application pourront prévoir toutes les « béquilles » possibles - j'ai cru comprendre, en écoutant la réponse de Mme Guigou, hier, que c'était ce qu'elle prévoyait -, ce risque ne peut être écarté, à moins, évidemment, de croiser de manière systématique les informations des organismes de sécurité sociale et celles des services fiscaux. Dans ce cas, excusez-moi « l'usine à gaz » ne serait plus très éloignée de Big brother ... Saisir les inspecteurs des services fiscaux du cas de personnes percevant 1,4 SMIC serait d'un ridicule achevé !
Sixièmement, le mécanisme introduit une progressivité dans le financement de la sécurité sociale, progressivité limitée, de surcroît, à un seul type de revenus : les revenus d'activité et à une seule fraction de ces revenus. La CSG sur les revenus d'activité sera à la fois progressive, jusqu'à 1,4 SMIC, puis proportionnelle.
De ce fait, se posent, septièmement, des problèmes de constitutionnalité, dont nous ne débattrons pas maintenant puisque nous déposerons, bien évidemment, un recours devant le Conseil constitutionnel, en raison des « pluriactifs » et de la progressivité du financement de la protection sociale, alors que la CSG était jusqu'alors une imposition quasi proportionnelle.
Nous ne sommes pas sûrs que cette progressivité soit constitutionnelle s'agissant d'une imposition affectée exclusivement à la sécurité sociale. La Cour de justice des Communautés européennes, le 15 février 2000, a bien rappelé, à propos de la décision sur les travailleurs frontaliers, que la CSG n'était pas un impôt et qu'elle ne pouvait pas être prélevée sur le territoire où habitent les travailleurs qui exercent leur activité dans le pays voisin.
De plus, le Conseil constitutionnel devra se prononcer sur une imposition à la fois progressive jusqu'à 1,4 SMIC, puis proportionnelle au-delà. Or, dans sa décision sur la loi de finances pour 1991, il a indiqué qu'il appartenait au législateur « de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives des redevables ».
On peut faire toutes les interprétations que l'on souhaite de cette décision : elle tend quand même à montrer qu'une imposition est soit proportionnelle, soit progressive, mais ne peut pas être les deux à la fois ! Or la CSG arrive à être à la fois proportionnelle et progressive.
Il serait facile de nous rétorquer qu'en nous opposant à la suppression de la CSG pour les bas salaires, nous refusons en quelque sorte à ceux-ci un supplément de pouvoir d'achat...
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Charles Descours, rapporteur. Pas de chance ! Les membres du groupe communiste républicain et citoyen ne pourront pas nous tenir ces propos !
En effet, deux raisons motivent notre position.
Il s'agit, tout d'abord, de favoriser les revenus d'activité par rapport aux revenus d'inactivité, et sur ce point existe un consensus politique ; il s'agit ensuite de corriger les effets pervers de la modération salariale exigée en contre-partie de l'application des 35 heures, modération salariale que les syndicats de salariés dénoncent aujourd'hui.
Aussi, la commission des finances, avec laquelle la commission des affaires sociales a travaillé en étroite collaboration - j'ai notamment travaillé avec Philippe Marini, son rapporteur général, et Jacques Oudin, rapporteur pour avis - proposera, dans le cadre du seul texte permettant de mettre en place un dispositif « de justice fiscale », c'est-à-dire le projet de loi de finances, un mécanisme de crédit d'impôt prenant en compte l'ensemble des revenus du foyer fiscal, ainsi que ses charges de famille. Ce dispositif sera plus juste et plus équitable que celui que propose le Gouvernement.
Je remercie Mme la ministre des affaires sociales de m'avoir expliqué, hier, que le Gouvernement avait hésité entre le crédit d'impôt, que nous proposons, et la simple détaxation, qui a été retenue. Je ne saurais trop recommander au Gouvernement, lorsqu'il hésite, de nous écouter ; ainsi, s'agissant de la CMU, nous ne serions pas dans les ennuis que nous connaissons actuellement si le Gouvernement nous avait écoutés !
Mme Guigou m'a donc indiqué que le mécanisme de crédit d'impôt n'avait pas été retenu parce qu'il serait très lourd à gérer ; comme si la CSG ne l'était pas ! En somme, un dispositif de « justice fiscale » est « très lourd à gérer » quand les services fiscaux doivent se mettre à la tâche, alors qu'il est « simple à gérer » quand ce sont les entreprises et les organismes de recouvrement qui devront l'appliquer...
Mme la ministre a précisé ensuite que la ristourne dégressive avait l'avantage d'entrer en vigueur dès le 1er janvier, à la différence du crédit d'impôt... Quel aveu ! Je comprends bien : il s'agit d'un affichage politique avant les élections municipales ; c'est simple, mais autant le dire !
Toutefois, rien n'empêche d'imaginer, dans le cas du crédit d'impôt, un mécanisme d'acomptes trimestriels sur la base des revenus 1999, qui serait ensuite régularisé l'année suivante...
Je vous propose donc, mes chers collègues, de supprimer cet article 2.
Je tiens à remercier la commission des finances, qui, la semaine prochaine, introduira dans le projet de loi de finances, comme Philippe Marini l'a annoncé dans la conférence de presse qu'il a tenue il y a deux heures, et ainsi que Jacques Oudin va vous l'expliquer, un mécanisme de crédit d'impôt qui apportera plus de justice, d'équilibre et sera plus facile à gérer sans léser les bas salaires. Je crois vraiment que le Gouvernement aurait intérêt à nous écouter !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 46.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame le secrétaire d'Etat, comme vient de le dire excellemment Charles Descours, la commission des finances juge le mécanisme que vous nous proposez injuste, dangereux, complexe. Elle ne peut donc y être favorable.
Toutefois, ne voulant pas en rester à une attitude négative, elle a examiné ce matin un mécanisme de crédit d'impôt qui pourrait se substituer au mécanisme contenu dans le projet de loi.
Le système que nous proposerons au Sénat d'adopter la semaine prochaine ne sort pas de notre pure imagination, puisqu'il est utilisé dans d'autres pays.
Pour l'instant, nous vous proposons, mes chers collègues, de suivre la commission des affaires sociales et la commission des finances en supprimant l'article 2.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour présenter l'amendement n° 77.
M. Guy Fischer. Cet amendement peut évidemment quelque peu surprendre dans la mesure où il propose de modifier la teneur de l'article en renonçant à la mise en oeuvre de la ristourne dégressive sur les salaires les plus faibles au profit de l'exemption d'imposition au titre de la contribution sociale généralisée pour l'ensemble des salaires. Cet amendement vise en fait à alléger la CSG sur l'ensemble des salaires et des revenus d'activité. Mais, permettez-moi, mes chers collègues, de m'expliquer davantage.
Aux termes de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, les salariés bénéficient d'un abattement de 5 % pour frais professionnels, assez proche dans son fondement de l'abattement équivalent pratiqué en matière d'impôt sur le revenu.
Dans un autre contexte, d'aucuns auraient estimé incongru de maintenir cette éviction d'assiette mais, dans le contexte de dynamisme relativement important des recettes de la CSG que nous connaissons, il ne nous semble pas, eu égard à la transparence des revenus considérés, qu'une telle mesure soit dénuée de portée.
Nous nous sommes trouvés en face de la question suivante que, assez étonnamment d'ailleurs, on retrouve dans le rapport de notre collègue M. Descours : la mesure préconisée par l'article 2 ne va-t-elle pas conduire, sous des dehors a priori sympathiques - alléger la contrainte fiscale et sociale pesant sur les revenus les plus modestes - à remplacer la « trappe à inégalités » par la « trappe à bas salaires » ?
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il a tout compris !
M. Charles Descours, rapporteur. Il faut voter notre amendement !
M. Guy Fischer. Nous nous étions étonnés de ce que ni la commission des affaires sociales, ni la commission des finances ne proposent d'autre mesure que la suppression pure et simple de l'article.
Nous savons maintenant que la commission des finances nous proposera, la semaine prochaine, la création d'un mécanisme de crédit d'impôt. Mais, mes chers collègues, quand on entend qu'il s'appliquerait aux bas salaires, aux plus défavorisés, à ceux-là même qui ne sont pas imposables sur le revenu, on croit rêver !
Il y a d'ailleurs une relative symétrie entre la mise en oeuvre des dispositions de l'article et les mesures déjà anciennes, que vous vous gardez, bien évidemment, de remettre en question, d'allégement de cotisations sociales sur les bas salaires, qui font aujourd'hui partie intégrante des missions confiées au FOREC.
Cette symétrie ne nous semble pas correspondre parfaitement aux enjeux du moment. En effet, alléger le poids des prélèvements fiscaux et sociaux assis sur les salaires les plus faibles est le meilleur moyen d'ouvrir assez largement la trappe à bas salaires, ce que n'hésiteront pas à faire, de toute évidence, un certain nombre de chefs d'entreprise. Des études récentes montrent d'ailleurs que la France est en train de dépasser les Etats-Unis, qu'il s'agisse de la précarité, du temps partiel ou du niveau des rémunérations. Je vois là quelque matière à inquiétude.
M. Charles Descours, rapporteur. Eh oui !
M. Guy Fischer. Mais vous oubliez un peu vite, mes chers collègues, que c'est vous-mêmes qui avez ouvert cette trappe dans le passé en faisant par exemple voter, au cours de l'été 1995, une réduction des cotisations sociales des entreprises et la hausse du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée.
M. Charles Descours, rapporteur. Le Gouvernement actuel n'est pas revenu sur ces dispositions.
M. Guy Fischer. Je parle de ce que vous avez fait, et vous savez très bien que nous n'avons jamais été d'accord sur l'institution de la CSG. Nous n'allons pas refaire les débats d'il y a dix ans !
Vous oubliez également un peu vite - mais cela ne peut manquer de pousser un peu plus la contradiction - que le vote de l'article 2 aurait l'avantage de permettre aux entreprises où les salaires sont les plus bas de se dégager à bon compte - celui de l'argent public - de la nécessité d'augmenter la rémunération directe de leurs employés.
M. Charles Descours, rapporteur. Justement on veut le supprimer !
M. Guy Fischer. Si l'on devait pousser la logique à son terme, on pourrait d'ailleurs se demander si les salariés ne devraient pas être informés de la réalité des allégements de cotisations dont bénéficie leur employeur en un temps où la modération salariale règne assez largement dans la négociation collective.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ils le savent !
M. Guy Fischer. Pour notre part, nous estimons que l'on peut baisser et réduire le poids des contributions sociales acquittées par les salariés, mais qu'il faut le faire en ayant le souci de mettre plus largement à contribution ceux qui, encore aujourd'hui, bénéficient des effets de l'application des taux proportionnels de la CSG.
M. le président. Mon cher collègue, il faut conclure maintenant !
M. Guy Fischer. Excusez-moi de m'être expliqué un peu longuement, monsieur le président, mais nous sommes au coeur même du débat. Par la suite, nous serons plus brefs.
Je conclus.
Tel est donc le sens de cet amendement, qui, tout en réduisant l'assiette de la contribution prélevée sur les salaires, vise à doubler le taux de prélèvement affectant les revenus du patrimoine et les revenus de placement.
M. le président. La parole est à M. Muzeau, pour présenter l'amendement n° 78.
M. Roland Muzeau. Ce second amendement portant sur l'article 2 défend les mêmes enjeux que ceux que nous venons d'exposer.
Il s'agit, là encore, de modifier le champ d'application de la mesure prévue par l'article, laquelle tend à créer une forme de ristourne dégressive sur le montant de la contribution sociale généralisée en portant son seuil d'application à 1,8 fois le SMIC.
La critique à laquelle nous pouvons évidemment nous attendre est déjà présente dans le rapport de notre collègue Charles Descours : modifier le seuil d'application de la ristourne ne fait qu'ouvrir un peu plus la « trappe à bas salaires ».
Mais la question véritablement pertinente que soulève l'article 2 est bel et bien celle de l'actuel niveau de rémunérations dans notre pays, singulièrement dans le secteur marchand.
Ainsi, si le salaire moyen est assez nettement supérieur à 11 000 francs, le salaire de la majorité des salariés est aujourd'hui inférieur à 9 000 francs bruts, en tout cas pour ceux des salariés qui exercent leur activité à temps plein.
Si nous nous en tenions à l'orientation fixée par le présent projet de loi, la mesure s'appliquerait donc à ce salaire médian et non au salaire moyen.
La réflexion que nous nous devons de mener sur la question de la contribution sociale généralisée et de son application aux revenus d'activité, singulièrement aux salaires, porte au demeurant sur une question plus générale que le débat ne le laisse aujourd'hui présager.
Cette question, c'est celle de savoir ce qui doit effectivement être mis à contribution pour financer la protection sociale, après des années d'accroissement des prélèvements sur les revenus d'activité et la persistance d'une moindre contribution des revenus financiers, plus encore de ceux des entreprises.
Tel est le sens de cet amendement, qui, à l'instar du précédent, lie baisse de la CSG sur les salaires et accroissement de la contribution sur les revenus du patrimoine et les revenus de placement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 77 et 78 ?
M. Charles Descours, rapporteur. J'ai relevé, dans les propos de nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen, tous les reproches qu'ils adressaient à l'article 2 tel qu'il nous provient de l'Assemblée nationale. Je ne comprends pas, dès lors, pourquoi ils ne soutiennent pas notre amendement...
En tout état de cause, la commission émet un avis défavorable sur leurs amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 2 et 46 ainsi que sur les amendements n°s 77 et 78 ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces quatre amendements.
Bien sûr, je comprends la proposition du groupe communiste républicain et citoyen tardant à étendre la portée de la mesure jusqu'à 1,8 SMIC, car il est évident qu'un salaire représentant un peu plus de 1,4 SMIC reste un salaire modeste. Mais je dois quand même faire valoir des arguments de coût et de faisabilité.
La mesure qui a été adoptée par l'Assemblée nationale aura un coût de 27 milliards de francs en plein régime, c'est-à-dire à partir de 2003. C'est un effort important, dont nous savons que l'Etat pourra assumer la compensation intégrale vis-à-vis des organismes de sécurité sociale. Les prévisions ne portent pas au-delà.
Par conséquent, dans l'immédiat, je ne peux que m'opposer à cet amendement, même si nous pouvons partager l'affirmation selon laquelle les salaires bas et moyens ne s'arrêtent pas à 1,4 SMIC.
En ce qui concerne le passage du taux forfaitaire d'abattement de l'assiette de la CSG pour frais professionnels de 5 % à 10 %, mesure qui serait financée par le passage de 7 % à 15 % du taux de la même contribution portant sur les revenus du patrimoine et sur les produits de placements, tout en partageant, là encore, monsieur Fischer, monsieur Muzeau, votre souhait d'alléger les prélèvements sociaux sur les bas salaires, je dois vous indiquer que votre proposition n'aurait pas l'effet recherché.
En effet, elle vise à alléger les prélèvements sur l'intégralité des rémunérations. Or le taux d'abattement pour frais professionnels est proportionnel : son augmentation serait donc plus favorable aux salaires les plus élevés. La seule mesure appropriée est donc, à l'évidence, celle que prévoit l'article 2 du projet de loi, à savoir la mise en place d'une réduction dégressive de la CSG et de la CRDS sur les revenus d'activité les plus modestes. C'est une mesure à la fois bien ciblée et plus avantageuse que celle qui est proposée.
Le passage à 10 % du taux d'abattement pour frais professionnels n'augmenterait que de 200 francs le pouvoirs d'achat mensuel de la personne payée au SMIC, alors que la réduction dégressive, au terme des trois ans de sa mise en place, l'améliorera de 540 francs.
En ce qui concerne la proposition de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, je ne crois pas utile de réitérer les explications que Mme Guigou a fournies hier.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 2 et 46.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Ces deux amendements de suppression de l'article 2 appellent évidemment plusieurs observations.
La première est purement formelle : il s'agit de constater, notamment pour ce qui concerne le rapporteur pour avis, l'extrême minceur de l'argumentation.
Notre commission des finances s'enferre en quelque sorte dans une stricte logique comptable de réduction des déficits publics, la légère réduction du poids de la contribution sociale généralisée dans les prélèvements obligatoires étant supprimée et permettant, dans l'absolu, de modifier l'équilibre de la loi de finances.
Nous savons d'ores et déjà que l'article 17 du projet de loi de finances sera largement amendé, ce qui conduira à la suppression de 8 milliards de francs de dépenses au titre de la compensation de la ristourne dégressive de la CSG.
Quant à la commission des affaires sociales, elle invoque, à l'appui de sa proposition de suppression, la construction, dans le projet de loi, d'une sorte de « tuyauterie monstrueuse » pour le financement de la protection sociale.
Il est vrai que la majorité sénatoriale a acquis, notamment entre 1993 et 1997, une forte expérience et une remarquable compétence en cette matière.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Nous sommes de bons mécanos !
M. Guy Fischer. Dois-je rappeler qu'en 1993 le fonds de solidaroté vieillesse, au motif qu'il était destiné à prendre en charge des prestations ressortissant à la solidarité nationale, avait été alimenté par un prélèvement sur les droits perçus sur les alcools, prélèvement qui défiait toute logique ?
M. Charles Descours, rapporteur. Il vaut mieux le faire pour le fonds de solidarité vieillesse que pour les 35 heures !
M. Guy Fischer. Dois-je aussi rappeler la fabrication, cette même année, d'une CSG à plusieurs étages - certains fiscalement déductibles et d'autres non - manquant pour le moins de lisibilité pour les premiers intéressés ?
Dois-je encore rappeler qu'en 1995, dans le cadre d'une proposition de loi portant mesures urgentes pour l'emploi et la sécurité sociale, de nombreuses dispositions favorables aux entreprises avaient été adoptées et que l'on avait procédé à la majoration du taux normal de la TVA pour les financer ?
Dois-je enfin souligner que, lorsque la loi quinquennale pour l'emploi a organisé la mise en place de la ristourne dégressive sur les bas salaires, la majorité sénatoriale et le gouvernement qu'elle soutenait n'avaient pas trouvé d'autre moyen que celui consistant à diriger le circuit de financement dans le « vase d'expansion » du budget des charges communes, ce qui signifiait que l'on payait ces mesures soit avec des titres de dette publique, soit avec ce que l'on peut appeler de la « monnaie de singe » ?
Les objectifs visés à travers l'article 2 et la méthode qu'il met en oeuvre sont-ils pour autant totalement validés ?
Concédons à notre commission des finances une certaine valeur dans sa position. Cependant, quelques points méritent d'être mis en évidence.
En supprimant l'article 2, vous supprimez aussi l'allégement de la CSG pour les commerçants et artisans, pour les exploitants agricoles qui, dans de nombreuses régions du pays, n'ont pas, malgré leur acharnement et leur travail, de revenus fiscaux très supérieurs à ceux des salariés.
On ne saurait décemment défendre régulièrement les intérêts et les aspirations de ces travailleurs - comment pourrait-on leur dénier cette qualité ? - non salariés et remettre en cause une mesure qui les prend en compte.
De surcroît, comment allez-vous expliquer aux employeurs, qui voient dans la ristourne dégressive de CSG un moyen peu coûteux d'augmenter les salaires sans mettre trop la « main à la poche », que vous souhaitez revenir sur les dispositions de l'article ?
Si vous maintenez cette position courageuse, force sera de constater que votre démarche est proprement idéologique et vise uniquement à pourchasser le financement de la réduction du temps de travail, que vous voyez poindre directement ou indirectement dans l'ensemble des dispositions du projet de loi.
C'est en parfaite connaissance de cause que nous ne vous suivrons pas et que nous ne voterons pas ces deux amendements.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Que ce soit bien clair : le crédit d'impôt n'est évidemment pas réservé aux titulaires de salaires modestes ; ce dispositif intéresse tous les revenus.
Monsieur Fischer, vous essayez de faire peur aux commerçants ou aux artisans en prétendant qu'ils seront exclus du bénéfice de la mesure.
M. Guy Fischer. Je pose des questions !
M. Charles Descours, rapporteur. De deux choses l'une : soit vous êtes de mauvaise foi, ce que je ne peux croire, soit je me suis mal expliqué.
Non, vous pouvez rassurer les commerçants de Vénissieux : ils auront aussi droit au crédit d'impôt.
M. Bernard Cazeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau. L'article 2 vise à permettre aux salariés qui perçoivent les salaires les plus bas - dans la limite de 1,4 fois le SMIC - de bénéficier à leur tour de la redistribution des fruits de la croissance, en leur donnant en quelque sorte l'équivalent d'un treizième mois.
Nous aurions pu, monsieur le rapporteur, être sensibles au principe de l'universalité si vous aviez proposé un système plus performant. Or vous nous proposez de donner un crédit d'impôt à des gens qui n'en paient pas. Il s'agirait, en fait, d'un impôt négatif, ce qui me paraît pour le moins curieux et qui induit, par ailleurs, des conditions d'attribution et de contrôle beaucoup plus complexes que celles qui sont mises en oeuvre actuellement dans le projet de loi par le biais des organismes de recouvrement.
C'est pourquoi nous voterons contre ces amendements identiques.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 2 et 46, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est supprimé et les amendements n°s 77 et 78 n'ont plus d'objet.

Articles additionnels après l'article 3 (priorité)



M. le président.
Je rappelle que, à la demande de la commission, nous allons examiner par priorité les amendements n°s 3 et 106.
Par amendement n° 3, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Toute mesure d'exonération de la contribution pour le remboursement de la dette sociale fait l'objet d'une compensation à due concurrence par le budget de l'Etat.
« Cette compensation s'impute sur le versement de la recette mentionnée au IV de l'article 4 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996.
« II. - La perte de recettes, pour l'Etat, résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° 106, MM. Adnot, Darniche, Donnay, Durand-Chastel, Foy, Seillier et Türk proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le IV de l'article 4 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi rédigé :
« IV. - La caisse verse chaque année au budget général de l'Etat, de l'année 1996 à l'année 2000, une somme de 12,5 milliards de francs, et de l'année 2009 à l'année 2013, une somme de 20 milliards de francs. »
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 3.
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 3 prévoit des exonérations de la contribution pour le remboursement de la dette sociale en faveur des retraités et des chômeurs non imposables. Nous nous réjouissons, bien sûr, de ces mesures pour les intéressés, mais nous constatons que l'Etat les prodigue à bon compte puisqu'il n'entend pas compenser à la caisse d'amortissement de la dette sociale, la CADES, les exonérations de CRDS.
Or la CADES a pour mission de rembourser, depuis 1996 et jusqu'en 2014, la dette sociale, soit 334 milliards de francs, au seul moyen de la CRDS.
Réduire l'assiette de la CRDS conduit à fragiliser le plan de financement de la dette sociale et, à l'évidence, à reporter une nouvelle fois le remboursement de cette dette sur les « générations futures » qui, pour reprendre le titre d'un livre célèbre, pourront aller « cracher sur nos tombes » !
Il est prévu d'accorder, dès 2001, 2,8 milliards de francs d'exonérations. Compte tenu de la montée en charge de l'exonération de la CRDS sur les revenus d'activité, que nous venons de supprimer à l'article 2 mais qui pourrait être rétablie par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, le coût est de 4,1 milliards de francs en 2003. Cumulées sur l'ensemble de la période, ces exonérations - Philippe Adnot l'a bien montré hier - représentent 50 à 60 milliards de francs.
Pour ces raisons, la commission des affaires sociales propose, par analogie avec l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, qui pose le principe général de compensation par le budget général des exonérations de cotisations de sécurité sociale - et le Sénat avait joué un grand rôle dans l'édiction de ce principe -, d'instituer un principe général de compensation des exonérations de CRDS.
Cette compensation est possible, cher collègue Fischer, sans « tuyauterie » supplémentaire.
En effet, elle peut aisément s'imputer à due concurrence sur les 12,5 milliards de francs que verse chaque année la CADES au budget général et qui constituent une recette non fiscale de ce même budget. Ce versement, opéré depuis 1996 et jusqu'en 2009, est lié, sans qu'aucune disposition juridique le précise expressément, à la « reprise de la dette » de 110 milliards de francs qu'avait financée l'Etat au titre des déficits d'avant 1994.
M. le président. La parole est à M. Adnot, pour présenter l'amendement n° 106.
M. Philippe Adnot. Madame la secrétaire d'Etat, l'année dernière, je vous avais posé une question sur le profil de remboursement de la dette de la CADES ; vous ne m'aviez pas fait l'honneur d'une réponse. Cette année, je ne vous ai pas posé de question, mais j'ai décrit l'impasse dans laquelle vous allez vous trouver ; vous n'avez pas, là non plus, daigné me fournir d'explications.
Vous vous trouvez exactement dans la situation d'une entreprise en règlement judiciaire qui privilégierait le remboursement de l'un des créanciers.
La CADES doit de l'argent à l'Etat, entre autres. Vous vous servez intégralement. Le reste, éventuellement, suffira peut-être, un jour, à rembourser les autres créanciers.
Voici donc ce que je vous propose par cet amendement : laissez d'abord la CADES rembourser la dette qui porte intérêt, prenez ensuite le reste, puisque vous êtes certaine qu'il y aura suffisamment d'argent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 106 ?
M. Charles Descours, rapporteur. Je souhaiterais entendre l'avis du Gouvernement, qui, depuis deux ans, semble avoir du mal à répondre sur ce sujet.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 3 et 106 ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 3 tend à poser un principe général de compensation, par le budget général, des mesures d'exonération de la CRDS.
Une telle disposition ne nous paraît pas nécessaire. En effet, les projections dont nous disposons, qui sont visiblement différentes des vôtres, montrent que, dans les hypothèses centrales de taux d'intérêt et de croissance, la CADES est en mesure d'assurer le remboursement de la dette bien avant 2014, en dépit des exonérations de la CRDS proposées initialement par le Gouvernement. Il n'y a donc pas lieu de compenser la perte de recettes résultant de ces dispositions.
L'amendement n° 106 a pour objet de supprimer le versement de la CADES à l'Etat entre 2001 et 2009, et de le reporter sur la période 2009-2013, afin que ce versement n'intervienne qu'après le remboursement de la dette contractée par la CADES auprès des organismes financiers.
Par cet amendement, monsieur le sénateur, vous faites peser, me semble-t-il, une certaine suspicion sur la capacité de la CADES à honorer ses engagements. Comme je viens de le dire, les projections dont nous disposons montrent que, dans les hypothèses centrales de taux d'intérêt et de croissance, la CADES est en mesure d'assurer le remboursement de la dette avant janvier 2014.
Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de modifier les mécanismes de refinancement de la dette ni les engagements de la CADES à l'égard du budget de l'Etat.
Je m'oppose donc à votre amendement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, je voudrais savoir si les projections auxquelles vous venez de faire allusion tiennent compte des 60 milliards de francs d'exonération de la CRDS...
M. Christian de la Malène. C'est intéressant !
M. Jean Chérioux. Oui, il faut répondre !
M. Charles Descours, rapporteur. J'attends la réponse de Mme le secrétaire d'Etat !
M. le président. Elle n'est pas obligée de répondre !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Vous venez de faire référence à deux reprises, madame le secrétaire d'Etat, aux projections dont vous disposiez.
M. Philippe Adnot. Quelles sont-elles ?
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Peut-être m'avez-vous entendu hier poser, au nom de la commission des finances, des questions au Gouvernement sur la CADES. Or je n'ai pas reçu de réponse.
La commission des affaires sociales, pour sa part, n'a aucune projection. D'ailleurs, personne, dans cet hémicycle, n'en a ! Avouez qu'il est pour le moins surprenant que le Parlement n'ait pas d'informations financières sur les capacités de la CADES : et dont je suis membre du comité de surveillance, après en avoir été le président. Vous affirmez que nous les détenons. Pas que je sache !
Par conséquent, communiquez-nous ces projections, madame le secrétaire d'Etat, et nous vous croirons sur chiffres.
M. Jean Chérioux. Nous attendons ! Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je comprends, monsieur le rapporteur pour avis, que vous vous mettiez en colère. Cependant, toutes les informations utiles ont été données aux membres du comité de surveillance sur les perspectives financières de la CADES.
M. Jean Delaneau, président de la commissoin des affaires sociales. C'est faux !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. On ne les a pas !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Que je sache, vous en faites partie ! Vous devez donc avoir les mêmes informations que les nôtres : les marges de manoeuvre sont utilisées et les perspectives sont bonnes et équilibrées. Ces projections ont été réalisées en tenant compte du prélèvement de 60 milliards de francs.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous le contestons !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ce sont des phrases, pas des chiffres !
M. Jean Chérioux. Il n'y a pas beaucoup de chiffres dans tout ça !
M. Christian de la Malène. On aimerait bien avoir quelques chiffres !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
M. Bernard Cazeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Notre groupe votera contre cet amendement.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Il est évident que nous ne pouvons souscrire à la philosophie qui a été développée. Nous voterons donc contre ces deux amendements. M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je voterai, bien évidemment, l'amendement de la commission.
Madame le secrétaire d'Etat, je suis simple parlementaire et je ne fais pas partie du comité de surveillance de la CADES. Je sais que M. Oudin tient parfaitement sa place, et ce qu'il nous a dit ne fait que confirmer mes présomptions. Mais, pour ma part, je m'en tiens aux documents qui sont communiqués au Parlement.
Or, à l'annexe F du projet de loi de finances pour 2001, figurent les comptes de résultats prévisionnels de la CADES. Madame le secrétaire d'Etat, je constate simplement que le résultat, qui se traduisait par une diminution de la dette en 2000, s'élevait à 5,7 milliards de francs, et qu'il est ramené, en 2001, à 4,5 milliards, alors que n'a pas encore été voté le passage de 1,3 à 1,4 SMIC. Il sera donc certainement de 4 milliards de francs.
Je sais, par ailleurs, que les taux d'intérêt n'ont pas tendance à diminuer.
Par conséquent, ce que nous disait M. Oudin, rapporteur pour avis, n'est pas du tout démenti par vos propres documents. Si vous voulez nous convaincre, donnez-nous au moins des simulations et non pas des documents incomplets.
M. Jean Chérioux. Nous nageons dans le flou !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ou vous naviguez à vue, ou vous avez les chiffres ! M. Philippe Adnot. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Adnot.
M. Philippe Adnot. Madame la secrétaire d'Etat, il est quand même un peu trop facile de nous répondre que vos projections sont bonnes ! On ne peut pas se contenter de cette affirmation. Les chiffres que j'ai cités sont ceux de la CADES ; M. Fréville vient de les rappeler.
L'année dernière, les recettes étaient de 28,7 milliards de francs, contre 28 milliards de francs cette année. On observe donc non pas une augmentation, mais une diminution des recettes. Vous êtes dans une impasse ! Votre affirmation n'est pas suffisante.
J'ajouterai que 16 % environ de la dette contractée par la CADES est en dollars : 16 % de 209 milliards de francs, cela représente quelques milliards de francs, qui, d'un seul coup, viennent de bénéficier d'une certaine revalorisation !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement n° 3 est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3, et l'amendement n° 106 n'a plus d'objet.
Nous en revenons à l'article 3.

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - L'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifié :
« 1° Le deuxième alinéa du I est ainsi rédigé :
« Cette contribution est assise sur les revenus visés et dans les conditions prévues aux articles L. 136-2 à L. 136-4 et au III de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale. » ;
« 2° Le dernier alinéa du I et les 1° à 6° du II sont abrogés ;
« 3° Dans la première phrase du premier alinéa du III, la référence : "6° " est supprimée. »
Sur l'article, la parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. J'avais prévu d'intervenir pour demander à Mme le secrétaire d'Etat de nous donner quelques éclaircissements sur la façon dont elle procéderait cette année pour compenser les exonérations prévues dans le présent projet de loi en matière de CRDS. J'ai donc écouté avec intérêt les interpellations de mes collègues à cet égard et, avec une certaine ironie, la réponse de Mme le secrétaire d'Etat.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est navrant !
M. Dominique Leclerc. Bien évidemment, nous sommes tous inquiets. La CADES avait été mise en place en 1993 pour financer, au travers de la CRDS, l'ensemble de la dette de la sécurité sociale, Toutefois, au-delà de cette première intention, l'objectif premier était d'assainir la situation financière du régime général, afin de faire face à la fameuse période 2005-2010 concernant les retraites.
Je note, à cette occasion, l'immobilisme coupable du Gouvernement et son incapacité à engager des réformes en la matière ces dernières années.
Madame le secrétaire d'Etat, ce débat peut-il avoir lieu aujourd'hui, alors que l'on s'accorde à considérer la présence de cet article 3 dans le présent projet de loi comme étant inconstitutionnelle.
Sur tous ces thèmes, nous sommes en droit d'attendre des informations un peu plus précises que des allusions à des documents internes, dont nous aimerions bien avoir communication. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 3 (suite)



M. le président.
Par amendement n° 79, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le cinquième alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la variation de la masse salariale dans la valeur ajoutée globale. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, par souci de cohérence et de parallélisme des formes et des objets, je souhaite défendre de manière conjointe les trois amendements que nous avons déposés pour insérer des articles additionnels après l'article 3.
M. le président. J'appelle donc également les amendements n°s 80 et 81, présentés par MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 80 tend à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le taux de ces cotisations est modulé pour chaque entreprise selon la variation de la masse salariale dans la valeur ajoutée globale. »
L'amendement n° 81 vise à insérer, après l'article 3, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le troisième alinéa (1°) de l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale, après les mots : "des cotisations proportionnelles à l'ensemble des rémunérations ou gains perçus par les salariés des professions non agricoles", sont insérés les mots : ", modulées pour chaque entreprise selon la variation de sa masse salariale dans la valeur ajoutée globale". »
Veuillez poursuivre, monsieur Fischer.
M. Guy Fischer. Nous nous interrogeons, depuis le début de l'examen de ce projet de loi, sur la question du financement de la protection sociale et sur le problème posé par la correction aux règles universelles de financement dont nous débattons assez régulièrement avec l'ensemble des articles de la présente loi relatifs aux recettes de la protection sociale.
Nous avons déjà souligné que la commission des affaires sociales, si elle demeure idéologiquement défavorable à la mise en oeuvre des moyens du FOREC pour le financement de la réduction négociée du temps de travail, ne souffle mot sur la question, pourtant tout aussi importante, du financement de l'allégement des cotisations sociales assises sur les bas salaires, dont le coût est estimé à plus de 40 milliards de francs.
D'ailleurs, si la commission voulait pousser jusqu'au bout la logique du raisonnement, elle se demanderait s'il ne serait pas bienvenu de s'interroger sur l'opportunité de laisser en l'état une « réforme » des cotisations sociales limitée à un simple allègement de cotisations et s'apparentant beaucoup plus à une prime au développement du travail sous-payé qu'à une véritable réforme.
C'est ce que nous vous proposons en partie de faire avec nos trois amendements visant à modifier quelques-unes des données actuelles de la situation.
Premier aspect : s'agissant des cotisations sociales, on observera que ne sont aujourd'hui concernées par des mesures de correction que les cotisations vieillesse, maladie et famille, celles-ci ayant d'ailleurs été largement fiscalisées en ce qui concerne tant les ressources que les prestations. Ce sont donc ces trois branches de la protection sociale que nous visons directement avec nos amendements, attendu que, s'agissant de la branche accidents du travail, la « modulation » se fait par essence dans l'amélioration de la sécurité au travail dans chaque entreprise. Au demeurant, le MEDEF vient d'anoncer qu'il se proposait de supprimer cette branche de la sécurité sociale. Il y a donc lieu d'être pour le moins perplexe !
Comme nous l'avons déjà fait dans le passé, nous proposons de procéder à une modulation de cotisations sociales fondées sur l'évolution de l'utilisation de la valeur ajoutée créée, rendant par là même aux cotisations sociales leur sens premier, celui d'un prélèvement sur les richesses créées au bénéfice de la satisfaction de besoins collectifs.
L'assiette de calcul des cotisations sociales ne subirait donc aucune modification sensible puisqu'elle resterait fondée sur les salaires et rémunérations, mais elle serait susceptible de correction au travers de l'appréciation des politiques salariales au regard de l'affectation de la valeur ajoutée globale.
Plus une entreprise créerait d'emplois et sortirait des ornières de la modération salariale et de la maîtrise du coût salarial global, plus sa contribution au financement de la protection sociale serait soumise à une réfaction.
A l'inverse, toute stratégie salariale tendant à la réduction de la part des salaires dans la valeur ajoutée serait pénalisée et source d'accroissement de la contribution de l'entreprise.
Tel est le sens de ces amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la comission sur les amendements n°s 79, 80 et 81 ?
M. Charles Descours, rapporteur. Je souhaite revenir un instant sur le problème de la CADES !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Moi aussi !
M. Charles Descours, rapporteur. Je rappelle que le Parlement a droit aux mêmes informations que le Gouvernement.
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Charles Descours, rapporteur. Apparemment, ce n'est pas le cas actuellement ! Avec Jacques Oudin, rapporteur pour avis, nous ne laisserons pas tomber cette affaire. Ce sont les droits du Parlement qui sont en jeu !
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Charles Descours. Je reviens aux amendements qu'a défendus notre collègue Guy Fischer, disant qu'ils avaient pour objet de parvenir à une réelle réforme des cotisations patronales.
Monsieur Fischer, c'est la deuxième fois depuis le début de la discussion des articles que je suis d'accord avec vous, preuve que, comme nous le disons, l'institution du FOREC n'est pas une réforme des cotisations patronales. Sur cette affaire, nous sommes donc d'accord, ...
M. Guy Fischer. Il y a quand même de profondes différences entre nous!
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ce sont les petits rapprochements qui font les grandes coalitions !
M. Charles Descours, rapporteur. ... mais, avant de donner l'avis de la commission, je souhaiterais entendre celui du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Cela tombe bien, monsieur Descours, moi aussi, je voulais revenir sur la question de la CADES ! (Ah ! sur les travées du RPR.)
M. Guy Fischer. Il faut leur expliquer plusieurs fois !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous semblez, en effet, avoir des difficultés à comprendre.
Je reviens donc sur la question, en espérant que, cette fois, vous comprendrez sur quels chiffres nous nous appuyons.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il nous faudrait une suspension de séance.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vous le confirme, dans l'hypothèse centrale utilisée par la CADES, c'est-à-dire une croissance de la CRDS de 3,5 % par an en valeur, à 6 % de taux d'intérêt, la caisse rembourse sa dette avant 2014. On me précise que cette hypothèse centrale est prudente et vérifiable. Vous vous en doutez bien, d'ailleurs. Ces chiffres sont publics ; ils sont suivis par les agences de notation et les établissemens financiers créanciers de la CADES.
Par ailleurs, toutes ces informations sur les perspectives financières de la CADES ont été fournies aux membres du comité de surveillance. Je vous demande donc de vous reporter aux documents qui vous ont été remis.
Les marges de manoeuvre utilisées assurent une perspective de remboursement de la dette avant 2014.
M. Jean Chérioux. Après prélèvement ?
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, me permettez-vous de vous interrompre?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur, avec l'autorisation de Mme le secrétaire d'Etat.
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, le comité de surveillance de la CADES ne s'est pas réuni depuis que le projet de loi du Gouvernement proposant des exonérations de CRDS a été publié.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est bien là le problème !
M. Charles Descours, rapporteur. Il n'est donc pas question de dire que nous, membres du comité de surveillance, sommes en mesure de savoir que les prévisions que vous nous donnez intègrent les 60 milliards de francs d'exonérations. Ce n'est pas vrai !
Pour ma part, je réaffirme - mais on ne va pas rester sur ce problème jusqu'à minuit ! - que les exonérations ici proposées ne sont pas prises en compte dans les projections qui ont été faites. En tout cas, le comité de surveillance ne peut pas être au courant, puisqu'il ne s'est pas réuni depuis !
M. Christian de La Malène. Ce n'est pas sérieux !
M. Jean Chérioux. Plus la baisse de l'euro !
M. Christian de La Malène. Il faut suspendre la séance ! Qu'est-ce que c'est que ce travail ?
M. Jean Deleveau, président de la commission des affaires sociales. Non, cela n'avancera à rien !
M. le président. Veuillez poursuivre, madame le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Tout cela est un peu confus, monsieur le président.
Mais je me tourne maintenant vers l'auteur de ces trois amendements.
Monsieur Fischer, je sais l'importance qu'a pour vous cette proposition, qui a déjà été formulée en première lecture à l'Assemblée nationale et qui a fait l'objet d'une longue discussion. Cependant, je ne peux toujours pas l'accepter, pour les mêmes raisons que celles qui avaient été alors invoquées.
Cela étant, le Gouvernement s'est déjà engagé dans la voie que vous préconisez, monsieur Fischer. Vous en avez conscience et vous nous en donnez acte. Un élargissement de l'assiette du prélèvement social a été réalisé dans le cadre du financement des 35 heures. Ce financement pèse désormais moins qu'auparavant sur les salaires. L'allégement sur les bas et moyens salaires institué par la deuxième loi sur la réduction du temps de travail profite ainsi aux salaires atteignant jusqu'à 1,8 fois le montant du SMIC, alors que le dispositif précédent de ristourne sur les bas salaires ne concernait que les salaires à concurrence de 1,3 fois le SMIC. La progression est donc nette.
Cette réforme a été notamment financée, vous le savez, par une contribution sociale sur les bénéfices des sociétés et sur la taxe générale sur les activités polluantes, prélèvements qui pèsent sur les entreprises. Elle sera poursuivie cette année via l'extension de l'assiette de la TGAP dans le cadre du collectif budgétaire de fin d'année.
En outre, la modulation des charges sociales en fonction de la part des salaires dans la valeur ajoutée a été écartée l'an dernier, parce qu'elle n'avait pas un effet positif réel sur l'emploi. Plusieurs travaux avaient abordé cette question : le dernier en date étant le rapport établi par M. Malinvaud sur la réforme de l'assiette des cotisations patronales. Tous ont mis en évidence d'importants effets de transferts de charges entre secteurs jouant, en définitive, au détriment de l'emploi général. Or, vous le savez, l'objectif principal de ce gouvernement, sa priorité essentielle est d'agir pour l'emploi. Ces travaux soulignaient également l'effet beaucoup plus élevé sur l'emploi d'un allègement des charges bénéficiant prioritairement aux bas salaires.
J'ajoute enfin que le dispositif que vous proposez serait assez difficile à appliquer, les entreprises devant s'adapter à la fluctuation des taux de cotisations.
Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement ne peut être favorable à ces amendements et je vous demande donc, monsieur Fischer, de reconsidérer votre proposition.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. J'ai cru comprendre que Mme le secrétaire d'Etat invitait le groupe communiste républicain et citoyen à retirer ses amendements...
M. Guy Fischer. Ils sont maintenus !
M. Charles Descours, rapporteur. Dans ces conditions, je vais aider le Gouvernement en m'y déclarant également défavorable. (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 80, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 81, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis. - I. - Le V de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998) est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette indemnité de cessation d'activité est exclue de l'assiette des cotisations de sécurité sociale. »
« II. - Le III de l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 7° L'indemnité de cessation d'activité visée au V de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998). » - (Adopté.)

Article 3 ter



M. le président.
« Art. 3 ter. - I. - Le premier alinéa du III de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le produit de cette contribution est versé à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale sans déduction d'une retenue pour frais d'assiette et de perception. »
« II. - Les articles L. 133-1 et L. 135-5 du code de la sécurité sociale, le III de l'article 1647 du code général des impôts et l'article 8 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 précitée sont abrogés.
« III. - La taxe sur la valeur ajoutée est majorée à due concurrence. »
Par amendement n° 4, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer le II de cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 3 ter , adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouverement ! - vous voyez comme cela me peine - constitue la troisième tentative, après celle de 1998 et de 1999, de supprimer les frais d'assiette et de recouvrement supportés par la sécurité sociale sur le produit de la CSG prélevé sur les revenus du patrimoine.
Par deux fois, le Gouvernement a supprimé cette disposition, votée par l'Assemblée nationale et le Sénat en loi de financement, par le biais d'une disposition figurant dans une loi de finances rectificative. C'est ce que l'on appelle « le respect du Parlement ».
Cependant, l'article adopté par l'Assemblée nationale me semble aller trop loin par rapport au dispositif que nous avions déjà voté dans le passé avant qu'il soit annulé de la manière que je viens de dire.
Cet article tend à supprimer tous les frais d'assiette et de recouvrement perçus par l'Etat. Il supprimerait également les frais d'assiette et de recouvrement supportés par le FSV sur la CSG prélevée sur les revenus d'activité ainsi que les revenus de remplacement et les frais d'assiette et de recouvrement supportés par la CADES sur la CRDS prélevée sur les revenus d'activité et les revenus de remplacement. Or ces frais d'assiette et de recouvrement sont prélevés au bénéfice du régime général. Le « gage » de l'article est ainsi incomplet, puisqu'il s'agit non pas seulement d'une perte de recettes pour l'Etat, mais également d'une perte de recettes pour la sécurité sociale.
Or, tant l'Assemblée nationale que le Sénat demandent une mise à plat des différents dispositifs et une comptabilisation des frais de gestion du versement, par la sécurité sociale, au nom de l'Etat, de différentes prestations, par exemple le RMI.
Nous appelons à cette mise à plat, nous appelons à une « étude d'ensemble », qui pourrait s'appuyer sur les travaux annoncés de la Cour des comptes. D'ailleurs, nous en avons parlé avec le Premier président, M. Joxe.
La commission des affaires sociales préfère, en conséquence, s'en tenir au dispositif traditionnellement adopté par les deux assemblées : la seule suppression des frais d'assiette et de recouvrement de la CSG sur les revenus du patrimoine.
Elle souhaite aussi que le Gouvernement lève le gage ce qui sera ainsi le « gage » de la pérennité de la mesure !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. L'Assemblée nationale a voté un amendement visant à abroger les frais de gestion attachés à diverses opérations de recouvrement. Vous proposez d'en limiter l'objet aux seuls frais de gestion attachés à la CSG sur les revenus du patrimoine. Or, lors du débat à l'Assemblée nationale, Mme Guigou a indiqué qu'il lui semblait nécessaire d'appréhender la totalité de la question des frais de gestion de manière globale. Elle a donc pris l'engagement d'examiner cette question, sous ses différents aspects, avec le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Dans ces conditions, votre amendement ne me paraît pas opportun.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Nous n'avons plus foi dans les ministres !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, le rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je rappelle la procédure : l'Assemblée nationale propose un amendement relatif aux frais de gestion et de recouvrement. Le Gouvernement s'y oppose. Contre l'avis du Gouvernement, l'amendement est voté. Dans le mesure où le Gouvernement était contre cette disposition à l'Assemblée nationale, j'ai pensé qu'il y serait également opposé au Sénat. Or, vous n'y êtes plus défavorable, madame le secrétaire d'Etat.
J'avoue ne pas bien comprendre.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, oui, je m'oppose à cet amendement et je vous demande de le retirer.
M. Charles Descours, rapporteur. Je ne comprends toujours pas !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Dans la mesure où l'Assemblée nationale a voté une remise à plat du dispositif...
M. Charles Descours, rapporteur. Nous aussi !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... et que Mme Guigou a pris l'engagement de satisfaire le Parlement et de revoir la question des frais de gestion de manière globale, je vous demande de retirer cet amendement, faute de quoi j'y serai défavorable.
D'autant que votre amendement est partiel et en deçà non seulement de ce qu'a adopté l'Assemblée nationale, mais aussi de l'engagement de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
M. Yann Gaillard. Qui peut le plus peut le moins !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je rappelle que le Parlement se prononce sur des amendements et non pas sur les intentions des ministres.
En conséquence, madame le secrétaire d'Etat, je maintiens l'amendement n° 4.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 4.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je n'ai pas suivi l'affaire dans ses détails mais, si mes souvernirs sont exacts, l'année dernière, l'Assemblée nationale puis le Sénat avaient adopté un amendement en termes identiques. Donc, en principe le vote était définitif.
M. Charles Descours, rapporteur. Oui !
M. Yves Fréville. Et il a fallu que le Gouvernement revienne, en loi de finances, sur un vote acquis dans les mêmes termes à l'Assemblée nationale et au Sénat. (Marques d'approbation sur les travées du RPR.)
Je pose donc la question à M. le rapporteur : si le texte actuellement en discussion est le même que celui que nous avons voté l'année dernière, nous aurions peut-être intérêt à le voter encore !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il ne faut pas se fier aux engagements du Gouvernement !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Compte tenu des déclarations de Mme le secrétaire d'Etat et des explications que vient de donner M. Fréville, je retire mon amendement n° 4. Nous verrons bien ce que fera le Gouvernement !
M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'article 3 ter .

(L'article 3 ter est adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - I. - Après l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, il est rétabli un article L. 136-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 136-9 . - La diminution de ressources résultant de la réduction de la contribution sociale généralisée prévue à l'article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° du ) est compensée intégralement chaque année par l'Etat aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes créés pour concourir à leur financement, dans les conditions fixées par la loi de financement de la sécurité sociale et la loi de finances. »
« I bis. - Le deuxième alinéa de l'article L. 114-1 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : "et de l'article L. 136-9". »
« II. - A l'article L. 241-1 du code de la sécurité sociale, après la référence : "L. 136-7-1, ", sont insérés les mots : "par une fraction des sommes allouées en application de l'article L. 136-9,". »
« III. - A l'article L. 241-6 du code de la sécurité sociale, il est rétabli un 6° ainsi rédigé :
« 6° Une fraction des sommes allouées en application de l'article L. 136-9. »
« IV. - Après le 4° de l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Une fraction des sommes allouées en application de l'article L. 136-9 ; ».
« V. - Dans les conditions fixées par l'article 17 de la loi de finances pour 2001 (n° du ), et en application de l'article L. 136-9 du code de la sécurité sociale, une fraction du produit de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance visée à l'article 991 du code général des impôts est ainsi répartie :
« - 20,8 % à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ;
« - 4,4 % à la Caisse nationale des allocations familiales ;
« - 4,6 % au fonds visé à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale.
« VI. - Les dispositions du présent article s'appliquent au produit de la taxe sur les conventions d'assurance perçue à compter du 1er janvier 2001. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 5 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 47 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement de suppression est une conséquence de l'amendement de suppression adopté à l'article 2.
La suppression du mécanisme de réduction dégressive de CSG dispense d'affecter des fractions de la taxe sur les conventions d'assurance au FSV, à la CNAMTS et à la CNAF, pour un total de 8,4 milliards de francs.
Il reste que la commission a les plus grands doutes sur cette compensation. Cette taxe repose sur une assiette qui est peu dynamique et bien différente de celle de la CSG. Son destin serait donc plutôt de disparaître.
Je m'interroge aussi sur les conditions de la compensation de la ristourne de CSG en 2003. Je rappelle que le coût total de l'exonération de CSG pour la sécurité sociale est estimé, en 2003, entre 25 milliards de francs et 30 milliards de francs, soit un montant équivalent au rendement actuel de la taxe sur les conventions d'assurance, qui rapporte actuellement 28,3 milliards de francs. Le choix de cette taxe est probablement dû à cette coïncidence de chiffres.
Mais je rappelle qu'en vertu d'un arbitrage 14,1 % de cette taxe, soit 4 milliards de francs, sont déjà prévus pour le FOREC par le présent projet de loi. En conséquence, il faudra, en 2003, soit opter pour une nouvelle taxe permettant de compenser intégralement l'exonération de CSG à la sécurité sociale, soit choisir une nouvelle fois de financer les 35 heures au détriment de la sécurité sociale.
Je me demande enfin pourquoi le Gouvernement a résisté à sa tentation préférée, celle de créer un fonds - il ne serait que le vingt-deuxième ! - qui aurait pu s'appeler « fonds de la compensation de la réduction de contribution sociale généralisée », doté d'un conseil d'administration et d'un conseil de surveillance et dont le décret d'application ne serait paru que plusieurs mois après le vote de la loi !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 47.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous proposons également de supprimer cet article, ce qui permettra de conserver des recettes pour financer le crédit d'impôt alternatif que nous allons proposer prochainement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 5 et 47 ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est évidemment défavorable.
L'article 4 tire la conséquence, sur les recettes de la sécurité sociale et sur celles du fonds de solidarité vieillesse, de la réduction de la CSG sur les revenus les plus modestes.
L'affectation de la taxe sur les conventions d'assurance à la sécurité sociale et au fonds de solidarité vieillesse répond aux engagement de l'Etat de compenser intégralement cette réduction. Il est par conséquent indispensable que cette mesure soit maintenue, au nom de l'équilibre même.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 5 et 47.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Ces deux amendements, respectivement de la commission des affaires sociales et de la commission des finances, ont plus qu'un point commun : exactement identiques dans leur rédaction, ils tendent à la suppression pure et simple de l'article 4.
Cette position est d'ailleurs logique et cohérente, puisque l'article 2 a été supprimé et qu'il est donc légitime, dans cette perspective, que l'on ne procède pas à la compensation attachée à quelque chose qui n'existe plus, au moins temporairement.
Pour autant, cette démarche appelle des observations complémentaires.
Le souci qui anime nos deux commissions dans leur refus d'adopter l'article 4 provient, pour l'essentiel, de la volonté de créer les conditions d'une réduction durable des déficits sociaux, d'autant que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 n'est pas déficitaire, mais présente un excédent prévisionnel non négligeable.
Qu'une part de cette marge de manoeuvre soit utilisée pour réduire les prélèvements ne nous paraît pas forcément scandaleux, mais je crois qu'en la matière nous prêchons des convaincus.
Qui est, en effet, régulièrement, en première ligne pour proposer que les fruits de la croissance soient utilisés pour réduire les prélèvements obligatoires ?
Je connais un peu la réponse à cette question.
On nous objectera que l'artice 4 ne fait pas véritablement varier le niveau global des prélèvements, car il affecte des ressources fiscales à la compensation d'allégements de contributions sociales. Il n'en demeure pas moins qu'un effort est fait dans le sens que vous défendez assez régulièrement. On peut donc s'étonner que vous repoussiez cet article.
Mais nous n'en restons pas là.
Nous débattons, soit dit en passant, d'une mesure d'allégement de contribution sociale parce qu'il existe des possibilités pour le faire, parce qu'il y a des marges de manoeuvre financières.
Cette situation est liée à deux facteurs. Elle est liée, d'une part, à la progression des recettes issue de la croissance par le jeu de la création d'emplois, notamment par ceux qui proviennent de l'application de la réduction négociée du temps de travail. Elle est liée, d'autre part, à la progression plus limitée des dépenses, même si cette situation est, selon nous, loin d'être satisfaisante.
Que ce mouvement qui a conduit à la disparition des déficits d'exécution et à l'apparition des excédents puisse ensuite être partagé entre allégements de cotisations ou de contribution et amélioration des prestations servies n'est pas en soi scandaleux.
Ce qui l'est, c'est de s'en tenir inflexiblement à une seule logique comptable, qui connaît au demeurant, l'examen des amendements le prouve, deux exceptions : l'accroissement permanent des allégements de cotisations accordés aux patronat et la grande liberté demandée par les médecins libéraux.
Nous ne voterons donc pas ces amendements de suppression de l'article 4.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5 et 47, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est supprimé.

Article 4 bis



M. le président.
« Art. 4 bis. - I. - L'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En matière de contrôle, une union de recouvrement peut déléguer à une autre union ses compétences dans des conditions fixées par décret. »
« II. - Sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée, sont validés sur le plan procédural les contrôles en cours ou clos et susceptibles de recours, dès lors qu'ils ont été effectués par des unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales pour le compte d'autres unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales. »
Par amendement n° 59 rectifié, M. Louis Boyer propose de compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - A la fin du premier alinéa de l'article L. 722-10 du code rural, les mots : "à condition que les intéressés résident sur le territoire métropolitain" sont supprimés. »
La parole est à M. Louis Boyer.
M. Louis Boyer. Cet amendement vise à supprimer la condition de résidence pour l'assujettissement à l'assurance obligatoire des non-salariés agricoles, qu'il s'agisse de la maladie, de l'invalidité ou de la maternité. Cette suppression harmonise la législation agricole avec celle qui est relative aux non-salariés non agricoles et permet l'adaptation au secteur agricole de la cotisation particulière d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès prévue à l'article L. 131-7-1 du code de la sécurité sociale. Celui-ci prévoit que des taux particuliers de cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès sont applicables aux revenus d'activité et de remplacement perçus par les personnes qui ne remplissent pas les conditions de résidence fiscale et relèvent à titre obligatoire d'un régime français d'assurance maladie ou qui sont titulaires de la carte de séjour « retraité ».
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Nous n'avons pas eu à examiner de DMOS ou de projet de loi de modernisation sanitaire, que vous nous avez annoncé depuis longtemps, madame le secrétaire d'Etat. Or cet amendement aurait plutôt trouvé sa place dans un tel texte.
Il s'agit peut-être d'un cavalier. Cependant, comme le Gouvernement est tombé dans ce travers à l'occasion de nombreux articles que nous examinerons tout à l'heure, je ne peux reprocher à M. Boyer de suivre le mauvais exemple donné par le Gouvernement. C'est pourquoi, sur le fond, j'émets un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ? Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. J'admire la souplesse de M. Descours ! (Sourires).
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est pour cela qu'il été nommé rapporteur. (Nouveaux sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je comprends bien votre amendement, monsieur le sénateur. Il s'agit d'assujettir au régime des travailleurs non-salariés agricoles les personnes exerçant une activité agricole en France mais résidant à l'étranger. C'est le problème des frontaliers, que l'on a souvent évoqué dans cette enceinte. Leur régime social serait ainsi identique à celui des travailleurs non salariés non agricoles exerçant leur activité en France mais résidant à l'étranger.
Il est vrai que votre amendement est sans rapport avec l'objet du présent projet de loi. Pour cette raison, je ne peux l'accepter, même s'il apporte une réponse à un vrai problème, que nous serons conduits à trancher bientôt.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ah !
M. le président. Monsieur Louis Boyer, l'amendement n° 59 rectifié est-il maintenu ?
M. Louis Boyer. Je remercie Mme le secrétaire d'Etat et j'espère que je retrouverai cette disposition dans un prochain DMOS.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Ça ? Vous êtes naïf, cher collègue !
M. Louis Boyer. Aussi, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 59 rectifié est retiré.
Par amendement n° 60, M. Louis Boyer propose de compléter l'article 4 bis , par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Le premier alinéa de l'article L. 724-7 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée : "Pour l'exercice de ce contrôle, une caisse de mutualité sociale agricole peut déléguer à une autre caisse de mutualité sociale agricole ses compétences dans des conditions fixées par décret.". »
La parole est à M. Louis Boyer.
M. Louis Boyer. Les caisses de MSA, mutualité sociale agricole, comme les URSSAF, les Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, sont limitées pour leur contrôle au ressort de leur circonscription. Toutefois, et cela est particulièrement vrai pour les entreprises forestières, des entreprises agricoles exercent leur activité sur plusieurs départements. Il convient donc de permettre, comme pour les URSSAF, que les caisses de MSA puissent déléguer leur pouvoir de contrôle à une autre caisse de MSA.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. J'ai été très sensible à la rigueur législative dont Mme le secrétaire d'Etat a fait preuve voilà un instant sur l'amendement qui a été retiré. Je lui rappellerai son propos lors de l'examen d'un certain nombre d'articles du projet de loi.
Cela étant dit, je suis très favorable au présent amendement. Il vise à mettre la MSA et les URSSAF sur le même plan. Je crois que, sur ce point, tout le monde est d'accord.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Pour ma part, je suis très sensible à la courtoisie de M. Louis Boyer.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Et vous n'avez pas tout vu ! (Sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Louis Boyer, le Gouvernement n'est pas défavorable à votre proposition. (Marques d'approbation sur le banc des commissions.)
M. Guy Fischer. Ah !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Par conséquent, il s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Charles Descours, rapporteur. M. Louis Boyer a de la chance ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 60, accepté par la commission et sur lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ce sont les premiers petits pas que nous faisons ensemble !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4 bis, ainsi modifié.

(L'article 4 bis est adopté.)

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 731-15 du code rural est ainsi rédigé :
« Les revenus professionnels pris en compte sont constitués par la moyenne des revenus se rapportant aux trois années antérieures à celle au titre de laquelle les cotisations sont dues. »
« II. - L'article L. 731-19 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 731-19 . - Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 731-15, les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles peuvent, dans des conditions fixées par décret, opter pour une assiette de cotisations constituée de leurs revenus professionnels tels que définis à l'article L. 731-14 et afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle les cotisations sont dues. »
« III. - L'article L. 731-21 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 731-21 . - Un décret détermine les conditions d'application des dispositions de l'article L. 731-19, notamment le délai minimal dans lequel les chefs d'exploitation ou d'entreprise doivent formuler l'option mentionnée à l'article L. 731-19 préalablement à sa prise d'effet, la durée minimale de validité de celle-ci, les conditions de sa reconduction et de sa dénonciation.
« Les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles ayant dénoncé l'option ne peuvent ultérieurement demander l'application des dispositions prévues à l'article L. 731-19, avant un délai de six ans après cette dénonciation. »
« IV. - A titre transitoire, au titre de 2001, pour les chefs d'exploitation ou d'entreprise ayant exercé l'option, prévue à l'article 32 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994 portant diverses dispositions concernant l'agriculture, pour une assiette de cotisations sociales constituées par les revenus professionnels afférents à l'année au titre de laquelle ces cotisations sont dues, la régularisation des cotisations provisionnelles dues au titre de l'année 2000 est effectuée lorsque les revenus professionnels sont définitivement connus.
« V. - Les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles ayant exercé l'option prévue à l'article 13 de la loi n° 91-1407 du 31 décembre 1991 modifiant et complétant les dispositions du code rural et de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 relatives aux cotisations sociales agricoles et créant un régime de préretraite agricole ou à l'article 35 de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre social ou à l'article 32 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994 précitée perdent le bénéfice de ladite option le 1er janvier 2001. L'assiette de leurs cotisations est déterminée selon les modalités prévues à l'article L. 731-15 du code rural.
« Pour 2001, à titre exceptionnel, les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles peuvent exercer l'option prévue à l'article L. 731-19 du code rural jusqu'au 30 avril 2001.
« VI. - Les articles L. 731-20 et L. 731-22 du code rural sont abrogés à compter du 1er janvier 2001.
« VII. - L'article L. 731-23 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 731-23 . - Les personnes qui dirigent une exploitation ou une entreprise agricoles dont l'importance est inférieure à celle définie à l'article L. 722-5 et supérieure à un minimum fixé par décret ont à leur charge une cotisation de solidarité calculée en pourcentage de leurs revenus professionnels définis à l'article L. 731-14, afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la cotisation est due ou à défaut sur une assiette forfaitaire provisoire déterminée dans des conditions fixées par décret. Cette assiette forfaitaire est régularisée lorsque les revenus sont connus. Le taux de la cotisation est fixé par décret. »
« VIII. - Dans la première phrase de l'article L. 731-24 du code rural, les mots : "ces revenus" sont remplacés par les mots : "leurs revenus professionnels afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la cotisation est due". »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 62 rectifié, est présenté par MM. Arnaud, Amoudry, Barraux, Bernardet, Deneux, Deriot, Faure, Franchis, Grignon, Hérisson, Herment, Hoeffel, Huchon, Jarlier, Lorrain, Machet, Marquès, Louis Mercier, Michel Mercier, Moinard, Richert, Souplet, Vecten et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 103 est déposé par MM. Bernard, Gaillard et Vasselle.
Tous deux tendent :
I. - Dans le texte proposé par le II de l'article 5 pour l'article L. 731-19 du code rural, après les mots : « chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles », à insérer les mots : « relevant d'un régime forfaitaire » ;
II. - En conséquence :
a) A compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 731-19 du code rural, par une phrase ainsi rédigée : « Ceux relevant d'un régime réel d'imposition peuvent, dans des conditions fixées par décret, opter pour une assiette de cotisations constituée de leurs revenus professionnels tels que définis à l'article L. 731-14 et afférents à l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues. »
b) A supprimer le IV de cet article.
La parole est à M. Lorrain, pour défendre l'amendement n° 62 rectifié.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement vise à maintenir, pour les exploitants relevant d'un régime réel, la possibilité d'opter pour une assiette de cotisations sociales et de CSG/CRDS constituée par les revenus professionnels de l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues.
En effet, cette possibilité actuelle donne entière satisfaction aux exploitants qui l'ont choisie, dans la mesure où elle permet d'asseoir les cotisations et contributions sur le revenu le plus proche possible du paiement des cotisations et contributions.
De plus, le mécanisme actuel de cotisations provisionnelles sur les revenus de la dernière année connue est empreint d'une certaine souplesse, puisque la base provisionnelle peut être minorée en cas de chute des revenus prévue sur l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues à titre définitif.
En cas d'augmentation des revenus professionnels, une provision fiscale permet de répercuter immédiatement sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année l'augmentation de cotisations qui résulte de la hausse des cotisations.
Enfin, on soulignera que les artisans, commerçants et professions libérales cotisent également sur une base constituée des revenus de l'année au titre de laquelle les cotisations sont dues, sans que cela ne présente aucune difficulté pratique.
M. le président. La parole est à M. Bernard, pour défendre l'amendement n° 103.
M. Jean Bernard. Je souscris aux propos qui viennent d'être tenus puisque l'amendement que je présente et l'amendement n° 62 rectifié sont identiques.
Les nouvelles modalités concernées sont en vigueur depuis 1994, à la grande satisfaction des exploitants. Aussi, je m'interroge sur les raisons qui conduisent à modifier ce dispositif.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 62 rectifié et 103 ?
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 5 proposé par le Gouvernement - je réponds à M. Bernard - tend à simplifier les assiettes de cotisations sociales des exploitants agricoles, en passant d'un système de quatre assiettes différentes à un système de deux assiettes différentes.
Comme tous les systèmes de simplification, le dispositif du Gouvernement supprime un cas particulier, celui qui concerne les exploitants imposés au réel qui, aujourd'hui, choisissent de s'acquitter de leurs cotisations agricoles sur les revenus de l'année n en cours. Il s'agit évidemment d'une partie seulement des exploitants agricoles.
La suppression de l'année n est demandée par les organismes de mutualité sociale agricole, c'est-à-dire par les gestionnaires du régime. En effet - et on le comprend très bien - ce dispositif pose aujourd'hui des problèmes de contrôle et de définition. Les cotisations sociales agricoles sont calculées sur des revenus nets, après déduction des cotisations elles-mêmes. En conséquence, elles sont d'abord acquittées sur la base prévisionnelle des revenus de l'année n - 1, puis régularisées au cours de l'année n + 1 sur la base des revenus de l'année n , une fois ceux-ci connus.
Mais, selon les organisations professionnelles agricoles, le passage à l'assiette n - 1 serait un retour en arrière.
C'est pour moi un dilemme cornélien : en tant que président du conseil de surveillance de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, connaissant donc les organismes de sécurité sociale, je comprends la position de la MSA ; mais en tant que sénateur, rôle dans lequel j'écoute souvent les organisations syndicales agricoles de mon département, je comprends aussi ces organisations professionnelles.
Dans ces conditions, très courageusement, je m'en remets à la sagesse du Sénat, sagesse... un peu positive. (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je ne vais peut-être pas simplifier le choix cornélien du rapporteur.
En effet, le dispositif proposé par ces amendements pour les seuls exploitants dont les cotisations sociales sont actuellement calculées sur le revenu de l'année au titre de laquelle ces cotisations sont demandées est contraire aux objectifs de simplification et d'harmonisation des assiettes de cotisations sociales des travailleurs non salariés agricoles. Il laisserait perdurer une troisième assiette de cotisations sociales pour moins de 10 % d'entre eux.
Les difficultés engendrées par le dispositif actuel militent en faveur de la suppression du calcul des prélèvements non salariés agricoles sur le revenu de l'année à laquelle ils se rapportent, comme le préconise le rapport de M. Cahuzac, qui est, lui aussi, un fin calculateur.
M. Charles Descours, rapporteur. Il est chirurgien, comme moi, et donc un spécialiste des calculs dans le domaine agricole ! (Sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 62 rectifié et 103.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je ne comprends pas la réponse administrative que vient de faire Mme le secrétaire d'Etat. Réellement, c'est méconnaître la situation de la profession agricole aujourd'hui ! Il y avait un dispositif d'une grande souplesse, qui permettait à la profession de s'adapter en fonction de l'évolution de ses revenus, et s'il existe une profession en France qui connait de fortes variations de revenus d'un exercice sur l'autre du fait des aléas climatiques, c'est bien la profession agricole ! Vouloir absolument caler l'assiette des cotisations sur l'année n - 1 dans un souci de simplification administrative, qu'au demeurant nous comprenons, c'est vraiment méconnaître la réalité du terrain et le fonctionnement des entreprises agricoles.
J'en appelle donc, madame le secrétaire d'Etat, à votre bons sens et à votre souci de « coller » à la réalité afin de répondre au mieux aux difficultés des entreprises, pour au moins donner aux entreprises agricoles la faculté de prendre comme année de référence l'année n, au lieu de l'année n - 1, chaque fois que la situation le justifie.
Cette solution est plus pertinente que jamais aujourd'hui où nous discutons du projet de loi de financement de la sécurité sociale, après les événements récents que nous avons connus avec la « vache folle » et les farines animales, les annonces qui sont faites quasi quotidiennement, soit par des membres du Gouvernement, soit par des représentants de la profession agricole. Nous le savons, tout un pan de l'économie agricole sera touché par cette crise. Or, on veut continuer à asseoir le calcul des cotisations sociales sur un exercice de référence qui n'a rien à voir avec les réalités des revenus de l'exploitation agricole au cours de l'année n.
Que le Parlement fasse donc preuve d'un peu de pertinence et de bons sens dans ses décisions en adoptant cet amendement, qui a été déposé par notre collègue Jean Bernard et qui avait d'ailleurs été défendu avec beaucoup de pertinence par Charles de Courson, à l'Assemblée nationale ! Réellement, si aujourd'hui la Haute Assemblée n'est pas en mesure d'adopter un amendement de cette nature, c'est à désespérer du fonctionnement du Parlement ! (M. de La Malène applaudit.)
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Je n'ai pas grand-chose à ajouter à l'explication très éloquente de M. Vasselle. Le Gouvernement se félicite de faire passer le nombre d'assiettes de quatre à deux. Si les amendements n°s 62 rectifié et 103 étaient adoptés, il y aurait alors non plus quatre, mais trois assiettes, ce qui constituerait déjà une simplification.
J'ajoute que l'élevage n'est pas la seule branche de l'agriculture concernée par cette affaire : il y a également, notamment, la viticulture. Ce secteur n'est pas sinistré, mais la profession viticole est tout à fait attachée au dispositif proposé dans un souci de bonne gestion. Ce n'est donc pas un hasard si MM. de Courson et Bernard, ainsi que votre serviteur, soutiennent cet amendement.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. J'ai bien sûr entendu les arguments développés par MM. Vasselle et Gaillard.
Pour ma part, j'ai toujours vu mettre en avant, notamment par M. le rapporteur, ce souci de rigueur qui devrait être notre règle commune.
On parle de droit constaté. En matière de sécurité sociale, c'est une volonté affichée par tout le monde. La Cour des comptes l'a dit, et on progresse en ce sens.
Le souhait du Gouvernement de ramener le nombre d'assiettes de quatre à deux est, à mon avis, légitime. En effet, cela ne concerne que 10 % d'assujettis - certes, me direz-vous, c'est toujours 10 % ! - et il nous faut trouver des règles qui soient justes pour tous. D'autres catégories sociales ont-elles le choix de leur régime fiscal ? Bien entendu, ces dernières ne sont pas soumises à un certain nombre d'aléas que nous connaissons bien et qui sont préoccupants ; mais nous pensons, pour notre part, que ce pas devrait être franchi aujourd'hui, et nous attendons de connaître l'avis de M. le rapporteur.
Je ne comprends pas la position de M. Vasselle, qui est pourtant, d'habitude, très rigoureux dans ses raisonnements,...
M. Jean Chérioux. C'est vrai !
M. Guy Fischer. ... et qui nous encourage bien souvent à la rigueur.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Guy Fischer. Cette fois-ci, je suis étonné de la position qu'il adopte.
M. Alain Vasselle. Je pensais que le fils d'agriculteur que vous êtes aurait compris !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les deux amendements identiques n°s 62 rectifié et 103, repoussés par le Gouvernement et sur lesquels la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Les amendements sont adoptés.)
M. Alain Vasselle. La sagesse a parlé !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 5 bis



M. le président.
« Art. 5 bis. - Au début de la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 731-13 du code rural, le mot : "trois" est remplacé par le mot : "cinq". » - (Adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. - I. - L'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Les deux premiers alinéas du I sont ainsi rédigés :
« Sont soumis à la contribution les revenus professionnels visés à l'article L. 731-14 du code rural.
« Les revenus pris en compte sont constitués par la moyenne des revenus se rapportant aux trois années antérieures à celle au titre de laquelle la contribution est due. Lorsque le chef d'exploitation ou d'entreprise agricoles a exercé l'option prévue à l'article L. 731-19 du code rural, les revenus pris en compte sont constitués par les revenus afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la contribution est due. » ;
« 2° La dernière phrase du troisième alinéa du I est supprimée ;
« 3° Le II est ainsi rédigé :
« II. - Lorsque la durée d'assujettissement au régime de protection sociale des non-salariés agricoles d'un chef d'exploitation ou d'entreprise agricoles ne permet pas de calculer la moyenne des revenus professionnels se rapportant aux trois années de référence prévues au premier alinéa de l'article L. 731-15 du code rural, l'assiette de la contribution est déterminée forfaitairement à titre provisoire dans les conditions suivantes :
« a) Pour la première année au titre de laquelle la contribution est due, l'assiette forfaitaire provisoire est fixée conformément aux dispositions des III, IV et V ci-dessous ; cette assiette fait l'objet d'une régularisation sur la base des revenus professionnels afférents à la première année lorsque ceux-ci sont définitivement connus ;
« b) Pour la deuxième année au titre de laquelle la contribution est due, l'assiette est égale à la somme de la moitié de l'assiette forfaitaire prévue au a et de la moitié des revenus professionnels de l'année précédente ; cette assiette fait l'objet d'une régularisation sur la base de la moyenne des revenus afférents à la première et à la deuxième année lorsque ceux-ci sont définitivement connus ;
« c) Pour la troisième année au titre de laquelle la contribution est due, l'assiette est égale au tiers de la somme de l'assiette forfaitaire prévue au a et des revenus professionnels des deux années précédentes ; cette assiette fait l'objet d'une régularisation sur la base de la moyenne des revenus afférents aux trois premières années lorsque ceux-ci sont définitivement connus.
« Lorsque le chef d'exploitation ou d'entreprise agricoles a opté pour l'assiette prévue à l'article L. 731-19 du code rural, pour la première année au titre de laquelle la contribution est due, celle-ci est calculée à titre provisoire sur la base de l'assiette forfaitaire fixée conformément aux dispositions des III, IV et V ci-dessous. Cette assiette fait l'objet d'une régularisation sur la base des revenus professionnels afférents à la première année lorsque ceux-ci sont définitivement connus.
« Par dérogation aux dispositions ci-dessus du présent II, pour les personnes mentionnées au deuxième et au troisième alinéas de l'article L. 731-16 du code rural, l'assiette de la contribution est déterminée selon les modalités des deuxième, troisième et quatrième alinéas du même article. » ;
« 4° Le III est ainsi rédigé :
« III. - Pour les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles dont l'importance de l'exploitation ou de l'entreprise peut être appréciée en pourcentage de la surface minimum d'installation prévue à l'article L. 312-6 du code rural, l'assiette forfaitaire prévue au a du II est égale au produit de ce pourcentage par le tiers de 2028 fois le montant du salaire minimum de croissance, sans que l'assiette puisse être inférieure à 800 fois le montant du salaire minimum de croissance ou supérieure à 2028 fois le montant du salaire minimum de croissance. » ;
« 5° Le IV est ainsi rédigé :
« IV. - Pour les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles dont l'importance de l'exploitation ou de l'entreprise ne peut être appréciée en pourcentage de la surface minimum d'installation, l'assiette forfaitaire prévue au a du II est égale à 1000 fois le montant du salaire minimum de croissance.
« Pour les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles qui débutent simultanément deux activités agricoles non salariées dont l'une ne peut être appréciée en pourcentage de la surface minimum d'installation, à l'élément d'assiette déterminé au III s'ajoute, au titre de la seconde activité, 800 fois le montant du salaire minimum de croissance, sans que le montant total de l'assiette puisse être supérieur à 2028 fois le salaire minimum de croissance. » ;
« 6° Le V est ainsi rédigé :
« V. - Pour l'application des III et IV, le salaire minimum de croissance à prendre en considération est celui en vigueur au 1er janvier de l'année au titre de laquelle la contribution est due.
« Pour l'application du III, l'importance de l'exploitation ainsi que la valeur de la surface minimum d'installation sont appréciées au 1er janvier de l'année au titre de laquelle la contribution est due. » ;
« 7° Il est inséré, après le VI, un VII ainsi rédigé :
« VII. - Sont soumis à la contribution les revenus professionnels, définis à l'article L. 731-14 du code rural, des personnes redevables des cotisations de solidarité visées aux articles L. 731-23 et L. 731-24 du même code.
« Les revenus pris en compte sont ceux afférents à l'année précédant celle au titre de laquelle la contribution est due.
« Les revenus sont majorés des cotisations de solidarité visées aux articles L. 731-23 et L. 731-24 du code rural.
« Pour les personnes redevables de la cotisation de solidarité définie à l'article L. 731-23, lorsque les revenus professionnels ne sont pas connus, la contribution est calculée sur une assiette forfaitaire provisoire définie dans des conditions fixées par décret. Cette assiette forfaitaire est régularisée lorsque les revenus sont connus. »
« II. - Le II de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« II. - La contribution due sur les revenus des personnes assujetties aux régimes de la sécurité sociale des salariés et non-salariés des professions agricoles ainsi que la contribution due sur les revenus des personnes redevables des cotisations de solidarité visées aux articles L. 731-23 et L. 731-24 du code rural sont directement recouvrées et contrôlées par les caisses de mutualité sociale agricole, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues aux régimes de la sécurité sociale des salariés et non-salariés des professions agricoles. »
Je suis tout d'abord saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 64 est présenté par M. Arnaud et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° 104 est déposé par MM. Bernard, Gaillard et Vasselle.
Tous deux tendent à compléter le second alinéa du texte présenté par le 1° du I de l'article 6 pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale par les mots : « lorsque les chefs d'exploitation ou d'entreprise relèvent d'un régime forfaitaire d'imposition, et des revenus afférents à l'année au titre de laquelle la contribution est due pour ceux relevant d'un régime réel d'imposition. »
La parole est à M. Lorrain, pour présenter l'amendement n° 64.
M. Jean-Louis Lorrain. Il s'agit d'un simple amendement de coordination.
M. le président. La parole est à M. Bernard, pour défendre l'amendement n° 104.
M. Jean Bernard. C'est effectivement un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques n°s 64 et 104 ?
M. Charles Descours, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les deux amendements identiques n°s 64 et 104, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Par amendement n° 6, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de remplacer le dernier alinéa du texte proposé par le 7° du I de l'article 6 pour le VII de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les personnes redevables de la cotisation de solidarité définie à l'article L. 731-23, lorsque les revenus professionnels ne sont pas connus, la contribution est calculée sur une assiette forfaitaire provisoire. Lorsque l'importance de l'exploitation ou de l'entreprise agricoles peut être appréciée en pourcentage de la surface minimum d'installation prévue à l'article L. 312-6 du code rural, cette assiette forfaitaire est égale au produit de ce pourcentage par le tiers de 2 028 fois le montant du salaire minimum de croissance. Dans le cas contraire, elle est égale à 200 fois le montant du salaire minimum de croissance.
« Cette assiette forfaitaire est régularisée lorsque les revenus sont connus ».
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement très technique tend à préciser l'assiette forfaitaire provisoire de la CSG due par les personnes redevables de la cotisation de solidarité visée à l'article L. 721-23 du code rural, lorsque leurs revenus professionnels ne sont pas connus.
Il s'agit des 210 000 agriculteurs dont la superficie de l'exploitation est inférieure au seuil d'affiliation à l'assurance maladie des exploitants agricoles. Cette cotisation n'ouvre pas de droits.
Le texte initial se borne à renvoyer à un décret pour préciser l'assiette forfaitaire provisoire de la CSG qu'ils doivent également acquitter. Or, considérant que la CSG est une « imposition de toute nature », la commission estime important de préciser cette assiette forfaitaire provisoire dans la loi.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je confirme les propos de M. le rapporteur. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement purement technique.
M. Jean-Jacques Hyest. Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris. Mais cela ne fait rien !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article additionnel après l'article 6



M. le président.
Par amendement n° 63, MM. Badré, Huriet, Hyest et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après l'article 6, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 22° - Les notaires salariés d'une société d'exercice de la profession de notaire, lorsqu'ils en sont associés, sauf pour les risques gérés par la Caisse de retraite des notaires ».
« II. - Après l'article L. 642-4 du même code, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les notaires sont affiliés de plein droit à la Caisse de retraite des notaires quelle que soit la forme de leur exercice professionnel, à l'exception des notaires salariés d'une société d'exercice de la profession de notaire, et non associés dans celle-ci.
« Les cotisations acquittées par les notaires visés au 22° de l'article L. 311-3 sont assises sur leur rémunération brute telle que définie à l'article L. 242-1 et sont versées par l'employeur à la Caisse de retraite des notaires. Une quote-part, dont le montant est fixé par décret, est due par le salarié.
« Cette quote-part est précomptée par l'employeur dans les conditions fixées à l'article L. 243-1.
« Ces cotisations sont recouvrées dans les mêmes conditions et sous les mêmes sanctions que les cotisations du régime général, en application des dispositions de l'article L. 133-3 et des chapitres 3 et 4 du titre 4 du livre 2 du présent code. Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat ».
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement vise à unifier, pour le risque vieillesse, l'affiliation des notaires au profit de la caisse de retraite des notaires, à l'exception des notaires salariés.
La loi de modernisation des professions juridiques du 31 décembre 1990 traitait de la question de l'affiliation desdites professions à leur régime d'assurance vieillesse. Cette loi permet des perspectives de carrière évolutives conduisant le professionnel à changer de mode d'exercice : salarié, non salarié.
La loi du 31 décembre 1991 a précisé pour les avocats les conditions leur permettant de demeurer affiliés à la caisse nationale des barreaux français, notamment s'agissant de l'assiette. D'autres adaptations sont intervenues plus récemment concernant les agents généraux d'assurance et les experts-comptables.
Il importe de rendre possible cette mutation pour le notariat, sans porter atteinte à la caisse de retraite des notaires. Il n'y a en effet pas de raison de ne pas appliquer aux notaires un dispositif mis en place pour d'autres professions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur le sénateur, l'équilibre financier de la caisse des retraites des notaires, à l'exception des notaires salariés, est supposé être menacé par l'adhésion au régime général des notaires exerçant dans une société d'exercice libéral.
La solution que vous proposez est inopportune et ne règle pas le problème posé.
J'observe d'abord que la caisse de retraites des notaires n'est pour l'heure nullement touchée par un quelconque mouvement de départ de ses ressortissants.
Il faut également souligner que la situation des notaires n'est pas spécifique. Toutes les caisses de retraite des professions libérales sont concernées par les conséquences éventuelles du développement des sociétés d'exercice libéral. On ne peut régler ce problème que globalement et non profession par profession.
Enfin, l'amendement n° 63 tend à asseoir les cotisations sur les « salaires » perçus par les notaires exerçant en société d'exercice libéral, assiette plus étroite que celle qui est actuellement applicable et qui comprend l'ensemble de leur revenu. Or, le maintien de l'assiette actuelle serait en tout état de cause indispensable pour que les adhérents apportent une contribution suffisante à la caisse de retraite des notaires pour assurer son équilibre financier.
Votre proposition n'est donc pas de nature à sauvegarder l'équilibre financier de cette caisse. C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 63, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.

Article additionnel avant l'article 7



M. le président.
Par amendement n° 7 rectifié, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose d'insérer, avant l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 651-2-1 - Au titre de chaque exercice, le produit de la contribution sociale de solidarité, minoré des frais de recouvrement, est réparti de la manière suivante :
« - 35 % pour le régime d'assurance maladie maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles ;
« - 30 % pour le régime d'assurance vieillesse des professions mentionnées au 2° de l'article L. 621-3 ;
« - 15 % pour le régime d'assurance vieillesse des professions mentionnées au 1° de l'article L. 621-3 ;
« - 20 % pour le fonds mentionné à l'article L. 135-6.
« Des acomptes provisionnels sont versés aux régimes et à l'organisme bénéficiaires. Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget procède à une régularisation dans les trois premiers mois de l'année suivant l'exercice. »
« II. - Le 1° de l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 1° Une fraction de la contribution sociale de solidarité des sociétés dans les conditions fixées par l'article L. 651-2-1 ; ».
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Cet amendement tendant à insérer un article additionnel, très technique en apparence, est en fait de nature politique. Il vise la lisibilité des comptes sociaux, point auquel tout le monde souhaite s'attacher et à propos duquel nous avons beaucoup de travail.
Les régimes des non-salariés non agricoles, en dehors de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales, sont structurellement déficitaires.
En conséquence, ils bénéficient, depuis la loi du 3 janvier 1970, c'est-à-dire depuis trente ans, d'une imposition affectée, la fameuse contribution sociale de solidarité sur les sociétés, la C3S, censée compenser les effets de l'extension du salariat.
La C3S est répartie entre la caisse nationale d'assurance maladie, ou CANAM, l'Organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, ou ORGANIC, et la caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale, ou CANCAVA, au prorata et dans la limite de leurs déficits comptables, mesurés en encaissements-décaissements.
Les excédents de la C3S - et les excédents sont toujours bons pour le ministère de l'économie et des finances - sont ensuite affectés, pour partie, à titre dérogatoire en 1999, 2000 et 2001, au BAPSA, sous la forme d'un versement forfaitaire et, pour partie, au fonds de solidarité vieillesse. Des arrêtés des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, publiés au Journal officiel, procèdent à ces répartitions.
Ce mécanisme nous semble avoir atteint aujourd'hui ses limites. En effet, il oblige à des régularisations complexes au titre de l'année antérieure ; il ne responsabilise pas les régimes des non-salariés, ceux-ci disposant d'un financement automatique de leurs déficits ; enfin, il fait dépendre l'affectation des excédents de C3S au fonds de solidarité vieillesse de l'évolution des dépenses des régimes des non-salariés.
Ces excédents de la C3S au fonds de solidarité vieillesse, à part 2 milliards de francs en octobre 1999, ne sont même pas utilisés pour le fonds de réserve des retraites : ils servent en fait à équilibrer de manière fragile le fonds de solidarité vieillesse, qui est victime de toutes les ponctions en 2000 puisqu'il ne bénéficie plus, selon l'article 11 du présent projet de loi, du produit des droits sur les alcools, qui s'élève à plus de 11 milliards de francs, et qu'il verra sa CSG diminuée de 7,5 milliards de francs au profit de la CNAMTS.
Il est nécessaire d'améliorer la lisibilité de l'affectation de la C3S, qui représente tout de même 19 milliards de francs en 2001. Et si nous voulons débrancher quelques tuyaux, cet amendement devrait nous y aider.
En conséquence, la commission des affaires sociales propose au Sénat un dispositif tendant à affecter la C3S par une clé de répartition en pourcentages fixée par la loi : 35 % pour la CANAM, 30 % pour l'ORGANIC et le régime complémentaire du bâtiment, 15 % pour la CANCAVA et 20 % pour le fonds de réserve.
Nous n'avons pas à prévoir une affectation au fonds de solidarité vieillesse, puisque nous refusons de le ponctionner. Nous n'avons pas non plus à prévoir une affectation de C3S au budget annexe des prestations sociales agricoles, puisque nous considérons qu'il n'est pas de bonne gestion de financer une recette dérogatoire. La commission des finances déposera d'ailleurs un amendement au projet de loi de finances tendant à supprimer cette affectation de C3S et à augmenter le taux de TVA affecté au régime agricole.
Comme l'année dernière, lorsque j'avais proposé un mécanisme de répartition en pourcentages de la CSG maladie, je ne prétends pas avoir trouvé un système idéal mais le dispositif présenté ferait, à mon avis, franchir un petit progrès dans la lisibilité des comptes de la sécurité sociale. Ce seraient un ou deux tuyaux de moins pour les plombiers du Gouvernement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur Descours, votre proposition méconnaît l'esprit dans lequel est conçu le mécanisme de distribution de la C3S. L'objectif recherché est de garantir en priorité l'équilibre financier des régimes de non-salariés non agricoles en couvrant leur déficit comptable en fonction des besoins effectifs. Le solde, s'il existe, est attribué au fonds de solidarité vieillesse ou au fonds de réserve des retraites.
Votre amendement introduirait un double facteur de rigidité, d'une part en figeant les quote-parts d'affectation et, d'autre part, en interdisant au fonds de solidarité vieillesse de bénéficier de cette ressource, alors même que la C3S est nécessaire à ce fonds pour honorer les dépenses de solidarité dont il a la charge. Je ne peux donc émettre un avis favorable sur l'amendement n° 7 rectifié.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Madame la secrétaire d'Etat, je ne méconnais pas que ce dispositif introduirait une certaine rigidité ; mais, au moins, il améliorerait la lisibilité, car les pourcentages ne varieraient plus d'une année à l'autre.
Par ailleurs - excusez-moi de le dire ! -, cela responsabiliserait les organismes de sécurité sociale des non-salariés non agricoles. En effet, il est plutôt confortable, pour un organisme, de savoir que son déficit est toujours couvert et il est dommage que la CNAM n'ait pas la même certitude !
Par conséquent, si cette mesure entraînerait certes une certaine rigidité, elle légaliserait cependant un pourcentage, ce qui permettrait d'avoir, année après année, une lisibilité permanente, ce qui n'est pas le cas actuellement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 7.

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - I. - A. - Dans l'article L. 651-7 du code de la sécurité sociale, les mots : "et L. 243-3, du premier alinéa de l'article L. 243-6, de l'article L. 243-14, des articles" sont remplacés par la référence : ", L. 243-14, ". »
« B. - L'article L. 651-6 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article L. 243-3 et du premier alinéa de l'article L. 243-6 sont applicables à la contribution sociale de solidarité. »
« II. - Pour l'application de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale et jusqu'à 2001 inclus, les déficits pris en compte sont établis sur la base des dépenses réalisées et des recettes encaissées au cours de l'exercice considéré. »
Par amendement n° 8, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer le II de cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le paragraphe II de l'article 7 tend à ce que soit appliqué de manière dérogatoire, pour la répartition de la C3S entre les régimes des non-salariés non agricoles selon leurs déficits, le principe des encaissements-décaissements.
Cette application est dérogatoire du droit commun, puisque ces régimes disposent, depuis trois ans, de comptes en droits constatés. Je rappelle que nous avions fixé une date limite en la matière, et que cette date est déjà largement dépassée.
Ce n'est donc pas, en conséquence, une demande de ces régimes, mais du Gouvernement, qui la justifie par le fait que les comptes présentés à la commission des comptes et dans les annexes du projet de loi de financement restent en encaissements décaissements.
La commission des affaires sociales ne partage pas cette appréciation.
En effet, depuis septembre 2000, les comptes établis par la commission des comptes font l'objet d'un « tome III » relatif aux comptes établis en droits constatés. Nous disposons des déficits prévisionnels établis en droits constatés de la CANAM, de l'ORGANIC et de la CANCAVA. Il est donc possible de suivre la répartition de la C3S selon ce mode de comptabilisation.
Par ailleurs, force est de constater que cette exigence mise en avant par le Gouvernement est « à géométrie variable » : l'affectation des excédents prévisionnels de la CNAVTS est réalisée « en droits constatés ».
Nous nous interrogeons également sur les comptes du FOREC, présentés par l'annexe f du projet de loi, qui seraient également en droits constatés, ce qui reviendrait à surestimer légèrement ses recettes en 2000 et en 2001, alors que ce mode de comptabilisation n'est précisé nulle part.
En conclusion, le retour aux encaissements-décaissements serait un mauvais service rendu à la réforme comptable des organismes de sécurité sociale et un signal négatif que nous ne pouvons pas approuver.
Telles sont les raisons qui ont conduit la commission à adopter cet amendement. J'espère, madame le secrétaire d'Etat, que vous l'approuverez aussi, car c'est une question de lisibilité. Nous entendons bien montrer que nous sommes contre le retour aux encaissements-décaissements !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut pas accepter cet amendement, puisque le paragraphe II de l'article 7 constitue une simple mesure de cohérence.
Vous le savez, les lois de financement de la sécurité sociale sont, à ce stade, présentées en encaissements-décaissements. Il est cohérent que les déficits des régimes de non-salariés pris en compte pour la redistribution de C3S soient présentés sous la même forme pour garantir la lisibilité des affectations !
Cette question ne se posera plus en 2002, lorsque la loi de financement sera présentée « en droits constatés ». Mais, cette année, nous devons poursuivre de cette manière.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, vous n'êtes pas sans savoir que les caisses de sécurité sociale ont, depuis 1994, obligation de présenter leurs comptes en droit constaté, et qu'elles l'ont fait depuis 1997.
Je constate donc simplement, puisque vous nous dites que ce sera fait en 2002, que le Gouvernement aura cinq ans de retard par rapport aux caisses ! Je le déplore, et je maintiens mon amendement.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Aujourd'hui, nous examinons un projet de loi de financement, pas les comptes !
M. Jean Chérioux. Quelle subtilité !
M. Charles Descours, rapporteur. Je constate simplement le retard du Gouvernement sur les caisses !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - I. - Le quatrième alinéa de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La réduction prévue au présent article doit s'entendre comme n'étant pas applicable aux cotisations dues au titre de ces indemnités par lesdites caisses de compensation. »
« II. - Sous réserve des décisions juridictionnelles passées en force de chose jugée, sont validées les décisions des organismes de recouvrement des cotisations de sécurité sociale en tant que leur légalité serait contestée au motif que la réduction prévue à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale n'est pas applicable aux cotisations dues au titre des indemnités de congés payés mutualisées entre les employeurs affiliés aux caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16 du code du travail et versées par ces caisses. » - (Adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. - I. - Au I de l'article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, après les mots : "soit à 1 600 heures sur l'année", sont insérés les mots : "ou à la durée considérée comme équivalente en application du dernier alinéa de l'article L. 212-4 du code du travail".
« I bis. - Le IX de l'article 19 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« - les entreprises qui appliquent une convention ou un accord de branche étendu ou un accord d'entreprise ou d'établissement soumis aux dispositions de l'article L. 132-26 du code du travail conclu avant la date d'entrée en vigueur de la présente loi réduisant la durée collective du travail au plus à la durée considérée comme équivalente à la durée prévue au I en application de dispositions réglementaires ou conventionnelles. »
« II. - L'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Le quatrième alinéa du III est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Pour ceux des salariés de ces entreprises qui sont soumis à des dispositions spécifiques en matière de durée maximale du travail et sous réserve du respect de ces dispositions, le calcul de l'allégement peut être adapté pour tenir compte de la rémunération mensuelle minimale, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. » ;
« 2° Le IV est ainsi modifié :
« a) A la première phrase du premier alinéa, après les mots : "à la durée collective du travail applicable dans l'entreprise", sont insérés les mots : "ou à la durée prise en compte pour l'application du quatrième alinéa du III" ;
« b) A la première phrase du deuxième alinéa, après les mots : "à la durée collective du travail applicable", sont insérés les mots : "ou à la moitié de la durée prise en compte pour l'application du quatrième alinéa du III". »
« III. - Au deuxième alinéa du I de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail, les mots : "au niveau de la durée légale fixée par l'article L. 212-1 bis du code du travail" sont remplacés par les mots : "au niveau de la durée légale fixée par l'article L. 212-1 du code du travail ou de la durée considérée comme équivalente en application du dernier alinéa de l'article L. 212-4 du code du travail ou de dispositions réglementaires ou conventionnelles antérieures à l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail". »
Par amendement n° 9, M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer cet article.
La parole est M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 9 a pour objet d'ouvrir le bénéfice des allégements de cotisations sociales liés à la réduction du temps de travail à 35 heures aux salariés soumis à des horaires d'équivalence ainsi qu'à ceux qui sont soumis à des dispositions spécifiques en matière de durée maximale du travail.
Il illustre la complexité du mécanisme mis en place par le Gouvernement : la loi du 19 janvier 2000 n'est-elle pas déjà modifiée - on voit bien que c'est une mesure absolument illisible et inexplicable pour la population - afin de lier le bénéfice des allégements de charges sociales au fait de s'engager à réduire le temps de travail ?
J'observe que le Gouvernement n'a pas chiffré - mais peut-être nous l'indiquera-t-il tout à l'heure - le coût des modifications apportées par cet article aux lois Aubry.
Or, à partir du moment où l'on étend les possibilités d'accéder aux allégements de charges sociales, on augmente, par définition, les pertes de recettes pour les régimes de sécurité sociale. Il y aura donc une augmentation des dépenses du FOREC, qui, je le rappelle, sera doté de 85 milliards de francs en 2001.
Par ailleurs, il convient de rappeler que le Sénat s'était opposé, lors de la discussion des lois Aubry, au lien opéré entre réduction du temps de travail et 35 heures, qui a pour conséquence d'entretenir la confusion sur les mérites réels des 35 heures et de réduire l'efficacité des allégements de charges sociales, qui, au lieu d'améliorer la compétitivité des entreprises et le pouvoir d'achat des salariés, servent à compenser le surcoût consécutif aux 35 heures.
Pour ces raisons, nous vous proposons de réaffirmer cette opposition en adoptant un amendement de suppression de cet article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. L'article 9 a pour objet de permettre aux petites entreprises, voire aux très petites entreprises - les hôtels, les cafés, les restaurants, les transporteurs routiers, les boulangeries, les commerces de détail alimentaire - d'accéder aux allégements de charges mis en place par loi du 19 janvier 2000, en compensation de la réduction du temps de travail à 35 heures hebdomadaires ou 1 600 heures annuelles.
Ce dispositif, vous en conviendrez, peut favoriser la conclusion d'accords de branche réduisant la durée du travail dans ces entreprises qui auraient été exclues de la première loi Aubry.
Cette réduction, qui améliorerait les conditions de travail dans des métiers jugés pénibles par ailleurs, pourrait contribuer à résoudre les difficultés de recrutement que nous ont signalés les responsables de ces secteurs, alors qu'ils ont à faire face à une demande en croissance. Il n'est bon ni pour les salariés ni pour les enreprises que les conditions de travail dans ces métiers soient sensiblement moins attractives que dans les autres !
C'est pourquoi je ne peux être favorable à votre amendement, monsieur le rapporteur. Je m'étonne même que vous ayez choisi la censure de cette disposition pour manifester à nouveau votre opposition bien connue à la législation sur les 35 heures.
En ce qui concerne, enfin, l'impact financier, les prévisions de dépenses du FOREC au titre des aides aux 35 heures intègrent un accès des secteurs concernés à ces aides comme si les adaptations proposées étaient déjà intervenues. Il n'y a donc pas de surcoût par rapport au dépenses annoncées.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur. M. Charles Descours, rapporteur. Dont acte pour le coût ! Toutefois, depuis que Mme Guigou a remplacé Mme Aubry au ministère de l'emploi et de la solidarité, j'entends dire par Mme Guigou, par M. Fabius et par M. le Premier ministre qu'un problème se pose pour l'application des 35 heures dans les PME. Raison de plus pour les toutes petites entreprises de moins de vingt salariés, voire, quelquefois, sans salarié ou employant un seul salarié !
Je voudrais donc savoir comment votre argumentation peut s'articuler avec la position de Mme Guigou, de M. Fabius et de M. le Premier ministre, qui nous disent que nous allons probablement revoir l'application des 35 heures dans les PME !
M. Alain Gournac. C'est très important !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous le savez, il existe déjà des souplesses dans la loi.
M. Alain Gournac. Oh !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oui : puisque vous voulez les supprimer aujourd'hui, cela prouve qu'elles existent !
M. Jean Chérioux. Quelles souplesses ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Il faut faire la part des choses entre, d'une part, le débat, l'expression publique, le dialogue social, qui permettent de faire passer des messages pédagogiques de soutien, d'encouragement politique à la mise en oeuvre de dispositifs qui existent et, d'autre part, une réglementation que vous voulez détruire pour satisfaire vos objectifs d'opposition à la mise en oeuvre des 35 heures !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Il est clair que nous sommes formellement contre l'application des 35 heures aux PME de moins de vingt salariés, notamment aux toutes petites PME !
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Charles Descours, rapporteur. On voit bien que c'est impossible, madame le secrétaire d'Etat !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Non, ce n'est pas impossible : la preuve !
M. Charles Descours, rapporteur. Si vous dirigiez un restaurant, vous verriez - les restaurateurs me l'ont expliqué - comme il est facile, en conservant les mêmes horaires d'ouverture et les mêmes prix pour le consommateur, de passer aux 35 heures !
Nous sommes contre l'application des 35 heures dans les PME, c'est clair ! Alors, à propos de cet amendement, n'essayez pas de nous faire dire le contraire !
M. Alain Gournac. Exactement !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. C'est bien pourquoi nous proposons des allégements de charges pour ces petites entreprises !
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Voilà !
M. Charles Descours, rapporteur. Il serait beaucoup plus intéressant de supprimer les 35 heures dans les PME !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Et vous voulez rendre les aides attractives !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 9.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement n° 9 nous éclaire assez largement sur la logique qui habite la majorité de la commission des affaires sociales quand il s'agit de sécurité sociale et de financement de la protection sociale.
Enferré, pour ne pas dire enfermé, dans une stricte logique comptable, notre rapporteur nous invite en effet à supprimer l'article 9 du projet de loi, qui spécifie le champ d'application du FOREC et lui permet notamment d'intervenir lorsque des accords ont conduit à la réduction négociée du temps de travail, singulièrement dans les secteurs où se pose directement la question de la détermination du temps de travail effectif.
Posons le problème : la réduction du temps de travail a-t-elle uniquement un coût, ou bien est-elle susceptible de générer, sinon des produits, du moins des économies ?
Pour notre part, nous estimons qu'il est sans doute délicat de mesurer avec la plus grande précision le nombre d'emplois qui ont pu résulter de l'application des 35 heures, la situation de l'emploi dans chaque entreprise couverte par un accord collectif pouvant connaître d'autres sources d'évolution, comme la nécessité d'un développement de l'activité, la progression du chiffre d'affaires ou la mise en oeuvre d'un effort particulier de recherche-développement.
La réalité nous amène à penser qu'il y a convergence de facteurs ayant concouru, dans la dernière période, à la création d'emplois, quand bien même la qualité de ces emplois peut parfois être mise en cause.
Si le fameux coût des 35 heures est clair pour ce qui concerne les mouvements observés sur le FOREC, il doit, de notre point de vue, être minoré de la croissance économique qu'elles ont permise. Celle-ci a des traductions en termes d'emplois et de recettes fiscales ; elle a aussi, pour ce qui nous occupe aujourd'hui, des traductions sociales.
Notons d'ailleurs, de ce point de vue, qu'aucune des politiques menées entre 1993 et 1997 en matière sociale n'a permis d'atteindre les objectifs de redressement des comptes sociaux que l'amère potion - ah ! j'allais dire : du « docteur Balladur », excusez-moi ! -, s'était pourtant fixés.
Quelle surprise, en effet, que de constater aujourd'hui que c'est ce que nous avons toujours défendu, nous, parlementaires du groupe communiste républicain et citoyen - c'est-à-dire l'amélioration des comptes sociaux par la progression des recettes liées à la création d'emplois et au redressement des salaires -, qui trouve sa concrétisation dans la situation actuelle !
Les 35 heures sont un élément de progression des recettes sociales. Les remettre en cause - au-delà de la question de la qualité des accords collectifs, qui regarde avant tout les partenaires sociaux, ainsi que le Gouvernement quand il s'agit de les agréer - est à la fois antisocial et antiéconomique : antisocial parce que l'aspiration à travailler moins est fortement ancrée dans la mentalité collective des salariés, notamment quand tant de personnes restent privées du droit au travail, et antiéconomique, car la réduction du temps de travail est un des éléments d'amélioration des comptes sociaux, comme d'ailleurs des comptes de l'Etat.
Accessoirement, les 35 heures ne semblent pas avoir profondément bouleversé la rentabilité des entreprises et, quand nous ferons les comptes le 1er janvier, nous nous apercevrons que l'on a pu conjointement mener la réduction du temps de travail et améliorer très sensiblement la productivité et les résultats des entreprises. (M. Alain Gournac rit.)
Vous verrez, monsieur Gournac !
M. Alain Gournac. Ne dites pas n'importe quoi !
M. Guy Fischer. Je vous montrerai la progression du CAC 40, et on en reparlera !
M. Alain Gournac. Ce n'est pas encore fait ! Arrêtez de dire des bêtises !
M. Guy Fischer. Croyez-moi, même s'il s'avère difficile d'appliquer les 35 heures dans les PME, je puis vous dire, pour connaître ces problèmes comme vous compte tenu des responsabilités que nous exerçons, que - et je rejoins là les allusions qui ont été faites tout à l'heure à nos viticulteurs ou à nos agriculteurs - l'année 2000 sera un bon cru pour notre secteur industriel et pour les PME.
Voilà pourquoi nous voterons contre l'amendement n° 9.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Je ne serais pas intervenu si M. Fischer n'était venu nous expliquer à l'instant que le Gouvernement et la majorité plurielle avaient eu raison d'imaginer ce financement, voulu donc par l'Assemblée nationale, subi par la Haute Assemblée, et qui est assuré par la sécurité sociale au moyen d'une tuyauterie imaginée par le Gouvernement, telle qu'avec les financements croisés entre CNAM, CNAF, FSV, etc., plus personne ne s'y retrouve.
Si la situation actuelle apparaît favorable, n'oublions pas que c'est l'arbre qui cache la forêt. Nous savons bien - je l'ai dit à Mme Guigou en m'exprimant à la tribune en ma qualité de rapporteur sur la branche vieillesse - dans quelle situation nous allons nous trouver à l'horizon 2006, 2010 ou 2020.
Le Gouvernement fuit ses responsabilités. Il a imaginé un dispositif qui explosera à la figure des gouvernants à un moment donné. Il a mis en place de véritables bombes à retardement. Les Français ne s'en rendent pas compte pour le moment. Leur laisser croire que le dispositif est équilibré, qu'il peut être supporté par les finances de la sécurité sociale grâce à l'amélioration de la situation économique et sociale, c'est leur mentir, ce n'est pas leur tenir un langage courageux, c'est leur préparer des lendemains douloureux.
Je tenais à le dire en cet instant, car celui qui ne le ferait pas porterait la lourde responsabilité d'être complice du dispositif qui a été imaginé et qui est en train de mettre la France en situation de faiblesse.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je pensais intervenir sur un amendement ultérieur, mais, le débat étant engagé sur ce point, je veux conforter ce qu'ont dit à la fois M. Descours et M. Vasselle.
Contrairement à ce qu'à dit M. Fischer, nous ne sommes pas contre le principe d'un abaissement des heures de travail. Si, dans une économie concurrentielle, les entreprises, en fonction des gains de productivité, peuvent le mettre en place, fort bien ! Cela s'appelle une politique contractuelle ou conventionnelle. Les entreprises le font en fonction de leurs possibilités.
Il n'y a pas longtemps, je m'entretenais avec des responsables de France Télécom. Eux peuvent se permettre 32 heures. Très bien ! S'ils peuvent se le permettre, grâce à une rente téléphonique considérable, c'est leur affaire.
En fait, ce contre quoi nous sommes, c'est l'imposition autoritaire.
M. Alain Gournac. Autoritaire, oui !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Mais non !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Mais si !
Pour la faire accepter, vous êtes conduite à engager des sommes colossales - je dis bien « colossales » - afin de compenser financièrement. On y reviendra dans un instant.
Vous dites que cela permet de créer des emplois. Vous dites également qu'en l'absence de cette baisse du temps de travail, certains métiers ne seront pas attractifs. Mais nous avons tous, dans nos régions, des petits artisans, des petites et moyennes entreprises qui n'arrivent même plus à trouver des employés, car nous sommes parfois, dans certaines parties de nos régions, en situation de suremploi.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Eh bien, oui !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Mais cela bloque l'économie, madame !
Vous dites que cela va créer des richesses, mais c'est l'inverse qui se produit.
Car, pour financer les 35 heures, à combien de milliards de francs de compensation en êtes-vous ? A 85 milliards de francs ! En année de plein régime, vous en serez à 120 milliards de francs ! Avec un tel système, vous êtes sans cesse obligée d'alimenter la pompe à finances et, pour ce faire, vous polluez tout le système des prélèvements fiscaux et sociaux.
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Vous avez, à mon sens, totalement pollué la fiscalité de l'écologie et de l'environnement.
La TGAP, que vous avez créée, pourrait être parfaitement acceptable si les sommes ainsi prélevées étaient destinées à la défense de l'environnement. Mais non ! On taxe la pollution et, plutôt que de consacrer le produit de cette taxe à l'environnement, on s'en sert pour financer les 35 heures. Le même raisonnement vaut pour le FOREC, sauf que, là, c'est la sécurité sociale que l'on taxe pour alimenter les 35 heures.
Ainsi, vous polluez plusieurs secteurs de la fiscalité. Vous ponctionnez 100 milliards de francs, alors que le budget de l'Etat est en déficit de 200 milliards de francs.
Cette politique est irrationnelle, car elle conduit à augmenter encore des prélèvements fiscaux déjà excessifs. Nous sommes, parmi les grands pays développés, les champions d'Europe en la matière puisque les prélèvements fiscaux atteignent 45,4 % - excusez du peu ! - et les prélèvements sociaux 21,4 %, contre 20,4 %, il y a quatre ans.
Ne venez pas nous dire que vous allez développer l'économie avec un tel système ! Au contraire, soyez assurée qu'en accroissant leurs charges vous ne rendez pas un bon service aux entreprises.
Voilà pourquoi nous partageons la position de la commission des affaires sociales.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Il est tout de même dommage que l'on s'enferme dans une telle logique, qui est démentie par l'adhésion de tous nos concitoyens à la réduction du temps de travail, qu'ils plébiscitent.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est de la démagogie !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Franchement, 300 000 emplois créés cette année grâce à la réduction du temps de travail, plus d'un million depuis 1997, vous ne pouvez dire que c'est de la démagogie ! C'est tangible ! C'est ce qui permet à l'économie française de redémarrer, d'être conquérante.
Il n'est qu'à voir les difficultés qu'éprouvent nombre de petits ou de moyens entrepreneurs, de commerçants, notamment dans les commerces de bouche, dans la petite distribution, dans l'hôtellerie, à recruter des jeunes, qui ne veulent pas travailler cinquante ou soixante heures par semaine et qui voient que d'autres peuvent bénéficier, eux, d'une vie familiale et professionnelle équilibrée, pour se rendre compte que votre démonstration va à l'encontre de l'intérêt de ces entrepreneurs.
Les petites et moyennes entreprises ont besoin, elles aussi, de pouvoir proposer des aménagements, des réductions du temps de travail à leurs employés, pour attirer des candidats vers ces métiers qui sont absolument nécessaires au développement de la croissance, pour répondre à la demande de nos concitoyens, qui retrouvent une capacité de consommation et qui reprennent confiance dans une économie restaurée.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 est supprimé.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - I. - L'article L. 131-9 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
« 1° Au 1°, sont insérés un d et un e ainsi rédigés :
« d) A la prise en charge de l'exonération visée aux articles L. 241-6-2 et L. 241-6-4 du présent code, et L. 741-5 et L. 741-6 du code rural ;
« e) A la prise en charge de l'incitation à la réduction collective du temps de travail prévue aux articles 39 et 39-1 de la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 quinquennale relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle. » ;
« 2° Au deuxième alinéa du 2° , les mots : "aux a, b et c " sont remplacés par les mots : "aux a, b, c, d et e ".
« II. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur au 1er janvier 2001. »
Sur l'article, la parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac. Cet article concerne l'une des plus remarquables monstruosités juridiques inventées par la majorité plurielle : le FOREC.
Institué il y a un an, le FOREC demeure encore aujourd'hui à l'état virtuel. Nous attendons le décret définissant son fonctionnement, son mode d'organisation, son mode de gestion, son financement, ses modalités de contrôle. On ne sait rien. Mais on en parle !
Malgré ce vide juridique, ce fonds réussit l'exploit d'être en déficit en 2000 et de présenter un besoin de financement à hauteur de 85 milliards de francs pour 2001, dont la moitié est imputable aux exonérations de cotisations sociales liées à la mise en place de la réduction généralisée et autoritaire du temps de travail.
Le financement de ce fonds est d'une complexité stupéfiante. Heureusement, les excellents documents élaborés par les rapporteurs de la commission des affaires sociales et de la commission des finances nous permettent de nous y retrouver dans les tuyauteries de l'usine à gaz.
Ainsi, les ressources du FOREC laissent apparaître que l'Etat ne prend plus ou pas à sa charge les dépenses liées aux 35 heures,...
M. Alain Vasselle. Absolument !
M. Alain Gournac. ... choisissant de les faire peser sur notre système de protection sociale.
M. Alain Vasselle. Voilà !
M. Alain Gournac. Or, une projection dans l'avenir laisse prévoir un coût des 35 heures, en régime de croisière, proche de 110 à 120 milliards de francs par an !
Les comptes de la sécurité sociale ne vont pas si bien pour pouvoir absorber une telle charge financière.
M. Alain Vasselle. C'est évident !
M. Alain Gournac. Quant à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail sur le terrain, elle demeure très préoccupante, contrairement à ce que vous venez de nous dire, madame le secrétaire d'Etat. La mise en place des 35 heures dans les entreprises fait les belles heures des cabinets d'avocats et de conseils. Les textes législatifs réglementaires atteignent un niveau d'illisibilité tel que cela pourrait remettre en cause le principe selon lequel nul n'est censé ignorer la loi.
S'agissant de l'application de ces mesures dogmatiques dans les PME, les dirigeants d'entreprise s'arrachent les cheveux pour les mettre en place, usant leur énergie à trouver des solutions qui ne les conduisent pas à mettre la clé sous la porte.
Et qu'on ne vienne pas nous expliquer que les 35 heures ont permis d'améliorer les chiffres de l'emploi en France !
Les pays européens voisins, je l'ai déjà dit, connaissent les mêmes résultats positifs sans avoir imposé quoi que ce soit à leurs dirigeants d'entreprises et sans avoir entraîné leur pays dans une spirale croissante de dépenses publiques compromettant l'équilibre des comptes sociaux.
Tout au contraire, ils font le choix de réduire les dépenses, comme en Espagne, ou de baisser significativement les prélèvements, comme en Allemagne, pour favoriser le développement de la croissance.
J'ai pris l'exemple de ces deux pays politiquement différents pour éviter, sur un sujet aussi préoccupant, de faire de la politique politicienne.
Madame le secrétaire d'Etat, vous êtes une Européenne convaincue. Prenez exemple sur ces pays. Ce ne sont ni de mauvais exemples ni de mauvais Européens. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Monsieur le président, mes chers collègues, nous allons maintenant examiner deux articles concernant le FOREC, c'est-à-dire la débudgétisation de vingt milliards de francs d'impôts de l'Etat et celle de quelque trois milliards de francs de dépenses de l'Etat.
Il y a deux façons de poser le problème du FOREC. Il y a, d'abord, celle qui consiste à examiner en détail la « tuyauterie », puisque c'est le terme qui a été adopté - on ne peut plus parler d'usine à gaz, c'est une raffinerie ! - mais ce travail a déjà été fort bien fait par nos rapporteurs, qui nous ont parfaitement éclairés.
Ou bien alors, on examine globalement tout le mouvement de débudgétisation que traduit ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Moi, je m'appuie toujours sur les documents fournis par le Gouvernement. Non pas que je mette en doute le moins du monde le travail des rapporteurs, mais parce que ces documents sont opposables au Gouvernement.
Et dans le « jaune », excellent, qui s'intitule : Bilan des relations financières entre l'Etat et la protection sociale, on peut considérer les choses globalement.
Sur deux ans, c'est-à-dire de 1999 à 2001, on voit que les dépenses concernant les politiques menées par l'Etat en matière de protection sociale ont diminué de cinquante deux milliards de francs - cinquante deux milliards de francs transférés donc de l'Etat vers l'ensemble FOREC-sécurité sociale - passant de 193 milliards de francs, en 1999, à 141 milliards de francs en 2001.
Quand on tourne la page, on voit apparaître les recettes, les impôts transférés. Et l'on s'aperçoit alors qu'ils ont augmenté, eux, de 104 milliards de francs, juste le double, passant de 456 milliards de francs à 560 milliards de francs.
Donc, 52 milliards de francs de dépenses débudgétisées et 104 milliards de francs de recettes débudgétisées. Voilà le problème !
En effet, quand, parlant du budget de l'Etat, on dit à nos concitoyens que les dépenses de l'Etat vont augmenter de 1 % ou que les impôts vont diminuer de tant, on doit faire cette consolidation globale avec la sécurité sociale. On ne peut pas nier ce transfert considérable, que nous devons tout de même dénoncer devant l'opinion publique.
Je sais bien que certains diront que ces 104 milliards de francs d'impôts couvrent, pour l'essentiel, des aides à l'emploi. Mais, précisément, les aides à l'emploi font partie - M. le rapporteur l'a parfaitement démontré - du domaine normal du budget de l'Etat. Cela n'a rien à voir avec la sécurité sociale, et c'est pourquoi je me permets d'intervenir ici dans un domaine qui n'est pas normalement le mien.
Dans les 84 milliards de francs d'aides à l'emploi, il y a effectivement, il faut le dire, la ristourne Juppé et également les 31 milliards de francs d'aides incitatives et pérennes pour les 35 heures.
A cet égard, j'ai très bien compris vos propos, madame la secrétaire d'Etat, lorsque vous disiez tout à l'heure que nombre de nos concitoyens se félicitaient de l'instauration des 35 heures. Mais ils attendent aussi autre chose : des augmentations de salaire !
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Yves Fréville. Je ne suis pas opposé aux 35 heures. Pour bon nombre de travailleurs des industries de labeur - je pense aux abattoirs dont on parle beaucoup actuellement, ou aux industries agroalimentaires -, la réduction du temps de travail est une avancée fondamentale. Pour autant, d'autres ne demanderaient pas mieux, surtout en période de croissance économique, que de travailler plus et d'être rémunérés en heures supplémentaires, contribuant ainsi à soutenir la consommation des ménages et à alimenter votre mécanisme.
La majorité sénatoriale n'est donc pas hostile par principe aux 35 heures ; elle dénonce simplement l'absence totale de souplesse du dispositif que vous proposez.
Je terminerai en disant, à l'instar de M. Gournac, que la façon tout à fait cavalière dont vous vous êtes comporté en 2000 montre que tous ces organismes, prétendûment établissements publics, sont du « pipeau ».
Le Parlement affecte les droits sur l'alcool au FSV. Il est décidé ensuite que les excédents du FSV alimenteront le fonds de retraites dont vous nous parlez. Et par un trait de plume, dans un collectif dont nous n'avons pas encore discuté, que nous ne connaissons pas, vous décidez, sans prévenir quiconque, de réaffecter ces 5,1 milliards de francs de droits sur les alcools au FOREC, pour combler son déficit ! Cette façon de procéder montre très bien que ces opérations de débudgétisation sont des opérations de camouflage ; elles ne permettent pas à nos concitoyens de voir la réalité des choses. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Sur l'article 10, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 10 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 48 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer l'article 10.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 10.
M. Charles Descours, rapporteur. Au préalable, je ferai deux réflexions.
Nous parlons du problème des PME et M. Fischer évoque le CAC 40 !
M. Guy Fischer. Non !
M. Charles Descours, rapporteur. Combien y a-t-il de PME au CAC 40 ? Il ne doit pas y en avoir beaucoup ! Peut-être quelques-unes sont-elles cotées au NASDAQ...
M. Guy Fischer. Je visais les grosses PME ! Je ne suis pas idiot, quand même !
M. Charles Descours, rapporteur. En revanche, les chiffres que cite M. Fréville sont exacts. Ils figurent d'ailleurs à la page 79 de mon rapport écrit.
S'agissant de l'amendement n° 10, après les plaidoyers de MM. Gournac et Fréville, je n'ai pas grand-chose à ajouter pour le défendre. Je rappellerai simplement pour mémoire que l'article 10 prévoit l'extension du champ de compétences du FOREC aux exonérations de la loi de Robien et aux exonérations de cotisations d'allocations familiales, principalement accordées aux employeurs agricoles.
Mais le FOREC n'est toujours pas en place et nous sommes hostiles à ces débudgétisations et à ces échanges permanents - M. Fréville les a bien dénoncés - entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale. C'est un mélange entre la politique de l'emploi et le financement de la sécurité sociale.
Pour toutes ces raisons, je considère qu'il faut continuer à « débrancher les tuyaux », et c'est l'objet de l'amendement n° 10, qui vise à supprimer l'article 10.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 48.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Cet amendement, identique à celui de la commission des affaires sociales, a une motivation profonde.
Je souhaite souligner ce travail de Sisyphe que, année après année, nous essayons de poursuivre, qui consiste à demander au Gouvernement de nous présenter des comptes publics ou sociaux clairs et compréhensibles.
Souvenez-vous, nous avons mis plusieurs années à obtenir que la Constitution habilite le Parlement à voter une loi de financement de la sécurité sociale ; nous l'avons obtenue. Nous avons mis des années à obtenir la création d'une commission des comptes de la sécurité sociale avec un secrétaire général ; cela a finalement été entériné, un amendement ayant été voté à cette fin en premier lecture dans cet hémicycle, et, chaque année, cette commission des comptes relève les insuffisances de clarté des comptes sociaux.
Lorsque des améliorations sont apportées, notamment en termes de comptabilité ou de droits constatés, nous nous en réjouissons. Mais, année après année, à côté de cette clarification qui s'effectue peu à peu, nous constatons un travail de sape, d'opacité volontaire, que ce soit en termes de gestion budgétaire ou de débudgétisation, comme l'a dit notre collègue Fréville, ou que ce soit dans les comptes sociaux, comme on vient de le voir avec le FOREC. Le secrétaire général de la commission des comptes de la sécurité sociale dénonce, année après année, cette situation. Mais cela ne semble pas émouvoir outre mesure le Gouvernement !
Nous pensons que les choses deviennent assez graves. Je citerai un seul exemple, qui ne concerne pas les comptes sociaux : les 150 milliards de francs de dette de la SNCF ont été transférés à Réseau ferré de France mais ils ne sont pas pris en compte dans l'endettement de notre pays !
Il nous faut des comptes consolidés !
La commission des finances - et la commission des affaires sociales partage notre souci - souhaite pouvoir disposer des modalités précises de consolidation des comptes de façon à démonter la tuyauterie que vous avez créée et ainsi faire apparaître, d'abord au Parlement, ensuite auprès de nos concitoyens, la réalité des comptes publics fiscaux et celle des comptes sociaux : tout le monde doit savoir où va l'argent des contribuables. Au niveau de prélèvements obligatoires que nous avons atteint, c'est la moindre des choses vis-à-vis des Français !
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement, identique à celui de la commission des affaires sociales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Messieurs les rapporteurs, messieurs Fréville et Gournac, en fait, vous vous élevez contre le principe même du FOREC. Or, messieurs, qu'est-ce que le FOREC sinon une institution permettant d'identifier le montant des allégements de charges liés à la réduction du temps de travail ?
Je suis votre raisonnement : on supprime le FOREC. Que se passe-t-il ?... Soit des exonérations non compensées à la sécurité sociale et donc une diminution de ses ressources - je ne pense pas que ce soit votre objectif - soit une compensation directe par le budget de l'Etat, et donc une dépendance de plus en plus grande de la sécurité sociale au budget de l'Etat - je ne pense pas non plus que ce soit votre objectif.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. C'est l'Etat qui a imposé les 35 heures !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oui, la sécurité sociale est désormais moins dépendante du budget de l'Etat.
M. Yves Fréville. Oh !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oui, des ressources fiscales ad hoc sont affectées au FOREC ! Il y a une nouvelle politique, donc il y a une nouvelle affectation des ressources publiques. Il n'y a là rien de choquant.
Le fond du problème, c'est en fait votre hostilité au principe même des 35 heures et de l'allégement des charges, ainsi qu'à tout dispositif de financement des 35 heures, quel qu'il soit. Ainsi, chaque fois que vous entendez « allégement de charges », « 35 heures », vous êtes hostiles et vous demandez la suppression.
Je ne peux pas vous suivre dans cette voie, vous l'imaginez bien.
L'article 10 que vous proposez de supprimer a pour objet de rationaliser le périmètre d'intervention du FOREC. Il permet de faire prendre en charge par l'établissement public l'ensemble des mesures d'aide à la réduction du temps de travail, notamment l'aide dite de Robien mise en place - est-il besoin de le rappeler ? - par l'actuelle opposition. Le coût de cette mesure est pris en compte dans l'équilibre financier du FOREC qui vous est présenté.
M. Alain Gournac. Nous avions négocié !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. La réduction du temps de travail est aussi négociée, monsieur le sénateur !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je souhaite apporter quelques précisions.
Nous sommes contre l'affectation de recettes sociales au FOREC. Nous disons : le Gouvernement et sa majorité ont décidé les 35 heures, leur financement doit donc relever du budget général.
M. Alain Gournac. Point !
M. Patrice Gélard. Exactement !
M. Charles Descours, rapporteur. C'est simple, précis, et il n'y a rien à ajouter !
A votre argument, madame le secrétaire d'Etat, selon lequel nous sommes opposés au FOREC et que nous en demandons la suppression, je réponds : comment voulez-vous demander la suppression d'un organisme qui n'existe pas ?
Je vous avais posé en commission la question suivante, qui figure à la page 40 de mon rapport écrit : « Quelles sont les raisons de la création retardée du "fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale" ? » Vous m'aviez répondu : « Conformément aux dispositions de l'article LO 111-4 du code de la sécurité sociale, les éléments de réponse à la question posée, et notamment le compte prévisionnel du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale pour les exercices 2000 et 2001, seront présentés en annexe - annexe f - au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. »
Je me suis dit : Diantre ! Précipitons-nous sur l'annexe f ! Naturellement, l'annexe f , si elle présente les comptes du FOREC, n'explique en aucune façon les raisons du retard à le créer effectivement !
Alors, madame le secrétaire d'Etat, nous ne sommes pas contre le FOREC...
M. Alain Gournac. Il n'existe pas !
M. Charles Descours, rapporteur. ... mais nous vous demandons pourquoi le FOREC, qui a été créé par une loi, n'est toujours pas mis en place.
Je le répète, nous ne pouvons pas dissoudre quelque chose qui n'existe pas !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vous rassure tout de suite monsieur le rapporteur : le décret de création du FOREC est actuellement soumis au Conseil d'Etat, et va sortir sous peu. Il a effectivement fallu un certain temps à l'administration pour aboutir à cette étape.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. On verra !
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 10 et 48.
M. Roland Muzeau. Je demande la parole contre les amendements.
M. le président. La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Ces deux amendements identiques poussent le paradoxe de la position de nos rapporteurs jusqu'aux limites de la contradiction.
L'article 10 du présent projet de loi vise en effet à s'assurer de la couverture effective des exonérations de cotisations sociales procédant des dispositions de la loi Robien et découlant de lois déjà assez largement antérieures que la majorité sénatoriale avait votées.
La solution de financement préconisée est-elle la meilleure, consistant à confier au FOREC la gestion et le financement de ces dispositions, attendu que ce fonds perçoit certaines recettes affectées ? On peut se poser la question.
Nous avons eu l'occasion de dire que ces solutions étaient peut-être discutables, de même qu'il était d'ailleurs discutable de se demander si la meilleure politique publique pour l'emploi était de procéder à des allégements de cotisations sociales.
Pour autant, l'article 10 a le mérite d'assurer un financement cohérent de dispositions qui ont pu souffrir d'être couvertes dans le passé par des autorisations de découverts budgétaires, et non par des ressources propres.
La simple sincérité budgétaire nous incite donc à rejeter sans ambiguïté ces deux amendements, dont on peut d'ailleurs s'étonner qu'ils aient été déposés par ceux-là mêmes qui nous en parlent assez régulièrement et qui ont voté les textes couverts par le champ des dispositions de l'article.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Monsieur Muzeau, vous plaisantez ou vous le faites exprès ?
M. Guy Fischer. Nous le faisons exprès !
M. Charles Descours, rapporteur. Je rappelle que, si les exonérations de Robien ont été effectivement votées par la majorité précédente, le FOREC a été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, il y a un an. Ce ne sont pas les lois de Robien que nous demandons de supprimer, c'est le FOREC !
Nous disons que la majorité plurielle doit prendre ses responsabilités ; ...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Charles Descours, rapporteur. ... nous disons que, lorsque nous étions au pouvoir, c'est à la charge du budget général que nous mettions les exonérations que nous décidions !
M. Alain Gournac. Oui !
M. Charles Descours, rapporteur. Nous ne ponctionnions pas la sécurité sociale !
Alors, faites pareil, et vous pourrez nous donner des leçons !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oh !
Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. On va se parler calmement.
M. Charles Descours, rapporteur. Il faut bien un peu se réveiller de temps en temps !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. On n'est pas obligé de jouer à se mettre en colère quand ce n'est pas le cas !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est un élève de Mme Aubry ! (Rires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. S'agissant des 35 heures, un certain nombre de rappels me semble s'imposer.
Tout d'abord, le coût des 35 heures correspond à des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale. On n'est donc pas infondé à parler du financement de la réduction du temps de travail dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale puisqu'il s'agit d'exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale. Ce n'est pas une charge supplémentaire mais, au contraire, un allégement de charges existantes.
Ensuite, les dépenses au titre du FOREC, qui vont s'établir à 85 milliards de francs en 2001, se partagent de la façon suivante : 40 milliards de francs correspondent au coût des allégements accordés au titre du passage aux 35 heures - leur décompte figure dans les documents qui vous ont été transmis - alors que les 45 milliards de francs restants correspondent à la ristourne Juppé ainsi qu'au coût de l'exonération de Robien. Il s'agit donc de dépenses correspondant à des allégements de charges.
Par ailleurs, l'Etat se privera de certaines recettes qui entraient auparavant dans son budget général, à savoir des droits sur les tabacs, qui passent en totalité dans le FOREC. L'équilibre est donc constitué, et il est lisible.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je me félicite que le ministère de la santé se réjouisse que les droits du tabac soient enlevés à la CNAM pour aller au FOREC !
M. Alain Gournac. Oui, c'est incroyable !
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, les cancéreux des poumons vous remercient ! (Exclamations sur les travées socialistes.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Oh !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 10 et 48, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est supprimé.

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - I. - Le 1° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 1° Une fraction égale à 96,8 % du produit du droit de consommation visé à l'article 575 du code général des impôts ; ».
« II. - A la troisième phrase du III de l'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-1194 du 23 décembre 1998), les mots : "fraction du produit du droit de consommation visé à l'article 575 du code général des impôts, dans les conditions fixées par l'article 55 de la loi de finances pour 2000" sont remplacés par les mots : "fraction égale à 0,39 % du produit du droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts".
« III. - Le septième alinéa de l'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 1° Une fraction égale à 2,81 % du droit de consommation prévu à l'article 575 du code général des impôts ; ».
« IV. - Le 4° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 4° Le produit des droits visés aux articles 402 bis, 438 et 520 A du code général des impôts ainsi qu'une fraction égale à 55 % du produit du droit de consommation visé à l'article 403 du code général des impôts, à l'exception du produit de ce droit perçu dans les départements de la Corse et du prélèvement effectué au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles selon les dispositions de l'article 1615 bis du même code ; ».
« IV bis. - Le troisième alinéa (2°) de l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale est supprimé.
« V. - Le 5° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« 5° La taxe sur les véhicules des sociétés visée à l'article 1010 du code général des impôts ; ».
« VI. - A. - Supprimé.
« B. - Après le 5° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :
« 5° bis Une fraction de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances visée à l'article 991 du code général des impôts, dans les conditions fixées par la loi de financement de la sécurité sociale et la loi de finances ; ».
« C. - Pour l'année 2001, la fraction visée au 5° bis de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale est égale à 14,1 %.
« VII. - Les dispositions du I sont applicables pour la fraction affectée à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés transférée au fonds mentionné à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, en application du même I, aux sommes à recevoir à compter du 1er janvier 2001.
« VIII. - Les dispositions du IV s'appliquent aux sommes reçues à compter du 1er janvier 2000.
« Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget fixe la date et le montant du reversement par le Fonds de solidarité vieillesse mentionné à l'article L. 135-1 du code de la sécurité sociale des sommes perçues au cours de l'exercice 2000 au titre de l'article L. 131-10 du même code. »
Sur l'article, la parole est à M. Gournac.
M. Alain Gournac. Avec cet article, on nous explique que, plus nous boirons, plus nous fumerons, plus nous polluerons, plus cela coûtera cher à la sécurité sociale... mieux les 35 heures seront financées. Ben, voyons !
Lorsque l'on connaît l'impérieuse nécessité qu'il y aurait à mener une politique de prévention intensive contre ces fléaux, dont la diminution ne serait pas sans influence significative sur les dépenses de santé publique, nous ne pouvons qu'insister sur l'erreur que constitue l'utilisation de ces recettes pour des mesures qui n'ont aucun lien, même lointain, avec l'origine du prélèvement.
Lorsque l'on sait que 50 000 Français meurent chaque année des ravages de l'alcool et que six fois plus souffrent de pathologies liées à une consommation excessive d'alcool, lorsque l'on constate que plus de 60 000 Français décèdent à cause des méfaits du tabac et que ce chiffre est en hausse constante, notamment au sein de la population féminine, on ne peut que déplorer les choix du Gouvernement.
Lorsque l'on constate enfin que, par un jeu de taquet, une grande partie des excédents de la branche famille permet de financer le FOREC, la coupe est pleine.
Notre groupe ne pourra donc que s'opposer à ces manipulations comptables que le Gouvernement devrait s'efforcer de combattre, parce qu'elles sont en contradiction avec des principes qui, j'en suis sûr, font l'unanimité.
Mes chers collègues, la comptabilité n'exclut pas un minimum d'éthique. Ne la réservons pas aux seuls comités ad hoc.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Je me suis déjà exprimé sur le FOREC, je me bornerai donc à poser deux questions à Mme le secrétaire d'Etat.
Ma première question est la suivante : puisque le FOREC est un établissement public, quel est actuellement l'ordonnateur de ses dépenses ? J'ai lu que c'était l'ACOSS. Pourtant, en principe, qui dit établissement public dit budget. Je voudrais donc savoir qui a la faculté d'exécuter ce budget.
Ma seconde question concerne l'évolution des recettes. Vous avez dit, madame le secrétaire d'Etat, que des projections sur plusieurs années avaient été établies s'agissant de la CADES. Je serais heureux de savoir si les projections que vous n'avez pas manqué de faire sur l'évolution des recettes transférées par l'Etat au FOREC nous assurent qu'il n'y aura plus jamais de subvention d'équilibre versée par le budget. S'il y a subvention d'équilibre en provenance du budget - et c'est prévu dans le texte qui crée le FOREC - votre appréciation sur la garantie qu'apporte ce transfert de recettes au FOREC pour la couverture du coût du passage aux trente-cinq heures perdrait toute pertinence.
M. le président. La parole est à M. Franchis.
M. Serge Franchis. MM. les rapporteurs et nombre de nos collègues ont insisté avec talent sur les effets pervers de la méthode de parcellisation du financement de la protection sociale et sur les phénomènes de débudgétisation.
Ils ont dénoncé en particulier les conditions de financement du FOREC, c'est-à-dire les modalités du financement des incidences de la loi sur les trente-cinq heures.
Parmi les moyens de financement du FOREC figurent les produits des droits de circulation sur les vins, précédemment affectés au Fonds de solidarité vieillesse. Les professionnels de la filière viti-vinicole rappellent à cette occasion que les droits de circulation sur les vins avaient à l'origine vocation à assurer le financement du contrôle de la qualité des produits, notamment, en partie, celui de l'Institut national des appellations d'origine. Ces droits ont ensuite été affectés au financement du Fonds de solidarité vieillesse. Et les voilà maintenant transférés au financement de la réduction du temps de travail.
La filière viti-vinicole s'insurge contre l'affectation de taxes prélevées sur les vins, qui représentent environ 800 millions de francs, au financement de mesures n'ayant aucun rapport avec ses produits.
Le Gouvernement semble ignorer l'extrême sensibilité des régions viticoles sur un tel sujet à un moment où se révèle la nécessité de défendre la viticulture française, et ce d'autant plus que ce transfert se met en place sans concertation avec la population.
Les vignerons du nord de la Bourgogne, d'Irancy, de Saint-Bris-le-Vieux, de Vézelay et de Chablis ne sauraient admettre ce qu'ils considèrent comme un détournement d'affectation d'un financement nécessaire à la surveillance économique de la filière, à la traçabilité et à la qualité des produits.
Les professionnels de la filière ont conscience qu'ils contribuent à la réputation de la France à travers le monde et à l'excédent de notre balance agroalimentaire. Ils souhaitent être écoutés par les pouvoirs publics.
Le rapport d'évaluation de M. Berger sur la loi Evin reconnaissait à la filière son approche socialement responsable. Les acteurs de cette filière ont en effet pour objectifs d'assurer une politique qualitative à travers une fiscalité adaptée et de participer à une consommation responsable en contribuant à l'éducation des consommateurs.
L'amendement présenté par M. César traduisait ces objectifs. Puisqu'il n'aura plus d'objet si l'amendement de suppression de la commission des affaires sociales est adopté, j'indique au Sénat que la filière viti-vinicole souhaite l'ouverture d'un véritable débat sur les instruments d'une politique efficace de santé publique.
Il serait intéressant de savoir comment le Gouvernement a l'intention de répondre à l'attente de la viticulture.
M. le président. La parole est à Mme Dieulangard. Mme Marie-Madeleine Dieulangard. L'année dernière, l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale créait un nouveau fonds chargé du financement des dispositifs d'allégement de cotisations sociales en organisant la diversifications des ressources.
A l'époque, le rapporteur de notre commission des affaires sociales évoquait « une synthèse monstrueuse de deux promesses électorales », la réforme des cotisations et la réduction du temps de travail.
Bien entendu, monsieur le rapporteur, je ne vous suivrai pas sur ce terrain, ni bien sûr dans vos exagérations de langage. Les sénateurs socialistes revendiquent pleinement la corrélation entre l'un et l'autre.
L'exonération des charges patronales sur les bas et moyens salaires pour la main-d'oeuvre peu qualifiée est une démarche que nous avons tous préconisée, à droite comme à gauche. M. Alain Juppé lui-même y avait souscrit en plafonnant ces exonérations à 1,3 SMIC. Chacun était bien conscient qu'il y avait là un outil de lutte en faveur de l'emploi.
En l'occurrence, l'importante extension de la ristourne dégressive concerne près de 70 % des salariés et permet la prise en charge de près de 86 % des cotisations pour un salaire égal au SMIC.
Ces exonérations sur lesquelles vous êtes si vindicatifs, messieurs de la majorité sénatoriale, ne constituent pas, selon nous, un chèque en blanc. Nous avons en effet souhaité lier son application à la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail afin d'en optimiser l'impact sur la création d'emplois, qui est la priorité du Gouvernement, et afin d'améliorer les conditions de travail des salariés.
Il n'y a là rien de scandaleux, pas plus qu'il n'est scandaleux d'aider les entreprises de main-d'oeuvre à appliquer les trente-cinq heures.
La diversification des ressources qui permettent de financer les exonérations de cotisations se poursuit cette année. Elle donne lieu à des analyses parfois caricaturales sur lesquelles je veux revenir brièvement. Nous en avons entendu une kyrielle cet après-midi. Nous avons même atteint des sommets.
Certains dénoncent l'affectation d'une partie des droits sur l'alcool au profit du FOREC ; d'autres, notamment M. Franchis, estiment qu'il est même inadmissible que ces taxes financent les trente-cinq heures.
Je me dois, à cet égard, de rappeler avant tout que cette fraction des droits sur l'alcool n'est pas un nouveau prélèvement, puisqu'elle était jusqu'ici affectée au FSV pour le financement d'avantages vieillesse non contributifs, notamment pour les périodes de chômage ou de service national.
J'ajoute que, de par sa nature, cette affectation demeure dans le champ du financement de la protection sociale. En 1993, il s'agissait de remboursements aux différents régimes de retraite. Aujourd'hui, il s'agit de la prise en charge des exonérations de cotisations sociales, en particulier de celles qui sont liées à l'ensemble des dispositifs de réduction du temps de travail, mais aussi de celles qui s'appliquent aux zones de revitalisation rurale.
Ce fonds a le mérite de regrouper dans une seule entité juridique l'essentiel des mécanismes d'exonération de cotisations, et nous nous prononçons sur son financement dans ce cadre juridique adapté. Il s'agit de compensations pour des exonérations. Si nous ne procédions pas à ces compensations, cela déstabiliserait les comptes de la sécurité sociale, que les mesures initiées par le Gouvernement de Lionel Jospin ainsi que la croissance ont contribué à redresser.
M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 11 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 49 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer l'article 11.
Les deux amendements suivants sont présentés par MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 82 tend à rédiger comme suit le texte proposé par le I de l'article 11 pour le 1° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale :
« 1° Une contribution assise sur le montant net versé par les sociétés, les entreprises et autres personnes morales, assujetties en France, à la déclaration de l'impôt sur les sociétés, au titre de l'article 206 du code général des impôts, des revenus des capitaux mobiliers, des plus-values, gains en capital et profits réalisés sur les opérations menées sur titres, les opérations menées sur les marchés réglementés et sur les marchés à terme d'instruments financiers et de marchandises, ainsi que sur les marchés d'options négociables.
« Pour les sociétés placées sous le régime de l'article 223 A du code général des impôts, la contribution est due par la société mère.
« Le taux de cette contribution sociale sur les revenus financiers des entreprises est fixé à 10 %. La contribution sociale est contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles que les cotisations sociales. »
L'amendement n° 83 vise à supprimer le IV de l'article 11.
Par amendement n° 53 rectifié bis , MM. César, Huchon, Doublet, Eckenspieller, Franchis, de Montesquiou, Gaillard, Darcos, Rispat, Fournier, Hugot, Valade, Vinçon, Lepeltier, de Richemont, Vial, Dufaut, Haenel, Bernard, Courtois, Ostermann et de Broissia proposent :
I. - Dans le texte présenté par le IV de l'article 11 pour le 4° de l'article L. 131-10 du code de la sécurité sociale, de supprimer la référence : « , 438 »
II. - Afin de compenser les pertes de recettes du I ci-dessus, d'insérer, après le IV, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant de la suppression de l'affectation au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale des droits de circulation sur les vins sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. » Par amendement n° 84, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent de supprimer le IV bis de l'article 11.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 11.
M. Charles Descours, rapporteur. Ce fonds est une « synthèse monstrueuse de deux promesses électorales », ai-je failli répéter, madame Dieulegard. Il s'agit du moins d'un rapprochement, peut-être monstrueux, de deux promesses électorales.
Quoi qu'il en soit, quand nous disons « usine à gaz » et « tuyauteries compliquées », vous parlez plus élégamment de « diversification des ressources ». Au fond, nous sommes donc d'accord.
Je vous rappelle qu'il y a six taxes affectées au FOREC cette année, sans compter les ponctions sur le Fonds de solidarité vieillesse et les 18 milliards de francs de la sécurité sociale. C'est cela la « diversification des ressources », selon vous. Pour nous, c'est de la « tuyauterie bien compliquée », et nous débranchons quelques tuyaux pour éviter les courts-circuits entre la loi de financement de la sécurité sociale et la loi de finances.
Avec l'article 11, il s'agit de réaffecter des recettes au profit du FOREC et au détriment du Fonds de solidarité vieillesse et de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés. En effet, le FSV perd l'intégralité des droits sur les alcools - M. Franchis vient de le rappeler - et la CNAMTS une grande partie des droits sur le tabac, comme Mme le secrétaire d'Etat l'a indiqué très opportunément tout à l'heure.
La commission des affaires sociales ne souhaite pas diminuer les recettes du FSV de 5,7 milliards de francs à cinq ans du choc démographique sur les retraites, M. Vasselle l'a clairement rappelé hier.
La commission des affaires sociales a toujours souhaité l'affectation des droits sur le tabac à la CNAMTS. Je rappelle que, même lorsque des gouvernements que nous soutenions étaient au pouvoir, nous avions déploré que le centime supplémentaire par cigarette qui avait été instauré par la loi Evin, me semble-t-il, n'ait jamais été versé à la CNAMTS. Nous avons toujours dénoncé cette pratique, sous tous les gouvernements.
Comme, chaque année, 60 000 personnes meurent à cause du tabac, il est logique que les droits sur le tabac soient affectés en quasi-totalité à la CNAMTS, et non pas à la réduction du temps de travail. Voilà un objectif de santé publique qui nous semble logique, compréhensible par l'opinion publique. En revanche, il nous paraît très difficile d'expliquer à nos concitoyens que les droits sur les tabacs doivent servir à financer les 35 heures.
Cette pratique remonte, certes, au gouvernement Juppé, mais vous êtes au pouvoir depuis bientôt quatre ans...
Nous avons décidé de remonter jusqu'à 1997...
M. Guy Fischer. Une bonne année pour nous !
M. Jean Delaneau, président de la commission de affaires sociales. Lisez le rapport Renaud !
M. Charles Descours, rapporteur. ... et non jusqu'au gouvernement de Bérégovoy. Restons-en là !
Puisque vous êtes au pouvoir depuis quatre ans, ou vous n'exercez aucune responsabilité ou vous n'avez rien fait ! Si vous avez agi, parlez de ce que vous avez fait ! Mais cessez de vous référer sans arrêt au passé, d'autant que, je le signale au passage, depuis 1981, la majorité plurielle a été plus souvent au pouvoir que nous !
Nous proposons de supprimer l'article 11, parce que nous ne pouvons pas approuver le transfert du produit de ces taxes au FOREC, à un établissement public mal identifié. En tant que président du conseil de surveillance de l'ACOSS, monsieur Fréville, je peux d'ailleurs vous dire que ce fonds figure sur ligne spéciale, qu'il n'est pas géré en tant que tel.
Donc, la suppression de ces tuyauteries est nécessaire pour que le financement de la sécurité sociale reste assis sur des bases saines. Je le répète, le Gouvernement doit financer le FOREC par d'autres moyens que ces tuyauteries. Et, madame Dieulangard, que l'on parle de « tuyauterie » ou de « diversification des ressources, » sur le fond cela ne change rien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 49.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Le souci de la commission des finances, c'est à la fois de bien comprendre le présent et de cerner au mieux l'avenir.
Tout à l'heure, nous avons eu un débat intéressant et un peu passionné sur la CADES ; je vous ai dit alors que nous n'avions pas d'information sur les prévisions de cette caisse. Nous voulons non pas seulement des assurances, mais des chiffres. Je formulerai à cet égard la même demande que notre collègue Fréville.
Non seulement la complexité des systèmes de financement du FOREC soulève notre désapprobation, mais en outre nous n'avons aucune vision de l'avenir. Nous voudrions savoir comment va évoluer le FOREC. Or les questions que nous avons posées à ce sujet n'ont reçu aucune réponse. D'ailleurs, madame le secrétaire d'Etat, vous n'avez pas répondu à 60 % des questions que vous ont posées la commission des finances et la commission des affaires sociales. C'est le record absolu de ces dernières années ! S'agissant de montants de cette importance - 18 milliards de francs - nous référant à l'article XV de la Déclaration des droits de l'homme - aux termes duquel la société a le droit de demander compte de l'utilisation des fonds publics - nous réclamons le droit de savoir de quelle manière ils vont évoluer.
A défaut de ces informations, avec la commission des affaires sociales, nous demandons la suppression de l'article.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre les amendements n°s 82, 83 et 84. M. Guy Fischer. L'affectation au FOREC de la totalité des droits perçus sur la consommation de tabac est, à y regarder de plus près, une question parfaitement secondaire dans le débat qui nous occupe.
La certaine habitude que j'ai des débats parlementaires me laisse à penser, de prime abord, que nos collègues de la majorité sénatoriale sont quelque peu dépités de voir disparaître du strict champ de la loi fiscale des droits dont ils avaient pris l'habitude de se servir pour gager nombre de leurs propositions.
Au-delà de cette première constatation s'impose à nous une question : à quoi sert le FOREC, comme l'ensemble des autres fonds - je pense ici au fonds de solidarité vieillesse - qui, de près ou de loin, ont à voir avec le financement de la protection sociale.
Le grand défaut du FOREC est, selon la commission des affaires sociales, de permettre un financement important et même exorbitant de la réduction négociée du temps de travail.
Il serait sans doute quelque peu lassant de revenir en totalité sur le débat qui a animé notre assemblée lors de l'examen des deux lois relatives à la réduction négociée du temps de travail, débat auquel nous avons tous beaucoup participé ; on peut néanmoins revenir sur quelques points essentiels.
Tout d'abord, la progression de la productivité apparente du travail nous amène à penser que, d'une certaine manière, la réduction du temps de travail a déjà largement été amortie dans les faits.
On soulignera notamment que la part des salaires dans la valeur ajoutée, un temps accrue dans les années 1997 et 1998, connaît de nouveau une inflexion à la baisse, ce qui la ramène à son niveau de la fin des années soixante ou du début des années soixante-dix, alors même que les prélèvements sociaux imputés aux salariés ont sensiblement augmenté.
C'est l'un des points que nous soulevons dans le débat que nous avons au sein du Gouvernement. Le problème d'une politique salariale se pose car, du fait de l'expérience positive des 35 heures, la modération et le gel des salaires, en période de croissance, ne sont plus de mise.
Or, nombre d'entreprises ont assorti la mise en oeuvre des 35 heures de clauses de modération, voire de stagnation des rémunérations qui leur ont largement permis, avec le bonus de l'aide publique, de tirer leur épingle du jeu quant au coût supposé de la réduction du temps de travail.
Nous sommes, bien loin de penser que les gains de productivité des entreprises se sont effondrés avec la mise en oeuvre de cette réduction négociée, bien au contraire, comme en témoigne l'exceptionnel rendement de l'impôt sur les sociétés ces dernières années ! D'ailleurs, un certain nombre d'entreprises, certes parmi les plus grandes, ont mis en oeuvre les 35 heures sans rien demander à l'Etat, sans bénéficier de son aide.
S'agissant du FOREC, nous sommes donc confrontés à une proposition très simple de la commission des affaires sociales : poursuivre l'illusoire inapplication de la réduction négociée en refusant le principe des ressources affectées et continuer, en revanche, dans la voie des allégements généraux de cotisations sociales et l'application de la loi Robien.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Oui, et la loi de Robien coûte cher !
M. Guy Fischer. La loi Juppé - la ristourne dégressive - coûte cher également.
Nous estimons, pour notre part, que cette orientation pose clairement une question : quel est l'outil de financement le plus adapté pour le FOREC ?
Par nos amendements, nous proposons de substituer à l'affectation des droits sur le tabac une mise à contribution des revenus financiers des entreprises, plus légitime en ce sens qu'elle organise entre les entreprises elles-mêmes la mutualisation du coût éventuel de la réduction négociée du temps de travail, faisant contribuer les entreprises les plus capitalistiques, qui manient le plus la spéculation financière au profit de celles qui créent des emplois et réalisent des efforts dans le cadre de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail.
M. le président. La parole est à M. Franchis, pour présenter l'amendement n° 53 rectifié bis .
M. Serge Franchis. Cet amendement avait pour objet de supprimer l'affectation au FOREC des droits de circulation sur les vins. Mais il deviendra sans objet dans la mesure où les amendements n°s 11 et 49 seront adoptés. Je le retire donc dès maintenant.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 53 rectifié bis est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 82, 83 et 84 ?
M. Charles Descours, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements, qui, je l'espère, vont devenir sans objet.
Mon cher collègue Fischer, si vous voulez des chiffres, vous les trouverez à la page 75 de mon rapport. On joue donc cartes sur table. Je ne vous reproche d'ailleurs pas de ne pas avoir lu la page 75 de mon rapport...
M. Guy Fischer. Je l'ai lue !
M. Charles Descours, rapporteur. On y voit une ristourne dégressive pour 41 milliards de francs, que l'on peut mettre au compte de l'ancienne majorité. Mais le problème n'est pas ce qu'elle coûte, c'est le fait qu'on fasse peser la dépense sur le FOREC et sur la sécurité sociale. Puis, on voit que le passage de 1,3 à 1,8 SMIC entraîne un coût de 10 milliards de francs. Les aides au titre des lois Aubry I et Aubry II coûtent, quant à elles, 30 milliards de francs, l'allégement de Robien, 3,5 milliards de francs.
Au total, on peut dire que nous sommes dos à dos puisque, sur les 85 milliards de francs de dépenses, 44 milliards de francs sont dus à l'initiative des uns et 41 milliards de francs à l'initiative des autres.
En fait, le problème réside dans la façon dont le coût de ces allégements est financé, et nous ne sommes pas d'accord sur la diversification proposée.
Un allégement de cotisations sociales coûte toujours de l'argent. Décider d'un allégement est donc une décision politique qui s'inscrit dans le budget de l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11, 49, 82, 83 et 84 ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vais d'abord donner l'avis du Gouvernement sur les amendements du groupe communiste républicain et citoyen.
Monsieur Fischer, une fois de plus, je vous répète que nous partageons votre souci de favoriser le développement d'activités productives créant des emplois, et nous comprenons votre inquiétude davant le poids pris par des opérations financières.
Cependant, il paraît difficile de mettre en place un prélèvement assis sur les seuls revenus financiers des entreprises. Nous avons déjà eu l'occasion de nous expliquer. Il faudrait pouvoir, de fait, parmi les revenus financiers, distinguer ceux qui proviennent d'opérations dont l'intention est spéculative. Je ne vois pas comment y parvenir, cela ne paraît guère possible.
Par ailleurs, nous devons nous efforcer de rechercher les assiettes les plus stables possibles pour financer la sécurité sociale. Les catégories de revenus que vous évoquez sont particulièrement instables et ne pourraient donc pas, à elles seules, constituer une assiette satisfaisante garantissant l'équilibre et la pérennité des recettes.
Je vous rappelle que le Gouvernement a déjà augmenté les prélèvements sur les revenus des capitaux au profit de la sécurité sociale, dès 1998. Il s'agit d'une réforme importante allant dans le sens que vous souhaitez.
Par ailleurs, les mesures votées dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale ont permis, comme le disait Mme Dieulangard, de diversifier les ressources, en créant deux prélèvements à la charge des entreprises : la contribution sociale sur les bénéfices des entreprises, ainsi que la taxe générale sur les activités polluantes, dont l'assiette sera élargie aux consommations intermédiaires d'énergie dans le cadre du prochain collectif qui vous sera bientôt soumis.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement n'est pas favorable à vos amendements.
Vous avez posé une question sur le détail des dépenses du FOREC. M. Descours ayant fait part des données qui relèvent de ses propres calculs, je vais vous citer, pour ma part, les chiffres bruts.
La ristourne dégressive jusqu'à 1,3 SMIC, qui est la ristourne Juppé, pèsera pour 27 milliards de francs dans les dépenses du FOREC en 2001, après avoir pesé pour 31,3 milliards de francs en 2000.
L'aide incitative Aubry I coûtera 16,3 milliards de francs en 2001, l'allégement Aubry II 37,1 milliards de francs. Les majorations d'allégement coûteront 0,9 milliard de francs et l'aide de Robien, les exonérations de cotisations d'allocations familiales 3,7 milliards de francs. Tout cela fait un total de 85 milliards de francs de dépenses.
Tel est, en toute transparence, le chiffrage des dépenses du FOREC.
Je vais maintenant donner l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 11 et 49.
M. Descours a encore dit, à propos de son amendement, qu'il voulait « débrancher les tuyaux » du FOREC.
M. Charles Descours, rapporteur. Vous préférez la formule de Mme Dieulangard ?
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. J'ai bien compris : en débranchant les financements, vous tuez la RTT ! Vous êtes logique avec vous-même !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est un cas d'euthanasie ! (Sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Vous comprendrez que nous ne vous suivions pas dans cette logique.
M. Fréville a demandé qui perçoit les recettes et ordonne les dépenses aujourd'hui, puisque le FOREC n'est pas encore créé - je vous l'ai dit, le décret est actuellement devant le Conseil d'Etat. En attendant sa constitution, c'est l'ACOSS qui encaisse sur compte de tiers les recettes qui lui sont attribuées. Bien évidemment, dès qu'il sera institué, elle lui rendra ses comptes.
M. le rapporteur pour avis m'a par ailleurs interrogée sur l'évolution des dépenses et des recettes du FOREC. Personne, pas plus pour le FORECF que pour la CNAM ou la CNAF, ne peut prétendre connaître parfaitement l'évolution des recettes et des dépenses à moyen terme. C'est bien pourquoi il existe une garantie, par l'Etat, d'équilibre du FOREC.
On affecte aujourd'hui des recettes fiscales pérennes pour financer les 35 heures ; cette affectation ne touche en rien la filière vitivinicole et ne remet nullement en question l'éthique du financement de la protection sociale, contrairement à ce que j'ai pu entendre.
Le Gouvernement ne peut évidemment que s'opposer à la suppression de l'article 11, qui prévoit de nouvelles recettes pour le FOREC.
Je vous rappelle que c'est le Parlement qui a décidé, l'année dernière, la création d'un établissement public pour assurer le financement des allégements de charges sur les bas et moyens salaires mis en place dans le cadre de la réduction du temps de travail.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il n'existe pas encore !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Le décret de création est au Conseil d'Etat, et c'est l'ACOSS qui, pour le moment, agit au nom du FOREC !
Ce choix, en permettant d'isoler le coût du dispositif, répond à un objectif de clarté et de transparence. Il en assure également les modalités de financement puisque le fonds est contraint à une obligation d'équilibre entre ses recettes et ses dépenses. C'est cette logique qui a conduit à la création d'un établissement public administratif.
Une telle décision paraît plutôt saine, et je ne comprends pas votre volonté de la remettre en cause aujourd'hui en proposant la suppression de l'article 11. Sauf à conclure que vous souhaitez seulement couper les « tuyaux », asphyxier le dispositif et tuer la RTT !
Vous contestez l'affectation de resssources fiscales nouvelles au FOREC, mais c'est quand même le gouvernement Balladur qui, en 1993, avait affecté au FSV la CSG et les droits sur les alcools. En quoi cette logique était-elle plus évidente à l'époque qu'elle ne l'est aujourd'hui ? Et ce sont bien ces versements qui permettent de prolonger la diversification des ressources affectées à la sécurité sociale, au profit de recettes qui pèsent moins sur la masse salariale.
Ajoutons que le financement d'exonérations de charges me semble mieux assuré et pérennisé s'il est couvert par des recettes fiscales transférées plutôt que par des concours budgétaires révisés chaque année.
Ces transferts financiers semblent aujourd'hui un peu complexes, je l'admets, mais nous sommes dans un phase de transition. Ils sont, de fait, étroitement liés à la montée en charge des 35 heures, qui n'est pas encore achevée. Mais la volonté du Gouvernement est, par la précision des recettes du FOREC, d'assurer la transparence.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Madame le secrétaire d'Etat, vous venez de nous dire que le FOREC, qui n'est pas encore constitué, avait une obligation d'équilibre.
Monsieur Fréville, je vais vous dire, moi, en quoi consiste l'obligation d'équilibre du FOREC, qui est géré actuellement par l'ACOSS, dont je préside le conseil de surveillance. Et si ce que je vais dire - cela figure, au demeurant, à la page 37 du tome I de mon rapport - n'est pas vrai, que le Gouvernement apporte un démenti !
A la fin du mois d'août, 32 milliards de francs de recettes avaient été encaissés par le FOREC - du moins par la ligne « FOREC » puisque l'établissement FOREC n'existe pas encore -, contre 42 milliards de francs d'exonérations de charges correspondant aux « dépenses » du FOREC et « aux pertes de recettes » des régimes sociaux. Le déséquilibre est ainsi d'une dizaine de milliards de francs. Le FOREC n'étant pas constitué, l'ACOSS supporte cette charge de trésorerie supplémentaire.
Puisque certains de nos collègues siégeant à gauche de cet hémicycle sont toujours très attentifs à ne pas faire supporter aux organismes de sécurité sociale des charges indues, je leur signale que l'ACOSS doit supporter, de manière totalement indue, 10 milliards de francs de charges !
Cela prouve bien que le retard qui a été pris dans la création du FOREC, ce temps qui a été perdu, a pesé sur la sécurité sociale.
Par ailleurs, je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, d'avoir précisé que la ristourne Juppé coûtait moins cher que je ne l'avais dit. J'avais fait confiance aux documents qui nous sont communiqués par le Gouvernement ! A l'annexe F, je vois, pour l'année 2001 : « Equilibre financier du FOREC, ristourne dégressive jusqu'à 1,3 SMIC : 41 milliards de francs ». Vous nous avez dit que cela allait coûter beaucoup moins cher. Je ne sais pas si c'est vous qui avez raison ou l'annexe F, mais finalement, monsieur Fischer, Juppé coûte moins cher qu'Aubry ! (Sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Je vais employer un mot qui va vous fâcher, monsieur le rapporteur, et je vous prie de m'en excuser, mais il s'agit là de « finasseries » qui n'ont pas lieu d'être aujourd'hui.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Et 41 milliards de francs, vous appelez ça des finasseries !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Permettez-moi de m'expliquer, monsieur Oudin !
Les chiffres que j'ai donnés étaient détaillés : ristourne dégressive jusqu'à 1,3 fois le SMIC ; aide incitative au titre de la loi Aubry I ; allégements au titre de la loi Aubry II.
Or, dans le document qui vous a été communiqué, la ristourne dégressive jusqu'à 1,3 fois le SMIC, la « ristourne Juppé », est évaluée pour les entreprises encore à 39 heures - 27 milliards - et pour celles passées à 35 heures. C'est ce qui explique ce chiffre de 41 milliards de francs.
M. Charles Descours, rapporteur. C'est le « plan Jubry » ! (Sourires.)
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, avant de faire de l'ironie, essayez au moins d'écouter les arguments jusqu'au bout. Mon souci, en vous donnant ces chiffres, était celui de la plus parfaite transparence.
J'en viens à votre remarque sur la ligne concernant le FOREC. Au mois d'août dernier, il s'agissait d'une activité de six mois : 32 milliards de francs encaissés, 42 milliards de francs décaissés au titre des allégements de charges. La participation de l'Etat n'avait pas encore été versée puisque nous ne sommes pas dans le même calendrier d'exécution.
Attendez la fin de l'année : la réunion du conseil de surveillance vous permettra d'avoir l'expression complète des comptes, et vous verrez que l'équilibre est atteint.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 11 et 49.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. J'ignore, madame le secrétaire d'Etat, si notre séance de ce soir est retransmise par la chaîne parlementaire. Si c'est le cas, ceux des Françaises et des Français qui suivent nos débats doivent avoir beaucoup de mal à comprendre le dispositif financier imaginé pour le FOREC.
Vous avez dit, madame le secrétaire d'Etat, qu'en définitive le « débranchement des tuyaux » que propose M. Descours n'aurait pour conséquence que de tuer la réduction du temps de travail. Je m'inscris en faux ! En effet, ce que nous contestons, ce n'est pas le financement de l'exonération des charges sociales, ce sont les modalités de financement que vous avez retenues et qui ne sont pas sans conséquences.
Vous faites totalement fi des dispositions législatives que le Parlement avait adoptées avant que vous n'arriviez aux affaires et qui visaient à établir l'étanchéité entre la branche famille, la branche vieillesse et la branche maladie. Depuis que vous êtes au pouvoir, en effet, cette étanchéité n'existe plus !
Vous avez décidé, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, de supprimer une dépense qui était à la charge du fonds de solidarité vieillesse, lequel avait été créé en 1993 - j'ai été le rapporteur de la loi qui l'a créé - pour financer toutes les dépenses non contributives liées à la branche vieillesse : minimum vieillesse, dépenses de solidarité, exonérations, etc. Etaient également à la charge du fonds de solidarité vieillesse les majorations pour enfant.
Or vous avez transféré cette dépense, qui avait sa place dans le FSV, à la charge de la CNAF, c'est-à-dire la branche famille. Maintenant, vous supprimez des recettes du FSV - une partie de la CSG et des droits sur les alcools - pour financer le FOREC. Mais vous ne compensez pas au franc le franc ce que vous transférez sur le FOREC puisque le FSV accusera, au titre de l'exercice 2001, compte tenu des recettes nouvelles et des dépenses nouvelles, un déficit de plus de 1,5 milliard de francs.
De surcroît, vous pompez l'excédent du FSV dans la mesure où vous ne compensez pas 11 milliards de francs de recettes qui venaient l'alimenter. Vous plombez donc l'avenir du fonds de réserve de la branche vieillesse puisque les excédents du FSV devaient alimenter le fonds de réserve et que le fonds de réserve doit permettre, à terme, de faire face au déficit qu'accusera l'ensemble de la branche vieillesse.
Evidemment, avec le dispositif que vous avez mis en place, il n'y a pas de répercussion majeure immédiate sur le fonds de solidarité vieillesse et il n'y aura pas de répercussion sur la compensation de l'allégement des charges. Mais, par ricochet, ce dispositif va entraîner des difficultés à la fois pour l'alimentation du fonds de réserve et, à terme, pour l'équilibre de la branche vieillesse.
Je tenais à verser ces éléments au débat, en sus des remarques qui ont été faites par notre collègue Charles Descours, car il importe de saisir les conséquences que ne manquerait pas d'avoir le texte s'il était définitivement adopté tel qu'il nous a été transmis par l'Assemblée nationale.
C'est à vous, madame le secrétaire d'Etat, qu'il appartient de trouver, dans le budget de l'Etat, d'autres financements que ceux que vous avez imaginés, qui consistent simplement à prendre des recettes qui alimentaient le FSV et dont l'excédent devait alimenter le fonds de réserve.
C'est la raison pour laquelle je voterai les amendements qui nous sont présentés par les deux commissions.
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. Ce débat est important.
Je voterai l'amendement tout simplement pour que soient respectés les droits du Parlement. En effet, en tant que parlementaires, nous devons contrôler l'utilisation des impôts.
Dans deux secteurs très différents, les collectivités locales et la sécurité sociale, le budget de l'Etat est amené à financer des compensations de pertes de recettes.
S'agissant des collectivités locales, je regrette la perte des recettes au titre de la taxe professionnelle ou de la vignette, mais là n'est pas la question. Ce que je constate, c'est que, lorsqu'il s'agit des collectivités locales, nous pouvons au moins contrôler les compensations qui sont versées parce qu'elles sont intégralement inscrites dans le budget de l'Etat, soit sous forme de prélèvements, soit sous forme de dépenses. Autrement dit, indépendamment de la question de savoir si ces compensations sont opportunes, le Parlement exerce son contrôle.
C'est pourquoi je ne comprends pas que, quand il s'agit de la sécurité sociale, alors qu'on nous demande de voter des taux d'impôts - car, en définitive, c'est bien de cela qu'il est question -, ces impôts sortent du budget de l'Etat pour passer sous le contrôle d'organismes quelconques, voire d'organismes fantômes, comme le FOREC.
Il y a là, selon moi, concernant les droits du Parlement, un cas de capitis diminutio .
C'est la raison pour laquelle je voterai de tout coeur les amendements des deux commissions.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 11 et 49, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence l'article 11 est supprimé et les amendements n°s 82, 83 et 84 n'ont plus d'objet.
Mes chers collègues, nous allons interrompre maintenant nos travaux.
Nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRESIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, adopté par l'Assemblée nationale.
J'informe le Sénat que la commission des affaires sociales m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 12.

Article 12



M. le président.
« Art. 12. - I. - A. - Au IV de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le taux : "1,3 %" est remplacé par le taux : "1,15 %" et les mots : "5,1 % ou de 3,8 % pour les revenus visés au II et au III" par les mots : "5,25 % pour les revenus visés au I, de 3,95 % pour les revenus visés au II ou de 3,8 % pour les revenus visés au III". La référence à l'article L. 139-2 est remplacée par la référence à l'article L. 139-1. »
« B. - Au deuxième alinéa (1° ) de l'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale, le taux : "1,3 %" est remplacé par le taux : "1,15 %". »
« C. - L'article 154 quinquies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au I, les mots : "pour la fraction affectée en application du IV de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale au financement des régimes obligatoires d'assurance maladie" sont remplacés par les mots : "à hauteur de 5,1 points, ou de 3,8 points pour les revenus visés aux II et III de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale" ;
« 2° Au II, les mots : "pour la fraction affectée en application du IV de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale au financement des régimes obligatoires d'assurance maladie" sont remplacés par les mots : "à hauteur de 5,1 points". »
« II. - Les dispositions du I sont applicables :
« 1° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2001 ou, pour les revenus professionnels visés à l'article L. 136-4 du même code, sur les revenus pris en compte pour le calcul de la contribution due à compter de l'année 2001 ;
« 2° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, à compter de l'imposition des revenus de 2000 ;
« 3° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée à l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, aux produits de placement sur lesquels est opéré à partir du 1er janvier 2001 le prélèvement prévu à l'article 125 A du code général des impôts et aux revenus assujettis en application du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale à compter de cette même date ;
« 4° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au I de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, aux tirages, événements sportifs et émissions postérieurs au 31 décembre 2000 ;
« 5° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au II de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, sur les sommes engagées à compter du 1er janvier 2001 ;
« 6° En ce qu'elles concernent la contribution mentionnée au III de l'article L. 136-7-1 du code de la sécurité sociale, sur le produit brut des jeux et sur les gains réalisés à compter du 1er janvier 2001 ;
« 7° En ce qu'elles concernent la déductibilité partielle de la contribution sociale généralisée prévue par l'article 154 quinquies du code général des impôts, à la détermination des bases d'imposition des revenus à compter de l'année 2001. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par M. Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 50 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Descours, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12.
M. Charles Descours, rapporteur. L'article 12 tend à compenser à la CNAMTS la perte de la majeure partie de la fraction des droits sur les tabacs qui lui est aujourd'hui affectée : 7,1 milliards de francs.
Nous n'allons pas revenir, madame Royal, sur la discussion que nous avons eue cet après-midi avec Mme Gillot, mais je suis obligé de rappeler brièvement que le système imaginé par le Gouvernement consiste à élever de 5,1 points à 5,25 points la part de CSG affectée à l'assurance maladie et à diminuer, à due concurrence, la part de CSG affectée au fonds de solidarité vieillesse. Nous nous étonnons que, dans la situation actuelle des retraites, l'on réduise la fraction d'un prélèvement affecté à la branche vieillesse.
Comme nous l'avons dit cet après-midi, ce système rend encore plus illisible la déductibilité ou la non-déductibilité de la CSG puisque ce 0,15 point de CSG maladie supplémentaire ne sera pas déductible, à la différence des 5,1 points actuels.
L'amendement de suppression de cet article est donc une conséquence de la suppression de l'article 11, que nous avons votée avant le dîner.
La commission des affaires sociales ne souhaite pas compenser à la CNAMTS la perte des droits sur les tabacs, parce qu'elle ne souhaite pas, je l'ai dit tout à l'heure à Mme Gillot, diminuer les droits sur les tabacs affectés à l'assurance maladie.
La commission n'entend pas davantage diminuer la CSG affectée au fonds de solidarité vieillesse, parce qu'elle désire que les excédents du fonds de solidarité vieillesse restent affectés au fonds de réserve des retraites.
Telles sont les raisons qui ont conduit la commission des affaires sociales à adopter un amendement de suppression de l'article 12.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 50.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Je ne vais pas prolonger les débats, M. Descours a parfaitement explicité les positions communes et convergentes de la commission des affaires sociales et de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué à la famille et à l'enfance. Pour les raisons que Mme Gillot a exposées tout à l'heure, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
Vous avez longuement débattu de cette question : j'ai, depuis dix-huit heures, suivis vos débats, sur un écran de contrôle, en attendant l'examen des dispositions sur la famille. Vous avez reçu des réponses en abondance.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous avons posé des questions, nous n'avons pas eu de réponses !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Vous voudrez donc bien m'excuser de ne pas argumenter plus longuement l'avis défavorable du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 12 et 50, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 12 est supprimé.

Demande de réserve



M. Charles Descours,
rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Monsieur le président, je suis obligé de demander la réserve de l'article 13, qui fixe les prévisions de recettes par catégorie des régimes de base de sécurité sociale et des organismes concourant à leur financement.
Je vais m'en expliquer brièvement.
Trois articles pourtant relatifs aux recettes se trouvent au titre III intitulé « Dispositions relatives aux dépenses et à la trésorerie » : - l'article 24 procède à une énième réaffectation du prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement ; l'article 25 prévoit l'affectation au fonds de réserve d'une partie des recettes tirées des licences UMTS ; nous sommes contents de voir que la téléphonie mobile profite aux retraites, bien que ce ne soit pas d'une logique absolue ; enfin, l'article 41 bis augmente les taux de la contribution due par les laboratoires et les grossistes répartiteurs.
Les deux derniers articles cités modifient le montant des recettes de la sécurité sociale.
Nous ne pouvons pas anticiper les votes du Sénat sur ces articles. Il est donc nécessaire de reporter la discussion de l'article 13 jusqu'avant l'examen de l'article 43, relatif aux objectifs de dépenses.
Je n'irai pas jusqu'à proposer d'adopter l'article fixant les prévisions de recettes « après » l'article fixant les objectifs de dépenses, ce qui a pourtant été réalisé à l'Assemblée nationale, au mépris du texte constitutionnel de 1996 : « Les lois de financement de la sécurité sociale, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses ».
Bref, cette architecture nous paraît plus que discutable.
C'est pourquoi nous demandons la réserve de l'article 13.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de réserve ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Favorable.
M. le président. La réserve est ordonnée.

Article additionnel après l'article 13



M. le président.
Par amendement n° 85, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 13, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les élections à la sécurité sociale sont rétablies.
« II. - Les dispositions contraires des articles L. 211-2, L. 212-2, L. 213-2, L. 215-2 et L. 215-3 sont abrogées.
« III. - Après le dixième alinéa du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les revenus visés au c , l'assiette de la contribution s'entend sans déduction de l'avoir fiscal. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement tend à rétablir les élections des administrateurs de la sécurité sociale. Depuis l'établissement de la loi de financement de la sécurité sociale, vous m'avez souvent entendu présenter cet amendement.
Ces élections ont, en effet, été supprimées par ordonnance en 1996 après avoir été sans cesse reportées depuis 1983, date de la dernière consultation organisée.
Nous sommes fermement opposés au principe actuel de désignation des administrateurs : il accorde des postes au conseil d'administration des différentes caisses à des organisations syndicales, certes représentatives des salariés sur le plan national, mais sans tenir compte de leur influence réelle dans le paysage syndical français, et laisse au MEDEF une part importante des responsabilités.
Nous proposons donc que les représentants des assurés sociaux, mandatés par les syndicats, soient de nouveaux élus et que le nombre d'administrateurs dévolu à chaque organisation syndicale soit, de fait, proportionnel au nombre de voix obtenu par ces organisations lors des élections à la sécurité sociale. Il ne s'agit, ni plus ni moins, que d'une simple question de démocratie.
Le problème de la protection sociale est central dans notre société.
Le MEDEF vient de décider de quitter l'Union nationale des centres communaux d'action sociale, l'UNCCAS. Par conséquent, dans les semaines, voire dans les jours à venir, le débat va se tendre. Il sera intéressant de voir comment la situation va évoluer.
Nous considérons, je le répète, que les personnes chargées d'administrer la sécurité sociale doivent être non pas nommées, mais élues.
C'est la raison pour laquelle nous vous présentons cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. M. Fischer a surtout insisté sur les élections des administrateurs de la sécurité sociale. J'écouterai avec intérêt la position du Gouvernement sur cette affaire importante, qui revient d'ailleurs fréquemment depuis 1983, me semble-t-il, puisqu'il n'y a pas eu d'élections depuis 1983...
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Charles Descours, rapporteur. Pourtant, depuis cette date, vous avez souvent fait partie du Gouvernement, monsieur Fischer.
Indépendamment de cette affaire, il y a, dans cet amendement, un III que M. Fischer n'a pas défendu et qui concerne le gage : on nous propose de ne pas déduire l'avoir fiscal de l'assiette de la contribution sociale sur les revenus du patrimoine... Mais je vais faire cesser cet insoutenable suspense et dire sans plus tarder à M. Fischer que je suis défavorable à son amendement, non pas sur le principe des élections,...
M. Guy Fischer. Ah !
M. Charles Descours, rapporteur. ... mais sur le gage.
M. Guy Fischer. Dont acte !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
Le choix de la démocratie sociale a été fait depuis 1996. Les organisations syndicales représentatives sont, par définition, représentatives. Aussi, travaillons plutôt au renforcement de cette démocratie sociale et à son bon fonctionnement, sans en revenir aux élections.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 85, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Nous allons aborder l'examen des dispositions relatives à la famille.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, messieurs les rapporteurs, nous abordons maintenant la politique familiale et la discussion importante qui va s'engager concerne des mesures très attendues par les familles.
Je remercie l'ensemble des groupes du Sénat des travaux préparatoires, dans lesquels tous se sont impliqués.
Il s'agit pour moi de vous présenter les actions que nous allons mettre en oeuvre et qui ont été définies lors de la conférence de la famile qu'a présidée M. le Premier ministre au mois de juin dernier.
J'ai voulu que cette conférence de la famille s'organise autour de cinq idées fortes et ambitieuses, qui se traduisent par l'attribution de 10 milliards de francs supplémentaires aux familles.
Quelles sont ces cinq idées fortes ?
Il s'agit d'abord de mesures importantes pour la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, avec l'instauration d'un fonds exceptionnel d'investissement pour les crèches, avec la revalorisation de l'AFEAMA, l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée, avec la création d'une aide nouvelle à la reprise d'activité : l'allocation parentale d'éducation sera ainsi maintenue pendant deux mois pour aider les femmes à reprendre une activité professionnelle.
Ensuite, nous avons réformé les aides au logement. Elles ne figurent pas, à proprement parler, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisqu'elles sont de nature réglementaire, mais je ne voudrais pas que nous les oubliions ici, car le logement, c'est le droit fondamental des familles. L'harmonisation vers le haut des barèmes, qui représente un coût de 6,5 milliards de francs, est, là encore, une réforme très importante pour les familles.
En troisième lieu, il s'agit de mieux partager la responsabilité parentale avec, d'abord, la création du congé pour enfant malade. En effet, j'ai voulu que le cumul de deux congés pris par chacun des deux parents à mi-temps puisse bénéficier d'un bonus.
Même si cette mesure ne relève pas explicitement du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je tiens à dire qu'elle s'appuie sur des démarches concernant non seulement le renforcement de l'autorité parentale conjointe tel qu'il sera mis en oeuvre dans la réforme du droit de la famille, mais aussi le renforcement des réseaux de parents pour que les parents soient mieux épaulés dans leurs responsabilités.
Enfin, la réforme du droit de la famille vise à stabiliser et à solenniser les liens de filiation, à égaliser le droit des enfants, à améliorer aussi l'accès aux origines. Votre assemblée sera prochainement saisie de ces textes par le Gouvernement.
Enfin, je tiens à préciser que les mesures que vous présente aujourd'hui le Gouvernement résultent d'un partenariat et d'une coopération de longue date avec les acteurs de la politique familiale, au premier rang desquels la CNAF, l'Union nationale des associations familiales, l'UNAF, mais aussi les fédérations de parents d'élèves, les grandes associations caritatives, les associations de parents d'enfants handicapés, les associations de familles rurales - je ne peux pas toutes les citer - en bref, tous les partenaires de la conférence de la famille, qui ont largement contribué à l'émergence de ces différentes propositions.
M. Philippe Nogrix. Et les élus ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Ces importantes décisions dont nous allons maintenant débattre témoignent de notre volonté commune, je le pense, de nous adresser à toutes les familles, telles qu'elles sont, avec leurs difficultés, en tenant compte de la variété des situations vécues, afin que chacune d'elles soit pour chaque enfant un lieu d'affection, un lieu de solidarité et un lieu d'éducation.
Si le Sénat, saisi aujourd'hui de cette politique ambitieuse, vote ces propositions, il fera un pas très important dans le sens de ce droit pour chaque enfant d'être aimé, bien éduqué et de bénéficier de la solidarité nationale.
Si les attentes des parents par rapport au bonheur et à la réussite de leurs enfants sont peut-être plus pressantes aujourd'hui que dans le passé, plus impatientes aussi, c'est parce que ces efforts s'inscrivent dans une diversité des parcours familiaux et conjugaux.
Je le répète, nous nous adressons à toutes les familles, dans leur diversité, qu'elles soient dans le mariage, hors du mariage, monoparentales ou recomposées, c'est-à-dire sans doute plus difficiles à vivre pour les enfants que par le passé, mais parfois aussi plus tolérantes et plus ouvertes. Ce sont ces évolutions-là que je souhaite accompagner pour que les enfants retrouvent toujours leurs marques par rapport à la construction des adultes qu'ils doivent devenir.
La famille contemporaine offre de multiples visages. Ma conception de la politique familiale, c'est d'accompagner cette pluralité des formes, en étant respectueuse des libertés conquises, attentive aux fragilités nouvelles qui en résultent parfois, fidèle à un certain nombre de valeurs partagées, telles que l'universalité, qui est l'un des piliers de notre politique familiale, mais aussi la solidarité, qui consiste à donner plus aux familles qui en ont le plus besoin et à construire une responsabilité parentale solidement et équitablement assumée. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Vasselle. L'universalité, vous l'avez remise en cause !

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES
ET À LA TRÉSORERIE

Section 1

Branche famille

Articles additionnels avant l'article 14



M. le président.
Par amendement n° 86, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le second alinéa de l'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Ces bases mensuelles de calcul évoluent conformément à l'évolution moyenne des salaires nets telle que constatée par les organismes d'encaissement des cotisations sociales. »
« II. - a) Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement a pour objet d'indexer les prestations familiales sur les salaires.
Nous sommes en effet favorables à ce que les familles puissent intégralement profiter de la reprise de l'activité économique. A ce titre, nous trouverions tout à fait logique que l'ensemble des prestations versées aux ménages, et en particulier les prestations familiales, suivent l'évolution de la situation économique et non pas seulement l'évolution de l'inflation. Certes, il y a là matière à débat.
Par conséquent, l'indexation de ces prestations sur les salaires nous paraît tout à fait répondre à un objectif de plus grande justice sociale et d'efficacité économique.
C'est à cette fin que nous présentons de nouveau cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Nous sommes, tout comme les auteurs de l'amendement, extrêmement sensibles à la revalorisation des prestations familiales. Donc, dans le contexte de modération salariale imposé par le passage aux 35 heures que vous avez dénoncé à plusieurs reprises au cours de l'après-midi, monsieur Fischer,...
M. Guy Fischer. Que j'ai constaté !
M. Charles Descours, rapporteur. ... que nous avons constaté avec vous, je considère que votre amendement n° 87 est plus favorable aux familles que l'amendement n° 86, raison pour laquelle je vous invite à retirer ce dernier, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, le Gouvernement a décidé de maintenir le pouvoir d'achat des prestations familiales en 2001, ce qui représente un coût de 3 milliards de francs.
Vous proposez d'aller au-delà.
A partir du moment où des sommes importantes sont en jeu, le Gouvernement préfère cibler les familles qui en ont le plus besoin.
Vous n'êtes pas sans savoir que la moitié des prestations familiales sont versées sans condition de ressources. Dès lors, le Gouvernement a fait le choix de faire porter l'effort de 10,5 milliards de francs qu'il vient de consentir, et dont vous allez d'ailleurs voter un certain nombre d'éléments, sur les familles les plus défavorisées.
Cet effort de 10,5 milliards de francs, je vous le fais observer, dépasserait le coût de l'indexation sur les salaires moyens que vous proposez. En effet, l'AFEAMA est ciblée sur les ménages les plus modestes, de même que les allocations de logement nouvelles, puisque ce sont 5 millions de foyers parmi les plus pauvres qui vont pouvoir en bénéficier. Les aides à la petite enfance, dont le barème tient compte des revenus des familles, vont aussi aller prioritairement aux familles qui en ont le plus besoin.
Donc, le Gouvernement va au-delà de votre proposition par cet effort, et il le fait en concentrant ses efforts et les excédents de la branche famille sur les familles qui en ont le plus besoin.
Monsieur le sénateur, à partir du moment où vous avez satisfaction, je vous demande de retirer votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 86 est-il maintenu, monsieur Fischer ?
M. Guy Fischer. Je reviendrai sur ce point à l'occasion d'un autre amendement, et je retire non seulement l'amendement n° 86 mais aussi l'amendement n° 87.
M. Charles Descours, rapporteur. Les deux ?
M. Guy Fischer. Oui, monsieur le rapporteur. Nous avons débattu, n'est-ce pas ?
Il est nécessaire de permettre aux familles les plus modestes de pouvoir faire garder leurs enfants à domicile. Or, jusqu'à présent, cela n'a pas été facile. La sociologie des familles qui pratiquent les équipements collectifs, les crèches collectives, le montre : les familles les plus défavorisées ne sont pas toujours touchées par ces structures. Il est vrai que les crèches familiales sont peut-être plus adaptées, du fait de l'étalement des horaires d'ouverture, notamment, qui permet de fournir un service de meilleure qualité.
M. le président. L'amendement n° 86 est retiré.
Par amendement n° 87, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 551-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au titre de l'année 2001, le coefficient de revalorisation applicable au 1er janvier aux prestations familiales est de 1,022. »
« II. - a) Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références: "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
Cet amendement est retiré.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Permettez-moi de réagir aux propos de Mme le ministre et à ceux de M. Fischer.
Je rappelle que la politique familiale, depuis l'institution des allocations familiales, en 1946, s'adresse à l'enfant, à tous les enfants. Voilà l'universalité dont vous parliez.
M. Alain Vasselle. Exactement.
M. Charles Descours, rapporteur. Sur ce point, nous nous rejoignons.
Mais de là, madame le ministre, à ne développer la politique familiale qu'en faveur des familles les plus modestes...
M. Guy Fischer. Non, ne nous faites pas cette injure!
M. Charles Descours, rapporteur. ... vous comprendrez que nous ne soyons plus d'accord.
M. Alain Vasselle. Madame le ministre, vous faites du social, et non pas de la politique familiale.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, il en va de l'universalité comme de l'égalité : il y a égalité formelle et égalité réelle. D'ailleurs, cela ne va pas à l'encontre de ce que vous venez de dire. Simplement, même si l'on peut être fidèle à des valeurs telles que l'universalité et l'égalité, il reste que des familles ont plus de besoins que d'autres. Si l'on veut vraiment que la politique familiale soit universelle, il faut qu'elle soit redistributive.
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas de la politique familiale, c'est de la politique sociale. Il faut appeler les choses par leur nom !
M. Guy Fischer. Vous, vous avez parfois fait de l'universalité très, très à la limite du social !

Article 14



M. le président.
« Art. 14. - I. - Au chapitre Ier du titre IV du livre VIII du code de la sécurité sociale, l'article L. 841-1 est ainsi modifié :
« 1° Le II est ainsi rédigé :
« II. - L'aide visée au I est assortie d'une majoration d'un montant variant en fonction de l'âge de l'enfant et des ressources du ménage ou de la personne employant une assistante maternelle agréée, selon des modalités fixées par décret. Les montants de la majoration sont fixés en pourcentage de la base mensuelle de calcul mentionnée à l'article L. 551-1. Le montant versé ne peut excéder un pourcentage, fixé par décret, du salaire net servi à l'assistante maternelle agréée. » ;
« 2° Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. - L'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée n'est pas cumulable avec l'allocation parentale d'éducation à taux plein, mentionnée à l'article L. 532-1, sauf si cette allocation parentale d'éducation est versée au titre de l'article L. 532-4-1. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2001 pour les périodes d'emploi postérieures à cette date. »
Sur l'article, la parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, une politique familiale ambitieuse est une politique capable de s'adapter le mieux possible au plus près de chacun.
Dans le cadre des mesures dirigées en faveur de la petite enfance, notamment des modes de garde, je tiens à rappeler avant toute chose l'importante dotation supplémentaire accordée pour 2001 au fonds national d'action sociale, d'un montant sans précédent de 1,7 milliard de francs. Destiné à venir en aide aux collectivités territoriales pour le bon fonctionnement des structures, il favorisera de ce fait le développement des modes de garde collectifs.
Toujours dans ce sens, l'article 14 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, premier article consacré à la branche famille, tente de rétablir l'égalité entre les familles dans leur choix en matière de mode de garde.
Il concrétise ainsi ce qui a été décidé lors de la conférence de la famille, en juin dernier.
Je rappelle que l'aide pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée est une mesure adoptée sur l'initiative déjà d'un gouvernement de gauche, en 1991. Cette allocation a été instaurée afin d'apporter un soutien financier forfaitaire aux familles, en leur permettant de recourir à une garde personnalisée de leurs enfants par un personnel qualifié, à savoir les assistantes maternelles agréées.
Aujourd'hui, le Gouvernement nous propose d'aller plus loin et de permettre aux familles les plus modestes de pouvoir choisir également ce mode de garde en introduisant une modulation du complément de l'aide en fonction des revenus.
Il est vrai que cette allocation, jusqu'alors forfaitaire, sera dégressive, mais c'est ainsi que l'on rétablit un minimum de justice sociale et d'équité, d'autant que le montant minimum de l'aide ne sera pas abaissé et demeurera à 826 francs par mois. En revanche, le montant de la majoration perçue par les familles les plus modestes sera porté à 1290 francs pour les ménages avec un enfant dont le revenu mensuel est inférieur à 9 400 francs. Le principe d'une participation minimale des parents est prévue. Cette mesure me paraît donc juste et solidaire.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Très bien !
M. le président. Par amendement n° 13, MM. Lorrain et Descours, au nom de la commission des affaires sociales, proposent de supprimer la dernière phrase du texte proposé par le 1° du I de l'article 14 pour le II de l'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale.
La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour la famille. La commission des affaires sociales propose un amendement ayant pour objet de maintenir à son niveau actuel le plafond de la majoration de l'allocation pour l'emploi d'une aide maternelle.
Cette majoration est la somme que les familles perçoivent directement et qui les aident à régler le salaire net de l'assistante maternelle.
Le présent article prévoit en réalité deux dispositifs.
Dans un premier temps, il faut prendre acte du basculement partiel de cette prestation sur le versant de la politique familiale sous condition de ressources. Certes, les familles disposant d'un revenu mensuel de plus de 13 000 francs par mois environ ne seront pas pénalisées. Seules les familles dont les revenus sont inférieurs à ce seuil verront leur situation s'améliorer.
La fin du paragraphe instaurant cette modulation devrait être, en réalité, un article à lui tout seul. Vous proposez, madame le ministre, que le montant de l'allocation servie puisse excéder un pourcentage - environ 85 % - du salaire net de l'assistante maternelle. Aujourd'hui, ce plafond est de 100 % du salaire.
Cette disposition change considérablement l'économie de votre texte. Après examen, cette mesure, qui ne devait pénaliser personne, procède en réalité à une redistribution entre les familles. La mesure est en quelque sorte gagée pour partie sur les économies engendrées par la baisse de ce plafond. Sous couvert d'un dispositif au mieux avantageux, au pire indolore pour les familles, il est en fait proposé de pénaliser ces dernières en instaurant une sorte de « ticket-modérateur » sur le recours à une assistante familiale.
Cette mesure nous apparaît d'autant plus inacceptable qu'elle pénalisera les personnes ayant recours à une assistante maternelle à temps partiel, c'est-à-dire en grande majorité des personnes travaillant elles-mêmes à temps partiel, qui ne sont pas, vous le savez, les plus aisées.
En conséquence, mes chers collègues, la commission vous invite à revoir la copie sociale du Gouvernement et à supprimer l'abaissement de ce plafond.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, je vous ai écouté attentivement, et je me demande s'il n'y a pas un malentendu. Je tiens en effet à vous affirmer qu'aucun ménage ne verra diminuer l'aide qui lui est allouée.
Le Gouvernement a voulu précisément réduire le coût restant à la charge des familles ayant des revenus modestes d'un recours à une assistance maternelle. Par conséquent, dans tous les cas, soit la situation de la famille reste la même, soit la prise en charge du coût résiduel restant à la charge de la famille est améliorée. Aucune famille ne verra donc, à la suite de l'adoption de ce dispositif, sa situation régresser ; 30 000 familles supplémentaires vont pouvoir entrer dans le dispositif, conformément au premier objectif de ce texte - aujourd'hui, en effet, des familles trop modestes ne peuvent avoir accès à une assistante maternelle - et 100 000 familles vont voir l'aide de la solidarité s'améliorer.
Pourquoi avoir pris cette décision ? Dans la mesure où nous mettons en place un fonds d'aide à l'investissement pour les crèches et que nous faisons un effort en faveur des modes de garde collectifs, nous avons voulu consentir le même effort en matière de modes de gardes individuels, pensant à cet égard aux familles les plus modestes - nous souhaitons qu'elles aient également la liberté de choix - et aux familles résidant en zones rurales, là où les structures d'accueil collectives sont moins fréquentes qu'en milieu urbain.
C'est donc en vue d'égaliser le taux d'effort des familles, que ces dernières mettent leurs enfants à la crèche ou qu'elles aient recours à une assistante maternelle, que le dispositif a été mis en place.
Cette diminution du coût restant à la charge des familles modestes constitue donc une étape dans le rapprochement des taux d'effort des ménages, qu'ils aient recours à l'AFEAMA ou aux crèches.
Cette mesure va dans le sens de la neutralité de la politique familiale par rapport au choix des parents, et donc dans le sens de la modernité.
Cette réforme prévoit en effet, le plafonnement du supplément d'aide à 85 % du salaire net, et ce tout simplement pour faire participer les usagers, même faiblement, au financement de la garde d'enfants.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Le ticket modérateur !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Dans ce contexte, seul le supplément d'aide sera plafonné, c'est-à-dire que seront touchés uniquement les ménages dont le revenu est supérieur à 13 000 francs.
A titre d'exemple, s'agissant des familles versant déjà à une assistante maternelle, un salaire net, par enfant, de 826 francs, le complément sera maintenu à 826 frans par mois, et la prise en charge à 100 % du salaire de l'assistante maternelle sera toujours la règle. Les familles les plus modestes ne souffriront d'aucune diminution. Pour les familles versant un salaire net supérieur à cette somme, le reste à charge pourra aller jusqu'à un pourcentage de 15 % du salaire versé, soit, globalement, une contribution pouvant s'élever aux alentours de 200 francs.
Le Gouvernement propose donc une organisation à la fois équitable et universelle, étendant le bénéfice du dispositif à 30 000 familles supplémentaires. C'est d'ailleurs peut-être ce point qui vous a laissé penser que le système de plafonnement touchait toutes les familles, ce qui n'est pas le cas.
Compte tenu de ces différentes explications, j'invite M. Lorrain à retirer l'amendement n° 13. Je suis d'ailleurs prête, monsieur le rapporteur, si vous le souhaitez, à vous apporter par écrit, s'agissant du dispositif proposé, des compléments d'information et des précisions, à partir de cas très concrets faisant correspondre le salaire des familles, le coût de l'assistance maternelle et le montant résiduel restant à leur charge.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 13.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai bien entendu l'amendement n° 13, proposé par la commission.
Mais je profiterai de l'occasion qui m'est donnée pour soumettre un problème à Mme la ministre et pour aller au devant de son désir de manifester une sollicitude tout à fait particulière envers les personnes disposant de faibles revenus : madame la ministre, vous faites une redistribution, vous aidez ceux qui vivent dans les conditions les plus difficiles, comme c'est normal.
Je voudrais évoquer un point que je ne cesse de soumettre, en vain d'ailleurs, au conseil de surveillance de la caisse nationale d'allocations familiales. Ce point relève, je crois, du pouvoir réglementaire : il s'agit du remboursement des sommes indues.
Régulièrement, des personnes viennent nous voir pour attirer notre attention sur leur situation : ces personnes, au niveau de ressources très faible, se sont vu attribuer par erreur une allocation d'un montant supérieur à celui qui leur était dû. Et, une fois l'erreur relevée, ces personnes, qui avaient utilisé au fur et à mesure l'argent versé par la caisse nationale d'allocations familiales, comme cela va de soi, se voient retenir jusqu'à 30 ou 35 % de leur allocation au titre du remboursement des sommes indues ! Comment peut-on vouloir exiger de telles personnes le moindre remboursement ? Ce n'est pas pensable !
J'aimerais donc bien, madame la ministre, que vous examiniez ce problème et que vous me donniez votre point de vue à cet égard.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard et M. Philippe Nogrix. Très bien !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, je vais répondre à cette question importante, en effet, qui touche à la qualité du service rendu par les caisses d'allocations familiales. Les familles dont l'essentiel du revenu est constitué par des revenus de transfert, notamment par les revenus familiaux, se trouvent confrontées à de graves difficultés lorsqu'elles ont des sommes indues à rembourser.
Je tiens tout d'abord à vous indiquer que, de ce point de vue, il existe toujours une possibilité de négociation avec les caisses d'allocations familiales.
Au-delà, il est prévu que la convention d'objectifs et de gestion que je suis actuellement en train de négocier avec la caisse nationale d'allocations familiales comporte un dispositif pouvant couvrir cette question des sommes indues ; nous y travaillons en tout cas.
Mais je voudrais dénoncer un scandale à mes yeux encore plus grand que la question des sommes indues ; en effet, dans ce dernier cas, si les problèmes du remboursement sont certes très compliqués, rien n'a cependant été retiré aux familles.
Il est donc un scandale beaucoup plus aigu : celui du surendettement des familles, avec les promotions, les publicités des organismes proposant différents prêts à la consommation. Nous y sommes confrontés tous les jours, et je peux donc vous indiquer que je serai amenée prochainement à faire des propositions pour que les familles cessent d'être escroquées comme elles le sont, avec des taux d'intérêt proprement scandaleux et une fuite en avant vers des consommations qui, ensuite, les mettent dans des situations extrêmement difficiles.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L'introduction d'un seuil comporte à mon avis le risque que les personnes situées juste au-dessus soient considérées comme nanties. J'avoue que cela me laisse toujours un sentiment d'amertume. Or, nous avons, comme vous je crois, tout à fait le souci d'aider au maximum ces familles disposant de moyens très limités.
J'aimerais donc bien, madame la ministre, que, comme vous nous l'avez proposé, vous nous donniez, par écrit, des assurances, en particulier en ce qui concerne les personnes travaillant à temps partiel et pouvant donc aussi disposer de revenus modestes, et que vous nous indiquiez ce que vous avez l'intention de faire figurer dans le décret.
Sous ces réserves, je retire l'amendement n° 13.
M. le président. L'amendement n° 13 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 14



M. le président.
Par amendement n° 61, M. Nogrix et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après l'article 14, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 18 du décret du 29 juillet 1939 relatif à la famille et à la natalité françaises est abrogé. »
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. L'amendement que j'ai déposé avec mes collègues du groupe de l'Union centriste vise tout simplement à permettre le libre choix de l'allocataire des prestations familiales dans les départements d'outre-mer.
En effet, en métropole, la législation de la sécurité sociale permet ce libre choix. En revanche, dans les départements d'outre-mer, ce libre choix n'est aujourd'hui possible qu'au sein des couples dont les deux membres sont des salariés relevant du régime général.
Une telle différence de traitement repose, à l'évidence, sur des bases juridiques fragiles et semble, en tout état de cause, contraire à l'équité et au principe d'égalité.
Cet amendement prévoit, en conséquence, de supprimer l'article 18 du décret du 29 juillet 1939 relatif à la famille pour permettre aux familles des départements d'outre-mer de disposer des mêmes libertés de choix que les familles de métropole.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Cet article d'un décret du 29 juillet 1939 peut effectivement être abrogé.
La commission est donc favorable à l'amendement n° 61.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Les dispositions concernant les allocations dans les départements d'outre-mer relèvent d'un régime particulier extrêmement complexe, et je pense qu'il n'est pas souhaitable de modifier ainsi au hasard...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas au hasard !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. ... l'un des dispositifs sans prendre en considération l'ensemble de la structure des prestations.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 61.
M. Alain Vasselle. Si cet amendement avait été déposé par un socialiste, vous y seriez favorable ! C'est parce que cela vient de chez nous !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 61.
M. Philippe Nogrix. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Je ne comprends pas très bien, madame le ministre : quand on contacte le secrétariat d'Etat à l'outre-mer, il est tout à fait d'accord ; quand on contacte le ministère de la fonction publique, il est tout à fait d'accord. Il n'y a que Bercy pour trouver inutile la suppression d'un article en vigueur depuis 1939...
Je crois qu'il faut cesser de tourner en rond ! Il est absolument nécessaire, à mon avis, d'abroger cet article 18 du décret du 29 juillet 1939. Même si les départements d'outre-mer ont connu de nombreuses avancées, comment pourrait-on considérer que, là-bas, seul le père serait le chef de famille alors qu'en métropole il y a longtemps qu'il a été reconnu que, dans un couple, dans une famille, le père et la mère avaient les mêmes droits pour toucher les allocations familiales ?
Il me paraît donc difficilement soutenable de ne pas accepter cet amendement.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous savez bien que, dans les départements d'outre-mer, le dispositif des prestations familiales est tout à fait particulier, que les taux ne sont pas les mêmes !
Je suis une militante de très longue date de la perception par les femmes, par les mères, des allocations familiales, pour être certain que les enfants en seront bien les destinataires. Mais, sur ce sujet, le choix n'est pas tant entre le père et la mère qu'entre les différents régimes de prestations. Or ce chantier-là relève aussi du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, et des discussions son actuellement en cours avec le ministère des finances sur cette question, qui est tout à fait fondée au demeurant.
Même si, sur le fond je partage votre point de vue, il ne me semble pas raisonnable - et ce n'est pas l'objet de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale - de toucher à l'un des éléments du dispositif en vigueur dans les départements d'outre-mer sans mesurer les conséquences de ce geste sur le choix des régimes dont les différents intéressés, qu'ils soient salariés ou non, relèvent. Il ne faut pas compliquer encore la situation !
De plus, vous savez aussi qu'il faut respecter des procédures particulières outre-mer et consulter les collectivités territoriales concernées, puisque ce sont elles qui gèrent les prestations familiales, celles des fonctionnaires en particulier.
La procédure que vous proposez n'est donc pas la bonne, même si, sur le fond, je prends l'engagement devant vous d'en saisir très officiellement le secrétariat d'Etat à l'outre-mer, parce que je crois comme vous qu'il serait bon que les prestations soient plus fréquemment servies aux mères de famille.
En l'état actuel, je ne peux donc pas donner un avis favorable à cet amendement.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Mme le ministre vient de reconnaître qu'elle n'était pas compétente sur ce dossier et qu'il fallait en saisir son collègue chargé de l'outre-mer. La solution est donc simple : il suffit de réserver cet amendement...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Non ! Passons au vote !
M. Alain Vasselle. ... et d'attendre que le secrétaire d'Etat à l'outre-mer vienne nous donner son sentiment sur ce point. Peut-être aurons-nous alors la confirmation de l'avis dont M. Nogrix vient de faire état !
Par ailleurs, quand les ministres parviendont-ils enfin à s'émanciper de la décision de Bercy sur des sujets dont on sait pertinemment qu'ils ont leur justification ?
En tout cas, voilà la solution que, pour ma part, je propose.
Maintenant, comme M. le président de la commission des affaires sociales semble souhaiter que nous passions tout de suite au vote...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Merci !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Pour aider Mme le ministre, je propose en effet que nous nous prononcions tout de suite sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 61, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.
Par amendement n° 66 rectifié, Mme Bocandé et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 14, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : "Elles sont également dues pour le dernier enfant à la charge d'un ménage ou d'une personne ayant assumé la charge de trois enfants au moins".
« II. - Les dépenses engagées par le I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Bocandé.
Mme Annick Bocandé. Cet amendement, déposé avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, concerne les allocations familiales en faveur des familles nombreuses.
Le dernier enfant restant à la charge d'une famille n'ouvre pas droit, aujourd'hui, au bénéfice des allocations familiales.
Cette situation résulte de la conjonction de deux dispositions législatives : d'une part, les allocations familiales ne sont attribuées qu'à partir du deuxième enfant à charge ; d'autre part, les enfants atteignant l'âge de vingt ans cessent d'être considérés comme étant à la charge de leur famille.
Le décalage entre la taille « réelle » d'une famille - à savoir le nombre d'enfants présents au foyer - et la taille « légale » au sens des allocations familiales est particulièrement flagrant.
Au fur et à mesure que les aînés atteignent l'âge de vingt ans, les familles voient en effet leur nombre d'enfants à charge diminuer. Quand seul le benjamin satisfait aux conditions pour être considéré à charge, la famille ne perçoit plus rien au titre des allocations familiales, alors même que les aînés sont encore très souvent à sa charge effective.
Cette législation frappe particulièrement les familles nombreuses : une famille ayant, par exemple, trois enfants à sa charge, âgés respectivement de seize, vingt et vingt-trois ans, ne percevra plus les allocations familiales, à un moment où ces enfants génèrent, précisément, des dépenses très élevées.
Des efforts significatifs ont, certes, été accomplis depuis plusieurs années pour relever l'âge limite d'ouverture du droit aux prestations familiales. Il n'en reste pas moins que la prolongation de la scolarité et les difficultés d'intégration professionnelle que rencontrent encore certains jeunes conduisent les parents à assumer la charge de leurs enfants de plus en plus longtemps, alors même que ces derniers n'ouvrent plus droit aux prestations familiales et que leur entretien coûte de plus en plus cher.
Si l'extension des allocations familiales au premier enfant n'est, paraît-il, pas envisageable aujourd'hui pour des raisons financières - une telle mesure accroîtrait les dépenses de la branche famille de 14 milliards de francs environ par an -, il apparaît cependant possible et nécessaire d'accomplir dès à présent un effort en faveur des familles ayant élevé au moins trois enfants, car elles supportent une charge financière importante et sont particulièrement touchées par la suppression des allocations familiales lorsque les aînés dépassent l'âge de vingt ans.
Le présent amendement vise donc à maintenir une aide aux familles d'au moins trois enfants lorsqu'elles n'ont plus qu'un seul enfant à charge.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. M. Lorrain, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille, a longuement insisté, dans son intervention à la tribune, sur le problème des jeunes enfants ou des jeunes adultes.
L'amendement de Mme Bocandé va dans le même sens et la commission a émis un avis très favorable.
M. Alain Vasselle. Très bien ! C'est un très bon amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Le dossier des jeunes adultes est, en effet, très important, et nous aurons à en reparler, puisque le Gouvernement a décidé qu'il serait au coeur de la prochaine conférence de la famille : nous préparons pour juin prochain...
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Anticipons !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. ... un certain nombre d'actions dont nous devrons d'abord discuter avec les partenaires de la politique familiale.
J'ai entrepris, dans un premier temps, de faire un état des lieux de l'ensemble des problèmes. La question fondamentale que nous devons, selon moi, nous poser avant de prendre toute décision est de savoir comment aider les parents qui ont de jeunes adultes à leur charge sans pour autant freiner le cheminement vers l'autonomie de ces jeunes adultes.
J'ajoute que, pour les jeunes adultes qui sont à la charge de leurs parents, l'aide de la collectivité prend d'autres formes que le versement des allocations familiales. Je citerai notamment les bourses de l'enseignement supérieur, mais aussi le dispositif fiscal qui prévoit la prise en compte dans le revenu fiscal des parents de leurs enfants jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, ou encore la possibilité de réduire de leur revenu imposable la pension alimentaire qu'ils leur versent.
En outre, depuis 1998, nous avons progressivement reculé le seuil de versement de certaines prestations : en 1998, nous avons déjà porté de dix-huit ans à dix-neuf ans l'âge limite pour bénéficier des prestations familiales ; en 1999, nous l'avons fait passer de dix-neuf ans à vingt ans ; en 2000, l'âge limite servant à la prise en compte des enfants dans le calcul des aides personnelles au logement et le complément familial a été porté de vingt à vingt et un ans.
Cette année, vous le savez, les priorités de la conférence de la famille rejoignent celles qui sont présentées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, à savoir le logement, l'aide à la petite enfance, l'aide pour les parents qui ont des enfants gravement malades, ainsi que l'ensemble des mesures que j'ai évoquées tout à l'heure.
Le chantier concernant les jeunes adultes est donc actuellement envisagé dans sa globalité, à la fois sociale, avec les prestations, fiscale peut-être, mais aussi éducative, professionnelle, avec tous les dispositifs d'accompagnement qui pourront trouver un juste équilibre entre les charges qui pèsent sur les parents et la nécessité d'encourager l'autonomie des jeunes.
Votre préoccupation est ainsi prise en compte et le Gouvernement ne peut qu'émettre, dans ce contexte, un avis défavorable, non parce qu'il est contre la philosophie globale de cet amendement, mais parce qu'il prépare un plan d'ensemble sur cette question du jeune adulte dans les familles.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 66 rectifié.
Mme Annick Bocandé. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bocandé.
Mme Annick Bocandé. J'ai bien entendu les arguments de Mme la ministre, mais je pense que nous ne parlons pas tout à fait de la même chose : certes, les grands enfants sont concernés par la question que j'ai posée, mais aussi le petit dernier, celui qui n'ouvre plus droit aux allocations familiales et qui, pourtant, est effectivement toujours dans la famille.
Il me semble que, dans un contexte financier assez favorable - je rappelle que la branche famille est en excédent - nous aurions pu faire un geste de reconnaissance vis-à-vis des familles nombreuses, qui le méritent bien.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Voilà pourquoi nous allons voter cet amendement !
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai l'amendement de Mme Bocandé, qui concerne bien, madame la ministre, le dernier enfant. Il s'agit de reconnaître les efforts faits par la famille pendant des années pour faire face aux dépenses inhérentes à la vie d'une famille nombreuse.
Et, même si vos propos sur les enfants majeurs allaient dans le bon sens, madame la ministre, permettez-moi cependant de vous rappeler que vous n'avez fait que poursuivre le plan qui, lancé en 1994 par un précédent gouvernement, n'avait malheureusement pu aller jusqu'à son terme.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. L'occasion était sans doute trop belle pour le Gouvernement de saisir la balle au bond à l'occasion de l'examen de cet amendement !
Depuis 1997, date à laquelle vous avez pris la responsabilité des affaires dans ce pays, madame la ministre, la politique familiale de ce gouvernement a connu des allers et retours. Je ne me fais pas d'illusion quant à l'influence que nous aurions pu exercer sur le Gouvernement pour revenir sur des décisions qui furent contestées avec force en leur temps, mais je dois reconnaître que, grâce à une partie de la majorité plurielle, alors que vous aviez porté un coup à l'universalité des allocations familiales, le groupe communiste a pesé très lourd dans la balance pour amener M. Jospin à faire marche arrière.
Depuis cette époque, on ne peut toutefois pas considérer que ce gouvernement ait une véritable politique familiale, et encore moins une politique familiale en faveur des familles nombreuses, véritables laissées pour compte, surtout parmi les classes moyennes, qui sont les premières à souffrir de cette situation : l'exemple qui a été développé par Mme Bocandé illustre parfaitement la situation dans laquelle se trouvent certaines familles nombreuses, plus particulièrement au sein des familles modestes.
Mais, je le répète, l'occasion était sans doute trop belle pour le Gouvernement de faire un geste en direction de ces familles pour montrer qu'il partage notre préoccupation, en répondant aux besoins patents des familles nombreuses. Certes, le projet de loi de finances pour 2001 prévoit un relèvement du quotient familial pour compenser en partie les pertes subies par les familles, puisque ce quotient, qui était passé de 16 000 francs à 11 000 francs, est remonté à 12 000 francs ou 13 000 francs.
C'est là un petit effort dans la bonne direction, mais, au moment où la branche famille dégage des excédents - alors que, reconnaissons-le au passage, elle doit supporter une dépense qui devrait être assumée par le fonds de solidarité vieillesse -, les familles ne comprendraient pas que l'on mette à la charge de cette branche une dépense de solidarité qui devrait en réalité être supportée par l'Etat et que l'on ne fasse rien en direction des familles.
C'est la raison pour laquelle je me permets d'insister, aux côtés de Mme Bocandé et de mon collègue Jean Chérioux, pour qu'un geste soit fait par le Gouvernement en direction des familles nombreuses. Je ne pense pas que cela irait très loin en termes de coût financier, mais ce serait tout à fait souhaitable pour la branche famille, tant pour le présent que pour l'avenir.
M. Gilbert Chabroux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. Après avoir entendu M. Vasselle, j'ai le sentiment qu'il a oublié ce qui s'est passé voilà quelques années, s'agissant en particulier d'une loi famille votée en 1994 qui avait été financée à crédit,...
M. Jean Chérioux. Non, c'est faux !
M. Gilbert Chabroux. ... suivie d'un déficit très lourd enregistré par la branche famille en 1997 : 14 milliards de francs !
Je crois que M. Vasselle n'est donc guère fondé à nous donner des leçons de politique familiale, certainement pas ! (MM. Alain Vasselle et Jean Chérioux protestent.) Vous n'êtes pas qualifié ! Vous avez échoué !
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas le problème !
M. Gilbert Chabroux. Depuis 1997, il y a eu des avancées. Moi, je constate que les engagements qui ont été pris...
M. Alain Vasselle. Sur le dos des familles !
M. Gilbert Chabroux. ... lors de la conférence de la famille, le 15 juin dernier, par exemple, ont été tenus. La priorité avait été donnée à l'accueil de la petite enfance et aux aides au logement, et les résultats sont là.
En ce qui concerne l'accueil de la petite enfance, je rappelle qu'il existe un fonds d'investissement de 1,5 milliard de francs pour accélérer la réalisation de places de crèche.
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas le problème !
M. Gilbert Chabroux. En ce qui concerne les aides au logement nous en avons parlé de nombreuses fois ici et nous avons appelé de nos voeux une simplification et une harmonisation des barèmes. C'est fait ! La réforme se fait par le haut...
M. Alain Vasselle. Ce n'est pas l'objet de l'amendement en discussion ! Cela n'a rien à voir !
M. Gilbert Chabroux. ... en augmentant les prestations qui sont versées. Ainsi, 4,8 millions de ménages bénéficieront d'une allocation de logement majorée en moyenne de 1 300 francs par an, ce n'est pas rien.
M. Alain Vasselle. Cela n'a rien à voir avec l'amendement de Mme Bocandé.
M. Gilbert Chabroux. Il y a des mesures nouvelles significatives dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, notamment d'allocation de présence parentale. C'est la première fois que l'on crée une nouvelle allocation depuis des années, cela mérite tout de même d'être signalé. Je crois que M. Neuwirth appréciera, que nous apprécierons tous, car cela va dans le bon sens.
Il faut savoir reconnaître les progrès qui ont été accomplis et les comparer aux actions qui ont été décidées quelques années et qui ont toutes, je le répète, échoué.
Pour autant, il ne faut pas en tenir là. Certes, des mesures importantes sont prises, mais il faut aller encore plus loin. Pour ma part, je suis assez d'accord avec la proposition présentée par Mme Bocandé ; elle mérite d'être approfondie. Il faudra bien que lors de la prochaine conférence de la famille, on examine de plus près le problème des jeunes adultes, de la façon la plus large et la plus globale possible.
Beaucoup a déjà été fait et est fait dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour la petite enfance ; il faut maintenant s'occuper du créneau des jeunes adultes.
Beaucoup reste à faire, et c'est un enjeu social de première importance. Je suis heureux que ce soit le thème de la prochaine conférence de la famille. Je suis persuadé que des mesures seront arrêtées, qui reprendront sans doute des propositions qui ont pu être faites ici et donc que nous avancerons encore.
Il s'est passé des choses importantes. Il faut mesurer le chemin accompli. Mesurez, comparez, voyez, il a des excédents ! M. Vasselle dit qu'ils pourraient être encore plus importants. Mais c'est formidable d'avoir des excédents ! A partir du moment où l'on en a, on peut effectivement se demander ce que l'on pourrait en faire. Mais avant, quand il y avait des déficits (M. Alain Vasselle s'exclame) , on ne parlait pas de l'utilisation des déficits, il fallait les combler ! C'est ce que le gouvernement actuel a fait.
Je souhaite que l'on aille encore plus loin, qu'il y ait encore des avancées. Je mise sur la prochaine conférence de la famille et sur ce qu'elle décidera en faveur des jeunes adultes d'une manière globale et après concertation avec les partenaires de la politique familiale. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Reconnaissez ce qu'ont fait les autres !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Pour que les choses soient bien claires pour tout le monde, je tiens à corriger votre propos, monsieur Vasselle.
Vous avez parlé de « familles nombreuses et modestes ». Or, l'amendement n° 66 rectifié ne vise pas les familles modestes, car il ne s'agit pas d'une prestation qui n'est pas versée sous condition de ressources.
M. Alain Vasselle. Les familles nombreuses et modestes.... entre autres !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Au nom de quoi, monsieur le sénateur, une famille qui a un enfant pourrait, tout simplement parce que cet enfant n'a pas encore atteint l'âge de vingt ans, prétendre à la solidarité nationale, alors même que ses deux enfants aînés sont peut-être parfaitement intégrés dans la vie active ? Au nom de quoi les prestations qui ont été versées dans le passé devraient-elles continuer à l'être dans le futur ? Au nom de quoi ?
Il y a encore dans notre pays beaucoup de familles qui ont des difficultés à insérer leurs enfants dans la vie active ; il y a encore trop d'enfants qui n'ont pas accès à l'enseignement supérieur parce qu'ils sont issus de familles modestes. C'est sur ces familles-là que doit porter notre effort.
M. Alain Vasselle. C'est de la politique sociale !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Oui, monsieur le sénateur ! Lorsqu'on fait de la redistribution, on fait à la fois du familial et du social. On tient fermement le cap sur l'universalité et sur le familial, sans remettre en cause les prestations !
M. Henri de Raincourt. C'est faux !
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée. Ne pas soumettre la moitié des prestations familiales à condition de ressources, c'est déjà considérable.
Tous les efforts nouveaux doivent donc porter sur une analyse du besoin des familles. Parfois, le besoin est universel : nous verrons dans quelques instants que l'allocation pour enfant gravement malade est ouverte à toutes les familles...
M. Henri de Raincourt. Heureusement !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué ... sans condition de ressources.
Dans certains cas, s'agissant d'un risque bien identifié, on peut parfaitement concevoir des dispositifs qui bénéficient à toutes les familles. Mais, dès lors qu'il s'agit de solidarité nationale, nous avons l'obligation de cibler la mesure sur les familles qui en ont le plus besoin.
Or, vous proposez une mesure générale, applicable à toutes les familles, même à celles qui n'en ont pas besoin, sous le seul prétexte qu'elles ont un troisième enfant qui n'a pas atteint l'âge de vingt ans. Cela ne serait pas raisonnable.
M. Alain Vasselle. C'est de la politique familiale, pour les familles nombreuses !
C'est un dialogue de sourds !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14.

Article 15



M. le président.
« Art. 15. - I. - L'article L. 511-1 du code de la sécurité sociale est complété par un 11° ainsi rédigé :
« 11° L'allocation de présence parentale. »
« II. - Le titre IV du livre V du code de la sécurité sociale est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Allocation de présence parentale
« Art. L. 544-1 . - Une allocation de présence parentale est attribuée à la personne qui interrompt ou réduit son activité professionnelle dans les conditions prévues à l'article L. 122-28-9 du code du travail, lorsque l'enfant dont elle assume la charge est atteint d'une maladie ou d'un handicap graves ou est victime d'un accident grave nécessitant une présence soutenue ou des soins contraignants pendant une durée prévisible minimale fixée par décret qui peut varier selon les pathologies.
« Ces dispositions sont également applicables à la personne qui interrompt ou réduit son activité professionnelle dans les conditions prévues aux articles 37 bis et 54 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, 60 bis et 75 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ainsi que celles prévues aux articles 46-1 et 64-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.
« Art. L. 544-2 . - Le montant de l'allocation varie en fonction de la durée d'activité restante appréciée par rapport à la durée légale du travail ou la durée considérée comme équivalente ou la durée fixée conventionnellement dans l'entreprise. Le montant de la prestation est majoré pour la personne assumant seule la charge de l'enfant, dans des conditions fixées par décret.
« Art. L. 544-3 . - Pour chaque période d'attribution de la prestation, la nécessité d'une présence soutenue ou de soins contraignants de la part des parents est attestée par un certificat médical détaillé et soumise à l'avis du service du contrôle médical prévu aux articles L. 315-1 et L. 615-13 ou du régime spécial de sécurité sociale. Le droit à la prestation est subordonné à un avis favorable dudit service.
« Art. L. 544-4 . - L'allocation est versée dans la limite d'une durée maximale fixée par décret pour un même enfant et par maladie, accident ou handicap.
« Art. L. 544-5 . - Lorsque les deux membres d'un couple réduisent leur activité professionnelle, ils peuvent bénéficier chacun d'une allocation à taux partiel dans les conditions prévues à l'article L. 544-2 même si le montant cumulé des deux prestations excède celui de l'allocation à taux plein.
« Les deux membres du couple ne peuvent cumuler le bénéfice de deux allocations de présence parentale à taux plein ni celui d'une allocation de présence parentale à taux plein et de l'allocation à taux partiel.
« Art. L. 544-6 . - L'allocation de présence parentale est due à compter du premier jour du mois civil suivant le début de la période de congé visée à l'article L. 122-28-9 du code du travail. En cas de changement de la durée d'activité restante, le montant de la prestation est modifié à compter du premier jour du mois civil suivant le changement.
« L'allocation cesse d'être due à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel les conditions de droit cessent d'être réunies.
« Art. L. 544-7 . - Les modalités selon lesquelles l'allocation de présence parentale à taux plein ou à taux partiel est attribuée aux personnes visées aux articles L. 751-1 et L. 772-1 du code du travail, aux 1° , 4° et 5° de l'article L. 615-1, à l'article L. 722-1 du présent code, à l'article L. 722-9 du code rural et les modalités selon lesquelles l'allocation de présence parentale est attribuée à taux plein aux travailleurs à la recherche d'un emploi visés aux articles L. 351-1 à L. 351-15 du code du travail ou en formation professionnelle rémunérée sont fixées par décret.
« Art. L. 544-8 . - L'allocation de présence parentale n'est pas cumulable avec :
« 1° L'indemnisation des congés de maternité ou d'adoption ;
« 2° L'allocation forfaitaire de repos maternel prévue aux articles L. 615-19 et L. 722-8 du présent code ou l'allocation de remplacement pour maternité prévue à l'article L. 732-10 du code rural ;
« 3° L'indemnisation des congés de maladie ou d'accident du travail ;
« 4° Les indemnités servies aux demandeurs d'emploi ;
« 5° Un avantage personnel de vieillesse ou d'invalidité ;
« 6° L'allocation parentale d'éducation ;
« 7° Le complément d'allocation d'éducation spéciale perçu pour le même enfant ;
« 8° L'allocation aux adultes handicapés.
« Toutefois, l'allocation de présence parentale à taux partiel est cumulable en cours de droit avec l'indemnisation mentionnée au 3° perçue au titre de l'activité exercée à temps partiel.
« Le versement des indemnités dues aux demandeurs d'emploi est suspendu au début du versement de l'allocation de présence parentale et est, à la date de cessation de paiement de l'allocation de présence parentale, repris et poursuivi jusqu'à son terme.
« Lorsque le complément d'allocation d'éducation spéciale est attribué au titre d'une période pour laquelle un droit à l'allocation de présence parentale a déjà été ouvert, la prestation la plus favorable reste acquise au bénéficiaire. »
« III. - Au premier alinéa de l'article L. 552-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : "à l'exception de l'allocation de parent isolé", sont insérés les mots : "et de l'allocation de présence parentale". »
« IV. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 381-1 du code de la sécurité sociale, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« La personne bénéficiaire de l'allocation de présence parentale à taux plein est affiliée à l'assurance vieillesse du régime général, sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret.
« La personne bénéficiaire de l'allocation de présence parentale à taux partiel est affiliée à l'assurance vieillesse du régime général de sécurité sociale, sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret. »
« V. - Au chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est créé un article L. 161-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-9-1 . - Les personnes bénéficiaires de l'allocation de présence parentale conservent leurs droits aux prestations en nature de l'assurance maladie, maternité, de leur régime d'origine pendant la durée de perception de l'allocation. A l'issue de cette période, elles retrouvent les droits aux prestations en espèces de l'assurance maladie, maternité, invalidité et décès, acquis antérieurement à l'ouverture du droit à l'allocation. »
« VI. - Le chapitre V du livre VII du code de la sécurité sociale est complété par une section 14 ainsi rédigée : "Section 14
« Allocation de présence parentale
« Art. L. 755-33 . - L'allocation de présence parentale est attribuée dans les départements mentionnés à l'article L. 751-1. »
« VII. - A la section 5 du chapitre II du titre II du livre Ier du code du travail, l'article L. 122-28-9 est ainsi rédigé :
« Art. L. 122-28-9 . - Tout salarié dont l'enfant à charge au sens de l'article 513-1 du code de la sécurité sociale et remplissant l'une des conditions prévues par l'article 512-3 du même code est victime d'une maladie, d'un accident ou d'un handicap graves, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, et nécessitant la présence d'une personne à ses côtés, a le droit soit de travailler à temps partiel, soit de bénéficier d'un congé de présence parentale entraînant la suspension de son contrat de travail.
« La période d'activité à temps partiel, ou de suspension du contrat de travail, a une durée initiale de quatre mois au plus. Elle peut être renouvelée deux fois, dans la limite maximale de douze mois, renouvellements inclus.
« Le salarié doit envoyer à son employeur, au moins quinze jours avant le début du congé ou du travail à temps partiel, une lettre recommandée avec demande d'avis de réception l'informant de sa volonté de bénéficier des dispositions du premier alinéa du présent article, ainsi qu'un certificat médical établi selon les modalités fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Lorsque le salarié entend prolonger son congé ou son activité à temps partiel, il doit avertir l'employeur de cette prolongation, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au moins un mois avant le terme initialement prévu et l'informer, le cas échéant, de son intention soit de transformer le congé de présence parentale en activité à temps partiel, soit de transformer l'activité à temps partiel en congé de présence parentale. Toutefois, pendant la période d'activité à temps partiel ou à l'occasion des prolongations de celle-ci, le salarié ne peut pas modifier la durée du travail initialement choisie sauf accord de l'employeur ou si une convention ou un accord collectif de travail le prévoit expressément.
« A l'issue du congé de présence parentale ou de la période d'exercice de son activité à temps partiel, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente.
« Toutefois, en cas de décès de l'enfant ou de diminution importante des ressources du ménage, le salarié retrouve également son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente, s'il a accompli les formalités prévues à l'article L. 122-28-2. »
« VIII. - A l'article L. 122-28-6 du code du travail, les mots : "est prise en compte" sont remplacés par les mots : "et la durée du congé de présence parentale prévue au premier alinéa de l'article 122-28-9 sont prises en compte". »
« IX. - La loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 32 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° Dans le deuxième alinéa de l'article 37 bis, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 3° L'intitulé de la section 6 du chapitre V est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 54, un article 54 bis ainsi rédigé :
« Art. 54 bis. - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son administration ou service d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire, pour une durée initiale de quatre mois au plus ; il peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite.
« A l'issue du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son corps d'origine. Il est réaffecté dans son ancien emploi. Dans le cas où celui ci ne peut lui être proposé, le fonctionnaire est affecté dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail. S'il le demande, il peut également être affecté dans un emploi le plus proche de son domicile sous réserve de l'application de l'article 60 ci dessous.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
« X. - La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 55 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° L'intitulé de la section 6 du chapitre V est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 3° Dans le deuxième alinéa de l'article 60 bis, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 75, un article 75 bis ainsi rédigé :
« Art. 75 bis. - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son administration ou service d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon les modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit sur demande écrite du fonctionnaire pour une durée initiale de quatre mois au plus et peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite
« A l'issue du congé de présence parentale, ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans sa collectivité ou établissement d'origine, sur sa demande et à son choix, dans son ancien emploi ou dans un emploi le plus proche de son dernier lieu de travail ou de son domicile lors de sa réintégration, lorsque celui ci a changé pour assurer l'unité de la famille. » ;
« 5° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 136, les mots : "des articles 59, 75, 100" sont remplacés par les mots : "des articles 59, 75, 75 bis, 100". »
« XI. - La loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifiée :
« 1° Le 6° de l'article 39 est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 2° Dans le deuxième alinéa de l'article 46-1, les mots : "service à mi-temps" sont remplacés par les mots : "service à temps partiel" ;
« 3° L'intitulé de la section 6 du chapitre IV est complété par les mots : "et congé de présence parentale" ;
« 4° Il est inséré, après l'article 64, un article 64-1 ainsi rédigé :
« Art. 64-1 . - Le congé de présence parentale est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son établissement d'origine lorsque la maladie, l'accident ou le handicap graves d'un enfant à charge, appréciés selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat, nécessite la présence de sa mère ou de son père auprès de lui.
« Ce congé non rémunéré est accordé de droit, sur demande écrite du fonctionnaire, pour une durée initiale de quatre mois au plus ; il peut être prolongé deux fois, dans la limite d'un an.
« Dans cette position, le fonctionnaire conserve ses droits à l'avancement d'échelon, réduits de moitié, ainsi que la qualité d'électeur lors de l'élection des représentants du personnel au sein de la commission administrative paritaire. Il n'acquiert pas de droits à la retraite.
« A l'issue du congé de présence parentale ou en cas de diminution des ressources du ménage ou en cas de décès de l'enfant, le fonctionnaire est réintégré de plein droit, au besoin en surnombre, dans son établissement d'origine.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. »
Sur l'article, la parole est à M. Neuwirth.
M. Lucien Neuwirth. Si je me réjouis, effectivement, que le Gouvernement ait fait sien le principe d'une allocation de présence parentale, qui était l'objet de la proposition de loi créant une allocation de présence familiale adoptée à l'unanimité par notre Haute Assemblée le 15 juin dernier, je regrette que Mme le secrétaire d'Etat à la santé se soit opposée, à l'époque, à l'adoption des mesures budgétaires d'accompagnement que notre commission des affaires sociales avaient prévues en nous opposant l'irrecevabilité aux termes de l'article 40 de la Constitution.
Cela fait beaucoup de retard pris pour la mise en oeuvre de ce dispositif d'aide aux familles d'enfants malades, dont tout le monde, ici et ailleurs, s'accorde à dire qu'il doit être instauré rapidement ; il s'agissait en effet d'une lacune extrêmement regrettable dans notre système de protection sociale.
Je redis également mon regret que n'ait pas été repris par le Gouvernement le dispositif envisagé pour étendre l'allocation de présence familiale à une autre situation au moins aussi douloureuse, celle de l'accompagnement d'un proche en fin de vie.
Aujourd'hui, nous est donnée la possibilité d'entériner la création de cette allocation de présence parentale.
Nous pouvons toutefois nous poser la question de sa mise en oeuvre.
Reculée au 1er janvier 2001, prélevée sur les recettes de la branche famille à hauteur de 200 millions de francs, nous annonce-t-on. Mais qu'en sera-t-il dans la réalité ?
La présidente de la caisse nationale des allocations familiales, Mme Nicole Prud'homme, nous a rendu compte, en commission, de l'avis défavorable rendu par le conseil d'administration de la CNAF sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Mais, surtout, elle a regretté, madame le ministre, que l'annonce par le Gouvernement du congé et de l'allocation de présence parentale ait eu lieu avant même la saisine du conseil d'administration de la CNAF.
En réalité, où se trouve le vrai problème ? Il est d'ordre rédactionnel. Pourra-t-on vraiment compter sur cette enveloppe de 200 millions de francs, chiffre annoncé uniquement dans l'exposé des motifs de l'article 15 ? Un exposé des motifs n'est pas une loi !
Je vous rappelle en outre, madame le ministre, qu'un décret est encore nécessaire pour fixer les montants de l'allocation de présence parentale en fonction des variations de réduction de l'activité.
Nous venons de perdre six mois pour des raisons, disons d'appropriation d'effet d'annonce...
Pouvez-vous nous assurer, madame le ministre, d'une publication en urgence de ce décret et du déblocage de l'enveloppe dans des délais rapides ? Nous avons déjà perdu six mois. Il serait regrettable d'en perdre encore au moins autant.
Vous savez que « chat échaudé craint l'eau froide. » J'attends toujours, depuis un an et demi, d'autres décrets d'application, notamment sur la mise en oeuvre des soins palliatifs ; je voudrais bien qu'en ce qui concerne ce décret sur l'allocation de présence parentale les choses aillent un peu plus vite. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. La création d'une nouvelle allocation est rare, mon collègue Gilbert Chabroux l'a dit tout à l'heure avec conviction. Aussi, nous nous félicitons de la création de ce congé parental, assorti d'une allocation.
Certaines situations graves et douloureuses n'étaient jusqu'à présent couvertes par aucun dispositif. Cette création répond à un véritable problème, auquel notre assemblée avait déjà eu l'occasion de montrer à quel point elle était sensible. La proposition de loi de M. Neuwirth, déposée en juin dernier, a très certainement contribué à enrichir le débat.
Le Gouvernement avait promis de s'emparer de cette question. C'est aujourd'hui chose faite.
Pour la première fois, la primauté de la relation parentale lors d'une maladie grave d'un enfant est reconnue. Ce sont quelque 13 000 familles qui, chaque année, sont confrontées à cette douloureuse épreuve. Je me réjouis de pouvoir dire qu'enfin leur détresse est prise en compte.
Par ailleurs, ce dispositif offre un véritable cadre juridique protecteur : maintien de la protection sociale, légitimité à être absent sans risque de licenciement, possibilité d'opter pour un congé à temps plein ou d'aménager son activité professionnelle en fonction des besoins de l'enfant.
Le groupe socialiste votera donc, bien évidemment, l'article 15.
M. le président. Par amendement n° 14, MM. Lorrain et Descours, au nom de la commission des affaires sociales, proposent, à la fin du deuxième alinéa du IV de l'article 15, de supprimer les mots : « , sous réserve que ses ressources ou celles du ménage soient inférieures à un plafond fixé par décret ».
La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je voudrais d'abord rappeler à Mme Campion la chronologie des faits : avant la conférence de la famille de 1999, le Sénat avait déjà accepté de prendre en compte l'allocation parentale d'éducation ainsi que l'accompagnement d'un proche en fin de vie.
Le Sénat souhaitait en effet que cette faculté d'obtenir un congé pour assister un proche en fin de vie soit offerte. Malheureusement, nous n'avions pas été entendus.
Mais je crois qu'une bonne idée est une idée qui ne vous appartient plus, qui n'appartient plus à personne, qui appartient à tous. Voilà qui, en définitive, est important.
Vous comprendrez donc que les déclarations d'autosatisfaction nous paraissent quelquefois un peu difficiles à supporter...
M. Henri de Raincourt. C'est misérable !
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. J'en viens à l'amendement n° 14.
La commission propose de supprimer la condition de ressources s'agissant des parents bénéficiant de l'allocation de présence parentale au titre de l'assurance vieillesse. D'après ce que j'ai perçu, madame le ministre, dans votre propos tout à l'heure, je crois que nous allons dans le sens que vous souhaitez.
Cette allocation reprend en fait un dispositif voisin de l'APE. Les bénéficiaires perçoivent une allocation et sont affiliés à l'assurance maladie. Mais en ce qui concerne les cotisations vieillesse, cette prise en charge est assurée seulement sous condition de ressources.
On ne discutera pas ici à nouveau de la pertinence du dispositif s'agissant de l'APE, prestation qui relève du choix de vie des parents. Mais en ce qui concerne l'allocation de présence parentale qui est attribuée aux parents d'enfants malades, accidentés, handicapés, sont les accidents de la vie.
Cette allocation entre bien dans le cadre d'une prestation de solidarité nationale. Elle s'adresse à toutes les familles frappées par le malheur d'avoir un enfant malade ou handicapé. Il ne serait donc pas équitable que certains partent, parce que leurs revenus dépassent un montant déterminé, voient l'âge de leur retraite repoussé de la durée du congé.
De surcroît, il s'agit d'une affiliation au régime général, dont les cotisations sont calculées sur un montant plafonné du salaire - environ 14 000 francs - ce qui constitue déjà une forme de mise sous condition de ressources. L'article 15 propose d'y ajouter un effet de seuil.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Nous arrivons, avec l'article 15, à une mesure très importante, puisqu'il s'agit de la création d'une nouvelle allocation, l'allocation de présence parentale.
Je voudrais rappeler que le dispositif financier se double d'un dispositif juridique, puisque, dorénavant, le père ou la mère, ou les deux, lorsqu'ils travaillent à temps partiel seront des salariés protégés, c'est-à-dire qu'ils ne pourront plus être licenciés lorsqu'ils prendront, désormais légalement, un congé pour s'occuper de leur enfant gravement malade. C'est un aspect important du dispositif.
J'ai voulu encourager la parité parentale en augmentant le niveau de l'allocation lorsque les deux parents suspendent leur activité. Il faut revaloriser le rôle du père, et c'est une façon d'y parvenir. Un enfant gravement malade a autant besoin de son père que de sa mère. C'est pourquoi le montant cumulé des deux allocations pour une réduction de l'activité à mi-temps atteindra 4 000 francs, au lieu de 3 000 francs si un seul des parents s'arrête totalement.
L'activité à 80 % sera également autorisée. Ce dispositif, qui était très attendu par les associations, pourra soulager les parents, et éviter qu'ils ne se sentent culpabilisés s'ils s'absentent de leur travail.
Jusqu'à présent, les parents s'arrêtaient en utilisant parfois des dispositifs qui n'étaient pas prévus pour cela ; je me réjouis donc que certaines propositions rejoignent la volonté du Gouvernement.
Je précise que le dispositif prévu à l'article 15 a été retenu tout simplement parce que c'est celui dont relèvent les parents qui bénéficient de l'allocation d'éducation spéciale et qui s'arrêtent de travailler pour donner des soins à un enfant handicapé.
Créer deux dispositifs différents ne semblerait pas équitable. C'est pour ne pas traiter plus favorablement des interruptions ou des réductions d'activité de quelques mois afin d'assurer des soins à un enfant gravement malade que le dispositif a été « calé » sur celui qui existe déjà.
Je tiens cependant à préciser que l'expérience et les témoignages des associations montrent que, dans la plupart des cas, les parents choisissent de s'arrêter partiellement de travailler sauf s'ils sont contraints de se déplacer pour aller dans les centres hospitaliers, et donc d'abandonner totalement leur travail, dans la plupart des cas, ils se « raccrochent » à leur activité professionnelle, même à temps très partiel, pour pouvoir « tenir le coup » ; ils sont conduits alors à partager les charges. C'est ce à quoi vise cette prestation, qui pourra être versée si les parents réduisent leur activité à 80 % ou à 50 %.
Il est clair, monsieur le rapporteur, que, même dans ce cas, le régime financier de l'allocation reste très favorable, notamment les règles de validation des droits à retraite : il n'y a pas remise en cause des droits à retraite pour des parents qui bénéficient de cette allocation de présence parentale.
J'espère avoir répondu à vos préoccupations et vous avoir éclairé sur les raisons pour lesquelles ce dispositif a été mis en place.
Quant à notre volonté politique de prendre les textes d'application, monsieur Neuwirth, je dirai que les dernières réunions ont eu lieu cette semaine au ministère. Les décrets sont prêts et seront adressés la semaine prochaine au conseil d'administration de la CNAF. Je n'ai pas l'habitude de faire des annonces qui ne soient pas suivies d'effet. Je puis affirmer solennellement ici que le dispositif sera, comme prévu, applicable au 1er janvier.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Autant je critique sévèrement ce qui m'apparaît ne pas correspondre à ce qu'attend la société française sur le plan législatif, autant je tiens à saluer ici cette initiative, qui me paraît tout à fait heureuse.
Elle ne me semble cependant pas absolument complète.
Je rappelle à cet égard à la Haute Assemblée que la majorité sénatoriale avait déposé une proposition de loi relative à la famille dans laquelle était prévu un dispositif qui étendait le bénéfice du congé parental aux descendants de personnes âgées devenues dépendantes. Nous savons que, aujourd'hui, pratiquement cinq générations coexistent dans la même famille et que, si nous allons apporter une solution au problème posé par les enfants, plus particulièrement par les enfants malades, reste pendant celui des personnes qui deviennent dépendantes ou qui sont en fin de vie, comme l'a rappelé très justement M. Neuwirth.
Je pense pouvoir réaffirmer ici que cette idée n'est pas nouvelle en soi. Il est heureux que le Gouvernement ait repris à son compte notre initiative au travers de ce texte. Ce que je regrette, c'est qu'il n'aille pas encore plus loin. Mais je ne désespère pas que, rapidement, le Gouvernement sache tenir compte des propositions avancées par l'opposition nationale, qui ne sont pas toutes à rejeter. Il faut savoir en prendre en compte, parce qu'elles ont tout autant de légitimité que celles du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 15, ainsi modifié.

(L'article 15 est adopté.)

Article 16



M. le président.
« Art. 16. - I. - L'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° De verser au Fonds de solidarité vieillesse créé à l'article L. 135-1 un montant égal aux dépenses prises en charge par ce fonds au titre des majorations de pensions mentionnées au a du 3° et au 6° de l'article L. 135-2 ; ce versement fait l'objet d'acomptes. »
« II. - L'article L. 135-3 du code de la sécurité sociale est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Les sommes mises à la charge de la Caisse nationale des allocations familiales par le 5° de l'article L. 223-1. »
« III. - Pour l'année 2001, la Caisse nationale des allocations familiales verse au Fonds de solidarité vieillesse un montant égal à 15 % des sommes visées au présent article. »
Sur l'article, la parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Cet article organise le transfert progressif du financement des majorations de pension pour enfant du Fonds de solidarité vieillesse vers la Caisse nationale des allocations familiales.
Les majorations pour enfant accordées dès 1945 au titre de la politique familiale ont pour effet d'augmenter la pension de tout assuré de 1/10 de son montant si l'assuré a eu ou a élevé au moins trois enfants pendant au moins neuf ans, avant leur seizième anniversaire.
Il s'agit d'un avantage familial différé, explicitement institué pour les familles nombreuses et visant à instaurer une compensation en termes de pension du fait du taux élevé d'inactivité chez les mères de famille ayant eu trois enfants ou plus.
Il n'apparaît donc pas choquant, au moment où la branche famille est excédentaire - je rappelle que le déficit était de 14,5 milliards de francs en 1997, du fait de l'absence de financement de la loi de 1994 - d'opérer ce juste retour, surtout à une époque où c'est la branche vieillesse qui doit être soutenue.
C'est d'autant moins choquant que, corrélativement, le Fonds d'action sociale des travailleurs immigrés et de leur famille, de son côté, est transféré, à hauteur de 900 millions de francs, dans le collectif budgétaire 2000 et, pour plus de 1 milliard de francs, dans le projet de loi de finances pour 2001.
Ce transfert permet une clarification des relations entre la branche vieillesse et la branche famille, une meilleure transparence et la pérennité de cette mesure.
Cette affectation des excédents de la branche famille au financement d'avantages familiaux de retraite reste conforme à la spécification des branches : les excédents de la branche famille contribuent à financer les avantages familiaux.
M. le président. Par amendement n° 15, MM. Lorrain et Descours, au nom de la commission des affaires sociales, proposent de supprimer cet article.
La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L'enthousiasme à l'égard de ce dispositif n'a, semble-t-il, pas été partagé par l'Assemblée nationale. Nous proposons de le supprimer.
Madame le ministre, en agissant ainsi, nous vous aidons en quelque sorte parce qu'il ne semble pas que vous soyez très favorable à cette formule imposée par Bercy.
A l'égard de cette mesure, que vous aviez dit découvrir lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, la majorité plurielle, quant à elle, s'est montrée plus que réservée, car elle y voit, à juste titre, l'instrument de l'enterrement définitif de toute politique familiale de grande ampleur dans notre pays.
M. Georges Sarre a déposé un amendement de suppression à l'Assemblée nationale. Mme Jacquaint a fait part des fortes réserves du groupe communiste. Les acteurs de la politique familiale ont marqué leur opposition à cette option, Mme Prud'homme en a fait état devant notre commission.
En vous apportant son aide, la majorité du Sénat défend la politique familiale.
Nous proposons de supprimer cet article parce que cette majoration est par essence un avantage de l'assurance vieillesse.
Cette mesure a été créée à la Libération, en même temps que le régime général. L'esprit de la Libération, c'était de dire, à l'inverse de François Guizot, « faites des enfants plutôt que de l'épargne », c'était de donner à ceux qui n'avaient pas pu se constituer un pécule pour leurs vieux jours, parce qu'ils avaient eu beaucoup d'enfants, un complément de retraite.
M. le Premier ministre a déclaré, le 21 mars dernier : « La retraite, c'est le patrimoine de ceux qui n'en ont pas. » C'est là l'objet de la majoration de pension pour enfant.
Il s'agissait aussi d'assurer une vigueur nouvelle au régime de retraite que le Conseil national de la Résistance avait voulu, c'est-à-dire notre régime par répartition, dont la prospérité repose avant tout sur la démographie. La majoration de pension pour enfant est donc un pilier de l'assurance vieillesse.
Vous avez dit à l'Assemblée nationale : « Lorsque le conseil d'administration de la CNAF examinera le dispositif, il pourra, le cas échéant, l'améliorer ou le moduler. »
Or, vous le savez bien, le conseil d'administration applique la loi. Reprenons donc la procédure à zéro en supprimant cet article et soumettons votre proposition à la CNAF. Vous donnerez ainsi un bel exemple de concertation.
Si les interlocuteurs familiaux sont favorables à une reprise par la branche famille de cet avantage vieillesse, nous discuterons des modalités. S'ils n'y sont pas favorables, c'est dans le cadre d'une réforme globale des retraites, dont Alain Vasselle vous entretiendra tout à l'heure, qu'il faudra trouver la solution.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Personne ici ne peut nier que les majorations de pension concernées sont liées aux charges de famille. Il s'agit donc bien de prestations familiales différées dans le temps.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. Bien sûr !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Dès lors, il n'est pas incohérent de les mettre à la charge de la branche famille et, par là-même, de les consolider.
Comme vous le savez, vous qui êtes très au fait de ces questions, voilà quelques années, des ajustements sur la branche vieillesse ont donné lieu à des débats et il a été question de remettre en cause ces acquis de la Libération.
Le transfert est un peu rude, c'est exact. Mais il correspond à une clarification des comptes, nul ne peut le nier.
Il s'agit bien d'un avantage familial différé, qui a quelque chose à voir aussi avec la solidarité entre les générations - je reviendrai sur ce point ultérieurement.
Enfin, je tiens à vous dire que ce transfert s'étalera sur sept années. J'en prends ici solennellement l'engagement.
La montée en charge du dispositif figure à hauteur de 15 % dans le projet de financement de la sécurité sociale pour 2001. Le dispositif est extrêmement précis et, comme je l'ai dit aux partenaires de la politique familiale, ces transferts s'étaleront dans le temps.
L'intérêt de ce transfert réside dans le fait que ces majorations seront désormais débattues au sein du conseil d'administration de la CNAF, qu'il s'agira désormais de prestations familiales à part entière.
Je crois que la rudesse du transfert, que je ne nie pas, je le redis, est largement compensée par la clarification des comptes, par l'engagement sur la pérennisation de cet acquis très important et, enfin, par le fait qu'il se traduira par une montée en puissance du dispositif, qui garantira en tout état de cause le maintien de marges de manoeuvre, d'excédents qui nous permettrons de prendre les mesures nouvelles que nous préparons, en particulier celles qui intéressent le jeune adulte.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. J'ai bien entendu ce qu'a dit Mme le ministre, et j'aimerais la croire. Je relève toutefois que, si le transfert de l'allocation de rentrée scolaire avait été prévu sur trois ans, en fait, il se fera sur deux ans.
Aujourd'hui, pour un autre dispositif, vous parlez de sept ans. Je veux bien vous croire, mais il faudrait que nous disposions d'un certain nombre de sécurités.
Ensuite, vous parlez de modulation et du rôle du conseil d'administration de la CNAF. Pourtant, vous encadrez l'action de ce dernier. On ne voit pas tellement la part de modulation qu'il pourrait y avoir.
Nos interrogations portent peut-être sur des questions annexes, mais elles n'en demeurent pas moins des interrogations.
M. Alain Vasselle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Veuillez m'excuser de reprendre à nouveau la parole, mais, madame le ministre - est-ce volontairement ou non ? - vous omettez de préciser que le dispositif qui a été imaginé par le Gouvernement a essentiellement pour objet d'assurer le financement du FOREC.
M. Charles Descours, rapporteur. C'est exactement ce que je voulais dire !
M. Alain Vasselle. C'est bien de placer le débat entre la branche vieillesse et la branche famille, mais la question de fond n'est pas du tout là. Si c'était réellement le débat, nous aurions pu en discuter longuement.
En fait, l'objectif du Gouvernement n'est pas tant de faire assumer par la branche famille une charge que supportait jusque-là la branche vieillesse, c'est plutôt d'alléger les charges du FSV pour compenser ce que ce fonds devra verser au FOREC pour financer les 35 heures.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Oui, c'est cela !
M. Alain Vasselle. C'est cela le dispositif. Il faut le dire clairement.
Il faut avoir l'honnêteté intellectuelle d'aller jusqu'au bout de l'explication. Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt et trouver de faux arguments, essayer de montrer que le Gouvernement est de bonne foi et que le problème consiste simplement à transférer une charge de la branche vieillesse à la branche famille. Ce n'est pas du tout cela ! Il s'agit du financement du FOREC.
Ce que vous ne dites pas, en outre, madame le ministre, c'est que, en mettant en place ce dispositif, vous diminuez la possibilité - que vous aviez vous-même prévue - qui était offerte au fonds de solidarité vieillesse d'alimenter le fonds de réserve des retraites, car vous otez autant d'excédents au fonds de solidarité qui devaient alimenter le fonds de réserve et qui devaient assurer, à terme, le financement de la branche vieillesse.
Bref, vous avez mis en place un dispositif qui est obscur, difficile à comprendre et qui est tout à fait autre que ce que vous avez bien voulu dire, avec la bonne foi dont vous prétendez vouloir faire preuve en cette occasion. Permettez-moi de vous dire que je ne suis pas du tout convaincu.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous ne pouvez à la fois dire, ici et ailleurs, que les 35 heures ne sont pas financées et voir partout la main dissimulée de l'Etat prélever dans toutes les caisses pour financer les 35 heures. Il y a quelque chose d'incohérent dans votre appréciation des choses.
M. Jean Chérioux. C'est la triste vérité !
M. Alain Vasselle. C'est la réalité !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je ne comptais pas reprendre la parole après Alain Vasselle, qui avait exprimé mieux que je ne l'aurais fait ce que je voulais dire. Mais je me sens obligé de reprendre la parole, madame le ministre, malgré tout le désir que j'aurais de vous être agréable, parce que Alain Vasselle a raison et que tout ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est complètement pollué par le financement du FOREC,...
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Mais non !
M. Charles Descours, rapporteur. Mais si !
... par le financement du FOREC, je le répète, assuré par une tuyauterie (Mme le ministre proteste.) C'est bien de manifester votre indignation, madame, mais si on vous montrait toute cette tuyauterie !...
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 16 est supprimé.

Article 17



M. le président.
« Art. 17. - Au chapitre II du titre III du livre V du code de la sécurité sociale, il est créé un article L. 532-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 532-4-1 . - Par dérogation à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 532-1, l'allocation parentale d'éducation à taux plein peut être cumulée pendant une durée fixée par décret avec un revenu professionnel en cas de reprise d'activité du parent bénéficiaire alors qu'il a un enfant à charge remplissant des conditions d'âge fixées par décret.
« Lorsque le parent bénéficiaire a cumulé l'allocation parentale d'éducation à taux plein avec un revenu professionnel, le droit à l'allocation parentale d'éducation à taux plein ne peut être réouvert qu'en cas de changement de sa situation familiale. »
Sur l'article, la parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. L'allocation parentale d'éducation répond à une forte attente des familles, qui souhaitent accompagner les premières années de vie de leurs enfants. Mais la pratique a révélé une faiblesse dans cette mesure. En effet, au moment de reprendre une activité professionnelle, les jeunes mères sont confrontées à de nombreuses difficultés occasionnées par un éloignement durable du marché du travail.
Cet article, dans le prolongement des mesures incitatives à la reprise d'activité figurant dans la loi relative à la lutte contre les exclusions au profit des allocataires de minima sociaux, tend à pallier cet inconvénient et ouvre aux allocataires de l'APE la possibilité de cumuler le bénéfice de celle-ci avec un retour à l'emploi.
Cette mesure favorable à la reprise d'une activité instaure donc une période transitoire de deux mois pendant laquelle le cumul de l'allocation parentale d'éducation et d'un revenu d'ordre professionnel sera possible lorsque la reprise s'effectuera entre le dix-huitième et le trentième mois de l'enfant.
J'approuve cette disposition, car j'y vois plus qu'une simple incitation à la reprise d'activité. Elle aura, en outre, l'avantage de permettre aux femmes de choisir le moment de leur retour dans un milieu professionnel.
M. le président. Par amendement n° 88, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter in fine le second alinéa du texte présenté par l'article 17 pour l'article L. 532-4-1 du code de la sécurité sociale par les mots : « ou professionnelle ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement a pour objet de permettre à une personne ayant cumulé l'allocation parentale d'éducation à taux plein avec un revenu professionnel de voir rouvrir ses droits à l'allocation parentale d'éducation en cas, non seulement de changement de situation familiale, comme le prévoit le texte, mais aussi de changement de situation professionnelle.
Cela peut paraître discutable, mais nous souhaitons renforcer le caractère social de l'article et favoriser encore plus la possibilité d'un retour à l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L'allocation parentale d'éducation a été considérablement renforcée en 1994 : ses conditions d'ouverture ont été assouplies et elle peut être demandée dès le deuxième enfant.
Cette allocation connaît un succès assez remarquable dans la mesure où 500 000 familles environ en bénéficient, et son coût s'élève à 18 milliards de francs par an.
S'appuyant sur une étude du CREDOC, le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie selon laquelle le taux d'activité des femmes à la sortie du dispositif serait plus faible que ce qu'il est pour l'ensemble des femmes, le Gouvernement prétend que l'APE piège les femmes qui ont choisi de garder elles-mêmes leur enfant car elles peinent à retrouver un emploi.
Sous couvert de favoriser la sortie du dispositif et l'activité féminine, le Gouvernement propose d'autoriser un cumul très temporaire de l'APE avec un revenu d'activité pour les allocataires ayant choisi de retourner sur le marché du travail.
Mais, au-delà de la volonté affichée de favoriser le travail des femmes, le Gouvernement songe-t-il peut-être également à favoriser la sortie d'un dispositif qui coûte cher et qui est plébiscité... Mais, je n'ai pas l'intention de faire un mauvais procès.
Selon un rapport remis au Gouvernement, la mesure, en raison de son succès, donnerait lieu à des dérapages financiers.
Au demeurant, j'observe que l'article 17 crée une faculté et non une obligation pour les familles allocataires. Aussi, la commission ne s'y opposera pas.
J'observe, en outre, que l'annexe C du projet de loi présente cette mesure comme génératrice d'une économie de 110 millions de francs pour la branche famille, ce qui est tout de même important.
Toutefois, le dispositif proposé par le Gouvernement introduit un risque pour les familles. Le bénéficiaire de l'allocation à taux plein, s'il choisit de reprendre une activité, ne pourra se voir rouvrir le droit à une allocation qu'en cas de changement de sa situation familiale.
L'amendement n° 88 propose d'élargir la possibilité de réouverture d'une allocation parentale d'éducation à un changement de situation professionnelle. En effet, si une personne choisit de sortir du dispositif pour souscrire un contrat à durée déterminée et si, à l'issue de ce contrat, cette personne ne se voit pas renouvelée dans son emploi, elle aura perdu son droit à l'APE.
Le dispositif proposé n'est donc que faiblement incitatif à un retour à l'emploi pour les personnes à qui il n'est pas proposé de contrat à durée indéterminée. Cette disposition révèle bien la nature du dispositif : ne veut-on pas réaliser des économies sur une prestation ? Nous n'irons pas jusqu'à l'affirmer, mais quand même... On ne peut s'empêcher de penser à la baisse du plafond de l'AFEAMA, mesure que le Gouvernement semblait proposer en faveur des familles, alors qu'en fait s'engageait une baisse du niveau des prestations. Cela n'est pas anodin.
En conséquence, et sous réserve de précisions supplémentaires, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je ferai tout d'abord observer que le taux de chômage des femmes qui sortent de l'allocation parentale d'éducation est environ le double du taux de chômage du reste de la population. Il est clair qu'à la sortie d'une APE les femmes éprouvent beaucoup de difficultés à se réinsérer dans le monde du travail.
Seconde observation : certaines femmes hésitent à s'engager dans un nouvel emploi car elles se trouvent brutalement confrontées au problème de la garde de leurs enfants.
La possibilité de cumuler pendant deux mois cette allocation avec un salaire, ce qui constitue une dérogation exceptionnelle, a un double objectif : aider les femmes qui ont retrouvé un emploi à faire face aux frais de garde de leurs enfants et les encourager à rechercher un emploi stable.
L'amendement que vous proposez, monsieur le sénateur, part d'une bonne intention. Vous pensez que, si une femme perd son emploi, il faut qu'elle puisse retrouver l'allocation parentale d'éducation.
Après avoir mûrement réfléchi, je pense qu'un tel dispositif pourrait se retourner contre les femmes elles-mêmes, dans la mesure où certains employeurs recruteraient des femmes à l'essai pendant deux mois et leur diraient ensuite : vous n'avez qu'à redemander l'APE.
Avec le dispositif proposé, en deux mois, une femme pourra évaluer si elle fait un bon choix. En tout cas, elle cherchera un contrat à durée indéterminée et hésitera à accepter un contrat à durée déterminée précaire.
J'ajouterai qu'il s'agit d'un dispositif facultatif.
En tout cas, il ne me semble pas bon de laisser penser aux femmes qu'elles peuvent devenir salariées, puis revenir sous le régime de l'APE.
Je peux vous proposer, mesdames, messieurs les sénateurs, de faire évaluer le dispositif dans un an. Nous verrons alors si certaines femmes ont été véritablement privées d'une possibilité de retour en APE. En attendant, je pense que ce serait donner un mauvais signal, allant dans le sens de la précarité, que de ne pas faire le pari d'un retour stable et durable des femmes qui ont fait le choix du monde du travail.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Madame la ministre, notre rapporteur pour la branche famille a signalé que le problème allait se poser pour les femmes qui obtiendraient un CDD.
Selon vous, une femme qui voudra reprendre une activité professionnelle trouvera un contrat à durée indéterminée.
Or, compte tenu de ce que vous avez dit vous-même des difficultés qu'ont les femmes qui sortent de l'APE à retrouver du travail, je crains qu'on ne leur propose des contrats à durée déterminée.
Pour les encourager à accepter malgré tout ces CDD, je pense qu'il faut adopter cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 88.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je partage le point de vue de notre rapporteur.
Cette discussion me donne l'occasion de dire à M. Chabroux, qui semblait considérer que seule la gauche était capable de créer des allocations, que tel n'est pas le cas. Ainsi, l'APE n'a pas été créée par vous, mais par un gouvernement placé sous la direction de Jacques Chirac, Mme Barzach étant ministre chargé de la santé. Je le regrette pour vous car c'est une allocation importante.
Je sais que, par la suite, on a dit que la loi « famille » de Mme Veil coûtait fort cher. Certes ! Mais ce coût est la rançon d'un très gros succès, auquel on ne s'attendait pas. Si plus de 500 000 femmes se sont précipitées pour bénéficier de cette allocation, c'est bien parce que cela répondait à leur souci. C'est à croire que vous nous reprochez d'avoir fait une politique réaliste qui corresponde aux besoins des familles ! Voilà une curieuse façon de concevoir la politique familiale ! (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Gilbert Chabroux. Et les 14 milliards de francs de déficit en 1997 0!
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 88, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, ainsi modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Article additionnel après l'article 17



M. le président.
Par amendement n° 89 rectifié, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 17, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans l'article L. 521-1 du code de la sécurité sociale, le mot : "deuxième" est remplacé par le mot : "premier".
« II. - a) Les pertes de recettes résultant du I sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cette proposition, notre groupe la soumet à la Haute Assemblée à chaque occasion, et cela au moins depuis que je siège dans cet hémicycle.
Nous sommes, certes, conscients de ses limites, mais, sachant que Mme la ministre est attachée à la mise en oeuvre d'une politique familiale fondée à la fois sur l'universalité et sur la recherche d'une plus grande justice, nous ne désespérons pas de la convaincre du bien-fondé du versement des allocations familiales dès le premier enfant.
Ne l'oublions pas, le premier enfant arrive parfois « accidentellement ». Souvent, en tout cas, il arrive chez de très jeunes couples, qui débutent dans la vie professionnelle. Nous le constatons dans les grands ensembles, il n'est pas rare que ce premier enfant naisse dans une famille en situation de précarité. Bref, je ne veux pas faire de misérabilisme, mais bon nombre de familles ont leur premier enfant alors qu'elles connaissent de sérieuses difficultés financières.
J'ajoute que le nombre de familles monoparentales ne cesse de croître, ce qui appelle des mesures spécifiques.
Le versement des allocations familiales dès le premier enfant serait un moyen efficace de contribuer à l'augmentation du pouvoir d'achat de nombreux ménages, augmentation qui se traduirait immédiatement, comme on l'a toujours observé avec les prestations familiales, par une consommation accrue. Cette mesure serait donc aussi un facteur de développement économique.
Nous souhaitons lancer la discussion et nous pensons que notre proposition rencontrera un écho lors de la prochaine conférence de la famille.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. M. Fischer a convaincu la commission. (Sourires.) Je crois qu'il veut soutenir la politique familiale ambitieuse que vous nous avez annoncée tout à l'heure, madame le ministre. Je vous suggère donc, pour éviter toute discussion subalterne, de lever le gage. En tout cas, monsieur le président, nous souhaitons entendre l'avis du Gouvernement avant de nous prononcer.
M. le président. Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Monsieur le rapporteur, je vous retournerai le trait : je serais fort surprise que vous acceptiez de vous engager dans une taxation du capital. Mais le Sénat a déjà eu de telles audaces ... Peut-être ne sommes-nous pas à l'abri d'une nouvelle surprise ! (Sourires.)
Monsieur Fischer, si nous pouvions consacrer 14 milliards de francs de plus à la politique familiale, il serait bien préférable d'en faire profiter les familles qui en ont le plus besoin.
Je sais que vous partagez nos valeurs de solidarité et de justice sociale. Je comprends votre préoccupation, mais je vous demande, au nom de cette justice sociale, de retirer votre amendement.
M. Jean Chérioux. Ce serait dommage !
M. Alain Vasselle. Allez, monsieur Fischer, un petit effort !
M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. Je suis désolé que le Gouvernement n'ait pas levé le gage. Dans ces conditions, je demande un vote par division. Je suggère à la majorité sénatoriale de voter le paragraphe I et de rejeter le paragraphe II.
M. le président. Je suis donc saisi d'une demande de vote par division...
M. Guy Fischer. Je retire l'amendement, monsieur le président !
M. le président. L'amendement n° 89 rectifié est retiré.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Ce n'était qu'un roulement de tambour !
M. Jean Chérioux. Nous allions voter son amendement et il le retire !
M. Guy Fischer. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Ecoutez, mes chers collègues, nous faisons de la politique !
M. Jean Chérioux. On s'en doutait un peu !
M. Guy Fischer. On en a entendu d'autres, dans ce débat !
J'ai bien écouté Mme la ministre. Je ne peux que répéter ce que j'ai dit tout à l'heure : parmi les familles qui voient naître leur premier enfant ou qui n'ont qu'un enfant, il y a beaucoup de familles modestes. Et puis, il y a les familles monoparentales, pour lesquelles sont prévues des prestations particulières.
Je pense que cela mérite qu'on y réfléchisse. Cela étant, dans un souci de responsabilité, j'ai jugé préférable de retirer mon amendement.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Il ne veut pas que nous le votions !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Il faudra réessayer l'année prochaine, monsieur Fischer !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je propose, mes chers collègues, que sur les 16 milliards de francs qui doivent aller au FOREC, 14 milliards soient prélevés pour financer les allocations au premier enfant ! Le Gouvernement n'aura qu'à prendre ses dispositions pour financer les 35 heures sur le budget de la nation !
Nous aurons ainsi engagé, ce soir, une politique familiale grande et ambitieuse, incluant des allocations familiales pour le premier enfant.
Vous pourriez d'ailleurs appuyer cette proposition, monsieur Fischer. Mais vous avez malheureusement retiré cet amendement, comme vous avez retiré tous les autres depuis le début de la soirée...
M. Guy Fischer. Non ! Il y en a même un qui a été adopté !
M. Charles Descours, rapporteur. C'est vrai, mais ce fut grâce à la majorité sénatoriale et contre l'avis du Gouvernement !
Dites-nous donc si vous allez retirer tous vos amendements les uns après les autres. S'ils ne sont là que pour faire des effets d'annonce, vous risquez de décevoir toutes les familles qui m'ont dit : « Puisque le groupe communiste demande une allocation au premier enfant, elle va sûrement être votée ! » Vous voyant retirer votre amendement, ces familles vont être bien tristes, ce soir ! (Sourires sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'union centriste.)
M. Roland Muzeau. Et toutes celles qui pensaient que vous alliez imposer le capital ?... (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)

Article 18



M. le président.
« Art. 18. - Il est créé, à compter du 1er janvier 2001, au sein du Fonds national d'action sanitaire et sociale de la Caisse nationale des allocations familiales, un fonds d'investissement pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance.
« Ce fonds a pour objet d'apporter aux collectivités locales et aux associations gestionnaires des aides à la création d'équipements ou services d'accueil de la petite enfance, notamment pour la création de crèches innovantes et de structures multi-accueil.
« La recette de ce fonds est constituée par l'excédent de l'exercice 1999 de la branche famille, affecté à un compte de réserve spécifique à hauteur de 1,5 milliard de francs.
« Pour chaque exercice, les dépenses correspondantes sont inscrites et individualisées en dépenses exceptionnelles au sein du Fonds national d'action sanitaire et sociale de la Caisse nationale des allocations familiales.
« Ces dépenses sont équilibrées en fin d'exercice par une affectation des réserves à due concurrence.
« Ce fonds prend fin à la consommation complète des crédits inscrits au compte de réserve spécifique. »
Sur l'article, la parole est à Mme Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Au même titre que le renforcement de l'aide pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée et le cumul de l'allocation parentale d'éducation avec la reprise d'une activité professionnelle, l'article 18 va dans le sens d'une réconciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle.
Il répond à une attente forte des familles. En effet, l'organisation du travail s'est modifiée et les couples ont de plus en plus de difficultés à trouver des gardes appropriées au rythme de leur vie professionnelle. Ces difficultés sont d'autant plus importantes que l'offre des équipements d'accueil reste très insuffisante.
Rappelons néanmoins qu'un grand pas a déjà été fait dans le sens d'une forte amélioration du nombre de places d'accueil et du développement de projets innovants à la suite de la publication du décret du 9 août 2000, attendu de longue date par les acteurs du secteur de la petite enfance.
Le fonds, doté de 1,5 milliard de francs, ainsi que cela a été annoncé lors de la dernière conférence de la famille, a donc pour objet d'apporter aux collectivités locales et aux associations gestionnaires des aides à la création d'équipements ou de services d'accueil de la petite enfance.
La recette de ce fonds est constituée par l'excédent de l'exercice de 1999 de la branche famille, ce qui signifie que cet excédent est restitué à la branche famille. Ainsi, plus de 30 000 enfants supplémentaires pourront être accueillis dans les structures d'accueil rénovées ou créées grâce à ce fonds.
M. le président. Par amendement n° 16, MM. Lorrain et Descours au nom de la commission des affaires sociales, proposent de rédiger ainsi cet article :
« I. - Après l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. 223-1-1. - Les excédents de la branche famille sont affectés à un compte de réserve spécifique.
« L'utilisation des excédents est décidée dans les conditions prévues par les lois de financement de la sécurité sociale, après avis du conseil d'administration de la Caisse nationale des allocations familiales. »
« II. - En application du I ci-dessus, au titre des excédents 1999, le Fonds national d'action sanitaire et sociale de la Caisse nationale des allocations familiales est doté d'une somme de 1,5 milliard de francs pour apporter des aides à la création d'équipements ou services d'accueil de la petite enfance aux collectivités locales et aux associations gestionnaires. »
La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Il est bien normal de vouloir affirmer sa politique. Mais il convient tout de même de remettre l'église au milieu du village : ce qui nous est annoncé est logique mais pas révolutionnaire.
Deux préoccupations constantes expliquent que, au-delà de l'objectif consensuel que constitue l'augmentation du nombre de places de crèche, la commission propose de modifier considérablement la rédaction de cet article.
En premier lieu, cet article crée un fond supplémentaire, alors que la commission est très réservée sur la multiplication de fonds sociaux, qui « parcellise » le financement de la protection sociale.
En second lieu, il touche au sujet hautement sensible de l'affectation des excédents de la branche famille.
Le présent article crée donc un fonds supplémentaire, alors que la CNAF dispose dejà du Fonds national d'action sociale, dont les prévisions de dépenses s'élèvent pour 2000 à 14,6 milliards de francs. Il s'agit principalement de dépenses d'intervention, correspondant à des aides attribuées directement aux familles, à des services et équipements sociaux ou à des actions conduites par les associations, les collectivités locales ou les caisses elles-mêmes.
Dès lors, je ne vois pas l'utilité de créer un fonds supplémentaire : il suffit de doter le FNAS de la même somme, soit 1,5 milliard de francs, en en précisant l'affectation. L'Etat, qui dispose du pouvoir de tutelle sur la CNAF, le conseil de surveillance, que préside par ailleurs notre collègue Claude Huriet, et le Parlement pourront contrôler l'utilisation conforme de ce crédit par rapport aux objectifs assignés par la loi.
La seconde préocupation de la commission est de veiller à la séparation comptable des branches. Or cet article touche - et c'est la première fois dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale - à l'affectation passée des excédents de la branche famille.
Le Gouvernement présente volontiers cette mesure comme une « mesure nouvelle », bénéficiant aux familles. Or il ne fait que redonner pour partie aux familles le fruit d'un excédent entre les prélèvements affectés à la branche, alimentés par les entreprises et par les Français, et les dépenses raisonnables de cette branche. Mais c'est là un choix que nous soutenons.
Dans le cas précis, la « loi famille » avait prévu un accroissement de l'enveloppe des prestations de service de 3 milliards de francs sur la période 1995-1999. Au total, seulement 2,13 milliards de francs ont été dépensés. Il reste donc un solde de 870 millions de francs environ.
Il n'existe pas de disposition générale, dans le code de la sécurité sociale, relative à l'affectation des excédents de la branche famille. En conséquence, il nous paraît important de « sanctuariser » ces excédents en créant un compte de réserve spécifique au sein de la CNAF. Ce principe général trouve sa place dans le code de la sécurité sociale.
L'affectation de ces excédents sera décidée, au cas par cas, par le législateur, dans le cadre des lois de financement. Afin d'associer les partenaires sociaux à des décisions importantes, le conseil d'administration de la CNAF sera consulté.
En application de ce dispositif général, je vous propose d'affecter au FNAS, au titre des excédents de la branche famille, 1,5 milliard de francs, afin de financer des dépenses d'investissement des crèches. Sur le fond, le résultat sera identique à l'effet recherché par le Gouvernement, c'est-à-dire la création de 40 000 places de crèche.
Cela étant, il faut avoir l'honnêteté de dire que les collectivités locales, notamment les conseil généraux, mais aussi les particuliers, en tant que clients, participent à la mise en place des crèches.
J'ajoute que se pose également le problème de la prise en charge des frais de fonctionnement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Je ne suis pas, monsieur le rapporteur, favorable à cet amendement parce que, si ce dispositif a été créé, au fond, c'est pour aller vite. Le Gouvernement fait confiance aux services de la CNAF et aux CAF qui se sont mobilisées pour l'engagement de ce fonds.
Le FNAS est essentiellement un fonds de fonctionnement. Or il s'agit de mettre en place un dispositif exceptionnel pour l'investissement.
Enfin, vous venez de dire que le Parlement délibérerait sur le nouveau fonds que vous proposez. Mais, monsieur le rapporteur, où sommes-nous donc ? Le Sénat est précisément en train de délibérer sur l'utilisation des excédents de la branche famille !
Nous avons donc à la fois un dispositif démocratique, efficace et rapide. Le Gouvernement s'oppose par conséquent à votre amendement.
Mais permettez-moi, monsieur le rapporteur, de vous faire un petit cadeau... (Mme le ministre délégué remet une plaquette à M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur.)
Plusieurs sénateurs sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. Et nous ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lorrain, rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Sans vouloir être malicieux, je dirai simplement que la sanctuarisation du fonds de réserve répond à notre volonté de ne pas le voir ponctionné et ainsi utilisé à des fins pour lesquelles il n'aurait pas été créé.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Nous avons déjà vingt et un fonds de réserve !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est un compte de réserve, pas un fonds !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 16.
M. Guy Fischer. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement nous paraît pour le moins surprenant.
Le texte de l'article 18 est suffisamment explicite puisqu'il crée un fonds d'investissement pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance et affecte à ce fonds l'excédent de la branche famille, soit 1,5 milliard de francs. Nous nous sommes réjouis de cette mesure, même si, comme vous venez de le rappeler, madame le ministre, elle ne porte que sur l'investissement, laissant ainsi - mais c'est un autre problème que nous ne traiterons pas là - le coût de fonctionnement, très important, même s'il y a un engagement de la CNAF à la charge des collectivités locales. J'avais attiré l'attention sur ce problème dans mon intervention générale.
Les besoins en structures d'accueil destinées à la petite enfance sont criants, singulièrement dans les zones urbaines. Nous savons que ces équipements sont des facteurs de socialisation très importants. Compte tenu, notamment, de la croissance du nombre des familles monoparentales, ils sont absolument nécessaires.
C'est pourquoi nous ne comprenons pas que nos collègues de la commission des affaires sociales veuillent transformer un texte clair et présentant des avancées notables en le rédigeant de telle manière que la destination des excédents de la branche famille devient plus aléatoire. Nous connaissons, bien sûr, le peu de cas que font parfois nos collègues des structures collectives. Il est en effet bien clair que certains préfèrent, et de loin, le système des emplois familiaux à domicile, qui peut présenter un double avantage pour les ménages aisés.
Un débat a eu lieu voilà deux ans à cet égard et il a donné lieu à de vives polémiques entre nous. Mais M. Vasselle a reconnu que nous avions contribué à résoudre le problème.
Bien évidemment, nous ne vous suivrons pas dans votre démarche, surtout que, soit dit en passant, les structures collectives sont nettement moins coûteuses pour le contribuable que le système de garde individualisée, qui profite, le plus souvent, à une certaine catégorie de la population.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je me demande à quoi sert le vote du Parlement !
Je le redirai à propos de l'ONDAM. Je ne vois pas pourquoi on vote ce fonds puisque, déjà, tout est décidé ! Mme le ministre vient de nous remettre solennellement une plaquette sur laquelle est apposé le timbre du ministère délégué à la famille et à l'enfance, alors que nous n'avons pas encore voté !
Mme Ségolène Royal, ministre délégué. Le logo de la CNAF !
M. Charles Descours, rapporteur. Je savais que vous alliez me faire cette réponse ! Mais comme il y a le timbre de votre ministère, qui est, me semble-t-il, l'organisme de tutelle de la CNAF, c'est vous qui êtes responsable !
Dès lors, mes chers collègues, est-il vraiment nécessaire que nous votions, puisque, avant même que le Parlement se soit prononcé, le ministère a déjà imprimé les plaquettes ?
On peut y lire, notamment, qu'une subvention de 40 000 francs à 70 000 francs sera versée par place créée. Tout est prévu, même le coût des structures d'accueil... les décrets qui ne sont pas pris... Bravo, vous tirez plus vite que votre ombre ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 18 est ainsi rédigé.

Section 2

Branche vieillesse

Article 19 A



M. le président.
« Art. 19 A. - La loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite est abrogée. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 17 est présenté par MM. Vasselle et Descours, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 51 est déposé par M. Oudin, au nom de la commission des finances.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. Vasselle, rapporteur, pour défendre l'amendement n° 17.
M. Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l'assurance vieillesse. Nous abordons les articles qui concernent la branche vieillesse.
Il s'agit, en l'occurrence, de l'article 19 A, qui est dû à une initiative de l'Assemblée nationale.
Je crois me souvenir que, l'année dernière, le Gouvernement, pour une initiative identique - et Mme Guigou me semble bien placée aujourd'hui, à la fois en sa nouvelle qualité de ministre de l'emploi et de la solidarité et comme ancien garde des sceaux pour porter un jugement pertinent sur l'initiative de l'Assemblée nationale - avait considéré que l'amendement de l'Assemblée nationale était un cavalier et n'avait pas sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il avait donc émis un avis défavorable sur ledit amendement.
Cette année - je ne sais si cette attitude est liée au changement de ministre - l'avis est tout autre puisque, à l'Assemblée nationale, le même amendement a reçu un avis favorable du Gouvernement. Permettez-moi, madame le ministre, d'être surpris, étant donné votre compétence juridique, de voir que vous avez donné un avis favorable à cet amendement. Mais il existe certainement des arguments auxquels nous allons peut-être nous rallier dans quelques instants, lorsque vous nous expliquerez ce qui a motivé votre avis favorable, contraire à l'avis qu'avait émis Mme Aubry l'année dernière.
Dès lors, et sans vouloir introduire ne serait-ce qu'une feuille de papier à cigarette entre vous-même et votre « prédécesseure », vous comprendrez mon trouble.
Personnellement, je ne vois pas comment l'abrogation d'une loi, que Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale, avait déclarée en « coma clinique » et que Jean Le Garrec, rapporteur au fond, avait qualifiée de « virtuelle », pourrait « affecter directement les équilibres financiers de la sécurité sociale ».
Mais, au-delà de cette question constitutionnelle, deux raisons supplémentaires justifient la suppression de cet article.
Tout d'abord, nous sommes attachés aux plans d'épargne retraite, et je vois un paradoxe dans cet article 19 A.
Le Gouvernement a refermé le dossier de la réforme des retraites. Mais comme l'oisiveté est toujours mauvaise conseillère, la majorité plurielle a tenu à apporter sa propre contribution à cette absence de réforme en votant l'abrogation d'une loi non appliquée.
La loi Thomas comporte également des dispositions qui sont sans lien avec les plans d'épargne retraite et qui ne peuvent être abrogées sans dommage. Je vous renvoie au texte de l'article 11 du projet de loi de modernisation sociale. Il y va, semble-t-il, notamment, du statut des agents de France Télécom !
Voilà donc au moins trois raisons de supprimer cet article.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous encourage vivement à suivre la proposition que je viens de développer devant vous au nom de la commission des affaires sociales.
J'ose espérer que la cohérence de la position du Gouvernement avec celle qu'il avait prise l'année dernière se manifestera au moins devant la Haute Assemblée, qui est, de notoriété publique, un lieu où la sagesse s'exprime d'une manière coutumière.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est un lieu inspiré !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 51.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis. Avec des motivations complémentaires, j'approuve tout ce qu'a dit notre collègue M. Vasselle.
Premièrement, cet article a-t-il vraiment sa place dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale ? J'en doute !
Deuxièmement, la suppression de ces dispositions ne saurait tenir lieu de politique en matière de retraites.
La semaine dernière, lors de l'examen du projet de la loi relatif à l'épargne salariale, sur l'initiative de la commission des finances et de l'un de nos collègues, Joseph Ostermann, le Sénat a fait une proposition qui me semble équilibrée, conforme aux attentes des citoyens, avec des plans retraite construits sur une base collective, facultative et respectueuse des régimes par répartition, puisqu'ils sont soumis à des cotisations-vieillesse. Il nous paraît préférable d'aller dans ce sens plutôt que de prévoir une abrogation pure et simple de la loi créant les plans d'épargne retraite.
Nous attendions des propositions constructives du Gouvernement dans ce domaine ou, au moins, la prise en considération des votes du Sénat.
C'est la raison pour laquelle nous avons présenté cet amendement tendant à supprimer l'article 19 A.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Mon avis ne va pas vous surprendre : il est évidemment négatif.
Monsieur Vasselle, si les décrets d'application de la loi Thomas n'ont pas été pris, c'est parce que cette loi a été votée le 25 mars 1997. Une dissolution étant intervenue, le gouvernement d'alors, qui était à l'origine de cette loi, n'a pas eu le temps de prendre les décrets d'application, ce qu'il n'aurait certainement pas manqué de faire avec diligence.
Cette loi était donc une loi virtuelle.
Elle avait pourtant une force symbolique extrêmement importante. En effet, d'abord, elle fragilisait considérablement les régimes de retraite par répartition, ensuite, elle privilégiait une approche individuelle, donc égoïste, des systèmes de retraite ; enfin, elle favorisait, par des exonérations fiscales à notre avis éhontées, les personnes aux revenus les plus élevés.
Notre majorité avait donc toutes les raisons d'abroger une loi qui n'avait jamais été appliquée. C'est d'ailleurs l'engagement qui a été pris dans le projet de loi de modernisation sociale, qui a été approuvé par le conseil des ministres en mai 2000.
Des députés ont proposé d'anticiper, et je leur ai accordé avec joie cette satisfaction. J'estime en effet comme eux que, ce qu'il faut avant tout, c'est consolider les régimes de retraite par répartition, plutôt que de basculer dans les fonds de pension.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement souhaite l'abrogation de cette loi.
De toute façon, elle sera abrogée !
Encore une fois, c'est avec beaucoup de plaisir que je me suis ralliée à cet amendement déposé par le groupe communiste à l'Assemblée nationale.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Nous verrons si votre plaisir est partagé par le Conseil constitutionnel !
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Ne vous réjouissez pas trop vite, madame le ministre ! Comme vient de le dire M. Delaneau, nous verrons si le Conseil constitutionnel partage votre joie !
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. L'examen de cet article est un grand moment pour ceux qui défendent les retraites.
La loi Thomas faisait l'objet de deux critiques majeures.
En premier lieu, elle organisait des inégalités, en renvoyant à une assurance privée, individuelle et facultative. Les inégalités risquaient même de se creuser selon les revenus, les connaissances économiques et l'insertion sociale.
En second lieu - et certains de mes collègues ont formulé cette critique avant même que je sois parlementaire - la loi Thomas déstabilisait les régimes complémentaires et, à terme, elle aurait « miné » les bases financières du système par répartition.
L'abrogation de la loi Thomas a-t-elle sa place ici ? Celle-ci est-elle « virtuelle » ? Pour ma part, je constate que la suppression de la loi Thomas épargne des dépenses à la protection sociale. Elle entre donc dans le champ du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Enfin, je me permettrai de rappeler que la loi Thomas a été combattue au Sénat et à l'Assemblée nationale, en particulier par les groupes socialistes, qu'elle a été publiée le 25 mars 1997 et que, moins d'un mois plus tard, le Président de la République a dissous l'Assemblée nationale. Au cours de la campagne qui a suivi, de nombreux engagements ont été pris, notamment celui d'abroger la loi Thomas. En 1997, les Français ont souhaité changer de majorité et nous ont mandatés, en particulier, pour cette abrogation. C'est ce que nous faisons. Vouloir tenir ses engagements est une motivation majeure.
Le groupe socialiste votera donc contre les amendements identiques n°s 17 et 51, qui tendent à conforter la capitalisation.
M. Roland Muzeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Ces amendements ont pour objet de supprimer l'article 19 A, qui, précisément, abroge la loi Thomas du 25 mars 1997, laquelle instituait les plans d'épargne retraite.
La majorité sénatoriale est décidément incorrigible !
En effet, la loi Thomas a été abrogée voilà deux semaines à l'Assemblée nationale, ce dont nous nous sommes félicités. Mais la majorité sénatoriale tente de la faire rétablir par tous les moyens, que ce soit par le biais de la discussion du projet de loi sur l'épargne salariale - la semaine dernière, nous avons eu l'occasion d'assister à des débats assez épiques - ou, comme c'est le cas aujourd'hui, au détour de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
Nous tenons à réaffirmer notre opposition la plus ferme à cette initiative, qui consiste à tenter de faire revenir les fonds de pension, véritable acte d'opposition au régime de retraite par répartition.
Car c'est bien de cela qu'il s'agit : non pas mettre en oeuvre un complément de rémunération ou de retraite pour les salariés, mais bel et bien distraire des sommes toujours plus importantes de l'économie réelle vers la bulle de la spéculation financière.
La loi Thomas était une opération menée contre la retraite par répartition, contre le dialogue social, contre la solidarité entre les générations. Elle n'est donc pas plus recevable aujourd'hui qu'hier.
Nous ne voterons évidemment pas ces amendements n°s 17 et 51, et nous nous félicitons de la décision prise à l'Assemblée nationale, que nous confirmons aujourd'hui.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Permettez-moi de tirer deux enseignements des dernières interventions, ainsi que de la manière dont Mme Guigou a justifié son soutien à l'amendement de l'Assemblée nationale.
Premier enseignement, je note, madame le ministre, que vous vous affranchissez d'une rigueur juridique qui devrait s'imposer au Gouvernement, et plus encore à vous qu'à quiconque. En effet, le président de la commission des affaires sociales et le rapporteur, Charles Descours, ont attiré votre attention sur le caractère anticonstitutionnel de l'initiative, qui risque, de ce fait, d'être « retoquée » par le Conseil constitutionnel.
Second enseignement, à nos collègues du groupe communiste républicain et citoyen et du groupe socialiste, qui viennent de développer toute une argumentation pour condamner l'initiative prise, à l'époque, par les promoteurs de la loi Thomas pour mettre en place ce « troisième étage » que sont les fonds de pension, je rappellerai que nous avons fait ensemble, avec le président Delaneau, un déplacement, il y a peu, en Suède et en Italie, pour voir ce qui s'y passe. Or ces deux pays, qui sont souvent cités en exemple pour leur politique sociale progressiste, ont mis ou sont en train de mettre en place l'équivalent des fonds de pension. Et je n'oublie pas l'Allemagne, bien entendu ! La France sera-t-elle donc le dernier de la classe en ce qui concerne les solutions à apporter pour régler les problèmes latents de la branche vieillesse et des retraites de demain ?
Décidément, j'ai l'impression que, pour des questions purement idéologiques, vous vous arc-boutez contre une solution qui, de toute façon, est celle à laquelle il faudra aboutir. Et quand bien même vous admettriez la solution, vous refusez de lui donner son nom pour mieux l'habiller à votre manière et, surtout, par l'affichage politique que constituera le vote de ce soir, laisser penser à l'opinion qu'en adoptant un dispositif de cette nature nous voulions mettre à bas les retraites par répartition, ce qui n'a jamais été notre volonté.
M. Guy Fischer. Allons ! Et la semaine dernière ?
M. Alain Vasselle, rapporteur. Nous avons toujours affirmé haut et fort qu'il était hors de question de mettre en cause les retraites par répartition et que nous voulions les préserver, mais en leur ajoutant un étage supplémentaire. (Protestations sur les travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Il s'agissait de consolider les retraites par répartition, ce que vous n'avez pas fait, et ce que nous avons fait, à notre heure.
Donc, nous attendions vos initiatives dans ce domaine, et elles sont inexistantes. Ce n'est pas nous qui pouvons les prendre à votre place, puisque c'est vous qui avez la responsabilité de l'exécutif. Alors, ne venez pas nous donner des leçons dans ce domaine ; ne venez pas nous dire que nous ne proposons rien, que nous ne faisons rien ! Qui a le pouvoir ? C'est nous ou c'est vous ? C'est vous ! Assumez vos responsabilités et assumez-les devant les Français !
M. Guy Fischer. Les régimes par capitalisation, vous les avez créés la semaine dernière !
Mme Hélène Luc. Qui a voté les fonds des pension ? C'est vous !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 17 et 51, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 19 A est supprimé.

Article 19



M. le président.
« Art. 19. - L'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 351-11 . - Au titre de l'année 2001, le coefficient de revalorisation applicable au 1er janvier aux pensions de vieillesse déjà liquidées ainsi qu'aux cotisations et salaires servant de base à leur calcul est de 1,022. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 112, M. Joly propose, à la fin du second alinéa de cet article, de remplacer le coefficient : « 1,022 » par le coefficient : « 1,032 ».
Par amendement n° 90, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
A. - A la fin du texte présenté par l'article 19 pour l'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale, de remplacer le coefficient : « 1,022 » par le coefficient : « 1,03 » ;
B. - Pour compenser les pertes de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter l'article 19 par un paragraphe ainsi rédigé.
« a) Les pertes de recettes résultant de la revalorisation des retraites et pensions sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées » ;
C. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I - ».
La parole est à M. Joly, pour présenter l'amendement n° 112.
M. Bernard Joly. Cet amendement vise à majorer le coefficient de revalorisation afin de compenser, pour les ménages, l'évolution annuelle moyenne des prix à la consommation, évaluée à 1,2 %.
M. le président. La parole est à M. Fischer, pour défendre l'amendement n° 90.
M. Guy Fischer. La Haute Assemblée poursuit ce soir un débat engagé depuis maintenant plusieurs mois.
Nous nous réjouissons des décisions qui ont été prises en faveur de l'évolution des pensions, notamment.
Notre amendement a pour objet de faire réagir et la Haute Assemblée et Mme le ministre en proposant une revalorisation des retraites et des pensions à hauteur de 3 %.
Cette mesure, que nous prônons à titre transitoire pour l'année 2001, vise à rattraper, en partie seulement, la perte de pouvoir d'achat des retraités, perte consacrée par l'indexation des retraites sur l'inflation depuis 1993.
Je me souviens d'avoir personnellement interrogé M. Cazette sur la perte de pouvoir d'achat : il l'estime à près de 10 %.
En attendant, comme nous la réclamons avec insistance depuis longtemps et comme nous allons d'ailleurs la réclamer de nouveau au cours du débat, nous souhaitons l'indexation des retraites et pensions sur les salaires, afin de faire profiter les retraités de la reprise économique et de renforcer la nécessaire solidarité entre les générations.
Dans le même temps, nous souhaiterions, madame la ministre, que vous nous précisiez comment nous pourrions faire bénéficier les retraités d'un gain de pouvoir d'achat. En effet, nous voudrions être sûrs que les effets des hausses, par exemple de 2,2 %, ne soient pas limités par des politiques fiscales, notamment au niveau des tranches d'imposition qui feraient que, finalement - je caricature certainement - ce que l'on donnerait de la main droite serait repris de la main gauche.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Celle qui reprend, c'est toujours la main gauche ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Les retraités sont très sensibles à la politique fiscale menée en leur faveur, notamment.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 112 et 90 ?
M. Charles Descours, rapporteur. Je félicite tout d'abord les auteurs de ces deux amendements, qui veillent à ce que les retraites ne prennent pas de retard s'agissant de leur pouvoir d'achat.
A propos de l'amendement de M. Joly, je rappelle ce que disait M. Vasselle dans son rapport initial sur les retraites : « La revalorisation de 2,2 % des pensions est sans nul doute économiquement possible aujourd'hui dans un contexte caractérisé par une croissance forte des recettes et un rapport démographique favorable. D'aucuns trouveront d'ailleurs cette revalorisation insuffisante ». MM. Joly et Fischer l'ont entendu.
M. Joly est de ceux qui, parce qu'ils ne peuvent s'appuyer sur aucune autre indication du Gouvernement, hormis ce nouveau contexte de forte croissance, sont favorables à une valorisation généreuse des retraites.
La commission, sous réserve de l'avis du Gouvernement, s'en remet à la sagesse du Sénat pour cet amendement, qui prévoit une forte revalorisation - de 3,2 % - des pensions de retraite. Cette sagesse est motivée par l'écart qui, sinon, se creuserait encore entre la revalorisation de la base mensuelle de calcul des allocations familiales et la revalorisation des retraites. Pour cette raison, nous nous contentons d'un avis de sagesse favorable.
Pour ce qui est de l'amendement présenté par M. Fischer, je ne doute pas que lui-même et les membres de son groupe sont très attentifs à l'évolution des pensions de retraite, comme il vient de le dire, et je ne doute pas non plus qu'il retirera l'amendement n° 90 au profit de l'amendement n° 112 de M. Joly, plus favorable que le sien.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je comprends tout à fait l'objet des amendements respectifs de MM. Joly et Fischer, qui est de revaloriser les pensions de retraite.
Je ferai remarquer que, sur les deux dernières années, les revalorisations ont été supérieures à ce qui aurait été nécessaire pour maintenir le pouvoir d'achat des retraités. De surcroît, un effort supplémentaire a été fait pour les retraités les plus modestes dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, puisque le Gouvernement prévoit de revaloriser les pensions de retraite de 2,2 % et d'exonérer de CRDS les retraités qui ne paient pas l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire, je le précise, la moitié des retraités.
C'est donc un effort important, qui se traduit par une revalorisation de 2,2 % plus 0,5 % pour les retraités les plus modestes, ce qui n'est pas négligeable.
Si bien que, sur la période 1998-2001, nous aurons eu un gain de pouvoir d'achat, si vous votez les mesures préconisées par le Gouvernement, de 1,3 % pour la moitié des retraités et de 1,8 % pour l'autre moitié.
Evidemment, on peut toujours souhaiter faire plus - encore une fois, l'objectif est louable - mais il me semble que l'équilibre financier des régimes de sécurité sociale, alors que le besoin de financement demeure important, ne permet pas d'aller au-delà de l'effort consenti.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 112.
M. Dominique Leclerc. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Revaloriser les pensions, évidemment, c'est toujours bien, et peu importe les pourcentages.
Mais, madame le ministre, je tiens à attirer votre attention sur l'état d'esprit des pensionnés. Vous pourrez le comprendre, ils sont très déçus, d'autant qu'ils attendent depuis des mois, voire des années, la concrétisation de cette ambition que vous nous avez présentée lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole le minimum vieillesse à 75 % du SMIC pour le xxie siècle !
Il nous a été dit que c'était illusoire. Et de rétorquer à ces personnes que tout cela est consécutif à des choix faits par elles dans les années cinquante. C'est évidemment alimenter un peu plus le débat sur la revalorisation des retraites, qui suscite déjà de grandes tensions dans notre pays.
A ceux de mes collègues - je les écoute avec une particulière attention depuis quelques instants - qui nous invectivent sans cesse sur le thème « Mais qu'avez-vous fait en votre temps ? », je rappelle simplement l'ampleur des déficits auxquels nous avons dû faire face lorsqu'ils nous ont passé la main à la fin des années quatre-vingt et au début des années quatre-vingt-dix.
Pour ma part, j'ai toujours compris que réformer, être généreux en période de crise n'était pas facile. Et aujourd'hui, avec la même arrogance, vous venez nous dire que la conjoncture actuelle, dont on peut se féliciter, n'est due qu'à votre mérite ! Croyez-moi, c'est le moment d'être audacieux et courageux !
M. Claude Domeizel. Ah ! si cela avait été le contraire !
M. Dominique Leclerc. Sincèrement, je vous ai écoutés avec beaucoup de correction, mais il y a des choses que l'on ne peut laisser passer.
Tout à l'heure, je vous faisais part de l'état d'esprit de tous les pensionnés. Vous savez aussi bien que moi qu'un nombre croissant de Français craignent pour l'avenir des retraites. Vous parlez de cette embellie qui ne serait due qu'à vos mérites, mais qu'attendez-vous pour agir ? En effet, nous connaissons tous l'ensemble des données : les données démographiques, les projections chiffrées, tous les besoins de financement.
Vous qui soutenez le Gouvernement, votre responsabilité est très grande, car vous devez préparer les Français à tous les efforts qu'ils devront réaliser demain, afin, précisément, que tous ces choix soient faits. Et cessez de nous répéter que tout va très bien ! Il ne suffit pas de commander de nouveaux rapports, de mettre en place nombre d'instruments statistiques, de demander des conseils et de réfléchir ! Il manque en effet un zéro pour que le fonds de réserve puisse un jour être efficace !
En d'autres termes, il est grand temps de prendre toutes les mesures qui s'imposent. Le rapporteur pour la branche vieillesse l'a très bien exposé dans son rapport. Tout est donc clair et sans équivoque. Nous devons faire face à une situation. Ne soutenez donc pas un gouvernement qui serait le fossoyeur d'un régime de retraite par répartition auquel nous tenons tous.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard. On ne parle pas de cela !
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Je ne peux laisser passer l'intervention de M. Leclerc sans réagir.
Notre collègue évoque l'héritage qui avait été laissé. Mais je rappelle qu'en 1997 le déficit de la sécurité sociale s'élevait à 54 milliards de francs. Aujourd'hui, l'équilibre est retrouvé et même dépassé. (M. Nogrix s'exclame.)
Vous dites que rien n'est fait pour les retraites. Mais ce sont les gouvernements que vous avez soutenus qui n'ont rien fait pour les retraites !
Le fonds de réserve, même s'il n'a pas atteint l'objectif qui a été fixé, a au moins été créé. Voilà une disposition concrète ! Le Gouvernement a créé le fonds de réserve, et nous le soutenons.
Nous soutenons un gouvernement qui est favorable à la répartition. C'est la raison pour laquelle nous avons voté tout à l'heure l'abrogation de la loi Thomas, qui allait dans le sens contraire. Alors, ne dites pas que le Gouvernement ne fait rien, car c'est archi-faux ! C'est vous qui mettiez en place un système visant à affaiblir encore la répartition !
M. Dominique Leclerc. Vous vous enfoncez !
M. Claude Domeizel. On peut bien sûr demander 3 % ou 3,2 % - peu importe, le problème n'est pas là. Mais nous, nous considérons que la position du Gouvernement est raisonnable, et c'est la raison pour laquelle nous voterons contre l'amendement n° 112.
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Le Gouvernement, à l'Assemblée nationale, a accepté un amendement proposant une exonération de CRDS en faveur des retraités non imposables. C'est la première fois que le Gouvernement s'engageait dans cette voie, et cela a d'ailleurs provoqué un débat.
Pour notre part, nous considérons cela comme un acte positif. Cette progression de 2,7 % pour les retraités les plus modestes, qui ne sont pas imposables, ne pose pas de problème, à notre avis. Nous demandons simplement à examiner de plus près les conséquences fiscales afin de nous assurer - mais vous l'avez affirmé, madame la ministre - qu'il existe réellement une progression de 1,3 % du pouvoir d'achat.
M. Leclerc a évoqué les retraités, et notamment les titulaires de pensions agricoles. Mais vous savez fort bien, monsieur Leclerc, que c'est ce gouvernement qui a fait le plus en matière de rattrapage des pensions agricoles. C'est certes insuffisant, et nous avons déposé des amendements, notamment l'année dernière, pour aller plus vite dans le cadre du BAPSA. Mais, rappelez-vous que des décisions regrettables ont été prises dans l'histoire des retraites : à un moment donné, la profession agricole a arrêté de payer une retraite complémentaire.
Des efforts sont accomplis maintenant, et nous avons d'ailleurs tous été sollicités, récemment, par des délégations des organisations agricoles souhaitant un rattrapage des petites retraites. Mais si l'on reprend les trois ou quatre précédents budgets, on constate que l'effort n'a certainement jamais été aussi important.
Quant à notre amendement n° 90, nous le retirons.
M. Charles Descours, rapporteur. Comme d'habitude !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Voilà ! On s'y attendait !
M. le président. L'amendement n° 90 est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 112, repoussé par le Gouvernement et sur lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. Charles Descours, rapporteur. J'observe que nos collègues communistes se sont abstenus !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, ainsi modifié.

(L'article 19 est adopté.)

Article additionnel après l'article 19



M. le président.
Par amendement n° 92, MM. Fischer, Muzeau, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer après l'article 19, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. - Un arrêté interministériel pris chaque année après avis du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés fixe :
« 1° le coefficient de majoration applicable aux salaires et aux cotisations servant de base au calcul des pensions ou rentes ;
« 2° le coefficient de revalorisation applicable aux pensions déjà liquidées. Ces coefficients sont fixés conformément à l'évolution moyenne des salaires nets telle que constatée par les organismes d'encaissement des cotisations sociales. »
« II. - a) Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement à 15 % du taux des contributions sociales mentionnées aux articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale.
« b) En conséquence, dans le I de l'article L. 136-8 du même code, les références : "L. 136-6, L. 136-7" sont supprimées. »
La parole est à M. Muzeau.
M. Roland Muzeau. Comme je vous l'avais annoncé tout à l'heure, nous vous proposons de voter cet amendement visant à indexer les pensions de retraites sur les salaires. C'est un principe auquel nous tenons beaucoup.
Il nous apparaît en effet légitime, dans un souci de solidarité entre les générations, que les retraités ne soient pas exclus de la redistribution des fruits de la croissance et voient, de ce fait, le montant de leur retraite suivre l'évolution sociale, et non l'inflation.
Cette mesure est, selon nous, une simple question de justice sociale qui ne manquera pas de se conjuguer avec un souci d'efficacité économique puisque, vous le savez, mes chers collègues, les retraités sont de plus en plus dynamiques et actifs et, par conséquent, consommeront de plus en plus, à condition qu'on leur en donne les moyens.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Charles Descours, rapporteur. La majorité sénatoriale vient de voter, le groupe communiste républicain et citoyen s'étant abstenu, une augmentation des pensions de retraite de 3,2 %. Si, en adoptant l'amendement n° 92, nous options pour l'indexation des retaites sur l'augmentation des salaires - je crois qu'elle était de 1,5 % cette année - le résultat serait infiniment moins favorable.
Le groupe communiste républicain et citoyen ne peut vouloir diminuer les pensions de retraite et, alors que nous venons de les augmenter de 3,2 %, en revenir à un taux de 1,5 % !
Cet amendement, me semble-t-il, n'a donc plus d'objet. Il est en tout cas absolument incompatible avec celui que nous venons de voter. S'il est maintenu, la commission émettra un avis défavorable. Nous sommes en effet favorables à une augmentation de 3,2 % !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je viens de rappeler que le Gouvernement souhaite que l'on puisse augmenter le pouvoir d'achat des retraites. Nous venons d'ailleurs d'en donner la preuve avec les mesures que nous proposons dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et l'amendement que nous avons accepté à l'Assemblée nationale sur l'exonération de CRDS pour les retraités les plus modestes.
Mais il me semble qu'il faut intégrer la question d'un mécanisme plus automatique d'indexation des retraites dans une réflexion globale, et je ne vois que des avantages à ce que le conseil d'orientation des retraites - je pense d'ailleurs que c'est le cas - inclue cette question dans ses réflexions. Nous aurons donc à examiner cette question d'un mécanisme - restera à voir lequel ! - de revalorisation régulière des retraites dans le cadre d'un plan plus global que, naturellement, nous proposerons au vu du rapport du conseil d'orientation des retraites.
Je ne souhaite par conséquent pas que le Sénat adopte cet amendement aujourd'hui.
M. le président. Monsieur Muzeau, l'amendement n° 92 est-il maintenu ?
M. Roland Muzeau. J'ai bien entendu Mme la ministre expliquer qu'elle prenait en compte la question d'un mécanisme, sans dire lequel, intégrant notre souci d'une indexation prenant appui sur la relance économique et profitant à nombre de couches sociales dans notre pays. C'est tout à fait intéressant.
Compte tenu de ce qui vient d'être indiqué, la revendication légitime des retraités, notamment pour les retraites les plus modestes, de bénéficer de cette reprise économique pourrait être examinée prochainement.
En fonction de cet engagement de discussion et d'examen d'un possible mécanisme, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 92 est retiré.

Article 19 bis



M. le président.
« Art. 19 bis . - I. - Au premier alinéa de l'article L. 356-1 du code de la sécurité sociale, les mots : "et de nombre d'enfants à charge ou élevés" sont supprimés.
« II. - Au cinquième alinéa du même article, les mots : ", de nombre d'enfants" sont supprimés. » - (Adopté.)

Article 20



M. le président.
« Art. 20. - I. - A la sous-section 4 de la section 1 du chapitre Ier du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-17-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-17-1 . - En vue d'améliorer la connaissance statistique sur les effectifs de retraités et les montants des retraites et de faciliter la coordination entre les régimes de retraite en matière de service des prestations, il est créé un répertoire national des retraites et des pensions.
« A cette fin, les organismes gérant les régimes de retraite mentionnés au présent titre et au titre II du livre IX, les débiteurs d'avantages de vieillesse non contributifs ou d'avantages gérés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1 du présent code et les organismes gérant les régimes d'assurance invalidité communiquent à l'organisme chargé par décret de la gestion technique du répertoire, lors de la liquidation des avantages de retraite, les informations sur la nature et le montant des avantages servis, ainsi que les informations strictement nécessaires à l'identification des assurés et de leurs ayants droit, et à la détermination de leurs droits.
« Le numéro d'identification au répertoire national d'identification des personnes physiques est utilisé dans les traitements et les échanges d'informations nécessaires à l'application de ces dispositions par les organismes débiteurs des avantages mentionnés au deuxième alinéa du présent article.
« Le contenu et les modalités de gestion et d'utilisation de ce répertoire sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
« II. - Les organismes cités à l'article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale transmettent à l'autorité compétente de l'Etat les données nécessaires à la constitution d'un échantillon statistique inter-régimes de cotisants, anonyme et représentatif, visant à élaborer un système d'informations sur les droits acquis à la retraite par les personnes d'âge actif.
« Un décret fixe les conditions de la communication des données mentionnées au premier alinéa.
« III. - Une synthèse des données du répertoire national des retraites et des pensions et de l'échantillon inter-régimes de cotisants est transmise, tous les deux ans, au Parlement et au Conseil d'orientation des retraites. »
Sur l'article, la parole est à M. Vasselle, rapporteur.
M. Alain Vasselle, rapporteur. La commission n'a pas jugé opportun de présenter d'amendements sur l'article 20, car l'exposé des motifs figurant dans le projet de loi déposé sur le bureau des assemblées ne nous incitait pas à le faire. Cet article 20, je vous le rappelle, mes chers collègues, crée un répertoire national des retraites et des pensions.
Néanmoins, l'exposé des motifs de cet article, tel qu'il figure à la page 37 du projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, précise que « ces deux outils ont reçu un avis favorable de la Commission nationale de l'informatique et des libertés ». Or, mes chers collègues - et je m'en excuse auprès des membres de la commission des affaires sociales parce que, au moment où nous avons examiné cet article de la loi et au moment où la commission s'est réunie pour examiner les amendements extérieurs, nous ne possédions pas l'information qui nous a été communiquée depuis par la CNIL - en fait, il n'en est rien, et la déclaration formulée par le Gouvernement dans l'exposé des motifs est complètement erronée !
Je vous donne lecture de l'avis de la CNIL :
« Compte tenu de ces observations, la commission est d'avis :
« - que les finalités de contrôle des situations de cumuls des avantages de retraite soient précisées au premier alinéa du paragraphe I du futur article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale :
« - que le dernier alinéa du paragraphe I du futur article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale soit rédigé ainsi : "le contenu, les modalités de gestion et d'utilisation de ce répertoire ainsi que les dispositions prévues pour assurer la sécurité des informations sont fixées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la CNIL" ;
« - que l'avant-dernier alinéa du paragraphe II du futur article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale soit rédigé ainsi : "un décret, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les conditions de communication des données mentionnées au premier alinéa et les modalités de fixation de l'échantillon" ;
« - que le dernier alinéa du paragraphe II du futur article L. 161-17-1 du code de la sécurité sociale soit supprimé. »
En conséquence, pour que le Gouvernement puisse déclarer, sans la moindre réserve, que le dispositif proposé avait « reçu un avis favorable de la CNIL », j'ai pensé, avec mes collègues de la commission des affaires sociales, que les modifications demandées avaient été prises en compte.
J'ai donc comparé l'avant-projet soumis à la CNIL et le projet de loi déposé. Or, à une seule exception près, aucune des modifications demandées par la CNIL n'a été intégrée.
Par conséquent, le Gouvernement a pris en compte l'avis de la CNIL non pas en totalité, mais seulement pour partie, et ce alors même qu'il affirmait dans l'exposé des motifs que la CNIL avait émis un avis favorable sur la globalité de la rédaction de cet article. Pis, le projet de loi est en retrait par rapport à l'avant-projet !
Je me résume : d'une part, le projet de loi ne tient aucun compte des demandes de précisions formulées par la CNIL, s'agissant des dispositions prévues pour assurer « la sécurité des informations » ou pour ce qui est « des modalités de fixation des échantillons » ou encore pour ce qui est des « finalités de contrôle des situations de cumuls des avantages de retraite ».
D'autre part, il revient en arrière par rapport au texte soumis à la CNIL, puisqu'il supprime toute référence à l'avis de la CNIL dont devaient être assortis les décrets en Conseil d'Etat, conformément aux documents que je possède et que je tiens à la disposition du Gouvernement s'il me les demandait - mais il les détient lui-même !
Cela veut donc dire très clairement que l'exposé des motifs du projet de loi, en mentionnant un avis favorable de la CNIL, s'écarte de la réalité au point d'être une tromperie.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Aussi, madame le ministre, soit le Gouvernement met le dispositif de l'article 20 en accord avec son exposé des motifs et dépose des amendements pour le compléter, afin que les conditions soient, cette fois-ci, réunies pour considérer que l'avis de la CNIL a été respecté - et nous sommes prêts, si nécessaire, à demander la réserve de cet article -, soit le Gouvernement ne souhaite pas amender son texte pour tenir compte de l'avis de la CNIL, et alors vous comprendrez, mes chers collègues, que nous ne puissions vous proposer de voter l'article 20 en l'état. Il serait quand même détestable, en effet, de penser que nous aurions pu induire le Sénat en erreur sur la base de ce que j'ai appelé une tromperie !
Enfin, permettez-moi une dernière question, madame le ministre : pourquoi le Gouvernement ne nous a-t-il pas adressé, comme il aurait dû le faire, l'avis de la CNIL qui a été adopté le 21 septembre 2000 - ce n'est quand même pas hier ! - alors que les textes le prévoient très clairement ? En effet, l'article 20 du décret du 17 juillet 1978 prévoit que tout projet de loi portant création d'un traitement automatisé d'informations nominatives est transmis au Parlement accompagné de l'avis de la CNIL. Et tel n'a pas été le cas !
Permettez-nous de nous interroger sur la manière dont ce texte a été rédigé et sur la méthode qui a été employée par le Gouvernement !
Mais je ne doute pas, madame le ministre, qu'il s'agit simplement - du moins je l'espère - d'un pas de clerc et que, en l'occurrence, vous allez très rapidement apaiser les préoccupations et les inquiétudes de la Haute Assemblée pour que tout rentre dans l'ordre dès que nous vous aurons entendue !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je vais mettre aux voix l'article 20.
M. Charles Descours, rapporteur. Je demande la parole, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Descours, rapporteur.
M. Charles Descours, rapporteur. Je croyais que Mme le ministre allait répondre aux interrogations de M. Vasselle !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. La question était gênante !
M. Charles Descours, rapporteur. A titre personnel, j'indique donc que je suis opposé à cet article, et je demande à mes amis de voter contre, parce qu'il y a vraiment là un vice de forme grave.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est, en effet, tout à fait abusif !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 20.

(L'article 20 n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous propose de renvoyer la suite de la discussion à la prochaine séance.

8

DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Fauchon un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi organique modifiant les règles applicables à la carrière des magistrats (n° 483, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 75 et distribué.
J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, destinée à améliorer l'équité des élections à l'assemblée de la Polynésie française (n° 439, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 76 et distribué.
J'ai reçu de M. Paul Girod un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi de MM. Jean Bizet, Paul Blanc, Gérard Braun, Robert Bret, Michel Caldaguès, Marcel-Pierre Cléach, Charles Descours, Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Guy Fischer, Thierry Foucaud, Paul Girod, Georges Gruillot, Alain Journet, Jean-Paul Hugot, Pierre Lefebvre, Paul Loridant, Rolant du Luart, Jean-Luc Miraux, Roland Muzeau, Jacques Peyrat, Jean-François Picheral, Jean-Marie Poirier, Jack Ralite, André Rouvière, Jean-Pierre Schosteck, Mme Odette Terrade et M. Paul Vergès tenant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales (n° 455, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 77 et distribué.
J'ai reçu de M. Charles Jolibois un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi de M. Michel Dreyfus-Schmidt et des membres du groupe socialiste et apparentés tendant à harmoniser l'article 626 du code de procédure pénale et les nouveaux articles 149 et suivants du même code (n° 474, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 78 et distribué.
J'ai reçu de M. Daniel Hoeffel un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale (urgence déclarée) (n° 20, 2000-2001).
Le rapport sera imprimé sous le n° 80 et distribué.

9

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Joël Bourdin un rapport d'information fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification sur les perspectives macroéconomiques à moyen terme (2000-2005).
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 79 et distribué.

10

DÉPÔT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. Patrice Gélard un avis présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du réglement et d'administration générale, en application de l'article 11, alinéa 1, du réglement, sur la proposition de résolution de MM. Jean Arthuis, Guy-Pierre Cabanel, Henri de Raincourt et Josselin de Rohan tendant à la création d'une commission d'enquête sur les conditions d'utilisation des farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage et les conséquences qui en résultent pour la santé des consommateurs (n° 73, 2000-2001).
L'avis sera imprimé sous le n° 81 et distribué.

11

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 16 novembre 2000 :
A neuf heures trente :
1. Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 64, 2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale.
Rapport n° 67 (2000-2001) de MM. Charles Descours, Jean-Louis Lorrain et Alain Vasselle, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Avis n° 68 (2000-2001) de M. Jacques Oudin, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Suite de l'ordre du jour du matin.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi (n° 77, 2000-2001) de M. Jean Bizet et plusieurs de ses collègues tendant à moderniser le statut des sociétés d'économie mixte locales (n° 455, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 novembre 2000, à dix-sept heures.
Question orale avec débat n° 27 de M. Jean-Jacques Hyest à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la suite des conclusions de la commission d'enquête du Sénat sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : lundi 20 novembre 2000, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi (n° 78, 2000-2001) de M. Michel Dreyfus-Schmidt et plusieurs de ses collègues tendant à harmoniser l'article 626 du code de procédure pénale avec les nouveaux articles 149 et suivants du même code (n° 474, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 novembre 2000, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires culturelles (n° 387, 1999-2000) sur la proposition de loi de M. Louis de Broissia modifiant la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse (n° 368, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 20 novembre 2000, à dix-sept heures.
Proposition de loi organique, adoptée par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, destinée à améliorer l'équité des élections à l'assemblée de la Polynésie française (n° 439, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 21 novembre 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi organique modifiant les règles applicables à la carrière des magistrats (n° 483, 1999-2000) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 21 novembre 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale (urgence déclarée) (n° 20, 2000-2001) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 21 novembre 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 21 novembre 2000, à dix-sept heures.

Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale du projet de loi de finances pour 2001

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale du projet de loi de finances pour 2001 est fixé au mercredi 22 novembre 2000, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2001

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2001 est fixé au jeudi 23 novembre 2000, à onze heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le jeudi 16 novembre 2000, à zéro heure vingt.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Plan d'adaptation viticole de la région de Cognac

943. - 13 novembre 2000. - M. Jean-Pierre Raffarin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la probable remise en cause, par l'Union européenne, des fondements du plan d'adaptation viticole de la région délimitée Cognac. Cette position est particulièrement préoccupante et les professionnels sont très inquiets quant aux points fondamentaux de ce plan : le respect de l'engagement des pouvoirs publics pour le paiement des aides au réencépagement pour la campagne 1999/2000 ; « les Charentes » ne doivent pas être exclues de la nouvelle organisation commune de marché (OCM) pour les aides à la reconversion ; l'accord de l'Etat pour la mise en oeuvre du volet cognac annexé au contrat de plan Etat-région.

Armes des agents de police municipale

944. - 14 novembre 2000. - M. Christian Demuynck souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la mise en oeuvre du décret du 24 mars 2000 fixant les modalités d'application de l'article L. 412-51 du code des communes et relatif à l'armement des agents de police municipale. En effet, l'article 2 de ce texte stipule que ceux-ci peuvent être autorisés à porter des armes de 4e et 6e catégorie incluant notamment des revolvers 7,65, calibre 38. Une interprétation stricte de ces dispositions tendrait à exclure des armements autorisés ceux de 7e catégorie, par définition moins dangereux. Certaines communes ont aujourd'hui équipé leur police municipale de « gomcogne » GC54, calibre 12,5, à balles en caoutchouc. Désignée comme pistolet de protection et de signalisation, cette arme, alliant efficacité et sécurité, ne présente pas de danger particulier. Il entend, par conséquent, connaître la position du Gouvernement sur ce « gomcogne ». Est-il prêt à réformer le décret précité en vue d'y intégrer cette arme bien particulière ?

Modalités d'intervention des DDE pour les communes
et leurs groupements

945. - 15 novembre 2000. - M. René-Pierre Signé appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur un problème très sensible dans un département rural comme la Nièvre : les modalités d'intervention de la direction départementale de l'équipement (DDE) pour les communes et leurs groupements. Il s'agit de l'avenir des services publics de proximité dans notre pays, peut-être même de leur pérennité. Ainsi, les travaux menés par les personnels d'exploitation de la direction départementale de l'équipement sont sollicités sur devis par les communes et cela en dehors du champ des marchés publics. Mais les communes regroupées en communautés, bénéficiant du transfert de la compétence voirie, donnent souvent lieu à des masses annuelles de travaux supérieures à 300 000 francs, somme qui représente le seuil de passation de ces marchés publics. Les services de la DDE craignent ainsi que tous les travaux communaux sur les voiries leur échappent. A cet enjeu central de la cohésion territoriale et sociale de notre pays en général et des zones rurales en particulier est lié un autre sujet qui concerne les missions d'ingénierie publique, entre autres d'assistance, d'études et de suivi, etc. La prééminence d'une logique concurrentielle est inquiétante. En conséquence, il souhaiterait savoir quelles mesures le Gouvernement peut engager afin d'assurer la continuité des travaux de voirie comme compétence des services de la DDE et connaître son point de vue sur les enjeux et les conséquences de la réforme des missions d'ingénierie publique.

Réalisation du viaduc de Millau sur l'A 75

946. - 15 novembre 2000. - M. Jean Puech appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur le retard pris dans la réalisation du viaduc de Millau sur l'A 75. Les bouchons que connaît ce secteur de plus en plus fréquemment entre Séverac-le-Château et la Cavalerie vont à l'encontre des efforts d'ouverture du département de l'Aveyron et de ses intérêts économiques. Au regard de leur incidence, il lui demande : d'indiquer le calendrier de réalisation de cet ouvrage ainsi que sa date d'ouverture probable à la circulation en précisant la durée des différentes étapes que doit franchir le dossier avant le démarrage des travaux : date de remise des offres par les quatre candidats à la concession, examen des offres par la commission consultative, décision du ministre, mise au point du traité de concession, consultation et avis du Conseil d'Etat, étude d'exécution de l'ouvrage, démarrage des travaux et la durée des travaux ; d'indiquer les tarifs de péage proposés dans le cahier des charges de la concession ; d'indiquer si le cahier des charges laisse la possibilité au candidat à la concession de faire une offre de projet touristique pour laquelle celui-ci serait maître d'ouvrage et gestionnaire de l'équipement ; de préciser les mesures que compte prendre le Gouvernement pour ne pas isoler la région de Millau des flux migratoires comme cela figure sur l'itinéraire « Bison futé », mais, au contraire, rechercher un tracé permettant de passer à proximité de cette ville. Au regard des précédents éléments, il apparaît que la date d'ouverture probable du viaduc de Millau annoncée en 2001, puis en 2003, sera difficilement respectée. Aussi, il lui demande d'indiquer les mesures qu'il compte prendre pour assurer, dans des conditions de sécurité optimales, la traversée de Millau par les véhicules légers et les poids lourds lorsqu'en 2002 l'autoroute arrivera au nord à Saint-Germain et au sud à la Cavalerie.