Séance du 3 février 2000






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Gens du voyage. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Article 1er (p. 2 )

Amendement n° 9 de la commission. - MM. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois ; Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. - Adoption.
Amendements n°s 38 de M. Jean-Claude Peyronnet et 10 de la commission. - MM. Jean-Claude Peyronnet, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Dominique Braye. - Retrait de l'amendement n° 38 ; adoption de l'amendement n° 10.
Amendement n° 39 de M. Serge Lagauche. - MM. Serge Lagauche, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Serge Lagauche, Jean-Claude Peyronnet. - Adoption.
MM. Jean Delaneau, Jean-Claude Peyronnet.
Rejet de l'article.
MM. le secrétaire d'Etat, Jacques Larché, président de la commission des lois.

Suspension et reprise de la séance (p. 3 )

M. le secrétaire d'Etat.

Article additionnel après l'article 1er (p. 4 )

Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jean-Claude Peyronnet. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 2 (p. 5 )

Amendement n° 40 de M. Jean-Claude Peyronnet et sous-amendement n° 73 du Gouvernement ; amendement n° 13 de la commission et sous-amendement n° 29 rectifié de M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis ; amendements n°s 48 de Mme Odette Terrade, 57 de M. Jacques Legendre et 14 de la commission. - MM. Jean-Claude Peyronnet, le secrétaire d'Etat, le rapporteur, Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Thierry Foucaud, Jacques Legendre, le secrétaire d'Etat, Dominique Braye. - Rejet du sous-amendement n° 73 et de l'amendement n° 40 ; retrait du sous-amendement n° 29 rectifié et des amendements n°s 48 et 57 ; adoption des amendements n°s 13 et 14.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 (p. 6 )

Amendements n°s 15 de la commission et 49 de Mme Odette Terrade. - MM. le rapporteur, Thierry Foucaud, le secrétaire d'Etat, Jean-Claude Peyronnet, Dominique Braye, Nicolas About, Jacques Legendre. - Adoption de l'amendement n° 15, l'amendement n° 49 devenant sans objet.
Amendement n° 16 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 4 (p. 7 )

Amendement n° 58 de M. Patrick Lassourd. - MM. Patrick Lassourd, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Nicolas About, Serge Lagauche, Thierry Foucaud. - Adoption.
Amendement n° 17 de la commission. - Adoption.
Amendements identiques n°s 47 de M. Jean-Claude Carle et 50 de Mme Odette Terrade. - MM. Jean-Claude Carle, Thierry Foucaud, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, François Trucy, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité des deux amendements.
Amendement n° 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, François Trucy, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 4 (p. 8 )

Amendement n° 59 rectifié de M. Dominique Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° 60 de M. Auguste Cazalet. - MM. Auguste Cazalet, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, François Trucy, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité.

Article 5 (p. 9 )

M. Claude Huriet.
Amendements n°s 41 et 42 de M. Jean-Claude Peyronnet. - MM. Jean-Claude Peyronnet, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Claude Huriet. - Rejet des deux amendements.
Amendement n° 19 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, François Trucy, au nom de la commission des finances. - Irrecevabilité.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 (p. 10 )

Amendement n° 21 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 62 rectifié bis de M. Dominique Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jacques Legendre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 6 (p. 11 )

Amendement n° 51 de Mme Odette Terrade. - MM. Thierry Foucaud, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 7 (p. 12 )

Amendements n°s 22 de la commission et 43 rectifié de M. Jean-Claude Peyronnet. - MM. le rapporteur, Jean-Claude Peyronnet, le secrétaire d'Etat, le rapporteur pour avis. - Retrait de l'amendement n° 22 ; adoption de l'amendement n° 43 rectifié.
Amendements n°s 44 de M. Jean-Claude Peyronnet et 74 du Gouvernement. - MM. Jean-Claude Peyronnet, le secrétaire d'Etat, le rapporteur. - Retrait de l'amendement n° 44 ; adoption de l'amendement n° 74.
Adoption de l'article modifié.

Article 8 (p. 13 )

Amendement n° 23 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 9 (p. 14 )

M. Michel Charasse.
Amendement n° 68 du Gouvernement et sous-amendements n°s 75 à 78 de M. Michel Charasse et 45 rectifié de M. Jean-Claude Peyronnet ; amendements n°s 24 rectifié, 25 rectifié de la commission et sous-amendements n°s 69 à 72 de M. Michel Charasse et 30 rectifié de M. Nicolas About ; amendements n°s 31 à 35 de M. Philippe Darniche, 26 de la commission, 52 de Mme Odette Terrade, 63 de M. Dominique Braye et 64 de M. Patrick Lassourd. - MM. le secrétaire d'Etat, Michel Charasse, le président de la commission, le rapporteur, Jean-Claude Peyronnet, Nicolas About, Philippe Darniche, Thierry Foucaud, Dominique Braye, Gérard Larcher. - Rejet du sous-amendement n° 45 rectifié ; adoption du sous-amendement n° 75.

Suspension et reprise de la séance (p. 15 )

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 16 ).
M. le président.

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX (p. 17 )

Mme Josette Durrieu, M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX (p. 18 )

MM. Alain Vasselle, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

RÉPARTITION DE LA DOTATION GLOBALE
DE FONCTIONNEMENT (p. 19 )

MM. Jean-Pierre Fourcade, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

MESURES EN FAVEUR DES HÔPITAUX (p. 20 )

Mmes Nicole Borvo, Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX (p. 21 )

MM. André Dulait, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX (p. 22 )

MM. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

MARÉE NOIRE CONSÉCUTIVE
AU NAUFRAGE DE L' ÉRIKA (p. 23 )

M. Philippe Darniche, Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

POLITIQUE HOSPITALIÈRE DU GOUVERNEMENT (p. 24 )

M. Claude Domeizel, Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

EXISTENCE D'UNE CAGNOTTE FISCALE (p. 25 )

MM. Philippe Marini, Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

RÉFORME DES ÉTUDES MÉDICALES (p. 26 )

MM. Claude Huriet, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

VIOLENCES SCOLAIRES (p. 27 )

MM. Jean-Claude Carle, Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

Suspension et reprise de la séance (p. 28 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

4. Organisme extraparlementaire (p. 29 ).

5. Gens du voyage. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi (p. 30 ).

Article 9 (suite) (p. 31 )

Amendement n° 68 du Gouvernement et sous-amendements n°s 76 à 78 de M. Michel Charasse ; amendements n°s 24 rectifié, 25 rectifié de la commission et sous-amendements n°s 69 à 72 de M. Michel Charasse et 30 rectifié de M. Nicolas About ; amendements n°s 31 à 35 de M. Philippe Darniche, 26 de la commission, 52 de Mme Odette Terrade, 63 de M. Dominique Braye et 64 de M. Patrick Lassourd (suite). - M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois. - Rejet des sous-amendements n°s 76 à 78 et des amendements n°s 68 et 35 ; adoption de l'amendement n° 24 rectifié, des sous-amendements n°s 69, 70, 30 rectifié, 71, 72, de l'amendement n° 25 rectifié modifié et de l'amendement n° 26, les autres amendements devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.


Articles additionnels après l'article 9 (p. 32 )

Amendement n° 65 de M. Dominique Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur, Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. - Retrait.
Amendement n° 66 de M. Patrick Lassourd. - MM. Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jean-Jacques Hyest, Jacques Larché, président de la commission des lois. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 9 bis (p. 33 )

Amendement n° 27 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 10. - Adoption (p. 34 )

Article additionnel après l'article 10 (p. 35 )

Amendements n°s 36 de M. Philippe Darniche et 67 de M. Dominique Braye. - MM. Philippe Darniche, Dominique Braye, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 36 insérant un article additionnel, l'amendement n° 67 devenant sans objet.

Article 11. - Adoption (p. 36 )

Intitulé (p. 37 )

Amendement n° 53 de M. Dominique Braye. - M. Dominique Braye. - Retrait.

Seconde délibération (p. 38 )

Demande de seconde délibération. - MM. le président de la commission, le secrétaire d'Etat. - Adoption.

Article 1er (supprimé) (p. 39 )

Amendement n° A-1 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Jean-Claude Carle. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.

Vote sur l'ensemble (p. 40 )

MM. Jacques Legendre, Jean-Jacques Hyest, Dominique Braye, Jean-Claude Peyronnet, Robert Bret, Philippe Darniche.
Adoption du projet de loi.

6. Commission nationale de déontologie de la sécurité. - Adoption d'un projet de loi (p. 41 ).
Discussion générale : MM. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur ; Henri de Richemont, rapporteur de la commission des lois ; Robert Bret, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Jacques Hyest.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er (p. 42 )

Amendement n° 1 de la commission et sous-amendement n° 24 de M. Robert Bret. - MM le rapporteur, Robert Bret, le ministre. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement.
Amendement n° 2 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 2 (p. 43 )

Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement n° 23 du Gouvernement. - Adoption.
Amendements n°s 5 à 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des cinq amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 3. - Adoption (p. 44 )

Article 4 (p. 45 )

Amendements n°s 10 et 11 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 (p. 46 )

Amendements n°s 12 à 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 6 (p. 47 )

Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 7 (p. 48 )

Amendement n° 16 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 8 (p. 49 )

Amendements n°s 17 et 18 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 9 (p. 50 )

Amendement n° 19 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 9 (p. 51 )

Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles 10 à 13. - Adoption (p. 52 )

Article 13 bis (p. 53 )

Amendement n° 21 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 14 (p. 54 )

Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Vote sur l'ensemble (p. 55 )

M. Jean-Pierre Schosteck.
Adoption du projet de loi.

7. Dépôt d'une proposition de loi (p. 56 ).

8. Ordre du jour (p. 57 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GUY ALLOUCHE
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

GENS DU VOYAGE

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi n° 460 (1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. [Rapport n° 188 (1999-2000) et avis n° 194 (1999-2000).]
Le Sénat a commencé, hier, l'examen de l'article 1er. J'en rappelle les termes.

Article 1er (suite)



M. le président.
« Art. 1er. _ I. _ Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles.
« II. _ Dans chaque département, en fonction des données existantes et des besoins constatés, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques, un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées. Il précise la destination de ces aires et leur capacité. Il définit la nature des interventions sociales en direction des gens du voyage qui les fréquentent.
« En outre, le schéma départemental détermine les emplacements susceptibles d'être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l'Etat intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements.
« III. _ Le schéma départemental est élaboré par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général. Après avis du conseil municipal des communes concernées et de la commission consultative prévue au IV, il est approuvé conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi. Passé ce délai, il est approuvé par le représentant de l'Etat dans le département. Il fait l'objet d'une publication et est opposable.
« Le schéma départemental est révisé dans les mêmes conditions au moins tous les six ans à compter de sa publication.
« IV. _ Dans chaque département, une commission consultative, comprenant notamment des représentants des communes concernées et des représentants des gens du voyage, est associée à l'élaboration et à la mise en oeuvre du schéma. Elle est présidée conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et par le président du conseil général, ou par leurs représentants.
« La commission consultative établit chaque année un bilan d'application du schéma. Elle peut désigner un médiateur chargé d'examiner les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de ce schéma et de formuler des propositions de règlement de ces difficultés. Le médiateur rend compte à la commission de ses activités.
« V. _ Le représentant de l'Etat dans la région coordonne les travaux d'élaboration des schémas départementaux. Il s'assure de la cohérence de leur contenu et de leurs dates de publication. Il réunit à cet effet une commission constituée des représentants de l'Etat dans les départements, du président du conseil régional et des présidents des conseils généraux, ou de leurs représentants. »
Au sein de l'article 1er, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 9.
Par amendement n° 9, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose, dans le second alinéa du III de cet article, de remplacer les mots : « dans les mêmes conditions » par les mots : « selon la même procédure ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 38, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit le premier alinéa du IV de l'article 1er :
« Dans chaque département est créée une commision consultative des gens du voyage ; celle-ci est associée à l'élaboration et à la mise en oeuvre du schéma départemental. Cette commission est présidée conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et par le président du conseil général, ou par leurs représentants. Elle comprend en outre, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, notamment des représentants des communes concernées et de leurs groupements, des représentants des gens du voyage et des personnalités qualifiées. »
Par amendement n° 10, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose, dans la première phrase du premier alinéa du IV de l'article 1er, de remplacer les mots : « comprenant notamment des représentants des communes concernées et des représentants des gens du voyage » par les mots : « composée des représentants de la région, des représentants du département, des représentants des communes et de leurs groupements, des représentants des services de l'Etat, des représentants des gens du voyage et des personnalités qualifiées, ».
La parole est à M. Peyronnet, pour défendre l'amendement n° 38.
M. Jean-Claude Peyronnet. La composition de la commission consultative des gens du voyage ne doit pas être trop restrictive, d'autant que, selon nous - je l'ai dit, hier, dans la discussion générale - le traitement de l'accueil doit être global et non pas se limiter au stationnement.
D'où l'idée de faire siéger au sein de cette commission, en nombre sinon important du moins raisonnable, des personnalités qualifiées, comme, par exemple, des assistantes sociales, des représentants de l'éducation nationale, des représentants de la caisse d'allocations familiales.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 10 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 38.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. L'amendement n° 38, qui vise, à juste titre, à élargir la composition de la commission, notamment en y faisant siéger des personnes qualifiées, me paraît satisfait par l'amendement de la commission, qui va même plus loin puisqu'il y ajoute les représentants de la région et du département.
D'où l'avis défavorable de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 38 et 10 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Ces deux amendements me paraissent satisfaits en raison de la présence dans le texte de l'adverbe « notamment »,...
M. Jean-Jacques Hyest. Qui est très mauvais !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. ... qui a le mérite de permettre une adaptation selon les départements, où les situations sont diverses. Dans tel département, les personnes qualifiées seront très faciles à identifier, dans tel autre on n'en trouvera pas nécessairement, dans tel autre encore, même si l'on trouve, on n'est pas sûr qu'elles accepteront de siéger, car ces assistantes sociales, ces enseignants considérés comme pouvant être ces personnes qualifiées, seront, bien évidemment, en tant que fonctionnaires, le vivier de la représentation de l'Etat dans la commission.
Encore une fois, l'adverbe « notamment » laisse toute souplesse.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Le mot « notamment » ne donne aucune garantie et le texte proposé par le Gouvernement est très restrictif, car il ne vise que les représentants des communes et ceux des gens du voyage.
La proposition de la commission, qui élargit celle de M. Peyronnet, me paraît mieux correspondre à la situation du terrain.
Nous maintenons donc notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 38 est-il également maintenu, monsieur Peyronnet ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Je vais me rallier à la position de la commission, qui ne me donne que relativement satisfaction, car j'aurais tout de même préféré que l'on élargisse encore, en particulier en conservant l'adverbe : « notamment ».
M. le président. L'amendement n° 38 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 10.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. L'amendement de la commission est bienvenu. Si cela va bien sans dire, cela va manifestement encore mieux en le disant, et je ne comprends donc pas pourquoi M. le secrétaire d'Etat, qui, à l'évidence, partage notre souci, émet des réserves.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 39, M. Lagauche et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de compléter le IV de l'article 1er par un alinéa ainsi rédigé :
« Au vu du bilan mentionné à l'alinéa précédent, et du contrôle de l'entretien des aires d'accueil qu'il effectue tous les six mois, le représentant de l'Etat dans le département peut, en cas de carence, mettre en demeure la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale d'effectuer, dans un délai de trois mois, les travaux d'entretien nécessaires au bon fonctionnement de l'aire d'accueil. »
La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je l'ai dit dans la discussion générale : il est essentiel que le préfet, qui doit mettre en oeuvre le schéma départemental, en assure la pérennité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Nous comprenons bien la proposition de M. Lagauche, qui a d'ailleurs donné lieu à débat sur le point de savoir s'il fallait faire confiance au partenariat entre collectivités locales et Etat ou prévoir une disposition contraignante.
La commission a privilégié la concertation par rapport à l'obligation, tout en maintenant le caractère obligatoire de la mise en oeuvre du schéma dans un délai de deux ans. Elle émet donc un avis défavorable sur l'amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement, dans la mesure où l'aide à la gestion tend à ce que les subventions d'investissement ne perdent pas de leur efficacité en raison d'un manque d'entretien des aires réalisées grâce à elles.
Le pouvoir de mise en demeure de réaliser des travaux, qui appartient au préfet, est déjà prévu par l'article 3 du projet de loi. Le contrôle de l'entretien des aires est prévu implicitement dans le cadre de son pouvoir de substitution, qui ne pourra être mis en oeuvre qu'après contrôle constatant la carence de la commune dans le fonctionnement des aires. Le contrôle annuel de l'entretien et la gestion des aires sont prévus explicitement dans l'article 5. En effet, le préfet s'appuiera sur les conventions relatives à l'aide forfaitaire pour la gestion des aires passées entre l'Etat et les gestionnaires. Cette aide sera accordée uniquement lorsque ces aires seront effectivement entretenues et gérées.
L'amendement me semble donc satisfait.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 39.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Si je comprends bien M. le secrétaire d'Etat, il y a déjà dans le texte tous les moyens d'atteindre le but que je vise, et les préfets, qui comme les élus, se reporteront à nos débats, plutôt que de constater qu'ils ne payent pas parce qu'il n'y a pas d'accueil, paieront en exigeant une remise en ordre.
Ma crainte, c'est que des aires ne deviennent des zones abandonnées, qu'il faudra alors interdire parce qu'elles seront dangereuses pour tout le monde, et que les maires qui font preuve de bonne volonté, qui font leur travail, qui entretiennent leurs aires, ne voient arriver chez eux des afflux provenant de communes voisines qui font preuve de mauvaise volonté, ce qui remettrait en cause le schéma. Dans cette affaire, nous sommes tous solidaires.
Fort des propos de M. le secrétaire d'Etat, je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
Par amendement n° 11, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de remplacer le V de l'article 1er par deux paragraphes ainsi rédigés :
« V. - En région d'Ile-de-France, une commission régionale composée des représentants de l'Etat dans les départements, du président du conseil régional et des présidents de conseils généraux, ou de leurs représentants, assure, le cas échéant, la coordination des travaux d'élaboration des schémas départementaux ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs dates de publication. Elle se réunit sur l'initiative du représentant de l'Etat dans la région, sur la demande de l'un de ses membres ou d'une commission consultative départementale.
« Les propositions de la commission régionale sont soumises pour avis aux commissions consultatives départementales concernées.
« VI. - Hors la région d'Ile-de-France, une commission interdépartementale composée des représentants de l'Etat dans les départements et des présidents de conseils généraux concernés, ou de leur représentants, assure, le cas échéant, la coordination des travaux d'élaboration des schémas départementaux de départements limitrophes ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs dates de publication. Elle se réunit sur la demande de l'un de ses membres ou d'une commission consultative départementale.
« Les propositions de la commission interdépartementale sont soumises pour avis aux commissions consultatives départementales concernées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. L'Assemblée nationale a mis en place une coordination régionale. Autant celle-ci s'impose en Ile-de-France, autant, ailleurs, la coordination doit pouvoir être établie entre départements qui, éventuellement, appartiennent à des régions différentes.
Voilà pourquoi nous proposons de maintenir la coordination régionale en Ile-de-France, en envisageant même, comme cela a été fait en commission, une mutualisation des coûts puisque, dans cette région, nombre de communes urbaines, même avec la meilleure volonté du maire, ne peuvent pas réaliser une aire d'accueil, et que les gens du voyage préfèrent d'ailleurs s'installer dans des zones périphériques, qui supportent ainsi la totalité de la charge pour l'agglomération parisienne. Il ne serait donc pas inintéressant d'imaginer des flux financiers de solidarité.
Ailleurs, les limites géographiques des structures régionales - M. Peyronnet l'a fait observer en commission - ne correspondent pas à la tradition des gens du voyage.
Voilà pourquoi nous proposons que des commissions départementales puissent, quelles que soient les limites de région, s'associer dans des commissions interdépartementales permettant une rationalisation des schémas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas opposé à ce que la coordination régionale soit limitée à la seule région d'Ile-de-France, comme le prévoyait d'ailleurs le projet de loi initial. Cette coordination se justifie notamment par le fait que, dans cette région, il y a un fort transit de gens du voyage.
Cependant, les conditions de la saisine de la commission régionale proposées lui semblent trop larges, puisqu'il peut s'agir d'un seul de ses membres. En outre, de telles précisions relèvent du domaine réglementaire.
En revanche, le Gouvernement est nettement plus réservé sur l'introduction dans la loi de l'obligation de créer une commission interdépartementale partout, même s'il est bien prévu qu'elle ne fonctionnera que le cas échéant. En effet, il est des secteurs où l'on sait que cette coordination ne sera pas nécessaire, notamment dans les zones de faible flux migratoire. Là, la création systématique alourdirait inutilement les choses.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à l'amendement.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Monsieur le secrétaire d'Etat, je constate que nous sommes d'accord sur le fond mais non sur la rédaction. Nous n'avons pas la même lecture du texte. C'est la raison pour laquelle nous donnons la possibilité à des commissions départementales de se réunir pour mettre en place un schéma de coordination.
Nous maintenons donc notre amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Les explications de M. le secrétaire d'Etat, surtout la dernière, m'étonnent un peu. Tout de même, les lois de décentralisation ont implicitement reconnu...
M. Dominique Braye. C'est la gauche qui parle !
M. Serge Lagauche. ... que les élus ne sont pas idiots, et ne font pas des réunions pour le plaisir de faire des réunions ! Si la loi prévoit qu'un élu peut demander la réunion de la commission, c'est pour aboutir à quelque chose de concret. Les élus sont sur le terrain et connaissent donc bien les problèmes qui se posent ; si l'un se montre un peu excessif, les autres peuvent le tempérer.
La réponse de M. le secrétaire d'Etat, je le répète, m'étonne donc quelque peu et, pour ma part, je soutiendrai la proposition de M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je soutiendrai également la proposition de la commission et je voterai son amendement. J'ai développé au cours de la discussion générale les arguments pour lesquels j'y étais favorable, et je n'y reviendrai pas. Le cadre régional n'est pas forcément adapté alors même qu'une concertation interdépartementale est souvent indispensable.
Cela étant, je comprends la pertinence des arguments développés par M. le secrétaire d'Etat. En effet, l'obligation de réunir ces commissions cinq ou six fois de plus par an risque d'être d'une lourdeur excessive. Peut-être conviendra-t-il de revoir ce texte en deuxième lecture.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'article 1er.
M. Jean Delaneau. Je demande la parole contre l'article.
M. le président. La parole est à M. Delaneau.
M. Jean Delaneau. Je voterai en effet contre cet article, non pas que j'y sois opposé sur le fond, car ce texte est très important, monsieur le secrétaire d'Etat, mais parce qu'il sera la source d'un contentieux qui sera difficile à régler.
J'ai regretté, hier soir, de ne pouvoir être présent lorsque mon collègue M. Carle, vice-président de notre groupe, a défendu l'amendement n° 46, au nom des Républicains et Indépendants, qui tendait à éviter la tutelle d'une collectivité territoriale sur une autre du fait que, dans un certain nombre de cas, probablement la majorité, les présidents de conseils généraux cosigneront les schémas qui, dans la rédaction initiale de l'article 1er, étaient effectivement opposables. Certes, un amendement proposé par M. le rapporteur a supprimé l'opposabilité des schémas, mais il n'empêche que le texte qui serait publié par le président du conseil général et le préfet serait en totale contradiction avec le code général des collectivités territoriales, qui, sous le chapitre « Principe de libre administration », précise, en son article L. 1111-3 : « La répartition de compétences entre les communes, les départements et les régions ne peut autoriser l'une de ces collectivités à établir ou exercer une tutelle, sous quelque forme que ce soit, sur une autre d'entre elles. »
Si on laisse au président du conseil général la liberté de ne pas signer ce schéma, si seul le préfet le signe et le met en oeuvre, il n'y a pas de problème. Mais à partir du moment où ce schéma est publié à la fois par le préfet et par le président du conseil général, n'importe quel maire qui sera dans l'obligation de créer une aire d'accueil pourra demander l'annulation auprès des instances administratives aux motifs qu'il lui aura été imposé à la fois par le préfet et par le président du conseil général.
Je voterai donc contre l'article 1er car je suis certain qu'il sera à l'origine de nombreux contentieux.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale qui avait introduit l'opposabilité la rétablira sans doute ; cela donne encore plus de poids à l'argument que je viens de développer.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Nous voterons contre l'article 1er du fait des modifications qui y ont été introduites par rapport au texte qui nous a été transmis par l'Assemblée nationale.
Je n'en retiendrai qu'une : le représentant de l'Etat ne peut plus imposer, au terme d'un délai de dix-huit mois, la mise au point du schéma départemental. Le texte perd ainsi beaucoup de sa force car ce dispositif en était un des éléments majeurs, et ce quels que soient le arguments que l'on puisse tirer de la défense de la décentralisation. Si l'ont veut donner toute son efficacité à ce texte, il faut maintenir cette disposition.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er n'est pas adopté.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, le vote qui vient d'intervenir porte un coup décisif au texte dont nous débattons. Il résulte, en particulier sur les travées de la majorité du Sénat, d'une contradiction dont je souhaiterais qu'elle puisse être levée. Hier, la disposition qui prévoyait en ultime recours, en cas de refus du conseil général, d'approuver conjointement avec le préfet le schéma départemental, a été combattue comme une atteinte à la décentralisation, et cette possibilité d'intervention du préfet seul a donc été exclue par la Haute Assemblée.
Aujourd'hui, c'est sur les mêmes travées qu'on nous explique que seul le préfet serait habilité à prendre cette décision. Vous voyez qu'il y a là quand même un problème extrêmement sérieux.
Cela étant, je souhaite appeler l'attention de M. Delaneau sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui, chaque fois qu'il a été saisi de recours sur des prérogatives données aux représentants de l'Etat que d'aucuns dénonçaient comme attentatoires à la décentralisation, a toujours confirmé que la libre administration des collectivités territoriales devait s'entendre dans le respect des lois de la République. Il est évident qu'une disposition législative créant les conditions de cette libre administration n'est pas anti-constitutionnelle par définition.
Sur ces éléments, nous devons être très clairs afin de pouvoir poursuivre utilement la discussion de ce texte.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Monsieur le président, je demande une suspension de séance d'une dizaine de minutes.
M. le président. Le Sénat va, bien entendu, accéder à votre demande.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures cinquante-cinq, est reprise à dix heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, après le vote qui vient d'intervenir sur l'article 1er, le Gouvernement a décidé, conformément au règlement du Sénat, de demander une seconde délibération sur cet article.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, cette seconde délibération aura lieu avant le vote sur l'ensemble du projet de loi.

Article additionnel après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 12, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré dans le chapitre V du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales un article L. 2215-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2215-1-1. - Dans le cadre des pouvoirs qui lui sont reconnus par l'article L. 2215-1, le représentant de l'Etat dans le département veille à la mise en oeuvre des orientations fixées par le schéma national prévu par la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet article additionnel vise à réaffirmer le rôle de l'Etat dans le cadre du schéma national pour veiller au bon déroulement des grands rassemblements traditionnels.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement souhaite être conséquent avec lui-même : comme il n'a pas approuvé l'idée du schéma national, il peut difficilement être favorable à cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 12.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Par cohérence aussi, nous n'avons pas non plus retenu le schéma national. Nous voterons donc contre cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ I. _ Les communes de plus de 5 000 habitants sont tenues, dans un délai de deux ans suivant la publication du schéma départemental, de participer à la mise en oeuvre de ce schéma en mettant à la disposition des gens du voyage une ou plusieurs aires d'accueil, aménagées et entretenues. Elles peuvent également transférer cette compétence à un établissement public de coopération intercommunale chargé de mettre en oeuvre les dispositions du schéma départemental ou contribuer financièrement à l'aménagement et à l'entretien de ces aires d'accueil dans le cadre de conventions intercommunales.
« II. _ Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale intéressés assurent la gestion de ces aires ou la confient par convention à une personne morale publique ou privée. »
Par amendement n° 40, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent de rédiger comme suit cet article :
« I. - Les communes de plus de 5 000 habitants sont tenues, dans un délai de deux ans suivant la publication du schéma départemental, de participer à la mise en oeuvre de ce schéma en mettant à la disposition des gens du voyage une ou plusieurs aires d'accueil, aménagées et entretenues.
« II. - Les communes intéressées peuvent transférer à un établissement public de coopération intercommunale la mise en oeuvre des dispositions du schéma départemental qui leur incombent, ou contribuer financièrement à l'aménagement et à l'entretien des aides d'accueil dans le cadre de conventions intercommunales.
« III. - Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale intéressés assurent la gestion des aires ou la confient par convention à une personne publique ou privée. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 73, présenté par le Gouvernement et tendant :
A. - A rédiger ainsi le II de l'amendement n° 40 :
« II. - Toute commune mentionnée au schéma départemental peut transférer à un établissement public de coopération intercommunale la mise en oeuvre des dispositions du schéma départemental qui lui incombent, ou contribuer financièrement à l'aménagement et à l'entretien des aires d'accueil dans le cadre de conventions intercommunales. »
B. - Dans le III du même amendement, à supprimer le mot : « intéressés ».
Par amendement n° 13, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de remplacer la première phase du I de l'article 2 par deux phrases ainsi rédigées : « Les communes et leurs groupements concourent à la mise en oeuvre du schéma départemental par la réservation, en fonction des orientations fixées par celui-ci, de terrains aménagés et entretenus en vue du passage et du séjour des gens du voyage. A cette fin, dans un délai de deux ans à compter de la publication du schéma départemental, les communes mettent à la disposition des gens du voyage les aires d'accueil, aménagées et entretenues, prévues par ce dernier. »
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Hérisson, au nom de la commission des affaires économiques, et tendant :
I. - A compléter in fine le texte proposé par l'amendement n° 13 par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, les communautés de communes de plus de 5 000 habitants dont aucune commune membre n'a une population supérieure à ce seuil pourront, conformément aux dispositions du schéma départemental, être substituées à leurs membres pour l'application du présent alinéa. »
II. - En conséquence, à rédiger comme suit le premier alinéa de cet amendement :
« Remplacer la première phrase du I de cet article par trois phrases ainsi rédigées : »
III. - En conséquence, à rédiger comme suit le début de la deuxième phrase du I de cet article : « Les communes peuvent également ».
Par amendement, n° 48, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter le I de l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, ne sont pas tenues à cette obligation les communes qui disposent d'emplacements destinés à être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et qui répondent à un coefficient équivalent temps plein, dont les modalités de calcul sont définies par décret. »
Par amendement n° 57, MM. Legendre, Braye, Doublet, Gérard, Goulet, Gournac, Lassourd, Murat et Peyrat proposent de compléter le I de l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, ne sont pas tenues à cette obligation les communes qui disposent d'emplacements susceptibles d'être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et qui répondent à un coefficient équivalent temps plein dont les modalités de calcul sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
Par amendement n° 14, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après le I de l'article 2 un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« I bis. - Sur la demande de la commune concernée, le délai mentionné au I ci-dessus peut être prolongé par le représentant de l'Etat dans le département, après avis de la commission consultative départementale, lorsque la réalisation de l'aire dans ce délai se heurte à des difficultés techniques ou de procédure dûment constatées. »
La parole est à M. Peyronnet, pour défendre l'amendement n° 40.
M. Jean-Claude Peyronnet. Il s'agit d'un amendement de clarification, qui tend à distinguer plus formellement les obligations spécifiques des communes de plus de 5 000 habitants et les possibilités qui sont offertes à toutes les communes, quelle que soit leur population, pour la mise en oeuvre des obligations qui leur incombent en les inscrivant dans des paragraphes différents.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour défendre le sous-amendement n° 73.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 4 tend à clarifier le texte. Tel qu'il est rédigé, on pourrait en effet en déduire que les solutions intercommunales sont réservées aux seules communes de plus de 5 000 habitants. Or il semble souhaitable au Gouvernement de permettre à toute commune mentionnée au schéma départemental de choisir la solution intercommunale.
Ce sous-amendement vise à lever toute ambiguïté sur ce point et à élargir la possibilité de recourir à la solution intercommunale.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 13.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Le projet de loi indique que les communes de plus de 5 000 habitants sont tenues de mettre en application les prescriptions du schéma départemental. Or l'introduction de ce seuil démographique rompt la cohérence du dispositif et ne correspond pas à la réalité locale.
Ainsi, en zone urbaine, des communes de 5 000 habitants seront incapables de faire face à leurs obligations, alors que, dans d'autres zones, des communes plus petites, parce qu'elles disposeront d'aires adaptées en termes de superficie, pourront créer des aires d'accueil.
Par ailleurs, le projet de loi ne précise pas les conditions dans lesquelles les communes pourront satisfaire à leurs obligations, notamment en ce qui concerne les coopérations intercommunales.
Prévoir de manière uniforme que toutes les communes de plus de 5 000 habitants seraient tenues de créer une aire d'accueil n'est pas non plus réaliste parce que, dans certains départements, il n'y a pas de gens du voyage.
Le plus important c'est d'instaurer un dispositif cohérent, c'est donc au schéma départemental qu'il revient d'équilibrer les besoins et les offres, de définir les meilleures localisations démographiques en fonction des souhaits exprimés par les gens du voyage, les élus ou le préfet.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement, qui vise par ailleurs à maintenir le délai de deux ans pour la réalisation des aires.
De ce fait, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 40 et sur le sous-amendement n° 73.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter le sous-amendement n° 29 rectifié.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan. Ce sous-amendement tend à concilier nos préoccupations et celles de la commission des lois, qui souhaite supprimer le seuil et qui prévoit que « toutefois, les communautés de communes de plus de 5 000 habitants dont aucune commune membre n'a une population supérieure à ce seuil pourront, conformément aux dispositions du schéma départemental, être substituées à leurs membres pour l'application du présent alinéa ».
Nous considérons comme nécessaire que les communautés de communes composées de petites communes jouissent du droit d'interdire sur leur territoire le stationnement des gens du voyage dès lors qu'elles ont créé une aire de stationnement ou contribué à son financement. Actuellement, rien ne les y oblige, même si, en vertu de l'article 9-1 du projet de loi, les communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil ou contribuant à son financement peuvent interdire le stationnement sur l'ensemble de leur territoire.
Concrètement, nous craignons que l'application de la loi ne se fasse au détriment des petites communes, qui verront se multiplier les occupations illicites. C'est pourquoi nous proposons que, lorsque des besoins seront constatés par le préfet et le président du conseil général au sein du schéma départemental, les communautés de petites communes puissent être substituées à leurs membres pour la mise en oeuvre de ce schéma. Ce dispositif est souple, puisqu'il vise à associer au schéma départemental non pas toutes les communautés de petites communes, mais seulement celles pour lesquelles le besoin s'en fait sentir.
Notre sous-amendement, qui comble une carence, a été adopté à l'unanimité par la commission des affaires économiques.
M. le président. La parole est à M. Foucaud, pour défendre l'amendement n° 48.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à prendre en considération les différents types d'emplacements dont les gens du voyage ont besoin. Dans ce contexte, d'ailleurs, nous nous félicitons qu'à l'article 8 on nous propose, comme nous le pensions nécessaire, de faciliter le développement des petites aires d'accueil de type « terrain familial ».
L'offre en structures d'accueil doit également comporter des aires de passage, aménagées tant pour des arrêts de très brève durée que des aires de séjour pour des stationnements de plusieurs jours.
Enfin, l'existence de grands rassemblements traditionnels, tels que certains pèlerinages regroupant plusieurs milliers de gens du voyage, nécessite également une prise en charge appropriée par les pouvoirs publics afin de coordonner les actions entre l'Etat et les collectivités concernées.
Nous nous félicitons à ce sujet que l'article 1er prévoie l'obligation de désigner, dans le schéma départemental, des lieux pouvant permettre les grands rassemblements traditionnels.
Force est cependant de constater que de tels terrains exigent une mobilisation plus importante que les autres types d'aire d'accueil et qu'il serait par conséquent opportun qu'une commune qui dispose d'une grande aire temporaire de type « grand rassemblement » ne soit pas obligée de construire une aire d'accueil.
Peut-être pourrions-nous imaginer d'instaurer, selon un critère que je qualifierai de « journée par caravane », une équivalence entre terrains permanents et terrains temporaires pour l'accueil des grands rassemblements.
A titre d'exemple, pour une commune qui accueille sur un terrain spécifique, au titre des grands rassemblements, quatre cents caravanes pendant environ trente-cinq jours, soit deux ou trois rassemblements, cela équivaudrait à l'accueil en permanence de trente-huit caravanes par jour.
Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que l'adoption de cet amendement soit opportune.
M. le président. La parole est à M. Legendre, pour présenter l'amendement n° 57.
M. Jacques Legendre. Cet amendement répond à la même préoccupation que celle que vient d'exprimer M. Foucaud.
De nombreuses communes accueillent régulièrement de grands rassemblements de gens du voyage. C'est par exemple le cas de Lille à l'occasion de la braderie.
Les communes qui ont déjà consenti des efforts significatifs pour cet accueil spécifique nous semblent avoir fait preuve de l'esprit civique qui s'impose. Il nous paraît donc souhaitable qu'elles ne soient pas astreintes, par ailleurs, à participer systématiquement à l'accueil défini par le schéma départemental.
On nous rétorquera que la commission départementale tiendra compte des efforts faits par les communes. Mais il serait curieux qu'il en soit tenu compte dans certains départements et pas dans d'autres.
Ce débat est nécessaire, car il nous semble préférable de préciser dans la loi que les communes qui font un effort significatif - lequel peut être défini par un coefficient équivalent-temps plein, dont le mode de calcul peut être renvoyé à un décret en Conseil d'Etat - sont dispensées de prévoir par ailleurs un accueil permanent.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 14 et pour donner l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 73 et 29 rectifié et sur les amendement n°s 48 et 57.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. L'amendement n° 14 est en quelque sorte un amendement de précaution. En effet, si nous gardons le délai légal de deux ans, nous avons souhaité l'aménager, car il peut être dépassé dans quelques cas, pour des raisons soit de contentieux juridiques, soit d'occupation d'espace. L'application d'un délai identique pour toutes les situations nous paraît donc dangereux.
Cet amendement n° 14 vise donc à permettre, à la demande de la commune, la prolongation par l'Etat du délai, après avis de la commission consultative départementale, en cas de difficultés techniques ou de difficultés de procédure. Je pense notamment à la proximité de sites classés ou encore à des contentieux mis en avant par des associations ou des populations.
A partir du moment où la commission a supprimé le seuil de 5 000 habitants, elle ne peut qu'être défavorable à l'amendement n° 40 et au sous-amendement n° 73 qui s'y rapporte.
Nous souscrivons à la préoccupation de la commission des affaires économiques qui, par son sous-amendement n° 29 rectifié, donne la possibilité aux petites communes de s'en remettre à des solutions intercommunales. Mais nous estimons que cette préoccupation est satisfaite par notre amendement n° 13.
Toutefois, le sous-amendement précisant qu'il s'agit des communautés de communes « de plus de 5 000 habitants », je laisse au rapporteur pour avis le soin de voir s'il maintient ou non son sous-amendement. S'il était maintenu, je m'en remettrais à la sagesse du Sénat.
La commission est défavorable aux amendements n°s 48 et 57. Nous sommes très sensibles au fait que les communes qui supportent l'implantation des grands déplacements soient non pas épargnées dans l'élaboration du schéma départemental mais, en tout cas, prises en compte. Toutefois nous pensons que cette préoccupation doit s'inscrire dans la réflexion de ceux qui élaboreront le schéma départemental.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° 40, 13, le sous-amendement n° 29 rectifié et les amendements n°s 48, 57 et 14 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Avec l'amendement n° 13, la commission des lois, par la voix de son rapporteur M. Delevoye, propose la suppression du seuil de 5 000 habitants.
Le Gouvernement observe d'abord que ce seuil est admis depuis neuf ans. De plus, l'expérience acquise montre que les besoins en aires sont plus importants dans les communes de plus de 5 000 habitants, qui, en raison de leurs services, sont plus attractives.
Ensuite, ce seuil est une garantie puisqu'il constitue une obligation générale de réaliser des aires quand il y a des communes de 5 000 habitants et que la négociation intercommunale a échoué. Il permet aussi de déterminer à qui revient cette obligation dans le cas d'une aire intercommunale quand il y a des communes de moins de 5 000 habitants et de plus de 5 000 habitants.
Mais il est bien évident que, si l'analyse des besoins faisait ressortir la nécessité d'aires d'accueil dans un secteur géographique ne comportant aucune commune de plus de 5 000 habitants, l'obligation de réaliser une ou des aires pèserait nécessairement sur l'une ou l'autre de ces communes de moins de 5 000 habitants. Ce seuil ne constitue donc pas un obstacle dans un secteur qui ne compterait aucune commune de plus de 5 000 habitants.
Compte tenu de cette interprétation, le Gouvernement ne souhaite donc pas la suppression du seuil.
Le sous-amendement n° 29 rectifié est dans la logique de l'amendement n° 13, le Gouvernement en donne volontiers acte à leurs auteurs, tout particulièrement au rapporteur pour avis M. Hérisson. Toutefois, chacun le conçoit bien, des solutions intercommunales seraient, de fait, imposées. Par souci de cohérence, le Gouvernement est défavorable à ce sous-amendement.
Les amendements n°s 48 et 57 ont le même objet. Nous devons rester très concrets, très réalistes. Dans une commune où a lieu un rassemblement de grande importance, traditionnel et répétitif, aux Saintes-Maries-de-la-Mer notamment, on ne voit pas bien ce qui justifierait la création d'aires d'accueil supplémentaires.
Mais d'autres types de rassemblements sont beaucoup plus irréguliers. Que l'année où est élaboré le schéma départemental ait été précédée d'un rassemblement qui, d'une manière tout à fait occasionnelle, s'est déroulé dans la commune en question ne légitime pas pour autant de ne pas prendre en compte les besoins d'aires d'accueil permanentes sur le territoire considéré. Compte tenu, donc, de l'évolution des pratiques, des comportements et du fait que certains rassemblements, traditionnellement fixes, sont devenus itinérants, le Gouvernement ne voit pas comment on pourrait ne pas prendre en compte cette réalité et, immédiatement, en venir à exclure telle ou telle commune au prétexte qu'elle aurait accueilli une fois un rassemblement occasionnel.
Je suis convaincu que, dans le cas de rassemblements répétitifs, les commissions départementales dispenseraient d'elles-mêmes ces communes de toute autre obligation. Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements n°s 48 et 57.
S'agissant de l'amendement n° 14, je tiens à dire à M. le rapporteur que, bien évidemment, les cas de force majeure sont toujours pris en compte de droit et je dirai même davantage car il y a eu des précédents. Les dispositions qui donnent à la loi le dernier mot existent déjà et n'ont jamais posé de problème majeur.
Pour me cantonner dans mon domaine, je citerai les plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées. La loi du 31 mai 1990 avait donné un an à tous les conseils généraux pour conclure avec l'Etat un accord sur ces plans, faute de quoi, ceux-ci pouvaient être unilatéralement approuvés par arrêté interministériel. Tous les départements français sont couverts par un tel plan sans que jamais un arrêté interministériel ait été nécessaire. Certes, pour quelques départements, il a fallu un peu plus de temps mais, bien évidemment, chaque fois que l'Etat a observé que les discussions en cours avaient des chances d'aboutir, il a différé la solution d'autorité. Je crois donc que les choses se font d'elles-mêmes.
Dans ces conditions, le Gouvernement ne considère pas qu'il soit indispensable d'ajouter cet alinéa au texte, car il est convaincu que cet amendement n° 14 est effectivement satisfait, soit au titre de la force majeure dûment constatée, soit dans les pratiques auxquelles on peut faire référence et qui sont appliquées à des lois antérieures.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 73.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Je souhaite expliquer mon vote à la fois sur ce sous-amendement et sur tous les autres amendements afin d'éviter de reprendre plusieurs fois la parole.
J'appelle mes collègues à faire preuve de réalisme ; il est indispensable de supprimer le seuil, et je le dis en tant que sénateur d'Ile-de-France. J'en veux pour preuve trois arguments qui ont été développés, mais sur lesquels je voudrais insister.
Beaucoup de communes de plus de 5 000 habitants n'ont pas besoin d'aires d'accueil, tout simplement parce qu'elles ne sont jamais saisies de demandes de stationnement des gens du voyage. Pourquoi donc maintenir ce seuil ?
Par ailleurs, beaucoup de communes de plus de 5 000 habitants auraient besoin d'aires d'accueil. Elles sont cependant dans l'incapacité manifeste de les réaliser, tout simplement parce que, comme le rappelait notre collègue rapporteur Jean-Paul Delevoye, étant complètement urbanisées, elles ne disposent d'aucun terrain susceptible d'être transformé en aire d'accueil !
On me rétorquera qu'elles peuvent transférer cette compétence à un EPCI mais c'est l'Ile-de-France qui, vous le savez, compte le moins d'établissements publics de coopération intercommunale et où l'intercommunalité est la moins développée. Avant qu'elles puissent transférer cette compétence à un EPCI, aujourd'hui inexistant, il se passera un peu de temps !
C'est sur ce principe de réalisme que j'appelle l'attention de mes collègues. Supprimons ce seuil, car rien n'est pire que de légiférer sur des dispositions manifestement impossibles à mettre en oeuvre.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 73, repoussé par la commission.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 40, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 29 rectifié.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Mes chers collègues, nous vivons dans un pays qui compte plus de 36 000 communes ; 80 % d'entre elles ont moins de 2 000 habitants, 90 % moins de 5 000.
Que les maires ou les élus des communes de plus de 5 000 habitants aient eu plus facilement la possibilité de se faire entendre soit par l'Association des maires de France - et je parle sous le contrôle de son président - soit par le Gouvernement, c'est certain. Il n'empêche que l'essentiel des problèmes liés au stationnement et, surtout, à l'accueil des gens du voyage se pose dans ces communes. Il est donc nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, de supprimer le seuil.
Tel est l'objet de l'amendement n° 13, qui vise en outre à permettre d'organiser l'accueil, au sens le plus large du terme, de ces citoyens que, comme je l'ai déjà dit, nous considérons, nous, comme des citoyens à part entière, mais qui doivent, eux aussi, se considérer comme des citoyens à part entière.
J'avais déposé un sous-amendement à ce texte, mais compte tenu des garanties qui nous sont apportées, je le retire, en adhérant pleinement au texte de la commission saisie au fond.
M. le président. Le sous-amendement n° 29 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 48.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Je retire cet amendement, qui est satisfait dans la mesure où M. le secrétaire d'Etat a indiqué que les communes équipées pour recevoir de grands rassemblements traditionnels n'auront pas à se doter d'aires d'accueil plus petites.
M. le président. L'amendement n° 48 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 57.
M. Jacques Legendre. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre. L'amendement n° 57 avait le même objectif que celui qu'a défendu M. Foucaud. Pour la même raison, je le retire aussi.
Je souhaite, bien évidemment, que l'avis exprimé clairement devant le Sénat par M. le secrétaire d'Etat guide le travail des commissions départementales, qui, par conséquent, prendront les mêmes dispositions sur l'ensemble du territoire.
Vous avez souhaité la souplesse, monsieur le secrétaire d'Etat. En la matière, je vous comprends, mais qu'il soit bien clair que les communes qui font de grands efforts pour les rassemblements exceptionnels ne seront pas particulièrement mises à contribution du fait même qu'elles ont l'équipement nécessaire.
M. le président. L'amendement n° 57 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 14.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Le groupe communiste républicain et citoyen ne votera pas cet amendement parce que nous estimons que, dans le projet de loi qui nous est soumis, les délais sont bien assez longs.
Je me permets de rappeler que cela fait déjà dix ans que les communes de plus de 5 000 habitants sont tenues de mettre à disposition des gens du voyage des aires d'accueil. Or un quart d'entre elles seulement se sont conformées à cette obligation.
Dans ces conditions, permettez-moi de penser, mes chers collègues, que les dix-huit mois prévus pour l'élaboration du schéma départemental, auxquels s'ajoutent deux années durant lesquelles les communes sont tenues de réaliser leurs aires d'accueil, sont suffisants pour permettre à l'ensemble des personnes concernées de se mettre d'accord sur les modalités de réalisation de ces aires.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ I. _ Si, à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la publication du schéma départemental et après mise en demeure par le préfet restée sans effet dans les trois mois suivants, une commune ou un établissement public de coopération intercommunale n'a pas rempli les obligations mises à sa charge par le schéma départemental, l'Etat peut acquérir les terrains nécessaires, réaliser les travaux d'aménagement et gérer les aires d'accueil au nom et pour le compte de la commune ou de l'établissement public défaillant.
« Les dépenses d'acquisition, d'aménagement et de fonctionnement de ces aires constituent des dépenses obligatoires pour les communes ou les établissements publics qui, selon le schéma départemental, doivent en assumer les charges. Les communes ou les établissements publics deviennent de plein droit propriétaires des aires ainsi aménagées, à dater de l'achèvement de ces aménagements.
« II. _ Le 31° de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« 31° Les dépenses occasionnées par l'application des dispositions des articles 2 et 3 de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ;
« 32° L'acquittement des dettes exigibles. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 15, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de supprimer le I de cet article.
Par amendement n° 49, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent dans le premier alinéa du I de l'article 3 de remplacer les mots : « l'Etat peut » par les mots : « l'Etat se substituera au maire défaillant pour ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 15.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit de supprimer le pouvoir de substitution reconnu au représentant de l'Etat en cas de carence des communes.
Bien évidemment, nous sommes conscients de la nécessité de fixer un délai d'exécution de l'obligation, mais, en l'occurrence, nous reprendrons l'argument qu'a invoqué tout à l'heure M. le secrétaire d'Etat lorsqu'il a indiqué que les plans départementaux d'action pour le logement des défavorisés avaient été réalisés.
Je suis convaincu, en ce qui me concerne, que, dans la pratique, aucun préfet ne pourra se substituer au pouvoir des communes et qu'il sera contraint à la négociation et à la concertation. Par conséquent, c'est avec confiance dans le partenariat et la responsabilisation des acteurs, ce qui correspond à l'esprit même de ce projet de loi, que nous vous soumettons cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à M. Foucaud, pour défendre l'amendement n° 49.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à rendre obligatoire l'intervention de l'Etat en cas de refus d'une commune de participer à la mise en place effective du schéma départemental d'accueil des gens du voyage.
Force est de constater, près de dix ans après l'adoption des premières dispositions relatives au stationnement des nomades, que le bilan de leur application n'est pas satisfaisant.
En effet, sur les 1 739 communes de plus de 5 000 habitants que compte notre pays, 358 seulement, soit un peu plus d'un quart, sont dotées d'une aire de stationnement, ce qui répond à moins d'un quart des besoins, qui sont évalués à plus de 35 000 places, mais dont le nombre est sans doute supérieur si l'on tient compte des gens du voyage ayant choisi aujourd'hui de se sédentariser.
Le bilan est également mitigé quant à l'élaboration des schémas départementaux puisque seulement trente-deux départements disposent d'un schéma approuvé par le préfet et le président du conseil général et quinze d'un schéma approuvé par le préfet seul, d'où la nécessité, que nous avons évoquée il y a quelques instants, de laisser la possibilité au préfet d'approuver seul le schéma.
Notre amendement vise ainsi à élargir les chances de voir un jour un nombre d'emplacements suffisants pour répondre à l'ensemble des besoins des gens du voyage.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 49 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 15 et 49 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Il n'aura pas échappé à la Haute Assemblée que ces deux amendements traduisent des positions diamétralement opposées.
Je suis, bien entendu, persuadé que la démarche partenariale prévaudra dans la plupart des cas et que les communes inscrites au schéma départemental respecteront les obligations qui seront les leurs. Les subventions prévues par le projet de loi inciteront naturellement à ce respect.
Pour autant, l'expérience acquise depuis 1990 montre, comme le rappelait à l'instant M. Foucaud, qu'il est nécessaire de prévoir des instruments permettant de passer outre en cas de mauvaise volonté ou d'inertie de collectivités concernées par l'accueil des gens du voyage et, pour cette raison, inscrites au schéma départemental.
C'est pourquoi, si les dispositions du paragraphe I de l'article 3 ont vocation à ne pas servir, ou plus précisément à servir le moins souvent possible, elles doivent cependant être maintenues. La référence aux plans départementaux d'action pour le logement des défavorisés me semble illustrer cette affirmation, car la possibilité de substitution par un arrêté interministériel à sûrement contribué à ce que la solution contractuelle préfet-président de conseil général l'emporte dans tous les départements.
Mais les obligations n'ont de sens que si elles sont assorties de sanctions. Nous le demandons pour ce qui est des obligations que les gens du voyage eux-mêmes doivent respecter. Il faut évidemment que la réciprocité existe à la charge de ceux qui ont la responsabilité de l'aménagement des aires d'accueil, faute de quoi certains pourraient être tentés de jouer sur les délais, de retarder sine die, la mise en oeuvre des obligations qui résulteront du schéma départemental et, dans le même temps, de continuer de demander à d'autres d'assumer la responsabilité qu'ils n'ont pas voulu prendre.
C'est une question tout à fait fondamentale. La République, par ses lois, a besoin d'être chez elle partout, et cela implique que ses lois s'appliquent partout. C'est un principe de base qui ne peut, me semble-t-il, qu'être partagé par tous ceux qui, sincèrement, se réfèrent aux valeurs républicaines.
Les maires qui agissent dans cette conception républicaine de la décentralisation et qui n'ont pas cette vision ultra-libérale qui consisterait à faire de chaque commune une république autonome s'affranchissant de la République une et indivisible, ont besoin d'avoir l'assurance qu'ils ne seront pas confrontés à des problèmes accrus en prenant eux-mêmes leur part des besoins à satisfaire.
Ce sont ces maires qu'il faut soutenir. La Haute Assemblée se grandirait en en convenant et en ne retenant pas l'amendement n° 15. C'est un appel solennel que je vous lance, mesdames, messieurs les sénateurs, car il s'agit d'un point majeur pour l'équilibre de l'ensemble du texte dont nous débattons.
Faut-il pour autant, comme le prévoit l'amendement n° 49, aller jusqu'à prévoir une substitution obligatoire ? Cela reviendrait à supprimer tout pouvoir d'appréciation du préfet sur l'opportunité de cette substitution au maire.
En matière de pouvoir de substitution, la loi prévoit toujours que le préfet dispose d'un pouvoir d'appréciation. C'est ce qu'indiquent l'article L. 2122-34 du code des collectivités territoriales lorsque le maire refuse d'exercer les pouvoirs qui sont les siens en tant qu'agent de l'Etat, l'article L. 2215-1 du même code lorsque le maire refuse ou néglige d'exercer ses pouvoirs de police municipale et même l'article 2124, qui permet au préfet de se substituer au maire pour prendre en temps de guerre des mesures d'intérêt communal.
Il y aurait, aux yeux du Gouvernement, quelque paradoxe à supprimer tout pouvoir d'appréciation du préfet dans la matière qui nous intéresse, d'abord parce qu'il peut y avoir matière à hésitation et à discussion avec le maire sur la réalité du non-respect par celui-ci de ses obligations ; ensuite, parce qu'il n'est pas dans les intentions du Gouvernement d'empêcher le dialogue particulièrement nécessaire dans ce domaine et très utile pour faire aboutir des solutions de meilleure qualité, de plus grande adéquation aux problèmes à résoudre.
Le Gouvernement est dont également défavorable à l'amendement n° 49.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Monsieur le président, permettez-moi d'avancer des arguments totalement opposés à ceux qu'a invoqués M. le secrétaire d'Etat.
D'abord, si la République doit être partout, c'est une raison supplémentaire de supprimer les seuils.
Ensuite, monsieur le secrétaire d'Etat, les maires sont prêts, j'en suis convaincu, à s'engager dans l'installation d'aires d'accueil s'ils ont l'assurance que le préfet mettra en oeuvre les dispositifs d'interdiction de stationnement liés à la création des aires d'accueil. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
Autrement dit, ce n'est pas l'institution d'un pouvoir de substitution du préfet, par défaut des collectivités locales, qui permettra de mettre en application votre texte - et nous y sommes favorables - car ce pouvoir ne sera pas réellement mis en oeuvre.
Je ne conçois pas qu'un préfet puisse à la fois demander à un maire de dépenser de l'argent pour un contrat éducatif local, un contrat local de sécurité ou d'autres opérations liées à la politique de l'Etat et lui dire qu'il va lui imposer l'implantation d'une aire d'accueil.
En revanche, si les élus locaux ont la conviction que, dès lors qu'ils auront réalisé une aire d'accueil ou mis en place une politique de sédentarisation, l'Etat assumera toutes ses responsabilités et que son autorité s'exercera avec toute la fermeté requise, à ce moment-là, je puis vous l'assurer, la politique que vous souhaitez voir se développer entrera dans les faits. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je me permets de vous renvoyer, monsieur le rapporteur, après cette intervention très ferme, à la réponse précise que j'ai apportée sur ce point à l'issue de la discussion générale. J'ai bien montré alors quelle était la détermination du Gouvernement d'user de toutes les prérogatives que nos principes fondamentaux lui permettent de mettre en oeuvre.
Bien sûr, on peut toujours faire un procès d'intention sur la réalité d'une volonté !
Il reste que cette volonté, je l'ai exprimée avec autant de force, monsieur le rapporteur, que vous venez d'un mettre dans votre interpellation, et je souhaite que vous vouliez bien m'en donner acte.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Tout à fait !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 15.
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Bien sûr, M. Delevoye a évidemment raison lorsqu'il explique que tant les collectivités locales que les préfets doivent repecter la loi. Toutefois, l'amendement n° 15 m'apparaît, au même titre que d'autres amendements, comme un subterfuge dans la mesure où il tend à supprimer ce qui constitue, pour mon groupe, l'unique moyen efficace d'obtenir la réalisation d'aires d'accueil en nombre suffisant.
A travers cet amendement, vous nous proposez quasiment, messieurs de la majorité sénatoriale, le retour au fameux article 28 du texte de 1990, qui s'est révélé terriblement inefficace puisque, en dix ans, 8 000 places ont été réalisées quand les besoins sont estimés à 30 000 places.
Le présent projet de loi permet d'accomplir de réelles avancées en ce qui concerne le stationnement des gens du voyage, tant par les objectifs qu'il assigne que par les compétences qu'il définit et les financements qu'il prévoit. Mais la majorité sénatoriale refuse ces avancées sur cette question d'intérêt général que seule la solidarité nationale est susceptible de résoudre. Or, précisément, ce texte établit nettement que l'Etat prendra ses responsabilités en la matière.
Nous ne pourrons donc que voter contre cet amendement.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Selon nous, il s'agit là, je l'ai dit dans la discussion générale, d'une disposition tout à fait majeure en ce qu'elle permet que, grâce à l'intervention des préfets, la loi puisse enfin être appliquée. Cette disposition doit donc être maintenue dans son intégralité. Or, comme l'a dit M. Foucaud, le vote de l'amendement n° 15 nous ferait revenir à la loi de 1990, et donc à la situation qui a été dénoncée à juste titre puisque les aires d'accueil n'ont pas été réalisées en nombre suffisant.
M. Delevoye nous dit que cette disposition ne sera pas appliquée, que les préfets ne recourront pas à cette possibilité que leur donne le texte. Peut-être, mais cela fournira tout de même un élément de négociation. Ce n'est pas parce que l'inscription par le préfet de dépenses obligatoires dans les budgets des communes est fort peu mise un oeuvre qu'il faut supprimer ce dispositif ! Ici, d'une certaine manière, la situation est la même.
Par ailleurs, je ne pense pas que la disposition qui nous est proposée dans le projet de loi mette en cause la décentralisation. Il y aura simplement des négociations. Aussi faut-il absolument la maintenir, faute de quoi le texte perdra toute efficacité.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. M. le secrétaire d'Etat a lancé un appel solennel en invoquant l'humanisme et la tolérance, et ce sont des valeurs que je partage. Cependant, je considère que ce projet de loi illustre bien l'adage selon lequel l'enfer est pavé de bonnes intentions.
M. Foucaud a rappelé qu'il n'y avait que 8 000 places quand il en faudrait 30 000.
Mais pourquoi en sommes-nous là ? J'invite M. Foucaud à se rendre dans une commune des Yvelines gérée par ses amis, Trappes, où le syndicat de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines a fait aménager une aire d'accueil, laquelle a été très rapidement abandonnée.
En fait, les maires renoncent à réaliser ces aires d'accueil tout simplement parce qu'ils se sont aperçus que l'Etat n'avait pas rempli ses devoirs vis-à-vis des communes qui en avaient mis en place. Ils ont très vite compris que le fait d'implanter une aire d'accueil était le meilleur moyen d'exacerber les problèmes !
Il est toujours facile de mettre en avant l'humanisme et la tolérance dans les discours ! Dans les faits, c'est autre chose ! Nous vivons malheureusement dans une société où tout le monde, il est pas beau, tout le monde, il est pas gentil, monsieur le secrétaire d'Etat !
De toute façon, je ne connais pas un préfet qui mettra en oeuvre les dispositions que vous nous proposez. Sans cesse, nous donnons aux préfets des pouvoirs qu'ils ne peuvent pas utiliser. Nous l'avons encore fait récemment à propos du périmètre des EPCI - établissements publics de coopération intercommunale - après transformation en communauté d'agglomération. Sur les cinquante-deux communautés qui se sont créées, un certain nombre, dont la mienne, auraient, de l'avis de tous, dû voir leur périmètre modifié. Eh bien, les préfets n'ont pas fait usage de leur pouvoir, et nous savions à l'avance qu'ils ne le feraient pas.
Avec cette disposition, monsieur le secrétaire d'Etat, vous allez faire plaisir aux maires qui ne veulent pas mettre en place une aire d'accueil ! Ils attendront d'y être contraints par le préfet. Si celui-ci fait seulement mine d'intervenir, ils se tourneront vers leur population, et il y aura alors des manifestations, des tracteurs et des voitures qui « débouleront » pour empêcher le préfet d'aller contre l'absence de décision du maire.
Voilà ce que vous êtes en train d'instituer, monsieur le secrétaire d'Etat, et je ne peux que m'y opposer.
L'enfer est décidément pavé de bonnes intentions ! Comme toujours, comme en matière scolaire notamment, vous donnez des arguments à ceux qui ne veulent pas jouer le jeu du partenariat.
Voilà pourquoi je voterai avec conviction l'amendement de la commission. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Les maires qui auraient le comportement indigne que vient de décrire M. Braye ne seraient pas, j'en suis certain, des maires capables d'agir dans le volontariat. (Marques d'approbation sur les travées socialistes.)
En outre, monsieur Braye, vous invoquez le fait que des aires ont été abandonnées. Pourquoi ? Parce qu'elles n'étaient pas entretenues. J'en connais comme vous ! Et pourquoi n'ont-elles pas été entretenues ? En raison d'une absence totale d'aide au fonctionnement.
Précisément, ce texte prévoit la prise en charge de ces coûts à 50 % par l'Etat et à 25 % par le département, ce qui permet de laisser une part à la charge des gens du voyage eux-mêmes, faute de quoi ils ne seraient pas responsabilisés.
Par conséquent, ne préjugez pas ce qui résultera de l'entrée en vigueur d'un nouveau texte à partir de la situation précédente. Nous tirons les enseignements de cette situation et nous prévoyons les moyens permettant de gérer les nouvelles aires.
M. Dominique Braye. Ce n'est pas le coût qui est en cause !
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Si je n'avais qu'une seule raison de voter contre cet amendement, M. Braye me l'aurait fournie. Il nous a en effet expliqué que la loi ne serait pas appliquée dans tous les cas parce que de mauvais maires ne l'appliqueraient pas et que de mauvais préfets ne la feraient pas appliquer ! (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean Chérioux. Il n'a pas du tout dit cela !
M. Serge Lagauche. Ne vous énervez pas ainsi !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Lagauche.
M. Serge Lagauche. Moi, monsieur Braye, je suis favorable à l'implantation des aires d'accueil...
M. Dominique Braye. Moi aussi !
M. Serge Lagauche. ... et à la mise en place de schémas départementaux. Je suis également d'accord pour demander aux préfets d'agir envers ceux qui ne respecteront pas la loi, dès lors que ces schémas départementaux auront été arrêtés. Il est évident que nous, élus locaux, devons commencer par respecter la loi en réalisant les aires.
M. Nicolas About. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Les propos de notre collègue Dominique Braye m'ont paru très intéressants, car, s'écartant des grandes envolées oratoires, c'est la vérité du terrain qu'ils ont fait émerger.
Le terrain, c'est quoi ? Ce sont des maires qui ont été blessés physiquement lors d'affrontements extrêmement durs. Le terrain, c'est l'incapacité de faire payer un droit de place. A moins de confier au trésorier principal le soin de prélever le droit de place à l'entrée des aires d'accueil ! Le terrain, c'est le gardien de l'aire d'accueil de Trappes qui, après avoir été roué de coups, a été transporté presque mort à l'hôpital. Le terrain, c'est l'aire de 120 places qui a été détruite en totalité, alors que nous l'avions financée.
Le terrain, c'est tout cela !
Ce que nous vous avons dit, monsieur le secrétaire d'Etat, à travers notre vote de tout à l'heure sur l'article 1er, c'est qu'il ne faut pas croire que le rôle de l'Etat consiste simplement à financer 70 % d'une place. Des places, nous en avons déjà payé sans avoir besoin de vos financements !
Financer, c'est facile ! Ce qui est dur, c'est de gérer, c'est d'obtenir un soutien des juges et, surtout, du préfet. Car le préfet a aussi le droit de prendre des mesures pour obtenir l'exécution forcée de certaines décisions, pour obtenir l'expulsion.
Pourquoi n'avons-nous pas le soutien - le soutien physique - de l'Etat dans la gestion même des aires ? Pourquoi n'avons-nous pas de réponse immédiate du préfet, alors même que nous sommes en règle s'agissant des aires d'accueil, quand nous sommes confrontés à des occupations illicites, non seulement de terrains communaux et de terrains privés, mais aussi de zones d'activité économique, par des gens qui saccagent tout et, par là même, réduisent à néant les efforts que font nos collectivités pour appuyer le développement économique ?
Ne demandez pas tout aux maires ! M. Braye a raison : il ne faut pas s'en tenir à de belles déclarations. Il faut obtenir de vos représentants dans les départements qu'ils nous apportent un soutien réel. Ou alors, vous irez dire aux maires qui ont été blessés, massacrés, qu'ils sont des maires indignes ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. La caricature est grotesque !
M. Jacques Legendre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre. Lorsque M. le secrétaire d'Etat en appelle à l'esprit républicain, nous sommes évidemment tous très attentifs. Il n'y a ici personne pour penser que la République n'est pas partout chez elle et que ses lois ne doivent être exécutées partout.
Mais ce n'est pas être un mauvais républicain, monsieur le secrétaire d'Etat, que de souffrir de voir se créer des zones de non-droit, de constater qu'il y a non-respect, ici et là, des normes républicaines et de déplorer que les représentants de l'Etat à qui les maires demandent d'intervenir le fassent trop tard après maintes hésitations.
Dans la région Nord - Pas-de-Calais, que vous connaissez bien, monsieur Delevoye, nous avons de nombreux rassemblements sur les aérodromes. Souvent les enfants jouent à proximité des pistes. C'est dangereux pour leur vie. L'Etat et ses représentants hésitent tant à intervenir qu'il faut les menacer de mettre en cause leur responsabilité en cas d'accident. Dans ces conditions, comment, en effet, ne pas s'interroger ?
Je vous ai livré un témoignage. Les uns et les autres s'y reconnaîtront. Je crois que nous sommes à la recherche d'un équilibre : les maires prennent leurs responsabilités et ils sont en droit d'exiger que l'Etat prenne les siennes.
Voilà ce que nous recherchons. Ce texte n'aura un sens que si nous avons avec la certitude que l'Etat prendra ses responsabilités. Or, aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat, nous n'en avons pas la preuve. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 49 n'a plus d'objet.
Par amendement n° 16, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par le II de l'article 3 pour remplacer le 31° de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales, de remplacer les mots : « des articles 2 et 3 » par les mots : « de l'article 2 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ L'Etat prend en charge les investissements nécessaires à l'aménagement et à la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II de l'article 1er ci-dessus, dans la proportion de 70 % des dépenses, pour l'ensemble des travaux engagés dans le délai fixé à l'article 2, dans la limite d'un plafond fixé par décret.
« La région, le département et les caisses d'allocations familiales peuvent accorder des subventions complémentaires pour la réalisation de ces aires d'accueil. »
Par amendement n° 58, MM. Lassourd, Braye, Doublet, Gournac, Goulet, Larcher et Murat proposent, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « et à la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II de l'article 1er ci-dessus », par les mots : « et la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II de l'article ci-dessus, ainsi que la réparation de dommages éventuels, ».
La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Cet amendement se situe dans le droit-fil du débat qui vient de s'instaurer sur la difficulté de gestion des aires d'accueil, notamment s'agissant des dégradations que l'on peut y constater.
Aux termes de l'article 4, l'Etat prend en charge les investissements nécessaires à l'aménagement et à la réhabilitation des aires qui sont prévues, Or, avec une interprétation restrictive, le terme « réhabilitation » pourrait ne concerner que la rénovation d'aires obsolètes ou non adaptées.
Je souhaite donc ajouter à la réhabilitation la réparation des dommages éventuels. Il importe en effet que l'Etat s'engage financièrement, au-delà de la construction et de la réhabilitation des aires de stationnement, pour la réparation des dommages éventuellement constatés.
Dans ma commune, en dépit de la protection d'un bloc sanitaire par une porte blindée destinée à interdire l'accès aux infrastructures en matière de tuyauterie, tout a été démoli en une seule nuit. Cette anecdote illustre la nécessité d'une intervention financière de l'Etat lorsque des dégradations sont consistantes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. M. Lassourd pose deux problèmes. Si l'un me semble résolu par la loi, il me paraît important de soumettre l'autre à M. le secrétaire d'Etat.
Puisque le texte prévoit la prise en charge par l'Etat des investissements nécessaires à l'aménagement et à la réhabilitation, j'ai la conviction que, si une aire d'accueil est intégrée dans le schéma départemental, et qu'il convient de la réhabiliter, donc de la réparer, l'Etat peut accompagner cette réparation dans le délai de deux ans suivant la publication dudit schéma.
A contrario, la question que pose M. Lassourd est la suivante : lorsque le schéma départemental est arrêté, lorsque les aires d'accueil construites avec la participation de l'Etat sont détruites, il conviendrait, monsieur le secrétaire d'Etat, d'instaurer, sous une forme ou sous une autre, une pérennisation des aides de l'Etat pour permettre la réparation des aires d'accueil qui ne peuvent pas être laissées uniquement à la charge des collectivités locales.
M. Lassourd ayant satisfaction pour la concrétisation du schéma départemental, il pourrait donc retirer son amendement. En revanche, il pose une question sur la pérennisation des aires d'accueil au-delà de la mise en oeuvre du schéma départemental. Je crois qu'il faut ouvrir une possibilité d'accès à des subventions d'Etat via les commissions départementales ou la DGE.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. J'ai bien entendu et l'argumentation de l'auteur de l'amendement et l'interrogation de M. le rapporteur.
Le texte du Gouvernement, qui vise à engager financièrement l'Etat à la fois pour la création des aires et pour leur réhabilitation, met en place des aides à la gestion destinées, nous en sommes convaincus, à limiter au minimum les dommages éventuels et répétitifs.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Bien sûr !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Dans le cas contraire, cette situation relèverait alors plus d'une aide exceptionnelle que d'une aide systématique ; je vous concède que c'est en effet un point qu'il faut approfondir.
Cependant, l'amendement n° 58 présuppose une inefficacité des aides à la gestion à mon sens difficilement admissible puisque nous sommes en train de les créer. Pourquoi le faire si elles sont a priori réputées inefficaces ? Je préfère donc que ces aides à la gestion soient maintenues, au moins dans une première phase.
Par conséquent, le Gouvernement préconise le rejet de l'amendement n° 58.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Nous prenons acte - et nous l'avons souligné - de l'effort financier que fournit l'Etat pour la réalisation des aires de stationnement dans l'optique de la mise en oeuvre du schéma.
J'ai bien entendu que, si les aires d'accueil sont arrêtées dans le schéma, même la réparation d'une aire pourra bénéficier de la prise en charge par l'Etat à hauteur de 70 % des dépenses engagées.
Il n'en reste pas moins que, dans la mesure où l'aide forfaitaire à la gestion favorise le gardiennage - que nous souhaitons - le risque zéro n'existe pas.
Nous pensons que, dans un pourcentage important, les aires fonctionneront bien et illustreront ainsi le succès de ce texte.
Mais on ne peut écarter l'éventualité que certaines aires, pour une raison ou pour une autre, subissent des destructions comparables à celles qui ont été évoquées par M. Lassourd. Je pense que, dans ce cas-là, ou bien les communes se retourneront vers l'Etat, qui n'aura pas su faire respecter la sécurité publique, notamment, ou bien il faudra mettre en place un système d'assurance qui n'existe pas pour l'instant.
Il faut que nous réfléchissions dans le cadre départemental à un dispositif qui, sous une forme ou sous une autre - par le biais de la DGE ou d'un concours de l'Etat - permette au préfet de faciliter la réparation de ces aires.
En effet, monsieur le secrétaire d'Etat, si je partage votre point de vue, selon lequel la qualité de la gestion est un facteur du succès et de la pérennité des aires d'accueil, je tiens à indiquer que la rapidité de la réparation est un autre facteur de cette pérennité. Or, si une collectivité locale doit faire face tous les six mois à des réparations fort importantes, ce que je n'espère pas, à un moment ou à un autre, la lassitude s'emparera des élus...
M. Patrick Lassourd. Absolument !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. ... au risque de remettre en cause la qualité des aires d'accueil.
Je vous invite à être attentif à la question posée par M. Patrick Lassourd. Nous avons salué l'effort du Gouvernement et nous prenons acte de l'importance de l'incitation financière pour la réalisation des investissements. Reste le problème de la pérennité des aires d'accueil qui, malgré l'effort du préfet pour mobiliser les forces de l'ordre, l'effort des élus pour mettre en place un gardiennage, pourraient subir des déprédations.
Nous demandons une réparation rapide grâce peut-être à des fonds qui seraient mis à la disposition du préfet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 58.
M. Nicolas About. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Je voterai cet amendement qui pose le problème majeur de l'entretien des aires auquel nous sommes confrontés chaque fois qu'elles ont été fortement occupées : les candélabres étant vidés de leurs câbles, le matériel installé étant déboulonné et emporté, il revient aux communes de supporter plusieurs dizaines de milliers de francs de réparations. Pour en être convaincus, il suffit que vous vous adressiez aux établissement publics - établissement public administratif ou syndicat d'agglomérations qui gèrent la ville de Saint-Quentin-en-Yvelines. Ils vous communiqueront les factures des réparations successives.
L'Etat pourra nous imposer des aires, que nous construirons, et pourra nous demander de les gérer. Nous le ferons certainement. Mais, si nous n'avons pas son soutien, nous nous arrêterons.
La question sera alors de savoir si l'Etat reprendra à sa charge la gestion directe de ces aires et quels seront les moyens qu'il mettra en place, pour gérer, si les communes sont défaillantes, l'ensemble de ces aires à travers la France.
La conclusion qui s'impose, que l' Etat doit nous aider à les entretenir.
M. Serge Lagauche. Je demande la parole pour explications de vote.
M. le président. La parole est à M. Lagauche.
M. Serge Lagauche. Je suis étonné de ce que j'entends. J'avais en effet déposé un amendement dans lequel je proposais que l'Etat reprenne l'entretien des aires en cas de défaillance des communes.
Je partage le point de vue de M. le rapporteur selon lequel les réparations doivent être envisagées. L'expérience montre que, dans un premier temps, il faudra insister pour maintenir ces aires dans un certain nombre de zones.
Cette opération sera coûteuse et nécessitera la participation de l'Etat pendant toute la période de mise en route. Nous allons, nous le savons tous, nous heurter à de grosses difficultés. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Je ne les ai jamais niées. Il est donc du devoir et du rôle de l'Etat d'aider les collectivités s'il impose de nouvelles obligations.
Je comprends M. le secrétaire d'Etat lorsqu'il évoque les obstacles sur le plan réglementaire.
Peut-être pourrions-nous profiter de la navette pour tenter de trouver une solution. Monsieur le secrétaire d'Etat, sachez que le groupe socialiste demande formellement, pendant toute cette période de démarrage, une participation de l'Etat aux réparations éventuelles. Espérons que cela incitera le préfet à intervenir à temps pour éviter des dégâts trop importants.
M. Patrick Lassourd. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lassourd.
M. Patrick Lassourd. Je tiens à exprimer ma satisfaction à l'égard des propos tenus par M. le rapporteur.
Non seulement il a bien compris le sens de mon amendement, mais il l'a encore précisé et éclairé. En effet, à la construction de nouvelles aires et à la réhabilitation des aires anciennes, s'ajoutera leur maintenance.
Vous nous assurez, monsieur le secrétaire d'Etat, d'une contribution financière effective de l'Etat en matière de fonctionnement. Mais cette contribution financière permettra de couvrir les dépenses d'entretien courantes, la dégradation et la vétusté, le renouvellement du matériel, les dépenses de gardiennage.
Mais la véritable question est celle des dégradations très lourdes qui, quelquefois, surviennent en une seule nuit privant une aire d'alimentation en eau et en électricité ainsi que d'équipements sanitaires.
Dans ces conditions, l'Etat ne peut pas se désengager financièrement de cette opération.
Il a choisi le cadre d'un schéma départemental pour aider financièrement les collectivités locales dans la réalisation de ces aires.
L'Etat doit les aider également à assurer le devenir de ces aires, qui subiront systématiquement, l'expérience le montre, des dégradations imposant des renouvellements complets de matériels.
Je maintiens mon amendement, car ce principe doit figurer dans la loi. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Thierry Foucaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous voterons cet amendement car il s'inspire de la même philosophie que notre amendement n° 50.
Certes, l'aide financière de l'Etat est beaucoup plus importante que ce qui était prévu dans la loi de 1990. Cependant, le plafonnement envisagé pourrait conduire à réaliser des aires d'accueil à moindre coût.
Il faut prendre en compte les paramètres de notre discussion, à savoir les réalités locales, les réalités de terrain, si vous me permettez ce jeu de mot. Ainsi, nous aurons des terrains d'accueil dignes de ce nom et nous éviterons peut-être les méfaits qui ont été exposés à l'instant.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 58, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 17, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose, dans le premier alinéa de l'article 4, de remplacer les mots : « des dépenses, pour l'ensemble des travaux engagés » par les mots : « des dépenses engagées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 47 est présenté par M. Carle et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
L'amendement n° 50 est déposé par Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Tous deux tendent, à la fin du premier alinéa de l'article 4, à supprimer les mots : « , dans la limite d'un plafond fixé par décret ».
La parole est à M. Carle pour présenter l'amendement n° 47.
M. Jean-Claude Carle. Il s'agit de supprimer une disposition qui peut exprimer un certain désengagement de l'Etat et une certaine méfiance de celui-ci vis-à-vis des collectivités, en mettant en doute leur sens des responsabilités, au motif qu'elles vont dépenser trop, ce qui ne sera pas le cas. De plus, les coûts de réalisation ne sont pas les mêmes d'un département à l'autre, ce qui peut créer des situations différentes voire une certaine injustice.
M. le président. La parole est à M. Foucaud, pour présenter l'amendement n° 50.
M. Thierry Foucaud. J'ai déjà expliqué la philosophie de notre position. Cet amendement est dans le droit-fil de ceux qui tendent à permettre l'aménagement d'aires d'accueil dignes de ce nom et qui prévoient un réel soutien des collectivités en ce domaine.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 47 et 50 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Ces amendements tombent sous le coup de l'article 40, puisqu'ils augmentent la dépense sans prévoir de recettes supplémentaires.
Cela étant, soyons clairs : le Gouvernement a repris pour base de dépenses subventionnables celles qui résultent des travaux de votre propre assemblée. Ce plafond est la dépense d'investissement moyenne telle que vous l'aviez fixée vous-mêmes. N'oubliez pas que si, demain, était réalisé une aire d'accueil à un prix prohibitif, vous auriez aussi des réactions de la population qui, comme vous, doute des capacités des intéressés à toujours rigoureusement respecter les installations mises à leur disposition. Vous en viendriez alors à critiquer l'Etat qui aurait été inutilement dispendieux.
En tout état de cause, j'invoque l'article 40.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. François Trucy, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements identiques n°s 47 et 50 ne sont pas recevables.
Par amendement n° 18, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose :
A. - De compléter in fine l'article 4 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« II. - Après l'article L. 2335-2 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2335-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2335-2-1. - Des subventions exceptionnelles peuvent être attribuées par arrêté ministériel à des communes ou à des établissements publics de coopération intercommunale supportant des charges financières particulières en vue de prévenir ou de réparer les dommages causés par le stationnement de résidences mobiles mentionnées à l'article 1er de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, sur des sites classés ou inscrits. »
B. - En conséquence, de faire précéder le premier alinéa de la mention : « I. - ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit de prévoir des subventions exceptionnelles, notamment pour supporter des charges très lourdes en cas d'arrivée massive ou inopinée sur des sites classés ou inscrits.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Pour faire gagner du temps à la Haute Assemblée, je serai concis. Je précise simplement que cet amendement ne vise que les stationnements illicites, car la réalisation d'aires de stationnement est bien évidemment interdite dans les sites classés ou inscrits.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Bien sûr !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. En prévoyant la réalisation suffisante d'aires de stationnement pour répondre aux besoins, le projet de loi devrait fortement limiter, voire empêcher les stationnements illicites dans les sites classés ou inscrits. Le renforcement des pouvoirs des maires et du pouvoir des juges devrait aussi avoir un effet dissuasif à l'encontre d'éventuels contrevenants. Je fais référence à l'explication que j'ai donnée à la fin de la discussion générale.
Enfin, en cas de stationnement illicite, la faculté qui sera donnée aux juges de recourir au référé « d'heure à heure », si la situation le requiert, sera bien sûr de nature à réduire les risques de dommages en permettant une expulsion rapide des lieux.
L'article L. 2335-2 du code général des collectivités territoriales prévoit un dispositif particulier d'aide pour les communes qui rencontreraient des difficultés financières importantes. Cette procédure s'appuie sur le chapitre 41-52 relatif au ministère de l'intérieur. Elle est donc exceptionnelle et réservée, certes, aux communes les plus en difficulté, mais celles que vous visez seraient, incontestablement, au moins confrontées à une difficulté exceptionnelle.
L'amendement n° 18 va beaucoup plus loin, puisqu'il tend à attribuer ces subventions à toute commune qui aurait subi des dommages ou qui pourrait en subir, sans que soient fixées les conditions tenant soit à l'importance des dégâts, soit à la situation de plus ou moins grande difficulté de la commune. Cette mesure ne se justifie donc pas dans la mesure où le projet de loi prévoit déjà différentes aides pour les communes.
C'est pourquoi le Gouvernement ne peut qu'être défavorable à cette disposition. Aussi, il invoque l'article 40.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. François Trucy, au nom de la commission des finances. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 18 n'est pas recevable.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 4



M. le président.
Par amendement n° 59 rectifié, MM. Braye, Doublet, Goulet, Gournac, Larcher, Lassourd et Murat proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est institué un répertoire national des terrains aménagés pour le stationnement des gens du voyage. Lors des grandes migrations, les préfets pourront prendre toutes les mesures techniques afin d'assurer une répartition homogène sur l'ensemble des sites concernés. Une coopération interdépartementale en liaison avec le ministère de l'intérieur pourra être instituée le cas échéant. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. La commission des lois avait déjà proposé la mise en place de ce répertoire, indépendamment de l'instauration du schéma national, répertoire et schéma national étant deux notions différentes. Or, cette idée n'a été reprise ni dans le projet de loi, ni par notre commission. Comme elle me paraît bonne, je propose de l'intégrer dans le texte.
En effet, un tel répertoire, qui sera la liste actualisée de toutes les aires d'accueil pour les gens du voyage, constituera un outil de connaissance de l'état d'avancement des réalisations en la matière, et, nous l'avons vu, il est important de connaître cette évolution. Ce répertoire sera aussi un outil indispensable pour permettre aux acteurs d'organiser, dans les meilleures conditions possibles, l'accueil et les déplacements des gens du voyage, notamment lors des grandes migrations.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Monsieur Braye, nous avions effectivement prévu un schéma national qui, aux termes de l'article 1er, que nous avions adopté, fixe la liste des terrains susceptibles d'être utilisés à cette fin et prévoit les aménagements nécessaires. Nous n'avions donc pas prévu un répertoire national hors du schéma national, mais nous avions intégré dans le schéma national la liste des terrains susceptibles d'être proposés dans l'organisation de ce schéma. Nous considérons que l'élaboration du schéma national vous donne satisfaction et c'est pourquoi nous vous demandons de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Braye, l'amendement n° 59 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Braye. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 59 rectifié est retiré.
Par amendement n° 60, MM. Cazalet, Braye, Gérard, Goulet, Gournac, Larcher, Lassourd, Murat et Peyrat proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'Etat prend en charge une partie des frais exposés par les communes et les établissement publics de coopération intercommunale en vue d'interdire à tous véhicules ainsi qu'à tout engin tracté l'accès de portions de leur territoire communal lorsque celles-ci ont fait l'objet d'un classement de la part de la commission départementale des sites ou lorsque celles-ci relèvent des articles R. 443-9 et R. 443-10 du code de l'urbanisme.
« La prise en charge s'effectue dans la limite d'un plafond fixé par décret et dans le cadre d'une convention passée avec l'Etat par les collectivités concernées ou leurs groupements.
« La perte des recettes occasionnée par la présente disposition est compensée par une augmentation à due concurrence des droits institués par les articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Cazalet.
M. Auguste Cazalet. Les communes sur le territoire desquelles se trouvent des sites naturels classés susceptibles d'être à tout moment envahis par des occupants sans titre réunis dans le cadre de rassemblements massifs occasionnels doivent pouvoir prendre les mesures de prévention propres à interdire l'accès de ces sites à tous véhicules ainsi qu'aux engins tractés par ces véhicules, en particulier des résidences mobiles.
Ces mesures de prévention relèvent clairement de l'intérêt général dans la mesure où les sites naturels classés, inscrits ou protégés susceptibles d'être envahis représentent un patrimoine risquant d'être ainsi gravement ou irrémédiablement dégradé.
Il y a donc lieu de prévoir un mécanisme d'aide de la part de l'Etat aux communes et aux groupements de communes qui, dans la limite d'un plafond et dans le cadre d'une convention passée avec l'Etat, engagent des travaux de nature à protéger l'accès de ces sites naturels classés, inscrits ou protégés. Nous avions prévu un gage pour cet amendement, mais je sais bien que l'article 40 peut être invoqué.
M. le président. Je constate que vous êtes très lucide, monsieur Cazalet.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 60 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. L'amendement n° 60 était satisfait par l'amendement n° 18. Toutefois, ce dernier n'ayant pas été recevable, nous soutenons l'amendement n° 60, mais la lucidité nous incline à penser que l'espérance de vie de cet amendement sera relativement brève.
M. le président. Monsieur le secrétaire d'Etat, quelle est la sentence du Gouvernement ? (Sourires.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut pas démentir la lucidité de la Haute Assemblée (Nouveaux sourires) - sinon elle lui en ferait grief - d'autant que cet amendement - j'attire l'attention de ces auteurs sur ce point - pourrait s'appliquer à d'autres catégories d'occupants sans titre que les gens du voyage.
Aussi, j'invoque l'article 40.
M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. François Trucy, au nom de la commission des finances. La durée de vie de cet amendement sera effectivement très courte : l'article 40 est applicable.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 60 n'est pas recevable.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. _ I. _ Dans l'intitulé du livre VIII du code de la sécurité sociale et du titre V de ce livre, les mots : "Aide aux associations logeant à titre temporaire des personnes défavorisées" sont remplacés par les mots : "Aides aux collectivités et organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées ou gérant des aires d'accueil des gens du voyage".
« II. _ Avant le premier alinéa de l'article L. 851-1 du même code, il est inséré un "I".
« III. _ L'article L. 851-1 du même code est complété par un II ainsi rédigé :
« II. _ Une aide forfaitaire est versée aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale qui gèrent une ou plusieurs aires d'accueil de gens du voyage. Elle est également versée aux personnes morales qui gèrent une aire en application d'une convention prévue au II de l'article 2 de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.
« Une convention passée avec l'Etat fixe, compte tenu de la capacité effective des aires d'accueil, le montant prévisionnel de l'aide versée annuellement à ces gestionnaires. Cette convention détermine les modalités de calcul du droit d'usage perçu par les gestionnaires des aires d'accueil et définit les conditions de leur gardiennage. »
« IV. _ A l'article L. 851-2 du même code, les mots : "L'aide est liquidée et versée" sont remplacés par les mots : "Les aides sont liquidées et versées".
« V. _ A l'article L. 851-3 du même code, les mots : "Le financement de l'aide" sont remplacés par les mots : "Le financement des aides". »
Sur l'article, la parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences, pour la branche famille, du présent projet de loi.
L'article 5 prévoit en effet le versement d'une aide forfaitaire aux communes, établissements publics de coopération intercommunale ou personnes morales de droit public ou privé, qui gèrent une ou plusieurs aires d'accueil des gens du voyage.
Cette aide, destinée à couvrir les frais de fonctionnement occasionnés par les aires d'accueil, sera versée par les caisses d'allocations familiales, selon des mécanismes comparables à ceux qui sont prévus pour l'aide aux organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées, l'ALT, l'aide au logement temporaire.
Il est prévu une aide d'un montant de 10 000 francs par place et par an. Le coût prévisionnel est donc évalué, à partir d'un objectif à terme de 30 000 places, à 300 millions de francs par an et 5 000 places seraient concernées dès l'entrée en vigueur de la loi, ce qui représente un coût immédiat de 50 millions de francs.
Toutefois, contrairement à l'ALT qui, certes, est versée par la branche famille mais qui lui est intégralement remboursée, la nouvelle aide serait partiellement financée par la branche famille selon la clé de répartition suivante : 50 % pour l'Etat, soit 150 millions de francs à terme, 48 % par la Caisse nationale des allocations familiales, soit 144 millions de francs, et 2 % pour la mutualité sociale agricole.
Pour la branche famille, cette nouvelle aide représente donc à terme une charge directe de 150 millions de francs par an et une charge indirecte non négligeable liée au coût de gestion de cette nouvelle prestation. En outre, la création d'une nouvelle prestation ajoute à la complexité des règles dont les caisses d'allocations familiales doivent assurer l'application.
Dans ces conditions, on comprend que le conseil d'administration de la CNAF ait émis, le 4 mai 1999, un avis défavorable sur ce texte.
En tant que président du conseil de surveillance de la CNAF, je constate que le Gouvernement a décidé de passer outre et d'imposer à la branche famille une charge nouvelle.
Perdons - ou perdez, monsieur le secrétaire d'Etat - cette mauvaise habitude qui consiste à confier systématiquement à la branche famille la gestion de toute nouvelle prestation créée par le législateur, quand bien même cette prestation n'aurait qu'un très lointain rapport avec la famille !
Les caisses d'allocations familiales connaissent aujourd'hui des situations difficiles, comme le montrent les réactions de l'opinion, à travers la presse, et les travaux de contrôle sur pièces et sur place actuellement menés au nom de la commission des affaires sociales par les rapporteurs des lois de financement de la sécurité sociale. Ce n'est pas le moment, monsieur le secrétaire d'Etat, de charger davantage la barque !
J'aimerais par conséquent vous poser trois questions.
Pour quelles raisons la branche famille a-t-elle été désignée, contre son gré, comme gestionnaire de cette nouvelle aide ? Quelle est la justification du financement par cette branche de la moitié de cette aide ? Comment cette charge nouvelle pour la branche famille sera-t-elle compensée financièrement ?
M. le président. Sur l'article 5, je suis saisi de deux amendements, présentés par M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 41 vise à compléter, in fine, la première phrase du premier alinéa du II du texte proposé par le III de l'article 5 pour compléter l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale par les mots : « satisfaisant aux normes techniques en vigueur, fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu au deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales. »
L'amendement n° 42 tend, dans la première phrase du second alinéa du II du texte proposé par le III de l'article 5 pour compléter l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « aires d'accueil », à insérer les mots : « et sous réserve d'un entretien satisfaisant ».
La parole est à M. Peyronnet, pour défendre ces deux amendements.
M. Jean-Claude Peyronnet. Ces amendements visent à préciser, d'une part, que les aires devront satisfaire aux normes techniques en vigueur et, d'autre part, que l'aide ne sera versée que sous réserve d'un entretien satisfaisant.
Il s'agit d'éviter, pour des raisons que l'on connaît et que l'on comprend, qu'un certain nombre d'aires ne soient fermées après dégradation, ce qui mettrait en cause l'équilibre général du texte et des schémas départementaux.
En effet, si l'on dimensionne le nombre des places en fonction des besoins, l'ensemble des aires doivent fonctionner dans de bonnes conditions, être attractives et convenablement réparties.
Certes, c'est une contrainte pour les maires. Mais ces amendements me semblent d'autant plus recevables que nous avons adopté l'amendement n° 58, à l'article 4, qui prévoit que l'Etat devra participer aux réparations. Il n'y a donc plus guère de raisons, s'il y en avait, de rejeter ces amendements puisque, désormais la mise aux normes et l'entretien pourront être subventionnés par l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 41 et 42 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission est défavorable à ces deux amendements.
Obligation est faite dans la loi aux communes de mettre à disposition des aires aménagées et entretenues ; nous entendons bien, en effet, que l'Etat ne versera les aides qu'au vu du respect des dispositions prévues par la loi.
De plus, nous estimons qu'il convient d'éviter la multiplication et la complexité des normes et des vérifications.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 41 et 42 ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Les raisons pour lesquelles le Gouvernement est favorable à ces deux amendements sont les raisons mêmes pour lesquelles la commission y est défavorable !
En effet, les aides ne seront versées que si les aires sont aménagées et entretenues. Ces amendements ont pour objet d'expliciter cette règle ; cela va de soi, et le Gouvernement n'est donc pas défavorable à ces amendements, contrairement à M. le rapporteur qui, pour cette même raison, conclut, lui, à un avis défavorable. Il y a donc une unanimité d'appréciation ! Par conséquent, l'application qui sera faite et qui va bien dans le sens des préoccupations des auteurs de l'amendement et des propos de M. le rapporteur ne soulèvera pas de contestation.
Après avoir donné cet avis favorable sur les amendements n°s 41 et 42, je répondrai brièvement à M. Huriet, qui m'a interrogé sur la démarche du Gouvernement dans cette affaire.
Le Gouvernement considère que tout ce qui touche aux bonnes conditions d'accueil et d'habitat des familles intéresse forcément la branche famille de notre protection sociale. Par la disposition qu'il préconise, il met un terme à l'exclusion de fait qui était en vigueur pour ces catégories de population qui n'avaient pas l'équivalent de l'ALT dont bénéficient les populations accueillies temporairement, mais dans d'autres structures. Par conséquent, par symétrie avec l'ALT, est prévu un dispositif qui n'est en rien dérogatoire.
Telles sont les deux réponses que je pouvais donner à M. Huriet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 41.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Je donne acte à M. le secrétaire d'Etat de sa réponse. Il n'a cependant pas répondu à une question portant sur un point essentiel : alors que l'ALT fait l'objet d'une compensation financière, il n'en est pas de même, dans l'état actuel du texte, de la nouvelle prestation.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 42, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 19, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose, dans la seconde phrase du second alinéa du texte présenté par le III de l'article 5 pour le II de l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale, de remplacer les mots : « du droit d'usage perçu » par les mots : « de la redevance perçue ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement vise à remplacer la notion du droit d'usage perçu par la notion de redevance perçue. Cela permet aussi la délégation du service public.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je crois que le mieux est l'ennemi du bien. En effet, la notion de redevance est appliquée aux budgets annexes, la justification étant la nécessité d'équilibrer le service rendu dans ces budgets annexes, c'est-à-dire que la redevance exclut normalement la subvention. Le droit d'usage est appliqué de manière plus pertinente, puisqu'il y aura une aide au fonctionnement ; le droit d'usage ne demandera pas l'intégralité des coûts. La redevance devrait le faire, mais elle devrait, par voie de conséquence, supprimer la subvention. Je ne pense pas que ce soit ce que souhaite la Haute Assemblée.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 19 pour une unique raison : il faut garder la légitimité de l'aide au fonctionnement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose :
A. - De compléter in fine le texte présenté par le III de l'article 5 pour le II de l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :
« L'aide mentionnée au premier alinéa ne peut être inférieure à 15 000 francs par place de résidence mobile. »
B. - Pour compenser la perte de recette résultant du A ci-dessus, d'insérer, après le III de l'article 5, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de la fixation du minimum de l'aide forfaitaire par place de résidence mobile à 15 000 francs sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Après avoir entendu les propos de M. Huriet, nous avons effectivement hésité, puisque le projet de loi prévoit une DGF avec un habitant par place. Nous aurions aimé soutenir la proposition de M. Peyronnet tendant à retenir le nombre de quatre habitants par place, mais, le montant de l'enveloppe globale de la DGF étant maintenu, cela se ferait en réalité au détriment de la dotation de solidarité urbaine ou de la dotation de solidarité rurale.
Certes, le Gouvernement aurait pu abonder l'enveloppe de la DGF au prorata de l'aide forfaitaire et du nombre de places créées ; mais cela n'est pas prévu, et nous souhaitons donc que l'aide forfaitaire soit portée de 10 000 francs à 15 000 francs par place, de façon que l'on puisse contractualiser avec les communes d'accueil l'aide à l'investissement et l'aide au fonctionnement. Mais nous avons bien évidemment fait nôtres les interrogations exprimées par M. Huriet sur le transfert de charges aux organismes sociaux, s'agissant du financement de ces aides.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas en mesure d'accepter la disposition prévue par cet amendement qui, sauf à examiner en détail les compensations proposées aux pertes de recettes, tombe sous le coup de l'article 40 de la Constitution.
M. le président. Monsieur Trucy, l'article 40 de la Constitution est-il applicable ?
M. François Trucy, au nom de la commission des finances. Il l'est, monsieur le président.
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 20 n'est pas recevable.
Je vais mettre aux voix l'article 5.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est au nom de la commission des affaires sociales que j'interviens à cet instant, après mon collègue M. Claude Huriet, qui a bien démonté le mécanisme de financement d'une partie de ce projet de loi par les caisses d'allocations familiales, contre l'avis de ces dernières, comme M. le rapporteur l'a d'ailleurs lui-même indiqué.
C'est devenu pratiquement une habitude : quand le Gouvernement a un dispositif à financer, il se tourne vers les caisses. On l'a vu lors de l'élaboration de la loi sur la réduction négociée du temps de travail ; on le voit aujourd'hui avec ce texte. On prélève sans compensation, et le tour est joué ! On se sert des cotisations des assurés sociaux et des entreprises pour financer un certain nombre de solutions à des problèmes qui, certes, sont difficiles : on a d'ailleurs vu tout à l'heure les énormes problèmes posés aussi bien à l'Etat ou à ses représentants qu'aux collectivités territoriales. Mais il faudra bien arrêter de mettre la main dans la caisse des caisses !
La dette globale a dû être cantonnée, et un impôt, qui va durer encore une quinzaine d'années, a été institué pour couvrir les déficits. Et là, alors qu'il est extrêmement difficile de parvenir à l'équilibre, on nous propose une fois de plus de prélever dans les caisses sociales des fonds pour financer des actions qui ne relèvent pas forcément de leur domaine.
Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, que le logement des personnes démunies relève du champ habituel d'intervention de la caisse d'allocations familiales, mais l'exemple que vous avez pris - M. Huriet l'a souligné - est sans valeur puisque vous avez fait une comparaison avec une prestation qui, elle, fait l'objet d'une compensation. C'est la raison pour laquelle je ne voterai pas cet article.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ I. _ Les modalités des interventions sociales mentionnées au II de l'article 1er, dont le financement incombe à l'Etat, au département et, le cas échéant, aux organismes sociaux concernés, dans le cadre de leurs compétences respectives, sont fixées par des conventions passées entre ces personnes morales et les gestionnaires des aires d'accueil prévues par le schéma départemental.
« II. _ Des conventions passées entre le gestionnaire d'une aire d'accueil et le département déterminent les conditions dans lesquelles celui-ci participe aux dépenses de frais de fonctionnement des aires d'accueil prévues au schéma départemental, sans que cette participation puisse excéder le quart des dépenses correspondantes. »
Par amendement n° 21, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le début du I de cet article :
« Les modalités de mise en oeuvre des actions de caractère social mentionnées au II de l'article 1er, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Jean-Claude Peyronnet. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 62 rectifié, MM. Braye, Gournac et Larcher proposent de rédiger ainsi le II de l'article 6 :
« II. - Une convention conclue entre l'Etat, le département, la commune sur le territoire de laquelle l'aire de stationnement est réalisée et la région, ainsi que, le cas échéant, un établissement public de coopération intercommunale compétent et tout autre organisme public définit les modalités de fonctionnement de l'aire et de prise en charge des dépenses qui en résultent. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Nous retrouvons manifestement l'éternel problème de l'entretien de ces zones d'accueil, puisque la participation du Gouvernement s'apparente à un faux-semblant. Nous savons tous que l'installation des aires d'accueil est la partie émergée de l'iceberg, tandis que la partie immergée est constituée par l'entretien de ces aires d'accueil. C'est pourquoi je pense qu'il faut, par cet amendement, impliquer tous les partenaires.
Dans l'état actuel du texte, le département peut participer à hauteur de 25 % au maximum. Je ne comprends pas les raisons de cette limitation à la participation du département.
Cet amendement vise donc à faire en sorte que ces aires d'accueil puissent perdurer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, qui a pour objet de favoriser la mutualisation des coûts, sous réserve que M. Braye accepte de remplacer les mots « aire de stationnement » par les mots « aire d'accueil ».
M. le président. Monsieur Braye, acceptez-vous la proposition de M. le rapporteur ?
M. Dominique Braye. Je l'accepte, monsieur le président, et je rectifie mon amendement en conséquence.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement, n° 62 rectifié bis , présenté par MM. Braye, Gournac et Larcher, et tendant à rédiger ainsi le II de l'article 6 :
« II. - Une convention conclue entre l'Etat, le département, la commune sur le territoire de laquelle l'aire d'accueil est réalisée et la région, ainsi que, le cas échéant, un établissement public de coopération intercommunale compétent et tout autre organisme public définit les modalités de fonctionnement de l'aire et de prise en charge des dépenses qui en résultent. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'entend pas exclure la participation de la région, mais il considère que la loi ne doit pas la rendre obligatoire. Cela étant, si tel est le souhait du Sénat, il en prendra acte !
Pourquoi le Gouvernement avait-il limité à 25 % la participation des départements ? Parce que, si l'on ajoute la participation de l'Etat, qui doit normalement correspondre à 50 % de la dépense, il ne restera alors que 25 % à la charge des occupants. Quelles que soient les difficultés de recouvrement dont tel ou tel d'entre vous a pu faire état, le Gouvernement ne désespère pas que l'on parvienne, par ce biais, à une responsabilisation desdits occupants.
Si la mutualisation s'élargit au conseil régional, rien n'empêche, de toute façon, que l'intégralité de la dépense soit couverte. Néanmoins, ce principe de la participation de l'occupant pourra être préservé.
Sur ce point, le Gouvernement s'en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 62 rectifié bis.
M. Jacques Legendre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Legendre.
M. Jacques Legendre. A titre personnel, je suis un peu perplexe. Introduire la région dans le système, et donc accroître la complexité des financements, ne me paraît pas très sage.
Je crains aussi qu'une telle disposition n'ait pour effet de déresponsabiliser davantage les usagers des aires, qu'il est bon, au contraire, de responsabiliser.
Personnellement, je ne pourrai donc pas voter cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 62 rectifié bis, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Jean-Claude Peyronnet. Le groupe socialiste s'abstient.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. Par amendement n° 61, MM. Le Grand, Doublet, Gérard, Goulet, Lassourd et Murat proposent :
A. De compléter l'article 6 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La dotation globale de fonctionnement des départements est majorée à due concurrence des dépenses mentionnées aux deux paragraphes précédents de cet article. »
B. Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de la majoration de la dotation globale de fonctionnement au titre de la compensation des dépenses de fonctionnement des aires d'accueil sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Article additionnel après l'article 6



M. le président.
Par amendement n° 51, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 6, un article additionnel ainsi rédigé :
« La loi n° 69-3 du 3 janvier 1969 relative à l'exercice des activités ambulantes et au régime applicable aux personnes circulant en France, sans domicile ni résidence fixe, est abrogée. »
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement concerne un problème qui n'est pas traité par ce projet de loi et qui, pourtant, est essentiel pour les gens du voyage : il s'agit de leur reconnaissance sociale, de leur place dans la société, ou plus exactement de la place que la société française leur réserve.
En effet, et je pèse mes mots, les gens du voyage sont considérés, par nos lois républicaines, comme de véritables sous-citoyens. Ils sont soumis à un ensemble de mesures discriminatoires et attentatoires à la liberté, comme le livret de circulation ou la réduction des droits civils.
Permettez-moi de revenir quelques instants sur l'évolution de notre législation relative aux gens du voyage.
C'est l'ordonnance de Colbert qui instaure, en 1662, un délit de nomadisme, d'oisiveté et d'errance. En 1789, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen garantit à tout citoyen la liberté d'aller et venir, et donc la liberté de stationnement. La Constitution de 1958 réaffirme de nouveau ce principe en tant que liberté constitutionnelle.
C'est en 1912, avec la loi du 16 juillet, que l'on définit les individus « réputés nomades ». Ce sont, d'une part, les individus « exerçant une profession, une industrie ou un commerce ambulant » ; d'autre part, les individus exerçant la profession de commerçant ou d'industriel forain, et ce même s'ils ont des ressources ou prétendent exercer une profession. Tous doivent détenir un carnet anthropométrique d'identité, visé par les autorités publiques à chaque arrivée ou départ d'une commune.
En 1971, date d'entrée en vigueur de la loi du 3 janvier 1969, les modalités de contrôle sont atténuées ; elles restent toutefois très discriminatoires et sont actuellement encore en vigueur.
Le carnet anthropométrique est remplacé par le carnet de circulation, destiné aux personnes sans domicile fixe ni résidence fixe n'exerçant pas une activité ambulante et ne disposant pas de ressources régulières. Ce carnet doit être visé tous les trois mois au commissariat, sous peine d'amendes variant de 5 000 francs à 20 000 francs.
Cette loi organise également le rattachement administratif sur une commune donnée, le nombre de personnes rattachées ne pouvant dépasser 3 % de la population municipale.
Depuis, la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions a permis aux personnes sans domicile fixe de se déclarer domiciliées dans un organisme d'accueil. Les gens du voyage espèrent légitimement que cette loi leur est applicable.
Hélas ! rien n'est moins sûr, et c'est peut-être sur ce point, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous pourrez nous rassurer. En effet, les interprétations du ministère de l'emploi et de la solidarité divergent de celles du ministère de l'intérieur. N'y-a-t-il pas là l'opportunité de faire bénéficier les gens du voyage des mêmes droits que leurs concitoyens ?
En votant notre amendement, mes chers collègues, vous abrogerez la loi de 1969, et les gens du voyage seront des citoyens de droit commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Nous avons, sur ce sujet, proposé à M. le secrétaire d'Etat d'engager une réflexion européenne concernant le livret de circulation.
Nous ne pouvons pas accepter l'amendement n° 51 dans la mesure où il tend à abroger la loi du 3 janvier 1969. Il n'est en effet pas possible de laisser les gens du voyage dans une situation d'instabilité juridique.
Nous souhaitons donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous confirmiez que vous allez engager une réflexion sur la modernisation des titres de circulation, qui ne sont plus adaptés à la situation actuelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement confirme à M. Foucaud ce qu'il a indiqué hier : ce projet de loi n'a pas pour ambition de répondre à toutes les préoccupations des gens du voyage. Il se limite à leur accueil.
Les autres questions relevant de la compétence d'autres ministères, je ne puis me prononcer à leur égard, mais il est préférable - et c'est ce point que je souhaiterais voir retenu par M. Foucaud - qu'un débat soit préalablement engagé au sein de la commission nationale consultative des gens du voyage, dont les membres ont été nommés au mois de décembre.
Cette commission abordera l'ensemble des problèmes posés par les gens du voyage, qui pourront s'exprimer devant elle, et, le dialogue s'instaurant avec l'ensemble des acteurs publics, des perspectives seront ouvertes avant d'envisager, éventuellement, des modifications législatives.
Au regard de ce processus, cet amendement est donc prématuré et le Gouvernement en souhaite le retrait ou, à défaut, le rejet.
M. le président. Monsieur Foucaud, maintenez-vous votre amendement ?
M. Thierry Foucaud. Les propos optimistes et positifs de M. le secrétaire d'Etat me permettent de retirer cet amendement : une discussion va s'engager et la situation pourra ainsi progresser rapidement.
M. le président. L'amendement n° 51 est retiré.

Article 7



M. le président.
« Art. 7. _ Le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Cette population est la population totale majorée, sauf disposition particulière, d'un habitant par résidence secondaire et d'un habitant par place de caravane située sur une aire d'accueil des gens du voyage satisfaisant aux normes techniques en vigueur, fixées par un décret en Conseil d'Etat. »
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 22, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
Par amendement n° 43, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent :
I. Dans le texte présenté par l'article 7 pour le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, de remplacer les mots : « d'un habitant par place de caravane » par les mots : « de quatre habitants par place de caravane ».
II. Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter l'article 7 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de la majoration de la population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
III. En conséquence, de faire précéder le début de l'article 7 de la mention : « I. ».
Par amendement n° 44, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans le texte présenté par l'article 7 pour le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « satisfaisant », d'insérer les mots : « à de bonnes conditions d'entretien et ».
Par amendement n° 74, le Gouvernement propose, dans le texte présenté par l'article 7 pour le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « satisfaisant », d'insérer les mots : « aux conditions de la convention de l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale et ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 22.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Compte tenu du rejet de l'amendement relatif à l'augmentation de l'aide forfaitaire, nous retirons cet amendement et nous apporterons notre soutien à l'amendement n° 43 de M. Peyronnet tendant à la prise en compte du nombre de places dans la DGF.
M. le président. L'amendement n° 22 est retiré.
La parole est à M. Peyronnet, pour présenter l'amendement n° 43.
M. Jean-Claude Peyronnet. S'agissant du nombre d'occupants par place, il nous semble que la référence à un occupant par place de caravane est une estimation très faible. Nous proposons donc de tenir compte de la statistique réelle d'occupation, qui est de quatre habitants en moyenne.
En majorant la population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement, nous alignerons le droit sur la réalité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je confirme l'avis favorable de la commission.
Je voudrais néanmoins attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat sur le nécessaire abondement de l'enveloppe globale de la DGF. En réalité, la proposition, que nous soutenons, tendant à retenir quatre habitants par place conduit, bien évidemment, à amputer les enveloppes de DSU et de DSR pour augmenter la DGF des communes sur le territoire desquelles seront réalisées des aires d'accueil. Il ne s'agit donc pas d'une aide supplémentaire de l'Etat, mais d'une aide de solidarité des collectivités locales entre elles.
Nous acceptons donc l'amendement n° 43, en souhaitant que le Gouvernement veuille bien abonder l'enveloppe de la DGF à la mesure de l'engagement financier des collectivités locales.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'interprétation de M. le rapporteur est exacte et le paragraphe II de l'amendement n° 43 est inutile : il s'agit non pas d'une perte de recettes, mais d'une répartition différente à l'intérieur de l'enveloppe globale de la dotation globale de fonctionnement.
N'ayant pas personnellement capacité à prendre un engagement sur l'abondement de la DGF dans son montant global, je ne peux qu'appeler l'attention du Sénat sur les conséquences qu'aurait le vote de cet amendement : aujourd'hui, le texte prévoit un habitant par place de caravane ; or on considère que les normes retenues pour définir un emplacement dans une aire d'accueil sont telles qu'il y a en principe trois caravanes par emplacement, ce qui signifie qu'un habitant par place de caravane correspond à trois habitants par emplacement dans les aires.
L'amendement prévoyant un quadruplement, cela entraînera bien évidemment un effet perturbateur à plus grande échelle dans les répartitions internes de la DGF. Le Gouvernement considère que ce n'est pas possible en l'état et il émet donc un avis défavorable.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis. Nous avons étudié longuement - M. Braye l'a souligné - la réalité quotidienne sur le terrain.
Les négociations et les discussions que nous avons engagées avec les associations représentatives ou avec les gens du voyage ont bien montré que tout le monde souhaitait que les collectivités qui vont réaliser les terrains d'accueil puissent prendre des dispositions matérielles pour qu'un emplacement ne puisse pas être utilisé par plusieurs caravanes.
Nous nous sommes engagés à tenir compte de ce souhait et à faire passer le message auprès des maîtres d'ouvrage et des maîtres d'oeuvre : un emplacement doit être affecté véritablement à une seule caravane.
Les collectivités locales ont donc la volonté de régler ce problème. Raison de plus pour prendre en compte la réalité quotidienne sur le terrain : le nombre moyen d'habitants par caravane est bien de quatre, voire de cinq.
M. le président. Monsieur Peyronnet, souhaitez-vous rectifier votre amendement en supprimant son paragraphe II, qui, semble-t-il, n'a pas plus lieu d'être ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Oui, monsieur le président.
Bien que n'étant pas un technicien de la finance, je crains qu'en proposant une augmentation de la DGF on ne tombe sous le coup de l'article 40. Mieux vaut donc, pour l'instant, en rester là ; nous verrons lors de la deuxième lecture.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 43 rectifié, présenté par M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans le texte proposé par l'article 7 pour le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales, à remplacer les mots : « d'un habitant par place de caravane » par les mots : « de quatre habitants par place de caravane ».
Quel est l'avis de la commission sur cet amendement ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission des lois, voulant éviter que la DGF, déjà fort complexe, ne le soit encore davantage, souhaitait qu'il y ait une aide forfaitaire, abondée par l'Etat, de 15 000 francs. Elle s'est vu opposer l'article 40.
La commission, qui soutient l'amendement, invite fermement le Gouvernement à réfléchir à l'abondement du dispositif, faute de quoi ce sont les collectivités locales qui continueront de financer la mesure, ce qui est sans doute un peu injuste.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 43 rectifié ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est toujours défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Peyronnet, pour défendre l'amendement n° 44.
M. Jean-Claude Peyronnet. C'est un amendement de précision, qui rejoint un amendement que j'ai déjà présenté à l'article 6.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° 74 et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 44.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 74 semble plus heureux au Gouvernement, dans la mesure où il renvoie aux conditions de la convention prévue à l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale, tel que proposé à l'article 5, que la Haute Assemblée vient d'adopter. Mais nous nous rejoignons tout à fait sur l'objectif !
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 44 et 74 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 44 et elle s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 74, qu'elle n'a pas pu examiner.
M. le président. L'amendement n° 44 est-il maintenu, monsieur Peyronnet ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 44 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74, pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. _ Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
« 1° Au 2° de l'article L. 111-1-2, après les mots : "Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs,", sont insérés les mots : "à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage," ;
« 2° Au premier alinéa de l'article L. 121-10, après les mots : "la satisfaction des besoins présents et futurs en matière d'habitat", sont ajoutés les mots : ", y compris ceux des gens du voyage" ;
« 3° Le chapitre III du titre IV du livre IV est complété par un article L. 443-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 443-3 . _ Des terrains bâtis ou non bâtis peuvent être aménagés afin de permettre l'installation de caravanes constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. L'autorisation d'aménagement est délivrée dans les formes, conditions et délais définis par le décret en Conseil d'Etat mentionné à l'article L. 443-1. »
Par amendement n° 23, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le début du texte présenté par le 3° de cet article pour insérer l'article L. 443-3 du code de l'urbanisme :
« Sans préjudice des règles générales et des servitudes d'utilisation des sols fixées par le plan d'occupation des sols ou, en l'absence de plan d'occupation des sols ou de document en tenant lieu, des règles générales d'urbanisme, des terrains peuvent être aménagés... »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement traduit la volonté d'intégrer dans les schémas départementaux, dans l'offre des places sur les terrains d'accueil, les terrains familiaux, en prenant en compte l'argument que nous avait opposé M. le secrétaire d'Etat, c'est-à-dire en faisant en sorte que l'utilisation de ces terrains familiaux ne serve pas d'excuse pour tenter de se soustraire à l'obligation de réaliser un certain nombre de places.
Les gens du voyage nous ont clairement indiqué que, dans certains départements, l'offre de places des terrains familiaux représentait quasiment 50 % des besoins et qu'il fallait en tenir compte, obligation étant faite, bien sûr, de respecter les règles d'urbanisme.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable. Non seulement cette disposition ne serait pas utile, mais elle semble même poser problème.
En effet, les autorisations prévues à l'article L. 443-3, comme d'ailleurs celles qui sont prévues à l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme, doivent respecter les règles d'urbanisme en vigueur et applicables à tout le monde, qu'il s'agisse de POS, de carte communale ou même du règlement national d'urbanisme.
Le préciser à l'article L. 443-3 introduirait un a contrario qui pourrait être très dommageable. Il ne faudrait pas, en effet, qu'un doute s'établisse sur le fait que les autorisations mentionnées à l'article L. 443-1 doivent respecter les règles d'urbanisme.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, ainsi modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. _ I. _ Dès lors qu'une commune respecte les obligations qui lui incombent en application du schéma départemental prévu à l'article 1er de la présente loi, son maire ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er. Ces dispositions sont également applicables aux communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil, ainsi qu'à celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d'une telle aire.
« II. _ En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I, y compris sur le domaine public, le maire peut, par voie d'assignation délivrée aux occupants et, le cas échéant, au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance pour voir ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la présente loi à défaut de quitter le territoire communal et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au seul vu de la minute.
« III. _ Supprimé .
« IV. _ Les dispositions du I et du II ci-dessus ne sont pas applicables au stationnement des résidences mobiles appartenant aux personnes mentionnées à l'article 1er de la présente loi :
« 1° Lorsque ces personnes sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent ;
« 2° Lorsqu'elles disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ;
« 3° Lorsqu'elles stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L. 443-3 du code de l'urbanisme. »
Sur l'article, la parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. L'article 9, qui est important, fait l'objet de deux propositions de rédaction différentes : l'une émane de la commission des lois - c'est l'amendement n° 25 - l'autre du Gouvernement - c'est l'amendement n° 68.
Si je m'exprime maintenant, c'est parce que j'ai déposé toute une série de sous-amendements qui, moyennant une rédaction adaptée, s'appliquent respectivement à l'un et à l'autre de ces amendements et que je souhaite signaler très rapidement leur contenu au Sénat pour ne pas avoir à y revenir ensuite.
En réalité, j'aimerais qu'à l'occasion de l'examen de ce texte nous puissions régler trois problèmes.
Premièrement, quelles que soient, mes chers collègues, les procédures envisagées, qu'on saisisse le juge judiciaire ou le juge administratif par la voie du référé, il faut savoir que, dans la plupart des cas, il est très difficile d'obtenir une décision du juge, d'abord dans des délais rapides et même, de façon générale, pour la raison très simple que les identités des intéressés ne sont pas connues, parce que les deux ou trois gendarmes du coin ont généralement peur de pénétrer dans un campement de gens du voyage sur leurs gardes, voire hostiles, pour aller relever les identités et que, de toute façon, s'ils le font, on leur dit que telle caravane est fermée, que telle autre appartient à on ne sait qui, etc.
Si donc nous ne précisons pas dans la loi que, dans ce cas, les mesures prises par le juge sont des mesures collectives qui visent toutes les caravanes en stationnement, sans retenir le nom de leur propriétaire - sinon on n'en sortira pas ! - nous perdons notre temps.
MM. Louis Moinard et François Trucy. Tout à fait !
M. Michel Charasse. C'est l'objet de la première série de mes sous-amendements, qu'ils s'appliquent à l'amendement n° 25 ou à l'amendement n° 68.
Deuxièmement, la même observation vaut pour l'astreinte. On dit « sous astreinte ». Mais si l'on n'a pas l'identité ? Il faut donc convenir que, dans ce cas, on se contente de relever l'immatriculation des véhicules, on voit, à partir de cette immatriculation, si l'on peut trouver le propriétaire et on facture l'astreinte à ceux que l'on pourra trouver.
Troisièmement, lorsque le maire prend des dispositions tendant, en particulier, à ordonner une expulsion pour des raisons de tranquillité publique, d'ordre sanitaire, de salubrité, etc., bref parce qu'il y a un danger qu'il a l'obligation de faire cesser, nous savons tous que, dans la généralité des cas, il n'a pas les moyens d'appliquer son propre arrêté et qu'il se tourne alors vers le préfet en demandant le concours de la force publique.
Généralement, le préfet demande si l'affaire est connue à l'extérieur, s'il y aura sur place la télévision, la radio, les journaux, la presse, les associations les plus diverses, etc. Comme, généralement, tout ce monde est là, le préfet sait qu'il ne sera pas couvert par Paris, et il n'envoie donc pas la force publique, si bien que la mesure prise par le maire n'est pas appliquée.
Seulement, ce qu'il faut savoir, c'est que la responsabilité du maire demeure : ainsi, s'il ne peut pas être mis un terme à une occupation illégale et que, au cours de cette occupation illégale, pour des raisons sanitaires, se développe, par exemple, une parasitose qui touche trente ou quarante gamins qu'il faut hospitaliser d'urgence, c'est le maire qui est responsable pénalement.
Voilà pourquoi je propose d'écrire tout simplement que, si le préfet ne fournit pas le concours de la force publique, la responsabilité pénale et civile est transférée automatiquement au préfet. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.) Ainsi les choses auront au moins l'avantage d'être claires.
Et pourquoi dis-je cela, ravi que ce soit notre collègue Jean-Paul Delevoye qui soit rapporteur ? Parce que, théoriquement, si l'on applique l'article 121-3 du code pénal, c'est-à-dire ce que l'on appelle la « loi Delevoye » le maire n'est pas responsable. Mais nous savons tous - M. le président de la commission des lois, présent au banc de la commission, il y a quelques jours, lors de l'examen du texte sur la responsabilité pénale des décideurs publics, a été obligé d'en convenir, ainsi que le rapporteur, M. Fauchon - nous savons tous, dis-je, que la justice refuse d'appliquer ce texte. Donc, les maires ne sont pas couverts.
Par conséquent, il est beaucoup plus simple de dire que, puisque la mesure du maire ne peut pas être exécutée parce que le préfet ne lui en donne pas les moyens, eh bien ! la responsabilité civile et pénale et assumée par le préfet.
MM. Dominique Braye et François Trucy. Très bien !
M. Michel Charasse. Voilà, j'ai présenté en bloc les sous-amendemens aux deux amendements et je n'y reviendrai pas, monsieur le président.
M. le président. Sur l'article 9, je suis saisi de treize amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune mais que, pour la clarté du débat, j'appellerai successivement.
Par amendement n° 68, le Gouvernement propose de rédiger ainsi l'article 9 :
« I. - Dès lors qu'une commune respecte les obligations qui lui incombent en application du schéma départemental prévu à l'article 1er de la présente loi, son maire ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er. Ces dispositions sont également applicables aux communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil, ainsi qu'à celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d'une telle aire.
« II. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I ci-dessus sur un terrain n'appartenant pas au domaine public, le maire peut, par voie d'assignation délivrée aux occupants ainsi qu'au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance pour voir ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la présente loi, à défaut de quitter le territoire communal et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au seul vu de la minute. Si le cas requiert célérité, il fait application des dispositions du second alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure civile.
« III. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I ci-dessus sur un terrain appartenant au domaine public, le juge administratif peut prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la présente loi, à défaut de quitter le territoire communal et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des référés.
« IV. - Les dispositions du I et du II ci-dessus ne sont pas applicables au stationnement des résidences mobiles appartenant aux personnes mentionnées à l'article 1er de la présente loi :
« 1° Lorsque ces personnes sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent ;
« 2° Lorsqu'elles disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ;
« 3° Lorsqu'elles stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L. 433-3 du code de l'urbanisme. »
Cet amendement est assorti de quatre sous-amendements présentés par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 75 tend, après les mots : « le maire peut », à rédiger comme suit la fin du premier alinéa du II de l'amendement n° 68 : « saisir le président du tribunal de grande instance pour voir ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles. Le maire agit par voie d'assignation délivrée au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un droit réel d'usage. Cette assignation est également délivrée à ceux des occupants dont l'identité est connue et elle est valable pour l'ensemble des résidences mobiles concernées. Le président du tribunal doit statuer dans les vingt-quatre heures de sa saisine par le maire. »
Le sous-amendement n° 76 a pour objet, au début du deuxième alinéa du II de l'amendement n° 68, de remplacer les mots : « Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, » par les mots : « même si le terrain n'appartient pas à la commune, ».
Le sous-amendement n° 77 vise à rédiger comme suit le début de la première phrase du dernier alinéa du II de l'amendement n° 68 :
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, individuellement ou collectivement si les identités ne sont pas connues ou ne le seraient qu'après un délai dépassant vingt-quatre heures, le cas échéant sous astreinte, dont le recouvrement est poursuivi en fonction des éléments recueillis à partir des numéros d'immatriculation des véhicules, de rejoindre... »
Le sous-amendement n° 78 tend à insérer après le III de l'amendement n° 68, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Lorsque le maire agit, en ce qui concerne les propriétés privées ou les propriétés publiques, en matière d'atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique, il peut demander au représentant de l'Etat de mettre en oeuvre la force publique en vue d'exécuter les mesures qu'il a prises. Si le représentant de l'Etat n'a pas donné suite à cette demande dans les vingt-quatre heures de sa transmission par tout moyen ou si elle a été déclarée illégale par le président du tribunal administratif pendant le même délai, la responsabilité civile et pénale du maire ne peut être recherchée et seule est engagée la responsabilité du représentant de l'Etat. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° 68.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je rappelle à M. Charasse, qui est intervenu sur l'ensemble de l'article, que, lorsque l'Etat, représenté par le préfet, n'applique pas une décision de justice ou n'aide pas à son application, la responsabilité lui est automatiquement transférée. C'est le cas, par exemple, pour les refus de concours de la force publique pour l'exécution de jugements d'expulsion de logements.
M. Michel Charasse. Monsieur le secrétaire d'Etat, je parlais des mesures administratives et non pas de l'exécution des décisions de justice ! Je visais, par exemple, l'arrêté pris par le maire en urgence en raison d'un problème sanitaire grave.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Si le maire prend cet arrêté, c'est qu'il aura été mis en échec dans la procédure d'expulsion qu'il aura demandée.
M. Michel Charasse. Non !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je le répète, si c'est un jugement qui décide de cette expulsion, le transfert de responsabilité est automatique.
M. Michel Charasse. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le secrétaire d'Etat ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je vous en prie.
M. le président. La parole est à M. Charasse, avec l'autorisation de M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Charasse. Monsieur le secrétaire d'Etat, cher ami, il y a deux procédures différentes.
Soit une « invasion » subite d'un terrain qui n'est pas fait pour cela, avec des problèmes sanitaires absolument terribles. Dans ce cas, vous devez, comme maire, faire cesser le danger, et vous le faites par arrêté en ordonnant une mesure administrative d'expulsion qui n'a pas à être vue par le juge : c'est la mesure d'expulsion administrative. Et c'est dans ce cas-là que nous sommes conduits, nous, les maires, à demander le concours de la force publique, et c'est dans ce cas-là qu'on nous le refuse !
S'il y a un jugement, s'il y a une ordonnance du juge en référé ou autre, il est vrai que votre raisonnement s'applique, monsieur le secrétaire d'Etat. Dans ce cas, il n'y a pas de problème.
Mais, moi, je vise les mesures administratives d'urgence visant à faire cesser un danger, et là, cher ami, nous ne sommes, malheureusement, ni aidés ni couverts.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Au travers de l'amendement n° 68, le Gouvernement souhaite rétablir la distinction, supprimée par l'Assemblée nationale, entre le recours au juge administratif et le recours au juge judiciaire, en fonction de la nature du terrain concerné.
Cet amendement vise également à intégrer une référence au second alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure civile et à bien expliciter - c'est l'objet du paragraphe IV - les cas dans lesquels les dispositions des paragraphes I et II ne sont pas applicables.
Cet amendement ne reprend pas la proposition de la commission visant à codifier ces dispositions dans le code général des collectivités territoriales. En effet, pour des raisons de cohérence des textes, le Gouvernement estime préférable de les maintenir dans le projet de loi lui-même. Ces dispositions, si elles devaient être codifiées, devraient l'être non pas dans le code général des collectivités territoriales, mais dans le code des tribunaux administratifs et dans le code de procédure civile. Ce dernier code ne contient que des dispositions de nature réglementaire et ne peut intégrer des dispositions législatives. C'est en tout cas ce que nous retenons de l'avis du Conseil d'Etat, qui est très attentif à ces questions, et qui serait interrogé puisque, lors de l'examen de ce projet de loi sur la codification de ces dispositions, il ne l'avait pas estimé possible.
Telle est, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la réflexion qui a conduit le Gouvernement à déposer cet amendement.
S'agissant de l'article proprement dit, je me permets de vous renvoyer aux propos que j'ai tenus hier quant au rôle de l'Etat dans les limites des principes constitutionnels qu'il doit respecter. Je les rappellerai brièvement, ce qui m'évitera d'y revenir lorsque je donnerai l'avis du Gouvernement sur les différents sous-amendements et amendements qui ont été déposés sur l'article 9.
Je l'ai déjà indiqué hier, je le confirme aujourd'hui, la liberté d'aller et de venir est reconnue par la Constitution. L'arrêt du Conseil d'Etat du 2 décembre 1983, « Ville de Lille », a expressément confirmé ce principe pour les gens du voyage. Vouloir empêcher le stationnement des gens du voyage sur le territoire d'une commune serait une atteinte à une liberté constitutionnelle.
L'objet de ce projet de loi est précisément d'empêcher le stationnement sauvage et irrégulier, source à la fois de nombreuses difficultés avec les populations et de nombreux contentieux. Ce projet de loi organise ce stationnement dans des aires aménagées et adaptées aux besoins.
Certes, personne n'est angélique ou naïf - je tiens à rassurer M. Braye. Les membres du Gouvernement qui suivent ce texte sont aussi des élus locaux, et ont été à ce titre confrontés à ces difficultés. J'observe cependant - les statistiques le démontrent - que le nombre des occupations illégales décroît à proportion des capacités d'accueil. C'est donc bien par la multiplication du nombre des places aménagées que la loi entraînera la diminution des occupations illégales.
J'ai bien entendu dans la discussion générale, et je risque de l'entendre à nouveau à l'occasion de la défense de certains amendements, que plusieurs sénateurs doutent de la capacité de l'Etat à mettre en oeuvre des dispositifs pour lutter contre ces occupations illégales.
Je voudrais rappeler les modalités pratiques qui témoignent de la détermination du Gouvernement à se donner les moyens de parvenir à mieux maîtriser les occupations illégales, au terme d'une période maximum de quatre ans, au cours de laquelle l'effort aura été accompli pour créer ces 30 000 places.
D'abord, il y aura l'intervention du juge préalablement à une expulsion. C'est une garantie fondamentale, que personne ne peut remettre en cause - ce serait inconstitutionnel - sauf sous la seule réserve consacrée par la jurisprudence des cas d'urgence caractérisés.
Le projet de loi prévoit une intervention rapide du juge. Ce dernier peut être saisi par le maire, c'est là une nouveauté importante, alors même que le terrain irrégulièrement occupé peut être un terrain privé. Le juge statuant en la forme du référé - c'est la procédure civile la plus rapide - sa décision est exécutoire par provision, c'est-à-dire sans attendre l'expiration des délais d'appel. L'exécution peut avoir lieu au seul vu de la minute, ce qui évite la procédure de signification du jugement et donc les frais qui lui sont liés.
Le Gouvernement reprend à son compte dans l'amendement qu'il vous propose la proposition de votre commission des lois tendant à rappeler que le référé d'heure à heure est possible, ce qui signifie que le maire peut obtenir une décision - je le dis à l'intention de M. Charasse - dans la journée, aux termes du texte qui vous est proposé dans l'amendement n° 68.
Par ailleurs, pour expliciter cette détermination du Gouvernement à faire respecter la loi, le garde des sceaux prendra, à destination des juridictions, une circulaire sur l'application de ces dispositions. La chancellerie m'en a donné l'assurance.
M. Michel Charasse. On sait que ce sont des amis des élus !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Quant à la mise en oeuvre effective des décisions d'expulsion, les préfets sont tenus de prêter le concours de la force publique à leur exécution. C'est ce que rappelle l'article 16 de la loi du 16 juillet 1991 sur les procédures civiles d'exécution. Vous comprendrez cependant qu'il est impossible d'inscrire dans la loi le caractère systématique de ce concours, puisque le principe de la séparation des pouvoirs a toujours conduit à laisser le préfet apprécier le risque pour l'ordre public que pourrait entraîner l'exécution par la force d'une décision d'expulsion.
M. Michel Charasse. Mais ils ne le font pas !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. C'est un principe consacré par la jurisprudence de longue date, mais il est clair que, dès lors que le concours de la force publique n'a pas été accepté, le transfert de responsabilités intervient.
En matière d'occupation illégale de terrains par les gens du voyage, le ministre de l'intérieur m'a donné l'assurance que les préfets seraient particulièrement sensibilisés aux dispositions de la loi, et il va sans dire que, dans les communes disposant d'une aire d'accueil répondant aux prescriptions du schéma départemental, tout sera mis en oeuvre pour exécuter l'expulsion ordonnée par le juge.
Le représentant du ministère de l'intérieur me confirme que, même dans le cas évoqué par M. Charasse, le refus de concours de la force publique pour faire appliquer un arrêté pris en urgence par le maire engage la responsabilité de l'Etat. Vous pouvez donc être convaincu, monsieur le sénateur, que votre sous-amendement est, dans les faits, satisfait.
M. Michel Charasse. Dans toutes ses conséquences ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les engagements que je pouvais explicitement prendre et formuler en réponse à vos interventions. Vous y trouverez, sinon la conviction d'une perfection désormais possible dans la gestion d'un texte aussi complexe, du moins l'assurance que vous avez été attentivement écoutés.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Monsieur le secrétaire d'Etat, la responsabilité de l'Etat en cas de refus du concours de la force publique est une responsabilité pécuniaire, c'est-à-dire que, s'il y a dommage et si, du fait du non-engagement de la force publique, celui qui l'a demandé subit un préjudice personnel, l'Etat doit le dédommager après un procès qui dure de deux à trois ans. L'engagement de la responsabilité de l'Etat doit être très clairement compris.
M. Michel Charasse. Ce n'est pas une responsabilité pénale !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes là au coeur de ce qui fait la crédibilité de votre texte. J'ai cru comprendre que les sous-amendements de M. Charasse s'appliquaient à votre amendement n° 68 ou à celui de la commission.
Ce que vient de dire M. le président de la commission des lois est tout à fait fondamental. Les élus locaux attendent non pas un transfert de responsabilités de leurs épaules sur celles de l'Etat sur le plan pécuniaire, mais une obligation de résultat des mesures d'expulsion lorsqu'il y a occupation illégale de terrains...
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. ... et un transfert de responsabilité pénale.
M. Dominique Braye. C'est le coeur du problème !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il faudra donc, à travers les différents amendements, examiner cette obligation de résultat imposée au représentant de l'Etat. L'inquiétude est née du fait qu'un certain nombre de maires et certains représentants du corps préfectoral nous ont dit qu'une brigade de gendarmerie cantonale ne pouvait pas procéder à l'expulsion de cinq cents caravanes. On voit bien qu'il y a là une obligation très claire de l'Etat quant à la mise en conformité des moyens nécessaires à l'application de la loi. Il ne s'agit pas d'un transfert de responsabilité financière.
Je vous donne acte, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre bonne volonté car, homme de terrain pragmatique, vous comprenez bien que toute la crédibilité de votre texte repose sur l'incitation des élus à offrir des aires d'accueil en contrepartie de quoi la population sera assurée qu'en cas d'occupation illégale les mesures d'expulsion vers les aires d'accueil seront immédiatement exécutées.
J'ai bien entendu les propos tenus par M. Charasse et par M. le président de la commission des lois. Il faut engager une réflexion sur l'obligation de résultat. Par exemple, l'Etat, en cas d'expulsion de locataires pour impayés, n'assume pas ses responsabilités en raison de pressions médiatiques. Il préfère en supporter les conséquences financières plutôt que d'appliquer la décision qui lui est demandée.
Il faut donc engager un débat sur le transfert de responsabilité et sur les moyens mis en oeuvre pour procéder à l'expulsion quand il y a occupation illégale des terrains. Je souhaite que ce débat soit l'occasion pour le Gouvernement de prendre des engagements fermes s'agissant de cette obligation de résultat. Les élus locaux les attendent pour accorder du crédit à ce texte.
M. le président. M. Charasse a déjà défendu ses sous-amendements n°s 75, 76, 77 et 78.
Par amendement n° 24 rectifié, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le paragraphe I de l'article 9 :
« I. - La section I du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un article L. 2213-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-6-1. - Dès qu'une commune respecte l'obligation qui lui incombe en application du schéma départemental, prévu à l'article 1er de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, de réaliser une aire d'accueil, le maire ou, à Paris, le préfet de police, peut, par arrêté, interdire le stationnement sur le territoire de la commune, en dehors des aires d'accueil aménagées, des résidences mobiles mentionnées au même article.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables aux communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil, ainsi qu'à celles qui décident, sans y être tenues de contribuer au financement d'une telle aire.
« Elles ne sont pas applicables au stationnement des résidences mobiles appartenant à des gens du voyage, lorsque ceux-ci sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent, lorsqu'ils disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ou qu'ils stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L. 443-3 dudit code. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Pourquoi la commission a-t-elle déposé cet amendement ?
L'amendement du Gouvernement retient certes deux propositions de la commission des lois, à savoir le rétablissement de la compétence du juge administratif, supprimé par l'Assemblée nationale, et le référé d'heure à heure. Ce sont là deux avancées importantes. Mais, contrairement à M. le secrétaire d'Etat, la commission souhaite que la codification de la procédure, qui intéresse directement les communes, figure dans le code général des collectivités territoriales.
Par ailleurs, le texte proposé par le Gouvernement ne permet au maire de prendre un arrêté d'interdiction que si l'ensemble des obligations prévues au schéma sont mises en oeuvre. Or, la commission souhaite confirmer le droit actuel qui permet au maire de prendre un arrêté dès que l'aire d'accueil est réalisée, ce qui fonde le pouvoir du maire sur un critère objectif.
C'est la raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable sur l'amendement n° 68 du Gouvernement.
M. le président. Par amendement n° 45, M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la seconde phrase du I de l'article 9, après les mots : « aire d'accueil », d'insérer les mots : « satisfaisant aux normes techniques en vigueur, fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu au deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales ».
La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le président, je transforme cet amendement en un sous-amendement à l'amendement n° 68 du Gouvernement.
Il concerne le cas des communes qui ne sont pas inscrites au schéma départemental et qui, malgré tout, bénéficient des pouvoirs dévolus aux maires pour interdire le stationnement en dehors des aires aménagées. Il me semble vraiment indispensable de préciser que ces aires qui ne sont pas inscrites au schéma satisfassent aux normes techniques en vigueur car, si tel n'était pas le cas, les aires pourraient être trop sommairement aménagées.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 45 rectifié, présenté par M. Peyronnet et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant, dans la seconde phrase du I du texte présenté par l'amendement n° 68, après les mots : « aire d'accueil », à insérer les mots : « satisfaisant aux normes techniques en vigueur, fixées par le décret en Conseil d'Etat prévu au deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des collectivités territoriales ».
Par amendement n° 25 rectifié, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le II de l'article 9 :
« II. - La section I du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un article L. 2213-6-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-6-2. - I. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu à l'article L. 2213-6-1 sur un terrain n'appartenant pas au domaine public, le maire peut, par voie d'assignation délivrée aux occupants ainsi qu'au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance aux fins de faire ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publiques.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, à défaut de quitter le territoire communal, et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au vu de la seule minute. Si le cas requiert célérité, il fait application des dispositions du second alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure civile.
« II. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu à l'article L. 2213-6-1 sur un terrain appartenant au domaine public, le juge administratif peut prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, à défaut de quitter le territoire communal, et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des référés.
« III. - Les dispositions du I ne sont pas applicables au stationnement des résidences mobiles appartenant à des gens du voyage, lorsque ceux-ci sont propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent, lorsqu'ils disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ou qu'ils stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L. 443-3 dudit code. »
Cet amendement est assorti de cinq sous-amendements.
Les deux premiers sont présentés par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 69 a pour objet, au début du deuxième alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales, de remplacer les mots : « Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, » par les mots : « Même si le terrain n'appartient pas à la commune, ».
Le sous-amendement n° 70 tend à compléter le deuxième alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales par les dispositions suivantes :
« Lorsque le maire agit, en ce qui concerne les propriétés privées ou les propriétés publiques, en matière d'atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquilité publique, il peut demander au représentant de l'Etat de mettre en oeuvre la force publique en vue d'exécuter les mesures qu'il a prises. Si le représentant de l'Etat n'a pas donné suite à cette demande dans les vingt-quatre heures de sa transmission par tout moyen ou si elle a été déclarée illégale par le président du tribunal administratif pendant le même délai, la responsabilité civile et pénale du maire ne peut être recherchée et seule est engagée la responsabilité du représentant de l'Etat. »
Le sous-amendement n° 30 est présenté par M. About.
Il vise, après le deuxième alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, en cas d'urgence, et lorsque la présence de ces résidences mobiles est de nature à porter atteinte à l'activité économique d'un bien à usage industriel, commercial ou professionnel, ou de la zone économique environnante, le maire peut solliciter l'intervention du préfet qui prononce l'expulsion et au besoin en assure l'exécution forcée. »
Les deux sous-amendements suivants sont présentés par M. Charasse.
Le sous-amendement n° 71 est ainsi redigé :
I. - Dans la première phrase du troisième alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, » insérer les mots : « individuellement ou collectivement si les identités ne sont pas connues ou ne le seraient qu'après un délai dépassant vingt-quatre heures ; ».
II. - Dans la première phrase du troisième alinéa du I dudit texte, après les mots : « le cas échéant sous astreinte, » ajouter les mots : « dont le recouvrement est poursuivi en fonction des éléments recueillis à partir des numéros d'immatriculation des véhicules, ».
Le sous-amendement n° 72 tend, au II du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales, à remplacer les mots : « aux occupants, le cas échéant sous astreinte, » par les mots suivants : « aux occupants, individuellement ou collectivement si les identités ne sont pas connues ou ne le seraient qu'après un délai dépassant vingt-quatre heures, le cas échéant sous astreinte dont le recouvrement est poursuivi en fonction des éléments recueillis à partir des numéros d'immatriculation des véhicules ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 25 rectifié.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Par cet amendement, nous rétablissons la procédure spécifique devant le juge administratif en ce qui concerne l'occupation du domaine public.
M. le président. M. Charasse a présenté ses sous-amendements n°s 69, 70, 71 et 72.
Je suis maintenant saisi de cinq amendements.
Par amendement n° 31, MM. Darniche et Braye proposent, après le premier alinéa du II de l'article 9, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans l'attente de la décision du juge, le maire, ou, à Paris, le préfet de police, peut faire procéder à l'immobilisation ou à la mise en fourrière des véhicules tracteurs de résidences mobiles. »
Par amendement n° 32, MM. Darniche et Adnot proposent de compléter la deuxième phrase du dernier alinéa du II de l'article 9 par les mots : « dans un délai de vingt-quatre heures ».
Par amendement n° 33, MM. Darniche et Adnot proposent, après la deuxième phrase du dernier alinéa du II de l'article 9, d'insérer une phrase ainsi rédigée : « Le préfet à l'obligation de faire exécuter la décision judiciaire. »
Par amendement n° 34, MM. Darniche et Braye proposent, dans la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article 9, après les mots : « l'exécution » d'insérer le mot : « immédiate ».
Enfin, par amendement n° 35, M. Darniche propose d'insérer, après le III de l'article 9, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Le fait, par le propriétaire du terrain ou de toute autre personne en ayant la jouissance, ou par le propriétaire d'une caravane ou celui qui en a l'usage, de laisser stationner une caravane, en violation d'un arrêté interdisant le stationnement des caravanes en dehors des terrains aménagés à cet effet, pris en application de l'article 28, alinéa 3, de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. »
La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Ces amendements visent à renforcer, comme l'a indiqué M. le rapporteur lors de la discussion générale, les pouvoirs des maires et du préfet en matière de procédure d'expulsion.
S'agissant de l'amendement n° 31 la Constitution protège strictement le domicile ; il faut introduire dans la loi la distinction entre la caravane, qui est le domicile des gens du voyage, et le tracteur, qui est un véhicule comme un autre.
Quand n'importe quel citoyen se gare en stationnement interdit, les maires peuvent prendre des sanctions immédiates, y compris poser un sabot et demander la mise en fourrière.
Ces sanctions devraient également s'appliquer aux tracteurs, afin d'aligner les gens du voyage sur le droit commun pour les infractions aux règles de stationnement. Cela permettrait de remédier à une inégalité manifeste et, surtout, de ne pas dispenser le contrevenant de toute sanction entre le constat du stationnement illégal et la décision du juge.
Cet amendement, qui ne légalise aucunement la voie de fait, vise à appliquer un début de sanction, tout en renforçant les attributions de l'autorité administrative, dès lors que les gens du voyage illégalement stationnés ne désirant pas quitter les lieux voient leurs véhicules mis en fourrière.
Par expérience, les maires savent que la caravane reste souvent sur le terrain illégalement occupé, mais que le véhicule continue à circuler et y revient à toute heure du jour ou de la nuit.
L'amendement n° 32 vise à raccourcir le délai d'obtention du référé. Alors même que la procédure d'expulsion n'est pas aisée, il faut pouvoir trouver une solution efficace. Or, dans les faits, l'obtention d'un référé n'est pas chose aisée.
Sans abuser de mon temps de parole, je souhaite en rappeler les étapes.
Première étape : le propriétaire d'un terrain, qui peut être le maire représentant la commune, fait appel à un huissier territorialement compétent ; deuxième étape : l'huissier se rend sur place pour procéder au constat ; troisième étape : l'huissier relève les numéros des plaques minéralogiques des véhicules et des caravanes ; quatrième étape : il remet son constat à un avocat ; cinquième étape : l'avocat rédige un mémoire et le projet d'ordonnance sur requête, et ce jusqu'à une quatorzième étape au cours de laquelle la force publique assiste, éventuellement, l'huissier dans l'exécution de l'ordonnance.
Rappelons que, pour la commune, c'est entre 6 000 et 10 000 francs de dépenses. Pour le maire, c'est toute une série de déplacements, au tribunal et au chef-lieu, le tout pour un résultat très aléatoire.
Or cet amendement qui impose une réduction des délais d'obtention du délibéré de vingt-quatre heures aux juridictions - vise en conséquence à gagner du temps en réduisant ces délais et à donner une possibilité d'intervention plus rapide.
Même si nous savons tous qu'aucune sanction procédurale n'est envisageable, le fait de retenir ce symbolique délai de vingt-quatre heures est réaliste et n'engorge ni ne paralyse les juridictions compétentes.
L'amendement n° 33, qui a déjà fait l'objet d'un débat, tout à l'heure, vise à donner au préfet l'obligation de faire exécuter la décision judiciaire.
Le juge peut prescrire aux occupants de quitter le territoire communal et ordonner l'expulsion de tout terrain qui serait occupé en violation de l'injonction ou illégalement. Statuant sous forme de référé, la décision du juge est exécutoire à titre provisoire et, en cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution ait lieu au seul vu de la minute. Si l'exécution n'est pas réalisée, c'est alors au préfet que revient l'obligation de faire exécuter la décision judiciaire d'expulsion, certains de mes collègues l'ont fort bien exprimé tout à l'heure.
L'amendement n° 34 suit l'esprit de l'amendement n° 33 et le complète.
Quant à l'amendement n° 35 que j'ai déposé à titre personnel, il vise à réhausser le niveau de la sanction du stationnement irrégulier des caravanes pour en faire une contravention de quatrième classe. En effet, les contraventions sont actuellement de l'ordre de 200 francs au maximum et ne sont donc pas dissuasives.
Il faut faire en sorte que l'action publique, là où elle s'exerce, puisse être respectée. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé que l'on alourdisse les sanctions financières.
M. le président. Monsieur About, je suis impardonnable ! Comment ai-je pu ne pas voir que vous aviez déposé un sous-amendement n° 30 à l'amendement n° 25 rectifié ? Je vous donne la parole pour le défendre.
M. Nicolas About. Les amendements de notre collègue M. Charasse ont dû phagocyter mon sous-amendement ! (Sourires.)
Ce sous-amendement n° 30 est, lui aussi, au coeur des problèmes que nous rencontrons dans nos communes et au coeur du dispositif dont nous débattons ce matin.
J'estime que, « en cas d'urgence, et lorsque la présence de ces résidences mobiles est de nature à porter atteinte à l'activité économique d'un bien à usage industriel, commercial ou professionnel, ou de la zone économique environnante, le maire - et, là, je rectifie mon sous-amendement en précisant qu'il doit être saisi par le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage du terrain - peut solliciter l'intervention du préfet qui prononce l'expulsion et au besoin en assure l'exécution forcée ».
En cas d'urgence, l'exécution d'office doit pouvoir être déclenchée par le préfet. Certaines entreprises peuvent, en effet, du fait de ces occupations illégales, voir leur survie économique menacée. La perte de clients induite par la présence de ces caravanes, la difficulté pour les salariés d'accéder à leur lieu de travail, l'impossibilité pour les transporteurs...
M. Gérard Larcher. Et pour les pompiers !
M. Nicolas About. ... d'apporter les matières premières ou d'acheminer les produits finis, enfin, le risque, considérable et bien réel de destruction des bâtiments et de leurs abords ont des conséquences suffisamment graves pour justifier une intervention préfectorale efficace et sans délai. Je considère d'ailleurs que le rejet de ce sous-amendement pourrait modifier notre position lorsque l'article 1er sera à nouveau voté.
Je rappelle que je modifie ce sous-amendement en ajoutant, après les mots : « le maire », les mots : « saisi par le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain, » pour ne pas tomber sous le coup de l'argument, que l'on nous a opposé en commission des lois et selon lequel seul le propriétaire peut demander le déclenchement de l'action.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 30 rectifié présenté par M. About et tendant, après le deuxième alinéa du I du texte proposé par l'amendement n° 25 rectifié pour l'article L. 2213-6-2 du code général des collectivités territoriales, à insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, en cas d'urgence, et lorsque la présence de ces résidences mobiles est de nature à porter atteinte à l'activité économique d'un bien à usage industriel, commercial ou professionnel, ou de la zone économique environnante, le maire, saisi par le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain, peut solliciter l'intervention du préfet qui prononce l'expulsion et au besoin en assure l'exécution forcée. »
Par amendement n° 26, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de supprimer le IV de l'article 9.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Par amendement n° 52, Mme Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger ainsi le deuxième alinéa (1°) du IV de l'article 9 :
« 1° Lorsque ces personnes ou leurs ayants droit sont propriétaires ou locataires de bonne foi du terrain sur lequel elles stationnent ; ».
La parole est à M. Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement a pour objet de protéger les gens du voyage qui occupent un terrain de façon licite des pouvoirs de police du maire.
J'ajouterai, pour expliquer la philosophie de notre groupe, que l'article 9 nous paraît équilibré et que je partage les propos tenus par M. le secrétaire d'Etat. Prenons garde, cependant, à ne pas donner au maire des pouvoirs de police trop étendus, ce qui risquerait de rompre l'équilibre que nous soutenons, les uns et les autres, dans les rapports des maires avec les gens du voyage qui résident de façon momentanée sur le territoire de leur commune.
M. le président. Par amendement n° 63, MM. Braye, Doublet, Gournac, Goulet, Larcher, Lassourd et Murat proposent de compléter l'article 9 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le préfet prononce à la demande du propriétaire d'un bien à usage professionnel l'expulsion des occupants entrés irrégulièrement lorsque leur présence porte atteinte à la poursuite de l'activité économique. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Cet amendement a le même objet que le sous-amendement n° 30 rectifié de notre collègue M. Nicolas About. Etant dans le même département, nous avons manifestement les mêmes problèmes.
Nous sommes bien obligés de constater que les chefs d'entreprise, les gérants d'activités commerciales et les maires nous saisissent de plus en plus souvent des conséquences de l'occupation sauvage de leurs installations, notamment en zone périurbaine, où les zones d'activités touchent très fréquemment des friches ou des zones agricoles qui offrent des surfaces tentantes à l'occupation sauvage.
Les chefs d'entreprise confrontés à ces occupations illégales doivent engager, comme l'a rappelé mon collègue M. Philippe Darniche, une procédure judiciaire longue, dix jours à un mois, et coûteuse - chez nous près de 12 000 francs avec le recours à un huissier et un avocat - dont ils supportent d'ailleurs le coût. Ils supportent donc seuls les conséquences d'une situation dont ils sont pourtant les premières victimes.
De ce fait, actuellement, ce sont les victimes que l'on taxe et les fauteurs de troubles que l'on protège !
Ces occupations illégales sont préjudiciables à l'activité économique parce qu'elles vont parfois jusqu'à entraîner des licenciements et des faillites. De toute façon, elles mettent en péril de manière inacceptable l'activité économique dans les zones où les élus et les chefs d'entreprise peinent souvent à maintenir l'activité.
J'ajoute que ces élus et ces chefs d'entreprise, mais aussi l'ensemble de nos concitoyens, ont de la peine à comprendre ce qu'ils perçoivent à tort ou à raison comme une véritable absence de réaction des pouvoirs publics.
La finalité de cet amendement est naturellement non pas de porter atteinte à la propriété privée en dessaisissant le juge judiciaire au profit des autorités administratives, mais au contraire de mieux la protéger, puisque la rapidité d'exécution est une garantie pour le chef d'entreprise et que cette intervention ne pourrait se faire qu'à la demande expresse du propriétaire.
M. le président. Par amendement n° 64, MM. Lassourd, Braye, Doublet, Gournac, Goulet, Gérard, Larcher et Murat proposent de compléter l'article 9 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le préfet prononce à la demande du maire, concernant les équipements ou installations sportives, culturelles ou de loisirs appartenant soit au domaine public, soit au domaine privé des collectivités, l'expulsion des occupants entrés irrégulièrement lorsque leur présence entrave la poursuite des activités correspondant à des services au public. »
La parole est à M. Braye. M. Dominique Braye. Il s'agit tout simplement ici de faire en sorte qu'en aucun cas l'accueil des gens du voyage ne puisse entraver la continuité d'un service public reconnu par la Constitution et donc que les installations sportives et de loisirs qui sont à la disposition de nos concitoyens ne puissent pas être immobilisées.
Comme l'a rappelé lui-même M. le secrétaire d'Etat, qui nous a fait part de l'une de ses expériences estivales, ces installations sportives sont parfois profondément détériorées, puisque les gens du voyage peuvent y stationner pendant une huitaine de jours, délai en général nécessaire pour pouvoir, par la procédure normale, leur demander de partir.
En permettant au préfet d'intervenir plus vite et directement, nous pourrons donc non seulement restituer plus rapidement aux utilisateurs ces équipements sportifs et rendre service à ces gens du voyage, qui, comme l'a rappelé M. le secrétaire d'Etat, détériorent quelquefois des installations parce qu'ils n'ont pas conscience du coût qu'engendreront les réparations. Les dégradations peuvent d'ailleurs résulter du simple fait de circuler ou de stationnner à certains emplacements.
C'est donc bien à la fois aux utilisateurs et aux gens du voyage que nous rendrons service en adoptant cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements et des sous-amendements portant sur l'article 9 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 68 et au sous-amendement n° 45 rectifié.
Sur les sous-amendements de M. Charasse, n°s 69, 70, 71 et 72, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat, ainsi que sur le sous-amendement n° 30 rectifié de M. About.
La commission a, en revanche, émis un avis défavorable sur les amendements n°s 31, 32, 33, 34, 35 et 52.
L'amendement n° 63 présentant une similitude forte avec le sous-amendement n° 30 rectifié, M. Braye pourrait peut-être retirer son texte au profit de celui de M. About ?
Enfin, la commission est défavorable à l'amendement n° 64, car il nous semble satisfait par les dispositifs prévus à l'article 9.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement a indiqué qu'en présentant longuement l'amendement n° 68 et en reprenant les garanties qu'il avait données de sa détermination hier dès la discussion générale il s'abstiendrait, de ce fait, de longs commentaires sur chaque amendement.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 24 rectifié.
Il est favorable au sous-amendement n° 45 rectifié par coordination avec les amendements n°s 41 et 42 qu'il avait acceptés, mais que votre assemblée n'a pas suivis.
Il est défavorable à l'amendement n° 25 rectifié et aux sous-amendements n°s 69, 70, 30 rectifié, 71 et 72.
Il est également défavorable aux amendements n°s 31, 32, 33, 34, 35, 26, 52, 63 et 64.
Je souligne que plusieurs de ces amendements sont satisfaits par l'amendement n° 68 du Gouvernement.
Je souligne aussi que certains de ces amendements visent à permettre au pouvoir administratif de s'affranchir d'une décision du juge. C'est un principe que le Gouvernement tient à respecter et sur lequel il ne veut pas transiger.
S'agissant des sous-amendements de M. Charasse, pour lesquels M. le rapporteur vient de s'en remettre à la sagesse du Sénat, je vous rappelle que le Sénat a débattu, le 27 janvier, d'une proposition de loi tendant à préciser la définition des délits non intentionnels et à exiger un strict lien de causalité entre la faute d'imprudence reprochée et le dommage pour voir engagée la responsabilité des décideurs. Sur le plan pénal, la responsabilité du maire ne sera donc engagée qu'en cas de faute d'imprudence caractérisée en lien direct avec le dommage. Dans le cas visé par M. Charasse, où le maire aura pris son arrêté, nul ne pourra lui faire grief d'une imprudence. Il n'y a donc pas d'ambiguïté sur la responsabilité pénale dans ce cas.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Ce texte n'est pas encore adopté !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 45 rectifié, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° 75.
M. Dominique Braye. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Pardonnez-moi de reprendre la parole, mais je voudrais tout simplement constater, à la lecture de la proposition de notre collègue M. Charasse, que le problème concerne très largement l'ensemble des membres de notre assemblée, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, car il touche ceux qui vivent la réalité au quotidien. Même si les fonctionnaires sont des élus ou que le secrétaire d'Etat est un ancien élu, peut-être que les choses ont évolué depuis ce temps-là et que le fait d'avoir pris un peu de recul par rapport à la réalité du terrain ne rend pas aussi vive la perception de tous ces problèmes concrets.
Il ne se passe pas de réunion - je parle sous l'autorité du président de l'Union des maires des Yvelines qui est ici présent, Gérard Larcher - de notre association regroupant les 262 maires des communes sans que nous soyons saisis, comme premier point à l'ordre du jour, de ce problème des gens du voyage, qui est donc manifestement très important.
Monsieur le secrétaire d'Etat, parmi les réalités de terrain auxquelles nous sommes confrontés, je souhaite que vous me répondiez sur un point concret.
Prenons l'exemple d'une petite commune qui a réalisé une aire de stationnement pour 15 caravanes et qui en voit arriver une cinquantaine. Où iront celles qui n'ont pas de place ? Elles stationneront donc illégalement n'importe où.
Que pourront espérer du vote de ce texte les élus qui seront confrontés à cette situation et combien de temps leur faudra-t-il pour espérer disposer de solutions efficaces ?
Je vous pose ce problème très concret sur lequel nos électeurs ne manqueront pas de nous interroger dès la semaine prochaine lorsqu'ils apprendront que nous avons examiné ce texte.
M. Philippe François. Très bien !
M. Gérard Larcher. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher. Je formulerai une observation en forme d'explication.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai créé, comme huit des maires des Yvelines que vous citiez, une aire d'accueil pour les gens du voyage. Je l'ai fait par le biais intercommunal, c'est-à-dire avec l'aide de quatorze communes qui ont accepté de participer, au travers du syndicat intercommunal, à la construction de cette aire.
Une telle réalisation n'était pas évidente, mais sans doute cette opération a-t-elle été facilitée du fait que Rambouillet a offert le terrain sur son propre territoire. Naturellement, les autres communes observent ce qui ce passe, et ce sont les résultats concrets de cette observation qui inciteront ou non les autres communes à se doter d'aires d'accueil. Comme le disait Nicolas About, la première aire créée à Trappes a été un échec total.
Qu'attendent les élus ? Ils attendent de savoir si les efforts d'accueil, de socialisation, de scolarisation des enfants, efforts qui coûtent très cher au quotidien à une commune, seront payés de retour. Même si le concours de la force publique nous est accordé quand des stationnements sont constatés en dehors de ces aires, si les efforts des élus n'ont pour objet que de répondre aux prescriptions d'un texte ancien sans avoir pour contrepartie une forme d'organisation sociale dans la collectivité, croyez-moi, dans quelques années, moins de huit communes auront des aires de stationnement !
C'est cette réponse pragmatique que, avec M. Braye, nous attendons concrètement. Je dois à la vérité de dire que le préfet des Yvelines, qui vient de nous quitter pour devenir préfet de région, a soutenu notre syndicat intercommunal dans sa démarche à chaque fois qu'un incident s'est produit.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sans réponse concrète, votre texte n'aura aucun avenir, comme M. Jean-Paul Delevoye l'a rappelé. C'est bien du concret que nous vivons ! Les bons sentiments que j'ai entendus hier, nous les partageons. Tous les hommes ont la même dignité, certes, mais tous doivent respecter les lois de la République.
Je tenais à vous faire part de mon expérience, mais aussi de mes attentes, moi qui suis à l'origine de la création d'une aire d'accueil des gens du voyage. Or, croyez-moi, de telles initiatives ne sont guère populaires dans une collectivité ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Claude Peyronnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je comprends bien ce qu'a dit M. Gérard Larcher. La philosophie du texte, telle que je l'ai comprise, c'est, précisément, de permettre une réalisation rapide et surtout quasi concomitante des aires. Si les communes attendent de voir comment les choses se passent sur l'aire qui a été créée dans le département, il est évident qu'elles ne seront pas incitées à faire de même si elles constatent des dégradations. Le texte permet de résoudre ce problème.
Je suis d'accord avec M. Braye sur le fait que beaucoup d'idées sont communes à ceux qui siègent sur l'ensemble de ces travées. Mais je voulais préciser que les sous-amendements déposés par M. Charasse l'ont été sous son nom personnel.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. L'avis de sagesse que nous avons émis concerne les sous-amendements de M. Charasse qui sont rattachés à l'amendement n° 25 rectifié de la commission.
Mais nous sommes défavorables aux sous-amendements qui sont rattachés à l'amendement n° 68 du Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 75, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

3

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Conformément à la règle posée à l'unanimité par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur et le ministre disposent chacun de deux minutes trente.
Chaque intervenant aura à coeur, par courtoisie, de respecter le temps imparti de deux minutes trente afin que toutes les questions et toutes les réponses puissent bénéficier de la retransmission télévisée.

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX

M. le président. La parole est à Mme Durrieu.
Mme Josette Durrieu. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et porte sur la réorganisation des services fiscaux.
Par cette réforme, monsieur le ministre, vous exprimez la volonté de mettre en place une gestion nouvelle. Soit. Vous dites aussi que vous voulez donner la priorité aux usagers du service public ; c'est tant mieux ! Mais il faut, dites-vous, simplifier et moderniser.
Pour simplifier, vous préconisez un correspondant unique pour les particuliers et les entreprises, qui sera l'hôtel des impôts. Notons au passage que les percepteurs ne procéderont plus au recouvrement.
Moderniser, cela signifie sans doute utiliser Internet notamment. Toutefois, monsieur le ministre, toutes les populations, notamment les populations rurales, n'ont pas forcément accès aux nouvelles techniques de l'information. Par ailleurs, cette utilisation aura un coût pour les usagers.
Ma question portera sur les risques qui peuvent accompagner cette réforme.
Le premier réside dans le regroupement et donc dans la suppression de perceptions dans l'espace rural. C'est la menace majeure, monsieur le ministre ; la mettrez-vous à exécution ?
Le deuxième risque est lié au précédent : il s'agit de la réduction du service de proximité aux usagers, que ce soit les particuliers ou les collectivités.
Le troisième risque est lié à la réduction des effectifs qui aura une double conséquence : l'une pour les usagers qui seront confrontés à une diminution des services qui leur étaient dispensés ; l'autre pour les salariés auxquels se poseront des problèmes de mobilité et de déroulement de carrière.
Peut-être, monsieur le ministre, comptez-vous attribuer de nouvelles missions aux percepteurs en matière de conseils aux collectivités et aux maires, par exemple pour la conception des budgets, la gestion de la dette, la surveillance des marchés publics, la conformité de l'acte administratif avant le contrôle de légalité.
Pourquoi n'envisagerait-on pas également une collaboration entre le percepteur et le sous-préfet, ce qui, vous le savez fort bien, allégerait d'autant le travail des tribunaux administratifs et celui des cours régionales des comptes ?
Voilà autant de réformes qui sont nécessaires si l'on veut aider et rassurer les maires - sur ce point, je pense que vous êtes tous d'accord, mes chers collègues - autant de réformes qui justifient une densification du réseau et une requalification des personnels. Ces réformes auraient sûrement un coût, monsieur le ministre, mais l'aménagement du territoire doit être l'expression de la solidarité nationale ! (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Madame la sénatrice, je vous remercie de m'interroger sur une réforme importante d'un service public assuré par le ministère dont j'ai la charge. Connaissant votre attachement au développement du service public, je vais répondre précisément à vos questions.
L'objectif de cette réforme est de faire en sorte que le contribuable ne soit plus « baladé », si vous me permettez l'expression, de bureau en bureau et, qu'il s'agisse d'une entreprise, petite ou moyenne, ou d'un particulier, qu'il trouve la solution à tous problèmes en ne faisant qu'une seule démarche en un seul lieu.
Vous m'interrogez sur les conséquences qu'aura cette réforme sur le réseau du Trésor public, notamment en milieu rural.
Le réseau du Trésor public, particulièrement en milieu rural, travaille à 80 % ou 90 % pour les maires des communes du canton dans lequel est située la trésorerie.
Je peux vous dire très solennellement, ainsi qu'à l'ensemble de la Haute Assemblée, qu'il n'est pas question de réduire en quoi que ce soit ce service de proximité assuré aux collectivités locales. (Applaudissements.) Il est même question, comme vous l'avez suggéré, madame la sénatrice, d'accroître les services rendus par les trésoreries. (Oh ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Vous en avez vous-même exprimé le souhait, monsieur le président, lors d'assises qui se sont tenues à Caen.
Il est en effet possible et souhaitable que les trésoriers assurent la comptabilité des communes - ils seront des interlocuteurs financiers impartiaux puisqu'ils n'ont pas de contrat à passer ou de prêt à placer - mais aussi qu'ils soient garants de la sécurité juridique des maires qui se sentent de plus en plus menacés en la matière.
Je peux donc répondre très clairement à votre question, madame : nous allons améliorer le service assuré aux contribuables et aux collectivités locales sans que les agents en souffrent. (Applaudissements.)
M. Charles Revet. Nous jugerons aux actes !

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX

M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. « La décision est prise. » Tels sont les propos qui ont été tenus par le trésorier-payeur général du département de l'Oise devant le conseil d'administration de l'Association des maires que je présidais lundi dernier.
Sans aucune concertation...
M. Alain Gournac. Comme d'habitude !
M. Alain Vasselle. ... avec les associations représentatives d'élus, M. Sautter vient de décider que les Françaises et les Français ne paieront plus leurs impôts à la perception de leur lieu de domicile : ils feront plusieurs kilomètres pour se rendre à l'hôtel des impôts du chef-lieu d'arrondissement.
M. René-Pierre Signé. C'est faux !
M. Alain Vasselle. En supprimant également l'activité bancaire, le Gouvernement provoquera une baisse de 30 % de l'activité des perceptions, menaçant ainsi les emplois.
L'objet du rapport de la mission 2003 était une réorganisation du service de proximité du territoire. Or, dans un document ministériel, en réponse à la question de savoir s'il y aurait des fermetures de perception, vous répondez : « Non ! » en ajoutant aussitôt que « le réseau sera modulé selon la géographie. » (Rires sur les travées du RPR.)
Autrement dit, des perceptions seront fermées.
C'est toute notre politique d'aménagement du territoire qui est en cause. (Protestations sur les travées socialistes.)
Les services de proximité de l'Etat n'ont cessé de se détériorer ces dernières années.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Oh !
M. Alain Vasselle. J'en prends pour exemple les services apportés aux communes...
M. Dominique Braye. C'est vrai !
M. Alain Vasselle. ... à travers la DDA, la direction départementale de l'agriculture, l'électrification, la DDE, la direction départementale de l'équipement, avec la partition des services de l'équipement, la DDASS, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales. Savez-vous, monsieur le ministre, que ce n'est plus la DDASS qui instruit les dossiers d'assainissement ? Cette charge a été renvoyée aux communes. Elles ont dû embaucher du personnel pour ce faire.
M. René-Pierre Signé. Arrêtez !
M. Alain Vasselle. Tout cela pèse sur les finances locales et donc sur les impôts locaux. Résultat : ce sont les contribuables qui feront les frais de l'opération et qui supporteront le coût de cette réforme !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce n'est pas une question !
M. Alain Vasselle. La concertation avec les élus locaux,...
M. Alain Gournac. Zéro, la consultation !
M. Alain Vasselle. ... dont vous avez pris l'engagement devant nos collègues députés mardi et hier encore, aurait dû se faire avant et non après la remise du rapport.
M. le président. Posez votre question, monsieur Vasselle !
M. Alain Vasselle. J'y viens, monsieur le président.
Quand le Gouvernement stoppera-t-il son action de destruction du service public de proximité ? (Exclamations sur les travées socialistes.)
Quelles garanties pouvez-vous apporter aux Français quant au maintien d'un véritable maillage des services publics de proximité sur l'ensemble du territoire ?
Pouvez-vous nous assurer qu'aucune perception, sans exception, ne fermera sur l'ensemble du territoire ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Chacun aura noté la différence de ton entre les deux questions qui viennent de m'être posées. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Je tiens, monsieur Vasselle, à relever la vivacité de votre ton, mais surtout les critiques que vous avez glissées au passage à l'égard des fonctionnaires qui font correctement leur travail.
M. Dominique Braye. Il s'agit du Gouvernement, pas des fonctionnaires !
M. Alain Gournac. Ne transformez pas nos propos, monsieur le ministre !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, lorsqu'on interroge les contribuables sur les fonctionnaires du ministère dont j'ai la responsabilité, on s'aperçoit que 80 % d'entre eux les considèrent comme compétents et courtois. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. Et alors !
M. Jean Chérioux. Vous déviez la question !
M. Alain Vasselle. C'est inadmissible !
M. le président. Je vous en prie, messieurs !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je serais très heureux de pouvoir répondre aux questions de M. Vasselle.
Je tiens donc à vous indiquer, monsieur Vasselle, que ma volonté est d'améliorer les services aux collectivités locales et aux contribuables.
M. Dominique Braye. Votre sens de l'amélioration, on le connaît !
M. Claude Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cela implique - et je suis prêt à le répéter autant de fois que nécessaire - le maintien d'un réseau dense de trésoreries de proximité.
M. Dominique Braye. Donc, aucune perception ne fermera ?
MM. Gérard Cornu et Alain Gournac. Y aura-t-il, oui ou non, des fermetures ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cette réforme ne provoquera pas de fermetures. Le réseau évolue ! (Ah ! sur les travées du RPR.) On crée des recettes des finances en banlieue parisienne. Il arrive que deux postes soient placés sous la même autorité. Mais je n'ai ni l'intention ni l'ambition de réduire le réseau rural.
Ceux qui parlaient de réduire les effectifs de fonctionnaires, c'est bien de ce côté-ci de l'hémicycle qu'ils se trouvaient ! (M. le ministre désigne la droite de l'hémicycle. - Protestations sur les travées du RPR et applaudissements sur les travées socialistes.) Vous vous trompez donc de réforme !
Je veux que les fonctionnaires, qui travaillent bien, accomplissent leur mission dans un cadre collectif, où ils pourront rendre de meilleurs services, aussi bien aux contribuables qu'aux collectivités locales. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

RÉPARTITION DE LA DOTATION GLOBALE
DE FONCTIONNEMENT

M. le président. La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre...
M. Henri de Raincourt. Il n'est pas là !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... mais c'est bien volontiers que je la poserai à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, d'autant qu'il est directement intéressé. Ainsi qu'il le demande, je le ferai sur un ton courtois, mais aussi avec gravité.
Mardi dernier, le Comité des finances locales a eu quelques difficultés à répartir les 110 milliards de francs de dotation globale de fonctionnement pour l'an 2000, compte tenu des conséquences financières qu'ont eues les erreurs d'appréciation du Gouvernement quant au rythme de création des communautés d'agglomération.
En effet, le Gouvernement avait ajouté 500 millions de francs à la DGF pour tenir compte de ces créations. En fait, c'est un milliard de francs qu'il fallait ajouter. Il y a donc un déficit de 500 millions de francs.
Plusieurs sénateurs du RPR et des Républicains et Indépendants. Et la cagnotte ?
M. Jean-Pierre Fourcade. Ce déficit va être financé par une reprise sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle, reprise qui va gêner un certain nombre de communes, notamment des communes importantes telles que Paris, Lyon, Bordeaux, etc.
M. Emmanuel Hamel. Comme par hasard !
M. Gérard Larcher. Rambouillet !
M. Jean-Pierre Fourcade. Cette réduction en 2000 intervenant après une réduction encore plus importante en 1999, en deux années, le montant de la dotation de compensation de la taxe professionnelle aura diminué, pour ces villes, de plus de 40 % ! Cette diminution de 40 %, je crois, a de quoi inquiéter tout le monde.
Au sein du Comité des finances locales, a été évoqué un deuxième problème qui, pour n'avoir pas la même ampleur financière, n'en a pas moins d'importance sur le plan psychologique. Il s'agit des mécanismes du calcul de la répartition de la DGF qui nous ont interdit de stabiliser la dotation de solidarité rurale « seconde part », celle qui va à la péréquation, pour les 25 000 communes rurales qui en bénéficient, et cela parce que, lors du vote de la loi de finances, un certain nombre de masses ont été rajoutées en différents endroits. Quelles que soient les modalités de calcul, quels que soient les efforts que nous avons faits - et j'en appelle au témoignage de ceux de mes collègues qui participaient à la même réunion - il a été impossible de majorer l'enveloppe de la DSR, et il s'en faut, monsieur le ministre, d'une vingtaine de millions de francs.
Vous reconnaîtrez que donner des motifs d'inquiétude à 25 000 maires ruraux pour 20 millions de francs c'est vraiment faire un mauvais calcul et commettre une maladresse !
C'est la raison pour laquelle j'ai été mandaté par l'ensemble du Comité des finances locales, toutes sensibilités confondues, pour vous demander de bien vouloir essayer de remédier à ces difficultés en mettant en place dès cette année - et non pas l'année prochaine, monsieur le ministre - un dispositif permettant d'éviter cette pénalisation d'une grande partie des communes rurales et des communes non éligibles à la dotation de solidarité urbaine.
Comme nous sommes à quelques jours de l'annonce des résultats fiscaux de 1999,...
MM. Alain Gournac et Charles Revet. La cagnotte !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... et que vous allez, semble-t-il, faire état de chiffres très supérieurs à ceux que je viens d'évoquer, ma question est claire : quand nous proposerez-vous un texte correctif pour la DGF de l'an 2000 ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, je vous rappellerai tout d'abord, d'un ton courtois et grave (Sourires), que nous avons remplacé le fameux pacte de stabilité, qui n'indexait la DGF que sur les prix - ce que j'appelle la « méthode 1995-1998 » - par un pacte de croissance et de solidarité, qui indexe cette même dotation non seulement sur les prix mais aussi sur une fraction croissante de la croissance. Je tenais à faire ce rappel pour montrer que les problèmes précis que vous avez évoqués s'inscrivent dans un contexte beaucoup plus détendu que celui que les communes ont connu entre 1995 et 1998.
Vous me dites que le Gouvernement a commis une erreur d'appréciation à propos de l'évolution de l'intercommunalité. Il est vrai que la loi que mon collègue Jean-Pierre Chevènement a présentée a conduit, dès le 1er janvier 2000, à la création de cinquante et une communautés d'agglomération, quand on en attendait la moité. Il me semble qu'en relevant ce que vous considérez comme une erreur, vous avez indirectement rendu hommage au Gouvernement en soulignant qu'il avait lancé un puissant mouvement de regoupement des compétences communales. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Certes, cela pose un problème financier.
M. Serge Vinçon. Voilà !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mais celui-ci ne doit pas masquer le succès de cette loi.
Il est vrai que nous n'avons inscrit, dans la loi de finances pour 2000, que 500 millions de francs, alors qu'une somme plus importante serait nécessaire.
M. Alain Gournac. Un milliard de francs !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je dispose d'un chiffre effectivement proche de un milliard de francs.
Nous procéderons donc, dans le dispositif actuel, selon les méthodes habituelles, mais en épargnant complètement les communes qui bénéficient soit de la dotation de solidarité urbaine, soit de la dotation de solidarité rurale.
Mon collègue Jean-Pierre Chevènement a, lui-même, soulevé le problème que vous avez évoqué.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai presque terminé, monsieur le président, mais convenez qu'il s'agit d'une question importante.
Nous allons examiner ce problème dans le cadre de la préparation, que nous entamons, du projet de loi de finances pour 2001. J'ai bien senti toute l'importance que vous attachiez à cette question. (Applaudissements sur les travées socialistes.)

MESURES EN FAVEUR DES HÔPITAUX

M. le président. La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo. Madame la secrétaire d'Etat, le malaise est profond dans les hôpitaux. Depuis le mois de décembre, les personnels se mobilisent et leur unité se renforce. Aujourd'hui encore, agents, cadres et praticiens hospitaliers sont dans la rue. Ils rencontrent dans la population une grande sympathie parce que nos concitoyens sont particulièrement attachés à l'hôpital public.
Ce qui se passe à l'hôpital est très significatif. C'est le rejet des politiques de restriction budgétaire et de restructuration mises en oeuvre depuis trop longtemps. C'est, vous le savez, une des raisons principales du refus des parlementaires communistes de voter le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000.
J'ajoute que la forte implication, depuis décembre, des hôpitaux parisiens dans les mouvements actuels démontre, s'il en était besoin, que déshabiller Paul pour habiller Pierre n'est pas acceptable.
M. Alain Gournac. C'est vrai !
Mme Nicole Borvo. Certes, il y a des réformes à entreprendre, notamment à l'Assistance publique, un secteur que je connais mieux que d'autres. Certes, il faut recenser les besoins de la manière la plus précise. Mais aujourd'hui, madame la secrétaire d'Etat, il y a urgence.
Les dotations prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale ne permettent pas de faire face aux besoins, et il n'est pas possible d'y répondre par la seule mise en oeuvre des 35 heures. Vous en êtes convenue hier en prévoyant, avec les syndicats, un calendrier de discussions. Il est en effet nécessaire que l'Etat dégage des moyens en sus des budgets actuels.
Le Gouvernement se félicite de la croissance, qui produit des recettes supplémentaires, qu'il s'agisse de l'excédent de 2 milliards de francs prévu cette année à la CNAM ou des rentrées fiscales supplémentaires au titre de 1999. Nos concitoyens ne comprendraient pas que ces moyens ne soient pas affectés en priorité aux besoins urgents, que ceux-ci concernent les hôpitaux, les personnels des caisses primaires d'assurance maladie ou la mise en oeuvre de la CMU. Pourquoi ne pas proposer un collectif budgétaire ? Il faut que l'engagement de l'Etat soit à la hauteur. Il est des besoins qui sont d'ores et déjà connus : par exemple, ne serait-ce qu'à l'Assistance publique de Paris, il faut créer des milliers d'emplois.
Madame la secrétaire d'Etat, ne pensez-vous pas qu'il serait opportun de sortir de la logique des enveloppes prédéterminées, de revoir le financement de la sécurité sociale à partir des besoins sanitaires et sociaux réels de la population, pour définir une politique de santé ambitieuse ? Un signe dans ce sens pourrait être adressé en répondant dès à présent à l'urgence, et cela en adéquation avec les besoins. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur quelques travées socialistes.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Madame la sénatrice, en effet, depuis plusieurs semaines, les hospitaliers sont mobilisés, et le Gouvernement a entendu les personnels, qui réclament effectivement de meilleures conditions de travail pour assurer la qualité du service public hospitalier auquel nous sommes très attachés.
Les hospitaliers ont ainsi montré leur attachement à l'hôpital, et nous les remercions de cette mobilisation professionnelle et de cette responsabilité. (Rires et exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. C'est la meilleure !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Depuis de nombreuses années, ces hommes et ces femmes ont donné beaucoup d'eux-mêmes pour permettre que le service public de santé soit à la hauteur des exigences de soins des Français et des exigences de santé publique que nous lui avons fixé.
La sécurité sociale est maintenant à l'équilibre...
M. Alain Gournac. Il faut le dire vite !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... et il nous appartient, en dialogue avec les personnels, avec leurs représentants, de définir les modalités qui permettront au service public de répondre aux attentes de la population.
M. Henri de Raincourt. Du baratin !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Les personnels veulent être associés pleinement aux transformations opérées dans chaque hôpital, dans chaque service, et ils ont raison. C'est un message fort qu'ils nous ont envoyé ; nous l'avons entendu, et nous devons renforcer les moyens du dialogue.
Vous le savez, hier, Mme Aubry et moi-même avons engagé un processus de discussion sincère, transparente, avec les représentants du personnel. Nous avons mis au point un calendier de discussions...
M. Alain Gournac. Il aurait fallu y penser plus tôt !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... qui devrait aboutir, après un certain nombre de réunions. Une nouvelle réunion est d'ores et déjà prévue pour la fin du mois, ou le début du mois de mars, afin de convenir des mesures à prendre pour répondre aux exigences actuelles et aux problèmes qui sont aujourd'hui portés sur la place publique. Je pense notamment aux remplacements qui ne sont pas effectués ou aux difficultés que soulèvent les départs en formation, celle-ci étant évidemment nécessaire à la modernisation du service public.
Nous allons donc recenser les problèmes de fonctionnement des services, puis nous définirons les moyens permettant d'assurer la modernisation sociale et professionnelle des hôpitaux. La situation des urgences fera l'objet d'une évaluation spécifique. Le Gouvernement a clairement affirmé que des moyens supplémentaires seraient dégagés pour répondre aux attentes exprimées. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Exclamations sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Philippe Marini. Mépris du Parlement !

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX

M. le président. La parole est à M. Dulait.
M. André Dulait. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et je le formulerai, bien sûr, avec courtoisie. (Sourires.)
Le Gouvernement vient d'annoncer une réorganisation des services fiscaux avec la mise en place, d'ici à 2003, d'un correspondant unique, au niveau local, pour l'ensemble des contribuables.
Monsieur le ministre, les arguments invoqués sont difficilement réfutables. Je vous cite : « Nous croyons dans un Etat efficace et moderne. Le service public que nous voulons est un service public citoyen, à l'écoute de la société et transparent. »
Certes, l'Etat doit évoluer, mais plus que l'objectif, c'est la méthode du Gouvernement qui est éminemment critiquable. Est-ce se mettre à l'écoute des citoyens que de supprimer des postes administratifs qui sont en contact direct avec le public, ce public qui est constitué par les particuliers et les entreprises, mais aussi par les collectivités locales, pour lequelles le Trésor public constitue un interlocuteur privilégié ?
Quant à l'argument de la transparence, monsieur le ministre, il fait sans doute écho au récent rapport de la Cour des comptes qui, rappelons-le, dénonce de graves dysfonctionnements au sein de l'administration centrale des finances. Plutôt que d'aborder le problème par la base, au niveau local, il serait bien préférable de procéder à une remise à plat de la politique de rémunération au sein des services de Bercy et à une véritable gestion patrimoniale de l'Etat, faisant appel aux technologies les plus modernes en ce domaine.
Dans mon département, j'ai pu constater que la direction générale de la comptabilité publique ne mettait pas en pratique vos propos sur le terrain. En effet, les élus locaux ont accepté, en liaison avec le trésorier payeur général, dans un certain nombre de cas, d'une part, une gestion duale des postes, et, d'autre part, le remplacement de cadres A par des cadres B, principe que l'administration centale a entériné.
Afin de maintenir une qualité d'accueil du public et des conditions de travail a minima pour le personnel, l'Etat a accepté la revalorisation des loyers des locaux mis à disposition par les communes qui effectuent les travaux d'investissement. Or, aujourd'hui, il semble que des consignes aient été données pour bloquer ces loyers.
M. le président. Votre question, s'il vous plaît !
M. André Dulait. J'y viens, monsieur le président.
Le Conseil national de l'aménagement du territoire a adopté, en juillet dernier, un texte précisant : « La cohésion territoriale et la cohésion sociale vont de pair. La spirale de l'exclusion s'accélère en un point quelconque du territoire si celui-ci ne bénéficie plus des services publics. »
Monsieur le ministre, comment mettre en cohérence les promesses officielles sur le maintien des trésoreries en milieu rural, le service de proximité et les décisions prises sur le terrain par le Gouvernement ?
Cette réforme, dans l'immédiat, ne semble donner satisfaction ni aux gens ni aux agents. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Henri de Richemont. Il a raison !
M. Jean-Pierre Raffarin. Cela méritait du temps !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, je ne commenterai pas le rapport de la Cour des comptes. Je me bornerai à dire que, comme le sait le président de votre commission des finances, nous avons intégré dans le budget un certain nombre de financements extrabudgétaires.
M. Alain Lambert. Grâce au Sénat !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Grâce au Sénat, soit ! (Très bien ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Nous allons donner un fondement juridique à toutes les indemnités versées, tandis que celles qui échappent traditionnellement à l'impôt seront taxées. Mais telle n'est pas la question que vous avez posée. Je précise simplement à cet égard que nous allons accélérer la procédure en matière de comptabilité patrimoniale et analytique.
Vous vous intéressez au sort du réseau des perceptions.
M. Alain Gournac. C'est vrai !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous allons conserver, je le répète, un réseau dense qui suivra l'évolution que vous avez décrite et qui fera l'objet d'une concertation avec les élus.
J'annoncerai deux mesures au grand conseil des communes de France qu'est la Haute Assemblée.
M. Alain Gournac. Merci !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Tout d'abord, Mme Parly et moi-même recevrons les associations d'élus locaux dans les prochains jours afin d'évoquer ce sujet.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Philippe François. Bravo !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ensuite, comme c'est de droit mais j'y insiste, il sera procédé, avant toute répartition différente non pas des postes mais des compétences au sein de chaque département, à une consultation des élus, notamment dans le cadre de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics.
Il n'est pas dans mes habitudes de prendre des décisions unilatérales. Je suis très attaché au travail avec les élus qui sont des usagers du service public, notamment du Trésor public. C'est une dimension à laquelle j'accorde une grande importance. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

RÉORGANISATION DES SERVICES FISCAUX

M. le président. La parole est à M. de Rocca Serra.
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. Ma question s'adresse également à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. J'ai quelques scrupules à intervenir à mon tour sur ce dossier qui intéresse l'ensemble de nos collègues puisque, sur les six questions qui viennent d'être posées, quatre le concernent.
Je vais être très bref car il me semble que tout à été dit. Cependant, à l'heure où cette réforme d'envergure va être entreprise, en dehors de toute concertation avec les élus locaux, notamment avec les commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics que la loi devrait vous obliger à consulter,...
M. Claude Estier. Il vient de vous dire le contraire !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. ... pouvez-vous assurer à la représentation nationale que cette réforme ne va pas déboucher à terme sur des fermetures de trésoreries situées en milieu rural,...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il l'a déjà dit !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. ... sur le regroupement éventuel dans des unités éloignées du contribuable et de l'élu et, donc, sur des suppressions d'emplois qui priveraient la notion de service public de sa principale qualité, celle du service au public.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il vous a déjà répondu !
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. Telle est la question que je voulais poser sur un ton moins passionné que les orateurs qui m'ont précédé mais avec autant de fermeté.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Cette occasion de revenir sur un sujet, qui, à l'évidence, préoccupe les élus de cette assemblée, me paraît bien heureuse. En répétant la question de vos prédécesseurs, vous me permettez d'ajouter deux précisions. (Ah ! sur les travées du RPR.)
Premièrement, j'ai sous les yeux des articles de journaux, des tracts syndicaux...
M. Alain Lambert. De quels syndicats ?
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... des voeux de conseils généraux, qui donnent des évaluations chiffrées des suppressions de perceptions et d'hôtels des impôts dont je tiens à dire qu'elles sont totalement fantaisistes.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Bravo ! Il fallait le dire !
M. Denis Badré. Les syndicats ne partagent pas votre avis !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les élus auront, dans les commissions départementales d'organisation et de modernisation des services publics, l'occasion d'être consultés sur nos projets.
Par ailleurs, puisque c'est vous, monsieur de Rocca Serra, qui posez cette question, j'en profite pour rendre hommage aux fonctionnaires des impôts et du Trésor public qui font en Corse, comme ailleurs en France, un travail tout à fait remarquable dans le domaine du conseil aux collectivités locales et dans le domaine de l'établissement et du recouvrement des impôts. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Dominique Braye. Il est très bon !

MARÉE NOIRE CONSÉCUTIVE AU NAUFRAGE DE L' ERIKA

M. le président. La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'environnement. Il s'agit non pas de traiter du problème des perceptions mais plutôt, madame la ministre, de connaître votre perception sur les conséquences du naufrage de l' Erika qui a gravement sinistré le littoral atlantique.
Madame le ministre, devrai-je vous convaincre qu'il s'agit bien d'une véritable catastrophe écologique d'une ampleur exceptionnelle ?
M. Henri de Raincourt. Elle n'en sait rien !
M. Philippe Darniche. Les rivages défigurés, les oiseaux morts, les coquillages souillés et aujourd'hui interdits à la vente en sont autant de preuves. Des centaines de « rafiots », selon votre propre terme, véritables poubelles flottantes, continuent pourtant à transporter des substances dangereuses pour l'homme et pour notre environnement.
Ils circulent impunément en mer en longeant nos côtes françaises, dont simplement - excusez du peu ! - 50 000 sur le seul rail d'Ouessant. De quels moyens légaux nationaux, européens ou internationaux disposons-nous réellement pour les obliger à quitter nos eaux territoriales et prévenir ainsi toute nouvelle catastrophe ? Hélas ! Aucun, car nous ne sommes plus maîtres sur nos eaux territoriales.
Si, sur le terrain, le plan de lutte contre les pollutions marines, le plan POLMAR, a bien joué son rôle, si, grâce à une mobilisation des départements et des communes, des centaines de bénévoles sont venus prêter main forte à la sauvegarde du littoral, force est de constater que trop de zones d'ombre, trop de points restent encore obscurs ou étrangement en suspens. C'est la raison pour laquelle j'appelle de mes voeux, monsieur le président, la constitution d'une commission d'enquête sénatoriale visant à faire connaître toute la vérité sur cette affaire. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Gournac. Voilà une vraie proposition !
M. Philippe Darniche. Madame le ministre, dans la formidable partie de ping-pong à laquelle se livrent les différents experts et analystes, nous ne savons toujours pas ce qui s'est véritablement passé et dans quelles conditions a eu lieu ce naufrage ; nous ne connaissons toujours pas la légitimité réelle du Centre de documentation, de recherche et d'expérimentation, le CEDRE ; nous ne connaissons toujours pas le véritable propriétaire de l' Erika ; nous ne connaissons toujours pas l'efficacité réelle du colmatage ; enfin, nous ne savons toujours pas dans quelles conditions le repompage va se dérouler.
Pour couronner le tout, alors que nous avons la sensation que ce sujet ne figure déjà plus parmi les préoccupations du Gouvernement, une expertise menée sur un échantillon de rejets pétroliers a montré qu'il s'agissait probablement de déchets industriels spéciaux de très haute toxicité.
Ma question est la suivante : pouvez-vous nous dire, madame le ministre, ce que contiennent véritablement les soutes de l' Erika et quelles mesures vous comptez prendre pour qu'une telle catastrophe ne se renouvelle pas ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur, vous n'avez pas évoqué de façon explicite un aspect de la question qui me paraît essentiel : s'agit-il d'une catastrophe ?
Oui, monsieur le sénateur, mais encore faut-il préciser qu'il ne s'agit pas seulement d'une catastrophe écologique mais aussi d'une catastrophe patrimoniale, économique, sociale et humaine qui mobilise des milliers de personnes sur l'ensemble des départements concernés.
De quels moyens disposons-nous ? Nous ne sommes pas dépourvus de moyens. C'est ainsi que, tour à tour, le Premier ministre et le ministre de l'équipement, des transports et du logement ont affirmé avoir pris la décision de faire de l'amélioration de la sécurité dans le domaine du transport maritime l'une des priorités essentielles de la présidence française de l'Union européenne.
Il s'agit d'améliorer le dispositif à la fois dans le cadre de l'OMI, l'Organisation maritime internationale, dans le cadre des engagements pris par l'Union européenne et dans le cadre du mémorandum de Paris.
De premières décisions tendant au renforcement des contrôles ont déjà été prises. Elles rompent heureusement avec une tradition qui se traduisait régulièrement ces dernières années par des suppressions de postes, qui, vous le savez, monsieur le sénateur, sans qu'il soit nécessaire d'y insister, sont antérieures à 1997. (Vives protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini. Dites tout de suite que c'est la faute de Juppé !
M. Henri de Raincourt. Voilà un argument de choc !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Je voudrais revenir plus concrètement sur deux thèmes.
Le premier concerne la nature du produit qui s'est répandu. Les analyses réalisées par le CEDRE, par l'Institut français du pétrole, par le Muséum national d'histoire naturelle, par le Laboratoire de la marine nationale, par l'IFREMER, l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, font toutes apparaître qu'il s'agit bien de fioul lourd, numéro 2 classique...
M. Alain Gournac. C'est bien le problème !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. ... qui est utilisé dans les centrales thermiques et transporté en Italie, non pas parce que nous ne pouvons pas l'employer ici mais parce que peu nombreuses sont en France les centrales thermiques en production.
M. Jean Chérioux. Grâce au nucléaire !
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il subsiste de nombreuses zones d'ombre sur les conditions de prélèvement et d'analyse du laboratoire privé toulonnais qui affirme qu'il s'agit de déchets toxiques. Bien entendu, la toxicité de ce fioul existe. Tous les produits pétroliers comportent des composés aromatiques polycycliques susceptibles d'être cancérigènes.
C'est pourquoi nous avons diffusé très rapidement des mesures de précaution à l'attention des bénévoles pour les inciter à la prudence dans la manipulation de ces produits. C'est aussi pourquoi l'AFSSA, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, recommande d'interdire la consommation de produits marins susceptibles d'être contaminés.
Deux minutes trente, la règle est imparable ! Je dois m'interrompre mais, monsieur le sénateur, je suis tout à fait disposée à vous rencontrer à l'issue de cette séance pour vous expliquer où en sont les opérations de préparation du pompage des soutes de l' Erika . (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)

POLITIQUE HOSPITALIÈRE DU GOUVERNEMENT

M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, je vous promets de respecter le temps de parole qui m'est imparti. (Ah ! sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
La question que M. Lagauche et moi-même souhaitons poser s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale a partiellement levé mes interrogations en répondant à la question posée par notre collègue Mme Borvo.
Depuis quelques jours, le personnel hospitalier exprime, par diverses manifestations, son inquiétude sur l'avenir de l'hôpital.
M. Jean Chérioux. Son mécontentement !
M. Claude Domeizel. Madame la secrétaire d'Etat, nous connaissons l'engagement personnel de Mme Aubry et le vôtre en faveur de l'hôpital et de ses agents, lesquels démontrent tous les jours leur sens du service public et leur compétence.
Depuis 1997, tant pour le personnel que pour les moyens, vous avez inscrit dans le budget des sommes considérables. Cependant, ces réels efforts faits par le Gouvernement ne semblent pas être suffisants pour répondre aux besoins.
Dernièrement, l'épidémie de grippe a montré de façon notoire, tout particulièrement en région parisienne, l'impossibilité de mobiliser la médecine de ville. Ainsi, l'hôpital a dû faire face seul et de nombreux services d'urgence ont été quasiment bloqués pendant plusieurs jours.
Je souhaiterais, madame la ministre, savoir comment vous comptez réduire les fausses urgences.
Par ailleurs, quel sera l'impact réel de la couverture maladie universelle, la CMU, que le Gouvernement vient de mettre en place en faveur de six millions de nos concitoyens qui - faut-il le préciser ? - s'adressent plus volontiers à l'hôpital public, parce que c'est la seule porte ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre ?
M. Gérard Larcher. Exact !
M. Claude Domeizel. En outre, la politique de rééquilibrage entre régions, dont l'objectif - louable - tend à réduire les inégalités, se traduit par des diminutions d'effectifs et, par voie de conséquence, par des conditions de travail plus lourdes pour le personnel.
M. le président. Votre question !
M. Claude Domeizel. Le malaise s'amplifie avec l'inquiétude suscitée par la perspective du passage aux 35 heures. Aussi, madame la secrétaire d'Etat, une révision des orientations budgétaires est-elle envisageable pour que ces réformes puissent intervenir dans la sérénité ? (Exclamations sur les travées du RPR.)
Enfin, pouvez-vous indiquer les lignes directrices que vous entendez mettre en oeuvre pour l'application de l'aménagement et de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière ? (Applaudissements sur les travées socialistes. - Mme Luc applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le sénateur, je vous remercie de me permettre de poursuivre mon argumentation, interrompue tout à l'heure par le gong. (Sourires sur les travées du RPR.)
Le dialogue est effectivement engagé avec les représentants du personnel. Le calendrier, élaboré hier soir, nous conduira, à la fin du mois de février, à une concertation sincère avec l'ensemble des représentants de la fonction publique hospitalière à propos des urgences et de l'amélioration et de la modernisation du service public hospitalier.
La réduction du temps de travail ne prétend pas apporter la réponse à tous les problèmes de la fonction publique hospitalière. (Ah ! sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Cependant c'est l'un des outils que nous actionnerons pour permettre d'accélérer la modernisation et l'adaptation du service public hospitalier. Nous avons donc décidé avec les personnels.
M. Alain Gournac. Après les manifestations !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... avec, je le répète, des moyens supplémentaires - le Gouvernement a affirmé qu'il était disposé à mobiliser des moyens supplémentaires pour répondre aux attentes du personnel - d'engager une réflexion sur la mise en oeuvre de l'aménagement et de la réduction du temps de travail dans les hôpitaux...
Un sénateur du RPR. Il est temps !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. ... dès lors que le cadre inter-fonctions publiques sera mis en place. Cette négociation aura lieu ensuite établissement par établissement, car c'est au plus près des préoccupations des professionnels et des usagers que doit se mettre en place la réduction du temps de travail, et nous y mettrons le temps qu'il faudra.
M. Alain Gournac. Il fallait y penser avant !
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat. Nous ne pouvions pas y penser avant, monsieur le sénateur ! Nous avons anticipé. Par cette mesure, nous anticipons (Rires sur les travées du RPR) sur un cadre national. Il est assez cocasse que, dans cet hémicycle, alors que vous nous avez reproché d'augmenter trop les dépenses hospitalières, vous défendiez aujourd'hui un conflit social qui se déroule dans la rue, alors que c'est nous qui défendons la fonction publique hospitalière ! (Applaudissements sur les travées socialistes et exclamations sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
Plusieurs sénateurs du RPR. Non, c'est nous !
M. le président. Silence ! Le gong a sonné !
M. Alain Gournac. Elle n'a rien compris !

EXISTENCE D'UNE CAGNOTTE FISCALE

M. le président. La parole est à M. Marini. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini. Ma question s'adresse à M. Christian Sautter, mais je ne vais pas l'interroger sur les perceptions. (Ah ! sur diverses travées.) C'est en ma simple qualité de « prince de l'extrapolation », puisque vous m'avez qualifié ainsi au mois de novembre dernier, monsieur le ministre, que je vais m'adresser à vous pour vous parler des recettes fiscales de 1999. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Alain Gournac. On va savoir !
M. Jean-Pierre Raffarin. La cassette !
M. Philippe Marini. Je souhaite simplement vous poser la question de la transparence et de la sécurité budgétaire,...
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Philippe Marini. ... sur plusieurs plans. Tout d'abord, quelle est la vérité des chiffres ?
M. Alain Gournac. Enfin !
M. Philippe Marini. Selon les estimations de la commission des finances du Sénat, l'excédent de recettes devait être compris entre 30 milliards de francs et 40 milliards de francs par rapport au budget initial de 1999. Vous avez balayé cette évaluation d'un revers de main. Depuis, vous avez avoué une petite partie de l'excédent...
M. Alain Gournac. Toute petite !
M. Philippe Marini. ... vous avez fait quelques pas sur votre chemin de Damas, monsieur le ministre.
Plus récemment, un quotidien économique, qui utilisait des informations sans doute puisées à bonne source, a évoqué des chiffres que Mme Parly a qualifiés de fantaisistes.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Jaloux !
M. Philippe Marini. Quelle est la réalité des chiffres ? Monsieur le ministre, quand direz-vous la vérité sur ces chiffres...
M. Alain Gournac. Jamais !
M. Dominique Braye. Jamais, comme d'habitude !
M. Philippe Marini. ... et où et à qui direz-vous cette vérité ?
Vous avez promis à la commission des finances de l'Assemblée nationale de lui divulguer les chiffres la semaine prochaine. Pourquoi ne venez-vous pas simultanément devant la commission des finances du Sénat ?
Ensuite, quand et comment aura lieu le débat sur la répartition de l'excédent ? Monsieur le ministre, si j'étais député ou sénateur de votre majorité (Ah non ! Pas ça ! sur les travées socialistes) je serais extrêmement inquiet, je serais très frustré car je considérerais que l'on m'a privé de ce débat ô combien légitime !
M. Jean Chérioux. Eh oui !
M. Philippe Marini. Quelle part de l'excédent pour réduire le déficit ?
Un sénateur du RPR. Ce sont des godillots !
M. Philippe Marini. Quelle part de l'excédent pour réduire l'endettement ? Quelle part de l'excédent pour réaliser des dépenses supplémentaires ? Ce débat, vous devez l'avoir, en toute transparence, vis-à-vis de l'opinion publique.
M. Bernard Piras. Vous êtes jaloux !
M. Philippe Marini. Vous parlez de réduire les impôts : lesquels ? De quoi s'agit-il ? Dites-nous la vérité, monsieur le ministre, ne vous bornez pas à des annonces purement électorales.
M. Jean-Pierre Raffarin. Cela ne les intéresse pas ! C'est pour les élections !
M. Philippe Marini. Voilà ma question, monsieur le ministre : quand et comment nous direz-vous la vérité sur le budget de l'Etat et sur les recettes fiscales ? (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Pierre Raffarin. La vérité sur la cassette !
MM. Paul Raoult et Bernard Piras. Cela va mieux !
M. le président. Question importante, réponse importante. Aussi, je vous en prie, mes chers collègues.
La parole est à M. le ministre.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. M. Marini est meilleur rapporteur que procureur,...
M. Dominique Braye. C'est vous qui le dites !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... mais je vais répondre à ses questions.
D'abord, peut-on parler d'excédent ? J'ai entendu parler de cagnotte, de cassette, termes dignes de Molière. Lorsque le déficit dépasse deux cent milliards de francs,...
M. Alain Lambert. Deux cent trente milliards de francs !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... quand, chaque année, les contribuables paient, au titre des intérêts de la dette, presque autant que ce qu'ils consacrent à l'emploi et à la solidarité, il faut avoir, je crois, un peu de mesure dans le vocabulaire. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur plusieurs travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Paul Raoult. Voilà !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le rapporteur général, vous ne vous livrez pas à ces excès de langage, je vous en donne acte. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Delaneau. Vous avez géré quatorze ans sur vingt ans !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous parlons des recettes de l'année 1999. J'ai déjà, au mois de septembre, revalorisé ces recettes, parce que la croissance est là, parce que les entreprises paient davantage d'impôts que prévu, ce qui ne me paraît pas une nouvelle désastreuse. C'est plutôt le signe que les entreprises vont bien : la preuve, elles font des profits, elles paient des impôts...
M. Alain Lambert. Surtout des impôts !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... et, surtout, elles créent de nombreux emplois.
Nous avons revalorisé les recettes de 1999 de treize milliards de francs, puis de onze milliards de francs. Vous me demandez la vérité, monsieur Marini : la vérité, c'est clair, nous la connaîtrons dès que les comptes de l'année 1999 seront bouclés. Vous me demandez également à qui nous réserverons la primeur de ces chiffres. Comme je l'ai dit, nous les communiquerons d'abord à la commission des finances de l'Assemblée nationale et, bien sûr, à la commission des finances du Sénat, si celle-ci le souhaite, mais je ne peux pas être présent à deux endroits à la fois. Il faudra tout de même me laisser le temps d'effectuer le trajet de l'une à l'autre assemblée !
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas long ! Un quart d'heure !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Vous aurez la primeur de ces chiffres avant la presse, car si celle-ci fait son métier, elle n'est pas à mes yeux le Journal officiel .
M. Dominique Braye. Le Monde l'est souvent !
M. Christian Sautter, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous nous retrouverons la semaine prochaine, mercredi si vous le voulez bien, et vous connaîtrez alors les comptes de l'année 1999. Je crois que, en la matière, le Gouvernement fait preuve de transparence et de respect républicain à l'égard des deux assemblées parlementaires. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Monsieur le ministre, vous avez bien fait de venir, puisque vous avez répondu à six questions sur onze !

RÉFORME DES ÉTUDES MÉDICALES

M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.
Avant-hier, le premier secrétaire du parti socialiste vous demandait, monsieur le ministre, de clarifier votre message. Eh bien, la démarche de cet après-midi a finalement le même objet. En effet, je souhaite vous interroger sur la réforme des études médicales.
C'est un projet qui est attendu depuis deux ans ; c'est un projet qui a été programmé tant par M. le secrétaire d'Etat à la santé, voilà quelques mois, que par M. le Premier ministre, et c'est un projet qui était déjà fort bien engagé.
Projet attendu, puisqu'il y a, pour constater la nécessité d'une modification profonde de la formation des futurs médecins, un accord très général. Cette réforme est attendue tant par les enseignants, à travers la conférence des doyens, que par les étudiants et les médecins eux-mêmes, en particulier les généralistes, et par les résidents. Bref, il y a une demande de plus en plus impatiente.
D'ailleurs, pour répondre à cette impatience, monsieur le ministre, au mois de juin 1999, le secrétaire d'Etat à la santé, qui était, à l'époque, M. Bernard Kouchner, avait laissé entrevoir les grandes lignes de ce que lui, au moins, concevait comme réforme de la formation des médecins, en laissant entendre que ce projet de réforme serait rendu public à la fin de l'année 1999.
Et puis, le Premier ministre, M. Lionel Jospin, concluant les états généraux de la santé, au mois de juillet dernier, s'était engagé plus précisément en annonçant une réforme du second cycle mise en place en 2001 et une réforme du concours de l'internat mise en place en 2004. D'ailleurs, des instances diverses s'étaient mises au travail pour élaborer un projet de réforme.
Or, voilà quelques jours, à l'occasion de la cérémonie des voeux de votre ministère, vous avez pris une décision très surprenante et qui a beaucoup inquiété, à savoir la désignation d'un chargé de mission, mon collègue respecté et éminent le professeur Carpentier, qui lui-même d'ailleurs, semble-t-il, n'est pas tout de suite revenu de s'être vu confier cette mission.
Monsieur le ministre, j'ai trois questions à vous poser. D'abord, quelles raisons vous ont amené à faire abstraction du travail qui était sur le point de parvenir à son terme ? S'agit-il d'un désaveu par rapport au travail qui a été entrepris ? Quel est le champ de la mission que vous avez confiée au professeur Carpentier ? S'agit-il du premier ou du second cycle, de la réforme de l'internat ? Enfin et surtout, la lettre de mission est-elle enfin parvenue à M. Carpentier, après que vous avez obtenu, non sans difficulté, semble-t-il, la cosignature de Mme le secrétaire d'Etat à la santé ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le sénateur, les séances de questions d'actualité devant les deux assemblées sont, pour moi, un haut lieu de la démocratie. Toutefois, je ne crois pas, monsieur le sénateur, que nous devions, ni les uns ni les autres, passer notre temps à commenter des informations de presse qui sont de la désinformation.
M. André Maman. Ah !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Nous avons à lutter contre cette tendance qui fait que la vie politique est ballottée par la presse.
M. Philippe Marini. Tout à fait !
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Oubliez ce que vous avez lu dans la presse. Posez-moi des questions directes. C'est votre droit et j'ai le devoir de vous répondre.
M. Henri de Raincourt. Cela commence mal !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Je vous réponds. Le Premier ministre a engagé une profonde réforme des études médicales et il l'a annoncée lors de la clôture des états généraux de la santé. Cette réforme porte sur le deuxième cycle, dont le programme est en cours de révision, sur le concours de l'internat et sur l'organisation du troisième cycle de médecine générale. Ces points ont fait l'objet, depuis deux ans, d'une très large concertation, en liaison étroite avec le ministère de la santé, et nous sommes sur le point de concrétiser cet ensemble.
L'arrêté modifiant l'organisation du deuxième cycle sera présenté le 21 février au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le Conseil constitutionnel va être saisi par le secrétaire général du Gouvernement d'une demande de déclassement des dispositions relatives à la durée du résidanat pour nous permettre de la modifier par voie réglementaire. Voilà des faits précis. La durée du résidanat devrait être portée de deux ans et demi à trois ans pour les futurs médecins généralistes prenant leurs fonctions au 1er novembre 2000.
Par ailleurs, le Gouvernement proposera de rétablir par voie législative, vous aurez à en débattre, l'internat pour tous, c'est-à-dire de former l'internat des futurs médecins spécialistes comme des futurs médecins généralistes. Donc, monsieur le sénateur, le calendrier prévu initialement sera respecté.
La mission que nous allons confier au professeur Carpentier concerne le premier cycle de médecine et la formation des médecins pour la recherche. Aujourd'hui, celle-ci est insuffisante puisque trop peu de médecins font de la recherche.
Notre problème, c'est qu'il y a un gâchis. En effet, 80 % des élèves qui passent le concours de médecine et qui sont souvent de bonne qualité sortent au bout de deux ans sans rien. Nous avons décidé de nous attaquer à ce problème. Les lignes générales sont arrêtées. Le professeur Carpentier mènera une discussion technique pour mettre un terme à cette injustice, dont une autre conséquence est le fait qu'aujourd'hui nous recrutons - il faut que le pays le sache - les médecins, qui jouent un rôle essentiel dans la société, sur un QCM, c'est-à-dire un questionnaire à choix multiples, corrigé par un ordinateur. (Applaudissements sur les travées socialistes. - MM. Serge Franchis et André Dulait applaudissent également.)

VIOLENCES SCOLAIRES

M. le président. La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie et concerne la violence en milieu scolaire.
Monsieur le ministre, à l'annonce de votre plan, nous avons été partagés entre plusieurs sentiments : la tristesse, d'abord, devant la gravité de certains événements ; l'ironie, ensuite, car, avouons-le, qu'un ministre socialiste fasse entrer la police dans l'école et impose les cours de morale ne manque pas de saveur ni de courage, j'en conviens (Ah ! sur les travées socialistes) surtout lorsque son bras droit, M. Geismar, a été l'un des principaux leaders de mai 1968 ! (Sourires et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Tristesse et ironie donc, mais aussi déception. On ne traite pas un problème de cette gravité dans l'urgence médiatique.
Une fois de plus vous n'avez qu'une réponse : toujours plus de moyens.
M. Jean Chérioux. Et pour quel résultat ?
M. Jean-Claude Carle. Si telle était la solution, vous ne seriez pas obligé de présenter un deuxième plan anti-violence en deux ans.
Nous sommes inquiets de voir que la violence devient un fait accepté. Déjà, le développement de polices d'assurance contre le racket scolaire nous avait fait craindre une banalisation. Aujourd'hui, nous redoutons que l'action des pouvoirs publics ne se contente de rendre supportable la violence en milieu scolaire, au lieu de la prévenir.
Monsieur le ministre, une fois de plus, vous posez les bonnes questions sans apporter les bonnes réponses. (Exclamations sur les travées du RPR.) Ce nouveau plan antiviolence est un véritable constat d'échec et d'impuissance pour le Gouvernement.
Vous avez déclaré, monsieur le ministre, que le courage en politique, c'est d'oser dire que l'on est parfois d'accord avec son adversaire. Je vous prends au mot en vous posant plusieurs questions, qui sont aussi des propositions.
Tout d'abord, d'où viennent les 7 000 postes supplémentaires annoncés ? S'agit-il de redéploiements ou de créations qui auraient échappé au contrôle du Parlement ? Dans l'affirmative, quand allez-vous cesser de dépenser plus pour dépenser mieux ?
Ensuite, êtes-vous prêt à changer de méthode et à mettre en place des contrats d'établissement, lycée par lycée, collège par collège, école par école, associant, autour d'un projet commun, l'ensemble des acteurs de la communauté éducative ?
Parmi ces acteurs figure la famille,...
M. René-Pierre Signé. Ah !
M. Jean-Claude Carle. ... que vous oubliez souvent dans vos propos, monsieur le ministre, et qui doit être considérée dans sa double dimension : parents d'élèves, bien sûr, mais aussi cellule de base de la société (Très bien ! sur les travées de l'Union centriste), avec les grands-parents, notamment, qui pourraient jouer un rôle fondamental mais que l'on oublie d'associer à la réflexion sur l'éducation.
Etes-vous disposé à favoriser un volontariat permettant aux parents et aux grands-parents d'apporter leur soutien et leur expérience à la vie scolaire en s'impliquant dans la vie de l'établissement et à faciliter une solidarité entre générations qui fait défaut ? C'est ainsi que l'éducation nationale remplira sa vraie mission ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le sénateur, comme je l'ai dit, ce problème de lutte contre la violence scolaire nécessite un engagement de tout le pays et la mobilisation de tous, sans esprit partisan. (Très bien ! sur plusieurs travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Très bien ! Il est temps !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Pour nous, socialistes, la première chose, c'est l'égalité des chances.
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Jean Chérioux. Pour nous aussi !
M. Dominique Braye. Cela n'a jamais été aussi vrai qu'en ce moment !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Je vous parle de nous, vous, vous parlez de vous !
M. Alain Gournac. C'est vrai pour nous !
M. le président. Seul M. le ministre a la parole !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. La première des choses, c'est l'égalité devant la sécurité. Quant au problème que vous évoquez, je considère que, lorsque l'école est menacée, c'est la République qui est menacée, et qu'un certain nombre de valeurs, quels que soient les propos qui ont pu être tenus à cet égard, doivent être enseignées à l'école.
D'ailleurs, lorsque j'ai dit qu'il fallait enseigner la morale civique à l'école,...
M. Dominique Braye. Ce n'est pas ce que vous disiez avant !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. ... personne ne m'a découragé ! Oui, il faut enseigner la morale civique à l'école (Exclamations sur les travées du RPR. - Mme Brisepierre applaudit), et 92 % des Français, à en croire un sondage, m'approuvent.
M. Jean Chérioux. On y avait pensé avant vous...
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous avez voté toutes les dispositions budgétaires prévues dans ce plan violence dans la mesure où ce dernier était déjà programmé, lors de l'examen du budget.
Comme je l'ai indiqué à l'occasion de la discussion budgétaire, le premier plan de lutte contre la violence a donné un certain nombre de résultats, même s'il n'a pas tout réglé : la violence, qui, en valeur absolue, est trop élevée, s'est arrêtée de croître dans les établissements scolaires - c'est une nouveauté - et ce grâce non pas au ministre de l'éducation nationale mais à l'action, sur le terrain, des équipes, des chefs d'établissement, des enseignants, des personnels, des parents d'élèves, qui se sont mobilisés en divers endroits pour faire reculer la violence.
Notre plan vise à donner les mêmes moyens à tous les établissements menacés par ce fléau pour leur permettre d'avoir la même réussite.
Vous me parlez de mobilisation de la famille, monsieur le sénateur. Eh bien, je vais dans quelques instants rejoindre les fédérations de parents d'élèves, justement pour discuter de cette mobilisation !
J'ai dit que la mobilisation devait aussi être celle de l'ensemble du pays. La semaine prochaine, je recevrai les présidents de conseils régionaux concernés par les problèmes de violence,...
M. Dominique Braye. Trop tard !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. ... les présidents de conseils généraux, les maires, les associations, les parents d'élèves, un certain nombre de personnalités qui veulent s'engager.
Je ne citerai pas de noms aujourd'hui par crainte que certains ne dénoncent des gadgets. En tout cas, je reçois depuis une semaine des lettres spontanées de hautes personnalités françaises me faisant part de leur souhait de s'engager dans la lutte contre ce problème de violence.
Je demande à toute la représentation nationale de soutenir cette action et de formuler des suggestions. Le Gouvernement ne veut pas faire de ce problème un clivage politique, car - je vous le dis solennellement - il s'agit d'un problème d'ordre culturel. Mais ce n'est pas la culture de l'Europe.
M. Jean-Pierre Raffarin. Il concerne toutes les régions !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. C'est le symbole de quelque chose venu d'ailleurs.
M. Gérard Cornu. De mai 1968 !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Monsieur le sénateur, les archives de mon ministère font état de mesures proposées par l'un de vos collègues, ancien ministre de l'intérieur, à mon prédécesseur, qui les a refusées, alors qu'il était encore possible d'enrayer le problème.
M. Dominique Braye. Vous êtes responsable, pas nous ; il faut assumer !
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Je ne veux pas en faire un sujet de débat. Je veux que la France entière se mobilise pour faire reculer ce fléau. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Avant d'aborder la suite de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Jean-Claude Gaudin.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE

M. le président. J'informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de procéder à la désignation du sénateur appelé à remplacer M. Jean-Marie-Poirier, démissionnaire, au sein de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.
En conséquence, j'invite la commission des affaires culturelles à présenter un candidat.
La nomination du sénateur appelé à siéger au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du règlement.

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GENS DU VOYAGE

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi n° 460 (1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

Article 9 (suite)



M. le président.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 9, dont nous avons commencé l'examen ce matin.
Tous les amendements et sous-amendements en discussion commune sur cet article ont été présentés par leurs auteurs.
La commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Je rappelle que le Sénat a repoussé le sous-amendement n° 45 rectifié et adopté le sous-amendement n° 75, qui affectent l'amendement n° 68.
Je vais maintenant mettre aux voix le sous-amendement n° 76.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je tiens à apporter quelques précisions pour éviter toute confusion.
Dans la mesure où la commission des lois est prononcée contre l'amendement n° 68 du Gouvernement, je souhaite que le Sénat rejette non seulement cet amendement, mais la totalité des sous-amendements qui l'affectent, à savoir les sous-amendements n°s 75, 76, 77 et 78 de M. Charasse. Toutefois, ceux-ci ayant été également déposés, dans la même rédaction, à l'amendement n° 25 rectifié, nous pourrons nous prononcer à leur égard lorsque ce dernier amendement sera mis aux voix, et j'indique que la commission s'en remettra alors à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 76, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 77, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 78, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 68, repoussé par la commission.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 69, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 70, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 30 rectifié, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. Robert Bret. Le groupe communiste républicain et citoyen votre contre.
M. Jean-Jacques Hyest. Je vote également contre ce sous-amendement.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 71, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 72, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 25 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 31, 32, 33 et 34 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, les amendements n°s 52, 63 et 64 n'ont plus d'objet.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 9



M. le président.
Par amendement n° 65, MM. Braye, Doublet, Gérard, Gournac, Goulet, Larcher, Lassourd, Murat, Peyrat et Darniche proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le droit au logement n'autorise pas une occupation illicite de terrains ou la construction d'habitations hors des zones prévues à cet effet par le plan d'occupation des sols. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Alors que l'on assiste à la sédentarisation d'une partie des gens du voyage, il est inacceptable que certains d'entre eux construisent des habitations de fortune sur des terrains agricoles, donc en zone non constructible, faisant fi non seulement du plan d'occupation des sols mais aussi des règles d'urbanisme, qui veulent, nous le savons tous, qu'on ne construise qu'en zone constructible et après obtention d'un permis de construire délivré par le maire.
Les maires, contraints ainsi d'aller en justice pour faire respecter le droit, se voient parfois déboutés par application d'une jurisprudence qui donne raison aux gens du voyage au nom du droit au logement.
C'est le cas, par exemple, d'un arrêt de la Cour de cassation du 28 mai 1997, qui a confirmé l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, en reconnaissant coupables du délit de construction illégale des familles de gens du voyage qui avaient construit en zone agricole et en zone de servitude publique, en bordure de l'A 13, des cabanons qui sont devenus au fil du temps de belles propriétés, mais en les autorisant à se maintenir dans ceux-ci.
Cette décision pour le moins perverse, qui remet en cause les pouvoirs du maire en matière d'urbanisme, se fonde sur l'argument suivant : le droit au logement est une norme juridique supérieure au plan d'occupation des sols.
Cet arrêt, profondément incohérent, introduit un grave déséquilibre dans la hiérarchie des normes juridiques et est porteur d'une jurisprudence dangereuse. Comment nos concitoyens pourraient-ils d'ailleurs le comprendre et l'admettre, eux qui, quand ils veulent ajouter un Velux ou une terrasse à leur maison, doivent demander au maire un permis de construire qu'ils peuvent se voir refuser ?
Pourquoi la loi s'appliquerait-elle avec toute sa rigueur au commun des citoyens et non à une certaine catégorie de citoyens qui a décidé de pratiquer la politique du fait accompli ?
Une telle jurisprudence, née d'ailleurs d'une confusion des normes introduite par l'article 28 de la loi Besson, qui mettait en place le droit au logement, doit manifestement être corrigée, car elle menace l'équilibre juridique de notre pays.
C'est inadmissible. Nos concitoyens ne comprennent plus que l'on puisse ainsi appliquer la loi de façon différenciée et les élus locaux ne supportent plus de voir ainsi leur autorité quotidiennement bafouée.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demande d'adopter cet amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je remercie M. Braye d'avoir soulevé cette question. Je constate cependant qu'il a satisfaction puisque, à l'article 8, nous avons voté un amendement selon lequel toutes les dispositions des documents d'urbanisme s'imposent, notamment à l'aménagement des terrains familiaux.
Par conséquent, je souhaite que M. Braye retire son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
J'ajouterai seulement que le droit au logement est reconnu comme étant un droit à valeur constitutionnelle et que le vote éventuel d'une disposition de ce type n'altérerait pas ce droit.
La jurisprudence, quand elle a abouti à ce qui peut apparaître à certains comme une tolérance, a toujours été légitimée par les juridictions comme étant une prise en compte de l'état de nécessité.
D'où l'intérêt que tous les moyens de cette loi soient utilisés pour rendre les capacités d'accueil suffisantes et faire en sorte que cet état de nécessité résultant d'un défaut de capacité d'accueil ne puisse plus être constaté par les juridictions. Seule cette voie est de nature à répondre au problème qui a été soulevé.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Braye ?
M. Dominique Braye. Je vais le retirer, non sans avoir dit auparavant à M. le secrétaire d'Etat que sa réponse ne me satisfait pas. Il s'agit en effet de personnes en voie de sédentarisation qui ne demandent aucunement une aire d'accueil.
Le prix du terrain étant manifestement moins cher en zone non constructible, ils achètent un terrain en zone agricole, y construisent un petit cabanon qu'ils « solidifient », comme on dit dans les départements d'outre-mer, pour en faire de belles propriétés qui se trouvent ainsi construites illégalement en zone agricole, mais que manifestement la Constitution - M. le secrétaire d'Etat vient de le dire - leur permet de conserver.
Il suffirait de donner ce « tuyau » à l'ensemble de nos concitoyens, et ainsi les règles d'urbanisme ne serviraient plus à rien !
M. Jean-Pierre Schosteck. C'est très dangereux !
M. Jacques Legendre. C'est un vrai problème !
M. le président. L'amendement n° 65 est retiré.
Par amendement n° 66, MM. Lassourd, Braye, Le Grand et Bizet proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas de stationnement illicite sur le domaine public appartenant à l'Etat, notamment le domaine maritime, le préfet, se saisissant lui-même, ou alerté par les maires des communes riveraines, prononce l'expulsion, et assure l'exécution de son arrêté d'expulsion. »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Cet amendement vise essentiellement à permettre au préfet, sur proposition du maire, d'expulser des gens du voyage qui se seraient installés sur le domaine maritime et dans les zones protégées, y provoquant des dégâts importants.
C'est, je crois, Mme Boyer qui a dit, hier, qu'il serait souhaitable que le préfet puisse très rapidement mettre fin à cette occupation dans les zones protégées.
Quant à vous, monsieur le président, vous êtes bien placé pour savoir qu'il faut parfois des dizaines d'années pour faire repousser une végétation sur le domaine maritime. Or, huit jours d'occupation par les gens du voyage peuvent réduire à néant tous les efforts consentis, souvent à grands frais.
C'est donc pour permettre au préfet, face à de telles situations, de prononcer l'expulsion sans attendre le temps que nécessite la voie juridique que je propose cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. M. Braye pose un problème qui a souvent été évoqué au cours de ce débat. Il est vrai que, sur le plan juridique, l'intervention du juge semble s'imposer.
M. Jean-Jacques Hyest. Oui !
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Mais, comme nous avons donné satisfaction à M. About en adoptant le sous-amendement n° 30 rectifié, qui procédait du même esprit, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est irréductiblement attaché au respect du principe fondamental de l'intervention d'une décision de justice préalable à l'expulsion.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 66.
M. Jean-Jacques Hyest. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Je comprends bien les réactions des élus qui sont confrontés à certaines difficultés. Cela vaut aussi pour les chefs d'entreprise visés par le sous-amendement de notre ami M. About, pour les agriculteurs, pour toutes sortes de gens.
Mais on nous dit par ailleurs que le préfet n'exécute pas les décisions de justice, ce dont, bien souvent, nous nous plaignons amèrement.
On peut essayer d'accélérer les procédures, mais cela nous renvoie à un autre débat, celui sur la justice.
Si l'on donne à l'autorité administrative le pouvoir de prendre des décisions d'expulsion et d'exécuter ses propres décisions, outre, bien entendu, le contentieux administratif qui en naîtra, car il faudra apprécier si c'est utile, si c'est nécessaire, etc., on entre dans une voie quelque peu délicate.
Cela étant, je comprends parfaitement qu'ayant accepté le sous-amendement de M. About visant des terrains privés la majorité au Sénat en accepte un autre qui concerne des terrains qui appartiennent au domaine maritime ou au domaine lacustre. C'est logique.
Simplement, je la mets en garde, au nom du respect d'un certain nombre de principes, notamment celui de la séparation des pouvoirs, et de ce qui fait la légalité des décisions en droit français.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je veux simplement dire à M. le secrétaire d'Etat que nous attendons de la navette des réponses très concrètes aux problèmes que posent ces amendements.
M. le secrétaire d'Etat a fait beaucoup de propositions en la matière. Mettons à profit la navette pour approfondir le sujet !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je remercie M. le rapporteur, qui vient de confirmer la clarté des engagements que j'ai eu l'occasion de prendre au nom du Gouvernement.
Le Gouvernement a déploré l'adoption du sous-amendement de M. About, car il constitue une entorse à un principe fondamental que le Gouvernement souhaite défendre. Il ne peut pas, dans ces conditions, avoir une attitude différente sur l'amendement n° 66, qui serait une répétition de cette entorse à un principe fondamental.
Que l'on me permette toutefois de soulever une certaine contradiction dans l'analyse des auteurs de l'amendement. Je les ai en effet entendus expliquer que l'une des difficultés majeures - nous nous efforçons de la surmonter - était que, certes, il y avait bien des décisions de justice, mais que les préfets ne les faisaient pas appliquer. Et voilà que maintenant on aurait confiance dans l'application d'une décision qui émanerait non pas de la justice mais du préfet lui-même ! Le corps préfectoral sera sans doute sensible à cet élan tardif de confiance qui prend la forme d'un rattrapage à la fin de l'examen du texte. Moi, j'y vois un paradoxe que je ne pouvais pas ne pas souligner.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, de suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Nous sommes confrontés à une difficulté juridique. Cette difficulté, à l'heure actuelle, ni la décision de justice ni l'intervention du préfet ne nous permettent de la surmonter, nous le constatons.
Monsieur le secrétaire d'Etat, concevez que, dans l'état actuel des choses, un texte de cette nature, qui soulève sur la totalité du territoire, et peut-être davantage encore dans certaines portions de ce territoire, les problèmes que vous savez, ne puisse pas passer sous silence ce sentiment d'exaspération et ne pas tenir compte de la nécessité d'y répondre par des mesures concrètes.
Enfin, je veux attirer votre attention sur le fait que, si le préfet ne faisait pas ce que l'on lui enjoindrait de faire par cet article, la responsabilité de l'Etat serait susceptible d'être mise en cause.
M. le président. L'amendement n° 66 est-il maintenu, monsieur Braye ?
M. Dominique Braye. Oui, monsieur le président.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 66, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

Article 9 bis



M. le président.
« Art. 9 bis. _ L'article 984 du code rural est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque ces travailleurs et les membres de leur famille sont des personnes mentionnées à l'article 1er de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, l'employeur est tenu de mettre à leur disposition, en cas de manque de disponibilités dans l'aire d'accueil ou de passage ou d'absence de ces dernières dans un périmètre compatible avec les obligations liées à l'exécution du contrat de travail, les emplacements nécessaires au stationnement de leur résidence mobile sur le domaine de l'exploitation ou tout autre terrain dont il a la jouissance. »
Par amendement n° 27, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet article a été ajouté par l'Assemblée nationale pour imposer des obligations spécifiques aux employeurs de travailleurs saisonniers. Ces besoins étant prévisibles, ils peuvent parfaitement s'inscrire dans le schéma départemental.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'était laissé ébranler, si ce n'est convaincre, par l'argumentation qu'avait développée l'auteur de l'amendement, lequel avait expliqué très précisément le problème posé aux saisonniers de la viticulture au moment des vendanges. Son texte avait pour ambition de faire prendre en compte cette particularité.
Le Gouvernement ne s'étant pas opposé à l'adoption de cet amendement, il lui est difficile d'approuver sa suppression.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, repoussé par le Gouvernement.
M. Jean-Claude Peyronnet. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 9 bis est supprimé.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. _ I. _ Les schémas départementaux établis en application de l'article 28 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, publiés antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi, font l'objet d'un nouvel examen dans les conditions et délais prévus à l'article 1er ci-dessus.
« II. _ L'article 28 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée est abrogé. Toutefois, dans les départements qui ne disposent pas d'un schéma départemental approuvé dans les conditions définies à l'article 1er ci-dessus, les deux derniers alinéas de cet article restent en vigueur. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 10



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 36, M. Darniche propose d'insérer, après l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« Un recensement des populations composant la communauté des gens du voyage est organisé au plus tard un an après la promulgation de la présente loi. »
Par amendement n° 67, MM. Braye, Doublet, Goulet, Gournac, Larcher, Lassourd, Murat et Darniche proposent d'insérer, après l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« La Commission nationale consultative des gens du voyage publie tous les cinq ans, avec l'aide de l'INSEE, un rapport dressant un état statistique et sociologique de la population des gens du voyage en France.
« Ce rapport doit apporter la meilleure information possible pour l'élaboration et la révision du schéma national visé à l'article premier et des schémas départementaux visés au II de la présente loi. »
La parole est à M. Darniche, pour présenter l'amendement n° 36.
M. Philippe Darniche. Nous proposons que soit organisé un recensement des populations composant la communauté des gens du voyage au plus tard un an après la promulgation de la présente loi.
En effet, nous prenons aujourd'hui un certain nombre de mesures, mais nous ne connaissons pas bien les populations concernées. Il conviendrait de pallier cette absence de chiffres réels, car le dernier recensement concernant les gens du voyage remonte à l'année 1960.
La réussite de ce projet de loi passe par une meilleure connaissance sociologique des populations qui composent cette communauté.
M. le président. La parole est à M. Braye, pour défendre l'amendement n° 67.
M. Dominique Braye. C'est une anomalie dans notre pays, où l'administration - par exemple l'administration fiscale - fonctionne à tous niveaux à grand renfort de statistiques précises et régulièrement actualisées que, depuis près d'une quarantaine d'années - depuis 1961 exactement - aucun recensement de la population des gens du voyage n'ait été effectué. En cette absence, le législateur et les pouvoirs publics sont contraints de se référer à de simples estimations dont la fiabilité me semble contestable : de 79 452 personnes exactement en 1961, on passe à une estimation de 250 000 personnes en 1999.
L'administration des finances, dont relève l'INSEE, chargé de l'élaboration des statistiques, nous objectera, comme elle l'a déjà fait, la difficulté qu'il y aurait à réaliser un tel recensement.
Je l'ai d'ailleurs officiellement interrogée sur cette question le 21 octobre dernier, sur la base des résultats du dernier recensement général de la population française. Il m'a été répondu qu'on ne pouvait différencier les gens du voyage, et qu'on peut seulement dénombrer les personnes résidant dans des habitations mobiles, ce qui ne correspond pas, j'en conviens aisément, à la définition des gens du voyage.
Mais à partir du moment, mes chers collègues, où l'on rédige un projet de loi consacré strictement aux gens du voyage et rien qu'à eux, comment peut-on être incapable de les différencier et donc de les dénombrer ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, n'y a-t-il pas contradiction entre le Gouvernement, qui présente un projet de loi relatif aux gens du voyage, et une administration qui s'avoue tout à fait incapable de les identifier et de les dénombrer ?
Au moment où le législateur doit se prononcer sur un texte qui aura des conséquences financières non négligeables, comme nous l'avons dit à plusieurs reprises au cours de cette discussion, cette lacune me gêne, comme d'ailleurs aussi l'absence de chiffrage du coût global de ce projet de loi pour la collectivité, notamment en matière sociale.
Comment peut-ont prendre une décision éclairée sur des bases aussi floues ?
C'est pourquoi je demande la mise en place d'un dispositif technique simple qui permette aux pouvoirs publics de disposer d'un tableau de bord pour conduire cette politique.
Ce qu'il a été possible de faire en 1961, monsieur le secrétaire d'Etat, à une époque où les moyens informatiques et statistiques étaient balbutiants, je ne vois pas pourquoi il ne serait pas possible de le réitérer aujourd'hui avec les moyens dont nous disposons.
Je vous demande, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 36 et 67 ?
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. D'abord, la commission observe que les dispositions proposées relèvent du domaine réglementaire.
Ensuite, elle rappelle que les populations en question ont été intégrées, lors du dernier recensement, dans les communes de rattachement lorsqu'elles étaient d'origine française. A ce propos, nous avons souhaité ouvrir le débat avec M. le secrétaire d'Etat sur la modernisation des titres de circulation.
Cela étant dit, la commission s'en remet à la sagesse du Sénat, même si l'élaboration des schémas départementaux devrait permettre, par coordination, d'avoir une meilleure approche du monde des gens du voyage.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est défavorable, d'une part parce que ces dispositions relèvent du domaine réglementaire, d'autre part, parce que ces amendements sont satisfaits. En effet, le décret du 22 mai 1998, qui a fixé les conditions de l'organisation du recensement général de mars 1999, a expressément prévu que les personnes résidant dans des habitations mobiles seront comptabilisées dans la population municipale de la commune où elles se trouvent le jour du recensement, ce qui, bien sûr, a été fait.
Aller au-delà s'inscrit à l'encontre de la démarche d'intégration qui refuse les stigmatisations. Vous serez très rapidement contraint d'en arriver à des interrogations sur l'origine ethnique des gens du voyage sédentarisés. Ce n'est pas du tout raisonnable, et ce serait ouvrir la voie à une démarche au terme de laquelle nos valeurs fondamentales, largement partagées dans notre République, seraient bafouées.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10, et l'amendement n° 67 n'a plus d'objet.

Article 11



M. le président.
« Art. 11. _ Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de la présente loi. » - (Adopté.)

Intitulé du projet de loi



M. le président.
Par amendement n° 53, MM. Braye et Darniche proposent, dans l'intitulé du projet de loi, de remplacer les mots : « à l'accueil » par les mots : « au stationnement ».
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Nous avons eu l'occasion de débattre longuement de ce problème à l'occasion de l'examen de certains sous-amendements.
Je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 53 est retiré.

Seconde délibération



M. Jacques Larché,
président de la commission des lois. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Monsieur le président, en application de l'article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, la commission demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 1er, qui a été précédemment rejeté.
J'indique que, en cas d'accord du Gouvernement, la commission s'est déjà réunie pour proposer un texte susceptible d'être soumis à la délibération du Sénat.
M. le président. La commission des lois demande qu'il soit procédé à une seconde délibération de l'article 1er du projet de loi.
Je rappelle qu'en application de l'article 43, alinéa 4, du règlement, tout ou partie d'un texte peut être renvoyé, sur décision du Sénat, à la commission, pour une seconde délibération, à condition que la demande de renvoi ait été formulée ou acceptée par le Gouvernement.
Quel est l'avis du Gouvernement sur la demande de seconde délibération formulée par la commission des lois ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut qu'accéder à cette demande - il en avait d'ailleurs lui-même exprimé le souhait - faute de quoi le projet de loi serait décapité, en l'absence de l'article 1er.
M. le président. Je rappelle en outre que, sur la demande de seconde délibération, ont seuls droit à la parole l'auteur de la demande ou son représentant, un orateur d'opinion contraire, le président ou le rapporteur de la commission et le Gouvernement. Aucune explication de vote n'est admise.
Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, acceptée par le Gouvernement.

(La seconde délibération est ordonnée.)
M. le président. Nous allons donc procéder à la seconde délibération.

Article 1er



M. le président.
L'article 1er a été supprimé par le Sénat.
Mais, par amendement n° A1, M. Delevoye, au nom de la commission des lois, propose de le rétablir dans la rédaction suivante :
« I. - Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles.
Sont considérées comme des résidences mobiles, au sens de la présente loi, les caravanes affectées à l'habitat permanent de leurs occupants ainsi que tout autre abri mobile ayant la même destination.
« I bis . - Un schéma national d'accueil des gens du voyage définit les conditions d'accueil des gens du voyage dans le cadre de rassemblements traditionnels ou occasionnels.
Dans le respect des orientations de la politique nationale d'aménagement et de développement du territoire, le schéma national fixe la liste des terrains susceptibles d'être utilisés à cette fin et prévoit les aménagements nécessaires qui devront être réalisés sur ces terrains.
Le Conseil national de l'aménagement et du développement du territoire, créé par la loi n° 95-115 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 et la Commission nationale consultative des gens du voyage sont associés à l'élaboration du projet de schéma national d'accueil des gens du voyage. Ils donnent leur avis sur ce projet.
Les directives territoriales d'aménagement mentionnées à l'article L. 111-1-1 du code de l'urbanisme lorsqu'elles précisent les objectifs de l'Etat en matière de localisation des terrains d'accueil des gens du voyage dans le cadre des grandes migrations traditionnelles prennent en compte les orientations du schéma national prévu à l'article 1er de la présente loi.
« II. - Dans chaque département, au vu d'une évaluation préalable des besoins et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques, un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées. Il précise la destination de ces aires et leur capacité. Il recense les autorisations délivrées sur le fondement de l'article L. 443-3 du code de l'urbanisme. Il définit la nature des actions à caractère social menées au bénéfice des gens du voyage qui fréquentent les aires permanentes d'accueil.
« III. - Le schéma départemental est élaboré par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général. Après avis du conseil municipal des communes concernées et de la commission consultative prévue au IV, il est approuvé conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil général dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi. Il fait l'objet d'une publication.
Le schéma départemental est révisé selon la même procédure au moins tous les six ans à compter de sa publication.
« IV. - Dans chaque département, une commission consultative, composée des représentants de la région, des représentants du département, des représentants des communes et de leurs groupements, des représentants des services de l'Etat, des représentants des gens du voyage et des personnalités qualifiées, est associée à l'élaboration et à la mise en oeuvre du schéma. Elle est présidée conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et par le président du conseil général, ou par leurs représentants.
« La commission consultative établit chaque année un bilan d'application du schéma. Elle peut désigner un médiateur chargé d'examiner les difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre de ce schéma et de formuler des propositions de règlement de ces difficultés. Le médiateur rend compte à la commission de ses activités.
« V. - En région d'Ile-de-France, une commission régionale composée des représentants de l'Etat dans les départements, du président du conseil régional et des présidents de conseils généraux, ou de leurs représentants, assure, le cas échéant, la coordination des travaux d'élaboration des schémas départementaux ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs dates de publication. Elle se réunit sur l'initiative du représentant de l'Etat dans la région, sur la demande de l'un de ses membres ou d'une commission consultative départementale.
Les propositions de la commission régionale sont soumises pour avis aux commissions consultatives départementales concernées.
« VI. - Hors la région d'Ile-de-France, une commission interdépartementale composée des représentants de l'Etat dans les départements et des présidents de conseils généraux concernés, ou de leurs représentants, assure, le cas échéant, la coordination des travaux d'élaboration des schémas départementaux de départements limitrophes ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs dates de publication. Elle se réunit sur la demande de l'un de ses membres ou d'une commission consultative départementale.
« Les propositions de la commission interdépartementale sont soumises pour avis aux commissions consultatives départementales concernées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Cet amendement, visant à rétablir l'article 1er, reprend les amendements que le Sénat avait adoptés au cours de sa première délibération.
J'en rappelle les points : la définition des résidences mobiles, l'élaboration du schéma national, la prise en compte des directives territoriales d'aménagement, le recensement des terrains familiaux dans le schéma départemental, la suppression du dernier mot laissé au préfet pour l'approbation du schéma départemental, la clarification de la coordination régionale ainsi que la clarification de la composition de la commission consultative.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement reste hostile à la rédaction de l'article 1er telle qu'elle est présentée par la commission dans la mesure où il décèle dans la suppression de la possibilité de publication du schéma départemental par le préfet seul, en cas de refus du président du conseil régional, une possibilité de blocage absolu de la mise en oeuvre effective de la loi, ce qui, bien évidemment, n'est pas satisfaisant. Ainsi, les départements dotés d'un schéma et qui offriraient des structures d'accueil seraient débordés par une population qui ne serait pas accueillie dans les départements où ce schéma n'aurait pas été voté et appliqué.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° A 1.
M. Jean-Claude Carle. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Carle.
M. Jean-Claude Carle. Avant de nous prononcer en seconde délibération sur l'article 1er, qui est l'article clé du projet de loi, tout comme l'article 9, je voudrais donner quelques explications de vote qui vaudront pour l'ensemble du texte, ce qui nous permettra de gagner du temps.
Ce texte, je l'ai dit hier, monsieur le secrétaire d'Etat, est important car il touche à un véritable problème de société, un problème d'actualité. Il mérite d'être abordé avec sérénité, sans passion excessive, car il concerne le quotidien de nos concitoyens.
Je le répète, ce texte était incomplet et inadapté. Il a été amélioré par les amendements de la commission dont certains vont dans le sens que nous souhaitons. C'est vrai en particulier pour le schéma national ; c'est vrai aussi pour la suppression du paragraphe I de l'article 3.
En revanche, ce texte nous pose encore des problèmes sur la clarification et le rôle des différents partenaires, notamment le rôle du département. Hier, j'ai présenté un amendement qui a été rejeté. Aujourd'hui, on rend plus complexe encore le problème en introduisant les régions qui n'ont aucune compétence en ce domaine. C'est une mauvaise solution : lorsqu'un problème est déjà complexe, ce n'est pas en multipliant les partenaires que l'on fait avancer les choses !
En revanche, il est clair que les responsabilités et les compétences relèvent, bien sûr, des communes et surtout de l'Etat. Nous attendons, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'Etat affirme et assume ses responsabilités et ses compétences.
C'est vrai, notamment, dans le domaine financier, que ce soit au niveau des investissements ou du fonctionnement, et je souhaite que la navette qui aura lieu puisse encore améliorer la situation.
Mais le plus important n'est pas le domaine financier. Le plus important est de faire respecter la loi chaque fois qu'elle est bafouée et que le préfet, qui est le représentant de l'Etat dans le département, fasse respecter la loi et prenne les dispositions et les mesures nécessaires s'il n'en est pas ainsi, qu'il s'agisse de stationnements illégaux, de dégradations ou, qu'il s'agisse de la transparence fiscale qui a été évoquée hier. C'est un problème, il est vrai difficile, mais tout citoyen, quels que soient son statut social et son mode de vie, doit être traité avec équité par l'Etat.
C'est ce respect de la loi, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, qui a justifié notre position en première délibération. Il ne s'agissait pas d'un quelconque mouvement d'humeur.
Le Gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, doit clairement prendre l'engagement de donner aux préfets les moyens de faire respecter la loi, sinon ce texte, comme les précédents, n'aura aucun effet, aucune efficacité et les élus que nous avons l'honneur de représenter seront encore plus exposés. Je crois que M. Charasse l'a très bien dit ce matin !
Monsieur le secrétaire d'Etat, de votre engagement dépend notre vote, en particulier le mien, sur un texte difficile, il est vrai. Je voudrais saluer le travail accompli par nos deux rapporteurs sur ce texte très complexe.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° A 1, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 1er est rétabli dans cette rédaction.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Legendre pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, deux ans quasiment jour pour jour après l'adoption par notre assemblée de la proposition de loi relative au stationnement des gens du voyage, nous sommes sur le point d'adopter un nouveau texte qui, nous l'espérons, sera quant à lui promulgué.
Ce texte, dûment amendé par un Sénat guidé par les excellentes propositions de notre rapporteur M. Jean-Paul Delevoye, est un texte équilibré.
Il est équilibré car M. le rapporteur a su maintenir de la mesure dans la passion, qualité dont il a fait maintes fois preuve.
Ce projet de loi, dans la rédaction que nous adoptons aujourd'hui, sera, nous l'espérons, à même d'apporter des solutions pour l'accueil des gens du voyage.
Parallèlement, il donne aux maires, même si nous étions nombreux à être tentés d'aller plus loin, les moyens d'engager une lutte plus efficace contre les stationnements sauvages.
En effet, l'interdiction de stationnement, dès lors qu'une aire d'accueil a été prévue, et, surtout, la procédure de référé accélérée ainsi que le rétablissement de la compétence du juge administratif pour les occupations illicites du domaine public sont d'indéniables avancées.
Il n'était pas nécessaire d'aller plus loin, non parce que nous prônons le laxisme, mais simplement parce que les lois existent déjà. Il suffit de les faire appliquer. Ainsi que le soulignait hier notre collègue M. Bernard Murat, il est de la responsabilité de l'Etat et de ses représentants de faire tout simplement respecter la loi.
Vous serez donc jugé sur les actes, monsieur le secrétaire d'Etat. Des droits importants sont octroyés aux gens du voyage. Des devoirs et des responsabilités en découlent, qui devront être scrupuleusement observés. Le Gouvernement doit en être le garant. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Tout au long de nos débats, nous avons cheminé entre la nécessité de trouver des solutions satisfaisantes pour l'accueil des gens du voyage - c'est le volet des schémas départementaux et du schéma national, l'Etat devant assumer ses responsabilités pour les grands rassemblements, monsieur le secrétaire d'Etat - et la nécessité d'éviter que les collectivités, mais aussi les particuliers, ne soient en butte à un stationnement illicite qui est de plus en plus insupportable.
Nous disposions depuis dix ans d'une loi. Ses effets ont été insuffisants. Pourtant, elle prévoyait déjà un schéma départemental et imposait des obligations aux communes. Elle n'a pas atteint ses objectifs, mais je pense que désormais le développement de l'intercommunalité dans le cadre départemental devrait permettre de trouver des solutions.
Le dispositif ne doit pas reposer sur les seuls représentants de l'Etat, ou alors l'Etat doit prendre ses responsabilités et ne plus associer financièrement les collectivités locales, ce qui, après tout, est un point de vue concevable.
Je crois que le texte que le Sénat va vraisemblablement adopter parvient à un équilibre.
Au-delà de ce texte, j'ajouterai - ce n'est pas nouveau, cela remonte même à la nuit des temps ! - que ceux qui voyagent sont parfois considérés par la population sédentaire comme des gens au comportement différent et sont donc souvent rejetés.
Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il y avait un recensement. Je pense néanmoins que nous ne connaissons pas bien cette population des gens du voyage. Elle évolue et, au milieu des traditionnelles populations tziganes ou gitanes, il y a des foyers de criminalité et de délinquance. Des affaires d'une extrême gravité l'ont montré. Je citerai le gang des châteaux. Mais d'autres grands trafics internationaux, notamment en matière de drogue, ont pour source des camps de gens du voyage.
Cela ne relève pas de votre responsabilité, monsieur le secrétaire d'Etat, mais il faudrait demander au ministère de l'intérieur ou au ministère de la défense de poursuivre cette grande délinquance, d'autant plus que ces personnes disposent souvent des moyens importants.
Ces populations ont droit, je l'ai dit, au respect de leur mode de vie, au logement, à condition qu'elles respectent les règles de la vie en société. Or beaucoup de maires nous disent que, hélas ! aujourd'hui, ces personnes ont un comportement menaçant qui n'est pas citoyen que ni les maires ni l'ensemble de la nation ne peuvent accepter.
Ces populations ont le droit de vivre comme elles l'entendent, mais, parallèlement, il faut dégager des moyens. A cet égard, je souhaite que l'Etat s'engage beaucoup plus financièrement. La solidarité nationale doit jouer. En effet, ni les communes ni les départements ne peuvent seuls faire face à ce problème.
Les dispositions votées par le Sénat ne doivent pas être repoussées d'un revers de main. Si tel était le cas, nous n'aurions pas beaucoup progressé dans ce débat difficile. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous venons de consacrer un jour et demi à l'examen de ce projet de loi que de très nombreux élus locaux et citoyens attendent, car il sera pour eux un signe très important de la volonté du Gouvernement de défendre concrètement ou de ne pas défendre les valeurs républicaines.
La plupart de nos collègues ont eu l'occasion au cours des débats de brosser un tableau non exhaustif, néanmoins très préoccupant, des différents problèmes posés aux élus locaux par les nombreux comportements peu citoyens de certains des gens du voyage.
Je l'ai dit et je le répète : le présent projet de loi n'apportera d'amélioration à cette déplorable situation de fait que si l'Etat a la volonté politique de faire appliquer les lois de la République.
De nombreux orateurs - en particulier M. Hyest il y a un instant - ont évoqué le nécessaire équilibre entre les droits et les devoirs qui s'appliquent aux gens du voyage, comme à tous nos concitoyens. Il était bon de rappeler que la loi est la même pour tous et que ceux qui sont si prompts à réclamer l'exercice de leurs droits sont souvent ceux qui oublient systématiquement qu'ils ont aussi des devoirs envers la communauté nationale, des devoirs envers la République.
Notre collègue du groupe communiste républicain et citoyen, Mme Bidard-Reydet, a tenu à rappeler hier un autre principe fondateur de notre République, la devise gravée sur les frontons de nos mairies : « Liberté, Egalité, Fraternité ». Combien elle avait raison !... Mais elle n'aurait pas dû en tirer, comme elle l'a fait, des conclusions complètement déconnectées de la réalité quotidienne vécue par les élus locaux.
Cette non-prise en compte des réalités du terrain a prévalu lors de la rédaction du présent texte. C'est ce que la majorité sénatoriale lui reprochait et c'est ce qu'elle s'est efforcée de corriger par les amendements qu'elle a adoptés.
La Haute Assemblée a heureusement fait preuve de davantage de réalisme, de pragmatisme et de rigueur quant à l'analyse des problèmes posés par les gens du voyage et quant aux solutions de nature à les régler.
Nous vous avons aussi entendu, M. le secrétaire d'Etat et certains de nos collègues mettre en avant leur approche tolérante et humaniste de ce problème. Je tiens à leur rappeler que la défense de ces valeurs n'est pas l'apanage de certaines travées de la Haute Assemblée, et je revendique aussi, quant à moi, une conception humaniste de notre société.
Cependant, force est de constater que l'humanisme est souvent un paravent, pour certains, masquant une vision angélique et béate des remèdes à apporter aux maux dont souffre notre société, quand ce n'est pas une attitude complaisante et laxiste.
La plupart des élus locaux de France, confrontés au développement de véritables zones de non-droit du fait du comportement de certains gens du voyage savent pertinemment que, trop souvent, l'Etat entretient à leur égard cette attitude complaisante et laxiste que mes collègues, sur toutes les travées, ont rappelée au cours de nos débats.
Je ne désespère pas que nos actuels gouvernants finissent un jour par ouvrir les yeux sur l'ampleur de leur propre laxisme, comme ils ont commencé à le faire - mais bien trop tard, malheureusement, on l'a vu tout à l'heure lors des questions d'actualité - sur les problèmes de sécurité et de violence en général et dans le milieu scolaire en particulier.
Vous venez de comprendre que ce serait finalement peut-être une bonne idée que de réintroduire un minimum d'éducation citoyenne et d'ordre dans nos écoles, alors que, voilà dix ans, ceux qui prônaient cela étaient traités de ringards et de conservateurs.
M. Michel Caldaguès. Exact !
M. Dominique Braye. Cette prise de conscience, lorsque vous la ferez enfin vôtre, monsieur le secrétaire d'Etat, nécessitera alors, comme pour les problèmes de la violence scolaire que j'évoquais précédemment, des moyens répressifs accrus, plus coûteux et moins bien acceptés que la simple application des lois et réglementations existantes.
Vous pardonnerez donc aux sénateurs de vous dire qu'ils pensent avoir raison avant vous - comme ce fut le cas pour les problèmes de violence scolaire - quand ils vous disent que, si les mesures proposées par le Sénat ne sont pas retenues à l'issue de la navette parlementaire, la réalité des problèmes de terrain vous obligera une fois de plus à abandonner votre candeur, mais une fois encore trop tard, une fois que le mal se sera inévitablement aggravé.
Permettez-moi, pour conclure, de revenir à notre belle devise républicaine « Liberté, Egalité, Fraternité », et vous comprendrez certainement ce que j'entends par un humanisme réaliste, qui est le seul qui vaille, à mes yeux.
Liberté pour les gens du voyage de vivre leur mode de vie, oui ; mais aussi liberté pour tous nos concitoyens et leurs élus de n'avoir pas à subir quotidiennement leur mépris des lois de la République.
Selon une formule pleine de bon sens et connue de tous, la liberté des uns s'arrête là où commence celles des autres.
Egalité des droits des gens du voyage et des droits des autres citoyens, oui ; mais aussi égalité des devoirs entre les gens du voyage et les autres citoyens. L'égalité républicaine, c'est d'abord l'égalité de tous devant la loi, et non toujours des droits pour les uns et toujours des devoirs pour les autres.
Fraternité, enfin, entre les citoyens français, oui ; mais fraternité entre citoyens qui reconnaissent également l'autorité de la loi. La fraternité, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, impose de respecter autrui et non de vivre à ses dépens en bafouant les principes dont on se réclame.
Fort de ces convictions, je voterai le texte tel qu'il a été amendé par la Haute Assemblée, car il a le mérite de mettre en oeuvre une vision plus réaliste, plus juste et plus rigoureuse des principes républicains qui doivent aussi s'appliquer aux gens du voyage.
Dura lex sed lex : la loi est dure, mais c'est la loi, et elle est la même ou, du moins, elle doit être la même pour tous. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je ne reprendrai pas les propos de M. Braye dont certains aspects me semblent excessifs et donc un peu dérisoires. Je partage son souci d'humanisme, mais la façon dont il l'a exprimé me semble en contradiction totale avec l'esprit de ce texte.
Le projet de loi transmis par l'Assemblée nationale était équilibré. Il respectait les droits et les modes de vie des gens du voyage.
M. Dominique Braye. Que deviennent leurs devoirs ?
M. Jean-Claude Peyronnet. Ce texte permettait, par des mesures contraignantes, de réaliser un nombre suffisant de places d'accueil pour les gens du voyage dans l'ensemble des départements, et ce de, façon concomitante afin que certaines communes ne soient pas découragées.
Le projet de loi prévoyait ainsi que le schéma départemental devait être élaboré en dix-huit mois et qu'à défaut d'accord le préfet pouvait prendre seul la décision, se substituer aux communes défaillantes pour réaliser les aires. Mais vous avez adopté un certain nombre de mesures de prorogation qui affadissent le texte.
A mon avis, toutes ces mesures vont à l'encontre du but recherché, quelle que soit la bonne foi des uns et des autres. Nous ne pouvons pas accepter le texte tel qu'il ressort de nos travaux, car nous sommes pour une vraie efficacité. Dans le cas présent, il faut non pas faire une entorse à la décentralisation, mais laisser le préfet jouer pleinement son rôle, et il ne semble pas que nous soyons en contradiction avec nous-mêmes.
En revanche, la Haute Assemblée, dans sa majorité, risque de l'être avec elle-même. En effet, on ne peut pas, à certains noments, reprocher à l'Etat de ne pas faire son devoir et lui refuser les moyens de l'accomplir en cas de défaillance des communes !
Cela dit, le débat m'a semblé de bonne qualité, à l'exception de quelques excès qui s'expliquent par l'aspect passionnel du sujet abordé. Des améliorations et des précisions qui ne peuvent pas du tout être considérées comme négatives ont été apportées. Toutefois, nous voterons contre le texte tel qu'il vient d'être modifié, mais nous espérons que la navette permettra de l'améliorer.
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen ne votera pas le texte tel qu'il vient d'être modifié par la majorité sénatoriale et qui, dans son état actuel, ne permettra pas d'améliorer les conditions d'accueil des gens du voyage.
Il ne constitue toujours qu'une incitation pour les communes et l'Etat n'a plus la possibilité de se substituer à celles qui seront défaillantes. Il n'y a ainsi aucune chance que l'application de ce texte soit plus positive que celle de l'article 28 de la loi de 1990. Vous avez sapé le dispositif tout en augmentant considérablement les pouvoirs des maires. Ce qui n'était qu'une contrepartie est devenu la mesure essentielle.
Nous ne pensons pas que la question des gens du voyage se limite aux seuls problèmes du stationnement illégal. La réalisation rapide d'un nombre suffisant d'aires d'accueil est, comme le prévoyait le texte du Gouvernement, le préalable indispensable au renforcement de la lutte contre les installations illicites et contre la surpopulation et les dégradations des aires aménagées.
Mes chers collègues, comment exiger des individus qu'ils se comportent comme des citoyens si nous ne les considérons pas comme tels ? M. Braye vient de rappeler la belle devise inscrite au fronton de nos mairies : « Liberté, égalité, fraternité ».
Pourquoi n'a-t-il pas alors voté les amendements proposés par notre groupe et visant précisément à abolir le carnet de circulation qui fait des gens du voyage des sous-citoyens dans notre pays ou tendant à abolir les limitations du droit de vote ? On peut toujours parler de liberté, d'égalité et de fraternité !
M. Dominique Braye. La liberté s'arrête là où commence celle des autres !
M. Robert Bret. Le débat concernant les gens du voyage soulève, on le sait, des questions de fond qu'il nous faut examiner en toute sérénité et auxquelles il faut apporter des réponses.
Le texte du Gouvernement apportaient des réponses fortes, mais vous refusez de reconnaître les discriminations que les gens du voyage vivent au quotidien. Vous faites rimer, comme à l'instant, « nomade » avec « délinquance » ! C'est fort dommageable, voire insupportable.
Je souscris pleinement aux propos de M. le secrétaire d'Etat quand il disait hier soir que la référence à l'humanisme n'est pas forcément limitée aux clivages partisans. Mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, je constate avec regret que vous ne nous en avez pas fait la démonstration, ni dans vos interventions, ni dans les amendements que vous avez adoptés lors de ce débat, ce qui contraint mon groupe à ne pas voter le projet de loi tel qu'il ressort de nos travaux.
M. le président. La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Me joignant à l'ensemble des collègues de la majorité sénatoriale qui sont intervenus, je veux brièvement dire à M. le secrétaire d'Etat combien nous attendions un texte permettant de corriger la loi de 1990, qui est notoirement insuffisante. Mais le projet que vous nous avez proposé, monsieur le secrétaire d'Etat, l'est tout autant.
Vous n'avez pas suffisamment écouté ici les élus, les nombreux maires qui se sont exprimés. J'ai la conviction que si votre projet était soumis, par référendum, à l'ensemble des maires de France, il serait très massivement rejeté. Je me réjouis par conséquent que le Sénat ait apporté des modifications qui sont de nature à leur donner satisfaction.
Hélas ! au cours de la navette parlementaire, je crains qu'un certain nombre des amendements essentiels qui ont été votés par la Haute Assemblée ne soient rejetés, ce qui rapidement, à l'évidence, ramènera, votre texte au niveau de celui de 1990, et le rendra peu applicable. Non seulement il ne donnera pas satisfaction, mais, au bout du compte, il ne réglera pas les troubles multiples que nous connaissons aujourd'hui.
En conséquence, les sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe et moi joignons notre voix à celle de l'ensemble de mes collègues qui sont intervenus brillamment au cours de ce débat. Je félicite et remercie M. le rapporteur et M. le président de la commission des lois pour les propositions qui ont été faites et je soutiendrai avec conviction le texte issu des travaux du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

6

COMMISSION NATIONALE DE DÉONTOLOGIE
DE LA SÉCURITÉ

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi n° 480 (1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, portant création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité. [Rapport n° 173 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant d'aborder les éléments qui définissent le dispositif proposé et de rappeler les dispositions principales du texte adopté par l'Assemblée nationale, je crois nécessaire de présenter, à titre liminaire, les motifs qui ont amené le Gouvernement à proposer au Parlement la création de cette instance nouvelle.
Deux idées, je crois, méritent d'être développées. La première est liée au caractère fondamental du droit à la sûreté dans un Etat républicain. L'Etat a le devoir d'en assurer la sauvegarde. Rappelons, au nombre des textes fondateurs, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dont l'article II énonce le principe républicain du droit à la sûreté.
La mise en oeuvre de ce principe implique l'existence de services. S'il est évident que l'Etat, la police nationale, la gendarmerie nationale, la justice jouent un rôle central - nous sommes dans un domaine par définition régalien -, on voit de plus en plus se développer un partenariat actif avec tous ceux qui sont en mesure d'apporter une contribution à la sécurité.
Au-delà de ce partenariat, d'autres acteurs de la sécurité ont surgi : il s'agit essentiellement d'agents privés appartenant à des sociétés prestataires de services de sécurité.
Il est d'autant plus important que les citoyens aient une relation de confiance forte avec les acteurs de la sécurité que ceux-ci se multiplient. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement présentera d'ailleurs prochainement au Parlement un projet de loi permettant de préciser l'étendue des missions ainsi que le contrôle des activités privées de sécurité.
La création d'une Commission nationale de déontologie de la sécurité, je le dis d'emblée, participe de cet objectif de restauration et d'approfondissement de la confiance que les citoyens doivent avoir envers la police et, plus généralement, envers tous ceux qui contribuent à leur sécurité.
La deuxième idée, votre commission l'a posée sous forme d'interrogation : en quoi la création d'une instance de contrôle est-elle nécessaire au développement de la déontologie dans le domaine de la sécurité ? La réponse est assez simple.
La déontologie, on le sait, est la « science des devoirs ». La notion n'est pas véritablement nouvelle. En revanche, la codification des règles de comportement est sans doute en France une caractéristique de la seconde moitié du xxe siècle.
Je songe en particulier au code de déontologie de la police nationale que le Gouvernement a édicté, sous forme de décret, en 1986, sur l'initiative de l'un de mes prédécesseurs, Pierre Joxe.
D'autres exemples méritent d'être cités : la loi du 15 avril 1999 relative aux polices municipales a ainsi prévu qu'un décret en Conseil d'Etat fixerait un code de déontologie des agents de police municipale.
Deux raisons, pourtant, expliquent qu'il vous soit proposé de créer en ce domaine une instance particulière unique ; nous sommes face à une certaine multiplication de textes.
D'une part, tous les acteurs de la sécurité doivent respecter des principes déontologiques comparables dès lors que leur intervention les place dans un rapport d'autorité vis-à-vis du citoyen. L'existence d'un code de déontologie applicable aux fonctionnaires ne dispense évidemment pas les autres acteurs de la sécurité d'obéir aux principes déontologiques qui s'imposent à eux, même sans texte spécifique.
Cette unité des principes justifie qu'une instance unique soit mise en place.
D'autre part, une instance unique aura une meilleure capacité à hiérarchiser, à nuancer éventuellement l'importance des questions soulevées. Son rôle dans la diffusion des principes déontologiques en sera d'autant plus aisé et, j'en suis persuadé, plus efficace.
Ce rappel de la philosophie générale du texte effectué, j'en viens à la présentation des principales orientations du projet qui est soumis à votre assemblée : nature et composition de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, champ de compétence, mode de saisine, attributions et prérogatives et, enfin, relations avec les autorités judiciaires et disciplinaires.
Qu'en est-il, tout d'abord, de la nature et de la composition de la Commission nationale de déontologie de la sécurité ?
Le projet du Gouvernement que l'Assemblée nationale a adopté en première lecture prévoit de créer une autorité administrative indépendante. Si elle a souhaité modifier l'appellation de l'instance de contrôle en substituant « commission nationale » à « conseil supérieur », ce qui a été accepté par le Gouvernement, elle a maintenu la qualification d'autorité administrative indépendante qui doit, j'en suis convaincu, s'attacher à cette institution.
Sur le plan juridique, une telle autorité administrative indépendante, qui ne dispose pas de la personnalité morale, se caractérise par le fait qu'elle ne peut recevoir d'instruction de personne. L'indépendance est sa vertu, elle est également sa raison d'être.
Votre commission des lois a été, un temps, réticente à l'égard de la création d'une nouvelle autorité indépendante, qui constituerait un démembrement de l'autorité de l'Etat. La Haute Assemblée connaît l'attachement que je porte aux prérogatives de l'Etat et combien je répugne à toute forme de démembrement, organique ou fonctionnelle. Je crois pourtant qu'en matière de déontologie de la sécurité le recours à une autorité administrative indépendante peut être judicieux et bienvenu.
La création d'une autorité indépendante s'impose dans le domaine de la sécurité à un double titre.
En premier lieu, elle est nécessaire dès lors que le champ de compétence de cette instance s'étend au-delà d'un département ministériel.
L'intention du Gouvernement en matière de déontologie de la sécurité n'est pas de se limiter à un corps ou à une profession. En conséquence, l'autorité administrative indépendante apparaît comme la meilleure solution permettant une telle extension de compétence, indifférente aux frontières organiques ou fonctionnelles entre ministères d'une part, entre agents de service public et personnes privées d'autre part.
En deuxième lieu, il s'agit de faire reconnaître à la commission nationale une légitimité incontestable aux yeux des citoyens. Elle serait sans doute affaiblie s'il subsistait une relation hiérarchique entre elle et le Gouvernement. La commission des lois fait justement valoir, pour considérer en deuxième analyse comme opportune la création de cette commission nationale, qu'elle sera un instrument supplémentaire de transparence au bénéfice des citoyens et qu'elle pourra, en particulier, signaler des comportements non susceptibles de sanctions disciplinaires ou pénales qui, pourtant, peuvent heurter les citoyens dans leur vie quotidienne.
Pour l'ensemble de ces raisons, je crois que le Sénat n'aura aucune difficulté à admettre le bien-fondé de la création de cette nouvelle autorité administrative indépendante.
S'agissant de sa composition, deux objectifs ont guidé le Gouvernement : l'efficacité de son action et les garanties de son indépendance. Le choix initial et qui n'a été que légèrement modifié par l'Assemblée nationale est celui d'un nombre restreint de membres. Un certain nombre de créations récentes conforte cette approche, comme celle de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité ou celle de la Commission du secret de la défense nationale. Il convient de relever que ces autorités, qui disposent de prérogatives de contrôle, n'ont que le pouvoir d'émettre des avis ou des recommandations à l'instar des attributions qu'il est prévu de confier à la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
Initialement fixé à six, le nombre de membres de la commission a été porté à sept par l'Assemblée nationale pour ajouter au président, aux parlementaires et aux magistrats prévus dans le projet du Gouvernement une personnalité qualifiée. Votre commission des lois propose d'amender l'article 2 et de porter à huit le nombre des membres de cette instance en augmentant le nombre de personnalités qualifiées. Il s'agit d'une faible augmentation qui ne remet pas vraiment en cause la composition de la commission nationale.
Ce n'est d'ailleurs pas, je crois, l'intention du Sénat ; les autres amendements proposés à l'article 2, au nom de la commission des lois, montrent bien que la recherche d'un nombre pair de membres est en fait liée au mode de renouvellement de la commission nationale.
Comme on le sait, les garanties de l'indépendance de l'autorité administrative que le Gouvernenemt entend créer sont largement liées à la qualité des personnes qui en seront membres et à leur mode d'organisation.
A cet égard, l'origine des membres de la Commission nationale de déontologie de la sécurité est sans aucun doute une excellente garantie. On la retrouve d'ailleurs dans un grand nombre d'autorités administratives indépendantes qui associent des parlementaires, des magistrats appartenant à la Cour de cassation, des membres du Conseil d'Etat et de la Cour des Comptes et des personnalités qualifiées.
La durée du mandat - assez longue, en général - et son caractère non renouvelable sont également des garanties d'indépendance. Le texte qui est soumis à votre appréciation prévoit une durée de six ans et l'absence de renouvellement du mandat. Votre commission des lois s'est demandé s'il ne serait pas judicieux de renouveler par moitié la commission nationale, pour assurer une continuité de son action et de ses orientations. La question peut effectivement être abordée et elle n'est pas dépourvue d'intérêt pratique.
Je crois que l'examen des amendements sur cet article vous permettra d'améliorer le texte en tenant compte, à la fois, du souci de la commission des lois de rendre le fonctionnement de la commission nationale plus efficace et du souhait du Gouvernement de ne pas en bouleverser la composition.
La dernière des garanties d'indépendance - et non la moindre - est le régime des incompatibilités.
L'Assemblée nationale a été convaincue par mon argumentation. Il me paraît en effet dangereux qu'un membre de la commission nationale puisse être suspecté en raison des activités ou des fonctions qui l'amèneraient à intervenir lui-même dans un des domaines de la sécurité couverts par la loi. Il s'agit du problème des parlementaires qui, en qualité de maire ou d'ajoint ayant délégation pour la sécurité publique, dirigeraient la police municipale ou les agents de la commune assurant des missions de sécurité.
Certes, le régime des incompatibilités peut apparaître contraignant, mais il est une garantie très réelle et un élément d'autorité de la commission. Il ne gênera pas grand monde d'ailleurs ! (Sourires.)
J'en viens au champ de compétence de cette commission.
Le Gouvernement a abordé cette importante question avec quelques idées simples, dont l'article 1er du projet voté par l'Assemblée nationale donne la traduction juridique.
Le champ de compétence de la commission est étendu. Sont visés à la fois les agents des services publics de sécurité et les personnes privées que l'exercice des missions et des activités dans le domaine de la sécurité amène à établir une relation d'autorité avec les citoyens.
La loi se doit dès lors d'être précise. Cette précision doit permettre de définir des exclusions du champ de compétence, notamment en ce qui concerne les services publics.
Trois exclusions méritent d'être soulignées.
La première exclusion concerne les forces armées, sauf, bien entendu, la gendarmerie, qui n'ont pas la charge d'activités de sécurité. Leur mission, tout autre, est de faire respecter l'intégrité du territoire national.
La deuxième exclusion concerne les agents publics qui concourent à la sécurité civile, car il ne faut pas confondre la sûreté avec la prévention des accidents.
La troisième exclusion mérite qu'on s'y attarde davantage. Elle concerne l'administration pénitentiaire, et nous aurons l'occasion d'y revenir ultérieurement puisqu'un amendement de la commission des lois propose de revenir sur cette exclusion.
Je voudrais dès maintenant indiquer qu'il n'y a aucune volonté de la part du Gouvernement d'exonérer les agents de l'administration pénitentiaire du respect des règles de déontologie. J'ai déjà indiqué au contraire qu'un code de déontologie de l'administration pénitentiaire est en cours d'élaboration. La mission des agents de cette administration est d'assurer l'exécution des décisions rendues par les juridictions pénales. De ce fait, ces agents ne constituent pas une force contribuant à la sécurité générale, notion dont le présent projet fait utilisation pour délimiter la compétence d'intervention de la commission nationale.
Je comprends que l'interrogation soit possible ; elle a déjà été formulée en d'autres enceintes. Je me devais, quant à moi, de fournir l'explication que le Gouvernement entend donner pour justifier sa position.
Pour que cette présentation soit complète, il faut préciser que le critère organique d'appartenance à un corps ou à un service se combine avec un critère matériel, celui de l'exécution ou de la participation à des missions de sécurité, pour apprécier si tel ou tel entre bien dans le champ de compétence de la commission nationale. S'agissant des fonctionnaires de la police nationale, seuls ceux qui exercent une mission de sécurité ont vocation à entrer dans le champ de compétence de cette commission, à l'exclusion par exemple de ceux qui sont affectés à des tâches d'intendance.
Ces précisions étant apportées, le champ d'application de la loi est très large. En ce qui concerne les agents publics, il vise bien sûr les agents de la police nationale, les militaires de la gendarmerie nationale, les agents des douanes et les agents des collectivités territoriales et des établissements publics qui exercent des missions de sécurité. Il s'agit parfois de catégories d'agents relativement peu nombreuses, mais dont les attributions relèvent incontestablement des attributions de la sécurité ; je pense, par exemple, en ce qui concerne les communes, aux agents de la police municipale et aux gardes champêtres.
La rédaction de l'article qui énumère les agents publics gagnerait à être simplifiée. Je n'y suis bien sûr pas opposé, dès lors qu'une rédaction nouvelle ne contredirait pas la volonté d'extension de champ souhaitée par l'Assemblée nationale avec l'accord du Gouvernement.
En ce qui concerne le secteur privé, le champ retenu est également très vaste. Il vise à la fois le secteur commercial et l'intervention des bénévoles.
Le secteur marchand de la sécurité recouvre l'ensemble des prestataires de sécurité relevant de la loi du 12 juillet 1983 relative aux activités de surveillance et de gardiennage. Il couvre également les services internes de sécurité des entreprises.
La même vision large entraîne l'inclusion dans le champ de compétence de la commission nationale des gardes particuliers soumis au régime de la loi du 16 avril 1892 et qui exercent des tâches de sécurité au bénéfice de propriétaires de certains biens.
Mais la loi s'applique également aux bénévoles, sous quelque statut et dans quelques conditions qu'ils interviennent. Leurs interventions sont, au demeurant, nombreuses, notamment aux fins d'assurer la sécurité des manifestations sportives, récréatives ou culturelles, comme y invite l'article 23 de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité.
Il paraîtrait anormal que les règles déontologiques ne puissent s'appliquer à leur endroit alors que le contact avec le public aux fins de sécurité est, bien évidemment, un élément de définition de leur mission. Il serait également anormal que les membres des services d'ordre, de façon générale, échappent à la compétence de la Commission nationale de déontologie de la sécurité.
J'en viens, mesdames, messieurs les sénateurs, au mode de saisine de la commission nationale.
Le Gouvernement n'a pas manifesté l'intention de limiter cette saisine. Il n'a pas, par exemple, souhaité limiter le droit de réclamation aux seules personnes qui s'estimeraient victimes d'un manquement aux règles déontologiques. Le texte voté par l'Assemblée nationale prévoit que le droit de réclamation aux fins de saisine de la commission nationale est ouvert à toute personne victime ou témoin de faits qu'elle estime contraire aux règles de déontologie.
Dans un souci d'efficacité, le dispositif finalement retenu est celui d'un accès indirect. La réclamation devra d'abord être adressée à un parlementaire. Celui-ci décidera s'il y a lieu de saisir la Commission.
L'objectif, évidemment, en recourant à un mécanisme déjà utilisé pour le médiateur de la République, est d'éviter tout engorgement de l'institution nouvelle. Le rôle dévolu aux membres du Parlement n'est pas dépourvu de portée. Il a semblé légitime au Gouvernement que les parlementaires disposent du pouvoir d'appréciation qui permettra une saisine utile de la Commission.
La commission des lois, qui s'est ralliée, après examen, à l'économie générale du dispositif, a estimé que le rôle confié aux membres du Parlement confortait, dans une perspective de transparence plus grande des acteurs de la sécurité, les liens entre la représentation nationale et les citoyens. Je souscris volontiers à ce jugement.
J'ai bien conscience que votre tâche ne sera pas toujours aisée, mais je suis persuadé qu'elle sera bénéfique aux citoyens et aux acteurs de la sécurité si vous savez, en effet, exercer les prérogatives que la loi vous confie avec la vigilance nécessaire.
Quelles sont maintenant les attributions et prérogatives de la commission nationale ? Celle-ci devra traiter avec efficacité la réclamation qui lui aura été transmise. Pour ce faire, elle se voit reconnaître un certain nombre de prérogatives : droit de communication, droit d'audition et vérification sur place.
Grâce au droit de communication, elle disposera d'éléments lui permettant de porter une appréciation éclairée sur les faits qui ont entraîné la réclamation. Ce droit de communication d'informations et de pièces s'applique à l'égard, à la fois, des autorités publiques et des personnes privées. Il s'exerce, bien sûr, dans le respect de la défense nationale, de la sûreté de l'Etat et de la politique extérieure. J'incline à penser que la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale est peut-être un peu restrictive sur ce point. Dès lors qu'une protection d'un secret déterminé est prévue par la loi, il me semble qu'il faut en tenir compte.
La commission nationale dispose également d'un droit d'audition des personnes qui, estime-t-elle, peuvent lui apporter les éléments nécessaires à l'exercice de sa mission. Cette prérogative doit, bien sûr, être entourée de garanties procédurales. Les personnes dont l'audition est estimée nécessaire sont destinataires d'une convocation qui mentionne l'objet de l'audition. Elles peuvent se faire assister du conseil de leur choix et un procès-verbal contradictoire de l'audition est dressé à la suite de celle-ci.
Au-delà du droit de communication ou d'audition, la commission nationale procède aux consultations qu'elle juge utiles.
Les membres de cette commission auront accès aux lieux où se sont déroulés les faits. Cette visite, qui n'est pas une perquisition, permet notamment à la commission d'aller dans les locaux professionnels, à l'exclusion, naturellement, du domicile, par exemple pour constater la disposition des lieux et se rendre compte ainsi du cadre dans lequel s'est opéré l'éventuel manquement à la déontologie.
Je crois utile que le déplacement soit précédé d'un préavis.
L'Assemblée nationale, quant à elle, n'a pas retenu l'obligation de préavis dans la rédaction qu'elle a adoptée de l'article 6. Cela m'apparaît pourtant non seulement une règle de bonne administration, mais aussi une meilleure garantie juridique, ainsi que je l'avais indiqué lors des débats. L'examen des amendements permettra, je crois, de revenir sur ce point, comme, de façon générale, sur les garanties procédurales.
La commission nationale peut enfin demander aux ministres de saisir les corps de contrôle placés sous leur autorité en vue de faire des études, des vérifications ou des enquêtes sans excéder la limite des attributions de ces corps.
Il appartiendra, bien sûr, aux ministres d'informer la commission des suites données aux demandes de concours des corps d'inspection.
On le voit, la commission nationale dispose de prérogatives importantes et bénéficie de concours de qualité. Il paraît également utile à sa mission que ses pouvoirs fassent l'objet d'une protection particulière. C'est la raison pour laquelle des sanctions pénales - il s'agit d'une amende assortie éventuellement de peines complémentaires - ont été prévues lors de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale, pour éviter que des entraves ne soient apportées à l'exercice des prérogatives de la commission.
Celle-ci demeure une instance consultative dépourvue de pouvoir de décision. Il s'agit d'un choix de la part du Gouvernement. Sans aucun doute sera-t-elle amenée à saisir parfois l'autorité judiciaire ou bien l'autorité investie du pouvoir disciplinaire. Mais elle ne peut, à cet égard, se substituer aux autorités directement compétentes non plus qu'elle ne doit interférer avec les procédures en cours.
Le rôle de la commission nationale est d'émettre une recommandation ou, un avis destiné aux autorités ou aux personnes habilitées à leur donner suite.
Il appartiendra, en effet, à ces dernières, de tirer les conséquences de l'appréciation portée par la commission sur la réclamation qu'elle aura instruite. Dans le cas où celle-ci lui aura paru fondée, l'autorité administrative ou le responsable d'une société intervenant dans le domaine de la sécurité pourra, par exemple, être amené à modifier l'organisation du service ou à changer l'affectation des personnels et agents chargés de certaines missions.
Quelle que soit en tout cas la suite réservée à son avis ou à sa recommandation, la commission devra en être informée par le moyen d'un compte rendu.
A défaut et dans le cas où les suites réservées à l'avis ou à la recommandation apparaîtraient insuffisantes, voire inexistantes, la commission pourra établir un rapport spécial publié au Journal officiel.
Cette forme de sanction, qui est stigmatisante, devrait constituer un levier puissant pour faire respecter la déontologie.
La commission aura l'obligation d'informer l'auteur de la saisine, c'est-à-dire le parlementaire qui la lui transmet, des suites réservées à la réclamation.
Elle pourra aussi indiquer au Gouvernement les modifications de législation ou de réglementation souhaitables dans le domaine de la déontologie.
La diffusion de la déontologie participe d'une conception républicaine de la sécurité à laquelle le Gouvernement est très attaché.
Des efforts manifestes ont été accomplis, notamment dans le domaine de la formation des agents publics chargés de missions de sécurité. Hier encore, le Conseil national de la formation de la police nationale a approuvé un certain nombre de programmes qui mentionnent notamment la formation à la déontologie.
Le rapport de la commission des lois du Sénat retrace d'ailleurs très précisément la part consacrée à la déontologie dans la formation initiale des policiers et des gendarmes. De nouveaux codes de déontologie sont appelés à être créés : je songe notamment, je l'ai déjà dit, à la police municipale.
La création d'une instance nationale compétente en matière de déontologie participe de la même démarche, et le Gouvernement fonde de grands espoirs sur l'institution nouvelle que j'ai l'honneur de proposer à votre assemblée d'instaurer. Vous serez d'ailleurs vous-même destinataires privilégiés des productions de la commission, puisqu'il est prévu un rapport annuel d'activité, qui vous sera remis, ainsi qu'au président de la République.
J'en viens enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, aux relations entre la commission et les autorités judiciaires et disciplinaires.
C'est un point important, qui a donné lieu à des débats approfondis et à des modifications substantielles du projet de loi lors de son examen par l'Assemblée nationale.
Les principes sont simples : la commission nationale ne peut se substituer ni à l'autorité judiciaire, ni aux instances disciplinaires ; son intervention ne saurait donc en aucun cas les dessaisir des compétences et des prérogatives dont elles disposent.
Au contraire, si les faits dont elle est saisie lui semblent constituer une infraction pénale, la commission a le devoir, comme d'ailleurs tout citoyen, de les porter à la connaissance du procureur de la République. La loi l'impose à toutes les autorités constituées. Il est donc normal que la commission respecte cette obligation. Le procureur de la République la tiendra informée de la suite donnée à ce signalement, ce qu'il n'est pas légalement tenu de faire pour les autres autorités constituées.
De même, lorsque les faits dont elle est saisie lui semblent susceptibles d'entraîner des poursuites disciplinaires, la commission en avertit les autorités investies du pouvoir disciplinaire. Celles-ci lui indiquent en retour la suite réservée à cette information.
La commission conserve, en toute hypothèse, je l'ai déjà indiqué, la possibilité d'adresser aux autorités compétentes tout avis, toute recommandation visant à remédier aux manquements constatés ou à en prévenir le renouvellement, surtout lorsque la faute déontologique trouve, totalement ou partiellement, son origine dans la mauvaise organisation du travail.
Si l'intervention de la commission nationale ne doit entraîner aucune restriction du rôle des autorités judiciaires ou disciplinaires, à l'inverse, l'existence d'une procédure judiciaire ne doit pas entraîner ipso facto la paralysie ou le dessaisissement de la commission.
Cette considération a amené l'Assemblée nationale à préférer une rédaction qui tienne compte des compétences de la commission et respecte les prérogatives de l'autorité judiciaire.
Aussi l'intervention de la commission en cas d'existence d'une procédure judiciaire sera-t-elle liée à l'accord de l'autorité judiciaire. Cette solution paraît équilibrée et réaliste. Elle évite les risques d'empiètements en ménageant les compétences respectives de l'autorité administrative indépendante et de l'autorité judiciaire.
La commission nationale, cela va de soi, ne pourra jamais intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction, ni remettre en cause le bien-fondé de la décision juridictionnelle ; elle ne saurait bien évidemment constituer une instance d'appel.
Je viens de présenter, mesdames, messieurs les sénateurs, les grandes orientations du texte soumis à votre examen.
Sa finalité est claire, et j'espère que nous pourrons aisément dégager un consensus autour des orientations qu'il traduit. Je souhaite que la représentation nationale fasse sienne la volonté du Gouvernement de créer une instance aux pouvoirs importants et au champ de compétence étendu sans équivalent à certains égards.
Au-delà de l'institution elle-même, la confiance des citoyens dans les acteurs de la sécurité en sera renforcée et, par voie de conséquence, l'efficacité de la sécurité. C'est là l'essentiel. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Mes chers collègues, je salue la présence pour la première fois dans notre hémicycle de M. Jean-Yves Autexier. Sans doute, la présence de M. le ministre de l'intérieur n'y est-elle pas étrangère. J'observe que, par prudence, il ne s'est pas assis sur le siège de Victor Hugo. (Sourires.) Je lui adresse nos souhaits de bienvenue. (Applaudissements.)
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre assemblée est effectivement saisie d'un projet de loi portant création d'une commission nationale de déontologie et de la sécurité.
Monsieur le ministre, je crois me souvenir que ce projet figurait dans la déclaration de politique générale de M. Jospin de 1997. Il s'agit donc de la réalisation d'une promesse qui démontre l'émergence d'un souci de la déontologie.
Ce Gouvernement n'a pas été le premier à s'en préoccuper puisque, dès septembre 1993, a été créé le Haut Conseil de la déontologie de la police nationale qui a publié un ouvrage très intéressant intitulé : Guide pratique de la déontologie dans la police nationale, préfacé par son président, M. Pierre Bordry, et qui est remis à tous les policiers de France et de Navarre.
Jugeant que cela n'était pas suffisant, vous avez voulu étendre à toutes les forces de sécurité ces normes déontologiques, jusqu'à présent réservées à la police. Nous sommes donc saisis aujourd'hui de ce texte.
La commission, par principe très réservée à l'égard des autorités dites indépendantes, a manifesté quelque circonspection quant à cette création. En effet, ces autorités non dotées de la personnalité morale, appartenant à l'administration de l'Etat, et qui échappent à tout contrôle hiérarchique ont connu depuis vingt ans un développement très important.
Nous nous sommes demandé si la création d'une telle commission ne devait pas être interprétée comme la faillite du pouvoir disciplinaire et du pouvoir judiciaire pour sanctionner les abus de comportement commis par des acteurs de sécurité.
Nous nous sommes également interrogés sur l'indépendance de la notion d'atteinte à la déontologie par rapport à une infraction pénale ou à une faute disciplinaire. Peut-on commettre une infraction à la déontologie sans enfreindre un règlement ou une obligation sanctionnée par l'autorité disciplinaire ?
C'est une vraie question, comme il est tout aussi important, monsieur le ministre, de savoir à quelles règles déontologiques la commission nationale devra se référer.
Il est paradoxal de voir la commission nationale saisie de réclamations de particuliers pour des manquements à des règles déontologiques en grande partie non définies.
Appartiendra-t-il, monsieur le ministre, à cette commission, de créer à l'instar du Conseil d'Etat, les grands principes de la déontologie ? Trop souvent condamnée à Strasbourg par la Cour européenne des droits de l'homme, la France aurait besoin de se doter d'un code de la déontologie.
Nous avons également craint que la création de cette commission soit interprétée comme une suspicion à l'égard des forces de sécurité.
Ayant retenu de l'enseignement des jésuites qu'il faut toujours être positif, je me suis montré circonspect tout en recherchant les aspects positifs de votre texte et je dois dire que cette démarche n'a pas été vaine.
En effet, nous considérons que la commission nationale présente l'avantage important d'être plus accessible aux citoyens que ne le sont actuellement le pouvoir disciplinaire et l'autorité judiciaire auprès desquels il leur est trop rarement possible de faire entendre leur voix. S'il est vrai que les corps de contrôle existent, ces derniers ont toutefois souvent pour vocation première de fonctionner de manière interne à l'administration.
Quant à la justice, elle est trop lourde à mettre en oeuvre et nombreux sont les citoyens qui hésitent à porter plainte. Un sondage publié dans Le Monde d'avant-hier témoigne des critiques qu'ils expriment lorsqu'ils y ont finalement recours. Cela révèle bien l'existence d'un problème auquel il faut apporter une solution.
Dans ces conditions, il est important qu'une commission s'intéresse à des comportements qui, pris individuellement, ne sont pas toujours susceptibles de sanctions disciplinaires ou pénales, mais n'en heurtent pas moins régulièrement les citoyens dans leur vie quotidienne.
Je vous ferai une suggession, monsieur le ministre. A l'étranger, les agents qui contrôlent nos passeports nous disent gentiment bonjour. En France, ce n'est jamais le cas. Ne faut-il pas y voir une infraction à la déontologie ? Ne serait-il pas possible que les policiers du premier pays touristique du monde accueillent leurs ressortissants comme les étrangers par un bonjour ?
Nous avons constaté également que tous les acteurs de la sécurité étaient favorables à la création de cette commission, qui, je le souligne, n'a ni vocation, ni compétence à se substituer au pouvoir disciplinaire ou même à la justice.
Nous nous sommes interrogés - et je ne reviendrai pas sur le texte de votre projet de loi, monsieur le ministre, puisque vous l'avez présenté de manière très complète - sur le rôle des parlementaires. Fallait-il créer un filtre permettant aux citoyens de s'adresser à la commission nationale par l'intermédiaire des parlementaires ? Nous nous sommes finalement prononcés favorablement. En effet, même si les parlementaires n'ont pas la possibilité de vérifier le bien-fondé d'une demande, il leur revient à notre sens le rôle essentiel d'assurer la médiation entre les forces de sécurité et les citoyens qui s'intègre dans notre fonction de défenseur de ces derniers.
Monsieur le ministre, nous avons apporté dans un esprit constructif des modifications au texte que vous nous présentez. La commission des lois du Sénat a proposé d'élargir le champ de compétence de la commission nationale à l'administration pénitentiaire. Dans votre exposé liminaire, vous avez déclaré qu'il était du devoir de l'Etat républicain d'assurer le droit à la sûreté pour tout le monde.
J'avoue ne pas comprendre pourquoi le gouvernement auquel vous appartenez a exclu l'administration pénitentiaire du champ d'application de cette commission.
Si la notion d'activité de sécurité visée par le texte doit être comprise comme l'exercice d'un pouvoir direct de contrainte ou d'autorité sur les citoyens, nous considérons que l'administration pénitentiaire rentre dans cette qualification.
Mme le garde des sceaux a reconnu elle-même que les contrôles extérieurs exercés sur l'administration pénitentaire sont insuffisants. Au cours des auditions auxquelles nous avons procédé, les directeurs de prison, qui sont favorables à cette extension du champ d'application du texte à l'administration pénitentiaire, nous ont appris que non seulement la commission de surveillance présidée par le préfet ne se déplace qu'une fois par an, mais que, de surcroît, son contrôle consiste uniquement à faire « un bon gueuleton ».
Nous avons été profondément indignés d'entendre un représentant syndical nous affirmer qu'il n'y a pas lieu d'inclure l'administration pénitentiaire, au motif que les détenus sont des citoyens de deuxième zone. Selon nous, un citoyen, même détenu, n'est pas un citoyen de deuxième zone, surtout lorsqu'il est, comme plus d'un tiers des détenus, en détention provisoire. Comment, dans ces conditions, peut-on justifier l'exclusion de l'administration pénitentiaire du champ d'application de cette commission ?
Je sais bien qu'une commission présidée par M. Guy Canivet est chargée par le garde des sceaux de formuler des propositions tendant à améliorer les contrôles. Elle devait rendre ses conclusions à la fin du mois de janvier 2000.
Il est tout de même paradoxal, au moment où est instituée une commission nationale à compétence très large, comme vous l'avez souligné, d'exclure l'administration pénitentiaire. Nous proposons de l'inclure, tout en précisant que cela ne doit pas empêcher les améliorations du contrôle extérieur spécifique à l'administration pénitentiaire que pourrait susciter le rapport de M. Canivet.
Après les événements de Beauvais, le procès de Clairvaux et la polémique suscitée sur la prison de la Santé, l'opinion publique ne comprendrait pas que l'administration pénitentiaire soit exclue du champ de compétence de cette commission.
Comme je le rappelais encore tout à l'heure, nous avons soutenu le principe du filtre parlementaire mais nous avons voulu donner aux parlementaires la possibilité d'informer ceux qui viendront leur demander de saisir cette commission.
C'est la raison pour laquelle nous avons prévu que toute dénonciation calomnieuse devrait faire l'objet d'une saisine du procureur de la République par la commission sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale. Il reviendra aux parlementaires de prévenir celui qui le consulte du risque de poursuite qu'il encourt si sa dénonciation est calomnieuse.
Mais nous avons prévu que le parlementaire ne pourra pas être poursuivi pour complicité de dénonciation calomnieuse. C'est un moyen dont nous avons voulu le doter pour lui permettre de bien remplir son rôle de filtre.
Vous ne serez pas surpris que la commission des lois ait voulu assurer les droits de la défense. Vous l'avez rappelé tout à l'heure : la commission nationale ne dispose pas de pouvoirs d'enquête comparables à ceux d'une juridiction. La commission des lois considère toutefois qu'il convient de préserver les droits de la défense dans une procédure pouvant conduire à mettre en cause les personnes devant le pouvoir disciplinaire.
Afin de permettre la protection des personnes, nous proposons donc de rétablir les dispositions de votre texte initial qui avaient été supprimées par l'Assemblée nationale.
Nous demandons donc, en premier lieu, de rétablir la motivation des demandes de communication de documents adressés aux autorités publiques ou aux personnes privées. Nous proposons, en second lieu, car nous avons le souci de préserver le principe du contradictoire, de rétablir le préavis et la présence des personnes concernées lors d'une vérification sur place.
Nous prévoyons également d'étendre le secret pouvant être opposé à l'ensemble des secrets protégés par la loi, y compris le secret professionnel qui n'est pas visé dans votre texte, monsieur le ministre.
Nous avons également voulu renforcer l'information des auteurs de la saisine. A partir du moment où vous avez souhaité, et je crois avec raison, instaurer un filtre en prévoyant la saisine de la commission par l'intermédiaire des parlementaires, nous avons voulu, en retour, que ceux-ci soient informés du déroulement de la procédure. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'il soit adressé un accusé de réception de la saisine et que tout au long de la procédure le parlementaire soit informé de son déroulement afin qu'il puisse lui-même informer l'auteur de la réclamation. En effet, comme nous l'avons indiqué tout à l'heure, cette commission n'a un sens que si elle permet une plus grande transparence et si nos concitoyens se sentent protégés. Il serait, à notre avis, tout à fait dommageable que des procédures d'enquête durent un an, voire deux ans, et que personne ne sache ce qui se passe. C'est pourquoi nous avons proposé une information régulière tout au long de la procédure.
Puisque vous nous proposez de créer une telle commission, nous souhaitons la rendre plus efficace, monsieur le ministre. C'est la raison pour laquelle nous proposons de garantir sa continuité en prévoyant un renouvellement par moitié de ses membres tous les trois ans. Il serait en effet dommageable que la continuité de la commission soit assurée par les fonctionnaires, et non par les membres de la commission. Pour permettre ce renouvellement, nous demandons la présence au sein de la commission d'une deuxième personnalité qualifiée. Vous avez eu l'amabilité, et je vous en remercie, monsieur le ministre, de considérer que cette proposition pouvait recueillir l'accord du Gouvernement, et je m'en félicite.
Nous proposons également de limiter les incompatibilités. Vous nous avez indiqué que ne pourraient être membres de la commission nationale que ceux qui n'exercent pas de mission en rapport avec la sécurité. Seraient donc exclus, vous l'avez reconnu, la plupart des parlementaires qui sont maires. Les petites communes rurales, même si elles sont trop souvent délaissées, peuvent employer un garde champêtre. Si tel est le cas, le maire ne pourra être membre de la commission. Il en sera de même pour les maires des communes employant des policiers municipaux. Ainsi, vous excluez nombre de sénateurs et de députés. Il serait dommage de réduire de la sorte le nombre de parlementaires qui pourraient être membres de cette commission. C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'il soit précisé que la qualité de membre de la commission est incompatible avec l'exercice « à titre principal » d'activités dans le domaine de la sécurité. Cela permettrait aux parlementaires qui sont maires de siéger au sein de cette commission.
Enfin, nous avons prévu la possibilité de fixer des délais de réponse. Il serait en effet utile, lorsque les membres de la commission procèdent à une transmission d'information au pouvoir disciplinaire, qu'un délai de réponse soit imparti à l'administration. A quoi servirait-il de transmettre une information si, après six mois ou un an, rien ne se passe ? En demandant que le nécessaire soit fait dans un délai prévu par la commission, nous pensons que cela permettra à celle-ci de jouer le rôle que vous lui avez dévolu.
Monsieur le ministre, voilà ce que nous considérons comme un apport. Nous pensons que la commission des lois a fait son travail. Elle a voulu rendre plus efficace cette Commission nationale de déontologie de la sécurité que vous avez cru utile de créer. Finalement, la création d'une telle commission nous semble une bonne idée.
Mais il reste une interrogation. Quels seront les moyens qui seront accordés à cette Commission ? Sans personnel, sans moyens financiers, elle restera un voeu pieux, ce qui serait dommage. Aussi, nous souhaiterions obtenir du Gouvernement l'assurance qu'il dotera cette Commission des moyens lui permettant d'accomplir son rôle. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner un projet de loi portant création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité.
Cette commission doit être replacée dans la perspective du colloque de Villepinte de 1997, qui a posé les bases de la police de proximité. Penser la police sous l'angle de la proximité revient à placer le citoyen au centre du dispositif : alors qu'il était bénéficiaire passif d'une politique sécuritaire, il devient acteur de sa propre sécurité.
Un tel système ne peut avoir de sens et de portée pratique que s'il repose sur une relation de confiance effective entre le citoyen et les personnes qui assurent sa sécurité. Cette relation de confiance doit être fondée sur la conviction profonde et avérée que ces personnes exercent leur mission dans un cadre strict dans lequel tout manquement au devoir de probité sera sanctionné et dénoncé.
C'est la raison d'être des règles déontologiques : toute profession qui met en jeu les droits naturels et imprescriptibles de l'individu doit être réglementée par un cadre déontologique incontestable. Tel est le cas de la médecine ou des avocats.
Cet impératif est d'autant plus vrai qu'est en jeu la sûreté, qui est un des droits fondamentaux reconnus par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. C'est pourquoi on peut être étonné que la définition de règles déontologiques soit relativement récente dans ce domaine.
Il est vrai que l'on a du mal à définir la règle déontologique par rapport au manquement disciplinaire ou à l'infraction pénale : les champs d'application se recoupent pour partie sans néanmoins se confondre totalement, le champ déontologique étant par définition plus large.
La création d'une autorité indépendante qui aurait pour mission d'en garantir le respect par les acteurs de la sûreté recueille, au-delà des réticences qui peuvent se manifester ici ou là sur l'opportunité de créer une nouvelle autorité administrative indépendante, une très large adhésion. Ce n'est pas si courant pour ne pas être souligné.
C'est ainsi qu'en 1993, sur l'initiative de M. Paul Quilès, avait été crée le Conseil supérieur de l'activité de la police nationale chargé des questions relatives au fonctionnement de la police nationale. Si le changement de gouvernement n'a pas permis qu'il fonctionne, l'idée est restée et son successeur au ministère de l'intérieur, M. Pasqua, devait créer le Haut Conseil de la déontologie de la police nationale chargé de donner des avis sur la déontologie policière.
Loin de s'apparenter à un signe de défiance à l'égard des personnels de sécurité, la mise en place d'une commission chargée de faire respecter la déontologie donne, au contraire, un cadre transparent à leur action.
Elle permet en particulier, dans la logique des enquêtes de « victimation », de s'attacher à des comportements qui peuvent ne pas être graves au point d'impliquer une sanction pénale ou disciplinaire, mais dont la non-reconnaissance nourrit le sentiment d'injustice des citoyens et jette l'opprobre sur l'ensemble des personnels de sécurité.
La grande originalité du projet de loi et son principal mérite, c'est de donner compétence à la commission pour apprécier tout manquement déontologique, quel que soit le statut de la personne qui l'a commis, dès lors que celle-ci « concourt à une activité de sécurité ».
Qu'il s'agisse d'un officier de police judiciaire, d'un agent de police municipale ou d'un salarié d'une société privée de gardiennage, cette personne doit être tenue au respect des mêmes valeurs, dont la Commission nationale de déontologie de la sécurité aura pour mission de garantir l'application effective.
Cette volonté de fédérer au sein d'une même instance déontologique le contrôle de toutes les activités de sécurité a été confirmée par l'Assemblée nationale, qui a fort heureusement étendu le champ de compétence de la commission à tous les agents des collectivités locales et des établissements publics.
Quant aux personnels privés qui entreront dans la sphère du contrôle de la commission nationale, peu importe désormais qu'ils exercent ces activités de sécurité « à titre principal ou à titre accessoire », ou même à titre bénévole, si le Sénat suit sur ce point, comme nous l'espérons, les conclusions de la commission des lois.
Le point le plus important que nous aurons à traiter ici est de savoir s'il convient d'étendre la compétence de la commission nationale à l'administration pénitentiaire. Ce point mérite que l'on s'y attarde.
Les membres du groupe communiste républicain et citoyen sont, je le dis avec force, tout à fait favorables au renforcement du contrôle sur les prisons. Nous avons, à plusieurs reprises, attiré l'attention du Gouvernement et des parlementaires sur cette question.
Mais, si nous voulons que la prison ne soit plus la « maladie honteuse de la République », que l'on cache volontiers pour ne pas s'en préoccuper, il faut étudier avec soin l'idée de l'intégration de l'administration pénitentiaire au sein de la Commission nationale de déontologie de la sécurité. L'attente des personnels de surveillance est trop forte pour que nous réagissions uniquement sous le coup de l'émotion suscitée par la publication du livre du docteur Vasseur.
Pour ma part, je me pose un certain nombre d'interrogations que je voudrais vous exposer en trois questions principales : Ce rattachement est-il logique ? Est-il opérationnel ? Est-il opportun ?
En premier lieu, je me demande s'il est logique de faire entrer les personnels de l'administration pénitentiaire dans le champ de compétence de la commission sous l'angle de la notion de « sécurité ».
En effet, ce qui unit toutes les catégories de personnels qui entrent dans le champ de compétence de la commission, telle que conçue par le projet de loi, c'est, me semble-t-il, le contact avec le public.
M. Jean-Jacques Hyest. Très bien !
M. Robert Bret. Or, ce contact n'existe pas, ou n'existe que de façon exceptionnelle, dans le cas des personnels de l'administration pénitentiaire : la population carcérale ne peut être assimilée au public puisqu'elle n'est constituée que par la décision d'un juge.
C'est pourquoi les membres du groupe communiste républicain et citoyen ont déposé un amendement qui fait explicitement référence à la Convention européenne pour la prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants de 1987. Il nous semble que c'est uniquement sous cet angle que le rattachement de l'administration pénitentiaire à la commission prend toute sa logique. Il convient alors d'intégrer tous les personnels qui exercent dans des lieux où les personnes sont privées de leur liberté.
En second lieu, je m'interroge sur l'effectivité du contrôle qui sera opéré.
Dans son rapport, M. de Richemont a exposé les différents contrôles auxquels est déjà soumise l'administration pénitentiaire : inspection des services pénitentiaires, inspection des affaires sociales, commissions de surveillance, juge de l'application des peines, juge administratif... On peut également évoquer les contrôles indirects, via les avocats ou les visiteurs de prison.
Ces contrôles, notamment administratifs, nous paraissent souvent « plus formels que réels ». C'est justement pour cela que l'on doit refuser d'en mettre un énième en place sans réfléchir préalablement à sa mise en oeuvre pratique et effective.
Nous ne pouvons en effet faire l'économie de certaines questions. Les détenus seront-ils en mesure de s'adresser au parlementaire pour qu'il intervienne auprès de la commission, sachant que les correspondances ne sont pas secrètes ? Le parlementaire ne sera-t-il pas tenté de ne pas déférer à la demande ? L'exemple du médiateur de la République ne semble pas particulièrement probant sur ce point.
La commission sera-t-elle en mesure d'exercer un contrôle plus effectif sur les cent quatre-vingt-six établissements de métropole ? Comment ce contrôle pourra-t-il s'articuler avec le contrôle extérieur « spécifique » à l'administration pénitentiaire qui pourrait être mis en place du fait des conclusions du rapport Canivet ? Tous ces points restent en suspens.
Enfin, il ne nous semble pas que l'enjeu des prisons doive être circonscrit à la déontologie.
L'État sanitaire des établissements, l'indigence des prisonniers, leur réinsertion dans la société, les relations affectives en prison, le statut des visiteurs de prison, ces questions ne recouvrent que de façon limitée la question de la déontologie, et on peut craindre qu'elles ne soient enterrées sous prétexte qu'il y aurait une commission chargée de la déontologie.
Fort heureusement, la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la situation dans les prisons vient à point nommé. Ses travaux pourront amener un éclairage très intéressant sur tous ces points. Ce ne serait d'ailleurs pas la première fois qu'une commission parlementaire déboucherait sur une amélioration de la législation en vigueur.
Pour finir, les sénateurs communistes voudraient indiquer d'ores et déjà leur opposition à certains amendements de la commission des lois qui, selon nous, réduisent très nettement les pouvoirs de la commission nationale : l'institution d'un préavis préalablement à toute visite, l'opposition du secret professionnel aux investigations sont autant de dispositions qui risquent de réduire de rôle de la commission à une peau de chagrin.
De même, si l'on peut être sensible à l'argument de continuité qui a présidé au choix du renouvellement de moitié de la commission, il nous semble qu'il peut être source d'instabilité, alors qu'il conviendrait de mettre en place une véritable équipe.
Pour conclure, je souhaite m'élever contre l'application du délit de dénonciation calomnieuse aux plaintes reçues par la commission : elle semble particulièrement peu opportune s'agissant d'une procédure non judiciaire ; elle découragera sans nul doute les saisines, en particulier des témoins. C'est le meilleur moyen de faire une commission mort-née !
Au-delà de ces réserves, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, en attendant d'être fixés sur le sous-amendement qu'ils ont déposé, réservent leur vote jusqu'à la fin de la discussion. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Monsieur le ministre, le texte que vous nous présentez est en effet - cela a été dit - dans la droite ligne du colloque de Villepinte d'octobre 1997 et des mesures annoncées alors par M. le Premier ministre. Il s'agit ici de renforcer les liens de confiance et de proximité entre la population et les différentes personnes exerçant une activité de sécurité.
Les aspirations de nos concitoyens sont clairement connues : besoin de transparence dans leurs relations avec les personnes chargées de veiller à leur sécurité, besoin d'une règle de bonne conduite applicable à l'ensemble des intervenants. Ces exigences sont justifiées par le souci, pour chaque citoyen, de mieux faire respecter ses droits ; le projet de loi portant création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité est de nature à répondre à ces aspirations.
Il est vrai que cette réforme a fait l'objet d'une lente maturation ; certains l'ont même trouvée trop lente. Force est tout de même de constater qu'elle reçoit désormais un large accueil favorable tant des professionnels que des citoyens, et beaucoup de commentateurs du projet de loi ont souligné l'intérêt d'un regard extérieur et indépendant sur la presque totalité des intervenants en matière de sécurité, ainsi que le fait que le rappel à l'ordre déontologique procèdera non plus seulement, mais aussi du citoyen.
La mise en place d'une autorité chargée de veiller au respect de la déontologie en matière de sécurité n'est, on l'a dit, pas nouvelle. Déjà, en 1986, sous le ministère de M. Pierre Joxe, un code de déontologie de la police avait été élaboré. On a rappelé ce qui a été fait par M. Paul Quilès en 1993, et la transformation par M. Pasqua, dans un cadre un peu plus restreint, de ce Conseil supérieur de l'activité de la police en Haut Conseil de la déontologie de la police nationale.
Pourtant, malgré ces précédents, le texte que vous nous soumettez aujourd'hui, monsieur le ministre, est novateur, car il donne à l'autorité nouvellement instituée un champ de compétence et un ensemble de prérogatives d'une ampleur inégalée à ce jour. Par la création d'une autorité administrative indépendante, ce texte vise à promouvoir le respect des règles de déontologie communes inspirées des valeurs républicaines qui doivent s'imposer à toutes les personnes concourant à la mission de sécurité.
Pour autant, il ne faut pas se méprendre : cette nouvelle autorité administrative a pour mission de veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité, et non pas d'étendre exagérément son champ de compétence à des activités qui ne correspondent pas à cette notion de sécurité, non plus que de veiller au respect de règles autres que déontologiques. Vous avez su, monsieur le ministre, sur ce plan comme sur les autres plans, éviter les écueils.
Ainsi, cette instance échappera à toute hiérarchie, et sa composition lui assurera une indépendance nécessaire à l'accomplissement de sa mission. Elle ne sera ni un tribunal, ni un conseil de discipline, ni une administration ; elle sera plutôt un lieu de médiation et de contrôle des faits qui peuvent constituer des manquements à la déontologie et qui ne sont pas sanctionnés ni même souvent repérés comme peuvent l'être la faute personnelle ou l'infraction pénale.
L'existence de contrôles internes, que l'on ne peut méconnaître et auxquels le texte fait d'ailleurs référence, ne doit pas conduire à nier l'utilité de la création de cette commission. En effet, la sécurité n'est pas le seul fait de l'administration ; elle peut être l'oeuvre de personnes privées. Il importe alors que ces dernières soient soumises au contrôle éventuel d'une telle commission d'autant que, bien souvent, elles ne sont soumises qu'à des contrôles très restreints, quand ils existent, contrôles qui peuvent se limiter à une simple déclaration.
Pour mener à bien sa mission, cette commission jouira de nombreux pouvoirs. Elle disposera, à côté de ce que je qualifierai de pouvoirs propres, de pouvoirs d'alerte qui montrent bien que sa tâche n'est pas de supplanter d'autres autorités. Ainsi disposera-t-elle de pouvoirs d'investigations lui permettant de veiller a posteriori au respect des règles déontologiques par la communication d'informations, la convocation des personnes intéressées, la vérification sur place.
Elle sera également chargée d'alerter, par ses avis et ses recommandations, les personnes publiques et privées soumises à son contrôle. Ces avis ou recommandations lui permettront a posteriori de remédier à certains manquements, mais également - et cet aspect mérite une attention particulière - a priori d'en éviter le renouvellement. Elle jouera alors pleinement le rôle pédagogique que je crois être aussi celui de la déontologie.
On l'aura compris, la création de cette nouvelle autorité emporte notre assentiment, non seulement parce qu'elle est nécessaire mais aussi parce que ses pouvoirs correspondent bien aux besoins de transparence d'une démocratie moderne.
Pour autant, certains points nous semblent mériter des précisions. Ils sont, à vrai dire, résumés dans les trois questions que je vais aborder et qui correspondent à des amendements de la commission.
La première question concerne la suppression de l'obligation de motivation des demandes. Le projet de loi initial prévoyait que les demandes d'informations et de pièces devaient être motivées. Cette disposition a été supprimée par l'Assemblée nationale, le Gouvernement s'en étant alors remis à sa sagesse. Le rapporteur, à l'Assemblée nationale, estimait qu'en raison de l'imprécision du terme « motivé » et du sérieux de la commission, la condition de motivation était superfétatoire.
On ne peut que s'interroger sur cet argument : la plupart des décisions sont aujourd'hui motivées, et cela concerne particulièrement la justice ; or on ne peut douter du sérieux de la justice. Certes, la commission n'est pas une juridiction - on l'a dit - et c'est une raison de plus pour qu'elle soit soumise à ce qui est souvent perçu comme une garantie première de démocratie. La commission des lois propose de rétablir cette condition. Nous la suivrons.
La deuxième question concerne la suppression de la condition de préavis de la présence des personnes intéressées en matière de vérification sur place. Là aussi, nous comprenons bien les raisons qui ont conduit l'Assemblée nationale à supprimer le préavis : l'intérêt de l'effet de surprise, la crainte de voir disparaître certains éléments, la modification des locaux. Cependant, nous ne sommes pas hostiles au retour au texte initial. Une vérification sur place ne peut procéder de la seule volonté de la commission, et il n'est pas anormal, dès lors, qu'elle motive sa demande, d'autant qu'il est créé un délit d'entrave à l'exercice des pouvoirs d'investigation de la commission sur place. Il semble difficile d'accorder à la commission un pouvoir qui aboutirait à supprimer tout caractère contradictoire.
Le préavis assure, outre le respect des conditions de forme nécessaires, la présence des personnes intéressées, ce qui permet un respect effectif des droits de chacun. Certes, la commission est chargée de veiller au respect de la déontologie, mais cela ne doit pas conduire à la soustraire aux règles élémentaires du droit.
La question la plus importante, comme l'ont souligné M. le rapporteur et M. Bret, concerne l'inclusion du personnel pénitentiaire dans le champ des compétences de la commission nationale.
Nous n'avons pas d' a priori sur cette question, mais nous nous posons un certain nombre d'interrogations qui peuvent être de fond. Avec l'administration pénitentiaire, nous entrons dans un autre champ : ce n'est plus celui de la sécurité dans les lieux publics. Il s'agit bien, dans ce texte, de la sécurité de l'ensemble des citoyens dans leur vie quotidienne, en particulier sur la voie publique. L'administration pénitentiaire n'a jusque-là jamais été assimilée à une force de sécurité publique.
Qu'il se pose de graves problèmes dans les établissements pénitentiaires n'est pas un secret. Le Gouvernement s'en est d'ailleurs préoccupé avant même que l'émotion particulière se répande dans le public en raison de la publication du rapport que chacun connaît. Mais si cet amendement ne vise qu'à nous donner une bonne conscience, il est probable qu'il n'atteindra pas son objectif et que cette motivation est tout à fait insuffisante.
Je remarque aussi qu'aucun pays européen, même parmi les pays les plus avancés dans le domaine du respect des personnes, y compris dans celui des personnes incarcérées, n'a retenu le dispositif proposé par la commission.
Par ailleurs, je mets en garde contre l'effet de mode ou de la pression de l'actualité qui pourrait être lié à la promulgation du rapport auquel je faisais allusionn tout à l'heure. Il est rare que l'émotion soit bonne conseillère.
Enfin, monsieur le ministre, il me paraît nécessaire de traiter le sujet autrement, c'est à dire par une attention particulière, mais très spécifique, aux lieux clos : les prisons certes, les locaux de garde à vue, les locaux de rétention des étrangers en situation irrégulière, mais aussi, éventuellement - mais c'est un sujet extrêmement délicat - les hôpitaux psychiatriques.
En outre, comme cela a été dit, M. Canivet doit remettre, dans quelques semaines, un rapport, et un code de déontologie de l'administration pénitentiaire devrait bientôt paraître.
Mes amis du groupe socialiste et moi-même nous interrogeons. Avant de prendre une décision définitive sur ce point, nous serions heureux, monsieur le ministre, que vous puissiez nous apporter des précisions sur ces domaines.
Cela ne remet pas en cause notre approbation globale d'un texte qui nous semble tout à fait intéressant. Ce projet de loi est conforme à ce que l'on est en droit d'attendre d'une commission chargée de veiller au respect de la déontologie, même si, je le répète, certains éléments doivent être précisés. Le groupe socialiste votera ce texte.
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Après l'exposé très complet du projet de loi par M. le ministre et le rapport excellent de M. de Richemont, je me contenterai de formuler quelques observations, de peur, par des répétitions, de lasser l'auditoire dont le nombre montre bien à quel point les problèmes de sécurité préoccupent notre assemblée, et ce depuis longtemps.
J'observe tout d'abord - mais ce n'est pas grave - une tendance à un maniement quelque peu particulier de la langue française : je connaissais la déontologie médicale, la déontologie de la police nationale ; je pourrais connaître la déontologie des professions concourant à la sécurité ; mais je ne sais pas ce que signifie l'expression « déontologie de la sécurité » !
Monsieur le ministre, vous voulez créer une commission nationale qui veillera à l'application des règles par les professions concourant à la sécurité. Sur ce point, nous sommes tout à fait d'accord. Un certain nombre d'organismes déjà créés ont fait leur métier, notamment le Haut Conseil de la déontologie de la police nationale qui avait, je crois, bien travaillé. Mais, dans le cadre du rapprochement entre la police et les citoyens - c'était l'idée de départ - le Gouvernement a souhaité créer une nouvelle institution.
Monsieur le ministre, on peut s'interroger sur la création de plus en plus fréquente de hautes autorités indépendantes dont la mission est de donner des avis et des conseils. Ces autorités, qui sont de pures autorités morales - j'exclus le médiateur qui a une fonction tout à fait spécifique - se multiplient alors que, globalement, il apparaît que les corps de contrôle remplissent bien leur office. Pour ne parler que de la police nationale, les chiffres qui figurent dans le rapport de M. de Richemont prouvent que tant l'IGPN que l'IGS font bien leur travail et que les manquements d'une certaine gravité aux règles déontologiques par les forces de police sont sanctionnées. Il faut le rappeler, car certains disent que les corps d'inspection sont laxistes. Pas du tout !
Des sanctions disciplinaires sont prises, et, souvent, des renvois aux juridictions pénales sont prononcés en cas de nécessité.
Que restera-t-il, alors, à cette commission ? Bien entendu, elle pourra donner des avis, des recommandations pour améliorer les règles déontologiques ; il n'en demeure pas moins que l'essentiel de la déontologie, c'est l'application, surtout quand il s'agit de policiers ou de gendarmes, des lois et règlements, tout en ayant une conduite qui respecte les personnes.
Cependant, il existe tant de délits et tant de manières de poursuivre ce qui n'est pas respect des personnes que je me demande comment les dispositions qui nous sont proposées seront appliquées. Certes, lorsque, dans un commissariat, on s'aperçoit que le tutoiement vis-à-vis de certaines personnes est plus fréquent que le voussoiement, ce qui n'est peut-être pas tout à fait normal, il s'agit sans doute du non-respect de règles déontologiques. Il en est de même pour la manière d'arrêter les véhicules : parfois, on assiste à des choses curieuses qui ne sont pas forcément représentatives de ce que l'on peut attendre du respect dû aux citoyens.
Quant aux manquements plus graves, ils relèvent des procédures disciplinaires ou des procédures pénales.
Je m'interroge également, monsieur le ministre, sur le champ de compétence de cette institution, puisque vous l'étendez à la police nationale, à la gendarmerie nationale, à tous les agents publics des collectivités locales, aux policiers municipaux, gardes champêtres, gardes forestiers, gardes-chasse, gardes-pêche, ainsi qu'à tous ceux qui assurent, même bénévolement, la police dans les manifestations sportives et à toutes les sociétés privées de sécurité.
A ce sujet, monsieur le ministre, la loi de 1963 sur le gardiennage et la sécurité me paraît totalement dépassée. Lorsque nous avons examiné le projet de loi d'orientation sur la police et la sécurité, l'Etat s'était engagé à présenter un texte pour réglementer ces activités. En effet, nous constatons aujourd'hui un manque réel de professionnalisme chez certains et il faut apporter les garanties nécessaires dans l'exercice de missions qui se développent de plus en plus. C'est, monsieur le ministre, une priorité.
Vous avez fait voter la loi sur les polices municipales, qui était indispensable. Vous disiez vous-même alors qu'il fallait clarifier les missions, les fonctions. Or c'est encore plus indispensable pour les sociétés exerçant des missions privées de sécurité !
J'en viens à la question de l'extension du dispositif au personnel pénitentiaire, car, sur le reste, nous sommes d'accord. Mais la privation de liberté n'intervient pas seulement dans les prisons ! Il ne faut pas oublier les centres de rétention et la garde à vue, auxquels doit s'appliquer le code de déontologie, même si l'on a pris un certain nombre d'autres précautions pour garantir les libertés publiques.
Par ailleurs, monsieur le ministre, beaucoup souhaiteraient que le personnel pénitentiaire assure désormais les transfèrements au lieu et place de la police. On parle de tâches indues, mais elles ne le sont pas tant que la loi ou le règlement ne les a pas modifiées ! Or je ne vois pas au nom de quoi une personne, qu'elle soit détenue ou non, n'aurait pas le droit au même respect, et les gardiens de prison concourent largement, à mon avis, à la sécurité extérieure.
Quoi qu'il en soit, la déontologie ne s'applique pas seulement aux « clients », mais aussi au public en général : la déontologie s'adresse à tout le monde. Il est donc nécessaire - même si l'amendement de la commission des lois, en tout état de cause, va faire avancer un débat qui ne peut pas se cantonner simplement à cet aspect - que le problème grave des prisons soit pris en compte à d'autres niveaux, et je sais que le Sénat va présenter des propositions dans ce domaine.
Je ne vise pas seulement ici, bien sûr, les relations entre gardiens de prison et détenus, mais, au début de l'an 2000, on ne peut pas accepter que, là comme ailleurs, le minimum de respect ne soit pas assuré. Ainsi que M. Larché l'a rappelé récemment, lorsque des événements graves se produisaient dans des centres de détention voilà plusieurs années et même encore il y a quelques mois, tout le monde « couvrait » et personne ne disait rien. Je crois donc qu'il est nécessaire que les parlementaires puissent saisir une autorité indépendante pour qu'il soit remédié à ces dysfonctionnements.
Sous ces réserves, le groupe de l'Union centriste votera le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ La Commission nationale de déontologie de la sécurité, autorité administrative indépendante, est chargée, sans préjudice des prérogatives que la loi attribue notamment en matière de direction et de contrôle de la police judiciaire, à l'autorité judiciaire, de veiller au respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le territoire de la République.
« Sont concernés, à ce titre, lorsqu'ils concourent à une activité de sécurité, les personnels de la police nationale, de la gendarmerie nationale, de la douane, les gardes-chasse, les gardes-pêche, les gardes forestiers, les agents des collectivités territoriales et des établissements publics. Sont également concernées toutes personnes physiques et morales de droit privé assurant, à titre permanent ou occasionnel, à titre principal ou accessoire, des activités de sécurité. »
Par amendement n° 1, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du second alinéa de cet article, après le mot : « douane », d'insérer les mots : « et de l'administration pénitentiaire ainsi que ».
Cet amendement est assorti d'un sous-amendement n° 24, présenté par M. Bret et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et visant, dans le texte proposé par l'amendement n° 1 de la commission des lois, après les mots : « administration pénitentiaire », à insérer les mots : « , les personnels exerçant des activités de sécurité dans tout lieu où des personnes sont privées de liberté, au sens de la convention européenne du 26 octobre 1987 pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'ajouter les agents de l'administration pénitentiaire à la liste des agents de l'Etat qui entrent dans le champ d'application de la Commission. Je me suis longuement expliqué tout à l'heure sur les raisons qui ont justifié le dépôt de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Bret, pour défendre le sous-amendement n° 24.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, par ce sous-amendement, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen souhaitent aller au bout de la logique de l'amendement de la commission.
En effet, il nous a semblé que ce qui faisait le lien entre l'administration pénitentiaire et les personnels de sécurité au sens strict était la volonté de réprimer les atteintes aux droits de l'homme, notamment sous l'angle de la torture et des traitements inhumains et dégradants.
Faire entrer l'administration pénitentiaire dans le champ de compétence de la Commission sous l'angle de la notion de sécurité prise au sens strict n'est pas tout à fait satisfaisant.
Certes, l'article 1er de la loi n° 87-432 du 22 juin 1987, relative au service public pénitentiaire, indique que celui-ci « participe au maintien de la sécurité publique », mais on notera que sa fonction première concerne « l'exécution des décisions et des sentences pénales ». Il a également pour mission, selon la loi de 1987, de favoriser la réinsertion sociale.
De même, on soulignera que l'Institut des hautes études de sécurité intérieure n'inclut pas l'administration pénitentiaire dans son champ de compétence, et que le loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité ne se réfère nulle part à la sécurité en prison.
Le glissement progressif opéré par la commission des lois de la notion de sécurité à celle d'autorité me semble refléter cette ambiguïté.
Il nous semble, en conséquence, que, pour plus de clarté, il convient de faire expressément référence à la convention européenne.
On peut notamment rappeler que c'est sur ce fondement que la France a été condamnée, le 28 juillet 1999, par la Cour européenne des droits de l'homme pour des sévices qu'avait dû subir M. Selmouni pendant une garde à vue
De même, le code de déontologie de la police nationale prévoit, à l'article 10, que « toute personne appréhendée ne doit subir aucune violence ni aucun traitement inhumain ou dégradant.
Enfin, la présence d'une personnalité « connue pour ses compétences en matière de droits de l'homme », introduite par l'Assemblée nationale et qui serait, si le texte de la commission des lois du Sénat était adopté, portée à deux, me semble aller dans ce sens.
Si le sous-amendement que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen vous proposent était adopté, entreraient désormais dans la sphère de la Commission de déontologie les locaux de garde à vue, les prisons, les centres de rétention pour étrangers mais aussi les hôpitaux psychiatriques. C'est en effet l'interprétation qui a été donnée de l'article 2 de la Convention de 1987 par le comité de prévention de la torture.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 24 ?
M. Henri de Richemont, rapporteur. Toute référence à l'article 2 de la Convention des droits de l'homme est sympathique.
Il est vrai que l'article 1er vise tous les lieux, les lieux de garde à vue, les lieux de rétention et les établissements psychiatriques, et je ne vois pas l'intérêt de l'ajout qui est proposé par notre collègue.
En fait, le texte du projet de loi vise les policiers et les gendarmes et notre amendement y ajoute les personnels de l'administration pénitentiaire, ainsi que les personnels des établissements publics et les personnes privées exerçant des fonctions de sécurité. Le champ est tellement large que même les personnels des établissements psychiatriques, qui sont des personnels d'établissements publics, sont concernés. Je ne vois donc pas quelles personnes visées dans ce sous-amendement ne le seraient pas déjà par le texte tel qu'amendé par la commission.
Enfin, nous ne voudrions pas que soient intégrés dans le champ d'application du texte les médecins qui exercent dans les hôpitaux psychiatriques, car ce serait dénaturer l'objet de la Commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1 et sur le sous-amendement n° 24 ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement a choisi d'exclure de la compétence de la Commission les agents de l'administration pénitentiaire.
Comme tous les autres fonctionnaires, bien évidemment, les agents de l'administration pénitentiaire doivent respecter les règles déontologiques. Ils seront d'ailleurs bientôt dotés d'un code de déontologie. Cependant, l'administration pénitentiaire a pour vocation exclusive l'exécution des décisions rendues par les juridictions pénales. On ne peut donc pas assimiler à une force contribuant à la sécurité intérieure l'administration pénitentiaire, contrairement aux autres personnels définis par l'article 1er du projet de loi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement ne peut donner un avis favorable ni à l'amendement ni au sous-amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° 24, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2 rectifié, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans la première phrase du second alinéa de l'article 1er, de supprimer les mots : « , les gardes-chasse, les gardes-pêche, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Les gardes-chasse et les gardes-pêche sont déjà visés par le texte soit en tant que personnels des collectiviés locales, soit comme agents des établissements publics, ou encore en tant qu'employés comme gardes particuliers d'une personne privée. Leur énumération est donc redondante.
En revanche, nous maintenons la référence aux gardes forestiers.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. La suppression de la référence aux gardes-chasse et aux gardes-pêche n'a pas de conséquence sur le champ d'application de la loi puisque ceux-ci sont des agents des collectivités locales ou des établissements publics, ou encore des agents privés visés par la définition donnée par la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 1er.
Par conséquent, je ne suis pas opposé à cette suppression.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 3, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans la seconde phrase du second alinéa de l'article 1er, après le mot : « accessoire, », d'insérer les mots : « y compris bénévolement, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. M. le ministre nous a indiqué tout à l'heure qu'étaient visés ceux qui exercent des missions à titre bénévole. Nous pensons qu'il est bon de le préciser.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. M. le rapporteur ne fait que préciser l'intention que j'ai affirmée tout à l'heure à la tribune ; le Gouvernement est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ La Commission nationale de déontologie de la sécurité est composée de sept membres, nommés pour une durée de six ans non renouvelable :
« _ le président, désigné par le Président de la République ;
« _ un sénateur, désigné par le président du Sénat ;
« _ un député, désigné par le président de l'Assemblée nationale ;
« _ un conseiller d'Etat, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat ;
« _ un magistrat hors hiérarchie de la Cour de cassation, désigné conjointement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près ladite Cour ;
« _ un conseiller-maître, désigné par le premier président de la Cour des comptes ;
« _ une personnalité désignée par les autres membres de la Commission nationale de déontologie de la sécurité, qualifiée en matière de sécurité et connue à raison de ses compétences en matière de droits de l'homme.
« La qualité de membre de la Commission est incompatible avec l'exercice de fonctions ou d'activités dans le domaine de la sécurité ou de la protection.
« Les parlementaires membres de la Commission cessent d'y exercer leurs fonctions lorsque prend fin le mandat au titre duquel ils ont été nommés.
« Si, en cours de mandat, un membre de la Commission cesse d'exercer ses fonctions, le mandat de son successeur est limité à la période restant à courir. Par dérogation au premier alinéa, le mandat de ce dernier est renouvelable lorsqu'il a commencé moins de deux ans avant son échéance normale. »
Par amendement n° 4, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans le premier alinéa de cet article, de remplacer le chiffre : « sept » par le chiffre : « huit ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de porter de sept à huit le nombre de membres de la commission, pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure dans mon exposé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. J'ai déjà expliqué à la tribune que je n'y étais pas défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 23, le Gouvernement propose, dans le deuxième alinéa de l'article 2, de remplacer les mots : « désigné par le Président de la République » par les mots : « nommé par décret du Président de la République ».
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ? M. Henri de Richemont, rapporteur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par la commission.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 5, M. de Richemont, au nom de la commission, propose de rédiger ainsi le huitième alinéa de l'article 2 :
« - deux personnalités qualifiées désignées par les autres membres de la Commission nationale de déontologie de la sécurité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement a deux objets : d'une part, supprimer la référence à une personnalité « connue en raison de ses compétences en matière de droits de l'homme » - on ne sait pas très bien ce que cela signifie ! - pour en rester à l'expression générale de « personnalité qualifiée » ; d'autre part, augmenter d'un membre la composition de la commission pour aboutir à un nombre pair.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement émet un avis favorable, à condition que l'on précise qu'il s'agit de personnalités qualifiées en matière de sécurité et connues en raison de leurs compétences en matière de droits de l'homme.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Ce sont précisément les dispositions que nous voulons supprimer, monsieur le ministre, parce que nous n'en voyons pas l'intérêt. Mieux vaut s'en tenir à l'expression « personnalités qualifiées ». Qu'est-ce qu'au juste que les compétences en matière de droits de l'homme ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Dans ces conditions, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 6, M. de Richemont, au nom de la commission, propose d'insérer, après le huitième alinéa de l'article 2, un alinéa ainsi rédigé :
« La commission est renouvelée par moitié tous les trois ans. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement se situe dans la logique de ce qu'a voté tout à l'heure le Sénat avec l'accord du Gouvernement, ce dont je le remercie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 7, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, après les mots : « l'exercice », de rédiger ainsi la fin du neuvième alinéa de l'article 2 : « , à titre principal, d'activités dans le domaine de la sécurité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement a simplement pour objet de permettre aux parlementaires qui sont maires d'être nommés à cette commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je regrette de ne pas pouvoir donner un avis favorable.
L'incompatibilité prévue par le projet de loi est un gage d'indépendance de la commission. Concrètement, cette disposition interdit, bien évidemment, que soient désignés des parlementaires qui seraient en même temps maire ou adjoint ayant délégation pour la sécurité publique, même si l'on précise que ce n'est pas là leur activité principale - on aime à le croire, d'ailleurs, s'agissant de parlementaires ! (Sourires.)
Au surplus, la condition d'exercice, à titre principal, d'activités dans le domaine de la sécurité risquerait de soulever de nombreux problèmes d'interprétation.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 8, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, après les mots : « leurs fonctions », de rédiger ainsi la fin de l'avant-dernier alinéa de l'article 2 : « lorsqu'ils cessent d'appartenir à l'assemblée au titre de laquelle ils ont été désignés ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de permettre explicitement à un député ou à un sénateur réélu de rester membre de la commission pour la durée de la fonction restant à courir après sa réélection.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 9, M. de Richemont, au nom de la commission, propose de compléter l'article 2 par un alinéa ainsi rédigé :
« Lors de la première constitution de la commission nationale de la déontologie de la sécurité suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, sont désignés par tirage au sort quatre membres, à l'exclusion du président, dont les mandats prendront fin à l'issue d'un délai de trois ans.»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. C'est toujours la conséquence de ce que le Sénat a voté tout à l'heure ; il s'agit de déterminer par tirage au sort les membres dont le mandat fera l'objet du premier renouvellement par moitié au bout de trois ans.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ La commission établit son règlement intérieur.
« En cas de partage des voix, celle du président est prépondérante. » - (Adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ Toute personne qui a été victime ou témoin de faits dont elle estime qu'ils constituent un manquement aux règles de la déontologie, commis par une ou plusieurs des personnes mentionnées à l'article 1er peut, par réclamation individuelle, demander que ces faits soient portés à la connaissance de la Commission nationale de déontologie de la sécurité. Ce droit appartient également aux ayants droit des victimes. Pour être recevable, la réclamation doit être transmise à la commission dans l'année qui suit les faits.
« La réclamation est adressée à un député ou à un sénateur. Celui-ci la transmet à la commission si elle lui paraît entrer dans la compétence de cette instance et mériter son intervention.
« Le Premier ministre et les membres du Parlement peuvent, en outre, saisir de leur propre chef la commission de faits mentionnés au premier alinéa.
« La commission ne peut être saisie par les parlementaires qui en sont membres.
« Une réclamation portée devant la Commission nationale de déontologie de la sécurité n'interrompt pas les délais relatifs à la prescription des actions en matière civile et pénale et aux recours administratifs et contentieux. »
Par amendement n° 10, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, après les mots : « et mériter », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa de cet article : « l'intervention de cette dernière. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement purement rédactionnel précise que la réclamation doit mériter l'intervention de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Cet amendement dissipe une légère ambiguïté grammaticale. Le Gouvernement y est donc favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 11, M. de Richemont, au nom de la commission, propose d'insérer, après le deuxième alinéa de l'article 4, un alinéa ainsi rédigé :
« La commission adresse au parlementaire auteur de la saisine un accusé de réception. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de l'obligation pour la commission nationale d'accuser réception de la saisine des parlementaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Est-ce du domaine de la loi ?
M. Jean-Jacques Hyest. Oh, il y a beaucoup de choses qui sont du domaine de la loi !
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5



M. le président.
« Art. 5. _ La commission recueille sur les faits portés à sa connaissance toute information utile.
« Les autorités publiques doivent prendre toutes mesures pour faciliter la tâche de la commission. Elles communiquent à celle-ci, sur sa demande, toutes informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission telle qu'elle est définie à l'article 1er.
« La commission peut demander dans les mêmes conditions aux ministres compétents de saisir les corps de contrôle en vue de faire des études, des vérifications ou des enquêtes relevant de leurs attributions. Les ministres informent la commission des suites données à ces demandes.
« Les personnes privées mentionnées à l'article 1er et leurs préposés communiquent à la commission, sur sa demande, toutes informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission.
« Les agents publics ainsi que les dirigeants des personnes mentionnées au précédent alinéa et leurs préposés sont tenus de déférer aux convocations de la commission et de répondre à ses questions. Les convocations doivent mentionner l'objet de l'audition.
« Les personnes convoquées par application de l'alinéa précédent peuvent se faire assister du conseil de leur choix. Un procès-verbal contradictoire de l'audition est dressé à la suite de celle-ci et remis à l'intéressé.
« La commission peut consulter toute personne dont le concours lui paraît utile.
« Le caractère secret des informations et pièces dont elle demande communication ne peut lui être opposé sauf en matière de secret concernant la défense nationale, la sûreté de l'Etat ou la politique extérieure. »
Par amendement n° 12, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans la seconde phrase du deuxième alinéa de cet article, après le mot : « demande », d'insérer le mot : « motivée ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Rétablissant en cela le texte du Gouvernement, il s'agit de motiver la demande de communication du document adressée à des autorités publiques. Cette motivation avait été curieusement supprimée par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Cette suppression avait été votée malgré la réserve émise par le Gouvernement, qui est donc très favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 13, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans le quatrième alinéa de l'article 5, après le mot : « demande », d'insérer le mot : « motivée ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement est semblable au précédent, mais concerne les demandes de communication de documents adressées à des personnes privées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 14, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, après les mots : « en matière de », de rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de l'article 5 : « secrets protégés par la loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'élargir le secret pouvant être opposé à la commission : nous avons voulu inclure le secret professionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ La commission peut charger un ou plusieurs de ses membres de procéder à des vérifications sur place. Ces vérifications ne peuvent s'exercer que dans les lieux publics et les locaux professionnels. »
Par amendement n° 15, M. de Richemont, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« La commission peut charger un ou plusieurs de ses membres de procéder à des vérifications dans les lieux où se sont déroulés les faits ayant fait l'objet de la saisine de la commission.
« Ces vérifications ne peuvent s'exercer que dans les lieux publics et les locaux professionnels, après un préavis adressé aux agents intéressés et aux personnes ayant autorité sur eux, ou pour le compte desquelles l'activité de sécurité en cause était exercée, afin de leur permettre d'être présents. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de limiter les vérifications sur place au lieu où se sont déroulés les faits et, par ailleurs, de rétablir le préavis, qui avait été supprimé par l'Assemblée nationale, afin de permettre aux agents concernés et à leurs supérieurs hiérarchiques d'être présents pour respecter le principe du contradictoire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je veux rendre hommage au travail de la commission et de son rapporteur, car cet amendement se rapproche effectivement beaucoup du texte que le Gouvernement avait proposé à l'Assemblée nationale.
Le préavis permet d'être certain de la présence des autorités hiérarchiques ou de l'employeur et de l'audition éventuelle de leurs observations. A défaut de préavis, cette opération courrait le risque d'être inutile et de rendre vaines les investisgations de la commission.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 est ainsi rédigé.

Article 7



M. le président.
« Art. 7. _ La commission adresse aux autorités publiques et aux dirigeants des personnes privées mentionnées à l'article 1er intéressés tout avis ou recommandation visant à remédier aux manquements constatés ou à en prévenir le renouvellement.
« Les mêmes autorités ou personnes concernées sont tenues, dans un délai fixé par la commission, de rendre compte à celle-ci de la suite donnée à ces avis ou recommandations.
« En l'absence d'un tel compte rendu ou si elle estime, au vu du compte rendu qui lui est communiqué, que son avis ou sa recommandation n'a pas été suivi d'effet, la commission peut établir un rapport spécial qui est publié au Journal officiel de la République française.
« La commission informe l'auteur de la saisine des suites de celle-ci. »
Par amendement n° 16, M. de Richemont, au nom de la commission, propose de supprimer le dernier alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de supprimer la mention concernant l'information par la commission de l'auteur de la saisine, car cette mention sera reportée dans un article additionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article 8



M. le président.
« Art. 8. _ La commission ne peut intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction. Elle ne peut remettre en cause le bien-fondé d'une décision juridictionnelle.
« Lorsque la commission est saisie de faits donnant lieu à une enquête judiciaire ou pour lesquels une information judiciaire est ouverte ou des poursuites judiciaires sont en cours, elle doit recueillir l'accord préalable des juridictions saisies ou du procureur de la République, selon le cas, pour la mise en oeuvre des dispositions de l'article 5 relatives à la communication de pièces et des dispositions de l'article 6 relatives à l'accès aux lieux des faits.
« Si la commission estime que les faits mentionnés dans la saisine laissent présumer l'existence d'une infraction pénale, elle les porte sans délai à la connaissance du procureur de la République, conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale.
« Le procureur de la République informe la commission de la suite donnée aux transmissions faites en application de l'alinéa précédent. »
Par amendement, n° 17, M. de Richemont, au nom de la commission, propose d'insérer, avant le dernier alinéa de cet article, un alinéa ainsi rédigé :
« L'article 226-10 du code pénal relatif aux dénonciations calomnieuses est applicable aux réclamations portées devant la commission. Si celle-ci estime qu'une réclamation constitue une telle dénonciation, elle en donne avis sans délai au procureur de la République, conformément aux dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale. Les parlementaires ne peuvent être poursuivis pour dénonciation calomnieuse ou complicité de dénonciation calomnieuse du fait des transmissions effectuées par eux à la commission en application du deuxième alinéa de l'article 4 de la présente loi. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet amendement précise explicitement que les dénonciations calomnieuses effectuées auprès de la commission nationale pourront faire l'objet de poursuites et prévoit, en conséquence, l'information du procureur de la République par la commission de telles dénonciations.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je ne suis pas sûr que cet amendement soit nécessaire parce que le code pénal a vocation à s'appliquer et que toute dénonciation calomnieuse tombe sous le coup du code pénal.
Bien entendu, les parlementaires n'ont pas à craindre de se voir reprocher ce délit. Comme le délit de dénonciation calomnieuse exige la connaissance de l'inexactitude des faits dénoncés, un parlementaire qui transmettrait une plainte en ignorant que les faits rapportés sont inexacts ne serait ni auteur ni complice de ce délit.
Le Gouvernement n'est pas favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 18, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, à la fin de l'article 8, de remplacer les mots : « de l'alinéa précédent » par les mots : « des deux alinéas précédents ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement précédent ayant pour conséquence l'information de la commission par le procureur de la République des suites données à l'ensemble des transmissions qu'il aurait effectuées en application de l'article 40.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 9



M. le président.
« Art. 9. _ Sans préjudice des dispositions des articles 7 et 8, la commission porte sans délai à la connaissance des autorités ou des personnes investies du pouvoir disciplinaire, les faits de nature à entraîner des poursuites disciplinaires. Ces autorités ou personnes informent la commission de la suite donnée aux transmissions effectuées en application du présent article. »
Par amendement n° 19, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans la seconde phrase de cet article, après les mots : « la commission », d'insérer les mots : « , dans le délai fixé par elle, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de souligner, comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, que la commission peut imposer à l'autorité administrative un délai pour l'informer des suites données aux transmissions effectuées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Il semble qu'il n'appartienne pas à la commission de fixer un délai en vue d'obtenir un retour d'information sur les transmissions qu'elle fait à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire. Cela reviendrait à fixer à cette dernière un délai pour faire les diligences qui relèvent de sa compétence. Cette obligation est d'ailleurs d'autant plus inutile que ce délai n'est assorti d'aucune sanction.
Le Gouvernement n'est donc pas favorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, ainsi modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Article additionnel après l'article 9



M. le président.
Par amendement n° 20, M. de Richemont, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« La commission tient informé le parlementaire auteur de la saisine des suites données à celle-ci en application des articles 7 à 9. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Cet article permet au parlementaire auteur de la saisine d'être informé des suites de cette saisine. C'est la raison pour laquelle nous préférons la formule « tient informé ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Je réitère l'accord que j'ai donné à la tribune.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9.

Articles 10 à 13



M. le président.
« Art. 10. _ La Commission nationale de déontologie de la sécurité peut proposer au Gouvernement toute modification de la législation ou de la réglementation dans les domaines de sa compétence. » - (Adopté.)
« Art. 11. _ La Commission nationale de déontologie de la sécurité remet chaque année au Président de la République et au Parlement un rapport sur les conditions d'exercice et les résultats de son activité. Ce rapport est rendu public. » - (Adopté.)
« Art. 12. _ Les membres de la commission, ses agents, ainsi que les personnes que la commission consulte par application de l'avant-dernier alinéa de l'article 5, sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes ou renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions, sous réserve des éléments nécessaires à l'établissement des rapports prévus aux articles 7 et 11. » - (Adopté.)
« Art. 13. _ Les crédits nécessaires à la commission pour l'accomplissement de sa mission sont inscrits au budget des services du Premier ministre. Le président est ordonnateur des dépenses de la commission. Il nomme ses agents et a autorité sur ses services. » - (Adopté.)

Article 13 bis



M. le président.
« Art. 13 bis. _ Est puni d'une amende de 50 000 francs le fait de ne pas communiquer à la commission, dans les conditions prévues à l'article 5, les informations et pièces utiles à l'exercice de sa mission ou de ne pas déférer, dans les conditions prévues au même article, à ses convocations ou d'empêcher les membres de la commission d'accéder, dans les conditions prévues à l'article 6, aux locaux professionnels.
« Les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction des droits civils, civiques et de famille, suivant les modalités prévues par l'article 131-26 du code pénal ;
« 2° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions prévues à l'article 131-35 du code pénal.
« Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, du délit défini au premier alinéa. Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-28 du code pénal ;
« 2° L'exclusion des marchés publics, suivant les modalités prévues par le 5° de l'article 131-39 du code pénal ;
« 3° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée, suivant les modalités prévues par le 9° de l'article 131-39 du code pénal. »
Par amendement n° 21, M. de Richemont, au nom de la commission, propose, dans le sixième alinéa de cet article, de remplacer la référence : « 131-28 » par la référence : « 131-38 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de rectifier une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13 bis, ainsi modifié.

(L'article 13 bis est adopté.)

Article 14



M. le président.
« Art. 14. _ La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte, à l'exception des agents des territoires de la Polynésie française et de Wallis-et-Futuna, ainsi que des agents du territoire et des provinces de Nouvelle-Calédonie. »
Par amendement n° 22, M. de Richemont, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« La présente loi est applicable en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, dans les Terres australes et antarticques françaises et à Mayotte. Elle ne s'applique pas aux agents de la Polynésie française, du territoire des îles Wallis-et-Futuna, de la Nouvelle-Calédonie et des provinces de Nouvelle-Calédonie. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Henri de Richemont, rapporteur. Il s'agit de tenir compte des modifications constitutionnelles qui sont en cours concernant la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 14, est ainsi rédigé.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Schosteck pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Schosteck. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne cacherai pas que nous avons été de prime abord très dubitatifs quant à l'intérêt d'un projet de loi portant création d'une commission nationale de la déontologie de la sécurité.
Notre inquiétude tenait à une raison simple. Dans quelle mesure cette commission nationale pourrait-elle échapper à l'image concomitante d'une défiance instinctive à l'égard de nos forces de sécurité, qui assurent avec beaucoup de dévouement un métier et des fonctions difficiles et parfois très éprouvants.
Il n'était pas question pour nous de jeter la moindre ombre de suspicion sur ces professionnels dévoués.
Si nous nous sommes finalement ralliés à ce projet de loi, ainsi que l'a excellemment expliqué notre rapporteur, Henri de Richemont, c'est parce qu'il nous a semblé, à nous aussi, que cette commission pouvait apporter un certain nombre de garanties à nos concitoyens.
Souvent ceux-ci se sentent impuissants face au poids de l'Etat et de sa machinerie implacable. Lorsqu'ils se sentent spoliés, à juste titre ou non, ils n'ont bien souvent aucun moyen d'être réellement entendus. Dorénavant, par le biais de leur parlementaire, ils pourront obtenir une écoute attentive.
Sans instituer pour autant une présomption de culpabilité pour nos forces de sécurité, cette commission rendra la logique de l'Etat plus intelligible à nos concitoyens, notamment grâce aux amendements de notre rapporteur, qui prévoient de renforcer l'information des auteurs de la saisine.
Enfin, l'extension du champ de compétence de la commission nationale à l'administration pénitentiaire va tout à fait dans le sens souhaité par notre assemblée, qui sera d'ailleurs amenée à se prononcer prochainement sur les propositions de résolution des présidents de groupe de la majorité sénatoriale et de M. Badinter tendant à créer une commission d'enquête sur la situation de ces établissements pénitentiaires.
Notre groupe votera donc ce projet de loi, qui est en mesure de donner à nos concitoyens de nouvelles garanties. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

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DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Michel Mercier et Denis Badré une proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 206, distribuée et renvoyée à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

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ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 8 février 2000 :
A neuf heures trente :
1. Questions orales sans débat suivantes :
I. - M. Bernard Murat attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur les conséquences du classement des foyers-logements en « Equipement recevant du public », ou ERP. Dans un rapport rendu public fin mai et rédigé en commun par les services du ministère de la solidarité et du ministère du logement, il est prévu que les foyers-logements existants devront à l'avenir être classés en ERP et donc réaliser les travaux de sécurité en conséquence. En outre, ce rapport indique qu'il conviendra alors que les financements nécessaires à l'application des nouveaux textes soient trouvés. D'autant que le ministère a laissé entendre qu'une période de six à sept ans serait donnée à ces établissements pour s'adapter. D'une part, en ce qui concerne la mise en sécurité de ces établissements, il note que ce rapport ne précise pas le type de classement en ERP : sont-ils classés en ERP de type U ou en ERP de type tout public ? Il lui semble qu'une distinction prenant en compte les personnes domiciliées dans ces établissements, c'est-à-dire la destination du bâti, doit être envisagée sur ce point. D'autre part, bien que favorable à cette mesure, il s'inquiète de ses répercussions sur le budget des foyers-logements. Afin de ne pas alourdir le prix des journées ainsi que la pression fiscale des collectivités, il lui semble important que l'Etat s'engage financièrement dans cette démarche. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer, d'une part, selon quelles modalités son ministère entend classer les foyers-logements en ERP et, d'autre part, si l'Etat envisage d'intervenir financièrement sur ce dossier, à quelle hauteur et sous quel délai. (N° 643.)
II. - M. Charles Descours interroge Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur les conséquences des avis de la Commission de la transparence sur le remboursement des médicaments. Ces deux directives ont créé un lien entre les trois impôts commerciaux, si bien qu'une association assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée devient désormais redevable des autres impositions. Ces nouvelles mesures pénalisent en particulier les associations culturelles organisant des spectacles vivants qui étaient alors assujetties à la TVA à taux réduit, à savoir les théâtres nationaux et les autres théâtres fixes, les concerts symphoniques, les orchestres et les chorales, ainsi que les théâtres de marionnettes, les cabarets artistiques, les cafés-concerts, les music-halls et les cirques, à l'exclusion des établissements où il est d'usage de consommer pendant les séances. Pour la grande majorité d'entre elles, ces dispositions risquent d'être structurellement déficitaires. Conscient de ce problème, le Gouvernement, sans renoncer pour sa part à sa fiscalisation, a demandé aux collectivités locales de voter avant le 15 octobre 1999 une exonération totale de la taxe professionnelle. Devant cette situation, il lui demande de bien vouloir prendre en compte le rôle spécifique joué par les associations en maintenant les dispositions particulières dont elles bénéficiaient en matière fiscale. (N° 671.)
III. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur la dégradation importante des conditions de travail des personnels et du service rendu aux assurés sociaux des différentes caisses d'assurance maladie aggravée par le manque de personnels affectés pour répondre à l'afflux de demandes de couverture maladie universelle. Alors que les caisses d'assurance maladie sont chargées depuis le 1er janvier 2000 d'accueillir les bénéficiaires de la CMU qui doit permettre à quelque six millions de personnes résidant en France et percevant de faibles revenus d'être soignées gratuitement, les 1 400 emplois n'apparaissent pas suffisants pour faire face à la demande. Les différents acteurs avaient déjà prévu, l'année dernière, qu'il fallait créer un minimum de 3 000 emplois pour faire face à cette affluence. Outre l'insuffisance du nombre d'emplois, il est à remarquer qu'aucun poste n'a été affecté à Paris, un des départements pourtant les plus concernés par l'afflux de demandes de CMU. Les conséquences en sont des heures d'attente aux guichets et la forte augmentation du nombre de dossiers en instance. Selon les centres, le retard à la liquidation est de trois à trente-sept jours. Le manque de personnel fait que l'on gère au plus pressé et que les dossiers complexes, comme les indemnités journalières, les accidents de travail ou les nouvelles demandes d'affiliation restent en solde. Pour toutes ces raisons elle lui demande ce que l'Etat compte faire pour créer le nombre de postes nécessaires pour assurer un service de qualité aux assurés et de meilleures conditions de travail des personnels alors que les négociations sur la réduction du temps de travail ne sont toujours pas engagées pour ceux-ci. (N° 702.)
IV. - M. Francis Grignon attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur le remboursement des traitements de certaines maladies dites orphelines. En effet, la maladie de Biermer, maladie génétique grave et orpheline, peut être soignée par des injections régulières de vitamine B 12. Or, ce traitement n'est nullement remboursé par la sécurité sociale. Il lui demande donc si, dans ce type de cas, qui ne doit pas être le seul, il ne serait pas envisageable de prévoir un remboursement par la sécurité sociale, remboursement qui serait ainsi fonction de la pathologie et non du médicament. (N° 655.)
V. - M. Raymond Soucaret attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la disparition des postes de correspondants locaux des douanes et des droits indirects et sur ses conséquences financières. La tenue du poste de correspondant local est généralement une charge d'emploi imposée par l'administration au titre de l'exercice principal de débitant de tabac. C'est également une activité complémentaire à la tenue de librairie-journaux ou encore de débits de boissons. Ces recettes locales forment un maillage essentiel pour la présence de l'administration sur l'ensemble du territoire. Alors qu'une majorité des correspondants locaux ont un faible niveau d'activité, et qu'un certain nombre d'entre eux ont été affectés par la suppression des titres de mouvement sur les céréales, face à un faible niveau d'activité, il leur est proposé une aide pécuniaire à la cessation d'activité. Cette aide a un coût non négligeable, voire démesuré. Aussi, il lui demande les raisons de cette politique de suppression des correspondants locaux très coûteuse, ainsi que la suppression de cette dernière. (N° 642.)
VI. - M. Jean-Pierre Demerliat souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les difficultés rencontrées par les communes ou les particuliers pour obtenir l'autorisation d'ouvrir un bureau de tabac dans les petites communes. Il est parfaitement conscient des dangers que peut occasionner l'abus du tabac sur la santé mais il sait aussi que si les habitants d'une petite commune n'ont pas la possibilité de se procurer leur « drogue » chez eux, ils iront faire l'ensemble de leurs achats dans une ville plus grande, ce qui aura pour conséquence de faire péricliter les commerces des toutes petites communes et accentuera le phénomène de désertification des zones rurales. (N° 674.)
VII. - M. Xavier Darcos attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le projet de réforme envisagé par son département ministériel, à la suite des conclusions de la mission 2003 présidée par MM. Bert et Champsaur, et dont l'objet tend à la fermeture des services du Trésor public dans les cantons ruraux. De nombreuses communes rurales de Dordogne étant particulièrement préoccupées par la suppression de ces services de proximité qui sont indispensables en termes d'aménagement du territoire, il souhaite recueillir des précisions sur sa politique mise en oeuvre pour les services déconcentrés du Trésor. (N° 706.)
VIII. - Mme Dinah Derycke souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'industrie sur les inquiétudes très fortes des salariés d'Alstom, entreprise qui vient de fusionner, pour sa partie énergie, avec l'entreprise ABB. Des documents émanant de la direction mentionnent un nombre très important de suppressions d'emplois. Pour la seule usine de Lys-lez-Lannoy, unique lieu de production de chaudières en France, un projet de la direction en voie de finalisation prévoit une suppression de 346 postes. A cette occasion, les instances de représentation des salariés n'ont pas été consultées et ces défaillances ont donné lieu à une procédure juridictionnelle récente, à la suite de laquelle les organisations syndicales ont obtenu gain de cause. Elle souhaite que le Gouvernement porte la plus grande attention à cette réorganisation par produits qui, en désolidarisant juridiquement les diverses activités d'une entreprise et leur multidisciplinarité, remet en cause des savoir-faire et sape ce qui fait la force et assure la pérennité de certains lieux de production. Compte tenu de l'ampleur de cette réorganisation et de ses implications notamment en matière d'emploi et particulièrement au coeur du versant nord-est de l'agglomération lilloise frappée de plein fouet par les restructurations industrielles, elle demande au ministre quelle position il compte prendre face à cette situation. (N° 679.)
IX. - M. Bernard Plasait attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat sur le champ d'application de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 modifiée. Il semble, en effet, que les commissions départementales d'équipement commercial aient tendance, suivant l'interprétation de la circulaire du 16 janvier 1997 portant application des dispositions de la loi Royer, à faire une application extensive de l'article 29-1 et à vouloir inclure toutes les activités de prestation de service à caractère artisanal, comme les salons de coiffure, de haute coiffure et d'esthétique, dans le champ d'application de la loi. Pour justifier en pratique une telle extension, les commissions départementales d'équipement commercial se fondent sur l'article 1-B de la circulaire précitée, qui se réfère à deux décisions du Conseil d'Etat, respectivement rendues les 30 septembre 1987 - SCAEX Interrégion parisienne - et 4 novembre 1994 - Les 3 Sautets. Or, ni l'esprit de la loi qui vise à contrôler l'installation de magasins de détail ayant une grande surface, ni la jurisprudence du Conseil d'Etat précitée ne confortent la position de l'administration concernant le champ d'application extensif de la loi. En effet, les décisions précitées du Conseil d'Etat soumettent les activités de prestation de service à caractère artisanal aux dispositions de la loi du 27 décembre 1973 modifiée uniquement lorsqu'elles s'exercent dans des locaux qui s'intègrent à un magasin de grande surface participant d'un même ensemble ou centre commercial. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer si le projet d'extension d'un salon parisien de haute coiffure dont la surface est supérieure à 300 mètres carrés mais dont les locaux ne sont pas inclus dans un ensemble commercial est soumis au respect des dispositions de la loi précitée, alors même que l'activité de ce salon n'a rien de comparable à celle d'une grande surface puisqu'une partie de sa superficie serait même réservée à une clientèle privilégiée disposant de cabines de coiffage et d'esthétique individuelles. (N° 682.)
X. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les très graves conséquences pour le département de la Haute-Loire du contrat de plan à venir dans l'hypothèse où l'Etat s'en tiendrait à l'enveloppe annoncée de 875 millions de francs pour sept ans. Il lui rappelle que, pour le précédent contrat de plan, une enveloppe de 1,350 milliard de francs avait été prévue. Il tient également à lui rappeler que l'enveloppe annoncée ne permettra pas la réalisation d'opérations routières absolument indispensables : raccordement de Brioude à l'A 75, contournement du Puy-en-Velay, travaux entre Yssingeaux et Le Puy-en-Velay. Il lui demande donc si l'Etat envisage d'abonder ou non l'enveloppe annoncée. (N° 630.)
XI. - M. René Marquès attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les nuisances sonores provoquées par les vélomoteurs. Dans de nombreuses villes, les habitants se plaignent de ces nuisances sonores et regrettent qu'aucune mesure ne soit prise pour sanctionner les conducteurs de ces vélomoteurs d'une puissance inférieure à 50 centimètres cubes et dépourvus de plaque minéralogique. La plupart du temps, ces engins sont équipés de « kit » permettant d'accroître leur vitesse dans des proportions très importantes. Les forces de l'ordre éprouvent des difficultés non seulement à les arrêter, mais également à les verbaliser. De plus, les propriétaires de ces vélomoteurs, en roulant à des vitesses prohibées, mettent leur sécurité en danger ainsi que celle des piétons. Lors de l'examen du projet de loi relatif à la sécurité routière, un amendement avait prévu l'obligation d'immatriculation pour les vélomoteurs d'une puissance inférieure à 50 centimètres cubes. De caractère réglementaire, cette disposition avait été supprimée. Or, elle répond à une préoccupation importante de nombreuses personnes et de nombreux élus locaux, incapables d'apporter des solutions à ce problème. Cette obligation d'immatriculation permettrait de retrouver plus facilement les propriétaires de ces engins et de les sanctionner En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer ses intentions pour régler cette question de sécurité routière. (N° 644.)
XII. - M. Léon Fatous souhaite interpeller M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la baisse des effectifs des directions de l'équipement, et plus particulièrement celle du Pas-de-Calais. En effet, même si le ministère a considérablement ralenti, depuis 1997, la baisse des effectifs de l'équipement, il s'avère que cette dernière reste plus importante que les autres, pour le département du Pas-de-Calais. Cette situation est inquiétante pour un département et une région qui ont toujours été sous-administrés - le différentiel est de 20 % par rapport aux autres départements. Aussi, il voudrait savoir s'il sera tenu compte de cette situation. (N° 676.)
XIII. - M. Alain Joyandet appelle l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la compatibilité de l'arrêté du 4 avril 1996 du ministère de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme publié au Journal officiel (n° 101) du 28 avril 1996 relatif aux manifestations aériennes, avec l'arrêté du 9 décembre 1998 du ministère de la jeunesse et des sports, publié au Journal officiel (n° 31) du 6 février 1999, relatif aux garanties de technique et de sécurité dans les établissements d'activités physiques et sportives qui organisent la pratique ou l'enseignement du parachutisme. Des problèmes d'interprétation se posent entre les deux textes notamment lors des sauts en tandem définis par l'arrêté de 1996 comme des « baptêmes de l'air » (art. 2) et, plus particulièrement, en ce qui concerne la limite d'âge des passagers des baptêmes de l'air. En effet, alors que l'arrêté du 4 avril 1996 ne prévoit pas de condition d'âge pour les sauts en tandem qualifiés de baptêmes de l'air et que, de surcroît, il exclut que ceux-ci puissent être l'occasion de pratiquer un quelconque enseignement du parachutisme, l'arrêté du ministère de la jeunesse et des sports de 1998 impose une limite d'âge en dessous de laquelle l'enseignement du parachutisme est interdit. Ces deux textes, qui devraient être complémentaires - l'arrêté de 1996 réglementant les baptêmes de l'air et celui de 1998 réglementant l'enseignement du parachutisme - s'opposent dans la pratique. En effet, cette interprétation n'est pas retenue puisque les dispositions de l'arrêté de 1998, notamment celles qui concernent la limite d'âge, sont opposées par les autorités compétentes aux passagers de baptêmes de l'air. Cette situation est fort préoccupante car elle menace les activités de démonstration des parachutistes professionnels. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer de quel arrêté relève la pratique des baptêmes de l'air, dits sauts en tandem, et les recommandations qu'il compte faire pour permettre qu'une telle ambiguïté entre les textes réglementaires cesse, et plus particulièrement si les règles édictées par le ministère chargé des sports sont opposables aux parachutistes professionnels détenant leurs prérogatives de son ministère chargé de l'aviation civile. (N° 681.)
XIV. - M. Jean-Claude Peyronnet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur certaines conséquences de la décision française de maintenir l'embargo sur la viande bovine britannique. Le Gouvernement a décidé, à juste titre, de maintenir l'interdiction d'importation de viande bovine britannique. Cette décision, dont les consommateurs lui savent gré, a entraîné la riposte immédiate de la presse britannique qui incite au boycottage des produits français. Parmi ces produits, il en est un qui est particulièrement visé puisqu'il est l'un des symboles de notre pays : la pomme. En Limousin, les producteurs de pommes subissent durement cette mesure de rétorsion. Quelques chiffres : le Limousin produit 120 000 tonnes de pommes (des Golden d'altitude haut de gamme pour l'essentiel) réparties sur 4 000 hectares de vergers. Sur ces 120 000 tonnes, 50 000 sont destinées à l'export. Le premier marché à l'étranger de la pomme du Limousin est la Grande-Bretagne. Dès lors, les conséquences sont multiples : perte de parts de marché par le référencement de la concurrence, baisse des prix, augmentation des coûts de production, dépôts de bilan, marché de l'emploi déprimé. Ces incidences se répercutent par ailleurs sur les autres professionnels de la filière - transport, emballage, étiquetage. Aussi, il souhaiterait savoir quelles mesures le Gouvernement entreprendra pour accompagner ces professionnels. Il serait nécessaire de mettre en place des reports de charges, d'échéances de prêts, d'impôts exigibles afin de préserver la trésorerie des exploitants. (N° 687.)
XV. - M. Jean Faure attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la situation dans laquelle se trouvent certaines communes devant l'inadéquation qui perdure entre les objectifs du Gouvernement en matière de diversification énergétique et les outils financiers mis en oeuvre pour assurer la réalisation de ces objectifs. Chacun s'accorde, en effet, à reconnaître l'intérêt de la production décentralisée d'énergie en termes d'aménagement du territoire, et notamment de la filière bois, très développée dans le département de l'Isère. Or, les communes rurales, qui sont pourtant les mieux placées pour mettre en oeuvre d'ambitieux projets de diversification, se trouvent dans une situation ubuesque. En effet, les projets énergétiques qu'elles ont mis à l'étude sont jugés excellents, techniquement et économiquement. Par exemple, la mise en place de chaufferies à plaquettes leur ferait économiser des sommes importantes sur leur budget de fonctionnement, les temps de retour de ces investissements étant très courts (de l'ordre de quelques années). Elles obtiennent des subventions diverses au titre des politiques énergétiques menées par l'Etat, l'Europe et les collectivités régionales et départementales. Pourtant, elles ne trouvent aucune structure financière pour assurer l'autofinancement restant à leur charge, qu'elles ne sont pas en mesure d'avancer. Car ces communes sont confrontées à des besoins urgents en matière de voirie, de sauvegarde du patrimoine, ou à des dépenses obligatoires qui leur interdisent tout investissement autre, aussi rationnel et porteur d'avenir soit-il. Or, ces communes rurales sont mises en demeure de résorber leur déficit structurel et d'abonder leur capacité d'autofinancement. A l'heure de l'adoption du budget de l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, il lui demande si le Gouvernement a l'intention de doter cette agence d'une structure financière capable soit de financer directement les projets n'ayant pu être pris en charge dans le cadre de financements traditionnels, soit de se porter caution auprès des prêteurs traditionnels. Il lui rappelle que c'est à ce prix que la politique de diversification énergétique et de valorisation de la forêt française pourra obtenir des résultats significatifs. (N° 669.)
XVI. - M. Serge Franchis rappelle à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement que la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987, modifiée par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 met à la charge de l'Etat l'élaboration de plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations. Le problème se pose des obligations des habitants mais aussi de celles de l'Etat. A Auxerre, les services de l'Etat ont réalisé une simulation hydraulique à partir des données de la crue centennale de 1910. Cette simulation a conduit à l'établissement d'un zonage qui classe le quart du secteur urbanisé de la ville en zone inondable. La direction départementale de l'équipement prépare un règlement qui fixe des contraintes qui s'imposeront aux habitants, à quelque 250 entreprises, aux collectivités locales et aux concessionnaires de services publics, comme EDF-GDF pour ses ouvrages d'électricité ou de gaz. Les contraintes prévues dans le projet de règlement sont telles qu'elles obligeront toute la communauté auxerroise à accepter des efforts très importants : les 250 entreprises existantes ne pourront plus étendre leur activité sur le site, les habitants devront entreprendre des travaux dans leurs maisons. Le projet de plan, qui sera prochainement soumis à l'enquête publique, ne fixe aucune obligation à l'Etat alors même que la rivière Yonne est une rivière domaniale. Or, l'article 40-1 de la loi dispose que les plans définissent les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises par les collectivités publiques dans le cadre de leurs compétences. Aussi, il lui demande si le plan de prévention des risques d'Auxerre, comme dans toutes les situations similaires, ne devrait pas prévoir les engagements de l'Etat et fixer sa contribution à la réalisation des objectifs définis par la loi : nature des travaux, obligation de résultat s'agissant de l'entretien du lit et des berges, solidité des ouvrages de franchissement. (N° 689.)
XVII. - M. Dominique Leclerc souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur le projet de réforme des études des professions de santé actuellement en cours d'élaboration au sein de son ministère. Il lui serait reconnaissant de bien vouloir lui faire savoir s'il entend tenir compte des propositions formulées par les conférences de doyens de médecine, pharmacie et chirurgie dentaire au nom des différents professionnels concernés par cette réforme et si ce projet sera prochainement soumis au Parlement. (N° 673.)
XVIII. - M. Michel Duffour appelle l'attention de M. le ministre de la défense sur les récentes déclarations du président de la Société nationale d'études et de constructions de moteurs d'aviation, la SNECMA, annonçant une réorientation stratégique de l'entreprise au travers de la création d'une société de holding dont le nouvel objet serait la participation directe ou indirecte dans toute opération financière, commerciale ou industrielle, ainsi que la gestion d'un portefeuille de titres de participation. Certes, aujourd'hui plus un seul programme aéronautique majeur ne peut être lancé par une seule entreprise, ni même par une seule nation. Il faut donc trouver des alliances technologiques et des montages financiers afin de préparer l'avenir. Notre pays ne part pas de rien dans ce domaine. La France a une solide expérience, que ce soit avec Airbus, Ariane ou CFMI, il existe donc bien d'autres choix que celui d'engager une réorientation de la vocation des établissements vers des activités financières ouvertes aux capitaux privés en France et à l'étranger, dont on sait bien qu'elle sert d'abord aux actionnaires. Le personnel, les acquis sociaux, la réduction du temps de travail, l'emploi, les programmes et l'outil industriels passent dans ces conditions au second plan. Il souhaiterait connaître son avis sur cette déclaration et savoir s'il entend consulter les salariés, leurs organisations syndicales, les parlementaires avant toute décision engageant la privatisation d'une entreprise nationale de pointe. (N° 685.)

A seize heures et, éventuellement, le soir :
2. Discussion en deuxième lecture de la proposition de loi (n° 141, 1999-2000), modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à modifier l'article 6 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.
Rapport (n° 198, 1999-2000) de M. Henri Revol, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 7 février 2000, à dix-sept heures.
3. Discussion du projet de loi (n° 488, 1998-1999) portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relatif à la signature électronique.
Rapport (n° 203, 1999-2000) de M. Charles Jolibois, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 7 février 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 7 février 2000, à dix-sept heures.
4. Discussion en deuxième lecture du projet de loi (n° 135, 1999-2000), modifié par l'Assemblée nationale, modifiant le code pénal et le code de procédure pénale et relatif à la lutte contre la corruption.
Rapport (n° 202, 1999-2000) de M. José Balarello, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 7 février 2000, à dix-sept heures.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Déclaration du Gouvernement, suivie d'un débat, sur les conséquences et les suites des intempéries et de la marée noire intervenues fin décembre 1999.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 8 février 2000, à dix-sept heures.
Projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif aux volontariats civils institués par l'article L. 111-2 du code du service national (n° 179, 1999-2000.)
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 8 février 2000, à dix-sept heures.
Proposition de loi de M. Bernard Joly tendant à permettre la dévolution directe de tous les biens vacants et sans maître à la commune en lieu et place de l'Etat (n° 325, 1998-1999.)
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 février 2000, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires économiques sur la proposition de loi de M. Jean-Pierre Raffarin et de plusieurs de ses collègues tendant à favoriser la création et le développement des entreprises sur les territoires (n° 189, 1999-2000.)
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 9 février 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 9 février 2000, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
CONSEIL NATIONAL DES POLITIQUES DE LUTTE
CONTRE LA PAUVRETÉ ET L'EXCLUSION SOCIALE

Le 28 janvier 2000, M. le président du Sénat a nommé, en application du décret n° 99-216 du 22 mars 1999, pour siéger au sein du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale :
- M. Bernard Seillier, en qualité de membre titulaire ;

- M. Alain Gournac, en qualité de membre suppléant.

NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES

M. Paul Masson a été nommé rapporteur du projet de loi n° 171 (1999-2000) autorisant la ratification des amendements à la constitution de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

COMMISSION DES FINANCES

M. Joseph Ostermann a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 140 (1999-2000) de M. Guy Fischer et plusieurs de ses collègues relative à la constitution d'une commission de contrôle nationale et décentralisée des fonds publics accordés aux entreprises.
M. Joseph Ostermann a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 163 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la constitution d'une commission de contrôle nationale et décentralisée des fonds publics accordés aux entreprises.