Séance du 13 décembre 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 2000. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Budgets annexes de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération (p. 2 )

M. le président.
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mmes Marie-Claude Beaudeau ; Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

LÉGION D'HONNEUR (p. 3 )

Adoption des crédits figurant aux articles 42 et 43

ORDRE DE LA LIBÉRATION (p. 4 )

Adoption des crédits figurant aux articles 42 et 43

Justice
(p. 5 )

M. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour les services généraux ; MM. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour l'administration pénitentiaire ; Patrice Gélard, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour la protection judiciaire de la jeunesse ; Robert Badinter, Pierre Fauchon, Jacques Peyrat, Robert Bret, Guy Cabanel, Jean-Pierre Bel, Jean-Jacques Hyest, Dominique Leclerc, Georges Othily.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Crédits des titres III à VI. - Adoption (p. 6 )

Article 71. - Adoption (p. 7 )

Article additionnel après l'article 71 (p. 8 )

Amendement n° II-9 de la commission des finances. - M. le rapporteur spécial, Mme le ministre. - Retrait.

Suspension et reprise de la séance (p. 9 )

3. Demande d'autorisation de missions d'information (p. 10 ).

4. Loi de finances pour 2000. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 11 ).

Articles de totalisation des crédits (p. 12 )

M. le président.

Article 37. - Adoption (p. 13 )

Article 38 et état B (p. 14 )

MM. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur ; Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances ; Alain Lambert, président de la commission des finances.
Adoption de l'article et de l'état annexé.

Articles 39 et état C, 42, 43, 51 et état E, 52 et état F,
53 et état G, 54 et état H. - Adoption (p. 15 )

Articles non rattachés
(p. 16 )

Article 56 (p. 17 )

Amendement n° II-86 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 57 (p. 18 )

Amendements identiques n°s II-12 rectifié de M. Murat, II-16 de M. Arthuis et II-77 de M. Trucy ; amendements identiques n°s II-44 de la commission, II-17 de M. Arthuis et II-78 de M. Trucy. - MM. Gérard Braun, Claude Huriet, François Trucy, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, le président de la commission, Bernard Angels. - Retrait des amendements n°s II-12 rectifié, II-16, II-77 et II-78 ; adoption des amendements n°s II-44 et II-17.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 57 (p. 19 )

Amendement n° II-64 de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements n°s II-43 de la commission, II-18, II-19 de M. Fréville et II-63 de M. Oudin. - MM. le rapporteur général, Denis Badré, Gérard Braun, le secrétaire d'Etat, Michel Moreigne, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Retrait des amendements n°s II-63 et II-18 ; adoption de l'amendement n° II-43 insérant un article additionnel, l'amendement n° II-19 devenant sans objet.

Article 58 (p. 20 )

Amendement n° II-45 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-46 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-47 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 58 (p. 21 )

Amendement n° II-65 rectifié de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-59 rectifié bis de M. Pelletier repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, le président de la commission, Jean Chérioux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-66 rectifié de M. Oudin. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-48 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-49 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-50 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-62 de Mme Bardou. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Moreigne. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 59. - Adoption. (p. 22 )

Article 60 (p. 23 )

Amendement n° II-51 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 60 (p. 24 )

Amendement n° II-76 rectifié de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux. - Rejet.

Article 61. - Adoption (p. 25 )

Articles additionnels après l'article 61 (p. 26 )

Amendement n° II-75 de M. Ostermann. - MM. Gérard Braun, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Jean Chérioux, Denis Badré. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article additionnel avant l'article 61 bis (p. 27 )

Amendement n° II-79 rectifié de M. Revet. - MM. François Trucy, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 61 bis (p. 28 )

Amendements identiques n°s II-52 de la commission et II-81 de M. Deneux. - MM. le rapporteur général, Marcel Deneux, le secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 62. - Adoption (p. 29 )

Article additionnel après l'article 62 (p. 30 )

Amendement n° II-38 de M. Foucaud. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 63. - Adoption (p. 31 )

Article additionnel après l'article 63 (p. 32 )

Amendements n°s II-37 de M. Foucaud, II-53 de la commission et II-82 de M. Hérisson. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° II-82 ; rejet de l'amendement n° II-37 ; adoption de l'amendement n° II-53 insérant un article additionnel.

Article 63 bis. - Adoption (p. 33 )

Article 63 ter (p. 34 )

Amendement n° II-54 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

Article additionnel après l'article 63 ter (p. 35 )

Amendement n° II-41 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Articles 63 quater et 63 quinquies. - Adoption (p. 36 )

Article 63 sexies (p. 37 )

Amendement n° II-55 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 63 septies . - Adoption (p. 38 )

Article 63 octies (p. 39 )

Amendement n° II-56 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 63 nonies (p. 40 )

Amendement n° II-57 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel avant l'article 63 decies (p. 41 )

Amendement n° II-40 rectifié de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 63 decies (p. 42 )

Amendement n° II-58 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel après l'article 63 decies (p. 43 )

Amendement n° II-39 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Yann Gaillard. - Rejet.

Article additionnel avant l'article 63 undecies (p. 44 )

Amendement n° II-42 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 63 undecies . - Adoption (p. 45 )

Articles additionnels après l'article 63 undecies (p. 46 )

Amendement n° II-80 rectifié de M. Trucy repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles 63 duodecies à 63 quaterdecies . - Adoption (p. 47 )

Articles additionnels après l'article 63 quaterdecies (p. 48 )

Amendement n° II-74 rectifié de M. Ostermann repris par la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Demande de seconde délibération (p. 49 )

MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur général.
La seconde délibération est ordonnée.
M. le président.
Renvoi de la suite de la discussion.

5. Dépôt d'un avis (p. 50 ).

6. Ordre du jour (p. 51 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 2000

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000 (n° 88, 1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 89 (1999-2000).]

Budgets annexes de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les budgets de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Je suis heureux, au nom du Sénat, de saluer la présence, aux côtés de Mme le ministre, du général Douin, grand chancelier de l'ordre national de la Légion d'honneur, et du général Simon, chancelier de l'ordre de la Libération.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le grand chancelier, monsieur le chancelier, mes chers collègues, en 2000, le montant des recettes et des dépenses du budget annexe de la Légion d'honneur s'élèvera à 123,914 millions de francs, en augmentation de 9,42 % après une hausse de 2,82 % en 1999.
Les recettes de l'ordre de la Légion d'honneur proviennent, pour l'essentiel, de la subvention de l'Etat, versée par le budget de la justice, qui n'augmente que de 0,26 % pour s'établir à 105,75 millions de francs. En 1999, la progression était de 2,86 %.
Les ressources propres progressent, en 2000, de 5,16 %, pour atteindre 8,163 millions de francs. Elles comprennent trois éléments : les droits de chancellerie, qui restent stables, les pensions et trousseaux des élèves des maisons d'éducation, relevés par arrêté de 3,43 % pour atteindre 5,86 millions de francs, et les produits accessoires, qui sont en augmentation de 32,77 %, du fait de l'intégration des recettes du musée de la Légion d'honneur.
Je voudrais maintenant vous présenter les dépenses du budget annexe de l'ordre de la Légion d'honneur.
Les dépenses de fonctionnement concernent pour 92 % le fonctionnement de l'administration centrale de la grande chancellerie de la Légion d'honneur et des maisons d'éducation, qui reçoivent les filles ou les petites-filles des légionnaires de l'Ordre, ainsi que les filles des membres de l'ordre national du Mérite. Elles s'élèvent à 98,976 millions de francs, leur augmentation de 1,17 % étant liée à l'application de l'accord salarial conclu dans la fonction publique et à la création nette de trois emplois.
En effet, l'intégration du musée dans le budget annexe de la Légion d'honneur pour 2000 aura pour conséquence la création de huit emplois en contrepartie de cinq suppressions, ce qui portera l'effectif de 413 à 416 emplois, dont 101 à la grande chancellerie et 315 dans les maisons d'éducation.
Les opérations en capital, avec 16,43 millions de francs, connaissent une importante augmentation, même si 10,15 millions de francs concernent des programmes déjà engagés. Sur les 6,28 millions de francs de mesures nouvelles, 4,4 millions de francs sont destinés à l'entretien des bâtiments.
Le budget annexe de la Légion d'honneur a bénéficié, au titre de la loi de finances rectificative pour 1998, d'ouvertures nettes de 15 millions de francs destinés au financement partiel de la restauration du cloître de la maison d'éducation de Saint-Denis. Cette année, c'est en loi de finances initiale qu'il est attribué 10 millions de francs pour la réalisation pluriannuelle de ces travaux dont le coût total est estimé à 37 millions de francs.
En outre, une dotation de 1,6 million de francs pour les travaux à la grande chancellerie permettra la poursuite de la réfection des toitures et des menuiseries extérieures du palais de Salm.
Pour conclure l'examen du budget annexe de la Légion d'honneur, je souhaite vous faire part de quelques observations.
Je me félicite de la reprise, dans les recettes, pour un montant de 10 millions de francs, d'une « provision pour risques et charges financières », afin de tenir compte des observations de la Cour des comptes. Je constate toutefois que l'augmentation des dotations en capital résulte surtout de cet ajustement de trésorerie.
Je relève avec satisfaction la persistance de l'effort en matière de travaux. En effet, après la restauration des maisons d'éducation, il est indispensable de préserver les collections du musée de la Légion d'honneur comme l'ensemble architectural constitué par le palais de Salm et ses annexes.
J'approuve la dissolution prochaine de l'établissement public administratif gérant le musée national de la Légion d'honneur, pour l'intégrer au budget annexe, ce qui permettra l'utilisation de sa trésorerie pour réaliser les travaux nécessités par l'état de vétusté du musée.
A cet égard, j'espère que l'ensemble des travaux prévus pourra être terminé avant 2002, année du bicentenaire de l'Ordre.
J'apprécie la qualité de l'enseignement dispensé dans les maisons d'éducation, attesté par l'excellence des résultats obtenus, notamment un troisième prix et une mention régionale aux concours généraux.
Enfin, je m'inquiète de la question, soulevée par la Cour des comptes, concernant la qualité d'ordonnateur principal dont ne disposerait pas le grand chancelier de l'ordre de la Légion d'honneur pour son budget. Cette interrogation a déjà été formulée par le rapporteur spécial de l'Assemblée nationale, lors de l'examen de ces crédits, et je souhaite savoir, madame la garde des sceaux, si la situation a été clarifiée depuis.
J'en viens à présent à l'examen des crédits relatifs au budget annexe de l'ordre de la Libération.
La subvention du budget général, seule ressource du budget annexe, s'établit, en 2000, à 4,96 millions de francs, soit une diminution de 1,1 %. Cette réduction n'est qu'apparente, puisqu'elle résulte d'une mesure d'ajustement. Cette subvention avait progressé de 21,9 % en 1999, pour permettre la reprise des investissements pour des gros travaux devenus indispensables.
Les dépenses de fonctionnement diminuent de 1,32 %, pour s'établir à 4,11 millions de francs. Quant aux dépenses en capital, elles concerneront, pour un montant de 850 000 francs, une deuxième tranche de crédits de paiement destinés à la réfection de l'installation électrique de la chancellerie et du musée de l'ordre de la Libération.
Comme en 1999, outre le chancelier, douze personnes seront employées par la chancellerie.
Je conclurai en vous faisant part de deux observations.
Si le coût prévisionnel des travaux de la chancellerie s'élève à 2,63 millions de francs en autorisations de programme, les crédits de paiement s'échelonnent sur trois exercices. Leur réalisation, qui ne prendra que quelques mois, ne pourra débuter avant la fin de l'an 2000 pour permettre leur règlement début 2001, lorsque la totalité des crédits aura été attribuée. Je regrette cette conséquence, mais je me satisfais toutefois du maintien de l'effort dans le projet de budget pour 2000.
Je me félicite surtout de l'adoption de la loi créant le Conseil national des communes « Compagnons de la Libération », qui permettra de pérenniser la mémoire et les traditions de l'ordre de la Libération, par l'institution d'un établissement public à caractère administratif, lorsqu'il ne comptera plus le nombre de compagnons nécessaire à son fonctionnement. En effet, au 4 août 1999, si l'Ordre comptait 6 300 médaillés de la Résistance, seulement 161 compagnons de la Libération étaient encore en vie. Depuis la semaine dernière, ils ne sont, hélas ! plus que 157.
Cette organisation a été retenue pour préserver à l'Ordre personnalité morale et autonomie financière. En l'état actuel de la réflexion, les crédits seraient toujours rattachés au ministère de la justice, mais la question du maintien d'un budget annexe reste en suspens. Quant au choix des communes, il repose sur le souci de fonder l'avenir de l'Ordre sur les seuls cinq compagnons permanents : Grenoble, Nantes, Paris, l'île de Sein et Vassieux-en-Vercors. En effet, sur les dix-huit unités combattantes compagnons, certaines sont dissoutes et la pérennité des autres n'est pas assurée.
J'apprécie le large consensus observé dans les deux chambres à l'occasion de ce débat. Ainsi nous acquitterons-nous de notre devoir de mémoire à l'égard de ceux qui, par leur volonté de résistance et leur courage, ont contribué à sauver notre pays de l'obscurantisme et de la barbarie. A l'aube du troisième millénaire, le message universel délivré par leur sacrifice continuera à être transmis aux jeunes générations.
Ces observations étant faites, je vous propose, mes chers collègues, de suivre votre commission des finances en adoptant à l'unanimité les budgets annexes de l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée le 2 novembre 1999, la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discusion.
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant d'aborder l'examen des crédits de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération, je souhaiterais obtenir quelques précisions du Gouvernement sur une anomalie juridique concernant l'ordonnateur du budget de la Légion d'honneur.
Je rappelle que l'ordonnance du 10 août 1945 précise que « l'ordre sera doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Son budget, dont le chancelier est institué l'ordonnateur principal, sera un budget annexe à celui du ministère de la justice ».
Est-il exact, madame la ministre, que des dispositions seraient prises faisant du ministre de la justice l'ordonnateur principal et le grand chancelier l'ordonnateur secondaire ?
Nous en sommes étonnés, car il s'agit d'une loi qui, à notre connaissance, n'a pas été modifiée. Des textes nouveaux ont-ils été décidés, ne pouvant alors prendre forme que d'une ordonnance ?
Nous n'avons pas connaissance de modifications intervenues pour la Légion d'honneur et nous considérons toujours le chancelier de l'ordre de la Légion d'honneur comme ordonnateur principal d'un budget annexe.
Confirmez-vous cette réalité, car ce que j'ai pu lire des débats à l'Assemblée nationale n'est pas clair à ce sujet ?
L'institution n'est pas dépassée, puisqu'elle s'occupe des enfants de la France s'étant illustrés à son service dans les domaines les plus divers, qu'ils soient civils ou militaires. Il en est ainsi des actes de la République qui, au fil du temps, s'ennoblissent ; son budget est à l'image de l'institution, sans bouleversement majeur.
Deux modifications cependant sont à noter.
La première concerne le musée national de la Légion d'honneur. Sa gestion en sera confiée au budget de la Légion d'honneur, et non à un établissement public de gestion qui disparaît. Cette mesure assure une appartenance du musée à l'Institution, mesure pérenne, justifiée mais entraînant cependant une dépense de 205 730 francs.
La seconde mesure porte sur un ajustement de la trésorerie du budget annexe aux besoins réels de l'ordre. Les ressources du budget annexe augmenteront de 9,42 %. Une analyse attentive démontre que le ministère de la justice n'augmentera la subvention que de 0,26 %, alors que les ressources propres croîtront de 134 %. Le fonds de roulement a d'ailleurs été réduit comme le souhaitait la Cour des comptes dans ses observations du début de l'année.
Nous voudrions noter un aspect trompeur concernant la création de postes.
Huit postes sont créés, mais du fait de l'intégration du musée national de la Légion d'honneur au budget annexe. Il ne faut pas oublier que cinq postes seront supprimés, un à la grande chancellerie et quatre dans les maisons d'éducation.
Parmi les grosses dépenses, 10 millions de francs supplémentaires seront investis pour le cloître de la Maison de Saint-Denis. La fin de la restauration du cloître était attendue. Elle est justifiée. Rappelons que l'ensemble de cette dépense s'élève à 37 millions de francs et a été échelonnée sur plusieurs années.
Je voudrais faire trois remarques complémentaires après avoir précisé que nous voterons les crédits de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Le Sénat se doit de féliciter les 897 élèves pour leurs brillants résultats aux examens. Le taux de réussite atteint 97 % pour le brevet des collèges et 88 % pour le BTS.
Tous les élèves de khâgne et d'hypokhâgne ont au moins obtenu l'équivalence correspondant à leur niveau universitaire, DEUG première ou seconde année.
Ma deuxième remarque porte sur une augmentation de tous les effectifs et promotions des deux ordres nationaux de la Légion d'honneur et des médaillés militaires avec une progression de 3,7 %. En 1999, les effectifs de la Légion d'honneur se montaient à 114 042.
Ne faudrait-il pas se montrer un peu plus généreux pour la recherche des mérites ? Ne faudrait-il pas également féminiser les promotions ?
La dignité de grand-croix de la Légion d'honneur n'a été attribuée qu'à deux femmes, Mme Geneviève de Gaulle-Anthonioz et Germaine Tillon. En 1999, 20 % de femmes ont été promues dans les promotions civiles.
Enfin - et il s'agira plutôt d'une proposition - ne conviendrait-il pas d'attribuer la Légion d'honneur à tout titulaire du titre de combattant volontaire de la Résistance ? Les plus jeunes ont aujourd'hui soixante-quinze ans. Pour les anciens combattants de 1914-1918, la décision a été prise un peu tard pour nombre d'entre eux qui ont attendu en vain cette distinction. N'attendons pas pour prendre une décision de reconnaissance des combattants volontaires de la résistance qu'ils ne soient plus que quelques survivants. Le devoir de mémoire, c'est aussi le devoir de reconnaissance. (M. Jean-Pierre Bel applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le grand chancellier de l'ordre national de la Légion d'honneur, monsieur le chancellier de l'ordre de la libération, le budget annexe de la Légion d'honneur atteindra, en 2000, 123,9 millions de francs, soit une augmentation des crédits de 9,4 % par rapport à la dotation de l'exercice précédent.
La subvention budgétaire s'élèvera à 105 millions de francs en 2000 comme en 1999. Les recettes propres, d'un montant de 8,16 millions de francs sont en augmentation de 5,16 %.
Les crédits de fonctionnement, qui s'élèvent à 107,5 millions de francs, soit une augmentation de 1 % par rapport à 1999, assurent le paiement des traitements des membres de la Légion d'honneur et des médaillés militaires, le fonctionnement des services ainsi que l'action sociale menés par la grande chancellerie. Dans ce total, les traitements des membres du premier ordre national et des médaillés militaires s'élèvent à 8,16 millions de francs.
Les nominations et promotions dans la Légion d'honneur et l'ordre national du Mérite, qui constituent la raison d'être de la grande chancellerie, ont concerné, en 1998, 10 600 citoyens français, hommes et femmes, civils et militaires ; 3 600 médailles militaires ont été concédées pendant la même période.
Les effectifs globaux des décorés vivants sont connus avec précision : c'est ainsi qu'au 30 septembre dernier la Légion d'honneur comptait 115 765 membres dans ses rangs.
Le premier ordre national s'est ouvert davantage, en cette période de paix que connaît la France, aux civils de toutes catégories et aussi aux femmes qui représentent désormais plus de 20 % des promotions de l'ensemble des ministères.
Il faut également signaler que le musée national de la Légion d'honneur, établissement public à caractère administratif, est supprimé à compter du 1er janvier 2000 et intégré dans le budget annexe de la Légion d'honneur ; cette opération, réalisée à coût nul, nécessite la transformation de quatre emplois à la grande chancellerie et aux maisons d'éducation.
Les dépenses en capital prévues en 2000 représentent 16,44 millions de francs en autorisations de programme et en crédits de paiement.
Le financement partiel des travaux de restauration du cloître de l'abbaye de Saint-Denis, dont le coût est estimé à 37 millions de francs, sera assuré en loi de finances initiale pour 2000 par une dotation budgétaire de 10 millions de francs.
Dans ses deux maisons d'éducation, la grande chancellerie de la Légion d'honneur a pour mission d'assurer l'éducation de près de 1 000 élèves, filles et petites-filles des membres français de l'ordre.
Comme les années précédentes, les résultats obtenus aux examens à la fin de l'année scolaire 1998-1999 par les élèves de maisons d'éducation ont été excellents : 98 % d'entre elles ont obtenu le brevet des collèges, alors que le taux de réussite national est de 76,20 % ; 91 % ont réussi aux épreuves du baccalauréat, taux, là encore, plus élevé que le taux de réussite national qui est de 78,4 % ; 88 % ont obtenu le BTS, taux beaucoup plus élevé que le taux de réussite national qui est de 58,5 %.
Ces résultats, fondés non pas sur la sélection des meilleurs mais sur la qualité de l'éducation et de l'enseignement dispensés, sont le meilleur gage de la pérennité de ces institutions.
S'agissant de la possibilité de conférer la qualité d'ordonnateur principal au grand chancelier, point évoqué par M. le rapporteur spécial et par Mme Beaudeau, je peux vous indiquer que mon collègue du budget et moi-même examinerons cette proposition pour savoir quelle suite lui donner dans le cadre de la préparation de la loi de finances pour 2001. Pour ma part, je n'y vois aucun inconvénient. Ce serait le même statut que celui qui a été donné au Conseil d'Etat et qui me paraît présenter toute garantie.
Je vous demande donc de bien vouloir voter ce projet de budget annexe de la Légion d'honneur qui permettra à l'ordre d'assumer ses missions et de s'adapter à l'évolution de notre société à l'approche du bicentenaire de la Légion d'honneur que nous célébrerons en 2002.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, avant le début de la discussion sur le budget de la justice, vous prier de bien vouloir m'excuser car je devrai quitter la séance vers dix heures pour accueillir le Président de la République à la Sorbonne à l'occasion des manifestations du bicentenaire du Conseil d'Etat. J'espère être de retour parmi vous assez vite, en tout cas pour participer à la fin du débat. Mon collègue François Huwart, que je remercie de sa disponibilité, assurera la présence du Gouvernement jusqu'à mon retour. (Applaudissements.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant les budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération et figurant aux articles 42 et 43.

LÉGION D'HONNEUR

Services votés

M. le président. « Crédits : 107 285 110 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 42.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 16 437 000 francs ;
« II. - Crédits : 16 628 723 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 43.

(Ces crédits sont adoptés.)

ORDRE DE LA LIBÉRATION

Services votés

M. le président. « Crédits : 5 043 096 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 42.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 0 franc ;
« II. - Crédits de paiement : moins 83 498 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 43.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé les dispositions du projet de loi de finances concernant les budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.

Justice

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant le ministère de la justice.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai décidé de présenter cette année le projet de budget de la justice d'une manière un peu différente.
Le rapport qui vous a été distribué contient toutes les indications chiffrées. Je n'y reviendrai donc pas. Je tiens seulement à rappeler que ce projet de budget se caractérise par la poursuite de l'effort entrepris en faveur de la justice depuis le vote de la loi de programme sur la justice de 1995 et intensifié par le gouvernement actuel.
Ainsi, les crédits de la justice pour 2000 progressent de 3,9 %, atteignant 27,29 milliards de francs. Cette hausse intervient après une augmentation de 5,6 % en 1999 et de 4 % en 1998. La loi de programme visait en effet à accroître les moyens des juridictions de 8,1 milliards de francs sur cinq ans. Son application a été prolongée jusqu'en 2000.
De même, les effectifs seront considérablement renforcés en 2000, puisque 1 237 emplois seront créés, contre 939 en 1999 et 762 en 1998. Je rappelle que la loi de programme votée en 1995 prévoyait 5 760 créations d'emplois budgétaires.
J'en viens donc immédiatement à mes principales observations.
Je constate tout d'abord - ce sera ma première observation - que l'effort budgétaire réel fourni en faveur de la justice ne se traduit pas encore - mais il y faut bien sûr du temps - par une amélioration notable, pour le justiciable, du fonctionnement de la justice.
Ainsi, le stock d'affaires en cours auprès de la Cour de cassation, des cours d'appel, des tribunaux de grande instance et des tribunaux d'instance s'est encore accru en 1998, tandis que la durée moyenne des procédures s'est encore allongée.
Les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel sont également confrontés à une augmentation inquiétante de leurs stocks d'affaires. Ainsi, à Paris, celui-ci était de 50 575 affaires en 1998, pour 16 561 affaires réglées. Quant au délai moyen de jugement dans les cours administratives d'appel, il est passé d'un an en 1993 à près de trois ans en 1998.
Certes, les juridictions doivent faire face à un flux toujours croissant d'affaires nouvelles, tandis qu'une partie non négligeable des emplois créés ne sont réellement pourvus qu'avec un décalage de plusieurs années, en raison des impératifs de recrutement et de formation.
Pour autant, la justice sera jugée sur sa capacité, le moment venu, c'est-à-dire au fur et à mesure des mois et des années, à tirer le meilleur parti des moyens financiers et humains qui sont mis à sa disposition pour améliorer la qualité du service public de la justice.
Ma deuxième observation concernera le nombre de postes vacants - j'ai déjà évoqué cette question l'année dernière, j'y reviens cette année - et la difficulté d'obtenir un chiffre fiable à cet égard auprès de la chancellerie.
En 1997, l'Union syndicale des magistrats avait envoyé à toutes les juridictions un questionnaire relatif au nombre de postes officiellement vacants et à celui des postes vacants de fait. Cette enquête avait été éclairante : alors que la chancellerie avançait un taux de 3 % d'emplois vacants - soit 195 postes budgétaires de magistrat sur un total de 6 287 - les réponses au questionnaire conduisaient à évaluer ledit taux à 7,7 %, soit à 482 postes vacants.
Aujourd'hui, malheureusement, cette ambiguïté subsiste. Curieusement, lorsque je me rends dans les juridictions, ce qui m'arrive fréquemment, la question des vacances de postes est toujours soulevée et constitue l'un des principaux griefs des magistrats. La chancellerie, au contraire, assure que la gestion des effectifs a été considérablement améliorée et que le nombre des vacances d'emplois aurait atteint un niveau incompressible - 0,17 % pour 1999 - ce qui correspondrait, d'après les calculs de la chancellerie, à onze emplois vacants ! Qui croire ?
Je vais donc devoir, à moins que vous ne le fassiez vous-même, madame le garde des sceaux, adresser à tous les chefs de cour, au titre des pouvoirs de contrôle sur place et sur pièces des rapporteurs spéciaux, un questionnaire pour tenter d'évaluer le nombre exact de vacances, tant pour les magistrats que pour les fonctionnaires des greffes des juridictions de l'ordre judiciaire. Je trouve regrettable de devoir revenir sur ce point : quel est le bon chiffre ? Finalement, on n'en sait rien !
Ma troisième observation portera sur la nécessité de renforcer les crédits consacrés à l'entretien des juridictions et des services des établissements pénitentiaires.
Les crédits de fonctionnement mis à disposition des juridictions et des établissements pénitentiaires ne permettent pas, en effet, d'assurer l'entretien courant de ces bâtiments. Ainsi, faute de moyens suffisants, les travaux de maintenance, de modernisation du parc et d'adaptation aux normes de sécurité ne sont pas réalisés, ce qui oblige à effectuer, de manière beaucoup trop fréquente, de gros travaux de réparation, voire de reconstruction, financés sur les crédits du titre V.
A ce propos, plusieurs de mes collègues de la commission des finances ont soulevé la question de la sécurité dans les palais de justice et les établissements pénitentiaires. Quelle est la commission de sécurité compétente ? Quelles sont notamment les responsabilités respectives des chefs de juridiction ou des directeurs d'établissement pénitentiaire, de l'autorité préfectorale et du maire ? Le Gouvernement pourrait-il donner au Sénat toutes les indications utiles sur ce point ?
Il est urgent que le ministère de la justice obtienne les crédits nécessaires à l'entretien de son parc immobilier. A défaut, cette administration, qui est déjà parfois en infraction avec les règles élémentaires de sécurité, risque d'engager un jour lourdement sa responsabilité devant l'opinion publique.
Ma quatrième observation visera la nécessité d'adopter une nouvelle loi de programme pour permettre d'achever la rénovation des juridictions et des établissements pénitentiaires.
A ce titre, la loi de programme relative à la justice avait prévu une enveloppe de 8,1 milliards de francs en autorisations de programme, dont 4,5 milliards de francs pour les services judiciaires et 3 milliards de francs pour les services pénitentiaires. Rappelons que ces crédits ont permis de lancer un programme de réhabilitation du parc immobilier de la justice. Pour autant, les besoins restent encore énormes, et de nombreux bâtiments demeurent vétustes, inadaptés à l'accueil du public, voire dangereux. Un certain nombre de mes collègues de la commission des finances l'ont souligné avec force lorsque nous avons examiné les crédits de la justice.
En outre, faute de crédits suffisants pour effectuer en même temps les travaux d'équipement concernant les services judiciaires et ceux qui intéressent les services pénitentiaires, la réalisation de certaines opérations a été différée. Il est à craindre que ce retard ne sera pas comblé. Pourriez-vous indiquer au Sénat, madame la ministre, les raisons précises de cette situation, qui a d'ailleurs conduit - appelons un chat un chat - à remettre parfois en cause le vote de certains projets de budget ?
Pour remédier à cet état de fait, il me paraît nécessaire d'adopter une nouvelle loi de programme pour la justice qui permette d'achever le programme de rénovation du parc immobilier entrepris en 1995. Je sais, madame le garde des sceaux, que vous y êtes hostile, mais je persiste à penser, et la plupart de mes collègues avec moi, que cette démarche donnerait plus de visibilité et de lisibilité aux efforts budgétaires, qu'il faut souligner, consentis en faveur de la justice, au moins pour ce qui concerne l'immobilier.
J'en arrive à ma cinquième observation, qui tendra à mettre en exergue l'utilité des travaux de la Haute Assemblée et des rapports qu'elle publie.
En effet, je constate avec plaisir que le garde des sceaux tient parfois compte, sans le dire, des observations contenues dans les rapports du Sénat, ceux de la commission des finances mais aussi ceux de nos collègues de la commission des lois.
Ainsi, mes remarques sur le développement incontrôlé des frais de justice - j'y reviendrai tout à l'heure - semblent avoir été entendues, puisque de nombreuses mesures ont été prises pour limiter l'augmentation de ceux-ci.
Par ailleurs, j'avais insisté l'année dernière sur la nécessité de mettre à la disposition du tribunal de grande instance de Paris, par le biais de la construction d'un nouveau palais de justice, des locaux lui permettant de remplir sa mission correctement. Or, il semblerait qu'un arbitrage dans ce sens soit en passe d'être rendu.
S'il arrive parfois que le Sénat soit entendu, il arrive aussi trop souvent que les questions posées dans l'optique de l'exercice des prérogatives des pouvoirs du rapporteur spécial ne rencontrent que peu d'écho dans certains services, et que le dialogue, qui pourrait être fructueux avec un parlementaire, fût-il issu du Sénat, relève davantage du dialogue de sourds ou de la langue de bois que de l'éclairage institutionnel prévu dans le cadre constitutionnel.
Cette année, par exemple, M. Jean-Louis Nadal, inspecteur général des services judiciaires, s'est montré très coopératif, mais j'ai renoncé depuis deux ans à perdre du temps avec d'autres services et directions, pour lesquels le contrôle parlementaire représente une formalité sans grand intérêt. Je ne peux en dire autant, bien entendu, des échanges le plus souvent constructifs que j'ai pu entretenir avec certains membres du cabinet du garde des sceaux. Cela étant, l'administration française, particulièrement celle de la justice, n'a pas encore assimilé les règles élémentaires qui régissent ses relations codifiées avec le Parlement.
En effet, depuis 1986, date de mon entrée au Sénat, j'ai pu constater, après avoir présidé trois commissions d'enquête, rapporté cinq projets de budget de la justice et mené plusieurs contrôles relatifs à des questions de fond, que nous sommes très loin de la lettre et de l'esprit des textes. Contrôle, évaluation, remise en cause sont trop souvent étrangers à la culture du ministère de la justice, et lorsque le Parlement révèle certains dysfonctionnements administratifs, comme ce fut le cas récemment pour des services participant à la sécurité, c'est le diable qui est lâché !
Le président de la commission des finances, notre collègue Alain Lambert, a émis le voeu que le rapporteur spécial du projet de budget de la justice dresse le bilan, au cours de l'année 2000, de toutes les suites données ou non aux observations budgétaires ou aux propositions des commissions d'enquête et de contrôle. Ce sera peut-être l'occasion de vérifier la pertinence de tout ce que, trop sommairement, je me suis contenté voilà quelques instants de suggérer avec, il est vrai, parfois quelque lassitude !
Ma dernière observation concernera le renforcement de l'inspection générale des services judiciaires, qui me paraît devoir être l'une des priorités du ministère de la justice.
Alors que, voilà douze ans, ce service ne comprenait que trois magistrats, son effectif s'élèvera, au 1er janvier 2000, à vingt-deux personnes, reconnues par le monde judiciaire pour leurs compétences et leur connaissance approfondie des services du ministère de la justice.
Ce renforcement apparaît très opportun. En effet, depuis quelques années, le ministère de la justice bénéficie d'une augmentation importante des crédits mis à sa disposition. En contrepartie, il me paraît nécessaire de vérifier que l'argent public est dépensé de la manière la plus efficace possible.
En outre, l'adoption de la réforme de l'organisation du parquet devrait conduire à accentuer l'indépendance des magistrats. Pour autant, ceux-ci ne doivent pas échapper à tout contrôle, or leur responsabilité pourra être engagée à partir des informations transmises par l'inspection générale des services judiciaires. C'est la raison pour laquelle il me paraît important de poursuivre l'effort financier et humain que vous avez entrepris en faveur de l'inspection générale des services judiciaires, afin que celle-ci puisse jouer un rôle équivalent à celui d'autres inspections, comme l'inspection des finances ou encore l'inspection générale des affaires sociales, pour ne citer que ces deux exemples.
A cet égard, je tiens à vous soumettre une proposition. Au cours de l'année prochaine, je souhaiterais, en tant que rapporteur spécial des crédits de la justice, être associé, autant que faire se peut, à une mission de contrôle du fonctionnement des juridictions menée par l'inspection générale des services judiciaires dans le ressort d'une cour d'appel. En effet, je souhaiterais conduire une mission d'information sur la gestion d'une cour d'appel et des juridictions de son ressort, or pouvoir coopérer avec les services de l'inspection me paraît très utile, dans la mesure où nos approches sont complémentaires.
Au terme de cette analyse, je tiens à rappeler que, eu égard à l'évolution des crédits de la justice, qui est très comparable à celle qui avait été observée l'année dernière, la commission des finances a proposé, à l'unanimité des présents, d'adopter le projet de budget de la justice pour 2000. Toutefois, l'analyse de la commission des finances est purement financière, et elle n'a pas pris position sur la politique menée par le garde des sceaux. Cet examen plus qualitatif relève de la commission des lois qui, par ses avis, dresse un bilan de la politique judiciaire menée par Mme la ministre. Mes collègues rapporteurs pour avis de la commission des lois interviendront donc sur ce point.
En conséquence, mes chers collègues, au nom de la commission des finances, je vous propose l'adoption des crédits du ministère de la justice. Je pourrais me contenter, en guise de conclusion, de cette formule et m'en tenir à des chiffres, mais vous auriez l'impression que le compte n'y est pas. Nous aurions parlé pour le Journal officiel et constaté que les crédits de la justice sont en amélioration, sans que le coeur y soit.
J'ai d'ailleurs été tenté, ces jours derniers, de m'en remettre purement et simplement à mon rapport écrit. En effet, à quoi bon ? A quoi sert cette liturgie, dans le contexte actuel et la polémique récurrente ?
Il y aura bientôt dix ans que, avec Jean Arthuis et une vingtaine de nos collègues, nous avons tiré la sonnette d'alarme : justice sinistrée, démocratie en danger. Aujourd'hui nous pourrions, en établissant le bilan de dix années, arriver à la même conclusion, pour d'autres raisons. Certes, le budget de la justice a progressé. Il y a eu la loi de programme « Balladur-Méhaignerie », les efforts notables de l'actuel gouvernement, que l'on mettra plus tard au crédit du tandem « Jospin-Guigou » (Sourires), mais ces bouffées d'air n'ont pas suffi à apaiser le débat. La sérénité n'est pas revenue.
La paupérisation de la justice, la banalisation de ses fonctions, les hésitations et les polémiques sur sa place dans les institutions et dans la société ont considérablement brouillé la perception qu'en ont l'opinion publique, les élus, les auxiliaires de justice, voire les magistrats eux-mêmes.
Nous payons cher, la démocratie paie cher l'état dans lequel nous avons laissé se dégrader la justice sur le plan tant budgétaire qu'institutionnel ; et à ceux qui se plaignent aujourd'hui de la justice, nous pouvons répondre que nous avons les juges et la justice que nous méritons !
Le nouveau Premier président de la cour d'appel de Paris, M. Jean-Marie Coulon, disait, à l'occasion de son installation, lundi dernier, que les magistrats - au moins certains d'entre eux - étaient gagnés par la mélancolie. Voilà qui est dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui, car, souvent, un tel état d'âme précède la dépression ou la révolte.
Les temps ne sont-ils pas venus où des sages - il y en a - dans l'exécutif, au Parlement, dans l'institution judiciaire ou dans la presse s'inquiètent de l'avenir du combat engagé ? Les débats actuels, l'attitude de tel ou tel, ou de telle ou telle corporation, mettent en danger la démocratie et risquent de bouleverser l'ordre institutionnel.
M. Pierre Fauchon. Très juste !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Alors, que faut-il faire ? Ou faut-il ne rien faire ? Est-il encore temps de convoquer des états généraux de la justice précédant un grand référendum pour que le peuple, au nom duquel nous siégeons, nous légiférons et nous contrôlons, au nom duquel les magistrats rendent la justice, tranche et fasse cesser ce combat entre juges et politiques qui ne peut conduire qu'à une extermination réciproque ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Derycke, rapporteur pour avis.
Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour les services généraux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, lors du quarantième anniversaire de l'Ecole nationale de la magistrature, le 1er octobre 1999, à Bordeaux, le Président de la République affirmait ceci : « Notre appareil judiciaire doit sortir de la misère et de la vétusté qui ont été trop longtemps les siennes. » Ce constat est unanimement partagé tant il est vrai que notre justice a toujours été le parent pauvre de l'Etat.
Alors même qu'elle constitue une mission régalienne, que son bon fonctionnement est une condition essentielle à l'exercice de notre démocratie et que le besoin de justice est aujourd'hui une exigence forte de nos concitoyens, la part des crédits de la justice dans le budget de l'Etat, même si elle progresse d'année en année, reste ridiculement faible.
Rappelons les chiffres : ces crédits ne représentaient que 1,55 % du budget général de l'Etat en 1997. Ils en représenteront 1,62 % en l'an 2000. Cette progression a d'ailleurs été soulignée par le Chef de l'Etat qui, toujours devant l'Ecole nationale de la magistrature, déclarait que « des efforts réels ont été faits par le Gouvernement, qu'il s'agisse des montants des crédits, des créations d'emploi ou des recrutements exceptionnels de magistrats ». Il ajoutait que ces efforts devaient être poursuivis.
Le budget qui nous est présenté par Mme la garde des sceaux répond à cette exigence : avec une augmentation de 3,91 %, soit une progression trois fois supérieure à la moyenne de l'ensemble des budgets civils de l'Etat, le Gouvernement persévère dans sa volonté de placer la justice au rang de ses priorités.
Un autre chiffre significatif de cet effort concerne les recrutements, avec la création de 1 237 emplois, chiffre le plus important de tous les ministères.
Ce budget en augmentation permet donc d'achever l'exécution de la loi de programme relative à la justice du 6 janvier 1995 pour les services judiciaires et les juridictions administratives, les objectifs fixés par cette loi étant réalisés voire dépassés en ce qui concerne tant les créations d'emplois budgétaires que les équipements.
Conformément à l'engagement pris par Mme la garde des sceaux, ce budget permet également la mise en oeuvre des réformes en cours ou à venir, qu'il s'agisse de la création de juges de la détention provisoire, de la mixité des formations de jugement au sein des tribunaux de commerce ou des mesures nouvelles résultant de réformes législatives déjà votées ou en cours d'examen, telles la loi du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits, celle du 23 juin 1999 renforçant l'efficacité de la procédure pénale ou le projet de loi relatif à la présomption d'innoncence.
La commission des lois regrette toutefois que, près d'un an après le vote définitif de la loi du 18 décembre 1998, aucun décret d'application n'ait été publié.
La commission des lois a également pris acte des actions qualitatives entreprises avec les contrats de juridiction, les contrats de procédure et l'amélioration de l'outil informatique, afin de réduire les coûts, d'améliorer les délais de jugement et de stabiliser les stocks d'affaires en cours.
A ce sujet, notre collègue Robert Badinter a souligné que la pratique des contrats de procédure, expérimentée entre 1983 et 1985, avait alors donné des résultats très positifs.
Un budget en augmentation constante depuis trois ans, des réformes dont le financement est prévu voire anticipé, constituent des motifs de satisfaction.
Toutefois, la commission des lois a souligné plusieurs raisons d'inquiétude tenant aux délais toujours excessifs devant les juridictions civiles, administratives et prud'homales, à l'accroissement des stocks des affaires en cours, au taux toujours élevé des classements sans suite en matière pénale et à un engorgement préoccupant des juridictions administratives.
Devant cette situation, plusieurs membres de la commission des lois ont estimé que, compte tenu des besoins importants liés à la mise en oeuvre des réformes, les créations d'emploi, en particulier de magistrats, seraient insuffisantes pour améliorer le fonctionnement de la justice au quotidien. Ils ont ainsi fait valoir que seuls 34 postes de magistrats sur les 212 postes créés seraient affectés au renforcement des moyens ordinaires des juridictions.
Comme l'année dernière, ils ont également regretté la faiblesse des recrutements de magistrats à titre temporaire et de conseillers de cour d'appel en service extraordinaire.
Par ailleurs, ils se sont interrogés sur le fonctionnement, l'année prochaine, de la justice commerciale, confrontée à de nombreuses démissions de juges consulaires suscitées par l'annonce de la réforme des tribunaux de commerce.
A ce sujet, la commission des lois a pris acte de la révision de la carte judiciaire des tribunaux de commerce annoncée l'an dernier par Mme la garde des sceaux, mais elle souhaite attirer l'attention de cette dernière sur l'urgence de la réforme de la carte judiciaire pour l'ensemble des juridictions.
Enfin, la commission des lois regrette la baisse importante des crédits d'équipement et le retard dans la consommation des crédits d'investissement, tout en se félicitant de la décision de construire un nouveau palais de justice à Paris.
En conclusion, la commission des lois a émis un avis partagé sur les crédits du ministère de la justice consacrés aux services généraux. L'augmentation incontestable des crédits n'a pas suffi à emporter l'adhésion de toute la commission des lois, qui s'en est remise à la sagesse du Sénat.
A titre personnel, prenant en considération l'effort continu depuis trois ans à l'égard du budget de la justice, le financement effectif des réformes réalisées ou engagées, le commencement de la révision de la carte judiciaire et la méthode de concertation adoptée pour cette révision, ainsi que les progrès de rationalisation de gestion, je suivrai l'avis de la commission des finances et j'émettrai un vote positif sur le budget de la justice pour l'an 2000. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Haenel, rapporteur spécial, applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Othily, rapporteur pour avis.
M. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour l'administration pénitentiaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits de l'administration pénitentiaire dans le projet de budget pour 2000 s'élèvent à 7,85 milliards de francs et sont en hausse de près de 6 % ; 386 créations d'emploi sont prévues : c'est bien, mais on est loin de rattraper le retard pris dans l'exécution de la loi de programme de 1995.
Dans le temps qui m'est imparti, je voudrais formuler cinq observations à propos de la situation de l'administration pénitentiaire.
Tout d'abord, monsieur le secrétaire d'Etat, voilà maintenant deux ans presque jour pour jour que nous avons voté définitivement la loi relative au placement sous surveillance électronique. L'année dernière, Mme le garde des sceaux nous avait dit que des études étaient nécessaires et que les premières expérimentations débuteraient à la fin de 1999. Pourtant, nous n'avons rien vu venir. On nous déclare maintenant que ces premières expérimentations auront lieu dans le cadre des centres pour peines aménagées. Or, j'ai appris que ces centres ne fonctionneraient qu'à partir de 2001. Faudra-t-il donc plus de trois ans pour que cette loi reçoive ses premières applications ? On en vient à se demander si le Gouvernement veut réellement la mettre en oeuvre.
Nous savons que Mme le garde des sceaux réfléchit aux alternatives à l'incarcération et qu'elle est très préoccupée par l'évolution de la libération conditionnelle. Avec la surveillance électronique, le législateur lui a donné un outil important pour éviter les effets de désocialisation de la prison. Bien sûr, c'est novateur, mais on ne va tout de même pas reprocher au Sénat de s'être montré novateur en proposant et en adoptant cette loi ! Nous demandons donc instamment au Gouvernement d'accélérer les choses, afin que des expérimentations aient lieu dès l'an 2000.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Oui ! Ça, c'est bien !
M. Georges Othily, rapporteur pour avis. J'en viens à la question du contrôle des établissements pénitentiaires.
Comme vous le savez, certains incidents graves survenus dans des établissements pénitentiaires et impliquant des personnels ont été révélés au cours de l'année. Pourtant, en théorie, les contrôles qui s'exercent sur l'administration pénitentiaire sont nombreux. Il y a des contrôles internes, exercés notamment par l'inspection générale des services judiciaires. En outre, les autorités judiciaires - juge de l'application des peines, juge d'instruction, Procureur de la République - sont censées exercer un contrôle sur les établissements de leur ressort. En fait, il semble que ce contrôle soit réduit au strict minimum. Il existe, par ailleurs, une commission de surveillance auprès de chaque établissement, qui regroupe les autorités administratives et judiciaires, mais, là encore, ce contrôle paraît être formel.
Il est peut-être temps d'aller plus loin : les visites parlementaires dans les établissements pénitentiaires doivent se développer. La commission des lois participe d'ailleurs à ce développement puisque j'ai pu visiter cette année, avec Mme Derycke, MM. Gélard et Bret, quatre établissements.
Un projet de loi déposé sur le bureau du Sénat prévoit la création d'une commission nationale de déontologie de la sécurité, qui excercerait un contrôle sur le respect de la déontologie par certains agents, en particulier de la police, de la gendarmerie et de la douane. Mme le garde des sceaux ne semble cependant pas favorable à ce que cette commission contrôle le respect de la déontologie par les personnels pénitentiaires. Je crois qu'il s'agit d'une question importante dont nous devrons débattre de manière approfondie.
Mme le garde des sceaux a mis en place un groupe de travail présidé par M. Canivet, groupe dont fait partie notre collègue M. Cabanel, pour réfléchir à cette question du contrôle externe de l'administration pénitentiaire.
Il faut aller plus loin dans le contrôle de l'administration pénitentiaire. Sur cette question, nous resterons vigilants, afin que les événements qui ont été révélés ne puissent plus se produire.
Une autre question me paraît mériter quelques remarques : il s'agit de la libération conditionnelle. Cette mesure connaît une évolution préoccupante puisqu'elle est de moins en moins accordée depuis quelques années. Cela s'explique notamment par la situation économique et la difficulté pour certains détenus sous-qualifiés de présenter un projet de sortie en vue d'une libération conditionnelle.
Actuellement, la libération conditionnelle est accordée par le juge de l'application des peines lorsque la peine est inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement et par le garde des sceaux dans les autres cas. Depuis longtemps, des propositions sont formulées pour modifier le régime de la libération conditionnelle, notamment pour judiciariser cette mesure qui, aujourd'hui, est une simple mesure d'administration judiciaire. Là, encore, monsieur le secrétaire d'Etat, la commission de réflexion mise en place rendra ses conclusions, en principe, avant le début de l'année prochaine.
Il me semble qu'une réflexion approfondie s'impose compte tenu de tous les phénomènes que nous pouvons observer : la durée de détention s'allonge, les libérations conditionnelles diminuent, la population carcérale change. De plus en plus de détenus purgent de très longues peines. Il semble aussi qu'il y ait de plus en plus de personnes souffrant de problèmes psychiatriques dans les prisons. Peut-être notre régime d'application des peines mériterait-il d'être remis à plat ?
J'évoquerai brièvement la situation des établissements pour constater que, s'il existe en France des établissements modernes, le parc pénitentiaire est dans l'ensemble plutôt vétuste, voire très vétuste.
M. Jacques Peyrat. C'est le moins que l'on puisse dire !
M. Georges Othily, rapporteur pour avis. Nous avons visité quatre établissements cette année et nous avons pu constater que l'état de certaines cellules dans les maisons d'arrêt de Loos et des Baumettes n'était pas acceptable. L'organisation du centre de jeunes détenus de Fleury n'est pas plus acceptable et il est en train d'être modifié à la suite de la violence qui s'y est développée.
Actuellement, un programme de construction de six établissements dans les agglomérations de Lille, Toulouse, Avignon, Montpellier, Meaux et Liancourt est en cours de réalisation, et Mme le garde des sceaux a décidé la construction d'un septième établissement, à la Réunion, ce dont nous nous réjouissons.
Pour l'avenir, un second programme est envisagé, qui pourrait notamment comprendre la construction d'un nouvel établissement à Nice.
M. Jacques Peyrat. Très bonne nouvelle !
M. Georges Othily, rapporteur pour avis. Par ailleurs, un programme de rénovation de cinq grandes maisons d'arrêt a été lancé, qui concerne Fleury-Mérogis, Fresnes, La Santé, Les Baumettes et Loos. A ce sujet, permettez-moi de vous faire part de mon inquiétude. Dans un premier temps, les travaux ont été estimés à un milliard de francs, ils font maintenant l'objet d'estimations plus proches de 2 milliards de francs. Or, 50 millions de francs seulement ont été inscrits en autorisations de programme sur le budget 1999 et 50 millions de francs sur le projet de budget pour 2000. Tout cela est-il exact ?
Comme nous, Mme le garde des sceaux a visité les maisons d'arrêt de Loos et des Baumettes. Elle sait donc qu'il y a urgence à rénover ces établissements. Je sais que la construction des nouveaux établissements coûte cher mais, vraiment, ce programme de rénovation doit être accéléré.
Ma dernière remarque concerne le nombre élevé des suicides dans les établissements pénitentiaires : 114 détenus se sont suicidés depuis le début de l'année, ils étaient 118 à l'avoir fait en 1998. En 1998, la chancellerie a diffusé une circulaire sur ce sujet, qui invite notamment à une grande vigilance au cours des premiers jours d'incarcération et incite à un accueil individualisé des personnes incarcérées. Très honnêtement, dans les grandes maisons d'arrêt, compte tenu du nombre quotidien d'entrées et de sorties, un tel accueil me paraît difficile à assumer. La surpopulation carcérale ne facilite vraiment pas la conduite d'une politique de prévention des suicides.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Eat, je vous dirai que nous sommes inquiets. Les crédits de l'administration pénitentiaire augmentent, mais les problèmes sont nombreux et sérieux. Pour marquer son inquiétude face au constat dressé par les délégations de la commission qui ont visité des prisons cette année et sa désapprobation à l'égard du retard pris dans l'application de la loi relative au placement sous surveillance électronique, la commission des lois a donné un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'administration pénitentiaire.
M. le président. La parole est à M. Gélard, rapporteur pour avis.
M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour la protection judiciaire de la jeunesse. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les crédits des services de la protection judiciaire de la jeunesse sont, dans ce budget, d'un montant exceptionnel : 3,18 milliards de francs - 11,7 % du budget total de la justice - soit une hausse de 14,7 % par rapport à 1999. Cet effort financier est sans précédent.
Les créations d'emplois sont également sans précédent : 380 dont 258 d'éducateur, auxquelles il convient d'ajouter 600 emplois-jeunes qui seront affectés à la protection judiciaire de la jeunesse.
Par ailleurs, un remarquable effort est fait au bénéfice des vingt-six départements pour poursuivre les actions engagées qui, d'ores et déjà, donnent des résultats significatifs.
Il s'agit donc là d'un bon budget pour la protection judiciaire de la jeunesse.
Je ferai cependant trois constatations, trois remarques et trois propositions.
Première constatation, je note le retard important pris dans les investissements en matière d'hébergement collectif ; il en va de même d'ailleurs en ce qui concerne la rénovation de certains quartiers pour jeunes. Un effort devra être fait dans les années à venir pour rattraper ce retard.
Deuxième constatation, trop de décisions de justice sont en attente d'exécution ou restent inappliquées.
Enfin, troisième constatation, l'accueil d'urgence ne s'effectue actuellement que par transformation de structures existantes et non par la mise en place de structures nouvelles.
Ces constatations étant faites, j'en viens aux remarques.
Première remarque, il est nécessaire de maintenir des concours de recrutement qui garantissent la qualité des candidats et de leur formation initiale. En effet, 200 emplois d'éducateur seront pourvus par la voie d'un concours dérogatoire qui ne garantit pas le recrutement de qualité et le niveau de formation que l'on est en droit d'attendre. Il y a là une inquiétude que je tiens à souligner.
Deuxième remarque, et je rejoins là ce qu'a dit notre collègue, M. Othily, voilà quelques instants, la sécurité physique et psychologique des jeunes nous préoccupe. Sans doute convient-il de trouver des moyens nouveaux pour mieux évaluer l'état de santé psychologique et mieux protéger la santé physique des jeunes, lorsqu'ils sont incarcérés ou même placés dans des centres éducatifs.
Troisième remarque, il importe d'exercer un meilleur contrôle de toute nature sur les associations privées qui gèrent des établissements car, parmi ces derniers, certains sont excellents, d'autres moins bons et, disons-le franchement, quelques-uns sont exécrables. Il convient par un contrôle approprié d'harmoniser la façon dont fonctionnent ces associations privées lorsqu'elles ont en charge la jeunesse qui est placée dans leurs établissements.
Enfin, je formulerai trois propositions.
Première proposition, il faut améliorer la prévention. En effet, nous constatons à cet égard un manque sur le plan de la réflexion et des propositions du ministère. Je souhaiterais que le ministère engage, soit sous la forme d'une mission, soit sous la forme d'une enquête, une vaste étude pour déterminer les causes et les conséquences de la délinquance juvénile, et réfléchir aux moyens de réintégrer les jeunes qui, à un moment donné, ont été délinquants. Cet effort de réflexion, de conceptualisation s'impose à nous. Certes, une multitude d'études ont déjà été faites, mais elles sont dispersées et elles ne nous permettent pas d'avoir une vision d'ensemble de l'évolution de la situation.
Deuxième proposition, il faut améliorer la prévention. Il me semble que les liens entre la protection judiciaire de la jeunesse et l'éducation nationale sont insuffisants et qu'un effort pourrait déjà être fait au niveau de l'IUFM afin de sensibiliser les futurs enseignants aux problèmes de la protection judiciaire de la jeunesse.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Bonne idée !
M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis. Mais il faudrait également établir un partenariat permanent entre l'éducation nationale et la protection judiciaire de la jeunesse. Des modalités de concours existent déjà entre ces deux grands ministères, mais le ministère de l'éducation nationale me semble très éloigné des préoccupations de la protection judiciaire de la jeunesse.
Enfin, ma troisième proposition est beaucoup plus terre à terre. Il s'agit de prendre en compte de façon un peu plus objective la rémunération des avocats en ce qui concerne la défense des jeunes qui n'ont pas toujours les avocats de qualité qu'ils mériteraient. Il faut également prendre en compte le fait que les avocats font toute une série d'actes qui ne sont pas rémunérés lorsque l'on n'aboutit pas à une poursuite pénale du jeune délinquant. Notamment dans le cadre de la médiation pénale, il n'y a pas à ce moment-là une prise en compte suffisante de la rémunération des avocats.
En conclusion, je dirai mon inquiétude pour l'avenir. Il faudra, selon moi, que le ministère se penche très sérieusement sur la carrière des éducateurs. Il y a là maintenant une anomalie puisque les éducateurs, vous le savez, étaient auparavant sur le même plan que les instituteurs. Les instituteurs sont maintenant devenus des cadres de catégorie A du fait de leur recrutement par le biais de l'IUFM et de leur transformation en professeurs des écoles. Cela va créer dans les années à venir des tensions car les éducateurs, qui resteront de catégorie B, auront un déroulement de carrière nettement moins intéressant ou moins satisfaisant que les instituteurs. Cette réflexion d'ensemble déborde très largement le cadre de la protection judiciaire de la jeunesse et celui du ministère de la justice : il faudra bien un jour que l'on se saisisse de l'ensemble des problèmes de carrière de toute une série de fonctionnaires de catégorie B, qu'ils soient éducateurs ou infirmiers des hôpitaux ou autres encore et dont la carrière ne correspond plus aux réalités du monde contemporain.
Compte tenu de ces constatations, de ces remarques et de ces propositions, la commission des lois a émis sur ce budget qui, je le répète, est exceptionnel par l'effort financier consenti, un avis favorable. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 21 minutes ;
Groupe socialiste, 18 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 16 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes ;
Groupe communiste, républicain et citoyen, 12 minutes.
La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est avec une satisfaction non dissimulée que le groupe socialiste accueille le budget de la justice pour l'an 2000.
S'agissant de la volonté politique qui anime Mme la garde des sceaux, il n'y a pas de doute que l'effort en direction du service public de la justice est remarquable et, comme je traiterai de la question des services judiciaires, je tiens à le souligner.
La progression du budget par rapport à 1999 atteint près de 4 %, chiffre qui traduit à la fois un progrès constant et la continuité des actions déployées par le Gouvernement depuis trois ans.
M. Haenel a fait remarquer qu'aujourd'hui, avec 27,291 milliards de francs, le budget de la justice représente 1,62 % du budget de la nation, et notre excellente rapporteur, ou rapporteuse pour avis,...
Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis. « Rapporteuse » !
M. Robert Badinter. ... Mme Dinah Derycke, a souligné que nous en étions sensiblement à quelque 1,56 % ou 1,60 %.
Nous sommes unanimes, dans cet hémicycle, à considérer que l'accroissement quantitatif doit se poursuivre ; nous sommes unanimes à considérer que, dans les budgets à venir, la part du budget de la justice dans le budget général doit être réévaluée.
Nous savons que Mme le garde des sceaux partage cette conviction et la traduit dans les faits.
Permettez-moi à cet égard de rappeler un souvenir ancien. Lorsque, pour la première fois de ma vie, j'ai pénétré dans cet hémicycle, c'était au moment du discours introductif de M. Pierre Mauroy. A la sortie, un vétéran qui avait été dix-huit fois ministre sous les IVe et Ve Républiques et que je connaissais depuis longtemps me fit signe de le rejoindre, et il me dit alors : « Les grandes réformes, c'est bien beau ; mais une seule chose compte dans la vie ministérielle : le budget, encore le budget, toujours le budget. Le reste est superfétatoire ». Je n'ai pas oublié cet avertissement dans les années suivantes. Il en sera fait écho ici encore.
Je note avec satisfaction la création, dans le budget des services judiciaires, de 382 postes contre 370 en 1999 et 300 en 1998. Voilà qui est à mettre en parallèle avec la création de 212 postes de magistrats, de 155 postes de fonctionnaires de greffe et de 15 postes de contractuels.
S'agissant des magistrats, je me félicite de ces créations, qui tranchent, je dois le dire, avec le retard qui a été malheureusement pris par certains des prédécesseurs de notre garde des sceaux dans la réalisation du plan pluriannuel pour la justice, dont la paternité revient à M. Méhaignerie.
J'ai relevé que, pour la période 1995-1997, le taux d'exécution du plan, s'agissant des magistrats, ne s'élevait qu'à 50 %. Le budget de 1997, chacun s'en souvient, avait prévu la création de 30 postes seulement au lieu des 60 qui auraient dû l'être.
Aujourd'hui, le retard a été comblé grâce à votre action. Si je fais le calcul global, ce sont en trois ans, 422 postes de magistrats qui auront été créés dans les juridictions judiciaires. A n'en pas douter, il s'agit là d'un progrès très satisfaisant.
Cependant, je tiens à faire part, à titre personnel, d'une remarque que j'avais déjà formulée devant la commission des lois. Je m'inquiète quelque peu de la proportion de magistrats recrutés par la voie de concours exceptionnels par rapport à celle du concours donnant accès à l'ENM. Le nombre de postes a été porté à 185 pour 1998 et 1999, ce qui marque un accroissement certain ; mais ce chiffre doit être mis en parallèle avec le nombre de magistrats recrutés par les concours exceptionnels pendant la même période.
Je sais bien que nécessité fait loi mais je tiens à souligner que la part ouverte au recrutement par l'école doit être plus importante, sauf à décourager nos meilleurs étudiants, ce qui serait très fâcheux pour l'avenir.
Je souligne aussi, mais cette remarque ne s'adresse pas directement à Mme la ministre, l'insuffisance des recrutements extérieurs réalisés par la commission d'intégration. J'ai relevé des chiffres allant de l'ordre de 20 à 25 %. Ce malthusianisme n'est pas admissible.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Tout à fait !
M. Robert Badinter. Il vaudrait mieux favoriser le recrutement des meilleurs éléments des professions par la voie de la commission d'intégration au lieu d'organiser des concours exceptionnels par nécessité.
Cette remarque faite, félicitons une fois encore l'auteur de ce budget qui s'inscrit dans le cadre d'une action législative et réglementaire que nous approuvons et que nous soutenons tout à fait en ce qu'elle porte sur l'amélioration de la justice au quotidien, aussi bien par la loi du 18 décembre 1998 que par le décret du 28 décembre 1998, qui s'inspire, d'ailleurs, des excellentes propositions formulées dans le rapport du président du tribunal de grande instance de Paris, M. Coulon.
Là encore, je note avec plaisir que l'on favorise le règlement amiable des litiges par la médiation, la conciliation et la transaction. Vous savez combien, depuis des années, je ne cesse de rappeler qu'il est indispendable de recourir au mode alternatif de solution des conflits et que, à défaut d'y recourir toujours plus, nous ne parviendrons pas à surmonter l'engorgement judiciaire.
Je veux faire maintenant quelques observations plus précises.
Tout d'abord, j'insiste à nouveau auprès de Mme le garde des sceaux, comme j'insistais déjà auprès de ses prédécesseurs, pour qu'il soit enfin procédé à la révision de la carte judiciaire dans son ensemble. (MM. Fauchon, Hyest et Peyrat applaudissent.)
C'est une exigence prioritaire de la réforme de la justice. Voilà des années que les travaux ont été engagés sur ce point. Très franchement, ce ne sont pas les suppressions de quelques juridictions consulaires en état de survie, pour ne pas parler d'acharnement thérapeutique, qui suffiront.
Nous savons que Mme le ministre songe à cette grande réforme. Il est temps qu'elle agisse dans les prochains mois.
En ce qui concerne la justice civile et le flux des affaires au cours de la période 1992-1998, le nombre des affaires nouvelles a augmenté sensiblement : il est en effet passé de 523 000 à 623 000. Cependant - et cela porte témoignage des efforts réalisés par tous dans les juridictions de première instance - la durée moyenne de règlement des litiges a baissé. Augmentation du nombre des litiges et baisse des durées de règlement, la situation est donc en progrès.
En revanche, la situation est tout à fait différente dans les cours d'appel, où la durée des procédures s'est accrue de 13,5 à 17,4 mois. Alors que le nombre des affaires a légèrement baissé entre 1997 et 1998 - il est effectivement passé de 213 000 à 209 000 -, je constate avec inquiétude que la durée moyenne des procédures s'est accrue.
Les cours d'appel doivent bénéficier d'une action en priorité. Il faudra prévoir non seulement un accroissement des effectifs, mais aussi une amélioration des méthodes.
Je suis heureux de constater que Mme le garde des sceaux soutient les contrats de juridiction de procédure. Cette concertation juridiction par juridiction, avec le concours plus qu'actif de l'inspection des services judiciaires s'est révélée très fructueuse. Il suffit à cet égard de consulter un traité sur les institutions judiciaires pour s'en convaincre.
En ce qui concerne les juridictions prud'homales, j'attire l'attention de Mme la garde des sceaux sur le fait que, là aussi, cela ne va pas : la durée moyenne des jugements atteint près de dix mois ; 60 % des décisions sont frappées d'appel, ce qui contribue d'ailleurs aux difficultés des juridictions de second degré.
Dans les Hauts-de-Seine, le conseil de Nanterre, qui est très important, a vu le nombre des affaires quadrupler en vingt ans. Or, sur vingt-cinq postes budgétés dans cette juridiction, seuls dix-huit sont pourvus, et il faut compter près de vingt mois pour aboutir à un jugement. Il en va de même pour le conseil des prud'hommes de Boulogne, où il y a sept présents pour dix-sept postes budgétés.
Ces contentieux revêtent, pour les demandeurs, une importance extrême sur le plan humain. Il faut leur accorder une priorité.
Par ailleurs, s'agissant de la chambre sociale de la Cour de cassation, il faut absolument instituer le recours à la représentation par avocat pour réduire son encombrement.
Je laisse de côté les questions concernant les juridictions pénales. Nous aurons l'occasion d'en reparler.
Toutefois, la première cause du nombre de détentions provisoires, c'est la longueur de l'instruction et non pas les décisions de placement.
M. Jacques Peyrat. C'est sûr !
M. Robert Badinter. J'insiste donc auprès de Mme la garde des sceaux pour que les services de la Chancellerie, qui sont si compétents, examinent dans quelle mesure on peut utiliser une partie des nouveaux magistrats, de l'ordre d'une centaine, pour veiller sur la durée des détentions, donc des instructions.
Il faut porter le fer là où est la plaie !
M. Jean-Jacques Hyest. Ah !
M. Robert Badinter. C'est à vous, cher monsieur Haenel, que j'adresserai ma conclusion : ne soyez pas à ce point mélancolique, ne dressez pas un état des lieux si cataclysmique, ne dramatisez pas !
Je sais que le mur des lamentations est une tradition de la société judiciaire française. Mais on ne peut pas à la fois proposer notre modèle judiciaire à travers toute l'Europe centrale et orientale et dire ici que c'est une institution en ruine et dans laquelle il ne reste plus qu'à compter les morts.
Pour avoir beaucoup voyagé, comme vous, monsieur le rapporteur spécial, je constate que nous ne sommes pas, même en Europe occidentale, les plus mal placés. Allez ailleurs et vous verrez ce qui se passe. Regardez les statistiques et vous constaterez que, si nous ne sommes certes pas les meilleurs, nous sommes loin, très loin d'être les plus mauvais.
Si je regarde la grande justice britannique, le rapport de Lord Woolf le montre, je constate que la situation est catastrophique.
Si je passe les Alpes et que j'arrive chez nos amis italiens, je n'ose même pas dire ce qu'il en est.
M. Jean-Jacques Hyest. Et pourquoi !
M. Robert Badinter. Si j'écoute ce qui se passe chez nos amis espagnols, je m'aperçois que ce n'est pas brillant.
Pour ce qui est des Belges, nous savons dans quel désastre judiciaire ils sont.
M. Jean-Jacques Hyest. Il reste l'Allemagne !
M. Robert Badinter. Alors, de grâce, mon cher collègue, si les institutions judiciaires françaises ne sont certainement pas le modèle absolu, j'affirme très franchement qu'elles tiennent leur rang par rapport à celles des autres pays occidentaux.
Cela tient beaucoup à l'énergie et au courage avec lesquels magistrats et fonctionnaires font face à leur tâche. Ne donnons pas de cet effort une représentation mélancolique, pour ne pas dire funèbre. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Je voudrais non pas rectifier vos propos, monsieur Badinter, mais vous dire que peut-être ne m'avez vous pas bien écouté.
Je suis intervenu au nom de la commission des finances, j'ai donc reflété le débat qui a eu lieu d'abord en présence de Mme le garde des sceaux, puis entre nous.
Lorsque j'ai fait allusion à la mélancolie, je n'ai fait que citer l'un de nos amis communs, le président Jean-Marie Coulon. Par ailleurs, je n'ai fait preuve d'aucun catastrophisme.
Etant magistrat de formation, j'observe avec une grande attention le fonctionnement d'un certain nombre de juridictions et je ne peux que constater l'effort qui a été réalisé ces dernières années : bien des choses vont bien. Mes inquiétudes portaient en fait sur les relations qui existent actuellement entre le monde politique et le monde judiciaire d'une manière générale.
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour ma part, je parlerai, non pas sur le ton de la mélancolie mais - vous voudrez bien m'en excuser - sur celui de l'indignation.
Il y a plusieurs façons de considérer un budget ministériel. J'en vois au moins deux.
On peut, d'une manière que je qualifierai de comptable et d'administrative, comparer le budget de l'année qui vient à celui des années précédentes, constater un certain nombre d'avancées et conclure que le budget de la justice pour l'année 2000 est un bon budget, ce qui n'est pas faux, puisqu'il est meilleur que celui de l'année précédente qui lui-même était meilleur...
On peut aussi, et je dirai même qu'on doit aussi, surtout si l'on considère les choses du point de vue de la commission des lois, élever le regard pour avoir une vue générale des missions de ce département ministériel et s'interroger sur le point de savoir si l'Etat consacre à ces missions les moyens qui lui sont nécessaires.
Je ne crois pas avoir beaucoup de peine à montrer que nous sommes très loin du compte, que la gestion financière de notre pays sacrifie - et sacrifie délibérément - la justice à des missions probablement plus visibles médiatiquement, plus gratifiantes électoralement, et qu'elle assume ainsi la responsabilité d'entretenir au coeur de l'Etat une plaie qui ne cesse d'empirer. Vous avez compris que je m'adresse beaucoup moins à l'actuel Gouvernement qu'à ses prédécesseurs.
A partir de là, je suis conduit à dire que le budget de 2000 est dramatiquement insuffisant, comme l'ont été depuis des décennies tous les autres budgets, mais que le présent budget a peut-être moins d'excuses que n'en avaient bien de ses prédécesseurs du fait de l'évolution des données économiques générales.
Disant cela, je n'ai pas le sentiment de parler contre Mme le garde des sceaux, à qui j'aurais aimé m'adresser directement, ni contre son action personnelle ou celle de son équipe, à laquelle je rends hommage, et moins encore contre ces quelques milliers de juges et de fonctionnaires - trop peu de milliers de juges et de fonctionnaires - qui luttent quotidiennement pour préserver ce qui peut l'être et qui sans doute font aussi bien, sinon mieux que leurs collègues d'outre-Manche ou d'outre-Pyrénées. Avec eux, avec Mme la ministre elle-même, je crois, je parlerai contre une tradition gouvernementale indigne des proclamations auxquelles on se complaît sur l'état de droit et les vertus humanistes de la République. Oserais-je dire que les raisons pour lesquelles Mme la ministre a cru devoir déserter cet hémicycle me confirme un peu dans ce diagnostic !
Est-il nécessaire de démontrer le caractère dramatiquement insuffisant des moyens de la justice ? Nous l'avons fait naguère : la situation ne s'est pas sensiblement modifiée.
L'augmentation des moyens a d'ailleurs pour origine le plan quinquennal de M. Méhaignerie - fort honnête homme ! - appliqué et amplifié par les plus récents budgets. Cette amélioration, très limitée tout de même, a plus qu'été absorbée par l'augmentation générale des contentieux, à quoi s'ajoute l'augmentation des tâches qui résultent des réformes et spécialement des réformes en cours.
Il me vient à l'esprit la fameuse fable de La Fontaine : Le Savetier et le financier, quand le savetier dit : cela pourrait aller si l'on n'augmentait pas tous les jours ma tâche ; alors je ne peux plus m'en sortir. Je transposerais volontiers la fable en ces termes :

On nous ruine en instances
L'une fait tort à l'autre et Mme la ministre
De quelques nouveaux points
charge toujours l'audience.
(Sourires.)

N'est-il pas visible que la justice ne peut pas fonctionner en France avec à peu près le même nombre de magistrats à la fin de ce siècle qu'elle en comportait au milieu de l'autre ?
N'est-il pas visible que les procédures sont trop longues, que bien des audiences pénales sont aussi trop longues comme les instructions, les détentions provisoires et les délibérés, à la différence des motivations qui, elles, sont souvent trop courtes et quelquefois quasi inexistantes ?
N'est-il pas visible que le nombre de classements sans suite est tel que le ministère est conduit à nous proposer, pour corriger cette situation, un système qui ne brille pas par sa simplicité et qui, en alourdissant la tâche du parquet, risque fort d'aggraver la situation ?
N'est-il pas visible, à Nantes par exemple, ces jours-ci, que les facilités du traitement rapide que l'on qualifie, abusivement selon moi, de traitement en temps réel des affaires pénales courantes se traduit par un ralentissement excessif et fâcheux et quelquefois par un oubli pur et simple des affaires plus complexes et en réalité plus importantes ?
Je demande qu'on n'allègue pas ici telle ou telle statistique pour donner une impression moins négative, en particulier celle sur la durée moyenne des procédures.
D'abord, ces statistiques ne donnent que des moyennes et celles-ci n'ont de sens que si les données de base ne sont pas trop dispersées comme elles le sont.
Ensuite, ces statistiques sont encore tout à fait globales, elles sont même grossières, et la durée moyenne du règlement des affaires est une notion qui, en réalité, n'a aucune signification, d'autant qu'elle s'arrête, excusez la supercherie, à la date du jugement, sans se soucier de la date à laquelle la copie exécutoire du jugement est délivrée, c'est-à-dire quelquefois des mois plus tard. Nous en savons quelque chose, nous autres praticiens !
Enfin, il faudrait traiter séparément les procédures naturellement brèves comme les requêtes et les référés, le jugement avant faire droit et les décisions de fond. A ce moment-là, la notion de durée moyenne prendrait peut-être un certain sens !
Est-il permis d'espérer que nous aurons un jour de telles précisions ? Je me le demande et, en vérité, je vous le demande.
J'en viens à ma dernière observation sur les statistiques. Il y a manière et manière de gérer un contentieux. Malheureusement, nous rencontrons ici comme ailleurs des modes de gestion dans lesquels le souci de la statistique, de faire du chiffre, est prioritaire, ce qui est une dernière raison de ne pas tenir les statistiques pour des indicateurs fiables, d'ailleurs nous n'en avons pas besoin.
Je maintiens donc, et nul ne peut sérieusement les contester, les conclusions de notre rapport sur les moyens de la justice. Cette dernière est en état d'hémiplégie. Je ne me console pas à l'idée que cette hémiplégie est un phénomène largement répandu en Europe. Ce n'est pas mieux. C'est à juste titre en tout cas que, en France, une majorité de Français considèrent - tous les sondages le montrent - que c'est là le plus grave problème de notre société.
Sans doute n'est-ce pas seulement un problème de moyens. Il est impossible cependant de s'attaquer aux problèmes d'organisation, d'intensité d'action aussi longtemps que prévaudront l'insuffisance des moyens et leur mauvaise répartition.
Je pense d'abord à la carte judiciaire, dont on a parlé très justement voilà quelques instants, et je m'inquiète de ne plus en entendre parler ailleurs qu'à cette tribune. Tant qu'on n'aura pas apporté ces modifications, on ne pourra pas progresser.
Je signale au passage les remèdes, sans doute partiels, que nous avons imaginés, qui ont été votés par le Parlement et que la chancellerie, manifestement, ne veut pas mettre en oeuvre.
Je pense également aux magistrats à titre temporaire et je partage le point de vue qui a été exprimé tout à l'heure à propos des recrutements exeptionnels. Je pense aussi au bracelet électronique. Je trouve, à cet égard, assez « surprenante » la ligne de conduite de votre ministère.
Si le Gouvernement doit être remercié d'accorder près de 4 % d'augmentation à ce budget, il faut aussi souligner que ce pourcentage est en réalité tout à fait insuffisant. M. Hyest montrera d'ailleurs que c'est une moyenne en elle-même trompeuse.
En vérité, pour faire face aux missions de la justice, il conviendrait de prévoir une augmentation substantielle de 10 % pendant dix ans ou de 20 % pendant cinq ans. Seule une telle augmentation serait à la hauteur de la difficulté.
Si j'insiste particulièrement sur ce point à l'occasion de l'année 2000, c'est parce que, pour la première fois depuis longtemps, le retour de la croissance économique en France comme dans l'ensemble du monde occidental, permet de dégager des disponibilités considérables, alors que, dans le passé, notamment durant la phase préparatoire au passage à l'euro, toute augmentation substantielle d'un budget nécessitait un prélèvement sur un autre, ce qui, personne ne peut l'ignorer, est toujours très difficile. Mais, à partir du moment où des disponibilités existent, la responsabilité du Gouvernement est entière quant à leur emploi.
Dès lors, est-il supportable - et je pense que cela ne l'est pas - que les crédits de la justice, qui s'élèvent à 27,29 milliards de francs, restent à la même hauteur que ceux des anciens combattants : 25 milliards de francs, ou que la dotation de la SNCF : 26 milliards de francs ? C'est tout de même effarant ! Il est encore moins supportable que les emplois-jeunes, que je préfère ne pas qualifier ici pour ne pas dévier de mon propos, coûtent presque autant que la justice en 2000, soit 24 milliards de francs, et ils atteindront 34 milliards de francs en année pleine par la suite. Où en sera alors la justice ?
M. Jean-Jacques Hyest. Et les 35 heures !
M. Pierre Fauchon. Et les 35 heures, autre catastrophe !
Il serait facile de stigmatiser de tels choix et quelques autres. Je préfère pour conclure dire qu'un Etat moderne, qui se vante d'être un Etat de droit, ne peut pas traiter ainsi le service public de la justice. C'est injuste, mais aussi c'est inconséquent lorsqu'on considère les effets de la démoralisation des Français, avec la progression à chaque élection des abstentions ou des votes extrêmes qui sont, pour la plupart, des votes de protestation.
Face à une situation aussi grave, il faut protester, il faut crier, comme notre collègue M. Haenel l'a fait.
Si le Gouvernement juge ne pas devoir prêter une oreille trop attentive aux réflexions du Sénat, comme il en donne aujourd'hui encore le sentiment, puisse-t-il du moins grâce à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, entendre l'immense plainte des praticiens comme des justiciables, sans se boucher les oreilles. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Peyrat.
M. Jacques Peyrat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, bien des choses ont été dites soit pour approuver, soit pour critiquer les divers aspects de ce budget ; je vais pour ma part vous livrer mes propres observations.
En dix ans, le budget de la justice aura connu un accroissement considérable, de plus de 10 milliards de francs, ce qui nous permet d'espérer franchir, d'ici à deux ans, la barre des 30 milliards de francs, à laquelle il ne nous était même pas permis de rêver il y a quelques années.
L'honnêteté m'oblige donc à vous exprimer, monsieur le sécrétaire d'Etat, ma satisfaction devant l'aspect quantitatif de ce budget.
Pour autant, ce satisfecit mérite d'être tempéré, car la seule question qui vaille est de savoir si ces crédits permettent à votre ministère de rendre à la société le service qu'elle en attend.
Et là, force est de constater que la réponse est loin d'être positive puisque les Français sont toujours aussi nombreux à se plaindre des dysfonctionnements du service public de la justice.
En fait, l'appréciation portée à votre budget sera tout à fait différente selon que l'on regarde d'où l'on vient ou que l'on se penche sur les chantiers prioritaires et nombreux qui demeurent. Ils sont, à mon sens, essentiellement au nombre de deux.
Le premier d'entre eux concerne les délais de jugement, qui ne cessent de s'allonger. Notre collègue Robert Badinter le rappelait tout à l'heure. En effet, devant les tribunaux d'instance, ceux-ci sont passés de 5 mois à 5,2 mois, devant les tribunaux de grande instance de 8,9 mois à 9,3 mois et, devant les cours d'appel, soit après tous les délais précédents, ils sont aujourd'hui de plus de 17 mois. A la cour d'appel d'Aix-en-Provence, ils peuvent atteindre trois ans et trois ans et demi en matière sociale.
Cette situation conduit donc, dans un très grand nombre de cas, à de véritables dénis de justice. Cela vaut particulièrement en matière de droit du travail, au mépris, d'ailleurs, de l'égalité entre les parties, puisque ce sont les salariés qui ont intérêt le plus souvent à un jugement rapide.
La diminution du stock doit donc être notre priorité. Or, sur les 212 créations de postes de magistrat prévues, la résorption du retard ne vient qu'en troisième position avec trente-quatre créations, soit un magistrat pour sept cours ou tribunaux. Celui-ci sera, certes, le bienvenu, mais ce choix constitue, à mon avis, une erreur dans la définition des priorités.
C'est là que vous attendaient les Français, et c'est grâce à cela, d'abord, qu'ils pouvaient retrouver confiance dans leur justice. Malheureusement, vous n'en avez pas suffisamment tenu compte.
Le fait que vous ayez souhaité faire voter bien des nouveaux textes sur la justice - relatifs à accès au droit, à la résolution amiable des conflits, à la présomption d'innocence - n'est en soi pas contestable.
Je pense que leur application pourra contribuer à améliorer le fonctionnement de la justice. Mais cela ne pouvait vous exonérer de penser d'abord et en priorité au problème numéro un de notre justice : sa lenteur.
Avouez quand même qu'il est plus important de créer de nouveaux postes de magistrat dans de nombreuses chambres de tribunaux plus qu'encombrés que de prévoir d'ores et déjà la création de cent postes pour appliquer une loi introduisant la mixité de jugement dans les tribunaux de commerce, loi très discutable d'ailleurs, mais qui, de toute façon, n'est pas encore votée.
Qui dit raccourcissement des délais de jugement dit donc nécessaire réforme de la carte judiciaire. Or celle-ci n'avance que très lentement.
Certes, vous avez supprimé cet été trente-six tribunaux de commerce, et vous avez bien fait. Mais, pour les autres juridictions, l'indispensable remise en cause de la carte judiciaire ne progresse guère.
C'est là, j'en suis conscient, une réforme difficile, impopulaire parfois braquant tous les conservatismes, ceux des élus locaux, des avocats, des magistrats, se conjuguent pour ne rien changer dans leur ressort. Mais quand l'intérêt général vous semble l'exiger, vous savez passer en force !
Car c'est grâce à cette réforme que vous pourrez affecter les postes supprimés dans les petits tribunaux à ceux, plus grands, où l'évolution du stock l'impose.
A ce sujet, rassurez-vous, je ne reviendrai pas une nouvelle fois sur ma demande de création d'une cour d'appel à Nice puisque Mme le garde des sceaux m'avait déjà adressé en commission des lois une aimable fin de non-recevoir.
Elle m'a d'ailleurs aussi répondu à propos de l'éventuelle construction d'une nouvelle prison à Nice, une fois la première tranche de construction réalisée.
Permettez-moi néanmoins, avec un peu de malice, de vous dire toute la chance qu'ont le Vaucluse et Avignon (Sourires), qui ont bénéficié de la construction d'un nouveau palais de justice, pour un coût de 212 millions de francs, d'un nouveau centre pénitentiaire, doté de 122 emplois, pour un coût de 270 millions de francs, et du renforcement du tribunal de grande instance.
Devant ce dynamisme, je me dis que j'aurais presque aimé voir confirmée la rumeur qui annonçait, un temps, la candidature de Mme Guigou à Nice pour les prochaines échéances électorales. (Nouveaux sourires.)
Je sais que, pour justifier cette frénésie de nouvelles constructions dans la prestigieuse cité des papes, elle a déclaré qu'à son arrivée place Vendôme, les dossiers techniques étaient bouclés et qu'il ne manquait qu'un financement. Mais permettez-moi de vous dire qu'il en est ainsi partout.
Pour la prison de Nice, par exemple, les services nous avaient déjà donné leur accord pour un transfert sur un terrain que la ville de Nice a même réservé dans son POS, et qui n'attend donc plus, comme pour Avignon, qu'un financement.
J'espère au moins que ce relatif désintérêt du ministère de la justice pour la ville de Nice ne nous empêchera pas de créer dans le quartier sensible de l'Ariane, cette maison de la justice et du droit pour l'installation de laquelle nous nous battons depuis maintenant deux ans.
Je suis, pour ma part, très favorable à cette implantation, qui permettra d'améliorer le traitement de la petite délinquance et d'offrir un accès au droit gratuit et à proximité pour tous les justiciables.
Nous étions d'ailleurs très près d'aboutir il y a un an, mais il semble que la position du nouveau procureur sur ce sujet soit assez « contrastée », ce qui a quelque peu retardé les choses.
Je vous demande donc de tout faire pour que cette maison puisse voir le jour dès cette année. Je n'ose d'ailleurs penser qu'il puisse en aller différemment, sachant que vous avez budgété cinquante-cinq projets de ce type pour l'an 2000.
Le deuxième chantier qui me semble absolument prioritaire concerne la délinquance des mineurs. Les réponses que vous y apportez me semblent bien insuffisantes et surtout inadaptées à l'explosion de ce phénomène, qui devrait vous inciter à revoir l'ordonnance de 1945, ou tout au moins à la faire appliquer complètement, plutôt que de créer des postes d'éducateur au sein de la protection judiciaire de la jeunesse dont l'utilité me paraît parfois douteuse.
Commençons néanmoins par une bonne nouvelle : je constate avec plaisir que vous vous êtes ralliée à la politique lancée par votre prédécesseur, Jacques Toubon - en collaboration avec le ministre de la ville de l'époque, Jean-Claude Gaudin - qui avait créé les premiers centres éducatifs renforcés, lesquels s'appelaient d'ailleurs, à l'époque, « unités à encadrement éducatif renforcé ».
Vous en prévoyez vingt nouveaux pour l'année prochaine, ce qui portera leur total à une centaine. C'est un bel effort pour un ministre qui, par méconnaissance peut-être, ou par réflexe idéologique, en avait décidé la suppression dès son arrivée.
Pour autant, les autres réponses que vous apportez à la problématique de la délinquance des mineurs ne me semblent pas à la hauteur du fléau.
Tout d'abord, je pense qu'il est devenu indispensable de réformer l'ordonnance de 1945 pour l'adapter à notre époque, c'est-à-dire au rajeunissement de la délinquance et à son caractère, hélas ! de plus en plus violent.
Aujourd'hui encore, la mesure éducative demeure la règle alors que la sanction pénale reste l'exception, et encore seulement à l'égard des plus de treize ans. C'est cela qui conduit au sentiment d'impunité de certains jeunes. Car toutes les enquêtes démontrent qu'ils savent pertinemment jusqu'où ils peuvent aller et quelles sont les limites à ne pas franchir sous peine d'aller en prison.
Je pense également qu'il est indispensable aujourd'hui, compte tenu des résultats obtenus, d'obliger tous les parquets, et non pas seulement ceux qui le souhaitent, à mettre en place une politique volontariste de traitement de la délinquance en temps réel.
En matière d'organisation, ensuite, des dysfonctionnements perdurent. En effet, un certain nombre de départements comportent plusieurs tribunaux pour enfants alors que certains tribunaux de grande instance n'en disposent pas.
D'autre part, les ressorts des régions de la protection judiciaire de la jeunesse et de l'administration pénitentiaire ne correspondent pas aux ressorts des cours d'appel. A l'évidence, la mauvaise imbrication de ces divers découpages territoriaux nuit à la collaboration des divers acteurs.
Enfin, mon attention a été attirée sur l'une des propositions du rapport de mes anciens collègues de l'Assemblée nationale, les députés Jean-Pierre Balduyck et Christine Lazerges, qui sont d'ailleurs socialistes, sur la délinquance des mineurs.
Elle consiste à informer les élèves, dès l'école primaire, pour qu'ils connaissent les principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945, afin qu'il leur soit précisé qu'ils peuvent faire l'objet dès l'âge de raison de poursuites devant les juridictions pénales, que dès treize ans ils sont susceptibles d'aller en prison et qu'à partir de seize ans ils peuvent être placés en détention provisoire, même pour un délit.
Il s'agirait là d'une mesure intéressante, qui pourrait parfaitement être mise en oeuvre dans les établissements scolaires par ceux de vos nombreux emplois-jeunes qui travaillent auprès des juridictions pour mineurs. Je souhaiterais, puisque cela ne coûte pas cher, avoir votre avis à ce sujet.
Voilà, monsieur le secrétaire d'Etat, qui représentez Mme le garde des sceaux, ce que je tenais à dire dans le temps qui m'était imparti. Je ne crois pas que le fonctionnement de la justice en France permette de se réjouir pleinement d'un tel budget, certes en augmentation, mais qui ne répond pas aux principaux défis qui se présentent à vous.
Je voudrais terminer en attirant votre attention sur l'extrême gravité de la situation pénitentiaire de notre pays. L'année dernière, 118 prisonniers se sont suicidés dans les prisons de France. Cette année, nous avons déjà rattrapé ce chiffre : 114 à ce jour.
Ce malaise, qui frappe tous les établissements de l'administration pénitentiaire, a un corollaire : la violence. Or, je le dis comme je le pense, la démocratie française n'a pas d'établissement pénitentiaire digne de ses grands principes. Je sais que vous en avez conscience, et ce sera tout à votre honneur que de mobiliser le plus rapidement possible tous les moyens nécessaires pour que cessent ces situations indignes d'un Etat de droit. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour la troisième année consécutive, le budget de la justice est en progression.
Il augmente cette année de 3,91 %, soit trois fois plus que la croissance moyenne du budget de l'Etat.
Nous devrions tous nous réjouir de l'effort particulier qui est consenti en cette matière.
Certes, on peut déplorer que la part du budget de la justice ne représente que 1,63 % du budget général ; néanmoins cette part est en augmentation puisqu'elle était de 1,55 % et de 1,56 % les années précédentes.
Sachons tous en convenir : le budget de la justice est, dans l'ensemble, un bon budget, et les élus du groupe communiste républicain et citoyen le voteront.
La continuité des efforts financiers permet de donner vie aux priorités affichées par le Gouvernement, notamment l'amélioration de la vie carcérale et la lutte contre la délinquance juvénile. Ce sont les secteurs qui bénéficient en effet des plus fortes hausses de crédits : de 14,7 % pour la protection judiciaire de la jeunesse et de 5,85 % pour l'administration pénitentiaire. Ces deux secteurs totalisent plus des trois cinquièmes des créations d'emplois, soit 766 sur les 1 237 proposés.
La protection judiciaire de la jeunesse - les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen s'en félicitent - a été placée au centre des préoccupations gouvernementales ces dernières années. Les priorités définies par le conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998 en matière de lutte contre la délinquance des mineurs ont été confirmées en janvier de cette année. L'augmentation substantielle des moyens de la protection judiciaire de la jeunesse dans le projet de budget pour 2000 permettra, notamment, une réelle prise en charge des mineurs délinquants dès la première infraction.
Pourtant, l'effort ne doit pas être, loin de là, relâché. Les besoins sont immenses, les retards énormes. Certains chiffres continuent ainsi d'être préoccupants, voire parfois catastrophiques.
Tel est le cas, d'autres l'ont souligné avant moi, des délais de jugement, qui continuent de s'allonger, si l'on fait exception des tribunaux de commerces, malgré les efforts entrepris ces dernières années pour les réduire : il faut attendre près d'un an et demi - 17,4 mois - pour avoir un arrêt de cour d'appel ; les délais dans les tribunaux d'instance et les conseils de prud'hommes sont d'un mois plus longs que ceux de l'année précédente ; l'augmentation est de deux mois dans les tribunaux de grande instance.
Le problème semble difficile à résoudre, surtout là où le nombre d'affaires en cours augmente.
Au civil, le recul du nombre d'affaires nouvelles ne permet pas de résorber le stock existant.
Au pénal, la situation est encore plus préoccupante. On enregistre une forte proportion d'affaires nouvelles : près de 10 % tant au niveau de la Cour de cassation qu'à celui des cours d'assises. Ne parlons même pas de la situation des juges des enfants qui voient leur activité en nette progression - de 14,5 % en 1998 - ainsi que des juridictions prud'homales, qui ont enregistré une augmentation de 11,6 % des affaires introduites en 1998.
C'est la quadrature du cercle : plus on traite d'affaires, plus il y en a à traiter !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. C'est vrai !
M. Robert Bret. Cette illustration de la juridiciarisation de notre société doit nous conforter dans l'idée selon laquelle il faut absolument persister, comme le fait Mme la garde des sceaux depuis quelques années, dans le développement des réponses extrajudiciaires aux conflits, telles la médiation ou la transaction, faute de quoi l'encombrement continuera à enfler.
Venons-en, à la situation dans les prisons, qui reste, à bien des égards, catastrophique. En atteste le nombre des suicides : 118 l'année dernière, 114 depuis le début de l'année. On pense également aux scandales qui émaillent régulièrement l'actualité : celui de Beauvais, ou, plus près de nous, celui de Riom, qui remet à l'ordre du jour la question du contrôle des prisons.
Mme la garde des sceaux a refusé que la commission nationale de déontologie de la sécurité soit chargée de cette mission, au motif que le contrôle de l'autorité judiciaire s'exerce dejà sur ce point. Mais dans quelles conditions ? Nous aimerions savoir où en sont, à cet égard, les réflexions du groupe de travail présidé par M. Canivet ?
S'agissant de l'état du parc pénitentiaire, chaque budget, année après année, a son « établissement de la honte » : l'an dernier, nous nous émouvions de la situation de vétusté extrême dans laquelle se trouvait la maison d'arrêt de Lyon-Perrache et de sa surpopulation carcérale puisque le taux d'occupation y était de 165 %. Cette année, c'est au tour des établissements d'outre-mer, et particulièrement de celui de Saint-Denis de la Réunion, dont une délégation de la commission des lois du Sénat a qualifié les conditions de détention d'« humainement inacceptables », constatant en outre que les mesures de sécurité y étaient tout à fait insuffisantes. Avec son taux d'occupation de 229 %, cet établissement bat d'ailleurs un bien triste record !
Quel établissement sera, l'année prochaine, celui de la honte ? Nous avons malheureusement l'embarras du choix !
Très récemment, j'ai visité le centre des Baumettes avec notre collègue M. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois pour l'administration pénitentiaire, et nous avons été profondément choqués devant l'état de vétusté de cet établissement.
Les établissements pénitentiaires sont dans un tel état de délabrement qu'on a l'impression, malgré l'effort notable consenti par le Gouvernement dans ce domaine - près de 600 millions de francs d'autorisations de programme pour la rénovation ou la reconstruction du parc pénitentiaire, y compris d'ailleurs le centre des Baumettes - qu'il s'agit d'une goutte d'eau dans un océan !
Comment s'étonner, dès lors, des violences exercées par les détenus sur les surveillants ?
Certes, la surpopulation carcérale diminue, avec un taux d'occupation qui est passé de 114 % en 1998 à 107 % en 1999, mais on ne peut se satisfaire d'un tel chiffre.
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen notent avec satisfaction que le Gouvernement poursuit ses efforts pour l'amélioration de la vie en prison.
L'année dernière, une action particulière a été menée en direction, notamment, de l'hygiène ; l'affectation de 152 nouveaux surveillants à l'accueil et à la prise en charge des détenus devrait permettre de renforcer cette démarche.
On sait aujourd'hui que les efforts devront être maintenus concernant la prise en charge sanitaire des détenus, en particulier en direction des malades mentaux.
Nous sommes également sensibles aux moyens affectés à la préparation de la sortie de prison et à l'accent mis sur les centres pour peines aménagés. Ils sont en effet de nature à remédier, en partie du moins, à la surpopulation des prisons et freiner la récidive.
Mon collègue André Gerin soulignait, à l'Assemblée nationale, que le taux de libération conditionnelle était en baisse en partie à cause de la situation économique. Il est donc absolument nécessaire de concentrer nos efforts sur ces questions de réinsertion économique des prisonniers.
Mme la garde des sceaux a souhaité mettre l'accent sur l'importance des moyens humains dégagés. Nous ne pouvons que l'approuver. Néanmoins, les sénateurs communistes souhaitent faire part de leurs inquiétudes quant à la gestion de ces personnels.
Tout d'abord, nous ne sommes pas favorables à la multiplication des emplois issus du recrutement en masse d'emplois-jeunes. Ces personnels recrutés à titre temporaire et qui bénéficient d'une formation souvent sommaire ne nous semblent pas de nature à répondre aux attentes et aux besoins exprimés.
Ainsi, pour ce qui est de l'administration pénitentiaire, l'affectation d'emplois-jeunes aux quartiers de mineurs peut susciter quelques inquiétudes. Là, plus que nulle part ailleurs, la délicatesse de la mission à remplir exigerait au contraire la présence d'un personnel qualifié. On peut exprimer les mêmes craintes pour la protection judiciaire de la jeunesse.
Veillons également à ne pas former des personnels « au rabais ». Les syndicats ont émis des réserves quant à l'opportunité d'une formation de six mois pour les nouveaux éducateurs de la PJJ, ce qui paraît en effet bien court compte tenu de la complexité des tâches qui leur incombera. Dans le même sens, la réduction à quatre mois de la formation en école des nouveaux surveillants de prison ne semble guère opportune. Et songez que, bien souvent, ils sont déjà en poste avant d'être formés !
Les conséquences de la bonification du 1/5 semblent avoir été mal évaluées : les 600 départs à la retraite qui devraient avoir lieu au début de 2000 ne seront pas compensés, au moins dans un premier temps, par les recrutements. Ils pourraient concerner, dans certains établissements, jusqu'à 20 % des effectifs. Si l'on y ajoute les mutations, on peut alors craindre que des établissements pénitentiaires ne se retrouvent avec un personnel majoritairement, sinon quasi exclusivement novice.
Lorsqu'on connaît le fort taux d'absentéisme qui sévit déjà à l'heure actuelle chez les personnels de surveillance, compte tenu notamment des conditions de travail, et la faible attractivité des carrières pénitentiaires aujourd'hui, on a de quoi être inquiet. Les personnels en place, déjà démotivés par les inégalités statutaires flagrantes dont ils nous ont fait part et par un manque de reconnaissance générale, risquent d'être confrontés à un surcroît de travail qui ne fera qu'amplifier le phénomène et les cantonnera un peu plus dans un rôle de « porte-clés » dont ils ne se satisfont pas.
Il est donc urgent d'opérer des recrutements en prévision de ces départs. Il apparaît également nécessaire de revaloriser suffisamment la profession pour attirer à elle un personnel qualifié et motivé.
Sur toutes ces questions, nous regrettons que Mme la ministre n'ait pas cru bon de pousser plus loin l'effort de concertation avec les syndicats concernés : tous ont déploré auprès de nous le manque de dialogue avec la chancellerie.
C'est dommage. Au surplus, cette situation est préjudiciable au développement de certains projets. La formule des unités de vie familiale en est l'exemple symbolique qui risque d'achopper devant les réticences des personnels chargés de la faire vivre, comme nous avons pu l'entendre dire lors de notre visite des Baumettes.
Pour conclure, nous voudrions nous faire l'écho des inquiétudes exprimées par les personnels des greffes des tribunaux de commerce qui ont été supprimés. Le reclassement de certains d'entre eux ne va pas sans réelles difficultés, contrairement à la réponse que nous a fournie Mme la ministre lors de son audition par la commission.
Nous souhaiterions que le ministère règle au plus vite ces situations individuelles dues, en partie, à la parution tardive du décret relatif à la cession des greffes et au reclassement des personnels, et dues aussi au manque de concertation avec les personnels concernés.
Sur toutes ces questions, que j'ai formulées au nom de mon groupe, je souhaite que, dans un instant, Mme la ministre puisse m'apporter un certain nombre de réponses. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, malgré les nombreuses analyses critiques entendues ce matin, il faut bien reconnaître que, dans le projet de loi de finances pour 2000, les crédits du ministère de la justice connaissent une augmentation globale de 3,9 %, soit trois fois plus que la croissance moyenne du budget de l'Etat.
Je ne rappellerai pas dans le détail l'architecture de ce budget, que nos excellents collègues ont soulignée lors de la présentation de leur rapport. J'évoquerai tout d'abord la place croissante de la justice dans notre société, et vous ferai part ensuite de mes interrogations sur la politique pénitentiaire.
La justice est actuellement au centre des préoccupations de l'opinion publique, des responsables politiques et des médias. Depuis dix ans, de nombreux rapports se sont succédé, traduisant la perte de confiance des citoyens en ce service public. Le manque de moyens face à une demande de plus en plus pressante de justice y était également dénoncé.
Où en est-on aujourd'hui ? Un plan quinquennal avait été lancé, en 1995, pour rénover l'institution judiciaire, mais il n'a pu atteindre ses objectifs, compte tenu de l'insuffisance des moyens mis en oeuvre. Sur la proposition de Mme le garde des sceaux, voilà deux ans, le Gouvernement a décidé d'engager une réforme de la justice articulée autour de sept projets de loi. Cet ensemble, en cours de discussion tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, nécessitera une réunion en congrès du Parlement.
Ce train de réformes ne pourra être mis en oeuvre sans que la justice bénéficie durablement d'une part suffisante dans le budget de l'Etat.
En effet, le système judiciaire évolue, mais sans pouvoir répondre, jusqu'ici, à l'attente des justiciables, dont les demandes sont croissantes. La justice doit arbitrer des conflits de plus en plus nombreux dans une société frappée par l'incivilité et la délinquance.
Il est vrai que notre pays fait l'objet de recours devant la Cour européenne des droits de l'homme. Cependant, il faut rappeler qu'une grande part de ce contentieux concerne la durée excessive des procédures pénales, les décisions sans appel des cours d'assises et l'importance de la détention provisoire.
Notre organisation judiciaire reste, malgré l'abondance des affaires à traiter, soucieuse d'une stricte défense des droits des citoyens. Il en résulte des délais relativement longs.
Quant aux reproches concernant le nombre des prévenus, il est au centre d'une large réflexion engagée dans le cadre du projet de loi sur la présomption d'innocence, afin de limiter la détention provisoire. La solution gouvernementale consistant à confier la décision de mise en détention à un juge particulier est l'une des voies de réflexion dans ce débat.
Mes interrogations porteront principalement sur la situation de l'administration pénitentiaire. Certes, des moyens ont été dégagés par le ministère afin d'améliorer la prise en charge des personnes détenues et la sécurité dans le système carcéral.
Dans le cadre de la poursuite de l'amélioration du parc pénitentiaire, je constate avec satisfaction qu'en plus des efforts de réhabilitation et d'entretien des locaux l'année 2000 sera celle du plein engagement en faveur de la construction de six - voire sept, si l'on tient compte de la promesse qui a été faite pour Saint-Denis de la Réunion - nouvelles prisons et de la rénovation lourde des cinq principales maisons d'arrêt de France, celles qui posent le plus de problèmes.
Des préoccupations demeurent néanmoins sur certains aspects du fonctionnement de l'administration pénitentiaire. Dans beaucoup de pays, les effectifs de personnes emprisonnées ne cessent de croître. Il faut savoir que l'augmentation de la population carcérale en France est due en grande partie à la sévérité des condamnations et à l'allongement consécutif des durées de détention. Cette surpopulation, malgré une certaine stabilisation récente du fait, notamment, de la diminution du nombre de prévenus, reste préoccupante par la promiscuité qu'elle entraîne dans certains établissements pénitentiaires.
Afin d'éviter l'incarcération pour des courtes peines, on dispose, depuis la loi du 19 décembre 1997 - comme l'a rappelé mon collègue et ami Georges Othily - de la possibilité de placement sous surveillance électronique. Vous savez tout l'intérêt que je porte, et depuis de nombreuses années, à cette alternative à l'emprisonnement.
Mme le ministre nous a annoncé l'expérimentation prochaine de cette technique dans les centres pour peines aménagées. Je me réjouis - malgré certains bruits entendus ce matin - qu'en 2000 la mise en oeuvre de cette loi, votée par le Parlement voilà deux ans, se fasse dans le centre de Metz puis dans celui des Baumettes, à Marseille. Je serais reconnaissant au Gouvernement de tenir strictement informé le Sénat de l'évolution de ce processus.
Il faut aussi améliorer les conditions de vie des condamnés détenus. Ce souci humaniste doit naturellement être concilié avec la préoccupation du maintien de l'ordre dans les prisons. C'est dire combien les solutions sont difficiles à trouver. On peut tout de même se féliciter des progrès déjà accomplis.
Cependant, si la prison s'humanise, elle reste un espace de contraintes après avoir été longtemps une zone de non-droit.
Cette évolution conduit à plusieurs réflexions. La première est qu'une judiciarisation des décisions du juge d'application des peines doit être aujourd'hui envisagée. Cette proposition, que j'avais présentée voilà quelques années, devrait permettre de respecter les droits de la défense dans des décisions jusqu'ici considérées comme de simples mesures disciplinaires.
En ce domaine de l'humanisation de la vie sous main de justice, la situation doit impérativement évoluer. Je tiens à souligner l'heureuse initiative prise par Mme le garde des sceaux de mettre en chantier un code de déontologie - à défaut d'appliquer à l'administration pénitentiaire le code de déontologie des forces de sécurité en général - et d'instituer un groupe de travail, sous la présidence du premier président de la Cour de cassation, M. Guy Canivet, chargé de rénover le contrôle externe de l'administration pénitentiaire.
Je participe avec intérêt aux travaux de ce groupe, qui devrait proposer dans ses conclusions une clarification des contrôles existants ainsi que des mesures nouvelles permettant de faire mieux respecter les droits de la personne humaine détenue.
Enfin, je tiens à évoquer le système de santé dans le milieu carcéral, qui a nécessité une réforme, décrite dans la circulaire ministérielle du 21 décembre 1990 et, surtout, clairement définie par la loi du 18 janvier 1994.
Ces efforts d'adaptation étaient indispensables étant donné l'impact de la durée et des conditions de détention sur l'état de santé des prisonniers. Cet impact est d'autant plus sensible que la population carcérale a un profil sanitaire particulier.
Elle comprend, en effet, 80 % de fumeurs invétérés et 15 % de toxicomanes ; les hépatites B et C y sont fréquentes ; le taux de prévalence du VIH y est beaucoup plus important que dans l'ensemble du pays ; enfin, des troubles de santé mentale touchent un nombre non négligeable de détenus.
Les moyens sanitaires en milieu pénitentiaire ont été longtemps inadaptés à la diversité et à la gravité des pathologies. Certes, les contraintes liées au maintien de l'ordre et à la sécurité rendent l'intervention médicale plus complexe.
Aujourd'hui, que constate-t-on ? Les unités de consultation et de soins ambulatoires sont créées ou en passe de l'être. Les conventions de transfert de la prise en charge sanitaire de l'administration pénitentiaire vers le service public hospitalier sont presque toutes élaborées. De même, l'adaptation des missions de l'établissement public de santé national de Fresnes, dans le cadre de ce nouveau dispositif, est en préparation. Je me félicite de cette évolution.
Néanmoins, le caractère alarmant du récent rapport Pradier, qui attire l'attention sur les difficultés résultant d'une présence de malades mentaux en augmentation dans les prisons, conduit logiquement à de nouveaux efforts. Ces derniers doivent se faire en faveur non seulement des services médicaux psychiatriques régionaux mais aussi d'autres structures d'accueil à inventer.
J'aimerais savoir si l'année 2000 sera celle de la mise en oeuvre d'un dispositif sanitaire cohérent, rénové, en pleine application de la loi du 18 janvier 1994. Pour ma part, je souhaite que les actions entreprises jusqu'ici se concrétisent le plus rapidement possible.
Compte tenu de la progression globale des crédits du ministère de la justice et des efforts en vue d'une évolution humaniste des services pénitentiaires, je voterai, malgré certaines insuffisances, le budget de la justice pour 2000. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bel.
M. Jean-Pierre Bel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, Robert Badinter procédait, voilà un instant, avec le brio et la maîtrise du sujet que nous lui connaissons, à l'examen des crédits des services judiciaires. J'aborderai, quant à moi, celui des crédits de l'administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse.
Ce budget est en constante augmentation. Pourtant, nous avons noté, en commission des lois et peut-être aussi ce matin, au cours des débats, des réactions plutôt contrastées.
Pour ne fâcher personne dans cet hémicycle, et après avoir relevé l'avis favorable du rapporteur spécial de la commission des finances et la mention « bon budget au plan quantitatif » décernée à l'Assemblée nationale par le rapporteur, M. Devedjian, je ne puis que m'étonner de l'indignation excessive de certains.
Entendre un ancien ministre des finances, ces derniers jours, et ce matin encore à la radio, vilipender sans retenue l'action qui est conduite, critiquer un budget trois fois supérieur à la croissance moyenne du budget de l'Etat, réclamer à hauts cris un plan Orsec pour la justice après avoir lui-même, lorsqu'il était aux responsabilités, taillé allègrement dans les crédits de la justice, ne manque pas de piquant. Il est vrai que, pour dépenser beaucoup plus et baisser massivement les impôts, M. Madelin, puisque c'est de lui qu'il s'agit, entrevoit la panacée de la privatisation, privatisation des prisons avant celle, on peut l'imaginer, d'autres pans de notre administration.
C'est une vision, c'est une philosophie, mais ce n'est pas la nôtre. Avec moins de démagogie, mais certainement avec plus de sérénité, Mme la garde des sceaux nous propose de poursuivre et d'amplifier les efforts consentis ces trois dernières années en augmentant - cela a été dit - de près de 6 % les crédits de l'administration pénitentiaire et de 14,7 % ceux qui concernent la protection judiciaire de la jeunesse.
L'administration pénitentiaire absorbe plus d'un quart du budget de la justice et, cette année, plus d'un tiers des autorisations de paiement. Cela démontre, là encore, la volonté du Gouvernement de mettre en oeuvre les quatre grandes orientations de la politique pénitentiaire, que je ne rappellerai pas.
Le projet de loi de finances pour 2000 prévoit la création de 386 emplois, dont 290 emplois de surveillants. Je me félicite que ces emplois soient destinés à mieux préparer la sortie de prison. Or, cette préparation, qui est essentielle pour prévenir la récidive, a longtemps été négligée par les pouvoirs publics. Mme la ministre de la justice tente de rattraper ce retard : outre le projet d'exécution des peines, qui permet de placer les personnes condamnées dans une perspective de réinsertion dès le début de la peine, et les centres pour peines aménagées, elle met en place deux réformes susceptibles de favoriser la réinsertion des détenus : la mise en place des unités de vie familiale et la modification de la liberté conditionnelle.
Nous encourageons Mme la ministre à généraliser les dispositifs d'unités de vie familiale, tout comme nous l'encourageons à réfléchir à l'instauration d'un revenu minimum pour les détenus les plus démunis.
La libération conditionnelle, quant à elle, est l'une des mesures les plus efficaces pour préparer la réinsertion des condamnés et limiter la récidive. On dénombre deux fois moins de récidives parmi les détenus qui ont bénéficié de cette mesure. Cela a encore été rappelé ce matin par un responsable syndical dans une interview à un quotidien.
Or, depuis quelques années, on assiste à une baisse du nombre de libérations conditionnelles. Aussi Mme la ministre a-t-elle, à juste raison, mis en place un groupe de travail chargé de réfléchir à cette question et dont nous attendons beaucoup.
Si l'on constate depuis quatre ans une diminution constante de la population carcérale, le taux d'occupation des établissements pénitentiaires reste encore trop élevé.
Cette surpopulation associée à l'allongement de la durée des incarcérations a des incidences sur les détenus, dont le taux de suicide est très préoccupant. L'observatoire international des prisons a fait état du suicide de 114 personnes dans les prisons françaises depuis le début de l'année. Cette information a beaucoup ému l'opinion. Les gardiens de prison nous le disent : il est impossible de travailler avec des personnes qui n'ont aucun espoir.
L'état de santé des détenus est, lui aussi, inquiétant. A côté des pathologies traditionnelles, on assiste à une augmentation des détenus souffrant de troubles mentaux, troubles aggravées par l'allongement constant des peines qui leur sont infligées ainsi que par les conditions de la vie carcérale.
Malgré le renforcement des soins psychiatriques en prison se pose en permanence la question de la présence de ces détenus malades, au comportement imprévisible et souvent violents. Face à eux, les surveillants sont démunis, car ils ne sont pas formés pour gérer ce type de situation.
Je me réjouis que le Gouvernement fasse des efforts importants pour la formation des personnels pénitentiaires et je me félicite des mesures statutaires et indemnitaires dont ceux-ci font l'objet.
Nombre de problèmes que je viens d'évoquer sont en partie liés à la surpopulation carcérale. Les efforts pour lutter contre cette dernière ont, jusqu'à présent, essentiellement porté sur les flux d'entrée en détention. Outre le développement des alternatives à l'incarcération, qu'il faut multiplier à tout prix, une réforme de la détention provisoire a été engagée. Par ailleurs, le projet de loi visant à renforcer la protection de la présomption d'innocence, actuellement en discussion devant le Parlement, devrait limiter les détentions provisoires, et donc l'encombrement des maisons d'arrêt.
Quant à la protection judiciaire de la jeunesse, les crédits qui la concernent augmentent, dans le projet de loi de finances pour 2000, de 14,7 % et atteignent 3 200 millions de francs en crédits de paiement. Cette forte croissance des crédits mis à la disposition de la protection judiciaire de la jeunesse, que l'on peut, comme l'a fait le rapporteur pour avis M. Patrice Gélard, qualifier d'exceptionnelle, traduit la priorité donnée par le Gouvernement au traitement de la délinquance juvénile.
L'augmentation des moyens en personnel est sans précédent. Cet effort se traduit par des mesures de revalorisation statutaires et indemnitaires, par un effort pour le recrutement et la formation des délégués des procureurs et par une meilleure prise en compte des situations d'urgence grâce à une coordination accrue. Cela doit maintenant se traduire rapidement par du concret.
Dans vingt-six départements prioritaires, la prise en charge immédiate a été décidée et elle est effective dans neuf d'entre eux. Même si elle se heurte à des difficultés, la mise en place de ces centres de placement immédiat est une réelle innovation.
On peut se féliciter du travail accompli par les délégués du procureur chargés de mettre en oeuvre, à la demande ou sous le contrôle du parquet, des mesures décidées dans le cadre de l'opportunité des poursuites, principalement des rappels à la loi et du classement sous condition.
Le projet de budget pour 2000 marque votre volonté, madame la garde des sceaux, de faire de ce secteur un outil majeur de la lutte contre la délinquance des mineurs et, par ricochet, de la délinquance en général. Le groupe socialiste se félicite de ce choix.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Jean-Pierre Bel. Notre collègue Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances, a émis un avis favorable sur votre projet de budget, madame la ministre. La commission des lois, elle, s'en est remise à la sagesse du Sénat pour les crédits des services judiciaires, a adopté ceux de la protection judiciaire de la jeunesse et rejeté ceux de l'administration pénitentiaire. Je laisse chacune juge de la cohérence de l'ensemble !
Quant au groupe socialiste, madame la ministre, il votera sans état d'âme votre projet de budget comme il sera prochainement derrière vous, uni et rassemblé, pour appuyer vos choix, et plus précisément le chantier de réforme de la justice. Nous le ferons d'autant plus aisément, madame la ministre, que vos engagements et votre action depuis maintenant deux ans et demi donnent du sens à nos convictions et font honneur à l'image que nous avons d'une justice équitable, transparente et moderne. (Applaudissements sur les travées socialistes. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Madame le garde des sceaux, depuis deux ans, le Sénat a approuvé le budget du ministère de la justice qui a effectivement connu des augmentations sensibles, et vous soulignez vous-même qu'en trois ans les crédits du ministère de la justice progresseraient de 14 % et que près de 3 000 postes seraient créés.
Le fait que, pour 2000, le budget augmente de 3,91 %, un peu moins que les autres années mais l'inflation est, paraît-il, moins importante, ne doit pas faire oublier qu'il ne représente, beaucoup l'ont dit, que 1,62 % du budget de l'Etat, pour une de ses missions essentielles. Pour un parlementaire en fonction depuis quelques années, une progression de 0,2 % par an, c'est tout de même considérable.
Mais encore faut-il examiner de près si ce budget correspond aux objectifs affichés d'amélioration de la justice au quotidien, au-delà des réformes en tous genres engagées.
S'il faut se féliciter, comme l'ont fait MM. les rapporteurs et de nombreux orateurs, de l'effort en faveur de la protection judiciaire de la jeunesse pour traiter la délinquance des mineurs - 380 postes créés auxquels s'ajoutent 25 postes de magistrat et de greffier - et si on note une augmentation de 5,9 % des crédits des services pénitentiaires, on ne peut en dire autant des services judiciaires, dont la part relative baisse en 2000. L'augmentation n'est que de 0,6 %, monsieur le rapporteur ; j'ai puisé ces excellents chiffres dans votre rapport.
Une observation souvent faite s'impose tout d'abord en ce qui concerne l'équipement. On note une forte diminution des autorisations de programme et des crédits de paiement, et, quel que soit le garde des sceaux - cela dure depuis longtemps - on ne peut guère se féliciter de l'efficacité des services du ministère de la justice en matière d'équipement. D'ailleurs, certains nouveaux palais de justice - mais cette situation n'est pas nouvelle - font sans doute plaisir aux architectes mais moins aux utilisateurs. En effet, on constate des malfaçons ou des difficultés de fonctionnement considérables dans un certain nombre de palais de justice. Je pense tout particulièrement à l'un d'entre eux, que vous avez inauguré récemment, madame le garde des sceaux.
J'en viens aux moyens des services judiciaires. Il est apparemment très satisfaisant que des juridictions soient dotées de nombreux postes. Cependant, un examen attentif montre que, sur les 212 postes de magistrat créés, seuls 34 postes sont réservés à l'amélioration de la justice au quotidien, outre les 25 postes que j'évoquais tout à l'heure au titre de la justice des mineurs.
Si le recrutement de cent assistants de justice supplémentaires est positif, on peut s'interroger sur la création de 1 050 agents de justice, ce qui constitue une nouveauté. Nous pensions jusqu'à présent que les emplois-jeunes devaient être, comme cela nous avait été dit, des emplois « émergents ». Or, il apparaît clairement que, dans leur grande majorité, ceux-ci vont remplacer les contrats emploi-solidarité et autres emplois précaires pour soulager les greffes et les services d'accueil du public.
Mais surtout, outre les quarante-huit emplois prévus pour la mise en oeuvre de la réforme de la procédure de la détention provisoire, après les cinquante qui avaient été inscrits au budget de 1999, cent postes sont réservés pour la réforme des tribunaux de commerce, afin de permettre la « mixité ». On ne peut que déplorer, même si la réforme des tribunaux de commerce se révèle nécessaire, le caractère précipité et polémique pris par cette question.
Certes, des dysfonctionnements et quelques comportements indélicats, et même délictueux, ont existé. Ils ont été grossis à l'excès par un rapport trop partiel et partial ; ce n'est pas celui qui a été établi par le ministère de la justice. D'ailleurs, qu'a donc fait le parquet sur ces affaires ? Cependant, on ne peut oublier les services rendus par les juges consulaires depuis tant de décennies. D'ailleurs, je serais heureux de connaître le nombre d'appels concernant les décisions au fond des tribunaux de commerce, notamment en matière de défaillances d'entreprises. Qu'en sera-t-il au 1er janvier prochain, puisque nombre de juges de tribunaux de commerce démissionnent en bloc, car ils ont été ulcérés par la campagne de dénigrement systématique et orientée dont ils ont fait l'objet.
Certes, et ce sera sans doute la seule réforme de la carte judiciaire qui marquera votre présence à la chancellerie - même si nous vous y souhaitons une longue vie - l'émiettement des juridictions commerciales dans certaines zones mérite un regroupement, à condition qu'une juste indemnisation des personnels et des greffes intervienne.
Par ailleurs, nous ne connaissons pas encore, si ce n'est de manière très lacunaire et par voie de presse, la teneur exacte des projets dans ce domaine. Deux questions se posent. Compte tenu des enjeux humains, notamment la situation des personnels, et des enjeux économiques, la justice commerciale requiert à la fois la rapidité et une connaissance approfondie des entreprises. Nous savons que, dans les circonscriptions judiciaires où il n'existe pas de tribunaux de commerce, la situation n'est pas non plus parfaite, c'est le moins que l'on puisse dire, et que les professionnels du droit se plaignent de retards dans le traitement des difficultés des entreprises dans certaines juridictions. Qu'en sera-t-il demain ? Comment garantir, même s'ils sont accompagnés d'assesseurs, qu'un ou deux juges professionnels par tribunal de commerce mèneront à bien cette tâche ?
Enfin, quels juges allez-vous recruter et comment ? Par l'Ecole nationale de la magistrature ou dans divers corps d'Etat ? Il faut être très attentif à la qualité des personnes recrutées : des professionnels du droit, dotés d'une connaissance des entreprises. De ce point de vue, les juges du commerce tels qu'ils existent actuellement sont indispensables.
Enfin, j'évoquerai la situation dans les départements et territoires d'outre-mer, dernier sujet de préoccupation qui ne permet pas de porter un jugement favorable sur votre projet de budget, madame le garde des sceaux. J'ai eu l'occasion de dire, dans mon rapport sur le budget des territoires d'outre-mer, combien la situation est préoccupante dans certains territoires. D'ailleurs, les statistiques sont lacunaires ou très tardives ou inexistantes. Il est un département français, la Guyane, où la justice est en faillite, comme le montrent les rapports parlementaires et de grands hebdomadaires. Pour sa part, la commission des lois du Sénat l'a constaté sur place. Il faut absolument remettre de l'ordre. En effet, sur 1 200 jugements rendus, une vingtaine seulement auraient été dactylographiés et exécutés. Si c'est la réalité, on ne peut accepter cette situation plus longtemps et des mesures urgentes doivent être prises pour y remédier.
Telles sont, madame le garde des sceaux, les observations complémentaires que je souhaitais présenter après mon excellent collègue M. Fauchon. Bien entendu, ce budget se situe aussi dans une période où l'on parle beaucoup de la justice, certains le faisant d'ailleurs de manière inconsidérée. Vous le savez bien, nous attendons que l'Etat prenne ses responsabilités quand des magistrats se permettent de dépasser les bornes, soit en critiquant des commissions parlementaires, soit - ce qui est plus grave - en disant que les sénateurs font du chantage. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de budget qui nous est présenté aujourd'hui marque une progression de 3,9 % par rapport à 1999 et s'inscrit dans la continuité des efforts engagés dans ce domaine depuis 1988, comme cela a été dit à plusieurs reprises par les orateurs qui m'ont précédé.
En effet, les crédits consacrés à la justice sont maintenus, et certains d'entre eux, notamment ceux qui sont destinés aux créations de postes, augmentent même notablement. Aussi, quantitativement, ce projet de budget est-il bon.
Pourtant, je reste sceptique quant aux résultats que le projet de budget permettra d'obtenir, n'étant pas convaincu de la complète utilisation des crédits annoncés.
M. Raymond Courrière. C'était la spécialité de M. Juppé, cela !
M. Dominique Leclerc. Cette incertitude, nous la tenons de la situation actuelle : on constate la diminution du taux de consommation des crédits de paiement et des autorisations de programme, alors même que persistent un certain engorgement des tribunaux, l'allongement des délais de jugement et un manque d'accessibilité de la justice pour l'ensemble de nos concitoyens.
Ainsi, si l'aspect quantitatif est satisfaisant, on ne peut pas toujours en dire autant de l'aspect qualitatif. Il est donc essentiel d'améliorer la « performance » de la justice.
Cela doit se traduire notamment, bien sûr, par des efforts financiers, qui devraient vous être aisés, madame le garde des sceaux, puisque le Gouvernement annonce avec satisfaction des embellies fiscales.
Cependant, l'amélioration du fonctionnement de la justice exige une volonté politique forte.
A cet effet, nous attendons, madame le garde des sceaux, l'annonce d'une nouvelle loi de programmation qui permettrait non seulement de remettre à niveau l'ensemble du secteur judiciaire, mais aussi d'y apporter quelques améliorations.
Je pense tout d'abord ici aux délais de jugement, qui, je vous l'ai dit, restent beaucoup trop longs, que ce soit au civil, au pénal ou devant les juridictions administratives, où le nombre annuel d'affaires enregistrées progresse de plus de 10 % par an.
Or les Français ne comprennent plus aujourd'hui de telles lenteurs. Par conséquent, je souhaite que les créations de postes prévues par votre projet de budget permettent, malgré le nombre insuffisant de magistrats spécialisés, une amélioration notable des services rendus.
Permettez-moi maintenant, mes chers collègues, d'aborder le problème de la petite délinquance, notamment de la délinquance des mineurs, à laquelle nos concitoyens sont particulièrement sensibles, puisqu'ils y sont confrontés quotidiennement.
Dans ce domaine, certaines solutions, comme la convocation par officier de police judiciaire ou la mesure de réparation, mériteraient d'être préconisées plus largement, malgré certaines réticences des uns et des autres.
En effet, la convocation par officier de police judiciaire, de par sa forme, est une bonne mesure, puisqu'elle permet au jeune délinquant de prendre conscience de la relation directe qui existe entre son acte délictueux et l'intervention du juge.
La mesure de réparation, quant à elle, présente l'avantage de pouvoir être prononcée avant le jugement. Elle constitue ainsi une réponse rapide et adaptée au délit, tout en réduisant le sentiment d'impunité et en replaçant la victime au centre du débat.
Dans ce domaine, les maisons de justice, qui sont en plein développement, ont elles aussi un grand rôle à jouer. Elles permettent en effet d'assurer une présence judiciaire de proximité et de répondre de manière adaptée au problème de la petite délinquance, notamment en associant différents partenaires aux professionnels de la justice, ainsi qu'en impliquant les parents.
Toutefois, nous devons prendre garde aux dérives possibles, car ces maisons de justice sont des lieux d'accès au droit, où il faut notamment veiller à ce que l'institution judiciaire ne soit pas désacralisée. Nous devons donc faire en sorte qu'elles restent l'apanage de professionnels, qui seuls sont susceptibles de rendre une justice de qualité.
Le problème du financement se pose par ailleurs avec la même acuité pour l'aide juridictionnelle, qui connaît un immense succès, puisque le nombre des dossiers a décuplé en dix ans.
Pourtant, là aussi, les moyens, qui atteignent 17 millions de francs, restent insuffisants. Or, si vous souhaitez réellement que les plus démunis puissent bénéficier eux aussi d'une défense de qualité et que chacun de nos concitoyens puisse se voir accorder une aide, vous vous devez d'accroître les crédits consacrés à l'aide juridictionnelle. Nous ne pouvons, madame le garde des sceaux, au motif de vouloir réduire les flux, faire entrer la justice dans une logique purement comptable.
J'aimerais à présent formuler quelques remarques sur la situation de l'administration pénitentiaire.
Dans ce domaine, malgré une hausse de 5,85 % par rapport au précédent budget, les moyens en personnels restent encore insuffisants, notamment au regard de la surpopulation carcérale qui, en dépit d'une stagnation du nombre des détenus depuis trois ans, reste importante. Elle accroît les risques de conflits entre détenus, et donc la charge de travail des personnels de surveillance, qui se trouve également alourdie par certaines réformes que vous mettez en place, par exemple l'instauration de la « troisième douche ».
Cette dernière réforme est bonne en soi, mais, une fois encore, sa mise en oeuvre exige des moyens supplémentaires en termes de personnels de surveillance, que les établissements, pour certains d'entre eux déjà en sous-effectif, ont du mal à dégager. Ne serait-il pas possible, pour le parc classique, de procéder à l'installation de douches dans les cellules, ce qui éviterait des mouvements supplémentaires et donc les problèmes de personnel afférents ?
Un autre problème important demeure celui du suivi social des détenus, en vue, notamment, de limiter la récidive. Permettez-moi à cet égard de prendre l'exemple de mon département.
En juin 1999, le service pénitentiaire de probation et d'insertion a été officiellement créé en Indre-et-Loire. Ainsi, le suivi social et l'insertion sont désormais assurés par un seul service départemental responsable des milieux fermé et ouvert. Ce service représente aujourd'hui le seul interlocuteur administratif pénitentiaire en matière d'accompagnement et d'insertion pour tous les partenaires départementaux, ce qui est une bonne chose.
J'ai pu personnellement constater la remarquable qualité du travail accompli par cette administration. Cependant, pour garantir véritablement l'efficacité du suivi par ce service des populations concernées, il convient de poursuivre avec détermination les efforts entrepris en matière de recrutement.
En effet, j'ai noté qu'un éducateur est chargé en permanence d'en moyenne 120 dossiers, ce qui est très lourd. Globalement, ce sont en permanence près de 1 000 dossiers par an qui sont gérés par huit travailleurs sociaux.
Par ailleurs, les observations que j'ai faites localement me conduisent à penser que le développement de la semi-liberté est essentiel, l'enfermement contribuant, dans la plupart des cas, à déstructurer plus encore la personnalité d'individus déjà en difficulté.
Pour les peines inférieures à un an d'emprisonnement, qui sont les plus nombreuses, le magistrat peut prononcer une mesure alternative à l'incarcération. La semi-liberté fait partie de ces mesures, or le recours à celle-ci est actuellement limité, faute de places, ce qui est particulièrement regrettable. Dans mon département, la maison d'arrêt de Tours possède quatorze places de détention en semi-liberté, ce qui est nettement insuffisant au regard des besoins. Alors que nous nous accordons tous aujourd'hui pour recommander un recours plus large aux mesures alternatives à l'incarcération, le manque de moyens conduit encore à limiter l'application du régime de la semi-liberté.
La construction d'un centre autonome en agglomération constituerait une réponse cohérente avec les ambitions affichées par les différents budgets de la justice depuis la mise en oeuvre du programme pluriannuel. Je souhaite, dans l'intérêt des personnes concernées, que cette requête rencontre votre approbation, madame le ministre, et je vous remercie par avance de bien vouloir prendre en compte les différents points que je viens d'évoquer. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Othily.
M. Georges Othily. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat doit aujourd'hui se prononcer sur les crédits du ministère de la justice. Si l'étude de chaque projet de budget est un moment important pour le Parlement, celui que nous examinons maintenant est essentiel, puisqu'il correspond à l'une des missions régaliennes de l'Etat. Qui plus est, cette fonction, en application de la théorie de la séparation des pouvoirs, est l'un des trois pouvoirs permettant à la démocratie d'exister.
Un Etat de droit ne peut, en effet, durer sans une justice indépendante et efficace. Or, en Guyane - et j'y reviendrai ultérieurement - la justice ne répond plus à ces principes.
Les crédits qui nous sont soumis, madame la garde des sceaux, connaissent une augmentation de 3,9 % dans le projet de loi de finances pour 2000. A ce stade du débat, il apparaît inutile de revenir sur l'ensemble des éléments que nous ont présentés, avec éloquence, nos éminents collègues, M. Haenel, Mme Derycke et M. Gélard. Je centrerai donc mon intervention sur deux points, à savoir la situation particulière de la justice en Guyane et les peines alternatives à l'emprisonnement.
J'évoquerai tout d'abord les défaillances dont souffre la justice guyanaise.
Si, en métropole, le système judiciaire connaît des maux, que la loi de programmation de 1995 a permis de commencer à atténuer - action d'ailleurs poursuivie par le Gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre - en Guyane la justice se trouve actuellement dans un état plus que lamentable.
Madame la garde des sceaux, un rapport vous a été remis, voilà quelques mois, dressant un tableau accablant de l'état de la justice guyanaise : au manque de moyens matériels s'ajoutent des insuffisances en matière de personnel.
En effet, on peut s'étonner que le budget de fonctionnement de la juridiction de Cayenne stagne depuis plus de huit années, alors que la population guyanaise, pour sa part, a crû d'un tiers au cours de la même période. Dans ce département d'outre-mer, l'on peut parler réellement, et le mot n'est pas trop fort, de justice sinistrée.
Madame la garde des sceaux, si le Gouvernement marque une attention particulière à la justice, notamment grâce à votre action, le département de la Guyane semble être oublié. Il faut pourtant impérativement donner à la justice guyanaise les moyens d'améliorer son fonctionnement au quotidien.
En ce sens, si l'on peut souhaiter une hausse des effectifs et des moyens en personnel, il apparaît urgent, parallèlement, de créer une cour d'appel autonome à Cayenne, car l'échelon actuel de Fort-de-France ne répond pas aux exigences d'une juridiction à double degré, son fonctionnement anormal étant fortement et depuis longtemps remis en cause.
En effet, les réquisitions sont souvent prises, en première instance et en appel, par le même substitut au procureur lorsque l'avocat général ne peut venir de Fort-de-France.
On peut proposer, au surplus, pour tenir compte des exigences de la population, la création d'un tribunal de grande instance dans la région ouest de la Guyane. Si une maison de justice a été créée à Saint-Laurent-du-Maroni, cela ne renforce en aucun cas la présence judiciaire.
Ainsi, madame la ministre, les départements d'outre-mer, partie intégrante de la République, doivent se voir appliquer les mêmes lois et connaître le même système juridictionnel que la métropole.
Ce n'est pas le cas actuellement, et la situation est telle, en Guyane, que des mesures urgentes doivent être arrêtées, car on assiste à des grèves à répétition au tribunal de Cayenne. Bientôt, les magistrats descendront dans la rue avec les membres du barreau. Ils l'ont d'ailleurs déjà fait voilà quelque temps, et ils risquent très certainement de récidiver avant la fin de l'année.
S'agissant des mesures alternatives à l'emprisonnement, je désirerais maintenant vous faire part de mes interrogations concernant le service pénitentiaire, ce pan de la justice que l'on dit souvent oublié. Dans la plupart des pays occidentaux, les effectifs des personnes emprisonnées ne cessent de croître. Pourquoi, dans les sociétés où la liberté est posée comme un principe fondamental, recourt-on toujours autant à la prison ? La prison y apparaît comme la sanction habituelle et efficace, et si la surpopulation carcérale n'est pas une caractéristique française, elle reste un problème préoccupant.
Aujourd'hui, après la suppression des peines corporelles, des travaux forcés et de la peine de mort, la privation de liberté est la peine la plus élevée dans l'échelle des peines. Alors que la gamme des petites peines a été élargie, les infractions les plus graves n'ont toujours, à l'heure actuelle, qu'une solution : la prison.
Parmi les peines les moins lourdes, on doit compter, depuis la loi du 19 décembre 1997, le placement sous surveillance électronique.
Ce système, comme l'a d'ailleurs rappelé mon éminent collègue Guy Cabanel, apparaît comme une alternative intéressante à l'emprisonnement. Je serais heureux, madame la ministre, que vous nous rappeliez, dans cet hémicycle, les lieux d'expérimentation qui ont été choisis par le Gouvernement. Surtout, je pense qu'il est grand temps de voir appliquer cette loi adoptée par le Parlement voilà bientôt deux ans. Je vous serais ainsi reconnaissant de me dire quand cette loi sera appliquée non plus sous forme d'expérimentation sur certains sites mais d'une manière générale et définitive.
Madame la ministre, vous pouvez compter sur notre vote favorable sur votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées du RDSE. - M. Haenel, rapporteur spécial, et Mme Derycke, rapporteur pour avis, applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier les rapporteurs des commissions qui ont apporté leur concours aux travaux parlementaires précédant le vote de la loi de finances.
Le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Haenel, a donné acte, et je l'en remercie, de « l'effort budgétaire réel » fait par le Gouvernement en faveur de la justice, ce qui justifie un avis favorable à l'adoption du budget de la justice. Il a également fait plusieurs observations importantes auxquelles je vais m'efforcer de répondre.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez regretté notamment que les services de la justice ne répondent pas aux questions que vous leur avez posées. Je déplore absolument ce constat, car j'ai demandé que le rapporteur spécial et plus généralement tous les parlementaires reçoivent le plus rapidement possible réponse à leurs questions. Vous avez d'ailleurs bien voulu reconnaître qu'il en était le plus souvent ainsi. J'aimerais donc que vous me fassiez connaître très précisément toutes les questions sans retour pour que vous puissiez recevoir, comme il est bien normal, les réponses qui vous sont dues.
Je voudrais aussi saluer la qualité des travaux des rapporteurs pour avis de la commission des lois.
Mme Derycke a fait une analyse approfondie et nuancée de la situation des juridictions et a rappelé l'importance des moyens nouveaux, aussi bien en personnel que pour l'équipement.
M. Gélard, tout en relevant les difficultés de traitement de la délinquance juvénile, a salué le changement d'échelle dans les moyens alloués à la protection judiciaire de la jeunesse.
M. Othily s'est attaché à décrire les progrès qui restent encore à réaliser par l'administration pénitentiaire pour remplir une mission dont il connaît la difficulté.
Sans entrer dans le détail des crédits et avant de répondre aux principales observations des rapporteurs, je voudrais rappeler brièvement les grandes lignes de l'action que j'ai entreprise à la tête de ce ministère.
Il s'agit, vous le savez, d'une politique d'ensemble qui, d'une part, engage des réformes très attendues par nos concitoyens et mobilise les moyens nécessaires pour les mettre en oeuvre et, d'autre part, inscrit dans la durée l'effort de modernisation et d'amélioration d'une justice au service des citoyens, conformément à la communication que j'ai présentée au conseil des ministres du 29 octobre 1997 et dont nous avons débattu ici même le 22 janvier 1998, débat qui donnait déjà, voilà deux ans, une vision globale des textes qui seraient soumis au Parlement.
Les réformes embrassent l'ensemble du système de la justice. Ce sont d'abord la réforme constitutionnelle et les projets de loi organique qui fondent l'organisation judiciaire ; ce sont aussi le projet de loi sur la présomption d'innocence, qui renforce les garanties du justiciable, le projet de loi sur la conduite de la politique pénale, qui garantit l'égalité et l'impartialité des poursuites ; ce sont enfin les réformes destinées à simplifier et à rendre plus efficace la justice au quotidien. Je crois que l'achèvement de ce vaste chantier législatif permettra de mieux garantir l'indépendance et l'impartialité de la justice que réclament les Français.
Mais nos concitoyens réclament aussi une amélioration de la justice au quotidien. C'est un objectif qui demande un travail de modernisation de longue haleine et une augmentation des moyens inscrits dans la durée. C'est ce qui est fait depuis trois ans.
Comme l'ont relevé les rapporteurs, le budget pour 2000 est un très bon budget. C'est d'autant plus remarquable qu'il vient après les deux exercices 1998 et 1999 qui avaient déjà été très favorables. C'est ainsi que, sur les trois premiers budgets de la législature, les crédits du ministère auront progressé de 3,4 milliards de francs, soit un gain de 14 %, et ses effectifs auront gagné près de 3 000 postes - 2 930 exactement.
Je veux remercier M. Fauchon de son hommage au travail réalisé dans mon ministère et par l'ensemble des juridictions. Je comprends évidemment que l'on puisse souhaiter encore plus et encore mieux ; mais on ne rattrape pas, vous le savez, de tels retards en un jour ni en un seul budget, et c'est bien par un effort persévérant et soutenu dans la durée que les améliorations que nous attendons seront obtenues.
Les créations de postes de magistrat seront au total de 422 en trois ans, soit un effort sans précédent depuis vingt ans. Par ailleurs, les effectifs d'auditeurs à l'Ecole nationale de la magistrature ont également été accrus dès 1998 pour passer de 140 à 185, ce qui augmentera les effectifs de la promotion qui sortira en 2002.
A ce sujet, je veux dire à M. Badinter que, actuellement, la part des magistrats recrutés par le concours de l'ENM représente 80 % des magistrats en fonction, 20 % provenant soit des concours exceptionnels, soit des recrutements latéraux.
Les deux concours exceptionnels de 1998 et 1999 représenteront 200 magistrats supplémentaires, la part de l'ENM, pour la même période, étant de 370 magistrats.
Quant à la commission d'avancement statuant pour l'intégration de magistrats, elle est aujourd'hui constituée uniquement de magistrats. J'envisage, dans la loi organique sur le CSM, de transférer cette compétence au Conseil supérieur de la magistrature rénové.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. L'effort en faveur de la protection judiciaire de la jeunesse est historique, avec 380 emplois et une augmentation de 16 % des crédits ordinaires.
M. le rapporteur spécial a bien voulu observer que « cet effort budgétaire ne se traduit pas encore par une amélioration du fonctionnement de la justice ».
S'agissant des délais de jugement, je crois qu'il est facile d'expliquer le décalage. Les statistiques de 1998, sur lesquelles portent les commentaires, reflètent les postes ouverts dans les budgets de 1997 et de 1998. L'augmentation forte des moyens en magistrats est intervenue en 1999 et sera surtout sensible l'an prochain. Chacun comprendra que les moyens attribués pour l'année prochaine ne peuvent évidemment avoir eu d'impact sur les statistiques de l'année dernière !
En outre, et comme le rappelle à juste titre M. le rapporteur spécial, les créations de poste ne se traduisent pas par des renforts au 1er janvier, du fait des délais liés aux mouvements de personnel. En général, les magistrats ne sont arrivés dans les juridictions qu'à l'automne 1999.
Vous avez également insisté, monsieur le rapporteur spécial, sur le problème important des vacances de postes de magistrat. Le seul chiffre sur lequel nous pouvons nous fonder est celui des vacances budgétaires. Sur ce plan, je confirme que nous sommes arrivés à un taux très bas, puisque, à la fin de 1999, seuls 46 postes budgétaires seront non utilisés sur 6 502 ouverts en loi de finances pour 1999, c'est-à-dire un taux de 0,7 %. Ce résultat est d'autant plus remarquable que nous sommes en période de créations de poste et qu'il faut à la fois combler les vacances antérieures et recruter pour pourvoir les nouveaux emplois.
Mais il faut aussi parler des absences physiques pour raisons diverses, car c'est bien cela qui est vécu dans les juridictions. Les mises à la disposition sont modestes - soixante-dix - et les décharges syndicales sont seulement au nombre de douze. Bien entendu, ce sont les absences pour maladie, les congés de maternité ou les congés pour formation qui comptent, et c'est la raison pour laquelle il convient de poursuivre l'effort de création de postes de magistrats placés auprès des chefs de cour. C'est en effet le système qui permet de faire face aux vacances temporaires.
Je ne rappelle pas cela pour éluder la question, mais parce que j'ai déjà indiqué à plusieurs reprises, y compris aux chefs de cour à qui j'ai présenté le budget pour 2000, que le travail des juridictions sera aussi jugé sur leur capacité à tirer profit des moyens qui leur sont accordés pour améliorer le service public. C'est un message qui, je crois, a été entendu.
M. Badinter a fort justement souligné la nécessité de maîtriser les flux en amont. Plusieurs dispositions vont dans ce sens : le développement des alternatives aux poursuites pénales, d'ailleurs souhaité également par M. Leclerc, les aides à la transaction, à la conciliation, la médiation civile, la réorientation vers les tribunaux d'instance de certains petits contentieux grâce à l'élévation de leur taux de compétence, la création des maisons de justice.
Je suis d'accord avec M. Badinter pour rappeler que toutes ces mesures ont pour objet d'éviter de mettre en oeuvre des procédures juridictionnelles lourdes pour des affaires qui peuvent être réglées plus rapidement et plus efficacement par d'autres voies.
Mme Derycke a eu raison d'appeler mon attention sur l'application de la loi du 18 décembre 1998, sur laquelle je peux donner les précisions suivantes : deux décrets, l'un sur le conseil départemental d'accès au droit, l'autre sur les maisons de la justice et du droit, ont été transmis au Conseil d'Etat et devraient être publiés très prochainement ; les autres sont en cours de consultation auprès des professionnels.
La réforme du juge de la détention va dans le même sens. En limitant le nombre de détentions provisoires, on limitera ainsi la surpopulation carcérale.
Par ailleurs, et comme le rappellent à juste titre Mme Derycke et M. Badinter, il faut clarifier le problème des délais. Je ne dirai pas, comme M. Fauchon, que les statistiques n'ont aucun sens ; je considère plutôt qu'il ne faut pas tout réduire à un seul chiffre. Nous avons besoin d'indicateurs plus fins et, l'an prochain, nous devrions enregistrer des progrès en ce sens. Je souhaiterais, en effet, que l'on essaye de ne pas tout mélanger.
Pour le premier degré de juridiction, c'est plutôt la stabilité qui prime et, sur longue période, les performances des tribunaux de grande instance se sont améliorées et sont plutôt bonnes, comparées à celles des autres tribunaux européens.
De plus, les moyennes nationales cachent une grande diversité de situation. La moitié des affaires civiles - ce sont elles qui intéressent au premier chef nos concitoyens - sont traitées en moins de six mois, et les trois quarts en moins de neuf mois. En général, ce sont les 10 % d'affaires très longues qui font augmenter les délais moyens des tribunaux.
Le vrai problème, comme l'ont parfaitement observé les rapporteurs et les orateurs, se pose dans les cours d'appel qui ont vu leur situation se dégrader très rapidement, les délais de jugement passant de treize mois et demi en 1993, à dix-sept mois et demi en 1998, et ce en l'espace de cinq ans.
C'est la raison pour laquelle j'ai mis en place un véritable plan d'urgence pour y faire face, en augmentant de 90 postes les effectifs globaux. Je regrette d'ailleurs qu'on ait tant attendu pour renforcer ces juridictions. Si l'on avait commencé à créer des postes plus tôt, en 1995, en 1996 et en 1997, les statistiques de 1998 seraient évidemment bien meilleures.
S'agissant, par exemple, de la cour d'appel d'Aix, qui est la plus surchargée de France et que M. Peyrat a mentionnée, je rappelle que son encombrement ne date pas d'hier : elle avait déjà, en 1994 et en 1995, des délais de jugement de vingt-trois mois, alors que la moyenne nationale était alors de quatorze mois. Qu'a-t-on fait à l'époque pour la remettre à flot ? Trois postes en 1996, zéro en 1997 ! Voilà comment s'expliquent les statistiques de 1998. En revanche, dès mon arrivée, j'ai pris des mesures d'urgence pour cette même cour : sept postes de magistrats en 1998, cinq en 1999, soit une augmentation de 10 % en deux ans, et une augmentation de 66 % du nombre des assistants de justice !
Je réfute ainsi les amalgames tendant à faire croire que tous les tribunaux de France sont en difficulté, alors que, comme chacun le sait, c'est dans quelques grandes juridictions et du fait de certains contentieux, notamment dans les chambres sociales, qu'est concentré l'essentiel des problèmes. Ce n'est pas une raison pour minorer ces derniers ; mais il faut voir la réalité en face.
Il existe effectivement un problème de contentieux social, que M. Robert Badinter a bien décrit : 60 % des décisions prud'homales font l'objet d'un appel, d'où un encombrement des juridictions du second degré.
L'an prochain, comme les années précédentes, les renforts seront affectés dans les juridictions les plus encombrées dans le cadre de contrats de gestion incluant des objectifs précis de réduction des stocks. Plus généralement, c'est un changement de culture qui doit s'installer et qui s'installe d'ailleurs peu à peu dans les juridictions, avec l'informatisation, la déconcentration, les contrats de gestion, le développement de l'évaluation, la maîtrise des frais de justice, les progrès sur le travail en équipe, l'accueil du public, la coopération avec les autres services de l'Etat.
Plusieurs orateurs ont rappelé la nécessité d'une réforme de la carte judiciaire. La suppression de trente-six tribunaux de commerce en juillet dernier a montré qu'on était enfin passé des discours aux actes.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est le plus facile !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Certes, mais encore fallait-il le faire ! Cela faisait deux cents ans que rien n'avait été fait à cet égard, monsieur Hyest !
Quant à la dernière réforme de la carte judiciaire, elle remonte à 1958 !
M. Jean-Jacques Hyest. C'est vrai !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Il y en a eu deux pendant notre siècle : celle de Poincaré et celle de Michel Debré, par ordonnance. Aujourd'hui, on ne pourrait plus faire la même chose !
M. Jean-Jacques Hyest. C'est dommage !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Par conséquent, les concertations engagées localement sur ces mesures ont permis d'ouvrir des discussions sereines et constructives sur la meilleure façon de concilier la bonne utilisation des moyens publics et les exigences de la justice de proximité, et je pense que nous progressons dans la bonne voie.
M. Bret a, sur ce sujet, souhaité connaître les dispositions prises pour accompagner la fermeture des greffes des tribunaux de commerce.
Les deux décrets concernant, d'une part, le reclassement des greffiers et, d'autre part, les modalités de conciliation pour le rachat des offices entre greffiers ont été publiés au Journal officiel du 7 décembre. Je rappelle qu'il s'agit de mesures d'accompagnement qui ne concernent que la situation personnelle des greffiers et qui n'interfèrent pas avec les mesures de carte judiciaire.
Le décret de suppression des tribunaux a été publié en juillet dernier. La préparation des opérations de transfert de registres et d'archives a donc été suffisante pour une entrée en vigueur au 1er janvier prochain.
M. Badinter a également attiré mon attention sur les difficultés que peuvent rencontrer certains conseils de prud'hommes du fait de l'insuffisance de leurs moyens administratifs. Je partage sa préoccupation et je rappelle que le projet de budget pour 2000 ouvre 145 postes de greffiers, après 122 en 1999, pour renforcer les juridictions qui en ont besoin.
J'indique à Mme Derycke, que c'est dans cette masse que sont prévus la trentaine de greffiers qui constitueront des renforts pour la gestion du PACS.
Il faut également mentionner les efforts faits pour les juridictions administratives, avec la création de 82 emplois dont 40 de magistrat, contre 61 dont 21 de magistrat en 1999.
Ces créations d'emplois sont complétées par un effort en investissement pour la construction du tribunal administratif de Cergy-Pontoise et des crédits informatiques pour le déploiement du logiciel Skipper lancé en 1999.
Sur la situation, il est vrai très particulière, de Saint-Pierre-et-Miquelon, je voudrais rassurer M. Hyest. Les risques d'incompatibilité des fonctions dus au faible nombre de magistrats ont été vus et traités. Je lui ferai parvenir sur ce point une réponse détaillée, expliquant comment fonctionne ce ressort en liaison avec la cour de Paris et grâce à des moyens de visioconférence, pour éviter les problèmes qu'il a évoqués.
Sur la Guyane, également mentionnée par MM. Hyest et Othily, le directeur des services judiciaires a en effet attiré mon attention sur les difficultés graves de ce département. J'envisage de saisir l'inspection des services judiciaires.
S'agissant du budget de la protection judiciaire de la jeunesse, M. Gélard, rapporteur pour avis, attire l'attention sur l'importance des moyens débloqués pour la justice des mineurs mais aussi sur l'augmentation considérable de l'activité des juges des enfants. Tout en soulignant cette mobilisation des juges, il rappelle qu'il y avait, à la fin de 1998, plus de 5 000 mesures de suivi en attente d'exécution dans le milieu ouvert.
Jean-Pierre Bel pour le groupe socialiste a également salué ce changement d'échelle dans les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse, moyens qui doivent profiter à tous les dispositifs gérés par cette direction.
Je partage ce souci d'apporter des réponses judiciaires multiples à la délinquance des mineurs et c'est un des axes forts de la politique que je mène depuis deux ans.
Les moyens sont, tout d'abord, affectés à l'une des priorités annoncées en 1999, l'ouverture de centres de placement immédiat et de centre éducatif renforcé. Sans crédits spécialement affectés à cet effet au budget 1999 et sans postes supplémentaires, 15 centres de placement immédiat auront pu être ouverts à la fin de cette année.. C'est un effort considérable qui a été demandé aux personnels de la protection judiciaire de la jeunesse. Nous en programmons vingt pour l'an prochain. De la même façon, vingt centres éducatifs ont été ouverts, toujours à moyens constants, à la fin de 1999. Nous avons déjà une vingtaine de nouveaux projets en préparation pour l'an 2000. L'examen des projets est évidemment un processus continu et nous apportons un grand soin à la validation des projets.
Dans les deux prochaines années, nous allons, vous l'avez souligné, opérer de très gros efforts de recrutement et de gestion de personnel, qui nous conduiront à un ajustement progressif de la carte des centres d'hébergement de toutes natures et à un renforcement des départements prioritaires.
Ces nouvelles structures sont indispensables mais elles ne doivent pas nous faire oublier les autres besoins : prises en charge en milieu ouvert, classes relais, mesures de réparation, qui passeront le cap de 10 000 en 1999 pour atteindre 12 000 l'année prochaine.
J'en viens maintenant aux observations de M. Othily sur l'administration pénitentiaire.
S'agissant du comportement de certains chefs d'établissement, votre commission a souligné ce que certains pouvaient avoir d'inadmissible. Vous avez insisté notamment sur les poursuites disciplinaires engagées à la maison d'arrêt de Beauvais et plus récemment à la centrale de Riom.
Je souhaite indiquer ici que, depuis mon arrivée au ministère, j'ai exercé l'action disciplinaire avec la plus grande fermeté. En 1998, 298 sanctions ont été prononcées. Ce chiffre était de 109 sur les six premiers mois de 1999.
En ce qui concerne la maison d'arrêt de Beauvais, je tiens à vous préciser que les faits ont été portés à la connaissance de la direction de l'administration pénitentiaire en décembre 1997. Immédiatement, une inspection a été ordonnée. Elle a procédé, de janvier à avril 1998, à des investigations et, le 7 mai, à l'audition du directeur de cet établissement, qui a été immédiatement suspendu.
A la suite d'un conseil de discipline, le chef d'établissement et un de ses collaborateurs ont été révoqués, quatre autres agents ont été exclus à titre temporaire. Ces décisions ont donc été prises bien avant que cette affaire ne soit portée à la connaissance du public, au printemps de 1999.
En ce qui concerne la centrale de Riom, les faits ont été portés à la connaissance de l'administration en juin 1999. Une inspection a été diligentée et a entendu dix-neuf personnes. Le 12 novembre 1999, le directeur de cet établissement et son adjoint ont été suspendus. Ils seront déférés devant le conseil de discipline très prochainement. Là aussi, les mesures ont été prises rapidement par l'administration et avant que les faits ne soient rendus publics, le 17 novembre.
De manière générale, je partage l'appréciation de votre commission des lois sur la faiblesse des contrôles dans les prisons. C'est pourquoi j'ai souhaité l'élaboration d'un code de déontologie, dont la commission nationale consultative des droits de l'homme est saisie, et qui sera transmis dans les prochaines semaines au Conseil d'Etat, pour avis.
Par ailleurs, le Conseil supérieur de l'administration pénitentiaire a apporté son concours précieux à la réflexion sur ces sujets.
J'ai souhaité passer à une phase décisionnelle et j'ai demandé à M. Canivet de présider une commission sur le contrôle extérieur des établissements pénitentiaires. Elle me rendra ses conclusions à la fin du mois de janvier prochain.
Les avancées n'ont ainsi jamais été aussi importantes que depuis ces deux dernières années. Croyez bien que je compte les poursuivre. Sur les suicides en détention, qui constituent un problème grave sur lequel - vous le savez - j'ai demandé une mobilisation constante des agents et des chefs d'établissements, je souhaite rappeler les évolutions récentes et les mesures prises.
Le nombre de suicide a connu une forte augmentation ces dernières années. En 1996, il a atteint le chiffre de 138, pour baisser à 125 en 1997 et à 118 en 1998. Il est de 114 à la fin du mois de novembre 1999. Dès mon arrivée, j'ai souhaité mettre en place un dispositif de prévention, présenté dans une circulaire du 28 mai 1998.
Ces mesures améliorent l'accueil des détenus arrivants, le suivi de ceux qui sont repérés par l'équipe médicale comme sensibles et les conditions de prise en charge dans les quartiers disciplinaires. A plusieurs reprises, des actions de mobilisation ponctuelle des agents ont été mises en place, notamment à Fleury-Mérogis, où cela a permis d'éviter plusieurs décès. Un bilan d'application de cette circulaire doit m'être communiqué en janvier prochain.
Mais j'ai souhaité, dès le budget pour 2000, renforcer encore le dispositif. Ainsi, 21 emplois sur les 386 créés, soit 5 % du total, seront consacrés à la prévention des suicides, dont 10 emplois de premier surveillant pour renforcer les équipes de nuit et 5 emplois de psychologue.
S'agissant des libérations conditionnelles, sujet qui a été évoqué par MM. Bel et Cabanel, je souhaite, comme vous le savez, une relance de la politique en la matière. J'ai demandé à M. Farge, président du Comité national de la libération conditionnelle, de présider un groupe de travail sur ce thème, qui doit me rendre ses conclusions en janvier 2000.
Votre commission, tout comme MM. Cabanel et Othily, a regretté les lenteurs de la mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique. Il est inexact de dire que le Gouvernement n'a pas pris d'initiative pour l'application de la loi du 19 décembre 1997. En 1998, 1 million de francs a été engagé afin de passer un marché pour des études de faisabilité qui sont en voie d'achèvement. La mise en place de ce dispositif est complexe d'un point de vue informatique et technique.
En 2000 seront validés les premiers dispositifs qui seront expérimentés dans les futurs centres pour peines aménagées, à Metz et aux Baumettes. En effet, il est apparu judicieux de rattacher ces expérimentations à des établissements conçus pour la prise en charge des courtes peines.
S'agissant des départs en retraite, comme vous le soulignez justement, le déficit entre les postes budgétaires et les agents présents est largement dû à la mise en place de la loi de 1996, qui a permis aux agents de surveillance de bénéficier d'une bonification, dans le calcul des annuités pour la retraite, à hauteur de un cinquième.
Cette mesure, qui représente une avancée importante pour les personnels de surveillance exercant un métier difficile, n'a pas été accompagnée, lors de son adoption, en 1996, des moyens budgétaires nécessaires pour faire face aux départs importants et anticipés en retraite qu'elle induit.
Aussi, lors de mon arrivée au ministère de la justice, j'ai dû prendre les mesures nécessaires pour pallier cette difficulté : autorisation de surnombre en cours d'année, pour permettre l'ouverture des concours, augmentation des recrutements d'élèves surveillants à l'Ecole nationale de l'administration pénitentiaire.
Ainsi, en 1999, l'administration pénitentiaire a recruté 968 élèves surveillants et ce chiffre devrait être proche de 2000, l'année prochaine.
C'est une montée en charge rapide qui pose des problèmes de gestion de concours et de mouvement de personnels très lourds, qui auraient pu être évités si l'augmentation des recrutements avait été effective dès l'adoption de la loi, en 1996. Nous avons malheureusement perdu deux ans...
Vous voyez, monsieur Bret, j'ai, comme vous, le souci de prendre en compte les attentes sociales des personnels de l'administration pénitentiaire auxquels nous devons une grande considération, car ils exercent leur métier dans les conditions extrêmement difficiles que nous connaissons tous, pour aller visiter régulièrement les prisons.
Enfin, tous les rapporteurs ont évoqué la question des investissements et de la consommation des crédits.
Sur ce sujet, je voudrais faire une remarque générale. Les cycles des opérations lourdes d'investissement sont de cinq à six ans. Entre la décision qui conduit à inscrire les premières autorisations de programme et les travaux, il s'écoule plusieurs années. Toute gestion budgétaire erratique, avec des « coups d'accordéon » qui retardent le lancement de certaines opérations, ce qui nécessite ensuite des rattrapages massifs, se traduit par des creux d'activité et des sous-consommations passagères des crédits. Le budget de la justice n'a pas manqué de « coups d'accordéon » ces dernières années, à l'exception toutefois des trois dernières ; j'espère que cela continuera.
La situation du programme pénitentiaire 4000 est, à cet égard, caricaturale. Annoncé en 1995 pour 2 milliards de francs, ce projet était au point mort en 1997, du fait de l'absence d'autorisations de programme inscrites. Il a donc fallu inscrire 1,5 milliard de francs sur deux budgets, 1998 et 1999, pour sauver l'opération.
Malgré cette célérité, les décaissements ne pourront pas intervenir de façon importante avant 2000 et 2001. Je trouve donc bien léger que l'on vienne me dire aujourd'hui que ces crédits ne sont pas consommés assez vite. Que ne les a-t-on inscrits plus tôt !
M. Philippe Marini. C'est toujours la faute des autres !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. De la même façon, il est plutôt incongru de demander au Gouvernement d'aller plus vite sur la rénovation du parc existant, alors qu'il lance un plan sans précédent pour traiter ce problème : un milliard de francs pour la rénovation des cinq grosses maisons d'arrêt et un milliard de francs pour la rénovation du parc classique entre 2000 et 2004.
Par ailleurs, 200 millions de francs d'autorisations supplémentaires ont été inscrites en loi de finances rectificative pour 1999 pour la construction d'une nouvelle prison à la Réunion. Cette opération s'ajoutera aux six établissements du programme 4000 déjà lancé.
Au total, ce sont plus de cinq milliards de francs qui seront consacrés aux investissements dans les établissements pénitentiaires dans les cinq prochaines années : c'est un effort unique pour l'investissement civil de l'Etat.
J'informe également M. Othily que les crédits pour la remise en état de la prison de Remiré-Montjoly en Guyane ont été débloqués en loi de finances rectificative pour 1999. Les travaux qui débuteront en début d'année prochaine devraient permettre un retour des détenus à l'été 2000.
S'agissant des services judiciaires, je rappelle que 805 millions de francs d'autorisations de programme nouvelles ont été inscrites en 2000 et que le lancement de l'opération de construction d'un nouveau tribunal de grande instance à Paris entre 2000 et 2006...
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. C'est bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... ajoutera plus de deux milliards de francs d'investissement à l'enveloppe prévisionnelle des investissements en province. Au total, nous mobiliserons près de six milliards de francs pendant la période 2000-2004 pour la rénovation et la construction des palais de justice.
M. Peyrat a évoqué les constructions nouvelles dans le Vaucluse, la prison du Pontet et le palais de justice d'Avignon. Je lui parlerai de Nice : 20 millions de francs en 1998 pour le tribunal de commerce, 220 millions de francs pour la rénovation et l'extension du tribunal de grande instance achevée en 1999 : 240 millions de francs en cinq ans, ce n'est pas rien ; validation prochaine de la maison de justice du quartier de l'Ariane dont le retard est dû à des problèmes locaux ; résolution des problèmes de recherche foncière par une nouvelle prison à Nice prévue dans le cadre d'une troisième tranche de constructions neuves. Je crois que l'on peut dire que Nice n'est ni oubliée ni défavorisée !
Pour conclure sur ce sujet, je voudrais donc rassurer le Sénat : la consommation des autorisations de programme est très bonne, en dehors du cas très particulier du programme 4000 de la pénitentiaire sur lequel je ne reviens pas et qui est en plein rattrapage du retard accumulé avant mon arrivée.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, des éléments qui démontrent l'ampleur du travail entrepris et l'importance des moyens mobilisés.
J'espère avoir répondu sinon à toutes, du moins à l'essentiel des observations ou des questions précises des différents orateurs, et je les en remercie. Dans le cas contraire, je ne manquerai pas de leur faire parvenir, s'ils le souhaitent, des compléments écrits.
Comme vous le demande votre commission des finances et dans un esprit de continuité, nécessaire au travail de longue haleine qui a été entrepris, je souhaite, naturellement, que le Sénat, comme il m'en a fait l'honneur les années précédentes, adopte les crédits du budget de la justice pour 2000. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le ministère de la justice et figurant aux états B et C.



ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 832 150 569 francs. »
Par amendement n° II-85, M. Paul Girod propose de réduire ces crédits de 11 000 000 francs.
L'amendement est-il soutenu ?...
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits du titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 34 115 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits du titre IV.

(Ces crédits sont adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 1 555 300 000 francs ;
« Crédits de paiement : 509 300 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre VI. - Autorisations de programme : 21 500 000 francs ;
« Crédits de paiement : 4 000 000 francs. »
Personne de demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits de figurant au titre VI.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 71 qui est rattaché pour son examen aux crédits affectés à la justice ainsi que l'amendement n° II-9 tendant à insérer un article additionnel après l'article 71.

Article 71



M. le président.
« Art. 71. - Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée de l'unité de valeur mentionnée au troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique est fixé, pour les missions achevées à compter du 1er janvier 2000, à 134 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 71.

(L'article 71 est adopté.)

Article additionnel après l'article 71



M. le président.
Par amendement n° II-9, M. Haenel, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 71, un article additionnel ainsi rédigé :
« A partir du 1er janvier 2000, il est établi dans chaque juridiction une comptabilité retraçant le détail des dépenses de frais de justice criminelle, correctionnelle et de police engagées par dossier d'instruction.
« Les comptabilités sont transmises chaque année pour contrôle aux présidents des chambres d'accusation compétentes.
« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Ces dernières années, les dépenses de frais de justice ont connu une croissance telle que vous avez vous-même, madame la ministre, fait procéder à une enquête sur les causes de leur forte augmentation.
Une grande partie de ces dépenses apparaissent inéluctables du fait de la technicité indéniablement croissante des affaires et du recours beaucoup plus systématique aux expertises et contre-expertise.
Toutefois, une liste de dysfonctionnements a été dressée, qui concerne principalement les dépenses de fourrières et de scellés ainsi que les réquisitions aux opérateurs de télécommunications, que l'on appelle plus prosaïquement les écoutes téléphoniques.
Toute une série de réformes a donc été mise en oeuvre pour éviter certains gaspillages.
Pour autant, à l'heure actuelle, les chefs de juridiction, les chefs de cour et les présidents de chambre d'accusation ne disposent d'aucun outil leur permettant d'exercer un suivi des dépenses de frais de justice engagées par chacun des cabinets d'instruction de leur ressort.
Cette situation apparaît d'autant plus paradoxale, madame la ministre, que vous avez multiplié depuis trois ans les actions d'évaluation des services.
Les dépenses de frais de justice ne doivent pas rester à l'écart de ces réformes, qui visent à améliorer, à moyens constants, la qualité des services rendus par une responsabilisation de tous les acteurs de la justice et par l'introduction de certaines réformes dans le domaine de l'organisation et de la méthode.
Pourtant, il n'existe aujourd'hui aucune comptabilité permettant de connaître le montant des dépenses de frais de justice engagées par un juge d'instruction pour une affaire déterminée. On pourrait dire la même chose du juge d'application des peines, du juge des enfants, etc.
C'est pourquoi la commission des finances propose, à titre expérimental, de rendre la tenue d'une telle comptabilité obligatoire. Cette proposition n'a pour objectif que d'évaluer le coût d'une instruction, de permettre certaines comparaisons entre affaires de nature similaire, de compléter et d'affiner le tableau de bord dont se dotent ou devraient se doter les chefs de cour et de juridiction, mais aussi les présidents de chambre d'accusation.
Cette proposition de la commission des finances s'inscrit dans la réflexion menée dans le cadre de l'Ecole nationale de la magistrature sur la responsabilisation des magistrats et sur la nécessaire évaluation à laquelle doit consentir tout magistrat pour ne pas se laisser gagner par l'excessive culture du précédent.
Mme l'avocat général Commaret a parfaitement mis en lumière la nécessité de procéder à cette évaluation dans une note de synthèse sur l'école. Ce rapport mériterait, madame la ministre, d'être porté à la connaissance de tous les magistrats pour cette raison, mais aussi pour d'autres raisons.
Tel est le sens, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, de cet amendement n° II-9 de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Cet amendement aborde un sujet extrêmement important : la maîtrise des frais de justice.
Il prévoit, selon son exposé des motifs, un dispositif tendant à éviter une dérive supposée du coût des instructions.
Je rappelle d'abord que la maîtrise des frais de justice est justement l'un des grands succès de la gestion de mon ministère en 1999.
Jusqu'en 1997, ces frais augmentaient de 8 % par an. Un premier ralentissement, limitant la hausse à 5 %, avait été obtenu en 1998. Mais, en 1999, nous avons obtenu la stabilisation, c'est-à-dire en réalité une baisse en francs constants : par rapport aux crédits votés, nous avons ainsi réalisé 100 millions de francs d'économies.
Ce résultat sans précédent a été obtenu grâce à une révision du coût de garde des scellés, une renégociation des tarifs de certaines prestations avec France Télécom, la mise en place d'un visa obligatoire des parquets sur les devis présentés par les experts, mais aussi et surtout grâce à une mobilisation des magistrats du fait de la mise en place de contrats de gestion.
Il s'agit de donner un supplément de crédits de fonctionnement aux cours d'appel qui ont fait des économies sur les frais de justice. Et cela marche ! En 1998, quinze cours d'appel sur trente-trois ont eu leur bonus ; en 1999, on est passé à vingt-deux. Certaines cours particulièrement mobilisées ont même obtenu des baisses de plus de 10 % des frais de justice.
Ces chiffres montrent que nous n'avons pas eu besoin de mesures de contrainte pour obtenir des résultats. La responsabilisation des prescripteurs de la dépense est une méthode qui s'est révélée plus efficace.
S'agissant de la mise en place d'une comptabilité analytique, je crois, comme vous, que nous devons et que nous pouvons progresser. Nous allons d'ailleurs nous en donner les moyens avec le déploiement progressif, à partir de 2000, du nouveau logiciel national des régies des tribunaux, regina.
Le ministère, comme vous le savez, achève le déploiement du logiciel gibus de gestion des crédits budgétaires déconcentrés, la prochaine étape est celle des dépenses des régies. J'observe que cet outil, lorsqu'il sera en place, nous permettra d'aller plus loin que ce que prévoit l'amendement, puisqu'il donnera le détail des dépenses pour toutes les procédures et pas seulement pour les instructions.
Telles sont les raisons pour lesquelles je ne suis pas favorable à ce que figure dans la loi une telle disposition, qui serait d'ailleurs inapplicable pour l'année 2000 et qui relève plus de la bonne gestion administrative que de la loi de finances.
Il est très important que, tout en mettant en place la modernisation informatique du ministère, nous montrions bien que nous ne souhaitons pas mélanger le contrôle juridictionnel et le contrôle administratif et financier.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement. Je reconnais certes que le problème posé doit être résolu, mais je préfère qu'il le soit par d'autres méthodes.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Cette question a été abordée en commission des finances à l'occasion de l'examen des crédits du ministère de la justice. Je ne disposais pas des précisions que vous venez de donner à l'instant, madame la ministre, et qui devraient, me semble-t-il, donner satisfaction à mes collègues.
Des efforts ont été faits dans ce domaine, mais il reste des progrès à faire. Il faudrait notamment que les présidents de chambre d'accusation soient invités à examiner plus attentivement la situation dans les cabinets d'instruction, et pas seulement dans le cadre de la « notice trimestrielle ».
Les jeunes juges d'instruction méritent d'être guidés et conseillés. On nous apprenait autrefois que le président de la chambre d'accusation était en quelque sorte le « tuteur » des juges d'instruction. Si mon maître, le professeur Vitu, tenait aujourd'hui de tels propos, les réactions seraient certainement diverses et variées !...
Quoi qu'il en soit, compte tenu des précisions que vous venez de donner, madame la ministre, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° II-9 est retiré.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances concernant la justice.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures.)

M. le président. La séance est reprise.

3

DEMANDE D'AUTORISATION
DE MISSIONS D'INFORMATION

M. le président. M. le président a été saisi :
- par M. Adrien Gouteyron, président de la commission des affaires culturelles, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information sur le fonctionnement de la Bibliothèque nationale de France ;
- par M. Jean François-Poncet, président de la commission des affaires économiques, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information en Italie sur l'évolution de la poste italienne et ses stratégies d'avenir ;
- par M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information en Iran afin de recueillir des informations sur l'évolution de la situation politique et économique de ce pays et sur les relations bilatérales entre la France et ce pays ;
- par M. Jacques Larché, président de la commission des lois, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information pour poursuivre la préparation de l'examen du volet institutionnel du projet de loi d'orientation relatif aux départements d'outre-mer et étudier les problèmes posés par l'élaboration d'un nouveau statut pour la collectivité territoriale de Mayotte.
Le Sénat sera appelé à statuer sur ces demandes dans les formes fixées par l'article 21 du règlement.

4

LOI DE FINANCES POUR 2000

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale.
Nous en sommes parvenus à l'examen des articles de la deuxième partie non joints aux crédits.

Articles de totalisation des crédits

M. le président. Tous les crédits afférents au budget général et aux budgets annexes étant examinés, le Sénat va maintenant statuer sur les articles qui portent récapitulation de ces crédits.
Le service de la séance a procédé à la rectification des états B et C, compte tenu des votes intervenus dans le cadre de la deuxième partie. Ces deux états ont été annexés au « dérouleur ».
J'appellerai successivement l'article 37, qui comporte le total des crédits du budget général ouverts au titre des services votés ; les articles 38 et 39, auxquels sont annexés les états B et C, qui récapitulent les crédits du budget général ouverts au titre des mesures nouvelles ; l'article 42, qui récapitule les crédits ouverts au titre des services votés des budgets annexes, et l'article 43, qui récapitule les crédits ouverts au titre des mesures nouvelles des budgets annexes.

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE Ier

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2000
I. - Opérations à caractère définitif
A. - Budget général

Article 37



M. le président.
« Art. 37. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au titre des services votés du budget général, est fixé à la somme de 1 940 475 324 397 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 37.

(L'article 37 est adopté.)

Article 38 et état B



M. le président.
« Art. 38. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles de dépenses ordinaires des services civils, des crédits ainsi répartis :

« Titre Ier : "Dette publique et dépenses en atténuation de recettes" 19 719 780 000 F
« Titre II : "Pouvoirs publics" 95 899 000 F



« Titre III : "Moyens des services" 4 099 228 579 F
« Titre IV : "Interventions publiques" - 3 293 423 594 F
« Total 20 621 483 985 F


« Ces crédits sont répartis par ministère conformément à l'état B annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état B annexé :

É T A T B
Répartition, par titre et par ministère,
des crédits applicables aux dépenses ordinaires des services civils (mesures nouvelles)

(En francs)

MINISTE`RES OU SERVICES


TITRE Ier

TITRE II

TITRE III

TITRE IV

TOTAUX
Affaires étrangères . . 86 450 797 - 153 934 707 - 67 483 910
Agriculture et pêche . . . . .

Aménagement du territoire et environnement : I. - Aménagement du territoire

. . . . .
II. - Environnement . . . . .
Anciens combattants . . . . .
Charges communes 19 719 780 000 95 899 000 2 391 440 000 - 696 806 000 21 510 313 000
Culture et communication . . 173 840 935 169 595 432 343 436 367

Economie, finances et industrie : I. - Economie, finances et industrie
. . . . .
II. - Industrie (ancien) . . . . .
III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat (ancien) . . . . .
Total . . . . .

Education nationale, recherche et technologie : I. - Enseignement scolaire
. . . . .
II. - Enseignement supérieur . . . . .
III. - Recherche et technologie . . . . .

Emploi et solidarité : I. - Emploi
. . . . .
II. - Santé et solidarité . . . . .
III. - Ville . . . . .

Equipement, transports et logement : I. - Services communs
. . . . .
II. - Urbanisme et logement . . . . .

III. - Transports : 1. Transports terrestres
. . . . .
2. Routes . . . . .
3. Sécurité routière . . . . .
4. Transport aérien et météorologie . . . . .
Sous-total . . . . .
IV. - Mer . . . . .
V. - Tourisme . . . . .
Total . . . . .
Intérieur et décentralisation . . 603 694 841 - 3 582 304 140 - 2 978 609 299
Jeunesse et sports . . - 4 723 269 155 001 000 150 277 731
Justice . . 832 150 569 34 115 000 866 265 569
Outre-mer . . - 8 307 562 780 688 860 772 381 298

Services du Premier ministre : I. - Services généraux
. . . . .
II. - Secrétariat général de la défense nationale . . 11 656 084 . 11 656 084
III. - Conseil économique et social . . 6 987 473 . 6 987 473
IV. - Plan . . 6 038 711 220 961

6 259 672

Total général 19 719 780 000 95 899 000 4 099 228 579 - 3 293 423 594 20 621 483 985


M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je voulais noter que l'article 38 et l'état B, ainsi que les articles suivants, tels qu'ils sont présentés, traduisent les votes du Sénat et les positions qui ont été prises, fascicule budgétaire par fascicule budgétaire.
Je ne ferai pas de remarques spécifiques à ce stade, si ce n'est pour marquer un désaccord de principe sur la méthode qui consiste à rejeter des budgets purement et simplement, sans proposer de mesures de remplacement. Cela ne me semble ni raisonnable ni responsable. J'aurai l'occasion de le dire ultérieurement, au moment du vote sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2000.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, votre remarque, nous l'avons bien entendue, mais peut-être pourriez-vous nous dire ce qu'une opposition peut faire dans le cadre de la loi organique du 2 janvier 1959 sur les lois de finances ? Vous savez fort bien que nous ne pouvons pas modifier les dépenses prévues par le Gouvernement pour les allouer différemment et vous savez fort bien que notre liberté d'initiative est extrêmement réduite par les textes qui concernent les finances publiques !
L'opposition a le devoir d'exprimer, sur les budgets qui lui sont proposés, les objectifs qui sont les siens. Nous avons examiné ces budgets de façon - je crois pouvoir le dire - extrêmement honnête par rapport à des critères que nous nous sommes donnés, qui sont des critères de bonne gestion.
Le maximum est-il fait pour cantonner les dépenses de fonctionnement ?
Le maximum est-il fait, en particulier, pour utiliser au mieux les ressources humaines de l'Etat ?
Le maximum est-il fait pour préparer l'avenir, notamment au travers des dépenses d'investissement ?
C'est au vu de ces critères que nous avons adopté des positions globales, en effet, budget par budget, et il me semble que l'actuel gouvernement est mal fondé à reprocher à la majorité sénatoriale ce qui se faisait autrefois, dans des configurations différentes, quand, par exemple, à l'Assemblée nationale, sous d'autres gouvernements, l'opposition refusait tout simplement de voter les budgets qui lui étaient soumis !
Faudrait-il croire, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous avons une carte forcée et que nous n'avons que le choix d'adhérer à vos démarches ? Je ne peux pas penser que telle est votre conception de la démocratie, en particulier de la démocratie parlementaire !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, non, bien sûr, je ne vous incite pas à croire cela ! J'étais en train de me dire qu'il existait une autre solution, qui pouvait consister comme cela a été le cas par le passé, à faire une contre-proposition,...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. C'est un compliment pour l'année dernière !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. ... avec des mesures d'économies.
Je fais donc une réserve sur la méthode, mais loin de moi l'idée de priver le Sénat du moyen de s'exprimer !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je voudrais dire à M. le secrétaire d'Etat que je prends comme un compliment pour le Sénat les propos qu'il vient de tenir ! Il a raison de dire que l'oeuvre qui a été accomplie au cours des deux années passées était très utile pour éclairer la nation sur le lien qui existe entre la dépense et l'impôt. En effet, si l'on n'agit pas sur les dépenses, l'impôt explose, comme il le fait actuellement.
Cela dit, nous avons mené cet exercice à deux reprises, comme l'a fort bien souligné voilà quelques instants M. le rapporteur général, et nous n'avions pas senti - mais peut-être n'avions-nous pas eu la chance de vous avoir au banc du Gouvernement - l'intérêt que vous avez témoigné voilà un instant et la reconnaissance, trop tardive, mais qui nous touche néanmoins, que vous venez de manifester envers le Sénat pour les lectures auxquelles il a procédé ces deux dernières années sur les projets de loi de finances. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Raymond Courrière. Vous n'avez pas tellement réussi !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 38 et de l'état B annexé, avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les lignes de l'état B.

(L'ensemble de l'article 38 et de l'état B est adopté.)

Article 39 et état C



M. le président.
« Art. 39. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles de dépenses en capital des services civils du budget général, des autorisations de programme ainsi réparties :

« Titre V : "Investissements exécutés par l'Etat" 5 888 900 F
« Titre VI : "Subventions d'investissement accordées par l'Etat" 20 299 097 F
« Titre VII : "Réparation des dommages de guerre" 0 F

« Total 26 187 997 F


« Ces autorisations de programme sont réparties par ministère conformément à l'état C annexé à la présente loi.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles des dépenses en capital des services civils du budget général, des crédits de paiement ainsi répartis :

« Titre V : "Investissements exécutés par l'Etat" 1 674 753 F
« Titre VI : "Subventions d'investissement accordées par l'Etat" 10 432 346 F
« Titre VII : "Réparation des dommages de guerre" 0 F

« Total 12 107 099 F


« Ces crédits de paiement sont répartis par ministère conformément à l'état C annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état C annexé :



É T A T C

Répartition, par titre et par ministère, des autorisations de programme et des crédits de paiement
applicables aux dépenses en capital des services civils
(Mesures nouvelles)

(En milliers de francs)

TITRE V


TITRE VI

TITRE VII

TOTAUX











MINISTÈRES OU SERVICES

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

de programme
de paiement
de programme
de paiement
de programme
de paiement
de programme
de paiement
Affaires étrangères 478 000 149 000 2 663 000 461 000 . . 3 141 000 610 000
Agriculture et pêche . . . . . . . .

Aménagement du territoire et environnement :

I. _ Aménagement du territoire . . . . . . . .
II. - Environnement . . 2 755 708 1 903 824 . . 2 755 708 1 903 824
Anciens combattants » » . . . . » »
Charges communes » » » » . . » »
Culture et communication 2 024 100 515 633 1 681 470 900 645 . . 3 705 570 1 416 278

Economie, finances et industrie :
I. _ Economie, finances et industrie . . . . . . . .
II. - Industrie (ancien) » » » » . . » »
III. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat (ancien) . . » » . . » »
Total . . . . . . . .

Education nationale, recherche et technologie :
I. _ Enseignement scolaire . . . . . . . .
II. _ Enseignement supérieur . . . . . . » .
III. _ Recherche et technologie . . . . . . » .

Emploi et solidarité :
I. _ Emploi . . . . . . . .
II. - Santé et solidarité . . . . . . . .
III. - Ville . . . . . . . .

Equipement, transports et logement :
I. _ Services communs . . . . » » . .
II. _ Urbanisme et logement . . . . . . . .

III. _ Transports : 1. Transports terrestres
. . . . . . . .
2. Routes . . . . . . . .
3. Sécurité routière . . . . . . . .
4. Transport aérien et météorologie . . . . . . . .
Sous-total . . . . . . . .
IV. - Mer . . . . . . . .
V. - Tourisme » » . . . . . .
Total . . . . » » . .
Intérieur et décentralisation 1 698 000 422 100 11 302 681 6 504 489 . . 13 000 681 6 926 589
Jeunesse et sports 40 000 27 500 66 550 54 550 . . 106 550 82 050
Justice 1 555 300 509 300 21 500 4 000 . . 1 576 800 513 300
Outre-mer 39 500 22 220 1 805 188 602 638 . . 1 844 688 624 858

Services du Premier ministre :
I. _ Services généraux . . . . . . . .
II. _ Secrétariat général de la défense nationale 50 000 25 000 . . . . 50 000 25 000
III. _ Conseil économique et social 4 000 4 000 . . . . 4 000 4 000
IV. _ Plan . . 3 000 1 200 . . 3 000

1 200

Total général 5 888 900 1 674 753 20 299 097 10 432 346 » » 26 187 997 12 107 099


M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 39 et de l'état C annexé, avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les lignes de l'état C.

(L'ensemble de l'article 39 et de l'état C est adopté.)

Articles 40 et 41

M. le président. Je rappelle que le Sénat a rejeté les articles 40 et 41, le mercredi 8 décembre 1999.

B. - Budgets annexes

Article 42

M. le président. « Art. 42. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2000, au titre des services votés des budgets annexes, est fixé à la somme de 104 997 323 988 F, ainsi répartie :

« Aviation civile 7 781 174 150 F
« Journaux officiels 887 068 999 F
« Légion d'honneur 107 285 110 F



« Ordre de la Libération 5 043 096 F
« Monnaies et médailles 1 337 052 633 F
« Prestations sociales agricoles 94 879 700 000 F

« Total 104 997 323 988 F. »


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 42 avec les chiffres sans modification résultant des votes précédemment émis par le Sénat.
M. Bernard Angels. Notre groupe votera cet article.
Mme Hélène Luc. Le groupe communiste et républicain et citoyen également.

(L'article 42 est adopté.)

Article 43

M. le président. « Art. 43. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles des budgets annexes, des autorisations de programme s'élevant à la somme totale de 86 687 000 F, ainsi répartie :

« Aviation civile »
« Journaux officiels 30 450 000 F
« Légion d'honneur 16 437 000 F



« Ordre de la Libération 0 F
« Monnaies et médailles 39 800 000 F

« Total 86 687 000 F


« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2000, au titre des mesures nouvelles des budgets annexes, des crédits s'élevant à la somme totale de 222 165 838 F, ainsi répartie :

« Aviation civile »
« Journaux officiels 334 831 001 F
« Légion d'honneur 16 628 723 F

« Ordre de la Libération - 83 498 F


« Monnaies et médailles 58 489 612 F
« Prestations sociales agricoles - 187 700 000 F

« Total 222 165 838 F. »


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 43 avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat.

(L'article 43 est adopté.)

Articles 44, 44 bis, 45 à 50

M. le président. Je rappelle que le Sénat a examiné les articles 44, 44 bis, 45 à 50 relatifs aux comptes spéciaux du Trésor le mardi 7 décembre 1999.

III. - Dispositions diverses

Article 51 et état E

M. le président. « Art. 51. - La perception des taxes parafiscales dont la liste figure à l'état E annexé à la présente loi continuera d'être opérée pendant l'année 2000. »
Je donne lecture de l'état E annexé :



É T A T E

Tableau des taxes parafiscales dont la perception est autorisée en 2000
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953 et au décret n° 80-854 du 30 octobre 1980)



LIGNES



Nomen-
clature

1999

Nomen-
clature

2000




NATURE DE LA TAXE

ORGANISMES BÉNÉFICIAIRES

ou objet


TAUX ET ASSIETTE

TEXTES

PRODUIT
pour l'année 1999
ou la campagne

1998-1999

ÉVALUATION
pour l'année 2000
ou la campagne

1999-2000






(En francs)
(En francs)

I. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRE^T ÉCONOMIQUE
A. - AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DES MARCHÉS ET DE LA QUALITÉ DES PRODUITS
RÉGULATION DES MARCHÉS AGRICOLES

AGRICULTURE ET PÊCHE

1 1 Taxe perçue pour le financement des actions du secteur céréalier.

Office national interprofessionnel des céréales (ONIC).
Institut technique des céréales et des fourrages (ITCF). Fonds de solidarité des céréaliculteurs et des éleveurs (FSCE).


Répartition entre organismes : ONIC 42,5 %, ITCF 49 %, FSCE 8,5 %.
Montant de la taxe/tonne de céréales livrées aux collecteurs agréés et producteurs grainiers (taux effectif) :
- blé tendre : 5,55 F/tonne ;
- orge : 5,55 F/tonne ;
- maïs : 5,55 F/tonne ;
- blé dur : 5,50 F/tonne ;
- seigle, triticale : 5,10 F/tonne ;
- avoine : 3,50 F/tonne ;
- riz : 5,20 F/tonne ; - sorgho : 3,50 F/tonne.

Décret n° 97-1265 du 29 décembre 1997. Arrêté du 31 août 1998.
324 578 000 301 875 000
2 2 Taxe acquittée par les fabricants et importateurs de conserves et de jus de tomate. Société nationale interprofessionnelle de la tomate (SONITO).
Tomates entrées en usine :
- 0,025 F/kg de tomates traitées sur contrats de culture ;
- 0,040 F/kg de tomates traitées hors contrats de culture.
Concentrés de tomate :
- 12 à 15 % d'extrait sec : 0,080 F/kg ;
- au-delà de 15 et jusqu'à 30 % : 0,180 F/kg ;
- au-delà de 30 et jusqu'à 90 % : 0,230 F/kg ;
- au-delà de 90 % : 0,600 F/kg.
Conserves de tomate : 0,030 F/kg.
Jus de tomate : 0,035 F/kg.
Tomates congelées ou surgelées : 0,030 F/kg. Pour le jus concentré : 0,060 F/kg.

Décret n° 97-814 du 3 septembre 1997. Arrêté du 1er décembre 1998.
1 550 000 1 550 000
3 3 Taxe acquittée par les producteurs de prunes séchées d'Ente, les transformateurs et importateurs de pruneaux. Bureau national interprofessionnel du pruneau (BIP).
Taux maxima :
- producteurs et transformateurs : 2,5 % du montant des ventes de prunes ;
- importateurs : 5 % de la valeur en douane des produits importés de pays tiers. Taux effectifs : 2 % et 4 %.

Décret n° 97-809 du 29 août 1997. Arrêté du 29 août 1997.
22 448 000
20 550 000

CONTRÔLE DE LA QUALITÉ DES PRODUITS ET SOUTIEN DES PÊCHES MARITIMES

AGRICULTURE ET PÊCHE

4 4 Taxe due annuellement par les professionnels en raison de leurs activités sur les produits selon leur nature, le tonnage et la valeur. Groupement national interprofessionnel des semences, graines et plants (GNIS). Le taux des taxes à percevoir au profit du groupement est fixé par arrêté dans la limite des maxima fixés par le décret institutif.

Décret n° 98-769 du 3 septembre 1998. Arrêté du 3 septembre 1998.

130 297 000 130 975 000
5 5 Taxe due par les armateurs de tous les navires armés à la pêche, par les premiers acheteurs de produits de la mer et les éleveurs de produits de culture marine (sauf conchyliculture). Comité national, comités régionaux et comités locaux des pêches maritimes et des élevages marins.
Armateurs : taxe sur la somme des salaires forfaitaires des équipages de navires armés ; taux maximum : 3 %.
Premiers acheteurs : taxe forfaitaire différenciée par tranche de salariés permanents, maximum 8 500 F. Eleveurs de cultures marines (hors conchyliculture) : taxe forfaitaire fixe, maximum 600 F.
Décret n° 96-1231 du 27 décembre 1996, modifié par le décret n° 97-1230 du 26 décembre 1997. 27 000 000 27 000 000
6 6 Taxe due par l'armateur et le premier acheteur pour les produits de la pêche maritime débarqués sur le territoire français ou dans un port étranger par un navire de pêche immatriculé en France, et par le déclarant en douane de produits de la mer importés en France hors CEE et AELE. Office national interprofessionnel des produits de la pêche maritime et de l'aquaculture (OFIMER).
Taxe payée par l'armateur et l'éleveur. Taxe assise sur la valeur hors taxe des produits débarqués ou commercialisés (sauf importations). Taux maximal :
- conserves, semi-conserves : 0,13 % ;
- autres produits de la mer : 0,15 %.
Taxe payée par le déclarant en douane. Taxe assise sur la valeur en douane des produits importés. Taux maximal :
- conserves, semi-conserves : 0,26 % ; - autres produits de la mer : 0,30 %.

Décret n° 98-1260 du 29 décembre 1998. Arrêté du 29 décembre 1998.
22 000 000
22 000 000

B. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLES

AGRICULTURE ET PÊCHE

7 7 Taxe sur la betterave destinée au financement et à la mise en oeuvre des programmes agricoles. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).

Taux maximum : 1,42 F/tonne de betteraves destinées à la production de sucre. Campagne 1998-1999 : 1,06 F/tonne.


Décret n° 95-1044 du 22 septembre 1995. Arrêté du 2 janvier 1998.
15 600 000 15 600 000
8 8 Taxe sur les céréales livrées par les producteurs aux organismes agréés pour la collecte et aux producteurs grainiers. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- blé tendre, orge : 5,20 F/tonne ;
- maïs : 4,75 F/tonne ;
- blé dur, riz : 4,75 F/tonne ;
- avoine : 3,40 F/tonne ; - sorgho, seigle, triticale : 2,75 F/tonne.

Décret n° 95-1042 du 22 septembre 1995. Arrêté du 2 juillet 1998.
140 000 000 140 000 000
. . . .
Campagne 1998-1999 :
- blé dur, riz : 2,85 F/tonne ;
- blé tendre, orge : 3,10 F/tonne ;
- maïs : 2,85 F/tonne ;
- avoine : 2,05 F/tonne ; - sorgho, seigle, triticale : 1,65 F/tonne.
. . .
9 9 Taxe sur les graines oléagineuses et protéagineuses. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- colza, navette : 4,10 F/tonne ;
- tournesol : 5 F/tonne ;
- soja : 2,65 F/tonne ;
- lupin doux : 1,75 F/tonne ;
- pois : 1,55 F/tonne ; - fèves et féveroles : 1,50 F/tonne.

Décret n° 95-1043 du 22 septembre 1995. Arrêté du 9 décembre 1998.
17 000 000 17 000 000
. . . .
Campagne 1998-1999 :
- colza, navette : 3,38 F/tonne ;
- tournesol : 4,14 F/tonne ;
- soja : 2,21 F/tonne ;
- lupin doux : 1,17 F/tonne ;
- pois : 1,04 F/tonne ; - fèves et féveroles : 0,97 F/tonne.
. . .
10 10 Taxes versées par les producteurs sur les graines oléagineuses. Centre technique interprofessionnel des oléagineux métropolitains (CETIOM).
Taux maxima :
- colza, navette, oeillette, ricin et carthame : 13 F/tonne ;
- tournesol, soja et lin oléagineux : 15 F/tonne.
Campagne 1998-1999 :
- colza, navette, oeillette, ricin et carthame : 10 F/tonne ;
- tournesol : 11,55 F/tonne ;
- soja : 11,30 F/tonne ; - lin oléagineux : 12 F/tonne.

Décret n° 96-118 du 8 février 1996. Arrêté du 18 août 1998.
55 000 000 52 000 000
11 11 Taxe sur certaines viandes.
Association nationale pour le développement agricole (ANDA).

Taux maxima :
- boeuf et veau, espèces chevaline, asine et leurs croisements : 48 F/tonne de viande ;
- porc : 44,50 F/tonne ;
- mouton, chèvre : 60 F/tonne ;
- lapin : 44 F/tonne ;
- poulet : 24,80 F/tonne ;
- poule de réforme : 72 F/tonne ;
- dinde : 30,60 F/tonne ; - canard, pintade, oie : 36 F/tonne.

Décret n° 95-1338 du 28 décembre 1995. Arrêté du 22 décembre 1998.
162 000 000 162 000 000
. . . .
Taux effectifs pour 1999 :
- boeuf et veau : 48 F/tonne ;
- porc : 36 F/tonne ;
- mouton : 46,50 F/tonne ;
- espèces chevaline et asine et leurs croisements : 48 F/tonne ;


- chèvre : 30 F/tonne ;
- lapin : 24,90 F/tonne ;
- poulet et coq non labellisés : 9,50 F/tonne ;
- poulet et coq labellisés : 17,75 F/tonne ;
- poule de réforme : 44,90 F/tonne ;
- dinde non labellisée : 11,80 F/tonne ;
- dinde labellisée : 23,75 F/tonne ;
- canard non labellisé : 18,25 F/tonne ;
- canard labellisé : 23,75 F/tonne ;
- pintade et oie non labellisées : 21,30 F/tonne ; - pintade et oie labellisées : 23,75 F/tonne.
. . .
12 12 Taxe versée par les entreprises intéressées. Centre technique de la salaison, de la charcuterie et des conserves de viande.
Taux maximum : - 3 du montant du chiffre d'affaires.

Décret n° 97-291 du 28 mars 1997. Arrêté du 28 mars 1997.
8 500 000 8 500 000
13 13 Taxe sur le lait de vache. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- lait : 0,45 F/hl ;
- crème : 9,15 F par 100 kilogrammes de matière grasse incluse dans la crème. Taux en vigueur : 0,41 F et 8,21 F.

Décret n° 95-1340 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
88 200 000 88 200 000
14 14 Taxe sur les vins. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- vin d'appellation d'origine contrôlée : 3 F/hl (en vigueur 2,80 F/hl) ;
- vin délimité de qualité supérieure : 1,95 F/hl (en vigueur 1,69 F/hl) ; - autres vins : 0,80 F/hl (en vigueur 0,77 F/hl).

Décret n° 95-1337 du 28 décembre 1995. Arrêté du 26 décembre 1997.
74 000 000 74 000 000
15 15 Taxe sur les produits de l'horticulture florale, ornementale et des pépinières non forestières. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 3 du montant des ventes hors taxes. Taux en vigueur : 1,5 .

Décret n° 97-1234 du 26 décembre 1997. Arrêté du 22 décembre 1998.
6 000 000 6 000 000
16 16 Taxes sur les fruits et légumes. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 4,6 des montants des ventes hors taxes réalisées par les producteurs. Taux en vigueur : 2,25 .

Décret n° 95-1341 du 28 décembre 1995. Arrêté du 22 décembre 1998.
35 000 000 35 000 000
17 17 Taxe forfaitaire payée par les exploitants agricoles. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 500 F. Taux en vigueur : 500 F.

Décret n° 95-1335 du 28 décembre 1995. Arrêté du 26 décembre 1997.
205 000 000 205 000 000
18 18 Taxe sur les laits de brebis et de chèvre. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- 0,9 F/hl pour le lait de brebis ;
- 0,58 F/hl pour le lait de chèvre.
Taux en vigueur :
- 0,70 F/hl pour le lait de brebis ; - 0,40 F/hl pour le lait de chèvre.

Décret n° 95-1336 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
1 800 000 1 800 000
19 19 Taxes destinées à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du comité. Comité des fruits à cidre et des productions cidricoles.
Taux maxima :
- 0,80 F/quintal de fruits à cidre et par 12,5 kg de concentrés desdits produits ;
- 1,10 F/hl de jus, de moûts, de cidre, de fermenté et de poiré ;
- 20 F/hl d'alcool pur de calvados, d'eaux-de-vie de cidre et de poiré. Taux en vigueur : 0,80 F, 1,10 F et 20 F.

Décret n° 97-808 du 29 août 1997. Arrêté du 1er septembre 1997.
1 900 000 1 900 000
20 20 Taxe destinée à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. Bureau national interprofessionnel du cognac.
Pour les livraisons par les viticulteurs : 1,19 F/hl de vin :
- pour les mouvements de place : 18,88 F/hl d'alcool pur de cognac ;
- pour les ventes à la consommation : de 43,69 F à 64,88 F/hl d'alcool pur de cognac selon l'importance des sorties ;
- pour les autres eaux-de-vie : 4,72 F/hl d'alcool pur ;
- pour les cognacs entrant dans des produits composés : 4,72 F/hl d'alcool pur de cognac ; - pour le pineau des Charentes : 4,72 F/hl d'alcool pur.

Décret n° 97-1087 du 25 novembre 1997. Arrêté du 25 novembre 1997.
36 554 000 33 800 000
21 21 Taxe destinée à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. Bureau national interprofessionnel des calvados et eaux-de-vie de cidre et de poiré.
Taux maxima :
- 32 F/hl d'alcool pur pour les calvados et les produits composés avec ces calvados ;
- 18 F/hl d'alcool pur pour les eaux-de-vie de cidre et de poiré et les produits composés élaborés avec ces eaux-de-vie. Taux en vigueur : 25 F et 12,40 F.

Décret n° 97-1231 du 21 décembre 1997. Arrêté du 26 décembre 1997.
670 000 670 000
22 22 Taxes dues par les négociants et récoltants sur les ventes de bouteilles de champagne. Comité interprofessionnel du vin de Champagne.
Taux maxima :
- 0,16 F/bouteille de vente départ hors taxe ; - récoltants manipulants : 0,11 F/bouteille.

Décret n° 97-1073 du 20 novembre 1997. Arrêté du 10 décembre 1998.
33 000 000 32 500 000
23 23 Taxe sur la valeur de la récolte. Comité interprofessionnel du vin de Champagne.
Taux maximum : 0,15 F/kg de récolte. Taux en vigueur : 0,12 F/kg pour la récolte 1998.

Décret n° 97-1073 du 20 novembre 1997. Arrêté du 20 décembre 1998.
34 000 000 41 500 000
24 24 Taxe destinée au financement des conseils, comités ou unions interprofessionnels des vins tranquilles.
Conseil, comités ou unions interprofessionnels des vins de :
Bordeaux ;
Appellation contrôlée de Touraine ;
La région de Bergerac ;
Appellation d'origine de Nantes ;
Anjou et Saumur ;
Côtes du Rhône et vallée du Rhône ;
Fitou, Corbières et Minervois ;
Côtes de Provence ;
Gaillac ;
Beaujolais ;
Alsace ; Bourgogne.

Taux maximum : 5 F. Taux en vigueur : 4,83 F.

Décret n° 97-1003 du 30 octobre 1997. Arrêté du 30 décembre 1997.
83 824 647 81 255 500
25 25 Taxe destinée au financement du comité. Comité interprofessionnel des vins doux naturels et vins de liqueur d'appellation d'origine contrôlée.
Taux maximum : 5 F. Taux en vigueur : 4,83 F.

Décret n° 97-1004 du 30 octobre 1997. Arrêté du 30 décembre 1997.
2 300 000 2 250 000
26 26 Taxe sur les plants de vigne. Etablissement national technique pour l'amélioration de la viticulture (ENTAV).
Montant maximum :
- 2,20 F pour 100 plants racinés (en vigueur : 1,80 F) ; - 7 F pour 100 plants greffés-soudés (en vigueur : 5,50 F).

Décret n° 97-154 du 18 février 1997. Arrêté du 8 octobre 1998.
4 600 000 5 200 000
27 27 Taxes versées par les vendeurs en gros de fruits et légumes. Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL).
Taux maximum : 1,8 prélevé sur le prix des ventes de fruits et légumes frais ou secs, et de plantes aromatiques à usage culinaire, réalisées par toute personne physique ou morale vendant en gros à tout détaillant. Taux en vigueur : 1,8 .

Décret n° 98-1258 du 29 décembre 1998. Arrêté du 29 décembre 1998.
84 000 000 85 000 000
28 28 Taxes versées par les entreprises intéressées. Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA). Taux maximum : 2 du montant des ventes et variable selon la nature des fabrications vendues.
Décret n° 96-1153 du 26 décembre 1996. Arrêté du 26 décembre 1996.
16 400 000 16 400 000
29 29 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Réunion.
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 7,14 F/tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 16 novembre 1998.
12 495 000 12 495 000
29 29 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Martinique.
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 2,68 F/tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1998.
559 650 559 650
29 29 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Guadeloupe.
Taux maximum : 7,65 F/tonne de canne entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires des cannes. Taux en vigueur : 7,08 F/tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1998.
4 566 600
4 566 600

C. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT INDUSTRIELS

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE

32 30 Taxe versée par les entreprises de la profession. Membres du groupement d'intérêt économique Comité de coordination des centres de recherche en mécanique.

Mécanique, soudage et décolletage : 0,112 % du CAHT (taux maximum : 0,112 %).
Construction métallique : 0,30 % du CAHT sur le marché communautaire et à l'export hors CEE (taux maximum : 0,34 %). Activités aérauliques et thermiques : 0,265 % du CAHT sur le marché communautaire et à l'export hors CEE (taux maximum : 0,32 %).


Décret n° 93-1370 du 29 décembre 1993 (modifié par le décret n° 96-146 du 22 février 1996, par le décret n° 97-680 du 30 mai 1997 et par le décret n° 98-130 du 27 février 1998).
Arrêté du 29 décembre 1997. Décret en cours de renouvellement.
381 000 000 385 000 000
33 31 Taxe versée par les industries de l'habillement. Comité de développement et de promotion du textile et de l'habillement. 0,11 % de la valeur des articles d'habillement fabriqués en France ou importés hors UE (taux maximum : 0,14 %).
Décret n° 96-82 du 24 janvier 1996.
Arrêté du 24 janvier 1996. Décret en cours de modification.
85 000 000 62 000 000
34 32 Taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel. Institut français du pétrole.
1,92 F/hectolitre de supercarburant (taux maximum : 2,20 F) ;
1,92 F/hectolitre d'essence (taux maximum : 2,20 F) ;
1,92 F/hectolitre de carburéacteur (taux maximum : 2,20 F) ;
1,92 F/hectolitre de gazole et fioul assimilé (taux maximum : 2,20 F) ;
1,10 F/hectolitre de fioul domestique (taux maximum : 2 F) ;
1,17 F/quintal de fioul lourd (taux maximum : 2 F) ;
1,92 F/hectolitre de pétrole lampant (carburant) (taux maximum : 2,20 F) ;
4,84 F/quintal de mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant (taux maximum : 4,84 F) ;
1,10 F/hectolitre de white-spirit (combustible domestique) (taux maximum : 2 F) ;
6 F/millier de m³ de gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant (taux maximum : 10 F) ; 0,40 F/millier de kWh de gaz naturel livré à l'utilisateur final par les réseaux de transport et de distribution (taux maximum : 1,10 F).

Décret n° 97-1182 du 24 décembre 1997.

Arrêté du 24 décembre 1997 fixant les montants de la taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel. Arrêté du 31 décembre 1997, modifié par l'arrêté du 25 janvier 1999 fixant le taux de prélèvement pour frais d'assiette et de perception opéré par la direction générale des douanes et droits indirects, sur la taxe perçue au profit de l'IFP.
1 222 000 000 1 224 000 000
36 33 Taxe à la charge des entreprises ressortissant au Centre d'études et de recherches du béton manufacturé et au Centre technique des tuiles et briques. Association Les Centres techniques des matériaux et composants pour la construction. Taux en vigueur : 0,35 % pour le béton (taux maximum : 0,35 %) et 0,40 % pour la terre cuite (taux maximum : 0,40 %).
Décret n° 95-1334 du 27 décembre 1995. Arrêté du 27 décembre 1995.
60 500 000 62 000 000
38 34 Taxe versée par les industriels et négociants de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. Comité professionnel de développement de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. 0,20 % du montant hors taxes des opérations de vente (taux maximum : 0,3 %).
Décret n° 96-148 du 22 février 1996. Arrêté du 22 décembre 1998.
48 000 000 50 000 000
39 35 Taxe versée par les entreprises de la profession. Comité de développement des industries françaises de l'ameublement. 0,20 % du montant hors taxes des ventes, y compris à l'exportation, sauf certains produits métalliques taxés à 0,15 % (taux maximum : 0,35 %).
Décret n° 96-147 du 22 février 1996.
Arrêté du 22 février 1996. Décret en cours de modification.
68 500 000 51 000 000
40 36 Taxe versée par les entreprises des professions.
Comité interprofessionnel de développement des industries du cuir, de la maroquinerie et de la chaussure. Centre technique du cuir, de la chaussure et de la maroquinerie.

0,18 % du montant hors taxes (taux maximum : 0,18 %) :
- des ventes, exportations comprises, de cuirs et peaux finis ou semi-finis, d'articles de maroquinerie, de voyage et de chasse, d'articles divers en cuir et similaires et d'articles chaussants ;
- des ventes de cuirs et peaux bruts aux utilisateurs métropolitains et à l'exportation, à l'exclusion des peaux brutes d'ovins. 55 % du produit de la taxe sont affectés au Centre technique du cuir, de la chaussure et de la maroquinerie.

Décret n° 96-78 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996.
50 000 000 49 000 000
41 37 Taxe parafiscale sur certaines huiles minérales. Comité professionnel de la distribution des carburants. 0,115 F/hl pour le supercarburant, l'essence et le gazole (taux maximum : 0,13 F).
Décret n° 97-201 du 5 mars 1997.
Arrêté du 5 mars 1997. Décret en cours de modification.
56 000 000
59 200 000

II. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRÊT SOCIAL

A. - PROMOTION CULTURELLE ET LOISIRS

CULTURE ET COMMUNICATION

43 38 Taxes sur les spectacles. Association pour le soutien du théâtre privé et Association pour le soutien de la chanson, des variétés et du jazz. 3,50 % des recettes brutes des théâtres et 3,50 % des recettes brutes des spectacles de variétés.

Décret n° 95-609 du 6 mai 1995.
Arrêté du 6 mai 1995. Décret et arrêté en cours de renouvellement.

73 000 000

75 000 000

B. - FORMATION PROFESSIONNELLE

ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

46 41 Taxe sur les salaires versée par les employeurs du secteur du bâtiment et des travaux publics. Comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics. Pour les entreprises dont l'effectif moyen de l'année au titre de laquelle la cotisation est due est de dix salariés ou plus : 0,16 % en règle générale, et 0,08 % pour les entreprises relevant du sous-groupe 34-8 de la nomenclature des entreprises, établissements et toutes activités collectives.

Décret n° 98-67 du 4 février 1998. Arrêté du 3 mars 1998.

246 900 000 246 900 000
. . . . Pour les entreprises dont l'effectif moyen de l'année au titre de laquelle la cotisation est due est inférieur à dix salariés : 0,30 % en règle générale, et 0,10 % pour les entreprises relevant du sous-groupe 34-8 de la nomenclature des entreprises, établissements et toutes activités collectives. . . .
47 42 Taxe versée par les entreprises de réparation des automobiles, cycles et motocycles. Association nationale pour la formation automobile. 0,75 % du montant total des salaires versés au personnel des ateliers et services de réparation.
Décret n° 98-19 du 8 janvier 1998. Arrêté du 8 janvier 1998.
101 000 000
103 000 000

ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT
III. - TRANSPORTS
1. Transports terrestres

48 43 Taxe additionnelle au droit de timbre des cartes grises des véhicules utilitaires pour le financement de la formation professionnelle dans les transports. Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports (AFT).

Véhicules pour le transport des marchandises dont le poids total autorisé en charge est :
- inférieur ou égal à 3,5 tonnes : 178 F ;
- supérieur à 3,5 tonnes et inférieur à 6 tonnes : 731 F ;
- supérieur à 6 tonnes et inférieur à 11 tonnes : 1 094 F. Véhicules automobiles de transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 11 tonnes, tracteurs routiers et véhicules de transport en commun de personnes : 1 642 F.


Décret n° 96-139 du 21 février 1996. Arrêté du 5 janvier 1999.
302 631 000 310 000 000


Je rappelle que le Sénat, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication, a adopté la ligne 39 concernant la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision et la ligne 40 concernant la taxe sur la publicité radiodiffusée et télévisée.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les lignes 1 à 38 et 41 à 43 de l'état E.

(Ces lignes sont adoptées.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 51 et l'état E annexé tel qu'il résulte des votes précédemment intervenus.

(L'ensemble de l'article 51 et de l'état E est adopté.)

Article 52 et état F

M. le président. « Art. 52. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état F annexé à la présente loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent des crédits évaluatifs autres que ceux limitativement énumérés à l'article 9 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. »
Je donne lecture de l'état F annexé :

É T A T F

Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits évaluatifs

NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.
TOUS LES SERVICES
33-90 Cotisations sociales. - Part de l'Etat.
33-91 Prestations sociales versées par l'Etat.
.

AGRICULTURE ET PÊCHE
44-42

Prêts à l'agriculture. - Charges de bonification.

.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT

.
II. - Environnement
44-30 Dations en paiement en application de la loi n° 95-1346 du 31 décembre 1995.
.

CHARGES COMMUNES
44-91 Encouragements à la construction immobilière. - Primes à la construction.
46-98 Réparation de préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience humaine de transfusés.
.

CULTURE ET COMMUNICATION
43-94 Dations en paiement faites en application de la loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968.
.

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
.
I. - Economie, finances et industrie
42-07 Application de conventions fiscales passées entre la France et des Etats étrangers.
44-97 Participation de l'Etat au service d'emprunts à caractère économique.
44-98 Bonfications d'intérêt dans le domaine de l'artisanat.
.

EMPLOI ET SOLIDARITÉ
.
I. - Emploi
46-71 Fonds national de chômage.
.

JUSTICE
46-12 Aide juridique.
.

AVIATION CIVILE
60-03 Variation des stocks.
65-04 Autres charges de gestion courante.
66-01 Pertes de change.
68-02 Dotations aux provisions.
.

JOURNAUX OFFICIELS
68-00 Dotation aux amortissements et aux provisions.
.

LÉGION D'HONNEUR
68-00 Amortissements et provisions.
.

MONNAIES ET MÉDAILLES
60-03 Variation des stocks (approvisionnements et marchandises).
68-00 Dotations aux amortissements et aux provisions.
83-00 Augmentation de stocks constatée en fin de gestion.
88-00 Utilisation et reprises sur provisions.
.

PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES
11-91 Intérêts dus.
11-92 Remboursements des avances et prêts.
37-94 Versement au fonds de réserve.
46-01 Prestations maladie, maternité, soins aux invalides versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille.
46-02 Prestations invalidité versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille.
46-03 Allocations de remplacement versées aux conjoints des non-salariés agricoles.
46-04 Prestations d'assurance veuvage versées aux non-salariés du régime agricole.
46-92 Prestations familiales versées aux non-salariés du régime agricole.
46-96 Prestations vieillesse versées aux non-salariés du régime agricole.
46-97 Contribution aux assurances sociales des étudiants et au régime d'assurance obligatoire des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (art. L. 381-8 et L. 722-4 du code de la sécurité sociale).
.

COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE
.

COMPTE D'EMPLOI DE LA TAXE PARAFISCALE AFFECTÉE AU FINANCEMENT DES ORGANISMES

DU SECTEUR PUBLIC DE LA RADIODIFFUSION SONORE ET DE LA TÉLÉVISION

04 Versement au compte de commerce « Liquidation d'établissements publics et d'organismes para-administratifs ou professionnels et liquidations diverses ».
.
COMPTE D'AFFECTATION DES PRODUITS DE CESSIONS DE TITRES, PARTS ET DROITS DE SOCIÉTÉS
01 Dotations en capital, avances d'actionnaire et autres apports aux entreprises publiques et aux établissements publics.
02 Achats de titres, parts et droits de sociétés.
03 Dépenses afférentes aux ventes de titres, de parts ou de droits de sociétés.
04 Versements à la Caisse d'amortissement de la dette publique.
05 Versements au Fonds de soutien des rentes.
06 Reversements au budget général.
.

COMPTES DE PRÊTS
.
AVANCES DU TRÉSOR CONSOLIDÉES PAR TRANSFORMATION EN PRÊTS DU TRÉSOR
.

COMPTES D'AVANCES DU TRÉSOR
.

AVANCES AUX DÉPARTEMENTS SUR LE PRODUIT DE LA TAXE DIFFÉRENTIELLE SUR LES VÉHICULES À MOTEUR
AVANCES AUX COLLECTIVITÉS ET ÉTABLISSEMENTS PUBLICS,

TERRITOIRES, ÉTABLISSEMENTS ET ÉTATS D'OUTRE-MER

03 Avances de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1953 (avances spéciales sur recettes budgétaires).
04 Avances au territoire de la Nouvelle-Calédonie (fiscalité Nickel).
.

AVANCES SUR LE MONTANT DES IMPOSITIONS REVENANT AUX DÉPARTEMENTS,
COMMUNES, ÉTABLISSEMENTS ET DIVERS ORGANISMES

AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

01 Avances aux budgets annexes.
02 Avances à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole au titre des besoins temporaires de préfinancement des dépenses communautaires.
03 Avances aux autres établissements publics nationaux et services autonomes de l'Etat.
04 Avances à des services concédés ou nationalisés ou à des sociétés d'économie mixte.
05 Avances à divers organismes de caractère social.


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 52 et de l'état F annexé.

(L'ensemble de l'article 52 et de l'état F est adopté.)

Article 53 et état G

M. le président. « Art. 53. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état G annexé à la présente loi, la liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel. »
Je donne lecture de l'état G annexé :

É T A T G

Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits provisionnels

NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
34-03 Frais de réceptions et de voyages exceptionnels.
42-31 Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires).
46-91 Frais de rapatriement.
.

ANCIENS COMBATTANTS
46-03 Remboursements à diverses compagnies de transports.
46-27 Soins médicaux gratuits et frais d'application de la loi du 31 mars 1919 et des lois subséquentes.
.

CHARGES COMMUNES
46-02 Secours aux victimes de sinistres et calamités.
.

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
.
I. - Economie, finances et industrie
31-96 Remises diverses.
37-44 (Ligne supprimée.)
37-61 Dépenses et remboursements supportés par la France au titre de l'infrastructure pétrolière.
.

INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION
34-03 Frais de réception et de voyages exceptionnels.
37-61 Dépenses relatives aux élections.
41-61 Financement des partis et groupements politiques (lois n° 88-227 du 11 mars 1988 et n° 90-55 du 15 janvier 1990).
46-91 Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques.
.

JUSTICE
37-23 Services pénitentiaires. - Dépenses de santé des détenus.
37-33 Services de la protection judiciaire de la jeunesse. - Remboursement des prestations effectuées par le secteur habilité ou conventionné.
37-61 Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. - Dépenses relatives aux élections.
.

OUTRE-MER
34-03 Frais de réceptions et de voyages exceptionnels.
34-42 Service militaire adapté. - Alimentation.
46-93 Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques.


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 53 et de l'état G annexé.

(L'ensemble de l'article 53 et de l'état G est adopté.)

Article 54 et état H

M. le président. « Art. 54. - Est fixée pour 2000, conformément à l'état H annexé à la présente loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits pouvant donner lieu à report, dans les conditions fixées par l'article 17 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. »
Je donne lecture de l'état H annexé :

É T A T H

Tableau des dépenses pouvant donner lieu à reports de crédits de 1999 à 2000

NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.

BUDGETS CIVILS

AFFAIRES ÉTRANGÈRES

41-03 Promotion de Strasbourg, capitale parlementaire européenne.
41-43 Concours financiers.
42-26 Transport et dépenses diverses au titre de l'aide alimentaire.
42-29 Coopération militaire et de défense.
42-31 Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires).
42-37 Autres interventions de politique internationale.
.

AGRICULTURE ET PÊCHE
44-36 Pêches maritimes et cultures marines. - Subventions et apurement FEOGA.
44-41 Amélioration des structures agricoles.
44-43 Aide alimentaire et autres actions de coopération technique.
44-53 Interventions en faveur de l'orientation et de la valorisation de la production agricole.
44-55 Primes au maintien du troupeau des vaches allaitantes.
44-70 Promotion et contrôle de la qualité.
44-80 Amélioration du cadre de vie et aménagement de l'espace rural.
44-84 Contrats territoriaux d'exploitations agricoles.
46-33 Participation à la garantie contre les calamités agricoles.
.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT

I. - Aménagement du territoire

44-10 Fonds national d'aménagement et de développement du territoire.
.

ANCIENS COMBATTANTS
46-31 Indemnités et pécules.
.

CULTURE ET COMMUNICATION
43-92 Commandes artistiques et achats d'oeuvres d'art.
.

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE

I. - Charges communes

41-25 Plan d'urgence en faveur des lycées.
44-02 Réaménagement de charges d'endettement.
46-02 Secours aux victimes de sinistres et calamités.
46-90 Versements à divers régimes obligatoires de sécurité sociale.
46-91 Français rapatriés d'outre-mer. - Moratoire des dettes, indemnisation des biens, remise des prêts de réinstallation, financement des prêts de consolidation.
47-92 Contribution de l'Etat à l'amélioration des retraites des rapatriés.
.
II. - Services communs et finances
42-80 Participation de la France à diverses assemblées et expositions internationales.
44-42 Interventions diverses.
44-84 Subventions pour l'expansion économique à l'étranger et coopération technique.
44-85 Modernisation des organismes de soutien au commerce extérieur. - Crédit à répartir.
.
III. - Industrie
46-93 Prestations à certains retraités des mines et des industries électriques et gazières.
.

EMPLOI ET SOLIDARITÉ

I. - Emploi

43-70 Financement de la formation professionnelle.
44-01 Programme « nouveaux services-nouveaux emplois ».
44-70 Dispositifs d'insertion des publics en difficulté.
44-77 Compensation de l'exonération des cotisations sociales.
44-79 Promotion de l'emploi et adaptations économiques.
.
II. - Santé et solidarité
43-32 Professions médicales et paramédicales. - Formation et recyclage.
46-03 Prestations sociales et actions culturelles en faveur des rapatriés.
46-92 Contribution de l'Etat au financement de l'allocation aux adultes handicapés.
47-16 Action interministérielle de lutte contre la toxicomanie.
.
III. - Ville
46-60 Interventions en faveur de la ville et du développement social urbain.
.

ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT

II. - Urbanisme et logement

46-50 Participation de l'Etat aux fonds de solidarité pour le logement et aux fonds d'aides aux accédants en difficulté. - Subventions aux associations logeant des personnes défavorisées.
.

III. - Transports

2. Routes

44-42 Subventions intéressant la gestion de la voirie nationale (dépenses déconcentrées).
.
3. Sécurité routière
44-43 Sécurité et circulation routières. - Actions d'incitation.
.
IV. - Mer
44-34 Ports autonomes maritimes. - Participation aux dépenses.
45-35 Flotte de commerce. - Subventions.
46-37 Gens de mer et professions de la filière portuaire. - Allocations compensatrices.
.

INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION
41-55 Dotation de compensation aux régions des pertes de recettes fiscales immobilières.
41-56 Dotation générale de décentralisation.
41-57 Dotation générale de décentralisation de la collectivité territoriale de Corse.
.

JUSTICE
41-11 Subventions en faveur des collectivités.
46-01 Subventions et interventions diverses.
.

OUTRE-MER
46-01 Actions d'insertion en faveur des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion dans les départements d'outre-mer.
.

BUDGET MILITAIRE

DÉFENSE

36-01 Subventions de fonctionnement et participation aux dépenses de fonctionnement de divers organismes.
.

BUDGETS ANNEXES

AVIATION CIVILE

60-00 Achats et services.
61-01 Dépenses d'informatique et de télématique.
63-00 Impôts, taxes et versements assimilés.
66-00 Charges financières.
.
JOURNAUX OFFICIELS
60-01 Achats.
61-02 Fonctionnement informatique.
.
LÉGION D'HONNEUR
60-00 Achats.
61-02 Informatique.
.
ORDRE DE LA LIBÉRATION
60-00 Matériel et entretien immobilier.
.
MONNAIES ET MÉDAILLES
60-01 Achats.
.

COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE

. Fonds national pour le développement des adductions d'eau.
. Fonds forestier national.
. Soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie audiovisuelle.
. Fonds de secours aux victimes de sinistres et calamités.
. Compte d'emploi de la taxe parafiscale affectée au financement des organismes du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la télévision.
. Fonds national du livre.
. Fonds national pour le développement du sport.
. Fonds national des haras et des activités hippiques.
. Fonds national pour le développement de la vie associative.
. Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France.
. Actions en faveur du développement des départements, des territoires et des collectivités territoriales d'outre-mer.
. Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés.
. Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien.
. Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables.
. Indemnisation au titre des créances françaises sur la Russie.
. Fonds de modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale.
.
COMPTES DE PRÊTS
. Prêts du Fonds de développement économique et social.
. Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social.
. Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de dettes envers la France.
. Avances du Trésor consolidées par transformation en prêts du Trésor.

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 54 et de l'état H annexé.

(L'ensemble de l'article 54 et de l'état H est adopté.)

Articles 55 et 55 bis

M. le président. Je rappelle que le Sénat a adopté les articles 55 et 55 bis le samedi 11 décembre, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication.

Articles non rattachés

M. le président. Le Sénat va examiner maintenant les articles de la deuxième partie du projet de loi de finances qui n'ont pas encore été discutés lors de l'examen des crédits, c'est-à-dire ceux que nous appelons « les articles non rattachés ».

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES
« A. _ Mesures fiscales »

Article 56



M. le président.
« Art. 56. _ I. _ Il est inséré, dans le livre des procédures fiscales, un article L. 52 A ainsi rédigé :
« Art. L. 52 A . _ Les dispositions de l'article L. 52 ne s'appliquent pas aux personnes morales ni aux sociétés visées à l'article 238 bis M du code général des impôts à l'actif desquelles sont inscrits des titres de placement ou de participation pour un montant total d'au moins 50 millions de francs. »
« II. _ Les dispositions du I s'appliquent aux contrôles pour lesquels la première intervention sur place a lieu à compter du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° II-86, M. Marini, au nom de la commission, propose, dans le texte présenté par le I de cet article pour l'article L 52 A du livre des procédures fiscales, de supprimer les mots : « ni aux sociétés visées à l'article 238 bis M du code général des impôts ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 56 concerne la durée des vérifications fiscales de comptabilité applicables à certaines entreprises. Cette durée est limitée à trois mois pour les petites entreprises, et cet article vise à exclure du dispositif certaines catégories de sociétés. Cela nous sembler aller dans le bon sens. Mais il nous semble nécessaire d'apporter une précision supplémentaire. C'est l'objet de notre amendement.
Nous souhaitons revenir au texte initial du Gouvernement, c'est-à-dire maintenir une durée maximale de vérification de comptabilité de trois ans pour les sociétés en participation visées à l'article 238 bis M du code général des impôts.
En effet, ces société sont, en règle générale, des sociétés fiscalement transparentes. Si l'on adoptait l'article en l'état, l'allongement des délais de vérifications s'étendrait de manière contestable à des contribuables qui ne devraient pas être compris dans le champ d'application de cette mesure, c'est-à-dire aux détenteurs de parts des sociétés dites en participation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, la précision que vous proposez de supprimer a été apportée par un amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Le Gouvernement s'était alors rangé aux voeux de vos collègues députés, qui ont estimé cette précision nécessaire.
Elle me paraît d'ailleurs toujours utile pour éviter toute incertitude dans l'interprétation du code général des impôts à la lumière du code civil. En tout cas, il est parfaitement dans l'esprit du texte d'appliquer aux sociétés en participation la même règle qu'aux holdings.
Dans ces conditions, je ne puis que suggérer le retrait de cet amendement. A défaut, je serai obligé de m'y opposer.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Concernant les holdings, c'est-à-dire des sociétés complexes, la mesure se comprend. En revanche, s'agissant de sociétés en participation, qui, je le répète, pour la plupart d'entre elles sont des sociétés transparentes fiscalement, aller rechercher chez les porteurs de parts les responsabilités fiscales en s'exonérant du délai de trois mois semble excessivement pénalisant. Sociétés en participation et sociétés holdings, lorsque les sociétés holdings sont bien des sociétés de capitaux classiques, ne peuvent être assimilées.
Je maintiens donc l'amendement n° II-86.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-86, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 56, ainsi modifié.

(L'article 56 est adopté.)

Article 57



M. le président.
« Art. 57. _ I. _ Après le premier alinéa de l'article 99 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le livre-journal mentionné au premier alinéa comporte, quelle que soit la profession exercée, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires. »
« II. _ Le 4 de l'article 102 ter du même code est complété par les mots : " , l'identité des clients ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires ".
« III. _ Le deuxième alinéa de l'article 1649 quater G du même code est supprimé.
« IV. _ Il est inséré, dans le livre des procédures fiscales, un article L. 13-0 A ainsi rédigé :
« Art. L. 13-0 A . _ Les agents de l'administration des impôts peuvent demander toutes informations relatives à l'identité des clients ainsi qu'au montant, à la date et la forme du versement afférent aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel en vertu des dispositions de l'article 226-13 du code pénal. Ils ne peuvent demander de renseignement sur la nature des prestations fournies par ces personnes. »
« La présentation spontanée par ces personnes de documents comportant d'autres informations que celles mentionnées au premier alinéa n'affecte pas les procédures d'imposition mises en oeuvre par l'administration. »
« IV bis. _ Dans l'article L. 86 A du livre des procédures fiscales, les mots : " par l'adhérent d'une association agréée " sont supprimés et les mots : " cet adhérent " sont remplacés par les mots : " le contribuable ".
« V. _ S'agissant du droit de contrôle, les dispositions du présent article s'appliquent aux opérations enregistrées à compter du 1er janvier 2000. »
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Monsieur le président, je vous propose, pour éviter des redites et alléger la tâche de tout le monde, de renoncer à ce droit de parole au bénéfice des deux amendements que j'ai déposés sur l'article et que vous me permettrez sans doute de présenter ensemble.
M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° II-12 rectifié est présenté par MM. Murat, Bernard, Bizet, Blanc, Braun, Braye, Calmejane, Ceccaldi-Raynaud, Cornu, de Cuttoli, Darcos, Dejoie, Delong, Descours, Dufaut, Fournier, Giraud, Gruillot, Larcher, Lassourd, Laurin, Leclerc, Le Grand, Lemaire, Michaux-Chevry, Neuwirth, Ostermann, Peyrat, de Richemont, Rufin, Taugourdeau, Vasselle, Vial, Besse et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° II-16 est déposé par M. Arthuis et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° II-77 est présenté par M. Trucy et les membres du groupe des Républicains et indépendants.
Tout trois tendent à supprimer l'article 57.
Les trois suivants sont également identiques.
L'amendement n° II-44 est déposé par M. Marini au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-17 est présenté par M. Arthuis et les membres du groupe de l'Union centriste.
L'amendement n° II-78 est déposé par M. Trucy et les membres du groupe des Républicains et indépendants.
Tous trois tendent à supprimer le IV de l'article 57.
La parole est à M. Braun, pour défendre l'amendement n° II-12 rectifié.
M. Gérard Braun. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 57, qui, d'une part, enfreint le secret médical et qui, d'autre part, est contraire à une directive européenne devant entrer en vigueur le 1er mars prochain et disposant que le secret professionnel est un droit inaliénable.
Un arrêt du Conseil d'Etat de 1998 a même réaffirmé le principe du respect de ce secret, estimant que tout redressement fiscal après un contrôle ayant enfreint ce principe était nul et non avenu.
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° II-16.
M. Claude Huriet. Bien évidemment, je souscris aux arguments qui viennent d'être exposés, non seulement quant au rappel de la jurisprudence du Conseil d'Etat, jurisprudence constante, mais aussi quant aux conséquences que pourrait avoir ce qui nous apparaît comme une manière de contourner le principe fondamental et jamais contesté la préservation du secret médical.
M. le président. La parole est à M. Trucy, pour défendre les amendements n° II-77 et II-78.
M. François Trucy. L'article 57 étend à toutes les professions médicales la faculté donnée à l'administration fiscale de connaître l'identité des clients des membres des professions libérales, ainsi que la date du versement des honoraires. A ceux qui s'émurent - et ils furent nombreux - de cette entorse au secret médical à des fins fiscales, il fut répondu, dans la presse et ailleurs, qu'après tout il ne s'agissait que d'étendre une procédure qui existait déjà, ne serait-ce qu'à l'égard des praticiens médicaux qui adhèrent à des centres de gestion agréés.
Ce cas existe effectivement, mais il est un élément qui devrait rassurer pleinement l'administration fiscale : le fait que, depuis de très nombreuses années l'ensemble des honoraires des praticiens, quelle que soit leur spécialité, fait l'objet d'un relevé du SNIR - Syndicat national interrégimes - en fin d'année. Il y a belle lurette que les déclarations des médecins sont conformes à ces documents et collent donc à la réalité !
J'ajouterai qu'il ne suffit pas de ne donner que le noms, les actes, les adresses et les dates de versement des clients pour penser que le secret médical est respecté car si l'on va dans un centre de cancérologie, ce n'est pas pour soigner une grippe ! Si l'on va dans un centre de traitement des maladies sexuellement transmissibles, ce n'est pas pour traiter une angine ! Aller dans certains endroits et donner son nom pour qu'il figure dans un relevé, c'est pratiquement permettre son identification, et donc permettre le viol du secret professionnel.
C'est pourquoi notre groupe présente deux amendements : l'un visant à supprimer l'article 57 et l'autre, par défaut, tendant à supprimer le paragraphe IV de cet article.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° II-44.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 57 vise deux objectifs qu'il ne faut pas confondre.
En premier lieu, il tend à aligner les obligations comptables de tous les titulaires de bénéfices non commerciaux soumis au secret professionnel, en second lieu, il comporte des innovations par rapport au régime préexistant. Ce sont ces innovations que nous critiquons tout particulièrement.
Sur le premier point, je rappellerai que tous les membres des professions libérales sont tenus de remplir un livre-journal servi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles.
En revanche, seuls les professionnels adhérant à une association de gestion agréée doivent établir des documents comptables qui comprennent, conformément à l'article 1649 quater G du code général des impôts, quelle que soit la profession exercée, l'identité du client ainsi que le montant, la date et la forme du versement des honoraires.
La commission n'est pas opposée à l'extension des obligations comptables actuellement applicables aux adhérents d'associations de gestion agréées à tous les membres des professions libérales soumis à la règle du secret professionnel.
Mais l'article comporte une disposition infiniment plus critiquable en son paragraphe IV, qui vise à autoriser l'administration fiscale à accéder aux informations et aux documents relatifs à l'identité des clients, à la date et à la forme du versement afférents aux recettes de toute nature perçues par les personnes dépositaires du secret professionnel, dans le cadre d'une vérification de comptabilité.
De plus, et d'une façon que je qualifierai de particulièrement insidieuse, cet article précise que la présentation spontanée par les personnes soumises à une vérification de comptabilité de documents comportant d'autres informations n'affecterait pas la régularité des procédures d'imposition mises en oeuvre par l'administration.
Le terme « spontané » fait penser - pardonnez cette image - aux « aveux spontanés » qui parfois sont obtenus dans le cadre de procédures pénales.
Je crois devoir rappeler que les jurisprudences que le Gouvernement s'efforce de combattre par cette disposition ont été confirmées très récemment.
La Cour de cassation, par une décision du 18 mars 1997, a renouvelé le principe selon lequel « les dispositions relatives au secret professionnel font obstacle à ce que l'identité d'un malade soit divulguée sans son consentement ».
Le Conseil d'Etat, quant à lui, par une décision du 7 juin 1998, a jugé que les dispositions du code pénal « font obstacle à ce que les membres des professions auxquelles elles s'appliquent fassent connaître à des tiers les noms des personnes qui ont recours à leurs services ou à leurs soins. Bien que les agents des services fiscaux soient eux-mêmes tenus au secret professionnel, il ne saurait être dérogé en leur faveur, sauf dispositions législatives expresses, à la règle édictée par l'article 378 du code pénal, y compris dans le cas où ils entendent faire usage, pour les besoins des contrôles qu'ils doivent effectuer, de renseignements contenus dans des documents obtenus auprès de l'autorité judiciaire ».
J'ajoute que le Conseil d'Etat, par un arrêt du 20 janvier 1999 - c'est encore plus récent -, a confirmé un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes qui estimait que les dispositions en vigueur du code général des impôts et du livre des procédures fiscales « n'ont pas et ne peuvent avoir pour effet de permettre à l'administration des impôts d'avoir connaissance, par l'intermédiaire d'organismes de sécurité sociale, de faits couverts par le secret médical, au nombre desquels figure le nom des patients ».
Mes chers collègues, cette affaire est grave et les professionnels concernés ne s'y sont pas trompés.
Il n'est pas possible d'accepter une telle entorse au principe de portée générale du secret professionnel. D'ailleurs, si la mesure envisagée par le Gouvernement devait s'appliquer, il y aurait bien conflit de droit entre, d'une part, les obligations que les professionnels sont toujours tenus de respecter en termes de secret professionnel, obligations qui sont assorties de sanctions pénales, et, d'autre part, les facilités que se donnerait l'administration fiscale en vertu de la législation que l'on veut ici nous faire approuver.
Il est clair que, avec le terme très général, très vague, d'« informations » qui figure dans le texte de l'article 57, nous serions conduits à une mise en cause à dimension variable, et probablement grave dans bien des cas, du secret professionnel. Ce terme ne permet en aucun cas de circonscrire les demandes de l'administration fiscale.
En votant cette disposition, nous donnerions donc à cette dernière des pouvoirs de contrôle extrêmement puissants, remettant en question le fragile équilibre établi en 1982 lors de la fixation du dispositif concernant les professionnels affiliés à un centre de gestion agréé.
Du reste, je ne résiste pas au plaisir d'évoquer certains des commentaires qu'avait suscités, en 1982, l'instauration de ce dispositif. Christian Pierret, votre collègue, monsieur le secrétaire d'Etat, qui a d'ailleurs occupé le banc du Gouvernement tout au long de la discussion des articles la première partie, et qui était, en 1982, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale, avait tenu des propos plus que réservés sur le dispositif proposé par le gouvernement d'alors. Il avait notamment eu cette phrase, à laquelle chacun pourra souscrire : « Les libertés du citoyen doivent prendre le pas sur les facilités administratives. »
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Tout est dit !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout est dit par cette seule phrase, en effet !
Nous avons ici, mes chers collègues, un devoir, qui est de préserver et de conforter le secret professionnel, car des conséquences extrêmement dommageables pourraient résulter de la disposition que l'on nous demande, en cet instant, d'adopter.
Dans les arguments opposés aux parlementaires qui ont contesté le bien-fondé de cette mesure, on a en fait confondu ce qui a trait à la tenue des comptabilités et ce qui concerne le secret professionnel.
En outre, mes chers collègues, je vous laisse imaginer ce que peut avoir de « spontanée » la présentation d'informations dans le cadre d'une vérification fiscale, lorsqu'un vérificateur « campe » à domicile et utilise naturellement tous les moyens qui lui sont conférés par le code des procédures fiscales ! Il s'agit évidemment d'une spontanéité toute particulière !
Nous ne pouvons vraiment pas accepter, monsieur le secrétaire d'Etat, d'aller dans la voie qu'on nous invite à suivre. Je me permets de le dire avec quelque solennité, car j'ai le sentiment que cette proposition est faite précisément pour contrer les jurisprudences très claires qui ont été confirmées ces dernières années tant par la Cour de cassation que par le Conseil d'Etat. Il me semble que, dans cette affaire, l'administration fiscale veuille avoir raison envers et contre tous, y compris contre la Cour de cassation et le Conseil d'Etat, en l'occurrence protecteurs des libertés individuelles. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Huriet, pour défendre l'amendement n° II-17.
M. Claude Huriet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais qu'il n'y ait pas d'ambiguïté dans la position que mes collègues et moi-même nous efforçons de faire valoir.
En effet, l'objectif affiché par le Gouvernement est la lutte contre la fraude et le blanchiment d'argent. Comment ne serions-nous pas d'accord sur cet objectif ? C'est sur les moyens dont le Gouvernement souhaite disposer pour atteindre ce but que nous divergeons fondamentalement.
J'approuve les arguments qui ont été développés à l'instant par M. le rapporteur général et qui rejoignent ceux qu'avait avancés, voilà quelques années à peine, M. Christian Pierret, alors rapporteur général de l'Assemblée nationale.
Ce qui est en cause, en effet, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est la préservation des libertés et de la vie privée.
Il se trouve que plusieurs d'entre nous ont célébré, il y a quelques jours seulement, le cent cinquantième anniversaire de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris. A cette occasion, non seulement des médecins mais aussi de nombreux représentants des associations de malades se sont émus du fait que, en raison du développement de certaines techniques de communication, le secret médical risquait d'être de plus en plus largement bafoué.
En vérité, dans ce débat, nous sommes face à un dilemme : si nous donnons à l'administration fiscale de tels moyens, pour renforcer, ce qui est apparemment l'objectif du Gouvernement, sa lutte contre la fraude, nous ne pouvons le faire qu'au détriment de libertés fondamentales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, qu'arrivera-t-il si, en cas de vérification de comptabilité, les agents de l'administration des impôts demandent des informations relatives à l'identité des clients et si le médecin refuse de les donner ? Le médecin sera-t-il sanctionné, soupçonné, ou sera-t-il finalement contraint, sous les pressions dont M. le rapporteur général vient de faire état, de céder et de révéler l'identité de ses clients ?
Enfin, le dispositif adopté à l'Assemblée nationale va à l'encontre d'une directive européenne qui prévoit que le secret professionnel est un droit inaliénable. Cette directive devra d'ailleurs être transposée en droit français à compter du 1er mars 2000. Comment concilier cette obligation pour notre pays de transposer une directive européenne et les entorses que, à travers ces dispositions, on nous demande d'apporter au secret professionnel ?
Pour toutes ces raisons, je demande au Sénat, s'il ne juge pas devoir supprimer l'ensemble de l'article 57, au moins d'en supprimer le paragraphe IV.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s II-12 rectifié, II-16 et II-77 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ces amendements tendent à supprimer la totalité de l'article 57, et cela peut se comprendre. Leur adoption reviendrait en fait à maintenir le statu quo .
Cependant, on peut distinguer, comme je me suis efforcé de le faire voilà quelques instants, deux parties dans cet article. Il y a, d'un côté, des précisions concernant les obligations comptables et, d'un autre côté, l'innovation consistant dans l'accès de l'administration fiscale aux informations relatives à l'identité des clients, à la date et à la forme des versements afférents aux recettes de toute nature perçues par les professionnels concernés, à quoi s'ajoute la disposition particulièrement inopportune portant sur la présentation dite « spontanée » de documents. C'est cette deuxième partie qui est manifestement constitutive d'entorses au secret professionnel.
Si nous voulons que le Sénat ait une position parfaitement compréhensible sur ce sujet, mieux vaut accepter le maintien de l'équilibre établi depuis 1982 en ce qui concerne les adhérents à un centre de gestion agréé. Mieux vaut donc accepter l'alignement des obligations comptables de tous les professionnels concernés et refuser avec énergie les dérives matérialisées par le paragraphe IV.
Je suggère donc aux auteurs des amendements n°s II-12 rectifié, II-16, II-77, puisque leurs motivations sont les mêmes que les nôtres, de bien vouloir les retirer au bénéfice des amendements identiques qui se bornent à supprimer le paragraphe IV de l'article 57.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je voudrais rappeler quelle est, pour le Gouvernement, la portée exacte de l'article 57.
Cet article correspond à une levée seulement partielle du secret professionnel.
En premier lieu, il étend à tous les membres des professions libérales soumises au secret professionnel les obligations comptables qui sont actuellement celles des membres de ces mêmes professions lorsqu'ils adhèrent à une association de gestion agréée. Il s'agit de la tenue d'un livre-journal qui récapitule les versements d'honoraires avec le nom du client et la date du versement. Ce document est accessible aux agents de l'administration en cas de contrôle de comptabilité. La tenue de ce document comptable et son contrôle sont nécessaires pour valider les recettes qui sont déclarées à l'administration.
Cette disposition a été instaurée, pour les membres des associations de gestion agrées, par la loi de finances de 1983. Je souligne que, en dix-sept ans, elle n'a donné lieu à aucun incident.
En second lieu, l'article 57 permet l'accès des agents des impôts, lors d'un contrôle de comptabilité, à toutes les informations comptables et extra-comptables qui sont utiles à son contrôle et qui peuvent porter identité des clients.
L'exemple typique est celui du carnet de rendez-vous. Le vérificateur doit pouvoir procéder au décompte du nombre de rendez-vous du professionnel pour vérifier qu'il n'est pas supérieur à ce qui est déclaré à d'administration. Il y a donc une levée partielle du secret professionnel, limitée à l'identité des clients, le texte précisant bien que les agents de l'administration ne peuvent pas avoir accès à la nature des prestations fournies.
Il ne s'agit surtout pas, pour le vérificateur, de relever les noms des clients et encore moins de réaliser des fichiers de clients. Pour que ce soit possible, il faudrait que le texte de l'article 57 l'autorise explicitement. Or il ne le fait en aucune façon.
Il convient d'observer qu'il s'agit d'une levée partielle indispensable pour la réalisation du contrôle. Afin de procéder à une vérification de comptabilité, les agents de l'administration doivent pouvoir accéder aux informations comptables et extra-comptables détenue par un professionnel de façon à valider la cohérence d'ensemble de la comptabilité et des sommes déclarées. Or certaines informations ne sont pas accessibles dès lors qu'elles peuvent comporter des noms de clients.
En pratique, il est donc impossible de contrôler les recettes d'un membre de profession libérale soumis au secret professionnel. Cette impossibilité introduit une rupture d'égalité entre les citoyens face aux charges fiscales.
Cete situation découle de la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui a jugé, en 1998 et 1999, que la procédure de vérification était viciée, et donc les impositions correspondantes irrécouvrables, dès lors que le vérificateur avait pu avoir accès à des documents ou informations comportant le nom du client.
Il ne s'agit cependant évidemment pas de contrer une jurisprudence du Conseil d'Etat, contrairement à ce qui est affirmé par certains, y compris dans cette assemblée.
Hubert Haenel. Heureusement !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. En effet, le Conseil d'Etat a rappelé, dans son arrêt de 1998, que cette interdiction d'accès s'imposait, sauf disposition législative expresse. Il a donc implicitement jugé qu'une disposition législative pouvait introduire cette levée partielle. D'ailleurs, lors de l'examen du projet de l'article 57, le Conseil d'Etat n'a émis aucune objection.
J'ajoute qu'il s'agit d'une dérogation limitée du secret professionnel de façon à maintenir un équilibre entre les nécessités du contrôle et l'indispensable préservation de la vie privée.
Les règles du secret professionnel ne sont pas de valeur supra-législative. Le secret professionnel est instauré par l'article 226-13 du code pénal. D'ailleurs, l'article 226-14 du même code prévoit des possibilités de dérogation, dès lors que celles-ci sont précisées par un texte législatif. Ces possibilités de dérogation sont parfaitement reconnues par la Cour de cassation, laquelle considère que les règles du secret professionnel n'interdisent pas aux agents de l'administration fiscale d'avoir accès à l'identité des client, des membres de professions libérales soumises au secret professionnel. Sur ce point, il y a donc une divergence de jurisprudence avec le Conseil d'Etat.
Pour répondre plus précisément à M. le rapporteur général, je préciserai que la Cour de cassation juge, depuis 1966, que les règles du secret professionnel n'ont pas pour effet d'interdire aux agents de l'administration fiscale d'avoir accès, dans le cadre du contrôle qu'ils exercent, à l'identité des clients de membres de professions libérales soumises au secret professionnel.
Cette position a été encore confirmée par un arrêt du 29 avril 1996 : après avoir relevé que « les agents de l'administration se sont bornés à examiner, pour les besoins de leur contrôle, les documents comptables obligatoires et deux états informatiques ayant les caractéristiques de feuilles de recettes et mentionnant, notamment, le nom des clients et le montant des honoraires payés », la Cour de cassation a jugé que « l'exploitation de tels documents qui ne comportaient aucun renseignement d'ordre médical sur les patients ne saurait constituer une violation du secret professionnel. Par conséquent, pour la Cour de cassation, seul l'accès à la nature des prestations est interdit aux agents de l'administration fiscale.
Un arrêt plus récent de la Cour de cassation a pu être évoqué au cours du débat pour affirmer qu'il y avait eu un revirement de jurisprudence de la Cour de cassation. Dans un arrêt du 18 mars 1997, la cour aurait jugé que « les dispositions relatives au secret professionnel font obstacle à ce que l'identité d'un malade soit divulgée sans son consentement ». Il s'agit, en réalité, d'une phrase qui est sortie de son contexte. Le litige portait, tout d'abord, sur un cas de figure très différent puisqu'il ne concernait pas le droit d'accès de l'administration fiscale. Dans le cadre d'un litige privé entre deux médecins, la cour d'appel avait ordonné une expertise et l'expert avait eu accès aux dossiers médicaux des patients, et non pas seulement à leur identité. Au surplus, la cour s'est prononcée, en fait, non pas sur l'accès de cet expert au dossier, mais sur les risques de divulgation de l'identité des clients qui en découlaient.
Après avoir énoncé le principe selon lequel l'identité des clients ne pouvait être divulguée, la Cour de cassation a reconnu la possibilité d'accès de l'expert aux dossiers médicaux, dès lors que les précautions nécessaires avaient été prises pour éviter les risques de divulgation. La cour a ainsi jugé qu'il appartient au juge, lorsqu'une expertise impliquant l'accès à des informations couvertes par le secret médical est nécessaire à la manifestation de la vérité, de prescrire des mesures efficaces pour éviter la divulgation de l'identité des malades aux consultants.
Il ne s'agit donc pas d'un revirement de jurisprudence. D'ailleurs, cet arrêt n'a pas du tout été relevé comme tel par les commentateurs. La cour s'inscrit dans la continuité de sa jurisprudence en admettant la levée limitée du secret professionnel, ici pour un expert, avec des précautions nécessaires.
Un parallèle peut d'ailleurs être établi sur ce point avec les agents de l'administration fiscale qui sont eux-mêmes tenus au secret professionnel, ce qui répond aux précautions relatives à l'absence de divulgation prescrite par la Cour de cassation. C'est notamment grâce à cette sécurité que la cour admet l'accès des agents de l'administration aux noms des clients.
A la différence de la jurisprudence de la Cour de cassation, monsieur le rapporteur général, celle du Conseil d'Etat, très restrictive, s'oppose à ce que les vérificateurs puissent, exception faite des adhérents d'associations agréées, avoir connaissance de l'identité des clients des membres des professions libérales soumises au secret professionnel. Cette jurisprudence résulte d'une application stricte des textes législatifs en vigueur. En effet, l'arrêt Chung du 7 juin 1998 indique, sans équivoque, que l'accès d'un vérificateur à l'identité des patients vicie la procédure, à défaut - j'insiste sur ce point - de dispositions législatives expresses.
Cette même approche restrictive a conduit le Conseil d'Etat, par l'arrêt Méas rendu le 20 janvier 1999, à sanctionner l'exploitation, par un vérificateur, d'informations strictement nominatives contenues dans les relevés récapitulatifs fournis par les différents organismes de sécurité sociale.
L'objet de l'article 57 du projet de loi de finances est donc de créer la disposition législative, dont le principe a été expressément réservé par la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui permettra aux agents de l'administration d'avoir accès à l'identité des clients, et seulement l'identité des clients.
Vous avez rappelé, monsieur le rapporteur général, des propos tenus voilà dix-sept ans par mon collègue Christian Pierret, alors rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale. Je ne sais pas si je dois y voir de la malice. En tous les cas, je suis certain qu'il ne dirait pas autre chose aujourd'hui et voici pourquoi.
Il s'agissait alors, pour me replacer dans le contexte de l'époque, d'un amendement hâtif. Je ne crois pas que tel soit le cas du texte dont nous débattons aujourd'hui. Celui-ci a fait l'objet, comme il se doit, d'une discussion entre le Gouvernement et le Conseil d'Etat et il a été rendu public le 15 septembre dernier.
S'agissant de la recherche d'un équilibre entre la nécessité de lutter contre l'évasion fiscale et le respect des libertés publiques et privées, vous convenez vous-même dans votre rapport, monsieur le rapporteur général, que dans ce texte, la démarche du Gouvernement est conforme à ce principe fondamental.
En ce qui concerne l'atteinte portée à la vie privée par la divulgation à un tiers du fait qu'une personne a consulté tel médecin spécialisé, cela a suscité à l'époque, de la part de Christian Pierret, un certain nombre de réserves. Voilà, me semble-t-il, la réaction juste d'un démocrate sincère et voici le bilan qu'il pourrait en tirer aujourd'hui devant vous.
Un inspecteur des impôts, vous le savez, n'est pas un tiers comme les autres. Il est soumis à une obligation de secret professionnel absolu. Les professions médicales ne sont pas seules en cause, même si elles sont, et de très loin, les plus largement adhérentes d'associations de gestion agréées.
En seize années, le dispositif de la loi de finances de 1983 n'a connu aucun incident imputable à l'administration fiscale. La jurisprudence, et c'est son rôle, a précisé le droit dans plusieurs cas limites ; je pense, notamment, à la décision du 7 juin 1998 du Conseil d'Etat que cite votre rapport. Cela a parfois eu pour conséquence de faire tomber des procédures d'imposition. Le texte qui vous est soumis corrige le tir sur certains points.
Tout cela nous montre au moins une chose : le vrai débat, c'est l'imposition des professions libérales et l'égalité devant l'impôt, et non pas le secret de la vie privée auquel ce Gouvernement, comme celui de 1982, est bien sûr profondément attaché.
M. Hubert Haenel. Comme tous les gouvernements !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. L'explication est longue ! Vous avez beaucoup de choses à vous faire pardonner !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Pour conclure, j'indique que je suis défavorable aux amendements n°s II-12 rectifié, II-16, II-77, II-44, II-17 et II-78.
M. le président. Monsieur Braun, l'amendement n° II-12 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Braun. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-12 rectifié est retiré.
Monsieur Huriet, l'amendement n° II-16 est-il maintenu ?
M. Claude Huriet. Je le retire également.
M. le président. L'amendement n° II-16 est retiré.
Monsieur Trucy, l'amendement n° II-77 est-il maintenu ?
M. François Trucy. Si je n'avais eu que les seules réponses de M. le secrétaire d'Etat, j'aurais maintenu cet amendement tendant à supprimer l'article 57. Toutefois, M. le rapporteur a formulé des propositions.
En effet, à partir d'un carnet de rendez-vous - on y a fait allusion tout à l'heure - de cancérologues, de psychiatres ou de vénérologues, comme on les appelait autrefois, on peut, derrière l'identification du praticien, déterminer la maladie du patient.
Si le serment d'Esculape impose aux médecins le secret médical - et il l'a fait bien longtemps avant que la fiscalité soit une dominante des rapports financiers entre l'Etat et les praticiens - c'est pour protéger non pas la fiscalité des médecins, pour ne parler que d'eux, mais l'identité du malade et sa personnalité.
Par conséquent, je me rallie à la proposition de M. le rapporteur général. Elle instaure, en effet, un équilibre et elle donne une preuve au Gouvernement que, par ces attendus, nous cherchons à protéger non pas quelque fraude que ce soit, mais l'essentiel, c'est-à-dire le secret médical, qui mérite d'être conservé.
Je retire donc les amendements n°s II-77 et II-78, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s II-77 et II-78 sont retirés.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Si j'ai bien compris, monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous dites que le Gouvernement préconise à la fois une levée partielle et une levée indispensable du secret professionnel.
S'agissant de la levée partielle, les trois premiers alinéas de l'article 57 suffisent. Le paragraphe IV n'est pas nécessaire, car vous alignez les obligations comptables. Or nous sommes déjà parvenus à un équilibre à cet égard. Vous avez dit vous-même que cela n'avait pas suscité d'incidents d'application en ce qui concerne les affiliés aux centres de gestion agréés. Par conséquent, point n'est besoin, je le répète, du paragraphe IV !
Vous préconisez également une levée indispensable du secret professionnel. J'avoue ne pas comprendre, là non plus, la raison d'être de ce paragraphe IV, car l'administration dispose déjà de moyens très étendus. En fait, ce paragraphe IV serait essentiel pour éviter que ne soient considérés comme non valables des procédures ou des contentieux qui seraient fondés sur des informations que l'on a soutirées indûment et en marge de la loi.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Et voilà !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par conséquent, c'est l'administration qui veut se protéger, compte tenu de la jurisprudence, et qui vous inspire cette disposition. Elle pousse toujours plus loin l'inquisition à l'égard des particuliers, notamment des professions libérales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite vous poser une question de fond. Permettez-moi de vous relire l'article 226-13 du code pénal : « La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire, soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende. »
Monsieur le secrétaire d'Etat, je croirais plus volontiers à votre bonne foi, plus exactement à celle du Gouvernement, si, au-delà de l'article 57 que vous présentez, vous proposiez une modification du code pénal tendant à atténuer les sanctions prévues par cet article 226-13. En effet, si l'article 57 est voté en l'état, l'administration fiscale va accéder à des informations nominatives de nature à porter préjudice à des tiers, donc à des clients de ces professionnels libéraux. Croyez-vous que ces clients ne vont pas, un jour ou l'autre, se retourner contre les professionnels libéraux en question ? Croyez-vous que ces professionnels libéraux ne seront pas, un jour ou l'autre, traînés devant les prétoires pour atteinte au secret professionnel et violation de l'article 226-13 du code pénal ?
Ne serait-il pas plus simple et plus clair qu'enfin une coordination ministérielle existe et que la Chancellerie soit un peu plus associée à des textes de cette nature qui, je le maintiens, portent atteinte à des libertés publiques ?
M. Hubert Haenel. La création d'une grande direction des affaires juridiques au ministère des finances a complètement effacé les directions juridiques du ministère de la justice !
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai la faiblesse de penser, cher collègue, qu'il existe encore un ministre de la justice ! D'ailleurs, elle s'est exprimée ce matin à cette tribune. Par conséquent, il doit être possible de concevoir, sur le plan interministériel, une approche de cette question.
S'il y a levée des obligations du secret professionnel, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut également lever les sanctions correspondantes et il importe de le prévoir dans le code pénal, et pas seulement dans le code général des impôts !
Je crois pouvoir dire que ce dispositif est improvisé et excessif et qu'il ne peut en aucun cas être approuvé par le Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je souhaite simplement vous rappeler, monsieur le rapporteur général, que, depuis 1982, l'administration fiscale accède à des informations nominatives pour les associations agréées sans qu'aucun incident n'ait été signalé.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Restez-en là !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je vous rappellerai, par ailleurs, en réponse aux risques que vous évoquez, que les agents de l'administration fiscale sont tenus au secret professionnel. Je ne leur fais ni l'injure ni le procès de croire que cela puisse poser problème, pas plus d'ailleurs que ne me permettrait de le faire l'expérience de la gestion de ces affaires depuis longtemps.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. M. le rapporteur général nous a très bien rappelé que la commission des finances ne souhaite pas s'opposer à ce que les obligations comptables auxquelles sont soumis les membres d'associations agréées soient étendues à ceux qui ne le sont pas, pour montrer, précisément, qu'il ne s'agit en aucune façon d'empêcher que le contrôle ne puisse s'effectuer. En revanche, il a beaucoup insisté sur le paragraphe IV de l'article 57, qui vise à étendre l'ampleur et la portée du contrôle que vous vous êtes attaché à essayer de réduire.
Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, ne faites pas de nous - nous ne l'accepterons pas - le greffier de vos bureaux !
Mettez-vous à la place de vos bureaux : ils ont un métier qui consiste à lever l'impôt et à le faire dans des conditions conformes à la loi. Ils vont donc vous demander en permanence des moyens légaux supplémentaires. Si vous ne veillez pas à ce que la limite protectrice des libertés publiques et des libertés individuelles ne soit pas franchie, nous allons nous retrouver un jour dans un régime totalitaire sans nous en être aperçus et sans l'avoir voulu !
M. Hubert Haenel. C'est vrai !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Si j'en juge aux éléments d'information que vous portez à notre connaissance, j'y vois le germe d'un certain manque d'attention au regard de grands principes, singulièrement au regard des libertés publiques et des libertés individuelles.
Vous nous dites - je trouve l'expression charmante - que les fonctionnaires des impôts sont soumis au secret professionnel...
M. Hubert Haenel. Sauf pour Le Canard enchaîné ! (Sourires).
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Mais de qui se moque-t-on ? Prenez le cas du médecin cancérologue. On le choisit d'abord pour sa compétence, certes, mais aussi parce que l'on sait qu'il a certaines valeurs et qu'il respectera un certain nombre de règles, notamment celle du secret professionnel. Quand on va chez son inspecteur des impôts, ce n'est pas le secret professionnel qui motive vraiment, sauf peut-être pour vous, monsieur le secrétaire d'Etat, mais parce que vous êtes vraiment un contribuable parfait. (Nouveaux sourires.)
Pour que vos inspecteurs des impôts puissent en savoir plus sur les clients, parce que c'est de cela qu'il s'agit, vous allez tenter d'obtenir l'autorisation pour vos bureaux d'en connaître davantage non pas sur les redevables de l'impôt, mais sur leurs clients, y compris sur les difficultés qu'ils rencontrent. Cela, nous ne le voulons pas. Vous pouvez peut-être l'obtenir d'une majorité qui vous obéit, mais pas de cette maison, car elle a une haute idée des libertés individuelles et des libertés publiques. Elle a choisi de n'être le greffier de personne. Elle a le souci d'instaurer un certain équilibre et, franchement, ce que vous nous proposez ne va pas dans ce sens.
D'ailleurs, l'insistance du Gouvernement nous ferait presque regretter de ne pas rejeter l'ensemble de l'article 57 ! (Sourires.) Dieu merci ! M. le rapporteur général est modéré, et il ne nous propose de n'en rejeter que les dispositions réellement insupportables. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je comprends bien que le Sénat est dans son rôle de gardien des libertés, mais je ne veux pas laisser penser que le Gouvernement n'est pas animé de la même préoccupation.
M. Jean Chérioux. C'est à prouver !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. J'ai clairement indiqué tout à l'heure, en me référant à la jurisprudence de la Cour de cassation, qui est aussi, me semble-t-il, en ce domaine, gardienne des libertés, que telle n'était pas la volonté du Gouvernement. Simplement, celui-ci souhaite, sans porter atteinte le moins du monde aux libertés, donner à l'administration fiscale l'efficacité qu'elle ne peut avoir si elle n'a pas accès à certaines informations. Cela ne va pas au-delà.
Je le répète, le droit en vigueur, qui s'impose aux agents du fisc, offre suffisamment de garanties pour que l'on ne puisse pas dresser un tableau aussi pessimiste et aussi noir de la situation que nous voulons créer.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s II-44 et II-17.
M. Bernard Angels. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Cet article a provoqué un certain émoi, car il a été dit qu'il s'attaquait au secret professionnel, notamment au secret médical. Si tel était le cas, notre groupe serait le premier à s'insurger. Mais il n'en est rien. En effet, il s'agit simplement d'aligner la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière de secret professionnel sur celle de la Cour de cassation, d'unifier les obligations des contribuables exerçant des professions libérales et de renforcer par là même les moyens du contrôle fiscal.
Par cette disposition, les membres de professions libérales non adhérents à des associations de gestion agréées, soit seulement 25 % d'entre eux, devront, comme leurs collègues adhérents, également faire figurer dans leur comptabilité les noms de leurs clients et le montant des honoraires versés.
Il n'y a, dans cette extension, aucun élément contraire au secret professionnel et médical, à moins de penser que les membres des associations de gestion agréées acceptent cette mise en cause.
Monsieur le rapporteur général, il ne s'agit pas pour l'administration fiscale de se lancer dans une recherche d'informations sur les clients d'un avocat ou d'un médecin. Cette disposition rappelle simplement que la vérification de comptabilité peut être réalisée afin de s'assurer de la réalité des informations que l'administration fiscale reçoit.
Sans vérification de comptabilité, il n'y a plus de réel contrôle fiscal.
De plus, je vous rappelle que la procédure de vérification de comptabilité est très encadrée, et vous savez bien qu'en qualité de rapporteur spécial de services financiers je m'y attache tout particulièrement.
Enfin, l'Assemblée nationale a introduit des protections supplémentaires en rappelant la règle selon laquelle les agents des impôts ne pouvaient demander des renseignements sur la nature des prestations fournies et a prévu explicitement que tous les contribuables membres de professions libérales bénéficiaient de l'article L. 86 A du livre des procédures fiscales aux termes duquel il ne peut y avoir, de la part de l'administration, de demandes de renseignements sur la nature des prestations fournies pour un membre d'une profession non commerciale soumise au secret professionnel.
Ainsi, les craintes exprimées sont, je crois, infondées. Notre groupe votera contre ces amendements de suppression.
M. Claude Huriet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Huriet.
M. Claude Huriet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne vois absolument pas, dans une matière aussi délicate que celle dont nous parlons en cet instant, en quoi peut consister une « dérogation limitée » ou une « levée partielle ». Un secret, on le garde ou on le livre !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Claude Huriet. Vous avez fait référence également aux propos tenus, voilà une quinzaine d'années, par M. Christian Pierret, disant que les choses avaient changé et que le contexte était différent. C'est vrai, les choses ont beaucoup changé en quinze ans. On parle beaucoup plus désormais des droits du malade. Je crois savoir d'ailleurs que le Gouvernement a l'intention de déposer prochainement sur le bureau des assemblées un texte dans lequel précisément seront défendus les droits du malade.
Or, actuellement, monsieur le secrétaire d'Etat, s'il y a un droit auquel les malades tiennent particulièrement, c'est le droit au secret médical, et plus encore que par le passé. En effet, avec cette notion extensive de ce « secret partagé », ils ont le sentiment, et je crains malheureusement qu'ils ne se trompent pas toujours, qu'à force d'être « partagé », le secret médical n'existe plus.
Permettez-moi aussi de relever une sorte de contradiction de la part du Gouvernement. J'ai lu dans les journaux ces derniers temps que la question de la publication des PACS n'était pas encore réglée. Il semble, en effet, qu'un courant, peut-être majoritaire, s'oppose à cette publicité au motif que, à travers le PACS, on serait amené à évoquer tel ou tel comportement qui ne serait pas accepté par la société. Permettez-moi de vous dire que les dispositions que le Gouvernement défend actuellement sont bien pires que les effets que pourrait avoir la publicité, somme toute normale, des PACS. Car il existe en ville, monsieur le secrétaire d'Etat, des médecins dont on sait qu'ils sont spécialistes des maladies infectieuses et qu'ils ont en charge plus particulièrement des séropositifs. Comment éviter, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'à l'occasion d'un contrôle fiscal, alors que le médecin ne pourra pas, semble-t-il, ne pas livrer les informations relatives à l'identité de ses clients - bien que vous n'ayez pas répondu clairement à ma question sur ce point - que l'administration n'établisse un lien et ne déduise des consultations répétées auprès de tel ou tel médecin la présence de telle ou telle pathologie ?
Pour toutes ces raisons, il va de soi, monsieur le secrétaire d'Etat, que le groupe de l'Union centriste votera les amendements de suppression du paragraphe IV de l'article 57.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais simplement poser une question complémentaire à M. le secrétaire d'Etat.
Le texte qui nous est proposé par l'article 57 n'est-il applicable qu'en matière de vérification de comptabilité ou serait-il applicable dans le cadre de la procédure unilatérale du droit à communication ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, bien entendu, cette procédure s'applique exclusivement dans le cadre des vérifications de comptabilité.
Je saisis cette opportunité pour répondre à M. Huriet qu'il s'agit pour l'administration d'avoir accès à l'identité des clients, et aucunement à la nature des prestations fournies.
Par conséquent, je crois utile de répéter que ce texte ne met pas en cause le secret dans ce qu'il a d'essentiel.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s II-44 et II-17, repoussés par la Gouvernement.

(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 57, modifié.

(L'article 57 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 57



M. le président.
Par amendement n° II-64, MM. Oudin, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le quatrième alinéa du 3° de l'article 83 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "A compter de l'imposition des revenus de 2000, cette limite est de 50 000 francs pour les voyageurs, représentants et placiers de commerce ou d'industrie."
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. Cet amendement prend en compte la spécificité des voyageurs, représentants et placiers, dont le rôle est particulièrement important pour le développement des PME et du commerce extérieur de la France. Il convient de revenir, pour cette catégorie et à compter des revenus de l'année 2000, au plafond antérieur de 50 000 francs pour la déduction forfaitaire supplémentaire pour frais professionnels.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous avons évoqué en première partie cette proposition, qui semble tout à fait légitime s'agissant de professions qui bénéficiaient naguère d'une déduction supplémentaire et qui se trouvent aujourd'hui traitées moins favorablement que d'autres.
Nous avions évoqué le cas d'une autre profession qui a obtenu le rétablissement du système favorable qui lui était appliqué auparavant. En l'occurrence, il s'agit de nos amis les journalistes pour lesquels dorénavant, dans la limite de 50 000 francs, une allocation d'emploi est soustraite à l'impôt comme représentative de frais. Monsieur le secrétaire d'Etat, il est certes légitime que d'autres professions, tout aussi estimables, comme celle des VRP, viennent demander un traitement équivalent.
La commission, sur ce sujet, considérant la discussion comme tout à fait opportune, s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Certains proposent de revenir, mais pour les seuls VRP, sur la suppression progressive des déductions forfaitaires supplémentaires qui, je le rappelle, ont été entreprises sur l'initiative du gouvernement précédent.
Le Gouvernement ne peut vous accompagner dans une telle démarche. En effet, il n'est pas envisageable de rétablir les déductions forfaitaires supplémentaires qui ont été source d'inégalités entre des contribuables exerçant des professions voisines, au bénéfice, de surcroît, d'une seule profession, ce qui, du même coup, créerait une nouvelle inégalité au sein même de l'ensemble des professions bénéficiaires de ces déductions.
Dans ce cas particulier des VRP, l'existence, depuis de nombreuses années, d'un barème administratif du prix de revient kilométrique des véhicules automobiles permettant l'évaluation forfaitaire des frais de déplacement professionnels, qui représentent avec les frais d'hébergement et de restauration près de 80 % du total des frais déduits par les membres de cette profession, facilite d'ores et déjà grandement aux intéressés l'exercice d'une option pour les frais réels. Elle leur permet même, pour un kilométrage parcouru de 50 000 kilomètres par an - qui serait la moyenne de la profession selon ses propres représentants - de bénéficier d'une déduction de frais mieux adaptée pour évaluer les frais réellement engagés, alors même que la déduction supplémentaire était plafonnée à 50 000 francs.
Compte tenu de ces éléments, je ne pense pas que votre amendement soit utile, et je vous demande de bien vouloir le retirer. Si tel n'était pas le cas, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-64, repoussé par le Gouvernement et pour lequel la commission s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 57.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-43, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à l'imposition commune, le montant de l'impôt est diminué dans la limite de son montant, de la différence entre 6 700 francs et son montant."
« II. - Les dispositions du I ci-dessus s'appliquent aux revenus perçus à compter de l'année 2000.
« III. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du I et du II ci-dessus sont compensées par la majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-18, MM. Fréville, Badré, Mme Bocandé et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 6 700 francs et son montant ;"
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers prévue à l'article 265 bis 1- b du code des douanes. »
Par amendement n° II-19, MM. Fréville, Badré, Mme Bocandé et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 4 de l'article 197 du code général des impôts est complété par le membre de phrase suivant : "; pour un couple marié soumis à imposition commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 5 020 francs et son montant ;" ;
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par la réduction de l'exonération de taxe intérieure sur les produits pétroliers prévue à l'article 265 bis 1- b du code des douanes. »
Par amendement n° II-63, MM. Oudin, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 57, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter de l'imposition des revenus de 2000, dans le 4 I de l'article 197 du code général des impôts, la somme : "3 350 francs" est remplacée par la somme : "2 280 francs".
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-43.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Vous vous souvenez sans doute, que lors de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances, notre collègue M. Yves Fréville a présenté,...
M. Denis Badré. Avec beaucoup d'éloquence et de conviction !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... avec la connaissance du droit fiscal que chacun lui connaît, un amendement relatif à ce qu'on a appelé la « conjugalisation » de la décote au titre de l'impôt sur le revenu.
Le mécanisme de la décote, qui est conçu pour retarder l'entrée dans le barème des contribuables célibataires modestes, aboutit paradoxalement, comme l'a fort bien montré M. Fréville en s'appuyant sur des arguments chiffrés, à pénaliser certains couples mariés soumis à imposition commune. A l'évidence, on ne peut considérer comme normal que les mêmes personne bénéficient deux fois de la décote lorsqu'elles sont imposées séparément et n'en bénéficient plus qu'une seule fois lorsqu'elles se marient, ce qui se traduit par un surcroît d'impôt significatif.
Les calculs montrent que ce mécanisme défavorise surtout les couples formés de deux personnes qui travaillent lorsque celles-ci sont de condition modeste ou moyenne, c'est-à-dire lorsque leur revenu imposable est inférieure à 10 000 francs de revenus salariaux par mois et pour le couple.
Dans l'exemple que nous donnait M. Yves Fréville, le passage devant M. le maire pour se marier représentait pour les intéressés un supplément d'impôt de 2 700 francs, ce qui constitue une contre-incitation à se marier, qui ne peut bien sûr être acceptée.
Par cet amendement qui a vocation à être un signal pour l'avenir et pour une future réforme de la fiscalité, notamment une réforme de la fiscalité sur le revenu que nous appelons de nos voeux, nous voulons dire qu'il faut cesser de pénaliser fiscalement le mariage, qu'il serait préférable de l'avantager pour des raisons de stabilité sociale et de bonne éducation des enfants, plutôt que de le pénaliser, comme c'est le cas, dans certains situations telle celle qui a été mise en évidence par notre collègue M. Fréville.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre les amendements n°s II-18 et II-19.
M. Denis Badré. M. le rapporteur général vient de rappeler très clairement de quoi il s'agit.
Voilà quelques jours, dans cet hémicycle, la clarté de l'exposé et la qualité du plaidoyer de M. Yves Fréville, qui a mis toute sa force de conviction pour défendre ce dossier, ont, je crois, emporté l'adhésion de tous. Aujourd'hui, je reprends modestement son exposé, je me fais le porte-parole de la même thèse et met au service de celle-ci une conviction au moins égale à celle qu'ont exprimée nos collègues MM. Marini et Fréville. Je dénonce simplement ce qui serait une incitation au non-mariage dans la situation actuelle et, inversement, ce qui est une injustice pour les personnes mariées. Je demande que cette situation cesse.
L'amendement n° II-19 est un amendement de repli par rapport à l'amendement n° II-18. Ce dernier prévoit que, pour un couple marié soumis à imposition commune, le montant de l'impôt est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 6 700 francs et son montant. Quant à l'amendement n° II-19, il dispose que le montant de l'impôt est diminué de la différence entre 5 020 francs et son montant.
M. le président. La parole est à M. Braun, pour défendre l'amendement n° II-63.
M. Gérard Braun. Nous avons la même préoccupation et nous différons seulement sur les chiffres. Aussi, je retire cet amendement au profit de celui qui a été présenté par M. le rapporteur général.
M. le président. L'amendement n° II-63 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-18 et II-19 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est évidemment très favorable à l'amendement n° II-18 puisqu'il prévoit, comme celui que j'ai présenté, que le montant de l'impôt est diminué de la différence entre 6 700 francs et son montant. Elle préfère cette rédaction à la version de repli présentée dans l'amendement n° II-19.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-43, II-18 et II-19 ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Permettez-moi, monsieur le rapporteur général, d'attirer votre attention sur le fait que l'exemple que vous citez concerne le cas très spécifique de personnes qui vivent en concubinage. Or, il me paraît extrêmement réducteur de limiter la problématique du sujet qui a été abordé à ce simple aspect de la question. En effet, la décote a été instituée pour corriger, au profit des contribuables célibataires de condition modeste, les effets d'un barème progressif conçu en tenant compte du système du quotient familial, celui-ci constituant une technique très favorable pour les contribuables soumis à l'imposition commune qui bénéficient du quotient conjugal.
M. Jean Chérioux. Pour ce qu'il en reste ! Il n'en reste pas grand-chose !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. En outre, le bénéfice de la décote a été étendu en 1987 à l'ensemble des contribuables. Sa « conjugalisation » - je ne sais si je dois employer ce terme - ne se justifie toutefois pas dès lors que son objectif n'est pas d'instituer un seuil directement proportionnel à la situation de famille.
Or, ainsi que M. le Premier ministre l'a annoncé, le Gouvernement conduira en 2000 une réflexion sur les impôts directs pesant sur les ménages. La question de la décote sera naturellement examinée à cette occasion. Si, comme vous l'avez dit, cet amendement est un signal, vous pourriez enregistrer ce signal et nous en resterions là. Je suis donc défavorable à cette disposition.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-43.
M. Michel Moreigne. Je demande la parole contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne. Nous considérons que, si des réformes doivent être accomplies s'agissant de l'impôt sur le revenu, elles doivent intervenir de manière globale, et non au coup par coup, par des touches sans grande cohérence.
M. Raymond Courrière. Très bien !
M. Michel Moreigne. Certes, les ressauts d'imposition, lorsque le contribuable se retrouve soumis à l'impôt sur le revenu, constituent un problème important, qu'il faut résoudre. Un rapport de M. Bourguignon l'a suffisamment démontré. Mais, à nos yeux, cela ne concerne pas la seule décote appliquée à l'imposition des couples mariés.
M. le secrétaire d'Etat a confirmé à l'instant qu'une réforme d'ensemble est prévue pour l'année prochaine. Il nous semble préférable d'attendre cette réforme pour résoudre cette question.
M. Raymond Courrière. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ces amendements présentés par nos collègues de la majorité sénatoriale concernent l'application des dispositions correctrices du barème de l'impôt progressif. Vous souhaitez, mes chers collègues, à travers ces amendements, donner une sorte de prime aux couples mariés qui subiraient les conséquences un peu perverses de l'application actuelle de la décote.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Cela vous choque-t-il ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président de la commission du finances, je souhaite faire un petit rappel.
Une part essentielle des contribuables au titre de l'impôt sur le revenu est aujourd'hui constituée de personnes seules. Je crois même qu'aujourd'hui pratiquement un foyer fiscal sur deux est dans ce cas. Le dispositif de décote s'applique donc à l'ensemble de ces foyers fiscaux.
En la matière, il y a une diversité de situations. Il convient notamment de souligner que la décote n'est pas, si l'on peut dire, une prime aux unions illicites, d'autant que le débat récent que nous avons mené sur le pacte civil de solidarité a abondamment montré que les liens du mariage n'étaient plus - on peut le regretter comme l'admettre une bonne fois pour toutes - la condition sine qua non de la définition d'un projet de vie commune. Je doute, de surcroît, que les personnes qui vivent en union libre pensent aussi d'abord, dans leur choix, à l'optimisation fiscale qui peut découler de leur situation. Ou bien ce serait à désespérer de la nature humaine.
Sur le fond, d'ailleurs, le système de la décote a été mis en place non pas pour favoriser les couples non mariés, mais pour tenir compte de situations de ressources modestes. On ne peut, par exemple, oublier que des célibataires rémunérés au SMIC sont aujourd'hui imposables, compte tenu des règles de calcul en vigueur. La véritable question est la suivante : qu'est ce qui fait que notre pays compte autant de salariés sous-rémunérés, que les revenus de remplacement sont parfois si faibles - regardez les allocations chômage. Il ne s'agit pas d'une prétendue amoralité fiscale, qui ne profiterait qu'aux couples illégitimes, terminologie un peu poussiéreuse.
C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ces amendements.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je n'ai vraiment rien compris !
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi reporter à demain la suppression d'une injustice qui est avérée dès aujourd'hui ? Pourquoi reporter l'examen à demain de cette question, alors que nous l'avons examinée attentivement et de manière très approfondie ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. Denis Badré. Je préfère que nous supprimions cette injustice tout de suite. Ainsi, nous confirmerons que le mariage est une valeur fondatrice de notre société et nous affirmerons clairement - il me paraît important de le faire aujourd'hui - qu'elle doit le rester.
MM. Emmanuel Hamel et Gérard Braun. Très bien !
M. Denis Badré. Monsieur le président, je précise que je retire l'amendement n° II-18 au profit de celui qui a été présenté par la commission. Pour l'instant je ne parle pas de l'amendement n° II-19 puisque son destin dépendra du sort qui sera réservé à l'amendement de la commission.
M. le président. L'amendement n° II-18 est retiré.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-43, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 57, et l'amendement n° II-19 n'a plus d'objet.

Article 58



M. le président.
« Art. 58. _ I. _ A. _ L'article 44 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au I :
« a) A la première phrase du premier alinéa, les mots : "créées à compter du 1er octobre 1988 jusqu'au 31 décembre 1994" sont supprimés et, après les mots : "des bénéfices réalisés", sont insérés les mots : ", à l'exclusion des plus-values constatées lors de la réévaluation des éléments d'actif,";
« b) Au deuxième alinéa, les mots : "A compter du 1er janvier 1995 :" sont supprimés et les 1 et 2 deviennent respectivement les deuxième et troisième alinéas ;
« c) Au troisième alinéa, les mots : "jusqu'au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "à compter du 1er janvier 1995 jusqu'au 31 décembre 2004";
« d) Au quatrième alinéa, les mots : "les dispositions du 1" sont remplacés par les mots : "Ces dispositions";
« e) Après la première phrase du premier alinéa, il est inséré deux phrases ainsi rédigées :
« Dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A, le bénéfice des dispositions du présent article est également accordé aux contribuables visés au 5° du I de l'article 35. Le contribuable exerçant une activité de location d'immeubles n'est exonéré qu'à raison des bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une zone de revitalisation rurale.
« Dans le dernier alinéa, après les mots : "de gestion ou de location d'immeubles", sont insérés les mots : "sauf dans les cas prévus au premier alinéa". »
« 2° Le II est ainsi rédigé :
« II. _ Le capital des sociétés nouvellement créées ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés.
« Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvellement créée est détenu indirectement par d'autres sociétés lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie :
« _ un associé exerce en droit ou en fait une fonction de direction ou d'encadrement dans une autre entreprise, lorsque l'activité de celle-ci est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire ;
« _ un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise dont l'activité est similaire à celle de l'entreprise nouvellement créée ou lui est complémentaire. » ;
« 3° A la fin du III, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L'existence d'un contrat, quelle qu'en soit la dénomination, ayant pour objet d'organiser un partenariat, caractérise l'extension d'une activité préexistante lorsque l'entreprise nouvellement créée bénéficie de l'assistance de ce partenaire, notamment en matière d'utilisation d'une enseigne, d'un nom commercial, d'une marque ou d'un savoir-faire, de conditions d'approvisionnement, de modalités de gestion administrative, contentieuse, commerciale ou technique, dans des conditions telles que cette entreprise est placée dans une situation de dépendance. » ;
« 4° Il est inséré un IV ainsi rédigé :
« IV. _ Pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2000, le bénéfice exonéré ne peut en aucun cas excéder 225 000 euros par période de trente-six mois. »
« B. _ Au douzième alinéa (e) du I de l'article 125-0 A du code général des impôts et au c du 3 de l'article 92 B decies du même code, les mots : "au deuxième alinéa du 2 du I de l'article 44 sexies " sont remplacés par les mots : "au quatrième alinéa du I de l'article 44 sexies ".
« II. _ L'article 39 quinquies D du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa, les mots : "entre le 1er janvier 1995 et le 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "avant le 1er janvier 2005";
« 2° Le dernier alinéa est supprimé. »
Par amendement n° II-45, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose, après les mots : « sont supprimés », de supprimer la fin du a) du 1° du A du I de cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit, dans cet article 58, du régime fiscal des entreprises nouvelles.
Le Gouvernement propose, au premier alinéa de cet article, de ne pas inclure, dans les bénéfices susceptibles d'être exonérés d'impôts, les plus-values réalisées par une entreprise à l'occasion de la réévaluation libre de ses éléments d'actifs, et donc de valider expressément la doctrine actuelle de l'administration, récemment infirmée par la cour administrative d'appel de Nantes dans un arrêt du 2 octobre 1998.
Mes chers collègues, nous ne saurions accepter de telles méthodes. Lorsque l'administration est condamnée, elle doit respecter la règle du jeu et ne pas demander au Parlement de valider des comportements qui ont été, à juste titre, censurés par les cours compétentes !
M. Jean Chérioux. Exactement ! La loi est pour tout le monde !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est donc pour des raisons de principe, parce que nous demandons à l'administration fiscale de respecter le droit, que nous ne saurions, encore une fois, accepter de valider cette doctrine administrative.
Par conséquent, le présent amendement vise à ce que ne soient pas distingués, au sein des profits d'une entreprise, les bénéfices réalisés et ceux qui sont simplement constatés, ces deux catégories devant demeurer exonérées. Il s'agit, je le répète, d'un amendement de principe, qui témoigne de notre souci de lutter contre le recours à la méthode un peu trop facile des validations administratives.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est radicalement opposé à cet amendement, dont l'adoption reviendrait à avaliser par la loi des opérations ayant l'évasion fiscale pour unique objet.
La précision apportée dans la loi vise à dissiper une ambiguïté née d'une décision de la cour administrative d'appel de Nantes, qui a considéré que les plus-values pouvaient bénéficier du régime d'exonération dès lors que, en l'absence d'éléments particuliers figurant dans les travaux et les débats parlementaires, l'expression « bénéfices réalisés » utilisée à l'article 44 sexies ne traduisait pas une intention claire du législateur de taxer ces profits. Or l'application du régime d'exonération à des bénéfices résultant d'un simple jeu d'écriture comptable n'aurait aucune légitimité et serait sans rapport avec les objectifs visés dans l'optique de ce dispositif.
Dans ces conditions, si la commission ne retire pas son amendement, le Gouvernement émettra un avis défavorable sur celui-ci.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-45, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-46, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
I. A la fin du c) du 1° du A du I de l'article 58, de remplacer la date : « 31 décembre 2004 » par la date : « 31 décembre 2006 ».
II. En conséquence, à la fin du 1° du II de l'article 58, de remplacer la date : « 1er janvier 2005 » par la date « 1er janvier 2007 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cet amendement, il s'agit toujours du régime fiscal des entreprises nouvelles, au sens de l'aménagement du territoire. Notre amendement a pour objet de proroger ce régime issu de l'article 44 sexies du code général des impôts, ainsi que le régime d'amortissement exceptionnel des immeubles construits par des petites et moyennes entreprises dans certaines zones du territoire.
Le régime en question devrait à notre avis s'appliquer non pas jusqu'au 31 décembre 2004, comme le propose le Gouvernement, mais jusqu'au 31 décembre 2006, c'est-à-dire jusqu'au terme des nouveaux contrats de plan Etats-régions en cours de négociation, ce dernier mot devant parfois être mis entre guillemets.
Il serait logique, s'agissant d'aménagement du territoire, de « caler » la mesure sur la durée de validité de ces contrats de plan, ainsi que sur la programmation européenne des fonds structurels.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement.
Le texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale prévoit une prorogation, pour cinq ans, du régime d'exonération des entreprises nouvelles et de l'amortissement dérogatoire des immeubles commerciaux construits dans les ZRR, les zones de rénovation rurale, et les ZRU, les zones de redynamisation urbaine.
Ce délai nous paraît satisfaisant. S'agissant d'aménagement du territoire, je note d'ailleurs que, comme vous venez de le dire, monsieur le rapporteur général, c'est celui qui avait été retenu par le Sénat lors de la discussion en 1995 de la loi « Pasqua ».
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-46, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-47 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le dernier alinéa e du 1° du A du I de l'article 58 :
« e) Le cinquième alinéa est ainsi modifié :
« 1. Les mots : "aux entreprises qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances, ou de location d'immeubles ni" sont supprimés ;
« 2. Il est complété par une phrase ainsi rédigée : "Les contribuables exerçant une activité de location d'immeubles ne sont exonérés qu'à hauteur des bénéfices provenant des seuls immeubles situés dans une des zones visées au premier alinéa.". »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant des dispositions du A ci-dessus, de compléter in fine l'article 58 par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'extension du champ d'application de l'article 44 sexies du code général des impôts est compensée à due concurrence par une majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous souhaitons, par cet amendement, étendre le régime fiscal des entreprises nouvelles à toutes les entreprises, quelle que soit leur branche d'activité, c'est-à-dire, en particulier, à celles qui exercent une activité bancaire, financière, d'assurances ou de location d'immeubles.
Nous pensons qu'il n'y a aucune raison d'exclure du champ du dispositif ces entreprises, qui sont aussi créatrices d'emplois et de richesses que d'autres et qui peuvent être tout aussi fragiles au cours de leurs premières années d'existence.
Au demeurant, je rappellerai que, à lire la version initiale du projet de loi de finances, c'était bien cette logique qu'avait suivi l'ancien ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, l'article 10 prévoyant d'étendre, par ailleurs, le régime des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise aux activités que j'ai citées.
Il faut souligner que seules les entreprises créées dans certaines zones d'aménagement du territoire sont éligibles, ce qui conduit à penser que le coût de l'extension que nous souhaitons devrait être tout à fait acceptable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le régime d'exonération prévu à l'article 44 sexies est destiné à renforcer les fonds propres d'entreprises nouvelles indépendantes qui doivent recourir à l'emprunt et supporter des charges importantes au cours de leurs premières années d'existence.
Dans ces conditions, l'exclusion des activités bancaires, financières et d'assurances du champ du dispositif de l'article 44 sexies du code général des impôts se justifie par le fait que ces activités sont généralement exercées dans des conditions telles qu'une aide de l'Etat ne se justifie pas.
Ces secteurs d'activité sont en effet moins exposés que d'autres aux difficultés économiques...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah bon !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. ... et sont, par ailleurs, peu créateurs d'emplois.
En outre, le respect de la condition d'implantation exclusive en zone d'aménagement du territoire soulèverait d'importantes difficultés pour les entreprises relevant de ces secteurs d'activité. En effet, la réalité de leur implantation reste, en pratique, difficile à établir pour le contribuable et délicate à vérifier pour l'administration.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cette disposition ne coûterait pas cher !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. En tout état de cause, le Gouvernement demande le rejet de cet amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-47 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je remarque que, dès qu'il s'agit d'alléger la contribution des entreprises au financement de la charge publique, la majorité de la commission des finances du Sénat sait toujours faire preuve de beaucoup d'imagination. Il en est ainsi avec l'amendement n° II-47 rectifié, comme avec l'amendement n° II-45, que nous avons examiné précédemment.
Pour notre part, nous avons approuvé les orientations ayant guidé la rédaction de l'article 58 du projet de loi, qui tend, dans sa version actuelle, à rééquilibrer le dispositif d'exonération temporaire de l'impôt sur les sociétés défini à l'article 44 sexies .
L'application de ce dispositif représente, faut-il le rappeler, un certain coût, qui s'élèverait aujourd'hui, selon les estimations tirées du document d'évaluation des voies et moyens, à un milliard de francs.
On notera aussi que la mise en oeuvre de ce dispositif a engendré un important contentieux fiscal, dont les dispositions de l'actuel article 58 permettraient d'ailleurs de limiter l'ampleur, voire d'amener la disparition.
Il est également indispensable de s'interroger sur la portée et l'efficacité réelles du dispositif en termes de développement économique et de création d'emplois. Nous étions très sceptiques lors de l'instauration du dispositif, et nous le demeurons.
En effet, nous pensons que la meilleure incitation au développement économique des parties du territoire dites défavorisées réside non pas dans l'accumulation de facilités fiscales ou d'allégements de cotisations sociales, mais dans une meilleure allocation des ressources du crédit aux entreprises en faveur des véritables « entreprises nouvelles ».
Ces observations expliquent que nous ne voterons pas cet amendement de la commission des finances, pas plus que nous n'avions voté les deux précédents.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je voudrais rappeler à M. le secrétaire d'Etat que la disposition prévue par notre amendement vise à apporter une simplification, qui devrait amener une réduction du contentieux.
En effet, il suffit aujourd'hui qu'une entreprise exerce à titre accessoire une activité de nature immobilière ou financière pour que puissent lui être opposées les dispositions actuelles du code général des impôts et que, bien que créant réellement des emplois dans une zone aidée au sens de l'aménagement du territoire, elle se voit privée de l'exonération d'impôt sur les bénéfices, ce qui suscite un contentieux nourri.
Alors, que veut-on ? Veut-on oui ou non que le système des ZRU et des ZRR soit efficace ? Un emploi n'en vaut-il pas un autre ?
Vous avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il n'y avait sans doute guère d'entreprises de ces secteurs d'activité qui soient localisées spécifiquement dans les zones en question. Par conséquent, puisqu'il y en a si peu, et puisque la simplification proposée aurait pour effet de réduire les difficultés d'application des textes préexistants, vous ne risquez pas grand-chose à accepter la suggestion que nous formulons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-47 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 58, modifié.

(L'article 58 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 58



M. le président.
Par amendement n° II-65 rectifié, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, le taux : "14 %" est remplacé par le taux : "17 %".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter des revenus de 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et du II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. L'objet de cet amendement est de favoriser les propriétaires bailleurs, dont les revenus tirés d'une location sont les plus taxés. La charge fiscale est lourde par rapport aux risques pris par le propriétaire bailleur.
Il convient donc de relever le taux de l'abattement auquel a droit le propriétaire au titre des frais de gestion, car il est insuffisant au regard des frais réels.
Je pense que le Gouvernement, en acceptant cet amendement, marquerait tout l'intérêt qu'il porte au secteur locatif et aux propriétaires bailleurs, lesquels rencontrent bien des difficultés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout à fait favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Défavorable, pour des raisons qui ont déjà été expliquées par M. Christian Pierret lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-65 rectifié.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. J'indiquerai simplement qu'en employant l'expression « frais de gestion », on fait rarement référence à une notion qui est capitale pour ceux qui possèdent des biens immobiliers, à savoir l'amortissement.
En effet, la situation du bailleur n'est pas identique à celle d'une entreprise, qui peut amortir chaque année, dans son bilan, le bien qu'elle possède. Le bailleur, lui, ne pratique pas l'amortissement. La seule possibilité qui lui est donnée, c'est donc d'inclure le montant équivalent à cet amortissement dans l'abattement de 14 %, qui passera à 17 % si le Sénat veut bien suivre les auteurs de l'amendement, ce que je souhaite.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-65 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-59, M. Pelletier propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le cinquième alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° La première phrase est complétée in fine par les mots : "ou reconduit ou renouvelé à compter du 1er janvier 2000".
« 2° La troisième phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Cet engagement prévoit que le loyer et les ressources du locataire, qu'il a perçus pendant l'avant-dernière année précédant celle au titre de laquelle la location avec ce locataire ouvre droit pour la première fois aux dispositions du présent alinéa, ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret. Cet engagement prévoit, en outre, que la location ne peut être conclue avec un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant du contribuable, ou, si le logement est la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, l'un de ses associés ou un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant d'un associé. »
« B. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° II-59 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement de notre collègue Jacques Pelletier a semblé tout à fait opportun à la commission, car il vise à étendre le bénéfice du régime dit « Besson », pour le logement ancien, aux baux conclus, reconduits ou renouvelés avec une personne occupant déjà le logement, lorsque cette personne respecte les conditions de ressources prévues par le régime.
Il s'agit donc d'étendre au logement ancien le régime de la loi « Besson », et de favoriser ainsi le succès de cette formule destinée aux logements intermédiaires.
Toutefois, monsieur le président, et pour tenir compte du fait que, lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, nous avons souhaité étendre le régime Besson aux locaux loués à un ascendant ou à un descendant du contribuable concerné, je rectifie cet amendement afin de supprimer par deux fois, dans le texte proposé par l'alinéa 2° du paragraphe A, les mots : « , un ascendant ou un descendant ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-59 rectifié bis , présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, et visant à insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le cinquième alinéa du e du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° La première phrase est complétée in fine par les mots : "ou reconduit ou renouvelé à compter du 1er janvier 2000".
« 2° La troisième phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Cet engagement prévoit que le loyer et les ressources du locataire, qu'il a perçues pendant l'avant-dernière année précédant celle au titre de laquelle la location avec ce locataire ouvre droit pour la première fois aux dispositions du présent alinéa, ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret. Cet engagement prévoit, en outre que la location ne peut être conclue avec un membre du foyer fiscal du contribuable, ou, si le logement est la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, l'un de ses associés ou un membre du foyer fiscal d'un associé. »
« B. - Les pertes de recettes sont compensées, à due concurrence, par une majoration des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement. Cette mesure procurerait en effet au bailleur, dont le contrat de location et le locataire remplissent déjà les conditions prévues pour le faire bénéficier de la déduction forfaitaire majorée de 25 %, un avantage fiscal important dépourvu de toute utilité incitative.
En outre, l'exclusion des locations en cours permet d'étaler la montée en puissance, et donc le coût budgétaire, d'un dispositif qui, à terme, compte tenu du taux de rotation des locataires, devrait concerner une part très importante du parc locatif.
Je ne doute pas des bonnes intentions de M. Pelletier ni de celles de M. le rapporteur général, mais je tiens à préciser que tout avantage fiscal important doit avoir pour contrepartie un effort du contribuable en direction du logement intermédiaire. En l'absence d'un réel sacrifice, l'avantage fiscal constituerait une aubaine.
J'ajoute que le dispositif Besson vient tout juste de naître et qu'il faut donc le laisser vivre avant d'envisager de le corriger.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Je suis désolé d'insister, mais il nous faut attirer régulièrement l'attention des gouvernements, quels qu'ils soient, sur la situation du logement ancien. Une sorte de fatalité pèse en effet, dans notre pays, sur ce type de logements : tout pour le neuf, rien pour l'ancien ! C'est une obsession !
Or, le logement ancien, en particulier la catégorie à laquelle s'est référé M. le rapporteur général tout à l'heure, est précisément celui qu'il faut inciter les propriétaires soit à conserver dans leur patrimoine, soit à acquérir pour le réhabiliter et le remettre à la disposition de locataires de condition modeste, dans la mesure où il s'agit de loyers plafonnés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes issu d'un terroir que je connais. Vous ne pouvez pas me laisser penser que vous estimez plus adapté et plus conforme aux besoins des familles d'être « stockées », dirai-je, dans des immeubles collectifs de type HLM, construits voilà vingt-cinq ou trente ans et qui ont, hélàs ! produit les dégâts sociaux que nous connaissons.
Parallèlement, en tout cas dans une région que vous connaissez bien et qui est proche de la vôtre, il existe des logements anciens de qualité qui ne sont plus en état d'être habités. Il faut donc impérativement inciter les propriétaires à les réhabiliter, à les remettre sur le marché locatif et à les louer à des conditions qui répondent aux normes fixées par l'Etat pour les locataires de condition modeste. C'est de cela qu'il s'agit.
Cet amendement vise donc à atteindre en même temps deux objectifs utiles : d'une part, loger des ménages aux revenus modestes dans d'excellentes conditions ; d'autre part, permettre la réhabilitation du patrimoine de la France.
Vous allez nous dire qu'il est déjà beaucoup fait. Mais curieusement, il est tellement fait que force est de constater que les mesures prises n'ont pas l'effet attendu !
Faisons donc ce qu'il faut. Prenons des dispositions pour que ces logements puissent être réhabilités, pour que les familles qui les recherchent les trouvent sur le marché locatif aux meilleures conditions. Et vous aurez alors vraiment fait progresser les choses.
Les réponses qui nous sont apportées sont toujours les mêmes. Elles ne nous donnent pas satisfaction. Croyez bien que nous n'avons pas du tout le sentiment d'être à côté de la réalité parce que les Français, eux, ne se trompent pas et ne comprennent rien aux réponses données par le Gouvernement. Ils attendent des logements anciens réhabilités ouverts précisément aux familles de condition modeste. Tel est l'objet de l'amendement n° II-59 rectifié bis, qu'a bien fait de reprendre M. le rapporteur général.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je suis naturellement sensible à l'expérience partagée à laquelle M. le président de la commission des finances a fait allusion. Je ne peux néanmoins pas laisser dire que rien ne serait fait pour l'ancien et que tout serait fait pour le neuf !
Permettez-moi de rappeler certaines des mesures qui ont été prises depuis juin 1997 et auxquelles les Français, me semble-t-il, comprennent quelque chose : la baisse de 60 % des frais de notaire et la baisse de la TVA sur les logements, qui représente 20 milliards de francs, sont des mesures extrêmement concrètes en direction des logements dont vous parliez. Cela faisait bien longtemps qu'un gouvernement ne s'était pas attaqué à cette question de façon aussi dynamique !
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Cela n'a rien à voir avec le marché locatif !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Rien à voir !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Si !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-59 rectifié bis.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je suis étonné des arguments utilisés par M. le secrétaire d'Etat. Il considère qu'il ne serait pas normal d'accorder l'avantage en question aux bailleurs qui sont visés par cet amendement sous prétexte qu'ils ne feraient aucun effort.
S'il s'agit effectivement de faire des travaux, c'est autre chose ; mais s'il s'agit des logements soumis à la loi Besson, un propriétaire qui accepte de mettre à la disposition du locataire un logement sous condition de ressources, selon des conditions bien déterminées et avec un loyer plafonné, consent bien, à mon avis, un effort ; si vous ne considérez pas que c'en est un, je voudrais bien savoir ce que c'est !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Exactement !
M. Jean Chérioux. Je pense que, s'agissant des logements à loyer modéré, M. le secrétaire d'Etat préfère bien entendu, comme le disait tout à l'heure M. le président de la commission des finances, les grands logements HLM aux petits logements mis à la disposition des locataires dans des conditions aussi avantageuses que les HLM et certainement plus agréables à habiter.
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Exactement !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-59 rectifié bis, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-66, MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Gaillard, Joyandet, Ostermann et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199 terdecies OA du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Au premier alinéa du paragraphe I, le taux : "25 %" est remplacé par le taux : "40 %".
« 2. Le paragraphe II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, les limites mentionnées au premier alinéa sont portées respectivement à 50 000 francs et 100 000 francs.
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter de l'imposition des revenus de 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. Cet amendement tend à rendre plus attractifs les investissements dans les PME par le relèvement des plafonds de la réduction d'impôt pour souscription au capital des PME. Quand on connaît l'importance de tels investissements pour toutes les PME qui manquent de fonds propres, il apparaît qu'il faut vraiment encourager ces souscriptions en capital.
Il est proposé pour cela que le taux de 25 % soit remplacé par le taux de 40 % et, pour les versements réalisés à compter du 1er janvier 1999, que les limites mentionnées au premier alinéa soient portées respectivement à 50 000 francs et à 100 000 francs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission des finances est favorable aux objectifs fixés. Elle est également favorable à la première partie du dispositif, c'est-à-dire le passage du taux de 25 % à celui de 40 %.
En revanche, s'agissant des plafonds, nous avons déjà voté, lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances, un amendement les fixant à 75 000 francs et à 150 000 francs.
Aussi, mon cher collègue, pour que la commission puisse émettre un avis favorable sur cet amendement, je vous invite à le rectifier en en supprimant l'alinéa 2 du paragraphe I.
M. le président. Monsieur Braun, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur général ?
M. Gérard Braun. J'y suis tout à fait favorable, et je rectifie donc mon amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-66 rectifié, présenté par MM. Oudin, Braun, Cazalet, Chaumont, Delong, Gaillard, Joyandet, Ostermann et Trégouët, et tendant à insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 199 terdecies OA du code général des impôts est ainsi modifié :
« Au premier alinéa du paragraphe I le taux : "25 %" est remplacé par le taux : "40 %".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter de l'imposition des revenus de 2000.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Il est défavorable, pour des raisons qui ont été déjà largement expliquées lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-66 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-48, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 220 quinquies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le quatrième alinéa du I est ainsi rédigé :
« La créance est remboursée l'année suivant celle de la clôture de l'exercice au cours duquel l'option visée au premier alinéa a été exercée. »
« 2° Le cinquième alinéa du I est supprimé.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je rappelle que le régime dit « de l'imputation en arrière » - je n'ose parler de carry-back en la présence de notre collègue Emmanuel Hamel ! (Sourires) - s'applique lorsque les résultats d'un exercice sont déficitaires alors que ceux des exercices antérieurs ont été bénéficiaires. Dans ce cas, et depuis 1985, les sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés ont la possibilité d'imputer le déficit en question sur les bénéfices des exercices précédents.
A l'étranger, lorsque de tels régimes existent - et je pense, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous y êtes sensible puisque vous êtes en charge du commerce extérieur, donc de la compétitivité des entreprises - le Trésor rembourse aussitôt l'impôt antérieurement versé, ce qui apporte un ballon d'oxygène à la trésorerie de l'entreprise, d'autant plus appréciable que celle-ci connaît par définition à ce moment-là des difficultés financières.
Le régime en vigueur en France est moins favorable puisqu'il aboutit seulement à la constatation d'une créance fiscale imputable sur les impôts futurs ou remboursable cinq ans plus tard si aucun bénéfice susceptible de permettre l'imputation n'a été réalisé. Théoriquement, la créance peut être cédée à titre de garantie à un établissement de crédit selon la procédure prévue par la loi Dailly, mais une telle mobilisation est peu usitée, voire quasiment jamais opérée.
L'amendement n° II-48 vise à permettre aux entreprises de se voir rembourser immédiatement la créance née du report en arrière du déficit. Cette mesure aurait, selon nous, un impact budgétaire limité, car le stock actuel de créances est évalué, nous dit-on, à 150 millions de francs environ. Elle permettrait de préserver la situation d'entreprises qui ont des besoins de trésorerie pour faire face, à la suite d'un retournement de la conjoncture, à des restructurations ou à des redéploiements dans une période difficile de leur existence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le dispositif du report en arrière des déficits procure déjà des avantages financiers importants ; la créance de l'Etat résultant du report en arrière améliore les résultats de l'entreprise et contribue au renforcement des fonds propres. Ce dispositif prévoit le remboursement de la créance au terme d'un délai de cinq ans et permet ainsi de tenir compte de la situation des entreprises qui connaissent des difficultés sur une longue période.
L'objectif du dispositif est donc rempli. Aller au-delà poserait un problème de principe en rompant le parallélisme qui existe entre le report en arrière et le report en avant des déficits.
Enfin, en ce qui concerne le coût budgétaire de l'amendement n° II-48, j'indiquerai simplement que, quoi qu'il en soit, le Gouvernement a d'autres priorités en matière de réduction d'impôts. L'impôt sur les sociétés n'est en effet pas le plus injuste.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-48.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement n° II-48 s'inscrit dans la droite ligne des amendements défendus tout à l'heure par M. le rapporteur général lors de l'examen de l'article 58. Il présente la même sollicitude en faveur de l'allégement de l'impôt sur les sociétés.
M. Philippe Marini. C'est la réaction en marche !
Mme Marie-Claude Beaudeau. En l'occurrence, il s'agit de nous inviter à accélérer le remboursement pour les entreprises des déficits fiscaux cumulés dans le cadre du dispositif de report en arrière, dont je conçois qu'il soit difficile à comprendre pour quelques-uns de nos compatriotes. Ce dispositif est d'un coût important pour le budget de l'Etat. Il s'en faut en effet de peu qu'il corrige de quelque 20 milliards de francs le produit de l'impôt sur les sociétés. Et contrairement à ce qui nous est proposé par cet amendement, il ne nous semble pas utile d'en accroître le coût pour les finances publiques.
Vous qui êtes si attentif à la réduction de la dette et des déficits publics, monsieur le rapporteur général, vous devriez tout de même regarder d'un peu plus près à une dépense de 20 milliards de francs. Mais vous avez, en fait, une vision un peu sélective et tronquée de la consistance de ce déficit public et vous oubliez un peu vite que, parmi ses éléments constitutifs, figurent l'abaissement du taux de l'impôt sur les sociétés et l'ensemble des dispositifs qui en ont rabrougri l'assiette, dont le coût cumulé n'a pas que peu participé à la création du déficit et de la dette publique.
Pour quels résultats ? Des créations d'emplois ? Nous les attendons, d'autant que les secteurs dégageant aujourd'hui le plus de valeur ajoutée ne sont pas nécessairement ceux qui créent le plus d'emplois. La santé financière des entreprises ? Assurément, quand on constate que les sociétés non financières ont distribué, en 1998, plus de 500 milliards de francs de dividendes et que la progression de ce prélèvement sur la richesse créée est chaque année plus spectaculaire : il suffit d'observer le CAC 40 !
Nous ne vous suivrons donc pas dans l'adoption de cet amendement, qu'il nous semble d'ailleurs presque indécent de déposer dans le contexte économique que nous connaissons, marqué par le maintien d'un haut niveau des profits des entreprises.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un amendement « indécent » !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-48, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-49, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A la fin de la première phrase du b du 1° de l'article 209 OA du code général des impôts, les mots : "ouvrant droit à l'avoir fiscal" sont supprimés.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'ai peur que cet amendement ne soit aussi « indécent » que le précédent ! Mais peut-être Mme Beaudeau animera-t-elle nos débats en expliquant à nouveau son vote ?
Depuis la loi de finances pour 1993, les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés sont, en principe, imposables chaque année au titre de la valorisation des parts d'OPCVM détenues en France ou à l'étranger alors qu'auparavant la plus-value n'était imposable que lors de la cession de ces parts.
Toutefois, et afin de ne pas remettre en cause les efforts visant à renforcer les fonds propres des entreprises, les titres des OPCVM placés en actions sont exemptés de ladite mesure à condition que leur actif soit composé pour 90 % au moins d'actions ou de certificats d'investissement émis par des sociétés situées dans l'Union européenne et à condition que les dividendes auxquels ils donnent droit soient assortis d'un avoir fiscal.
Ces deux conditions visent à exclure les montages qui reviendraient à transformer des produits d'actions en revenus de taux.
La condition qui impose que les dividendes des actions figurant dans l'actif des OPCVM exonérées ouvrent droit à l'avoir fiscal vise en effet à éviter que les actions logées dans l'organisme de placement collectif recouvrent en réalité d'autres sociétés de capitalisation ayant un actif composé de produits de taux.
Toutefois, cette condition apparaît aujourd'hui démesurément restrictive, puisqu'elle prive du bénéfice de la mesure les organismes de placement collectif dont l'actif est constitué d'actions de sociétés situées dans des Etats membres de l'Union européenne qui n'ont pas institué un crédit d'impôt équivalent à l'avoir fiscal, ce qui est le cas de la plupart des pays européens.
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'année dernière, également dans le cadre de la discussion de la loi de finances, la question avait été posée. Christian Sautter, à l'époque secrétaire d'Etat au budget, avait assuré, pour leur demander de le retirer, les auteurs d'un amendement similaire que l'appel qu'ils avaient lancé avait été entendu.
Un an après, l'appel aura sans doute été entendu et peut-être les travaux de l'administration ont-ils progressé ? Peut-être vous exprimerez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, sur l'orientation qu'il vous paraît souhaitable de suivre pour garantir la compétitivité fiscale et l'équité de traitement entre les OPCVM dont l'actif est constitué d'actions de sociétés françaises et ceux dont l'actif est constitué d'actions des sociétés d'autres pays de l'Union européenne.
Parfaitement averti, monsieur le secrétaire d'Etat, de la problématique de la concurrence fiscale en Europe, vous savez que, dans ce domaine, les choses sont difficiles. Vous avez en mémoire les épisodes récents de la directive traitant de la taxation de certaines catégories de produits d'épargne ! Au regard des décisions récentes de la Commission européenne, peut-être serait-il utile que notre législation fiscale ne crée pas de discriminations entre les placements en actions de sociétés françaises et les autres.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est sensible au problème qui vient d'être soulevé.
Vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur général, l'année dernière, le Gouvernement s'était engagé devant votre assemblée à procéder à un examen approfondi de cette question technique, qui est d'ailleurs d'une grande complexité.
S'il a bien confirmé la réalité des difficultés évoquées, cet examen a aussi mis en évidence l'importance du coût budgétaire de la proposition qui est faite : il s'élève à au moins 2 milliards de francs, ce qui paraît disproportionné par rapport à l'objectif recherché, même si celui-ci est louable.
Dans ces conditions, le Gouvernement suggère le retrait de l'amendement ou, à défaut, son rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-49, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-50 rectifié, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
« A. - L'article 54 septies est ainsi modifié :
« a) Le deuxième alinéa du I est abrogé ;
« b) Le III est ainsi rédigé :
« III. - Pour les scissions de sociétés placées sous le régime prévu aux articles 210 A et 210 B, les sociétés bénéficiaires des apports doivent produire un état indiquant la situation de propriété, au cours de l'exercice, des titres représentatifs des apports que les associés de la société scindée se sont engagés à conserver. Cet état, conforme au modèle fixé par l'administration, doit être joint à leurs déclarations de résultats souscrites au titre de la période couverte par l'engagement de conservation des titres. » ;
« B. - Le dernier alinéa du II de l'article 151 octies est abrogé ;
« C. - L'article 93 quater est ainsi modifié :
« a) Au I ter et au II, les mots : "des quatrième et cinquième alinéas" sont remplacés par les mots : "du dernier alinéa" ;
« b) Le dernier alinéa du V est ainsi rédigé :
« Les personnes placées sous le régime prévu à l'alinéa précédent sont soumises aux obligations définies à l'article 54 septies . » ;
« D. - L'article 1734 ter est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, le pourcentage : "1 %" est remplacé par le pourcentage : "5 %" ;
« b) Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« De même, si l'état prévu au I de l'article 54 septies ou au II de l'article 151 octies n'est pas produit au titre de l'exercice au cours duquel est réalisée l'opération visée par ces dispositions ou au titre des exercices ultérieurs, ou si les renseignements qui sont portés sur ces états sont inexacts ou incomplets, il est prononcé une amende égale à 5 % des résultats omis.
« Si l'état prévu au III de l'article 54 septies n'est pas produit au titre d'un exercice ou si les renseignements qui y sont portés sont inexacts ou incomplets, il est prononcé une amende égale à 5 % des résultats de la société scindée non imposés en application des dispositions prévues aux articles 210 A et 210 B. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2000. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article additionnel que nous proposons d'insérer vise les sanctions pour défaut de présentation de l'état de suivi des plus-values en report d'imposition.
Le sujet que nous abordons ici est déjà ancien puisque, dès le mois de mai 1998, lors de l'examen d'un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, le rapporteur général de l'époque, M. Alain Lambert, avait présenté un amendement visant à limiter l'application de ces sanctions au cas où l'état manquant n'aurait pas été souscrit dans les trente jours d'une mise en demeure.
L'amendement que la commission des finances présente aujourd'hui me paraît être le résultat d'une collaboration fructueuse entre les spécialistes de la commission des finances du Sénat et certains des collaborateurs de Bercy.
Cet amendement aurait pu trouver sa place à l'occasion de la discussion de l'article 14 du projet de loi de finances rectificative que nous examinerons la semaine prochaine, lequel article réforme profondément les conditions d'exercice des professions libérales, mais nous considérons que cette seconde partie du projet de loi de finances peut tout aussi bien constituer un support approprié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, votre amendement initial rejoignait les intentions du Gouvernement, mais il avait semblé à ce dernier que le dispositif technique proposé méritait d'être amélioré.
En revanche, dans sa nouvelle rédaction corrigée, qui assouplit les conséquences en termes de taxation tout en maintenant le principe d'une sanction pécuniaire, il nous paraît tout à fait équilibré.
Dans ces conditions le Gouvernement ne peut que l'accepter.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-50 rectifié, accepté par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.
Par amendement n° II-62, Mme Bardou, MM. Jean Faure, Natali, Jarlier, Descours, Braun, Louis Grillot, de Rocca Serra, Carle, Amoudry, Lesbros, Jean Boyer, Besse, Vissac, Blanc, Jourdain, Althapé et Fournier proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1383 C ainsi rédigé :
« Art. 1383 C. - Sauf délibération contraire de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales, à compter du 1er janvier 2000, les immeubles situés dans les zones de revitalisation rurale définies au troisième alinéa de l'article 1465 A et affectés, au 1er janvier 2000, à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle sont exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties pour une durée de cinq ans.
« Pour les immeubles affectés, après le 1er janvier 2000, à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle, l'exonération prévue à l'alinéa précédent s'applique à compter du 1er janvier de l'année qui suit celle où est intervenue cette affectation.
« L'exonération prévue aux premier et deuxième alinéas cesse de s'appliquer à compter du 1er janvier de l'année suivant celle où les immeubles ne sont plus affectés à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle.
« En cas de changement d'exploitant, l'exonération s'applique pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier de l'année suivant celle où est intervenu le changement.
« L'exonération porte sur la totalité de la part revenant à chaque collectivité ou groupement de collectivités territoriales et ne peut avoir pour effet de reporter de plus de cinq ans l'application du régime d'imposition de droit commun.
« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'exonération prévue à l'article 1383 A et celles prévues au présent article sont remplies, le contribuable doit opter pour l'un ou l'autre de ces deux régimes avant le 1er janvier de l'année au titre de laquelle l'exonération prend effet. L'option est irrévocable.
« Les obligations déclaratives des personnes et organismes concernés par les exonérations prévues au présent article sont fixées par décret. »
« II. - L'article 1383 A du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l'exonération prévue à l'article 1383 C et celles prévues au présent article sont remplies, le contribuable doit opter pour l'un ou l'autre de ces deux régimes avant le 1er janvier de l'année au titre de laquelle l'exonération prend effet. L'option est irrévocable. »
« III. - Dans les conditions prévues par la loi de finances, l'Etat compense, chaque année, la perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales ou leurs groupements dotés d'une fiscalité propre de l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties, mentionnée à l'article 1383 C du code général des impôts.
« Le prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale est majoré à due concurrence.
« IV. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. Le présent amendement vise à apporter aux entreprises situées ou ayant des établissements situés dans des zones de revitalisation rurales, les ZRR, un allégement du poids de la fiscalité locale qu'elles supportent au moyen d'une exonération temporaire de la taxe sur le foncier bâti.
Il a pour objet de remédier au caractère largement inopérant du dispositif actuellement en vigueur, lequel est, s'agissant des mesures d'exonérations de fiscalité locale en faveur des zones de revitalisation rurale, circonscrit à la seule taxe professionnelle aux termes de l'article 1465 A du code général des impôts.
Nonobstant une réécriture en faveur du secteur particulier de l'artisanat, opérée à l'occasion de l'élaboration de la loi de finances pour 1998, cet article 1465 A dispose que le bénéfice de l'exonération est conditionné à une taille minimale d'établissement - dans le meilleur des cas, six emplois et 300 000 francs d'investissement - et est réservé aux activités industrielles et de recherches scientifiques et techniques, ainsi qu'aux services de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique.
Il est donc rédigé de telle façon que les mesures qu'il prévoit sont déconnectées de la réalité de la quasi-totalité de l'activité économique à même de se développer en milieu rural défavorisé. Au demeurant, le coût total des compensations de taxe professionnelle dans les ZRR s'élève à 58,4 millions de francs, soit moins du vingtième de ce qu'il représente dans les zones urbaines.
Plutôt qu'une réécriture de l'article 1465 A, laquelle souffrirait nécessairement d'une mauvaise lisibilité à l'égard des entreprises du fait de la réforme de la taxe professionnelle introduite par la loi de finances pour 1999, une exonération de la taxe sur le foncier bâti, à titre temporaire, apparaît préférable. Par ailleurs, elle présente l'avantage de la modération du coût pour le budget de l'Etat.
En acceptant cet amendement, le Gouvernement montrera tout l'intérêt qu'il porte à ces zones particulièrement défavorisées car, si les zones urbaines connaissent des difficultés, il ne faut pas oublier, monsieur le secrétaire d'Etat, les zones rurales et les zones de montagne, qui ont elles aussi besoin d'aides.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, après s'être livrée à quelques recherches du côté de l'Assemblée nationale, a constaté qu'un amendement de même nature avait été présenté en commission des finances par M. Bonrepaux, président de ladite commission, et par son collègue M. Idiart.
Adopté par la commission des finances de l'Assemblée nationale, cet amendement n'a pas été, pour des raisons mystérieuses - en tout cas, nous ne les avons pas élucidées - présenté en séance publique.
Nous estimons, monsieur le secrétaire d'Etat, que, dans un souci de bonne camaraderie envers nos collègues de l'Assemblée nationale, il vous faut accepter cette excellente initiative, qui a été défendue avec talent et conviction par M. Braun.
Il s'agit d'exonérer pendant cinq ans de taxe foncière sur les propriétés bâties les entreprises situées en zone de revitalisation rurale et qui sont assujetties à la taxe professionnelle.
Quant aux entreprises nouvelles ou à celles qui reprennent une entreprise en difficulté, elles devront opter entre ce dispositif et l'exonération de deux ans accordée aux entreprises nouvelles par l'article 1383 A du code général des impôts, l'exonération étant accordée de plein droit, sauf délibération contraire de la collectivité concernée.
Les députés sont partis du constat tout à fait justifié que l'exonération de taxe professionnelle accordée dans ces zones est insuffisante : le dispositif actuel paraît inadapté aux activités installées en milieu rural défavorisé.
La disposition proposée ne coûterait pas très cher à l'Etat, puisqu'elle représenterait une dépense fiscale de l'ordre de 55 millions de francs.
Le Sénat ne pourra donc, je l'espère, qu'adopter cette disposition, sur laquelle la commission des finances a émis un avis favorable.
M. Paul Loridant. Marini, Bonrepaux, même combat ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je veux tout d'abord assurer M. Braun et M. Marini de l'esprit de constante et de bonne camaraderie - doublé de surcroît de bonne convivialité - qui anime le Gouvernement.
Je veux toutefois aussi leur dire que je ne peux être favorable à cet amendement, dont le coût serait proche de 6 milliards de francs, ce qui est considérable.

(M. le rapporteur général s'exclame.)
M. Gérard Braun. Nous n'avons pas les mêmes chiffres !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteurgénéral.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne saurais mettre en doute les estimations des services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, mais 6 milliards de francs supposent un beau dynamisme dans ces zones défavorisées !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Et le gage est le tabac !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il faut savoir de quelles zones on parle. Les ZZR sont strictement définies dans la loi sur l'aménagement du territoire. Si le plateau de Millevaches - n'est-ce pas, M. Moreigne ? - et un certain nombre d'autres zones dans d'autres départements généraient autant de bases fiscales, je crois qu'elles en seraient particulièrement ravies !
Monsieur le secrétaire d'Etat, vos estimations, nous y croirons vraiment le jour où vous nous donnerez votre méthode de travail et de calcul, car il est vraiment trop facile d'asséner de tels chiffres. Disant cela, je ne mets nullement en cause votre probité intellectuelle.
Certes, la Constitution de 1958 laisse déjà relativement peu de marge de manoeuvre au législatif par rapport à l'exécutif.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. C'est vous qui le dites !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous vivons cette réalité au quotidien - et elle ne peut être contestée. Mais au moins faudrait-il qu'il y ait un partage du savoir afin que le législateur puisse faire et soutenir des propositions en toute connaissance de leurs coûts.
Monsieur le secrétaire d'Etat, cette remarque de méthode que je me suis permis de faire valoir, sur cet amendement, se veut de portée générale.
M. Gérard Braun. Très bien !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, il n'est pas dans mes intentions de martyriser les consciences collectives. (Sourires.) Nous vous fournirons les éléments et la méthode qui ont permis d'aboutir à ce chiffrage.
M. Gérard Braun. Parfait !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-62.
M. Michel Moreigne. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Moreigne.
M. Michel Moreigne. M. le rapporteur général m'a fait un grand honneur tout à l'heure en citant le plateau de Millevaches. Je tiens tout de même à lui préciser que ce plateau ne m'appartient pas tout entier (Sourires) , la Corrèze en possède la plus grande partie.
Cela étant, je voudrais dire à M. le secrétaire d'Etat que la préoccupation qu'exprime l'amendement n° II-62 n'est pas illégitime. Je souhaiterais donc que le Gouvernement étudie cette proposition avec la plus grande attention, bien que je comprenne, vu son coût, qu'il ne puisse lui donner aujourd'hui une suite favorable.
Néanmoins, il s'agit là d'une grande préoccupation qui a été exprimée par les zones de revitalisation rurale. Et même si la Creuse ne compte sur son territoire qu'une petite fraction du plateau de Millevaches - qui vit d'ailleurs très bien - monsieur le secrétaire d'Etat, je vous prie d'étudier ce dossier, avec le Gouvernement, en y portant l'intérêt qu'il mérite.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je serais tenté de demander le retrait de cet amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, sous réserve que vos services acceptent de nous transmettre, comme vous avez bien voulu l'accepter tout à l'heure, tous les éléments de méthodologie permettant de calculer la moins-value fiscale de 6 milliards de francs. A partir de ces éléments de calcul, nous pourrions naturellement, pour d'autres textes, retailler une mesure qui, si nous validons l'estimation considérable que vous avez donnée, pourrait devenir une mesure plus acceptable budgétairement, ou susceptible d'être absorbée par fraction sur une certaine période.
Si nous sommes d'accord sur l'objectif, nous devons pouvoir trouver un chemin pour l'atteindre. Cette disposition est susceptible de s'appliquer, notamment aux zones défavorisées du Massif central, mais également à celles de l'Ariège ou d'autres beaux départements ruraux de notre beau pays.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ou de la Lozère !
M. Gérard Braun. Ou des Vosges !
M. le président. Monsieur Braun, l'amendement n° II-62 est-il maintenu ?
M. Gérard Braun. Je maintiens cet amendement, mais cela n'empêche absolument pas le Gouvernement - et je rejoins là tout à fait M. le rapporteur général - de nous fournir tous les éléments et d'établir cette méthodologie de travail tout à fait intéressante entre le Gouvernement et le Parlement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-62, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 58.

Article 59



M. le président.
« Art. 59. _ L'avant-dernier alinéa de l'article 199 quater F du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné à la condition que soient mentionnés sur la déclaration des revenus, pour chaque enfant concerné, ses nom et prénom, le nom de l'établissement scolaire et la classe qu'il fréquente ou le nom de l'établissement supérieur dans lequel il est inscrit. » - (Adopté.)

Article 60



M. le président.
« Art. 60. _ I. _ Avant l'article 150 A du code général des impôts, il est inséré les articles 150-0 A, 150-0 B, 150-0 D et 150-0 E ainsi rédigés :
« Art. 150-0A . _ I. _ 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 A bis, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 50 000 francs par an.
« Toutefois, en cas d'intervention d'un événement exceptionnel dans la situation personnelle, familiale ou professionnelle des contribuables, le franchissement de la limite précitée de 50 000 francs est apprécié par référence à la moyenne des cessions de l'année considérée et des deux années précédentes. Les événements exceptionnels doivent notamment s'entendre de la mise à la retraite, du chômage, du redressement ou de la liquidation judiciaires ainsi que de l'invalidité ou du décès du contribuable ou de l'un ou l'autre des époux soumis à une imposition commune.
« 2. Le complément de prix reçu par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux par laquelle le cessionnaire s'engage à verser au cédant un complément de prix exclusivement déterminé en fonction d'une indexation en relation directe avec l'activité de la société dont les titres sont l'objet du contrat, est imposable au titre de l'année au cours de laquelle il est reçu, quel que soit le montant des cessions au cours de cette année.
« 3. Lorsque les droits détenus directement ou indirectement par le cédant avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants dans les bénéfices sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et ayant son siège en France ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années, la plus-value réalisée lors de la cession de ces droits, pendant la durée de la société, à l'une des personnes mentionnées au présent alinéa, est exonérée si tout ou partie de ces droits sociaux n'est pas revendu à un tiers dans un délai de cinq ans. A défaut, la plus-value est imposée au nom du premier cédant au titre de l'année de la revente des droits au tiers.
« II. _ Les dispositions du I sont applicables :
« 1. Au gain net retiré des cessions d'actions acquises par le bénéficiaire d'une option accordée dans les conditions prévues aux articles 208-1 à 208-8-2 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ;
« 2. Au gain net réalisé depuis l'ouverture du plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D en cas de retrait de titres ou de liquidités ou de rachat avant l'expiration de la cinquième année dans les mêmes conditions. Pour l'appréciation de la limite de 50 000 francs mentionnée au 1 du I, la valeur liquidative du plan ou la valeur de rachat pour un contrat de capitalisation à la date de sa clôture est ajoutée au montant des cessions réalisées en dehors du plan au cours de la même année ;
« 3. Au gain net retiré des cessions de titres de sociétés immobilières pour le commerce et l'industrie non cotées ;
« 4. Au gain net retiré des rachats d'actions de sociétés d'investissement à capital variable et au gain net résultant des rachats de parts de fonds communs de placement définis au 2 du III ou de la dissolution de tels fonds ;
« 5. Au gain net retiré des cessions de parts des fonds communs de créances dont la durée à l'émission est supérieure à cinq ans.
« III. _ Les dispositions du I ne s'appliquent pas :
« 1. Aux cessions et aux rachats de parts de fonds communs de placement à risques mentionnées à l'article 163 quinquies B, réalisés par les porteurs de parts, remplissant les conditions fixées aux I et II de l'article précité, après l'expiration de la période mentionnée au I du même article. Cette disposition n'est pas applicable si, à la date de la cession ou du rachat, le fonds a cessé de remplir les conditions énumérées au 1° et au 1° bis du II de l'article 163 quinquies B ;
« 2. Aux titres cédés dans le cadre de leur gestion par les autres fonds communs de placement sous réserve qu'aucune personne physique agissant directement ou par personne interposée ne possède plus de 10 % des parts du fonds ;
« 3. Aux titres cédés dans le cadre de leur gestion par les fonds communs de placement, constitués en application des législations sur la participation des salariés aux résultats des entreprises et les plans d'épargne d'entreprise ainsi qu'aux rachats de parts de tels fonds ;
« 4. A la cession des titres acquis dans le cadre de la législation sur la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et sur l'actionnariat des salariés, à la condition que ces titres revêtent la forme nominative et comportent la mention d'origine ;
« 5. A la cession de titres effectuée dans le cadre d'un engagement d'épargne à long terme lorsque les conditions fixées par l'article 163 bis A sont respectées ;
« 6. Aux profits réalisés dans le cadre des placements en report par les contribuables qui effectuent de tels placements.
« Art. 150-0B . _ Les dispositions de l'article 150-0A ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable, de conversion, de division, ou de regroupement, réalisée conformément à la réglementation en vigueur ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés.
« Les échanges avec soulte demeurent soumis aux dispositions de l'article 150-0 A lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus. »
« Art. 150-0D . _ 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation.
« 2. Le prix d'acquisition des titres ou droits à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain net de cession des titres ou droits concernés est, le cas échéant, augmenté du complément de prix mentionné au 2 du I de l'article 150-0A.
« 3. En cas de cession d'un ou plusieurs titres appartenant à une série de titres de même nature acquis pour des prix différents, le prix d'acquisition à retenir est la valeur moyenne pondérée d'acquisition de ces titres.
« Le détachement de droits de souscription ou d'attribution emporte les conséquences suivantes :
« a) Le prix d'acquisition des actions ou parts antérieurement détenues et permettant de participer à l'opération ne fait l'objet d'aucune modification ;
« b) Le prix d'acquisition des droits détachés est, s'ils font l'objet d'une cession, réputé nul ;
« c) Le prix d'acquisition des actions ou parts reçues à l'occasion de l'opération est réputé égal au prix des droits acquis dans ce but à titre onéreux, augmenté, s'il y a lieu, de la somme versée par le souscripteur.
« 4. Pour l'ensemble des titres admis aux négociations sur un marché réglementé acquis avant le 1er janvier 1979, le contribuable peut retenir, comme prix d'acquisition, le cours au comptant le plus élevé de l'année 1978.
« Pour l'ensemble des valeurs françaises à revenu variable, il peut également retenir le cours moyen de cotation au comptant de ces titres pendant l'année 1972.
« Ces dispositions ne sont pas applicables lorsque la cession porte sur des droits sociaux qui, détenus directement ou indirectement dans les bénéfices sociaux par le cédant ou son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants, ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années. Pour ces droits, le contribuable peut substituer au prix d'acquisition la valeur de ces droits au 1er janvier 1949 si elle est supérieure.
« 5. En cas de cession de titres après la clôture d'un plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D ou leur retrait au-delà de la huitième année, le prix d'acquisition est réputé égal à leur valeur à la date où le cédant a cessé de bénéficier, pour ces titres, des avantages prévus aux 5° bis et 5° ter de l'article 157 et au IV de l'article 163 quinquies D.
« 6. Le gain net réalisé depuis l'ouverture du plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D s'entend de la différence entre la valeur liquidative du plan ou la valeur de rachat pour les contrats de capitalisation à la date du retrait et le montant des versements effectués sur le plan depuis la date de son ouverture.
« 7. Le prix d'acquisition des titres acquis en vertu d'un engagement d'épargne à long terme est réputé égal au dernier cours coté au comptant de ces titres précédant l'expiration de cet engagement.
« 8. Le gain net mentionné au 1 du II de l'article 150-0A est constitué par la différence entre le prix effectif de cession des actions, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et le prix de souscription ou d'achat.
« Le prix d'acquisition est, le cas échéant, augmenté du montant mentionné à l'article 80 bis imposé selon les règles prévues pour les traitements et salaires.
« Pour les actions acquises avant le 1er janvier 1990, le prix d'acquisition est réputé égal à la valeur de l'action à la date de la levée de l'option.
« 9. En cas de vente ultérieure de titres reçus à l'occasion d'une opération mentionnée à l'article 150-0B, le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange.
« 10. En cas d'absorption d'une société d'investissement à capital variable par un fonds commun de placement réalisée conformément à la réglementation en vigueur, les gains nets résultant de la cession ou du rachat des parts reçues en échange ou de la dissolution du fonds absorbant sont réputés être constitués par la différence entre le prix effectif de cession ou de rachat des parts reçues en échange, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et le prix de souscription ou d'achat des actions de la société d'investissement à capital variable absorbée remises à l'échange.
« 11. Les moins-values subies au cours d'une année sont imputables exclusivement sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des cinq années suivantes.
« 12. Les pertes constatées en cas d'annulation de valeurs mobilières, de droits sociaux, ou de titres assimilés sont imputables, dans les conditions mentionnées au 11, à compter de l'année au cours de laquelle intervient soit la réduction du capital de la société, en exécution d'un plan de redressement mentionné aux articles 69 et suivants de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, soit la cession de l'entreprise ordonnée par le tribunal en application des articles 81 et suivants de la même loi, soit le jugement de clôture de la liquidation judiciaire.
« Ces dispositions ne s'appliquent pas :
« a) Aux pertes constatées afférentes à des valeurs mobilières ou des droits sociaux annulés détenus, dans le cadre d'engagements d'épargne à long terme définis à l'article 163 bis A, dans un plan d'épargne d'entreprise mentionné à l'article 163 bis B ou dans un plan d'épargne en actions défini à l'article 163 quinquies D ;
« b) Aux pertes constatées par les personnes à l'encontre desquelles le tribunal a prononcé au titre des sociétés en cause l'une des condamnations mentionnées aux articles 180, 181, 182, 188, 189, 190, 192, 197 ou 201 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 précitée.
« 13. L'imputation des pertes mentionnées au 12 est opérée dans la limite du prix effectif d'acquisition des titres par le cédant ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, de la valeur retenue pour l'assiette des droits de mutation. Lorsque les titres annulés ont été reçus, à compter du 1er janvier 2000, dans le cadre d'une opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0B, le prix d'acquisition à retenir est celui des titres remis à l'échange, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange.
« La perte nette constatée est minorée, en tant qu'elle se rapporte aux titres annulés, du montant :
« a) Des apports remboursés ;
« b) De la déduction prévue à l'article 163 septdecies ;
« c) De la déduction opérée en application de l'article 163 octodecies A.
« 14. Par voie de réclamation présentée dans le délai prévu au livre des procédures fiscales en matière d'impôt sur le revenu, le prix de cession des titres ou des droits retenu pour la détermination des gains nets mentionnés au 1 du I de l'article 150-0A est diminué du montant du versement effectué par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession par laquelle le cédant s'engage à reverser au cessionnaire tout ou partie du prix de cession en cas de révélation, dans les comptes de la société dont les titres sont l'objet du contrat, d'une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou d'une surestimation de valeurs d'actif figurant au bilan de cette même société à la date de la cession.
« Le montant des sommes reçues en exécution d'une telle clause de garantie de passif ou d'actif net diminue le prix d'acquisition des valeurs mobilières ou des droits sociaux à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain net de cession des titres concernés.
« Art. 150-0E . _ Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0A doivent être déclarés dans les conditions prévues au 1 de l'article 170. »
« II. _ Le code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. L'article 92 B decies devient l'article 150-0 C et est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa du 1, la référence : "92 B" est remplacée par la référence : "150-0A" ;
« b) Le 6 est ainsi rédigé :
« 6. A compter du 1er janvier 2000, lorsque les titres reçus en contrepartie de l'apport font l'objet d'une opération d'échange dans les conditions du quatrième alinéa de l'article 150 A bis ou dans les conditions prévues à l'article 150-0B, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée en application du 1 est reportée de plein droit au moment où s'opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus. ;
« c) Le 7 est abrogé.
« 2. Au premier alinéa de l'article 96 A, les mots : "et aux articles 92 B et 92 F" sont supprimés.
« 3. Au 6° de l'article 112, les mots : "92 B ou 160" sont remplacés par les mots : "150-0 A ou 150 A bis ".
« 4. Au premier alinéa de l'article 124 C, les mots : "aux 1 et 2 de l'article 94 A" sont remplacés par les mots : "aux 1 et 2 de l'article 150-0D".
« 5. Au deuxième alinéa de l'article 150 quinquies, au 3 de l'article 150 nonies et au 3 de l'article 150 decies , les mots : "6 de l'article 94 A" sont remplacés par les mots : "11 de l'article 150-0 D".
« 6. Au 2 de l'article 150 undecies, les mots : "aux 1 et 2 de l'article 94 A" sont remplacés par les mots : "aux 1 et 2 de l'article 150-0D".
« 7. L'article 150 A bis est ainsi modifié :
« a) Au deuxième alinéa, les mots : "de l'article 92 C" sont remplacés par les mots : "du 3 du II de l'article 150-0A" ;
« b) Au troisième alinéa, après les mots : "En cas d'échange de titres résultant d'une fusion, d'une scission ou d'un apport", sont insérés les mots : "réalisé antérieurement au 1er janvier 2000" ;
« c) Après le troisième alinéa, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés ;
« A compter du 1er janvier 2000, les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables, au titre de l'année de l'échange des titres, aux plus-values réalisées dans le cadre d'une opération de fusion, de scission ou d'un apport de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés. Cette exception n'est pas applicable aux échanges avec soulte lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus.
« A compter du 1er janvier 2000, lorsque les titres reçus dans les cas prévus au troisième alinéa font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les conditions du quatrième alinéa ou dans les conditions prévues à l'article 150-0B, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée est reportée de plein droit au moment où s'opérera la cession, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus. »
« 8. Il est créé un article 150 H bis ainsi rédigé :
« Art. 150 H bis . _ En cas de vente ultérieure de titres reçus à l'occasion d'une opération mentionnée au quatrième alinéa de l'article 150 A bis, la plus-value imposable en application du premier alinéa du même article est calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange. »
« 9. A l'article 160 quater , les mots : "article 160" sont remplacés par les mots : "article 150-0A lorsque ces actions ou parts sont détenues dans les conditions du f de l'article 164 B".
« 10. Le premier alinéa de l'article 161 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque les droits ont été reçus, à compter du 1er janvier 2000, dans le cadre d'une opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0 B, le boni est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres ou droits remis à l'échange, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange. »
« 11. Au premier alinéa de l'article 163 bis C, les mots : "92 B, 150 A bis ou 160" sont remplacés par les mots : "150-0A ou 150 A bis ".
« 12. Au deuxième alinéa de l'article 163 bis D, à l'article 163 bis E et à l'article 163 bis F, les mots : "94 A" sont remplacés par les mots : "150-0D".
« 13. Au premier alinéa du I de l'article 163 bis G, les mots : "aux articles 92 B, 92 J ou 160," sont remplacés par les mots : "à l'article 150-0A".
« 14. Au premier alinéa du 1 du II de l'article 163 quinquies D, les mots : "au 2° de l'article 92 D" sont remplacés par les mots : "au 3 du III de l'article 150-0A".
« 15. Le f de l'article 164 B est ainsi rédigé :
« f) Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0A et résultant de la cession de droits sociaux, lorsque les droits détenus directement ou indirectement par le cédant avec son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants dans les bénéfices sociaux d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés et ayant son siège en France ont dépassé ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq dernières années.
« 16. Au 1 du I de l'article 167 bis, les mots : "l'article 160" sont remplacés par les mots : "l'article 150-0A et détenus dans les conditions du f de l'article 164 B".
« 17. L'article 200 A est ainsi modifié :
« a) Au 2, les mots : "aux articles 92 B et 92 F" sont remplacés par les mots : "à l'article 150-0A" ;
« b) Au 5, les mots : "à l'article 92 B ter " sont remplacés par les mots : "au 2 du II de l'article 150-0A" ;
« c) L'article est complété par un 7 ainsi rédigé ;
« 7. Le taux prévu au 2 est réduit de 30 % dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion et de 40 % dans le département de la Guyane pour les gains mentionnés à l'article 150-0A résultant de la cession de droits sociaux détenus dans les conditions du f de l'article 164 B. Les taux résultant de ces dispositions sont arrondis, s'il y a lieu, à l'unité inférieure. »
« 18. A l'article 238 bis HK et à l'article 238 bis HS, les mots : "aux articles 92 B et 160" sont remplacés par les mots : "à l'article 150-0 A".
« 19. L'article 238 septies A est complété par un V ainsi rédigé :
« V. _ Lorsque les titres ou droits mentionnés au II et au III ont été reçus, à compter du 1er janvier 2000, dans le cadre d'une opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0B, la prime de remboursement mentionnée au II est calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres ou droits remis à l'échange, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée. »
« 20. Le premier alinéa de l'article 244 bis B est ainsi rédigé :
« Les gains mentionnés à l'article 150-0A résultant de la cession de droits sociaux détenus dans les conditions du f de l'article 164 B réalisés par des personnes physiques qui ne sont pas domiciliées en France au sens de l'article 4 B ou par des personnes morales ou organismes quelle qu'en soit la forme, ayant leur siège social hors de France, sont déterminés et imposés selon les modalités prévues aux articles 150-0 A à 150-0 E. »
« 21. Le premier alinéa de l'article 244 bis C est ainsi rédigé :
« Sous réserve des dispositions de l'article 244 bis B, les dispositions de l'article 150-0A ne s'appliquent pas aux plus-values réalisées à l'occasion de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières ou de droits sociaux effectuées par les personnes qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B, ou dont le siège social est situé hors de France. »
« 22. L'article 248 B est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, les mots : ", 92 B et 160" sont remplacés par les mots : "et 150-0A" ;
« b) Les deuxième, troisième et quatrième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé. »
« En cas de vente des titres reçus en échange, la plus ou moins-value est calculée à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres ayant ouvert droit à l'indemnisation. »
« 23. L'article 248 F est ainsi modifié :
« a) Au premier alinéa, les mots : "des articles 92 B et 160" sont remplacés par les mots : "de l'article 150-0A" ;
« b) Au deuxième alinéa, l'avant-dernière phrase est supprimée.
« 24. A l'article 248 G, les mots : "Les dispositions du II de l'article 92 B" sont remplacés par les mots : "Les dispositions de l'article 150-0B".
« 25. Au premier alinéa de l'article 1740 septies , les mots : "à l'article 92 B ter " sont remplacés par les mots : "au 2 du II de l'article 150-0A".
« III. _ Le livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
« 1. Au deuxième alinéa de l'article L. 16, après le mot : "impôts", sont insérés les mots : "ainsi que des gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux tels qu'ils sont définis aux articles 150-0A à 150-0E du même code".
« 2. Au 1° de l'article L. 66, les mots : "de l'article 150 S du code général des impôts, les plus-values imposables qu'ils ont réalisées" sont remplacés par les mots : "des articles 150-0E et 150 S du code général des impôts, les gains nets et les plus-values imposables qu'ils ont réalisés".
« 3. Avant le dernier alinéa de l'article L. 73, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4. Les gains de cession de valeurs mobilières ou de droits sociaux des contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 16. »
« IV. _ Le II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et le II de l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale sont ainsi modifiés :
« a) Au 8° , les mots : "à l'article 92 G" sont remplacés par les mots : "au 1 du III de l'article 150-0A" ;
« b) Au 9° , les mots : "5° de l'article 92 D" sont remplacés par les mots : " 5 du III de l'article 150-0A".
« V. _ Les articles 92 B, 92 B bis, 92 B ter, 92 C, 92 D, 92 E, 92 F, 92 G, 92 H, 92 J, 92 K, 94 A et 160 du code général des impôts sont abrogés. Ces articles, ainsi que l'article 96 A du même code dans sa rédaction antérieure à la présente loi, demeurent applicables aux plus-values en report d'imposition à la date du 1er janvier 2000. L'imposition de ces plus-values est reportée de plein droit lorsque les titres reçus en échange font l'objet d'une nouvelle opération d'échange dans les conditions prévues à l'article 150-0B du code général des impôts.
« En cas de vente ultérieure de titres reçus avant le 1er janvier 2000 à l'occasion d'une opération de conversion, de division, ou de regroupement ainsi qu'en cas de vente ultérieure de titres reçus, avant le 1er janvier 1992, à l'occasion d'une opération d'offre publique, de fusion, de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable, le gain net est calculé à partir du prix ou de la valeur d'acquisition des titres échangés, diminué de la soulte reçue ou majoré de la soulte versée lors de l'échange.
« VI. _ Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article et notamment les obligations déclaratives incombant aux contribuables, aux intermédiaires ainsi qu'aux personnes interposées.
« VII. _ Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° II-51, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose :
A. - I. - Après les mots : « sont soumis à l'impôt sur le revenu », de rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte présenté par le paragraphe I de l'article 60 pour l'article 150-OA du code général des impôts : « après un abattement de 50 000 francs sur le total imposable des plus-values réalisées au cours d'une même année, après application éventuelle des moins-values prévues au 11 de l'article 150-OD ».
II. - Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 150-OA du code général des impôts, après les mots : « par référence à la moyenne des », d'insérer les mots : « plus-values de ».
B. - Pour compenser les pertes de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du A ci-dessus, de compléter in fine cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« VIII. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'introduction d'un abattement de 50 000 francs sur les plus-values de cession à titre onéreux de valeurs mobilières et de droits sociaux est compensée par le relèvement à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur spécial. L'article 60 est relativement long et complexe puisqu'il comporte 113 alinéas.
M. Paul Loridant. Il y a plus long !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vrai, nous verrons cela tout à l'heure.
Les 113 alinéas ont quatre objectifs : premièrement, l'harmonisation des conditions d'imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux ; deuxièmement, le remplacement du mécanisme du report d'imposition par celui du sursis d'imposition ; troisièmement, la prise en compte fiscale des clauses d'intéressement et de garanties de passif ainsi que l'annulation de titres ; quatrièmement, la modification des modalités de contrôle par l'administration des plus-values de cession.
Dans le rapport écrit, nous nous sommes livrés à de nombreux commentaires sur ce dispositif, et je m'empresse de dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que, dans l'ensemble, nous approuvons ses objectifs. Cet article traite de problèmes bien réels, notamment la prise en compte fiscale des clauses d'intéressement et de garantie de passif lorsqu'une entreprise est vendue à un prix susceptible d'évoluer en fonction de ses résultats futurs. Lorsqu'une entreprise est vendue et que le vendeur donne une garantie de passif, il faut en tenir compte. Jusqu'à présent il y avait, sur le plan fiscal, quelques incertitudes ; ce texte les lèvent. C'est une excellente chose.
Je reviens sur le régime du sursis d'imposition dont le champ d'application est très large. Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous confirmiez que le présent article ne crée aucune distorsion en fonction de la nationalité de la société et que la doctrine administrative ne pourra donc pas exclure du bénéfice du sursis d'imposition les plus-values résultant d'opérations d'échange de titres de sociétés ayant leur siège hors de l'Union européenne.
Cette précision est nécessaire dans la mesure où l'administration fiscale avait estimé, en l'absence même de dispositions expresses, que les fusions portant sur des titres dont la société émettrice est hors de l'Union européenne n'ouvraient pas droit au report d'imposition.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, je regrette que la réforme ait été introduite à droit constant, sans tenir compte des remarques que le conseil des impôts a formulées dans son dernier rapport en ce qui concerne l'inadaptation du seuil d'imposition.
C'est pourquoi je propose, par cet amendement, de remplacer le seuil d'imposition actuel par « un abattement de 50 000 francs sur le total imposable des plus-values réalisées au cours d'une même année ».
C'est un point sur lequel nous devons nous arrêter quelques instants, mes chers collègues. La règle selon laquelle l'impôt est dû au-delà d'un volume de cession de 50 000 francs, outre le chiffre très faible dont il s'agit pour les détenteurs de valeurs mobilières, ne semble pas très défendable d'un point de vue économique car elle s'oppose à la rotation des portefeuilles. Il serait manifestement plus clair de taxer les plus-values réalisées au-delà d'un certain seuil et non pas, comme le prévoit le système actuel, en fonction du volume des cessions réalisées.
Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas favorable à cet amendement. La réforme opérée par l'article 60 du projet de loi de finances est au premier chef une réforme de simplification qui est réalisée à droit constant, vous l'avez d'ailleurs souligné en manifestant votre désaccord, monsieur le rapporteur général.
Ce n'est pas le sens de votre proposition qui, loin de simplifier les obligations déclaratives des contribuables, rend nécessaire la déclaration de toutes les cessions de valeurs immobilières quel qu'en soient leur montant et le montant des plus-values réalisées.
L'avantage fondamental du mécanisme du seuil de cession par rapport à celui de l'abattement est de dispenser de toutes formalités fiscales les titulaires de petits portefeuilles qui ne pratiquent pas une gestion active de leurs titres et ne retirent pas un revenu substantiel des opérations qu'ils réalisent. Nous sommes loin de la simplification voulue par le Gouvernement.
En d'autres termes, votre proposition induit plus de déclarants, plus de formalités pour les contribuables, des opérations plus complexes pour les établissements bancaires qui offrent à leurs clients un service de calcul des plus-values, enfin un alourdissement des charges de gestion des déclarations par l'administration.
Je persiste à penser que le texte proposé par le Gouvernement, et qui a été adopté par l'Assemblée nationale, est meilleur.
Il me semble que l'on pourrait se poser des questions sur l'applicabilité de votre proposition. Comment peut-on, en effet, par le premier alinéa de votre amendement supprimer le seuil de cession puis prévoir dans le second alinéa que le franchissement de cette limite que vous venez de supprimer est apprécié par rapport à la moyenne des plus-values de cession sur les trois années ?
Monsieur le rapporteur général, vous m'avez demandé, par ailleurs, de préciser les conditions d'application du nouveau régime de report au regard des plus-values réalisées sur des titres étrangers. Je ne suis pas maintenant en mesure de vous apporter une réponse, mais je m'engage à vous la transmettre très rapidement.
Vous aurez compris que, pour les raisons que je viens d'évoquer, je souhaite que cet amendement soit retiré. Si tel n'était pas le cas, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-51, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 60, ainsi modifié.

(L'article 60 est adopté.)

Article additionnel après l'article 60



M. le président.
Par amendement n° II-76, M. Loridant propose d'insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier est inséré un article 1er bis ainsi rédigé :
« Art. 1er bis. - I. - Peuvent être autorisées à prendre et à conserver la dénomination de "sociétés de capital-risque" les sociétés françaises par actions qui satisfont aux conditions suivantes :
« 1° Avoir pour objet social la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières. Une société de capital-risque dont le total de bilan n'a pas excédé 10 millions d'euros au cours de l'exercice précédent peut également effectuer à titre accessoire des prestations de services dans le prolongement de son objet social, sous réserve que le montant du chiffre d'affaires hors taxes de ces prestations n'excède pas au cours de l'exercice 50 % des charges, autres que les dotations aux provisions et les charges exceptionnelles, admises en déduction sur le plan fiscal au cours du même exercice.
« L'actif d'une société de capital-risque comprend exclusivement des valeurs mobilières françaises ou étrangères, négociées ou non sur un marché réglementé, des droits sociaux, des avances en compte courant, d'autres droits financiers et des liquidités. L'actif peut également comprendre les biens meubles et immeubles nécessaires à son fonctionnement.
« La situation nette comptable d'une société de capital-risque doit en outre être représentée de façon constante à concurrence de 50 % au moins de parts, actions, obligations convertibles ou titres participatifs de sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger, qui exercent une activité mentionnée à l'article 34 du code général des impôts et qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun au taux normal ou qui y seraient soumises dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France.
« Sont également pris en compte pour le calcul de la proportion de 50 % :
« a) Les parts, actions, obligations convertibles ou titres participatifs des sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger, qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun au taux normal ou qui y seraient soumises dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France, et qui ont pour activité exclusive de gérer des participations :
« - dans des sociétés qui répondent aux conditions prévues pour que leurs titres soient inclus dans le quota de 50 % en cas de participation directe de la société de capital-risque ;
« - ou dans des sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, dont les titres ne sont pas admis à la négociation sur un marché réglementé français ou étranger, qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun au taux normal ou qui y seraient soumises dans les mêmes conditions si l'activité était exercée en France, et qui ont pour activité exclusive de gérer des participations qui répondent aux conditions prévues pour que leurs titres soient inclus dans le quota de 50 % en cas de participation directe de la société de capital-risque ;
« b) Les titres, détenus depuis cinq ans au plus, des sociétés qui, admises aux négociations sur l'un des marchés réglementés de valeurs de croissance de l'Espace économique européen ou un compartiment de valeurs de croissance de ces marchés dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de l'économie, et remplissant les conditions mentionnées au 3e alinéa du 1° ci-dessus autres que celle tenant à la non-cotation, ont procédé à une augmentation en numéraire de leur capital d'un montant au moins égal à 50 % du montant global de l'opération d'introduction de leurs titres, ont obtenu leur première cotation moins de cinq ans avant l'acquisition des actions par la société de capital-risque et ont réalisé un chiffre d'affaires hors taxes inférieur ou égal à soixante-seize millions d'euros au cours du dernier exercice clos avant leur première cotation ;
« c) Dans la limite de 15 % de la situation nette comptable, les avances en compte courant consenties, pour une durée de trois ans au plus, à des sociétés remplissant les conditions pour être retenues dans le quota de 50 % dans lesquelles la société de capital-risque détient au moins 5 % du capital.
« Lorsque les titres d'une société détenus par une société de capital-risque sont admis aux négociations sur un marché réglementé, ils continuent à être pris en compte pour le calcul de la proportion de 50 % pendant une durée de cinq ans à compter de la date de l'admission.
« La proportion de 50 % est atteinte dans un délai de deux ans à compter du début du premier exercice au titre duquel la société a demandé le bénéfice du régime fiscal de société de capital-risque. Pour le calcul de cette proportion, les augmentations de capital d'une société de capital-risque ne sont prises en compte qu'à compter du deuxième exercice suivant celui au cours duquel elles sont réalisées.
« Les participations prises en compte pour la proportion de 50 % ne doivent pas conférer directement ou indirectement à une société de capital-risque ou à l'un de ses actionnaires directs ou indirects la détention de plus de 40 % des droits de vote dans lesdites sociétés ;
« 2° Ne pas procéder à des emprunts d'espèces au-delà de la limite de 10 % de son actif ;
« 3° Une personne physique, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne peuvent pas détenir ensemble, directement ou indirectement, plus de 30 % des droits dans les bénéfices d'une société de capital-risque ;
« 4° L'option pour le régime fiscal des sociétés de capital-risque est exercée avant la date d'ouverture de l'exercice au titre duquel ce régime s'applique, si la société exerce déjà une activité ou, dans le cas contraire, dans les six mois suivant celui de la création de son activité. »
« II. - Le code général des impôts est modifié comme suit :
« 1. Le 5 de l'article 38 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, les sommes correspondant à la répartition, prévue au sixième alinéa de l'article 22 de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances, d'une fraction des actifs d'un fonds commun de placement à risques qui remplit les conditions prévues au II de l'article 163 quinquies B, sont affectées en priorité au remboursement des apports. L'excédent des sommes réparties sur le montant des apports est compris dans le résultat imposable de l'exercice au cours duquel cet excédent apparaît. Il est soumis au régime fiscal des plus-values à long terme dans la proportion existant entre le montant des apports effectués depuis au moins deux ans à la date de la répartition et le montant total des apports effectués à cette même date. »
« 2. L'article 39 terdecies est complété par un 4 bis ainsi rédigé :
« 4 bis . Les distributions par les sociétés de capital-risque qui fonctionnent dans les conditions de l'article 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée sont soumises, lorsque l'actionnaire est une entreprise, au régime fiscal des plus-values à long terme lors de la cession d'actions si la distribution est prélevée sur des plus-values nettes réalisées au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres, cotés ou non cotés, détenus depuis au moins deux ans et de la nature de ceux qui sont retenus pour la proportion de 50 % mentionnée au même article 1 bis.
« 3. Le 2 de l'article 119 bis est complété par les dispositions suivantes :
« La retenue à la source ne s'applique pas aux distributions des sociétés de capital-risque fonctionnant dans les conditions prévues à l'article 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée qui bénéficient à des personnes dont le domicile fiscal ou le siège de direction effective est situé dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales, lorsque :
« a) La distribution est prélevée sur des plus-values nettes réalisées au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres, cotés ou non cotés, de la nature de ceux retenus pour la proportion de 50 % mentionnée à l'article 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée et l'actionnaire, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne détiennent pas ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la société de capital-risque, ou n'ont pas détenu ce montant à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription ou l'acquisition des actions de la société de capital-risque ;
« b) La distribution entre dans les prévisions du 4 bis de l'article 39 terdecies et le bénéficiaire effectif est une personne morale qui ne détient pas, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la société de capital-risque, ou n'a pas détenu ce montant à un moment quelconque au cours des cinq ans précédant la souscription ou l'acquisition des actions de la société de capital-risque. »
« 4. Au III de l'article 150-O A, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. Aux cessions d'actions de sociétés de capital-risque mentionnées au II de l'article 163 quinquies C souscrites ou acquises à compter du 1er janvier 2000, réalisées par des actionnaires remplissant les conditions fixées au II de l'article précité, après l'expiration de la période de cinq ans mentionnée au 2° du même II. Cette disposition n'est pas applicable si, à la date de la cession, la société a cessé de remplir les conditions énumérées à l'article 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée ; ».
« 5. Au II de l'article 163 quinquies B, il est inséré un 1° ter ainsi rédigé :
« 1° ter A compter du 31 décembre 1999, les fonds doivent avoir 50 % de leurs actifs constitués par des titres remplissant les conditions prévues à l'article 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 précitée. »
« 6. L'article 163 quinquies C est ainsi modifié :
« a) Les deux premiers alinéas constituent un I ;
« b) Les troisième et quatrième alinéas constituent un III ;
« c) Le dernier alinéa devient le troisième alinéa du I et les mots : "Les dispositions du présent article" sont remplacés par les mots : "Ces dispositions" ;
« d) Il est créé un II ainsi rédigé :
« II. - Les distributions par les sociétés de capital-risque qui remplissent les conditions prévues à l'article I bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 précitée, prélevées sur des plus-values nettes réalisées au cours des exercices clos à compter du 31 décembre 2000 provenant de titres, cotés ou non cotés, de la nature de ceux retenus pour la proportion de 50 % mentionnée au même article 1 bis sont soumises, lorsque l'actionnaire est une personne physique, au taux d'imposition prévu au 2 de l'article 200 A.
« Toutefois, les distributions prélevées sur les bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet social défini à l'article 1er bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée sont exonérées lorsque les conditions suivantes sont remplies :
« 1° L'actionnaire a son domicile fiscal en France ou dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ;
« 2° L'actionnaire conserve ses actions pendant cinq ans au moins à compter de leur souscription ou acquisition ;
« 3° Les produits sont immédiatement réinvestis pendant la période mentionnée au 1° dans la société soit sous la forme de souscription ou d'achat d'actions, soit sur un compte bloqué ; l'exonération s'étend alors aux intérêts du compte, lesquels sont libérés à la clôture de ce dernier ;
« 4° L'actionnaire, son conjoint et leurs ascendants et descendants ne détiennent pas ensemble, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices de sociétés dont les titres figurent à l'actif de la société de capital-risque, ou n'ont pas détenu cette part à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription ou l'acquisition des actions de la société de capital-risque ».
« 7. Au 3° septies de l'article 208, il est créé un deuxième alinéa ainsi rédigé :
« Les sociétés de capital-risque qui fonctionnent dans les conditions prévues à l'article 1 bis de la loi précitée, sur les produits et plus-values nets provenant de leur portefeuille autres que ceux afférents aux titres rémunérant l'apport de leurs activités qui ne relèvent pas de leur objet social ainsi que, pour les sociétés de capital-risque mentionnées à la deuxième phrase du a du 1 de l'article 1 bis précité, sur les prestations de services accessoires qu'elles réalisent. »
« 8. Au premier alinéa du a ter du I de l'article 219, les mots : "à l'article 1er modifié" sont remplacés par les mots : "aux articles 1er modifié ou 1 bis ".
« 9. Aux articles 238 bis HI et 238 bis HQ, les mots ; "l'article 1er modifié" sont remplacés par les mots : "les articles 1er modifié et 1 bis ".
« III. - Le 8 du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale et le 8° du II de l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale sont ainsi rédigés :
« Les répartitions de sommes ou valeurs effectuées par un fonds commun de placement à risques dans les conditions prévues aux I et II de l'article 163 quinquies B, les distributions effectuées par les sociétés de capital-risque dans les conditions prévues au deuxième alinéa du I et du II de l'article 163 quinquies C, lors de leur versement, ainsi que les gains nets mentionnés au 1 et 1 bis du III de l'article 150-OA ; ».
« IV. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article, notamment les limites dans lesquelles les sociétés de capital-risque peuvent effectuer des prestations de services ainsi que les caractéristiques des participations prises en compte pour la proportion de 50 % mentionnée au 1 bis de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 modifiée et les obligations déclaratives des sociétés de capital-risque et des contribuables.
« V. - Sous réserve des dispositions des 1 et 5 du II, les dispositions du présent article sont applicables aux exercices clos à compter du 31 décembre 2000. L'article 1er modifié de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 cesse de s'appliquer aux exercices clos à compter du 1er janvier 2001.
« VI. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du présent article sont compensées par le relèvement à due concurrence des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Ce modeste amendement technique vise à préciser le régime d'imposition des sommes réparties par un fonds commun de placement à risques.
Les dispositions de l'article 38-5 du code général des impôts sont complétées pour prévoir que les sommes ou valeurs distribuées par un FCPR, un fonds commun de placement à risques, et correspondant au prix de cession de ses titres sont imposables pour la fraction qui excède les apports effectivement libérés non encore amortis et qui seraient remboursés en priorité.
Par suite, le porteur serait imposé sur l'excédent des sommes distribuées sur le montant de son apport au titre de l'exercice au cours duquel cet excédent apparaît.
L'excédent en cause serait soumis au régime des plus-values à long terme dans la proportion existant entre le montant des apports effectués depuis au moins deux ans à la date de distribution et leur montant total à cette même date.
Par ailleurs, les sociétés de capital-risque, les SCR, bénéficient d'un régime fiscal de faveur à condition d'avoir un actif constitué, à concurrence de 50 % au moins, de titres de sociétés non cotées ayant leur siège dans un Etat de l'Union européenne et répondant à certaines conditions.
Mais, à la différence des FCPR, qui bénéficient également d'un régime fiscal de faveur, les SCR sont libres de détenir, en dehors de ce quota de 50 %, des actifs de toute nature et d'exercer diverses activités.
Sur le plan fiscal, cette situation conduit à créer deux secteurs d'activité dans les sociétés de capital-risque. D'une part, un secteur exonéré d'impôt sur les sociétés, restreint à la détention d'un portefeuille de valeurs mobilières et dont le résultat est constitué des seuls produits et plus-values provenant de ce portefeuille. D'autre part, un secteur taxable dans lequel les autres produits et plus-values sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.
La gestion de ce double secteur est difficile et implique la mise en oeuvre de règles particulièrement complexes de répartition de frais et charges, de distribution des produits et de transmission des crédits d'impôt et des avoirs fiscaux.
Or une simplification très profonde du régime fiscal des SCR est possible, mais elle suppose que ces sociétés s'en tiennent à un objet exclusif, analogue à celui des FCPR et de l'ensemble des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, OPCVM. En effet, dans cette nouvelle situation, il serait possible d'accorder aux sociétés de capital-risque une exonération sur la totalité de leurs bénéfices réalisés dans le cadre de leur objet social.
C'est pourquoi je propose de recentrer l'activité des sociétés de capital-risque sur la gestion d'un portefeuille d'investissement à risques. Seuls les SCR de taille modeste, c'est-à-dire dont le total de bilan serait inférieur à dix millions d'euros, seraient autorisées à effectuer à titre accessoire des prestations de services dans le prolongement de leur objet social.
Cette simplification devrait avoir pour résultat de renforcer l'attrait de ces sociétés auprès des investisseurs, tant personnes physiques que personnes morales, et, par conséquent, d'apporter des fonds propres aux petites et moyennes entreprises qui sont, je vous le rappelle, les plus grosses entreprises en termes de création d'emplois.
Je vous propose en outre de prendre en compte pour le calcul de la proportion de 50 % de titres non cotés des SCR et des FCPR : d'une part, les avances en compte consenties à des sociétés éligibles au quota de 50 % et, d'autre part, les participations dans le capital des sociétés holdings communautaires non cotées qui ont pour activité exclusive de gérer des participations dans des sociétés remplissant les conditions pour que leurs titres soient compris dans la proportion de 50 %.
Voilà donc le détail des explications de l'amendement que je vous propose d'adopter. Je tiens à remercier tous ceux qui m'ont aidé à mettre au point ce dispositif très technique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est admirative : il a certainement fallu une équipe nombreuse de spécialistes, sous la direction de M. Paul Loridant, pour aboutir au résultat qui nous est proposé.
Il s'agit, en effet, de réformer les sociétés de capital-risque, leur statut, les règles régissant la répartition de leurs actifs et, bien entendu, leur régime fiscal par un amendement de six pages, qui constitue une véritable proposition de loi !
Je dois d'abord rappeler que le Conseil constitutionnel veille - et cette jurisprudence a été réaffirmée à plusieurs reprises - à ce que les amendements n'excèdent pas une taille raisonnable. Sommes-nous en deçà ou au-delà de la taille raisonnable ? Seuls les sages de la place du Palais-Royal, qui sont huit actuellement, seraient en mesure de répondre à cette question.
Je dois ensuite confesser que la commission n'a pas disposé du temps nécessaire pour entrer dans le détail de ce dispositif...
M. Alain Lambert, président de la commission des finances. Elle n'a pas les troupes de Paul Loridant !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... et il faudrait que nous puissions, au-delà de la période budgétaire, analyser ce sujet très au fond, comme il le mérite, puisque nous partageons très largement les objectifs du dispositif proposé.
Mais, pour autant que ces objectifs soient respectables, puisqu'il s'agit d'étendre le champ des entreprises dans lesquelles les sociétés de capital-risque seraient autorisées à intervenir, il y a sans doute un certain nombre de finesses techniques et de dispositions qu'il nous faudrait, je le répète, pouvoir approfondir comme elles le méritent. Je suggère donc à notre collègue de bien vouloir retirer son amendement.
J'ajoute que M. Loridant pourrait présenter à nouveau cet amendement, au moins en partie, lors de la discussion d'un texte que l'on nous annonce pour l'année prochaine et qui traiterait notamment de l'épargne salariale, mais aussi d'un certain nombre d'instruments de nature à favoriser l'investissement dans le capital des entreprises, notamment des petites et moyennes entreprises auxquelles il a fait allusion.
En l'état, la commission n'est pas en mesure d'émettre un avis favorable et elle souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement partage les motivations de M. Loridant dans son amendement.
Les sociétés de capital-risque sont un facteur essentiel de l'animation économique de notre pays. Il est important qu'elles ne soient pas empêchées, pour des raisons tenant à la complexité du régime d'imposition, de lever, tant auprès des personnes physiques que des personnes morales, les capitaux dont elles ont besoin.
Le Gouvernement est donc heureux de cette simplification qui peut prendre corps aujourd'hui grâce à cet amendement, qui, je le souligne, est très attendu par les professionnels.
Je ne puis donc que recommander au Sénat de l'adopter sans tarder et, bien entendu, je lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° II-76 rectifié.
Je vais le mettre aux voix.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. J'ai bien entendu ce qu'a dit M. le rapporteur général et je reconnais que cet amendement traite d'un problème intéressant. Il n'en demeure pas moins qu'en matière de développement de l'actionnariat il y a bien des choses à faire et qu'il serait préférable que ces dispositions s'insèrent dans un ensemble.
Ce qui m'étonne, c'est la position du Gouvernement : amendement après amendement, à chacune de nos propositions, M. le secrétaire d'Etat a déclaré qu'il fallait attendre la grande réforme que le Gouvernement allait présenter. Je pensais que M. le secrétaire d'Etat adopterait la même attitude à l'égard de l'amendement de M. Loridant. Mais pas du tout ! Il a pris la position inverse !
Je me demande pourquoi il y a deux poids, deux mesures... et je préfère m'en tenir à la position de la commission des finances.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur Chérioux, j'ai bien entendu M. le rapporteur général et M. le président de la commission des finances demander à plusieurs reprises que des mesures soient prises à part...
M. Jean Chérioux. C'est du réchauffé par rapport à mon argumentation, et c'est bien triste !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Non ! monsieur Chérioux, ce n'est pas triste et il ne faudrait pas que vous pensiez que le Gouvernement, parce qu'il considère qu'il y a urgence sur ce point, ne suit pas avec constance la ligne qu'il s'est fixée et qui tend à intégrer vos propositions aux mesures qui seront prises l'année l'année prochaine.
Il me semble par ailleurs que les dérogations demandées par M. le rapporteur général et par M. le président de la commission des finances étaient bien plus importantes.
Nous sommes donc cohérents.
M. Jean Chérioux. C'est une vision globale modulable ! (Sourires.)
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur Chérioux, il ne faut pas faire de crise de jalousie !...
M. Jean Chérioux. Je suis sensible, moi !
M. Paul Loridant. L'opposition sénatoriale dépose un amendement qui vise à favoriser le financement des petites et moyennes entreprises, et vous ne seriez pas sensible à sa démarche !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il est puisé à bonne source ! Il est trop beau pour être vrai !
M. Paul Loridant. Cet amendement très technique, je le reconnais, est attendu par les professionnels et il vise à favoriser l'initiative, je vous invite donc, mes chers collègues, à l'adopter.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-76 rectifié, repoussé par la commission et adopté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 61



M. le président.
« Art. 61. _ Au treizième alinéa du f) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, la date : "1er janvier 2001" est remplacée par la date : "1er juillet 2001". » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 61



M. le président.
Par amendement n° II-75, MM. Ostermann, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont, de Broissia, Oudin et Trégouët proposent d'insérer, après l'article 61, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du b) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est complétée par les mots : "quel que soit leur mode de présentation".
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er juillet 2001.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Braun.
M. Gérard Braun. Aujourd'hui, non seulement la plupart des produits de chocolaterie sont toujours assujettis à un taux de TVA de 20,6 %, contrairement à la quasi-totalité des produits alimentaires, mais, en outre, l'administration fiscale tente d'imposer ce taux au chocolat noir jusqu'ici taxé à 5,5 %, n'hésitant pas à entreprendre des redressements fiscaux contre les entreprises de chocolaterie en dépit de la position du juge administratif, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et de la Commission européenne. Le présent amendement vise donc à remédier à cette instabilité juridique en proposant de fixer à 5,5 % le taux de TVA applicable au chocolat noir de couverture.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, c'est un amendement de justice, car le chocolat noir reste le chocolat noir, qu'il soit en barrette, en rond ou en triangle !
Il n'y a aucune raison pour établir des catégories selon je ne sais quel critère pour taxer le chocolat noir, selon le cas, soit à 5,5 %, soit à 20,6 %. C'est donc un amendement de bon sens qu'il faut naturellement soutenir.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Cette question a déjà été largement débattue en première partie, je n'y reviens donc pas : l'avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-75.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je suis étonné de la hargne de Bercy contre le chocolat noir. Peut-être est-ce dicté par le souci de lutter contre la drogue, le chocolat étant considéré comme une drogue douce bien entendu ? (Sourires.) Peut-être est-ce parce qu'on ne sait pas très bien faire la différence entre le chocolat qui est noir et celui qui ne l'est pas !
En tout cas, il s'agit d'une mesure de justice qu'il faut adopter.
J'ajoute que les services de Bercy feraient bien de manger du chocolat noir parce que cela rend optimiste ! (Nouveaux sourires.)
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Je confirme que nous avons eu, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un grand débat sur le chocolat et la TVA qui lui est applicable.
Il est clair que ramener le taux de la TVA à 5,5 % sur l'ensemble des chocolats est eurocompatible.
Nous avons cependant distingué clairement dans le débat précédent la chocolaterie de confiserie et la chocolaterie alimentaire. Dans le droit-fil de ce raisonnement, comme le disait M. le rapporteur général à l'instant, l'amendement n° II-75 prévoit une mesure d'équité : tout ce qui est chocolat alimentaire doit être taxé à 5,5 %.
Nous avons finalement estimé qu'appliquer le taux de TVA de 5,5 % immédiatement à l'ensemble des chocolats coûterait trop cher et que nous avions des priorités plus marquées. En revanche, sur ce sujet tout à fait spécifique, nous pensons qu'il n'y a aucune raison d'hésiter.
M. Jean Chérioux. Vous êtes trop raisonnable !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-75, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.
Par amendement n° II-67, MM. Oudin, Cazalet, Chaumont, Delong, Ostermann, Trégouët, Blanc,Descours, Giraud, Leclerc et Taugourdeau proposent d'insérer, après l'article 61, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le c) du 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est supprimé.
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2001.
« III. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 403 du même code. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Article additionnel avant l'article 61 bis



M. le président.
Par amendement n° II-79 rectifié, M. Revet et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, avant l'article 61 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 2224-6 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - A titre transitoire, jusqu'à la date prévue au L. 2224-9, les excédents de la section d'investissement du budget du service de distribution d'eau potable peuvent être reversés à la section d'investissement du budget d'assainissement de l'ensemble des communes et groupements. »
La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Depuis l'application de la M 49, deux budgets distincts s'appliquent à la distribution d'eau et au traitement des eaux usées.
Dans l'esprit de la M 49 et de la politique européenne, l'usager doit financer le service qu'il utilise et donc l'eau qu'il consomme et rejette.
Le traitement des eaux usées est directement lié à la consommation d'eau.
Dans cette logique, il paraît normal, à l'image de ce qui se passe en Suisse et en Allemagne, que les excédents financiers résultant de l'amortissement des réseaux d'eau plus anciens que ceux de l'assainissement permettent de protéger les nappes phréatiques.
A l'inverse, il semble anormal de solliciter la participation des communes pour rééquilibrer les services d'assainissement. Le ministère de l'intérieur avait, en son temps, interdit aux communes de recourir à la fiscalité.
Les contributions communales fausseraient en effet la règle selon laquelle l'usager doit rémunérer le service.
Il est donc proposé d'autoriser les communes et les groupements à reverser les excédents de la section investissement du budget de l'eau vers la section investissement du budget de l'assainissement.
Ce dispositif serait instauré à titre transitoire jusqu'à la date limite fixée par la loi sur l'eau pour la généralisation de l'assainissement, c'est-à-dire le 31 décembre 2005.
Il présente plusieurs avantages.
Il permettrait tout d'abord de prolonger les réseaux d'assainissement, de créer des unités autonomes et, ainsi, d'être en conformité avec la loi sur l'eau.
Il éviterait ensuite un recours à la fiscalité qui s'est révélé inadapté et qui d'ailleurs a été supprimé voilà quelques années, dans un souci d'équité et de juste paiement par l'usager de la prestation.
A ce sujet, mon collègue Charles Revet tient à souligner les limites d'une solution qui consisterait à ajuster les deux budgets en modulant simplement le taux des redevances.
Cette modulation est lourde et très difficile à mettre en oeuvre.
Elle pourrait conduire, demain ou après-demain, à une sorte de yo-yo fiscal dans l'hypothèse où de nouveaux investissements seraient nécessaires pour le service de l'eau.
Enfin, la consommation d'eau impliquant des rejets et un traitement, il apparaît cohérent qu'une passerelle existe afin de donner toute sa force à la solidarité de l'eau en faveur de l'assainissement car, sans eau, il n'y a pas d'assainissement.
M. André Maman. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est tout à fait favorable à cet amendement, car elle voit plusieurs avantages au dispositif envisagé par notre collègue Charles Revet et par les membres de son groupe.
En premier lieu, il éviterait que les redevances demandées aux citoyens ne varient de manière considérable pour assurer l'équilibre des comptes des services de distribution et d'assainissement.
En deuxième lieu, il permettrait une plus grande souplesse de gestion.
En troisième lieu, il respecterait la logique qui consiste à financer les investissements nouveaux d'assainissement grâce à l'amortissement des réseaux anciens de redistribution d'eau.
De plus, l'amendement permettrait le redéploiement au niveau intercommunal des excédents dégagés par les sections investissement des services des eaux des budgets annexes du service des eaux, car il peut se produire que la distribution d'eau soit au niveau communal et que l'assainissement soit au niveau intercommunal. Par une disposition de cette nature, un transfert serait possible de l'excédent du service municipal des eaux, section investissement, vers le service d'assainissement, pris en charge par l'établissement public de coopération intercommunal, là aussi dans sa section investissement.
Pour l'ensemble de ces raisons, je crois qu'il faut soutenir cette initiative particulièrement opportune.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Les services de l'eau et de l'assainissement sont, comme vous le savez, deux services publics industriels et commerciaux distincts. Lorsqu'ils sont exploités en régie, leurs opérations sont retracées dans deux budgets annexes. Chacun de ces deux services doit être financé par une redevance proportionnelle au coût du service rendu.
Le dispositif prévu par le présent amendement aurait pour effet de faire payer indûment par l'usager du service de l'eau les dépenses du service d'assainissement, qui devraient, pour leur part, être répercutées sur l'usager de ce service. Ce dispositif conduirait donc à fausser le calcul de la redevance de chacun de ces deux services.
En outre, les services de l'eau et de l'assainissement des communes peuvent être concédés. Dans ce cas, le dispositif prévu par cet amendement ne pourrait pas être applicable. Il y aurait donc une inégalité entre les communes qui ont concédé leur service et celles qui le gèrent en régie.
Pour ces raisons, et sans même évoquer le fait que cet amendement est un cavalier budgétaire, je vous demande de retirer votre amendement. A défaut, j'exprimerai un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-79 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 61 bis.

Article 61 bis



M. le président.
« Art. 61 bis . _ Il est inséré, après l'article L. 2333-86 du code général des collectivités territoriales, une section 12 ainsi rédigée :

« Section 12

« Taxe sur les activités commerciales non salariées
à durée saisonnière

« Art. L. 2333-87 . _ Toute commune peut, par délibération du conseil municipal, instituer une taxe sur les activités commerciales non salariées à durée saisonnière. La taxe est due par l'exploitant de l'emplacement où s'exerce l'activité concernée ou, si celle-ci s'exerce exclusivement dans un véhicule, par son conducteur. Les redevables de la taxe professionnelle au titre d'une activité dans la commune ne sont pas assujettis au paiement de la taxe.
« Art. L. 2333-88 . _ La taxe est assise sur la surface du local ou de l'emplacement où l'activité est exercée. Si elle est exercée exclusivement dans un véhicule, la taxe est assise sur le double de la surface du véhicule. Elle est due pour l'année d'imposition à la date de la première installation.
« Art. L. 2333-89 . _ Le tarif de la taxe est fixé par une délibération du conseil municipal avant le 1er juillet de l'année précédant l'année d'imposition. Ce tarif uniforme ne peut être inférieur à 50 F par mètre carré, ni excéder 800 F par mètre carré.
« Art. L. 2333-90 . _ La taxe est établie et recouvrée par les soins de l'administration communale sur la base d'une déclaration annuelle souscrite par le redevable. Elle est payable au jour de la déclaration. Le défaut de déclaration ou de paiement est puni d'une amende contraventionnelle. Les communes sont admises à recourir aux agents de la force publique pour assurer le contrôle de la taxe et en constater les contraventions. Un décret fixe les conditions d'application du présent article, notamment le taux de l'amende contraventionnelle. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-52 est présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-81 est déposé par M. Deneux et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° II-52.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une curieuse obsession que celle qui consiste à revenir périodiquement sur certaines activités saisonnières non salariées, et on se demande quelle importance économique considérable elles doivent avoir pour justifier un tel acharnement !
Le Conseil constitutionnel a annulé à plusieurs reprises des dispositions analogues. Voilà pourtant un nouvel avatar de cette taxe sur les activités saisonnières en question. Mon rapport écrit contient à cet égard un texte très intéressant qui est examiné dans le détail : « La taxe est due par l'exploitant de l'emplacement où s'exerce l'activité concernée, ou, si celle-ci s'exerce exclusivement dans un véhicule, par son conducteur ». Voilà une mesure extraordinaire ! Si le véhicule est une remorque, celle-ci n'ayant pas de conducteur, qui paie la taxe ?
Il y a là matière à quelques facéties que je vous remercie d'avoir l'indulgence d'accepter ! La nouvelle rédaction qui nous est proposée n'est toujours pas satisfaisante. Le recouvrement de cette taxe soulève de nombreuses difficultés qui risquent de donner naissance à un réel contentieux. En outre, il y a doute sur la constitutionnalité de cette mesure, qui pose le problème de l'égalité devant l'impôt. Mais peut-être M. le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale trouvera-t-il, pour des futurs textes, une autre rédaction ?
Sans nier l'existence de ce problème, qui est peut-être très préoccupant dans le département de l'Ariège et dans certaines stations climatiques, nous ne pouvons toujours pas accepter la proposition tendant à créer cette nouvelle taxe.
M. le président. La paroles est à M. Deneux, pour défendre l'amendement n° II-81.
M. Marcel Deneux. Cet amendement ayant le même objet que celui que vient de présenter, mieux que je ne saurais le faire, M. le rapporteur général, je n'insisterai pas.
Je rappelle simplement que la disposition introduite par l'article 61 bis a déjà été condamnée à deux reprises par le Conseil constitutionnel. Je ne comprends donc pas pourquoi on insiste autant !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s II-52 et II-81 ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. L'article 61 bis adopté en première lecture à l'Assemblée nationale vise à créer une taxe pour assujettir, l'année de leur établissement, les activités commerciales non salariées. Elle est assise sur la surface du local ou de l'emplacement où est exercée l'activité du redevable. Elle serait recouvrée par les communes auprès du redevable.
Le Gouvernement comprend l'objet d'une telle taxe, qui tend à faire participer les activités saisonnières au financement des collectivités locales et à faire en sorte qu'elles exercent leur activité dans des conditions normales de concurrence.
Comme vous l'avez souligné, cette disposition a déjà été annulée, à deux reprises, par le Conseil constitutionnel, d'abord pour des questions de procédure, lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier de l'année dernière, puis en raison d'une définition trop imprécise des modalités de recouvrement.
Dans ces conditions, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s II-52 et II-81, pour lesquels le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Ces amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 61 bis est supprimé.

Article 62



M. le président.
« Art. 62. _ Pour l'année 1999 et par exception aux dispositions de l'article 1639 A bis du code général des impôts, les délibérations des collectivités locales et des organismes compétents relatives aux exonérations de taxe professionnelle prévues à l'article 1464 A du même code prises au plus tard le 15 novembre 1999 sont applicables à compter des impositions établies au titre de l'année 2000. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 62



M. le président.
Par amendement n° II-38, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 62, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La seconde phrase du second alinéa de l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales est supprimée.
« II. - Les taux d'imposition des deux dernières tranches du barème de l'impôt sur le revenu des personnes physiques sont relevés à due concurrence des pertes de recettes résultant du I. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement que nous avions déjà présenté lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances a pour objet de supprimer la disposition dite « amendement Auberger ».
Vous connaissez bien ce dispositif. Instauré en même temps que le pacte de stabilité du gouvernement Juppé, il autorise l'utilisation par l'Etat de la dotation de compensation de la taxe professionnelle comme variable d'ajustement de l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat.
A l'origine, la dotation de compensation de la taxe professionnelle était destinée à compenser les pertes de recettes de la taxe professionnelle résultant des mesures législatives d'allégement.
Or force est de constater aujourd'hui, et chaque année le confirme, que cette dotation est loin de compenser intégralement les recettes des collectivités locales perdues au titre de divers allégements et exonérations consentis par l'Etat aux contribuables locaux, et cela d'autant plus que le nombre des compensations ne cesse d'augmenter.
De 1993 à 1999, la dotation de compensation de la taxe professionnelle a baissé de près de 30 %. Elle est passée de 18,85 milliards de francs en 1993 à 12,4 milliards de francs en 1999.
L'an dernier, cette baisse n'a pas été accusée de la même façon par l'ensemble des communes, puisque le Gouvernement a souhaité limiter la perte de recettes de communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou des communes dites bourgs-centres bénéficiaires de la dotation de solidarité rurale.
En revanche, les collectivités non éligibles à l'une de ces dotations de solidarité doivent prendre à leur charge cette nouvelle diminution de la dotation de compensation de la taxe professionnelle.
Leurs propres taux de diminution s'établit ainsi, en 1999, à moins 23,14 % pour les communes, à moins 12,88 % pour les départements et à moins 16,60 % pour les régions.
Cette année, l'examen à l'Assemblée nationale a permis de réduire ces effets que je qualifierai de pervers en améliorant le dispositif de compensation de la suppression de la base salaire de la taxe professionnelle, en reconduisant les dotations exceptionnelles de 500 millions et 150 millions de francs pour la DSU et le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle qui permettent de réduire les répercussions pour les communes éligibles aux dotations de solidarité.
Ce sont des mesures dont nous nous félicitons, mais elles ne sont que ponctuelles. La seule solution consite à supprimer la possibilité d'utiliser la dotation de compensation de la taxe professionnelle comme variable d'ajustement de l'enveloppe normée. C'est ce que je vous propose, mes chers collègues, au nom du groupe communiste républicain et citoyen avec cet amendement n° II-38.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n'est pas favorable à cet amendement.
Nous souhaitons en effet que les collectivités soient associées aux fruits de la croissance et, pour cela, que la croissance soit davantage prise en compte dans le calcul de l'enveloppe normée. Mais, dès lors, il faut en accepter les contreparties. Autrement dit, si la croissance se ralentit, il faudra bien admettre les ajustements pour la part de l'enveloppe normée qui sera indexée sur elle.
Etre intéressé à la croissance, c'est comme être intéressé aux résultats d'une entreprise. Ce qui vaut dans un sens doit valoir dans l'autre. Il faut accepter cette règle du jeu. On ne peut pas gagner à tous les coups ! Les défenseurs énergiques des finances locale que nous sommes tous doivent se soumettre à ce principe de bon sens.
Par ailleurs, la réflexion globale sur les concours de l'Etat aux collectivités est en cours. Nous connaîtrons bientôt les conclusions de la mission sur la décentralisation, qui se réunit sous la présidence de M. Delevoye et dont notre collègue M. Michel Mercier est le rapporteur. A ce moment-là, peut-être ce sujet pourra-t-il être réexaminé.
Enfin, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen sait bien que le gage utilisé pour compenser cet amendement ne peut recueillir l'accord de la majorité de la commission.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, vous avez déjà déposé cet amendement, qui vise à ne plus procéder à la régularisation de la DGF lorsque celle-ci est négative et le Sénat l'a rejeté.
Je suis donc conduit à répéter ce qui avait été dit à cette occasion.
Compte tenu du poids de la DGF dans les concours de l'Etat aux collectivités locales et du mode de calcul de l'évolution de cette dotation d'une année sur l'autre, il me paraît difficilement envisageable qu'il ne soit pas procédé à une actualisation de son indice d'évolution en fonction de l'évolution des indicateurs économiques. Il s'agit d'une démarche technique qui tient compte des mécanismes et du calendrier régissant l'élaboration de la loi de finances.
L'esprit de cette régularisation n'est en effet certainement pas de chercher à réduire les moyens affectés aux collectivités locales, dont je veux préciser qu'ils augmenteront de 4 % sur l'année 2000, puisque l'article 1613-2 du code général des collectivités locales s'applique aussi bien lorsque la régularisation doit être négative que lorsqu'elle doit être positive.
Supprimer un ajustement technique lorsqu'il se révèle défavorable aux collectivités locales ne me paraît donc pas légitime.
Compte tenu de ces considérations, je vous demande, madame, de bien vouloir retirer votre amendement. Si tel n'était pas le cas, l'avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-38, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 63



M. le président.
« Art. 63. _ L'article 1518 bis du code général des impôts est complété par un t) ainsi rédigé :
« t) Au titre de 2000, à 1,01 pour les propriétés non bâties, pour les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 et pour l'ensemble des autres propriétés bâties. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 63



M. le président.
Après l'article 63, je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-37, M. Foucaud, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 63, un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - Le II de l'article 1635 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Les 4° et 5° sont abrogés.
« 2. Le 6° est ainsi rédigé :
« 6° Le produit des cotisations afférentes aux impositions visées au I, diminué de la fraction des cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux articles 1520 et 1528, est perçu par les collectivités locales accueillant, sur leur territoire, un établissement de La Poste ou de France Télécom, à hauteur de la moitié du montant global des produits subvisés, l'autre moitié étant versée au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle visé à l'article 1648 A bis. »
« B. - L'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence du A ci-dessus. »
Par amendement n° II-53, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 63, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article 1635 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« A. - Le 4° est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« S'agissant de la taxe professionnelle acquittée par France Télécom à compter de la date qui sera fixée par la loi de finances pour 2001, les taux applicables aux établissements de cette entreprise sont les taux appliqués pour l'année en cours par l'ensemble des collectivités locales, des établissements publics de coopération intercommunale et des établissements et organismes divers habilités à percevoir le produit de la taxe professionnelle sur le territoire desquels ils sont implantés. »
« B. - Il est complété, in fine, par un alinéa ainsi rédigé :
« 6° bis. A compter de la date qui sera fixée par la loi de finances pour 2001, le produit des cotisations afférentes à la taxe professionnelle acquittée par les établissements de France Télécom est, pour moitié, conservé par les collectivités locales, les établissements publics de coopération intercommunale et les établissements et organismes divers habilités à percevoir le produit de la taxe professionnelle sur le territoire desquels ils sont implantés et, pour moitié, versé au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle mentionné à l'article 1648 A bis. »
« II. - Pour compenser la perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du I ci-dessus, les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont majorés à due concurrence. »
Par amendement n° II-82, M. Hérisson et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 63, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le II de l'article 1635 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Au début des 4° et 5° sont insérés les mots suivants : "Dans le cas des impositions acquittées par La Poste et visées au I..."
« 2. Au 5°, les mots : "et France Télécom" sont supprimés.
« 3. Aux premier, deuxième et troisième alinéas du 6°, après le mot : "impositions", sont insérés les mots : "acquittées par La Poste et".
« 4. Au troisième alinéa du 6°, les mots : "et de France Télécom" sont supprimés.
« 5. Au 6°, après le troisième alinéa est inséré un alinéa nouveau ainsi rédigé :
« D'autre part, le produit des cotisations afférentes aux impositions acquittées par France Télécom et visées au I, diminué de la fraction des cotisations afférentes aux taxes mentionnées aux articles 1520 et 1528, est perçu en totalité par les établissements publics de coopération intercommunale créés dans le cadre de la loi n° 99-586 du 12 juillet 1999 ou, à défaut, par les communes accueillant, sur leur territoire, un établissement de ladite société, à hauteur de la moitié du montant global des produits subvisés, l'autre moitié étant versée au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle visé à l'article 1648 A bis. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-37.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Mes chers collègues vous connaissez l'objectif de cet amendement, que nous avons déjà défendu lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances. Il vise à ce que l'imposition à la taxe professionnelle de France Télécom revienne dans le droit commun.
Lors des débats, M. Christian Sautter nous a confirmé l'engagement du Gouvernement de rechercher une solution. Le groupe de travail technique qui associe la direction générale des impôts et France Télécom doit, bien entendu, en premier lieu, recenser les bases locales par établissement, pour aboutir à une réforme ambitieuse.
Nous nous félicitons de cet engagement puisque le Gouvernement a exprimé la volonté d'avancer sur ce dossier. Toutefois, je ne vous cacherai pas notre impatience.
Cette situation, en effet, perdure depuis 1991. Certaines communes, excédées, ont entamé une procédure devant la Cour de justice des Communautés européennes pour non-respect des règles concurrentielles entre les entreprises.
Il est presque certain qu'elles vont obtenir satisfaction, étant donné les disparités d'imposition entre France Télécom et les entreprises de téléphonie.
Vous le voyez donc, monsieur le secrétaire d'Etat, cette situation exige d'être réglée rapidement sans pour autant oublier, comme nous le rappelait le Gouvernement lors des discussions de la première partie, qu'une partie du produit de la taxe professionnelle de France Télécom profite aux communes défavorisées.
C'est la raison pour laquelle, par cet amendement, nous proposons que 50 % du produit de la taxe professionnelle de France Télécom alimente le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, l'autre moitié étant attribuée aux collectivités locales accueillant des établissements France Télécom.
Cette solution présenterait l'avantage de tenir compte des frais engagés par les communes pour l'accueil des salariés dudit établissement et de la nécessité d'amplifier la solidarité entre les communes.
Il s'agit d'une péréquation qui, je tiens à le rappeler, ne s'opère que sur 6 milliards de francs, ce qui est très peu au regard de la somme globale que représentent les concours de l'Etat aux collectivités.
Je ne doute pas du fait que vous saurez, mes chers collègues, apprécier cet amendement, que je considère comme équilibré, et que vous l'adopterez.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-53.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous abordons là un sujet que nous connaissons bien car, l'année dernière, nous avons adopté à l'unanimité l'amendement que je vais à nouveau proposer.
Il résultait de la rédaction de la commission des finances, sous-amendée, en séance, par un orfèvre en la matière, notre collègue M. Michel Charasse.
Ce dispositif est bien connu : il s'agit d'attribuer le produit de la taxe professionnelle de France Télécom pour moitié, au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et, pour l'autre moitié, aux collectivités locales d'implantation des établissements de France Télécom.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il n'est pas possible de rester plus longtemps dans le statu quo , qui laisse France Télécom dans une situation pénalisante par rapport à ses compétiteurs. Les collectivités locales d'implantation, quant à elles, ne peuvent que considérer comme insupportable cette situation injuste des établissements dépendant d'une société qui développe ses activités sur le plan mondial, européen et national et dont le capital est largement ouvert, ne paient toujours pas la taxe professionnelle dans leur commune d'implantation.
Cette situation tout à fait inacceptable se retourne contre France Télécom. Il faut donc y mettre un terme, et la manière la plus simple de le faire est d'adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Deneux, pour présenter l'amendement n° II-82.
M. Marcel Deneux. Le produit de la taxe professionnelle payé par France Télécom doit revenir entièrement aux collectivités locales. Le Gouvernement a pris un engagement dans ce sens lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1999. Le coût de cette mesure est d'environ 6 milliards de francs mais, par ailleurs, l'Etat a perçu cette année 4,3 milliards de dividendes en tant qu'actionnaire de France Télécom.
Enfin, l'administration dispose depuis fin octobre des bases actualisées fournies par France Télécom, et rien ne s'oppose donc à la réforme proposée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-37 et II-82 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission considère que l'amendement qu'elle propose devrait rassembler toutes les bonnes volontés du Sénat car la répartition proposée, 50 % revenant aux collectivités locales d'implantation, 50 % étant versé au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, permet à la fois d'intéresser les collectivités territorialement concernées et le reste du tissu communal français, en particulier les communes petites et moyennes, par le biais du fonds national de péréquation.
L'amendement n° II-37 du groupe communiste républicain et citoyen est identique au nôtre à l'exception du gage, qui ne saurait être accepté par la majorité de la commission des finances. Je demande donc à Mme Beaudeau de le retirer au bénéfice de l'amendement de la commission.
Quant à l'amendement n° II-82, présenté par notre collègue Marcel Deneux, il a également les mêmes objectifs. Toutefois, la répartition proposée relève de principes un peu différents, puisqu'elle vise, ce qui se comprend, à avantager certaines catégories d'établissements publics de coopération intercommunale : ceux qui ont été créés dans le cadre de la loi du 12 juillet 1999, donc les plus intégrés d'entre eux et, sans doute, les communautés d'agglomération.
Mais, par ce fait même, la répartition du produit de la taxe professionnelle serait plus concentrée qu'elle ne le serait aux termes de l'amendement n° II-53 de la commission des finances, laquelle souhaite que la totalité ou la quasi-totalité des communes françaises bénéficient, chacune pour sa part, des 5 milliards ou 6 milliards de francs supplémentaires qui seraient ainsi obtenus.
Je souhaiterais donc également que l'amendement n° II-82 soit retiré au bénéfice de l'amendement n° II-53.
M. le président. Madame Beaudeau, l'amendement n° II-37 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Nous tenons beaucoup à notre gage. Je maintiens donc cet amendement.
M. le président. Monsieur Deneux, l'amendement n° II-82 est-il maintenu ?
M. Marcel Deneux. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-82 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° II-37 et II-53 ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Ces deux amendements visent à assujettir La Poste et France Télécom à la taxe professionnelle en fonction des taux de chacune des collectivités locales sur le territoire desquelles les établissements de La Poste ou de France Télécom sont implantés, et à répartir le produit de cette imposition entre, d'une part, ces mêmes collectivités et, d'autre part, le Fonds national de péréquation.
Une telle proposition a déjà été présentée lors de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2000, et le Gouvernement a alors exposé les raisons pour lesquelles il y était défavorable. Je ne puis que confirmer cet avis.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-37, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-53, repoussé par le Gouvernement.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 63.

Article 63 bis



M. le président.
« Art. 63 bis. _ Dans le premier alinéa de l'article 73 B du code général des impôts, la date : "31 décembre 1999" est remplacée par la date : "31 décembre 2000". » - (Adopté.)

Article 63 ter



M. le président.
« Art. 63 ter . _ Le dernier alinéa du 1 de l'article 170 du code général des impôts est complété par les mots : "ainsi que le montant des produits de placement soumis à compter du 1er janvier 1999 aux prélèvements libératoires opérés en application de l'article 125 A". »
Par amendement n° II-54, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. L'article 63 ter, qui vise à l'instauration d'une obligation de déclaration des revenus bénéficiant du prélèvement libératoire, a été introduit à l'Assemblée nationale sur l'initiative du député Jean-Pierre Brard.
Nous nous demandons s'il ne s'agit pas, plus que d'une mesure de transparence fiscale, d'une mesure d'inquisition fiscale, la frontière étant souvent incertaine entre ces deux sortes de mesures.
Pour éclairer le débat, il faut préciser quelques points et souligner quelques incohérences du dispositif proposé.
La pénalité applicable en cas de non-déclaration est un droit fixe de 100 francs par omission ou inexactitude, avec un minimum de 1000 francs.
Il convient de rappeler que l'article 125 A du code général des impôts s'applique également aux bons anonymes : cela pourrait, selon une interprétation stricte du dispositif, conduire à en faire tomber l'anonymat, ce qui n'est pas jusqu'ici, semble-t-il, dans l'intention du législateur.
Enfin, s'agissant du calcul du revenu de référence applicable pour le plafonnement de la taxe d'habitation, il est peu cohérent d'inclure les revenus soumis à prélèvement forfaitaire et non ceux des placements exonérés, sans doute beaucoup plus fréquents dans la population concernée ; d'où des risques d'incompréhension chez certains contribuables, qui auront le sentiment qu'il y a deux poids deux mesures.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission préconise la suppression de l'article 63 ter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. L'article 63 ter a pour objet de prévoir l'obligation déclarative des prélèvements libératoires effectués en application de l'article 125 A du code général des impôts.
En effet, la prise en compte des revenus soumis aux prélèvements libératoires, bien que spécifiquement prévue par la loi de finances pour 1997 - je me permets de le souligner - n'a jamais pu être mise en oeuvre, faute d'obligation déclarative permettant de les identifier. Or ce sont près de 50 milliards de francs de produits de placement à revenu fixe qui, en 1997, ont été soumis d'office ou sur option aux prélèvements libératoires de l'impôt sur le revenu. Il en résulte donc des inégalités choquantes dans l'accès aux divers avantages que j'ai évoqués.
Le Gouvernement est favorable à ce que ces inégalités ne perdurent pas. C'est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-54, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 63 ter est supprimé.

(M. Jean-Faure remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

Article additionnel après l'article 63 ter



M. le président.
Par amendement n° II-41, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 63 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 734 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 734 . - A compter du 1er janvier 2001, la cession d'un contrat d'assurance vie rachetable est enregistrée au droit fixe de 100 francs. »
« II. - L'article 1936 bis du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 1936 bis. - Toute infraction aux dispositions de l'article 734 est punie d'une amende fiscale égale au double du droit fixe défini à cet article. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement porte sur la cession des polices d'assurance vie. Il différe légèrement de celui que nos collègues du groupe communiste de l'Assemblée nationale ont déposé sur le même sujet.
Nous avons été animés, dans la rédaction de cet amendement, par un souci d'équilibre.
Il nous semble en effet regrettable que les cessions de police ne fassent pas aujourd'hui l'objet de la moindre procédure d'enregistrement, d'autant qu'une telle police d'assurance vie peut être assise sur des valeurs particulièrement significatives.
Notre amendement vise donc tout simplement à rendre obligatoire une procédure d'enregistrement des opérations concernées, afin de donner à l'administration fiscale un outil de connaissance et de mesure du patrimoine acquis par un contribuable donné.
La modicité de ce droit fixe et le « formatage » subséquent de la sanction en cas d'omission dans l'accomplissement de la procédure d'enregistrement sont symboliques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission émet un avis défavorable, car cette mesure créerait une nouvelle incertitude quant au régime fiscal de l'assurance vie, que l'on n'a déjà que trop souvent modifié. De plus, elle ferait peser à tort une suspicion sur une certaine catégorie de contribuables.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à assujettir à un droit de 100 francs les cessions de police d'assurance vie afin d'éviter qu'elles donnent lieu, lorsqu'il existe une faculté de rachat, à une donation indirecte. A défaut, une sanction fiscale égale à 200 francs serait appliquée.
Le Gouvernement partage votre souci, madame Beaudeau, de lutter contre de telles manoeuvres frauduleuses, qui constituent aujourd'hui un réel sujet d'actualité. M. Christian Sautter l'avait déjà indiqué lorsqu'un amendement visant le même objectif a été déposé par certains de vos collègues, à l'Assemblée nationale, au cours de la première lecture du présent projet de loi de finances.
Cela étant, le texte présenté ne me semble pas de nature à répondre à l'objectif visé dans la mesure où il prévoit simplement le tarif de la formalité de l'enregistrement, sans instituer la formalité obligatoire de l'enregistrement.
De plus, la faiblesse de la sanction envisagée rendrait le dispositif inopérant.
Le Gouvernement s'engage à poursuivre, avec les auteurs des deux amendements, la réflexion sur ce sujet important afin d'aboutir à l'élaboration d'un texte susceptible d'atteindre vraiement le but recherché.
Au bénéfice de ces explications, je demande à Mme Beaudeau de bien vouloir retirer son amendement. A défaut de retrait, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-41, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles 63 quater et 63 quinquies



M. le président.
« Art. 63 quater . - Aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 1649 quater B du code général des impôts, la somme : "50 000 F" est remplacée par la somme : "20 000 F". - (Adopté.)
« Art. 63 quinquies . - I. _ L'article 1649 quater B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout versement d'une prime ou d'une cotisation d'assurance au titre d'un contrat d'assurance vie ou d'assurance décès doit être opéré selon les modalités prévues au premier alinéa, au-delà de 20 000 F par an et par contrat. »
« II. _ Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article 1er de la loi du 22 octobre 1940 relative aux règlements par chèques et virements, après les mots : "titres nominatifs", sont insérés les mots : "et des primes ou cotisations d'assurance". » - (Adopté.)

Article 63 sexies



M. le président.
« Art. 63 sexies . I. _ Le 3 de l'article 1728 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 80 % en cas de découverte d'une activité occulte. »
« II. _ Les dispositions du I s'appliquent aux infractions commises à compter du 1er janvier 2000. »
Par amendement n° II-55, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi le I de cet article :
« I. - L'article 1728 du code général des impôts est complété par un 4 ainsi rédigé :
« 4. Par dérogation au 3, la majoration visée au 1 est portée à 80 % sans qu'il y ait eu lieu de procéder à une mise en demeure préalable en cas de découverte d'une activité occulte, caractérisée par l'absence de toute démarche ou formalité de nature à porter à la connaissance de l'administration l'exercice par le contribuable de cette activité. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je rappelle qu'il existe, dans le code général des impôts, deux sortes de pénalité d'assiette : d'une part les pénalités liées au défaut ou au retard dans la souscription d'une déclaration ; d'autre part, celles qui concernent les insuffisances, omissions ou inexactitudes relevées dans les déclarations souscrites.
Ce sont bien les déclarations qui permettent de sanctionner la mauvaise foi ou l'utilisation, par le contribuable, de manoeuvres frauduleuses ; s'il n'y a pas de déclaration, il ne peut pas y avoir mauvaise foi constatée.
Ces pénalités de l'une et de l'autre sorte ne sont applicables qu'aux contribuables qui ont sciemment déclaré ou fait apparaître une base ou des éléments d'imposition insuffisants, inexacts ou incomplets. En conséquence, elles ne peuvent pas s'appliquer à un contribuable exerçant des activités occultes, dans la mesure où celui-ci ne souscrit pas de déclaration.
Afin de pallier ces inconvénients, il est proposé, avec l'article 63 sexies, d'instaurer une majoration de 80 % en cas de découverte d'une activité occulte.
Nous n'avons pas de réserve sur le principe, mais nous considérons que la solution adoptée par l'Assemblée nationale n'est pas satisfaisante.
D'abord, en proposant d'inclure la pénalité relative aux activités occultes à cet endroit du code général des impôts, on établit une confusion entre les majorations de 40 % et de 80 % liées au refus du contribuable de déposer sa déclaration malgré les mises en demeure de l'administration fiscale et, d'autre part, la majoration proposée, qui vise à sanctionner le contribuable exerçant une activité occulte sans qu'il soit procédé à une mise en demeure préalable.
Par ailleurs, dans la mesure où cette sanction constitue une exception au principe selon lequel la mauvaise foi d'un contribuable ne peut être établie en l'absence de déclaration, il convient de limiter son champ d'application en donnant une définition de l'exercice d'activités occultes.
C'est pourquoi nous proposons, par le présent amendement, de considérer comme activité occulte une activité caractérisée par l'absence de toute démarche, de toute formalité de nature à porter à la connaissance de l'administration l'exercice par le contribuable de ladite activité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, rapporteur spécial. Si je comprends bien, il s'agit d'un amendement de précision. Or la notion d'activité occulte est aujourd'hui dénuée de toute ambiguïté. Il s'agit simplement de l'exercice d'une activité qui n'a pas été portée à la connaissance de l'administration.
Dès lors, je ne vois pas l'utilité d'apporter quelque précision que ce soit. J'émets donc un avis défavorable.
M. Gérard Braun. Quel sens du dialogue !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je vous avoue mon extrême surprise, monsieur le secrétaire d'Etat. Vous ne souhaitez pas que les activités occultes soient définies sous prétexte que cette notion apparaît déjà, si j'ai bien compris votre propos, dans le livre des procédures fiscales, sans d'ailleurs, on le notera au passage, que ladite notion ait été davantage définie au moment où la disposition visée a été introduite.
Pardonnez-moi, mais l'argument que vous avez utilisé ne me convainc pas. Il me semble que nous devrions plutôt regretter, pour des raisons de sécurité juridique, que les activités occultes n'aient jamais reçu de définition. Nous devons donc saisir l'occasion qui se présente à nous pour combler cette lacune.
En effet, à se référer à une notion qui n'est pas définie, on accroît considérablement les moyens d'action de l'administration. Le flou des textes élargit évidemment sa marge de manoeuvre ! Il est alors impossible d'exercer un contrôle efficace sur l'action de l'administration. Il est impossible de vérifier qu'elle applique, certes, toutes les dispositions du livre des procédures fiscales, mais seulement les dispositions du livre des procédures fiscales.
Nous ne voulons pas qu'un blanc-seing soit donné à l'administration. C'est pourquoi notre amendement tend à encadrer par une définition, suffisamment large pour englober tous les cas, la notion d'activité occulte.
Il me semble que les précisions que nous apportons ne sont pas contraires à l'esprit du texte que vous soutenez, monsieur le secrétaire d'Etat, mais qu'elles sont nécessaires et font évoluer favorablement le droit fiscal.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-55, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63 sexies, ainsi modifié.

(L'article 63 sexies est adopté.)

Article 63 septies



M. le président.
« Art. 63 septies . - Au début du premier alinéa de l'article 1733 du code général des impôts, les mots : "L'intérêt de retard et les majorations prévus à l'article 1729 ne sont pas applicables" sont remplacés par les mots : "Lorsque le montant des droits mis à la charge du contribuable n'est pas assorti des majorations prévues à l'article 1729, l'intérêt de retard prévu à ce même article n'est pas applicable". » - (Adopté.)

Article 63 octies



M. le président.
« Art. 63 octies . - Après le deuxième alinéa de l'article 1740 ter du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il est établi qu'une personne n'a pas respecté l'obligation de délivrance d'une facture ou d'un document en tenant lieu, elle est redevable d'une amende fiscale égale à 50 % du montant de la transaction. Le client est solidairement tenu au paiement de cette amende. Toutefois, lorsque le fournisseur apporte, dans les trente jours d'une mise en demeure adressée obligatoirement par l'administration fiscale, la preuve que l'opération a été régulièrement comptabilisée, il encourt une amende réduite à 5 % du montant de la transaction. »
Par amendement n° II-56, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose, dans la première phrase du texte présenté par cet article pour compléter l'article 1740 ter du code général des impôts, après les mots : « en tenant lieu », d'insérer les mots : « mentionné à l'article 289 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je rappellerai tout d'abord que, dans l'état actuel de la législation, il n'existe pas d'amende fiscale spécifique applicable aux ventes sans facture entre professionnels. Les ventes sans facture ne peuvent être sanctionnées que lorsqu'elles peuvent être assimilées à une manoeuvre frauduleuse.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement qui complète l'article 1470 ter du code général des impôts et qui sanctionne le non-respect de l'obligation de délivrance d'une facture ou d'un document en tenant lieu par une amende égale à 50 % de la transaction.
Je tiens à rappeler, ensuite, que, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1998, ce sujet avait déjà été évoqué et, à l'époque, on nous proposait de sanctionner le défaut de présentation de facture ou de document par une amende de 10 000 francs par document non présenté. Cette disposition avait été censurée par le Conseil constitutionnel, qui avait été saisi par nos soins : il avait jugé la sanction disproportionnée par rapport à l'infraction commise.
A présent, une disposition tient compte des observations formulées à l'époque ; elle est donc plus satisfaisante : dès lors qu'il s'agit de 50 % de la transaction, le principe de proportionnalité est, par définition, respecté. En effet, l'objectif recherché est de sanctionner les professionnels assujettis à la TVA qui ne respectent pas l'obligation de délivrance de facture pour les biens livrés ou les services rendus à un autre assujetti prévue à l'article 289 du code général des impôts.
Il est donc proposé ici de faire référence explicitement à l'article 289 du code général des impôts. En réalité, c'est une précision de nature technique que nous voulons apporter au dispositif qui a été approuvé par le Gouvernement lors de l'examen du texte à l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. L'amendement présenté par M. Marini tend à préciser le cadre juridique des obligations de facturation dont la violation entraîne l'application de sanctions sévères.
Il est exact que l'obligation générale est prévue à l'article 289 du code général des impôts. Je rappelle cependant que les mentions précises que doivent comporter les factures sont indiquées à l'article 242 nonies de l'annexe II du code général des impôts. D'autres textes existent également comme l'article 290 quinquies en ce qui concerne les travaux immobiliers ou l'article 242 undecies de la même annexe relatif aux opérations intracommunautaires portant sur les moyens de transport.
Par ailleurs, les deux premiers alinéas de l'article 1740 ter du code général des impôts ne font pas référence à l'article 289 du même code.
Dans un souci de cohérence, il me semble donc souhaitable de maintenir le texte voté par l'Assemblée nationale : il a le mérite de la clarté et ne risque pas de provoquer des questions inutiles, voire des interprétations qui seraient contraires à la volonté du Parlement.
Je pense, monsieur le rapporteur général, que nous avons, l'un comme l'autre, le souci d'éviter l'insécurité juridique. C'est la raison pour laquelle je vous demande de retirer votre amendement qui, s'il était adopté, aurait pour inconvénient de susciter des interrogations.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, c'est plutôt votre réponse qui suscite des interrogations. En effet, pourquoi ne pas se référer à l'article 289 du code général des impôts ? C'est lui qui énonce la règle générale ! Les exemples que vous avez cités sont, en fait, des applications spécifiques de cette règle générale issue de l'article 289.
En refusant de faire référence à l'article 289, comme vous le faites - et cela figurera au compte rendu intégral des débats, lesquels deviendront les travaux préparatoires de la loi - vous soulevez une suspicion sur le véritable champ d'application de la mesure et je le regrette. Il serait de meilleure législation, me semble-t-il, de se situer clairement dans le champ d'application ainsi défini par l'article 289. C'est pourquoi la commission ne peut que maintenir son amendement n° II-56.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-56, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63 octies, ainsi modifié.

(L'article 63 octies est adopté.)

Article 63 nonies



M. le président.
« Art. 63 nonies . - I. _ Après l'article 1740 ter, il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1740 ter A ainsi rédigé :
« Art. 1740 ter A . _ Toute omission ou inexactitude constatée dans les factures ou documents en tenant lieu mentionnés aux articles 289 et 290 quinquies donne lieu à l'application d'une amende de 100 F par omission ou inexactitude. Toutefois, l'amende due au titre de chaque facture ou document ne peut excéder le quart du montant qui y est ou aurait dû y être mentionné.
« Cette amende ne peut être mise en recouvrement avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai des observations. Elle est recouvrée suivant les procédures et sous les garanties prévues pour les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont instruites et jugées comme pour ces taxes. »
« II. _ Au troisime alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales, les mots : "et 1740 ter " sont remplacés par les mots : ", 1740 ter et 1740 ter A".
« III. _ Au premier alinéa de l'article 1736 du code général des impôts, après la référence : "1740 ter, ", est insérée la référence : "1740 ter A,". »
Par amendement n° II-57, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi le II de cet article :
« II. - Au troisième alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales, les mots : "et 1740 ter " sont supprimés. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit, là encore, des procédures fiscales.
En l'état actuel de la législation, il n'existe pas, je le répète, de sanction applicable en cas d'omissions ou d'inexactitudes constatées dans les factures. Le présent article constitue, à la suite des dispositions envisagées dans la loi de finances de 1998, une nouvelle tentative pour sanctionner ces omissions ou inexactitudes : il nous est proposé d'appliquer une amende de 100 francs par omission ou inexactitude, sans que cette amende puisse excéder 25 % du montant de la facture. Ce dispositif répond aux critiques qui avaient été formulées voilà deux ans par le Conseil constitutionnel.
En revanche, nous ne pouvons pas accepter le paragraphe II de cet article 63 nonies dans sa rédaction actuelle : il autorise, en effet, l'application des amendes prévues au nouvel article 1740 ter A à la suite de la mise en oeuvre du droit d'enquête.
Or le droit d'enquête - et cela avait été martelé par la commission des finances voilà deux ans - ne s'apparente pas à une procédure de contrôle fiscal. C'est une démarche de caractère unilatéral de l'administration. Les éventuels manquements relevés lors de cette procédure font l'objet non pas de sanctions immédiates, mais d'un procès-verbal.
En conséquence, si la commission des finances accepte que le droit d'enquête puisse donner lieu à l'application de l'amende prévue à l'article 1725 A du code général des impôts qui sanctionne le défaut de présentation ou de tenue de registre obligatoire en matière de TVA, elle s'oppose à ce que le nombre des amendes applicable dans le cadre de cette procédure soit étendu.
L'amendement n° II-57 vise donc à supprimer l'extension de l'application d'amendes à la suite de la procédure du droit d'enquête. Nous rétablirions ainsi le dispositif qui existait avant 1998 et qui limitait l'application d'amende à la suite de la mise en oeuvre du droit d'enquête à la seule amende prévue à l'article 1725 A du code général des impôts.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Cet amendement constitue une régression par rapport à la législation adoptée par le Parlement en 1997 : il conduirait, en effet, à laisser impunies les fraudes les plus manifestes.
Lors de l'adoption de la loi de finances de 1998, un renforcement des sanctions pour les fautes graves a été voté. De façon parfaitement cohérente, le Parlement a estimé que, s'agissant d'infractions aux règles de facturation, l'application des pénalités pourrait naturellement être effectuée à l'issue d'un droit d'enquête.
La procédure de droit d'enquête, qui a précisément pour objet de contrôler le respect des règles de facturation, permet notamment d'auditionner le dirigeant d'entreprise qui a ou aurait dû émettre une facture ou qui y a apporté des mentions erronées. Dans ce cadre, l'administration constate fréquemment l'existence de facturations fictives ou, à l'inverse, que certaines opérations n'ont pas été facturées.
Le Gouvernement considère que l'administration fiscale ne peut se contenter de constater passivement de tels agissements. Par conséquent, il émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-57, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 63 nonies, ainsi modifié.

(L'article 63 nonies est adopté.)

Article additionnel avant l'article 63 decies



M. le président.
Par amendement n° II-40 rectifié, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 63 decies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, après le mot : "directes" sont insérés les mots : "autres que lors du premier établissement de la taxe professionnelle". »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement concerne la mise en oeuvre de la procédure de redressement contradictoire en matière de taxe professionnelle. Il répond à un objectif relativement simple : permettre l'établissement clair et précis de l'état de la matière fiscale existant au titre de la taxe professionnelle, donc des ressources que cet impôt procure aux collectivités locales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lorsque nous avons examiné cet amendement en commission, nous avons exprimé une crainte : des incertitudes pouvaient résulter des mesures proposées quant à la définition des bases de la taxe professionnelle et risquaient de peser sur les budgets des collectivités territoriales. En effet, cette information doit être transmise chaque année, avant le 31 janvier, aux collectivités territoriales, pour qu'elles fixent leur taux d'imposition.
Les remarques qui ont été formulées lors de la réunion de la commission, ont été, me semble-t-il, prises en compte par les auteurs de l'amendement : ils ont accepté de considérer que l'extension de la procédure contradictoire devrait être limitée au premier établissement de la taxe professionnelle.
Compte tenu de cette rectification qui répond aux objections qui avaient été formulées par certains d'entre nous en commission, il est possible d'émettre un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Il ne paraît pas souhaitable d'étendre la procédure de redressement contradictoire à la taxe professionnelle.
Certes, une extension de la procédure permettrait d'améliorer l'information des contribuables qui font l'objet d'un redressement. Toutefois - cela vient d'être dit - une telle mesure me paraît lourde de conséquences pour les collectivités locales.
Le recensement des bases de taxe professionnelle s'effectue aujourd'hui, vous le savez, dans un calendrier très serré. Les services de l'administration fiscale doivent communiquer les bases de la fiscalité locale aux collectivités locales dès le 31 janvier pour leur permettre de voter les taux d'imposition. Avec l'introduction de la procédure de redressement contradictoire, une telle célérité ne serait plus possible. Il faudrait informer au préalable les contribuables puis attendre leurs réponses. Le processus serait inévitablement rallongé de plusieurs mois, sans compter les délais relatifs au traitement du contentieux.
Sous le bénéfice de ces explications de caractère technique, mais importantes, je souhaite le retrait de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-40 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 63 decies .

Article 63 decies



M. le président.
« Art. 63 decies . - L'article L. 80 C du livre des procédures fiscales est abrogé.
Par amendement n° II-58, M. Marini, au nom de la commission des finances, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement tend à supprimer une disposition fiscale introduite à l'Assemblée nationale, sur l'initiative de Jean-Pierre Brard.
L'article L. 80 C du livre des procédures fiscales dispose : « L'intervention près d'un contribuable, sur le territoire national, d'un agent d'une administration fiscale d'un pays étranger - je parle notamment pour notre collègue Emmanuel Hamel ...
M. Emmanuel Hamel. Pourquoi me citez-vous lorsque vous parlez de l'étranger ? Je suis français !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... rend nuls et de nul effet le redressement ainsi que toute poursuite fondée sur celui-ci. »
Or l'Assemblée nationale voudrait abroger cette disposition, donc permettre aux agents des administrations fiscales étrangères d'interférer dans les procédures, ce en arguant de la signature prochaine d'une convention du Conseil de l'europe qui date d'une époque relativement ancienne puisque le sujet était déjà évoqué en 1987-1988.
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, de deux choses l'une : soit la France signe cette convention et les agents d'administrations fiscales étrangères auront accès aux dossiers dans les conditions prévues par la convention ; soit elle ne la signe pas et il n'y a aucune raison de revenir sur le statu quo. Or, d'après ce qui m'a été dit, il n'existerait aucune décision formelle sur l'intention de signer cette convention de l'OCDE. Il est donc inopportun d'abroger l'article L. 80 C du livre des procédures fiscales.
Il convient, en outre, de rappeler que, si la convention était signée, la question serait dès lors tranchée, puisqu'elle aurait une force supérieure aux dispositions du code général des impôts. Dès lors, qu'il n'est pas opportun d'abroger l'article L. 80 C du livre des procédures fiscales, il devient particulièrement opportun de supprimer l'article 63 decies, ce que nous proposons par le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, j'ai quelque peine à comprendre les raisons qui vous conduisent à rétablir un texte qui avait été voté en 1987 sur l'initiative d'un député appartenant au groupe du front national.
L'objet du texte que l'Assemblée nationale a justement supprimé était de manifester, par une décision politique, l'opposition de la France à la disposition de la convention du Conseil de l'Europe qui prévoit des interventions de fonctionnaires des administrations fiscales en territoire étranger.
Comme vous le savez, monsieur le rapporteur général, la France adhérera à la convention du Conseil de l'Europe...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Qu'attend-on ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. ... et cette décision implique nécessairement l'abrogation de cet article L. 80 C (M. le rapporteur général fait un signe de dénégation) qui constitue un obstacle à la coopération internationale pour lutter contre la fraude fiscale. Nos partenaires ne comprendraient pas le maintien d'une telle disposition dans notre législation.
Je suis persuadé que, sur ce point, nous partageons la même analyse. Aussi, je suis convaincu qu'il vous apparaîtra que cet amendement n'est pas nécessaire.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, je le regrette, mais je ne suis pas d'accord avec vous, ni sur un plan technique, ni sur un plan constitutionnel.
Si la convention a force légale en France, si elle a été signée, si notre pays y a adhéré, toutes dispositions contraires de droit national deviendront caduques. C'est donc exactement l'inverse de ce que vous nous dites. La disposition actuelle du code général des impôts n'est pas un obstacle à la signature de la convention, mais si la convention est signée, l'article en question sera caduc car le traité international a une autorité supérieure à celle des lois. Ainsi le prévoit la Constitution, en ce domaine comme dans les autres.
Votre argument me paraît mal fondé tout comme l'initiative du député M. Jean-Pierre Brard. Je ne comprends pas que l'on aille rechercher dans l'histoire parlementaire qui est à l'origine de tel ou tel amendement. Nous examinons des situations de droit et nous ne jugeons pas en fonction des opinions des uns ou des autres !
MM. Gérard Braun et André Maman. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-58, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 63 decies est supprimé.

Article additionnel après l'article 63 decies



M. le président.
Par amendement n° II-39, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 63 decies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 228 du livre des procédures fiscales, après le mot : "affaires" sont insérés les mots : "pour lesquelles le montant total des droits rappelés est supérieur à 500 000 francs, ainsi que celles". »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement porte sur les conditions de saisine de la commission des infractions fiscales.
Une part importante des articles du projet de loi de finances pour 2000, que nous venons d'examiner ou que nous allons examiner, concerne la lutte contre la fraude fiscale, qui constitue, dans les faits, l'un des vecteurs essentiels du déficit de l'Etat, et conditionne donc lourdement les choix fiscaux et politiques que nous sommes amenés à faire.
Cet amendement présente quelque similitude avec un amendement que notre collègue Jean-Pierre Brard avait déposé à la fin du débat de l'Assemblée nationale sur ce projet de loi de finances.
Cela dit, il présente la particularité - car nous avons tenu compte du débat - de ne porter a priori, en matière de saisine de la commission, que sur les dossiers pour lesquels la fraude peut s'avérer particulièrement importante et donc pénalisante pour le comptable public et l'ensemble de la collectivité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Le délit général de fraude fiscale, défini à l'article 1741 du code général des impôts, comprend, outre l'élément matériel, un élément intentionnel, dont la preuve appartient à la partie poursuivante. La proposition tendant à rendre obligatoire la saisine de la commission des infractions fiscales au-delà d'un certain seuil de rappel fait totalement abstraction de la démonstration de l'élément intentionnel. Or cette exigence est incontournable. Devant la juridiction pénale, la charge de la preuve incombe toujours à l'accusation, c'est-à-dire au ministère public et à l'administration partie civile. Il est nécessaire que l'auteur de l'infraction ait agi en connaissance de cause, c'est-à-dire qu'il ait eu conscience d'accomplir un acte illicite et que son comportement ait été animé par une volonté de fraude. Des rappels de droits élevés n'impliquent pas nécessairement une intention frauduleuse avérée, le redressement pouvant être d'ordre purement technique sans que la bonne foi du contribuable soit remise en cause.
Sous le bénéfice de ces explications, je demande à Mme Beaudeau de bien vouloir retirer cet amendement, sinon le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-39.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Je vais bien sûr voter contre cet amendement.
Si j'ai demandé la parole, c'est parce que j'ai été brusquement tiré de ma torpeur par la présentation d'une telle disposition. D'habitude, notre collègue Mme Beaudeau est mieux inspirée. Il est véritablement incroyable d'accroître ainsi la pénalisation de notre société et d'ôter au ministre son pouvoir de choix et d'initiative. D'ailleurs, M. le secrétaire d'Etat aurait dû être plus éloquent pour combattre cet amendement, qui, à l'évidence, est liberticide.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-39, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel avant l'article 63 undecies



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-42, Mme Beaudeau, MM. Foucaud, Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 63 undecies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa de l'article 265 septies du code des douanes, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« c) De transports publics en commun de voyageurs. »
« II. - Le dispositif prévu au I s'applique aux acquisitions de gazole effectuées à compter du 11 janvier 2000.
« III. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence. »
Par amendement n° II-68, MM. Descours, Bernard, Cazalet, Gerbaud et Haenel proposent d'insérer, après l'article 63 undecies , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Il est inséré dans le code des douanes un article 265 octies ainsi rédigé :
« Art. 265 octies. - Les exploitants de réseaux de transport public en commun de voyageurs peuvent obtenir, sur demande de leur part, le remboursement d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur le gazole.
« Ce remboursement est égal à la différence entre la taxe intérieure de consommation sur le gazole exigible au cours de l'année et celle calculée sur la base d'un taux spécifique qui est fixé, pour la période du 11 janvier 2000 au 10 janvier 2001, à 246,56 francs par hectolitre. Pour les périodes ultérieures, ce taux spécifique est relevé, le 11 janvier de chaque année, du produit du dernier taux de la taxe intérieure de consommation appliqué au supercarburant sans plomb au cours de la période précédente par le taux prévisionnel d'évolution des prix à la consommation des ménages de l'année précédente associé au projet de loi de finances de l'année du remboursement.
« Le remboursement est plafonné à 40 000 litres de gazole par an et par véhicule.
« La période couverte par le remboursement s'entend de la période comprise entre le 11 janvier d'une année et le 10 janvier de l'année suivante.
« Les exploitants de réseaux de transport public en commun de voyageurs concernés peuvent adresser leur demande de remboursement au service des douanes à partir du 12 janvier de l'année suivant la période au titre de laquelle le remboursement est sollicité et au plus tard dans les trois ans qui suivent à compter de cette date.
« Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.
« II. - Le dispositif prévu au I s'applique aux acquisitions de gazole effectuées à compter du 11 janvier 2000.
« III. - La perte de recettes résultant de l'application des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du même code. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-42.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement porte sur une question qui a, en partie, déjà été traitée lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances mais qui méritait et mérite encore, de notre point de vue, d'être examinée avec le plus grand intérêt.
Dans le cadre de la loi de finances pour 1999, le principe d'un alourdissement de la taxation du gazole a été retenu et a donc commencé à être mis en oeuvre.
Toujours est-il que l'application de ce principe a été corrigée pour ce qui concerne les activités de transport routier de marchandises, soumises, selon la définition même fournie par le document Evaluation des voies et moyens, à des contraintes de compétitivité à l'échelon européen.
Je me permettrai de faire observer que le coût fiscal de la mesure d'accompagnement ainsi votée est estimé à 320 millions de francs pour l'exercice 2000, ce qui relativise, de fait, la proposition contenue dans cet amendement s'agissant de son incidence financière.
Ce qui nous a cependant guidé dans notre démarche, c'est de permettre aux exploitants de services de transport public de voyageurs de bénéficier d'un allégement de leurs contraintes de fonctionnement, contraintes qui se répercutent sur l'usager, à travers le relèvement des tarifs ou de la fiscalité permettant le financement de tels services.
D'ailleurs, cette possibilité nous est offerte par les règles communautaires en vigueur. Il est regrettable que, en la matière, notre pays ait parfois un peu de peine à se saisir d'opportunités positives issues du droit communautaire et que nous nous contentions trop souvent d'accepter des contraintes bien moins agréables.
Sur le fond, on peut bien sûr nous interroger sur le choix que nous avons opéré alors que le Gouvernement fait un effort particulier pour l'émergence d'une fiscalité environnementale favorisant, en particulier, le recours aux sources d'énergie les moins polluantes.
Le problème, c'est que l'incitation à l'utilisation des carburants comme le GNV, le gaz naturel véhicule, ou le GPL, le gaz de pétrole liquéfié, nécessite aussi que les exploitants de services publics de transports de voyageurs aient les moyens d'autofinancer un investissement nouveau en matériels utilisant ces carburants. C'est aussi le sens de notre proposition.
De surcroît, même si l'on doit se demander s'il est effectivement prouvé que le gazole est plus polluant que les autres carburants pétroliers, vous comprendrez qu'il nous paraisse également nécessaire de favoriser, autant que possible, le recours aux transports en commun publics par vos compatriotes.
La circulation automobile doit être maîtrisée, notamment dans les plus grandes agglomérations, et le développement des transports collectifs est un outil indispensable pour cette maîtrise.
Tel est l'objet de l'amendement que je vous invite, mes chers collègues, à adopter.
M. le président. L'amendement n° II-68 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-42 ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Les amendements n°s II-42 et II-68 sont similaires : le premier est présenté par Mme Beaudeau et les membres de son groupe ; le second est proposé par M. Charles Descours et plusieurs de ses collègues. Les uns et les autres souhaitent que les entreprises de transports publics en commun bénéficient, comme les transporteurs routiers, de la possibilité d'obtenir le remboursement de la TIPP sur le gazole.
En ce qui concerne les transporteurs routiers, c'est le projet de loi de finances pour 1999 qui a permis ce remboursement. Vous vous en souvenez, mes chers collègues, celui-ci a résulté d'une dérogation acceptée par la Commission européenne aux dispositions de l'article 8-4 de la directive communautaire de 1992, dite directive structures, la directive sur les huiles minérales.
Il semble tout à fait logique et même conforme à l'esprit de la mesure adoptée l'année dernière de faire bénéficier les entreprises de transport public en commun de voyageurs de cette même possibilité de remboursement. Mais pour obtenir cette extension, encore faut-il, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement sollicite la même dérogation de la part de la Commission européenne. Cela nécessite un encouragement de la part du Parlement et, en l'occurrence, du Sénat. Cet encouragement, nous vous l'apporterons en votant l'amendement n° II-42.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. L'année dernière, en instaurant un remboursement partiel de TIPP pour les transporteurs routiers de marchandises, le Gouvernement a estimé que cette mesure devait être accordée aux professionnels de la route les plus exposés à la concurrence internationale du fait de leur activité et de la libéralisation du cabotage intervenue le 1er juillet 1998, et qui réalisent en très grande majorité des transports interurbains.
Vous proposez d'étendre ce dispositif aux transports publics de voyageurs. Comme vous l'avez souligné, j'observe tout d'abord qu'une telle mesure, pour être conforme au droit communautaire, doit nécessairement être autorisée sur le fondement de l'article 8, paragraphe 4, de la directive 92/81 du 19 octobre 1992 relative à l'harmonisation des droits d'accises sur les huiles minérales. Cette dérogation ne pouvant être obtenue qu'après un délai de plusieurs mois, il n'est pas envisageable d'adopter un remboursement de ce type dans le cadre du présent projet de loi de finances.
Par ailleurs, comme vous le savez, des mesures ont déjà été prises afin de développer l'utilisation des carburants propres par des exploitants de transports en commun de voyageurs, comme le remboursement total de la TIPP sur leur consommation de GPL carburant et de gaz naturel véhicule. Celui-ci s'élève à 40 000 litres par an et par véhicule, ce qui couvre la totalité de la consommation annuelle de la plupart des autobus et des autocars.
Des réductions de taux de la TIPP ont été votées l'an passé pour les émulsions d'eau dans du gazole et sont encore accrues cette année, puisque le Gouvernement a accepté, en première lecture, un amendement en ce sens. Il s'agit, là encore, d'une mesure favorable aux exploitants de transports en commun. Ces émulsions sont actuellement expérimentées à grande échelle à Paris et dans de nombreuses villes de province.
Si l'on accordait aujourd'hui un nouvel avantage fiscal pour le gazole consommé en milieu urbain, cette mesure irait à l'encontre de la politique environnementale du Gouvernement. Je veux réaffirmer la volonté du Gouvernement de poursuivre ses efforts en faveur d'une généralisation des carburants propres dans les transports publics urbains.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-42, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 63 undecies .

Article 63 undecies



M. le président.
« Art. 63 undecies . - Il est inséré, dans le code des douanes, un article 266 quinquies A ainsi rédigé :
« Art. 266 quinquies A . _ Les livraisons de fioul lourd d'une teneur en soufre inférieure ou égale à 2 %, de gaz naturel et de gaz de raffinerie destinés à être utilisés dans des installations de cogénération, pour la production combinée de chaleur et d'électricité ou de chaleur et d'énergie mécanique, sont exonérées des taxes intérieures de consommation prévues aux articles 265 et 266 quinquies pendant une durée de cinq années à compter de la mise en service des installations.
« Cette exonération s'applique aux installations mises en service, au plus tard, le 31 décembre 2005.
« La nature et la puissance minimale de ces installations ainsi que le rapport entre les deux énergies produites sont fixés par décret en Conseil d'Etat. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 63 undecies



M. le président.
Par amendement n° II-30, MM. Vasselle et Delong proposent d'insérer, après l'article 63 undecies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1 du I de l'article 266 sexies du code des douanes est ainsi rédigé :
« 1. Tout exploitant d'une installation de stockage ou d'incinération de déchets ménagers et assimilés ou tout exploitant d'une installation d'élimination de déchets industriels spéciaux par incinération, coincinération, stockage, traitement physico-chimique ou biologique non exclusivement utilisés pour les déchets que l'entreprise produit ; »
« II. - Les dispositions du I sont applicables au 1er janvier 2001. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° II-80, M. Trucy et les membres du groupe des Républicains et Indépendants proposent d'insérer, après l'article 63 undecies, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 1615-4 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Par dérogation, les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient des attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée au titre des dépenses d'équipement relatives au traitement des déchets ménagers dont les opérations sont partiellement assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, à hauteur de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'investissement qui n'a pas été déduite fiscalement. »
« II. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée par la majoration, à due concurrence, des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° II-80 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il s'agit ici d'un sujet qui revient périodiquement dans nos débats, à savoir l'éligibilité au fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, des investissements relatifs au traitement des déchets ménagers lorsque la TVA grevant ces investissements n'a pas été déduite fiscalement. Sont visés en particulier les centres de valorisation énergétique, en d'autres termes les usines d'incinération, dont une partie de l'activité peut conduire à réaliser des recettes résultant, par exemple, de la vente de chaleur à un réseau de chauffage urbain ou à des installations industrielles, recettes qui sont accessoires par rapport à l'activité essentielle de l'outil.
De nombreuses collectivités, notamment des syndicats intercommunaux, qui sont maîtres d'ouvrage de telles installations se heurtent au problème de l'insécurité fiscale dans laquelle elles se trouvent.
L'éligibilité au FCTVA de tous les équipements de valorisation, même lorsque les ventes de services ou d'énergie représentent une certaine proportion du volume d'activité total de ces outils industriels, paraît donc constituer une mesure importante pour encourager les collectivités territoriales à mettre en oeuvre des investissements souvent très ambitieux et très lourds financièrement, rendus nécessaires par l'obligation où elles se trouvent de supprimer toutes les décharges à l'horizon 2002 et de mener à bien de vastes projets de traitement des déchets ménagers.
C'est, je pense, dans cet esprit que nos collègues du groupe des Républicains et Indépendants ont déposé cet amendement, que je me suis permis de reprendre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Les textes relatifs au FCTVA excluent de l'assiette de celui-ci les dépenses réelles liées à des équipements utilisés concurremment pour la réalisation d'opérations commerciales et d'opérations relevant du service public.
Par dérogation à la règle générale de non-éligibilité au FCTVA, il est cependant déjà prévu que la taxe non déductible par la voie fiscale peut faire, sous certaines conditions, l'objet d'un remboursement, grâce à une attribution du bénéfice du FCTVA dans la limite de la fraction relative aux opérations de service public.
Toutefois, cette dérogation prévoit que l'usine de traitement ne doit être utilisée qu'à titre accessoire pour les besoins de l'activité soumise à la TVA. Aller au-délà de cette dérogation remettrait en cause les principes mêmes du fonctionnement du FCTVA.
Je rappelle par ailleurs que, si la collectivité locale décide de financer ce service au moyen de la redevance pour l'enlèvement des ordures ménagères, elle peut opter pour l'assujettissement à la TVA, ce qui permet d'éviter toute rémanence de TVA pour les dépenses d'investissement et de fonctionnement.
Enfin, le Gouvernement, je voudrais le rappeler, a déjà consenti, dans l'optique de la loi de finances de 1999, un effort financier important, s'agissant des dépenses relatives aux prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets des ménages assumées par les collectivités locales, puisque l'article 31 prévoit que ces dépenses peuvent être soumises au taux réduit de TVA de 5,5 %.
Je souhaite donc le retrait de cet amendement ; dans le cas contraire, j'y serai défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-80 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 63 undecies.

Articles 63 duodecies à 63 quaterdecies



M. le président.
« Art. 63 duodecies . - L'article 66 de la loi de finances pour 1976 (n° 75-1278 du 30 décembre 1975) est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - Le Gouvernement publie chaque année dans le fascicule "Evaluation des voies et moyens" annexé au projet de loi de finances les éléments permettant d'établir le rapport entre le montant des droits rappelés lors de l'exercice du contrôle fiscal, celui des sommes effectivement mises en recouvrement et celui des sommes effectivement recouvrées.
« Le rapport entre les droits rappelés une année donnée et le montant des recouvrements relatifs à ces rappels constatés année après année est également précisé. » - (Adopté.)
« Art. 63 terdecies . - Au premier alinéa de l'article 40 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, de l'article 60 ter de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et de l'article 47-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, les mots : "cinq ans" sont remplacés par les mots : "six ans". » - (Adopté.)
« Art. 63 quaterdecies . - I. _ Au premier alinéa de l'article 12 de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire, les mots : "pour une période allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999" sont remplacés par les mots : "pour une période allant du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000". »
« II. - Aux articles 14, 31 et 42 de la même loi, l'année : "1999" est remplacée par l'année : "2000". » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 63 quaterdecies



M. le président.
Par amendement n° II-73, M. Le Grand propose d'insérer, après l'article 63 quaterdecies, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article L. 211-8 du code des juridictions financières, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - La chambre régionale des comptes examine, dans son ressort, les demandes d'avis qui peuvent lui être transmises par les maires, les présidents de conseil général et les présidents de conseil régional sur une question de droit relative aux textes applicables aux collectivités locales dans les domaines financier, budgétaire ou comptable.
« Elle formule ses observations dans un délai d'un mois à compter de sa saisine. L'avis de la chambre régionale des comptes est transmis à la collectivité territoriale et au représentant de l'Etat.
« L'assemblée délibérante est informée de l'avis de la chambre régionale des comptes dès sa plus prochaine réunion ».
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° II-74, M. Ostermann et Mme Olin proposent d'insérer, après l'article 63 quaterdecies, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article L. 293 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'article L. 288 sont applicables aux étrangers résidant en France pendant la Deuxième Guerre mondiale et internés ou déportés dans les conditions prévues par cet article. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° II-74 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. M. Ostermann et Mme Olin ont soulevé, par cet amendement, un réel problème d'équité.
En effet, l'article L. 293 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre accorde le statut d'interné politique aux étrangers arrivés en France avant le début de la Seconde Guerre mondiale, c'est-à-dire avant la déclaration de guerre, le 1er septembre 1939, lorsque ces personnes ont été ensuite internées par l'ennemi ou par l'autorité de fait, dite alors « gouvernement de l'Etat français ».
Pour des raisons qu'il est difficile de comprendre, des étrangers s'étant réfugiés en France entre le 1er septembre 1939 et l'invasion de 1940 ne peuvent pas bénéficier de ces dispositions. J'avoue que l'on ne cerne pas très bien les motifs de cette discrimination, car il a pu notamment s'agir de personnes venant de pays de l'Europe centrale ou orientale, de Belgique ou des Pays-Bas qui, étant donné l'évolution du conflit, se sont réfugiées en France. Certaines d'entre elles ont pu ensuite être appréhendées pendant la période de l'Occupation et internées.
J'ajoute que la situation évoquée ne concerne très certainement aujourd'hui que quelques personnes d'un âge, hélas, avancé, puisque plus de cinquante années se sont écoulées depuis les événements en question, et le coût du dispositif devrait donc être insignifiant. Compte tenu des malheurs que les anciens internés ont pu connaître dans leur existence, d'autant qu'ils ont parfois affronté des événements encore plus graves et plus douloureux que ceux que j'ai évoqués et que tous n'ont pas survécu à la Seconde Guerre mondiale, ce serait, pour ces quelques personnes, une mesure de reconnaissance et de réparation extrêmement précieuse.
Je connais personnellement des cas d'anciens internés politiques qui, dans l'état actuel du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, ne peuvent pas se faire reconnaître cette qualification. Il serait donc très souhaitable qu'un assouplissement intervienne et que les dispositions de l'article L. 288 dudit code soient applicables aux étrangers ayant résidé en France pendant la Seconde Guerre mondiale et ayant été internés ou déportés dans les conditions prévues par cet article.
C'est donc avec conviction et même avec émotion que je suis amené à défendre l'amendement qui avait été déposé par nos collègues.
M. Emmanuel Hamel. Très bien ! Emotion partagée !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. La loi du 9 septembre 1948 a posé une condition de résidence sur le territoire français avant le 1er septembre 1939 pour les ressortissants étrangers déportés politiques ou internés politiques, condition que l'amendement défendu par le rapporteur général vise donc à lever, s'agissant des internés politiques.
Certes, les personnes concernées ne sont pas nombreuses et elles sont incontestablement âgées, mais j'ai le regret de devoir dire au Sénat que l'adoption de cet amendement créerait une inégalité, qui serait difficile à justifier au regard de l'intensité des préjudices subis, entre, d'une part, les déportés politiques ressortissants étrangers, qui devront toujours justifier de leur présence en France avant le 1er septembre 1939, et, d'autre part, les internés politiques ressortissants étrangers, pour lesquels cette condition ne s'appliquerait plus.
En outre, les législateurs des pays européens ont mis en place un dispositif de réparation en faveur de leurs propres ressortissants victimes du nazisme, déportés et internés.
A ce titre, il convient de préciser que la France a signé, dès les années soixante, des conventions bilatérales de réciprocité avec certains pays comme la Belgique ou les Pays-Bas, en vue de permettre l'instauration de mécanismes de réparation des préjudices subis par les victimes du nazisme.
Dès lors, ces ressortissants étrangers ont déjà bénéficié de réparations. Une seconde indemnisation ne s'impose pas, d'autant que cela les placerait dans une position indemnitaire plus favorable que les ressortissants français ayant subi le même préjudice.
Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement demande le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement.
M. Philippe Marini, rapporteur général, et M. Emmanuel Hamel. Consternant !
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Il s'agit bien entendu, vous l'aurez compris, d'une question d'équité et d'égalité de traitement, même si j'éprouve quelque regret de devoir apporter une telle réponse.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, au-delà des considérations administratives, peut-être faut-il écouter un peu son coeur !
Je vais vous exposer un cas qui m'a sensibilisé à la question qui nous occupe.
C'est celui d'un jeune israélite d'origine polonaise, dont les parents habitaient la région d'Anvers. Cette famille, devant l'avancée des troupes allemandes, fut contrainte de passer en France après le 1er septembre 1939. Quelque temps après, toute la famille fut internée au camp de Rivesaltes. On se souvient de ces camps d'internés où séjournaient de nombreux étrangers. Malheureusement, la plupart des membres de cette famille furent ensuite déportés dans les camps de la mort, et aucun n'en revint. Il n'y eut qu'un seul survivant, ce jeune homme qui, après s'être évadé du camp d'internement, rejoignit un réseau de résistance. Du sud-ouest de la France, il put passer en Espagne et émigrer enfin dans ce qui n'était pas encore l'Etat d'Israël.
Cet homme a fait sa vie, et a d'ailleurs réalisé des choses assez remarquables grâce à son énergie, à son esprit d'entreprise et à son sens des autres.
Mais aujourd'hui, lorsqu'il considère sa situation, il constate qu'il ne bénéficie à la vérité de rien. Il ne demande d'ailleurs pas d'avantage pécuniaire, ce qu'il demande c'est que l'on reconnaisse que les membres de sa famille, juifs et ressortissants étrangers, ont été enfermés dans un camp d'internement, avec le concours naturellement des autorités de fait que je citais tout à l'heure. Il ne demande rien d'autre ! Il veut simplement que cette situation soit reconnue dans le code français des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, comme ce serait le cas si les intéressés étaient arrivés en France avant le 1er septembre 1939.
Vous me parlez d'égalité de traitement, mais j'avoue que je ne comprends pas cette réponse administrative. En effet, les internés politiques qui sont arrivés dans notre pays avant le 1er septembre 1939 sont reconnus sans problème, même s'ils ne bénéficient d'ailleurs pas de grand-chose. Ce n'est pas un pactole, c'est même très modeste, mais ils bénéficient au moins d'une reconnaissance et d'une petite, toute petite pension. Mais ceux qui sont arrivés après le 1er septembre 1939 ne bénéficient d'aucune reconnaissance et se trouvent devant un vide juridique ! Est-ce justifié ?
Je puis vous assurer, pour avoir décortiqué le cas que j'ai exposé, qu'il n'existe aucune convention internationale ni avec la Belgique ni avec les Pays-Bas permettant de traiter des situations de cette nature.
Alors, franchement, monsieur le secrétaire d'Etat, aujourd'hui où il ne reste pratiquement plus de survivants, pourquoi faire de pareilles réponses administratives ? Certes, il est bien tard, cinquante-cinq ans après les faits, pour se pencher sur ce problème, et il aurait fallu y être attentif plus tôt. Mais il n'est pas trop tard pour réparer. Même s'il ne reste qu'une seule personne qui se pense en situation d'injustice au regard de cette histoire terrible dont notre pays garde la mémoire, nous devons savoir traiter son cas.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère qu'après avoir entendu l'explication que je voulais vous donner, vous accepterez de défendre ce point de vue au sein du Gouvernement, car vraiment cette disposition ne coûtera rien à l'Etat, et ce sera une bonne action ! M. Gérard Braun. Très bien !
M. Emmanuel Hamel. Vous avez écouté, monsieur le secrétaire d'Etat ?
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Oui, j'ai écouté, monsieur Hamel, et je tiens à répondre à M. le rapporteur général que je ne peux pas demeurer insensible aux propos qu'il a tenus, d'autant que j'ai souvent été confronté à de telles situations en tant qu'élu local, et que j'ai longtemps été fonctionnaire au ministère des anciens combattants. Il ne faut donc pas me dire à moi que je ne connais pas le sujet ou que j'y serais insensible !
J'ai simplement dit tout à l'heure que la philosophie du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre répond à l'état d'esprit général des anciens combattants, qui sont animés par un souci d'égalité de traitement et d'équité dans le droit à réparation. La France s'est dotée d'un droit à réparation - nous sommes d'ailleurs l'un des seuls pays à l'avoir fait -, mais le droit en cause répond moins à des considérations pécuniaires qu'au besoin de reconnaissance de la patrie et de l'Histoire. C'est donc une question extrêmement sensible chez les anciens combattants.
Voilà ce que j'ai voulu dire tout à l'heure. Il ne s'agissait pas pour moi de donner le point de vue d'une administration !
Cela dit, j'examinerai plus en détail les cas qui restent à traiter compte tenu de leur caractère effectivement exceptionnel, tout en ayant à l'esprit que les déportés et les internés politiques, qui sont aussi concernés par cette question, ont bien entendu leur mot à dire dans ce débat. Nous en reparlerons donc.
Quoi qu'il en soit, je tenais à vous dire que je n'accepte pas d'être accusé de manquer de coeur sur ce sujet.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-74 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. Emmanuel Hamel. A l'unanimité !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 63 quaterdecies .
Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des articles de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2000.

Demande de seconde délibération



M. François Huwart,
secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, en application de l'article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, le Gouvernement, avec l'aval de la commission des finances, demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 38 et état B, 39 et état C, 46 et, pour coordination, de l'article 36 et état A.
M. le président. Le Gouvernement demande qu'il soit procédé à une seconde délibération des articles 38 et état B, 39 et état C, 46 et, pour coordination, de l'article 36 et état A.
Quel est l'avis de la commission des finances sur cette demande de seconde délibération ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Favorable.
M. le président. Y a-t-il un orateur contre ?...
Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, acceptée par la commission.

(La seconde délibération est ordonnée.)
M. le président. Cette seconde délibération aura lieu au début de la séance de demain.
J'informe le Sénat que, compte tenu de l'avancement de nos travaux et après accord entre le Gouvernement et la commission des finances, la séance de demain, mardi 14 décembre, débutera à seize heures au lieu de quinze heures.

5

DÉPÔT D'UN AVIS

M. le président. J'ai reçu de M. René Trégouët un avis présenté au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la proposition de loi de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de l'Union centriste relative au développement du partenariat social (n° 87, 1999-2000).
L'avis sera imprimé sous le n° 129 et distribué.

6

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, fixée au mardi 14 décembre 1999, à seize heures :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 88 et 89, 1999-2000).
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Seconde délibération sur les articles 38 (et état B), 39 (et état C), 46 et, pour coordination, 36 (et état A).
Explications de vote sur l'ensemble.
Vote sur l'ensemble (scrutin public à la tribune de droit, en application de l'article 60 bis, troisième alinéa, du règlement.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la réduction négociée du temps de travail (n° 115, 1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 14 décembre 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 14 décembre 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jean Faure visant à permettre aux communes d'exiger des intéressés le remboursement des frais de secours qu'elles ont engagés à l'occasion d'accidents consécutifs à la pratique d'une activité sportive et de loisir (n° 31, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à dix-sept heures.
Eventuellement, conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Nicolas About tendant à renforcer le dispositif pénal à l'encontre des associations ou groupements à caractère sectaire qui constituent, par leurs agissements délictueux, un trouble à l'ordre public ou un péril majeur pour la personne humaine ou la sûreté de l'Etat (n° 79, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à dix-sept heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, modifiant les conditions d'acquisition de la nationalité française par les militaires étrangers servant dans l'armée française (n° 104, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 118, 1999-2000) sur :
« - la proposition de loi de M. Jean Chérioux et de plusieurs de ses collègues tendant à favoriser le développement de l'actionnariat salarié (n° 52, 1999-2000) ;
« - la proposition de loi de M. Jean Arthuis et des membres du groupe de l'Union centriste relative au développement du partenariat social (n° 87, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 15 décembre 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures vingt.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON