Séance du 3 mars 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Retrait de l'ordre du jour d'une question orale sans débat (p. 1 ).

3. Communication du Gouvernement (p. 2 ).

4. Conseil national des communes « Compagnon de la Libération ». - Adoption d'un projet de loi (p. 3 ).
Discussion générale : M. Lucien Neuwirth, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Mme Gisèle Printz, MM. Guy Fischer, René-Georges Laurin, Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er. - Adoption (p. 4 )

Article 2 (p. 5 )

Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 2 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3. - Adoption (p. 6 )

Article 4 (p. 7 )

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 5 et 6. - Adoption (p. 8 )

Article 7 (p. 9 )

Amendement n° 4 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 8 et 9. - Adoption (p. 10 )

Article 10 (p. 11 )

Amendement n° 5 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Vote sur l'ensemble (p. 12 )

MM. Emmanuel Hamel, le secrétaire d'Etat, Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales.
Adoption du projet de loi.
M. le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 13 )

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD

5. Charte sociale européenne. - Adoption de deux projets de loi (p. 14 ).
Discussion générale commune : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; André Boyer, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale commune.

PROJET DE LOI N° 140 (p. 15 )

M. Jean-Luc Bécart.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

PROJET DE LOI N° 141 (p. 16 )

Adoption de l'article unique du projet de loi.

6. Convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique-Nord et les autres Etats participant au partenariat pour la paix. - Adoption d'un projet de loi (p. 17 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Serge Vinçon, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

7. Conventions avec la Suisse portant rectification de la frontière franco-suisse. - Adoption de deux projets de loi (p. 18 ).
Discussion générale commune : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; André Dulait, en remplacement de M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; Emmanuel Hamel.
Clôture de la discussion générale commune.
Adoption des articles uniques des deux projets de loi.

8. Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées. - Adoption d'un projet de loi (p. 19 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

9. Convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963. - Adoption de deux projets de loi (p. 20 ).
Discussion générale commune : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Xavier de Villepin, président, en remplacement de M. Paul Masson, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale commune.
Adoption des articles uniques des deux projets de loi.

10. Convention commune sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs. - Adoption d'un projet de loi (p. 21 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Robert Del Picchia, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

11. Convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière. - Adoption d'un projet de loi (p. 22 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

12. Accord avec l'Allemagne relatif à la création de l'université franco-allemande. - Adoption d'un projet de loi (p. 23 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Pierre Biarnès, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

13. Convention douanière avec l'Afrique du Sud. - Adoption d'un projet de loi (p. 24 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

14. Convention douanière avec la Slovaquie. - Adoption d'un projet de loi (p. 25 ).
Discussion générale : MM. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie ; Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; Emmanuel Hamel.
Clôture de la discussion générale.
Adoption de l'article unique du projet de loi.

15. Adoption définitive d'un texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 26 ).

16. Retrait de textes soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 27 ).

17. Transmission de projets de loi (p. 28 ).

18. Dépôt de propositions de loi (p. 29 ).

19. Dépôt d'une résolution (p. 30 ).

20. Dépôt de rapports (p. 31 ).

21. Ordre du jour (p. 32 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN-CLAUDE GAUDIN
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix-huit heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

RETRAIT DE L'ORDRE DU JOUR
D'UNE QUESTION ORALE SANS DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que la question orale sans débat n° 391 de M. Alain Gournac est retirée à la demande de son auteur de l'ordre du jour du 9 mars 1999.

3

COMMUNICATION DU GOUVERNEMENT

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 2 mars 1999, relative à la consultation de l'assemblée territoriale de la Polynésie française sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et l'Azerbaïdjan sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Ce document a été transmis à la commission compétente.

4

CONSEIL NATIONAL DES COMMUNES
« COMPAGNON DE LA LIBÉRATION »

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 142, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, créant le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération ». [Rapport n° 154 (1998-1999)].
Je suis heureux de saluer, au nom du Sénat, la présence, au côté de M. le secrétaire d'Etat, du général Simon, chancelier de l'ordre de la Libération. (Applaudissements.)
Dans la discussion générale, et à la demande de M. le secrétaire d'Etat, la parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur de la commission des affaires sociales. « Soldats tombés dans les déserts, les montagnes ou les plaines ; marins noyés que bercent pour toujours les vagues de l'océan ; aviateurs précipités du ciel pour y être brisés sur la terre ; combattants de la Résistance tués aux maquis et aux poteaux d'exécution ; vous tous qui, à votre dernier souffle, avez mêlé le nom de la France, c'est vous qui avez exalté les courages, sanctifié l'effort, cimenté les résolutions. » C'est par ces mots que le général de Gaulle s'exprimait devant le mémorial des Compagnons de la Libération.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous présenter, loin d'avoir une portée exclusivement symbolique, est un texte important. Il associe le législateur au devoir de mémoire sur l'une des heures les plus tragiques, mais aussi, paradoxalement, l'une des plus exaltantes peut-être de l'histoire de notre pays.
Ce texte vise, en effet, à assurer la pérennité de l'ordre de la Libération au moment où la disparition progressive et inéluctable des Compagnons de la Libération menace son existence même.
Or, l'extinction de l'ordre apparaît inconcevable, tant celui-ci incarne la mémoire de la Libération et l'esprit de la Résistance. Le général de Gaulle voyait ainsi dans l'ordre « une chevalerie exceptionnelle créée au moment le plus grave de l'histoire de France, fidèle à elle-même, solidaire dans le sacrifice et dans la lutte ». C'est cette image qui ne doit pas s'éteindre au moment où le dernier compagnon ira rejoindre la place qui l'attend dans la crypte du mont Valérien, sous la fameuse inscription : « Nous sommes ici pour témoigner devant l'Histoire que de 1939 à 1945 ses fils ont lutté pour que la France vive libre. » Et pourtant, mes chers collègues, ce moment approche. Des 1 036 compagnons, il n'en reste désormais que 167.
Il appartenait donc à la loi de garantir la continuité de l'ordre.
Bien évidemment, notre mémoire nationale ne doit pas être l'objet d'un quelconque clivage politique. Aussi, c'est dans un esprit très consensuel qu'a été préparé ce projet de loi, comme en témoignent les principales étapes de son élaboration.
Ce texte est l'aboutissement d'une démarche engagée depuis plusieurs années déjà par l'ordre de la Libération. En effet, en avril 1996, la chancellerie de l'ordre a présenté un avant-projet au ministre délégué aux anciens combattants de l'époque, M. Pasquini. A la demande du Président de la République, celui-ci a accepté de présenter un projet de loi devant le Parlement. Un projet de loi, très proche des propositions de la chancellerie de l'ordre, a donc été rédigé en novembre 1996 et transmis au conseil de l'ordre pour consultation. Après avis du Conseil d'Etat, le projet a été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale le 16 avril 1997 par le ministre délégué aux anciens combattants et victimes de guerre et par le garde des sceaux. Après la dissolution de l'Assemblée nationale, le nouveau Gouvernement a redéposé un projet de loi identique le 19 juin 1997. Celui-ci a été adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 17 décembre 1998. La commission des affaires sociales du Sénat l'a, à son tour, adopté à l'unanimité le 19 janvier dernier, sous réserve de l'adoption de plusieurs amendements, la plupart de cohérence ou rédactionnels.
Avant de détailler le contenu du projet de loi, il nous faut garder en mémoire ce qu'a représenté l'ordre de la Libération et ce qu'il est aujourd'hui.
Contrairement à ce que beaucoup pensent, c'est le 16 novembre 1940 à Brazzaville, et non à Londres, qu'a été créé l'ordre de la Libération. Destinée, selon les termes de l'ordonnance qui l'a instituée, à « récompenser les personnes ou les collectivités militaires et civiles qui se seront signalées de manière exceptionnelle dans l'oeuvre de libération de la France et de son empire » - en effet, mes chers collègues, la génération à laquelle nous appartenons a appris de ses instituteurs et de ses professeurs que la France repésentait un empire de 100 millions d'âmes, sur lequel le soleil ne se couchait jamais -...
M. Emmanuel Hamel. Grande vérité !
M. Jean Chérioux. Ne la renions pas !
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. ... la croix de la Libération a été décernée, entre 1941 et 1946, à 1 036 personnes physiques, à 18 unités militaires et à 5 communes françaises, à savoir : Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et Ile-de-Sein. Toutes portent le titre de « Compagnon de la Libération ».
Sur les 1 036 compagnons, 238 ne reçurent leur insigne qu'à titre posthume. Ils étaient morts au combat ou, pour nombre d'entre eux, en déportation. Le général de Gaulle a souvent rendu hommage à leur mémoire.
Dès l'origine, le chef de la France libre avait jugé nécessaire la création d'une récompense particulière pour tous ceux qui, au prix d'immenses sacrifices, avaient tout abandonné et risqué leur vie pour la libération de la France. Leur détermination exemplaire exigeait, pour ceux qui se sont tout particulièrement distingués dans ce combat, une marque de reconnaissance elle aussi exemplaire.
A l'époque, il affirmait ainsi : « Notre entreprise est hérissée de difficultés. Les Français seront lents à nous rallier... Je suis décidé à créer un insigne nouveau face à l'imprévisible conjoncture. Il récompensera ceux des nôtres qui se seront distingués dans cette haute et âpre campagne... »
La Libération n'a, pas signifié une quelconque mise en sommeil de l'ordre, même si le décret du 23 janvier 1946 a mis fin à l'attribution de la croix de la Libération. Bien au contraire : par deux ordonnances, du 26 août 1944 et du 10 août 1945, le général de Gaulle a assuré la pérennité de l'ordre et confirmé ses missions.
Cette architecture est très largement celle qui existe encore aujourd'hui.
Deuxième ordre national après celui de la Légion d'honneur, l'ordre de la Libération est doté, en application de l'ordonnance du 10 août 1945, de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Il est ainsi financé par un budget annexe à celui du ministère de la justice, et ses crédits s'élèvent à un peu plus de 5 millions de francs en loi de finances initiale pour 1999.
L'organisation actuelle de l'ordre repose sur deux piliers complémentaires.
Le conseil de l'ordre en est l'organe délibérant. Chargé de veiller à la discipline de l'ordre et d'élaborer les grandes orientations de son action, il est actuellement composé de seize membres, tous Compagnons de la Libération. Il se réunit au moins quatre fois par an sur convocation du chancelier.
L'administration et la direction de l'ordre sont assurées par le chancelier, assisté d'un secrétaire général. Le chancelier en exercice est, depuis 1978, le général d'armée Jean Simon, que j'ai grand plaisir à saluer. Le rôle du chancelier est déterminant. Dépositaire du sceau de l'ordre, il est seul qualifié pour le représenter. Ordonnateur du budget, il consulte le conseil et prend les décisions. Nommé par décret du Président de la République pour un mandat de quatre ans renouvelable, il est membre du conseil de l'ordre, qui propose un candidat au Président de la République.
Les missions actuelles de l'ordre de la Libération répondent à sa vocation initiale : la reconnaissance et la mémoire.
La première de ces missions est bien évidemment la politique de la mémoire.
L'ordre organise de nombreuses cérémonies commémoratives, dont celle du 18 juin au mont Valérien. Il assure également, par l'intermédiaire du chancelier, l'administration du musée de l'ordre de la Libération, qui a été créé en 1970, et veille sur les archives de l'ordre. En outre, afin de maintenir la tradition et l'idéal voulus dans la Résistance, l'ordre assure la discipline de ses membres.
Mais l'ordre est également chargé, en vertu de l'ordonnance du 10 août 1945, d'assurer le service de la médaille de la Résistance. Cette médaille, créée le 9 février 1943 par le général de Gaulle, a vocation à « reconnaître les actes remarquables de foi et de courage qui, en France, dans l'empire et à l'étranger, auront contribué à la Résistance du peuple français contre l'ennemi et ses complices depuis le 18 juin 1940 », selon les termes de l'ordonnance qui l'a instituée. Cette médaille, qui n'est plus attribuée depuis 1947 sauf à titre posthume, a permis d'honorer près de 43 000 résistants, mais aussi dix-sept communes et le territoire de Nouvelle-Calédonie.
L'ordre a enfin, depuis l'ordonnance du 26 août 1944, pour mission d'apporter un secours exceptionnel aux Compagnons de la Libération, aux médaillés de la Résistance et à leurs familles. Ainsi, en 1997, vingt-cinq Compagnons et dix médaillés ont bénéficié de ce soutien.
C'est donc parce que l'ordre de la Libération correspond à une mémoire glorieuse et exemplaire, mais aussi à une réalité concrète, qu'il importe d'assurer sa pérennité pour l'avenir. C'est le sens de ce projet de loi.
Ce texte, mes chers collègues, propose la création d'un nouvel établissement public national à caractère administratif - le conseil national des communes « Compagnon de la Libération » - qui sera chargé de succéder à l'actuel conseil de l'ordre. La logique du dispositif proposé est à la fois claire et cohérente : il s'agit de fonder l'avenir de l'ordre sur les seuls Compagnons de la Libération dont la permanence sera assurée, c'est-à-dire les cinq communes.
L'ordre est, en effet, inséparable de ses membres. C'est évident sur le plan historique, mais cela se vérifie également sur le plan juridique. La structure de l'ordre de la Libération repose sur deux organes : le conseil de l'ordre et le chancelier. Or, les membres du conseil de l'ordre et le chancelier sont tous, en vertu des statuts de l'ordre, des compagnons de la Libération. Il en découle nécessairement qu'à la disparition du dernier compagnon de la Libération, que la structure de l'ordre serait dissoute et l'ordre ne serait plus qu'une « coquille vide ».
C'est pourquoi ce projet de loi propose une nouvelle architecture institutionnelle pour l'ordre, accordant une place centrale aux communes titulaires de la croix de la Libération.
Il apparaissait difficile d'intégrer les unités combattantes « Compagnon de la Libération » dans le futur conseil national. En effet, certaines sont d'ores et déjà dissoutes et le mouvement actuel de restructuration des armées ne permet pas de garantir la pérennité des autres. Les unités combattantes seront toutefois associées à la mission de mémoire du conseil national.
En revanche, la place accordée aux cinq communes sera centrale. Elle correspond d'ailleurs au rôle actuellement joué par ces communes dans l'oeuvre de Résistance et de Libération, comme en témoigne l'exposé des motifs des décrets les élevant au rang de Compagnon de la Libération, que vous trouverez dans mon rapport écrit.
En plaçant les cinq communes au coeur de la nouvelle structure de l'ordre, le projet de loi permet de garantir une continuité dans la mémoire et l'architecture institutionnelle de l'ordre.
D'une part, son organisation reposera toujours sur des titulaires de la croix de la Libération. La mémoire, que l'ordre doit tout à la fois incarner et transmettre, sera bien celle de ses membres.
D'autre part, l'équilibre institutionnel de l'ordre ne sera que peu modifié : le futur conseil national succédera au conseil de l'ordre dans toutes ses attributions. Ses missions resteront donc inchangées et ses modalités d'organisation et de fonctionnement seront très proches de celles qui existent actuellement.
L'équilibre du texte proposé témoigne de cette continuité.
L'article 1er crée le futur conseil national, qu'il place sous la tutelle du garde des sceaux, ministre de la justice.
Les articles 2 à 9 précisent les missions, l'organisation et le fonctionnement de ce nouvel établissement public. Ils ne font donc que reprendre, et parfois adapter, dans la loi, les dispositions déjà existantes en ces trois domaines.
Les missions du futur conseil national, énumérées à l'article 2 du projet de loi, correspondent aux missions actuellement assurées par le conseil de l'ordre.
Ces missions sont au nombre de cinq : assurer la pérennité des traditions de l'ordre et porter témoignage devant les générations futures ; mettre en oeuvre des initiatives pédagogiques, muséographiques ou culturelles, afin de conserver la mémoire de l'ordre ; veiller sur le musée et sur les archives de l'ordre ; organiser les cérémonies commémoratives de l'appel du 18-Juin et de la mort du général de Gaulle ; participer à l'aide morale et matérielle aux Compagnons et à leurs femmes et leurs enfants.
Par ailleurs - j'attire votre attention sur ce point - l'article 7 du projet de loi précise que le conseil national assure le service de la médaille de la Résistance.
Sur proposition de son rapporteur - qui était d'ailleurs une dame (Sourires) - l'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant que les médaillés de la Résistance pourront également bénéficier de l'aide morale et matérielle du conseil national. La commission estime elle aussi que le projet de loi doit légitimement prévoir une telle disposition, dans la mesure où cette aide est actuellement l'une des missions de l'ordre de la Libération.
Dans le même esprit, et à des fins d'équilibre et d'équité, la commission vous proposera un amendement étendant aux médaillés de la Résistance française la mission de mémoire du futur conseil de l'ordre. Nous considérons en effet que les médaillés de la Résistance ne peuvent pas être seulement concernés par la seule mission sociale du futur conseil national. Dans la mesure où ils symbolisent eux aussi la mémoire exemplaire de la Libération et de la Résistance, le futur conseil national devra également s'attacher à conserver et à entretenir leur mémoire.
Ainsi que le rappelait, dans son style inimitable, André Malraux lors d'une émission de télévision, le 17 juin 1971 : « Le dernier cercueil du mont Valérien ne sera pas non plus un cercueil solitaire. On ne le fermera pas seulement sur le dernier compagnon : on le fermera aussi sur le dernier combattant de la première division française libre ou de la 2e division blindée, sur le dernier pêcheur breton qui amena des Français clandestins en Angleterre, sur le dernier cheminot qui paralysa provisoirement les V 2, sur les derniers maquisards grâce à qui les panzers d'Aquitaine n'arrivèrent pas à temps en Normandie, sur la dernière couturière morte dans un camp d'extermination pour avoir pris chez elle un de nos postes émetteurs. »
Et André Malraux concluait : « Alors, la croix de Lorraine de Colombey, l'avion écrasé de Leclerc, la grand-mère corse qui cachait tranquillement le revolver de Maillot dans la poche de son tablier, le dernier cheminot fusillé comme otage, la dernière dactylo morte à Ravensbrück pour avoir donné asile à l'un des nôtres, confondront leur ombre avec celle de notre dernier compagnon. » Telle est, mes chers colègues, l'inspiration de notre amendement.
S'agissant de l'organisation et du fonctionnement du futur conseil national, le texte prévoit que le conseil d'administration du conseil national se compose des personnes physiques titulaires de la croix de la Libération, des maires en exercice des cinq communes « Compagnon de la Libération » et d'un délégué national. A terme, le conseil ne devrait donc réunir que six membres : les cinq maires et le délégué national. Le délégué national, qui succédera à l'actuel chancelier, sera nommé par décret du Président de la République, après avis des membres du conseil.
La présidence du conseil national sera assurée conjointement par l'un des maires, ceux-ci se succédant chaque année, et par le délégué national. A ce propos, votre commission vous propose d'adopter un amendement de cohérence précisant que la présidence ici visée est celle du conseil d'administration.
Les fonctions du conseil d'administration et du délégué national sont précisées aux articles 5 et 6.
Le conseil d'administration, organe délibérant, fixe les grandes orientations, vote le budget et approuve les comptes.
Le délégué national, organe exécutif, dispose du pouvoir administratif et financier.
L'article 8 détermine les ressources du conseil national et l'article 9 soumet le conseil national au contrôle administratif et financier, comme pour tout établissement public à caractère administratif.
Le schéma institutionnel prévu paraît donc très cohérent.
Votre commission observe, en outre, qu'il est loin d'être une création ex nihilo. Il s'appuie, au contraire, sur une expérience qui a su faire la preuve de son dynamisme. Ce schéma fait reposer très largement l'avenir de l'ordre sur les cinq communes « Compagnon de la Libération ». Or celles-ci, regroupées au sein d'une association, sont déjà très actives et prennent de nombreuses initiatives dans le cadre de la politique de mémoire de la Libération et de la Résistance. En ce sens, le projet de loi ne fait finalement qu'institutionnaliser le rôle moteur déjà joué par les communes dans la vie de l'ordre. Le projet de loi fixe les modalités d'entrée en application du futur schéma institutionnel. L'entrée en vigueur du texte est en effet différée jusqu'au moment où l'organisation actuelle de l'ordre ne sera plus en mesure d'assurer son fonctionnement régulier. Là encore, il s'agit d'assurer une continuité entre le système existant et le dispositif futur.
Enfin, l'article 10 du projet prévoit que la loi entrera en application au moment où l'actuel conseil de l'ordre ne pourra plus, matériellement, réunir quinze Compagnons de la Libération. La chancellerie de l'ordre estime qu'un tel fait constitutif pourrait survenir dans une dizaine d'années.
En première lecture, l'Assemblée nationale a, sur proposition de son rapporteur, adopté un amendement à l'article 10. Sans modifier le sens de l'article, cet amendement a supprimé l'exigence initiale d'un décret du Président de la République pour fixer la date d'entrée en vigueur de la présente loi. En revanche, cet amendement prévoit qu'un décret du Président de la République nommera le chancelier de l'ordre en exercice délégué national, afin d'officialiser par un acte le changement de statut institutionnel de l'ordre, tout en assurant la continuité de son fonctionnement ; nous sommes entièrement d'accord avec l'Assemblée nationale.
Evoquant les Compagnons de la Libération morts pour la France, le général de Gaulle écrivait : « Votre pensée fut, naguère, la douceur de nos deuils. Votre exemple est, aujourd'hui, la raison de notre fierté. Votre gloire sera, pour jamais, la compagne de notre espérance. » C'est de ce passé, de ce présent et de cet avenir que sera dépositaire le futur conseil national des communes « Compagnon de la Libération ».
C'est pourquoi la commission des affaires sociales vous propose d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le chancelier de l'ordre de la Libération, mes chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd'hui est un élément important d'une politique consacrée au devoir de mémoire. Il résulte de la réflexion engagée depuis plusieurs années par les Compagnons de la Libération, inquiets pour la pérennité de l'ordre.
En effet, les Compagnons survivants aujourd'hui sont peu nombreux et il ne peut être envisagé que les actes qu'ils ont accomplis pour la libération de la France disparaissent avec leur personne physique.
Mais, avant d'examiner les dispositions de ce projet, j'aimerais rappeler brièvement ce qu'est cet ordre très particulier : l'ordre de la Libération.
Le général de Gaulle, dès juin 1940, a souhaité récompenser d'une manière exceptionnelle ceux qui, très peu nombreux au départ, ont tout risqué pour participer avec le chef de la France libre à une aventure dont personne ne connaissait le devenir.
Cela s'est fait très rapidement, puisque le 16 novembre 1940, à Brazzaville, capitale de l'Afrique équatoriale française ralliée à la France libre, le général de Gaulle signa l'ordonnance n° 7 créant l'ordre de la Libération.
Il définit ainsi le cadre de son attribution : « Récompenser les personnes ou les collectivités militaires et civiles qui se seront signalées dans l'oeuvre de la libération de la France et de son empire. »
La rapidité de création de cet ordre montre bien l'importance qui lui est accordée par le général de Gaulle. Sa représentation, une croix où figure au revers la devise Patriam servando victoriam tulit - en servant la patrie, il a remporté la victoire - marque aussi sa vision de la France.
Cette croix est attachée par un ruban dont les couleurs sont hautement symboliques, puisque ce ruban est noir et vert, le noir pour le deuil et le vert pour l'espérance.
Ainsi, 1036 croix seront décernées à des civils et à des militaires, et ce jusqu'au 23 janvier 1946, date de la cessation de l'attribution de cette très haute distinction.
La croix de l'ordre de la Libération a aussi été décernée à cinq villes - Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors, Ile-de-Sein - ainsi qu'à dix-huit unités combattantes appartenant aux trois armées.
Cet ordre, le deuxième ordre national après celui de la Légion d'honneur, s'éteindra avec la disparition du dernier Compagnon. Une place vide attend celui-ci dans la crypte du mont Valérien, haut lieu de la Résistance.
Il n'est pas permis que cette page de notre histoire soit ainsi oubliée. Le texte que vous allez voter est un élément important de notre politique consacrée au devoir de mémoire.
Il faut informer les jeunes générations de notre histoire, des épreuves qu'ont dû surmonter les hommes et les femmes de notre pays au cours du xxe siècle, en particulier lors de la Seconde Guerre mondiale.
Nous devons le faire non pas passivement, dans le simple dessein de rappeler l'histoire, mais d'une manière active, pour permettre à ceux qui feront la France de demain de trouver le sens d'un tel engagement et de le prendre pour exemple.
Pour les jeunes qui, au xxie siècle, vont avoir en main les destinées de la France et de l'Europe et vont assumer des responsabilités, l'exemple de ceux qui ont accepté, à un moment de leur vie, que leur destin personnel s'efface devant le destin collectif de notre pays doit leur permettre de construire leur identité de citoyen et les aider dans leurs responsabilités futures à avoir toujours en mémoire les valeurs de la République française.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Gisèle Printz. Pour ces différentes raisons, il était nécessaire d'assurer la pérennité de l'ordre avant que le dernier survivant nous quitte. Pour cela, il fallait trouver une nouvelle formule.
C'est dans ce dessein qu'a été proposée la création d'un établissement public national appelé conseil national des communes « Compagnon de la Libération », regroupant les cinq villes Compagnon précédemment citées, établissement appelé à prendre la succession de l'ordre.
Ce conseil national comprendra, outre les personnes physiques titulaires de la croix de la Libération, les maires des communes Compagnon, qui présideront à tour de rôle cet organisme, conjointement avec un délégué national nommé par le chef de l'Etat.
Ce conseil sera placé sous la tutelle du ministère de la justice et devra mettre en oeuvre toutes les initiatives qu'il jugera utiles pour conserver la mémoire de l'ordre ainsi que celle de ses membres.
Il devra aussi organiser des cérémonies commémoratives, s'agissant notamment de l'appel du 18-Juin, veiller sur le musée de l'ordre de la Libération, apporter une aide morale et matérielle aux veuves et aux enfants des compagnons décédés.
En ce qui concerne la période transitoire entre le conseil de l'ordre de la Libération et le nouveau conseil national des communes « Compagnon de la Libération », le texte prévoit un certain nombre de règles. Il est, entre autres choses, précisé que le délégué national doit présider la commission de la médaille de la Résistance, fixer les orientations de l'établissement public, arrêter les programmes, voter le budget et approuver les comptes.
Tout semble donc prévu dans ce texte, dont l'esprit est celui de la résistance qui a animé ceux qui se sont battus et ont donné leur vie pour que vive la France.
Comme l'a dit André Malraux, « l'ordre de la Libération n'est pas formé d'hommes qui se sont séparés des autres par leur courage, mais bien d'hommes à qui leur courage a donné la chance de représenter tous ceux qui, le cas échéant, n'avaient pas été moins courageux qu'eux. »
Ce projet de loi est un très bon texte et c'est pourquoi le groupe socialiste le votera. (Très bien ! et applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le chancelier de l'ordre de la Libération, mes chers collègues, ce projet de loi, adopté avec une belle unanimité par l'Assemblée nationale le 17 décembre 1998, a pour objet de prolonger l'oeuvre et la mission historique de l'ordre de la Libération, créé à Brazzaville par le général de Gaulle le 16 novembre 1940, au-delà de l'existence physique de ses membres éminents.
En effet, si cent soixante et onze Compagnons de la Libération sont encore en vie à l'heure où nous parlons, il est apparu néanmoins nécessaire de prévoir la reconstitution de l'ordre autour d'une structure nouvelle, le conseil national des communes « Compagnon de la Libération ».
Chacun l'aura bien compris, l'enjeu de ce texte est la pérennité et la transmission, au fil des générations, de la mémoire d'une période noire et honteuse de notre histoire, durant laquelle quelques hommes, mais aussi des femmes se sont dressés courageusement contre l'occupant nazi, refusant l'impasse de la collaboration et de l'allégeance aveugle au maréchal Pétain.
C'est dans le souvenir de ces combats héroïques de la Résistance que la plupart d'entre nous trouvent l'origine et le ferment de leur engagement politique, au-delà de nos diversités de pensées et de traditions. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
Les cinq communes titulaires de la croix de la Libération assureront désormais la gestion de l'ordre de la Libération. Il s'agit de Nantes, première ville distinguée, dès novembre 1941, pour ses actes de résistance, de Grenoble, qui répondit aux représailles et à l'exécution des chefs de la résistance locale, de Paris, qui a chassé l'ennemi à la suite de combats acharnés, de Vassieux-en-Vercors, qui, grâce à son centre de parachutage, a permis le recours de l'aviation alliée, et d'Ile-de-Sein, enfin, dont les enfants sont morts au combat.
A l'énumération de ces cinq communes, on se rend compte qu'au-delà du caractère élitaire de l'ordre de la Libération c'est davantage la diversité d'origines des Compagnons qui perdurera avec la mise en place du conseil national.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Très bien !
M. Guy Fischer. Mais s'il est essentiel que l'ordre survive à ses Compagnons historiques, c'est avant tout pour continuer le travail inlassable de mémoire auprès des nouvelles générations d'aujourd'hui et du siècle prochain.
Alors que disparaissent les témoins, les acteurs directs de la Résistance, les victimes de la déportation, il ne faut pas permettre que les opérations de réhabilitation du régime de Vichy et de négation du génocide juif prennent de l'ampleur et sèment le doute dans les esprits désorientés de nos enfants.
Qui peut nier que les thèses xénophobes et antisémites s'expriment aujourd'hui de plus en plus à visage découvert, sans vergogne et, pire, bien souvent en toute impunité malgré l'adoption, sur l'initiative des parlementaires communistes, d'une loi, dite « loi Gayssot », tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe ?
Face à des dérives révisionnistes, il est de la responsabilité de nous tous, des pouvoirs publics, de soutenir toute action qui va dans le sens de la promotion des valeurs portées en leur temps par les premiers combattants de la Résistance, d'André Malraux à Jean Moulin, jusqu'aux milliers de maquisards « anonymes » ayant sacrifié leur famille, leur jeunesse et finalement leur vie à la survie de la France libre.
C'est pourquoi l'ordre de la Libération doit trouver auprès du Gouvernement de la nation - et je suis persuadé qu'il le trouvera - le soutien nécessaire à la mise en oeuvre de ses missions, énumérées à l'article 2 de ce projet de loi.
Au nom du groupe communiste républicain et citoyen, je suis heureux de m'associer, à mon tour, à l'hommage rendu aux patriotes combattants de la Résistance à travers l'adoption d'un texte qui permettra la transmission de cette flamme jaillie des ténèbres de l'année 1940. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Laurin.
M. René-Georges Laurin. Je tiens tout d'abord à saluer respectueusement le général Simon, chancelier de l'ordre de la Libération, qui fut un héros de la guerre - nous connaissons tous le subterfuge qu'il employa, avec Pierre Messmer, pour quitter le territoire français et rejoindre la France libre - ainsi que M. de Bresson, président de l'Association nationale des médaillés de la Résistance française.
Mon intervention sera un peu particulière, mes chers collègues.
J'ai été chargé par le groupe gaulliste d'apporter son accord à ce projet de loi, dont je parlerai d'ailleurs très peu car Lucien Neuwirth, qui est un camarade de la Résistance, a, dans son excellent rapport, fort brillamment évoqué les souvenirs, les textes et l'histoire des Compagnons de la Libération.
Avant de dire un mot du problème que nous traitons aujourd'hui, je voudrais vous faire, ce soir, une confidence, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues : les bancs sur lesquels vous êtes assis sont ceux sur lesquels le général de Gaulle nous a réunis au retour d'Alger. Ils ont été occupés par des résistants, des combattants, qui formaient l'Assemblée consultative.
Je suis heureux de le dire ce soir, parce que je suis le seul membre de l'Assemblée consultative qui soit aujourd'hui sénateur et le seul à pouvoir témoigner de ce petit moment d'histoire.
L'Assemblée consultative - la plupart d'entre vous le savent, mais je le dis pour les plus jeunes - a été créée par le gouvernement d'Alger pour donner une représentation de l'aspect républicain de l'appel du général de Gaulle.
Elle était composée de délégués de la Résistance, de délégués de la France libre, de résistants intérieurs, de délégués des mouvements de résistance, des partis politiques - M. Fernand Grenier occupait à l'époque un siège peu éloigné du vôtre, monsieur Fischer.
Elle était composée aussi de délégués de la jeunesse. Au nombre de quatre, nommés par le général de Gaulle, ils représentaient respectivement le Mouvement uni de la Résistance, pour la zone Sud, l'Organisation civile et militaire, le Front national, pour la zone Nord, votre serviteur représentant les Jeunes Chrétiens combattants.
Je voudrais vous décrire l'atmosphère qui était celle de cette assemblée et évoquer pour vous ce que ces murs ont entendu de ce petit « morceau d'histoire », pour ceux qui en faisaient partie, et de ce « grand » morceau d'histoire, pour la France !
Nous étions les quatre plus jeunes, les « députés de la jeunesse », comme on disait. Nous avions été nommés officiers supérieurs des Forces françaises de l'intérieur. Le général de Gaulle nous avait décorés - nous avions alors vingt-trois et vingt-quatre ans - de la Légion d'honneur, de la croix de guerre et, bien entendu, de la médaille de la Résistance.
Parmi ceux qui étaient moins jeunes, il y avait tous les membres du Conseil national de la Résistance, le CNR, dont beaucoup étaient Compagnons, les représentants des mouvements de la Résistance de la zone Nord et de la zone Sud, ainsi que le parti communiste, le parti socialiste et les différentes organisations politiques qui avaient rallié le général de Gaulle.
Je voulais rappeler ces éléments aujourd'hui parce qu'ils constituent quand même un souvenir important et qu'il est difficile d'en parler dans un débat autre que celui auquel nous participons. Je voudrais que les sénateurs soient fiers d'être les successeurs de ces équipes de résistants qui siégeaient dans notre assemblée et qui ont écrit une page d'histoire.
Permettez-moi de vous livrer une anecdote.
Nous siégions dans cet hémicycle quand on nous annonça que le général de Gaulle venait nous rendre visite. Il entra, vêtu de son uniforme. Il demanda au président de l'assemblée la permission d'accéder à la tribune et il nous déclara que le général Leclerc venait de libérer Strasbourg. Nous avons éclaté en sanglots, une Marseillaise a fusé et nous avons tous chanté avec un coeur infini notre hymne national.
C'est vous dire que cette salle est pleine d'histoire et qu'elle mérite, ô combien, de recevoir aujourd'hui, si j'ose dire, le testament des Compagnons.
Il y avait évidemment de nombreux Compagnons de la Libération et médaillés de la Résistance. Beaucoup sont morts, et ceux qui restent ne sont pas en très bonne santé. Sur les dix Compagnons que j'avais dans ma ville de Saint-Raphaël, il y a dix ans, trois seulement sont encore vivants, mais maintenant très fatigués.
Voilà, mesdames, messieurs, ce que je voulais vous dire, indépendamment du problème qui nous occupe aujourd'hui.
Je n'ai pas besoin de répéter ce qui a été dit par Lucien Neuwirth : la création de l'ordre... le Grand-Maître, le général de Gaulle... les déclarations de ce dernier, en particulier le célèbre : « Quoi qu'il arrive, la flamme de la Résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas. » Par ce texte, quoi qu'il arrive, l'oubli ne recouvrira pas l'histoire des hommes, de cette chevalerie exceptionnelle, selon les mots du général de Gaulle.
A l'origine, le général de Gaulle avait décidé que ses compagnons - qu'il n'avait pas encore appelé ses « Compagnons », mais qu'il appelait ses « camarades de combat » - seraient des croisés. Ce n'est que plus tard qu'il a retenu le terme de « Compagnon ». Nous, médaillés de la Résistance, nous l'avons étendu. Ainsi, sur le plan proprement politique, ceux qui ont continué à suivre le général de Gaulle après la guerre ont gardé cette appellation.
Nous considérons toujours, nous, que le général de Gaulle était notre chef : nous avons été et nous resterons ses compagnons jusqu'à notre mort. En fait, les Compagnons, ceux qu'il avait désignés comme tels et qu'il avait choisis - dont le général Simon est l'un des plus éminents exemples - sont ceux qu'il avait appelés ses compagnons.
Aussi suis-je fier aujourd'hui de représenter le groupe du RPR, qui adoptera à l'unanimité le projet de loi tel qu'il sera amendé par la Haute Assemblée, témoignage de l'époque tragique et glorieuse de l'histoire de notre pays.
Les peuples qui se sont combattus hier ont aujourd'hui choisi une autre voie ; nous espérons qu'elle durera. Mais, pour nous, qui avons combattu, qui avons été arrêtés par la Gestapo, emprisonnés, à Fresnes, à Compiègne, dans les camps de la mort... les nazis resteront les nazis.
J'ai toujours dans l'oreille le bruit - et il arrive rarement que je le fasse taire - que faisaient mes camarades - dont certains étaient de jeunes communistes - en tapant sur les tuyaux de la prison, à Fresnes, pour nous faire connaître le matin, en morse, le nom de ceux qui allaient être fusillés.
Je me souviendrai toujours de tous ces jeunes que nous avons laissés sur la route et qui ne faisaient pas de politique - à l'époque, les jeunes communistes criaient : « Vive de Gaulle » et « Vive la France » - parce qu'il s'agissait de la patrie, et que, grâce aux Compagnons de la Libération, la patrie a été sauvée. (Vifs applaudissements.)
M. le président. Avant de donner la parole à M. le secrétaire d'Etat, je tiens à dire combien nous avons été émus par le témoignage de notre éminent collègue René-Georges Laurin et par son évocation de l'Histoire.
Vous avez la parole, monsieur le sécrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants. Monsieur le président, monsieur le chancelier, mesdames, messieurs les sénateurs, il est évidemment un peu difficile pour moi d'intervenir après M. René-Georges Laurin, sénateur du Var, ancien maire de Saint-Raphaël, qui a évoqué ce qu'il a vécu, comme M. Lucien Neuwirth et d'autres.
J'appartiens à une génération qui n'a pas connu la guerre, qui n'a même participé à aucun conflit, puisque je suis entré à l'université à la fin de la guerre d'Algérie. Mais si ma génération, celles qui suivent et les jeunes générations actuelles peuvent tranquillement exprimer leurs revendications dans les rues, si la France est aujourd'hui un pays de liberté, une démocratie, si la France peut encore porter son témoignagne universel, centré autour des valeurs de la République - liberté, égalité, fraternité - c'est parce qu'il y a eu des femmes et des hommes tels que ceux dont vous venez d'évoquer la mémoire, monsieur Laurin, en « un moment difficile et glorieux », selon l'expression employée tout à l'heure par M. le rapporteur, dont la vie est une illustration de cette période.
En effet, Lucien Neuwirth était encore un adolescent quand il a été parachuté aux Pays-Bas, a été pris, a été fusillé et laissé pour mort. Et c'est lui qui, aujourd'hui, 3 mars 1999, rapporte le projet de loi qui vous est soumis.
La France a connu une période difficile : l'année 1940 fut celle de la défaite, de l'occupation, des pleins pouvoirs donnés à Pétain et Laval, de l'engagement du processus de collaboration, de la multiplication des drames humains, de la mise en cause de la dignité de la personne humaine. Mais ce fut aussi une période glorieuse, qui est née avec l'appel du général de Gaulle, avec le refus héroïque qu'opposa Jean Moulin aux Allemands. N'oublions pas ces hommes et ces femmes qui, en zone occupée, en zone libre, dans tout l'empire, se sont relevés, ont refusé la défaite et se sont engagés dans la Résistance.
C'est cette période que nous évoquons, et c'est pour moi un honneur de défendre en cet instant ce projet de loi. J'ai la chance, ce qui est assez rare dans une assemblée où s'affrontent diverses tendances politiques, de présenter un texte qui, je le sais, recueillera l'assentiment unanime.
En effet, ce soir, nous allons traiter ensemble de la mémoire d'une période particulière de notre pays, celle de la Résistance, période au cours de laquelle des hommes et des femmes ont été capables, comme l'a rappelé Mme Printz, de subordonner leur propre vie, leur destin individuel, au destin collectif et supérieur de la France.
C'est de cela qu'il s'agit ce soir.
Le général de Gaulle ne s'y était pas trompé. Dès juin 1940, il manifestait la volonté de distinguer ceux, hommes, femmes, collectivités militaires et civiles, qui allaient s'engager derrière lui pour que vive la France, mais une France libre. Ce point de notre histoire a déjà été évoqué ce soir, je n'y reviendrai pas.
C'est donc, mesdames, messieurs les sénateurs, en novembre 1940, à Brazzaville, qu'est créé l'ordre de la Libération, que le projet de loi que je vous soumets ce soir vise à pérenniser, au-delà de la disparition du dernier Compagnon, par la mise en place d'une nouvelle structure institutionnelle.
Ainsi, cet ordre prestigieux, très strict, totalement égalitaire puisque aucune distinction n'est faite entre ses différents membres va subsister.
Je rappelle que 1 036 croix ont été attribuées et qu'actuellement 167 Compagnons sont encore en vie. Je tiens à ce propos à remercier Lucien Neuwirth d'avoir fait figurer la liste de tous les Compagnons de la Libération dans son rapport. On peut y lire des noms qui évoquent notre histoire, mais aussi des noms inconnus, et, dans cet anonymat même, c'est la France tout entière qui se retrouve, la France libre, la Résistance de l'intérieur. Sont également cités Churchill et Eisenhower et, bien entendu, le regretté Maurice Schumann, qui siégait encore, il n'y a pas si longtemps sur les bancs de la Haute Assemblée.
La croix de l'ordre de la Libération a aussi été décernée à cinq collectivités - Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors, l'Ile-de-Sein - auxquelles il appartiendra dans l'avenir de perpétuer la mémoire des Compagnons de la Libération et de toute la Résistance.
Cet ordre exceptionnel était jusqu'à maintenant géré par les Compagnons de la Libération eux-mêmes. Mais vous avez rappelé, madame, messieurs les sénateurs, que notre destin était mortel et qu'un cercueil attendait, au mont Valérien, le dernier Compagnon de la Libération. Or l'ordre dépasse les personnes qui le composent. Ce qui est en cause, c'est donc la survie de ce symbole, de cette expression de la Résistance et de la Libération.
Par conséquent, il fallait permettre à l'ordre de survivre, par delà la mort du dernier Compagnon. Le rapport de M. Lucien Neuwirth et les propos de Mme Printz et de M. Fischer illustrent bien la démarche qui a été adoptée à cette fin. Mais, j'y insiste pour qu'il n'y ait pas de malentendu, l'ordre ne disparaît pas, ce sont ses structures qui changent, avec la création d'un établissement public à caractère administratif qui prendra le nom de conseil national des communes « Compagnon de la Libération » et sera placé sous la tutelle du garde des sceaux. Il bénéficiera par conséquent des moyens financiers du ministère de la justice. Ne nous posons donc pas de questions à propos des moyens dont disposera cet établissement pour exister et agir demain : la France n'abandonnera pas ce monument de son histoire, quelles que soient les majorités qui présideront à son destin. L'enjeu dépasse en effet l'esprit partisan, puisque c'est de notre histoire qu'il s'agit et des difficultés que notre pays eut à affronter victorieusement.
Cet établissement devra assumer un devoir de mémoire, gérer le musée de l'ordre de la Libération, assurer la commémoration de l'appel du 18 Juin, date importante de notre histoire s'il en est, conserver le souvenir des actions du général de Gaulle, bien évidemment, mais aussi participer à l'aide morale et matérielle accordée aux Compagnons, à leurs femmes et à leurs enfants, comme les différents intervenants l'ont précisé.
Ce projet de loi est naturellement un texte de nature juridique en ce qu'il règle la composition et le fonctionnement de l'établissement public à caractère administratif, notamment de son conseil national.
Il est ainsi prévu que les personnes physiques qui y siégeront seront, bien sûr, toutes titulaires de la croix de la Libération et que les maires le présideront à tour de rôle aux côtés du délégué national, nommé par le chef de l'Etat. Le texte prévoit également les règles relatives à la période transitoire.
Avant de conclure, permettez-moi de vous annoncer d'emblée que les amendements proposés par la Haute Assemblée seront acceptés par le Gouvernement, fort du conseil technique que lui apporte le chancelier de l'ordre, ici présent, le général Simon.
Ainsi donc, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez améliorer le texte en le rendant plus précis, plus rigoureux, donc plus efficace.
Il suffit maintenant de travailler sur ce devoir de mémoire, et ce en direction des jeunes générations, comme les différents intervenants l'ont dit, notamment Mme Printz.
Ce devoir de mémoire, ce n'est pas pour nous, plus anciens, qu'il est important ; il constitue aujourd'hui un élément de l'apprentissage de la citoyenneté pour les jeunes générations, qui auront à organiser la vie de notre pays, à en assumer la responsabilité dans le xxie siècle qui s'annonce. Elles devront le faire, je le dis toujours, avec, certes, les moyens technologiques, scientifiques et techniques du xxie siècle, en prenant en compte les évolutions culturelles, mais aussi en se rattachant au socle de valeurs que nous leur léguons, aux valeurs de la République, ce pour quoi vous vous êtes engagés, Lucien Neuwirth, René-Georges Laurin, Roger Husson, sénateur de la Moselle... comme bien d'autres membres de cette assemblée.
La liberté, l'égalité, la fraternité, ce ne sont pas simplement trois mots gravés au fronton de nos mairies, de nos écoles. Cette devise nous engage tous dans nos responsabilités quotidiennes quel que soit le niveau où nous les exerçons. C'est le patrimoine de notre pays, c'est le message universel qu'adresse la France et que nous devons faire passer aux jeunes générations. Mais, au-delà de notre pays, c'est au sein de la construction européenne que ce message doit se transmettre car, s'il est une spécificité propre à la France, que tout le monde lui reconnaît d'ailleurs, c'est bien son rôle de porteur de valeurs universelles.
Les jeunes générations qui vont faire la France de demain ne peuvent ignorer la France du xxe siècle. Elles ne peuvent ignorer le 18 juin 1940. Elles ne peuvent ignorer la période 1940-1945, ni l'ensemble des sacrifices qui furent consentis par des hommes et des femmes courageux pour que vive la France. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ En vue de succéder au Conseil de l'Ordre de la Libération, dans les conditions fixées à l'article 10 de la présente loi, il est créé un établissement public national à caractère administratif dénommé Conseil national des communes "Compagnon de la Libération", placé sous la tutelle du garde des sceaux, ministre de la justice. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ Le Conseil national des communes "Compagnon de la Libération" a pour mission :
« _ d'assurer la pérennité des traditions de l'Ordre de la Libération et de porter témoignage de cet ordre devant les générations futures, en liaison avec les unités combattantes titulaires de la Croix de la Libération ;
« _ de mettre en oeuvre toutes les initiatives qu'il juge utiles, dans les domaines pédagogique, muséographique ou culturel, en vue de conserver la mémoire de l'Ordre de la Libération et de ses membres ;
« _ de veiller sur le musée de l'Ordre de la Libération et de le maintenir, ainsi que les archives de l'ordre, en leurs lieux dans l'Hôtel national des Invalides ;
« _ d'organiser, en liaison avec les autorités officielles, les cérémonies commémoratives de l'Appel du 18 juin et de la mort du général de Gaulle ;
« _ de participer à l'aide morale et matérielle aux Compagnons de la Libération, aux médaillés de la Résistance et à leurs veuves et enfants. »
Par amendement n° 1, M. Neuwirth, au nom de la commission, propose, après les mots : « la mémoire de l'ordre de la Libération », de rédiger comme suit la fin du troisième alinéa de cet article : « , de ses membres, et des médaillés de la Résistance française ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. J'ai évoqué cet amendement tout à l'heure.
L'Assemblée nationale a pris une très bonne initiative en précisant que la mission du conseil national des communes consistant à « participer à l'aide morale et matérielle aux veuves et aux enfants des Compagnons de la Libération » devait également viser les médaillés de la Résistance ainsi que leurs veuves et enfants.
La commission a estimé que, pour des raisons d'équité, il fallait apporter la même précision s'agissant de la mission du conseil national des communes qui est relative à la conservation de la mémoire : celle-ci doit aussi concerner les médaillés de la Résistance française.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2, M. Neuwirth, au nom de la commission, propose, dans le dernier alinéa de cet article, après les mots : « médaillés de la Résistance », d'insérer le mot : « française ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ Le conseil d'administration du Conseil national des communes "Compagnon de la Libération" est composé :
« _ des maires en exercice des cinq communes titulaires de la Croix de la Libération : Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors, Ile-de-Sein ;
« _ des personnes physiques titulaires de la Croix de la Libération ;
« _ d'un délégué national nommé par décret du Président de la République, après avis des autres membres du conseil d'administration, pour un mandat de quatre ans renouvelable plusieurs fois. » - (Adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ La présidence du Conseil national est assurée conjointement :
« _ d'une part, par l'un des maires en exercice des communes titulaires de la Croix de la Libération, chacun successivement, pour une durée d'une année ;
« _ d'autre part, par le délégué national. »
Par amendement n° 3, M. Neuwirth, au nom de la commission, propose, au début du premier alinéa de cet article, après les mots : « La présidence », d'insérer les mots : « du conseil d'administration ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Cet amendement vise à apporter une précision propre à éviter toute ambiguïté quant à la présidence dont il s'agit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Articles 5 et 6



M. le président.
« Art. 5. _ Le conseil d'administration du Conseil national fixe les orientations de l'établissement public et arrête ses programmes. Il vote son budget et approuve les comptes. » - (Adopté.)
« Art. 6. _ Le délégué national prépare et exécute les délibérations du conseil d'administration, et représente l'établissement en justice et dans tous les actes de la vie civile. Il prend les décisions qui ne relèvent pas de la compétence du conseil d'administration. Il est assisté d'un secrétaire général et de collaborateurs appartenant à des corps de fonctionnaires de l'Etat ou des collectivités locales mis à disposition ou détachés. » - (Adopté.)

Article 7



M. le président.
« Art. 7. _ Le Conseil national assure le service de la médaille de la Résistance française. Son délégué national préside la Commission de la médaille de la Résistance française. »
Par amendement n° 4, M. Neuwirth, au nom de la commission, propose, dans la seconde phrase de cet article, après les mots : « la Commission », d'insérer le mot : « nationale ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Articles 8 et 9



M. le président.
« Art. 8. _ Les ressources du Conseil national comprennent notamment :
« _ les subventions attribuées par l'Etat et, le cas échéant, par d'autres personnes publiques ;
« _ les dons et legs. » - (Adopté.)
« Art. 9. _ Le Conseil national est soumis au contrôle administratif et financier de l'Etat. » - (Adopté.)

Article 10



M. le président.
« Art. 10. _ La présente loi entre en vigueur lorsque le Conseil de l'ordre ne peut plus réunir quinze membres, personnes physiques. Le chancelier de l'Ordre de la Libération en informe le Président de la République.
« Un décret du Président de la République nomme le chancelier de l'Ordre de la Libération en exercice délégué national du Conseil national des communes "Compagnon de la Libération" pour la durée restant à courir de son mandat de chancelier. »
Par amendement n° 5, M. Neuwirth, au nom de la commission, propose, au début du premier alinéa de cet article, de remplacer les mots : « Conseil de l'ordre », par les mots : « Conseil de l'Ordre de la Libération ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Ce dernier amendement est encore de nature rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10, ainsi modifié.

(L'article 10 est adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Hamel pour explication de vote.
M. Emmanuel Hamel. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous êtes né le 23 août 1944, deux jours avant l'achèvement des combats pour le libération de Paris.
Vous n'étiez pas né, vous n'étiez pas encore enfant de notre France lorsque Lucien Neuwirth accomplissait les actes d'héroïsme qui lui ont valu d'être promu officier de la Légion d'honneur, après avoir été décoré de la médaille militaire, de la Croix de guerre 1939-1945, de la médaille de la Résistance, de la médaille des évadés.
Vous n'étiez pas né lorsque René-Georges Laurin connaissait dans les prisons ce qu'il a évoqué tout à l'heure avec tant d'émotion, y compris le risque d'être conduit sur le chemin de la fusillade.
Je vous supplie d'intensifier l'action de l'Etat pour que vive la mémoire de ce que fut la France dans le passé, de ce qu'a été le patriotisme de notre génération.
Nous avons vécu dans une idée de la France qu'il faut continuer à transmettre. Ceux qui sont morts à nos côtés étaient convaincu qu'ils se devaient d'accomplir des actes pouvant les conduire au suprême sacrifice parce qu'ils servaient ainsi la France et que la France, c'est ce qu'il y a de plus grand, de plus beau, de plus noble au monde. Cela doit être transmis.
Vous avez évoqué tout à l'heure avec la sérénité qui sied à un membre du Gouvernement la définition de votre devoir et vous avez parlé de la mémoire. Mais je vous supplie de faire en sorte d'augmenter votre influence, d'amplifier l'action que vous menez au sein du Gouvernement de la République, notamment dans vos relations avec M. le ministre de l'éducation nationale et avec Mme le ministre de la culture.
En effet, le patriotisme ne pourra véritablement perdurer au cours du troisième millénaire que si les générations actuelles apprennent ce que nous fûmes, savent que ce que nous avons fait nous a été dicté tout naturellement par l'idée de la France et de la République dans laquelle nous avions été formés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, conservez bien dans votre mémoire les propos si émouvants de nos collègues Lucien Neuwirth et René-Georges Laurin. Permettez-moi d'espérer que vous garderez aussi le souvenir de cette supplication que je vous adresse au nom de mes camarades du IIe bataillon de choc tombés à mes côtés pour que désormais vous intensifiiez votre action visant à renforcer la mémoire patriotique du peuple français et que l'ensemble des Français, quelles que soient leurs origines, soient fiers d'appartenir à cette nation unique, exceptionnelle qui est la nôtre.
Développez l'esprit de patrie, développez la fierté de la France, surtout en cette veille du troisième millénaire où la construction de l'Europe nous fait courir le risque d'une dilution progressive du patriotisme.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez une mission historique : je vous en conjure, assumez-la ! (Applaudissements.)
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Je n'ai sûrement pas le talent de M. Hamel mais il me semblait avoir dit, depuis la tribune de la Haute Assemblée, ce que je ressentais par rapport à cette histoire.
Je suis le produit de cette histoire et, dans la mission gouvernementale qui m'est confiée, à savoir la gestion des intérêts moraux et matériels du monde ancien combattant, je développe et continuerai de développer tout ce travail de mémoire comme apprentissage de la citoyenneté, comme élément constitutif de la citoyenneté française, de l'appartenance à cette nation dont les valeurs permettent de dépasser les différences.
Monsieur Hamel, je vous ai entendu. Soyez persuadé que, avec les moyens, sans doute insuffisants, dont je dispose aujourd'hui, ce travail de mémoire est la priorité du secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
Vous le savez, j'ai engagé une réforme conduisant à l'insertion du département ministériel des anciens combattants dans le ministère de la défense. La concrétisation juridique de cette réforme doit intervenir dans quelques jours, dans deux semaines trois au plus tard. Lorsqu'elle sera entrée dans les faits, je serai effectivement chargé de l'ensemble du travail de mémoire.
A l'intérieur du département ministériel de la défense, croyez-le bien, nous allons tout mettre en oeuvre à la fois pour développer le lien entre la nation et l'armée, mais aussi, en relation avec le monde scolaire et universitaire, l'enseignement de notre histoire. Il s'agit, au sein même de nos structures éducatives, de développer l'esprit de défense et, en s'appuyant sur l'exemplarité du monde combattant, de donner aux jeunes générations des éléments qui leur permettent de construire leur citoyenneté au sein de cette nation, au sein de la République française.
Il ne faudrait pas que le passage au xxie siècle conduise ce pays à oublier la page du xxe siècle.
M. Lucien Neuwirth, rapporteur. Très bien !
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat. Vous m'avez entendu m'exprimer le soir du 11 novembre à l'Institution nationale des Invalides : vous connaissez donc ma pensée et mes objectifs politiques. Il est hors de question, pour moi, de laisser oublier le xxe siècle. C'est pourquoi nous devons tout mettre en oeuvre pour que ce passé reste vivant, et pour cela tous doivent se mobiliser : non seulement le ministère de l'éducation nationale, le ministère de la défense, le secrétariat aux anciens combattants - qui évoluera probablement, comme je l'ai dit - mais encore l'ensemble des élus.
Une politique de la mémoire ne peut pas se bâtir si elle n'est pas soutenue concrètement par l'ensemble de la nation. A cet égard, la définition des contrats de plan Etat région - pardonnez-moi de devenir terre-à-terre - est un rendez-vous important. Il faut que, dans chaque région française, puisse se mettre en place une politique de la mémoire associant les principales collectivités territoriales et l'Etat.
Il est en effet fondamental que nous nous adressions aux jeunes générations pour qu'elles aient une claire idée de ce qu'a été ce pays, des épreuves qu'il a subies mais aussi des victoires qu'il a su remporter sur la barbarie, sur ces horreurs qu'ont évoquées MM. Neuwirth et Laurin.
C'est ainsi que nous construirons une citoyenneté du xxie siècle, enracinée à la fois sur la connaissance du xxe siècle et sur les valeurs de la République française.
Comme vous, monsieur Hamel, je crois que ce pays est fabuleux et qu'il est porteur d'un message universel. Il est de notre devoir de tout mettre en oeuvre pour que ce message soit d'abord compris, intégré, puis transmis par les jeunes Françaises et Français. C'est la condition de son rayonnement.
En tout cas, monsieur Hamel, je vous remercie de m'avoir en quelque sorte rappelé à cette obligation, mais croyez bien que je n'avais pas oublié le devoir de mémoire. (Applaudissements.)
M. Emmanuel Hamel. Entretenez la flamme de la mémoire !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le chancelier de l'ordre de la Libération, monsieur le président de l'Association nationale des médaillés de la Résistance française, mes chers collègues, après toutes ces paroles très émouvantes, je crains que ne puissent avoir quelque chose de dérisoire les propos que le président de la commission tient à tenir avant que notre assemblée se prononce, j'en suis certain, à l'unanimité en faveur de ce projet de loi.
Je voudrais d'abord souligner que la commission des affaires sociales a pris toute la mesure de la charge qui lui incombait, et qu'elle a accueillie avec respect, d'avoir à présenter ce projet de loi à la Haute Assemblée. La désignation de notre collègue Lucien Neuwirth comme rapporteur est un signe du respect que nous inspire cette période, durant lasquelle il fut l'un de ceux qui incarnèrent l'honneur.
Cette période, je n'ai pu la vivre que comme spectateur : j'avais onze ans en 1944. Cela ne m'a évidemment pas empêché de partager, avec mes camarades de lycée, la joie de la libération de la France.
J'ai vite compris ce que cette libération devait à tous ces hommes que nous avions rencontrés par hasard dans la campagne ou que nous voyions arriver un soir à la maison, sans être toujours conscients - on ne disait rien aux enfants - des dangers qu'ils couraient.
J'ai également vite compris tout ce que notre patrie devait à des hommes comme Churchill et Eisenhower, et aux peuples qu'ils représentaient, alors qu'elle avait failli périr en tant que telle.
Ce soir, je ne peux que dire aux Compagnons de la Libération notre souhait de voir ce texte que nous allons voter mis en oeuvre le plus tard possible et de les voir eux-mêmes continuer à mener le plus longtemps possible la mission qui est actuellement la leur.
Je voudrais dire aussi, au nom de la Haute Assemblée, combien, ce soir, une voix nous manque : celle de Maurice Schumann. Il est certain que s'il était encore parmi nous, nous l'aurions, les uns et les autres, écouté avec beaucoup d'attention et aussi d'affection, car c'est bien le sentiment que nous nourrissions pour lui.
Enfin, je veux témoigner de notre reconnaissance à tous ceux qui, par raison, par conviction, mais aussi parfois parce qu'ils avaient simplement le sentiment que c'était de ce côté-là qu'il fallait aller, ont choisi d'emblée la seule voie qui était susceptible d'incarner l'honneur de la France. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que le projet de loi a été adopté à l'unanimité.
Au terme de cette discussion, je tiens à exprimer à nouveau au général Jean Simon, chancelier de l'ordre de la Libération, et à M. Jean-Jacques de Bresson, président de l'Association nationale des médaillés de la Résistance française, toute la considération qu'éprouve le Sénat à leur égard. C'est avec un grand plaisir que nous avons vu ces personnalités assister cet après-midi à l'intégralité de ce débat très important, parfaitement consensuel et un peu particulier car marqué par l'Histoire.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Paul Girod.)

PRÉSIDENCE DE M. PAUL GIROD
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

5

CHARTE SOCIALE EUROPÉENNE

Adoption de deux projets de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion :
- du projet de loi (n° 140, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la charte sociale européenne (révisée) (ensemble une annexe) [Rapport n° 160 (1998-1999).] ;
- du projet de loi (n° 141, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole additionnel à la charte sociale européenne prévoyant un système de réclamations collectives. [Rapport n° 160 (1998-1999).]
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la charte sociale européenne révisée est issue de l'initiative de relance engagée en novembre 1989 par Mme Lalumière, alors secrétaire général du Conseil de l'Europe, à l'occasion de la conférence ministérielle sur les droits de l'homme tenue à Rome pour le quarantième anniversaire de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Dans une première phase, un protocole portant amendement à la charte sociale européenne, le « protocole de Turin 1991 », a clarifié le rôle respectif des différents organes de contrôle et facilité celui-ci.
Une seconde phase a été consacrée à la révision du contenu de la charte et a permis l'adoption de la « charte sociale européenne révisée », qui rassemble dans un instrument unique l'ensemble des droits garantis dans la charte de 1961, adaptés et complétés, ceux qui sont garantis par un premier protocole signé en 1988 et, enfin, de nouveaux droits.
L'instrument a été rédigé de façon à exister de manière autonome, mais avec le même mécanisme de contrôle que la charte de 1961, et à ne pas être contraire à cette charte, à laquelle il a vocation de se substituer à terme.
La charte sociale révisée ne prévoit pas la dénonciation de l'ancienne charte. Toutefois, l'acceptation par un Etat contractant des dispositions de la charte révisée a pour conséquence que les dispositions correspondantes de la charte initiale et de son protocole cessent de s'appliquer à cet Etat.
Un protocole additionnel a par ailleurs été élaboré et ouvert à la signature en novembre 1995. Il est né de l'idée d'instaurer pour la charte sociale européenne, à l'instar de ce qui existe à l'Organisation internationale du travail, un système de réclamations collectives.
L'institution d'un tel système a pour objet d'accroître l'efficacité d'un mécanisme de contrôle qui repose jusqu'à présent exclusivement sur la soumission de rapports gouvernementaux. Ce système permettra aux organisations nationales et internationales d'employeurs et de travailleurs, ainsi que à certaines organisations non gouvernementales, de présenter des réclamations au secrétaire général du Conseil de l'Europe en cas d'application non satisfaisante de la charte sociale par un Etat signataire de ce protocole. Le système de réclamations collectives a été conçu comme un complément à l'examen des rapports gouvernementaux qui continue à constituer le mécanisme de base pour le contrôle de l'application de la charte. En outre, la procédure prévue par le protocole sera plus rapide que celle qui est suivie pour l'examen des rapports.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent la charte sociale européenne révisée et le protocole additionnel, qui font l'objet des projets de loi aujourd'hui soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Boyer, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce sont deux accords importants qui, ce soir, sont soumis à l'examen de notre Haute Assemblée. Ils touchent un volet encore trop méconnu de l'action du Conseil de l'Europe. Pourtant, la charte sociale, qui fait aujourd'hui l'objet d'une révision d'ensemble, a été signée voilà près de quarante ans et, à ce jour, elle a été ratifiée par trente et un Etats.
Aussi, avant d'évoquer les deux accords que vous venez d'évoquer, monsieur le ministre, je souhaiterais dresser un bilan rapide de la charte sociale de 1961. Ce bilan apparaît en demi-teinte.
En premier lieu, même si la charte énonce des objectifs très ambitieux, elle présente des lacunes, par exemple en ce qui concerne le droit à l'éducation.
En deuxième lieu, nombre de dispositions ne revêtent aucun caractère contraignant. Seuls quelques articles impliquent la reconnaissance expresse d'un droit, tel que le droit de grève, ou des engagements précis, par exemple la mise en place d'un régime de sécurité sociale.
En troisième lieu, les Etats ne sont pas tenus de souscrire à la totalité des articles, mais seulement à un nombre minimal de dispositions, parmi lesquelles doivent toutefois figurer un nombre déterminé de principes jugés essentiels. Près de la moitié des parties, par exemple, n'ont pas reconnu l'interdiction de licencier une salariée en congé de maternité.
Enfin, le mécanisme de contrôle de la charte paraît insuffisant.
Toutefois, la charte a plusieurs mérites. J'en relèverai trois principaux.
D'abord, elle représente un complément utile par rapport aux instruments adoptés dans le cadre de l'Union européenne. Elle détermine d'ailleurs, dans certains cas, des normes sociales plus élevées.
Ensuite, elle a induit un relèvement du niveau des exigences en matière sociale, en particulier en ce qui concerne le droit des travailleurs masculins et féminins à une rémunération égale pour un travail comparable.
Enfin et surtout, la charte a vocation à servir de référence pour les pays d'Europe centrale et orientale - PECO - et pour la Russie. Plusieurs de ces Etats ont signé le texte de 1961 ; la Pologne l'a même ratifié. Pour les PECO, une telle initiative prépare opportunément leur intégration à l'Union européenne.
J'en viens aux deux accords dont nous devons autoriser l'approbation aujourd'hui. Je ne reviendrai pas sur le dispositif de ces deux textes, que vous avez clairement exposé, monsieur le ministre. J'insisterai sur les aspects qui ont retenu l'attention de la commission.
S'agissant de la charte sociale révisée, la commission a relevé avec satisfaction que la France avait accepté la totalité des dispositions de la charte, malgré la liberté laissée à chaque Etat de ne souscrire qu'à un nombre minimal d'articles. Toutefois, le comité des experts indépendants, qui constitue le premier maillon de contrôle de l'application de la charte par les Etats signataires, a relevé quelques contradictions entre la législation française et certaines des stipulations de la charte de 1961 reprises dans la charte révisée.
Le comité d'experts a cité notamment trois points : le maintien de sanctions pénales à l'encontre des marins dans des cas où il n'y a aucun risque pour la sécurité du navire ou pour la vie ; la retenue sur salaire appliquée aux fonctionnaires de l'Etat en grève, qui n'est pas, dans tous les cas, proportionnelle à la durée de la grève ; s'agissant, enfin, de la protection des jeunes, les inégalités en matière de droits successoraux à l'encontre des enfants adultérins.
L'interprétation de la charte par le comité d'experts apparaît souvent extensive. Toutefois, dans certains cas, le comité des ministres, qui est l'instance suprême de contrôle de la charte, a repris à son compte certaines observations du comité d'experts. Je pense notamment à la recommandation qui a été adoptée à l'encontre de l'Allemagne s'agissant de la législation de ce pays en matière de droit de grève, cette dernière n'étant autorisée que lorsqu'elle a pour objet de parvenir à une négociation collective. Un tel risque pourrait-il se produire pour la France ?
S'agissant du protocole additionnel prévoyant un système de réclamations collectives, il faut souligner qu'il complète plus le dispositif existant qu'il ne le modifie en substance. Sans doute ouvre-t-il un droit de réclamation collective à certaines catégories d'organisations. Cependant, sa portée est limitée.
Il faut souligner trois points : le droit de recours individuel demeure exclu ; la réclamation ne peut porter que sur des dispositions acceptées par l'Etat mis en cause ; enfin, la réclamation ne peut pas porter sur des situations individuelles.
En conclusion, la portée des dispositions contenues dans la charte sociale européenne révisée ainsi que dans le protocole additionnel prévoyant un système de réclamations collectives demeure modeste.
Toutefois, l'approbation de ces textes, malgré leurs limites, représente un enjeu essentiel. Ils ont vocation à servir de point de référence pour les pays d'Europe centrale et orientale. La mise en place d'une économie de marché respectueuse des droits sociaux et la substitution d'un système de protection sociale à une assistance généralisée et étatique sont autant de défis à relever pour des pays qui aspirent à rejoindre l'Union européenne.
Aussi la France se doit-elle de ratifier rapidement des textes directement inspirés du « modèle social » européen. C'est pourquoi la commission vous invite, mes chers collègues, à approuver les deux présents projets de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.

PROJET DE LOI N° 140

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 140.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la charte sociale européenne (révisée) (ensemble une annexe) faite à Strasbourg le 3 mai 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Je vais mettre aux voix l'article unique du projet de loi.
M. Jean-Luc Bécart. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. L'avis des membres du groupe communiste républicain et citoyen sur les projets de loi n°s 140 et 141, relatifs à la mise en place de la charte sociale européenne, est mitigé. En effet, si, ces deux textes comportent, comme vous l'avez souligné, monsieur le ministre, des aspects qui sont intéressants, ils contiennent aussi, selon nous, des éléments qui sont moins intéressants, je pense au nivellement par le bas de certaines protections, notamment celles qui sont relatives au travail de nuit des femmes ou à l'interdiction de l'emploi à caractère dangereux. Ces dispositions relèvent plus de la pétition de principe.
Comme l'a noté M. le rapporteur, le dispositif de contrôle et de sanctions est quasi inexistant.
Il est étonnant de constater, d'une part, que l'Union européenne a organisé dans le moindre détail le respect des critères de convergence pour parvenir à gérer le passage à la monnaie unique, en particulier par l'instauration d'un pacte de stabilité contraignant, et, d'autre part, que s'agissant de l'emploi et des droits sociaux, malgré des progrès sur le plan des principes, la volonté de contrainte n'est pas éloignée du degré zéro.
Nous nous abstiendrons lors du vote sur ces deux textes tant le décalage entre la mise en oeuvre de l'Europe financière et celle de l'Europe sociale demeure grand.
M. le président. Personne ne demande plus la parole...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

PROJET DE LOI N° 141

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 141.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation du protocole additionnel à la charte sociale européenne prévoyant un système de réclamations collectives, fait à Strasbourg le 9 novembre 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

6

CONVENTION ENTRE LES ÉTATS PARTIES AU TRAITÉ DE L'ATLANTIQUE-NORD ET LES AUTRES ÉTATS PARTICIPANT AU PARTENARIAT POUR LA PAIX

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 5, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique-Nord et les autres Etats participant au partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces (ensemble un protocole additionnel). [Rapport n° 158 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, depuis la fin de la guerre froide, l'Alliance atlantique s'est engagée dans un processus d'ouverture à ses nouveaux partenaires. Dès 1991, les Alliés ont mis en place le Conseil de coopération nord-atlantique, le COCONA, enceinte de consultations sur les questions de sécurité de l'OTAN avec tous ses partenaires d'Europe centrale et orientale.
Puis, sous la pression des candidats à l'adhésion et des partenaires qui souhaitaient simplement renforcer leurs liens avec l'OTAN, les Alliés ont, en 1994, lancé le Partenariat pour la paix, vaste programme de coopération militaire.
Enfin, au moment où l'OTAN entamait son premier élargissement lors du sommet de Madrid de juillet 1997, les Alliés ont une nouvelle fois intensifié leurs liens de partenariat en créant le Conseil du partenariat euro-atlantique, le CPEA, en renforçant le partenariat pour la paix, en signant enfin un acte fondateur avec la Russie et une charte de partenariat avec l'Ukraine.
Dans ce contexte, le volume des activités de coopération avec les Etats participant au partenariat pour la paix est en croissance constante. Cette coopération militaire se traduit surtout par des exercices d'entraînement commun ainsi que par de nombreux échanges, visites ou stages dans les écoles militaires et les centres d'instruction des armées, ainsi que dans les unités.
Cette montée en puissance de la coopération militaire rend nécessaire de disposer d'un accord global régissant les échanges de personnels. Il est en effet essentiel d'assurer une couverture juridique à ces personnels, en explicitant les garanties dont ils bénéficieront et plus précisément les conditions d'entrée et de séjour des membres des forces armées d'un Etat sur le territoire d'un autre.
La France, qui participe pleinement au partenariat pour la paix, a bien entamé avec certains partenaires des négociations en vue de conclure des accords bilatéraux. Mais ces négociations sont longues, ne concernent que quelques Etats et sont susceptibles d'aboutir à une multiplication de statuts bilatéraux, malgré les efforts faits pour uniformiser les textes.
Il est donc préférable de disposer d'un texte unique pour régler les problèmes juridiques liés aux activités de coopération avec les pays du partenariat pour la paix.
Tel est bien l'objet de la convention qui vous est soumise aujourd'hui, dite « SOFA-PPP » - accord sur le statut des forces participant au partenariat pour la paix - et que la France a signé le 1er décembre 1995. Cette convention s'appuie très largement sur la convention de Londres du 19 juin 1951, dite « SOFA-OTAN », qui régit les échanges de personnels entre Alliés.
Le SOFA-PPP se compose de la convention proprement dite et d'un protocole additionnel.
La convention elle-même prévoit que la convention de Londres de 1951 - le SOFA-OTAN - s'applique aux Etats participant au partenariat pour la paix.
Pour la France, la zone d'application de cet accord recouvre uniquement le territoire métropolitain, en raison du caractère « euro-atlantique » de la coopération dans le cadre du partenariat pour la paix et dans la droite ligne de l'article XX du SOFA-OTAN, qui prévoit que la convention, sauf notification contraire, s'applique uniquement au territoire métropolitain d'une partie contractante.
Les dispositions du SOFA-OTAN relatives aux modalités de recours à un arbitre ou au Conseil de l'Atlantique Nord en cas de différend sur l'interprétation de la convention sont adaptées au contexte du partenariat pour la paix. Dans le cadre du SOFA-OTAN, les litiges sont réglés par négociation entre les parties, par la voie de l'arbitrage et, le cas échéant, en faisant appel au Conseil de l'Atlantique Nord. Les parties renoncent, en revanche, à recourir à une juridiction extérieure, que ce soient la Cour internationale de justice ou les juridictions internes des Etats parties.
Il est précisé, dans le cadre du SOFA-PPP, que les parties doivent régler leurs différends par la seule voie des négociations, y compris par la voie du recours à l'arbitrage. En effet, dans la mesure où les pays partenaires parties au SOFA-PPP ne sont pas parties au SOFA-OTAN ni membres du Conseil de l'Atlantique Nord, elles ne peuvent avoir recours à cette instance. Enfin, comme dans le cadre du SOFA - OTAN, elles renoncent à porter le litige devant une juridiction extérieure.
La convention précise également que son cadre juridique est susceptible d'être complété ou modifié par des arrangements particuliers entre des Etats parties, tel, par exemple, l'accord concernant les forces stationnées en République fédérale d'Allemagne.
Le protocole additionnel, quant à lui, précise que les Etats s'abstiendront d'appliquer la peine de mort dans le cadre du fonctionnement de la convention.
Les parties ayant ratifié le SOFA-PPP ont également ratifié le protocole additionnel, à l'exception - notable - des Etats-Unis. Ce protocole ne comporte pas d'engagement supplémentaire pour la France, mais il protège ses ressortissants engagés dans des actions de coopération dans des Etats du partenariat pour la paix.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique Nord et les autres Etats participant au partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Serge Vinçon, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la convention qui est aujourd'hui soumise à notre examen vise à étendre les dispositions d'une convention de 1951, sur le régime OTAN de stationnement des forces militaires d'un Etat sur le territoire d'un autre, aux échanges de personnels militaires effectués dans le cadre du partenariat pour la paix.
Il n'est pas inutile de rappeler l'origine et les objectifs du partenariat pour la paix.
C'est au sommet de Bruxelles, en 1994, que les chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres de l'Alliance atlantique ont décidé de créer, au profit des pays de l'ex-pacte de Varsovie et des républiques de l'ex-URSS, y compris la Russie, cette structure de coopération et de dialogue. Elle réunit aujourd'hui, au côté des Seize, vingt-huit pays partenaires.
Le partenariat pour la paix répond à un objectif de transparence dans les affaires de défense, et, chez les partenaires, de contrôle démocratique des forces armées. Surtout, le partenariat pour la paix a été mis à profit pour associer les forces des pays partenaires à des opérations humanitaires ou de maintien de la paix : la composition de la SFOR, en Bosnie-Herzégovine, en est la traduction la plus étonnante.
Perçu dans un premier temps comme une solution d'attente à l'intégration de plein exercice dans l'OTAN, le partenariat pour la paix constitue de plus en plus, à lui seul, un forum de coopération, distinct du processus d'intégration, en particulier dans la mesure où il est évident que tous les pays partenaires n'ont pas vocation, ni même le désir, d'adhérer à l'Alliance atlantique.
Il semble d'ailleurs que le prochain sommet de Washington, qui accueillera solennellement dans l'Alliance les trois nouveaux membres hongrois, tchèque et polonais, ne formulera aucune invitation nouvelle, même pas pour la Slovénie ou la Roumanie, pourtant objets d'une mention spéciale dans le communiqué du sommet de Madrid de juillet 1997. Vous me permettrez de le regretter.
M. Emmanuel Hamel. Nous aussi !
M. Serge Vinçon, rapporteur. Le partenariat pour la paix n'en revêtira donc, pendant quelques années encore, qu'une importance plus grande à l'égard des partenaires candidats à l'adhésion.
Concrètement, le partenariat a permis d'établir des relations pratiques entre l'OTAN et chaque partenaire, en associant les différents pays participants à des exercices militaires conjoints. Les activités d'entraînement correspondent, en effet, soit à des exercices militaires, soit à des séminaires de préparation. Les déploiements de forces ne dépassent pas deux semaines pour une durée d'exercice d'une semaine.
La France, initialement quelque peu sceptique à l'égard du partenariat, entend, pour les années à venir, prendre une part accrue à ses activités. Depuis 1996, quelque 800 hommes des trois armées ont participé à des exercices conjoints, et la France devrait, en l'an 2000, recevoir des forces étrangères pour la première fois sur son sol.
C'est dans le cadre de ces opérations d'entraînement que des forces militaires d'un ou de plusieurs des quarante-quatre pays participant au partenariat peuvent être déployées sur le territoire de l'un de ces Etats. Ces stationnements, même temporaires, doivent bénéficier d'un cadre juridique précis, que la présente convention et son protocole annexé sont destinés à offrir.
La convention de Londres de 1951, dite « SOFA-OTAN », avait un objet identique pour les forces de l'OTAN stationnées sur les territoires des Etats membres. Ses dispositions sont apparues transposables aux échanges de personnels effectués dans le cadre du partenariat, et l'objet de la présente convention est précisément d'opérer cette transposition.
La convention régira donc, sur le modèle de celle qui l'a précédée, les éventuels problèmes de juridictions, de règlements des dommages causés par ce stationnement et prévoira les diverses mesures dérogatoires aux règles fiscales ou douanières du pays d'accueil. Enfin, le protocole annexé à la convention tend à exclure, dans le cas où le membre d'une force serait attrait devant une juridiction pénale d'un pays d'accueil, l'applicabilité de la peine de mort dans les pays où elle existe encore.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes collègues, le partenariat pour la paix est une instance de dialogue et de coopération à la fois politique et militaire entre des pays que des différends, voire des conflits, opposent encore parfois. Ce cadre de négociations permanentes est donc un instrument précieux pour notre continent ; la présente convention en facilitera le fonctionnement. C'est pourquoi, au nom de la commission, je vous invite à adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée la ratification de la convention entre les Etats parties au Traité de l'Atlantique-Nord et les autres Etats participant au partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces (ensemble un protocole additionnel), faite à Bruxelles, le 19 juin 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

7

CONVENTIONS AVEC LA SUISSE
PORTANT RECTIFICATION
DE LA FRONTIÈRE FRANCO-SUISSE
Adoption de deux projets de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 72, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois (département de la Haute-Savoie) et Bardonnex (canton de Genève) et du projet de loi (n° 73, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud. [Rapport n° 159 (1998-1999).]
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la République française et la Confédération suisse ont signé, en 1996, deux accords destinés à modifier le tracé de la frontière.
Le premier accord, relatif à la rectification de la frontière entre Saint-Julien-en-Genevois, dans le département de la Haute-Savoie, et Bardonnex, dans le canton de Genève, a pour objet de situer entièrement en territoire français le pont autoroutier, long de 377 mètres et comprenant deux chaussées de trois voies chacune, qui relie les autoroutes française A 401 et suisse N 1 A.
Dans un souci de rationalité, il avait été prévu, dans l'accord intergouvernemental relatif à ce raccordement, signé à Paris le 27 septembre 1984, que l'entretien de l'ouvrage reviendrait à une seule des parties, en l'occurrence la France, et que l'ouvrage serait situé intégralement sur le territoire de cette dernière.
L'emplacement du pont étant, à l'heure actuelle, situé pour les deux tiers, en territoire suisse, la Confédération doit céder cette parcelle à la France et recevoir, en échange, trois parcelles dont la surface totale est équivalente, soit 81 400 mètres carrés.
Les parcelles françaises sont situées sur les communes de Saint-Julien-en-Genevois et de Viry. Elles appartiennent, pour une part, aux communes et, pour une autre, à des personnes physiques dont deux étaient résidentes en France au moment de la signature de l'accord. Leur consentement a été recueilli en application de l'article 53 de la Constitution.
La convention présente la configuration de l'échange, confie aux délégués locaux responsables de l'abornement le soin de réaliser les travaux résultant de la modification du tracé et stipule que les frais occasionnés par ces travaux seront partagés à parts égales. Enfin, l'obligation française relative au remblayage du site a pu être satisfaite depuis la signature.
La seconde convention, qui prévoit une rectification entre le département du Doubs, au niveau de la commune de Jougne, et le canton de Vaud, commune de Vallorbe, porte sur un échange de terrains de 30 mètres carrés de chaque côté de la frontière.
M. Emmanuel Hamel. C'est beaucoup ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Hamel, veuillez ne pas interrompre M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué. Les autorités suisses ont en effet souhaité étendre leur plate-forme douanière au point frontière La Ferrière-sous-Jougne, en France, et Le Creux, en Suisse, afin d'y recevoir des camions. Des travaux de canalisation du cours d'eau la Jougnenaz ayant été effectués par la partie suisse, l'extension était envisageable à la condition que les deux pays procèdent à une rectification du tracé de la frontière en cet endroit.
Les délégués français et suisses chargés de l'abornement du secteur ont proposé un nouveau tracé, répondant aux intérêts des deux parties, sur la base d'un échange mètre carré pour mètre carré. Cette proposition a été avalisée par la commission mixte d'abornement franco-suisse réunie à Genève en 1995 et entérinée par l'accord international signé à Berne le 18 septembre 1996.
Cette convention, de même que la précédente, présente la configuration de l'échange. Elle confie aux délégués à l'abornement le soin de procéder à toutes les mesures techniques qui découlent du nouveau tracé, telles que la pose des bornes et l'établissement de plans. Elle stipule également que les frais occasionnés par ces opérations seront supportés à parts égales par la France et la Suisse. Souhaitons que ces frais ne soient pas trop considérables !
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent, d'une part, la convention portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois et Bardonnex et, d'autre part, la convention portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud qui font l'objet des projets de loi aujourd'hui proposés à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait, en remplacement de M. Hubert Durand-Chastel, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous mesurez toute l'importance que revêtent ces échanges entre la France et la Suisse ! (Sourires.)
M. Emmanuel Hamel. Un mètre carré est un mètre carré ! (Nouveaux sourires.)
M. André Dulait, rapporteur. J'ai effectivement conscience, mon cher collègue, que la mission qui m'incombre du fait de l'absence de notre collègue Durand-Chastel est fort lourde. (Sourires.)
Les projets de loi qui nous sont soumis autorisent la ratification de deux conventions conclues entre la France et la Suisse le 18 septembre 1996. Elles induisent des modifications de frontière entre la France et la Suisse d'une portée assez limitée.
Ces modifications de frontières entre la France et la Suisse ne sont pas sans précédents : on relève, en effet, cinq rectifications pour la seule période 1959-1973, dues, dans la plupart des cas, à des travaux d'infrastructures, ce qui est le cas des deux conventions qui nous réunissent aujourd'hui.
Dans le premier cas, il s'agit de la canalisation d'un cours d'eau, la Jougne, ou Jougnenaz, selon que l'on est de la région ou non. L'échange de terrain concerne deux parcelles d'une superficie de trente mètres carrés.
Quant à la seconde convention, elle est liée au raccordement des autoroutes française et suisse entre la Haute-Savoie et le canton de Genève. Elle vise à intégrer au territoire français le pont autoroutier qui raccorde les deux autoroutes. La portion de terrain cédée par la Suisse représente une surface de 81 400 mètres carrés, très exactement l'équivalent des trois parcelles cédées en échange par la France.
Ces deux conventions se fondent sur des stipulations voisines, qui renvoient, pour une large part, à l'accord de 1965. Une commission et des délégués chargés de l'abornement feront les travaux nécessaires, qui concernent, en fait, pour ces parcelles, les centres locaux des impôts ou les directions régionales des douanes et des droits indirects.
Les conséquences pratiques de la modification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud se limitent au déplacement d'une borne. Compte tenu de l'importance mineure des travaux matériels et de l'absence de risque de contestation, les travaux prévus ont déjà été effectués par la Suisse. (M. Emmanuel Hamel s'exclame.) Il était important que je vous le dise, mes chers collègues !
M. Emmanuel Hamel. Ce n'est pas normal ! (Sourires.)
M. André Dulait, rapporteur. Les dépenses seront réparties par moitié entre la France et la Suisse.
Mes chers collègues, la commission des affaires étrangères a longuement travaillé sur cette modification du territoire français.
M. Emmanuel Hamel. Ah !
M. André Dulait, rapporteur. A l'unanimité, elle a estimé que cela n'aurait pas de conséquence sur notre politique étrangère vis-à-vis de la Suisse. (Sourires.)
C'est pourquoi je vous propose, en son nom, de ratifier ces deux conventions. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Je saisis l'occasion de ces conventions soumises à notre approbation pour dire mon admiration pour la Suisse, exemple de démocratie dans le monde, et mon souhait de voir approfondies, dans un souci réciproque d'amitié, nos relations avec la Confédération helvétique. (Très bien ! et applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.

PROJET DE LOI N° 72

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 72.
« Article unique. - Est autorisée la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois (département de la Haute-Savoie) et Bardonnex (canton de Genève), signée à Berne le 18 septembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

PROJET DE LOI N° 73

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 73.
« Article unique. - Est autorisée la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud, signée à Berne le 18 septembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

8

CONVENTION SUR LES PRIVILÈGES
ET IMMUNITÉS
DES INSTITUTIONS SPÉCIALISÉES

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 62, 1998-1999) autorisant l'adhésion de la République française à la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées approuvée par l'assemblée générale des Nations unies le 21 novembre 1947 (ensemble dix-sept annexes approuvées par les institutions spécialisées). [Rapport n° 169 (1998-1999)].
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi qui vous est présenté a pour objet l'adhésion de la France à la convention du 21 novembre 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées.
Les institutions spécialisées sont ces organisations intergouvernementales, reliées aux Nations unies, qui mènent des actions internationales dans différents domaines intéressant l'humanité. Parmi elles figurent, par exemple, l'Organisation internationale du travail ou l'Organisation mondiale de la santé et, plus près de nous, puisque son siège est à Paris, l'UNESCO. Dix-sept organisations au total ont adhéré à ce texte depuis son adoption.
La convention qui vous est soumise a été élaborée par les Etats membres des institutions spécialisées des Nations unies, au rang desquels figure la France. Ce texte définit les privilèges et immunités de ces organisations internationales, des représentants des Etats membres participant aux réunions qu'elles organisent, ainsi que des fonctionnaires internationaux qu'elles emploient. De cette manière, l'accomplissement des missions qui leur sont confiées est facilité et assuré dans les mêmes conditions sur le territoire de tous les membres.
Les dispositions sont de facture classique, voisines de celles de la convention de 1946 sur l'organisation des Nations unies elle-même, à laquelle la France a adhéré.
Les institutions bénéficient ainsi d'immunités de juridiction pour leurs biens, fonds et avoirs, ainsi que de privilèges fiscaux et douaniers. Leurs locaux sont inviolables et l'exemption de toute contrainte exécutive s'ajoute à ces protections.
Les représentants des Etats membres invités à des réunions disposent d'une protection comparable à celle des envoyés diplomatiques, de même que le dirigeant de l'organisation.
Les fonctionnaires internationaux de ces institutions, dans le cadre de leurs fonctions et pour en faciliter l'exercice, bénéficient d'immunités de juridiction, de privilèges fiscaux et de modalités facilitant leur libre circulation.
La convention prévoit également dans quelle mesure de nouvelles institutions peuvent adhérer à ce texte et les conditions dans lesquelles les Etats membres acceptent de leur reconnaître les privilèges et immunités. Il n'y a en effet pas d'obligation pour un membre de reconnaître ou d'agréer toutes les institutions. La France, dans la mesure où elle est membre de toutes les institutions spécialisées, n'est, pour sa part, pas confrontée à ce genre de choix.
S'agissant de la démarche qui a abouti à la présentation de ce projet de loi, il est difficile, cinquante ans après, d'identifier les motifs pour lesquels cet accord n'a pas été soumis, à l'époque, à l'approbation du parlement français.
Cependant, les privilèges et immunités ont été accordés de fait : il était naturel pour les pouvoirs publics français d'accepter les contreparties qu'implique le statut de membre des institutions spécialisées.
Cette situation a été grandement facilitée par le fait que, sur cette longue période, aucun litige susceptible de remettre en cause les immunités n'a été relevé. De même, les protections et avantages se sont résumés, pour l'essentiel, à la fiscalité des personnels résidents de France. En effet, de toutes les institutions, une seule, l'UNESCO, a son siège sur le territoire national, et son régime est réglé par un accord bilatéral.
La situation aurait ainsi pu perdurer si un débat, ouvert au début des années quatre-vingt-dix, n'était venu démontrer la nécessité juridique et pratique d'une adhésion de la France à la convention de 1947.
La nécessité juridique est évidente. J'ai souligné la qualité des relations avec les institutions spécialisées, qui n'ont pas généré de contentieux notable. Il n'en demeure pas moins que, si un incident devait survenir, le champ diplomatique et juridictionnel devrait être clairement défini pour ne pas devoir faire face à une situation confuse.
Par ailleurs, différents litiges fiscaux opposent des personnes employées par les institutions spécialisées à l'administration française. Lorsque ces différends débouchent sur des procédures contentieuses, l'absence de ratification de la convention, et donc d'une base légale définissant les privilèges et immunités des intéressés, pose régulièrement un problème de forme.
La nécessité pratique est également patente. Je ne citerai, pour illustrer mon propos, que l'exemple révélateur de la place de Genève, où sont installées des organisations relevant de trois régimes distincts mais comparables : l'ONU, qui relève de la convention du 13 février 1946, l'Organisation mondiale du commerce, créée par l'accord de Marrakech en 1994, et les institutions spécialisées.
Près de 30 % à 40 % des personnels résident en France et franchissent chaque jour la frontière pour aller travailler. Tant que la convention de 1947 n'aura pas été ratifiée, les fonctionnaires qu'elle régit n'auront pas les mêmes droits que les autres, même si ces droits leur sont accordés dans la pratique.
Cette multiplicité de situations n'est susceptible que de compliquer la mission de certaines administrations - douanes, gendarmerie, police - alors qu'un cadre juridique est prévu et qu'il suffit de le valider pour tout régulariser.
Pour ces raisons, le Gouvernement avait décidé, en 1994, de présenter au Parlement un projet de loi autorisant l'adhésion de la France à la convention de 1947. Cette décision a été officiellement annoncée le 6 avril 1995 par le Premier ministre au secrétaire général de l'ONU.
Je suis heureux, aujourd'hui, de prolonger l'action entreprise par mes prédécesseurs et de contribuer à concrétiser un engagement pris par les pouvoirs publics français.
Je sais également que nombre d'entre vous ont suivi ce dossier avec attention, qu'ils se sont souciés de son évolution, et je tiens à les en remercier.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention de 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, qui fait l'objet du projet de loi présenté aujourd'hui à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Dulait, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons vivre, ce soir, un grand moment : en effet, si le Sénat adopte le présent projet de loi, nous mettrons un terme à une curiosité juridique vieille de plus de cinquante ans puisque remontant au 21 novembre 1947.
La France participe activement aux travaux des institutions spécialisées des Nations unies, telles que le Bureau international du travail, le BIT, ou l'Organisation mondiale de la santé, l'OMS, sans pour autant avoir formellement ratifié l'instrument leur conférant les privilèges et immunités reconnus, à des degrés divers, à toute organisation internationale. Parmi ces institutions, seule l'UNESCO, installée à Paris, bénéficie d'une pleine reconnaissance juridique de notre pays, dans le cadre de l'accord de siège de 1954.
A vrai dire, la commission des affaires étrangères s'est longuement interrogée sur les raisons juridiques, diplomatiques, politiques ou financières qui auraient pu justifier la non-adhésion à la convention du 21 novembre 1947. Ses recherches sont restées vaines. Un projet de loi de ratification, strictement identique à celui dont nous discutons ce soir, avait même été déposé en 1957 par le Gouvernement de M. Bourgès-Maunoury. Sans doute aurait-il été adopté sans difficulté par le Parlement si les turbulences de la fin de la IVe République n'avaient fait passer d'autres sujets au premier plan de l'ordre du jour.
Si aucune raison précise n'est avancée pour justifier l'ajournement, durant plusieurs décennies, de la ratification de ce texte, beaucoup plus clair est, en revanche, le motif de son inscription à nos travaux de la présente session.
En effet, il s'agit aujourd'hui de clore définitivement un débat de nature fiscale engagé en 1992 et de prévenir l'apparition de tout nouveau contentieux avec les organisations concernées et leurs personnels.
Vous trouverez dans mon rapport écrit les tenants et les aboutissants de la controverse qui a opposé, il y a quelques années, nos services fiscaux et un certain nombre de fonctionnaires internationaux résidant en France mais travaillant pour des institutions spécialisées situées à Genève. Je rappellerai simplement que l'administration fiscale, se fondant sur l'absence de ratification de la convention, avait remis en cause le statut fiscal accordé de facto à ces fonctionnaires, sur la base d'une simple pratique, durant plusieurs dizaines d'années.
La commission des affaires étrangères a considéré qu'en annonçant, en avril 1995, l'adhésion de la France à la convention du 21 novembre 1947 le Gouvernement de M. Balladur avait choisi la voie la plus logique et la plus juste pour sortir de cette difficulté.
Une clarification juridique s'imposait et il n'était pas imaginable qu'elle s'opère autrement que par une reconnaisance des privilèges et immunités établis par la convention, car rien ne peut justifier que la France applique à l'OMS ou au BIT un traitement différent de celui qu'elle réserve à l'UNESCO, à l'Organisation mondiale du commerce et à l'ONU elle-même.
Une telle distorsion de traitement, par ses implications fiscales, aurait, en outre, pour effet de faire obstacle à l'établissement dans nos départements frontaliers de fonctionnaires internationaux relevant des institutions spécialisées des Nations unies ; près de 2 500 d'entre eux résident déjà en France sans qu'il y ait lieu, nous semble-t-il, d'en négliger les implications.
Pour cet ensemble de raisons, la commission des affaires étrangères et de la défense, unanime, vous demande, mes chers collègues, d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'adhésion de la République française à la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées approuvée par l'assemblée générale des Nations unies le 21 novembre 1947 (ensemble dix-sept annexes approuvées par les institutions spécialisées), et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

9

CONVENTION DE VOISINAGE ENTRE LA FRANCE ET LA PRINCIPAUTÉ DE MONACO DU 18 MAI 1963

Adoption de deux projets de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 60, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres portant aménagements du titre Ier de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963 et du projet de loi (n° 61, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application de l'article 7 modifié de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963. [Rapport n° 168 (1998-1999).]
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le 18 mai 1963, dans le cadre de la rénovation des accords les liant dans de nombreux domaines, la France et Monaco ont signé une convention de voisinage dont le titre Ier portait sur l'entrée, le séjour et l'établissement des étrangers.
Ce texte s'inscrivant dans un contexte strictement bilatéral, certaines de ses dispositions ne sont plus en harmonie avec la convention d'application de l'accord de Schengen, en vigueur depuis mars 1995. Cette dernière instaure un contrôle obligatoire aux frontières extérieures, ce qui devrait être le cas de la frontière franco-monégasque, où, pourtant, aucun contrôle n'est effectué. En effet, depuis le rattachement du comté de Nice à la France, en 1860, la France et Monaco forment un espace de libre circulation où les ressortissants des deux Etats voyagent et s'établissent sans visa, bien que la mesure n'ait fait l'objet d'aucune disposition d'un traité ou accord entre les deux pays.
Pour combler ces déficiences, nos deux gouvernements ont donc négocié, à partir de juillet 1996, les échanges de lettres qui vous sont soumis aujourd'hui.
Il convenait d'aménager le titre Ier sans toucher à l'essentiel et, surtout, aux deux autres titres de la convention de voisinage, qui organisent une coopération multiforme : coordination des mesures de police, transfèrement des condamnés, frappe de la monnaie, monopole du tabac, transit des troupes. Par ailleurs, le fonctionnement des points de passage autorisés nécessitait un texte spécifique.
Le premier échange, à la base de l'édifice, porte sur l'entrée, le séjour, la circulation et l'établissement des personnes.
Pour nos nationaux, la liberté d'entrée, de séjour, de circulation et d'établissement devient une règle écrite. Pour les tiers, entrée, séjour, circulation et établissement suivront la législation française.
Le régime de court séjour à Monaco, en France ou sur le territoire de nos partenaires dans Schengen, est fonction de la nationalité de la personne et, pour les étrangers titulaires d'un titre de séjour, de l'autorité qui l'a délivré, Etat Schengen ou autre.
En ce qui concerne le long séjour et l'établissement, si l'étranger est ressortissant d'un Etat de l'espace économique européen ou de l'Union européenne, la procédure est allégée. Sinon, elle reste celle qui est traditionnellement appliquée pour la France. Elle est cependant simplifiée quand l'intéressé est résident depuis un an en France. Un étranger, quelle que soit son origine, ne peut s'installer à Monaco si les autorités françaises s'y opposent.
Pour répondre à un souhait monégasque, une procédure moins lourde, mais tout aussi sécurisante pour la France, qui conserve son droit d'opposition, a été prévue pour les étrangers recrutés pour la saison touristique, notamment les artistes.
La France conserve également son pouvoir d'opposition sur la prolongation ou la transformation du séjour, le changement d'activité ou le transit par la France d'étrangers.
Enfin, ce premier accord matérialise l'enclavement de la principauté dans l'espace Schengen, puisqu'il repousse la frontière extérieure aux frontières aériennes et maritimes de la principauté. Il y établit des points de passage contrôlés, dont les modalités de fonctionnement font l'objet du second échange de lettres.
Ce second échange définit ainsi leur objet : un double contrôle, effectué par les autorités de chacun des deux pays dans une zone déterminée et, pour la France, par les services de la Direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins, la DICCILEC.
Le cadre des contrôles exercés par les autorités françaises est celui des accords de Schengen : contrôle des personnes et des bagages, interrogation du système d'information Schengen, refus d'admission, possibilité d'octroi de visas à la frontière.
Les procédures s'appuient sur les règles posées par l'article 5 de la convention d'application de l'accord de Schengen, qui s'imposent à la principauté, conformément aux principes énoncés dans le premier échange de lettres. Les autorités monégasques ont toutefois la possibilité de renforcer ces règles ou de refouler un étranger qui, même s'il répond aux critères Schengen, est jugé indésirable dans la principauté.
Conséquence logique : ce second échange fixe également les conditions d'appréhension des personnes inscrites au système d'information Schengen et de transfert en France, à moins que ces personnes ne soient également recherchées à Monaco, y bénéficient du privilège de juridiction ou relèvent des juridictions pénales locales.
Enfin, les modalités du contrôle que les autorités françaises effectuent aux points de passage suivent une doctrine bien établie et constante en matière de faute, de responsabilité et de compétence judiciaire.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent les accords sous forme d'échanges de lettres portant aménagements du titre Ier et application de l'article 7 modifié de la convention de voisinage entre la France et la principauté de Monaco du 18 mai 1963, signées à Paris et à Monaco le 15 décembre 1997, qui font l'objet des projets de loi aujourd'hui proposés à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Xavier de Villepin, président, en remplacement de M. Masson, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, M. Paul Masson, empêché, m'a demandé de présenter à sa place ces deux accords qu'il avait commentés en commission, avec la grande compétence que lui donne sa connaissance du dossier Schengen.
En effet, les deux présents accords sous forme d'échange de lettres entre la France et Monaco ont pour objet d'adapter le volet de la convention de voisinage de 1963 consacré à l'entrée, au séjour et à l'établissement des étrangers aux dispositions de la convention d'application de l'accord de Schengen.
Je ne reviendrai pas sur le dispositif de ces deux textes que vous venez de présenter avec talent, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je rappellerai qu'ils s'inscrivent dans le réseau très étroit des relations nouées entre notre pays et Monaco depuis plusieurs siècles. Aux termes du traité d'amitié protectrice du 17 juillet 1918, la France garantit l'intégrité du territoire monégasque et, en retour, la principauté s'engage à ne rien entreprendre qui puisse nuire aux intérêts de la France et à consulter au préalable notre pays dans la conduite de ses relations internationales.
Par ailleurs, sur le plan institutionnel, la principauté réserve plusieurs hautes fonctions à des Français. Il en est ainsi notamment pour les fonctions de ministre d'Etat, qui assiste le prince dans l'exercice du pouvoir exécutif.
Ces deux textes ont pour effet de ne pas permettre que Monaco devienne une brèche dans le dispositif du contrôle aux frontières extérieures de l'espace Schengen.
Le risque n'était pas théorique dans la mesure où le principe de libre circulation prévaut entre la France et Monaco, alors même que la principauté, qui n'est pas signataire des accords de Schengen, n'applique pas les mesures de contrôle prévues par ces textes.
Or la part des étrangers qui se rendent sur « le rocher » ne peut être tenue pour négligeable.
Ainsi, en 1997, 96 escales de croisière ont eu lieu, tandis que 3 683 mouvements de navires de plaisance ont été enregistrés. Les contrôles ont porté sur un peu moins de 30 000 passagers maritimes. Fallait-il, dès lors, réintroduire des contrôles entre la France et Monaco ? Cela n'était naturellement pas envisageable.
C'est pourquoi ces deux accords ont dû être signés. Monaco, en coopération avec la France, mettra en oeuvre les règles de contrôle fixées par les accords de Schengen. La frontière extérieure de la principauté sera intégrée aux frontières de l'espace Schengen. En contrepartie, la France a obtenu du comité exécutif Schengen, en juin 1998, que nos partenaires reconnaissent la libre circulation des Monégasques et des étrangers titulaires d'un titre de séjour à Monaco au sein de l'espace Schengen.
En pratique, aucun effectif français ne sera affecté en permanence sur le territoire monégasque. Les autorités de la principauté préviendront les services compétents des Alpes-Maritimes de l'arrivée d'un hélicoptère provenant d'un territoire situé hors de l'espace Schengen ou d'un navire provenant d'un port non français. Les fonctionnaires français chargés des contrôles se rendront en temps utile dans les zones qui leur sont attribuées en suivant des itinéraires définis par arrangement administratif.
En conclusion, les accords de Schengen n'ont pas tenu compte de la situation des micro-Etats ou principautés en Europe, dont le régime particulier est souvent l'héritage des vicissitudes de l'histoire de notre vieux continent.
Certes, la plupart de ces Etats, enclavés dans les frontières intérieures de l'espace Schengen, ne soulèvent guère de difficultés au regard de la libre circulation des personnes.
Il n'en est toutefois pas de même de Monaco. Sauf à exposer la France aux critiques justifiées de nos partenaires, la principauté ne devait pas représenter une faille aux frontières extérieures de l'espace Schengen. Les deux accords signés avec le gouvernement princier permettent de fixer les garanties nécessaires et d'exercer aux frontières monégasques un contrôle conforme aux dispositions des accords de Schengen. C'est pourquoi votre commission vous invite à adopter les deux présents projets de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.

PROJET DE LOI N° 60

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 60.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres portant aménagements du titre Ier de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963, signées à Paris et à Monaco le 15 décembre 1997 et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

PROJET DE LOI N° 61

M. le président. Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi n° 61.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application de l'article 7 modifié de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963, signées à Paris et à Monaco le 15 décembre 1997 et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

10

CONVENTION COMMUNE SUR LA SÛRETÉ
DE LA GESTION DES DÉCHETS RADIOACTIFS

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 135, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs. [Rapport n° 170 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la gestion des déchets radioactifs suscite aujourd'hui des interrogations légitimes quant à la façon de les traiter de manière sûre et d'éviter que ceux-ci ne constituent pour les générations futures un fardeau, voire une menace.
Dans ce contexte, l'adoption en septembre 1997 de la convention commune sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs constitue une avancée notable. Elle est l'expression de la volonté de la communauté internationale de traiter cette question importante de façon concertée en donnant la priorité à la notion de sûreté.
La sûreté nucléaire relève de la responsabilité exclusive des Etats. Les études menées dans ce domaine dans un cadre transnational ont longtemps été le fait d'experts, essentiellement sous l'égide de l'Agence internationale de l'énergie atomique, mais aussi sous celle de l'Agence de l'énergie nucléaire de l'OCDE ou d'autres instances internationales, conduisant à la mise au point de recommandations non contraignantes.
En 1986, la catastrophe de Tchernobyl a suscité une prise de conscience de la nécessité d'une approche collective des questions de sûreté nucléaire. Cette préoccupation commune a été le facteur déclencheur qui a permis l'engagement de la négociation de la convention sur la sûreté nucléaire, adoptée en juin 1994, ratifiée par la France en septembre 1995 et entrée en vigueur en octobre 1996, dont le champ d'application a été limité aux réacteurs nucléaires.
Cette convention, tout en réaffirmant le principe de la responsabilité exclusive des Etats en matière de sûreté nucléaire, a posé un certain nombre de principes dont les Etats s'engageaient à s'inspirer pour la mise en oeuvre de leur législation ou réglementation nationale. Des conférences périodiques d'examen des politiques nationales « par les pairs » - la première doit avoir lieu au printemps 1999 - doivent permettre de suivre l'effet pratique de cette approche « pédagogique » qui vise à promouvoir une « culture de la sûreté nucléaire ». L'Agence internationale de l'énergie atomique sous l'égide de laquelle cette convention a été négociée parle, quant à elle, de « convention incitative ».
Si je reviens sur la convention sur la sûreté nucléaire, c'est qu'initialement il avait été envisagé qu'elle traite également de la question de la sûreté des déchets radioactifs. La complexité des problèmes que ceux-ci soulevaient et le souci de ne pas prolonger outre mesure la négociation ont conduit à les exclure et à convenir qu'ils feraient l'objet d'un instrument juridique séparé : la convention commune de 1997.
Il n'est donc pas surprenant que l'inspiration, la philosophie générale et même l'architecture de ces deux instruments juridiques soient très similaires.
Cependant, la convention commune a dû tenir compte de certaines particularités. Le point majeur a été la question de l'inclusion des combustibles usés. Pour les Etats qui n'ont pas choisi l'option du retraitement, ceux-ci sont des déchets, pour lesquels aucun usage ultérieur n'est envisagé. En revanche, dans une perspective de retraitement, les combustibles usés constituent une matière valorisable. Dans le même temps, les impératifs de sûreté sont les mêmes que les combustibles usés soient considérés comme des matières valorisables ou comme des déchets. Une initiative française a permis de trouver une solution d'équilibre entre ces deux concepts : le traitement de la sûreté de la gestion du combustible usé et de la sûreté de la gestion des déchets est décrit dans deux chapitres distincts, mais comportant des dispositions similaires.
Un autre point délicat a été la question de l'inclusion dans le champ de la convention commune des combustibles usés et déchets radioactifs faisant partie ou provenant de programmes militaires. Après de longues discussions, il a été convenu qu'ils seraient exclus, les Etats parties gardant la possibilité de soumettre aux dispositions de la convention certains de leurs combustibles ou déchets d'origine militaire.
Enfin, la question des mouvements transfrontières a donné lieu à discussions, certains Etats souhaitant introduire de nouvelles contraintes pour les transports de combustibles usés ou de déchets radioactifs. Finalement, le chapitre consacré au mouvement transfrontières est, du point de vue du Gouvernement, équilibré. Nous attachons une importance particulière au fait que le principe de la liberté de navigation ait pu être réaffirmé expressément.
Sans entrer dans les détails des dispositions de la convention commune, on notera que celle-ci se limite à établir des principes de sûreté très généraux, le choix des moyens pour atteindre ces objectifs étant du ressort des Etats. Le principe de base est que l'Etat doit se doter d'un cadre législatif et réglementaire pour régir la sûreté de la gestion du combustible usé et des déchets radioactifs et, par ailleurs, assurer l'indépendance effective des fonctions de réglementation par rapport aux autres fonctions dans les organismes qui s'occupent à la fois de réglementation et de gestion dans ce domaine.
Il est de fait que la France et les principaux pays industrialisés ont depuis longtemps introduit dans leur législation ou leur réglementation le type de dispositions prescrites par la convention. En revanche, des progrès restent à faire dans de nombreux pays d'Europe de l'Est et du tiers-monde. Le mécanisme d'examen par les pairs, qui implique de réunir les parties contractantes pour des réunions d'examen qui doivent se tenir à intervalle de trois ans au plus, est destiné à permettre la confrontation des expériences et une émulation positive.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et la sûreté de la gestion des déchets radioactifs qui fait l'objet du projet de loi proposé aujourd'hui à votre approbation.
M. François Trucy. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Robert Del Picchia, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en effet, la gestion des combustibles usés et des déchets nucléaires reste un sujet très sensible. Sans revenir sur l'actualité toute récente de nos relations commerciales avec l'Allemagne dans le domaine du nucléaire, le sujet est sensible en ce qu'il intéresse la sûreté surtout et, bien sûr aussi, au regard de la protection de l'environnement.
La convention du 5 septembre 1997 « sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs » constitue en quelque sorte le complément logique et même indispensable de la convention de 1994 sur la sûreté nucléaire, laquelle était en effet limitée à la sûreté des centrales électronucléaires.
Cette nouvelle convention de 1997 représente en quelque sorte le second pilier d'une réglementation internationale établie sur la base des prescriptions et des recommandations de l'Agence internationale de l'énergie atomique, réglementation qui codifie les règles techniques, jusqu'alors dépourvues de force contraignante, et qui couvre désormais, avec la question des déchets, l'ensemble de la gestion du cycle du combustible nucléaire.
Cette convention du 5 septembre 1997 pose un certain nombre de principes applicables tant aux opérations de stockage définitif de déchets radioactifs qu'au combustible usé, lorsque les Etats ont choisi l'option du retraitement, ainsi qu'aux mouvements transfrontières de ces matières.
J'ai détaillé dans mon rapport écrit la déclinaison de ces différents principes, inspiré du souci de promouvoir une « culture de sûreté nucléaire ».
Le contrôle de l'application de la convention reposera sur un mécanisme souple d'examen périodique par les parties signataires des rapports présentés par chaque Etat.
Notre commission des affaires étrangères a observé que la France avait pris une part très importante à l'élaboration de cette convention, qui est totalement en phase avec les conceptions en vigueur dans notre pays.
Les textes généraux relatifs à l'environnement, ainsi que ceux qui sont spécifiques au nucléaire, en particulier la loi de 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs, ont déjà défini un cadre législatif et réglementaire conforme aux prescriptions de la convention. Au demeurant, ce cadre juridique n'est pas figé ; il est appelé à évoluer dans le sens d'un renforcement des préoccupations de sûreté.
Il est donc logique et souhaitable que la France rejoigne rapidement les quelques pays, encore peu nombreux, qui ont déjà ratifié la convention. Trente-sept pays ont signé le texte, mais cinq seulement l'ont ratifié : l'Allemagne, le Canada, la Hongrie, la Norvège et la Slovaquie.
Rappelons que cette convention n'a toujours pas été signée par des pays importants disposant de capacités nucléaires, tels que la Chine, l'Inde, le Pakistan, le Japon ou encore le Mexique. Quant à la Russie, son président avait annoncé voilà quelques semaines son intention d'engager la procédure de signature. On ne peut que souhaiter que ce signe encourageant soit suivi d'effet.
Il nous paraît bien entendu très important que cette convention rallie le plus grand nombre de signataires, afin notamment de favoriser une amélioration significative de la sûreté dans des pays où celle-ci est insuffisante, que ce soit des pays de l'ex-Union soviétique ou des pays émergents.
La commission des affaires étrangères, considérant que la convention du 5 septembre 1997 constitue une pièce très importante dans le dispositif visant à renforcer la sûreté nucléaire, demande donc au Sénat d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs, signée à Vienne le 29 septembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

11

CONVENTION SUR L'ÉVALUATION
DE L'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT
DANS UN CONTEXTE TRANSFRONTIÈRE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 134, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices). [Rapport n° 189 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, qui fait l'objet du présent projet de loi, trouve son origine dans la conférence tenue à Sofia en novembre 1989 à l'occasion de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, la CSCE.
Au titre de la troisième corbeille des travaux de la conférence étaient lancées trois conventions en matière d'environnement destinées à apporter une contribution à la paix en Europe en favorisant la prévention et la résolution pacifique des litiges internationaux nés de problèmes environnementaux.
Ces conventions, consacrées respectivement à l'évaluation de l'impact sur l'environnement d'activités en projet, aux accidents industriels, ainsi qu'aux cours d'eau et lacs internationaux, sont pour cette raison centrées sur les aspects transfrontières de ces questions.
En vertu de la présente convention, que la France a signée le 26 février 1991, les parties sont tenues d'évaluer l'impact sur l'environnement d'activités en projet susceptibles d'avoir un effet préjudiciable important sur une autre partie, avant leur autorisation ou leur mise en service.
Ces activités sont définies par la convention et comportent les industries les plus génératrices de nuisances ou de danger : l'énergie, en particulier les centrales thermiques à combustible fossile ou nucléaire, la production et le traitement de combustibles et déchets nucléaires, les grands travaux publics, enfin, les déboisements de grandes superficies.
Pour ces activités, et chaque fois qu'un impact transfontière important est prévisible, soit à l'appréciation de la partie d'origine, soit sur demande de la partie susceptible d'être touchée, une consultation s'engagera entre les parties concernées, selon des règles précisées par la convention.
Ces règles s'inspirent du principe selon lequel la partie d'origine doit prendre au moins autant en compte les effets transfrontières des activités conduites sur son territoire que les effets sur son propre territoire, principe consacré dès la déclaration de Stockholm en 1972.
Parallèlement, la modification de la directive européenne concernant l'évaluation de l'incidence de certains projets publics et privés sur l'environnement a été menée à son terme.
Cette directive contient, sur les projets ayant une incidence transfrontalière, des dispositions qui se rapprochent de celles de la convention d'Espoo, avec un champ d'application semblable. Avec nos voisins de la Communauté, la convention sera mise en oeuvre selon les modalités prévues par cette directive modifiée, dès qu'elle sera entrée en vigueur.
Enfin, notre voisin suisse a reconsidéré sa position initialement réservée et a ratifié la convention en septembre 1996. Des arrangements bilatéraux pourront être passés avec la Suisse, comme le prévoit la convention, pour définir les modalités pratiques de ces procédures.
Les consultations transfrontalières seront dans toute la mesure possible menées en parallèle à l'enquête publique française et à la phase finale d'instruction qui lui succède, pour éviter un allongement des délais d'instruction. Elles seront au demeurant circonscrites à une faible proportion des dossiers soumis annuellement en France à étude d'impact.
Dans l'esprit de la convention, la France pratique déjà des consultations transfrontalières, sur la base du décret du 25 février 1993 relatif aux études d'impact et sa circulaire d'application, avec les Etats membres de la Communauté. Les affaires les plus nombreuses concernent les frontières franco-allemande et franco-suisse, où les dossiers relatifs aux établissements classés soumis à la directive Seveso sont examinés avec les autorités voisines.
Dans ce contexte géographique essentiel s'agissant d'un accord fonctionnant sur le principe de la réciprocité, l'approbation française confirmera nos engagements européens, conformément à la déclaration ministérielle adoptée à Sofia lors de la conférence des ministres de l'environnement d'Europe, le 25 octobre 1995.
Cette convention va également donner une impulsion à une participation plus étendue des pays d'Europe centrale et orientale. Dans ces pays, dont le droit environnemental est récent, l'application de la convention aux dossiers transfrontaliers devrait aussi contribuer à améliorer la pratique interne de l'étude d'impact.
A ce jour, vingt-sept Etats d'Europe et la Communauté européenne ainsi que les Etats-Unis et le Canada ont signé la convention ; vingt-deux l'ont ratifiée.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Rouvière, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Ainsi que vous venez de le préciser avec beaucoup de clarté, monsieur le ministre, le texte qui nous intéresse se rapporte à la convention signée le 25 février 1991 à Espoo, en Finlande.
M. Emmanuel Hamel. Voilà huit ans !
M. André Rouvière, rapporteur. Cette convention est relative à l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière.
Signée par une trentaine de pays européens - l'Autriche, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, la Suède, les Pays-Bas, entre autres - ainsi que par les Etats-Unis et le Canada, cette convention tend à instaurer la pratique d'une information et d'une consultation du pays, ou des pays voisins, dès lors qu'un projet d'équipement, d'installation industrielle ou d'infrastructure entraîne un impact tranfrontière probable sur l'environnement.
Le texte contient une liste des travaux et des installations concernés. Sans prétendre être exhaustif, je rappelle qu'il s'agit de raffineries de pétrole, de centrales thermiques, de centrales nucléaires, d'installations chimiques, de constructions d'autoroutes, de lignes de chemin de fer, de constructions d'oléoducs, de gazoducs de grande section, d'installations d'élimination de déchets, de constructions de grands barrages, de réservoirs et de grandes installations de stockage de produits pétroliers, pétrochimiques, chimiques et, ainsi que vous l'avez indiqué, monsieur le ministre, du déboisement de grandes superficies.
Si la France a tardé à ratifier cette convention, ce n'est pas parce qu'elle s'en désintéresse, bien au contraire. C'est par souci de cohérence. Dès 1992, la France appliquait une directive communautaire de 1985 en matière d'études d'impact transfrontière.
La signature de la convention de 1991 a entraîné une révision du droit communautaire et l'adoption, en 1997, d'une nouvelle directive qui devrait être transposée en droit français avant la fin du mois de mars. L'approbation de la convention interviendra donc après la mise à jour de notre réglementation, de manière à ce qu'aucune contradiction n'apparaisse entre ses dispositions et nos engagements européens.
La commission des affaires étrangères a approuvé le dispositif de la convention de 1991 qui conduira à généraliser les procédures d'étude d'impact et d'enquêtes publiques en les étendant au-delà des frontières lorsque le projet peut avoir des incidences sur l'environnement ou sur les populations des pays voisins. De même, les pouvoirs publics français et les populations pourront être informés des projets envisagés par nos voisins à proximité de nos frontières.
Nous avons bien relevé le caractère essentiellement incitatif de cette convention, qui généralise les consultations bilatérales sans instaurer pour autant de mécanisme juridique susceptible de remettre en cause ou de bloquer un processus de décision strictement national. Il nous paraît également important qu'une clause de sauvegarde autorise l'Etat d'origine du projet à ne pas transmettre à l'Etat voisin tout renseignement couvert par le secret industriel et commercial ou par les exigences de la sécurité nationale.
C'est dans ces limites que les autorités ou les populations d'un pays voisin pourront prendre connaissance des dossiers et faire valoir leur point de vue, avant que l'Etat à l'origine du projet ne prenne souverainement ses décisions.
Etait également envisagée l'option zéro, c'est-à-dire les conséquences qu'il y aurait à ne pas réaliser ce projet.
Par rapport au droit communautaire, ce texte n'entraînera pas pour la France de contraintes supplémentaires. En effet, la France pratique déjà des consultations analogues à celles qui sont prévues par la présente convention. Mais cette convention permettra en pratique d'appliquer à nos relations avec la Suisse les règles en vigueur dans l'Union européenne.
Cette convention va dans le sens d'une meilleure prise en compte des problèmes d'environnement, qui ne peuvent pas toujours être traités dans un cadre strictement national dès lors que les incidences prévisibles d'un projet s'étendent ou peuvent s'étendre au-delà des frontières.
Dans ces conditions, la commission des affaires étrangères vous demande d'adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices), signée à Espoo, Finlande, le 25 février 1991, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

12

ACCORD AVEC L'ALLEMAGNE RELATIF
À LA CRÉATION DE L'UNIVERSITÉ
FRANCO-ALLEMANDE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 148, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l'université franco-allemande. [Rapport n° 188 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, proposée par la France en 1996, la création de l'université franco-allemande a fait l'objet d'un accord intergouvernemental signé par les ministres des affaires étrangères lors du sommet de Weimar, le 19 septembre 1997. Il s'agit d'un établissement « sans murs », organisé en réseau.
En ce qui concerne le siège de la future université, l'accord de Weimar renvoyait à un avenant. La France a accepté, lors du sommet de Potsdam du 1er décembre 1998, la proposition allemande de fixer ce siège à Sarrebruck.
M. Emmanuel Hamel. Warum nicht in Frankreich ?
M. Charles Josselin, ministre délégué. L'objectif est de renforcer la coopération existant entre établissements d'enseignement supérieur français et allemands en promouvant des relations de partenariat nouvelles et plus approfondies.
L'université franco-allemande, réseau d'établissements d'enseignement supérieur des deux pays, aura pour mission de développer qualitativement et quantitativement les échanges d'étudiants, d'enseignants et de chercheurs entre les deux pays.
A cette fin, elle favorisera la mise en oeuvre de cursus communs, sanctionnés par des diplômes dans l'ensemble des cycles universitaires et des disciplines, ainsi que des programmes de recherche et de formation professionnelle.
Elle reprendra en cela, en les élargissant, les missions d'un autre réseau déjà existant, le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur, qui a, depuis sa création en 1988, suscité et accompagné soixante-douze cursus intégrés dans le domaine des formations de deuxième cycle - maîtrises et ingénieurs - impliquant cent quarante établissements. Près de mille étudiants, en nombre sensiblement égal de part et d'autre, suivent actuellement l'un de ces cursus.
Elle disposera donc, dès le départ, d'un acquis considérable, mais devra innover en imaginant de nouvelles filières franco-allemandes au niveau du premier et du troisième cycle et de la recherche.
Les deux pays ont mis en place un groupe de travail pour préparer la création de cette université. Du côté français, y participent les ministères des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur et de la recherche, dont un représentant de la conférence des présidents d'université et un représentant de la conférence des directeurs d'écoles et des formations d'ingénieurs ; du côté allemand sont présents le ministère des affaires étrangères, le ministère chargé de la formation supérieure et un représentant des Länder . Les principaux textes fondateurs sont prêts, les contributions en régime de croisière, à partir de l'année 2001, sont estimées à 30 millions de francs par pays.
Nous disposons donc, avec cette nouvelle université, d'un instrument indispensable au rapprochement durable des sociétés civiles de nos pays, impliquant les étudiants, les universitaires, les chercheurs et, plus généralement, les innovateurs.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l'université franco-allemande, signé à Weimar le 19 septembre 1997, aujourd'hui proposé à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Biarnès, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'accord signé à Weimar le 19 septembre 1997 et portant création d'une université franco-allemande doit permettre de relancer et d'amplifier la coopération franco-allemande dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche.
En cette matière, nous partons d'un acquis important, qui repose sur de nombreux accords interuniversitaires, sur des échanges scientifiques et sur le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur, créé en 1988. Ce dernier a développé près de soixante-dix formations universitaires communes débouchant sur des doubles diplômes reconnus dans nos deux pays et constitue l'embryon de la future université franco-allemande.
La commission des affaires étrangères a relevé tout l'intérêt qui s'attachait à la création de cette université puisqu'il s'agira d'élargir les formations communes à des domaines nouveaux : le premier cycle universitaire, les formations doctorales et la recherche, la formation professionnelle continue.
L'accord de Weimar donne à l'université une pleine autonomie juridique et financière qui devrait favoriser son essor, tout en lui permettant de délivrer ses propres diplômes, reconnus en France et en Allemagne.
Je signale également que ce développement des formations communes correspond à un besoin réel, exprimé par les milieux économiques franco-allemands, qui souhaitent des formations plus diversifiées et plus longues. Tout laisse donc à penser que les étudiants trouveront au sein de l'université franco-allemande la possibilité d'une meilleure insertion professionnelle future.
La commission a également noté que le choix de Sarrebruck comme siège de l'université s'intégrait dans une politique d'ensemble relative aux structures franco-allemandes. Nous souhaitons donc que le projet de regroupement dans un lieu unique, en l'occurrence Strasbourg d'après les dernières indications fournies par le Gouvernement, des services de l'office franco-allemand pour la jeunesse se concrétise rapidement. Nous souhaitons également que cette restructuration favorise une relance de l'office, qui a été quelque peu handicapé ces dernières années par une diminution de ses moyens financiers, c'est le moins qu'on puisse dire.
Je conclurai en soulignant le grand intérêt de la création de cette université franco-allemande. Elle procède d'une inspiration analogue à celle des trois lycées franco-allemands de Buc, Fribourg et Sarrebruck, dont les résultats sont tout à fait remarquables.
On ne peut que regretter qu'après la création de ces trois institutions, voilà bientôt une trentaine d'années, d'autres n'aient pas suivi. On peut formuler la même remarque à propos de la coopération franco-italienne ou franco-espagnole, par exemple.
La commission des affaires étrangères, qui s'est inquiétée de constater le déclin de l'étude du français en Allemagne, ne peut, en tout état de cause, qu'être favorable à une initiative renforçant notre coopération bilatérale dans le domaine universitaire, tout en étant vraiment consciente des freins financiers qui poseront inévitablement certaines limites à la mise en place de ces filières communes bilingues.
En conséquence, malgré les quelques réserves que j'ai esquissées, la commission des affaires étrangères vous demande, mes chers collègues, d'approuver le présent projet de loi.
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l'université franco-allemande, signé à Weimar le 19 septembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

13

CONVENTION DOUANIÈRE
AVEC L'AFRIQUE DU SUD

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 149, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières. [Rapport n° 191 (1998-1999).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'heure de l'internationalisation des échanges et de la mondialisation de l'économie, la grande fraude commerciale à l'échelle mondiale prend une ampleur sans précédent. Son corollaire est un accroissement et une sophistication des infractions douanières.
La complexité des circuits économiques, dans laquelle la criminalité organisée trouve de nouveaux terrains d'action, la favorise.
Dans ce contexte, le but des Etats a toujours été de se doter de moyens pour mieux appréhender les nouveaux types de délinquance, dans un cadre multilatéral ou bilatéral.
Les conventions des Nations unies sur les stupéfiants de 1961, sur les substances psychotropes de 1971 et contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988 y répondent sur cet aspect particulier.
Au sein de l'Union européenne, pour parer aux effets néfastes de la mise en place de l'union douanière et de politiques communes, les nouvelles formes de fraude ayant de graves conséquences financières et éconoiques, un mécanisme de coopération administrative a accompagné le mouvement de libéralisation des échanges et la suppression des formalités douanières.
Au niveau bilatéral enfin, la France s'est engagée très tôt sur la voie de la coopération. Les dispositions pertinentes du paragraphe 6 de l'article 65 du code des douanes dans le domaine de la coopération internationale n'offrent en effet qu'une faible base juridique pour organiser ce type de coopération, notamment en ce qui concerne la protection de la confidentialité des renseignements et informations échangés entre administrations.
Dès 1936, la France signait avec les Etats-Unis un premier accord d'assistance administrative mutuelle en matière douanière. Depuis lors, vingt-trois conventions bilatérales sont entrées en vigueur et une dizaine sont en négociation ou en cours d'approbation.
Les conventions d'assistance administrative mutuelle en matière douanière prévoient spécifiquement la communication spontanée de renseignements concernant les opérations illicites, la transmission, sur demande, de documents qui les corroborent, le recours à des enquêtes permettant l'audition de personnes suspectes ou de témoins, la possibilité d'utiliser à titre de preuves les documents et informations recueillis dans leur cadre, ainsi que la possibilité, pour les agents des douanes, de comparaître en tant que témoins ou experts devant les tribunaux de l'Etat contractant requérant. L'assistance organisée ne peut cependant porter atteinte à l'ordre public ni à un secret industriel, commercial ou professionnel.
L'assistance administrative est déterminante dans la lutte contre la fraude. Elle a été une source importante de renseignements en 1997. Les demandes d'assistance se sont accrues de 15 % au cours de cette année par rapport à 1996. Pour la zone des pays de l'Est, la progression des échanges a été de 43 %.
S'agissant de l'Afrique du Sud, la France et ce pays sont des partenaires économiques majeurs en Afrique subsaharienne. Avec plus de 8,3 milliards de francs d'échanges commerciaux en 1996, l'Afrique du Sud représente le premier partenaire économique de la France dans cette région. Or le développement des flux commerciaux s'est accompagné de fraudes, dont l'une est liée à l'importation en France de tee-shirts. Il est à craindre que le développement des échanges n'entraîne la multiplication de celles-ci.
Pour ce qui concerne les stupéfiants, l'Afrique du Sud est à la fois un pays producteur et un pays de transit.
Elle est l'un des principaux producteurs mondiaux de cannabis, en grande partie pour la consommation locale, mais sans qu'il soit exclu qu'elle se tourne davantage vers l'exportation.
Elle sert de plus en plus de plaque tournante pour la cocaïne en provenance d'Amérique latine et, dans une moindre mesure, pour l'héroïne. Le développement spectaculaire du trafic depuis le début des années quatre-vingt-dix est facilité par le nombre élevé de liaisons aériennes avec ce pays, ainsi que par le niveau élevé de développement de celui-ci.
Au total, la convention franco-sud-africaine d'assistance administrative mutuelle en matière douanière devrait permettre, à la fois, d'assurer une meilleure perception des droits et taxes, de protéger la sécurité et la santé des consommateurs et d'assurer une protection plus efficace des entreprises contre les menaces d'irrégularités liées aux échanges internationaux, telles que la concurrence déloyale ou les contrefaçons.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle la convention d'assistance administrative mutuelle pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des fraudes douanières entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République sud-africaine, objet du projet de loi soumis à votre approbation.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goulet rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette convention, conclue avec l'Afrique du Sud, a le même objet que la précédente : instaurer un cadre juridique précis pour la coopération entre les deux administrations douanières afin de lutter contre les fraudes commerciales et les trafics illicites. Le dispositif de cette convention, précisé dans le rapport écrit, est très voisin de celui que nous venons d'examiner et dont M. le ministre vient de rappeler les grandes lignes.
Ce texte est d'autant plus opportun qu'il a pour objet d'accompagner un développement significatif des échanges commerciaux entre l'Afrique du Sud et la France. Cela étant, le partenariat économique et commercial qui nous lie à l'Afrique du Sud est encore très modeste : si notre part de marché a quelque peu augmenté, nous nous situons encore au cinquième rang des fournisseurs de ce pays, assez loin derrière nos partenaires allemands et britanniques, les Etats-Unis et le Japon. Nous sommes également le cinquième investisseur en flux, et cent vingt-cinq entreprises françaises sont aujourd'hui présentes en République sud-africaine. Deux conventions de coopération ont par ailleurs été signées en novembre dernier ; elles contribueront à développer notre partenariat économique.
La commission des affaires étrangères reste cependant très préoccupée par le revers récemment subi par notre pays sur le marché sud-africain de l'armement.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très bien !
M. Emmanuel Hamel. Il faut s'en souvenir !
M. Daniel Goulet, rapporteur. L'enjeu était considérable sur le plan financier et devait refléter l'état de nos relations politiques bilatérales, dont la visite du Président de la République avait pourtant permis de vérifier la qualité. Par-delà cet échec, la commission s'est montrée très désireuse d'être informée précisément sur les actions engagées dans le domaine de notre organisation à l'export pour le secteur de l'armement, afin d'en améliorer l'efficacité.
M. Serge Vinçon. Très bien !
M. Daniel Goulet, rapporteur. Dernier point : la prochaine signature, malgré des difficultés de dernière minute, de l'accord conclu entre l'Union européenne et Pretoria donnera un coup de fouet aux échanges commerciaux. La France a dû défendre des intérêts importants au cours d'une difficile négociation qui aura duré quatre ans. Il ressort de cet accord que, dans un délai de dix ans, 95 % des exportations sud-africaines vers l'Union seront détaxées et que 86 % des exportations européennes vers l'Afrique du Sud le seront avant douze ans.
Sur le plan politique, l'Afrique du Sud a su ancrer des institutions démocratiques et libérales où la protection des droits de l'homme tient une place essentielle.
Dans quelques mois se tiendront des élections générales qui redéfiniront profondément le paysage politique sud-africain.
Si le travail exemplaire de la commission « vérité et réconciliation » a contribué à exorciser les rancoeurs accumulées pendant les sombres années de l'apartheid, le pays reste cependant confronté à des enjeux sociaux assez dramatiques qui suscitent une impatience croissante dans une société chroniquement violente.
Les années qui viennent seront donc cruciales pour la consolidation de l'état de droit et la modernisation du pays qui conditionnent, en définitive, la paix, la paix politique et la paix sociale.
Au bénéfice de ces observations, je ne peux que vous inviter, mes chers collègues, à adopter le présent projet de loi. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique . - Est autorisée l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières signée à Midrand le 26 juin 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

14

CONVENTION DOUANIÈRE
AVEC LA SLOVAQUIE

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 150, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières. [Rapport n° 190 (1998-1999).]
Le président du groupe d'amitié France-Slovaquie est particulièrement heureux de présider la séance au cours de laquelle est examiné ce projet de loi.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la convention d'assistance administrative mutuelle pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières, signée en mai 1998 avec le gouvernement de la République slovaque procède de la même démarche que l'accord conclu avec l'Afrique du Sud, dont il vient d'être question.
Je ne crois donc pas utile d'insister sur la priorité que constitue la lutte contre les fraudes douanières et les trafics illicites et sur les moyens qui sont mis en oeuvre pour y parvenir, car le dispositif de l'accord franco-slovaque est semblable à celui de l'accord passé avec l'Afrique du Sud : échange de renseignements, de documents, enquêtes menées sur demande d'une des parties, témoignages devant les tribunaux.
S'agissant de la Slovaquie, l'accord s'inscrit toutefois dans un contexte différent : celui de l'essor considérable des échanges commerciaux avec l'Europe centrale et orientale et du rapprochement entre l'Union européenne et les pays de la zone.
Notre administration douanière a entrepris de mettre en place un réseau de conventions bilatérales pour acoompagner le mouvement et établir des contacts réguliers sur une base juridique stable et contraignante avec les Etats concernés. Depuis 1996, sept accords ont ainsi été signés respectivement avec la Pologne, l'Ukraine, la République tchèque, la Russie, la Hongrie, la Macédoine et la Slovaquie. Les trois premiers sont entrés en vigueur, les autres sont en cours d'approbation en France comme chez ses partenaires.
Si la Slovaquie n'a pas suivi le mouvement d'ensemble de développement des relations commerciales du continent, son ouverture est néanmoins réelle et devrait s'accentuer.
Les échanges bilatéraux reposent essentiellement sur de grands contrats remportés par des entreprises françaises, mais le commerce courant se développe, tout particulièrement en ce qui concerne les voitures, les pièces détachées et les produits agricoles.
Cette expansion a facilité les fraudes de toute nature. On peut relever principalement des minorations sur des exportations de viande ou d'alcool vers la Slovaquie.
En outre, située sur la route des Balkans, la Slovaquie est devenue un pays de transit et de stockage de stupéfiants. En effet, une quantité importante de l'héroïne en provenance du Moyen-Orient, acheminée par voie routière vers l'Europe occidentale, y transite, et des dépôts de drogue ont été constitués par des organisations criminelles sur le sol slovaque.
L'ouverture de relations avec les douanes slovaques a d'ores et déjà permis de mettre en oeuvre un « ciblage » des camions TIR à destination de la France.
La convention franco-slovaque devrait permettre une meilleure perception des droits et taxes, d'assurer une protection plus efficace des entreprises contre les menaces d'irrégularités liées aux échanges internationaux et de protéger la sécurité et la santé des consommateurs. Elle est, à ce titre, un élément important de nos relations bilatérales.
Telles sont les principales observations qu'appelle la convention d'assistance administrative mutuelle pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières signée par le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque, objet du projet de loi soumis à votre approbation. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Daniel Goulet, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis a pour objet de donner une base juridique claire à la coopération entre les administrations douanières française et slovaque, afin de lutter plus efficacement contre les fraudes douanières et les trafics illicites divers. Ces mécanismes permettront d'accompagner favorablement l'essor significatif des échanges commerciaux entre nos deux pays.
Je ne reviendrai pas sur le dispositif de la convention elle-même, que M. le ministre vient de rappeler. Je voudrais, en quelques mots, évoquer la nouvelle situation politique de la Slovaquie.
Ce pays a donné au monde, après sa séparation d'avec la République tchèque, une image politique troublée, largement imputable à la personnalité quelque peu autoritaire de son Premier ministre.
M. Xavier de Villepin, président de la commission. C'est le moins qu'on puisse dire !
M. Daniel Goulet, rapporteur. La Slovaquie a fait une entrée hésitante dans la démocratie : l'intimidation des médias et la radicalisation des rapports avec la minorité hongroise du pays en ont été les signes les plus visibles.
Il en est résulté pour la jeune République slovaque une mise à l'écart sévère, par la communauté internationale, des processus d'intégration à l'Union européenne, à l'OTAN ou encore à l'OCDE.
Les élections du mois de septembre dernier ont heureusement modifié la donne ; la nouvelle majorité en place entend définir une orientation différente pour le pays : consécration de la liberté des médias, affirmation de l'indépendance judiciaire, ouverture à l'égard de la minorité hongroise et modernisation institutionnelle. Une attitude diplomatique plus conciliante permettra aussi à la Slovaquie d'améliorer ses relations toujours complexes avec ses voisins hongrois et tchèque.
La forte croissance de l'économie slovaque n'est pas sans produire des effets positifs pour nos échanges commerciaux bilatéraux : les exportations françaises vers la Slovaquie ont connu un essor considérable, qui nous laisse encore toutefois à la septième place des fournisseurs de ce pays. Nous y sommes, en revanche, le quatrième investisseur, grâce à une présence active des entreprises françaises.
Ces liens commerciaux doivent prendre une plus grande ampleur à l'avenir et la présente convention, à sa façon, permettra d'y contribuer.
Je vous invite, en conséquence, mes chers collègues, à adopter ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Hamel.
M. Emmanuel Hamel. Monsieur le président, vous me permettrez de parler ici sous l'autorité du président du groupe d'amitié France-Slovaquie, puisque vous avez vous-même fait allusion à ces fonctions que vous exercez par ailleurs.
Monsieur le ministre, je vous interpelle pour vous demander de faire en sorte que le Gouvernement, quelles que soient les difficultés qu'éprouve actuellement la République slovaque, accorde plus d'attention et réponde avec plus de célérité à l'espoir profond que nourrit ce pays de voir la France témoigner une plus grande compréhension des problèmes qu'il rencontre et adopter une attitude plus positive devant son voeu d'être associé au processus d'intégration européenne.
Les Slovaques placent en effet en la France un grand espoir.
Aujourd'hui même, alors que nous pouvions entendre le magnifique discours de M. le Président de la République tchèque, nous étions également honorés de la présence de M. l'ambassadeur de Slovaquie en France. Celui-ci est venu dans cette enceinte notamment pour se faire l'écho de cet espoir : la Slovaquie souhaite vivement que la France contribue plus activement à l'intégration de la Slovaquie au sein de l'Europe.
Monsieur le ministre, puisque l'intégration de votre domaine dans celui du Quai d'Orsay fait pratiquement de vous un ministre des affaires étrangères, soyez l'homme qui favorise l'amélioration des relations entre la France et la Slovaquie, ainsi que l'intensification de notre amitié avec ce pays ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de l'article unique.
« Article unique. - Est autorisée l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières signée à Paris le 27 mai 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

15

ADOPTION DÉFINITIVE D'UN TEXTE SOUMIS
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 1er mars 1999, l'informant de l'adoption définitive du texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution suivant :
E-716. - Le « projet de décision de la Commission relative à la conclusion par la CE de l'accord intérimaire pour le commerce et les mesures d'accompagnement entre la CE, la Communauté européenne du charbon et de l'acier et la Communauté européenne de l'énergie atomique d'une part et la République d'Ouzbékistan, d'autre part » a été adopté définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 30 avril 1998.

16

RETRAIT DE TEXTES SOUMIS
EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 1er mars 1999, l'informant du retrait des textes suivants soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution :
E-222. - Proposition de règlement (CECA, CE, EURATOM) du Conseil modifiant le règlement financier du 21 décembre 1977 applicable au budget des Communautés européennes.
E-432. - Proposition de règlement du Conseil relatif à l'appui aux programmes de réhabilitation en Afrique australe.

17

TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 243, distribué et renvoyé à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant la ratification du traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 250 (1998-1999), distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

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DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Louis Souvet, Louis Althapé, Pierre André, Paul Blanc, Jean Bernard, Louis de Broissia, Robert Calmejane, Auguste Cazalet, Charles de Cuttoli, Xavier Darcos, Désiré Debavelaere, Luc Dejoie, Jacques Delong, Robert Del Picchia, Charles Descours, Michel Esneu, Bernard Fournier, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Charles Ginésy, Daniel Goulet, Alain Gournac, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Christian de la Malène, Lucien Lanier, Robert Laufoaulu, Guy Lemaire, Paul Natali, Mme Nelly Olin, MM. Jacques Oudin, Jacques Peyrat, Jean-Pierre Schosteck, Jacques Valade et Guy Vissac une proposition de loi visant à valider l'évolution jurisprudentielle en matière de preuve par écrit.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 244, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Hubert Haenel, Louis Althapé, Pierre André, Jean Bizet, Paul Blanc, Gérard Braun, Dominique Braye, Mme Paulette Brisepierre, MM. Louis de Broissia, Robert Calmejane, Auguste Cazalet, Gérard César, Jacques Chaumont, Gérard Cornu, Désiré Debavelaere, Luc Dejoie, Jacques Delong, Robert Del Picchia, Charles Descours, Michel Doublet, Alain Dufaut, Daniel Eckenspieller, Bernard Fournier, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Charles Ginésy, François Giraud, Daniel Goulet, Alain Gournac, Adrien Gouteyron, Emmanuel Hamel, Jean-Paul Hugot, André Jourdain, Lucien Lanier, Patrick Lassourd, Dominique Leclerc, Jacques Legendre, Jean-François Le Grand, Pierre Martin, Bernard Murat, Paul Natali, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Joseph Ostermann, Jean-Jacques Robert, Louis Souvet, Martial Taugourdeau, Jacques Valade, Alain Vasselle et Serge Vinçon une proposition de loi tendant à prendre en compte le temps du service national dans le calcul de la retraite.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 245, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Louis Souvet, Louis Althapé, Pierre André, Paul Blanc, Mme Paulette Brisepierre, MM. Louis de Broissia, Robert Calmejane, Auguste Cazalet, Xavier Darcos, Désiré Debavelaere, Luc Dejoie, Jacques Delong, Robert Del Picchia, Charles Descours, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Charles Ginésy, Daniel Goulet, Alain Gournac, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Christian de La Malène, Lucien Lanier, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Guy Lemaire, Bernard Murat, Paul Natali, Mme Nelly Olin, MM. Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Jacques Peyrat, Jean-Jacques Robert, Jean-Pierre Schosteck, Martial Taugourdeau et René Trégouët une proposition de loi visant à reconnaître la valeur probatoire d'un message électronique et de sa signature.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 246, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

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DÉPÔT D'UNE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu, en application de l'article 73 bis, alinéa 8, du règlement, une résolution, adoptée par la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sur la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen sur l'établissement de nouvelles perspectives financières pour la période 2000-2006 (E-1049) et sur le document de travail de la Commission : accord interinstitutionnel sur la discipline budgétaire et l'amélioration de la procédure budgétaire (n° E-1128).
Cette résolution sera imprimée sous le n° 249 et distribuée.

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DÉPÔT DE RAPPORTS

M. le président. J'ai reçu de M. Guy Cabanel un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi constitutionnelle, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes (n° 228, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 247 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Paul Amoudry un rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur le projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (n° 153, 1998-1999).
Le rapport sera imprimé sous le n° 248 et distribué.

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ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 4 mars 1999 :
A dix heures :
1. Discussion en deuxième lecture du projet de loi constitutionnelle (n° 228, 1998-1999), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes.
Rapport (n° 247, 1998-1999) de M. Guy Cabanel, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Aucune inscription de parole dans la discussion générale de ce projet de loi n'est plus recevable.
Délai limite pour le dépôt des amendements : à l'issue de la discussion générale.
Scrutin public ordinaire de droit lors du vote sur l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.
A quinze heures et éventuellement, le soir :
2. Questions d'actualité au Gouvernement.
3. Suite de l'ordre du jour du matin.

Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements



Propositions de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à inciter au respect des droits de l'enfant dans le monde, notamment lors de l'achat des fournitures scolaires (n° 80, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 8 mars 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (n° 153, 1998-1999) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 9 mars 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 9 mars 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. André Jourdain relative au multisalariat en temps partagé (n° 125, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 mars 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jacques Oudin et plusieurs de ses collègues visant à modifier l'article L. 255 du code électoral (n° 208, 1998-1999) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 mars 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures quarante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





COMMUNICATION RELATIVE À LA CONSULTATION
DES ASSEMBLÉES TERRITORIALES

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 2 mars 1999, relative à la consultation de l'assemblée territoriale de la Polynésie française sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et l'Azerbaïdjan sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements.
Ce document a été transmis à la commission compétente.

NOMINATIONS DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN

M. Henri Revol a été nommé rapporteur du projet de loi n° 243 (1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité.

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES

M. Paul Masson a été nommé rapporteur du projet de loi n° 229 (1998-1999) autorisant la ratification du protocole établissant, sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne et de l'article 41, paragraphe 3, de la convention Europol, les privilèges et immunités d'Europol, des membres de ses organes, de ses directeurs adjoints et de ses agents.

COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 152 (1997-1998) de Mme Hélène Luc relative à l'élection sénatoriale.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 209 (1997-1998) de M. Jean-Michel Baylet relative au mode d'élection des sénateurs.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 458 (1997-1998) de M. Guy Allouche modifiant des dispositions du code électoral relatives à l'élection des sénateurs.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 460 (1997-1998) de M. Guy Allouche tendant à modifier le tableau n° 6 annexé à l'article L. 279 du code électoral fixant le nombre de sénateurs représentant les départements, ainsi que le tableau n° 5 annexé à l'article LO 276 du code électoral relatif à la répartition des sièges de sénateurs entre les séries.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi n° 230 (1998-1999) de M. Henri de Raincourt modifiant le mode d'élection des sénateurs.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 54 (1997-1998) de Mme Hélène Luc tendant à modifier le nombre de sénateurs élus dans les départements.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 459 (1997-1998) de M. Guy Allouche tendant à modifier le nombre de sénateurs élus dans les départements et à abaisser l'âge d'éligibilité des sénateurs.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 496 (1997-1998) de Mme Hélène Luc tendant à abaisser l'âge d'éligibilité des sénateurs.
M. Paul Girod a été nommé rapporteur de la proposition de loi organique n° 231 (1998-1999) de M. Henri de Raincourt abaissant l'âge d'éligibilité au Sénat.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Budget des hôpitaux publics

476. - 3 mars 1999. - M. Dominique Leclerc appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le budget des hôpitaux publics et, en particulier, sur l'évolution de la dotation budgétaire des hôpitaux de la région Centre pour 1999. La circulaire ministérielle du 26 novembre 1998, fixant l'évolution des dotations des hôpitaux pour 1999, annonce une orientation générale inscrivant la campagne budgétaire dans le cadre de la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire et un objectif prioritaire visant à concentrer l'effort de réduction des inégalités sur les régions qui en ont le plus besoin. Le SROS implique, outre une planification à moyen terme, la redéfinition des missions et objectifs des établissements dans le cadre de contrats négociés avec l'agence régionale et une recherche de complémentarité dans le cadre de contrats inter-établissements. Or, en raison de l'insuffisance de la dotation budgétaire régionale pour 1999, il s'avère que la reconduction seule des moyens courants et dépenses imposées par les normes sécuritaires consommera la totalité de l'enveloppe et enlèvera toute possibilité de mener des actions planifiées et contractualisées. C'est pourquoi il lui demande quels moyens le Gouvernement entend mettre en oeuvre afin de donner aux hôpitaux de la région Centre la possibilité d'appliquer les orientations fixées par circulaire ministérielle.