Séance du 2 mars 1999






SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Dépôt de rapports du Gouvernement (p. 1 ).

3. Code de justice militaire. - Adoption d'un projet de loi (p. 2 ).
Discussion générale : MM. Alain Richard, ministre de la défense ; René Garrec, rapporteur de la commission des lois ; Serge Vinçon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères ; Jean-Luc Bécart.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er. - Adoption (p. 3 )

Article 2 (p. 4 )

Amendements n°s 1 et 2 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements. - Adoption de l'article modifié.

Article 2 bis (p. 5 )

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Articles 2 ter et 2 quater. - Adoption (p. 6 )

Article 3 (p. 7 )

Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 3 bis (p. 8 )

Amendements identiques n°s 5 de la commission et 42 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 4 (p. 9 )

Amendements identiques n°s 6 de la commission et 43 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre. - Adoption des deux amendements rédigeant l'article.

Article 5 (p. 10 )

Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 5 bis à 5 quater. - Adoption (p. 11 )

Article 5 quinquies (p. 12 )

Amendement n° 8 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 sexies. - Adoption (p. 13 )

Article 5 septies (p. 14 )

Amendement n° 9 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 5 octies et 5 nonies. - Adoption (p. 15 )

Article 5 decies (p. 16 )

Amendements n°s 10 et 11 de la commission. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 5 undecies. - Adoption (p. 17 )

Article 6 (p. 18 )

Amendement n° 12 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 6 bis et 6 ter. - Adoption (p. 19 )

Article 7 (p. 20 )

Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 8 et 9. - Adoption (p. 21 )

Article 10 (p. 22 )

Amendement n° 14 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles 11 et 12. - Adoption (p. 23 )

Article 13 (p. 24 )

Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 14 à 16. - Adoption (p. 25 )

Article 17 (p. 26 )

Amendement n° 16 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 18. - Adoption (p. 27 )

Article 19 (p. 28 )

Amendements n°s 17 à 19 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.

Articles 20 à 23. - Adoption (p. 29 )

Article 24 (p. 30 )

Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 25 (p. 31 )

Amendement n° 21 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 26. - Adoption (p. 32 )

Article 27 (p. 33 )

Article 202 du code de justice militaire
(p. 34 )

Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.

Article 203 du code précité (p. 35 )

Amendement n° 23 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.

Article 204 du code précité (p. 36 )

Amendement n° 24 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Adoption de l'article 27 modifié.

Article additionnel après l'article 27 (p. 37 )

Amendement n° 25 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 28 (p. 38 )

Amendement n° 26 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 29 (p. 39 )

Amendement n° 27 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 30. - Adoption (p. 40 )

Article 31 (p. 41 )

Amendement n° 28 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 32. - Adoption (p. 42 )

Article 32 bis (p. 43 )

Amendement n° 29 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 33 à 35. - Adoption (p. 44 )

Article 36 (p. 45 )

Amendement n° 30 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 37 (p. 46 )

Amendement n° 31 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 37 bis et 37 ter. - Adoption (p. 47 )

Article 38 (p. 48 )

Amendements identiques n°s 32 de la commission et 44 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 39 (p. 49 )

Amendements identiques n°s 33 de la commission et 45 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 40 (p. 50 )

Amendements identiques n°s 34 de la commission et 46 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Article 41. - Adoption (p. 51 )

Article 42 (supprimé)

Articles 43 et 44. - Adoption (p. 52 )

Article 45 (p. 53 )

Amendement n° 35 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article 45 bis. - Adoption (p. 54 )

Article 46 (supprimé) (p. 55 )

Amendements identiques n°s 37 de la commission et 47 rectifié de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre. - Adoption des deux amendements rétablissant l'article.

Article 47. - Adoption (p. 56 )

Article 48 (p. 57 )

Amendement n° 36 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles 49 et 50. - Adoption (p. 58 )

Article 51 (p. 59 )

Amendement n° 38 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 51 (p. 60 )

Amendements n°s 39 de la commission et 48 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 39 ; adoption de l'amendement n° 48 insérant un article additionnel.

Article 52 (supprimé)

Article 52 bis (p. 61 )

Amendements identiques n°s 40 de la commission et 49 de M. Vinçon, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article 53 (p. 62 )

Amendement n° 41 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Vote sur l'ensemble (p. 63 )

MM. Guy Penne, Jacques Machet, le ministre.
Adoption du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance (p. 64 )

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

4. Message de M. le Président de la République (p. 65 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 66 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

5. Chèques-vacances. - Adoption d'un projet de loi (p. 67 ).
Discussion générale : Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme ; MM. Paul Blanc, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Bernard Joly, Mme Odette Terrade, M. Claude Domeizel.
Mme le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.

Article 1er. - Adoption (p. 68 )

Article additionnel après l'article 1er (p. 69 )

Amendement n° 10 de Mme Terrade. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 2 (p. 70 )

Amendements n°s 1 rectifié de la commission et 8 du Gouvernement. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, M. Claude Domeizel, Mme Odette Terrade. - Adoption de l'amendement n° 1 rectifié rédigeant l'article, l'amendement n° 8 devenant sans objet.

Article 3 (p. 71 )

Amendement n° 2 rectifié de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, MM. Jean Chérioux, Guy Fischer, Claude Domeizel, Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 4 (p. 72 )

Amendement n° 3 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le secrétaire d'Etat, Odette Terrade. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Articles additionnels après l'article 4 (p. 73 )

Amendement n° 4 rectifié de la commission ; amendements identiques n°s 7 de M. Domeizel et 11 de Mme Terrade. - MM. le rapporteur, Claude Domeizel, Mmes Odette Terrade, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement n° 4 rectifié insérant un article additionnel, les amendements n°s 7 et 11 devenant sans objet.
Amendement n° 5 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 12 de Mme Terrade. - MM. Guy Fischer, le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 5. - Adoption (p. 74 )

Articles additionnels après l'article 5 (p. 75 )

Amendement n° 13 de Mme Terrade. - Mme Odette Terrade, M. le rapporteur, Mme la secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 6 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le secrétaire d'Etat, MM. Claude Domeizel, Jean Chérioux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Vote sur l'ensemble (p. 76 )

MM. Guy Fischer, Claude Domeizel, Jacques Machet, André Jourdain, François Trucy.
Adoption du projet de loi.

6. Dépôt d'une question orale avec débat (p. 77 ).

7. Texte soumis en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 78 ).

8. Dépôts rattachés pour ordre au procès-verbal de la séance du 18 février 1999 (p. 79 ).

9. Ordre du jour (p. 80 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

présidence de m. jacques valade
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.)

1

procès-verbal

M. le président. Le procès-verbal de la séance du jeudi 18 février 1999 a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.

2

dépôt de rapports du gouvernement

M. le président. M. le président a reçu de M. le Premier ministre :
- le rapport sur le bilan de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement et à la mise en valeur du littoral, établi en application de l'article 41 de cette loi ;
- le rapport sur les transferts transfrontaliers de déchets pour 1995, établi en application de l'article 23-4 de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.

3

code de justice militaire

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 490, 1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale. (Rapport n° 225 [1998-1999] et avis n° 226 [1998-1999]).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale que je vous présente aujourd'hui au nom du Gouvernement, et qui a été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, vise à rapprocher la procédure suivie devant la juridiction militaire du droit commun procédural.
Il s'inscrit dans le cadre plus vaste de la réforme de la justice dont les principales orientations ont été développées par Mme la garde des sceaux en juin 1998.
En procédant à cette adaptation législative, nous satisfaisons à un impératif fixé par l'article 229 de la loi du 4 janvier 1993, qui prévoit que les dispositions du nouveau code de procédure pénale seront applicables aux procédures de la compétence des tribunaux militaires.
Le délai que fixait cet article a d'ailleurs été dépassé, car cette transposition a été reportée à trois reprises : deux fois au cours de la législature précédente et une fois lorsque le Parlement a refusé qu'il y soit procédé par voie d'ordonnance, comme le proposait le Gouvernement dans un souci de simplification, à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la réforme du service militaire.
Il convient donc maintenant de mener cette réforme à son terme.
Ce projet s'inscrit également dans une volonté collective de renouveler le lien unissant la nation à son armée, en contribuant à ne conserver, parmi les règles de toute nature relatives aux armées, que les dispositions spécifiques nécessaires à l'état de militaire ou à l'emploi des forces.
Avant de vous présenter les principales dispositions du projet de loi, je voudrais rappeler quelques caractéristiques essentielles des règles de procédure pénale spécifiques au traitement des affaires pénales militaires, règles issues de la loi du 21 juillet 1982.
Le législateur d'alors a conservé la distinction, traditionnelle, fondée sur l'idée selon laquelle les affaires pénales militaires doivent être jugées différemment en temps de paix et en temps de guerre.
En effet, en temps de guerre, l'impératif de protection de la nation devant le danger l'emporte sur toute autre considération pour justifier la mise en place de juridictions militaires destinées à réprimer les infractions commises par les militaires et les infractions portant atteinte aux intérêts fondamentaux du pays.
En revanche, le législateur a estimé que, en temps de paix, il devait n'y avoir qu'une seule justice répressive, en conformité avec le principe constitutionnel d'égalité devant la loi. Cette considération l'a conduit à supprimer les tribunaux permanents des forces armées pour confier le jugement des infractions militaires à des juridictions de droit commun spécialisées.
A titre secondaire, en temps de paix, la loi distingue les infractions commises sur le territoire national de celles qui sont commises hors de ce territoire.
Les infractions commises sur le territoire national sont soumises, depuis le 1er janvier 1983, à des juridictions de droit commun spécialisées qui sont, dans le ressort de chaque cour d'appel, un tribunal de grande instance et une cour d'assises désignés par décret.
Ces juridictions appliquent la procédure pénale de droit commun sous réserve de quelques particularités : le procureur de la République apprécie librement l'opportunité d'engager l'action publique, mais son acte de poursuite doit, sauf exception, être précédé d'une dénonciation ou d'un avis du ministre de la défense ; la mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée n'est possible qu'en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité permanente, ce qui signifie que la constitution de partie civile n'est pas de droit commun.
En matière militaire, les juridictions de droit commun spécialisées connaissent des crimes et délits spécifiquement militaires, c'est-à-dire prévus par le code de justice militaire, ainsi que des crimes et délits de droit commun commis par des militaires dans l'exécution du service.
Elles sont compétentes à l'égard des militaires de carrière, des militaires servant en vertu d'un contrat et de ceux qui effectuent leur service national. La compétence de ces juridictions spécialisées s'étend également aux personnes majeures complices ou coauteurs d'infractions commises par des militaires.
S'agissant des infractions commises hors du territoire national, la situation est plus complexe.
Ces infractions peuvent tout d'abord être jugées par des juridictions militaires établies, par décret, auprès des forces stationnant ou opérant à l'étranger. Il en est ainsi pour les forces françaises stationnées en Allemagne.
En outre, pour satisfaire aux accords de défense liant la France à huit Etats africains et donnant compétence aux juridictions militaires françaises, la loi du 21 juillet 1982 a créé le tribunal des forces armées siégeant à Paris.
Enfin, lorsque aucun tribunal n'est mis en place, les militaires sont justiciables de la juridiction de droit commun spécialisée en France, qui est généralement celle du lieu de situation de leur unité d'origine.
Si les juridictions de droit commun spécialisées appliquent le code de procédure pénale, les juridictions militaires appliquent, quant à elles, les règles de procédure prévues par le code de justice militaire, qui sont aujourd'hui assez éloignées du droit commun. A cet égard, quelques particularités méritent d'être signalées.
Tout d'abord, en cas de dénonciation d'une infraction par le ministre de la défense ou l'autorité militaire habilitée, le commissaire du Gouvernement est tenu de mettre en mouvement l'action publique : il n'a donc pas à apprécier l'opportunité des poursuites.
Ensuite, le militaire mis en examen peut être placé en détention, avant même tout acte de poursuite, en vertu d'un ordre d'incarcération du commissaire du Gouvernement, valable pour une durée de cinq jours.
Enfin, les jugements rendus par les juridictions militaires, notamment en matière délictuelle, ne sont pas susceptibles d'appel.
Pour satisfaire à notre volonté politique d'alignement sur le droit commun, ces spécificités devaient être remises en cause.
Par ailleurs, il nous fallait également nous conformer aux prescriptions de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne permettent pas de telles exceptions.
Je conclurai ce rappel du droit existant en précisant que les règles de procédure pénale applicables en temps de guerre ne sont pas modifiées par le présent projet de loi. Les circonstances exceptionnelles du temps de guerre, la nécessité de la défense de la nation justifient toujours autant, sans autre considération, l'application de règles spécifiques. Chacun sait qu'il en est de même dans tous les Etats démocratiques.
La réforme que j'ai l'honneur de soumettre à votre examen ne vise donc que le temps de paix. Ses objectifs sont simples et s'inscrivent dans le mouvement de réforme des forces armées entrepris depuis 1997.
Il s'agit tout d'abord de poursuivre l'effort de rapprochement entre la procédure pénale militaire et le droit commun.
Le présent projet de loi s'inscrit dans le prolongement de la réforme de 1982, qui avait déjà réduit les particularismes des règles pénales spécifiques aux juridictions militaires.
Avec la présente réforme, les personnes justiciables des juridictions des forces armées bénéficieront des garanties du droit commun, notamment des dispositions concernant l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue et des dispositions relatives à la détention provisoire et à l'instruction.
A l'avenir, du fait de la nouvelle rédaction du code de justice militaire, les dispositions relatives au renforcement de la présomption d'innocence et à la présence de l'avocat dès le début de la garde à vue seront applicables de plein droit dès leur entrée en vigueur pour le droit commun.
Ce rapprochement substantiel des procédures a conduit l'Assemblée nationale, avec l'approbation du Gouvernement, à unifier les terminologies applicables devant les juridictions militaires et de droit commun. Sont ainsi supprimées dans le projet de loi les désignations « chambre de contrôle de l'instruction » et « commissaire du Gouvernement », qui correspondaient respectivement à la « chambre d'accusation » et au « procureur de la République ».
Je veux par ailleurs souligner que le projet de loi va plus loin que la seule incorporation des règles du code de procédure pénale modifié dans la procédure militaire. Ce texte permet dorénavant l'examen successif, au fond, de la même affaire par deux juridictions d'un degré différent. L'adoption de la règle du double degré de juridiction représente bien sûr, aux yeux du Gouvernement, un acquis important. Cette règle est en outre, comme je l'ai rappelé, conforme à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
L'adoption de ce projet de loi permettra, en outre, d'assurer la cohérence générale des dispositions relatives à l'organisation juridictionnelle, tout en conservant des règles minimales destinées à garantir la stabilité et la spécificité de l'institution militaire.
Cela est garanti par une modification substantielle des règles de compétence, puisque le Gouvernement, suivant en cela la proposition de la commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale, vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, d'adopter le principe de la compétence exclusive du tribunal aux armées de Paris pour les infractions commises hors du territoire national, avec toutefois la possibilité, pour le tribunal, d'instituer des chambres détachées auprès des forces stationnant ou opérant hors de France.
A la suite de vote de la loi, le tribunal « forces armées de Baden-Baden » sera en effet supprimé par décret. Nous pourrons ainsi satisfaire le souhait exprimé par nos partenaires allemands de voir disparaître cette juridiction spécifique, qui correspondait à un autre contexte historique.
Ne demeureront que les dispositions de procédure strictement nécessaires à garantir la spécificité du métier des armes, la stabilité des armées et la protection des intérêts de la défense. Il en va ainsi des règles permettant d'instaurer le huis clos et l'absence de jury populaire dans le cas où les débats risqueraient d'entraîner la divulgation d'un secret de la défense nationale. Il en va de même des règles imposant de recueillir l'avis préalable du ministre de la défense avant toute mise en mouvement de l'action publique, que celle-ci intervienne sur l'initiative du ministère public ou de la partie lésée.
Je voudrais souligner brièvement l'importance que revêtent ces spécificités, que nous souhaitons maintenir. Notre responsabilité collective est, nul ne l'ignore, de veiller aux intérêts de la défense. Elle présente des particularités qu'il nous faut apprécier sereinement, et qui peuvent justifier, selon les cas, certaines dérogations aux procédures de droit commun. Il en va particulièrement ainsi pour l'avis du ministre de la défense, qui ne lie d'ailleurs pas ensuite les juges dans leur appréciation. Cet avis est une disposition protectrice des droits de l'homme et une garantie pour le justiciable militaire.
D'une part, les droits statutaires des militaires comportent des restrictions par rapport à ceux des autres citoyens. Ainsi, les militaires n'ont pas la liberté d'association professionnelle et leur expression est strictement encadrée. Donc, en cas d'infraction reprochée à un militaire, l'avis du ministre permet d'assurer la sauvegarde des intérêts du personnel militaire en portant à la connaissance de la justice l'ensemble des éléments de l'espèce, notamment le contexte professionnel.
D'autre part, il est très important que le ministère public ne soit pas le seul à pouvoir obtenir l'avis du ministre. Ce droit doit être ouvert également lorsque c'est la personne lésée qui a mis en mouvement l'action publique. Il en va particulièrement ainsi alors que les missions confiées par l'autorité publique aux militaires peuvent revêtir un caractère sensible.
Par ailleurs, cette procédure particulière en temps de paix qu'est l'avis du ministre préfigure la procédure du temps de guerre, mais aussi du temps de crise : mobilisation, mise en garde, état d'urgence, notamment. Le ministre de la défense retrouve alors, dans ces différents cas, des prérogatives essentielles dans le déclenchement de l'action publique devant la justice. Il est fondamental de ne pas compromettre l'exercice de ces prérogatives exceptionnelles en supprimant en temps de paix l'avis du ministre et donc tout lien entre le monde militaire et le monde judiciaire.
Là encore, il est de notre responsabilité collective de ne pas hypothéquer le futur et d'avoir toujours à l'esprit la sauvegarde des intérêts fondamentaux du pays. Comme le disait, en 1982, lors de la discussion du précédent projet de loi, M. Robert Badinter, alors garde des sceaux, il est nécessaire de veiller à ne pas ouvrir la possibilité d'entreprises de déstabilisation de l'armée républicaine. Nul ne sait si cette préoccupation ne retrouvera pas, dans l'avenir, toute son actualité.
Au regard de ces particularismes, l'Assemblée nationale a inséré un articles 45 bis qui vise à étendre les cas de constitution de partie civile. Le Gouvernement approuve cet article qui ne remet pas en cause l'avis du ministre. Votre commission des lois et votre commission de la défense et des forces armées souhaitent confirmer la place de l'avis ministériel dans un article 46. Le Gouvernement n'y est pas opposé, car cela ne constituerait qu'une précision par rapport à l'article 45 bis .
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous présente aujourd'hui un projet de loi visant à mettre en conformité le code de justice militaire avec les progrès du droit positif. Les travaux préparatoires particulièrement enrichissants de la Haute Assemblée, et j'en remercie les rapporteurs MM. René Garrec et Serge Vinçon, font apparaître que le Gouvernement et le Sénat apprécient de la même manière la portée du texte qui vous est soumis et l'utilité qu'il revêt. Les propositions d'améliorations que nous allons examiner, sur l'initiative du Sénat, apportent, sur de nombreux points, des précisions qui me paraissent utiles.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Très bien !
M. Alain Richard, ministre de la défense. Mesdames, messieurs les sénateurs, c'est avec la conviction profonde que ce projet de loi représente une avancée pour les libertés publiques et la qualité du lien entre l'armée et la nation que je souhaite que la Haute Assemblée veuille bien l'adopter. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis le mandement de Montdidier, par lequel Philippe VI a soustrait, en 1347, aux juridictions ordinaires les sergents et soldats employés à la garde des châteaux, la France a connu une multitude de juridictions militaires, avant que la loi du 21 juillet 1982, dont notre regretté collègue Marcel Rudloff fut le rapporteur au Sénat, conduise à la disparition des juridictions militaires pour le jugement des infractions commises sur le territoire de la République.
Avant d'en souligner les principales caractéristiques et de présenter la position de la commission des lois, je rappellerai brièvement les règles qui s'appliquent actuellement aux justiciables militaires.
En pratique, trois cas doivent être distingués : les infractions commises en temps de paix sur le territoire de la République, les infractions commises - en temps de paix toujours - hors du territoire de la République, enfin les infractions commises en temps de guerre.
Evoquons d'abord les infractions commises en temps de paix sur le territoire de la République. Depuis la loi de 1982, des juridictions de droit commun spécialisées en matière militaire connaissent des infractions militaires et des infractions de droit commun commises par des militaires dans l'exécution du service. Par ailleurs, les infractions de droit commun commises en dehors de l'exécution du service relèvent tout naturellement des juridictions de droit commun.
La procédure applicable devant ces juridictions est très proche des règles du droit commun. Ainsi, le procureur de la République est compétent pour mettre en mouvement l'action publique. Aucun militaire ne participe au jugement des affaires portées devant les juridictions spécialisées. Les jugements rendus par les tribunaux correctionnels spécialisés sont susceptibles d'appel.
La loi de 1982 a en outre ouvert aux victimes le droit d'exercer l'action civile tendant à la réparation du dommage causé par l'infraction. Toutefois, la loi avait maintenu l'interdiction faire aux victimes de mettre en mouvement l'action publique. Une loi de 1992 est venue tempérer l'interdiction faite à la partie lésée de mettre en mouvement l'action publique. Cette mise en mouvement de l'action publique est désormais possible « en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité permanente ».
Quelques spécificités subsistent dans la procédure applicable devant les juridictions spécialisées.
Ainsi, le procureur de la République doit demander l'avis du ministre de la défense ou de l'autorité militaire habilitée préalablement à tout acte de poursuite, sauf en cas de crime ou de délit flagrant. Enfin, les militaires doivent être détenus dans des locaux séparés, qu'ils soient prévenus ou condamnés. En outre, le contrôle judiciaire ne leur est pas applicable.
La situation est plus complexe en ce qui concerne les infractions commises par des militaires hors du territoire de la République.
En principe, des tribunaux aux armées établis hors du territoire de la République sont compétents pour le jugement des infractions commises par les militaires et assimilés lorsque des forces stationnent ou opèrent hors du territoire. En pratique, un seul tribunal aux armées existe aujourd'hui, le tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne, dont le siège est à Baden-Baden, autrefois tribunal de Landau.
Quand aucun tribunal aux armées n'a été établi auprès d'une force stationnant à l'étranger, les juridictions spécialisées de droit commun sont en principe compétentes pour connaître des infractions commises par des militaires hors du territoire de la République.
Ces règles de compétence sont toutefois rendues plus complexes par l'existence d'un tribunal des forces armées à Paris. Celui-ci connaît des infractions commises sur un territoire étranger par des militaires français si des accords internationaux prévoient une attribution expresse de compétence au profit des juridictions militaires françaises et si aucune juridiction militaire n'a été établie sur ce territoire. De tels accords - M. le ministre l'a indiqué tout à l'heure - ont été conclu avec plusieurs pays, notamment le Burkina, la Côte d'Ivoire et Madagascar.
La procédure applicable devant les juridictions militaires comporte encore de nombreuses particularités, la plus importante et la plus choquante étant l'absence d'appel.
Enfin, pour mémoire, j'évoquerai brièvement le droit applicable en temps de guerre. Il est très dérogatoire par rapport au droit commun puisque des juridictions militaires spécifiques, les tribunaux territoriaux des forces armées et les tribunaux militaires aux armées, peuvent être établies, devant lesquelles des procédures simplifiées sont applicables.
J'en viens au projet de loi qui nous est soumis, pour souligner tout d'abord qu'il était nécessaire. En effet, l'article 229 de la loi du 4 janvier 1993 visant à modifier le code de procédure pénale prévoyait que les dispositions de cette loi seraient rendues applicables aux procédures de la compétence des juridictions des forces armées à compter du 1er janvier 1995. Comme l'a rappelé M. le ministre, cette échéance a été reportée à trois reprises, d'abord au 1er mars 1996, ensuite au 1er janvier 1997, enfin au 1er janvier 1999.
La justice militaire attend depuis longtemps, mais son heure est enfin venue.
Le projet de loi tend, en premier lieu, à rapprocher les règles applicables devant les juridictions militaires des règles de droit commun de procédure pénale. Ce texte permettra aux justiciables des juridictions militaires de bénéficier des garanties offertes aux autres justiciables, en particulier en ce qui concerne la garde à vue, la détention provisoire et le droit d'appel. Le projet aura en outre pour conséquence que, à l'avenir, l'ensemble des réformes de la procédure pénale seront applicables aux justiciables militaires.
L'évolution proposée est donc très importante, puisqu'elle conduira à un rapprochement sensible des règles applicables en temps de paix aux militaires en cas d'infraction hors du territoire de la République de celles qui leur sont applicables en cas d'infraction sur le territoire de la République.
En revanche, le droit applicable en temps de guerre ne fait l'objet d'aucune modification dans le projet de loi.
Indépendamment de l'objectif consistant à rapprocher la justice militaire du droit commun, le Gouvernement a souhaité apporter, dans un souci de simplification, certaines modifications aux règles applicables pour les infractions commises par des militaires tant sur le territoire que hors du territoire.
Ainsi, le projet de loi prévoit en particulier la compétence du tribunal aux armées de Paris pour l'ensemble des infractions commises hors du territoire par des militaires. Cette évolution conduira à une grande simplification du droit actuel en ce qui concerne la compétence des juridictions.
L'Assemblée nationale a apporté de nombreuses modifications au projet de loi.
Elle a en particulier décidé de supprimer la possibilité d'établir des tribunaux aux armées auprès des forces stationnant ou opérant à l'étranger en temps de paix, au motif qu'un seul tribunal avait été établi jusqu'à présent et qu'il allait être prochainement supprimé. En contrepartie, elle a accepté, à la demande du Gouvernement, que des chambres du tribunal aux armées de Paris, appelé dans ces conditions à devenir la seule juridiction compétente pour les infractions commises par des militaires hors du territoire national, puissent être éventuellement détachées auprès des forces stationnant ou opérant à l'étranger.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a apporté une modification très importante aux conditions de mise en mouvement de l'action publique par la personne lésée. Actuellement, l'action publique n'est possible qu'en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité permanente. L'Assemblée nationale a élargi cette possibilité en supprimant, toute restriction au droit, pour la partie lésée, de mettre en mouvement l'action publique. Elle n'a toutefois prévu la mise en mouvement de l'action publique que par la voie de la plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction, excluant ainsi la voie de la citation directe.
A la demande du Gouvernement, l'Assemblée nationale a accepté que cette mesure n'entre en vigueur que le 1er janvier 2002, c'est-à-dire lorsque l'armée ne comportera plus d'appelés. Le Gouvernement a en effet exprimé la crainte que des personnes refusant de participer à des exercices qu'elles jugent périlleux puissent déposer plainte avec constitution de partie civile en invoquant le délit de mise en danger d'autrui.
J'en viens à la position de la commission des lois.
Tout d'abord, la commission ne peut que se féliciter du fait que le présent projet de loi soit enfin présenté, alors que les justiciables militaires auraient dû bénéficier depuis longtemps des garanties offertes aux autres justiciables.
Toutefois, elle regrette que le projet de loi soit en quelque sorte inachevé. Le rapprochement considérable opéré entre le droit applicable pour les infractions commises hors du territoire et le droit applicable pour les infractions commises sur le territoire aurait pu justifier le regroupement de l'ensemble des dispositions applicables en temps de paix au sein du code de procédure pénale, cependant que le code de justice militaire n'aurait plus concerné que le temps de guerre.
En ce qui concerne le droit applicable en temps de guerre, le Gouvernement a choisi de ne lui apporter aucune modification. Toutefois, la suppression ou la modification de dispositions communes aux temps de paix et de guerre a conduit à une solution peu satisfaisante. En effet, le droit applicable en temps de guerre sera le code de justice militaire dans sa rédaction précédant le présent projet de loi. En cas de renvoi au code de procédure pénale, le droit applicable sera le code de procédure pénale dans sa rédaction précédant l'adoption de la loi du 4 janvier 1993.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela ne facilitera pas la compréhension et la lisibilité du droit applicable. Il eût été préférable de procéder à une recodification à droit constant.
L'Assemblée nationale a d'ailleurs invité le Gouvernement, dans un article additionnel au projet de loi, à procéder à une refonte du code de justice militaire avant le 1er janvier 2002. Afin que la prochaine réforme puisse tenir compte des premiers effets de la professionnalisation des armées, la commission des lois vous propose de reporter cette date au 31 décembre 2002.
Sur le fond, la commission des lois approuve les orientations de ce texte, qui favorisera une extension des droits des justiciables et simplifiera les règles applicables. Les modifications qu'elle propose ont le plus souvent pour objet d'aller plus loin encore dans le sens d'une simplification et d'une unification de la justice militaire.
Ainsi, la commission des lois a estimé souhaitable d'exclure du code de justice militaire toute référence au tribunal de Baden-Baden, dans la mesure où la suppression de cette juridiction est envisagée dans un délai très bref. Une disposition transitoire à la fin du projet de loi permettra de prévoir le sort des affaires relevant actuellement de la compétence du tribunal de Baden-Baden.
Par ailleurs, la commission des lois a adopté des amendements de coordination, afin de prendre pleinement en compte le fait que le tribunal aux armées de Paris est appelé à devenir la seule juridiction militaire en temps de paix. Elle a en particulier prévu des dispositions spécifiques pour la composition du tribunal lorsqu'il sera appelé à juger des crimes.
Sur un point seulement, en définitive, la commission des lois est en désaccord avec l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale a souhaité étendre la possibilité pour la partie lésée de mettre en mouvement l'action publique, qui n'est possible aujourd'hui qu'en cas de décès, de mutilation ou d'infirmité permanente. Elle a donc prévu sans restrictions la possibilité de mettre en mouvement l'action publique par la voie de la plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction. Elle a par ailleurs supprimé l'article 46 du projet de loi prévoyant une demande d'avis du ministre de la défense en cas de mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée.
D'après les informations que j'ai recueillies, les procureurs, actuellement, sollicitent l'avis du ministre de la défense lorsque la partie lésée met en mouvement l'action publique.
La commission des lois pense que cet avis peut avoir une utilité pour expliquer le contexte des infractions. Il faut rappeler que les militaires n'ont pas de représentation syndicale et qu'ils ont un devoir de réserve très strict. Rien ne permet d'affirmer que l'avis du ministre de la défense sur une procédure fait des militaires des justiciables protégés. Il faut rappeler que cet avis ne lie pas et qu'il n'interrompt pas le cours de la justice. Surtout, il n'y a guère de raison de prévoir un avis du ministre lorsque le procureur met en mouvement l'action publique et d'exclure cet avis lorsque la partie lésée met en mouvement l'action publique.
Aussi, la commission des lois vous propose d'accepter l'élargissement de la mise en mouvement de l'action publique par la partie lésée décidé par l'Assemblée nationale et de prévoir explicitement un avis du ministre de la défense, afin d'éviter toute ambiguïté en cette matière.
Telles sont, mes chers collègues, les observations que je souhaitais formuler sur ce texte, qui mérite d'être adopté rapidement, dans la mesure où il offre à certains justiciables des garanties importantes dont ils ne bénéficient pas, en particulier le droit d'appel.
En conclusion, je ferai observer que l'on cite souvent, dans les débats sur la justice, la phrase suivante de Napoléon Bonaparte : « La justice est une en France : on est citoyen français avant d'être soldat. » La commission des lois souscrit à cette philosophie et approuve donc l'esprit de ce projet de loi, qui marque un nouveau rapprochement entre la situation des justiciables militaires et celle des autres justiciables.
Il convient toutefois de garder à l'esprit l'utilité que peuvent avoir certaines spécificités en ce qui concerne les justiciables militaires, surtout lorsqu'elles n'entravent en rien le cours de la justice. La volonté de concilier unité de la justice et prise en compte du caractère propre de l'institution militaire a inspiré la commission des lois dans les propositions qu'elle vous soumet.
Enfin, je tiens personnellement à remercier M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, pour la qualité du travail accompli tant par cette dernière que par lui-même. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'origine du projet de loi qui nous réunit aujourd'hui, projet dont la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a été saisie pour avis, se trouve la nécessité d'adapter le droit pénal militaire aux modifications apportées au code de procédure pénale par la loi du 4 janvier 1993.
Mais ce projet de loi va plus loin. Il vise, en effet, à poursuivre la mise à jour du droit pénal militaire par rapport aux évolutions du droit pénal général, comme l'a très justement souligné notre collègue René Garrec, rapporteur de la commission des lois, que je tiens également à féliciter pour la qualité de son travail.
Ce projet de loi procède donc d'une logique d'harmonisation du droit pénal militaire par rapport au droit commun. Il satisfait sur ce point le principe exprimé par Napoléon et rappelé à l'instant par M. le rapporteur, selon lequel « on est citoyen avant d'être soldat ».
Les modifications du droit pénal militaire qui nous sont proposées maintiennent toutefois certaines spécificités du code de justice militaire et du code de procédure pénal destinées à tenir compte des contraintes particulières propres au métier des armes, principe auquel la commission des affaires étangères, de la défense et des forces armées souscrit.
Une autre motivation se trouve à l'origine du présent projet de loi : il s'agit de trouver une réponse pénale appropriée aux difficultés posées par l'impératif de projections des forces, défini par le Président de la République, qui peut introduire un accroissement significatif du nombre des militaires français engagés dans des opérations extérieures ou dans des opérations de maintien de la paix, sous l'égide des Nations unies.
De ce fait, le nombre d'infractions susceptibles d'être commises par des militaires - ou par des civils « à la suite » des forces - en dehors du territoire national peut être amené à augmenter.
Or, les règles de compétence en vigueur à l'égard des infractions commises par des militaires en dehors du territoire national sont d'une complexité telle que, en fonction du lieu de stationnement du régiment dont sont originaires les militaires en cause, la même infraction peut relever de juridictions différentes - chambres spécialisées des juridictions de droit commun ou tribunaux aux armées de Baden-Baden ou de Paris - appliquant, selon les cas, soit le code de procédure pénale, soit le code de justice militaire.
Le projet de loi vise ainsi, dans un souci d'équité et de bonne administration de la justice, à simplifier ces règles de compétence et à harmoniser les dispositions légales applicables aux infractions susceptibles d'être commises par des militaires à l'étranger.
Enfin, le projet de loi portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale ne concerne pas les dispositions valables pour le temps de guerre, qui s'appuient sur le recours à des tribunaux aux armées composés à la fois de magistrats civils et de juges militaires, appliquant des procédures simplifiées justifiées par des circonstances exceptionnelles.
Je souhaiterais maintenant commenter brièvement un aspect essentiel de la réforme de la justice militaire, même s'il ne concerne qu'indirectement le présent projet de loi, aspect qui a trait au rapport entre cette réforme et le lien armées-nation.
La réforme de la justice militaire peut, en effet, être présentée comme une contribution au rapprochement entre l'armée et la nation, car ce projet de loi vise à considérer le justiciable militaire avant tout comme un justiciable. A l'heure de la professionnalisation, il paraît essentiel, de l'avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, d'étendre explicitement aux militaires les mêmes droits que ceux que reconnaît le code de procédure pénale aux justiciables « civils », afin de contribuer à limiter l'isolement des militaires au sein de notre société.
Il serait regrettable, à l'évidence, que la professionnalisation aille de pair avec le maintien de procédures pénales dérogatoires à l'égard des militaires, non seulement parce qu'il s'agit d'éviter toute coupure entre l'armée et la société civile, mais aussi parce que la nation ne saurait confier une mission aussi importante que sa défense à une catégorie de citoyens qui ne bénéficierait pas de la plénitude des droits et garanties reconnus en France à tout justiciable.
En revanche, on ne saurait, à ce jour, prévoir de manière rigoureusement fiable l'incidence à venir de la professionnalisation sur l'évolution de la justice militaire, en ce qui concerne la nature des décisions de justice ou la nature des infractions commises par les militaires.
Il semble toutefois que devraient fortement diminuer, sinon cesser, les désertions et les mutilations volontaires, car ces infractions concernent essentiellement des appelés. Les accusations d'insoumission et de refus d'obéissance des objecteurs de conscience devraient, quant à elles, tomber d'elles-mêmes avec la suspension de la conscription.
Par ailleurs, le volume de l'activité de la justice militaire, qu'il s'agisse des tribunaux aux armées de Baden-Baden et de Paris ou des chambres spécialisées des juridictions de droit commun, devrait diminuer sensiblement, le nombre de justiciables devant passer, avec la réduction du format des armées, de plus de 573 000 personnes, en 1996, à 440 000 personnes, en 2002, en tenant compte des seuls personnels militaires et civils des armées, et non des membres des familles accompagnant un militaire à l'étranger.
Abordons maintenant plus précisément le projet de loi qui nous est soumis.
Je souhaite dire d'emblée que son champ d'application est limité, car il concerne, comme je le remarquais à l'instant, une population limitée à quelque 440 000 personnes à l'échéance de 2002 : 83 023 civils et 357 183 militaires.
En ce qui concerne le temps de paix, le projet de loi poursuit le rapprochement entre le droit pénal militaire et le droit commun.
De manière générale, le code de procédure pénale devient la règle pour le justiciable du droit pénal militaire, sous réserve de quelques spécificités dues à la nécessité évidente de tenir compte des contraintes de l'institution militaire. Ainsi, le droit d'appel est instauré pour tous. De même, les modifications récentes du code de procédure pénale en matière de garde à vue et de détention provisoire sont étendues aux justiciables du code de justice militaire.
L'autre objet de ce texte est de simplifier les règles de compétence dont la complexité est à l'origine de regrettables inégalités entre justiciables militaires. Le projet de loi propose ainsi de confier systématiquement au tribunal aux armées de Paris les infractions commises en dehors du territoire national. La simplicité de cette règle de compétence constitue un progrès évident, surtout pour une armée aujourd'hui conçue pour la projection.
Initialement, le projet de loi visait également à étendre les cas dans lesquels doit intervenir un avis du ministre de la défense, préalablement à tout acte de poursuite à l'encontre des justiciables militaires, à l'hypothèse où une victime lésée mettrait en mouvement l'action publique contre un justiciable militaire.
En ce qui concerne le temps de guerre, le projet de loi, dans le texte proposé par le Gouvernement, ne change rien aux dispositions du code de justice militaire.
Si le principe du statu quo à l'égard du temps de guerre est imparable, l'impératif de survie de la collectivité nationale devant, en cas de guerre, l'emporter sur toute autre considération, la méthode retenue est, en revanche, contestable. Le projet de loi, en effet, se borne, pour déterminer la loi applicable en temps de guerre, à renvoyer à la législation en vigueur avant qu'intervienne la loi dont nous discutons, pour ce qui est du code de justice militaire, et au code de procédure pénale antérieur à la loi de 1993. Cette formule rend difficilement compréhensible la loi applicable en temps de guerre, compte tenu des multiples renvois entre dispositions d'époques différentes qui caractérisent le droit pénal militaire. Le fait que l'hypothèse de la guerre paraisse de nos jours largement théorique ne justifie pas que l'on néglige la lisibilité du code de justice militaire.
J'en viens donc au texte qui nous est transmis, tel que l'Assemblée nationale l'a modifié.
En ce qui concerne le temps de guerre, l'Assemblée nationale propose de procéder à une refonte du code de justice militaire avant le 1er janvier 2002, au lieu de s'en tenir à une référence peu satisfaisante au droit en vigueur, selon le cas, avant 1993 ou 1999. Nos collègues ont donc eu raison de se soucier de la lisibilité des dispositions applicables en temps de guerre.
L'Assemblée nationale a également favorisé la poursuite du rapprochement entre le droit pénal militaire et le droit pénal général en proposant une nouvelle terminologie commune aux juridictions civiles et militaires, en prescrivant l'intervention d'un jury populaire en matière criminelle, en permettant à une victime lésée de mettre en mouvement l'action publique en dehors des cas très restrictifs de décès et de mutilation ou d'invalidité permanente, et, enfin, en souhaitant supprimer l'exigence d'avis préalable du ministre de la défense dans le cas de mise en mouvement de l'action publique par la victime lésée.
L'Assemblée nationale a, par ailleurs, poursuivi la simplification des règles de compétence propres à la justice militaire, en excluant la création de nouveaux tribunaux aux armées en dehors du territoire, après la suppression prochaine du tribunal de Baden-Baden, liée à la dissolution des forces françaises stationnant en Allemagne.
Le texte transmis par l'Assemblée nationale prévoit cependant que des chambres détachées du tribunal aux armées de Paris pourront être instituées, à titre temporaire, pour permettre le jugement, sur place, des infractions susceptibles d'être commises à l'étranger par des militaires en opérations extérieures.
Dans ce contexte, mes chers collègues, tout en souscrivant globalement à la logique retenue par l'Assemblée nationale, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose un certain nombre d'amendements destinés à confirmer que l'ouverture de la mise en mouvement de l'action publique par la victime lésée, en dehors des cas de décès, d'infirmité permanente ou de mutilation, induit explicitement l'intervention d'un avis préalable du ministre de la défense, nécessaire, selon la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, à l'information des juges.
D'autres amendements visent à confirmer le maintien du statu quo à l'égard des dispositions valables pour le temps de guerre et à aménager les conditions de la refonte à venir du code de justice militaire, de manière que l'échéance prévue par la loi en vue de la réécriture de ce code permette de tenir compte, le cas échéant, des premiers enseignements de la professionnalisation.
Enfin, d'autres amendements ont pour objet de confirmer la suppression des tribunaux aux armées à l'étranger, car le seul tribunal de ce type à avoir été institué à ce jour est celui de Baden-Baden, auprès des forces françaises stationnées en Allemagne. La commission des affaires étrangères propose donc, sur ce point, de supprimer deux articles du projet de loi qui renvoient, de manière désormais inadéquate, à ces tribunaux militaires établis à l'étranger. En contrepartie serait inséré dans le projet de loi un article prenant acte du maintien, à titre provisoire, du tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne.
Ces amendements sont proposés dans une forme similaire, voire identique à ceux de la commission des lois. A cet égard, je tiens à souligner, pour m'en féliciter, la convergence des points de vue de la commission saisie au fond et de la commission saisie pour avis qui s'est manifestée sur ce texte.
Sous réserve de ces quelques modifications, qui ne remettent pas en cause l'esprit du texte qui nous est soumis, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées propose d'adopter le projet de loi portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale ainsi amendé. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui le projet de loi réformant le code de justice militaire qui fait suite à la refonte du service national et qui s'inscrit par ailleurs dans le cadre plus général du chantier ouvert depuis maintenant plusieurs mois, concernant l'ensemble de la justice française.
Les présentes dispositions visent à rapprocher le droit militaire du droit commun, sortant ainsi l'armée d'une justice d'exception, dont le fossé s'est élargi avec les modifications intervenues ces dernières années en matière de procédure pénale.
L'objectif poursuivi par les présentes dispositions aura pour conséquence d'offrir de nouvelles garanties aux justiciables militaires. Leur seront désormais applicables les régimes de la garde à vue, avec notamment l'intervention de l'avocat au cours de la garde à vue, de la détention provisoire, de la mise en examen et des droits de la défense en cours d'instruction. Enfin, leur sera donnée la possibilité de faire appel, ce qui n'existe pas actuellement.
La nouvelle présentation du code de justice militaire résultant du présent projet de loi aura, par ailleurs, comme avantage non négligeable de permettre l'application de plein droit dans ledit code des réformes de la procédure pénale, en cours d'examen par le Parlement.
Je pense, en particulier, à l'intervention de l'avocat dès le début de la garde à vue, mesure qui sera, espérons-le, prochainement adoptée par le Parlement et donc, automatiquement et sans délai, applicable à la procédure pénale en matière militaire en temps de paix.
La commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale a, de surcroît, apporté plusieurs améliorations au dispositif original.
C'est donc positivement que nos collègues et moi-même accueillons la démarche qui tend à calquer le plus possible la procédure pénale en matière militaire sur le droit commun, qui fait lui-même l'objet en ce moment de réformes utiles et importantes.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

TITRE Ier

DISPOSITIONS

MODIFIANT LE CODE DE JUSTICE MILITAIRE

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ L'article 1er du code de justice militaire est ainsi rédigé :
« Art. 1er . _ La justice militaire est rendue sous le contrôle de la Cour de cassation :
« _ en temps de paix et pour les infractions commises hors du territoire de la République, par le tribunal aux armées de Paris et, en cas d'appel, par la cour d'appel de Paris ;
« _ en temps de guerre, par des tribunaux territoriaux des forces armées et par des tribunaux militaires aux armées.
« Des tribunaux prévôtaux peuvent être établis dans les conditions prévues par le présent code. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ L'article 2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 2 . _ En temps de paix, les infractions de la compétence du tribunal aux armées sont instruites et jugées selon les dispositions du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions particulières édictées par les articles 698-1 à 698-9 de ce code et de celles édictées par le présent code.
« Les attributions conférées par le code de procédure pénale au juge d'instruction, au procureur de la République, au président du tribunal et au président de la cour d'assises sont exercées respectivement par le juge d'instruction du tribunal aux armées, le procureur de la République près le tribunal aux armées et le président du tribunal aux armées.
« Le procureur général exerce vis-à-vis du tribunal aux armées les attributions qui lui sont dévolues par le code de procédure pénale à l'égard des juridictions de droit commun. »
Par amendement n° 1, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 2 du code de justice militaire, après les mots : « de la compétence du tribunal aux armées sont », d'insérer les mots : « poursuivies, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à mieux marquer que l'ensemble des règles du code de procédure pénale, y compris celles qui concernent les poursuites, sont applicables sous réserve de dispositions particulières.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 2, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de remplacer les deux derniers alinéas du texte présenté par l'article 2 pour l'article 2 du code de justice militaire par trois alinéas ainsi rédigés :
« En temps de guerre, les infractions de la compétence des tribunaux territoriaux des forces armées et des tribunaux militaires aux armées sont instruites et jugées selon :
« - les dispositions du code de procédure pénale avant l'entrée en application de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale ;
« - et celles du code de justice militaire dans sa rédaction résultant de la loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative à l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'Etat. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit, là aussi, d'un amendement rédactionnel.
L'Assemblée nationale a décidé de rapprocher la terminologie utilisée pour la justice militaire de celle qui existe en droit commun. Elle a donc remplacé le commissaire du Gouvernement par le procureur de la République et la chambre de contrôle de l'instruction par la chambre d'accusation.
Compte tenu de cette évolution, les précisions figurant aux deuxième et troisième alinéas de l'article 2 apparaissent sans utilité.
Nous vous proposons donc de regrouper les articles 2 et 2 bis afin d'édicter dans un même article le droit applicable en temps de paix et en temps de guerre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Le Gouvernement est favorable à cet amendement rédactionnel.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 bis



M. le président.
« Art. 2 bis . _ Après l'article 2 du même code, il est inséré un article 2-1 ainsi rédigé :
« Art. 2-1 . _ En temps de guerre, les infractions de la compétence des tribunaux territoriaux des forces armées et des tribunaux militaires aux armées sont instruites et jugées selon :
« _ les dispositions du code de procédure pénale avant l'entrée en application de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale ;
« _ et celles du code de justice militaire dans sa rédaction résultant de la loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative à l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'Etat. »
Par amendement n° 3, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 bis est supprimé.

Articles 2 ter et 2 quater



M. le président.
« Art. 2 ter . _ Dans l'intitulé du chapitre Ier du titre Ier du livre 1er du même code, les mots : "Des tribunaux" sont remplacés par les mots : "Du tribunal". » - (Adopté.)
« Art. 2 quater . _ L'article 3 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 3 . _ Il est établi un tribunal aux armées ayant son siège à Paris, dénommé tribunal aux armées de Paris. » - (Adopté.)

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ I. _ La première phrase de l'article 4 du même code est ainsi rédigée :
« Un décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense fixe le nombre des chambres de jugement du tribunal aux armées de Paris, le ressort dans lequel s'exerce sa juridiction ainsi que la cour d'appel compétente. »
« II. _ Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Des chambres détachées du tribunal aux armées de Paris peuvent, en cas de besoin, être instituées à titre temporaire hors du territoire de la République, par décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense. »
Par amendement n° 4, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans le texte présenté par le I de cet article pour la première phrase de l'article 4 du code de justice militaire, de supprimer les mots : « , le ressort dans lequel s'exerce sa juridiction ainsi que la cour d'appel compétente ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. L'article 1er précise que, en cas d'appel des décisions du tribunal aux armées de Paris, la cour d'appel compétente est celle de Paris.
En outre, le tribunal aux armées de Paris sera compétent pour toutes les infractions commises hors du territoire.
Il est donc inutile que le décret précise le ressort de la cour d'appel compétente.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Cet amendement est logique et le Gouvernement le soutient.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3 bis



M. le président.
« Art. 3 bis . _ Après l'article 4 du même code, il est inséré un article 4-1 ainsi rédigé :
« Art. 4-1 . _ Les juridictions des forces armées établies hors du territoire national en vertu de conventions internationales sont maintenues. Les infractions relevant de leur compétence sont instruites et jugées selon les dispositions de l'article 2.
« Un décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense détermine la cour d'appel compétente. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° 5, est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
Le second, n° 42, est déposé par M. Vinçon au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 5.
M. René Garrec, rapporteur. Le tribunal aux armées des forces françaises en Allemagne est la seule juridiction établie hors du territoire. Or le Gouvernement a annoncé son intention de le supprimer aussitôt après le vote du présent projet de loi.
Dans ces conditions, il est préférable de supprimer toute référence à cette juridiction dans le code de justice militaire et de prévoir une disposition transitoire à la fin du projet de loi. C'est d'ailleurs ainsi qu'avait procédé le législateur en 1982 pour la suppression des tribunaux permanents des forces amées.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 42.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Même amendement, même motivation !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 5 et 42 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Si le Sénat a compris des propos du Gouvernement que son intention était de supprimer le tribunal de Baden-Baden après le vote de la présente loi, c'est une erreur : cette suppression n'interviendra, évidemment, qu'après la promulgation de la loi.
Au-delà de ce détail juridique, c'est bien ainsi que nous entendons procéder, c'est-à-dire que les affaires qui relevaient du tribunal de Baden-Baden - et qui ne disparaîtront pas puisque, dans le nouveau régime, avec l'Eurocorps et, surtout, avec la brigade franco-allemande, des militaires français opéreront encore en Allemagne - seront transférées au tribunal de Paris. Le tribunal de Baden-Baden ne doit donc pas être mentionné dans un code à valeur permanente.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 5 et 42, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 3 bis est supprimé.

Article 4



M. le président.
« Art. 4. _ L'article 5 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 5 . _ Lorsqu'un tribunal n'a pas été établi avant l'entrée en vigueur de la loi n°... du... portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale auprès d'une force armée qui stationne ou opère hors du territoire de la République, les infractions de la compétence des tribunaux aux armées visées à l'article 59 sont portées devant le tribunal aux armées de Paris et, en cas d'appel, devant la cour d'appel de Paris.
« Lorsqu'un tribunal aux armées a cessé de fonctionner, les affaires de sa compétence sont renvoyées devant le tribunal aux armées de Paris. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 6 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 43 est présenté par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à rédiger ainsi cet article :
« L'article 5 du même code est abrogé. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 6.
M. René Garrec, rapporteur. Cet article ne concerne lui aussi que le tribunal aux armées de Baden-Baden. Il est donc préférable d'en renvoyer les dispositions à la fin du projet de loi, pour les raisons précédemment évoquées.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 43.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Même amendement, même motivation !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 6 et 43 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 6 et 43, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. _ L'article 6 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 6 . _ Pour le jugement des contraventions, le tribunal aux armées est composé de son président ou d'un magistrat qu'il délègue. Pour le jugement des délits, il est composé d'un président et de deux assesseurs, ou, dans les cas prévus par l'article 398-1 du code de procédure pénale, d'un seul de ces magistrats exerçant les pouvoirs conférés au président. Pour le jugement des crimes, la formation de jugement est composée selon les dispositions des articles 698-6 et 698-7 du code de procédure pénale. »
Par amendement n° 7, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, à la fin du texte présenté par cet article pour l'article 6 du code de justice militaire, de remplacer les mots : « la formation de jugement est composée selon les dispositions des articles 698-6 et 698-7 du code de procédure pénale » par les mots : « il est composé conformément aux dispositions de l'article 205 du présent code ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Le renvoi aux dispositions des articles 698-6 et 698-7 du code de procédure pénale pour la composition du tribunal aux armées en matière criminelle n'est pas pertinent. En effet, ces articles renvoient eux-mêmes aux articles généraux du code de procédure pénale, ce qui posera des difficultés pour la désignation des assesseurs professionnels et du jury lorsqu'un tel jury est prévu.
Il paraît donc préférable de renvoyer à une disposition spécifique au tribunal aux armées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je partage l'analyse juridique de M. le rapporteur et je suis favorable à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Articles 5 bis à 5 quater



M. le président.
« Art. 5 bis . _ Dans l'article 10 du même code, les mots : "un commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "aux armées un procureur de la République". » - (Adopté.)
« Art. 5 ter . _ L'intitulé de la section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du même code est ainsi rédigé : "De la chambre d'accusation". » - (Adopté.)
« Art. 5 quater . _ L'article 11 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 11 . _ Le tribunal aux armées comporte une chambre d'accusation composée d'un président et de deux assesseurs, tous trois magistrats du siège appartenant au corps judiciaire et désignés comme il est dit à l'article 7. » - (Adopté.)

Article 5 quinquies



M. le président.
« Art. 5 quinquies. I. _ Dans le premier alinéa de l'article 12 du même code, les mots : "de contrôle de l'instruction" sont remplacés par les mots : "d'accusation" ».
« II. _ Il est procédé à la même substitution dans le dernier alinéa de l'article 21 du même code. »
Par amendement n° 8, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose d'insérer dans le II de cet article, après les mots : « la même substitution », les mots : « dans l'avant-dernier alinéa (4°) de l'article 20 et ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à réparer un oubli dans les changements de terminologie opérés par l'Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5 quinquies , ainsi modifié.

(L'article 5 quinquies est adopté.)

Article 5 sexies



M. le président.
« Art. 5 sexies . _ Dans le dernier alinéa de l'article 12 du même code, les mots : "commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "procureur de la République" ». - (Adopté.)

Article 5 septies



M. le président.
« Art. 5 septies. - Dans l'article 13 du même code, les mots : "de contrôle de l'instruction" sont remplacés par les mots : "d'accusation du tribunal aux armées". »
Par amendement n° 9, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article 13 du même code est abrogé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. L'article 13 du code de justice militaire dispose qu'un décret peut prévoir que les attributions d'une chambre de contrôle de l'instruction auprès d'un tribunal aux armées peuvent être exercées par la chambre d'accusation d'une cour d'appel.
Comme le tribunal de Paris devient la seule juridiction militaire en temps de paix, cet article ne paraît plus présenter d'intérêt.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Le raisonnement est logique : le Gouvernement le partage et est favorable à l'amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 5 septies est ainsi rédigé.

Articles 5 octies et 5 nonies



M. le président.
« Art. 5 octies. _ I. _ Dans le premier alinéa de l'article 14 du même code, les mots : "des tribunaux" sont remplacés par les mots : "du tribunal" ».
« II. _ Il est procédé à la même substitution dans les articles 65 et 66 du même code. » - (Adopté.)
« Art. 5 nonies . _ I. _ Dans le premier alinéa de l'article 15 du même code, les mots : "des tribunaux aux armées" sont remplacés par les mots : "du tribunal aux armées" ».
« II. _ Dans le dernier alinéa du même article, les mots : "commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "procureur de la République". » - (Adopté.)

Article 5 decies



M. le président.
« Art. 5 decies . _ I. _ Dans le premier alinéa de l'article 16 du même code, les mots : "commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "procureur de la République près le tribunal aux armées".
« II. _ Il est procédé à la même substitution dans le dernier alinéa de l'article 17, dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'article 21, dans les cinquième et avant-dernier alinéas de l'article 82, à la fin du premier alinéa de l'article 83, dans l'article 86, dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article 87 et dans l'article 90 du même code. »
Par amendement n° 10, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose au début du I de cet article, de remplacer les mots : « Dans le premier alinéa » par les mots : « Dans les deux alinéas ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Nous vous proposons de corriger une erreur dans le décompte des alinéas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Voilà un signe supplémentaire de la vigilance de la commission des lois du Sénat !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° 11, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans le II de l'article 5 decies , de remplacer le mot : « cinquième » par le mot : « sixième ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Cet amendement a le même objet que le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5 decies , modifié.

(L'article 5 decies est adopté.)

Article 5 undecies



M. le président.
« Art. 5 undecies . - Dans l'article 22 du même code, les mots : "de la juridiction des forces armées à laquelle" sont remplacés par les mots : "du tribunal aux armées auquel". » - (Adopté.)

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ L'article 23 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 23 . _ Les personnes mentionnées aux articles 59 à 66 peuvent faire assurer leur défense par un avocat ou, si l'éloignement le justifie, par un militaire qu'elles choisissent sur une liste établie par le président de la juridiction des forces armées. »
Par amendement n° 12, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, à la fin du texte présenté par cet article pour l'article 23 du code de justice militaire, de remplacer les mots : « de la juridiction des forces armées » par les mots : « du tribunal aux armées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement de coordination qui vise à prendre en compte le fait que le tribunal aux armées de Paris deviendra la seule juridiction compétente pour les infractions commises par les militaires hors du territoire national.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Articles 6 bis et 6 ter



M. le président.
« Art. 6 bis . _ Le début de l'article 59 du même code est ainsi rédigé :
« Sous réserve des engagements internationaux, le tribunal aux armées connaît des infractions de toute nature commises hors du territoire de la République par les membres... (Le reste sans changement.) » - (Adopté.)
« Art. 6 ter . _ Le début de l'article 64 du même code est ainsi rédigé :
« Le tribunal aux armées est incompétent à l'égard des mineurs de dix-huit ans, sauf s'ils sont membres des forces armées ou lorsque aucune juridiction française des mineurs n'a compétence à leur égard. Ce même tribunal est compétent à l'égard... (Le reste sans changement.) » - ( Adopté. )

Article 7



M. le président.
« Art. 7. _ I. _ Le premier alinéa de l'article 67 du même code est ainsi rédigé :
« Dans le cas des juridictions des forces armées établies en vertu d'une convention et mentionnées au chapitre Ier du titre Ier du présent livre, est compétent le tribunal aux armées : ».
« II. _ Le dernier alinéa du même article est supprimé. »
Par amendement n° 13, M. Garrec au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit cet article :
« L'article 67 du même code est abrogé. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. L'article 67 du code de justice militaire prévoyait des critères pour délimiter la compétence des tribunaux aux armées établis hors du territoire.
Dans la mesure où le seul qui existait va disparaître, cet article devient inutile.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.

Articles 8 et 9



M. le président.
« Art. 8. _ A l'article 76 du même code, les mots : "par l'article 662" sont remplacés par les mots : "par les deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 665". » - (Adopté.)
« Art. 9. _ I. _ Dans le premier alinéa de l'article 80 du même code, les mots : "commissaire du Gouvernement placé auprès de la juridiction des forces" sont remplacés par les mots : "procureur de la République près le tribunal aux".
« II. _ Au deuxième alinéa du même article, les mots : "les articles 41 et 42" sont remplacés par les mots : "les articles 41 à 42". » - (Adopté.)

Article 10



M. le président.
« Art. 10. _ Au huitième alinéa de l'article 82 du même code, après les mots : "au cours", sont insérés les mots : "d'une enquête préliminaire ou". »
Par amendement n° 14, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger ainsi cet article :
« I. - La deuxième phrase du septième alinéa de l'article 82 du même code est supprimée.
« II. - Au début du huitième alinéa du même article, le mot : "Exceptionnellement" est remplacé par les mots : "En cas d'urgence".
« III. - Au huitième alinéa du même article, après les mots : "au cours", sont insérés les mots : "d'une enquête préliminaire ou". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. L'article 82 du code de justice militaire prévoit que les officiers de police judiciaire des forces armées ont compétence dans les limites territoriales où ils exercent leurs fonctions habituelles.
Il prévoit, en outre, qu'en cas d'urgence ils peuvent opérer dans tout le ressort de la juridiction des forces armées à laquelle ils sont rattachés.
Or le tribunal aux armées de Paris devient la seule juridiction compétente. Son ressort s'étendant au monde entier à l'exception du territoire national, il est souhaitable de supprimer cette disposition, d'autant plus que l'alinéa suivant prévoit que les officiers de police judiciaire peuvent procéder à certaines opérations en tout lieu sur commission rogatoire du juge d'instruction ou sur instruction du procureur de la République.
A cet égard, il convient de remplacer le mot : « exceptionnellement » par les mots : « En cas d'urgence », par souci de rapprochement avec le code de procédure pénale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Cet amendement tire l'ensemble des conséquences du caractère dorénavant unique du tribunal aux armées de Paris et tient notamment compte de la disparition de toute notion de ressort territorial pour ce tribunal.
Il convient de supprimer les cas d'extension de compétence des officiers de police judiciaire prévus par l'article 82 du code de justice militaire.
Un alignement est ainsi opéré sur le droit commun, s'agissant notamment des circonstances dans lesquelles les officiers de police judiciaire peuvent voir étendue leur compétence territoriale.
Cet amendement entre bien dans la philosophie du projet de loi initial, et le Gouvernement le soutient.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé.

Articles 11 et 12



M. le président.
« Art. 11. _ A l'article 88 du même code, le mot : "inculpation" est remplacé par les mots : "mise en examen". » - (Adopté.)
« Art. 12. _ L'article 89 du même code est abrogé. » - (Adopté.)

Article 13



M. le président.
« Art. 13. _ L'article 91 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 91 . _ Les règles relatives à la mise en mouvement de l'action publique et à l'exercice de l'action civile en réparation du dommage causé par l'une des infractions qui sont de la compétence du tribunal aux armées sont celles applicables devant les juridictions mentionnées à l'article 697 du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions de la présente section. »
Par amendement n° 15, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article 91 du code de justice militaire :
« Art. 91. - Les règles relatives à la mise en mouvement de l'action publique et à l'exercice de l'action civile en réparation du dommage causé par l'une des infractions de la compétence du tribunal aux armées sont celles prévues par le code de procédure pénale, sous réserve des dispositions particulières édictées par les articles 698-1 à 698-9 du même code et de celles édictées par la présente section. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel, qui ne change rien au fond : il vise simplement à rédiger l'article 13 de façon telle qu'il apparaisse clairement que le principe est désormais l'application du code de procédure pénale, sous réserve de dispositions particulières.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 13, ainsi modifié.

(L'article 13 est adopté.)

Articles 14 à 16



M. le président.
« Art. 14. _ L'article 92 du même code est abrogé. » - (Adopté.)
« Art. 15. _ L'article 95 du même code est abrogé. » - (Adopté.)
« Art. 16. _ Les articles 96 à 98 et 100 du même code sont abrogés. » - (Adopté.)

Article 17



M. le président.
« Art. 17. _ L'article 101 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 101 . _ Les infractions de la compétence du tribunal aux armées sont, sauf prescriptions particulières de la présente section, instruites selon les dispositions applicables devant les juridictions mentionnées à l'article 697 du code de procédure pénale. »
Par amendement n° 16, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article 101 du code de justice militaire :
« Art. 101. - Les infractions de la compétence du tribunal aux armées sont instruites selon les dispositions du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions particulières édictées par les articles 698-1 à 698-9 du même code et de celles édictées par la présente section. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel, qui a le même objet que le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 17, ainsi modifié.

(L'article 17 est adopté.)

Article 18



M. le président.
« Art. 18. _ Les articles 102 à 108 du même code sont abrogés. » - (Adopté.)

Article 19



M. le président.
« Art. 19. _ L'article 112 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 112 . _ Si la personne mise en examen recherchée en vertu d'un mandat d'amener est trouvée à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite dans les vingt-quatre heures, soit avec son accord, devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat, soit devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation ou devant le procureur de la République près le tribunal aux armées de Paris si celui-ci est plus proche ; le procureur de la République ou le procureur de la République près le tribunal aux armées de Paris procèdent comme il est dit aux deuxième et troisième alinéas de l'article 133 du code de procédure pénale.
« Toute personne mise en examen arrêtée en vertu d'un mandat d'arrêt à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat est conduite devant le procureur de la République du lieu de l'arrestation, ou devant le procureur de la République près le tribunal aux armées de Paris si celui-ci est plus proche ; ces magistrats procèdent comme il est dit aux deuxième et troisième alinéas de l'article 133 du code de procédure pénale. »
Sur cet article, je suis saisi par M. Garrec, au nom de la commission des lois, de trois amendements.
L'amendement n° 17 vise, dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 112 du code de justice militaire, à supprimer les mots : « ou devant le procureur de la République près le tribunal aux armées si celui-ci est plus proche ».
L'amendement n° 18 tend, dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 112 du code de justice militaire, à remplacer les mots : « ou le procureur de la République près le tribunal aux armées de Paris procèdent » par le mot : « procède ».
L'amendement n° 19 a pour objet, dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 112 du code de justice militaire, de remplacer les mots : « , ou devant le procureur de la République près le tribunal aux armées de Paris si celui-ci est plus proche ; ces magistrats procèdent » par les mots : « ; ce magistrat procède ».
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces trois amendements.
M. René Garrec, rapporteur. Le tribunal aux armées de Paris sera désormais la seule juridiction compétente pour les infractions commises par les militaires hors du territoire en temps de paix.
Si une personne recherchée est trouvée à plus de 200 kilomètres du tribunal aux armées de Paris, il n'existe aucune possibilité que le procureur de la République du tribunal aux armées soit plus proche que celui du lieu de l'arrestation !
Il convient donc de supprimer les dispositions qu'implique la conduite de la personne devant le tribunal aux armées « lorsqu'il est le plus proche ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Les trois amendements proposés simplifient les conditions d'intervention du procureur.
Le Gouvernement les accepte.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 19, modifié.

(L'article 19 est adopté.)

Articles 20 à 23



M. le président.
« Art. 20. _ Les articles 113 à 130 du même code sont abrogés. » - (Adopté.)
« Art. 21. _ L'article 131 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 131 . _ Les règles relatives à la détention provisoire sont, sous réserve des dispositions particulières des articles 135 et 137 du présent code, celles prévues par le code de procédure pénale. » - (Adopté.)
« Art. 22. _ Les articles 132 à 134 du même code sont abrogés. » - (Adopté.)
« Art. 23. _ A l'article 135 du même code, les mots : "d'un ordre d'incarcération, d'un mandat de justice ou d'un jugement, l'inculpé" sont remplacés par les mots : "d'une ordonnance prescrivant la détention provisoire, d'un mandat de justice ou d'un jugement, la personne mise en examen". » - (Adopté.)

Article 24



M. le président.
« Art. 24. _ L'article 136, les deuxième à cinquième alinéas de l'article 137 et les articles 138 à 150 du même code sont abrogés. »
Par amendement n° 20, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger ainsi cet article :
« I. - L'article 136 du même code est abrogé.
« II. - A la fin du deuxième alinéa de l'article 137 du même code, les mots : "des juridictions militaires, sous les conditions suivantes" sont remplacés par les mots : "du tribunal aux armées".
« III. - Les troisième à cinquième alinéas de l'article 137 et les articles 138 à 150 du même code sont abrogés. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. L'article 137 du code de justice militaire prévoit actuellement l'inapplicabilité du contrôle judiciaire aux militaires. Cependant, le contrôle judiciaire est applicable aux militaires rendus à la vie civile depuis la date de l'infraction, ainsi qu'aux personnes étrangères à l'armée et justiciables des juridictions militaires.
Le Gouvernement propose de supprimer cette limite à l'absence de contrôle judiciaire. Il n'existe aucune raison d'exclure ce contrôle pour les personnes étrangères à l'armée ou rendues à la vie civile.
L'amendement rétablit donc le contrôle judiciaire pour ces personnes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je crois que cette extension des possibilités de contrôle judiciaire pour des personnes qui ne relèvent pas du statut militaire, notamment pour les militaires et assimilés qui sont rendus à la vie civile, est sage. Pour ces personnels qui ne sont pas soumis à une autorité hiérarchique pendant la procédure, le placement sous contrôle judiciaire peut se révéler tout à fait utile.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 24 est ainsi rédigé.

Article 25



M. le président.
« Art. 25. _ I. _ L'intitulé du paragraphe 3 de la section 4 du chapitre Ier du titre Ier du livre II du même code est ainsi rédigé : "De la chambre d'accusation".
« II. _ L'article 151 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 151 . _ Les règles applicables à la chambre d'accusation sont celles relatives à la chambre d'accusation mentionnée au deuxième alinéa de l'article 698-7 du code de procédure pénale. »
Par amendement n° 21, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par le II de cet article pour l'article 151 du code de justice militaire :
« Art. 151. - Les règles relatives à la chambre d'accusation sont celles prévues par le code de procédure pénale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel qui vise à mieux rendre perceptible le fait que le droit commun est désormais applicable pour les infractions commises en temps de paix hors du territoire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, ainsi modifié.

(L'article 25 est adopté.)

Article 26



M. le président.
« Art. 26. _ I. _ Après l'article 151 du même code, il est inséré une division et un intitulé ainsi rédigés : "4. _ De la réouverture de l'information sur charges nouvelles".
« II. _ Les articles 152 à 164 du même code sont remplacés par un article 152 ainsi rédigé :
« Art. 152 . _ Lorsque le juge d'instruction ou la chambre d'accusation a rendu une décision de non-lieu, il appartient au ministre chargé de la défense ou à l'autorité mentionnée à l'article 4 de dénoncer au procureur de la République près le tribunal aux armées les charges nouvelles telles qu'elles sont définies par l'article 189 du code de procédure pénale. Si le procureur de la République près le tribunal aux armées envisage, à défaut de dénonciation, de requérir la réouverture de l'information sur ces charges, il lui appartient de recueillir l'avis de l'autorité mentionnée ci-dessus. La dénonciation ou l'avis est classé au dossier de la procédure. » - (Adopté.)

Article 27



M. le président.
« Art. 27. _ Les articles 202 à 204 du même code sont ainsi rédigés :
« Art. 202 . _ En temps de paix et hors du territoire de la République, les infractions mentionnées à l'article 59 sont jugées par le tribunal aux armées selon les règles de procédure suivies devant les juridictions mentionnées à l'article 697 du code de procédure pénale ou, s'agissant des contraventions, selon les règles de procédure suivies devant les tribunaux de police.
« Art. 203 . _ Les jugements rendus par le tribunal aux armées en matière délictuelle peuvent être attaqués par la voie de l'appel dans les mêmes conditions que les décisions rendues par les juridictions mentionnées à l'article 697 du code de procédure pénale.
« Les jugements rendus en matière contraventionnelle peuvent être attaqués par la voie de l'appel, dans les mêmes conditions que les jugements rendus par le tribunal de police.
« Art. 204 . _ Lorsque, postérieurement à une condamnation non définitive prononcée par défaut contre un insoumis ou un déserteur, le ministère public près la juridiction qui a statué ou, en cas de suppression de cette juridiction, le ministère public près la juridiction compétente en application des articles 5, 27 ou 51 acquiert la preuve que le condamné défaillant ne se trouvait pas en état d'insoumission ou de désertion, il saisit le tribunal aux fins d'annulation du jugement rendu par défaut. Le tribunal statue sur requête du ministère public. »

ARTICLE 202 DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE

M. le président. Par amendement n° 22, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article 202 du code de justice militaire :
« Art. 202. - En temps de paix et hors du territoire de la République, les infractions mentionnées à l'article 59 sont jugées par le tribunal aux armées selon les règles de procédure prévues par le code de procédure pénale, sous réserve des dispositions particulières édictées par les articles 698-1 à 698-9 du même code et de celles édictées par le présent chapitre. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Cet amendement rédactionnel vise à préciser que le droit commun est applicable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence le texte proposé pour l'article 202 du code de justice militaire est ainsi rédigé.

ARTICLE 203 DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE

M. le président. Par amendement n° 23, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par l'article 27 pour l'article 203 du code de justice militaire :
« Art. 203. - Les jugements rendus par le tribunal aux armées peuvent être attaqués par la voie de l'appel dans les conditions prévues par le code de procédure pénale. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Cet amendement a le même objet que le précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. L'une des modifications majeures du projet de loi est de rendre applicable, à l'avenir, le principe de l'appel en matière de délits et de contraventions.
L'amendement aligne sur le droit commun procédural les conditions d'exercice du droit d'appel à l'encontre des jugements de première instance du tribunal aux armées.
L'avantage de la rédaction proposée par la commission des lois est que toute modification ultérieure de la procédure d'appel, notamment dans l'hypothèse où le droit d'appel viendrait à être instauré en matière criminelle - il est toujours légitime de l'espérer ! - serait, dès lors, automatiquement appliquée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 23, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 203 du code de justice militaire est ainsi rédigé.

ARTICLE 204 DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE

M. le président. Par amendement n° 24, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans le texte présenté par l'article 27 pour l'article 204 du code de justice militaire, de supprimer les mots : « en application des articles 5, 27 ou 51 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Le renvoi aux articles 5, 27 et 51 du code de justice militaire ne paraît pas pertinent.
Les articles 27 et 51 concernent le temps de guerre, pour lequel aucun changement n'est prévu. Quant à l'article 5, qui ne concerne, en pratique, que le tribunal de Baden-Baden, il sera supprimé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 24, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article 204 du code de justice militaire.

(Ce texte est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 27, modifié.

(L'article 27 est adopté.)

Article additionnel après l'article 27



M. le président.
Par amendement n° 25, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 27, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 205 du code de justice militaire est ainsi rédigé :
« Art. 205 . - Pour le jugement des crimes, le tribunal aux armées est composé d'un président et de six assesseurs. Les dispositions des deuxième àcinquième alinéas de l'article 698-6 du code de procédure pénale sont applicables au tribunal ainsi composé. Toutefois, ces dispositions ne sont applicables, pour le jugement des crimes de droit commun commis dans l'exécution du service par les militaires, que s'il existe un risque de divulgation d'un secret de la défense nationale. L'arrêt de mise en accusation prononcé par la chambre d'accusation du tribunal aux armées constate, s'il y a lieu, qu'il existe un risque de divulgation d'un secret de la défense et ordonne que le tribunal aux armées soit composé conformément aux dispositions du présent alinéa.
« Pour le jugement des crimes de droit commun commis par des militaires dans l'exécution du service, lorsqu'il n'a pas été fait application des dispositions de l'alinéa précédent, le tribunal aux armées comprend le tribunal et le jury. Le tribunal proprement dit est composé d'un président et de deux assesseurs. Le jury est composé conformément aux articles 254 à 258-1, 293 à 305-1 du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions prévues aux troisième à cinquième alinéas.
« Trente jours au moins avant l'audience, le président du tribunal aux armées ou son délégué établit la liste du jury de la juridiction et la liste des jurés suppléants, en procédant comme il est dit à l'article 266 du code de procédure pénale. Pour l'application de ces dispositions, il est fait usage de la liste annuelle établie pour la cour d'assises de Paris. Si, parmi les noms tirés au sort, figurent ceux d'une ou plusieurs personnes déjà inscrites sur les listes de session ou les listes des jurés suppléants établies précédemment pour la cour d'assises de Paris par tirage au sort sur la même liste annuelle, il procède comme il est dit au deuxième alinéa de l'article 266 du code de procédure pénale.
« Le préfet notifie à chacun des jurés et jurés suppléants l'extrait de la liste le concernant dans les formes et délais prévus par l'article 267 du code de procédure pénale.
« A l'ouverture de l'audience, le tribunal procède à la révision de la liste du jury conformément aux dispositions des articles 288 à 292 du code de procédure pénale.
« Lorsqu'une chambre du tribunal aux armées de Paris est instituée hors du territoire de la République, elle est composée, pour le jugement des crimes, d'un président et de six assesseurs. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il est nécessaire de prévoir des dispositions spécifiques pour la composition du tribunal aux armées pour le jugement des crimes, notamment afin de tenir compte du fait qu'il s'agit d'une juridiction unique siégeant à Paris.
Le jury sera tiré au sort sur la liste annuelle établie pour la cour d'assises de Paris.
Il s'agit, enfin, de prévoir le cas où une chambre du tribunal aux armées de Paris serait détachée hors du territoire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. En matière de procédure criminelle, l'application pure et simple de certaines règles de droit commun n'est pas vraiment possible devant le tribunal aux armées de Paris. C'est notamment le cas des dispositions relatives à la constitution du jury et à la tenue des sessions d'une cour d'assises.
L'amendement prévoit donc d'adapter les règles.
Il tend, d'abord, à supprimer la notion de session puisque, en réalité, il n'y aura que des instances sur chaque affaire et non plus des sessions avec plusieurs affaires successives.
Il vise, ensuite, à permettre d'établir une liste du jury, dans les cas où le jury pourra être réuni, en procédant au tirage au sort sur les listes de la cour d'appel de Paris, sans aller chercher des jurés à l'autre bout du territoire.
Enfin, comme il sera possible, sur le plan pratique, de réunir un jury d'assises pour le jugement d'affaires criminelles dans des chambres détachées qui pourraient se situer dans des pays lointains, l'amendement introduit, également à juste titre, une disposition prévoyant, dans cette hypothèse, que l'instance criminelle sera composée exclusivement de magistrats professionnels. C'est le bon sens.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 25, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 27.

Article 28



M. le président.
« Art. 28. _ Les articles 205 à 210 du même code sont abrogés. »
Par amendement n° 26, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans cet article, de remplacer les références : « 205 à 210 » par les références : « 206 à 210 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 26, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 28, ainsi modifié.

(L'article 28 est adopté.)

Article 29



M. le président.
« Art. 29. _ L'article 263 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 263 . _ Les dispositions du code de procédure pénale relatives au pourvoi en cassation sont applicables aux jugements rendus en dernier ressort par les juridictions des forces armées en temps de paix. »
Par amendement n° 27, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, à la fin du texte présenté par cet article pour l'article 263 du code de justicemilitaire, de remplacer les mots : « les juridictions des forces armées en temps de paix » par les mots : « le tribunal aux armées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 27, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 29, ainsi modifié.

(L'article 29 est adopté.)

Article 30



M. le président.
« Art. 30. _ Les articles 264 à 271 du même code sont abrogés. » - ( Adopté. )

Article 31



M. le président.
« Art. 31. _ L'article 273 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 273 . _ Les dispositions du code de procédure pénale relatives aux demandes en révision sont applicables aux jugements rendus par les juridictions des forces armées en temps de paix. »
Par amendement n° 28, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, à la fin du texte présenté par cet article pour l'article 273 du code de justice militaire, de remplacer les mots : « les juridictions des forces armées en temps de paix » par les mots : « le tribunal aux armées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Il s'agit, là encore, de tirer les conséquences de la suppression à venir du tribunal de Baden-Baden. Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 28, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 31, ainsi modifié.

(L'article 31 est adopté.)

Article 32



M. le président.
« Art. 32. _ Les articles 274 et 275 du même code sont abrogés. » - (Adopté.)

Article 32 bis



M. le président.
« Art. 32 bis . _ I. _ L'intitulé du titre IV du livre II du même code est ainsi rédigé : "Des citations et notifications".
« II. _ Dans l'article 276 du même code, les mots : "et à la partie civile, les assignations" sont remplacés par les mots : ", à la partie civile, et". »
Par amendement n° 29, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le II de cet article :
« II. - Dans l'article 276 du même code, les mots : "Devant les juridictions des forces armées" sont remplacés par les mots : "Devant le tribunal aux armées" et les mots : "et à la partie civile, les assignations" sont remplacés par les mots : ", à la partie civile, et". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 29, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 32 bis, ainsi modifié.

(L'article 32 bis est adopté.)

Articles 33 à 35



M. le président.
« Art. 33. _ L'article 277 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 277 . _ Les dispositions du code de procédure pénale relatives aux citations et significations sont applicables, sous réserve des dispositions du présent titre. » - (Adopté.)
« Art. 34. _ I. _ Les articles 278 à 282, 284 et 285 du même code sont abrogés.
« II. _ Dans le premier et l'avant-dernier alinéa de l'article 283 du même code, le mot : ", assignations" est supprimé.
« III. _ Dans le dernier alinéa du même article, les mots : "commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "procureur de la République près le tribunal aux armées". » - ( Adopté. )
« Art. 35. _ Les chapitres Ier à IV du titre V du livre II du même code sont abrogés. » - ( Adopté. )

Article 36



M. le président.
« Art. 36. _ L'article 345 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 345 . _ Les jugements rendus par les juridictions des forces armées en temps de paix sont exécutés selon les règles du code de procédure pénale, sous réserve des dispositions du présent chapitre. »
Par amendement n° 30, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans le texte présenté par cet article pour l'article 345 du code de justice militaire, de remplacer les mots : « les juridictions des forces armées en temps de paix » par les mots : « le tribunal aux armées ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Coordination, monsieur le président !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 30, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 36, ainsi modifié.

(L'article 36 est adopté.)

Article 37



M. le président.
« Art. 37. _ I. _ Les articles 346 à 348, 350 à 355 du même code sont abrogés.
« II. _ Dans l'article 357 du même code, les mots : "les tribunaux des forces armées" sont remplacés par les mots : "le tribunal aux armées".
« III. - les articles 365, 367, 378, 379, 382, le troisième alinéa de l'article 384 et les articles 387 et 394 du même code sont abrogés. »
Par amendement n° 31, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après le paragraphe I de cet article, un paragraphe ainsi rédigé :
« ... Dans le premier alinéa de l'article 349 du même code, les mots : "commissaire du Gouvernement" sont remplacés par les mots : "procureur de la République". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. C'est une clarification utile. Il faut maintenant préférer l'expression « procureur de la République » à celle de « commissaire du Gouvernement », qui provoque de nombreuses confusions dans l'esprit des justiciables du Conseil d'Etat.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 31, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 37, ainsi modifié.

(L'article 37 est adopté.)

Articles 37 bis et 37 ter



M. le président.
« Art. 37 bis . _ Dans le premier alinéa de l'article 479 du même code, les mots : "des tribunaux aux armées ou" sont supprimés. » - ( Adopté. )
« Art. 37 ter . _ Les trois premiers alinéas de l'article 482 du même code sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les tribunaux prévôtaux sont saisis par le renvoi qui leur est fait, en temps de guerre, par l'autorité militaire qui exerce les pouvoirs judiciaires dont ils dépendent. » - ( Adopté. )

Article 38



M. le président.
« Art. 38. _ Au premier alinéa de l'article 491 du même code, les mots : "condamne le prévenu aux frais envers l'Etat, et" sont supprimés. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 32 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 44 est déposé par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 32.
M. René Garrec, rapporteur. Le projet de loi initial prévoyait de modifier certaines dispositions relatives aux tribunaux prévôtaux afin de les rapprocher du droit commun.
Toutefois, l'Assemblée nationale a décidé qu'il ne pourrait plus être établi de tribunaux aux armées hors du territoire en temps de paix. Or, les tribunaux prévôtaux ne peuvent être établis en temps de paix que lorsqu'un tribunal aux armées a lui-même été établi. Il ne pourra donc plus y avoir de tribunaux prévôtaux en temps de paix. Par conséquent, il ne sert à rien de modifier les dispositions relatives à ces tribunaux.
En ce qui concerne le temps de guerre, le droit applicable sera celui qui existait avant le projet de loi. Les modifications proposées n'apporteraient donc rien.
Voilà pourquoi il convient de supprimer les articles relatifs à ces tribunaux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 44.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Je fais miennes les explications de M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 32 et 44 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Ils témoignent d'une grande logique de procédure.
Les juridictions prévôtales n'ayant plus de fondement en temps de paix, il n'y a plus lieu de les mentionner dans le code de procédure relatif au temps de paix.
En revanche, naturellement, les dispositions applicables à cette juridiction particulière subsisteront pour le code de la justice militaire applicable en temps de guerre.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 32 et 44, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 38 est supprimé.

Article 39



M. le président.
« Art. 39. _ Le dernier alinéa de l'article 492 du même code est supprimé. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 33 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 45 est déposé par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 33.
M. René Garrec, rapporteur. Même raisonnement que précédemment !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 45.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Effectivement, même logique que précédemment, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s 33 et 45 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 33 et 45, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 39 est supprimé.

Article 40



M. le président.
« Art. 40. _ L'article 493 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 493. _ Les jugements des juridictions prévôtales peuvent faire l'objet d'un appel dans les conditions prévues par le code de procédure pénale pour le tribunal de police. Les jugements des juridictions prévôtales peuvent faire l'objet d'un pourvoi en cassation dans les conditions prévues à l'article 263. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 34 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 46 est déposé par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 34.
M. René Garrec, rapporteur. Même logique !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 46.
M. Serge Vinçon, rapporteur. Même logique, effectivement !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 34 et 46, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 40 est supprimé.

TITRE II

DISPOSITIONS

MODIFIANT LE CODE DE PROCÉDURE PÉNALE

Article 41



M. le président.
« Art. 41. _ Au premier alinéa de l'article 465 du code de procédure pénale, après les mots : "délit de droit commun", sont insérés les mots : "ou d'un délit d'ordre militaire prévu par le livre III du code de justice militaire". » - (Adopté.)

Article 42

M. le président. L'article 42 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Articles 43 et 44



M. le président.
« Art. 43. _ L'article 697-2 du même code est abrogé. » - (Adopté.)
« Art. 44. _ Au premier alinéa de l'article 698 du même code, les mots : "les articles 698-1 à 698-8" sont remplacés par les mots : "les articles 698-1 à 698-9". » - (Adopté.)

Article 45



M. le président.
« Art. 45. _ A la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 698-1 du même code, après les mots : "crime ou délit flagrant", sont insérés les mots : "tel que défini au premier alinéa de l'article 53". »
Par amendement n° 35, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Actuellement, le procureur doit demander un avis au ministre de la défense préalablement à tout acte de poursuite, sauf en cas de crime ou de délit flagrant.
Or, le droit commun assimile au crime ou délit flagrant le cas dans lequel un chef de maison requiert un officier de police judiciaire pour constater un crime ou un délit.
Certains chefs de corps ont préféré ne pas dénoncer des infractions afin que le ministre de la défense ne soit pas privé de la possibilité de donner son avis.
Cet article tend donc à exclure la flagrance par assimilation des cas qui permettent de ne pas demander l'avis du ministre.
Toutefois, cet article est inutile, car le projet de loi sur les alternatives aux poursuites, déjà adopté par le Sénat en première lecture, tend à supprimer purement et simplement la flagrance par assimilation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Nous sommes là dans le cas, qui se produit parfois, de deux projets de loi qui sont en cours d'élaboration ou d'examen et qui aboutissent au même effet pratique.
Il est en effet prévu que le mécanisme qui étend la situation de flagrant délit ne soit plus applicable, à l'avenir, dans le code de procédure pénale.
Après concertation avec ma collègue garde des sceaux, il m'apparaît en effet que la méthode qui consiste à laisser s'appliquer la nouvelle disposition du code de procédure pénale est préférable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 35, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 45 est supprimé.

Article 45 bis



M. le président.
« Art. 45 bis . _ I. _ La dernière phrase de l'article 698-2 du même code est ainsi rédigée :
« L'action publique peut être mise en mouvement par la partie lésée dans les conditions déterminées aux articles 85 et suivants. »
« II. _ Les dispositions du présent article entreront en vigueur le 1er janvier 2002. » - (Adopté.)

Article 46



M. le président.
L'article 46 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Mais je suis saisi de deux amendements identiques tendant à le rétablir.
L'amendement n° 37 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 47 rectifié est déposé par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent à rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« L'article 698-2 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la partie lésée a mis en mouvement l'action publique, la juridiction saisie demande l'avis du ministre chargé de la défense ou de l'autorité militaire habilitée par lui, sur les poursuites engagées si l'avis prévu par l'article 698-1 ne figure pas déjà dans la procédure. Cet avis est donné dans le délai d'un mois. La demande d'avis ne suspend pas le déroulement de l'information. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 37.
M. René Garrec, rapporteur. L'Assemblée nationale a tout à la fois voulu étendre la possibilité pour la partie civile de mettre en mouvement l'action publique et exclure l'avis du ministre de la défense dans ce cas.
On ne voit pas pourquoi - c'est le parallélisme des formes - le ministre rendrait un avis lorsque l'action publique est mise en mouvement par le procureur et non pas lorsqu'elle est mise en mouvement par la partie lésée. L'avis ne lie en rien l'autorité judiciaire et n'interrompt pas le cours de la justice. Il est donc utile qu'un tel avis soit possible.
Actuellement, il est difficile de savoir si le procureur doit demander l'avis du ministre de la défense lorsque l'action publique est mise en mouvement par la partie lésée. Il semble que les procureurs aient pour pratique de demander cet avis. Il n'est toutefois pas souhaitable de laisser place à l'ambiguïté en cette matière.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 47 rectifié.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Mon argumentation est identique à celle de M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je partage la préoccupation des deux commissions.
En effet, à mes yeux - je parle pour l'avenir - l'avis du ministre de la défense dans de telles procédures est une garantie pour le bon fonctionnement de la justice dans son ensemble et, dans de nombreux cas, pour les droits subjectifs de la personne poursuivie.
Tout ce qui va dans le sens d'une automaticité de cet avis, qui, en effet, ne préjudicie en rien, qui est simplement une garantie d'information plus complète de la juridiction, a donc mon soutien.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 37 et 47 rectifié, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 46 est rétabli dans cette rédaction.

Article 47



M. le président.
« Art. 47. _ A l'article 698-5 du même code, les mots : "les articles 73 à 77, 93, 94, 137, 302, 307 à 318, 357, 371, 374, 375, 377 et 384, alinéa 3, du code de justice militaire" sont remplacés par les mots : "les articles 73 à 77, 93, 94, 137, 204, 349, 357, 366, 368, 369, 371, 373, 374, 375, 377 et le deuxième alinéa de l'article 384 du code de justice militaire". » - (Adopté.)

Article 48



M. le président.
« Art. 48. _ Il est inséré, après l'article 698-8 du même code, un article 698-9 ainsi rédigé :
« Art. 698-9 . _ Les juridictions de jugement mentionnées à l'article 697 peuvent ordonner, par une décision rendue en audience publique, que les débats se tiennent à huis clos si la publicité risque d'entraîner la divulgation d'une information couverte par le secret de la défense nationale. Toutefois, la décision sur le fond doit toujours être prononcée en audience publique. »
Par amendement n° 36, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour l'article 698-9 du code de procédure pénale :
« Art. 698-9. - Les juridictions de jugement mentionnées à l'article 697 peuvent, en constatant dans leur décision que la publicité risque d'entraîner la divulgation d'un secret de la défense nationale, ordonner, par décision rendue en audience publique, que les débats auront lieu à huis clos. Lorsque le huis clos a été ordonné, celui-ci s'applique au prononcé des jugements séparés qui peuvent intervenir sur des incidents ou exceptions.
« La décision au fond est toujours prononcée en audience publique. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Cet amendement rédactionnel vise à rapprocher la rédaction choisie de celle qui est prévue pour le huis clos devant le tribunal correctionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 36, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 48, ainsi modifié.

(L'article 48 est adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Articles 49 et 50



M. le président.
« Art. 49. _ L'article 229 de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale est abrogé. » - (Adopté.)
« Art. 50. _ Les dispositions de l'article 1018 A du code général des impôts sont applicables aux décisions rendues par les juridictions des forces armées. » - (Adopté.)

Article 51



M. le président.
« Art. 51. _ Les articles 8 et 10 et le troisième alinéa de l'article 14 de la loi n° 82-621 du 21 juillet 1982 relative à l'instruction et au jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'Etat sont abrogés. »
Par amendement n° 38, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose de compléter in fine cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les procédures en cours devant le tribunal des forces armées de Paris à la date de promulgation de la présente loi sont déférées de plein droit au tribunal aux armées de Paris. Les actes, formalités et décisions intervenus antérieurement demeurent valables. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. Le présent projet de loi tend à supprimer le tribunal des forces armées de Paris. Il convient de prévoir le renvoi des affaires de la compétence de ce tribunal devant le tribunal aux armées de Paris.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 38, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 51, ainsi modifié.

(L'article 51 est adopté.)

Article additionnel après l'article 51



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 39, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose d'insérer, après l'article 51, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne est provisoirement maintenu. Son ressort s'étend sur l'aire de stationnement des forces françaises en Allemagne et à tous lieux de ce territoire où ces forces sont appelées à se déplacer. Les infractions de sa compétence sont instruites et jugées selon les dispositions du premier alinéa de l'article 2 du code de justice militaire.
« Un décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense détermine la cour d'appel compétente.
« Le tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne peut être supprimé par décret pris sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense. En cas de suppression de cette juridiction, les affaires de sa compétence sont renvoyées devant le tribunal aux armées de Paris. »
Par amendement n° 48, M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères, propose d'insérer, après l'article 51, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne est provisoirement maintenu. Son ressort s'étend sur l'aire de stationnement des forces françaises en Allemagne et à tous lieux de ce territoire où ces forces sont appelées à se déplacer. Les infractions relevant de sa compétence sont instruites et jugées selon les dispositions du premier alinéa de l'article 2 du code de justice militaire.
« Un décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense détermine la cour d'appel compétente.
« Le tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne peut être supprimé par décret pris sur rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre de la défense. Les affaires de sa compétence sont alors renvoyées devant le tribunal aux armées de Paris. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 39.
M. René Garrec, rapporteur. Il s'agit d'une disposition transitoire visant à prévoir le cas du tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne, qui existe toujours.
L'amendement prévoit la suppression de ce tribunal par décret et le renvoi des affaires de sa compétence devant le tribunal aux armées de Paris.
Cela étant dit, l'amendement n° 48, déposé par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères, me paraissant meilleur, je retire notre amendement à son profit.
M. le président. L'amendement n° 39 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 48.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à maintenir à titre provisoire le tribunal de Baden-Baden jusqu'à la prochaine dissolution des forces françaises stationnées en Allemagne.
Cette disposition s'insère parmi les dispositions diverses du présent projet de loi et n'est pas destinée à être codifiée.
Elle prévoit, en outre, les conditions de la transition entre le tribunal de Baden-Baden et le tribunal aux armées de Paris, appelé, à terme, à instruire et à juger les affaires de la compétence de l'actuel tribunal aux armées des forces françaises stationnées en Allemagne, les FFSA.
Nous avons, à un mot près, une identité de vue avec M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 48 ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Le Gouvernement est favorable à la formule proposée, comme je l'ai indiqué lorsque nous en tirions par avance les conséquences dans les différents articles mentionnant la pluralité des tribunaux.
L'intention du Gouvernement est bien de supprimer le tribunal aux armées des FFSA. Prévoir la possibilité de sa suppression ultérieure dans les dispositions transitoires et de bonne logique rédactionnelle.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi après, l'article 51.

Article 52

M. le président. L'article 52 a été supprimé par l'Assemblée nationale.

Article 52 bis



M. le président.
« Art. 52 bis . _ Le code de justice militaire fera l'objet d'une refonte avant le 1er janvier 2002.
« En conséquence et jusqu'à l'entrée en vigueur du nouveau code, les dispositions du code de justice militaire valables en temps de guerre résultent des articles du code de justice militaire dans leur rédaction antérieure à la présente loi. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 40 est présenté par M. Garrec, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 49 est présenté par M. Vinçon, au nom de la commission des affaires étrangères.
Tous deux tendent, à la fin du premier alinéa de cet article, à remplacer la date : « 1er janvier 2002 » par la date : « 31 décembre 2002 ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 40.
M. René Garrec, rapporteur. Il est souhaitable que la prochaine réforme du code de justice militaire puisse prendre en compte les premiers effets de la disparition de la conscription.
En outre, si l'on inscrit un délai trop court, il est vraisemblable qu'il ne sera pas respecté, comme en témoigne le présent projet de loi, qui aurait dû être présenté et adopté avant le 1er janvier 1995.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 49.
M. Serge Vinçon, rapporteur pour avis. Je partage le point de vue de la commission des lois.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les deux amendements identiques ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. Nous savons tous que ces articles sont totalement dépourvus d'effet juridique ; les rendez-vous que se donne à elle-même la loi n'emportent aucune obligation pour le législateur. Nous en parlons donc avec une certaine liberté d'allure. D'ailleurs, le Conseil d'Etat le rappelle avec beaucoup d'insistance mais sans succès à tous les gouvernements, quels qu'ils soient, et qui persévèrent à inscrire de tels articles dans les projets de loi.
En l'occurrence, la date fixée marquait le souhait commun du législateur et du Gouvernement de procéder à cette remise en ordre du code de justice militaire. Cela dit, la date du 31 décembre 2002 semble plus adaptée que celle du 1er janvier 2002, puisque c'est à cette première date que prendra fin la transition vers l'armée professionnelle. Espérons que les calendriers législatifs successifs permettront de respecter cette échéance !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s 40 et 49, acceptés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 52 bis, ainsi modifié.

(L'article 52 bis est adopté.)

Article 53



M. le président.
« Art. 53. _ La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte. »
Par amendement n° 41, M. Garrec, au nom de la commission des lois, propose, dans cet article, de remplacer les mots : « dans les territoires d'outre-mer » par les mots : « , en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, à Wallis et Futuna ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec, rapporteur. La Nouvelle-Calédonie n'est plus un territoire d'outre-mer. Par conséquent, il convient de la mentionner explicitement pour y rendre la loi applicable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Richard, ministre de la défense. C'est l'éternel conflit entre l'esprit de décentralisation et la simplification administrative. Il semble que ce soit plutôt cette dernière qui soit perdante en ce moment.
M. Emmanuel Hamel. Hélas ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 41, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 53, ainsi modifié.

(L'article 53 est adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Penne, pour explication de vote.
M. Guy Penne. Ce projet de loi, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale et portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale, est, sous un air très technique, un texte qui témoigne d'une avancée de civilisation dans notre société.
En effet, comme l'a rappelé notre collègue René Garrec, un mandement de Philippe VI a permis en 1347 de soustraire aux juridictions ordinaires « les sergents et soldats employés à la garde des châteaux ». Plus tard, en 1857, fut élaboré le premier code de justice militaire, qui fut revu en 1928 puis en 1965.
Il a fallu attendre 1982 pour que le ministre de la justice de l'époque, notre collègue Robert Badinter, propose et fasse adopter par le Parlement une réforme aboutissant à faire évoluer la notion même de justice militaire.
Depuis le code de 1857, la justice militaire s'est caractérisée, au fil du temps, par une restriction croissante des spécificités qui la distinguent du droit commun. La réforme de 1982, en supprimant les tribunaux permanents des forces armées, avait radicalement transformé la justice militaire en consacrant le principe de l'application du droit commun pour le jugement des infractions commises en temps de paix et sur le territoire de la République.
Avec le projet de loi qui nous est soumis, une nouvelle étape est franchie, puisqu'il s'agit essentiellement de mettre fin à l'écart entre les procédures suivies devant les juridictions relevant du code de justice militaire, d'une part, et devant les juridictions de droit commun, d'autre part.
Ce texte s'inscrit dans la prolongation de l'oeuvre commencée en 1982 et poursuivie en 1993 avec la loi portant réforme de la procédure pénale. Ainsi, ce projet de loi permettra aux justiciables des juridictions militaires de bénéficier des garanties offertes aux autres justiciables, en particulier en ce qui concerne la garde à vue et la détention provisoire. Il autorisera également dorénavant l'application de l'ensemble des réformes de la procédure pénale aux justiciables militaires.
Dans ce projet de loi, il n'est pas envisagé de modifier les critères de compétences juridictionnelles pour les infractions commises en temps de guerre. Il apparaît toutefois nécessaire de se pencher, à l'avenir, sur la question de l'absence de définition juridique satisfaisante des notions de temps de guerre et de temps de crise.
Les sénateurs socialistes vont voter ce texte convaincus qu'ils font ainsi oeuvre utile, d'une part, parce qu'il constitue un volet non négligeable de la réforme en cours de la justice et, d'autre part, parce qu'il permet une nouvelle déclinaison du lien entre les citoyens et l'armée en faisant fi de certaines différences qui ont pu naguère séparer le citoyen-militaire du citoyen-civil et qui sont, aujourd'hui, devenues sans objet.
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Le rappel historique que vient de faire M. Penne montre bien la très grande importance de l'armée dans notre pays. Après la symbiose à laquelle nous venons d'assister entre les positions des deux commissions et celle du Gouvernement, le groupe de l'Union centriste votera ce projet de loi avec sincérité mais, surtout, avec foi.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. Avant de donner la parole à M. le ministre, je voudrais complimenter les rapporteurs, M. Serge Vinçon, qui est un habitué de ce gende d'exercice, et tout particulièrement M. René Garrec, qui intervenait pour la première fois en cette qualité.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le président, je voudrais tout d'abord m'associer aux hommages qui viennent d'être rendus et souligner le travail de préparation qui a été mené par les deux commissions, et tout particulièrement par les rapporteurs ; je veux, en outre, remercier l'ensemble des sénateurs pour la valeur et le contenu positif de cette discussion.
L'objectif du Gouvernement, après le retard avec lequel ce projet de loi vous a été soumis, est maintenant de faire au mieux pour que les navettes interviennent au plus vite afin que le texte entre en application.
La qualité du travail législatif du Sénat, qui est entré dans les détails, contribuera au rapprochement des points de vue qui sont de toute manière très convergents, et à un déroulement efficace de la suite de la discussion.
Le Gouvernement confirme bien son intention de poursuivre ce travail de mise en forme et de modernisation des dispositions de procédure et de fond applicables à la justice militaire en travaillant maintenant sur les dispositions du temps de guerre. Bien entendu, cela peut paraître abstrait aujourd'hui, mais c'est la valeur du travail législatif que de prévoir toutes les situations, y compris les plus extrêmes. Nous oeuvrerons donc dans ce sens. (Applaudissements.)
M. Jacques Machet. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux.
J'attire votre attention sur le fait que notre ordre du jour de cet après-midi a été modifié : à quinze heures, nous entendrons la lecture d'un message de M. le Président de la République ; à seize heures, nous reprendrons nos travaux tels qu'ils avaient été initialement prévus.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)

PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET

M. le président. La séance est reprise.

4

MESSAGE
DE M. LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE

M. le président. J'ai reçu de M. le Président de la République la lettre suivante :

« Paris, le 2 mars 1999.

« Monsieur le président,
« Conformément à l'article 18 de la Constitution, je vous prie de bien vouloir trouver, sous ce pli, un message que j'ai décidé d'adresser au Parlement.
« Je vous remercie de bien vouloir en donner lecture au Sénat dès l'ouverture de la séance de ce jour.

« Veuillez agréer, Monsieur le président, l'assurance de mes sentiments les meilleurs. »

« Signé : JACQUES CHIRAC »

Je vais donner lecture du message de M. le Président de la République (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent) :
« Mesdames et messieurs,
« Au moment où le Parlement ouvre le débat sur la ratification du traité d'Amsterdam, je voudrais, comme la Constitution m'y autorise, vous dire l'idée que je me fais de l'Europe et de la place que la France doit y tenir.
« L'Europe est le fruit d'une nécessité, d'un idéal et d'une volonté. Elle a surgi des décombres de la guerre et de la barbarie. Ses fondations ont été établies sur un socle étroit, exposé dès la première heure à de nouvelles menaces totalitaires.
« En dépit de toutes les forces contaires, elle n'a cessé de grandir. Ce fut la réconciliation franco-allemande, pierre d'angle du projet européen, l'union des démocraties pour défendre la paix et la liberté, la proclamation de l'Europe des droits de l'homme. Ce fut l'élan de la reconstruction dans la solidarité, l'Europe du charbon et de l'acier, l'EURATOM.
« Sous l'impulsion du général de Gaulle, la France s'est engagée résolument dans le marché commun et la politique agricole commune, à nos yeux inséparables. L'Europé a progressé, surmontant les crises de croissance, dépassant les blocages, assez sûre d'elle-même pour s'ouvrir peu à peu à ceux qui avaient tardé à la rejoindre. Elle n'a cessé de se renforcer dans ses institutions comme dans ses politiques.
« Il y eut la création du Conseil européen, l'élection d'un parlement au suffrage universel, l'Acte unique. Il y eut la libre circulation des personnes, le marché intérieur et les nombreuses politiques communes. Il y a maintenant l'euro, qui nous permet, avec nos partenaires, de reconquérir une souveraineté monétaire de plus en plus difficile à exercer au niveau national. Il y aura demain le traité d'Amsterdam, qui ouvre des voies nouvelles.
« Cette Europe, encore inachevée, les Français l'ont faite ensemble. Presque tous, nous pouvons en revendiquer notre part. Chaque président, chaque gouvernement a laissé sa trace dans cette grande aventure collective qui exige autant de passion que de raison, autant d'audace que de prudence.
« A ce point de notre histoire, dans un monde qui peine à trouver ses équilibres, il est important de nous fixer des objectifs clairs, dans l'intérêt des peuples de l'Union et pour que l'Europe poursuive et achève sa quête d'elle-même.
« Dans l'immédiat, c'est la consolidation de l'acquis européen, tâche de tous les jours, souvent difficile, comme nous le voyons avec l'Agenda 2000. Le financement de l'Union et l'avenir des politiques agricoles et régionales sont en jeu. C'est pourquoi la France défend avec fermeté les principes et le contrat sur lesquels s'est bâtie l'Europe.
« C'est aussi, plus largement, libérer les énergies, assurer la croissance de l'activité sur notre continent. Notre ambition doit être de transformer le succès de l'euro en coordonnant nos politiques économiques, en diminuant les prélèvements obligatoires et en donnant la priorité à l'emploi.
« Réformer les institutions de l'Union pour les rendre plus efficaces et plus démocratiques est une autre nécessité.
« Il n'est déjà pas facile de travailler à quinze avec des institutions conçues pour six. La prochaine adhésion de nouveaux membres nous impose de modifier au préalable la composition de la Commission comme les règles de majorité et de pondération au Conseil.
« Les peuples ne se sentent pas assez concernés par la construction de l'Union. Il faut qu'ils y participent davantage par leurs députés européens, qui vont être prochainement renouvelés et dont la présence et l'engagement à Strasbourg sont indispensables.
« Il faut aussi une plus grande implication des parlements nationaux, et je vous invite à user largement des pouvoirs que la Constitution vous attribue en la matière.
« Plus de démocratie, c'est enfin clarifier les responsabilités. L'Europe s'épuiserait à vouloir traiter de tout par des réglementations excessives qui la rendent parfois impopulaire et l'éloignent de sa vocation. Le principe de subsidiarité, libérateur d'énergies, doit s'imposer.
« Cette tâche accomplie, il faudra solder définitivement les déchirures de l'histoire, donner à l'Union ses véritables frontières, lui permettre d'accueillir, dès qu'ils seront prêts, les peuples sans lesquels elle demeurerait inaccomplie. Pendant près d'un demi-siècle, ces peuples sont restés interdits d'Europe. L'espoir de nous rejoindre les a soutenus dans leur combat pour la liberté et la démocratie. Nous n'avons pas le droit de les décevoir.
« Parce que souvent jugée trop technocratique, l'Europe est apparue lointaine et abstraite. Agissons pour qu'elle s'enracine enfin dans le coeur des hommes.
« Il y a une civilisation européenne. Elle est faite de cultures nationales qui se parlent et se répondent depuis des temps anciens. Des grandes universités médiévales aux encyclopédistes du xviiie siècle, cette civilisation a été portée par les idéaux de la liberté et de l'humanisme. Elle n'est pas une nostalgie. Elle est un projet vivant pour chaque Européen, celui d'une Europe de la culture et de l'esprit.
« Défendre et faire vivre nos langues ; échanger les savoirs, partager les expériences, renforcer nos pôles de recherche, mêler les hommes, professeurs et étudiants ; harmoniser les parcours universitaires pour créer l'Europe de l'intelligence ; mieux se connaître, et pour cela faire circuler oeuvres et créateurs ; c'est ainsi, en faisant vivre l'Europe, que nous la ferons aimer aux Européens, et d'abord aux jeunes parce qu'elle sera synonyme de liberté plus grande, d'épanouissement, d'émotion et d'amitié.
« De même qu'il y a une civilisation européenne, il y a un modèle social européen : une tradition de négociation collective, une protection contre les aléas de l'existence, un Etat garant de la cohésion sociale. C'est aussi, pour nous, un modèle de développement. Il est indissociable de la citoyenneté européenne. Depuis le mémorandum que j'ai présenté au nom de la France en mars 1996 et l'impulsion donnée par le Conseil européen de Luxembourg, l'Europe sociale progresse plus vite. L'Union se dote enfin d'une politique de l'emploi. Elle doit, en privilégiant la voie du dialogue contractuel, rechercher une plus grande harmonisation et une baisse coordonnée des charges pesant sur le travail.
« Les Français seront d'autant plus attachés à l'Europe qu'elle les protégera. Mais il faut pour cela que l'Union monte en puissance et en volonté, qu'elle assume ses responsabilités, qu'elle soit capable de s'imposer dans les discussions internationales et d'y relayer notre action.
« C'est par l'Europe que nous prendrons le meilleur de la mondialisation tout en maîtrisant les forces aveugles qu'elle peut générer. C'est par l'Europe que nous obtiendrons, ainsi que je le propose, la refonte de l'architecture financière internationale pour mieux prévenir les crises économiques.
« Qu'il s'agisse de l'aide au développement, pour que ceux qui ne manquent de rien aident ceux qui manquent de tout, qu'il s'agisse de la maîtrise des flux migratoires, de la protection de l'environnement, de la lutte contre la drogue et le terrorisme, nous serons plus forts si nous sommes ensemble.
« Je plaide depuis longtemps pour que les pays européens prennent mieux en charge leur défense, pour que l'Union se dote de moyens militaires. Les esprits devront encore évoluer et je m'y emploie jour après jour. La priorité est de bâtir un partenariat de défense transatlantique mieux équilibré, dans l'esprit de la récente déclaration franco-britannique de Saint-Malo. L'Europe doit pouvoir jouer tout son rôle dans le règlement des crises qui la concernent, comme elle a commencé à le faire au Kosovo.
« Le moment est venu de jeter les bases d'une véritable politique étrangère et de sécurité commune. Il y faudra du temps et de la persévérance. Mais la France est bien dans son rôle en proposant à ses partenaires que l'Europe pousse à l'organisation d'un monde multipolaire fondé sur l'ordre juridique international patiemment bâti depuis cinquante ans. Ayons pour ambition de faire de l'Union européenne un ensemble politique porteur de paix, d'équilibre et de progrès dans le monde.
« Mesdames et messieurs, voilà l'Europe que je souhaite, une Europe qui doit être l'expression commune des peuples qui la composent, dans la fidélité à leur identité, à leur langue, à leur culture. Aucun n'accepterait de s'y dissoudre. Chacun, à travers elle, veut au contraire exister davantage.
« Le destin de la France n'a jamais été de se replier sur son hexagone. Il est au contraire de se projeter vers l'extérieur et de faire vivre et partager ses idéaux. Cette identité française, à laquelle nous sommes tous si profondément attachés, a, aujourd'hui et pour les temps qui viennent, besoin de l'espace européen pour s'exprimer, pour essaimer, pour évoluer. Loin d'être incompatible avec l'idée de nation, l'Europe est le lieu politique et spirituel où cette idée peut respirer et s'enrichir avec le plus de force.
« Certes, des difficultés nous attendent qui sont le poids des habitudes, les conflits d'intérêts, les réticences de certains à entrer pleinement dans le mouvement et à en accepter le rythme et l'ampleur. Nous savons aussi qu'une volonté politique sera nécessaire pour défaire les noeuds qui trop souvent nous empêchent d'avancer et de gagner, pour tirer le meilleur parti des atouts que sont nos richesses humaines, nos entreprises, notre recherche, notre espace rural et maritime.
« Les élus du peuple que vous êtes, l'élu du peuple que je suis, nous devons, les uns et les autres, prendre toute notre part à cette grande oeuvre collective. Pour mieux servir les Français, je veux bâtir une Europe humaine et puissante. Etre ambitieux pour la France, c'est aussi être ambitieux pour l'Europe. » (Applaudissements sur de nombreuses travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Emmanuel Hamel. Vive la France libre !
M. le président. Le Sénat donne acte à M. le Président de la République de son message, qui sera imprimé sous le numéro 242 et distribué.
Mes chers collègues, avant d'aborder la suite de l'ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures vingt, est reprise à seize heures cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)

présidence de m. jean faure
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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chèques-vacances

Adoption d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi n° 178 (1998-1999) modifiant l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances. (Rapport n° 227 [1998-1999]).
Avant de vous donner la parole, madame le secrétaire d'Etat, je voudrais relever le fait que vous avez choisi le Sénat pour présenter votre premier projet de loi devant le Parlement. Nous apprécions ce geste à l'égard de la Haute Assemblée, et nous tenons à vous en remercier.
Vous avez la parole, madame le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est avec grand plaisir que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui, devant la Haute Assemblée et au nom du Gouvernement, le projet de loi tendant à élargir l'accès au chèque-vacances, dispositif auquel vous me savez tout particulièrement attachée.
Ce projet de loi confirme les règles essentielles et les objectifs sociaux de l'ordonnance du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances, dont vous me permettrez de rappeler les grands principes fondateurs.
Lorsque cette ordonnance a été élaborée, il s'agissait de répondre aux aspirations légitimes des individus et des familles les plus modestes à pouvoir accéder, eux aussi, elles aussi, aux vacances.
Devant vous, je n'ai pas besoin d'insister sur l'importance du droit aux vacances, indispensable à l'équilibre de la vie en société, facteur de resserrement des liens familiaux.
Vous savez combien l'accès aux vacances, à la culture, aux voyages, à la découverte contribue à l'épanouissement de la personnalité et, au-delà, en favorisant la multiplication des échanges, participe à la construction d'un monde plus tolérant.
Or, c'est bien parce qu'une partie importante, trop importante, de la société ne pouvait accéder à ce droit pour des raisons essentiellement financières que le mécanisme du chèque-vacances a été mis en place, comme un outil d'aide au départ.
On peut légitimement se féliciter que cet objectif ait été atteint pour plusieurs centaines de milliers de familles qui, grâce au chèque-vacances, ont pu, chaque année depuis 1982, se voir offrir la possibilité de rompre avec le quotidien.
Néanmoins, force est de constater qu'un grand nombre de familles, pour des raisons économiques, n'ont toujours pas - ou n'ont plus - la possibilité d'y accéder.
Une enquête menée en 1997 par la direction du tourisme confirme ainsi que 35 % des foyers disposant d'un revenu inférieur à 6 000 francs par mois ne partent jamais et que plus de la moitié des non-partants appartiennent à un foyer dont les revenus mensuels ne dépassent pas 10 000 francs.
Cette étude est révélatrice du vrai problème que nous avons à traiter avec ce projet de loi : aider à partir en vacances ces hommes, ces femmes, ces jeunes qui, aujourd'hui, sont privés de ce droit élémentaire.
C'est ce constat, cette réalité inconcevable à notre époque, qui m'a amenée à concrétiser le renforcement du dispositif existant du chèque-vacances, en projet, d'ailleurs, dès sa conception.
Sincèrement, je suis persuadée que la mise en oeuvre du projet de loi qui vous est soumis doit, en quelques années, permettre le départ de plusieurs centaines de milliers de familles supplémentaires, donc de nombreux jeunes, en particulier des jeunes familles, qui, le plus souvent, manquent de ressources pour partir.
Telle est, mesdames, messieurs les sénateurs, la finalité de ce projet de loi.
C'est un projet de loi profondément humaniste, un projet de loi de justice sociale, qui concerne exclusivement les salariés, mais qui s'inscrit dans une démarche globale tendant à favoriser l'accès de toutes et de tous aux vacances, démarche qui m'a notamment conduite à mettre en place une « bourse solidarité vacances » en direction des plus démunis, après avoir fait inscrire le droit aux vacances pour tous dans la loi de prévention et de lutte contre les exclusions.
De manière à lever toutes les ambiguïtés, je rappellerai d'emblée que le chèque-vacances ne saurait être un supplément de salaire déguisé, exonéré de charges sociales, pas plus qu'un titre de voyage banalisé, ce qui le détournerait de son objet initial. Il est évident que, tant dans l'esprit de l'ordonnance de 1982 que dans celui du projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui, l'attribution ne saurait donc en être laissée à la seule discrétion de l'employeur.
Je ne crois pas, en effet, que l'on puisse, sans risque de confusion, prêter au chèque-vacances des missions qui ne sont pas les siennes.
Ainsi, en suggérant d'assimiler le chèque-vacances au concept de participation ne va-t-on pas, logiquement, vers une distribution du chèque-vacances à l'ensemble des salariés sans critères sociaux d'attribution ?
Il me semble en effet que l'objectif de la participation créée par l'ordonnance de 1967 était bien de faire bénéficier les salariés d'une partie des fruits de l'expansion des entreprises et non, comme le prévoit l'ordonnance de 1982, de favoriser le départ en vacances des salariés qui ne le pourraient pas sans cette aide.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'exemple social original que constitue notre chèque-vacances a démontré, depuis 1982, sa raison d'être et son efficacité.
En 1998, 4 millions de personnes, soit un million de salariés et leur famille, en ont bénéficié.
Cependant, nous constatons que, dans la pratique, de très nombreux salariés n'ont pas accès au chèque-vacances.
C'est notamment le cas de la majorité des salariés des PME-PMI de moins de cinquante salariés, qui, en l'absence de comité d'entreprise, sont de fait exclus du bénéfice du chèque-vacances alors que c'est bien dans ce secteur que l'on trouve les salaires les plus modestes.
Le législateur peut, comme il lui est proposé, corriger cette situation en ouvrant le dispositif à ces salariés aux revenus les plus modestes, employés dans les PME-PMI, ainsi qu'aux salariés des entreprises, sociétés ou organismes soumis à l'article L. 351-12, 3° et 4°, ainsi qu'à l'article L. 351-13 du code du travail.
J'attire votre attention sur l'importance des effectifs potentiels concernés puisque, actuellement, 7 millions et demi de salariés sont employés par des PME. Mais je veux aussi attirer votre attention sur ce que ces salariés représentent au regard de l'évolution du monde du travail.
Les effectifs des PME ne cessent, en effet, de grandir ; aujourd'hui, ils représentent plus de 55 % de l'ensemble des salariés du secteur privé.
Est-il normal que ceux qui travaillent dans les petites entreprises ne soient pas traités de la même manière que les autres ? Car telle est bien la réalité. Quel est le frein qui les empêche d'accéder, eux aussi, au bénéfice du chèque-vacances ?
L'ordonnance de 1982, telle qu'elle est rédigée, n'interdit certes pas explicitement aux PME de faire bénéficier leurs salariés du chèque-vacances. Mais deux obstacles d'importance les pénalisent par rapport aux grandes entreprises.
Le premier concerne le coût de l'avantage du chèque-vacances. Concrètement, faute de comité d'entreprise, les employeurs ne peuvent prétendre aux exonérations de charges sur le chèque-vacances, puisque leur contribution est, du coup, considérée comme un élément de rémunération.
Le second obstacle découle du premier car, en l'absence de comité d'entreprise ou de délégués du personnel, quels moyens possèdent les salariés pour proposer à leur employeur de mettre en place le chèque-vacances ? Très peu. Cela explique qu'un nombre très marginal de PME ait signé une convention avec l'Agence nationale pour les chèques-vacances.
Aussi, le projet de loi qui vous est soumis entend prioritairement lever ces deux obstacles.
A l'article 3 du projet de loi, il est proposé d'exonérer de charges sociales la contribution au chèque-vacances des employeurs d'entreprises de moins de cinquante salariés.
En outre, de manière à permettre un dialogue social plus large et à favoriser ainsi une diffusion plus importante du chèque-vacances, il est prévu que, en l'absence de comité d'entreprise ou de représentation syndicale, un système de mandatement, comme celui qui commence à faire ses preuves dans le cadre de la loi sur la réduction du temps de travail, soit mis en place. C'est l'objet du deuxième alinéa de l'article.
Mais, pour tenir compte au mieux des difficultés d'organisation des relations sociales dans ce type d'entreprise, je propose également de permettre la délivrance du chèque-vacances par des organismes paritaires de gestion d'activités sociales de branche ou territoriaux.
C'est l'objet de l'article 5 du projet de loi.
Ainsi, comme vous pouvez le vérifier, sans bouleverser le dispositif, actuellement en vigueur, de l'ordonnance de 1982, ce projet de loi donne la priorité au dialogue social car, nous le savons bien, c'est le renforcement des relations sociales qui permettra une meilleure prise en considération du chèque-vacances par les différents partenaires sociaux.
Cette façon de faire, j'en suis persuadée, constitue une garantie contre toute tentation de dévoiement du chèque-vacances.
Par ailleurs, le projet de loi comporte un certain nombre de dispositions visant à remplir l'objectif social du chèque-vacances et à assurer une bonne gestion des deniers publics.
Ainsi, l'article 2 précise les conditions auxquelles doivent répondre les salariés pour bénéficier du chèque-vacances dans le cadre d'un avantage consenti par l'employeur, quelle que soit la taille de l'entreprise.
C'est pour répondre à un souci de justice et d'efficacité sociale que cet article prévoit également de remplacer la référence à l'impôt payé par le revenu fiscal de référence du foyer, lequel, je le rappelle, a été fixé, au titre de 1999, à 87 680 francs pour une part, majoré de 19 990 par demi-part supplémentaire.
Vous le voyez, en proposant cette disposition, nous favorisons légèrement les familles. En revanche, elle neutralise les avantages fiscaux qui permettaient à quelques salariés de bénéficier du chèque-vacances malgré des revenus initiaux dépassant le plafond.
A ce propos, il ne m'a pas échappé, monsieur le rapporteur, que la commission propose d'élargir encore plus que je ne le fais le champ des catégories de bénéficiaires potentiels du chèque-vacances. Je ne vous le cache pas, je vois là un risque de remise en cause du fondement social du chèque-vacances, qui a pour objet, non de favoriser ceux qui ont déjà les moyens de partir en vacances, mais bien d'aider les familles qui ne le peuvent pas.
J'ajoute que, si nous allions à un quasi-doublement de la référence actuellement prise en compte dans l'ordonnance de 1982, il est vraisemblable que les employeurs seraient les premiers à dire qu'ils ne pourront pas continuer à abonder le chèque-vacances.
C'est, me semble-t-il, dans le même esprit qu'il convient d'apprécier le plafond d'exonération des charges sociales qui, dans l'article 3 du projet de loi, est fixé à 30 % du SMIC brut mensuel par salarié et par an, sur la base de la durée légale du travail actuellement en vigueur, c'est-à-dire encore aujourd'hui 169 heures par mois. Ce plafond correspond au double de l'abondement moyen constaté actuellement.
Vous me permettrez d'insister sur le progrès contenu dans cette disposition nouvelle. Elle est, en effet, suffisamment large pour permettre le développement d'une aide effective au départ en vacances et rester parfaitement tolérable pour les finances publiques.
Dans ce même article 3, il est par ailleurs rappelé que le chèque-vacances ne doit en aucun cas se substituer à une rémunération ou à un avantage prévu contractuellement.
Cette disposition permet à la fois d'assurer le maintien des avantages acquis en termes de salaires et d'éviter la tentation de détourner le chèque-vacances de son objectif pour en faire un instrument pur et simple d'exonération des charges sur un élément de rémunération, au détriment de la sécurité sociale et des droits futurs des salariés, telles la retraite et les prestations sociales.
Je ne crois d'ailleurs pas inutile de rappeler que la force essentielle du chèque-vacances tient à la fois au système d'épargne et à l'abondement de l'employeur. Je pense qu'il convient de réaffirmer la nécessaire articulation de ce double principe, afin de lutter contre toutes les formes de détournement du chèque-vacances.
Permettez-moi d'aborder maintenant un autre aspect du rôle social du chèque-vacances : je veux parler de la mission confiée à l'Agence nationale pour le chèque-vacances, l'ANCV.
Certes, le projet de loi qui vous est soumis ne prévoit en aucune manière de modifier la mission confiée par l'Etat à l'ANCV, mission qu'elle remplit avec efficacité.
Il me semble toutefois que le débat d'aujourd'hui doit nous permettre de mesurer toutes les conséquences que peut avoir l'élargissement de l'attribution du chèque-vacances, en particulier quant au rôle social joué par l'ANCV.
Vous le savez, par le biais de l'agence qui gère ces titres de paiement, c'est toute une politique de soutien au développement des équipements de tourisme à vocation sociale qui a pu être mise en place.
Des milliers de « bourses vacances » ont, par ailleurs, pu être attribuées à des familles parmi les plus démunies pour leur permettre d'accéder, elles aussi, aux vacances et aux loisirs, et ce par l'intermédiaire des organismes sociaux et des associations caritatives.
Ainsi entre 1991 et 1996, ce sont plus de 60 000 personnes qui ont pu en profiter.
En 1998, les excédents réalisés par l'agence ont permis de soutenir 100 projets de réhabilitation de villages de vacances du tourisme social et associatif, pour un total de 26 millions de francs d'investissements. L'extension du chèque-vacances aux salariés des PME devrait nous permettre de conforter et d'élargir encore cette politique de rénovation du patrimoine social des vacances.
Mais vous me permettrez d'insister aussi sur l'impact de ce projet de loi dans l'économie et l'emploi touristiques.
Avec plus de 3 milliards de francs de chèques-vacances utilisés en 1997, ce dispositif a engendré 10 milliards de francs de consommation touristique dans les quelque 130 000 entreprises prestataires agréées. Il a également suscité la création de nombreux emplois en participant activement au développement local et à l'aménagement de notre territoire.
En fait, le chèque-vacances, au-delà de l'aide au départ qu'il représente pour les salariés, possède en quelque sorte une deuxième vie sociale : outre qu'il favorise l'accès aux vacances de familles qui, sans ce titre de paiement, ne pourraient sans doute pas y accéder, il constitue un véritable outil de développement du tourisme dans notre pays.
Cela permet de souligner combien la mise en place du chèque-vacances a été et demeure un véritable succès social et économique, grâce aux orientations mises en oeuvre par l'ANCV, dont la vocation est garantie par la tutelle que l'Etat - et en particulier le secrétariat d'Etat au tourisme - exerce sur elle.
Voilà pourquoi je n'entends pas que cet outil puisse disparaître ou être vidé de sa substance sociale, car cela remettrait en cause toute l'impulsion au départ en vacances que les pouvoirs publics s'efforcent de donner depuis 1982 et qu'il est aujourd'hui de notre devoir d'amplifier.
Conçu à partir d'une large concertation avec les partenaires sociaux, entamée dès le mois de septembre 1997, ce projet de loi va étendre le bénéfice du chèque-vacances à tous les salariés des petites et moyennes entreprises de moins de cinquante salariés, en ne portant atteinte ni aux droits des organismes d'activités sociales ni au fonctionnement et au statut de l'ANCV.
Il préservera surtout le caractère social et redistributif du chèque-vacances, tout en favorisant l'intervention des partenaires sociaux et des institutions représentatives du personnel.
D'ailleurs, je suis convaincue qu'un grand nombre d'employeurs saura saisir l'opportunité qu'offre le chèque-vacances pour ouvrir une activité sociale dans leurentreprise. J'en veux pour preuve le très bon accueil qui a été réservé à l'annonce de la présentation de ce projet par les organisations professionnelles, au premier rang desquelles l'Union professionnelle artisanale.
Je voudrais également souligner l'intérêt que suscite le chèque-vacances dans les autres pays européens : des gouvernements ainsi que le Bureau international du tourisme social réfléchissent actuellement avec nous à la mise en oeuvre d'un dispositif similaire et réciproque.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet qui est soumis à votre examen est donc un projet concret, cohérent, qui contribuera à l'élargissement des bénéficiaires du chèque-vacances, au renforcement de sa vocation sociale, au développement des capacités de solidarité de l'ANCV et à la croissance de notre économie touristique.
C'est un projet porteur de justice sociale et d'efficacité économique, qui permettra, pour de nombreuses familles, de faire du droit aux vacances une réalité. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyens, ainsi que sur les travées socialistes et sur certaines travées du RPR.)
Mme Hélène Luc et M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le chèque-vacances a été créé par l'ordonnance du 26 mars 1982. Son objectif était de mettre en place et de développer une nouvelle aide à la personne afin de permettre le départ en vacances des salariés aux revenus modestes. En 1980, en effet, 44 % des familles ne partaient pas en vacances, bien souvent pour des raisons financières.
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Paul Blanc, rapporteur. Vous me permettrez de continuer à penser, madame le secrétaire d'Etat, que ce dispositif s'insère dans la tradition française de la participation souhaitée par le général de Gaulle.
M. Jean Chérioux. Tout à fait !
M. Paul Blanc, rapporteur. Il s'apparente dans son principe au titre-restaurant. Les chèques-vacances sont des titres nominatifs acquis par les salariés par un effort d'épargne, avec abondement de l'employeur et, le cas échéant, du comité d'entreprise. Ils sont destinés à payer des dépenses de vacances, sur le territoire national, auprès d'organismes agréés. Ils sont émis et gérés par l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'ANCV, qui délivre également les agréments.
Au-delà de ce principe finalement assez simple, l'ordonnance de 1982 met en place un système un peu plus compliqué en instituant deux circuits de distribution des chèques-vacances.
Le premier circuit de distribution est celui de l'entreprise. Mis en place sur décision de l'employeur après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, il s'adresse aux salariés sous condition de ressources. Ainsi, en 1999, ne pourront bénéficier des chèques-vacances que les salariés pour lesquels l'impôt sur le revenu payé en 1998 ne dépasse pas le plafond de 11 450 francs.
Le chèque-vacances est financé conjointement par l'employeur et le salarié. La participation du salarié se fait au moyen de versements mensuels qui doivent être obligatoirement répartis sur au moins quatre mois et compris entre 4 % et 20 % du SMIC mensuel.
A chaque versement du salarié correspond un versement de l'employeur qui représente entre 20 % et 80 % de la valeur libératoire du chèque-vacances. Il peut être complété par une contribution du comité d'entreprise.
S'agissant du régime fiscal et social des chèques, la contribution de l'employeur aux chèques-vacances est soumise aux cotisations de sécurité sociale et d'assurance chômage, à la CSG - contribution sociale généralisée - et à la CRDS - contribution pour le remboursement de la dette sociale. En revanche, elle est exonérée des taxes sur les salaires et des cotisations de retraite complémentaire.
La participation de l'employeur aux chèques-vacances constitue pour le salarié un avantage en nature qui est exonéré de l'impôt sur le revenu dans la limite d'un SMIC mensuel.
Le second circuit de distribution est celui des « organismes sociaux » défini par l'article 6 de l'ordonnance. Il concerne les organismes qui sont habilités, en vertu des textes qui les régissent, à aider les familles à partir en vacances. Il s'agit notamment des comités d'entreprise, des caisses de retraite, des caisses d'allocations familiales, des mutuelles, des services sociaux de l'Etat et des collectivités publiques. Ces organismes ont alors la possibilité de verser les aides aux vacances sous forme de chèques-vacances.
Ce circuit dérogatoire est, paradoxalement, bien plus souple que le circuit direct. Il n'est pas limité aux salariés, chaque organisme pouvant attribuer les chèques-vacances à ses ressortissants. C'est l'organisme qui fixe ses propres critères d'attribution des chèques-vacances. Il n'est pas tenu de respecter les plafonds d'imposition fixés par l'ordonnance. En outre, à la différence de l'abondement versé par les employeurs, les aides aux vacances versées sous forme de chèques-vacances par les comités d'entreprise ne sont assujetties ni à cotisations sociales ni à la CSG ni à la CRDS.
Plus de quinze ans après l'institution des chèques-vacances, il est possible de dresser un bilan de ce dispositif. Ce bilan est en demi-teinte.
Certes, après un démarrage lent et difficile, le bilan quantitafif des chèques-vacances peut être considéré comme positif. En 1998, des chèques-vacances ont été émis pour une valeur de 3,7 milliards de francs. On peut rappeler que ce montant n'était que de 4,6 millions de francs en 1983. Par ailleurs, environ 10 000 organismes, qu'il s'agisse d'entreprises ou d'« organismes sociaux », ont distribué des chèques-vacances à un million d'attributaires. Au total, avec les ayants droit, ce sont 4 millions de personnes qui ont bénéficié de ce dispositif.
En outre, les chèques-vacances ont une incontestable dimension sociale. Ainsi, une enquête de l'Agence nationale pour les chèques-vacances montre qu'un tiers des bénéficiaires ne prendraient pas de vacances sans le chèque.
Les bénéfices de l'Agence, qui devraient atteindre 34 millions de francs en 1998, sont très largement réinvestis dans le tourisme social, par le biais soit d'une aide à la rénovation d'équipements touristiques à vocation sociale, soit d'une aide spécifique aux personnes les plus défavorisées, notamment au travers de la distribution de bourses de vacances.
Pour autant, ces éléments positifs ne doivent pas cacher les failles du dispositif.
La commission des affaires sociales du Sénat en distingue trois principales, rejoignant très largement en cela le constat établi par le Gouvernement.
Force est d'abord de constater que les objectifs visés par les chèques-vacances n'ont été atteints que partiellement. C'est là la première faille. Si le taux de départ en vacances a augmenté depuis le début des années quatre-vingt, il diminue de nouveau depuis 1991. Aujourd'hui encore, plus du tiers de nos compatriotes ne partent pas en vacances. L'accès aux vacances reste, en outre, inégal. Il dépend essentiellement de deux facteurs : les revenus du ménage et la taille de la famille. Ainsi, en 1997, seulement 55 % des familles de trois enfants ou plus sont parties en vacances.
Le système du chèque-vacances apparaît de surcroît très déséquilibré. C'est là la deuxième faille. L'ordonnance de 1982 prévoyait la coexistence de deux circuits de distribution du chèque-vacances. Dans la logique de participation qui fondait le système, le premier circuit - celui de l'entreprise - avait vocation à être le circuit du droit commun. Le second circuit - celui des organismes sociaux - ne devait être qu'un circuit alternatif, permettant à ces organismes d'attribuer l'aide aux vacances qu'ils versaient déjà sous la forme de chèques-vacances.
Pourtant, en 1998, le circuit de l'entreprise n'a représenté que 4,3 % du montant des chèques émis, celui des organismes sociaux en représentant plus de 95 %. Un tel déséquilibre s'explique d'une double manière.
D'abord, les agents des fonctions publiques et des organismes rattachés - La Poste, France Télécom - constituent la majorité des bénéficiaires des chèques-vacances puisque 55 % des chèques émis en 1998 leur ont été attribués. Or, ces agents relèvent du circuit de distribution des organismes sociaux. La surreprésentation des fonctionnaires parmi les bénéficiaires contribue alors à déséquilibrer le système.
Ensuite, le régime fiscal et social applicable aux contributions versées par les organismes sociaux est plus favorable. Leur contribution au financement des chèques-vacances n'est assujettie ni aux charges sociales ni à la CSG ou à la CRDS. On peut dès lors comprendre que les entreprises ne sont pas incitées à s'impliquer directement dans la distribution des chèques-vacances. Elles sont conduites, dans le meilleur des cas, à transférer cette fonction à leur comité d'entreprise afin de limiter le poids du prélèvement social.
La troisième faille du système actuel concerne les salariés des petites et moyennes entreprises. Leur accès aux chèques-vacances reste très faible. En 1997, seules 226 entreprises de moins de cinquante salariés avaient signé une convention mettant en place le chèque-vacances. Cela représente uniquement 3 000 salariés. Les entreprises de moins de cinquante salariés emploient pourtant, vous l'avez rappelé, madame le secrétaire d'Etat, environ 7,5 millions de salariés, soit 55 % de l'effectif total du secteur privé.
Cette situation s'explique simplement : comme elles sont dépourvues de comité d'entreprise, les PME qui mettent en place des chèques-vacances ne peuvent bénéficier des mêmes exonérations de charges sociales que les entreprises dotées d'un comité d'entreprise. Le surcoût est alors de 40 %, ce qui est très pénalisant pour les PME.
Devant ce bilan mitigé, les majorités successives ont formulé un constat partagé : le dispositif actuel n'est pas assez incitatif pour permettre une diffusion large des chèques-vacances, notamment dans les PME. Pourtant, à ce jour, malgré cet accord sur le constat, aucune réforme en profondeur du système n'a abouti.
Plusieurs propositions de loi ont cependant été déposées sur le bureau de l'Assemblée nationale en 1997. Je pense, notamment, à celle qui a été présentée par M. Jacques Blanc, à celle qui a été déposée par M. Bernard Pons et à celle dont l'auteur était M. Léonce Desprez.
A la faveur d'une « niche » parlementaire ouverte par l'article 48-3 de la Constitution, le groupe du RPR a obtenu à l'Assemblée nationale l'inscription à l'ordre du jour réservé de la proposition de loi de M. Bernard Pons. Toutefois, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, qui l'a examinée le 13 mai 1998, a conclu qu'il fallait la rejeter. Les conclusions de rejet ont été adoptées en séance publique le 15 mai 1998.
Il semble que le Gouvernement ait préféré déposer son projet de loi. Et c'est ce projet de loi, adopté en conseil des ministres le 26 août 1998, que nous examinons aujourd'hui.
Ce texte se fonde sur un diagnostic : la faible pénétration du chèque-vacances dans les PME. Il contient donc quatre mesures nouvelles, les deux premières visant à corriger cette carence, les deux autres modifiant à la marge le cadre général de l'ordonnance de 1982.
La première mesure tend à étendre la portée de l'article 6 de l'ordonnance de 1982 qui concerne le circuit de distribution des chèques-vacances par la voie des organismes sociaux. Cet article autorise tout organisme paritaire chargé de la gestion d'activités sociales et créé par accord de branche ou territorial à distribuer des chèques-vacances. Il vise explicitement à favoriser une certaine forme de mutualisation du chèque-vacances pour les PME par le biais de la négociation collective.
La deuxième mesure nouvelle exonère de charges sociales la contribution de l'employeur au financement du chèque-vacances. Cette exonération, qui ne vise pas la CSG et la CRDS, est cependant limitée aux entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de comité d'entreprise et ne relevant pas d'un organisme paritaire.
Les deux dernières mesures nouvelles ont pour objet un simple toilettage de l'ordonnance de 1982. Elles prévoient l'extension du chèque-vacances à deux nouvelles catégories de salariés - les marins pêcheurs et les dockers - et une modification du critère d'appréciation des ressources pour le salarié, le critère de l'assujettissement à l'impôt sur le revenu étant abandonné au profit du critère du revenu fiscal de référence.
La commission des affaires sociales ne peut que partager les préoccupations qui ont conduit le Gouvernement à présenter ce projet de loi, notamment son souci de voir le plus grand nombre de personnes accéder aux vacances. Elle s'interroge toutefois sur la portée réelle des mesures proposées. Il est à craindre qu'au-delà des affirmations généreuses de l'exposé des motifs les dispositions du projet de loi n'aboutissent en pratique qu'à un développement limité du chèque-vacances.
S'agissant de l'accès des salariés des PME aux chèques-vacances, la portée effective des deux mesures nouvelles proposées risque d'être faible.
L'ouverture, au travers des organismes paritaires, d'une nouvelle voie est étroite. A l'heure actuelle, il n'existe en effet que six organismes paritaires chargés de la gestion d'activités sociales, qui ne couvrent qu'un nombre minime de salariés. Le développement de cette voie exigera, en outre, une forte implication des partenaires sociaux.
Or, il est à craindre que les employeurs ne soient guère incités à développer ce type d'organismes dans la mesure où ceux-ci sont financés précisément par une contribution des employeurs. Dès lors, la mise en place de tels organismes entraînera un alourdissement supplémentaire des charges pesant sur les PME.
De même, l'exonération de charges sociales pour les PME ne sera finalement guère incitative pour l'employeur car elle est triplement encadrée.
D'abord, l'exonération reste partielle dans la mesure où elle ne vise ni la CSG ni la CRDS. Il subsistera donc un écart non négligeable entre le coût de la participation pour l'employeur et le montant net de la contribution perçue par le salarié.
En outre, la contribution ouvant droit à exonération est plafonnée à un niveau faible - 1,610 franc par salarié et par an - proche du montant actuel moyen de cette contribution, qui s'élevait à 1,350 franc en 1997. Ce montant est incontestablement insuffisant, notamment pour les salariés ayant une famille nombreuse.
Enfin, le bénéfice de l'exonération dépend d'une procédure de mise en place du chèque-vacances dans l'entreprise. Cette procédure est très rigide dans la mesure où elle oblige les PME à négocier soit un accord d'entreprise, soit un accord de regroupement d'entreprises au sein d'une commission paritaire. Or, il est à craindre que les PME ne puissent pas parvenir à conclure un accord d'entreprise faute d'interlocuteurs salariés, la négociation éventuelle avec des salariés mandatés dans les conditions prévues par la loi du 13 juin 1998 n'ouvrant que de modestes perspectives. De plus, les accords de regroupements d'entreprises demeurent rares.
S'agissant de l'extension du champ des bénéficiaires potentiels, le projet de loi reste modeste : il ne vise que les dockers et les marins pêcheurs.
La modification du critère d'appréciation des ressources aura également des effets pervers. Ce changement va se traduire par une diminution du nombre de bénéficiaires, sans pour autant permettre une appréciation véritablement objective de la capacité contributive des ménages et tout en posant un délicat problème de communication des données fiscales à l'employeur. Le Gouvernement estime à 4 % ou 5 % le nombre de bénéficiaires actuels du chèque-vacances qui seront exclus du système.
En outre, la réforme proposée neutralise la revalorisation du plafond de ressources au titre de 1999. Ce plafond est donc, à droit constant, abaissé. Ces effets vont, à l'évidence, à l'encontre de l'objectif affiché de meilleure diffusion du chèque-vacances.
Mais, au-delà de l'impact somme toute incertain des mesures proposées par le projet de loi, la commission des affaires sociales observe que le texte n'aborde pas plusieurs questions qui apparaissent pourtant comme autant de points de passage obligés pour une réforme en profondeur du chèque-vacances.
D'une part, le projet de loi ne cherche pas à mieux harmoniser les deux circuits de distribution du chèque-vacances. Au contraire, il tend à complexifier plus encore le dispositif en introduisant un troisième circuit de distribution réservé aux PME. La commission des affaires sociales estime que le système ne deviendra véritablement incitatif qu'à la condition qu'il soit simplifié et qu'il assure - au moins en termes de prélèvement social - une neutralité entre les différents circuits.
D'autre part, le projet de loi ne contient aucune mesure susceptible d'améliorer l'accès des familles et des classes moyennes modestes aux chèques-vacances.
S'agissant de la prise en compte des familles, le projet de loi n'apporte aucune innovation. Dans la mesure où le coût des vacances augmente en fonction des charges de famille, il aurait été logique de moduler l'aide apportée par le chèque-vacances en fonction du nombre d'enfants à charge.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Paul Blanc, rapporteur. Le projet de loi ne vise aucune modulation de ce type.
M. Jean Chérioux. C'est bien dommage !
M. Emmanuel Hamel. Nous n'avons pas de politique familiale !
M. Paul Blanc, rapporteur. S'agissant des classes moyennes modestes, le projet de loi est là encore en retrait. Il est pourtant démontré que le taux de départ en vacances augmente sensiblement au-delà de 15 000 francs de revenus mensuels du foyer. Néanmoins, le projet de loi n'augmente pas le plafond de ressources actuellement situé en deçà du seuil de 15 000 francs. L'accès des classes moyennes modestes aux vacances n'est donc pas favorisé.
Le projet de loi n'aborde pas non plus la question de l'avenir du chèque-vacances dans un contexte pourtant en pleine évolution.
Des négociations se sont ouvertes au sein du Bureau international du tourisme social. Elles pourraient déboucher à terme sur la mise en place d'un chèque-vacances européen. Or, la législation actuelle ne permet pas d'ouverture du chèque-vacances vers l'étranger. Le projet de loi ne donne pas à l'Agence nationale pour les chèques-vacances les moyens de prendre une « longueur d'avance » face à une telle perspective.
L'avenir du chèque-vacances passe aussi par une amélioration de sa distribution. L'Agence, qui est un établissement public industriel et commercial, conserve le monopole d'émission et de distribution du chèque-vacances.
S'il est prématuré de mettre fin au monopole d'émission dans la mesure où les ressources financières de l'ANCV sont affectées au financement d'opérations de tourisme social - et, sur ce point, je suis d'accord avec vous, madame la secrétaire d'Etat - il aurait été en revanche possible, dans un souci de pragmatisme, d'accroître l'efficacité du dispositif en permettant à l'Agence de sous-traiter la distribution des chèques-vacances.
La comparaison avec le titre restaurant souligne en effet que la coexistence de plusieurs distributeurs ne remet pas en cause la vocation sociale du dispositif et permet au contraire une meilleure diffusion du titre.
Enfin, le projet de loi semble ignorer l'effet d'entraînement du chèque-vacances en termes de retombées économiques et sociales, que vous avez pourtant soulignées. Une étude de l'Observatoire français des conjonctures économiques montre qu'un transfert de la consommation des ménages vers les services a un impact très favorable sur la croissance et l'emploi, tout en se traduisant par une diminution du déficit public.
Or, les dépenses réglées en chèques-vacances relèvent essentiellement du secteur tertiaire : hébergement, restauration, transports, activités de loisirs ou culturelles. Une augmentation de l'émission de chèques-vacances permettrait donc une création nette d'emplois et une croissance supplémentaire, notamment en provoquant une majoration des rentrées de TVA.
Dans ces conditions, et tout en s'inscrivant dans les perspectives ouvertes par ce projet de loi, la commission estime nécessaire d'enrichir le contenu du texte pour assurer une portée réelle à la réforme du chèque-vacances.
Elle vous soumettra donc plusieurs amendements visant à remédier aux insuffisances déjà signalées du projet de loi.
Cet ensemble d'amendements, qui s'articule autour de trois axes, tend à instaurer un dispositif étendu, simplifié et plus dynamique.
M. Emmanuel Hamel. Belle synthèse !
M. Paul Blanc, rapporteur. Un dispositif étendu, tout d'abord : la commission proposera d'élargir le champ des bénéficiaires potentiels de deux façons : par une augmentation sensible du plafond de ressources, pour permettre aux classes moyennes de bénéficier du chèque-vacances, et par la réaffirmation de la possibilité pour les non-salariés d'avoir accès aux chèques-vacances par le biais des organismes sociaux.
Toujours dans cette logique d'extension, la commission proposera d'étendre l'exonération de charges sociales des contributions des employeurs dans une triple direction : élargissement à l'ensemble des entreprises pour garantir la neutralité entre les deux circuits de distribution, exonération de la CSG et augmentation du plafond de la contribution pouvant être exonérée afin de rendre les chèques-vacances plus attractifs pour les employeurs.
La commission proposera également un amendement visant à abaisser de 4 % à 2 % du SMIC le montant minimum d'épargne mensuel du salarié afin de permettre aux salariés les plus modestes de se constituer une « épargne-vacances ». Je crois que ce point ne provoquera aucune discussion.
Pour mieux prendre en compte la situation des familles, il paraît souhaitable que la contribution de l'employeur au financement des chèques-vacances soit modulée en fonction du nombre d'enfants à charge. De même, il est nécessaire de majorer le plafond de la contribution de l'employeur ouvrant droit à exonération en fonction du nombre d'enfants à charge.
Mais cette extension ne sera véritablement effective que si elle s'accompagne d'une simplification des procédures, souvent très lourdes pour les entreprises. Ainsi, la commission proposera deux nouvelles voies pour permettre la diffusion des chèques-vacances dans les PME. De plus, afin d'assurer une plus grande lisibilité du dispositif, elle proposera de garantir une plus grande neutralité entre les deux réseaux de distribution.
Enfin, il est nécessaire d'intégrer ce projet de loi dans une démarche plus dynamique afin d'optimiser les retombées économiques et sociales du chèque-vacances. Pour cela, la commission proposera de permettre la distribution des chèques-vacances à l'étranger...
M. Jean Chérioux. Non ! Non !
M. Paul Blanc, rapporteur. ... et d'introduire la possibilité pour l'ANCV de sous-traiter la distribution des chèques-vacances afin de pouvoir toucher le maximum d'entreprises et de personnes.
Telles sont les principales propositions que la commission des affaires sociales vous demandera, mes chers collègues, d'adopter à l'issue de la discussion générale. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Joly.
M. Bernard Joly. Comme vous y avez fait référence, madame la secrétaire d'Etat, une étude réalisée en 1996 par l'INSEE établissait un triste constat : près de 40 % de la population ne partait pas en vacances et pour 48 % des ménages à revenu modeste le budget des vacances était le premier sacrifié.
C'est la raison pour laquelle je suis heureux de débattre aujourd'hui de ce texte.
En effet, ainsi que l'a brillamment exposé M. le rapporteur, si le bilan du chèque-vacances est positif, puisqu'un million de salariés en ont bénéficié, force est de constater que l'objectif fixé par l'ordonnance de 1982 n'est toujours pas atteint.
Le projet de loi que vous nous soumettez, madame la secrétaire d'Etat, est nécessaire ; chacun de nous en conviendra. Il élargit l'accès des salariés des PME, en particulier des entreprises de moins de cinquante salariés, au chèque-vacances.
Toutefois, ne croyez-vous pas que ses dispositions sont insuffisantes ? Je pense, notamment, à l'extension restreinte du champ des bénéficiaires et à la prise en compte insuffisante des familles et des classes moyennes modestes.
En premier lieu, le texte que nous examinons n'étend le bénéfice du chèque-vacances qu'à deux nouvelles catégories de salariés. Il n'y a rien concernant les artisans, les commerçants, les agriculteurs, les retraités ou les demandeurs d'emploi.
Or, dans la pratique, l'accès des non-salariés aux chèques-vacances reste très limité, même s'ils peuvent en bénéficier par l'intermédiaire d'organismes sociaux. En effet, seule la CNRACL - Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales - et la caisse de retraite des agents de la fonction publique hospitalière délivrent des chèques-vacances aux retraités et une seule caisse d'allocations familiales en distribue. Il est évident que, pour ces catégories, le problème réside dans le principe même du cofinancement des chèques-vacances.
En second lieu, votre projet de loi, madame la secrétaire d'Etat, ne prend en compte ni la taille de la famille ni les revenus du ménage, alors qu'il est démontré que les familles nombreuses et les classes moyennes modestes éprouvent des difficultés à partir en vacances.
S'agissant de ces deux points, je ne peux que me féliciter des modifications que propose le rapporteur M. Paul Blanc.
Si nous voulons offrir la possibilité de partir en vacances à ces personnes, il me paraît indispensable de prendre en compte les non-salariés et d'augmenter le plafond de ressources.
Je ne m'étendrai pas plus longtemps sur les amendements que M. le rapporteur nous propose d'adopter. J'orienterai mon intervention sur l'aspect touristique.
Une étude réalisée par l'Agence nationale pour les chèques-vacances, l'ANCV, a montré que la fréquence des départs des porteurs de chèques est une fois et demie supérieure à la moyenne nationale, et que le chèque-vacances induit une dépense touristique trois fois supérieure au volume des chèques émis, soit 10 milliards de francs en 1997.
Le bilan du chèque-vacances est positif pour le tourisme puisqu'il contribue à son développement en favorisant une meilleure répartition de la fréquentation dans la saison, une meilleure rentabilité des équipements et en induisant des dépenses directes et indirectes assez importantes.
L'extension du chèque-vacances, telle que nous la propose M. le rapporteur, ne pourra avoir que des incidences bénéfiques pour le tourisme, dans la mesure où elle permet de cibler de nouvelles clientèles ; je pense tout particulièrement aux retraités, qui représentent actuellement un potentiel qu'il ne faut pas négliger.
Le développement du tourisme dans un certain nombre de départements, notamment en espace rural et en zone de montagne, conditionne le développement des autres activités, telles que le commerce, l'artisanat ou l'agriculture.
Il ne faut pas oublier que le maintien de services et de la population sur certains territoires n'est possible que grâce à l'apport du tourisme ; je sais que vous en êtes convaincue, madame la secrétaire d'Etat. Il concourt aux équilibres économiques locaux en créant notamment des emplois permanents et en maintenant un tissu social cohérent.
En outre, les chèques-vacances contribuent, sous forme de subvention, à la rénovation du patrimoine touristique à vocation sociale : villages de vacances, maisons familiales de vacances, hôtels, campings, auberges de jeunesse, etc.
Cela vise à améliorer l'offre de nos territoires, qui se caractérise bien souvent, en espace rural, par la faiblesse des investissements et par une rentabilité des équipements plus faible.
Actuellement, le chèque-vacances est utilisé par 87 % des services loisirs accueil. Il permet d'accroître leur volume d'affaires avec une sécurité de paiement, leur portefeuille « produits » étant principalement composé d'hébergements tels que gîtes ruraux ou campings.
La répercussion du chèque-vacances sur le secteur touristique est indéniable et nous devons la prendre en considération.
Nombre de nos concitoyens ne peuvent partir en vacances. Offrons leur la possibilité de le faire. C'est avec cet espoir que je voterai le texte modifié par la commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Le groupe communiste républicain et citoyen accueille avec satisfaction la discussion en première lecture, ici, au Sénat, d'un projet de loi qui marquera l'aboutissement d'une des priorités de l'action que vous avez engagée, madame la secrétaire d'Etat, depuis vingt mois au sein du Gouvernement.
L'ordonnance du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances, qu'il nous est proposé, aujourd'hui, de modifier pour en étendre le bénéfice aux salariés des petites et moyennes entreprises, reposait sur une idée essentielle à nos yeux, mais trop peu souvent exploitée, selon laquelle le progrès social peut aussi être le moteur du développement économique.
C'est d'ailleurs cette même vision de la société qui avait conduit, quarante-six années plus tôt, le gouvernement du Front populaire à la création des premiers congés payés, permettant ainsi l'accès du plus grand nombre aux vacances.
Somme toute, il n'est pas étonnant que ce soit une ministre communiste qui porte un tel projet, lequel s'inscrit dans le prolongement et la continuité de l'ordonnance de 1982 et du droit aux vacances reconnu aux salariés en 1936, et je m'en félicite.
Ici, certains me rétorqueront que le gouvernement précédent avait déposé un projet de loi semblable quelques jours seulement avant une dissolution hasardeuse. Je tiens à dire qu'il s'agissait alors d'un texte dont l'objectif n'était pas tant d'élargir l'attribution du chèque-vacances à l'ensemble des travailleurs que de procéder plutôt à son détournement, pour satisfaire les appétits de quelques groupes privés.
M. Paul Blanc, rapporteur. Mais non !
Mme Odette Terrade. Si ! Aussi, je me félicite que votre texte, madame la secrétaire d'Etat, ait surmonté deux obstacles : d'une part, la soumission aux pressions financières de quelques lobbies et, d'autre part, ce qui n'est un secret pour personne, les réticences de Bercy.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cela n'a pas changé !
Mme Odette Terrade. C'est ainsi que l'équilibre de la législation du chèque-vacances est préservé, voire renforcé. Cette législation se fonde sur trois atouts qui ont assuré la réussite du chèque-vacances, tout en garantissant sa fonction sociale et populaire.
Premièrement, ce dispositif doit s'adresser en priorité aux plus défavorisés qui, sans cela, n'auraient pu partir en vacances - ils représentent le tiers des bénéficiaires - ou à ceux pour lesquels le chèque-vacances se révèle déterminant dans le choix du départ et dans la constitution d'un budget « vacances » suffisant.
Il est, en effet, essentiel que soit garanti ce caractère incitatif pour les salariés les plus modestes qui hésitent, faute de moyens, à exercer ce droit fondamental qu'est le droit aux vacances, aux voyages, à la culture et aux loisirs. En revanche, le chèque-vacances ne saurait être un budget d'appoint ou de confort destiné à compléter avantageusement la situation du bénéficiaire qui dispose d'un certain niveau de salaire.
C'est pourquoi ce projet de loi vise, parmi les 40 % de Français qui ne partent pas en vacances, la plupart de ceux qui connaissent des difficultés financières réelles.
Deuxièmement, le système de cogestion entre les salariés et les employeurs doit être maintenu et conforté sous des formes adaptées selon le type d'entreprise, mais sans que soient remis en cause les instances traditionnelles de négociation ni le rôle des organisations syndicales.
Troisièmement, l'originalité du modèle français du chèque-vacances repose sur le caractère public de l'Agence nationale pour les chèques-vacances qui assure la redistribution des excédents du dispositif au profit de la rénovation des infrastructures touristiques à vocation sociale, ainsi que l'attribution de « bourses-vacances » aux plus défavorisés.
Il est vrai que l'importance des chiffres qui ont été cités et les perspectives de croissance du nombre de bénéficiaires dans les prochaines années suscitent des convoitises : avec 3,7 milliards de francs de chèques-vacances utilisés en 1998, 10 milliards de francs de consommation touristique induite et 4 millions d'ayants droit pour 130 000 entreprises prestataires, il est à craindre une récupération du chèque-vacances, dans une optique bien éloignée des préoccupations d'ordre social que l'on a su faire prévaloir jusqu'à présent.
Avec le chèque-vacances, nous disposons d'un outil qui, tout en ayant une stricte vocation sociale, a fait la preuve de sa viabilité et s'avère, de surcroît, profitable à l'ensemble de l'économie nationale, ainsi qu'au budget de l'Etat.
Pour autant, nous aurions tort de nous satisfaire de la situation présente, lorsque l'on constate que 7,5 millions de salariés sont exclus de fait de ce mécanisme !
Le bilan mitigé dépeint par M. le rapporteur résulte moins, selon moi, des limites intrinsèques du chèque-vacances lui-même que du développement continu d'un chômage de masse, de la précarité et de la pauvreté.
A cet égard, ne faut-il pas voir dans la recrudescence des chèques-vacances distribués depuis les années quatre-vingt-dix la conséquence logique de la baisse du pouvoir d'achat des salariés, notamment des ouvriers, de la multiplication des temps partiels et des contrats à durée déterminée ?
J'observe à cet égard que 56 % des bénéficiaires sont des femmes, démonstration supplémentaire, s'il en était encore besoin, que ce sont les femmes qui souffrent d'abord des salaires à bas niveau.
Prétendre, comme le fait M. Paul Blanc, que la faible participation des PME-PMI aux financements des chèques-vacances s'expliquerait exclusivement par les insuffisances des exonérations de cotisations sociales...
M. Paul Blanc, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !
Mme Odette Terrade. ... correspond à une vision partielle de la réalité. C'est davantage l'atomisation du monde du travail, la désorganisation de la représentation salariale et l'absence de toute participation directe du personnel dans la gestion des entreprises qu'il faut montrer du doigt.
Si le chèque-vacances s'est développé d'abord dans la fonction publique puis dans de grandes sociétés de plus de deux cents salariés, c'est parce que l'expression syndicale y est mieux structurée et mieux à même d'engager l'entreprise dans une politique sociale active et volontariste.
Vouloir réduire le problème à un manque d'incitation fiscale de la part de l'Etat, c'est oublier le rôle prépondérant des syndicats, des représentants des salariés dans l'entreprise, et c'est surtout vouloir passer outre le dialogue social.
En ce sens, nous désapprouvons la logique des propositions élaborées par la commission des affaires sociales du Sénat. Nous y retrouvons d'ailleurs en filigrane les dispositions du projet Pons.
Le projet - le « contre-projet », devrais-je plutôt dire - de la majorité sénatoriale met en cause les trois principes fondateurs que j'évoquais voilà un instant.
Il prétend élargir le bénéfice du chèque-vacances aux classes moyennes et, par là même, pervertir le caractère populaire du système.
Il confère toute liberté aux employeurs en leur accordant des exonérations de cotisations sociales de façon systématique et généralisée en dévalorisant à terme le rôle des comités d'entreprises.
Enfin, il engage l'ANCV dans une remise en cause plus ou moins avouée de sa situation de monopole dans l'émission des chèques-vacances. Rappelons pour mémoire que le gouvernement Chirac avait déjà tenté, dès 1987, de privatiser l'Agence. La droite n'a visiblement pas renoncé à cet objectif, mais avance cette fois-ci de façon plus masquée en incitant à la sous-traitance de la distribution des chèques-vacances.
Madame la secrétaire d'Etat, comme vous pouvez le constater, votre texte est loin de réaliser le consensus espéré.
Deux conceptions diamétralement opposées apparaissent.
La position de la droite se résume à vouloir transformer le chèque-vacances pour en faire un placement financier intéressant,...
M. Paul Blanc, rapporteur. Mais non !
M. Jean Delaneau, président de la commission des affaires sociales. C'est une caricature !
Mme Odette Terrade. ... voire spéculatif, pour le seul intérêt du grand patronat. En vérité, la majorité sénatoriale prend prétexte du chèque-vacances pour réaliser sa politique de compression des coûts sociaux en faveur des patrons.
La conception du Gouvernement, que notre groupe partage pleinement, est d'une tout autre nature. Nous considérons qu'un droit n'a de valeur qu'à la mesure des moyens qu'on lui attribue pour le réaliser. Partant de là, ce texte se veut pragmatique et équilibré, prenant acte des carences du dispositif mis en place en 1982 tout en s'appuyant sur ce qui fonctionne.
Le projet de la commission est, quant à lui, dogmatique et loin de répondre aux attentes sociales suscitées par la réforme de l'ordonnance. (M. le président de la commission proteste.)
Pour conclure, madame la secrétaire d'Etat, je souhaiterais obtenir des précisions de votre part sur le cas de salariés de la fonction publique, en particulier les contractuels de droit privé.
A l'heure où les fonctionnaires font l'objet d'attaques de toutes sortes, il est bon de rappeler que nombre d'entre eux ne disposent pas même du SMIC pour vivre. Je pense, notamment, aux contrats emploi-solidarité ou aux emplois-jeunes.
Je sais que vous travaillez d'arrache-pied, en concertation avec vos collègues ministres concernés, pour éviter toute discrimination à l'égard de ces personnes en situation de précarité. Peut-on raisonnablement espérer qu'une solution soit trouvée avant la promulgation de cette loi ? Si tel est le cas, quelle forme prendra-t-elle ?
Le même problème se pose, bien qu'en des termes différents, pour les retraités ou les chômeurs. Pour ces derniers, ne peut-on envisager une participation des ASSEDIC pour promouvoir l'utilisation du chèque-vacances ?
S'agissant, en revanche, des travailleurs indépendants, l'ouverture en direction des organismes paritaires de gestion d'activités sociales visés à l'article 6 de l'ordonnance semble pertinente.
Par ailleurs, peut-on avoir confirmation que les comités d'activités sociales et culturelles instaurés par la loi d'orientation agricole actuellement en discussion auront la possibilité de distribuer les chèques-vacances aux salariés agricoles ?
Enfin, où en est-on des négociations à l'échelon européen pour permettre à terme aux bénéficiaires français du chèque-vacances de partir à l'étranger ? Nous proposerons sur ce point un amendement qui devrait permettre d'avancer dans cette voie.
Le texte que le Sénat adoptera devra être à même de garantir l'intégrité du modèle français du chèque-vacances. Malheureusement, au regard des amendements présentés par la commission, tous les doutes sont permis. (M. le rapporteur proteste.)
En conséquence, vous comprendrez, madame la secrétaire d'Etat, que le groupe communiste républicain et citoyen, attaché à votre conception de l'élargissement des chèques-vacances aux PME et aux PMI, ne pourrait voter un texte à ce point remanié et malmené par la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Paul Blanc, rapporteur. Mais non !
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour les sénateurs du groupe socialiste, le chèque-vacances est indissolublement lié à la grande idée du droit aux vacances pour tous, tel qu'il a commencé à être mis en oeuvre en 1936. Ce fut en effet une idée neuve à l'époque que de considérer les salariés non comme de la main-d'oeuvre mais comme des êtres humains à part entière ayant droit aux loisirs, aux voyages, aux découvertes, à la liberté, à tout ce qui pouvait, en un mot, favoriser l'enrichissement et l'épanouissement de leur personnalité.
Mais il ne suffit pas de proclamer les principes pour leur donner une existence concrète dans le quotidien de nos concitoyens.
Comme l'indique le préambule de l'ordonnance du 26 mars 1982 portant création du chèque-vacances, « le droit aux vacances n'a pu s'inscrire dans les faits que parce qu'étaient mis en place certains moyens permettant de l'exercer ». Le chèque-vacances, créé en 1982 par une ordonnance signée de Pierre Mauroy, est au nombre de ces moyens.
Nous avons plaisir à constater que les réticences exprimées dans le passé sur les travées de la majorité sénatoriale ont disparu. Aujourd'hui, le Sénat est unanime à reconnaître tant l'utilité du chèque-vacances que la nécessité d'en étendre le bénéfice aux millions de salariés qui n'en disposent pas encore aujourd'hui.
Certes, nous divergeons sur les modalités, comme le débat le démontrera ; mais il convenait d'abord de rendre cet hommage à celui qui était alors Premier ministre et qui est devenu notre collègue.
Le chèque-vacances, après des débuts modestes, a connu un incontestable succès. Quatre millions de personnes, soit un million de salariés et leurs familles, en bénéficient aujourd'hui. Le taux de personnes ne partant pas en vacances est passé de 4,4 %, en 1982, à 35 %, aujourd'hui. Je tiens à souligner ce résultat, parce que l'on parle beaucoup, à juste titre d'ailleurs, de tous ceux qui ne partent pas en vacances, notamment parmi les 7,5 millions de salariés des petites entreprises qui ne bénéficient pas encore des chèques-vacances.
Il convient donc d'élargir le dispositif de manière décisive, comme vous nous le proposez avec votre projet de loi, madame la secrétaire d'Etat. Mais, dès à présent, des mesures ont été prises, notamment dans le prolongement de la loi relative à la lutte contre les exclusions, pour aider ceux qui ne peuvent pas partir, pas même un week-end par an. Au moment où nous nous apprêtons à élargir un dispositif en direction des salariés en activité, nous ne devons pas oublier ceux qui vivent l'exclusion ou le risque d'exclusion au quotidien. Les vacances, la possibilité de s'évader de son univers habituel, souvent vécu comme un lieu de relégation, sont un facteur important d'équilibre personnel et d'insertion sociale. Elles ont un impact positif sur la santé et l'harmonie familiale.
Votre action sur ce point, madame la secrétaire d'Etat, est significative, puisque vous consacriez, dès 1998, 2 millions de francs sur votre budget aux bourses-solidarité-vacances, qui permettent d'assurer le transport etl'hébergement des familles les plus démunies dans des équipements de loisirs. Pour 1999 et 2000, 4 millions de francs et 6 millions de francs sont respectivement prévus. Nous vous apportons tout notre soutien dans cet effort, qu'il convient de ne pas ralentir et qui est la preuve de votre attachement profond aux valeurs de justice et de solidarité.
Permettez-moi de citer l'expérience - la première du genre, je crois - qui a été engagée, en 1996, par la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, en faveur de ses retraités les moins favorisés pour accéder aux loisirs. Jusqu'alors, les retraités des fonctions publiques territoriale et hospitalière étaient écartés de ce dispositif. Dans le cadre de cette expérience lancée en février 1996, l'objectif annuel de 6 000 souscriptions a été atteint dès les deux premiers mois. Cette démonstration d'un besoin réel a été confirmée en 1997, année au cours de laquelle 45 millions de francs en chèques-vacances ont été employés par les retraités de la CNRACL, dont un nombre très significatif était inconnu du fonds d'action sociale de la caisse.
Pour l'avenir, la qualité du partenariat qui s'est instauré entre l'ANCV et la CNRACL laisse augurer d'une extension aménagée de ce service au profit des retraités à mobilité réduite.
C'est donc un texte très important que vous nous présentez aujourd'hui, madame la secrétaire d'Etat. Je dirai même que, pour un sénateur socialiste, c'est un projet de loi particulièrement satisfaisant dans la mesure où il conjugue efficacité économique et progrès social.
S'agissant de l'efficacité économique, le tourisme est le premier secteur, en termes d'emplois du secteur marchand, dans notre pays. La France est d'ailleurs la première destination mondiale ; représentant d'un département à haute valeur touristique, les Alpes-de-Haute-Provence, je suis particulièrement conscient de l'importance économique de ce secteur, notamment en nombre d'emplois.
Le chèque-vacances constitue un apport économique important puisque les 3 milliards de francs de chiffre d'affaires de chèques utilisés en 1997 ont engendré 10 milliards de francs de consommation touristique. Le coefficient démultiplicateur est donc non négligeable, et, même si le processus d'élargissement aux employés de petites et moyennes entreprises ne peut atteindre immédiatement un tel score, son impact doit évidemment être pris en compte.
De plus, l'Agence nationale du chèque-vacances redistribue la totalité de ses excédents au tourisme social. Elle contribue ainsi à soutenir le développement des équipements de tourisme à vocation sociale et participe indirectement à l'aménagement du territoire, qui est très cher à la Haute Assemblée. Son rôle est donc irremplaçable.
Par ailleurs, ce texte entraînera un progrès social, et ce pour d'évidentes raisons. En adoptant cette loi, nous allons en effet ouvrir aux salariés modestes des petites et moyennes entreprises la possibilité de bénéficier du chèque-vacances, moyennant une contribution que nous voudrions d'ailleurs voir ramenée à 2 % du SMIC. Nous ferons aussi oeuvre de justice sociale, puisque vous précisez, madame la secrétaire d'Etat, que l'exonération de charges ne sera consentie à l'employeur que si sa contribution est plus élevée pour les salariés dont les rémunérations sont les plus faibles, ce qui était oublié jusqu'à présent. Je rappelle que cette participation peut atteindre 50 % du montant total des chèques-vacances.
Au travers de cette exonération de charges, vous procédez également à un rééquilibrage de l'effort entre les employeurs et les organismes sociaux, notamment les comités d'entreprise, qui étaient seuls jusqu'à présent à en bénéficier, ce qui explique le faible nombre d'employeurs engagés directement dans le dispositif du chèque-vacances.
A ce propos, je précise également que la méthode d'accord paritaire de branche ou à base territoriale que vous proposez nous convient parfaitement. Elle est de nature à favoriser le développement du dialogue social dans les petites entreprises et à garantir la clarté du dispositif sur le plan financier.
Ce projet de loi permettra aussi un progrès social dans la mesure où sera adoptée la formule du plafond de revenu du foyer fiscal, selon le système utilisé pour les allégements d'impôts sous conditions de ressources, qui prend également en compte les enfants.
Je voudrais néanmoins attirer votre attention sur la situation des personnels non titulaires de la fonction publique, madame la secrétaire d'Etat. En effet, les fonctionnaires de l'Etat peuvent, depuis le 1er avril 1987, bénéficier du chèque-vacances à condition que leur impôt sur le revenu n'excède pas 11 350 francs, chiffre de 1997. Le système est géré par la mutualité de la fonction publique, et les fonctionnaires s'adressent à leur mutuelle pour ouvrir les plans d'épargne.
Quant aux collectivités territoriales, elles ont été, si l'on peut dire, raccrochées pour leurs agents titulaires à l'article 6 de l'ordonnance par le biais des mutuelles, la CNRACL servant de support pour leurs retraités selon le dispositif que j'ai abordé précédemment.
Mais qu'en est-il des personnels non titulaires, contractuels de droit public et de droit privé, vacataires, contrats emploi-solidarité et contrats emploi consolidés, emplois-jeunes ? La situation est actuellement aussi confuse que le nombre de statuts est différent.
Pouvez-vous, madame la secrétaire d'Etat, nous apporter des précisions sur ce qu'il est possible de faire pour ces personnels qui ne bénéficient pas déjà des avantages liés au régime de la fonction publique et qui perçoivent des rémunérations souvent très modestes ? Leur situation justifie amplement que l'on envisage à leur égard une extension du dispositif chèque-vacances.
Enfin, et j'en terminerai par là, une question se pose pour l'avenir du chèque-vacances. Ce dispositif n'existe qu'en France - il est également présent en Suisse, semble-t-il, dans un système un peu différent - et le chèque-vacances ne peut être utilisé que sur le territoire national. A notre époque, cela limite les possibilités d'utilisation, et je ne suis pas certain que nous puissions justifier longtemps cette situation au regard de la législation européenne.
Ne serait-il pas possible, sous une forme qui reste à définir, et bien évidemment sous réserve d'accords de réciprocité, d'étendre progressivement l'utilisation du chèque-vacances au moins aux pays membres de l'Union européenne ? Tout ce qui peut permettre à nos compatriotes de découvrir d'autres horizons, d'autres modes de vie, doit être encouragé.
Telles sont, madame la secrétaire d'Etat, en quelques mots, les remarques que je tenais à faire sur ce projet de loi. Comme vous le voyez, elles sont de nature fort positive. C'est avec plaisir que le groupe socialiste du Sénat vous fait part de son soutien dans votre action, en particulier sur ce projet de loi dont nous approuvons à la fois le principe et les modalités. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en premier lieu, je voudrais remercier les différents orateurs qui se sont exprimés sur ce projet de loi, auquel je tiens beaucoup.
J'ai remarqué avec plaisir le travail très fouillé et très fourni de votre rapporteur, M. Paul Blanc. Et, même si je ne partage pas toutes les conclusions de son rapport, je me félicite d'y avoir noté que la commission des affaires sociales, son président et son rapporteur ont décidé de s'inscrire dans la démarche du Gouvernement et d'apporter leur contribution pour que ce projet ait une portée réelle.
Je dois dire que c'est tout à fait dans cet esprit que j'entends défendre ce projet de loi.
Les enjeux de l'élargissement du chèque-vacances, sociaux pour les salariés et économiques pour le pays, méritent de confronter les idées des uns et des autres et, dans ce même état d'esprit positif, il conviendra de vérifier la validité de la portée réelle des propositions de chacun ainsi que leur faisabilité.
C'est pourquoi, avant la discussion des articles, je souhaite répondre à quelques-unes des questions qui ont été soulevées au cours de cette discussion générale.
Je suis très sensible aux remarques de M. Blanc sur les difficultés que rencontrent les ménages les plus modestes et les familles nombreuses pour partir en vacances. M. Joly a d'ailleurs également soulevé ce problème.
Je crois qu'il faut bien voir que ces difficultés ne résultent pas d'une seule cause, qui serait un demi-échec du chèque-vacances. Plusieurs facteurs ont contribué à un moindre départ en vacances des salariés modestes et des familles. Je pense à la montée du chômage, à la fermeture de grandes entreprises ou à la baisse de leurs effectifs, et à la réduction corrélative du nombre de comités d'entreprises et de leurs moyens. Lorsque les difficultés financières apparaissent, c'est d'abord, vous le savez, le budget vacances qui est rogné, comme l'a souligné M. Joly.
Enfin, les effectifs de salariés dans les PME se sont proportionnellement accrus, comme le souligne le rapport de M. Blanc, pour atteindre maintenant 55 % du secteur privé. Cela contribue à rendre plus complexe, parce que plus diffus, la distribution du chèque-vacances.
Le présent projet de loi a donc pour objectif premier de permettre à un nombre croissant de salariés des PME de bénéficier du chèque-vacances.
C'est aussi pour répondre aux difficultés des familles que j'entends conserver au chèque-vacances, sans le banaliser, sa vocation sociale d'outil d'aide au départ en vacances des salariés modestes.
Je l'ai dit en introduction, mon action ne se limite pas au chèque-vacances. Je vous ai parlé de la bourse solidarité vacances, et, en accord avec Mme Martine Aubry, nous avons décidé de mettre en place un groupe de travail, animé par le délégué interministériel à la famille, pour mettre à plat la politique familiale en matière de vacances et redonner à cette idée des vacances en famille la place qui doit être la sienne.
Sachez que je suis très attachée, comme ceux d'entre vous qui ont soulevé cette question, à la confidentialité de l'avis d'imposition des bénéficiaires. Au demeurant, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a demandé à la direction générale des impôts de résoudre ce problème, qui ne concerne d'ailleurs pas que les seuls chèques-vacances.
Mme Odette Terrade, comme M. le rapporteur et M. Domeizel, a souligné l'originalité du modèle français du chèque-vacances. Dans sa forme ou dans ses variantes, a-t-il une vocation à devenir européen ? La question est posée, pour plusieurs raisons : d'abord, parce que d'autres pays réféchissent et avancent sur le concept du chèque-vacances ; ensuite, parce que le Gouvernement n'est pas insensible à l'utilisation du chèque-vacances dans les Etats membres de l'Union européenne ; enfin, parce que va se poser la question de l'utilisation de la monnaie unique et du libellé des chèques-vacances en euros.
Toutefois, cette possibilité est encore en voie d'expertise. C'est en effet une construction extrêmement complexe, qui doit se faire de façon maîtrisée, parce qu'il s'agit d'agréer des prestataires sur le territoire de l'Union européenne.
Vous comprendrez donc bien que l'on ne peut pas agir avec précipitation. De plus, tout cela doit être fait dans le souci de ne pas déséquilibrer l'industrie touristique nationale.
Pour intervenir dans ce domaine, la réflexion doit être encore approfondie. Je vous propose de consacrer le temps qui nous sépare d'une deuxième lecture pour avancer dans ce sens.
M. Claude Domeizel et la plupart des orateurs m'ont parlé des salariés de la fonction publique actuellement écartés de l'accès au chèque-vacances.
C'est une préoccupation que je partage, comme d'ailleurs mon collègue chargé de la fonction publique, M. Zuccarelli.
Le comité interministériel d'action sociale a par ailleurs, sous l'autorité de Mme Escoffier, abordé cette question et il a proposé des pistes de réflexion qui seront discutées dans les prochaines semaines.
A ce jour, M. Zuccarelli considère qu'une ouverture aux emplois-jeunes et aux contrats emploi-solidarité n'est pas exclue, sous réserve d'une maîtrise des coûts du chèque-vacances.
D'ores et déjà, les agents contractuels de droit public et les adjoints de sécurité de la police nationale ont accès au chèque-vacances. J'ajoute que ces dispositions ne relèvent pas du domaine législatif et que, par conséquent, nous pourrons encore agir prochainement sur ce point.
Je voulais dire en outre à M. Joly que je partage l'opinion selon laquelle le chèque-vacances devrait avoir des incidences positives pour le développement du tourisme, en permettant de viser de nouvelles clientèles.
Tel est bien l'objet du présent projet de loi, puisque celui-ci ouvrira de nouveaux droits à un potentiel de 7,5 millions de salariés de PME.
Mais le texte antérieur laisse bien évidemment aux retraités la possibilité d'accéder au chèque-vacances, au travers de l'article 6 de l'ordonnance. Nous aurons peut-être encore l'occasion d'y revenir au cours du débat. En tout état de cause, croyez bien que je ne néglige pas ce potentiel touristique.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques précisions que je voulais apporter avant que nous engagions la discussion des articles. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - Le premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances est remplacé par l'alinéa suivant :
« Les salariés des entreprises, sociétés et organismes soumis aux dispositions des articles L. 223-1, L. 351-12 3° et 4° et L. 351-13 du code du travail, leur conjoint ainsi que les personnes à leur charge, telles qu'elles sont définies aux articles 6 et 196 du code général des impôts, peuvent, avec la contribution de leur employeur, acquérir des titres nominatifs appelés "chèques-vacances". »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article additionnel après l'article 1er



M. le président.
Par amendement n° 10, Mmes Terrade, Beaudeau et Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les chèques-vacances peuvent également être remis en paiement des dépenses effectuées sur le territoire des Etats membres de l'Union européenne aux prestataires dont les conditions d'agrément sont fixées par décret. »
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Je souhaite revenir sur la possibilité d'utiliser les chèques-vacances à l'étranger, même si une réponse sur ce point nous a été apportée à l'instant par Mme la secrétaire d'Etat.
L'utilisation du chèque-vacances étant, à l'heure actuelle, limitée au territoire français, nous proposons par cet amendement de permettre à ses titulaires d'en jouir également dans un autre Etat membre de l'Union européenne.
Sauf à considérer - mais je ne pense pas que ce soit le but que nous nous fixions - qu'une telle mesure serait de nature à défavoriser quelque peu le tourisme français, aucun argument ne peut s'opposer à la liberté de circulation des personnes sur le territoire de l'Union européenne.
C'est pourquoi il doit être possible à l'ANCV, l'Agence nationale pour les chèques-vacances, de passer, comme nous le souhaitons, des conventions avec les entreprises prestataires non françaises afin d'assurer la mobilité des salariés partout en Europe. Bien entendu, cela se ferait progressivement, dans la mesure où leur pouvoir d'achat oblige le plus souvent ces familles à choisir un lieu de vacances situé sur le territoire national.
Bien évidemment, nous en avons conscience, une telle disposition ne peut être décidée de façon unilatérale, sans concertation préalable avec les gouvernements et les acteurs du tourisme des pays concernés.
Sans vouloir anticiper sur une décision qui doit être prise à l'échelon communautaire, il nous paraît toutefois souhaitable d'inscrire le principe de cette ouverture dans le présent texte, en laissant à un décret le soin de fixer, le moment venu, les conditions d'agrément des prestataires non nationaux.
Je crois savoir, madame la secrétaire d'Etat, que vous avez d'ores et déjà engagé des démarches auprès de nos partenaires européens pour tendre vers une harmonisation des réglementations nationales à ce niveau. Encore faut-il que cette harmonisation s'effectue par le haut, en préservant notre spécificité nationale en matière de promotion et de gestion des chèques-vacances. En effet, une ouverture de l'ANCV sur l'Europe doit s'opérer en prenant par ailleurs toutes les garanties nécessaires quant à la gestion publique et redistributive des chèques-vacances.
C'est donc dans cette optique qu'il faut comprendre le sens de notre amendement, qui préparerait positivement notre législation sans attendre que la Commission européenne impose sa propre conception du chèque-vacances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. La commission souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Comme je viens de l'indiquer, le Gouvernement n'est pas hostile à l'utilisation du chèque-vacances dans les Etats membres de l'Union européenne.
Toutefois, cette possibilité est encore en voie d'expertise. C'est en effet une construction extrêmement complexe, qui doit se faire de façon maîtrisée : il s'agit d'agréer des prestataires sur le territoire de l'Union européenne et un certain nombre de pays, tels que le Portugal, l'Espagne et l'Italie, s'orientent actuellement, sur la base de notre expérience, vers la mise en place de leur propre chèque-vacances.
Cette situation va permettre d'envisager l'établissement d'une réciprocité, notamment au niveau des prestataires. Vous comprendrez donc bien qu'il faut agir sans précipitation, en veillant à ne pas déséquilibrer notre industrie touristique nationale.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Nous ne voulons pas intervenir avant d'avoir encore approfondi notre réflexion. Je vous propose donc de consacrer le temps qui nous sépare de la deuxième lecture à cette tâche et, en attendant, je vous demande, monsieur Fischer, de retirer votre amendement.
M. le président. Quel est, dans ces conditions, l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. La commission s'associe à la demande de retrait formulée par le Gouvernement.
M. le président. Monsieur Fischer, l'amendement n° 10 est-il maintenu ?
M. Guy Fischer. Je retire cet amendement d'autant plus volontiers que je considère que Mme la secrétaire d'Etat nous a répondu à deux reprises !
Nous souhaitons poursuivre dans la voie qui est tracée et nous aurons certainement l'occasion, dans quelque temps, de revenir sur cette question.
M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.

Article 2



M. le président.
« Art. 2. - L'article 2 de l'ordonnance du 26 mars 1982 susmentionnée est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 2. - I. - Les salariés doivent justifier chaque année, auprès de leur employeur, que le montant des revenus de leur foyer fiscal de l'avant-dernière année, tels qu'ils sont définis au V de l'article 1417 du code général des impôts, n'excède pas la somme de 86 840 francs pour la première part de quotient familial, majorée de 19 770 francs par demi-part supplémentaire. Ces chiffres sont actualisés chaque année, dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.
« II. - L'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés est exonéré de l'impôt sur le revenu, dans la limite du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle.
« Cette contribution de l'employeur est exonérée de la taxe sur les salaires prévue à l'article 231 du code général des impôts.
« Les chèques-vacances sont dispensés du timbre.
« III. - L'employeur, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ou de toute autre instance de concertation ayant compétence en matière d'oeuvres sociales, définit, sous réserve des dispositions du 2° du II de l'article 2 bis de la présente ordonnance, les modalités de l'attribution éventuelle de chèques-vacances à ses salariés qui répondent aux conditions fixées au présent article. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 1 rectifié, M. Blanc, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - Dans les premier et deuxième alinéas de l'article 2 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée, le nombre : "9 000" est remplacé par le nombre : "20 000".
« II. - Dans le troisième alinéa du même article, le mot : "interprofessionnel" est supprimé.
« III. - L'avant-dernier alinéa du même article est ainsi rédigé :
« La contribution de l'employeur est exonérée des taxes prévues aux articles 224, 231, 235 bis et 235 ter C du code général des impôts. »
Par amendement n° 8, le Gouvernement propose, dans la première phrase du paragraphe I du texte présenté par l'article 2 pour l'article 2 de l'ordonnance du 26 mars 1982 précitée :
I. - De remplacer la somme : « 86 840 francs » par la somme : « 87 680 francs ».
II. - De remplacer la somme : « 19 770 francs » par la somme : « 19 990 francs ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 1 rectifié.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement a plusieurs objets.
Le paragraphe I vise, d'une part, à maintenir le critère actuel d'appréciation des ressources du salarié, à savoir la cotisation d'impôt sur le revenu, pour pouvoir bénéficier du chèque-vacances. Le maintien du droit existant semble préférable, dans un souci de simplification : les entreprises y sont habituées, le salarié n'a pas à faire état auprès de l'entreprise du détail de ses revenus, il lui suffit de connaître le montant de l'impôt acquitté. Cela permet également d'éviter les effets de champs négatifs du changement de critères, qui se traduiront, je le rappelle, par une diminution de l'ordre de 5 % du nombre des bénéficiaires sans pour autant garantir une appréciation véribablement objective des ressources du salarié.
Par ailleurs, dans le paragraphe I, nous augmentons sensiblement le plafond de ressources afin de mieux prendre en compte les classes moyennes.
Dans le paragraphe II, de nature rédactionnelle, nous actualisons l'ordonnance de 1982 en corrigeant l'appellation du SMIC pour retenir le terme officiel tel qu'il résulte des articles L. 141 et suivants du code du travail.
Dans le paragraphe III, nous mettons en cohérence l'ordonnance de 1982 avec la législation actuelle. L'ordonnance de 1982 prévoyait que la contribution de l'employeur serait exonérée de la taxe sur les salaires. La loi de finances pour 1989 a étendu cette exonération fiscale à la taxe d'apprentissage, à la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle et au 1 % logement.
Il s'agit donc simplement, je le répète, d'actualiser le texte de l'ordonnance de 1982.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat, pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 1 rectifié et pour défendre l'amendement n° 8.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, vous exprimez, dans cet amendement, deux préoccupations : la première est relative à l'accès au chèque-vacances pour certaines catégories de salariés ; la seconde se rapporte à l'exonération des taxes sur les salaires pour les entreprises.
Sur le premier point, je l'ai déjà dit, le chèque-vacances est avant tout un outil d'aide au départ en vacances des salariés. C'est pour cela que le projet l'étend aux salariés des petites et moyennes entreprises, dont le niveau de salaire est souvent modeste.
De plus, le revenu fiscal de référence, prévu par la loi, est une notion plus stable et plus équitable pour les salariés : plus stable parce que ce concept gomme les réductions d'impôt à caractère conjoncturel qui peuvent à tout moment être mises en cause par les lois de finances ; plus équitable parce qu'il prend seulement en compte le revenu imposable après abattement des 10 % et 20 %. A ce titre, il évacue les réductions d'impôt dont peuvent bénéficier certains contribuables.
Doubler quasiment le niveau d'imposition retenu actuellement, comme vous le proposez, ne peut qu'entraîner un financement par l'Etat au bénéfice de salariés qui pourraient partir grâce à leurs propres ressources.
Enfin, le barème retenu dans le projet de loi, à savoir 87 680 francs pour une part et 19 990 francs pour la demi-part supplémentaire, chiffres actualisés pour 1999 - cela répond à votre crainte - touche une grande partie de la population. Une récente étude de la direction générale des impôts chiffre à 75 % la proportion de salariés entrant dans le champ du barème, soit 8 millions de personnes non imposables et 8 millions de personnes imposables disposant d'un revenu fiscal de référence inférieur au plafond.
Je ne sais d'ailleurs si l'on ne pourrait inclure dans cette catégorie de la population les « couches moyennes modestes », comme vous le souhaitez, encore que je m'interroge sur ce concept nouveau de « couches moyennes modestes ».
C'est donc un accès massif aux chèques-vacances que permet le projet de loi.
Quant à la précision que vous proposez, dans le paragraphe II, sur l'exonération des taxes sur les salaires, taxes d'apprentissage, taxes sur la construction, il s'agit d'un élément nouveau qui fait l'objet d'un examen approfondi, avec le souci de la sécurité juridique des entreprises et de la simplification des obligations qui leur incombent.
Pour ce qui est de la suppression de la reprise de la dispense de timbre, j'observe qu'il s'agit d'une simple cohérence rédactionnelle.
Enfin, je ne peux pas accepter la suppression du paragraphe III de l'article 2, qui est une pièce essentielle de la mise en place du chèque-vacances dans les entreprises parce que intimement liée au dialogue social.
Pour toutes ces raisons, l'amendement n° 1 rectifié recueille un avis défavorable du Gouvernement.
L'amendement n° 8 a pour objet de répondre à une interrogation de la commission, qui s'inquiétait de la stagnation du montant du revenu fiscal de référence. Nous voulons, en effet, par cet amendement, prendre en compte les dispositions issues de la loi de finances de 1999.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 8 ?
M. Paul Blanc, rapporteur. L'amendement n° 8 tend à actualiser le nouveau critère d'appréciation des ressources proposé dans ce projet de loi pour tenir compte de la revalorisation intervenue dans la loi de finances de 1999. La commission prend acte de cette correction d'une erreur matérielle et du souci du Gouvernement de relever le plafond de ressources.
Cet amendement est cependant incompatible avec l'amendement de la commission, qui prévoit le maintien du critère actuel, à savoir la cotisation d'impôt sur le revenu, et une revalorisation sensible du plafond de ressources.
Par ailleurs, madame la secrétaire d'Etat, permettez-moi de vous dire que je ne vous suis pas lorsque vous affirmez que l'augmentation du plafond de ressources supprimerait la dimension sociale du système. En effet, aujourd'hui - des études l'ont montré - un tiers des bénéficiaires ont des revenus supérieurs à 15 000 francs mensuels et 10 %, des revenus supérieurs à 20 000 francs mensuels. Les organismes sociaux fixent en effet librement les conditions de ressources, comme je l'ai indiqué dans mon rapport.
La commission, dans son amendement, cherche à assurer une meilleure neutralité au système tout en étant favorable aux classes sociales modestes. Je me réjouis, d'ailleurs, que vous ayez repris cette expression de « classes sociales modestes », car je crois qu'elle correspond à une réalité.
Si l'on se réfère au revenu net moyen calculé par l'INSEE, l'augmentation du plafond a pour principal effet de permettre aux membres des professions intermédiaires de bénéficier du chèque-vacances, pour peu qu'ils aient au moins deux enfants.
Voilà pourquoi, bien entendu, je souhaite l'adoption de l'amendement n° 1 rectifié, ce qui entraîne ipso facto le rejet de l'amendement du Gouvernement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. M. le rapporteur donne, à la page 52 de son rapport, une précision très importante quant à sa conception du chèque-vacances. Il indique, en effet : « Le chèque-vacances se fonde plus sur une logique de participation qu'il ne constitue un instrument réservé aux seuls défavorisés. »
Nous ne partageons pas cette conception, et c'est pourquoi nous voterons contre cet amendement.
Le chèque-vacances ne s'apparente pas à l'intéressement ou à la participation, et encore moins à l'épargne en vue de la retraite. C'est avant tout une mesure sociale destinée à permettre aux salariés les moins bien rémunérés de concrétiser leur droit aux vacances et aux loisirs. C'est d'ailleurs pour cette raison qu'une exonération de charges proportionnelle à l'effort de l'employeur est consentie.
Comme vous le soulignez, monsieur le rapporteur, il existe pour les personnes et les familles en difficulté des mesures spécifiques, telles que les bons-vacances. Mais vous ne pouvez ignorer que la grande majorité des salariés disposent de salaires nets inférieurs à 10 000 francs. Le revenu médian, c'est-à-dire ce que gagnent aujourd'hui la moitié des salariés disposant d'un emploi à temps plein, est de 8 800 francs. Encore ne prenons-nous pas en compte ici l'aggravation de cette situation par la précarité ! Là est sans doute le véritable problème.
Voilà qui explique que le texte du projet de loi permettra de couvrir potentiellement 75 % de la population active salariée, soit 17 millions de personnes, soumises ou non à l'impôt sur le revenu.
Dans ces conditions, il ne nous semble pas que le relèvement de la cotisation d'impôt à 20 000 francs soit nécessaire. Une telle modification, apparemment destinée aux familles par le jeu des demi-parts supplémentaires par enfant, aboutirait, en fait, à changer profondément la nature du chèque-vacances dans un sens que nous n'approuvons pas. Elle en ferait rapidement, en direction des professions intermédiaires et des cadres moyens, un instrument d'épargne participative.
Quels que soient les mérites, que l'on peut toujours reconnaître, de l'intéressement et de la participation, ce n'est pas là l'objectif du chèque-vacances, et nous voulons éviter toute dérive potentielle.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'amendement de la commission des affaires sociales apporte principalement deux modifications de fond.
La première consiste à revenir sur le nouveau critère de revenu fiscal, qui avait pourtant recueilli l'assentiment de l'ensemble des organisations syndicales représentatives de salariés. Il est apparu, en effet, que le revenu fiscal de référence, à l'inverse de la cotisation d'impôt, assure une bien meilleure photographie de la situation réelle de la personne et garantit ainsi l'égalité de traitement des salariés.
Il est tenu compte, par ailleurs, de toutes les déductions fiscales, qui ne se réduisent pas, contrairement à ce que laisse entendre le rapport de la commission, aux investissements réalisés outre-mer ou à l'acquisition de parts de copropriété de navires de commerce, ils intègrent également les réductions d'impôt ayant un caractère social, telles que les dépenses relatives aux travaux de réparation dans une habitation, à l'embauche d'une employée à domicile ou encore le remboursement d'un emprunt.
Le changement de critère n'oublie pas la famille puisque le montant retenu sera majoré par demi-part supplémentaire déclarée.
Enfin, la revalorisation et l'actualisation des seuils mentionnés à l'article 2 par l'amendement du Gouvernement pour tenir compte de la loi de finances pour 1999 doivent permettre d'aller vers une situation équivalente, sans exclure pour autant des bénéficiaires potentiels.
L'amendement n° 1 rectifié tend à élargir l'accès au chèque-vacances aux classes moyennes, ou tout au moins aux personnes qui s'acquittent d'une cotisation d'impôt de l'ordre de 20 000 francs.
Je rappelle, sur ce dernier point, que l'ordonnance de 1982 visait expressément les salariés les plus défavorisés, consacrant ainsi la fonction sociale et populaire du chèque-vacances.
Nous croyons préférable, quant à nous, de rester fidèles à cette approche, considérant que la population concernée est d'ores et déjà importante.
En outre, en généralisant l'attribution du chèque-vacances à ce niveau, le risque serait de soumettre encore davantage la gestion du système aux multiples pressions financières des quelques sociétés privées qui souhaitent récupérer le marché.
Pour ces raisons, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre l'amendement présenté par M. le rapporteur, au nom de la commission des affaires sociales.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 2 est ainsi rédigé et l'amendement n° 8 n'a plus d'objet.

Article 3



M. le président.
« Art. 3. - Il est inséré, après l'article 2 de l'ordonnance du 26 mars 1982 susmentionnée, un article 2 bis ainsi rédigé :
« Art. 2 bis. - I. - Dans les entreprises de moins de 50 salariés, dépourvues de comité d'entreprise et qui ne relèvent pas d'un organisme paritaire mentionné au second alinéa de l'article 6 de la présente ordonnance, l'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés satisfaisant à la condition de ressources fixée au I de l'article 2 est exonéré des cotisations et contributions prévues par la législation du travail et de la sécurité sociale, à l'exception de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Le montant de l'avantage donnant droit à exonération, qui ne peut excéder les plafonds fixés au dernier alinéa de l'article 3, est limité, par salarié et par an, à 30 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle.
« II. - L'exonération prévue au I ci-dessus est accordée si :
« 1° La fraction de la valeur des chèques-vacances prise en charge par l'employeur est plus élevée pour les salariés dont les rémunérations sont les plus faibles ;
« 2° Le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution, notamment sa modulation définie conformément au 1° ci-dessus, font l'objet soit d'un accord d'entreprise conclu avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux, ou, en l'absence d'une telle représentation syndicale, avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail, soit d'un accord conclu dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 132-30 du code du travail ;
« 3° La contribution de l'employeur ne se substitue à aucun élément faisant partie de la rémunération versée dans l'entreprise, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ou prévu pour l'avenir par des stipulations contractuelles individuelles ou collectives. »
Sur cet article, la parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Madame la secrétaire d'Etat, cet article pose le principe d'une exonération de la contribution des PME au financement des chèques-vacances au titre des charges sociales.
Il prévoit toutefois que l'avantage ouvrant droit à exonération est plafonné, ce plafond étant fonction d'un certain pourcentage du SMIC apprécié sur une base mensuelle.
Cette référence au montant du SMIC apprécié sur une base mensuelle n'est d'ailleurs pas la seule ; il y est fait mention aux articles 2 et 3 de l'ordonnance de 1982.
La commission s'est donc interrogée sur les conséquences de la réduction de la durée légale du travail en ce qui concerne le montant du SMIC apprécié sur une base mensuelle. Actuellement, le SMIC est une garantie de salaire horaire. Il correspond à un montant mensuel brut de 6 797,18 francs sur la base de l'horaire légal de 39 heures par semaine, soit 169 heures par mois. Or, la durée légale hebdomadaire de travail sera ramenée à 35 heures, soit 151,6 heures par mois, dès le 1er janvier 2000 pour les entreprises de plus de vingt salariés. A SMIC horaire inchangé, le SMIC apprécié sur une base mensuelle serait alors ramené de 6 797 francs à 6 099 francs, et le plafond ouvrant droit à l'exonération instituée au présent article serait ramené, en net, de 1 610 francs à 1 445 francs.
En outre, entre le 1er janvier 2000 et le 1er janvier 2002, dans la mesure où la durée légale du travail sera différente selon la taille de l'entreprise, le plafond ouvrant droit à exonération serait aussi variable en fonction des effectifs de l'entreprise.
Toutefois, Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité a évoqué à plusieurs reprises la création d'une rémunération mensuelle minimale qui consisterait à assurer aux salariés un nouveau SMIC de 35 heures payées 39. Cette nouvelle référence, qui sera introduite par la deuxième loi sur les 35 heures, modifiera-t-elle le texte dont nous discutons aujourd'hui ? Comment sera-t-elle indexée ?
Aujourd'hui, force est de constater que nous ne savons pas ce que nous votons. Nous attendons donc, madame la secrétaire d'Etat, des informations complémentaires.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous apporter quelques précisions au sujet du SMIC et de son évolution, dans le cadre du plafond fixé par le projet de loi.
Le projet de loi fait référence au SMIC tel qu'il existe aujourd'hui et à une durée de travail qui est de 39 heures par semaine, soit 169 heures par mois. C'est la base de calcul de l'abattement. Par ailleurs, le SMIC est un salaire brut.
Il ne m'appartient pas de préjuger l'évolution future du SMIC, dans le cadre de la réduction du temps de travail à 35 heures. Il n'existe à ce jour qu'un SMIC qui, je le rappelle, sert de référence à d'autres minima tels que le minimum garanti.
Pour la clarté du débat, il convient d'apprécier à son niveau réel l'exonération de charges sociales pour les PME, comme je le propose. Cette exonération est plafonnée non pas à 1 610 francs par salarié et par an, mais à 30 % du SMIC brut actuellement fixé à 6 797 francs pour 169 heures, ce qui représente 2 039 francs. Même en retenant votre chiffre d'un abattement moyen de 1 350 francs, la marge disponible reste importante.
J'ajoute que 40 % du SMIC net ne donnent pas une somme fondamentalement différente de 30 % du SMIC brut.
M. le président. Par amendement n° 2 rectifié, M. Blanc, au nom de la commission, propose :
A. - De rédiger comme suit le texte présenté par l'article 3 pour l'article 2 bis à insérer dans l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances :
« Art. 2 bis. - L'avantage résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition des chèques-vacances par les salariés satisfaisant à la condition de ressources fixée à l'article 2 est exonéré de l'ensemble des cotisations et contributions prévues par la législation du travail et de la sécurité sociale, à l'exception de la contribution pour le remboursement de la dette sociale. Le montant de l'avantage donnant droit à exonération, qui ne peut excéder le plafond fixé au dernier alinéa de l'article 3, est limité, par salarié et par an, à 40 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle ; ce taux est majoré de 10 points par enfant à charge au sens des articles 6 et 196 du code général des impôts.
« L'exonération prévue à l'alinéa précédent n'est accordée que si :
« 1° La fraction de la valeur des chèques-vacances prise en charge par l'employeur est modulée en faveur des salariés dont les rémunérations sont les plus faibles et comporte une majoration pour enfant à charge ;
« 2° La contribution de l'employeur ne se substitue à aucun élément faisant partie de la rémunération versée au salarié dans l'entreprise, au sens de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, ou prévu pour l'avenir par des stipulations contractuelles individuelles ou collectives. »
B. - De compléter cet article par un paragraphe II ainsi rédigé :
« II. - L'extension des exonérations de charges sociales aux entreprises de cinquante salariés et plus et l'exonération de contribution sociale généralisée pour l'ensemble des entreprises sont compensées à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
C. - En conséquence, de faire précéder cet article de la mention : « I. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Par cet amendement, la commission propose une modification substantielle du dispositif d'exonération de charges sociales présenté par le Gouvernement dans une double direction : extension du champ de l'exonération et meilleure prise en compte des situations des familles.
Il étend d'abord l'exonération de charges sociales au titre de la contribution de l'employeur à l'ensemble des entreprises et non aux seules PME. Il prévoit également l'exonération de la CSG, celle-ci tendant de plus en plus à se substituer aux cotisations sociales.
L'objectif est ici d'assurer une neutralité entre les deux circuits de distribution de chèques-vacances : le circuit « entreprises », ici visé, et le circuit « organismes sociaux » qui bénéficie déjà de ces exonérations.
En outre, l'assujettissement des PME à la CSG, prévu par le projet de loi, risquait de limiter la portée pratique de l'exonération.
Cet amendement prévoit aussi une augmentation de 30 % à 40 % du SMIC du plafond de la contribution de l'employeur ouvrant droit à une exonération, ainsi qu'une modulation de ce plafond en fonction du nombre d'enfants à charge, afin de mieux prendre en compte la situation des familles. Nous avons beaucoup insisté sur l'ouverture aux familles du dispositif des chèques-vacances.
Par cohérence, cet amendement fixe enfin l'obligation de moduler la contribution de l'employeur en fonction non seulement des rémunérations des salariés, mais aussi du nombre d'enfants à charge, toujours dans le souci de favoriser la mise en place d'une politique familiale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Par cet amendement, la commission souhaite exonérer toutes les entreprises, qu'elles disposent ou non d'un comité d'entreprise, de cotisations sociales, y compris de la CSG, relever le plafond d'exonération de 30 % à 40 % du SMIC et introduire un majoration pour enfant à charge, et enfin supprimer le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 3.
Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le rapporteur, que le projet de loi prévoit l'exonération de cotisations sociales pour les entreprises de moins de cinquante salariés, lesquelles sont donc dépourvues de comité d'entreprise, que l'obligation de constitution d'un comité d'entreprise au-delà du seuil de cinquante salariés est prévue par le code du travail, et que 80 % des entreprises concernées ont un comité d'entreprise.
Le Gouvernement n'entend pas, à la faveur de l'examen de ce projet de loi, remettre en cause le rôle des comités d'entreprise dans la gestion des activités sociales et culturelles, ni du reste encourager l'absence de comité d'entreprise, dont les compétences vont bien au-delà des seules activités sociales et culturelles.
Vous souhaitez également exonérer la contribution de l'employeur de la CSG : cela sous-estime l'effort consenti au titre de l'exonération des charges sociales. Par ailleurs, il n'y a pas de basculement des charges sociales « employeur » sur la CSG.
C'est pourquoi notre souhait est le maintien de ce dispositif, et la seule exonération des contributions sociales - hors CSG et RDS - pour les entreprises de moins de cinquante salariés.
La commission souhaite également porter l'exonération de 30 % à 40 % du SMIC sur une base mensuelle, et majorer ce taux de dix points par enfant à charge.
Je vous rappelle que l'exonération prévue dans le projet de loi correspond déjà au double de l'abondement constaté actuellement, ce qui paraît raisonnable. Son montant, apprécié sur le SMIC brut, est de 2 309 francs, sensiblement identique donc à la somme résultant du calcul qui est le vôtre sur le SMIC net.
De surcroît, la base imposable retenue inclut déjà les majorations pour enfant à charge. Cela reviendrait donc à une double exonération.
J'attire votre attention sur le fait que la multiplication des critères serait lourde, et donc dissuasive pour les PME.
Enfin, comme vous le savez, le chèque-vacances, qui repose sur un abondement de l'employeur dans le cadre du contrat de travail, ne peut être assimilé à une prestation familiale.
S'agissant de l'ajout de la notion de « salarié » dans votre amendement, cette précision me semble inutile compte tenu de la référence à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.
S'agissant de votre proposition tendant à supprimer le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article 3, c'est-à-dire l'obligation d'un accord d'entreprise pour bénéficier d'exonérations, elle repose sur une confusion des rôles respectifs du comité d'entreprise et des organisations syndicales.
Comme vous le savez, le comité d'entreprise a en charge la gestion des activités sociales, tandis que les syndicats ont un rôle de négociation, de conclusion d'accords.
Il en est de même des délégués du personnel, qui ont pour mission de défendre les intérêts individuels et collectifs des salariés, et dont le rôle ne peut être confondu avec celui des délégués syndicaux.
C'est donc bien l'accord d'entreprise qui doit permettre à l'employeur de bénéficier de l'exonération de charges et qui garantit le dialogue social.
Je souhaite donc que cet amendement ne soit pas retenu par votre assemblée.
M. Paul Blanc, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Madame la secrétaire d'Etat, la commission ne souhaite en aucune manière limiter l'action des comités d'entreprise ; il n'en a jamais été question !
L'amendement vise simplement à assurer une meilleure neutralité entre deux circuits de distribution - selon un principe même d'égalité - à savoir celui des comités d'entreprise et celui des organismes sociaux quand il n'y a pas de comité d'entreprise.
Par ailleurs, ce que nous cherchons, à travers cet amendement, c'est à faire bénéficier le plus grand nombre possible de salariés du chèque-vacances. Nous l'avons dit à plusieurs reprises. J'estime, pour ma part, que là où il y a une volonté, il y a un chemin.
M. Emmanuel Hamel. Ah !
M. Paul Blanc, rapporteur. C'est ce que disait le général de Gaulle. Vous avez la volonté, nous vous montrons le chemin !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 2 rectifié.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je voterai l'amendement de la commission.
Je suis choqué des réactions du Gouvernement dans cette affaire. En effet, il s'agit d'une action sociale fort intéressante, dont je souligne d'ailleurs l'importance, et voilà que, pour des raisons de représentation syndicale et autres, on voudrait instaurer des différences et pénaliser certains salariés qui travaillent dans les entreprises ne comprenant pas de représentation syndicale !
Cette réaction n'a aucun caractère social. Elle serait même quelque peu mesquine.
En l'occurrence, l'essentiel est l'intérêt des salariés. Il s'agit de donner la possibilité aux salariés qui ont des ressources relativement faibles de partir en vacances. Tous les autres arguments sont secondaires.
Par ailleurs, l'amendement n° 2 rectifié comprend, je l'avoue, une disposition relative aux familles que je juge excellente. S'il est un domaine dans lequel il faut faire un effort en matière de vacances, c'est bien le domaine familial.
Au cours de la discussion générale, il a été fait état d'un certain nombre de statistiques montrant à l'évidence que ce sont les familles nombreuses qui partent le moins en vacances.
Je demande donc à Mme le secrétaire d'Etat de faire un geste social. Cela ne doit pas lui être difficile ; je connais ses qualités puisqu'elle a siégé parmi nous au sein de la commission des affaires sociales.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Guy Fischer. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. A entendre notre collègue Jean Chérioux, on se demande pourquoi cette disposition n'a pas été prise auparavant.
L'amendement de la commission prend le contre-pied de la démarche pragmatique et raisonnable adoptée par le Gouvernement, car c'est là l'essentiel.
M. Hilaire Flandre. Il faut oser !
M. Jean Chérioux. Hors les syndicats point de salut !
M. Guy Fischer. Vous faites de la démagogie ! (M. Chérioux proteste.)
La commission propose une réécriture complète de l'article. Qui pouvait le moins hier, aujourd'hui peut le plus, et ce de façon et dans des conditionsdéraisonnables.
Le Gouvernement souhaite impliquer davantage - car c'est là où le bât blesse - les petites et les moyennes entreprises de moins de cinquante salariés dépourvues de comité d'entreprise, par le biais d'une incitation plus forte des employeurs sous forme d'exonération de cotisations sociales plafonnées par salarié et par an à 30 % du SMIC brut.
Mais, prenant prétexte de la possibilité d'exonération totale qu'offre le circuit « organismes sociaux », la commission finalement y trouve à redire, alors que le Gouvernement envisageait d'accorder aux PME et aux PMI un avantage à la condition qu'un accord soit conclu au sein de l'entreprise.
M. Paul Blanc, rapporteur. Laissez-les vivre !
M. Guy Fischer. La commission, par le biais de l'amendement n° 2 rectifié, remet en cause cette mesure équilibrée et procède, selon nous, à une attaque en règle contre les structures de négociations traditionnelles et contre la représentation syndicale.
M. Jacques Machet. Pas du tout !
M. Jean Chérioux. Ce problème n'a pas sa place dans cette discussion !
M. Guy Fischer. Sous prétexte de neutralité entre les deux circuits de distribution des chèques-vacances - le circuit « employeur » et le circuit « organismes sociaux » - la commission suggère d'abandonner toute distinction de taille de l'entreprise pour finalement, disons-le, dévaloriser le rôle des comités d'entreprise.
M. Jean Chérioux. Mais non !
M. Guy Fischer. En vérité, derrière cet amendement, n'y a-t-il pas la volonté de généraliser le type de rapports sociaux qui, jusqu'à présent, prévaut dans les PME-PMI à l'ensemble de l'économie, en faisant fi des espaces démocratiques que constituent les comités d'entreprise créés à la Libération ?
En outre, vouloir supprimer la condition de l'exonération à la signature d'un accord d'entreprise est révélateur, selon nous, de l'état d'esprit de la majorité de la commission des affaires sociales, qui souhaite octroyer toute liberté d'initiative et de décision à l'employeur et passer outre la négociation salariale.
M. Paul Blanc, rapporteur. Pas du tout !
M. Guy Fischer. Enfin, le relèvement à 40 % du SMIC et plus du plafond de la contribution donnant droit à exonération pour toutes les entreprises est, somme toute, contraire à la logique de participation de l'employeur au financement du chèque-vacances.
Si l'on suit la démarche préconisée par le rapporteur, le chèque-vacances destiné au financement d'une activité sociale par les partenaires sociaux serait dévoyé de ses origines sociales. Pour nous, c'est inacceptable.
C'est pourquoi notre groupe s'oppose vigoureusement à cet amendement, qui dénature profondément l'esprit et la lettre du projet de loi et contribue ainsi à dévoyer l'usage des chèques-vacances.
M. Paul Blanc, rapporteur. Pas du tout !
M. Jean Chérioux. Au profit des salariés, c'est l'essentiel !
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Pour des raisons analogues à celles qui nous ont amenés à voter contre le précédent amendement de la commission, nous voterons contre celui-ci.
En effet, pour ne prendre qu'un exemple, le cumul entre les pourcentages 40 % du niveau du SMIC et 10 % par enfant à charge pour déterminer le montant maximum d'exonération nous paraît aller davantage dans le sens de l'avantage fiscal que dans celui d'une mesure sociale en direction des salariés modestes. (Très bien ! sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Hilaire Flandre. Pourquoi ? Les modestes n'ont pas d'enfant !
M. Jean Chérioux. Tout cela est assez mesquin !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Delaneau, président de la commission. Je suis quelque peu peiné de la tournure que prend le débat.
Tout à l'heure déjà, en entendant Mme Terrade, je me suis demandé si nous ne revenions pas dix à vingt ans en arrière ! (Mme Terrade s'exclame.) Je considère en effet que vos critiques sont outrancières, madame. (Mme Terrade et M. Fischer protestent.)
Vous intentez en quelque sorte un procès à la majorité de la commission, à la majorité du Sénat, comme si elles n'étaient pas capables, elles aussi, d'avoir un sentiment social.
Il y a là une sorte de « captation » de votre part, comme si cela vous faisait mal que d'autres se préoccupent eux aussi du social. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Bien sûr, nous n'avons pas la même vision des choses, et c'est heureux. Si tout le monde pensait la même chose, ce serait bien triste. Cela nous ramènerait à des régimes du genre de ceux que vous avez soutenus - même de loin - par le passé, encore que vous soyez trop jeunes pour avoir connu les pires excès de cette période !
Nous vivons dans un monde qui change, et le Sénat apporte une conception plus libérale et qui permet à nos concitoyens de s'exprimer davantage sur le terrain plutôt qu'à des niveaux très élevés d'appareils divers, qu'ils soient syndicaux ou politiques.
Nous pensons que c'est dans ce sens-là que doit aller notre pays, et c'est ce que nous défendons, sans passer notre temps - sauf quand, vraiment, vous faites déborder la coupe - à vous dire que vous êtes des ringards, des retardataires.
Mme Odette Terrade. On verra jeudi avec le débat sur la parité !
M. Jean Delaneau, président de la commission. Effectivement !
Si vous faites des procès d'intention à la majorité de la commission et à la majorité du Sénat, ne vous étonnez pas que nous vous en fassions en retour. Mais je ne souhaite pas du tout que nous nous engagions dans cette voie ! (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. Jean Chérioux. Les salariés s'en réjouiront !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4



M. le président.
« Art. 4. - Le premier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance du 26 mars 1982 susmentionnée est abrogé. »
Par amendement n° 3, M. Blanc, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit cet article :
« Le premier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée est ainsi rédigé :
« Le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution font l'objet soit d'une consultation du comité d'entreprise, soit d'un accord d'entreprise conclu avec un ou plusieurs délégués syndicaux ou délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux, soit, en l'absence de tels délégués, d'un accord d'entreprise conclu en application d'un accord de branche mettant en oeuvre les dispositions de l'article 6 de la loi n° 96-985 du 12 novembre 1996 relative à l'information et à la consultation des salariés dans les entreprises et les groupes d'entreprises de dimension communautaire, ainsi qu'au développement de la négociation collective, ou conclu avec un ou plusieurs salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 3 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative au temps de travail, soit d'un accord conclu dans les conditions prévues aux deux premiers alinéas de l'article L. 132-30 du code du travail. A titre expérimental, dans les entreprises de moins de 50 salariés où n'existent pas de délégués syndicaux ou de délégués du personnel désignés comme délégués syndicaux ni de salariés mandatés dans les conditions prévues au III de l'article 6 de la loi du 12 novembre 1996 précitée ou au III de l'article 3 de la loi du 13 juin 1998 précitée, le montant de la contribution de l'employeur et les modalités de son attribution peuvent être fixés après consultation des délégués du personnel. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement prévoit une nouvelle rédaction d'un article de coordination désormais inutile et une simplification de la procédure de mise en place des chèques-vacances dans l'entreprise.
Le projet initial prévoyait deux procédures. Pour les entreprises de plus de cinquante salariés, les employeurs devaient consulter les comités d'entreprise et les délégués du personnel ou toute autre instance de concertation. La procédure de l'ordonnance de 1982 était donc maintenue. Pour les entreprises de moins de cinquante salariés bénéficiant de l'exénoration des charges sociales, il existait deux solutions : soit la conclusion d'un accord d'entreprise avec un délégué syndical ou un délégué du personnel désigné comme délégué syndical ou avec un salarié mandaté dans le cadre de la loi Aubry, soit la mise en place de commissions paritaires professionnelles à la suite d'un accord collectif prévu à l'article L. 232-30 du code du travail.
Cet amendement maintient pour l'essentiel ces procédures, mais il en prévoit deux nouvelles, qui sont plus simples, afin d'assurer un meilleur développement du chèque-vacances sur le terrain.
Il prévoit d'abord que l'accord d'entreprise puisse être conclu avec des salariés mandatés en application de la loi du 12 novembre 1996 qui dispose qu'un accord de branche peut permettre, en l'absence de représentation syndicale, aux délégués du personnel ou à des salariés mandatés de négocier un accord collectif. Actuellement, il existe vingt-cinq accords de branche de ce type couvrant 850 000 salariés de PME.
Il prévoit enfin, pour les PME et en l'absence de toute autre possibilité, qu'à titre expérimental la mise en place du chèque-vacances se fasse à la suite d'une consultation des délégués du personnel.
Il s'agit encore d'un amendement qui doit permettre à un plus grand nombre de salariés d'utiliser les chèques-vacances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Ainsi que je l'ai indiqué pour l'amendement précédent, cet amendement n° 3, proposé par la commission, tend à confondre les rôles respectifs des comités d'entreprise, des délégués du personnel et des délégués syndicaux.
Le Gouvernement n'entend pas, à l'occasion de ce projet de loi, bouleverser l'édifice de la négociation collective dans notre pays à un moment où de grands chantiers, telle la réduction du temps de travail, traduisent un renouveau du dialogue social.
J'ajoute que 42 % des accords signés au 23 février 1999 sur la base de cette loi l'ont été par des salariés mandatés, soit presque 1 000 accords sur 2 355. Par ailleurs, plus de 800 000 salariés sont d'ores et déjà concernés par des accords d'entreprise signés selon des procédures comparables à celle du projet de loi.
La loi de 1998 fait explicitement référence à celle du 12 novembre 1996. La précision que vous souhaitez apporter devient de ce fait inutile.
Nous venons d'avoir un débat sur la modernité. Pour ma part, je suis particulièrement convaincue que favoriser le dialogue social, ouvrir la porte à des accords d'entreprises, partout et le plus largement possible, est un signe de modernité.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 3.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement poursuit la même logique antisociale que l'amendement n° 2 rectifié qui vient d'être adopté. Et, au risque de passer pour ringarde, comme le disait M. le président de la commission tout à l'heure. (Exclamations sur les travées du RPR), j'affirme que cet amendement amorce un nivellement par la base de la négociation salariale dans notre pays, en déréglementant au maximum le cadre du dialogue social au sein de l'entreprise, laissant s'instaurer les rapports de force, dont on sait qu'ils s'exercent dans les petites entreprises au détriment des salariés.
M. Jean Delaneau, président de la commission. On n'est plus au temps de Zola !
M. Jean Chérioux. Hors du syndicalisme, point de salut !
Mme Odette Terrade. La commission va jusqu'à autoriser l'employeur à décider de l'attribution du chèque-vacances sans qu'un accord soit nécessaire, et à fixer seul le montant de sa propre contribution après une simple consultation des délégués du personnel, qui sont pourtant habilités à négocier à ce sujet.
D'une démarche de cogestion entre partenaires sociaux qui a prévalu pendant dix-sept ans, nous passerions, avec cet amendement, à une décision unilatérale de l'employeur, au motif que la négociation aurait échoué en suivant les canaux traditionnels.
Dans ce cadre-là, il est bien évident que le patron aurait tout intérêt à freiner toute possibilité d'accord avec les délégués syndicaux ou les mandataires pour in fine rester maître du jeu, et disposer ainsi d'une marge de manoeuvre au-delà de ce qui est raisonnable pour l'apaisement du lien social dans l'entreprise.
Bien que la commission n'émette cette possibilité qu'à titre expérimental, le groupe communiste républicain et citoyen votera contre cet amendement qui aurait pour conséquence d'affaiblir encore l'expression syndicale dans notre pays.
M. Paul Blanc, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Madame la secrétaire d'Etat, les accords sur la durée du temps de travail sont au nombre de 1 000, alors qu'il y a 1,5 million d'entreprises concernées ; permettez-moi donc de penser que les résultats sont loin de vos espérances.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Il s'agit de 800 000 salariés !
M. Paul Blanc, rapporteur. Certes, mais 1,5 million d'entreprises sont concernées.
Par ailleurs, cette procédure consultative des délégués du personnel figure déjà dans le code du travail : elle tient lieu d'accord d'entreprise dans les entreprises qui n'ont pas de délégués syndicaux. Je ne vois donc pas pourquoi vous ne l'accepteriez pas dans le cas présent.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 4 est ainsi rédigé.

Articles additionnels après l'article 4



M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 4 rectifié, M. Blanc, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le deuxième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée est ainsi rédigé :
« Les salariés acquièrent les chèques-vacances dans le cadre d'un plan d'épargne par des versements mensuels obligatoirement répartis sur trois mois au moins et d'un montant compris entre 2 % et 20 % du salaire minimum de croissance apprécié sur une base mensuelle. »
« II. - La dernière phrase du dernier alinéa de l'article 3 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée est supprimée. »
L'amendement n° 7, présenté par M. Domeizel et les membres du groupe socialiste et apparentés, et l'amendement n° 11, déposé par Mmes Terrade, Beaudeau, Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, sont identiques.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa de l'article 3 de l'ordonnance du 26 mars 1982 précitée, le pourcentage "4 %" est remplacé par le pourcentage "2 %". »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 4 rectifié.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement tend à limiter à 2 % du SMIC, au lieu de 4 % actuellement, le montant minimal des versements mensuels des salariés pour bénéficier des chèques-vacances. Il vise à ouvrir aux salariés les plus modestes la possibilité de se constituer une épargne de manière étalée et avec des versements faibles, car le seuil actuel de 4 % du SMIC est parfois trop élevé et se révèle dissuasif.
Dans un souci de souplesse, il prévoit également que la durée minimale d'épargne soit ramenée de quatre à trois mois.
Par ailleurs, dans son paragraphe II, cet amendement a pour objet de supprimer le plafond de la contribution annuelle globale de l'employeur pour le financement de chèques-vacances pour l'ensemble de ses salariés. Ce plafond fait en effet largement double emploi avec les plafonds mis en place à l'article 3, qui fixent le montant maximum de la contribution donnant droit à l'exonération. De toute façon, l'employeur reste libre de fixer un plafonnement global de sa contribution.
Tout le monde souhaitait le passage à ce taux de 2 %, qui augmentera le nombre des bénéficiaires. Une belle unanimité devrait donc se dégager sur cet amendement.
M. Emmanuel Hamel. C'est ce que nous souhaitons !
M. le président. La parole est à M. Domeizel, pour défendre l'amendement n° 7.
M. Claude Domeizel. Cet amendement tend à revenir au texte original de la loi relative au chèque-vacances. Compte tenu de l'expérience acquise maintenant, il apparaît nécessaire d'abaisser le seuil actuel de 4 % pour revenir à un niveau qui rende le chèque-vacances utilisable par les salariés les moins bien rémunérés.
Il est évident que le versement minimum exigé aujourd'hui est trop élevé par rapport à un SMIC net de 5 000 francs pour un emploi à temps complet. Ce montant a un effet dissuasif sur des salariés qui, compte tenu de la faiblesse de leurs ressources ou de leur situation de famille, hésitent à s'engager à verser durant plusieurs mois une somme qui pourrait leur faire défaut par ailleurs, en cas de difficulté. En maintenant le niveau minimal de 4 %, nous irions à l'encontre de la vocation sociale du chèque-vacances, à laquelle nous sommes très attachés.
En revanche, le versement minimal de 2 % à l'issue non pas de trois mois mais de quatre mois, qui est, là aussi, un délai minimal, permettra au salarié d'épargner 560 francs, auxquels viendront s'ajouter l'abondement exonéré de charges de l'employeur. Dans ces conditions et sans effort démesuré, le dispositif financier du chèque-vacances jouera pleinement son rôle en direction des salariés les plus modestes.
M. le président. La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° 11.
Mme Odette Terrade. Notre amendement vise à ramener le niveau minimal des versements mensuels des salariés à 2 % du SMIC au lieu de 4 % actuellement.
Il s'agit de favoriser l'accès des salariés les plus précaires au dispositif du chèque-vacances, en leur permettant d'étaler dans le temps - pourquoi pas au-delà d'une année ? - la constitution de leur épargne, ce qui les fera bénéficier, à terme, d'un « capital vacances » satisfaisant.
Notre proposition rejoint pour partie celle de M. le rapporteur, mais pour partie seulement.
En effet, par le biais de l'amendement n° 4, en proposant de ramener à trois mois le délai nécessaire pour bénéficier du chèque-vacances, la commmission des affaires sociales ouvre la porte à de possibles abus, car elle donne peut-être trop facilement et trop rapidement accès au dispositif.
Il est en effet peu vraisemblable qu'un salarié rémunéré au SMIC soit à même de se constituer un montant d'épargne suffisant en seulement trois mois.
Dès lors, les chèques-vacances seront financés de moins en moins par l'employeur et de plus en plus par les contribuables.
C'est pourquoi notre groupe votera contre l'amendement défendu par M. le rapporteur. Il lui préfère l'amendement n° 11, qui est d'ailleurs identique à celui qui a été déposé par les membres du groupe socialiste.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s 7 et 11 ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Je crois que nous sommes tous d'accord sur le fait de ramener de 4 % à 2 % du SMIC le taux minimal des versements mensuels des salariés. En revanche, un petit litige semble se faire jour à propos du délai nécessaire pour bénéficier des chèques-vacances.
Si nous avons proposé de le ramener à trois mois, c'est simplement dans le dessein d'introduire de la souplesse dans la mise en oeuvre du dispositif et de permettre à ceux qui peuvent se constituer une épargne suffisante en trois mois de le faire sans que cela lèse ceux qui ont besoin de plus de temps.
Le souci permanent de la commission a été de permettre au plus grand nombre d'accéder au chèque-vancances et de donner la plus grande liberté possible aux salariés pour se constituer l'épargne nécessaire.
Au demeurant, la commission ne fera pas de ce point un casus belli. Sans doute le texte reviendra-t-il en discussion ; à ce moment-là, le débat pourra s'engager de nouveau.
Notre but principal est de faire en sorte que les salariés les plus modestes des petites et moyennes entreprises puissent bénéficier des chèques-vacances.
M. Charles Descours. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les trois amendements ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur, par votre amendement, vous proposez en même temps de réduire le taux et la durée de l'épargne et de supprimer le plafonnement de l'abondement de l'employeur.
Je ne peux souscrire à deux des idées développées dans ce même amendement : d'une part, à votre proposition de plan d'épargne - je suis d'ailleurs surprise de constater que vous ne la détaillez pas - d'autre part à celle de réduire à trois mois la durée mimimum d'épargne.
En effet, je vous le rappelle, la collecte de l'épargne relève de la seule activité des établissements bancaires. De plus, cette notion de plan d'épargne n'est pas juridiquement définie.
Par ailleurs, abaisser le taux minimum de l'épargne tout en réduisant à trois mois la durée minimum de celle-ci rendrait le niveau de l'épargne dérisoire.
En revanche, comme le proposent également le groupe socialiste et le groupe commmuniste républicain et citoyen, ramener le taux minimum d'épargne de 4 % à 2 % permettrait, j'en suis sûre, par un niveau de prélèvement plus accessible, d'élargir encore l'accès au chèque-vacances des revenus les plus modestes, notamment les salariés précaires et à temps partiel.
Le paragraphe II de l'amendement vise à supprimer le plafond de la somme totale consacrée par l'employeur aux chèques-vacances.
Or, comme je l'ai déjà précisé, le chèque-vacances est l'élément d'une politique sociale et non un substitut de rémunération. Il convient donc d'éviter tout effet de substitution entre la mise en place du chèque-vacances et les argumentations salariales à venir, conformément au principe accepté, d'ailleurs, par la commission.
Compte tenu des dispositions négatives contenues dans l'amendement présenté par la commission, le Gouvernement y est défavorable. En revanche, il est favorable aux amendements présentés par le groupe socialiste et par le groupe communiste républicain et citoyen.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4, et les amendements n°s 7 et 11 n'ont plus d'objet.
Par amendement n° 5, M. Blanc, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Au début du dernier alinéa de l'article 4 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée, les mots : "Le salarié titulaire" sont remplacés par les mots : "Le titulaire". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. L'amendement n° 5 modifie, dans un souci de cohérence, la rédaction actuelle de l'article 4 de l'ordonnance de 1982.
Cet article définit les conditions de validité et de remboursement des chèques-vacances. Ces conditions sont applicables, qu'il s'agisse des chèques distribués par les entreprises ou des chèques distribués par les organismes sociaux.
Or les organismes sociaux peuvent délivrer des chèques-vacances à des non-salariés tels que les retraités, les indépendants, les demandeurs d'emploi. La mention : « Le salarié titulaire » figurant dans l'article 4 de l'ordonnance de 1982 doit donc être remplacée par la simple mention : « Le titulaire ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. La commission souhaite que soit supprimée du dernier alinéa de l'article 4 la référence au salarié.
Cet amendement s'appuie sur le fait que les retraités - notamment dans la fonction publique - bénéficient du chèque-vacances, alors qu'ils ne sont plus salariés. Or, dans ce cas précis, la mise en oeuvre du chèque-vacances relève non pas de l'article 2 mais de l'article 6 de l'ordonnance, qui laisse les organismes d'activités sociales libres de fixer les conditions d'épargne et de remboursement de celle-ci, sans que la loi ait à intervenir.
J'insiste sur le fait que la mise en oeuvre du chèque-vacances s'appuie sur la notion d'épargne d'un salarié abondée par l'employeur, ce qui justifie la précision incluse dans le texte existant.
En effet, l'ordonnance qui institue le chèque-vacances n'a pas vocation à ouvrir l'accès à des non-salariés, tels que les commerçants et artisans, car comment imaginer que l'organisme abondeur puisse se confondre avec le bénéficiaire ?
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. Paul Blanc, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Tout d'abord, madame la secrétaire d'Etat, je me félicite de vous avoir entendu prononcer le mot « épargne », que vous me reprochiez tout à l'heure d'avoir employé.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. J'ai parlé de « plan d'épargne ».
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement s'inscrit tout à fait dans une logique d'épargne destinée à favoriser les départs en vacances. Il tend à apporter une garantie aux bénéficiaires des chèques distribués par les organismes sociaux, qui sont en droit de se voir rembourser leur contribution. Une telle garantie n'existait pas dans la loi de 1982.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.
Par amendement n° 12, Mmes Terrade, Beaudeau et Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 4, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa de l'article 5 de l'ordonnance du 26 mars 1982 précitée, les mots : "ministre du temps libre" sont remplacés par les mots : "ministre chargé du tourisme" ».
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Cet amendement, de nature rédactionnelle, vise à actualiser la dénomination du ministère qui assure la tutelle de l'Agence nationale pour les chèques-vacances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, accepté par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4.

Article 5



M. le président.
« Art. 5. - L'article 6 de l'ordonnance du 26 mars 1982 susmentionnée est complété par un second alinéa ainsi rédigé :
« Peuvent également être versées sous forme de chèques-vacances les aides aux vacances accordées par tout organisme paritaire de gestion d'une ou plusieurs activités sociales, dont la création et les principes de fonctionnement sont prévus par un accord collectif de branche, ou territorial, conclu conformément aux articles L. 132-1 et suivants du code du travail. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° 13, Mmes Terrade, Beaudeau, Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance du 26 mars 1982 précitée, avant les mots : "chargé notamment d'émettre les chèques-vacances", il est inséré le mot : "seul". »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement tend à spécifier, dans le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance du 26 mars 1982 qui crée l'ANCV, que cette même agence conservera le monopole d'émission des chèques-vacances afin d'assurer le contrôle public des excédents générés par l'utilisation des chèques-vacances.
Il est nécessaire de préciser qu'aujourd'hui, d'un point de vue strictement juridique, l'ANCV ne dispose pas du statut de monopole public qui la protégerait de la concurrence sauvage. En effet, seul le montant dissuasif du droit du timbre garantit actuellement un monopole de fait et non de droit à l'ANCV.
En outre, compte tenu des intérêts de plus en plus grands que suscite le chèque-vacances auprès de quelques groupes privés bien connus, compte tenu de l'ouverture à l'Europe qu'il nous faut préparer et non subir, il nous paraît préférable de conforter l'ANCV dans ses missions de service public.
D'ailleurs, l'amendement n° 6 est quelque peu ambigu et lourd de dangers pour la pérennité d'une gestion publique et solidaire du chèque-vacances telle que nous la connaissons.
J'observe d'ailleurs que cet amendement reprend en des termes presque identique la rédaction proposée par M. Bernard Pons, à l'exception notable de la précision que nous souhaitons, quant à nous, voir apporter au texte.
Doit-on comprendre cette omission comme une porte laissée ouverte à une éventuelle privatisation de l'ANCV et de ses excédents ?
Pour notre part, nous défendons une tout autre logique avec amendement n° 13, qui renforce la législation de 1982. En conséquence, j'indique dès maintenant que nous voterons contre l'amendement n° 6 de la commission des affaires sociales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement vise à garantir le monopole d'émission de l'ANCV. La commission n'est pas opposée au maintien de ce monopole. Elle considère simplement que la rédaction actuelle de l'ordonnance de 1982 est suffisamment précise sur ce sujet et que l'amendement est inutile, aucun autre organisme n'étant habilité à émettre des chèques-vacances.
Au demeurant, elle s'en remet à la sagesse du Sénat.
Mme Odette Terrade. Ah !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Madame la sénatrice, par votre amendement, vous souhaitez garantir la mission sociale de l'ANCV en confortant son monopole d'émission.
C'est une attention que je respecte tout particulièrement. Je voudrais cependant souligner que l'ensemble du projet de loi est porté par cette ambition, à l'image de l'ordonnance de 1982, qui prévoyait, dans son article 5, l'exclusivité d'émission des chèques par l'agence. Aussi, le Gouvernement s'en remet-il à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, pour lequel la commission et le Gouvernement s'en remettent à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Par amendement n° 6, M. Blanc, au nom de la commission, propose d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article 5 de l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 précitée, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Cet établissement public est chargé de promouvoir et diffuser le titre nominatif "chèques-vacances" en France et à l'étranger. A cette fin, il est autorisé à conclure des conventions de partenariat avec des entreprises ou organismes susceptibles d'en assurer la plus large diffusion.
« Il rend public chaque année un rapport établissant un bilan économique et social de l'utilisation du chèque-vacances. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Cet amendement vise à étendre les missions de l'Agence nationale pour les chèques-vacances. Il permet d'abord à l'Agence de diffuser des chèques-vacances à l'étranger sans toucher à l'objet de ces chèques qui viennent financer des dépenses en France.
Je peux donc rassurer pleinement notre collègue Jean Chérioux, qui, tout à l'heure, pensait que nous voulions permettre l'utilisation des chèques à l'étranger. Tel n'est pas le cas.
Cet amendement permet également de sous-traiter la diffusion des chèques-vacances, notamment auprès d'organismes qui connaissent bien les PME et qui seraient donc en mesure d'assurer une plus grande distribution des chèques-vacances dans ces entreprises.
Ces deux nouvelles dispositions s'inscrivent dans une démarche pragmatique. Elles répondent au souci de dynamiser la distribution des chèques-vacances et de permettre notamment à l'ANCV de prendre une longueur d'avance dans le développement d'un futur chèque-vacances européen.
L'amendement prévoit enfin qu'un bilan économique et social sera publié chaque année. Il confirme donc notre volonté de ne pas voir disparaître le monopole de l'ANCV, dont nous avons confirmé le principe tout à l'heure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Cet amendement vise à autoriser l'ANCV à promouvoir le chèque-vacances en France et à l'étranger.
Il m'apparaît important de souligner que le chèque-vacances n'est pas un titre de voyage. Sa diffusion à l'étranger ne peut concerner que les salariés français expatriés, ce qui ne pose pas de problèmes dans le cadre des dispositions existantes reposant sur un système d'épargne salariale. Il est bien réservé aux seuls salariés, aux bénéficiaires de notre pays.
Diffuser le chèque-vacances à l'étranger pose la question de la nature même du chèque-vacances.
Par ailleurs, l'utilisation du chèque-vacances en Europe est effectivement un sujet d'actualité sur lequel nous réfléchissons. Nous en avons abondamment débattu dans la discussion ; je ne reviendrai donc pas sur le sujet.
Le partenariat que vous souhaitez est déjà organisé par l'ANCV, notamment dans le cadre de l'article 6, comme en témoigne la convention conclue avec les mutuelles de fonctionnaires et les caisses de retraites des agents des collectivités locales. Son développement est d'ailleurs envisagé par l'ANCV pour que le projet de loi qui vous est soumis trouve rapidement une application concrète : l'Agence a déjà pris des contacts avec des organisations existant dans le secteur des PME.
Enfin, du fait des missions spécifiques de l'ANCV, qu'il s'agisse de l'émission du chèque-vacances ou de ses interventions sociales, notre souci est de préserver l'instrument, sans le corseter ; nous voulons rendre possibles des partenariats, mais sans que la maîtrise de la mission par l'Agence soit entamée.
Vous souhaitez également qu'un bilan économique et social du chèque-vacances soit établi par l'ANCV. Or il est évident qu'il n'appartient pas à l'Agence d'établir ce document : cela relève de la tutelle, donc des services de l'administration du tourisme.
En conclusion, je comprends le souci qui anime la commission, mais je considère que les modalités proposées dans l'amendement risquent d'apporter plus de confusion que d'éléments nouveaux. Pour cette raison, j'y suis défavorable.
M. Paul Blanc, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Paul Blanc, rapporteur. Madame la secrétaire d'Etat, je crains de ne m'être pas bien fait comprendre.
Dans la mesure où, aujourd'hui, avec l'ouverture économique mondiale, de plus en plus d'entreprises françaises s'implantent à l'étranger, notamment dans d'autres pays européens, il serait intéressant que les salariés étrangers de ces entreprises puissent acheter des chèques-vacances à l'ANCV pour ensuite venir les dépenser en France.
Il me semble que cet amendement apporte de la souplesse au dispositif et qu'il est susceptible de fournir des recettes supplémentaires, en provenance de l'étranger, à un plus grand nombre de lieux d'accueil touristique, ce qui va dans le sens de votre propre souci d'aménagement du territoire.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat. Je vous remercie de cette précision, monsieur le rapporteur. Je comprends parfaitement votre souci, mais le sujet est aussi d'une grande complexité. Il requiert une expertise très complète. Nous continuerons donc à étudier cette question afin d'envisager d'y répondre lors de la deuxième lecture.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 6.
M. Claude Domeizel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Si vous le permettez, monsieur le président, je reviendrai un instant sur l'amendement précédent, car j'avais levé le doigt juste avant que vous n'appeliez le Sénat à voter, mais vous ne m'avez pas vu. Je veux seulement dire que, selon moi, le mot « seul » aurait dû être placé entre virgules, afin qu'il soit encore mieux mis en relief.
Pour ce qui est de l'amendement n° 6, nous sommes un peu partagés.
En effet, la possibilité de disposer chaque année d'un rapport sur l'utilisation du chèque-vacances est tout à fait intéressante. Un tel rapport peut même se révéler très précieux pour mesurer l'impact du texte que nous examinons, notamment en ce qui concerne le nombre de salariés utilisateurs. Il permettrait donc, dans la clarté, de savoir où il convient de faire porter l'effort pour optimiser le dispositif du chèque-vacances, afin qu'il concerne le plus possible d'entreprises.
Cependant, le premier rapport annuel ne serait publié qu'à la fin de l'an 2000, soit à l'issue de la deuxième campagne sous le régime de l'extension du chèque-vacances aux PME. En effet, l'année 1999 sera certainement, pour l'essentiel, consacrée à sa mise en place.
Il nous paraît également tout à fait utile de préciser que l'Agence nationale pour le chèque-vacances est chargée de promouvoir le chèque-vacances en France et à l'étranger, même si ce dernier point a un aspect plus prospectif qu'immédiatement réalisable. Mais, après tout, il est bon que le Sénat montre parfois sa capacité à se projeter dans l'avenir ! (Sourires.)
En revanche, nous sommes beaucoup plus réservés sur la possibilité donnée à l'ANCV de signer des conventions de partenariat avec des entreprises privées qui se verraient concéder la diffusion du chèque-vacances.
Le chèque-vacances, faut-il le rappeler, n'est pas un chèque de voyage. Sa vocation est sociale, tout comme est sociale l'action de l'ANCV, qui redistribue l'essentiel de ses bénéfices au profit du tourisme social. On ne peut attendre la même préoccupation d'une entreprise qui aurait pour principal souci la distribution des dividences à ses actionnaires. A terme, suivant la plus grande pente, le chèque-vacances deviendrait un moyen de paiement comme un autre.
L'adoption d'une telle disposition comporte donc un risque de changement de nature du chèque-vacances. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre cet amendement.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Le chèque-vacances est quand même un instrument de paiement dont les caractéristiques évoquent un peu la monnaie scripturale. Aussi émettrai-je des réserves sur le texte de l'amendement tel qu'il est libellé.
Mes réserves ne tiennent pas à des considérations analogues à celles qu'a exposées notre collègue socialiste, qui a insisté sur le caractère social de ce moyen de paiement ; elles sont plutôt inspirées par un souci de protection. En effet, le texte est bien vague : « Cet établissement public est chargé de promouvoir et diffuser le titre nominatif "chèques-vacances" en France et à l'étranger. A cette fin, il est autorisé à conclure des conventions de partenariat avec des entreprises ou organismes susceptibles d'en assurer la plus large diffusion. »
Cela mériterait tout de même d'être étudié d'un peu plus près. Un certain nombre de précautions me paraissant s'imposer pour éviter que des conventions soient signées avec n'importe qui, faute de quoi on risquerait de voir naître des difficultés ou même de déplorer des « magouillages ». Or ce serait très ennuyeux à la fois pour les intéressés et pour l'image du chèque-vacances.
Par conséquent, je souhaiterais que, au cours de la navette, cette notion d'entreprises ou d'organismes susceptibles d'assurer la diffusion des chèques-vacances soit encadrée de manière plus précise.
C'est la raison pour laquelle je m'abstiendrai à ce stade de la discussion.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Fischer, pour explication de vote.
M. Guy Fischer. Au terme de cette discussion, il apparaît clairement que le texte modifié par le Sénat est, sur de nombreux points, fort différent du projet de loi initial.
M. Emmanuel Hamel. C'est-à-dire meilleur !
Mme Odette Terrade. Non, hélas !
M. Guy Fischer. En effet, la majorité sénatoriale a profondément modifié un texte qui était pragmatique, raisonnable, susceptible d'être approuvé par la plus grande partie des acteurs.
A suivre la majorité sénatoriale, d'une logique de participation des employeurs et des salariés, nous passerions à une logique d'exonération quasi systématique, et ce au profit des entreprises les plus importantes.
Sous prétexte de neutralité, le rôle des comités d'entreprise a été, nous semble-t-il, remis en cause.
Les dispositions retenues par la majorité sénatoriale, si elles étaient définitivement adoptées, tendraient à transformer pratiquement les chèques-vacances en un produit commercial, au détriment de leur fonction sociale vis-à-vis des travailleurs les plus défavorisés.
Il est bien évident que le groupe communiste républicain et citoyen ne peut se retrouver dans ce qui apparaît comme un contre-projet de loi élaboré par la majorité sénatoriale. Bien sûr, notre groupe aurait souhaité pouvoir adopter une attitude plus positive, comme en témoignent les amendements que nous avons déposés.
Nous voulons vous assurer, madame la secrétaire d'Etat, de l'appui que nous étions décidés à apporter à votre projet de loi et de notre confiance en l'action du Gouvernement en matière de tourisme social. Ne doutez pas un seul instant que nous poursuivrons notre propre action pour que soit finalement mis au point un texte susceptible de donner satisfaction au plus grand nombre, un texte à visées authentiquement sociales et correspondant aux objectifs que vous vous êtes fixés.
C'est pourquoi, aujourd'hui, nous nous opposerons au contre-projet de la majorité sénatoriale. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Domeizel.
M. Claude Domeizel. Le groupe socialiste votera contre ce texte tel qu'il résulte des amendements adoptés par la majorité sénatoriale.
Il va de soi que nous approuvons le principe de l'extension du chèque-vacances aux 7,5 millions de salariés qui n'en bénéficient pas encore et que nous approuvions pleinement les modalités de cette extension telles qu'elles nous avaient été présentées par le Gouvernement.
Malheureusement, nous ne pouvons souscrire aux modifications apportées aujourd'hui.
Ces modifications, si l'on en fait l'addition, ne sont pas minces et reflètent une conception des droits sociaux radicalement différente de la nôtre.
Le chèque-vacances est pour nous un droit attaché au salarié, sous condition de ressources, et non un simple dispositif d'épargne en vue d'une dépense future. Son utilisation doit être rapide, comme le montre la condition des deux ans, parce que cela correspond à la réalité d'un projet de vacances.
Le chèque-vacances n'est pas non plus lié à la situation de famille du bénéficiaire qui, à suivre la majorité sénatoriale, pourrait parfaitement être un cadre supérieur dont l'épouse n'a pas d'activité professionnelle. Non, le chèque-vacances n'est pas un instrument de la politique familiale. Il doit demeurer lié au statut social de la personne.
M. Emmanuel Hamel. Il doit contribuer à la politique familiale !
M. Claude Domeizel. Or, avec le projet tel qu'il résulte des amendements adoptés par le Sénat, nous sommes dans une autre logique, celle de l'épargne,...
M. Hilaire Flandre. C'est une vertu !
M. Claude Domeizel. ... tout à fait louable, certes, mais qui n'a plus rien à voir avec les objectifs de l'ordonnance de 1982.
Le texte issu des travaux du Sénat a perdu de vue ces objectifs. Il prend délibérément le risque de banaliser le chèque-vacances, d'en diluer l'identité dans l'économie de profit.
Tel qu'il a été conçu en 1982, le chèque-vacances est un dispositif cohérent, qui doit être maintenant étendu, mais qui ne doit en aucun cas changer de nature. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Machet.
M. Jacques Machet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je tiens à m'inscrire en faux contre l'idée que vient de défendre M. Domeizel. Au contraire de lui, je considère que le chèque-vacances est, par excellence, affaire de politique familiale : les vacances ne sont-elles pas un moment privilégié pour la famille, un moment de partage entre les parents et les enfants ?
C'est précisément la raison pour laquelle je voterai le texte tel qu'il est issu des travaux de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Jourdain.
M. André Jourdain. Le système des chèques-vacances, qui répond à un principe simple, particulièrement cher au groupe du Rassemblement pour la République puisque c'est celui de la participation, s'est révélé, tout au long de nos débats, constituer un dispositif technique complexe.
Cela a été très bien mis en évidence par notre rapporteur, Paul Blanc, qui a effectué un travail de grande qualité, témoignant ainsi de la valeur ajoutée que peut apporter le Sénat au travail législatif. Ce projet de loi visant à étendre le champ d'application du chèque-vacances était cependant décevant tel qu'il nous était proposé.
S'il permettait de favoriser le départ en vacances de ses bénéficiaires, trop de personnes restaient encore insuffisamment aidées, telles que les non-salariés, les employés des PME ou les familles nombreuses.
En outre, l'inégalité persistante en termes de régime fiscal et social entre les deux circuits de distribution du chèque-vacances, entreprises et organismes sociaux, n'était pas de nature à assurer l'équilibre du système.
Ces problèmes n'étaient pas résolus dans le projet de loi que vous nous avez présenté, madame le secrétaire d'Etat. C'est pourquoi les propositions judicieuses de notre rapporteur ont été adoptées par le Sénat, car elles ont permis d'enrichir un texte incomplet.
Ainsi, désormais, grâce au Sénat, l'exclusion d'un certain nombre de bénéficiaires à revenu moyen est évitée par le maintien du critère actuel d'appréciation des ressources du salarié. Cela permet non seulement de réintégrer près de 5 % des bénéficiaires actuels, mais également de préserver le secret fiscal du salarié et de son conjoint à l'égard de l'employeur.
De même, le plafond de ressources est relevé, ce qui permet d'ouvrir l'accès du dispositif aux salariés de classes moyennes modestes. Le Sénat va ainsi de nouveau dans le sens, voulu par le Gouvernement, de l'élargissement du nombre de bénéficiaires.
La possibilité d'accès des non-salariés aux chèques-vacances est réaffirmée.
La neutralité entre les différents circuits de distribution est enfin rétablie. L'exonération des charges sociales est élargie à toutes les entreprises, et non pas réservée aux organismes sociaux. De plus, cette exonération est étendue à la CSG.
Afin de garantir le caractère incitatif de cette exonération, le plafond de la contribution de l'employeur ouvrant droit à exonération est relevé.
Enfin, une nouvelle disposition essentielle est introduite en faveur des familles, puisqu'il est prévu une modulation de la contribution de l'employeur en fonction du nombre d'enfants à charge. De même, le plafond de cette contribution ouvrant droit à exonération est relevé et modulé en fonction de la taille de la famille.
Pour répondre aux inquiétudes soulevées durant les débats sur l'absence d'interlocuteurs compétents au sein des PME, le Sénat a adopté un amendement introduisant le principe du mandatement, encadré par les partenaires sociaux.
Pour toutes ces raisons, le groupe du Rassemblement pour la République adoptera ce projet de loi tel que modifié par les amendements de notre commission des affaires sociales. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le projet de loi dont nous venons de discuter apporte une nouvelle pierre à un dispositif dont je me permets de rappeler que l'idée est née dans les rangs des Républicains et Indépendants à la fin des années soixante-dix.
Le chèque-vacances est aujourd'hui un succès : 4 millions de personnes en ont bénéficié en 1997, soit un million de salariés et leurs familles. C'est un succès, raison de plus pour l'étendre au plus grand nombre !
Cependant, parmi eux, on ne compte qu'environ 3 000 salariés employés dans des entreprises dont les effectifs sont inférieurs à cinquante.
Ce projet de loi a donc pour objectif d'étendre le chèque-vacances aux salariés de ces petites entreprises qui, du fait de l'absence de comité d'entreprise, n'y ont pas suffisamment, voire pas du tout accès.
Pour positif qu'il soit, ce texte n'en méritait pas moins quelques aménagements auxquels a judicieusement procédé notre commission des affaires sociales, à l'instigation de son excellent rapporteur, notre ami M. Paul Blanc.
C'est ainsi qu'il convenait de revenir sur le nouveau critère d'appréciation des ressources qui risquait d'exclure environ 5 % des bénéficiaires actuels du dispositif.
Par ailleurs, en augmentant le plafond de ressources donnant accès aux chèques-vacances, notre assemblée a étendu le champ de ces bénéficiaires aux classes moyennes modestes.
Comme l'a fort bien dit l'orateur précédent, plusieurs amendements rendent l'exonération de charges sociales véritablement incitative, que ce soit son extension à la CSG et à la contribution au remboursement de la dette sociale ou sa généralisation à l'ensemble des entreprises, ou encore l'augmentation du plafond de la contribution de l'employeur ouvrant droit à l'exonération.
Nous nous félicitons également de la simplification apportée à la procédure de mise en place des chèques-vacances dans les PME, tout comme de la suppression du plafonnement de la contribution annuelle globale de l'entreprise au financement de ces chèques.
Enfin, nous avons opportunément étendu la mission de l'Agence nationale pour les chèques-vacances.
Les amendements que nous avons votés permettent ainsi d'améliorer l'essor du chèque-vacances et le texte tel qu'il est modifié donnera au dispositif le nouvel élan dont il avait besoin et que nous souhaitions.
C'est pourquoi les sénateurs du groupe des Républicains et Indépendants voteront le projet de loi tel qu'il résulte des travaux de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR, de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Madame le secrétaire d'Etat, je vous félicite. (Sourires.)

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DÉPÔT D'UNE QUESTION ORALE AVEC DÉBAT

M. le président. J'informe le Sénat que j'ai été saisi de la question orale avec débat suivante : dans le prolongement du problème qu'il a déjà soulevé dans son rapport en qualité de rapporteur spécial du budget de la justice et au cours de l'examen des crédits de ce ministère (rapport n° 66, session ordinaire 1998-1999, JO du Sénat, séance du 7 décembre 1998), M. Hubert Haenel demande à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle entend prendre pour que les maires ne soient plus systématiquement harcelés, mis en cause personnellement, cloués au pilori dans des différends qui relèveraient plus naturellement d'un procès devant les juridictions pénales ou administratives. Ces hommes et ces femmes de bonne volonté, qui se sont le plus souvent engagés dans la vie publique par seul souci de l'intérêt général et par sens du service de leurs prochains les plus proches, ressentent leur mise en cause systématique comme un acharnement alors qu'ils sont d'abord les victimes de l'inflation des normes, de la juridiciarisation excessive de la société et de la responsabilisation pénale galopante. Il lui demande d'engager sans tarder une mise à plat concertée de l'ensemble de ces problèmes afin de dresser un état des lieux complet et objectif, de dégager les solutions et de les traduire sans tarder dans des textes législatifs et réglementaires (n° 12).
Conformément aux articles 79, 80 du règlement, cette question orale avec débat a été communiquée au Gouvernement et la fixation de la date de la discussion aura lieu ultérieurement.

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TEXTE SOUMIS EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux conditions de détachement des travailleurs salariés ressortissants d'un Etat tiers dans le cadre d'une prestation de services transfrontaliers. Proposition de directive du Conseil étendant la libre prestation de services transfrontaliers aux ressortissants d'un Etat tiers établis à l'intérieur de la Communauté.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-1220 et distribué.

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DÉPÔTS RATTACHÉS POUR ORDRE
AU PROCÈS-VERBAL
DE LA SÉANCE DU 18 FÉVRIER 1999

DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI

M. le président. J'ai reçu, le 24 février 1999, de M. le Premier ministre un projet de loi autorisant la ratification des amendements à la convention portant création de l'Organisation internationale de télécommunications maritimes par satellites (INMARSAT) relatifs à la création de l'Organisation internationale de télécommunications mobiles par satellites (ensemble une annexe).
Ce projet de loi a été imprimé sous le n° 239, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, le 19 février 1999, de MM. Henri Revol, Marcel Deneux, Charles Descours, Pierre Laffitte et Franck Sérusclat une proposition de loi tendant à modifier l'article 6 ter de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 modifiée relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.
Cette proposition de loi sera imprimée sous le n° 235, distribuée et renvoyée à la commission des affaires économiques et du Plan, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de M. Serge Vinçon une proposition de loi modifiant l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et portant création de délégations parlementaires à l'évaluation de la politique nationale de renseignement à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Cette proposition de loi sera imprimée sous le n° 236, distribuée et renvoyée à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de Mme Nicole Borvo, MM. Robert Bret, Guy Fischer, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Michel Duffour, Thierry Foucaud, Gérard Le Cam, Pierre Lefebvre, Mme Hélène Luc, MM. Jack Ralite, Ivan Renar et Mme Odette Terrade une proposition de loi visant à modifier le titre Ier du livre V du code général des collectivités territoriales sur l'organisation administrative de Paris, Marseille et Lyon.
Cette proposition de loi a été imprimée sous le n° 237, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de MM. Robert Bret, Bernard Piras, Guy Fischer, Gilbert Chabroux, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Jean-François Picheral, Jean-Luc Bécart, Jean-Noël Guérini, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Jean Besson, Mme Nicole Borvo, MM. Henri d'Attilio, Michel Duffour, Guy Allouche, Thierry Foucaud, Jean-Pierre Bel, Gérard Le Cam, Mme Yolande Boyer, MM. Pierre Lefebvre, Jean-Louis Carrère, Mme Hélène Luc, MM. Bernard Cazeau, Jack Ralite, Marcel Charmant, Ivan Renar, Michel Charzat, Mme Odette Terrade, MM. Raymond Courrière, Roland Courteau, Marcel Debarge, Mmes Dinah Derycke, Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Claude Domeizel, Léon Fatous, Serge Godard, Claude Haut, Roger Hesling, Alain Journet, Serge Lagauche, Roger Lagorce, Dominique Larifla, André Lejeune, Louis Le Pensec, Jacques Mahéas, François Marc, Marc Massion, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Jean-Marc Pastor, Daniel Percheron, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Plancade, Mme Gisèle Printz, MM. Paul Raoult, Gérard Roujas, Claude Saunier, Michel Sergent, Franck Sérusclat, René-Pierre Signé, Simon Sutour, Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, André Vézinhet et Marcel Vidal, une proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915.
Cette proposition de loi a été imprimée sous le n° 238, distribuée et renvoyée à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, le 25 février 1999, de M. Philippe Richert, une proposition de loi tendant à faciliter et à améliorer l'indemnisation des victimes de violences urbaines.
Cette proposition de loi a été imprimée sous le n° 240, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, le 25 février 1999, de M. Philippe Richert, une proposition de loi tendant à créer un fonds national de prêts d'honneur aux étudiants.
Cette proposition de loi a été imprimée sous le n° 241, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

TEXTES SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4
DE LA CONSTITUTION

M. le président. J'ai reçu, le 23 février 1999, de M. le Premier ministre, le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution.
Proposition de décision du Conseil relative à l'adhésion de la Communauté européenne au règlement n° 67 de la commission économique pour l'Europe des Nations unies concernant l'homologation des équipements spéciaux des automobiles utilisant les gaz de pétrole liquéfiés dans leur système de propulsion.
Ce texte a été imprimé sous le n° E-1215 et distribué.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de M. le Premier ministre, le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution.
Proposition de décision du Conseil relative à l'acceptation d'amendements à la convention pour la protection de la mer Méditerranée contre la pollution et au protocole relatif à la prévention de la pollution par les opérations d'immersion effectuées par les navires et aéronefs (convention de Barcelone).
Ce texte a été imprimé sous le n° E-1216 et distribué.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de M. le Premier ministre, le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution.
Proposition de règlement (CE) du Conseil sur les mesures destinées à favoriser la pleine intégration de la dimension environnementale dans le processus de développement des pays en développement.
Ce texte a été imprimé sous le n° E-1217 et distribué.
J'ai reçu, le 23 février 1999, de M. le Premier ministre, le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à des mesures visant à promouvoir la conservation et la gestion durable des forêts tropicales et autres forêts dans les pays en développement.
Ce texte a été imprimé sous le numéro E-1218 et distribué.
J'ai reçu, le 24 février 1999, de M. le Premier ministre, le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Projet de décision du Conseil déterminant les bases juridiques pour l'acquis de Schengen qui a été révisé à la suite de la réunion du groupe « Acquis de Schengen » des 14 et 15 mai.
Ce texte a été imprimé sous le numéro E-1219 et distribué.

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ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 3 mars 1999, à seize heures :
1. Discussion du projet de loi (n° 142, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, créant le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération ».
Rapport (n° 154, 1998-1999) de M. Lucien Neuwirth, fait au nom de la commission des affaires sociales.
Aucun amendement à ce projet de loi n'est plus recevable.
A 22 heures :
2. Discussion du projet de loi (n° 140, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la charte sociale européenne (révisée) (ensemble une annexe).
Rapport (n° 160, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
3. Discussion du projet de loi (n° 141, 1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du protocole additionnel à la charte sociale européenne prévoyant un système de réclamations collectives.
Rapport (n° 160, 1998-1999) de M. André Boyer, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
4. Discussion du projet de loi (n° 5, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre les Etats parties au Traité de l'Atlantique-Nord et les autres Etats participant au partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces (ensemble un protocole additionnel).
Rapport (n° 158, 1998-1999) de M. Serge Vinçon, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
5. Discussion du projet de loi (n° 72, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois (département de la Haute-Savoie) et Bardonnex (canton de Genève).
Rapport (n° 159, 1998-1999) de M. Hubert Durand-Chastel, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
6. Discussion du projet de loi (n° 73, 1998-1999) autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud.
Rapport (n° 159, 1998-1999) de M. Hubert Durand-Chastel, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
7. Discussion du projet de loi (n° 62, 1998-1999) autorisant l'adhésion de la République française à la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées approuvée par l'assemblée générale des Nations unies le 21 novembre 1947 (ensemble dix-sept annexes approuvées par les institutions spécialisées).
Rapport (n° 169, 1998-1999) de M. André Dulait, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
8. Discussion du projet de loi (n° 60, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres portant aménagements du titre Ier de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963.
Rapport (n° 168, 1998-1999) de M. Paul Masson, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
9. Discussion du projet de loi (n° 61, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord sous forme d'échange de lettres relatif à l'application de l'article 7 modifié de la convention de voisinage entre la France et la Principauté de Monaco du 18 mai 1963.
Rapport (n° 168, 1998-1999) de M. Paul Masson, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l'objet d'une discussion générale commune.
10. Discussion du projet de loi (n° 135, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs.
Rapport (n° 170, 1998-1999) de M. Robert Del Picchia, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
11. Discussion du projet de loi (n° 134, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière (ensemble sept appendices).
Rapport (n° 189, 1998-1999) de M. André Rouvière, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
12. Discussion du projet de loi (n° 148, 1998-1999) autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l'Université franco-allemande.
Rapport (n° 188, 1998-1999) de M. Pierre Biarnès, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
13. Discussion du projet de loi (n° 149, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Afrique du Sud pour la prévention, la recherche, la constatation et la répression des infractions douanières.
Rapport (n° 191, 1998-1999) de M. Daniel Goulet, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
14. Discussion du projet de loi (n° 150, 1998-1999) autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République slovaque pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières.
Rapport (n° 190, 1998-1999) de M. Daniel Goulet, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Je vous rappelle en outre, mes chers collègues, qu'à seize heures aura lieu la réception solennelle de M. Vaclav Havel, Président de la République tchèque.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

Projet de loi constitutionnelle, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes (n° 228, 1998-1999).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 3 mars 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : à l'issue de la discussion générale.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à inciter au respect des droits de l'enfant dans le monde, notamment lors de l'achat des fournitures scolaires (n° 80, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 8 mars 1999, à dix-sept heures.
Projet de loi relatif aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations (n° 153, 1998-1999).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 9 mars 1999, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 9 mars 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi de M. André Jourdain relative au multisalariat en temps partagé (n° 125, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 mars 1999, à dix-sept heures.
Conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi de M. Jacques Oudin et plusieurs de ses collègues, visant à modifier l'article L. 255 du code électoral (n° 208, 1998-1999).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 mars 1999, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Elargissement du champ d'action des mairies d'arrondissement

468. - 22 février 1999. - Mme Nicole Borvo appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fait qu'il est nécessaire de réformer la loi de décentralisation Paris-Marseille-Lyon en élargissant le champ d'action des mairies d'arrondissement. Cette extension des compétences dévolues aux mairies décentralisées concernerait la gestion de tous les équipements locaux, des caisses des écoles et centres sociaux, l'attribution d'une partie importante des logements relevant de la commune ou de ses sociétés d'économie mixte. Ce renforcement des pouvoirs suppose des moyens financiers et en personnels adaptés alors que les dotations directement gérées par les mairies d'arrondissement sont estimées à deux francs par habitant. Il faudrait notamment qu'un sujet repoussé en conseil d'arrondissement ne puisse être inscrit à l'ordre du jour du conseil municipal. Dans ce cas une commission mixte paritaire, composée d'un nombre égal de représentants de la commune et des arrondissements, essayerait alors de trouver un accord, avant une deuxième lecture au niveau décentralisé. Les parlementaires communistes ont déposé une proposition de loi en ce sens. D'autres propositions de loi ont été déposées par d'autres parlementaires à ce sujet. Elle lui demande quand le Gouvernement compte organiser le débat parlementaire en vue de réformer la loi de décentralisation Paris-Marseille-Lyon.

Fixation d'une date unique des soldes
sur l'ensemble de l'hexagone

469. - 23 février 1999. - M. Paul Girod attire l'attention de Mme le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat sur la nécessité de fixer une date unique des soldes sur l'ensemble de l'hexagone comme le réclament depuis plusieurs années les professionnels du commerce, de l'industrie et des services. En effet, la complexité et l'opacité des règles actuelles qui fixent les dates de démarrage des soldes dans chaque département entraînent, pour le commerce, des incidences économiques majeures d'un département par rapport à un autre, voire d'une région par rapport à une autre. Il lui rappelle une récente déclaration par laquelle elle semblait vouloir s'engager à déposer une proposition de loi d'ici à la fin de ce premier semestre 1999. Il lui demande si elle envisage de stipuler dans ce futur texte : 1° la fixation d'une date unique de démarrage pour les soldes d'hiver et ceux d'été (après le 10 janvier pour l'hiver et le 10 juillet pour l'été) ; 2° un accord de dérogation pour les départements tributaires d'une économie saisonnière (stations de sports d'hiver et balnéaires).

Pénurie de psychiatres praticiens hospitaliers

470. - 23 février 1999. - M. Paul Girod attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale sur la pénurie de psychiatres praticiens hospitaliers et plus particulièrement dans l'Aisne, au centre hospitalier de Prémontré. En effet, le développement actuel de la psychiatrie publique hors les murs de l'hôpital et son application dans les soins apportés à des populations nouvelles (exclus, délinquants sexuels, toxicomanes) sont de plus en plus exigeants en temps médical. Or, la pénurie actuelle de psychiatres et leur inégale répartition sur le territoire national nuit au bon exercice de cette spécialité dans certaines régions et plus particulièrement dans les zones rurales. Le département de l'Aisne est malheureusement frappé de plein fouet par cette situation. Le centre hospitalier de Prémontré, établissement public de santé mentale, gérant la quasi-totalité des secteurs de psychiatrie du département (cinq secteurs sur sept de psychiatrie générale et trois intersecteurs de psychiatrie infanto-juvénile) souffre depuis déjà plusieurs années d'une pénurie structurelle de médecins. Les difficultés de recrutement font que, sur 55,3 postes créés, seulement 27,8 sont pourvus. Dans ces conditions, les fonctions de base de la psychiatrie publique peuvent difficilement être assurées. Il lui demande donc quelles mesures il entend prendre, dans le cadre d'une politique de santé mentale bien gérée, afin de permettre la couverture complète des postes créés et enrayer ainsi ce processus de paupérisation médicale patent.

Conséquences de l'intégration de l'école d'ingénieur de Tours
au sein de l'université François-Rabelais

471. - 24 février 1999. - M. Dominique Leclerc appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie concernant les conséquences de l'intégration de l'école d'ingénieurs de Tours au sein de l'université François-Rabelais et plus particulièrement la situation du personnel employé par l'Association gérant l'école d'ingénieurs de Tours (AGEIT). En effet, quinze personnes actuellement sous contrat de droit privé avec cette association vont perdre leur emploi dans la finalisation de ce processus en juin prochain. Ce problème a été évoqué à de nombreuses reprises et aucune solution concrète n'a pu à ce jour être proposée au personnel. Dans le cas d'un licenciement de la totalité du personnel, l'AGEIT ne pourra s'acquitter de l'ensemble des indemnités de licenciement et des mesures d'accompagnement du personnel sans être confrontée à des risques financiers importants. Afin de préserver l'emploi de personnels qui n'ont pas démérité et d'assurer la continuité des services rendus aux étudiants, il lui demande de mettre en oeuvre une solution spécifique permettant d'intégrer ces personnels au sein de la fonction publique. Il n'apparaît pas équitable en effet que l'Etat ne se soumette pas aux mêmes contraintes qu'une autre société lorsqu'il reprend une activité.

Conduite à tenir par un médecin en cas de refus
de se soumettre à une vaccination obligatoire

472. - 25 février 1999. - M. Charles Descours interroge M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale pour savoir quelle est la conduite à tenir, pour un médecin, en présence d'un mineur ou de l'un de ses parents, qui oppose un refus de se soumettre à une vaccination obligatoire. Faut-il, dans ce cas, considérer, en application de l'article 16-3 du code civil, qu'il existe un droit au refus de soins (Cass. civ. 2e, 19 mars 1967) dans des situations où la vaccination est obligatoire ?

Conséquences de la mise en service de la ligne à grande vitesse
Méditerranée sur la desserte ferroviaire de l'Ardèche

473. - 25 février 1999. - M. Michel Teston interroge M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les conséquences de la mise en service de la ligne à grande vitesse Méditerranée sur la desserte ferroviaire de l'Ardèche. Si la réalisation de cette grande infrastructure ferroviaire contribuera à favoriser les échanges entre le nord et le sud de l'Europe, elle risque de se traduire aussi par une dégradation de l'accès au réseau ferroviaire pour les Ardéchois, tout particulièrement ceux du sud du département. La question se pose d'ailleurs dans les mêmes termes pour les habitants du sud de la Drôme et, dans une moindre mesure, pour les habitants du nord du Vaucluse. En effet, s'il est prévu en gare de Montpellier et de Valence-Ville le maintien de quatre allers-retours quotidiens par le TGV pour Paris, il n'en est pas de même des autres relations assurées actuellement sans rupture de charge par les trains à grande vitesse (TGV) et/ou les trains « grandes lignes » avec : Marseille, Nice, Montpellier et Toulouse ; Lyon, Dijon, Metz et Strasbourg. La suppression de ces relations directes, si elle était confirmée, serait particulièrement pénalisante pour les habitants du sud de la région Rhône-Alpes, qui devraient supporter jusqu'à deux ruptures de charge sur les relations citées précédemment. Lors d'une visite qu'il a bien voulu effectuer en Ardèche fin août 1998, il lui a fait part de cette préoccupation. Le ministre l'a d'ailleurs entendu, puisque, à sa demande, quatre réunions de concertation ont été organisées par la préfecture de la région Rhône-Alpes, dont deux concernant l'Ardèche et la Drôme. Il n'en demeure pas moins que lors de ces réunions, aucune réponse précise n'a encore pu nous être donnée. Aussi, il souhaite connaître les dispositions qu'il envisage de prendre pour permettre à l'Ardèche, déjà pénalisée par l'absence de trains voyageurs sur son territoire, de conserver au moins le même niveau de service qu'actuellement, après la mise en service de la ligne à grande vitesse Méditerranée.

Modernisation de la ligne SNCF Le Puy-en-Velay - Saint-Etienne

474. - 1er mars 1999. - M. Adrien Gouteyron attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur la nécessaire modernisation de la ligne SNCF Le Puy-en-Velay-Saint-Etienne. Il lui indique que cette ligne souffre de problèmes d'infrastructures : le matériel, âgé de plus de quarante ans, souffre d'évidents problèmes d'obsolescence : autorail X 2008 issu des années cinquante, remorques vétustes et en mauvais état. Il lui indique, d'autre part, que l'augmentation du nombre de voyageurs entraîne la nécessité d'augmenter les cadences : ainsi la ligne Bas-Monistrol a vu augmenter sa fréquentation de 20 %. C'est pourquoi il lui demande comment il entend promouvoir la modernisation d'une ligne qui ne saurait pâtir d'un éventuel désengagement de la part de l'Etat au profit d'autres choix prioritaires.

Avenir du TGV-Méditerranée

475. - 2 mars 1999. - M. René Marquès attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur l'avenir du train à grande vitesse (TGV) Méditerranée. Le groupement européen d'intérêt économique « Sud Europe Méditerranée » réuni le 21 janvier 1999 à Perpignan qui comprend, outre les représentants des Etats français et espagnol, les techniciens de la SNCF (Société nationale des chemins de fer français) et de la RENFE (chemins de fer espagnols) et des collectivités régionales concernées - Languedoc-Roussillon et Catalogne - a fait le point sur l'évolution du dossier TGV-Méditerranée. En 1985, il y a bientôt quinze ans, les premières analyses géologiques étaient réalisées sur l'emplacement du futur tunnel pyrénéen d'une longueur de huit kilomètres. Depuis lors de nombreuses études ont été réalisées sur le coût des investissements, de l'exploitation et sur les prévisions de recettes. La mission TGV, créée il y a quelques années, est en contact avec les élus locaux mais ne peut définir un calendrier approximatif reposant sur des éléments fiables. En 1986, les prévisions programmaient la réalisation du TGV-Méditerranée pour l'an 2000. Au fil du temps, et à l'exemple du TGV-Est qui ne sera opérationnel qu'en 2006, alors que ce dossier est très avancé, on peut supposer que la réalisation ne sera effective qu'en 2015 pour la section Montpellier-Perpignan. En effet, dans la mesure où la section Barcelone-Perpignan d'une part et Nîmes-Montpellier d'autre part seraient terminées en 2005, le contournement préalable de Nîmes et Montpellier semble prioritaire. Le Gouvernement l'a récemment rappelé. Il faut également rappeler que la déclaration d'utilité publique (DUP) est pratiquement réalisée en Espagne alors qu'il n'en est rien en France (délai minimum de deux ans). En conséquence, il lui demande si le TGV-Méditerranée verra le jour et à quel horizon Barcelone sera à quarante-cinq minutes de Perpignan.