SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Hommage à Claude Erignac, préfet de Corse (p. 1 ).

3. Décès de Maurice Schumann (p. 2 ).

Suspension et reprise de la séance (p. 3 )

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE

4. Dépôt du rapport d'une commission d'enquête (p. 4 ).

5. Démission d'un membre d'une commission d'enquête et candidature (p. 5 ).

6. Baux ruraux. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission (p. 6 ).
Discussion générale : M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Serge Vinçon, Guy Allouche.
Clôture de la discussion générale.
M. le rapporteur.

Articles 1er et 2. - Adoption (p. 7 )

Vote sur l'ensemble (p. 8 )

MM. Jean Derian, Guy Allouche, Serge Vinçon, Michel Dreyfus-Schmidt.
Adoption, par scrutin public, d'une proposition de loi.

7. Nomination d'un membre d'une commission d'enquête (p. 9 ).

8. Prestation compensatoire en cas de divorce. - Discussion des conclusions du rapport d'une commission (p. 10 ).
Discussion générale : M. Jean-Jacques Hyest, en remplacement de M. Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des lois ; Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice ; MM. Michel Dreyfus-Schmidt, Nicolas About, Robert Pagès.
Mme le garde des sceaux.
Clôture de la discussion générale.
Renvoi de la suite de la discussion.

Suspension et reprise de la séance (p. 11 )

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

9. Conférence des présidents (p. 12 ).

10. Intervention des organismes d'HLM sur le parc locatif privé. - Adoption d'une proposition de loi (p. 13 ).
Discussion générale : MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ; Gérard Braun, rapporteur de la commission des affaires économiques ; Daniel Eckenspieller, Alain Vasselle, Bernard Piras, Dominique Braye, Robert Pagès, Marcel-Pierre Cléach, Georges Mouly.
M. le secrétaire d'Etat.
Clôture de la discussion générale.

Articles 1er et 2. - Adoption (p. 14 )

Adoption de l'ensemble de la proposition de loi.

11. Remplacement d'un sénateur décédé (p. 15 ).

12. Dépôt de propositions de loi (p. 16 ).

13. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 17 ).

14. Dépôt d'un rapport d'information (p. 18 ).

15. Ordre du jour (p. 19 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le procès-verbal de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté.

2

HOMMAGE À CLAUDE ÉRIGNAC,
PRÉFET DE CORSE

M. le président. Madame le ministre, mes chers collègues, au moment de reprendre nos travaux, je voudrais que le Sénat observe une minute de silence après les terribles événements survenus en Corse ces derniers jours. (Mme le ministre, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence.)
En votre nom, mes chers collègues, j'ai exprimé notre indignation devant cet acte lâche et inacceptable : l'attentat dont a été victime le représentant de l'Etat, le préfet Claude Erignac.
Le Sénat, comme l'ensemble des institutions de la République, ne saurait accepter l'enchaînement tragique dans lequel certains voudraient pousser une partie du territoire national à laquelle nous sommes tant attachés ; il ne l'accepte pas, il ne s'y résigne pas ; il le rejette et le combattra.
Que chacun sache que, au-delà de la profonde solidarité dont nous assurons la famille de ce serviteur de l'Etat, nous ferons preuve, à notre place, de la détermination la plus totale pour faire reculer la violence et garantir à chacun qu'il peut vivre, sous les lois de la République, dans la sécurité et la paix civile.

3

DÉCÈS DE MAURICE SCHUMANN

M. le président. Mes chers collègues, je suis très ému, car j'ai une autre mauvaise nouvelle à vous annoncer : la mort de Maurice Schumann, cette nuit. (Marques d'émotion sur toutes les travées.)
Vous voyez mon désarroi. C'est terrible ! Je m'apprête à aller m'incliner devant sa dépouille.
Le Sénat va interrompre ses travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à neuf heures trente-cinq, est reprise à neuf heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Jean Faure.)

PRÉSIDENCE DE M. JEAN FAURE
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

4

DÉPÔT DU RAPPORT
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

M. le président. M. le président a reçu de M. Jean Arthuis un rapport fait au nom de la commission d'enquête chargée de recueillir des éléments d'information sur les conséquences financières, économiques et sociales de la décision de réduire à trente-cinq heures la durée hebdomadaire du travail, créée en vertu d'une résolution adoptée par le Sénat le 11 décembre 1997.
Ce dépôt a été publié au Journal officiel, édition des lois et décret du vendredi 6 février 1998. Cette publication constitue, conformément au paragraphe III du chapitre V de l'instruction général du bureau, le point de départ du délai de six jours nets pendant lequel la demande de constitution du Sénat en comité secret peut être formulée.
Ce rapport sera imprimé sous le n° 279 et distribué, sauf si le Sénat, constitué en comité secret, décide, par un vote spécial, de ne pas autoriser la publication de tout ou partie du rapport.

5

DÉMISSION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE
ET CANDIDATURE

M. le président. J'ai reçu avis de la démission de M. Fernand Tardy, comme membre de la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire.
Le groupe intéressé à fait connaître à la présidence le nom du candidat proposé en remplacement.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.

6

BAUX RURAUX

Adoption des conclusions
du rapport d'une commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 314, 1995-1996) de M. Jean-Paul Delevoye, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur la proposition de loi (n° 239, 1995-1996) de MM. Serge Vinçon, Michel Alloncle, Louis Althapé, Jean Bernard, Roger Besse, Paul Blanc, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Robert Calméjane, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Jacques Chaumont, Jean-Patrick Courtois, Désiré Dabavelaere, Philippe de Gaulle, Luc Dejoie, Jacques Delong, Charles Descours, Michel Doublet, Alain Dufaut, Patrice Gélard, Alain Gérard, Daniel Goulet, Georges Gruillot, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Alain Joyandet, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Pierre Martin, Mme Nelly Olin, MM. Charles Pasqua, Alain Pluchet, Victor Reux, Roger Rigaudière, Michel Rufin, Jean-Pierre Schosteck, Maurice Schumann, Louis Souvet et Jacques Valade tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, permettez-moi de vous soumettre les conclusions de la commission des lois sur la proposition de loi proposée par Serge Vinçon.
Ce problème suscite un intérêt non négligeable de la part des élus puisqu'une enquête de l'Association des maires de France montre qu'environ 1 000 collectivités locales de moins de 3 500 habitants sont concernées.
Il convient d'affirmer en préalable que nous tenons à ce que les affaires publiques soient empreintes d'une très grande éthique, d'une très grande moralisation, d'une très grande transparence, et qu'il ne s'agit en aucun cas de confondre intérêt privé et intérêt public. Mais il convient aussi de ne pas pénaliser celles et ceux qui acceptent de se concacrer à la vie publique. La démocratie a besoin d'eux.
L'article 432-12 du nouveau code pénal dispose : « Le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou le paiement - même quand l'opération est positive pour la commune et même si la personne ne retire aucun bénéfice de l'opération prohibée - est puni... »
Les choses sont donc très claires ; une lacune apparaît cependant. Dès 1967, le législateur a prévu des dérogations au délit d'ingérence, devenu, en 1994, le délit de prise illégale d'intérêts, et l'article 432-12 du code pénal prévoit trois séries d'assouplissement.
Tout d'abord, les maires, les adjoints et les conseillers municipaux peuvent traiter avec leurs communes pour le transfert de biens ou la fourniture de services dans la limite de 100 000 francs.
Ils peuvent aussi, sur autorisation du conseil municipal, acquérir une parcelle d'un lotissement communal pour y construire leur habitation personnelle.
Ils peuvent également, toujours sur autorisation du conseil municipal, acquérir un bien qui appartient à la commune pour y créer ou y développer une activité à caractère professionnel.
Bien évidemment, dans tous ces cas, l'élu intéressé ne doit pas participer à la délibération du conseil municipal relative à la conclusion ou à l'approbation du contrat.
Notre collègue Serge Vinçon a souligné l'impossibilité, pour certains élus locaux, de conclure des baux ruraux avec leur commune et a mis l'accent sur une situation paradoxale. En effet, le code pénal reconnaît aux élus la faculté de conclure avec leur collectivité des actes a priori plus lourds, portant sur le patrimoine de la commune, mais leur refuse la possibilité de conclure des baux ruraux.
Selon nous, qui peut le plus peut le moins, à condition bien évidemment de prendre un certain nombre de précautions.
Quels sont les objectifs visés par la proposition de loi qui est soumise à votre approbation par la commission des lois ?
A l'évidence, il s'agit de préserver l'intérêt de la commune et, dans cet esprit, de s'assurer que l'élu ne puisse pas se prévaloir de son autorité pour en tirer un quelconque avantage, ne puisse pas commettre, ce que j'appellerai un délit d'initié, et que les baux soient conclus à un prix tout à fait normal.
C'est la raison pour laquelle il vous est proposé d'ajouter au code pénal la possibilité de louer des terrains, mais d'encadrer strictement cette faculté comme celles qui sont d'ores et déjà reconnues par le code pénal. Ainsi, cette dérogation posée par la proposition de loi ne concerne que les baux ruraux de droit commun régis par le titre Ier du livre IV du code rural.
Cette précision apporte une garantie sur le prix du bail, puisque celui-ci doit être compris dans la fourchette fixée par le préfet ; ce qui constitue une garantie absolue et permet à la commune de résilier le bail à tout moment lorsque les biens loués sont nécessaires à la réalisation d'un projet d'utilité publique.
Nous proposons en outre de limiter à neuf ans la durée du bail ainsi conclu. Nous n'avons pas souhaité autoriser une durée inférieure à neuf ans pour ne pas apporter de dérogation supplémentaire. Nous n'avons pas non plus souhaité une durée supérieure, de façon à éviter toute rente de situation.
Enfin, nous prévoyons la publication de l'estimation du service des Domaines, ce qui donne la garantie de la transparence de l'information, et ce d'autant plus que le contrat ne pourra en aucun cas être signé moins de deux mois après cette publication. Il n'y aura donc aucun risque de « délit d'initié ».
Il nous semble donc que cette proposition de loi permet de combler une lacune, de garantir la transparence dans la gestion des affaires publiques, de préserver les intérêts de la commune et de ne pas fausser le libre jeu de la concurrence.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les dispositions qui sont soumises à votre approbation. (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou. garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat examine aujourd'hui, par application des dispositions de l'article 48, alinéa 3, de la Constitution, une proposition de loi amendée par votre commission des lois et tendant à apporter une nouvelle dérogation au délit de prise illégale d'intérêts, ou délit d'ingérence.
Cette dérogation tend à permettre aux élus des communes de moins de 3 500 habitants de conclure avec leur collectivité locale des baux ruraux, ainsi que vient de l'expliquer votre rapporteur, M. Delevoye.
De prime abord, cette proposition paraît réaliste. La loi ne permet-elle pas déjà à ces élus d'acquérir sous certaines conditions des biens de leur commune ou de lui louer un logement ?
Ne faut-il pas par ailleurs permettre aux agriculteurs de nos petites communes rurales, comme il est indiqué dans l'exposé des motifs de la proposition de loi, de continuer à participer activement à la vie publique locale ?
Les choses ne sont toutefois pas aussi simples, même si le Gouvernement partage à l'évidence pleinement le souci qui anime les auteurs de la proposition de loi de permettre à des élus des petites communes de poursuivre leur activité professionnelle.
Cette proposition ne peut donc recevoir l'accord du Gouvernement, pour des raisons de principe que je vais vous exposer et dont j'espère vous convaincre.
A titre préliminaire, un bref rappel s'avère indispensable.
L'ancien article 175 du code pénal ne connaissait qu'une dérogation en matière d'ingérence : dans les communes de moins de 1 500 habitants, les élus concernés pouvaient traiter avec la commune pour l'exécution de menus travaux ou la livraison de fournitures courantes, dans la limite de 75 000 francs par an.
L'actuel article 432-12, entré en vigueur avec le nouveau code pénal le 1er mars 1994, a introduit d'autres dérogations : le seuil d'habitants des communes susvisées a été porté à 3 500 ; le montant annuel autorisé a été porté à 100 000 francs et peut s'appliquer à tous types d'opérations, y compris immobilières ; les élus peuvent désormais acquérir une parcelle d'un lotissement communal pour se loger ; ils peuvent aussi acquérir un bien appartenant à la commune pour créer ou développer une activité professionnelle.
Les trois premières dérogations figuraient dans le projet de loi initial du Gouvernement de l'époque, la dernière résultant d'un amendement parlementaire, combattu en son temps par le Gouvernement pour des raisons liées à la nécessaire impartialité de la puissance publique.
La proposition de loi vise à élargir cette dernière dérogation, en permettant non plus seulement l'acquisition, mais aussi la location d'un bien appartenant à la commune pour créer ou développer une activité professionnelle, agricole en l'espèce.
Elle encourt des critiques du même ordre que celles qui avaient été formulées à l'époque.
Le délit de prise illégale d'intérêt ou d'ingérence est un délit « préventif », un délit obstacle. Son rôle dans notre droit pénal est symbolique : il est de proclamer de la manière la plus solennelle que tout conflit entre un intérêt privé et l'intérêt général est prohibé.
Cette affirmation est essentielle au plan de l'impartialité de la puissance publique. Non seulement ceux qui représentent celle-ci ne doivent pas « faire des affaires » - comme l'on dit habituellement - ce qui va de soi, mais surtout ils ne doivent pas pouvoir être soupçonnés d'en faire avec elle.
L'élu titulaire d'un mandat électif public ne doit pas prêter le flanc à des critiques, même injustes ; pour ce faire, il doit s'abstenir, aussi exigeant que cela puisse paraître, de se placer dans des situations à risque. Le statut comporte, en effet, ses servitudes.
Par ailleurs, l'élu pourra toujours être soupçonné de disposer, de par ses fonctions, d'informations qui rompent l'égalité entre lui et ses concitoyens s'il traite avec sa commune ; il est, d'une certaine façon, initié, juge et partie.
Il est tout autant question ici d'apparence et de perception de la vie publique que de réalité de la fraude.
Le maire dispose potentiellement de tous les éléments pour fausser la concurrence entre lui et ses administrés. Cela ne signifie pas qu'il le fera, mais il peut être soupçonné de le faire. En effet, il connaît les règlements d'occupation du sol et leur évolution à long terme, il est informé des travaux de viabilisation ou d'adduction d'eau et des projets en cours, il a les moyens d'influer sur leur évolution, enfin, il connaît la situation personnelle de ses administrés.
C'est aussi et surtout afin d'éviter le soupçon que le délit de prise illégale d'intérêts a été conçu dans des termes aussi larges. Il a pour objet non pas de nuire aux élus en les empêchant d'exercer leur activité professionnelle, mais, bien au contraire, de les protéger dans l'exercice impartial de la puissance publique.
Il s'agit en réalité d'un texte de protection de l'élu et non d'un texte dirigé contre l'élu.
Dans cet esprit, seules des dérogations pour des cas parfaitement transparents et incontestables peuvent être envisagées.
Tel est le cas de l'actuelle dérogation destinée à permettre à l'élu de se loger dans un lotissement communal ou dans un logement appartenant à la commune. Il est évident que le maire doit se loger dans sa commune. Or cette opération ne peut guère donner lieu à des abus dans les communes de moins de 3 500 habitants, qui sont rarement propriétaires d'un parc important de bâtiments d'habitation.
Il en va tout autrement lorsqu'il s'agit d'une activité professionnelle, notamment de son développement. L'activité professionnelle est en effet un intérêt exclusivement privé et lucratif, qui doit être dissocié de l'activité publique.
C'est pour cette raison que le Gouvernement s'était opposé à l'époque à la dérogation que j'évoquais tout à l'heure, tendant à permettre aux élus d'acquérir un bien appartenant à la commune pour créer ou développer une activité professionnelle.
Il avait été soutenu, lors des débats relatifs au nouveau code pénal, que la dérogation souhaitée se justifiait parce qu'il était impossible de créer ou de développer une activité industrielle ou artisanale en dehors des zones prévues à cet effet, zones dont la création et l'organisation dépendent de la commune.
Cette particularité ne se retrouve pas pour les terres agricoles.
Par ailleurs, la dérogation introduite par le nouveau code pénal est en pratique d'une portée limitée, puisqu'il s'agit d'un achat qui, à la différence d'une location, engage l'acheteur dans une dépense importante. Les situations de location sont potentiellement plus nombreuses et peuvent porter sur des surfaces importantes, les petites communes étant fréquemment propriétaires de grandes surfaces de terre.
Enfin et surtout, permettre au maire de louer un bien communal ancre une situation de conflit d'intérêts dans le temps.
A ce stade de mon propos, je voudrais aborder les garanties que les auteurs de la proposition de loi, puis la commission des lois, ont prévues pour encadrer le texte.
Ces garanties sont les suivantes. Tout d'abord, il doit s'agir d'un bail rural au sens du code rural, ce qui rend applicables les dispositions de ce code en matière de fixation du prix et de résiliation par la puissance publique pour cause d'utilité publique. Ce bail doit ensuite faire l'objet d'une estimation préalable par le service des Domaines. Enfin, ce bail ne peut être conclu avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la publication de cette évaluation.
Ces précisions sont, bien entendu, très utiles, et je rends hommage à leurs auteurs. Mais, à mes yeux, elles ne constituent pas des garanties à la mesure des inconvénients présentés par le texte.
Il convient ici de rappeler que la durée d'un bail rural est de neuf années, renouvelable. Le conflit d'intérêts ne peut donc que s'installer dans le long terme.
Par ailleurs, quelle peut être l'effectivité de la faculté de résiliation pour cause d'utilité publique ? Qui instruit en effet les dossiers d'utilité publique ? Si l'équipe municipale ne change pas, elle n'aura aucune raison de résilier le bail. Et si elle change et qu'elle le résilie, la situation sera critiquable, car il pourrait s'agir d'un règlement de comptes politiques.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est vrai !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. La mesure de publicité ne constitue pas davantage une garantie importante. Qui est en mesure, dans une petite commune rurale, de concourir avec le maire ?
Quelles seront les chances réelles de bénéficier du contrat dans la mesure où c'est précisément le maire qui va choisir le contractant de la commune ?
Quant à la question du montant du loyer, elle est sans intérêt : l'ingérence ne suppose en effet nullement un préjudice pour la commune.
J'espère que vous comprenez bien la position que je développe ici. Je ne crois pas que les élus feraient un mauvais usage de ce texte car, comme je l'ai déjà dit, les élus locaux de notre pays sont honnêtes dans leur immense majorité. Mais il suffit que l'on puisse soupçonner qu'il n'en soit pas ainsi pour que l'image de l'ensemble des élus soit atteinte.
Pour conclure, je voudrais appeler votre attention sur des considérations plus générales.
Le professeur Emile Garçon écrivait, dans son code pénal annoté de 1901, que l'article 175 du code pénal trouvait son origine dans des dispositions du droit romain et de nombreuses ordonnances des rois de France.
Force est de constater que l'interdiction pour un maire de conclure des baux ruraux avec sa commune est plus que séculaire et que la France est un pays de tradition agricole très ancienne. Pourquoi alors ne pas avoir soulevé plus tôt la difficulté ?
La réponse paraît contenue dans l'exposé des motifs de la présente proposition de loi : les élus redoutent des poursuites pénales. Vous conviendrez avec moi qu'il ne faut pas modifier la loi pénale pour des cas particuliers.
Enfin, d'autres catégories socioprofessionnelles également dignes d'intérêt pourraient légitimement former des demandes de même nature, qu'il s'agisse des chercheurs, pour la valorisation de la recherche publique, des membres des chambres de commerce et d'industrie ou des membres des chambres de métiers.
Je crois que la loi pénale doit être, autant qu'il est possible, la même pour tous et qu'il ne faut y déroger qu'avec la plus grande circonspection.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne peut que s'opposer à l'adoption de la présente proposition de loi.
Pour autant, le Gouvernement est bien évidemment sensible aux difficultés rencontrées par les élus concernés, dont le Sénat se fait légitimement l'écho.
Comme vous le savez, la question évoquée aujourd'hui a fait l'objet à la Chancellerie d'un groupe de travail qui a réuni, au-delà de toute sensibilité ou, plutôt, en rassemblant toutes les sensibilités des membres du Sénat, des membre de la Chancellerie et des représentants de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.
Ce groupe de travail a fait, dans son rapport, une analyse juridique détaillée de la question et a conclu, en substance, qu'une appréciation stricte de la loi pénale permettait de considérer que le délit n'avait pas un champ d'application aussi étendu que celui qui lui est souvent donné.
Ce document technique général n'a évidemment pas vocation à régler toutes les difficultés rencontrées, que vous avez soulignées, et encore moins à conférer aux personnes concernées une immunité. Les interprétations des textes qui y sont données le sont, comme il est d'usage, sous la réserve de l'appréciation souveraine des juridictions.
Toutefois, sa diffusion pour information aux parquets, aux préfets, voire aux chambres régionales des comptes, leur permettrait de disposer d'une documentation technique leur permettant d'exercer leurs missions de la manière la plus avisée.
Si votre rapporteur, qui a participé à ces travaux, en est d'accord, la Chancellerie est disposée à diffuser ce travail et à procéder, le moment venu, à une nouvelle évaluation de la situation. Telle est la proposition que vous fait le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, les activités agricole et forestière constituent le socle irremplaçable de toute politique cohérente de développement rural. En effet, ces activités sont les seules capables d'entretenir 85 % de notre territoire.
Cette fonction d'entretien est, vous me permettrez de le rappeler, indispensable à la survie du monde rural. Chacun d'entre nous, dans cette enceinte, a certainement en mémoire, pour les avoir parfois vécues dans son département, les conséquences néfastes de l'abandon de ces activités : enfrichement, réapparition de risques écologiques, tels que les incendies, les avalanches ou les inondations, et perte totale d'attrait d'un milieu rural non entretenu.
Face à ces risques, nous sommes confrontés à une insuffisante adéquation de la législation aux réalités sociologiques propres aux communes rurales, et plus particulièrement aux plus petites d'entre elles.
En effet, les exploitants agricoles constituent le poumon de nos communes rurales non seulement par l'importance qu'ils représentent pour celles-ci sur le plan économique, mais également par le fait que nombre d'entre eux siègent au sein des conseils municipaux et participent activement à la vie locale.
Or en vertu de notre législation, et plus précisément de l'article 432-12 du code pénal, sont considérés comme coupables de prise illégale d'intérêts, et donc passibles de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 francs d'amende, les élus locaux qui concluent des baux ruraux avec leur collectivité.
Cet article du nouveau code pénal vise ainsi à réprimer le délit d'ingérence, afin d'éviter toute confusion entre les intérêts personnels de certains agents publics et ceux des collectivités qu'ils administrent.
Toutefois, les alinéas 2, 3 et 4 du même article prévoient des dérogations applicables aux élus des communes comptant 3 500 habitants au plus.
Ainsi, ces derniers peuvent-ils traiter avec les communes dont ils ont la charge pour le transfert des biens mobiliers ou immobiliers, ou la fourniture de services dans la limite d'un montant annuel de 100 000 francs.
Ceux-ci peuvent encore acquérir une parcelle d'un lotissement communal pour y édifier leur habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation avec la commune pour leur propre logement, voire acquérir un bien appartenant à la commune pour la création ou le développement de leur activité professionnelle.
Cependant, l'actuelle rédaction de l'article 432-12 du code pénal passe sous silence la conclusion des baux ruraux. L'élu d'une commune de 3 500 habitants au plus peut donc acquérir, mais non louer, un terrain appartenant à la collectivité locale.
N'est-ce pas, ici, une lacune du code pénal, quand on sait que les communes comptant au plus 3 500 habitants sont majoritairement rurales et représentent plus de 90 % des 36 000 communes que compte notre pays ?
N'est-ce pas aussi quelque peu paradoxal quand on sait que ces communes possèdent, dans leur domaine privé, des terrains qu'elles louent à des exploitants agricoles et que, de surcroît, un grand nombre d'exploitants agricoles sont depuis toujours les élus de ces communes ?
L'élu se trouve donc placé face à l'alternative suivante : soit abandonner son mandat, soit renoncer à son activité professionnelle. Dans les deux cas, c'est la commune qui est perdante. En effet, c'est soit la démocratie locale, soit la vie économique du village qui est atteinte par ce choix.
On ne peut donc que regretter que les agriculteurs soient empêchés, aujourd'hui, de conclure de tels baux ruraux avec la collectivité qu'ils administrent.
J'insiste également sur le fait que les services de l'Etat chargés du contrôle de légalité des actes des collectivités locales qualifient en effet d'illégales sur le fond, et non sur la forme, puisque l'article L. 121-35 du code des communes est respecté, des délibérations de conseils municipaux accordant la location de terrains communaux au maire ou à un conseiller municipal.
L'enquête réalisée en 1997 par l'Association des maires de France, que préside notre rapporteur et collègue Jean-Paul Delevoye, permet d'affirmer que plus de 1 000 maires ou maires adjoints sont directement concernés et pourraient être à tout moment mis en examen. Ne pas agir reviendrait à laisser se dégrader une situation qui pose un véritable problème de fonctionnement de la démocratie locale, je le répète, notamment dans les plus petites communes.
Les dernières élections municipales de juin 1995 ont montré le peu d'empressement dont les Français font preuve pour être candidats à un mandat électoral dans les petites communes et, paradoxalement, l'article 432-12 du nouveau code pénal fait aujourd'hui peser la menace de démissions collectives des élus exploitants agricoles pour lesquels l'activité professionnelle est mise en péril. Cela s'est déjà produit depuis 1995.
Loin de remettre en cause le principe louable qui est d'éviter tout risque d'amalgame entre les affaires de la collectivité et les affaires de l'élu, je souhaite ardemment que la législation prenne en compte les spécificités de nos communes rurales.
Madame le ministre, je tiens à vous citer l'exemple d'une commune de mon département, qui compte vingt-six habitants, dont trois agriculteurs, qui tous exploitent des terrains appartenant à la commune et sont élus. Nous voyons bien qu'il n'y a là aucun risque de prise illégale d'intérêt et que nous sommes loin des grandes affaires qui, quelquefois, secouent l'actualité.
Dans cet exemple, soit il n'existe plus de conseil municipal, soit il faut supprimer la commune, puisqu'il n'y aura plus personne pour l'administrer. Il faut faire preuve de pragmatisme et de réalisme dans des cas de figure aussi patents que celui-là. Les propositions de notre rapporteur vont dans le sens que je souhaitais, puisque, d'une part, il autorise les élus à conclure certains baux ruraux avec leur collectivité, et que, d'autre part, il assure une parfaite transparence de la procédure.
Je voterai donc, avec mes collègues du groupe du RPR, les conclusions de la commission des lois, en remerciant M. Delevoye et l'Association des maires de France d'avoir étudié cette délicate question depuis maintenant 1995. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, moins de quatre ans après l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, le 1er mars 1994, la majorité sénatoriale, sur proposition de plusieurs de nos collègues, dont Serge Vinçon est le premier signataire, et sur la base d'un rapport de notre collègue Jean-Paul Delevoye, nous invite à modifier, pour en atténuer la portée, l'article 432-12 du code pénal qui incrimine la prise illégale d'intérêts par une personne dépositaire de l'autorité publique.
En l'occurrence, la majorité sénatoriale veut autoriser certains élus locaux - les maires et les adjoints des communes de moins de 3 500 habitants - à conclure, avec la collectivité locale dont ils ont la charge, des baux ruraux, et ce en totale contradiction avec l'esprit qui a présidé à la rédaction et à l'adoption de cet article du code pénal.
On peut comprendre la motivation des auteurs de cette proposition de loi : peut-être entendent-ils apporter réponse et solution à un problème posé...
MM. Serge Vinçon et André Jourdain. Oui, c'est cela !
M. Guy Allouche. Ce serait légitime, encore qu'il aurait été utile de connaître le nombre de cas portés à leur connaissance. Nous aurions aimé être en possession d'une statistique portant sur l'ensemble du territoire national, statistique annexée au rapport et comprenant une analyse détaillée par département. Je pense que l'Association des maires de France que vous présidez, monsieur le rapporteur, aurait pu fournir à temps une telle étude. Mais ce n'est pas le cas !
Au-delà de cette interrogation, cette demande d'atténuation de la portée de l'article 432-12 du code pénal est-elle opportune ? Assurément, non.
Pour ses auteurs, la présente proposition de loi est justifiée par des considérations d'intérêt général. Mais justement, chers collègues, en cette période où tout le personnel politique, à tous niveaux, est injustement mis en cause au motif qu'une poignée d'élus a fait preuve d'indélicatesse, il n'est ni opportun ni judicieux de vouloir confondre intérêt général, dévouement à la chose publique et intérêts économiques et privés personnels.
Cette proposition va à l'encontre de la moralisation de la vie politique tant réclamée par l'opinion publique.
Ceux qui défendent un tel dispositif ont-ils pleinement mesuré son impact, ses effets et ses conséquences ? Michel Dreyfus-Schmidt a coutume de dire que « le mieux est parfois l'ennemi du bien ». Cette formule n'a jamais été autant appropriée qu'à l'égard de cette proposition de loi. Tous les élus doivent constamment avoir à l'esprit qu'ils sont là pour « servir et non pas se servir » !
La tradition républicaine a consisté à mettre en place, par des dispositions légales, par une forme de contrainte sociale, un grand nombre de précautions destinées à prémunir les élus contre les tentations. Un élu, et plus particulièrement le maire, ne peut pas faire comme tout le monde. Il faut préserver cet état d'esprit ; mieux, il faut lui redonner un second souffle. Que celui qui brigue un mandat majoral sache que la contrepartie de son élection comporte un certain nombre de limitations à sa liberté d'action, en particulier dans le domaine économique.
Oui, mes chers collègues, la fonction élective a ses honneurs, mais elle a aussi ses contraintes et ses devoirs. N'est-ce pas d'ailleurs son titre de noblesse et sa force d'abnégation ?
Précisément, le problème soulevé n'est pas nouveau. La prise illégale d'intérêts a fait l'objet d'un long et riche débat à l'occasion de la réforme du code pénal. Lors de son examen, l'autorisation pour les élus d'acquérir une parcelle appartenant à la commune pour le développement de leur activité commerciale ou artisanale n'avait pas été retenue au motif essentiel qu'il ne doit pas exister de confusion possible entre l'exercice d'une fonction publique et les intérêts privés de la personne exerçant une telle fonction. J'ajoute que l'extension de la dérogation pour les baux ruraux proposée aujourd'hui n'avait pas, alors, été formulée. Pourtant, la commission mixte paritaire avait abouti à un accord statisfaisant.
Nous pouvons affirmer que la solution retenue en 1992 tient compte de la réalité de ce problème et lui apporte une réponse grâce à de nombreuses dérogations. Rappelons que le seuil de population a été relevé, puisqu'il est passé de 1 500 habitants à 3 500 habitants, que le plafond annuel de la transaction est désormais de 100 000 francs, alors qu'il était fixé à 75 000 francs, et que les élus de ces communes peuvent acquérir une parcelle communale pour y édifier leur habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation pour leur propre logement. Ainsi le législateur a fait preuve de réalisme pour plus de rigueur.
On peut concevoir et justifier une dérogation lorsqu'il s'agit de se loger. Mais il existe une grande différence entre ce que j'appellerai le « droit à un toit », pour loger sa famille, et le droit d'acheter un terrain pour développer son activité professionnelle. Dans un cas, on répond à un besoin fondamental de la personne humaine, dans l'autre, on favorise une situation. C'est là que le bât blesse.
Le débat parlementaire de 1992 s'était fait l'écho de cette nécessaire distinction. Accepter d'y déroger aujourd'hui, c'est ouvrir la voie à de nombreux abus. Ce serait source de confusions de toute nature, d'autant que la location ici proposée, contrairement à l'acquisition qui revêt un caractère ponctuel, se poursuit dans le temps, et par là même pérennise une situation de confusion.
Il est cependant exact que, depuis plusieurs années, se manifeste chez les élus une prise de conscience plus aiguë du risque pénal encouru. Mes chers collègues, sans aller jusqu'à considérer que cette proposition de loi porte en elle des dispositions amnistiantes, je ne peux m'empêcher de penser que son auteur et ceux qui approuvent sa démarche ont sûrement connaissance de situations actuellement illicites !
Je note au passage que ce texte, qui a été déposé en 1996, est inscrit à l'ordre du jour du Sénat en 1998, comme par hasard année de renouvellement sénatorial. Certes, il faut être de mauvaise foi pour relever cette coïncidence,...
M. Serge Vinçon. Je crois !
M. Guy Allouche. ... mais comment pourrais-je m'en dispenser ?
M. Serge Vinçon. Il ne faut tout de même pas exagérer !
M. Guy Allouche. A cet égard, le rapporteur de la commission des lois a restreint le dispositif initial en le limitant à l'intitulé exact de la proposition de loi et en proposant des mesures destinées à assurer la transparence et l'égalité entre les citoyens.
Néanmoins, ces garanties - a minima - sont quelque peu illusoires, car elles n'empêchent pas les élus concernés d'être en situation privilégiée par rapport aux autres citoyens. Il y a même un « parfum de délit d'initié » dans cette opération puisque c'est le maire qui est le maître d'oeuvre de la procédure. Il est détenteur de toutes les informations, bien avant ses administrés, sans oublier qu'il se trouve déjà dans une position de force puisqu'il est informé de ce qui se passe dans sa commune, comme chez chacun de ses administrés.
Dès lors qu'il est maître de l'action, l'estimation du service des Domaines, la publication par voie d'affichage en mairie et la limitation de la durée du bail ne changent rien ni quant au fond ni quant à l'opportunité. Au contraire, une telle mesure est de nature, quoi qu'il en soit, à faire peser le soupçon sur les élus et à porter atteinte à leur fonction.
Mes chers collègues, sur un plan plus général, il convient de rappeler que la définition d'un délit de prise illégale d'intérêts a pour finalité essentielle d'éviter tout conflit entre l'intérêt général et l'intérêt privé. Il ne nous paraît pas opportun d'affaiblir ce principe d'impartialité de la puissance publique en accordant une dérogation supplémentaire au profit d'une catégorie d'élus, aussi estimable soit-elle.
Il ne s'agit pas pour moi de méconnaître la réalité, parfois l'acuité, de certaines situations, mais je considère que l'article 432-12 du code pénal, qui prévoit déjà des dérogations, constitue un cadre raisonnable dans la mesure où il protège les élus et préserve leur image d'honnêteté et d'intégrité.
L'opinion publique, aujourd'hui plus qu'hier, ne comprendrait pas qu'un maire puisse profiter - c'est bien le terme qui convient - de sa fonction pour développer son activité économique ou, ce qui paraît encore plus excessif, pour la créer.
Certes, les dispositions de l'article 432-12 du code pénal sont sévères. Lors de son adoption, le Parlement a considéré que cette sévérité était nécessaire pour assurer la moralisation de la vie publique et protéger les élus. C'est encore vrai aujourd'hui.
Par ailleurs, alors que le code pénal vient juste d'être mis en oeuvre, il n'est pas sage de vouloir déjà modifier les règles relatives au délit d'ingérence - domaine sensible s'il est est - dans un sens plus libéral pour les élus, et ce en contradiction avec ce que nous avons adopté en 1992.
Cette proposition de loi n'emportant pas leur approbation, loin s'en faut, tant elle va à l'encontre de l'objectif visé, les sénateurs du groupe socialiste ne l'adopteront pas. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye, rapporteur. Je souhaite faire quelques commentaires sur l'analyse que vient de présenter M. Allouche.
Je note tout d'abord, mon cher collègue, que tout votre propos relève en quelque sorte de l'air du soupçon. Ainsi vous dites que ce débat se nourrit d'arrière-pensées, de calculs électoraux. De deux choses l'une : soit vous avez un profond respect pour le débat parlementaire, soit vous estimez que c'est le calcul électoral qui prédomine dans ce débat, mais alors vous manifestez un certain mépris pour le Parlement.
Par ailleurs, vous semblez avoir une curieuse conception de l'exercice du mandat de maire. Lorsque vous participez à des cérémonies de remise de médailles, par exemple, ne saluez-vous pas l'engagement des 500 000 élus locaux - et de leurs proches - et des millions de bénévoles qui se trouvent au coeur des plus belles réussites économiques et qui sont confrontés aux plus grandes détresses sociales ? Ne soulignez-vous pas à quel point le sacrifice qu'ils consentent, au détriment de leur vie professionnelle, de leur vie personnelle et au profit de la collectivité publique est un gage de la bonne respiration républicaine ?
Monsieur Allouche, puisque vous souhaitiez des indications chiffrées, permettez-moi de vous indiquer que, sur 1 398 communes propriétaires de terres agricoles, 400, soit 28,5 %, ont loué des terrains leur appartenant à des élus après leur élection et 604 en ont loué à des élus avant leur élection.
Il paraît un peu surprenant, ainsi que Mme le garde des sceaux l'a parfaitement souligné, qu'un maire qui exerce par ailleurs la profession d'agriculteur et qui a conclu un bail avec sa commune avant son élection soit accusé de prise illégale d'intérêts lors du renouvellement de ce bail. Voilà en effet une personne dont la commune estimait, sans doute à juste raison, qu'en sa qualité d'agriculteur elle devait entretenir le terrain communal, mais qui, sous prétexte qu'elle a décidé de s'engager au service de sa commune en se présentant au suffrage de ses concitoyens, est désormais considérée comme se trouvant en opposition avec l'intérêt de sa commune ! Il y a tout de même là quelque chose de tout à fait étonnant.
Enfin, monsieur Allouche, vous faites aux élus, en quelque sorte, un procès en « opacité ». Vous parlez même de « délit d'initié ». Vos propos ont dû dépasser votre pensée !
Selon le texte actuellement en vigueur, lorsqu'un maire achète une maison ou contracte un bail avec sa commune, il n'y a pas publicité du prix. Or la disposition que nous proposons vise précisément à injecter de la transparence en instituant la publicité de l'estimation du bien par le service des Domaines, assortie d'un délai qui permet à chacun de savoir que la commune est sur le point de louer un de ses biens à un élu. C'est une disposition qui concerne toutes les hypothèses, y compris celles qui sont d'ores et déjà prévues par le code pénal, et non la seule location de terrains agricoles.
Monsieur Allouche, il faut également tenir compte des réalités de la vie de tous les jours dans une petite commune. Vous savez aussi bien que moi ce que peut apporter le monde agricole dans la gestion de la commune. Le maire d'une commune de vingt-six habitants n'est pas seulement maire : il est aussi un peu cantonnier, c'est l'homme à tout faire. Souvent, les habitants sont bien contents de trouver un agriculteur qui prête son tracteur, sa remorque, ses bras, ses collaborateurs pour apporter bénévolement une amélioration à l'environnement, à la voirie et, parfois, pour les mettre au service de la sécurité.
Monsieur Allouche, votre accusation - car vos propos étaient singulièrement dépourvus de délicatesse - quant à l'opacité des procédures et aux arrière-pensées des uns et des autres ne pouvait rester sans réponse.
J'ai préféré de beaucoup l'analyse plus mesurée de Mme le garde des sceaux. Celle-ci a d'ailleurs souligné que d'autres catégories professionnelles pourraient « légitimement » revendiquer le bénéfice de mesures de même nature. Le terme « légitimement » est révélateur. Il montre à quel point la situation dans laquelle nous sommes actuellement n'est pas satisfaisante.
Je suis favorable à ce que la note du groupe de travail soit diffusée. Cela étant, je relève que, comme le souligne cette note, la Cour de cassation assimile le renouvellement du bail à la conclusion d'un bail entièrement nouveau. Par conséquent, le renouvellement du bail pose le problème de la prise illégale d'intérêts. D'ailleurs, le code rural est très clair à cet égard : « A défaut de congé, le bail est renouvelé pour une durée de neuf ans. Sauf conventions contraires, les clauses et conditions du nouveau bail sont celles du bail précédent. » Le code rural qualifie donc expressément le bail renouvelé de « nouveau bail ».
C'est pourquoi, si je suis tout à fait favorable à la diffusion de cette note, je considère que le problème demeure et qu'une proposition de loi doit donc être adoptée.
Monsieur Allouche, au regard de la bonne respiration démocratique, de la préservation des intérêts des citoyens et des communes, vous n'avez pas abordé le débat sous un bon angle. Il ne s'agit pas de protéger les élus contre eux-mêmes ou contre de quelconques dérapages : il s'agit avant tout de poser les conditions d'une bonne gestion publique, de garantir l'intérêt de la commune au regard de son patrimoine et d'assurer une bonne pratique républicaine.
C'est parce que cette proposition de loi apporte de la transparence, permettant aux citoyens d'être mieux informés de la gestion des affaires communales, et parce qu'elle donne aux maires ruraux les moyens de faire vivre pleinement cette ruralité dont chacun est si fier dans les discours qu'elle doit être votée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Serge Vinçon. Belle connaissance du terroir !
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ L'article 432-12 est modifié comme suit :
« I. _ Après les mots : "ou conclure", la fin de la première phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : "avec la commune des baux d'habitation pour leur propre logement ou des baux régis par le titre premier du livre IV du code rural".
« II. _ Il est ajouté in fine un alinéa ainsi rédigé :
« Les estimations et évaluations du service des domaines prévues par le présent article font l'objet d'une publication avant l'autorisation de l'acte par le conseil municipal. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. « Art. 2. _ L'article L. 411-4 du code rural est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« Un contrat de bail entre une commune de 3 500 habitants au plus et le maire, un adjoint ou un conseiller municipal délégué ou agissant en remplacement du maire ne peut être autorisé par le conseil municipal qu'à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la publication de l'estimation des biens concernés par le service des domaines. La durée de ce bail est de neuf ans. » - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble



M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Dérian, pour explication de vote.
M. Jean Dérian. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne voteront pas la proposition de loi présentée par M. Vinçon et rapportée par M. Jean-Paul Delevoye.
Cette proposition vise à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.
Il s'agit en fait d'ouvrir une nouvelle brèche dans le principe du délit d'ingérence, brèche déjà entrouverte par l'article 432-12 du nouveau code pénal. Cet article atténuait la sévérité, que nous jugions pourtant nécessaire, de l'article 175 de l'ancien code pénal, qui ne prévoyait qu'une dérogation en matière d'ingérence.
Pour résumer, l'article 432-12 du nouveau code pénal autorisait notamment le transfert de biens ou la fourniture de services, dans la limite de 100 000 francs par an, l'acquisition d'une parcelle d'un lotissement communal pour y édifier une habitation personnelle ou conclure des baux d'habitation avec la commune pour son propre logement ainsi que l'acquisition d'un bien communal en vue d'une activité professionnelle, et ce dans certaines conditions.
Le 23 avril 1992, lors du débat sur le nouveau code pénal, M. Charles Lederman, alors sénateur du Val-de-Marne et juriste dont la qualité était largement reconnue sur ces travées, indiquait que les dispositions « du texte qui nous est proposé peuvent laisser craindre qu'il ne soit porté atteinte à l'indépendance de la fonction élective. Certes, nous comprenons parfaitement les problèmes de logement que peuvent rencontrer les maires ou les élus des petites communes. Néanmoins, il nous semble exclu que les convenances personnelles interviennent dans la gestion des communes. Il nous apparaît très important de le souligner à l'heure où la lutte contre la corruption figure parmi les premiers objectifs du Gouvernement ».
Cette attitude, qui peut paraître stricte, nous semble devoir être maintenue tant la lutte contre la corruption, contre la confusion des intérêts privés et de l'intérêt général est, selon nous, toujours d'actualité.
Nous sommes, bien entendu, soucieux des problèmes particuliers qui peuvent apparaître ici et là. Toutefois, comme le débat l'a montré, ces problèmes sont extrêmement limités et peuvent être résolus dans le cadre de la législation actuelle.
Ces quelques cas ne justifieraient donc pas, à notre sens, une remise en cause nouvelle du principe d'interdiction de l'ingérence, et ce d'autant plus que la location, objet de la présente proposition de loi, revêt un caractère de longue durée pouvant créer, durant de nombreuses années, une confusion entre l'intérêt de l'élu et celui de la commune, alors que l'acquisition autorisée par l'article 432-12 du nouveau code pénal revêt, elle, un caractère ponctuel. Comme certains l'ont souligné, la location donnera lieu à une multiplication des situations d'ingérence car il s'agit d'une procédure moins lourde que celle de l'acquisition.
Nous ne voterons donc pas cette proposition de loi, car nous n'estimons pas acceptable, sur le plan des principes démocratiques, à une époque où la politique est parfois vivement critiquée, qu'un élu puisse être soupçonné de tirer un profit personnel de sa position élective.
Notre vote a pour objectif de préserver l'élu ainsi que son indépendance et d'éviter, au nom de la résolution de quelques cas, je le répète, rares, de jeter une nouvelle fois le soupçon sur ces hommes et sur ces femmes qui, dans leur immense majorité, sont dévoués à leurs administrés, à leur ville, à leur village. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - Mme Bergé-Lavigne applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Allouche.
M. Guy Allouche. J'ai déclaré, voilà quelques instants, que nous ne pouvions pas adopter cette proposition de loi, mais je profite de cette explication de vote pour tenter de répondre en partie aux propos tenus par M. le rapporteur.
Monsieur le rapporteur, je ne soupçonne personne ; ce n'est pas dans mes habitudes. Nous débattons d'un sujet sensible, dans une période sensible, et je n'ai porté d'accusation à l'encontre de personne. Au contraire, je me suis efforcé de mettre en garde contre des tentations ou des tentatives de prise illégale d'intérêts. Je n'accepte donc pas les accusations que vous avez portées à mon encontre.
Vous parlez de mépris du Parlement. Mais si chaque fois que nous exprimons une divergence profonde lors d'un débat parlementaire nous méprisons le Parlement, alors, mes chers collègues, nous le faisons tous ! S'il est un lieu où, précisément, doivent s'exprimer nos convictions souvent divergentes, c'est bien le Parlement à moins, monsieur le rapporteur, que vous n'ayez une conception particulière de cette institution où se formulerait la pensée unique, l'idée unique. Je ne partage pas cette conception.
Nous vivons en démocratie, et le Parlement est justement, je le répète, le lieu privilégié de la confrontation d'idées. Permettez-moi, à mon tour, de vous dire que vos paroles ont sans doute dépassé votre pensée, puisque je vous sais profondément respectueux à la fois du Parlement et des idées des uns et des autres.
Il faut bien évidemment rendre hommage au travail des maires - nous le faisons tous régulièrement - mais prenons le cas des agriculteurs. Je m'interroge : est-on agriculteur avant d'être maire ou maire avant d'être agriculteur ? Si un agriculteur devient maire dans l'espoir de tirer profit d'une situation élective. (Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Cela me paraît dangereux. Pour ce qui me concerne, je ne peux pas concevoir les choses ainsi. Vous mettez le doigt dans un engrenage dont vous ne mesurez pas aujourd'hui les conséquences à terme.
Il est toujours question, dans ces cas-là, d'intention louable. Vous entendez aujourd'hui remédier à la situation actuelle, mais qu'en sera-t-il demain et après-demain ? Vous l'ignorez.
Monsieur le rapporteur, il est vrai que le monde rural souffre de certains problèmes. Vous les connaissez, tout comme nous, mais, au nom de la crise économique et des mesures qui doivent être prises, il ne faut pas tout mélanger.
Nous examinons un texte qui a trait à la moralisation de la vie publique. Il faut s'en tenir à la disposition qui a été prévue, lors du débat sur le code pénal, à propos de la prise illégale d'intérêts car elle préserve les élus. Le texte que vous soutenez met le doigt dans un engrenage qui peut être un jour fatal non seulement aux intéressés et aux maires concernés, mais également à l'ensemble de la démocratie.
M. le président. La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon. Monsieur le président, je ne peux pas rester silencieux après les propos qui viennent d'être tenus. Cette proposition de loi tend à répondre à une question qui se pose aujourd'hui concrètement dans de nombreuses communes de notre pays.
Je ne pensais franchement pas, en déposant ce texte, remettre en cause la démocratie ni mettre le doigt dans un engrenage qui aboutirait aux grandes affaires que nous connaissons.
J'ai voulu me placer au plan local. Je ne suis pas le seul dans cet hémicycle à connaître la situation dans nos départements ruraux. Il ne s'agit pas de grandes affaires ni de grandes exploitations. Dans les plus petites communes de France, la plupart des exploitants qui exploitent des terres communales se retrouvent normalement, légitimement au conseil municipal. Faut-il pour autant qu'ils cessent d'être exploitant agricole et d'exploiter des terres qui risquent alors de devenir des friches ou de ne plus être entretenues ?
Je comprends bien les grands principes qui ont été évoqués par mes collègues et auxquels je souscris. Mais n'exagérons pas.
J'ai cité un exemple qui peut apparaître, aux yeux de certains, caricatural. Dans une petite commune de vingt-six habitants, trois exploitants agricoles exploitent des terres appartenant à la commune. Ce ne sont ni des truands ni des tricheurs ; ils entretiennent le patrimoine de la commune, exercent une activité économique et veulent se dévouer à la cause commune. Il n'y a là rien de coupable.
Il est vrai qu'il faut mettre des garde-fous. Je tiens, à cet égard, à rendre hommage au travail accompli par la commission des lois, par la commission qui a été créée par l'AMF et par le groupe de travail, auquel j'ai d'ailleurs participé au début, qui a été constitué à la Chancellerie sur ce thème.
Il s'agit de répondre à un problème concret qui soulève des difficultés dans mon département comme dans d'autres. Des élus ont dû démissionner depuis 1995 ; d'autres sont aujourd'hui menacés d'être mis en examen. Il faut mettre un terme à cette situation inconfortable qui ne répond pas pleinement aux exigences de la démocratie locale, du devenir économique et du développement de nos plus petites communes.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai suivi le débat avec beaucoup d'intérêt comme je l'avais d'ailleurs fait en commission des lois voilà quelque temps. Un argument sur lequel a insisté M. le rapporteur retient l'attention : il s'agit du renouvellement du bail. Sur ce point, peut être pourrions-nous le suivre. Il n'est pas normal, en effet, qu'un exploitant, au motif qu'il devient maire, ne puisse plus continuer de louer les terres qu'il exploitait.
A entendre votre dernière intervention, monsieur le rapporteur, chacun pourrait croire que tel est l'objet de la proposition de loi que nous examinons. Mais ce n'est pas cela du tout ! Elle va beaucoup plus loin. Vous proposez qu'une personne qui est maire puisse se voir consentir des avantages dont il sera toujours à craindre qu'elle ne les doive à sa qualité de maire. Or aucun élu ne doit pouvoir être soupçonné. C'est la raison pour laquelle, comme l'a parfaitement dit Guy Allouche, nous ne pouvons pas vous suivre et nous voterons contre ce texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 74:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 218
Contre 97

Le Sénat a adopté.

7

NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste a présenté une candidature pour la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire.
Le délai prévu par l'article 8 du règlement est expiré.
La présidence n'a reçu aucune opposition.
En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Roger Rinchet, membre de la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire, en remplacement de M. Fernand Tardy, démissionnaire.

8

PRESTATION COMPENSATOIRE
EN CAS DE DIVORCE

Discussion des conclusions
du rapport d'une commission

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 20, 1997-1998) de M. Daniel Hoeffel, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale sur :
- la proposition de loi (n° 151, 1996-1997) de M. Nicolas About tendant à modifier les propositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce ;
- la proposition de loi (n° 400, 1996-1997) de MM. Robert Pagès, Michel Duffour, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mmes Danielle Bidard-Reydet, Nicole Borvo, MM. Guy Fischer, Pierre Lefebvre, Paul Loridant, Mme Hélène Luc, MM. Louis Minetti, Jack Ralite, Ivan Renar et Mme Odette Terrade relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, en remplacement de M. Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, je dois d'abord excuser notre collègue M. Daniel Hoeffel, rapporteur de la commission des lois sur les propositions de loi que nous examinons, car il ne peut, hélas ! être parmi nous.
La commission des lois s'est interrogée sur l'opportunité de l'adoption, par le Sénat, d'une proposition de loi relative à la prestation compensatoire en matière de divorce. On pouvait effectivement se demander s'il n'était pas plus logique d'attendre qu'une réforme plus globale de la loi sur le divorce puisse être engagée. La commission a toutefois estimé que le législateur ne pouvait ignorer plus longtemps certaines conséquences négatives des dispositions relatives à la prestation compensatoire en matière de divorce qui figurent aujourd'hui dans le code civil.
En 1986, le Sénat avait abordé cette question à l'occasion de l'examen d'une proposition de loi issue de l'Assemblée nationale qui ne l'a pas, jusqu'à présent, inscrite à son ordre du jour pour une deuxième lecture. Il nous a donc semblé que les difficultés constatées après vingt ans d'application de cet aspect de la loi de 1975 justifiaient que le législateur intervienne sans attendre une réforme globale de la procédure de divorce.
Depuis la loi de 1975 portant réforme du divorce, la pension alimentaire entre époux a été remplacée par une prestation compensatoire, même si certains regrettent cette modification. La pension alimentaire ne subsiste que dans les cas de divorce pour abandon du domicile conjugal. Selon l'article 270 du code civil, la prestation compensatoire a pour objet de « compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ».
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Dans la rupture de la vie commune !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. En principe, cette prestation revêt, en vertu de l'article 273 du code civil, un caractère forfaitaire. Le législateur a prévu comme moyen de paiement principal le versement d'un capital. Toutefois, l'article 276 du code civil prévoit, à titre subsidiaire, que la prestation compensatoire peut prendre la forme d'une rente. En fait, cette modalité subsidiaire est devenue la règle, les magistrats optant dans la plupart des cas pour un versement périodique sans référence à un capital et dont la durée n'est pas toujours fixée.
Cette préférence pour la rente s'explique sans doute par les habitudes des juges et des parties, par la composition des patrimoines, mais également par des considérations fiscales. En cas de versement d'un capital en effet, l'imposition est celle des mutations à titre gratuit. Ainsi, au-delà d'une franchise de 330 000 francs, les droits progressent de 5 à 40 %.
Par ailleurs, l'une des caractéristiques de la prestation compensatoire est d'être très difficilement révisable. L'article 273 du code civil prévoit qu'elle ne peut être révisée que si l'absence de révision devait avoir pour l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
A l'heure actuelle, les juges modulent souvent le montant et la durée de la prestation en fonction de la durée du mariage, de l'âge des conjoints et de leurs perspectives professionnelles, mais ces précautions ne suffisent pas à éviter certaines situations difficiles quand interviennent des changements importants dans la situation de l'une ou l'autre des parties. En effet, les juges appliquent l'article 272 du code civil, mais un certain nombre de choses n'ont pas été prévues, dont il convient de tenir compte aujourd'hui.
Les propositions de loi déposées, d'une part, par M. About et, d'autre part, par M. Pagès et plusieurs de ses collègues, visaient toutes deux à permettre l'assouplissement des conditions de révision de la prestation compensatoire lorsqu'elle prend la forme d'une rente. La proposition de loi de M. About tendait, en outre, à limiter à dix ans la durée de la rente et à supprimer le report de la charge de la rente sur les héritiers du débiteur.
Au cours de sa réunion du 8 octobre 1997, la commission des lois, sur le rapport de M. Hoeffel, a adopté un texte composé de quatre articles.
L'article 1er prévoit l'assouplissement des modalités de révision de la rente, cette dernière pouvant être révisée « en cas de changement substantiel dans les ressources ou les besoins des parties ».
L'article 2 dispose que le juge fixe la durée de la rente. La commission a estimé préférable de ne pas déterminer dans la loi un plafond pour cette durée et d'en laisser la libre appréciation au juge.
L'article 3 tend à faciliter le versement de la prestation compensatoire sous forme d'un capital, en atténuant ses conséquences fiscales par le doublement de l'abattement prévu par le code général des impôts pour les droits de mutation à titre gratuit.
Enfin, l'article 4 prévoit l'application de ces nouvelles dispositions aux rentes en cours. Naturellement, les demandes de révision éventuelles ne vaudront que pour les arrérages futurs de la rente et ne sauraient remettre en cause les versements effectués antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi.
La commission a décidé de maintenir la transmission de la dette aux héritiers, telle qu'elle est prévue à l'article 276-2 du code civil, car elle est conforme au droit commun. Dès lors que l'on facilite la possibilité de révision, il convient de maintenir cette règle commune qui figure dans la loi de 1975.
La commission a été saisie d'un certain nombre d'amendements qui émanent, notamment, du Gouvernement. Ceux qui visent à améliorer les propositions de la commission des lois seront accueillis favorablement. S'agissant des autres, nous aurons l'occasion d'en débattre. L'examen des articles permettra de vérifier la concordance entre la position du Gouvernement et celle de la commission. (Applaudissements sur le bancs des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le Sénat a souhaité inscrire à son ordre du jour la proposition de loi de M. Nicolas About et celle de M. Robert Pagès, au nom du groupe communiste républicain et citoyen, qui tendent à permettre de réviser la prestation compensatoire allouée en cas de divorce.
Dans son principe, cette initiative recueille mon approbation.
En effet, nul ne conteste que des aménagements doivent être apportés au dispositif en vigueur en raison de l'évolution, depuis 1975, de la situation économique et sociale. Par ailleurs, cette réforme peut être conduite en marge de la réflexion d'ensemble que j'ai décidé d'engager concernant le droit de la famille.
Mais la marge de manoeuvre est étroite, car il ne saurait être question de remettre en cause la philosophie de la réforme de 1975, et la commission des lois du Sénat est d'ailleurs la première à en convenir.
C'est dans cet esprit qu'elle propose une adaptation sur trois points du dispositif en vigueur.
Le premier concerne la possibilité de réviser la prestation compensatoire versée sous forme de rente en cas de changement substantiel dans les besoins et les ressources des parties.
Le deuxième a trait à la fixation de la durée de la rente en considération de critères caractérisant la situation particulière du couple.
Le troisième consiste à aménager la fiscalité applicable à la prestation allouée en capital.
Cependant, je ne suis pas certaine que ces modifications apportent toutes les réponses nécessaires à l'adaptation du régime de la prestation compensatoire qui, il est vrai, est attendue, plus de vingt ans après le vote de la loi du 11 juillet 1975.
C'est pourquoi le Gouvernement vous propose d'adopter une démarche quelque peu différente.
Il faut en effet, à mes yeux, répondre à un double objectif : d'abord, privilégier et faciliter le paiement de la prestation compensatoire au moment même du prononcé du divorce,...
M. Nicolas About. Très bien !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. ... et, ensuite, circonscrire la faculté nouvelle de révision de celle-ci aux situations les plus graves.
Je souhaite maintenant m'expliquer sur ce point.
Comme l'a fort justement souligné la commission, les principes qui ont guidé le législateur de 1975 dans l'instauration de la prestation compensatoire ont été battus en brèche dans les faits.
L'idée de départ, pourtant, était excellente : il s'agissait de mettre fin au mécanisme des pensions alimentaires entre époux divorcés, dont les conséquences néfastes étaient avérées.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. La possibilité de prendre en compte l'attribution des torts pour l'allocation et la révision des pensions alimentaires a en effet généré un contentieux important, exacerbant les passions et laissant aux époux le sentiment de ne pouvoir clore définitivement une union qui s'est soldée par un échec.
A notre époque où les difficultés économiques et sociales influent fortement sur la situation des couples qui se défont et où se développent les familles recomposées, il est plus que jamais nécessaire de régler, dans toute la mesure possible, bien entendu, les effets pécuniaires du divorce au moment de son prononcé.
La prestation compensatoire répond à cet objectif, puisque, aux termes de l'article 270 du code civil, elle vise à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des ex-époux.
De là découlent un certain nombre de règles auxquelles la prestation est soumise : son fondement est indemnitaire, elle est forfaitaire, elle n'est pas révisable et elle est en principe attribuée sous forme de capital.
Cependant, la majorité des couples ne disposent pas de biens suffisants pour permettre le versement d'un capital, et en auraient-ils que l'opération est dissuasive sur le plan fiscal.
Aussi le législateur de 1975 a-t-il dû prévoir que, à titre subsidiaire, le débiteur de la prestation pouvait s'en acquitter sous forme de rente. Dans un souci de réalisme, le législateur a été conduit à opérer un certain rapprochement entre la prestation compensatoire et les anciennes pensions alimentaires.
C'est ainsi que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins du créancier et les ressources du débiteur, c'est l'article 271 du code civil. Elle est indexée « comme en matière de pension alimentaire » et peut varier par périodes successives suivant l'évolution probable des ressources et des besoins des intéressés, c'est l'article 276-1. Elle peut, dans les divorces sur requête conjointe, est révisée en cas de changement imprévu dans la situation des époux, dès lors que ces derniers en ont prévu la possibilité, c'est l'article 279. Elle peut également, dans les autres divorces où elle est susceptible d'être allouée, être révisée si le maintien de son montant initial devait avoir pour l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité, c'est l'article 273. Enfin, elle ne peut bénéficier à l'époux aux torts exclusifs duquel le divorce est prononcé, c'est l'article 280-1.
Ce sont autant de caractéristiques qui, vous en conviendrez, empruntent à la pension alimentaire.
La pratique elle-même a d'ailleurs accentué la ressemblance en s'écartant à certains égards de l'esprit de la loi de 1975.
Ainsi, la démarche n'a pas toujours été faite de rechercher si l'allocation d'un capital était possible.
La prestation compensatoire sous forme de rente a été privilégiée. En 1994, parmi les prestations compensatoires, 60,3 % prenaient la forme d'une rente, près de 4 % celle d'une rente ajoutée à un capital et seulement 20 % celle d'un capital pur.
Enfin, si le législateur de 1975 n'a pas entendu exclure les rentes viagères, leur usage devait, dans son esprit, rester limité afin de ne pas faire perdurer les effets patrimoniaux du divorce. Or nombreuses ont été, au lendemain de la réforme, les rentes à vie. En 1994, celles-ci représentaient encore près de 31 %.
Aussi n'est-il pas surprenant que les conjoints eux-mêmes aient vu dans la rente une simple pension alimentaire soumise, dans leur esprit, aux fluctuations des besoins et des ressources de chacun d'eux.
C'est pourquoi la jurisprudence de la Cour de cassation, faisant une stricte interprétation de l'article 273 du code civil, n'a généralement pas été comprise par les intéressés.
La perte d'un emploi, la mise à la retraite, la maladie, le remariage de l'époux créancier avec un conjoint fortuné ne constituent pas nécessairement des événements impliquant que le maintien de la prestation initiale aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. D'où un taux de rejet des demandes de révision atteignant près de 54 %. Telle est la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement.
Lorsqu'un décalage entre les attentes du corps social et les dispositions d'un texte de loi se développe de cette façon, il est temps de s'interroger - c'est ce que vous avez fait - sinon sur la pérennité même de celles-ci, du moins sur les adaptations dont elles pourraient faire l'objet.
Depuis un certain nombre d'années, plusieurs propositions de loi ont été déposées tendant à réformer plus ou moins en profondeur le dispositif de 1975. Celles dont nous discutons aujourd'hui entendent s'inscrire dans une démarche à la fois ponctuelle et mesurée.
Je crains néanmoins que les propositions formulées ne permettent ni d'encadrer suffisamment le mécanisme de révision proposé ni, d'une manière plus générale, de tendre réellement à apurer les relations financières des époux au moment où ils se séparent.
La commission des lois souhaite permettre désormais la révision de la prestation compensatoire en cas de changement substantiel dans les ressources ou les besoins des parties et entend modifier en ce sens l'article 273 du code civil.
Si l'assouplissement de l'accès à la révision ainsi proposé est de nature à permettre au juge de mieux individualiser la situation des couples, je crains cependant que la formulation retenue ne soit à l'origine de plus de questions que de réponses.
Le qualificatif « substantiel » me semble en effet impropre à préserver la révision de la prestation compensatoire des errances qu'ont connues les anciennes pensions alimentaires.
Il est probable que l'on discute sans fin sur ce qu'est ou non un changement financier « substantiel ». Est-ce une diminution de 30 %, de 50 % ou de 70 % des ressources ? A l'inverse, quel niveau d'augmentation de salaire retenir ? Qu'en est-il du remariage ? Voilà autant d'interrogations propres à engendrer l'insécurité juridique.
Un écueil doit être évité : celui de laisser penser que le principe actuel est désormais renversé et que la révision redevient la règle. Tout débiteur voyant ses ressources varier à la baisse aussi peu que ce soit trouve sa charge trop lourde et souhaite la voir alléger. Actuellement, et malgré les termes extrêmement restrictifs de l'article 273 du code civil, le taux d'appel des débiteurs insatisfaits atteint 60 %, ce qui constitue un record.
Qu'en sera-t-il alors demain avec la rédaction retenue par la commission des lois ?
Contrairement à ce qui est suggéré dans le rapport de la commission, la révision de la prestation compensatoire ne doit à mon avis pas cesser d'être une exception. Ce sont les situations les plus graves qu'il convient de prendre en compte.
C'est pourquoi le Gouvernement a déposé un amendement tendant à circonscrire plus clairement la faculté de révision désormais ouverte. Celle-ci doit être subordonnée à un changement non seulement important, mais encore imprévu dans la situation financière respective des parties, et sa mise en oeuvre doit rester exceptionnelle.
Ce triple critère que je vous propose d'introduire dans la nouvelle rédaction de l'article 273 du code civil me paraît plus à même de prévenir les querelles d'interprétation et les divergences jurisprudentielles que la formulation retenue par la commission des lois.
Je crois également nécessaire d'être plus directif que la commission dans la fixation de la durée de la rente lorsque la prestation compensatrice emprunte cette forme.
La commission s'est longuement interrogée sur la question de la transmissibilité de la charge de cette rente aux héritiers du débiteur. Je le comprends, et j'ai moi-même beaucoup hésité.
Le principe, en droit français, est que les dettes se transmettent aux ayants droit du défunt, sauf lorsqu'elles ont un caractère personnel. Tel était le cas de la pension alimentaire.
Le fondement indemnitaire de la prestation compensatoire milite pour la solution inverse.
Néanmoins, le propre de la prestation compensatoire est de remédier à la disparité que la rupture provoque dans les conditions de vie respectives des époux, considération proprement personnelle à ces derniers.
C'est pourquoi il m'apparaît en définitive que le caractère au maximum viager de la rente devrait en principe prévaloir, même si, dans un souci d'individualisation des situations, il semble opportun de laisser au juge et aux époux, en cas de divorce par requête conjointe, la faculté d'en décider autrement.
Le Gouvernement vous propose de modifier en ce sens l'article 2 de la proposition de loi.
J'en viens maintenant aux mesures complémentaires qu'il me paraît souhaitable d'insérer dans le texte afin de conforter l'objectif du législateur de 1975 de mettre un terme au contentieux pécuniaire de l'après-divorce entre époux.
A dire vrai, je me suis longuement interrogée sur l'ampleur que devaient revêtir ces mesures.
La logique de la réforme de 1975 devrait conduire à imposer un règlement d'ensemble de tous les problèmes financiers entre époux au moment du divorce. Je pense à la liquidation du régime matrimonial qui n'est opérée à cette date que dans la procédure sur requête conjointe. Je pense également au sort des donations et autres avantages pécuniaires, qui n'est pas davantage figé lors de la rupture du lien matrimonial.
Mais une telle réforme implique une véritable refonte de pans entiers de notre droit patrimonial de la famille et ne peut à l'évidence se faire sans un examen approfondi qui retarderait d'autant les modifications dont le régime de la prestation compensatoire - je suis d'accord avec vous sur le principe - doit faire l'objet.
Le Gouvernement, vous le savez, a décidé d'entreprendre une réflexion générale sur les adaptations que l'évolution de la famille nécessite dans notre droit. Une mission vient d'être confiée par Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et par moi-même à Mme Irène Théry, sociologue du droit, spécialiste de la famille et de la vie privée. Son rapport, les travaux menés par la commission présidée par le professeur Hauser, constituée dans le cadre du groupement d'intérêt public « Recherche Droit et Justice », et la mise en place de groupes de travail plus spécialisés permettront de mettre en oeuvre des réformes d'ensemble.
Mais, dans l'immédiat, il m'apparaît que peuvent être détachés de cette réflexion d'ensemble un certain nombre d'aménagements propres à conforter le caractère forfaitaire de la prestation compensatoire voulu par le législateur de 1975.
Les dispositions qu'il vous est proposé d'introduire forment un tout cohérent destiné à faciliter le versement de la prestation en capital et, lorsque cette modalité de paiement n'est pas praticable, à limiter dans toute la mesure du possible la durée de la rente.
C'est ainsi que je crois tout d'abord nécessaire de prévoir que, lorsque le juge entend écarter le paiement en capital, il lui appartient de motiver spécialement sa décision.
Dans la même optique, le débiteur de la rente doit pouvoir en demander à tout moment la capitalisation.
Enfin, il paraît souhaitable d'assouplir les formes que peut présenter le versement en capital afin de le rendre plus attractif.
S'agissant du versement de la prestation compensatoire sous forme de rente, le principe du caractère temporaire de celle-ci me paraît devoir être affirmé.
Certes, un tel principe ne saurait être absolu et le juge doit avoir la latitude d'en disposer autrement. Mais si son choix se porte sur une rente viagère, sa décision devra faire l'objet d'une motivation spéciale.
Enfin, et dans le souci de diversifier les modalités de versement, la rente doit pouvoir faire l'objet, comme le réclament les praticiens, d'un terme extinctif, tel que la mise à la retraite du débiteur, ou d'une condition résolutoire, comme le remariage du créancier.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales dispositions qui me paraissent utilement compléter la proposition de loi que vous examinez aujourd'hui tout en respectant les préoccupations qui ont animé ses auteurs.
Parce que ces aménagements participent du souci de rechercher, dans l'intérêt même des parties, un équilibre entre la possibilité nouvelle de révision de la prestation compensatoire et l'objectif essentiel de ne pas ressuciter le contentieux pécuniaire entre époux, le Sénat, je pense, ne restera pas insensible à la démarche du Gouvernement.
En proposant une réforme de la prestation compensatoire, le Sénat a montré sa préoccupation d'adapter un aspect essentiel de notre droit de la famille aux réalités économiques et sociales contemporaines et d'aider nos concitoyens à surmonter cette épreuve que constitue toujours l'échec d'une vie matrimoniale.
Cette préoccupation, je la partage pleinement : elle constitue, je le rappelle, l'un des axes essentiels de mon plan de réforme de la justice.
Aujourd'hui, les propositions de MM. les sénateurs About et Pagès, que la commission des lois a synthétisées avec la qualité qu'on lui connaît, vont nous permettre de franchir une première étape. D'autres étapes viendront. J'espère que nous les poursuivrons ensemble. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. About applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je constate d'emblée avec beaucoup de satisfaction que le Gouvernement n'est pas insensible aux préoccupations du Parlement... Voilà des problèmes qui se posent depuis vingt-trois ans.
Le Sénat avait déjà examiné en première lecture, il y a plus de dix ans, une proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, sur l'initiative de notre ami Jean-Pierre Michel. Mais ce texte n'ayant jamais été inscrit à l'ordre du jour pour une deuxième lecture, nous n'avons donc jamais eu à l'examiner de nouveau. Il convient par conséquent de se féliciter des initiatives de nos collègues Robert Pagès et Nicolas About, grâce auxquelles le problème de la prestation compensatoire en matière de divorce se retrouve posé devant le Parlement.
Si la perspective d'une réforme d'ensemble est satisfaisante, vous avez néanmoins raison, madame la garde des sceaux, de ne pas nous demander d'attendre, pour traiter de la prestation compensatoire, la fin de la réflexion générale qui a été engagée. En effet, comme le rappelait tout à l'heure Guy Allouche, le mieux est l'ennemi du bien. C'est donc maintenant qu'il faut prendre des mesures simples pour éviter des situations souvent extrêmement pénibles.
Je suis parfaitement d'accord avec nombre de vos réflexions, madame la garde des sceaux, et en particulier avec votre analyse de l'évolution de la situation avant 1975 et depuis 1975, comme avec celle des textes. En revanche, je ne partage pas votre sévérité envers le système de la pension alimentaire, qui avait une qualité rare : une parfaite souplesse.
Ce système permettrait en effet de revenir à tout moment devant le juge, dès lors qu'était intervenue une modification dans les besoins de l'un ou dans les possibilités de l'autre.
Le fondement juridique de la pension était l'engagement pris, l'article 212 du code civil stipulant que « les époux se doivent mutuellement fidélité, secours, assistance ». L'un des deux époux, dès lors qu'il avait rompu le contrat, devait une pension alimentaire si l'autre en avait besoin.
Ce système était tout à fait acceptable à la réserve près que, dès lors qu'il y avait faute, aucune pension alimentaire n'était plus octroyée, et ce même si l'époux se trouvait dans le besoin, ce qui était chèrement payer un manquement au contrat !
Bien sûr, il fallait revenir devant le juge, qui appréciait s'il y avait ou non une modification suffisante des besoins ou des possibilités - il le faisait même si le terme « substantielle » ne figurait pas dans le texte - pour que la pension soit elle-même modifiée ou non dans un sens ou dans l'autre. C'était parfait.
Or, en 1975, est intervenu le changement de législation, la prestation compensatoire remplaçant le plus souvent la pension alimentaire sur un fondement nouveau : régler le problème une fois pour toutes, tout en veillant à éviter que ne s'instaure du fait du divorce une trop grande disparité dans les conditions de vie des époux.
Si l'idée était bonne, elle est malheureusement impossible à mettre en pratique : on ne peut en effet pas régler les problèmes une fois pour toutes, d'autant plus que, en raison du développement du chômage, certaines personnes tenues au versement d'une prestation compensatoire n'arrivent plus à payer cette dernière, alors que d'autres, qui ne perçoivent pas ou plus de prestation compensatoire, ne parviennent plus à vivre faute de trouver du travail. La situation économique a, à l'évidence, joué un grand rôle dans l'échec, aujourd'hui patent, de la prestation compensatoire.
Madame le garde des sceaux, vous avez dit vous-même que l'on avait voulu supprimer la pension alimentaire au profit d'un autre système, mais que, finalement, la logique reprenant ses droits, on en était revenu à quelque chose qui ressemblait beaucoup à la pension alimentaire. Règler les questions une fois pour toutes n'est possible qu'en prévoyant l'évolution des choses : or il n'est pas possible de tout prévoir !
La loi prévoit que la règle, en matière de prestation compensatoire, est le versement d'un capital mais nombreux sont ceux qui n'ont pas la possibilité de verser un capital !
J'ai lu dans les motifs de l'un de vos amendements, madame le garde des sceaux, que le paiement en capital doit rester la règle. Mais, vous l'avez parfaitement dit, la règle, en pratique, c'est, au contraire, une rente. C'est dans la logique des choses !
Notre ami Jean-Pierre Michel avait fait observer que, si l'on capitalisait les rentes telles qu'elles sont ordonnées et payées, on atteignait des sommes d'une importance extraordinaire, et qu'il fallait donc fixer le montant du capital, dans tous les cas, de manière que les débirentiers ne finissent pas par payer infiniment trop. Mais la prestation compensatoire n'est pas révisable.
Ce qui est tout de même incroyable, alors que le but est de compenser les disparités de revenus résultant de la dissolution du mariage, c'est que le résultat, en cas de modifications importantes de la situation de chacun des époux, peut être une disparité inversée de ce qu'elle était au moment du divorce : ainsi l'époux qui avait largement les moyens de donner de l'argent à son ex-conjoint pour lui maintenir son niveau de vie peut, au bout d'un certain temps, se trouver dans l'impossibilité de le faire, alors que l'ex-conjoint, au contraire, s'est entre-temps, par remariage ou autrement, fait une situation florissante. Ainsi, ce dernier continue à toucher des fonds de quelqu'un qui en a beaucoup moins que lui ! Il n'est évidemment pas pensable de laisser perdurer cette situation !
C'est tellement vrai que l'on porte atteinte au principe - qui est qu'il n'y a pas possibilité de révision, que la prestation compensatoire est forfaitaire - en cas d'« exceptionnelle gravité ». On en est ainsi revenu à la notion de pension alimentaire, elle, révisable.
Seulement, la jurisprudence - elle n'est pas en cause, elle a appliqué les textes - a constaté qu'une « exceptionnelle gravité » est, c'est l'évidence, extrêmement rare. Dans la plupart des cas, elle refuse donc toute révision. D'où des situations extrêmement pénibles.
Tout le monde est d'accord ici pour dire qu'il faut rendre la révision plus facile.
Certains font valoir qu'il en résultera un travail accru pour les magistrats, comme c'était le cas avec la possibilité de réviser les pensions alimentaires, travail que le système de la rente était censé alléger. Certes, mais ce n'est pas là une bonne manière de voir les choses. Ce qu'il faut, bien entendu, c'est qu'il y ait une justice ; et la justice, c'est que la prestation compensatoire, si on la garde - je ne sais d'ailleurs pas pourquoi on s'escrime à vouloir la garder, mais on verra cela plus tard, dans le cadre de la réforme générale - puisse être révisée lorsque c'est nécessaire.
Autre problème : cette prestation doit-elle être transmissible aux héritiers ? Il serait normal qu'une dette soit transmissible. Oui, sauf si l'on considère qu'une prestation compensatoire révisable est assimilable à une pension alimentaire !
La pension alimentaire présentait en effet l'avantage de disparaître avec le décès, avec, bien entendu, pour le survivant, la possibilité de demander une aide alimentaire à ceux qui y sont tenus par la loi.
Sur ce point, je suis en désaccord avec la commission. En effet, cela me choque que l'on puisse demander aux enfants, particulièrement s'ils sont d'un autre lit, ou à la veuve de continuer à payer. J'aimerais mieux que l'on s'en remette au système ancien, c'est-à-dire à l'aide alimentaire, qui ne peut être demandée qu'aux uns et pas aux autres, et seulement si l'intéressé est dans le besoin. Car c'est un faux problème, je le répète, de dire que, du moment où c'est une dette, il y a prestation compensatoire, il y a dette à laquelle tout héritier est tenu. Il suffit que la loi dise, en l'espèce, le contraire.
Car, comme vous le savez très bien, cette prestation compensatoire est redevenue, en vérité - elle ne peut pas être autre chose - une pension alimentaire - c'est une pension alimentaire déguisée - ne vous arrêtez pas aux termes « prestation compensatoire » et considérez qu'il n'est pas normal, finalement, que son paiement soit transmissible et donc payable par les héritiers, quels qu'ils soient et dans tous les cas.
Il est bon que cette discussion s'ouvre. J'espère qu'elle se poursuivra rapidement devant l'Assemblée nationale. En effet, s'il reste un important travail parlementaire à faire pour peaufiner les nouveaux textes, il y a aussi urgence, et je suis obligé de constater que c'est parce que le Parlement peut dorénavant inscrire à son ordre du jour des propositions de loi qu'il y a maintenant cet espoir de voir rapidement apportées les solutions indispensables à des problèmes qui se posent depuis trop longtemps. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. About.
M. Nicolas About. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, à l'heure où les autorités des Yvelines, autour du préfet, rendent hommage à Claude Erignac, je souhaite, en tant que parlementaire de ce département, m'associer très officiellement, du haut de cette tribune, à cet hommage.
J'en viens à notre sujet.
Lorsqu'une loi est mauvaise, il ne faut pas hésiter à la réformer, ses intentions premières fussent-elles parfaitement louables.
Dans un souci d'équité, le législateur de 1975 avait souhaité pallier la disparité de revenus que pouvait engendrer un divorce entre deux époux en instaurant une prestation compensatoire.
Comme son nom l'indique, cette prestation versée par le conjoint le plus fortuné à son ex-époux devait servir à compenser autant que possible le préjudice financier que pouvait constituer pour le conjoint le plus démuni la rupture de la vie commune.
Le juge, au regard d'un certain nombre de critères - l'âge, la situation professionnelle, la durée du mariage, etc. - devait s'ériger en prophète pour fixer le montant de cette indemnité forfaitaire, en évaluant les ressources et les besoins des ex-époux « dans un avenir prévisible ». La tâche ne semblait pas alors trop ardue puisqu'il suffisait de tenir compte de l'évolution normale d'une carrière professionnelle qui ne présentait guère de surprises, il y a vingt ans.
La situation, aujourd'hui, a bien changé. L'instabilité qui règne sur le monde du travail ne permet plus de prédire avec justesse ce que l'avenir réserve à deux personnes qui se séparent. Et il n'est pas rare de voir se produire, avec la montée du chômage dans toutes les catégories sociales, les véritables retournements de situation dont parlait M. Dreyfus-Schmidt à l'instant, où le conjoint qui semblait pourtant le mieux armé financièrement au moment du divorce tombe dans une grave précarité. Cette précarité ne l'exempte pourtant pas de continuer à payer une rente à son ex-conjoint beaucoup mieux loti que lui. Devant une telle instabilité socio-économique, la rigidité qu'impose la loi de 1975 en matière de prestation compensatoire est devenue obsolète. Pis, elle est devenue, à son corps défendant, source d'injustices sociales.
Cette rigidité n'a pas échappé à la vigilance de la commission des lois, qui a souhaité, sur l'une de mes propositions ; introduire plus de souplesse. C'est dans cet esprit que je reprendrai les trois grands axes de la réforme qu'il me paraît urgent de réaliser : l'assouplissement des modalités de révision de la rente, sa limitation dans le temps, son intransmissibilité aux héritiers.
Premier axe, donc, l'assouplissement des modalités de révision.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur, le principe même de la prestation compensatoire était de régler une fois pour toutes les différends pécuniaires entre les ex-époux, afin de limiter dans le temps les effets néfastes du divorce.
La règle générale était d'instaurer entre le débiteur et le créancier un versement en capital. A titre exceptionnel, la prestation pouvait prendre la forme d'une rente. La pratique judiciaire - vous l'avez rappelé, madame le ministre - a, hélas ! détourné la lois de 1975 puisque le versement sous forme de rente ou sous une forme qui peut s'apparenter à une pension alimentaire est devenu la règle générale - plus de 80 % des cas - et le capital, l'exception - seulement 20 % des cas.
Comment expliquer cette dérive ?
D'abord, par des dispositions fiscales aberrantes qui privilégient, aujourd'hui, le versement d'une rente plutôt que d'un capital ; la rente est déductible, chaque année, du revenu du débirentier, alors que le versement en capital, même en trois annuités, est soumis à la même imposition que les donations. Je m'inscris donc très clairement en faveur des mesures fiscales proposées par la commission des lois, et qui consistent à doubler l'abattement fiscal lorsque la prestation est versée en capital, même si cette disposition est peut-être encore insuffisante.
La deuxième explication à cette dérive - je crains, hélas ! que les facilités fiscales annoncées ne fassent qu'en atténuer les effets sans les régler totalement - c'est la précarité des capitaux personnels, qu'il est bien difficile, en cette période de chômage, de mobiliser lors du prononcé du divorce, divorce qui - faut-il le rappeler ? - est toujours source d'appauvrissement pour le couple qui se sépare.
Souvent mal informé des conséquences d'un tel choix, l'époux débiteur, quand on lui offre le choix, opte pour le versement d'une rente à son ex-conjoint, pensant ainsi préserver son capital dans l'hypothèse d'une nouvelle installation, voire d'un remariage.
La troisième explication à cette dérive, c'est peut-être, de la part de certains, la volonté de punir à vie l'un des époux en établissant des liens financiers avec son ex-époux. Divorcer serait-il donc devenu un crime si grave pour se voir infliger non pas une peine de sûreté de trente ans, non pas la perpétuité, mais la transmissibilité de la peine ?
La quatrième explication réside sans doute dans la confusion, dans l'esprit des juges, entre la prestation compensatoire et la pension alimentaire. A partir du moment où le versement de la rente est devenu la règle, l'étalement dans le temps des effets du divorce a peu à peu fait perdre à la prestation compensatoire son caractère indemnitaire pour prendre une dimension alimentaire.
Cette assimilation de la prestation à la pension alimentaire était l'un des écueils tant redoutés de la loi de 1975. Il n'a malheureusement pas pu être évité, tant les juges, habitués au régime de la pension alimentaire, tendaient à y faire référence dans le calcul de la prestation.
A partir du moment où la prestation compensatoire prend une dimension alimentaire, il devient difficile de rester inflexible sur le chapitre de la révision.
Cessons de croire que le versement d'un capital et le versement d'échéances étalées dans le temps sont équivalents. Le temps introduit des changements importants dans la situation initiale des époux, qui sont difficilement prévisibles pour un juge. La réalité, nous le savons, dépasse souvent la fiction.
C'est, par exemple, le cas d'un retraité dont les ressources ont chuté et qui doit continuer à verser une prestation - équivalant à 49 % de ses revenus - à son ex-épouse pourtant remariée avec un P-DG ! Ce type de situations est monnaie courante, et pourtant elles ne relèvent pas, comme on l'a dit, du critère d'« exceptionnelle gravité », qui permettrait d'ouvrir une procédure en révision.
Une importante baisse des revenus due au chômage, à une maladie ou à un départ à la retraite ne constitue pas une cause suffisante pour une demande en révision. Pis, il existe des disparités d'appréciation entre les juges pour juger du degré de gravité recevable pour une révision : ainsi, le chômage est apparu tantôt comme insuffisant, tantôt comme recevable, suivant les tribunaux. A tel point qu'une spécialiste du droit de la famille a récemment qualifié de « loterie judiciaire » les procédures en révision des prestations compensatoires.
Soyons clairs : l'étroitesse des critères de révision, qui devait mettre fin, dans l'esprit de 1975, au contentieux entre les ex-époux, est devenue, avec le temps, source d'injustices et de nouvelles rancoeurs. Au lieu de régler définitivement les effets néfastes du divorce, la rente compensatoire n'a fait que les prolonger, en remplaçant des liens affectifs rompus par des liens financiers perpétuels et indénouables. A la lumière de ces exemples, il me paraît urgent d'ouvrir les possibilités de révision de la rente, et ce dans les deux cas de figure suivants.
Premier cas de figure, en cas de changement « négatif », lorsque la rente devient difficile à honorer pour le débiteur, pour cause de baisse substantielle de son niveau de vie. C'est le cas, notamment, du chômage ou d'un départ à la retraite. Nous devons en effet considérer que, si le mariage avait perduré, le conjoint aurait de toute façon connu une baisse de revenus, si son époux s'était retrouvé au chômage ou à la retraite.
Second cas de figure, en cas de changement positif, lorsque la prestation compensatoire n'est plus nécessaire pour le créancier, en raison d'une élévation importante de ses revenus. C'est notamment le cas lorsque survient un héritage ou un remariage.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pas toujours !
M. Nicolas About. Mais c'est possible !
J'irai même plus loin : je m'inscris en faveur d'une suppression automatique de la prestation compensatoire en cas de remariage ou de concubinage notoire du créancier.
A partir du moment où le créancier contracte une nouvelle union, le lien de solidarité qui existait entre lui et son ex-conjoint tombe, ou, plutôt, il est transféré à son nouveau conjoint ou concubin qui assume désormais la charge du ménage.
M. Dreyfus-Schmidt évoquait tout à l'heure les articles 212, 213 et suivants du code civil ; je rappelle que, aux termes de l'article 214, « si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ». Ainsi, le nouveau contrat de mariage entraînera des obligations pour le nouveau conjoint et devrait donc lever celles du précédent.
Il faut, en effet, éviter à tout prix ces situations invraisemblables où, par exemple, une femme qui a divorcé deux fois et se remarie cumule les deux prestations compensatoires de ses ex-maris, malgré une situation financière devenue très confortable et de nouveaux liens de solidarité tissés. C'est cela qui est important.
Dans notre code civil, les pensions alimentaires deviennent caduques dès qu'il y a remariage ou concubinage de l'époux bénéficiaire. A partir du moment où la prestation compensatoire prend, dans la pratique - tout le monde l'a rappelé - une dimension alimentaire, on doit accepter qu'elle s'éteigne dans les mêmes conditions que la pension alimentaire. La rente compensatoire doit donc s'éteindre dès l'instant où l'époux créancier se remet en ménage.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais non !
M. Nicolas About. J'en viens à la limitation de la durée de la rente.
Je rappelais à l'instant comment le législateur de 1975, en donnant la possibilité au juge de transformer le capital en rente, sans guère lui laisser la possibilité de la réviser, n'avait fait que perpétuer des liens d'ordre financier entre les ex-époux. Après tout, il n'est pas choquant de penser que subsiste entre deux personnes qui ont partagé de nombreuses années de leur vie, qui ont eu ensemble des enfants, un devoir moral d'assistance. Un divorce ne peut effacer d'un trait de plume une histoire passée, vécue en commun. Personne ne conteste ici le bien-fondé de la prestation compensatoire, correspondant à l'ancien devoir de secours du code Napoléon.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pourquoi la limiter ?
M. Nicolas About. Ce qui est plus choquant, c'est de voir se prolonger des versements, parfois à vie. Un capital versé une fois pour toutes, dès le prononcé du divorce, pourrait pourtant permettre à l'époux créancier de prendre une certaine autonomie financière par rapport à son ex-conjoint. Il devrait également permettre à l'époux débiteur de tourner la page. Il faut souligner ici le caractère vexatoire que peuvent représenter pour le débirentier des versements indemnitaires perpétuels, surtout lorsque leur montant est faible. Au bout d'un certain temps, il finit par les vivre comme une sanction financière qui lui est infligée par la justice, alors qu'il n'est pas coupable. Rappelons en effet que le régime des prestations compensatoires est valable, y compris pour les divorces les plus neutres, par consentement mutuel ou sur requête conjointe. Il arrive même que ce soit celui qui ne voulait pas le divorce qui soit contraint de payer ! C'est le cas le plus fréquent. Arrêtons cette condamnation absurde, en revenant au système du capital ou, à défaut, en limitant le plus possible la durée de versement de la rente.
J'avais, pour ma part, proposé de limiter à dix ans la durée de versement de la rente, sauf si cette limitation devait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour le créancier. Je voulais en effet que la loi n'oublie pas le cas particulier des vieux époux, pour qui l'arrêt des versements aurait pu avoir des conséquences fâcheuses.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Eh oui !
M. Nicolas About. Ma proposition n'a pas été retenue par la commission qui a préféré laisser au juge - on a vu ce qu'il a fait de la loi de 1975 ! - la libre appréciation de cette durée.
Je crains, pour ma part, qu'une telle liberté ne crée de nouveau des disparités d'appréciation d'un tribunal à l'autre, et des ruptures d'égalité entre les justiciables.
Pour y remédier, il me paraît important de fixer une borne symbolique que le juge pourra toujours reculer si, à l'expiration de cette période, la suppression de la prestation devait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Je défendrai tout à l'heure un amendement en ce sens, en proposant une durée maximale égale à deux fois celle du mariage.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ah !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cela dépend de l'âge des enfants !
M. Nicolas About. Le troisième aspect de mon propos portera sur l'intransmissibilité de la rente aux héritiers.
En ne fixant aucune limite temporelle à la rente compensatoire, le législateur de 1975 a commis une double erreur : ...
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ah non !
M. Nicolas About. ... non seulement il a « condamné à perpétuité » l'un des époux à subvenir aux besoins de l'autre, mais, en plus, il a en quelque sorte hypothéqué son avenir et celui de ses enfants. Par une disposition parfaitement aberrante, il a en effet inscrit dans le code civil le principe de la transmissibilité de la charge aux héritiers.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'était logique.
M. Nicolas About. Autrement dit, si l'époux débiteur vient à décéder, la charge de la rente se transmet à ses héritiers, c'est-à-dire à son nouveau conjoint et aux éventuels enfants issus de son second mariage, alors même que ceux-ci n'ont aucun lien de parenté avec le créancier. Le seul moyen dont disposent les héritiers pour échapper à cette obligation consiste alors à refuser purement et simplement la sucession.
Cette disposition me semble particulièrement injuste. De nombreuses femmes remariées se voient ainsi contraintes, alors qu'elles viennent de perdre leur mari et qu'elles doivent continuer à élever leurs enfants, de payer une rente à la première femme de leur mari, alors qu'elles ne sont en rien responsables des liens de ce premier mariage, auxquels le divorce a, en principe, mis un terme définitif.
M. Robert Pagès. C'est exact !
M. Nicolas About. D'autres sont obligées de rependre une activité professionnelle pour payer une prestation à la première épouse qui, elle, n'a jamais travaillé ! Tout se passe, en droit français, comme dans les dynasties chinoises, où la seconde épouse devait respect et assistance à la première du nom, selon une hiérarchie très codifiée.
La commission n'a pas jugé bon de revenir sur la transmissibilité de la rente et je le regrette. Je ne pense pas pour ma part que ce principe soit « conforme au droit commun », ou bien, s'il l'est, changeons le droit commun. C'est après tout le rôle du législateur.
Au contraire, je pense que la rente compensatoire n'est pas une dette comme les autres : elle découle de liens affectifs passés qui s'éteignent à la mort de celui qui les a contractés. Contrairement à ce que dispose la loi - et, je le répète, lorsque la loi n'est plus adaptée à la réalité de notre temps, il faut la changer - il s'agit non pas d'une dette d'ordre patrimonial, mais bien d'une dette à caractère personnel, correspondant à l'ancien devoir de secours entre les ex-époux, qui ne saurait échoir à leurs héritiers.
Contraindre un nouveau conjoint ou des enfants issus d'un second mariage à refuser la succession de leur père constitue une mesure inégalitaire qui ne trouve aucun fondement valable. On ne peut, je le rappelle, faire porter la charge de la rente à des individus que rien ne lie au créancier. Imaginez la charge financière qu'aurait représentée une rente compensatoire versée à Jeanne Calment, dernière doyenne de l'humanité, par les héritiers de son ex-mari et vous comprendrez qu'on ne peut faire ainsi porter le poids d'une rente à toute une descendance, sous prétexte qu'un aïeul a contracté des liens matrimoniaux par le passé.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Elle avait vendu en viager !
M. Nicolas About. En achetant en viager, on prend un risque : on cherche à tirer un bénéfice de cette transaction. Ce n'est pas le cas pour une prestation compensatoire. On ne peut donc assimiler prestation compensatoire et rente viagère !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Non, mais sur la forme, c'est comparable puisque la prestation compensatoire c'est le versement d'un capital.
M. Nicolas About. Certes, mais ce n'est pas une rente.
J'irai plus loin dans mon raisonnement, pour montrer l'absurdité à laquelle nous conduit le principe de la transmissibilité de la rente.
Admettons que des ayants cause refusent la succession du défunt à cause de cette rente alimentaire. Puisque la loi part du principe que le devoir de secours à l'égard de l'ex-conjoint ne s'éteint pas à la mort du débiteur, pourquoi l'Etat, qui reprend la succession, refuserait-il d'assumer le paiement de la rente ? C'est vrai que l'Etat n'est jamais débiteur !
Par un dispositif qui n'incite guère les héritiers à reprendre la succession, l'Etat peut récupérer les biens du défunt, mais il ne va pas jusqu'à reprendre la dette qu'est la prestation compensatoire, puisqu'il n'assure pas le relais du versement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très juste !
M. Nicolas About. C'est donc bien que lui, l'Etat, estime que cette dette n'est pas d'ordre patrimonial mais bien qu'elle est personnelle au défunt. Revenir au principe de l'intransmissibilité de la rente n'est donc que justice, pour le débirentier, mais aussi pour sa descendance.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est audacieux comme raisonnement !
M. Nicolas About. C'est audacieux. De l'audace, toujours de l'audace, encore de l'audace ! (Sourires.)
Vous l'aurez compris, madame le ministre, mes chers collègues, deux principes doivent à mon sens guider notre discussion : souplesse et justice. Souplesse, d'abord, par l'ouverture des possibilités de révision de la rente.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !
M. Nicolas About. Souplesse, ensuite, par la limitation temporelle de son versement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !
M. Nicolas About. Souplesse, enfin, par l'abrogation du principe de transmissibilité aux héritiers.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui !
M. Nicolas About. Cet objectif vers lequel nous devons tendre, et que, je l'espère, mes chers collègues, nous atteindrons ensemble, ne fera que répondre au souci d'équité qui avait présidé à l'élaboration de la loi de 1975, mais que la réalité socioéconomique a dépassé. Faisons donc acte de justice.
En terminant, madame le ministre, même si certaines de vos propositions appelleront de ma part quelques remarques au cours de la discussion des articles, je veux vous remercier pour l'ensemble de vos propositions qui contribuent très sensiblement à l'avancement de ce dossier délicat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bien !
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec l'examen de ces deux propositions de loi modifiant les règles de la prestation compensatoire, nous anticipons la réforme plus globale du divorce envisagée par le Gouvernement.
Cette prestation compensatoire, instituée par la loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce, est sûrement l'un des volets dont les effets pécuniaires sont les plus conséquents, donc les plus urgents à traiter.
A l'époque, dans les années soixante-dix, au moment où le nombre des divorces explose, cette prestation avait pour objectif de garantir un revenu à l'épouse divorcée, souvent femme au foyer, ou bien de compenser la disparité créée par le divorce entre les conditions de vie des deux époux, lorsque les revenus de la femme étaient inférieurs à ceux du mari. Il faut se rappeler qu'en 1975 près de 59 % des femmes de vingt-cinq à quarante-quatre ans avaient une activité professionnelle, contre environ 80 % en 1996.
Le principe de ce dispositif est juste et généreux, puisqu'il permet de maintenir une certaine égalité dans les revenus des deux ex-conjoints après le divorce.
Cependant, on l'a dit à plusieurs reprises, après vingt années d'application de la loi de 1975, étant donné qu'aucun garde-fou n'a été prévu, les effets pervers de cette loi que je dirai « égalitaire » se sont révélés, à l'usage, redoutables, aboutissant à des situations d'une criante injustice, en raison notamment de la persistance du chômage.
Parfois, la différence peut devenir trop importante entre les deux ex-époux, avec le cas extrême où le débiteur devient chômeur, perdant ainsi une part substantielle de ses revenus, alors que l'époux bénéficiaire voit ou peut voir ses revenus augmenter ou sa situation s'améliorer, par remariage notamment.
La prestation compensatoire est alors souvent vécue comme une rente à vie, voire une sanction à vie, par les débiteurs.
En effet, si en principe cette charge devait être versée en capital, en pratique cette formule n'est pas fréquemment retenue ou très partiellement. En conséquence, ce versement, qui prend, le plus souvent, la forme d'une rente mensuelle, n'est pas limité dans le temps.
En outre, sa révision est exceptionnelle, donc quasiment impossible en pratique, et le report de la charge de cette rente se fait sur les héritiers en cas de décès du débiteur.
Ce système, rigide et sévère pour le débirentier, a engendré des situations invraisemblables et injustes, dont nous avons pris connaissance et conscience, et qui nous ont amené à déposer une proposition de loi visant à assouplir la législation en la matière.
Je tiens à préciser que si, à l'origine, la loi de 1975 avait pour objectif premier de mettre à l'abri du besoin l'épouse divorcée et ses enfants, les temps ont changé.
C'est ainsi qu'aujourd'hui les femmes sont, en tant qu'épouses d'hommes divorcés, elles aussi les victimes des aberrations du système, puisqu'en cas de décès de leur mari elles héritent de la dette et doivent à leur tour verser la prestation à la première épouse.
En outre, il arrive également, même si les cas sont plus rares, que les tribunaux allouent des prestations aux hommes quand les épouses ont des salaires plus élevés qu'eux.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C'est l'égalité !
M. Robert Pagès. Je ne dis pas que c'est mal ; je fais un constat. Ce n'est pas un jugement de valeur, mon cher rapporteur.
M. Pierre Fauchon. C'est une information !
M. Robert Pagès. Pour en venir aux termes mêmes des conclusions de la commission des lois, je ferai plusieurs observations.
L'article 1er prévoit que la prestation peut être révisée uniquement « en cas de changement substantiel dans les ressources des parties ».
Actuellement, l'article 273 du code civil précise que la prestation « ne peut être révisée même en cas de changement imprévu dans les ressources ou les besoins des parties, sauf si l'absence de révision devait avoir pour l'un des conjoints des conséquences d'une exceptionnelle gravité ».
Le législateur de 1975 a voulu que la situation soit définitivement fixée lors du prononcé du divorce et ne puisse plus être constamment remise en cause.
Le fait est que, généralement, le jugement intervient au moment où le débirentier est en activité et où la rente est supportable.
Les problèmes surviennent lorsque le débiteur devient retraité, chômeur, RMIste, invalide ou à la tête d'une famille nombreuse - pourquoi pas ? Dans ces cas précis, la rente devient, du jour au lendemain, à proprement parler insupportable, car elle absorbe tout ou partie des revenus du débiteur.
Or, étant donné la rédaction de l'article 273 du code civil, la révision est presque toujours impossible. C'est ainsi qu'il a été jugé que le licenciement d'un débiteur ne constituait pas un changement imprévisible « compte tenu du contexte économique » et ne pouvait justifier une révision. Il a été jugé de même pour la mise à la retraite, même anticipée, et la liquidation judiciaire.
Il n'y a guère qu'en cas de maladie grave que les juges se montrent plus tolérants.
Il est donc urgent de modifier la loi, à l'heure où notre pays compte plus de 3,5 millions de chômeurs et bon nombre d'autres exclus, à l'heure où un foyer sur trois est touché par le problème de la perte d'emploi. C'est d'autant plus urgent que, dans la tranche d'âge comprise entre vingt-cinq et quarante-neuf ans, c'est-à-dire celle qui est la plus confrontée au divorce, la proportion des chômeurs de longue durée est la plus élevée.
Il est des situations qui aboutissent à l'inverse du but que la loi cherche à atteindre, puisque le débiteur, dont la rente a été calculée sur la base d'un salaire qu'il ne perçoit plus, se trouve désormais dans une situation matérielle plus difficile que la personne à qui il apporte son soutien financier.
Au surplus, le conjoint bénéficiaire de la rente qui se remarie peut non seulement voir sa situation s'améliorer, mais également, en cas de nouveau divorce, percevoir une seconde prestation compensatoire. Et ainsi de suite !...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Robert Pagès. C'est pourquoi il eût été utile de préciser dans la loi qu'« en cas de remariage ou de concubinage notoire de l'époux créancier, la charge de la rente disparaît ».
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !
M. Robert Pagès. Mais notre collègue M. Dreyfus-Schmidt n'en est évidemment pas convaincu !
Par ailleurs, il faut savoir que l'avenir de ces débirentiers, retraités, chômeurs ou dont le salaire a substantiellement diminué du fait de la précarité de l'emploi, est complètement bouché.
Et si leur ex-époux, remarié, peut voir sa situation devenir plus confortable, il peut bien évidemment n'en être pas de même pour le débiteur.
A cela s'ajoute le fait que, si ce dernier se remarie, à son décès, la charge de la rente sera supportée par leur nouveau conjoint, voire par les enfants nés de cette nouvelle union, ce qui n'est pas acceptable.
En effet, la charge de la rente est transmissible et peut engendrer des situations absurdes. Le cas le plus marquant est celui où, en cas de décès des deux ex-époux, les enfants du second mariage du débirentier doivent verser une rente au deuxième époux du ou de la bénéficiaire, alors qu'il n'y a aucun lien de parenté entre eux !
Le versement d'une rente sur une trop longue durée pénalise ou favorise injustement des personnes étrangères au divorce. C'est donc à juste titre que l'article 2 du présent texte prévoit que « le décès de l'époux créancier avant l'expiration de cette durée met fin à la charge de la rente ».
Toutefois, pour que le dispositif soit complet, nous estimons qu'il est nécessaire de prévoir qu'« à la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente disparaît ».
Il arrive en effet que, en cas de décès du débiteur, les héritiers qui ne peuvent pas prendre en charge la rente compensatoire soient dans l'obligation de renoncer à la succession. Par notre amendement, nous proposons donc que la charge de la rente disparaisse avec le décès du débiteur.
Nous approuvons également l'article 2 en ce qu'il précise que « le juge fixe la durée de la rente en prenant les éléments d'appréciation prévus à l'article 272 ».
D'ailleurs, en pratique et en raison de la situation économique et sociale des années quatre-vingt-dix, les juges ont déjà tendance à limiter le paiement de la rente sur une période de trois à quinze ans, alors qu'elle était due à vie, auparavant.
La rente ne devrait plus pouvoir être attribuée au-delà de la période d'activité du débirentier ou, du moins, devrait-elle être largement révisée dès cette date. On peut, en effet, considérer que, si le mariage était arrivé à « tenir » jusqu'à la mise à la retraite des époux, le « créancier » aurait de toute manière subi la diminution des ressources de son conjoint.
Les tribunaux tiennent bien compte, en cas de divorce d'époux retraités, de la situation de retraité de chacun d'eux !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !
M. Robert Pagès. Quant à l'article 3, qui prévoit de doubler l'abattement fiscal en cas de versement de la prestation compensatoire sous forme de capital au lieu et place d'une rente, il confirme un principe, l'attribution d'un capital, qui n'est pas respecté actuellement.
En effet, les trois quarts des prestations sont aujourd'hui accordées sous forme de rentes, dont le montant est fixé au jour du divorce et atteint en moyenne 2 300 francs, mais un tiers d'entre elles excèdent 3 500 francs et 7 % 6 000 francs.
Le régime fiscal proposé, plus avantageux que le régime actuel, devrait inciter les personnes qui divorcent à choisir le versement d'un capital plutôt qu'une rente, ce qui leur permettrait de couper définitivement les liens du mariage.
C'est d'ailleurs l'objectif de la loi de 1975, qui devait régler le plus rapidement possible les effets du divorce en érigeant notamment en principe le versement, une bonne fois pour toute, d'un capital.
Or, on l'a vu, le principe est devenu l'exception, et l'attribution d'une rente a été largement employée par les tribunaux, qui ont fait ainsi perdurer les « liens du divorce » bien au-delà de la volonté du législateur de 1975.
Telles sont les quelques observations que je tenais à faire quant aux conclusions de la commission des lois, sur lesquelles nous reviendrons, bien entendu, lors de la discussion des articles.
Nous sommes, bien évidemment, conscients qu'il ne s'agit là que de premières mesures eu égard à l'importance du chantier que constitue la réforme du divorce. Néanmoins, nous considérons qu'il est urgent de remédier d'ores et déjà aux situations dramatiques que vivent les personnes divorcées, condamnées à payer une rente à vie, une rente devenue trop lourde par rapport à leurs revenus.
Avant de finir, il me reste à soulever deux interrogations.
L'une concerne la multiplication des requêtes qu'entraînera l'adoption de ces mesures tant la pression des justiciables en la matière est grande, et donc la question des moyens à mettre en oeuvre.
L'autre est relative à l'inscription de ce texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, inscription que nous souhaitons, bien entendu, rapide, de façon à ne pas prolonger encore une situation douloureuse pour nombre de nos concitoyens.
En tout état de cause, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen sont favorables à l'adoption des modifications proposées. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
Le capital, voilà l'ennemi ! (Sourires.)
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes d'accord sur le principe : il faut modifier la prestation compensatoire telle qu'elle a été instituée par la loi de 1975. Cette prestation s'est en effet révélée inadaptée à l'évolution de la société, à la grave instabilité résultant de la crise économique et sociale, de l'explosion du chômage et du développement des situations de précarité. Mais il faut, dans le même temps, faire attention à ne pas créer d'autres difficultés.
Je partage l'avis de M. Hyest. Comme il l'a exprimé dans son rapport, il convient d'assouplir les conditions de révision. Je le remercie d'ailleurs de l'ouverture qu'il a faite quant aux améliorations possibles du dispositif envisagé.
Je partage aussi l'avis de M. Dreyfus-Schmidt sur l'intérêt qui s'attache à une modification de la prestation compensatoire sans attendre une réforme d'ensemble du divorce ou du droit de la famille.
Je ne crois pas pour autant qu'il soit exact - nous divergeons sur ce point - que la pension alimentaire donnait satisfaction. En effet, nous le savons tous, les pensions alimentaires généraient un très important contentieux, un contentieux qui se pérennisait pendant des années. Je ne souhaite donc pas que nous revenions purement et simplement à l'ancien système.
Monsieur About, je partage votre souhait d'instaurer un dispositif souple. Je pense d'ailleurs que les amendements proposés par le Gouvernement répondent à votre voeu.
En effet, je ne suis pas favorable à un système rigide qui interdirait systématiquement que la charge de la prestation compensatoire soit supportée par les héritiers ou qui imposerait qu'elle cesse en cas de concubinage notoire. Il nous faut trouver un point d'équilibre.
Je voudrais également dire à M. Pagès que je suis extrêmement sensible aux observations qu'il a formulées concernant les situations d'injustice qui ont été créées par cette prestation compensatoire : pénalisation de personnes en situation de chômage ou de personnes mises à la retraite anticipée, sans oublier la situation de seconde épouse par rapport à la première.
C'est pourquoi je suis entièrement d'accord avec vous, monsieur Pagès, quant à la nécessité de modifier la loi et je vous remercie d'avoir déposé cette proposition de loi qui nous permet d'avoir cette discussion aujourd'hui.
Il nous faut arriver à élaborer un système souple afin de tenir compte des modifications pouvant intervenir dans la situation tant du créancier que du débiteur. Mais, en même temps, il ne faut pas tomber dans une insécurité juridique susceptible d'engendrer des contentieux eux-mêmes persistants.
Je pense - mais nous aurons le temps d'en reparler - que la discussion parlementaire devrait nous permettre de parvenir à un bon point d'équilibre.
Le Gouvernement, je le rappelle, souhaite que la prestation compensatoire reste forfaitaire, tout en faisant en sorte qu'elle puisse être modifiée plus facilement qu'aujourd'hui en cas de changements imprévus et importants.
Le Gouvernement souhaite par ailleurs que la prestation compensatoire sous forme de capital soit privilégiée - en tout cas, chaque fois que cela est possible, mais nous savons bien que cela n'est pas toujours le cas - pour permettre le règlement financier du divorce au moment où celui-ci est prononcé.
Le Gouvernement estime de plus qu'à tout moment le débiteur de la rente doit pouvoir demander la capitalisation au cas où sa situation de fortune changerait.
Le Gouvernement souhaite en outre que la rente soit temporaire, qu'elle soit assortie d'un terme ou d'une condition - ce que la jurisprudence jusqu'ici n'avait pas permis - et que l'attribution d'une rente à titre viager soit spécialement motivée.
Le Gouvernement souhaite encore que, sauf disposition contraire, lorsque le débiteur de la rente meurt, le versement de celle-ci ne soit plus transmis aux héritiers, tous les orateurs ont insisté sur ce point.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Sauf la commission !
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. C'est exact !
Enfin, le Gouvernement souhaite que soit prévue, pour garantir le paiement de la rente, la possibilité de cautions ou d'assurance, ce qui était jusqu'ici impossible.
Il me semble que nous sommes d'accord sur les objectifs tout en différant manifestement sur quelques-unes des propositions. Nous sommes les uns et les autres animés du souci de trouver un point d'équilibre pour remédier à des situations difficiles. J'espère que la discussion parlementaire nous permettra d'y parvenir ; en tout cas, je vous remercie de l'avoir suscitée. En ce qui me concerne, je ferai tout pour que cette discussion puisse aboutir dans les meilleurs délais. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La discussion des articles interviendra à une date ultérieure.
Afin de permettre à la conférence des présidents de se réunir, le Sénat va maintenant interrompre ses travaux ; il les reprendra à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Michel Dreyfus-Schmidt.)

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

9

CONFÉRENCE DES PRÉSIDENTS

M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l'ordre du jour des prochaines séances du Sénat.

A. - Mercredi 11 février 1998 :
Ordre du jour prioritaire

A quinze heures :
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).

La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
B. - Jeudi 12 février 1998 :
A neuf heures trente :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.
C. - Mardi 24 février 1998 :
A neuf heures trente :
1° Dix-huit questions orales sans débat.
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- N° 157 de M. Jean Huchon à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer (statut de la zone des cinquante pas géométriques dans les DOM) ;
- N° 159 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de la culture et de la communication (avenir des cinémas d'art et d'essai) ;
- N° 161 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (retraités agricoles) ;
- N° 164 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (problème du logement dans le bassin minier) ;
- N° 165 de M. Aubert Garcia transmise à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (contrôle sur le recrutement des agents non titulaires dans la fonction publique territoriale) ;
- N° 166 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (mission des SAFER) ;
- N° 169 de M. François Autain à M. le secrétaire d'Etat à la santé (statut des médecins à diplôme étranger) ;
- N° 170 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (projet de délocalisation du centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge) ;
- N° 171 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de la défense (conditions d'incorporation des jeunes ayant un contrat de travail) ;
- N° 173 de M. Charles Descours à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (réalisation de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron) ;
- N° 174 de M. André Vallet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (contribution des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé) ;
- N° 175 de M. Georges Mouly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises) ;
- N° 176 de M. Bernard Piras à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice (statut des administrateurs ad hoc ) ;
- N° 177 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (projet de loi sur la qualité sanitaire des denrées alimentaires destinées à l'alimentation humaine et animale) ;
- N° 178 de M. Gérard Fayolle à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement (gestion et traitement des déchets en Dordogne) ;
- N° 179 de M. Henri Revol à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice (avenir du tribunal de Châtillon-sur-Seine) ;
- N° 182 de M. André Vézinhet à M. le ministre de l'intérieur (sécurité publique à Lunel) ;
- N° 186 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (délais de paiement appliqués aux produits cuisinés).
A seize heures et, éventuellement, le soir :
2° Eloge funèbre de M. Pierre Croze.

Ordre du jour prioritaire

3° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture de la proposition de loi relative au fonctionnement des conseils régionaux.
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification et modification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte (n° 195, 1997-1998).
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.
5° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives.
La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
D. - Mercredi 25 février 1998 :
A quinze heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif à la nationalité.
La conférence des présidents a fixé au mardi 24 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.

Ordre du jour complémentaire

2° Suite des conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About, tendant à modifier les dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 151, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 400, 1996-1997).
Aucun amendement à ce texte n'est plus recevable.
E. - Jeudi 26 février 1998 :
A dix heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
La conférence des présidents a fixé au mercredi 25 février 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.
A quinze heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.
F. - Mardi 3 mars 1998 :
A neuf heures trente :
1° Onze questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- N° 92 de M. Paul Masson transmise à M. le secrétaire d'Etat à la santé (lutte contre la toxicomanie) ;
- N° 103 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de l'intérieur (montant de la vignette automobile) ;
- N° 109 de M. Ivan Renar à Mme le ministre de la culture et de la communication (situation fiscale des structures culturelles) ;
- N° 112 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget (régime de la taxe professionnelle applicable à France Télécom et à la Poste) ;
- N° 142 de M. Jean-Jacques Robert à Mme le ministre de la jeunesse et des sports (conditions d'exercice du parachutisme sportif en région parisienne) ;
- N° 155 de Mme Anne Heinis transmise à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (problèmes de la pêche aux abords des îles anglo-normandes et du Cotentin) ;
- N° 181 de M. André Dulait à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (financement de l'utilisation des ressources multimédia dans les établissements scolaires) ;
- N° 183 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (tracé du TGV pendulaire Clermont-Paris) ;
- N° 184 de M. Franck Sérusclat à M. le secrétaire d'Etat à la santé (politique en matière de toxicomanie) ;
- N° 187 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (statut des animateurs de la mission d'insertion de l'éducation nationale) ;
- N° 188 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de l'intérieur (conditions d'incorporation dans les écoles de police).
A seize heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN n° 512) ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 mars 1998, à dix-sept heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;
- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant dix-sept heures, le lundi 2 mars 1998.
G. - Mercredi 4 mars 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A quinze heures et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN n° 512).
H. - Jeudi 5 mars 1998 :

Ordre du jour établi en application de l'article 48,
troisième alinéa, de la Constitution

A neuf heures trente :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 257 rect., 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Michel Moreigne et plusieurs de ses collègues visant à étendre aux centres de santé gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n° 43, 1996-1997) ;
- la proposition de loi de M. Georges Mouly et plusieurs de ses collègues visant à étendre aux centres de soins infirmiers gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n° 377, 1996-1997).
2° Proposition de loi de M. Jean Delaneau et plusieurs de ses collègues visant à élargir les possibilités d'utilisation des crédits obligatoires d'insertion des départements (n° 250, 1997-1998) ;
A quinze heures et le soir :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant onze heures.

Ordre du jour prioritaire

4° Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN n° 512).
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents s'agissant de l'ordre du jour établi en application de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution et de l'ordre du jour complémentaire ?...
Ces propositions sont adoptées.

10

INTERVENTION DES ORGANISMES HLM
SUR LE PARC LOCATIF PRIVÉ

Adoption d'une proposition de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi (n° 185, 1997-1998), adoptée par l'Assemblée nationale, permettant aux organismes d'habitations à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en sous-location (rapport n° 262 [1997-1998]).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi que nous allons examiner aujourd'hui prévoit, ainsi que M. le rapporteur vous l'indiquera dans quelques instants, un nouvel outil pour remettre en location des logements vacants du secteur privé.
L'enquête logement de 1996, la plus récente de l'Institut national de la statistique et des études économiques, l'INSEE, chiffre ce parc à 2 231 000 logements, soit 7,9 % de l'ensemble des logements, c'est-à-dire les logements pour la résidence principale, les résidences secondaires et les logements occasionnels. L'importance de cette vacance ne peut laisser indifférent puisque, parallèlement à l'existence de logements vides, nous nous heurtons à la difficulté de proposer un toit à des personnes sans logement ou très mal logées.
Toutefois, gardons-nous - mais vous en avez bien conscience - de conclusions hâtives en aboutissant à une équation pure et simple entre le nombre de logements vides et le nombre de logements qui font défaut. C'est évidemment moins simple.
Le Conseil national de l'habitat, le CNH, rappelle, dans son rapport de 1996, que les chiffres doivent être considérés avec précaution. Il s'agit, pour de nombreux logements, d'une vacance qui peut être purement conjoncturelle, alors que c'est bien entendu sur une vacance structurelle, dont la durée est d'au moins six mois pour être considérée comme telle, que les efforts doivent porter pour une mobilisation du parc vacant.
Quant à l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, elle signalait en 1995 que l'expression « logement vacant » non seulement ne veut pas forcement dire « logement disponible », mais signifie souvent « logement hors marché ». Le logement peut être situé dans une zone qui ne connaît pas de demande ; il peut ne pas correspondre à la demande. La demande de logement n'est pas excédentaire partout ; il apparaît que la mobilisation du parc vacant n'est donc pas nécessaire partout.
Cependant, l'intérêt pour la mobilisation d'une offre nouvelle et la fluidité du parc de logements est indéniable dans les zones où l'offre fait défaut au regard des files d'attente pour l'attribution de logements sociaux. Le chiffrage effectué dans le rapport Robert de 1992, selon lequel 500 000 logements pourraient être recyclés, dont 200 000 rapidement, ne peut laisser indifférent.
Il est donc raisonnable de ne rien négliger pour que l'offre potentielle réponde à la demande locale dès lors que cette demande est bien réelle. C'est ce que le Gouvernement souhaite faire dans le cadre des chantiers qu'il a ouverts dans le domaine du logement.
Pour ce faire, il faut bien appréhender les divers aspects de la vacance de façon à mieux évaluer les besoins d'intervention.
Certains logements connaissent un temps de vacance normal dans l'attente d'une vente ou d'une mise en location. D'autres logements connaissent une vacance dite de transformation du bien soit en raison de travaux, de démolition prévue, de changement d'usage, de situation de blocage juridique, ou encore une vacance liée à l'absence de demande du fait du manque de confort, de l'environnement déplaisant ou d'un phénomène local de dépopulation.
Reste la vacance que l'ANAH, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, qualifiait en 1995 de vacance « expectative » : celle des logements réservés pour une occupation future, voués à disparaître ou faisant l'objet d'une rétention, spéculative ou non. Il faut alors prendre en compte la volonté du propriétaire de conserver le bien en état pour une transmission de l'héritage, le refus de complications, l'indécision du propriétaire, quand elle existe, sur le devenir de son logement.
Cette diversité des causes de la vacance est essentielle à connaître pour proposer des outils différents, adaptés à chaque situation. Il serait illusoire de vouloir apporter une réponse unique ; nous pouvons tous en convenir, et je suis sûr que c'est la conclusion à laquelle est parvenue la commission au terme de ses travaux.
Tout d'abord, il me paraît nécessaire de ne pas lier la remise en location au logement d'un public déterminé. Le propriétaire décidé à remettre son bien sur le marché ne doit pas être contraint à loger un seul type de locataires.
Aussi, c'est dans le cadre de deux dossiers, celui du projet de loi pour la prévention et la lutte contre les exclusions, mais également celui qui portera statut du bailleur, privé que le Gouvernement traitera cette question.
Au regard de la prévention et de la lutte contre les exclusions, comment ne pas être sensible au caractère inadmissible de la vacance, alors que des personnes sont sans logement ou mal logées ? Aussi prévoyons-nous d'appliquer une taxe sur les logements vacants là où l'offre de logements fait cruellement défaut ; je dis bien : là où l'offre de logements fait cruellement défaut. Mais taxer la vacance serait injuste si le propriétaire ne disposait pas d'outils pour mettre son bien en location.
D'une part, nous étudions les améliorations à apporter au bail à réhabilitation et les moyens de renforcer le rôle des intermédiaires associatifs, dont l'intervention est parfois nécessaire pour assurer une gestion locative adaptée ou un accompagnement social.
D'autre part, dans le cadre du futur statut du bailleur privé, nous recherchons les moyens de motiver les investisseurs à s'engager sur le champ du locatif privé et les propriétaires de logements vacants à remettre leur bien en location. Le choix du locataire doit alors être laissé, sans imposer le logement de telle ou telle catégorie de personnes.
Pour cela, nous devons prendre en compte la rentabilité d'une mise en location, et nous nous efforcerons de moduler l'effort financier de l'Etat en faveur des propriétaires en fonction des efforts consentis par ceux-ci sur le niveau des loyers et la durée de la location. Nous avons également à examiner les moyens de sécuriser les propriétaires en recherchant des systèmes de garantie pour le paiement des loyers.
Sur ce dernier point, nous savons que la sécurisation des bailleurs passe aussi par la capacité de disposer d'intermédiaires pour l'acte de louer. Je pense à des propriétaires âgés qui ne veulent pas assurer en direct la gestion de la location. C'est ainsi que nous réfléchissons au rôle que peuvent jouer les agences immobilières qui interviennent habituellement sur le secteur locatif privé - je pense à ces agences qui ont pignon sur rue dans toutes nos villes - mais également les agences immobilières à vocation sociale ou les organismes d'HLM généralement confrontés à un public qui n'est pas forcément au centre de l'intérêt de tel ou tel agent immobilier.
L'objectif du Gouvernement est d'apporter des réponses adaptées en tenant compte des attentes de tous. C'est à cette condition que les propositions pour une mobilisation de la vacance seront les plus efficaces.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai cru devoir vous présenter l'ensemble de notre réflexion sur ce sujet, car la proposition de loi que vous allez examiner aujourd'hui se situe sur ce champ.
Cette proposition de loi assigne au parc mobilisable un rôle social en désignant des locataires potentiels dont les revenus sont inférieurs aux plafonds de ressources pris en compte pour l'attribution de logements sociaux et en prévoyant des limites aux loyers praticables. Elle propose un nouvel intervenant, l'organisme d'HLM, pour une prise à bail de logements vacants.
Tel qu'il a été adopté par les députés, le texte laisse aux intervenants habituels sur le secteur locatif privé le temps de mettre en location les logements de façon plus classique. En effet, vous l'avez observé, c'est un délai de vacance de deux ans qui a été retenu avant que s'ouvre la possibilité de la prise à bail par un organisme d'HLM.
Le dispositif proposé tient compte des attentes de chacun et laisse à la voie contractuelle le soin de régler les questions du financement des travaux éventuellement nécessaires et du coût de la gestion locative. Ainsi, propriétaires et organismes d'HLM pourront, en signant un contrat de location permettant la sous-location, répondre au souci de trouver des solutions de logement pour des personnes en dehors du cadre souvent très collectif du logement social ; mais encore au souci de permettre l'intervention d'un gestionnaire social pour une période de location aboutissant soit à une location directe au ménage logé, soit à une solution de relogement dans le parc social.
Cette proposition de loi donne une chance supplémentaire de mobilisation de logements par un nouveau type d'intervenant, l'organisme d'HLM. Cette démarche n'est pas en contradiction avec les travaux du Gouvernement, qui s'en remet donc à la sagesse de votre assemblée, mesdames, messieurs les sénateurs, pour l'adoption de ce texte.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Braun, rapporteur de la commission des affaires économiques et du Plan. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi n° 185, adoptée par l'Assemblée nationale, dont est saisie la commission des affaires économiques, doit permettre aux organismes d'habitation à loyer modéré d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en sous-location.
Elle est issue d'une proposition de loi déposée par M. Meyer, député, qui reprend, dans des termes quasiment identiques, une proposition de loi qu'il avait déjà déposée sous la précédente législature, mais qui n'avait pu aboutir en raison de la dissolution décidée le 22 avril 1997.
Le dispositif qu'il nous est demandé d'examiner se veut une réponse au problème de la vacance dans le parc immobilier privé, qui est ressenti de façon aiguë, compte tenu des deux millions de personnes dépourvues de logement ou mal logées.
Cette crise du logement durable est un problème primordial, qui nécessite la recherche d'outils très diversifiés pour faciliter une meilleure adéquation entre l'offre et la demande de logements.
Dans mon rapport écrit, qui procède à une analyse précise des causes de la vacance, j'indique qu'environ 200 000 logements devraient pouvoir être remis rapidement sur le marché, selon les différentes enquêtes menées sur le sujet.
Mais je voudrais insister sur les mécanismes existants pour mobiliser les logements vacants, en opposant au dispositif du bail à réhabilitation, institué par la loi du 31 mai 1990 et qui n'a connu qu'un succès très relatif, le rôle très positif de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH.
En effet, en cinq ans, le bail à réhabilitation n'a été utilisé que dans cinquante-quatre départements et n'a concerné qu'environ 1 000 logements. Les preneurs ont été essentiellement des associations, qui ont bénéficié des aides de l'ANAH pour réhabiliter ces logements. Mais force est de constater que les collectivités territoriales et les organismes sociaux se sont très peu impliqués dans ce dispositif.
Les raisons de cet échec tiennent aux difficultés et aux lourdeurs constatées dans le bouclage des opérations, à la longueur du bail imposé par la loi - douze ans - et aux incertitudes fiscales, en fin de bail, portant sur la qualification des travaux d'amélioration réalisés sur le logement.
En revanche, il convient de souligner, parmi les dispositifs existants, le rôle primordial joué par l'ANAH, qui a fait de la remise sur le marché des logements vacants l'un de ses objectifs prioritaires. En 1996, elle a subventionné la remise en état de 38 500 logements vacants, ce qui représente un tiers des logements subventionnés mais les trois quarts des subventions distribuées, soit 1,9 milliard de francs sur un total de 2,59 milliards de francs.
On constate ainsi que les opérations menées avec les collectivités territoriales contribuent fortement à la remise sur le marché de logements vacants, qu'il s'agisse d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat, les OPAH, ou de programmes sociaux thématiques, les PST.
De plus, pour augmenter l'offre de logements conventionnés dans les OPAH, le conseil d'administration de l'ANAH a décidé, en 1994, de porter de 35 % à 40 % le taux de subvention de l'Agence, sous réserve qu'une collectivité locale accorde une subvention complémentaire de 5 %, ce qui porte au total le taux de subvention à 45 %. Ces aides des collectivités sont assorties de critères particuliers, dépendant des priorités que se donne la collectivité, notamment la résorption de la vacance.
On ne peut donc, une fois encore, que dénoncer la très insuffisante progression de la subvention de l'Etat au budget de l'ANAH - 10 % sur cinq ans - alors même que, durant la même période, le produit de la taxe additionnelle au droit de bail, la TADB, a augmenté de 43 %. Il y a, pour la période 1990-1996, un déficit de 1,2 milliard de francs entre ce qu'a rapporté la taxe et le budget de l'ANAH.
Contrairement aux engagements pris en 1987, le « décrochage » entre le produit de la TADB et les ressources de l'ANAH n'a fait que s'accentuer, alors que, pour remédier à la vacance des logements dans le secteur privé, une augmentation sensible des moyens de l'ANAH aurait des effets immédiatement positifs.
Cela aurait également un impact très fort sur l'activité du secteur du bâtiment, notamment pour les petites et moyennes entreprises et les artisans ; on estime en effet que un milliard de francs de subvention de l'ANAH génère environ 4,5 milliards de francs de travaux. Vous pourriez monsieur le secrétaire d'Etat, en privilégiant cette voie, faire d'une pierre deux coups : lutter efficacement contre la vacance des logements et favoriser la création d'emplois.
J'en viens à la proposition de loi qui est aujourd'hui soumise à l'examen de la Haute Assemblée.
Ce texte met en place un dispositif qui présente des analogies avec le bail à réhabilitation, mais en privilégiant une procédure beaucoup plus souple, qui renvoie largement à la convention conclue entre les parties.
Si le bail à réhabilitation peut être signé par un organisme d'HLM, une société d'économie mixte, une collectivité territoriale ou une association agréée, le dispositif de la prise à bail est réservé aux seuls organismes d'HLM.
Dans le cadre du bail à réhabilitation, la durée du bail est au minimum de douze ans, alors qu'elle est fixée librement par les parties pour la prise à bail.
En ce qui concerne les travaux à effectuer, ils sont à la charge du preneur dans un bail à réhabilitation et du bailleur, c'est-à-dire du propriétaire, dans le cas de la prise à bail.
Mais, dans l'un et l'autre des dispositifs, le relogement des occupants est obligatoire en fin de bail, et il est à la charge du preneur, étant précisé que, dans la prise à bail, les ressources de l'occupant ne doivent pas dépasser le plafond de ressources fixé pour bénéficier d'un prêt locatif aidé.
La définition de ce nouveau champ de compétences ainsi ouvert aux organismes d'HLM nécessite l'insertion d'un chapitre nouveau dans le code de la construction et de l'habitation.
Le premier article de ce chapitre arrête la liste des organismes pouvant prendre à bail des logements vacants. Il s'agit, en plus des offices publics d'habitations à loyers modérés, des offices publics d'aménagement et de construction, des sociétés anonymes coopératives de production d'HLM et des sociétés anonymes d'HLM.
Le deuxième article fixe deux conditions importantes.
En premier lieu, dans les communes qui, au sens de la loi d'orientation sur la ville, ont un nombre de logements locatifs sociaux supérieur à 20 % du nombre total de logements, le contrat de prise à bail doit recueillir l'accord du maire, qui peut en apprécier l'impact au regard des besoins de la commune ou de la mixité sociale.
En second lieu, le logement pris à bail doit être vacant depuis deux ans au moins. Cette durée implique qu'il s'agit d'une vacance structurelle et que toutes les solutions offertes par le secteur privé se sont révélées inopérantes.
Le troisième article précise que les travaux de mise aux normes, s'ils sont nécessaires, sont à la charge du bailleur, mais que l'organisme d'HLM peut être chargé de leur suivi et de leur réalisation pour le compte du propriétaire.
Les quatrième et cinquième articles précisent que le logement est attribué dans les mêmes conditions qu'un logement HLM et, pour certaines dispositions concernant le contenu du contrat de sous-location, les droits et obligations de l'occupant ou encore le droit à congé, qu'il est fait application de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.
Le dernier article du nouveau chapitre précise les conditions de fin de bail entre le propriétaire et l'organisme d'HLM, à l'issue de la durée de location, qu'ils auront librement déterminée.
Le propriétaire peut ainsi décider de passer directement un contrat de location avec le sous-locataire du logement, mais il peut également décider de récupérer son bien libre de toute occupation.
Dans ce dernier cas, l'organisme d'HLM est tenu, vis-à-vis du propriétaire, de faire libérer le logement. Vis-à-vis de l'occupant, si ce dernier remplit les conditions pour être bénéficiaire d'un logement HLM, l'organisme doit lui proposer un logement répondant à ses besoins et à ses possibilités.
La commission des affaires économiques juge tout à fait intéressant le contenu de la proposition adoptée par l'Assemblée nationale. Ce texte devrait répondre aux besoins de personnes en attente de logement ainsi qu'aux souhaits des propriétaires, qui seraient assurés de percevoir régulièrement un loyer et de récupérer leur bien en bon état en fin de bail.
De même, en favorisant la réalisation de travaux de réhabilitation sur le patrimoine privé, ce dispositif va stimuler l'activité dans le secteur du bâtiment.
Il s'agit en outre d'un dispositif équilibré, qui respecte l'initiative privée en prévoyant un délai de vacance suffisamment long et en ne donnant pas un mandat de gestion aux organismes d'HLM, de telle sorte que les agences immobilières et les syndics n'auront pas à subir une concurrence à cet égard.
Enfin, il associe au processus les élus locaux, qui ont des responsabilités particulières en ce qui concerne la mixité sociale des populations qu'ils administrent.
Cet outil, certes, monsieur le secrétaire d'Etat, ne constitue pas la panacée, mais c'est un élément de réponse tant pour des communes rurales, par l'intervention d'un office départemental d'HLM,...
M. Alain Vasselle. Tout à fait !
M. Gérard Braun, rapporteur. ... que pour des logements vacants situés dans des villes moyennes. Il peut s'insérer, en tant qu'outil d'intervention pour un organisme d'HLM, dans une opération programmée d'amélioration de l'habitat lancée par une collectivité locale.
Enfin, je soulignerai tout l'intérêt de ce dispositif pour des populations en difficulté : un bon usage de la prise à bail devrait leur permettre, à terme, de bénéficier d'un logement convenable dans des conditions de droit commun. Je juge en effet très souhaitable que l'organisme d'HLM puisse, le plus souvent possible, s'effacer à l'issue de la convention de prise à bail pour que le propriétaire bailleur signe un contrat de location directement avec l'occupant du logement.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous indique, mes chers collègues, que la commission a approuvé l'ensemble de cette proposition de loi et qu'elle vous invite à l'adopter sans modification. (Très bien ! et applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous sommes saisis vise à mettre en place une procédure qui répond à une incontestable utilité.
L'excellent rapport présenté par notre collègue M. Gérard Braun est, à cet égard, éloquent.
Outre son utilité, sur laquelle je reviendrai dans un instant, ce texte a la triple particularité de s'appuyer, d'une manière très pragmatique, sur des constats vérifiables sur le terrain, de reposer sur la libre adhésion de ceux qui auront à le mettre en oeuvre et de laisser la place à une très grande souplesse dans son application.
Rien ne devrait donc s'opposer à ce que cette proposition de loi rencontre un accueil consensuel.
Notre pays compte aujourd'hui environ deux millions de logements vacants, soit près de 8 % du parc total, et cela alors que des centaines de milliers de demandes, émanant le plus souvent de familles modestes, ne peuvent pas être satisfaites.
Parmi ces logements vacants, il en est bien sûr qui, appartenant à des investisseurs institutionnels, ne sont pas visés par la présente proposition de loi. Il y a également ceux qui sont situés dans des immeubles neufs et qui, au gré des fluctuations du marché, seront mis en vente ou loués ; ceux-ci non plus, ne serait-ce qu'en raison de leur coût, ne peuvent entrer dans le cadre qui nous intéresse ici.
En revanche, peuvent être concernés les logements devenus vacants et restant dans l'attente d'un nouveau locataire, les logements pour lesquels les normes minimales d'habitabilité et de confort ne sont plus respectées, les logements que leur propriétaire hésite à relouer, pour les raisons les plus diverses, ainsi que les logements provisoirement indisponibles, dans l'attente de travaux ou du règlement d'une situation juridique complexe.
Le dispositif proposé ne pouvant s'appliquer qu'aux logements vacants depuis au moins deux ans, on est fondé à admettre qu'il vise les cas où le propriétaire n'a pas voulu ou n'a pas pu relouer son bien ou encore que les professionnels de la gestion immobilière n'ont su répondre à l'attente éventuelle du propriétaire.
L'intervention d'un organisme public qui viendrait pallier cette inertie ou cette défaillance ne saurait donc être contestée dans son principe.
Comme, en tout état de cause, le dispositif envisagé repose sur la libre acceptation du propriétaire, il ne peut s'agir pour lui d'une contrainte ; il s'agit plutôt de lui offrir une assistance pour faire face à une situation problématique qui, souvent, le dépasse.
Il convient en effet, me semble-t-il, d'échapper à une vision trop manichéenne des relations entre propriétaires et locataires.
La gestion d'un bien peut se révéler, pour un propriétaire, une tâche trop lourde. Les membres d'une même famille héritant d'un immeuble, les personnes âgées hébergées en maison de retraite et désireuses de ne pas se défaire de leur bien immobilier avant leur décès, les propriétaires qui devraient assumer tant sur le plan technique que du point de vue administratif la réhabilitation ou la mise aux normes d'un logement locatif, ceux qui ont vécu des relations difficiles avec un ou plusieurs locataires préfèrent, plus souvent qu'on pourrait le penser, laisser leur bien vacant.
C'est là que le savoir-faire des organismes d'habitation à loyer modéré peut permettre au propriétaire de se décharger des contraintes et des risques qu'entraînerait pour lui une initiative dont il garderait la maîtrise.
Il n'est pas question, bien évidemment, que ces organismes investissent financièrement au bénéfice de propriétés privées. Ils sauront, cependant, en tant que mandataires des propriétaires, conduire les études techniques nécessaires, établir éventuellement les dossiers de demande de subvention spécifique, négocier avec les entreprises, surveiller leurs prestations et faire bénéficier les propriétaires d'économies d'échelle, compte tenu de l'importance du parc sur lequel les entreprises sont conduites à intervenir.
S'agissant de l'occupation du logement, le propriétaire n'a à entretenir de relations qu'avec un seul interlocuteur, l'organisme d'HLM, celui-ci étant tenu de restituer, au terme du contrat, le logement au propriétaire, libre de toute occupation, après qu'il aura - et c'est une autre de ses obligations - assuré le relogement de son propre locataire.
Sans doute la mission des organismes d'HLM s'en trouvera-t-elle alourdie. Mais chacun d'entre eux ne mettra en oeuvre cette procédure que dans la mesure et dans les proportions qu'il aura lui-même décidées. De plus, les avantages devraient être globalement tels qu'ils justifient très largement les contraintes supplémentaires inhérentes au système.
Avant tout, le parc locatif se trouvera considérablement élargi, et il sera donc possible d'apporter plus rapidement une réponse aux très nombreuses demandes en instance.
La diversité des logements entrant dans le cadre de la procédure visée par la loi permettra, au regard tant de la composition et de la surface des logements que du prix de location au mètre carré, de répondre à l'attente et aux possibilités financières des familles d'une manière sans doute plus fine que si l'on ne dispose que d'un grand ensemble locatif aux unités relativement stéréotypées.
Le dispositif qui est proposé va aussi dans le sens d'une plus grande mixité sociale, objectif prioritaire de la politique de la ville, puisque les logements concernés seront nécessairement disséminés à travers le tissu urbain.
A cet égard, il convient de souligner la sagesse de la disposition qui associe obligatoirement le maire aux opérations envisagées, sachant qu'il est le mieux à même d'en mesurer l'effet sur l'équilibre social de telle ou telle partie de sa ville ou de sa ville considérée dans sa globalité.
Un autre intérêt, non négligeable, me semble résider dans le « coup de fouet » que la mise en oeuvre de la loi pourrait donner aux métiers du second oeuvre du bâtiment, métiers qui connaissent aujourd'hui d'importantes difficultés.
Sans doute une étude macroéconomique permettrait-elle de démontrer que, grâce au levier que représente la subvention de l'ANAH pour la mise aux normes et la réhabilitation de logements anciens, les cotisations sociales, les taxes sur les salaires et, surtout, le produit de la TVA compensent les fonds publics investis dans les opérations, sans compter le coût qu'induirait le chômage des ouvriers concernés si les chantiers n'étaient pas ouverts.
Un abondement significatif des crédits destinés à l'ANAH constituerait dans cette perspective, me semble-t-il, un investissement particulièrement opportun et efficace.
L'objectif que vise la proposition de loi dont nous débattons est ambitieux : il consiste à remettre sur le marché locatif, en quelques années, plusieurs centaines de milliers de logements.
Son principal atout réside dans sa très grande souplesse, puisqu'elle renvoie à la négociation entre le propriétaire et l'organisme d'HLM la détermination des conditions du contrat ainsi que sa durée.
Le propriétaire ne court aucun risque. L'organisme d'HLM n'investit pas de fonds et ne court, dans ses relations avec son propre locataire, pas plus de risques qu'il n'en court dans le parc qui lui appartient en propre.
Reste une interrogation : comment le contact entre l'organisme d'HLM et les propriétaires va-t-il s'établir ? Comment arrivera-t-on à dénicher ces centaines de milliers de logements qui se trouvent aujourd'hui dans l'attente d'un locataire ?
Il est bien entendu tout à fait impensable que des services publics, tels que les services fiscaux ou encore l'INSEE, à l'issue d'un recensement, fournissent aux organismes d'HLM une liste de logements inoccupés. Ce serait non seulement totalement illégal, mais encore contraire à l'esprit de la proposition de loi dont nous délibérons, le dispositif devant s'appliquer sans pression d'aucune sorte.
Il conviendra donc de mener une importante campagne d'information, en y consacrant les moyens nécessaires. L'enjeu le justifie.
Il faudra également ouvrir un large dialogue avec les syndicats de propriétaires, afin qu'ils se fassent, eux aussi, auprès de leurs mandants, les avocats d'un dispositif qui va dans le sens de leur intérêt et qui devrait, par ailleurs, permettre d'assurer un logement décent et à un prix abordable à des familles aujourd'hui en attente.
La réduction de la fracture sociale passe aussi par la réalité du droit au logement.
Le groupe du Rassemblement pour la République votera avec conviction la proposition de loi qui nous est soumise et qui est due à l'initiative du député-maire de Colmar, M. Gilbert Meyer. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Vasselle.
M. Alain Vasselle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec un parc vacant qui a plus que triplé en quarante ans, avec 1,9 million de logements vacants - M. le secrétaire d'Etat a cité le chiffre de 2,2 millions et M. Eckenspieller celui de 2 millions - dénombrés sur un parc de 26 millions de logements, ce qui n'est pas négligeable, il fallait prendre rapidement des mesures favorisant le développement de l'offre locative du parc social privé. La proposition de loi qui nous est soumise va dans le bon sens et devrait répondre à l'attente de nombreux maires, notamment en milieu rural, sans cesse confrontés à la pénurie de logements locatifs.
Comme je l'avais dit devant la mission sur l'aménagement du territoire, je préfère plutôt des mesures incitatives de cette nature à une formule de taxation des propriétaires de logements vacants qui ne mettraient pas ceux-ci sur le marché, soit en les louant, soit en les vendant. Cette idée avait été défendue par le président de la commission des affaires économiques du Sénat, M. François-Poncet, et soutenue par nombre de nos collègues du groupe socialiste
Je dénonce, pour ma part, une disposition de cette nature. Il vaut mieux, je le répète, prendre des mesures incitatives et voir leurs effets. La proposition de loi qui nous est soumise y contribue. Si nous constatons qu'un certain nombre de propriétaires sont récalcitrants et que les résultats escomptés ne sont pas obtenus, il sera temps d'envisager la taxation de ces logements.
La construction de logements locatifs sociaux se révèle de plus en plus difficile d'un point de vue tant financier que juridique et les dispositifs actuels n'ont pas eu l'effet escompté.
Ainsi, comme l'ont souligné M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur, le bail à réhabilitation n'est pas suffisamment exploité. A la fin de 1993, seules 420 opérations ont été réalisées ; c'est vraiment peu. Mille logements, avez-vous dit, monsieur le rapporteur, ont été concernés depuis l'existence de ce bail ; c'est vraiment en deçà des espérances des gouvernements qui se sont succédé.
Pourtant, ce mécanisme constitue l'une des « bonnes » solutions pour répondre à nos besoins en matière de logements sociaux avec le concours des organismes d'HLM et des communes. En tant que président d'une société anonyme d'HLM, j'ai signé plusieurs baux à réhabilitation et même quelques baux à construction. Mais il est vrai qu'il n'est pas facile de convaincre les propriétaires. Il faut donc mener une campagne de sensibilisation auprès de ceux-ci pour qu'ils s'engagent dans une opération de cette nature.
Vous avez relevé vous-même, monsieur le rapporteur, quels étaient les obstacles : la durée du bail, les difficultés de montage sur le plan juridique, les dispositions fiscales qui peuvent en résulter et que craint le propriétaire en fin de parcours. Tous ces éléments ont été de nature à freiner les effets attendus de la mise en place du bail à réhabilitation ou du bail à construction.
Il faudrait sans aucun doute, en dehors des mesures qui vont être prises par le biais de ce texte, mener des campagnes de sensibilisation ou d'information auprès de l'ensemble des propriétaires et peut-être également auprès des organismes qui semblent peu user du dispositif qui leur est offert.
D'autres dispositifs ont tenté de contribuer à réactiver le parc vacant. C'est ainsi que le propriétaire qui a reloué son logement vacant depuis plus d'un an peut bénéficier pendant deux ans d'une exonération de ses impôts sur ses revenus fonciers. Par ailleurs, la faculté a été reconnue aux préfets de réquisitionner un logement vacant depuis plus de dix-huit mois. Là encore, les résultats sont assez mitigés. Il s'agit d'une formule coercitive qui n'enchante bien évidemment pas les propriétaires mais qui se justifie certainement dans des villes importantes.
Les résultats étant ce qu'ils sont, une initiative devait être prise et je me réjouis donc du dépôt de la proposition de loi de notre collègue député Gilbert Meyer. Elle devrait constituer une avancée notable au regard de la législation actuelle.
Le dispositif proposé s'inspire très largement des baux à réhabilitation. Le texte prévoit qu'une convention de location sera passée entre le bailleur privé et l'organisme d'HLM. Ce contrat librement négocié, vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur, devra préciser les missions de ce dernier, au regard notamment du logement pris à bail, et définir les modalités de rémunération de l'organisme d'HLM.
Le propriétaire aura plusieurs options : concernant les travaux de rénovation, soit il en assumera la charge, soit il en confiera la réalisation à l'organisation d'HLM locataire ; s'agissant du loyer, le propriétaire pourra soit se conformer à la réglementation de droit commun, soit opter pour la législation applicable aux HLM en matière de plafond de ressources. Encore faudrait-il préciser - et sur ce point M. le secrétaire d'Etat et M. le rapporteur ont été muets - les conditions d'éligibilité des futurs locataires à l'APL. Cette disposition est essentielle si nous voulons que cette proposition de loi ait les effets escomptés.
Ce sont autant de possibilités qui devraient rassurer le propriétaire privé tant en ce qui concerne le paiement du loyer que l'entretien du bien. Comme pour le bail à réhabilitation, le propriétaire serait assuré de récupérer son logement à l'issue du contrat, l'organisme d'HLM ayant l'obligation de reloger le sous-locataire.
Certes, ce dispositif introduira une plus grande souplesse. Nous pouvons donc espérer que les retombées seront positives. Toutefois, il subsiste un certain nombre de points sur lesquels je souhaiterais obtenir de la part de M. le secrétaire d'Etat ou de M. le rapporteur quelques précisions complémentaires.
Il demeure, à mon sens, pour ce qui concerne les organismes d'HLM, un certain flou qui risque de compliquer la gestion et de soulever quelques difficultés pratiques qu'il me paraît souhaitable de prévenir. S'il faut en effet indéniablement inciter les propriétaires privés, il n'en est pas moins nécessaire de définir les contours juridiques, administratifs et financiers de ce dispositif pour les organismes d'HLM afin de les encourager à y entrer.
S'agissant des modalités financières et fiscales, le texte qui nous est soumis n'est pas très explicite. Des dispositions d'ordre réglementaire devraient donc venir le préciser et le compléter afin que ce dispositif « intéressant » soit pleinement effectif.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous faire connaître vos intentions quant aux décrets d'application ? Certes, vous nous avez dit tout à l'heure que le loyer tiendrait compte de la durée du bail et qu'une ou deux mesures complémentaires préciseraient les conditions dans lesquelles cette opération pourrait se réaliser.
Accepterez-vous l'application d'une TVA minorée ? Les organismes d'HLM pourront-ils, pour ces logements, accéder aux crédits PALULOS, prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale ? Pourront-ils bénéficier des prêts bonifiés pour ces opérations ? Quelle en sera la durée ? Quel sera le délai pour le relogement du locataire ? Quelle sera la durée du bail ? Le conventionnement sera-t-il possible ?
Ce sont autant de questions que les organismes d'HLM se posent et se poseront et sur lesquelles les propriétaires souhaitent obtenir des assurances.
J'approuve le bilan de l'ANAH dressé de manière fort exhaustive par M. le rapporteur. Lors de l'examen des crédits consacrés au logement, j'avais déjà eu l'occasion de relever que la taxe additionnelle au droit au bail qui alimentait les ressources de l'ANAH n'était pas totalement réaffectée à cette agence. Je ne puis donc que m'associer totalement aux remarques pertinentes formulées à ce sujet par notre excellent rapporteur, M. Braun.
J'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous réussirez à convaincre très rapidement votre collègue de Bercy et M. le Premier ministre pour qu'un pas en avant sensible soit franchi en faveur du logement privé au moins dans la perspective de la loi de finances pour 1999.
Comme pour le bail à réhabilitation, les organismes d'HLM vont se trouver confrontés à la difficulté de reloger le sous-locataire à l'issue du contrat. Peut-être s'agit-il d'un élément susceptible de dissuader un certain nombre d'organismes d'HLM de se lancer dans une telle opération, à l'instar de l'expérience vécue pour les baux à réhabilitation. En effet, il n'est pas aisé de reloger un locataire dans une petite commune rurale qui dispose d'un parc locatif limité.
Il faudrait donc pouvoir introduire par la voie réglementaire une plus grande souplesse pour donner un délai à l'organisme HLM afin de lui permettre de reloger le sous-locataire qui occupait un logement privé. J'ai conscience que certains candidats propriétaires pourraient manifester quelques réticences mais à, mon avis, dans la mesure où les délais resteraient raisonnables, l'organisme d'HLM et le propriétaire devraient pouvoir accepter une telle pratique.
A cet égard, il conviendrait donc de poursuivre la démarche entreprise par le biais de cette proposition de loi en instituant, à la fin du bail, un système plus souple, tel que le mandat de gestion au profit des organismes d'HLM. Si cette formule était mise en oeuvre, il serait possible de pérenniser l'ensemble du dispositif à l'issue du bail.
Cette proposition de loi devra également prendre en compte la mixité sociale. Il faudra veiller à une meilleure mixité sociale non seulement dans les villes, mais aussi sur l'ensemble du territoire, c'est-à-dire à une mixité géographique entre espaces urbains et ruraux, afin de mettre un terme à la concentration des habitants aux ressources modestes dans des quartiers qui, à terme, vont se dégrader et poser tous les problèmes que nous connaissons aujourd'hui en matière de sécurité et d'intégration des habitants dans les quartiers et dans les villes.
Si nous pouvons développer cette formule du parc social en milieu rural en nous appuyant sur le parc privé, je suis persuadé que nous répondrons à un objectif essentiel de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.
Ce texte devrait donc avoir le mérite de remettre en vie nombre de logements abandonnés et de satisfaire de nombreuses demandes de logement en instance tout en évitant au parc public d'HLM de croître sans cesse et de faire toujours appel à la collectivité publique. Toutefois, pour que son succès soit certain et que nous n'ayons pas dans deux ans à en tirer les mêmes conclusions que pour le bail à réhabilitation, il me semble impérieux qu'un certain nombre de mesures complémentaires suivent, dispositions que nous pourrions d'ailleurs tout à fait intégrer dans un projet de loi portant diverses dispositions d'ordre social, si vous le jugez nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, le moment venu. Si ce texte est accompagné d'un arsenal réglementaire complet et qui répond à l'attente des organismes d'HLM et des propriétaires, nul doute qu'il répondra aux objectifs que l'on cherche à atteindre.
Compte tenu de ces remarques, j'associerai sans aucune difficulté mon vote à celui de mes collègues pour approuver la proposition de loi telle qu'elle nous a été présentée par M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Piras.
M. Bernard Piras. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si nous examinons aujourd'hui une proposition de loi permettant aux organismes d'HLM d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en sous-location, c'est parce que nous assistons, pour l'instant impuissants, à une situation véritablement paradoxale.
D'un côté, on constate un manque cruel de logements, ou plutôt une offre de logements inadaptée aux besoins de la population : une pénurie de logements en zone urbaine et des logements dont les loyers sont trop élevés par rapport aux ressources d'une partie de la population. Il en résulte que plus d'un million et demi de personnes sont mal logées et que plus de 200 000 personnes sont sans logement. De l'autre, on constate que deux millions de logements sont vacants, dont environ 20 % pourraient être assez rapidement remis dans le circuit locatif, selon le rapport du Haut comité pour le logement des personnes défavorisées.
Devant la persistance d'un tel déséquilibre, socialement et moralement insupportable, les pouvoirs publics se devaient, à l'évidence, d'intervenir. Tel a d'ailleurs été le principal objet de la loi du 31 mai 1990, visant à la mise en oeuvre du droit au logement, dont vous avez été l'heureux initiateur, monsieur le secrétaire d'Etat. Dans cette loi a été institué le bail à réhabilitation. Ce dispositif, comme la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui, vise à inciter les propriétaires privés à mettre en location des logements vacants en confiant la gestion, les travaux d'amélioration et l'entretien à une personne morale : organisme d'HLM, SEM, collectivité territoriale, organisme spécialisé dans le logement des personnes défavorisées. Le bail est conclu pour une durée de douze ans.
Par ailleurs, depuis 1994, pour rendre le système un peu plus attractif, les communes peuvent exonérer de la part de la taxe foncière qui leur revient les logements faisant l'objet d'un bail à réhabilitation.
Malheureusement, cette disposition n'a pas donné les résultats escomptés, même si le nombre de baux ne cesse de croître.
L'esprit du dispositif qui nous est proposé dans la présente proposition de loi est assez proche de celui du bail à réhabilitation : le preneur est une personne morale, en l'espèce les seuls organismes d'HLM ; la prise à bail ne vise que les logements de personnes physiques, vacants depuis deux ans. Toutefois, et c'est une différence importante avec le bail à réhabilitation, aucune durée de location n'est fixée par la loi. Les conditions de la prise à bail sont fixées par voie contractuelle ; il est simplement précisé que les logements sont attribués selon les règles en vigueur pour les HLM et que la grille des loyers est déterminée par l'autorité administrative. A ce propos, le Gouvernement peut-il nous indiquer quelle sera la grille de référence, à savoir celle des HLM ou celle des logements conventionnés par l'ANAH ?
Enfin, je souhaite souligner un dernier point. A l'origine, la proposition de loi prévoyait de solliciter l'accord du maire de la commune concernée avant toute prise de bail. Sur l'initiative des députés socialistes, il a été précisé que l'accord des maires ne sera requis que dans les communes dont le parc public social représente au moins 20 % du parc total des logements - seuil retenu pour la dotation de solidarité urbaine. Cet amendement me paraît capital pour éviter que des maires peu soucieux de mixité sociale ne puissent s'opposer à la prise à bail. La commission des affaires économiques a retenu cette rédaction et je m'en félicite.
Ce nouveau dispositif permettra-t-il non seulement de pallier les insuffisances du bail à réhabilitation, mais aussi de mobiliser le parc privé vacant ? Permettez-moi d'en douter.
Je vois à cela plusieurs raisons.
La première réside dans une question de méthode. Je m'étonne que l'on mette en place un dispositif proche d'un autre dispositif dont tout le monde s'accorde à dire qu'il n'a pas très bien fonctionné. N'aurait-il pas fallu avant toute chose examiner les raisons de cet échec ? Sur ce point, pouvez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous indiquer l'état de vos réflexions ? Envisagez-vous de modifier le régime fiscal des baux à réhabilitation - revenus fonciers, taxe de publicité foncière et droits de mutation - pour les rendre plus attractifs ?
La deuxième raison est la suivante : l'un des principaux acteurs du système, les organismes d'HLM, ne sont pas demandeurs. En effet, on a du mal à voir quel est leur intérêt dans cette affaire, puisqu'ils ont à supporter tous les inconvénients du système : prise en charge des impayés et de leurs conséquences malheureuses que sont les expulsions, ou encore obligation de faire une offre de relogement au sous-occupant dans leur parc à l'issu du contrat de bail, quand bien même le taux de vacance de ce parc est nul...
L'auteur de la proposition de loi met alors en avant le savoir-faire des organismes d'HLM en matière de gestion locative. Soit. Mais que devient ce savoir-faire dès lors qu'il s'agit de gérer non pas des ensembles collectifs mais des copropriétés ? Par ailleurs, cette procédure risque d'entraîner pour ceux-ci des frais supplémentaires. Or on connaît les difficultés de trésorerie qu'ils rencontrent.
Les organismes d'HLM auraient préféré le mécanisme du mandat de gestion. Mais ce serait alors les transformer en administrateurs de biens. Ce n'est sans doute pas là leur vocation.
Troisième raison : les organismes d'HLM ne sont peut-être pas ceux qui sont le plus à même de gérer ce type d'opérations.
Je considère que c'est une bonne chose, dans le souci de permettre le logement des personnes défavorisées et de mieux mobiliser le parc vacant, d'encourager ce qu'on appelle la gestion locative intermédiée. La location de logements par des associations en vue de leur sous-location à des familles en difficulté et la gestion par des agences immobilières à vocation sociale se sont développées au cours des dernières années. C'est bien souvent un moyen judicieux pour vaincre les réticences des propriétaires. On remarque, par exemple, que, parmi les preneurs de baux à réhabilitation, 93 % sont des associations. Cette mission d'intermédiation a malheureusement un coût élevé, en raison du public auquel elle s'adresse. Là encore, monsieur le secrétaire d'Etat, allez-vous, dans le cadre du projet de loi relatif à la lutte contre les exclusions, faire des propositions pour favoriser ce genre d'initiative ?
Dernière raison : l'autre acteur du dispositif, le propriétaire du logement, n'a, lui non plus, guère d'intérêt à un tel système. Certes, il est déchargé de soucis importants : les impayés et la réalisation des travaux, ce qui est un élément non négligeable pour les personnes âgées. Néanmoins, la charge financière des travaux incombe au propriétaire. Il est vrai que les logements étant conventionnés, celui-ci pourra avoir recours aux subventions de l'ANAH. Cependant, malgré la hausse des crédits budgétaires dans la loi de finances pour 1998, la ressource n'est guère extensible, d'autant que ce type d'opérations coûte cher et que les crédits de l'ANAH vont subventionner des réhabilitations plus en zone rurale qu'en zone urbaine, là où le marché n'est pas tendu.
Pour toutes ces raisons, nous doutons que ce nouveau dispositif ait un effet important sur la baisse du nombre de logements vacants. Je souhaite de tout coeur me tromper, compte tenu des enjeux, mais j'ai bien peur que cela ne se révèle décevant. Cependant, il ne serait pas raisonnable de ne pas tout essayer pour résoudre le paradoxe actuel. Aussi, tout en étant conscient des lacunes, nous ne nous opposerons pas à cette proposition de loi.
M. Gérard Braun, rapporteur. Très bien !
M. Bernard Piras. Cependant, nous souhaitons que le problème de la vacance des logements dans le parc locatif privé soit abordé de manière approfondie et exhaustive dans les projets de loi en cours de préparation : celui qui est relatif à la lutte contre les exclusions et celui qui concerne le statut du bailleur privé.
Les sénateurs du groupe socialiste font, depuis plusieurs années, des propositions pour lutter contre la vacance des logements, je pense à un amendement que nous défendons régulièrement et qui vise à réduire de 50 % à 20 % la déduction du montant de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements vacants depuis plus de deux ans. J'espère que vous ferez vôtre cette idée, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Alain Vasselle. Non !
M. Bernard Piras. J'espère, enfin, que vous explorerez toutes les voies possibles pour donner à tous un logement décent. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Alain Vasselle. Sur ce point, nous sommes d'accord, mais pas sur la taxation.
M. le président. La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cette proposition de loi fait la preuve de l'excellent travail issu de l'initiative parlementaire. Je tiens d'ailleurs à féliciter mon éminent collègue Gérard Braun de la clarté et de la pertinence de son rapport.
M. Alain Vasselle. Comme toujours !
M. Dominique Braye. Ce texte permet d'atteindre l'objectif visé en proposant une solution, parmi beaucoup d'autres naturellement, au problème crucial du logement dans notre pays. Mais je souhaiterais surtout insister sur la politique de réhabilitation des logements anciens, qui est, selon moi, une solution d'avenir, dans un contexte budgétaire resserré.
Il est évident qu'il faut trouver un remède au douloureux problème de l'insuffisance des logements dans notre pays, surtout de logements adaptés à l'extrême diversité des situations sociales. Alors que, comme l'a rappelé M. le rapporteur, près de deux millions de personnes sont mal logées ou sont sans logement, il est impératif de se mobiliser pour que tous les logements vacants - nombreux, on le sait - soient mis en état d'accueillir des locataires. C'est un service à rendre à des personnes en attente de logement, mais aussi à de nombreux petits propriétaires.
Cette proposition de loi répond parfaitement à cet objectif par la mise en place d'une procédure souple, et plus équilibrée que le bail à réhabilitation qui, comme tous les orateurs l'ont rappelé, a montré ses limites. C'est donc un dispositif qui devrait profiter aussi bien aux propriétaires qu'aux locataires et aux offices d'HLM.
J'observe que ce texte marque une reconnaissance officielle du savoir-faire et de la compétence des offices d'HLM dans la gestion d'un parc locatif à la fois très important et essentiel à notre société.
M. Alain Vasselle. Et des sociétés anonymes !
M. Dominique Braye. Les offices d'HLM en général, et les sociétés anonymes d'HLM en particulier, si vous voulez, mon cher collègue.
Ce parc est en effet un élément clé de notre politique sociale. L'utilité sociale des mesures prévues par ce texte est indéniable, et nous pouvons tous nous en féliciter.
Le système qui nous est proposé a l'avantage de concilier les intérêts souvent divergents des propriétaires privés et des locataires, qui peuvent parfois rencontrer des difficultés à se loger hors du parc HLM public. Il garantit, en effet, une sécurité financière et juridique aux propriétaires, sécurité qui est devenue aujourd'hui un critère déterminant dans la conclusion des baux.
Il est évident qu'une telle incitation systématisée sur l'ensemble du parc locatif ancien et vacant aura des incidences extrêmement positives sur le bâtiment, secteur de notre économie riche en main-d'oeuvre. Cela aura donc des retombées positives, d'une part, sur les chiffres du chômage dans un secteur d'activité particulièrement sinistré et, d'autre part, sur la qualité globale du parc locatif ancien.
Si ce texte est en mesure d'apporter une solution à l'un des aspects de la vacance des logements, il n'en demeure pas moins qu'il met en lumière une perspective essentielle de la politique du logement comme de la politique de la ville : la réhabilitation du parc ancien, pour laquelle l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, est un outil essentiel et irremplaçable.
La réhabilitation des logements anciens est une idée d'avenir, car elle est une alternative économique à la construction de logements neufs. Elle permet, notamment, d'élargir la gamme de l'offre à tous les niveaux de revenus.
Mais la principale raison de la vacance, après la crainte des loyers impayés, est la non-conformité des logements aux normes de salubrité et de confort, que les petits propriétaires ne peuvent résoudre seuls.
Je m'arrêterai ici un instant sur un exemple que je connais particulièrement bien et qui illustre la place indispensable de l'ANAH.
Dans le cadre du projet « Mantes en Yvelines », programme d'investissement et de redynamisation urbaine sans précédent, que vous connaissez, monsieur le secrétaire d'Etat, puisque vous vous êtes récemment déplacé dans notre Mantois afin de signer le CDU, le contrat de développement urbain, nous avons mis en place un programme coordonné d'intervention sur le logement. Mis en oeuvre pour trois ans depuis le 1er janvier 1997, il a déjà atteint le tiers de ses objectifs au bout d'un an, à savoir quatre cents logements, soixante enseignes et quarante vitrines rénovées en centre-ville.
Or il faut savoir que, sur les 55 millions de francs du budget total de ce programme, 40 millions de francs sont pris en charge par l'Etat par le biais de l'ANAH et de la prime à l'amélioration de l'habitat, la PAH. L'apport de l'ANAH a donc été décisif dans le lancement de cette opération, dont le résultat sera la réhabilitation du centre de Mantes-la-Jolie, qui était progressivement déserté en raison de la vétusté de la plupart des logements, lesquels étaient le plus souvent récupérés par des marchands de sommeil.
La redynamisation du centre-ville, qui est au coeur de notre politique, répond en outre à deux objectifs ambitieux, qui sont la restauration d'une véritable mixité sociale dans l'habitat et la relance du secteur du bâtiment dans le Mantois.
On le voit, l'ANAH est un instrument formidable. En 1996, elle a permis, comme le rappelait M. le rapporteur, de remettre sur le marché 38 500 logements vacants en France. La remise en état de ces logements a mobilisé les quatre cinquièmes de son budget, soit 1,9 milliard de francs. Malheureusement, son budget total, qui s'élève à 2,2 milliards de francs, est notoirement insuffisant.
Je voudrais soulever ici un point préoccupant. Le budget de l'ANAH devait initialement être abondé à la même hauteur que les sommes perçues au titre de la taxe additionnelle au droit de bail, la TADB. L'Etat s'y était en effet engagé lors de l'institution de cette taxe. Or, depuis 1992, l'assiette de cette dernière a été élargie et son revenu a augmenté de 43 % en cinq ans pour atteindre 3,358 milliards de francs en 1996, alors que, dans le même temps, le budget de l'ANAH n'a augmenté que de 10 %.
La TADB, destinée à l'amélioration de l'habitat, ne saurait être consacrée à d'autres objectifs. Et, sans aller jusqu'à parler de « hold-up », je m'étonne qu'un tiers de la somme qui devait être allouée à l'ANAH, soit plus d'un milliard de francs, soit affecté au budget général de l'Etat. Cela va à l'encontre de la politique d'amélioration de l'habitat, qui fait pourtant, je crois, l'objet d'un vaste consensus.
Les moyens de l'ANAH doivent non seulement être préservés, mais même augmentés pour atteindre cet objectif. Nous attendons par conséquent un engagement ferme de l'Etat en faveur d'une augmentation soutenue du budget de l'ANAH. Consacrer nos efforts à l'amélioration de l'habitat, c'est contribuer à remédier aux deux problèmes centraux de notre société que sont le chômage et le logement. Cela mérite, mes chers collègues, toute notre attention et, de votre part, monsieur le secrétaire d'Etat, une totale détermination.
Cette proposition de loi allant dans ce sens, je la voterai avec plaisir. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la situation du logement dans notre pays demeure, pour de nombreuses familles, un droit à conquérir.
En effet, les conséquences de la législation issue de la loi Méhaignerie et la détérioration des conditions de vie d'un grand nombre de nos compatriotes sont tellement prégnantes que l'on ne peut manquer de souligner que cette proposition de loi témoigne de la gravité des problèmes posés.
L'un des objectifs de la réforme de 1986 était de développer l'offre foncière et de permettre, par la voie d'un libéralisme harmonieux dans les relations locatives, à chacun de nos compatriotes de disposer du logement de ses rêves.
Le constat est aujourd'hui amer ! Un grand nombre de logements du parc privé ont en effet quitté le champ de l'accessible pour de nombreux ménages, et leurs loyers ont pris l'ascenseur, faute d'installation de ce dernier dans les parties communes des immeubles mis en location.
La pression s'est donc retournée vers les organismes d'HLM, eux-mêmes confrontés à des difficultés majeures de financement de leur politique de construction neuve et de réhabilitation de logements.
En ces matières, on ne peut d'ailleurs que souligner à nouveau la nécessité d'un maintien à un niveau acceptable de l'aide publique directe à la construction et à la réhabilitation de logements sous forme de subvention PLA et PALULOS.
La présente proposition de loi apparaît en fait comme une solution parmi d'autres aux difficultés de logement qui perdurent dans de très nombreuses villes.
Il nous faut apprécier la présente proposition de loi comme un outil de gestion de la demande de logement dans de nombreuses collectivités locales où se posent, par exemple, des problèmes de relogement liés à des opérations de maîtrises d'oeuvre urbaine et sociale particulièrement importantes et structurantes.
On peut d'ailleurs considérer que la possibilité ouverte par la proposition de loi peut constituer une réponse face à certaines demandes de logement émanant de locataires qui souhaitent quitter certains de nos grands ensembles d'habitat social pour d'autres types de résidence.
Nous ajouterions donc ainsi un élément de plus à la panoplie, certes déjà importante, des outils de régulation de la demande et d'intervention publique en matière de logement, qui passe par la réhabilitation des anciens hôtels meublés ou par l'exercice du droit de réquisition.
On peut d'ailleurs faire de cette proposition de loi un palliatif à l'exercice de ce droit de réquisition, une sorte de contrat plus harmonieux que la situation naturellement conflictuelle issue de ce droit.
Pour autant, la présente proposition de loi doit conserver certaines précautions qui sont loin d'être inutiles.
Tout d'abord, même si cela est dit dans le texte même, la qualité des logements soumis à la passation d'un contrat de location doit être réelle et répondre aux exigences d'aujourd'hui.
En cette matière, force est de constater que l'inoccupation d'une partie du parc privé est aujourd'hui un facteur de dégradation de ce dernier, en grande partie de par la négligence des propriétaires, même si certains ont pour excuse de ne pas disposer de ressources suffisantes.
M. Dominique Braye. Comment, « pour excuse » ?
M. Robert Pagès. La question de la fixation du montant du loyer est également importante. Nous pensons, en particulier, que le loyer ne doit et ne peut dépasser les plafonds en vigueur en matière de prêts locatifs aidés, voire être limité à un pourcentage significatif de ces plafonds.
Les futurs sous-locataires ayant en effet les mêmes caractéristiques que les locataires du secteur social, il ne serait pas juste, de notre point de vue, de créer une forme de discrimination peu justifiée.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous vous saurions gré de nous éclairer sur ce point précis. Vous avez abordé le problème tout à l'heure ; je souhaiterais que vous nous l'exposiez de façon plus détaillée.
La question des éventuels travaux de remise en état des logements reloués se pose également.
Il importe ici de savoir si un financement est prévu pour faciliter ces opérations et si, par exemple, les travaux accomplis par les organismes bailleurs sociaux seront subventionnables ou susceptibles d'être expressément décomptés du montant du loyer dû au propriétaire en titre.
En tout état de cause, et compte tenu du fait que la gravité de la situation du logement dans notre pays impose de faire preuve de quelque peu d'imagination et de trouver des solutions diversifiées, nous ne pouvons qu'approuver les principes de cette proposition de loi.
Pour autant, et ce indépendamment des réponses qui seront fournies à nos interrogations sur sa mise en oeuvre, cette proposition de loi souligne à quel point le dispositif existant en matière de contrats de location et de relations locatives nécessite aujourd'hui une réforme en profondeur, comme d'ailleurs l'ensemble des règles de financement du logement dans notre pays ainsi que des conditions de son développement et de sa pérennité. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Cléach.
M. Marcel-Pierre Cléach. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'objectif de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui est d'arriver à mobiliser le parc de logements privés disponibles mais inutilisés en donnant la possibilité à certains organismes d'habitation à loyer modéré de les prendre à bail pour les mettre en sous-location auprès des personnes physiques.
La vacance, dont les raisons sont multiples, est en matière de logement l'un des problèmes constants auxquels la France est confrontée depuis de nombreuses années.
Sans vouloir dresser un panorama complet d'une situation bien connue de tous, rappelons pour mémoire que la part du parc vacant dans le parc total a plus que triplé de volume depuis 1954.
Pourtant, plusieurs mesures fiscales ont été prises afin d'inciter les propriétaires à remettre en location leurs logements vacants ; je citerai notamment à cet égard la loi du 31 mai 1990 instituant le bail de réhabilitation - vous la connaissez bien, monsieur le secrétaire d'Etat - et celle du 21 juillet 1994, permettant aux communes d'exonérer de leur part de taxe foncière les logements faisant l'objet d'un bail de réhabilitation.
Force est de constater que ces formules n'ont connu qu'un succès très mitigé - vous l'avez d'ailleurs souligné, monsieur le secrétaire d'Etat - et que le règlement de ce problème nécessite de nouvelles initiatives.
Le dispositif que nous examinons aujourd'hui tend à la mise en place d'un nouvel outil de mobilisation du parc des logements habituellement vacants en tirant parti d'un savoir-faire existant qui est celui des organismes d'HLM, sans que ce recours déséquilibre le marché existant : le texte qui nous est proposé institue un mécanisme souple qui respecte à la fois l'initiative privée et le pouvoir des élus locaux.
Si, dans son esprit, le nouveau dispositif est proche du bail à réhabilitation, la procédure, pour sa part, est sensiblement améliorée et allégée, puisqu'il n'y a pas de durée de détention et que les conditions du contrat sont renvoyées à la libre négociation entre les parties. Cette souplesse offre un gage de réussite certain puisqu'elle permet une réelle adaptabilité aux réalités du terrain.
Par ailleurs, en prévoyant que seuls les logements vacants depuis plus de deux ans entrent dans le nouveau cadre législatif, le texte respecte l'équilibre entre l'initiative privée et l'initiative publique, évitant que le recours aux organismes d'HLM n'en fasse des concurrents déloyaux des administrateurs de biens. Elle respecte également la liberté de décision des bailleurs en leur offrant un simple choix sans contrainte.
Enfin, le dispositif proposé respecte le pouvoir des maires en matière de logement social, notamment le pouvoir d'appréciation de la mixité sociale, puisque l'accord formel du maire est obligatoire pour les communes comptant au moins 20 % de logements locatifs sociaux au 1er janvier de la pénultième année. Il s'agit là d'une mesure de bon sens de nature à éviter que les villes déjà largement pourvues en logements sociaux ne voient leur situation s'aggraver.
Pour les autres communes dans lesquelles l'autorisation formelle des maires n'est pas requise, il apparaît néanmoins évident que l'organisme d'HLM devra, avant d'arrêter toute disposition, en informer le maire afin de préserver sa relation privilégiée avec les élus locaux.
L'intérêt pour l'organisme d'HLM est bien évidemment de pouvoir proposer de nouveaux logements sans devoir les acquérir : ainsi, il se contentera de les gérer sans avoir à modifier sa stratégie d'acquisition patrimoniale.
Pour le propriétaire privé, l'intérêt de cette sous-location réside dans la garantie qu'apporte l'organisme d'HLM. En effet, ce dernier devient le bailleur garant du locataire face au propriétaire privé. L'organisme prend donc en charge les loyers impayés, les dégradations et devient responsable du comportement de la famille ainsi logée. De plus, l'organisme d'HLM pourra intervenir en qualité de mandataire du propriétaire pour réaliser les travaux de remise aux normes du logement. Ces dispositions sont certes de nature à inciter le propriétaire privé. Mais seront-elles suffisantes ?
L'intérêt, enfin, est grand pour le particulier qui se verra offrir en sous-location un logement avec des garanties, des règles d'accès et d'attribution identiques à celles qui sont prévues pour le parc locatif social par le code de la constrution et de l'habitation.
Le problème est de savoir si le propriétaire privé va se laisser séduire par cette offre ; en effet, les organismes d'HLM ont vocation non seulement par nature, mais également en raison de la conjoncture à loger des familles présentant socialement des handicaps de plus en plus lourds : faiblesse des ressources financières et, parfois, comportements hors norme.
La faisabilité financière du projet suppose que le loyer fixé puisse couvrir à la fois le loyer à acquitter au propriétaire et les frais de gestion de l'organisme, tels les frais généraux, les frais d'impayés et les frais d'entretien. Cela signifie que le loyer perçu par le propriétaire privé devra, dans la plupart des cas, être inférieur au loyer plafond fixé par l'autorité administrative. Cette difficulté, non négligeable, laisse entrevoir les limites du système.
La dernière difficulté réside dans le fait que les logements vacants sont souvent petits, anciens, inconfortables, et qu'ils nécessitent donc, dans la majorité des cas, des travaux importants de remise en état. Or, compte tenu du fait que les loyers que peuvent escompter les propriétaires seront plutôt faibles, il est à craindre que ces derniers ne renâclent à entreprendre des travaux importants. Même si les aides à la réhabilitation de l'ANAH leur sont ouvertes dans les conditions prévues par la réglementation actuelle, l'obstacle financier risque de bloquer la remise sur le marché de nombreux logements vacants.
En conclusion, il est souhaitable et possible d'arriver à une plus grande mobilisation du parc locatif privé. Recourir au savoir-faire des organismes d'HLM est justifié, dans la mesure où l'initiative privée s'avère défaillante et où l'intérêt général et social le commande.
Comme beaucoup de mes collègues, je pense que la multiplication des initiatives devrait nous permettre de résoudre, partiellement en tout cas, ce problème de vacance. C'est pourquoi le groupe des Républicains et Indépendants votera cette proposition de loi, qui est de nature à répondre à certaines situations locales critiques.
La réussite de ce texte dépendra aussi, d'une part, de l'importance des garanties données au propriétaire privé pour l'inciter à laisser gérer son logement par les organismes d'HLM, en dépit de la « perte » ou de la moins-value financière qui en résultera sur le plan locatif et, d'autre part, du sérieux du suivi des sous-locataires assuré par les HLM.
Je crains néanmoins que ce palliatif législatif ne soit insuffisant pour répondre au problème posé. Tout d'abord, il n'entre pas dans la vocation des organismes d'HLM de se transformer en gérants du parc locatif privé ; ensuite, cette disposition ne doit pas conduire à remettre en cause l'importance de la construction sociale ; enfin, il est nécessaire de multiplier les dispositions pour élargir le parc locatif, et cette discussion me donne l'occasion de rappeler combien il nous semble indispensable, monsieur le secrétaire d'Etat, de mettre en place sans tarder le statut du bailleur privé que vous nous annoncez.
Ne nous faisons cependant pas trop d'illusions. Des mesures techniques, même intelligentes, comme celles que contient la proposition de loi qui est soumise à notre examen, mes chers collègues, ne suffiront pas à ramener les investisseurs privés sur le marché locatif.
Je crains que leur désenchantement ne soit irrémédiable, et les causes en sont bien connues. Elles ne tiennent pas uniquement, loin s'en faut, au ministère concerné, mais surtout aux évolutions ondoyantes des politiques fiscales de l'Etat, qui privent de visibilité ce type d'investissement en modifiant, et ce d'une année sur l'autre quelquefois, la donne fiscale.
Comment espérer, dans ces conditions, faire revenir sur ce marché le grand nombre de propriétaires, pour la plupart des petits propriétaires, qui avaient vu dans ce type de placement l'espoir d'un complément de retraite ou de constitution d'un capital pour leurs enfants ou leurs petits-enfants ? Il leur est bien plus facile, plus rémunérateur et moins risqué de souscrire à un fonds financier !
Si l'on ajoute à cette incertitude fiscale, qui est toujours allée dans le sens d'une aggravation des charges, les difficultés rencontrées en cas d'impayés de loyers, les années et les coûts nécessaires pour obtenir réparation - j'allais dire justice - il faudra aussi de très longues années et un changement radical de politique inscrit et engagé dans la durée pour que ce secteur, qui fut très important pour notre vie économique, remplisse à nouveau le rôle qui fut le sien et dont nous connaissons l'importance pour l'activité du bâtiment et le maintien de l'emploi dans ce secteur.
M. Emmanuel Hamel. Analyse très juste ! Monsieur le secrétaire d'Etat, méditez ce qui vient d'être dit !
M. Marcel-Pierre Cléach. Je crois, mon cher collègue, que M. le secrétaire d'Etat connaît parfaitement cette question !
Il dépend encore un peu de nous, mes chers collègues, qu'il en soit ainsi un jour et que nos désillusions successives ne nous conduisent pas à baisser les bras mais que, au contraire, elles nous encouragent à nous battre pour le retour à une politique d'initiative, de liberté et de bon sens. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Mouly.
M. Georges Mouly. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'absence de logement est l'une des formes d'exclusion les plus destructrices pour l'individu qui, privé d'un espace protecteur, est menacé dans son intégrité physique et morale, dans sa santé comme dans ses capacités relationnelles.
Ce constat, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, est d'évidence. Si l'énoncé peut paraître banal, la réalité n'en est pas moins dramatique. La vacance de logements, dans une société qui compte près de 200 000 ménages dépourvus de logement, apparaît à beaucoup comme un phénomène scandaleux et d'aucuns, face à ce phénomène, formalisent des équations simples telles que celle-ci : on répond aux besoins de 200 000 ménages en rendant rapidement disponibles 200 000 logements vacants sur les quelque 2 000 000 qui sont recensés. Mathématiquement, c'est facile ; la réalité est plus nuancée et la solution n'est pas si simple. A preuve, si les mesures jusque-là proposées - parmi lesquelles la loi de 1990, que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d'Etat - ont quelque peu facilité les choses, elles n'ont cependant pu résoudre la crise que connaît le logement social, qui reste confronté à de graves difficultés pour accueillir tous ceux qui demandent à se loger dans des conditions compatibles avec la dignité à laquelle chacun doit pouvoir prétendre.
Plus précisément, l'examen des mesures qui existent afin d'inciter les propriétaires bailleurs à remettre leur logement sur le marché - et ces mesures sont assez nombreuses ! - montre l'effort qui a été entrepris depuis des années.
Les incitations fiscales spécifiquement liées à la vacance ont bien pour objectif de redynamiser le marché locatif. Par ailleurs, le rôle joué par l'ANAH - agence à propos de laquelle je partage tout à fait les réflexions formulées par notre excellent rapporteur et par notre collègue Alain Vasselle - est important, je puis en témoigner sur le terrain, dans la mesure où elle accorde des subventions pour les travaux de mise aux normes de confort. Ce dispositif a été renforcé par les diverses primes qui, depuis 1995 notamment, viennent en complément des subventions.
Les besoins n'en restent pas moins très importants, d'ou l'opportunité, à mes yeux, du texte que nous examinons aujourd'hui.
Son adoption doit permettre aux organismes d'HLM d'intervenir sur le parc locatif privé en prenant à bail des logements vacants pour les donner en sous-location.
Il y a tout lieu de se féliciter de l'économie générale de ce texte, qui est susceptible de résoudre deux difficultés : d'une part, celle qui tient au fait que certains propriétaires ne souhaitent pas investir pour rénover des logements ne répondant plus aux normes ; d'autre part, celle qui provient des propriétaires qui renoncent à assumer la gestion locative et qui craignent les risques locatifs.
Je ne reviendrai pas sur les divers éléments de la proposition de loi, qui ont été longuement développés par les différents intervenants. Je me contenterai de souligner qu'à mes yeux il s'agit d'un texte équilibré, d'un texte suffisamment souple et d'un texte sage, les mécanismes prévus étant limités aux logements appartenant à des personnes physiques et la vacance étant constatée après deux ans.
Comment ne pas souligner au passage l'importance de ce texte pour l'artisanat ? Je suis président d'une association de restauration immobilière et protection, amélioration, conservation, transformation de l'habitat existant, ou PACT-ARIM. Je me plais à souligner que ces associations, au sujet desquelles je vous ai posé une question orale sans débat mardi dernier, monsieur le secrétaire d'Etat, ont une expérience en la matière.
Cela étant, si le président de la fédération des PACT-ARIM considère la présente proposition justifiée, il y voit cependant un double inconvénient : premièrement, la concurrence pour ce qui est de l'intervention dans le parc privé ; deuxièmement, la multiplication des systèmes et des modes d'action dans un secteur déjà complexe.
Je peux comprendre ces remarques, même si je ne suis pas leur auteur en ce qui concerne la réserve exprimée en conclusion d'un rapport dont vous avez peut-être eu connaissance.
J'espère que, tout bien arbitré, les bénéficiaires - d'abord les locataires, mais aussi les propriétaires - y trouveront heureusement et harmonieusement leur compte.
En conclusion, je formulerai un souhait - qui a déjà été exprimé par notre excellent rapporteur - celui que le système mis en place permette aux organismes d'HLM de s'effacer à terme, en tout cas le plus tôt possible, devant les propriétaires.
Bref, tout bien considéré, le groupe du RDSE est favorable à l'adoption du texte en discussion, même s'il ne constitue pas la panacée, même s'il n'apporte pas une solution d'ensemble à un problème que nous retrouverons - vous l'avez dit, monsieur le secrétaire d'Etat - lors de l'examen du projet de loi relatif à l'exclusion, en particulier pour ce qui est du statut du bailleur privé. Mais quel texte, au demeurant, apporterait une solution d'ensemble ? Il faut bien avouer, mes chers collègues, que le souhait est facile à exprimer, mais les mesures plus difficiles à prendre.
En tout cas, aux yeux de l'élu rural que je suis,...
M. Emmanuel Hamel. Ce sont les meilleurs yeux ! (Sourires.)
M. Georges Mouly. ... un instrument appréciable est mis en place avec la présente proposition de loi, dont la mise en oeuvre et le succès supposeront cependant une large information. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je souhaite m'exprimer par courtoisie à l'égard de tous les intervenants, plusieurs d'entre eux ayant ajouté à leur adhésion unanime aux conclusions de la commission des questions ou des observations qui méritent, me semble-t-il, un écho.
Selon certains d'entre vous, un équilibre est souhaitable dans les efforts faits par la collectivité publique en direction des diverses composantes du parc immobilier.
Permettez-moi, à cet égard, de rappeler les grandes masses en cause. Le parc privé reçoit la ligne budgétaire PAH, « prime à l'amélioration de l'habitat », pour les propriétaires occupants dont les ressources sont modestes, pour un montant de 800 millions de francs. Le budget de l'ANAH, qui provient effectivement de la taxe additionnelle au droit au bail, est cette année de 2 200 millions de francs. Par conséquent, ANAH plus PAH, cela fait 3 milliards de francs.
A cela s'ajoutent les mesures fiscales des lois de finances successives en termes d'abattements sur le revenu - quant il y a impôt sur le revenu - ou le remboursement de 15 % des factures acquittées à défaut d'un taux de TVA réduit, ce qui répond à un souhait des artisans. Les deux mesures additionnées, celle qui préexistait et celle qui s'ajoute pour l'exercice 1998, représentent un coût annuel de 5 milliards de francs à 5,2 milliards de francs.
Globalement, donc, l'effort de la collectivité publique pour le parc privé est de 8 milliards de francs.
L'an dernier, il était effectivement inférieur, puisqu'il était de 6,6 milliards de francs. Ainsi, avec 400 millions de francs de plus pour l'ANAH et la PAH et 1 milliard de francs de plus pour les mesures fiscales relatives au remboursement de 15 % des factures acquittées ou pour les dégrèvements d'impôt sur le revenu, voire les mesures de restitution pour les personnes non imposables à l'impôt sur le revenu - mesure totalement nouvelle puisque, vous le savez, les mesures fiscales ne pouvaient jusqu'à présent s'appliquer à ceux qui n'étaient pas assujettis à l'impôt sur le revenu - nous sommes passés, avec la loi de finances pour 1998, de 6,6 milliards de francs à 8 milliards de francs pour le parc privé.
Dans le même temps, il y a eu une augmentation, elle aussi significative, de l'effort pour le parc social. Celui-ci bénéficiait de 1,6 milliard de francs de subventions PALULOS. Il gardera 800 millions de francs, les 800 millions de francs restants étant affectés à l'aide à la pierre, rétablie pour le financement des prêts locatifs aidés pour 30 000 d'entre eux.
A ces 800 millions de francs de subventions PALULOS, qui demeurent, s'ajoute cependant la mesure d'abaissement du taux de la TVA qui, en année pleine, représentera 2,8 milliards de francs. Nous passons donc de 1,6 milliard de francs à 3,6 milliards de francs.
L'effort pour le parc privé est donc accru de 1,4 milliard de francs, et l'effort en faveur du parc social de 2 milliards de francs. L'écart demeure, certes : 8 milliards de francs d'un côté et 3,6 milliards de francs de l'autre. Quand on a le souci de l'équilibre, on peut porter des appréciations diverses, mais il faut savoir que le nombre des logements en cause n'est pas comparable. Il faut, en tout cas, me semble-t-il, garder ces grandes masses présentes à l'esprit.
Plusieurs d'entre vous ont souhaité savoir si les travaux éventuellement nécessaires seront éligibles aux subventions PALULOS, à la TVA minorée ou à d'autres dispositifs. En fait, les propriétaires gardent leur statut de propriétaire privé. Nous sommes donc dans le mécanisme de l'ANAH, et non des PALULOS.
En revanche, nous n'avons pas encore tranché - et je n'aurai garde d'oublier à cet égard les interventions de différents intervenants sur ce point - à propos de la grille des loyers de référence.
Il est vrai que l'on peut avoir à choisir entre les loyers ANAH et les loyers HLM. Si l'on veut rester complètement dans la logique du propriétaire privé, on devrait plutôt choisir la logique des loyers ANAH, mais il faut bien en examiner les conséquences pour les locataires - j'allais dire les sous-locataires - eux-mêmes, car il est évident que ces derniers sont, hors conventionnement, éligibles à l'allocation logement ; par ailleurs, s'il y a conventionnement, l'article L. 353-9-1 du code de la construction s'applique et les rend éligibles à l'APL.
Il faut donc approfondir ce point particulier, dont les modalités d'application pourront faire l'objet d'un arrêté spécifique. Avant de fixer définitivement le contenu des textes d'application, je me reporterai à vos contributions.
M. Vasselle a fait état de ses préoccupations quant à une éventuelle taxation de la vacance. Je l'ai dit, nous sommes conscients de la diversité des situations rencontrées.
En fait, le problème que nous posons est celui de la pertinence du maintien de l'avantage fiscal que constitue pour la vacance le fait de ne pas être dans le champ de la taxe d'habitation, surtout dans les secteurs urbains les plus tendus, là où la demande est forte et la vacance, de ce fait, plus inadmissible encore.
Si donc une mesure était prise, elle consisterait à supprimer cet avantage fiscal pour constituer une incitation supplémentaire à la remise sur le marché. C'est en tout cas l'axe des réflexions qui sont conduites dans la préparation de la disposition correspondante devant figurer dans le projet de loi de prévention et de lutte contre les exclusions.
M. Cléach a parlé de la multiplication pertinente des outils. C'est vrai, plus nous mettons à la disposition du bailleur potentiel des preneurs diversifiés - après le preneur professionnel, médiateur compétent, l'agence immobilière à vocation sociale et, aujourd'hui, les organismes d'HLM - plus nous lui accordons des protections : si c'est un organisme d'HLM, par exemple, il assure le relogement du locataire ; si c'est une association médiatrice, elle apporte la garantie de loyer.
Lorsqu'il y a ainsi une large palette de preneurs, le bailleur potentiel qui ne serait pas intéressé par toute incitation nouvelle, y compris fiscale, pourrait, portant attention à ces dispositifs votés par la représentation nationale, choisir le plus adapté des preneurs et donc avoir moins de raisons de faire une rétention là où les besoins sont très réels.
Je tiens donc, moi aussi, à souligner l'intérêt de cette multiplication des outils.
M. Pagès a rappelé que le marché ne pouvait pas pourvoir au droit au logement. Effectivement, et c'est bien pourquoi notre intention est de renforcer les dispositifs législatifs sur le droit au logement. Ce sera le cas, en particulier, avec le volet « logement » du projet de loi de prévention et de lutte contre les exclusions.
Cela se traduit aussi par le retour de l'aide à la pierre dans presque la moitié de la programmation PLA 1998. Autrement dit, après la baisse du taux de la TVA, nous retrouvons des subventions dont le taux va varier entre 8 % et 20 % selon les catégories de PLA, étant entendu que le PLA d'intégration bénéficiera du taux maximum de 20 % calculé sur la base d'une subvention moyenne de 80 000 francs par logement, niveau de subvention qui n'avait jamais été atteint pour un PLA, quand bien même, à l'époque, le taux de TVA était de 20,6 %.
Aujourd'hui, donc, non seulement nous avons un taux de TVA à 5,50 %, mais nous avons également 80 000 francs de subvention. Voilà pourquoi, bien évidemment, nous souhaitons une mobilisation de tous les acteurs pour que ces moyens nouveaux soient mis en oeuvre avec le maximum d'efficacité.
Monsieur Mouly, vous avez expliqué pourquoi il fallait toujours porter des appréciations nuancées puisque chaque mesure ne peut pas avoir l'efficacité maximale ; il y a toujours quelque obstacle que l'on a tendance à minimiser. Je vous rejoins tout à fait sur ce point.
Vous avez appelé mon attention sur l'appréciation de la fédération des PACT-ARIM. A mon avis, il faut que nous indiquions clairement que la démarche qui nous anime tous, au travers de ce texte, est non pas la création d'une concurrence pour les organismes existants, mais la volonté d'une complémentarité qui, me semble-t-il, grâce à cette multiplication des acteurs, devrait permettre de répondre de façon plus large à l'attente des propriétaires.
M. Braye et bien d'autres après lui ont souligné la qualité du travail effectué par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat. Le Gouvernement partage, bien sûr, cette appréciation sur cet outil qui vient de fêter ses vingt ans et auquel il faut, évidemment, continuer à donner le maximum de moyens tant son action est efficace, nous le savons tous.
Comme MM. Piras et Vasselle, je suis heureux qu'ait été souligné le souci de la Haute Assemblée d'une mixité sociale dans le parc immobilier sur l'ensemble du territoire.
Ce point a fait l'objet d'un amendement à l'Assemblée nationale, M. Piras l'a rappelé. C'est essentiel, car, si la même démarche ne prévalait pas sur tout le territoire, cela voudrait dire que la loi - je pense, en particulier, à la loi d'orientation sur la ville - ne serait pas appliquée partout.
Or, la décentralisation n'a pas pour vocation de faire obstacle à l'application de la loi ; elle est une invitation à tous les responsables des collectivités territoriales décentralisées à procéder, certes, aux adaptations que chaque situation locale peut justifier, mais dans le cadre de la loi, sans s'exonérer de son application.
Ayant ainsi, me semble-t-il, répondu à peu près à toutes les questions, je veux faire savoir au Sénat que des dirigeants du mouvement HLM qui se sont exprimés ont vu dans cette proposition de loi un intérêt pour la mise en oeuvre du protocole d'accord qui a été signé sur la politique d'attribution, pensant en particulier à la vacance éventuelle de logements plus autonomes, et donc plus adaptés ou plus facilement adaptables à des familles connaissant de vraies difficultés d'insertion sociale.
Il y a donc là une conjonction d'appréciations qu'on ne peut que souligner, pour l'apprécier.
M. Hamel, dans une très brève interruption qui se voulait constructive, m'a adressé une invitation à la méditation.
M. Emmanuel Hamel. Pour vous connaître depuis si longtemps, monsieur le secrétaire d'Etat, je sais votre capacité intense de méditation !
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Je vous ai bien entendu et je vais vous donner satisfaction, monsieur Hamel : je n'exclus nullement la méditation dans la préparation de l'action que nous avons à conduire.
M. Emmanuel Hamel. Merci, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat. Cet outil nous aidera dans l'action que nous voulons conduire ensemble pour le droit au logement.
Puisque l'unanimité sur cette proposition de loi a été annoncée, puisqu'il n'y a pas d'amendement, puisque, de ce fait, je ne reprendrai pas la parole, je voudrais remercier de nouveau la commission et son rapporteur pour le travail positif qui a été accompli.
Je me réjouis de ce souci qui s'est manifesté d'une meilleure coopération entre exécutif et législatif, de l'existence de cette « niche » - je crois que c'est le mot qui a été retenu - qui permet à une proposition de loi émanant de l'opposition à l'Assemblée nationale d'aboutir, et ce dans un domaine qui nous est cher à tous.
C'est un fait qu'il faut se garder de passer sous silence. Longtemps parlementaire, j'ai souffert de ne pouvoir faire adopter des propositions de lois parce que j'étais dans l'opposition.
Aujourd'hui, démonstration est faite que cela peut être le cas de parlementaires qui ne sont pas dans la majorité. C'est un plus pour la démocratie. En l'espèce, c'est aussi un plus pour faire progresser la cause du logement. (Très bien ! et applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. _ Le titre IV du livre IV du code de la construction et de l'habitation est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« Chapitre IV

« Prise à bail de logements vacants
par les organismes d'habitations à loyer modéré

« Art. L. 444-1 . _ Les offices publics d'habitations à loyer modéré, les offices publics d'aménagement et de construction, les sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré visées à l'article L. 422-3 du présent code et les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré peuvent prendre à bail des logements vacants pour les donner en sous-location à des personnes physiques dans les conditions fixées par le présent chapitre.
« Art. L. 444-2 . _ Le contrat de prise à bail ne peut être conclu qu'avec l'accord du maire de la commune, site du logement concerné lorsque dans cette commune le nombre des logements locatifs sociaux, mentionnés à l'article L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales, représente au 1er janvier de la pénultième année au moins 20 % des résidences principales au sens du II de l'article 1411 du code général des impôts. Le logement pris à bail doit être vacant depuis deux ans au moins et appartenir à une ou des personnes physiques.
« Art. L. 444-3 . _ Le logement donné en sous-location par l'organisme d'habitations à loyer modéré doit satisfaire aux normes minimales de confort et d'habitabilité mentionnées à l'article 25 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière.
« L'organisme d'habitations à loyer modéré peut être chargé par le propriétaire de réaliser en son nom et pour son compte les travaux permettant le respect de ces normes.
« Art. L. 444-4 . _ Le logement est attribué au sous-locataire selon les règles fixées par la section 1 du chapitre Ier du présent titre.
« Art. L. 444-5 . _ Les dispositions des articles 3 à 7, 9-1, 12, des deuxième et troisième alinéas du I de l'article 15, du d de l'article 17 et des articles 21 à 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont applicables au contrat de sous-location. Les dispositions de l'article 14 de la même loi sont applicables au contrat de sous-location, lorsque le bénéficiaire du transfert de ce contrat remplit les conditions pour l'attribution d'un logement d'habitations à loyer modéré.
« Le loyer de sous-location ne peut excéder un plafond fixé selon les zones géographiques par l'autorité administrative.
« L'organisme d'habitations à loyer modéré ne peut donner congé au sous-locataire que pour un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le sous-locataire de l'une des obligations lui incombant. Le congé doit mentionner le motif allégué.
« Art. L. 444-6 . _ Si, à l'expiration du contrat de location passé entre le propriétaire et l'organisme d'habitations à loyer modéré, il n'a pas été conclu de contrat de location entre le propriétaire et le sous-locataire, ce dernier est déchu de tout titre d'occupation sur le logement que l'organisme est tenu de restituer au propriétaire libre de toute occupation.
« Trois mois avant l'expiration du contrat entre le propriétaire et l'organisme d'habitations à loyer modéré, ce dernier est tenu de proposer au sous-occupant qui n'a pas conclu de contrat de location avec le propriétaire et qui remplit les conditions pour l'attribution d'un logement d'habitations à loyer modéré la location d'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 2

M. le président. « Art. 2. _ Le code de la construction et de l'habitation est ainsi modifié :
« I. _ Il est inséré, après l'article L. 353-9, un article L. 353-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 353-9-1 . _ Lorsqu'un logement conventionné par son propriétaire en application du 4° de l'article L. 351-2 est pris à bail par un organisme d'habitations à loyer modéré dans les conditions fixées par les articles L. 444-1 et suivants, le sous-locataire est assimilé à un locataire pour bénéficier de l'aide personnalisée au logement et l'organisme d'habitations à loyer modéré est assimilé au bailleur du logement pour le versement de cette aide. »
« II. _ L'article L. 421-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ils peuvent aussi prendre à bail des logements vacants pour les donner en sous-location à des personnes physiques dans les conditions fixées par les articles L. 444-1 et suivants. »

« III. _ L'article L. 422-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Elles peuvent aussi prendre à bail des logements vacants pour les donner en sous-location à des personnes physiques dans les conditions fixées par les articles L. 444-1 et suivants. » - (Adopté.)

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

11

REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR DÉCÉDÉ

M. le président. Conformément aux articles L.O. 325 et L.O. 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article L.O. 320 du code électoral, M. Jean-Paul Bataille est appelé à remplacer, en qualité de sénateur du Nord, M. Maurice Schumann, décédé le 9 février 1998.

12

DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président. J'ai reçu de M. Hubert Haenel une proposition de loi tendant à étendre la dotation de solidarité rurale aux communes situées dans un parc régional.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 280, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-François Le Grand, Michel Alloncle, Louis Althapé, Henri Belcour, Jean Bizet, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calmejane, Jean-Pierre Camoin, Charles Ceccaldi-Raynaud, Désiré Debavelaere, Jean-Paul Delevoye, Jacques Delong, Christian Demuynck, Charles Descours, Michel Doublet, Alain Dufaut, François Gerbaud, Daniel Goulet, Alain Gournac, Georges Gruillot, Emmanuel Hamel, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, Lucien Lanier, René-Georges Laurin, Pierre Martin, Lucien Neuwirth, Mme Nelly Olin, MM. Jacques Oudin, Maurice Schumann et Louis Souvet une proposition de loi visant à étendre à certains agents de la fonction publique de l'Etat la possibilité de se voir attribuer la médaille d'honneur régionale, départementale et communale.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 282, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Daniel Eckenspieller, Michel Alloncle, Roger Besse, Paul Blanc, Mme Paulette Brisepierre, MM. Robert Calmejane, Auguste Cazalet, Jacques Chaumont, Jean-Patrick Courtois, Désiré Debavelaere, Christian Demuynck, Xavier Dugoin, Philippe François, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Daniel Goulet, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Emmanuel Hamel, Bernard Hugo, Jean-Paul Hugot, Roger Husson, André Jourdain, Gérard Larcher, Edmond Lauret, René-Georges Laurin, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Joseph Ostermann, Victor Reux, Jean-Pierre Schosteck, Louis Souvet et Alain Vasselle une proposition de loi relative à la prime de fin d'année attribuée aux fonctionnaires des collectivités territoriales.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 283, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu de MM. Jean-Michel Baylet et Yvon Collin une proposition de loi tendant à créer un minimum contributif pour les retraites agricoles.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 284, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

13

DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement CE du Conseil concernant la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres modifiant l'accord sous forme d'échange de lettres entre la Communauté européenne et la Roumanie, relatif à l'établissement réciproque de contingents tarifaires pour certains vins, et modifiant le règlement CE n° 933/95, portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires pour certains vins.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-1007 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de décision du Conseil relative à la conclusion du protocole d'adaptation des aspects commerciaux de l'accord européen établissant une association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la République d'Estonie, d'autre part, pour tenir compte de l'adhésion de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne et des résultats des négociations agricoles de l' Uruguay Round y inclus les améliorations du régime préférentiel existant.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sour le numéro E-1008 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres en matière de publicité en faveur des produits du tabac.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sour le numéro E-1009 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- recommandation du Conseil sur la décharge à donner à la Commission sur l'exécution du budget général des Communautés européennes pour l'exercice 1996.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-1010 et distribuée.

14

DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Lucien Lanier un rapport d'information, fait au nom de la délégation du Sénat pour l'Union européenne, sur une révision de l'article 88-4 de la Constitution.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 281 et distribué.

15

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 11 février 1998, à quinze heures :
Discussion du projet de loi (n° 291, 1996-1997) relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction.
Rapport (n° 253, 1997-1998) de M. Francis Grignon, fait au nom de la commission des affaires économiques et du Plan.
Avis (n° 268, 1997-1998) de M. Guy Penne, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Avis (n° 254, 1997-1998) de M. Jean-Paul Amoudry, fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Aucun amendement n'est plus recevable.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-sept heures cinquante-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ORDRE DU JOUR
DES PROCHAINES SÉANCES DU SÉNAT
établi par le Sénat dans sa séance du mardi 10 février 1998
à la suite des conclusions de la conférence des présidents

Mercredi 11 février 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures :
Projet de loi relatif à l'application de la convention du 13 janvier 1993 sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et sur leur destruction (n° 291, 1996-1997).
(La conférence des présidents a fixé au mardi 10 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
Jeudi 12 février 1998 :
A 9 h 30 :

Ordre du jour prioritaire

1° Suite de l'ordre du jour de la veille.
A 15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures.)
Mardi 24 février 1998 :
A 9 h 30 :
1° Dix-huit questions orales sans débat (l'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement) :

- n° 157 de M. Jean Huchon à M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer (Statut de la zone des cinquante pas géométriques dans les DOM) ;

- n° 159 de Mme Nicole Borvo à Mme le ministre de la culture et de la communication (Avenir des cinémas d'art et d'essai) ;

- n° 161 de M. Bernard Dussaut à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Retraités agricoles) ;

- n° 164 de M. Léon Fatous à M. le secrétaire d'Etat au logement (Problème du logement dans le bassin minier) ;

- n° 165 de M. Aubert Garcia transmise à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation (Contrôle sur le recrutement des agents non titulaires dans la fonction publique territoriale) ;

- n° 166 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Mission des SAFER) ;

- n° 169 de M. François Autain à M. le secrétaire d'Etat à la santé (Statut des médecins à diplôme étranger) ;

- n° 170 de M. Jean-Jacques Robert à M. le ministre de la défense (Projet de délocalisation du centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge) ;

- n° 171 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de la défense (Conditions d'incorporation des jeunes ayant un contrat de travail) ;

- n° 173 de M. Charles Descours à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Réalisation de l'autoroute A 51 Grenoble-Sisteron) ;

- n° 174 de M. André Vallet à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Contribution des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé) ;

- n° 175 de M. Georges Mouly à Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité (Aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises) ;

- n° 176 de M. Bernard Piras à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice (Statut des administrateurs ad hoc) ;

- n° 177 de M. Jean-Patrick Courtois à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Projet de loi sur la qualité sanitaire des denrées alimentaires destinées à l'alimentation humaine et animale) ;

- n° 178 de M. Gérard Fayolle à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement (Gestion et traitement des déchets en Dordogne) ;

- n° 179 de M. Henri Revol à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice (Avenir du tribunal de Châtillon-sur-Seine) ;

- n° 182 de M. André Vézinhet à M. le ministre de l'intérieur (Sécurité publique à Lunel) ;

- n° 186 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie (Délais de paiement appliqués aux produits cuisinés).

A 16 heures et, éventuellement, le soir :
2° Eloge funèbre de Pierre Croze.

Ordre du jour prioritaire

3° Conclusions de la commission mixte paritaire ou nouvelle lecture de la proposition de loi relative au fonctionnement des conseils régionaux.
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)
4° Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant ratification et modification de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte (n° 195, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)
5° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, de la proposition de loi relative à la sécurité et à la promotion d'activités sportives.
(La conférence des présidents a fixé au lundi 23 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)

Mercredi 25 février 1998 :

A 15 heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Nouvelle lecture, sous réserve de sa transmission, du projet de loi relatif à la nationalité.
(La conférence des présidents a fixé au mardi 24 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi.)

Ordre du jour complémentaire

2° Suite des conclusions de la commission des lois (n° 20, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Nicolas About tendant à modifier les dispositions du code civil relatives à la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 151, 1996-1997) ;

- la proposition de loi de M. Robert Pagès et plusieurs de ses collègues relative à l'attribution de la prestation compensatoire en cas de divorce (n° 400, 1996-1997).

(Aucun amendement à ce texte n'est plus recevable.)
Jeudi 26 février 1998 :
A 10 heures :

Ordre du jour prioritaire

1° Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme (n° 222, 1997-1998).
(La conférence des présidents a fixé au mercredi 25 février 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à cette proposition de loi.)

A 15 heures :
2° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures.)

Ordre du jour prioritaire

3° Suite de l'ordre du jour du matin.

Mardi 3 mars 1998 :

A 9 h 30 :
1° Onze questions orales sans débat :
L'ordre d'appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 92 de M. Paul Masson transmise à M. le secrétaire d'Etat à la santé (Lutte contre la toxicomanie) ;

- n° 103 de M. Gérard Roujas à M. le ministre de l'intérieur (Montant de la vignette automobile) ;

- n° 109 de M. Ivan Renar à Mme le ministre de la culture et de la communication (Situation fiscale des structures culturelles) ;

- n° 112 de M. François Lesein transmise à M. le secrétaire d'Etat au budget (Régime de la taxe professionnelle applicable à France Télécom et à La Poste) ;

- n° 142 de M. Jean-Jacques Robert à Mme le ministre de la jeunesse et des sports (Conditions d'exercice du parachutisme sportif en région parisienne) ;

- n° 155 de Mme Anne Heinis transmise à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche (Problèmes de la pêche aux abords des îles Anglo-Normandes et du Cotentin) ;

- n° 181 de M. André Dulait à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (Financement de l'utilisation des ressources multimédia dans les établissements scolaires) ;

- n° 183 de M. René-Pierre Signé à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement (Tracé du TGV pendulaire Clermont-Paris) ;

- n° 184 de M. Franck Sérusclat à M. le secrétaire d'Etat à la santé (Politique en matière de toxicomanie) ;

- n° 187 de M. Yann Gaillard à M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie (Statut des animateurs de la mission d'insertion de l'éducation nationale) ;

- n° 188 de M. Christian Demuynck à M. le ministre de l'intérieur (Conditions d'incorporation dans les écoles de police).

A 16 heures et le soir :

Ordre du jour prioritaire

2° Sous réserve de sa transmission, projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN, n° 512).
(La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 3 mars 1998, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ce projet de loi ;

- à cinq heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des divers groupes ou ne figurant sur la liste d'aucun groupe.

L'ordre des interventions sera déterminé en fonction du tirage au sort auquel il a été procédé au début de la session et les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 2 mars 1998.)

Mercredi 4 mars 1998 :

Ordre du jour prioritaire

A 15 heures et le soir :
Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN, n° 512).

Jeudi 5 mars 1998 :

A 9 h 30 :
(Ordre du jour établi en application de l'article 48, troisième alinéa, de la Constitution) :
1° Conclusions de la commission des affaires sociales (n° 257 rectifié, 1997-1998) sur :
- la proposition de loi de M. Michel Moreigne et plusieurs de ses collègues visant à étendre aux centres de santé gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n° 43, 1996-1997) ;

- la proposition de loi de M. Georges Mouly et plusieurs de ses collègues visant à étendre aux centres de soins infirmiers gérés par la Mutualité sociale agricole la subvention prévue à l'article L. 162-32 du code de la sécurité sociale (n° 377, 1996-1997).

2° Proposition de loi de M. Jean Delaneau et plusieurs de ses collègues visant à élargir les possibilités d'utilisation des crédits obligatoires d'insertion des départements (n° 250, 1997-1998).
A 15 heures et le soir :
3° Questions d'actualité au Gouvernement.
(L'inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance, avant 11 heures.)

Ordre du jour prioritaire

4° Suite du projet de loi d'orientation et d'incitation relatif à la réduction du temps de travail (AN, n° 512).

A N N E X E
Questions orales sans débat inscrites
à l'ordre du jour du mardi 24 février 1998

N° 157. - M. Jean Huchon attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat à l'outre-mer sur le retard pris dans la mise en oeuvre de la loi sur les cinquante pas géométriques. A sa connaissance, aucun décret d'application à ce jour n'est paru. Or de nombreuses familles des départements d'outre-mer, en particulier de la Guadeloupe et de la Martinique, concernées par ce texte, attendent de pouvoir régulariser leur situation, notamment par la validation de leur titre de propriété. Les dispositions de la loi répondent à une situation d'urgence à la fois humaine et économique. Tout retard dans son application met à mal le règlement définitif concernant la question de l'occupation sans titre, mais aussi la question du développement économique, au regard notamment de la concrétisation de projets de rénovation de l'habitat insalubre et de la modernisation de certains quartiers, et enfin la question de l'amélioration de la protection du littoral. C'est pour l'ensemble de ces éléments qu'il lui demande de bien vouloir l'informer des dispositions que compte prendre le Gouvernement pour l'application rapide de la loi.
N° 159. - Mme Nicole Borvo attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur le fait que deux cinémas d'art et d'essai parisiens, Entrepôt et Accatone, s'inquiètent de leur avenir à la suite de la diminution des subventions accordées par le Centre national de cinématographie. Accatone, ex-studio Cujas, créé il y a dix ans par Kazik Hentchel, est sérieusement menacé par de nouveaux critères d'attribution d'aides aux salles d'édition qui ont fait chuter sa subvention de 60 % en deux ans. Quant à Entrepôt, créé en 1975 par Frédéric Mitterrand, il annonce la suspension de ses activités d'art et d'essai. Le montant de sa subvention s'élève seulement à 180 000 francs pour 1997, au lieu de 225 000 francs pour 1996. Afin que des cinémas d'art, d'essai et de recherche tels qu'Accatone et Entrepôt puissent vivre et assurer une programmation indépendante, qui donne toutes ses chances à des oeuvres exigeantes, elle lui demande ce qu'il compte faire pour attribuer des moyens suffisants et prendre les mesures nécessaires.
N° 161. - M. Bernard Dussaut appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur la situation des retraités agricoles. Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998 notamment, des dispositions ont été annoncées permettant la revalorisation des plus basses retraites et plus particulièrement celles des conjoints et des aides familiaux. L'effort budgétaire consenti doit, pour être rendu effectif, donner lieu à la publication de décrets d'application. Il lui demande de bien vouloir lui en faire connaître la teneur et les délais de publication. Il souhaiterait par ailleurs vivement que lui soient précisées les mesures qu'il entend prendre pour permettre à tous les retraités agricoles de bénéficier rapidement d'une retraite agricole égale au moins à 75 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance.
N° 164. - M. Léon Fatous attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat au logement sur le cas spécifique du bassin minier, qui représente près de 450 000 habitants. En 1990, le bassin minier se voyait accorder une dotation de 300 prêts locatifs aidés par an ; il serait nécessaire que ce niveau d'attribution soit reconduit. Par ailleurs, il aimerait connaître son avis sur l'élaboration d'un statut définitif apparenté aux organismes de logements sociaux pour le parc du logement minier actuellement géré par les Charbonnages de France.
N° 165. - M. Aubert Garcia attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la brèche de plus en plus profonde ouverte dans le statut de la fonction publique territoriale, par le recours abusif aux non-titulaires, rendu possible en raison de l'inefficacité du contrôle de légalité à endiguer cette tendance. A titre d'exemple, il cite la situation créée par un fonctionnaire territorial du grade d'agent de maîtrise principal, en cessation progressive d'activité qui a démissionné pour être repris le lendemain, sur le même emploi, en qualité de contractuel avec une rémunération de catégorie A, alors que l'emploi libéré était de catégorie C. En laissant perdurer et prospérer de telles pratiques, non seulement le statut s'érode, mais, de plus, les lauréats des concours administratifs en attente sur les listes d'aptitudes voient leurs perspectives d'embauche considérablement réduites et finissent sur des listes mouroirs, participant ainsi à la décrédibilisation des concours organisés par les centres de gestion et le Centre national de la fonction publique territoriale et par là même du statut dans son ensemble. Il lui demande de lui faire connaître les dispositions qu'il entend prendre tant au plan du renforcement des moyens dont disposent les préfectures pour assurer un contrôle de légalité homogène sur le territoire, ainsi que l'exigent les principes de la République, qu'au plan législatif, si la loi se révélait impraticable eu égard aux conditions d'administration souhaitables pour les collectivités territoriales. (Question transmise à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.)
N° 166. - M. René-Pierre Signé rappelle à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche que la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 complétée par le décret du 18 août 1993 prévoit et organise le concours technique des Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) aux collectivités. Toutefois, ce concours demeure trop limité, en raison de la définition trop restrictive de la mission assignée aux SAFER relativement à la rétrocession des terres agricoles. Il en est ainsi, en particulier, de l'impossibilité encore faite aux communes, dans le cadre de ce type de procédures, de préempter des parcelles pour les destiner à des projets d'aménagement et de développement d'intérêt collectif. Il lui demande s'il envisage d'élargir la mission des SAFER dans ce domaine, approfondissant ainsi la démarche adoptée en 1990.
N° 169. - M. François Autain souhaite attirer l'attention de M. le secrétaire d'Etat à la santé sur la situation des médecins à diplôme étranger. En effet, après avoir passé avec succès l'examen d'équivalence du diplôme français de docteur en médecine selon les dispositions de l'article L. 356 (2) du code de la santé publique, complété par l'article 1er de la loi n° 72-661 du 13 juillet 1972, leur situation est encore aujourd'hui précaire. Le statut de praticien adjoint contractuel (PAC) ne résout en rien les discriminations dont sont victimes ces médecins, en dépit des services rendus et du nombre d'années exercées au sein de l'hôpital public (ils assurent la majorité des gardes délaissées et désertées par leurs collègues français de souche). Le comité des médecins à diplôme étranger proteste contre le statut actuel accordé à ces médecins et il lui demande si l'adoption d'un texte réglementaire qui les intégrera complètement et définitivement dans le système médical français est prochainement envisagée.
N° 170. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de la défense sur l'avenir du centre d'essais en vol (CEV) de Brétigny-sur-Orge. Ce centre, qui relève de la direction générale pour l'armement, envisage la délocalisation de la moitié de son personnel, près de six cents personnes, et le transfert des activités d'essais en vol sur les sites d'Istres et de Cazaux. Il s'inquiète des conséquences de ce projet : 1. Pour les personnels civils et militaires de la base, et leur famille habitant à proximité ; 2. Pour les entreprises de la région qui, grâce à la sous-traitance, bénéficient du rayonnement et des retombées des activités économiques du CEV ; 3. Pour les quatre communes de Leudeville, Vert-le-Grand, Le Plessis-Pâté et Brétigny-sur-Orge, qui sont regroupées en syndicat de communes, afin de partager les recettes fiscales provenant de la taxe professionnelle versée au titre des activités de l'Etat. Déjà, le 19 septembre 1996, un engagement écrit de son prédécesseur avait garanti aux salariés du CEV la poursuite des activités sur le site de Brétigny : « ni délocalisation, ni transfert de site, ni plan social » (extrait du courrier). Dans le climat économique actuel, peut-on imaginer que notre Gouvernement veuille revenir sur la « parole donnée » ? C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui faire connaître le projet de décision prévu à ce jour.
N° 171. - M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre de la défense sur les conditions de report d'incorporation des jeunes appelés qui ont obtenu un contrat de travail au moins trois mois avant la date d'expiration de leur report. La loi n° 97-1019 du 28 octobre 1997 portant réforme du service national donne la possibilité aux jeunes titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée de demander à bénéficier d'un report d'incorporation d'une durée de deux ans pouvant être prolongée. Si ces jeunes concluent un contrat de travail à durée déterminée d'une durée au moins égale à six mois, ils pourront demander un report jusqu'au terme de leur contrat en cours dans la limite de deux ans. La loi précise que ce texte doit entrer en vigueur au plus tard le 1er janvier 1999. Les jeunes incorporables en 1998 s'interrogent légitimement sur la date exacte de ces nouvelles mesures. Il lui demande quand doivent paraître les décrets d'application pour ces deux cas définis par la loi et à partir de quand ces dispositions seront effectivement applicables.
N° 173. - M. Charles Descours attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement sur les décisions qu'il compte prendre concernant le projet autoroutier A 51 Grenoble-Sisteron. Le 9 juin 1997, M. le ministre prenait la décision de suspendre le démarrage de l'enquête publique de ce projet autoroutier au motif de la nécessité de recommencer la concertation sur ce dossier, concertation engagée pourtant depuis dix ans déjà. Les conclusions des experts nommés pour cette nouvelle concertation devant lui être remises courant février, il souhaiterait, en tant qu'élu de l'Isère, les connaître ainsi que les décisions qu'il compte prendre, la ville de Grenoble, l'agglomération et l'Isère étant au premier chef concernées.
N° 174. - M. André Vallet attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur la contribution des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé. Il lui indique qu'en 1995, comme vient de le révéler l'APCG (Assemblée des présidents des conseils généraux), les dépenses d'aide sociale des départements ont représenté 82 milliards de francs, soit plus de 60 % des dépenses de fonctionnement de ceux-ci. Il lui rappelle en outre que les lois de décentralisation ont cependant maintenu le principe d'une participation financière des communes aux dépenses d'aide sociale et de santé relevant pourtant de la compétence des départements (art. 93 de la loi du 7 janvier 1983 et art. 42 de la loi du 22 juillet 1983). Il lui indique également que ce contingent d'aide sociale constitue pour les communes une dépense obligatoire qui pèse de plus en plus sur les budgets communaux. En outre, il lui indique que le montant et la progression de cette dépense tendent, de simple problème ponctuel lié à des situations particulières, à devenir une véritable difficulté structurelle concernant les communes. Par ailleurs, si, en moyenne nationale hors Paris, les communes participent à hauteur de 15,8 % aux dépenses nettes d'aide sociale obligatoire du département, soit 202 francs par habitant, la diversité des situations locales permet de s'interroger sur l'équité de la participation financière des communes à ce financement. Il lui signale qu'en 1995 les participations financières des communes représentaient, en moyenne hors Paris, 7,6 % des quatre taxes principales des impôts communaux. Ce taux de prélèvement était de 1,3 % pour l'Essonne, 2,9 % pour les Hauts-de-Seine, 3,1 % pour la Seine-Saint-Denis, alors qu'il dépassait 17 % dans les Bouches-du-Rhône. Il lui demande donc dans quelle mesure, dans le cadre des réformes annoncées par le précédent gouvernement, notamment en matière de clarification des compétences pour éviter les financements croisés et l'absence de lisibilité des réelles responsabilités pour le contribuable local, le Gouvernement envisage de réserver aux seuls départements le financement de l'aide sociale.
N° 175. - M. Georges Mouly attire l'attention de Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité sur le problème posé par la disparition, en 1996, de l'ACCRE (aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises). A l'heure où le Gouvernement déclare tout mettre en oeuvre pour combattre le chômage avec le programme emplois-jeunes et la mise en chantier des 35 heures, il lui demande s'il ne serait pas opportun de réinstaurer cette aide. Selon les statistiques de l'INSEE, en effet, il semblerait que presque 80 000 entreprises privées ont pu être créées en France, grâce à l'ACCRE, et en particulier dans des régions défavorisées comme l'Auvergne et le Limousin, ce qui laisse supposer a priori que l'ACCRE a été utile.
N° 176. - M. Bernard Piras attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des administrateurs ad hoc . Le régime juridique de ces derniers est partiellement évoqué par le projet de loi, actuellement en débat au Parlement, sur la prévention et la répression des infractions en matière sexuelle. Malheureusement, lors de cette réforme, la situation de ces administrateurs ad hoc n'est évoquée que de manière partielle, alors que leur mission ne peut être cantonnée au droit pénal. En effet, leur intervention peut, par exemple, se révéler nécessaire en matière de droit civil (problème de succession ou de filiation). Il est indispensable qu'un projet de loi, ou bien un décret si cela relève du domaine réglementaire (encore que, si l'on se réfère au statut des tuteurs, cf. loi n° 64-1230 du 14 décembre 1964, une loi paraît mieux appropriée), soit adopté pour appréhender de manière globale le statut de ces auxiliaires de justice, qui ont une mission bien particulière d'ordre public ou de service public. Il doit ainsi être précisé dans leur statut : le mode de désignation, notamment l'agrément, la qualification nécessaire, les causes d'exclusion et les cas d'incompatibilités, le refus et la démission, le mandat, notamment le contenu et le contrôle, la responsabilité et la rémunération... Il semble à ce sujet que, selon une réponse à une question écrite posée par un député, une réflexion soit actuellement menée à la chancellerie. Il est vivement souhaitable qu'elle débouche sur un texte permettant une reconnaissance publique du rôle des administrateurs ad hoc . Mais avant que celui-ci ne soit adopté définitivement, un problème doit être réglé de manière urgente : à qui incombe le financement de ces mandats judiciaires ? Les conseils généraux sont-ils tenus de les financer ? Sont-ils tenus légalement d'exercer ces mandats lorsque le juge ne trouve personne pour le faire ? A ce jour, il semble qu'aucun texte ne prévoit clairement à qui il revient de verser ces sommes. De fait, la situation varie en fonction des départements concernés, selon que le conseil général décide ou non d'assumer cette charge, ou que la trésorerie générale accepte ou non d'appliquer les décisions judiciaires. Mais même au titre des frais de justice, l'indemnisation est refusée par certains TG. C'est ainsi que, dans certains départements, les administrateurs ad hoc ne sont pas indemnisés depuis plusieurs mois. Par ailleurs, les indemnités prévues aux articles R. 130 et R. 138 du code de procédure pénale, lorsqu'elles sont versées, ne couvrent qu'une partie infime, voire dérisoire, des frais exposés par l'administrateur ad hoc , puisque l'indemnité kilométrique est de 0,38 franc. Il lui demande alors sur quelle base les administrateurs ad hoc peuvent solliciter le remboursement de leurs frais et auprès de qui.
N° 177. - M. Jean-Patrick Courtois appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le devenir du projet de loi sur la qualité sanitaire des denrées alimentaires destinées à l'alimentation humaine et animale (n° 224, Sénat). Ce texte, amendé et adopté par l'Assemblée nationale les 18 et 19 février 1997, a été transmis à M. le président du Sénat. Renvoyé à la commission des affaires économiques et du Plan, il a fait l'objet d'un rapport de notre collègue Marcel Deneux. A ce jour, son examen n'a toujours pas été inscrit à l'ordre du jour de la séance du Sénat. Par conséquent, il demande quelle est l'intention du Gouvernement quant à l'avenir de ce texte, d'une part, et, d'autre part, quelle politique il entend mener pour renforcer le dispositif de réglementation et de contrôle de l'hygiène des produits alimentaires, et plus particulièrement en matière de lutte contre l'utilisation d'anabolisant et toute autre substance prohibée.
N° 178. - M. Gérard Fayolle appelle l'attention de Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur le plan pour la gestion et le traitement des déchets de la Dordogne. Il lui demande si certaines modifications vont être apportées au plan arrêté en 1995 et, dans ce cas, de lui préciser lesquelles.
N° 179. - M. Henri Revol souhaite faire part de son inquiétude à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, quant à la possible suppression du tribunal de commerce de Châtillon-sur-Seine, dans le cadre de la refonte de la carte judiciaire. Cette réforme intégrerait la circonscription de Châtillon à celles de Montbard et Semur-en-Auxois, qui dépendent du tribunal de commerce de Dijon, entraînant ainsi la disparition du tribunal de Châtillon, et ce en dépit d'une activité soutenue. Ainsi, pour l'année 1997, 152 affaires ont été inscrites : 126 ont été évacuées, dont 103 par jugement contradictoire et RC, une par défaut, 22 par radiation, désistement, 26 affaires restant à juger au 31 décembre 1997. Aussi, il souhaiterait savoir s'il ne serait pas plus opportun que le tribunal de Châtillon puisse désencombrer le tribunal de commerce de Dijon en lui intégrant les circonscriptions de Montbard et Semur-en-Auxois. Il semblerait dommageable, en effet, alors que les pouvoirs publics font de l'aménagement du territoire l'une de leurs priorités, que l'on choisisse de priver le Châtillonnais de sa juridiction de commerce. En tout état de cause, il souhaiterait obtenir des assurances quant à la pérennité du tribunal de commerce de Châtillon-sur-Seine.
N° 182. - M. André Vezinhet souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la situation de la quatrième ville de son département, Lunel, au regard des moyens mis à sa disposition pour assurer la sécurité publique. Chef-lieu d'un canton de 40 000 habitants (13 communes), Lunel compte à ce jour une population de 21 500 personnes et n'est pas dotée d'une police d'Etat. Elle relève de la brigade territoriale de la gendarmerie nationale, composée de 23 gendarmes pour 40 000 habitants. Il lui indique que le sentiment général manifesté par les 13 maires concernés est que l'Etat n'exerce pas, faute de moyens, sa mission de sécurité publique, analyse partagée par la population et doublée d'un sentiment manifeste d'insécurité, malgré la prise en charge du problème par la ville de Lunel contrainte de pallier cette carence par le recours à une police municipale comptant 28 agents armés et patrouillant de nuit. Connaissant particulièrement bien la situation de ce canton de l'est héraultais, il lui fait part de son appui total à la demande réitérée de son collègue maire et conseiller général de création d'une police urbaine d'Etat dans sa commune qui, outre le fait qu'elle dépasse le seuil des 20 000 habitants prévu par les textes, présente notamment les caractéristiques d'être classée en zone d'éducation prioritaire (ZEP), d'avoir des quartiers classés en zone urbaine sensible et zone de revitalisation urbaine, et bénéficie d'un contrat de prévention de la délinquance... L'implantation d'un commissariat de police nationale permettrait naturellement le redéploiement de l'intervention de la brigade territoriale de la gendarmerie nationale sur les 12 autres communes du canton. Il insiste sur la justesse et la légitimité de cette revendication et le remercie de bien vouloir lui donner des assurances sur ce dossier important et sensible sur lequel il a déjà été alerté par les élus concernés.
N° 186. - M. Yann Gaillard attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les délais de paiement appliqués aux plats cuisinés et aux conserves. Il apparaît en effet anormal que les industriels soient assujettis à un délai de paiement de 30 jours (art. 35 nouveau de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 modifié par la loi n° 92-1442 du 31 décembre 1992 et par la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996) pour les produits périssables à partir desquels ils produisent des plats cuisinés et ne soient payés qu'à un délai compris entre 120 et 150 jours par les centrales de restauration hors foyer et les distributeurs qui revendent ces produits. Il apparaît clairement que dans cette situation les industriels jouent un rôle de banquier à l'égard de leurs clients, ce qui ne se justifie pas. Il serait donc normal, aux yeux de ces industriels, d'aligner les conditions de l'épicerie (conserves de légumes, de viande, plats cuisinés...) sur celles des produits frais. Il lui demande donc ce qu'il compte faire pour rétablir une certaine logique et une certaine équité dans ce domaine et ne soit pas tenté d'exercer en plus une activité d'organisme financier.

DÉCÈS D'UN SÉNATEUR

M. le président du Sénat a le regret de porter à la connaissance de Mmes et MM. les sénateurs qu'il a été avisé du décès de M. Maurice Schumann, sénateur du Nord, survenu le 9 février 1998.

REMPLACEMENT D'UN SÉNATEUR

Conformément aux articles LO 325 et LO 179 du code électoral, M. le ministre de l'intérieur a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article LO 320 du code électoral M. Jean-Paul Bataille est appelé à remplacer, en qualité de sénateur du Nord, M. Maurice Schumann, décédé le 9 février 1998.

MODIFICATIONS AUX LISTES
DES MEMBRES DES GROUPES
GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE
(87 membres au lieu de 88)

Supprimer le nom de M. Maurice Schumann.

RÉUNION ADMINISTRATIVE DES SÉNATEURS NE FIGURANT
SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE
(10 au lieu de 9)

Ajouter le nom de M. Jean-Paul Bataille.

NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UNE COMMISSION D'ENQUÊTE

Dans sa séance du mardi 10 février 1998, le Sénat a nommé :
M. Roger Rinchet membre de la commission d'enquête chargée d'examiner le devenir des grands projets d'infrastructures terrestres d'aménagement du territoire, dans une perspective de développement et d'insertion dans l'Union européenne, en remplacement de M. Fernand Tardy, démissionnaire.



Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Conditions d'incorporation
dans les écoles de police

188. - 6 février 1998. - M. Christian Demuynck attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les conditions d'incorporation, dans les écoles de police, des candidats qui ont réussi le concours de gardien de la paix. Pour être intégré dans ces écoles, les démarches sont particulièrement longues. En premier lieu, une enquête administrative est faite sur le candidat qui doit passer une visite médicale et des tests psychologiques. Pour être admis au concours, ce dernier doit ensuite réussir des épreuves écrites, orales et sportives. Une fois l'admission définitive acquise, il doit encore patienter de nombreux mois avant d'obtenir des informations précises sur la date d'incorporation et sur l'école nationale de police ou le centre de formation qu'il devra rejoindre. Ainsi, il n'est pas rare qu'un an et demi se passe entre le moment où le postulant s'inscrit et celui où il est effectivement affecté dans l'école. Alors que la nécessité de recruter des gardiens de la paix dans notre pays est évidente, il n'est pas admissible qu'un candidat attende aussi longtemps pour commencer sa formation. Il lui demande si les services chargés du suivi des dossiers peuvent informer les élèves gardiens de la paix de la date et du lieu d'affectation, dès qu'ils ont réussi leur concours d'entrée.

Octroi d'une indemnité de résidence aux agents hospitaliers
de l'hôpital de l'Assistance publique Georges-Clemenceau
de Champcueil (Essonne)

189. - 9 février 1998. - M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'inégalité de traitement subie par les personnels hospitaliers de l'hôpital Georges-Clemenceau de Champcueil, qui ne perçoivent aucune indemnité de résidence, bien qu'agents de l'Assistance publique de Paris. La réglementation sur l'indemnité de résidence (art. 9 du décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 modifié) fixe le taux de cette indemnité en fonction des zones territoriales d'abattement de salaires, déterminées par l'article 3 du décret du 30 octobre 1962. Ce sont des dispositions fort anciennes qui ont pour conséquence d'exclure injustement le personnel de cet hôpital de la zone ouvrant droit au versement de l'indemnité de résidence : la commune de Champcueil est classée dans la zone 3, au taux de 0 % de l'indemnité de résidence. Tenant compte de l'évolution démographique dans ces zones, la circulaire interministérielle, intervenue en 1991, a permis le reclassement de certains personnels. Dans un esprit de compromis face à la réalité sur le terrain, pourquoi ne pas prévoir aussi l'indemnité de résidence dont ces agents ne peuvent pas bénéficier, exerçant à moins d'un kilomètre de la zone favorable ? Il lui demande de bien vouloir répondre à cette demande de simple justice entre les personnels de l'Assistance publique, alignant l'indemnité de résidence des agents de l'hôpital de Champcueil sur celle de leurs collègues, soumis aux mêmes réalités économiques.

Réalisation du TGV Montpellier-Barcelone

190. - 9 février 1998. - M. Roland Courteau souhaite indiquer à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement qu'il prend acte des récentes décisions du Gouvernement en faveur de la réalisation prochaine du TGV-Est et Rhin-Rhône. Il lui fait remarquer, cependant, que cette annonce a suscité (à tort ou à raison), en Languedoc-Roussillon, nombre d'interprétations dont certaines consistaient à conclure que par voie de conséquence le projet global TGV, entre Montpellier et Barcelone, serait mis, délibérément, entre parenthèses pour ne pas dire abandonné ou, au mieux, reporté à une date aussi éloignée qu'indéterminée : 1° il lui demande donc, face à autant de déductions hâtives et empressées, de lui apporter tous éclaircissements précis susceptibles de fonder un jugement objectif sur les perspectives d'évolution du dossier (TGV-Languedoc-Roussillon ; 2° par ailleurs, en sa qualité de rapporteur au titre de la commission des affaires économiques et du Plan, lors de la séance au Sénat du 14 octobre 1997, consacrée à l'examen du projet de loi autorisant l'accord franco-espagnol pour la construction d'une ligne grande vitesse entre Perpignan et Figueras, il sollicite toutes précisions quant à l'évolution de ce projet et aux délais précis concernant la mise en place de la commission intergouvernementale, la désignation du concessionnaire, la procédure conduisant à la déclaration d'utilité publique et le démarrage effectif des travaux. Dans une logique non seulement française, mais européenne, il lui rappelle qu'avec la réalisation de la deuxième phase Montpellier-Narbonne-Perpignan, il s'agit là du plus européen de tous les projets TGV européens, sur l'axe Londres-Paris-Montpellier-Barcelone-Madrid-Séville, mais également du plus rentable, tant par l'immense marché des transports que par la cohésion qu'il apporte. C'est pourquoi, et alors que de nombreuses études annoncent la saturation très prochaine et plus rapide que prévue des axes routiers, autoroutiers, mais aussi ferroviaires, entre Montpellier et la frontière espagnole, il lui demande de lui faire connaître sa position, d'une part, sur la pertinence de la réalisation d'une liaison à grande vitesse, d'abord entre Montpellier et Narbonne, puis ensuite entre Narbonne et Perpignan, sous quels délais il lui paraît raisonnable d'envisager sa mise en place et s'il entend procéder au lancement de l'enquête publique sur l'ensemble du tracé.

Congés bonifiés pour les employés
des hôpitaux originaires des DOM-TOM

191. - 10 février 1998. - Mme Marie-Claude Beaudeau demande à M. le secrétaire d'Etat à la santé de lui préciser les mesures modificatives du décret n° 87-482 du 1er juillet 1987 qu'il envisage pour permettre à tout employé hospitalier originaire d'un département ou territoire d'outre-mer exerçant actuellement dans un établissement public hospitalier métropolitain de bénéficier des congés bonifiés. Elle lui demande également de lui préciser les mesures financières qu'il envisage d'attribuer à chaque hôpital concerné afin de permettre ainsi une application nouvelle de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

Droit de prêt à la charge des bibliothèques

192. - 10 février 1998. - M. Jean-Louis Lorrain attire l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les conséquences pour les bibliothèques publiques de l'application de la directive européenne 92/100/CEE du 19 novembre 1992. Cette directive, qui vise la protection des droits d'auteur, demande aux bibliothèques publiques de payer un droit de prêt et seuls certains établissements peuvent être exemptés dudit paiement par les Etats membres. La France n'a pas appliqué ce droit de prêt dans la mesure où le Centre national du livre, fondé en 1946, aide les auteurs et les éditeurs. De plus, la loi du 11 mars 1957 protège les droits d'auteur par rapport à l'éditeur et à la diffusion de ses oeuvres. Afin d'éviter l'alourdissement des charges des municipalités qui participent majoritairement aux frais de fonctionnement des bibliothèques, serait-il possible que le ministère de la culture adopte la dérogation prévue à l'article 5 de la directive européenne, pour les documents imprimés, prêtés ou consultés sur place dans les bibliothèques publiques ? Ces dernières verraient, par l'application d'un droit de prêt, leur budget d'achat de livres grevé par cette nouvelle contrainte. En outre, du fait de leur développement récent, les bibliothèques ne disposent pas encore toutes d'un service de lecture et de documentation.

Enseignement du latin et du grec

193. - 10 février 1997. - M. Jean-Louis Lorrain appelle l'attention de Mme le ministre délégué chargé de l'enseignement scolaire sur les études des latinistes, dans la filière des lettres classiques. La trilogie français, latin et grec a toujours constitué une grande tradition de la culture française et un élément non négligeable d'unité de la culture européenne. Or, une décision récente allant à l'encontre des dispositions antérieures, favorablement accueillies par les enseignants et les parents d'élèves, contraint désormais les élèves de troisième à opter, au choix, soit pour le latin, soit pour le grec. Les priver de ce double enseignement fragilise la formation classique tout entière. Et cette dernière est un moyen efficace pour lutter contre la baisse de niveau souvent observée dans les collèges. Quelles motivations ont précédé une telle prise de position et quelle sera la filière désormais pour ceux des élèves qui souhaitent étudier simultanément grec et latin ?



ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du mardi 10 février 1998


SCRUTIN (n° 74)



sur l'ensemble des conclusions du rapport de M. Jean-Paul Delevoye, fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi de M. Serge Vinçon et plusieurs de ses collègues, tendant à autoriser les élus des communes comptant 3 500 habitants au plus à conclure avec leur collectivité des baux ruraux.

Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 218
Contre : 97

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 16.
Contre : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (94) :

Pour : 94.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 56.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Pour : 43.
Abstention : 1. _ M. Nicolas About.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
André Gaspard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Bernard Seillier
Raymond Soucaret


Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët


François Trucy
Alex Türk



Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstention


M. Nicolas About.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Faure, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.