SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 1998. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).

Budgets annexes de l'ordre de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération (p. 2 )

MM. René Régnault, rapporteur spécial de la commission des finances ; Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

LÉGION D'HONNEUR (p. 3 )

Adoption des crédits figurant aux articles 32 et 33.

ORDRE DE LA LIBÉRATION (p. 4 )

Adoption des crédits figurant aux articles 32 et 33.

Justice (p. 5 )

MM. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances ; Germain Authié, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour les services généraux ; Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour l'administration pénitentiaire ; Patrice Gélard, en remplacement de M. Michel Rufin, rapporteur pour avis de la commission des lois, pour la protection judiciaire de la jeunesse ; Robert Pagès, Dominique Leclerc, Pierre Fauchon, Hubert Durand-Chastel, José Balarello, Robert Badinter, Yvon Collin, Mme Nelly Olin, MM. Bernard Plasait, Germain Authié, Gérard Delfau.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Crédits du titre III (p. 6 )

M. Christian Bonnet.
Adoption des crédits.

Crédits des titres IV, V et VI. - Adoption (p. 7 )

Article 67. - Adoption (p. 8 )

3. Mise au point au sujet d'un vote (p. 9 ).
MM. Robert Pagès, le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 10 )

4. Loi de finances pour 1998. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 11 ).

Articles de totalisation des crédits (p. 12 )

Article 26. - Adoption (p. 13 )

Article 27 et état B (p. 14 )

Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances.
Adoption de l'article et de l'état annexé.

Articles 28 et état C, 31 et état D, 32, 33, 44 et état E, 45 et état F, 46 et état G et 47 et état H. - Adoption des articles et des états annexés (p. 15 )

Articles non rattachés (p. 16 )

Article 49 (p. 17 )

M. Bernard Angels, Mme Odette Terrade, M. Christain Sautter, secrétaire d'Etat au budget.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 49 (p. 18 )

Amendement n° II-56 de Mme Terrade. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° II-57 de Mme Terrade. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° II-58 de Mme Terrade. - Mme Odette Terrade, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Article 49 bis (p. 19 )

Amendement n° II-75 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Article additionnel après l'article 49 bis (p. 20 )

Amendement n° II-40 rectifié de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 50 (p. 21 )

Amendement n° II-76 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Philippe Marini. - Adoption.
Amendement n° II-77 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-78 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-79 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 50 (p. 22 )

Amendements n°s II-131 de Mme Beaudeau et II-80 rectifié de la commission. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Philippe Marini. - Rejet de l'amendement n° II-131 ; adoption de l'amendement n° II-80 rectifié insérant un article additionnel.
Amendements n°s II-156 à II-158 de M. Loridant. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des amendements n°s II-156 et II-157 ; rejet de l'amendement n° II-158.

Article 50 bis (p. 23 )

Amendements n°s II-81 de la commission et II-132 de Mme Beaudeau. - M. le rapporteur général, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Philippe Marini. - Adoption de l'amendement n° II-81 rédigeant l'article, l'amendement n° II-132 devenant sans objet.

Article 50 ter (p. 24 )

Amendements n°s II-133 de Mme Beaudeau et II-82 de la commission. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° II-133 ; adoption de l'amendement n° II-82.
Adoption de l'article modifié.

Article 51 (p. 25 )

Amendement n° II-159 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article 51 bis . - Adoption (p. 26 )

Article 52 (p. 27 )

Amendement n° II-134 de Mme Beaudeau. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article.

Article 53 (p. 28 )

M. Bernard Angels.
Adoption de l'article.

Article 54 (p. 29 )

Amendement n° II-83 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 54 (p. 30 )

Amendement n° II-3 de M. Larcher. - MM. André Diligent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Philippe Marini. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 55. - Adoption (p. 31 )

Demande de réserve (p. 32 )

Demande de réserve de l'article 56. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - La réserve est ordonnée.

Article 57. - Adoption (p. 33 )

Article 58 (p. 34 )

Amendement n° II-88 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Paul Loridant. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 58 (p. 35 )

Amendement n° II-112 de M. Régnault. - MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° II-113 de M. Régnault. - MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° II-114 de M. Régnault. - MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° II-135 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Articles 59 et 60. - Adoption (p. 36 )

Articles additionnels après l'article 60 (p. 37 )

Amendement n° II-102 de M. Ostermann. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques n°s II-19 de M. Gaillard, II-20 de M. Adnot et II-150 rectifié de M. Machet ; amendement n° II-95 de M. César. - MM. Yann Gaillard, Hubert Durand-Chastel, Philippe Arnaud, Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° II-95 ; adoption des amendements n°s II-19, II-20 et II-150 rectifié insérant un article additionnel.
Amendements identiques n°s II-96 de M. Pluchet et II-149 de M. Machet. - MM. Philippe Marini, Philippe Arnaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des deux amendements.
Amendements n°s II-97 de M. César et II-148 de M. Machet. - MM. Philippe Marini, Philippe Arnaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des deux amendements.

Article 61. - Adoption (p. 38 )

5. Mise au point au sujet d'un vote (p. 39 ).
MM. Michel Sergent, le président.

Suspension et reprise de la séance (p. 40 )

6. Loi de finances pour 1998. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 41 ).

Article 56 (précédemment réservé) (p. 42 )

MM. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances ; Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.
Amendements n°s II-84 à II-87 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Bernard Angels, Philippe Marini. - Adoption des quatre amendements.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 61 (p. 43 )

Amendement n° II-94 de M. Oudin. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Articles 61 bis et 61 ter. - Adoption (p. 44 )

Articles additionnels après l'article 61 ter (p. 45 )

Amendement n° II-100 rectifié de M. Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Michel Caldaguès. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° II-121 de M. Miquel. - MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° II-98 rectifié bis de M. Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Article 61 quater. - Adoption (p. 46 )

Articles additionnels après l'article 61 quater (p. 47 )

Amendement n° II-136 rectifié bis de M. Loridant. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° II-110 de M. de Rocca Serra. - MM. Louis-Ferdinand de Rocca Serra, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendements n°s II-103 à II-106 de M. Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des quatre amendements.
Amendements n°s II-107 de M. Braye, II-119 de M. Régnault et II-161 (priorité) de la commission. - MM. le rapporteur général, Dominique Braye, Bernard Angels, le secrétaire d'Etat, Christian Poncelet, président de la commission des finances. - Demande de priorité de l'amendement n° II-161 ; retrait des amendements n°s II-107 et II-119 ; adoption de l'amendement n° II-161 insérant un article additionnel.
Amendement n° II-108 de M. Braye. - MM. Dominique Braye, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
M. le président.
Renvoi de la suite de la discussion.

7. Communication relative à une proposition d'acte communautaire (p. 48 ).

8. Dépôt d'une proposition de loi (p. 49 ).

9. Dépôt d'un rapport (p. 50 ).

10. Ordre du jour (p. 51 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale. [N°s 84 et 85 (1997-1998).]

Budgets annexes de la Légion d'honneur
et de l'ordre de la Libération

M. le président. Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.
Je suis heureux, au nom du Sénat, de saluer la présence aux côtés de M. le secrétaire d'Etat au budget du général Forray, grand chancelier de l'ordre national de la Légion d'honneur, et du général Simon, chancelier de l'ordre de la Libération.
Nous sommes heureux aussi d'accueillir M. Sautter. Nous devons cependant lui dire que nous regrettons bien sûr, les uns et les autres, l'absence de Mme Guigou, et espérons qu'elle reviendra très vite parmi nous.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. René Régnault, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, messieurs les grands chanceliers, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les dotations allouées en 1998 au budget annexe de l'ordre national de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération diminuent. Elles s'établissent respectivement à 110 millions de francs, soit une baisse de 8,15 % par rapport à 1997, et à 4,1 millions de francs, soit une baisse de 3,2 %.
S'agissant de l'ordre national de la Légion d'honneur, ce recul s'explique par la forte diminution des dépenses en capital, qui passent de 16,5 millions de francs en 1997 à 5,9 millions de francs, en raison du prochain achèvement des travaux engagés dans des dortoirs de la maison d'éducation de Saint-Denis. Cette diminution est donc tout à fait justifiée.
Les crédits d'investissement permettront de réaliser des travaux de sécurité et d'aménagement à la grande chancellerie et dans les maisons d'éducation de Saint-Denis. La restauration du cloître de l'abbaye de Saint-Denis devra bientôt être prise en compte.
Les dépenses de fonctionnement progressent légèrement, de 0,74 %, en raison d'une augmentation des crédits de fonctionnement de l'administration centrale de la grande chancellerie et des maisons d'éducation. Rappelons pour mémoire que la grande chancellerie emploie 94 personnes et les maisons d'éducation 319, ce qui fait un total de 413 emplois.
Les secours accordés par la grande chancellerie bénéficient d'une dotation stable.
En revanche, les montants prévus pour les traitements des légionnaires et des médaillés militaires augmentent de 2,8 %, du fait de la mise à jour de la liste des membres des ordres nationaux et de la progression des nominations.
Quant aux ressources de l'Ordre, elles diminueront. La subvention de l'Etat baisse de 8,9 % et s'établit à 102,5 millions de francs. En revanche, les recettes propres progressent, du fait de l'augmentation de 10 % des droits de chancellerie et de 3 % des prix des pensions et trousseaux des élèves des maisons d'éducation.
Les crédits alloués à l'ordre de la Libération diminuent de 3,2 % et s'établissent à 4,1 millions de francs. Aucune opération en capital n'est prévue pour 1998.
L'ordre de la Légion d'honneur assure également la gestion des nominations et promotions de légionnaires, en mettant en oeuvre les orientations définies par le Grand Maître. En effet, les décrets du Président de la République fixent, pour une période de trois ans, les différents contingents de médaillés.
Le ministère de la défense bénéficiera ainsi d'une majoration exceptionnelle de 380 croix de chevalier.
Un contingent exceptionnel a également été institué à l'occasion du 35e anniversaire de la fin des combats en Algérie.
Le caractère universel des Ordres a été réaffirmé. Les nominations et promotions doivent obéir à un meilleur équilibre social, professionnel et géographique. De même, les femmes sont de plus en plus nombreuses au sein des contingents. Je salue, à cet égard, la promotion de Mme Geneviève de Gaulle Anthonioz, première femme élevée à la dignité de grand-croix de la Légion d'honneur.
La seconde mission dévolue à l'ordre de la Légion d'honneur concerne l'instruction des élèves des maisons d'éducation, qui accueillent près de 1 000 jeunes filles dans les classes allant de la sixième à la khâgne et au BTS de commerce international.
Les résultats scolaires y sont excellents et largement supérieurs à la moyenne nationale ; surtout, ils sont fondés - et j'insiste sur ce point - non sur la sélection, mais sur la seule qualité de l'enseignement.
Je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous indiquiez à la Haute Assemblée où en est la réflexion engagée sur l'avenir de l'ordre de la Libération.
Parce que la France est profondément attachée à ces Ordres, qui récompensent des mérites éminents, je vous propose, mes chers collègues, de suivre la commission des finances en adoptant comme elle, à l'unanimité, les budgets annexes de l'ordre de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, monsieur le grand chancelier de la Légion d'honneur, monsieur le grand chancelier de l'ordre de la Libération, monsieur le rapporteur spécial, mesdames, messieurs les sénateurs, comme l'a si bien expliqué M. le rapporteur spécial, le budget annexe de la Légion d'honneur atteindra en recettes et en dépenses 110,13 millions de francs, soit une diminution des crédits de 8,15 % par rapport à la dotation de l'exercice précédent.
Cette situation résulte principalement de la diminution des crédits de paiement afférents aux opérations en capital des maisons d'éducation.
Les ressources du budget annexe de la Légion d'honneur sont constituées par la subvention versée par le ministère de la justice et par les recettes propres de la Légion d'honneur.
La subvention budgétaire s'élèvera à 102,54 millions de francs en 1998, contre 112,57 millions de francs en 1997, soit une diminution de 8,90 %. Les recettes propres de la Légion d'honneur, d'un montant de 7,59 millions de francs, représentent 6,90 % de l'ensemble des ressources du budget annexe.
Ces recettes propres, constituées essentiellement par la perception des droits de chancellerie, des pensions et trousseaux des élèves des maisons d'éducation, sont en légère augmentation de 3,50 %.
Cette augmentation résulte essentiellement de la majoration des droits de chancellerie de 10 %, ainsi que du prix du trousseau et de pension de 3 % par rapport à 1997.
Les dépenses prévues pour l'exercice de 1998 sont le reflet exact de l'évolution des recettes.
Les dotations de fonctionnement de 104,21 millions de francs, en légère augmentation de 0,74 % par rapport à 1997, assurent le paiement des traitements des membres de la Légion d'honneur et des médaillés militaires, le fonctionnement des services, ainsi que l'action sociale menée par la grande chancellerie.
Tel que ce projet de budget a été préparé pour 1998, les crédits ouverts à hauteur de 8,15 millions de francs permettent de régler les traitements des membres du premier ordre national et des médaillés militaires.
Il convient de préciser que le décret n° 96-1063 du 4 décembre 1996 fixant les contingents de croix de la Légion d'honneur pour la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 a prévu, comme l'a rappelé M. le rapporteur spécial, un contingent exceptionnel majoré de 280 croix de chevalier de la Légion d'honneur destiné aux anciens combattants de la guerre 1939-1945, des théâtres d'opérations extérieures ou d'Afrique du Nord.
De plus, en application du décret n° 96-1066 du 4 décembre 1996 et à l'occasion du 35e anniversaire de la fin des combats en Algérie, un contingent exceptionnel a été institué pour récompenser des anciens combattants particulièrement valeureux. Nombre de ces nominations ont ouvert droit au traitement.
Ces dossiers sont venus s'ajouter aux 15 000 nominations, promotions et concessions qui interviennent annuellement. L'administration centrale de la grande chancellerie a achevé la mise en place de l'informatisation des fichiers de décorés de la Légion d'honneur, de l'ordre national du Mérite et de la Médaille militaire. Cette informatisation a permis, par le rapprochement du fichier informatique des légionnaires et du fichier de l'INSEE, de connaître avec précision la population des membres de la Légion d'honneur vivants : ils sont 114 500.
D'autres applications de l'informatique donnent une meilleure connaissance de la population des décorés, leur appartenance socioprofessionnelle, leur répartition géographique, leur moyenne d'âge, leur durée de services, etc., apportant ainsi au Président de la République et aux instances de l'Ordre des informations utiles pour la détermination des choix à faire pour l'avenir de ces décorations nationales.
D'ores et déjà, M. le Président de la République, après avoir décidé que la durée des services serait la même pour tous les secteurs d'activité du pays, a choisi d'augmenter les contingents de croix de chevalier de la Légion d'honneur afin d'assurer, d'une part, le maintien des effectifs de l'Ordre et, d'autre part, leur rajeunissement.
Enfin, le budget de l'action sociale, c'est-à-dire les secours et allocations en faveur des membres des ordres nationaux ou de leurs familles reste fixé à 345 884 francs pour l'année 1998.
Les dépenses en capital prévues en 1998 représentent 5,14 millions de francs en autorisations de programme et 5,92 millions de francs en crédits de paiement, soit une diminution de 64 % par rapport aux crédits de 1997.
En 1998, la dotation des crédits de paiement est consacrée à l'entretien des bâtiments, de la grande chancellerie et des maisons d'éducation.
Ces derniers travaux consistent à remettre au niveau de notre époque les conditions d'hébergement et à rénover les structures des bâtiments, dont la vétusté risquait de mettre en cause la sécurité des élèves.
Il y a lieu de relever que le financement des travaux de restauration du cloître de l'abbaye de Saint-Denis a fait l'objet d'une demande d'ouverture de crédits au titre du projet de loi de finances rectificative de 1997, à concurrence de 10 millions de francs en autorisations de programme et de 2 millions de francs en crédits de paiement. Son coût total est estimé à 30 millions de francs. Sa réalisation s'effectuera sur une période de trois ans.
Dans ses deux maisons d'éducation, la grande chancellerie de la Légion d'honneur a pour mission d'assurer l'éducation de près de 1 000 élèves, filles et petites-filles des membres français de l'Ordre.
Selon une habitude bien établie, les résultats obtenus aux examens à la fin de l'année scolaire 1996-1997 par les élèves des maisons d'éducation ont été excellents : 97,52 % des candidats ont réussi les épreuves du baccalauréat pour un taux de réussite national de 77,10 %.
Ces résultats, fondés, non pas sur la sélection des meilleures, mais sur la qualité de l'éducation et de l'enseignement qui leur sont prodigués - M. Régnault a eu raison de le souligner - sont le meilleur gage de la pérennité de ces institutions.
Tout en restant fidèle aux principes qui fondent le prestige des ordres nationaux, la grande chancellerie de la Légion d'honneur a su mettre au service de leur gestion les méthodes les plus modernes. C'est ainsi qu'elle a conçu un outil informatique adapté et efficace qui lui permettra, notamment, de faire face à l'augmentation des contingents.
Tradition et modernité, tels sont les axes de l'avenir des Ordres nationaux qui sont consubstantiels à la République française.
Pour terminer, je dirai brièvement, s'agissant de l'ordre de la Libération, qu'un projet de loi a été élaboré et qu'il a été déjà soumis au conseil des ministres. Il sera déposé prochainement sur le bureau de la Haute Assemblée. Vous pourrez donc travailler à partir de réflexions qui ont été menées sur l'avenir de cet Ordre, auquel le pays est profondément attaché. (Applaudissements.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant les budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération et figurant aux articles 32 et 33.

LÉGION D'HONNEUR

Services votés

M. le président. « Crédits : 105 522 940 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 32.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. « I. - Autorisations de programme : 5 140 000 F ;
« II. - Crédits : 4 612 417 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33.

(Ces crédits sont adoptés.)

ORDRE DE LA LIBÉRATION

Services votés

M. le président. « Crédits : 4 111 414 francs. »
Personne ne demande la parole ?... »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 32.

(Ces crédits sont adoptés.)

Mesures nouvelles

M. le président. I. - Autorisations de programme : 0 franc ;
« II. - Crédits : 1 652 francs. »
Personne ne demande la parole ?... »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 33.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi concernant les budgets annexes de la Légion d'honneur et de l'ordre de la Libération.

Justice



M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant le ministère de la justice.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Permettez-moi tout d'abord, monsieur le président, d'assurer à Mme Guigou mes voeux chaleureux de prompt rétablissement.
Mme Guigou a eu l'occasion devant tant la commission des finances que la commission des lois de présenter ce budget et de commenter la communication qu'elle a faite en conseil des ministres relativement à la réforme d'ensemble de la justice. Je crois savoir que nous aurons l'occasion d'en reparler avec elle au mois de janvier.
Quelles observations appelle l'examen du projet de budget de la justice qui nous est soumis cette année ?
Dans le contexte actuel de réduction du déficit public, le projet de budget pour 1998 constitue un effort budgétaire réel, bien que relatif, en faveur du ministère de la justice. Ce dernier voit ses crédits augmenter de 4,03 % par rapport à l'année dernière et atteindre 23,9 milliards de francs.
Toutefois, je voudrais replacer cette hausse dans son contexte.
Une loi de programme relative à la justice adoptée en 1995 avait fixé des objectifs précis à réaliser sur cinq ans en matière d'emplois et de crédits.
Le projet de loi de finances pour 1998 ne fait que s'y conformer, même s'il comble également partiellement le retard pris l'année dernière, la hausse du budget de la justice pour 1997 n'ayant atteint que 1,8 % contre les 4 % annuels nécessaires au respect de la loi de programme.
En outre, ce budget ne se révélera à la hauteur des espérances qu'il suscite que si aucun gel de crédits n'intervient - il est heureux que vous soyez présent pour entendre cela, monsieur le secrétaire d'Etat au budget - durant l'année 1998.
Certes, la levée de tous les gels de crédits intervenus en 1997 par le nouveau Gouvernement constitue un signal fort, mais les membres de la commission des finances - moi tout particulièrement - resteront attentifs aux modalités d'exécution de ce budget.
Par ailleurs, cette hausse des crédits ne sera efficace que si elle s'inscrit dans la durée. La commission des finances estime que le service public de la justice ne pourra fonctionner correctement que s'il dispose d'un budget d'environ 35 milliards de francs, ce qui nécessiterait, au-delà de la loi de programme, une augmentation annuelle de l'ordre de deux milliards de francs du budget de la justice pendant cinq ans.
Ma deuxième observation portera sur la réforme de la carte judiciaire.
Cette réforme nous paraît très urgente. Je tiens à rappeler que, même si des moyens supplémentaires sont indispensables pour assurer un fonctionnement normal de la justice, cette dernière ne répondra aux défis auxquels elle est confrontée que par la mise en oeuvre de réformes structurelles, dont la réforme de la carte judiciaire constitue la plus urgente et la plus importante.
En effet, depuis 1958, la carte judiciaire n'a été modifiée qu'à la marge, par la création des cours d'appel de Metz, de Reims et de Versailles et par celle de trois tribunaux périphériques autour de Paris, à Créteil, Bobigny et Nanterre. Or la carte judiciaire - tout le monde est d'accord sur ce point - n'est plus du tout adaptée aux évolutions économiques, sociales et contentieuses ; elle doit en conséquence être réformée impérativement.
J'indique d'emblée qu'il ne s'agit pas de faire uniquement ce que l'on appelait dans le passé de la RCB, c'est-à-dire de la rationalisation des choix budgétaires, ce qui correspond à une vue assez étriquée du problème.
Mais cette réforme ne doit pas non plus consister en des suppressions à tel endroit pour renforcer tel autre.
Depuis de nombreuses années, je plaide pour que le réseau des juridictions soit calqué autant que faire se peut sur celui des administrations. Dans cette optique, le cadre naturel de la cour d'appel serait la région et celui du tribunal de grande instance, le département.
Cette réforme permettrait la mise en place d'un échelon départemental fort afin qu'aux préfets commandants de groupements de gendarmerie, directeurs départementaux de police et autres directeurs et chefs de services corresponde un procureur départemental.
Sans être supprimés, les cours d'appel et les tribunaux de grande instance actuels seraient transformés en chambres détachées.
Par ailleurs, en tant qu'échelon de proximité par excellence, le tribunal d'instance serait renforcé en ce qui concerne tant sa compétence que ses moyens. Il deviendrait l'antenne polyvalente de la justice sur l'ensemble du territoire national.
Cette réforme de la carte judiciaire ne pourra être efficace que si elle est menée de pair avec le volet, ô combien important, de l'organisation, des méthodes et procédures aux différents degrés : civil, commercial et pénal.
Ma troisième observation portera sur les quelques réformes qui sont en panne, alors qu'elles sont pourtant considérées comme indispensables.
Il s'agit, par exemple, de la réforme des tribunaux de commerce, des tribunaux de prud'hommes ou encore de l'importante réforme des cours d'assises.
Certes, je défends le principe selon lequel aucune réforme ne doit être engagée en l'absence des moyens financiers, matériels et humains nécessaires à sa mise en oeuvre et si elle n'est pas intégrée dans une réflexion globale sur la justice.
Toutefois, cet argument ne doit pas servir de prétexte à l'immobilisme.
En outre, je tiens à rappeler, une nouvelle fois, que ces réformes ne pourront aboutir qu'à la condition de mettre fin à certaines surenchères sur la justice, qui mérite, je l'ai dit souvent, une réflexion sereine et apolitisée.
Ma quatrième observation porte sur la croissance inquiétante des frais de justice. Après avoir connu une forte hausse jusqu'en 1993, le rythme de progression des frais de justice s'est infléchi pendant trois ans.
Toutefois, leur hausse semble de nouveau s'accélérer depuis 1996, avec un taux annuel supérieur à 10 %. Ainsi, le montant des frais de justice a doublé au cours des cinq dernières années, passant de 800 millions de francs à 1 600 millions de francs.
Certes, la complexité et la technicité croissantes des affaires dont est saisie la justice nécessitent un recours accru aux expertises. Toutefois, votre rapporteur a eu écho de gaspillages, lesquels ont d'ailleurs été reconnus par les magistrats. Ainsi, la hausse de 114 % des frais de fourrière entre 1993 et 1996 est, pour une grande partie, liée à l'insuffisante gestion des scellés judiciaires : des voitures restent pendant des années en fourrière, puis, à la sortie, il faut régler la facture !
C'est pourquoi je tiens à souligner la nécessité de développer un contrôle plus strict des dépenses relatives aux frais de justice. En effet, il serait fâcheux que la progression des crédits du ministère de la justice soit absorbée par une croissance incontrôlée et excessive des frais de justice.
Je vous suggère donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de mandater une inspection sur ce sujet.
La cinquième observation concerne la distinction entre l'accès au droit et l'accès à la justice, qui n'a pas encore acquis droit de cité au sein de l'institution judiciaire.
Je souhaite réaffirmer avec solennité qu'aucune réforme de l'institution judiciaire ne pourra échapper à la question fondamentale de la redéfinition des missions de la justice. En effet, la juridiciarisation croissante des questions de société conduit la justice à élargir à l'infini le champ de ses interventions.
Or non seulement le manque de moyens l'empêche de faire face à cet afflux de contentieux, mais son image est brouillée, la justice se transformant en réceptacle de tous les dysfonctionnements sociaux. Cette tendance est également favorisée par la multiplication des textes législatifs assortis de dispositions pénales.
C'est pourquoi j'estime urgent de rappeler que l'accès au droit ne signifie pas l'accès à la justice. Au contraire, le recours au juge dans certaines affaires doit être subsidiaire, lorsque toutes les autres voies de médiation et de conciliation ont été épuisées et doit servir uniquement à trancher un conflit en disant le droit.
Parallèlement, il faut mieux informer nos concitoyens de leurs droits et de leurs devoirs et permettre aux plus défavorisés d'avoir accès au droit.
En outre, il importe d'encourager le développement des modes alternatifs de résolution des conflits. A cet égard, même si je défends l'aide juridique dans son principe, je regrette que l'aide juridictionnelle absorbe la quasi-totalité des crédits mis à disposition au détriment de l'aide à l'accès au droit, qui doit absolument être encouragée.
Il me paraît donc indispensable, monsieur le secrétaire d'Etat, de mieux orienter l'aide juridique.
Le franc succès remporté par la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle montre que celle-ci répond à un vrai besoin. En ce qui concerne l'aide juridictionnelle, les demandes d'admissions se sont élevées à 729 791 en 1996 et 665 719 d'entre elles ont reçu une réponse favorable.
Les difficultés économiques des familles concernées par l'aide juridictionnelle constituent une réalité puisque plus de la moitié des demandeurs sont des chômeurs ou des inactifs. Les demandes d'aide juridictionnelle émanent en majorité de femmes : 59 % et 71 % lorsqu'il s'agit de demandes qui s'inscrivent dans le cadre d'un divorce.
Sans remettre en cause l'aide juridique dans son principe, l'augmentation des crédits mis à sa disposition est inquiétante dans la mesure où elle absorbe une part croissante de la hausse générale des crédits du budget de la justice. Dans les tableaux qui figurent à la page 35 de mon rapport, vous pourrez comparer l'évolution du budget de la justice et celle de l'aide juridique.
A l'exception des années 1994 et 1995, les crédits mis à la disposition de l'aide juridique ont crû beaucoup plus rapidement que ceux du budget de la justice. Ainsi, en 1996, les premiers ont augmenté de 18,6 %, contre 6,1 % pour les seconds. De même, en 1997, les hausses ont atteint respectivement 11,9 % et 1,8 %.
Aujourd'hui, l'aide juridique représente 5 % du budget de la justice, contre 2,80 % en 1987, voilà il y a dix ans. Les services du ministère de la justice devraient se montrer vigilants et s'inquiéter de cette propension à la hausse. Les inspecteurs généraux et autres sont suffisamment nombreux pour pouvoir travailler sur ce sujet et mettre en évidence cette augmentation. D'un côté, on constate une augmentation des crédits et, de l'autre, cela ne correspond pas aux besoins des gens. Par conséquent un problème se pose.
En outre, je regrette la lenteur de la mise en place du deuxième volet de la loi du 10 juillet 1991, qui a vocation à intervenir en amont du procès, afin de faciliter l'accès des citoyens à la connaissance de leurs droits et obligations. Ainsi, depuis l'entrée en vigueur de la loi, seuls vingt conseils départementaux ont été institués.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les services de la Chancellerie devraient s'inquiéter de cette situation. Pourquoi une loi qui date de 1991 n'est-t-elle appliquée que dans vingt départements ?
Par ailleurs, si les conseils départementaux de l'aide juridique ont permis de mettre en place des dispositifs de consultations juridiques gratuites ou aidées, ils n'ont pas inclus, dans leurs programmes d'activité, l'assistance au cours de procédures non juridictionnelles. Or seul le développement massif d'alternatives au recours contentieux permettra de désengorger les tribunaux et d'apporter aux justiciables des solutions acceptables dans des délais raisonnables.
C'est pourquoi je plaide, une fois de plus, pour une augmentation substantielle, à l'intérieur de l'aide juridique, des crédits à la disposition de l'aide à l'accès au droit. Parallèlement, je souhaite une adaptation du droit aux évolutions de la société : la multiplication du nombre de familles recomposées appelle sans doute une modification de la procédure de divorce par consentement mutuel et de la prestation compensatoire.
A cet égard, il convient de ne pas oublier que les admissions à l'aide juridictionnelle pour les contentieux civils, et principalement familiaux, constituent les trois cinquièmes des admissions totales à l'aide juridictionnelle. En réalité, le débat sur les modalités de l'aide juridique pose implicitement la question de la gratuité de la justice. Je sais qu'il s'agit d'un sujet sensible et que toute réflexion sur ce thème entraîne le risque, pour son auteur, d'être accusé de vouloir instaurer une justice à deux vitesses. Pourtant, le statu quo actuel n'est pas tenable.
En premier lieu, le principe de la gratuité de la justice est d'ores et déjà un leurre. Certes, les magistrats et les greffiers sont payés par l'Etat, mais le justiciable doit assumer d'autres frais, notamment les honoraires de son avocat. Or les plafonds de l'aide juridictionnelle - 4 480 francs pour l'aide totale et 7 273 francs pour l'aide partielle en 1997 - excluent de son bénéfice une grande partie de la population sans qu'elle puisse pour autant faire face à ces frais.
Beaucoup de personnes ne saisissent pas la justice, soit parce qu'elles pensent que cela ne sert à rien, soit parce qu'elles n'en ont pas les moyens. Quand on gagne 6 000 francs net par mois ou 7 000 francs pour un couple, on ne peut pas engager la saisine d'une juridiction avec toutes les conséquences que cela entraîne.
En second lieu, que penser d'une justice qui est peut-être gratuite, mais qui se trouve dans l'incapacité d'apporter au justiciable une décision dans des délais raisonnables ? La justice n'est pas un bien de consommation courante et, fort heureusement, les individus n'y ont recours qu'un nombre très limité de fois dans leur vie. En revanche, lorsqu'ils y font appel, ils attendent d'elle une réponse rapide à la question de droit posée. La priorité doit donc être donnée moins à la gratuité de la justice qu'à sa rapidité et à son efficacité.
Il n'est pas question de contester la gratuité de la justice dans sa globalité. Ainsi, ce principe conserve toute sa légitimité en matière pénale pour les affaires matrimoniales et pour toutes celles qui sont traitées par les juridictions de l'ordre administratif. En revanche, il pourrait être modulé pour les affaires qui ne mettent en jeu que des intérêts patrimoniaux, afin de favoriser les procédures de médiation et de transaction.
Une telle réforme permettrait de désengorger les tribunaux et de responsabiliser certains justiciables qui ne s'estiment satisfaits que si leur affaire a été tranchée par un juge, alors même qu'il existe des alternatives au recours contentieux.
Enfin, en matière pénale, il est urgent d'examiner le problème de la répression et de l'exécution des peines d'amende et d'emprisonnement. Par conséquent, je proposerai, au cours du mois de janvier prochain, la création d'une commission d'enquête sur l'arsenal répressif et son application par les différentes autorités chargées de la mise en oeuvre d'une politique pénale d'ensemble.
Il me paraît utile, en effet, de procéder à une remise à plat, dans le cadre d'une réflexion d'ensemble, en ce qui concerne les peines d'amende et d'emprisonnement, l'exécution des condamnations pénales par les juges de l'application des peines, les disparités d'application et, en amont, la répression de ce que l'on appelle pudiquement aujourd'hui les incivilités, enfin, la primo-délinquance des mineurs, qui n'est pas traitée. Toutes ces questions méritent, me semble-t-il, notre vigilante attention.
C'est la raison pour laquelle il me paraîtrait utile que le Sénat, comme il l'a fait voilà plusieurs années, réfléchisse en toute sérénité et en toute objectivité sur ce sujet et propose des solutions.
Enfin, je conclurai en formulant quelques suggestions.
Les ministres successifs en charge des sceaux et de la justice demandent souvent à des hauts magistrats, à des parlementaires, à des professeurs de réfléchir à des problèmes précis et de faire des propositions. Ces rapports, souvent très riches, finissent, quelle que soit la sensibilité politique représentée au Gouvernement, dans les oubliettes des tiroirs de la place Vendôme, où, je le sais, on n'apprécie pas toujours l'empiètement de ces missionnaires sur les attributions de la chancellerie.
Mme Guigou nous a indiqué qu'elle souhaitait retenir une partie des réformes proposées par M. Jean-Marie Coulon, M. le président du tribunal de grande instance.
Pourquoi ne pas demander aux auteurs de rapports dont les propositions sont en tout ou partie retenues de s'assurer que la lettre et l'esprit de ces propositions sont bien respectés ?
Disant cela, je m'appuie sur mon expérience dans un tout autre domaine, celui de la régionalisation des transports ferroviaires. Pendant cinq ans, j'ai suivi l'évolution de cette question, et je peux affirmer que c'est la bonne méthode.
Il serait tout à fait possible de demander à M. Coulon ou à M. Casorla, premier président de la cour d'appel d'Orléans, de veiller à ce que leurs propositions - celles du dernier nommé portent sur la proximité de la justice - soient suivies d'effets. Ainsi, les services de la Chancellerie seraient un peu « émoustillés », pour leur plus grand bien, et l'on pourrait enfin engager quelques réformes.
Il me paraît également judicieux de recourir à l'expérimentation, afin de tester les solutions envisagées et, le cas échéant, de convaincre les uns et les autres de leur bien-fondé, avant de les généraliser par une véritable réforme.
Trois domaines me paraissent se prêter particulièrement à cette méthode.
En ce qui concerne la réforme de la carte judiciaire, ...
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Vaste sujet !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. ... pourquoi ne pas retenir deux ou trois cours d'appel qui seraient volontaires, avec des barreaux volontaires et des élus qui seraient associés à l'expérience, pour essayer de déterminer ce que doit être la présence judiciaire sur un territoire ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Recomposition volontaire !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Sinon, que va-t-il se passer ? On aura les rapports émanant des préfets et résultant de la mission qui leur a été confiée par le précédent ministre de la justice,...
M. Pierre Fauchon. C'est zéro !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. ... ainsi que ceux des premiers présidents et des procureurs généraux, et il ne se passera absolument rien !
Mieux vaut donc choisir trois cours d'appel volontaires et travailler en profondeur avec elles. Mais il faut, bien entendu, associer les barreaux et les élus. Il s'agirait de savoir quelle doit être la présence judiciaire dans le ressort de la cour d'appel correspondant au département dont l'élu est, par exemple, mon collègue Pierre Fauchon.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Avec un tel missionnaire, le problème sera très vite réglé ! (Sourires.)
M. Pierre Fauchon. On sait d'avance qu'il ne se passera rien, cher ami ! (Nouveaux sourires.)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Je n'en suis pas sûr !
Autre champ se prêtant à l'expérimentation : la réforme relative à l'organisation, aux méthodes et aux procédures.
Là encore, on pourrait convaincre les plus frileux en utilisant l'imagination et l'énergie des autres et pousser ainsi à la réforme. Je reviens là à mes suggestions concernant le rapport Coulon et le rapport Casorla.
Enfin, on peut aussi expérimenter la mise en place d'équipes pluridisciplinaires autour des cabinets d'instruction chargés d'affaires lourdes et inédites. Ces équipes pourraient comprendre plusieurs juges d'instruction, un substitut, des experts-comptables, des représentants des services fiscaux, des douanes, de la police nationale et de la gendarmerie. Une telle organisation éviterait bien des errements et des lenteurs.
Voilà quelques propositions qui mériteraient que, au moins, on y réfléchisse, de sorte que, dans quelques mois, on soit éventuellement en mesure de me dire pourquoi on ne peut pas les mettre en oeuvre.
Mes chers collègues, sous le bénéfice de l'ensemble des observations orales et écrites que j'ai formulées au nom de la commission des finances, je vous propose d'adopter les crédits relatifs à la justice pour 1998. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Authié, rapporteur pour avis.
M. Germain Authié, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour les services généraux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, mes premiers mots seront pour souhaiter à Mme le garde des sceaux un prompt et complet rétablissement.
Compte tenu de la brièveté du temps de parole qui m'est imparti, je ne commenterai pas les grandes lignes du budget de la justice, tâche dévolue à notre excellent collègue M. Hubert Haenel, rapporteur spécial de la commission des finances.
Je dirai simplement, en ce qui me concerne, que c'est un bon budget : on peut en effet considérer qu'il est équilibré et en progression, concentrant les moyens sur des actions bien ciblées et traduisant la volonté du Gouvernement de faire de la justice une priorité. Bref, c'est un budget fiable et sincère.
Dans mon avis présenté au nom de la commission des lois, j'ai replacé l'augmentation des crédits des services généraux de la justice dans leur contexte historique et je me suis efforcé d'en mesurer l'incidence, compte tenu des difficultés persistantes que rencontrent les juridictions pour traiter des volumes d'affaires civiles et pénales toujours préoccupants.
Partant du constat des délais de traitement, je souhaite présenter deux observations et poser deux questions.
Les durées moyennes de traitement des affaires civiles restent très élevées, selon les dernières statistiques connues : en appel, 15,6 mois en 1996, ce qui est bien loin des 12 mois envisagés par le plan pluriannuel ; devant les tribunaux de grande instance, 8,8 mois, délai sensiblement supérieur aux 6 mois prévus ; devant les tribunaux d'instance, 5 mois, alors que la loi de programme prévoyait 3 mois.
Et encore ne s'agit-il là que de moyennes ! Vous le savez, certaines cours et certains tribunaux connaissent des délais que la commission des lois avait, en son temps, assimilés à un « déni de justice », expression reprise, d'ailleurs, par le tribunal de grande instance de Paris dans une décision récente.
Au demeurant, ces délais ne sont atteints qu'au prix, d'une part, d'un taux de classement sans suite au pénal qui avoisine toujours 80 % pour l'ensemble des affaires - 50 % lorsque l'auteur est connu - et, d'autre part, d'« audiences marathons », au cours desquelles le justiciable, après avoir attendu des mois l'examen de son affaire, la voit expédiée en quelques minutes.
En outre, ces délais ne rendent pas compte des retards d'exécution.
Dans ces conditions, après avoir félicité Mme le garde des sceaux pour l'annulation des gels d'emplois et des crédits qu'elle a obtenue dès le mois de juillet 1997, la commission des lois ne peut que souligner la nécéssité impérative de rendre les recrutements effectifs, réguliers et de qualité.
Trop de juridictions connaissent aujourd'hui des vacances - deux cents au moins pour les magistrats - non seulement du fait des délais de recrutement ou de formation mais aussi en raison des difficultés de gestion des mouvements.
La commission des lois relève, par ailleurs, l'impossibilité de répondre par les seules mesures budgétaires à la croissance des contentieux.
Comme vient de l'indiquer M. Haenel, nous ne pouvons différer plus longtemps la réflexion sur la carte judiciaire, sur la simplification de la procédure civile et sur les méthodes alternatives de traitement des contentieux. Ces réformes-là concernent des milliers de justiciables et la quasi-totalité des magistrats dans leurs tâches quotidiennes.
En conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais vous poser deux questions d'actualité budgétaire.
Premièrement, le projet de loi sur le recrutement exceptionnel de magistrats a été examiné lors du dernier conseil des ministres. Pouvez-vous nous indiquer quels effets concrets vous en attendez au regard des deux cents vacances constatées, un nombre qui augmentera virtuellement dès la création des soixante-dix postes prévus dans le projet de budget pour 1998.
Plus généralement, compte tenu des différentes formules de recrutement utilisables, de combien de magistrats supplémentaires - retraites déduites - pensez-vous disposer effectivement dans les juridictions le 1er juin 1998 et le 31 décembre 1998 ?
Deuxièmement, la signature d'un accord-cadre sur les emplois-jeunes pour la justice a été annoncée. Pourriez-vous nous préciser le contenu de cet accord, faire le point sur les accords plus ponctuels éventuellement en préparation sur le terrain et nous en donner quelques exemples ?
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des lois, à l'unanimité, a émis un avis favorable quant à l'adoption des crédits du ministère de la justice consacrés aux services généraux inscrits dans le projet de loi de finances pour 1998.
Votre rapporteur vous invite, mes chers collègues, à suivre l'avis donné par la commission des lois. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Othily, rapporteur pour avis.
M. Georges Othily, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour l'administration pénitentiaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je tiens à m'associer aux voeux de prompt rétablissement qui ont déjà été adressés à Mme le garde des sceaux.
S'agissant du projet de budget, le montant des crédits de l'administration pénitentiaire pour 1998 s'établira à 7,01 milliards de francs, en accroissement de 3,5 % par rapport à 1997.
Pour 1998, 221 millions de francs de mesures nouvelles sont prévus au titre des dépenses ordinaires. Elles seront, pour l'essentiel, consacrées tout d'abord à la création de 300 emplois, dont 200 emplois au sein des comités de probation et d'assistance aux libérés, pour développer les mesures alternatives à l'incarcération, et 50 emplois de surveillance, pour renforcer la prise en charge des détenus mineurs dans des quartiers spécialisés.
Les dépenses ordinaires seront également affectées à des mesures indemnitaires et statutaires en faveur des personnels ; il s'agit notamment de 5 millions de francs pour la réforme des statuts des corps de direction et de 7,4 millions de francs de revalorisation pour les personnels administratifs.
Les dépenses ordinaires permettront enfin l'abondement des crédits de fonctionnement de l'administration pénitentiaire, à hauteur de 49,4 millions, et l'octroi d'une indemnité de changement de résidence pour la mise en service du centre pénitentiaire de Rémiré-Montjoly, en Guyane ; ce sont 7,8 millions de francs qui sont consacrés à cette action par nature non reconductible.
En ce qui concerne les dépenses en capital, 1,024 milliard de francs d'autorisations de programme sont prévus. Ils seront répartis comme suit : 20 millions de francs pour le lancement d'un programme de construction de centres de semi-liberté ; 117 millions de francs pour des travaux de rénovation ; 32 millions de francs pour renforcer la sécurité ; 45 millions de francs au titre de la délocalisation de l'école nationale d'administration pénitentiaire ; 810 millions de francs pour le programme de construction de trois nouveaux établissements pénitentiaires, près de Lille, de Toulouse et d'Avignon.
Nous saluons ces efforts, mais nous n'oublions pas pour autant que l'administration pénitentiaire est dans une situation préoccupante.
J'évoquerai, à cet égard, deux problèmes récurrents.
Le premier concerne la surpopulation carcérale, même si la situation s'est légèrement améliorée en 1996 : avec 54 496 détenus au 1er janvier dernier, le taux d'occupation était de 108 % contre 111 % un an auparavant.
Le situation n'en demeure pas moins inquiétante : d'abord, parce que la durée moyenne d'incarcération est passée de 7,1 mois en 1994 à 7,8 mois en 1996 ; ensuite, en raison de l'extrême diversité de la situation selon les établissements puisque le taux d'occupation va de 78 % pour les centres de semi-liberté à 131 % pour les maisons d'arrêt ; enfin, en raison de la diversité géographique puisque certaines régions sont particulièrement touchées. Ainsi, en outre-mer, le taux d'occupation était de 169 % en 1996.
Le second problème que je souhaite souligner a trait à l'augmentation inquiétante du nombre de prévenus incarcérés.
Alors que nous étions longtemps demeurés en deçà des 21 000 prévenus incarcérés, ce niveau a été dépassé en 1995. Au 1er janvier dernier, on comptait 22 521 personnes en détention provisoire, soit 41,4 % de la population carcérale, contre 39,7 % en 1996.
Mme le garde des sceaux est consciente, nous le savons, de ces problèmes, et de bien d'autres. J'en veux pour preuve l'annonce qu'elle a faite d'une réforme de la détention provisoire et du milieu ouvert.
Mais la commission des lois considère qu'il ne suffit pas de légiférer pour régler tous les problèmes. Nous en débattrons, le moment venu.
Pour l'heure, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la commission des lois a donné un avis favorable quant à l'adoption des crédits de l'administration pénitentiaire pour 1998. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Gélard, rapporteur pour avis.
M. Patrice Gélard, en remplacement de M. Michel Rufin, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, pour la protection judiciaire de la jeunesse. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je m'associe tout naturellement aux voeux de prompt rétablissement de Mme le garde des sceaux. J'y ajouterai ceux que j'adresse à M. Michel Rufin, que je remplace cette année en raison de son état de santé. Je souhaite le voir prochainement rétabli afin qu'il puisse à nouveau présenter, comme il le fait depuis plus de sept ans, ce rapport.
Le budget de la protection judiciaire de la jeunesse est positif cette année, puisqu'il est en augmentation de 4,12 % ; il représentera ainsi 10,5 % du budget de la justice. Il est donc satisfaisant. Il demeure cependant toujours un peu trop faible, à notre avis, compte tenu de l'atonie générale du budget de la justice. Je ne reprendrai pas les propos tenus par notre excellent rapporteur spécial à ce sujet.
Le budget de la protection judiciaire de la jeunesse a prévu 100 créations d'emplois, qui seront fort utiles, ainsi qu'une amélioration importante des conditions de travail des personnels en augmentant les indemnités des directeurs, notamment, en poursuivant une réforme statutaire de qualité et en prévoyant des actions de formation continue.
Reste cependant toujours posé le problème du remboursement des frais de déplacement des personnels de la protection judiciaire de la jeunesse qui sont le plus souvent obligés d'utiliser leur propre voiture alors qu'il serait souhaitable qu'ils soient équipés à l'avenir de voitures de service.
En ce qui concerne les dépenses en capital, il faut noter la création de deux foyers d'hébergement, l'un à Quimper, l'autre à Epinal, l'adaptation des structures d'accueil existantes et la mise aux normes de sécurité des bâtiments. La commission des lois est favorable à toutes ces orientations.
Pour les orientations à plus long terme de la chancellerie, nous approuvons la poursuite des améliorations statutaires déjà engagées pour des personnels qui exercent un métier difficile et parfois même pénible. Il est donc nécessaire d'améliorer leurs conditions de travail.
Nous approuvons également la recherche d'une accélération des réponses judiciaires en continuant l'action initiée par le prédécesseur de Mme le garde des sceaux, M. Toubon, par la loi du 1er juillet 1996.
Cependant, je souhaite vous faire part de deux incertitudes que soulève ce budget. La première concerne l'avenir des unités à encadrement éducatif renforcé sur lesquelles un rapport est attendu. Seront-elles maintenues ? Seront-elles transformées ? Toute une série de questions sont ainsi posées.
De même, une incertitude plane sur le recours aux emplois-jeunes ; 1 000 emplois-jeunes environ sont en effet prévus pour la protection judiciaire de la jeunesse. Seront-ils adaptés à cette mission ? Par ailleurs, ils seront financés à concurrence de 80 % du SMIC plus les charges sociales par le ministère de l'emploi et de la solidarité ; il convient donc de s'interroger sur les 20 % restants.
Par ailleurs, une question demeure : les crédits suffiront-ils à l'avenir ? Il faudra sans doute consentir des efforts très largement supérieurs à ceux qui sont actuellement engagés, surtout si le tendance actuelle au développement de la délinquance juvénile tend à se maintenir, voire à s'amplifier au cours des prochaines années.
En conclusion, je vous demande, mes chers collègues, d'adopter ce budget. (Applaudissements.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 20 minutes ;
Groupe socialiste, 18 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 17 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 15 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, 6 minutes.
La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je m'associe pleinement aux voeux de prompt rétablissement de Mme le garde des sceaux.
J'en viens au budget de la justice.
L'action de l'Etat dans le domaine de la justice, annoncée comme l'une des priorités du budget de la nation pour 1998, est confirmée par la progression de 4 % des crédits qui y sont consacrés.
En termes d'emplois, vous me pardonnerez ces répétitions, cette hausse se traduit par une augmentation des effectifs de 762 postes. Ces créations concernent 70 postes de magistrats et 230 postes de greffes dans les services judiciaires, 300 postes nets de personnels pénitentaires, 100 postes dans les services de la protection judiciaire de la jeunesse et 62 postes dans les juridictions administratives. Il faut y ajouter les 600 emplois, qui ont été gelés en 1997 par le gouvernement de M. Juppé et que vous avez décidé de débloquer.
Nous souhaitons y voir la volonté d'une rupture définitive avec la politique des gels d'emplois qui a prévalu durant trop d'années, dans le domaine de la justice, notamment.
Ce budget ambitieux n'aura donc de sens que si le Gouvernement ne recourt pas, en 1998, à des gels d'emplois.
Sans doute ce budget ne permettra-t-il pas de rattraper le retard accumulé depuis des années ; toutefois, il marque incontestablement la volonté résolue du Gouvernement d'infléchir la politique judiciaire menée depuis trop longtemps et d'apporter un commencement de réponse aux besoins cruciaux de nos services judiciaires.
Pour autant, la lenteur de la justice reste un point qui préoccupe, à juste titre, les personnels judiciaires et les justiciables, sachant que la lenteur des procédures est liée à l'insuffisance des moyens des juridictions.
Les juridictions françaises sont, pour la majorité d'entre elles - je ne suis pas le seul, hélas ! à le dire - asphyxiées par la montée du contentieux qui a plus que triplé durant les vingt dernières années ; le nombre de dossiers civils est ainsi passé de 200 000 à 650 000.
Si l'on observe une stabilisation de la durée des procédures civiles devant les tribunaux d'instance et de grande instance, la durée des procédures devant la cours d'appel ne cesse de croître, atteignant désormais près de seize mois.
Au pénal, les procédures relatives aux délits et aux contraventions tendent à s'accélérer tandis que les procédures relatives aux crimes atteignent près de quarante-cinq mois.
Quant aux conseils de prud'hommes, je ne pense pas que le budget permettra de satisfaire les besoins en matériels et en personnels nécessaires à l'accomplissement de ses tâches dans les meilleures conditions.
La situation d'engorgement chronique de certaines juridictions a incité les avocats à faire grève, au début du mois de novembre, pour protester contre le manque cruel de moyens qui affecte la justice et dont les premières victimes sont les justiciables.
En réponse, Mme le garde des sceaux a annoncé un plan d'urgence de recrutement exceptionnel de magistrats pour donner une bouffée d'oxygène à l'institution judiciaire.
Si nous approuvons, bien entendu, le principe de ces mesures d'urgence, nous sommes néanmoins conscients que leurs effets ne se feront sentir qu'au bout de dix-huit, voire de vingt-quatre mois, le temps d'organiser les concours et d'assurer la formation.
D'un mot, j'évoquerai la situation des personnels des greffes qui demandent une revalorisation de leur situation statutaire et indemnitaire ainsi qu'une amélioration de leurs conditions de travail.
Ils revendiquent également que soient transférées certaines compétences non juridictionnelles aux fonctionnaires des greffes pour permettre un meilleur fonctionnement des juridictions en termes de rapidité.
Par ailleurs, s'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, force est de constater que le garde des sceaux a fait de la protection des mineurs en danger et de la prise en charge des jeunes délinquants sa priorité.
Cette administration, durement éprouvée au cours des années précédentes, se voit attribuer cent postes budgétaires dont quarante-huit éducateurs.
A cela, il convient d'ajouter les crédits d'investissement qui seront consacrés à la construction de nouveaux bâtiments, notamment de deux foyers d'hébergement à Quimper et à Epinal, à la création d'une direction générale ainsi qu'à l'adaptation des hébergements existants et de certains centres de jour.
Nous sommes très attachés à l'importante mission éducative de prévention et de réinsertion dévolue à la protection judiciaire de la jeunesse.
La détention des mineurs est un sujet qui nous préoccupe au plus haut point. Aussi pensons-nous qu'il faut valoriser autant que possible les solutions alternatives à l'incarcération, en privilégiant la réparation à l'enfermement. Mon ancien métier me porte à avoir confiance dans les missions éducatives.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Vous avez bien raison !
M. Robert Pagès. D'une manière générale, le milieu ouvert - suivi des peines et réinsertion - sera privilégié puisque le secteur pénitentiaire bénéficiera de la création de trois cents emplois, dont deux cents réservés au milieu ouvert.
Les comités de probation et d'assistance aux libérés, qui suivent les libérations conditionnelles et les mises à l'épreuve, devraient, par exemple, pouvoir assurer le futur « suivi socio-judiciaire » des délinquants sexuels.
Il faut dire, par ailleurs, qu'avec 116 % de taux d'occupation des prisons en moyenne il est grand temps de rechercher des réponses innovantes pour lutter contre la surpopulation carcérale.
Se pose également la question de la détention préventive, le nombre de prévenus étant de plus de 22 521 personnes sur 54 496 détenus, soit 41 % de la population carcérale au 1er janvier 1997. De plus, la durée moyenne de détention provisoire ne cesse d'augmenter, passant de 3,5 mois en 1992 à 4,2 mois en 1996.
Pour ce qui est de l'accueil du justiciable, de l'amélioration de l'attention portée aux victimes, de l'accélération du traitement des affaires et de la simplification du langage, un renfort de 3 500 jeunes est prévu dans les tribunaux, ce que nous apprécions, mais encore faudra-t-il penser à leur devenir après les cinq ans effectués au titre de leur contrat.
Par ailleurs, des crédits d'investissement sont prévus pour construire des tribunaux à Grenoble, à Avignon et à Fort-de-France.
Enfin, j'évoquerai le problème de l'aide juridictionnelle. La loi du 10 juillet 1990 devait favoriser l'accès au droit et à la justice des personnes défavorisées. Or, la revalorisation de l'unité de valeur qui sert de base à la rémunération des avocats n'avait pas été revue depuis 1995.
Nous regrettons que votre budget n'y consacre qu'un effort minimal alors que, dans le même temps, le nombre d'admissions à l'aide juridictionnelle ne cesse de croître : ce sont, en effet, chaque année 650 000 affaires qui sont soumises à l'aide juridictionnelle partielle ou totale.
Au total, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront votre budget, considérant qu'il traduit un effort sérieux à l'intérieur du budget de la nation qui, dans l'ensemble, reste soumis à la rigueur. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur les travées socialistes. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Je m'associe à tous mes collègues qui m'ont précédé à la tribune pour adresser à Mme le garde des sceaux mes voeux de prompt rétablissement.
Ce matin, nous devons débattre du budget de la justice qui nous a été présenté comme le budget prioritaire du Gouvernement, qui nous en a vanté toutes les vertus.
A cet effet, il n'a pas manqué d'émailler son propos de nombreuses comparaisons avec le budget de 1997, afin de démontrer les imperfections dont ce dernier était, à ses yeux, entaché.
Ce budget ne justifie, par le niveau des crédits qui lui sont affectés, en hausse de 4,03 % par rapport à l'an dernier, ni les excès de louanges, ni les excès de critiques.
En effet, cette hausse, si l'on se réfère aux précédents fascicules budgétaires, se situe en réalité dans la moyenne des taux d'augmentation du budget de la justice de 1994 à 1997, même si, l'an dernier, la hausse a été plus faible ; en 1996, les crédits du ministère de la justice avaient progressé de 6 % alors que les dépenses du budget de l'Etat avaient, elles, augmenté de 2,2 %.
Par ailleurs, l'augmentation pour 1998 reste en deçà du programme pluriannuel initié par M. Pierre Méhaignerie.
C'est pourquoi, plutôt que de m'attarder sur les mérites comparés des différents budgets et sur les efforts des uns et des autres, je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, obtenir de votre part des réponses précises à plusieurs questions essentielles pour la justice de notre pays.
En premier lieu, je ne peux cacher mon scepticisme à l'égard des 3 500 emplois-jeunes qui sont en cours de création au sein du ministère de la justice.
Mon doute tient à leur mode de financement qui paraît encore incertain. Cette incertitude, je la tiens de M. Authié, rapporteur pour avis de la commission des lois. Celui-ci n'a pas manqué de souligner, dans son rapport, que, sur les 400 millions de francs que représentent ces emplois, 320 millions de francs sont issus, à coup sûr, du budget de l'Etat mais que les 80 millions de francs restants proviennent de sources encore mal identifiées.
Ce doute tient également à leur définition qui demeure problématique, même si l'on peut se réjouir que vous ayez finalement renoncé à confier des médiations pénales ou familiales aux jeunes recrutés.
Il me semble qu'avec ces emplois-jeunes l'Etat se dérobe à ses responsabilités en offrant des contrats qui n'ont, dans la réalité, rien de véritablement qualifiant et qui surtout obèrent l'embauche de personnel qualifié.
En effet, aujourd'hui, la question se pose de savoir si, en l'état actuel des moyens de la justice, il est plus judicieux de dépenser ces 400 millions de francs annuels pour financer des emplois-jeunes qui permettront de développer des activités encore périphériques aux missions essentielles de la justice ou s'il faut donner la priorité aux moyens de traitement traditionnels du contentieux aujourd'hui asphyxiés.
Cette asphyxie résulte notamment du manque de magistrats. C'est pourquoi il est nécessaire d'augmenter leurs effectifs.
Il a été annoncé, lors du dernier conseil des ministres, l'ouverture de concours exceptionnels permettant de recruter cent magistrats en 1998 et un nombre identique en 1999. C'est une bonne chose. Toutefois, le financement a-t-il été prévu ?
Par ailleurs, le projet de budget, qui prévoit la création de près de soixante-dix postes de magistrat, poursuit l'effort qui avait été engagé dans le plan de programmation pluriannuel.
Ces mesures vont dans le bon sens. Cependant, ces créations de postes seront-elles suffisantes ? Malheureusement, je ne le pense pas.
En effet, les vacances budgétaires, qui restent trop importantes en raison des délais de recrutement et de formation, viennent s'ajouter aux vacances de « friction » dues à la multiplication des mouvements de personnels ainsi qu'aux vacances ponctuelles non intégralement compensées.
Par ailleurs, les effectifs sont lourdement handicapés par les détachements très nombreux. Je ne suis pas hostile aux détachements parce qu'ils permettent aux magistrats de sortir de leur spécialité et de voir autre chose. Cependant, il est regrettable que certains soient trop longs.
Ne serait-il pas possible d'en limiter la durée ? On pourrait envisager de la fixer à trois ans. En effet, au-delà, c'est l'administration de la justice elle-même qui en pâtirait.
Enfin, la mise en oeuvre de la réforme de la procédure criminelle préconisée par M. Jacques Toubon et pour laquelle rien n'est prévu dans le projet de budget exigera des moyens importants en effectifs qu'il faut dès à présent envisager.
A ce sujet, je souhaiterais m'attarder un instant sur la réforme de l'appel en matière criminelle qu'a suspendue Mme le garde des sceaux.
Son attitude, dans ce domaine, me semble regrettable, et ce pour trois raisons.
Tout d'abord, parce que nous avons fait naître d'immenses espoirs en annonçant à des justiciables passant en cour d'assises ou devant y passer qu'ils pourraient bénéficier d'un appel.
Ensuite et surtout, parce que cette réforme était une réforme juste. Non seulement elle tendait à améliorer notre système juridique, qui, aujourd'hui, ne prévoit de double degré de juridictions que pour les infractions les moins graves, ce qui, vous l'admettrez, est particulièrement choquant.
Enfin, parce que cette réforme nous aurait permis de mieux respecter la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, l'article 2.1 du protocole n° 7 prévoit que toute personne déclarée coupable d'une infraction par une juridiction pénale a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation.
Pour toutes ces raisons j'aimerais connaître le projet de Mme le garde des sceaux en la matière, cette réforme paraissant urgente.
Toutefois, on le sait bien et le projet de budget le démontre encore aujourd'hui, l'effort de création de postes aura toujours ses limites et devra être secondé par des gains en matière d'organisation.
Aussi est-il urgent de revoir l'organisation purement administrative de la justice, en ayant toujours pour souci de la rapprocher du citoyen et de réduire ses délais.
A cette fin, comme mes collègues l'ont indiqué, il est nécessaire de réformer la carte judiciaire, de manière à mieux prendre en compte les données humaines et les impératifs de l'aménagement du territoire. Tout le monde dit qu'il faut le faire, mais personne n'ose le faire !
Il est également nécessaire de distinguer plus efficacement ce qui constitue du petit contentieux et ce qui relève de procédures plus longues.
Il faut, dans cette perspective, réexaminer la répartition des compétences entre les tribunaux, afin de les simplifier tout en ayant toujours comme premier objectif de faire trancher les litiges au plus près du citoyen.
En outre, un audit des diverses juridictions permettrait d'identifier un grand nombre de tâches souvent mineures ou subalternes, effectuées par celles-ci et dont elles pourraient être utilement déchargées, au profit, notamment, des auxiliaires de justice.
Dans le cadre de la prise en charge de la population pénale, je souhaiterais attirer votre attention sur les associations de contrôle judiciaire.
Ces dernières jouent un rôle non négligeable dans la politique d'alternative à l'incarcération mise en place depuis une dizaine d'années.
En effet, plus de 50 000 personnes leur sont confiées chaque année.
Ce succès tient aux méthodes d'intervention socio-éducatives qu'elles ont su mettre en oeuvre et qui sont aujourd'hui reconnues par l'ensemble des partenaires.
Pourtant, malgré cette dynamique, ces associations rencontrent des difficultés économiques liées à la précarité des financements, à la multiplicité des partenaires, à l'absence de dotation globale et d'inscription aux dépenses obligatoires, ainsi qu'à l'absence d'une réelle autorité de tutelle.
Actuellement, elles n'ont plus les moyens de faire face aux demandes exprimées par les uns et par les autres - l'Etat, les collectivités, les juridictions et les citoyens.
Aussi paraît-il opportun, comme le souhaitent ces associations, de créer une instance chargée d'évaluer l'intérêt et la pertinence de leurs missions, ainsi que leur utilité dans la mise en oeuvre de la politique pénale.
A cet égard, il faudrait inscrire dans la loi la dimension sociale et éducative de leurs actions, et tout spécialement du contrôle judiciaire.
Il conviendrait aussi de redéfinir les moyens de leur intervention pour accroître les alternatives à la détention, pour prévenir la récidive et pour restaurer la paix sociale au profit des collectivités locales et nationale.
Pour finir, j'insisterai sur la nécessité de mettre en place une justice qui soit attentive aux jeunes.
Mme le garde des sceaux a indiqué que la protection judiciaire de la jeunesse serait la grande priorité de ce projet de budget.
Nous nous en réjouissons, car nous ne pouvons assister sans réagir à la véritable explosion des chiffres relatifs à la délinquance des mineurs.
Dans ce sens, Mme le garde des sceaux a déclaré qu'en matière de délinquance des mineurs elle n'était pas favorable à ce que l'on se cantonne à une action uniquement éducative et qu'il fallait prononcer des sanctions en faisant en sorte qu'elles soient adaptées à chaque type de délinquance.
Pour compléter ce propos, il serait nécessaire de s'interroger sur le cadre le plus opportun à mettre en oeuvre à l'égard des multirécidivistes.
Le prédécesseur de Mme le garde des sceaux avait ouvert le débat et proposé, notamment, la création d'unités à encadrement renforcé pour ces jeunes. Malheureusement, ce dispositif a été suspendu. Aussi, Mme le garde des sceaux pourrait-elle nous faire connaître son sentiment sur ce point précis ?
Telles sont les principales interrogations que l'examen de ce projet de budget n'a pas manqué de nous inspirer. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, en ma qualité de vice-président de la commission des lois et en l'absence du président de la commission des lois, M. Jacques Larché, sans doute empêché - j'espère que ce n'est pas pour les mêmes raisons que Mme le garde des sceaux (M. Hyest fait un signe de dénégation.) - je tiens à exprimer l'émotion qui a été la nôtre lorsque nous avons appris que Mme Guigou était atteinte d'un trouble de santé qui risque d'être grave. Nous souhaitons de tout coeur qu'il ne le soit pas. Nous regrettons vivement qu'elle ne puisse être parmi nous car cela nous prive, vous me permettrez de le dire, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'agrément et de l'intérêt d'un dialogue direct avec elle. Nous le déplorons d'autant plus que nous avons toujours trouvé auprès d'elle l'audience à laquelle peuvent légitimement s'attendre les parlementaires, audience qu'elle nous a toujours accordée très généreusement et très attentivement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il est deux manières de considérer un budget, vous le savez mieux que moi. On peut l'examiner dans le contexte de la politique budgétaire générale arrêtée par le Gouvernement pour une année déterminée. Mais on peut aussi le considérer d'un point de vue plus élevé,...
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. C'est souhaitable !
M. Pierre Fauchon. ... du point de vue de l'Etat, de la mission à laquelle ce budget veut répondre, de ce qu'elle exige, et confronter cette réponse à cette exigence.
Du premier point de vue - gouvernemental, conjoncturel - et bien qu'il soit relativement facile, convenons-en, d'améliorer un petit budget - ce qui est le cas du budget de la justice - il n'est pas douteux que celui-ci puisse être considéré comme satisfaisant par rapport aux autres, et plus encore par rapport à son prédécesseur, fâcheusement victime d'une politique générale en elle-même fort justifiée.
Sur ce terrain, je me fais un plaisir de joindre ma voix à celle des rapporteurs pour en féliciter - vous voudrez bien le lui dire - Mme le garde des sceaux et en complimenter le Gouvernement qui manifeste ainsi la conscience qu'il a de la priorité dont doit bénéficier la fonction de justice après tant et tant d'années de méconnaissance, interrompue cependant - il faut le rappeler sans cesse - par le plan quinquennal de M. Méhaignerie, en 1995, plan qui va maintenant retrouver son rythme.
Du second point de vue qui nous importe davantage - celui de l'Etat - et qui entre plus profondément dans notre sujet, je n'apprendrai rien à personne en disant qu'au regard de la demande de justice les moyens offerts sont très loin de ce qui serait nécessaire. M. le rapporteur spécial a avancé tout à l'heure un chiffre plus élevé de 50 % ; je souscris à cette estimation.
Je ne reviendrai pas sur l'inventaire établi par une mission de la commission des lois, sous la présidence de notre excellent collègue M. Jolibois - son absence aussi ce matin m'inquiète - si ce n'est pour nous féliciter d'avoir préféré l'énoncé de la vérité au culte de l'euphémisme, ce qui n'est pas si courant.
En effet, nous avons dénoncé catégoriquement ce que nous avons appelé « l'hémiplégie » de la justice.
Il en est résulté un certain bruit, relayant d'ailleurs celui de précédentes enquêtes auxquelles M. Haenel n'était pas étranger. Ce bruit s'est propagé un peu partout, jusqu'à se faire entendre au sommet de l'Etat puisque, rappelons-le, voilà près d'un an, le Président de la République lui-même a marqué très solennellement sa préoccupation de voir transformée et assainie la situation matérielle et morale de la justice, qu'il s'agisse des moyens de fonctionnement, pour la situation matérielle, ou des questions d'ordre moral que pose à la justice pénale, en particulier, le respect qu'elle doit aux personnes et qu'elle se doit à elle-même, ce que l'on dénomme, un peu sommairement peut-être, son indépendance.
J'ajouterai quelques réflexions particulières à ce propos général.
La première concerne les moyens financiers proprement dits, et c'est peut-être le point auquel j'attache le plus d'importance. Je ne reviendrai pas sur une répartition qui a été évoquée par MM. les rapporteurs, mais je suis surpris de voir que leur attention ne s'est pas étendue à cet autre aspect des moyens financiers de la justice que constituent les 3 500 emplois-jeunes qui lui sont affectés. Si cela ne fait que 1 % du programme emplois-jeunes, cela représente 5,75 % des effectifs gérés par le ministère, soit, sauf erreur, 60 864 emplois en 1998. Le coût, pour l'Etat, s'élevant à 92 000 francs par emploi, cela représente 322 millions de francs, montant considérable par rapport au budget de la justice.
Il y aurait beaucoup à dire, si nous en avions le temps, sur les modalités de financement complémentaire de ces emplois-jeunes, sur les modalités de recrutement, d'encadrement et de gestion de cette jeune armada dont le destin court grand risque d'évoquer celui de son aînée, pour ne pas parler des Ateliers nationaux de décevante mémoire.
Pour nous en tenir à la justice, comment ne pas se poser et vous poser la simple question suivante : alors que l'on manque de conseillers, de juges, de procureurs, de juges d'instruction, de greffiers, de gardiens de prison et d'éducateurs, alors que l'insuffisance est partout dans l'ordre du nécessaire tout simplement et que la justice est submergée, ne tient la tête hors de l'eau qu'au prix de l'abandon d'une bonne part de sa tâche, est-il nécessaire et supportable de la doter de moyens humains complémentaires et accessoires, sinon superflus, dans des conditions qui répondent si mal à ce que sa mission exige de qualification, de conscience professionnelle et de responsabilité ?
La rémunération de 3 500 emplois-jeunes, c'est tout de même l'équivalent de 10 000 assistants de justice - on augmente très légèrement leur nombre ; d'ailleurs, ils sont demandés partout, ce qui prouve que nous avions une très bonne idée en les instituant, dans cette maison - c'est l'équivalent de 1 396 magistrats en début de carrière - les uns et les autres pourraient être des jeunes - de 6 000 magistrats à titre temporaire, de 783 conseillers de cour d'appel, l'équivalent encore de 2 546 greffiers débutants - qui seraient donc des jeunes - du même nombre de surveillants pénitentiaires en début de carrière - qui seraient, eux aussi, des jeunes.
Pour revenir à une idée qui nous tient à coeur et dont nous reparlerons, je l'espère, il y a là probablement le moyen de doter les tribunaux d'instance et de police de la capacité de traiter convenablement une bonne partie, sinon la totalité, des contentieux de masse, ce qui aurait pour contrecoup d'alléger considérablement la tâche des autres juridictions, de leur permettre de retrouver un rythme convenable et de rétablir l'ensemble du système judiciaire dans un état de fonctionnement acceptable, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle.
Nous constatons, en tout cas, que ce n'est pas l'argent qui manque et si l'on veut à tout prix le réserver aux jeunes, on peut aussi, après l'avoir réintégré dans le budget du ministère, le consacrer entièrement, mais sous le contrôle du garde des sceaux, à des jeunes et à la jeunesse en recrutant des assistants, des jeunes greffiers ou des jeunes gardiens et en renforçant les moyens de la protection judiciaire de la jeunesse ! Ainsi les légitimes préoccupations du ministre de l'emploi seraient-elles satisfaites, puisque c'est la jeunesse qui en profiterait, et le budget de la justice se verrait augmenter de 400 millions de francs, soit plus de 40 % de la majoration dont il se prévaut aujourd'hui. De même, le taux de croissance de ce budget, qui est actuellement de 4 %, passerait à plus de 5 %, ce qui serait remarquable.
Est-il trop tard ? Dans l'état où se trouve la justice, il n'est pas permis de le croire, et je ne veux pas le croire. Mais, de grâce, monsieur le secrétaire d'Etat, ne nous dites pas que tout cela résulte d'un choix du Gouvernement qui s'impose à vous-même comme aux autres ministres, nous avons déjà entendu ce genre de réponse et, justement, nous ne sommes pas d'accord sur ce choix du Gouvernement. Alors, la question est de savoir ce que vous pouvez répondre au-delà de cette formule un peu sommaire. Je veux bien que cette réponse puisse suffire au ministre, qui est « solidaire », mais elle ne nous suffit pas à nous, et encore moins à la justice.
Permettez-nous donc de conserver l'espoir de voir s'ouvrir utilement le débat sur les modalités de cette politique d'emploi pour les jeunes en ce qui concerne la justice, politique dont l'efficacité me paraît, d'ailleurs, en partie conditionnée par la diversification réaliste de sa mise en oeuvre.
Ma deuxième réflexion portera sur la nécessaire réforme de la carte judiciaire, et je rejoins ici les propos de notre rapporteur spécial et de plusieurs de mes collègues.
Inutile de revenir sur le caractère anachronique, parfois jusqu'à la caricature, de la répartition territoriale des moyens de la justice, la démonstration est faite et les exemples ne manquent pas pour l'illustrer.
Ce qui manque terriblement, avouons-le, c'est la volonté d'agir. On se réfugie, ou l'on s'est réfugié, dans des enquêtes, dans des concertations, comme si des enquêtes pouvaient contredire ou éclairer des statistiques nationales irréfutables et qui ont déjà été exploitées avec beaucoup de soin dans le rapport de la commission Carrez ; comme si des concertations locales ou régionales, sous réserve de ce que je dirai tout à l'heure, avaient quelque chance de réaliser miraculeusement un consensus au terme duquel telle juridiction serait réduite ou supprimée, et telle autre renforcée ou créée, en fonction, tout simplement, de la masse du contentieux qui serait soumis aux unes et aux autres, masse que l'on connaît parfaitement. Cette idée, simple, est sans doute trop simple et trop évidente pour l'emporter sur le poids des routines, des habitudes et des positions acquises.
Le seul préalable qui nous paraisse utile et salutaire, c'est l'établissement de la carte de ce que devrait être une répartition théorique et correcte des juridictions en fonction, par priorité, des volumes de contentieux, sans méconnaître, bien entendu, les réalités socio-politiques de l'organisation territoriale de notre pays. Sur ce point, la concertation qu'a suggérée tout à l'heure M. le rapporteur spécial pourrait trouver toute sa justification.
La comparaison entre une telle carte idéale, qui est très facile à établir, et la réalité actuelle mettrait en lumière les anomalies les plus graves et, du même coup, elle les rendrait moins défendables parce que, malgré tout, une « opération vérité » assainirait fortement cette question. Et je suis persuadé que les résistances qui se manifestent actuellement s'inclineraient devant l'évidence des réalités.
Dès lors, on pourrait arrêter un plan de redéploiement ménageant des délais convenables, tenant compte inévitablement du principe d'inamovibilité, lequel mériterait, d'ailleurs, d'être reconsidéré à la lumière des circonstances actuelles, qui le justifient infiniment moins que dans un passé lointain. Nous ne sommes plus, avec l'actuel Conseil supérieur de la magistrature, dans la situation du XIXe siècle. Il conviendrait peut-être de s'en souvenir !
Ma dernière réflexion concernera le thème quelque peu rebattu de l'indépendance des juges. Mais si l'on n'en parle pas, on a l'air d'avoir oublié l'essentiel. (Sourires.) Je me dois donc d'en parler.
A vrai dire, il me semble que cette expression, dans l'usage qui en est communément fait, recèle beaucoup d'exagération et quelque peu d'illusion.
Il est exagéré de dire que les juges ne sont pas indépendants du pouvoir politique ou de laisser entendre que ceux qui le disent n'ont pas tort.
La vérité, selon moi, au terme d'une longue expérience, est que les juges sont très largement indépendants du pouvoir politique à condition qu'ils le veuillent bien, évidemment. Parfois, ils sont même indépendants de la loi, ce qui n'est pas nécessairement un progrès ! Puissent-ils être toujours aussi indépendants de leurs préjugés personnels. J'ai lu à cet égard, dans le rapport spécial, quelques réflexions qui m'ont intéressé. Puissent de même ces juges être toujours aussi indépendants de leurs passions ou de celles de leurs syndicats, puisque la confusion des genres et la confusion des esprits ont fait que les magistrats sont syndiqués, ce dont on s'inquiète beaucoup moins que de leur supposée dépendance à l'égard de leur hiérarchie.
J'ai dit aussi qu'il y avait beaucoup d'illusions dans ce domaine. Il est illusoire, en effet, d'attendre tant et tant de textes nouveaux, notamment d'interdictions formelles dont chacun sait qu'elles ont fort peu de prise sur le réel.
La vraie indépendance, mes chers collègues, nous le savons parfaitement, elle est dans les caractères, elle n'est pas dans les textes. Si elle n'est pas fortement ressentie, aucun texte n'empêchera les uns de chercher à plaire et les autres de chercher à influencer. Et, s'il n'y a pas d'écrit, il y aura encore le téléphone. Il ne suffit pas de changer les textes pour changer les consciences.
Il reste, et je tiens à lui rendre hommage sur ce point, que la proclamation par Mme le garde des sceaux d'un principe de non-ingérence a été en lui-même sain et mérite, à ce titre, d'être salué.
On éclaircirait beaucoup cette question en rappelant qu'il existe deux sortes de magistrats en France : ceux qui sont des juges et ceux qui ne le sont pas, les uns et les autres étant des magistrats, ce qui crée une très fâcheuse confusion, car seuls peuvent être appelés juges, et c'est l'indépendance de ces derniers qu'il convient de sacraliser, ceux qui rendent la justice !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Tout à fait !
M. Pierre Fauchon. Ceux qui « poursuivent » ne sont pas des juges, même s'ils sont, dans notre système judiciaire particulier, des magistrats. Or, dans un véritable Etat de droit, les magistrats chargés de la poursuite ne sont pas, à l'égard de cet Etat, et donc de son appareil gouvernemental, dans une situation différente de celle des avocats à l'égard de leurs clients. Rappelons ici l'expérience de la Grande-Bretagne, qui reste maîtresse dans ces matières.
On voit donc, dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, que nous vivons dans une confusion et que, sous couvert de magistrature, on confond les juges et ceux qui ne le sont pas. Il y a là une sorte de survivance de l'Ancien Régime, ce qui nous prouve qu'il y a bien des bastilles à réduire encore.
J'ai cru comprendre qu'il était dans les intentions de votre gouvernement de s'attaquer à de telles bastilles. La carte judiciaire n'en est-elle pas une autre ? Je forme des voeux pour qu'il le fasse avec ce qu'il faut de discernement et ce qu'il faut de résolution. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Durand-Chastel.
M. Hubert Durand-Chastel. Monsieur le secrétaire d'Etat, permettez-moi, tout d'abord, de joindre mes voeux à ceux que mes collègues ont déjà exprimés et de souhaiter un prompt rétablissement à Mme le garde des sceaux.
Le plus grand mal dont souffre le système judiciaire français réside dans l'extrême lenteur de ses procédures, à un point presque dissuasif pour tout justiciable. Le résultat en est une insatisfaction générale des Français vis-à-vis de leur justice, j'irai même jusqu'à dire une perte de confiance dans cette institution régalienne.
Mme le garde des sceaux nous annonce vouloir remédier à ce grave handicap, mais l'augmentation de 4 % de son budget pour l'année prochaine ne saurait suffire à inverser une situation qui perdure depuis de trop nombreuses années. A une époque où les liens sociaux se distendent, en particulier ceux de la famille, la demande de justice explose. Ainsi, il y eut deux millions de décisions au civil l'an dernier ; quant aux crimes et délits, on dépasse les dix millions d'affaires jugées, soit un doublement dans les dernières années.
Aussi est-il urgent de réformer notre système judiciaire, en simplifiant les procédures et en assouplissant le règlement des conflits par l'instauration de transactions sous l'autorité des juges.
J'insiste, à ce sujet, sur la nécessité d'encourager tous les justiciables à recourir à l'arbitrage en matière civile.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
M. Hubert Durand-Chastel. A l'instar de la pratique connue dans de nombreux pays, les magistrats à la retraite pourraient servir d'arbitres ; ces procédures d'arbitrage peuvent être entérinées par les magistrats, qui interviendraient donc à trois niveaux. Dès l'assignation, les magistrats proposeraient aux justiciables de recourir à des listes d'arbitres, qui pourraient siéger dans les mairies ou dans les chambres de commerce et d'industrie, notamment. Ils auraient au préalable désigné ces listes d'arbitres qu'ils recommanderaient. Enfin, ils donneraient autorité de la chose jugée aux sentences arbitrales.
Une telle procédure devrait être systématisée et encouragée par les professionnels de la justice. Il s'agirait, pour nous, Français, d'un véritable changement culturel, dans l'intérêt d'un meilleur fonctionnement de la justice. Le ministère a-t-il l'intention de mettre en oeuvre de telles procédures arbitrales ?
Dans le plan d'urgence élaboré pour réduire les délais de traitement des affaires par les juridictions, il est prévu le recrutement exceptionnel de magistrats, ce qui alourdira d'autant le coût de fonctionnement de la justice. N'aurait-il pas été plus efficace de décharger les magistrats en place des nombreuses tâches administratives qui ne leur incombent pas ?
La simplification des procédures est également attendue par les Français établis hors de France, que j'ai l'honneur de représenter ici. Qu'il s'agisse des démarches relatives à l'état civil, à Nantes, ou de la délivrance des certificats de nationalité dans les différents tribunaux d'instance compétents, nos compatriotes se plaignent de délais trop longs pour des procédures courantes, d'autant que les services spécialisés pour l'étranger ne bénéficient pas toujours d'un personnel suffisant pour faire face aux nombreuses demandes.
Je mentionnerai toutefois la nette amélioration de rendement du service de la rue Ferrus, à Paris, chargé de la délivrance des certificats de nationalité des Français nés et résidant à l'étranger, hors pays du Maghreb et océan Indien. Après de multiples interventions, la loi du 8 février 1995 a judicieusement confié cette tâche administrative à des greffiers en chef assistés d'autres greffiers, bien formés et dédiés entièrement à cette tâche. Dans le cas de la rue Ferrus, le stock des dossiers en instance, de 16 000 en 1995, est maintenant réduit à 9 000 et sera ramené à 6 000 en 1998, chiffre considéré comme satisfaisant.
On ne peut pas en dire autant d'autres tribunaux d'instance spécialisés, comme celui de Saint-Denis de la Réunion, compétent pour les Français de Madagascar, qui reste très engorgé, pour ne pas dire complètement bloqué.
Dans le cadre des recrutements de greffiers qu'annonce pour 1998 Mme le garde des sceaux, a-t-il été prévu de renforcer les services consacrés aux Français de l'étranger ?
Le bon fonctionnement des services administratifs et judiciaires dont ils dépendent est essentiel pour des Français qui, éloignés de leur patrie, cherchent à maintenir le lien avec leur pays d'origine. Les lenteurs et les complications administratives qu'ils rencontrent souvent sont de nature à les décourager vis-à-vis de leur appartenance nationale, ce qui serait contraire non seulement à leur intérêt mais aussi à l'intérêt de notre pays : les expatriés participent à son rayonnement partout dans le monde, et encore ils sont encore en nombre insuffisant.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de la réponse que vous me ferez à ce sujet. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Balarello.
M. José Balarello. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaiterais que vous transmettiez à Mme le garde des sceaux nos souhaits de prompt rétablissement.
Mes chers collègues, la justice en France a besoin d'un traitement urgent, tous les gouvernements, de droite comme de gauche, s'accordent sur ce point.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le budget de la justice présente une progression de 4 %, pour approcher 25 milliards de francs. Il s'agit d'un redémarrage de l'effort en faveur de la justice, car si ce budget avait connu une progression en 1996 de 6,06 %, celle-ci n'était plus que de 1,9 % dans le budget pour 1997.
Cependant, il nous faut relativiser cet effort, car la part du budget de la justice ne représente que 1,57 % de la totalité du budget de la nation alors qu'en Allemagne, pour l'année 1997, la part du budget de la justice dans le budget total représente 1,86 % et, aux Pays-Bas, où le délai de traitement des affaires par les tribunaux de grande instance est de deux cent trente-deux jours, soit 7,7 mois, au lieu de 16,1 mois chez nous, le budget de la justice représente 2,5 % du budget de l'Etat.
Compte tenu du temps qui m'est imparti, je n'insisterai que sur quatre points qui me paraissent plus importants que les autres : la protection judiciaire de la jeunesse, la carte judiciaire, la pénalisation et l'espace judiciaire européen.
Les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse progressent de 4,4 %. Il est essentiel, mes chers collègues, que tous ensemble nous réfléchissions au problème la violence chez les jeunes, car c'est un fait nouveau dans notre pays.
Le profil de ces jeunes correspond, la plupart du temps, à des échecs scolaires : leurs résultats sont de 10 % à 30 % inférieurs à la moyenne nationale, un grand nombre de ces jeunes âgés de quatorze ans à dix-huit ans ne savent ni lire ni compter - les enseignants le savent - et le chômage les touche plus que les autres car ils n'ont aucun métier.
Aussi, la prévention doit être organisée sur deux pôles : au niveau du système scolaire, en affectant des crédits plus importants de l'éducation nationale sur ce qu'il est convenu d'appeler les « études dirigées » et en envisageant des réformes afin d'éviter la constitution de classes lourdes, mais également au niveau du tissu associatif, qui doit s'implanter de façon plus concentrée dans les zones difficiles en proposant des apprentissages et des activités adaptées aux goûts de ces jeunes gens. Le recours aux emplois-jeunes - 3 500 sont prévus - est, à mon avis, un bon élément.
Lorsque je présidais l'office d'HLM de Nice et des Alpes-Maritimes - qui gère 23 000 logements avec de grands ensembles pouvant compter jusqu'à 3 000 foyers - je subventionnais non seulement l'association SOS-devoirs, qui assurait des études après la classe, mais également plus de cinquante clubs sportifs ou associations. J'avais fait acheter trois cars pour emmener les jeunes de deux grands ensembles, à tour de rôle, faire du ski. Et beaucoup d'entre eux, monsieur le secrétaire d'Etat, n'avaient jamais vu la neige ! J'ai fait même acheter un Zodiac pour leur faire faire du ski nautique. Tous ces jeunes étaient passionnés, et je puis vous dire que nous n'avons jamais eu de problèmes dans ces grands ensembles.
Bien évidemment, il faut ajouter à cela un emploi. C'est la raison pour laquelle les zones franches, créées par M. Jean-Claude Gaudin, sont des expériences à suivre de très près. Dans celle qui a été créée dans les Alpes-Maritimes, dans le quartier de l'Ariane, de nombreuses entreprises se sont déjà implantées.
En matière de répression, votre budget prévoit 71 millions de francs de crédits de paiement consacrés à la création, à la rénovation et à l'extension des structures d'accueil pour jeunes ainsi que la création de cent emplois, dont la moitié d'éducateurs.
Mais, au-delà des crédits, je pense qu'il faudra également réfléchir sur les résultats : les foyers pour jeunes délinquants sont parfois des écoles de perfectionnement à la délinquance. Faites-en des centres d'apprentissage !
Quelle est, à ce propos, votre orientation en ce qui concerne les unités à encadrement éducatif renforcé ?
Le deuxième problème sur lequel je veux attirer votre attention concerne la carte judiciaire et les écarts entre les juridictions quant au traitement des dossiers.
Comme le souligne le rapport Carrez, il nous faut considérer que la justice n'est pas rendue uniformément sur le territoire français.
Ne pensez-vous pas qu'une bonne part des dysfonctionnements actuels tient à la volonté de faire fonctionner selon des règles homogènes des juridictions qui n'ont aucune réalité commune ?
A titre d'exemple, l'écart de population entre les ressorts des cours d'Aix-en-Provence et d'Agen est de un à six, et de un à dix en volume d'affaires traitées.
La carte judiciaire française comprend certaines zones qui reflètent encore - je vais peut-être vous faire sourire - le réseau des places-fortes et des villes médiévales, où le droit de justice des seigneurs semble avoir survécu sans discontinuité jusqu'à nos jours, et ce - je ne peux résister au désir de vous le rappeler - à l'exception de Nice, place-forte savoyarde depuis le 28 septembre 1388, à qui le Second Empire, en 1860, a retiré sa cour d'appel. Mais j'aurais mauvaise grâce, monsieur le secrétaire d'Etat, à en reparler de façon trop insistante puisque je l'ai déjà fait ici même, le 14 octobre dernier, lors du débat sur une question orale posée à Mme le garde des sceaux.
Je citerai cependant deux chiffres : en 1996, on a dénombré 306 978 affaires en cours pour l'ensemble des trente-trois cours d'appel de France, la moyenne d'affaires en cours par cour d'appel s'élevant donc à 9 302. Pourtant, la cour d'appel d'Aix à elle seule en a dénombré 56 008 !
Aussi la durée de règlement des affaires est-elle de 23,5 mois à Aix-en-Provence, alors que la moyenne nationale est de 15,6 mois, chiffre déjà élevé.
La situation est devenue si critique qu'un justiciable grassois vient de faire condamner l'Etat à lui payer 50 000 francs de dommages et intérêts pour la lenteur de la justice. Cette personne avait en effet fait appel d'un jugement du conseil des prud'hommes et le parquet général d'Aix-en-Provence lui avait notifié que son appel ne serait pas examiné par la cour d'appel avant quarante mois.
Son cas n'est pas isolé dans le ressort de la cour d'Aix-en-Provence, notamment dans le département des Alpes-Maritimes, et les risques sont nombreux de voir une jurisprudence se développer et votre budget mis à mal.
Nice, cinquième ville de France, se verra accorder, sur votre proposition, des audiences foraines tenues par des magistrats venus de la cour d'Aix-en-Provence. Lorsque l'on sait que 40 % des affaires traitées par la cour d'Aix-en-Provence émanent des Alpes-Maritimes, on n'est pas persuadé que cette solution permette de réduire les délais d'instruction des affaires.
Aussi, pour quelles raisons a-t-on décidé que la création, ne serait-ce que de deux chambres détachées, n'était pas nécessaire ? Elle avait pourtant été promise par plusieurs gardes des sceaux, le premier étant M. Chalandon !
Je sais que le lobby aixois est puissant, même à la Chancellerie. (M. le secrétaire d'Etat sourit.)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Eh oui !
M. José Balarello. Eh oui ! Je dis ce que je pense !
Pourquoi cet ostracisme contre les Alpes-Maritimes, Nice étant la seule grande ville de France à ne pas avoir de cour d'appel en son sein ou à proximité ?
Comme je suis tenace, nous en reparlerons, car les situations contraires au bon sens ne peuvent, à mon avis, perdurer.
Votre budget prévoit l'affectation de soixante-dix magistrats dans les cours d'appel les plus encombrées, de deux cent trente fonctionnaires de greffes et de deux cent vingt assistants de justice. Vous en êtes conscient, monsieur le secrétaire d'Etat, l'amélioration de la qualité de la justice passe par un accroissement du nombre de magistrats et de fonctionnaires, mais surtout par la nécessité de revoir la carte judiciaire.
Il importe sans doute aussi d'augmenter, comme vous l'a suggéré le rapporteur spécial, M. Haenel, les compétences des tribunaux d'instance. Oui, vous avez parfaitement raison, mon cher collègue !
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Je vous remercie.
M. José Balarello. D'ailleurs, si l'on voulait remettre la justice à flot, il faudrait augmenter les effectifs du ministère de la justice de 2 216 magistrats et 4 681 fonctionnaires : je reprends là les estimations faites en 1994 dans le rapport Carrez, mais, en considérant la progression du nombre d'affaires, on peut penser que ces chiffres sont toujours d'actualité.
Le troisième problème sur lequel j'attire l'attention du Sénat et de la Chancellerie résulte de ce que l'on pourrait appeler la « pénalisation » de notre droit.
Si, effectivement, une meilleure organisation de la justice est nécessaire, l'encombrement des tribunaux résulte au départ de la progression constante du nombre d'affaires à traiter.
Je relisais, voilà quelques jours, le livre d'Antoine Garapon et de Denis Salas - deux magistrats que vous connaissez bien, monsieur le secrétaire d'Etat - La République pénalisée : il est très révélateur de la complexité de la situation créée, je l'avoue, par le Parlement, qui devrait quelquefois, tous partis politiques confondus, refuser de légiférer sur les textes inutiles que lui proposent les gouvernements, qu'ils soient de droite ou de gauche, d'ailleurs, et de pénaliser à tout va.
Alors que la réglementation fiscale, le code de l'urbanisme et le droit du travail sont d'application quotidienne, le droit pénal est censé n'intervenir qu'en renfort, pour les garantir et en sanctionner les inobservations les plus graves. Or notre droit pénal compterait pourtant près de 13 000 incriminations, d'après ces deux magistrats, qui dénoncent ce qu'ils appellent une « démocratie de prétoire » résultant d'une alchimie entre trois éléments : l'irruption des victimes, le pouvoir d'accuser et la presse à l'affût. Selon eux, le ministère de la justice ne peut donner une liste exhaustive des incriminations en vigueur. Est-ce exact, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Il est devenu impossible de faire la distinction entre les transgressions graves et les simples fautes professionnelles. Selon, toujours, ces deux magistrats - et je partage leur point de vue - il faut retrouver la responsabilité civile : c'est en retrouvant des instances de régulation et une responsabilité civile, commerciale, administrative et professionnelle que l'on pourra dépénaliser un certain nombre de délits et réduire d'autant les recours abusifs à la plainte, qui est gratuite et pourvoyeuse de dossiers en cours dans nos tribunaux, le tout ralentissant notre système judiciaire.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, j'évoquerai un quatrième et dernier point, qui est peut-être le plus important.
Il va falloir organiser rapidement l'espace judiciaire européen. Depuis le 25 janvier 1997, ce sont plus de cinq cents magistrats européens qui ont signé l'« Appel de Genève ». Le texte de cet appel est très significatif des problèmes rencontrés par la justice des pays européens dans les procédures d'extradition et dans les enquêtes à mener hors du territoire national, notamment dans les affaires de grand banditisme, de réseaux de blanchiment, de trafics de drogue et, depuis peu, de filières d'immigration.
Ces cinq cents magistrats demandent l'abolition des protectionnismes dépassés en matière policière et judiciaire et l'instauration d'un véritable espace judiciaire européen mettant en application les accords de Schengen qui prévoient la transmission directe de commissions rogatoires internationales et la transmission du résultat des investigations entre juges, sans interférences du pouvoir exécutif et sans recours à la voie diplomatique.
Je pense que ces magistrats ont raison, monsieur le secrétaire d'Etat. Pouvez-vous me faire connaître où en est, en ce domaine, l'application des accords européens ?
Un magistrat spécialiste de la lutte antimafia propose par ailleurs la création de « missions pluridisciplinaires mobiles », constituées d'un policier, d'un douanier et d'un inspecteur des impôts et se déplaçant à la demande de la justice. L'Europe vivant avec des textes qui, en ces domaines, sont obsolètes puisque datant de la fin des années cinquante, l'Appel de Genève doit, à mon avis, être entendu. Comment réagissez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, à cette demande pressante des magistrats, magistrats instructeurs pour la plupart ? (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Badinter.
M. Robert Badinter. Monsieur le secrétaire d'Etat, il va de soi que, comme chacun des intervenants, je vous prie de transmettre à Mme le garde des sceaux nos voeux de prompt rétablissement. Je sais que la fonction qu'elle occupe est difficile, je dirai même parfois cruelle, lorsqu'on l'exerce avec coeur, ce qui est son cas. Qu'elle se ménage et qu'elle soit rapidement de retour parmi nous.
Je regrette d'autant plus son absence que j'aurais eu le plaisir de lui dire avec quelle satisfaction le groupe socialiste accueille et vote son premier budget.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Robert Badinter. S'agissant d'une discussion sur le budget de la justice, je ne me lancerai pas sur les terrains qui ont été évoqués çà et là. Je me contenterai d'analyser certains postes budgétaires, plus particulièrement ceux des services judiciaires, puisque le problème réside d'abord dans le fonctionnement de la justice au regard des moyens dont elle dispose.
La satisfaction que j'ai évoquée tient d'abord au montant des crédits. Ainsi, la hausse du budget de la justice est, en soi, importante : 4,03 %. C'est une progression sensible, chacun le reconnaît, par rapport à celle de l'année dernière qui, avec ses 1,77 %, ne couvrait pas l'inflation. Même en calculant sur deux ans - 1996-1997 - on arrivait à une augmentation moyenne de 3,4 %, sensiblement inférieure à celle que connaît le budget qui nous est présenté.
Nous éprouvons de la satisfaction aussi quand il s'agit de comparer le montant du budget de la justice à celui du budget de la nation dans sa globalité : je rappelle, à cet égard, que le budget de l'Etat connaît, en cette période de rigueur, une hausse de 1,36 %. C'est dire que l'on a véritablement voulu marquer une priorité pour l'institution judiciaire.
Si l'on y ajoute le dégel intervenu de 180 millions de francs et de 600 emplois, dégel engagé dès le mois de juillet 1997, on constate l'importance des progrès réalisés.
Mais il y a de la satisfaction aussi pour celui qui s'applique à examiner l'affectation des ressources : priorité est donnée, en effet, au secteur si important aujourd'hui de la protection judiciaire de la jeunesse, avec une progression des crédits de 4,14 %.
Une attention particulière est accordée au fonctionnement quotidien de la justice, notamment à l'amélioration des conditions de fonctionnement des juridictions et à la présence de la justice dans les quartiers sensibles.
Mes amis MM. Authié et Delfau évoqueront successivement les crédits pénitentiaires et les crédits affectés à la protection judiciaire de la jeunesse, sujets que je viens seulement d'esquisser.
Pour ma part, je m'attacherai aux services judiciaires comme chaque année.
Tout d'abord, en masse, la progression des crédits des services judiciaires est supérieure à celle des crédits du budget total de la justice : 4,71 %, au lieu de 4,03 %.
La progression des effectifs est remarquable : le projet de budget prévoit la création de 300 emplois, contre 96 seulement en 1997.
Chez les magistrats professionnels, soixante-dix postes ont été créés en 1997. Compte tenu de l'allongement de la durée d'application de la loi de programme de M. Méhaignerie, loi de programme qu'il faut absolument respecter - et malgré la création de trente postes seulement en 1997, nous l'avions relevé avec affliction car soixante étaient prévus par la loi - le recrutement que je viens d'évoquer permettra de rattraper, au moins pour une bonne part, le retard pris dans l'exécution de la loi de programme.
J'ai parlé de l'affectation des ressources. Les nouveaux postes sont affectés en priorité dans les secteurs les plus encombrés, notamment les cours d'appel, les juridictions pour mineurs, les affaires familiales, le service d'application des peines.
Nous approuvons ces choix, mais nous demandons que ne soit pas perdue de vue la question du nécessaire renforcement des moyens de l'instruction, qui demeure un problème clé de notre institution judiciaire.
Nous avons tous appris par Mme le garde des sceaux qu'un concours extraordinaire pour le recrutement de magistrats - 100 en 1998 et 100 en 1999 - doit être soumis au Parlement. Nous en débattrons le moment venu. Ces effectifs contribueraient, en effet, à renforcer la capacité d'action de la justice.
Il demeure, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'Ecole nationale de la magistrature doit rester le foyer premier de recrutement de la magistrature. J'avoue que je suis inquiet lorsque je vois le faible nombre de postes - 154 en 1997 - qui sont mis au concours. C'est extrêmement préoccupant et, de surcroît, tout à fait décourageant pour les meilleurs de nos étudiants. Au moins ai-je relevé avec satisfaction que l'ENM est dotée de crédits plus importants et sont de près de 10 % en augmentation.
J'en viens aux greffiers, sans lesquels aucun progrès n'est possible dans le fonctionnement de la justice.
La loi prévoit la création de 230 postes, dont 10 de greffiers en chef et 90 de greffiers. Ce progrès est d'autant plus sensible que, je le rappelle, aucun concours de recrutement n'était intervenu en 1997.
Par ailleurs, j'approuve la revalorisation indemnitaire des agents des catégories A, B et C.
Je relève avec plaisir l'importance des crédits consacrés au recrutement de 220 assistants de justice. Leur concours est très apprécié par les magistrats. Il faut de plus en plus développer cette fonction, qui permet de surcroît - j'en reviens à la question des étudiants - de mieux préparer les étudiants de troisième cycle aux carrières de la magistrature.
Voilà les progrès que j'ai constatés et les satisfecit qui s'imposent. Est-ce à dire que notre inquiétude sur le fonctionnement de la justice est pour autant dissipée ? Certes pas !
On relève toujours la modicité du budget de la justice et, monsieur le rapporteur spécial, vous avez à juste titre mis l'accent sur ce point.
J'avais déjà eu l'occasion de le rappeler l'année dernière, si l'on regarde l'évolution du budget de la justice, on constate que, depuis 1981, il a toujours augmenté régulièrement de presque 0,25 % par an. En francs constants, il a plus que doublé en quinze ans. Sa part dans le budget de l'Etat s'est accrue de 50 % sur la même période. Il s'agit là d'un effort budgétaire régulier, malgré, de temps en temps, des hausses et des régressions, mais, il faut bien le dire, toujours insatisfaisant.
Il en est insuffisant pour une raison simple : l'effort d'accroissement budgétaire ne peut pas être comparé à l'inflation judiciaire, qui est galopante. Les causes en sont connues ; elles ont été analysées bien des fois dans cette enceinte, notamment récemment par l'excellent rapport de nos collègues MM. Jolibois et Fauchon.
Ces causes de l'inflation judiciaire sont inscrites dans la structure même de notre société. Elle est de plus en plus réglementée, de plus en plus déchirée par les conflits individuels et collectifs de toute nature, notamment, vous l'avez évoqué, dans le domaine familial, mais dans bien d'autres aussi.
Le recours accru à l'aide juridique, qui est en effet un très grand progrès social et dont les ressources, d'ailleurs, progressent, ne peut aussi que contribuer à accroître les demandes judiciaires.
Ajoutons que l'effacement des modes traditionnels de solution des conflits par des autorités morales : le maire, l'instituteur, le prêtre, a disparu.
Bref, tout concourt à ouvrir la voie à l'inflation judiciaire et également, je le rappelle, à l'augmentation constante de l'usage des voies de recours.
Au pénal, on y remédie par une technique que chacun connaît et sur laquelle on peut s'interroger : le classement sans suite ; mais, en matière civile, rien n'est possible.
Dès ce moment-là, je le dis clairement, je le répéterai toujours, il n'y a que deux remèdes face à une telle situation.
Le premier, c'est évidemment l'accroissement considérable des crédits des services judiciaires, qui s'élèvent à 11 milliards de francs environ, soit 44,4 % des crédits du ministère. J'ai fait les calculs et, comme le temps ne me permet pas de les développer ici, je les tiens, bien entendu, à votre disposition. S'il était porté à 15 milliards de francs en francs constants, le fonctionnement de notre justice ne connaîtrait plus de problème.
Le coût de rénovation de la justice française, service public essentiel à la disposition des justiciables, est de 4 milliards de francs par an. Ce montant, cher monsieur le secrétaire d'Etat, par rapport à un budget global de 1 877,5 milliards de francs que vous avez la lourde responsabilité, je le sais, de gérer, représente une augmentation de l'ordre de 0,22 %.
Des choix doivent être opérés dans un Etat.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Robert Badinter. Le Président de la République, première autorité de l'Etat, vous avait laissé augurer dans son discours lors de l'installation de la commisssion Truche que l'heure était venue. Comme l'a dit le premier président Truche en tête de son rapport : « Notre pays n'aura jamais que la justice dont il veut bien payer le prix. »
J'ai constaté sur quinze ans que, malgré toutes les déclarations d'intention, tous les gouvernements et, cher monsieur le secrétaire d'Etat, tous les ministres successifs du budget - et j'en ai fréquentés, fort amicalement ! - ne se résignent pas à véritablement doter la justice. Pourquoi ?
Certains - je pense en particulier à notre amie Mme Blandine Barret-Kriegel - vous diraient que, historiquement, l'Etat français a toujours été un Etat d'administration et n'a jamais voulu devenir un Etat de justice. La conséquence se traduit dans les budgets. Nous ne sommes pas capables de faire à cet égard la véritable révolution culturelle qui s'impose. Je le dis clairement, la barre se situe à 4 milliards de francs - en dessous, nous n'arriverons qu'à bricoler - et ce n'est qu'à ce niveau-là que nous aurons une institution judiciaire répondant aux besoins de la France.
Je souhaite par conséquent que le Gouvernement, dans le cadre de législature et compte tenu du temps qui et le sien, de votre excellente compétence, monsieur le secrétaire d'Etat, et de votre intérêt particulier, je le sais, pour la chose judiciaire, mesure que tout se joue à 4 milliards de francs près !
Même avec un budget accru, le redressement de la situation judiciaire appellerait, à mon sens, quatre ordres de mesures.
La première est l'élaboration de la carte judiciaire. Je n'insiste pas sur ce point, car nous sommes tous d'accord.
La deuxième est la simplification des procédures. Je rappelle à cet égard les excellentes propositions du rapport du président Coulon.
La troisième est le traitement, auquel pense la Chancellerie avec intérêt et précision, des contentieux de masses. Il y a des approches nouvelles qu'il faut absolument mettre en oeuvre.
Enfin, la quatrième, sur laquelle, vous le savez, je reviens chaque année avec la même passion, est le recours systématique au mode de règlement alternatif des conflits par la conciliation et la médiation. C'est le cas pour toutes les justices, de tous les grands Etats ; à cet égard, ne nous leurrons pas.
Je terminerai en vous donnant lecture d'une lettre que m'a adressée le président Coulon à la suite d'une réunion que nous avions sur les progrès de la médiation et de la conciliation, bref, sur les modes de règlement alternatif ; certains pensent aussi à l'arbitrage.
Le président Coulon a conduit une enquête pour savoir où nous en étions dans ce domaine et voici la réponse qu'il m'a autorisé à vous communiquer :
Monsieur le président, les premiers renseignements que j'ai pu obtenir sur la médiation révèlent que cette institution relève encore essentiellement du domaine de la réflexion.
Au tribunal de Paris, une dizaine de médiations ont été prononcées en 1996 par les juridictions du fond et une vingtaine par les juges des référés. Les médiations familiales » - dont on fait volontiers cas dans les colloques - « sont de l'ordre de cinquante, étant observé cependant que les parties doivent ressaisir le juge.
Des recherches ont été effectuées auprès des tribunaux de Bordeaux, Lille, Lyon, Rennes et Toulouse. Ces juridictions ne pratiquent, et encore très rarement, que la médiation familiale. »
J'arrête là ma lecture. Comme je vous le disais, le tribunal de Paris et le barreau vont créer un groupe de travail pour tenter de généraliser la médiation judiciaire.
C'est dire que nous sommes au début de l'entreprise ; c'est dire aussi qu'à partir des travaux qui ont été plusieurs fois évoqués dans cet hémicycle - je pense en particulier au rapport Jolibois-Fauchon - il est évident que doit maintenant véritablement commencer l'ère de ce que l'on appelle le mode alternatif de solution des conflits.
Ce sont là des perspectives que, j'en suis convaincu, le Gouvernement aura à coeur de mettre en oeuvre, et je pense que nous aurons l'occasion d'oeuvrer avec lui dans ce domaine comme dans tant d'autres.
Simplement, s'agissant aujourd'hui du vote du budget, monsieur le secrétaire d'Etat, vous direz à Mme le garde des sceaux que nous le voterons magna cum laude. (Applaudissements sur les travées socialistes. - MM. Hyest et Leclerc applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, comme l'ensemble des citoyens et, comme la plupart des orateurs qui interviennent dans ce débat, je ferai part de mon aspiration à une justice plus simple, plus rapide, plus efficace et plus proche du justiciable. Si ce souhait est bien souvent exprimé, c'est que la réalité est tout autre.
En effet, il est regrettable de constater qu'un des principaux rouages du fonctionnement de la démocratie, l'un des piliers de notre République, manque à l'évidence cruellement de moyens.
Quotidiennement, il est fait état de l'encombrement des tribunaux et de la lenteur des procédures. On assiste un peu partout dans notre pays à l'asphyxie d'une grande partie des juridictions. A tel point qu'à la suite d'un délai anormalement long un tribunal a récemment indemnisé un justiciable pour « préjudice moral résultant du maintien anormal d'une tension psychologique ». Cette décision pourrait faire jurisprudence quand on sait que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme impose à la justice de rendre ses décisions dans un délai raisonnable.
L'inflation du contentieux, notamment en matière civile, et la « juridicisation » des rapports sociaux expliquent en partie cette situation.
De 1975 à 1994, le nombre d'affaires nouvelles examinées par les tribunaux est passé de 200 000 à 650 000, soit une augmentation de 220 %. Doit-on se plaindre de cette évolution sous prétexte qu'elle engorge les tribunaux ? A mon sens, c'est délicat, car elle témoigne finalement - s'il l'on fait abstraction des dysfonctionnements qui sont mal vécus - de l'existence d'une confiance envers le règlement des litiges par la justice. Les citoyens savent se saisir des tribunaux et, visiblement, ils n'hésitent pas. Toutefois, des moyens doivent accompagner cette demande dans les mêmes proportions.
Les justiciables doivent pouvoir obtenir un jugement ou une réparation dans des délais raisonnables. Je crois, mes chers collègues, que, sur ce point, l'unanimité est acquise.
Par ailleurs, apporter satisfaction aux justiciables quant aux délais implique que l'on réponde bien évidemment aux besoins de ceux qui travaillent à rendre la justice, car si la lenteur des procédures est difficile à supporter par les premiers, elle n'en est pas moins difficile à vivre pour les seconds.
La grève déclenchée par les bâtonniers le 6 novembre dernier traduit le malaise de toute une profession. Les avocats réclament un plan d'urgence afin de « répondre sur tout le territoire aux besoins de justice et d'accès au droit des citoyens ». Habituellement enclins à la pondération, les bâtonniers ont clairement manifesté leur colère. La situation est donc vraiment dramatique.
Il faut imaginer qu'au quotidien les avocats sont confrontés à toutes les carences que j'ai évoquées plus haut. Non seulement leur travail est parfois rendu pénible par l'insuffisance des moyens matériels et humains des tribunaux, mais, en plus, c'est à eux que revient le soin d'annoncer aux clients qu'un divorce demandera deux ans avant d'être prononcé, que le jugement d'une affaire de copropriété prendra trois ans ou que la reconnaissance de leurs droits se fera d'ici à quatre ans.
Ensuite, outre la désagréable tâche d'annoncer ces faits, les avocats reçoivent parfois en retour des critiques ; le justiciable, méconnaissant les réalités, peut parfois, hâtivement, remettre en cause la compétence de celui qu'il a pourtant choisi pour le défendre.
Et ne parlons pas des conditions matérielles dans lesquelles exercent certains magistrats, avocats et tout le personnel de justice !
Dans ma région, le tribunal de grande instance de Toulouse, abrité par un bâtiment vénérable de 1850, est dans un état de délabrement à la limite du supportable ; la vétusté des locaux, l'ancienneté des installations électriques et du matériel imposent des rénovations urgentes. Hélas, celles-ci tardent à venir !
Mais j'espère, monsieur le secrétaire d'Etat, que les nouveaux moyens inscrits dans la loi de finances pour 1998 vont permettre de répondre à tous ces besoins.
Si le tableau que je viens de brosser est un peu noir, j'en conviens, nous avons toutefois la satisfaction, cette année, d'avoir à examiner un budget de la justice en forte hausse. En atteignant 25 milliards de francs, il progresse de 4 % par rapport à 1997. C'est un point très positif qui traduit à l'évidence la volonté du Gouvernement de faire de la justice une réelle priorité.
Dans un contexte général de maîtrise des finances publiques, ce budget a le privilège de connaître une hausse trois fois supérieure à celle du budget de l'Etat.
En matière de création d'emplois, le ministère de la justice se place au second rang derrière l'enseignement supérieur, autre grande priorité du Gouvernement.
A la lecture des documents budgétaires, monsieur le secrétaire d'Etat, on remarque une concentration des crédits sur l'amélioration du fonctionnement de la justice au quotidien, sur la jeunesse et sur la modernisation des établissements pénitentiaires.
S'agissant du fonctionnement de la justice, je ne reviendrai pas sur ses difficultés puisque j'en ai traité au début de mon intervention. Je souhaiterais toutefois féliciter le Gouvernement pour l'effort qu'il engage dans ce domaine avec, notamment, le renforcement des effectifs dans les juridictions, l'abondement des crédits de fonctionnement ou la poursuite des programmes immobiliers.
Toutefois, pour faire face à l'augmentation des plaintes, qui pourrait être plus rapide que l'amélioration des structures, il est nécessaire de développer parallèlement les procèdures de conciliation et de médiation.
Sur la seconde priorité affichée par le budget, c'est-à-dire la jeunesse, je souhaite vous faire part de mon approbation quant aux choix des lignes budgétaires à renforcer. Les mesures que vous envisagez, telles que l'augmentation du nombre de juges pour enfants, d'éducateurs ou la création de nouveaux foyers d'hébergement devraient permettre de mieux assurer à la fois la prévention et le suivi des jeunes aux prises avec la justice.
Compte tenu des ravages que provoquent la présence du chômage, la consommation de drogue, l'absence de perspective et de rêve, la jeunesse est, pour un trop grand nombre, vécue comme un handicap plus que comme un atout.
Les jeunes sont nos enfants et notre avenir. Nous devons les aider à trouver, au sein de la justice, la réponse la plus adaptée à leur problème, ce qui implique le développement d'un panel de moyens.
La modernisation des établissements pénitentiaires constitue la troisième grande priorité du budget de la justice. Dans ce domaine également, nous sommes conscients, pour avoir visité des prisons ou entendu des témoignages, de l'existence d'un réel malaise, tant pour les prisonniers que pour le personnel pénitentiaire. La surpopulation carcérale est un phénomène bien connu.
L'augmentation des crédits affectés aux autorisations de programmes et au renforcement des effectifs devrait permettre de répondre à l'urgence de cette situation.
Dans le même temps, il serait souhaitable de tenter de diminuer le nombre de personnes incarcérées en limitant peut-être la détention provisoire, en infligeant plus souvent des peines de substitution ou en développant des alternatives à l'incarcération, comme par exemple le port du bracelet électronique.
Telles sont, mes chers collègues, les quelques remarques que je souhaitais faire sur le projet de budget de la justice.
Je terminerai mon intervention en abordant deux points, dont l'un d'ailleurs n'est pas dépourvu de lien avec les questions financières.
Mme le garde des sceaux a présenté, lors du conseil des ministres du 29 octobre dernier, les grandes lignes de la réforme de la justice. je veux dire que, si les efforts budgétaires sont appelés à rendre la justice plus efficace et plus rapide, c'est à une réforme structurelle que l'on devra la réconciliation des citoyens avec leur justice.
L'opinion publique attend beaucoup de l'indépendance du parquet. Bien qu'en pratique la majorité des affaires soient conduites, bien sûr, en toute indépendance, le blocage réel ou non de certaines d'entre elles a terni le lien entre le pouvoir exécutif et la justice. C'est pourquoi la réforme de la justice mérite d'être menée à terme dans l'intérêt des justiciables, des magistrats et de l'institution.
Enfin, je terminerai mon propos sur la réforme de la carte judiciaire, qui est un autre chantier indispensable au bon fonctionnement de la justice.
J'aimerais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous me rassuriez sur les orientations envisagées par cette réforme. Une refonte de la carte judiciaire signifierait-elle la suppression de certaines juridictions ? Compte tenu du constat que l'on fait sur l'engorgement des tribunaux, cette tendance serait, me semble-t-il, contradictoire avec les besoins de la justice, ainsi qu'avec une notion qui nous est très chère, celle d'aménagement du territoire.
L'existence d'une justice de proximité contribue à l'équilibre du territoire. Une logique de concentration priverait une nouvelle fois nos campagnes de services publics élémentaires.
En attendant vos éclaircissements sur ce dernier point, je vous assure en tout cas, monsieur le secrétaire d'Etat - et vous pourrez en faire part à Mme le garde des sceaux - du soutien des radicaux de gauche sur le présent budget. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - M. le rapporteur spécial applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Olin.
Mme Nelly Olin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je m'associe bien évidemment aux voeux de prompt rétablissement qui ont été adressés à Mme le garde des sceaux.
Le budget qui nous est soumis aujourd'hui progresse de 4,03 %. S'il est vrai, comme cela a été suffisamment répété, que ces crédits sont en nette progression par rapport à 1997, cette progression correspond néanmoins à la moyenne des années précédentes.
Ce budget va permettre d'appliquer, dans les délais prévus, le programme pluriannuel de 1995 lancé par M. Méhaignerie. Nous serons cependant tous d'accord pour admettre que le Gouvernement semble toutefois donner une priorité à la justice.
J'ai noté que les crédits accordés aux services de l'administration centrale, en augmentation, vont permettre de revaloriser les indemnités accordées au personnel. Je m'inquiète toutefois de la stagnation des effectifs dans ce secteur, alors qu'a été annoncée la création d'une mission interministérielle de réforme de la carte judiciaire, qui mobilisera sûrement plus de personnel que les cinq emplois temporaires dont Mme le garde des sceaux a autorisé la création.
Concernant le secteur des services judiciaires, je note avec satisfaction la forte augmentation des effectifs, qu'il s'agisse des magistrats ou des fonctionnaires de justice. Toutefois, cet effort doit être relativisé, puisqu'il entre dans le cadre de la loi de programme relative à la justice du 6 janvier 1995. Le Gouvernement ne fait que respecter cette dernière. Nous devons cependant nous féliciter de cette progression car, s'il est un secteur qui a besoin de personnel, c'est bien celui de la justice.
Je ne citerai que quelques chiffres très révélateurs : en matière civile, le contentieux a augmenté de 220 % en vingt ans, tandis que le nombre des magistrats est passé, quant à lui, de 5 000 en 1975 à 6 000 aujourd'hui. J'ai peine à croire, même si c'est la réalité, qu'ils ne sont guère plus nombreux qu'au xixe siècle !
Ainsi, le projet de loi de finances pour 1998 prévoit la création de soixante-dix postes de magistrats destinés aux secteurs les plus encombrés, notamment à celui des affaires familiales, et de 230 emplois de fonctionnaires de justice. Mme le garde des sceaux est tout à fait consciente du décalage existant entre l'annonce des créations d'emplois et la création réelle de ces emplois. C'est pourquoi elle a prévu le recrutement de seize magistrats et de 220 assistants de justice à titre temporaire.
Je reconnais volontiers vos efforts en matière de création d'emplois. Toutefois, je m'inquiète du rôle que vont avoir à jouer les 3 500 jeunes qui seront embauchés dans le cadre de la loi pour le développement de l'emploi des jeunes. Ces emplois vont mobiliser 400 millions de francs sur le budget de la justice.
J'aurais aimé que ces emplois et les crédits qui leur sont affectés soient plus clairement définis avant que nous ayons à voter ce budget. Je ne vois, en effet, aucun crédit spécifiquement destiné à ces créations.
De nombreux problèmes se posent quant au recrutement puisque, la justice relevant du droit commun, l'Etat ne peut pas être considéré comme l'employeur. Il sera bon de définir très clairement quels seront les organismes habilités à recrutés ces jeunes.
Je me réjouis toutefois de l'engagement du Gouvernement, et j'espère qu'il sera tenu de ne pas substituer ces emplois à ceux qui existent déjà. Il vous faudra alors bien réfléchir sur les tâches qu'auront à accomplir ces jeunes en délimitant très strictement leur rôle, mais également leurs responsabilités en matière pénale. Lorsque l'on connaît le manque énorme de personnel dont pâtit tout le secteur de la justice, on est amené à penser que les 400 millions de francs destinés aux emplois-jeunes auraient peut-être leur place dans les services déjà existants.
Je parle en connaissance de cause. Elue du Val-d'Oise, je suis particulièrement touchée par la situation de la juridiction de Pontoise, qui, vous le savez, est désastreuse et le mot n'est pas trop fort.
Je profite de l'occasion pour insister sur l'aspect préoccupant de l'augmentation des zones de non-droit dans le Val-d'Oise, qui sont, hélas, la conséquence directe d'une justice « en panne ».
Au début du mois de novembre, la grève des avocats, qui fut très importante dans mon département, nous a rappelé combien il était nécessaire d'améliorer le fonctionnement de la justice au quotidien. Cette grève nous a, en effet, permis de mieux comprendre l'ampleur des dysfonctionnements. Il est clair que la juridiction de Pontoise est à cent lieues de l'idéal du service public. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère que, comme le Gouvernement l'a annoncé, la juridiction de Pontoise sera réellement considérée comme prioritaire en 1998.
Une telle situation ne peut plus durer. Je suis indignée de savoir que, faute de moyens, de nombreuses affaires sont classées sans suite. Ces dernières représentent environ 80 % des affaires prénales. Cette méthode, que j'accuse aujourd'hui, n'est qu'un moyen d'éviter de trop grands retards dans le traitement des affaires qui attendent, pourtant souvent, plusieurs années pour être traitées.
Il semblerait, malheureusement, que la justice s'éloigne de plus en plus de son image de « garante de la démocratie ». Avec ce volume énorme d'affaires classées sans suite, on ne s'étonne plus de voir, dans certains quartiers difficiles, dans ma ville de Garges-lès-Gonesse entre autres, les victimes découragées refuser de porter plainte face à l'impunité dont semblent jouir les auteurs de délits. Une telle situation doit absolument cesser : dans l'idéal, la justice devrait être présente partout dans les quartiers difficiles.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'aimerais m'attarder un peu sur le problème de la délinquance des mineurs, qui est très importante dans nos banlieues. Vous avez déclaré que toute faute devait être sanctionnée de façon appropriée. Je suis tout à fait d'accord avec vous !
On l'a assez dit, l'ordonnance de 1945 n'est plus du tout adaptée aux problèmes actuels, et il est nécessaire de la modifier en profondeur. Votre précédesseur avait commencé cette réforme, j'espère que vous la poursuivrez. Vous avez fait du renforcement de la protection judiciaire de la jeunesse une de vos priorités, et c'est une bonne chose. Il faut désormais que la police puisse faire son travail convenablement et dans les meilleures conditions. C'est la crédibilité de nos policiers qui est en jeu, car si, comme je l'ai dit, les gens ne croient plus beaucoup en la justice, l'image de la police nationale se dégrade également en raison du manque de suivi des affaires.
Malheureusement, malgré la progression des crédits de la justice, les retards accumulés sont loin d'être rattrapés. Au mieux, l'année 1998 ne sera pas pire que les autres.
La justice a besoin de moyens, c'est vrai ; mais elle a également un grand besoin d'être une bonne fois pour toutes réformée. La justice doit retrouver ses lettres de noblesse aux yeux des citoyens qui la jugent aujourd'hui inefficace, voire dans certains cas corrompue, ce qui est très grave.
Je ne suis pas la seule, il s'en faut de beaucoup, à dire qu'il faut réformer la carte judiciaire, qui est loin d'être adaptée à nos besoins actuels. Votre prédécesseur avait lancé cette réforme qui, je vous l'accorde, sera très difficile à réaliser. Cependant, était-il réellement nécessaire de créer une mission « carte judiciaire » ? Je pense très sincèrement que nous sommes tous ici favorables à une meilleure répartition des moyens sur tout le territoire français. En cela, nous nous entendons tous sur la nécessaire refonte de la carte judiciaire, qui a fait l'objet de nombreux rapports. C'est pourquoi je m'interroge aujourd'hui sur la réelle utilité d'une énième mission interministérielle qui coûtera quand même 500 000 francs au ministère de la justice.
Je pense qu'il conviendrait de se lancer désormais concrètement dans cette réforme en travaillant tous ensemble et en analysant les réels besoins des différentes régions de France.
Mon souhait, monsieur le secrétaire d'Etat, est que le budget de la justice s'inscrive dans la continuité. J'ose croire qu'il n'est pas l'effort d'une seule année, c'est hélas ! souvent le cas pour les crédits attribués à la justice.
En espérant qu'il n'y aura ni gel ni annulation de crédits cette année, je voterai ce projet de budget, car il marque tout de même un retour à une progression normale. Je resterai toutefois très attentive à la situation du tribunal de Pontoise qui est, je le rappelle, inacceptable et inadmissible au regard des effectifs de magistrats et de fonctionnaires ainsi qu'en matière de locaux. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le secretaire d'Etat, mes chers collègues, il faut rendre cette justice à Mme le garde des sceaux : elle ne ménage ni son temps ni sa peine et, comme tous mes collègues, je lui souhaite un prompt rétablissement.
« Le budget de la justice est misérable : un peu plus de 20 milliards de francs, moins du cinquième du déficit du Crédit lyonnais, l'équivalent de la subvention de l'Etat à Air France. Il faut avec cela payer les magistrats, les greffiers, les fonctionnaires de la Chancellerie, les personnels pénitentiaires et ceux de l'éducation surveillée. Il faut aussi entretenir et construire les palais de justice, les prisons et les établissements pour mineurs. Il faut enfin assurer le fonctionnement de l'ensemble. Comment, dès lors, remédier au délabrement des prisons ou à la surcharge chronique des juridictions ? »
C'est en ces termes que Thierry Jean-Pierre pose, dans un de ses livres, la problématique de la justice dans notre pays.
Cette insuffisance de moyens est notoire. Elle affecte à la fois les effectifs, les traitements et les moyens matériels.
Les enjeux sont clairs : quelle place notre démocratie accorde-t-elle à la justice ? Quel prix notre pays est-il prêt à payer pour disposer d'un système judiciaire qui soit le plus efficace et le plus équitable possible ? Il s'agit d'un domaine vital pour l'Etat et pour les équilibres de notre société.
Il faut donc que les ambitions affichées, les déclarations d'intention trouvent une traduction concrète. Or c'est par l'examen du projet de budget que l'on peut mesurer la réalité des efforts consentis.
Ainsi, avec un montant global de 24 milliards de francs, les crédits du ministère de la justice progressent, en francs courants, de 4,04 %, ce qui correspond approximativement à l'affectation de un milliard de francs supplémentaires.
Nous ne pouvons, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous en féliciter.
Néanmoins, je formulerai trois observations.
La première a trait au souci d'un juste traitement des fonctions régaliennes de l'Etat. Je constate que, si ce projet de budget progresse de manière bien plus sensible que l'ensemble des budgets civils pour 1998, dans le même temps, le budget de la défense subit cette année un rude coup.
Ma deuxième observation rejoint celle qu'a déjà exposée M. le rapporteur spécial : la progression des crédits ne permet pas de rattraper le retard provoqué par la loi de finances pour 1997 dans l'exécution de la loi de programme relative à la justice.
Ma troisième observation concerne, plus généralement, la part du budget de la justice dans le budget de l'Etat, laquelle est encore bien trop faible, même si elle progresse lentement, passant de 1,51 % en 1997 à 1,56 % pour 1998.
A cet égard, je souscris aux conclusions de notre éminent collègue Hubert Haenel : le service public de la justice ne pourra fonctionner correctement que s'il dispose d'un budget d'environ 35 milliards de francs.
Sans entrer dans les détails, je dirai que les trois orientations majeures de ce projet de budget, assorties des moyens nécessaires, répondent à de réels besoins.
En effet, la lenteur excessive des jugements démontre l'absolue nécessité d'améliorer la justice au quotidien en diminuant les délais de contentieux, en particulier dans les cours d'appel, et en renforçant la justice de la famille et des enfants.
De même, il était vivement souhaitable d'accroître les efforts en faveur des services pénitentiaires, en particulier pour la modernisation des établissements et le développement des mesures alternatives à l'incarcération, même si les besoins en crédits de fonctionnement sont loin d'être satisfaits.
Enfin, il est proposé de renforcer les moyens consacrés à la protection judiciaire de la jeunesse, ce qui me conduit à vous demander, monsieur le secrétaire d'Etat, quelles orientations seront privilégiées en matière de traitement de la délinquance des mineurs, et cela dans le droit-fil des déclarations de M. le ministre de l'intérieur concernant les multirécidivistes.
Je rappelle que l'on observe aujourd'hui une croissance extrêmement rapide de la délinquance des mineurs et un abaissement constant de l'âge des délinquants.
Dans le même esprit, je partage les interrogations déjà exprimées quant à l'affectation des 3 500 emplois-jeunes et je m'associe aux remarques sur l'urgence d'une réforme en profondeur de la carte judiciaire.
J'ai pris bonne note de la communication de Mme le garde des sceaux au conseil des ministres du 29 octobre dernier et des réformes qu'elle y a annoncées : « L'année 1998 va être consacrée à l'ensemble "indépendance du parquet - présomption d'innocence". » Fort bien ! Nous en débattrons.
Mais je voudrais dire ici mon inquiétude concernant les réformes dites « en panne » ou « avortées ». Je pense en particulier à deux d'entre elles : la réforme de la cour d'assises, tendant à créer un deuxième degré de juridiction ; l'indispensable adaptation de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, notamment dans ses dispositions pénales, en particulier sur la base des propositions de notre excellent collègue Philippe Marini.
Cela étant, je partage la conclusion de Mme le garde des sceaux selon laquelle « il est nécessaire qu'un effort budgétaire significatif soit consenti en faveur de la justice au cours des prochaines années ».
C'est donc sur la durée que nous jugerons de l'attachement du Gouvernement à donner, notamment, tout leur sens aux articles 5 et 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Authié.
M. Germain Authié. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je limiterai mon propos à l'examen des crédits de l'administration pénitentiaire.
Toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais saluer à nouveau l'embellie que constitue l'ensemble de ce budget de la justice par rapport à celui qui l'a précédé, embellie non seulement en termes de chiffrage, mais aussi en termes d'équilibre - tous les postes du ministère de la justice bénéficiant de l'augmentation - et surtout d'orientation.
Ainsi, s'agissant de l'administration pénitentiaire, on assiste à l'abandon du « tout carcéral », les crédits nouveaux étant affectés en priorité à la création de centres de semi-liberté, aux comités de probation et au milieu ouvert.
Le milieu ouvert concerne 117 000 personnes, ce qui correspond à 1 078 emplois.
On observe une nette volonté d'améliorer les secteurs du milieu ouvert et de la détention des mineurs. Cela passe par le recours plus fréquent aux peines alternatives à la prison et contribue à la lutte contre la surpopulation carcérale.
Ainsi, sur les 726 emplois créés, 300 sont réservés au milieu ouvert. A ces créations, il faut ajouter les postes qui ont été débloqués par Mme le garde des sceaux au mois de juillet, dès son arrivée au Gouvernement, et aux 3 500 emplois-jeunes répartis entre les tribunaux et les associations travaillant avec l'administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse ; ce sont là d'importants moyens nouveaux.
L'ambition de Mme le garde des sceaux est de créer des services pénitentiaires d'insertion et de probation à compétence départementale, chargés de remplir leurs missions tant en milieu ouvert qu'en milieu fermé, et dirigés par un cadre pénitentiaire responsable de l'action des travailleurs sociaux.
Nous la félicitons de cette réforme, qui devra s'accompagner d'une clarification des rôles respectifs du juge de l'application des peines et des directeurs des comités de probation et d'assistance aux libérés. Une telle clarification devrait permettre d'améliorer l'individualisation du suivi des peines, de favoriser la réinsertion des détenus et, ainsi, de lutter indirectement contre la surpopulation carcérale.
La surpopulation carcérale est, en effet, un des maux auxquels il est urgent d'apporter remède. Tous les moyens doivent être déployés pour la réduire : je pense, bien entendu, à la nécessité de limiter le recours à la détention provisoire, mais aussi au développement des alternatives à l'emprisonnement.
Pour faire face à la surpopulation carcérale, il est en outre proposé de créer trois nouveaux établissements pénitentiaires, représentant 1 000 places supplémentaires, ce qui constituera une bouffée d'oxygène non négligeable.
Il est toutefois nécessaire de consentir aussi des efforts en matière de réhabilitation des établissements existants, qui sont trop souvent dans un état de grand délabrement, rendant extrêmement dures les conditions de travail imposées aux personnels, les conditions de détention et les conditions de réception des familles venant rendre visite aux détenus.
Je vous demande, monsieur le secrétaire d'Etat, d'insister pour que les efforts, dans ce domaine, soient poursuivis.
Je suis également préoccupé par la santé en milieu carcéral : les détenus constituent une population particulièrement exposée à un certain nombre de risques, et pour laquelle il est donc nécessaire de développer prévention et soins ; je serais heureux si vous pouviez me donner plus de précisions dans ce domaine.
C'est un excellent budget qui nous est présenté. Il appartiendra au Gouvernement, au cours de cette législature, de faire de la justice une priorité durable. Je ne doute pas qu'il y parviendra. Le groupe socialiste lui apportera, pour cela, son total soutien. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, faute de temps, je ne m'exprimerai pas sur l'ensemble du budget de la justice, un budget qui est pour moi source de satisfaction, comme pour tous mes collègues du groupe socialiste et, me semble-t-il, pour la Haute Assemblée.
Je voudrais évoquer seulement une question qui préoccupe beaucoup les maires et, d'ailleurs, tous nos citoyens : l'augmentation rapide des actes d'incivilité et des petits délits perpétrés par des mineurs, ainsi que le climat de violence qui s'installe dans nos cités, trop souvent en toute impunité. Mais le plus grave est encore l'âge de plus en plus bas de ces jeunes en rupture ou en rébellion.
Nous, les élus locaux, nous sommes désarmés devant ces faits. Nos clubs d'adolescents, nos maisons des jeunes sont placés devant un choix impossible : soit accueillir difficilement tout le monde, soit réserver leurs activités à la jeunesse sans problème, bref, sélectionner et marginaliser plus encore des adolescents qui sont, pour l'essentiel, issus des catégories où sévit le plus fort taux de chômage.
Et si, par un bon réflexe, nous tentons de nous tourner vers la protection judiciaire de la jeunesse, c'est-à-dire d'avoir recours à des professionnels, nous nous trouvons alors parfois devant des travailleurs sociaux dépassés par l'évolution rapide de leur tâche, peu soutenus - c'est un euphémisme ! - par leur encadrement, désorientés par l'incertitude qui entoure leur mission.
La controverse qui a surgi à propos de la validité des structures ouvertes exprime, bien sûr, le malaise des élus, mais elle est aussi le signe d'un désarroi profond de la protection judiciaire de la jeunesse.
Il serait illusoire de penser qu'une augmentation substantielle des crédits suffit pour parer à cette situation, même si elle est un préalable, que ce projet de budget assure d'ailleurs bien.
De même, réinventer des structures fermées, même si je n'y suis pas hostile par principe, ne résoudrait pas le problème de fond.
En fait, c'est sur la nature même de la protection judiciaire de la jeunesse et sur sa relation avec les élus locaux qu'il faut s'interroger.
Je sais qu'une mission a été confiée à ce sujet à ma collègue Christine Lazerges, député de l'Hérault, qui connaît bien ces questions, et je m'en fécilite. Il serait souhaitable qu'une consultation assez large suive le dépôt de ce rapport. Il faudrait notamment, à cette occasion, dresser un bilan des conseils communaux ou intercommunaux de la délinquance créés à la suite des travaux de Gilbert Bonnemaison, un pionnier en la matière.
Je ne vous cacherai pas que, dans mon département et sur ma commune, les résultats sont très décevants. J'en ai tiré en tout cas la certitude que l'Etat doit réinvestir complètement cette dimension de la « sûreté » des citoyens, pour reprendre la terminologie des droits de l'homme. Les élus locaux peuvent et doivent prendre leur place dans le dispositif, mais il est dangereux pour la République de se décharger sur eux d'une responsabilité à laquelle ils ne peuvent faire face, sauf à les transformer en shérifs. Il est, en outre, dommageable de les désigner ainsi à la vindicte des citoyens.
Au passage, j'aurai la même attitude réservée face à l'idée de transférer au maire le soin de prononcer les divorces. Ce serait une confusion des fonctions très dangereuses pour la paix civile.
Ma deuxième conviction, c'est qu'il ne faut pas confondre prévention et répression des fautes. Il est, certes, nécessaire que la gendarmerie et la police nouent des liens avec la population autrement qu'à l'occasion du constat d'un délit ou d'une arrestation. Je ne suis pas certain, en revanche, que l'actuel mélange des genres soit profitable à la régulation de notre société, ni d'ailleurs à ses corps qui ont la charge principale d'assurer la sécurité des citoyens.
Ma conclusion sera pour vous demander de lancer un débat sur la dimension territoriale de la justice qui ne soit pas limité à une révision de la carte judiciaire.
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
M. Gérard Delfau. Une justice de proximité devrait intégrer, entre autres, la protection de la jeunesse et la prévention de la petite délinquance, voire sa répression.
C'est dans ce contexte, et seulement dans ce contexte, que, sous l'autorité directe de l'Etat et avec l'implication de ses personnels, les élus locaux, le milieu associatif, les forces de l'ordre, éventuellement, pourraient trouver matière à coopérer.
Il s'agit là de quelques réflexions trop rapides pour un dossier devenu brûlant et qu'il importe d'affronter sans a priori ni faiblesse.
Nous savons Mme le garde des sceaux déterminée. Nous l'assurons de notre confiance et espérons son prompt retour à la Chancellerie après un bref repos bien mérité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes, sur celles du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, sachez que Mme le garde des sceaux est vraiment désolée de ne pouvoir présenter elle-même le projet de budget de la justice devant la Haute Assemblée. Elle m'a demandé d'essayer de le faire à sa place. Elle m'a dit qu'elle serait très attentive à vos débats et qu'elle répondrait personnellement aux sénateurs qui auraient posé des questions trop précises pour que je puisse en traiter complètement moi-même.
Elle apportera une attention particulière aux suggestions concrètes et ambitieuses que M. le rapporteur spécial a développées. Je ne doute pas qu'elle appréciera les voeux de rétablissement que vous avez formulés et que je ne manquerai pas de lui transmettre dès la fin de ce débat.
Vous l'avez tous dit, les Français attendent aujourd'hui beaucoup de la justice. Dans une société de plus en plus mobile et imprévisible, la justice demeure l'un des ultimes recours de nos concitoyens.
C'est pourquoi l'un des grands chantiers de cette législature sera la réforme de la justice. Cette réforme, dont vous avez pu découvrir les orientations dans la communication faite par Mme le garde des sceaux au conseil des ministres, le 29 octobre dernier, devra améliorer le fonctionnement de la justice du quotidien, renforcer la présomption d'innocence et les libertés fondamentales et lever le soupçon sur sa dépendance vis-à-vis d'intérêts particuliers.
Si les Français, en tant qu'usagers du service public de la justice, sont d'abord soucieux - vous l'avez tous dit - des délais de jugement et de l'accès au juge, le doute sur l'impartialité de la justice les atteint également profondément en tant que citoyens. Je n'irai pas jusqu'à employer l'expression de « justice corrompue », utilisée par Mme Olin, mais il n'en demeure pas moins que le problème est sérieux et qu'elle a eu raison de le souligner.
Il faut donc traiter de front deux questions qui sont indissociables pour renforcer la justice : celle de l'indépendance et celle de son bon fonctionnement. Que serait une justice efficace et rapide, mais partiale ? Que serait une justice indépendante, mais incapable de traiter les affaires dans des délais raisonnables ? Ces questions ont été posées ce matin avec une vigueur particulière par M. Fauchon et par d'autres orateurs.
La réforme de la justice que vous serez conduits à examiner dans les mois à venir nécessitera des moyens nouveaux, car les principes que nous devons défendre - exigence en toute matière d'un double degré de juridiction, indépendance du juge décidant des peines privatives de liberté par rapport au juge d'instruction - sont coûteux. Ils sont le prix à payer pour plus de démocratie et plus de liberté.
A cet égard, je vous rappelle que la communication du 29 octobre dernier indiquait explicitement que « pour mettre en oeuvre les réformes annoncées, un effort budgétaire significatif devra être consenti en faveur de la justice au cours des prochaines années ». Cela me semble répondre au voeu exprimé par M. le rapporteur spécial, ainsi que par M. Badinter et d'autres orateurs.
Le projet de budget pour 1998 est clairement un budget de priorité en faveur de la justice. Votre rapporteur spécial a parlé d'un effort budgétaire réel. Effectivement, avec une hausse des crédits de près de 1 milliard de francs, le budget de la justice pour 1998 sera proche de 25 milliards de francs.
Dans un budget de l'Etat en hausse de 1,36 % en 1998, la justice est fortement privilégiée, avec une augmentation des crédits légèrement supérieure à 4 %, soit une hausse trois fois plus vive. M. Badinter a souligné qu'il s'agissait d'une hausse importante.
En 1997 - certains d'entre vous l'ont rappelé - le budget de la justice n'avait progressé que de 1,2 % hors transferts. On voit donc qu'il se retrouve, en 1998, au premier rang des priorités de l'Etat. Il obtient même la hausse de crédits la plus forte de l'ensemble des ministères dotés d'implantations déconcentrées sur l'ensemble du territoire.
Cet effort pour la justice est mérité - vous l'avez souligné avec force, notamment M. Badinter - d'abord, parce que la justice est soumise à un flux d'affaires en forte croissance depuis un quart de siècle, ensuite, parce que l'insatisfaction des usagers du service public de la justice devant ses lenteurs et ce qu'ils ressentent comme de l'archaïsme doivent trouver une solution.
Le rapporteur spécial du budget de la justice, M. Haenel, souligne que « la hausse des crédits ne sera efficace que si elle s'inscrit dans la durée ». Bien évidemment, Mme le garde des sceaux ne peux que partager cette préoccupation. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur spécial, qu'une hausse des crédits de 2 milliards de francs par an, pendant cinq ans, vous semblait nécessaire. Je prends acte avec intérêt de l'ambition que la Haute Assemblée affiche pour ce ministère prioritaire.
Bien évidemment, des crédits supplémentaires ne peuvent constituer la seule solution aux attentes fortes des Français ; ils doivent être complétés par des réformes de fond.
A cet égard, je mentionnerai les suites du rapport Coulon évoqué par MM. Haenel et Badinter. Mme le garde des sceaux est fermement décidée à accélérer les délais par l'exécution immédiate des décisions de première instance, par la limitation des appels dilatoires et par l'institution de contrats de procédure avec les avocats.
S'agissant de la médiation civile, M. Badinter a eu raison de souligner que de grands progrès restaient à faire.
Si les moyens budgétaires ne sont pas suffisants, ils constituent néanmoins une réponse indispensable à la bonne marche du service public de la justice. Vous connaissez tous - vous l'avez dit - son encombrement, l'insuffisance des moyens d'accueil et d'orientation, la vétusté de nombreuses prisons et tribunaux.
C'est pourquoi Mme le garde des sceaux s'est réjouie de proposer la création de sept cent soixante-deux emplois pour la justice, dans un budget d'ensemble où les effectifs civils sont restés pratiquement stables.
Cette hausse est d'autant plus significative que ma collègue a obtenu, dès son arrivée au ministère, le dégel intégral de six cents emplois en 1997 : ce sont donc près de mille quatre cents agents supplémentaires dont va pouvoir disposer le ministère de la justice.
En ce qui concerne l'équipement, il se trouve également parmi les ministères les plus favorisés, avec une hausse des autorisations de programme de 26 % : cette hausse permettra, j'y reviendrai, le lancement d'une première tranche de construction de nouveaux établissements pénitentiaires qui sont indispensables - vous l'avez dit - pour faire face à la surpopulation carcérale.
Comme l'a dit M. Authié, rapporteur pour avis, il s'agit d'un budget équilibré et sincère.
En premier lieu, c'est un budget équilibré, car le service de la justice forme un tout. Pour son bon fonctionnement, il est important que les moyens de chaque secteur évoluent d'une façon équilibrée ; tel sera bien le cas en 1998. Les crédits des juridictions judiciaires augmentent de 4,71 %, comme M. Badinter l'a souligné ; les crédits des services pénitentiaires croissent de 3,52 % et ceux de la protection judiciaire de la jeunesse de 4,14 %.
Un effort est également accompli au profit des juridictions administratives, qui connaissent une progression de leur budget de plus de 7 %. Mais cet écart à la moyenne tient aux crédits obtenus - 21 millions de francs - pour mettre en oeuvre la réforme statutaire issue de la loi du 25 mars 1997.
Par ailleurs, il importe également que les progressions soient équilibrées entre les différents moyens dont le service de la justice a besoin pour fonctionner : personnel, crédits indemnitaires et statutaires, crédits de fonctionnement courants, crédits d'équipement. A cet égard, il convient de remarquer que, si la loi de programme relative à la justice du 6 janvier 1995 - nombre d'entre vous y ont fait référence - a prévu des emplois et des autorisations de programme, elle est, en revanche, restée muette pour ce qui concerne les crédits de fonctionnement et les mesures pour les personnels.
C'est pourquoi Mme le garde des sceaux a insisté pour que le projet de budget pour 1998 permette non seulement de combler les retards observés en 1997 pour le personnel et l'équipement, mais aussi de dégager des mesures d'accompagnement. Mme Olin peut trouver là, me semble-t-il, quelques éléments de réponse à ses interrogations.
Il s'agit, en second lieu, d'un budget sincère. En effet, il n'y a pas de trompe-l'oeil dans les augmentations d'emplois et de crédits qui sont présentées dans le projet de budget de la justice.
D'abord, toutes les progressions sont de vraies progressions.
Contrairement aux années précédentes, les 762 créations d'emplois ne sont affectées par aucune mesure d'économie. Ce sont donc 762 créations nettes d'emplois qui vous sont proposées.
Il en est de même pour les crédits de fonctionnement général : au budget de 1997 figuraient, vous vous en souvenez, des économies importantes, à hauteur de 81 millions de francs. La principale mesure positive résultait du transfert de la charge des frais postaux. En 1998, il vous est proposé une hausse de 158 millions de francs des moyens de fonctionnement disponibles pour les services.
S'agissant de l'équipement, le projet de loi de finances pour 1998 non seulement comporte des autorisations de programme en forte hausse, mais il renoue avec la croissance des crédits de paiement qui sont en augmentation de 80 millions de francs, alors qu'ils avaient diminué d'un même montant en 1997.
Par ailleurs, l'utilisation des emplois et des crédits de 1998 ne sera pas obérée par des contraintes de gestion.
Tout d'abord, il n'y aura pas de report de charges de fonctionnement de 1997 sur 1998. Le budget de la justice, vous l'avez constaté, a été le seul à être totalement épargné au titre de la gestion de 1997 par les annulations de crédits, marquant la priorité très forte que lui accorde le Gouvernement.
M. Gérard Delfau. C'est vrai !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ensuite, le projet de loi de finances rectificative que vous examinerez prochainement devrait autoriser l'ouverture de 101 millions de francs d'autorisations de programme supplémentaires et de 91 millions de francs de crédits de paiement pour ce ministère.
Au-delà de ces dispositions, un plan d'urgence pour la justice - vous y avez fait allusion - a été lancé permettant l'ouverture de deux concours exceptionnels de magistrats et le doublement du nombre de fonctionnaires recrutés en 1998 par rapport aux prévisions initiales, ce grâce à une gestion plus tendue des vacances budgétaires et à l'autorisation de surnombres transitoires.
M. Leclerc s'est interrogé à propos des vacances de postes. Actuellement, 195 postes budgétaires de magistrats sont vacants sur 6 000, soit 3 % environ. Je tiens par ailleurs à rassurer M. Badinter en lui disant que le recrutement par le biais de l'Ecole nationale de la magistrature demeurera la voie prioritaire. Cette grande institution deviendra un véritable pôle d'excellence en formation juridique et sera davantage ouvert sur la recherche et sur l'international.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Après avoir décrit les grandes masses du budget, j'indique que Mme le garde des sceaux a choisi de concentrer les moyens obtenus autour de trois priorités, comme, d'ailleurs, M. Badinter l'avait appelé de ses voeux, qui permettent à la fois de remédier à certains dysfonctionnements de l'institution et d'améliorer le service offert à nos concitoyens.
La première priorité a trait à la jeunesse, par la protection des mineurs en danger et la réponse à la délinquance des jeunes, sur laquelle nombre d'entre vous se sont exprimés.
La deuxième concerne la justice quotidienne, par l'amélioration des conditions de fonctionnement des juridictions, la présence dans les quartiers sensibles et la modernisation des tribunaux.
La troisième réside dans la modernisation de l'administration et des établissements pénitentiaires pour améliorer les conditions de vie des détenus et les conditions de travail des personnels.
La question de la protection de la jeunesse, sur laquelle MM. Gélard, Pagès, Balarello, Leclerc et Delfau se sont notamment exprimés, et qui est fondamentale, comme vous l'avez souligné, est double : elle est celle de la jeunesse en danger, mais également, et de manière accrue ces dernières années, celle de la jeunesse délinquante. Les statistiques en la matière sont difficiles à décrypter, mais le sentiment qui prévaut chez nos compatriotes, comme M. Plasait l'a souligné très clairement, est que le phénomène s'accroît et la précocité des auteurs des actes commis et la violence marquent, comme le sentiment d'impunité, une certaine exaspération.
Ces deux questions doivent être traitées simultanément car, bien qu'il soit indispensable de ne pas confondre dans un même élan les enfants victimes et les jeunes délinquants, trop souvent, la limite entre les deux catégories se brouille dans les itinéraires des jeunes à la dérive.
Les jeunes en danger ou qui connaissent des difficultés particulières d'insertion, pris en charge par l'Etat, à concurrence de 16 %, et les départements, à concurrence de 84 %, sont environ 120 000.
Selon les chiffres encore provisoires pour 1996, 35 245 jeunes se trouvaient pris en charge par le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse au 31 décembre 1996, soit presque 5 000 de plus qu'à la fin de 1994. Il est donc indispensable, comme vous l'avez dit, que les moyens du ministère dans ce domaine soient renforcés.
C'est pourquoi, dans l'ensemble des secteurs du ministère, la priorité est mise sur la prise en charge des enfants et des mineurs.
Avec cent créations d'emplois, dont la moitié d'éducateurs, la protection judiciaire de la jeunesse connaît la hausse d'effectifs la plus rapide du ministère.
Ce souci de la jeunesse se traduit également par l'accroissement du nombre de juges pour enfants et de juges aux affaires familiales ainsi que par l'affectation de cinquante surveillants spécialement formés pour les quartiers des mineurs dans les établissements pénitentiaires.
Les emplois-jeunes, que nombre d'entre vous ont évoqués, permettront également de renforcer le secteur associatif habilité qui prend en charge l'essentiel des mesures décidées par le juge.
Mme le garde des sceaux a signé, le 3 décembre dernier, trois accords-cadres avec l'association française de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence, avec l'INAVEM, que vous connaissez bien, et avec le comité de liaison des associations de contrôle judiciaire.
Au total mille emplois-jeunes ont ainsi été signés. Ce sont là de véritables emplois et, pour répondre aux questions de Mme Olin, de MM. Gélard, Leclerc et Plasait, ils concernent des jeunes qui travailleront non pas à la place de professionnels mais auprès de ces derniers pour faciliter l'accès au droit, étoffer l'activité des maisons de justice et de droit, aider les victimes, apporter une assistance à la médiation familiale, assumer un rôle d'animation auprès de jeunes mineurs en danger et développer une action culturelle et éducative auprès des détenus.
Le Gouvernement est convaincu que ces emplois-jeunes, qui seront financés à concurrence de 80 % par l'Etat et de 20 % par des ressources diverses provenant, par exemple, des collectivités locales, des caisses d'allocations familiales et de mutualité permettront, d'une part, à ces jeunes de sortir de la désespérance et, d'autre part, d'apporter, pour un coût somme toute raisonnable, une aide essentielle aux fonctionnaires. Bien évidemment, il n'est pas question que ces derniers soient en quoi que ce soit remplacés par ces jeunes.
S'agissant précisément des fonctionnaires, des mesures statutaires et indemnitaires importantes permettront d'assurer une meilleure organisation territoriale de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse.
La création de nouveaux foyers d'hébergement et la rénovation des foyers existants permettra d'améliorer les conditions de vie des jeunes pris en charge. Des crédits de paiement, pour un montant de 71 millions de francs, seront consacrés à la rénovation et à l'extension des structures d'accueil.
Les crédits de fonctionnement du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse seront en hausse de 17 millions de francs pour faire face à l'augmentation des mesures qui lui sont confiées par les juges.
Le précédent gouvernement avait décidé de créer cinquante unités à encadrement éducatif renforcé, les UEER, pour répondre au traitement des jeunes délinquants de plus en plus difficiles à maîtriser. M. Gélard m'avait notamment interrogé à ce sujet.
Mme le garde des sceaux estime que la création des UEER sous le signe de la répression a quelque peu brouillé leur mission éducative et peut-être nui à leur bon fonctionnement. C'est pourquoi elle a demandé que les seize premières unités mises en place et actuellement en service fassent l'objet d'une évaluation sans préjugé.
Par une lettre de mission en date du 16 septembre 1997, le ministre de l'emploi et de la solidarité, le garde des sceaux et le ministre de l'intérieur ont demandé à leurs inspections générales respectives de procéder à une mission conjointe sur la prise en charge en hébergement des mineurs délinquants, notamment dans les UEER mais aussi dans les foyers spécialisés.
Dès la remise du rapport à la fin du mois de décembre, le devenir de ces structures nouvelles sera examiné, je le répète, sans aucun a priori .
J'en viens maintenant à la deuxième priorité, l'amélioration du fonctionnement de la justice quotidienne.
Il est indispensable que les juridictions puissent répondre à l'accroissement du contentieux civil - M. Balarello a dénoncé, parmi d'autres orateurs, l'encombrement des tribunaux - et à la nécessité d'améliorer les réponses apportées aux délits pénaux. Depuis vingt ans, les magistrats rendent chaque année deux fois plus de jugements - on ne le dit pas suffisamment - mais cet effort de productivité doit être poursuivi, comme M. le rapporteur spécial l'a souhaité.
Le nombre d'affaires civiles nouvelles devant les cours d'appel a connu, pour la première fois, une légère baisse de 0,3 % en 1996. Le nombre d'affaires terminées au cours de l'année a connu une hausse de 2,6 %. Cependant, les stocks d'affaires en cours augmentent fortement de 5,25 % et les délais s'allongent pour atteindre 15,6 mois, ce que nombre d'entre vous ont regretté.
Devant les tribunaux de grande instance, le nombre d'affaires nouvelles au civil progresse de 2 % et celui des affaires terminées de 1,5 % en 1996. En dépit d'une augmentation du stock d'affaires en cours de 3,3 %, les délais sont passés de 8,9 mois en 1995 à 8,8 mois en 1996.
Le rapporteur pour avis pour les services généraux, M. Germain Authié, a souligné, à juste titre, le paradoxe qui veut que la justice apparaisse aujourd'hui, aux yeux du justiciable, à la fois lente et expéditive.
Au pénal, sujet évoqué par M. Balarello, si l'activité globale n'évolue pas sensiblement par rapport aux années précédentes, avec 5,2 millions environ de procès-verbaux reçus par les parquets, dont 61 % avec auteur inconnu, les classements sans suite des procès-verbaux avec auteur connu diminuent de 21 % en 1996 et les procédures alternatives aux poursuites augmentent de près de 9 %. Les réponses pénales, dans les procédures avec auteur connu, passent de 51 % en 1995 à 55 % en 1996.
Face à l'évolution du contentieux, l'accroissement du nombre de magistrats et de leurs collaborateurs répond à une double exigence : d'une part, celle de ne pas laisser perdurer les situations intenables que connaissent certaines juridictions, en particulier les cours d'appel, et, d'autre part, celle de répondre à la demande des juges spécialisés plus nombreux, qu'il s'agisse des juges des enfants ou des juges aux affaires familiales, pour suivre l'évolution du volume de ces contentieux.
Les effectifs obtenus vont dans le sens de ces exigences. Ainsi, 70 magistrats, ce qui représente la plus forte progression depuis dix ans, seront affectés dans les cours d'appel les plus encombrées et permettront d'augmenter le nombre de juges pour enfants et de juges aux affaires familiales.
De plus, 230 fonctionnaires de greffes, dont M. Pagès a parlé, 10 greffiers en chef, 90 greffiers et 130 adjoints et agents administratifs viennent compléter le dispositif, après une année 1997 qui avait été marquée par une diminution des postes de greffiers et par le blocage des recrutements.
Enfin, 220 assistants de justice s'ajouteront aux 330 déjà en place.
Les personnels bénéficient aussi de mesures catégorielles significatives. Les personnels de la justice connaissent des évolutions de leur métier. M. Pagès a insisté sur ce point. C'est le cas notamment pour les greffiers en chef auxquels sont confiés des fonctions nouvelles, telles que l'établissement des certificats de nationalité ou la surveillance des comptes de tutelle. Nous poursuivons également la réflexion sur l'enrichissement des tâches.
Les personnels de la justice connaissent aussi des conditions de travail délicates, en raison notamment de l'apparition de nouveaux types de violences et de publics de plus en plus difficiles.
Ces évolutions doivent, dans la mesure du possible, se traduire dans les statuts et les régimes indemnitaires.
Les personnels de greffe bénéficient d'un point indemnitaire supplémentaire pour un coût de 22 millions de francs, soit une augmentation de 5 % de leurs primes.
La réforme du satut des magistrats, destinée à lutter contre le blocage des carrières, fera l'objet, dès cette année, de l'ouverture d'une discussion interministérielle qui n'avait pas été engagée jusqu'à présent.
Enfin, la réforme du statut des conseillers de tribunaux administratifs que vous avez votée au début de l'année sera financée en 1998. Elle marque une amélioration sensible pour la carrière des six cents conseillers qui sont en charge du contrôle juridique de l'administration centrale et locale.
Enfin, j'évoquerai la hausse des crédits consacrés au fonctionnement courant des juridictions.
Les juridictions, vous l'avez indiqué, souffrent d'une insuffisance chronique de moyens, notamment de moyens de communication et de déplacement. Est-il normal que les procureurs de permanence ne disposent pas systématiquement de véhicules de service ? Est-il normal que nombre de magistrats ne disposent ni de secrétariats ni de boîtes vocales, de sorte qu'ils sont difficilement joignables ?
En 1997, les crédits de fonctionnement des juridictions avaient diminué de 57 millions de francs. En 1998, ils bénéficient d'une hausse de 51 millions de francs, ce qui permet de les remettre à niveau.
Ces moyens supplémentaires permettront d'améliorer l'accueil du public, d'offrir de meilleures conditions de travail au personnel, notamment dans le secteur de l'informatique ou de la documentation, et, enfin, de doter la justice de moyens permettant d'assurer sa mobilité et sa permanence.
Des crédits seront dégagés pour permettre de développer les mesures de médiation et de conciliation assurées par les associations habilitées par la justice.
A ce point de mon exposé, je voudrais répondre aux questions du rapporteur spécial, M. Haenel, sur l'aide juridique.
S'agissant d'abord de l'aide juridictionnelle, la hausse des crédits a été très forte après la réforme de 1991. En 1998, elle devrait se stabiliser autour de 1 %. En effet, la hausse du recours à l'aide juridictionnelle qui a suivi la réforme de 1991 semble aujourd'hui être achevée.
Plusieurs d'entre vous ont abordé l'accès au droit. L'aide juridique, c'est aussi l'accès au droit pour apporter d'autres réponses que l'accès au juge. Ce point a été fortement souligné, à juste titre, par M. le rapporteur spécial.
A ce propos, je préciserai que les comités départementaux d'aide juridique, mis en place par la loi de 1991, ne sont qu'au nombre de vingt sur l'ensemble des départements français. Le principal problème qui se pose, c'est celui de leur statut actuel. En effet, il s'agit de groupements d'intérêt public. Mme le garde des sceaux prépare une modification de la loi, afin de simplifier le statut juridique de ces centres et d'étendre leur développement.
J'en viens à la modernisation des tribunaux.
La baisse des crédits d'équipements intervenue en 1997, en raison de l'étalement sur une année supplémentaire de la loi de programme de 1995, avait contraint à retarder des grandes opérations dont le lancement était imminent, notamment à Grenoble et en Avignon.
Mme Guigou ayant obtenu une hausse de 26 % des autorisations de programme et de 6 % des crédits de paiement, il est possible de relancer en 1998 les deux grandes opérations de Grenoble et d'Avignon et d'y ajouter une grande opération à Fort-de-France.
Mme le garde des sceaux a également tenu à ce que la relance des « grandes opérations judiciaires » ne se fasse pas au détriment de l'ensemble des autres tribunaux pour lesquels des travaux de sécurité et de mise aux normes sont nécessaires - c'est notamment le cas à Toulouse, comme l'a dit M. Collin. En effet, il n'est pas normal que des tribunaux menacent ruine ou soient mis en demeure de fermer par les commissions de sécurité. Ainsi, pour 1998, 470 millions de francs de crédits de paiement sont inscrits à cette fin, contre 286 millions de francs en 1997.
Le dernier point, dans cette grande priorité de l'amélioration de la justice quotidienne, est celui des juridictions administratives. Vous savez qu'elles contribuent de manière déterminante au respect du droit par les administrations et au contrôle de légalité des actes des collectivités locales.
En 1996, le nombre des affaires nouvelles a diminué de 2 % devant les tribunaux administratifs et de 18 % devant le Conseil d'Etat, alors qu'il avait encore crû en 1995.
En revanche, le nombre d'affaires nouvelles continue de croître fortement devant les cours administratives d'appel, avec un taux d'augmentation de 34 %, principalement en raison des transferts de compétences.
Les délais de jugement restent stables par rapport à l'année précédente au Conseil d'Etat - dix-huit mois - comme devant les tribunaux administratifs - vingt-trois mois - mais augmentent fortement devant les cours administratives d'appel - trente-six mois, contre dix-neuf mois en 1995.
La situation devient préoccupante dans les cours administratives d'appel. Elle devrait toutefois s'améliorer à partir de 1998, compte tenu de la création de la nouvelle cour administrative d'appel de Marseille, en septembre 1997, et de la modification, par la loi du 25 mars 1997, des conditions qui sont exigées pour la nomination des magistrats dans les cours administratives d'appel.
Le projet de budget pour 1998 va permettre la création de vingt et un postes de magistrat, quinze postes de magistrat à titre temporaire, trente-deux postes de greffier et huit postes de personnels administratifs.
J'en viens à la troisième priorité : la modernisation de l'administration pénitentiaire, évoquée notamment par MM. Othily et Authié.
L'administration pénitentiaire est confrontée, comme les services judiciaires, à une pression forte. Le nombre de détenus, en raison de l'augmentation des longues peines prononcées et de leur allongement, n'a cessé de croître depuis vingt ans, soit 72 %.
L'importance de la population carcérale et l'insuffisance des structures d'accueil créent une surpopulation - cela a été rappelé par M. Pagès - qui accroît la difficulté et la pénibilité de la tâche des personnels de l'administration pénitentiaire qui effectuent un métier difficile.
Sur les neuf premiers mois de 1997, la population pénale incarcérée a été, en moyenne, de 56 528 détenus. Le nombre de détenus a augmenté, en 1996, de moins de 1 % par rapport à 1995, et il paraît stabilisé en 1997.
En revanche, la population pénale suivie en milieu ouvert, c'est-à-dire sans passer la nuit en prison, augmente fortement : 117 000 au 1er janvier 1997, contre 105 000 en janvier 1996. Le développement des peines alternatives à l'incarcération, outre qu'il contribue à réduire la surpopulation carcérale, permet d'améliorer les conditions de réparation aux victimes et à la société, et d'accroître les chances de réinsertion.
Aujourd'hui, au-delà du nombre, la difficulté tient également à la personnalité des détenus. Nombreux sont ceux qui souffrent de troubles psychiatriques. Le nombre de toxicomanes et leurs problèmes de dépendance en prison sont le souci quotidien des personnels.
Face à ces problèmes, Mme le garde des sceaux a choisi de retenir deux options fortes. La première, c'est de moderniser les établissements pénitentiaires en lançant une première tranche de trois établissements. La seconde option consiste à consacrer l'essentiel des emplois nouveaux obtenus en 1998 au milieu ouvert pour permettre d'assurer un meilleur suivi des détenus, une politique d'individualisation des peines et de suivi social et médical efficace, en particulier pour les délinquants sexuels.
Ce sont 810 millions de francs d'autorisations de programme qui vont être affectés à la construction d'une première tranche de trois établissements pénitentiaires - Lille, Toulouse et Avignon - permettant de fermer des prisons vétustes et d'augmenter les capacités d'accueil.
Un programme de construction de centres de semi-liberté, mieux défini et mieux localisé va être lancé. Afin d'améliorer leur utilisation, une réflexion est engagée sur la possibilité d'y accueillir des détenus condamnés à de courtes peines. Aujourd'hui, on dénombre douze centres de ce type. Leur nombre sera significativement augmenté dans les années à venir.
La réforme du milieu ouvert - comité de probation et d'assistance aux libérés - a été évoquée par M. Plasait.
Cette réforme a été initiée en 1996. Dans la loi de finances pour 1997, seulement quarante postes budgétaires lui ont été consacrés. Mme Guigou tient à ce que l'année 1998 marque de manière définitive la mise en oeuvre de cette réforme, afin d'améliorer l'individualisation du suivi des peines et de faciliter la réinsertion des détenus.
A cette fin, sur les trois cents emplois qui ont été obtenus pour l'administration pénitentiaire, deux cents seront consacrés à la réforme des comités de probation et d'assistance aux libérés.
L'engagement de réformes statutaires permettra d'accompagner cette évolution.
Mme Guigou compte beaucoup sur la réforme des comités de probation et d'assistance aux libérés pour contribuer à remédier à la surpopulation carcérale. La libération conditionnelle et les alternatives à l'incarcération - travaux d'intérêt général, sursis avec mise à l'épreuve, semi-liberté - sont insuffisamment appliquées en raison du manque de personnel qui se consacre au suivi des détenus.
Le Gouvernement est décidé à assurer un meilleur fonctionnement de l'ensemble des établissements pénitentaires.
Pour prolonger, dans ces établissements, les efforts consacrés à la jeunesse, cinquante postes de surveillant sont consacrés aux quartiers des mineurs, afin de répondre aux exigences d'encadrement très particulières de cette population. En effet, le recours à l'incarcération pour les mineurs, on ne le sait pas suffisamment, croît depuis quelques années.
Les autres centres et quartiers de détention ne sont pas oubliés pour autant, leur sont affectés les deux cent quarante-huit postes de surveillant rendus disponibles par le dégel des emplois, obtenu en septembre, qui vont renforcer l'ensemble des établissements.
Des moyens de fonctionnement supplémentaires - 77 millions de francs - vont permettre d'améliorer l'hygiène et la sécurité dans les établissements. La prison ne doit pas doubler la peine privative de liberté par des conditions de détention qui font offense à la personne.
En conclusion le projet de budget de la justice se résume ainsi : des moyens supplémentaires pour une réforme indispensable.
Si des moyens supplémentaires sont nécessaires pour assurer un fonctionnement normal de la justice, c'est-à-dire des délais de jugement raisonnables, des réponses pénales adaptées, des conditions de détention acceptables, la justice ne répondra aux défis auxquels elle est confrontée que par la mise en oeuvres de réformes.
La première, celle qui a été la plus abordée ce matin, est la réforme de la carte judiciaire.
Le rapporteur spécial, M. Haenel, a dit que la carte judiciaire n'est plus adaptée et il a formulé des suggestions très utiles dont Mme le garde des sceaux fera tout son profit, notamment dans le domaine de l'expérimentation qui est une voie souple pour progresser en la matière.
Il faut en effet adapter la répartition des implantations judiciaires aux demandes et à la géographie de la population. Cette réforme sera engagée avec méthode. Une mission ministérielle est prévue à cette fin dans le projet de la loi de finances. Je sais, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous souhaitez cette réforme en général, mais que vous la craignez parfois en particulier. Je tiens à vous dire qu'elle fera l'objet d'une concertation avec vous, qu'il sera veillé à une adaptation aux réalités de chaque situation locale. Tout sera fait pour préserver une justice de proximité et de qualité, comme M. Delfau l'a souhaité.
Ce qui sera recherché, c'est une autre organisation du travail, une spécialisation des tribunaux, peut-être une plus grande mobilité du juge, y compris par audience foraine.
Cependant, cette réforme de la carte judiciaire n'interdira pas de traiter les problèmes urgents, et je dirai à Mme Olin qu'à Pontoise de nouveaux moyens en personnel seront affectés dès 1998.
La deuxième réforme concerne l'amélioration de la gestion. Il s'agit de déconcentrer plus largement la gestion dans les juridictions autour des services d'administration régionale, dans les directions régionales de la protection judiciaire de la jeunesse comme dans l'administration pénitentiaire. Il s'agit aussi de développer l'évaluation, la création de tableaux de bord et de gestion, ainsi que la signature de contrats de modernisation.
M. Haenel a évoqué les frais de justice. Mme le garde des sceaux a déjà envoyé une circulaire à ce sujet. Le budget de 1997 sera tenu. Mme Guigou est favorable à la mission d'inspection sur les frais de justice que M. Haenel a suggérée et qui sera menée conjointement par l'inspection générale des finances et par l'inspection générale des services judiciaires.
La troisième réforme, c'est l'augmentation des réponses non juridictionnelles, qui doit être favorisée, comme M. Authié l'a souhaité. Les 3 500 emplois-jeunes que la justice s'est engagée à accueillir permettront d'accentuer cet effort. La demande de justice ne peut être la seule réponse à tous les maux de la société et à tous les aspects de la crise sociale que nous traversons. Il faut diversifier nos réponses, aider à la résolution des litiges en amont de la justice. M. Haenel a insisté sur ce point avec des mots forts : l'accès au droit n'est pas obligatoirement l'accès au juge, comme l'a également dit M. Durand-Chastel.
La quatrième réforme vise à accroître la présence de la justice dans les banlieues et dans les quartiers difficiles, tant pour les actions de prévention que pour la répression et la prise en charge des victimes. La répartition inadaptée des moyens sur le territoire et le vieillissement de la carte judiciaire se traduisent par la pénalisation des zones périurbaines les plus dynamiques dont les équilibres sociaux sont les plus fragiles.
Je dirai deux mots sur la méthode.
La réforme, comme M. le rapporteur spécial l'a souhaité, sera conduite dans la durée et dans la concertation, avec le Parlement et avec les chefs de cour. L'expérimentation dont il a parlé à propos de la carte judiciaire sera aussi pratiquée pour le bracelet électronique, si votre assemblée en adopte le principe, pour la politique de la ville, la lutte contre la délinquance des jeunes, la lutte contre la délinquance financière et contre la grande criminalité.
Il ne pourra y avoir de réforme de la justice sans le soutien et la participation des parlementaires - un prochain débat, à la fin du mois de janvier, vous en donnera l'occasion - ainsi que des élus locaux, des juges, des fonctionnaires et des professions du droit, notamment les avocats, les huissiers et les notaires, qui y seront associés.
Monsieur Balarello, l'espace judiciaire européen est maintenant une réalité quotidienne, qu'il s'agisse du droit patrimonial, des questions matrimoniales, du droit des entreprises ou de la vie culturelle.
Mme le garde des sceaux participe pleinement aux travaux européens sur la rénovation de l'extradition et de l'entraide judiciaire, sur les programmes contre la criminalité organisée et sur la présence de l'autorité judiciaire au sein de ce que l'on appelle le Troisième pilier.
Vous avez fait allusion à l'appel de Genève ; ce n'est pas pour le Gouvernement une question gênante, bien au contraire : c'est un motif supplémentaire d'agir.
Ce projet de budget marque une relance de l'effort pour la justice. C'est un premier pas qui sera suivi par d'autres dans les années qui viennent, de façon que la justice puisse pleinement assumer l'ensemble de ses missions. C'est ainsi qu'elle pourra retrouver la confiance des Français. Je dois dire que le très large soutien du Sénat, tout au moins des orateurs qui se sont exprimés jusqu'à présent, sera un appui précieux pour Mme le garde des sceaux dans la poursuite de son action au service de la justice et de tous les Français. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le ministère de la justice et figurant aux états B et C.

ÉTAT B

M. le président. « Titre III : 585 808 269 francs. »

La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. Monsieur le secrétaire d'Etat, je pense qu'il est inutile de vous dire à quel point je m'associe à tous les voeux qui ont été formulés dans cette enceinte pour le rétablissement de Mme le garde des sceaux.
Cela dit, je trouve en quelque sorte une compensation dans la présence, aujourd'hui, du responsable du budget de la nation que vous êtes. Cela me permet de reprendre les termes de l'intervention que j'ai prononcée à l'issue de l'examen du budget de l'intérieur, samedi dernier, mais devant un ministre dépensier, ce que vous n'êtes pas, monsieur le secrétaire d'Etat. (Sourires.)
J'ai souhaité, et je souhaite encore une redistribution des crédits de l'Etat au bénéfice de ses attributs régaliens...
M. Hubert Haenel, rapporteur spécial. Très bien !
M. Christian Bonnet. ... et au détriment des tâches d'assistanat généralisé, qui peuvent être assumées par d'autres collectivités mieux et plus rigoureusement que par l'Etat. C'est vrai des tâches d'assistanat généralisé comme des tâches économiques et financières. A cet égard, certains désastres financiers récents dont le montant s'élève à quelque huit fois le budget que vous venez de défendre, monsieur le secrétaire d'Etat, nous donnent à penser que les hauts fonctionnaires, quelles que soient leurs qualités, et elles sont grandes, ne sont pas toujours les mieux à même de diriger des établissements économiques et financiers qui, de publics, pourraient bien un jour devenir privés, et ce serait une excellente chose.
De même, monsieur le secrétaire d'Etat, certaines de nos ambassades sont dans un état tout à fait pitoyable et, lorsque nous constatons ce que sont les effectifs des services économiques et commerciaux de nos ambassades par rapport à ceux des ambassades d'Allemagne et, a fortiori, des Etats-Unis, par exemple, nous nous nous disons que nous sommes vraiment bien mal pourvus !
Enfin, vous me permettrez d'évoquer un dossier que vous connaissez sans doute, du fait des fonctions qui ont été les vôtres, le projet ACROPOL, qui est destiné à favoriser la confidentialité des transmissions de la police nationale et, par là, la sécurité même des fonctionnaires de police. Ce projet fut lancé voilà quelques années ; on nous avait dit à l'époque qu'il devrait aboutir en 2014 ou en 2015. C'était se payer la tête, pardonnez-moi l'expression, des fonctionnaires de police ! M. le ministre de l'intérieur a bien voulu ramener ce terme aux années 2007 ou 2008. C'est trop loin encore, dès lors qu'il s'agit d'un système assurant, je le répète, la confidentialité des transmissions. D'ailleurs, peut-être l'ignorez-vous, de très nombreux pays s'assurent tour à tour de ce dispositif tant il est efficace et performant, plus que ne l'est, sans vouloir vexer M. le rapporteur spécial, le dispositif Rubis de la gendarmerie et plus que ne le sont les systèmes de transmission utilisés même aux Etats-Unis.
Monsieur le secrétaire d'Etat, bien évidemment, s'agissant des crédits d'un attribut régalien et, de surcroît, d'un budget qui progresse de 4 %, mon groupe ne pourra que les voter. Vous le savez sans doute, le Sénat est, des deux assemblées, celle qui s'est, et de très loin, préoccupée le plus de l'accroissement des moyens de la justice, comme l'atteste un rapport tout à fait remarquable - M. Fauchon n'y est pas étranger, c'est le moins que l'on puisse dire - qui fut présenté ici même, l'an dernier. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre IV : 1 703 000 francs. »

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.

(Ces crédits sont adoptés.)

ÉTAT C

M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 1 712 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 356 000 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. « Titre VI. - Autorisations de programme : 8 000 000 francs ;
« Crédits de paiement : 3 000 000 francs. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.

(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'article 67, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la justice.

Article 67



M. le président.
« Art. 67. - Le montant hors taxe sur la valeur ajoutée de l'unité de valeur mentionnée au troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, est fixé, pour les missions achevées à compter du 1er janvier 1998, à 132 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 67.

(L'article 67 est adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi concernant la justice.

3

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. Robert Pagès. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. J'indique que, lors de la séance de nuit du dimanche 7 décembre, le groupe communiste républicain et citoyen a voulu voter contre l'ensemble des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement tels que modifiés par la majorité sénatoriale.
M. Pierre Fauchon. Et vous êtes fier ?
M. le président. Monsieur Pagès, acte vous est donné de cette mise au point.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à seize heures cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

4

LOI DE FINANCES POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale. [N°s 84 et 85 (1997-1998).]

Articles de totalisation des crédits

M. le président. Tous les crédits afférents au budget général et aux budgets annexes étant examinés, le Sénat va maintenant statuer sur les articles qui portent récapitulation de ces crédits.
J'appellerai successivement l'article 26, qui comporte le total des crédits du budget général ouvert au titre des services votés ; les articles 27 et 28, auxquels sont annexés les états B et C, qui récapitulent les crédits du budget général ouverts au titre des mesures nouvelles ; l'article 31, auquel est annexé l'état D ; l'article 32, qui récapitule les crédits ouverts au titre des services votés des budgets annexes ; enfin, l'article 33, qui récapitule les crédits ouverts au titre des mesures nouvelles des budgets annexes.

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES
ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE Ier

DISPOSITIONS
APPLICABLES À L'ANNÉE 1998
I. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF
A. - Budget général

Article 26



M. le président.
« Art. 26. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 1998, au titre des services votés du budget général, est fixé à la somme de 1 781 386 220 499 F. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 26.

(L'article 26 est adopté.)

Article 27 et état B



M. le président.
« Art. 27. - Il est ouvert aux ministres, pour 1998, au titre des mesures nouvelles de dépenses ordinaires des services civils, des crédits ainsi répartis :

« Titre Ier : "Dette publique et dépenses en atténuation de recettes" 23 561 975 800 F
« Titre II : "Pouvoirs publics" 118 434 000 F
« Titre III : "Moyens des services" 975 833 814 F

« Titre IV : "Interventions publiques" - 4 082 486 622 F
« Total 20 573 756 992 F
« Ces crédits sont répartis par ministère conformément à l'état B annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état B :

É T A T B

Répartition, par titre et par ministère, des crédits applicables
aux dépenses ordinaires des services civils
(mesures nouvelles)

(En francs.)



MINISTE`RES OU SERVICES


TITRE I

TITRE II

TITRE III

TITRE IV

TOTAUX

Affaires étrangères et coopération : I. - Affaires étrangères

. . 157 289 002 - 137 623 204 19 665 798
II. - Coopération . . 9 831 233 - 378 363 675 - 368 532 442
Agriculture et pêche . . - 99 999 930 56 799 093 - 43 200 837

Aménagement du territoire et environnement : I. - Aménagement du territoire
. . 0 0 0
II. - Environnement . . 5 256 569 31 149 793 36 406 362
Anciens combattants . . 0 0 0
Culture et communication . . 184 432 629 - 406 669 629 - 222 237 000

Economie, finances et industrie : I. - Charges communes
23 561 975 800 118 434 000 - 179 160 000 - 12 075 044 000 11 426 205 800
II. - Services financiers . . - 537 484 413 6 000 000 - 531 484 413
III. - Industrie . . - 737 009 961 - 185 339 501 - 922 349 462
IV. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat . . - 1 320 000 5 951 920 4 631 920
V. - Poste, télécommunications et espace . . » » »

Education nationale, recherche et technologie : I. - Enseignement scolaire
. . - 145 999 640 1 067 147 181 921 147 541
II. - Enseignement supérieur . . 586 287 414 - 283 900 000 302 387 414
III. - Recherche et technologie . . 986 376 517 81 700 000 1 068 076 517

Emploi et solidarité : I. - Emploi
. . 42 506 848 3 470 738 124 3 513 244 972
II. - Santé, solidarité et ville . . - 113 075 171 1 058 709 527 945 634 356
III. - Action sociale et solidarité . . » » »
IV. - Ville et intégration . . » » »

Equipement, transports et logement : I. - Urbanisme et services communs
. . - 148 350 829 3 761 545 - 144 589 284

II. - Transports : 1. Transports terrestres
. . - 5 890 000 - 141 152 825 - 147 042 825
2. Routes . . - 17 720 537 - 1 581 159 - 19 301 696
3. Sécurité routière . . 10 285 627 » 10 285 627
4. Transport aérien . . - 3 090 447 » - 3 090 447
5. Météorologie . . - 12 749 576 » - 12 749 576
Sous-total . . - 29 164 933 - 142 733 984 - 171 898 917
III. - Logement . . - 910 000 3 374 801 092 3 373 891 092
IV. - Mer . . 39 378 865 - 26 200 000 13 178 865
V. - Tourisme . . - 5 078 819 - 13 430 000 - 18 508 819
Total . . - 144 125 716 3 196 198 653 3 052 072 937
Intérieur et décentralisation . . 350 506 925 72 303 296 422 810 221
Jeunesse et sports . . 23 169 516 - 121 146 000 - 97 976 484
Justice . . 585 808 269 1 703 000 587 511 269
Outre-mer . . 20 739 089 187 098 612 207 837 701

Services du Premier ministre : I. - Services généraux
. . 452 436 265 890 614 266 343 050
II. - Secrétariat général de la défense nationale . . - 16 098 640 » - 16 098 640
III. - Conseil économique et social . . 1 317 382 » 1 317 382
IV. - Plan . . - 3 866 544 4 209 574
343 030
Total général 23 561 975 800 118 434 000 975 833 814 - 4 082 486 622 20 573 756 992


Je vais mettre aux voix l'ensemble de l'article 27 et de l'état B annexé.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'article 27 du projet de loi de finances pour 1998 récapitule les crédits du budget général ouverts au titre des mesures nouvelles.
Dans sa rédaction initiale, cet article prévoyait l'ouverture d'environ 17,8 milliards de francs de crédits pour les titres III et IV.
Ces sommes ont été pour le moins réduites après l'adoption des propositions de la commission des finances et je ne peux m'empêcher de faire part du désaccord profond du groupe communiste républicain et citoyen vis-à-vis de l'orientation qui a été choisie par ladite commission, qui a eu le souci de réduire les dépenses publiques à concurrence des allégements fiscaux qu'elle a adoptés en première partie et qui, nous l'avons souligné, profitent fondamentalement aux plus hauts revenus.
Avec cet article 27, nous bouclons la boucle, en quelque sorte. Pour sauver l'avoir fiscal, pour maintenir un dispositif « Pons » dont l'efficacité économique reste à prouver et à appréhender sur la longue durée, pour réduire l'imposition des revenus relevant de la tranche supérieure du barème progressif - il s'agit tout de même de revenus mensuels de 30 000 francs minimum ! - on impose aux plus modestes de nos compatriotes une réduction des dépenses pour l'école, la formation des jeunes, l'emploi des chômeurs de longue durée, le développement des activités culturelles, mais aussi le tourisme populaire ou les transports collectifs.
On préfère donc accorder des avantages fiscaux plutôt que répondre à des besoins collectifs alors que tout le monde sait que le marché ne peut pas les prendre en compte, enfermés que sont les défenseurs de l'économie de marché dans leur seule et étroite logique de la profitabilité.
C'est sous le bénéfice de ces observations que le groupe communiste républicain et citoyen ne s'associera pas au vote sur cet article 27 tel qu'il ressort des travaux du Sénat car, vous l'avez bien compris, mes chers collègues, notre conception est à mille lieues de celle que l'on nous présente comme indispensable et justifiée.
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je n'avais pas l'intention de m'exprimer à ce moment du débat, mais Mme Beaudeau m'y invite !
Je rappelle donc au Sénat que les réductions de crédits auxquelles il s'était engagé et qu'il a approuvées ont donné lieu à une réduction de 21,285 milliards de francs, ce qui est très proche des 21,3 milliards de francs que nous avions envisagés.
Le Sénat est donc allé au bout de la démarche responsable qu'il a engagée. Voilà qui témoigne de la cohérence de la majorité sénatoriale !
Un seul incident, purement matériel, s'est produit sur le titre III du budget de secrétariat d'Etat aux départements d'outre-mer. Il demeure que les 21,3 milliards de francs d'économies que nous nous étions fixés sont atteints.
Je ne souhaite pas faire état de certaines économies qui ne sont qu'optiques et qui sont liées au rejet de certains budgets et, donc, au rejet de certaines mesures nouvelles : il ne serait pas vertueux pour la majorité sénatoriale de s'en recommander. Je n'ai donc souhaité acter que les réductions de crédits qui sont intervenues à la suite d'un vote responsable et sans ambiguïté de la part de la majorité sénatoriale.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 27 et de l'état B annexé, avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les lignes de l'état B.

(L'ensemble de l'article 27 et de l'état B est adopté.)

Article 28 et état C



M. le président.
« Art. 28. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 1998, au titre des mesures nouvelles de dépenses en capital des services civils du budget général, des autorisations de programme ainsi réparties :
« Titre V : Investissements exécutés par l'Etat

14 945 841 000 F

« Titre VI : Subventions d'investissement accordées par l'Etat

54 859 703 000 F

« Titre VII : Réparation des dommages de guerre

0 F

« Total

69 805 544 000 F

« Ces autorisations de programme sont réparties par ministère, conformément à l'état C annexé à la présente loi.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 1998, au titre des mesures nouvelles de dépenses en capital des services civils du budget général, des crédits de paiement ainsi répartis :
« Titre V : Investissements exécutés par l'Etat

6 324 187 000 F

« Titre VI : Subventions d'investissement accordées par l'Etat

29 588 150 000 F

« Titre VII : Réparation des dommages de guerre

0 F

« Total

35 912 337 000 F

« Ces crédits de paiement sont répartis par ministère conformément à l'état C annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état C :




É T A T C

Répartition, par titre et par ministère, des autorisations de programme et des crédits de paiement
applicables aux dépenses en capital des services civils (mesures nouvelles)

(En milliers de francs)



TITRE V


TITRE VI

TITRE VII

TOTAUX











MINISTÈRES OU SERVICES

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

Autorisations

Crédits

de programme
de paiement
de programme
de paiement
de programme
de paiement
de programme
de paiement

Affaires étrangères et coopération :

I. _ Affaires étrangères 251 000 96 000 5 000 5 000 . . 256 000 101 000
II. _ Coopération 22 000 11 000 2 299 800 449 180 . . 2 321 800 460 180
Agriculture et pêche 80 900 24 270 923 860 385 420 . . 1 004 760 409 690

Aménagement du territoire et environnement :
I. _ Aménagement du territoire . . . . . . . .
II. - Environnement 273 370 87 921 525 499 202 464 . . 798 869 290 385
Anciens combattants . . . . . . . .
Culture et communication 1 438 490 369 541 2 263 040 1 130 488 . . 3 701 530 1 500 029

Economie, finances et industrie :
I. _ Charges communes 246 000 91 500 2 927 000 486 000 . . 3 173 000 577 500
II. - Services financiers 353 725 161 720 . . . . 353 725 161 720
III. - Industrie 62 000 21 898 5 262 300 1 711 510 . . 5 324 300 1 733 408
IV. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat 300 300 18 770 5 630 . . 19 070 5 930
V. - Poste, télécommunications et espace . . . . . . . .

Education nationale, recherche et technologie :
I. _ Enseignement scolaire 620 180 421 590 90 820 54 490 . . 711 000 476 080
II. _ Enseignement supérieur 760 000 225 800 4 167 900 2 314 500 . . 4 927 900 2 540 300
III. _ Recherche et technologie 13 000 6 500 13 773 006 12 307 456 . . 13 786 006 12 313 956

Emploi et solidarité :
I. _ Emploi 61 420 32 420 546 880 233 768 . . 608 300 266 188
II. - Santé, solidarité et ville 71 600 38 450 1 295 404 397 099 . . 1 367 004 435 549
III. - Action sociale et solidarité . . . . . . . .
IV. - Ville et intégration . . . . . . . .

Equipement, transports et logement :
I. _ Urbanisme et services communs 183 576 69 407 247 300 134 154 . . 430 876 203 561

II. _ Transports : 1. Transports terrestres
20 000 6 000 997 500 302 850 . . 1 017 500 308 850
2. Routes 4 771 650 2 277 550 131 600 49 900 . . 4 903 250 2 327 450
3. Sécurité routière 183 200 109 900 4 000 2 400 . . 187 200 112 300
4. Transport aérien 1 829 000 1 273 500 27 000 27 000 . . 1 856 000 1 300 500
5. Météorologie . . 234 000 234 000 . . 234 000

234 000

Sous-total 6 803 850 3 666 950 1 394 100 616 150 . . 8 197 950 4 283 100
III. - Logement 45 500 21 100 6 362 775 2 248 635 . . 6 408 275 2 269 735
IV. - Mer 278 250 93 220 209 700 97 700 . . 487 950 190 920
V. - Tourisme . . 50 672 25 672 . . 50 672

25 672

Total 7 311 176 3 850 677 8 264 547 3 122 311 . . 15 575 723 6 972 988
Intérieur et décentralisation 1 545 500 458 800 10 554 020 6 066 756 . . 12 099 520 6 525 556
Jeunesse et sports 39 710 24 410 71 876 71 876 . . 111 586 96 286
Justice 1 712 000 356 000 8 000 3 000 . . 1 720 000 359 000
Outre-mer 36 470 19 090 1 857 981 639 602 . . 1 894 451 658 692

Services du Premier ministre :
I. _ Services généraux 17 000 10 500 . . . . 17 000 10 500
II. _ Secrétariat général de la défense nationale 23 000 8 800 . . . . 23 000 8 800
III. _ Conseil économique et social 7 000 7 000 . . . . 7 000 7 000
IV. _ Plan . . 4 000 1 600 . . 4 000

1 600

Total général 14 945 841 6 324 187 54 859 703 29 588 150 . . 69 805 544 35 912 337


Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 28 et de l'état C annexé, avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat sur les lignes de l'état C.

(L'ensemble de l'article 28 et de l'état C est adopté.)

Articles 29 et 30

M. le président. Je rappelle que le Sénat a rejeté les articles 29 et 30 le vendredi 5 décembre.

Article 31 et état D

M. le président. « Art. 31. _ Le ministre de la défense est autorisé à engager en 1998, par anticipation, sur les crédits alloués pour 1999, des dépenses se montant à la somme totale de 130 000 000 F, conformément à l'état D annexé à la présente loi. »
Je donne lecture de l'état D :

ÉTAT D

Tableau, par chapitre, des autorisations d'engagement accordées par anticipation sur les crédits à ouvrir en 1999


NUMÉROS
des

chapitres


SERVICES

TITRE III
.
Défense
34-03 Armées de l'air. Fonctionnement 10 000 000
34-04 Armée de terre. Fonctionnement 65 000 000
34-05 Marine. Fonctionnement 45 000 000
34-06 Gendarmerie. Fonctionnement

10 000 000

. Total pour l'état D 130 000 000

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 31 et de l'état D annexé.

(L'ensemble de l'article 31 et de l'état D est adopté.)

B. - Budgets annexes

Article 32

M. le président. « Art. 32. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 1998, au titre des services votés des budgets annexes, est fixé à la somme de 101 194 225 840 francs, ainsi répartie :


« Aviation civile 7 312 251 960 F
« Journaux officiels 843 478 181 F
« Légion d'honneur 105 522 940 F
« Ordre de la Libération 4 111 414 F
« Monnaies et médailles 828 233 560 F
« Prestations sociales agricoles

92 100 627 785 F


« Total

101 194 225 840 F. »



Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 32 avec les chiffres sans modification résultant des votes précédemment émis par le Sénat.

(L'article 32 est adopté.)

Article 33

M. le président. « Art. 33. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 1998, au titre des mesures nouvelles des budgets annexes, des autorisations de programme s'élevant à la somme totale de 1 829 810 000 F, ainsi répartie :
« Aviation civile

1 763 950 000 F

« Journaux officiels

19 700 000 F

« Légion d'honneur

5 140 000 F

« Ordre de la Libération

0 F

« Monnaies et médailles

41 020 000 F

« Total

1 829 810 000 F

« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 1998, au titre des mesures nouvelles des budgets annexes, des crédits s'élevant à la somme totale de 2 447 534 320 F, ainsi répartie :
« Aviation civile

822 216 213 F

« Journaux officiels

126 671 819 F

« Légion d'honneur

4 612 417 F

« Ordre de la Libération

1 652 F

« Monnaies et médailles

216 660 004 F

« Prestations sociales agricoles

942 372 215 F

« Total

2 112 534 320 F. »

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 33 avec les chiffres modifiés résultant des votes précédemment émis par le Sénat.

(L'article 33 est adopté.)

Articles 34 à 38, 38 bis, 39 à 43 et 43 bis

M. le président. Je rappelle que le Sénat a examiné les articles 34 à 38, 38 bis , 39 à 43 et 43 bis relatifs aux comptes spéciaux du Trésor le mercredi 3 décembre.

III. - DISPOSITIONS DIVERSES

Article 44 et état E

M. le président. « Art. 44. - La perception des taxes parafiscales dont la liste figure à l'état E annexé à la présente loi continuera d'être opérée pendant l'année 1998. »
Je donne lecture de l'état E.




É T A T E

Tableau des taxes parafiscales dont la perception est autorisée en 1998
(Taxes soumises à la loi n° 53-633 du 25 juillet 1953 et au décret n° 80-854 du 30 octobre 1980)



LIGNES



Nomen-
clature

1997

Nomen-
clature

1998




NATURE DE LA TAXE

ORGANISMES BÉNÉFICIAIRES

ou objet


TAUX ET ASSIETTE

TEXTES

PRODUIT
pour l'année 1997
ou la campagne

1996-1997

ÉVALUATION
pour l'année 1998
ou la campagne

1997-1998












(En francs)
(En francs)
I. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRE^T ÉCONOMIQUE
A. - COMPENSATION DE CERTAINES NUISANCES
AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT
II. - ENVIRONNEMENT

1 1 Taxe sur la pollution atmosphérique. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

250 F par tonne d'oxyde de soufre émise dans l'atmosphère ;
250 F par tonne d'autres composés soufrés exprimés en équivalent dioxyde de soufre ;
250 F par tonne d'oxydes d'azote et autres composés oxygénés de l'azote, exprimés en équivalent dioxyde d'azote ;
250 F par tonne émise d'acide chlorhydrique ;
500 F par tonne de composés organiques volatiles ; 500 F par tonne de poussières.

Décret n° 95-515 du 3 mai 1995. 190 000 000 227 000 000
2 2 Taxe sur les huiles de base. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie. Taux maximum de 150 F par tonne d'huile de base, neuve ou régénérée produite ou importée de France.
Décret n° 94-753 du 31 août 1994. Arrêté du 31 août 1994.
117 000 000
117 000 000

B. - AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT DES MARCHÉS ET DE LA QUALITÉ DES PRODUITS
RÉGULATION DES MARCHÉS AGRICOLES
AGRICULTURE ET PÊCHE

3 3 Taxe perçue pour le financement des actions du secteur céréalier.

Office national interprofessionnel des céréales (ONIC).
Institut technique des céréales et des fourrages (ITCF). Fonds de solidarité des céréaliculteurs et des éleveurs (FSCE).


Répartition entre organismes : ONIC 24 %, ITCF 27 %, FSCE 49 %.
Montant de la taxe par tonne de céréales entrées en organismes stockeurs, taux 1996-1997 :
- blé tendre : 10 F/tonne ;
- orge : 9,80 F/tonne ;
- maïs : 9,55 F/tonne ;
- blé dur : 10,25 F/tonne ;
- seigle, triticale : 9,55 F/tonne ;
- avoine : 8,45 F/tonne ;
- riz : 5,20 F/tonne ; - sorgho : 7,75 F/tonne.

Décret n° 97-174 du 25 février 1997.
Arrêté du 25 février 1997. Décret en cours de renouvellement. Le montant de la taxe en 1996-1997 traduit l'effort de solidarité interfilière dans le contexte de la crise de l'ESB.
517 370 000 281 800 000
4 4 Taxe acquittée par les fabricants et importateurs de conserves et jus de tomates. Société nationale interprofessionnelle de la tomate (SONITO).
Taxe assise sur les tomates entrées en usine. Taux maximum :
- 0,030 F par kilogramme de tomates traité sur contrats de culture ;
- 0,040 F par kilogramme de tomates traité hors contrats de culture.
Pour les concentrés de tomate :
- 12 à 15 % d'extrait sec : 0,080 F/kg ;
- au-delà de 15 et jusqu'à 30 % : 0,180 F/kg ;
- au-delà de 30 et jusqu'à 90 % : 0,230 F/kg ;
- au-delà de 90 % : 0,600 F/kg.
Pour les conserves de tomate : 0,030 F/kg.
Pour les jus de tomate : 0,035 F/kg. Pour les tomates congelées ou surgelées : 0,030 F/kg.

Décret n° 94-1043 du 23 novembre 1994.
Arrêté du 26 août 1996. Décret et arrêté en cours de renouvellement.
1 720 000 1 720 000
5 5 Taxe acquittée par les producteurs de prunes séchées d'Ente, les transformateurs et importateurs de pruneaux. Bureau national interprofessionnel du pruneau (BIP).
Taux maximum :
- producteurs et transformateurs : 2,5 % du montant des ventes de prunes ;
- importateurs : 5 % de la valeur en douane des produits importés de pays tiers ; Taux effectifs : 2 % et 4 %.

Décret n° 94-871 du 10 octobre 1994.
Arrêté du 6 février 1996. Décret et arrêté en cours de renouvellement.
25 368 000
20 730 000

CONTRÔLE DE LA QUALITÉ DES PRODUITS ET SOUTIEN DES PÊCHES MARITIMES
AGRICULTURE ET PÊCHE

6 6

Taxes dues :
- annuellement par les professionnels en raison de leurs activités ; - sur les produits selon leur nature, le tonnage et la valeur.

Groupement national interprofessionnel des semences, graines et plants (GNIS). Le taux des taxes à percevoir au profit du groupement est fixé par arrêté dans la limite des maxima fixés par le décret institutif.
Décret n° 96-265 du 28 mars 1996. Arrêté de 5 août 1996.
125 426 000 123 067 000
7 7 Taxe due par les armateurs de tous les navires armés à la pêche, par les premiers acheteurs de produits de la mer et les éleveurs de produits de culture marine (sauf conchyliculture). Comité national, comités régionaux et comités locaux des pêches maritimes et des élevages marins.
Armateurs : taxe sur la somme des salaires forfaitaires des équipages de navires armés ; taux maximum : 3 % ;
Premiers acheteurs : taxe forfaitaire différenciée par tranche de salariés permanents, maximum 8 500 F ; Eleveurs de cultures marines (hors conchyliculture) : taxe forfaitaire fixe, maximum 600 F.

Décret n° 96-1231 du 27 décembre 1996.
Arrêté du 27 décembre 1996.
26 000 000 27 000 000
8 8 Taxe due par l'armateur et le premier acheteur pour les produits de la pêche maritime débarqués sur le territoire français ou dans un port étranger par un navire de pêche immatriculé en France, et par le déclarant en douane de produits de la mer importés en France hors CEE et AELE. FIOM : Fonds d'intervention et d'organisation des marchés des produits de la pêche maritime et des cultures marines.
Taxe payée par l'armateur et l'éleveur. Taxe assise sur la valeur hors taxe des produits débarqués ou commercialisés (sauf importations). Taux maximal :
- conserves, semi-conserves : 0,13 % ;
- autres produits de la mer : 0,15 % ;
Taxe payée par le déclarant en douane. Taxe assise sur la valeur en douane des produits importés. Taux maximal :
- conserves, semi-conserves : 0,26 % ; - autres produits de la mer : 0,30 %.

Décret n° 96-304 du 9 avril 1996. Arrêté du 22 octobre 1996.
20 000 000
20 000 000

C. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT AGRICOLES
AGRICULTURE ET PÊCHE

9 9 Taxe sur la betterave destinée au financement et à la mise en oeuvre des programmes agricoles. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).

Taux maxima : 1,42 F par tonne de betteraves destinées à la production de sucre. Campagne 1996-1997 : 1,06 F par tonne.


Décret n° 95-1044 du 22 septembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
15 600 000 15 600 000
10 10 Taxe sur les céréales livrées par les producteurs aux organismes agréés pour la collecte et aux producteurs grainiers. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- blé tendre, orge : 5,20 F/tonne ;
- maïs : 4,75 F/tonne ;
- blé dur, riz : 4,75 F/tonne ;
- avoine : 3,40 F/tonne ;
- sorgho, seigle, triticale : 2,75 F/tonne.
Campagne 1996-1997 :
- blé dur, riz : 2,85 F/tonne ;
- blé tendre, orge : 3,10 F/tonne ;
- maïs : 2,85 F/tonne ;
- avoine : 2,05 F/tonne ; - sorgho, seigle, triticale : 1,65 F/tonne.

Décret n° 95-1042 du 22 septembre 1995. Arrêté du 14 octobre 1996.
131 000 000 125 000 000
11 11 Taxe sur les graines oléagineuses et protéagineuses. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- colza, navette : 4,10 F/tonne ;
- tournesol : 5 F/tonne ;
- soja : 2,65 F/tonne ;
- lupin doux : 1,75 F/tonne ;
- graines de pois : 1,55 F/tonne ;
- fèves et féveroles : 1,50 F/tonne.
Campagne 1996-1997 :
- colza, navette : 2,89 F/tonne ;
- tournesol : 3,54 F/tonne ;
- soja : 1,89 F/tonne ;
- pois : 1,04 F/tonne ;
- lupin doux : 1,17 F/tonne ; - fèves et féveroles : 0,97 F/tonne.

Décret n° 95-1043 du 22 septembre 1995. Arrêté du 14 octobre 1996.
14 000 000 16 000 000
12 12 Taxes versées par les producteurs sur les graines oléagineuses. Centre technique interprofessionnel des oléagineux métropolitains (CETIOM).
Taux maxima :
- colza, navette, oeillette, ricin et carthame : 13 F/tonne ;
- tournesol, soja et lin oléagineux : 15 F/tonne.
Campagne 1996-1997 :
- colza, navette : 10 F/tonne ;
- tournesol : 11,55 F/tonne ;
- soja : 11,30 F/tonne ;
- oeillette, ricin et carthame : 10 F/tonne ; - lin oléagineux : 12 F/tonne.

Décret n° 96-118 du 8 février 1996. Arrêté du 12 août 1996.
50 000 000 48 300 000
13 13 Taxe sur certaines viandes.
Association nationale pour le développement agricole (ANDA).

Taux maxima :
- boeuf et veau, espèces chevaline, asine et leurs croisements : 60 F par tonne de viande ;
- porc : 44,5 F par tonne ;
- mouton, chèvre : 60 F par tonne ;
- lapin : 44 F par tonne ;
- volaille : 24,8 F par tonne ;
- poule de réforme : 72 F par tonne ;
- dinde : 30,6 F par tonne ; - canard, pintade, oie : 36 F par tonne.

Décret n° 95-1338 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
161 000 000 161 000 000
. . . .
Taux en vigueur pour 1997 :
- boeuf et veau : 48 F par tonne ;
- porc : 36 F par tonne ;
- mouton : 46,5 F par tonne ;
- espèces chevaline et asine et leurs croisements : 18 F par tonne ;
- chèvre : 30 F par tonne ;
- lapin : 22 F par tonne ;
- poulet et coq non labellisés : 8 F par tonne ;
- poulet et coq labellisés : 15 F par tonne ;
- poule de réforme : 36 F par tonne ;
- dinde non labellisée : 10 F par tonne ;
- dinde labellisée : 20 F par tonne ;
- canard non labellisé : 16,5 F par tonne ;
- canard labellisé : 20 F par tonne ;
- pintade et oie non labellisées : 18 F par tonne ; - pintade et oie labellisées : 20 F par tonne.
14 14 Taxes versées par les entreprises intéressées. Centre technique de la salaison, de la charcuterie et des conserves de viande.
Taux maxima :
- 3 pour 10 000 du montant du chiffre d'affaires ; - taux effectif : de 1,6 à 3 pour 10 000 selon les tranches de chiffre d'affaires.

Décret n° 97-291 du 28 mars 1997. Arrêté du 26 mars 1997.
7 500 000 7 500 000
15 15 Taxe sur le lait de vache et la crème. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- lait : 0,45 F par hectolitre ;
- crème : 9,15 F par 100 kilogrammes de matière grasse incluse dans la crème. Taux en vigueur pour 1997 : 0,41 F et 8,21 F.

Décret n° 95-1340 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
87 200 000 87 200 000
16 16 Taxe sur les vins. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maxima :
- vin d'appellation d'origine contrôlée : 3 F/hl (en vigueur 2,60 F/hl) ;
- vin délimité de qualité supérieure : 1,95 F/hl (en vigueur 1,69 F/hl) ; - autres vins : 0,90 F/hl (en vigueur 0,77 F/hl).

Décret n° 95-1337 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
65 000 000 65 000 000
17 17 Taxe sur les produits de l'horticulture florale, ornementale et des pépinières non forestières. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 1,5 du montant des ventes hors taxes. Taux en vigueur en 1997 : 1,2 .

Décret n° 95-1339 du 28 décembre 1995.
Arrêté du 28 décembre 1995. Décret en cours de modification eu égard à la liquidation du CNIH.
3 000 000 3 000 000
18 18 Taxes sur les fruits et légumes. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 4,6 des montants des ventes hors taxes réalisées par les producteurs. Taux en vigueur en 1997 : 1,88 .

Décret n° 95-1341 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
25 700 000 27 400 000
19 19 Taxe forfaitaire payée par les exploitants agricoles. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum : 500 F. Taux en vigueur : 500 F.

Décret n° 95-1335 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
202 000 000 196 000 000
20 20 Taxe sur les laits de brebis et de chèvre. Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Taux maximum :
- 0,9 F par hectolitre pour le lait de brebis ;
- 0,58 F par hectolitre pour le lait de chèvre.
Taux en vigueur en 1997 :
- 0,70 F par hectolitre pour le lait de brebis ; - 0,40 F par hectolitre pour le lait de chèvre.

Décret n° 95-1336 du 28 décembre 1995. Arrêté du 28 décembre 1996.
1 800 000 1 800 000
21 21 Taxes destinées à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du comité. Comité des fruits à cidre et des productions cidricoles.
Taux maxima :
- 0,80 F par quintal de fruits à cidre et par 12,5 kg de concentrés desdits produits ;
- 1,10 F par hectolitre de jus, de moûts, de cidre, de fermenté et de poiré ;
- 20 F par hectolitre d'alcool pur de calvados, d'eaux-de-vie de cidre et de poiré et d'apéritifs à base de cidre et de poiré. Taux en vigueur : 0,80 F, 1,10 F et 20 F.

Décret n° 93-1205 du 27 octobre 1993.
Arrêté du 30 août 1996. Décret en cours de renouvellement.
1 800 000 1 800 000
22 22 Taxe destinée à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. Bureau national interprofessionnel du cognac.
Viticulteurs : 1,19 F par hectolitre de vin :
- pour les mouvements de place : 18,88 F par hectolitre d'alcool pur de cognac ;
- pour les ventes à la consommation : de 49,69 F à 64,88 F par hectolitre d'alcool pur de cognac selon l'importance des sorties ;
- pour les autres eaux-de-vie : 4,72 F par hectolitre d'alcool pur ;
- pour les cognacs entrant dans des produits composés : 4,72 F par hectolitre d'alcool pur de cognac ; - pour le pineau des Charentes : 4,72 F par hectolitre d'alcool pur.

Décret n° 92-1388 du 30 décembre 1992.
Arrêté du 30 décembre 1992. Décret en cours de renouvellement.
38 738 000 38 700 000
23 23 Taxes destinées à couvrir les frais de fonctionnement et les actions techniques du bureau. Bureau national interprofessionnel des calvados et eaux-de-vie de cidre et de poiré.
Taux maxima :
- 32 F par hectolitre d'alcool pur pour les calvados et les produits composés avec ces calvados ;
- 18 F par hectolitre d'alcool pur pour les eaux-de-vie de cidre et de poiré et les produits composés élaborés avec ces eaux-de-vie. Taux en vigueur : 25 F et 12,40 F.

Décret n° 94-216 du 14 mars 1994.
Arrêté du 2 janvier 1995. Décret en cours de renouvellement.
630 000 700 000
24 24 Taxes dues par les négociants et récoltants sur les ventes de bouteilles de champagne. Comité interprofessionnel du vin de Champagne.
Taux maxima :
- 0,16 F par bouteille de vente départ hors taxe ;
- récoltants manipulants : 0,09 F par bouteille. Taux en vigueur 1996-1997 : 0,11 F par bouteille.

Décret n° 92-1386 du 30 décembre 1992.
Arrêté du 29 décembre 1996. Décret en cours de renouvellement.
28 000 000 28 600 000
25 25 Taxe sur la valeur de la récolte. Comité interprofessionnel du vin de Champagne.
Taux maximum : 0,15 F par kilogramme de récolte. Taux en vigueur : 0,12 F par kilogramme pour la récolte 1996 ramené à 0,118 F par kilogramme pour les négociants propriétaires de vignobles.

Décret n° 92-1386 du 30 décembre 1992.
Arrêté du 29 décembre 1996. Décret en cours de renouvellement.
36 000 000 37 900 000
26 26 Taxe destinée au financement des conseils, comités ou unions interprofessionnels des vins tranquilles.
Conseil, comités ou unions interprofessionnels des vins de :
Bordeaux ;
Appellation contrôlée de Touraine ;
La région de Bergerac ;
Appellation d'origine de Nantes ;
Anjou et Saumur ;
Côtes du Rhône et vallée du Rhône ;
Fitou, Corbières et Minervois ;
Côtes de Provence ;
Gaillac ;
Beaujolais ;
Alsace ; Bourgogne.

Taux maximum : 6 F par hectolitre. Taux en vigueur : 4,83 F par hectolitre.

Décret n° 92-1385 du 30 décembre 1992.
Arrêté du 30 décembre 1992. Décret en cours de renouvellement.
77 257 000 79 139 500
27 27 Taxe destinée au financement du comité. Comité interprofessionnel des vins doux naturels et vins de liqueur d'appellation d'origine contrôlée.
Taux maximum : 6 F par hectolitre. Taux en vigueur : 4,83 F par hectolitre.

Décret n° 92-1387 du 30 décembre 1992.
Arrêté du 30 décembre 1992. Décret en cours de renouvellement.
2 410 000 2 350 000
28 28 Taxe sur les plants de vigne. Etablissement national technique pour l'amélioration de la viticulture (ENTAV).
Montant maximum :
- 2,20 F pour 100 plants racinés (en vigueur : 1,60 F) ; - 7 F pour 100 plants greffés-soudés (en vigueur : 5 F).

Décret n° 97-154 du 18 février 1997. Arrêté du 9 juillet 1992.
3 800 000 4 200 000
29 29 Taxes versées par les vendeurs en gros de fruits et légumes. Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL).
Taux maximum : 1,8 prélevé sur le prix des ventes de fruits et légumes frais ou secs, et plantes aromatiques à usage culinaire, réalisées par toute personne physique ou morale vendant en gros à tout détaillant. Taux en vigueur : 1,8 .

Décret n° 96-45 du 18 janvier 1996. Arrêté du 11 décembre 1996.
74 800 000 75 000 000
30 30 Taxes versées par les entreprises intéressées. Centre technique de la conservation des produits agricoles (CTCPA).
Taux maximum : 2 du montant des ventes et variable selon la nature des fabrications vendues. Taux en vigueur : 0,2 à 1,2 en fonction de la nature des produits.

Décret n° 96-1153 du 26 décembre 1996. Arrêté du 26 décembre 1996.
16 300 000 16 300 000
31 31 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Réunion.
Taux maximum : 7,65 F par tonne de cannes entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires de cannes. Campagne 1996-1997 : 7,14 F par tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 5 mars 1997.
12 138 000 13 566 000
31 31 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Martinique.
Taux maximum : 7,65 F par tonne de cannes entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires de cannes. Campagne 1996-1997 : 2,52 F par tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1996.
630 000 630 000
31 31 Taxes versées par les planteurs et transformateurs de canne à sucre. Centre technique de la canne et du sucre de la Guadeloupe.
Taux maximum : 7,65 F par tonne de cannes entrée en usine, dont 1/3 dû par les industriels transformateurs et 2/3 par les propriétaires de cannes. Campagne 1996-1997 : 6,81 F par tonne.

Décret n° 95-1307 du 14 décembre 1995. Arrêté du 30 juin 1996.
4 157 000
4 226 000

ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE
III. - RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

32 32 Taxe sur les expéditions de fruits et de préparations à base de fruits perçue dans les départements d'outre-mer. Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement.

Sur les produits frais et secs : 0,80 % Sur les produits transformés : 0,50 %.


Décret n° 92-780 du 5 août 1992.
Arrêté du 6 décembre 1994. Textes en cours de renouvellement.
4 640 000 5 080 000

D. - ENCOURAGEMENTS AUX ACTIONS COLLECTIVES DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT INDUSTRIELS
ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
III. - INDUSTRIE

33 33 Taxe versée par les entreprises de la profession. Centre technique des industries de la fonderie.
0,30 % de la valeur des produits des industries de la fonderie avec abattement dégressif suivant les tranches du chiffre d'affaires. Taux réduit de 50 % pour les appareils de chauffage domestique au gaz.

Décret n° 93-287 du 5 mars 1993 modifié par le décret n° 97-679 du 30 mai 1997.
Arrêté du 23 décembre 1996. Textes en cours de renouvellement.
54 400 000 54 400 000
34 34 Taxe versée par les entreprises de la profession. Membres du groupement d'intérêt économique « comité de coordination des centres de recherche en mécanique ».
Mécanique, soudage et décolletage : 0,112 % du CAHT.
Construction métallique : 0,30 % du CAHT sur le marché communautaire et à l'export hors CEE (0,32 % pour le premier semestre 1997). Activités aérauliques et thermiques : 0,265 % du CAHT sur le marché communautaire et à l'export hors CEE.

Décret n° 93-1370 du 29 décembre 1993 (modifié par le décret n° 96-146 du 22 février 1996 et par le décret n° 97-680 du 30 mai 1997). Arrêté du 19 décembre 1996 (modifié par l'arrêté du 30 mai 1997 et par l'arrêté du 16 juillet 1997).
340 000 000 340 000 000
35 35 Taxe versée par les industries de l'habillement. Comité de développement et de promotion du textile et de l'habillement. 0,14 % de la valeur des articles d'habillement fabriqués en France ou importés (hors CEE). Au minimum 45 % du produit au bénéfice de la recherche technique et 15 % pour des actions de formation et d'études économiques.
Décret n° 96-82 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996.
78 000 000 78 000 000
36 36 Taxe perçue sur certains produits pétroliers et sur le gaz naturel. Institut français du pétrole.
1,92 F par hectolitre de supercarburant ;
1,92 F par hectolitre d'essence ;
1,92 F par hectolitre de carburéacteur ;
1,92 F par hectolitre de gazole et fioul assimilé ;
1,10 F par hectolitre de fioul domestique ;
1,17 F par quintal de fioul lourd ;
1,92 F par hectolitre de pétrole lampant (carburant) ;
4,84 F par quintal de mélange spécial de butane et de propane destiné à être utilisé comme carburant ;
1,10 F par hectolitre de white-spirit (combustible domestique) ;
6 F par millier de m³ de gaz naturel comprimé destiné à être utilisé comme carburant ; 0,4 F par millier de kWh de gaz naturel livré à l'utilisateur final par les réseaux de transport et de distribution.

Décret n° 93-28 du 8 janvier 1993, modifié par le décret n° 96-912 du 10 octobre 1996.
Arrêté du 1er décembre 1993 (taux).
Arrêté du 19 mars 1997 fixant le taux de prélèvement pour frais d'assiette et de perception opéré par la direction générale des douanes et des droits indirects sur la taxe perçue au profit de l'IFP. Décret en cours de renouvellement.
1 170 000 000 1 181 700 000
37 37 Taxe sur les pâtes, papiers et cartons. Centre technique de l'industrie des papiers, cartons et celluloses et Association Forêt-Cellulose.
Pâtes à papier fabriquées en France et consommées dans la CEE :
0,32 % de la valeur hors taxes des pâtes à papier commercialisées ;
0,18 % de la valeur hors taxes des pâtes à papier livrées à soi-même.
Papiers et cartons fabriqués en France :
0,13 % de la valeur hors taxes des papiers-journaux, papiers et cartons dont la composition fibreuse comporte au plus 25 % de fibres vierges (pâtes écrues ou blanchies de fibres végétales) ; 0,16 % autres papiers et cartons.

Décret n° 94-1215 du 30 décembre 1994. Arrêté du 30 décembre 1994.
63 200 000 68 000 000
38 38 Taxe à la charge des entreprises ressortissant au centre d'études et de recherches du béton manufacturé et au centre technique des tuiles et briques. Association « Les centres techniques des matériaux et composants pour la construction ».
La taxe est assise sur le montant des ventes hors taxe, elle est fixée dans les limites de 0,35 % pour les produits en béton et 0,40 % pour les produits en terre cuite. Taux en vigueur : 0,35 % pour le béton et 0,40 % pour la terre cuite.

Décret n° 95-1334 du 27 décembre 1995. Arrêté du 27 décembre 1995.
52 700 000 54 000 000
39 39 Taxe des industries du textile et de la maille. Comité de développement et de promotion du textile et de l'habillement. 0,08 % pour les articles du textile et de la maille, 0,03 % pour les produits de la filature fabriqués en France, exportés vers la CEE ou importés hors CEE. Au minimum 65 % du produit au bénéfice de la recherche technique, d'actions de formation et d'études économiques.
Décret n° 96-81 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996.
72 000 000 72 000 000
40 40 Taxe versée par les industriels et négociants de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. Comité professionnel de développement de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie et de l'orfèvrerie. 0,20 % du montant HT des opérations de vente.
Décret n° 96-148 du 22 février 1996. Arrêté du 5 décembre 1996.
45 000 000 50 000 000
41 41 Taxe versée par les entreprises de la profession. Comité de développement des industries françaises de l'ameublement. 0,20 % du montant hors taxes des ventes, y compris à l'exportation (sauf certains produits métalliques taxés à 0,15 %). Au minimum 30 % du produit au profit de la recherche et du développement.
Décret n° 96-147 du 22 février 1996. Arrêté du 22 février 1996.
62 000 000 62 000 000
42 42 Taxe versée par les entreprises de la profession. Comité interprofessionnel de développement des industries du cuir, de la maroquinerie et de la chaussure et centre technique cuir, chaussure, maroquinerie.
0,18 % du montant hors taxes :
- des ventes, exportations comprises, de cuirs et peaux finis ou semi-finis, d'articles de maroquinerie, de voyage et de chasse, d'articles divers en cuir et similaires et d'articles chaussants ;
- des ventes de cuirs et peaux bruts aux utilisateurs métropolitains et à l'exportation, à l'exclusion des peaux brutes d'ovins. 55 % du produit de la taxe sont affectés au centre technique du cuir, chaussure, maroquinerie.

Décret n° 96-78 du 24 janvier 1996. Arrêté du 24 janvier 1996.
45 300 000 46 000 000
43 43 Taxe parafiscale sur certaines huiles minérales. Comité professionnel de la distribution des carburants. 0,115 F par hectolitre pour le supercarburant, l'essence et le gazole.
Décret n° 97-201 du 5 mars 1997. Arrêté du 5 mars 1997.
43 300 000 54 700 000
44 44 Taxe versée par les entreprises ressortissant à l'institut. Institut des corps gras. 0,053 % du montant des ventes.
Décret n° 95-852 du 25 juillet 1995. Arrêté du 27 décembre 1996.
5 900 000

6 000 000 II. - TAXES PERÇUES DANS UN INTÉRÊT SOCIAL
A. - PROMOTION CULTURELLE ET LOISIRS
CULTURE ET COMMUNICATION

45 45 Taxes sur les spectacles. Association pour le soutien du théâtre privé et association pour le soutien de la chanson, des variétés et du jazz. 3,50 % des recettes brutes des théâtres et 3,50 % des recettes brutes des spectacles de variétés.
Décret n° 95-609 du 6 mai 1995. Arrêté du 6 mai 1995.
39 050 000
39 000 000

B. - FORMATION PROFESSIONNELLE
ÉDUCATION NATIONALE, RECHERCHE ET TECHNOLOGIE

48 48 Taxe sur les salaires versés par les employeurs du secteur du bâtiment et des travaux publics. Comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics. 0,30 % pour les entreprises de moins de 10 salariés et 0,16 % pour les entreprises de 10 salariés et plus du montant total des salaires et traitements bruts retenus pour les cotisations de sécurité sociale, y compris les indemnités de congés payés.
Décret n° 96-165 du 4 mars 1996.
Arrêté du 3 octobre 1996. Décret en cours de renouvellement.
252 892 000 252 892 000
49 49 Taxe versée par les entreprises de réparation des automobiles, cycles et motocycles. Association nationale pour la formation automobile. 0,75 % du montant total des salaires versés au personnel des ateliers et services de réparation.
Décret n° 96-166 du 4 mars 1996.
Arrêté du 4 mars 1996. Décret en cours de renouvellement.
92 000 000
92 000 000

ÉQUIPEMENT, TRANSPORTS ET LOGEMENT
II. - TRANSPORTS
1. Transports terrestres

50 50 Taxe additionnelle au droit de timbre des cartes grises des véhicules utilitaires pour le financement de la formation professionnelle dans les transports. Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports (AFT).
Véhicules pour le transport des marchandises dont le poids total autorisé en charge est :
- inférieur ou égal à 3,5 tonnes : 154 F ;
- supérieur à 3,5 tonnes et inférieur à 6 tonnes : 632 F ;
- supérieur à 6 tonnes et inférieur à 11 tonnes : 948 F ;
- supérieur ou égal à 11 tonnes : 1 423 F.
Véhicules de transport en commun des voyageurs : 1 423 F. Tracteurs routiers : 1 423 F.

Décret n° 96-139 du 21 février 1996. Arrêté du 29 juillet 1996.
270 000 000 270 000 000


Le Sénat, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication, a adopté la ligne 46 concernant la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision et la ligne 47 concernant la taxe sur la publicité radiodiffusée et télévisée.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix les lignes 1 à 45 et 48 à 50 de l'état E.

(Ces lignes sont adoptées.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 44 et de l'état E annexé.

(L'ensemble de l'article 44 et de l'état E est adopté.)

Article 45 et état F

M. le président. « Art. 45. - Est fixé pour 1998, conformément à l'état F annexé à la présente loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent des crédits évaluatifs autres que ceux limitativement énumérés à l'article 9 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. »
Je donne lecture de l'état F annexé :

É T A T F

Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits évaluatifs





NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.
TOUS LES SERVICES
. Cotisations sociales. - Part de l'Etat.
. Prestations sociales versées par l'Etat.
.

AGRICULTURE ET PÊCHE
44-42

Prêts à l'agriculture. - Charges de bonification.

.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET ENVIRONNEMENT

.
II. - Environnement
44-30 Dations en paiement en application de la loi n° 95-1346 du 31 décembre 1995.
.

CULTURE ET COMMUNICATION
43-94 Dations en paiement faites en application de la loi n° 68-1251 du 31 décembre 1968.
.

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
.
I. - Charges communes
37-05 Supprimé.
42-04 Supprimé.
42-07 Application de conventions fiscales passées entre la France et des Etats étrangers.
44-91 Encouragements à la construction immobilière. - Primes à la construction.
44-92 Primes d'épargne populaire.
44-96 Charges afférentes aux emprunts émis pour le financement des prêts de reclassement aux rapatriés.
44-97 Bonifications d'intérêts à verser par l'Etat au Fonds national d'aménagement foncier et d'urbanisme.
44-98 Participation de l'Etat au service d'emprunts à caractère économique.
46-98 Réparation de préjudices résultant de la contamination par le virus d'immunodéficience humaine de transfusés.
.
IV. - Petites et moyennes entreprises, commerce et artisanat
44-98 Bonifications d'intérêt.
.

EMPLOI ET SOLIDARITÉ
.
I. - Emploi
46-71 Fonds national de chômage.
.

JUSTICE
46-12 Aide juridique.
.

AVIATION CIVILE
60-03 Variation des stocks.
65-04 Autres charges de gestion courante.
66-01 Pertes de change.
68-02 Dotations aux provisions.
.

MONNAIES ET MÉDAILLES
60-03 Variation des stocks (approvisionnements et marchandises).
68-00 Dotations aux amortissements et aux provisions.
83-00 Augmentation de stocks constatée en fin de gestion.
88-00 Utilisation et reprises sur provisions.
.

PRESTATIONS SOCIALES AGRICOLES
11-91 Intérêts dus.
11-92 Remboursements des avances et prêts.
37-94 Versement au fonds de réserve.
46-01 Prestations maladie, maternité, soins aux invalides versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille.
46-02 Prestations invalidité versées aux exploitants agricoles et aux membres non salariés de leur famille.
46-03 Allocations de remplacement versées aux conjoints des non-salariés agricoles.
46-04 Prestations d'assurance veuvage versées aux non-salariés du régime agricole.
46-92 Prestations familiales versées aux non-salariés du régime agricole.
46-96 Prestations vieillesse versées aux non-salariés du régime agricole.
46-97 Contribution aux assurances sociales des étudiants et au régime d'assurance obligatoire des praticiens et auxiliaires médicaux conventionnés (art. 381-8 et L. 722-4 du code de la sécurité sociale).
.
COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE
.
FONDS FORESTIER NATIONAL
07 Subventions à divers organismes.
.
FONDS DE SOUTIEN AUX HYDROCARBURES OU ASSIMILÉS
02 Versement au budget général.
.

COMPTE D'EMPLOI DE LA TAXE PARAFISCALE AFFECTÉE AU FINANCEMENT DES ORGANISMES

DU SECTEUR PUBLIC DE LA RADIODIFFUSION SONORE ET DE LA TÉLÉVISION

04 Versement au compte de commerce Liquidation d'établissements publics et d'organismes para-administratifs ou professionnels et liquidations diverses.
.
COMPTE D'AFFECTATION DES PRODUITS DE CESSIONS DE TITRES, PARTS ET DROITS DE SOCIÉTÉS
01 Dotations en capital, avances d'actionnaire et autres apports aux entreprises publiques et aux établissements publics.
02 Achats de titres, parts et droits de sociétés.
03 Dépenses afférentes aux ventes de titres, de parts ou de droits de sociétés.
04 Versements à la caisse d'amortissement de la dette publique.
05 Versements au fonds de soutien des rentes.
06 Reversements au budget général.
.
COMPTES DE PRÊTS
.
AVANCES DU TRÉSOR CONSOLIDÉES PAR TRANSFORMATION EN PRÊTS DU TRÉSOR
.
COMPTES D'AVANCES DU TRÉSOR
.

avances aux départements sur le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur
avances aux collectivités et établissements publics,

territoires, établissements et états d'outre-mer

03 Avances de l'article 34 de la loi du 31 décembre 1953 (avances spéciales sur recettes budgétaires).
04 Avances au territoire de la Nouvelle-Calédonie (fiscalité nickel).
.

avances sur le montant des impositions revenant aux départements,
communes, établissements et divers organismes

avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics

01 Avances aux budgets annexes.
02 Avances à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole au titre des besoins temporaires de préfinancement des dépenses communautaires.
03 Avances aux autres établissements publics nationaux et services autonomes de l'Etat.
04 Avances à des services concédés ou nationalisés ou à des sociétés d'économie mixte.
05 Avances à divers organismes de caractère social.

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 45 et de l'état F annexé.

(L'ensemble de l'article 45 et de l'état F est adopté.)

Article 46 et état G

M. le président. « Art. 46. - Est fixée pour 1998, conformément à l'état G annexé à la présente loi, la liste des chapitres dont les dotations ont un caractère provisionnel. »
Je donne lecture de l'état G annexé.

É T A T G

Tableau des dépenses auxquelles s'appliquent des crédits provisionnels




NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COOPÉRATION

I. - Affaires étrangères

34-03 Frais de réceptions et de voyages exceptionnels.
42-31 Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires).
46-91 Frais de rapatriement.
.

ANCIENS COMBATTANTS
46-03 Remboursements à diverses compagnies de transports.
46-27 Soins médicaux gratuits et frais d'application de la loi du 31 mars 1919 et des lois subséquentes.
.

ÉCONOMIE, FINANCES ET INDUSTRIE
.
I. - Charges communes
37-04 Financement des partis et des groupements politiques (lois n° 88-227 du 11 mars 1988 et n° 90-55 du 15 janvier 1990).
46-02 Secours aux victimes de sinistres et calamités.
.
II. - Services financiers
31-96 Remises diverses.
37-44 Dépenses domaniales.
.
III. - Industrie
37-61 Dépenses et remboursements supportés par la France au titre de l'infrastructure pétrolière.
.

INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION
34-03 Frais de réceptions et de voyages exceptionnels.
37-61 Dépenses relatives aux élections.
46-91 Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques.
.

JUSTICE
34-23 Services pénitentiaires. - Dépenses de santé des détenus.
34-33 Services de la protection judiciaire de la jeunesse. - Remboursement des prestations effectuées par le secteur habilité ou conventionné.
37-61 Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. - Dépenses relatives aux élections.
.

OUTRE-MER
34-03 Frais de réceptions et de voyages exceptionnels.
34-42 Service militaire adapté. - Alimentation.
46-93 Secours d'extrême urgence aux victimes de calamités publiques.

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 46 et de l'état G annexé.

(L'ensemble de l'article 46 et de l'état G est adopté.)

Article 47 et état H

M. le président. « Art. 47. - Est fixée pour 1998, conformément à l'état H annexé à la présente loi, la liste des chapitres sur lesquels s'imputent les crédits pouvant donner lieu à report, dans les conditions fixées par l'article 17 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. »
Je donne lecture de l'état H :

É T A T H

Tableau des dépenses pouvant donner lieu à reports de crédits de 1997 à 1998





NUMÉROS

des chapitres


NATURE DES DÉPENSES
.

BUDGETS CIVILS

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COOPÉRATION

.
I. - Affaires étrangères
34-05 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-90 Frais de déplacement.
41-03 Promotion de Strasbourg capitale parlementaire européenne.
42-29 Coopération de défense.
42-31 Participation de la France à des dépenses internationales (contributions obligatoires).
.
II. - Coopération
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
41-42 Assistance technique et formation dans le domaine militaire.
41-43 Concours financiers.
42-23 Coopération technique.
42-26 Transport et dépenses diverses au titre de l'aide alimentaire et aide d'urgence.
.

AGRICULTURE, PÊCHE ET ALIMENTATION
34-14 Statistiques.
34-98 Centres de responsabilité.
44-36 Pêches maritimes et cultures marines. - Subventions et apurement FEOGA.
44-41 Amélioration des structures agricoles.
44-45 Restructuration des abattoirs publics.
44-54 Valorisation de la production agricole. - Subventions économiques et apurement FEOGA.
44-55 Valorisation de la production agricole : orientation des productions.
44-70 Promotion et contrôle de la qualité.
44-80 Amélioration du cadre de vie et aménagement de l'espace rural.
44-83 Fonds de gestion de l'espace rural.
46-33 Participation à la garantie contre les calamités agricoles.
.

AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE, VILLE ET INTÉGRATION

I. - Aménagement du territoire

34-03 Dépenses d'informatique et de télématique.
.
II. - Ville et intégration
46-60 Interventions en faveur de la politique de la ville et du développement social urbain.
.

ANCIENS COMBATTANTS ET VICTIMES DE GUERRE
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
46-31 Indemnités et pécules.
.

CHARGES COMMUNES
34-91 Services rendus par la Poste à l'administration.
37-02 Préparation de l'Union économique et monétaire.
44-02 Réaménagement de charges d'endettement.
44-20 Programmes européens de développement régional.
44-75 Mesures exceptionnelles en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle.
46-01 Actions d'insertion en faveur des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion dans les départements d'outre-mer.
46-02 Secours aux victimes de sinistres et calamités.
46-90 Versements à divers régimes obligatoires de sécurité sociale.
46-91 Français rapatriés d'outre-mer. - Moratoire des dettes, indemnisation des biens, remise des prêts de réinstallation, financement des prêts de consolidation.
47-92 Contribution de l'Etat à l'amélioration des retraites des rapatriés.
.

CULTURE
34-20 Etudes.
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-96 Centres de responsabilité.
35-20 Patrimoine monumental et bâtiments. - Entretien et réparations.
43-92 Commandes artistiques et achats d'oeuvres d'art.
.

ÉDUCATION NATIONALE, ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET RECHERCHE
.
I. - Enseignement scolaire
34-95 Services déconcentrés : centres de responsabilité et services des territoires et collectivités d'outre-mer.
34-96 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-60 Centre de responsabilité. - Centres de formation.
.
II. - Enseignement supérieur
34-96 Dépenses d'informatique et de télématique.
.
III. - Recherche
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
.

ENVIRONNEMENT
34-96 Dépenses d'informatique et de télématique.
.

ÉQUIPEMENT, LOGEMENT, TRANSPORTS ET TOURISME

I. - Urbanisme et services communs

34-96 Dépenses informatiques et télématiques.
34-97 Centres de responsabilité. - Dépenses de matériel et de fonctionnement.
.

II. - Transports

2. Routes

37-46 Services d'études techniques et Centre national des ponts de secours.
44-42 Subventions intéressant la gestion de la voirie nationale.
.
3. Sécurité routière
44-43 Sécurité et circulation routières. - Actions d'incitation.
.
IV. - Mer
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-97 Centres de responsabilité. - Matériel et fonctionnement.
37-32 Signalisation maritime. - Service technique de la navigation maritime et des transmissions de l'équipement.
45-35 Flotte de commerce. - Subventions.
46-37 Gens de mer. - Allocations compensatrices.
.
V. - Tourisme
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
.

INDUSTRIE, POSTE ET TÉLÉCOMMUNICATIONS
.
I. - Industrie
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-97 Centres de responsabilité et autres services déconcentrés. - Dépenses de matériel et de fonctionnement.
37-71 Frais d'élections consulaires.
44-82 Prime à l'acquisition de véhicules.
46-93 Prestations à certains mineurs pensionnés.
.
II. - Poste, télécommunications et espace
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-10 Dépenses diverses de fonctionnement de l'Autorité de régulation des télécommunications.
.

INTÉRIEUR ET DÉCENTRALISATION
34-82 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-10 Administration préfectorale. - Dépenses diverses.
37-61 Dépenses relatives aux élections.
41-56 Dotation générale de décentralisation.
41-57 Dotation générale de décentralisation de la collectivité territoriale de Corse.
.

JEUNESSE ET SPORTS
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-97 Centres de responsabilité.
43-91 Sports de haut niveau et développement de la pratique sportive.
.

JUSTICE
34-05 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-92 Fonctionnement des juridictions.
41-11 Services judiciaires. - Juridictions administratives. - Subventions en faveur des collectivités.
.

OUTRE-MER
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
46-01 Actions d'insertion en faveur des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion dans les départements d'outre-mer.
.

SERVICES DU PREMIER MINISTRE

I. - Services généraux

34-04 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-06 Divers services. - Réalisation et diffusion d'enquêtes et d'études.
37-07 Dépenses diverses liées aux réimplantations d'administrations.
37-10 Actions d'information à caractère interministériel.
46-03 Prestations sociales et actions culturelles en faveur des rapatriés.
46-04 Contributions à caractère social dans le secteur de la presse.
.
II. - Secrétariat général de la défense nationale
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
.
IV. - Plan
34-04 Travaux et enquêtes.
34-05 Dépenses d'informatique et de télématique.
.

SERVICES FINANCIERS
34-53 Réforme fiscale.
34-75 Enquêtes statistiques.
34-94 Centres de responsabilité.
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
34-96 Juridictions financières. - Dépenses d'informatique et de télématique.
37-53 Révision des évaluations cadastrales des propriétés bâties et non bâties.
37-75 Travaux de recensement.
37-90 Contrats locaux d'initiative et de responsabilité dans le domaine de la formation.
42-80 Participation de la France à diverses assemblées et expositions internationales.
44-42 Direction générale des douanes et des droits indirects. - Interventions.
44-84 Subventions pour l'expansion économique à l'étranger et coopération technique.
44-85 Modernisation des organismes de soutien au commerce extérieur. - Crédit à répartir.
.

TRAVAIL ET AFFAIRES SOCIALES
.
I. - Travail
34-94 Statistiques et études générales.
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-62 Elections prud'homales.
43-03 Fonds de la formation professionnelle et de la promotion sociale (FFPPS) et insertion des jeunes.
43-04 Formation et insertion professionnelles. - Rémunération des stagiaires.
44-01 Programmes en faveur de l'emploi des jeunes.
44-72 Application de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier.
44-74 Fonds national de l'emploi. - Réadaptation et reclassement de la main-d'oeuvre.
44-76 Actions pour la promotion de l'emploi.
44-78 Exonération de cotisations sociales en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle.
.
II. - Santé publique et services communs
34-94 Statistiques et études générales.
34-95 Dépenses d'informatique et de télématique.
37-13 Services des affaires sanitaires et sociales. - Dépenses diverses.
43-32 Professions médicales et paramédicales. - Formation et recyclage.
.
III. - Action sociale et solidarité
46-92 Contribution de l'Etat au financement de l'allocation aux adultes handicapés.
.

BUDGET MILITAIRE

DÉFENSE

34-05 Marine. - Fonctionnement.
34-20 Entretien programmé des matériels.
37-31 Participation de l'Etat aux dépenses d'expansion économique et de coopération technique.
.

BUDGETS ANNEXES

AVIATION CIVILE

61-01 Dépenses d'informatique et de télématique.
66-00 Charges financières.
.
JOURNAUX OFFICIELS
61-02 Fonctionnement informatique.
.
LÉGION D'HONNEUR
61-02 Informatique.
.
MONNAIES ET MÉDAILLES
60-01 Achats.
.

COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

COMPTES D'AFFECTATION SPÉCIALE

. Fonds national pour le développement des adductions d'eau.
. Fonds forestier national.
. Soutien financier de l'industrie cinématographique et de l'industrie audiovisuelle.
. Fonds de soutien aux hydrocarbures ou assimilés.
. Fonds de secours aux victimes de sinistres et calamités.
. Compte d'emploi de la taxe parafiscale affectée au financement des organismes du secteur public de la radiodiffusion sonore et de la télévision.
. Fonds national du livre.
. Fonds national pour le développement du sport.
. Fonds pour la participation des pays en développement aux ressources des grands fonds marins.
. Fonds national des haras et des activités hippiques.
. Fonds national pour le développement de la vie associative.
. Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France.
. Actions en faveur du développement des départements, des territoires et des collectivités territoriales d'outre-mer.
. Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés.
. Fonds de péréquation des transports aériens.
. Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables.
. Fonds pour l'accession à la propriété.
. Fonds pour le financement de l'accession à la propriété.
.
COMPTES DE PRÊTS
. Prêts du Fonds de développement économique et social.
. Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à la Caisse française de développement en vue de favoriser le développement économique et social.
. Prêts du Trésor à des Etats étrangers pour la consolidation de dettes envers la France.
. Avances du Trésor consolidées par transformation en prêts du Trésor.

Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 47 et de l'état H annexé.

(L'ensemble de l'article 47 et de l'état H est adopté.)

Article 48

M. le président. Je rappelle que le Sénat a adopté l'article 48 le vendredi 28 novembre, lors de l'examen des crédits relatifs à la communication.

Articles non rattachés



M. le président.
Le Sénat va maintenant examiner les articles de la deuxième partie du projet de loi de finances qui n'ont pas encore été discutés lors de l'examen des crédits.
Ces articles seront appelés dans l'ordre numérique.
Je mettrai également en discussion, dans l'ordre où ils se placent dans le projet de loi, les amendements tendant à insérer des articles additionnels.

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES
A. - MESURES FISCALES

Article 49



M. le président.
« Art. 49. _ A. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 200 ter ainsi rédigé :
« Art. 200 ter . _ I. _ Les contribuables qui, entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2000, payent, au titre de leur habitation principale, située en France et achevée depuis plus de deux ans, des dépenses d'entretien ou de revêtement des surfaces, autres que celles qui ont le caractère de réparations locatives au sens de la législation relative aux rapports locatifs, peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
« Pour une même habitation, le montant des dépenses ouvrant droit à crédit d'impôt ne peut excéder au titre d'une année la somme de 5 000 F pour une personne célibataire, veuve ou divorcée et de 10 000 F pour un couple marié soumis à imposition commune. Cette somme est majorée de 500 F par personne à charge au sens des articles 196 à 196 B. Cette majoration est fixée à 750 F pour le second enfant et à 1 000 F par enfant à partir du troisième.
« Le crédit d'impôt est égal à 15 % du montant de ces dépenses.
« Il est accordé sur présentation des factures des entreprises ayant réalisé les travaux et mentionnant l'adresse de réalisation des travaux, leur nature et leur montant.
« Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées, après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200, de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué.
« II. _ Pour les mêmes travaux, les dispositions du I sont exclusives de l'application des dispositions des articles 199 sexies et 199 sexies D. »
« B. _ Au II de l'article 1733 du code général des impôts, il est inséré un h ainsi rédigé :
« h. - Les dépenses ouvrant droit au crédit d'impôt prévu à l'article 200 ter. »
« C. _ L'article 1740 quater du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "et 199 decies D" sont remplacés par les mots : ", 199 decies D et 200 ter " ;
« 2° Après les mots : "réduction d'impôt", sont insérés les mots : "ou du crédit d'impôt".
« D. _ Il est inséré, avant l'article 200 ter du code général des impôts, un intitulé ainsi rédigé : "21° Crédit d'impôt accordé au titre des dépenses d'entretien afférentes à l'habitation principale". »
Sur l'article, la parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Je souhaitais intervenir sur cet article, qui me semble très important pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, retenir le principe d'un crédit d'impôt plutôt que d'une réduction d'impôt est une excellente initiative. Cette option, rarement choisie en matière d'impôt sur le revenu, est très équitable.
Jusqu'à présent, les avantages fiscaux accordés pour des dépenses concernant le secteur immobilier, que ce soit pour les intérêts d'emprunt, les dépenses de grosses réparations ou les investissements locatifs par exemple, ne profitaient qu'aux contribuables qui payaient l'impôt sur le revenu.
Avec cette disposition nouvelle, seront visés non seulement les contribuables qui sont imposables, mais également ceux qui ne le sont pas. Ainsi, d'une part, la mesure aura une plus grande portée et, d'autre part, les contribuables les plus modestes bénéficieront également de ce « coup de pouce » fiscal.
J'ajoute qu'il était très important que soient concernés non seulement les propriétaires, mais également les locataires.
Par ailleurs, les dépenses qui sont ici visées n'avaient jamais fait l'objet d'avantages fiscaux. Elles incluent pourtant les dépenses d'entretien courant et de menues réparations ne rentrant pas dans le champ des réparations locatives, ainsi que les dépenses de revêtement de surfaces.
Sur le fond, la mise en place d'une telle mesure permet d'offrir un avantage comparable à celui qui aurait consisté à abaisser le taux de la TVA due sur ces mêmes travaux.
Or, assujettir au taux réduit les opérations réalisées en matière de logement nous est interdit par la sixième directive européenne, sauf en matière de logement social, et cette dernière possibilité a été utilisée par le Gouvernement.
L'article 49 offre donc un moyen astucieux de contourner ces problèmes de TVA et de prévoir tout de même un allégement comparable en faveur des contribuables.
J'ajoute que cette mesure permettra de relancer le secteur de l'artisanat du bâtiment, qui joue un rôle prépondérant en matière d'emploi.
Les modifications apportées par l'Assemblée nationale sont excellentes, car elles permettent de conforter l'ensemble du dispositif en le rendant plus incitatif et plus en rapport avec le montant moyen des dépenses engagées par les ménages en matière d'entretien.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avec cet article 49 du présent projet de loi de finances, nous introduisons dans notre fiscalité une nouvelle réduction d'impôt concernant cette fois les dépenses d'entretien de l'habitation principale.
Nous approuvons la mesure proposée, qui vise notamment à favoriser une reprise des activités de second oeuvre dans le secteur du bâtiment, au moyen d'une incitation fiscale non négligeable, même si la portée de celle-ci peut paraître au demeurant assez limitée.
Il s'agit en effet d'accorder une remise d'impôt de 1 500 francs pour un couple sans enfant et d'environ 1 680 francs pour un ménage ayant deux enfants.
Dans l'absolu, si l'on va jusqu'au bout de cette logique, cela consiste en fait à permettre aux familles concernées de récupérer pour leur compte la quasi-totalité du montant de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les travaux en cause.
La mesure est donc, de notre point de vue, tout à fait bienvenue.
Cependant, il nous semble indispensable de stimuler la réflexion sur le problème de la multiplication, dans notre législation, des réductions d'impôt, dont les montants et les objets sont par trop divers pour que nous puissions nous dispenser d'y remettre de l'ordre dans les prochaines années.
Nous estimons, en particulier, que toute politique de réforme fiscale doit passer par une analyse critique des dispositions corrigeant l'impôt sur le revenu, notamment, mais pas seulement, nous l'avons dit, les réductions d'impôt.
Nous avions obtenu l'an dernier de MM. Juppé et Arthuis l'engagement que serait publié, dans le courant de l'année 1997 et avant l'ouverture de la session parlementaire, un rapport officiel sur la question des réductions d'impôt.
Tel n'a pas été le cas, mais le principe demeure valable, et nous pensons qu'il serait bon, monsieur le secrétaire d'Etat, que vos services assurent la publication de ce document.
En tout état de cause, nous devrons réfléchir au devenir des réductions d'impôt. Ainsi, quel doit être l'objet prioritaire de ces mesures ? En particulier, y a-t-il lieu, plutôt que de maintenir des réductions d'impôt, de les transformer en abattements sur le revenu global ?
Nous voterons cet article 49, tout en souhaitant qu'il puisse aussi s'appliquer aux contribuables titulaires d'un contrat de location en secteur social ou en parc social de fait et en gardant à l'esprit qu'il sera nécessaire de remettre en question, dans les années à venir, notre politique d'incitation fiscale.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je n'en dirai pas plus sur cette mesure qui, comme je l'ai entendu dire, est positive.
Je voudrais simplement indiquer à Mme Terrade que le rapport sur les réductions d'impôt qu'elle a évoqué sera, comme promis, déposé sur le bureau de la Haute Assemblée et sur celui de l'Assemblée nationale avant la fin de l'année.
Mme Odette Terrade. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 49.

(L'article 49 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 49



M. le président.
Par amendement n° II-56, Mme Terrade, MM. Lefebvre, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 49, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 302 bis ZC du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 302 bis ZC. - I. - Il est institué une taxe sur les logements non occupés, non déclarés résidences secondaires, propriété de personne morale ou physique dans les communes où il existe un déséquilibre entre l'offre et la demande, à l'exception des logements gérés par les organismes visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation.
« Le montant de la taxe est calculé en rapport avec le prix moyen des loyers pratiqués dans le secteur géographique :
« - un mois de loyer au bout de six mois d'inoccupation ;
« - deux mois de loyer au bout de dix-huit mois d'inoccupation ;
« - trois mois de loyer au bout de trente mois d'inoccupation. »
« II. - Le taux prévu à l'article 150 M du code général des impôts est réduit à due concurrence. »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Cet amendement tend à instituer, dans les communes où il existe un déséquilibre entre l'offre et la demande, une taxe sur les logements vacants non déclarés en tant que résidences secondaires par leurs propriétaires, qu'il s'agisse de personnes morales ou physiques.
Nous proposons d'exempter de cette taxe les logements gérés par des organismes d'HLM, afin de prendre en compte les différents motifs de vacance.
Il s'agit en effet ici de taxer les propriétaires qui s'orientent vers la spéculation, et non les organismes qui ont parfois, selon les quartiers et les types de logement, du mal à attribuer l'ensemble des logements de leur parc.
Cette proposition, qui traduit notre volonté de considérer le logement comme un produit de première nécessité, devrait inciter les propriétaires immobiliers à louer leurs biens.
En effet, nous ne pouvons oublier que des centaines de milliers de logements restent vides, alors que, comme en a fait état le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, 5 048 000 personnes sont mal ou pas du tout logées. A l'aube du xxie siècle, c'est inadmissible !
Par ailleurs, nous avons voté cette année des crédits pour financer la construction de 80 000 logements neufs, alors que l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, estime qu'il en faudrait 360 000.
L'Etat doit donc mettre à contribution les bailleurs privés, afin de combler le déficit en logements, qui croît d'année en année. Grâce à l'instauration de cette taxe, qui aurait une valeur incitative et dont le montant serait variable en fonction du nombre de mois de vacance, nous introduirons des garanties supplémentaires pour l'attribution de l'ensemble des logements inoccupés à des personnes mal logées ou sans abri.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Une discussion très approfondie a eu lieu sur ce thème lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, et il a alors paru extrêmement difficile d'identifier les logements laissés délibérément vacants.
La mesure préconisée par Mme Terrade risquerait donc, si elle était adoptée, de frapper des propriétaires qui souhaitent donner une destination définitive à leur bien et qui, pour des raisons juridiques ou autres, sont dans l'impossibilité de le faire.
Instaurer cette taxe sur la vacance n'est donc pas la bonne solution. Celle-ci serait plutôt de soutenir les organismes qui, à l'instar de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, aident à la réhabilitation de logements.
C'est la raison pour laquelle la commission des finances a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, le Gouvernement souhaite lui aussi limiter le nombre des logements vacants.
Nous réfléchissons d'ailleurs à la création d'une surtaxe spécifique dont seraient redevables, en sus de la taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle ils sont déjà assujettis, les propriétaires de logements vacants.
Mes services travaillent, en concertation avec ceux du secrétariat d'Etat au logement, sur les conditions et les modalités de l'instauration d'une telle surtaxe. Le Parlement sera probablement saisi de cette question en 1998.
En tout état de cause, la mesure de gage que vous proposez, madame Terrade, ne me semble pas véritablement aller dans le sens de la justice fiscale. Son adoption aurait, de plus, un effet psychologique très négatif sur le marché de l'immobilier, dont la relance favorisera la reprise de la croissance.
C'est pourquoi je vous demande, madame le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Madame Terrade, l'amendement n° II-56 est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade. Au bénéfice de la réponse de M. le secrétaire d'Etat, je le retire.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Très bien !
M. le président. L'amendement n° II-56 est retiré.
Par amendement n° II-57, Mme Terrade, MM. Lefebvre, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 49, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article L. 351-1 du code de la construction et de l'habitation, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L... Une aide personnelle temporaire d'insertion, destinée aux personnes dont les revenus sont des minima sociaux est instituée pour prendre en charge l'intégralité de leur charge logement, la première année d'accès à un nouveau logement. »
« II. - Le taux prévu à l'article 150 M du code général des impôts est réduit à due concurrence. »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Par cet amendement, nous proposons de créer une aide personnelle temporaire d'insertion venant en complément de l'APL.
Le bénéfice de cette allocation serait réservé aux personnes dont les revenus sont constitués par des minima sociaux, comme par exemple le RMI ou les allocations de fin de droit.
La première année suivant l'accès à un nouveau logement, elle permettrait de couvrir l'intégralité des frais, à savoir les loyers, les charges et les cautions.
En effet, le logement est un droit, au même titre que l'éducation ou la santé. Ce principe a d'ailleurs été réaffirmé, monsieur le secrétaire d'Etat, dans une loi qui porte le nom de M. Besson, secrétaire d'Etat au logement.
Depuis peu, le logement est considéré comme équivalant à un produit de première nécessité.
Cette disposition constituerait, si elle était retenue, un véritable moyen d'insertion. Elle offrirait notamment aux personnes sans domicile fixe la possibilité de sortir du cercle vicieux dans lequel ils vivent. Ouvrir aux SDF une autre perspective que celle des foyers et des lieux d'hébergement temporaires me semble urgent, car l'accès effectif au logement est une condition d'une civilisation humaine. Un être humain à qui le droit au logement n'est plus assuré, c'est un homme ou une femme chassé de la société. La nation se doit donc de répondre, dans des délais brefs, à sa demande, qu'il ait ou non un emploi, un salaire, une famille ou des revenus.
Mesure-t-on ce qu'implique pour un homme ou une femme d'être non pas « sans domicile fixe », SDF, mais en fait, sans domicile tout court ? Pas de boîte aux lettres, plus d'existence sociale, l'adresse postale devient celle du CCAS, du comité communal d'action sociale de la mairie. Mais toutes les mairies créent-elles les conditions optimum de cet « enregistrement » ?
Imagine-t-on qu'un développement individuel, la recherche d'une issue soient possibles dans ces conditions ? Des couples de la rue se forment, c'est naturel ; mais les services sociaux savent que les conditions d'insertion en couple seront délicates, sinon impossibles, pour la plupart d'entre eux dans la mesure où il n'existe pas de foyers d'hébergement mixtes.
Décider que ceux qui n'ont pas de toit peuvent s'inscrire à la mairie, correspond à la reconnaissance implicite que le service public est seul à pouvoir prendre en compte ce type de situation. Nous réaffirmons qu'assurer le droit à un habitat de qualité est une condition du développement de la société.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il existe déjà une allocation de logement temporaire pour aider les associations qui hébergent les personnes en grande difficulté. Cette allocation est d'ailleurs dotée de 110 millions de francs dans le projet de budget pour 1998.
Je signale également que cette proposition créerait une charge nouvelle pour l'Etat.
En conséquence, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement n° II-57 conduirait à accorder la gratuité du logement pour les titulaires de minima sociaux en faisant prendre en charge par l'aide personnalisée au logement l'ensemble du loyer. Ce dispositif est contraire au principe sur lequel reposent les aides personnelles, puisque le code de la construction et de l'habitation prévoit d'adapter les dépenses tout en laissant subsister un effort de la part des locataires.
C'est un bon principe, car il vise à responsabiliser les bénéficiaires à l'égard de leur logement. Il interdit peut-être aussi la tentation de relever le loyer puisque ce loyer serait entièrement pris en charge par la collectivité.
Vous le savez, madame Terrade, la situation des titulaires de minima sociaux est prise en compte dans le barème actuel des aides. Et, si l'on fait les calculs, on s'aperçoit que le loyer qui reste à leur charge est de l'ordre de 200 francs.
J'ajoute, pour appuyer la position du Gouvernement, que le coût de cette mesure serait d'environ 300 millions de francs.
Dans ces conditions, madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, sinon je serais obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Madame Terrade, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Odette Terrade. Je suis désolée de ne pouvoir accéder à votre requête, monsieur le secrétaire d'Etat. En effet, cet amendement vise à aider des personnes sans logement et sans ressources, et ce sur une période transitoire de un an.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-57, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-58, Mme Terrade, MM. Lefebvre, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 49, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 641-1 du code de la construction et de l'habitation, les mots : "sauf dans les communes de l'ancien département de la Seine" sont supprimés.
« II. - Le taux prévu à l'article 150 M est réduit à due concurrence. »
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'exercice du droit de réquisition par les collectivités territoriales se justifie historiquement par les insuffisances de l'offre de logements dans l'immédiat après-guerre.
L'exercice de ce droit est autorisé par la nécessité de relogement des familles mal logées ou sans logement à un moment où sévit une crise de l'offre de logements locatifs.
Evidemment, dans la période de l'immédiat après-guerre, la situation était particulièrement dramatique, comme en témoignent encore aujourd'hui les grands programmes de construction de logements sociaux lancés à partir des années cinquante pour résorber l'habitat insalubre ou répondre aux effets de la croissance de la population française.
Sommes-nous tout à fait sortis de cette période de crise ? Fort heureusement, mais la crise du logement a désormais d'autres caractéristiques.
Ainsi, par ses effets pervers, la loi Méhaignerie a progressivement contribué à la réduction du parc social et placé un nombre de plus en plus grand de familles dans une situation précaire.
On pourrait d'ailleurs dire que l'un des objectifs affichés de la loi de 1986, celui de développer l'offre foncière, n'a pas du tout été atteint, le nombre de logements mis en chantier n'ayant pas connu de progression, loin de là.
Cette crise du logement sous des formes nouvelles est particulièrement aiguë en région parisienne, singulièrement dans Paris et à proximité immédiate de la capitale.
En effet, dans ces communes, la spéculation immobilière ajoute aux difficultés nées de la contraction de l'offre et favorise l'exclusion.
L'exercice du droit de réquisition est aujourd'hui dévolu aux préfets des départements concernés, ce qui limite la portée éventuelle des propositions de relogement formulées par les services municipaux du logement pour faire face à la demande sociale.
Il importe donc, à notre sens, de banaliser l'exercice de ce droit et de lui donner la même portée sur l'ensemble du territoire, pour Paris et les communes de la proche banlieue qui firent jadis partie du département de la Seine.
Bien entendu, chacun l'aura compris, nous ne pensons pas que ce droit de réquisition soit la seule solution pour remédier aux difficultés de logement des Franciliens, mais il peut contribuer à améliorer la situation.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite, mes chers collègues, à adopter l'amendement n° II-58.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Chaque année, le même amendement nous est proposé, mais il n'a pas sa place dans la loi de finances. Par conséquent, la commission y est défavorable.
M. Le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le paragraphe dont Mme Terrade demande la suppression est la traduction de l'organisation territoriale qui prévalait en 1945, lorsque l'ordonnance qui a institué la procédure de réquisition est entrée en vigueur. Il n'a donc pas d'effet dans le cadre actuel. Cela dit, des réquisitions sont intervenues en 1995 et en 1996 dans les communes de l'ancien département de la Seine.
Le principal argument que j'avancerai, c'est que le projet de loi de finances n'est pas le texte qui convient pour inclure la modification que vous proposez. Votre proposition trouverait, à mon sens, mieux sa place dans le projet de loi relatif à la prévention et à la lutte contre les exclusions que le Sénat sera amené à examiner dans les mois qui viennent.
C'est pourquoi, madame le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, je serai obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-58, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 49 bis



M. le président.
« Art. 49 bis . _ Le premier alinéa de l'article L. 112-16 du code rural est ainsi rédigé :
« Le Fonds de gestion de l'espace rural contribue au financement de tout projet d'intérêt collectif concourant à l'entretien ou à la réhabilitation de l'espace rural, en priorité ceux auxquels les agriculteurs ou leurs groupements sont parties prenantes. »
Par amendement n° II-75, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Les missions du FGER, le Fonds de gestion de l'espace rural, ont été fixées par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire. L'Assemblée nationale les a modifiées à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances.
Cet aller et retour prouve que la loi de finances n'est pas au fond le bon texte pour définir les missions du FGER. La commission des finances a donc considéré qu'il valait mieux attendre l'examen de la loi d'orientation agricole pour que le débat de fond puisse se tenir.
Ce débat permettra de définir si les opérations du FGER doivent être menées exclusivement par des agriculteurs ou conjointement avec d'autres acteurs du monde rural.
C'est pour ces raisons que la commission a déposé cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-75, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
M. le président. En conséquence, l'article 49 bis est supprimé.

Article additionnel après l'article 49 bis



M. le président.
Par amendement n° II-40 rectifié, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste, républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 49 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le deuxième alinéa de l'article 53 de la loi de finances rectificative pour 1989 (loi n° 89-936 du 29 décembre 1989), après les mots : "le ministre de l'équipement" d'ajouter les mots : "après avis d'un comité d'orientation". »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement traite de l'utilisation des ressources dont bénéficient un certain nombre de comptes d'affectation spéciale.
En l'occurrence, il s'agit du Fonds d'aménagement de la région d'Ile-de-France, le FARIF, dont les ressources sont essentiellement constituées par le produit de la redevance sur les immeubles de bureaux.
Le montant de la taxe perçue est particulièrement important, puisqu'il atteint presque 2 milliards de francs.
Le Fonds est habilité à intervenir dans des domaines particulièrement sensibles en Ile-de-France, à savoir le logement et la réalisation d'infrastructures de transport.
Je relève que d'autres régions de France pourraient envisager la création de tels fonds alimentés par de telles taxes. Je pense en particulier à la région Rhônes-Alpes, où la réalisation de liaisons routières suburbaines donne lieu à la mise en place d'un péage urbain particulièrement discriminatoire. Chacun garde ici en mémoire la levée de bouclier suscitée par cette mesure chez les usagers des autoroutes.
Le problème, avec le FARIF, c'est qu'il est aujourd'hui florissant, puisque le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances situe sa balance d'entrée au niveau de ses ressources annuelles.
Cette situation est difficile à admettre, alors même que les besoins en transports et en logements sont particulièrement forts en Ile-de-France, où se poursuit notamment le processus de « remodelage » des lieux de résidence du fait des prix de l'immobilier, même s'ils ont connu, ces derniers temps, une baisse sensible.
En matière de transport, les besoins sont connus. Il s'agit notamment de la prolongation des lignes de métro - je pense aux deux branches de la ligne 13 vers le nord ou au prolongement vers Romainville - de la réalisation de nouvelles lignes de tramway après le succès public rencontré par les lignes Saint-Denis-Bobigny et Tram Val-de-Seine, il s'agit encore de la mise à l'étude d'une réouverture de la ligne grande ceinture au trafic voyageurs.
L'ensemble de ces besoins appelle des engagements financiers particuliers auxquels le FARIF peut tout à fait participer.
Mais il ne peut le faire que dans un processus de décision plus conforme à notre époque, qui ne fasse pas du ministre de l'équipement le seul décisionnaire en la matière.
Evidemment, nous ne doutons pas un seul instant de la volonté du nouveau ministre de l'équipement de résoudre les problèmes de logement et de transport des Franciliens. Nous estimons toutefois que les décisions d'utilisation du fonds doivent être prises de la manière la plus collective possible.
Tel est le sens de cet amendement qui vise à mettre en place, en concertation avec les services du ministère, un comité d'orientation de ce fonds associant élus locaux, élus régionaux et, bien entendu, usagers à des décisions qui doivent être prises rapidement.
M. le président. Quel l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission - je parle sous le contrôle du Gouvernement - a remarqué que ce fonds disposait déjà d'un comité de gestion comprenant le ministre de l'équipement, le préfet de région, les directeurs d'administration. De plus, depuis 1994, le président du conseil régional y est associé.
La commission estime que la surabondance des comités ne garantit pas une bonne utilisation du fonds. Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. La disposition que Mme Beaudeau vient de proposer relève non pas de la loi de finances, mais du domaine réglementaire.
J'ajoute que le comité de gestion de ce fonds existe depuis le 23 mars 1990, qu'il rassemble les principaux ministères concernés, qu'il inscrit son action dans le cadre plus large des contrats de plan entre l'Etat et les régions.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement souhaite que cet amendement soit retiré.
M. le président. Madame Beaudeau, l'amendement est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ce comité de gestion a certainement des difficultés de fonctionnement. Il conviendrait donc peut-être d'élargir la composition de ce comité non seulement aux élus locaux, mais aussi aux usagers des transports et aux confédérations du logement d'Ile-de-France.
Je retire cependant l'amendement, en souhaitant que nous examinions à nouveau la question.
M. le président. L'amendement n° II-40 rectifié est retiré.

Article 50



M. le président.
« Art. 50. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 163 bis G ainsi rédigé :
« Art. 163 bis G . _ I. _ Le gain net réalisé lors de la cession des titres souscrits en exercice des bons attribués dans les conditions définies aux II et III est imposé dans les conditions et aux taux prévus aux articles 92 B, 92 J ou 160, ou au 2 de l'article 200 A.
« Par dérogation aux dispositions du précédent alinéa, le taux prévu au 6 de l'article 200 A s'applique lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société depuis moins de trois ans à la date de la cession.
« II. _ Les sociétés par actions dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé peuvent, à condition d'avoir été immatriculées au registre du commerce et des sociétés depuis moins de sept ans, attribuer aux membres de leur personnel salarié, ainsi qu'à leurs dirigeants soumis au régime fiscal des salariés, des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise, incessibles, et émis dans les conditions prévues à l'article 339-5 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, lorsque les conditions suivantes sont remplies :
« 1. La société doit exercer une activité autre que celles mentionnées au deuxième alinéa du 2 du I de l'article 44 sexies et être passible en France de l'impôt sur les sociétés ;
« 2. Le capital de la société doit être détenu directement et de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par des personnes morales détenues par des personnes physiques. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital-risque, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies entre la société bénéficiaire de l'apport et ces dernières sociétés. De même, ce pourcentage ne tient pas compte des participations des fonds communs de placement à risques ou des fonds communs de placement dans l'innovation ;
« 3. La société n'est pas ou n'a pas été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou pour reprendre de telles activités.
« III. _ Le prix d'acquisition du titre souscrit en exercice du bon est fixé au jour de l'attribution par l'assemblée générale extraordinaire, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, et sur le rapport spécial des commissaires aux comptes. Il est au moins égal au prix d'émission des titres fixé lors de la dernière augmentation de capital à laquelle la société émettrice a procédé dans les six mois précédant l'attribution du bon.
« IV. _ Un décret précise les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant aux titulaires des bons et aux sociétés émettrices.
« V. _ Les bons de souscription de parts de créateur d'entreprise mentionnés au II peuvent être attribués à compter du 1er janvier 1998 et jusqu'au 31 décembre 1999, ou jusqu'à l'expiration du délai de cinq ans prévu au II si celle-ci est antérieure. »
Par amendement n° II-76, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De supprimer le second alinéa du I du texte présenté par cet article pour l'article 163 bis G du code général des impôts.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de l'extension de l'application du taux forfaitaire d'imposition des plus-values est compensée par la majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de supprimer le régime moins favorable qui a été introduit pour les salariés présents dans l'entreprise depuis moins de trois ans qui se verraient imposés au taux de 30 % au lieu de 16 %.
Cette différence de traitement entre les salariés, selon leur ancienneté, semble discutable à la commission et aura, selon cette dernière, des effets pervers. De plus, cette clause apparaît contre-productive, car elle ne s'applique, par définition, qu'aux salariés qui sont demeurés dans l'entreprise. Or un salarié quittant l'entreprise pourra céder ses titres dans des conditions plus favorables.
Aussi, ce dispositif qui vise à encourager la fidélité à l'entreprise est-il plutôt de nature à la pénaliser.
Telles sont les raisons qui ont inspiré la rédaction de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne comprend pas très bien le sens de l'amendement déposé par M. le rapporteur général, dans la mesure où l'article incriminé a précisément pour objet d'empêcher un certain nombre d'abus et de dérives constatés dans le passé.
Le fait de récompenser, si je puis dire, les salariés qui sont restés plus de trois ans dans leur entreprise me paraît conforme à la fois à la vertu et à l'efficacité. Je demande donc le rejet de l'amendement n° II-76 présenté par M. Lambert.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-76.
M. Michel Sergent. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. La commission des finances nous propose plusieurs amendements sur cet article. Mais, dans la réalité, elle préfère redonner un tour plus favorable au régime fiscal des plans de souscription d'actions, dits stock options, en revenant sur les modifications de ces dernières années. Elle nous proposera d'ailleurs un amendement en ce sens. C'est pourquoi il me faut d'abord traiter de ces stock options.
Je rappelle qu'ils avaient été créés pour faire bénéficier les salariés d'une entreprise d'une possibilité avantageuse de souscrire ou d'acheter les titres de l'entreprise et pour intéresser ces derniers directement à la valorisation de l'entreprise.
Le principe en est le suivant : l'entreprise attribue à certains de ses salariés ou mandataires sociaux des options ayant généralement une durée de vie de cinq ans et donnant aux bénéficiaires la possibilité d'acquérir des titres de l'entreprise, ou de l'une de ses filiales, pour un prix convenu d'avance.
Arrêté lors de l'attribution des options, ce prix peut d'ailleurs être d'emblée inférieur à la valeur de l'action à cette même date, le rabais ainsi consenti devant toutefois demeurer dans certaines limites fixées par la législation commerciale, limite qui est de 20 % pour les actions cotées.
Le bénéficiaire lève ses options quand le cours réel de l'action est nettement supérieur au prix de vente préalablement fixé. Il réalise alors une plus-value d'acquisition, qu'il matérialise au moment où il cède lui-même les titres ainsi acquis. Il peut d'ailleurs réaliser une plus-value supplémentaire, dite de cession, si la valeur des actions a continué à s'apprécier depuis la levée de l'option.
Ces salariés bénéficiaient donc d'avantages très dérogatoires et, en premier lieu, d'un régime fiscal particulier : l'article 163 bis C du code général des impôts prévoyait que la plus-value d'acquisition était fiscalement traitée comme une plus-value sur valeur mobilière, et donc imposée au taux réduite de 16 % sous réserve du respect de certaines conditions.
En second lieu, au niveau des prélèvements sociaux, la plus-value et l'avantage résultant de la levée d'options étaient exonérés de toute cotisation de sécurité sociale.
Du fait de ces avantages, comme le mentionnait le rapport de nos collègues MM. Marini, Loridant et Arthuis, la pratique des plans de souscription d'actions a été souvent détournée de son objet pour devenir, dans la réalité de simples et importants compléments de salaires pour les cadres et les dirigeants de grandes entreprises, permettant à leurs bénéficiaires de réaliser des plus-values non négligeables, dans des conditions parfois peu transparentes, et ne respectant pas le principe d'égalité devant l'impôt.
Aussi, le régime a été heureusement modifié ces dernières années, sans d'ailleurs perdre totalement de son aspect dérogatoire et inéquitable.
Depuis la loi du 4 février 1995 et la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997, les gains sont soumis, sous certaines conditions, aux cotisations de sécurité sociale, tant patronales que salariales, ainsi qu'à la CSG, et depuis la loi de finances pour 1996, le taux d'imposition du gain en plus-value est de 30 %.
Revenir sur ces modifications serait recréer totalement cette possibilité choquante donnée à certains dirigeants et hauts cadres de se rémunérer largement, de façon opaque et sans acquitter une imposition normale. Nous y sommes donc fortement opposés.
Monsieur le rapporteur général, cet article n'est pas inutilement complexe. Il crée une nouveau dispositif, proche en effet de celui des stock options, mais des stock options initiaux, non de ces rémunérations un peu occultes et totalement dérogatoires pour hauts cadres.
L'idée initiale était en effet intéressante. Il est indispensable de faciliter la création et le développement des petites et moyennes entreprises innovantes en permettant aux équipes qui participent à la création de ces entreprises et qui prennent des risques de capitaliser leur investissement personnel. Cela est très important pour conserver ou attirer en France et dans la création d'entreprise des équipes de haut niveau.
C'est l'objet de cet article et c'est pourquoi nous y sommes favorables.
Sur ce premier amendement, qui prévoit de supprimer le régime moins favorable prévu pour les salariés présents dans l'entreprise depuis moins de trois ans, nous suivons la position du ministre. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je voudrais apporter deux précisions.
S'agissant de l'intervention de notre collègue M. Sergent, on peut s'indigner de cette forme de rémunération allant aux dirigeants d'entreprise.
Toutefois, dans une période où la circulation des salariés et des dirigeants va s'accélerer, je suis prêt à faire le pronostic que, quel que soit le gouvernement en place, nous irons vers le rétablissement, sous des formes plus ou moins rampantes, de dispositifs de cette nature.
Par conséquent, je vous donne rendez-vous dans l'avenir, monsieur Sergent.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je ne suis pas sûr que notre désaccord soit politique ; j'ai peur qu'il ne soit que technique.
Personnellement, la lecture que je fais du dispositif est la suivante : vous prévoyez le cas de ceux qui sont dans l'entreprise depuis moins de trois ans, mais vous ne dites rien de ceux qui sont sortis de l'entreprise avant. Or nous pensons, nous, qu'ils seront mieux traités que les autres. Je vous précise l'objet de notre amendement, puisque vous avez indiqué tout à l'heure que vous en compreniez peu le sens.
Comme nous le disons depuis le début de cette discussion budgétaire, autant nous pouvons être en désaccord sur des points qui nous opposent réellement, autant je pense que, dans le cas présent, notre désaccord résulte plutôt une difficulté technique.
Quoi qu'il en soit, je propose au Sénat, tout au moins à sa majorité, de voter l'amendement de la commission.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je voudrais rappeler à notre collègue M. Sergent, qui a bien voulu citer le rapport que j'avais eu l'honneur et le plaisir de cosigner voilà quelques années avec MM. Loridant et Arthuis, que, depuis, un certain nombre de mesures importantes ont été prises pour améliorer la transparence concernant les options de souscription ou d'achat d'actions.
J'avais moi-même, à la suite de ce rapport, déposé une proposition de loi dont les dispositions ont été intégrées dans plusieurs textes.
En premier lieu, il s'agissait d'obliger à une transparence dans la distribution des options au sein d'un groupe de sociétés controlées, puisque, jusque-là, il n'y avait pas obligation d'informer l'assemblée générale de la société mère du groupe des options distribuées sur les titres des filiales. Maintenant cette obligation existe.
En deuxième lieu, il existait des risques de délit d'initié pour les sociétés cotées, risques dont je ne rappellerai pas les mécanismes. Les textes auxquels j'ai fait allusion et qui ont concrétisé le rapport Arthuis-Loridant-Marini, ainsi que la proposition que j'avais déposée, ont donc permis à la Commission des opérations de bourse d'exercer toutes ses compétences et au droit boursier d'être pleinement applicable pour des opérations que, jusque-là, on ne considérait pas comme étant réalisées sur le marché.
En troisième lieu, en matière de fiscalité, le différentiel s'est réduit et, même si l'on peut le regretter, cela est sans doute de nature à éviter certains comportements, je pense aux compléments de rémunération qui, en effet, comme l'a dit M. Sergent, sont tout à fait opposés à la nature même de cette forme d'intéressement à la valeur créée.
Tout cela étant dit, bien entendu, monsieur le secrétaire d'Etat, je suis solidaire de la commission des finances. L'approche qu'elle nous propose par ses amendements à l'article 50 étant tout à fait raisonnable, je voterai, en tout cas, l'amendement n° II-76.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne sais pas s'il y a un désaccord technique ou politique entre nous, mais la proposition du Gouvernement est la suivante : un salarié qui quitte l'entreprise avant les trois ans voit ses plus-values taxées de 30 % ; s'il quitte l'entreprise après trois ans, la taxation est de 16 %.
J'ajoute - mais ce n'est pas un point en débat - que les bons ne sont pas cessibles.
Votre commission des finances propose que la taxation réduite de 16 % s'applique aussi bien au salarié qui quitte avant trois ans qu'au salarié qui quitte après trois ans. Je crois très sincèrement qu'il est important de favoriser les salariés qui participent effectivement à la vie de l'entreprise nouvelle.
Je répète que le dispositif qui est proposé par le Gouvernement et que vous voulez corriger est à la fois juste et efficace. Je confirme donc ma demande de rejet ou, peut-être, de retrait si M. le rapporteur général est convaincu par mes arguments.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-76, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent avoir l'objet d'un discussion commune.
Par amendement n° II-77, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le 3 du II du texte présenté par l'article 50 pour l'article 163 bis G du code général des impôts :
« 3. La société n'a pas été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes, sauf si elle répond aux conditions prévues par le I de l'article 39 quinquies H. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« La perte de recettes résultant de la modification des conditions nécessaires pour qu'une société puisse émettre des bons de souscription de parts de création d'entreprises est compensée par la majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-142, M. Laffitte propose de rédiger comme suit le 3 du II du texte présenté par l'article 50 pour l'article 163 bis G du code général des impôts :
« 3. la société n'est pas ou n'a pas été créée dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-77.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Par cet amendement, nous proposons une extension du bénéfice de la mesure aux sociétés qui sont créées par voie d'essaimage.
Une telle extension a déjà été proposée à l'Assemblée nationale par le rapporteur général de la commission des finances, mais n'a pas été votée par les députés, le Gouvernement ayant donné l'assurance que la circulaire d'application prévoirait cette disposition.
Selon notre interprétation du droit, il nous semble qu'un texte réglementaire d'application ne peut admettre une extension du champ clairement contraire au texte du projet de loi, qui, dans sa rédaction actuelle, exclut toute activité qui n'est pas réellement nouvelle. C'est pourquoi la commission des finances du Sénat a jugé indispensable de déposer cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-142 est-il soutenu ?... Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-77 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le dispositif proposé par le Gouvernement de bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises ne peut être ouvert à des sociétés qui seraient simplement créées à l'occasion d'une concentration, d'une restructuration ou de l'extension d'une activité préexistante. Il est réservé à des entreprises véritablement nouvelles.
Cependant, des entreprises créées par essaimage dans les conditions prévues à l'article 39 quinquies H du code général des impôts - lequel vise le cas des sociétés qui consentent des prêts à taux privilégiés à des entreprises créées par les membres de leur personnel ou qui souscrivent au capital de sociétés créées par ces personnes - sont effectivement nouvelles.
Le Gouvernement a pensé qu'il n'était donc pas nécessaire, d'un point de vue juridique, d'apporter des précisions sur ce point dans la loi puisqu'il est déjà implicitement traité. La précision que vous apportez étant inutile, je vous suggère de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, le Gouvernement en demanderait le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-77, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-78, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit la seconde phrase du paragraphe III du texte présenté par l'article 50 pour l'article 163 bis G du code général des impôts :
« Il est au moins égal, lorsque la société émettrice a procédé dans les six mois précédant l'attribution du bon à une augmentation de capital, au prix d'émission des titres alors fixé. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est un amendement rédactionnel.
Le texte actuel du projet de loi a semblé ambigu à la commission des finances. En effet, il suppose que l'entreprise qui attribue des bons a, dans tous les cas, procédé à une augmentation de capital dans les six mois précédents. Or, pour la commission des finances, il ne s'agit que d'une hypothèse qui, si elle est vérifiée, lie l'assemblée générale pour la fixation du prix de souscription des titres attachés aux bons. Dans l'hypothèse inverse, l'assemblée générale est libre de fixer ce prix comme elle l'entend, sous le contrôle des commissaires aux comptes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui précise la rédaction initiale.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-78, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-79 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission, propose :
A. - De supprimer le paragraphe V du texte présenté par l'article 50 pour l'article 163 bis G du code général des impôts.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de la pérennisation du dispositif des bons de souscription de parts de créateur d'entreprise est compensée par la majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A. »
La parole est à M le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances juge tout à fait inopportune la décision de donner un caractère provisoire à ce dispositif. En effet, le législateur a toujours la possibilité d'abroger une disposition.
De toute façon, la période de deux ans qui est envisagée apparaît trop courte pour que le dispositif puisse faire l'objet d'une évaluation.
Cet affichage apparaît mauvais non seulement pour les entreprises existantes, mais surtout pour les candidats à la création d'entreprise qui n'en sont encore qu'au stade de projet. Il serait imprudent de leur part d'intégrer dans leur calcul un dispositif aussi rapidement périssable.
Il semble également inutile de préciser que les entreprises ne pourront plus attribuer de bons lorsqu'elles auront dépassé la durée d'existence prévue à compter de leur création. Ce délai n'est d'ailleurs plus de cinq ans, mais de sept ans, du fait de l'adoption d'un amendement par les députés, qui ont oublié de faire la coordination nécessaire.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'article 50 a pour but de favoriser la création de PME innovantes créatrices d'emplois en accordant des avantages directs aux personnes qui participent à la création de ces entreprises.
Il s'agit d'un dispositif nouveau, fortement incitatif, qui revêt en quelque sorte un caractère expérimental. Dès lors, il apparaît de bonne méthode d'envisager une période d'application limitée dans le temps ; à la fin de celle-ci, nous ferons ensemble le bilan de l'application de cette mesure et nous nous interrogerons sur son avenir éventuel.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° II-79 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-79 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 50, modifié.

(L'article 50 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 50



M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-131, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 50, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 163 bis C du code général des impôts est abrogé. »
Par amendement n° II-80 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 50, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est abrogé ;
« II. - La perte de recettes résultant de la suppression du taux forfaitaire majoré d'imposition des plus-values est compensée par la majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour présenter l'amendement n° II-131.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Par l'amendement n° II-131, nous vous proposons, mes chers collègues, d'accorder un regard particulier à la question des stock options, ces incitations fiscales particulièrement fortes mises en place il y a quelques années.
On sait que ce dispositif tendant à faire échapper à l'impôt sur le revenu une part importante d'éléments objectifs de rémunération des cadres dirigeants, a fait l'objet des plus vives critiques, notamment lors de l'examen de la loi de finances pour 1994, lorsque aucune condition de durée de détention ne fut exigée pour bénéficier du dispositif de prélèvement libératoire.
L'absence d'obligation de portage des titres se traduisait donc par une formidable incitation à l'usage des options d'achat d'actions, ce placement échappant, d'une part, à l'application du barème progressif auquel il aurait dû être soumis au taux marginal, d'autre part, aux prélèvements sociaux, hors CSG ou 1 %.
Après quelques péripéties, et alors même qu'il a été prouvé que l'existence des options d'achat a facilité la mise en place d'opérations de dissimulation de revenus de grande envergure, le dispositif a été modifié assez sensiblement et le niveau de prélèvement libératoire relevé.
Cette mesure n'aura toutefois pas de portée avant quelques années et l'impact n'en sera guère chiffrable, compte tenu du fait que l'évaluation des voies et moyens n'a jamais chiffré le coût fiscal du système.
Avec cet amendement, nous proposons de revenir à l'essentiel.
Il s'agit de supprimer les dispositions créant le prélèvement libératoire et de réinsérer les produits financiers concernés dans l'assiette même de l'impôt sur le revenu au titre des traitements et salaires, qu'ils n'auraient jamais dû quitter, de par leur nature.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement n° II-131, qui a pour objectif, vous l'aurez compris, la justice et l'équité fiscale.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° II-131 et pour présenter l'amendement n° II-80 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'amendement n° II-131 est apparu très radical à la commission des finances. Autant celle-ci comprend que Mme Beaudeau souhaite l'abrogation du paragraphe I de l'article 163 bis C du code général des impôts, autant elle est étonnée qu'elle souhaite l'abrogation du paragraphe II dans la mesure où ce paragraphe assimile les gains en question à une rémunération soumise au barème de l'impôt sur le revenu. On pourrait en déduire que Mme Beaudeau souhaite que ces revenus échappent à toute imposition. Je ne crois pas que ce soit son objectif.
Quoi qu'il en soit, la commission des finances est défavorable à cet amendement.
Quant à l'amendement n° II-80 rectifié, il tend à revenir au taux d'imposition de droit commun de 16 % pour les plus-values réalisées grâce à des options de souscription ou d'achat d'actions. Ce taux, vous vous en souvenez, avait été porté à 30 % par la loi de finances pour 1996.
Toutefois, deux éléments nouveaux sont intervenus depuis.
D'une part, la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 a soumis à cotisations sociales les gains sur options de souscription ou d'achat d'actions lorsque le délai d'indisponibilité de cinq ans n'est pas respecté.
D'autre part, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 porte à 10 % le total des prélèvements sociaux sur les revenus de placement.
Le régime fiscal et social des plans d'options de souscription ou d'achat d'actions apparaît désormais exagérément restrictif au regard des objectifs de ce mécanisme et de son intérêt pour les entreprises. La commission des finances estime donc opportun de revenir, au moins partiellement, au régime antérieur à 1996.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-131 et II-80 rectifié ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame Beaudeau, je comprends vos préoccupations d'équité, qui rejoignent les orientations politiques du projet de loi de finances pour 1998. Toutefois, le Gouvernement ne partage pas votre souhait de banaliser totalement les revenus tirés par les salariés de la levée d'options qui leur ont été accordées par leurs entreprises.
A l'opposé de plusieurs systèmes anglo-saxons qui imposent l'avantage tiré de la levée des options comme une simple plus-value financière, le système français a cherché un équilibre qui tient compte de la durée pendant laquelle le salarié a conservé ses options. Si les options sont cédées moins de cinq ans après l'attribution du plan, l'avantage en résultant est effectivement taxé comme un salaire.
Ce n'est que dans l'hypothèse où les actions sont cédées plus de cinq ans après l'attribution du plan que le gain réalisé relèverait du régime des plus-values mobilières, mais à un taux qui est désormais de 30 % au lieu du taux de droit commun de 16 %.
A cette imposition s'ajoutent, bien entendu, les prélèvements sociaux qui, à compter du 1er janvier 1998, avoisineront 10 %.
J'ai la conviction que ce mécanisme, dont le régime fiscal et social est aujourd'hui bien équilibré, doit être préservé tel qu'il est, au même titre que l'intéressement et la participation, qui répondent à la volonté d'associer les salariés, notamment les cadres, au développement de leur entreprise.
Je demanderai donc à Mme Beaudeau de retirer son amendement ; sinon, je serai obligé de donner un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° II-80 rectifié, présenté au nom de la commission, j'aurai une réaction de surprise.
En effet, voilà que le rapporteur général cherche à abolir une disposition de la loi de finances pour 1996 qui a été examinée par le Sénat au cours de la séance du 9 décembre 1995 ! A l'époque, dans la foulée du rapport d'information relatif aux plans d'options sur actions qu'il avait établi avec MM. Arthuis et Loridant, M. Marini, suivi par le Sénat, avait défendu cette disposition.
Il me semble qu'au nom de la cohérence la commission des finances serait bien avisée de défendre, en 1997, la même position qu'en décembre 1995...
M. Alain Lambert, rapporteur général. J'ai expliqué qu'il y avait des éléments nouveaux !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Certes, monsieur le rapporteur général, mais l'argumentation que vous avez brièvement développée sur l'augmentation récente des prélèvements sociaux sur tous les revenus de l'épargne ne doit pas conduire à une baisse du prélèvement de l'Etat sur certains de ces revenus.
C'est d'ailleurs ce dernier argument qui me pousse à demander le rejet de l'amendement n° II-80 rectifié.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-131, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-80 rectifié.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Monsieur le président, cet amendement propose de revenir, comme l'a dit M. le secrétaire d'Etat, sur une disposition de la loi de finances pour 1996 votée sur l'initiative de M. Arthuis, qui visait à remonter de 16 % à 30 % le taux d'imposition de droit commun applicable aux plus-values issues des stock-options.
J'ai expliqué, voilà quelques instants, notre position sur les stock-options. Mais je voudrais prolonger la réflexion dans la mesure où la commission des finances, qui trouvait il y a deux ans le dispositif trop intéressant, le trouve désormais exagérément restrictif, arguant des lois de financement de la sécurité sociale.
En dehors du caractère un peu contradictoire de la démarche,...
M. Philippe Marini. Pas du tout !
M. Michel Sergent. ... sur lequel je préfère ne pas insister, il se pose en effet un problème de fond.
Selon nous, dans la pratique, les stock-options sont devenues, comme aux Etats-Unis, un dispositif d'augmentation de la rémunération des dirigeants et cadres des entreprises, en dehors de tout accroissement des charges qui pèsent sur la masse salariale, de toute ponction sur la trésorerie des sociétés, par allégement de la facture fiscale des heureux souscripteurs.
Plusieurs grands patrons ont ainsi empoché de véritables fortunes, comme cela est apparu à l'occasion de la divulgation de certaines affaires, je pense à Alcatel par exemple. Cette surrémunération est de plus en plus souvent dispensée aux cadres supérieurs des entreprises.
Même en dehors de toute pratique frauduleuse, il est clair, comme l'énonçait un journal économique, que les entreprises françaises utilisent surtout les stock-options comme complément de salaire pour les cadres dirigeants.
Je rappelle - je l'ai déjà dit - que telle était le sentiment de MM. Marini, Arthuis et Loridant. C'était également celui de M. Madelin, qui, le 30 juin 1995, en réponse à une question de M. Marini, s'est exprimé en ces termes : « Comme vous l'avez révélé dans votre rapport, les plans d'option ont été trop souvent utilisés ces dernières années pour verser des compléments de rémunération bénéficiant d'une fiscalité allégée et d'absence de cotisations sociales ».
Vous voyez, mes chers collègues, même les plus libéraux d'entre vous pensent qu'il s'agit d'un complément de salaire !
M. Philippe Marini. Très bien !
M. Michel Sergent. En tant que complément de salaire, il n'y a aucune raison que de tels gains ne soient pas imposés à 30 % ou 40 %. S'agissant de personnes qui sont soumises au taux marginal souvent décrié ici, cela constituerait déjà un énorme avantage. Pour notre part, nous pensons que la véritable justice serait de les intégrer dans l'assiette de l'impôt sur le revenu.
La commission des finances a cependant une position originale sur la question puisqu'elle considère qu'il s'agit non pas d'un complément de rémunération mais d'une sorte de placement à risque justifiant une imposition très réduite.
Mes chers collègues, cette position est très minoritaire. De plus, elle aboutit à accorder encore un avantage dérogatoire à certains hauts et très hauts revenus.
Enfin, l'article 50 rend caduques les justifications liées à la nécessité d'attirer des cadres de haut niveau dans les entreprises en développement rapide ne pouvant les rémunérer suffisamment.
Cet amendement n'a donc pas de raison d'être et nous demandons à la Haute Assemblée d'avoir la sagesse de le rejeter.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Lorsqu'on fait des citations, et cela nous arrive aux uns et aux autres, il convient, pour être parfaitement objectif, de rappeler dans quel contexte les phrases que l'on cite ont été prononcées ou écrites, car il n'est plus nécessairement le même.
Or, en ce qui concerne les stock options, un certain nombre de choses ont changé depuis 1995.
En premier lieu, les défauts que nous avions relevés au sein de la commission des finances, concernant la non-transparence, ont été corrigés, ainsi que j'ai tenu à le rappeler il y a quelques instants en réponse à la précédente intervention de M. Sergent.
En second lieu, nous avons vu s'alourdir très significativement les prélèvements, et cela à deux reprises : d'abord - mais vous n'y êtes pour rien, monsieur le secrétaire d'Etat - dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 1997 ; ensuite - là, c'est le choix de l'actuel gouvernement - avec les 10 points de prélèvements sociaux supplémentaires sur les revenus de placement, qui ont donc porté de 30 % à 40 % le prélèvement sur les plus-values dégagées des options de souscription ou d'achat d'actions.
Voilà pour ce qui a changé. En revanche, ce qui n'a pas changé, c'est la nécessité pour nous d'avoir des entreprises compétitives et, en particulier des dirigeants et des personnels intéressés au succès de leur entreprise.
On ne peut pas considérer, en saine logique, que les stock options soient des compléments de rémunération : à cet égard, je maintiens totalement ce que j'ai sans cesse affirmé depuis 1995 ; il s'agit bien de transformer du travail en capital. Dès lors, ce qui est taxé, c'est bien une plus-value du capital, parce que l'on prend un risque ou parce que l'on est associé à un risque. Les options de souscription d'actions ont indiscutablement cette nature.
Dans notre rapport de 1995, nous avions évoqué de « sur-rémunérations sous-fiscalisées ». Effectivement, ce type de travers doit être pourchassé, car il n'est conforme ni à la logique économique ni à la logique psychologique qui fondent les options de souscription d'actions. Cependant, à la suite des modifications de la législation qui sont intervenues, il est tout à fait possible d'éviter un tel dévoiement, qui en ferait, en effet, des compléments de rémunération.
Je crains donc que nos collègues du groupe socialiste n'aient un peu confondu des choses qui ne devraient pas être confondues.
En résumé, monsieur le secrétaire d'Etat, la position que soutient la commission des finances est en parfaite cohérence avec notre approche d'il y a deux ans.
Je pense qu'il est indispensable que nos entreprises diffusent largement les stock options dans leur personnel. On parle trop des seuls cadres dirigeants. Dans de nombreuses sociétés, ainsi que nous l'avions constaté au cours de notre mission d'information, les stock options sont largement diffusées, selon des règles fixées par les assemblées générales des actionnaires, auprès des différentes catégories de personnel parce qu'on y considère qu'il est essentiel que chacun se sente associé à cette communauté qu'est l'entreprise.
Bien entendu, ceux qui préfèrent raisonner en termes de lutte de classe ne sont pas favorables à un mécanisme qui est, au contraire, axé sur la prospérité de l'entreprise, au service de ses différentes composantes.
Je voterai, naturellement, l'amendement de la commission des finances.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'amendement n° II-80 rectifié est tout à fait en ligne avec la réflexion de la commission des finances sur les dispositions fiscales relatives aux revenus du capital et au patrimoine.
En fin de compte, ce qu'on nous propose, ni plus ni moins, c'est de compléter les multiples dispositions incitatives concernant les revenus des capitaux mobiliers, par la suppression du traitement particulier des options d'achat d'actions institué il y a deux ans. Evidemment, et cela n'étonnera personne, nous n'approuvons pas cette suppression !
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est tout de même une déception ! (Sourires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Chacun sait que le dispositif des options d'achat d'actions a conduit à de scandaleux abus d'autant que, dans certains cas, l'application de ce système s'est accompagnée de délits d'initié.
Notre collègue M. Sergent a cité tout à l'heure le cas du dirigeant d'une entreprise du secteur de l'électronique, filiale du groupe Alcatel-Alsthom, qui a bénéficié d'une opération d'option d'achat de telle manière que cela lui a permis de réduire sa cotisation d'impôt sur le revenu d'environ 800 000 francs, sans parler des conséquences de cette opération sur ses cotisations de protection sociale et sur celle de son entreprise.
Monsieur Marini, pourriez-vous me dire quel risque ce dirigeant avait pris ? Et je rappelle que tout cela s'est produit au moment même où le groupe Alcatel-Alsthom, dont la clientèle est composée notamment de grandes entreprises nationales, surfacturait la réalisation de centraux téléphoniques électroniques à France Télécom ! Décidément, je ne vois pas, dans ces conditions, quel risque ce dirigeant avait pris !
M. Philippe Marini. Ne confondez pas tout !
Mme Marie-Claude Beaudeau. On peut également citer le cas du dirigeant d'une importante compagnie d'assurance privée, par ailleurs fortement engagé dans une réflexion idéologique sur le devenir de la protection sociale.
Nous ne pouvons pas accepter que, au motif de la montée en puissance de la contribution sociale généralisée, on décide de réduire le taux de prélèvement libératoire appliqué aux options d'achat d'actions et de le ramener au niveau du taux applicable aux autres opérations éligibles au mode d'imposition des plus-values des capitaux mobiliers.
Nous ne pensons pas qu'il y ait lieu d'instituer une fiscalité différenciée des revenus du capital qui consisterait à leur faire supporter un effort en matière de financement de la protection sociale et à atténuer les prélèvements les concernant en matière de fiscalité d'Etat.
Nous n'avons pas grand-chose à gagner, me semble-t-il, à maintenir une différenciation de fait entre les assiettes des prélèvements sociaux, qui sont de nature proportionnelle, et les prélèvements d'Etat, dont l'un au moins est de caractère progressif, à savoir l'impôt sur le revenu.
L'efficacité de notre impôt sur le revenu peut, en effet, s'accroître par l'extension de son assiette, de telle manière qu'il soit socialement plus juste et économiquement plus adapté.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous ne voterons pas l'amendement n° II-80 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, la commission des finances est « indiabolisable » : il n'est donc pas nécessaire de prétendre qu'elle se contredisait par rapport à des dispositions qu'elle avait prises deux ans auparavant. J'ai expliqué que des événements fiscaux s'étaient produits qui avaient eu pour effet d'alourdir sévèrement la facture.
Quelle est, en vérité, l'orientation fiscale de la commission des finances du Sénat ?
Selon elle, la France, dans la compétition mondiale où elle est engagée, a tout à fait intérêt à maintenir et à localiser sur son territoire le maximum de cadres. C'est stratégiquement essentiel ! Faire la chasse aux cadres, traquer les cadres, comme on a tendance à le faire maintenant, c'est affaiblir le pays.
Les conceptions fiscales de la commission des finances n'ont donc rien de honteux. Au contraire, la commission en est fière ! Il s'agit de montrer que notre pays veut être un site industriel extrêmement performant, extrêmement ambitieux et qu'il a une stratégie : attirer sur son territoire tous ceux qui sont capables de créer de la richesse, capables d'inventer de l'emploi, capables d'assurer le rayonnement de la France dans le monde.
Dès lors, comment pourrions-nous ressentir une quelconque honte ? Non, décidément, nous sommes fiers de ce que nous proposons. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et indépendants.)
MM. Jacques Oudin et Philippe Marini. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur général s'est un peu départi de son flegme habituel. Personne n'a ouvert la chasse aux cadres ! Il me paraît tout à fait excessif de dire qu'on traque les cadres à propos d'un article qui régit les stocks options, non pas des cadres, mais d'un petit nombre de cadres dirigeants.
En l'occurrence, le Gouvernement veut simplement préserver un dispositif qui a été voté en 1996, et je crois, monsieur le rapporteur général, que vous vous êtes laissé emporter par votre enthousiasme, le plus souvent réfréné.
Les cadres ont leur avenir en France : ils doivent apporter toute leur contribution au développement des entreprises de notre pays. Ce qui était valable en 1996 reste valable aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Claude Estier. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-80 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 50.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Tous trois sont présentés par M. Loridant.
L'amendement n° II-156 tend à insérer, après l'article 50, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa du 1° du II de l'article 125 AO du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Ces produits sont exonérés lorsque la durée du contrat est égale ou supérieure à douze ans. »
L'amendement n° II-157 vise à insérer, après l'article 50, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le cinquième alinéa du 1° du II de l'article 125 OA du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Ces produits sont soumis à un prélèvement libératoire de 3 % lorsque la durée du contrat est égale à douze ans. »
L'amendement n° II-158 a pour objet d'insérer, après l'article 50, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 125 OA du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1. Après le premier alinéa, il est inséré douze alinéas ainsi rédigés :
« Les produits attachés aux bons ou contrats d'une durée égale ou supérieure à six ans pour les bons ou contrats souscrits entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1989 et à huit ans pour les bons ou contrats souscrits à compter du 1er janvier 1990, acquis au 31 décembre 1997 ou constatés à cette même date pour les bons ou contrats en unités de compte visés au deuxième alinéa de l'article L. 131-1 du code des assurances, sont exonérés d'impôt sur le revenu quelle que soit la date des versements auxquels ces produits se rattachent. Il en est de même des produits de ces bons ou contrats afférents à des primes versées antérieurement au 26 septembre 1997, acquis ou constatés, à compter du 1er janvier 1998.
« Sont également exonérés d'impôt sur le revenu les produits des contrats mentionnés à l'alinéa précédent souscrits antérieurement au 26 septembre 1997, lorsque ces produits, acquis ou constatés à compter du 1er janvier 1998, sont afférents :
« - aux primes versées sur les contrats à primes périodiques et n'excédant pas celles prévues initialement au contrat ;
« - aux versements programmés effectués du 26 septembre 1997 au 31 décembre 1997 ; les versements programmés s'entendent de ceux effectués en exécution d'un engagement antérieur au 26 septembre 1997 prévoyant la périodicité et le montant du versement ;
« - aux autres versements effectués du 26 septembre 1997 au 31 décembre 1997, sous réserve que le total de ces versements n'excède pas 200 000 F par souscripteur.
« Sont exonérés d'impôt sur le revenu les produits attachés aux bons ou contrats en unités de compte visés au deuxième alinéa de l'article L. 131-1 du code des assurances, d'une durée égale ou supérieure à huit ans, et dont l'actif de référence est un organisme de placement collectif en valeurs mobilières dont l'actif est constitué pour 50 % au moins de :
« a ) actions ou certificats d'investissement de sociétés et certificats coopératifs d'investissement admis aux négociations sur un marché réglementé d'instruments financiers reconnu en application de l'article 41 ou du VII de l'article 97 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières ;
« b ) droits ou bons de souscription ou d'attribution attachés aux actions mentionnées au a ci-dessus ;
« c ) Actions ou parts d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières qui emploient plus de 60 % de leur actif en titres et droits mentionnés aux a et b ci-dessus ;
« d ) Parts de fonds communs de placement à risques, de fonds communs de placement dans l'innovation, actions de sociétés de capital-risque ou de sociétés financières d'innovation ;
« e ) actions émises par des sociétés qui sont, sans avoir exercé d'option pour un autre régime d'imposition, passibles de l'impôt sur les sociétés de plein droit ou sur option, qui exercent une activité autre que celles mentionnées au deuxième alinéa du 2e du I de l'article 44 sexies et dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé.
« Les titres mentionnés aux d et e doivent représenter 5 % au moins de l'actif de l'organisme de placement collectif en valeurs mobilières. »
« 2. Il est ajouté un dernier alinéa ainsi rédigé :
« Les contribuables dont le revenu de référence de l'année précédant celle de l'imposition, défini au V de l'article 1417, n'excède pas les limites prévues au III de ce même article bénéficient d'un abattement annuel de 30 000 F pour les contribuables célibataires et de 60 000 F pour les contribuables mariés soumis à imposition commune. Cet abattement est opéré sur la somme des produits imposables provenant de l'ensemble des bons ou contrats détenus par le foyer fiscal, d'une durée égale ou supérieure à six ans pour les bons ou contrats souscrits entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1989 et à huit ans pour les bons ou contrats souscrits à compter du 1er janvier 1990. »
« II. - Le premier alinéa du 1° du II de l'article 125 O A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« ... ° - à 7,5 % lorsque cette durée a été égale ou supérieure à six ans pour les bons ou contrats souscrits entre le 1er janvier 1983 et le 31 décembre 1989 et à huit ans pour les contrats souscrits à compter du 1er janvier 1990, et inférieure à douze ans ;
« ... ° - à 3 % lorsque cette durée a été égale ou supérieure à douze ans. »
« III. - Le deuxième alinéa du 1° du II de l'article 125-O A du code général ces impôts est supprimé.

« IV. - Au pénultième alinéa du 1° du II, de l'article 125 O A du code général des impôts, les mots : "Ces durées s'entendent" sont remplacés par les mots : "La durée des contrats s'entend".
« V. - Au dernier alinéa du 1° du II de l'article 125 0 A du code général des impôts, le mot : "Toutefois," est supprimé.
« VI. - Au deuxième alinéa du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et au quatrième alinéa du I de l'article 15 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, après les mots : "abattements mentionnés" sont insérés les mots "au I de l'article 125 O A et".
« VII. - Les dispositions du présent article s'appliquent à compter du 1er janvier 1998. »
La parole est à M. Loridant, pour défendre ces trois amendements.
M. Paul Loridant. Ces trois amendements, qui portent sur l'assurance vie et ont un même objet, prolongent la discussion que nous avons eue lors de l'examen des articles de la première partie.
Je rappelle que l'assurance vie est un produit de placement de l'épargne à très long terme qui bénéficie d'avantages fiscaux considérables.
Ces placements donnent lieu, en effet, à une exonération des droits de succession, et ils bénéficiaient jusqu'à présent d'une totale exonération de fiscalité sur les revenus tirés de ces placements, à condition qu'ils aient été bloqués pendant au moins huit ans.
Or le présent projet de loi de finances, s'il ne remet pas en cause l'avantage fiscal concernant les droits de succession - ce qui pourrait d'ailleurs, au-delà d'un certain seuil, se discuter -, prévoit d'imposer au taux de 7,5 % le produit des placements obtenu au-delà de huit ans.
Voilà quelques jours, j'ai expliqué que ce dispositif posait un sérieux problème quant à la gestion des circuits de l'épargne dans notre pays.
En effet, de très nombreux contrats d'assurance vie ont été souscrits au début des années quatre-vingt-dix. Par conséquent, il est probable que beaucoup de souscripteurs vont souhaiter liquider leur contrat à partir de 1998.
Dès lors, le changement de l'économie générale de ces contrats peut entraîner des mouvements très importants, l'épargne pouvant sortir massivement du circuit de l'assurance vie pour se porter ailleurs.
L'amendement que j'avais déposé en première partie avait essentiellement pour objet d'inviter le Gouvernement à réfléchir et à bien mesurer l'incidence de cette nouvelle disposition.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous m'aviez répondu que vous mettriez à profit les quelques jours nous séparant de l'adoption définitive du projet de loi de finances pour étudier cette question.
Voilà pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je présente aujourd'hui ces trois amendements.
L'amendement n° II-156 maintient la taxation de 7,5 % des revenus de l'épargne pour les contrats qui ont été souscrits entre huit et douze ans auparavant, l'exonération restant totale au-delà de douze ans. C'est la reprise de l'amendement que j'avais présenté lors de l'examen de la première partie.
L'amendement n° II-157, qui est un amendement de repli, a pour objet de soumettre à un prélèvement libératoire de 3 % seulement les produits de l'assurance vie, lorsque la durée du contrat est égale à douze ans.
Cet amendement a le mérite de la simplicité. Il tend, en effet, à hiérarchiser la taxation de l'épargne, donc à faire en sorte que ceux qui acceptent de placer très longtemps leur épargne puissent bénéficier d'une taxation réduite.
S'agissant de l'amendement n° II-158, il recueillera peut-être un avis favorable de la part du Gouvernement - c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je l'ai présenté - mais il rend le système plus complexe.
De quoi s'agit-il ? Je propose, par cet amendement, d'aménager la fiscalité pour les contrats d'assurance-vie d'une durée égale ou supérieure à douze ans en appliquant un prélèvement de 3 % au produit de ces contrats.
Afin que le coût de cette disposition ne soit pas trop élevé, je suggère de soumettre l'abattement de 30 000 francs pour un célibataire et de 60 000 francs pour un couple, tel que nous l'avons décidé dans la première partie de la loi de finances, à une condition de ressources.
Enfin, je propose des mesures pour permettre que, dans ces contrats d'assurance-vie, la part des placements en actions cotées soit majorée, de façon que cette épargne fort abondante puisse servir au financement de l'activité économique, notamment à celui des entreprises. Je vous rappelle que le montant des sommes récoltées au titre de l'assurance-vie est estimé à au moins 2 500 milliards de francs.
Telle est donc, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'économie générale de ces trois amendements.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il me paraît véritablement souhaitable que, à l'occasion de la discussion de ce projet de loi de finances, nous mesurions bien les effets des dispositions que nous allons prendre en matière de fiscalité de l'épargne longue. L'avantage de ces trois amendements est de rétablir une hiérarchie entre l'épargne populaire, qui serait totalement exonérée, l'épargne d'une durée inférieure à huit ans, dont les revenus seraient taxés au taux normal, l'épargne d'une durée de huit ans à douze ans, et l'épargne d'une durée supérieure à douze ans, étant entendu que tous les revenus seraient soumis au RDS et à la CSG. Je fais allusion uniquement à la fiscalité qui est applicable à ces produits de placement.
Je ne doute pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous aurez à coeur de traiter ce problème très important de l'épargne longue, en tenant compte de l'enjeu dont il est porteur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-156, II-157 et II-158 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Au fond, M. Loridant fait écho aux propos que je vous ai tenus, monsieur le secrétaire d'Etat, au nom de la commission des finances, lors de l'examen des articles de la première partie de la loi de finances, quant aux effets pervers de ces mesures qui ont été proposées par le Gouvernement, adoptées par l'Assemblée nationale et repoussées par le Sénat en première lecture. Il nous semble fâcheux, en effet, de réserver un meilleur traitement à l'épargne courte qu'à l'épargne longue.
M. Philippe Marini. Tout à fait !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je tiens à saluer la sagesse de M. Loridant.
Je serai bref sur l'amendement n° II-156, qui tend à exonérer les contrats d'une durée supérieure à douze ans et sur l'amendement n° II-157 qui, lui, vise à instaurer un prélèvement libératoire de 3 % sur les contrats d'une durée supérieure à douze ans. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° II-158, mais ce dernier mérite que je donne quelques explications.
La commission est convaincue, je le répète, que la solution la meilleure est celle que le Sénat a bien voulu adopter lors de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances. Cependant, elle considère que, si le Gouvernement venait à approuver, à l'Assemblée nationale, le rétablissement des dispositifs qu'il a initialement proposés, il serait très bien inspiré de retenir les enseignements qui viennent de nous être rappelés par M. Paul Loridant.
L'amendement n° II-158 de M. Loridant, sous cet aspect des choses - étant entendu, encore une fois, que je serai conduit à émettre un avis défavorable - mérite d'être médité. Il comporte, en effet, quelques effets pervers dans la mesure où il tend à taxer à 7,5 % les contrats dont la durée est comprise entre huit ans et douze ans à et 3 % ceux de plus de douze ans.
En revanche, la taxation intervient, le plus souvent, dès le premier franc, ce qui constitue un système moins généreux que celui qui est proposé par le Gouvernement. Il exclut, en effet, l'abattement de 30 000 francs et de 60 000 francs.
Par conséquent, l'amendement de M. Loridant est intéressant en ce qu'il constitue une voie moyenne entre la position adoptée par le Sénat lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances et celle qui est sans doute maintenue - nous le verrons tout à l'heure - par le Gouvernement. Néanmoins, le dispositif proposé est plus sévère que celui du Gouvernement du fait de la suppression de l'abattement.
Cela étant, il conduit à modifier l'équilibre budgétaire pour 1998. Il ne paraît donc pas recevable à la commission des finances.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il est encore temps d'éviter les effets pervers engendrés par ce dispositif, qui tend à moins bien traiter l'épargne longue - encore une fois indispensable à l'économie - que l'épargne courte.
Nous espérons donc que le texte qui sera adopté par l'Assemblée nationale sera conforme à celui qui sera voté par le Sénat. Ainsi éviterons-nous des états d'âme sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° II-156, II-157 et II-158 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je vais développer un raisonnement assez proche de celui de M. le rapporteur général et j'en arriverai à la conclusion logique qu'il faut adopter l'amendement n° II-158.
Le point de départ est clair et le Gouvernement est en parfait accord avec M. Loridant : dans la situation actuelle, les produits de l'assurance-vie bénéficient d'une exonération complète d'impôt sur le revenu, sans aucun plafonnement du montant des versements et sans risque financier pour l'épargne. Par rapport à d'autres placements - le PEP ou le PEA, par exemple - cela peut paraître particulièrement favorable. C'est pourquoi le Gouvernement souhaite donner un signal clair de remise en cause de cette exonération complète et ne tient pas à réintroduire dans le dispositif une exonération des contrats de plus de douze ans.
Je vais maintenant concentrer mes remarques sur l'amendement n° II-158. Il paraît constituer un bon compromis entre les préoccupations que vous avez exprimées, monsieur Loridant - M. le rapporteur général les a largement partagées, me semble-t-il (M. le rapporteur général fait un signe dubitatif.) - et le projet initial du Gouvernement.
C'est la raison pour laquelle cet amendement a retenu toute mon attention. Il comprend, dans son dispositif complexe, trois points principaux qui sont clairs.
Le premier point tend à réserver le bénéfice de l'abattement de 30 000, ou de 60 000 francs pour un couple, aux contribuables modestes ou moyens, qui sont définis dans le texte que vous proposez, monsieur Loridant. C'est tout à fait dans l'esprit de l'objectif que cherche à atteindre le Gouvernement : il s'agit de ne pas pénaliser les épargnants pour qui l'assurance-vie peut constituer un complément de revenu, notamment lors de la retraite. L'abattement de 30 000 à 60 000 francs n'est donc pas remis en cause pour les contribuables modestes ou moyens.
Le deuxième point - il recueille l'accord du Gouvernement - a pour objet d'inciter les épargnants à poursuivre leur effort d'épargne au-delà de l'échéance de huit ans. Votre proposition de fixer le taux du prélèvement libératoire à 3 % au-delà de douze ans m'apparaît donc, de ce point de vue, tout à fait judicieuse.
Enfin, le troisième point vise à exonérer les contrats d'assurance-vie d'une durée au moins égale à 8 ans, qui sont investis au moins pour moitié en actions, y compris en actions cotées. Il s'agit d'une idée qui mérite d'être prise en considération, car il est important que nos entreprises, grandes ou moins grandes, soient soutenues par cette masse d'épargne qui est regroupée dans les contrats d'assurance-vie.
Au moment où certains s'inquiètent du maintien des grands centres de décision dans notre pays, votre proposition me paraît aller tout à fait dans le bon sens.
C'est pourquoi le Gouvernement est prêt à accepter votre amendement n° II-158, ce qui n'exclut pas qu'il puisse faire l'objet d'aménagements techniques. Je vous demande donc de bien vouloir retirer les amendements n°s II-156 et II-157.
J'espère que cet amendement n° II-158, qui prévoit un dispositif clair et progressif dans le temps, recueillera les suffrages de la Haute Assemblée, puisqu'il a failli recueillir la sympathie de M. le rapporteur général de la commission des finances.
J'évoquerai un dernier point. Le rendement de la mesure que vous proposez est très limité : il représente environ dix millions de francs. Il n'est donc pas de nature à bouleverser l'équilibre général du budget.
M. le président. Monsieur Loridant, les amendements n°s II-156 et II-157 sont-ils maintenus ?
M. Paul Loridant. A la demande de M. le secrétaire d'Etat, je retire les amendements n°s II-156 et II-157, mais je maintiens l'amendement n° II-158.
Je ne suis pas sûr, tant le sujet est complexe, que cela répondra totalement à l'attente des épargnants qui investissent sur une longue durée. Peut-être aurez-vous la possibilité, monsieur le secrétaire d'Etat, à l'occasion d'autres débats, de rendre le système plus pédagogique et plus simple. En tout cas, c'est le souhait que je forme.
Cela dit, l'amendement n° II-158 constitue, me semble-t-il, un début de réponse pour permettre une sortie en douceur des contrats d'assurance-vie conclus dans les années quatre-vingt-dix. Il sera sans doute nécessaire d'améliorer le dispositif proposé.
M. le président. Les amendements n°s II-156 et II-157 sont retirés.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-158.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, je souhaite que ne subsiste aucune ambiguïté. Tout à l'heure, j'ai indiqué que la position de la commission des finances avait été clairement exprimée à l'occasion de l'examen de la première partie du projet de loi de finances : elle est défavorable à ces dispositifs.
J'ai souhaité, par souci d'honnêteté intellectuelle, saluer le travail qui avait été effectué par notre collègue Paul Loridant. Néanmoins, monsieur le secrétaire d'Etat, je n'ai aucune hésitation : l'avis de la commission des finances demeure défavorable L'amendement n° II-158 n'apporte, en effet, que peu d'améliorations au dispositif initial du Gouvernement. C'est peut-être d'ailleurs ce qui vous a conduit à lui trouver quelque avantage.
Ne serait-ce que pour être conforme aux lois qui nous régissent, ce système nous semble encore devoir être légèrement modifié. En tout état de cause, mes chers collègues, la commission des finances vous recommande de voter contre l'amendement n° II-158.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. Christian de La Malène. C'est un amendement du Gouvernement !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-158, repoussé par la commission et accepté par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 50 bis



M. le président.
« Art. 50 bis . - Le dernier alinéa du I de l'article 92 B du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Elle est fixée à 50 000 francs à compter de l'imposition des revenus de 1998." »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-81, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit cet article :
« I. - L'article 92 B du code général des impôts est ainsi modifié :
« A. - Le I. est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« A compter de l'imposition des revenus de 1998, la limite mentionnée au premier alinéa ne s'applique plus. »
« B. - Le I. bis est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces gains ne bénéficient pas de l'abattement prévu au deuxième alinéa du 1. de l'article 94 A. »
II. - Le 1. de l'article 94 A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« A compter de l'imposition des revenus de 1998, il est opéré un abattement annuel de 8 000 F pour les contribuales célibataires, veufs ou divorcés et de 16 000 F pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.
« Les contribuables concernés par le précédent alinéa peuvent effectuer le calcul de leurs plus-values en retenant, pour l'ensemble des titres cotés et assimilés détenus au 31 décembre 1997, le prix de revient réel des titres ou un prix de revient forfaitaire, égal à 85 % de leur cours coté au 29 décembre 1996. Ils font connaître leur choix au service des impôts, au plus tard lors du dépôt de la déclaration de revenus pour 1998. L'option exercée concerne tous les titres détenus au 31 décembre 1997 par l'ensemble des membres du foyer fiscal. Cette option est définitive. »
« III. - Les pertes de recettes résultant du II ci-dessus sont compensées par une majoration, à due concurrence, des droits de consommation prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° II-132, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de rédiger comme suit l'article 50 bis :
« Le dernier alinéa du I de l'article 92 B du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : "Elle est fixée à 50 000 francs à compter de l'imposition des revenus de 1998 et ne s'applique plus à compter de l'imposition des revenus de 1999." »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-81.
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'article 50 bis, introduit à l'Assemblée nationale, tend à abaisser à 50 000 francs le seuil d'imposition des gains nets en capital réalisés à l'occasion de cessions à titre onéreux de valeurs mobilières. Le seuil de déclenchement de l'imposition est, depuis 1997, de 100 000 francs de cessions. En dessous de ce seuil, les plus-values ne sont pas taxées ; au-dessus, elles le sont au premier franc.
Dans le souci de rééquilibrer la taxation des revenus du travail et des produits du capital, l'Assemblée nationale a décidé de poursuivre l'abaissement du seuil d'imposition des plus-values initié par le précédent gouvernement.
Mais quatre observations s'imposent aux yeux de la commission des finances.
Premièrement, la taxation de droit commun des plus-values mobilières s'est alourdie au cours de ces dix dernières années. Cet alourdissement a porté tant sur l'assiette que sur le taux de l'impôt. En l'espace de dix ans, le taux d'imposition des plus-values mobilières est passé de 16 % à 26 %. Concernant l'assiette, le seuil d'exonération des plus-values, qui était de 342 800 francs en 1995, a été réduit à 200 000 francs pour les revenus de 1996 et à 100 000 francs pour les revenus de 1997.
Deuxièmement, la taxation des plus-values mobilières en France se situe désormais au niveau le plus élevé des pays européens.
Troisièmement, la taxation des plus-values est économiquement maladroite et fiscalement inéquitable.
Quatrièmement, le rééquilibrage de la fiscalité des revenus du travail par rapport à ceux du capital n'est au fond qu'un alibi pour justifier une augmentation des prélèvements obligatoires.
Pour toutes ces raisons, la commission des finances demande de modifier le dispositif actuel afin, d'une part, de prendre en compte non pas le montant des cessions réalisées, mais celui des plus-values effectivement encaissé et, d'autre part, de procéder par voie d'abattement et non par voie de seuil. Cet abattement pourrait être fixé à 8 000 francs pour un célibataire et à 16 000 francs pour un couple marié.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-132.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à abaisser de 100 000 francs à 50 000 francs le seuil d'imposition des plus-values de cession d'actif mobilier.
Nous ne pouvons, bien entendu, qu'approuver cette mesure de justice et d'équité fiscale qui permet d'envisager dans un proche avenir une imposition au premier franc d'un certain nombre de produits financiers.
Nous sommes même convaincus que la suppression progressive des prélèvements libératoires existants et l'intégration des revenus du capital et du patrimoine dans l'assiette de l'impôt sur le revenu devraient être la principale orientation de la réforme fiscale. Un tel dispositif rendrait l'impôt sur le revenu plus efficace et plus proche des revenus réels des contribuables. Il ouvrirait même la voie, si la situation le permettait, à une réduction des taux d'imposition, de la TVA ou de la taxe intérieure sur les produits pétroliers.
Nous proposons donc, dans cette logique, la suppression pure et simple du seuil d'exonération des plus-values à compter de l'année 1999, ce qui marquera une nette inflexion par rapport à la pratique actuelle et réhabilitera d'une certaine façon la justice fiscale.
On pourrait certes nous objecter que l'abaissement du seuil d'exonération, voire sa disparition frapperait, d'abord, les plus petits investisseurs, les plus gros n'échappant pas à l'application du prélèvement libératoire sur la totalité de leurs revenus financiers.
Pour autant, cette mesure nous semble être la première à prendre pour parvenir, in fine , à la suppression pure et simple du prélèvement libératoire, seule solution acceptable pour ce qui concerne les cessions de valeurs mobilières. C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter l'amendement n° II-132.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-132 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-81 et II-132 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement n° II-81, présenté par la commission des finances, n'est pas acceptable, et ce pour deux raisons.
La première tient à son coût qui est de l'ordre de 1,3 milliard de francs, ce qui est une somme importante. La seconde tient aux difficultés que son application entraînerait pour les contribuables en dépit du souci de simplicité qui vous anime, monsieur le rapporteur général.
La fixation d'un seuil d'imposition des plus-values, même à 50 000 francs, permet à de nombreux contribuables de ne pas avoir à déclarer celles-ci lorsque le montant des cessions de valeurs mobilières est inférieur à cette somme. Si ce seuil est supprimé - et la même remarque vaut pour l'amendement n° II-132 - les établissements financiers devront calculer les plus-values et demanderont donc une rémunération à cet effet aux épargnants.
J'ajoute un argument qui n'est pas négligeable : bien qu'exonérées grâce à l'abattement, les plus-values qui seront, si je puis dire, déclarées au premier franc seront frappées par des prélèvements sociaux auxquelles elles échappent aujourd'hui.
Vous vous êtes également référé à des exemples étrangers. Permettez-moi d'indiquer qu'en Grande-Bretagne, exemple fréquemment cité dans la Haute Assemblée, les plus-values sont taxées au taux marginal de 40 %, après l'application d'un abattement à la base de 6 300 livres. Ce régime comporte donc un taux qui est beaucoup plus élevé que celui qui est appliqué en France.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° II-81.
La préoccupation qui sous-tend l'amendement n° II-132 est très respectable, mais la suppression du seuil d'imposition des plus-values compliquerait considérablement, comme j'ai essayé de l'expliquer tout à l'heure, la vie de contribuables qui ne sont pas véritablement aisés. C'est pourquoi, madame Beaudeau, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-81.
M. Michel Sergent. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. M. le rapporteur général écrit dans son rapport que « les revenus de l'épargne justifient d'un traitement fiscal privilégié en raison de l'importance de celle-ci dans la réalisation de l'équilibre économique... ». Il souhaite même l'améliorer encore.
Pour notre part, nous estimons que le travail compte autant dans la création de la richesse économique que le capital. Mais chacun est libre de penser le contraire.
En revanche, il apparente la volonté affichée par le Gouvernement à un slogan politique. Je trouve étrange et quelque peu choquant, je l'avoue, que de telles affirmations figurent dans le document de référence qu'est le rapport général sur le projet de loi de finances pour 1998.
Que vous ne soyez pas d'accord avec nous, monsieur le rapporteur général, est une chose, et nous l'admettons parfaitement. Mais que vous dénigriez jusque dans les documents dits techniques notre position relève d'une démarche plus politicienne que politique.
Vous avez dit tout à l'heure que vous étiez fier de la position de la commission des finances et de sa majorité. Mais, nous aussi, nous sommes très fiers de nos positions. La lutte des classes, la chasse aux sorcières, ce sont des images d'un autre temps. Il ne faut pas être caricatural. Nous défendons des propositions qui tendent à assurer une plus grande justice fiscale.
Vous vous étonnez que nous ne touchions pas aux produits défiscalisés et vous y voyez même une incohérence. Or notre choix s'explique aisément puisque le Gouvernement ne souhaite pas toucher les revenus modestes en général et la petite épargne en particulier, qui a souvent bien du mal à se constituer.
Il est, en revanche, normal de demander aux couches les plus fortunées de la population un effort supplémentaire, ne serait-ce qu'au titre de la solidarité.
Pour le reste, nous sommes hostiles au nouvel abattement proposé par la commission des finances. Nous pouvons certes réfléchir pour savoir s'il convient de taxer les cessions ou les plus-values. Il s'agit d'une vraie question. Mais, sur le fond, il ne nous paraît pas opportun d'offrir un nouvel avantage fiscal. L'épargne, comme le reconnaît lui-même M. le rapporteur général, bénéficie, par le biais des plans d'épargne en actions, dans la limite de 600 000 francs, d'une exonération de la taxation des plus-values. Qui, aujourd'hui, peut placer plus de 600 000 francs ? Il ne nous semble pas raisonnable d'aller au-delà sauf à vouloir encore accorder des avantages fiscaux à ceux qui en ont déjà beaucoup.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. La démarche de M. le rapporteur général me semble très utile car il a soulevé opportunément un problème de fond. Notre système nous conduit, depuis longtemps, à raisonner en termes de seuil de cession alors que la bonne démarche, sur le plan économique, consisterait à appréhender le montant des plus-values dégagées et de les taxer au-delà d'une limite à définir.
M. le rapporteur général, par sa démarche, nous rappelle simplement une évidence : le seuil de cession peut résulter de différentes opérations, mais ne pas conduire à la réalisation de plus-values très substantielles, alors que la véritable assiette fiscale est bien le montant des plus-values réalisées.
M. le secrétaire d'Etat a indiqué, à la suite de l'intervention de M. le rapporteur général, que des fiscalités étrangères, qui ont procédé à d'autres arbitrages que nous, ont adopté ce raisonnement. Mais il faut savoir que la France a une particularité qui a été fort bien illustrée, récemment, lors d'une réunion de la commission des finances, par le professeur André Babeau, qui est une autorité en matière de fiscalité de l'épargne, et nul ne le contestera, en tout cas certainement pas vous, monsieur le secrétaire d'Etat.
Il nous a dit en effet que nous empilions tous les instruments possibles et imaginables de politique fiscale parce que, en réalité, nous ne voulions jamais choisir. Nous fiscalisons le capital, le revenu et les plus-values ; nous avons l'impôt local, l'impôt national et, en définitive, les strates s'ajoutent les unes aux autres. On en arrive nécessairement à des effets pervers et à ne plus comprendre cette fiscalité qui devient de plus en plus sophistiquée.
Au sein même d'une majorité inchangée, il nous est proposé, chaque année des sophistications supplémentaires. Il ne peut qu'en être de même, a fortiori, lorsque se produit une alternance et que la nouvelle majorité veut montrer l'existence d'une inspiration nouvelle, même si s'expriment toujours les mêmes conceptions qui émergent de la part des technostructures.
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'amendement n° II-81 est très pédagogique parce qu'il conduit à remettre en cause des modes de raisonnement que nous considérons comme trop évidents. Il me paraît donc utile que cet amendement soit voté pour les raisons qui ont été exposées par M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Tout d'abord, je dirai à M. Michel Sergent que je partage son point de vue : la force des arguments ne nécessite pas l'emploi de mots blessants. En effet, nous devons, les uns et les autres, veiller à ce que le débat politique et démocratique demeure fondé sur une argumentation, et non pas sur des mots offensants. Si les mots figurant dans mon rapport écrit sont blessants, ce n'est pas ce que j'ai voulu faire.
M. Michel Sergent. Venant de vous, monsieur le rapporteur général, je n'en doutais pas.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je vous prie donc d'accepter mes regrets monsieur Sergent.
Cela étant, je n'ai pas de regret en ce qui concerne l'amendement de la commission. En effet, ainsi que M. Marini l'a très bien dit, ce débat est ouvert depuis longtemps. C'est l'Assemblée nationale qui l'a ouvert en 1990. Je fais référence au rapport Hollande, bien connu, qui concluait sur la nécessité de réfléchir plus au niveau de la plus-value réalisée que sur le volume de transactions. Le débat est utile. Peut-être reviendra-t-il un jour ? Le Gouvernement qui sera alors en fonction considérera peut-être que le dispositif préconisé par le Sénat est le meilleur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez évoqué, voilà un instant, les difficultés de calculer les plus-values sur actions. Ces difficultés s'étaient déjà posées à l'occasion de la taxation des OPCVM de taux au premier franc et elles avaient été surmontées. Certes, les opérateurs eux-mêmes font valoir que des difficultés peuvent surgir. Cependant, l'expérience des OPCVM a montré que de telles difficultés sont surmontables.
S'agissant du chiffrage, pouvons-nous au moins nous mettre d'accord sur le fait qu'il est difficile à établir. Le chiffre retenu par les services de la commission des finances est de 580 millions de francs. Nous ne nous situons donc pas sur le même niveau. J'ignore qui a raison et qui a tort.
Par ailleurs, vous avez fait des comparaisons avec la Grande-Bretagne et l'Espagne. Je préciserai que, en Grande-Bretagne, l'abattement est de 60 000 francs pour un célibataire et de 120 000 francs pour un couple. Je rappelle que notre amendement prévoit un abattement de 8 000 francs pour un célibataire et de 16 000 francs pour un couple.
Pour toutes ces raisons je recommande vivement au Sénat d'adopter l'amendement présenté par la commission des finances.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. La discussion s'étant très bien déroulée jusqu'à présent, je souhaiterais apporter une précision sur le chiffrage pour éviter toute ambiguïté et toute contestation entre la commission des finances et le Gouvernement.
Le chiffre de 580 millions de francs que vous avez cité représente le coût de l'abattement seul. Or, vous avez introduit une disposition supplémentaire de valorisation forfaitaire du prix de revient des titres en portefeuille au 31 décembre 1997. Le coût de l'abattement augmenté du coût de ce dispositif de prix de revient s'élèverait - la précision n'est pas parfaite - à 1 300 millions de francs.
Cela étant dit, je maintiens la position du Gouvernement, à savoir le rejet de l'amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-81, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 50 bis est ainsi rédigé et l'amendement n° II-132 n'a plus d'objet.

Article 50 ter



M. le président.
« Art. 50 ter. - Les dispositions de l'article 204 A du code général des impôts sont abrogées à compter de l'imposition des revenus de 1998. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-133, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° II-82, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
« II. - Dans le premier alinéa du 1. du I. de l'article 39 quindecies, dans la première phrase du premier alinéa du I. de l'article 160 et dans le 2. de l'article 200 A du code général des impôts, le taux : "16 % " est remplacé par le taux : "15 %".
« III. - La perte de recettes résultant du II ci-dessus est compensée par une augmentation, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de l'article 50 ter par la mention « I. - ».
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° II-133.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet article 50 ter, qui ne figurait pas dans le projet de loi de finances initial, résulte d'un amendement du Gouvernement et concerne le devenir de la fiscalité relative aux placements financiers.
Il s'agit, dans les faits, de tenir compte de la montée en charge de la contribution sociale généralisée en matière de prélèvements sur les revenus financiers pour justifier la disparition des prélèvements de 1 % existant depuis 1984 sur certains revenus financiers des particuliers.
Aujourd'hui, les revenus du capital et du patrimoine ne sont pas soumis à un niveau de prélèvement social et fiscal insupportable.
Nous avons souligné, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qu'il nous paraissait indispensable que les prélèvements effectués sur les revenus financiers des particuliers soient étendus aux entreprises qui continuent de bénéficier d'une franchise de prélèvements sur leurs revenus financiers, incitant, en fait, à un détournement de la valeur ajoutée qui a été créée.
Le Gouvernement semble avoir pris l'initiative de supprimer un des prélèvements fiscaux effectués sur les revenus des particuliers, au motif que ces prélèvements seraient en quelque sorte alignés sur l'assiette de la contribution sociale généralisée.
De notre point de vue, il n'y a pas nécessité de spécialiser au seul domaine de la protection sociale les prélèvements effectués sur les revenus du capital ; il y a même plutôt lieu de les mettre à contribution pour les dépenses budgétaires de l'Etat.
Tel est le sens de cet amendement, qui prévoit de rendre à l'Etat les 600 millions de francs qu'il s'apprête à perdre au bénéfice des détenteurs des revenus concernés par l'article 204 A du code général des impôts.
Vous le comprendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, nous apprécions d'autant moins cette perspective que, pour des mesures dont le coût était inférieur, nous n'avons pas eu, en première partie, des réponses très favorables.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement, qui vise à supprimer l'article 50 ter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° II-82 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° II-133.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La présentation de l'amendement n° II-82 me conduit à donner un avis défavorable sur l'amendement n° II-133.
En effet, la commission des finances approuve la suppression de la contribution complémentaire de 1 % au profit de l'Etat, qui n'est que la conséquence directe de la création du nouveau prélèvement social de 2 %.
Cependant, la suppression de la contribution complémentaire de 1 % ne tire que partiellement les conséquences de l'institution du prélèvement de 2 %. Afin de neutraliser complètement cette nouvelle taxation, il conviendrait, en effet, de réduire d'un point le taux du prélèvement libératoire, à défaut la taxation apparaît dissymétrique entre les plus-values sur titres imposées à 26 % et les revenus d'obligations imposés à 25 %. C'est ce qui a justifié que l'article soit complété afin de réduire d'un point le taux de la taxation forfaitaire sur les plus-values sur titres.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n° II-133 et II-82 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. S'agissant de l'amendement n° II-133, la mesure qui est inscrite dans le projet de loi de finances à l'article 50 ter est indissociable de l'institution du prélèvement social de 2 % sur l'ensemble des produits de l'épargne, tel qu'il a été prévu par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998.
Avant cette loi, les revenus de capitaux mobiliers, qui étaient soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu, supportaient, d'une part, un prélèvement de 1 % au profit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse et, d'autre part, le fameux prélèvement, qui est en cause, de 1 % au profit de l'Etat.
Après la loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, ces revenus supporteront un nouveau prélèvement de 2 % : 1 % au profit de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, prélèvement qui existait déjà, et un nouveau prélèvement de 1 % au profit de la Caisse nationale des allocations familiales.
Si le prélèvement de 1 % au profit de l'Etat, qui existait antérieurement, avait été maintenu, il en serait résulté un alourdissement des prélèvements portant sur ces revenus. Je comprends que Mme Beaudeau veuille alourdir ces prélèvements, mais tel n'est pas, compte tenu de l'ensemble du dispositif du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998 et du présent projet de loi de finances, le souhait du Gouvernement. C'est pourquoi je lui demande de bien vouloir retirer son amendement, sinon j'en demanderai le rejet.
M. le rapporteur général, au nom de la commission des finances, souhaite, s'agissant de l'imposition des plus-values, remplacer le taux de 16 % par celui de 15 %. On retrouve, là encore, une différence de 1 point.
Le Gouvernement n'est pas insensible à la préoccupation que vous avez exprimée, monsieur le rapporteur général. Cependant, en l'état, compte tenu du coût de cette disposition, à savoir 150 millions de francs, et du fait que l'élaboration du projet de budget pour 1999 n'a pas encore été engagée, le Gouvernement ne peut émettre un avis favorable sur cet amendement. C'est pourquoi je suggère son retrait, sinon, je demanderai au Sénat de le rejeter.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-133, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-82, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 50 ter , ainsi modifié.

(L'article 50 ter est adopté.)

Article 51



M. le président.
« Art. 51. _ I. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 92 B decies ainsi rédigé :
« Art. 92 B decies . _ 1. L'imposition de la plus-value retirée de la cession de titres mentionnés au I de l'article 92 B réalisée du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999, peut, si le produit de la cession est investi, avant le 31 décembre de l'année qui suit celle de la cession, dans la souscription en numéraire au capital de société dont les titres, à la date de la souscription, ne sont pas admis à la négociation sur un marché réglementé, être reportée au moment où s'opérera la transmission, le rachat ou l'annulation des titres reçus en contrepartie de cet apport.
« Le report est subordonné à la condition que le contribuable en fasse la demande et déclare le montant de la plus-value dans la déclaration prévue à l'article 97 et dans le délai applicable à cette déclaration.
« 2. Le report d'imposition est subordonné à la condition qu'à la date de la cession les droits détenus directement par les membres du foyer fiscal du cédant excèdent 10 % des bénéfices sociaux de la société dont les titres sont cédés.
« 3. Le report d'imposition est, en outre, subordonné aux conditions suivantes :
« a. Au cours des cinq années précédant la cession, le cédant doit avoir été salarié de la société dont les titres sont cédés ou y avoir exercé l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis ;
« b. Le produit de la cession doit être investi dans la souscription en numéraire au capital initial ou dans l'augmentation de capital en numéraire d'une société créée depuis moins de sept ans à la date de l'apport. Les droits sociaux émis en contrepartie de l'apport doivent être intégralement libérés lors de leur souscription ;
« c. La société bénéficiaire de l'apport doit exercer une activité autre que celles mentionnées au deuxième alinéa du 2 du I de l'article 44 sexies et, sans avoir exercé d'option pour un autre régime d'imposition, être passible en France de l'impôt sur les sociétés de plein droit ou sur option ;
« d. La société bénéficiaire de l'apport ne doit pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou pour reprendre de telles activités ;
« e. Le capital de la société bénéficiaire de l'apport doit être détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou des personnes morales détenues par des personnes physiques. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital-risque, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies entre la société bénéficiaire de l'apport et ces dernières sociétés. De même, ce pourcentage ne tient pas compte des participations des fonds communs de placement à risque et des fonds communs de placement dans l'innovation. Cette condition n'est pas exigée lorsque les titres de la société bénéficiaire de l'apport sont ultérieurement admis à la négociation sur un marché français ou étranger ;
« f. Les droits sociaux représentatifs de l'apport en numéraire doivent être détenus directement et en pleine propriété par le contribuable ;
« g. Les droits dans les bénéfices sociaux de la société bénéficiaire de l'apport détenus directement ou indirectement par l'apporteur ou son conjoint, leurs ascendants et leurs descendants ne doivent pas dépasser ensemble 25 % de ces bénéfices à un moment quelconque au cours des cinq années qui suivent la réalisation de l'apport ;
« h. Les personnes mentionnées au g ne doivent ni être associées de la société bénéficiaire de l'apport préalablement à l'opération d'apport, ni y exercer les fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis depuis sa création et pendant une période de cinq ans suivant la date de réalisation de l'apport.
« 4. Le report d'imposition prévu au présent article est exclusif de l'application des dispositions de l'article 199 terdecies -0 A.
« 5. Le non-respect de l'une des conditions prévues pour l'application du présent article entraîne, nonobstant toutes dispositions contraires, l'exigibilité immédiate de l'impôt sur la plus-value, sans préjudice de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 décompté de la date à laquelle cet impôt aurait dû être acquitté.
« 6. Lorsque les titres reçus en contrepartie de l'apport font l'objet d'une opération d'échange dans les conditions prévues au II de l'article 92 B ou au 4 du I ter de l'article 160, l'imposition de la plus-value antérieurement reportée en application du I peut, à la demande du contribuable, être reportée de nouveau au moment où s'opérera la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation des nouveaux titres reçus, à condition que la plus-value réalisée lors de cet échange soit elle-même reportée.
« 7. Un décret précise les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives des contribuables. »
« II. _ L'article 92 J est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "de l'article 92 B" sont remplacés par les mots : "des articles 92 B et 92 B decies " ;
« 2° Les mots : "à compter du 12 septembre 1990," sont supprimés.
« III. _ Le II de l'article 160 est ainsi rédigé :
« II. _ L'imposition de la plus-value retirée de la cession de titres mentionnée au I réalisée du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999 peut être reportée dans les conditions et les modalités prévues au premier alinéa du 1 et aux 3 à 6 de l'article 92 B decies et dans le dernier alinéa du I. »
Par amendement n° II-159, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose :
A. - De rédiger comme suit le d. du 3. du texte présenté par le I. de l'article 51 pour l'article 92 B decies du code général des impôts :
« d. La société bénéficiaire de l'apport ne doit pas avoir été créée dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes, sauf si elle répond aux conditions prévues par le I de l'article 39 quinquies H. »
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A. ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - La perte de recettes résultant de l'élargissement du champ d'application du présent dispositif opéré par la modification du d. du 3. du I. ci-dessus est compensée par une majoration, à due concurrence, des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Par coordination avec sa position sur l'article 50 pour les bons de souscription, la commission propose, avec le présent amendement, de ne pas restreindre le bénéfice du dispositif de l'article 51 aux parts de sociétés qui ont été créées par une opération dite d'essaimage.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est tout à fait cohérent avec sa position antérieure. Il pensait qu'il n'était pas nécessaire de modifier l'article 50 par l'adoption de l'amendement n° II-77. De même, il considère que l'amendement n° II-159 n'est pas nécessaire, car il ne vise qu'à apporter une précision qui coule de source.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, sinon son rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-159, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 51, ainsi modifié.

(L'article 51 est adopté.)

Article 51 bis



M. le président.
« Art. 51 bis . _ Aux I et II de l'article 154 quinquies du code général des impôts, les mots : "pour la fraction correspondant au taux de 1 %" sont remplacés par les mots : "pour la fraction affectée en application du IV de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale au financement des régimes obligatoires d'assurance maladie" et les années : "1997" et "1996" par les années : "1998" et "1997". » - (Adopté.)

Article 52



M. le président.
« Art. 52. _ I. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 220 octies ainsi rédigé :
« Art. 220 octies . _ 1. Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des emplois créés.
« Ce crédit d'impôt est égal au produit de la somme de 10 000 F par la variation constatée pendant l'année par rapport à l'année précédente de l'effectif salarié.
« Le crédit d'impôt s'apprécie en prenant en compte la variation de l'effectif salarié moyen de l'entreprise et la fraction de celle, correspondant aux droits de cette entreprise, constatée dans les sociétés de personnes mentionnées aux articles 8, 238 bis L, 238 ter et 239 ter et les groupements mentionnés aux articles 239 quater , 239 quater A, 239 quater B, 239 quater C et 239 quinquies .
« En cas de transfert de personnels entre entreprises ayant des liens de dépendance directe ou indirecte tels que définis au 1 bis de l'article 39 terdecies , ou résultant de fusions, scissions, apports ou opérations assimilées, il est fait abstraction pour le calcul de la variation de l'effectif salarié de la part de cette variation provenant de ce transfert.
« Le crédit d'impôt est applicable aux variations d'effectifs constatées au cours des années 1998 à 2000.
« 2. Le crédit d'impôt calculé au titre d'une année est imputé sur la contribution prévue à l'article 235 ter ZA, due au titre de l'exercice ouvert au cours de cette même année, dans la limite de 500 000 F.
« La fraction du crédit qui n'a pu faire l'objet d'une imputation au titre d'une année est ajoutée aux crédits d'impôt ou imputée sur les débits dégagés ultérieurement.
« Lorsque le produit défini au deuxième alinéa du 1 est négatif, il constitue un débit qui est imputé sur le ou les crédits suivants et, le cas échéant, sur la fraction du crédit d'impôt qui n'a pu précédemment faire l'objet d'une imputation. Les débits subsistant à la date de cessation de l'entreprise ou à compter du 1er janvier 2001 feront l'objet d'un reversement à hauteur des crédits de même nature qui auront été imputés par l'entreprise.
« Le crédit d'impôt n'est pas restituable.
« 3. Pour le calcul du crédit d'impôt mentionné au 1 afférent à 1998, la variation d'effectif sera déterminée en rapportant les douze quinzièmes de l'effectif salarié moyen occupé pendant la période du 1er octobre 1997 au 31 décembre 1998 aux douze neuvièmes de celui occupé du 1er janvier 1997 au 30 septembre 1997.
« 4. Un décret précise les modalités d'application du présent article, notamment les conditions du calcul de l'effectif salarié mentionné au deuxième alinéa du 1. »
« II. _ Le II de l'article 235 ter ZA du code général des impôts est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Elle prend en compte les crédits d'impôt pour augmentation des emplois dégagés par chaque société du groupe en application de l'article 220 octies . Pour le calcul du crédit d'impôt imputable au niveau du groupe, il est tenu compte des crédits et débits d'impôt des sociétés membres du groupe. »
Par amendement n° II-134, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après le premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 52 pour l'article 220 octies à insérer dans le code général des impôts, un alinéa ainsi rédigé :
« Ces emplois peuvent résulter de l'application d'accords collectifs passés en vertu des dispositions des chapitres I à V du titre III du livre premier du code du travail. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet amendement concerne le crédit d'impôt au titre des emplois créés qui est prévu par le projet de loi de finances pour 1998.
Nous estimons à sa juste valeur cette mesure, et nombre de ses aspects nous semblent positifs.
Je pense, en particulier, aux conditions de calcul du montant du crédit d'impôt et au fait que ce crédit d'impôt s'impute sur le montant de la première formule de majoration exceptionnelle d'impôt sur les sociétés, celle qui a été votée en juillet 1995 et proposée par le Gouvernement de M. Juppé.
Il s'agit donc, quand on garde à l'esprit le dispositif de la seconde majoration exceptionnelle - celle du texte portant mesures d'urgence à caratère fiscal et financier -, d'une mesure ciblée destinée aux petites et moyennes entreprises que la hausse de l'impôt adoptée en 1995 n'a pas épargnées.
Si les entreprises veulent payer moins d'impôts, elles peuvent choisir de créer des emplois en mobilisant la valeur ajoutée qu'elles produisent, du fait de leur activité, plus précisément de celle qui est produite par leurs salariés.
Sur le fond, la disposition de l'article 52 a donc tout à fait notre assentiment.
A nos yeux elle devrait même avoir un rôle plus important dans la politique de l'emploi. En effet, nous estimons nécessaire de valoriser ce type de démarche en lieu et place de celle qui consiste à alléger systématiquement et aveuglément les cotisations sociales des entreprises.
Cela est d'autant plus nécessaire qu'aujourd'hui est lancé le grand et indispensable débat sur la réduction du temps de travail.
Un projet de loi sur ce thème sera examiné par le Parlement dans quelques semaines. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler alors.
Mais il nous semble toutefois utile que le présent projet de loi de finances anticipe en quelque sorte sur ce projet de loi en faisant de notre amendement n° II-134 l'un des éléments de ce qui pourrait constituer son volet fiscal.
Nous proposons donc que les créations d'emploi qui découleront des accords d'entreprise de réduction du temps du travail soient, sous certaines conditions, éligibles au bénéfice du crédit d'impôt au titre des créations d'emploi.
Nous demandons en particulier que ne soient pris en compte que les accords collectifs passés dans le cadre des règles fixées par le code du travail en matière de négociation collective afin, notamment, qu'aucun accord signé dans une entreprise ne puisse se traduire par une détérioration ou une dégradation des garanties collectives accordées aux salariés.
Il nous semble indispensable de donner une prime aux entreprises qui joueront jusqu'au bout le jeu de la réduction du temps de travail et assumeront en particulier ce que l'on peut appeler leurs obligations morales vis-à-vis de leurs partenaires, notamment la collectivité nationale.
Il s'agit, en revanche, de ne pas favoriser les entreprises qui ne joueraient pas le jeu de la négociation et tireraient parti d'une réduction du temps de travail pour diminuer les garanties des salariés.
Vous me permettrez enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, de parler un peu des intentions belliqueuses affichées par le patronat et par celui qui devrait devenir prochainement son président, dont la vindicte anti trente-cinq heures est relayée d'ailleurs dans les rangs de la majorité sénatoriale, qui, si j'ai bien compris, veut créer une commission d'enquête sur ce sujet. Au demeurant, je m'interroge sur la portée d'une commission d'enquête ; sur quoi, en effet, va-t-on enquêter, puisqu'il s'agit des intentions du Gouvernement ? La création d'une mission d'information eut été, à mon avis, plus compréhensible. Mais on voit bien qu'il y a là une manoeuvre politique de la majorité sénatoriale.
N'en déplaise donc à celui qui, parmi d'autres, a fait fortune grâce aux indemnités reçues à l'occasion de la nationalisation d'Usinor-Sacilor - je parle là de M. Ernest-Antoine Seillière - les trente-cinq heures correspondent à une aspiration profonde des salariés de ce pays, aspiration qu'il conviendra de traduire dans la loi et donc dans la réalité des faits.
Nous avons le devoir, en qualité de parlementaires, de faire de la réduction du temps de travail un outil de réduction du nombre des sans-emploi et un facteur conduisant à un partage plus équitable de la richesse nationale. Nous pensons que cet amendement peut y contribuer.
C'est pourquoi, mes chers collègues, je demande à la Haute Assemblée de revenir sur ses intentions premières et de bien vouloir adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'avis de la commission ne portera que sur l'amendement lui-même et non pas sur le dernier aspect du propos de son auteur.
La précision que vise à apporter l'amendement n° II-134 n'a pas paru nécessaire à la commission des finances : le crédit d'impôt étant accordé pour toutes les créations d'emploi, qu'elles résultent ou non de l'application d'accords collectifs, la disposition proposée n'aboutirait qu'à alourdir le texte de l'article.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'article 52, sur lequel porte cet amendement, est important, puisqu'il donne un signe fort aux entreprises qui créent des emplois.
Comme M. le rapporteur général l'a indiqué, la rédaction du projet de loi permet déjà de prendre en compte les emplois visés résultant d'un accord collectif. La précision que tend à apporter l'amendement n° II-134 pourrait d'ailleurs, à mon avis, laisser croire que d'autres formes de créations d'emploi pourraient être exclues.
J'invite donc M. Loridant à retirer son amendement. S'il n'en allait pas ainsi, je serais obligé d'émettre un avis défavorable sur ce texte.
M. le président. Monsieur Loridant, l'amendement n° II-134 est-il maintenu ?
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous avez bien sûr compris que, par cet amendement, notre groupe entend s'inscrire pleinement dans le débat pour la réduction du temps de travail tout en veillant aux droits des salariés, notamment dans les entreprises privées.
J'ai bien entendu l'appel de M. le secrétaire d'Etat. Je ne suis pas en mesure, dans cet hémicycle, de vérifier que tout ce qui est annoncé permettra effectivement de préserver les droits des salariés. Mais, en attendant que cette question revienne en discussion, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-134 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 52.

(L'article 52 est adopté.)

Article 53



M. le président.
« Art. 53. _ A l'article 298 sexies du code général des impôts, il est inséré un V bis ainsi rédigé :
« V bis. Tout assujetti ou personne morale non assujettie, autre qu'une personne bénéficiant du régime dérogatoire prévu au 2° du I de l'article 256 bis, qui réalise des acquisitions intracommunautaires de moyens de transport mentionnés au 1 du III est tenu, pour obtenir le certificat fiscal avant d'acquitter effectivement la taxe, de présenter une caution solvable qui s'engage, solidairement avec l'assujetti ou la personne morale non assujettie, à acquitter la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de l'acquisition intracommunautaire.
« L'assujetti ou la personne morale non assujettie mentionné au premier alinéa peut cependant demander à être dispensé de l'obligation de présentation s'il offre des garanties suffisantes de solvabilité. Il est statué sur la demande de dispense dans un délai de trente jours.
« Dans le cas où l'assujetti ou la personne morale non assujettie n'a pas présenté une caution solvable ni offert des garanties suffisantes de solvabilité, le certificat fiscal ne lui est délivré qu'au moment où la taxe est effectivement acquittée. »
Sur l'article, la parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Je souhaite intervenir sur ce premier article ayant trait à la lutte contre la fraude fiscale ; d'ailleurs aussi mon propos concernera les cinq autres dispositions ayant le même objet.
Le groupe socialiste a toujours été très attentif aux mesures supplémentaires qui sont proposées au législateur pour lutter contre la fraude fiscale. En effet, d'une part, celle-ci constitue un véritable délit, préjudiciable aux finances publiques et donc à l'ensemble de nos concitoyens ; d'autre part, la fraude fiscale a comme effet induit de rendre l'impôt injuste : comment ne pas trouver injuste un impôt quand on sait que bien souvent, très facilement et en toute impunité, certains s'y soustraient ?
La lutte contre la fraude doit donc, pour ces deux raisons, être améliorée sans relâche.
Le système de la TVA intracommunautaire est suspecté de permettre une recrudescence de fraude dans notre pays non seulement sur cet impôt mais également en matière d'impôt sur les bénéfices ou d'impôt sur le revenu puisque, bien souvent, le montant des recettes est dissimulé.
Même si les estimations sur un tel sujet sont difficiles, nous avons toujours considéré que cette fraude élevait à 35 milliards de francs !
Comme le disait mon collègue Marc Massion lors de la discussion générale, le Gouvernement, pour la première fois, a reconnu ce problème. C'est sans doute sur la base de ce constat qu'il nous propose aujourd'hui cet article 53, de même que les articles 55 et 56, qui traitent du même sujet.
Je n'insisterai pas sur les modalités du système de taxation des échanges intracommunautaires qui ont été fixées par la directive du Conseil européen du 16 décembre 1991.
Simplement, je constate que ce système, notamment en matière d'acquisition de véhicules, ne permet pas d'empêcher bon nombre de malversations, voire d'escroqueries.
Je voudrais rappeler ici deux exemples de fraude à la TVA relatifs aux moyens de transports, en particulier aux voitures.
Il existe les cas classiques de non-paiement de la TVA, en dépit de la délivrance du certificat fiscal, puisque celui-ci n'est accordé à l'intermédiaire que sur simple engagement d'inclure l'acquisition intracommunautaire dans sa déclaration de chiffre d'affaires, ce qu'il peut ensuite s'abstenir de faire.
Mais il y a également des pratiques de faux crédit-bail qui permettent de ne pas acquitter la TVA française.
Il était donc important de renforcer la sécurisation des recettes de l'Etat en la matière.
La mise en place d'un régime de caution tend à cette fin. Elle s'applique à tous les intermédiaires qui obtiennent le certificat fiscal : ils devront fournir désormais une caution bancaire pour le paiement de la TVA due au titre de l'acquisition.
Espérons que cette mesure permettra d'enrayer les pratiques inadmissibles qui ont vu le jour depuis quelques années.
Je souhaiterais d'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous fassiez part, en 1999, des résultats que vous obtiendrez dans cette lutte contre la fraude fiscale grâce aux mesures que vous nous présenterez.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article 53.

(L'article 53 est adopté.)

Article 54



M. le président.
« Art. 54. _ L'article 283 du code général des impôts est complété par un 5 ainsi rédigé :
« 5. Pour les opérations de façon, lorsque le façonnier réalise directement ou indirectement plus de 50 % de son chiffre d'affaires avec un même donneur d'ordre, ce dernier est solidairement tenu au paiement de la taxe à raison des opérations qu'ils ont réalisées ensemble.
« Le pourcentage de 50 % s'apprécie pour chaque déclaration mensuelle ou trimestrielle. »
Par amendement n° II-83, M. Lambert, au nom de la commission, propose de rédiger comme suit le texte présenté par cet article pour compléter l'article 283 du code général des impôts :
« 5. Pour les opérations de façon, le donneur d'ordre est solidairement tenu avec le façonnier au paiement de la taxe, lorsque le défaut de paiement du second résulte d'une manoeuvre frauduleuse et que la mauvaise foi du premier est établie. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Le Gouvernement propose d'instaurer une solidarité de paiement automatique entre le donneur d'ordre et le façonnier pour décourager toute tentation de collusion de fraude, ce que nous pouvons tous soutenir.
La commission des finances de l'Assemblée nationale a estimé que le souci de prévenir la fraude ne pouvait pas justifier une mesure ainsi rédigée, qui instaure une présomption irréfragable de complicité de fraude aux dépens du donneur d'ordre.
En effet, une solidarité de paiement aussi générale paraît contraire aux principes généraux du droit, et particulièrement aux règles protectrices des contribuables.
Les députés ont donc voté en première délibération, contre l'avis du Gouvernement, deux amendements tendant à préciser, d'une part, que le défaut de paiement de la TVA doit résulter d'une fraude du façonnier et, d'autre part, que la mauvaise foi du donneur d'ordre doit être avérée.
Le Gouvernement a imposé en seconde délibération une nouvelle rédaction revenant à la solidarité de paiement automatique, mais prévoyant que celle-ci ne jouerait que lorsque le façonnier réalise plus de 50 % de son chiffre d'affaires avec le même donneur d'ordre.
Cette solution paraît tout aussi peu satisfaisante, et ce pour deux raisons : d'une part, elle pose les mêmes problèmes au regard des principes généraux du droit que la version initiale ; d'autre part, elle concerne en fait la quasi-totalité des façonniers, qui travaillent le plus souvent avec un donneur d'ordre principal, sinon exclusif.
En pratique, la mesure proposée paraît de nature à porter une atteinte grave au système du travail à façon. En effet, les donneurs d'ordre seront découragés de recourir à cette technique au regard du risque auquel ils s'exposent, faute de pouvoir contrôler la situation financière et la moralité des façonniers. Ils préféreront alors recourir à une sous-traitance traditionnelle.
Pour sa part, la commission des finances partage l'analyse des députés - une fois n'est pas coutume ! - et vous propose de rétablir le texte qu'ils avaient judicieusement, à son avis, adopté en première délibération.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement n° II-83, s'il était adopté, limiterait de manière trop importante la portée du texte présenté par le Gouvernement pour lui conserver son efficacité dans la lutte contre la fraude.
Ainsi qu'une récente affaire judiciaire l'a montré, il existe de véritables réseaux frauduleux organisés entre certains façonniers et certains donneurs d'ordre. Il est clair que, lorsqu'il y a fraude à la TVA, il y a le plus souvent complicité de fraude.
Cependant, monsieur le rapporteur général, je comprends évidemment le sens de vos préoccupations et votre souci de conserver le niveau des garanties accordées aux contribuables. La question est de savoir où se trouve le point d'équilibre entre, d'une part, l'efficacité du contrôle et, d'autre part, ces garanties accordées aux contribuables.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale, qui précise le niveau des relations commerciales entre les façonniers et les donneurs d'ordre à partir duquel la solidarité peut être mise en oeuvre, me paraît atteindre cet objectif. Ainsi que vous l'avez rappelé, la solidarité existe lorsque le façonnier réalise plus de 50 % de son chiffre d'affaires avec un même donneur d'ordre.
On peut penser que, lorsque les relations sont étroites à ce point, si le façonnier est en délicatesse avec le paiement de sa TVA, le donneur d'ordre en est certainement informé.
C'est parce que le Gouvernement entend bien, comme M. Angels l'a développé avec talent, accentuer la lutte contre la fraude fiscale, notamment contre la fraude à la TVA intracommunautaire, qu'il souhaite vivement que la Haute Assemblée adopte l'article 54 dans sa version initiale. L'avis est donc défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-83.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il va sans dire que nous ne souscrivons pas à cet amendement n° II-83, même si la commission le justifie en arguant de sa volonté d'éviter de longues et pénibles démarches contentieuses. En particulier, nous ne pouvons faire nôtres les propos qui ont été tenus, sachant, par ailleurs, ce qui est directement visé par l'article 54, dont nous approuvons les termes.
Il s'agit, en effet, de lutter contre des systèmes plus ou moins imbriqués de sous-traitance qui ont cours, notamment, dans des secteurs comme ceux du textile ou du bâtiment et des travaux publics.
Nous sommes, en fait, d'autant plus intéressés par cette mesure que l'actualité récente vient de nous montrer la nécessité de disposer de moyens nouveaux de sanction contre les circuits de sous-traitance qui organisent, disons-le ainsi, une sorte de course à la délocalisation de la production dans notre propre pays, au travers d'un jeu complexe et subtil de fausses factures et de relations commerciales plus ou moins déclarées entre donneurs d'ordre et façonniers.
Le fait qu'une investigation récente des services fiscaux et de police ait mis à jour, dans le quartier du Sentier, une véritable industrie de la fausse facture le prouve : il était nécessaire d'agir.
Il suffisait, en effet, pour un donneur d'ordre, de faire réaliser par un façonnier X ou Y telle ou telle production pour qu'il se retrouve en situation d'obtenir un crédit de taxe sur la valeur ajoutée. Dans le même temps, compte tenu de l'extrême volatilité de certains de ces façonniers et du caractère tout à fait intermittent de leur activité, le Trésor public pouvait être assez vite contraint d'accorder soit des délais de paiement, soit des remises sur les droits de TVA normalement exigibles auprès du façonnier.
Le même dispositif valait, bien entendu, pour les autres impôts dus, qu'il s'agisse de l'impôt sur les sociétés ou de la taxe professionnelle.
Nous ne croyons pas, si l'on peut dire, qu'il faille limiter à la seule mauvaise foi avérée l'application des dispositions de l'article 54.
Expliquez-moi, en effet, ce que peut être un façonnier qui réalise plus de 50 % de son chiffre d'affaires avec un donneur d'ordre, sinon, dans de nombreux cas, un salarié que l'on a artificiellement et juridiquement séparé de son entreprise pour jouer sur les crédits de TVA ou sur la valeur ajoutée de façon générale ? Et pensons également aux seuils sociaux applicables, par exemple, pour la désignation des délégués du personnel ou l'élection d'un comité d'entreprise !
Nous passons bien souvent de ce qu'il faut bien appeler une réalité juridique, c'est-à-dire le lien de subordination résultant du contrat de travail, à une fiction pure et simple, à savoir la constitution d'une entreprise individuelle ou d'une SARL placée dans l'orbite du donneur d'ordre.
Ce n'est pas ici une question de mauvaise foi : il s'agit bien plutôt de la remise en cause d'un dispositif fiscal et social pour favoriser la pression sur les salaires et les conditions de travail et faire supporter, en particulier, les coûts de conquête de marché par les façonniers. L'essentiel de la marge est, en effet, concentré entre les mains du donneur d'ordre, même si celui-ci est, fiscalement parlant, de bonne foi.
C'est le montage en lui-même qui, me semble-t-il, est pervers et qu'il faut donc combattre, comme nous y invite cet article 54 que nous ne souhaitons pas voir amendé.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Chacun le comprendra, la commission des finances souhaite lever toute éventuelle ambiguïté sur sa volonté de faire en sorte que l'administration dispose de tous les outils nécessaires pour réprimer sévèrement les montages frauduleux.
Ce qui suscite son inquiétude, c'est le caractère irréfragable de la présomption. Je rappelle, sous votre contrôle, monsieur le président, qu'une présomption irréfragable est celle dont on ne peut apporter la preuve contraire. Nous devons donc bien mesurer la portée du dispositif dont nous discutons.
Or, on ne peut pas nier que, pour certains secteurs d'activité, le travail à façon est totalement indispensable, en particulier dans les cas où la valeur des matières premières façonnées est telle que les PME ou les artisans concernés ne peuvent pas être propriétaires de leur stock ni travailler en sous-traitance ordinaire, ou alors très difficilement. C'est pourquoi ils travaillent « à façon ». Il leur est donc impossible d'envisager un mode de production différent.
Encore une fois, notre préoccupation à tous ici est la même : nous souhaitons que notre administration dispose des instruments nécessaires pour sanctionner tous les comportements frauduleux. Reste que, dans le dispositif proposé par le Gouvernement, aucune preuve contraire n'est possible. De plus, le niveau de chiffre d'affaires retenu, soit 50 %, n'est pas, pour la commission des finances, un élément de preuve aussi déterminant que le Gouvernement le dit.
Au fond, l'inquiétude de la commission des finances du Sénat est précisément la même que celle de la commission des finances de l'Assemblée nationale. On sait bien ce qu'est le fait majoritaire dans notre Constitution et la pression très forte du Gouvernement qu'il induit. Cependant, si j'ai bien lu et bien compris les débats de l'Assemblée nationale, la commission des finances était extrêmement perplexe - à l'égard de cette proposition.
C'est pourquoi la commission des finances du Sénat, en toute sagesse, vous recommande d'adopter son dispositif.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, il n'est pas question de mettre en doute la volonté de la Haute Assemblée, qui souhaite, c'est clair, lutter contre la fraude. Il n'est pas question non plus, pour le Gouvernement, d'interdire le travail à façon qui, dans certaines professions, par exemple le travail sur métaux précieux, est un mode de production tout à fait indispensable.
Le Gouvernement part du principe que la plupart de ceux qui travaillent à façon sont des contribuables parfaitement honnêtes et il n'entre pas dans ses intentions de les mettre en péril. Il s'agit simplement de lutter contre la fraude et, à cet égard, le dispositif proposé est, me semble-t-il, efficace. Toutefois, je comprends tout à fait les scrupules de M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. A ce point de notre débat, monsieur le président, je crois utile de donner de nouveau lecture du texte proposé par la commission, qui est sans ambiguïté : « Pour les opérations de façon, le donneur d'ordre est solidairement tenu avec le façonnier au paiement de la taxe, lorsque le défaut de paiement du second résulte d'une manoeuvre frauduleuse et que la mauvaise foi du premier est établie. » Comment pourrions-nous être plus clairs ?
Ce dispositif doit, en outre, pouvoir être appliqué sans difficulté et, parce qu'il ne comporte pas de seuil de chiffre d'affaires, aurait moins d'inconvénients que celui du Gouvernement.
M. Philippe Marini. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le texte que vient de lire M. le rapporteur général est, en effet, sans ambiguïté, tout comme celui du Gouvernement, qui a exactement la même ambition. La Haute Assemblée choisira.
Cela étant, pour véritablement progresser dans la lutte contre la fraude, pour toucher les rares façonniers et les rares donneurs d'ordre qui fraudent délibérément, le dispositif que propose le Gouvernement me semble efficace sans mettre en quoi que ce soit en cause les droits des contribuables.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-83, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 54, ainsi modifié.

(L'article 54 est adopté.)

Article additionnel après l'article 54



M. le président.
Par amendement n° II-3, MM. Gérard Larcher et André Diligent proposent d'insérer, après l'article 54, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les collectivités territoriales ou leurs groupements qui comprennent une zone franche urbaine définie au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, les dépenses réelles d'investissement relatives à l'installation et à l'aménagement d'équipements collectifs à caractère culturel ou sportif situés dans ces zones, donnent lieu, à compter de 1999, sous réserve des dispositions de l'article L. 1615-7, à remboursement du fonds de compensation dès l'exercice en cours. »
« II. - Les pertes de recettes résulant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Diligent.
M. André Diligent. Le Sénat connaît l'amendement qu'avec mon ami Gérard Larcher j'ai l'honneur de lui présenter, car il a voté un amendement exactement identique le 10 octobre 1996, lors de l'examen du projet de loi relatif à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Le Sénat avait émis un vote positif, malgré, je le précise, l'opposition du gouvernement de l'époque. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez l'occasion de vous distinguer de ce gouvernement-là, qui n'était pas le vôtre. (Sourires.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Très habile !
M. André Diligent. J'espère, en tout cas, que le Sénat restera dans sa logique, car il n'a pas changé, lui ! (Nouveaux sourires.)
M. Philippe Marini. Très bien !
M. André Diligent. Permettez-moi de citer un extrait du rapport du Haut Conseil à l'intégration : « La culture est sans doute l'un des domaines où le lien dialectique pourtant nécessaire entre identité et appartenance à la collectivité est mis en évidence. La ville est à la fois le lieu de développement des cultures spécifiques et celui de la recherche d'une culture pour tous. » On pourra reprendre ce texte à l'occasion du prochain débat sur l'intégration !
Dans le droit-fil de cette citation, l'amendement que je vous propose a pour objet d'accélérer le remboursement de la TVA au profit des communes des zones franches.
Afin d'éviter toute incidence sur le solde budgétaire de l'exercice 1998, et pour être agréable au Gouvernement, nous proposons même que la mesure n'entre en vigueur qu'à partir de 1999. Je suis persuadé que le Gouvernement sera très sensible à ce geste ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert. rapporteur général. Il est vrai que le Sénat et sa commission des finances sont constants, et ce quels que soient les gouvernements.
La commission des finances estime que cet amendement est tout à fait pertinent, puisqu'il s'agit de favoriser l'action en faveur de zones urbaines difficiles, en incitant au développement d'équipements sportifs et culturels de nature à offrir aux jeunes et aux habitants de ces quartiers un meilleur environnement. De surcroît, le dispositif ne nous semble pas exposer l'Etat à de trop lourdes dépenses, dans la mesure où il s'agit plutôt d'un coût de trésorerie, puisque cet amendement ne fait qu'avancer la date du versement du fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA.
La commission des finances a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est avec un grand respect que j'ai écouté M. Diligent. Avec continuité et une certaine obstination, il propose que les remboursements du Fonds de compensation pour la TVA interviennent l'année même - et non deux ans après, comme il est de règle - de la réalisation de l'investissement, lorsqu'il s'agit d'un investissement relatif aux équipements collectifs à caractère culturel ou sportif situés dans ce que l'on appelle les zones franches urbaines, les ZFU, et ce afin d'encourager les communes à y implanter de tels équipements.
M. Diligent y voit un encouragement à une politique d'intégration dont il a été l'un des artisans et l'un des défenseurs les plus acharnés.
Les communes qui réalisent des investissements dans ces zones franches urbaines sont d'ores et déjà bénéficiaires du FCTVA, à condition, bien évidemment, que les investissements en question satisfassent aux conditions d'éligibilité.
Par conséquent, ce qui est en cause, c'est non pas l'accès à ce fonds, mais la possibilité d'obtenir un remboursement anticipé, c'est-à-dire immédiatement plutôt qu'au terme de deux ans.
J'ai déjà eu l'occasion d'indiquer, au cours de ce débat budgétaire, que les relations entre l'Etat et les collectivités locales devraient faire l'objet d'une large concertation en 1998, et il va de soi que le FCTVA - car les montants en jeu sont considérables - sera inclus dans les éléments de cette concertation.
A ce stade, cet amendement me semble donc peut-être un peu prématuré, mais nous aurons le temps d'en reparler l'année prochaine, puisque M. Diligent propose que la mesure prenne effet en 1999.
Une décision trop rapide en la matière pourrait entraîner l'extension d'une telle dérogation, peut-être sans précaution, à de nombreux autres types d'équipements.
J'ajoute qu'il existe déjà de nombreuses mesures tendant à favoriser la redynamisation des territoires situés dans les zones franches urbaines. Celle que vous proposez constitue une incitation supplémentaire qu'il faut replacer dans la politique d'ensemble des zones franches urbaines.
Compte tenu de ces considérations et parce que nous aurons l'occasion de reparler du fonds de compensation de la TVA dans le courant de l'année 1998, je vous demande, avec tout le respect que j'éprouve pour vous, monsieur Diligent, de bien vouloir retirer cet amendement. Sinon, je serai obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Monsieur Diligent, l'amendement est-il maintenu ?
M. André Diligent. C'est avec beaucoup d'émotion que je reçois les respects d'un membre éminent du Gouvernement : je suis très touché par cette marque de sympathie.
J'aurais souhaité y répondre par un autre geste de politesse, mais je considère que je souscris déjà au souhait de concertation exprimé par M. le secrétaire d'Etat : mon amendement a aujourd'hui un caractère indicatif, afin de préparer le futur débat. (Sourires.) Je le considère donc comme la première étape de la concertation que nous allons avoir, et c'est la raison pour laquelle je le maintiens. (Rires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement II-3.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la semaine dernière, au cours du débat sur les crédits de la politique de la ville et de l'intégration, nous avons évoqué, avec le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan, M. Gérard Larcher, ce sujet des zones urbaines sensibles et des zones franches urbaines. Nous avons souhaité que les mesures mises en oeuvre par la loi portant pacte de relance pour la ville, votée voilà juste un peu plus d'un an, puissent perdurer et porter leurs fruits pendant un temps suffisant pour qu'il soit possible d'en dresser un vrai bilan dans la continuité. La persévérance est un élément essentiel dans le succès de ces dispositifs !
Nous avons insisté, les uns et les autres, sur le caractère primordial de la prise en charge des aspirations des jeunes de ces secteurs par différents moyens, qu'il s'agisse de la prévention, de l'action éducative et sociale, des sports - qui sont une remarquable école de discipline et d'apprentissage des règles collectives et des règles de la vie en société - ou qu'il s'agisse, lorsque c'est nécessaire, des services publics. Mais l'Etat a un rôle à jouer et doit poser des limites lorsque cela s'impose, de telle sorte que la société puisse intégrer ses différentes composantes et vivre autant que possible en harmonie.
Les considérations qui ont été développées sur toutes les travées de cet hémicycle en faveur d'une politique des zones urbaines sensibles, d'une politique de discrimination positive en faveur des secteurs qui cumulent le plus de handicaps, constituent, à mon sens, un cadre dans lequel s'inscrit tout logiquement l'initiative présentée par notre éminent collègue André Diligent.
Pour ma part, en tant que rapporteur spécial des crédits de la ville, c'est avec grand plaisir que je voterai cet amendement.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Très bien !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-3, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi des finances, après l'article 54.

Article 55



M. le président.
« Art. 55. _ I. _ L'article 109 de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 est ainsi modifié :
« A. _ Il est inséré, après le 2 bis, un 2 ter ainsi rédigé :
« 2 ter. Les documents nécessaires à l'établissement de la déclaration prévue au 2 doivent être conservés par les assujettis pendant un délai de six ans à compter de la date de l'opération faisant l'objet de cette déclaration. »
« B. _ Le cinquième alinéa du 3 est ainsi rédigé :
« L'amende est prononcée, dans le même délai de reprise qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, par l'administration qui constate l'infraction. Le recouvrement et le contentieux de cette amende sont assurés et suivis par l'administration qui prononce l'amende suivant les mêmes procédures, et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que ceux prévus pour cette taxe. »
« C. _ La dernière phrase du dernier alinéa du 4 est ainsi rédigée :
« Le contentieux de l'amende est assuré et suivi selon les mêmes procédures, et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que ceux prévus pour la taxe sur la valeur ajoutée. »
« D. _ Il est inséré, après le 4, un 5 ainsi rédigé :
« 5. Les agents des douanes peuvent exiger sans préavis, à des fins de contrôle statistique, la communication des documents nécessaires à l'établissement de la déclaration prévue au 2 chez toute personne physique ou morale tenue de souscrire celle-ci. »
« II. _ Le sixième alinéa de l'article 1788 octies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« L'amende est prononcée, dans le même délai de reprise qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, par l'administration qui constate l'infraction. Le recouvrement et le contentieux de cette amende sont assurés et suivis par l'administration qui prononce l'amende suivant les mêmes procédures, et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que ceux prévus pour cette taxe. » - (Adopté.)

Demande de réserve



M. Alain Lambert,
rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, je demande la réserve de l'article 56 jusqu'à la reprise de la séance de nuit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Pour ne pas déroger au bon esprit de dialogue qui s'est instauré avec la commission des finances, le Gouvernement accepte cette demande de réserve.
M. le président. En conséquence, la réserve est ordonnée.

Article 57



M. le président.
« Art. 57. _ I. _ Il est inséré, dans le livre des procédures fiscales, un article L. 47 C ainsi rédigé :
« Art. L. 47 C . _ Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité. »
« II. _ Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les rappels notifiés selon les règles prévues au I, avant le 1er janvier 1998, sont réputés réguliers en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré du défaut d'engagement d'une vérification de comptabilité. » - (Adopté.)

Article 58



M. le président.
« Art. 58. _ Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1768 quater ainsi rédigé :
« Art. 1768 quater . _ Toute personne, organisme ou groupement qui délivre irrégulièrement des certificats, reçus, états ou attestations permettant à un contribuable d'obtenir une déduction du revenu ou du bénéfice imposables, ou une réduction d'impôt, est passible d'une amende fiscale égale à 25 % des sommes indûment mentionnées sur ces documents.
« Cette amende est établie et recouvrée selon les mêmes procédures et sous les mêmes garanties et privilèges que ceux prévus pour l'impôt sur le revenu. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cet impôt.
« Les dirigeants de droit ou de fait des personnes morales émettrices des documents mentionnés au premier alinéa, qui étaient en fonction au moment de la délivrance, sont solidairement responsables du paiement de l'amende, si leur mauvaise foi est établie. »
Par amendement n° II-88 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après le premier alinéa du texte présenté par cet article pour l'article 1 768 quater à insérer dans le code général des impôts, un alinéa ainsi rédigé :
« Le contribuable ne fait pas l'objet d'un redressement si aucune collusion n'est établie entre lui et la personne, l'organisme ou le groupement ayant délivré les documents mentionnés à l'alinéa précédent. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances a tenu compte des arguments présentés par le Gouvernement en faveur de l'insertion dans le code général des impôts d'une amende fiscale à l'encontre de toute personne, organisme ou groupement qui délivre irrégulièrement des attestations de versement ouvrant droit à réduction ou déduction d'impôt.
Dans le cadre de la législation en vigueur, l'administration fiscale ne dispose en effet, face à une telle situation, que d'une seule possibilité : opérer un redressement à l'égard du contribuable qui a bénéficié de cette réduction d'impôt et appliquer un intérêt de retard.
Selon la commission, le système proposé ne doit pas autoriser l'administration à sanctionner et le contribuable et la personne ou l'institution qui a délivré l'attestation.
L'amendement vise à préciser que, si le contribuable est de bonne foi, il ne fera pas l'objet du redressement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne suis pas favorable à cet amendement, qui risque d'être interprété par les donateurs indélicats au détriment de l'intérêt général.
Il ne me semble pas opportun d'inscrire cette règle dans la loi et de s'interdire ainsi tout recours à l'encontre des contribuables sauf dans l'hypothèse de collusion entre ces derniers et l'organisme qui délivre les certificats, d'autant que cette collusion serait difficile à prouver.
De plus, le taux de 25 % qui est proposé est inférieur à certains taux de déduction ou de réduction applicables en la matière. Il existe, par exemple, une réduction de 50 % pour certains dons. Dès lors, l'application des seules amendes ne permettrait pas au Trésor de compenser la totalité du préjudice qu'il a pu subir.
Il m'apparaît donc nécessaire de conserver la possibilité d'effectuer des redressements, uniquement dans les cas qui le méritent.
En résumé, monsieur le rapporteur général, je ne serais pas opposé à un dispositif restreignant les facultés de redressement de l'administration dans l'hypothèse que vous visez, mais il me semble que la limitation au cas de collusion est trop restrictive.
Je demande donc au Sénat de rejeter l'amendement qui lui est proposé.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-88 rectifié.
M. Michel Sergent. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Cet amendement tend à supprimer, pour le contribuable, tout redressement à la suite de la délivrance d'une fausse attestation, puisqu'en fait il conviendrait que l'administration démontre une collusion entre l'organisme et lui, ce qui alourdit la procédure et la rend aléatoire.
Si je souscris à l'idée d'une véritable réforme permettant aux associations de ne plus être dans la situation juridico-fiscale fragile où elles sont actuellement, je souhaiterais rappeler ici que cette mesure va avoir beaucoup d'importance pour d'autres secteurs que le secteur associatif.
Je veux parler, en particulier, du secteur de l'assurance. Nous savons que, depuis plusieurs années, depuis que l'avantage fiscal à l'entrée a été supprimé pour la plupart des contrats, de nombreuses fraudes ont été constatées, notamment par le biais de fausses attestations portant des mentions antidatées, permettant ainsi aux bénéficiaires de conserver leur avantage fiscal.
La mesure sur l'assurance-vie qui est prévue dans ce projet de budget nous fait craindre à nouveau ce genre de pratique.
Si l'amendement n° II-88 rectifié était adopté, sauf à démontrer, pour chaque cas, la collusion, les contribuables qui sont les bénéficiaires de ces cas précis seraient exemptés. Cela n'est pas juste, puisque ce type de malversation d'écriture leur profite au premier chef.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. A l'occasion de l'examen de cet article 58 du projet de loi de finances, nous nous posons plusieurs questions.
Nous sommes évidemment favorables, par principe, à toute mesure qui permet de lutter contre la fraude fiscale, d'autant que la grande complexité à laquelle est parvenue notre législation favorise, notamment sous la forme de l'évasion fiscale, le développement de la fraude.
Il est, hélas ! quelques professionnels de la gestion comptable d'entreprise ou d'association qui utilisent régulièrement les multiples possibilités offertes par notre législation pour dissimuler des montants plus ou moins importants de droits à payer, et cette situation est regrettable.
Je pense, par exemple, aux abus auxquels a donné lieu l'application des dispositions relatives au crédit d'impôt-recherche, au crédit d'impôt-formation, ou encore aux dispositions prévues à l'article 44 sexies du code général des impôts relatif à l'exonération temporaire d'impôt sur les sociétés.
Mais, bien entendu, l'une des questions qui nous est posée est celle de l'impôt sur le revenu, notamment de l'ensemble des justificatifs que les particuliers doivent fournir à l'appui de leur demande pour bénéficier d'une réduction d'impôt définie aux articles 199 quater à 200 du code général des impôts.
Cela peut porter, par exemple, sur les frais réels déclarés par certains salariés. Force est de constater, dans ce cadre, que la rédaction de l'article 58 pose quelques problèmes. Il est à craindre, en effet, que son interprétation ne génère un contentieux important.
La bonne foi tant du contribuable que de l'organisme, de l'association, du groupement ou de l'entreprise délivrant le certificat concerné sera, en effet, parfois difficile à prouver et nous pouvons redouter quelques abus dans l'application du droit fiscal.
Nous vous saurions gré, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir nous assurer que la mesure définie à l'article 58 sera appliquée de manière équitable et en conformité avec l'intention du législateur, quitte à s'en prémunir par la voie d'une circulaire auprès des services fiscaux.
Nous ne voterons évidemment pas l'amendement de la commission des finances, qui nous semble d'une interprétation et d'une application délicates, mais nous attendons de vous des précisions sur la nature des procédures mises en oeuvre dans le cadre de cet article 58. En effet, nous ne souhaitons pas, monsieur le secrétaire d'Etat, que cet article crée des difficultés aux salariés qui demandent à bénéficier des frais réels.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Les explications de vote que nous venons d'entendre, et plus encore l'explication fournie par M. le secrétaire d'Etat voilà un instant, m'amènent à rappeler la préoccupation de la commission des finances, qui n'est pas opposée à celle du Gouvernement.
Il est écrit dans le commentaire de l'article 58 figurant dans le rapport et qui a été lu en détail par certains de nos collègues que ce dispositif n'est acceptable que s'il n'entraîne pas systématiquement une double sanction et du contribuable et de la personne ou de l'organisme délivrant irrégulièrement un certificat.
Or, le texte adopté par l'Assemblée nationale ne mentionne nulle part le fait que l'introduction de cette demande conduit à ne plus opérer de redressement sur le contribuable de bonne foi.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dès lors que votre réponse éclairerait de manière non équivoque et non ambiguë ceux qui auront à appliquer la loi, nous pourrions trouver un accord, tant il est vrai que la commission partage la préoccupation du Gouvernement.
Ce qui compte, c'est que le contribuable de bonne foi ne soit pas victime de tracasseries.
Prenons un exemple : un contribuable reçoit de bonne foi des certificats d'une association déclarée d'utilité publique ou d'une fondation qui lui ont fait croire qu'il peut bénéficier d'une réduction ou d'une déduction fiscale ; il ne s'est pas assuré que ladite association ou ladite fondation remplissait toutes les conditions.
Ce qui compte, c'est que le contribuable soit clairement informé. Si le Gouvernement pouvait nous donner tous apaisements à cet égard, la commission des finances serait prête à s'en remettre à son avis.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je voudrais tenir des propos rassurants, d'abord à destination de M. Loridant. Il est clair que le dispositif proposé ne concerne en rien les justificatifs délivrés en vue de déduire les frais professionnels des salariés, qui sont donnés par le contribuable sous sa propre responsabilité : kilométrages parcourus, achats de vêtements, etc.
Vous craignez, monsieur le sénateur, que cet article 58 ne dissuade les salariés d'être taxés aux frais réels. Votre crainte n'a pas lieu d'être.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur général, dans la plupart des cas, le dispositif proposé par le Gouvernement n'entraînera pas de doubles sanctions. Je peux vous confirmer que les contribuables de bonne foi ne sont pas - et ne sont d'ailleurs jamais - inquiétés en cas d'attestation inexacte.
Je ne sais pas si cette confirmation est de nature à vous rassurer, mais elle est claire. Dans ces conditions, peut-être pourriez-vous retirer votre amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-88 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 58, ainsi modifié.

(L'article 58 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 58



M. le président.
Par amendement n° II-112, M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« La réduction prévue à l'article 885-V bis du code général des impôts n'est pas applicable dans le cas où un contribuable fait l'objet d'un redressement pour lequel sa bonne foi a été écartée. »
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Nous pensons que, lorsqu'un contribuable assujetti à l'impôt de solidarité sur la fortune fait l'objet d'un redressement fiscal dans lequel sa bonne foi n'a pas été retenue, il doit perdre le bénéfice du plafonnement dont bénéficient l'ensemble des redevables.
Il s'agit d'une mesure d'équité envers les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu qui, depuis 1994, perdent le bénéfice de leur abattement de 20 % en cas de fraude.
Ce qui est actuellement appliqué pour l'impôt sur le revenu devrait être également appliqué en matière d'impôt de solidarité sur la fortune, car on sait bien que la fraude peut exister sur cet impôt.
Certains pourront prétendre que les deux avantages ne peuvent se comparer : pour l'impôt sur le revenu, l'abattement de 20 % est accordé au titre de la transparence fiscale ; pour l'impôt de solidarité sur la fortune, le plafonnement vise à limiter le poids de cet impôt dans l'hypothèse où les revenus sont faibles.
Même si, effectivement, ces deux avantages n'ont pas le même objet, je ne vois pas pourquoi les contribuables en perdraient le bénéfice en cas de dissimulation de revenus, alors que le titulaire d'un très important patrimoine ne subirait pas une pénalité analogue pour un agissement comparable.
On sait notamment qu'il est difficile d'appréhender les redevables potentiels à l'ISF qui, quelquefois, sont à la limite de la légalité - mais je n'en dirai pas plus car la presse s'en fait l'écho actuellement - et qui ont toujours dissimulé leur fortune en ne faisant pas de déclaration au fisc. Il serait bon, me semble-t-il, de prévoir des dispositions permettant de les décourager de continuer à agir ainsi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a considéré que le redressement fiscal comportait des sanctions très précisément définies par les textes. Elle n'a pas estimé qu'il convenait d'en modifier le contenu en prenant les dispositions les unes après les autres. C'est pourquoi elle a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement présenté par M. Sergent est, si je puis dire, prématuré, puisque l'idée est de supprimer les effets du plafonnement pour les redevables ayant fait l'objet de redressements assortis de pénalités exclusives de bonne foi.
Cet amendement est prématuré parce que, animé par le même souci d'équité, le Gouvernement entend bien, durant l'année à venir, engager avec les parlementaires qui le souhaitent une réflexion d'ensemble sur la fiscalité du patrimoine, la question du plafonnement de l'impôt de solidarité sur la fortune faisant évidemment l'objet de cette réflexion.
Nous pourrons débattre de cette question à cette occasion, monsieur Sergent. Je vous demande donc de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Sergent, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-112 est retiré.
Par amendement n° II-113, M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa du c de l'article 44 septies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Cette exonération est accordée sur agrément du ministre chargé du budget. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Les sociétés créées afin de reprendre une entreprise industrielle en difficulté sont exonérées d'impôt sur les sociétés jusqu'au terme du vingt-troisième mois qui suit leur création.
On sait que, dans des cas non négligeables, ces entreprises sont faussement liquidées pour permettre, par le biais de prête-noms, une reprise de leur activité sous une forme nouvelle de manière à échapper à l'impôt.
Actuellement, les dispositions de l'article 44 septies prévoient, notamment si une procédure judiciaire n'est pas mise en oeuvre, que cette exonération peut être accordée sur agrément du ministre chargé du budget.
Il nous semble que cette possibilité doit être rendue obligatoire, dans la mesure où il est parfois difficile à l'administration des impôts de déterminer spontanément les cas où il y a une fausse mise en liquidation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Les liquidations font l'objet d'un examen et d'une décision d'une juridiction. La commission des finances n'a pas à imaginer que les juridictions peuvent se rendre complices des maquillages décrits par les auteurs de l'amendement, qui font valoir que de nombreuses entreprises se mettraient volontairement en liquidation pour bénéficier de l'exonération de l'impôt sur les sociétés, et cela, en quelque sorte, avec l'accord des juridictions qui statuent.
Cela est apparu quelque peu invraisemblable à la commission des finances, c'est pourquoi elle a émis un avis défavorable, d'autant que l'agrément du ministre chargé du budget est notamment prévu quand il n'y a pas de procédure de redressement judiciaire, et donc justement quand il n'y a pas de juridiction statuant sur la réalité de la mise en liquidation de l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° II-113.
Tout d'abord, cet amendement a pour effet d'exclure du dispositif les reprises de branches complètes d'activités d'une société en redressement judiciaire ainsi que celles d'entreprises en difficulté qui ne sont pas en redressement judiciaire. Cette proposition pourrait contrarier les reprises de telles activités, lesquelles sont fréquemment celles qui peuvent le moins mal préserver l'emploi, ce qui est, pour vous comme pour nous, une priorité.
Ensuite, il ne me semble pas opportun de mettre en place une procédure d'agrément lorsque l'entreprise fait l'objet d'une cession dans le cadre d'un redressement judiciaire.
Monsieur le sénateur, vous soulignez la possibilité de détournement du dispositif, mais il semble que cette possibilité soit limitée, d'abord, du fait de l'interdiction faite aux anciens exploitants ou aux associés de participer au capital de la société créée pour la reprise, ensuite parce que les abus éventuels relèvent, sur le plan judiciaire, de sanctions pénales, et, sur le plan fiscal, de la procédure de répression des abus de droit.
Cela dit, si des cas particuliers étaient portés à ma connaissance, je ne manquerais pas d'examiner les conséquences qui devraient en être tirées. Ce sera fait au cas par cas. Si vraiment, ces exemples étaient aussi nombreux que vous le dites, nous en tirerions les conséquences sur le plan législatif.
Dans l'attente de cette vérification, je vous suggère de retirer cet amendement n° II-113, monsieur Angels.
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est la procédure de l'abus de droit !
M. le président. Monsieur Angels, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Angels. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-113 est retiré.
Par amendement n° II-114, M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 58, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les majorations visées au dernier alinéa du 3 de l'article 1728, ainsi que celles visées aux articles 1729 et 1730 du code général des impôts ne font pas l'objet de remise de la part de l'administration. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Trop de redressements font l'objet aujourd'hui de remises de la part de l'administration fiscale.
Il est ici proposé que, dans les cas de refus de souscription de déclaration alors même qu'une deuxième mise en demeure a été notifiée par l'administration, dans les cas où la mauvaise foi du contribuable a été établie ou en cas de manoeuvre frauduleuse ou d'abus de droit, ainsi que dans les cas relevant de l'évaluation d'office, c'est-à-dire dans tous les cas pouvant être considérés comme des cas de fraude avérée, il soit rendu impossible de diminuer les majorations prévues en la matière. En effet, à quoi sert un arsenal législatif, en matière de pénalité, si c'est pour ne pas l'appliquer dans la pratique ?
Il s'agit de faire en sorte que les dispositions en matière de lutte contre la fraude puissent, en étant appliquées, être dissuasives. Elles auront moins de chance de l'être si les fraudeurs savent qu'ils ont toutes les chances de voir les pénalités réduites !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances a estimé que le livre des procédures fiscales fixe très précisément les conditions dans lesquelles l'administration fiscale est autorisée à faire des remises.
Il ne lui paraît donc pas opportun de retirer à l'administration cette marge utile d'appréciation.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des finances est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est un fait que l'article L. 247 du livre des procédures pénales autorise les services fiscaux à remettre ou à transiger en matière de pénalité sans distinguer selon la nature ou la gravité des manquements sanctionnés.
Cette possibilité présente une utilité certaine tant pour l'Etat que pour les contribuables. L'administration fiscale peut, en effet, prévenir d'éventuels contentieux et assurer un recouvrement plus rapide des sommes qui ont été maintenues.
Elle peut aussi effectuer des remises en fonction du comportement spécifique du contribuable, en distinguant s'il s'agit d'une première infraction, s'il y a eu absence de nouvelles infractions entre la demande de remise et la notification de redressement.
Cette faculté permet, enfin, de tenir compte de la situation financière du contribuable.
Je voudrais rassurer les auteurs de l'amendement en leur indiquant - mais ils le savent probablement - que les transactions qui portent sur des sommes supérieures à 1,1 million de francs sont soumises à l'avis préablable d'un comité composé de conseillers d'Etat, de conseillers de la Cour de cassation et de conseillers maîtres à la Cour des comptes.
Toutes les garanties sont donc prises pour que l'Etat n'abuse pas de cette faculté. C'est pourquoi je vous suggère, monsieur Angels, de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Angels, l'amendement est-il maintenu ?
M. Bernard Angels. Il est retiré, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-114 est retiré.
Par amendement n° II-135, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, après l'article 58, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la quatrième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement revient sur l'une de nos positions fondamentales concernant la nécessaire lutte contre la fraude fiscale.
Nous sommes en effet attachés - nous ne sommes pas les seuls - au développement de l'action contre la fraude fiscale pour quelques raisons de fond.
La première est que la justice fiscale commence quand chaque contribuable, quel que soit l'impôt auquel il est assujetti, assume la part de sa contribution aux charges publiques.
La seconde, tout aussi fondamentale, consiste à appréhender la question de la fraude fiscale comme un obstacle essentiel à la réduction du poids relatif des impôts, dans le revenu des ménages comme des entreprises.
On disposerait sans doute de marges de réduction des prélèvements obligatoires s'il existait, vis-à-vis de l'impôt, un véritable comportement citoyen.
Force est de constater, à cet égard, que la nature de la fraude fiscale n'a, de façon générale, que peu de rapport avec le poids respectif de nos différents impôts.
En matière d'impôt sur le revenu, alors que les salaires, traitements, pensions et retraites constituent la grande majorité des éléments d'assiette, c'est sur les autres revenus que portent le plus souvent les redressements.
Comment également ne pas souligner la persistance d'une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, particulièrement préoccupante, et qui tend à se développer, d'autant que le taux normal de cette taxe est, à notre sens, trop élevé ?
Comment ne pas souligner également la fraude dont l'impôt sur les sociétés est l'objet, alors que son rendement est largement bridé par des dispositions correctrices d'un coût élevé pour le budget de l'Etat ?
Nous souhaitons donc - et c'est le sens de notre amendement - que le présent projet de loi marque une évolution en matière de lutte contre la fraude fiscale en allongeant le délai de reprise des droits omis d'une année supplémentaire, ce qui pourra, dans les faits, nous semble-t-il, favoriser des rentrées fiscales complémentaires et valider l'action nécessaire des services de recouvrement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances souhaite qu'en cas de découverte d'une activité occulte le délai de reprise soit étendu jusqu'à la sixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due.
Il lui a semblé que le dispositif était donc complet et qu'il ne méritait pas de modification.
En conséquence, elle est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame Beaudeau, le délai de reprise a été ramené de quatre ans à trois ans en 1986, et cela avec un double but : d'une part, faciliter l'acceptation des contrôles par les contribuables et, d'autre part - et c'est important pour l'Etat -, améliorer le recouvrement effectif des sommes rappelées. Cette mesure a permis de maintenir la fréquence des interventions de l'administration et d'accentuer l'approfondissement de ses investigations.
Un allongement du délai risquerait de remettre en cause un équilibre qui conditionne la qualité du contrôle.
De plus, comme l'a dit M. le rapporteur général, la loi de finances pour 1997 prévoit de porter le délai de reprise à six ans dans l'hypothèse où l'activité est exercée de manière occulte. Mais la loi prévoit aussi que le délai de reprise peut dépasser trois ans dans les cas les plus graves, notamment en cas de dépôt de plainte pour fraude fiscale ou lorsqu'une instance devant les tribunaux révèle une fraude.
Madame le sénateur, le délai de trois ans pour les cas ordinaires et le délai de six ans pour les cas aggravés constituent donc une bonne disposition. Aussi je vous suggère de retirer votre amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-135, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 59



M. le président.
« Art. 59. _ Le montant des redevances d'exploitation auxquelles sont assujettis les exploitants d'installations nucléaires de base, en application de l'article 17 de la loi de finances rectificative pour 1975 (n° 75-1242 du 27 décembre 1975), est revalorisé de 2,5 % à compter du 1er janvier 1998. » - (Adopté.)

Article additionnel après l'article 59

M. le président. Par amendement n° II-115, M. Charasse propose d'insérer, après l'article 59, un article additionnel ainsi rédigé :
« A compter du 1er janvier 1998, et à l'exception des services directement rattachés au Premier ministre, les ministères ne sont pas autorisés à éditer et diffuser des publications autres que celles prévues par la loi et les circulaires et bulletins officiels nécessaires à l'exécution de leurs missions. Toutefois, les contrats en cours à cette date peuvent continuer à être exécutés jusqu'à leur terme. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Article 60

M. le président. « Art. 60. _ I. _ Le montant maximum du droit fixe de la taxe pour frais de chambres de métiers prévu au premier alinéa du a de l'article 1601 du code général des impôts est fixé à 615 F.
« II. _ Les personnes physiques et morales acquittent à la chambre de métiers :
« _ un droit égal au montant maximum du droit fixe visé à la première phrase du a de l'article 1601 du code général des impôts au moment de leur immatriculation au répertoire des métiers ou au registre des entreprises tenu par la chambre ;
« _ un droit égal à la moitié du montant maximum de ce droit fixe pour les formalités suivantes : immatriculation simplifiée et création d'établissement. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 60



M. le président.
Par amendement n° II-102, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. Dans la première phrase du cinquième alinéa de l'article 199 quater E du code général des impôts, les mots : "1994 à 1996" sont remplacés par les mots : "1998 à 2000".
« II. Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Cet amendement, qui est dû à l'initiative de notre collègue M. Ostermann, est relatif à la réduction d'impôt pour les dépenses de formation des chefs d'entreprise.
Cette réduction a été instituée par l'article 199 quater B du code général des impôts pour les années allant de 1994 à 1996.
Notre collègue et les cosignataires de cet amendement souhaitent la reconduction de ce dispositif afin d'encourager l'effort de formation des chefs d'entreprise et de leur conjoint. Selon nous, cet effort est d'autant plus nécessaire que, dans bien des cas - nous le constatons dans nos départements - des petites entreprises ont malheureusement dû cesser de fonctionner peu de temps après leur création, en raison de problèmes liés à une formation insuffisante aux disciplines de la gestion.
Pour réduire ce taux élevé de mortalité des petites entreprises, il nous a semblé utile de prolonger l'application de l'article 199 quater B afin que la réduction d'impôt soit reconduite pour les années de 1998 à 2000.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances a trouvé cette réduction intéressante, même si elle a admis qu'elle avait donné des résultats encore à parfaire.
Comme ils sont à parfaire, le coût n'est pas élevé ; la commission des finances a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur Marini, la réduction d'impôt pour formation du chef d'entreprise et de son conjoint, qui était en vigueur entre 1992 et 1996, a eu un succès très limité et même presque confidentiel. Il suffit, pour s'en convaincre, de constater qu'en 1995 moins d'une entreprise individuelle sur mille a bénéficié de ce dispositif, soit environ un millier de bénéficiaires pour un coût de 1,75 million de francs.
Sachant que, actuellement, les entrepreneurs individuels peuvent désormais bénéficier de formations en contrepartie de leur participation au financement de la formation professionnelle continue, et conscient qu'il faut, en la matière, chercher la simplicité, le Gouvernement pense qu'il n'est pas souhaitable de reconduire une mesure qui alourdirait le code général des impôts, dont vous déplorez fréquemment la complexité, et qui n'a qu'une portée virtuelle.
Je vous suggère donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur Marini, faute de quoi j'en demanderai le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-102, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 60.
Je suis maintenant saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° II-19 est présenté par M. Gaillard.
L'amendement n° II-20 est déposé par MM. Adnot, Habert, Darniche, Durand-Chastel, Foy, Lafond, Türk et Maman.
L'amendement n° II-150 rectifié est présenté par MM. Machet, Vecten, Michel Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste.
Ces trois amendements visent, après l'article 60, à insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le premier alinéa du I de l'article 72 D du code général des impôts, il est inséré un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« Ce taux est également porté à 20 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1998 pour les exploitants qui réalisent des travaux de mise aux normes environnementales destinés à satisfaire aux obligations prévues par les textes d'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 modifiée relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. Un arrêté précise les documents à fournir pour justifier que ces travaux de mise aux normes sont destinés à satisfaire aux obligations fixées par la législation en vigueur. »
« II. - La perte de recettes résultant de l'application des dispositions du I ci-dessus est compensée par la majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Enfin, l'amendement n° II-95, proposé par MM. César, Valade, Fayolle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, tend à insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« La quatrième phrase du premier alinéa du I de l'article 72 D du code général des impôts est ainsi rédigée :
« Le taux de 10 % est porté à 20 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 1999 pour les exploitants qui réalisent des travaux de mise aux normes environnementales destinés à satisfaire aux obligations prévues par les textes d'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. »
La parole est à M. Gaillard, pour présenter l'amendement n° II-19.
M. Yann Gaillard. La loi de finances pour 1997 a créé un régime particulier, au titre de la déduction pour investissement pour les travaux de mise aux normes des bâtiments d'élevage.
Cet amendement a pour objet d'étendre ce régime à d'autres investissements agricoles, ceux qui ont bien sûr pour objet de mettre des installations en conformité avec les normes environnementales, lesquelles s'alourdissent d'ailleurs de plus en plus.
Parmi les activités agricoles qui posent des problèmes environnementaux et qui doivent donc investir figurent, bien entendu, les entreprises viticoles, notamment tout ce qui touche à la manipulation, par exemple en région Champagne.
Nous savons que le projet d'arrêté en préparation aura pour effet d'alourdir considérablement le coût de ces investissements, notamment pour des petites et moyennes entreprises de manipulation. C'est pourquoi les auteurs de ces différents amendements, dont votre serviteur, demandent au Sénat de bien vouloir faire bénéficier ces entreprises d'une déduction supplémentaire de même nature que celle qui est consentie pour les bâtiments d'élevage.
M. le président. La parole est à M. Durand-Chastel, pour défendre l'amendement n° II-20.
M. Hubert Durand-Chastel. L'amendement n° II-20 étant identique à celui de M. Gaillard, je me contenterai de confirmer ce qu'il vient de proposer au Sénat.
M. le président. La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° 150 rectifié.
M. Philippe Arnaud. Cet amendement est également identique aux précédents. Je voudrais toutefois insister sur un point.
Les agriculteurs, globalement, sont un peu trop souvent qualifiés de « pollueurs ». On les dit aussi irresponsables, parce qu'ils n'ont pas pris les dispositions nécessaires pour assurer le traitement de leurs effluents.
En réalité, il ne s'agit en l'occurence ni d'irresponsabilité ni de refus. Il s'agit simplement d'un manque de moyens pour mettre leurs installations aux normes. Cela est particulièrement vrai pour les exploitations viticoles.
De plus, il ne faut surtout pas faire l'amalgame entre les petites exploitations, qui supposent de petits aménagements, et les exploitations à caractère quasi industriel.
Cet amendement a donc pour objet d'étendre aux petites exploitations les dispositions fiscales qui existent pour les bâtiments d'élevage. Cela aiderait ces exploitations à se mettre aux normes.
M. le président. La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° II-95.
M. Philippe Marini. Notre collègue M. César, sénateur de Gironde et président de la chambre d'agriculture de ce département, attache, lui aussi, beaucoup d'importance au problème qui vient d'être évoqué : celui des coûts induits par la mise aux normes des exploitations viticoles quant à la gestion de leurs effluents. Il s'agit d'une mesure extrêmement importante pour les viticulteurs de notre pays.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s II-19, II-20, II-150 rectifié et sur l'amendement n° II-95 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances estime tout à fait judicieux les amendements identiques n°s II-19, II-20 et II-150 rectifié, qui ont une dimension environnementale intéressante, en même temps qu'un coût modeste : 40 millions de francs selon nos estimations.
En outre, l'avantage ne jouerait que pour les investissements effectués en 1998 car, dès 1999, le même régime s'appliquera à tous les investissements agricoles. De plus, l'arrêté ministériel prévu évitera tout détournement de procédure.
J'invite notre collègue Philippe Marini à bien vouloir retirer l'amendement n° II-95 pour se rallier aux trois autres, dont la rédaction nous semble meilleure.
M. le président. Monsieur Marini, maintenez-vous votre amendement ?
M. Philippe Marini. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-95 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s II-19, II-20 et II-150 rectifié ? M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est, me semble-t-il, un malentendu qui a conduit au dépôt de ces amendements, malentendu quant à la portée des dispositions de l'article 72 D du code général des impôts en matière de dépenses de mise aux normes environnementales des exploitations agricoles.
En effet, ces dispositions n'ont nullement pour objet de définir les utilisations qui peuvent être faites de la déduction pour investissement. Elles visent uniquement à définir les dépenses en prévision desquelles les exploitants peuvent pratiquer, dès l'imposition des exercices ouverts en 1997, une déduction complémentaire, au taux de 20 %, au lieu du taux de droit commun de 10 % prévu pour cette déduction.
L'application de cette mesure requiert de la part de l'exploitant la manifestation claire d'une volonté de réaliser un investissement d'ordre environnemental éligible. Cette volonté résulte, pour les dépenses de mise aux normes des bâtiments d'élevage, de la réalisation du diagnostic préalable - que les spécialistes appellent « étude DEXEL » - prévu par les circulaires du ministère de l'agriculture.
Or il n'existe aucune procédure de ce type pour les exploitations viticoles.
Pour autant, cela n'a pas pour effet de priver ces dernières de la possibilité de provisionner leurs dépenses de mise aux normes environnementales, au moyen de la déduction pour investissement, car celle-ci leur est applicable dans les conditions de droit commun.
En outre, comme cela a été dit, à partir des exercices ouverts en 1999, les viticulteurs pourront, au même titre que l'ensemble des agriculteurs, pratiquer une déduction complémentaire au taux de 20 % pour tous les investissements qu'ils envisageront de réaliser.
On peut donc s'interroger sur l'opportunité d'un nouvel aménagement du régime de la déduction pour investissement dont la portée pratique serait très limitée puisqu'elle aurait pour effet de permettre aux agriculteurs non éleveurs de pratiquer, pour le seul exercice ouvert en 1998, une déduction complémentaire au taux de 20 % au lieu de 15 %, alors que le taux de 20 % leur sera, en toute hypothèse, applicable dès l'exercice suivant.
Avancer d'un an ce relèvement de cinq points du taux de la déduction pour investissement entraînerait des difficultés d'application car, en dehors des exploitations d'élevage, il n'existe pas, actuellement, de définition des dépenses de mise aux normes environnementales. Il y aurait donc, pour les exploitants, un risque d'insécurité juridique important.
J'espère que ces explications auront convaincu les auteurs de ces amendements et que, en conséquence, ils accepteront de les retirer. A défaut, je serais obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s II-19, II-20 et II-150 rectifié.
M. Yann Gaillard. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gaillard.
M. Yann Gaillard. Malgré tout le respect que je porte à M. le secrétaire d'Etat, je ne suis pas complètement convaincu par ses explications.
Cette disposition présente un premier avantage, celui de gagner quelques points de déduction pour une année, ce qui n'est pas complètement négligeable.
En outre, sans être très coûteuse, elle permettrait de donner satisfaction à la profession viticole, qui a bien d'autres objets de revendication fiscale. Je rappelle que, à cet égard, beaucoup d'amendements avaient été préparés, que certains ont été présentés à l'Assemblée nationale, où ils n'ont pas été retenus, et qu'ils auraient pu l'être également au Sénat ; je pense, par exemple, à la distinction du revenu d'exploitation et du revenu personnel. Ici, on se contente de nous proposer, en quelque sorte une solution minimale.
Par ailleurs, il me semble qu'une procédure du type de celle qui existe pour les bâtiments d'élevage a de grandes chances d'être instituée dans les semaines ou les mois qui viennent puisqu'il existe un projet d'arrêté définissant les normes environnementales auxquelles doivent répondre ces exploitations, notamment en matière de protection contre les effluents.
Autrement dit, si ces amendements ne sont pas adoptés, pendant au moins une année, nos exploitants vont être contraints de procéder à ces investissements sans bénéficier de la contrepartie qui a été prévue pour les bâtiments d'élevage.
M. Philippe Arnaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, les exploitations viticoles sont conscientes du problème des effluents et certaines d'entre elles ont déjà élaboré des projets, voire réalisé des équipements pour éviter de polluer. Celles qui se sont ainsi lancées dans des études ou des travaux ne l'ont évidemment pas fait de gaieté de coeur.
Si vous pouviez m'assurer que les services de vos collègues de l'agriculture et de l'environnement n'exercent aucune pression sur les viticulteurs en se livrant à des contrôles extrêmement tatillons, je dirais : « Attendons un an », et je retirerais mon amendement. Malheureusement, ce qui se passe sur le terrain est là pour m'en dissuader.
De surcroît, on ne peut pas nous reprocher de rendre les choses plus complexes en introduisant un dispositif nouveau puisque nous proposons seulement d'étendre aux exploitations viticoles un dispositif existant.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n° II-19, II-20 et II-150 rectifié, acceptés par la commission et repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 60.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-96, MM. Pluchet, César, Valade, Fayolle, Bernard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'antépénultième et l'avant-dernier alinéas du I de l'article 72 D du code général des impôts sont supprimés.
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Par amendement n° II-149, MM. Machet, Vecten et Michel Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, après l'article 60, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les cinquième et sixième alinéas de l'article 72 D du code général des impôts sont supprimés.
« II. - La perte de ressources résultant de l'application du I ci-dessus est compensée par la majoration à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° II-96.
M. Philippe Marini. La déduction pour investissement tend à favoriser l'investissement dans les exploitations agricoles. Les modifications prévues par le projet de loi de finances permettent d'améliorer l'efficacité de ce dispositif. Toutefois, cette efficacité est limitée par deux contraintes peu justifiées économiquement. Tout d'abord, l'imputation sur la base d'amortissement prive le dispositif de la plus grande partie de son intérêt incitatif. Ensuite, le dispositif ainsi décrit semble peu compatible avec l'article 72 B du code général des impôts sur la comptabilisation des stocks de produits ou d'animaux.
M. le président. La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° II-149.
M. Philippe Arnaud. J'ajouterai simplement aux arguments qui vient d'énoncer M. Marini qu'il est particulièrement important de favoriser les investissements agricoles à la veille de la discussion d'un nouveau projet de loi d'orientation agricole.
Favoriser ces investissements, c'est tout simplement permettre à l'agriculture d'assurer sa reconversion. Dès lors, toute mesure permettant d'améliorer le mécanisme de l'amortissement aura valeur incitative et sera positive pour notre agriculture.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-96 et II-149 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ces deux amendements modifient de manière très substantielle le système de la déduction pour investissement en permettant à la fois de ne pas la rapporter aux amortissements, et donc d'en faire un avantage définitif, et de cumuler ce régime avec le système des stocks à rotation lente.
Selon la commission des finances, il s'agirait là d'une aide qui pourrait ne pas être conforme au droit communautaire.
Nous mettons également en garde contre le coût probablement élevé de cette mesure.
Il convient en outre de rappeler qu'une telle solution a été écartée l'an dernier, lorsque le système de la déduction pour investissement a déjà été sensiblement amélioré.
Je recommanderai donc à nos collègues de bien vouloir retirer leurs amendements, après qu'ils auront entendu les explications du Gouvernement. A défaut, je devrai, au nom de la commission, demander au Sénat de les rejeter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Aux excellents arguments avancés par M. le rapporteur général contre ces deux amendements qui sont presque identiques, j'en ajouterai un autre, précis, tangible, sonnant et trébuchant.
La première mesure proposée, qui consiste à rendre la déduction pour investissement définitive lorsqu'elle est utilisée pour financer des immobilisations amortissables, aurait un coût de 200 millions de francs.
La deuxième mesure, qui tend à autoriser le cumul des mécanismes de la déduction pour investissement, d'une part, et des stocks à rotation lente, d'autre part, coûterait entre 200 millions et 300 millions de francs.
Outre les raisons invoquées par M. le rapporteur général, cet argument de coût amène le Gouvernement à demander le rejet de ces amendements.
M. le président. Monsieur Marini, l'amendement n° II-96 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Compte tenu de l'analyse qui a été faite par notre commission ainsi que des différents éléments qui ont été portés à notre connaissance, il me semble préférable de retirer cet amendement, tout en souhaitant que ce sujet fasse l'objet d'une réflexion plus approfondie dans l'avenir.
M. le président. L'amendement n° II-96 est retiré.
M. le président. Monsieur Arnaud, l'amendement n° II-149 est-il maintenu ?
M. Philippe Arnaud. Je retire cet amendement mais je souhaite, monsieur le secrétaire d'Etat, que, au-delà de l'argument du coût, le problème de fond, qui n'est pas négligeable, soit réellement pris en compte.
M. le président. L'amendement n° II-149 est retiré.
Je suis maintenant saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-97, MM. César, Valade, Fayolle, Bernard et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 72 D du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, le bénéfice résultant de cette réintégration fait l'objet d'une imposition séparée au taux fixé au dixième du a bis du I de l'article 219 du code général des impôts à concurrence des sommes inscrites à une réserve spéciale d'autofinancement figurant au passif du bilan.
« La dotation à la réserve spéciale d'autofinancement ne peut résulter que d'un prélèvement sur le bénéfice comptable de l'exercice ou sur les capitaux propres de l'entreprise.
« Tout prélèvement sur la réserve spéciale d'autofinancement entraîne la réintégration des sommes correspondantes dans les bénéfices courants de l'exercice en cours. Il donne droit à un crédit d'impôt égal à l'impôt initialement payé. »
« II. - Dans la première phrase du dernier alinéa du II de l'article 1003-12 du code rural, après les mots : "plus-values et moins-values professionnelles à long terme", sont insérés les mots : "des sommes imposées au taux fixé au dixième alinéa du a bis du I de l'article 219 du code général des impôts en application de l'antépénultième alinéa du I de l'article 72 D du code général des impôts". »
Par amendement n° II-148, MM. Machet, Vecten, Michel Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste proposent d'insérer, après l'article 60, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe I de l'article 72 D du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, le bénéfice résultant de cette réintégration fait l'objet d'une imposition séparée au taux fixé au dixième alinéa du a bis de l'article 219 du code général des impôts (ou au l du point 1 de l'article 39 quindecies du code général des impôts), à concurrence des sommes inscrites à une réserve spéciale d'autofinancement figurant au passif du bilan.
« La dotation à la réserve spéciale d'autofinancement ne peut résulter que d'un prélèvement sur le bénéfice comptable de l'exercice ou sur les capitaux propres de l'entreprise.
« Tout prélèvement sur la réserve spéciale d'autofinancement entraîne la réintégration des sommes correspondantes dans les bénéfices courants de l'exercice en cours. Il donne droit à un crédit d'impôt égal à l'impôt initialement payé. »
« II. - Dans la première phrase du dernier alinéa du II de l'article 1003-12 du code rural, après les mots "plus-values et moins-values professionnelles à long terme", sont insérés les mots ", des sommes imposées au taux fixé au dixième alinéa du a bis de l'article 219-I du code général des impôts (ou au A du point 1 de l'article 39 quindecies du code général des impôts), en application de l'antépénultième alinéa du I de l'article 72 D du code général des impôts". »
« III. - La perte de recettes résultant de l'application des dispositions des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° II-97.
M. Philippe Marini. Chacun s'accorde aujourd'hui à reconnaître la nécessité de distinguer, d'un point de vue fiscal, le bénéfice réinvesti dans l'entreprise et le bénéfice prélevé pour rémunérer le travail de l'exploitant.
Le dispositif proposé s'appuie sur le mécanisme actuel de la déduction pour investissement tout en assurant un traitement fiscal différencié pour la fraction des bénéfices affectés au renforcement des fonds propres des entreprises.
Cet amendement tend donc à aménager un dispositif existant et déjà bien éprouvé : la déduction pour investissement.
Actuellement, si la déduction pour investissement n'est pas, dans un délai de cinq ans, utilisée à l'acquisition d'une immobilisation amortissable ou à l'augmentation de la valeur des stocks à rotation lente, elle doit être réintégrée dans les résultats du cinquième exercice suivant la déduction.
Il est proposé de maintenir cette réintégration, mais de soumettre les sommes réintégrées à une imposition proportionnelle de 19 % à concurrence des sommes inscrites à une réserve spéciale d'autofinancement figurant au passif du bilan. La dotation à cette réserve se ferait par prélèvement sur le bénéfice comptable de l'exercice ou sur les capitaux propres.
Le dispositif proposé assure une parfaite neutralité fiscale en cas de prélèvement des réserves pour les besoins personnels de l'exploitant, en prévoyant la réintégration des sommes ainsi prélevées dans le bénéfice passible de l'impôt sur le revenu au taux progressif, assortie d'un crédit d'impôt neutralisant l'impôt proportionnel précédemment acquitté.
Le cas échéant, ce dispositif peut jouer le rôle d'une réserve pour risque, en permettant, en cas de prélèvement sur la réserve lors d'une année déficitaire, le remboursement du crédit d'impôt correspondant à l'impôt proportionnel antérieurement acquitté. Il amplifie l'effet d'auto-assurance déjà recherché dans les modalités de réintégration de la déduction pour investissement.
Sur le plan social, les sommes portées dans la réserve spéciale d'autofinancement sont exclues de l'assiette des cotisations sociales. Les dispositions du code rural devraient, par ailleurs, être mises en harmonie pour tenir compte de cette disposition.
Nous avons le sentiment, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette disposition constituerait un utile assouplissement, qui serait opportunément reçu par les exploitants agricoles, car il répond à un réel besoin.
M. le président. La parole est à M. Arnaud, pour défendre l'amendement n° II-148.
M. Philippe Arnaud. J'ajouterai simplement à ce que vient de dire notre collègue Philippe Marini que cette proposition est extrêmement importante s'agissant, notamment, des stocks à rotation lente. Cela concerne, au premier chef, l'agriculture, en particulier un certain nombre de produits qui ne sont finis et marchands qu'après avoir vécu un certain nombre d'années par exemple dans des chais ; c'est le cas du cognac.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-97 et II-148 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a estimée que ces amendement tendaient, au fond, à calquer la fiscalité applicable à l'impôt sur le revenu sur la fiscalité de l'impôt sur les sociétés, en reprenant - ce qui montre d'ailleurs la grande ingéniosité de nos collègues - les meilleures dispositions des deux systèmes.
Ces amendements ont déjà été examinés par la commission des finances l'année dernière : elle les a rejetés, au motif qu'ils faisaient double emploi avec la déduction pour investissement spécifique à l'agriculture. C'est l'inconvénient de la constance du Sénat : ces amendements ayant été rejetés l'année dernière par la commission des finances, je ne peux que confirmer cet avis.
Toutefois, je souhaite donner de l'espoir à nos collègues en leur rappelant que le Sénat sera sans doute saisi très prochainement d'un texte relatif à l'agriculture, qui permettra d'ouvrir à nouveau ce débat dans un cadre plus large et, sans doute, de répondre à leurs très légitimes préoccupations.
Par conséquent, j'invite nos collègues, après avoir entendu le Gouvernement et après avoir mené une réflexion, que je sais rapide et féconde, à retirer leurs amendements, à défaut de quoi je serais dans l'obligation, tout à fait désagréable, d'émettre un avis défavorable.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les gouvernements passent et la commission des finances reste !
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. C'est ce qui justifie l'avantage du Sénat !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Après ce que vient de dire M. le rapporteur général, j'aurais scrupule à dire que cette proposition a déjà fait l'objet d'une étude approfondie dans le cadre de la préparation de la conférence agricole du 8 février 1996, au terme de laquelle elle a été écartée d'un commun accord entre le précédent gouvernement et les organisations professionnelles agricoles. Mais cela ne me paraît pas constituer un argument entièrement convaincant pour le gouvernement qui a succédé à celui de 1996.
Ce qui est plus préoccupant, c'est que ces deux amendements ne fixent aucune condition d'investissement ou de délai. Ils accordent un avantage nouveau aux entreprises agricoles, sans contrepartie particulière en terme d'économie ou d'emploi. En fait, cet avantage reviendrait à différer indéfiniment une fraction de l'imposition des déductions pratiquées.
En outre, ces bénéfices, qui seraient affectés à un compte de réserve spécial d'autofinancement, devraient être suivis dans le temps. Cela entraînerait une complexité excessive au regard du montant de l'imposition ainsi différée.
L'avant-dernier argument, qui me paraît important, a été exposé par le M. le rapporteur général : pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? (Sourires.) Les entreprises agricoles ont la possibilité d'opter pour l'impôt sur les sociétés. Dès lors, pourquoi tordre le droit pour parvenir à une situation qu'il est possible d'atteindre directement ?
Enfin, j'en arrive au dernier argument, qui n'est pas mince : si cet allégement était accordé aux entreprises individuelles agricoles, on ne voit pas ce qui empêcherait de l'étendre aux entreprises individuelles non agricoles. Or le coût d'une telle généralisation serait prohibitif.
Si j'ajoute, en conclusion, que votre proposition devrait être notifiée à Bruxelles, vous voyez qu'il existe de très nombreuses raisons pour lesquelles le Gouvernement demande le rejet de cet amendement.
M. le président. Monsieur Arnaud, l'amendement n° II-148 est-il maintenu ?
M. Philippe Arnaud. Je veux bien retirer cet amendement, compte tenu des propos tenus par M. le rapporteur général. Toutefois, comme tout à l'heure, je ne m'en contenterai pas. Il me semble que la spécificité des exploitations agricoles, même si elles peuvent effectivement s'installer en sociétés de droit commun, justifie qu'il y ait un examen particulier, notamment sur le plan fiscal, des stocks à rotation lente. Il s'agit d'un point extrêmement important.
A la veille de l'élaboration de la loi d'orientation agricole, monsieur le secrétaire d'Etat, vous verrez que ces éléments seront mis sur la table par les représentants agricoles. Nous devons nous déterminer, afin de pouvoir faire passer le message lors des négociations avec Bruxelles.
Je veux bien, je le répète, retirer cet amendement, mais je souhaite que soit pris en compte, de façon claire, le fait que le problème des stocks à rotation lente est spécifique à l'agriculture. Ce n'est pas en obligeant les exploitations agricoles à devenir des SARL ou des SA de droit commun que l'on va régler le problème. Au contraire, cette contrainte risque de susciter des réactions et des levées de boucliers.
M. le président. Monsieur Marini, l'amendement n° II-97 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Monsieur le secrétaire d'Etat, les exploitations agricoles, quelle que soit leur spécificité, deviennent de plus en plus des entreprises et doivent être gérées avec tous les moyens auxquels les entreprises ont accès. Ces propositions ont été conçues dans une telle optique.
Le principe même de la séparation, dans une exploitation personnelle... de deux secteurs fiscaux, serait une innovation importante dans notre droit fiscal. Je rapproche de cet argument certaines idées souvent exprimées pour la petite et moyenne entreprise et pour l'artisanat ; je veux parler du patrimoine fiscal d'affectation. En effet, il s'agit bien ici de la même idée appliquée à l'exploitation agricole.
Le patrimoine fiscal d'affectation n'est pas un dispositif absurde, à telle enseigne que de nombreux groupes de travail ont travaillé sur ce sujet et que le précédent ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, M. Jean-Pierre Raffarin, maintenant notre collègue, y est très attaché.
On peut se demander s'il n'y aurait pas lieu de remettre en question certains de nos schémas habituels afin, précisément, de permettre à des petites et moyennes entreprises dans les secteurs artisanal, agricole, industriel et des services, de provisionner des sommes pour faire face à des besoins futurs d'investissement et d'exploitation. Ainsi, l'exploitant aurait la possibilité de prélever sur cette réserve les sommes qu'il consacrerait à sa consommation personnelle, et qui seraient donc fiscalisées au titre de l'impôt sur le revenu.
Mais ce propos m'entraîne peut-être un peu loin. C'est vous qui m'y avez incité, monsieur le secrétaire d'Etat, en établissant une relation avec d'autres domaines de la fiscalité.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Vous enrichissez le débat, mon cher collègue !
M. Philippe Marini. Cela étant dit et compte tenu de la réponse de la commission - elle n'a pas encore débouché sur ces voies nouvelles, mais je ne désespère pas - je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-97 est retiré.
Monsieur Arnaud, l'amendement n° II-148 est-il maintenu ?
M. Philippe Arnaud. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-148 est retiré.

Article 61



M. le président.
« Art. 61. - I. - Les deux derniers alinéas du 1° de l'article L. 361-5 du code rural sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour 1998, le taux prévu au a est fixé à 15 % et le taux prévu au b est fixé à 7 %, à l'exception des conventions couvrant les dommages aux cultures et la mortalité du bétail, dont le taux reste fixé à 5 %. »
« II. - Au premier alinéa suivant le 3°, les mots : "pour une durée de dix ans" sont remplacés par les mots : "jusqu'au 31 décembre 1998" ; le deuxième alinéa suivant le 3° est supprimé. » - (Adopté.)

5

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. Michel Sergent. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Monsieur le président, au cours de la séance de dimanche soir, une confusion s'est produite. Le groupe socialiste, croyant voter pour les crédits du tourisme, a voté pour les crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement, alors qu'il souhaitait voter contre, en raison des nombreuses réductions de crédits opérées par la majorité sénatoriale.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, monsieur Sergent.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

6

LOI DE FINANCES POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles de la deuxième partie, nous revenons à l'article 56, qui a été précédemment réservé à la demande de la commission des finances et en accord avec le Gouvernement.

Article 56
(précédemment réservé)



M. le président.
« Art. 56. - I. - Le troisième alinéa de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Ils peuvent se faire délivrer copie des pièces se rapportant aux opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation. »
« I bis. - A la fin de la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales, le mot : "quinze" est remplacé par le mot : "trente". »
« II. - Le troisième alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales est ainsi rédigé :
« Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 au regard des impositions de toute nature et de la procédure d'enquête prévue à l'article L. 80 F. Elles peuvent être invoquées lorsqu'est demandée la mise en oeuvre des procédures de visite et de saisie mentionnées aux articles L. 16 B et L. 38. La mise en oeuvre du droit d'enquête ne peut donner lieu à l'application d'amendes hormis celles prévues aux articles 1725 A, 1740 ter et 1740 ter A du code général des impôts. »
« III. - Il est inséré, dans le code général des impôts, un article 1740 ter A ainsi rédigé :
« Art. 1740 ter A . - Toute omission ou inexactitude constatée dans les factures ou documents en tenant lieu mentionnés aux articles 289 et 290 quinquies donne lieu à l'application d'une amende de 100 F par omission ou inexactitude. Le défaut de présentation de ces mêmes documents entraîne l'application d'une amende de 10 000 F par document non présenté. Ces amendes ne peuvent être mises en recouvrement avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. Les amendes sont recouvrées suivant les procédures et sous les garanties prévues pour les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont instruites et jugées comme pour ces taxes. »
« IV. - L'article 1740 ter du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Il est inséré, après le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnes qui délivrent une facture ne correspondant pas à une livraison ou une prestation de services réelle sont redevables d'une amende fiscale égale à 50 % du montant de la facture. » ;
« 2° Le début du deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Ces amendes ne peuvent être mises en recouvrement avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations. Ces amendes sont recouvrées suivant les procédures... (Le reste sans changement.) »
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Avant que s'engage la discussion sur les amendements, je souhaite éclairer le Sénat sur la portée de l'article 56.
Cet article, modifié par l'Assemblée nationale, tend à renforcer le dispositif des amendes fiscales destinées à réprimer, d'une part, les manquements en matière de facturation pour l'établissement de la TVA et, d'autre part, les fausses facturations.
Sachez, monsieur le secrétaire, que, sur toutes les travées, nous souhaitons réduire au minimum la fraude fiscale qui se développe, sans doute en raison de la mondialisation des échanges.
En même temps, je ne vous cacherai pas que je crains que notre législation fiscale ne soit sur la mauvaise pente. En effet, nous sommes entrés dans une course infernale : nous essayons non seulement de contenir la fraude, ce qui est, je le répète, une préoccupation commune, mais aussi de régler, par la loi, tous les problèmes qui se posent et qui sont soulevés par des contribuables. Ces derniers sont, en effet, dotés de conseils qui mettent en place des dispositifs leur permettant d'échapper à l'impôt.
La tentation du Gouvernement, de l'exécutif quel qu'il soit, et la faiblesse peut-être du Parlement consistent à entrer dans cette spirale infernale d'une législation qui est fondée sur le soupçon permanent, dont l'effet est de freiner la vie économique, alors que celle-ci a besoin de confiance et qui, au fond, ne parvient pas, malgré tous ses efforts, à prendre dans ses filets ceux que nous recherchons, c'est-à-dire ceux qui procèdent à des optimisations constituant de réels abus de droit ou ceux qui procèdent à de véritables fraudes fiscales.
Si je donne un caractère quelque peu solennel à mon propos, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est parce que je crois vraiment que nous sommes sur une mauvaise pente. Nous sommes sur la pente de la prolifération de la norme législative, parce que nous refusons la norme jurisprudentielle, c'est-à-dire que nous ne voulons jamais aller devant les juridictions pour permettre à celles-ci de fixer le droit. Par conséquent, la norme législative, je le répète, prolifère. Elle est le fruit de sédimentations successives, ce qui devient, en matière fiscale, absolument ingérable.
Il va nous falloir prochainement faire une pause. Dans le cas présent, nous entrons dans une logique qui est préoccupante, car elle porte atteinte aux droits de la défense. Nous nous devons de veiller à ne pas franchir ce pas, dans le pays des droits de l'homme.
La mise en place du marché unique, à partir du 1er janvier 1993, impliquait, nous le savons tous, la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux à l'intérieur du territoire communautaire.
L'élimination des principaux risques de fraude supposait notamment la mise en place d'une procédure permettant, si nécessaire, de contrôler la cohérence entre les factures reçues ou émises par une entreprise et les stocks qu'elle détient.
C'est pour répondre à ces besoins que l'article 106 de la loi du 17 juillet 1992 a créé ce droit d'enquête. Il convient de rappeler, mes chers collègues, que, dès la création de ce droit d'enquête, la commission des finances du Sénat avait insisté sur le caractère strictement limité de son objet, à savoir les manquements aux règles de facturation, et sur le fait qu'il ne s'apparentait pas à une procédure de contrôle fiscal. Or le texte proposé initialement par le Gouvernement visait précisément à faire du droit d'enquête une nouvelle procédure de contrôle fiscal.
Mes chers collègues, les députés ont écrit quarante pages à ce sujet, ce qui traduit leur inquiétude face à l'évolution de cette législation. En effet, le texte initial visait à donner une valeur probante aux contestation du procès-verbal en l'absence de contestations et jusqu'à la preuve du contraire.
Par ailleurs, il étendait l'opposabilité aux tiers concernés par la facturation des constatations non contestées par l'assujetti.
Je n'aurais pu, je le dis clairement au Sénat, qu'émettre un avis défavorable sur ce texte s'il avait été présenté au Sénat dans sa rédaction initiale. En effet, non seulement il dénaturait la notion de droit d'enquête, sans pour autant l'affirmer clairement, mais aussi il portait atteinte, me semble-t-il, au principe constitutionnel des droits de la défense.
Toutefois, si l'Assemblée nationale a gommé les aspects les « moins acceptables » de l'article 56 - comme vous le voyez, je pèse mes mots - ce dernier contient encore des dispositions qui doivent être modifiées ; tel est l'objet des quatre amendements dont nous allons débattre dans quelques instants.
Mais, avant de m'exprimer sur ces amendements, je voudrais, et je m'adresse à vous solennellement, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous puissiez indiquer au Sénat quelle utilisation fera l'administration fiscale de la possibilité d'opposer les constatations figurant dans le procès-verbal lors de l'exercice du droit d'enquête à l'égard des tiers.
En effet, une telle procédure n'est-elle pas de nature à porter atteinte aux droits de la défense puisque le tiers mis en cause par le contribuable n'est informé des propos tenus contre lui qu'au moment où l'administration fiscale se propose de le contrôler, voire de le sanctionner par des amendes ?
A défaut d'en avoir eu connaissance, il n'a pas la possibilité de contester les constatations qui sont contenues dans les procès-verbaux. En outre, il lui revient alors de prouver qu'il n'a pas commis d'acte répréhensible alors que la règle en matière fiscale, à moins qu'elle n'ait été subrepticement modifiée au fil du temps, veut que la charge de la preuve incombe à l'administration.
Je suis d'autant plus préoccupé par cette atteinte aux droits de la défense que le but que l'on cherche par cette procédure, c'est-à-dire la vérification de la situation du tiers mis en cause par un contribuable, peut, sauf erreur de ma part, être atteint par d'autres moyens.
Ainsi, l'administration fiscale peut toujours exercer un droit d'enquête puis engager une procédure normale de contrôle. Je voudrais donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous expliquiez au Sénat, avec la solennité qui convient et la gravité que requiert la matière - et je ne doute pas que le Conseil constitutionnel examinera à la loupe nos propos - pourquoi cette disposition est à ce point indispensable et comment l'administration compte l'utiliser.
Je vous prie, monsieur le président, d'excuser la longueur de mon propos, mais il me semble que nous touchons là aux principes fondamentaux de notre droit. Je veux dire par là que, avec la meilleure bonne volonté du monde, l'exécutif, quel que soit le gouvernement en présence, et le Parlement glissent ensemble vers une utilisation de la loi fiscale qui, d'abord, ne me paraît pas conforme aux principes généraux de notre droit et qui, ensuite, comme je l'ai dit tout à l'heure en introduction, refuse toute les solutions jurisprudentielles au motif qu'elles sont complexes et incertaines.
Nous ne donnerons jamais naissance ainsi à une législation qui à la fois respectera les droits de la défense et permettra à l'économie de fonctionner normalement. Nous sommes sur une mauvaise pente ; il revenait au rapporteur général d'alerter le Gouvernement sur ce danger.
MM. Michel Caldaguès et Philippe Marini. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Après avoir déclaré en préambule, de manière solennelle, que vous étiez partisan de lutter contre la fraude fiscale, vous avez développé, monsieur le rapporteur général, une argumentation sincère, je n'en doute pas, qui revenait à vider de toute portée pratique le dispositif qui était proposé à cet effet. Vous avez évoqué les droits de la défense et les textes fondamentaux, et vous avez en quelque sorte, en termes courtois, quasiment reproché au Gouvernement de porter atteinte aux libertés fondamentales.
Je vous répondrai, avec la même courtoisie, mais aussi la même fermeté que celles que vous avez employées, que le Gouvernement n'est pas « liberticide » et que votre déclaration liminaire est, me semble-t-il quelque peu surprenante.
Permettez-moi de faire un très bref rappel historique. Dans son projet initial, le Gouvernement prévoyait effectivement que le procès-verbal d'enquête faisait foi jusqu'à preuve du contraire. Lors de l'examen de l'article 56, à l'Assemblée nationale, le Gouvernement, face aux bons arguments qui ont été avancés, a renoncé à ce renforcement de la valeur probante des procès-verbaux qui devait valoir non seulement à l'égard du redevable chez lequel l'enquête a été effectuée, mais également à l'égard des tiers concernés par la facturation.
Le Gouvernement a été sensible à l'analyse selon laquelle une telle disposition renversait la charge de la preuve à l'égard d'un tiers qui n'a pas pu suivre le déroulement de l'enquête et qui n'a pas pu faire valoir ses observations.
Dans l'état actuel du texte qui vous est soumis - et vous ne l'avez pas, selon moi, suffisamment souligné - la preuve restera à la charge de l'administration et les tiers seront, à l'égard de cette dernière, dans la même situation que le redevable qui a fait l'objet de la procédure d'enquête initiale.
Je ne vois donc pas en quoi les droits de la défense seraient atteints d'une quelconque manière, puisque le contribuable comme les tiers peuvent, au cours des procédures qui sont ouverte, faire valoir leurs observations exactement comme dans une procédure fiscale tout à fait ordinaire. A partir du moment où les constatations figurant dans le procès-verbal peuvent être contestées par le tiers concerné par la facturation, il est bien normal qu'elles puissent lui être opposées.
Nous avons là un débat qui porte sur les grands principes. Or, il faut bien voir que, en l'occurrence, nous sommes face à des réseaux ou à des mécanismes particulièrement frauduleux - vous l'avez dit, selon moi, trop brièvement dans votre exposé liminaire. Aussi, il est nécessaire de pouvoir opposer à un assujetti concerné par ladite facturation, qu'il soit fournisseur, client ou intermédiaire, des constatations matérielles faites par des agents assermentés. Il me semble donc normal que l'administration puisse, dans le respect des droits de la défense, faire usage de son droit d'investigation.
Il est clair - c'est le deuxième point sur lequel je voudrais insister parce que votre exposé était si éloquent que la Haute Assemblée n'en a peut-être pas complètement saisi la teneur - que l'administration ne peut tirer à l'égard des tiers de conséquences fiscales éventuelles de son droit d'enquête qu'en mettant en oeuvre une procédure qui assure l'ensemble des garanties prévues par la loi. Elle ne pourra infliger les amendes qui sont prévues par le présent texte qu'après avoir procédé à une nouvelle enquête à l'égard de la personne concernée.
Les grands principes ne semblent pas en cause. Je n'irai pas jusqu'à émettre des soupçons - ce serait indécent à l'égard de la Haute Assemblée - mais, à force d'évoquer les droits de la défense, on arrive à justifier l'impunité des fraudeurs. Or, nous savons que depuis le 1er janvier 1993 il existe une fraude manifeste, organisée, à la TVA intracommunautaire, qui est le fait non pas de l'ensemble des entreprises ou d'une majorité d'entre elles, mais de réseaux qu'il importe de démanteler.
Avec la même gravité et la même solennité que M. le rapporteur général, je dirai que vous vous placez, selon moi à tort, au niveau des principes, alors qu'ils ne sont pas en cause. En effet, ce qui est en cause, c'est la pratique de la lutte contre la fraude fiscale qui, comme chacun le sait, existe et est le fait de réseaux organisés.
Le Gouvernement propose, avec une volonté très ferme, de mettre les moyens du droit - c'est l'objet de l'article 56 tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale - au service de la traque de la fraude fiscale à la TVA intracommunautaire, et ce dans le respect des droits du contribuable. Ainsi, dès que l'enquête aura révélé une présomption de trafic délictueux, des procédures fiscales, entourées de toutes les garanties nécessaires, seront mises en oeuvre.
Monsieur le rapporteur général, je crains que votre exposé, placé à un niveau très élevé qui vous honore, n'atteigne pas l'objectif que nous partageons ensemble. Ce que nous voulons, c'est, dans le respect des principes fondamentaux du droit fiscal, traquer la fraude à la TVA intracommunautaire. Si nous sommes d'accord sur ces deux objectifs, vous admettrez que les graves accusations que vous avez lancées à l'encontre du texte proposé par le Gouvernement et modifié par l'Assemblée nationale ne sont pas fondées.
M. le président. Je suis saisi, par M. Lambert, au nom de la commission des finances, de quatre amendements.
L'amendement n° II-84 tend à insérer, après le paragraphe I de l'article 56, un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Dans le premier alinéa de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales, les mots : "pouvant se rapporter à des opérations ayant donné lieu ou devant donner lieu à facturation" sont remplacés par les mots : "directement liés aux opérations contrôlées". »
L'amendement n° II-85 vise, dans la troisième phrase du texte proposé par le paragraphe II de l'article 56 pour le troisième alinéa de l'article L. 80 H du livre des procédures fiscales, à supprimer la référence : « , 1740 ter ».
L'amendement n° II-86 a pour objet de rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe III de l'article 56 pour insérer un article 1740 ter A dans le code général des impôts :
« Art. 1740 ter A. - Toute omission ou inexactitude constatée dans les factures ou documents en tenant lieu mentionnés aux articles 289 et 290 quinquies donne lieu à l'application d'une amende de 100 francs par omission ou inexactitude.
« Cette amende est exclusive de l'application des dispositions de l'article 1725 et de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993.
« Elle ne peut être mise en recouvrement avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ces délais ses observations. Elle est recouvrée suivant les procédures et les garanties prévues pour les taxes sur le chiffre d'affaires. Les réclamations sont instruites et jugées comme pour ces taxes.
« L'administration peut adresser, par pli recommandé avec accusé de réception, une mise en demeure d'avoir à fournir les factures ou documents en tenant lieu dans un délai de trente jours. A défaut de production de ces mêmes documents dans ce délai, l'amende maximale est fixée à 10 000 francs par document non présenté, sans que son montant puisse dépasser le montant de la facture non fournie. »
Enfin, l'amendement n° II-87 a pour but de rédiger comme suit le texte proposé par le 1° du paragraphe IV de l'article 56 pour insérer un alinéa additionnel après le premier alinéa de l'article 1740 ter du code général des impôts :
« Lorsqu'il est établi qu'une personne a délivré une facture ne correspondant pas à une livraison ou à une prestation de service réelle, elle est redevable d'une amende fiscale égale à 50 % du montant de la facture. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter ces quatre amendements.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, il y a peut-être une différence entre la manière d'exprimer les choses et la manière de les entendre. Mais la solennité réelle que j'ai souhaité donner à mon propos liminaire était justifiée devant la Haute Assemblée.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne la critique pas !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Vous avez qualifié d'excessifs ces propos. Je n'en retire aucun. Je continue de penser que la législation fiscale, en France, est sur la mauvaise pente. C'est une folie - et je mesure chaque mot que je prononce - de vouloir utiliser la loi comme un outil contre chaque contribuable. En effet, la loi n'a jamais été faite pour cela, elle doit avoir une portée générale. Laissons aux juridictions - c'est leur rôle - le soin d'utiliser la loi pour condamner ceux qui en abusent. Or, en matière fiscale, et vous m'avez entendu le dire souvent, mes chers collègues, nous ne voulons plus utiliser les textes qui existent et aux termes desquels l'administration peut engager une procédure contre ceux qui abusent du droit.
Dans mon esprit, il n'a jamais été question de vider de toute portée pratique le droit en la matière. Utilisons les bons outils puisque notre objectif est commun - je ne doute pas qu'il soit commun, je vous demande de ne pas en douter vous-même. Or les bons outils ne sont pas ceux qui ont pour effet de soupçonner tout contribuable français d'être un fraudeur.
Vous nous avez avoué vous-même qu'il s'agissait d'engager la guerre - c'est moi qui utilise ce terme - contre les réseaux de fraude organisée. Pour autant, cette guerre doit-elle supposer la mobilisation d'un armement visant chaque contribuable ? Monsieur le secrétaire d'Etat, même en levant des divisions entières contre tous les contribuables, vous n'arriverez jamais à mettre en joue les réseaux de fraude organisée que vous avez cités et que nous cherchons tous à démanteler. Si vous n'utilisez pas la voie du recours aux juridictions compétentes, vous ne les atteindrez jamais.
Mes chers collègues, si je parle avec un peu de passion, avouons-le, c'est parce que je crois au droit.
Celui-ci est un élément essentiel de la vie en société et, après tout, le Parlement peut consacrer quelques instants pour parler du droit et de son rôle dans l'organisation de la société.
Je rappellerai que, en 1992, le Sénat, notamment la commission des finances, avait souligné qu'un décalage commençait à se produire entre l'objectif et les moyens du droit d'enquête. La commission des finances craignait déjà que le droit d'enquête ne se transforme en examen fiscal préalable et elle souhaitait définir de manière plus précise l'étendue du droit de communication. Il paraissait, dès lors, déjà souhaitable de limiter cette communication aux seules pièces directement liées aux opérations contrôlées, tels que les bons de transport ou de commande, les livres d'achat ou de vente, ainsi que la liste des clients.
La tentative du Gouvernement - des gouvernements qui se sont succédé, entendons-nous bien - de transformer le droit d'enquête en une nouvelle procédure de contrôle fiscal lui donne tort a posteriori . La dérive redoutée en 1992 - mes chers collègues, je ne fais que répéter ce que mon prédécesseur avait alors dit au Sénat - a lieu aujourd'hui.
Je reprends tout simplement l'amendement qui avait été proposé par la commission des finances en 1992. Monsieur le secrétaire d'Etat, si l'amendement n° II-84 fait de moi à vos yeux un hérétique, ce n'est pas la première fois. En effet, la commission des finances du Sénat avait déposé en 1992 un amendement rédigé dans les mêmes termes.
J'en viens à l'amendement n° II-85. L'article 56 prévoit d'élargir le champ des amendes applicables à la suite de la mise en oeuvre d'un droit d'enquête. Je vous suggère, mes chers collègues, d'accepter que cette procédure autorise l'administration fiscale à sanctionner l'omission, l'inexactitude ou encore le défaut de présentation des factures ou des documents.
En revanche, je vous propose de vous opposer à ce que la mise en oeuvre du droit d'enquête puisse avoir comme conséquence directe de sanctionner, sans recours préalable à une véritable procédure de contrôle fiscal, les fausses facturations ou la dissimulation d'identité ou d'adresse.
En effet, j'estime que le droit d'enquête ne permet pas aux vérificateurs d'établir que dans tel ou tel cas il y a eu fausse facturation ou manoeuvre frauduleuse. Pour arriver à ce résultat, l'administration fiscale est obligée d'examiner l'ensemble des documents comptables et dépasse le cadre des constatations purement formelles pour porter un jugement de valeur sur les factures examinées.
L'amendement n° II-86 est essentiellement rédactionnel. Il vise à mieux garantir les droits des contribuables lorsque ces derniers sont passibles des amendes décrites dans l'article 1740 ter A. Il vise également à plafonner le montant desdites amendes.
L'amendement n° II-87 est d'ordre rédactionnel. Il tend à confirmer que la preuve est à la charge de l'administration.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-84, II-85, II-86 et II-87 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur général ayant de nouveau abordé le débat général, je voudrais, à mon tour, y revenir, pour faire brièvement quelques remarques de caractère politique et juridique.
D'abord, je formulerai une remarque de bon sens politique. Vous estimez, monsieur le rapporteur général, que les textes qui sont proposés expriment une sorte de soupçon sur les contribuables honnêtes. Si l'on suivait votre raisonnement - mais je n'irai pas jusque-là ! - les contribuables honnêtes seraient, à la limite, une sorte de bouclier qui interdirait d'atteindre les réseaux de fraude,...
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est très intéressant !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... mais vous avez dit vous-même qu'il était important de démanteler ces réseaux.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ce que vous dites là est très porteur, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je considère que les gendarmes ne sont pas des agresseurs à l'égard des automobilistes qui respectent le code de la route. En effet, leur but est de verbaliser les automobilistes qui sont en infraction. Ceux qui respectent le code de la route - c'est le cas, je pense, de l'ensemble des membres de la Haute Assemblée - considèrent les gendarmes non comme des êtres hostiles, mais comme des personnes chargées de protéger leur sécurité.
Dans le domaine fiscal, l'analogie peut être faite. Faire porter le soupçon sur les contribuables honnêtes n'est absolument pas le but du Gouvernement ni de l'Etat.
J'en viens à des points juridiques un peu plus précis. Ce qui est proposé, c'est une procédure transversale qui a pour objet de lutter contre une forme de fraude qui n'a rien à voir avec l'abus de droit. Chaque fois que le Gouvernement veut renforcer les moyens à la disposition de l'Etat, tout en respectant les droits des contribuables, vous opposez la présence du juge. Or, on vise non pas chacun des contribuables, mais uniquement les contribuables assujettis à la TVA qui manquent effectivement à leur règle de facturation.
Si on devait vous suivre, monsieur le rapporteur général, il faudrait, à la limite, subordonner toute procédure fiscale à l'autorisation d'un juge. Ce qui vaut pour autoriser l'administration à accéder à des locaux d'habitation ne vaut pas et n'a jamais valu pour l'accès à des locaux professionnels. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est parfaitement claire sur ce point.
Je ne prolongerai pas le débat général, bien qu'il soit important.
Simplement, à force de vouloir protéger les droits des contribuables honnêtes qui, d'ailleurs, ne sont en rien menacés ici, vous ôtez toute efficacité aux moyens dont l'administration fiscale dispose pour traquer les réseaux malhonnêtes.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s II-84, II-85 et II-86 et, pour montrer qu'il n'est pas sectaire, accepte l'amendement n° II-87, qui tend à préciser sa propre rédaction.
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est trop de bonté !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Vous mesurez ainsi le pragmatisme du Gouvernement, monsieur le rapporteur général.
M. André Diligent. Pâté d'alouette !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mais l'alouette vole plus loin que le cheval, monsieur Diligent ! (Sourires.)
Plus sérieusement, monsieur le rapporteur général, si l'on vous suivait, animé que vous êtes d'une prévention à l'égard d'un renforcement des moyens de l'Etat, qui, encore une fois, ne porte pas atteinte aux droits des contribuables, alors, la fraude à la TVA intracommunautaire, qui se chiffre d'ores et déjà par milliards de francs, voire par dizaines de milliards de francs, ne pourrait que s'aggraver encore.
Il n'y a rien, me semble-t-il, dans ce que propose le Gouvernement, qui puisse nous entraîner sur une pente fatale.
Il est normal que la loi prévoie un renforcement des dispositifs destinés à la lutte contre les réseaux malhonnêtes au fur et à mesure que ces derniers se dotent de méthodes de plus en plus sophistiquées d'évasion et de fraude fiscales.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-84.
M. Bernard Angels. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. M. le rapporteur général, sous prétexte de renforcer les droits des contribuables, modifie sensiblement le contenu de l'article.
Je le rappelle, l'article 56 vise les manquements aux règles de facturation en matière de TVA. Or les assujettis ne se mettent pas en défaut par hasard, par oubli ou de bonne foi.
Le nouveau dispositif permet à la DGI d'être plus opétionnelle. Il faut savoir que, en 1996, 138 908 contribuables ont fait l'objet d'un redressement au titre de la TVA, soit une augmentation de 27 % par rapport à l'année précédente. Telle est la réalité incontournable que nous devons prendre en compte.
L'Assemblée nationale a, de notre point de vue, suffisamment renforcé les droits des contribuables.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Trop, même ! (Sourires.)
M. Bernard Angels. En cette matière, l'administration est confrontée à nombre de structures éphémères qui s'empressent d'ailleurs de disparaître après avoir été contrôlées. Elles utilisent, en vue d'échapper à l'impôt, toutes les ressources que leur offre la procédure fiscale.
En matière de fausse facturation, il n'est pas nécessaire de vérifier l'ensemble des documents comptables de l'entreprise. Si l'entreprise a fraudé et qu'il est possible de le prouver au niveau de la procédure d'enquête, pourquoi l'administration serait-elle obligée de faire comme si de rien n'était pour, dans la foulée, engager une vérification de comptabilité ? Il y a là beaucoup de temps perdu qui pourrait être utilisé ailleurs.
Il convient que l'administration puisse frapper vite et fort. Nous nous opposons donc aux amendements n°s II-84, II-85 et II-86.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. L'amendement n° II-84 est, en fait, de nature rédactionnelle. Il nous invite en effet à préciser que les facturations en question doivent être directement liées aux opérations contrôlées. Cela me paraît relever d'un souci de bonne écriture de la loi.
D'une manière plus générale, il semble utile de rappeler, pour ceux de nos collègues qui n'auraient pas eu le temps d'approfondir cette matière délicate, que le droit d'enquête est une prérogative de l'administration qui intervient en phase quasiment précontentieuse, et avant que le principe du contradictoire ne puisse jouer. C'est donc bien en vertu de l'urgence ou dans le cadre d'un programme de contrôle, s'il s'agit, par exemple, d'événements ou de faits ayant appelé l'attention de l'administration, que ses représentants, inspecteurs ou peut-être contrôleurs, vont pouvoir se rendre au titre du droit d'enquête chez les contribuables concernés pour se faire présenter certains documents comptables et pour procéder à des constatations.
Les propos de M. le rapporteur général doivent, me semble-t-il, être pris très au sérieux. Certes, toutes ces procédures sont encadrées à la fois par la Constitution, par l'autorité judiciaire, garante des libertés individuelles, par la jurisprudence du Conseil constitutionnel et par la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'homme. J'imagine, au surplus, qu'il est de l'intérêt de l'administration, pour asseoir des procédures sans doute nécessaires, que le texte que l'on nous invite à voter soit bien rédigé. S'il était rédigé en termes trop généraux ou trop vagues, il me semble, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous prendrions ensemble le risque d'affaiblir la portée de la loi. Or, il s'agit ici de réseaux et de personnes par définition bien organisés, bien conseillés, même, et j'éprouve une certaine appréhension. Je me demande si un texte trop large, un texte qui ne ferait pas une part suffisante au principe du contradictoire ne serait pas frappé d'une fragilité telle qu'elle risquerait de se retourner contre lui. Voilà pourquoi il me semble utile de rappeler que la précision rédactionnelle que l'on nous invite à apporter par l'amendement n° II-84 est tout à fait opportune.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. M. le secrétaire d'Etat, pour nous aider à comprendre ce dont nous parlons, a utilisé tout à l'heure une métaphore, celle du gendarme qui surveille la vitesse des automobilistes sur le bord de la route. Eh bien, monsieur le secrétaire d'Etat, je reprends cette métaphore à mon compte. (Sourires.) Il s'agit donc de faire en sorte que tout automobiliste signale que celui qui le précède ou qui le suit dépasse la vitesse autorisée. Le gendarme au bord de la route - l'administration fiscale - pourra verbaliser sur la seule déclaration de l'automobiliste, qui a lui-même été pris en flagrant délit.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je crois que vous avez peut-être commis tout à l'heure un lapsus qui justifie la crainte éventuelle de juristes attachés à ce que le contribuable puisse voir ses droits défendus comme tout justiciable.
Vous avez dit que l'administration pouvait mettre en oeuvre une procédure contre un tiers dans le cadre du droit d'enquête. Je pense, moi, que le tiers ne peut se voir mis en cause que dans le cadre d'une vérification. Il faudrait donc préciser ce point impérativement.
Sans doute mes propos passionnés ont-ils eux-mêmes suscité une réponse passionnée de votre part, monsieur le secrétaire d'Etat, ...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Absolument !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... et je vous prie de m'en excuser, mais, aux termes de cette réponse donc un peu passionnée, on a le sentiment que l'administration, sans même engager une procédure de vérification, pourra immédiatement requérir, retourner au titre du droit d'enquête, contre le tiers, qui n'aura même pas pu s'expliquer sur les informations auront été communiquées à son encontre.
Voilà où nous en sommes, cela justifie, mes chers collègues, la très grande prudence, voire la réserve de la commission des finances, réserve dont je rappelle qu'elle n'est pas nouvelle puisque, dès 1992, la même commission des finances avait fait la même recommandation au Sénat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je crois devoir intervenir de nouveau pour dissiper une confusion entre l'enquête et le contrôle. Je peux rassurer le Sénat sur les deux points que M. le rapporteur général a soulevés, comme d'ailleurs je l'avais fait devant l'Assemblée nationale.
Premièrement, ces sanctions qui peuvent être appliquées à l'issue de l'exercice d'un droit d'enquête ne peuvent concerner que la personne qui a fait l'objet de cette enquête et non pas les tiers. C'est tout à fait limpide, mais peut-être faut-il le répéter, pour bien faire comprendre qu'il ne s'agit pas ici d'une procédure arbitraire ou à la limite de la délation, comme les propos de M. le rapporteur général tendraient à le laisser penser.
Deuxièmement, les droits de la défense sont complètement garantis, car les constatations qui sont opposées au tiers ne sont pas de nature à remettre en cause les règles de preuve prévues dans le cadre des vérifications fiscales. Donc, si l'on veut s'orienter vers des tiers, il faut lancer des procédures de contrôle, et qui dit procédures de contrôle dit charge de la preuve incombant à l'administration et respect des droits de la défense.
Peut-être, tout à l'heure, n'ai-je pas été tout à fait assez clair, mais je tentais d'élever mon propos au niveau de passion que M. le rapporteur général avait porté le sien. Encore faut-il ne pas perdre de vue la réalité. Or, la réalité quotidienne, c'est qu'une enquête porte sur un contribuable et ne peut pas être étendue à des tiers si des procédures de contrôle contradictoires ne sont pas ouvertes à ce moment-là.
Les textes, pour les spécialistes, sont parfaitement clairs. J'espère que cette fois, monsieur le rapporteur général, je vous ai complètement rassuré.
Revenons-en à l'amendement n° II-84. Je n'ai pas le talent de votre collègue M. Charasse, qui, occupant mes fonctions, était parvenu, en 1992, à dissiper les craintes exprimées sur les travées de la Haute Assemblée à propos des documents que les agents des impôts pouvaient consulter dans le cadre du droit d'enquête.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cinq ans d'expérience !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. A ma connaissance, aucun litige sérieux n'est actuellement pendant devant l'administration ou devant les tribunaux sur la nature des pièces et des documents que mes services peuvent consulter au titre du droit d'enquête. Il me semble qu'il n'y a pas de raison, en s'appuyant sur des dérapages qui auraient pu avoir lieu, de modifier les textes existants. Si, à l'expérience, vos craintes se justifiaient, monsieur le rapporteur général, si des litiges apparaissaient, je suis sûr que le législateur saurait intervenir pour modifier le dispositif. Mais je pense que vos craintes sont infondées, raison pour laquelle l'amendement n° II-84 doit être repoussé.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-84, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-85, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-86, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-87.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mes chers collègues, nous venons d'écrire une page de droit dont la valeur n'est pas mineure.
Dès lors que l'exécutif a renoncé à utiliser la voie jurisprudentielle, les questions qui ont été posées au Gouvernement et les réponses assez précises que M. le secrétaire d'Etat a pu nous apporter seront extrêmement utiles pour la défense des droits des contribuables, car la seule source de droit vers laquelle pourront se tourner ces derniers sera la loi et ses travaux préparatoires, et donc les débats parlementaires. (Marques d'approbation sur les travées du RPR.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez bien voulu répondre à toutes les questions que nous vous avons posées. Vous avez accepté de vous prêter au débat parlementaire et vous avez apporté un certain nombre de précisions qui seront extrêmement utiles aux contribuables.
Je me réjouis donc, pour ma part, que ce débat ait pu avoir lieu au Sénat.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Au Sénat !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-87, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 56, modifié.

(L'article 56 est adopté.)

Article additionnel après l'article 61



M. le président.
Par amendement n° II-94, MM. Oudin, de Rohan, Althapé, Bailet, Bizet, Blanc, Bourges, Camoin, Cazalet, César, Dejoie, Delevoye, Debavelaere, Doublet, Gélard, Gérard, Ginésy, Laurin, Le Grand, Lemaire, de Menou, Valade et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 61, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article L. 651-3 du code de la sécurité sociale est complété, in fine, par les mots : "ainsi que du négoce des produits de la mer".
« II. - Les pertes de recettes pour les organismes bénéficiaires de la contribution sociale de solidarité des sociétés sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
« III. - Les pertes de recettes éventuelles pour le BAPSA sont compensées à due concurrence par le relèvement du taux prévu à l'article 1609 septdecies du code général des impôts.
« IV. - Les pertes de recettes pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par le relèvement des droits prévus à l'article 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. La contribution sociale de solidarité des sociétés, la C3S, calculée sur le chiffre d'affaires des entreprises assujetties, entraîne, malgré son taux unique pour tous les cotisants, des effets économiques très différents selon les secteurs d'activité concernés. Il s'agit, vous le savez, d'une cotisation en cascade.
Ses effets pervers sont manifestes. C'est pourquoi le législateur a prévu, dans l'article L. 651-3 du code de la sécurité sociale, des possibilités de plafonnement de la contribution à acquitter par les entreprises dont la marge brute est faible, notamment par celles qui exercent une activité de négoce agricole.
Nous avions, lors de la discussion d'une récente loi de finances, longuement débattu de ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat, avec votre prédécesseur.
S'agissant du négoce des produits de la mer, secteur voisin mais dont le sort n'a pas été directement traité lors du débat auquel je viens de faire allusion, l'impact de la C3S est extrêmement important.
La C3S a, en outre, pour effet de renchérir le coût de ces produits, et donc de pénaliser encore un peu plus le secteur dans ses relations avec l'aval commercial et avec la grande distribution. Nous savons que les risques de détournement de commandes vers des marchés extérieurs existent, avec des conséquences importantes pour la pêche et pour les emplois induits localement par celle-ci.
Il est donc légitime que les entreprises de négoce de produits de la mer bénéficient d'un dispositif de plafonnement, à l'instar de ce que nous avions obtenu pour les entreprises de négoce en gros de produits agricoles.
Une enquête récente menée au sein des coopératives de mareyage a montré que le taux moyen de marge brute de ces structures, calculé d'après la formule de l'ORGANIC, l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce, s'établit à 3,2 %, alors que le mécanisme envisagé de plafonnement de la contribution s'appliquerait jusqu'à 4 % de marge brute.
Enfin, je tiens à rappeler que, lors de l'examen du projet de loi relatif à la pêche maritime et aux cultures marines, le 15 octobre dernier, le Gouvernement s'était engagé à apporter une réponse à cette question fondamentale et qu'une étude avait été promise à ce sujet. Les professionnels sont légitimement inquiets et impatients.
C'est pourquoi nous souhaitons remédier, par cet amendement, à la dissymétrie observée par rapport aux activités du négoce agricole.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a beaucoup de mal à cacher l'admiration qu'elle a pour la connaissance universelle de M. Marini.
M. Jean Chérioux. Universelle, il faut le reconnaître !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Après avoir traité de l'agriculture tout à l'heure, le voilà, à l'instant, qui évoque la pêche ! Mais nous sommes toujours, il est vrai, dans les activités primaires !
La proposition de M. Marini, qui vise à étendre aux entreprises de négoce des produits de la mer le plafonnement en fonction de la marge commerciale qui existe déjà pour les entreprises de négoce agricole, apparaît justifiée.
Cet amendement a d'ailleurs été présenté le 15 octobre dernier, lors de la discussion du projet de loi sur la pêche maritime et les cultures marines et le ministre de l'agriculture et de la pêche, M. Le Pensec, n'avait pas alors contesté le bien-fondé de cette idée. Il avait simplement jugé utile de disposer d'informations complémentaires.
En tout cas, il n'avait sûrement pas voulu vous empêcher, monsieur le secrétaire d'Etat, de vous déclarer favorable à cette proposition. Aussi la commission des finances vous trace-t-elle, pour sa part, le chemin, et elle émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce que j'admire chez M. Marini, c'est la continuité, puisqu'il s'agit d'un amendement qui a déjà été déposé le 15 octobre dernier dans le cadre du débat sur la loi relative à la pêche maritime et aux cultures marines, ainsi que le 21 novembre, au cours de la discussion de la première partie du projet de loi de finances.
Mon collègue chargé de l'agriculture et de la pêche s'est engagé, vous l'avez dit, à faire procéder à l'étude technique indispensable. Ce que vous avez omis de dire, c'est qu'il a promis de faire faire cette étude dans un délai rapide de trois mois. Or, si je ne me trompe, ce délai n'est pas encore achevé.
Sans cette étude technique, il est très difficile de connaître la situation des bénéficiaires potentiels, et nous risquons de voir apparaître de nombreuses demandes reconventionnelles.
En conséquence, je prie M. Marini de faire encore preuve d'un peu de patience sur cette question, qui est certes importante. Dans l'intervalle, je lui demande de retirer son amendement ; sinon, j'en demanderai le rejet.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-94, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61.

Articles 61 bis et 61 ter



M. le président.
« Art. 61 bis. - L'article 1518 bis du code général des impôts est complété par un r ainsi rédigé :
« r. Au titre de 1998, à 1 pour les propriétés non bâties et pour les immeubles industriels ne relevant pas de l'article 1500 et 1,011 pour l'ensemble des autres propriétés bâties. » - (Adopté.)
« Art. 61 ter. - Le deuxième alinéa du I de l'article 1478 du code général des impôts est complété par les mots : "ou en cas de transfert d'activité". » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 61 ter



M. le président.
Par amendement n° II-144 rectifié, MM. Rausch, Borotra, Dufaut, Jean-Marie Girault, Souvet et Lombard proposent d'insérer, après l'article 61 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au début du deuxième alinéa (1°) de l'article 1464 A du code général des impôts, les mots : "Dans la limite de 50 %" sont remplacés par les mots : "Jusqu'à 100 %".
« II. - Les pertes de recettes résultant, pour les budgets des collectivités locales, du I ci-dessus sont compensées par une majoration à due concurrence de la dotation globale de fonctionnement.
« III. - Les pertes de recettes résultant, pour le budget de l'Etat, du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° II-100 rectifié, MM. Marini et Bourges et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 61 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le paragraphe II de l'article 1414 du code général des impôts est rétabli dans la rédaction suivante :
« II. - A compter de 1999, les étudiants logés dans les cités universitaires et tous autres locaux relevant des centres régionaux des oeuvres universitaires sont exonérés du paiement de la taxe d'habitation. Cette exonération est acquise quelle que soit l'origine du financement des logements qui accueillent ces étudiants.
« II. - La perte des recettes pour le budget de l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Nous proposons de rétablir l'égalité de traitement en matière d'imposition à la taxe d'habitation des étudiants logés dans des appartements qui sont la propriété de sociétés d'HLM mais qui sont donnés à bail aux centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires, les CROUS.
En application de l'article 1408-1 du code général des impôts, l'imposition à la taxe d'habitation est subordonnée à la condition que l'intéressé ait la disposition privative d'un logement imposable, distinct et réservé à son usage personnel.
L'administration fiscale s'est fondée, de manière assez aléatoire sur le territoire, sur ce principe pour reconnaître l'exonération de la taxe d'habitation des étudiants logés dans une cité universitaire, en estimant que les restrictions que comportent les règlements intérieurs de ces résidences ne permettent pas toujours de considérer que les étudiants ont la disposition privative de leur logement.
A l'inverse, cette administration considère le plus souvent, là encore de manière quelque peu aléatoire, me semble-t-il, que des étudiants logés dans des appartements propriété des sociétés d'HLM sont imposables à la taxe d'habitation dans les conditions de droit commun, même si ces immeubles sont réservés par les CROUS ou gérés par ces derniers.
Or les étudiants ayant recours aux CROUS pour se loger sont tous soumis à des règlements intérieurs identiques - c'est en tout cas ce que j'observe en ce qui me concerne dans ma région, en Picardie, et c'est ce qu'a observé M. Yvon Bourges dans sa région de Bretagne - qu'il s'agisse de cités universitaires ou de résidences propriété des sociétés d'HLM et données à bail aux CROUS.
Ces règlements intérieurs ont été adoptés par les CROUS en application de l'arrêté ministériel du 21 juillet 1970, relatif à l'organisation de la vie collective en résidence universitaire, et de l'arrêté interministériel du 21 juillet 1970, relatif aux régimes d'occupation et aux conditions financières du séjour des étudiants admis dans une résidence universitaire.
Dès lors, il apparaît nécessaire qu'une règle équitable et unique s'applique à tous et que l'exonération de la taxe d'habitation pour les étudiants logés par les CROUS puisse être obtenue dans la mesure où l'on se trouve bien en présence d'un logement dont les dispositions qui en limitent l'usage procèdent d'un règlement commun, quel que soit le statut juridique de ce logement.
La situation présente ne semble pas cohérente, monsieur le secrétaire d'Etat, car elle crée des discriminations entre étudiants relevant d'un même régime administratif et financier.
Ces discriminations peuvent être observées, au sein d'un même département et d'une même région, d'une ville à l'autre, et plusieurs de nos collègues ont pu les constater.
Il importe donc de préciser la législation pour assurer l'équité et tenir compte de la situation sociale étudiante, puisque l'admission dans les résidences gérées par les CROUS se fait sur dossier, en fonction des ressources des demandeurs et de leur famille.
En définitive, monsieur le secrétaire d'Etat, ce que nous proposons ici pourrait être intégré dans un statut de l'étudiant qui est rendu aujourd'hui nécessaire par le développement des études universitaires. C'est un élément parmi d'autres, mais, comme vous le savez, ce sujet est aujourd'hui très sensible.
C'est pourquoi nous vous prions, mes chers collègues, de bien vouloir adopter le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est précisément le caractère aléatoire de l'application sur le territoire, dont a parlé tout à l'heure M. Marini, qui a conduit la commission des finances à considérer que cette situation n'était pas satisfaisante.
Dans le même temps, la commission a considéré que l'exonération de principe prévue par cet amendement constituait une avancée souhaitable et positive en faveur des étudiants qui sont logés dans des résidences dont l'accès, je le rappelle, est subordonné à des conditions de ressources. Elle a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur Marini, vous souhaitez, par souci d'homogénéité, exonérer de taxe d'habitation tous les étudiants qui sont hébergés dans des logements gérés par un CROUS.
Il me paraît nécessaire de rappeler - vous l'avez d'ailleurs fait avec beaucoup de pertinence - qu'il existe deux types de logements pour les étudiants.
Nous avons, d'un côté, les résidences universitaires, qui sont propriété de l'Etat ou d'un CROUS, et qui sont gérées par les CROUS. Dans ce cas, les étudiants bénéficient effectivement d'une exonération de taxe d'habitation en raison d'une tolérance administrative fondée sur les restrictions diverses que comportent les règlements de ces résidences, et qui conduit les étudiants à ne pas avoir la pleine et entière disposition de leur logement.
En fait, il s'agit le plus fréquemment de chambres d'une superficie inférieure à 10 mètres carrés au titre de laquelle chaque étudiant verse une redevance au CROUS pour la durée de la seule année universitaire.
Nous avons, d'un autre côté, des résidences de type HLM qui sont éventuellement gérées par les CROUS. Ce type de logements, qui s'est développé au cours des dix dernières années, répond à des critères de confort et d'utilisation identiques à ceux des logements du secteur privé.
Il y a donc deux cas différents, ce qui a attiré l'attention de la presse. Quant au Gouvernement, il étudie ce dossier dans le cadre de la réflexion qu'il mène sur le statut social de l'étudiant.
Votre question est certes tout à fait pertinente, monsieur Marini, mais y apporter une solution aujourd'hui serait prématurée.
Le statut social de l'étudiant, que vous attendez, sera rendu public prochainement.
M. Jean-Pierre Camoin. Quand ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne peux pas le dire avec précision.
Compte tenu de ces observations, je vous demande, monsieur Marini, de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, le Gouvernement demanderait son rejet.
M. Jean Chérioux. Cela fait beaucoup de rendez-vous pour l'année prochaine !
M. le président. Je vais mettre au voix l'amendement n° II-100 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'amendement de M. Marini est très intéressant : il vise en effet à rectifier une anomalie fiscale.
La presse a fait état de cette anomalie en relatant que, de plus en plus souvent, les services fiscaux tentaient d'assujettir à la taxe d'habitation des étudiants qui, faute de logement en résidence universitaire, logeaient dans le parc HLM géré par les CROUS.
Il semble donc que les services fiscaux créent une disparité entre les étudiants qui sont logés dans les cités universitaires et ceux qui sont logés dans des HLM.
Les premiers seraient exonérés de la taxe d'habitation et les seconds y seraient assujettis alors qu'ils sont logés en HLM par manque de place en cité universitaire.
L'administration fiscale fait une différence entre des étudiants qui sont soumis à des règlements intérieurs identiques, qu'ils soient en cité universitaire ou en logement HLM.
Nous allons donc voter l'amendement de M. Marini.
MM. Christian Poncelet, président de la commission des finances, Alain Lambert, rapporteur général, et Philippe Marini. Très bien !
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous vous êtes référé à des arguments de principe, la configuration des locaux, par exemple, qui ne constituent évidemment pas l'essentiel du débat.
La situation est très claire : si les CROUS, par convention, acquièrent la mise à leur disposition de logements HLM, c'est parce qu'ils n'ont pas suffisamment de logements spécifiques pour répondre aux besoins de tous les étudiants.
S'il devait y avoir plus de locaux spécifiques, cela coûterait beaucoup plus cher au budget de l'Etat, monsieur le secrétaire d'Etat !
C'est donc une solution intelligente que de loger une partie des étudiants dans des locaux obtenus par voie de convention, c'est certainement la solution qui coûte le moins cher à l'Etat, et il serait paradoxal que le Gouvernement s'y oppose. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le secrétaire d'Etat, je veux seulement préciser que le critère dont nous souhaitons l'application c'est celui du règlement intérieur.
Qu'il soit bien clair que, quel que soit le statut juridique de propriété de ces résidences, si les locaux en question sont soumis à des restrictions d'usage relevant du même règlement, il n'y a aucune espèce de raison de les traiter d'une façon différente sur le plan fiscal.
M. Michel Caldaguès. Très bien !
M. Philippe Marini. Nous savons bien que ce sujet est sensible et, aujourd'hui, l'administration fiscale interprète différemment les textes d'un lieu à un autre.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. C'est ça le drame !
M. Philippe Marini. Prenons l'exemple de mon département. Les étudiants qui ont la malchance de résider à Compiègne dans le secteur HLM...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est une chance !
M. Philippe Marini. Fiscalement c'est une malchance. Les étudiants de Compiègne sont assujettis à la taxe d'habitation alors que ceux de Beauvais ne le sont pas alors qu'ils relèvent du même CROUS.
Vous nous dites qu'il faut attendre le statut social de l'étudiant. Pourquoi pas ? Le seul problème c'est que, chaque année voit revenir l'automne et les feuilles d'impôt.
Pour les étudiants en question, dont les parents sont de condition modeste et font des sacrifices pour que leurs enfants fassent des études supérieures, une année de taxe d'habitation, ce n'est pas rien. Nous souhaitons donc, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette situation puisse être modifiée et que l'équité s'applique dans ce domaine.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur Marini, sachez que nous sommes tous soucieux de simplification ! Mais s'il faut vérifier que tous les règlements sont identiques, cela nous promet de belles investigations ! Je reste donc opposé à cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-100 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du Rassemblement pour la République.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 55:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 244
Majorité absolue des suffrages 123
Pour l'adoption 238
Contre 6

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61 ter.
Par amendement n° II-121, M. Miquel et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 61 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1522 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1522. - La taxe est établie d'après le nombre de mètres carrés pondéré. »
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. M. Miquel a défendu cet amendement en première partie et il l'avait retiré à la demande de la commission des finances qui souhaitait l'étudier en seconde partie. Nous y sommes !
Cet amendement a pour objet de rendre la perception de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères plus équitable et de supprimer par là même une entrave importante à la mise en place et au bon fonctionnement des structures intercommunales.
Cet amendement vise donc à substituer le critère du nombre de mètres carrés pondéré à celui du revenu net foncier.
En effet, cette taxe, conformément à l'article 1522 du code général des impôts, est établie d'après le revenu net servant de base à la taxe foncière. La base d'imposition est donc celle de la taxe sur le foncier bâti, soit la moitié de la valeur locative cadastrale de l'immeuble.
Or, le critère du revenu net foncier ne permet pas de proportionner le montant de l'impôt à l'importance du service rendu. De plus, il entraîne des distorsions importantes entre les propriétés, et ce sans réelles justifications en termes de surface habitable ou d'occupation du logement.
C'est ainsi que, d'une commune à l'autre, pour un même service rendu, les bases varient à tel point que deux propriétaires d'immeubles identiques séparés de quelques mètres peuvent acquitter des montants de taxe qui varient du simple au double.
Il faut donc réformer la base de fixation de cette taxe et M. Miquel propose de substituer au critère du revenu net foncier le nombre de mètres carrés pondéré, ce qui rendra la taxe plus juste et atténuera les variations au sein d'un même syndicat de communes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission s'est inquiétée de la difficulté que présenterait l'application d'une disposition de cette nature.
En effet, nos collègues proposent de changer l'assiette de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui, actuellement, ne semble pas totalement satisfaisante. Mais quelle assiette l'est ?
La nouvelle assiette qui est proposée créerait des difficultés pour le recouvrement immédiat de la taxe en question, et cette nouvelle méthode de calcul ne paraît pas opérationnelle à la commission.
Cette dernière entendra avec grand intérêt le point de vue du Gouvernement. En attendant, elle a jugé utile d'en rester à un avis défavorable.
A l'occasion de la révision des bases cadastrales, peut-être aurons-nous la possibilité de tenir compte du souci qui est le vôtre, mes chers collègues ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement n'est pas non plus favorable à cet amendement.
L'assiette qui est proposée, tout en étant assez complexe, est très proche de l'assiette actuelle, puisque la taxe d'enlèvement des ordures ménagères est calculée de la même façon que la taxe foncière sur les propriétés bâties, c'est-à-dire à partir de la valeur locative, elle-même calculée en tenant compte de la surface pondérée des locaux, puisque la valeur locative de référence par catégorie de local exprime une valeur au mètre carré pondéré.
On voit donc que les deux dispositifs sont voisins. Le Gouvernement ne voit donc pas l'intérêt de compliquer un système qui n'est déjà pas très simple en instaurant une assiette qui soit différente de la taxe foncière sur les propriétés bâties.
C'est donc au nom de la simplicité pour les contribuables et aussi pour ceux qui sont en charge d'établir et de collecter les impôts que le Gouvernement suggère que cet amendement soit retiré. Dans le cas contraire, il en demanderait le rejet.
M. le président. Monsieur Sergent, l'amendement est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Par cet amendement, M. Miquel voulait à nouveau attirer l'attention sur l'assiette qui ne satisfait personne. Mais y a-t-il de moins mauvaises solutions ? Comme l'a dit notre rapporteur, peut-être parviendrons-nous, à l'occasion de la révision des évaluations cadastrales, à trouver autre chose. En tout état de cause, c'est bien volontiers qu'en son nom je retire cet amendement.
M. Michel Caldaguès. Bravo !
M. le président. L'amendement n° II-121 est retiré.
Par amendement n° II-98 rectifié, M. Marini et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, après l'article 61 ter, d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le paragraphe I de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts est complété, in fine, par deux alinéas ainsi rédigés :
« Elles peuvent instituer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, dès la première année d'application des dispositions du premier alinéa, jusqu'au 31 mars, dès lors qu'elles exercent la compétence d'enlèvement des ordures ménagères et que les communes qui ont décidé de la création de la communauté de communes, à l'exclusion de toute autre, étaient antérieurement associées dans un même syndicat de communes percevant une taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
« Pour cette première année, elles ne peuvent voter que le produit de cette taxe, à l'exclusion de toute modification de ses règles d'établissement. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Il s'agit d'un amendement d'ordre technique concernant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
Comme on le sait, il n'est pas possible, lorsqu'on crée une communauté de communes, d'instaurer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères dès la première année d'existence de cette communauté.
L'exercice de cette compétence relative à l'enlèvement des ordures ménagères par la communauté de communes implique, en effet, d'en prévoir le financement à partir de la fiscalité propre de la communauté sur les quatre taxes locales.
Cette solution, qui est la seule possible actuellement du fait de la loi telle qu'elle est rédigée, n'est pas satisfaisante, ou n'est pas toujours perçue comme telle, car elle contrarie fortement la neutralité fiscale souhaitable lorsqu'on passe d'un statut d'intercommunalité à un autre.
Cet amendement a donc pour objet de prévoir une dérogation positive à la date limite d'institution d'une taxe d'enlèvement des ordures ménagères, limitée au cas précis dans lequel la totalité des communes formant la nouvelle communauté de communes adhéraient auparavant à un syndicat ayant lui-même institué une taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
Afin de permettre la mise en oeuvre pratique de cette disposition par les services fiscaux dès la première année de fonctionnement de la communauté de communes, seul serait autorisé le vote d'un produit qui pourrait être supérieur à celui de l'année précédente, à l'exclusion de toute modification des règles d'établissement de cette taxe.
Il s'agit donc de combler une lacune technique des textes actuels et de faciliter la création d'intercommunalité active.
Monsieur le secrétaire d'Etat, dans mon département, il est en train de se constituer une communauté de communes, dont, vraisemblement, le futur président sera l'un de vos amis politiques ou en tout cas un proche. Je me permets d'apporter cette précision pour qu'il soit clair que cet amendement est présenté dans un souci d'intérêt général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Comme toujours !
M. Philippe Marini. Le cas de figure dont il m'a parlé me semble justifier une évolution législative. De surcroît, j'ai constaté que ce n'était pas une situation isolée.
Telle est la raison pour laquelle je soumets cet amendement à votre vote. (M. Caldaguès applaudit.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances a été sensible à l'actualité de cette question.
M. Marini expose le cas de communes qui règlent la question de l'enlèvement des ordures ménagères par le biais d'un syndicat et souhaitent le faire en intégrant cette taxe dans les compétences d'une communauté de communes.
Dès lors que celle-ci n'a pas la faculté de lever cette taxe dès la première année, elle se heurte à une difficulté pratique, puisque le financement s'opère alors sur la fiscalité, alors même qu'une taxe est expressément prévue pour acquitter ces dépenses.
Il y a en quelque sorte un vide juridique qu'il convient de combler. Notre collègue ayant le génie de combler tous les vides, la commission des finances souscrit volontiers a son amendement et a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Marini souhaite reporter au 31 mars de l'année suivant celle de leur création la date de délibération pour les communautés de communes qui souhaitent percevoir la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Il cherche donc à combler un vide mais, comme je vais essayer de le démontrer, il le remplace par une inégalité.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ce n'est pas possible ! (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Tel qu'il est rédigé, cet amendement permettrait aux communautés de communes de bénéficier du dispositif, même si elles n'assurent que l'enlèvement des ordures ménagères, sans prendre également en charge leur destruction ou leur traitement, comme la loi le prévoit.
Une inégalité serait ainsi créée, entre, d'une part, les groupements et, d'autre part, les syndicats de communes et les districts, qui, eux, perçoivent actuellement cette taxe pour assurer à la fois la collecte et la destruction ou le traitement des ordures ménagères.
Je ne peux accepter un tel amendement et j'en demande donc le rejet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° II-98 rectifié.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Compte tenu des explications de M. le secrétaire d'Etat, je ne vois aucun inconvénient à rectifier cet amendement pour ajouter, après les mots : « d'enlèvement », ceux de : « et de traitement », surtout si ce simple ajout me permet de persuader M. le secrétaire d'Etat que nous éviterons ainsi une éventuelle inéquité - nous avons vu tout à l'heure que le souci du Sénat était précisément de combattre les inéquités - et de trouver une solution à ce problème !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° II-98 rectifié bis, présenté par M. Marini et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, et tendant à insérer, après l'article 61 ter, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le I de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts est complété, in fine, par deux alinéas ainsi rédigés :
« Elles peuvent instituer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, dès la première année d'application des dispositions du premier alinéa, jusqu'au 31 mars, dès lors qu'elles exercent la compétence d'enlèvement et de traitement des ordures ménagères et que les communes qui ont décidé de la création de la communauté de communes, à l'exclusion de toute autre, étaient antérieurement associées dans un même syndicat de communes percevant une taxe d'enlèvement des ordures ménagères.
« Pour cette première année, elles ne peuvent voter que le produit de cette taxe, à l'exclusion de toute modification de ses règles d'établissement. »
Quel est l'avis du Gouvernement sur cet amendement ainsi rectifié ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je n'ai pas le brio de M. Marini et je ne suis pas capable de suivre cette évolution des amendements en temps réel.
Je m'en tiendrai à une position prudente, qui est une sorte de position de principe, à savoir qu'il vaut mieux réfléchir, se donner un peu de temps pour trouver une rédaction incontestable. Nous aurons l'occasion d'en reparler !
M. Michel Caldaguès. Sait-on jamais !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-98 rectifié bis, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61 ter .
Par amendement n° II-145 rectifié, MM. Rausch, Borotra, Dufaut, Girault, Souvet et Lombard proposent d'insérer, après l'article 61 ter , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter du 1er janvier 1998, France Télécom est assujettie dans les conditions de droit commun aux impositions directes locales perçues au profit des collectivités locales et des établissements et organismes divers.
« II. - Les pertes de recettes résultant du I ci-dessus seront compensées à due concurrence par un relèvement des droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Article 61 quater



M. le président.
« Article 61 quater. - I. - L'article 1465 A du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Dans la première phrase du premier alinéa, les mots : "à compter du 1er janvier 1995 à des créations ou extensions d'activités industrielles ou de recherche scientifique et technique, ou de services de direction, d'études, d'ingénierie et d'informatique dans les conditions et sous réserve, le cas échéant, de l'agrément prévu à l'article 1465," sont remplacés par les mots : "aux opérations mentionnées au premier alinéa de l'article 1465 dans les conditions et sous réserve, le cas échéant, de l'agrément prévu à cet article" ;
« 2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Cette exonération s'applique également aux artisans qui effectuent principalement des travaux de fabrication, de transformation, de réparation ou des prestations de services et pour lesquels la rémunération du travail représente plus de 50 % du chiffre d'affaires global, tous droits et taxes compris, et qui créent une activité dans les zones de revitalisation rurale. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 1998.
« III. - La perte de recettes pour les collectivités territoriales, leurs groupements dotés d'une fiscalité propre et pour les fonds départementaux de péréquation résultant des exonérations liées aux opérations de décentralisation, de reconversion et de reprise d'établissements en difficulté visées à l'article 1465 A, ainsi que de l'exonération visée au 2° du I du présent article, est compensée par le Fonds national de péréquation mentionné à l'article 1648 B bis du code général des impôts.
« Cette compensation est égale au produit obtenu en multipliant la perte de base résultant chaque année et pour chaque collectivité de l'exonération par le taux de la taxe professionnelle appliqué en 1997 dans la collectivité ou le groupement.
« Pour les communes qui appartenaient en 1997 à un groupement sans fiscalité propre, le taux voté par la commune est majoré du taux appliqué au profit du groupement en 1997.
« Pour les groupements qui perçoivent pour la première fois à compter de 1998 la taxe professionnelle aux lieu et place des communes en application des dispositions de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, cette compensation est égale au produit du montant des bases exonérées par le taux moyen pondéré des communes membres du groupement constaté pour 1997, éventuellement majoré dans les conditions fixées à l'alinéa précédent. » - (Adopté.)

Articles additionnels après l'article 61 quater



M. le président.
Par amendement n° II-136 rectifié bis M. Loridant, Mme Beaudeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, proposent d'insérer, après l'article 61 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans les dispositions des paragraphes I ter et I quater de l'article 1466 A du code général des impôts, après les mots : "collectivité territoriale", sont insérés les mots : ", de l'organisme consulaire".
« II. - Le taux prévu à l'article 978 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La loi du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville vise à dynamiser l'activité économique et la création d'emplois dans les quartiers urbains en difficulté au moyen d'un dispositif fiscal et social dérogatoire.
Cette loi a institué l'exonération de taxe professionnelle en faveur des entreprises situées dans les zones franches urbaines selon des critères précis. Sauf délibération contraire des collectivités locales ou de leurs groupements, cette exonération s'applique pour une durée de cinq ans.
Le dispositif étant lancé depuis le 1er janvier 1997, il s'avère que le texte de loi ne mentionne pas la possibilité pour les chambres consulaires, c'est-à-dire les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers, d'exonérer les entreprises situées dans ces zones.
En effet, les chambres consulaires perçoivent une taxe additionnelle à la taxe professionnelle sur la même base, destinée à pourvoir à leurs dépenses ordinaires.
Or, si la possibilité d'exonération de cette taxe est prévue à l'article 1602 A du code général des impôts, elle ne répond pas aux mêmes critères que ceux qui sont définis dans la loi relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
Les chambres consulaires, étant donné les textes existants, sont actuellement dans l'impossibilité d'exonérer leurs ressortissants de cette part de taxe professionnelle selon les mêmes critères de périmètres et d'entreprises appliqués aux zones franches urbaines.
Dès lors, elles se trouvent en décalage sur ces sites vis-à-vis des collectivités locales et ne peuvent, lorsqu'elles le souhaitent, contribuer de manière cohérente et efficace au développement de l'activité économique dans les quartiers difficiles.
Cet amendement, que voulait défendre M. Loridant - mais il siège en ce moment au nom du Sénat dans la zone franche de Grigny dans l'Essonne - vise à remédier à l'incohérence de la loi en permettant aux chambres consulaires d'exonérer les entreprises situées dans les zones franches urbaines de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission estime légitime l'objectif visé par les auteurs de l'amendement, mais il lui a semblé que le dispositif et la référence au code général des impôts ne répondaient pas à cet objectif.
Par ailleurs, cette exonération de taxe peut sembler opportune, mais sans doute conviendrait-il de réfléchir à un dispositif de cette nature dans le cadre d'une réforme d'ensemble du financement des chambres des métiers et des chambres de commerce, telle celle qu'a préconisée M. Gérolami dans un rapport.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des finances a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cet amendement a pour objet d'exonérer de taxe pour frais de chambre de commerce et d'industrie et de taxe pour frais de chambre des métiers les entreprises situées dans des zones de redynamisation urbaine ou dans des zones franches urbaines.
Je n'y suis pas favorable dans la mesure où les pertes de recettes qui en résulteraient pour les chambres consulaires devraient être compensées soit par l'Etat, soit par le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle.
Or il me paraît difficile d'envisager d'alourdir encore le coût de ce dispositif, d'autant que prévaut actuellement le principe selon lequel il n'y a aucune compensation au bénéfice des chambres consulaires. Il s'agirait donc d'un précédent fâcheux.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-136 rectifié bis , repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° II-110, M. de Rocca Serra propose d'insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le III de l'article 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La compensation revenant aux groupements de communes dotés d'une fiscalité propre depuis le 1er janvier 1995 est égale, chaque année, à compter de la deuxième année de fonctionnement, pour chaque groupement, au montant des bases exonérées en application de l'article 1465 A, qui excède celui de leur première année de fonctionnement multiplié par le taux de taxe professionnelle voté la première année de fonctionnement. Pour les groupements faisant application des dispositions de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, le taux de la taxe professionnelle pris en compte pour le calcul de la compensation est le taux moyen pondéré de taxe professionnelle constaté en 1994 dans l'ensemble des communes membres du groupement cette année-là. »
« II. - Le B de l'article 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La compensation revenant aux groupements de communes dotés d'une fiscalité propre depuis le 1er janvier 1997 est égale, chaque année, à compter de la deuxième année de fonctionnement, pour chaque groupement, au montant des bases exonérées en application des articles 1466 A I bis, 1466 A I ter et 1466 A I quater qui excède celui de leur première année de fonctionnement multiplié par le taux de taxe professionnelle voté la première année de fonctionnement. Pour les groupements faisant application des dispositions de l'article 1609 nonies C ou du II de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts, le taux de la taxe professionnelle pris en compte pour le calcul de la compensation est le taux moyen pondéré de taxe professionnelle constaté en 1996 dans l'ensemble des communes membres du groupement cette année-là. »
« III. - Le deuxième alinéa du III de l'article 2 de la loi n° 94-1131 du 27 décembre 1994 portant statut fiscal de la Corse est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La compensation aux groupements de communes dotés d'une fiscalité propre depuis le 1er janvier 1995 est égale, chaque année, à compter de la deuxième année de fonctionnement, pour chaque groupement, au montant des bases exonérées en application du II ci-dessus qui excède celui de leur première année de fonctionnement multiplié par le taux de taxe professionnelle voté la première année de fonctionnement. »
« IV. - Dans le dernier alinéa du III de l'article 2 de la loi n° 94-1131 précitée, les mots : "pour la première fois à compter de 1995" sont supprimés.
« V. - Le B de l'article 3 de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La compensation aux groupements de communes dotés d'une fiscalité propre depuis le 1er janvier 1996 est égale, chaque année, à compter de la deuxième année de fonctionnement, pour chaque groupement, au montant des bases exonérées qui excède celui de leur première année de fonctionnement multiplié par le taux de taxe professionnelle voté la première année de fonctionnement.
« VI. - Dans le dernier alinéa du B de l'article 3 de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse les mots : "pour la première fois à compter de 1997" sont supprimés.
« VII. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. de Rocca Serra.
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. Au moment où le Gouvernement incite fortement les communes à se regrouper, notamment à travers une intercommunalité à fiscalité propre, cet amendement vise à mettre en évidence les difficultés de mise en oeuvre de diverses mesures d'exonération de taxe professionnelle qui ont été prises ces dernières années en faveur des zones défavorisées.
C'est ainsi que, dans les zones de revitalisation rurale, les zones de redynamisation urbaine, les zones franches urbaines et la zone franche de Corse, les entreprises qui y sont implantées ou celles qui s'y implantent sont exonérées de taxe professionnelle.
Les pertes de recettes qui résultent de ces mesures sont compensées par l'Etat. La compensation versée chaque année à chaque collectivité et, le cas échéant, à chaque groupement doté d'une fiscalité propre est égale au montant des bases exonérées multiplié par le taux de taxe professionnelle de la commune et du groupement de l'année précédant celle où ces exonérations ont été instituées.
Il ressort de ce dispositif que les groupements de communes à fiscalité propre créés depuis l'adoption de ces mesures d'exonération ne perçoivent pas de compensation.
Cette situation est de nature à bloquer le développement de l'intercommunalité dans notre pays, notamment dans les territoires des communes les plus défavorisées. Dans ces territoires, en effet, les communes qui feraient le choix de se regrouper devraient renoncer à percevoir ces compensations d'exonération de taxe professionnelle pour la part de l'impôt voté par le groupement. La perte de recettes serait totale dans le cas où le groupement opterait pour le régime de la taxe professionnelle de zone ou pour celui de la taxe professionnelle unique.
Cet amendement a donc pour objet de rétablir la compensation à verser aux groupements de communes qui viendraient à se créer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a considéré, elle aussi, que la législation actuelle semblait mal intégrer les effets de la création de structures intercommunales à fiscalité propre sur les conditions de compensation des exonérations de taxe professionnelle dans différentes zones du territoire défavorisées où ces exonérations sont appliquées.
Une adaptation de la législation paraît justifiée à la commission des finances, mais il a semblé à celle-ci qu'elle s'intégrerait sans doute mieux dans la réflexion sur l'intercommunalité qui est annoncée par le Gouvernement et qui devrait faire prochainement l'objet d'une discussion devant le Parlement.
La commission des finances a donc souhaité, avant de se prononcer sur l'amendement, recueillir l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne peux être favorable à cet amendement pour deux raisons.
Je rappellerai d'abord que, s'agissant des groupements à taxe professionnelle unique ou des groupements à taxe professionnelle de zone, la compensation des pertes de recettes est déjà mise en oeuvre, quelle que soit la date de création de ces groupements, puisque ces groupements se substituent à des communes qui percevaient une compensation. Il aurait en effet été illogique de les priver d'une ressource dont bénéficiaient les communes avant qu'elles adhèrent au groupement.
En ce qui concerne les groupements à fiscalité additionnelle, monsieur le sénateur, votre proposition aurait pour conséquence de remettre en cause le principe même sur lequel reposent les compensations de l'Etat aux collectivités territoriales en matière de taxe professionnelle. En effet, vous le savez, ces compensations ne sont versées qu'aux collectivités qui percevaient la taxe professionnelle à la date de référence fixée par la loi.
Pour les groupements à fiscalité additionnelle qui se sont créés postérieurement à cette date de référence, l'exonération de taxe professionnelle ne peut donc constituer une perte de recettes : il s'agit seulement d'un manque à gagner. Certes, vous proposez une base de compensation réduite, mais il me semble que le principe demeure.
J'ajoute que votre système compliquerait exagérément la gestion, déjà bien embrouillée, de la taxe professionnelle.
Enfin, accroissant encore pour l'Etat et pour le Fonds national de péréquation le coût de la compensation d'exonération de taxe professionelle, votre proposition est peu compatible avec les contraintes budgétaires actuelles.
Telles sont les raisons pour lesquelles je me permets, monsieur de Rocca Serra, de vous inviter à retirer votre amendement.
M. le président. Quel est, à présent, l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ce n'est pas tout à fait cette réponse que la commission des finances attendait de la part du Gouvernement. Elle escomptait que le Gouvernement laisserait à M. de Rocca Serra une espérance pour le débat sur l'intercommunalité qui va s'ouvrir.
Monsieur le secrétaire d'Etat, peut-être ai-je une oreille insuffisamment attentive, mais j'ai eu le sentiment que vous n'ouvriez pas le champ de la réflexion sur cette question, qui me paraît pourtant devoir être débattue au fond.
La commission des finances, dans l'esprit de rigueur qui est le sien, ne recommande pas l'adoption de cet amendement, mais elle souhaiterait vivement que la question soulevée par notre collègue M. de Rocca Serra soit abordée lors du futur débat sur l'intercommunalité.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'ai l'impression que ma réponse à M. de Rocca Serra a semblé un peu abrupte. Ayant déjà, au goût de certains sénateurs, trop annoncé de réflexions pour l'an prochain, j'ai voulu éviter une nouvelle projection dans le futur. Mais il est vrai - le ministre de l'intérieur en a parlé - qu'une réflexion sur l'intercommunalité sera menée, réflexion au cours de laquelle il sera tout à fait possible de reprendre l'examen de cet amendement.
Voilà pourquoi je suggère à M. de Rocca Serra de retirer son amendement, dans l'attente de ce débat sur l'intercommunalité.
M. le président. Monsieur de Rocca Serra, maintenez-vous votre amendement ?
M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra. Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne s'agissait évidemment pas pour moi d'obtenir une solution aujourd'hui : c'était en quelque sorte un amendement d'appel, et j'ai bien entendu votre réponse.
Je souhaite fermement que, lors du prochain débat sur l'intercommunalité, ce problème puisse être débattu car il doit absolument être réglé, de façon à faire vraiment avancer l'intercommunalité. C'est avec cet espoir que je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° II-110 est retiré.
Je suis maintenant saisi de quatre amendements déposés par M. Braye.
L'amendement n° II-103 vise à insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1609 ter A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1609 ter A. - Le conseil d'une communauté urbaine peut, à la majorité des deux tiers de ses membres, décider de percevoir la taxe professionnelle selon les dispositions de l'article 1609 nonies C. Cette décision doit être prise avant le 31 décembre pour être applicable au 1er janvier de l'année suivante ; elle demeure applicable tant qu'elle n'a pas été rapportée dans les mêmes conditions. »
L'amendement n° II-104 tend à insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1609 ter B du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1609 ter B. - Le conseil d'une communauté urbaine peut, à la majorité des deux tiers de ses membres, décider d'opter pour le régime fiscal prévu au II de l'article 1609 quinquies C, si elle crée ou gère une zone d'activités économiques dans les conditions prévues à cet article. »
L'amendement n° II-105 a pour objet d'insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 1609 quinquies A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Art. 1609 quinquies A. - Le conseil d'un district exerçant les compétences mentionnées au I de l'article L. 5216-16 du code général des collectivités territoriales peut, à la majorité des deux tiers de ses membres, décider de percevoir la taxe professionnelle selon les dispositions de l'article 1609 nonies C. Dans ce cas, le district ne peut percevoir les impôts mentionnés au I de l'article 1609 bis dans les conditions prévues à cet article. »
L'amendement n° II-106 vise à insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le paragraphe III de l'article 1609 quinquies C du code général des impôts est ainsi rédigé :
« III. - Les dispositions de l'article 1609 nonies C sont applicables aux communautés de communes par délibération du conseil de communauté statuant à la majorité des deux tiers. Cette décision doit être prise avant le 31 décembre pour être applicable au 1er janvier de l'année suivante ; elle demeure applicable tant qu'elle n'a pas été rapportée dans les mêmes conditions. »
La parole est à M. Braye, pour présenter ces quatre amendements.
M. Dominique Braye. La mise en commun du produit de la taxe professionnelle et l'unification des taux au niveau des territoires de développement constituent aujourd'hui deux objectifs consensuels.
Les disparités actuelles de base et de taux de taxe professionnelle entre les communes conduisent à des politiques incohérentes en matière d'aménagement de l'espace et de développement économique. Elles contribuent à accroître l'inégalité entre les contribuables et à accentuer les effets pervers des concurrences entre les communes.
La mise en commun de la taxe professionnelle à l'échelle intercommunale est indispensable, non seulement pour mieux répartir le produit fiscal de l'impôt économique, mais aussi pour réellement organiser au niveau intercommunal le développement économique et l'aménagement de l'espace.
La taxe professionnelle unique est synonyme d'équité car elle met les entreprises à égalité face à l'impôt, elle réduit l'effet de rente de situation des communes riches et favorise une meilleure péréquation au profit des communes pauvres.
Elle est aussi synonyme de sécurité budgétaire en ce qu'elle est une mutualisation du risque économique entre les communes d'une même agglomération.
Elle accroît enfin la lisibilité et la cohérence des décisions fiscales puisque le développement économique s'opère à l'échelle intercommunale.
Pour toutes ces raisons, je crois qu'il faut encourager le mouvement d'uniformisation des taux de taxe professionnelle.
Tel est le sens de l'amendement n° II-103, qui a pour objet de faciliter le passage à la taxe professionnelle unique pour les communautés urbaines.
Le choix de la taxe professionnelle unique rencontre deux obstacles. C'est d'abord la date de création du groupement : les communautés urbaines créées avant le 8 février 1992 ne peuvent opter pour ce régime fiscal. C'est ensuite la majorité requise des trois quarts, qui provoque souvent un blocage de fait.
Je propose donc de supprimer ces deux obstacles, en étendant la possibilité d'opter pour la taxe professionnelle unique à toutes les communautés urbaines, quelle que soit la date de leur création et en en assouplissant la condition de majorité pour n'exiger que celle des deux tiers.
L'amendement n° II-104 vise à faciliter le développement de la taxe professionnelle de zone, qui est souvent le premier pas vers une taxe professionnelle unique sur l'ensemble d'un territoire de développement.
Je propose donc d'étendre à toutes les communautés urbaines l'option pour ce régime fiscal, de façon qu'il ne soit plus réservé à celles qui ont été créées par la loi du 6 février 1992, comme le suppose la rédaction actuelle de l'article 1609 ter B.
Je propose en outre, là encore, d'assouplir la condition de majorité requise pour cette option en la ramenant aux deux tiers.
L'amendement n° II-105 a le même objet que l'amendement n° II-103, mais il concerne les districts. Il tend à supprimer les mêmes deux obstacles, en étendant la possibilité d'opter pour la taxe professionnelle unique à tous les districts, quelle que soit leur date de création, et en assouplissant, là aussi, la condition de majorité en la portant aux deux tiers au lieu des trois quarts.
Quant à l'amendement n° II-106, il tend à faciliter le passage à la taxe professionnelle unique pour les communautés de communes, en assouplissant toujours la condition de majorité, qui est encore trop importante et qui provoque souvent des blocages : nous proposons également de la porter aux deux tiers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-103, II-104, II-105 et II-106 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Globalement - je parle sous le contrôle de M. Braye - il s'agit d'abaisser la majorité qualifiée requise pour l'institution de la taxe professionnelle unique des trois quarts des membres du conseil de la structure intercommunale aux deux tiers.
Dans l'amendement n° II-103, il est proposé d'étendre à toutes les communautés urbaines la possibilité d'opter pour la taxe professionnelle unique. C'est une très bonne suggestion qui pourrait - tout à l'heure, je donnerai un avis plus réservé - être adoptée prochainement, car elle répond à un réel besoin. L'amendement n° II-104 recouvre le même raisonnnement en faveur de la taxe professionnelle de zone. L'amendement n° II-105 vise les districts et l'amendement n° II-106 concerne les communautés de communes.
Votre volonté de promouvoir la taxe professionnelle unique est très positive, monsieur Braye. La commission des finances partage intégralement les raisons que vous avez exposées. En revanche, elle est assez prudente - je n'ose pas dire « réservée », car ce serait, me semble-t-il, aller au-delà de son sentiment - sur l'abaissement de seuil. Elle estime, en effet, que l'adhésion de l'ensemble des parties prenantes à cette mise en commun de taxe professionnelle est un élément essentiel de la réussite d'une démarche de cette nature car il importe de ne pas briser l'harmonie de la coopération intercommunale.
Dès lors que l'on abaisse le seuil de la majorité qualifiée, c'est que l'on sent une forme de résistance, qu'il faut effectivement savoir surmonter. Sans doute faut-il essayer d'y parvenir davantage par le dialogue que par l'abaissement de ce seuil.
Toutefois, la commission des finances considère que le bon moment pour trancher cette question essentielle serait sans doute celui de la discussion du projet de loi sur l'intercommunalité, car l'ensemble de ce problème sera alors évoqué et la recherche d'une plus grande intégration fiscale, d'une plus grande équité dans la fiscalité entre les différentes communes sera débattue. Il reviendra au Sénat et à l'Assemblée nationale de s'interroger sur le bon niveau de majorité requis pour prendre des décisions aussi importantes, qui se trouvent au coeur du pacte de coopération intercommunale.
Nous n'avons pas osé franchir le pas, même si tous vos amendements ont l'extrême mérite de poser le problème tel qu'il existe. Celui-ci devra, sans faiblesse, être tranché à l'occasion de la réforme de la coopération intercommunale.
J'ajoute que tous vos amendements soulèvent une question qui mériterait de connaître une réponse très rapide : il s'agit de l'extension à l'ensemble des communautés urbaines de la possibilité d'opter pour la taxe professionnelle unique. Vous en remarquez la nécessité.
Après avoir recueilli l'avis du Gouvernement, qui, je l'espère, sera encourageant, peut-être pourriez-vous prendre la bonne décision de retirer vos amendements et vous tenir prêt à participer très activement au débat sur l'intercommunalité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces quatre amendements ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Après les amendements d'appel, voici les amendements de proposition. Quelles structures intercommunales convient-il de développer et selon quel régime fiscal ? Les suggestions que vous faites dans ces quatre amendements, monsieur Braye, sont utiles à verser au débat.
Le problème est que le débat auquel ces amendements doivent être versés est celui qui aura lieu devant votre assemblée lors de la discussion de projet de loi relatif à l'intercommunalité.
Je vous invite donc, comme M. le rapporteur général, à mettre toute votre force de proposition dans ce débat qui aura lieu prochainement. Pour des raisons de procédures, vos quatre amendements y trouveront beaucoup mieux leur place que dans le présent projet de loi de finances.
Par conséquent, je vous demande, très courtoisement, de retirer vos quatre amendements.
M. le président. Monsieur Braye, les amendements n°s II-103, II-104, II-105 et II-106 sont-ils maintenus ?
M. Dominique Braye. Monsieur le rapporteur général, j'ai bien entendu vos arguments, ainsi que ceux de M. le secrétaire d'Etat, et j'ai été très sensible au fait que vous attachiez à cette question autant d'importance que moi-même. Mais je n'en doutais pas de la part d'un président d'établissement public de coopération intercommunale.
Je retire donc mes amendements, en étant convaincu que le débat sur l'intercommunalité sera sûrement plus propice et nous permettra d'aller plus loin. Naturellement, je m'attends, monsieur le rapporteur général, monsieur le secrétaire d'Etat, à voir mes amendements connaître un sort très favorable lors de l'examen du projet de loi sur l'intercommunalité.
M. le président. Les amendements n°s II-103, II-104, II-105 et II-106 sont retirés.
Je suis maintenant saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° II-107, M. Braye propose d'insérer, après l'article 61 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa du II de l'article 1636 B decies du code général des impôts est ainsi rédigé :
« La communauté ou le syndicat d'agglomération nouvelle visés à l'article 1609 nonies B ou les établissements publics de coopération intercommunale visés au I de l'article 1609 nonies C, soit au II de l'article quinquies C, votent le taux de la taxe professionnelle dans les conditions définies au premier alinéa du b du 1 de l'article 1636 B sexies , ainsi qu'aux 2 et 3 de ce même article et à l'article 1636 B septies . »
Par amendement n° II-119, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 61 quater , un article additionnel ainsi rédigé :
« Avant l'article 1636 B sexies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art... - A compter du 1er janvier 1998, les obligations prévues au b du 1 de l'article 1636 B sexies ne s'appliquent pas aux établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, ainsi qu'aux communes membres de ces établissements. »
Enfin, par amendement n° II-161, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, après l'article 61 quater , un article additionnnel ainsi rédigé :
« Il est inséré dans le code général des impôts un article 1636 B sexies A ainsi rédigé :
« Art. 1636 B sexies A. - A compter du 1er janvier 1998, l'obligation de diminuer le taux de taxe professionnelle dans une proportion au moins égale, soit à la diminution du taux de la taxe d'habitation ou à celle du taux moyen pondéré de la taxe d'habitation et des taxes foncières, soit à la plus importante de ces diminutions lorsque ces deux taux sont en baisse, prévue au b du 1 du I de l'article 1636 B sexies , ne s'applique ni aux établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre visés aux articles 1609 bis , 1609 quinquies , 1609 quinquies C, 1609 nonies B, 1609 nonies C ni aux communes membres de ces établissements publics. »
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande l'examen par priorité de l'amendement n° II-161.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
La parole est donc à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° II-161.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Les amendements que M. Braye a défendus précédemment démontrent bien que le besoin de faire le point sur l'intercommunalité est très important. Sur toutes les travées ont été présentés des amendements relatifs à la « déliaison » des taux. Aussi la commission des finances a-t-elle souhaité apporter une contribution, dont l'urgence apparaît évidente. Chacun sait, en effet, que si des dispositions ne sont pas prises lors du vote du budget, c'est une année perdue dans ce domaine.
L'amendement qui vous est proposé par la commission des finances - il tend à regrouper l'ensemble des préoccupations exprimées, je le répète, par tous les groupes - tend à assouplir les contraintes qui pèsent actuellement, tant sur les groupements que sur les communes qui sont membres de ces groupements, pour la fixation des taux. L'objet, ambitieux, de cet amendement est de donner à la démocratie locale tous ses droits et de lever les entraves que cette dernière connaît, qui ne correspondent plus aux réalités de l'époque.
La démarche de la commission des finances se veut comme toujours, mais plus encore cette fois, responsable. C'est pourquoi, dans un premier temps, elle n'envisage qu'une « déliaison » à la baisse ; j'y insiste.
Son champ d'application est assez large, j'en conviens, puisqu'il s'agit de favoriser, dans leur diversité, des structures intercommunales, telles que communautés urbaines, districts, ou communautés de communes. Bref, toutes les formules sont visées !
Les groupements et les communes membres de ces groupements n'auraient plus à subir la règle de liaison des taux, dès lors que cette « déliaison » s'opérerait à la baisse ; je le rappelle afin d'éviter toute ambiguïté.
Cela permettrait de résoudre, notamment, le problème crucial rencontré par les structures intercommunales auxquelles des compétences sont transférées par les communes.
Il s'agit d'un choix démocratique en faveur de l'ensemble des acteurs de l'intercommunalité, quel que soit le type de fiscalité adopté.
La commission des finances a jugé qu'il n'était pas possible d'attendre encore un an pour que des décisions soient prises. Il lui est apparu indispensable de légiférer dès maintenant sur ce point.
L'amendement qu'elle présente tend à satisfaire l'ambition exprimée dans les amendements qui ont été déposés par plusieurs de nos collègues, siégeant, je le rappelle, sur l'ensemble des travées. C'est la raison pour laquelle je demande au Sénat d'émettre un vote massivement favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Braye, pour défendre l'amendement n° II-107.
M. Dominique Braye. Cet amendement a le même objet que celui qui est présenté par la commission des finances.
Afin de favoriser le développement de la taxe professionnelle unique, je propose d'étendre à tous les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre les dispositions de l'article 1636 B decies du code général des impôts qui encadrent les liens entre les taux. En effet, aujourd'hui, seuls les districts sont exclus de ces mesures, ce qui ne paraît plus justifié.
En outre, je suggère de supprimer le verrouillage à la baisse du lien entre le taux de taxe professionnelle unique du groupement et les taux des trois taxes ménages des communes membres contenu dans le deuxième alinéa du b du 1 de cet article.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour défendre l'amendement n° II-119.
M. Bernard Angels. Cet amendement est semblable à celui qui a été déposé par la commission des finances, mais il vise à supprimer le lien entre les quatre taxes pour les groupements à fiscalité propre et pour les communes qui en sont membres.
Il s'agit de permettre aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre d'adopter la taxe professionnelle unique et de progresser dans l'harmonisation des taux : actuellement, les conditions d'exercice du lien l'interdisent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-107 et II-119 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission a le sentiment que les préoccupations de nos collègues MM. Braye et Angels sont satisfaites par l'amendement n° II-161 qu'elle a présenté. Elle leur demande donc de bien vouloir se rallier à la rédaction qu'elle propose, non pas parce qu'elle a un orgueil d'auteur, mais parce qu'il lui semble que cette rédaction répond mieux aux préoccupations des uns et des autres.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à retirer vos amendements au bénéfice de celui de la commission des finances, ce qui ne lui donnera que plus de force et, par voie de conséquence, plus de chances d'être adopté par le Sénat.
M. le président. L'amendement n° II-107 est-il maintenu, monsieur Braye ?
M. Dominique Braye. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-107 est retiré.
L'amendement n° II-119 est-il maintenu, monsieur Angels ?
M. Bernard Angels. Notre amendement allait plus loin que celui de la commission des finances. Néanmoins, dans un souci de faire progresser ce sujet, je le retire au bénéfice de l'amendement n° II-161 de la commission.
M. le président. L'amendement n° II-119 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-161 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cet amendement a pour objet de supprimer la règle de lien à la baisse du taux de taxe professionnelle pour les groupements dotés d'une fiscalité propre et pour les communes membres de ces groupements.
Ainsi, en cas de diminution du taux de taxe d'habitation et des taux des taxes foncières, les groupements et les communes membres ne seraient plus tenus de diminuer leur taux de taxe professionnelle dans une proportion égale à la diminution du taux de taxe d'habitation ou à la diminution du taux moyen pondéré des trois taxes, si celle-ci est plus importante.
Je ne suis donc pas favorable à cet amendement, apparemment séduisant, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, mais je n'insisterai pas sur ce point, il existe déjà des dispositions qui permettent de faire exception à la règle de lien à la baisse. Tel est le cas lorsque le ou les taux qui font l'objet d'une diminution sont supérieurs à la fois au taux moyen national de la taxe en cause constaté l'année précédente et au taux de taxe professionnelle voté l'année précédente par la collectivité considérée si celui-ci est plus élevé, et ne sont pas ramenés à un niveau inférieur au plus élevé de ces deux seuils.
Je vous accorde que ce dispositif n'est pas d'une extrême simplicité. C'est pourquoi les conditions de mise en oeuvre de cette exception ont été assouplies l'an dernier. Toutefois, ce n'est pas la raison principale de mon opposition à cet amendement.
En fait, ce dispositif qui supprime les liens entre les impôts locaux offre des marges de manoeuvre supplémentaires d'augmentation des taux de taxe professionnelle aux groupements et aux communes membres, qui pourront procéder à l'abaissement du taux des taxes prélevées sur les ménages puis remonter celui-ci.
Certains groupements de communes risquent de peser sur les entreprises de façon excessive puisque le lien qui existait antérieurement avec la fiscalité supportée par les électeurs serait distendu, voire supprimé.
Par ailleurs, le conseil des impôts a relevé le caractère inflationniste de la pression fiscale des groupements à fiscalité additionnelle et souligné qu'il n'est probablement pas souhaitable pour ces derniers de trop augmenter leur marge de manoeuvre.
J'ajoute, à l'intention des élus locaux, qui sont très nombreux au sein de la Haute Assemblée, qu'il est pour le moins paradoxal d'accorder plus de liberté pour le vote des taux à des instances qui sont élues au deuxième degré, alors que les conseils municipaux des communes non membres et les conseils généraux élus au suffrage universel resteront soumis aux règles existantes.
La prudence en la matière consisterait à aborder cette question délicate dans le cadre de la réflexion sur l'intercommunalité que M. le rapporteur général a fréquemment citée, et qui constitue, comme la fiscalité directe locale, l'un des chantiers des réformes prioritaires retenus par le Gouvernement pour 1998.
Je demande donc à M. le rapporteur général de bien vouloir retirer cet amendement en attendant le débat sur l'intercommunalité et la fiscalité directe locale, sinon j'en demanderai le rejet, car cet amendement, apparemment séduisant, ouvre en fait des marges de manoeuvre qu'il est difficile d'apprécier pour un relèvement de la taxe professionnelle sur les entreprises opéré par les groupements de communes.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Le Sénat est très touché de voir que le Gouvernement se préoccupe de l'accroissement de la fiscalité qui peut peser sur les entreprises, après les dispositions fiscales qui ont été proposées dans le projet de loi portant mesures urgentes à caractère fiscale et financier et qui visaient, je le rappelle, à augmenter l'impôt sur les sociétés et sur les plus-values.
Vous avez pu constater les effets que pouvaient avoir de telles dispositions sur la vie des entreprises et je comprends, par conséquent, votre prudence. Il vous en sera tenu compte pour votre rédemption, j'en suis sûr.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'irai en enfer avec vous. (Sourires.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Toutefois, ce problème revêt un second aspect. Il existe, avez-vous dit, des dispositions qui permettent de résoudre les problèmes qui ont été évoqués. Je vous inviterai lors d'un congrès de maires pour que vous expliquiez, avec le talent pédagogique qui vous caractérise, la simplicité de ces dispositifs dérogatoires. Pour ma part, je rends mon tablier, car je ne sais pas les expliquer simplement. Ces dispositifs sont quasiment inexplicables, et de nombreux maires se plaigent de ne pas pouvoir les appliquer.
Par ailleurs, vous avez soulevé le risque d'une hausse de l'impôt. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, aujourd'hui de tels comportements sont tout à fait possibles. Nous nous situons, en effet, dans un processus tendant à une plus grande intégration de nos coopérations intercommunales ; j'avais cru comprendre que tel était d'ailleurs le souhait de tous les gouvernements successifs.
Il résulte de ce processus que chacune des communes transfère à l'établissement public de coopération intercommunale un certain nombre de compétences, qui engendrent des coûts, ce qui signifie que les établissements publics de coopération intercommunale sont obligés d'accroître leur fiscalité. Si ces coûts apparaissent dans le budget de l'établissement public de coopération intercommunale, on ne retrouve plus les dépenses dans le budget communal. Il est donc possible de baisser la fiscalité des communes. Toutefois, rien n'oblige les conseils municipaux à le faire, ce qui signifie que, de toute façon, on peut constater un accroissement de la fiscalité locale.
Or, il est proposé, en la circonstance, de permettre, aux conseils municipaux de baisser leur fiscalité en rapport avec des charges moins nombreuses qu'ils ont à supporter et de le faire en toute liberté. Pourquoi cela est-il nécessaire ?
La structure fiscale de l'établissement de coopération intercommunale n'est pas toujours comparable à celle de chacune des communes qui le compose. Ainsi, la baisse de la fiscalité communale ne peut s'opérer que selon les modalités qui sont aujourd'hui offertes par la loi. Cela pose des problèmes parfois insurmontables et freine l'intégration de la coopération intercommunale - nous ne pouvons que le regretter - mais cela ne freine absolument pas l'accroissement des impôts que M. le secrétaire d'Etat a évoqué voilà un instant.
En effet, dans cette hypothèse, face à l'impossibilité de baisser les taux en question, les communes ne les baissent pas. Ainsi, les contribuables ont à supporter un accroissement de la fiscalité des établissements publics de coopération intercommunale sans avoir l'avantage de voir les taux communaux décroître.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il y a, en la matière, une sorte de résistance un peu forte que nous devons, les uns et les autres, surmonter. Il faut donner un peu de liberté, un peu de souplesse, un peu de confiance aux élus territoriaux, qui, de temps en temps, me semble-t-il, se font plutôt concurrence pour que leurs taux de taxe professionnelle ne soient pas trop élevés ; compte tenu du caractère parfois un peu forain des entreprises, le risque est quand même faible.
Vous avez tout à l'heure parlé de justice vis-à-vis des départements ou des régions. Nous qui siégeons au Sénat depuis déjà un certain nombre d'années et qui voyons les gouvernements se succéder, nous avons introduit des dispositifs souples de variation des taux des départements à l'occasion de précédents budgets. Les problèmes qui avaient été constatés pour les fiscalités départementales ont dont été résolus ; ceux que posaient les fiscalités des établissements publics de coopération intercommunale et les fiscalités communales ne le sont pas. Tel est le sens de la demande de la commission des finances, de MM. Braye et Angels.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Pour ma part, je suis prêt à rivaliser de simplicité avec M. le rapporteur général. Si la taxe professionnelle augmente du fait des groupements de communes, pourquoi ne pas prévoir une diminution de la taxe professionnelle émise par les communes qui en font partie ? Pourquoi établir des transferts qui sont, à mon avis, susceptibles de dérapages ?
Il faut, avez-vous dit, faire confiance aux élus locaux. Je crois me souvenir que, en 1982, les lois de décentralisation ont été élaborées par une certaine majorité. Je ne me souviens plus du sentiment du Sénat à l'époque, mais je crois que la confiance dans les élus locaux a été le fait de gouvernements plus proches de la majorité actuelle que de majorités antérieures. Mais nous n'allons pas remonter trop loin...
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je n'étais pas né à la politique.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Certes ! Il est clair qu'il faut faire confiance aux élus locaux et que la décentralisation qui a été mise en place se trouve maintenant parfaitement assimilée.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Il s'agit sans doute d'un oubli de la part de M. le secrétaire d'Etat, mais permettez-moi de souligner que la loi de décentralisation du 7 janvier 1983 a été votée à une très forte majorité par le Sénat, qui était donc bien soucieuse de faire confiance aux élus.
M. Philippe Marini. Très bien ! Bon rappel !
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° II-161, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 61 quater.
Par amendement n° II-108, M. Braye propose d'insérer, après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le septième alinéa de l'article L. 5211-36 du code général des collectivités territoriales, après les mots : "l'année où il lève pour la première fois, sa fiscalité propre dans la nouvelle catégorie" ; sont insérés les mots : "et les années suivantes, s'il a opté pour les dispositions de l'article 1609 nonies C du code général des impôts". »
La parole est à M. Braye.
M. Dominique Braye. Un grand nombre d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité additionnelle renoncent à passer à une taxe professionnelle unique, dans la crainte de voir baisser le montant de la dotation globale de fonctionnement dont ils sont bénéficiaires.
En effet, les mécanismes de garantie actuels font que, pour les groupements fortement intégrés, la fiscalité additionnelle assure un montant de DGF plus élevé que la taxe professionnelle unique.
Afin d'encourager le passage à cette taxe, il faut donc garantir le montant de la DGF non seulement l'année de ce passage, mais aussi les années suivantes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. M. Braye sera un sénateur extrêmement utile lors du débat sur la réforme de la coopération intercommunale parce qu'il nous paraît parfaitement maîtriser ce sujet.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est un brillant cavalier ! (Sourires.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ce qu'il souligne est vrai, et le très modeste président d'établissement public de coopération intercommunale que je suis...
M. Philippe Marini. Coopération entre plusieurs départements.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mais rien ne vous échappe, mon cher collègue, vous êtes redoutable !
Le très modeste président d'établissement public de coopération intercommunale que je suis, disais-je, a donc pu constater que le passage à la taxe professionnelle unique est rendu quasiment impossible ou, en tout cas, extrêmement pénalisant puisque les mécanismes de calcul de la DGF n'incitent pas à ce passage qui est pourtant un objectif souhaité par le Gouvernement et partagé sur plusieurs travées dans les deux assemblées.
Oui, votre suggestion, monsieur Braye, est bonne. Mais elle ne peut être adoptée dans la cadre de ce texte car elle n'y a pas sa place.
Il faut impérativement vous préparer au débat sur la réforme de l'intercommunalité. Certes, le dispositif que vous prévoyez peut être amélioré parce que, pour être franc, notre expertise n'est pas allée jusqu'au plus menu détail de sa rédaction. Mais si l'objectif qui le sous-tend n'est pas atteint, la taxe professionnelle unique restera un bel objectif qui ne se concrétisera pas.
Votre question est donc légitime. Ma réponse est néanmoins réservée : je vous propose, après avoir entendu le Gouvernement, d'en tirer toutes les conséquences. Cette disposition, je le répète, ne peut pas être adoptée dans le cadre du projet de loi de finances. L'objectif qu'elle sous-tend devrait être adopté dans la loi portant réforme de l'intercommunalité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce nouvel amendement présenté par M. Braye est un amendement de proposition, comme ceux dont nous avons déjà débattu. Il concerne la répartition interne de la dotation d'aménagement dont le montant résulte, comme chacun le sait, du solde entre, d'une part, la dotation globale de fonctionnement et, d'autre part, la dotation forfaitaire qui est prévue à l'article L. 2334-7 du code des collectivités locales.
Je pense, comme M. le rapporteur général, que cet amendement n'a pas sa place dans une loi de finances. C'est ce que l'on appelle familièrement un cavalier budgétaire. Cette proposition apportera une contribution très utile...
M. Alain Lambert, rapporteur général. Indispensable !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... au débat sur le prochain projet de loi relatif à l'intercommunalité. En attendant l'examen de ce projet de loi, je vous suggère, monsieur Braye, de retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Braye, l'amendement est-il maintenu ?
M. Dominique Braye. Compte tenu des propos de M. le secrétaire d'Etat et de M. le rapporteur général, je vais retirer mon amendement.
Monsieur le rapporteur général, j'ai, bien sûr, été très touché par les compliments que vous m'avez adressés et par des qualités dont vous m'avez crédité.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Compliments mérités !
M. Dominique Braye. Cependant, en tant que président de district, je ne crois pas les mériter. J'en veux pour preuve le fait que je ne sois pas parvenu, comme l'a fait M. Lambert au sein de l'établissement public de coopération intercommunale qu'il présidait, à transformer ce district en communauté urbaine, ce que j'aurais pourtant bien aimé réaliser.
J'ai noté que mes suggestions seraient examinées avec un oeil particulièrement clément par l'ensemble de mes collègues. J'ose espérer que l'on progressera vers la construction d'un territoire et un développement économique plus harmonieux dans un grand nombre d'agglomérations.
Cela étant dit, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-108 est retiré.
Par amendement n° II-146 rectifié, MM. Rausch, Borotra, Dufaut, Girault et Lombard proposent d'insérer après l'article 61 quater, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les troisième et quatrième alinéas du paragraphe I ter de l'article 1648 A du code général des impôts sont supprimés. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
J'informe le Sénat que la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.

7

COMMUNICATION RELATIVE
À UNE PROPOSITION
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 8 décembre 1997, l'informant que le Conseil d'Etat a rendu, le 4 décembre dernier, un avis rectificatif dont il résulte que la proposition d'acte communautaire concernant l'approbation, au nom de la Communauté, de la décision PARCOM 96/1 relative à l'élimination progressive de l'hexachloroéthane dans l'industrie des métaux non ferreux (n° E 974) n'est pas de nature législative au sens de l'article 88-4 de la Constitution. En conséquence, la transmission de cette proposition d'acte communautaire doit être considérée comme non avenue.

8

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

M. le président. J'ai reçu de MM. Alain Vasselle, Philippe Adnot, Michel Alloncle, Louis Althapé, Bernard Barbier, Jean Bernard, Jean Bizet, André Boyer, Gérard Braun, Jean-Claude Carle, Charles Ceccaldi-Raynaud, Gérard César, Désiré Debavelaere, Marcel Deneux, Charles Descours, Michel Doublet, Alain Dufaut, Ambroise Dupont, Daniel Eckenspieller, Alfred Foy, Yann Gaillard, Patrice Gélard, Alain Gérard, Daniel Goulet, Georges Gruillot, Hubert Haenel, Emmanuel Hamel, Rémi Herment, Roger Husson, André Jourdain, Pierre Lagourgue, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Edouard Le Jeune, André Maman, Philippe Marini, René Marquès, Serge Mathieu, Bernard Plasait, Alain Pluchet, Roger Rigaudière, Jean-Jacques Robert, Michel Rufin, Michel Souplet et Martial Taugourdeau une proposition de loi visant à modifier l'article 23 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 relatif à la répartition intercommunale des charges des écoles publiques accueillant des enfants issus de plusieurs communes.
La proposition de loi sera imprimée sous le numéro 160, distribuée et renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

9

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Philippe Marini un rapport fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur la proposition de résolution (n° 75, 1997-1998) de MM. Maurice Blin, Henri de Raincourt, Josselin de Rohan, Louis Souvet et Jean Arthuis tendant à créer une commission d'enquête sur les conséquences pour l'économie française de la réduction de la durée du travail à trente-cinq heures hebdomadaires.
Le rapport sera imprimé sour le numéro 159 et distribué.

10

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, fixée à aujourd'hui, mardi 9 décembre 1997, à dix heures, à seize heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 84 et 85, 1997-1998).
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Deuxième partie. - Moyens des services et dispositions spéciales :
Articles de la deuxième partie non joints à l'examen des crédits (suite).
Aucun amendement aux articles de la deuxième partie n'est plus recevable.
Eventuellement, seconde délibération sur la deuxième partie.
Explications de vote.
Vote sur l'ensemble (scrutin public à la tribune de droit, en application de l'article 60 bis, troisième alinéa, du règlement).

Délais limites pour les inscriptions de parole
dans la discussion générale
et pour le dépôt des amendements

- Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, consacrant le placement sous surveillance électronique comme modalité d'exécution des peines privatives de liberté (n° 285, 1996-1997) :
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 décembre 1997, à dix-sept heures.
- Conclusions de la commission des affaires économiques et du Plan sur la proposition de loi de M. Gérard César et plusieurs de ses collègues portant diverses mesures urgentes relatives à l'agriculture (n° 155, 1997-1998) :
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 10 décembre 1997, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 10 décembre 1997, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 9 décembre 1997, à zéro heure trente.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Aménagements à réaliser et sécurité sur la RN 504

134. - 6 décembre 1997. - M. Michel Barnier expose à M. le ministre de l'équipement, des transports et du logement que son prédécesseur avait été saisi du grave problème de la sécurité sur la RN 504. Il souligne que ce problème intéresse la Savoie et son avant-pays, mais aussi le département de l'Ain. Il lui rappelle que son prédécesseur avait pris l'engagement de saisir les préfets de cette question, et cet engagement a été respecté puisque, après consultation des préfets, le directeur des routes s'était rendu sur les lieux pour examiner l'itinéraire avant une réunion de travail en mairie de Belley, le jour même. A cette occasion, un programme d'aménagement de sécurité, qui doit également favoriser le détournement des poids lourds, a été validé. Le montant des aménagements du département de la Savoie s'élève à hauteur d'environ 70 millions de francs. Par ailleurs, le directeur des routes avait donné son accord de principe pour que soit obtenue rapidement l'interdiction de passage de matières dangereuses. Cette interdiction n'avait pu être mise en place avant l'été, compte tenu des délais. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui confirmer si l'Etat envisage de s'engager sur les travaux de sécurité à réaliser et leur calendrier, comme sur la mise en place de cette interdiction.



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du lundi 8 décembre 1997


SCRUTIN (n° 55)



sur l'amendement n° II-100 rectifié, présenté par M. Philippe Marini et les membres du groupe du Rassemblement pour la République, tendant à insérer un article additionnel après l'article 61 ter du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (exonération du paiement de la taxe d'habitation pour les étudiants logés en cités universitaires ou dans des locaux relevant du CROUS).

Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 244
Pour : 238
Contre : 6

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 16.
Contre : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Pour : 95.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Abstentions : 74.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 45.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jean Derian
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Michel Duffour
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy

Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Joëlle Dusseau et Robert-Paul Vigouroux.

Abstentions


Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Marcel Bony
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Paul Raoult
René Régnault
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.