SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Loi de finances pour 1998. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 1 ).
MM. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances ; Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Article 1er. - Adoption (p. 2 )

Article 2 (p. 3 )

M. le rapporteur général, Mme Hélène Luc, MM. Michel Sergent, le secrétaire d'Etat.
Amendements n°s I-149 de M. Marini et I-4 rectifié de la commission. - MM. Adrien Gouteyron, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° I-149 ; adoption, par scrutin public, de l'amendement n° I-4 rectifié.
MM. le secrétaire d'Etat, le rapporteur général.
Amendements n°s I-68 de Mme Beaudeau, I-150 de M. Descours, I-145 de M. Joly, I-30 de M. Foy et I-182 de M. Machet. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Jean Chérioux, François Lesein, Jacques Habert, Jacques Machet, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Charasse, Jean Clouet, Philippe Marini. - Rejet de l'amendement n° I-68 ; retrait des amendements n°s I-150, I-145 et I-30 ; adoption, par scrutin public, de l'amendement n° I-182.
Amendement n° I-5 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption par scrutin public.
Amendement n° I-6 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 2 (p. 4 )

Amendement n° I-71 de Mme Beaudeau. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Charasse, Philippe Marini. - Rejet.
Amendement n° I-151 de M. Vasselle. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-109 de M. Régnault. - MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-110 de M. Régnault. - MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Charasse, Philippe Marini. - Retrait.
Amendement n° I-69 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, François Lesein. - Rejet.
Amendement n° I-70 rectifié de Mme Beaudeau. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet.

Suspension et reprise de la séance (p. 5 )

Amendements identiques n°s I-48 de M. Lesein et I-183 de M. Badré. - MM. François Lesein, Denis Badré, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° I-183 ; rejet de l'amendement n° I-48.
Amendement n° I-112 de Mme Pourtaud. - Mme Danièle Pourtaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-111 de Mme Pourtaud. - Mme Danièle Pourtaud, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Demande de réserve (p. 6 )

Demande de réserve des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 8 et de l'ensemble de l'article 9. - MM. le rappporteur général, le secrétaire d'Etat. - La réserve est ordonnée.

Article 3 (p. 7 )

Amendement n° I-204 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article.

Articles 4 et 5. - Adoption (p. 8 )

Article additionnel après l'article 5 (p. 9 )

Amendement n° I-113 de M. Régnault. - MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 6 (p. 10 )

MM. le rapporteur général, Philippe Marini, le secrétaire d'Etat.
Amendements n°s I-7 rectifié de la commission, I-146 de M. Joly et I-33 rectifié de M. Marini. - MM. le rapporteur général, François Lesein, Philippe Marini, le secrétaire d'Etat, Maurice Blin, Maurice Schumann. - Retrait de l'amendement n° I-146 ; adoption des amendements n°s I-7 rectifié et I-33 rectifié.
Adoption de l'article modifié.

Articles additionnels après l'article 6 (p. 11 )

Amendement n° I-34 rectifié de M. Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 6 bis (p. 12 )

Amendements identiques n°s I-8 de la commission et I-153 de M. Gournac. - MM. le rapporteur général, Philippe Marini, le secrétaire d'Etat, Mme Odette Terrade, M. Michel Sergent. - Adoption des deux amendements supprimant l'article.

Articles additionnels après l'article 6 bis (p. 13 )

Amendement n° I-114 de M. Régnault. - MM. Michel Sergent, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-115 de M. Régnault. - MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 7 (p. 14 )

Amendement n° I-9 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Article additionnel après l'article 7 (p. 15 )

Amendement n° I-35 rectifié de M. Philippe Marini. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.

Article 8 (p. 16 )

MM. Philippe Marini, Jacques Oudin, Denis Badré, le secrétaire d'Etat.
Amendements identiques n°s I-140 de M. de Rohan et I-184 de M. Arzel ; amendements identiques n°s I-10 rectifié de la commission et I-141 de M. de Rohan. - MM. Jacques Oudin, Denis Badré, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Christian Bonnet. - Retrait des amendements n°s I-140 et I-184 ; adoption des amendements n°s I-10 rectifié et I-141 rédigeant l'article.

Article additionnel avant l'article 10 (p. 17 )

Amendements n°s I-78 rectifié, I-85 rectifié de Mme Beaudeau et I-116 de M. Régnault. - Mmes Marie-Claude Beaudeau, Odette Terrade, MM. Bernard Angels, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Rejet des amendements n°s I-78 rectifié et I-85 rectifié ; retrait de l'amendement n° I-116.

Article 10 (p. 18 )

MM. le rapporteur général, Ivan Renar, Philippe Marini, Michel Sergent, Philippe de Gaulle, le secrétaire d'Etat.
Amendements identiques n°s I-12 de la commission, I-156 de M. Vasselle et I-185 de M. Badré. - MM. le rapporteur général, Philippe Marini, Denis Badré, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Michel Caldaguès. - Adoption des trois amendements supprimant l'article.

Article 10 bis (p. 19 )

Amendement n° I-13 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.

Suspension et reprise de la séance (p. 20 )

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER

Article additionnel après l'article 8 (précédemment réservé) (p. 21 )

Amendement n° I-210 (priorité) de la commission et sous-amendement n° I-211 de M. Estier ; amendements n°s I-1 de M. Gouteyron, I-73 de M. Renar, I-72, I-74 à I-77 de Mme Beaudeau, I-31 rectifié de M. Estier et I-144 de M. Cluzel. - MM. Christian Poncelet, président de la commission des finances ; le secrétaire d'Etat, François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles ; Ivan Renar, Paul Loridant, Claude Estier, Jean Cluzel, Philippe Marini, Maurice Blin, Jean-Philippe Lachenaud, Roland du Luart. - Demande de priorité de l'amendement n° I-210 ; retrait des amendements n°s I-74 à I-77, I-31 rectifié, I-144 et I-1 ; adoption du sous-amendement n° I-211 et, par scrutin public, de l'amendement n° I-210 modifié insérant un article additionnel, les amendements n°s I-73 et I-72 devenant sans objet.

Article 9 (précédemment réservé) (p. 22 )

M. Paul Loridant.
Amendement n° I-11 de la commission. - MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Paul Loridant, Philippe Marini. - Adoption, par scrutin public, de l'amendement supprimant l'article.

Articles additionnels avant l'article 11 (p. 23 )

Amendement n° I-79 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Michel Sergent, Paul Loridant. - Retrait.
Amendement n° I-82 rectifié de Mme Beaudeau. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Philippe Marini. - Rejet.

Mise au point au sujet d'un vote (p. 24 )

MM. François Lesein, le président.

Article 11 (p. 25 )

Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Bernard Angels, le secrétaire d'Etat.
Amendement n° I-159 de M. Braun. - MM. Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Amendement n° I-80 de Mme Beaudeau. - MM. Paul Loridant, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait.
Adoption de l'article.

Articles additionnels après l'article 11 (p. 26 )

Amendements n°s I-53 de M. Collard et I-163 de M. Braun. - MM. André Egu, Philippe Marini, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des deux amendements.
Amendements identiques n°s I-29 de M. Michel Mercier et I-54 rectifié bis de M. Seillier. - MM. Jean-Jacques Hyest, Roland du Luart, le rapporteur général, le secrétaire d'Etat. - Retrait des deux amendements.
Amendement n° I-83 de Mme Beaudeau. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. le rapporteur général, le secrétaire d'Etat, Ivan Renar. - Rejet.

Article additionnel après l'article 11
ou avant l'article 11 bis (p. 27 )

Amendements n°s I-14 rectifié de la commission, I-124 de M. Chabroux, I-186 de M. Pourchet et I-160 de M. Marini. - MM. le rapporteur général, Michel Sergent, André Egu, Philippe Marini, le secrétaire d'Etat. - Retrait des quatre amendements.
Renvoi de la suite de la discussion.

3. Communication de l'adoption définitive de propositions d'acte communautaire (p. 28 ).

4. Transmission de projets de loi (p. 29 ).

5. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 30 ).

6. Ordre du jour (p. 31 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

LOI DE FINANCES POUR 1998

Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale. [N°s 84 et 85 (1997-1998).]
Je rappelle au Sénat que la discussion générale a été close.
Nous passons à la discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances.
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, avant d'engager la discussion des articles, je souhaite, afin de faire gagner du temps au Sénat et éviter d'y revenir tout au long du débat, formuler quelques remarques préalables.
En premier lieu, je préciserai que la commission des finances est attachée au solde budgétaire. J'aurai, au cours de la discussion des articles, la redoutable et parfois ingrate tâche, au moyen des avis que l'on me demandera de donner au nom de la commission des finances, de veiller à ce que le solde budgétaire ne se dégrade pas.
Cela me donne l'occasion de saluer le sens élevé de la responsabilité de la majorité sénatoriale. Mais je suis également prêt, tout au long de la discussion, à saluer le sens élevé de la responsabilité de l'opposition sénatoriale, pour éviter que ne soient proposées et adoptées des mesures tout aussi pertinentes les unes que les autres, mais dont le coût global se révélerait incompatible avec l'équilibre budgétaire auquel nous souhaitons parvenir. C'est ce qui me conduira parfois, au nom de la commission des finances, à ne pas recommander d'adopter des amendements dont l'objet n'est pas contestable, mais dont le coût est totalement dissuasif.
En deuxième lieu, je rappellerai à tous nos collègues les contraintes de la procédure budgétaire. Je prendrai deux exemples : tout d'abord, on ne peut pas gager une moindre recette par une moindre dépense, même si, parfois, on est tenté de le faire ; ensuite, on ne peut pas transférer des crédits ou des emplois d'un ministère à l'autre. Je donne ces deux exemples parce que nous pouvons quelquefois, les uns et les autres, être tentés de procéder de cette manière.
Je souhaite également rappeler, en troisième lieu, que la volonté de la majorité sénatoriale est de contenir la dépense publique - cela a été dit à plusieurs reprises pendant la discussion générale - tout en reconduisant, en volume de dépenses, le montant de 1997, économisant ainsi 21,3 milliards de francs.
La discussion des articles de la première partie du projet de loi de finances donnera donc l'impression d'une dégradation du solde, puisque les économies réalisées sur les dépenses permettront de réduire les prélèvements. Lors de la discussion de l'article d'équilibre - je m'adresse au Gouvernement - le plafond de dépenses proposé rendra possible le rétablissement de l'équilibre convenu.
Lorsque les amendements de la première partie devront être gagés - ils ne sont d'ailleurs pas nombreux - ces gages seront, bien sûr, présentés de manière formelle. Ils pourront, le cas échéant, être annulés en fin de discussion si le Gouvernement, dans une courtoisie républicaine dont nous ne doutons pas, nous autorisait une seconde délibération pour les supprimer.
S'agissant enfin, en quatrième lieu, des relations entre le Sénat et le Gouvernement, je souhaite vous dire, monsieur le secrétaire d'Etat, que la commission des finances, devant une remarque que je lui ai faite vendredi après-midi, a marqué une certaine impatience face aux retards pris - je tiens à peser chaque mot que je prononce - plus par l'exécutif que par le Gouvernement. En effet, les gouvernements passent parfois un peu rapidement et celui qui est en fonction peut penser que la critique du Sénat s'adresse principalement à lui. L'exécutif tarde effectivement à rendre les rapports qui sont prescrits par la loi. Je prendrai quelques exemples : la fiscalité de la vignette et de la carte grise, la taxe professionnelle, la taxe sur les salaires, les réductions d'impôts.
Monsieur le secrétaire d'Etat, les rapports sont utiles, voire indispensables au Sénat pour qu'il puisse légiférer en pleine connaissance de cause. Ils ont été adoptés par le législateur. Un délai pour les rendre a été fixé et ce délai n'est pas respecté par l'exécutif.
L'argument auquel tout le monde songe est, à l'évidence, le changement de Gouvernement. Toutefois, si les gouvernements passent, il existe aussi des administrations et nous avons le sentiment que les rapports sont, pour partie, établis par leurs services, qui sont, nous le savons, très compétents dans notre pays. Nous nous plaisons tous, en effet, reconnaître la très grande qualité de notre administration.
Dès lors que ces rapports sont établis, ils doivent, après que le ministre a eu le temps de les examiner, bien entendu, être mis à la disposition du Parlement. C'est un souhait très fort du Sénat, et je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, d'y veiller tout particulièrement pour que nous puissions élaborer la meilleure législation fiscale possible.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite répondre brièvement à M. le rapporteur général, avec la courtoisie républicaine dont il a lui-même fait preuve.
Premièrement, tout au long de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances, nous nous trouverons, comme l'a dit M. le rapporteur général, dans une situation un peu délicate, dans la mesure où certains amendements tendront à réduire les impôts sans que l'on connaissent les mesures qui seront proposées parallèlement.
Certes, à propos de l'article d'équilibre, M. le rapporteur général a bien annoncé que la correction nécessaire serait effectuée, mais je trouve un peu délicat, je le répète, l'exercice qui consiste à réduire des impôts - il s'agit d'un exercice assez facile - sans connaître véritablement les économies, toutes douloureuses, qui seront présentées en contrepartie. Mais nous aurons l'occasion d'en débattre à nouveau tout au long de l'examen du projet de budget.
Deuxièmement, s'agissant des rapports que le Gouvernement doit présenter au Parlement, je ne fais pas de distinction, monsieur le rapporteur général, entre le Gouvernement et l'administration. Je me considère comme le chef de l'administration des finances. Si certains rapports ont été déposés en retard, je me tiens personnellement pour responsable. Je sais que c'est par courtoisie que M. le rapporteur général a esquissé cette distinction. J'ai déjà promis que le rapport sur la cotisation minimale à la taxe professionnelle serait remis. Je ferai en sorte, avec mes collaborateurs, que les rapports qui vous manquent vous soient présentés dans les meilleurs délais.
Je profite de cette occasion pour rendre hommage - vous l'avez fait vous-même, monsieur le rapporteur général - aux administrations qui travaillent avec le Gouvernement et qui - vous avez eu l'amabilité de le souligner - ont préparé un projet de budget avec huit semaines en moins par rapport au calendrier habituel. Cette compression du temps explique peut-être le fait que certains rapports, certes importants, n'aient pas été fournis à temps.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES
DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
I. _ IMPÔTS ET REVENUS AUTORISÉS
A. _ Dispositions antérieures

Article 1er



M. le président.
« Art. 1er. - I. - La perception des impôts, produits et revenus affectés à l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir continue d'être effectuée pendant l'année 1998 conformément aux lois et règlements et aux dispositions de la présente loi de finances.
« II. _ Sous réserve de dispositions contraires, la loi de finances s'applique :
« 1° A l'impôt sur le revenu dû au titre de 1997 et des années suivantes ;
« 2° A l'impôt dû par les sociétés sur leurs résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 1997 ;
« 3° A compter du 1er janvier 1998 pour les autres dispositions fiscales. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

B. _ Mesures fiscales

Article 2



M. le président.
« Art. 2. _ I. _ Les dispositions du I de l'article 197 du code général des impôts sont ainsi modifiées :
« 1° Le 1 est ainsi rédigé :
« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 25 890 F les taux de :
« 10,5 % pour la fraction supérieure à 25 890 F et inférieure ou égale à 50 930 F ;
« 24 % pour la fraction supérieure à 50 930 F et inférieure ou égale à 89 650 F ;
« 33 % pour la fraction supérieure à 89 650 F et inférieure ou égale à 145 160 F ;
« 43 % pour la fraction supérieure à 145 160 F et inférieure ou égale à 236 190 F ;
« 48 % pour la fraction supérieure à 236 190 F et inférieure ou égale à 291 270 F ;
« 54 % pour la fraction supérieure à 291 270 F » ;
« 2° Le 2 est ainsi modifié :
« a) Les sommes de "16 200 F" et "20 050 F" sont portées respectivement à "16 380 F" et "20 270 F" ;
« b) Il est ajouté un troisième alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial, accordée aux contribuables qui bénéficient des dispositions des a, b et e du 1 de l'article 195, ne peut excéder 5 000 F pour l'imposition des années postérieures à l'année du vingt-sixième anniversaire de la naissance du dernier enfant ; ».
« 3° Au 4, la somme de "3 260 F" est fixée à "3 300 F".
« II. _ Le montant de l'abattement prévu à l'article 196 B du même code est porté à 30 330 F.
« III. _ Les dispositions du II de l'article 197 du code général des impôts sont abrogées. »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit d'un article important qui traite du barème de l'impôt sur le revenu.
Cet article procède à l'indexation traditionnelle, qui est bien connue, mais il renonce - ce qui est plus grave - à poursuivre la réforme de l'impôt qui a été décidée dans la loi de finances pour 1997. Ce faisant, le Gouvernement procède à un arrêt brutal de la réforme qui a été engagée l'année dernière.
Cette réforme de l'impôt sur le revenu prévoyait un allégement progressif des taux, un aménagement des tranches avec un élargissement de la tranche à taux zéro et une suppression progressive de la décote.
L'article 2 de la loi de finances que nous avons adoptée l'année dernière a constitué une première étape dans la réalisation de ces trois objectifs.
Cette réforme, répondait, je le rappelle, à deux principes : un allégement du barème et la suppression des avantages particuliers.
S'agissant de l'allégement du barème, tous les taux subissaient un allégement au cours de chacune des années de la réforme. La tranche à taux zéro était progressivement augmentée, ce qui aboutissait, à l'issue de la réforme, à exonérer 2,4 millions de contribuables supplémentaires.
En ce qui concerne la suppression des avantages particuliers, devaient disparaître de nombreuses dispositions. J'en citerai deux, sur lesquelles nous reviendrons à l'occasion du débat : les déductions forfaitaires complémentaires pour frais professionnels, dont bénéficient certaines professions - je sais que nous en reparlerons - et la réduction d'impôt pour dépenses de scolarité des enfants à charge - nous y reviendrons également.
Le présent projet de loi de finances opère un revirement total à cet égard.
Ainsi, l'article 2, au lieu de poursuivre l'allégement du barème prévu l'année dernière, prévoit seulement d'actualiser le barème et la décote au taux de l'indice prévisionnel des prix en 1997.
Je dois dire que la justification de ce revirement donnée par le Gouvernement dans les documents qui ont accompagné le projet de loi de finances a semblé faible à la commission des finances, en tout cas à la majorité des membres de celle-ci, eu égard à l'importance de la réforme. En effet, elle aboutit, en quelque sorte à traiter par omission un sujet qui concerne quinze millions de contribuables, ce qui n'est pas rien, et dont le poids budgétaire est de l'ordre de 15 milliards de francs.
Par ailleurs, chacun sait que, psychologiquement, l'impôt sur le revenu demeure tout à fait central aux yeux des Français. L'arrêt de cette réforme aurait dû, nous semble-t-il, être motivé de façon circonstanciée dans les documents d'information fournis au Parlement.
La justification de cette interruption de la réforme apparaît a posteriori bien sûr, dans le rapport général de l'Assemblée nationale : la réforme y est qualifiée de coûteuse et d'inéquitable, et il est précisé qu'elle laisse subsister des niches fiscales. On verra d'ailleurs ce qu'il en sera de celles-ci à terme.
Quelle a été, mes chers collègues, la réponse de la commission des finances sur ce sujet ?
Pour ce qui est du coût de la réforme, s'il est vrai que la poursuite de celle-ci, en 1998, aurait un coût important - de l'ordre de 14 milliards de francs - il est également vrai que cette réforme est ambitieuse et touche l'ensemble des revenus imposables en allégeant les taux de toutes les tranches et en élargissant, je le disais à l'instant, la tranche à taux zéro.
Il est vrai, aussi, que son financement impose une maîtrise de la dépense publique, à laquelle le Gouvernement manifeste, selon nous, une insuffisante attention.
En ce qui concerne le caractère prétendument inéquitable de cette mesure, la commission des finances estime que la réforme engagée en 1997 n'était, en aucune façon, réservée aux revenus les plus élevés, puisqu'elle prévoyait chaque année, de 1997 à 2001, une baisse des taux de chaque tranche.
Enfin, s'agissant des niches fiscales, ni le Gouvernement ni la commission des finances de l'Assemblée nationale n'ont consenti à rappeler que la réforme de l'impôt sur le revenu s'accompagnait de la suppression progressive de la plupart des réductions d'impôt ; je pense à l'assurance vie, à l'investissement locatif ou aux frais de scolarité.
Selon la commission des finances, la réforme doit être poursuivie, car sa justification demeure.
Il est utile, en effet, de prendre en compte le niveau très élevé des prélèvements obligatoires dans notre pays, qui doit être abaissé.
Par ailleurs, le système d'impôt sur le revenu français présente des défauts spécifiques bien connus : d'abord, une assiette trop étroite ; ensuite une progressivité trop forte, à la fois pour les revenus les plus faibles du fait de la progressivité à l'entrée du barème provoquée par la décote, et pour les revenus les plus élevés en raison d'un taux marginal de 54 %.
L'arrêt de la réforme de l'impôt sur le revenu est illogique, au moins à un double titre.
En premier lieu, cet arrêt intervient au moment où le projet de loi de financement de la sécurité sociale alourdit considérablement les prélèvements obligatoires proportionnels aux revenus.
En second lieu, il laisse subsister des dispositions adoptées en 1997, qui n'avaient de sens que dans l'optique de la poursuite de la réforme. Ainsi, la diminution progressive du plafond de l'abattement des pensions et retraites passera de 28 000 francs à 12 000 francs en l'an 2000.
L'arrêt de la réforme est même en contradiction avec la suppression des déductions supplémentaires pour certaines professions telle qu'elle a été votée par l'Assemblée nationale.
Telles sont donc, mes chers collègues, les raisons pour lesquelles la commission des finances présentera tout à l'heure plusieurs amendements tendant à modifier les dispositions de l'article 2.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les dispositions les plus significatives de la réforme de l'impôt sur le revenu telle qu'elle a été conçue par le précédent gouvernement, et, en l'occurrence, le mouvement programmé de réduction du barème de l'impôt, sont aujourd'hui abandonnés.
Il est évident que l'essentiel de la réforme Juppé avait comme conséquence de rendre moins progressif le barème de l'impôt sur le revenu, conduisant d'ailleurs de manière inéluctable à la diminution de son rendement, à concurrence, à terme, de 225 milliards de francs.
On sait aussi que si la tranche d'imposition à taux zéro était assez nettement élargie en contrepartie de la disparition du dispositif de décote des contribuables les plus modestes, l'essentiel de la réduction des taux du barème portait sur les tranches d'imposition maximales, et singulièrement sur la tranche historique imposée à 56,8 % et ramenée aujourd'hui à 54 %.
Nous avions critiqué ces dispositions pour plusieurs raisons de fond et singulièrement le fait que la véritable réforme de l'impôt sur le revenu n'était pas au rendez-vous.
A notre sens, il existe en effet une autre conception de la réforme de l'impôt sur le revenu fondée sur la réalité même de l'assiette de cet impôt.
Nous savons que le montant de l'impôt sur le revenu perçu dans notre pays avoisine aujourd'hui 300 milliards de francs, à quelques milliards près, si je puis m'exprimer ainsi.
Mais, à l'examen du document sur l'évaluation des voies et moyens, nous constatons que cet impôt est l'objet de nombreux correctifs, soit universels, soit spécifiques, dont les conséquences se chiffrent aujourd'hui elles aussi, à 300 milliards de francs ou peu s'en faut.
L'actualité récente a grandement focalisé l'attention sur les niches fiscales - nous avons d'ailleurs déposé un amendement tendant à revenir sur la disposition adoptée par l'Assemblée nationale à propos des journalistes - c'est-à-dire les réductions d'impôt dont le montant global avoisine 30 milliards de francs - mais il y a là une vingtaine de mesures dont la portée doit, à notre sens, être examinée de façon critique - ou sur le quotient familial dont le « coût » est de 70 milliards de francs environ mais pour lequel les marges de manoeuvre sont limitées.
Mais ce n'est là qu'une partie du problème, attendu que l'essentiel des dépenses fiscales portant sur l'impôt sur le revenu concerne les revenus du patrimoine et du capital.
Faire ici l'examen attentif et exhausif des dispositions concernées serait d'ailleurs quelque peu rébarbatif, mais nous aurons l'occasion d'y revenir, étant donné que la discussion des dernières lois de finances a, sans cesse, permis de perfectionner le dispositif existant en matière d'évasion fiscale des revenus concernés.
Même si cela doit déplaire à certains d'entre vous, mes chers collègues - et je suis certaine que tel sera le cas -, permettez-moi de souligner une nouvelle fois qu'il résulte de ces mesures que les revenus de capitaux mobiliers représentent moins de 3 % de l'assiette de l'impôt sur le revenu et 11 % du revenu global des ménages.
Dès lors, posons la question : pourquoi certaines dispositions prises en matière de cotisations sociales, et plus précisément de contribution sociale généralisée, prennent-elles en compte cette mise à contribution des revenus du capital alors que notre impôt sur le revenu, progressif et non proportionnel, comme peut l'être la CSG, continue de souffrir d'une réduction d'assiette sur ces mêmes revenus ?
C'est là, de notre point de vue, la voie d'une véritable réforme de l'impôt sur le revenu, le rendant à la fois plus lisible, plus juste, mieux réparti pour, en fin de compte, assurer une plus grande efficacité sociale et économique.
Tels sont, mes chers collègues, les quelques points que nous comptions aborder au début de la discussion de l'article 2.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. L'article 2 comprend, outre les dispositions usuelles d'indexation du barème de l'impôt sur le revenu, deux mesures majeures : la première tend à revenir sur la réforme engagée par le précédent gouvernement consistant à abaisser les taux du barème ; la seconde vise à revenir, pour le diminuer, sur le plafond de l'avantage fiscal procuré par la demi-part pour les personnes seules ayant eu un ou plusieurs enfants à charge.
Concernant le barème, le précédent gouvernement avait décidé d'alléger l'impôt sur le revenu de 75 milliards de francs sur cinq ans, soit un quart de son produit actuel. Cette réforme était très contestable parce qu'elle obérait fortement les recettes de l'Etat, ce qui n'était pas sans incidence sur la capacité de notre pays à se conformer aux critères en matière de déficit que nous nous sommes fixés pour le passage à l'euro, comme par rapport à de saines décisions de gestion de notre dette dont nous ne pouvons pas laisser perdurer la dérive.
Par ailleurs, déclarer que le barème de l'impôt sur le revenu est trop lourd s'apparente plus à un mythe qu'à une réalité. N'oublions pas que les taux cités sont des taux marginaux et non des taux moyens ; de ce fait, chaque contribuable paie moins d'impôt que s'il était imposé sur la base du taux marginal dont il relève officiellement.
On parle souvent du dernier taux, de 54 %, pour dire qu'à ce niveau de revenu l'Etat prélève plus de la moitié du revenu au contribuable concerné : c'est faux, puisque le barème est calculé par tranches de revenus sur lesquelles s'appliquent des taux différenciés et progressifs.
Pour payer 54 % de son revenu, un couple sans enfant, par exemple, devrait percevoir un revenu imposable supérieur à 12 292 200 francs, c'est-à-dire, gagner plus de 1,4 million de francs environ par mois.
Qui plus est, vouloir réduire plus encore qu'il ne l'est notre impôt sur le revenu ne pouvait qu'accroître le déséquilibre qui existe au niveau de nos structures de recettes publiques qui privilégient beaucoup trop les prélèvements indirects pesant sur tous les contribuables, au détriment de l'impôt direct dont sont exemptés 50 % des contribuables, ce qui, je le dis au passage, montre bien que la moitié des Français ne bénéficiaient pas le moins du monde de cette baisse d'impôt.
On nous parle souvent, dans d'autres domaines, de l'exception française. Ne pourrait-on pas dire, ici aussi, que la France est une exception dans la mesure où la majorité sénatoriale souhaiterait que l'impôt direct soit beaucoup moins important qu'il ne l'est dans les autres pays ?
Le Gouvernement a donc pris une sage décision ; nous tenions à le rappeler ici.
Pour ce qui concerne le plafonnement des effets du quotient familial, rappelons que cette demi-part ne correspond pas, pour les personnes concernées, à un surcoût dans leur vie quotidienne. En cela, cet avantage ne correspond en rien à la logique du quotient familial, qui tient compte des charges réelles de familles.
La majorité à l'Assemblée nationale a souhaité que cette mesure affecte moins de contribuables que prévu et, à cette fin, a relevé le plafonnement initial pour cette demi-part de 3 000 francs à 5 000 francs, ce qui réduira considérablement le nombre de personnes devenant imposables. Nous estimons que cette modification était sage et nécessaire.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'argumentation du Gouvernement semblant faible aux yeux de M. le rapporteur général, je me dois de la reprendre, d'autant qu'elle a été renforcée par les deux orateurs qui viennent de s'exprimer. Nous sommes en train de parler de la réforme Juppé, qui a été interrompue dans le présent projet de budget et que vous cherchez à rétablir en ce qui concerne le barème de l'impôt sur le revenu.
Je ne partage pas cette volonté, pour trois raisons qui me paraissent importantes.
En premier lieu, le dispositif proposé par le gouvernement précédent n'était pas financé. Le coût de cette réforme, je le rappelle, s'élevait à 75 milliards de francs sur cinq ans et les suppressions d'allégements, qui en étaient le corollaire, étaient très inférieures à ce montant.
En 1998, par exemple, le coût de la réforme du barème aurait été de 17,5 milliards de francs, et non de 15 milliards de francs comme, me semble-t-il, l'a affirmé M. le rapporteur général, alors que les suppressions d'allégements prévues en contrepartie n'auraient rapporté à l'Etat que 3,5 milliards de francs.
En second lieu, cette réforme accentuait un déséquilibre qui est déjà très important aujourd'hui entre la fiscalité directe et la fiscalité indirecte. Les impôts directs - et c'est une originalité française - ne représentent plus à ce jour qu'un peu moins de 40 % des recettes de l'Etat contre 60 % pour les impôts indirects.
Le Gouvernement et la majorité qui le soutient estiment qu'il faut remédier à cette situation, car les impôts indirects pèsent davantage sur les ménages à faibles ressources, comme une récente étude de l'INSEE l'a démontré. Une diminution supplémentaire du rendement de l'impôt sur le revenu accentuerait ce déséquilibre. Par ailleurs, les impôts directs représenteraient moins du tiers de l'ensemble des recettes fiscales de l'Etat contre 40 % aujourd'hui.
En troisième lieu - Mme Luc et M. Sergent ont, à juste titre, insisté sur ce point - cette réforme, si l'amendement de la commission était adopté, profiterait aux contribuables les plus aisés.
En fait, l'un des objectifs, sinon l'objectif essentiel de la réforme du barème est de diminuer le taux marginal maximal - Mme Luc l'a souligné à juste raison avec force - c'est-à-dire de ramener la tranche la plus élevée de 56,8 % à 47 %. On se rend bien compte que ce dispositif profiterait non pas aux 15 millions de contribuables, mais particulièrement à certains d'entre eux.
Permettez-moi de citer un exemple précis : les ménages les plus aisés, à savoir ceux dont les revenus fiscaux dépassent 500 000 francs par an, ce qui est une somme coquette, représentent 1,3 % des assujettis à l'impôt sur le revenu. Si cette réforme était poursuivie, c'est-à-dire si vous suiviez les recommandations de la majorité de la commission des finances du Sénat, ces 1,3 % de contribuables bénéficieraient de près de 15 % de l'allégement total.
Pour ces trois raisons qui me paraissent importantes, le Gouvernement estime que l'amendement de la commission doit être repoussé. Il a choisi une autre voie qui consiste à alléger les prélèvements sur les salaires. Le pouvoir d'achat des salariés sera accru grâce à l'abaissement du taux de la cotisation maladie et à son transfert sur une contribution sociale généralisée élargie à l'ensemble des revenus. Voilà une façon heureuse de rétablir la fiscalité entre les revenus du travail et ceux du capital, alors que le dispositif que propose la commission des finances va tout à fait en sens inverse.
J'ajoute que ce dispositif, en l'absence de contreparties, c'est-à-dire d'une diminution à due concurrence des dépenses, entraînerait un accroissement des déficits, ce qui serait absurde. Il est évident que, sur ce point, nous devrions être d'accord.
J'attends donc que M. le rapporteur général me précise, lors de l'examen de la deuxième partie de la loi de finances, sur quels budgets et sur quels chapitres au sein de chaque budget porteront ces diminutions. Tel est, en tout cas, l'esprit de la Constitution et des lois organiques.
En cet instant, n'ayant pas ces informations et au nom des trois raisons qui ont été parfaitement développées par Mme Luc et par M. Sergent, le Gouvernement demande le rejet de l'amendement de la commission.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-149, M. Marini et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent :
I. - De rédiger comme suit le 1° du texte présenté par le I de l'article 2 pour le I de l'article 197 du code général des impôts :
« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 27 630 francs les taux de :
« 9,5 % pour la fraction supérieure à 27 630 francs et inférieure ou égale à 50 380 francs ;
« 23 % pour la fraction supérieure à 50 380 francs et inférieure ou égale à 88 670 francs ;
« 32 % pour la fraction supérieure à 88 670 francs et inférieure ou égale à 135 000 francs ;
« 41 % pour la fraction supérieure à 135 000 francs et inférieure ou égale à 211 000 francs ;
« 46 % pour la fraction supérieure à 211 000 francs et inférieure ou égale à 275 000 francs ;
« 52 % pour la fraction supérieure à 275 000 francs. »
II. - En conséquence, de supprimer le paragraphe III de cet article.
III. - De compléter ce même article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant de l'allégement du barème de l'impôt sur le revenu prévu aux I et II ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Par amendement n° I 4 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission, propose :
I. - De rédiger comme suit le texte présenté par le 1° du I de l'article 2 pour le 1 du I de l'article 197 du code général des impôts :
« 1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 27 630 F les taux de :
« 9,5 % pour la fraction supérieure à 27 630 F et inférieure ou égale à 50 380 F ;
« 23 % pour la fraction supérieure à 50 380 F et inférieure ou égale à 88 670 F ;
« 32 % pour la fraction supérieure à 88 670 F et inférieure ou égale à 135 000 F ;
« 41 % pour la fraction supérieure à 135 000 F et inférieure ou égale à 211 000 F ;
« 46 % pour la fraction supérieure à 211 000 F et inférieure ou égale à 275 000 F ;
« 52 % pour la fraction supérieure à 275 000 F. »
II. - De supprimer le III de cet article.
La parole est à M. Gouteyron, pour défendre l'amendement n° I-149.
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je pourrais reprendre largement la plupart des arguments que M. le rapporteur général a développés tout à l'heure.
Dès 1997, l'allégement de l'impôt sur le revenu était de 25 milliards de francs et quelque 400 000 contribuables se voyaient exonérés du paiement de l'impôt sur le revenu.
La loi de finances pour 1997 prévoyait également les barèmes applicables à l'impôt sur le revenu pour les cinq années suivantes. Sur l'ensemble de la période, les taux du barème auraient subi une forte baisse et ce sont 2,4 millions de contribuables qui, au total, auraient été exonérés de l'impôt sur le revenu.
Le Gouvernement a décidé d'abandonner cette réforme et vous venez, monsieur le secrétaire d'Etat, de développer vos arguments. Cet amendement vise, au contraire, à la réintroduire. En effet, la baisse des prélèvements obligatoires constitue, avec la réduction de la dépense publique, les deux piliers de la politique dont la France a besoin.
De cette décision d'abandon, le Gouvernement ne tire d'ailleurs aucune conséquence. La réforme de l'impôt prévoyait, par exemple, de réduire progressivement le plafond de 10 % dont les retraités bénéficient. Or le Gouvernement gèle la réforme de l'impôt et maintient la réduction de ce plafond - les retraités apprécieront...
Environ un tiers de la baisse de l'impôt sur le revenu devait permettre l'intégration de la décote au barème. Le Gouvernement a déclaré se contenter de la situation actuelle sur ce sujet. C'est bien la preuve que nous n'avons pas la même approche de la politique fiscale touchant les familles. Sur l'année 1998, ce sont 5 milliards de francs qui devaient être consacrés à cette intégration. Nous soutenons toujours cette mesure d'équité fiscale en faveur des familles, qui dépasse de loin, en volume, chacune des mesures adoptées à grand renfort de publicité durant l'été. Ces dernières, d'ailleurs, n'ont pas eu les effets escomptés par le Gouvernement sur la consommation.
S'agissant de la réforme de l'impôt sur le revenu, monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement persiste à dire qu'elle n'était pas financée. A l'occasion de la discussion générale, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie nous a déclaré que le financement de 25 milliards de francs pour 1997 était insuffisant du seul fait de la suppression des niches fiscales prévue par le précédent gouvernement, et qu'il avait dû recourir à l'augmentation de l'impôt sur les sociétés, pour 24 milliards de francs.
Or vous-même, monsieur le secrétaire d'Etat, à l'occasion de la même séance du Sénat, vous avez déclaré que cette augmentation de l'impôt sur les sociétés avait servi en partie à financer 16 milliards de francs de moins-values dues à la surestimation des recettes de TVA. Il ne restait donc que 8 milliards de francs de recettes de la majoration de l'impôt sur les sociétés. Comment le Gouvernement a-t-il pu financer, dans ces conditions, la réforme de l'impôt qu'il a reprise à son compte pour 1997, s'il est exact que - et nous en doutons fortement - celle-ci n'était pas financée ?
Nous considérons que le financement existait pour 1997, mais que le Gouvernement utilise l'argument du non-financement pour justifier les ponctions supplémentaires opérées sur les entreprises pour financer les mesures de l'été dernier.
Nous n'avons pas la même approche de l'équité fiscale que le Gouvernement. Nous pensons que la réforme qu'avait introduite le gouvernement Juppé était une bonne réforme. C'est pourquoi notre groupe demande au Sénat d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-4 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Tout à l'heure, en m'exprimant sur l'article, j'ai expliqué les enjeux de cet amendement. Aussi ma présente intervention sera-t-elle plus brève.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'apprécie que vous ayez bien voulu indiquer que vous assumiez totalement vos responsabilités et que vous ne vous sépariez pas de l'administration de l'Etat - je n'en ai pas douté un instant. Je sais que vous partagez sans doute avec moi une certaine idée de l'Etat, à savoir sa continuité.
S'agissant, en particulier, de la présentation des rapports, on ne saurait imaginer que le changement de ministre puisse justifier trop de retard puisque, précisément, l'un et l'autre, nous croyons à la continuité de l'Etat. Cela relève d'une éthique républicaine que nous partageons, j'en suis convaincu, et je tenais à le souligner pour montrer que si beaucoup de choses nous séparent, des valeurs républicaines nous unissent.
M. Jacques Machet. Très bien !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Vous avez évoqué la réforme Juppé. Vous assumez vos responsabilités, avez-vous dit, ce que j'apprécie. Le Sénat assume les siennes. L'année dernière, il a voté, sur proposition du gouvernement précédent, une réforme portant allégement de l'impôt sur le revenu : c'est devenu sa réforme, ce n'est pas celle des Premiers ministres ! Nous sommes dans un pays où la loi reste votée par le Parlement ! Je veux bien que nous passions notre temps à donner le nom des ministres aux différents textes que nous approuvons, mais c'est une atteinte aux droits du Parlement. Je défends l'idée selon laquelle, dans notre pays, les lois sont encore votées par le Parlement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous considérez que cette réforme n'est pas très juste. M. Didier Migaud, qui est rapporteur général à l'Assemblée nationale, a indiqué, d'une manière tout à fait objective en la circonstance, que pour un ménage moyen, la baisse sur cinq ans serait d'environ un quart de l'impôt sur le revenu, ce qui, par conséquent, n'est pas totalement injuste.
S'agissant de l'intervention de M. Sergent, au nom de son groupe, j'ai noté - cela est important pour les agents économiques - que le groupe socialiste pense, au fond, que le taux marginal de l'impôt sur le revenu en France n'est pas si élevé que cela. Il faut donc que la France le sache !
En ce qui concerne la poursuite de cette politique d'allégement de l'impôt sur le revenu, la commission des finances considère qu'il faut nous rapprocher des autres pays européens, notamment pour éviter de pénaliser l'esprit d'entreprise dans notre pays.
Par ailleurs, il convient de prendre en compte la conséquence de l'augmentation de la CSG, qui est tout de même de 4,1 points. Cela aura pour effet d'augmenter à due concurrence le taux marginal de l'impôt sur le revenu que le groupe socialiste ne trouve pas élevé.
Je crois également - c'est une idée à laquelle le Sénat est attaché - qu'il faut en finir avec l'instabilité fiscale. En effet, cela pénalise beaucoup l'image de la France. L'impôt en France est réputé lourd, élevé, mais aussi instable. Cela porte atteinte à la crédibilité de notre pays.
En outre - je n'y reviens pas - ce plan quinquennal ne favorise pas les riches. Il profite à tous, notamment grâce à l'abaissement des taux de toutes les tranches et à la modification du système de la décote.
Tel est l'esprit de cet amendement que je recommanderai au Sénat de bien vouloir adopter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-149 et I - 4 rectifié ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je souhaiterais répondre à ces deux interventions, qui portent en fait sur deux sujets distincts.
Monsieur Gouteyron, vous êtes revenu sur ce que vous avez appelé « les mesures de l'été », c'est-à-dire les mesures correctrices qui ont dû être prises par le Gouvernement lorsqu'une évaluation des finances publiques, un « audit » comme on dit familièrement, a montré que des dérapages sérieux avaient eu lieu pendant l'été par rapport au projet qui avait été voté par vous-même à l'automne précédent, en ce qui concerne tant le budget de l'Etat que le financement de la sécurité sociale.
La majoration de l'impôt sur le bénéfice des sociétés, à la différence de celle qui a été votée en 1995 par le Parlement - je ne citerai plus de noms propres, monsieur le rapporteur général (Sourires) - épargne les petites entreprises. Elle a servi, pour les deux tiers, à couvrir des moins-values fiscales, c'est-à-dire des recettes de TVA qui avaient été annoncées et qui ne se réaliseront pas. Pour le reste, elle permettra de couvrir des moins-values de recettes concernant la sécurité sociale. Au total, les prélèvements resteront à peu près les mêmes que ce qui était prévu voilà un an. De cette manière, nous pourrons effectivement remplir les critères requis pour la mise en place de l'euro, ce qui n'était pas le cas cet été.
Mme Hélène Luc. La droite ne le supporte pas, monsieur le secrétaire d'Etat !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cela est bien possible. En tout cas, elle reste muette, et je l'en remercie ! (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Elle vous écoute !
M. Adrien Gouteyron. Soyez tranquille, nous répondrons !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. S'agissant toujours de l'année 1997, qui n'est pas terminée, vous avez évoqué les mesures qui ont été prises pour stimuler la consommation. Je vous remercie très sincèrement de faire référence au quadruplement de l'allocation de rentrée scolaire, aux crédits qui ont été votés pour que tous les enfants puissent manger à la cantine, à la majoration des aides personnalisées au logement et aux premiers crédits pour les emplois-jeunes, dont on voit maintenant les effets concrets sur le terrain.
M. Adrien Gouteyron. On verra !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ces mesures ont eu un impact sur la consommation. En effet, les dernières indications, qui datent du mois d'octobre et qui émanent de sources peu contestables, montrent que la consommation, avec des hauts et des bas, redémarre dans notre pays.
Ce que je retiendrai surtout de votre propos, monsieur Gouteyron, et M. le rapporteur général a dit la même chose, c'est que nous n'avons pas la même approche de l'équité fiscale.
Mme Hélène Luc. Ça c'est clair !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est clair en effet. Sur ce point, je ne rechercherai pas avec vous ce que l'on appelait naguère un « consensus mou ».
A mes yeux, la réforme proposée par la commission des finances du Sénat n'est pas conforme à notre vision de l'équité fiscale. Certes, elle bénéficie à l'ensemble des contribuables, mais elle donne une alouette aux petits contribuables et un cheval aux contribuables plus importants. (M. le rapporteur général sourit.) Elle corrige la progressivité de cet impôt, à laquelle nous sommes très attentifs.
M. le rapporteur général a ajouté l'argument de l'exception française, selon lequel nous devrions nous aligner sur nos partenaires européens sur ce sujet.
M. Alain Lambert, rapporteur général. En tenir compte !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Toutes les comparaisons internationales montrent que le poids de l'impôt sur le revenu, des impôts directs est plus faible en France que chez la plupart de nos partenaires européens. Par conséquent, si nous devions nous aligner sur nos partenaires européens, ce qui me paraît un objectif tout à fait louable, il faudrait diminuer la fiscalité indirecte. Par exemple, si nous en avions les moyens - mais nous essayons d'être sérieux - il faudrait diminuer la TVA...
M. Michel Charasse. Très bien !
Mme Hélène Luc. Voilà !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Depuis le temps que nous le demandons !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... à condition d'avoir un gage en face.
Vous, vous proposez de diminuer l'impôt sur le revenu sans inscrire quoi que ce soit en face, mais cela viendra peut-être dans la suite des débats.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Sûrement !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Donc, l'argument de l'alignement sur les autres pays européens se retourne, me semble-t-il, un peu contre vous.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit non pas d'alignement, mais de prise en compte !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je dois relater un fait. A l'Assemblée nationale, M. Leroy, député communiste, m'a posé une question concernant des salariés que l'on appelle « tuyauteurs », lesquels sont domiciliés en France et travaillent en Belgique. Ces salariés risquent, a-t-il dit, d'être imposés dans les deux pays et ils voudraient, bien qu'ils travaillent en Belgique, être imposés en France parce que l'impôt sur le revenu y est plus faible. (Exclamations sur les travées du RPR).
M. Jean Chérioux. Je connais beaucoup de gens qui font l'inverse !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je cite un cas précis !
M. Jean Chérioux. Il est unique en son genre !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le droit fiscal est clair : on est imposé dans le pays où l'on travaille.
Je ne veux pas être trop long, mais permettez-moi encore, monsieur le rapporteur général, de corriger un dernier point.
Les quatre points de CSG, me dites-vous, viennent s'ajouter au taux marginal d'imposition,...
M. Jean Chérioux. Oui !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... qui est, à l'évidence, l'objet de toutes vos attentions.
M. Jean Chérioux. Et pour cause !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je respecte parfaitement cette volonté sénatoriale de concentrer son attention sur le taux marginal de l'impôt sur le revenu.
M. Jean Chérioux. C'est une constatation !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est votre droit le plus strict.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il ne faut pas en avoir honte ! Je n'ai pas honte !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je respecte tout à fait vos convictions. Respectez les miennes ! Je crois d'ailleurs que c'est le cas.
Votre conception de l'équité fiscale est centrée sur le taux marginal maximal de l'impôt sur le revenu. La nôtre est centrée sur le taux moyen de l'impôt sur le revenu, et surtout sur celui de la TVA. Nous n'avons pas les mêmes idées, mais nous dialoguons courtoisement.
Dans ces conditions, je dis simplement que les quatre points de CSG dont nous parlons sont déductibles. En outre, ils ne sont pas ajoutés : ils viennent en substitution de cotisations salariales.
En conséquence, même les salariés qui ont des revenus substantiels vont gagner à cette opération puisqu'ils vont bénéficier d'une baisse de cotisation sociale.
Je ne peux donc que persister dans mon refus des deux amendements.
M. Jean Chérioux. Perseverare diabolicum !
M. Michel Charasse. Le président Chérioux ira au paradis ! (Sourires.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-149.
M. Adrien Gouteyron. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Gouteyron.
M. Adrien Gouteyron. Monsieur le président, nous retirons l'amendement n° I-149 au profit de l'amendement n° I-4 rectifié de la commission. (M. Chérioux applaudit.)
M. le président. L'amendement n° I-149 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-4 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances souhaite que le Sénat se prononce par scrutin public sur cet amendement qui vient de donner lieu à un débat important.
Il est clair que le désaccord est profond entre le Gouvernement et la majorité sénatoriale. Mais, j'y insiste, la majorité sénatoriale n'a surtout pas à avoir honte de ce désaccord, comme je l'ai dit à l'instant à M. le secrétaire d'Etat.
S'agissant du taux marginal et de la notion d'équité fiscale, mes chers collègues, ne nous laissons jamais diaboliser. Ce qui compte, c'est que le pays se développe, c'est que des emplois s'y créent, c'est que des entreprises s'y implantent.
M. Jean Chérioux. Voilà !
M. Alain Lambert, rapporteur général. En conséquence, tout ce qui relève d'une obsession égalitaire et qui aboutit au départ des entreprises, à la disparition des emplois, et va contre la France.
M. Adrien Gouteyron. Et contre les Français !
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est parce que nous voulons que la France soit un site industriel prospère que nous nous battons pour que la fiscalité soit attractive. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, vous venez de dire quelque chose d'important. Vous souhaitez - et nous le souhaitons aussi - que, dans notre pays, tirée par la consommation et par l'investissement, la croissance soit la plus rapide possible.
Nous sommes en train de parler de l'impôt sur le revenu, mais je pense que, le moment venu, vous aurez à coeur de revenir sur la majoration de la fiscalité qui pèse sur les entreprises. En effet, la majoration de 10 % qui a été votée par le Parlement en 1995 a handicapé l'investissement productif. Si vous voulez développer l'investissement - je suis votre propre logique, qui n'est pas celle du Gouvernement - vous aurez donc à coeur de revenir sur cette surtaxe.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-4 rectifié, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 16 : :

Nombre de votants 310
Nombre de suffrages exprimés 294
Majorité absolue des suffrages 148
Pour l'adoption 204
Contre 90

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Après ce scrutin solennel sur un article important aux yeux du Sénat, la majorité sénatoriale vient de dégrader - provisoirement, je l'espère - le déficit budgétaire d'environ 18 milliards de francs.
Ces 18 milliards de francs, il faudra, à un moment où à un autre, - le plus tôt sera le mieux - les compenser. Pour vous aider dans votre réflexion, je vous signale que si, d'aventure, aucun des 60 000 fonctionnaires qui partiront à la retraite en 1998 n'était remplacé, cela ne suffirait pas encore à gager cette somme.
Je veux donc simplement dire, au nom du Gouvernement, que la majorité sénatoriale a pris une décision lourde de conséquences soit pour le déficit, soit pour la réduction des dépenses, et je voulais marquer ce point avec un peu de solennité puisque cet amendement a été voté, lui aussi, avec solennité.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, restons dans la solennité.
Il faudrait que nous nous mettions d'accord sur l'estimation des mesures que nous prenons. Vous venez, monsieur le secrétaire d'Etat, de nous parler de 18 milliards de francs. Or ce ne sont pas les chiffres dont je dispose. S'il convient de les rectifier, je voudrais que cela soit fait !
Cela pose, mes chers collègues, un vrai problème de travail parlementaire. En effet, je présume que, lorsque je vais demander aux services du ministère des finances de me communiquer très exactement le coût de la réforme que nous venons d'adopter, nous ne serons pas à 18 milliards de francs. Il faut donc que nous puissions débattre dans de bonnes conditions.
M. Adrien Gouteyron. Très bien !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je ne mets en cause ni la loyauté, ni la sincérité, ni la courtoisie de M. le secrétaire d'Etat - la question ne se pose pas en ces termes-là - mais, lorsque nous évoquons l'argent des contribuables, nous devons parler de chiffres vérifiés, vérifiables et constants. A défaut, la commission des finances ne peut qu'éprouver beaucoup de difficultés pour travailler.
Ensuite, monsieur le secrétaire d'Etat, s'agissant des leçons que vous entendez nous donner sur la manière de réduire les dépenses, permettez-moi de livrer à mes collègues du Sénat quelques informations sur la procédure utilisée par le nouveau gouvernement lorsqu'il a voulu gager le décret d'avance qui a ouvert des crédits supplémentaires, le 9 juillet dernier.
Il n'y est pas allé de main morte : au titre III, il a annulé 431 millions de francs de crédits consacrés à l'enseignement scolaire. Si nous faisions des propositions de cette nature, nous serions condamnés sans jugement ! Au budget de l'intérieur, il a annulé 283 millions de francs sur des crédits destinés à la police nationale. Il a ensuite annulé - écoutez bien, monsieur Gouteyron ! - 209 millions de francs de crédits du ministère de la culture.
M. Michel Charasse. C'étaient des crédits gelés !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il a encore annulé, mes chers collègues, sur les crédits du titre IV du ministère du travail, 1 546 millions de francs.
Je veux bien que l'on nous fasse un procès d'intention sur les réductions de crédits que nous serons amenés à proposer au Sénat en seconde partie, mais je crois qu'il faut en toutes choses raison garder et ne pas nous faire de procès d'intention.
Je voudrais vous dire en conclusion, monsieur le secrétaire d'Etat, que la réflexion du Sénat s'est organisée selon l'ordre chronologique suivant : il ne s'est pas agi d'abord de vouloir réduire les prélèvements et de trouver à tout prix les réductions de crédits correspondant à cette réduction ; il s'est agi de plafonner la dépense publique. En effet, tous les experts, successivement, depuis plusieurs années, nous indiquent qu'on ne réduira jamais dans notre pays les prélèvements obligatoires si nous ne réduisons pas la dépense publique.
M. Michel Charasse. Cela, c'est sûr !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Nous avons donc voulu plafonner la dépense publique, ce qui nous permet de prélever moins : nous avons tout simplement choisi de rendre aux Français une partie des augmentations d'impôts qui avaient été votées les années précédentes.
Voilà, monsieur le président, pour rester dans le cadre de la solennité, ce qu'il me semblait indispensable d'ajouter. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, si j'ai dit 18 milliards de francs, c'est que j'ai arrondi : il s'agit exactement de 17,6 milliards de francs, je veux bien vous apporter cette précision.
M. Michel Charasse. Et 12,5 milliards de francs pour Juppé !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est donc une somme importante.
Vous avez cité certains des redéploiements qui ont été effectués en cours d'année 1997. Il s'agit là d'une pratique tout à fait normale ! Au total, 30 milliards de francs ont ainsi été redéployés entre différents budgets.
La question qui nous est posée collectivement consiste non pas à redéployer des dépenses, comme il est normal en cours de gestion, mais à trouver 17,6 milliards de francs d'économies. Mais je ne doute pas, monsieur le rapporteur général, que vous trouverez ces sommes dans la suite du débat budgétaire.
M. le président. Toujours sur l'article 2, je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-68, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent :
I. - De supprimer le texte présenté par le b) du 2° du paragraphe I de l'article 2 pour le troisième alinéa du I de l'article 197 du code général des impôts.
II. - De compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Le taux prévu au 2 de l'article 200 A du code général des impôts est relevé à due concurrence de la suppression du texte proposé par le b) du 2° du I. »
Par amendement n° I-150, MM. Descours, Chérioux, et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent :
I. - Dans le texte présenté par le b) du 2° du paragraphe I de l'article 2 pour modifier le paragraphe I de l'article 197 du code général des impôts, de remplacer la somme : « 5 000 » par la somme « 12 500 ».
II. - De compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du rélèvement du plafond de la demi-part du quotient familial des contribuables célibataires, veufs ou divorcés prévu au I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Par amendement n° I-24, M. About propose, dans le texte présenté par le b) du 2° du paragraphe I de cet article pour le troisième alinéa du 2 du I de l'article 197 du code général des impôts, de substituer à la somme : « 5 000 F », la somme : « 12 000 F ».
Par amendement n° I-145, MM. Joly et Lesein proposent :
I. - Dans le b) du 2° du paragraphe I de l'article 2, de remplacer la somme « 5 000 francs » par la somme « 11 600 francs ».
II. - De compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« « ... - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du relèvement du plafond de la demi-part de quotient familial des contribuables célibataires, veufs ou divorcés sont compensées à due concurrence par l'augmentation des droits de consommation prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-30, MM. Foy, Habert, Darniche, Durand-Chastel, Grandon, Maman, Türk et Adnot proposent :
I. - Dans le texte présenté par le b) du 2° du paragraphe I de l'article 2 pour le troisième alinéa du 2 du I de l'article 197 du code général des impôts, de remplacer la somme « 5 000 F » par la somme « 10 000 F ».
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« « ... - La perte de recettes résultant du relèvement du plafond de la réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial accordée aux personnes seules ayant élevé au moins un enfant est compensée à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-182, M. Machet et les membres du groupe de l'Union centriste proposent, dans le deuxième alinéa du b) du 2° du paragraphe I de l'article 2, de remplacer la somme « 5 000 F » par la somme « 8 190 F ».
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-68.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La réforme de l'impôt sur le revenu, telle qu'elle avait été définie l'an dernier par le précédent gouvernement, comprenait initialement une mesure tendant à limiter les effets de la demi-part accordée aux contribuables veufs, célibataires ou divorcés en termes de fixation du revenu imposable.
Nous avions combattu, mais nous n'étions pas les seuls, cette orientation du projet de loi de finances pour 1997. Pour finir, la disposition incriminée avait été jugée inconstitutionnelle. Je rappelle qu'un plafonnement avait été fixé à 16 200 francs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous voyons revenir cette disposition critiquable au travers d'un plafonnement de la réduction du montant de l'impôt liée à cette demi-part. Bien des personnes en ont été surprises et nous ont saisis du problème. Vous le savez également, monsieur le secrétaire d'Etat, cette disposition a suscité les protestations de nombreuses associations.
Nous nous interrogeons donc avec d'autres sur les objectifs visés ici.
Nous avons eu l'occasion de le souligner, notamment Mme Luc dans son intervention sur l'article, il nous paraît indispensable de concevoir une réforme de l'impôt sur le revenu partant d'une analyse objective de la dépense fiscale associée à cet impôt et, singulièrement, du traitement des clauses dérogatoires autorisées pour les revenus du capital et de la propriété.
La demi-part des contribuables veufs, célibataires ou divorcés est en effet une mesure de caractère somme toute marginal, dans l'ensemble de la dépense fiscale associée à l'impôt sur le revenu. Elle présente par ailleurs la caractéristique d'être universelle et non spécifique, quels que soient les éléments composant le revenu imposable.
Pour notre part, il nous semble donc qu'il y a sans doute d'autres sources à exploiter pour trouver, en l'état actuel des choses, un peu plus d'un milliard et demi de francs de recettes fiscales. Vous observerez d'ailleurs que c'est le sens du gage que nous avons proposé.
Pour autant, cette position doit, à mon sens, être plus explicitée.
J'ai invoqué la décision par laquelle, l'année dernière, une disposition de la loi de finances initiale avait été frappée d'inconstitutionnalité, ce qui revenait, à l'époque, à faire adopter un amendement de notre groupe par le Conseil constitutionnel !
Mais il y a plus.
Nous nous sommes livrés à un petit calcul, qui montre la portée de la mesure qui nous est ici présentée. Il en ressort que ce sont des contribuables disposant d'un revenu annuel d'environ 170 000 francs qui seraient concernés, donc des contribuables exerçant, par exemple, des professions d'agent de maîtrise ou encore des fonctionnaires de l'Etat en fin de carrière. Beaucoup de ceux qui protestent insistent parce qu'ils ne se considèrent pas, monsieur le secrétaire d'Etat, comme des priviligiés !
La cible, si l'on peut dire, est donc assez loin d'être les contribuables les plus aisés et, ne serait-ce que pour cela, il conviendrait pour le moins de réfléchir à la portée de la mesure proposée.
Il importe aussi d'être cohérents dans notre démarche. Ainsi, les mêmes contribuables pourraient, aux termes des articles relatifs à la taxe d'habitation, bénéficier d'un plafonnement de leur taxe d'habitation et, dans un autre cas, faire l'objet d'un plafonnement non pas de leur impôt mais plutôt de la réduction de leur impôt !
Il convient donc d'être logique, et cela pourrait constituer, dans les faits, une raison suffisante pour modifier la lettre de l'article, monsieur le secrétaire d'Etat.
Pour autant, il faut que les choses soient aussi claires, et vous verrez là une raison dernière de modifier l'article 2. Il ne nous semble pas très juste, sur le plan moral, de mettre ainsi en cause la situation fiscale de contribuables qui, pour l'essentiel, ont, avant de faire l'objet d'une catégorie spécifique en termes de quotient familial, connu ce que j'appelle des accidents de la vie tels que divorce, séparation, perte d'un enfant, c'est-à-dire des événements particulièrement pénibles et dont l'expérience montre qu'ils ne sont jamais vécus dans la sérénité.
Ce sont des épreuves et, ne serait-ce que pour cette ultime raison, il convient d'ôter cette disposition de l'article 2.
La commission des finances nous propose de modifier l'article en reprenant la lettre de la réforme de l'impôt sur le revenu arrêtée par le précédent gouvernement. Nous ne pouvons évidemment pas souscrire à cet amendement, et ce pour la raison simple que nous n'acceptons pas qu'une baisse du barème de l'impôt sur le revenu se traduise, en seconde partie, ...
M. le président. Veuillez conclure, madame Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. ...par la baisse équivalente des dépenses de l'Etat, singulièrement des dépenses d'intervention ou des dépenses de fonctionnement des services publics.
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Chérioux, pour défendre l'amendement n° I-150.
M. Jean Chérioux. Monsieur le secrétaire d'Etat, décidément, Bercy n'aime pas les veuves et les veufs !
Le gouvernement actuel, qui semble pourtant animé d'un grand souci de justice fiscale, s'est cru obligé de répondre aux pressions des services du ministère des finances pour reprendre cette vieille affaire de suppression de la demi-part qui était accordée aux veuves et aux veufs. A l'évidence, non seulement ce n'est pas une mesure de justice fiscale, mais c'est même une grande injustice, car les personnes visées ont des revenus relativement modestes, qui sont même inférieurs aux plafonds admis en matière d'allocations familiales. Surtout, cette mesure ne tient pas compte de la situation réelle des veuves et des veufs, et je pense ici surtout aux veuves, qui sont très nombreuses.
Monsieur le secrétaire d'Etat, une personne frappée par le veuvage ne peut changer son train de vie du jour au lendemain.
Des dépenses particulières s'imposent à elles que n'ont pas à assumer les célibataires. Pour les services fiscaux, tout est simple : ces personnes ont un appartement trop grand ? Elles n'ont qu'à déménager ! Abandonner quarante ou cinquante ans de vie derrière soi ? Rien que de très normal, si l'on ne peut plus faire face ! Non, vraiment il faut ici un peu d'humanité. A défaut, ce serait une attaque contre toutes ces personnes qui, non seulement, ont déjà été atteintes par la vie, puisqu'elles ont perdu le compagnon ou la compagne qu'elles aimaient, mais qui, de plus, se sont certainement privées, au début de leur vie, pour élever leurs enfants. Et, au terme de leur existence, alors qu'elles sont privées de leur conjoint, on mégote sur leurs moyens de vivre ? C'est absolument inadmissible !
M. Descours et moi-même n'avons pas proposé la suppression pure et simple de la disposition incriminée uniquement parce que nous voulons être cohérents, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous savons que la commission des finances a élaboré un projet qui suppose un certain équilibre. Aussi est-ce à regret que nous nous sommes contentés de proposer de relever simplement le plafond pour le porter de 5 000 francs à 12 500 francs. C'est une mesure de justice, raison pour laquelle je demande au Sénat de nous suivre.
M. le président. L'amendement n° I-24 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Lesein, pour défendre l'amendement n° I-145.
M. François Lesein. Monsieur le secrétaire d'Etat, comme vous l'avez vous-même souligné à l'Assemblée nationale, « les personnes seules ayant élevé un enfant méritent un hommage de la nation, même lorsque cet enfant a dépassé l'âge de vingt-six ans et qu'il n'est plus à charge ».
Cet « hommage » prend la forme d'une demi-part fiscale supplémentaire dont l'avantage est cependant plafonné ; dans le projet de loi de finances pour 1998, ce plafond est abaissé considérablement puisque, même après le « léger mieux » obtenu à l'Assemblée nationale, il est proposé de diviser l'avantage actuel par plus de trois.
S'il devait être adopté en l'état, ce nouveau plafond aurait de lourdes conséquences pour de nombreux contribuables, notamment veuves et veufs, modestes, on vient de le rappeler. C'est pourquoi le présent amendement vise, tout en tenant compte de l'effort de rigueur demandé à chacun et en retenant un critère objectif, à maintenir l'avantage au niveau de la moitié du « coût d'un enfant » estimé par l'Union nationale des allocations familiales, soit 11 600 francs.
M. le président. La parole est à M. Habert, pour défendre l'amendement n° I-30.
M. Jacques Habert. Cet amendement est rédigé dans le même esprit que les amendements précédents. Il est vrai qu'il concerne l'une des dispositions les plus scandaleuses de ce projet de loi, en tout cas celle qui a suscité le plus de protestations dans l'opinion publique, puisqu'elle frappe, on vient de le dire, des personnes âgées ou des personnes ayant connu, durant leur vie, des difficultés particulièrement sérieuses.
Abaisser le plafond de la réduction d'impôt accordée aux personnes seules ayant élevé au moins un enfant, notamment les veuves qui n'ont guère exercé d'activité professionnelle pour se consacrer à leurs enfants et dont la situation matérielle s'est dégradée au moment du décès de leur conjoint, c'est frapper une catégorie déjà défavorisée de nos concitoyens de manière tout à fait inappropriée et excessive.
Contre cette stipulation trop sévère, tous les groupes demandent que le plafond donnant droit à la déduction d'impôt soit relevé. M. Chérioux propose qu'il soit porté de 5 000 francs, somme tout à fait insuffisante retenue dans le projet de loi de finances, à 12 500 francs ; M. About suggère pour sa part 12 000 francs et M. Lesein 11 600 francs.
Dans l'amendement que je présente, M. Foy et les sénateurs non-inscrits se montrent moins exigeants et s'efforcent d'aller un peu plus dans le sens du Gouvernement : ils ne proposent qu'un relèvement à 10 000 francs, ce qui paraît vraiment le moins que l'on puisse faire.
Nous espérons donc que le Gouvernement nous entendra et que la commission des finances donnera un avis favorable sur cet amendement, qui constitue, pensons-nous, un effort de compromis et, en même temps, un geste de justice indispensable.
M. le président. La parole est à M. Machet, pour présenter l'amendement n° I-182.
M. Jacques Machet. Dans l'article 2 du projet de loi de finances pour 1998, il est prévu de ramener de 16 200 francs à 5 000 francs le plafond de l'avantage fiscal procuré par la demi-part supplémentaire dont bénéficient les célibataires, veufs ou divorcés ayant élevé au moins un enfant. Cette diminution interviendrait pour l'imposition des années postérieures à l'année du vingt-sixième anniversaire de la naissance du dernier enfant.
Il s'agit là d'une mesure particulièrement brutale et arbitraire, qui n'a fait l'objet d'aucune concertation, ce que je regrette au nom des personnes seules.
Cet avantage fiscal profite aujourd'hui avant tout aux veuves, pour lesquelles la réduction proposée par le Gouvernement pourrait avoir de lourdes conséquences. Plus de 3 500 000 personnes bénéficient en effet de cette demi-part supplémentaire, dont 2 400 000 veuves et veufs.
Mes chers collègues, dans leur majorité les femmes concernées par cette mesure fiscale ont consacré une partie de leur existence à l'éducation de leurs enfants, tout en exerçant parallèlement un emploi souvent précaire. Ces personnes ont peiné dur, dans des conditions parfois modestes, pour élever leur enfant.
L'octroi de cette demi-part supplémentaire, qui date de la loi de finances de 1946, est la preuve de la reconnaissance par la nation de la contribution que ces femmes ont apportée dans des circonstances difficiles.
Je suis naturellement conscient des efforts que chacun d'entre nous doit accomplir pour le redressement des finances publiques de notre pays, monsieur le secrétaire d'Etat. Cependant, la nécessaire solidarité ne doit pas s'exercer au détriment des veuves et des veufs qui ont élevé seuls des enfants : ces personnes ne sont en rien des « privilégiés », contrairement à ce qui a été dit.
Par ailleurs, cette mesure intervient parmi d'autres dispositions qui ont tendance à alourdir les prélèvements pesant sur les contribuables français. Je pense notamment à la remise en cause, à partir de 1998, de la réforme et de l'allégement de l'impôt sur le revenu.
Vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le Sénat a toujours été très attentif au sort des veuves et des veufs. Sur l'initiative de notre excellent collègue M. Jean Cluzel, la Haute Assemblée a d'ailleurs créé en son sein un groupe d'études des problèmes du veuvage, que j'ai aujourd'hui l'honneur de présider, et dont M. Jean-Pierre Fourcade est le président d'honneur.
Ce groupe d'études s'est réuni jeudi dernier afin de procéder à l'audition de la FAVEC, la fédération des associations de veuves civiles chefs de famille, dont chacun ici s'accorde à reconnaître le rôle essentiel. Sa présidente, Mme Hervé, a exprimé la très vive inquiétude qu'inspirait à ses adhérentes la mesure proposée par le Gouvernement.
Tous les membres du groupe d'études présents à cette réunion ont jugé beaucoup trop brutale la réduction envisagée.
Au nom des membres du groupe de l'Union centriste, je présente donc un amendement tendant à porter de 5 000 francs à 8 190 francs - soit la moitié du montant en vigueur actualisé - le plafond de l'avantage procuré par la demi-part supplémentaire accordée aux personnes ayant élevé seules un enfant.
Cet amendement permettrait de limiter les effets de la réduction proposée et de garantir aux contribuables de revenus modestes qu'ils ne seront pas lésés.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s I-68, I-150, I-145, I-30 et I-182.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Tous nos collègues ont exposé le problème réel que pose l'abaissement brutal du plafond, même si le principe du plafonnement spécifique n'est pas contestable.
L'Assemblée nationale a relevé ce plafond de 3 000 francs à 5 000 francs, ce qui montre la brutalité de la proposition initiale.
Je rappelle que l'amendement n° I-68 tend à la suppression du plafonnement spécifique, le n° I-150 le situe à 12 500 francs, le n° I-24 à 12 000 francs, le n° I-145 à 11 600 francs, le n° I-30 à 10 000 francs, enfin le n° I-182 à 8 190 francs.
C'est cette dernière solution, le plafonnement à 8 190 francs correspondant à la moitié du plafonnement prévu pour 1998 pour la demi-part normale du quotient familial, qui est apparue à la commission comme à la fois la plus équitable et la plus acceptable sur le plan du coût, lequel n'est pas négligeable, si je m'en réfère au chiffrage que m'ont donné les services du ministère du budget : 890 millions de francs.
Je demande donc aux auteurs des amendements n°s I-68, I-150, I-145 et I-30 de bien vouloir accepter de retirer leur amendement au bénéfice de l'amendement n° I-182, sur lequel la commission des finances émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-68, I-150, I-145, I-30 et I-182 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les différentes interventions sur cette mesure que propose le Gouvernement et je vais essayer de répondre avec clarté et humanité sur ce point.
M. Jean Chérioux. Avec clarté sûrement, avec humanité ce sera plus difficile !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. D'abord, la mesure proposée ne touche évidemment en rien les personnes seules, veuves ou divorcées qui élèvent leurs enfants. La question se pose à partir du moment où le dernier enfant a dépassé l'âge de vingt-six ans, âge auquel, logiquement, il est sorti du foyer fiscal.
Nous parlons là du quotient familial, et ce dispositif est un élément très important de notre code fiscal ; il prévoit des aménagements d'impôt sur le revenu pour les familles constituées en foyer fiscal.
Sur le principe, je puis simplement reprendre à mon compte, s'il le permet, ce qu'a dit M. le rapporteur général, à savoir que le principe est admissible. Le débat se situe donc non pas sur le principe - et c'est là me semble-t-il, une remarque très importante qu'a faite M. le rapporteur général - mais sur le niveau du plafond.
M. Jean Chérioux. Il y a déjà un plafond !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Ce que je voudrais dire sur ce point, monsieur Chérioux, c'est qu'il faut, au-delà du principe, puisque ce dernier n'est pas en cause, voir à quel niveau placer ce fameux plafond.
Il était, l'an dernier, de 16 200 francs. Le Gouvernement propose de le maintenir à 5 000 francs, montant qui a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale. Vous avez, pour votre part, mesdames, messieurs les sénateurs, fait différentes propositions : maintien à 16 200 francs pour Mme Beaudeau, 12 500 francs pour M. Chérioux, 12 000 francs pour M. About, 11 600 francs pour M. Lesein, 10 000 francs pour M. Habert et 8 190 francs pour M. Machet, proposition à laquelle s'est rallié M. le rapporteur général.
En ce qui me concerne, je voudrais simplement avancer deux types d'arguments en faveur du maintien de la position du Gouvernement.
En premier lieu, avec un plafond à 5 000 francs, on ne touche que les contribuables qui déclarent au moins 127 000 francs de pension, c'est-à-dire ceux qui perçoivent 10 500 francs de retraite par mois.
M. Jean Chérioux. Des gens très riches donc !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je n'ai pas dit cela, monsieur Chérioux, j'ai simplement indiqué la catégorie de retraités qui était touchée !
M. Jean Chérioux. Où va-t-on ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. D'ailleurs, il est écrit, à la page 15 de l'excellent rapport de M. Alain Lambert, que cette mesure concernerait 190 000 personnes.
M. Jean Chérioux. Entre autres !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. En fixant le plafond à 5 000 francs, on demande un effort de solidarité à 190 000 personnes, qui ont élevé, parfois dans des conditions difficiles, des enfants certes, mais qui ont quitté le foyer familial ; je veux mettre en regard de ces 190 000 personnes les trois millions et demi de personnes vivant seules.
Le second argument tient au coût de cette mesure. Je n'ajouterai rien aux propos de M. le rapporteur général qui a rappelé qu'il était de 890 millions de francs. Si le Sénat adoptait l'amendement proposé par M. Machet, et accepté par la commission des finances, aux allégements d'impôts que le Sénat a votés voilà peu, il conviendrait d'ajouter, en compression des dépenses, ces 890 millions de francs.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-68.
M. Michel Charasse. Je demande la parole contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. En réalité, monsieur le président, je m'exprimerai contre toute cette série d'amendements. (Ah ! sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Je trouve qu'il s'agit d'un excellent débat - je ne sais pas si le Gouvernement l'a voulu sciemment mais, en tout cas, il l'a - puisque cette affaire comporte un réel danger juridique, surtout à un moment - ce n'est pas seulement cette année, mais depuis deux ou trois ans - où nous nous préoccupons des niches fiscales et de tous les éléments qui introduisent une inégalité des Français devant l'impôt : or là, nous sommes en plein dedans !
La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui est le fondement du travail législatif qu'accomplit le Parlement en matière fiscale, rappelle que l'impôt doit être réclamé à « proportion des facultés respectives des contribuables ».
Le quotient familial, qui a été inventé à la Libération, tient compte de la situation des contribuables et de leurs familles, mais à l'instant - situation à l'instant - où s'applique l'impôt, c'est-à-dire au moment où on leur réclame l'impôt. On a complètement dévoyé la nature du quotient familial en changeant sa nature pour quelques catégories particulières, dont les veuves dont nous parlons aujourd'hui. On a donc transformé le quotient familial, qui est une aide accordée en matière fiscale pour tenir compte des charges de famille, en un abattement spécial pour des gens qui n'ont plus personne à charge, mais qui continuent à bénéficier d'une faveur comme s'ils en avaient toujours. Tant et si bien qu'on aboutit à une situation assez paradoxale, et j'ai la même tendresse pour les veuves que les uns et les autres qui se sont exprimés ici,...
M. Jean Chérioux. Nous l'espérons bien !
M. Michel Sergent. Nous n'en doutons pas !
M. Michel Charasse. ... la veuve et l'orphelin faisant partie quand même de notre vocation de base.
Le veuf qui a eu deux enfants garde un morceau de quotient familial ; mais le couple qui a eu cinq enfants ne garde rien du tout. On ne peut pas décrire plus clairement la rupture du principe d'égalité devant l'impôt.
Pour ma part, je pense que cette discussion devrait conduire le Gouvernement à réfléchir à la question de savoir s'il ne faut pas essayer de « nettoyer » le quotient familial, quitte à créer par ailleurs des abattements particuliers qui ne seraient pas liés au quotient familial.
Pourquoi vous dis-je cela, mes chers collègues ? Parce que cette disposition figure dans la loi de finances, dont le Conseil constitutionnel va certainement être saisi. J'ai fait ces observations pour lui signaler le problème : maintenant, il ne pourra pas éviter de se prononcer sur cette disposition, même s'il n'en n'est pas expressément saisi ! (M. le rapporteur général sourit.) J'aimerais bien ainsi qu'il clarifie les choses !
J'ajouterai que - mais cela va plutôt dans le sens du Gouvernement, on ne s'en étonnera pas, mais pas forcément par complaisance à son égard, Christian Sautter me connaît - moins l'avantage inégal sera important, moins le Conseil constitutionnel sera incité à l'annuler. C'est la raison pour laquelle je vais me prononcer contre tous ces amendements.
Par ailleurs, et sur un autre point, il y a eu une petite passe d'armes tout à l'heure, sympathique et courtoise, entre M. le rapporteur général et M. le secrétaire d'Etat au sujet du chiffrage du précédent amendement qui a été adopté.
Compte tenu des efforts que fait le rapporteur général - nous en sommes témoins - pour essayer de nous soumettre en commission des démarches intellectuelles qui ont leur logique, leur honnêteté, leur objectivité, même si nous ne sommes pas toujours d'accord - mais cela est un autre problème - je souhaiterais qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur ces histoires de chiffrage. Je suis moi-même resté à 12,5 milliards de francs en moins pour l'impôt sur le revenu dans le système Juppé de l'année dernière. Maintenant, on nous annonce 18 milliards de francs. Le rapporteur général a un peu protesté tout à l'heure en disant qu'il ne comprenait pas ces différences de chiffrage. Je ne mets pas en doute le chiffrage de 18 milliards de francs avancé par M. le secrétaire d'Etat, mais ne pourrait-on pas avoir, en trente secondes, la petite explication qui éclairerait les uns et les autres et qui nous sortirait de ce sentiment de malaise que j'ai ressenti tout à l'heure au début de cette discussion ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je voudrais clarifier la question du chiffrage.
La réforme qui a été adoptée par le Parlement l'an dernier comportait deux ensembles : une réduction du barème d'environ 18 milliards de francs et une suppression d'un certain nombre d'avantages fiscaux pour un montant de l'ordre de 5 milliards de francs. Le coût brut, puisque nous sommes en train de parler de l'allégement du barème, est donc de 17,6 milliards de francs.
Le dispositif voté l'an dernier comportait une réduction du barème et la suppression de certains avantages fiscaux. Le chiffre de 12,5 milliards de francs que M. le rapporteur général et M. Charasse ont cité, représente le coût net de la réforme, c'est-à-dire à la fois la réduction de barème et la réduction des avantages fiscaux.
Telles sont les explications que je souhaitais apporter pour qu'il ne subsiste pas d'ambiguïté.
Par ailleurs, je m'associe à l'hommage que M. Charasse vient de rendre au travail accompli par M. le rapporteur général et l'ensemble des membres de la commission des finances. J'ai lu les rapports avec un très grand intérêt, et j'ai pu constater que la clarté y règne. Si je ne partage pas les convictions qui y sont exprimées, la démarche intellectuelle me paraît parfaitement sérieuse.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-68, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-150.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. M. le secrétaire d'Etat a expliqué pourquoi les veuves ou les veufs perdaient cet avantage fiscal lorsque leurs enfants étaient âgés de vingt-six ans.
Mais, moi, tout à l'heure, j'ai voulu expliquer que, lorsque l'un des conjoints disparaît, l'autre, dont les revenus sont moindres, doit souvent faire face à des charges importantes. Cette situation justifie donc l'avantage fiscal qui leur avait été accordé. Je pense au loyer notamment, mais aussi à bien d'autres charges. Evidemment, sous l'angle de la justice, de l'égalité, entre les veuves et les veufs qui ont eu des enfants et ceux qui n'en ont pas eu, il y a une grande différence.
M. Michel Charasse. Eh bien, oui !
M. Jean Chérioux. Convenez que ceux qui ont fait des sacrifices, des efforts pour la nation, méritent bien une demi-part supplémentaire.
M. Michel Charasse. Pas sur le quotient familial !
M. Jean Chérioux. Je considère que, pour le moment, nous débattons du quotient familial !
Je serais prêt à retirer mon amendement au profit de l'amendement I-182 à la condition que son auteur, M. Machet, veuille bien préciser que cette mesure s'appliquera exclusivement en 1998.
En effet, un grand débat sur la famille, je pense que les veufs et les veuves font partie de la famille ; ne sont-ils pas représentés dans les associations, notamment à l'UNAF ? - va avoir lieu l'année prochaine et, à cette occasion, l'ensemble du dispositif sera revu.
Je ne voudrais pas que, par avance, on arrête définitivement une mesure défavorable aux veuves et aux veufs. Je souhaite donc que M. Machet rectifie son amendement pour indiquer que le plafond qu'il prévoit s'appliquera uniquement en 1998.
Si je me rallie à cette proposition, c'est pour des motifs d'équilibre budgétaire. C'est d'ailleurs la raison majeure qui a incité M. le rapporteur général et la commission des finances à prendre la position qu'ils ont adoptée.
Peut-être le prochain budget sera-t-il discuté dans de meilleures conditions ! Raison de plus pour ne pas prendre aujourd'hui une décision allant à l'encontre des intérêts des veuves et des veufs. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. le président. Monsieur Machet, acceptez-vous de rectifier votre amendement ?
M. Jacques Machet. Monsieur le président, je ne pense pas que ce soit nécessaire après ce qui vient d'être dit.
M. Jean Chérioux. Dans ce cas, je dépose un sous-amendement tendant, après la somme de « 8 190 francs » à ajouter les mots : « pour la seule année 1998 ».
M. Michel Charasse. Il faudrait dire : « pour les revenus de 1997 » !
M. Jean Chérioux. C'est exact.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, je voudrais, pour faciliter les travaux du Sénat, m'adresser à M. Jean Chérioux pour lui dire que nous pourrons sans difficulté, dès l'année prochaine, modifier ce chiffre.
Mon cher collègue, votre intervention a été lumineuse et vous avez accepté de vous rallier à l'amendement n° I-182, à la condition que la disposition ne s'applique que pour un an seulement. Or M. Machet vous a répondu qu'il l'entendait bien ainsi.
N'alourdissons pas encore les textes, d'autant que le code général des impôts n'est déjà guère lisible. Considérons, nous, sénateurs, que ce montant vaut pour l'année 1998 et, l'année prochaine, nous reviendrons sur cette discussion et nous fixerons le montant que les fruits de la croissance qui nous sont promis ne manqueront pas de nous permettre d'atteindre.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Je me rends aux arguments de M. le rapporteur général en spécifiant bien que j'attends de la commission des finances qu'elle garde en mémoire le débat que nous venons d'avoir. Et je retire mon amendement.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Elle fera preuve de vigilance !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. On peut lui faire confiance !
M. le président. L'amendement n° I-150 est retiré.
Monsieur Lesein, l'amendement n° I-145 est-il maintenu ?
M. François Lesein. Même si, avec l'amendement de M. Machet, nous sommes loin du chiffre que nous proposions avec mon collègue, M. Joly, mieux vaut un peu tenir que tout perdre ! Je me rallie donc à l'amendement n° I-182 et je retire notre amendement.
M. le président. L'amendement n° I-145 est retiré.
Monsieur Habert, l'amendement n° I-30 est-il maintenu ?
M. Jacques Habert. Pour toutes les raisons qui viennent d'être exposées, nous nous rallions à l'amendement n° I-182 de M. Machet et retirons notre amendement.
M. le président. L'amendement n° I-30 est retiré.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-182.
M. Jean Clouet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Clouet.
M. Jean Clouet. Une fois de plus, nous tenons une discussion où le comptable s'oppose au social.
Certains ont critiqué « Bercy ». C'est une approche un peu courte du problème. Il est, en effet, du devoir des fonctionnaires du ministère de l'économie et des finances d'être des comptables !
Mais ce devoir ne s'étend pas jusqu'au ministre. Le ministre assume une responsabilité politique, c'est à lui qu'il appartient, à partir des comptes présentés par les fonctionnaires de qualité, d'élaborer une politique.
Or, en cette affaire, le Gouvernement conduit une politique qui n'est pas de nature sociale. Cela pourrait paraître surprenant pour un gouvernement de gauche, s'il n'y avait pas l'expérience du passé !
Nous avons entendu expliquer - et c'était encore le comptable ministre qui s'exprimait - que ce dispositif toucherait uniquement 190 000 personnes. Pour lui, ce sont 190 000 personnes qui peuvent faire quelques sacrifices au nom de la solidarité.
Je suis étonné par la virulence antifamiliale de ce projet de budget ! On nous a en effet déjà expliqué que 300 000 personnes seulement seraient frappées par telle disposition mettant sous condition de revenus telle allocation.
Nous entendons chaque fois la même phrase : « Cela ne touchera pas grand monde ! » L'ennuyeux, c'est que ce sont toujours les mêmes catégories de familles qui sont touchées.
Mon collègue M. About avait déposé un amendement qu'il n'a pas pu venir défendre et se situant dans l'éventail que nous avons vu s'ouvrir entre les différentes possibilités financières. Quant aux propositions de M. Machet, elles sont...
M. François Lesein. Un peu bas !
M. Jean Clouet. ... au milieu du chemin. Par conséquent, puisqu'il paraît qu'il faut reculer, reculons jusqu'au chiffre qu'il a choisi.
M. Jacques Habert. C'est le juste prix !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Comme mon collègue M. Clouet, je vais me rallier à l'amendement de M. Machet.
Je comprends naturellement les arguments de nature budgétaire qui ont conduit M. le rapporteur général à formuler ce conseil et j'y souscris. Je voudrais toutefois rappeler deux choses.
Tout d'abord, la mesure proposée par la Gouvernement s'inscrit dans un ensemble de dispositions véhiculées tant par le projet de loi de financement de la sécurité sociale que par le projet de loi de finances, mesures ayant une forte résonance antifamiliale. Que le Gouvernement le veuille ou non, c'est bien l'effet produit par ce tir convergent. Voilà un nouvel exemple, un symptôme parmi d'autres de cette orientation.
En second lieu, monsieur le secrétaire d'Etat, et d'une façon plus concrète et plus précise, je rappelle que fonctionne au Sénat depuis déjà de longues années un groupe d'études sur le veuvage, qui a formulé bon nombre de propositions quant au statut social et moral des veuves et des veufs. C'est bien le sujet dont nous débattons aujourd'hui.
Nous serions bien inspirés ainsi, me semble-t-il, que le Gouvernement, de puiser dans les travaux de ce groupe d'études un certain nombre d'initiatives concrètes qui sont attendues par une partie significative de la population.
Je crois que, au-delà de ce que nous allons faire vraisemblablement en votant l'amendement de M. Machet, il convient de reprendre l'ensemble du statut social et moral des veuves et des veufs dans ce pays.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Je voudrais rappeler à mes collègues que, par notre amendement n° I-68, qui vient d'être repoussé, nous proposions le rétablissement de la demi-part supplémentaire dont bénéficiaient, jusqu'à la loi de finances pour 1997, les personnes veuves, divorcées ou seules ayant élevé au moins un enfant.
Or je constate que seuls les membres du groupe communiste républicain et citoyen ont voté cet amendement. Pourtant, je ne crois pas que la mesure proposée constituait une faveur. Il suffit, pour s'en convaincre, de lire les courriers que nous ont adressés de nombreuses organisations et qui décrivent les charges supplémentaires supportées par les personnes vivant seules.
Je voudrais d'ailleurs souligner que personne n'avait osé s'attaquer à cette mesure jusqu'à l'élaboration de la loi de finances pour 1997. Si cette demi-part existait, c'est qu'on estimait qu'elle était justifiée. Je ne pense pas qu'il s'agissait d'une faveur.
Même si nous considérons que l'amendement n° I-182 présenté par M. Machet est insuffisant, nous allons le voter. Nous regrettons cependant que ce ne soit pas le nôtre qui ait été adopté, il aurait en effet permis d'en revenir à la situation antérieure, qui répondait bien à une aspiration des veuves et des veufs.
M. Jean Chérioux. Vive la majorité plurielle !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est bien conscient de la situation des veuves et des veufs dans ce pays. Sa démarche n'est donc pas inspirée par je ne sais quelle sécheresse d'âme.
M. Clouet m'a reproché de faire des comptes ! Mais, en tant que responsable du budget de l'Etat, je suis bien obligé d'en faire.
M. Jean Chérioux. Il faut faire des choix aussi !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Il faut faire des choix, vous avez tout à fait raison d'insister sur ce point, monsieur Chérioux.
M. Jean Chérioux. Et le vôtre est mauvais !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Que font apparaître les comptes ?
Au mois de juillet 1997, lorsque la Cour des comptes a procédé à une remise à plat, que personne ne remet en cause, semble-t-il, il est apparu que le régime de la protection familiale était déficitaire de 12 milliards de francs et que des revenus absolument essentiels à certaines familles étaient menacés par ce déséquilibre. Un choix s'imposait.
Quels étaient les choix possibles ?
La solution classique aurait été de majorer les cotisations sociales, en faisant supporter la majoration soit par l'ensemble des salariés, soit par l'ensemble des employeurs, soit par l'ensemble des familles. Je ne citerai qu'un chiffre approximatif : cette majoration aurait dû alors être de l'ordre de 1 %. Ce n'est pas ce choix que le Gouvernement a fait.
Il a préféré mettre à contribution des personnes qui, certes, ne jouissaient pas de faveurs - les mesures proposées par le Gouvernement ne contiennent absolument aucune condamnation morale ou sociale - mais qui pouvaient le moins difficilement consentir un effort.
M. Clouet évalue à 190 000 le nombre de personnes seules qui seront touchées par cette mise à contribution. Mais ce n'est pas ce chiffre qui importe. Ce qui importe c'est que, pour rétablir l'équilibre des finances publiques en général, celui de la branche famille en particulier, le Gouvernement demande un effort, parmi les 3 500 000 personnes seules - toutes également respectables - à celles qui sont le plus susceptibles de fournir cet effort.
Ainsi, après avoir fait les comptes et ayant pris en considération la situation de l'immense majorité des familles qui ont besoin des prestations familiales - certaines de ces prestations ont été revalorisées à la demande de la majorité qui soutient le Gouvernement - le Gouvernement a effectivement décidé de demander un effort non pas à toutes les familles, mais à certaines d'entre elles.
M. Philippe Marini C'est un effort parmi bien d'autres.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-182, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 17:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 238
Contre 75

Par amendement n° I-5, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose, dans le 3° du paragraphe I de l'article 2, de remplacer la somme de « 3 300 francs » par la somme de : « 2 580 francs ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de reprendre le cours de l'abaissement progressif de la décote qui avait été décidé dans la loi de finances pour 1997.
En effet, la décote a pour inconvénient, d'une part, d'augmenter fortement la progressivité de l'impôt sur le revenu à l'entrée du barème et, d'autre part, d'être défavorable aux familles.
Je profite de l'occasion pour formuler une réflexion dans le prolongement de ce qu'a dit tout à l'heure M. Michel Charasse.
Il est évident que nous ne partageons pas les mêmes opinions sur tous les sujets. Nous sommes en désaccord politique, mais nous savons pourquoi ; nous sommes en désaccord non pas sur des questions de chiffrage mais sur des questions de fond, qui sont à l'honneur de la démocratie.
Je suis convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il en est de même entre nous et qu'il en sera toujours ainsi.
Dans mon esprit, l'ensemble du dispositif tel qu'il sera adopté par le Sénat à l'issue de la discussion de l'article 2, devrait conduire à une somme de 14,32 milliards de francs. En tout cas, c'est le chiffre que nos services respectifs ont échangé. C'est celui sur lequel j'ai travaillé et c'est celui sur lequel j'ai fondé les informations que j'ai fournies à mes collègues de la commission des finances ; c'est le chiffre sur lequel nous avons travaillé tard vendredi soir - pour ma part, je n'ai eu que deux heures pour examiner ces amendements entre la fin de la discussion générale et leur présentation à la commission. Il est important pour moi, pour ma crédibilité vis-à-vis de mes collègues, que les chiffres que je leur indique soient ceux qui ont été validés par nos services respectifs.
M. Michel Charasse. C'est mieux pour tout le monde !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, je ne conteste pas vos chiffres. Il faut simplement que nous mettions le même chiffre derrière le même concept. Je sais que nos services ont travaillé ensemble. J'espère que les services de Bercy vous ont apporté tout le concours que vous souhaitiez. Je ne me livrerai à aucune controverse technique avec vous. Nous parlons du fond, c'est-à-dire des mesures, et non pas du chiffrage des mesures.
J'en viens à l'amendement n° I-5, qui a le mérite d'être en parfaite cohérence avec un amendement qui a été adopté antérieurement et visant à rétablir le barème de l'impôt sur le revenu. Je serai, moi aussi, parfaitement cohérent en demandant le rejet de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-5, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 18:

Nombre de votants 319
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 216
Contre 97

Par amendement n° I-6, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de compléter l'article 2 par un paragraphe ainsi rédigé :
« Tous les seuils et limites qui sont relevés dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu ainsi que les seuils mentionnés au IV de l'article 182 A du même code sont relevés de 1,1 % pour 1997. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement de coordination qui a pour objet de prévoir l'indexation sur les prix de 1997 des seuils et limites qui sont éventuellement indexés sur la limite supérieure de la première tranche de l'impôt sur le revenu. En effet, nous avons très nettement élargi cette première tranche avec l'amendement portant sur le barème.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-6, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 2



M. le président.
Par amendement n° I-71, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 1 de l'article 6 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette disposition est applicable, à leur demande, aux foyers fiscaux composés de personnes vivant en vie maritale, élevant au moins un enfant. »
« II. - Le 3 du même article est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Le rattachement au foyer fiscal de tout autre contribuable, dès lors que ce contribuable ajoute à ses revenus le montant des revenus perçus pendant l'année entière par cette personne. »
« III. - Dans le premier alinéa de l'article 980 du code général des impôts, les mots "n'est pas" sont remplacés par le mot "est". »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances, l'Assemblée nationale a introduit dans notre législation fiscale une innovation majeure : les personnes vivant en concubinage pourront dorénavant déposer une déclaration de revenus commune.
Cette mesure répond non seulement au bon sens, mais aussi au souci de justice sociale et fiscale.
C'est, à l'évidence, une mesure de bon sens car, n'en déplaise à certains, la notion de famille a profondément évolué depuis quelques années : de plus en plus d'enfants naissent hors mariage, ce qui est finalement heureux au regard de la natalité et du renouvellement des générations dans notre pays.
On peut également remarquer que les couples non mariés, eux-mêmes de plus en plus nombreux, ont une stabilité au moins équivalente à celle des couples mariés.
Rappelons que, pour les organismes d'HLM, pour les caisses d'allocations familiales, pour les caisses d'assurance maladie, pour les services municipaux, pour l'éducation nationale et même pour les services qui établissent les rôles d'imposition locale, la cohabitation ou la vie maritale sont admises et traitées de la même manière que le mariage.
Il n'y a aujourd'hui que dans deux domaines de la fiscalité que la cohabitation n'est pas reconnue totalement : l'impôt sur le revenu, qui nous occupe en cet instant, et les droits de succession, dont nous reparlerons peut-être ultérieurement et pour lesquels les couples mariés et les couples non mariés sont toujours traités de manière inéquitable.
S'agissant de l'impôt sur le revenu - dans le passé, cela pouvait se comprendre -, dès lors que l'on considérait la vie maritale comme une sorte de situation précaire ou une parenthèse entre le célibat et le mariage, les enfants d'un concubin pouvaient être pris en compte pour une part entière de quotient familial, s'ajoutant à la part dont bénéficiait le parent comptant l'enfant à charge.
Cette situation a été modifiée par la loi de finances pour 1996 : cette part de quotient est devenue une demi-part.
Nous nous étions, à l'époque, opposés à cette mesure, et nos arguments gardent, de notre point de vue, toute leur pertinence d'alors.
Toutefois, cette réforme s'est, si l'on peut dire, arrêtée en route, ce qui n'est guère surprenant puisqu'elle était en fait inspirée, non pas tant par la volonté d'établir l'équité ou l'égalité devant l'impôt, mais plutôt par des considérations d'ordre moral, à caractère un peu poussiéreux.
M. Philippe Marini. Le mariage n'est pas poussiéreux !
M. Paul Loridant. Elle a en effet créé une nouvelle inégalité.
Pour bien me faire comprendre, je soulignerai que, si nous avons affaire à un couple marié avec un enfant et que seul l'un des deux parents travaille, il est probable que ce couple ne sera pas imposable, tandis que, dans le cas d'un couple vivant maritalement, il n'en ira pas nécessairement de même : le membre du ménage n'exerçant pas d'activité professionnelle déclarera un revenu nul et sera donc non imposable, mais le revenu de l'autre ne sera affecté que d'une part et demie de quotient familial.
C'est, par conséquent, une mesure de justice élémentaire que nous proposons de mettre en oeuvre.
Dans le paragraphe II de notre amendement, il s'agit de prendre en compte, en matière fiscale, un certain nombre de nouvelles formes de cohabitation. Nous pensons ici, en particulier, aux foyers que constituent désormais, notamment dans les centres urbains, des frères et soeurs majeurs vivant sous le même toit, qui n'est plus celui des parents, et pas uniquement pour des raisons de commodité. On rencontre d'ailleurs des cas similaires en zone rurale, où des frères et soeurs, célibataires ou veufs, vivent sous le même toit.
Derrière de telles situations, qui sont de plus en plus fréquentes, il y a souvent des problèmes d'insertion professionnelle et sociale ou simplement les nécessités pratiques liées à la poursuite d'une formation.
Ce sont des situations de ce type que nous souhaitons prendre en considération à travers cet amendement.
M. Michel Charasse. On ne sait pas si les « personnes vivant en vie maritale » doivent être de sexes opposés ! (Sourires.) Ce n'est pas précisé !
M. Jean Chérioux. Effectivement, et ce n'est pas évident !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances n'a pas manqué de remarquer qu'une disposition d'une forme légèrement différente avait été adoptée à l'Assemblée nationale, puis, à la demande du Gouvernement, supprimée en deuxième délibération. La commission des finances souhaite donc entendre l'avis du Gouvernemment avant de se prononcer.
M. le président. Quel est, par conséquent, l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. La proposition défendue par M. Loridant pose, en droit fiscal - je ne me prononce pas du tout sur les aspects moraux du concubinage ou du mariage - des questions fort complexes.
Le mariage est, en quelque sorte, une union organisée, alors que l'union libre est un état juridiquement inorganisé. A partir du moment où il n'existe pas de liens juridiques entre deux concubins, nous butons sur des difficultés.
Ainsi, les époux sont assujettis, en vertu de l'article 212 du code civil, à une obligation de secours et d'assistance, mais cette obligation ne pèse pas sur les personnes qui vivent maritalement.
M. Michel Charasse. Exactement !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. De même, au regard des dettes, les conjoints mariés sont solidaires alors que les concubins ne le sont pas.
La question est donc de savoir si l'on peut définir fiscalement les couples vivant en concubinage notoire. Or cette question a semblé insurmontable au Gouvernement, compte tenu des problèmes de contrôle qui se poseraient. Il pourrait même y avoir des difficultés au regard de l'équité puisque certains couples pourraient choisir, pour des raisons fiscales, l'imposition séparée et d'autres, l'imposition commune.
Par ailleurs, lorsqu'un couple de fait se dissout, aucun acte juridique n'est établi, et il est alors bien délicat de fixer la date de la fin de l'imposition commune.
Sur le fond, la position du Gouvernement rejoint celle de la majorité...
M. Jean Chérioux. Ce n'est pas étonnant !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... quant à la nécessité de définir un statut juridique du contrat d'union civile. (Nous y voilà ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Voilà la panacée ! C'est la grande avancée sociale !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. On ne peut définir un statut fiscal des concubins avant de les doter d'un statut juridique.
M. Philippe Marini. Il ne faut faire ni l'un ni l'autre !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Vous aurez l'occasion, monsieur Marini, de vous exprimer à ce sujet le moment venu.
Ce que je peux dire, au nom du Gouvernement, c'est que, si ce contrat civil était défini au cours de l'année 1998 - c'est une hypothèse - des règles fiscales du type de celles que vous avez préconisées, monsieur Loridant, et assorties de la même date d'entrée en vigueur que celle du contrat d'union civile, seraient insérées dans le projet de loi de finances pour 1999. Le Gouvernement n'est donc pas hostile au principe de cet amendement : il le trouve simplement prématuré. C'est pourquoi il en demande le retrait, à défaut de quoi il serait contraint d'inviter le Sénat à le rejeter.
M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Défavorable, monsieur le président.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-71.
M. Michel Charasse. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Sans entrer dans les détails, je dirai que je ne peux voter cet amendement, même si j'en comprends l'inspiration, parce que, là encore, se trouve soulevé le problème de l'application du principe d'égalité.
Comme l'a indiqué M. le secrétaire d'Etat, un couple marié est solidaire pour les dettes fiscales, et chacun sait à quels drames cela aboutit parfois : lorsque le couple se sépare, on essaie d'attraper un des deux ex-conjoints et l'on fait payer celui qu'on trouve pour les deux. Mais, au moins, en cas de divorce, il y a le partage des biens décidé par le juge.
Dans le cas du concubinage, on va se trouver face à deux personnes qui vivent ensemble le 1er janvier, qui font une déclaration commune et qui, si elles ne s'entendent plus le 1er avril, se séparent. Là, bien entendu, il n'y a pas de procédure, pas de juge pour faire un partage. Et si l'un des deux disparaît, à qui va-t-on s'adresser pour le règlement de la dette ?
Bref, tout cela pose bien des problèmes. Il est toujours facile de dire dans un congrès que ce serait merveilleux pour les concubins, y compris pour ceux qui sont de même sexe,...
M. Jean Chérioux. Et leurs enfants !
M. Michel Charasse. ... mais ce n'est pas si simple.
L'ensemble de notre droit est organisé sur la base du droit familial. On peut éventuellement le regretter. Moi, je ne suis peut-être pas moderne, je suis peut-être « ringard », mais je constate que c'est comme ça !
On en peut pas vouloir une chose et son contraire. Un oiseau, ça vole, ça ne plonge pas, ou alors pas bien longtemps ! Quant aux poissons, fussent-ils volants, ils ne restent pas non plus longtemps hors de l'eau ! La nature a fait un certain nombre de choses, et je crois que nous sommes, hélas ! obligés d'en tenir compte. (Sourires.)
M. Jean Chérioux. Il faut réformer la nature !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Pour ma part, si je suis résolument opposé à cet amendement, c'est pour des raisons de fond, des raisons philosophiques.
En effet, cet amendement vise à marginaliser le mariage. Or, si l'on marginalise le mariage, on banalise la famille, ce qui revient à la nier : on considère qu'une famille n'est plus qu'une communauté de fait, qui comporte des individus défendant chacun leurs intérêts.
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est une société en participation !
M. Philippe Marini. Comme le dit, en effet, avec son langage juridique, notre excellent rapporteur général, cela devient une société en participation, c'est-à-dire quelque chose de transparent.
Or la famille, qui, pour nous, naît du mariage, a une identité propre et représente une communauté ayant sa valeur propre, au-delà des intérêts individuels de ses membres. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Le mariage et la famille sont les moyens dont notre société dispose pour lutter contre l'individualisme, qui est la plaie de nos villes, de nos quartiers, de nos campagnes.
Je crois traduire le sentiment d'un certain nombre de mes collègues en exprimant une position philosophiquement très opposée à l'amendement présenté par M. Loridant. (Très bien ! et applaudissements sur les mêmes travées. - M. Daniel Millaud applaudit également.)
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. Jean Chérioux. Pour la défense de la morale républicaine ?
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Je m'attendais évidemment que notre amendement soulevât quelque émoi dans l'hémicycle, mais peut-être pas sur toute les travées.
Personnellement, je ne suis pas hostile à l'institution du mariage, bien au contraire. Cela dit, il me semble que les parlementaires doivent aussi savoir être attentifs à l'évolution de la société. Aujourd'hui, force est de constater que de plus en plus de couples vivent maritalement. C'est une réalité !
M. Jean Chérioux. Mais faut-il l'encourager ?
M. Paul Loridant. M. Marini nous explique que l'institution du mariage est le garant de la stabilité de notre société. Je me permettrai de rappeler que, dans notre histoire, il n'en a pas toujours été ainsi. Souvenez-vous de certaines pratiques observées dans la bonne région de Vendée, voilà quelques années.
Je vous renvoie aussi à un ouvrage remarquable d'un certain Léon Blum, écrit dans les années vingt, et intitulé Du mariage, dans lequel était préconisé pour les jeunes femmes le droit à l'expérience sexuelle avant le mariage. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. C'était un prophète !
M. Michel Charasse. Mais cela n'a pas d'incidence fiscale ! (Sourires.)
M. Paul Loridant. En effet !
En tout cas, je vous renvoie à toute une série d'ouvrages historiques...
M. Jean Chérioux. C'est votre nouvelle bible !
M. Paul Loridant. ... qui montrent que, contrairement à ce qu'on prétend souvent, le mariage n'est pas cette institution éternelle ayant toujours régi la vie en couple dans notre pays. Ainsi, ce n'était pas le cas au Moyen Age.
Personnellement, je le répète, je ne suis pas hostile, bien au contraire, à l'institution du mariage.
M. Christian de La Malène. Ah !
M. Paul Loridant. Simplement, la société évolue et, à un moment ou à un autre, le Parlement doit en tenir compte.
Enfin, je remarque, qu'il ne nous a pas été répondu sur une partie de l'amendement. Je veux parler du fait que de plus en plus de frères et soeurs célibataires vivent ensemble, soit en zone rurale, soit en zone urbaine, parce que cela correspond à des faits de société, par exemple parce que leurs parents âgés ont disparu.
Ces situations, qui soulèvent de réels problèmes, sont de plus en plus nombreuses. Vous vous cachez derrière votre opposition systématique au contrat d'union civile pour ne pas les prendre en compte !
M. Jean Chérioux. Cela montre le côté pernicieux des thèses que vous défendez !
M. Paul Loridant. C'est pourquoi, en dépit de toutes les difficultés qu'il peut soulever, j'invite le Sénat à adopter notre amendement.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Il s'agit vraiment d'une question de principe !
On peut avoir des expériences sexuelles avant de se marier, sans que cela ait d'incidence fiscale ! (Sourires.) Pour le moment, on ne nous a pas proposé d'amendement en ce sens !
Je voudrais dire à M. Loridant que tout cela est très compliqué à mettre en oeuvre, pas l'expérience sexuelle avant le mariage, mais le reste. (Nouveaux sourires.)
Si je comprends bien l'amendement, il s'agit de deux frères ou de deux soeurs habitant en zone rurale qui élèvent un enfant. Pas le leur, j'espère, puisque ce sont des frères et soeurs ! Il s'agirait d'un autre débat ! Ils élèvent donc un enfant qu'elle ou il aura eu par hasard...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Pas par hasard !
M. Michel Charasse. Bref, passons ! Mais, dans votre raisonnement, l'application de la disposition est soumise à la condition que le foyer fiscal élève un enfant.
Par ailleurs, en ce qui concerne les couples mariés, c'est la situation au 1er janvier qui est prise en compte. Si le mariage a lieu dans l'année, deux déclarations sont établies. Si deux personnes se mettent en concubinage le 1er mai, il y a deux déclarations pour la période du 1er janvier au 30 avril, puis il y a une autre déclaration commune. Mais si elles se séparent - c'est plus facile que le divorce ! - le 1er septembre, alors il y aura trois, quatre déclarations...
Voilà qui va vraiment simplifier la situation des concubins et, par là même, le travail de l'administration fiscales ! (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Il y a des dispositions, comme celle-là, qui touchent à un certains nombre d'éléments fondamentaux du droit de la famille.
On peut changer le droit de la famille ! Après tout, dans les populations primitives, on ne se mariait pas forcément, on n'avait pas de code civil, et cela marchait bien quand même. On peut également supprimer le droit de la famille ! Mais on ne peut avoir simultanément le droit de la famille et un droit fiscal qui ne tienne pas compte du droit de la famille.
C'est la raison pour laquelle, à mon grand regret, je voterai contre l'amendement de M. Loridant. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1-71, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-151, M. Vasselle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 194 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'imposition des revenus de 1998, le nombre de parts prévu au I est augmenté de 0,25 pour chaque enfant à charge de sa sixième année à la fin de sa dix-septième année, soit 0,75 part par enfant dans cette tranche d'âge. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Il s'agit d'un amendement de principe qui va dans le sens de la politique familiale. Nous souhaitons, en effet, adresser un signal positif aux familles.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. S'agissant d'un amendement de principe, je suis convaincu que notre ami Philippe Marini a dit tout à l'heure tout ce qu'il pensait sur le sujet.
Nous traitons de l'impôt sur le revenu pour 1998. Par conséquent, cet amendement trouverait toute sa place dans la deuxième partie du projet de loi de finances.
Notre collègue Philippe Marini connaît également le coût de cette disposition. Le Gouvernement formulera sans doute des observations à cet égard.
Cette mesure mérite d'être analysée, mais ne peut trouver de suite favorable cette année en raison de la situation budgétaire et du souci d'équilibre des finances publiques qui est le nôtre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement de principe, dont le coût s'élève à 7,5 milliards de francs. C'est une raison suffisante pour que le Gouvernement le rejette !
M. le président. L'amendement est-il maintenu, monsieur Marini ?
M. Philippe Marini. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-151 est retiré.
Par amendement n° I-109, M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Le montant total des réductions d'impôt sur le revenu et des déductions pratiquées sur le revenu global est plafonné pour la fraction supérieure à 20 000 F, à hauteur de 75 % du montant de l'impôt sur le revenu du redevable. »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Au travers de cet amendement, il est proposé de plafonner l'avantage fiscal procuré par les différentes réductions d'impôt sur le revenu ou déductions du revenu global, lorsque celles-ci sont de forte ampleur.
En effet, l'existence même de ces avantages, dont le nombre s'accroît sans cesse, contrevient au principe de la progressivité de l'impôt direct. Ce système est donc parfaitement injuste.
Les contribuables à revenus modestes et qui n'ont pas les moyens de réaliser les dépenses donnant lieu à ces avantages fiscaux s'acquittent seuls d'un impôt sur le revenu sur la base d'un barème défini par le législateur.
En revanche, les contribuables qui disposent de l'argent nécessaire pour réaliser de telles dépenses, s'acquittent, eux, d'un impôt sur le revenu qui n'a plus rien à voir avec celui qu'ils paieraient en fonction seulement du barème.
En plafonnant le total de ces réductions d'impôt à partir de 20 000 francs par rapport à l'impôt lui-même, on permet à ce dernier de retrouver une place plus en rapport avec celle qu'il devrait avoir par rapport aux véritables capacités contributives des contribuables, sans toucher aux classes moyennes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement a déjà été déposé l'année dernière. Il mérite de faire l'objet d'un examen approfondi, qui est néanmoins très difficile à réaliser.
Je rappelle à cette occasion au Gouvernement qu'un rapport devait être établi. Il avait été demandé par Mme Beaudeau, qui avait été soutenue par la majorité sénatoriale,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cela ne coûte pas cher !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... ce qui montre que cette dernière n'est pas sectaire.
Ce rapport n'est toujours pas déposé ! Il serait utile.
Pour l'instant, la commission des finances émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je précise, tout d'abord, que le rapport auquel il est fait allusion est en voie d'achèvement ; il sera transmis à la Haute Assemblée d'ici à une semaine.
S'agissant de l'amendement, il est proposé de plafonner le montant total des réductions d'impôt sur le revenu et des déductions du revenu global pour chaque contribuable.
Sous l'apparence d'une simplification, cette mesure comporte, à mon avis, plus de complications qu'elle n'en supprime.
En effet, si le plafond est fixé trop bas, un certain nombre d'avantages fiscaux, au demeurant légitimes, seront considérablement réduits. En revanche, si le plafond est fixé à un niveau trop élevé, certains contribuables auront la tentation de vouloir atteindre ce plafond.
En outre, cette disposition entraîne, pour l'établissement de l'impôt, des difficultés de gestion délicates.
Par conséquent, le Gouvernement vous propose, dans le présent projet de loi de finances, d'examiner les avantages fiscaux un par un et de concentrer particulièrement votre attention sur ceux dont bénéficient les contribuables qui perçoivent des revenus très élevés. Nous aurons l'occasion d'en reparler.
Toutefois, dans ce que l'on appelle familièrement la réduction des « niches fiscales », l'approche niche par niche semble préférable au Gouvernement à cette approche globale, qui pose un problème très sérieux.
C'est pourquoi je vous demande, monsieur Angels, de bien vouloir retirer cet amendement. Dans le cas contraire, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Angels, l'amendement n° I-109 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels. Bien que n'étant pas entièrement convaincu, je préfère le retirer, de façon que s'engage une discussion approfondie. En effet, il faudra quand même étudier les moyens d'éviter que des contribuables ne bénéficient de réductions d'impôts iniques. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'approbation.)
M. le président. L'amendement n° I-109 est retiré.
Par amendement n° I-110 M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa du 2° de l'article 83 du code général des impôts, après les mots : "à titre obligatoire", sont ajoutés les mots suivants : ", les cotisations de retraite versées à partir du 1er janvier 1998, qu'elles soient, ou non, à compter de cette date, immédiatement constitutives d'un droit certain au profit des intéressés". »
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Les cotisations qui servent à financer des couvertures sociales complémentaires sont déductibles de l'assiette de l'impôt sur le revenu dans des limites élevées. Ces cotisations ne sont considérées comme des compléments de salaire et donc réintégrés dans l'assiette de l'impôt sur le revenu que pour les titulaires de revenus substantiels.
Afin d'échapper à toute réintégration d'assiette, un certain nombre de régimes de retraite ont été mis en place avec diverses conditions, que je ne vous rappellerai pas. Ce régime, exorbitant du droit commun, ne peut être maintenu pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, selon la nature des régimes de retraite, le régime fiscal est différent. Il y a donc atteinte au principe constitutionnel de l'égalité.
Ensuite, les salariés titulaires des revenus les plus élevés sont les principaux bénéficiaires de ces régimes. Les dirigeants d'entreprise et les cadres supérieurs échappent à la réintégration dans l'assiette de l'impôt sur leur revenu des couvertures sociales complémentaires. Il y a donc lieu de les réintégrer dans le quota disponible déjà prévu, qui est confortable puisqu'il permet la déductibilité des cotisations jusqu'à 70 000 francs pour un salarié.
Enfin la Cour de cassation a jugé, à trois reprises, que les cotisations des employeurs à ces régimes constituaient bien, pour les salariés intéressés, un avantage servi à l'occasion du travail et, à ce titre, entraient dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale dès lors qu'elles dépassaient les limites d'exonération qui sont fixées à un niveau comparable aux limites fiscales. Or, en la matière, les règles fiscales et sociales ont été conçues de manière à être cohérentes entre elles.
Pour toutes ces raisons, l'article 83 du code général des impôts devrait, dans un double souci de cohérence avec les règles sociales et d'équité, être modifié, et cette mesure devrait prendre effet à compter du 1er janvier 1998.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances trouve intéressantes les dispositions prévues par cet amendement.
En effet, à l'heure actuelle, les versements qui sont effectués dans le cadre de contrats de retraite surcomplémentaire à prestations définies ne sont pas intégrés dans l'assiette de l'impôt sur le revenu. En revanche, les contrats à cotisations définies sont susceptibles de constituer un avantage en espèces devant être réintégré dans l'assiette du revenu imposable.
Cet amendement aurait pour effet de réintégrer dans l'assiette de l'impôt sur le revenu des versements effectués par des entreprises, dès lors que ces versements dépassent l'enveloppe de 19 % de huit fois le plafond.
Toutefois, la limitation de ces avantages ne paraît pas opportune tant que la loi sur les fonds de pension ne sera pas entrée en application. Dès que les décrets d'application de cette loi seront publiés, la commission des finances sera tout à fait disposée à revoir un dispositif de cette nature.
En attendant, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Il s'agit d'un amendement assez technique, auquel j'essayerai de répondre avec la même précision que M. le rapporteur général.
La mesure qui est proposée porte sur le régime fiscal des cotisations versées aux régimes de retraites à prestations définies et spécialement aux régimes dits « chapeau ».
La question que vous posez relève, vous l'avez bien expliqué, non pas de la modification des textes en vigueur mais de leur interprétation.
Il existe, en effet, en matière sociale comme en matière fiscale, des dispositions de portée générale qui permettent de déduire de l'assiette des cotisations sociales et de celle de l'impôt sur le revenu les cotisations versées aux régimes de retraite complémentaire et surcomplémentaire. Cette déduction est plafonnée, aussi bien sur le plan fiscal que sur le plan social.
Ces mesures ne posent pas de problème d'application lorsqu'il s'agit de régimes dits à cotisations définies, pour lesquels on connaît le montant exact des cotisations qui ont été versées pour chaque salarié. Ce montant est, en effet, nettement individualisable.
En revanche, l'application de ces règles s'est révélée un peu plus délicate, vous l'avez indiqué, pour les régimes dits à prestations définies, qui se caractérisent par un engagement de l'employeur à verser un certain montant de retraite supplémentaire, généralement aux seuls salariés qui sont présents dans l'entreprise à la date du départ à la retraite.
Cet engagement est, en effet, financé par un versement global de l'employeur à une compagnie d'assurances. Outre qu'il n'assure que des droits virtuels aux intéressés, il est difficile d'individualiser la part relative de chacun des salariés couverts.
En matière sociale, la Cour de Cassation a effectivement jugé, par des décisions récentes, que ces versements devaient bien être pris en compte pour l'appréciation du plafond spécifique de déduction des cotisations de retraite complémentaire et surcomplémentaire pour l'assiette des cotisations de sécurité sociale, ce qui représente 80 % du plafond, soit 139 944 francs en 1997.
La transposition de cette règle en matière fiscale devrait, en tout état de cause, être harmonisée avec le nouveau paysage de l'épargne-retraite, tel qu'il résultera du réexamen de la loi du 25 mars 1997 sur les fonds de pension, auquel il convient de procéder, conformément aux orientations définies par le Premier ministre lors de son discours de politique générale, afin de préserver les ressources de nos régimes de retraite par répartition et d'assurer le caractère collectif du nouveau dispositif qui ne doit pas être réservé à quelques privilégiés.
Il me semble donc indispensable d'attendre l'issue de cette réflexion que le Gouvernement entend conduire en concertation avec les parlementaires. En attendant, je vous prie, monsieur Sergent, de bien vouloir retirer l'amendement n° I-110 faute de quoi je serai obligé d'émettre un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° I-110 est-il maintenu, monsieur Sergent ?
M. Michel Sergent. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-110.
M. Michel Charasse. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai naturellement écouté vos explications avec attention, ainsi d'ailleurs que celles de M. le rapporteur général. Toutefois, puisqu'il s'agit d'un débat de nature fiscale, je crois que tout cela n'a rien à voir avec les fonds de pension ou assimilés.
Ce qui me pose problème, c'est ce que vient de rappeler M. Sergent, à savoir que, par trois arrêts successifs, la Cour de cassation a décidé un traitement particulier de ces cotisations en matière sociale.
Or, monsieur le secrétaire d'Etat, comme vous le savez, en matière de traitements, salaires et assimilés, il n'y a pas de différences - sauf si elles sont expressément prévues par la loi, ce qui n'est pas le cas - entre l'assiette des cotisations sociales et celle de l'impôt.
Tous les jours, des contrôleurs de l'URSSAF viennent dans nos mairies nous empoisonner pour des affaires de vacataires, de CES, de travail à mi-temps...
M. Jacques Oudin. De stagiaires !
M. Michel Charasse. Exactement !
M. François Lesein. Cela relève de l'Inquisition !
M. Michel Charasse. Et l'on vient nous expliquer que tout cela est parfaitement conforme, que c'est pris en compte par le droit social, puis dans les bases de nos déclarations fiscales.
Or voilà que la Cour de cassation, par des arrêts dont les dates ont été rappelées par M. Sergent, a affirmé que ces cotisations sont soumises, comme les traitements et salaires, aux cotisations sociales. Soit ! mais il n'en est pas de même du point de vue fiscal.
Je m'interroge sur la justification de l'amendement n° I-110. Il s'agit là d'une interprétation du service de la législation fiscale, qui, comme M. Sergent l'a également rappelé, date de 1977.
M. Sergent maintient donc son amendement. Soit ! Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, je crois que, même s'il le retirait, vous risqueriez d'être désavoué par le Conseil d'Etat si vous n'abrogez pas l'instruction de la direction générale des impôts de 1977 sur ce sujet. A partir du moment où la Cour de cassation s'est prononcée, le droit fiscal doit en effet s'aligner sur le droit social.
C'est la raison pour laquelle je voterai l'amendement n° I-110, tout en estimant qu'il n'est pas forcément utile. En effet, s'agissant de la remise en cause d'une instruction administrative, la hiérarchie des normes veut qu'il suffirait que le ministre demande à ses services de remettre en cause les instructions précédentes désavouées en quelque sorte par la Cour de cassation.
En tout cas, il ne peut pas y avoir, mes chers collègues, deux poids, deux mesures. Dans ce pays, les contrôleurs de l'URSSAF ne peuvent pas passer leur temps à effectuer des stages prolongés dans nos mairies pour venir rectifier la situation, ce qui a des incidences en matière fiscale en même temps qu'en matière de cotisations sociales, et ne pas tenir compte de ces trois arrêts de la Cour de cassation.
Si l'on ne veut pas que ces cotisations soient imposables, monsieur le secrétaire d'Etat, et j'en terminerai par là, il faut l'écrire dans la loi en précisant que bien qu'elles aient été considérées comme soumises à l'assiette de cotisations sociales par la Cour de cassation, elles ne seront pas incluses dans l'assiette fiscale. Mais il faut un article de loi. S'il n'y en a pas, compte tenu de la décision de la Cour de cassation, le service de la législation fiscale est obligé de s'incliner.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Les propos de M. Charasse sont naturellement judicieux. Il est évident que le droit fiscal devra s'adapter aux arrêts rendus par la Cour de cassation dans le domaine social mais, comme il l'a souligné très clairement, cela ne justifie pas un texte législatif.
Pour ma part, j'ai insisté sur le fait que cette réinterprétation doit être harmonisée avec tout ce qui a trait au traitement de l'épargne-retraite, et je pense que, sur ce point, il n'y a pas de désaccord avec M. Charasse.
Je confirme donc qu'il s'agit là d'un problème d'interprétation. M. Sergent a mis l'accent sur un point important dont le Gouvernement tiendra compte mais, je le répète, il n'est point besoin en ce domaine d'une disposition législative.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je rappelle que ce débat porte sur des contrats d'assurance de groupe, qui, aux termes de l'article 83 du code général des impôts, sont actuellement l'une des deux seules procédures disponibles pour créer dans une entreprise un régime de retraite surcomplémentaire. Les deux arrêts de la Cour de cassation sont en effet significatifs en ce sens qu'ils viennent accroître la fragilité fiscale de ces dispositifs.
Je souscris bien volontiers à l'analyse que faisait M. Charasse à ce sujet, mais je souhaite insister sur un autre point : nous avons adopté, au début de l'année 1997, une loi sur l'épargne-retraite. La façon la plus simple et la plus claire pour les entreprises qui mettent en place ce type de régime, de le faire dans de bonnes conditions de sécurité fiscale, est, selon moi, d'appliquer cette loi qui, elle, a bien prévu un dispositif spécifique d'incitation en matière fiscale et de charges sociales, s'agissant des abondements des employeurs lorsqu'ils existent.
Le délai absolument anormal qui sépare la promulgation de cette loi de la sortie des textes d'application crée, monsieur le secrétaire d'Etat, une situation grave pour les entreprises et leurs salariés car - nous venons de le voir - la Cour de cassation jette un doute sur la sécurité juridique et fiscale des opérations qui sont actuellement conduites et qui existent grâce à des accords conclus au sein de certaines entreprises.
Il existe, par ailleurs, un dispositif légal que nous avons voté afin d'instaurer précisément un cadre de transparence, permettant l'association des partenaires sociaux dans des conseils consultatifs. Nous avons veillé, ici même au Sénat, lorsque nous avons examiné ce texte, au respect des règles de dispersion des actifs, de prudence, de transparence et d'association des partenaires sociaux. Ce cadre est virtuel. Nous ne savons pas si le Gouvernement veut ou non l'abrogation de la loi dite Thomas sur l'épargne-retraite. Tout ce que nous savons, c'est que les décrets d'application sont sans cesse reportés.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voterai bien évidemment contre l'amendement n° I-110 du groupe socialiste. Toutefois, je profite de l'occasion qui m'est donnée pour exprimer le souhait de pouvoir disposer le plus rapidement possible du cadre juridique et fiscal dont nous avons besoin en la matière.
Il faut en effet bien être conscient qu'encourager nos concitoyens à placer leur épargne à long terme, voire à très long terme, dans des dispositifs afin de leur permettre de recevoir un complément de retraites suppose, en contrepartie du blocage de leurs actifs pendant une longue période, une incitation fiscale ainsi qu'une incitation en termes de charges sociales, si l'on veut que des capitaux soient drainés et utilisés notamment au financement des fonds propres de nos entreprises.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Comme M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie l'a indiqué à plusieurs reprises, la loi du 15 mars 1997 dite loi sur les fonds de pension doit être réexaminée. Certaines de ses dispositions doivent être abrogées et vous aurez bientôt, j'en suis convaincu, monsieur Marini, l'occasion de débattre à nouveau de ce sujet et, pour répondre à votre voeu, le plus vite sera le mieux.
M. Michel Sergent. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Je voulais simplement engager un débat sur ce sujet. J'ai bien écouté les explications de M. Charasse et de M. le secrétaire d'Etat. Selon eux, cet amendement, compte tenu des arrêts de la Cour de cassation, n'est pas très utile. En conséquence, je le retire.
M. le président. L'amendement n° I-110 est retiré.
Par amendement n° I-69, Mme Beaudeau, M. Loridant, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de l'article 7 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées.
« II. - Le taux prévu au 2 de l'article 200 A du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement a trait à l'une des dispositions les plus discutables de la réforme Juppé de l'impôt sur le revenu, à savoir la prise en compte dans le revenu imposable des congés de maternité et des allocations versées à ce titre par le régime général de protection sociale aux mères de famille salariées.
La portée de la mesure est d'ailleurs relativement limitée, puisque le Gouvernement escomptait récupérer environ 1,2 milliard de francs de produit fiscal. Nous avions combattu l'an dernier cette disposition avec fermeté, mais nous n'étions alors pas seuls dans ce combat, car nous nous appuyions pour ce faire sur la colère tout à fait légitime de nombreux syndicats et de nombreuses associations féminines.
Je pense d'ailleurs que cette mesure, parmi d'autres, a pu convaincre un certain nombre de femmes salariées de sanctionner, le 1er juin dernier, le gouvernement Juppé qui tentait de retrouver une légitimité perdue au gré des mouvements sociaux.
Cette disposition a été combattue par l'ensemble des forces politiques aujourd'hui situées dans la majorité parlementaire de l'Assemblée nationale, et on peut donc s'étonner, ou regretter, qu'elle n'ait pas fait l'objet d'une révision.
Notre amendement vise donc à réparer cet oubli, en rétablissant le principe de non-imposition des allocations pour congé de maternité.
J'observe, d'ailleurs, que si la majorité sénatoriale ne votait pas tout à l'heure cet amendement de bon sens, nous serions en droit de nous interroger sur la portée de son combat en faveur de la famille puisque, jusqu'à plus ample informé, il n'y a pas de famille, quelle qu'en soit la forme, monsieur Marini, s'il n'y a pas de maternité.
On pourra éventuellement nous rétorquer que la mesure ne concerne que les femmes salariées dépendant du régime général. Certes, mais, en toute honnêteté, qui osera proposer que la mesure que nous vous présentons soit frappée d'inconstitutionnalité, au motif de la rupture de l'égalité devant l'impôt de contribuables dont les situations sont en apparence identiques ?
J'aimerais savoir quel groupe parlementaire pourrait engager une telle démarche, surtout quand on connaît la sensibilité des Françaises et des Français aux questions de la famille.
Pour autant, la mesure que nous préconisons est défendue par deux motivations essentielles.
Elle est une mesure cohérente avec le rejet pur et simple de la réforme de l'impôt sur le revenu engagée l'an dernier, dont elle constituait l'un des éléments les plus discutables.
Nous avions notamment souligné, en 1996, que l'adoption de l'article 7 de la loi de finances pourrait finir par remettre en cause l'exercice même du droit au congé de maternité, avec toutes les conséquences qu'une telle mesure pouvait induire sur le déroulement même de cette maternité et sur ses suites.
Permettez-moi encore ici de souligner la contradiction - car il s'agit, pour moi, d'une contradiction - existant dans la démarche de la majorité gouvernementale et parlementaire de l'époque entre la remise en cause de l'exemption fiscale et la volonté affichée de développer, par exemple, la garde d'enfants à domicile ou l'éducation des enfants par les parents au travers de l'allocation parentale d'éducation.
L'objectif visé par l'ensemble du dispositif était peut-être plutôt de favoriser le retour des femmes au foyer et l'abandon de toute perspective de promotion sociale.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il ne serait pas bienvenu que le Gouvernement laisse en cette matière les choses en l'état et ne revienne pas sur l'article 7 de la loi de finances pour 1997.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mme Beaudeau s'interroge sur l'attachement sincère de la majorité sénatoriale à la défense de la famille. Cet attachement passe par le refus de reporter sur les générations futures les coûts que nous ne sommes pas capables d'assumer nous-mêmes. Je suis surpris que Mme Beaudeau ne soit pas indignée de voir à quel point nous renvoyons aux générations futures le remboursement de nos déficits actuels. Nous sommes tous collégialement responsables car, encore une fois, accepter le financement d'un déficit par l'emprunt, c'est renvoyer aux générations futures la charge des dépenses courantes d'aujourd'hui.
Madame Beaudeau, l'attachement de la majorité sénatoriale à la famille est donc total. L'idée qui sous-tend votre amendement est tout à fait respectable car c'est la générosité. Cependant, cette générosité coûte un milliard de francs, et un milliard de francs accordés aujourd'hui selon la formule que vous préconisez - un emprunt qui sera remboursé par les générations futures - ne nous paraît pas de bonne méthode. C'est ce qui nous a amenés à émettre un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mme Beaudeau a posé une véritable question, qui est celle de la taxation des indemnités de repos des femmes en congé de maternité instituée depuis le 1er janvier 1996.
Cette question touche à la politique de la famille, mais je dois dire à nouveau, avec un certain regret d'ailleurs, qu'il faut faire les comptes, et le Gouvernement n'a pas jugé possible d'adopter cette disposition car son coût - 1,2 milliard de francs - est considérable. Peut-être le Gouvernement qui a fait preuve de rigueur en matière de fiscalité est-il un peu moins embarrassé que M. le rapporteur général, lequel a défendu des abattements fiscaux considérables. Cependant, malgré toute la sensibilité que vous avez si bien exprimée, madame Beaudeau, il nous paraît difficile d'aller dans ce sens.
J'ajoute un argument qui, sans être décisif, est tout de même important : depuis toujours, les indemnités de congé de maternité des femmes fonctionnaires du secteur public sont taxées. Si je puis m'exprimer ainsi, il y a donc là un alignement des femmes salariées du secteur privé sur les femmes du secteur public. Ce n'est pas vraiment un argument décisif, je le concède. L'argument qui, malheureusement, me paraît le plus incontournable, c'est le coût de cette mesure.
Cela étant dit, il sera sans doute possible d'intégrer la préoccupation que vous exprimez avec autant de force dans la réflexion sur la politique familiale que Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité organisera en concertation durant l'année 1998.
Je vous demande donc, avec quelque scrupule, de retirer votre amendement, sinon, en raison de son coût, je serais obligé d'en demander le rejet.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-69.
M. François Lesein. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Monsieur le président, la semaine dernière, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous avez pu voir ma sensibilité à l'égard de la famille, notamment des parturientes. Contrairement à ce que vient de dire M. le rapporteur général, s'il n'y a plus d'enfants, les générations futures seront beaucoup moins nombreuses et cela pourra poser problème.
M. Philippe Marini. C'est vrai !
M. François Lesein. Cette préoccupation est très respectable, encore faut-il avoir des enfants dès maintenant.
Je voudrais que Mme Beaudeau me dise si la notion d'« allocations maternité » comprend non seulement les salaires, mais aussi les primes à la naissance.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il s'agit des indemnités journalières versées par les caisses de sécurité sociale.
M. François Lesein. Dernièrement, je me suis élevé contre le projet du Gouvernement, qui semblait défavoriser les familles, et contre notre commission, qui, en proposant cette année une baisse importante des taux d'augmentation des moyens de fonctionnement diminuait ainsi, monsieur le président, cher confrère, la sécurité dans certains hôpitaux, je pense notamment aux services chirurgicaux d'urgence obstétricale.
C'est la raison pour laquelle je suis très partisan de cette prime à la démographie dans notre pays. Aussi, je voterai cet amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-69, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-70 rectifié, Mme Beaudeau, M. Loridant, Mme Borvo, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions des articles 6 et 92 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées.
« II. - Dans le premier alinéa de l'article 199 decies B du code général des impôts, le taux "15 %" est remplacé par le taux "10 %". »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. En l'occurrence, il s'agit de l'abattement de 10 % sur les retraites et les pensions. La réforme de l'impôt sur le revenu du gouvernement de M. Juppé recèle des mesures pour le moins discutables, qui, selon nous, doivent être profondément revues et corrigées. L'examen du projet de loi de finances pour 1998 nous permet de revenir sur le sujet.
Cet amendement porte sur la suppression du plafonnement de l'abattement de 10 % accordé aux titulaires de pensions et de retraites.
Dans la philosophie, que nous ne partageons pas, de la réforme Juppé, la baisse du barème de l'impôt sur le revenu devait en effet s'accompagner d'une redéfinition de l'assiette de cet impôt, redéfinition incluant une part plus importante de revenus salariaux - nous y reviendrons avec les abattements professionnels supplémentaires et spécifiques - et des revenus de transfert tels que les allocations maternité, nous l'avons vu, ou encore les pensions et les retraites.
A l'époque, nous avions contesté cette orientation. En effet, toute extension d'assiette de l'impôt sur le revenu doit, selon nous, plutôt viser les revenus du capital et de la propriété que les revenus du travail ou ceux qui proviennent de transfert.
Les pensions et les retraites constituent une forme de salaire différé, puisque les prestations sont assises fondamentalement sur les salaires, et notamment sur le montant des prélèvements mensuels effectués sur les rémunérations pour financer le régime général d'assurance vieillesse.
On cotise aujourd'hui pour disposer demain d'une pension ou d'une retraite, comme nos cotisations d'aujourd'hui servent à assurer des prestations aux retraités et aux pensionnés d'aujourd'hui.
C'est le principe fondamental de la répartition, qui répond en fait à une idée simple : celle de la solidarité entre générations de salariés, anciens ou actuels.
Ces salaires et traitements ont subi naturellement le prélèvement visant à financer les retraites et les pensions et on doit assimiler ces retraites aux pensions et aux salaires.
Cela a motivé, dans la réforme initiale de l'impôt sur le revenu - lorsque s'est mis en place la barème progressif - que l'abattement de 10 % accordé aux salaires soit logiquement étendu aux retraites et aux pensions.
Rien ne permet donc aujourd'hui de justifier que le plafonnement de cet abattement continue à s'appliquer, frappant au fil des ans un nombre croissant de contribuables.
En effet, à la fin de la réforme, ce sont les retraités et pensionnés disposant d'un revenu annuel de 120 000 francs, c'est-à-dire, de 10 000 francs par mois, qui seront concernés par ce plafonnement.
On est, en la matière, encore très loin des couches les plus aisées de la population. Vous me permettrez de souligner le regrettable effet de seuil que produirait le maintien de cette partie de la réforme Juppé conduisant à une augmentation de l'impôt sur le revenu de certains contribuables.
Cet amendement, à l'instar de celui que nous avons défendu sur la demi-part des veufs, célibataires et divorcés, vise donc à rendre un peu de cohérence à notre système de calcul de l'impôt sur le revenu. Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite, mes chers collègues, à l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je souhaiterais au préalable dire à M. le secrétaire d'Etat que nous ferons, tout au long de cette discussion budgétaire, un peu de colorimétrie. En effet, à chaque fois qu'il rosira un peu son commentaire en interprétant la position réputée embarrassée de la commission des finances, je serai tenté de colorier dans l'autre sens. Tout à l'heure, j'ai résisté à cette tentation, vous l'avez constaté, afin de ne pas faire perdre de temps au Sénat.
M. Loridant peut qualifier les réformes de l'impôt sur le revenu du nom qu'il voudra. La fierté du Parlement, c'est de voter la loi. Or, de plus en plus souvent, mes chers collègues, nous-mêmes donnons à tous les textes qui sont adoptés le nom des ministres concernés. J'ai beaucoup de respect pour la fonction ministérielle ; j'en ai aussi beaucoup pour le Parlement. Si les parlementaires n'ont pas de fierté pour le Parlement, un jour viendra où il n'y aura plus besoin de Parlement dans notre pays, et le début de la tyrannie sera sonné.
M. Philippe Marini. Absolument !
M. Alain Lambert, rapporteur général. A ce propos, je dirai à notre collègue M. Loridant que le souci constant du Sénat est d'aboutir à une fiscalité stable, lisible et compréhensible pour nos concitoyens. L'année dernière, a été adoptée une réforme fiscale dont la mise en oeuvre s'étale sur cinq ans. La majorité sénatoriale s'y tient. Cette réforme a intégré les dispositifs anciens dans le nouveau barème. C'est pourquoi, logiquement, la commission émet aujourd'hui un avis défavorable sur tous les dispositifs visant à la fois à maintenir la réforme fiscale et à ajouter d'autres dispositifs qui ont été intégrés dans le barème. Elle est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, rassurez-vous, j'ai compris à votre premier message que certains noms propres ne devaient pas être prononcés devant la Haute Assemblée. Je vous le promets, je ne prononcerai plus aucun nom propre, sauf celui des sénateurs présents, si vous en êtes d'accord. (Sourires.)
Monsieur Loridant, on ne peut pas rigoureusement assimiler les retraites à des salaires. Considérer l'abattement de 10 % sur les retraites comme un abattement pour frais professionnels, c'est, à mon avis, aller un peu loin. Le plafond de 24 000 francs - qui n'est pas un seuil, je le souligne au passage - s'appliquera pour l'imposition des revenus de 1997. Il touchera - je reprends un peu la même argumentation, en donnant des chiffres pour montrer l'impact des mesures qui sont proposées par le Gouvernement - les foyers qui disposent d'un revenu fiscal supérieur à 240 000 francs. Ce ne sont donc pas - je veux vous rassurer entièrement, monsieur le sénateur - des retraités modestes ou moyens. En effet, cette disposition concerne environ un foyer fiscal sur dix parmi ceux qui déclarent des revenus au titre des pensions et des retraites.
Donc, j'appelle au retrait ou au rejet de cet amendement, tout simplement parce que l'assimilation entre les retraites et les salaires ne me paraît pas convenable et, surtout, en raison du coût, qui, en outre, est pluriannuel. L'expérience du gouvernement précédent - je ne citerai aucun nom propre (Sourires) - montre qu'il est un peu aventureux de prendre des engagements fiscaux sur cinq ans.
La solidarité entre générations doit jouer. En l'occurrence, il est demandé à un foyer fiscal de retraités sur dix de faire un petit effort de solidarité en faveur des générations qui arrivent sur le marché du travail. Il s'agit, je crois, d'un appel légitime.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-70 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus à l'examen de l'amendement n° I-152, tendant à insérer un article additionnel après l'article 2.
Par amendement n° I-152, M. Ostermann et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 154 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - Pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux et des bénéfices des professions non commerciales, le salaire du conjoint participant effectivement à l'exercice de la profession est déductible en totalité du bénéfice imposable de l'entreprise.
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-48 est présenté par M. Lesein.
L'amendement n° I-183 est déposé par MM. Badré, Arnaud et Egu.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La dernière phrase du premier alinéa de l'article 39 AC du code général des impôts est ainsi rédigée :
« Cette disposition s'applique également aux véhicules qui fonctionnent, exclusivement ou non, au moyen du gaz naturel véhicules ou du gaz de pétrole liquéfié. »
« II. - Les pertes de recettes éventuelles pour le budget de l'Etat sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Lesein, pour défendre l'amendement n° I-48.
M. François Lesein. Cet amendement a pour objet d'étendre aux véhicules fonctionnant au gaz pétrolier liquéfié, le GPL, les règles d'amortissement exceptionnel actuellement applicables uniquement à l'achat de véhicules électriques ou fonctionnant au gaz en monocarburation en vertu de l'article 39 AC du code général des impôts. En effet, la quasi-totalité du parc de véhicules GPL fonctionne en bicarburation et se trouve, de ce fait, exclue du bénéfice de cette mesure fortement incitative.
Cet amendement permettrait donc d'étendre significativement l'utilisation du GPL dans les flottes captives urbaines, étant souligné que le prix attractif du GPL engage à le préférer à tout autre carburant, et de mieux préserver l'environnement.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-183.
M. Denis Badré. Je n'ai pas grand-chose à ajouter aux propos de M. Lesein, qui a très bien expliqué quelle était notre préoccupation.
Vous connaissez notre attachement à la cause de l'environnement, d'une part, et à l'équité, d'autre part. Je pense qu'il serait bon que les flottes captives urbaines puissent bénéficier de cette mesure dans les mêmes conditions, quel que soit leur mode de carburation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques n°s I-48 et I-183 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, attaché, comme les éminents collègues qui viennent de s'exprimer, à l'environnement, je me dois néanmoins, au nom de la commission des finances, de rappeler que l'on nous propose un amortissement accéléré pour les véhicules bicarburés GPL et super.
Cette technologie, mes chers collègues, est déjà largement relancée par la baisse massive du prix du GPL à la pompe, qui se situe - je parle sous le contrôle du Gouvernement - aux alentours de 2,60 francs le litre.
L'admission à l'amortissement accéléré ne se justifie réellement que pour les véhicules électriques, dont le surcoût par rapport à un véhicule ordinaire est de l'ordre de 50 000 francs. Les véhicules bicarburés GPL et super ne présentent un surcoût, selon les informations que j'ai pu recueillir, que de 10 000 francs environ. Ils bénéficient, comme tout véhicule de société, d'un amortissement normal. En outre, ils peuvent prétendre à un allégement de la taxe sur les véhicules de société du quart de son montant, ce qui donne, au nouveau taux de cette taxe, pour les véhicules de plus de sept chevaux, un allégement de 3 700 francs par an. Soit, si mes calculs sont exacts, pour une durée de vie du véhicule de cinq ans, un allégement de 18 500 francs.
Il en résulte un avantage qui se révèle supérieur au surcoût de ces véhicules, ce qui a conduit la commission des finances à émettre, en termes purement économiques - et avec regret ...
M. François Lesein. Mais en termes amicaux !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, le Gouvernement rejoint le point de vue de la commission, et ses arguments sont voisins.
Tout d'abord, la loi sur l'air et sur l'utilisation rationelle de l'énergie, que vous connaissez bien, a pour objet d'encourager l'utilisation de carburants propres et non pas, même indirectement, l'utilisation de l'essence ou du gazole.
Le Gouvernement ne souhaite pas reproduire, à propos du gaz naturel, la dérive qui a été constatée sur le carburant sans plomb. Vous le savez, celui-ci a bénéficié d'un avantage fort coûteux pour les finances publiques, mais il a eu assez peu de conséquences pour l'environnement dans la mesure où il a été utilisé pour des véhicules non dotés du pot catalytique.
De surcroît, si l'on en juge à la façon dont la mesure est conçue, l'amortissement jouerait pour l'ensemble du coût du véhicule, alors que le surcoût de l'équipement spécifique qui peut bénéficier de cet amortissement exceptionnel n'excède pas 10 000 francs à 15 000 francs. La mesure n'est donc pas bien ciblée et risque d'être assez coûteuse.
Reste que le Gouvernement est aussi attaché que les membres de la Haute Assemblée à tout ce qui a trait à l'écologie et qu'il va réfléchir à l'élaboration d'une fiscalité écologique, c'est-à-dire qui soit soucieuse d'un développement durable. Sachez, mesdames, messieurs les sénateurs, que la Haute Assemblée sera associée à cette réflexion.
Le Gouvernement s'oppose donc aux amendements identiques n°s I-48 et I-183.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-48 et I-183.
M. Denis Badré. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Je suis sensible à l'argumentation présentée tant par M. le rapporteur général que par M. le secrétaire d'Etat, particulièrement sur le fait que la mesure n'a pas été suffisamment ciblée. Dans ce domaine, il est vrai, il nous faut être extraordinairement rigoureux pour ne pas gaspiller nos moyens, ce qui reviendrait à affaiblir la cause de l'environnement que nous voulons servir. Je pense avec vous, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'il faut cibler de manière plus précise l'ensemble de la mesure.
En revanche, je ne partage pas complètement votre pessimisme lorsque vous déclarez que ces mesures ne servent pas beaucoup l'environnement. Il faut avoir la foi, monsieur le secrétaire d'Etat, cela viendra !
Cela dit, je retire mon amendement et je pense que M. Lesein acceptera d'en faire autant.
M. le président. L'amendement n° I-183 est retiré.
Monsieur Lesein, l'amendement n° I-48 est-il maintenu ?
M. François Lesein. Monsieur le président, si l'on n'inscrit pas dès maintenant dans le texte dont nous discutons les bases de cette mesure dans la perspective d'une concertation plus large et plus générale et, certes, devenue nécessaire à l'heure actuelle, eu égard à la qualité de l'environnement, cela risque de nous coûter fort cher plus tard.
Je pense donc qu'il faut que le Sénat se prononce aujourd'hui. Je prends le risque d'être battu, mais je veux que l'on prenne date et, en conséquence, je maintiens mon amendement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-48, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° I-112, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 200 du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art... - Les contribuables qui, à partir du 1er décembre 1997, achètent en France des véhicules ou des kits de bicarburation agréés par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du budget et de l'environnement, utilisant comme carburants les gaz de pétrole et autres hydrocarbures présents à l'état gazeux ou fonctionnant à l'électricité électrique, peuvent bénéficier à ce titre d'un crédit d'impôt.
« Le montant de ce crédit d'impôt est fixé à 10 000 F par contribuable. Il est accordé sur présentation des factures de l'achat du véhicule ou du kit.
« Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt dû au titre de l'année au cours de laquelle les dépenses ont été payées. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Par cet amendement, nous proposons d'instituer un crédit d'impôt de 10 000 francs sur les achats de véhicules ou de kits de bicarburation permettant de fonctionner avec des carburants non polluants.
Il s'agit en fait de généraliser les mesures d'incitation qui n'existent pour l'instant que pour les véhicules de société.
J'attire l'attention du Sénat sur l'importance de cet amendement. Ces dernières années, en effet, on a vu se multiplier les rapports mesurant les conséquences de la pollution atmosphérique sur la santé publique. Au-delà des rapports, nous constatons tous dans notre entourage, à Paris en particulier, les difficultés respiratoires et les crises d'asthme, notamment.
Plus grave, dans les grandes villes, on estime que neuf cents personnes par an décèdent de manière prématurée du fait de la pollution automobile. Vous le savez, mes chers collègues, dans les grandes agglomérations, la première cause de pollution est la circulation automobile. En Ile-de-France, 75 % des oxydes d'azote sont émis par les transports, ainsi que la plupart des particules dangereuses pour la santé.
A ce titre, j'évoquerai tout particulièrement les véhicules diesel, qui représentent aujourd'hui plus de 40 % des immatriculations. Un rapport du comité de prévention et de précaution estime que 90 % des émissions de particules que l'on peut attribuer aux transports urbains sont issus de véhicules à moteur Diesel. Or ce carburant continue de bénéficier d'un avantage fiscal qui le rend particulièrement attractif.
M. Louis Schweitzer, président-directeur général de Renault, l'exprimait très bien : « Ce qu'il faut condamner avant tout, disait-il, c'est la part de marché unique que le moteur Diesel a prise chez nous. Les acheteurs ne le choisissent pas sur ses qualités mécaniques, mais pour de pures raisons fiscales, ce qui n'est pas sain, ni pour l'Etat ni pour les constructeurs. » J'ajouterai que c'est encore plus néfaste pour la santé publique.
Force est de constater que le renouvellement du parc en véhicules utilisant des moteurs ou des carburants moins polluants a été insuffisant et n'a pas compensé l'augmentation régulière du trafic au sein des grandes agglomérations.
Quelques chiffres permettront de mesurer la distance qui reste à parcourir. Ainsi, le parc automobile français compte 3 000 véhicules électriques ; plus particulièrement, sur les 2 600 000 véhicules et les 150 000 deux-roues qui se déplacent quotidiennement à Paris, seuls 2 160 étaient des véhicules électriques à la fin de 1996 !
Le GPL, pour ne citer que lui, est un carburant peu cher et sept fois moins polluant que l'essence, tout en conservant les mêmes performances. Pourtant, il n'alimente encore que 5 % des voitures vendues cette année. Avec 70 000 véhicules fonctionnant au GPL, la France se situe loin derrière le Japon ou l'Italie, qui en compte respectivement 1,7 million et 1,2 million.
Un certain nombre de mesures ont déjà été prises pour favoriser les carburants non polluants, en particulier le GPL, on vient d'y faire allusion. Nous ne pouvons que nous en féliciter. Cependant, ces mesures nous paraissent insuffisantes pour combattre le développement du marché du gazole et inciter, sinon au renouvellement du parc automobile du moins, au minimum, à l'équipement des véhicules existants avec des kits de bicarburation.
Il faut donc, et dès aujourd'hui, multiplier les initiatives pour qu'en France les véhicules propres remplacent rapidement les véhicules polluants. La pollution constitue une des préoccupations essentielles des Français, en particulier des Parisiens. Techniquement, nous sommes en mesure de faire en sorte qu'avec un trafic équivalent les véhicules polluent moins. Nous devons donc tout mettre en oeuvre pour promouvoir ces nouvelles carburations. C'est pour accélérer cette évolution balbutiante que nous vous proposons cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Comme pour l'amendement précédent, l'idée est intéressante, mais Mme Pourtaud elle-même reconnaît que le prix à la pompe est peu élevé...
De quoi s'agit-il ici ? Il s'agit de soutenir les redevables de l'impôt pour une démarche qu'ils engagent volontairement, ce en quoi il faut d'ailleurs les encourager et les complimenter, alors que nous constatons, corrélativement, la baisse du prix à la pompe.
Je souhaiterais que le Gouvernement, en la circonstance, vienne, si je puis dire, au secours de la commission des finances au nom de notre souci commun d'assainir les finances publiques.
Cela étant, cet amendement émanant de la majorité nationale et de l'opposition sénatoriale, je ne veux pas apparaître comme l'ayatollah du budget de la France ! (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous serons deux !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de venir à mon secours !
Ces incitations fiscales partent, certes, d'un bon sentiment, mais je ne sais pas si nous faisons de bonnes finances exclusivement avec de bons sentiments.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame Pourtaud, j'estime que les deux amendements que vous déposez vont au-delà des bons sentiments. Ils tendent en effet à répondre à un véritable problème de pollution urbaine, qui n'est apparu à certains que le 1er octobre dernier, mais que d'autres, plus éclairés, avaient déjà constaté auparavant.
Le 1er octobre, le Gouvernement a su prendre les décisions rapides qui s'imposaient en mettant en place pendant une journée la circulation alternée. Il esr clair cependant que ce n'est pas une solution durable et qu'il faut chercher ailleurs. Je prends donc les deux amendements que vous et vos collègues avez déposés comme un appel à agir sur ces sujets particulièrement importants. Je considère toutefois qu'ils relèvent, si je puis dire, de l'acupuncture fiscale et qu'ils ne sont pas tout à fait opportuns. En effet, adopter des mesures ponctuelles, c'est se condamner ensuite aux pires difficultés ; j'en veux pour preuve - mais je ne citerai pas de nom - les récentes exonérations consenties pour l'achat d'automobiles, qui ont provoqué des dents de scie considérables dans les courbes de ventes ! (Sourires.)
Je partage donc votre conviction, madame Pourtaud, il faut en effet trouver le moyen de lutter contre la pollution urbaine. La fiscalité doit pouvoir jouer un rôle en ce sens, à la condition d'être considérée dans son ensemble. Des mesures fiscales ont déjà été adoptées ponctuellement, M. le rapporteur général l'a dit. Ainsi, le prix du gaz propane liquéfié est très peu élevé en raison d'une fiscalité particulièrement avantageuse. De même, l'Assemblée nationale a décidé que l'électricité consommée par des véhicules appartenant à des entreprises pourrait bénéficier d'une déduction de TVA. Pour l'heure, je ne juge pas opportun d'ajouter une autre mesure ponctuelle à cette liste, d'autant que le coût de la mesure pourrait s'élever, mais il est difficile de l'estimer avec précision, à plusieurs centaines de millions de francs. Il est vrai, madame Pourtaud, que vous soulevez un problème réel, mais sachez que le Gouvernement est décidé non seulement avec sa majorité, mais, si possible, avec l'ensemble de la représentation nationale, à l'affronter.
Nous devons, non pas dans les années mais dans les mois qui viennent, j'y insiste, réfléchir à une fiscalité écologique. En la matière, je ne peux que renouveler les engagements que j'ai pris il y a quelques minutes.
Je vous demande donc, avec respect, de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, je serais obligé de demander son rejet, non pas parce que vous ne vous attaquez pas à un vrai problème, mais parce que vous proposez une solution ponctuelle à un problème qui mérite une solution, certes urgente, mais d'ensemble.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-112.
Mme Danièle Pourtaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai pris acte de l'engagement que vous venez de prendre devant nous et de l'importance que le Gouvernement attache, comme nous tous, à la lutte contre la pollution. Je me permets simplement d'insister sur le fait qu'il est nécessaire, à un moment donné, de prendre des mesures fortes et visibles par l'ensemble de la population pour susciter un appel à l'industrie automobile.
Le problème, aussi bien pour les véhicules propres que pour les simples kits de bicarburation, vient du fait que, pour l'instant, produits en trop petites séries, ils sont trop onéreux pour que des particuliers fassent spontanément la démarche de contribuer à l'effort de santé publique que représente la lutte contre la pollution.
Je rends donc le Gouvernement attentif au fait que les mesures qu'il nous promet devront être prises rapidement, quelle qu'en soit la nature. Cependant, je me rends à sa demande, et je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° I-112 est retiré.
Par amendement n° I-111, Mme Pourtaud, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 2, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 39 AC du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art.... - A compter du 1er décembre 1997, les propriétaires de taxis faisant équiper leurs véhicules de systèmes leur permettant de fonctionner à l'énergie électrique, au gaz de pétrole liquéfié, GPL, ou au gaz naturel véhicules, GNV, ou qui achètent en France des véhicules utilisant ces carburants peuvent bénéficier du remboursement du coût d'achat du véhicule ou de l'équipement, sur présentation des factures d'achat, dans la limite de 15 000 F par véhicule. Les systèmes ouvrant droit à remboursement doivent être agréés par arrêté conjoint des ministres chargés des transports, du budget et de l'environnement. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Pourtaud.
Mme Danièle Pourtaud. Par cet amendement, sur lequel M. le secrétaire d'Etat s'est pour ainsi dire déjà prononcé par anticipation, nous proposons d'inciter les propriétaires de taxis à utiliser des carburants moins polluants. Cette mesure tend au remboursement d'une partie du coût d'achat d'un kit de bicarburation permettant de fonctionner à l'électricité, au GPL ou au GNV. Pour ceux qui fonctionnent au diesel, qui sont largement majoritaires, nous proposons le remboursement d'une partie du coût d'achat d'un nouveau véhicule : les moteurs Diesel ne peuvent en effet être équipés de kit de bicarburation. Cette mesure représente donc une incitation pour que l'ensemble des taxis circule avec des carburants non polluants.
Dans les grandes agglomérations, la première cause de pollution est la circulation automobile. Or il n'est pas très difficile de comprendre qu'un taxi pollue beaucoup plus qu'une voiture particulière. A Paris notamment, les taxis, qui sont au nombre de 15 000 et dont plus des trois quarts fonctionnent au diesel, ont une importance considérable dans le trafic. Ils sont donc en première ligne si l'on veut mener une politique efficace contre la pollution.
En milieu urbain, la responsabilité du diesel dans la pollution atmosphérique n'est plus à démontrer. Les conséquences de celle-ci sur la santé publique deviennent alarmantes.
Pourtant, les propriétaires de taxis français continuent de bénéficier d'une détaxation importante sur le gazole, détaxation qui les conduit, dans leur grande majorité, à choisir ce carburant. Aujourd'hui, les taxis bénéficient d'une détaxation à hauteur de 5 000 litres de diesel par an. Il faut que nous parvenions à inverser cette tendance au profit des carburants non polluants.
Permettez-moi de rappeler que les taxis de Rome et de Tokyo utilisent tous le GPL.
Les taxis G 7 viennent de lancer sur Paris une première expérimentation de véhicules roulant au GPL. Je souhaite que cette expérience se généralise rapidement et que, à cette fin, le Sénat adopte l'amendement n° I-111, qui vise à rétablir l'équilibre ou du moins une concurrence égale entre les véhicules polluants et les véhicules non polluants.
Notons que les chauffeurs de taxi sont parmi les personnes les plus concernées par la pollution automobile, puisqu'ils la subissent toute la journée.
J'attire l'attention de mes collègues et du Gouvernement sur le fait que cette mesure pourrait avoir un important effet d'entraînement pour l'industrie des voitures roulant au gaz pétrolier liquéfié : en effet, les taxis constituent eux-mêmes un premier parc important ; de plus, leurs chauffeurs sont - nous ne pouvons l'oublier - des relais d'opinion précieux.
Voilà pourquoi je demande au Sénat de bien vouloir voter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, la commission des finances a trouvé cette proposition aussi intéressante, voire encore plus intéressante, que la précédente.
Voilà un instant, j'ai écouté M. le secrétaire d'Etat avec intérêt, comme toujours, d'ailleurs : son argumentation a d'ailleurs presque ébranlé ma conviction dans la mesure où M. le secrétaire d'Etat a indiqué combien, au fond, à quelque chose près, le Gouvernement pourrait émettre lui-même un avis favorable sur ces propositions. Je regarde donc M. le secrétaire d'Etat avec une circonspection positive afin de savoir quelle sera sa position sur cette idée plus intéressante encore !
Je voudrais dire le plus sérieusement du monde que, s'agissant des chauffeurs de taxi, la recommandation est plus forte encore que sur l'amendement précédent.
Mais il n'a pas échappé à Mme Pourtaud que les taxis bénéficient déjà d'une dérogation européenne qui leur permet de ne pas acquitter la taxe intérieure sur les produits pétroliers sous un plafond de 5 000 litres par an, ce qui va déjà dans le bon sens.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, votre proposition est particulièrement constructive, car elle vise le problème des taxis dans les grandes agglomérations.
Il est vrai que, dans certains pays étrangers, les taxis fonctionnent au gaz pétrolier liquéfié. Je laisse de côté, - vous n'y avez pas insisté - le fonctionnement des taxis à l'électricité, car ce mode de carburation n'est pas tout à fait conforme à leurs besoins. En tout cas, s'agissant du gaz pétrolier liquéfié, nous pouvons nous interroger très sérieusement sur le point que vous évoquez.
Si les taxis bénéficient d'une détaxe à hauteur de 5 000 litres de gazole, ils bénéficient d'une détaxe plus importante encore s'agissant du gaz pétrolier liquéfié : 12 000 litres. La vraie difficulté en la matière me semble donc liée non pas à la fiscalité, mais au nombre encore relativement faible des points d'approvisionnement dans Paris.
De plus, les taxis adaptés au gaz pétrolier liquéfié bénéficient d'un amortissement exceptionnel sur douze mois.
En outre, l'Assemblée nationale, à la demande de sa majorité, notamment du groupe socialiste, a institué pour les véhicules non polluants une déductibilité totale de la TVA sur les carburants et l'exonération de la vignette.
Par conséquent, je suis tout à fait circonspect : la proposition de Mme Pourtaud est l'une des idées les plus sérieuses sur lesquelles nous aurons à travailler dans le cadre de l'étude de la fiscalité écologique ; elle sera parmi les premières dispositions examinées, car elle apporte, me semble-t-il, une solution digne d'intérêt à court terme à un problème tout à fait important. Comme l'a dit Mme Pourtaud, dans certains pays étrangers, les taxis roulent au gaz pétrolier liquéfié ; de plus, l'adoption d'une telle mesure permettrait aux chauffeurs de taxi, au premier chef, de vivre dans une atmosphère plus salubre.
En attendant l'étude du dossier de la fiscalité écologique, que nous allons constituer ensemble, je vous demande donc, madame le sénateur, de bien vouloir retirer l'amendement n° I-111.
M. le président. Madame Pourtaud, l'amendement n° I-111 est-il maintenu ?
Mme Danièle Pourtaud. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre engagement, dont je prends bonne note.
Néanmoins, je voudrais attirer votre attention sur deux choses.
D'une part, les flottes de taxi sont généralement des véhicules diesel, sur lesquels les kits de bicarburation ne s'appliquent pas. Il faut donc parler en termes de renouvellement de la flotte, et il est nécessaire d'inciter les propriétaires de véhicules taxis à changer ces derniers.
Par ailleurs, vous m'avez fait remarquer que le gaz pétrolier liquéfié faisait déjà l'objet d'une incitation fiscale. Néanmoins, vous savez comme moi, monsieur le secrétaire d'Etat, que, pour une même distance, un véhicule roulant au GPL consommera plus de carburant qu'un véhicule utilisant du diesel. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'assentiment.) Par conséquent, bien que je ne sois pas une spécialiste de l'industrie automobile, les deux mesures sont, à mon avis, équivalentes.
Il y a donc toujours, aujourd'hui, un surcoût à l'achat des véhicules propres qui, me semble-t-il, handicape le développement du parc de véhicules propres. Par conséquent, il est urgent de prendre des mesures plus favorables.
J'ai pris bonne note de votre engagement. Je me permets néanmoins de vous demander quand de telles dispositions pourront intervenir.
Bien sûr, monsieur le président, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-111 est retiré.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Madame le sénateur, si je dis que nous allons étudier le dossier de la fiscalité écologique ce n'est pas pour repousser ce sujet à un avenir incertain !
Nous allons étudier ce dossier avec tous ceux qui voudront bien apporter leur contribution, de façon à insérer des dispositions précises de fiscalité écologique dans la loi de finances pour 1999. A cet égard, madame le sénateur, il me semble que la mesure que vous proposez mérite d'être examinée avec un soin particulier.
Tel est donc l'objectif du Gouvernement. Par conséquent, je le répète, ces dispositions ne sont pas repoussées aux calendes grecques !

Demande de réserve



M. Alain Lambert,
rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, afin de permettre à tous nos collègues d'organiser leur travail, je demande d'ores et déjà la réserve, d'une part, des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 8 et, d'autre part, de l'article 9, et ce jusqu'à la reprise de nos travaux, après le dîner.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne peux que m'incliner devant la demande de M. le rapporteur général. Je souhaite simplement que le débat puisse se poursuivre à un bon rythme.
M. le président. La réserve est ordonnée.

Article 3



M. le président.
« Art. 3. _ Il est rétabli, dans le code général des impôts, un article 32 ainsi rédigé :
« Art. 32 . _ 1. Par dérogation aux dispositions de l'article 31, lorsque le montant du revenu brut annuel défini à l'article 29 n'excède pas 30 000 francs, le revenu imposable correspondant est fixé, sur demande du contribuable, à une somme égale au montant de ce revenu brut diminué d'un abattement d'un tiers. La limite de 30 000 francs est ajustée, le cas échéant, au prorata du temps de location au cours de l'année civile.
« 2. L'option prévue au 1 s'applique à l'ensemble des revenus fonciers perçus par le foyer fiscal. Les contribuables concernés portent directement le montant du revenu brut annuel sur la déclaration prévue à l'article 170.
« L'option ne peut pas être exercée lorsque le contribuable ou l'un des membres du foyer fiscal est propriétaire d'un ou plusieurs biens appartenant aux catégories suivantes :
« a) Monuments historiques et assimilés ou immeubles en nue-propriété, donnés en location et visés au 3° du I de l'article 156 ;
« b) Immeubles au titre desquels est demandé le bénéfice des dispositions du b ter ou du b quater du 1° du I de l'article 31 ou de celles du deuxième ou du cinquième alinéa du 3° du I de l'article 156 ;
« c) Logements neufs au titre desquels est demandé le bénéfice de la déduction forfaitaire de 35 % ou 25 % ou de la déduction au titre de l'amortissement prévues au e et au f du 1° du I de l'article 31 ;
« d) Parts de sociétés, autres que celles visées à l'article 1655 ter, qui donnent en location des immeubles nus et dont les résultats sont imposés dans les conditions prévues à l'article 8.
« 3. L'option pour le régime défini au 1 est exercée pour une période de trois ans lors du dépôt de la déclaration des revenus de la première année au titre de laquelle elle s'applique. Irrévocable durant cette période, elle est renouvelable tacitement sauf renonciation expresse dans le délai de dépôt de la déclaration des revenus de l'année qui suit chaque période triennale. Toutefois, elle cesse immédiatement de produire ses effets au titre de l'année au cours de laquelle le seuil prévu au 1 est dépassé ou l'une des exclusions mentionnées au 2 est applicable. »
Par amendement n° I-204, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose, dans la première phrase du 1 du texte présenté par cet article pour l'article 32 à rétablir dans le code général des impôts, de remplacer les mots : « à l'article 29 » par les mots : « aux articles 29 et 30 ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-204, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, ainsi modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Articles 4 et 5



M. le président.
« Art. 4. _ I. _ Le sixième alinéa de l'article 1681 B du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Lorsque le montant de l'impôt mis en recouvrement est supérieur de plus de 10 % à celui présumé par le contribuable, la différence entre les deux tiers de l'impôt dû et le montant des prélèvements effectués conformément à la demande du contribuable ainsi que la majoration de 10 % appliquée sur ce montant sont acquittées avec le prélèvement du deuxième mois suivant. »
« II. _ Le dernier alinéa du B de l'article 1681 quater A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Lorsque le montant des taxes mises en recouvrement est supérieur de plus de 10 % à celui présumé par le contribuable, la différence entre la moitié des taxes dues et le montant des prélèvements effectués conformément à la demande du contribuable ainsi que la majoration de 10 % appliquée sur ce montant sont acquittées avec le prélèvement du deuxième mois suivant. »
« III. _ Le premier alinéa de l'article 1681 C du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le prélèvement de décembre est supérieur d'au moins 100 % à l'une des mensualités prévues à l'article 1681 B, le solde de l'impôt est recouvré, sauf opposition du contribuable, par prélèvements d'égal montant à partir de la seconde mensualité qui suit la mise en recouvrement du rôle. » - ( Adopté. )
« Art. 5. _ Le 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts est complété par cinq alinéas ainsi rédigés :
« La provision constituée par l'entreprise en vue de faire face à l'obligation de renouveler un bien amortissable dont elle assure l'exploitation est déductible, à la clôture de l'exercice, dans la limite de la différence entre le coût estimé de remplacement de ce bien à la clôture du même exercice et son prix de revient initial affectée d'un coefficient progressif. Ce coefficient est égal au quotient du nombre d'années d'utilisation du bien depuis sa mise en service sur sa durée totale d'utilisation.
« Les dotations à la provision visée à l'alinéa précédent ne sont pas déductibles si elles sont passées après l'expiration du plan de renouvellement en vigueur au 15 septembre 1997 ou, pour les biens mis en service après cette date, après l'expiration du plan initial de renouvellement.
« La fraction de la provision pour renouvellement régulièrement constituée, figurant au bilan du dernier exercice clos avant le 31 décembre 1997 et qui, à la clôture des exercices suivants, est supérieure au montant déterminé en application des deux alinéas qui précèdent et n'a pas été utilisée, n'est pas rapportée au résultat de ces exercices, sous réserve des dispositions du dixième alinéa.
« Lorsque le bien a` renouveler ne fait pas l'objet de dotations aux amortissements déductibles pour la détermination du résultat imposable de l'entreprise, le prix de revient initial du bien est retenu pour une valeur nulle.
« Dans l'hypothèse où cette obligation de renouvellement est mise à la charge d'un tiers, les dispositions des quatre alinéas précédents sont applicables à celui-ci. » - ( Adopté. )

Article additionnel après l'article 5



M. le président.
Par amendement n° I-113, M. Régnault, Mme Bergé-Lavigne, MM. Angels, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 5, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les cotisations versées par l'employeur à l'organisme assureur ou à l'institution de retraite supplémentaire, au titre des régimes à prestations définies, ne sont pas déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés. »
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Cet amendement tend à ce que les cotisations versées par l'employeur à l'organisme assureur ou à l'institution de retraite supplémentaire ne soient pas déductibles de l'assiette de l'impôt sur les sociétés. En effet, ces régimes ne répondent pas à un engagement « général et impersonnel » pris par l'entreprise, « dans l'intérêt de l'entreprise » ; par ailleurs, ils ne concernent pas l'ensemble des salariés des entreprises qui choisissent de cotiser pour de tels régimes ; enfin, l'article 39 du code général des impôts stipule bien, dans le deuxième alinéa du 1°, que ne peuvent être déductibles « les rémunérations considérées comme excessives eu égard à l'importance du service rendu ».
Le caractère excessif de la prestation servie peut être utilisé dans ce type de régime : celui-ci permet d'offrir un niveau de retraite dépassant 75 % du dernier salaire d'activité du bénéficiaire.
Il n'est pas normal que des régimes de retraite supplémentaire, bénéficiant à des cadres très supérieurs ou à des chefs d'entreprise, puissent voir les cotisations employeur déduites de l'impôt sur les sociétés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est un peu l'ombre portée de l'amendement n° I-110 sur l'impôt sur les sociétés, alors que nous avons traité ce matin de l'impôt sur le revenu.
Je me suis expliqué à propos de l'amendement n° I-110, et les propos que j'ai tenus ce matin valent pour cet amendement.
La commission des finances est donc défavorable à l'amendement n° I-113, étant entendu qu'elle souhaite l'entrée en vigueur la plus rapide possible de la loi sur les fonds de pensions.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Avis également défavorable, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Sergent, l'amendement n° I-113 est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Comme pour l'amendement n° I-110 examiné ce matin, mon objectif était d'ouvrir la discussion et d'attirer l'attention du Gouvernement. Par conséquent, de la même manière, je retire l'amendement n° I-113, en prenant note des mêmes conclusions - c'est du moins ce que je suppose - de M. le secrétaire d'Etat.
M. le président. L'amendement n° I-113 est retiré.

Article 6



M. le président.
« Art. 6. _ I. _ Après le quatrième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, il est inséré six alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions des troisième et quatrième alinéas cessent de s'appliquer pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 1997. Les provisions pour fluctuation des cours inscrites au bilan à l'ouverture du premier exercice clos à compter de cette même date sont rapportées, par fractions égales, aux résultats imposables de ce même exercice et des deux exercices suivants.
« Toutefois, les dispositions de la dernière phrase de l'alinéa qui précède ne sont pas applicables au montant des provisions visées à la même phrase qui sont portées, à la clôture du premier exercice clos à compter du 31 décembre 1997, à un compte de réserve spéciale. Les sommes inscrites à cette réserve ne peuvent excéder 60 millions de francs.
« Les sommes prélevées sur la réserve mentionnée à l'alinéa précédent sont rapportées aux résultats de l'exercice en cours lors de ce prélèvement. Cette disposition n'est toutefois pas applicable :
« a) Si l'entreprise est dissoute ;
« b) Si la réserve est incorporée au capital ; en cas de réduction de capital avant la fin de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle est intervenue l'incorporation au capital de la réserve, les sommes qui ont été incorporées au capital sont rapportées aux résultats de l'exercice au cours duquel intervient cette réduction. Le montant de la reprise est, s'il y a lieu, limité au montant de cette réduction ;
« c) En cas d'imputation de pertes sur la réserve spéciale, les pertes ainsi annulées cessent d'être reportables. »
« II. _ Le a du 3 de l'article 210 A du code général des impôts est complété par les mots : "ainsi que la réserve où ont été portées les provisions pour fluctuation des cours en application du sixième alinéa du 5° du 1 de l'article 39". »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, mon intervention vise à faire gagner du temps au Sénat.
Cet important article prévoit la suppression de la provision pour fluctuation des cours et la réintégration au résultat imposable des dotations déjà pratiquées.
Afin de ne pas accroître de façon excessive le résultat imposable des entreprises dès le premier exercice d'application de cette mesure, la réintégration serait étalée pour parts égales sur trois ans.
Pour limiter le nombre d'entreprises touchées par cette mesure, les députés ont institué une franchise de 60 millions de francs. Seul le montant des provisions pour fluctuation de cours qui excède ce seuil devra être rapporté au résultat des entreprises sur trois exercices.
Il convient, mes chers collègues - je parle sous le contrôle de beaucoup d'entre vous, qui connaissent admirablement le sujet - de rappeler tout d'abord que la provision pour fluctuation de cours permet d'atténuer le coût de l'intégration dans le résultat fiscal imposable des entreprises des plus-values ou moins-values latentes consécutives à la valorisation des stocks.
La commission des finances a décidé, uniquement pour ne pas dégrader le solde budgétaire, de maintenir, en l'améliorant, le dispositif adopté par l'Assemblée nationale.
Ainsi, l'amendement que je serai amené à présenter tout à l'heure visera à porter de trois ans à six ans la durée au cours de laquelle les entreprises devront rapporter à leur résultat imposable le montant des provisions constatées au 1er janvier 1997.
Pratiquement, et pour ne pas modifier les recettes attendues pour 1998, il s'agit de rapporter un tiers de la provision pour fluctuation des cours au résultat de l'exercice 1997, le reste étant réparti sur les cinq prochains exercices.
Cette provision - je parle, je le répète, sous le contrôle d'un certain nombre de mes collègues - et cela va donner une idée de l'importance du texte qui nous est proposé, peut en effet représenter jusqu'à 80 %, et même davantage, des fonds propres des entreprises françaises de transformation de matières premières. Cela vous donne une idée du risque de délocalisation de ces entreprises si nous n'y prenons garde.
La commission des finances estime qu'il ne faut pas en rester là. Pour l'avenir, et je me tourne vers le Gouvernement, il convient de trouver, monsieur le secrétaire d'Etat, un mécanisme fiscal de substitution à la provision pour fluctuation des cours. En effet, sans mécanisme équivalent à la provision pour fluctuation des cours, la France sera le seul pays d'Europe à faire payer à ses entreprises le coût de l'enrichissement sans cause. Il en résultera une dégradation de la compétitivité des entreprises françaises.
La méthode de comptabilisation des stocks par application de la règle « dernier entré, premier sorti », DEPS ou LIFO en anglais, appliquée dans la plupart des pays européens permet, en effet, de neutraliser la quasi-totalité des variations de prix affectant les stocks de base indispensables à la poursuite de l'exploitation.
Mes chers collègues, il deviendrait donc utile de s'orienter vers un alignement des méthodes comptables françaises sur celles de nos concurrents, donc vers un assouplissement des conditions de recours à la provision pour hausse des prix, en supprimant par exemple pour les entreprises de transformation de matières premières le seuil de 10 % de variation au-delà duquel elles sont autorisées à doter.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, je compte sur la magnanimité des services fiscaux à l'égard des entreprises qui devront réintégrer, si le dispositif est mis en place de manière définitive, la provision pour fluctuation des cours.
J'insiste : chacun comprendra, au-delà de cet hémicycle, qu'il s'agit de la survie d'entreprises françaises. Au moment où tous, selon des modalités différentes, nous sommes attachés au maintien de l'emploi dans notre pays, il convient de faire en sorte que cette disposition fiscale, qui est une disposition de rendement - soyons clairs - n'aboutisse pas à mettre en difficulté des entreprises de transformation de matières premières en France, des entreprises qui sont présentes dans de très nombreux départements français et qui y font l'emploi.
L'appel que je vous lance, monsieur le secrétaire d'Etat, est solennel : il y va de la survie de certaines entreprises, et vous aurez compris lesquelles.
M. le président. Sur l'article, la parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord dire que je souscris à l'analyse qui a été présentée excellemment par notre rapporteur général.
Pour ne pas prolonger le débat, je formulerai mes appréciations sur ce sujet lors de la présentation de l'amendement que j'ai déposé, lequel viendra en discussion dans quelques instants. En tout état de cause, je crois moi aussi que nous nous trouvons devant une situation qui risque d'être critique pour certaines entreprises de transformation des métaux, surtout si elles travaillent sur plusieurs productions différentes et que, dans certains cas, la proportion très importante de la provision pour fluctuation des cours par rapport au total de la situation nette de la société peut être à l'origine de véritables problèmes d'équilibre financier et de maintien des perspectives de développement.
Il se trouve d'ailleurs que l'une de ces entreprises a pour caractéristique d'avoir des établissements dans de nombreux départements, dont ceux de l'Orne et de l'Oise, ce qui me conduit bien sûr, parmi d'autres raisons, à attacher une importance particulière à ce que, pour l'avenir, des solutions satisfaisantes soient trouvées, au-delà du simple impératif de rendement fiscal.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le rapporteur général, monsieur Marini, le Gouvernement est, comme vous, tout à fait soucieux de ne pas mettre en péril les entreprises qui pourraient être frappées par une telle mesure.
A cet égard, permettez-moi de formuler quatre remarques.
En premier lieu, le Gouvernement a accepté, lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, un amendement de la commission des finances visant à instituer une exonération des provisions inscrites à une réserve spéciale, et ce dans la limite de 60 millions de francs. Cela veut dire que toutes les entreprises françaises, à l'exception d'une vingtaine, échappent à la mesure proposée par le Gouvernement, laquelle vise, pour l'essentiel, des grandes entreprises pétrolières qui ont parfois utilisé ce dispositif de provision pour fluctuation des cours afin de se placer dans une situation fiscale avantageuse.
En deuxième lieu, et puisque M. Lambert m'a invité à la magnanimité, dans le domaine de la première transformation des métaux, qui intéresse aussi M. Marini, mes services travaillent en concertation avec les professionnels pour voir dans quelle mesure cette disposition pourrait leur être dommageable.
En troisième lieu, M. le rapporteur général a souhaité un mécanisme fiscal de substitution. Il ne m'appartient pas de bouleverser les règles de comptabilisation des stocks, mais les entreprises concernées pourraient très bien, en contrepartie de la suppression de la provision pour fluctuation des cours, constituer une provision pour hausse des prix dont le mécanisme est plus simple et ne fait pas appel à des références de prix ou à des cours de devises périmés. Ce n'est là, à mon avis, qu'une piste - peut-être pas la solution idéale - mais c'est une piste.
Enfin, en quatrième lieu, j'ajouterai que, dans un grand pays qui est souvent cité en exemple dans votre Haute Assemblée, la Grande-Bretagne, il n'existe pas de provision pour fluctuation des cours ; pourtant, le dispositif de comptabilisation des stocks est le même que chez nous. Mais nous ne devons pas toujours chercher la solution à nos problèmes à l'étranger ; mieux vaut les trouver nous-mêmes.
M. le président. Sur l'article 6, je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-27, M. Mercier propose de rédiger comme suit cet article :
« Après le quatrième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des troisième et quatrième alinéas cessent de s'appliquer pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 1997. Les provisions pour fluctuations des cours inscrites au bilan à l'ouverture du premier exercice clos à compter de cette date sont rapportées à hauteur de 20 % de leur montant dans les résultats imposables de ce même exercice après un abattement minimum de 60 millions de francs. La provision diminuée du montant ainsi réintégré est portée en franchise d'impôt dans une réserve spéciale au passif du bilan. »
Par amendement n° I-7 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de rédiger ainsi la fin de la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de l'article 6 pour insérer des alinéas après le quatrième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts : « sont rapportés, pour un tiers aux résultats imposables de ce même exercice, et pour la fraction restante, par parts égales aux résultats imposables des cinq exercices suivants. »
Par amendement n° I-146, MM. Joly et Lesein proposent, dans la seconde phrase du premier alinéa du texte présenté par le I de l'article 6 pour insérer après le quatrième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de remplacer le mot « deux » par le mot « six ».
Par amendement n° I-33 rectifié, MM. Marini et Adnot proposent de compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« Le Gouvernement présentera au Parlement avant le 15 septembre 1998 un rapport comportant une analyse des méthodes de valorisation des stocks de matières premières internationales et des avantages et inconvénients de la provision pour fluctuation des cours pour les entreprises et pour les finances publiques ainsi qu'une étude d'impact de la suppression de la déductibilité de cette provision ou des autres mesures qu'il entendrait proposer dans le cadre de la loi de finances 1999. »
L'amendement n° I-27 est-il soutenu ?...
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l'amendement n° I-7 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de préserver pour 1998 le rendement fiscal attendu de la suppression de la déductibilité de provision pour fluctuation des cours, la PFC dans notre jargon, tout en permettant aux entreprises d'étaler sur cinq ans au lieu de deux ans le coût de la réintégration du solde de ces PFC restantes.
Pour ce faire, nous proposons de réintégrer un tiers de ces PFC constatées à l'ouverture du premier exercice clos à compter du 31 décembre 1997 dans les résultats imposables de cet exercice, le solde étant rapporté dans les cinq années suivantes.
M. le président. La parole est à M. Lesein, pour défendre l'amendement n° I-146.
M. François Lesein. Dans la détermination des bénéfices imposables relatifs à l'assiette de l'impôt sur le revenu, l'article 39 du code général des impôts dispose que le bénéfice net est établi sous déduction de toute charge, dont les provisions faites par les entreprises pour fluctuation des cours visées par l'article 6 du projet de loi de finances.
Ce dernier supprime cet avantage fiscal puisque, à compter du 31 décembre prochain, les provisions pour fluctuation des cours inscrites au bilan à l'ouverture du premier exercice clos dès cette date sont rapportées, par fractions égales aux résultats imposables à cet exercice et aux deux exercices suivants.
La réintégration des provisions au coeur des bénéfices imposables sur deux ans constitue, à notre avis, un délai trop court. C'est pourquoi un délai de six ans est souhaitable, car les provisions concernées représentent une densité de stocks importante dont l'assujettissement serait bénéfique pour l'Etat sans craindre véritablement un affaiblissement des capacités de production et de vente des entreprises françaises.
M. le président. La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° I-33 rectifié.
M. Philippe Marini. L'article 6 a suscité différentes réactions et différents débats.
La question que je me pose est de savoir si ce dispositif nouveau a bien été étudié comme il aurait dû l'être. L'impact de la suppression de la PFC a-t-il été correctement évalué ?
A l'Assemblée nationale, une disposition, qui est en quelque sorte une cote mal taillée, a été adoptée, à savoir la fixation d'un seuil de 60 millions de francs.
Les réactions des professionnels nous ont démontré que cette solution n'était certainement pas parfaite et que bien des entreprises, notamment dans le secteur que je citais tout à l'heure, peuvent rencontrer des problèmes de compétitivité lorsqu'elles sont confrontées à des entreprises concurrentes obéissant à des règles du jeu différentes.
J'ai bien entendu M. le rapporteur général, et j'indique par avance que je voterai l'amendement de la commission des finances, qui permet, par un étalement plus long, d'atténuer les difficultés à attendre de la mesure proposée par le Gouvernement.
Je crains, pour ma part, que ce ne soit pas la solution de fond pérenne qu'il serait nécessaire d'apporter à la question posée. Il semble que, pour préparer nos délibérations préalables à de futures lois de finances, il ne serait pas inutile de réaliser une étude plus complète. C'est pour cela que je suggère la présentation, par le Gouvernement, avant le 15 septembre 1998, d'un rapport nous permettant, notamment, de savoir s'il ne serait pas préférable d'opter pour une autre règle comptable d'évaluation des stocks.
Par ailleurs, la méthode « dernier entré, premier sorti », souvent adoptée par nos partenaires internationaux, me paraît de nature à répondre aux situations concrètes rencontrées par les entreprises concernées.
Une telle étude pourrait nous permettre de mieux apprécier la question. Monsieur le secrétaire d'Etat, ce rapport serait sans doute de nature, pour l'avenir, à mieux éclairer nos choix futurs.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-146 et I-33 rectifié ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'amendement n° I-146 a beaucoup de qualités. Il n'a qu'un seul défaut : il dégrade le solde du présent projet de loi de finances. C'est ce qui a conduit la commission des finances, qui partage totalement les objectifs de son auteur, à préférer son propre amendement qui n'a pas le même impact sur le solde budgétaire du projet de loi de finances. Si M. Lesein rejoignait la proposition de la commission des finances, celle-ci s'en sentirait honorée.
S'agissant de l'amendement n° I-33 rectifié, présenté voilà un instant par notre collègue M. Marini, qui a d'ailleurs peut-être esquissé la présentation de l'amendement n° I-34, la commission est tout à fait favorable à la présentation d'un rapport.
Si nous sommes bien conscients, les uns et les autres, qu'il faut trouver des recettes pour équilibrer le budget, nous souhaitons que celles-ci soient le moins pénalisantes possible pour l'entreprise mais, aussi et surtout, pour l'emploi.
La préconisation de notre collègue M. Marini va dans ce sens. Il s'agit, grâce au rapport qu'il demande au Gouvernement de présenter au Parlement, d'étudier l'impact des dispositions fiscales de même nature que la déductibilité de cette provision et de disposer des informations nécessaires que pour les dispositifs à venir soient les moins pénalisants possible pour l'emploi.
Voilà les raisons pour lesquelles la commission des finances a émis un avis favorable sur l'amendement n° I-33 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-7 rectifié, I-146 et I-33 rectifié ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'amendement n° I-7 rectifié vise à porter de trois ans à six ans la durée de réintégration de la provision pour fluctuation des cours. Je reconnais que M. le rapporteur général a eu l'habileté de faire en sorte que cette mesure n'ait pas d'impact sur les comptes de l'Etat en 1998. Cependant, comme il n'y a pas de miracle, ce dispositif coûtera 350 millions de francs en 1999 et 350 millions de francs en l'an 2000, notamment.
Si cette mesure ne dégrade pas l'équilibre budgétaire de l'année sur laquelle nous sommes en train de travailler, elle porte en germe une dégradation à terme. C'est la raison pour laquelle l'amendement n° I-7 rectifié, pas plus, monsieur Lesein, que l'amendement n° I-146 ne peuvent être acceptés par le Gouvernement.
Par ailleurs, je relève que les propositions du Gouvernement dans le projet de budget initial ont été modifiées par l'Assemblée nationale et qu'un bon point d'équilibre a été trouvé : le dispositif n'est plus applicable qu'aux très grandes entreprises.
M. Marini propose enfin le dépôt d'un rapport comportant une étude d'impact d'ici au 15 septembre 1998. Si les rapports et les études d'impact sont tout à fait importants, il me semble que ces demandes n'ont rien à faire dans une loi de finances.
C'est donc pour des raisons non pas de fond, mais de forme, que je demande au Sénat de rejeter également l'amendement n° I-33 rectifié.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-7 rectifié.
M. François Lesein. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. Pour honorer la commission, je me rallie bien sûr à sa proposition de cinq ans.
En acceptant de diminuer un tel délai d'un an, j'allège certainement vos soucis, monsieur le secrétaire d'Etat.
A l'Assemblée nationale, certains avantages ont été accordés, ici et là, comme vous venez de le reconnaître. Le Sénat vaut bien l'Assemblée nationale, il mérite donc que l'on fasse aussi quelques efforts ici. (Très bien ! sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
Cela dit, nous retirons notre amendement.
M. le président. L'amendement n° I-146 est retiré.
M. Maurice Blin. Je demande la parole pour explications de vote.
M. le président. La parole est à M. Blin.
M. Maurice Blin. Ce débat, qui paraît bien technique, est d'une importance économique et sociale considérable. J'espère que vous la mesurez à sa véritable dimension, monsieur le secrétaire d'Etat.
Vous avez bien voulu dire tout à l'heure que cette affaire méritait réflexion et qu'en ce qui concernait les plus grandes sociétés françaises concernées il y aurait, le temps venu, une étude plus approfondie des effets que cette disposition pourrait avoir sur elles.
Pourquoi donc ne pas commencer par là et pourquoi ne pas commencer par vous éclairer vous-même et éclairer le législateur sur une mesure qui risque d'avoir des conséquences graves, pour ne pas dire plus, sur des sociétés d'une extrême importance pour l'économie générale de notre pays, en particulier pour nos exportations ?
Je souhaiterais donc très vivement que le Sénat ne vous suive pas dans une décision que je trouve à tous égards regrettable.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez fait une distinction qui ne me paraît pas saine entre les grands, les moyens, les petits, en disant que l'Assemblée nationale s'était souciée de protéger les moyens et les petits.
Elle a eu raison, mais ce n'est pas parce qu'on est gros que l'on est coupable. Je pense au contraire que les plus grandes entreprises concernées - j'en compte dans mon département, comme certains de mes collègues - sont, en matière d'exportation, de production, de productivité, le fer de lance de l'économie française. Or, vous nous dites que vous ne savez pas très bien ce qu'il adviendra d'elles.
Je ne puis, pour ma part, approuver un texte conçu de cette manière, et c'est à regret que je serai peut-être conduit à approuver la disposition que nous soumet la commission des finances, qui est saine dans son principe, mais qui n'est qu'une demi-mesure.
C'est donc, monsieur le secrétaire d'Etat, au principe même du texte que vous proposez que je m'oppose, car il aurait pour effet de porter atteinte aux entreprises de très haute qualification.
Si l'Etat cherche de l'argent, de grâce, qu'il le cherche ailleurs ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Maurice Schumann. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Schumann.
M. Maurice Schumann. Je voudrais m'associer aux paroles qui viennent d'être prononcées par M. Blin et à celles qui avaient été prononcées auparavant par mon ami M. Philippe Marini.
Je suis consterné, je dois le dire, par l'accueil que réserve aux amendements du Sénat, même à celui de la commission des finances, le Gouvernement. Je me dois donc de vous poser très franchement une question, monsieur le secrétaire d'Etat.
L'industrie textile a le sentiment d'être l'une des cibles choisies par le Gouvernement. Je ne multiplierai pas les démonstrations à cet égard, je constate seulement qu'il y avait eu un arrêt de l'hémorragie, qu'il y avait eu une certaine reprise économique, et que tout cela est maintenant stoppé au détriment de l'emploi ! C'est là la considération capitale.
Il est vrai que l'amendement voté par l'Assemblée nationale avait amélioré la situation. Mais la distinction qui a été opérée et qui a été dénoncée par M. Blin ne tient pas compte du fait que les entreprises qui ne tireront pas de bénéfice de cet amendement sont précisément celles qui ont fait entrer pour l'essentiel, dans leurs fonds propres, la provision pour fluctuation des cours.
J'ai été très surpris d'apprendre que cette incorporation partielle des provisions pour fluctuation de cours dans les fonds propres avait été dénoncée par le Gouvernement alors qu'elle était parfaitement légale, qu'elle n'avait rien d'une fraude et qu'elle avait contribué à permettre l'arrêt de l'hémorragie de l'emploi et une participation croissante de l'industrie textile aux exportations.
Je dois vous dire que la consternation, non pas des syndicats patronaux seuls, mais également de tous ceux qui, de près ou de loin, participent aux industries textiles et de l'habillement, va être aggravée par le refus que vous venez de nous opposer, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je vous demande au moins de répondre à cette question précise : avez-vous calculé l'incidence en ce qui concerne l'emploi, c'est-à-dire l'essentiel, sur l'industrie qui est en cause et que je viens d'évoquer, l'industrie textile, des mesures que vous proposez imprudemment et des vetos que vous nous imposez non moins imprudemment ? (Applaudissements sur les travées du RPR et de l'Union centriste.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, comme j'imagine que M. le secrétaire d'Etat souhaitera intervenir, je préfère prendre la parole avant lui, par courtoisie républicaine.
Tout à l'heure, M. le secrétaire d'Etat m'a alerté sur le danger qu'il y aurait à reporter sur les exercices budgétaires suivants une « facilité », si je puis dire.
La fierté du Sénat, c'est précisément de tout faire pour garder dans ce pays une assemblée qui veille à ce que l'on ne reporte pas, ou le moins possible, sur les générations futures ce que l'on n'aura pas accepté de faire supporter par les contribuables dès l'année prochaine.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, quand il m'arrivera de céder à quelque facilité, j'ose dire à quelque lâcheté, rappelez-moi à mes devoirs !
Toutefois, en la circonstance, je tiens à présenter une observation d'ordre comptable.
L'amendement n° I-7 rectifié de la commission des finances vise effectivement à reporter un peu dans le temps l'application de la loi, mais il ne dégradera pas le montant global des recettes fiscales attendu pour 1999 et les quatre années suivantes, comme vous l'avez dit.
En premier lieu, le mécanisme proposé ne fait que reporter dans le temps une partie des recettes fiscales escomptées. En second lieu, si un mécanisme de substitution est mis en place, de type provisions pour hausse des prix améliorée, les sommes portées aux provisions pour fluctuation des cours seront en partie reportées sur la nouvelle provision, aux dépens des recettes de l'Etat.
Nous avons donc eu le sentiment d'assumer aussi les exercices budgétaires ultérieurs, ce qui est important pour nous. En effet - n'y voyez pas malice - si les ministres passent, un certain nombre d'entre nous restent et, si Dieu me prête vie, je siégerai encore dans cette assemblée en l'an 2001 et je serai alors prêt à assumer la responsabilité des propos que j'ai tenus aujourd'hui.
L'amendement de la commission des finances n'est peut-être pas acceptable pour le Gouvernement, il n'en demeure pas moins qu'il est tout à fait honorable et responsable. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je voudrais répondre de manière très précise à MM. Blin et Schumann et les rassurer.
Monsieur Blin, le Gouvernement n'a rien contre les grandes entreprises !
En l'espèce, il ne s'agit pas des grandes entreprises qui sont à la pointe de la technologie française et qui exportent dans le monde entier dont vous avez parlé. Le Gouvernement, qui est attaché à la croissance, comme vous tous, je pense, n'a en effet absolument aucune raison de les pénaliser.
Il s'agit d'une vingtaine de très grandes entreprises qui ont utilisé cette provision pour fluctuation des cours pour alléger leur contribution fiscale - c'était leur droit le plus strict, puisque cette possibilité figurait dans le droit fiscal - dans des proportions qui ont été parfois tout à fait notables.
Je rassure M. Blin en portant à 60 millions de francs la franchise pour ces provisions, les entreprises françaises de haute technologie sont épargnées.
Il en est de même pour les industries textiles. Monsieur Schumann, c'est à juste titre que vous vous êtes ému de leur situation, mais aucune d'entre elles ne figure dans les vingt entreprises dont je parle étant donné le seuil qui a été retenu. Sont épargnées également d'autres entreprises qui nous ont été signalées, telles que les papeteries, les scieries, etc.
Nous évoquerons peut-être le plan textile à l'occasion de la discussion d'autres amendements. Je sais que ce sujet vous tient à coeur, tout comme au Gouvernement d'ailleurs. Quoi qu'il en soit, même si les entreprises textiles achètent de la laine, du coton, en un mot utilisent des matières premières, elles ne sont pas touchées par cette provision pour fluctuation des cours de 60 millions de francs.
J'ajoute, monsieur le rapporteur général, que je n'ai jamais prononcé le mot de « facilité » ni a fortiori le mot de « lâcheté ». Je ne les ai même pas pensés. (M. le rapporteur général acquiesce.)
Je dis simplement, monsieur le rapporteur général, que votre mesure qui, effectivement, ne coûte rien en 1998, crée un risque pour les années 1999, 2000 et les suivantes.
Connaissant votre sagacité, il est tout à fait possible que vous ayez raison. Si la provision pour hausse de prix permettait à l'Etat de ne pas voir se dégrader ses recettes fiscales, nous serions effectivement dans une situation de glissement intelligent d'une mesure qui a permis l'évasion fiscale vers une disposition fiscale qui paraît tout à fait respectable.
Je maintiens néanmoins l'opposition du Gouvernement et je demande au Sénat de bien vouloir rejeter l'amendement défendu par M. le rapporteur général, parce que je crois qu'il présente un risque financier pour les années 1999 et 2000, notamment.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-7 rectifié, repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-33 rectifié, accepté par la commission et repoussé par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 6, ainsi modifié.

(L'article 6 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 6



M. le président.
Par amendement n° I-34 rectifié, MM. Marini et Adnot proposent d'insérer, après l'article 6, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa du 3 de l'article 38 du code général des impôts est complété par la phrase suivante :
« Toutefois, les entreprises dont l'activité consiste essentiellement à transformer directement des matières premières acquises sur les marchés internationaux ou des matières premières acquises sur le marché national et dont les prix sont étroitement liés aux variations des cours internationaux peuvent, sur option valable cinq ans, évaluer les stocks des matières premières sus-mentionnées acquis à compter du 1er janvier 1998 selon la méthode dite « dernier entré-premier sorti ».
« II. - La perte de recettes résultant du I est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Nous restons sur le même sujet.
Pour ma part, je considère que l'amendement n° I-33 rectifié de la commission des finances, qui vient d'être adopté, est une solution a minima, un pis-aller, en quelque sorte, pour les entreprises qui ont été évoquées au cours de la précédente discussion.
J'ai sous les yeux - mais je vous ferai grâce de leur lecture - des lettres tout à fait éloquentes qui émanent de différents secteurs d'activités. Elles évoquent des distorsions de concurrence ; certaines indiquent par exemple qu'il ne reste plus pour l'entreprise qu'une solution, celle de réduire drastiquement les investissements, d'autres précisent qu'il est insupportable de distribuer un quart de ses capitaux propres... Nous verrons bien !
Vous disiez tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, que la prescription d'un rapport n'a pas sa place dans un projet de loi de finances. Si vous consultez les lois de finances des années passées, vous constaterez que nous avons voté, les uns et les autres, de très nombreux articles tendant à solliciter le dépôt, de la part du Gouvernement, de rapports sur des questions précises et concrètes, afin d'éclairer les débats à venir.
J'en viens à l'amendement n° I-34.
Je rappelle que les industries transformatrices de matières achetées sur les marchés internationaux sont exposées aux fluctuations permanentes des cours, ce qui affecte le coût du renouvellement des stocks.
La législation fiscale, en France comme ailleurs, doit tenir compte de ce phénomène, faute de quoi le prélèvement d'impôts sur les ressources de l'entreprise peut faire obstacle au renouvellement du stock, et donc à la poursuite de l'exploitation. De nombreux pays industrialisés ont ainsi estimé que la règle « dernier entré, premier sorti » permettait de résoudre la difficulté en question.
Cette méthode, prévue, je le rappelle, par la quatrième directive comptable européenne, n'a pas encore été incorporée dans la législation fiscale française, qui ne prévoit que des méthodes de valorisation des stocks correspondant soit au prix d'acquisition historique, « premier entré, premier sorti », soit au prix moyen pondéré.
Il me semble, monsieur le secrétaire d'Etat, que l'on devrait réfléchir à cette question et amorcer une évolution, pour des raisons de compétitivité internationale...
M. Roland du Luart. Et d'harmonisation !
M. Philippe Marini. ... et d'harmonisation, en effet, évolution qui semble aller dans le sens de l'Europe et de meilleures conditions de compétition.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'auteur de l'amendement saura, après la réponse que le Gouvernement lui donnera, faire le choix qui s'impose, mais la question qu'il pose est capitale.
Il ne s'agit pas d'imiter ce qui se fait dans les autres pays. La France a son génie propre. Il est grand et il peut même se mesurer, puisque notre pays est la quatrième puissance industrielle du monde.
En fait, il s'agit de ne pas pénaliser nos entreprises avec des dispositions fiscales du siècle dernier ! Voilà pourquoi l'appel que lance Philippe Marini est extrêmement important. Agissons rapidement ! Soyons mobiles ! Adaptons-nous ! Soyons stratèges ! Choisissons un régime fiscal permettant à nos entreprises de rester les meilleures dans le monde.
L'appel lancé par Philippe Marini est apparu à la commission des finances suffisamment digne d'intérêt pour que le Gouvernement donne assez d'espérances à notre collègue afin de lui permettre de prendre la bonne décision sur son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Marini attire de nouveau l'attention du Gouvernement sur le secteur de la première transformation des matières premières acquises sur les marchés internationaux. Il propose de modifier le système de comptabilisation des stocks en passant au système « du dernier entré, premier sorti », qui effectivement supprime, si je puis dire, le risque de fluctuation des cours, et donc la provision correspondante.
Je lui ferai deux remarques sur ce point.
Tout d'abord, en proposant un tel système, il appelle à une transformation de l'article 12 du code de commerce qui n'admet que la méthode du coût moyen pondéré, ou celle du « premier entré, premier sorti ». La proposition que fait M. Marini est donc d'une grande ampleur.
Ensuite, comme sa proposition porte sur un secteur parfaitement respectable de l'activité, mais un secteur particulier, certaines entreprises auraient le système du « premier entré, premier sorti » ; d'autres auraient le système du « dernier entré, premier sorti » ; enfin, les entreprises exerçant une pluriactivité auraient les deux systèmes à la fois, ce qui, vous en conviendrez, n'est pas d'une grande simplicité !
S'agissant du secteur de la première transformation des métaux, où de très grandes entreprises peuvent être concernées, je dirai à M. Marini que mes services étudient avec les professionnels la question de savoir si la provision pour hausse de prix que pourront désormais constituer les entreprises concernées correspond, dans sa forme actuelle, aux besoins du secteur de la première transformation ou s'il faut l'adapter.
Nous cultivons le même souci de ne pas handicaper les très grandes entreprises du secteur de la première transformation des métaux. Pour répondre au très important problème ponctuel que vous avez signalé, monsieur Marini, nous allons certainement trouver des solutions adaptées sans qu'il soit nécessaire de bouleverser complètement le système comptable qui est le nôtre - M. le rapporteur général a eu raison de le souligner - ni, surtout, d'aller chercher systématiquement des références à l'étranger !
Je demande donc au Sénat de rejeter l'amendement n° I-34 rectifié de M. Marini.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-34 rectifié.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai bien entendu vos propos : il y a effectivement une étude de fond à mener. Je vais, dans un instant, retirer cet amendement, car il est vrai aussi que cette étude ne concerne pas un seul secteur. Elle doit donc être conduite de manière approfondie.
Je voudrais quand même préciser que les règles comptables n'ont pas de vertu en soi. Elles sont faites pour que les entreprises puissent développer leurs activités, établir la transparence de leurs comptes et rendre compte à tous leurs ayants droit.
Je vous rappelle, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'un projet de loi sur la normalisation comptable, adopté deux fois par le Sénat, est toujours en souffrance, et que nous attendons son inscription à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ! Beaucoup de professionnels s'étonnent du délai qui est mis à clore un dispositif qui est pourtant essentiel pour la crédibilité des entreprises françaises.
Cela étant dit, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-34 rectifié est retiré.
L'amendement n° I-28 ter rectifié est-il soutenu ?...

Article 6 bis



M. le président.
« Art. 6 bis. - Le 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les provisions pour indemnités de licenciement constituées en vue de faire face aux charges liées aux licenciements pour motif économique ne sont pas déductibles des résultats des exercices clos à compter du 15 octobre 1997. Les provisions pour indemnités de licenciement constituées à cet effet et inscrites au bilan à l'ouverture du premier exercice clos à compter du 15 octobre 1997 sont rapportées aux résultats imposables de cet exercice. »
Sur cet article, je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-8 est présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-153 est déposé par M. Gournac et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-8.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement a pour objet de supprimer un article qui a été introduit à l'Assemblée nationale et qui visait à supprimer la provision pour licenciement.
Cette proposition de suppression de l'article 6 émanant de notre commission des finances se justifie par deux raisons.
Tout d'abord, l'appel à contribution des entreprises a déjà bien fonctionné depuis quelques mois : nous avons doublé le taux de l'imposition des plus-values à long terme et augmenté le taux de l'impôt sur les sociétés, en nous réjouissant - mais c'est une malice de ma part, monsieur le secrétaire d'Etat, je le confesse par avance - d'avoir fait une augmentation que nous avons limitée dans le temps au motif que nous aurions, dans le passé, oublié de le faire ! Cela dit, nous avions la possibilité - si vous nous l'aviez proposé - de supprimer cette augmentation de l'impôt sur les sociétés.
Plus généralement, mes chers collègues, la provision pour indemnité de licenciement ne constitue pas du tout - donc, c'est de la politique - une dépense fiscale pour l'Etat, puisque toute provision dotée doit être rapportée au résultat comptable lorsque l'événement prévu ou anticipé se réalise.
On voit donc bien qu'il s'agit de délivrer un message politique. A qui s'adresse-t-il ? A des entreprises. Les entreprises françaises connaissent le comportement fiscal des différentes forces politiques de la France. Mais, si nous avons l'ambition d'accueillir des entreprises étrangères, et que nous affichons clairement par avance notre souci de les pénaliser dès lors qu'elles auront à ajuster leurs effectifs à ces marchés, alors nous sommes contre-productifs et nous allons à l'encontre de ce que nous souhaitons, c'est-à-dire faire de la France un site industriel, accueillant pour les entreprises, un site qui attire les investisseurs étrangers.
Nous faisons, en la circonstance, exactement le contraire de ce qu'il faut faire, et c'est pourquoi la commission des finances a cru bon de vous proposer de rejeter ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. Marini, pour présenter l'amendement n° I-153.
M. Philippe Marini. Notre collègue M. Gournac, porte-parole de notre groupe pour les questions relatives à l'emploi, a déposé un amendement identique à celui de la commission.
Nous considérons que la majorité de l'Assemblée nationale et le Gouvernement se trompent de cible en la matière et tentent de faire croire que certaines entreprises licencient pour des raisons fiscales.
Il est bien évident que mettre en oeuvre un plan social et envisager des licenciements est un drame pour les entreprises et qu'elles ne peuvent se résoudre à de tels drames que si des raisons économiques tout à fait dirimantes les y conduisent.
Le fait de supprimer la déductibilité fiscale des provisions pour restructuration, et donc pour licenciement, ne fera, à mon avis, qu'aggraver les difficultés financières d'entreprises qui connaissent déjà des difficultés économiques sur leur marché, ce qui les conduit précisément à envisager des licenciements.
Cette mesure me semble de nature à se retourner contre les objectifs que vous vous êtes fixés. Elle ne peut « qu'enfoncer » un peu plus des entreprises en difficulté. Voilà pourquoi nous la considérons comme particulièrement malheureuse, voire démagogique, monsieur le secrétaire d'Etat. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s I-8 et I-153 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je répondrai à M. le rapporteur général et à M. Marini sans utiliser des qualificatifs qui, à mon avis, ne sont pas tout à fait en harmonie avec la majesté de cette Haute Assemblée.
M. Jean Chérioux. On n'a pas de leçon à recevoir !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Mais je ne donne aucune leçon. Je fais, monsieur le sénateur, un simple constat.
M. Philippe Marini. Vous persiflez peut-être ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'Assemblée nationale a voté, sur proposition de la commission des finances, l'interdiction de la déductibilité des provisions pour licenciement afin non pas de provoquer une plus-value fiscale, mais de supprimer un avantage de trésorerie accordé aux entreprises fiscalement bénéficiaires - car, évidemment, si elles ne le sont pas, elles n'ont pas à faire de telles provisions - qui réduisent leurs effectifs.
L'objet de cette mesure est, me semble-t-il, assez modeste, mais ce n'est pas à moi de me substituer à l'Assemblée nationale. Il n'est pas, contrairement peut-être à ce que certains souhaiteraient, d'empêcher ces entreprises bénéficiaires de liciencier ; il est simplement de faire en sorte que les entreprises qui doivent licencier ne tirent pas de cette situation des avantages de trésorerie. Il ne s'agit de rien de plus et il me semble que cette neutralité fiscale est la contrepartie normale, si je puis dire, pour reprendre l'expression de M. Marini, du drame social, qui n'est souhaité par personne, que constitue un licenciement.
Le Gouvernement considère que la neutralité fiscale en matière de licenciement est une préoccupation de bon aloi. C'est pourquoi j'invite la Haute Assemblée à rejeter ces deux amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-8 et I-153.
Mme Odette Terrade. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il ne faut décidément s'étonner de rien ; j'en veux pour preuve la discussion de l'article 6 bis et, plus précisément, des amendements tendant à en demander la suppression.
Mes chers collègues, je ne vous cacherai pas que nous sommes évidemment favorables au maintien de l'article 6 bis en ce qu'il correspond à l'une des positions maintes fois exprimée par le groupe des sénateurs communistes républicains et citoyens.
Notre droit fiscal est en effet doté de multiples dispositions surprenantes dont la moindre n'est pas de permettre que les entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs, dans ce que l'on appelle des « plans sociaux », jouissent de la possibilité de déduire les charges afférentes à ces plans sociaux au titre de l'impôt sur les sociétés !
Nos collègues du groupe du RPR trouvent choquant que l'on revienne sur la mesure.
Mais ce qui est choquant, mes chers collègues, outre la déductibilité fiscale des provisions pour licenciements, ce sont les conséquences de ces plans de licenciement sur l'emploi et sur la vie des salariés qui sont ainsi « déduits » des effectifs de l'entreprise concernée.
Ce qui est choquant, mes chers collègues, c'est que des entreprises qui font des profits procèdent à des licenciements massifs, reportant sur la collectivité le poids social de la mise au chômage de centaines, voire de milliers de salariés.
Ce qui est choquant, c'est que l'obsession du résultat financier conduise à mettre sur le carreau des salariés et à laisser à d'autres - les élus locaux par exemple - le soin d'éponger le déficit social de telles mesures.
Soyons sérieux, mes chers collègues, et allons jusqu'au bout !
Il y a dans notre pays deux types d'entreprises qui procèdent à des licenciements.
Les premières, ce sont les entreprises dont la situation financière est difficile, dont les résultats d'exploitation sont en baisse, ce qui peut les conduire au déficit pur et simple, sans imputation quelconque de provisions.
Ces entreprises n'ont pas vraiment besoin de la déductibilité des provisions pour licenciement pour présenter des résultats comptables ou fiscaux déficitaires et être exemptées de l'impôt sur les sociétés.
La mesure contenue dans l'article 6 bis ne change donc rien pour elles, si ce n'est que le volume du résultat déficitaire reportable est moins important et que la probabilité d'un impôt positif est plus rapide en cas de « retour à meilleure fortune ».
Il est vrai que notre législation fiscale fait aussi de l'impôt sur les sociétés une sorte de compte ouvert par chaque entreprise au Trésor public et qu'il est assez difficile aux contribuables de l'impôt sur le revenu que sont les Français de se rendre compte que le jeu du report en arrière des déficits peut rendre leur entreprise créditrice.
La deuxième catégorie est composée des entreprises réalisant des bénéfices et qui, en réalité, plutôt que de licencier, devraient investir et créer des emplois.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Eh oui !
Mme Odette Terrade. Elles font tout le contraire, obnubilées qu'elles sont par la perspective des gains de productivité, de la marge brute d'autofinancement et de la distribution de dividendes.
Cette priorité de la logique de la finance sur l'emploi a fait trop de victimes depuis un certain nombre d'années pour que nous ne soyons aujourd'hui dans l'obligation de dire : « assez ! »
Assez de ces entreprises florissantes qui laissent à la collectivité le poids social de leur gestion des hommes !
Assez de cette appréciation du travail comme un facteur de production sans cesse à réduire !
Les exemples ne manquent pas dans l'actualité récente de ces décisions de gestion condamnables tant sur le plan moral - je pense même qu'il s'agit là de l'une des motivations de l'amendement Emmanuelli - que sur le plan économique.
Il nous semble aujourd'hui anti-économique de sacrifier le travail et les salariés sur l'autel de la rentabilité à court terme.
Sans création d'emploi, sans salaires corrects, par de croissance et pas de débouchés !
Nous nous opposons donc, résolument, à la suppression de l'article 6 bis.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Très bien !
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Je serai bref car nous souscrivons à bien des propos qui viennent d'être tenus.
Si les provisions sont indispensables, il faut reconnaître qu'elles sont parfois utilisées comme un outil d'optimisation fiscale dont la justification n'est plus fondée aujourd'hui. C'est le cas notamment de cette provision pour licenciement qui est particulièrement désastreuse sur le plan de la symbolique même. Sa suppression n'aura d'effet que sur la trésorerie des entreprises. C'est pourquoi nous ne voterons pas les deux amendements en discussion.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-8 et I-153, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 6 bis est supprimé.

Articles additionnels après l'article 6 bis



M. le président.
Par amendement n° I-114, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés propose d'insérer, après l'article 6 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa du 5 de l'article 39 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Sont également déductibles, mais pour 70 % de leur valeur, les dépenses suivantes : ».
« II. - Les deux derniers alinéas du 5 de l'article 39 du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où la preuve n'a pas été apportée qu'elles sont liées directement à l'exploitation de l'entreprise. »
La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Cet amendement concerne les frais généraux.
En principe, toutes les charges nécessaires à l'exploitation de l'entreprise sont déductibles pour la détermination du résultat fiscal. Toutefois, certaines charges - frais de réceptions, de restaurants, de cadeaux, d'automobiles, de bateaux, de logements - sont à la lisière de la notion de charges nécessaires à l'exploitation. Ainsi ont pu être observés des abus qui aboutissent à la prise en compte dans le résultat des entreprises de dépenses d'ordre privé.
Jusqu'en 1986 existait une taxe sur les frais généraux. Or, lorsqu'elle était en application, cette mesure ne déclenchait pas de polémiques.
Nous pensons donc qu'une réflexion doit être menée sur ce point. Il est certain que la distinction entre les frais utiles à l'exploitation des entreprises et les frais d'ordre privé est difficile à établir.
Sans vouloir rétablir formellement la taxe sur les frais généraux, nous pensons qu'il serait bon - c'est l'objet du paragraphe I de l'amendement - de limiter à 70 % la possibilité de déduction, mais surtout - c'est l'objet du paragraphe II de l'amendement - de donner à l'administration fiscale la possibilité de réintégrer les dépenses manifestement non liées à l'exploitation de l'entreprise.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances a estimé que l'article 54 quater du code général des impôts faisait déjà obligation aux entreprises de fournir à l'appui de leur déclaration de résultats le relevé détaillé des frais généraux qui sont visés à l'article qu'évoquait tout à l'heure notre collègue Michel Sergent, lorsqu'ils excèdent un certain montant fixé par arrêté. Il n'est pas question de passer en frais généraux les voyages de pur agrément qui ne présentent aucun caractère professionnel.
Sur un plan plus général, mes chers collègues, je dirai que, si nous voulons une économie dynamique, il va nous falloir cesser de pratiquer le soupçon systématique sur l'ensemble des charges des entreprises. Il faut savoir ce que nous voulons. Or, à l'audition des mesures que nous égrenons, les unes après les autres, j'ai l'impression que nous sommes revenus dix ans en arrière : le profit aurait quelque chose d'impur, de pas tout à fait sain. Mais, mes chers collègues, sans profit comment nos entreprises parviendront-elles à investir et donc à créer des emplois ?
Je ne voudrais pas tomber dans une appréciation idéologique, mais toutes ces mesures me semblent inspirées par le soupçon, et elles seront mal perçues par les entreprises.
La commission des finances a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur Sergent, il est déjà prévu dans le code général des impôts - au paragraphe V de l'article 39 - que certaines dépenses doivent être contrôlées de façon particulière ; or il s'agit des dépenses auxquelles vous faites référence dans votre amendement. Les services des impôts consentent un effort particulier en la matière, effort qui pourrait sans doute être encore amplifié.
La mesure proposée, qui tend de façon uniforme à réduire à 70 % le montant des frais professionnels déductibles, frais de voyages, etc., est par trop simpliste. En effet, certaines entreprises ont besoin, pour développer leur activité, de déduire à 100 % les frais de cet ordre qui sont utiles à leur exploitation. Pour elles, la mesure proposée constituerait un handicap important. Il me semble préférable de renforcer purement et simplement les contrôles, car des abus peuvent en effet être constatés en la matière.
Je demanderai donc à M. Sergent de retirer son amendement, sinon je recommanderai à la Haute Assemblée de le rejeter. Je ne pense pas que cet amendement constitue une bonne réponse à une vraie question.
Sans vouloir engager une discussion de nature religieuse, je dirai que le Gouvernement n'a pas de méfiance à l'égard du profit. Saint-Thomas-d'Aquin est mort depuis très longtemps ! (Sourires.) Le Gouvernement souhaite, comme, je l'imagine, de nombreux sénateurs, que les profits conséquents qui ont été réalisés par les entreprises soient investis pour accroître leurs capacités de production et favoriser la création d'emplois.
Les profits réinvestis dans l'entreprise, les profits consacrés à la création d'activités nouvelles, à la recherche de nouveaux débouchés à l'étranger nous paraissent parfaitement légitimes. Ainsi, à la boutade lancée par M. le rapporteur général, je répondrai que la Gouvernement ne nourrit aucune réticence à l'égard des profits recyclés dans la création de richesses.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je souhaitais vous l'entendre dire.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-114.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. M. le secrétaire d'Etat a exprimé le souhait que nous retirions notre amendement tout en soulignant qu'il soulevait une bonne question : celle de la détermination exacte des frais nécessaires à l'exploitation de l'entreprise, car nous avons tous pu constater des abus en la matière.
Quoi qu'il en soit, nous pensons, nous aussi, que rien ne vaut l'investissement dans les entreprises ; je retirerai donc cet amendement en souhaitant que, à cette vraie question, il soit donné, un jour, une vraie réponse.
M. le président. L'amendement n° I-114 est retiré.
Par amendement n° I-115, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 6 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le 1 de l'article 206 du code général des impôts, après les mots : "sociétés coopératives et leurs unions", sont insérés les mots : "; les sociétés en nom collectif détenues, même partiellement, par des sociétés soumises à l'impôt sur les bénéfices des sociétés,". »
La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Cet amendement vise à poser la question de l'évasion fiscale en matière d'impôt sur les sociétés, qui constitue un réel problème. M. d'Aubert comme M. Juppé, alors Premier ministre, avaient d'ailleurs reconnu l'existence de cette évasion.
L'une des principales sources d'évasion paraît résider dans les mécanismes de compensation des résultats bénéficiaires et déficitaires, qui ont permis un allégement d'impôt de l'ordre de 19 milliards de francs en 1995 ; un groupe intégré sur cinq a bénéficié d'un allégement total de l'impôt sur les sociétés.
Si ces mécanismes ne peuvent être mis en cause, il est nécessaire de tout faire pour réduire l'évasion fiscale. Les mécanismes des prix de transfert et d'abandons de créances devraient notamment être examinés.
Outre le régime fiscal des groupes, les entreprises utilisent de façon complémentaire ou non le régime des sociétés transparentes. Le cumul de ces deux régimes est devenu une pratique habituelle.
Le montage permet d'intégrer fiscalement, par le biais de filiales, le résultat de sociétés transparentes. Les sociétés de personnes permettent en effet une remontée immédiate des pertes au niveau des associés, qui sont fréquemment des sociétés de capitaux et qui constituent un instrument très souple de gestion de déficits. Ainsi, la compensation intégrée à des résultats bénéficiaires et déficitaires est étendue par montage à des sociétés transparentes sans aucune condition de détention de capital ni aucun formalisme.
C'est pourquoi nous pensons qu'il faudrait soumettre les sociétés en nom collectif détenues, même partiellement, par des sociétés à l'impôt sur les sociétés.
J'ajouterai, pour terminer, que l'utilisation des GIE, les groupements d'intérêt économique, présente souvent les mêmes caractéristiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit, par cet amendement, de soumettre les sociétés en nom collectif à l'impôt sur les sociétés.
La question soulevée par notre collègue mériterait un examen approfondi, car les sociétés en nom collectif, par rapport à d'autres sociétés, ont ceci de particulier que les associés ont une responsabilité indéfinie. Or cela ne devrait pas être sans conséquence au regard de la disposition fiscale proposée.
La commission des finances a estimé qu'il convenait d'examiner très soigneusement l'impact d'un changement de régime fiscal de ces sociétés avant de mettre en oeuvre une modification de cette ampleur.
De surcroît, elle a jugé qu'il fallait tenir compte du fait que la plupart de ces sociétés bénéficient du régime de l'intégration fiscale ; ainsi, la question est en partie réglée.
J'écouterai, bien sûr, avec beaucoup d'intérêt l'avis du Gouvernement sur cet amendement, mais la commission des finances a émis, quant à elle, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Angels a souligné fort justement que les structures fiscalement translucides pouvaient constituer un moyen d'optimisation fiscale non négligeable.
Encore faut-il mesurer correctement la nature de cette optimisation et son impact sur les finances publiques.
La possibilité de faire remonter immédiatement les déficits des structures translucides pour les compenser avec les bénéfices des associés, personnes physiques ou morales, constitue indiscutablement un avantage. Celui-ci n'est cependant réellement coûteux pour les finances publiques que lorsqu'il a pour objet de décaler les déficits non dans le temps mais dans l'espace. Je veux dire par là que le risque n'existe que dans le cas où un contribuable, quel qu'il soit, personne physique ou personne morale, prend une participation dans une activité à seule fin de diminuer son impôt grâce à des déficits qui sont sans lien avec sa propre activité.
Or l'amendement que vous présentez, monsieurs Angels, ne porte que sur les sociétés en nom collectif dont les associés sont des sociétés, alors que le problème concerne également les associés personnes physiques et tous les groupements translucides.
Votre amendement ne règle pas non plus le problème des moins-values de cession de parts de sociétés en nom collectif, pour lesquelles la législation actuelle permet de déduire une deuxième fois les déficits.
Enfin, la solution que vous proposez risquerait d'affecter des accords de participation - je parle de ce que l'on appelle parfois des joint ventures - dans les secteurs de la recherche médicale ou des hautes technologies, accords qui présentent un grand intérêt pour la création d'emplois très qualifiés, pour la promotion des techniques de pointe et, donc, pour notre économie en général.
Cela étant, monsieur Angels, je m'engage à proposer ultérieurement au Parlement, sur ce sujet fort complexe - je sais que de nombreux sénateurs sont tout à fait à même d'en juger - des solutions plus adaptées que celle dont vous avez bien voulu prendre l'initiative.
Voilà pourquoi je me permets de vous inviter à retirer cet amendement, qui ne répond pas complètement au problème que vous soulevez.
M. le président. Monsieur Angels, l'amendement n° I-115 est-il maintenu ?
M. Bernard Angels. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. Bien entendu, il ne s'agissait pas pour moi, par cet amendement, de régler le problème de l'évasion fiscale. Je souhaiterais simplement vous sensibiliser, ainsi que la Haute Assemblée, à la nécessité de trouver à brève échéance un moyen de limiter cette évasion fiscale.
Dans ces conditions, monsieur le président, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-115 est retiré.

Article 7



M. le président.
« Art. 7. - L'article 209-OA du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa du 1°, les mots : « autres que celles qui sont régies par le code des assurances » sont supprimés.
« 2° Après le troisième alinéa du 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des premier, deuxième et troisième alinéas ne sont pas applicables aux parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières français et étrangers représentant des engagements réglementés relatifs à des opérations d'assurances sur la vie ou de capitalisation réalisées par des entreprises exerçant majoritairement leur activité dans ce secteur. »
« 3° Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :
« 5° Pour les parts ou actions détenues par des entreprises d'assurances, les dispositions du 1° s'appliquent à la détermination des résultats imposables des exercices clos à compter du 1er novembre 1997.
« Pour le premier exercice d'application, l'écart est déterminé à partir de la valeur liquidative des parts ou actions concernées, à la plus tardive des dates suivantes : 1er juillet 1997, date d'acquisition ou celle d'ouverture de l'exercice. Toutefois, si un écart de sens opposé est constaté entre, d'une part, le début de l'exercice, ou la date d'acquisition si elle est postérieure, et le 1er juillet 1997 et, d'autre part, entre le 1er juillet 1997 et la date de clôture de l'exercice, le montant de l'écart retenu est égal à celui constaté depuis le plus tardif des évènements suivants : l'ouverture de l'exercice ou l'acquisition des parts ou actions. »
Par amendement n° I-9, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose de rédiger comme suit le 2° de cet article :
« 2° Après le troisième alinéa du 1°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des premier, deuxième et troisième alinéas ne sont pas applicables aux parts ou actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières français et étrangers détenues par les entreprises exerçant majoritairement leur activité dans le secteur de l'assurance sur la vie ou de capitalisation. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La commission des finances n'a pas souhaité s'opposer à l'article 7. Elle a cependant considéré qu'il convenait de simplifier la mesure qu'il contient en maintenant hors de son champ d'application les parts et actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières, ou OPCVM, qui sont détenues par les entreprises exerçant majoritairement leur activité dans le secteur de l'assurance vie ou de la capitalisation.
En effet, la rédaction actuelle du 2° de l'article 7 conduit à distinguer les parts représentatives d'engagements et celles qui sont adossées aux fonds propres, induisant ainsi une ségrégation qui n'existe pas sur le plan comptable.
Selon nous, la modification que nous proposons ne devrait pas affecter le rendement escompté de l'article.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Il s'agit là d'un amendement tout à fait utile, qui clarifie et simplifie le dispositif présenté par le Gouvernement. Celui-ci émet donc un avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-9, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 7, ainsi modifié.

(L'article 7 est adopté.)

Article additionnel après l'article 7



M. le président.
Par amendement n° I-35 rectifié, M. Marini propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 209-OA du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Au premier alinéa du 1°, après les mots : "organismes de placement collectif en valeurs mobilières français ou étrangers", sont insérés les mots : "de capitalisation".
« 2° Le début de la deuxième phrase du 9) du 1° est ainsi rédigé : "La proportion de 90 % est considérée comme satisfaite si, pour chaque semestre civil, la moyenne de la valeur réelle des titres inclus dans le portefeuille servant de base au calcul de la valeur liquidative est au moins égale... ( le reste inchangé) ".
« II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées, à due concurrence, par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. La loi n° 92-1376 du 30 décembre 1992 a fixé une nouvelle règle de rattachement des produits afférents aux parts ou actions d'OPCVM détenues par les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.
Cette loi prévoit que ces titres sont évalués à leur valeur liquidative à la clôture de chaque exercice, à l'exclusion des titres d'OPCVM dont l'actif est représenté à hauteur d'au moins 90 % par des actions, des certificats d'investissement et des certificats coopératifs d'investissement émis par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés.
Le présent amendement limite d'abord l'application de cette règle aux titres d'OPCVM de capitalisation. En effet, la prise en compte dans les résultats d'un exercice de l'excédent de valeur liquidative d'un OPCVM de distribution, par rapport à la valeur liquidative à l'ouverture de l'exercice, revient à imposer les plus-values latentes afférentes aux titres sous-jacents, ce qui est contraire au principe comptable de prudence qui veut que les gains ne soient pris en compte qu'une fois qu'ils ont été réalisés.
En pratique, la distinction entre OPCVM de capitalisation et OPCVM de distribution pourra reposer sur les principes déjà dégagés pour l'application du seuil de cession des plus-values de valeurs mobilières et explicités par l'instruction administrative du 20 juillet 1993.
Le présent amendement permettrait ensuite d'apprécier le quota de détention de titres actions en établissant une moyenne globale sur l'exercice et non une moyenne journalière sur le semestre civil, comme c'est aujourd'hui le cas.
Je profite, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'occasion qui m'est donnée pour vous demander à quelle échéance il est prévu de saisir le Parlement d'un texte relatif aux OPCVM et tendant à la prise en compte de notre entrée prochaine dans l'Union économique et monétaire ainsi que des impératifs d'harmonisation européenne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement comporte deux aspects.
La première des modifications de l'article 209-OA proposées par M. Marini est apparue difficilement acceptable à la commission des finances dans la mesure où la fiscalisation sur les échéances courues est devenue la règle, y compris pour les obligations, qui sont des produits que l'on peut assimiler aux parts ou actions d'OPCVM de distribution.
En revanche, la seconde des modifications marquerait, aux yeux de la commission des finances, un assouplissement des modalités actuelles, qui paraissent effectivement contraignantes.
La commission des finances, toutefois, n'est pas sûre que le problème serait totalement résolu par le dispositif proposé et elle souhaiterait, avant de se prononcer définitivement sur ce second aspect de l'amendement, connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Il s'agit, avec cet amendement, d'une question qui relève véritablement de l'orfèvrerie fiscale, ce qui ne me surprend pas venant de M. Marini. (Sourires.)
Le Gouvernement n'est pas favorable à votre amendement, monsieur le sénateur, et je vais m'efforcer de vous exposer les raisons de cet avis.
Sur le fond, l'exclusion des OPCVM de distribution ne me paraît pas fondée. D'une part, ces organismes peuvent ne pas distribuer au porteur une partie des produits qu'ils ont encaissés ; c'est le cas, en particulier, des OPCVM dits mixtes. D'autre part, les produits acquis mais non encore perçus ne sont, en toute hypothèse, pas distribuables.
Par la suite, la non-application, pour les OPCVM concernés, de la règle d'évaluation à la clôture de l'exercice aurait pour effet de reporter indûment l'imposition de ces produits, alors qu'ils seraient imposés si les actifs sous-jacents étaient détenus directement par les porteurs de parts ou d'actions des OPCVM.
De plus, la grande liquidité de ces titres, qui résulte notamment de la règle du rachat ou du remboursement automatique sur demande du porteur, justifie que les plus-values constatées au sein de ces organismes soient immédiatement prises en compte dans les résultats imposables.
Monsieur le sénateur, vous proposez tout d'abord que, pour les OPCVM actions, le seuil de 90 % au-delà duquel la règle d'évaluation à la valeur liquidative n'est pas applicable soit apprécié d'après la moyenne semestrielle des actifs détenus par le fonds et non à partir de la moyenne journalière. Il me semble qu'une telle proposition favoriserait des comportements d'optimisation fiscale. Il suffirait en effet aux OPCVM de respecter le seuil de 90 % le premier et le dernier jour de chaque semestre, soit quatre jours par an, pour bénéficier de l'exception à la règle de valorisation à la clôture de l'exercice. Vous en conviendrez, monsieur le sénateur, ce n'est pas acceptable.
Quant à votre seconde proposition, elle soulève une difficulté technique. Vous proposez, pour apprécier le pourcentage d'actions par rapport à l'ensemble des actifs détenus par l'OPCVM, de retenir une moyenne semestrielle pour les premiers et une moyenne journalière pour les seconds, ce qui ne me semble pas très cohérent.
Sous le bénéfice de ces explications, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
En réponse à la question que vous m'avez posée en conclusion, je peux vous indiquer que, dans la perspective de la mise en place de l'euro - à propos de laquelle a été lancée ce matin une campagne d'information, avec la participation active du président de la commission des finances du Sénat -, un prochain texte portant diverses dispositions d'ordre économique et financier comportera des dispositions relatives aux OPCVM.
M. le président. Monsieur Marini, votre amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-35 rectifié est retiré.

Article 8



M. le président.
« Art. 8. - L'article 238 bis HN du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
Les dispositions du présent article cessent de s'appliquer aux investissements qui n'ont pas fait l'objet d'une demande d'agrément parvenue à l'autorité administrative avant le 15 septembre 1997. »
Sur l'article, la parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Nous abordons, avec cet article, le problème de la politique maritime.
Il me semble utile de rappeler une nouvelle fois que la flotte de commerce française était la dixième au monde en 1975, qu'elle est tombée depuis lors au vingt-huitième rang, le nombre de ses navires passant de 500 à 200, soit une diminution de plus de moitié.
La loi du 5 janvier 1996 sur les quirats, dont l'application devait s'étaler sur quatre ans et à laquelle bon nombre d'élus de diverses obédiences politiques avaient apporté leur soutien, avait précisément pour objet d'enrayer un tel déclin.
Le succès a été au rendez-vous puisque 10 % de la flotte française ont été renouvelés, l'investissement maritime a plus que doublé par rapport à la moyenne des années antérieures, des emplois de navigants et de sédentaires ont été créés et des emplois ont été maintenus sur les chantiers navals.
Malheureusement, on nous propose aujourd'hui d'en finir prématurément avec ce dispositif. Cela veut-il dire que la France renonce à toute ambition maritime ? Cela veut-il dire que l'on se désintéresse de la maîtrise de nos échanges extérieurs et des navires qui en sont les vecteurs ? En d'autres termes, pour le Gouvernement, la flotte serait-elle « de droite » ?
Ces questions, nous nous les posons, naturellement, sur les travées de la majorité sénatoriale. Nous nous étonnons que le régime des quirats soit la seule mesure qui fasse l'objet d'une suppression sèche, sans référence à la politique maritime, alors que l'office parlementaire d'évaluation des politiques publiques a été saisi et sera conduit, prochainement, à examiner les rapports qui ont été établis sur les questions fondamentales qui se posent, rapports qui ont d'ailleurs été approfondis avec le concours du commissariat général du Plan.
Nous avons entendu les préoccupations exprimées par les organisations professionnelles - celles du transport maritime, de la construction navale, des ports, des secteurs de l'affrètement et de la consignation - et nous avons eu le sentiment que toutes ces préoccupations ont pesé d'un très faible poids dans les décisions du Gouvernement et de la majorité de l'Assemblée nationale.
Certes, on nous dit qu'il s'agit d'une niche fiscale, que l'achat de parts de navires est une formule trop généreuse fiscalement pour une certaine épargne.
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est vrai !
M. Philippe Marini. On nous indique que ce dispositif est destiné à profiter aux classes les plus aisées et à des entreprises voulant échapper à l'impôt.
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est vrai !
M. Philippe Marini. Mais alors, je demande à ceux - en particulier à Mme Beaudeau, puisqu'elle s'exprime sur le sujet - qui seraient tentés de suivre ce raisonnement de bien vouloir éviter l'hypocrisie. Si l'on veut investir dans les navires, il faut bien que l'argent provienne de quelque part, qu'il s'agisse des entreprises ou de ceux qui mettent en balance différents investissements afin d'effectuer des choix qui leur conviennent. Comment veut-on qu'ils opèrent ces choix sans se référer à des notions de rentabilité financière et de profit ?
Je sais également que l'on a combattu ce système des quirats en évoquant, par exemple, certaines comparaisons internationales. On nous dit que l'Allemagne abandonnerait une formule du même ordre. Toutefois, l'Allemagne a pratiquée cette formule pendant d'assez nombreuses années, et avec bonheur puisqu'elle se situe aujourd'hui au premier rang mondial pour les porte-conteneurs. Tout cela est assurément très choquant.
Les évaluations qui sont données du coût de la mesure que comporte la loi sur les quirats ne nous semblent pas être incontestables. On nous parle de 2 milliards de francs. Il est extrêmement difficile de vérifier un tel chiffre, qui est contesté par les professionnels.
Monsieur le secrétaire d'Etat, il est à craindre que les choix de la majorité à l'Assemblée nationale et du Gouvernement ne soient, en ce domaine, fortement pénalisants pour l'emploi et pour la place internationale de la France.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Mes chers collègues, c'est un peu au nom des élus du littoral et surtout en tant que président du groupe de la mer que je m'exprimerai dans cette assemblée en confirmant, point par point, l'intervention de M. Marini et en complétant son propos.
Vous savez que, en raison de la mondialisation, 75 % des échanges extérieurs de marchandises s'effectuent par la mer. Il se trouve que le commerce maritime augmente de 7 à 8 % par an. Dans ce contexte, où se trouve la France ?
Nous avons connu une décrépitude considérable. Les chiffres qui viennent d'être avancés doivent être confirmés. Voilà trente ans - je prends une période un peu plus longue - nous étions la quatrième ou la cinquième puissance commerciale industrielle du monde et nous possédions une flotte qui était du même ordre. Aujourd'hui, nous sommes à la vingt-huitième place. Le problème se pose plus en valeur relative qu'en valeur absolue.
Il faut savoir que les autres nations industrielles ont su conserver leur place dans le monde, qu'il s'agisse de l'Allemagne, de la Grande-Bretagne, de la Norvège, de la Grèce ou d'autres. Pour sa part, la France a vu le nombre de navires, cela a été dit, passer de 500 à 210, celui des marins de 30 000 à 5 000 et celui des employés des chantiers navals de 33 000 à 6 000.
Il fallait une nouvelle ambition maritime ! Dès son élection, le Président de la République a confirmé l'ambition maritime qui était la sienne. Celle-ci reposait sur trois piliers : premièrement, une flotte de commerce rénovée ; deuxièment, des sites portuaires compétitifs ; troisièmement, une pêche maintenue.
Malheureusement, par cet article 8, vous supprimez un dispositif que nous avons mis plusieurs mois à élaborer, en concertation avec tous les professionnels et après de nombreuses réunions qui se sont tenues avec le ministre compétent.
Vous nous dites : on supprime la mesure et on engagera ensuite la concertation. C'est une pratique assez curieuse ! Il eût été préférable d'engager la concertation avant. Vous avez fait la même chose pour la famille !
Dans ce contexte, les amendements que nous présentons visent, au mieux, à rétablir la mesure, au pire, à l'amender. Quoi qu'il en soit, je reviendrai tout à l'heure sur les critiques que le Gouvernement avance pour supprimer ce dispositif. Aucun des arguments que vous avez présentés, monsieur le secrétaire d'Etat, n'est fondé. Nous aurons l'occasion de le dire dans quelques instants en défendant nos amendements.
M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Nos collègues Philippe Marini et Jacques Oudin viennent de rappeler, avec éloquence et précision, l'intérêt et l'importance du régime des quirats, aussi bien pour notre flotte de commerce que pour l'emploi.
Pour ma part, j'insisterai sur le fait que ce régime commence à porter ses fruits, mais qu'il n'a pas encore eu le temps d'atteindre son plein effet. Toutefois, nous devons continuer à penser que son principe est bon. Tel est le cas des membres du groupe de l'Union centriste.
En matière fiscale, il faut de la continuité, monsieur le secrétaire d'Etat. Nous l'avons dit souvent dans cet hémicycle et nous avons aujourd'hui l'occasion de le répéter : fiscalité rime mieux avec continuité qu'avec velléité.
M. Jacques Oudin. Très bien !
M. Denis Badré. Par ailleurs, l'harmonisation des fiscalités de l'Union européenne s'imposera à nous de plus en plus. Philippe Marini évoquait à l'instant la position de l'Allemagne. Celle de nos quatorze partenaires est à peu près identique. Tous nos partenaires se sont posé cette question à un moment ou à un autre et ils ont tous fini par considérer que ce principe était bon.
Monsieur le secrétaire d'Etat, gardons-nous de supprimer aujourd'hui un régime dont le principe commence à être considéré comme bon par l'ensemble de nos partenaires ! Si nous étions conduits, au motif d'harmonisation fiscale, à le réintroduire dans quelques années, ce serait vraiment une politique de gribouille. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je souhaite répondre brièvement aux interventions très argumentées de MM. Marini, Oudin et Badré.
Ce qui est en cause, c'est non pas l'objectif mais le moyen. Que vous soyez attachés au développement de la flotte de commerce, je n'en doute pas. Le Gouvernement l'est aussi !
M. Christian Bonnet. Très bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'ajoute qu'il y a, d'une part, la flotte de commerce, industrie importante, et, d'autre part, la construction navale, secteur qui est également important.
Il ne s'agit pas de manifester de la méfiance envers une ou deux activités, qui sont absolument essentielles pour notre pays. Le problème est que l'instrument qui a été défini par la loi de 1996 n'atteint pas sa cible. Je vous en donnerai rapidement quelques illustrations.
Je commencerai par la construction navale. Cette mesure devait favoriser à la fois la construction navale française et - nous sommes tous des Européens convaincus - la construction navale européenne. Sur les vingt-cinq navires dont la construction a été financée par cette disposition fiscale, six seulement ont été construits dans des chantiers navals français ou européens.
Je sais que la Corée traverse une crise financière profonde mais, selon moi, on ne devait pas encore en être à subventionner les chantiers navals de ce pays. Efforçons-nous de concentrer l'argent des contribuables sur l'emploi français dans la flotte de commerce ou dans la contruction navale française ou européenne.
Le coût de cette mesure devait s'élever à 800 000 francs par emploi sauvergardé dans la flotte de commerce. On arrive aujourd'hui au chiffre stupéfiant d'environ 5 millions de francs par emploi directement sauvegardé. Cela représente l'équivalent de cinquante salariés payés au SMIC dans l'industrie textile ou dans d'autre industries, ce qui est tout à fait dispendieux. Au total, 400 millions de francs avaient été prévus. En fait, ce sont 2 milliards de francs qui ont été dépensés.
Par conséquent, du point de vue de l'efficacité économique - nous recherchons tous, en effet, l'efficacité économique - et sur le plan de la création d'emplois, cette mesure fiscale semble pour le moins dispendieuse.
S'y ajoute le fait que, en matière d'équité fiscale, cette mesure n'est pas particulièrement heureuse. Je rappelle - mais vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs - que les personnes physiques peuvent déduire de leur revenu imposable la somme de 500 000 francs pour un célibataire et 1 million de francs pour un couple. Cela ne touche pas véritablement les contribuables modestes !
En ce qui concerne les personnes morales, c'est-à-dire les entreprises, les fonds qu'elles investissent dans ce dispositif sont déductibles du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés, sans limitation.
Par conséquent, j'indiquerai simplement à M. Badré que la continuité, c'est bien lorsque le moyen est proportionné à la fin que l'on s'est fixé. Il n'y a pas à critiquer les auteurs de cette loi qui n'a pas donné les résultats escomptés. Lorsqu'un système n'est pas véritablement adapté, on le transforme !
Le Gouvernement propose, avec l'article 8, de supprimer le présent dispositif, mais pas pour ne pas le remplacer ; je réponds là à une question de M. Oudin. D'ici à la fin de l'année, un rapport sera élaboré conjointement par le ministère des transports et par celui de l'économie, des finances et de l'industrie sur les meilleurs moyens d'aider notre flotte de commerce et la construction navale française.
Je pense que le Gouvernement pourra vous proposer un dispositif visant le même objectif, que nous cherchons tous à atteindre, mais qui coûtera quand même beaucoup moins cher aux contribuables.
M. le président. Sur l'article 8, je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° I-140 est présenté par MM. de Rohan et Oudin, Mme Michaux-Chevry, MM. Debavelaère, Gélard et Lemaire, les membres du groupe du Rassemblement pour la République et MM. Bonnet, de Cossé-Brissac, Darniche et Demilly.
L'amendement n° I-184 est déposé par MM. Arzel, Le Jeune, Le Breton, Moinard, Millaud et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous deux tendent à supprimer l'article 8.
Les deux amendements suivants sont également identiques.
L'amendement n° I-10 rectifié est présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-141 est déposé par MM. de Rohan et Oudin, Mme Michaux-Chevry, MM. Debavelaère, Gélard et Lemaire, les membres du groupe du Rassemblement pour la République et MM. Bonnet, de Cossé-Brissac, Darniche et Demilly.
Tous deux visent à rédiger comme suit l'article 8 :
« I. - Le début du premier alinéa de l'article 238 bis HN du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Sont admises en déduction du revenu ou du bénéfice mentionnés respectivement au 2 de l'article 13 et au premier alinéa du I de l'article 209, selon les modalités définies aux articles 163 unvicies ou 217 nonies, les sommes versées au titre de la souscription de parts de copropriété de navires armés au commerce, prises en compte pour 50 % de leur montant si le navire est livré par un chantier naval situé hors de l'Union européenne, lorsque les conditions ci-après définies sont remplies :
« II. - Au e du premier alinéa de l'article 238 bis HN du code général des impôts, le mot : "quatrième" est remplacé par le mot : "septième".
« III. - Au premier alinéa de l'article 163 unvicies du code général des impôts, la somme : "500 000 F" est remplacée par la somme : "250 000 F" et la somme : "1 000 000 F" est remplacée par la somme : "500 000 F".
« IV. - Le premier alinéa de l'article 217 nonies du code général des impôts est complété par les mots : "dans la limite de 50 % du bénéfice imposable". »
La parole est à M. Oudin, pour défendre l'amendement n° I-140.
M. Jacques Oudin. Je souhaite tout d'abord répondre à M. le secrétaire d'Etat.
Vous nous dites, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous supprimez une disposition et que vous réfléchirez ensuite à son remplacement. Je rejoins la commission des finances dans son ensemble en disant qu'il s'agit de « yo-yo fiscal ». En effet, il n'est pas possible de mener une politique fiscale de cette nature, alors que nous avons passé des mois à élaborer la mesure en question. Vous présentez d'ailleurs des arguments que je réfuterai les uns après les autres.
Le premier d'entre eux, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est que toute notre procédure a été axée autour de la procédure d'agrément, qui est dirigée par vos services avec l'avis des autres ministères. Ce sont vos services qui recevaient les dossiers et qui étaient en mesure d'apprécier a priori les conséquences économiques, sociales et industrielles de chaque décision que vous preniez.
Or, après avoir pris ces décisions, vous dites maintenant qu'elles étaient mauvaises ! A quoi sert alors une procédure d'agrément si vous ne mesurez pas toutes les conséquences à l'avance ?
Vous dites également que ce dispositif n'a pas profité à la construction navale. Monsieur le secrétaire d'Etat, cette mesure était d'abord destinée aux armateurs, afin de bâtir une flotte. La construction navale en était éventuellement une conséquence importante, mais ce n'était pas l'objectif essentiel.
Vous dites encore que, sur les vingt-cinq navires, dont sept d'occasion, six ont été construits dans les chantiers navals français ou européens. Mais vous avez oublié de préciser à l'Assemblée nationale que, sur l'ensemble des bateaux construits, la moitié de la valeur ajoutée provenait des chantiers navals français. En effet, nos chantiers navals sont destinés à construire des bateaux à haute valeur ajoutée et, si un vraquier est construit en Corée, un navire de passagers, fort heureusement, l'est à Saint-Nazaire ou au Havre.
Je réfute donc votre premier argument.
Vous nous dites, deuxième argument, que le coût par emploi, représentant 5 millions de francs, est stupéfiant. Mais votre calcul est faux, monsieur le secrétaire d'Etat ! Vous n'avez pris en considération que les 150 emplois de navigants, en oubliant les emplois à terre. Or vous savez qu'un emploi en mer crée environ trois ou quatre emplois à terre. Votre résultat est donc évidemment stupéfiant, je le reconnais.
Vous parlez, troisième argument, d'équité fiscale. Monsieur le secrétaire d'Etat, il s'agit de savoir ce que l'on veut ! Tous les pays qui ont développé leur flotte l'ont fait en drainant l'épargne vers un monde maritime qui, à lui seul, ne pouvait s'autofinancer.
Est-ce une niche fiscale ou un moyen de développement de l'investissement ? Moi, je préfère honnêtement l'incitation fiscale, qui est active, à la subvention, qui est passive.
Si l'on veut vraiment faire une comparaison, comme M. Badré nous y a invités, je vous propose, mes chers collègues, d'examiner ce qui s'est passé en France et en Allemagne. Voilà qui expliquera pourquoi nous vous proposons de rétablir un dispositif que nous avons mis des mois à élaborer.
Le système fiscal allemand prévoit-il un agrément ? Non ! Nous, nous avons prévu un tel agrément. L'avantage fiscal, chez nous, est de 100 %. En Allemagne, il est de 125 % à 140 %, selon que l'on inclut ou non les frais accessoires. L'exonération des plus-values de cession de parts existe-t-elle en France ? Non, alors qu'elle existe en Allemagne. Nous avons des seuils de déduction fiscale de 500 000 francs et de 1 million de francs. En Allemagne, monsieur le secrétaire d'Etat, c'est illimité...
M. le président. Mon cher collègue, il vous faut maintenant en venir à votre amendement, car il vous reste à peine plus d'une minute.
M. Jacques Oudin. Nous proposons donc de rétablir un dispositif qui était excellent et grâce auquel l'ensemble du monde maritime français commençait à reprendre espoir. En effet, non seulement vingt-cinq gros dossiers étaient déjà prêts, mais encore se profilaient entre soixante et quatre-vingts petits dossiers, représentant 5 à 20 millions de francs. De ceux-là, vous n'avez pas parlé, monsieur le secrétaire d'Etat !
Notre amendement n'a donc d'autre objet que de poursuivre cette ambition maritime que vous êtes en train de détruire. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-184.
M. Denis Badré. Tout a été dit : M. Oudin vient de plaider très clairement et de manière détaillée la cause du rétablissement d'une mesure dont, je pense, nous n'avons pas eu le temps de mesurer tous les effets. Laissons ses chances à un principe qui nous paraît bon !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-10 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Comment être utile à la flotte de commerce française ? Comment avoir une vraie ambition maritime pour la France ? Telles sont les questions qui se posent.
Si nous parlons toujours des « niches fiscales » de manière péjorative, nous ne devons pas oublier que, lorsqu'elles ont été créées, c'était tout simplement parce que le secteur économique concerné ne pouvait s'autofinancer et que l'Etat se trouvait devant un choix : soit il offrait des aides budgétaires, soit il accordait des aides fiscales.
Je sais bien que des gens beaucoup plus savants que moi vont me dire que je n'ai sans doute pas bien compris, mais, s'agissant des quirats, il convient de faire en sorte que notre flotte de commerce française puisse retrouver la place qui était la sienne. Il s'agit de traduire sur le plan économique, plus que sur le plan verbal, une vraie ambition maritime pour la France.
Je considère que le système de l'agrément est un système intelligent, qu'il constitue en tout cas une bonne piste, en confiant à des services le soin d'examiner en détail les projets afin de déterminer si les règles fiscales qui ont été fixées par le Parlement sont respectées.
Si le régime de la procédure d'agrément fonctionne mal, réformons-le, faisons en sorte qu'il fonctionne ! Devrions-nous, si nous ne le faisons pas, remettre en cause tous les dispositifs fiscaux qui prévoient un agrément ? Cela ne me paraîtrait pas aller dans le bon sens.
Monsieur le secrétaire d'Etat, faites donc en sorte que la procédure d'agrément fonctionne et que tout soit bien clair. Dans cette maison, nous nous parlons toujours franchement : je vous demande donc de ne pas simplement vous en remettre - ce serait d'ailleurs une exception si vous agissiez ainsi - aux avis techniques qui vous sont remis. Vous devez les examiner aussi sous l'angle fiscal et veiller à ce que l'orientation fixée par le Parlement puisse être respectée.
Vous avez évoqué des arguments financiers. Il sont peut-être, sinon tronqués, du moins déséquilibrés, car les flux sont tels qu'ils n'entraînent pas automatiquement un investissement. Il faut ainsi comparer des choses comparables et il n'est pas certain - mais je le dis sous forme de question - que, statistiquement, les comparaisons exercice par exercice puissent nous donner un reflet très fidèle de la réalité économique.
Le système actuel favorise-t-il la construction navale française ? C'est la question que nous nous étions posée au moment où la loi a été adoptée. Il n'est pas un seul sénateur qui ne souhaite favoriser en priorité les chantiers navals français ! Mais la Commission européenne, à l'époque, avait opposé un veto et rien n'avait alors pu être fait. Or, aujourd'hui - je parle sous le contrôle de notre expert en matière communautaire, M. Denis Badré - la Commission a demandé aux pays de l'Union d'assortir leurs dispositifs d'aide fiscale d'une préférence européenne.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, vous nous avez dit que six navires seulement avaient été construits ou réhabilités en France. Or, sur les seize qui ont été concernés par le dispositif, dix ont connu un traitement européen : six d'entre eux sont passés par les chantiers navals français, et quatre ont été construits en Europe.
Cela étant, MM. Oudin et Badré nous ont présenté deux amendements qui visent au maintien du dispositif actuel. La majorité sénatoriale unie peut décider du dispositif qu'elle préfère, mais, si elle souhaite être utile à la flotte française et avoir une vraie ambition maritime pour la France, il me semble préférable qu'elle adopte un dispositif susceptible de survivre à la commission mixte paritaire et à la deuxième lecture à l'Assemblée nationale.
Un dispositif de repli pourrait donc être imaginé. Je le rappelle très rapidement : il s'articulerait autour de trois propositions principales.
La première consisterait à adopter un taux de déductibilité différencié, selon que le navire serait construit dans un chantier européen ou hors d'Europe. Nous prendrions alors en compte les souhaits de la Commission, que je viens d'évoquer.
La deuxième consisterait à alléger la durée du régime sous pavillon français en la portant de cinq à huit années.
Enfin, une modération du coût fiscal pourrait être envisagée en limitant l'avantage pour les personnes physiques, celui-ci passant de 500 000 francs pour une personne seule et de 1 million de francs pour un couple à respectivement 250 000 francs et 500 000 francs, tandis que, pour les personnes morales, la part déductible de l'impôt sur les sociétés serait réduite à 50 % du bénéfice imposable.
Mes chers collègues, il convient que le Sénat adopte la mesure la mieux à même d'aboutir à l'objectif unique que nous nous sommes fixé : il s'agit de soutenir la flotte de commerce française et d'avoir une réelle ambition maritime pour la France.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous écouterons avec une attention encore plus soutenue qu'à l'habitude votre réponse, car vous induirez sans doute le choix des sénateurs sur les différents dispositifs qui sont contenus dans les quatre amendements en discussion.
MM. Jacques Machet et Roland du Luart. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Oudin, pour présenter l'amendement n° I-141.
M. Jacques Oudin. Mes chers collègues, la position du Gouvernement est une position politique. Pour des raisons que j'ignore, d'autant que le monde maritime est souvent à gauche, le Gouvernement décide de supprimer ce dispositif.
M. Ivan Renar. Le monde maritime est à bâbord ou à tribord, mais pas à gauche ou à droite ! (Sourires.)
M. Jacques Oudin. La plupart des marins de commerce qui dépendent de ma circonscription votent à gauche !
M. Michel Charasse. Ils naviguent ! (Nouveaux sourires.)
M. Roland du Luart. Ils tiennent le cap comme ils peuvent !
M. Jacques Oudin. Pour des raisons politiques, excellemment expliquées par notre rapporteur général, il s'agit donc d'adopter ici une position susceptible de passser le cap d'une majorité à l'Assemblée nationale qui, fidèle au Gouvernement, est hostile à ce dispositif.
Devant ce dilemme, il est évident qu'il est préférable d'avoir un dispositif un peu réduit plutôt que de ne rien avoir du tout.
Par ailleurs, s'agissant des activités de la mer et du littoral, je connais l'opinion profonde de nos collègues de gauche. Demandez leur avis à M. Le Pensec ou aux autres : je vous assure qu'ils aimeraient bien que l'on continue à soutenir la flotte française !
Dans ces conditions, nous nous rallions à l'amendement de repli de la commission des finances afin d'adapter un peu le dispositif existant. Nous retirons donc l'amendement tendant à la reprise totale de la loi de juillet 1996, sous le bénéfice de deux observations.
Premièrement, je ne suis pas d'accord avec M. le rapporteur général quand il dit que la procédure d'agrément a mal fonctionné. En effet, les résultats ont montré qu'elle fonctionnait fort bien. Nous disposons donc de tous les éléments et de tous les moyens nécessaires pour nous prononcer.
Deuxièmement, je considère que le Gouvernement a fait une très mauvaise manière au Parlement. En effet, l'office parlementaire d'évaluation budgétaire avait demandé un rapport au commissariat général du Plan, et ce rapport devait nous être remis le 10 novembre. Il ne nous a pas été communiqué, mais il devrait nous parvenir dans les jours qui viennent. Or, sachant cela, vous avez néanmoins, sans concertation préalable avec les professionnels, décidé de supprimer la mesure que nous souhaitons rétablir ou adapter.
C'est la raison pour laquelle j'invite tous mes collègues à voter cet amendement de repli.
Quoi qu'il en soit, nous aurons le regret de constater que la France a, dans le domaine maritime, une position en retrait par rapport à tous ses partenaires européens. C'est bien dommage, le jour même où le Gouvernement lance une campagne d'information sur l'euro ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. L'amendement n° I-140 est retiré.
Monsieur Badré, qu'en est-il de l'amendement n° I-184 ?
M. Denis Badré. Convaincu par l'argumentation de M. le rapporteur général et avec le même souci d'efficacité que M. Oudin, je me rallie à l'amendement de la commission des finances.
M. le président. L'amendement n° I-184 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques n°s I-10 rectifié et I-141 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. Le débat qui vient de s'engager quant au meilleur moyen d'aider notre flotte de commerce est de qualité. Je reprendrai un certain nombre de points qui ont été développés par MM. Oudin et Badré, ainsi que par M. le rapporteur général, en commençant par l'agrément.
Il est clair que les agréments qui ont été jusqu'à présent accordés étaient favorables aux armateurs. Si tel est l'objectif visé par M. Oudin, aucun problème ne se pose.
Mais rejoignant en cela les propos de M. le rapporteur général, le Gouvernement a l'impression, non pas sur ce sujet mais sur d'autres, d'examiner véritablement les procédures d'agrément en fonction de deux critères importants : celui de l'emploi et celui du développement économique.
S'agissant du premier critère, M. Oudin a fait remarquer qu'à un emploi en mer correspondaient deux, trois ou quatre emplois à terre. Même en tenant compte de ces emplois induits, le coût fiscal d'un emploi créé ou sauvegardé dans l'ensemble de la flotte de commerce représente tout de même entre 1 million et 1,5 million de francs, ce qui est exorbitant.
Nous sommes attachés à la marine de commerce mais aussi à ses marins. Si les propositions qui ont été présentées avaient concerné plus de marins français ou européens que d'officiers de dunette, peut-être un plus grand nombre d'emplois auraient été créés.
La procédure de l'agrément a été utilisée dans le passé, je ne le nie pas, au bénéfice des armateurs. La preuve est faite qu'en matière d'emplois les dispositifs adoptés jusqu'à présent ont été très peu efficaces.
M. Oudin a affirmé qu'une exonération ou une aide fiscale était préférable à une subvention. Je ne suis pas d'accord avec lui : les dépenses fiscales sont indolores. Ainsi, on passe insensiblement et pratiquement sans s'en rendre compte de 400 millions de francs à 2 milliards de francs. Au contraire, les subventions sont des dépenses qui sont examinées beaucoup plus soigneusement par les deux assemblées et qui font l'objet d'un contrôle démocratique beaucoup plus poussé.
Pour conclure, monsieur Oudin, vous avez cité le système allemand. Celui-ci était si favorable que les Allemands l'ont supprimé l'an dernier estimant sans doute que le coût fiscal, qui était comparable au nôtre - peut-être était-il plus avantageux dans un sens et moins dans un autre - était exorbitant par rapport à l'objectif atteint.
Qu'allons-nous faire maintenant ? Lorsque nous aurons reçu, d'ici à quelques jours, le rapport du commissariat général du Plan que M. Oudin a évoqué et les résultats de l'expertise conjointe qui est actuellement menée par le ministère des transports et celui de l'économie et des finances, nous pourrons substituer au système actuel dont nous proposons la suppression à compter du début de l'année prochaine un autre système qui, à mon avis, atteindra le même objectif en étant beaucoup moins coûteux.
M. le rapporteur général a cherché, si je puis dire, un point de conciliation, ce qui prouve qu'il ne conteste pas totalement la démarche du Gouvernement. Il a proposé de réduire les aides fiscales, qu'il s'agisse de celles qui sont accordées lorsque les bateaux sont construits dans des chantiers situés en dehors de la Communauté européenne ou de l'allongement de cinq à huit ans de la durée de mise sous pavillon français du navire. Il a, en outre, proposé de limiter, modestement, les avantages fiscaux que des personnes physiques ou des personnes morales pouvaient tirer de ce dispositif.
L'amendement n° I-10 rectifié proposé par la commission des finances est moins « rebutant » pour le Gouvernement que ceux qui ont été proposés et qui tendent à revenir purement et simplement au système antérieur, mais il reste inacceptable.
Monsieur le rapporteur général, en dépit de votre effort de conciliation, que je respecte, le dispositif que vous suggérez reste encore très coûteux, et je relève le défi de proposer, dès le début de l'année 1998, un système plus avantageux qui atteigne les mêmes objectifs.
Avec toute la courtoisie dont je suis capable, je suggère donc à la Haute Assemblée, ce qui est pour le moins hardi (Sourires), de rejeter cet amendement de conciliation.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s I-10 rectifié et I-141.
M. Christian Bonnet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez exercé - et avec quelle compétence ! - une très haute charge en Ile-de-France.
M. Michel Charasse. Ça, c'est vrai !
M. Christian Bonnet. Si, d'aventure, vous l'aviez exercée sur le littoral, vous auriez eu du mal à tenir le langage, certes courtois, que vous venez de tenir.
M. le rapporteur général, au nom de la commission des finances, a présenté un amendement de conciliation, dans le souci de prolonger le débat et d'engager une concertation, mot que nous trouvons jour après jour, dans la bouche ou sous la plume de M. le Premier ministre, avec l'Assemblée nationale où les députés de la majorité élus du littoral sont, sans exception aucune, favorables à une mesure destinée à soutenir l'emploi sur le littoral.
Quelle est la situation du littoral aujourd'hui ? Peut-être pourriez-vous vous adresser à l'un de nos anciens collègues M. Alain Richard pour lequel nous avons tous une très grande estime - moi, en particulier, et il le sait. Il vous indiquera quelles sont les conséquences de la contraction des crédits de la défense et quel espoir anime certains sous-traitants qui se raccrochent à l'activité de quelques chantiers civils, qu'il s'agisse de navires de commerce ou de bateaux de pêche.
Dans cette optique, je ne parviens pas à comprendre l'obstination du Gouvernement face à une mesure de compromis. On pouvait être maximaliste, et M. Jacques Oudin ne m'en voudra pas de qualifier ainsi son amendement, et vous rebuter. On pouvait aussi espérer par la voie du compromis réussir, fût-ce partiellement, à atteindre l'objectif visé par tous les élus du littoral, quelle que soit leur orientation politique.
C'est la raison pour laquelle je me permets d'insister, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que, dans les jours et les semaines à venir, vous puissiez vous rendre compte par vous-même, en prenant contact avec les élus du littoral appartenant à la majorité, que l'amendement de compromis qui est proposé et qui vous permet d'être cohérent avec la démarche que vous aviez adoptée initialement peut être adopté par les deux assemblées. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE).
M. Jacques Oudin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. Sans vouloir trop prolonger le débat, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai l'impression que nos conceptions sont diamétralement opposées.
Vous êtes, dites-vous, plus favorable à la subvention qu'à une incitation fiscale. Je ne connais pas de subvention qui draine efficacement l'épargne vers des investissements productifs. En revanche, je sais que les incitations fiscales ont un tel effet. Or, ce que nous souhaitons, en ce domaine, c'est drainer plusieurs milliards de francs vers la flotte de commerce comme nous le faisons pour les départements d'outre-mer et comme les Allemands l'ont fait pour leur flotte de commerce. Je le répète, la subvention est passive ; la déduction fiscale est active et incitative.
Les Allemands, dites-vous, ont supprimé leur dispositif. D'abord, ils ne l'ont pas complètement supprimé ; ils vont maintenir certaines dispositions. Ensuite, ils l'ont partiellement supprimé parce qu'ils ont atteint leurs objectifs. A raison de 7 milliards de francs drainés tous les ans, l'Allemagne a gagné le pari de mettre sur pied l'une des premières flottes au monde. Nous disposons de 210 bateaux, les Allemands de 1 400 ; ils comptent 700 kilomètres de côtes, contre 5 500 pour nous ; ils ont 440 caboteurs, nous en possédons moins de 50. Voilà le bilan ! Et vous direz ensuite que la France peut être compétitive sur les mers face à nos partenaires européens ! Mais ils nous dépassent tous, même les Turcs. (Sourires.)
L'amendement n° I-10 rectifié, dites-vous, est moins rebutant. Eh bien ! Si rénover la flotte française est rebutant, alors les bras m'en tombent, mais je voterai cet amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Nous voulons tous soutenir notre flotte ; nous partageons tous une ambition maritime pour la France. Comme je vous l'avais promis, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous ai écouté avec une attention extrêmement soutenue. Vous préparez, avez-vous dit, un dispositif qui, si j'ai bien compris, serait fondé sur l'aide budgétaire.
Peut-être me suis-je trompé, mais j'ai le sentiment que l'OCDE, d'une part, et la Communauté européenne, d'autre part, s'apprêtent à proscrire cette voie. Alors, entendons-nous bien : est-il bien sage que le Gouvernement de la France choisisse une voie de soutien qui sera fermée demain ? Essayez de nous éclairer, monsieur le secrétaire d'Etat.
Je comprends parfaitement que vous ne vouliez pas nous donner des précisions, dans la mesure où vous ne disposez pas de la totalité des informations utiles pour nous décrire le dispositif envisagé. Mais, encore une fois, vous êtes devant la Haute Assemblée. Celle-ci essaie de vous témoigner la modération dont elle fait toujours preuve. Elle vous parle de la seule voie qui lui semble aujourd'hui empruntable, c'est-à-dire la voie fiscale.
Vous avez tout à l'heure appelé l'attention de la Haute Assemblée sur les dangers de la dépense fiscale. J'ai cru comprendre que, selon vous, la dépense budgétaire se mesurait peut-être plus facilement. Si vous nous faites l'amitié, monsieur le secrétaire d'Etat, de relire le tome I du rapport budgétaire que la commission des finances a rédigé l'année dernière, vous vous apercevrez que nous avons consacré des dizaines de lignes à la dépense fiscale, en démontrant justement qu'elle pouvait constituer un réel danger.
Vous vous adressez donc à la Haute Assemblée, qui, certes, ne prétend pas tout connaître en ce domaine mais qui s'est donné la peine de l'expertiser. Monsieur le secrétaire d'Etat, l'aide budgétaire nous semble fermée. Si c'est la voie que vous vous apprêtez à emprunter, c'en est fini de notre flotte et de notre ambition maritime. Notre démarche, n'est en rien critique. Ce que nous voulons, c'est une solution. Je vous en supplie, monsieur le secrétaire d'Etat, donnez-nous des motifs d'espérer ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'ai entendu le plaidoyer vibrant et émouvant que M. Bonnet a fait au nom des élus du littoral, mais ceux-ci ne sont pas les seuls à souhaiter développer notre flotte de commerce. Il y a là une opposition, que nous n'avez pas faite, entre les élus du littoral et ceux de l'intérieur. La question dont nous débattons n'est toutefois pas là.
Le Gouvernement, comme la majorité de l'Assemblée nationale et sans doute celle du Sénat, cherche à développer notre flotte de commerce par le meilleur moyen possible. M. Oudin affirme qu'il n'est pas possible d'accorder des subventions à concurrence de l'épargne attirée. Dans le système actuel, ce n'est pas de l'épargne qu'on attire.
M. Jacques Oudin. C'est quoi ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est de la dépense fiscale. En effet, la moitié au moins des sommes investies par les particuliers ou les entreprises dans ces fameuses parts de copropriété de navires de commerce sont exonérées d'impôts. Actuellement, pour un franc investi, un franc au moins est versé par l'Etat, c'est-à-dire par le contribuable.
Vous avez donc raison de souligner qu'il faut attirer de l'épargne mais la contrepartie est coûteuse et peu productive en termes d'emplois.
Le mot « rebutant » que j'ai employé s'appliquait non pas à la flotte de commerce, comme vous l'avez très bien compris, mais à votre souhait de pérenniser un système qui, me semble-t-il, n'atteint pas les objectifs en matière d'emplois et d'équité fiscale fixés par le Gouvernement.
Si vous songez à des aides budgétaires, veillez à ne pas être en contravention avec les directives européennes, avez-vous dit, monsieur le rapporteur général. Je peux vous promettre que, en l'occurrence, nous ne ferons pas l'erreur que le Gouvernement précédent a faite sur le textile. Comme nous avons l'intention de rester en fonctions quelque temps, nous ne souhaitons pas que ce type d'aventure se reproduise en ce qui concerne l'aide à la flotte de commerce. En effet, s'agissant du plan textile, la Commission de Bruxelles a cassé un dispositif qui, à l'évidence, était incompatible avec les dispositions communautaires.
Je retiens de l'intervention de M. Bonnet qu'il faut aller vite pour répondre à l'inquiétude exprimée sur le littoral, qui vit de la flotte et de la construction navale. Nous allons rapidement mettre au point un autre dispositif, qui s'inspirera de vos appels à la prudence et qui tiendra compte de votre souci, parfaitement légitime, d'éviter tout hiatus entre l'ancien système, très coûteux, et le nouveau, lequel, je l'espère, sera beaucoup plus économe des finances publiques.
Je prends note du souci, que vous partagez avec le Gouvernement, de défendre la flotte de commerce et de le faire en conformité avec le droit européen. J'espère que je pourrai vous donner des nouvelles rassurantes sur ce sujet d'ici à la fin de l'année.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-10 rectifié et I-141, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé.
Je rappelle que la commission a demandé la réserve des amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 8 et de l'article 9.

Article additionnel après l'article 9

M. le président. Par amendement n° I-155, M. Joyandet et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 83 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« ... - Les sommes engagées, à compter du 1er janvier 1998, pour l'achat de matériel informatique ou multimédia. La déduction ne peut excéder 25 % des sommes engagées et ne peut être supérieure à 5 000 francs par foyer fiscal. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...

Article additionnel avant l'article 10



M. le président.
Je suis saisi de trois amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont présentés par Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-78 rectifié vise à insérer, avant l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 231 bis N du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les salaires versés par les associations à but non lucratif sont exonérés de la taxe sur les salaires. »
« II. - Le 6 de l'article 200 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 6. - L'avantage mentionné au 1 de l'article 163 bis C est imposé au taux de 54 % ou, sur option du bénéficiaire, à l'impôt sur le revenu suivant les règles appliquées aux traitements et salaires. »
L'amendement n° I-85 rectifié tend à insérer, avant l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la première phrase de l'article 1679 A du code général des impôts, la somme : "28 000 F" est remplacée par la somme : "40 000 F" ;
« II. - A la fin de la première phrase du même article, les mots : "1er janvier 1996" sont remplacés par les mots : "1er janvier 1997" ;
« III. - Dans le d du 2° du I de l'article 31 du code général des impôts, le taux : "14 %" est remplacé par le taux : "10 %". »
Par amendement n° I-116, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 10, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 231 bis N du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les rémunérations des aides à domicile employées par les associations agréées au titre de l'article L. 129-1 du code du travail ou habilitées au titre de l'aide sociale ou conventionnées par un organisme de sécurité sociale sont exonérées de la taxe sur les salaires dans les mêmes conditions que celles prévues par le dernier alinéa de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale. »
« II. - Les pertes de recettes pour l'Etat résultant des dispositions précédentes sont compensées à due concurrence par une hausse des droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-78 rectifié.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement procède de l'une de nos préoccupations constantes depuis plusieurs années, celle de la situation fiscale des associations à but non lucratif.
En effet, nous avons souligné à de multiples reprises que cette situation méritait un examen attentif du fait de quelques effets pervers résultant des dispositions fiscales qui sont actuellement en vigueur dans notre pays.
Si les associations à but non lucratif sont exonérées de tout impôt au titre de l'imposition des sociétés, encore que certaines de leurs activités semblent aujourd'hui soumises à de telles dispositions, elles souffrent d'une situation complexe en ce qui concerne la taxe sur les salaires et son équivalent, la taxe sur la valeur ajoutée.
En effet, chacun sait, ici, que les entreprises sont habilitées, depuis la création et l'extension de la taxe sur la valeur ajoutée, à faite jouer l'option TVA et à se dispenser dès lors du règlement de la taxe sur les salaires.
Celle-ci est aujourd'hui essentiellement acquittée soit par les associations relevant de la loi de 1901, soit par les établissements publics administratifs, soit encore par certains employeurs de professions libérales qui n'ont pas fait jouer l'option TVA.
Pour autant, nul ne l'ignore, les associations connaissent, outre cet assujettissement à la taxe sur les salaires, une sorte de rémanence de TVA liée au fait qu'elles sont considérées, s'agissant de cet impôt, comme consommateurs finaux.
Il conviendrait de faire évoluer cette situation, afin de ne pas priver le mouvement associatif de possibilités de développement certaines.
Nous pensons, en particulier, qu'il est nécessaire, aujourd'hui, d'aider le mouvement associatif pour plusieurs raisons, la moindre n'étant pas le potentiel de création d'emploi qu'il recèle.
Cela est d'autant plus vrai dans un processus de mise en oeuvre du plan emploi-jeunes, dans lequel le secteur de l'économie sociale a un rôle décisif à jouer pour sortir en quelque sorte des dispositifs actuels, notamment des contrats emplois-solidarité, et pour être en mesure de développer ses interventions.
On ne peut oublier aussi que, dans bien des domaines, les emplois de l'économie sociale nécessitent aujourd'hui une nouvelle forme de technicité, en raison de l'évolution des modalités d'intervention des associations.
Cela est vrai, notamment, dans le domaine du tourisme, dont le développement doit s'accompagner d'une remise à niveau des qualifications et des conditions d'activité, mais aussi et surtout dans les domaines médico-sociaux et de l'action en direction de la jeunesse ou en faveur du développement de la pratique sportive.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous demande, mes chers collègues d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Terrade, pour présenter l'amendement n° I-85 rectifié.
Mme Odette Terrade. Cet amendement concerne, lui aussi, la taxe sur les salaires des associations relevant de la loi de 1901.
Son objectif fondamental est un peu le même. En l'occurrence, il s'agit de favoriser le développement des associations les plus petites. En effet, nous proposons de majorer le niveau de franchise de la taxe sur les salaires institué pour les associations comptant moins de trente salariés.
En l'état actuel des choses, les dispositions de l'article 1679 A du code général des impôts engendrent un coût relativement limité puisqu'il atteint, au total, 1,17 milliard de francs, malgré un relèvement récent du montant de la franchise.
Relever le niveau de la franchise de 28 000 francs à 40 000 francs aurait donc une incidence limitée, que l'on peut estimer dans le pire des cas à 400 millions ou 450 millions de francs, mais qui, en réalité, serait sans doute légèrement inférieure si on se réfère aux années passées.
Pour autant, une telle mesure, comme la mesure générale que nous avons précédemment évoquée, reviendrait à favoriser la création d'emplois dans le secteur de l'économie sociale qui, on le sait peut constituer un puissant vecteur de réduction du niveau du chômage et correspond, de surcroît, à une aspiration profonde de la jeunesse du pays.
En effet, nul n'ignore, ici, que l'action sociale sur le terrain, l'action humanitaire ou l'action internationale des associations à but non lucratif constituent quelques-uns des domaines où de nombreux jeunes de notre pays souhaitent devenir partie prenante.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Angels, pour présenter l'amendement n° I-116.
M. Bernard Angels. De très nombreux besoins sociaux et culturels restent aujourd'hui insatisfaits. Je pense, en particulier, à l'aide aux familles et aux personnes, aux activités sportives, aux activités culturelles ou de loisirs, à l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, etc. Les domaines concernés sont très nombreux et permettraient la création d'un très grand nombre d'emplois.
Cependant, faute de ressources suffisantes, nombre de nos compatriotes n'ont pas accès à ces services. Qui ne connaît, en tant que maire, des familles qui sont dans l'incapacité de mettre leurs enfants dans un club sportif, ou dans une association, faute de moyens financiers, en dépit des subventions que nous accordons aux associations. D'ailleurs, une étude de l'INSEE a montré que 66 % des ménages, soit les deux tiers, affirment ne pas avoir de budget pour recourir à des services de proximité. Il est donc nécessaire d'encourager et de structurer l'offre de tels services. C'est d'ailleurs l'un des objectifs du Gouvernement.
Toutefois, la taxe sur les salaires représente un coût pour ces associations. Il serait nécessaire de la supprimer progressivement.
Le recours à une association est un gage de professionnalisme et offre une sécurité à la famille qui va, par exemple, confier à une aide à domicile les soins qui doivent être donnés à une personne âgée. Cette disposition permettrait d'éviter que, par un souci d'économie excessif, certaines familles ne recourent à des associations non compétentes.
Dans cette optique, notre amendement tend à exonérer de la taxe sur les salaires les associations d'aide à domicile agréées au titre de l'article L. 129-1 du code du travail.
En effet, il s'agit d'un secteur particulièrement important à un double titre : d'une part, par les services qu'il procure aux familles et aux personnes âgées ; d'autre part, par les emplois qu'il crée ou est susceptible de créer dans les années à venir, compte tenu, notamment, de la pyramide des âges en Europe.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-78 rectifié, I-85 rectifié et I-116 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Nous le voyons bien que, rien que par le nom qu'elle porte, il est grand temps de regarder de plus près cette taxe, celle-ci a une longue histoire. Elle représente un produit non négligeable - j'ai presque lu dans votre esprit, monsieur le secrétaire d'Etat - et nous ne pouvons pas, à l'évidence, nous en passer.
Cela étant, autant que nous pourrons supprimer l'imposition des salaires aujourd'hui, nous ferons oeuvre utile. Monsieur le secrétaire d'Etat, cela m'amène à vous dire que nous attendons de votre part un rapport demandé par le Sénat et tendant à examiner les conséquences économiques de cette taxe.
Nous avons découvert - je parle sous le contrôle de mes collègues qui ont travaillé à mes côtés au sein du groupe « banque » dans le cadre duquel nous avons examiné la taxe sur les salaires - que le produit de cette taxe était issu pour partie d'organismes publics ou para-publics. Il ne faudrait pas que nous alimentions une sorte de pompe qui recyclerait des crédits publics. Cela justifie que l'on y regarde de plus près.
J'en viens aux amendements, car j'imagine que la présidence commence à s'impatienter. (Sourires.)
S'agissant de l'amendement n° I-78 rectifié, la commission des finances a considéré qu'il était difficile d'émettre un avis favorable pour trois raisons.
D'abord, l'article 1679 A du code général des impôts permet d'exonérer une partie des rémunérations qui sont versées par les associations à but non lucratif.
Ensuite, une exonération totale semble coûteuse pour les finances publiques. Peut-être pourrez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous préciser le montant qu'elle représente.
Enfin, il serait sans doute préférable d'attendre les résultats du rapport pour prendre la disposition appropriée. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° I-85 rectifié, la commission émet également un avis défavorable. Elle considère que le seuil a déjà été relevé ces dernières années, un pas important ayant été franchi en 1996. Aller plus loin aujourd'hui serait sans doute coûteux sur le plan budgétaire. A cette occasion, M. le secrétaire d'Etat pourrait également nous donner une estimation.
J'en viens à l'amendement n° I-116. Là encore, le rapport tant attendu pourrait nous éclairer sur la meilleure disposition à prendre. Je me tourne vers M. Angels pour lui suggérer, lorsqu'il aura entendu les explications du Gouvernement et si elles corroborent celles que je viens de donner, de retirer son amendement afin d'éviter que la commission des finances n'émette un avis défavorable alors que la question posée mérite intérêt.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le groupe communiste républicain et citoyen nous soumet, en fait, deux propositions distinctes. La première consiste à exonérer de la taxe sur les salaires les rémunérations versées par les associations à but non lucratif.
La seconde concerne, dans le même ordre d'idée, les emplois-jeunes.
Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de vous rappeler brièvement la situation actuelle. Les associations paient la taxe sur les salaires pour la simple raison qu'elles ne paient pas la TVA. En effet, lorsqu'il a été décidé d'exonérer de la TVA les associations à but non lucratif ainsi qu'un certain nombre d'autres organismes, l'assujettissement à la taxe sur les salaires a été décidé en contrepartie. Donc, supprimer complètement la taxe sur les salaires pour les associations à but non lucratif, comme Mme Beaudeau l'a réclamé avec vigueur, reviendrait à ouvrir une possibilité d'exonération très vaste, puisque c'est l'ensemble des associations à but non lucratif qui se trouveraient exonérées et de TVA et de taxe sur les salaires. D'une part, le risque de contagion serait important ; d'autre part, le coût de cette mesure, estimé à environ 3 milliards de francs, fait réfléchir, c'est le moins que l'on puisse dire !
De surcroît, à l'heure actuelle, ces associations ne paient pas la taxe sur les salaires au premier salarié. Un abattement annuel sur le montant de la taxe sur les salaires est prévu, qui est indexé sur la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. En pratique, l'an prochain, cet abattement sera de 28 840 francs, ce qui permettra d'exonérer, approximativement, les rémunérations versées à six salariés occupés à temps plein et rémunérés au SMIC. Vous voyez donc que, dans le dispositif actuel, ce n'est qu'à partir du septième salarié payé au SMIC à temps plein que les associations paient la taxe sur les salaires.
Mme Terrade propose de passer de six à trente salariés. La proposition serait coûteuse. Certes, je n'ai pas que des chiffres en tête, mais il me faut bien constater, madame le sénateur, qu'il s'agirait de 290 millions de francs. Mon sentiment est que, à partir du moment où les six premiers salariés sont exonérés, on couvre déjà, certes, non pas l'ensemble des associations sans but lucratif, qui font un travail remarquable sur le terrain, mais du moins un grand nombre d'entre elles. Je ne suis donc pas favorable à cet amendement, malgré l'intérêt qu'il présente.
M. Angels, lui, propose d'exonérer de la taxe sur les salaires les associations spécialisées dans l'aide à domicile. Mon argumentation sera à peu près la même que précédemment : les six premiers salariés à temps plein coûtent déjà 1 200 millions de francs à l'Etat ; il ne paraît pas possible d'aller plus loin.
Je conclurai sur une note plus constructive, madame Beaudeau, en ce qui concerne la mesure ponctuelle d'exonération que vous proposez en faveur des emplois-jeunes auxquels le Gouvernement et la majorité qui le soutient sont très attachés. Je peux vous annoncer, mais vous n'y êtes pas étrangère - la majorité plurielle, si je puis dire, a beaucoup insisté sur ce point, et à juste titre - que vous trouverez dans le prochain collectif budgétaire une proposition visant à exonérer de la taxe sur les salaires les rémunérations versées au titre des emplois-jeunes, exonération qui, vous le savez, concernera dans une large mesure les associations.
Vous aurez donc satisfaction, non pas dans le projet de loi de finances pour 1998, mais dans le prochain collectif budgétaire.
C'est la raison pour laquelle, me semble-t-il, vous donnant satisfaction sur le second point,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Mais pas sur le premier !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Certes ! Mais je ne puis accepter l'exonération de la taxe sur les salaires de l'ensemble des associations à but non lucratif. Je me permets donc de vous inviter à retirer votre amendement. A défaut, le Gouvernement y serait, à regret, défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-78 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-85 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° I-116 est-il maintenu, monsieur Angels ?
M. Bernard Angels. Je vais le retirer, mais non sans avoir remercié de sa réponse M. le secrétaire d'Etat et insisté sur le fait que cet amendement a un double objet. Il s'agit, tout d'abord, d'assurer une plus grande sécurité aux personnes recevant des soins à domicile, ensuite, de favoriser l'emploi, dans la mesure où les associations visées font appel à une large main d'oeuvre. On pourrait, en l'adoptant, non seulement favoriser l'emploi et donner un signe fort en direction de ces associations, mais également s'assurer que les personnes recevant des soins à domicile sont bien soignées.
M. le président. L'amendement n° I-116 est retiré.

Article 10



M. le président.
« Art. 10. - Au troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, la somme de "90 000 F" est remplacée par celle de "45 000 F". »
Sur l'article, la parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je souhaiterais pouvoir éclairer ou, en tout cas, informer le Sénat sur la portée de cet article 10, dans lequel on nous propose de réduire de 90 000 francs à 45 000 francs le plafond des dépenses retenu pour la réduction d'impôt accordée au titre des sommes versées pour l'emploi de salariés à domicile.
Chacun connaît l'histoire de cette réduction d'impôt. Il faut rappeler cependant que le législateur de 1994 était animé d'une triple ambition. Il s'agissait d'inciter un plus grand nombre de ménages à revenus moyens à entrer dans le dispositif, d'inciter les ménages qui bénéficiaient déjà du dispositif à employer une aide familiale pendant un plus grand nombre d'heures et enfin de faire reculer le travail au noir en assurant aux emplois familiaux une nouvelle reconnaissance sociale.
Quel a été le bilan de ce relèvement du plafond des dépenses ?
S'agissant de l'emploi, une récente étude du ministère de l'emploi et de la solidarité qui, sauf erreur de ma part, a d'ailleurs été publiée après que le Gouvernement eut pris sa décision sur les emplois à domicile - on ne peut donc pas lui reprocher d'en avoir méconnu les conclusions - met en évidence l'évolution des emplois familiaux constatée depuis 1995, sous la pression conjuguée de deux facteurs : l'augmentation du plafond de la réduction d'impôt de 13 000 francs à 45 000 francs, d'une part, qui a favorisé des emplois déclarés de plus longue durée pour la garde des enfants ou l'assistance aux personnes âgées, et le succès du chèque emploi-service, d'autre part.
Vous trouverez, mes chers collègues, à la page 84 du tome II du rapport général, un graphique très éclairant à cet égard. L'effet incitatif, en termes d'emploi, de la réduction d'impôt pour les emplois à domicile est donc parfaitement indéniable aux yeux de la commission des finances.
Je le disais, l'article 10 a pour objet de ramener à 45 000 francs le montant des dépenses pris en compte pour la réduction d'impôt. Le Gouvernement invoque à l'appui de cette mesure le fait que le relèvement du plafond de ces dépenses à 90 000 francs aurait, selon lui, abouti à favoriser les contribuables aisés.
Soyons, là encore, réalistes : pour recruter un employé, quel qu'il soit, encore faut-il avoir les moyens de le payer. On ne peut donc s'étonner de ce que les ménages qui emploient une personne à domicile aient des revenus suffisants pour la rémunérer et pour acquitter les charges afférentes. La commission des finances juge indispensable de rétablir le relèvement du plafond opéré en 1996 dans sa véritable motivation. Il s'agissait de traiter les ménages comme des employeurs potentiels, avec les avantages nouveaux liés à cette fonction.
Mes chers collègues, les choses sont simples : avons-nous, oui ou non, besoin de créer des emplois dans notre pays ? Avons-nous, oui ou non, besoin de maintenir des emplois dans notre pays ? Si nous en avons besoin, permettons à ceux qui en ont les moyens d'offrir des emplois salariés à ceux qui cherchent un travail et n'allons pas y chercher des motifs qui n'en sont pas. Après tout, il est peut être aussi bien que les revenus des ménages français d'un certain niveau puissent être consacrés à la création ou au maintien de l'emploi plutôt que soumis à des prélèvements supplémentaires destinés à subventionner des emplois publics !
Telle est l'opinion, somme toute modérée, de la commission des finances, opinion à laquelle je vous demanderai de souscrire en adoptant un amendement que je présenterai tout à l'heure.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 10 du présent projet de loi participe de l'approche critique menée par le Gouvernement sur le devenir de ce que l'on a appelé les « niches fiscales », qui sont répertoriées dans notre code général des impôts sous les articles 199 quater C à 200.
Nous avons souligné, dans le cadre de la discussion de l'article 2, relatif à l'impôt sur le revenu, qu'il nous apparaissait que la véritable réforme de l'impôt s'appréciait non pas uniquement par un regard particulier sur les réductions d'impôt, mais aussi par un examen de l'ensemble des dispositions correctrices de cet impôt.
Nous l'avons dit, la dépense fiscale globale représente 300 milliards de francs sur l'impôt sur le revenu et l'on ne peut se contenter de considérer les 30 milliards de francs imputables aux réductions d'impôt.
Cela étant posé, il nous faut examiner cet article 10, qui porte sur la réduction du montant de la réduction d'impôt pour emploi de personnel à domicile.
Dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances pour 1997, notre groupe avait - je tiens à le rappeler - fait insérer un article additionnel, devenu l'article 84 de la loi, qui prévoyait qu'il serait remis au Parlement un rapport sur les réductions d'impôt en vue, notamment, de mesurer leur impact réel et d'envisager leur transformation éventuelle en déductions sur revenus.
A ce titre, je ferai observer que ce rapport ne nous a pas été transmis, même s'il faut probablement imputer ce retard ou cet oubli à quelques événements survenus, de manière subreptice, ce printemps dernier, ce que d'aucuns ont appelé des « expérimentations hasardeuses » !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Et la continuité de l'Etat ?
M. Ivan Renar. Pour autant, s'agissant notamment de la transformation des actuelles réductions d'impôt en déductions sur revenus, je me permets de rappeler que cette formule fut utilisée à l'origine de la mise en oeuvre de telles dispositions. Mais je reconnais en la matière que le débat n'est pas tranché.
Permettez-moi de souligner ici que les réductions ont un taux proportionnel, qui peut atteindre ou dépasser 50 %, alors que le barème progressif de l'impôt est, lui, producteur d'un taux maximal moyen d'imposition estimé à 39 % environ. Le fait que certains appellent notre attention sur le taux marginal - aujourd'hui de 54 % - ne peut faire oublier cette vérité d'évidence.
J'observe enfin qu'un de nos collègues de la majorité sénatoriale propose, mais il est seul signataire, de procéder à cette évolution.
Pour autant, il nous semble quand même indispensable de revenir sur l'essentiel : la réduction d'impôt accordée au titre des emplois à domicile est incontestablement surdimensionnée !
Elle peut aller aujourd'hui jusqu'à 45 000 francs, montant qu'il convient de rapprocher, par exemple, de celui de la cotisation moyenne des contribuables effectivement imposés, inférieure à 20 000 francs.
Elle doit aussi être resituée dans son contexte. Ainsi, elle peut conduire à la non-imposition de contribuables aux ressources relativement élevées - il faut quand même avoir les moyens de dépenser 90 000 francs annuels pour engager du personnel de maison - et de mettre, en revanche, en situation de payer un impôt les salariés concernés.
Vous concevrez que cela est tout de même discutable.
Par ailleurs, elle est surdimensionnée par rapport au montant de la réduction accordée aux personnes optant pour les modes de garde collectifs, limitée à 3 750 francs.
Il est un autre argument que nous devons également combattre sur cette question des emplois familiaux. On nous a en effet présenté cette mesure comme un moyen de mettre un terme à l'exercice clandestin de certaines professions.
Posons la question : est-ce à la collectivité des contribuables de ce pays de payer le prix de la moralisation de pratiques d'emploi placées en dehors du droit ? Cela fait cher de la régularisation de situations professionnelles.
L'article 10 vise à reprofiler l'aide accordée aux employeurs de salariés à domicile. En tout état de cause, nous partageons les attendus de cet article et nous le voterons donc sans hésitation, s'il est maintenu en l'état, bien évidemment.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la proposition du Gouvernement me semble témoigner de l'esprit de doctrine. Comme cela a été montré, la mesure comportant la déduction fiscale, qu'il s'agit de réduire de moitié, s'est révélée vraiment efficace en nombre d'emplois. Or c'est tout à fait volontairement que le Gouvernement préfère des modalités de subvention, et donc la politique d'assistance, à des modalités d'incitation.
L'accent est mis sur des choses qui, me semble-t-il, sont de nature tout à fait différente : d'un côté, des emplois sont créés ou confortés au bénéfice de personnes non qualifiées de tous les âges, ce qui peut concerner, par exemple, des personnes exerçant des emplois à domicile après cinquante ans, à des âges où il est difficile de se resituer sur le marché du travail, d'un autre côté, il y a les quelque 8 milliards de francs que l'on se propose de dépenser en 1998 pour le dispositif des emplois-jeunes de Mme Aubry, dispositif sur le principe duquel je ne reviendrai pas mais qui ne s'adresse évidemment, par définition, qu'à une catégorie particulière de la population.
« L'utilisation des emplois familiaux par des personnes vivant dans une relative aisance est immoral, et il faut donc réduire cette déduction », nous dit-on. Ceux qui avancent ces arguments ne se rendent pas compte que, face à la déduction, figurent des emplois, et que la réduction de moitié de la déduction fiscale entraînera une diminution du nombre d'emplois. C'est ce que j'appelle « l'esprit de doctrine », esprit dont le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le secrétaire d'Etat, nous a fourni une illustration avec l'article 10, que, très opportunément, la commission des finances souhaite supprimer.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. La disposition introduite par l'article 10 a fait couler suffisamment d'encre et a été assez décriée à droite pour que j'en rappelle en quelques mots les fondements.
Tout d'abord, la réduction d'impôt pour emploi à domicile a été mise en place dans la loi de finances rectificative de 1991. Les socialistes en assument donc la paternité dans sa logique première, celle qui consistait à encourager le développement du travail à domicile et la lutte contre le travail au noir. Cette mesure, néanmoins - c'est très important - voyait sa portée plafonnée, puisque la réduction d'impôt était limitée à 12 500 francs.
La droite, en 1994, a porté ce plafond à 45 000 francs.
M. Philippe Marini. Pour créer des emplois !
M. Michel Sergent. De nombreux commentateurs, à cette époque, ont considéré que cet élargissement équivalait à une baisse du taux marginal le plus élevé du barème, et notre collègue Ivan Renar vient de le montrer. En effet, qui pouvait bénéficier à plein de cette mesure ? Ceux qui, par définition, payaient au moins 45 000 francs d'impôt.
M. Philippe Marini. C'étaient donc de mauvais emplois !
M. Michel Sergent. Rien qu'avec cette mesure, un couple marié avec deux enfants disposant d'un peu plus de 34 000 francs de revenus mensuels devenait non imposable !
M. Ivan Renar. Eh oui !
M. Michel Sergent. On voit bien, avec cet exemple, combien le dispositif a été dévoyé.
C'est non plus une incitation, contrairement à ce que certains prétendent, mais quasiment une évasion fiscale légale ! A tel qui affirmait que nous faisions preuve d'esprit de doctrine, je répondrai que, à cela, s'oppose une autre doctrine, qui revient à faire en sorte que les plus aisés paient peu d'impôt, voire n'en paient pas du tout. Est-ce là l'égalité ?
M. Philippe Marini. C'est la doctrine de l'assistance !
M. Michel Sergent. Pour l'imposition des revenus de 1996, 1 269 000 contribuables ont bénéficié de cet avantage. Parmi eux, seulement 69 000 ont réduit leur impôt d'un montant supérieur à 25 000 francs, qui est le montant du nouveau plafond proposé.
M. Philippe Marini. Cela ne fait pas beaucoup de monde !
M. Michel Sergent. Effectivement ! Cela touche 69 000 familles !
Seulement 5,5 % des contribuables utilisateurs du dispositif seront concernés par cette diminution du plafond.
M. Philippe Marini. Combien d'emplois ?
M. Michel Sergent. Que l'on ne vienne pas nous dire ici que ce sont les classes moyennes, d'autant que les statistiques montrent que le montant moyen déduit de l'impôt s'élevait à 6 000 francs. La très grande majorité des bénéficiaires emploient un salarié à domicile pour quelques heures par semaine. Ils ne sont donc pas visés par cette diposition.
Il était normal, quand on sait combien coûtait le dispositif - 7,6 milliards de francs - et à qui profitait le réhaussement du plafond décidé en 1995, de vouloir en revenir au dispositif initial instauré par le Gouvernement, en 1990, en faisant néanmoins passer la déduction fiscale de 12 500 francs à 22 500 francs.
Puisque ce débat s'est inutilement déplacé sur les classes moyennes, je voudrais mettre en parallèle le niveau de salaire touché par cette mesure - comme je l'ai déjà indiqué, il est de 34 000 francs - et la moyenne des salaires perçus en France.
En 1996, les salariés à temps plein ont gagné en moyenne 10 685 francs par mois. Le salaire médian est, quant à lui, nettement inférieur, puisqu'il ne dépasse pas 8 600 francs par mois. Pour un quart des salariés du privé, le salaire net n'est pas supérieur à 6 770 francs.
Qu'on arrête donc de faire des amalgames : cette disposition est parfaitement ciblée, et on comprendra aisément que le groupe socialiste l'approuve avec le plus grand intérêt.
M. le président. La parole est à M. de Gaulle.
M. Philippe de Gaulle. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je voterai dans le sens préconisé par M. le rapporteur général, en attendant une législation moderne sur les employés à domicile. Il s'agit en effet d'une profession normale, comme toutes les autres, et porteuse de beaucoup d'emplois. Nous ne sommes plus au temps où les employés à domicile n'avaient pas le droit de vote !
Personne ne réclame de cadeaux fiscaux. Nous demandons l'application pure et simple de la loi sur le travail, c'est-à-dire que tout salaire et charges sociales afférentes doivent être intégralement soustraits des revenus de l'employeur. Il est temps d'en venir enfin au droit commun.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je souhaite répondre aux diverses interventions, toutes argumentées, favorables pour certaines d'entre elles, défavorables pour certaines autres, à la proposition du Gouvernement.
Le principe n'est pas en cause en la matière. En effet, c'est en 1992 qu'a été institué un appui fiscal aux emplois à domicile de 50 % des dépenses engagées, ces dernières ne pouvant excéder 25 000 francs.
Je dirai respectueusement à M. de Gaulle qu'il n'y a pas d' a priori en ce qui concerne les emplois à domicile, qui sont tout aussi respectables que les emplois en entreprise ou en administration. Le principe, je le répète, n'est donc pas en cause.
Ce qui est en cause, c'est le fait, comme M. Renar l'a dit, que, depuis 1992, la mesure a été portée à un niveau clairement surdimensionné. M. Sergent a d'ailleurs fait en la matière une démonstration qui est à mon avis irréfutable.
Comme l'a dit M. le rapporteur général, nous voulons développer l'emploi. Il a avancé des chiffres parfaitement convaincants, montrant que cette mesure instituée en 1992 avait développé l'emploi. Mais de quel emploi s'agit-il ? Cet emploi a été pour l'essentiel, comme l'a expliqué de façon convaincante M. Sergent, de l'emploi à temps partiel, parce que peu de ménages français ont la capacité financière, quelles que soient les aides fiscales apportées, d'employer à plein temps une personne à son domicile.
Je pense très sincèrement qu'en portant la dépense maximale de 25 000 francs à 90 000 francs un gouvernement précédent avait, si je puis dire, pour employer un langage d'artilleur, « dépassé la cible ».
Le Gouvernement, en proposant de revenir non pas au niveau de 1992 mais à 45 000 francs, soit à mi-chemin entre le niveau de 1992 et celui qui a été établi ensuite, prend, me semble-t-il, une mesure qui n'aura pas de conséquences graves pour l'emploi. (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini. Qu'en savez-vous ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je vais essayer de vous l'expliquer !
Sur les 1 269 000 familles qui bénéficient de la réduction d'impôt, seulement 69 000, qui sont au demeurant parfaitement respectables, comme les autres familles, exploitent, si je puis dire, la totalité de cette possibilité de déduction fiscale.
M. Roland du Luart. Et le personnel gratuit du corps préfectoral ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Nous parlons non du corps préfectoral, mais des familles françaises, monsieur le sénateur !
Par conséquent, 5 % des familles sont effectivement touchées par la mesure proposée par le Gouvernement.
La proposition du Gouvernement vise à en revenir à un niveau correctement dimensionné, à mi-chemin entre la proposition initiale de 1992 et le niveau très élevé auquel la déduction fiscale avait été portée.
Ce faisant, le Gouvernement parvient à trouver une ressource financière dont je ne nie pas l'existence. Cette ressource entrera dans une politique familiale au sens large qui se caractérise par deux aspects : d'une part, l'orientation des efforts du Gouvernement vers les familles modestes et les familles de la classe moyenne ; et, d'autre part, le déficit de 2 milliards de francs du dispositif d'aide aux familles, dénommé en jargon technique « le régime famille ».
La mesure proposée épargne pour l'essentiel 95 % des familles imposables à l'impôt sur le revenu.
Pour répondre à M. Marini, je dirai qu'il ne s'agit pas, à mon avis, d'une mesure relevant de l'esprit de doctrine. Je me permettrai en revanche de lui indiquer que son insistance sur le taux marginal d'imposition auquel MM. Sergent et Renar ont fait allusion pourrait éventuellement être qualifiée de doctrinale ; mais je ne veux pas pousser trop loin en la matière.
Je pense que nous avons cherché de façon pragmatique à préserver l'essentiel des avantages fiscaux dont bénéficient les familles, en demandant, il est vrai, un effort fiscal à un petit nombre d'entre elles qui, plus que d'autres, ont la possibilité d'y consentir.
M. le président. Sur l'article 10, je suis saisie de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° I-12 est présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° I-156 est déposé par M. Vasselle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
L'amendement n° I-185 est présenté par MM. Badré, de Villepin, Egu et les membres du groupe de l'Union centriste.
Tous trois visent à supprimer l'article 10.
Par amendement n° I-59, M. Revet propose de rédiger ainsi l'article 10 :
« I. - Le II de l'article 156 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 12° Les sommes versées au titre d'un emploi d'un salarié à domicile travaillant, en France, à la résidence du contribuable sont retenues pour leur totalité. »
« II. - L'article 199 sexdecies du code général des impôts est abrogé.
« III. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la suppression de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 sexdecies. »
Par amendement n° I-25, M. About propose :
A. - De compléter l'article 10 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Après le troisième alinéa du 1° de l'article 199 sexdecies du code général des impôts, est inséré un alinéa nouveau ainsi rédigé :
« Toutefois, ce plafond est porté à 90 000 francs lorsque l'emploi en cause s'effectue au domicile d'une personne dont l'état de santé est tel qu'elle bénéficie de la prestation spécifique dépendance, de l'allocation compensatrice pour tierce personne, de l'allocation adulte handicapé, d'une pension d'invalidité, ou dont l'état de santé de l'enfant est tel qu'elle bénéficie d'une allocation d'éducation spéciale. »
B. - En conséquence, de faire précéder le début de cet article de la mention : « I ».
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-12.
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'amendement n° I-12 vise à la suppression de l'article 10 et nous donne encore une chance de convaincre le Gouvernement. Nous sommes d'ailleurs confiants en raison de la valeur des arguments que nous avons à développer, monsieur le secrétaire d'Etat !
Vous avez tout d'abord évoqué la question du temps partiel. Je crois que, si nous voulons que la croissance soit riche en emplois, nous n'avons pas à nous inquiéter. Au contraire, nous devons plutôt nous réjouir de ce que certains salariés choisissent le temps partiel, car cela peut convenir à l'organisation de la famille.
Mme Marie-Claude Beaudeau. L'important, c'est que cela soit le temps choisi !
M. Alain Lambert, rapporteur général. C'est effectivement du temps choisi, et c'est une bonne solution !
Vous avez évoqué, monsieur le secrétaire d'Etat, les 69 000 ménages qui exploitent, avez-vous dit, une possibilité fiscale. Mais ce sont ces 69 000 ménages qui offrent un emploi et, de nos jours, cela mérite d'être salué. Or, ces 69 000 emplois sont non pas menacés - ce serait excessif - mais mis en cause.
Comment, monsieur le secrétaire d'Etat, ne pas prendre en compte le fait que l'on impose un revenu qui est consacré à l'emploi puisque c'est bien de cela qu'il s'agit ? Lorsque vous payez un salaire, lorsque vous acquittez des charges, les sommes dépensées ne sont plus disponibles. Et pourtant elles sont éligibles à l'impôt sur le revenu. Il n'est donc pas illégitime, s'agissant d'une affectation aussi noble du revenu à l'emploi et aux charges sociales de bénéficier d'une réduction d'impôt.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quelle mesure, selon le Gouvernement, est politiquement et socialement correcte ? Pour moi, c'est, quand on en a les moyens, l'exigence d'offrir un emploi.
Je trouve dommageable que le Gouvernement de la France fasse tout pour empêcher les familles qui en ont précisément les moyens de faire ce qui représente aujourd'hui sans doute l'action la plus noble, c'est-à-dire offrir un emploi.
C'est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demande de soutenir massivement cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
M. le président. La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° I-156.
M. Philippe Marini. Notre amendement étant identique, il est clair que notre groupe souscrit entièrement à ce qui vient d'être excellemment dit par M. le rapporteur général. Nous sommes totalement solidaires de sa prise de position et de sa démarche.
M. le président. La parole est à M. Badré, pour défendre l'amendement n° I-185.
M. Denis Badré. Notre amendement, identique aux amendements n°s I-12 et I-156 vise également à supprimer l'article 10.
M. le rapporteur général, ainsi que nos collègues MM. Marini et de Gaulle ont très clairement rappelé. Tout l'intérêt de la réduction d'impôt pour emploi d'un salarié à domicile. Cette mesure a des conséquences certaines sur l'emploi. Elle a, en particulier, fait sensiblement reculer le travail au noir. Veillons, dans ce domaine, monsieur le secrétaire d'Etat, à ne pas perdre d'un coup le terrain que nous sommes en passe de regagner.
J'ajoute, en revenant sur l'intervention de M. Sergent et sur votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, que 45 000 francs c'est bien loin du coût d'un chômeur, qui est plutôt de l'ordre du double. Il faut aussi, dans ce domaine, savoir faire des comparaisons simples.
Je voudrais insister maintenant sur l'impact de cette mesure sur la politique de la famille.
Le groupe de l'Union centriste considère qu'il est urgent d'envoyer à nos familles un signe d'encouragement ou, au moins, si vous le permettez, un signe de moindre découragement. Comme je le disais jeudi, lors de la discussion générale, le problème n'est pas aujourd'hui d'opposer les familles qui ont peu de moyens à celles qui en ont un peu plus. Le problème est plutôt d'inciter le plus grand nombre possible de Françaises et de Français à faire le choix de la famille, quels que soient leurs revenus. C'est en tout cas l'option que la France avait retenue au lendemain de la guerre et je ne vois pas pourquoi elle serait remise en cause aujourd'hui.
Veillons, monsieur le secrétaire d'Etat, à ce que, dans notre pays, les familles ne se retrouvent pas dans une niche, fût-elle fiscale, qui se rétrécirait sans cesse. Elles s'y sentiraient bien mal à l'aise ! Elles méritent mieux que cela. Le soutien à leur apporter doit représenter, au contraire, une véritable priorité clairement affichée, eu égard à nos perspectives démographiques d'une part et, bien entendu, à nos préoccupations humanistes, d'autre part.
Souvenons-nous, monsieur le secrétaire d'Etat, que la famille demeure la meilleure manière, la plus simple et la plus forte de mettre au monde des enfants et de les éduquer. Dans nos société modernes, malheureusement - ou heureusement d'un autre point de vue - les solidarités familiales sont de plus en plus sollicitées, notamment entre les générations. Les générations qui travaillent doivent aujourd'hui veiller en même temps sur les plus jeunes et les plus âgés.
Les familles ont besoin des emplois familiaux. Oui, nous sommes clairement, monsieur le secrétaire d'Etat, dans un domaine où de vrais choix politiques s'imposent. C'est bien la nation - je réponds aussi à ce qui a été dit tout à l'heure par nos collègues de l'opposition - qui doit faire le choix de la famille. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) M. le président. L'amendement n° I-59 est-il soutenu ?...
L'amendement n° I-25 est-il soutenu ?...
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-12, I-156 et I-185 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. le rapporteur général, avec toute sa sincérité et sa conviction, affirme que nous nous attaquons à l'emploi. Je ne nie pas que, sur les 69 000 familles, certaines vont peut-être faire passer de plein temps à mi-temps leur employée de maison si les circonstances l'exigent.
J'espère, puique l'on parle d'emploi, que lorsque vous aurez l'occasion d'exposer les points sur lesquels vous allez faire des économies d'un total de 21,3 milliards de francs, vous aurez à coeur, au nom du principe de l'emploi que vous défendez avec tant de talent, de ne pas toucher aux emplois de fonctionnaires, parce que je considère que ces emplois n'appartiennent pas à une catégorie plus honteuse ni meilleure que celle des employés de maison. Mais nous aurons l'occasion d'en débattre.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Ce sont les contribuables qui paient les fonctionnaires !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. La mesure qui est proposée aboutit à une situation où, grosso modo, pour un salarié à plein temps employé par une famille, l'avantage fiscal est maintenant grosso modo équivalent à l'exonération de charges sociales qui a d'ailleurs été votée par l'ex-majorité pour les salariés peu qualifiés travaillant dans les entreprises.
Je pense donc qu'il n'existe pas de discrimination négative à l'égard des employés de maison, et j'estime que, avec la proposition du Gouvernement, puisqu'il s'agit fréquemment d'emplois peu qualifiés, l'exonération de charges publiques, si je puis dire, est à peu près la même, qu'il s'agisse d'un salarié non qualifié du secteur privé des entreprises ou d'un salarié employé par une famille. Si l'on ajoute les exonérations de charges sociales existant par ailleurs ou la fameuse AGED, l'allocation de garde d'enfant à domicile, dont le taux serait de 50 %, on constate, et je n'y vois pas personnellement de difficulté, que les emplois à domicile bénéficient d'un taux d'allégement des charges soit fiscales, soit sociales - cela revient au même, en fin de compte, puisque c'est la même personne qui paie - très sensiblement supérieur à celui qui est accordé au profit des salariés peu qualifiés des entreprises.
Je maintiens donc, monsieur le rapporteur général, messieurs Marini et Badré, que la mesure proposée est politiquement, socialement et économiquement correcte, et je confirme mon opposition à ces trois amendements.
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements n°s I-12, I-156 et I-185.
M. Michel Sergent. Je demande la parole contre ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Je confirme ce que nous avons dit tout à l'heure : nous sommes à cet égard complètement dans la ligne du Gouvernement. Aucun problème ne se pose entre nous.
M. Philippe Marini. Le contraire serait surprenant !
M. Michel Sergent. Monsieur Marini, ce n'est certainement pas surprenant, nous ne sommes, vous et moi, vraiment pas la même longueur d'onde !
M. Philippe Marini. Ce n'est pas surprenant, c'est bien ce que je dis !
M. Michel Sergent. En effet, 95 % des foyers fiscaux ayant bénéficié de cette réduction ne seront, de toute façon, pas concernés. Les 5 % restants continueront à déduire 22 500 francs d'impôts, ce qui n'est tout de même pas rien.
J'ai bien entendu la conviction, presque l'émotion suscitée par le maintien des emplois. Nous situant ici dans le domaine fiscal, dans une discussion de projet de loi de finances, il nous appartient bien de dire que ce qui est donné aujourd'hui aux familles les plus aisées est un véritable cadeau ; ne disons pas le contraire ! Certes, il s'agit non pas ici d'opposer les familles aisées à celles qui le sont un peu moins, mais bel et bien de se référer aux plus aisées qui bénéficient d'une réduction d'impôt, à l'heure actuelle, de 45 000 francs.
D'après notre collègue Denis Badré, cet avantage est un élément déterminant dans le choix des familles pour la garde des enfants. N'oublions pas, de surcroît, qu'une réduction d'impôt pour frais de garde des enfants de moins de six ans coûte 1 milliard de francs au budget de l'Etat et représente 25 % des 15 000 francs par enfant.
Concernant les économies réalisées en ce domaine, je préfère celles qui ont permis de quadrupler l'allocation de rentrée scolaire plutôt que celles qui ont privilégié 69 000 foyers fiscaux en France.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Je soutiendrai sans hésitation les amendements de suppression qui sont présentés, non pas parce que je suis hypnotisé par le sort des ressortissants des tranches supérieures de l'impôt, comme le Gouvernement le sous-entend trop souvent - c'est un argument qui a été beaucoup évoqué, monsieur le secrétaire d'Etat, et je crois qu'il faudrait cesser d'en user - mais parce que je constate - est-ce avec surprise ? je n'en suis pas sûr, monsieur le secrétaire d'Etat - que vous croyez encore à la pureté d'une relation mathématique entre une disposition fiscale et ses conséquences. Vous éliminez totalement le facteur psychologique.
Vous déclarez tranquillement, puisque les ordinateurs avancent les chiffres, que 69 000 familles seront concernées, pas 68 000, pas 70 000, mais 69 000 ! De même, c'est 5 %, c'est pas 4,9 %, pas 5,1 %, mais 5 % !
Vous êtes donc muré dans vos certitudes et vous éliminez totalement le facteur psychologique dans le comportement des Français face à l'impôt.
En tant que maire d'un arrondissement parisien, un des principaux problèmes que nous ayions à résoudre est celui des gardes d'enfants quand elles nécessitent des initiatives publiques, et je rencontre tous les jours des ménages qui se sont aujourd'hui organisés en fonction de la législation que vous êtes en train de démanteler. Nombre d'entre eux ne seront certes pas concernés par la mesure que vous proposez, mais ils croient qu'ils le seront, ils en sont persuadés. En tout état de cause, ils ne croient plus à la continuité des mesures prises par l'Etat.
Quand l'Etat change de comportement d'une année à l'autre, de façon incessante, les gens ne croient plus à l'Etat. C'est la raison pour laquelle je suis persuadé que vous allez ruiner dans une large mesure le bénéfice qui peut être tiré de cette disposition et pour la création d'emplois et aussi pour aider les familles à résoudre leurs problèmes de garde d'enfants. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix les amendements identiques n°s I-12, I-156 et I-185, repoussés par le Gouvernement.

(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 10 est supprimé.

Article 10 bis



M. le président.
« Art. 10 bis. - I. - Dans le cinquième alinéa du 3° de l'article 83 du code général des impôts, après la somme : "2 000 F", sont insérés les mots : "ou à 5 000 F pour les demandeurs d'emploi".
« II. - Au début du sixième alinéa du 3° du même article, les mots : "La somme de 2 000 F figurant au cinquième alinéa est révisée", sont remplacés par les mots : "Les sommes figurant au cinquième alinéa sont révisées".
« III. - Ce dispositif s'applique aux chômeurs de longue durée. »
Par amendement n° I-13, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose :
« I. - Dans le I de cet article, de remplacer les mots : "demandeurs d'emploi", par les mots : "personnes inscrites en tant que demandeurs d'emploidepuis plus d'un an" ;
« II. - De supprimer le III de cet article. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il s'agit d'un amendement rédactionnel ; il s'explique par son texte même.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Avis favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-13, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 10 bis, ainsi modifié.

(L'article 10 bis est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. GÉRARD LARCHER
vice-président

M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 1998.
Dans la discussion des articles de la première partie, nous en sommes parvenus à l'examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 8 et de l'article 9 dont la discussion avait été précédemment réservée.

Article additionnel après l'article 8
(précédemment réservé)



M. le président.
Je suis saisi de treize amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-1, M. Gouteyron, au nom de la commission des affaires culturelles, propose d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le troisième et le quatrième alinéas du 3° de l'article 83 du code général des impôts sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Les contribuables exerçant les professions mentionnées dans le tableau ci-dessous peuvent bénéficier d'une déduction supplémentaire pour frais professionnels dont le taux est indiqué audit tableau.



DÉSIGNATION

des professions

TAUX DE LA DÉDUCTION

supplémentaire

Artistes musiciens, choristes, chefs d'orchestre 20 %
Artistes dramatiques, lyriques, cinématographiques ou chorégraphiques 25 %
Journalistes, rédacteurs, photographes, critiques dramatiques et musicaux 30 %

« Pour l'imposition des revenus des années 1997, 1998, 1999 et 2000, cette déduction est respectivement limitée à 50 000 francs, 30 000 francs, 20 000 francs et 10 000 francs. Elle est supprimée à compter de l'imposition des revenus de l'année 2001.

« La déduction supplémentaire pour frais professionnels est calculée sur le montant global des rémunérations et des remboursements et allocations pour frais professionnels perçus par les intéressés, après application de la déduction forfaitaire prévue au deuxième alinéa. »
« II. - Dans le 1 quater de l'article 93 du code général des impôts, la troisième phrase du troisième alinéa est supprimée et le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Pour l'imposition des revenus des années 1997, 1998, 1999 et 2000, cette déduction supplémentaire est respectivement limitée à 50 000 francs, 30 000 francs, 20 000 francs et 10 000 francs. Elle est supprimée à compter de l'imposition des revenus de l'année 2001. »
Par amendement n° I-73, M. Renar, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les troisième et quatrième alinéas du 3° de l'article 83 du code général des impôts sont remplacés par les dispositions suivantes :
« Les contribuables exerçant les professions mentionnées dans le tableau ci-dessous peuvent bénéficier d'une déduction supplémentaire pour frais professionnels dont le taux est indiqué audit tableau.



DÉSIGNATION

des professions

TAUX DE LA DÉDUCTION

supplémentaire

Artistes musiciens, choristes, chefs d'orchestre 20 %
Artistes dramatiques, lyriques, cinématographiques ou chorégraphiques 25 %
Journalistes, rédacteurs, photographes, critiques dramatiques et musicaux 30 %

« La déduction supplémentaire pour frais professionnels est calculée sur le montant global des rémunérations et des remboursements et allocations pour frais professionnels perçus par les intéressés, après application de la déduction forfaitaire prévue au deuxième alinéa. »

« II. - Dans le 1 quater de l'article 93 du code général des impôts, la troisième phrase du troisième alinéa est supprimée et le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« A compter de l'imposition des revenus de l'année 1997, cette déduction supplémentaire est limitée à 50 000 francs. »
« III. - Le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-2, M. Gerbaud propose d'insérer après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions des articles 87, 88 et 91 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-72, Mme Beaudeau, MM. Loridant, Renar, Mme Luc, M. Ralite et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles 87, 88 et 91 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées. »
Par amendement n° I-31 rectifié, MM. Estier, Régnault, Mmes Bergé-Lavigne, Pourtaud, MM. Angels, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent, Courteau, Vezinhet et les membres du groupe socialiste et apparentés et MM. Baylet et Collin proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions des articles 87 et 88 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1997) sont abrogées. »
Par amendement n° I-3, M. Gerbaud propose d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A la fin du quatrième alinéa du 3° de l'article 83 et du quatrième alinéa du 1 quater de l'article 93 du code général des impôts, il est inséré une phrase ainsi rédigé :
« Les dispositions de cet alinéa ne s'appliquent pas aux journalistes. »
« II. - Les dispositions du II de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées.
« III. - Les dispositions de l'article 88 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées.
« IV. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-32, Mme Dusseau propose d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Les dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées au I et II pour ce qui concerne la référence au 1 quater de l'article 93, troisième alinéa du code général des impôts. »
Par amendement n° I-74, Mme Beaudeau, M. Loridant, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996) ne sont pas applicables à la profession suivante : "Voyageurs représentants placiers".
« II. - Le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-75, Mme Beaudeau, M. Loridant, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996) ne sont pas applicables à la profession suivante : " personnel navigant commercial des compagnies aériennes ".
« II. - Le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-76, Mme Beaudeau, M. Loridant, les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 novembre 1996) ne sont pas applicables à la profession suivante : "ouvriers du bâtiment de travaux publics".
« II. - Le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-77, Mme Beaudeau, M. Loridant, les membre du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Les dispositions de l'article 87 de la loi de finances pour 1997 (loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996) ne sont pas applicables à la profession suivante : " ouvriers mineurs ".
« II. - Le taux prévu à l'article 219 du code général des impôts est relevé à due concurrence. »
Par amendement n° I-144, MM. Cluzel, du Luart et Marini proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le quatrième alinéa du 3° de l'article 83 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« A titre exceptionnel, la limite mentionnée à l'alinéa précédent est maintenue à 50 000 francs pour l'imposition des revenus de 1997 des journalistes. »
Par amendement n° I-210, MM. Poncelet, Lambert et Blin, au nom de la commission des finances, proposent d'insérer, après l'article 8, un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 87 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) est ainsi modifié :
« I. - Dans le second alinéa du paragraphe I de cet article, les millésimes : 1997, 1998 et 1999 sont remplacés par les millésimes : 1998, 1999 et 2000.
« II. - A la fin du paragraphe II du même article, le millésime 2000 est remplacé par le millésime 2001. »
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Monsieur le président, je demande l'examen en priorité de l'amendement n° 210 de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. La priorité est ordonnée.
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour défendre l'amendement n° I-210.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Mes chers collègues, l'amendement que nous avons l'honneur de soumettre à votre appréciation, le rapporteur général, M. Alain Lambert, M. Maurice Blin et moi-même, a pour objet de différer d'un an l'entrée en vigueur du processus de dépérissement progressif des déductions forfaitaires supplémentaires dont bénéficient quelques dizaines de professions.
Comme vous le savez, la majorité de votre commission des finances a décidé, dans une démarche qui se veut cohérente avec les démarches passées, de maintenir le plan quinquennal, adopté l'an dernier, d'allégement du poids de l'impôt sur le revenu par une réduction échelonnée des taux du barème, dont la contrepartie résidait dans un élargissement de l'assiette de cet impôt sur le revenu par la suppression de certaines « niches » fiscales et par la disparition progressive des déductions forfaitaires supplémentaires.
Ce processus de démantèlement des déductions forfaitaires, qui a été institué par l'article 87 de la loi de finances pour 1997, a pris la forme d'une réduction progressive du plafonnement du montant de cette réduction, qui était fixé à 50 000 francs depuis 1979.
Le calendrier qui a été retenu pour la diminution du plafond, jusqu'à sa disparition en quatre ans, dans le cadre de ce qui s'appelle maintenant communément le plan quinquennal, était le suivant : pour les revenus de 1997, imposables en 1998 ; le plafond devrait être réduit à 30 000 francs contre 50 000 francs l'année précédente ; pour les revenus de 1998, imposables en 1999 à 20 000 francs contre 30 000 francs l'année antérieure ; pour les revenus de 1999, imposables en 2000 à 10 000 francs contre 20 000 francs l'année précédente. Pour les revenus de 2000, imposables en 2001 ; c'était la suppression de toutes les déductions forfaitaires.
Il s'agit donc de différer aux revenus de 1998, c'est-à-dire à l'imposition de 1999, le déclenchement du processus de démantèlement des déductions forfaitaires supplémentaires pour toutes les professions concernées. Ces déductions sont d'ailleurs différentes selon les catégories, puisqu'elles sont de 30 % pour les unes, et de 40 % pour d'autres.
Par conséquent, cet amendement embrasse l'ensemble des catégories qui pouvaient bénéficier de ces déductions supplémentaires.
L'amendement n° I-210 que nous vous proposons appelle deux remarques.
En premier lieu, il n'altère pas la logique de l'imposition retenue par la commission des finances en matière d'impôts sur le revenu : l'article 87 de la loi de finances pour 1997 subsiste, et le principe de la disparition programmée des déductions forfaitaires est donc maintenu. Seul l'échéancier du démantèlement progressif des déductions supplémentaires est modifié, bien évidemment à la marge.
Il s'agit de se donner le temps de la réflexion. C'est un argument qui a été avancé, si j'ai bien lu les débats de l'Assemblée nationale, lorsque celle-ci a adopté l'amendement qui fait obstacle aujourd'hui et sur lequel nous avons délibéré en commission des finances.
Il s'agit de se donner le temps de la réflexion, disais-je, pour appréhender toutes les conséquences de la suppression des déductions forfaitaires pour toutes les professions concernées. Certaines d'entre elles, du fait de cette suppression brutale de la déduction, éprouvent des difficultés à passer au régime des frais professionnels réels. C'était ma première remarque.
En second lieu, cet amendement procède d'une démarche générale et égalitaire, contrairement à d'autres, qui visent à atteindre un objectif identique au nôtre mais seulement pour des professions particulières. Il concerne toutes les professions qui bénéficient d'une déduction supplémentaire sans accorder de traitement privilégié aux seuls corps de métier qui occupent le devant de la scène ou qui nourrissent les médias.
Telles sont, mes chers collègues, les raisons qui motivent cet amendement que nous vous demandons de bien vouloir adopter.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. le président de la commission des finances a présenté avec clarté et avec une certaine solennité l'amendement qui donne un délai d'un an de réflexion et de concertation en ce qui concerne la suppression progressive des déductions forfaitaires supplémentaires pour frais professionnels.
Je voudrais rappeler brièvement à la Haute Assemblée quelle a été, sur ce point, la démarche du Gouvernement.
Dans le projet de budget initial que le Gouvernement a soumis à l'Assemblée nationale figurait une suspension de cette réduction des abattements, parce qu'une concertation lui paraissait nécessaire avant toute réduction de ces abattements.
Lors de la discussion devant l'Assemblée nationale, deux députés proches de la majorité sénatoriale ont émis une proposition qui a été suivie par la majorité de l'Assemblée nationale.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Par une très forte majorité !
M. Ivan Renar. A l'unanimité même !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. C'est exact !
L'Assemblée nationale a voté un amendement tendant à poursuivre la suppression progressive de ces frais professionnels forfaitaires.
Dès ce moment, le Gouvernement s'est attaché à ce que les membres de certaines professions, en particulier les journalistes, notamment les jeunes journalistes qui risquaient d'être pénalisés par cette mesure, puissent bénéficier d'un fonds de compensation, dont le principe avait été posé l'an dernier mais qui n'était pas doté.
Ainsi le Gouvernement a-t-il fait adopter par l'Assemblée nationale une provision de 100 millions de francs de façon que les journalistes qui ont les revenus les plus modestes ne soient pas pénalisés par cette mesure.
Ensuite, il est apparu que les professionnels étaient réticents à la mise en place de ce fonds de compensation.
M. le Premier ministre a reçu les représentants des organisations syndicales de journalistes qui ont exprimé leurs inquiétudes et il a été souhaité que soit adopté un dispositif transitoire pour que la concertation soit menée au cours de l'année 1998.
Après cet entretien entre M. le Premier ministre et les journalistes, certains sénateurs de la minorité sénatoriale - je pense à M. Estier et à Mme Beaudeau - se sont préoccupés de ce dossier.
Mais aujourd'hui, monsieur Poncelet, l'amendement que vous présentez avec M. le rapporteur général, M. Blin, au nom de la commission des finances, vise à instaurer un délai d'une année de réflexion pour mettre au point les dispositifs adéquats et éviter que certaines personnes ne soient lésées par une suppression trop brutale de certains avantages. J'ai le sentiment que cet amendement que vous proposez au nom d'une large majorité du Sénat va dans le sens des préoccupations que le Premier ministre a récemment exprimées.
Mais il convient de prendre le temps de poursuivre la concertation avec l'ensemble de la majorité. Donc, sur ce point, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Lesein, pour défendre l'amendement n° I-1.
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Je précise tout d'abord que, dès le 12 novembre, la commission des affaires culturelles a approuvé cet amendement à la très grande majorité de ses membres ; il n'y a eu en effet qu'une seule abstention.
L'Assemblée nationale a maintenu l'application, à partir de l'imposition des revenus de 1997, du dispositif de suppression progressive de la déduction forfaitaire supplémentaire pour frais professionnels.
La commission des affaires culturelles ne pouvait se désintéresser du problème qui en résulte pour les journalistes, les auteurs et les artistes.
Nous ne vous proposons pas, cependant, de revenir purement et simplement au texte initial du projet de loi de finances, et je voudrais insister sur les raisons pour lesquelles nous avons retenu le dispositif que nous vous soumettons.
En premier lieu, nous ne demandons le maintien provisoire du régime des déductions forfaitaires supplémentaires que pour certaines professions, douze en tout, parmi lesquelles les journalistes, les musiciens et les professions du spectacle, les auteurs.
Ce choix n'est pas uniquement dicté, vous vous en doutez bien, par référence aux secteurs de compétence de notre commission. Il correspond, à notre avis, aux catégories professionnelles pour lesquelles la suppression de ces déductions pose des problèmes particulièrement sérieux, et exigera des compensations négociées avec l'Etat.
Nous savons en effet que ce « privilège » constitue, pour les membres de ces professions, la contrepartie de revenus souvent très faibles et qu'il équivaut, lorsqu'ils sont salariés, à une aide indirecte à leurs employeurs. Il est aussi justifié par les frais professionnels très importants qu'ils supportent. On ne sait pas assez, par exemple, que les artistes musiciens, même s'ils font partie d'un orchestre, doivent acheter et entretenir leurs instruments.
On nous dit, bien sûr, que ces catégories pourront, comme les autres professions concernées, recourir au régime des frais réels. En théorie, c'est vrai. En pratique, il en va autrement, car les modalités d'application de ce régime sont très mal adaptées à la nature et à la diversité de frais qui ne sont pas toujours faciles à évaluer et dont la déduction n'est pas toujours acceptée, quand on peut en discuter !
Comment calcule-t-on l'amortissement d'un violon, par exemple ? Comment seront pris en compte des cours de chant ou de danse ? Comment apprécie-t-on le « coût de production » d'une oeuvre littéraire ou musicale ? Nous connaissons les problèmes auxquels ont été confrontés les artistes, les auteurs ou les journalistes qui ont essayé de passer « aux frais réels ».
En deuxième lieu, notre rédaction exprime à la fois le souci de surseoir à la réduction progressive du plafond de déduction et celui de maintenir le principe de cette réduction progressive.
La justification d'un sursis d'un an est évidente : la loi de finances pour 1997 avait prévu ce délai, et des concertations, des réflexions avaient été engagées. Elles ont été interrompues. Il faut leur laisser le temps de reprendre et d'aboutir.
Le maintien d'un calendrier dégressif se justifie aussi, parce qu'il ne faut pas retarder indéfiniment la suppression, souhaitable dans son principe, d'un régime que personne n'entend d'ailleurs perpétuer. Fixons donc un délai, c'est de bonne méthode, même si nous devions nous apercevoir l'année prochaine qu'il faut le prolonger !
Enfin, nous avons été sensibles au problème de constitutionnalité que pose la rédaction actuelle de l'article 83 du code général des impôts.
C'est en effet au législateur, compétent pour fixer l'assiette de l'impôt, qu'il revient de définir le champ d'application et le taux d'une déduction fiscale. Notre amendement, vous le constatez mes chers collègues, tient compte de cette exigence. Il faut donc la mentionner.
M. le président. La parole est à M. Renar, pour présenter l'amendement n° I-73.
M. Ivan Renar. La suppression des abattements accréditait, et accrédite toujours l'idée selon laquelle se trouveraient des privilégiés parmi ceux qui vivent de leur travail et de leur art.
La position du Gouvernement annoncée avant le débat à l'Assemblée nationale était raisonnable. Mais je dois dire que des sentiments de surprise et de mécontentement ont suivi le vote unanime de l'Assemblée nationale supprimant les abattements supplémentaires pour frais professionnels dont bénéficient certaines professions, en particulier de la vie culturelle et de la communication : surprise face à une décision inattendue, allant à l'encontre de promesses faites ; mécontentement face à une profonde méconnaissance des réalités de ces professions et à leur assimilation rapide, infondée, injuste, avec de prétendus privilèges.
Ces réalités, quelles sont-elles ? Nous avons déjà eu longuement l'occasion d'en débattre l'an passé à la même date. Je voudrais y revenir brièvement en m'appuyant sur l'exemple des musiciens et des journalistes, professions caractéristiques.
Tous les journalistes ne présentent pas le journal de 20 heures à la télévision et, chez les artistes, tous ne sont pas au firmament et au sommet de l'affiche.
Les artistes musiciens, tout d'abord, font partie de ces salariés obligés d'acheter leur propre outil de travail, c'est-à-dire leur instrument de musique, et de l'entretenir pour pouvoir exercer. Et ce n'est pas peu.
Sans tomber dans l'excès, et sans tenir compte de la spéculation importante touchant les instruments, il faut savoir qu'un « bon » instrument coûte au minimum 100 000 francs.
Il faut l'entretenir. Certains de ces instruments doivent être changés tous les trois ou quatre ans, en particulier les cuivres.
Il n'est pas rare, par ailleurs, que tel ou tel instrument précis, ayant telle ou telle sonorité, soit exigé pour telle ou telle oeuvre dans tel ou tel orchestre.
Le travail d'un musicien est aussi et surtout un travail personnel. C'est à ses propres frais qu'il doit bien souvent assumer sa propre formation continue. Pour travailler une oeuvre, il doit trouver un lieu de répétition ou insonoriser sa maison.
A-t-on vraiment conscience, en voyant ou en écoutant le produit fini, c'est-à-dire le concert ou le disque, de la somme d'efforts, créatifs mais aussi financiers, de chacun d'entre eux ?
L'abattement de 20 % n'est donc que juste compensation d'un salaire qui ne prend pas en compte ces éléments.
C'est donc aussi pour cette raison que les abattements constituent une aide, indirecte peut-être, mais une aide réelle, aux grands orchestres symphoniques de notre pays. Ils sont partie intégrante du financement de la culture.
Je parle en connaissance de cause, puisque j'ai l'honneur de présider l'Orchestre national de Lille, ainsi que la Conférence permanente des orchestres français. Supprimer les abattements, c'est, demain ou l'année prochaine, transférer le problème aux orchestres, qui se verraient réclamer par les musiciens soit le remboursement des instruments, soit des augmentations équivalentes de salaire. Je peux vous assurer que les orchestres n'en ont tout simplement pas les moyens.
Quant aux journalistes, les abattements ont été créés en 1934 et représentaient à l'origine une aide aux personnels les moins payés, à savoir les pigistes.
La finalité de cette mesure fiscale s'est modifiée ensuite pour devenir une aide indirecte à la presse, les abattements permettant aux entreprises de presse de ne pas avoir à faire face à des augmentations salariales qu'elles ne pouvaient assumer, en particulier au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Les abattements accordés aux journalistes sont donc à la fois une part du statut des journalistes et un élément déterminant du système d'aide à la presse.
La situation aurait-elle à ce point changé pour qu'il soit possible, sans dommage, de supprimer ce dispositif ? Parlons-en !
Le salaire brut mensuel de 12 000 francs cache une grande diversité de situations, selon les contrats, les lieux de travail... Piges, contrats à durée déterminée, précarité sont monnaie courante. Ajoutons les frais importants supportés par les seuls journalistes pour l'acquisition notamment d'ordinateurs, de téléphones mobiles, de télécopie.
Où est le privilège ? En revanche, la suppression de l'abattement fait perdre, comme vous le savez, un mois de salaire.
Quid de la situation des entreprises de presse ? Nous savons tous ici combien est difficile la conjoncture et quelles menaces pèsent sur la presse écrite en particulier, plus encore sur celle qui ne bénéficie que de peu de ressources publicitaires.
A l'heure où chacun réfléchit, en particulier ici, au Sénat, à la mise en oeuvre de nouvelles aides, à des solutions permettant à la presse écrite de sortir de la tourmente, allons-nous accepter une mesure qui aggraverait ces difficultés, alors que beaucoup semblent aujourd'hui reconnaître l'inefficacité d'un fonds de soutien ?
Nous voyons bien, mes chers collègues, à travers ces deux exemples, la portée de la décision que nous devons prendre. Il ne s'agit pas d'un débat sur une simple disposition fiscale dont on pourrait décider de reporter l'application afin que tout le monde s'y prépare. Le débat concerne le système de financement et porte sur les domaines culturels, de communication, économiques de première importance.
Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous vous demandons de voter cet amendement visant à rétablir, sans limite dans le temps, les abattements pour les professions citées dans ce tableau.
Telle est la différence entre notre proposition et les amendements n° I-210 de la commission des finances - sur lequel je donnerai mon opinion à l'occasion des explications de vote - et n° I-1 de la commission des affaires culturelles.
M. le président. L'amendement n° I-2 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Loridant, pour défendre l'amendement n° I-72.
M. Paul Loridant. Cet amendement vise à insister sur l'une des orientations les plus contestables arrêtée lors de la discussion de la première partie de la loi de finances pour 1997 et consistant à revenir sur deux dispositions de la réforme amorcée par le Gouvernement de M. Juppé, à savoir la suppression des abattements professionnels accordés à certaines professions et la réduction d'impôts sur les frais de scolarité des ménages ayant un enfant inscrit dans l'enseignement secondaire ou l'enseignement supérieur.
S'agissant de la question des abattements professionnels, il importe de souligner que ces dispositions n'ont souvent de folklorique que les apparences.
En effet, ce sont au total plus de 1 100 000 salariés du secteur privé qui bénéficient aujourd'hui de telles dispositions, c'est-à-dire pratiquement un sur dix.
Si à l'annexe IV du code général des impôts figure une liste, en son article 5, des mesures spécifiques à la situation fiscale de professions, telles que les polisseurs de pipes de Saint-Claude ou les ouvriers fabricants d'éponges métalliques du département de l'Ain, nous ne pouvons cependant oublier que des professions autrement plus connues du grand public bénéficient de mesures propres.
Chacun a en mémoire la grande émotion créée par cet article auprès des journalistes et photographes de presse, auprès des artistes musiciens - comme l'a rappelé Ivan Renar - auprès des auteurs compositeurs, auprès des ouvriers du bâtiment et des travaux publics ou encore des salariés exerçant la profession de voyageur représentant de commerce ou d'ouvrier mineur de fond.
Il serait rébarbatif de citer in extenso la liste des nombreuses professions concernées. Toutefois, cette situation appelle, à notre avis, plusieurs remarques.
La moindre n'est pas de comprendre que ces abattements correspondent à des conditions particulières d'exercice de telle ou telle activité professionnelle et qu'ils en constituent, si l'on peut dire, un élément de statut.
La remise de 10 % dont bénéficient les ouvriers du bâtiment sur chantier n'est pas superfétatoire quand on connaît, par exemple, les conditions particulière d'exercice de cette profession.
Chacun connaît les contraintes qu'entraîne, pour le salarié concerné, le fait de devoir travailler sur un chantier, parfois la nuit, je pense tout spécialement à la réalisation du Stade de France à Saint-Denis.
S'agissant de la presse, les données sont assez sensiblement proches, puisque l'information est un métier sans doute passionnant, mais qui n'est pas sans créer quelques contraintes en matière de disponibilité de ses salariés. On pourrait multiplier les exemples tirés de la fameuse liste de l'annexe IV.
J'en viens à la seconde raison fondamentale de notre position, à savoir la suppression des abattements professionnels, qui allait de pair l'an dernier avec la mise en oeuvre de la réforme de l'impôt sur le revenu.
Or, dès lors que cette réforme est interrompue - même si elle sera reprise avec d'autres modalités - il n'y a pas lieu de conserver ce qui, en quelque sorte, l'accompagnait.
Il est, enfin, une raison ultime de ne pas poursuivre dans la voie tracée l'an dernier, je veux parler du peu de rendement que l'on peut attendre de la suppression de ces abattements.
Le passage éventuel aux frais réels des professions concernées aurait en effet, entre autres conséquences, de reporter probablement une partie de la dépense fiscale aujourd'hui cantonnée dans le cadre des articles 83-3° et 93-1 du code général des impôts - et qui représente 2,4 milliards de francs de dépense fiscale - dans l'enveloppe imputable aux frais réels qui connaîtrait, dès lors, une progression sensible et finirait peut-être par annuler en grande partie les effets de la mesure.
En outre, il ne faut pas oublier que le passage aux frais réels constitue, tant pour l'administration que pour le contribuable, une charge nouvelle de gestion de chaque déclaration d'impôt.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
Monsieur le président, après avoir défendu cet amendement n° I-72, j'annonce que le groupe communiste républicain et citoyen retire les amendements n° I-74 relatif aux voyageurs représentants placiers, n° I-75 concernant le personnel navigant, n° I-76 portant sur les ouvriers du bâtiment et n° I-77 concernant les mineurs de fond.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Les amendements n°s I-74, I-75, I-76 et I-77 sont retirés.
La parole est à M. Estier, pour défendre l'amendement n° I-31 rectifié.
M. Claude Estier. Nous avions déposé cet amendement en réaction à la position prise par l'Assemblée nationale qui était - M. le secrétaire d'Etat l'a rappelé - contraire à la position initiale du Gouvernement.
En défendant cet amendement, je voulais expliquer que les abattements fiscaux dont bénéficient certaines catégories professionnelles ne sont pas des privilèges s'agissant, en particulier, des journalistes, des artistes, et je pense particulièrement aux musiciens.
Je souhaitais donc que l'on n'agisse pas dans la précipitation, mais que l'on prenne le temps de la réflexion.
Je me réjouis de constater que M. le président de la commission des finances a rejoint ce point de vue, et je fais volontiers mien le raisonnement qu'il a exposé voilà quelques instants. Je me réjouis également de ce que M. le secrétaire d'Etat au budget dans son intervention soit allé dans la même direction.
Dans la mesure où il me paraît souhaitable, mes chers collègues, que cette décision soit prise par la plus grande majorité, je suis prêt, au nom du groupe socialiste, à retirer l'amendement n° I-31 rectifié au profit de l'amendement n° I-210, à condition toutefois que la commission veuille bien accepter le sous-amendement que je dépose en l'instant et qui vise à compléter cet amendement par un paragraphe III ainsi rédigé :
« L'année 1998 sera mise à profit pour organiser une concertation entre les pouvoirs publics et les professions concernées afin de dégager une solution équitable et durable. »
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° I-211, présenté par M. Claude Estier, et tendant à compléter l'amendement n° I-210 par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - L'année 1998 sera mise à profit pour organiser une concertation entre les pouvoirs publics et les professions concernées afin de dégager une solution équitable et durable. »
L'amendement n° I-3 est-il soutenu ?...
L'amendement n° I-32 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Cluzel, pour présenter l'amendement n° I-144.
M. Jean Cluzel. Nous nous trouvons actuellement face à trois logiques : une logique fiscale, une logique sociale, une logique de bon sens et de justice.
La logique fiscale se fonde sur la nécessité de rendre à notre système sa cohérence en éliminant des avantages aujourd'hui injustifiés pour certains.
La logique sociale consiste à prendre en considération, pour certaines catégories, le fait que cet avantage est si ancien qu'il fait partie intégrante de la rémunération des uns et des coûts des autres.
Dans l'une et l'autre logique, on cherche cependant à compenser la perte de rémunération. En fait, on aboutit au même résultat. Dans un premier temps, on supprime l'abattement ; dans un second temps, on le compense, mais au risque d'une certaine surcharge de travail administratif et d'injustice.
Supprimer un abattement et le rétablir par un autre moyen est, d'une certaine façon, reconnaître qu'on avait tort de le supprimer. De cette volonté contradictoire résultent complications administratives ainsi qu'injustice.
Permettez-moi de souligner quelques chiffres. Sur 28 000 journalistes, 19 000 sont imposables. Dans le système prévu dans le projet de loi de finances pour 1997, on comptait 8 000 à 9 000 « perdants », si vous me passez ce terme, essentiellement des célibataires, étant donné la baisse du barème.
A l'heure actuelle, dès lors que l'on renonce à l'allégement du barème, le problème change de dimension. Il s'agit de compenser l'effet de la mesure non plus pour une minorité mais bien pour l'ensemble de la profession.
La perte globale à compenser pourrait donc atteindre les 100 millions de francs dont vous parliez tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'Etat, voire un peu plus. Ce ne sont donc plus 8 000 à 9 000 dossiers qu'il faudrait traiter, mais presque 20 000, monsieur Estier. Ce ne serait pas simple, a déclaré à l'instant M. le secrétaire d'Etat.
En rétablissant l'abattement de 30 %, plafonné à 50 000 francs, on s'inspirerait alors d'une troisième logique, à savoir celle du bon sens et de la justice. On éviterait ainsi bien des discussions, des contestations et des erreurs.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez indiqué tout à l'heure que nos collègues qui siègent à gauche de cet hémicycle avaient déposé un certain nombre d'amendements allant dans le sens de nos discussions actuelles et vers la solution à laquelle nous allons aboutir. Permettez-moi d'attirer votre attention sur le fait que d'autres sénateurs siégeant au centre et à droite de ce même hémicycle avaient fait les mêmes analyses et envisagé les mêmes conclusions.
Bien entendu, il n'est pas question de tirer la couverture à soi, il s'agit de faire état de ce débat qui a dépassé les clivages politiques et auquel le président de la commission des finances vient de donner une très heureuse conclusion.
Cette solution présenterait en outre l'avantage de contribuer à assurer la pérennité de l'abattement dont bénéficient actuellement les entreprises de presse pour le calcul de l'assiette des cotisations sociales. En effet, mes chers collègues, voilà encore un sujet dont il faudra que nous nous préoccupions car, si l'arrêté du 30 décembre 1996 a figé la situation jusqu'en l'an 2000, il est clair que, au-delà de cette date, l'avantage de cotisations dont bénéficient les entreprises de presse pourra éventuellement disparaître, alourdissant du même coup les charges sociales pesant sur elles. Le législateur devra se montrer très vigilant à cet égard.
En conclusion, je dirai que notre système fiscal est si complexe, héritier de si nombreuses modifications, que le changer partiellement risquerait de le modifier partialement.
L'amendement n° I-210 de la commission des finances s'inscrivant dans cette logique, il me semble que mes collègues MM. Marini et du Luart seront d'accord avec moi pour retirer l'amendement n° I-144, au bénéfice de celui de la commission assorti du sous-amendement n° I-211 de M. Estier, auquel, personnellement, je me déclare favorable.
M. Roland du Luart. Nous sommes solidaires de votre démarche, mon cher collègue.
M. Philippe Marini. Totalement !
M. le président. L'amendement n° I-144 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° I-211 ?
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. On peut s'interroger sur le caractère normatif de ce sous-amendement, mais il vient confirmer la démarche de la commission des finances, qui souhaite que, dans un délai très court - l'année 1998 - le Gouvernement prenne des dispositions pour que la mesure arrêtée en 1996 se trouve définitivement appliquée.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur le sous-amendement n° I-211, en souhaitant être suivi par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. J'ai écouté avec attention les motivations qui ont conduit MM. Lesein, Renar, Loridant, Estier et Cluzel à déposer leurs amendements respectifs.
En tout cas, je crois qu'il faut éviter de penser que le bon sens et la justice se trouvent au Sénat alors qu'à l'Assemblée nationale, par corollaire, ces qualités n'existeraient pas.
M. François Lesein. Nous sommes les meilleurs ! (Sourires.)
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Personne n'a voulu émettre un tel jugement, mais je crois qu'il serait bon d'examiner un instant le dossier au fond.
Sont concernées des professions parfaitement respectables. Certaines ont été citées : les journalistes, les VRP, les musiciens, les mineurs de fond, les ouvriers du bâtiment travaillant sur les chantiers. Ces professions sont certes honorables, mais ce ne sont pas les seules.
Cet état de fait tient à des raisons historiques et, pour certaines d'entre elles, archaïques, qui intéressaient non pas directement ces professions mais les employeurs. Toute une histoire existe derrière ces abattements exceptionnels !
Bien d'autres membres de professions qui me semblent également estimables ont la possibilité, dont ils usent, de recourir aux déductions des frais réels. Dans notre débat, nous devrons tenir compte du fait que ces abattements exceptionnels sont forfaitaires, en dehors de toute justification précise, profession par profession. Si les instruments de musique coûtent très cher, s'il faut les amortir, les entretenir - et je respecte tout à fait le point de vue qui a été développé par MM. Lesein et Renar - ils pourront être intégrés dans une logique de frais réels.
Pour ma part, je pense que ces abattements exceptionnels ont un côté un peu désuet et je ne voudrais pas que, parce qu'ils ont existé, ils soient maintenus de toute éternité. Il me semble que ni M. le président de la commission des finances, ni M. le rapporteur général, ni M. Blin n'ont envisagé de statuer au fond dès maintenant, et c'est une démarche que le Gouvernement peut comprendre.
Ils ont proposé que l'on se donne un an de réflexion et, dans son sous-amendement, M. Estier a suggéré que cette année soit mise à profit pour trouver un dispositif fiscal qui soit équitable.
En conclusion, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° I-210 et sur le sous-amendement n° I-211. Je ne dirai pas que j'y suis favorable car, ce faisant, ma position pourrait être interprétée comme un désaveu de l'Assemblée nationale, (Murmures sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) dont la position me semble digne de respect.
Chacun a le droit d'avoir une opinion, et cette question sera à nouveau soumise à l'Assemblée nationale.
En ce qui concerne les amendements n°s I-1, I-73 et I-72, le Gouvernement est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-1, I-73 et I-72 ?
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. L'amendement n° I-1 défendu par M. Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles, a été longuement examiné en commission des finances, et je rappellerai que M. Gouteyron nous a alertés à plusieurs reprises sur la nécessité d'apporter une modification à la disposition votée par l'Assemblée nationale. Aussi, je demanderai à M. Lesein de retirer son amendement au bénéfice de celui de la commission des finances, qui devrait lui donner satisfaction.
Monsieur le secrétaire d'Etat, sur le fond, nous sommes d'accord avec vous. Nous souhaitons également la disparition des déductions exceptionnelles. L'an dernier, la suppression de ces déductions était accompagnée d'un plan quinquennal de réduction de l'impôt sur le revenu. Un équilibre était donc garanti. Or, cette année, la réduction de l'impôt sur le revenu disparaît. Il reste donc à supprimer la mesure touchant les déductions supplémentaires. Au cours de l'année 1998, nous devrons réfléchir à la manière dont nous pourrons compenser la disparition des déductions supplémentaires et adopter une nouvelle procédure fiscale, car il est vrai que, dans certains cas, ces déductions supplémentaires ne se justifient pas.
En ce qui concerne l'amendement n° I-73, je dirai à M. Renar que nous avons pris en considération ses préoccupations. Je l'inviterai donc également à retirer son amendement au bénéfice de celui de la commission des finances.
Ma position sera la même à l'égard de l'amendement n° I-72 de Mme Beaudeau.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je tiens à bien préciser que je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée sur ce délai d'un an, qui sera mis à profit, comme l'a fort bien expliqué M. Estier, pour trouver une solution.
La liaison entre la réduction du barème de l'impôt sur le revenu et le problème évoqué par l'ensemble de ces amendements est un autre sujet.
Pendant un an, nous travaillerons à mettre au point un système fiscal plus moderne,...
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. C'est tout à fait cela !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... car le Gouvernement souhaite, comme vous, monsieur Poncelet, que le système actuel soit réformé.
M. le président. Je vais mettre aux voix le sous-amendement n° I-211.
M. Claude Estier. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. Je tiens à remercier le président de la commission des finances d'avoir accepté ce sous-amendement.
Je voudrais également remercier M. le secrétaire d'Etat, qui a, me semble-t-il, parfaitement compris le sens de notre proposition. Bien entendu, il ne s'agit nullement de prolonger ces abattements fiscaux ad vitam æternam. Il s'agit simplement de nous efforcer de trouver, au cours de l'année 1998, une solution équitable et durable, de manière à ne pas nous retrouver chaque année - car ce n'est pas la première fois que cela se produit - devant le même problème pour retenir, au dernier moment, une solution qui n'est pas, en soi, satisfaisante.
Avec le sous-amendement n° I-211 et l'amendement n° I-210, se dessine le cadre d'une concertation qui permettra, pendant l'année 1998, de régler le problème, profession par profession - car les situations sont différentes d'une profession à l'autre - et nous évitera d'être de nouveau confrontés au même problème dans un an.
Bien entendu, je retire l'amendement n° I-31 rectifié au profit de l'amendement n° I-210.
M. le président. L'amendement n° I-31 rectifié est retiré.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Tout le monde étant maintenant d'accord avec tout le monde,...
Mme Hélène Luc. Il n'en a pas toujours été ainsi !
M. Philippe Marini. ... je ne vais évidemment pas rompre cette unanimité si rare et qui ne peut naturellement que nous réjouir.
M. Jean Chérioux. Le sujet en vaut la peine !
M. Philippe Marini. Je m'apprête à voter le sous-amendement de M. Estier, qui prescrit une concertation.
Tout à l'heure, M. le secrétaire d'Etat me disait, sur un autre sujet, qu'un amendement prescrivant un rapport n'avait pas sa place dans une loi de finances. Je constate que, en revanche, un sous-amendement prescrivant une concertation peut, lui, y trouver éventuellement sa place.
M. Jean Chérioux. C'est encore plus étonnant !
M. Philippe Marini. Quoi qu'il en soit, ayant voté pour l'amendement prescrivant le rapport, je voterai aussi pour le sous-amendement prescrivant la concertation.
Cela dit, craignant que vous ne m'accusiez de persiflage...
M. Roland du Luart. Ce n'est pas votre genre ! (Sourires.)
M. Philippe Marini. ... si je poursuivais sur ce ton quelque peu ironique, je voudrais, plus sérieusement, insister sur le fait que la solution ainsi dégagée s'analyse comme un sursis à statuer. Nous maintenons pendant un an le statu quo. Cette position est cohérente de la part de la majorité sénatoriale dans la mesure où la réforme de l'impôt sur le revenu et de son barème, d'une part, et la suppression des différentes déductions professionnelles, d'autre part, représentent une approche globale elle-même cohérente, comme l'a opportunément rappelé le président Poncelet.
Nous verrons l'an prochain, monsieur le secrétaire d'Etat, ce qui sera proposé à l'issue de la concertation. Nous verrons ce qui se dégagera des contacts avec les divers milieux professionnels concernés, tous étant, naturellement, aussi respectables les uns que les autres.
Dans l'immédiat, nous pouvons sans doute nous réjouir de cette provisoire unanimité. (M. Christian de La Malène applaudit.)
M. Maurice Blin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Blin.
M. Maurice Blin. Tout a été dit, et excellemment, sur toutes les travées de notre assemblée. Je me félicite de la qualité des avis qui ont été exprimés. Ils me paraissent converger, fait rare que relevait justement tout à l'heure M. Marini. Ils me paraissent aussi souligner la pertinence de l'initiative prise par la commission des finances, initiative à laquelle j'ai naturellement apporté ma signature, après avoir consulté les présidents des autres groupes de la majorité sénatoriale.
J'insisterai sur trois points.
Je rappellerai tout d'abord que, l'an dernier, nous avions approuvé une disposition de cette sorte, mais, cela a été dit, dans un tout autre environnement. Il est bien évident que nous sommes aujourd'hui amenés à l'examiner sous un nouveau jour, ce qui explique le débat de ce soir.
Il est clair que, en demandant non pas l'abolition pure et simple de cette disposition, mais son report dans le temps, nous restons fidèles à une initiative qui avait été prise par le précédent gouvernement.
Par ailleurs, je crois que, entre deux thèses extrêmes, l'une consistant à se satisfaire du statu quo - par les temps qui courent, ce n'est jamais très bon - l'autre visant à l'abolition pure et simple de ce dispositif, le Sénat a tout à fait raison de choisir une voie moyenne, celle qui donne le temps d'examiner les effets probables d'une modification sensible du régime fiscal d'un certain nombre de catégories de citoyens.
Enfin, et je m'adresse particulièrement à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, cet après-midi, nous avons eu l'occasion, sur un tout autre sujet, d'évoquer la vertu de la consultation avant toute décision législative. Vous avez bien voulu, je crois, reconnaître que mon argument n'était pas sans force. Je pense que, là aussi, il est hautement nécessaire de consulter avant de légiférer. Nous nous épargnerons et vous vous épargnerez bien des inconvénients. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean Cluzel. Très bien !
M. Ivan Renar. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Si vous le permettez, monsieur le président, pour des raisons de logique, j'expliquerai notre vote sur l'amendement n° I-210 avant d'évoquer notre position sur le sous-amendement de M. Estier.
Monsieur le président de la commission des finances, nous voterons votre amendement,...
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. C'est bien !
M. Ivan Renar. ... en nous félicitant que vous acceptiez cette année ce que vous aviez refusé l'année dernière.
M. Jean-Jacques Hyest. Ce n'était pas le même contexte !
M. Ivan Renar. Je me félicite aussi de la résolution du groupe communiste républicain et citoyen sur ce problème des abattements.
M. Christian Poncelet, président de la commission des finances. Nous n'avons pas la même mémoire !
M. Ivan Renar. Bien entendu, si, comme je le souhaite, le Sénat vote cet amendement, le mien n'aura plus d'objet.
Nous considérons que la limitation à un an du rétablissement des abattements est un moindre mal, ou un mieux, c'est selon l'appréciation de chacun. Cela étant, il répare tout de même dans l'immédiat une injustice. Nous ne pouvons donc qu'y être favorables.
Cependant, rien n'est réglé au fond, et nous souhaitons que ce débat ne revienne plus chaque année, à chaque discussion budgétaire.
Le principe de l'abattement n'est peut-être pas le meilleur. Il peut en tout cas être discuté. Mais toute modification doit se faire dans la concertation avec tous les intéressés et, surtout, ne léser personne.
Au demeurant, les professionnels concernés ont des propositions très intéressantes à faire. C'est pourquoi j'approuve aussi le sous-amendement n° I-211, qui enrichit l'amendement de la commission des finances.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je voterai contre le sous-amendement de notre collègue M. Estier. D'abord, sa rédaction me paraît très imparfaite : il ne me semble pas très heureux d'écrire que l'on « mettra à profit l'année 1998 pour régler le problème ».
M. Ivan Renar. C'est vrai, le mot « profit » n'est pas bon ! (Rires.)
M. Claude Estier. Je peux changer le mot !
M. Jean-Philippe Lachenaud. Ce serait déjà une bonne chose !
Par ailleurs, donner pour instruction au Gouvernement de se concerter avec l'une des professions me paraît superfétatoire. La profession des journalistes se fait suffisamment entendre pour que la concertation ait eu lieu l'an dernier et cette année.
Non seulement c'est une injonction au Gouvernement mais j'ai cru comprendre, en outre, que le gouvernement de M. Jospin tirait gloire, en tous domaines, de pratiquer une concertation approfondie. Il est donc totalement superflu de lui rappeler qu'il doit se livrer à cette concertation.
S'agissant de l'amendement de la commission des finances, c'est un sursis : ce sera un sursis pour cette année, puis un sursis pour l'année prochaine, puis pour l'année suivante. N'avez-vous pas vous-même indiqué très clairement, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous étiez contre la réduction du barème de l'impôt sur le revenu ?
Or l'équilibre entre, d'une part, la réduction du barème et, d'autre part, la réduction d'un certain nombre d'abattements professionnels majorés était un élément essentiel du dispositif envisagé par le précédent gouvernement. Eh bien, cet équilibre-là, on ne le retrouvera ni demain ni après-demain. Pour employer une expression empruntée au rugby, il me semble que l'on « botte en touche », comme l'équipe de France aurait d'ailleurs dû mieux le faire samedi dernier !
Ainsi, la réforme est reportée à une époque totalement indéfinie, sans clarification vraisemblable dans un horizon visible.
C'est la raison pour laquelle je m'abstiendrai sur l'amendement de la commission des finances. (M. Jean Chérioux applaudit.)
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, je pensais que vous alliez appeler les amendements dans l'ordre initial, comme cela se fait habituellement.
M. le président. Mon cher collègue, c'est bien le sous-amendement n° I-211 qui doit maintenant être mis aux voix.
M. François Lesein, au nom de la commission des affaires culturelles. Mais, monsieur le président, vous auriez pu demander à chacun des auteurs des amendements qui font l'objet de la discussion commune s'il retirait ou maintenait son amendement.
Quoi qu'il en soit, m'étant longuement entretenu de ce problème avec M. le président de la commission des affaires culturelles - et celle-ci en a débattu dès le 12 novembre - je puis indiquer qu'il se rangera à la décision que j'ai prise de me rallier à l'amendement n° I-210, assorti du sous-amendement n° I-211 de M. Estier.
Par conséquent, je retire l'amendement n° I-1.
M. le président. L'amendement n° I-1 est retiré.
M. Roland du Luart. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. du Luart.
M. Roland du Luart. MM. Cluzel, Marini et moi-même avons déposé l'amendement n° I-144 relatif à la presse, compte tenu de ce que nous considérions comme une mauvaise délibération de l'Assemblée nationale et de l'erreur qui consiste, selon nous, pour le Gouvernement, à revenir sur la réduction du barème de l'impôt sur le revenu.
Depuis, le président de la commission des finances et le rapporteur général ont décidé de présenter un amendement consensuel. Je me rallie à cette proposition, comme l'a déjà fait M. Cluzel.
Le groupe des Républicains et Indépendants votera l'amendement de la commission des finances, étant entendu que M. le secrétaire d'Etat s'est engagé à faire en sorte que les choses bougent. J'espère que sa parole sera entendue. J'ai, en effet, le souvenir que, à une heure très avancée de la nuit, voilà quelques années, fut votée ici une loi très consensuelle sur l'eau, Mme Bouchardeau, ministre de l'environnement étant au banc du Gouvernement.
M. Emmanuel Hamel. Une femme remarquable et un grand ministre !
M. Roland du Luart. Or cette loi n'est toujours pas applicable. D'année en année, on trouve un moyen pour « botter en touche » et reporter à l'année suivante.
J'ose espérer que, en ce qui concerne la fiscalité des Français, le Gouvernement saura trouver des propositions honnêtes, constructives, dans l'intérêt de tous, et dès l'année prochaine.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix le sous-amendement n° I-211, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, l'amendement n° I-210, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des finances.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 19:

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 313


(Applaudissements.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 8, et les amendements n° I-73 et I-72 n'ont plus d'objet.
M. Ivan Renar. Dans La vie des spectacles, les critiques seront bonnes demain !
M. Roland du Luart. C'est un moment historique !

Article 9 (précédemment réservé)



M. le président.
« Art. 9. - Les dispositions de l'article 91 de la loi de finances pour 1997 (n° 96-1181 du 30 décembre 1996) sont abrogées. »
Sur cet article, la parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'article 9 a trait au rétablissement de la réduction d'impôt au titre des frais de scolarité.
A l'occasion de la discussion de cet article, nous voulons réaffirmer notre souci d'apporter une aide aux familles, notamment pour leur permettre de faire face au coût de la scolarité de leurs enfants. C'est l'occasion aussi pour nous de revenir sur la position de fond adoptée par la commission des finances et la majorité sénatoriale qui étaient, jusqu'à ce jour, favorables à la suppression de cette réduction d'impôt pour frais de scolarité dans l'enseignement du second degré et dans l'enseignement supérieur.
Or, cette même majorité sénatoriale se pique d'être le meilleur défenseur de la famille. Vous nous permettrez, mes chers collègues, d'apprécier la contradiction !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Qu'en termes modérés ces choses-là sont dites !
M. Paul Loridant. S'agissant de la réduction pour frais de scolarité, dont le coût est limité puisqu'il n'est que de 2,7 milliards de francs pour un nombre d'enfants scolarisés estimé à plus de 4 500 000, vous nous permettrez de considérer, aux côtés du Gouvernement, qu'elle est un élément important de la politique familiale.
Pour mémoire, je dirai que la majoration de l'allocation de rentrée scolaire représente, de son côté, une dépense supplémentaire de 3,5 milliards de francs environ. Ces mesures, ajoutées les unes aux autres, donnent une autre image de la réalité que celle que la majorité sénatoriale veut bien véhiculer.
Cette mesure favorable aux familles n'est pas superfétatoire, et sa suppression illustre les contradictions d'une majorité sénatoriale capable de rejeter le lendemain ce qu'elle a défendu avec force et conviction la veille.
C'est pourquoi nous ne nous associerons pas à la suppression de l'article 9, et nous appelons la majorité du Sénat, dans un souci de cohérence avec elle-même, à faire de même.
M. Michel Caldaguès. Merci, monsieur le professeur !
M. le président. Sur l'article 9, je suis saisi de deux amendements identiques.
Le premier, n° I-11, est présenté par M. Lambert, au nom de la commission des finances.
Le second, n° I-154, est déposé par M. Vasselle et les membres du groupe du Rassemblement pour la République.
Tous deux tendent à supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-11.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mes chers collègues, lors de l'examen de l'article 2, nous avons longuement et complètement expliqué les raisons qui conduisent la majorité sénatoriale à poursuivre la politique d'allégement de l'impôt sur le revenu. Or la réduction d'impôt pour frais de scolarité ayant été intégrée dans le barème que nous avons voté à l'article 2, il est logique que nous la supprimions ici.
M. Paul Loridant. Ce n'est pas clair !
M. le président. L'amendement n° I-154 est-il soutenu ?...
M. Paul Loridant. Son auteur n'ose pas le défendre !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-11 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est surpris par la proposition de M. le rapporteur général. Certains ont reproché, tout à l'heure, au Gouvernement son absence de générosité à l'égard des familles. En ce qui concerne la réduction d'impôts pour l'emploi d'un salarié à domicile, par exemple, il s'agissait de demander un effort à 70 000 familles environ. Je ne débattrai pas de ce chiffre avec M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. On verra bien !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Or voilà que vous nous proposez un prélèvement supplémentaire - on ne peut pas appeler cela autrement - qui pénaliserait environ 2 300 000 familles modestes et qui rapporterait 1 400 millions de francs.
Votre argumentation repose sur l'idée selon laquelle cette disposition fait partie de la réforme d'ensemble de l'impôt sur le revenu que vous proposez. J'ai déjà souligné que la diminution de l'impôt sur le revenu que vous suggérez était peu équitable. Vous êtes donc cohérent avec vous-même puisque la mesure que vous proposez à l'amendement n° I-11 est, à l'évidence, elle aussi, inéquitable.
En revanche, je ne comprends pas pourquoi vous souhaitez revenir sur la proposition du Gouvernement tendant à accorder une réduction d'impôt de 400 francs par enfant au collège, de 1 000 francs par enfant au lycée et de 1 200 francs par enfant dans l'enseignement supérieur. Cette proposition ayant pour objet de maintenir ces aides pour les familles qui supportent des frais de scolarité me paraissait parfaitement s'inscrire dans le dispositif de soutien à la majeure partie des familles de condition modeste ou moyenne que nous proposons.
J'avoue donc ne pas du tout comprendre, monsieur le rapporteur général, le sens de votre proposition.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je m'en expliquerai tout à l'heure.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne veux pas polémiquer. Dans le passé, des mesures, telles que le gel des allocations familiales, ont été prises. Je ne veux pas associer la mesure proposée par la commission à une politique qui n'est pas favorable aux familles les plus modestes. Je me bornerai à l'essentiel.
Vous proposez ce qui s'analyse comme un prélèvement supplémentaire pour 2 300 000 familles modestes ou moyennes. Je suis opposé à cet amendement et je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui connaissez bien les problèmes auxquels se heurtent les familles, de ne pas suivre M. le rapporteur général dans la voie certes cohérente mais, à mon avis, peu équitable qu'il suggère.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Mon intervention en cet instant peut paraître prématurée, puisque nombre de mes collègues pourraient légitimement s'exprimer maintenant.
Monsieur le secrétaire d'Etat, soyons clairs. Il s'agit non pas de polémique, mais d'opposition. Nous sommes en désaccord total sur cette question.
Mme Hélène Luc. Eh bien ça, c'est clair !
M. Alain Lambert, rapporteur général. J'en suis heureux, madame Luc, et vous me rassurez en le confirmant.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la réforme relative à l'allègement de l'impôt sur le revenu est une réforme que vous ne soutenez pas. C'est votre droit et je ne critique pas votre choix, mais permettez à la majorité sénatoriale d'être cohérente.
M. Alain Gournac. Un peu !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Dès lors que nous avons reconfiguré ce barème et intégré de nombreuses réductions existantes, il serait totalement démagogique de vouloir à la fois rétablir l'allégement de l'impôt sur le revenu et d'y ajouter les réductions d'impôt pour frais de scolarité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, puisque nous sommes entre nous, nous pouvons parler franchement. Si nous avions été tentés par la démagogie, nous y aurions immédiatement succombé. En effet, nous aurions pu craindre que le rétablissement de l'allégement de l'impôt sur le revenu n'aille pas jusqu'à son terme ; en ce cas, nous ne courions aucun risque en votant la réduction de l'impôt pour frais de scolarité. Personne n'aurait décelé l'incohérence. L'honneur et la grandeur de la politique consistent à assumer totalement ses responsabilités. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
La politique d'allégement de l'impôt sur le revenu, mes chers collègues, est une nécessité absolue. La France est en concurrence avec d'autres pays. Si nous continuons à être le pays d'Europe le plus imposé...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les familles paient !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... demain, avec la monnaie unique, nous rencontrerons des difficultés sur le plan industriel. N'ayons pas peur de nos choix. Soyons-en fiers.
Mme Nelly Olin. Surtout lorsqu'il s'agit des allocations familiales et de l'AGED.
M. Alain Lambert, rapporteur général. La décision de réduire l'impôt sur le revenu est heureuse. Notre proposition s'inscrit pleinement dans cette logique. Monsieur le secrétaire d'Etat, si votre gouvernement peut éviter de porter atteinte au droit des familles...
M. Alain Gournac. Oui !
M. Alain Lambert, rapporteur général. ... je vous assure que vous aurez rendu service à notre pays. En tout cas, s'agissant de la politique de la famille, la majorité sénatoriale n'a aucune leçon à recevoir. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-11.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Je ne comprends pas très bien l'explication de M. le rapporteur général, sauf à se placer uniquement sur le plan de la réduction d'impôt. Il revient aujourd'hui sur une mesure qui, l'an dernier, avait provoqué une réelle émotion, puisque 2 300 000 de contribuables bénéficiaient de cette réduction d'impôt pour frais de scolarité. Elle constitue une aide aux familles et va dans le même sens que la très forte majoration, décidée cet été, de l'allocation de rentrée scolaire, qui est passée de 420 francs à 1 600 francs.
Nous ne parlons probablement pas des mêmes familles. Nous, nous songeons aux 2 300 000 de familles qui ont les revenus les plus faibles, celles qui sont aidées par l'allocation de rentrée scolaire.
Nous ne voulons pas les opposer aux 70 000 familles qui disposent des revenus les plus élevés. Il n'en demeure pas moins que la majorité sénatoriale a choisi quelles familles elle voulait aider, et que nous, ici, à gauche, nous savons quelles familles nous voulons privilégier, celles qui sont les moins aisées, celles qui sont le plus dans le besoin...
Mme Nelly Olin. C'est scandaleux !
M. Michel Sergent. ... et qui ont besoin de ces allocations et de ces réductions d'impôt pour permettre à leurs enfants de poursuivre leur scolarité.
Il s'agit d'une mesure sociale, d'un encouragement donné aux familles. Il est d'ailleurs curieux que les associations familiales, ou du moins certaines d'entre elles, ne fassent guère mention par exemple de l'allocation renforcée de rentrée scolaire. Là aussi, certains doivent avoir des réactions un peu sélectives. Mais, après tout, chacun a bien le droit de défendre qui il veut ! (M. Estier et Mme Luc applaudissent - Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Ce débat est particulièrement intéressant. Je mets d'un côté 60 000 familles, peut-être moins, qui bénéficiaient de l'AGED et de réductions d'impôts pour emploi du personnel à domicile et, d'un autre côté, 2 300 000 familles.
M. Alain Gournac. Mais non !
M. Emmanuel Hamel. Pourquoi les opposer ? Ce sont toutes des familles !
M. Paul Loridant. A partir de ce constat, mes chers collègues, toute une campagne de presse a été organisée pour expliquer que le Gouvernement et la gauche n'aimaient pas la famille.
Plusieurs sénateurs du RPR. C'est vrai ils ne l'aiment pas !
M. Paul Loridant. Eh bien, mes chers collègues, je vous appelle à beaucoup plus de modestie !
M. Jean Chérioux. Quelles familles défendez-vous ?
M. Paul Loridant. En effet, l'argumentation de M. le rapporteur général est la suivante : des réductions générales d'impôt ont été décidées...
M. Jean Chérioux. Elles bénéficient à toutes les familles !
M. Paul Loridant. ... et l'avantage s'en trouve donc dilué. Cependant, monsieur le rapporteur général, avez-vous examiné dans le détail qui bénéficie le plus de votre proposition ? Ce sont bien les familles les plus fortunées, celles qui ont le plus de moyens. (M. Hyest fait un signe de dénégation).
Oui, les familles que vous aimez, ce sont celles qui ont de l'argent ! (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Ben voyons !
M. Michel Caldaguès. Démagogie !
M. Alain Gournac. Voilà la conception de la famille !
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explications de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Certains propos sont tout à fait excessifs dans un tel débat. Nous avions l'impression, voilà un instant, de retrouver les accents de la lutte des classes...
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Jean Chérioux. Voilà le communisme ! Beaux résultats !
M. Philippe Marini. Je ne sais pas si M. Loridant s'est rendu compte du ton qu'il employait et du contenu de son propos.
M. Alain Gournac. Il ne s'en est absolument pas rendu compte !
M. Philippe Marini. De grâce, revenons à la réalité des choses !
M. Roland du Luart. Très bien !
M. Philippe Marini. Que vous ne partagiez pas les options de la majorité sénatoriale, mes chers collègues...
M. Claude Estier. C'est sûr !
M. Philippe Marini. ... qui siégez sur les travées d'en face, c'est votre droit, mais respectez au moins l'intégrité et la conviction avec lesquelles nous développons la politique qui reflète nos valeurs.
M. le rapporteur général a, très justement, fait remarquer que lorsque l'on emprunte un chemin, on doit être cohérent et accepter toutes les conséquences. Nous avons besoin de réveiller l'esprit d'initiative dans notre pays. Nous devons faire cesser l'hémorragie qui, quotidiennement, ampute notre matière grise et nos forces vives. Cela passe par une réforme de l'impôt sur le revenu, en l'occurrence celle que nous préconisons.
M. Alain Gournac. Absolument !
M. Philippe Marini. Des conséquences doivent être assumées, nous les assumons ! Notre langage n'est pas un langage de démagogie. Ce n'est peut-être pas un langage pour cet instant ou pour aujourd'hui. Cependant, je suis persuadé qu'en prenant date ici clairement sur nos valeurs et sur nos options, nous préparons utilement l'avenir et que, sans attendre trop longtemps, ce langage sera écouté et compris par l'opinion publique. (Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. Alain Gournac. Ah oui !
Mme Hélène Luc. Le scrutin public permettra à chacun de prendre ses responsabilités !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Dans ce débat important, qui oppose effectivement deux conceptions différentes, je ne veux pas élever le ton. Je crois que l'on peut échanger sereinement des arguments.
Avec la proposition qui est faite par la majorité sénatoriale, je constate une continuité que je vais simplement citer. En 1995, les prestations familiales ont été insuffisamment revalorisées, et l'Etat vient d'être condamné sur ce point.
M. Claude Estier. Bon rappel !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Toujours en 1995, il y a eu une mise sous condition de ressources des allocations prénatales et postnatales, ainsi que l'imposition des indemnités journalières de maternité. En 1996, les prestations familiales ont été gelées. En 1997, nous avons une juxtaposition de mesures, je ne fais pas de corrélation entre elles, laissant à chacun le soin d'en juger.
Vous avez proposé, par rapport à la proposition du Gouvernement, de majorer la réduction d'impôt pour emploi à domicile. Cette mesure touchait les 70 000 familles auxquelles le Gouvernement demandait effectivement un sacrifice. Parallèlement, au nom d'une cohérence que je ne mets pas en cause, vous revenez sur une réduction d'impôt pour les familles. Je n'oppose pas les familles les unes aux autres. Je dis simplement qu'il y a d'un côté 70 000 familles qui sont un peu plus aisées que la moyenne et, de l'autre, 2 300 000 familles qui auraient pu attendre ou qui, je l'espère, bénéficieront, grâce à la majorité qui soutient le Gouvernement, d'une réduction d'impôt de 400 francs, de 800 francs ou de 1 200 francs, selon que leur enfant est au collège, au lycée ou à l'université.
J'ajoute, enfin, s'agissant de votre souhait - je le respecte - de poursuivre la réduction du barème de l'impôt sur le revenu, que cette réduction, je l'ai démontré antérieurement, n'est pas proportionnelle mais apporte un avantage beaucoup plus important à ceux qui disposent des revenus les plus élevés.
M. Jean Chérioux. C'est logique, c'est la progressivité !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je comprends la cohérence de la proposition de la majorité sénatoriale. Je dis simplement que, en matière de politique familiale, nous ne prêtons pas attention aux mêmes familles. C'est un constat que je voulais faire.
Je respecte tout à fait le point de vue que M. le rapporteur général a exprimé, et qui est soutenu par la majorité sénatoriale. Je dis simplement qu'il y a deux politiques familiales : celle que propose le Gouvernement, avec le soutien de sa majorité, et celle que vous proposez. Je respecte, comme cela doit être le cas dans une démocratie digne de ce nom, vos propositions.
Je constate effectivement que sur ce point, qui est absolument décisif pour la vie quotidienne des français, et peut-être aussi pour l'avenir de notre pays, deux conceptions radicalement différentes s'opposent. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Philippe Marini. Nous sommes contre l'assistanat !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je me suis attaché, depuis le début de la discussion budgétaire, à laisser le dernier mot au Gouvernement. En l'occurrence, je ne le ferai pas car je crois...
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je peux encore parler après vous !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, nous pourrions le faire toute la nuit !
Il faut, en toute chose, raison garder. Vous nous invitez à ne pas élever le ton, mais la passion peut parfois porter les convictions.
Monsieur le secrétaire d'Etat, alors que vous osez prélever 80 milliards de francs de plus sur les contribuables, vous prétendez que les familles seront mieux traitées. Vous ne le ferez jamais croire aux contribuables français.
M. Alain Gournac. C'est de la provocation !
M. Alain Lambert, rapporteur général. La réduction de l'impôt sur le revenu était contestable au seul motif que le montant de l'allégement pourrait éventuellement être consacré à la réduction du déficit budgétaire. Cela aurait pu être une solution.
Mais les Français, accablés d'impôts, ont besoin de reprendre espoir. Poursuivre ce qui leur a été promis, ce serait leur donner un encouragement. Nous l'avons dit, c'est très important pour la crédibilité. M. Caldaguès l'a rappelé cet après-midi : il est très important que la loi fiscale soit stable. L'impôt, en France, a mauvaise réputation parce qu'il est lourd.
M. Michel Sergent. Pas l'impôt direct !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Or, cette mauvaise réputation est aggravée par le fait qu'il est instable. Il est donc important pour le Sénat, qui, lui, est le plus constant dans ses convictions, de rester sur la ligne qu'il s'est fixée.
Monsieur le secrétaire d'Etat, n'opposons pas les familles entre elles. (M. Chérioux fait un signe d'assentiment.) Pour réussir, la France a besoin d'être unie et, au fond, vous êtes le Gouvernement de la France...
M. Philippe Marini. Hélas !
M. Alain Lambert, rapporteur général. Du point de vue politique, vous avez intérêt à ce que nous soyons une nation apaisée. Aussi, je vous en prie, ne soufflez pas sur les braises, n'essayez pas d'opposer les Français les uns aux autres, car ce n'est pas comme cela que notre pays réussira.
Il faut un juste équilibre entre toutes les catégories de contribuables. Les entreprises sont appelées largement à contribution. Les ménages y sont appelés très largement avec les impôts qui vont être prélevés cette année sur l'épargne...
M. Roland du Luart. Et sur les célibataires !
M. Alain Lambert, rapporteur général. N'essayez pas de diaboliser la majorité sénatoriale. Elle est sage et constante. Elle se fait une certaine idée de la France, qui mérite d'être respectée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Alain Gournac. C'est un autre discours !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je ne cherche pas à avoir le dernier mot et je respecte tout à fait M. le rapporteur général. Je n'entends pas poursuivre le débat. Toutefois, je veux, au-delà de toute polémique, apporter quelques précisions chiffrées.
En 1996, le gel des prestations familiales a représenté 7 milliards de francs. Les mesures de 1995 se sont élevées à 3,5 milliards de francs. Les indemnités journalières de maternité ont représenté 1,5 milliard de francs et les allocations prénatales et postnatales 1 milliard de francs ; les frais de scolarité, que nous évoquons aujourd'hui, se sont élevés à 1 milliard de francs.
Le total de ces dispositions représente, excusez-moi de citer ces chiffres mais nous sommes dans un débat budgétaire, 14,4 milliards de francs, qui sont prélevés sur toutes les familles, y compris celles qui sont modestes. Et je ne parle pas de l'augmentation de la TVA en 1995.
Je voulais simplement citer ces chiffres pour que les 80 milliards de francs que vous avez cités, monsieur le rapporteur général, n'induisent pas en erreur des observateurs inattentifs.
Dans le projet de budget de l'Etat qui vous est présenté, est prévu un prélèvement supplémentaire de 3 milliards de francs sur les ménages. Est également prévue une hausse des cotisations de la CSG, qui bénéficie à un grand nombre de ménages salariés et touche un peu les revenus de l'épargne.
M. Jean-Jacques Hyest. Et du travail des non-salariés !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Tout cela n'atteint pas la somme que vous avez indiquée.
Je ne cherche pas à polémiquer. Je ne veux pas opposer les familles les unes aux autres, car elles sont toutes estimables. Je dis simplement qu'il y a deux politiques familiales. C'est ce que vous avez souhaité développer. Je respecte votre point de vue. Ayez la courtoisie - vous l'avez d'ailleurs - de reconnaître que le Gouvernement développe une autre politique familiale, qui est tournée vers un plus grand nombre de familles.
M. Philippe Marini. Tournée vers l'union civile !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-11, repoussé par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 20:

Nombre de votants 318
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 217
Contre 98

En conséquence, l'article 9 est supprimé.
Mme Hélène Luc. Comme cela, tout le monde saura qui a voté pour les familles !
Mme Nelly Olin. On saura aussi qui a voté la diminution de l'AGED et des allocations familiales !

Articles additionnels avant l'article 11



M. le président.
Par amendement n° I-158, M. Gouteyron et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, avant l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le b ) du 4° de l'article 261 D du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Cette disposition s'applique également aux locaux répartis dans plusieurs immeubles faisant l'objet d'une opération d'aménagement au sens de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
L'amendement est-il soutenu ?...
Par amendement n° I-79, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le taux prévu à l'article 278 du code général des impôts est ramené à 19,5 %.
« II. - Les dispositions des articles 223 A à 223 U du code général des impôts sont abrogées. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. La fiscalité de notre pays a profondément évolué depuis plusieurs années, mais elle a conservé une caractéristique originale qui appelle, de notre point de vue, un certain nombre d'observations.
La caractéristique de notre fiscalité réside dans la persistance d'un niveau élevé de prélèvements fiscaux fondés sur la consommation plus que sur les revenus des entreprises ou des ménages.
Notre système fiscal prévoit, en effet, y compris dans le présent projet de loi de finances, que l'essentiel des recettes fiscales de l'Etat soit assuré ou par la taxe sur la valeur ajoutée ou par les droits d'accises sur les produits pétroliers.
Nous avons donc un système fiscal en grande partie hérité de notre tradition historique - la taille et la gabelle de l'Ancien Régime - qui accorde encore aujourd'hui plus d'importance aux droits indirects qu'aux impôts directs.
Cette situation est d'ailleurs assez sensiblement différente de celle qui prévaut chez nos principaux partenaires européens, la part des impôts directs, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou des impôts dus par les sociétés, y étant plus importante.
Il est vrai que le périmètre d'intervention de l'Etat est plus important dans notre pays que dans certains autres pays de l'Union, mais cela ne doit pas nous autoriser à faire l'économie d'une réflexion plus complète sur le sujet qui nous préoccupe.
Nous devons aujourd'hui et sur le moyen terme tendre en effet à réduire la part des impôts indirects, prétendument neutres et invisibles, sinon indolores, et veiller à accroître la part des impôts directs.
L'amendement de notre groupe répond donc à cet objectif, et ce pour certaines raisons sur lesquelles je souhaite ici revenir.
Il est incontestable que la hausse du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée intervenue durant l'été 1995 a eu des conséquences importantes sur la croissance et a pesé, contrairement à ce que pensent ceux qui prêchent la neutralité de la TVA, sur la consommation populaire comme sur le niveau des investissements, singulièrement sur celui des collectivités locales.
Nous avions eu d'ailleurs l'occasion de relever, dans le cadre de la discussion de la loi de finances pour 1996, que la majorité sénatoriale qui avait, quelques mois plus tôt, majoré le taux de la TVA, s'était sentie obligée de proposer certaines mesures de réduction de ce taux sur un certain nombre de biens ou de services.
Cette contradiction demeure forte, puisque le présent projet de loi de finances est encore marqué par des propositions de baisse du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ; il n'y a pas, et personne ne s'en étonnera, de proposition de hausse.
Pour autant, on doit aussi prendre en compte le fait qu'une baisse du taux normal peut avoir, bien entendu, des conséquences sur le niveau des recettes fiscales nettes de l'Etat.
Sur cette question, on ne peut oublier que, si la hausse a également eu des incidences sur le taux d'inflation - elle a généré un petit « plus » en la matière, les entreprises tendant ainsi à restaurer leur marge - les recettes attendues n'ont pas été effectivement constatées.
Il est vrai que cela s'est appliqué dans un contexte où la croissance de notre économie était et reste assez étroitement dépendante du niveau de nos exportations, opérations par nature dispensées de taxe sur la valeur ajoutée.
Vous me permettrez d'ailleurs, en la matière, de souhaiter que cette situation perdure et que les prochaines dispositions européennes ne reviennent pas sur ce régime favorable aux exportateurs.
La baisse de la taxe sur la valeur ajoutée aurait donc une influence sur le niveau des recettes de l'Etat, mais nous escomptons bien qu'une relance de la consommation amortira, pour partie, les effets de la baisse du taux en termes de produit fiscal.
Cela ne nous empêche pas - c'est le sens du gage proposé - de poser le principe d'un rééquilibrage de notre fiscalité au travers de la suppression de dispositions qui ont conduit, dans les faits, à dénaturer l'impôt sur les sociétés et à créer une distorsion de traitement entre les entreprises assujetties.
Pour conclure, ultime motivation de cet amendement, réduire dans un premier temps à 19,5 % le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée reviendrait à rapprocher ce taux de la moyenne constatée dans les pays voisins et à marquer une première étape vers le retour au taux antérieur à 1995.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Le coût de la mesure est apparu élevé à la commission des finances, qui sera heureuse d'entendre l'estimation du Gouvernement. Par avance, je crois pouvoir indiquer que l'avis défavorable de la commission ne s'en trouvera que plus justifié !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Comme l'a expliqué avec beaucoup de pertinence Mme Beaudeau, il est important, à long terme, de rééquilibrer notre fiscalité. Effectivement, le poids de la fiscalité indirecte dans les ressources de l'Etat est excessif par rapport à ce que connaissent nos partenaires européens.
En outre, la hausse de deux points de la TVA intervenue en 1995 n'a fait qu'accentuer tant le déséquilibre externe par rapport à nos partenaires que le déséquilibre interne, parce qu'elle a pesé sur l'évolution de la consommation.
Malheureusement, le coût de cette mesure serait de l'ordre de 31 milliards de francs. Or nous n'avons pas actuellement les moyens, dans le projet de budget pour 1998, de supporter une telle perte de fiscalité. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, faute de quoi le Gouvernement inviterait la Haute Assemblée à le rejeter.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-79.
M. Michel Sergent. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Sergent.
M. Michel Sergent. Avec cet amendement, nous entamons le débat sur la TVA.
Au contraire des gouvernements précédents, qui allégeaient l'impôt direct et accroissaient l'impôt indirect, nous considérons qu'il est important de réduire les prélèvements indirects, notamment la TVA. Si, comme le faisait remarquer M. le rapporteur général, l'impôt est lourd en France, cela n'est pas dû à l'impôt direct, que la majorité souhaite pourtant encore abaisser.
Nous souhaitons réduire l'impôt indirect d'abord pour des raisons de justice fiscale. Ces prélèvements sont les plus injustes et ils touchent le plus fortement les familles et les personnes aux revenus modestes. Je rappelle le jugement de M. Ducamin dans son rapport sur les prélèvements : « Le poids du prélèvement indirect apparaît décroissant en fonction du revenu des ménages. Ce résultat est lié au phénomène connu selon lequel la propension à consommer tend à diminuer lorsque le revenu s'élève et à l'absence d'effet correcteur de la modulation des taux de prélèvement selon le degré de nécessité des produits, car ils sont appliqués à des structures de consommation peu différenciées. »
Il est également nécessaire d'abaisser la TVA pour des raisons économiques, puisqu'il s'agit d'un encouragement au pouvoir d'achat et à la consommation. N'oublions pas que l'augmentation de la TVA intervenue au cours de l'été 1995 a coûté plus de 100 milliards de francs et a eu de sérieuses répercussions sur la croissance. Nous savons bien aussi que, du fait de son coût financier que je situerais dans une fourchette comprise entre 28 milliards de francs et 30 milliards de francs par point, mais dont M. le secrétaire d'Etat vient de préciser qu'il serait de 31 milliards de francs par point, et compte tenu du risque d'une répercussion seulement partielle sur les prix à la consommation, il serait contre-productif d'avancer sur une baisse du taux normal de TVA dès cette année.
Le Gouvernement a donc avancé dans la voie d'une réduction de la TVA sur les produits de première nécessité, ce qui nous semble la sagesse et un gage d'efficacité. Il nous faut l'encourager à poursuivre et à obtenir un élargissement de la liste des produits pouvant être soumis au taux réduit.
Cette réduction de TVA devra donc être l'un des objectifs du Gouvernement dans la réforme fiscale qu'il engagera sur la législature.
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Au moment d'expliquer notre vote sur cet amendement, nous devons rappeler, après d'autres, que le précédent gouvernement avait porté le taux normal de la TVA de 18,6 % à 20,6 %.
Je voudrais rappeler également que, contrairement à ce qui a été dit par des membres de la majorité sénatoriale à l'occasion du vote d'un précédent amendement, la fiscalité directe en France est plutôt moins élevée que dans les autres pays de la Communauté. En tout cas, le poids des impôts directs est nettement plus faible que celui de la fiscalité indirecte. Par conséquent, s'il était une orientation que notre pays devrait prendre, monsieur le rapporteur général et chers collègues de la majorité, c'est bien celle qui consisterait à abaisser la fiscalité indirecte pour augmenter la fiscalité directe ; ce faisant, nous serions « euroconvergents ».
Cependant, telle n'est pas l'orientation de la majorité sénatoriale et, d'une façon générale, de l'opposition dans ce pays.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai cru comprendre que le coût de cet amendement vous semblait élevé. Honnêtement, nous le pensons aussi ! Mais nous voudrions que le Gouvernement dise franchement et ouvertement qu'il a l'intention, dans l'avenir, dès que les circonstances le permettront...
Mme Hélène Luc. Voilà !
M. Paul Loridant. ... - nous souhaitons que ce soit le plus vite possible - de réduire le taux de la TVA, pour rejoindre la moyenne des pays européens. Si possible, ce taux normal devra être suffisamment bas pour favoriser la relance de la consommation des salariés et des populations les plus modestes.
Tel est, monsieur le secrétaire d'Etat, le sens de notre amendement. Nous souhaitons donc que le Gouvernement persiste dans la voie qu'il a choisie et abaisse le taux normal de TVA. J'ai cru comprendre que telle était sa position.
Cela étant, compte tenu du coût d'une telle mesure et du fait que les membres du groupe communiste républicain et citoyen, eux aussi, savent compter, je retire cet amendement.
Mme Hélène Luc. Très bien, monsieur Loridant !
M. le président. L'amendement n° I-79 est retiré.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je souhaite simplement confirmer à Mme Beaudeau et à M. Loridant que l'intention du Gouvernement est bien de baisser le taux des prélèvements obligatoires dès que ce sera possible, en commençant par la fiscalité indirecte, c'est-à-dire par la TVA. Cela nous semble en effet équitable du point de vue social et bon du point de vue économique ; de surcroît, cela rapprocherait la France de ses principaux partenaires européens.
Mme Hélène Luc. Mais il faut insister !
M. Philippe Marini. C'était une promesse électorale !
M. le président. Par amendement n° I-82 rectifié, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Au premier alinéa de l'article 278 bis du code général des impôts, le taux : "5,5 %" est remplacé par le taux : "5 %".
« II. - Le taux prévu au 6° du paragraphe III bis de l'article 125 A est relevé à due concurrence. »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Cet amendement porte sur la question du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, dont nous souhaitons qu'il soit ramené de 5,5 % à 5 %, ainsi d'ailleurs que l'autorisent, en l'état actuel, les directives communautaires.
La conséquence financière de cet amendement est relativement limitée.
Rappelons en effet que les taux réduits et particuliers, c'est-à-dire ceux qui sont inférieurs, en vertu de dispositions législatives antérieures, au taux défini par les directives communautaires pour le taux réduit, ne constituent qu'une part tout à fait limitée du produit net de la taxe sur la valeur ajoutée.
En effet, à ce jour, 97 % du produit de la taxe résulte de l'application du taux normal, et le produit dépendant des produits précités représente un montant inférieur à 15 milliards de francs.
Notre amendement est donc d'une portée financière faible, représentant certes de 1 à 1,5 milliard de francs, mais il présente une portée plus politique sur laquelle je souhaite revenir.
Le taux réduit s'applique de manière générale aux produits dits « de première nécessité », encore que l'on puisse regretter, par exemple, que les prestations de télécommunications ou les abonnements au réseau électrique ne bénéficient pas de ce taux, alors qu'ils constituent aujourd'hui des éléments indispensables pour la vie des ménages.
Il s'applique notamment de manière uniforme, à une exception près, à l'ensemble des produits alimentaires dont il est établi qu'ils constituent des produits de première nécessité.
Pour autant, un examen attentif de la situation des autres pays de l'Union européenne appelle plusieurs remarques.
Ainsi, au Royaume-Uni, les produits alimentaires bénéficient d'une exonération totale de la taxe sur la valeur ajoutée. En Espagne ou en Italie, les taux pratiqués sont inférieurs au taux défini par les directives pour de nombreux produits.
Il nous semble donc que cette situation appelle de la part du gouvernement français une attention nouvelle, conduisant notamment à modifier la législation communautaire en matière de TVA pour alléger le montant de la taxe perçue sur ces produits dits « de première nécessité ».
Nous pensons en particulier que, plutôt que de suivre les termes actuels de la directive TVA qui recommande la mise en oeuvre de deux taux - un taux réduit de 5 % minimum et un taux normal d'au moins 15 % -, le Gouvernement pourrait envisager d'intervenir pour requalifier notre législation en matière de TVA en fonction de l'application des taux les plus favorables aux consommateurs et aux ménages.
Pourquoi ne pas modifier les directives communautaires pour exonérer les produits alimentaires ou la presse de tout versement de TVA ?
Tel est le sens de cet amendement, qui vise en fait à donner un signe sur cette question de la TVA à taux réduit et à permettre de réouvrir le débat sur le devenir de cet impôt. Nous regrettons en particulier, monsieur le secrétaire d'Etat, que, chaque fois que les parlementaires essaient de faire des propositions en ce sens, l'argument de l'euro-compatibilité leur soit systématiquement opposé.
M. Emmanuel Hamel. Hélas !
M. Paul Loridant. C'est pourquoi nous voudrions, à l'occasion de la discussion de cet amendement portant sur la TVA à taux réduit, inviter le Gouvernement à essayer de faire évoluer les directives communautaires et à abaisser le taux réduit de TVA.
C'est sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, que nous vous invitons à adopter l'amendement n° I-82 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Tout à l'heure, pour ne pas faire perdre de temps au Sénat, je n'ai pas voulu faire remarquer que, lorsque nous parlons de la TVA, nous n'évoquons pas le fait qu'il s'agit du seul impôt frappant les produits fabriqués à l'extérieur.
Je veux bien que, dans de belles envolées, nous souhaitions tous réduire le taux de la TVA. Mais cette dernière est un instrument fiscal nous permettant de frapper les produits fabriqués à l'extérieur et, ainsi, d'éviter que notre industrie ne soit mise en difficulté.
S'agissant de l'amendement n° I-82 rectifié, il est apparu coûteux à la commission des finances, et je souhaiterais donc que le Gouvernement nous en indique le montant.
Par ailleurs, le gage constitué par le relèvement du taux de prélèvement libératoire sur les obligations et les titres participatifs n'a pas semblé heureux à la commission des finances. C'est pourquoi celle-ci a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. M. Loridant a fait une proposition au Gouvernement et interrogé ce dernier, au nom de ses collègues du groupe communiste républicain et citoyen.
La proposition consiste à porter de 5,5 % à 5 % le taux réduit de TVA. Il s'agit là d'une mesure dont le coût est effectivement plus faible que celui de la proposition antérieure. Malheureusement, il n'est pas aussi faible que le montant indiqué par M. Loridant puisque ce coût est de 4,4 milliards de francs,...
M. Alain Gournac. Mauvais calcul !
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. ... ce qui n'est pas négligeable, même si cela n'est pas suffisant, à mon avis, pour rejeter cette proposition.
L'argument principal à l'encontre de cet amendement vient du risque de voir le sacrifice fiscal résultant de la diminution de 5,5 % à 5 % du taux réduit de la TVA, par exemple sur les produits alimentaires, absorbé par les circuits de distribution et non répercuté sur les consommateurs.
Par conséquent, monsieur Loridant, s'agissant de votre proposition, je vous demande de bien vouloir retirer l'amendement n° I-82 rectifié. S'il n'en allait pas ainsi, je me verrais alors dans l'obligation d'émettre un avis défavorable sur ce texte.
J'en viens à votre interrogation puisque l'amendement n° I-82 rectifié pose la question plus générale de l'attitude du Gouvernement à l'égard du droit européen de la TVA.
Vous avez cité des exemples, notamment le Royaume-Uni où le taux de TVA sur les produits alimentaires est nul. Il est vrai que certains pays appliquent des taux de TVA inférieurs au taux minimal de 5 % pour des raisons historiques que chacun connaît. Par conséquent, nous pouvons peut-être tirer argument de ces derniers, ainsi que vous le suggérez, pour faire évoluer la situation.
Nous pourrions chercher à persuader la Commission de Bruxelles dans deux directions.
Nous pourrions tout d'abord demander le passage du taux réduit de 5,5 % au taux 0 pour les produits alimentaires et pour la presse, ainsi que vous l'avez suggéré, monsieur Loridant. Néanmoins, cela remettrait profondément en cause notre système de TVA.
Nous pourrions également demander - nous aurons l'occasion d'y revenir dans le débat - que certains produits taxés au taux de 20,6 % puissent l'être à 5,5 %.
Le Gouvernement soumettra à la Commission de Bruxelles une liste - ce ne sera pas une liste très longue, car notre ambition est non pas un effet d'annonce, mais l'obtention de résultats -, une liste, disais-je, s'appuyant sur des précédents étrangers, de biens ou de services à caractère culturel ou autre pour lesquels nous pourrions essayer de négocier avec la Commission de Bruxelles, durant l'année qui vient, un passage du taux normal au taux réduit de TVA.
Telles sont, monsieur Loridant, les explications que je peux vous apportez sur la politique du Gouvernement en matière de TVA.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-82 rectifié.
M. Philippe Marini. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Je voterai évidemment contre l'amendement n° I-82 rectifié pour les raisons indiquées tout à l'heure par M. le rapporteur général.
Mais c'est le développement que M. le secrétaire d'Etat vient d'effectuer à propos de la question de notre collègue M. Loridant qui m'incite à prendre la parole maintenant.
M. Sautter nous a fait part, si je ne me trompe, de son intention de poursuivre une démarche auprès de la Commission européenne en vue de tendre à un abaissement, voire à une annulation, du taux de TVA sur certains produits.
Il a évoqué la difficulté de ces démarches ainsi que l'existence de précédents. Les propos qu'il a tenus m'ont quelque peu plongé dans l'incertitude. En effet, dans les années à venir, il nous faudrait bien compenser la perte de recettes budgétaires qui en résulterait.
Si l'intention du Gouvernement était bien de cheminer vers une réduction significative des taux de TVA - ce qui serait d'ailleurs cohérent, il faut le reconnaître, avec tout un discours qui a été tenu lors de la préparation des élections législatives - il faudrait alors, à l'évidence, déplacer au sein de la fiscalité française, des milliards de francs, voire des dizaines de milliards de francs. En effet, ces sommes demeureraient nécessaires pour l'équilibre des comptes de l'Etat et pour la résorption du déficit public.
Par conséquent, mes chers collègues, si une telle orientation se manifestait, nous pourrions alors nous faire quelques soucis sur les lois de finances à venir et sur les futures dispositions fiscales qui risqueraient d'être imposées à nombre de nos concitoyens (Applaudissements sur certaines travées du RPR.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-82 rectifié, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mise au point au sujet d'un vote



M. François Lesein.
Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Lesein.
M. François Lesein. S'agissant du scrutin n° 19 sur l'amendement n° I-210, je souhaite préciser que MM. François Abadie, Honoré Bailet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux souhaitaient voter cet amendement, comme l'ensemble des membres du groupe du RDSE, alors que, à la suite d'une erreur matérielle, ils n'ont pas pris part au vote.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue.

Article 11



M. le président.
« Art. 11. - I. - A l'article 257 du code général des impôts, il est créé un 7° bis ainsi rédigé :
« 7° bis Sous réserve de l'application du 7° , et dans la mesure où ces travaux portent sur des logements sociaux à usage locatif mentionnés aux 2° et 3° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, les livraisons à soi-même :
« a. De travaux d'amélioration mentionnés à l'article R. 323-3 du code de la construction et de l'habitation, qui bénéficient de la subvention prévue aux articles R. 323-1 à R. 323-12 dudit code, et qui ont fait l'objet de la décision favorable du représentant de l'Etat dans le département prévue à l'article R. 323-5 du même code prise à compter du 1er janvier 1998 ;
« b. De travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement mentionnés à l'article R. 331-1 du code de la construction et de l'habitation, qui bénéficient d'un prêt prévu audit article, et qui ont fait l'objet de la décision favorable du représentant de l'Etat dans le département prévue aux articles R. 331-3 et R. 331-6 du même code prise à compter du 1er janvier 1998 ;
« c. De travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement, autres que ceux mentionnés aux a et b, ayant fait l'objet d'une décision favorable du représentant de l'Etat dans le département prise à compter du 1er janvier 1998.
« Un décret en Conseil d'Etat définit les conditions d'application des b et c ; ».
« II. - L'article 266 du code général des impôts est complété par un 6 ainsi rédigé :
« 6. En ce qui concerne les livraisons à soi-même de travaux visées au 7° bis de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise sur le prix de revient total des travaux. »
« III. - L'article 269 du code général des impôts est ainsi modifié :
« 1° Le 1 est complété par un d ainsi rédigé :
« d. Pour les livraisons à soi-même mentionnées au 7° bis de l'article 257, au moment de l'achèvement de l'ensemble des travaux et au plus tard dans les deux ans de la date de la décision favorable du représentant de l'Etat. » ;
« 2° Au a du 2, les mots : « au b et au c du 1 » sont remplacés par les mots : « aux b, c et d du 1 ».
« IV. - Le I de l'article 278 sexies du code général des impôts est complété par un 4 ainsi rédigé :
« 4. Les livraisons à soi-même mentionnées au 7° bis de l'article 257. »
« V. - L'article 284 du code général des impôts est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. - Toute personne qui a été autorisée à soumettre au taux réduit de 5,5 % les livraisons à soi-même de travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement de logements sociaux à usage locatif mentionnées au 7° bis de l'article 257 est tenue au paiement du complément d'impôt lorsque l'immeuble n'est pas affecté à la location dans les conditions prévues au 3° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation. »
Sur l'article, la parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, pour une fois, nous nous félicitons que notre pays ait enfin décidé de se conformer aux directives européennes, puisque la baisse du taux de la taxe sur la valeur ajoutée sur les logements sociaux, qu'il s'agisse des opérations de construction, de réhabilitation ou d'entretien, participe des domaines qui sont définis par l'annexe H de la sixième directive.
Cette opération de mise à niveau du taux de la taxe sur la valeur ajoutée est l'une des mesures que nous réclamions depuis longtemps, et nous ne pouvons que regretter que la décision ait tant tardé.
La mesure engagée par le précédent gouvernement, pour sa part, avait été prise dans de telles conditions qu'elle se concluait par un ensemble que je qualifierai pour le moins de peu engageant.
Cette année, s'il n'en est pas de même, nous gardons toutefois quelques préoccupations et inquiétudes sur lesquelles nous voulons attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat.
Il nous semble indispensable que la mesure de baisse de la taxe sur la valeur ajoutée, qui profite tant aux organismes d'HLM qu'aux entreprises du secteur du bâtiment - l'activité dans le domaine du logement social est déterminante pour leur simple survie - s'accompagne d'un maintien au niveau requis des subventions dévolues aux opérations de construction, aux prêts locatifs aidés, les PLA, aux primes à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, les PALULOS.
Réduire le coût de réalisation de ces opérations est un enjeu majeur, et ce pour de multiples raisons.
Cela compte pour les locataires, qui ne peuvent indéfiniment supporter les conséquences du renchérissement du coût des opérations, renchérissement engagé dès la loi Barre, voilà plus de vingt ans, qui accordait la priorité de l'action publique au financement des aides à la personne au détriment de l'aide à la pierre.
Cela compte aussi pour les finances publiques, le ralentissement de la hausse des loyers tendant à limiter la progression convergente du poids des aides personnelles.
Cela compte encore pour les organismes de bailleurs sociaux, qui doivent bénéficier de conditions meilleures de financement et de possibilités nouvelles de développement de leur activité, qui est indispensable tant pour les locataires que pour les logés en attente d'un logement.
Si cette mesure est hautement symbolique d'une nouvelle politique en matière de logement social, nous ne pouvons que demander que, à l'appui de cette première décision, ce soit l'ensemble de l'action publique en matière de logement qui soit prochainement repensée, car nous devrons le faire.
Le chantier de la réforme en la matière est pour le moins étendu.
Nous devons nous attacher, en particulier, à rééquilibrer l'intervention publique entre le logement privé et le logement social.
Il est en effet décisif que l'on procède à un examen précis des données du problème.
Il faudra en particulier s'interroger sur le mode de financement prioritaire du logement social, le livret A, dont la rémunération doit être maintenue et dont il nous semble décisif que le plafond soit relevé pour mobiliser des moyens nouveaux afin de répondre aux besoins.
Il conviendra également de s'interroger sur le problème de la fiscalité du logement.
Si les bailleurs sociaux sont exonérés du paiement de l'impôt sur les sociétés, il n'en demeure pas moins qu'ils subissent aujourd'hui les conséquences de la montée en charge des impôts fonciers, attendu que les logements sociaux, de par leurs qualités intrinsèques de confort, sont manifestement surcotés en matière d'imposition locale.
De la même façon, se pose le problème de la taxe sur les salaires acquittée par les offices d'HLM, dont le poids n'est pas négligeable dans le paysage fiscal du logement.
S'agissant de l'accession sociale à la propriété, nous ne pouvons que nous interroger, dans des délais relativement brefs, sur le devenir du dispositif Périssol, sans doute appelé à disparaître et nous sommes en droit de nous demander s'il est nécessairement juste que les organismes collecteurs du mal-nommé 1 p. 100 logement soient ponctionnés de la moitié de leurs moyens pour financer des opérations qui ont conduit à banaliser l'accession sociale à la propriété et à mettre en difficulté un établissement financier important, le Crédit foncier.
Nous avons besoin de définir un outil d'accession sociale à la propriété moderne, adapté à la demande, qui évite les écueils du dispositif des prêts aidés pour l'accession à la propriété, c'est-à-dire la progressivité des emprunts, et ceux du dispositif Périssol, à savoir la banalisation.
Le Gouvernement peut compter sur notre groupe pour participer à cette indispensable réflexion, vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat.
Le devenir du logement privé est, de notre point de vue, fondé sur quelques interrogations majeures.
Comment doit évoluer la défense fiscale s'agissant des amortissements accélérés, de la réduction d'impôt ?
Quelles dispositions doivent être prises en matière d'évolution des loyers ?
Comment doit être conçue l'aide au logement ancien : moyens de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, mutualisation des coûts, développement de l'ingénierie financière et économique du logement ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, ce sont là des pistes à explorer et que nous souhaitions décrire brièvement à l'occasion de la discussion de cet article.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Dans sa déclaration de politique générale, M. le Premier ministre a fait du logement une des priorités de l'action de son Gouvernement. Cette volonté était à peine affirmée qu'elle trouvait déjà sa traduction concrète dans le décret d'avances du 10 juillet.
Avec les mesures contenues dans ce projet de loi de finances, le Gouvernement confirme que le logement est bien une priorité de son action : les moyens budgétaires en faveur du logement sont en effet en hausse de 8,6 %.
L'article 11 s'inscrit dans cette politique en prévoyant le passage au taux réduit de la TVA pour les travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement réalisés dans les logements sociaux à usage locatif. C'est une excellente disposition proposée par notre groupe depuis plusieurs années.
Elle s'inscrit dans la volonté du Gouvernement de réduire les prélèvements indirects. Cette baisse de la TVA dont l'impact n'est pas négligeable, 2,2 milliards de francs en 1998, représentera une aide d'environ 12 % du montant des travaux.
De plus, cette mesure, contrairement à celle de l'année dernière sur les travaux de construction, ne s'accompagne pas d'une diminution équivalente des subventions budgétaires. Ces travaux seront donc plus aidés que dans le passé.
Il faut, en outre, y relier la mesure figurant à l'article 49 du projet de loi de finances, qui met en place un crédit d'impôt pour les dépenses d'entretien de l'habitation principale.
Enfin, il faut relever la forte augmentation de la dotation pour la prime à l'amélioration de l'habitat et celle des crédits de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, je voulais tout d'abord remercier Mme Beaudeau, comme M. Angels, du soutien qu'ils apportent à la mesure que propose le Gouvernement.
Je veux simplement dire qu'il s'agit d'une étape dans la politique sociale du logement qu'entend mener le Gouvernement. Cette étape consiste, je le rappelle, à faire passer du taux normal au taux réduit les travaux d'amélioration, de transformation et d'aménagement des logements locatifs sociaux.
Par ailleurs, une autre mesure, qui a été inscrite à la demande de la majorité de l'Assemblée nationale, instaure une quasi-diminution de la TVA sur les travaux d'entretien réalisés dans des logements privés, soit pas les propriétaires, soit par les locataires. Je dis « quasi », parce qu'il s'agit d'accorder à ces propriétaires ou à ces locataires un crédit d'impôt équivalent à 15 %, c'est-à-dire à l'écart entre le taux normal et le taux réduit.
Ces deux mesures sont utiles pour soutenir l'effort de réhabilitation du patrimoine français. Elles sont utiles pour l'artisanat du bâtiment. Elles permettent par ailleurs de décourager le trop fréquent recours au travail clandestin.
Il s'agit d'une étape comportant deux volets et un accroissement des crédits affectés au logement, M. Angels en a parlé. Mais d'autres étapes sont prévues.
Mme Beaudeau a évoqué un certain nombre de pistes, quant à la fiscalité locale et à ses bases, quant à la taxe sur les salaires et au dispositif Périssol. Elle a ainsi apporté une contribution, réalisé une expertise et fait preuve d'une conviction qui seront utiles tant au Gouvernement qu'à M. Louis Besson lorsqu'il présentera le projet de budget du logement et les perspectives à moyen terme qui l'accompagnent.
Votre contribution est tout à fait utile, madame le sénateur. Chacun des points que vous avez cités méritera d'être exploré de façon approfondie. Vos suggestions seront certainement très utiles pour progresser dans la voie de l'amélioration du logement social à laquelle le Gouvernement est particulièrement attaché.
M. le président. Par amendement n° I-159, M. Braun et les membres du groupe du RPR proposent :
« I. - Après le quatrième alinéa (c) du texte présenté par le paragraphe I de l'article 11 pour insérer un 7° bis à l'article 257 du code général des impôts, d'insérer un alinéa ainsi rédigé :
« d. - de travaux de réhabilitation, de transformation ou d'aménagement, autres que ceux mentionnés aux a, b et c ci-dessus, réalisés par les collectivités territoriales ou leurs groupements sur leur patrimoine immobilier ancien en vue de les transformer en logements sociaux à usage locatif. »
« II. - En conséquence, au dernier alinéa du texte proposé par le I de l'article 11 pour insérer un 7° bis à l'article 257 du code général des impôts, de remplacer les mots : "et c", par les mots : "c et d".
« III. - Pour compenser la perte de ressources résultant de l'application du I ci-dessus, de compléter l'article 11 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'extension aux travaux de réhabilitation du taux réduit de TVA sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. Marini.
M. Philippe Marini. Notre collègue M. Gérard Braun souhaitait évoquer cette question qui concerne les collectivités territoriales.
Lorsqu'il s'agit d'effectuer des travaux sur des biens immobiliers qui font partie de leur patrimoine propre en vue de transformer ces biens pour réaliser des logements sociaux à usage locatif, il nous semblerait équitable que le taux réduit de TVA de 5,5 % soit appliqué, dans la logique même de la mesure qui nous est présentée par le Gouvernement à l'article 11.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Cet amendement nous semble satisfait. En effet, dès lors qu'une collectivité publique décide de conventionner un logement locatif pour qu'il donne droit à l'APL, les travaux de transformation, d'amélioration ou d'aménagement peuvent bénéficier du taux réduit. Mais il est, bien sûr, indispensable que le logement soit conventionné et loué sous des plafonds de loyer.
Cela étant, l'article est d'application délicate lorsqu'on examine ses modalités d'application et une confirmation du Gouvernement ne sera pas inutile.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est très proche de celui de M. le rapporteur général. En effet, la mesure qui est proposée par le Gouvernement à l'article 11 s'étend à tous les travaux d'amélioration, de transformation ou d'aménagement des logements locatifs quelle que soit la nature de leur financement, j'y insiste, dès lors que les logements concernés font l'objet d'une convention avec l'Etat ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement.
Je ne peux donc que confirmer ce qu'a dit M. le rapporteur général. Les collectivités locales peuvent, d'une part, prétendre aux aides à l'amélioration de l'habitat, ce que, dans notre jargon, nous appellons les PLA et les PALULOS et, d'autre part, conclure des conventions ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement avec l'Etat au sens des paragraphes II et III de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation.
Par conséquent, je pense comme M. le rapporteur général que cet amendement est superflu, et je demande son retrait.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Il me semble que les travaux du Sénat et la réponse du Gouvernement doivent donner tous apaisements à l'auteur de l'amendement et le rassurer quant à l'application du taux réduit de TVA.
M. le président. Monsieur Marini, l'amendement n° I-159 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Je pense que les propos tenus ont été assez clairs pour que notre collègue M. Braun et les cosignataires de l'amendement puissent considérer qu'ils ont obtenu satisfaction. Cela me conduit à retirer celui-ci ; M. le secrétaire d'Etat n'aura donc pas à en demander le rejet.
M. le président. L'amendement n° I-159 est retiré.
Par amendement n° I-80, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent de compléter l'article 11 par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« ... - Dans l'article 150 M du code général des impôts, le taux "5 %" est remplacé par le taux "4 %". »
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Nous nous félicitons que le système fiscal français évolue dans le bon sens en matière de logement, avec, enfin, un taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations de réhabilitation et d'entretien des logements sociaux.
Pour autant, l'économie générale de la disposition appelle plusieurs observations qui nécessitent, selon nous, une clarification.
Notre groupe demande en effet, depuis plusieurs années, l'application aux logements sociaux de la mesure de réduction du taux de la taxe sur la valeur ajoutée. Nous avons constaté quelques évolutions favorables l'an dernier, et la mesure a commencé à être appliquée.
Cela étant, on ne peut pas dire qu'il y ait excès de soutien public à la construction de logements sociaux.
Le statut fiscal particulier des bailleurs sociaux qui bénéficient d'une exonération de l'impôt sur les sociétés, par exemple, ne peut pas faire oublier qu'ils doivent aussi répondre à des contraintes tout à fait particulières, en ce sens qu'ils interviennent par nature dans un domaine sensible, celui des personnes les plus modestes.
La cohésion sociale tout comme l'amélioration des conditions de logement des ménages sont, en effet, étroitement dépendantes des moyens dont disposent les bailleurs sociaux pour développer leur action.
On devrait donc faire en sorte que tous les outils soient aujourd'hui utilisés pour favoriser l'atteinte de ces objectifs, notamment celui de la lutte contre l'exclusion. Aujourd'hui encore, hélas ! trop de nos compatriotes n'ont pas de logements décents.
Cet amendement vise à instaurer une nouvelle réduction de la TVA sur la réhabilitation et l'entretien des logements sociaux, laquelle serait fixée à 4 %. Nous suggérons aussi, à cette occasion, un réexamen des avantages fiscaux accordés aux investissements locatifs privés et tendant à modifier les conditions d'amortissements de ces investissements.
On ne peut, en effet, se satisfaire d'une situation dans laquelle les logements PLA bénéficient de subventions de l'ordre de 60 000 francs par logement quand, par ailleurs, les logements privés peuvent, notamment par la voie de la réduction d'impôt, bénéficier d'une aide fiscale de 120 000 francs, et ce nonobstant les conditions d'amortissement. Celles-ci se traduisent aujourd'hui par une réduction forfaitaire, par exemple sur un investissement de 1 200 000 francs, de 20 000 francs annuels du revenu foncier déclaré, sans autre justification que l'application du taux d'amortissement.
Vous comprendrez donc la philosophie de cet amendement que je vous invite à adopter tout en précisant pour conclure, monsieur le secrétaire d'Etat, que nous partageons pleinement l'orientation fixée par l'article 11, mais que nous voulons aller un peu plus loin dans le sens indiqué.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le président, la commission n'a pas vu de lien immédiat ou direct entre la question évoquée, c'est-à-dire la TVA pour la réhabilitation sociale, et l'aggravation du régime des plus-values immobilières.
Toutefois, elle n'a pas cru souhaitable d'aggraver le régime des plus-values immobilières alors que - je me tourne vers le Gouvernement pour montrer que la Haute Assemblée souhaite être objective en toute chose - le Gouvernement, en la personne du secrétaire d'Etat, M. Louis Besson, partage aujourd'hui une préoccupation ancienne du Sénat : la restauration du parc locatif privé, qui a en réalité une vraie mission sociale.
Cela dit, la proposition de notre collègue, M. Loridant, nous semble finalement assez mal s'emboîter dans l'article 11 dont il est question. C'est pourquoi la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. L'avis du Gouvernement est, que parfois - mais parfois seulement - le mieux est l'ennemi du bien.
En la matière, je ne suis pas sûr que le fait d'exonérer les plus-values immobilières au bout de vingt-sept ans au lieu de vingt-deux ans constitue véritablement un grand pas dans le sens de la justice fiscale.
En revanche, deux arguments me semblent justifier le retrait de cet amendement.
D'abord, pour un bénéfice, somme toute, fort modeste, nous risquons d'adresser un signal très négatif au marché immobilier, dont la reprise me semble importante pour que la croissance redémarre et que la construction soit plus active.
Enfin - et il est bon, de temps en temps, d'avancer cet argument - le fait de réduire le taux de cet abattement de 5 % à 4 % serait la quatrième modification en dix ans. Dans un domaine où les cycles sont très longs, peut-être cela serait-il un peu trop précipité.
Pour ces deux raisons, l'une d'ordre psychologique tenant au marché immobilier, l'autre ayant trait à la volonté d'assurer une certaine stabilité des règles dans le domaine immobilier, je suggère à M. Loridant de retirer son amendement, faute de quoi je demanderai à la Haute Assemblée de le rejeter.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Maintenez-vous votre amendement, monsieur Loridant ?
M. Paul Loridant. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° I-80 est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 11.

(L'article 11 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 11



M. le président.
Je suis d'abord saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-53, MM. Collard, Egu, Joly et Mouly proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le I de l'article 278 sexies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... les travaux de réhabilitation des logements occupés à titre de résidence principale. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de l'application du taux réduit de la TVA à la réhabilitation des résidences principales est compensée par un relèvement à due concurrence des taxes prévues aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-163, MM. Braun, Vasselle, Leclerc et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. L'article 279 du code général des impôts est complété in fine par un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,5 % pour les opérations d'entretien, de rénovation et de réhabilitation de logements non aidés effectuées par des entreprises artisanales du bâtiment. »
« II. Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts.
La parole est à M. Egu, pour défendre l'amendement n° I-53.
M. André Egu. Je souhaite apporter une pierre supplémentaire à la réhabilitation du logement. Il s'agit donc d'un amendement d'appel.
Le taux réduit de la TVA s'applique aux biens de première nécessité, dont, à l'évidence, le logement fait partie.
Il ne paraît donc pas fondé de considérer que seul le logement locatif social public peut bénéficier de la TVA à taux réduit. Il existe un parc social privé dans lequel de nombreux propriétaires ou accédants sont aussi des personnes modestes.
D'une façon générale, toutes les résidences principales peuvent être considérées comme des biens de première nécessité, car il faut bien se loger, et il conviendra de s'interroger sur une extension du taux réduit à la réhabilitation comme à la construction, bien que nos engagements européens interdisent, pour le moment, une telle extension.
Par ailleurs, l'application du taux réduit de la TVA est d'une logique fiscale plus grande que la réduction d'impôt pour grosses réparations ou le crédit d'impôt pour entretien et revêtement, qui ont été décidés pour contourner l'impossibilité d'appliquer le taux réduit. Ces avantages fiscaux réduisent l'assiette de l'impôt sur le revenu, et sont plafonnés à des niveaux forfaitaires sans lien avec la réalité des travaux. Ils contredisent la politique de suppression des « niches » fiscales.
La Commission européenne vient de proposer d'étendre le taux réduit à l'ensemble des travaux de réhabilitation du logement. Cet amendement a pour objet de faire progresser le débat en ce sens et d'encourager le Gouvernement à négocier avec nos partenaires les modalités d'une telle extension.
M. le président. La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° I-163.
M. Philippe Marini. Nos collègues Gérard Braun, Alain Vasselle et Dominique Leclerc, souhaitant soutenir l'activité du bâtiment, posent la question de l'extension du dispositif du présent article 11 aux travaux portant sur le logement non aidé.
Cette disposition permettrait, en stimulant la demande de travaux émanant des particuliers, qui attendent une mesure incitative, non seulement de soutenir l'emploi dans ce secteur, mais aussi de faire diminuer le travail au noir.
Il nous semble donc utile d'aller plus loin dans le sens de l'incitation en étendant le dispositif de l'article 11 au secteur du logement non aidé.
Cet amendement, qui est également un amendement d'appel, est de même nature et de même esprit que celui qui vient d'être présenté par notre collègue M. André Egu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s I-53 et I-163 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Avec votre permission, monsieur le président, je ferai une réponse unique, car, au fond, la philosophie est la même.
La commission des finances a trouvé ces amendements très utiles. Il est vrai que nous nous préoccupons depuis longtemps du parc locatif privé.
Il nous semble donc tout à fait nécessaire d'encourager les propriétaires à conserver, dans leur patrimoine, ce parc locatif privé, car il assure une mission sociale qui est tout à fait évidente et qui n'est, je crois, contestée par personne.
Notons aussi le cas du parc occupé par les propriétaires de condition modeste. Il ne nous semble pas de bonne politique de réserver toutes les aides et les taux réduits au secteur des HLM.
Il faut encourager l'Union européenne à aller vers la reconnaissance du logement et de sa réhabilitation - dont le potentiel économique énorme est l'avenir de ce secteur - comme des biens et services de première nécessité.
Mes collègues ont présenté ces deux amendements comme des amendements d'appel. Je pense donc qu'ils les retireront dès lors qu'ils auront entendu votre réponse, monsieur le secrétaire d'Etat, et qu'ils auront été rassurés. C'est en tout cas ce que leur préconise la commission des finances, qui n'envisage pas d'autre hypothèse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s I-53 et I-163 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement ne peut évidemment pas être insensible à des appels qui s'expriment sous forme d'amendements lorsqu'ils portent sur le parc locatif privé !
Il est clair que ce dernier peut, dans un certain nombre de circonstances, jouer un rôle quasi social. Il est donc souhaitable de trouver le moyen d'en encourager la réhabilitation.
Malheureusement, le dispositif qui a été présenté aussi bien par M. Egu que par M. Marini - on peut le regretter, mais c'est un fait juridique - est absolument incompatible avec une directive communautaire n° 92/77 du 19 octobre 1992, qui limite la possibilité d'attribuer le taux réduit aux seuls logements présentant un caractère social affirmé.
J'ai entendu l'appel qui a été présenté. Il sera, je pense, satisfait par une disposition du Gouvernement qui va suivre et qui permettra d'agir indirectement sur le parc locatif privé par le biais de l'impôt sur le revenu.
La demande qui est faite est très largement partagée par la majorité qui soutient le Gouvernement, mais la voie qui est proposée n'est malheureusement pas ouverte. Si nous pouvons essayer de plaider en faveur d'un certain nombre de points auprès de l'Union européenne - ce que nous ferons, je l'ai dit -, en revanche, je suis obligé de demander le retrait de ce type d'amendement au nom de l'incompatibilité communautaire, faute de quoi j'en demanderais le rejet.
M. le président. Monsieur Egu, maintenez-vous l'amendement n° I-53 ?
M. André Egu. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Marini, maintenez-vous l'amendement n° I-163 ?
M. Philippe Marini. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. Les amendements n°s I-53 et I-163 sont retirés.
Par amendement n° I-66, M. Ostermann propose d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 278 sexies du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % sur les opérations individualisées de construction, reconstruction, réhabilitation totale ou extension de casernements de gendarmerie réalisées par les collectivités locales et déclarées prioritaires et urgents mais ne faisant pas l'objet de subvention de la part de l'Etat.
« II. - La perte de recettes pour le budget de l'Etat est compensée par le relèvement à due concurrence des droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts ainsi que par la création d'une taxe additionnelle aux droits perçus par l'article 403 du code général des impôts. »
Cet amendement est-il soutenu ?...
Je suis maintenant saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-29 est présenté par MM. Michel Mercier et Hyest.
L'amendement n° I-54 rectifié bis est déposé par MM. Seillier, Puech et Mme Bardou et les membres du groupe des Républicains et Indépendants.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le sixième alinéa de l'article 260 A du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Déchetteries.
« II. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Hyest, pour défendre l'amendement n° I-29.
M. Jean-Jacques Hyest. Il s'agit là d'un amendement non pas d'appel, mais d'éclaircissement.
De nombreuses collectivités territoriales se voient refuser par l'administration la récupération de la TVA en vertu de l'article 260 A du code général des impôts.
L'absence de référence relative aux déchetteries dans l'article 260 A du code général des impôts pénalise fortement les collectivités qui sont dans l'obligation de mettre en oeuvre des installations permettant aux particuliers et aux professionnels de traiter sélectivement les déchets.
L'option d'assujettissement à la TVA a, par ailleurs, été acceptée par les services des centres des impôts, et ce n'est qu'ensuite, sur contrôle de la comptabilité des collectivités, que l'article 260 A a été opposé.
Cet amendement vise donc à réparer cette lacune d'autant plus surprenante que l'on souhaite actuellement, en matière de déchets, encourager toute action, je pense à la collecte sélective, souhaitable pour l'environnement.
M. le président. La parole est à M. du Luart, pour défendre l'amendement n° I-54 rectifié bis.
M. Roland du Luart. Mes collègues M. Bernard Seillier et Puech ainsi que Mme Bardou ont déposé, au nom de notre groupe, cet amendement qui est identique à celui que vient de défendre à l'instant M. Hyest.
Il est important que le Gouvernement nous précise sa position pour qu'il n'y ait plus de lacune et que nous puissions récupérer la TVA sans nous heurter aux positions contradictoires d'un service fiscal à l'autre. Cela me paraît d'autant plus important à une époque où l'on veut améliorer l'environnement et faire fonctionner nos déchetteries de façon satisfaisante.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. L'article 260 A du code général des impôts autorise les collectivités locales à être assujetties à la TVA, sur leur demande, pour un certain nombre de services tels que la distribution d'eau, l'assainissement, les abattoirs, l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères, déchets et résidus.
L'exercice de cette option leur donne la possibilité de déduire la TVA supportée en amont sur leurs investissements par la voie fiscale directe et non pas par le biais du fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA. Les auteurs de ces amendements proposent d'étendre cette possibilité d'option aux déchetteries. Cette mesure paraît parfaitement cohérente avec la possibilité d'option existant déjà au profit de l'enlèvement et du traitement des ordures, déchets et résidus.
On peut considérer que ces amendements sont des amendements de précision tendant à corriger une interprétation restrictive des dispositions existantes, qui ne visent pas expressément les déchetteries, tout simplement parce que ce sont des établissements de création récente, du moins sous cette dénomination.
C'est ce qui a conduit la commission des finances à émettre un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Comme MM. Hyest et du Luart l'ont dit clairement, ces amendements visent à obtenir des précisions. Je vais donc essayer d'expliciter le droit fiscal en la matière.
Il s'agit de déchetteries, qui sont une composante du service de collecte et de traitement des ordures ménagères. En conséquence, les règles de TVA qui s'y appliquent ne peuvent être dissociées de l'ensemble des règles de TVA applicables à ces services, la particularité étant que les règles de TVA dépendent des modalités de financement.
Deux cas peuvent se trouver.
Si la collectivité a choisi de financer ce service par la redevance générale pour l'enlèvement des ordures ménagères, elle peut opter pour l'assujettissement à la TVA et déduire selon les règles de droit commun la taxe se rapportant aux dépenses de fonctionnement et d'investissements nécessaires à ces activités, dont celles qui sont afférentes aux déchetteries.
En revanche, lorsque ce service est financé par la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la collectivité se place dans le cadre d'opérations qui sont hors du champ d'application de la TVA. Elle ne peut donc pas déduire par la voie fiscale la TVA afférente aux diverses dépenses exposées pour les besoins de ces opérations, en l'occurrence de déchetteries.
Comme l'a dit avec beaucoup de sagacité M. le rapporteur général, dans le cas où elles sont en dehors du champ d'application de la TVA, elles peuvent bénéficier d'une attribution du fonds de compensation de la TVA sous certaines conditions, notamment à la condition que les éventuelles recettes soumises à la TVA et perçues dans le cadre du service revêtent un caractère accessoire.
Si elle était adoptée, votre proposition, qui consiste à rendre les collectivités locales partiellement assujetties à la TVA, risquerait de remettre en cause l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA de l'ensemble des dépenses d'investissements qui sont liées, non seulement aux déchetteries, mais également aux services de collecte et de traitement des ordures ménagères.
J'espère que, à la faveur de ces éclaircissements, vous voudrez bien, messieurs les sénateurs, retirer vos amendements.
M. le président. M. Hyest votre amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Hyest. Je remercie M. le secrétaire d'Etat des précisions qu'il nous a fournies, mais mon amendement visait simplement le cas où, pour la collecte et le traitement des ordures ménagères, on pouvait opter pour la TVA : c'était la première hypothèse développée.
Si vous prenez l'engagement de donner des instructions précises à vos services, qui semblent avoir une interprétation différente, en précisant que les collectivités peuvent déduire la taxe se rapportant aux dépenses afférentes aux déchetteries, je pourrai, bien entendu, retirer mon amendement. Il me semble nécessaire que vos services soient bien informés. C'était le motif du dépôt de mon amendement.
Au demeurant, vous avez bien dit, monsieur le secrétaire d'Etat, que les déchetteries étaient comprises dans la collecte et le traitement, et qu'il convenait de leur appliquer les règles générales d'assujettissement à la TVA.
Comme ces propos figureront au procès-verbal, je pense pouvoir retirer mon amendement.
M. le président. L'amendement n° I-29 est retiré.
Monsieur du Luart, l'amendement n° I-54 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Roland du Luart. Je le retire également, monsieur le président, en souhaitant que les directives appropriées seront données.
M. le président. L'amendement n° I-54 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-62, MM. Barbier, Revol, Lombard proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % en ce qui concerne les opérations d'achat, d'importation intracommunautaire, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant sur les produits de chocolaterie et confiserie suivants :
« 1° Chocolats présentés en tablettes ou en bâtons à compter du 1er janvier 1998 ;
« 2° Bonbons de chocolat vendus en vrac à compter du 1er janvier 1999 ;
« 3° Produits de chocolat préemballés individuellement à compter du 1er janvier 2000 ;
« 4° Produits de confiserie et autres produits de chocolat préemballés à l'exception des boîtage, à compter du 1er janvier 2001 ;
« 5° Tous produits de chocolaterie à compter du 1er janvier 2002 ;
« La gamme des produits mentionnés ci-dessus est définie par décret.
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par une augmentation des droits sur les tabacs mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-83, Mme Beaudeau, M. Loridant et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 2° de l'article 278 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 2° produits destinés à l'alimentation humaine à l'exception du caviar. »
« II. - Le taux prévu au 6° du paragraphe III bis de l'article 125 A est relevé à due concurrence. »
L'amendement n° I-62 est-il soutenu ?...
La parole est à Mme Beaudeau, pour défendre l'amendement n° I-83.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Cet amendement a pour objet de substituer au taux normal de TVA - 20,6 % - un taux réduit de 5,5 % sur les produits destinés à l'alimentation humaine, à l'exception du caviar. (Exclamations sur les travées du RPR.)
Je présente cet amendement tous les ans.
M. Philippe Marini. Vous ne le présentiez pas avant la chute du rideau de fer ! (Sourires.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Il s'agit principalement de confiserie et de chocolat. Selon nous, ces produits ne peuvent pas être considérés comme des produits de luxe.
Baisser la TVA sur les produits destinés à l'alimentation humaine est une mesure de justice sociale qui, si elle est retenue, permettrait, notamment une relance de la consommation populaire, ce qui n'est pas négligeable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Comme chaque année, l'avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Cet amendement porte principalement sur les produits de confiserie, et surtout sur le chocolat, qui, effectivement, pourraient être assujettis au taux réduit de 5,5 %. Une telle mesure serait tout à fait compatible avec le droit communautaire.
Malheureusement, pour demander le retrait de cet amendement, j'avancerai un argument de poids : le coût financier de cette disposition, qui serait de 3,2 milliards de francs.
J'ajoutereai que l'application du taux normal de TVA à ces produits n'a pas freiné le développement de ce secteur dans notre pays.
M. le président. L'amendement est-il maintenu, madame Beaudeau ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Oui, monsieur le président.
Pour une fois qu'il pouvait être compatible avec les dispositions communautaires, voilà que M. le ministre m'oppose un argument d'ordre financier. Nous vous avons pourtant suggérer à plusieurs reprises, monsieur le secrétaire d'Etat, des moyens susceptibles de dégager des disponibilités financières.
Nous présentons cet amendement chaque année, car il concerne les enfants, les familles.
M. Ivan Renar. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Je souscris totalement aux propos de mon amie Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je voudrais attirer votre attention sur le fait que l'adoption de cet amendement pourrait engendrer des économies. Chacun connaît les vertus du chocolat : à cette heure-ci, je ne parlerai pas de ses vertus aphrodisiaques, j'évoquerai simplement ses vertus anti-stress. Ce que le Gouvernement consentirait d'un côté, il en ferait l'économie ailleurs.
En attendant, moi qui suis du Nord, je continuerai à aller acheter pour ma famille et moi des chocolats en Belgique où ils sont beaucoup moins chers, même s'ils sont moins bons que les chocolats français. (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Philippe Marini. Evasion fiscale ! (Sourires.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-83, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 11
ou avant l'article 11 bis



M. le président.
Je suis saisi de cinq amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° I-14 rectifié, M. Lambert, au nom de la commission des finances, propose d'insérer, avant l'article 11 bis, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. Au 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, les mots "à usage domestique" sont supprimés.
« II. La perte de recettes résultant du paragraphe I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-124, MM. Chabroux, Miquel, Piras, Rinchet et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. Dans le premier alinéa du 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, les mots : "à usage domestique" sont supprimés.
« II. Le même texte est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« d. Part de la prestation d'exploitation de chauffage représentative du combustible bois, quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b et c du présent article.
« e. Terme de la facture d'un réseau de distribution d'énergie calorifique représentatif du combustible bois quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b et c du présent article. »
« III. Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par un relèvement des tarifs mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° I-56 est présenté par MM. Ploton, Mathieu, Poirieux, Carle, Pépin et Emin.
L'amendement n° I-186 est déposé par MM. Pourchet, Arnaud, Belot et Egu.
Tous deux tendent à insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts est complété par les dispositions suivantes :
« d) part de la prestation d'exploitation de chauffage représentative du combustible bois, quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b, c du présent article.
« e) terme de la facture d'un réseau de distribution d'énergie calorifique représentatif du combustible bois, quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b, c du présent article. »
« II. - La perte de recettes est compensée à due concurrence par le relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
Par amendement n° I-160, MM. Marini, Gouteyron et Goulet et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent d'insérer, après l'article 11, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le troisième alinéa c du 3° bis de l'article 278 bis du code général des impôts, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« ... Part de la prestation d'exploitation du chauffage représentative du combustible bois, quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b, c du présent article.
« Terme de la facture d'un réseau de distribution d'énergie calorifique représentatif du combustible bois, quand le combustible est un des trois mentionnés aux alinéas a, b, c du présent article. »
« II. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits figurant aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus à l'article 403 du code général des impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre l'amendement n° I-14 rectifié.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Pardonnez-moi, mes chers collègues, de retenir l'attention du Sénat sur un sujet qui pourrait paraître marginal, mais il s'agit d'une difficulté d'application d'un texte que nous avons voté et qui concerne le taux réduit de TVA applicable au bois de chauffage.
Nous sommes en effet à l'origine, monsieur le secrétaire d'Etat, d'une mesure qui a été votée l'an dernier tendant à abaisser de 20,6 % à 5,5 % le taux de la TVA sur le bois de chauffage. Il s'agissait d'une mesure de simplification mettant un terme à la distinction arbitraire qui a été faite entre le bois en tant que produit non transformé de la sylviculture, taxé à 5,5 %, et le bois en tant que bois de chauffage, taxé à 20,6 %.
Cette extension du champ d'application du taux réduit de la TVA doit profiter au consommateur final ; c'est pourquoi il est précisé qu'elle ne s'applique qu'au bois de chauffage et produits assimilés à usage domestique. Toutes les entreprises utilisant des combustibles en sont ainsi exclues, cette exclusion valant également pour les réseaux de chaleur. La précision selon laquelle il doit s'agir de bois de chauffage à usage domestique est donc nécessaire.
En revanche, elle semble présenter certaines difficultés d'interprétation qui justifie l'explication que je vous donne, mes chers collègues.
D'après les informations qui me sont parvenues depuis l'entrée en vigueur de la mesure, il semblerait que l'administration fiscale en fasse une interprétation excessivement restrictive.
Dans mon rapport de l'année dernière, j'avais indiqué qu'il fallait entendre la notion de chauffage à usage domestique comme visant le chauffage de locaux d'habitation à usage non professionnel.
D'autres problèmes d'interprétation sont survenus dans le cas où des intermédiaires entrent en jeu, et les interprétations des services fiscaux varient selon la nature du bois et la destination finale donnée à celui-ci.
Bref, il ne semble pas que l'administration fiscale soit favorable à une interprétation large de la disposition votée l'an dernier par le Parlement, dont le coût est pourtant très modique.
C'est la raison pour laquelle j'attends, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous donniez à votre administration des instructions qui favorisent une juste et équitable application de la loi votée par le Parlement.
M. le président. La parole est à M. Sergent, pour défendre l'amendement n° I-124.
M. Michel Sergent. La loi de finances de 1997 a permis l'application du taux réduit de TVA sur les bois de chauffage à usage domestique.
Or, nous pensons qu'il est important d'augmenter la part des biocombustibles dans l'énergie consommée en France. Cela permettra de répondre à un objectif de sauvegarde de l'environnement puisque le bois est une énergie renouvelable et non polluante. Cela soutiendra également le développement de la filière bois-énergie, ce qui réduira nos importations d'énergie fossile et créera des emplois en zones rurales. D'autres pays européens ont choisi soit d'exempter de taxes sur l'énergie les énergies renouvelables, soit de les soutenir activement en leur donnant un avantage sur les énergies fossiles par le biais de taxes affectées.
C'est pourquoi nous pensons qu'il faut élargir l'application du taux réduit de TVA au bois de chauffage, notamment pour les chaufferies utilisant du bois déchiqueté dans les établissements publics, dans les immeubles collectifs et dans le cas des réseaux de chaleur.
M. le président. L'amendement n° I-56 est-il soutenu ?...
La parole est à M. Egu, pour défendre l'amendement n° I-186.
M. André Egu. Me chauffant du même bois que M. le rapporteur général et que M. Sergent (Sourires), je présente un amendement qui va dans le même sens et vise donc à favoriser l'utilisation du bois.
Pour donner toute son efficacité à cette incitation fiscale, il semble opportun de supprimer la mention : « à usage domestique ».
Comme cela a été dit, c'est en outre un excellent moyen de favoriser les énergies renouvelables, de les mettre à égalité avec les autres sources d'énergie.
M. le président. La parole est à M. Marini, pour défendre l'amendement n° I-160.
M. Philippe Marini. Cet amendement est, si je puis dire, du même bois que les précédents. Il reflète du moins des préoccupations assez analogues.
Je rappelle que, dans la loi de finances pour 1997, nous avons voté cette fameuse baisse de taux de TVA applicable au bois utilisé comme matériau de chauffage pour les particuliers.
Ce combustible peut, bien entendu, être utilisé par l'intermédiaire de réseaux de chaleur pour vendre des calories ou par l'intermédiaire d'un exploitant de chauffage collectif d'immeuble pour vendre une prestation de services. Il semble malheureusement que, en vertu de l'interprétation donnée par l'administration, le taux réduit de TVA ne soit pas actuellement reconnu comme applicable à ces cas de figure.
Il s'agit donc de faire en sorte que soit respecté l'esprit de la loi telle que nous l'avons votée et d'étendre l'application du taux réduit aux réseaux de chaleur ainsi qu'aux équipements collectifs, dès lors qu'ils utilisent du bois comme combustible.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n° I-124, I-186 et I-160 ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Monsieur le secrétaire d'Etat, pour ce qui est de l'interprétation, le Sénat ne vous lâchera pas ! (Sourires.)
Les amendements en discussion visent à étendre la mesure relative au bois de chauffage votée l'an dernier sur deux points différents.
Le premier point est relatif aux chauffagistes qui, dans la plupart des immeubles d'habitation collectifs, ont en charge l'exploitation des installations de chauffage.
Une interprétation stricte des dispositions adoptées l'an dernier aboutirait à priver du bénéfice du taux réduit sur le bois de chauffage les copropriétés qui recourent aux services d'un chauffagiste.
Selon la commission des finances, qui est favorable à une application du taux réduit dans ce cas, il ne semble pas qu'une modification du code général des impôts soit indispensable. Une simple interprétation dans ce sens des dispositions existantes devrait suffire, interprétation que nous souhaitons vous entendre formuler, monsieur le sécrétaire d'Etat.
Le second point est relatif aux réseaux de chaleur. Du point de vue de la commission des finances, ceux-ci sont clairement exclus du bénéfice du taux réduit pour le bois de chauffage qu'ils achètent, car ils en font un usage commercial et non pas domestique.
Sans doute, monsieur le sécrétaire d'Etat, ces amendements ne touchent-ils pas fondamentalement à l'avenir de la France. Néanmoins, le Sénat est attaché à ce que la volonté qu'il a exprimée, et qui a été partagée par l'Assemblée nationale, puisse connaître une pleine application. On a clairement le sentiment que cette application est aujourd'hui freinée, pour ne pas dire plus, par une interprétation trop restrictive.
Il faut que vous puissiez lever toute ambiguïté, à défaut de quoi nous essayerions de donner au texte une force plus grande.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendemens n°s I-14 rectifié, I-124, I-186 et I-160 ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Je vais tenter de répondre à ce consensus chaleureux autour du bois de chauffage. (Sourires.)
En fait, deux questions distinctes sont posées : la première porte sur l'usage domestique ; la seconde, qui a été soulevée par M. Sergent ainsi que par M. Marini, porte sur les réseaux de chaleur.
S'agissant du premier aspect, M. le rapporteur général, avec une certaine flamme, a souhaité, que le Gouvernement précise ce que l'on doit entendre par « usage domestique ».
Jusqu'au 1er janvier 1997, le taux réduit de TVA ne s'appliquait qu'au bois de chauffage non transformé. Depuis cette date, il s'applique également au bois de chauffage transformé pourvu qu'il s'agisse d'un usage domestique. D'ailleurs, s'il s'agissait d'un usage professionnel, la question n'aurait guère de sens, car les professionnels qui brûleraient ce bois de chauffage pourraient déduire la TVA de leurs dépenses.
La question brûlante est de savoir ce qu'est l'usage domestique. Je reconnais qu'il existe effectivement un certain flou concernant la définition de l'usage domestique et donc l'application de l'instruction.
Au nom du Gouvernement, je prends l'engagement de veiller à ce que l'instruction qui précisera ce qu'est un usage domestique en donne une définition suffisamment large. Je crois que cela rejoint très largement le voeu ici exprimé de ne voir écartés du taux réduit que les usages véritablement professionnels.
Ainsi, lorsque des locaux collectifs tels que des maisons de retraite ou des hôpitaux, qui sont considérés comme des locaux d'hébergement, utilisent du bois de chauffage pour assurer le confort des personnes qu'ils accueillent, il faut y voir un usage domestique.
La question portant sur les réseaux de chaleur est de nature différente. Par ce biais, MM. Sergent et Marini souhaitent développer dans notre économie l'usage de cette énergie renouvelable qu'est le bois de chauffage.
A cet égard, deux difficultés se présentent.
D'une part, suivant la source d'énergie utilisée, les réseaux seraient assujettis à des taux de TVA différents, ce qui entache cette proposition d'une certaine fumée fiscale, nonobstant l'excellente intention qui l'inspire.
D'autre part, l'Union européenne - en matière de TVA, on est souvent amené à l'invoquer - n'autorise pas, actuellement, une telle extension.
Certes, l'essor de l'usage du bois de chauffage va dans le sens du développement durable et les propositions de M. Sergent et de M. Marini ouvrent la voie à une fiscalité plus écologique, mais nous devrons resituer ce problème dans le cadre de la réflexion plus large sur la fiscalité écologique, qui devrait déboucher sur des mesures concrètes dans la loi de finances pour 1999.
J'invite donc M. Sergent et M. Marini à bien vouloir retirer leurs amendements.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Alain Lambert, rapporteur général. Compte tenu des explications qui viennent d'être données par M. le secrétaire d'Etat, je pense que nous allons connaître une application plus satisfaisante des dispositions qui ont été adoptées l'an dernier par le Parlement, sur l'initiative du Sénat.
En espérant vivement que nous n'aurons pas à déposer ultérieurement un semblable amendement, monsieur le secrétaire d'Etat, je retire l'amendement n° I-14 rectifié.
M. le président. L'amendement n° I-14 rectifié est retiré.
Monsieur Sergent, l'amendement n° I-124 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Sergent. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-124 est retiré.
Monsieur Egu, l'amendement n° I-186 est-il maintenu ?
M. André Egu. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-186 est retiré.
Monsieur Marini, l'amendement n° I-160 subit-il le même sort ?
M. Philippe Marini. Je le retire, monsieur le président, en attendant l'épisode suivant !
M. le président. L'amendement n° I-160 est retiré.
La suite de la discussion du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

3

communication de l'adoption définitive
de propositions d'actes communautaires

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre une communication, en date du 21 novembre 1997, l'informant que :
- la proposition d'acte communautaire E 609 : « proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 89/647/CEE du Conseil relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit » a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 17 novembre 1997 ;
- la proposition d'acte communautaire E 652 : « proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de l'article 12 de la directive 77/780/CEE visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, des articles 2, 6, 7, 8 et des annexes II et III de la directive 89/647/CEE relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit, ainsi que de l'article 2 et de l'annexe II de la directive 96/6/CEE sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit ( corrigendum au COM [96] 183 final/ E 638) » a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 17 novembre 1997 ;
- la proposition d'acte communautaire E 783 : « proposition de décision du Conseil portant attribution d'une aide financière exceptionnelle à l'Arménie, à la Géorgie et, le cas échéant, au Tadjikistan » a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 17 novembre 1997 ;
- et la proposition d'acte communautaire E 893 : « proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 93/6/CEE du Conseil sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit » a été adoptée définitivement par les instances communautaires par décision du Conseil du 17 novembre 1997.

4

transmission de projets de loi

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du quatrième protocole (services de télécommunications de base) annexé à l'accord général sur le commerce des services.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 103, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie relatif au règlement définitif des créances réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai 1945 sous forme de mémorandum d'accord et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie sur le règlement définitif des créances réciproques financières et réelles apparues antérieurement au 9 mai 1945.
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 104, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

5

dépôt de propositions d'actes
communautaires

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil portant application de l'article 6 des règlements CE n° 3281/94 et CE n° 1256/96 du Conseil relatifs aux schémas pluriannuels de préférences tarifaires généralisées pour certains produits industriels et agricoles originaires de pays en développement, prévoyant l'exclusion des pays bénéficiaires les plus avancés du bénéfice des préférences tarifaires généralisées.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 962 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement CE n° 702/97 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires autonomes pour certains produits de la pêche.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 963 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires communautaires pour certains produits de la pêche, originaires de Ceuta.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 964 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil relatif à l'organisation d'une enquête par sondage sur les forces de travail dans la Communauté.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 965 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant le règlement CEE n° 2658/87 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun en accordant, à titre autonome, une exemption temporaire des droits de douane pour certaines turbines à gaz.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 966 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de décision du Conseil et de la Commission relative à la conclusion de l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Fédération de Russie, d'autre part. Proposition de décision du Conseil et de la Commission relative à la conclusion d'un protocole à l'accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et la Fédération de Russie, d'autre part.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 967 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- proposition de règlement (CE) du Conseil modifiant l'annexe du règlement CE n° 1255/96 du Conseil portant suspension temporaire des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits industriels et agricoles.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E 968 et distribuée.

6

ORDRE DU JOUR

M. le Président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, mardi 25 novembre 1997, à neuf heures trente, à quinze heures et le soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (n°s 84 et 85, 1997-1998).
M. Alain Lambert, rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Première partie (suite). - Conditions générales de l'équilibre financier :
Articles additionnels après l'article 11 à article 25 et état A.
Aucun amendement aux articles de la première partie de ce projet de loi de finances n'est plus recevable.

Vote de l'ensemble de la première partie
du projet de loi de finances pour 1998

En application de l'article 59, premier alinéa, du règlement, il sera procédé à un scrutin public ordinaire lors du vote de la première partie du projet de loi de finances pour 1998.

Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen des crédits
de chaque ministère

Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.

Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires
pour le projet de loi de finances pour 1998

Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires et articles rattachés du projet de loi de finances pour 1998 est fixé à la veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée le mardi 25 novembre 1997, à zéro heure vingt-cinq.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du lundi 24 novembre 1997


SCRUTIN (n° 16)



sur l'amendement n° I-4 rectifié, présenté par M. Alain Lambert au nom de la commission des finances, à l'article 2 du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (barème de l'impôt).


Nombre de votants : 312
Nombre de suffrages exprimés : 296
Pour : 205
Contre : 91

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Abstentions : 16.
N'ont pas pris part au vote : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Pour : 95.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 44.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan


Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Souplet



Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre

René Trégouët



François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade



Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions




Georges Berchet
Jacques Bimbenet
Guy Cabanel
Henri Collard
Fernand Demilly



Jean François-Poncet
Paul Girod
Pierre Jeambrun
Bernard Joly
Pierre Laffitte
François Lesein



Georges Mouly
Georges Othily
Jean-Marie Rausch
Raymond Soucaret
André Vallet

N'ont pas pris part au vote


MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Delaneau, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 310
Nombre de suffrages exprimés : 294
Majorité absolue des suffrages exprimés : 148
Pour l'adoption : 204
Contre : 90

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 17)



sur l'amendement n° I-182, présenté par M. Jacques Machet et les membres du groupe de l'Union centriste, à l'article 2 du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (limitation des effets de la réduction de l'avantage procuré par la demi-part supplémentaire dont bénéficient les veufs, divorcés et célibataires ayant élevé seuls un ou plusieurs enfants).


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 312
Pour : 237
Contre : 75

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 16.
Abstentions : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Pour : 95.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 44.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jean Derian
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Michel Duffour
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Jean-Marie Rausch
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy


Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Marcel Bony
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Léon Fatous
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Paul Raoult
René Régnault
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Delaneau, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 313
Majorité absolue des suffrages exprimés : 157
Pour l'adoption : 238
Contre : 75

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 18)



sur l'amendement n° I-5, présenté par M. Alain Lambert au nom de la commission des finances, à l'article 2 du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (réduction de la décote).


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 216
Contre : 97

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 11.
Contre : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
Abstentions : 5. _ MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun, Bernard Joly, François Lesein et Georges Mouly.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :
Pour : 95.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 44.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Jean Delaneau, qui présidait la séance.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët


François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstentions


MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun, Bernard Joly, François Lesein et Georges Mouly.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Jean Delaneau, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 319
Nombre de suffrages exprimés : 313
Majorité absolue des suffrages exprimés : 157
Pour l'adoption : 216
Contre : 97

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 19)



sur l'amendement I-210, présenté par MM. Christian Poncelet, Alain Lambert et Maurice Blin au nom de la commission des finances, tendant à insérer un article additionnel après l'article 8 du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (déductions forfaitaires supplémentaires de certaines professions).


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 317
Pour : 317
Contre : 0

Compte tenu de la rectification annoncée en séance publique immédiatement après l'annonce des résultats du scrutin.
Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Pour : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 22.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Pour : 94.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Pour : 74.
Abstention : 1. _ M. Michel Charasse.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 45.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


François Abadie
Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Guy Allouche
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Bernard Angels
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Michel Bécot
Henri Belcour
Jacques Bellanger
Claude Belot
Georges Berchet
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
Marcel Bony
James Bordas
Didier Borotra
Nicole Borvo
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
André Boyer
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Monique Cerisier-ben Guiga
Gérard César
Gilbert Chabroux
Marcel Charmant
Michel Charzat
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
William Chervy
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Yvon Collin
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Raymond Courrière
Roland Courteau
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Marcel Debarge
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Bertrand Delanoë
Jean-Paul Delevoye
Gérard Delfau
Jacques Delong
Jean-Pierre Demerliat
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Jean Derian
Dinah Derycke
Charles Descours
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Michel Dreyfus-Schmidt
Alain Dufaut
Michel Duffour
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Claude Estier
Hubert Falco
Léon Fatous
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Guy Fischer
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Aubert Garcia
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Roger Hesling
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Roland Huguet
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Philippe Labeyrie
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Serge Lagauche
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Dominique Larifla
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Pierre Lefebvre
Jacques Legendre
Guy Lèguevaques
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Claude Lise
Maurice Lombard
Paul Loridant
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Hélène Luc
Jacques Machet
Jean Madelain
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Kléber Malécot
André Maman
Michel Manet
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Marc Massion
Paul Masson
Serge Mathieu
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Minetti
Gérard Miquel
Louis Moinard
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Robert Pagès
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Jean-Marc Pastor
Michel Pelchat
Guy Penne
Jean Pépin
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Alain Peyrefitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jean Puech
Roger Quilliot
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jack Ralite
Paul Raoult
Jean-Marie Rausch
René Régnault
Ivan Renar
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Roger Rinchet
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Gérard Roujas
André Rouvière
Michel Rufin
Claude Saunier
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Fernand Tardy
Martial Taugourdeau
Odette Terrade
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Henri Weber

Abstention


M. Michel Charasse.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages exprimés : 313
Majorité absolue des suffrages exprimés : 157
Pour l'adoption : 313
Contre : 0

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés, conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 20)



sur l'amendement I-11, présenté par M. Alain Lambert au nom de la commission des finances, tendant à supprimer l'article 9 du projet de loi de finances pour 1998, adopté par l'Assemblée nationale (rétablissement de la réduction d'impôt au titre des frais de scolarité).


Nombre de votants : 318
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 217
Contre : 98

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (16) :
Contre : 16.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (22) :

Pour : 13.
Contre : 6. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Robert-Paul Vigouroux.
Abstentions : 3. _ MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun et François Lesein.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (95) :

Pour : 93.
Contre : 1. _ M. Emmanuel Hamel.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Gérard Larcher, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (75) :

Contre : 75.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (58) :

Pour : 57.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (45) :

Pour : 45.

Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (9) :

Pour : 9.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Michel Barnier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
Jean Bizet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Gérard Fayolle
Hilaire Flandre
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gélard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Jean-Pierre Raffarin
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët


François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
Bernard Angels
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Monique Cerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Jean Derian
Dinah Derycke
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Michel Duffour
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Aubert Garcia
Emmanuel Hamel
Claude Haut
Roger Hesling
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Dominique Larifla
Pierre Lefebvre
Guy Lèguevaques
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Jean-Baptiste Motroni
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Bernard Piras
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Régnault
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
Odette Terrade
Paul Vergès
André Vezinhet
Marcel Vidal
Robert-Paul Vigouroux
Henri Weber

Abstentions


MM. Georges Berchet, Pierre Jeambrun et François Lesein.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Gérard Larcher, qui présidait la séance.

Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.