SOMMAIRE


PRÉSIDENCE DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT

1. Procès-verbal (p. 0 ).

2. Missions d'information (p. 1 ).

3. Programmation militaire pour les années 1997 à 2002. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence (p. 2 ).
M. le président.
M. Charles Millon, ministre de la défense.

Exception d'irrecevabilité (p. 3 )

Motion n° 7 de Mme Luc. - Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Xavier de Villepin, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées ; le ministre. - Rejet par scrutin public.

Question préalable (p. 4 )

Motion n° 3 de M. Estier. - MM. Claude Estier, le rapporteur, le ministre, Guy Cabanel, Michel Caldaguès. - Rejet par scrutin public.

Article 1er (et rapport annexé) (p. 5 )

Amendement n° 10 de M. Bécart. - MM. Bécart, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 11 de M. Bécart. - MM. Bécart, le rapporteur, le ministre, Delanoë. - Rejet.
Amendement n° 12 de M. Bécart. - MM. Bécart, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement n° 1 de M. Calmejane. - MM. Camoin, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 8 du Gouvernement. - MM. le ministre, le rapporteur.

Suspension et reprise de la séance (p. 6 )

MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 8.
Amendements n°s 13 à 15 de M. Bécart et 9 rectifié de M. Alloncle. - MM. Caldaguès, Bécart, le rapporteur, le ministre. - Retrait de l'amendement n° 9 rectifié ; rejet des amendements n°s 13 à 15.
Amendement n° 4 de M. Demilly. - MM. Demilly, le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement n° 2 de M. Calmejane. - M. Camoin. - Retrait.
Amendement n° 16 de M. Bécart. - MM. Bécart, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Adoption de l'article et du rapport annexé.

Articles 2, 2 bis et 3. - Adoption (p. 7 )

Article 4 (p. 8 )

Amendements n°s 6 de M. Marini et 5 rectifié de M. Bourges. - MM. Trucy, Bourges. - Retrait des deux amendements.
Adoption de l'article.

Article 5. - Adoption (p. 9 )

Vote sur l'ensemble (p. 10 )

MM. Emmanuel Hamel, Serge Vinçon, Claude Estier, François Trucy, Pierre Laffitte, André Maman.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
M. le ministre.

Suspension et reprise de la séance (p. 11 )

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

4. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 12 ).

GESTION DU PERSONNEL INAPTE AU TRAVAIL
DANS LES PETITES ENTREPRISES (p. 13 )

M. Jean Clouet, Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi.

DIFFICULTÉS DE LA SOCIÉTÉ EUROCOPTER (p. 14 )

MM. André Vallet, Charles Millon, ministre de la défense.

INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
ET TRAITEMENT DU CANCER DU SEIN (p. 15 )

Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.

MESURES DE SOUTIEN
EN FAVEUR DE LA FILIÈRE BOVINE (p. 16 )

MM. Roger Besse, Alain Lamassoure, ministre délégué au budget.

PROCESSUS DE PAIX EN BOSNIE (p. 17 )

Mme Josette Durrieu, M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères.

MAINTIEN DE LA PROTECTION SOCIALE
DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER (p. 18 )

MM. Jean-Pierre Cantegrit, Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères.

RESTRUCTURATIONS MILITAIRES
ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE (p. 19 )

MM. François Trucy, Charles Millon, ministre de la défense.

SOMMET EUROPÉEN DE FLORENCE (p. 20 )

MM. Alain Gérard, Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères.

CRISE DE L'ÉLEVAGE BOVIN (p. 21 )

MM. Paul Raoult, Alain Lamassoure, ministre délégué au budget.

AMÉNAGEMENT DU PARC DE SAINT-CLOUD (p. 22 )

M. Denis Badré, Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement.

MOYENS ATTRIBUÉS AUX CENTRES DE LUTTE
CONTRE LA TOXICOMANIE (p. 23 )

MM. Philippe Darniche, Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.

Suspension et reprise de la séance (p. 24 )

PRÉSIDENCE DE M. YVES GUÉNA

5. Mise au point au sujet d'un vote (p. 25 ).
MM. Raymond Soucaret, le président.

6. Attentat contre un élu corse (p. 26 ).
Mme Hélène Luc, M. le président.

7. Lois de financement de la sécurité sociale. - Adoption d'un projet de loi organique en deuxième lecture (p. 27 ).
Discussion générale : MM. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale ; Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois ; Jean-Luc Mélenchon, Robert Pagès, Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement.
Clôture de la discussion générale.

Question préalable (p. 28 )

Motion n° 5 de M. Metzinger. - MM. Charles Metzinger, le rapporteur, le ministre, Jean-Luc Mélenchon, Robert Pagès. - Rejet par scrutin public.

Article 2 (p. 29 )

ARTICLE L.O. 111-3
DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE (p. 30 )

Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Metzinger. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

ARTICLE L.O. 111-4
DU CODE PRÉCITÉ. - ADOPTION (p. 31 )

ARTICLE L.O. 111-6 DU CODE PRÉCITÉ (p. 32 )

Amendement n° 2 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Larché, président de la commission des lois. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

ARTICLE L.O. 111-7 DU CODE PRÉCITÉ (p. 33 )

Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.

ARTICLE L.O. 111-8
DU CODE PRÉCITÉ (SUPPRIMÉ) (p. 34 )

Adoption de l'article modifié.

Article 4. - Adoption (p. 35 )

Vote sur l'ensemble (p. 36 )

MM. Charles Metzinger, André Maman.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi organique.

8. Saisine du Conseil constitutionnel (p. 37 ).

9. Transmission de projets de loi (p. 38 ).

10. Dépôt d'une proposition de résolution (p. 39 ).

11. Dépôt de propositions d'acte communautaire (p. 40 ).

12. Dépôt d'un rapport (p. 41 ).

13. Dépôt d'un rapport d'information (p. 42 ).

14. Ordre du jour (p. 43 ).



COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE
DE M. MICHEL DREYFUS-SCHMIDT
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

PROCÈS-VERBAL

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

MISSIONS D'INFORMATION

M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen des demandes d'autorisation de missions d'information suivantes :
1° Demande présentée par la commission des affaires culturelles tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information sur la francophonie et l'enseignement du français en République socialiste du Viêt Nam ;
2° Demande présentée par la commission des affaires sociales tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information sur les conditions de renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité des produits thérapeutiques ;
3° Demande présentée par la commission des lois tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information au Liban afin d'étudier les problèmes d'ordre constitutionnel et juridique posés par l'évolution institutionnelle de ce pays.
Il a été donné connaissance de ces demandes au Sénat au cours de sa séance du mardi 11 juin 1996.
Je vais consulter sur ces demandes.
Il n'y a pas d'opposition ?...
En conséquence, les trois commissions permanentes intéressées sont autorisées, en application de l'article 21 du règlement, à désigner ces missions d'information.

3

PROGRAMMATION MILITAIRE
POUR LES ANNEES 1997 A 2002

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
déclaré d'urgence

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 415, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002. [Rapport n° 427 (1995-1996) et avis n° 430 (1995-1996).]
J'informe le Sénat que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi actuellement en discussion.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
La nomination des représentants du Sénat à la commission mixte paritaire pourrait ainsi avoir lieu aussitôt après le vote sur l'ensemble du projet de loi, si le Gouvernement formulait effectivement sa demande.
Je rappelle que la discussion générale a été close hier.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, mesdames, messieurs les sénateurs, au terme de cette discussion générale, permettez-moi tout d'abord d'adresser mes remerciements à toutes celles et à tous ceux qui ont bien voulu participer à ce grand débat, souhaité par M. le Président de la République et qui nous permet aujourd'hui de nous retrouver autour du thème de la défense de la nation, du lien armée-nation et de la citoyenneté.
J'ai bien noté la gravité des propos qui ont été tenus. Comme vous, je sais la dimension de l'acte que vous êtes en train d'accomplir, dans le cadre de la grande réforme annoncée et initiée par M. le Président de la République.
Je tiens tout d'abord à remercier chacun des orateurs qui se sont exprimés, et vous comprendrez que mes remerciements aillent particulièrement à M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, dont le rapport écrit constitue une remarquable analyse du texte qui vous est soumis et dont le soutien lucide et vigilant n'a jamais fait défaut au Gouvernement, et donc au ministre de la défense.
Je remercie également MM. Maurice Blin et François Trucy, qui se sont exprimés au nom de la commission des finances avec la compétence qu'on leur connaît.
Ma gratitude va, enfin, aux porte-parole de la majorité sénatoriale, MM. Guy Cabanel, Yvon Bourges, Serge Vinçon, Bernard Plasait et Jacques Genton, qui ont apporté l'appui de leur groupe à la réforme qui s'engage.
Avant de répondre aux questions qui m'ont été posées sur les aspects financiers, humains ou industriels de la programmation, je voudrais, si vous le permettez, revenir quelques instant sur l'environnement stratégique et diplomatique dans lequel s'inscrit la réforme de notre appareil de défense.
En effet, vous êtes un certain nombre - MM. Jacques Genton, Bernard Plasait, Guy Penne et Bertrand Delanoë - à m'avoir interpellé sur cet environnement stratégique et diplomatique. C'est la raison pour laquelle je voudrais, tant sur le plan européen que sur le plan de l'Union de l'Europe occidentale, l'UEO, et sur le plan de la rénovation de l'Alliance atlantique, vous apporter un certain nombre de précisions.
Tout d'abord, pour ce qui est de la conférence inter-gouvernementale, je vous indique que nous en attendons une impulsion politique pour rendre plus visible la solidarité entre les membres de l'Union, plus efficace l'action collective des Européens et plus ambitieuse la perspective d'une politique de défense commune.
Cela implique - et je me permets de le rappeler - l'établissement d'une clause de solidarité politique entre les Etats membres de l'Union européenne. Vous savez que c'est là un objectif que cherchent à atteindre conjointement le chancelier Kohl et le président Chirac. J'émets le voeu que, rapidement, cette clause de solidarité politique entre les Etats membres de l'Union puisse être établie.
Cela implique également l'affirmation du rôle du Conseil européen sur les questions touchant à la politique de défense. En effet, c'est de la légitimité du Conseil que procède la décision.
Cela implique, en outre, des progrès dans la définition de ce qu'est une politique de défense commune, qui couvre à la fois les aspects militaires et les questions d'armement.
Cela implique, enfin, des mécanismes de décision souples, s'appuyant sur le recours à l'UEO et, si nécessaire, sur des ententes spécifiques, à géométrie variable, entre les Etats les plus engagés dans la construction européenne.
Un certain nombre d'entre vous m'ont interpellé sur le rôle de l'UEO, sur le rôle de l'OTAN et sur la construction européenne. Certains propos m'ont étonné.
Les propos de M. Delanoë, comme ceux qui ont été tenus par M. Penne, me paraissent un peu brefs dans l'analyse qui les sous-tend et un peu inadaptés à l'analyse qu'ils ont pu faire. S'ils le permettent, je vais leur donner un certain nombre d'éléments de réponse.
Je dirai tout d'abord à M. Delanoë, qui semblait regretter que l'Europe de la défense ne progresse pas, qu'elle a fait des pas de géant ces derniers mois.
M. Serge Vinçon. Tout à fait !
M. Charles Millon, ministre de la défense. S'il n'en est pas persuadé, je lui demande de relire tout simplement les comptes rendus de l'actualité. Il constatera que l'Europe du renseignement date non pas d'avant-mai 1995, mais des mois qui se sont écoulés depuis lors. Il constatera aussi que Hélios II, Horus, toute la politique qui est à la base même de l'Europe du renseignement et qui est en train de se constituer à partir du pôle franco-allemand date de ces derniers mois.
M. Josselin de Rohan. Très juste !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Par ailleurs, il constatera que, s'agissant de l'armement, si des voeux ont été émis depuis des décennies par un certain nombre d'hommes politiques, la constitution de l'Europe de l'armement date des mois derniers : c'est la constitution de l'Agence franco-allemande de l'armement, c'est la mise au point d'une démarche européenne. On s'aperçoit aujourd'hui de la réussite de cette politique puisque la Grande-Bretagne et l'Italie demandent à être associées à la démarche franco-allemande en matière d'armement.
Enfin, l'Europe de la défense a avancé aussi à travers les structures de commandement. M. Delanoë le sait bien, puisqu'il a lu, comme vous tous, le projet de loi de programmation militaire. Il a pu constater que, dans ce texte, il y a des structures de commandement projetables. Elles sont inscrites non pas pour le principe, mais pour permettre à la France de participer à la constitution de groupements de forces interarmées multinationales et à l'identité européenne de défense.
Aussi, je ne voudrais pas que M. Delanoë tombe dans le pessimisme noir. Puisqu'il a émis des voeux pour que nous poursuivions notre action dans le domaine spatial, qu'il en prenne acte, c'est fait. Je le remercie d'ailleurs, car il l'a dit d'une manière directe dans son propos. (M. Delanoë acquiesce.)
S'agissant de la dissuasion, il a expliqué que la fermeture du site d'Albion serait le résultat d'une approche budgétaire. Or elle est le résultat d'une analyse stratégique.
M. Josselin de Rohan. Très bien !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je suis prêt à le démontrer une fois de plus : cela n'a rien à voir avec une analyse budgétaire. D'ailleurs, M. Delanoë est un parlementaire trop averti pour ne pas savoir que le choix qui a été effectué, par exemple dans le domaine des sous-marins nucléaires lanceurs d'engins nouvelle génération, est plus coûteux sur le plan budgétaire, mais meilleur sur le plan stratégique.
Enfin, il a abordé la question de l'ATF, l'avion de transport futur. A cet égard, il a émis un certain nombre de réserves. J'aurai l'occasion d'y revenir tout à l'heure. En effet, il s'agit, selon moi, d'un problème exemplaire, car il est à la base d'une démarche européenne qui, je l'espère, sera prémonitoire.
Je voudrais répondre à M. Delanoë sur la question des GFIM, les groupements de forces interarmées multinationales, tels qu'ils ont été prévus à Berlin par le conseil de l'OTAN.
Je voudrais aussi revenir sur la question de la Bosnie car vous avez, monsieur le sénateur, ironisé...
M. Bertrand Delanoë. Il n'y avait pas d'ironie !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... en expliquant que c'était sans doute une bonne porte de sortie pour les Américains...
M. Bertrand Delanoë. Eh oui !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... que de nous laisser en Bosnie avec un GFIM qui ne serait composé que d'Européens, ce qui permettrait ainsi aux Etat-Unis de conserver le contrôle de l'opération sans pour autant que leurs propres hommes soient impliqués.
Monsieur Delanoë, vous vous êtes trompé de lecture ! Il s'agit là de la proposition de M. Rocard. Le Gouvernement français n'a jamais proposé une telle chose !
Je vous dis donc très clairement que nous ne partageons pas l'analyse de M. Rocard sur cette question. Puisque nous sommes arrivés en Bosnie conjointement avec les Américains, les Anglais, les Allemands, les Italiens et les Espagnols, nous souhaitons nous retirer de ce pays en même temps qu'eux. Par conséquent, il n'est pas question pour nous de nous prêter à une manoeuvre telle que celle que vous redoutez.
M. Penne a décrit un certain nombre de poncifs que je ne comprends pas très bien. Il nous a expliqué que, du fait de la stratégie décidée par le Président de la République, nous allions maintenant être complètement sous le contrôle américain, et il a tenté de donner un certain nombre d'illustrations à cet égard.
Je lui rappellerai que, durant la guerre du Golfe, la coalition a été dirigée par les Etats-Unis, François Mitterrand étant alors Président de la République.
M. Josselin de Rohan. Cela ne l'a pas troublé !
M. Charles Millon, ministre de la défense. En Bosnie, la force de réaction rapide a été mise au point par les Anglais et les Français, en l'absence des Américains, le Président de la République étant M. Jacques Chirac.
A partir de ce moment, il faut rendre à César ce qui est à César : s'il est vrai que, pendant la guerre du Golfe, la France s'est jointe à une coalition dirigée par les Etats-Unis, il est vrai aussi que, en 1995, avec la constitution de la force de réaction rapide, la France a permis la mise en place de la première force européenne à même de réagir à un événement qui concernait notre continent.
Aussi, je tiens à dire à M. Guy Penne qu'il ne convient pas d'aller trop vite dans ce domaine.
M. Penne a souhaité que l'on puisse mettre au point des coalitions qui soient adaptées à telle ou telle situation. Je lui rappellerai que les GFIM les groupes de forces interarmées multinationales, ont pour mission de faire face à tel ou tel objectif stratégique et militaire qui aura été désigné. Ces opérations s'effectueront, après un vote unanime du Conseil atlantique, sous le contrôle politique et militaire de l'UEO.
J'indique aux différents orateurs qui se sont exprimés sur ce sujet qu'il n'est pas question de droit de veto de la part des Etats-Unis. Il est simplement question de respecter les procédures de l'OTAN qui requièrent, pour une intervention extérieure, une décision unanime du Conseil atlantique. Il était à mon avis nécessaire de revenir sur ces différents points.
S'agissant de l'UEO, je souhaite rappeler les principes retenus à Berlin et leurs conséquences.
Le communiqué de Berlin permet de relancer l'action de l'UEO sur des bases claires, le rôle de l'organisation européenne étant pleinement reconnu par l'OTAN, y compris par les Etats-Unis. L'UEO sera, grâce à son conseil et aux organismes politico-militaires, le bras exécutif des Européens en cas d'opérations qui seraient conduites par eux seuls et auxquelles les Etats-Unis décideraient de ne pas participer.
Enfin, à l'égard de l'OTAN, l'UEO jouera un rôle d'impulsion et de proposition au cours des prochains mois, car il lui appartient de déterminer les principales hypothèses dans lesquelles elle serait amenée à agir et les grandes catégories de besoins qui en résultent.
Par conséquent, grâce à la décision de Berlin, l'UEO, comme l'ont dit certains de ses responsables, est passée du rêve à la réalité, du projet à la mise en pratique d'un certain nombre d'objectifs définis par les pays européens. Voilà qui devrait rassurer ceux qui étaient inquiets sur l'avenir de cette organisation.
Les Européens doivent, à mon avis, continuer à développer des capacités de commandement interarmées et des forces comme moyens de soutien utilisables aussi bien dans le cadre de l'Alliance atlantique que dans les opérations dirigées par l'UEO.
Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques réflexions que je voulais vous livrer sur l'environnement stratégique et politique, surtout sur les questions européennes, sur l'OTAN et sur l'UEO. En effet, il me semble tout à fait déplacé de dire que la démarche française renoncerait à une dimension européenne. Au contraire, je suis convaincu que les accords de Berlin, comme les accords passés aujourd'hui dans le cadre de l'OTAN et de l'UEO, sont là pour permettre l'affirmation de l'identité européenne de défense dans le cadre d'une nouvelle Alliance. C'est l'objectif qui avait été tracé par le Président de la République. C'est l'objectif qui, aujourd'hui, est mis en oeuvre par toute l'Union européenne.
Après les questions d'environnement stratégique, je voudrais aborder les questions financières.
Je tiens tout d'abord à indiquer que j'ai été étonné par le ton du propos de M. Delanoë. A l'entendre, le Gouvernement devrait tout à la fois réduire les déficits publics et accroître l'effort de défense, augmenter les crédits consacrés à l'équipement des forces et financer leur professionnalisation,...
M. Bertrand Delanoë. Ah non ! Il faut diminuer les crédits de fonctionnement !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... maintenir une armée conventionnelle et la composante terrestre de notre force de dissuasion. Je n'ose évaluer le coût des programmes dont vous avez dressé la liste à cette tribune, monsieur le sénateur.
M. Josselin de Rohan. Cela ne les gêne pas !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Dois-je vous rappeler que les gouvernements socialistes des années 1992 et 1993 ont supprimé près de 40 000 emplois dans les armées et que notre industrie d'armement a perdu 10 000 emplois par an depuis dix ans ? C'est à partir de ces rappels que vous devriez ciseler votre jugement, monsieur le sénateur, car il ne me paraît pas tout à fait responsable de réclamer des dépenses et, en même temps, une gestion rigoureuse des recettes.
M. Bertrand Delanoë. Il ne fallait pas augmenter les crédits de fonctionnement !
M. Charles Millon, ministre de la défense. M. Billard demande, quant à lui, un fort accroissement des crédits de la marine. Est-ce bien compatible avec la proposition du groupe communiste républicain et citoyen d'un titre V de 70 ou 75 milliards de francs ?
Quant à M. Philippe Madrelle, rien n'a résisté à sa critique ! Il a réclamé des augmentations de dépenses à peu près sur toutes les lignes budgétaires de la loi de programmation, sans pour autant faire parallèlement aucune proposition d'augmentation des recettes.
Il convient donc de rappeler que la loi de programmation est aussi un exercice financier et budgétaire, et que l'on ne peut programmer des équipements sans en programmer parallèlement les ressources.
J'en viens maintenant aux questions proprement financières qui ont été soulevées par plusieurs orateurs. Nombre d'entre elles ont trait au respect de la programmation, qui a été évoquée notamment par MM. de Villepin, Cabanel, Trucy, Vinçon et Genton.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous savez l'importance que revêt, pour nos armées et pour notre industrie de défense, la programmation à moyen terme des ressources humaines et financières que la nation est prête à consacrer à sa défense.
Vous connaissez les conséquences de l'absence de programmation ou, lorsqu'elle existe, de l'irréalisme des prévisions qu'elle contient. En témoignent les 12 milliards de francs d'annulations supportés par le budget d'équipement des armées en 1995 et le gel de 7 milliards de francs qui a affecté le titre V du département de la défense à la fin de ce même exercice, comme M. Cabanel l'a opportunément rappelé dans son intervention.
Vous mesurez donc, j'en suis persuadé, tout l'intérêt d'une programmation dans la période de très profond changement qu'aborde notre appareil de défense.
Redonner son sens à la programmation militaire, tel était le premier objectif que s'est assigné le Gouvernement.
C'est la raison pour laquelle il a inscrit la programmation pour les années 1997 à 2002 dans une planification qui va de 1997 à 2015.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a retenu un niveau de ressources réaliste et constant pour les six prochaines années.
C'est la raison pour laquelle il a soigneusement fixé les contours de la programmation. M. Bernard Plasait les a très bien décrits, et je me bornerai donc à les évoquer.
Tout d'abord, la totalité des crédits consacrés à la défense est programmée pour la première fois et répartie entre le titre III et les titres V et VI. Sans doute me direz-vous - et vous aurez raison - que c'est pure logique puisque la professionnalisation est engagée et que, dès lors, on ne peut la réussir qu'avec une bonne programmation du titre III.
Par ailleurs, l'évolution annuelle des différentes catégories d'effectifs du ministère de la défense figure également pour la première fois dans le texte même de la loi.
Ensuite, les dépenses d'investissement sont exprimées en autorisations de programme et en crédits de paiement. M. Yvon Bourges sait à quoi je fais allusion. C'est important pour le ministère de la défense, car cela nous permettra d'avoir une gestion pluriannuelle des investissements.
Enfin, comme en 1994, les ressources destinées aux armées seront actualisées chaque année en fonction de l'indice des prix à la consommation hors tabac qui sert à l'élaboration du budget de l'Etat. Dans les circonstances actuelles, je pense que chacun mesure l'importance de cet engagement.
Dans son rapport écrit et dans son intervention à cette tribune, M. de Villepin a évoqué le respect de la programmation que vous êtes invités à approuver aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs. Comme M. Yvon Bourges, il a indiqué, et je les en remercie tous les deux, que le contexte politique et la détermination affichée par le Président de la République sont de « bon augure ».
De fait, qui mieux que le chef de l'Etat, qui mieux que le chef des armées peut garantir le respect de la programmation ? Croyez bien que je me félicite du fait que le calendrier de la programmation corresponde au calendrier institutionnel, c'est-à-dire que les six prochaines années s'intègrent en totalité dans le mandat de M. Jacques Chirac.
Dans le contexte économique et financier actuel, l'engagement du Président de la République pèse d'un poids considérable, et c'est la raison pour laquelle je me permets d'y insister.
S'agissant des opérations extérieures dont le financement a suscité certaines interrogations, notamment de la part de MM. de Villepin, Blin et Trucy, je vous confirme qu'elles seront désormais classées en deux catégories qui relèveront de modalités de financement différentes ; d'une part, les opérations extérieures courantes devront être prises en charge par le budget du ministère de la défense ; d'autre part, les opérations extérieures exceptionnelles feront, quant à elles, l'objet d'un financement extérieur à la défense. Je ne vais pas décrire le processus qui permettra de distinguer les opérations exceptionnelles des opérations courantes, puisque cela a été fait à cette tribune par les orateurs, en particulier par M. de Villepin.
J'en viens maintenant aux questions de personnels.
A ce stade de mon propos, et même si ce sujet sera abordé de nouveau à l'occasion de l'examen des motions de procédure, je voudrais répondre aux interrogations concernant l'armée professionnelle. A cet égard, M. Paul Girod a fait part de ses inquiétudes légitimes, M. Jean-Luc Mélenchon a exprimé son opposition à la professionnalisation des armées, et un certain nombre d'orateurs ont exposé leurs hésitations.
Je rappellerai qu'il y a une logique qui s'appuie sur une analyse géostratégique faite par le Président de la République. C'est à partir de cette dernière qu'il a été décidé de faire évoluer nos armées de l'armée de conscription à l'armée professionnelle. Cela répond en fait à des besoins géostratégiques : on a constaté à l'évidence - personne aujourd'hui ne le conteste - que la menace se situe non plus à nos frontières, mais à des centaines ou à des milliers de kilomètres, et qu'elle exige des forces mobiles, efficaces, disponibles, professionnelles.
A partir de ce moment-là, la décision a été prise par le Président de la République de proposer au Parlement le passage de l'armée de conscription à l'armée professionnelle dans les six ans à venir.
Mais je me dois de répondre à un certain nombre d'objections qui ont été formulées soit par M. Paul Girod, soit par M. Mélenchon.
M. Paul Girod a soulevé le problème des menaces intérieures et s'est posé la question de savoir si le passage à une armée professionnelle permettrait de faire face à des risques tels que le terrorisme ou tels que ceux qui sont couverts par des opérations du type Vigipirate.
Je rappelle que l'armée de conscription actuelle comprend six cent mille hommes, civils et militaires, dont deux cent mille appelés. Demain, l'armée professionnelle comportera quatre cent quarante mille hommes, civils et militaires, plus cent mille vrais réservistes, c'est-à-dire des femmes et des hommes qui seront entraînés pour pouvoir soit prendre en charge des activités complémentaires, soit se substituer à des professionnels pour un certain nombre de tâches. A partir de ce moment - là, des missions telles que le plan Vigipirate pourront, à l'évidence, être assurées d'une manière plus efficace dans un certain nombre de cas, car ce seront des professionnels qui en assumeront la responsabilité.
Je souhaite répondre maintenant à M. Mélenchon, qui a abordé le sujet de la défense de notre territoire national en parlant de dérive expéditionnaire ; d'autres intervenants y ont d'ailleurs également fait allusion.
Une telle dérive n'existe pas ! Le premier objectif de nos armées est d'assurer la protection de nos intérêts vitaux et de garantir notre intégrité territoriale et notre souveraineté. Toutefois - je le répète une fois de plus à cette tribune - pour pouvoir assurer cette protection et cette garantie, il convient de dissuader, de prévenir, d'avoir la possibilité de projeter des forces, afin d'éteindre des incendies qui déstabiliseraient telle ou telle partie du monde avec, comme conséquence, à terme, la remise en cause de la sécurité française.
Par conséquent, il n'est pas question de dérive expéditionnaire ! Il s'agit simplement de prendre en compte les nouvelles conditions géostratégiques telles qu'elles sont aujourd'hui analysées.
M. Mélenchon a également fait part de son refus de l'armée professionnelle et de son attachement à l'armée de conscription. C'est un autre débat : celui du service national volontaire ou obligatoire. J'aurai sans doute l'occasion d'y revenir soit au cours de cette discussion, soit lors du débat sur le service national qui s'ouvrira à l'automne prochain.
Bien évidemment, il n'est pas question pour nous de défaire le lien armée-nation. Nous souhaitons, au contraire, le maintenir, grâce à un certain nombre de procédures sur lesquelles je reviendrai.
Je rappelle simplement que l'armée professionnelle telle que nous la proposons s'appuie sur trois composantes : des militaires de carrière et des civils, qui en consititueront le noyau dur ; des jeunes gens volontaires, qui apporteront leurs concours aux forces armées ; enfin, des réservistes, dont le rôle sera défini pour les associer plus étroitement aux missions des armées et de la gendarmerie.
Plusieurs d'entre vous, en particulier M. Trucy, ont posé des questions relatives au personnel militaire. Je leur répondrai par écrit de façon très détaillée, s'ils le veulent bien, car le temps ne me permet pas de faire à cette tribune une analyse qui, je le crains, serait fastidieuse.
Permettez-moi, toutefois, de répondre dès maintenant sur certains points.
S'agissant du droit des militaires à poursuivre leur vie professionnelle dans le secteur privé, le Gouvernement a clairement marqué, vous le savez, son attachement à cette mesure en acceptant un amendement tendant à l'inscrire dans le rapport annexé au projet de loi de programmation.
Je rappelle que ce droit figure dans le Livre blanc sur la défense et que je me suis toujours élevé avec la dernière énergie contre les atteintes qui pouvaient lui être portées.
M. Trucy s'est également préoccupé du sort qui est réservé aux contractuels dans le cadre de la professionnalisation.
Conscient des inquiétudes que peuvent ressentir les personnels concernés, je répète devant vous - je me suis déjà exprimé sur ce sujet devant le Conseil supérieur de la fonction militaire - que les contractuels ne seront pas la variable d'ajustement de la professionnalisation. Il ne serait pas responsable de prétendre instaurer cohésion et sérénité, indispensables à l'efficacité de l'armée professionnelle, si l'on plaçait sa création sous le signe de l'exclusion et de la précarité de certaines catégories professionnelles.
Par ailleurs, plusieurs intervenants, notamment MM. Plasait et Bourges, se sont préoccupés de l'avenir des réserves du fait de la professionnalisation.
Je tiens à rappeler que vous serez amenés, dans les mois à venir à délibérer, sur le statut du réserviste. Ce souhait avait été exprimé dans cet hémicycle lors du débat d'orientation.
Ce statut répondra à un certain nombre d'objectifs.
Le premier objectif est de faciliter le lien entre l'armée et le monde économique.
Le deuxième objectif est de permettre à ces réservistes de voir leur fonction reconnue au sein des armées. En effet, vous l'avez bien compris, les réservistes auront un rôle éminent à jouer dans l'organisation de notre défense.
Enfin, le troisième objectif est d'apporter à ces réservistes, à celles et à ceux qui accepteront de consacrer du temps à la défense de la nation, des garanties en ce qui concerne la protection de leur emploi.
Les réserves comporteront deux catégories de personnes : une catégorie, forte de cinquante mille hommes, sera rattachée à la gendarmerie et une catégorie, de cinquante mille hommes aussi, sera rattachée aux armées.
Enfin, outre ces réserves, sera constituée une réserve de femmes et d'hommes reconnus pour leurs compétences ou leurs qualités professionnelles, qui pourront être mobilisés au cas où la France en aurait besoin.
Plusieurs orateurs se sont exprimés sur l'avenir du service national, pour marquer soit leur hostilité soit leur soutien à la réforme.
Le 28 mai dernier, le Président de la République a proposé aux Français de mettre fin, à compter du 1er janvier prochain, au service national actuel de dix mois et de le remplacer par une courte période obligatoire - le « rendez-vous citoyen » - à laquelle seraient associées des formes civiles et militaires de volontariat.
Dans la perspective du débat qui aura lieu au Parlement, il appartient maintenant au Gouvernement de donner corps à ces orientations, c'est-à-dire de déterminer le contenu exact de ce rendez-vous citoyen et du volontariat.
Cela étant, comme MM. Hérisson, Clouet, de Villepin, Trucy et Bourges l'ont souligné, le coût de ce rendez-vous citoyen pèsera en partie sur le ministère de la défense. Du reste, c'est ce qui a conduit le Gouvernement à présenter dans le présent projet de loi de programmation militaire un amendement tendant à rétablir les effectifs de la Direction centrale du service national. Cet amendement a pour objet d'organiser d'ores et déjà les bases du rendez-vous citoyen et de permettre au Gouvernement de préparer le projet de loi sur le service national, que j'aurai l'honneur de vous soumettre dans quelques mois.
Je n'aborderai pas le fond du sujet ce matin.
Un certain nombre d'entre vous ont fait part de leurs réticences par rapport à un rendez-vous citoyen qui serait trop court. D'autres ont soulevé la question du volontariat, en précisant qu'il conviendrait d'indiquer très clairement quel type de volontariat pourrait être proposé à la jeunesse de France. D'autres, enfin, ont indiqué qu'il serait sans doute souhaitable de maintenir une formation militaire. Tous ces points feront l'objet du débat sur le service national qui aura lieu au mois d'octobre prochain.
Aujourd'hui, la décision qui vous est soumise tend à programmer le passage d'une armée de conscription à une armée professionnelle durant les six ans à venir. Il s'agit de la disposition essentielle de ce projet de loi de programmation.
J'en viens maintenant aux questions industrielles, et d'abord aux grands équipements.
MM. de Villepin, Cabanel, Husson, Trucy et Vinçon ont exprimé leur inquiétude quant à l'avenir du groupe aéronaval, sa capacité défensive et sa permanence.
Il est prévu, vous le savez, que le Charles-de-Gaulle entre en service au second semestre 1999 et connaisse une première grande période d'entretien programmé en 2004, pour une durée de dix-huit mois.
Le Foch , disponible jusqu'en 1999 puis « mis en sommeil », sera réactivité en 2004. En 2005, le Charles-de-Gaulle assurera donc seul la permanence, avec un potentiel nucléaire de l'ordre de sept ans.
L'objectif de permanence approuvé dans la planification conduirait à prévoir la mise en service d'un second porte-avions à partir de 2011, ce qui suppose une commande vers 2004.
Cet objectif pourra être réalisé, comme le Président de la République l'a indiqué aux délégations de personnel et aux syndicats qu'il a rencontrés à Brest le 14 juin dernier, si les conditions économiques le permettent, en particulier si la démarche de gains de productivité de la direction des constructions navales et de réduction des coûts globaux des programmes d'armement est conduite avec succès.
S'agissant du groupe aérien, le Foch continuera de mettre en oeuvre exclusivement des Super-Etendard et des Crusader. Ces derniers seront retirés du service en 1999 et remplacés progressivement par les premiers Rafale mis en oeuvre par le Charles-de-Gaulle.
La capacité de défense aérienne du groupe sera, certes, amoindrie - j'en conviens - entre 1999 et 2002...
M. Emmanuel Hamel. Ah !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... puis pendant la période d'intérim du Foch en 2004, même si elle est compensée par la présence des Hawkeye. Cela ne compromet pas la capacité de projection de puissance du groupe aéronaval, mais constitue un paramètre supplémentaire à prendre en compte dans l'analyse de situation et la manoeuvre tactique du groupe.
MM. de Villepin, Husson et Blin m'ont interrogé sur l'avenir de l'avion de transport futur. A ce propos, la position du Gouvernement est très claire, et je me permettrai de la répéter une fois de plus, car la position du Gouvernement sur l'ATF touche, bien sûr, à l'industrie de l'armement mais, au-delà, à la construction européenne : il n'est pas question pour la France de renoncer directement ou indirectement à la construction d'un avion de transport de nouvelle génération !
Nous savons bien que, pour pouvoir mettre en oeuvre la projection qui est inscrite dans le Livre blanc pour 1994 et qui est rappelée dans le projet de loi de programmation militaire que j'ai l'honneur de vous présenter, il est indispensable d'avoir une capacité de transport garantie. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit construit un avion de transport de nouvelle génération.
Si un débat doit s'ouvrir, il concernera la procédure retenue pour pouvoir engager la réalisation de cet avion de transport, les modalités de mise en oeuvre à l'échelon européen, la conception, le développement et la construction de cet avion de transport de nouvelle génération.
Je reviendrai brièvement sur nos objectifs.
Il s'agit, d'abord, de promouvoir une offre européenne.
Nous souhaitons, effectivement, l'émergence d'un consortium européen qui pourra prendre en charge le développement et l'industrialisation de l'avion de transport futur.
Nous souhaitons, effectivement, que cette entité industrielle européenne puisse profiter des développements civils qui ont déjà été réalisés, particulièrement avec les appareils Airbus, dont la France et l'Europe peuvent être fiers.
Nous souhaitons, effectivement, que ce consortium ait à construire un avion qui réponde aux principales missions de nos armées, sans pour autant tomber dans une complexité qui entraîne une augmentation des prix parfois totalement insupportable pour les futurs acheteurs.
C'est la raison pour laquelle non seulement nous appelons de nos voeux cette offre européenne, mais nous mettrons tout en oeuvre pour qu'elle se constitue.
Je précise que les Allemands ont rejoint notre analyse, qu'aujourd'hui, donc, Français et Allemands veulent participer à la constitution de cette offre européenne et que, par ailleurs, un certain nombre de contacts sont pris avec nos autres partenaires européens pour que, effectivement, ce consortium intéresse non seulement les grands pays constructeurs, comme l'Allemagne, la France ou la Grande-Bretagne, mais aussi les autres pays ayant des industries aéronautiques, comme l'Italie, l'Espagne ou d'autres. Tel est le premier objectif.
Le second objectif est la constitution d'une demande européenne. Vous avez été un certain nombre, à cette tribune, soit lors du débat d'orientation, soit lors de la discussion générale de ce projet de loi de programmation, à regretter que certains pays européens aillent acheter sur une étagère des produits américains.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que se constitue une demande européenne, c'est-à-dire que les pays européens se solidarisent pour regrouper leurs commandes d'avions de transport futurs de nouvelle génération, que des engagements fermes puissent être pris, pour qu'offre et demande puissent se rencontrer, que l'effet de série puisse jouer, afin de faire baisser les prix et d'alléger ainsi les budgets de la défense, tout en permettant à l'industrie européenne de défense de s'affirmer et de rayonner non seulement en France, non seulement en Europe, mais dans le monde.
Voilà, en fait, quelle est notre démarche, démarche qui a été retenue par le Président de la République et, maintenant, par l'Allemagne et la France.
Je suis convaincu que cette démarche, si elle est maintenue, aboutira. Je suis convaincu aussi qu'elle permettra des réductions de coût. Je suis convaincu, enfin, qu'elle permettra l'émergence d'une industrie européenne de l'aéronautique et de l'armement.
Je souhaite que cette démarche, engagée aujourd'hui pour l'ATF, inspire d'autres procédures pour d'autres équipements. J'aurai l'occasion, d'ailleurs, de vous le préciser dans quelques instants à propos du char dépanneur puisque c'est exactement la même méthode qui a été retenue.
A toutes celles et à tous ceux qui sont inquiets, je veux dire que, dans ce domaine, la France fait preuve d'innovation. Elle expérimente de nouvelles procédures, et je suis convaincu qu'elle ouvre ainsi un chemin qui débouchera sur la construction d'une véritable défense européenne en matière d'armement.
Comme l'a rappelé M. Demilly, l'Aérospatiale a fait des propositions allant dans ce sens, répondant en cela aux appels du Gouvernement. Nous devons maintenant tenir compte de ces propositions et les approfondir pour permettre à l'Aérospatiale de s'intégrer dans le consortium dont j'ai décrit les contours.
En ce qui concerne le Rafale, sur lequel M. le président de Villepin, M. le président Blin et Roger Husson m'ont interrogé, je tiens à rappeler que c'est le programme qui mobilise le plus de crédits sur la période de la loi de programmation.
Les chiffres, vous les connaissez : plus de 35 milliards de francs lui seront consacrés entre 1997 et 2002, dont près de 25 milliards en production. Sur cette période, 45 appareils seront commandés, dont 14 seront livrés. Les premiers appareils air seront d'ailleurs disponibles dès 1999, ce qui est de nature, je l'espère, à favoriser l'exportation.
Mais permettez-moi de faire quelques remarques.
Tout d'abord, s'il est vrai que l'existence d'un escadron en 2000 augmenterait nos chances à l'exportation, l'expérience française récente montre que nous pouvons exporter des armements et les voir entrer en service dans les armées étrangères avant la constitution d'unités dans nos armées. Si donc il est préférable d'avoir les équipements dans nos armées pour pouvoir exporter, ce n'est pas une condition nécessaire. J'en veux pour preuve le cas du Mirage 2000.
Ma seconde remarque concerne les durées de vie et de service des avions de combat.
Le Mirage 2000 est aujourd'hui en service dans l'armée de l'air sous six versions différentes. Les premiers appareils sont arrivés à Dijon en 1984, soit vingt ans après les premiers Mirage III. Après dix ans de service, le Mirage 2000 est arrivé à sa pleine maturité.
Le premier escadron de Rafale sera constitué en 2005, soit vingt ans après le Mirage 2000, et nous attachons la plus grande attention, à travers la programmation 1997-2002, à ce que les appareils livrés à cette date répondent pleinement aux besoins de l'armée de l'air et correspondent parfaitement à ses attentes.
J'ajoute que, si les gains de productivité, les baisses de coût nous permettent d'accélérer les commandes, nous le ferons, car nous avons, bien sûr, retenu les remarques qu'ont faites un certain nombre d'entre vous, selon lesquelles il serait meilleur, et même excellent, pour l'industrie aéronautique française qu'elle puisse précipiter le mouvement, si elle ne veut pas de nouveau être rattrapée par la concurrence internationale.
C'est la raison pour laquelle nous mettrons tout en oeuvre pour baisser les coûts au niveau de la DGA et augmenter ainsi la productivité.
L'objectif de 30 p. 100 de réduction des coûts et des délais des programmes fixé à la DGA est en effet de nature à dégager des marges financières. Comme je l'ai indiqué, ces marges permettront de modifier les échéanciers des programmes d'armement. Il pourra, comme le souhaite M. Husson, en être ainsi du programme Tigre.
Je tiens d'ailleurs, à ce stade, à faire le point sur un sujet auquel M. Blin et M. Husson sont attachés, et qui a donné lieu à des discussions parfois serrées : je veux parler des cibles de programmes d'hélicoptères.
Je me permets d'insister sur les chiffres que je vais donner, car ce sont les seuls qui font l'objet de négociations et de programmation.
Concernant le Tigre, le modèle d'armée à l'horizon 2015 fait apparaître environ 180 hélicoptères armés en ligne. A cette échéance, il s'agira de 120 hélicoptères Tigre et de 60 hélicoptères Gazelle.
Au-delà de 2015, les livraisons de Tigre sont appelées à se poursuivre pour remplacer les Gazelle. Cela correspond, en tenant compte de l'attrition et des besoins de formation, à une cible totale de 215 hélicoptères Tigre.
La cible sur la base de laquelle ont été établis les accords d'industrialisation est donc inchangée.
Pour le NH90, la situation est différente. La phase de développement de l'appareil est en cours d'achèvement et c'est prochainement que s'engageront les négociations relatives à l'industrialisation. A ce stade, tous les chiffres avancés comme cible de ce programme ne sont que des estimations.
Mais les orientations prises en matière de projection nécessitent, nous le savons, un renforcement à terme de notre aéromobilité. Il est donc prévu de doter progressivement l'armée de terre d'un premier régiment de NH90 pour 2015. Au-delà de cette date, un second régiment est envisagé. La marine, pour sa part, a prévu de se doter de 27 appareils à partir de 2004. Globalement, les besoins français s'élèvent à près de 160 appareils.
Je crois avoir répondu ainsi à un certain nombre d'interrogations, voire d'inquiétudes, qui s'étaient fait jour soit dans cet hémicycle, soit dans les commissions, soit dans les entreprises.
J'ose espérer que la sérénité reviendra pour pouvoir envisager maintenant la suite de cette programmation avec nos partenaires européens, comme avec les industriels et les ouvriers français.
M. de Villepin s'est interrogé sur les conséquences industrielles des évolutions des cibles et des cadences du char Leclerc. M. Roger Husson, pour sa part, a exprimé son inquiétude quant à l'absence supposée de chars dépanneurs.
La cible du programme pour la France est de 406 chars. Ils seront commandés - je pense que cela intéresse aussi M. Neuwirth - par l'armée de terre à une cadence de 44 chars par an et livrés à partir de l'année prochaine à raison de 33 chars par an. C'est, il faut le savoir, la cadence compatible avec la capacité industrielle de GIAT Industries compte tenu des commandes en cours. Ce sont là les hypothèses retenues pour l'élaboration du plan de retour à l'équilibre de la société.
L'amélioration sensible de la compétitivité et de la santé financière de GIAT Industries permettra, je l'espère, d'aborder les marchés extérieurs potentiels avec de bonnes chances de succès. Je souhaite que nous puissions tous déployer nos efforts pour augmenter cette capacité d'exportation de l'armement, en particulier du char Leclerc, car je suis convaincu qu'il s'agit là d'un produit tout à fait exceptionnel.
Concernant le char dépanneur, auquel j'ai fait référence voilà quelques instants, je tiens à indiquer qu'il fait partie des différents programmes d'environnement du char Leclerc. Il est donc bel et bien prévu par cette programmation. C'est une quarantaine de véhicules qui sont envisagés.
La procédure d'acquisition retenue est celle d'une mise en concurrence entre GIAT Industries et l'Allemand MAK. L'émulation est un facteur de compétitivité. Pour ma part, j'ai toutefois entière confiance dans la compétitivité de GIAT Industries et dans la qualité de ses produits, comme en attestent aujourd'hui ses commandes étrangères. J'émets donc le voeu que la conclusion soit positive.
Enfin, M. Lucien Neuwirth, avec toute la passion attachée à l'enracinement, a attiré notre attention sur GIAT Industries et sur les péripéties malheureuses qui ont caractérisé la vie de cette entreprise depuis un certain nombre d'années.
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, rapporteur. Il a eu raison !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Oui, monsieur Neuwirth, la pérennité du centre GIAT Industries de Saint-Etienne sera assurée et son développement poursuivi !
Les compétences en matière d'armes légères, mais aussi tous les efforts de diversification seront valorisés.
Les récents succès remportés par GIAT Industries, notamment pour ce qui est des masques à gaz fournis à l'armée américaine, montrent combien la démarche que nous avons engagée pour cette entreprise est une démarche d'avenir.
Saint-Etienne est le pôle français des armes légères et du développement d'activités nouvelles au sein de l'entreprise.
M. Lucien Neuwirth. Très bien !
M. Charles Millon, ministre de la défense. J'aurai l'occasion de le redire au président du conseil d'administration de GIAT Industries, je souhaite qu'il y ait une mobilisation non seulement de l'entreprise dans ses structures internes, mais aussi des élus concernés pour qu'effectivement GIAT Industries redevienne cette grande entreprise française et européenne apte à mettre sur le marché des produits de haute compétitivité.
MM. Xavier de Villepin, rapporteur, et Lucien Neuwirth. Très bien !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je veux, à ce stade, faire le point sur la part accordée par ce projet de loi à la coopération européenne.
Je tiens, à ce propos, à rassurer M. Vinçon : c'est bien à un ancrage européen de notre défense que nous allons assister dans les six années à venir.
D'ailleurs, j'invite ceux qui ont prétendu que l'on était en train de renoncer à la coopération européenne à venir me rencontrer ; je leur donnerai la description des quarante programmes européens qui caractérisent actuellement la démarche française.
Non seulement il n'y a aucun amoindrissement, mais, bien au contraire - j'ai eu l'occasion de le confirmer lors de déplacements à Londres et à Bonn - il y a affirmation de la démarche européenne dans le domaine de l'armement.
La part relative de nos moyens consacrée aux programmes en coopération va d'ailleurs pratiquement doubler, comme l'a souligné M. de Villepin. La structure d'armement franco-allemande poursuit sa montée en puissance. Lors du sommet de Dijon, le Président de la République et le chancelier Kohl ont confirmé notre volonté commune de continuer sur la voie tracée et de développer le noyau franco-allemand d'une défense européenne.
Ils ont confirmé les programmes réalisés en commun, qu'il s'agisse des hélicoptères Tigre et NH90, des satellites d'observation Hélios II et Horus, des missiles de croisière de la famille Apache, du missile antinavire futur.
Nous sommes convenus, avec mon collègue Volker Rühe, de la nécessité de réaliser un avion européen de transport de nouvelle génération, selon l'approche commerciale innovante que je vous ai indiquée il y a quelques instants.
A M. Yvon Bourges, je veux confirmer que, si les ressources budgétaires de notre pays le permettent, ou si l'action de réduction des coûts que j'ai engagée aboutit, il sera possible de compléter et de renforcer les programmes d'équipement de nos armées.
C'est la réalisation de cet objectif qui permettra de dégager les marges financières facilitant l'accélération des commandes et les fabrications de nombreux programmes, dont le Rafale, l'avion de transport de nouvelle génération, le Tigre, le NH90.
C'est la raison pour laquelle je soutiens totalement le délégué général pour l'armement, qui engage une véritable révolution dans les modes d'acquisition de nos armements.
Le raisonnement économique sera à la base de toutes les démarches que nous allons maintenant entreprendre. La conception à coût objectif, la mise en concurrence, une plus grande responsabilisation des acteurs, telles sont les grandes orientations sur lesquelles travaillent actuellement les services du ministère.
Voilà une réforme qui n'en est qu'à ses débuts. Je souhaite qu'elle aboutisse rapidement car, à partir du moment où elle produira des résultats, la loi de programmation nous offrira des espaces de souplesse, ce qui permettra d'accélérer un certain nombre de commandes.
MM. de Villepin m'a interrogé sur le déroulement de la privatisation de Thomson SA ainsi que sur le rapprochement entre Dassault Aviation et l'Aérospatiale.
En ce qui concerne ces deux entreprises, le comité de pilotage regroupant les directions s'est réuni à de nombreuses reprises. Comme prévu, il remettra ses propositions avant le 30 juin, et j'ai bon espoir que ce rapprochement, qui aboutira à une fusion, aille à son terme.
Pour ce qui est de Thomson, le processus de privatisation est en cours. Le président de l'entreprise conduit les consultations nécessaires avec les principaux industriels du secteur et il remettra ses conclusions au Gouvernement avant la fin du mois de juillet. Mais vous comprendrez aisément, monsieur de Villepin, vous qui êtes très averti sur ces sujets, que je ne puisse vous en dire plus aujourd'hui s'agissant d'une procédure de privatisation.
En ce qui concerne les exportations, je vous ai entendu. Je vous avais d'ailleurs déjà entendu au mois de mars dernier, lors du débat d'orientation.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Très bien !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je vous avais déjà dit à l'époque qu'il ne me paraissait pas possible, pour la France comme pour l'Europe, de conserver une industrie française ou européenne en matière d'armement et d'aéronautique si l'on n'engageait pas une politique d'exportation dynamique, je dirais même agressive dans certains cas.
M. Lucien Neuwirth. C'est vrai !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Nous sommes dans un monde où tous les budgets de défense ont été réduits, dans un monde où se livre aujourd'hui une véritable guerre économique dans le domaine de l'armement et de l'aéronautique.
C'est la raison pour laquelle j'ai demandé à mes collaborateurs de préparer un plan concernant le soutien et le développement des exportations françaises en matière d'armement et d'aéronautique.
Ce plan sera étudié non seulement par le ministère de la défense, mais également par les services de M. le Premier ministre, car il suppose une démarche interministérielle, et par M. le Président de la République. Ce plan relève, en effet, de la défense française, qui intéresse au plus haut point le chef de l'Etat.
Il sera ensuite soumis au Parlement avant la fin de l'année. A cet égard, je compte non seulement sur votre soutien, mais aussi sur votre participation, sur vos propositions quant à l'aide à l'exportation française en matière d'armement et d'aéronautique. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Permettez-moi maintenant de traiter quelques autres questions qui ne figurent pas parmi les grands thèmes que je viens d'évoquer mais qui sont toutefois importantes.
Tout d'abord, un certain nombre d'entre vous ont évoqué le calendrier des restructurations et m'ont demandé comment j'allais les annoncer.
Je l'ai déjà dit et je le confirme : dans le courant de l'été, j'annoncerai les restructurations militaires qui sont la conséquence de cette loi de programmation pour les années 1997 et 1998.
Certains d'entre vous ont souhaité que l'annonce porte sur les trois prochaines années et non sur les deux prochaines.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Absolument !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je les ai entendus.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Très bien !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je fais d'ailleurs actuellement étudier par les états-majors ainsi que par mes services la possibilité de faire cette annonce au cours du mois de juillet, afin de permettre aux familles ainsi qu'aux personnels militaires et civils de prendre leurs dispositions pour que ces restructurations puissent ne pas être un élément traumatisant pour leur vie familiale et professionnelle. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
S'agissant de la gendarmerie, vous savez que ses effectifs vont augmenter de 4,5 p. 100 au cours de la période de programmation. Au sein d'un ministère dont le nombre d'emplois va diminuer de près de 25 p. 100 en six ans, cette progression constitue une exception qui vaut d'être relevée.
Il est exact, comme l'a souligné M. Maurice Blin, que cette augmentation sera imputable au recrutement, sur la base du volontariat, de 4 200 gendarmes auxiliaires supplémentaires. Mais, d'une part, ces volontaires seront recrutés pour une période de deux ans, alors que les gendarmes auxiliaires actuels effectuent entre dix mois et dix-huit mois de service militaire, et, d'autre part, si le nombre de professionnels de la gendarmerie reste stable, celui des officiers va croître sensiblement, puisque 1 389 postes supplémentaires seront créés dans les six prochaines années.
Je veux enfin rassurer M. Bernard Plasait, qui s'inquiète d'un affaiblissement du maillage territorial de la gendarmerie en zone rurale.
Non seulement ce maillage sera maintenu, même s'il doit être ici ou là adapté, mais il sera renforcé par une augmentation des effectifs des brigades territoriales ou par la création d'un certain nombre de pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie, les PSIG.
La fonction de proximité qu'assure la gendarmerie est trop précieuse pour nos concitoyens, pour la défense et pour l'Etat - vous l'avez souligné à bien des reprises - pour être sacrifiée. Elle sera donc améliorée.
Voilà, mesdames, messieurs les députés,...
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les sénateurs !
M. Jean-Luc Mélenchon. Cela fait deux fois depuis hier !
M. Charles Millon, ministre de la défense. En effet ! Je vous prie de bien vouloir m'excuser...
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques réflexions dont je voulais vous faire part pour répondre à vos interrogations. Je sais qu'elles ont été partielles.
M. Claude Estier. Et partiales !
M. Charles Millon ministre de la défense. La raison en est simple : vous avez abordé nombre de questions, mais nous les traiterons lors des débats portant sur la réforme du service national qui se dérouleront dans cette assemblée à l'automne prochain.
Vous avez rappelé, unanimement je crois - tout particulièrement M. Machet : j'ai écouté avec émotion et conviction son plaidoyer à ce sujet - à quel point la défense est enracinée dans l'histoire, la mémoire et le paysage de la France. Loin d'être une convention ou une abstraction, le lien entre l'armée et la nation est une réalité concrète, une expérience quotidienne.
L'ambition que porte la réforme de notre défense est bien entendu de préserver, voire de renforcer ce lien entre les Français et l'armée, les Français et la nation.
L'augmentation du nombre des carrières courtes, l'importance croissante dévolue à la réserve et la permanence d'un volontariat militaire assureront un flux d'échanges permanent entre le monde civil et le monde militaire. Elles permettront, je l'espère, au coeur de la nation et au coeur des armées de battre au même rythme.
Cette réforme exprime aussi la volonté de permettre l'indispensable rencontre entre la nation et sa jeunesse. Le débat qui s'est déroulé ces derniers mois dans les communes de France et dans les assemblées a révélé que le développement de l'autonomie et la préférence pour le choix personnel n'étaient pas contradictoires avec la générosité et le renforcement de la cohésion nationale.
Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, cette réforme n'est pas seulement une réforme militaire, une réforme stratégique, une réforme industrielle, elle représente une véritable ambition de société. Elle doit permettre à la jeunesse de France de retremper sa citoyenneté, de se mettre, à travers un volontariat affirmé, au service de la nation et de ce que le général de Gaulle a appelé « une certaine idée de la France ». (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Exception d'irrecevabilité

M. le président. Je suis saisi, par Mmes Luc, Bidard-Reydet, M. Bécart et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d'une motion n° 7, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002 (n° 415, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant par cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est Mme Bidard-Reydet, auteur de la motion.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les conditions de discussion de ce projet de loi de programmation militaire soulignent, selon nous, une dérive particulièrement préoccupante de nos institutions. Elles privent le Parlement de ses prérogatives et transforment nos assemblées en chambre d'enregistrement.
La discussion générale a une nouvelle fois souligné l'importance, sur les plans économique et social et vis-à-vis de la politique de défense, de ce projet de loi qui s'inscrit directement dans la continuité du choix du Président de la République, et de lui seul, de supprimer le service militaire. Cette méthode est manifestement contraire à la Constitution de notre pays.
L'article 34 de notre Constitution est en effet très clair : « La loi détermine les principes fondamentaux de l'organisation générale de la défense nationale » tandis que le Parlement fixe « les sujétions imposées par la défense nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ».
La Constitution est sans ambiguïté ! C'est au Parlement et à lui seul de décider de suppression du service national.
La lecture de l'exposé des motifs de ce texte démontre le lien étroit entre la suppression de la conscription et le projet de loi de programmation militaire. Il y a même entre les deux une causalité directe.
On peut en effet lire, à la page 5 de cet exposé, qu'il est nécessaire « de tirer les conséquences de la réforme des armées et des infléchissements de notre politique industrielle sur l'évolution de la délégation générale pour l'armement ».
En proposant aux assemblées de débattre aujourd'hui des conséquences économiques, financières et sociales d'un texte sur la réforme du service national qui devrait être discuté par le Parlement à l'automne, le Gouvernement inverse l'ordre logique des discussions. Cette situation peut apparaître absurde.
Mais il y a plus : cela place le pouvoir législatif en position de sujétion par rapport à l'exécutif, tout particulièrement par rapport au pouvoir présidentiel, et cela bouscule les traditions démocratiques de notre pays.
En effet, en annonçant unilatéralement, le 28 mai dernier, la réforme du service national, le Président de la République n'a pas respecté l'article 34 de la Constitution.
Il déclarait en effet : « Je vous ai fait part de ma décision de professionnaliser l'ensemble de nos forces de défense. »
Pour atténuer l'impact d'une telle formulation, répondant à une question de mon ami Paul Mercieca, député du Val-de-Marne, monsieur le ministre, vous avez indiqué, le 29 mai dernier, que le Président de la République avait dit «je propose » et non « j'impose » ou « je décide ».
Or, dès le lendemain, le ministère de la défense faisait publier dans la presse un encart publicitaire qui confirmait la décision présidentielle :
« Le Président de la République, dans son allocution du 28 mai, vient d'annoncer la suppression du service national obligatoire. »
« Afin de faciliter la nécessaire transition vers l'armée professionnelle, les jeunes gens nés avant le 1er janvier 1979 effectueront leur service dans les conditions actuelles. Les autres pourront, à la suite du rendez-vous citoyen, choisir l'une des modalités du nouveau service volontaire.
« Ce rendez-vous citoyen sera obligatoire à partir de 1997 pour les jeunes nés après le 1er janvier 1979. »
Cette publicité confirme totalement la décision du président de la République !
L'enjeu est d'importance. Il s'agit de l'un des secteurs clés de notre démocratie : le droit pour les citoyens et leurs représentants de définir la défense nationale de la France.
A quoi bon réunir le Parlement à l'automne si l'on considère par avance son acceptation comme acquise, au point, je le répète, d'en examiner les conséquences dès aujourd'hui ?
Cette façon de procéder suscite d'ailleurs quelques interrogations dans les rangs de la majorité parlementaire.
D'une part, la presse s'est fait l'écho des propos très clairs du président de l'Assemblée nationale devant le Parlement des enfants, le samedi 1er juin : « Le nouveau service national n'existe pas, quoi qu'on ait pu dire. » Qui dit vrai ?
D'autre part, le 31 mai dernier, M. Olivier Darrason, député UDF, rapporteur de la mission d'information commune sur le service national, se déclarant « surpris » de découvrir dans la presse la publicité que je viens de vous lire, affirmait : « C'est une conclusion précipitée qui donnerait au Parlement le sentiment qu'il n'est qu'une chambre d'enregistrement. »
Les craintes de M. Darrason se sont confirmées, mais il les a fait taire puisqu'il a adopté, à l'Assemblée nationale, le projet de loi de programmation militaire le 7 juin.
Une telle attitude à l'égard du Parlement est contraire à l'esprit et à la lettre de la Constitution.
Quel que soit le gouvernement, nous ne pouvons lui apporter notre caution. Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen veulent rompre avec une telle pratique qui tourne le dos à l'aspiration du peuple d'être mieux associé aux décisions.
M. Chirac avait pourtant fait de la revalorisation du rôle du Parlement l'un des thèmes de sa campagne électorale. Nous pouvions par exemple lire, dans son ouvrage programme La France pour tous : « J'ai regretté depuis longtemps la dérive monarchique de nos institutions. Le moment est venu d'y mettre un terme. » Que sont les promesses devenues ?
M. Alain Gournac. Bonne lecture !
Mme Danielle Bidard-Reydet. L'article 15 de la Constitution confère certains pouvoirs au Président de la République en matière de défense. Je les rappelle : « Le Président de la République est le chef des armées. Il préside les conseils et comités supérieurs de la défense nationale. »
Cet article est complémentaire, mais il ne le contredit en rien, de l'article 34 reconnaissant la compétence parlementaire en matière de service national.
Certains diront que la pratique institutionnelle a, depuis 1958, élargi le champ des compétences du Président de la République.
Cette interprétation est contestée par certains fidèles de la Ve République, et non des moindres !
M. Pierre Mazeaud, président de la commission des lois de l'Assemblée nationale, écrivait, à propos du domaine réservé du Président de la République, dans son ouvrage Rappel au règlement : « N'en cherchez pas de trace dans la Constitution, n'y figurent ni les mots ni l'idée ». Il précisait même : « Tout dépend des hommes. De l'usage qu'ils réservent au texte ».
On peut se demander pourquoi cette attitude, pourquoi une telle remise en cause de la Constitution dans la procédure même d'examen de cet ensemble de dispositions relatif à la défense, à la loi de programmation militaire, à la réforme du service national.
Malheureusement, cette démarche, qui minimise le rôle du Parlement, n'est pas propre au texte dont nous discutons aujourd'hui. Il s'agit d'un véritable dérapage qui concerne l'ensemble de l'activité législative. Il suffit d'examiner le déroulement de cette session unique, notamment ces dernières semaines, pour comprendre que le souci du Gouvernement n'est pas d'améliorer le pouvoir de contrôle du Parlement, mais qu'il est bien d'imposer le plus rapidement possible ses propres choix. L'examen dans la plus grande précipitation du texte relatif au statut de France Télécom en est la parfaite démonstration.
Une raison plus conjoncturelle a sans doute poussé le Président de la République à dicter ses volontés. Peut-être les relatives interrogations de sa majorité sur le dossier militaire ainsi que la très grande inquiétude des élus locaux dans les régions menacées par les restructurations en sont-elles les causes ?
La lecture du Livre blanc sur la défense de 1994, qui préparait la précédente loi de programmation militaire présentée par MM. Balladur et Léotard, est éclairante sur ces interrogations.
Il y est indiqué : « L'armée de métier ne permettrait pas de répondre à l'ensemble des missions déjà évoquées, sauf à imaginer des dépenses budgétaires et un flux d'engagements qui seraient déraisonnables ou hors de portée. »
Nous estimons que l'expression de ces différents points de vue aurait permis l'instauration d'un débat riche et pluraliste avant que toute décision soit prise. Il n'en n'a rien été. Même la consultation organisée sur l'avenir du service militaire revêt un caractère aujourd'hui dérisoire.
Le premier point, que j'ai largement développé, de notre appel à rejeter ce projet de loi pour sa non-conformité à la Constitution est donc clair. Il est la conséquence, en grande partie, de la décision prise par le Président de la République, au mépris de la Constitution, de supprimer le service national. Ce texte est donc anticonstitutionnel.
Le second point est la remise en cause du secteur public de l'armement, que mes amis Jean-Luc Bécart et Claude Billard ont présentée avec précision, hier, comme contraire au principe clé de notre Constitution qu'est la souveraineté nationale.
Comment ne pas souligner, enfin, l'articulation soigneusement masquée entre la réintégration progressive dans l'OTAN, récemment confirmée par le Président de la République, l'annonce de l'instauration d'une armée uniquement professionnelle et l'ouverture en grand de la libre concurrence dans le secteur de l'industrie d'armement ?
L'exemple d'Eurocopter est symbolique. La réduction importante de la production, confirmée par le rapport de M. de Villepin, ne favorisera-t-elle pas la mainmise de l'industrie américaine d'armement sur le marché mondial et, peut-être demain, sur le nôtre ?
Les salariés d'Eurocopter sont d'ailleurs venus devant les portes du Sénat pour rappeler les conséquences sociales du projet de loi dont nous discutons.
Au nom de notre groupe, je leur réaffirme notre soutien ainsi qu'aux dizaines de milliers de salariés du GIAT, de la SNECMA et d'Aérospatiale, notamment.
En conclusion, nous estimons que l'action du Gouvernement est contraire aux valeurs républicaines qui placent la défense de la nation au centre de la souveraineté nationale.
La mise en cause du rôle du Parlement et l'atteinte à la souveraineté nationale justifient notre motion portant exception d'irrecevabilité. Nous vous proposons de l'adopter par scrutin public. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, rapporteur. Madame le sénateur, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, en cohérence avec le vote qu'elle a émis en adoptant l'ensemble du projet de loi, ne peut que rejeter la motion présentée par le groupe communiste républicain et citoyen et tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au texte qui nous est soumis.
Trois raisons principales me paraissent plaider en ce sens. D'abord, l'initiative prise par le Président de la République en ce qui concerne la professionnalisation de nos forces et le service national s'inscrit clairement dans le droit fil des pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution en matière de défense - notamment par l'article 15, qui en fait le chef des armées - et qui ont été confirmés et confortés par quarante ans de pratique institutionnelle constante.
Ensuite, le texte qui nous est présenté est, comme il est normal, un projet de loi sur lequel le Parlement est appelé à délibérer et à trancher ; à lui de le voter ou non. Les compétences du Parlement sont donc respectées.
Enfin, les modifications relatives au service national feront l'objet d'un autre projet de loi, dont nous serons saisis - M. le ministre de la défense vient encore de le confirmer ce matin - après le vaste débat qui a eu lieu dans le pays et au Parlement et auquel le Sénat a apporté une contribution très importante, voire, à bien des égards, madame le sénateur, déterminante.
Là encore, il appartiendra au Parlement de délibérer et de trancher.
C'est pourquoi je voudrais vous dire mon étonnement, madame le sénateur, quand vous déclarez que le Parlement n'a été qu'une chambre d'enregistrement.
Mme Hélène Luc. C'est vrai !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Il y a eu au Sénat des débats prolongés sur le sujet, non seulement en commission, mais aussi en séance publique. Relisez le rapport Vinçon et vous y retrouverez la contribution de tous les sénateurs, y compris ceux de votre groupe en présence d'ailleurs de sa présidente, Mme Luc. Alors, madame, ne dites pas qu'il n'y a pas eu débat !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je n'ai pas dit qu'il n'y avait pas eu débat ! Je n'ai pas dit cela !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. C'est en effet une contrevérité absolue.
Je suis persuadé que le débat démocratique qui a eu lieu dans notre pays restera un grand exemple du travail du Parlement français.
Mme Hélène Luc. La décision est prise par le Président de la République tout seul !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Non, madame, pas du tout ! Il la propose.
M. Yvon Bourges. Oui, il la propose !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Si les lois sont votées à l'automne, et seulement si elles le sont, la professionnalisation des armées sera mise en oeuvre.
Il va de soi, enfin, que je ne peux pas approuver l'exposé des motifs de l'exception d'irrecevabilité portant sur notre industrie d'armement.
En effet, le présent projet de loi se caractérise, M. le ministre l'a encore rappelé ce matin, par la volonté de tout mettre en oeuvre pour préserver nos capacités industrielles dans une perspective européenne, afin de donner à notre industrie les moyens de traverser une crise grave et d'affronter ainsi la concurrence internationale.
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donc rejeté votre motion. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Henri de Raincourt. Elle a eu raison, et le Sénat va faire pareil !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, bien évidemment, le Gouvernement est défavorable à l'adoption de cette exception d'irrecevabilité.
Se prononcer sur la motion qui vous est présentée, c'est se prononcer sur les compétences du Président de la République en matière de défense.
Le texte de la Constitution est clair. Aux termes de l'article 5 de la Constitution, le chef de l'Etat est le « garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités ». Aux termes de son article 15, « le Président de la République est le chef des armées. Il préside les conseils et comités supérieurs de la défense nationale ».
Quant à la pratique institutionnelle, vous la connaissez : du général de Gaulle à François Mitterrand, elle a confirmé la lettre de la Constitution.
Il est vrai qu'au début de la Ve République le député François Mitterrand avait critiqué cette procédure, mais le Président de la République François Mitterrand est revenu sur ses propos de jeunesse et a confirmé, lui, la lecture de la Constitution.
En effet, qui est, depuis 1964, responsable de l'engagement des forces nucléaires ? Qui a arrêté, depuis cette même date, les grands choix de notre dissuasion ?
Qui a affirmé, en 1983 : « La pièce maîtresse de la stratégie de dissuasion en France, c'est le chef de l'Etat, c'est moi » ?
Qui a décidé, depuis 1978, des interventions extérieures de la France, en Afrique, au Liban, en Yougoslavie ?
Qui s'est déclaré, en 1982, « comptable de la sécurité du pays » ?
Mesdames, messieurs les sénateurs, nul ne le conteste : le Président de la République, en décidant de proposer une réforme de notre outil de défense, est dans la droite ligne des compétences exercées par ses prédécesseurs, il ne fait qu'accomplir son devoir.
Madame le sénateur, quel est, alors, le sens de votre motion d'irrecevabilité ? S'agit-il de revenir sur les textes constitutionnels et la pratique institutionnelle ? S'agit-il d'en revenir à la IVe République ? Vous comprendrez que le Gouvernement ne puisse vous suivre dans cette voie.
Il appartenait à ce dernier d'élaborer un projet de loi de programmation militaire, ce qu'il a fait. Il reviendra au Gouvernement de présenter un projet de loi de réforme du service national, et c'est au Parlement, et seulement à lui, qu'il incombera de se prononcer sur ces sujets.
Voulez-vous bâillonner le Parlement ?
Mme Danielle Bidard-Reydet. Vous n'avez pas bien compris mon intervention !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Pourquoi ne voulez-vous pas que le Parlement débatte sur ce point ? C'est à vous de décider aujourd'hui si l'on doit passer d'une armée de conscription à une armée professionnelle.
M. Bertrand Delanoë. Alors, que ferons-nous à l'automne ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Vous pouvez voter contre cette proposition de faire évoluer nos équipements militaires. Vous pouvez voter contre toutes les dispositions de ce projet de loi de programmation militaire.
Sachant combien vous êtes attachée aux droits du Parlement et au fait qu'il délibère sur ce projet de loi de programmation, je suis certain que, au fond de vous-même, madame Bidard-Reydet, vous avez déjà voté contre votre motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité. (Rires et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR.)
Mme Danielle Bidard-Reydet. Vous n'y êtes pas du tout, monsieur le ministre !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 7, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 114:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 313
Majorité absolue des suffrages 157
Pour l'adoption 92
Contre 221

Question préalable

M. le président. Je suis saisi, par M. Estier et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n° 3, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002 (n° 415, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Estier, auteur de la motion.
M. Claude Estier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous assistons depuis hier après-midi à un débat qui me paraît un peu surréaliste et qui amène à se poser quelques questions avant que s'ouvre la discussion des articles du texte que nous présente le Gouvernement.
Première question : qu'est-ce qui a changé depuis le moment - il y a deux ans à peine - où le gouvernement d'alors faisait voter, par une majorité qui était la même qu'aujourd'hui, une loi de programmation militaire pour les années 1995 à 2000 ?
Le contexte géostratégique, bouleversé à partir de 1989 avec la chute du mur de Berlin et l'effondrement du bloc soviétique, n'a guère évolué depuis 1994, et l'on nous précise bien que sont toujours valables les analyses contenues dans le Livre blanc sur lequel s'appuyait la précédente loi de programmation.
M. Michel Caldaguès. Nous avons changé de Président de la République !
M. Claude Estier. Cela suffit-il à modifier le contexte géostratégique ? Bizarre ! (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Philippe de Gaulle. Bien sûr !
M. Claude Estier. Pourquoi cette loi de programmation, que vous avez votée, chers collègues de la majorité, voilà deux ans, tombe-t-elle aux oubliettes, pratiquement sans être entrée en application, pour laisser la place à une autre qui va dans une tout autre direction ?
Suffit-il que le Président de la République ait décidé, tout seul, en l'annonçant à la télévision le 22 février dernier, de transformer du tout au tout l'organisation de nos armées pour que la majorité parlementaire se déjuge et s'apprête à voter tout autre chose que ce qu'elle avait approuvé il y a deux ans ?
M. Michel Rufin. C'est parce que nous sommes plus intelligents ! (Sourires.)
M. Claude Estier. On comprend que, à l'Assemblée nationale, un certain nombre de députés de la majorité aient préféré s'abstenir, sans parler de ceux, très nombreux, qui n'ont pas cru devoir être présents au moment du vote, ce qui n'est pas la marque d'un grand enthousiasme.
A partir de là se pose une question plus grave encore : à quoi sert le Parlement, que l'on place, une fois de plus, devant un double fait accompli ? En effet, la professionnalisation de l'armée a été décidée par le seul Président de la République et la suppression du service national annoncée par le même. Ne jouons pas sur les mots : quand on propose une décision, c'est bien qu'on a décidé.
D'ailleurs, cette décision, Mme Bidard-Reydet le rappelait tout à l'heure, a été confirmée par une étonnante, et sans doute maladroite, publicité du ministre de la défense dans l'ensemble de la presse, alors que le débat sur le second sujet ne devrait avoir lieu, nous dit-on, que dans quelques mois.
Aurait-on aboli subrepticement - en tout cas sans nous avoir informés - l'article 34 de la Constitution, dont le Président de la République est en principe le gardien ? Je rappelle que, aux termes de cet article, la responsabilité de fixer « les principes fondamentaux de l'organisation générale de la défense nationale » incombe à la loi, donc au Parlement.
M. Michel Rufin. C'est nous, la loi ! C'est nous qui allons voter !
M. Claude Estier. Ce même article 34, qui définit le rôle du Parlement, précise encore, et nous touchons là au noeud du problème que j'évoque, que c'est la loi...
M. Michel Caldaguès. La loi, c'est nous qui la faisons !
M. Claude Estier. ... qui fixe les règles concernant « les sujétions imposées par la défense nationale aux citoyens en leur personne et en leurs biens ».
Il est évident que le service national obligatoire fait partie de ces sujétions et que c'est au seul Parlement qu'il revient d'en décider l'éventuelle suppression.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Eh bien oui !
M. Michel Caldaguès. Nous sommes d'accord !
M. Claude Estier. Je citerai, sur cette question, notre collègue M. Hubert Haenel, membre du groupe du RPR, qui a écrit, dans un ouvrage intitulé La Défense nationale : « Le Parlement joue un rôle majeur en matière de défense : il procure les moyens en votant le budget de la défense et il fixe les limites du pouvoir de l'exécutif. C'est en effet, selon l'article 34 de la Constitution, la loi qui détermine les principes fondamentaux de l'organisation de la défense nationale - l'ordonnance de 1959, qui fixe actuellement ces principes, est un texte de valeur législative - les ressources de l'Etat, les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux militaires, les règles concernant les sujétions imposées par la défense aux citoyens en leur personne et en leurs biens. »
On ne saurait mieux dire !
Mais je demande à M. Haenel et à vous tous, chers collègues de la majorité, quel sens aura le vote qui nous sera demandé à l'automne,...
M. Bertrand Delanoë. Et voilà !
M. Claude Estier. ... alors que la décision sur le service national aura déjà été prise et que la programmation des dépenses militaires pour les six prochaines années aura déjà, si vous suivez le Gouvernement, été votée depuis plusieurs mois.
M. Bertrand Delanoë. Exactement !
M. Claude Estier. Raisonnons un instant par l'absurde. Que se passerait-il si, à l'automne prochain, le Parlement, dont vous dites qu'il est libre de se prononcer, votait le maintien du service national, en contradiction avec la loi de programmation militaire et avec les annonces du Président de la République ?
Vous me répondrez, bien sûr, que, compte tenu de la majorité dont vous disposez, l'hypothèse est peu vraisemblable et que le résultat est acquis d'avance. Mais, alors, tirons de cela la conséquence logique et transformons le Parlement en simple chambre d'enregistrement des décisions présidentielles !
Je voudrais, sur ce point, répondre - avec la courtoisie qu'il me connaît - à M. de Villepin, qui s'élève contre l'expression « chambre d'enregistrement ». Il est vrai, monsieur de Villepin, que nous avons eu, sous votre autorité, un débat.
M. Alain Gournac. Un débat de bonne qualité !
M. Claude Estier. Je crois y avoir participé !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Absolument !
M. Claude Estier. Ce débat, qui a duré trois jours, a été engagé à partir d'une décision déjà prise et annoncée par le Président de la République. M. le ministre vient d'ailleurs de le confirmer.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Pas du tout ! Je n'ai pas dit ça !
M. Claude Estier. Libre à vous, chers collègues de la majorité, de renoncer ainsi à vos pouvoirs de législateur. Pour notre part, nous ne l'acceptons pas, et c'est pourquoi nous affirmons qu'il n'y a pas lieu de délibérer aujourd'hui du présent projet de loi.
Débattre aujourd'hui de ce texte, j'insiste sur ce point, c'est bafouer les droits du Parlement.
Soyons clairs, nous ne contestons nullement les fonctions et les prérogatives du Président de la République en tant que chef des armées...
M. Alain Gournac. C'est bien !
M. Claude Estier. ... telles que les définit l'article 15 de la Constitution, mais elles ne l'autorisent pas à se substituer au Parlement s'agissant, en particulier, du service national.
Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, que la décision tendant à réduire à dix mois la durée du service militaire, sous la présidence de M. François Mitterrand, a été prise dans le cadre d'un projet de loi. Le Président de la République n'a pas pris seul cette décision !
M. Bertrand Delanoë. Et voilà !
M. Claude Estier. Si cette loi de programmation était votée, coexisteraient une loi abrogeant de fait le service national obligatoire et l'ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de notre défense, et qui est entièrement bâtie autour de ce service obligatoire. L'article 43 de cette ordonnance, qui organise la mobilisation générale, se fonde en effet sur l'existence d'un service militaire auquel on est « appelé ».
On se rend bien compte que cette loi de programmation, élaborée dans l'improvisation et sans le débat préalable approfondi dans l'opinion qu'un tel bouleversement aurait nécessité, comporte de nombreux éléments de confusion qui - certains l'avouent dans les couloirs mais non dans l'hémicycle - inquiètent nombre d'entre vous, qu'il s'agisse des principes démocratiques, du fonctionnement de notre défense - en particulier pendant la période de transition - ou encore du financement, sur lequel je ne reviens pas dans la mesure où plusieurs collègues de mon groupe ont abordé ce sujet.
Nous risquons aujourd'hui, et dans les années à venir, d'assister à une désorganisation rapide, profonde et durable de l'outil de défense de la France. Pour tenter de la masquer, on a inventé une formule qui est un véritable objet conceptuel non identifié, la « pause stratégique », selon laquelle, pendant les dix ou quinze prochaines années, rien ne se passera qui mette directement en danger la sécurité de la France. Pendant cette période, nous devrions avoir le temps de réformer notre défense en toute tranquillité. Il s'agit, pour le moins, mes chers collègues, d'un pari risqué !
M. Bertrand Delanoë. Oui !
M. Claude Estier. J'imagine quelles auraient été vos protestations si un gouvernement socialiste s'était engagé dans cette voie, et de cette manière...
M. Michel Caldaguès. Pour l'arrêt des essais nucléaires, par exemple !
M. Claude Estier. ... alors que, ne l'oublions pas...
M. Bertrand Delanoë. Ils ne sont pas à l'aise !
M. Claude Estier. ... voilà seulement deux ans, M. Jacques Chirac, qui n'était pas encore Président de la République, demandait une augmentation des crédits militaires, et que vous l'approuviez alors.
M. Bertrand Delanoë. Très bien !
M. Claude Estier. Le Gouvernement est pressé, car il réserve - nous venons d'en avoir la confirmation - pour la période estivale toutes les mauvaises nouvelles dans les domaines industriel et social.
Vous voulez, monsieur le ministre, que la loi de programmation soit votée avant la fin de la session pour pouvoir procéder ou donner le feu vert au mois de juillet - vous venez de le confirmer - aux fermetures de bases, aux restructurations et aux plans sociaux sur lesquels - et reconnaissez, mes chers collègues que vous-mêmes êtes inquiets à ce sujet - M. le ministre est pour l'instant resté extrêmement discret.
Nous ne sommes pas les seuls à souligner que cette loi de programmation manque de cohérence. Tout est fait pour la projection, mais, sans avions ni hélicoptères en quantité suffisante, comment assurer efficacement celle-ci ? C'est bien la question que pose notre rapporteur, M. de Villepin, quand il souligne qu'« il en résultera une limitation de nos possibilités d'engagement extérieur dans les prochaines années ».
M. Bertrand Delanoë. Très bien !
M. Claude Estier. Par ailleurs, dans cette loi de programmation, les perspectives européennes ne sont visibles ni sur le plan stratégique ni sur le plan industriel. Et pourtant, la France doit pouvoir prendre des initiatives fortes pour accroître la solidarité européenne. Elle le doit en raison de la place qu'elle occupe en Europe, du rôle éminent qu'elle a joué sous la conduite du président François Mitterrand dans la construction européenne et, aussi, de ses incontestables capacités industrielles et technologiques.
Les propos que vous avez tenus à cet égard voilà quelques instants, monsieur le ministre, ne sont guère convaincants. Vous exprimez des souhaits. Fort bien, mais, en dehors de la confirmation des quelques programmes franco-allemands que vous avez énumérés, vous n'avez, et pour cause, aucune certitude.
Je le répète en conclusion, votre texte contribue, notamment par la façon dont il est présenté aujourd'hui, à bafouer les droits du Parlement. Alors qu'il s'agit d'un vrai débat de fond, on nous demandera dans cinq ou six mois de discuter, pour la forme, de l'avenir du service national et de légiférer sur une décision prise par ailleurs et déjà intégrée dans une loi de programmation militaire.
C'est pourquoi, mes chers collègues, avec cette question préalable, nous vous demandons, par scrutin public, de ne pas poursuivre la délibération. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?...
Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Monsieur Estier, je vous ai écouté avec beaucoup d'intérêt.
La commission, en cohérence avec le vote qu'elle a émis sur l'ensemble du projet de loi, ne peut que rejeter cette motion tendant à opposer la question préalable au projet de loi de programmation militaire.
J'ai eu l'occasion de développer dans mon rapport les très fortes raisons qui me paraissent plaider en faveur de l'élaboration d'une loi de programmation militaire dès cette session. Nous songeons à cet effet à nos armées, à notre jeunesse et à notre industrie.
Permettez-moi de rappeler brièvement les raisons qui rendent absolument indispensable le vote d'une loi de programmation.
La première de ces raisons est la nécessité, pour tirer toutes les conséquences des bouleversements internationaux survenus depuis 1989, d'aller au terme de la logique entamée par le Livre blanc et la loi de programmation votée en 1994.
Il s'agit, ensuite, de tirer la conséquence du « décrochage » entre la loi votée voilà deux ans et la réalité des budgets militaires, en prenant pleinement en compte l'objectif de maîtrise des finances publiques, objectif dont chacun est aujourd'hui pleinement conscient.
En troisième lieu, il convient d'organiser et de planifier la mise en oeuvre de la réforme globale de notre appareil de défense proposée par le chef de l'Etat, notamment de permettre la délicate transition vers l'armée professionnelle, dont le présent projet de loi constituera le fondement légal et la première traduction.
En quatrième lieu, il faut donner à la défense française des repères et des objectifs précis en matière d'équipements, alors qu'elle en est aujourd'hui privée.
Enfin, il s'agit de donner à l'industrie de la défense, qui traverse une période particulièrement difficile, la vision minimale de l'avenir qui lui est indispensable et dont elle manque cruellement à l'heure actuelle.
S'agissant du calendrier des réformes, je rappelle que le texte qui nous est présenté inclut l'évolution des effectifs correspondant à la professionnalisation de nos forces. Ce texte est, comme il est normal, un projet de loi, sur lequel le Parlement est appelé à délibérer et à trancher ; à lui de le voter ou non.
Ensuite, les modifications relatives au service national feront l'objet d'un autre projet de loi - vous l'avez rappelé à plusieurs reprises, monsieur le ministre - après le vaste débat, qui était un véritable débat, engagé dans le pays et devant le Parlement et auquel vous avez vous-même, monsieur Estier, très largement participé, ce dont je vous remercie.
Là encore, il appartiendra au Parlement de délibérer et de trancher. Ces deux lois, dont il n'est pas interdit de penser qu'elles seront cohérentes entre elles,...
M. Claude Estier. Cela vaudrait mieux !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. ... constitueront le fondement légal de la professionnalisation.
Notre responsabilité de parlementaires, monsieur Estier, est de penser l'avenir de nos armées à trente ans. C'est ce que nous faisons aujourd'hui et que nous continuerons de faire.
Pour toutes ces raisons, la commission des affaires étrangères, à laquelle vous appartenez, a rejeté cette question préalable. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur Estier, à travers votre motion de procédure, vous avez soulevé quatre questions sur lesquelles je voudrais revenir.
Vous avez, tout d'abord, posé une question un peu répétitive à laquelle je me permettrai donc d'apporter la même réponse.
Quels événements ont incité, entre 1994 et 1996, à soumettre au Parlement deux projets de loi de programmation militaire ? Examinons-les ensemble, monsieur Estier.
Un certain nombre d'événements relativement importants sont intervenus, qui, à travers les articles 15, 34 et 21 de la Constitution, ont des conséquences directes sur l'organisation de notre défense nationale.
Vous savez tout de même que, le 7 mai 1995, un nouveau Président de la République a été élu, qu'il s'appelle Jacques Chirac, qu'il a nommé un Gouvernement, dont le Premier ministre s'appelle Alain Juppé, et que la cohabitation a cessé. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) A partir de ce moment-là, oui, l'approche, en matière de défense, a changé.
M. Henri de Raincourt. Et voilà !
M. Charles Millon, ministre de la défense. C'est la raison pour laquelle nous ne contestons pas l'analyse du Livre blanc de 1994, aux attendus duquel nous nous raccrochons.
En revanche, il est des sujets dont, alors Président de la République, François Mitterrand ne voulait pas débattre. En vertu d'une application de la Constitution qui, tout à l'heure, était un peu contestée sur les travées de l'extrême gauche (M. le ministre montre la gauche de l'hémicycle)...
Mme Danielle Bidard-Reydet. Un peu beaucoup !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... auraient dû figurer dans la loi la suppression de la composante terrestre du plateau d'Albion ou la réforme du service national.
Pour cette raison, la loi de programmation qui a été présentée en 1994 ne pouvait pas embrasser complètement notre conception de la défense.
M. Claude Estier. Vous l'aviez quand même votée !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Sur ce sujet, vous devriez d'ailleurs faire preuve de modestie, monsieur Estier.
M. Alain Gournac. Un peu !
M. Charles Millon, ministre de la défense. En effet, en 1989, un événement important est survenu. Je veux parler de la chute du Mur de Berlin et de l'effondrement de l'empire soviétique. On aurait pu penser que, dès 1990, ou peut-être en 1991 - je comprends qu'il vous ait fallu un temps de réflexion pour prendre en compte la modification des conditions géostratégiques à la suite de la guerre du Golfe - le gouvernement que vous souteniez alors en tirerait les conclusions. Vous ne l'avez pas fait. Vous étiez frappés de paralysie.
M. Bertrand Delanoë. Vous avez quand même voté la loi de 1994 !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Vous avez tenté d'élaborer une loi de programmation qui n'a jamais été présentée devant le Parlement. Vous étiez frappés d'immobilisme.
M. Claude Estier. C'est vous qui avez voté la loi Léotard en 1994 !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Aujourd'hui, nous vous disons tout simplement...
M. Claude Estier. Et la loi Léotard !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ...que nous voulons aller au-delà de la loi Léotard. Nous ne contestons d'ailleurs pas celle-ci ! Nous estimons simplement qu'elle doit être menée jusqu'à son terme...
M. Bertrand Delanoë. Vous faites l'inverse !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... pour une simple raison : le Président de la République de l'époque n'avait pas voulu que soient abordés les deux dossiers qui nous paraissaient importants, à savoir, d'une part, le service national et la professionnalisation des armées et, d'autre part, l'évolution de la dissuasion nucléaire.
M. Bertrand Delanoë. Il avait bien raison !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Telle est la première raison du changement.
M. Alain Gournac. C'est une bonne raison !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Quant à la deuxième raison, dois-je rappeler les dettes accumulées de 1981 à 1993 ? Dois-je rappeler la situation budgétaire que vous avez créée ? (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.) Dois-je rappeler le trou financier que vous avez creusé ?
M. Bertrand Delanoë. Aujourd'hui, c'est pire qu'en 1993 !
M. Charles Millon, ministre de la défense. A partir de ce moment-là, oui, c'est vrai, les raisons budgétaires s'imposent à nous.
M. Bertrand Delanoë. C'est bien pire avec vous !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je suis un homme politique qui n'hésite pas à prendre ses responsabilités. Donc, je les prends. Je ne vous dirai pas qu'il n'y a pas de raisons budgétaires. Il y en a, c'est évident. Mais c'est dû à la gestion catastrophique que vous avez menée de 1981 à 1993. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Bertrand Delanoë. Vous êtes de mauvaise foi !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Deuxième point, il s'agit, dites-vous, d'une loi improvisée et d'une décision imposée.
M. Claude Estier. Ce n'est pas incompatible !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Il est extraordinaire que vous parliez de décision imposée ! Il faudrait maintenant que le Gouvernement ou le Président de la République soient les muets du sérail, qu'ils ne disent rien, qu'ils attendent les initiatives du Sénat ou de l'Assemblée nationale, qu'elles émanent des groupes parlementaires ou des partis politiques.
M. Claude Estier. Ne caricaturez pas !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Mais si, je caricature (Ah ! sur les travées socialistes) parce que vous avez vous-même caricaturé. Contre une caricature, il faut une autre caricature !
M. Jean Chérioux. M. le ministre reprend votre caricature !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Dans la Constitution de la Ve République, l'initiative appartient au Gouvernement. Il vous propose un projet de loi. Vous pouvez en débattre, c'est d'ailleurs ce que vous faites. A partir de ce moment-là, vous prenez vos responsabilités : vous votez pour ou vous votez contre, mais vous avez à vous prononcer. Alors, ne parlez pas de décision imposée !
Le Président de la République a proposé une décision ou a décidé de proposer. Il n'a fait que cela. Il vous appartient d'assumer vos responsabilités !
M. Claude Estier. Et votre publicité dans la presse ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Bien sûr, mais vous n'avez pas lu la dernière ligne...
M. Claude Estier. Si !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... où je précise qu'un projet de loi sera proposé à l'automne.
M. Claude Estier. A la dernière ligne !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Bien sûr, la dernière ligne, parce que c'est la plus importante ! Vous savez bien que, dans un ouvrage, la première chose qu'on lit c'est la conclusion.
M. Claude Estier. « A consommer avec modération » ! (Sourires.)
M. Charles Millon, ministre de la défense. J'en viens au troisième point. Là, selon moi, monsieur Estier, vous faites preuve de tactique politique, et en ce domaine vous êtes expert, j'en conviens,...
M. Bertrand Delanoë. Vous n'êtes pas mauvais non plus !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... mais où est votre esprit d'analyse ? En effet, il faudrait, dites-vous, examiner d'abord le projet de loi sur le service national avant de discuter de la loi de programmation.
M. Bertrand Delanoë. C'est le bon sens !
M. Claude Estier. C'est la logique !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Ce n'est pas logique, c'est aberrant ! (Exclamations sur les travées socialistes.) Nous n'allons pas commencer à parler des moyens avant d'avoir évoqué les finalités ! Si vous décidez le passage de l'armée de conscription à l'armée professionnelle... (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Attendez ! A partir de ce moment-là, effectivement, se posera le problème du service national. Si vous ne le décidez pas, si vous gardez l'armée mixte,...
M. Bertrand Delanoë. Vous n'êtes pas très cohérent !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Si, je suis très cohérent ! N'ayez aucun doute à cet égard, j'y ai réfléchi tout au long de la préparation de ce projet de loi.
Si vous ne le décidez pas, il n'y aura pas de projet de loi sur le service national.
Si vous votez pour, si effectivement vous adoptez le principe de l'armée professionnelle, et donc la suppression de la conscription,...
M. Claude Estier. On n'aura plus rien à voter !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Bien sûr que si ! Je poursuis mon raisonnement : à ce moment-là, vous serez obligés de discuter de la réforme du service national.
Vous aurez alors deux possibilités, et vous allez sans doute les utiliser aux mois de septembre, octobre, novembre et décembre prochains. Je vous demande d'ailleurs de les préparer pour que vous ne disiez pas que le débat est improvisé. Préparez-les dès aujourd'hui !
Ces deux possibilités sont les suivantes : le volontariat, et un service civil obligatoire plus important.
Le vote du principe de la professionnalisation signifie simplement que l'on a besoin de 10 p. 100, sous forme de volontaires ou d'appelés, d'une classe d'âge masculine. Restent 90 p. 100 : soit, si vous êtes favorable au service obligatoire, vous les mobilisez dans le cadre du service civil obligatoire ; soit, si vous êtes pour le service volontaire, vous optez pour la solution proposée par le Président de la République.
Donc, la logique est parfaite. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous avez eu du mal à défendre votre position (Sourires sur les travées socialistes) et c'est pourquoi vous allez sans doute voter contre votre motion.
M. Bertrand Delanoë. Vous n'êtes pas très convaincant !
M. Claude Estier. Nous n'allons tout de même pas voter contre !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je terminerai sur un point que je n'accepte pas : le ministre va annoncer les mauvaises nouvelles durant l'été, dites-vous. Monsieur Estier, vous me connaissez très mal ! Je ne me suis jamais soustrait à mes responsabilités, et je suis prêt à aller dans toutes les communes, dans tous les départements et dans toutes les régions où il y aura dissolution de régiment, fermeture de base, fermeture d'établissement, restructuration, pour les expliquer. Je ne me cacherai pas derrière mon petit doigt, ni derrière je ne sais qui. J'assumerai pleinement mes responsabilités.
M. Claude Estier. Vous allez passer un mauvais été !
M. Bertrand Delanoë. Cela va être dur !
M. Charles Millon, ministre de la défense. N'ayez crainte ! Nous ne sommes pas dans l'improvisation, comme vous l'avez pratiqué durant tant d'années !
M. Alain Gournac. Eh oui !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Si nous avons pris ce temps-là, c'est en réalité pour préparer une évolution de nos armées et de nos structures en matière d'armement, afin d'offrir à la France un outil adapté aux conditions géostratégiques.
C'est la raison pour laquelle, me tournant vers les membres de la majorité du Sénat, je leur demande de ne pas voter la motion de procédure proposée par M. Estier,...
M. Claude Estier. Ne soyez pas inquiet, ils ne la voteront pas !
M. Bertrand Delanoë. Même s'ils en ont envie !
M. Charles Millon, ministre de la défense. ... sinon, cela se traduirait par un retard regrettable dans la mise aux normes de la défense française afin qu'elle soit à la hauteur desdites conditions géostratégiques. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. Je vais mettre aux voix la motion n° 3.
M. Guy Cabanel. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Mon explication de vote sera un simple témoignage. On a beaucoup évoqué ici le fait que le Président de la République avait défini son option, avait, somme toute, pris une décision, en ce qui le concerne, d'un choix d'évolution du service national.
Je veux simplement rappeler un fait. En 1990, nous avons voté une loi modifiant le service national. J'en étais le rapporteur. Nous avons alors ramené la durée du service national à dix mois. Or nous avons voté cette loi en octobre-novembre - avec, d'ailleurs, deux passages devant le Sénat - alors que le Président de la République de l'époque, dans l'entretien qu'il avait accordé le 14 juillet à la fin de la cérémonie, avait déclaré : « J'ai l'intention de réduire à dix mois la durée du service national ; c'est le voeu de la jeunesse ; il en sera ainsi. » (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Bravo !
M. Guy Cabanel. Quand le débat a eu lieu dans cet hémicycle, nous l'avons rappelé au ministre de l'époque. Les arguments que vous avez développés aujourd'hui, nous les avions développés. Mais il faut savoir que le Président de la République ne peut pas être inerte ! Il exprime des choix, le Parlement décide. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Guy Penne. Nous n'avons jamais dit cela ! Mauvais examen clinique, monsieur le professeur !
M. Jean Chérioux. C'est l'arroseur arrosé !
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Mon intervention sera brève. Je dirai simplement que j'ai été stupéfait d'entendre M. Estier prétendre que le Président de la République avait pris une décision sur le service national et qu'il n'y avait pas eu débat.
Il a été rappelé que la commission avait procédé à de nombreuses auditions de personnalités venues nous informer des données du problème.
M. Claude Estier. Après !
M. Michel Caldaguès. Attendez !
M. Claude Estier. Nous n'avons pas voté !
M. Michel Caldaguès. Comment ? Nous avons voté en commission le rapport de notre ami Serge Vinçon. M. Estier, membre de la commission, l'a complètement oublié !
M. Claude Estier. Mais non !
M. Michel Caldaguès. Moi, j'ai souvenir que notre ami Serge Vinçon a fait un rapport très circonstancié en commission, qu'une large discussion s'est instaurée à ce sujet et que, très démocratiquement, la commission a voté sur le principe de la professionnalisation, en formulant même des propositions, notamment sur le rendez-vous citoyen, qui ont été finalement celles qui sont retenues à l'heure actuelle par le Gouvernement.
Par conséquent, le débat parlementaire n'a pas été vain au sein de notre commission. Aussi, monsieur Estier, vous n'avez absolument pas le droit de dire qu'il n'y a eu aucun débat démocratique. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Claude Estier. Ce n'est pas ce que j'ai dit !
M. Guy Penne. Il n'a pas dit cela ! M. Caldaguès n'a pas compris !
M. André Maman. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. Monsieur Maman, permettez-moi de vous rappeler que, aux termes du dernier alinéa de l'article 44 du règlement, seul un représentant de chaque groupe peut expliquer son vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes.
La réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe, dont vous êtes membre, ne constituant pas, selon son intitulé même, un groupe, je ne puis vous donner la parole en l'instant.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 3, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 115:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 314
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 93
Contre 221

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Article 1er et rapport annexé

M. le président. « Art. 1er. - Est approuvé le rapport annexé à la présente loi, qui fixe les orientations relatives à la politique de défense et aux moyens qui lui sont consacrés au cours de la période 1997-2002. »
Je donne lecture du rapport annexé :

« INTRODUCTION

« Le Président de la République a décidé d'engager une réforme majeure de nos moyens de défense, comparable par son ampleur à celle du début des années 1960, qui, sous l'impulsion du général de Gaulle, fut à l'origine d'une modernisation de nos armées et de la réalisation des forces nucléaires françaises.
« C'est un outil de défense rénové, adapté à l'environnement transformé, décrit dans le Livre blanc sur la défense de 1994, et anticipant les évolutions du début du siècle prochain, qui a fait l'objet d'une planification à l'horizon 2015.
« Une telle réforme requiert une approche globale, harmonisant doctrine, effectifs, équipements et politique industrielle. Il n'est pas un secteur de la défense qui ne soit concerné par cette mutation.
« La planification et la programmation militaire pour les six prochaines années consacrent le passage progressif à une armée professionnelle. Cette orientation, qui implique la disparition du service militaire dans sa forme actuelle, entraîne des conséquences importantes sur le format des forces armées, leur réorganisation et la restructuration de notre défense. Elle pose la question de l'avenir du service national.
« Le modèle d'armée professionnelle décrit dans le présent rapport prévoit qu'au terme de la période de transition seuls les jeunes Français volontaires effectueront un service dans les forces armées.
« La redéfinition de nos moyens de défense s'inscrit dans un contexte de maîtrise des finances publiques, avec le souci non seulement de limiter à un niveau raisonnable les crédits consacrés par l'Etat à sa défense, mais aussi d'édifier une défense plus efficace et moins coûteuse. Une enveloppe de ressources annuelle de 185 milliards de francs, en francs constants 1995, a été retenue. Elle permet sans conteste de maintenir la France parmi les premières nations d'Europe dans le domaine de la défense.
« La loi de programmation repose sur un double objectif : la réussite de la professionnalisation et de la réorganisation des forces armées ; la poursuite de la modernisation des forces. Elle accorde une attention particulière au personnel et aux conséquences des restructurations militaires et industrielles qui devront être mises en oeuvre. Une politique d'accompagnement économique et social est définie à cette fin.
« Le dispositif législatif nécessaire à la conduite d'ensemble de la réforme comportera donc, outre la présente loi de programmation, une loi sur le service national, une loi portant organisation générale de la réserve ainsi qu'une loi fixant les mesures propres à faciliter l'exécution de la présente loi de programmation en matière de personnel.

« 1. VERS UN NOUVEAU MODÈLE D'ARMÉE
« 1.1. Un environnement stratégique transformé
et toujours dangereux

« L'effondrement de l'Union soviétique et la dissolution du pacte de Varsovie ont mis fin à la division de l'Europe en deux blocs rivaux et à la menace militaire massive qui existait à nos frontières et à celles de nos alliés. Il subsiste cependant à l'Est de l'Europe, et pour de longues années encore, des arsenaux militaires surdimensionnés, dont le contrôle demeure une source de préoccupation.
« En Europe, il n'existe plus de source de conflit majeur, mais la paix demeure fragile. L'apparition de tensions, liées à des désaccords frontaliers, au statut de certaines minorités ou à des rivalités inter-ethniques ne peut être ignorée. Ces tensions peuvent donner naissance à des conflits armés susceptibles de s'étendre s'ils ne sont pas maîtrisés à temps.
« Au-delà des frontières de l'Europe, les ambitions de certaines puissances régionales ou la prolifération d'armes de destruction massive peuvent représenter des risques réels pour la paix dans le monde et la sécurité de notre pays, en dépit des progrès dans l'élaboration d'instruments de prévention internationale (conventions sur l'interdiction des armes chimiques et bactériologiques, projet de traité sur l'interdiction complète des essais nucléaires).
« Cette situation est particulièrement dangereuse dans les zones, comme au Moyen-Orient ou en Asie, dépourvues d'organisations ou de traités multilatéraux instaurant une coopération active dans le domaine de la sécurité et du règlement pacifique des différends.
« Par ailleurs, notre politique de défense doit également prendre en compte un certain nombre de menaces ne s'exerçant pas dans le cadre des rapports interétatiques traditionnels, qu'il s'agisse de l'activité de mouvements nationalistes et terroristes, des progrès du crime organisé, des trafics d'armes et de drogue.
« Si nos frontières sont aujourd'hui en paix, le monde qui nous entoure ne l'est pas. Une attitude vigilante s'impose donc. La France doit maintenir sa garde et conserver les moyens de sa défense et de sa sécurité.

« 1.2. Cadre politique et grands choix internationaux
« 1.2.1. Les objectifs

« Dans le nouvel équilibre résultant des changements de l'environnement international, le premier objectif de notre défense est de protéger :
« - nos intérêts vitaux, en toutes circonstances, quelle que soit l'origine ou la nature des menaces ; l'intégrité du territoire national et de ses approches aériennes et maritimes, le libre exercice de notre souveraineté et la protection de la population en constituent le coeur ;
« - nos intérêts stratégiques, qui résident prioritairement dans le maintien de la paix sur le continent européen et les zones qui le bordent, notamment la Méditerranée, ainsi que dans la préservation des espaces essentiels à notre activité économique et à la liberté de nos échanges ;
« - enfin, nos intérêts de puissance consciente de ses responsabilités dans le monde, membre permanent du Conseil de sécurité et dotée de l'arme nucléaire.
« Depuis le début de la Ve République, la politique de défense de la France allie préservation de l'autonomie stratégique et respect des solidarités. Le défi à venir sera de lui donner sa dimension européenne.

« 1.2.2. Le renforcement des solidarités

européenne et atlantique
« Aujourd'hui moins que jamais, la défense de la France ne doit être conçue comme un repli sur soi : elle s'inscrit dans une perspective européenne et internationale.
« La politique de défense servira la construction d'une défense européenne crédible, à la fois bras armé de l'Union européenne et moyen de renforcer le pilier européen de l'Alliance. En Europe, la France, membre de l'Union européenne, de l'Alliance atlantique et de l'UEO, est en effet au coeur de ce réseau de solidarités qui tendent à faire de notre continent un espace stratégique commun.
« La solidarité européenne tient d'abord pour la France à sa relation privilégiée avec l'Allemagne. La relation franco-allemande en matière de défense et de sécurité, fondée sur le traité de l'Elysée du 22 janvier 1963 et le protocole de 1988, est une priorité ancienne et solidement établie de notre politique. Depuis lors, cette coopération n'a cessé de s'approfondir, tant dans le domaine militaire, avec le Corps européen dont les deux pays sont à l'origine, que dans le domaine de l'armement, où l'Allemagne est notre premier partenaire, avec la structure commune de coopération récemment mise en place.
« Un partenariat privilégié nous lie également au Royaume-Uni, notamment dans le domaine nucléaire. La coopération entre les deux puissances nucléaires européennes de l'Alliance atlantique permet un renforcement mutuel de la dissuasion et consolide la contribution européenne à la dissuasion globale. Dans le domaine des forces classiques, la coopération entre les armées n'a cessé de se développer. Elle s'est manifestée dans le domaine aérien par la création du Groupe aérien européen (GAE).
« La coopération européenne repose aussi sur un réseau de coopérations multilatérales qui associent, en particulier, les pays de la Méditerranée, aussi bien dans les domaines opérationnels qu'industriels.
« Les progrès de la construction européenne ont renforcé les liens politiques, économiques et sociaux entre les Etats intéressés, à un point tel que leurs intérêts de sécurité sont devenus difficiles à distinguer. La France souhaite donc la mise en place, sous l'autorité du Conseil européen, d'une politique commune de sécurité et de défense ambitieuse. Dans le même esprit, elle souhaite constituer avec ses partenaires européens une base industrielle et technologique commune, composante à part entière de l'identité européenne en matière de défense.
« Notre vision de l'Alliance atlantique elle-même est européenne. Fondée sur une solidarité entre tous les alliés et singulièrement sur l'engagement des Etats-unis, l'Alliance demeure, pour la France comme pour ses partenaires, une garantie indispensable pour l'équilibre et la sécurité en Europe. Le développement des capacités politiques et militaires des Européens et le renforcement du pilier européen de l'OTAN sont les deux volets indissociables d'une même politique.
« La France entend participer pleinement à la réforme de l'Alliance ; son engagement futur dans l'Alliance rénovée dépendra des adaptations qui seront décidées et du degré de responsabilité que les Européens pourront effectivement y exercer dans le cadre d'un nouveau partenariat transatlantique. Les Européens devront pouvoir mener, y compris avec les moyens de l'Alliance, une opération militaire sous leur responsabilité.

« 1.2.3. Les responsabilités internationales de la France

« Membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU et puissance nucléaire, la France a enfin des responsabilités à assumer dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale, ainsi que des engagements de solidarité à respecter en Afrique et au Moyen-Orient.
« Depuis la fin de la "guerre froide", elle a sensiblement accru sa contribution aux opérations de maintien de la paix et les forces armées ont été fortement sollicitées à ce titre.

« 1.2.4. Les cadres d'engagement

« La conjonction de ces intérêts, de ces solidarités et de ces responsabilités définit les cadres d'engagement possible de nos forces.
« Il convient, en premier lieu, de prévoir la participation des armées à la protection et à la sécurité du territoire national et de ses approches, notamment dans l'hypothèse d'une entreprise de déstabilisation ou d'une vaste campagne de terrorisme.
« Il nous faut également pouvoir agir, sur une base nationale ou éventuellement multinationale, pour la défense d'intérêts nationaux menacés, ou au titre de la mise en oeuvre des accords de défense conclus avec des pays amis, en Afrique ou au Moyen-Orient.
« En troisième lieu, l'action dans le cadre de l'Alliance atlantique ou de l'Union de l'Europe occidentale doit être désormais conçue moins dans l'éventualité d'une menace du type de celle qu'a longtemps exercée l'URSS, qu'en cas de conflit régional mettant en jeu nos obligations au titre des traités.
« Enfin, nous devons être capables d'agir sur mandat de l'Organisation des Nations unies pour contribuer à des opérations de maintien ou de rétablissement de la paix. Celles-ci pourront se dérouler au sein d'une coalition appropriée, ou dans le cadre de l'UEO ou dans celui de l'OTAN.

« 1.3. Les grandes fonctions opérationnelles

« Les missions des forces armées définies par le Président de la République demeurent, en premier lieu de garantir la protection des intérêts vitaux de la France et la sécurité du territoire et des populations, d'assurer le respect de ses engagements internationaux et de lui permettre d'assumer les responsabilités particulières qui sont les siennes sur le plan international.
« L'incertitude et la diversité des menaces et des risques imposent de concevoir des moyens de défense souples et une stratégie capable de s'adapter en permanence à la variété des situations et des rapports de force internationaux.
« Le scénario principal de notre défense, qui avait conduit à codifier une relation étroite et continue entre service national et rôle de l'appelé, entre forces classiques et capacités de dissuasion nucléaire, ne peut plus être prédominant. Les crises et conflits, actuels et futurs, en Europe et hors d'Europe, appellent des traitements différenciés qui verront se combiner les divers instruments de notre politique de défense.
« A cette fin, le poids respectif et l'articulation des quatre grandes fonctions opérationnelles - dissuasion, prévention, projection, protection - varieront selon les situations. Il serait périlleux de les figer dans une configuration unique et un modèle stratégique invariable.

« 1.3.1. La dissuasion

« La dissuasion reste l'élément fondamental de la stratégie de défense de la France. Elle demeure la garantie contre toute menace sur nos intérêts vitaux, quelles qu'en soient l'origine et la forme. Elle reste nécessaire dans un monde où la vigilance continue de s'imposer. Elle doit prendre en compte la perspective européenne et le renforcement des solidarités.
« Simultanément, notre politique de dissuasion doit tirer parti du répit qu'offre la situation actuelle pour redéfinir les moyens et la posture de nos forces. En effet, la France n'est plus menacée, dans sa survie même, par la présence, à proximité immédiate de nos frontières, de forces nucléaires, aéroterrestres et chimiques considérables.
« Mais la présence, pendant de longues années encore, de milliers d'armes nucléaires dans les arsenaux hérités de la guerre froide, l'apparition d'autres types de dangers susceptibles de mettre en cause nos intérêts vitaux, notamment le développement sur d'autres continents d'armes de destruction massive, font que la dissuasion nucléaire garde toute son impérieure nécessité. Elle doit pouvoir s'adapter avec souplesse à l'incertitude qui entoure la nature des menaces et des risques futurs.
« Dissuasive, la stratégie nucléaire de la France demeure exclusivement défensive. Elle contribue à la sécurité et à l'équilibre en Europe et dans le monde. Elle ne saurait être un instrument de coercition, encore moins un outil de bataille susceptible d'être employé en vue d'un gain militaire.
« Cette stratégie doit prendre en compte la solidarité européenne. Aussi, l'imbrication croissante des intérêts vitaux des nations européennes et le caractère commun de bien des menaces qui les visent ont-ils conduit la France à avancer l'idée d'une dissuasion « concertée », dans le cadre d'une approche d'ensemble de la sécurité européenne et atlantique.
« Il ne s'agit pas d'étendre de manière unilatérale une garantie nucléaire française, ni d'imposer à nos partenaires un contrat. La France propose une démarche pragmatique et progressive, fondée sur l'idée que la concertation renforce la dissuasion.
« Avec nos partenaires britanniques, une concertation et une coopération sont engagées. Avec l'Allemagne, un dialogue approfondi sera entrepris, dans le respect des spécialités de chacun. Avec les autres pays européens, la mise en oeuvre, à terme, d'une défense commune telle que prévue par le Traité sur l'Union européenne appelle une concertation. Cette approche implique également un dialogue avec le Etats-Unis et au sein de l'Alliance.
« Sur le plan des moyens, notre politique de dissuasion doit tenir compte à la fois de la permanence de certtains risques et des évolutions favorables de l'environnement international. La structure de nos forces et leur niveau seront donc revus durant la période couverte par la loi de programmation, dans le strict respect des principes de suffisance et de crédibilité.
« Notre dissuasion entre ainsi dans une ère nouvelle.
« Elle repose désormais sur deux composantes qui seront modernisées, l'une balistique, emportée par les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins de nouvelle génération, l'autre aérobie, emportée par des aéronefs. Ces moyens offriront la souplesse et la diversité qui permettront à la dissuasion française de rester pertinente et crédible en toutes circonstances. Les composantes sol-sol de notre arsenal actuel seront démantelées et le format de la Force océanique stratégique (FOST) sera ramené à au moins quatre SNLE, entraînant une réduction significative du nombre des armes nucléaires déployées par la France.
« L'effort consacré au programme PALEN permettra, grâce à l'ultime campagne d'essais qui vient de s'achever, de garantir, dans l'avenir, la sûreté et la fiabilité de nos armes nucléaires. Les installations des sites d'expérimentation nucléaire du Pacifique seront démantelées. L'usine haute de Pierrelatte et l'usine de Marcoule seront fermées.
« La part du budget du ministère de la défense consacrée aux forces nucléaires s'établira en fin de période, à un niveau inférieur à 20 p. 100 du titre V (contre 31,4 p. 100 en 1990), au sein d'un budget d'équipement lui-même en diminution.

« 1.3.2. La prévention

« La contribution à la stabilité et à la paix est la meilleure garantie contre la réapparition de grandes menaces, le développement de situations de crise ou de conflits susceptibles de mettre en cause notre sécurité ou nos intérêts et ceux de nos partenaires de l'Union européenne et de l'Alliance atlantique.
« Pleinement impliquée dans le maintien de la paix et de la sécurité internationale par ses choix politiques, la France accorde donc une priorité à la mise en oeuvre d'une stratégie de prévention.
« La prévention doit aussi, par le renseignement, nous mettre à l'abri des surprises stratégiques, faciliter l'adaptation permanente des moyens et de l'organisation de notre défense, orienter la préparation du futur. Elle doit enfin permettre la résolution des crises au plus bas niveau d'engagement de forces.
« L'efficacité de la prévention repose sur les moyens de renseignement, une présence permanente à l'extérieur de nos frontières et les dispositifs de coopération avec les pays alliés ou amis.
« La détention d'une capacité propre d'anticipation et de compréhension des situations constitue dans ce cadre l'une des clés de l'autonomie stratégique.
« C'est pourquoi un effort particulier sera réalisé au bénéfice des moyens humains et techniques dont doivent disposer les grandes directions du renseignement, en particulier en matière d'observation d'origine spatiale.
« Le maintien d'un dispositif de forces prépositionnées, notamment en Afrique, permettra, dans les régions concernées, l'analyse permanente des situations, la réaction immédiate, l'accueil éventuel des renforts et l'exercice de la solidarité avec le pays hôte ou dans son environnement.
« La prévention appelle la réalisation et l'exploitation en commun de moyens de renseignement. Elle implique un rapprochement des capacités d'analyse des situations, dont la coopération engagée par les pays participant aux programmes des satellites Hélios et Horus sera le catalyseur.

« 1.3.3. La projection

« La crédibilité d'une stratégie de prévention ne peut être assurée que si elle est susceptible d'être prolongée par une capacité d'engagement militaire destinée à contrer une menace dans le cadre de nos alliances, à répondre à l'appel d'organisations internationales de sécurité, notamment les Nations unies, et à délivrer un signal politique fort, là où nos intérêts ou ceux de nos partenaires seraient directement mis en cause.
« Les menaces militaires à prendre en compte sont désormais plus éloignées de nos frontières. La localisation des zones de conflits potentiels, aussi bien en Europe qu'à l'extérieur du continent européen, implique une capacité d'action à distance qui dépasse le champ, très limité, assigné au principal de nos forces dans le passé.
« C'est pourquoi notre défense et la mise en jeu de nos obligations internationales se joueront souvent sur des théâtres situés à distance du territoire national. Notre capacité de projection sera donc conçue pour être au service de la défense nationale et européenne.
« Priorité assignée à nos forces classiques, la constitution de cette capacité de projection obéira aux principes suivants :
« - la disponibilité requise pour les forces, la maîtrise de procédures et d'équipements complexes, l'engagement dans un cadre qui sera souvent d'emblée multinational conduisent à compléter la professionnalisation de nos armées ;
« - la diversité des types d'engagement possibles, leur caractère interarmées et généralement international impliquent que l'on constitue les armées autour d'éléments organiques permettant une articulation souple du commandement et des forces, dont la nature et le volume soient, en toute occasion, adaptables au besoin ;
« - la capacité de la France à peser, à la mesure de sa contribution politique et militaire, dans la conception et la conduite d'opérations auxquelles elle aurait décidé de participer, suppose de disposer de moyens de commandement et de communications projetables, interarmées, interopérables avec nos alliés ; à terme, il s'agit de pouvoir mettre en oeuvre une force nationale ou participer au commandement d'une force multinationale avec nos partenaires européens, engageant des moyens terrestres du niveau d'un corps d'armée, un groupe aéronaval et des forces aériennes, avec leurs moyens de contrôle de l'espace aérien ;
« - s'il n'est pas à notre portée d'acheminer dans des délais très courts, en tout lieu et en tout temps, l'ensemble des forces projetables, il est indispensable de disposer d'une capacité autonome de projection initiale, terrestre, aérienne et maritime, pour mettre en place les premiers éléments ou les renforts. Pour la suite des opérations, il sera fait appel, comme aujourd'hui, à des moyens civils, des moyens alliés, ou, ultérieurement, à un « pool » européen.
« En termes de capacités, la loi de programmation doit permettre de progresser vers les objectifs retenus par la planification 2015, c'est-à-dire permettre aux forces armées de déployer à distance, avec leur support et leur logistique associés, sous commandement interarmées, les moyens suivants :
« - pour l'armée de terre, soit plus de 50 000 hommes pour prendre part à un engagement majeur dans le cadre de l'Alliance, soit 30 000 hommes sur un théâtre, pour une durée d'un an, avec des relèves très partielles (ce qui correspond à un total de 35 000 hommes), tandis que 5 000 hommes relevables sont engagés sur un autre théâtre (ce qui correspond à 15 000 hommes environ) ;
« - pour la marine, un groupe aéronaval et son accompagnement, ainsi que des sous-marins nucléaires d'attaque, à plusieurs milliers de kilomètres ;
« - pour l'armée de l'air, avec une capacité de transport maintenue au niveau actuel, une centaine d'avions de combat et de ravitailleurs en vols associés, ainsi que les moyens de détection et de contrôle aérien, et les bases aériennes nécessaires ;
« - pour la gendarmerie, des éléments spécialisés et d'accompagnement des forces.
« Enfin, les forces capables de missions de projection pourront être requises, si le besoin s'en fait sentir, pour la protection du territoire national. Leur plus grande mobilité, leur souplesse d'articulation permettront de répartir ou de concentrer les efforts sur le territoire pour des missions de sécurité ou de service public.

« 1.3.4. La protection

« Mission essentielle des forces armées, la protection du territoire est une exigence permanente. La défense du territoire national doit en effet pouvoir être assurée en toutes circonstances.
« En l'absence de menace extérieure majeure et directe sur nos frontières, c'est aujourd'hui une mission de sécurité intérieure plutôt qu'une mission de défense proprement militaire. De ce fait, les forces de gendarmerie, à la différence des autres forces armées, verront leurs effectifs s'accroître.
« Il s'agit d'être capable en permanence de prévenir ou de réprimer l'exercice d'un chantage, de représailles ou d'agressions limitées contre le territoire ou les populations, notamment en cas de risques résultant de crises internationales dans lesquelles la France serait directement ou indirectement impliquée.
« Dans un contexte d'intensification des échanges internationaux, il faut également pouvoir répondre à la diversification des menaces. Qu'il s'agisse de la lutte contre le terrorisme, contre le trafic de drogue ou la grande criminalité, pour ne parler que des menaces les plus apparentes, le concours des formations et des moyens militaires de toute nature peut s'avérer indispensable en cas de crise ou d'événement grave, à tout moment et en tout lieu.
« De même, dans le cadre de leurs missions de service public, les armées continueront d'apporter leur concours aux populations, en cas de catastrophe naturelle ou pour parer aux conséquences d'accidents technologiques.
« Elles pourront donc être mises à la disposition de l'autorité civile, dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui. Leur mobilité accrue permettra de satisfaire à ces demandes. La meilleure articulation possible sera recherchée entre les autorités civiles et le commandement territorial militaire, en matière de découpage territorial administratif et militaire, pour faciliter les liaisons et le commandement opérationnel.
« La sûreté et la défense aérienne du territoire seront assurées par l'aviation de combat. Elles s'appuieront sur la chaîne permanente de détection et de contrôle, reliée à celle de nos alliés, qui sera modernisée. La surveillance des approches maritimes relèvera, comme par le passé, des bâtiments et aéronefs de la marine.
« Enfin, conséquence directe de la liberté de circulation des personnes et des biens dans l'Union européenne, la protection du territoire s'inscrira de plus en plus dans le cadre d'une coopération renforcée avec nos voisins et alliés. La protection doit, elle aussi, se concevoir à une échelle européenne.

« 1.4. Les conséquences
« 1.4.1. La professionnalisation

« La professionnalisation des forces armées résulte d'un triple constat portant sur la nature des risques à affronter, le cadre d'engagement des forces et l'évolution des systèmes d'armes.
« La nature des crises auxquelles nous risquons d'être désormais confrontés nécessitera la projection, dans des délais très brefs, de forces réduites en nombre, mais immédiatement disponibles et opérationnelles, pour mener des actions limitées le plus souvent dans le temps et dans l'espace et remplir des missions extrêmement variées.
« Simultanément, l'imbrication toujours plus grande de nos intérêts de sécurité avec ceux de nos alliés et de nos voisins, la recherche permanente d'un ordre international plus stable nous conduiront à intervenir dans des cadres d'action très différents, exigeant de nos forces une très grande faculté d'adaptation, une expérience et un savoir-faire que seule la professionnalisation sera en mesure de leur apporter.
« Enfin, la mise en oeuvre et l'entretien de systèmes d'armes de plus en plus sophistiqués dans un environnement complexe requièrent une formation longue, coûteuse et soigneusement entretenue des servants, des opérateurs et des techniciens.
« C'est pourquoi, en réponse à l'évolution des besoins militaires, il a été décidé de conduire jusqu'à son terme la professionnalisation de nos forces.

« 1.4.2. La coopération internationale

« Dans la très grande majorité des cas, l'engagement de nos armées s'effectuera dans un contexte multinational.
« L'échange de renseignements, la mise en commun de moyens d'analyse et la recherche de l'interopérabilité des commandements et des forces sont donc autant de domaines à développer en priorité. La réforme entreprise donnera à nos forces la souplesse d'emploi nécessaire pour répondre aux besoins de plus en plus diversifiés de ces coopérations.
« Les coopérations européennes constitueront le champ privilégié de cette politique.
« La capacité opérationnelle et la disponibilité du Corps européen, de l'Eurofor et de l'Euromarfor seront accrues par la professionnalisation de nos forces. Le stationnement de nos troupes en Allemagne sera profondément modifié, à la suite de la restructuration de l'armée de terre. Mais la brigade franco-allemande sera confirmée dans ses missions et son stationnement actuels. Enfin, la coordination des activités opérationnelles des armées de l'air française et britannique sera poursuivie au sein du Groupe aérien européen.
« La diminution des formats des forces armées, aussi bien en France que chez nos partenaires, autant que l'amélioration des capacités opérationnelles de l'UEO et le renforcement de l'identité européenne au sein de l'OTAN, conduiront à intensifier ces coopérations. Les projets en cours d'étude doivent se concrétiser, en particulier dans les domaines du transport aérien et maritime, de la formation, ainsi que de la logistique opérationnelle.
« Au cours des années à venir, la part des programmes d'équipement réalisés en coopération croîtra sensiblement. Les objectifs de maîtrise des coûts, d'harmonisation des besoins et d'interopérabilité des forces rendent plus que jamais indispensable une coopération ambitieuse entre pays européens pour le lancement et la conduite de ces programmes.

« 1.4.3. Le modèle 2015

« Le modèle 2015, qui résulte des travaux de planification conduits par le ministère de la défense, a été établi au vu de l'ensemble des analyses qui précèdent (cf. tableaux ci-après). Approuvé par le Président de la République en conseil de défense, il correspond à une armée professionnelle, plus ramassée, mieux équipée, mieux adaptée aux actions hors du territoire national. Ses capacités ont été définies de façon à permettre, simultanément, le développement d'un dispositif permanent de prévention, une présence visible et significative dans une action internationale et d'abord alliée, ainsi que des opérations de moindre envergure sous commandement national, tout en préservant la protection du territoire et de ses approches.
« Les moyens nucléaires seront maintenus en permanence au niveau de suffisance adapté au nouvel environnement. Le renouvellement des composantes balistique (M51) et aérobie (ASMP amélioré) au début du siècle prochain offrira la garantie et la souplesse nécessaires ; la fiabilité et la crédibilité de ces forces sont assurées sur le long terme.
« La réduction des effectifs des armées s'accompagnera d'une modernisation destinée à conférer progressivement aux fonctions de prévention et de projection la dimension souhaitée.
« C'est ainsi que sont engagées simultanément, durant la période de planification, les principales réalisations suivantes : satellites Hélios II, Horus et Syracuse III, ensemble Leclerc/Tigre, avion Rafale polyvalent pour l'armée de l'air et la marine, hélicoptère NH 90, frégates antiaériennes Horizon, sous-marins nucléaires d'attaque de nouvelle génération, armements intelligents (antichars longue portée de troisième génération, amélioration du lance-roquettes multiples, MICA, armement guidé laser), missiles de croisière de la famille Apache, dont le SCALP, d'emploi général. Ces systèmes d'armes constituent la clé de la supériorité technologique pour la défense du pays et celle de l'Europe.
« L'accent sera également mis sur les capacités interarmées - renseignements, commandement (poste de commandement interarmées de théâtre - PCIAT) et communications. Il s'agit d'abord de conférer à notre pays l'autonomie stratégique nécessaire. Il faut, d'autre part, doter nos forces, lorsqu'elles seront engagées au sein de grands ensembles multinationaux, des moyens leur permettant de contribuer à la conduite et au commandement d'une opération à un niveau correspondant à notre engagement politique et militaire.
« La souplesse dans la nouvelle organisation des forces armées permettra la constitution de modules de différentes tailles, autorisant les combinaisons nécessaires pour répondre à la variété des situations et des cadres d'action possibles.
« A l'horizon 2015, l'armée de terre, beaucoup plus compacte, avec des effectifs réduits de l'ordre de 36 p. 100, sera réorganisée autour de quatre forces : une force blindée, une force mécanisée, une force d'intervention blindée rapide et une force d'infanterie d'assaut. Elle pourra ainsi mettre en oeuvre une capacité blindée équilibrée entre moyens lourds et légers ainsi que des appuis satisfaisants, avec une composante aéromobile qu'il conviendra cependant d'améliorer à terme.
« La marine, dont les effectifs auront connu une diminution de l'ordre de 19 p. 100, sera articulée essentiellement autour d'une force océanique stratégique, d'un groupe aéronaval doté de ses moyens d'accompagnement, ainsi que d'une Force de sous-marins nucléaires d'attaque. Le groupe aéronaval sera composé de 2 porte-avions Sous réserve que les conditions économiques le permettent.
, dont le Charles-de-Gaulle , et sera équipé de 3 avions du guet embarqué Hawkeye ainsi que de 60 Rafale.
« L'armée de l'air, dont les effectifs diminueront d'environ 24 p. 100, alignera à terme 300 avions modernes de type Rafale, aptes à toutes les missions classiques et nucléaires, avec une composante de commandement et de contrôle modernisée et mobile. Elle offrira par ailleurs une capacité de transport identique à celle d'aujourd'hui.
« La gendarmerie verra ses missions traditionnelles s'accroître et prendra une part plus importante à la protection du territoire. Aussi ses effectifs progresseront-ils de 5 p. 100. Elle continuera de s'appuyer sur le maillage territorial qui conditionne l'exécution de ses missions de sécurité intérieure.


« Modèles d'armée



SITUATION 1995

HORIZON 2015


Terre
239 100 militaires
32 400 civils 271 500 total.

136 000 militaires
34 000 civils 170 000 total.
.
9 divisions, 129 régiments

927 chars lourds
350 chars légers 340 hélicoptères.

Environ 85 régiments répartis en 4 forces
420 chars lourds
350 chars légers Environ 180 hélicoptères.

.
Marine
63 800 militaires
6 600 civils 70 400 total.

45 500 militaires
11 000 civils 56 500 total.
.
101 bâtiments (hors SNLE) dont :
- 2 PA et groupe aérien ;
- 6 SNA, 7 SMD ;
- 15 frégates de premier rang


Tonnage : 314 000 tonnes 33 avions de patrouille maritime.

81 bâtiments (hors SNLE) dont :
- 2 PA (1) et groupe aérien dont 3 Hawkeye et 60 Rafale ;
- 6 SNA ;
- 12 frégates de premier rang
Tonnage : 234 000 tonnes 22 avions de patrouille maritime.

.
Air
89 200 militaires
4 900 civils 94 100 total.

63 000 militaires
7 000 civils 70 000 total.
.
405 avions de combat

86 avions de transport
11 avions ravitailleurs C 135 101 hélicoptères.

300 avions de combat modernes type Rafale
52 avions de transport modernes
16 avions ravitailleurs 84 hélicoptères.

.
Gendarmerie
92 230 militaires
1 220 civils 93 450 total.

95 600 militaires
2 300 civils 97 900 total.

.

Services communs

18 130 militaires
29 780 civils 47 910 total.

12 600 militaires
27 000 civils 39 600 total.

.

Effectifs
(hors comptes de commerce)

502 460 militaires
74 900 civils 577 360 total.

352 700 militaires
81 300 civils 434 000 total.


(1) Sous réserve que les conditions économiques le permettent


« Présentation du modèle d'armée professionnalisée par fonctions opérationnelles à l'horizon 2015


FONCTIONS

TERRE

MARINE

AIR

GENDARMERIE

SERVICES COMMUNS
DISSUASION Soutien conventionnel.

4 SNLE (T.III).
4 SNA - 4 frégates anti-sous-marines
Autres frégates et bâtiments anti-mines
16 PATMAR Hélicoptères.


Avions de combat à capacité nucléaire
Ravitailleurs C 135
C 160 ASTARTE
Avions de transport
Hélicoptères Moyens Sol-Air.
Participation à la sécurité nucléaire.
FNS : 4 SNLE + M 51 ASMP +.
PRÉVENTION
Forces prépositionnées
Commandement des opérations spéciales
Brigades de renseignement et de guerre électronique Participation aux organismes de renseignement.

Frégates de surveillance et de 2e rang
Pétrolier ravitailleur
6 PATMAR
Bâtiment MINREM
Hélicoptères
Commandement des opérations spéciales Participation aux organismes de renseignement.

Avions de reconnaissance
Systèmes AWACS
Avions ROEM
Avions de transport
Hélicoptères + Moyens Sol-Air
Commandement des opérations spéciales Participation aux organismes de renseignement.
Participation aux organismes de renseignement.
ESPACE CPSM
Observations :
Hélios-Horus
Télécom : Syracuse
EMA : Renseignement/C 31
DRM-MMF/AD DGSE.
PROJECTION
420 chars lourds
350 engins blindés roues-canon
VAB et VBCI
Appuis :
Environ 180 hélicoptères avec armement Artillerie, y compris LRM.

2 porte-avions + 60 Rafale
3 Hawkeye
2 SNA - 4 FASM
4 frégates anti-aériennes
Bâtiments anti-mines
Transport de chalands de débarquement
Pétroliers ravitailleurs Hélicoptères.

220 avions de combat modernes de type Rafale (1)
Ravitailleurs C 135
Avions de transport à long rayon d'action
Avions de transport tactique
Hélicoptères
SAR de combat (1) Dont 60 de transformation opérationnelle.

Eléments spécialisés (GSIGN, Gendarmerie mobile) Accompagnement des forces (prévôté).

PCIAT EMA : SYRACUSE.
PROTECTION
Unités et moyens projetables utilisés en cas de besoin (missions de sécurité intérieure et de service public) Forces de souveraineté.

Frégates de 2e rang
Bâtiments anti-mines et de transport légers
Patrouilleurs
Avions de surveillance Hélicoptères.

Avions de combat
Avions de transport
Hélicoptères
Système de commandement et de conduite des opérations aériennes SCCOA Moyens Sol-Air.

Maillage territorial de 3 500 brigades
Escadrons de gendarmerie mobile
Hélicoptères
Unités de recherche
Unités motorisées SAPHIR - RUBIS.
.
.
Etudes amont (hors nucléaire)
Développement et fabrication hors DGA
Munitions d'instruction
EPP - EPM Infrastructures.

Etudes amont (hors nucléaire)
Développement et fabrication hors DGA
Munitions d'instruction
EPP - EPM Infrastructures.

Etudes amont (hors nucléaire)
Développement et fabrication hors DGA
Munitions d'instruction
EPP - EPM Infrastructures.

Munitions d'instruction
EPP Infrastructures.
DGA : études amont (hors nucléaire).

ENVIRONNEMENT

.
Administration centrale
Soutien des personnels (commissariat, ASA...)
Soutien central matériels
Formation (Ecoles) Transmissions d'infrastructures/gouvernementales.

Administration centrale
Soutien des personnels (commissariat, ASA...)
Soutien central matériels
Formation (Ecoles) Transmissions d'infrastructures/gouvernementales.

Administration centrale
Soutien des personnels (commissariat, ASA...)
Soutien central matériels
Formation (Ecoles) Transmissions d'infrastructures/gouvernementales.

Administration centrale
Soutien personnels
Formation (Ecoles) Transmissions d'infrastructures.

DGA - DSF
Service des essences des armées
Service de santé des armées EMA : infrastructures et fabrications diverses.

Total : 352 700
81 300
T III = 99 MdF
T V = 86 MdF
Total : 185 MdF

Militaires : 136 000 Civils : 34 000

Militaires : 45 500 Civils : 11 000

Militaires : 63 000 Civils : 7 000

Militaires : 95 600 Civils : 2 300

Militaires : 12 600 Civils : 27 000




« 2. LA PROGRAMMATION MILITAIRE 1997-2002 : UNE PREMIÈRE ÉTAPE VERS LE NOUVEAU MODÈLE D'ARMÉE
« La programmation militaire pour les années 1997-2002 constitue une première étape sur la voie de la réalisation du nouveau modèle d'armée arrêté par le Président de la République.
« A la différence de celles qui l'ont précédée, cette programmation marque ainsi une véritable rupture et amorce une profonde mutation. La professionnalisation et le changement de format des forces armées, ainsi que la réorganisation de notre industrie de défense, seront en effet achevés au terme des six années couvertes par la loi.
« Cette loi présente cinq caractéristiques :
« - elle programme l'ensemble des moyens de la défense ;
« - elle organise le passage à une armée professionnelle ;
« - elle adapte l'équipement de nos forces à leur nouveau format ;
« - elle engage les restructuration de notre outil industriel ;
« - elle est assortie de mesures d'accompagnement économique et social.

« 2.1. La programmation de l'ensemble
des moyens de la défense
« 2.1.1. L'enveloppe des moyens de la défense est fixée
à 185 milliards de francs constants 1995

« Le total des moyens financiers programmés s'inscrit dans une enveloppe annuelle de 185 milliards de francs constants 1995, répartis entre le fonctionnement (99 milliards de francs) et l'investissement (86 milliards de francs).
« L'enveloppe allouée à la défense ne comprend :
« - ni le financement des formes civiles du volontariat ; « - ni la contribution du ministère de la défense au titre du budget civil de recherche et développement (BCRD) ;
« - ni les sommes nécessaires à la recapitalisation des entreprises publiques de défense ;
- ni les crédits de reconversion des bassins d'emploi concernés par les restructurations, à l'exception des crédits inscrits au fonds pour la restructuration de la défense (FRED)
« Les moyens affectés au nouveau modèle d'armée professionnelle représentent donc une économie d'environ 20 milliards de francs par an par rapport aux 205 milliards de francs annuels découlant de la programmation 1995-2000.
« Les crédits ainsi programmés sont exprimés en francs constants, protégeant les ressources consacrées à notre effort de défense de l'érosion monétaire.

« 2.1.2. Le champ de la programmation
est étendu aux dépenses de fonctionnement

« Pour la première fois depuis le début de la Ve République, la totalité des moyens mis à la disposition de nos forces armées - à l'exception des pensions - et leur évolution annuelle seront programmées.
« Le nouveau modèle d'armée se traduira en effet par de profondes modifications qui toucheront non seulement les équipements des forces (qui sont tradionnellement décrits par les lois de programmation militaire) et leurs effectifs (qui ont été programmés pour la première fois par la loi n° 94-507 du 23 juin 1994), mais aussi leurs moyens de fonctionnement courant.
« La réussite de la transition vers ce nouveau modèle suppose que l'ensemble de ces moyens évoluent de façon cohérente. Aussi la programmation pour les années 1997-2002 précise-t-elle à la fois :
« - les effectifs budgétaires, pour chaque annuité de la période de programmation ;
« - les crédits affectés aux dépenses de fonctionnnement du titre III ;
« - les crédits affectés aux dépenses d'investissement des titres V et VI.

« 2.1.3. Les autorisations de programme
sont incluses dans la loi

« Les moyens destinés au financement des investissements sont programmés en termes de crédits de paiement, mais aussi en termes d'autorisations de programme, ce qui n'avait pas été fait depuis la troisième loi de programme couvrant les années 1971 à 1975.
« Le développement d'une politique de commandes pluriannuelles est par ailleurs le gage d'une meilleure visibilité et un facteur de réduction du coût des programmes.
« Le montant des autorisations de programme prévu aux titres V et VI est égal au montant des crédits de paiement affectés aux dépenses d'équipement. Compte tenu des autorisations de programme rendues disponibles par la réduction des crédits d'équipement intervenue au cours de ces dernières années, cette enveloppe permettra d'allonger significativement la durée des engagements contractuels du ministère de la défense.

« 2.1.4. Deux fonds pour l'adaptation
de l'outil de défense sont créés

« Dans la réussite de la transition vers le nouveau modèle d'armée, les mesures d'accompagnement de la professionnalisation et les mesures d'adaptation industrielle auront un rôle décisif.
« Aussi a-t-il été décidé de regrouper au sein de deux fonds les crédits affectés à ces mesures. L'ensemble représente, pour les six années à venir, un total de 13,9 milliards de francs constants 1995.

« a) Un fonds d'accompagnement
de la professionnalisation

« Doté de 9,1 milliards de francs, ce fonds regroupe les ressources consacrées chaque année à la professionnalisation et réparties sur plusieurs lignes budgétaires, concernant principalement : le pécule, l'incitation au départ, l'aide à la mobilité, la sous-traitance, l'amélioration de la rémunération des engagés, les moyens additionnels destinés aux réserves et au recrutement de militaires du rang.

« b) Un fonds d'adaptation industrielle

« Doté de 4,8 milliards de francs, ce fonds regroupe les ressources affectées aux mesures d'accompagnement social destinées à faciliter l'évolution des effectifs de la direction des constructions navales et de la direction des applications militaires du commissariat à l'énergie atomique.

« 2.1.5. Les crédits de fonctionnement courant seront réduits

« La réduction du format des armées se traduira par une réduction importante de leurs crédits de fonctionnement courant (titre III hors rémunérations et charges sociales). Evalués en francs constants, ces crédits seront en fin de programmation inférieurs de 20 p. 100 à leur niveau actuel.
« Cette diminution imposera aux forces armées et à l'ensemble des services du ministère de la défense d'accentuer les efforts d'économie et de rigueur de gestion engagés au cours des dernières années.

« 2.1.6. Un rapport d'exécution sera présenté
chaque année au Parlement

« L'extension de la démarche de programmation à l'ensemble des moyens des forces armées permettra à la représentation parlementaire de suivre l'exécution de la loi avec un degré de précision qui n'a jamais été atteint jusqu'à présent.
« A cet effet, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport sur l'exécution de la loi au moment du dépôt de chaque loi de finances initiale.

« 2.2. Le passage à une armée professionnelle

« La programmation militaire pour les années 1997-2002 organise le passage progressif d'une armée mixte, au sein de laquelle les appelés occupent une place importante, à une armée professionnelle essentiellement composée de militaires de carrière ou sous contrat et de civils, et comprenant des jeunes gens, garçons et filles, volontaires.

« 2.2.1. Les composantes de l'armée professionnelle

« L'armée professionnelle s'appuiera sur trois composantes :
« - des militaires de carrière ou sous contrat et des civils, qui en constitueront le noyau dur ;
« - des jeunes gens volontaires qui apporteront leur concours aux forces armées ;
« - des réservistes, dont le rôle sera redéfini pour les associer plus étroitement aux missons des armées et de la gendarmerie.

« a) Les militaires de carrière ou sous contrat
et les personnels civils

« Dans le nouveau modèle d'armée, les effectifs des diverses catégories de professionnels (militaires de carrière ou sous contrat, fonctionnaires, contractuels et ouvriers) évoluent de manière significative.
« Par rapport à l'armée mixte actuelle, l'armée professionnelle comportera, en valeur absolue, moins de cadres militaires (officiers et sous-officiers), davantage d'engagés et plus de civils.
« - Le nombre des officiers diminuera relativement peu. Cette quasi-stabilité recouvre des évolutions très contrastées selon les forces armées. En effet, il croîtra dans la gendarmerie et la marine, tandis qu'il diminuera dans l'armée de terre, l'armée de l'air et les services communs.
« - Le nombre total des sous-officiers sera réduit d'environ 15 000 postes. Cette évolution concernera toutes les armées.
« - Dans le même temps, le nombre des engagés va plus que doubler, passant de 45 000 environ à près de 92 000, soit une augmentation de 47 000 emplois.
« - Enfin, le nombre de personnels civils dans les forces et les soutiens passera de 73 700 à 83 000 et représentera alors 19 p. 100 des effectifs totaux au lieu de 13 p. 100 aujourd'hui.

« b) Les jeunes du service volontaire

« Au terme de la période de transition d'un modèle d'armée à l'autre, le service national obligatoire dans sa forme actuelle aura disparu et l'armée professionnelle n'accueillera plus que les jeunes gens, garçons et filles, qui seront volontaires pour apporter leur concours aux forces armées. 27 200 postes leur seront réservés en 2002. Ce chiffre est indicatif. Il pourra être dépassé, en tant que de besoin, tout en demeurant dans l'enveloppe financière fixée. Le cas échéant, le nombre de militaires d'active engagés ou de personnels civils serait réduit à due concurrence.
« En fonction de la durée du futur service, des emplois opérationnels pourront être confiés aux volontaires, comme c'est aujourd'hui le cas pour les volontaires service long.

« c) Les réservistes

« L'adaptation de notre politique de défense, la professionnalisation de nos forces et la modification du service national ont pour corollaire une transformation simultanée de la réserve. Cette évolution concerne principalement son rôle, sa constitution et son organisation.
« Dans l'armée professionnelle, les réserves auront pour rôle :
« - de fournir aux forces d'active les renforts nécessaires, le cas échéant, pour accroître ou maintenir leurs capacités dans leurs différentes fonctions ;
« - de remplir des missions sur le territoire national en substitution de personnel ou d'unités d'active, pour permettre la disponibilité permanente des forces ;
« - d'entretenir le lien entre les forces armées et la Nation.
« Au terme de l'évolution entreprise, cette réserve sera constituée, d'une part, d'anciens militaires de carrière ou sous contrat, d'autre part, des citoyens volontaires pour souscrire un engagement dans la réserve, qu'ils aient ou non une expérience militaire préalable.
« La réserve des forces armées s'organisera en deux ensembles :
« - la première réserve, en mesure de renforcer les unités d'active dans les délais impartis, sera composée de réservistes sélectionnés pour leur compétence et leur disponibilité ; son volume sera de 100 000 hommes ;
« - les autres réservistes, anciens de la première réserve ou ne remplissant pas les conditions de disponibilité ou de compétence de celle-ci, seront susceptibles, en cas de besoin, d'être employés après un délai de mise en condition.

« 2.2.2. Le nouveau format des forces armées

« Globalement, les effectifs du ministère de la défense, hors comptes de commerce, auront été réduits en 2002 d'environ un quart (- 23 p. 100), avec cependant des différences assez marquées selon les armées ou les services.

« a) La réduction du format des armées

« L'évolution des effectifs de chacune des armées découle de leur niveau actuel de professionnalisation.

« Evolution globale des effectifs des armées



1996

2002
Armée de terre 268 600 172 600
Marine 69 900 56 500
Armée de l'air 93 600
71 100
Total 432 100 300 200


« Le format des armées atteindra 300 200 hommes en 2002, civils et militaires confondus. L'armée de terre comptera environ 172 600 hommes, la marine 56 500 et l'armée de l'air 71 100.

« b) L'accroissement des effectifs de la gendarmerie

et des services de renseignement
« L'accroissement des missions de sécurité intérieure et l'effort entrepris dans le domaine du renseignement justifient que, contrairement au mouvement général de réduction du format des armées, la gendarmerie et les services de renseignement voient leurs effectifs augmenter.

« La gendarmerie :

« Les efffectifs globaux de la gendarmerie s'élèveront à 97 880 hommes en 2002, ce qui correspond à une augmentation de 4,5 p. 100.
« Les effectifs ne comprennent pas les emplois de gendarmes dont la création est financée par les fonds de concours que versent les sociétés concessionnaires d'autoroutes.
« Compte tenu du niveau déjà très élevé de professionnalisation de l'arme, cette évolution se traduira par un accroissement du nombre de postes destinés aux volontaires, comme l'indique le tableau suivant :


1996

2002
Professionnels 81 650 81 650
Appelés et volontaires 12 000
16 230
Total 93 650 97 880


« Les structures administratives seront rénovées. Le principe du maillage territorial conciliant proximité et efficacité étant maintenu, la capacité opérationnelle des unités sera améliorée grâce à cette augmentation des effectifs de gendarmes auxiliaires.

« Les services de renseignement :

« Les services de renseignement - direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et direction du renseignement militaire (DRM) - bénéficieront d'un accroissement significatif de leurs effectifs.

« c) Le renforcement des taux d'encadrement
et le recours accru au personnel civil
« Le renforcement de l'encadrement des armées :

« Réduite en valeur absolue, la part relative des cadres dans l'ensemble du personnel militaire de la défense s'accroîtra sensiblement pour deux raisons. D'une part, le mouvement de croissance relative de la part des cadres et de la maîtrise, que l'on note dans les entreprises, se retrouve dans nos armées comme conséquence d'une même évolution technologique. D'autre part, la diminution globale du nombre des militaires du rang entraîne une augmentation naturelle de la part relative des officiers et des sous-officiers.
« Le taux d'encadrement des armées françaises se rapprochera désormais des taux en vigueur dans les armées occidentales comparables. Ainsi, l'armée de terre passera de 31 à 48 p. 100, la marine de 59 à 78 p. 100 et l'armée de l'air de 56 à 70 p. 100.
« Cependant, le renforcement de l'encadrement ne revêt pas uniquement un aspect quantitatif.
« Le volume global des officiers sera pratiquement maintenu, en raison notamment de la montée en puissance des structures interarmées et de la nécessité de participer au développement de la présence de la France dans les états-majors et les organismes internationaux.
« Au sein de la gendarmerie, la part relative des officiers et des sous-officiers évoluera de manière originale. La nécessité d'améliorer l'encadrement des unités opérationnelles et d'adapter l'organisation fonctionnelle va se traduire par une forte augmentation du nombre d'officiers, qui passera de 2 666 à 4 055. Dans le même temps, le nombre global de sous-officiers (sous-officiers de gendarmerie et autres) passera de 77 728 à 75 337. La diminution du nombre de sous-officiers de gendarmerie, de 77 079 à 71 302, ne portera pas sur des emplois opérationnels, mais sur les emplois administratifs et de soutien logistique, emplois dans lesquels ils seront remplacés par des sous-officiers non-gendarmes et par des civils dont le nombre augmentera respectivement de 3 386 et 1 002.

« Un recours accru au personnel civil :

« La place des personnels civils va se trouver renforcée par la professionnalisation des armées. La diminution du format des forces conduit à affecter prioritairement les personnels militaires dans les emplois opérationnels. La technicité et la stabilité des personnels civils présentent des avantages certains, notamment pour les soutiens. Des emplois à vocation générale, aujourd'hui occupés par des militaires, le seront par des civils.
« L'encadrement du personnel civil sera renforcé en privilégiant l'appel aux cadres A et des fonctionnaires de niveau B. Des actions traitées aujourd'hui au niveau central seront déconcentrées, notamment en matière de gestion de personnel.
« L'adaptation des effectifs ouvriers aux activités des services industriels assurées par le ministère conduira, en revanche, à une décroissance de leur nombre. L'évolution des métiers requerra des agents de mieux en mieux formés et plus polyvalents.
« En plus du recours aux voies traditionnelles de recrutement, l'augmentation des effectifs globaux du personnel civil et sa présence plus nombreuse dans les armées seront assurées de plusieurs manières, durant la phase de transition :
« - par l'accueil de fonctionnaires ou d'ouvriers de la défense employés dans les entreprises d'armement (à GIAT Industries notamment) ;
« - par le transfert vers les armées d'une partie du personnel de la délégation générale pour l'armement ;
« - par le maintien au sein du ministère de la défense de certains des militaires devenus fonctionnaires civils par la voie de la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l'accès des officiers à des emplois civils ou de la procédure des emplois réservés.
« Les tableaux ci-après retracent l'évolution des effectifs du ministère de la défense, hors comptes de commerce, entre 1996 et 2002.

« Évolution des effectifs par armée ou service
et par catégorie entre 1996 et 2002



1996

2002


Terre

Officiers 17 461 16 080
Sous-officiers 56 644 50 365
MDR 30 202 66 681
Appelés et volontaires 132 319 5 500
Civils 31 946 34 000
Total 268 572
172 626

Marine

Officiers 4 844 4 961
Sous-officiers 32 530 30 136
MDR 8 103 7 998
Appelés et volontaires 17 906 1 775
Civils 6 495 11 594
Total 69 878
56 464

Air

Officiers 7 277 6 974
Sous-officiers 42 813 38 392
MDR 5 882 16 758
Appelés et volontaires 32 674 2 225
Civils 4 906 6 731
Total 93 552
71 080

Gendarmerie

Officiers 2 666 4 055
Sous-officiers 77 728 75 337
Dont : sous-officiers gendarmerie 77 079 71 302
autres sous-officiers 649 4 035
Appelés et volontaires 12 017 16 232
Civils 1 258 2 260
Total 93 669
97 884

Services communs

Officiers 6 208 6 119
Sous-officiers 5 113 5 066
MDR 365 1 090
Appelés et volontaires 6 582 1 439
Civils 29 142 28 438
Total 47 410
42 152

Totaux

Officiers 38 456 38 189
Sous-officiers 214 828 199 296
MDR 44 552 92 527
Appelés et volontaires 201 498 27 171
Civils 73 747 83 023
Total 573 081 440 206


« Evolution annuelle des éffectifs par catégorie entre 1996 et 2002




1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002
Officiers 38 456 38 523 38 527 38 475 38 403 38 306 38 189
Sous-officiers 214 828 213 369 211 532 208 842 205 234 202 353 199 296
Militaires du rang 44 552 52 216 60 054 68 643 76 606 84 239
92 527
Total des militaires de carrière ou sous contrat 297 836 304 108 310 113 315 960 320 243 324 898

330 012

Civils 73 747 74 875 76 241 77 929 79 964 81 796

83 023

Appelés et volontaires 201 498 169 525 137 672 103 496 74 577 47 107

27 171

Total général 573 081 548 508 524 026 497 385 474 784 453 801 440 206


« 2.2.3. La transition d'un modèle à l'autre

« La réussite de passage de l'armée mixte à l'armée professionnelle repose sur les réponses à apporter à trois défis majeurs :
« - favoriser et accompagner l'adaptation des ressources humaines des armées ;
« - prendre en compte l'évolution du service national ;
« - mettre en place une nouvelle politique des réserves.
« Chacune de ces trois actions donnera lieu à l'élaboration et au dépôt d'un projet de loi, au plus tard à l'automne 1996.

« a) L'accompagnement de l'adaptation
des ressources humaines des armées
« Le recrutement des engagés :

« La mise sur pied d'une armée professionnelle repose essentiellement sur la possibilité de susciter un volume d'engagements suffisant. Au doublement prévu des effectifs d'engagés coorespondra, en fin de période de programmation, la nécessité de recruter environ 12 p. 100 de la part d'une classe d'âge physiquement et intellectuellement apte à l'engagement, c'est-à-dire un niveau jamais réalisé jusqu'ici dans notre pays. La réalisation d'un tel objectif n'est possible que si des mesures concrètes de revalorisation de la condition des engagés sont décidées. Une augmentation significative du taux de féminisation doit également être envisagée.
« Pour attirer en quantité suffisante un personnel de qualité, il convient de lui assurer des conditions de vie convenables et de favoriser sa reconversion. Outre l'amélioration du dispositif de mobilité professionnelle, évoquée plus loin, deux mesures sont indispensables :
« - l'amélioration de la rémunération initiale des engagés :
« - la revalorisation de l'indemnité de départ, destinée aux sous-officiers et à certains engagés.

« La réduction des effectifs de cadres
militaires et d'ouvriers :

« La réduction des effectifs d'officiers et de sous-officiers s'effectuera sans loi de dégagement des cadres. Elle suppose la mise en oeuvre d'un dispositif d'incitation au départ, qui devra être très soigneusement adapté aux objectifs qualitatifs et quantitatifs recherchés. Il conviendra, dans le même temps, de maintenir un niveau de recrutement externe qui garantisse l'avenir et permette d'éviter un vieillissement accéléré de l'encadrement.
« Les mesures à mettre en oeuvre doivent susciter un nombre de départs volontaires sensiblement supérieur à celui de ces dernières années. Certaines de ces mesures existent déjà et devront être prorogées, voire élargies ; d'autres, au contraire, sont nouvelles.
« Parmi les premières, peuvent être cités :
« - la prorogation jusqu'en 2002 des dispositifs d'aide au départ prévus par les articles 5 et 6 de la loi n° 75-1000 du 30 octobre 1975 modifiant la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires (qui permettent aux intéressés de partir avec la retraite du grade supérieur) ainsi que les congés spéciaux de l'article 7 et les congés du personnel navigant ;
« - la prorogation jusqu'en 2002 du dispositif d'accès des militaires aux corps de la fonction publique prévu par la loi n° 70-2 du 2 janvier 1970 précitée et l'accroissement du nombre et de la variété des postes proposés ;
« - l'aménagement des modalités d'accès aux emplois réservés, afin que soient mieux prises en compte les qualifications détenues par les militaires ;
« - le droit à une deuxième période de carrière professionnelle accomplie dans la vie civile accompagnera la nécessité de reconversion qui touche un nombre élevé de militaires. La pension des militaires retraités ne doit pas être assimilée à un avantage de vieillesse avant l'âge fixé par la loi pour bénéficier de la pension du régime général de la sécurité sociale ;
« - la pratique des changements d'armée, qui seront proposés chaque année à plusieurs dizaines d'officiers et de sous-officiers en direction de la marine et de la gendarmerie.
« Parmi les mesures nouvelles, devront être mis en oeuvre :
« - un pécule, constituant la principale disposition nouvelle d'incitation financière au départ ; il devra être d'autant plus attractif que les bénéficiaires accepteront de partir tôt entre la date à laquelle ils pourraient prétendre à une retraite à jouissance immédiate et celle à laquelle ils auraient atteint la limite d'âge de leur grade ;
« - l'aménagement d'une période de reconversion permettant de faciliter la réinsertion professionnelle des personnels militaires.
« S'agissant des ouvriers d'Etat, la réduction des effectifs s'appuiera principalement sur trois mesures :
« - la prorogation jusqu'en 2002 et l'extension du dispositif de dégagement des cadres à partir de cinquante-cinq ans ;
« - l'augmentation de l'indemnité volontaire de départ ;
« - l'extension, enfin, des possibilités de reclassement des ouvriers d'Etat dans les administrations civiles.

« La compensation de la mobilité
imposée par les restructurations :

« L'adaptation de notre outil de défense va se traduire par un nombre très élevé de restructurations, de dissolutions d'unités et d'organismes divers, de transferts, de regroupements, de réductions d'effectifs. Ces opérations de restructuration et de réorganisation de notre appareil de défense susciteront une mobilité très importante chez tous les personnels.
« Pour les personnels civils, notamment les ouvriers, la mobilité devra pouvoir s'effectuer dans l'intérêt du service. La contrepartie nécessaire d'une telle obligation réside dans un renforcement de l'accompagnement social.
« Il en est de même pour les militaires, qui devront faire face à une surmobilité très importante, avec ses conséquences sur la vie professionnelle et, surtout, personnelle et familiale.
« La qualité de l'accompagnement social conditionnera donc largement l'adhésion des personnels aux réformes entreprises.
« En matière de compensations indemnitaires, les personnels civils et militaires bénéficient de dispositifs spécifiques adaptés à leur régime juridique.
« S'agissant des militaires, les règles d'attribution des indemnités pour mutation seront assouplies.
« S'agissant des civils, les mesures d'accompagnement de la mobilité porteront principalement sur la revalorisation des indemnités en vigueur et l'alignement des mesures indemnitaires entre les différentes catégories de personnel du ministère de la défense.

« b) L'évolution du service national

« La professionnalisation des armées permettra à notre pays de disposer de forces plus disponibles et plus efficaces. Elle a pour corollaire la fin du service national tel que nous le connaissons aujourd'hui, c'est-à-dire la disparition d'un service majoritairement militaire.
« A la suite du vote du Parlement, il pourrait être mis fin, à compter du 1er janvier 1997, au service actuel de dix mois qui serait éventuellement remplacé par une période obligatoire de courte durée et un service volontaire revêtant des formes civiles et militaires.
« Les modalités de ce dispositif seront précisées au cours de l'été et donneront lieu à l'élaboration d'un projet de loi modifiant le code du service national qui sera soumis au Parlement à l'automne.
« Le service national dans sa forme actuelle ne serait plus effectué à compter d'une classe d'âge désignée par la loi. Le nouveau dispositif (période courte obligatoire et volontariat) s'appliquerait à cette classe d'âge et aux classes postérieures. Les jeunes gens des classes précédentes resteraient soumis à leurs obligations de service national.

« c) La mise en place
d'une nouvelle organisation des réserves

« La mise en place d'un nouveau système de réserves contribue à la cohérence d'ensemble du modèle de référence. En fonction de la professionnalisation et des missions des forces d'active, leur rôle, leur composition et leurs modalités de constitution seront réexaminés.

« Un nouveau dispositif juridique :

« Une loi portant organisation générale de la réserve définira les principales orientations et dispositions de cette nouvelle politique, notamment dans les forces armées. La présente loi de programmation couvre une partie de la phase de transition, organisant, parallèlement à la professionnalisation des armées, le passage à la nouvelle réserve.
« La loi énoncera les obligations et les droits qui sont attachés à la qualité de réserviste, notamment les conditions d'emploi et de disponibilité, la protection sociale, la reconnaissance des services rendus par l'employeur du réserviste.
« Ces dispositions conduiront à modifier le code du travail, le code de la sécurité sociale, le code des pensions civiles et militaires de retraite et la loi n° 72-661 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires.

« Les moyens mis en oeuvre :

« Les moyens annuels consacrés à la réserve s'élèvent actuellement à environ 230 millions de francs. Les besoins de financement, hors opérations, du passage au nouveau régime sont les suivants :

(En millions de francs 1995)

1997


1998

1999

2000

2001

2002
240 270 309 368 466 584

« 2.3. L'adaptation et la modernisation
de l'équipement des forces

« Dans la période 1997-2002, seule une action volontariste pour rallier au plus tôt le format du modèle 2015 permettra à la fois de réussir la professionnalisation et de poursuivre la modernisation des forces.
« Sur le plan de la politique d'équipement, cette période de mutation sera donc marquée par l'arrivée à maturité d'un certain nombre de programmes majeurs et la restructuration de l'industrie d'armement.
« Les ressources affectées au budget d'équipement doivent à la fois répondre aux priorités opérationnelles et permettre d'infléchir les moyens et l'organisation des forces vers le modèle futur. Cette adaptation sera conduite en poursuivant simultanément plusieurs objectifs :
« - assurer la continuité de la dissuasion nucléaire et poursuivre la réalisation de systèmes multiplicateurs de forces (commandement, renseignement, communications...) ;
« - rééquilibrer les capacités des forces conventionnelles afin de confirmer la priorité accordée aux fonctions de prévention et de projection ;
« - accompagner l'évolution des effectifs et du format desarmées par une réévaluation des volumes de matériels et une modernisation des équipements ;
« - favoriser la rénovation de l'outil industriel.
« Sur la période, l'effort global des armées porte en priorité sur le financement et la mise en oeuvre des mesures de réorganisation et de restructuration. Ceci conduit à accepter une réduction temporaire des activités et de l'entraînement des forces au cours des prochaines années et limite pendant quelque temps certaines de nos capacités d'engagement extérieur.

« 2.3.1. Les forces nucléaires

« L'enveloppe financière consacrée à la dissuasion s'élève à 105,8 milliards de francs (francs 1995) sur la période de programmation.
« Le deuxième SNLE-NG, Le Téméraire , sera admis au service actif en 1999 et le troisième, Le Vigilant, fin 2002. Le quatrième sera commandé en 2000. Les développements relatifs à l'adaptation des SNLE-NG au nouveau missile M 51 seront également engagés pendant la période.
« Les livraisons de missiles M 45 et le développement du missile M 51 seront poursuivis. Le développement du nouveau missile air-sol, ASMP amélioré, sera lancé en 1997.
« La période de programmation verra également la montée en puissance des capacités de simulation avec la réalisation de la première phase du programme de laser mégajoule (LMJ) à travers la mise en service de la ligne d'intégration laser en 2000.
« Les démantèlements du système Hadès et des missiles stratégiques du plateau d'Albion débuteront dès 1996, pour se terminer respectivement en 1997 et 1998.
« Après l'arrêt en 1996 de la production de matières fissiles destinées aux armes, le démantèlement des installations de Pierrelatte et de Marcoule sera entrepris en cohérence avec la fin d'activité de ces sites.

« 2.3.2. La cohérence interarmées

« Dans les conflits de demain, l'efficacité opérationnelle reposera de manière croissante sur la conjugaison des capacités propres à chaque armée et sur la maîtrise de fonctions interarmées. Une attention particulière sera donc portée aux fonctions de commandement et communications, renseignement et projection.

« a) Commandement et communication

« L'importance de la maîtrise des moyens de commandement, de contrôle et de gestion de l'information a été démontrée dans les conflits récents. Ces moyens seront déterminants dans les engagements futurs.
« La réalisation du programme interarmées SICA de première génération et, en priorité, des modules adaptés au traitement du renseignement, permettra de disposer, en 2000, d'un outil moderne d'informatique de commandement et de gestion des situations, prolongé par les systèmes compatibles de chacune des armées, notamment SICF/SIR (Terre) et SCCOA (Air). La réalisation de la deuxième génération, comportant des fonctions complémentaires de commandement et de communications, commencera en 1999.
« Un poste de commandement interarmées de théâtre (PCIAT), interopérable avec nos alliés et équipé du SICA sera disponible dès l'an 2000.
« En 2002, les besoins essentiels en télécommunications vers les théâtres d'opérations extérieures resteront couverts par le système spatial Syracuse II. L'effort entrepris pour une meilleure cohérence interarmées et l'interopérabilité avec les alliés se poursuivra avec le développement des satellites de télécommunication de troisième génération. L'intégration des réseaux d'infrastructure des armées sur le territoire national sera poursuivie grâce au programme SOCRATE, réalisé à 75 p. 100 en 2002.

« Programmes




SICA Système d'information et de commandement des armées. Première tranche en service en 2000. Deuxième tranche en 2005.
Syracuse III Poursuite du développement en vue d'un premier lancement en 2005.
SOCRATE Raccordement au réseau de transmissions national des armées à compter de 1997 (Air) et 1998 (Terre et Marine).
MIDS Liaisons de données militaires très protégées. Mise en service en 2001.


Nota : Les abréviations sont explicitées dans le glossaire joint au présent rapport.

« b) Renseignement

« Outil principal de l'anticipation et de la prévention des conflits, indispensable à la gestion des crises et situé au coeur de toute stratégie de lutte contre la prolifération, le renseignement stratégique bénéficie d'une croissance de ses crédits.
« La dimension européenne du renseignement se traduit par une coopération renforcée sur les satellites d'observation optique. Après le lancement en 1995 de Hélios I, réalisé en coopération avec l'Italie et l'Espagne, la réalisation de Hélios II est engagée, en coopération avec l'Allemagne, pour un premier lancement prévu en 2001. Le système satellitaire d'observation tous temps par radar Horus sera développé avec l'Allemagne, en vue d'un lancement en 2005. D'autres partenaires européens pourraient se joindre à ces programmes.
« Simultanément, les moyens d'écoute électromagnétique seront renouvelés et verront leurs capacités accrues, avec la mise en service d'un DC-8 SARIGUE de nouvelle génération, en 2000, et la poursuite des développements nécessaires à la mise en service d'un navire d'écoute électromagnétique, successeur du bâtiment actuel, en 2004.

« Programmes (1)




Hélios I* 2 satellites d'observation optique, livrés en 1995 et 1996.
Hélios II* 3 satellites d'observation optique de deuxième génération. Lancement du premier satellite en 2001.
Horus*
Développement du système satellitaire d'observation radar. Lancement de 3 satellites à partir de 2005.
SARIGUE-NG Mise en service du système aéroporté d'écoute électromagnétique en 1999.
MINREM Réalisation de la charge utile du navire d'écoute électromagnétique à partir de 2001.


(1) Les programmes menés en coopération sont signalés par un astérisque.

« c) Projection interarmées

« Afin de conserver une capacité de transport au moins équivalente à celle d'aujourd'hui, il est prévu d'acquérir une flotte de 50 avions de transport de nouvelle génération ou un nombre supérieur d'appareils de moindre performance. Les premières commandes seront financées dès 2002.
« La capacité de transport maritime sera modernisée par la livraison d'un transport de chalands de débarquement (TCD) et la commande de deux bâtiments supplémentaires du même type.

« Programmes




Avions de transport de nouvelle génération Premières commandes en 2002.
Transport de chalands de débarquement Livraison d'un TCD en 1998. Nouvelles commandes en 2000 et 2002.

« d) Cohérence des forces

« Alors que la diminution des ressources affectées à l'équipement des personnels (- 5,7 p. 100 de variation annuelle en moyenne sur la période) traduit la mise au nouveau format des armées, les crédits d'entretien programmé des matériels restent globalement stables (+ 0,4 p. 100 de variation annuelle moyenne, avec des variations sensibles entre les armées), compte tenu du vieillissement des équipements.
« Les crédits d'infrastructure sont en légère augmentation (+ 1,6 p. 100 de variation annuelle moyenne) pour faire face aux conséquences des restructurations. Les dotations financières au profit des munitions (+ 9,6 p. 100 de variation annuelle moyenne) correspondent à l'entrée en fabrication de missiles modernes et d'armes de précision.
« La place tenue par les programmes majeurs conduit à différer, à ce stade, la réalisation de plusieurs programmes de supériorité technologique tels que les systèmes de désignation nocturne et de guerre électronique offensive.
« Les capacités spécifiques de lutte contre la prolifération seront améliorées par le développement simultané du renseignement d'origine spatiale, des moyens de détection des agents chimiques et biologiques, et d'études sur d'éventuelles capacités antimissiles balistiques pour les systèmes de défense sol-air.

« 2.3.3. Les forces armées
« a) L'armée de terre
« Commandement et communications :

« Afin de s'adapter aux conditions futures de combat, le système d'information et de commandement des forces (SIC/F) et le système d'information régimentaire (SIR) seront progressivement mis en service à partir de 1999. Une revalorisation du réseau d'informations tactiques (RITA) et du système de guerre électronique de l'avant (SGÉA) est engagée et doit aboutir à partir de 2000. Parallèlement, l'acquisition de postes de quatrième génération (PR 4 G) sera poursuivie.

« Programmes




SIC/F 8 ensembles d'information et de commandement des forces livrés à partir de 1999.
SIR Développement d'une première tranche de 317 systèmes livrables à partir de 2000.
Valorisation RITA 200 ensembles commandés dont 120 seront livrés entre 2000 et 2002.
Valorisation SGÉA Développement pour une mise en service à partir de 2002.
PR 4G Acquisition de 20 000 postes en cours. Fin de livraison en 2002.

« Renseignement :

« Dans le domaine du renseignement de théâtre, la capacité de surveillance du champ de bataille sera obtenue, de façon autonome, par l'achèvement de la mise en service du système héliporté HORIZON. Ce système sera adapté pour pouvoir, à court terme, fusionner ses informations avec celles fournies par l'armée de l'air, puis, à moyen terme, s'intégrer dans un ensemble plus large qui pourrait être mis en oeuvre par l'Alliance atlantique.
« La participation de la France au programme d'avions légers télépilotés BREVEL devra être interrompue au terme de la phase de développement en cours ; la capacité de renseignement tactique restera assurée par les drones en service CL 289 et CRECERELLE.

« Programmes




HORIZON Livraison du deuxième système en 1998.

« Forces

« La livraison annuelle de 33 chars Leclerc permettra de disposer en 2002 de 307 chars modernes. Le développement du véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) sera lancé et les 25 premiers hélicoptères Tigre en version appui-protection seront commandés entre 2000 et 2002. Le développement du NH 90 sera poursuivi.
« La rénovation de blindés légers anciens, tels l'AMX 10 RC et le VAB, sera entreprise dans l'attente des programmes futurs. La mobilité sera améliorée par la mise en service d'engins porte-blindés et d'engins de franchissement de l'avant.
« La mise en service des radars de contrebatterie COBRA permettra d'accéder à la capacité de détection des tirs d'artillerie. Une roquette LRM de nouvelle génération sera développée pour maintenir une capacité d'interdiction de zone dans la profondeur. Le développement du système sol-air à moyenne portée SAMP/T sera préservé.
« Le maintien de l'effort de fabrication conduit à réduire la part des ressources affectées à la préparation de l'avenir.

« Programmes




Char LECLERC 307 chars seront livrés en 2002, pour une cible totale de 406 chars.
VBCI* Lancement du développement (première livraison en 2004).
Rénovation AMX 10 RC 120 chars seront rénovés en 2002.
Hélicoptère TIGRE* Poursuite du développement. 25 commandes de la version HAP entre 2000 et 2002. Livraisons à compter de 2003. Commandes HAC ultérieurement.
Missile AC3G-LP* Industrialisation à partir de 1997, en cohérence avec la version antichar du TIGRE.
AC3G-MP* 10 postes de tir et 500 missiles livrés en 2002.
SATCP Mistral 380 postes de tir et 1970 missiles auront été livrés en 1997. 630 missiles supplémentaires seront livrés d'ici 2002.
Missile anti-blindé léger 30 800 missiles livrés entre 1997 et 2002.
Système antichar à courte portée ERYX Livraison de 200 postes de tir et de 6 400 missiles entre 1997 et 2000.
Système sol-air SAMP/T* Poursuite du développement du système de défense sol-air. Commande de 2 postes de tir et 50 missiles en 2002.
Radar de contrebatterie COBRA* 5 des 10 ensembles prévus seront livrés en 2002.
ROLAND valorisé* 40 systèmes livrés entre 1999 et 2002.
Hélicoptère NH 90* Fin du développement de l'hélicoptère NH 90 en 2002.
Engin de franchissement de l'avant Livraison des 39 engins terminée en 1998.
Engin porte-blindés Livraison des 220 engins terminée en 2000.

« b) La marine

« La marine aura rallié son format futur à la fin de la loi de programmation. A cette fin, elle retirera du service actif 28 bâtiments dont un porte-avions, 6 sous-marins d'attaque et 3 frégates de premier rang. Parallèlement, 6 bâtiments seront admis au service actif au cours de la période. Elle conserve les bâtiments inclus dans le modèle, en prolongeant leur durée de vie, le cas échéant.
« Le renouvellement des capacités de protection des approches maritimes et de prévention des crises sera préparé par la poursuite des programmes de frégates de nouvelle génération.

« Commandement, communications et renseignement :

« Les moyens de communication propres à la marine seront modernisés par la rénovation de ses chaînes de transmission HF. Au-delà de cette opération, le renforcement de ses capacités de transmission sera réalisé dans le cadre des programmes de cohérence interarmées. Il en sera de même, pour l'essentiel, en ce qui concerne la fonction renseignement. En complément, la marine disposera de moyens spécifiques modernes comme les avions de guet embarqués et de surveillance maritime.

« Programmes




Aéronefs de guet embarqués 2 avions livrés en 1998 pour le porte-avions Charles-de-Gaulle ; commande du troisième.
Avions de surveillance maritime Livraison de 4 Falcon 50 pendant la période.

« Forces :

« La capacité de projection de puissance de la marine sera renouvelée par la mise en service opérationnelle du porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle en 1999. Le groupe aéronaval recevra 2 avions Hawkeye, en 1998, et une première flottille de Rafale, début 2002. Le système de protection antiaérienne du PAN commencera à être livré en 2000 (SAAM). Le Foch, mis en sommeil avec un équipage réduit, sera en mesure de remplacer le PAN pendant ses indisponibilités programmées.
« Ce dispositif sera complété et modernisé ultérieurement par la livraison du troisième avion de guet aérien, la mise en service de sous-marins d'attaque, de frégates anti-sous-marines et antiaériennes (HORIZON), dont le développement est financé pendant la période de programmation, pour des mises en service s'échelonnant à partir de 2005.
« Le développement de l'hélicoptère NH 90, à partir de 1996, et son industrialisation, dès 1999, prépareront l'amélioration, à terme, des capacités de lutte anti-sous-marine et anti-navires. Celles-ci seront également renforcées par la livraison de 150 torpilles MU 90 entre 2000 et 2002 ainsi que par le développement du missile de lutte anti-sous-marine (MILAS) entre 1997 et 2002 et le développement du missile anti-navire futur.

« Programmes




PA Charles-de-Gaulle Admission au service actif fin 1999.
Frégates HORIZON* Commandes de 2 frégates dont une en 1998 et une en 2000.
Frégates LA FAYETTE 5 frégates livrées en 2002 (dont une en 1997, une en 1999 et une en 2002).
Sous-marin d'attaque futur Poursuite du développement pour commande en 2001.
RAFALE Première flottille opérationnelle début 2002 (12 appareils).
Hélicoptère NH 90* 11 commandes entre 2000 et 2002.
Modernisation Super-étendard Livraison des derniers avions en 1998.
PAAMS* Commande de 60 missiles en 2002.
SAAM* 24 munitions livrées en 2000, le reste en 2001.
MICA Livraison de 90 missiles entre 2000 et 2002.
Torpille MU 90* Livraison de 150 torpilles entre 2000 et 2002.
SATCP Mistral Fin des livraisons en 2001.
ANF* Développement entre 1997 et 2002. Version mer-mer.

« c) L'armée de l'air

« En 2002, la flotte de combat de l'armée de l'air comprendra 360 appareils de la génération actuelle, dans l'attente du Rafale, dont le développement et les fabrications seront poursuivis au cours de la période de programmation. Les deux premiers appareils seront livrés à partir de 1999 et le premier escadron sera opérationnel en 2005. Ceci impose d'entretenir et de moderniser les avions actuels ainsi que d'acquérir des avions spécialisés.

« Commandement, communications et renseignement :

« L'armée de l'air poursuit la réalisation de son système de commandement et de conduite des opérations aériennes (SCCOA), dont la première étape, en cours, sera achevée sur la période de programmation. Cette mise en place progressive du système SCCOA permettra à terme un fonctionnement entièrement cohérent avec le système ACCS de l'OTAN.
« La valorisation des quatre avions SDCA (AWACS) prévoit, pendant la période de programmation, l'installation d'un système de détection passive permettant d'améliorer la sécurité de l'appareil et d'assurer une meilleure interopérabilité au sein de l'Alliance atlantique.
« Le réseau de transmissions d'infrastructure des bases aériennes sera modernisé sur 36 sites en 2002 et rattaché au réseau interarmées SOCRATE.

« Programmes




SCCOA Première étape en cours, deuxième étape lancée en 1996 et troisième étape en 2000.
Valorisation SDCA 4 avions AWACS modernisés en 2002.
MTBA 36 sites rénovés en 2002.

« Forces :

« La rénovation de 37 Mirage 2000-DA de première génération (programme Mirage 2000-5) sera terminée en 2000, au profit de la défense aérienne, et 41 Mirage 2000-D de pénétration seront livrés entre 1997 et 2001.
« Quatre hélicoptères COUGAR-CSAR seront acquis afin d'assurer la mission de sauvetage des équipages en zone de combat.
« La capacité de projection sera améliorée par l'achat de 3 C-135 FR qui viendront renforcer les 11 appareils dont dispose déjà l'armée de l'air.
« Les premiers missiles MICA de défense aérienne seront livrés dès 1999 et équiperont les Mirage 2000-5, puis le Rafale.
« Les missiles de croisière à longue portée de la famille Apache seront réalisés et livrés, à partir de 1999, dans leurs différentes versions. Ils permettront des frappes de précision ainsi que la destruction de pistes et la neutralisation d'objectifs dans la profondeur.
« L'armement air-sol modulaire AASM, qui doit équiper également le Rafale Marine, sera développé à partir de 1996 pour des livraisons à partir de 2003.
« L'équipement en armement guidé laser sera également poursuivi, avec l'achat de missiles AS30 L et des pods associés entre 1998 et 1999.
« La protection sol-air sera modernisée par l'acquisition, après 2002, du sytème SAMP/T, dont le développement et l'industrialisation seront réalisés entre 1997 et 2002. Cette période verra également l'acquisition de missiles SATCP MISTRAL.

« Programmes




MIRAGE 2000-D Livraison de 41 appareils de 1997 à 2001.
Rénovation M 2000 DA (MIRAGE 2000-5) Livraison de 37 avions de 1997 à 2000.
RAFALE Poursuite de la réalisation du programme. Commandes de 33 avions entre 1999 et 2002. Livraison de 2 avions en 1999-2000.
C 135 FR Achat de 3 avions en 1997 et 1998.
COUGAR CSAR Achat de 4 hélicoptères entre 1997 et 2002.
MICA Livraison de 125 missiles entre 1999 et 2002.
APACHE anti-piste* Livraison de 100 missiles entre 1999 et 2002.
APACHE-SCALP emploi général 100 commandes du missile d'emploi général en 2001. Début de livraison en 2002.
APACHE interdiction de zone* 100 commandes en 1998. Début de livraison en 2002.
AASM Développement à partir de 1996 pour une livraison à raison de 250 par an à partir de 2003.
PDL CT et AS 30 L Livraison en 1999 et 2000.

« d) La gendarmerie

« Le programme de télécommunication RUBIS sera poursuivi, afin de doter la gendarmerie d'un réseau radioélectrique numérisé modernisé, destiné à ses composantes territoriale et mobile. L'objectif est fixé à près de 44 000 appareils de télécommunication.
« La gendarmerie disposera en 2002 de 280 véhicules blindés, dont 30 de la nouvelle génération, de 15 000 véhicules brigades et de 3 600 camionnettes tactiques.
« Le nombre d'hélicoptères en 2002 sera maintenu à 42 appareils.

« Programmes




RUBIS 97 groupements équipés en 2002.
Véhicules blindés 30 véhicules blindés de nouvelle génération en 2002.


des forces armées (1996-2002)




1996


2002



DISSUASION NUCLÉAIRE

5 SNLE.

- 1 lot M 45.
- 3 lots M 4/TN 71.
18 SSBS-S3.
18 MIRAGE IV P/ASMP.
30 HADES.
3 escadrons M 2000-N équipés ASMP. 2 flottilles SUPER-ETENDARD.

4 SNLE (dont 3 NG, le troisième fin 2002).
- 2 lots M 45.
- 1 lot M 4/TN 71.



3 escadrons M 2000-N équipés ASMP. 2 flottilles SUPER-ETENDARD.

.

MOYENS INTERARMEES
SICA de première génération en cours de mise en place.
SICA de première génération achevée. SICA de deuxième génération en cours de développement.
Commandement 4 satellites de télécommunication (deuxième génération). 4 satellites de télécommunication (deuxième génération).
Renseignement 1 satellite d'observation optique (première génération). 1 satellite d'observation optique (deuxième génération).
. 1 avion et 1 navire spécialisés dans le renseignement de théâtre. 1 avion modernisé et 1 navire spécialisés dans le renseignement de théâtre.
Forces
Forces spéciales :
1 avion C 160 rénové.
11 hélicoptères.

Forces spéciales :
1 avion C 160 rénové.
2 avions C 130 spécialisés. 4 hélicoptères adaptés.

.

ARMÉE
DE TERRE
Commandement
et communications

Réseau tactique RITA première génération. SIC première génération.

Réseau RITA valorisé.

Système d'information et de commandement SIC/F.
Système d'information régimentaire SIR.
. Postes radio tactiques de troisième génération.
Postes radio tactiques de quatrième génération.
ATLAS canons. Système de maillage radars anti-aériens MARTHA.
Renseignements Drone CL 289 et CRECERELLE.
Drones CL 289 et CRECERELLE.
5 radars de trajectographie COBRA. 2 systèmes HORIZON.
Forces
927 chars lourds.

350 chars légers.

800 VTT.
2 000 VAB.
302 canons.
48 LRM.
340 hélicoptères. 480 sol-air.

420 chars lourds dont 250 LECLERC en ligne.
350 chars légers dont 120 reconstruits.
500 VTT.
1 235 VAB.
208 canons.
48 LRM.
168 hélicoptères en ligne. 380 sol-air.




1996


2002



MARINE
Renseignement Action

25 avions PATMAR.
2 porte-avions.

6 SNA et 6 SMD.

22 avions PATMAR.
1 porte-avion nucléaire : le porte-avions Foch « en veille ». 6 SNA.
.
4 TCD dont un porte-hélicoptères.
4 frégates antiaériennes.
11 frégates anti-sous-marines.
17 frégates de deuxième rang.
16 bâtiments anti-mines.
74 avions embarqués.


38 hélicoptères de combat.

4 TCD et un porte-hélicoptères.
4 frégates antiaériennes.
8 frégates anti-sous-marines.
14 frégates de deuxième rang.
14 bâtiments anti-mines.
58 avions embarqués dont 12 RAFALE.
2 avions de guet embarqués. 40 hélicoptères de combat.

.

ARMÉE
DE L'AIR
Commandement
et communications

Systèmes de commandement et de contrôle des opérations (SCCOA) première phase. Transmissions modernes (MTBA) sur 2 bases.

SCCOA première phase terminée, deuxième et troisième phases en cours. Transmissions modernes (MTBA) sur 36 sites.
Renseignement
4 avions SDCA (AWACS).

Avions spécialisés F1CR et C 160 GABRIEL.


4 avions SDCA (AWACS) valorisés. Avions spécialisés F1CR et C 160 GABRIEL.
Forces 405 avions de combat (MIRAGE F1, MIRAGE 2000, JAGUAR, MIRAGE IV).
360 avions de combat (MIRAGE F1, MIRAGE 2000D, MIRAGE 2000-5, JAGUAR).
2 RAFALE. Missiles de croisière (livraison à partir de 1999).
.
80 avions de transport tactique ancienne génération.
6 TLRA.
11 avions ravitailleurs C 135 FR. 101 hélicoptères.

80 avions de transport tactique ancienne génération.
4 TLRA.
14 avions ravitailleurs C 135 FR.
82 hélicoptères. 4 hélicoptères CSAR.

.
GENDARMERIE
RUBIS : 29 groupements équipés.
304 véhicules blindés.

40 vedettes.

42 hélicoptères. 3 600 camionnettes tactiques.

RUBIS : 97 groupements équipés.
280 véhicules blindés dont 30 modernisés.
25 vedettes (sans baisse de capacité globale).
42 hélicoptères.
3 600 camionnettes tactiques. 15 000 véhicules brigades.

« 2.4. La restructuration
de l'industrie d'armement
« 2.4.1. Le constat

« L'adaptation au nouvel environnement du secteur de l'armement, composante essentielle de la politique de défense de la France, ainsi que des méthodes de réalisation des programmes est indispensable.
« La baisse générale des budgets de défense des principaux pays industrialisés et, plus largement, le rétrécissement du marché de l'armement contribuent à exacerber la compétition internationale.
« La construction européenne appelle un approfondissement de la politique engagée depuis plusieurs années à travers la réalisation de grands programmes en coopération. Elle connaîtra de nouveaux développements avec la structure franco-allemande décidée lors du sommet de Baden-Baden du 7 décembre 1995 et, au-delà, avec l'Agence européenne d'armement dont la création est prévue par le traité sur l'Union européenne.
« Un vaste mouvement de concentration industrielle s'est opéré, ces dernières années, aux Etats-Unis, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Il a donné naissance à de grands groupes à même d'exercer des responsabilités de maîtrise d'oeuvre dans les secteurs de haute technologie, tout en faisant face, grâce à leur importante surface financière, aux aléas de la conjoncture. Les entreprises françaises de défense doivent résolument s'engager dans cette voie, tant par des regroupements nationaux qu'à travers des alliances européennes.

« 2.4.2. L'adaptation du secteur de l'armement

« La politique du Gouvernement s'articule autour de quatre grands axes : la réduction des coûts, la constitution de pôles industriels de taille critique, la construction européenne et la recherche de nouveaux marchés.

« a) La réduction des coûts

« La réduction des coûts des programmes d'armement se traduira par l'accélération du processus mis en place en 1994. L'objectif est de réduire fortement mais progressivement, sur les six années de la loi de programmation, les coûts et les délais des programmes d'armement.
« Pour y parvenir, une évolution des méthodes d'acquisition est nécessaire. L'appel aux technologies duales sera étendu et un rapprochement avec le secteur concurrentiel sera recherché. Un recours systématique aux méthodes modernes d'analyse de la valeur permettra de limiter l'escalade des spécifications opérationnelles et techniques, réduisant d'autant les coûts.
« Des efforts substantiels de productivité sont attendus, tant à la délégation générale pour l'armement que dans les entreprises du secteur. Pour ce qui concerne la direction des constructions navales et la direction des applications militaires du commissariat à l'énergie atomique, un fonds pour l'adaptation industrielle financera les mesures d'accompagnement social destinées à faciliter l'évolution de leurs effectifs. Il sera doté, pour la période de programmation de 4,8 milliards de francs (en francs 1995).

« b) La constitution de pôles industriels

« La démarche retenue en matière de restructuration industrielle repose sur la constitution de grands pôles capables de maîtriser la réalisation de systèmes de taille importante dans les domaines sur lesquels s'appuie le secteur de l'armement : nucléaire, aéronautique et espace, électronique, électromécanique. Une telle démarche suppose une action volontariste en faveur des sous-traitants, petites et moyennes entreprises, dont la diversité et la capacité d'innovation font la richesse et la compétitivité.
« La constitution de deux pôles industriels est engagée dans le secteur de l'électronique et de l'aéronautique.
« La privatisation de Thomson SA vise à redonner au groupe les marges de manoeuvre stratégique qui lui sont nécessaires dans le contexte de la compétition internationale. La fusion de Dassault Aviation et d'Aérospatiale a pour objectif la création d'un pôle aéronautique et spatial, civil et militaire, dont l'ambition est de renforcer et de poursuivre le mouvement d'alliances européennes engagé dans ce secteur, notamment avec le partenaire allemand DASA.
« Pour ces deux projets, l'objectif est le maintien du capital industriel, technologique et humain, la préservation des intérêts de la defense nationale, l'ouverture de nouvelles perspectives de développement, enfin, la poursuite et le renforcement de la politique d'alliance et de concentration à l'échelle européenne.
« GIAT Industries se recentrera et se réorganisera autour de ses métiers principaux. L'objectif est de retrouver l'équibre de l'entreprise et d'assurer sa viabilité. Les adaptations nécessaires seront conduites progressivement, mais avec détermination, pour redonner à cette entreprise le rôle qui est le sien dans le domaine de l'armement terrestre en Europe et dans le monde.
« De la même manière, les atouts du service industriel de la direction des constructions navales seront valorisés par une amélioration de son mode de fonctionnement et par un effort soutenu de productivité et de restructuration. Il s'agit là d'un enjeu majeur pour le maintien de la France parmi les grandes nations de la construction navale militaire et pour la transition de la marine vers le modèle retenu.

« c) Une industrie européenne

« Afin de faire face à la diminution des budgets d'équipement et à l'augmentation de la concurrence mondiale dans le domaine de l'armement, l'Europe doit disposer d'une base industrielle et technologique de défense compétitive, performante et adaptée, permettant aux Etats d'acquérir les matériels nécessaires à l'équipement de leurs forces au meilleur rapport coût-efficacité. La constitution d'une telle base, la réduction des surcapacités existantes et la création d'une réelle complémentarité industrielle et technologique entre les pays partenaires, tout en garantissant l'approvisionnement des forces en toutes circonstances, doivent s'appuyer sur des projets concrets en coopération.
« C'est ainsi qu'en dépit de la forte contrainte budgétaire qui pèse sur cette programmation, la volonté de donner la priorité aux programmes européens, en respectant les engagements de la France vis-à-vis de ses partenaires, a prévalu dans les choix. Les programmes menés en coopération européenne, notamment avec l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Italie, verront leurs crédits plus que doubler entre 1996 et 2002.
« S'agissant de la préparation de l'avenir, les recherches-études et développements exploratoires bénéficieront de crédits dont le montant sera légèrement supérieur à 5 p. 100 du titre V. Une orientation européenne marquée caractérisera cet effort.
« Dans ce cadre, une attention particulière sera portée au fait que la France puisse, en tout état de cause, maintenir ses compétences technologiques et industrielles avec ses partenaires européens.

« d) La recherche de nouveaux marchés

« La recherche de nouveaux marchés est indispensable pour que les entreprises de défense françaises acquièrent une plus grande indépendance vis-à-vis du budget d'équipement des armées. Les performances de l'industrie à l'exportation sont liées à la compétitivité de ses produits. Celle-ci devrait se voir renforcée par les incitations à la productivité, la préservation des grands programmes et la constitution des pôles électronique et aéronautique.

« « 2.5. Mesures d'accompagnement
économique et social

« L'importance des mesures de restructuration militaire et industrielle et la durée de la phase de transition d'un modèle d'armée à l'autre nécessitent un effort d'accompagnement économique et social exceptionnel.
« La mise en oeuvre de ces mesures sera indispensable dans les régions qui, pour des raisons souvent historiques, ont bâti leur développement économique sur les productions d'armement et qui doivent, désormais, intensifier la diversification de leurs activités.
« Elle sera aussi importante pour les collectivités territoriales directement concernées par les réorganisations ou les dissolutions d'unités militaires. L'annonce de ces dernières mesures sera faite selon le calendrier suivant :
« - dès le vote de la loi de programmation militaire, l'architecture générale du plan de restructurations pour toute la période de transition sera annoncée, ainsi que le détail des mesures pour les années 1997 et 1998 ;
« - en 1998, le détail des mesures pour les années 1999 et 2000 sera présenté, la dernière tranche bisannuelle (2001-2002) étant, pour sa part, précisée en 2000.
« Par rapport à la procédure suivie entre 1990 et 1994, le délai entre l'annonce des mesures et leur entrée en application sera allongé, afin de permettre aux personnels, à leurs familles et aux collectivités territoriales de s'y préparer dans les meilleures conditions.
« L'évolution simultanée de la professionnalisation de l'armée et des restructurations de l'industrie de défense ouvrira la possibilité de reclasser des fonctionnaires, ouvriers d'Etat et ouvriers sous décret de l'industrie, sur une partie des postes qui ne seront plus tenus par des militaires mais par des civils.
« Ces mesures d'accompagnement seront suivies par le comité interministériel pour les restructurations de défense, créé par le décret n° 96-261 du 28 mars 1996, et seront mises en oeuvre par le délégué interministériel aux restructurations de défense placé auprès du ministre de la défense.

« « 2.5.1. L'accompagnement économique

« Les déséquilibres économiques sur les bassins d'emploi concernés par les restructurations seront limités par des mesures d'aide au reclassement et à l'essaimage, des actions en faveur des petites et moyennes entreprises et la reconversion des sites désaffectés.
« L'accompagnement économique sera conduit dans un cadre régional, en fonction de trois principes.

« a) L'implication et la coordination
des acteurs locaux dans chaque région

« Une convention sera conclue entre l'Etat et les conseils régionaux qui en exprimeront la volonté et servira de base à des protocoles concernant les bassins d'emploi. Un délégué régional au redéploiement industriel et aux restructurations de la défense sera chargé de l'animation de ce dispositif ; son action sera relayée par des chargés de mission, dans chaque bassin d'emploi.
« Les organisations syndicales seront associées aux décisions relevant de l'utilisation des crédits consacrés aux restructurations, notamment ceux du FRED et du fonds KONVER.

« b) La répartition du financement
entre tous les acteurs

« Cette répartition sera le gage d'une mobilisation des acteurs publics et privés, nationaux et locaux, et d'une limitation des coûts pour la collectivité.
« La responsabilité de l'accompagnement économique devra naturellement être assumée en priorité par les grandes entreprises, lorsque les mesures d'adaptation concernent leurs établissements et leur personnel.
« L'Union européenne, l'Etat et les collectivités territoriales auront, quant à eux, un rôle particulièrement important à jouer lorsqu'il s'agit de sites militaires.

« c) Le renforcement et la diversification
des moyens financiers apportés par l'Etat

« Les crédits affectés par la loi de finances initiale pour 1996 aux mesures d'accompagnement économique des restructurations de la défense s'élèvent à 130 millions de francs. Ces crédits seront portés dans les meilleurs délais à 295 millions de francs par redéploiement interne au sein du budget du ministère de la défense.
« Au cours de la période de programmation, les crédits affectés au FRED seront recentrés sur la reconversion des emprises militaires et les actions collectives et s'élèveront à 942 millions de francs constants 1995.
« Par ailleurs, les sociétés de conversion existantes, chargées de créer des activités de substitution dans les bassins d'emploi concernés par les restructurations seront recapitalisées. Compte tenu des moyens destinés à financer leur fonctionnement, le total des crédits qui leur seront alloués sera de 1 285 millions de francs constants 1995 au cours des six années à venir.
« Le FRED restera financé par le budget du ministère de la défense. Les crédits apportés aux sociétés de conversion seront, pour leur part, pris en charge par le ministère de l'économie et des finances.
« Avec un total de plus de 2,2 milliards de francs, représentant en moyenne 370 millions de francs pour chacune des annuités de la programmation, c'est un triplement des moyens financiers mis en oeuvre par l'Etat qui est décidé. Le calendrier d'engagement de ces moyens pourrait être le suivant :

(En millions de francs 1995)




1997

1998

1999

2000

2001

2002

TOTAL
FRED 132 162 162 162 162 162 942
Sociétés de conversion 186 195 226 226 226 226
1 285
Total 318 357 388 388 388 388 2 227

« 2.5.2. L'accompagnement social

« L'accompagnement social des restructurations industrielles s'adressera aux salariés des industries du secteur de la défense, qu'il s'agisse des salariés sous convention collective ou des agents de l'Etat employés dans des entreprises (GIAT Industries, SNPE).
« Cet accompagnement a pour objectif de ne procéder à aucun licenciement qui ne soit assorti de propositions de reclassement ou de reconversion.
« Le dispositif mis en place s'appuiera sur les procédures existantes. C'est notamment le cas des financements apportés par l'Etat au travers du Fonds national pour l'emploi (FNE) pour les plans sociaux des entreprises, de l'effort de formation favorisant les reclassements internes, de l'aide au reclassement externe ou de l'incitation à la mobilité professionnelle ou géographique.
« De nouveaux moyens d'action seront par ailleurs mis en place.
« - La réduction du temps de travail fera l'objet d'incitations renforcées. Depuis 1995, les emplois créés par une réduction du temps de travail peuvent être partiellement exonérés de cotisations sociales.
« Le Gouvernement a proposé que cette disposition soit étendue aux emplois sauvegardés par une réduction du temps de travail, permettant notamment aux entreprises de défense de limiter les réductions d'emplois décidées dans le cadre de plans sociaux.
« - Le reclassement des personnels fonctionnaires et ouvriers sous décret, employés dans des entreprises publiques (GIAT Industries, SNPE), vers les administrations de l'Etat sera encouragé. A cette fin, des conventions seront passées par le ministère de la défense avec le ministère de l'éducation nationale et d'autres départements ministériels, à l'image de celles qui ont été passées avec le ministère de l'équipement et de l'intérieur de manière à assurer le maximum de reclassements de proximité.

« CONCLUSION

« En 1960, la première loi de programmation militaire engageait la France dans un extraordinaire pari technologique et lui permettait d'engager la réalisation de la force de dissuasion nucléaire.
« En 1996, l'ambition de la programmation militaire pour les six années à venir est à la fois d'adapter nos armées au nouvel environnement géopolitique de l'après-guerre froide et de relever le défi de la professionnalisation des forces, tout en renouvelant l'adhésion des citoyens et les formes de leur participation à la défense de notre pays.
« Elle maintient un lien privilégié entre l'armée professionnelle et notre jeunesse, qui sera présente dans les forces armées à travers un service volontaire.
« Elle consolide le lien entre armée et Nation par le recrutement annuel des jeunes engagés. Beaucoup plus nombreux qu'aujourd'hui, ceux-ci consacreront une part de leur vie professionnelle aux armées auxquelles ils pourront continuer d'apporter leurs concours au travers des réserves.
« Elle permet aussi aux réservistes, plus étroitement associés aux activités des forces que dans le passé, de renforcer cette relation.
« La réforme qui s'engage revêt une portée historique. Elle s'attachera en priorité aux dimensions humaines des bouleversements qu'elle entraîne. C'est en se dotant d'un outil adapté aux exigences de sa défense pour le début du siècle prochain, en se reconnaissant dans les hommes et les femmes qui la servent, en mettant sa confiance dans une armée et une industrie modernisées, que le pays forgera la solidarité et la capacité d'engagement qui sont à la base d'un esprit de défense renouvelé. »

« Glossaire des programmes d'équipement figurant dans le rapport annexé de la loi de programmation 1997-2002



ABREVIATION


SIGNIFICATION
AASM Armement air-sol modulaire
AC 3G LP Missile antichar de troisième génération longue portée
AC 3G MP Missile antichar de troisième génération moyenne portée
ACCS Système de commandement des opérations aériennes de l'OTAN
APACHE/SCALP Famille de missiles air-sol (antipiste et emploi général)
AS 30 L Missile air-sol à guidage laser
ASMP Missile air-sol moyenne portée
ATF Avions de transport futur
ATLAS Système de gestion automatisée des feux d'artillerie sol-sol
BREVEL Aérodyne léger télépiloté
C-135 FR Avion ravitailleur
C 160-GABRIEL Avion de recueil de renseignements d'origine électromagnétique
C L 289 Missile programmé de reconnaissance optique
COBRA Radar de trajectographie des tirs d'artillerie
C S A R Hélicoptère de combat, de recherche et de sauvetage
E R Y X Type de missile antichar courte portée
H A C Hélicoptère antichar
H A P Hélicoptère d'appui et de protection
HAWKEYE Avion de guet embarqué sur porte-avions
HELIOS I Satellite d'observation par voie optique
HELIOS II Satellite d'observation par voies optique et infrarouge
HORIZON Système d'observation du champ de bataille par radar monté sur hélicoptère
HORIZON Frégate anti-aérienne de nouvelle génération
HORUS Système sattellitaire d'observation radar
L M J Laser mégajoule
L R M Lance roquette multiple
M 4 Missile balistique stratégique embarqué sur S N L E
M 45 Missile balistique stratégique embarqué sur S N L E-N G
M 51 Missile balistique stratégique embarqué sur S N L E-N G
M 2000-5 Version modernisée du M 2000 D A
M 2000-D Version assaut conventionnel du Mirage 2000
M 2000-DA Version défense aérienne du Mirage 2000
M 2000-N Version assaut nucléaire du Mirage 2000
MARTHA Maillage anti-aérien des radars tactiques contre hélicoptères et avions
MICA Missile d'interception et de combat aérien
M I D S Système très protégé de transmission de données
M I L A S Missile porte-torpille de lutte anti-sous-marine
MINREM Moyen interarmées navalisé de recherche électromagnétique
M T B A Moyens de communication des bases aériennes
MU 90 Torpille légère
NH 90 Hélicoptère de transport tactique et/ou de lutte anti-sous-marine et anti-navires
P A L E N Programme d'aide à la limitation des essais nucléaires
P A A M S Système de défense antiaérienne destiné à la frégate Horizon
P A N Porte-avions à propulsion nucléaire
Patmar (avion de) Patrouille maritime (avion de)
P D L C T Nacelles de désignation laser à caméra thermique
P R 4 G Poste radio de quatrième génération
R I T A Réseau intégré de transmissions automatiques
ROLAND Système sol-air à courte portée
RUBIS Système de transmissions de la gendarmerie nationale
S A A M Système d'autodéfense antiaérienne, version navalisée
S A M P/T Système de défense sol-air à moyenne portée, version terrestre
SARIGUE Système aéroporté de recherche électromagnétique
S A T C P Missile sol-air de très courte portée
S C C O A Système de commandement et de conduite des opérations aériennes
S D C A Système de détection et de commandement aéroporté (AWACS)
S G E A Système de guerre électronique du champ de bataille
S I C A Système d'information et de commandement des armées
S I C F Système d'information et de commandement des forces
S I R Système d'information des régiments
S M D Sous-marin Diesel
S N A Sous-marin nucléaire d'attaque
S N L E Sous-marin nucléaire lanceur d'engins
S N L E-N G Sous-marin nucléaire lanceur d'engins de nouvelle génération
SOCRATE Réseau interarmées de communications d'infrastructures
SYRACUSE Satellites de télécommunications
T C D Transport de chalands de débarquement
TIGRE Nom de l'hélicoptère de combat disponible en versions H A C et H A P
T L R A Avion de transport à très long rayon d'action
V A B Véhicule de l'avant blindé
V B C I Véhicule blindé de combat de l'infanterie
VTT Véhicule tout terrain


Par amendement n° 10, MM. Bécart, Billard, Mme Bidard-Reydet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le rapport annexé, après la date : « 1994 », de rédiger ainsi la fin du deuxième alinéa de l'introduction : « Cette loi confirme le choix de ce Livre blanc en matière de ressources humaines. Ainsi, le service national demeure le mode de recrutement le plus adapté au cadre et au contexte de la stratégie, des objectifs et de la politique de défense de la France, comme aux moyens qu'on peut y consacrer. Il se traduit par le choix d'un système mixte, associant professionnels et appelés. La représentation nationale sera appelée à définir une rénovation et la modernisation du service national, en vue d'un service court, qualifiant pour les jeunes, répondant aux exigences de citoyenneté et de démocratie. »
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec cet amendement, nous proposons que la présente loi de programmation militaire confirme les choix faits par le Livre blanc en matière de ressources humaines. En effet, si ce document était contestable sur bien des aspects, il avait le mérite d'être clair et pertinent sur cette matière.
Même si nous sommes conscients des problèmes actuels de nos armées, nous nous prononçons en effet tout à fait clairement pour une armée composée de militaires professionnels et d'appelés du contingent effectuant leur service militaire.
Cette mixité, qu'il convient de développer, est une des conditions de l'efficacité de notre défense et du maintien de son caractère national. Elle permet de maintenir le lien principal entre l'armée et la nation.
Nous avons déjà exposé, dans la discussion générale, nos craintes quant aux difficultés de recrutement qu'entraînerait la professionnalisation de notre armée, et il n'est donc pas utile d'y revenir en détail à cet instant de nos débats.
Bien entendu, nous ne nous contentons pas de la situation actuelle, et ce en raison tant de la conscription en elle-même que des moyens très insuffisants consacrés aux unités constituées majoritairement d'appelés.
Nous estimons au contraire qu'il convient de réformer en profondeur le service militaire pour l'adapter aux réalités de notre temps et pour le rendre plus attractif auprès de la jeunesse de notre pays ; ce n'est en effet pas en faisant passer les « trois jours » à une semaine qu'on éveillera le sens civique de cette dernière et qu'on assurera l'efficacité de notre système de défense.
La discipline est la force de nos armées, nous dit-on. Mais, selon nous, elle doit être revue et corrigée, afin que l'exigence d'une obéissance aveugle fasse place à la compréhension et à l'intelligence des objectifs à atteindre pour le bien commun.
Les jeunes appelés, qui doivent pouvoir être considérés comme des citoyens, devraient avoir leur mot à dire pour les affaires qui les concernent, tout en respectant, bien évidemment, la nécessaire discipline et la hiérarchie.
L'écoute devrait être recherchée en permanence par l'encadrement et la hiérarchie qui, aujourd'hui - il faut bien le dire -, ont trop souvent tendance à céder à la facilité démobilisante de l'autoritarisme.
Enfin, les compétences des jeunes devraient être mieux utilisées qu'elles ne le sont actuellement et même valorisées, car c'est un gage de cohérence et d'efficacité globale de notre défense.
Le service militaire mérite d'être raccourci progressivement, car, une fois la formation militaire acquise, rien ne justifie le maintien long et inutile des jeunes sous les drapeaux, alors même que les menaces extérieures ne le justifient pas. Nous savons tous que les jeunes se plaignent de perdre une bonne partie de leur temps, qui est souvent utilisé à des tâches répétitives, peu valorisantes, voire complètement inutiles.
Il convient donc aujourd'hui de poursuivre dans la voie de la réduction de la durée du service militaire, qu'une politique dynamique des réserves pourrait compléter de bonne manière, dans l'intérêt du pays.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe communiste républicain et citoyen invite le Sénat à adopter l'amendement n° 10.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Avant de formuler un avis, que j'annonce d'emblée défavorable, sur l'amendement n° 10, je voudrais préciser l'approche générale de la commission quant aux amendements déposés sur le projet de loi de programmation.
Je me suis efforcé de montrer dans mon rapport, que la commission a d'ailleurs adopté, tout à la fois le bien-fondé de la profonde réforme de notre défense proposée par le Gouvernement, le pari très ambitieux que cette réforme représente et les difficultés importantes qu'il faudra surmonter pour la mener à bien, tant pour le titre III que pour le titre V, dans le cadre de l'enveloppe réduite des 185 milliards de francs par an.
Dans cet esprit, le rapporteur que je suis s'est abstenu de déposer des amendements, d'une part, pour que le vote du Sénat apparaisse comme un geste politique fort d'approbation de la démarche proposée et de conscience des difficultés à surmonter et, d'autre part, pour résister à la tentation d'amendements auxquels nous serions a priori favorables, mais qui risqueraient de porter atteinte à la cohérence et à la crédibilité indispensables de ce texte. C'est dans cet esprit que la commission vous propose d'examiner les divers amendements, mesdames, messieurs les sénateurs.
L'amendement n° 10 est en contradiction avec l'objectif de professionnalisation de nos forces, objectif que la commission, comme cela a été rappelé tout à l'heure, a approuvé à l'occasion du rapport sur l'avenir du service national de notre collègue M. Serge Vinçon et en adoptant l'article 2 bis du présent projet de loi, qui tire les conséquences du choix de professionnalisation sur l'évolution des effectifs de nos armées.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement n° 10.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Défavorable.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 11, MM. Bécart, Billard, Mme Bidard-Reydet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le rapport annexé, de rédiger ainsi les trois premiers alinéas du paragraphe 1.2.1 :
« Dans le nouvel équilibre résultant des changements de l'environnement international, la posture de nos armées est exclusivement déterminée par les objectifs suivants :
« - garantir la sécurité du pays, sa liberté, face à des chantages ou menaces extérieurs éventuels. Cette conception est strictement défensive et au service de la nation ;
« - notre armée peut participer utilement à des missions internationales de paix, sous commandement de l'ONU. »
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Cet amendement vise à réaffirmer que nos forces armées doivent être exclusivement tournées vers la défense des seuls intérêts nationaux.
Il nous semble, en effet, que les objectifs décrits au début du paragraphe 1.2.1. du rapport annexé outrepassent le cadre national qu'il convient de garder à notre défense.
Le troisième des alinéas concernés, qui définit nos intérêts stratégiques de manière très extensive, vise en fait à faire jouer à nos armées un rôle de gendarme international qui n'a pas lieu d'être et qui pourrait participer d'une stratégie de tension internationale.
Ce texte est donc intrinsèquement porteur de risques de dérives inquiétantes.
Aussi, nous proposons que nos armées servent uniquement à garantir la sécurité du pays, sa liberté face à des menaces extérieures éventuelles, et que son utilisation soit strictement défensive et au service de la nation.
Par ailleurs, nous tenons à réaffirmer ici que nous ne comprenons la projection de puissance que dans le cadre de missions internationales placées sous l'égide de l'ONU.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer dans le rapport annexé les références à nos intérêt vitaux, à nos intérêts stratégiques et à nos intérêts de puissance, qui constituent pourtant l'objectif essentiel de notre défense.
Si la formulation proposée dans l'amendement n° 11 pour définir les objectifs de notre défense n'est pas en elle-même critiquable, elle est cependant, à l'évidence, incomplète et excessivement réductrice.
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a préféré maintenir le texte actuel du projet de loi et, par conséquent, a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 11.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Le Gouvernement partage l'analyse de la commission ; c'est la raison pour laquelle il émet un avis défavorable sur l'amendement n° 11.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 11.
M. Bertrand Delanoë. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Delanoë.
M. Bertrand Delanoë. Le groupe socialiste votera contre cet amendement. En effet, ce texte, en visant à limiter les objectifs de défense à la seule défense du territoire, occulte nos intérêts vitaux et nos alliances.
Par ailleurs, notre pays a conclu des accords de défense que l'adoption de cet amendement ne permettrait pas de respecter. (Très bien ! sur les travées du RPR et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 12, MM. Bécart, Billard, Mme Bidard-Reydet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le rapport annexé, de rédiger comme suit le deuxième alinéa du paragraphe 1.3.3 :
« Pour répondre à l'appel d'organisations internationales de sécurité, principalement les Nations unies, nos forces peuvent être utilisées dans des zones de conflits potentiels en vue d'agir pour la paix. La représentation nationale est informée, consultée et donne son avis sur chaque engagement de nos forces armées. »
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. Cet amendement vise à réaffirmer qu'aucun engagement de nos troupes à l'extérieur de nos frontières ne devrait se faire sans un contrôle effectif du Parlement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que « la représentation nationale est informée, consultée et donne son avis sur chaque engagement de nos forces armées », au titre des interventions dans le cadre des Nations unies.
Retenir une telle formulation ne nous permettrait pas d'engager nos forces avec la rapidité nécessaire à la bonne réussite de l'opération envisagée.
Par ailleurs, l'information du Parlement existe, et la commission y est particulièrement attentive. Cette information est d'ailleurs nécessaire pour associer nos compatriotes aux décisions prises.
La commission propose en conséquence d'émettre un avis dévavorable sur cet amendement.
M. Henri de Raincourt. Elle a raison !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Le Gouvernement partage la même analyse que la commission. C'est la raison pour laquelle il est défavorable à l'adoption de cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
M. Guy Penne. Le groupe socialiste s'abstient.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 1, MM. Calmejane et Camoin proposent, dans le rapport annexé, de compléter in fine le septième alinéa du paragraphe 1.4.3 par les deux phrases suivantes :
« Le nombre d'hélicoptères évoqué dans la présente loi de programmation est le nombre d'appareils réellement en service à l'horizon 2015. En tout état de cause, la France confirme ses besoins d'hélicoptères tels qu'exprimés au lancement des programmes Tigre et NH 90. »
La parole est à M. Camoin.
M. Jean-Pierre Camoin. L'amendement que j'ai l'honneur de présenter avec mon collègue M. Robert Calmejane est, malgré la sobriété de sa rédaction, d'une importance capitale pour l'avenir de la maîtrise, par notre pays, de l'industrie européenne de l'hélicoptère.
En effet, les deux programmes majeurs de cette industrie sont développés en coopération : avec l'Allemagne, pour le Tigre, avec l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie, pour le NH 90. La participation financière des Etats au développement de ces programmes et, demain, de son industrialisation, c'est-à-dire, pour résumer, la répartition des charges de travail dans les différents pays, s'est faite et se fera à partir de l'expression des besoins d'appareils, donc de commandes futures exprimées par les différents pays au lancement de ces programmes.
Nous savons que nos partenaires maintiennent leur engagement. Par conséquent, nous risquons de voir la répartition industrielle de demain se rééquilibrer en notre défaveur, et donc au détriment de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Cet amendement vise à clarifier la position du Gouvernement sur les hélicoptères Tigre et NH 90.
Je me suis moi-même inquiété, dans mon rapport, des décalages affectant ces programmes et la modernisation ainsi différée de l'aéromobilité. C'est l'une des « bosses financières » qu'il faudra surmonter après 2002, même s'il est important de souligner que ces programmes, qui paraissaient à beaucoup menacés - c'était notamment le cas du - NH 90 sont confirmés et pérennisés par le projet de loi.
M. Jacques Genton. Très bien !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. A la veille du débat, j'ai demandé à M. le ministre de la défense de bien clarifier ce point. Il l'a fait ce matin en citant des chiffres différents de ceux qui sont annoncés dans la presse.
Par ailleurs, je crois difficile de remettre en cause, par voie d'amendement, les choix effectués pour chaque programme sans remettre en cause la crédibilité indispensable de la programmation.
De surcroît, la rédaction de l'amendement proposé, notamment celle de la première phrase, ne me paraît pas très claire.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 1.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, je crois avoir répondu à vos inquiétudes ou à vos interrogations dans le propos que j'ai tenu à la tribune voilà quelques instants. J'ai donné les éléments chiffrés que vous attendiez. C'est la raison pour laquelle, comme vient de vous le suggérer en termes châtiés M. le rapporteur, je vous serais reconnaissant de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Monsieur Camoin, l'amendement n° 1 est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Camoin. Les précisions qui ont été apportées ce matin par M. le ministre étant de nature à nous satisfaire, je retire cet amendement.
M. Bertrand Delanoë. C'est dommage, nous voulions le voter !
M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
Par amendement n° 8, le Gouvernement propose, dans le rapport annexé, de supprimer les deuxième à sixième alinéas du paragraphe 2.1.1.
La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. L'Assemblée nationale a introduit, dans le texte du rapport annexé au projet de loi de programmation, un paragraphe mentionnant un certain nombre de catégories de dépenses qui n'ont pas vocation à être financées par le budget du ministère de la défense.
Il n'est pas question pour moi d'affirmer que ces catégories de dépenses doivent être financées par le budget de mon ministère. Si, aujourd'hui, je dépose cet amendement, c'est parce qu'il ne me paraît pas de bonne méthode d'introduire des formules de soustraction. En outre, ce serait créer un précédent.
En effet, dans le texte inséré par l'Assemblée nationale, sont évoqués le financement des formes civiles du volontariat, la contribution du ministère de la défense au titre du budget civil de recherche et de développement technologique, le BCRD, les sommes nécessaires à la recapitalisation des entreprises, les crédits de conversion des bassins d'emplois, à l'exception des crédits inscrits au fonds de la restructuration de la défense.
Faut-il apporter ces précisions dans le texte de la loi ? Personnellement, je ne le crois pas ; je l'ai dit à l'Assemblée nationale et je le répète devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs.
En effet, la programmation militaire a pour objet de définir les moyens financiers et humains qui seront mis à la disposition de nos forces armées. Elle n'a pas pour ambition de dresser la liste des dépenses que le budget de la défense ne supporte pas.
C'est la raison pour laquelle je vous demande de voter cet amendement n° 8. Dans le cas contraire, nous créerions un précédent juridique.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Il s'agit d'un moment important de notre débat, mes chers collègues !
L'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant que l'enveloppe de 185 milliards de francs allouée à la défense ne comprend ni le financement des formes civiles du volontariat, ni la contribution du ministère de la défense au titre du budget civil de recherche et de développement technologique, ni les sommes nécessaires à la recapitalisation des entreprises publiques de défense, ni les crédits de reconversion des bassins d'emplois concernés par les restructurations, à l'exception des crédits inscrits au fonds de restructuration de la défense.
L'amendement du Gouvernement tend à revenir au texte initial du rapport annexé, en supprimant ces précisions.
Cette adjonction de l'Assemblée nationale avait pour objet de préciser et de rendre crédible le contenu des 185 milliards de francs que j'ai évoqués, afin d'éviter que des charges supplémentaires ne pèsent sur le budget de la défense, qui est déjà fortement réduit - nous avons été nombreux à le souligner - et qui devra faire face, dans les six années à venir, à des charges très lourdes, tant pour le titre III - mise en place de la professionnalisation - que pour le titre V, réduit d'environ 20 milliards de francs par an par rapport à la précédente loi de programmation.
La commission a donc approuvé l'objectif recherché par l'Assemblée nationale.
Cependant, on peut faire valoir qu'une loi de programmation a pour but de définir les moyens mis à la disposition de la défense et non pas de dresser la liste des dépenses que le budget de la défense n'aura pas à supporter.
En outre, une telle énumération pourrait laisser penser que d'autres dépenses liées à la défense devraient naturellement être prises en charge par le budget de la défense. Ce risque n'est pas mince, notamment si l'on pense au surcoût des opérations extérieures, dont nous avons longuement discuté en commission.
Pour toutes ces raisons, monsieur le président, avant de se prononcer sur cet amendement, la commission demande une brève suspension de séance.
M. le président. Il va être fait droit, bien entendu, à la demande de la commission.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à douze heures vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Je vous avais dit, mes chers collègues, que cet amendement était très important.
La commission avait décidé, hier, de s'en remettre à la sagesse du Sénat, dans l'attente des précisions du Gouvernement. A mon grand regret je suis conduit, aujourd'hui, en tant que rapporteur, à vous proposer de rejeter l'amendement n° 8...
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. ... dans l'unique souci de rendre plus cohérente et plus crédible encore, monsieur Hamel,...
M. Emmanuel Hamel. C'est pour cela, en effet !
M. Xavier de Villepin, rapporteur. ... cette loi de programmation.
Dans le même esprit, je demande à tous mes collègues qui ont déposé des amendements de bien vouloir les retirer, afin que nous aboutissions dès aujourd'hui à un vote conforme qui marquera une adhésion forte du Sénat à cette programmation définitive. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Monsieur le ministre, il y a encore une autre solution : c'est que vous, dont nous partageons les convictions et les valeurs, acceptiez de retirer votre amendement. (Sourires. - Très bien ! sur certaines travées socialistes.)
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le rapporteur, vous ayant écouté, je retire l'amendement du Gouvernement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. L'amendement n° 8 est retiré.
Je suis maintenant saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont présentés par MM. Bécart, Billard, Mme Bidard-Reydet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 13 vise, dans le rapport annexé, à supprimer le paragraphe 2.2.
L'amendement n° 14 tend, dans le rapport annexé, à supprimer le paragraphe 2.2.1.
L'amendement n° 15 a pour objet, dans le rapport annexé, de rédiger comme suit le b du paragraphe 2.2.1 :
« b) Les jeunes du service volontaire.
« Le service national obligatoire sera réformé, son universalité et son caractère démocratique développés, sa durée réduite progressivement. »
Par amendement n° 9 rectifié, MM. Alloncle, Caldaguès et les membres du groupe du Rassemblement pour la République proposent, dans le rapport annexé, de rédiger ainsi le deuxième alinéa de la subdivision « La Gendarmerie » du b du paragraphe 2.2.2 :
« Les fonds versés par les sociétés concessionnaires d'autoroutes pour les tronçons nouveaux mis en service à partir du 1er janvier 1997, rattachés au budget de la gendarmerie par arrêté du ministre du budget, devront permettre le financement des emplois de gendarmes supplémentaires et des autres dépenses correspondantes. »
M. Michel Caldaguès. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Caldaguès.
M. Michel Caldaguès. Ne pouvant pas faire moins que le Gouvernement, je retire l'amendement n° 9 rectifié. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
M. le président. L'amendement n° 9 rectifié est retiré.
La parole est à M. Bécart, pour défendre les amendements n°s 13, 14 et 15.
M. Jean-Luc Bécart. Ces amendements découlent de notre opposition de principe à la création de l'armée de métier et de notre souhait de voir réformé l'actuel service national.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. L'amendement n° 13 tend à supprimer l'ensemble de la partie du rapport annexé relative au passage à l'armée professionnelle.
L'amendement n° 14 tend à supprimer une partie du rapport annexé relative au passage à l'armée professionnelle.
L'amendement n° 15 revient à contester la démarche choisie en faveur de la professionnalisation de nos forces, en prévoyant, notamment, le maintien d'un service national obligatoire.
Par cohérence avec les positions qu'elle a adoptées, la commission ne peut qu'émettre un avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Il émet également un avis défavorable sur les trois amendements.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 4, M. Demilly propose :
I. - Dans le rapport annexé, de remplacer le premier alinéa du c du paragraphe 2.3.2. par les trois alinéas suivants :
« Afin de conserver une capacité de transport au moins équivalente à celle d'aujourd'hui, il est prévu d'acquérir une flotte de cinquante-deux avions européens de transport de nouvelle génération (ATF).
« Afin de permettre le lancement du dévelopement de cet avion avec le concours de financements bancaires, la commande française sera passée en début de programmation avec celle d'autres pays européens.
« Dans le cas de non-lancement de l'ATF, il sera procédé à l'acquisition d'un nombre supérieur d'appareils étrangers de moindre performance. Les premières commandes seront financées dès 2002. »
II. - Dans ledit rapport, de rédiger comme suit la première ligne du tableau « programmes » du c du paragraphe 2.3.2 :


Avion européen de transport de nouvelle génération (ATF)...
Commande en 1997 ou début 1998


La parole est à M. Demilly.
M. Fernand Demilly. Le ministre de la défense a indiqué la volonté du Gouvernement de ne pas renoncer à la construction d'un avion de transport européen avec le concours de financements bancaires.
L'amendement proposé ménage cette possibilité, ce qui n'est pas le cas du texte initial.
En effet, le développement de l'ATF, avec le concours de financements bancaires, ne pourra être lancé sans commandes fermes préalables des Etats.
L'ATF doit être lancé en début de programmation pour respecter les délais des premières livraisons demandées par les Etats, à savoir 2004, dans le cadre - c'est un fait nouveau en matière militaire mais classique en matière civile - d'une phase unique de développement et de production.
Le lancement de cette phase repose sur des prix fermes offerts par l'industrie avec, en contrepartie, des commandes des Etats assorties de paiements d'acomptes jusqu'à livraison, comme dans le domaine civil.
Il est à noter que le nombre de cinquante-deux avions remplace celui de cinquante, qui n'était pas cohérent avec le tableau correspondant.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. L'amendement de notre collègue M. Fernand Demilly a pour objet de préserver, dans le rapport annexé, la concrétisation du programme européen d'avion de transport futur et de prévoir que la commande française sera passée en début de programmation afin de permettre aux industriels de bénéficier des concours bancaires nécessaires au lancement de ce programme.
Monsieur Demilly, j'ai moi-même fortement insisté dans mon rapport sur le souhait de notre commission de voir se concrétiser le projet d'avion de transport futur, qui est indispensable à la réalisation d'une autonomie européenne dans ce domaine sur le plan tant stratégique qu'industriel.
La commission a toutefois estimé, quel que soit l'intérêt de la préoccupation exprimée, que les dispositions que vous proposez risqueraient là encore de porter atteinte à l'équilibre global du présent projet de loi.
M. le ministre nous a clairement annoncé les intentions du ministère de la défense sur ce point ce matin même. Je vous propose donc, mon cher collègue, compte tenu des précisions apportées par M. le ministre de la défense, de retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je partage totalement le point de vue qui vient d'être exposé par M. le rapporteur : soit l'amendement est retiré, et je m'en féliciterai ; soit il n'est pas retiré, et je demanderai que le Sénat vote contre.
M. le président. Monsieur Demilly, l'amendement n° 4 est-il maintenu ?
M. Fernand Demilly. Compte tenu de l'avis de la commission et des affirmations de M. le ministre de la défense, je retire cet amendement.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
Par amendement n° 2, MM. Calmejane et Camoin proposent, dans le rapport annexé, de compléter in fine le premier alinéa de la subdivision « Forces » du a du paragraphe 2-3-3 par la phrase suivante : « La réalisation des objectifs de réduction du coût des programmes demandés à la DGA, aux états-majors et aux entreprises permettra de rendre la situation budgétaire compatible avec une anticipation partielle des échéanciers de livraison de l'hélicoptère Tigre. »
M. Jean-Pierre Camoin. Cet amendement se situait dans la droite ligne des actions engagées par nos collègues députés RPR des Bouches-du-Rhône et de la Seine-Saint-Denis, les 5 et 6 juin dernier, à l'Assemblée nationale.
Les réponses qui ont été apportées ce matin par M. le ministre nous satisfont. Dans ces conditions, nous retirons cet amendement. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.
Par amendement n° 16, MM. Bécart, Billard, Mme Bidard-Reydet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent, dans le rapport annexé, de compléter in fine le premier alinéa du paragraphe 2.5.1 par une phrase ainsi rédigée : « Les intérêts des collectivités locales seront préservés. »
La parole est à M. Bécart.
M. Jean-Luc Bécart. La suppression du service militaire va entraîner la réduction du format de nos armées et la dégradation de l'économie de bon nombre de régions, de bassins d'emplois où sont actuellement stationnées de nombreuses unités qui sont destinées à la dissolution.
Les collectivités locales avaient consacré d'importants efforts financiers pour s'équiper afin d'accueillir dans de bonnes conditions les militaires et leurs familles.
Nous proposons donc, avec l'amendement n° 16, que l'Etat s'engage à assumer toutes les conséquences de sa politique militaire.
Je signale d'ailleurs que cet amendement, qui a déjà été défendu à l'Assemblée nationale par mon ami Paul Mercieca, avait reçu un accueil favorable de la commission de la défense.
Aussi, compte tenu de son importance pour les communes et les départements concernés, nous proposons au Sénat, qui est le représentant naturel, au sein des institutions de la République, des communes et des départements, de bien vouloir l'adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Cet amendement tend à préciser que les mesures d'accompagnement économiques liées aux restructurations préserveront les intérêts des collectivités locales.
Sans être contestable en soi, cette précision me paraît à la fois trop générale et superflue.
En effet, les représentants des collectivités locales sont étroitement associés dans l'ensemble des structures mises en place ou confirmées dans le cadre des restructurations et précisées dans le rapport annexé.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 16.
M. Jean-Luc Bécart. C'est bien dommage !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Charles Millon, ministre de la défense. Le Gouvernement partage le point de vue de la commission et rejette donc également cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er et du rapport annexé.

(L'ensemble de l'article 1er et du rapport annexé est adopté.)

Articles 2, 2 bis, et 3

M. le président. « Art. 2. - Les dépenses ordinaires et les dépenses en capital en autorisations de programme et en crédits de paiement, inscrite en loi de finances initiale du ministère de la défense, s'élèveront au cours de chacune des années de la loi de programmation à 185 milliards de francs constants, exprimés en francs 1995, à hauteur de 99 milliards de francs pour les titres III et de 86 milliards de francs pour les titres V et VI.
« Ces montants seront actualisés chaque année par application de l'indice des prix à la consommation hors tabac retenu par la loi de finances pour chacune des années considérées. » - (Adopté.)
« Art. 2 bis. - Les effectifs inscrits au budget du ministère de la défense, hors comptes de commerce, évolueront de la façon suivante de 1997 à 2002 :



1997

1998

1999

2000

2001

2002
Officiers 38 523 38 527 38 475 38 403 38 306 38 189
Sous-officiers 213 369 211 532 208 842 205 234 202 353 199 296
Militaires du rang 52 216 60 054 68 643 76 606 84 239
92 527
Total des militaires de carrière ou sous contrat 304 108 310 113 315 960 320 243 324 898

330 012

Civils 74 875 76 241 77 929 79 964 81 796

83 023

Appelés et volontaires 169 525 137 672 103 496 74 577 47 107

27 171

Total général 548 508 524 026 497 385 474 784 453 801 440 206


« Les effectifs des réserves sont fixés à 100 000 hommes à l'échéance de 2002. » - (Adopté.)
« Art. 3. - Le Gouvernement présentera chaque année au Parlement, lors du dépôt du projet de loi de finances, un rapport sur l'exécution de la loi de programmation militaire et des mesures d'accompagnement économique et social.
« Tous les deux ans, à l'occasion du dépôt du rapport annuel qui pourra inclure une révision des échéanciers des programmes industriels, un débat sera organisé au Parlement sur l'exécution de la loi de programmation militaire. » - (Adopté.)

Article 4

M. le président. « Art. 4. - Après le deuxième alinéa de l'article 7 de la loi n° 83-607 du 8 juillet 1983 portant diverses dispositions relatives à la fiscalité des entreprises et à l'épargne industrielle, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, les dépôts susmentionnés peuvent également permettre, dans la limite de 5 p. 100, appréciée établissement par établissement, de l'encours des comptes visés à l'article 5, le financement jusqu'au 31 décembre 1998 des dépenses nouvelles d'investissement des entreprises, lorsque ces dépenses sont destinées à l'industrialisation des matériels aéronautiques militaires exportés et lorsqu'elles sont effectuées au profit de petites et moyennes entreprises. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 6, MM. Marini, Trucy et Badré proposent de supprimer cet article.
Par amendement n° 5 rectifié, MM. Bourges et Vinçon proposent, dans le texte présenté par l'article 4 pour le deuxième alinéa de l'article 7 de la loi du 8 juillet 1983, après les mots : « matériels aéronautiques », d'insérer les mots : « , maritimes et terrestres ».
La parole est à M. Trucy, pour défendre l'amendement n° 6.
M. François Trucy. Etant donné les propos liminaires de M. de Villepin et dans l'esprit qui a prévalu ensuite entre M. le ministre et certains de nos collègues, je retire cet amendement. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.
La parole est à M. Bourges, pour défendre l'amendement n° 5 rectifié.
M. Yvon Bourges. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. Xavier de Villepin, rapporteur. Très bien !
M. Bertrand Delanoë. C'est dommage, nous l'aurions voté !
M. Jean Chérioux. Raison de plus pour le retirer !
M. Bertrand Delanoë. Voilà qui n'est pas très sympathique !
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié est retiré.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 5

M. le président. « Art. 5. - Le Gouvernement présentera au Parlement, avant la fin de l'année 1996, un rapport sur les mesures d'aide et de soutien à l'exportation des matériels de défense. ». - (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Hamel pour explication de vote.
M. Emmanuel Hamel. Il est toujours douloureux, lorsque l'on porte amitié à un homme, de se trouver contraint, par le sentiment que l'on a de ses droits à l'égard de la nation, du pays et de la paix, d'affirmer son désaccord sur un projet de loi qu'il soumet au vote du Parlement.
Etant parlementaire d'abord, je ne veux pas être complice de ce sentiment que peut avoir l'opinion qu'un Parlement, sous une pression du Gouvernement, se déjuge. Or nous sommes à une époque où devait être appliquée une loi de programmation militaire que le Parlement a votée et qu'on lui demande aujourd'hui de modifier.
La raison de cette modification serait une nouvelle interprétation de la conjoncture internationale.
Je prie Dieu de me tromper dans mon pessimisme, mais je sais que demeurent, en Europe, des menaces qui, de nouveau, peuvent s'aggraver.
Je sais comme vous tous que, aux confins de l'Europe et dans d'autres parties du monde voisines de notre continent, des menaces peuvent surgir : lancements de missiles, bombes chimiques, agressions internes par la subversion entretenue et formée à l'étranger.
Hélas ! mes chers collègues, je crains que, en ce jour, nous ne soyons bien Français.
Vous aimez Péguy, monsieur le ministre ! Il a dit : « Ô toi peuple français, créateur de la cathédrale, mais peuple léger ».
Aujourd'hui, n'assumons-nous pas une légèreté tragique, comme le Parlement qui, sous Napoléon III, a refusé la loi de réforme militaire alors que déjà la Prusse avait vaincu l'Autriche à Sadowa, et comme le Parlement qui, en 1913, n'a pas accepté l'augmentation des moyens de la défense, ce qui s'est payé, le 2 août 1914, par 1,5 million de morts !
Et 1939 n'est pas si loin, monsieur le ministre ! Vous n'étiez pas né, mais j'ai le souvenir de ce refus d'accomplir l'effort nécessaire de défense nationale et d'équipement militaire face au danger de l'Allemagne, d'une Allemagne hitlérienne qui surgissait. Nous l'avons payé de la défaite et de quatre ans d'occupation.
Ce ne sont plus les mêmes menaces, mais il en demeure. Est-il normal, dans ces conditions, qu'un pays comme la France, dont le produit national brut est de 8 000 milliards de francs, ne consacre que 185 milliards de francs à l'équipement militaire et aux moyens de la défense ?
J'ajoute, monsieur le ministre, que cette loi de programmation militaire est la voie ouverte, le premier pas vers ce que vous demanderez - et sans doute, hélas ! obtiendrez - au mois de novembre : la suppression de la conscription.
Je ne suis pas contre l'accentuation de la professionnalisation des armées. Mais couper le lien entre l'armée et la nation, cesser de faire que le service soit obligatoire parce que nous sommes Français et que nous devons à la nation un moment de notre vie, je ne peux pas l'admettre.
En outre, monsieur le ministre, les promesses que vous faites, je sais que, dans votre coeur, vous espérez pouvoir les tenir ; mais nous n'en avons pas la certitude. Il s'agit de diminuer les équipements militaires, de les réduire dans des proportions tragiques, d'abandonner la deuxième composante de la dissuasion nucléaire.
Mes chers collègues, si vous lisez la page 22 du rapport, vous serez consternés d'apprendre que la programmation, c'est d'arriver à peine à 420 chars lourds, à seulement 300 avions de combat et 81 navires.
C'est cela la France de demain !
Et que dire des conséquences sur l'emploi ? Ces jeunes qui n'accompliront pas leur service militaire ne seront plus formés par lui, accroîtront d'autant, en tant que civils, la pression sur l'emploi et augmenteront le nombre des chômeurs.
Et que dire encore de la diminution des crédits et des effectifs dans les industries de la défense nationale et de sa conséquence sur l'ensemble de l'industrie française ? Quel danger économique que la diminution projetée des crédits affectés à la défense, qui fécondent tant la recherche et l'investissement dans les secteurs civils !
Pour toutes ces raisons, dans l'idée que je me fais de la France et de son rayonnement dans le monde, dans la conscience que j'ai des dangers extérieurs qui peuvent encore peser sur la France, parce que je sais le drame de l'emploi et parce que votre projet de loi en augmente encore la gravité, à mon vif regret, bien que sénateur de cette majorité - tant que je n'en suis pas exclu, compte tenu des positions que je prends - je ne voterai pas cette loi de programmation insuffisante et néfaste, hélas ! pour notre France. Mais, de tout coeur, j'espère me tromper.
M. Bertrand Delanoë. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi sur lequel nous sommes appelés à nous prononcer aujourd'hui, après un débat constructif enrichi par le travail remarquable de nos rapporteurs - tout particulièrement de M. de Villepin - est l'aboutissement d'une démarche volontaire, réaliste, lucide et cohérente du Président de la République.
Cette démarche, M. Chirac l'avait affirmée alors qu'il n'était encore que candidat, en mars 1995 - elle a été ratifiée par le vote du peuple français en mai 1995 - puisqu'il insistait déjà à l'époque sur la nécessité pour la France de repenser l'ensemble de sa politique de défense, en tenant compte de la nouvelle situation géostratégique.
M. Jacques Chirac se référait à deux mots clefs pour une nouvelle défense : modernisation et professionnalisation.
La réforme présentée au mois de février dernier repose sur ces deux principes, qui donneront à la France « un instrument militaire capable de frapper, au besoin sans délai », une armée réduite et mobile qu'appelait d'ailleurs de ses voeux le général de Gaulle...
M. Charles Pasqua. Très bien !
M. Serge Vinçon. ... qui, lui, n'a jamais bénéficié du consensus auquel vous faisiez allusion, monsieur Delanoë, en tout cas de 1958 à 1969.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Serge Vinçon. En effet, la réforme concrétisée par le présent projet de loi vise à doter la défense française des moyens d'une efficacité humaine et technique face aux nouveaux défis internationaux, en s'appuyant sur la dissuasion, avec le concept de suffisance.
La défense de la France ne se contente pas d'une gestion au jour le jour. C'est pourquoi nous accueillons très favorablement ce projet de loi de programmation, qui s'inscrit, qui plus est, dans une planification à long terme, prévoyant l'évolution du nouveau modèle d'armée jusqu'en 2015.
Il y a cohérence dans le temps avec cette programmation, dont les auteurs ont le courage de faire des choix financiers difficiles, mais aussi cohésion, avec la réforme du service national et le statut des réservistes qui découlent de la professionnalisation de l'armée et qui seront examinés à l'automne par le Parlement.
Le président Chirac s'y est engagé personnellement : la nouvelle loi de programmation sera respectée tout au long de son mandat, avec lequel elle coïncide d'ailleurs.
Le ministre de la défense s'est également engagé avec conviction et courage dans cette réforme, en parlant, je tiens à le souligner, le langage de la vérité.
Cohérence et pragmatisme de la programmation, engagement du Président de la République et du Gouvernement : telles sont les raisons pour lesquelles le groupe du RPR, avec lucidité, votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier. En écoutant notre collègue M. Hamel, je me suis dit que j'avais eu raison d'indiquer tout à l'heure que nous n'étions pas les seuls à exprimer des inquiétudes quant aux conséquences de ce projet de loi de programmation militaire.
Mes collègues du groupe socialiste, M. Delanoë notamment, ont suffisamment exprimé, comme je l'ai fait moi-même en défendant la question préalable, les raisons pour lesquelles nous y sommes hostiles. Aussi, je confirme simplement que nous voterons contre. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Permettez-moi d'abord de dire - et je le fais certainement au nom de beaucoup d'entre nous - qu'en écoutant M. Hamel à l'instant nous partagions l'émotion qu'il exprimait et sûrement une partie de ses préoccupations. Nous comprenons qu'il les ait exprimées de cette façon-là, avec ce style que nous aimons ici et qui correspond non seulement au sérieux et à la passion du Sénat, mais aussi à des préoccupations qui sont des préoccupations majeures. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
Cela étant, le groupe des Républicains et Indépendants apportera son soutien unanime à ce projet de loi.
Oui, il y a de l'émotion et des regrets, oui, il y a des craintes et des appréhensions. C'est pourquoi, dans les propos que nous avons tenus dans cet hémicycle, monsieur le ministre, vous avez souvent entendu le mot « confiance » et le mot « espoir ». En effet, ce projet ne pourra être une réussite sans l'espoir et sans la confiance du Parlement et de sa majorité, celle qui vous soutient, ni sans l'engagement total de ceux qui ont pris les importantes résolutions et garanties que nous avons entendues.
Certes, le chantier sera rude, nous le savons et vous le savez. Toutefois, vous pourrez compter sur la majorité du Sénat, sur celle du groupe des Républicains et Indépendants, pour vous apporter son soutien tout au long du périple. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Laffitte. M. Pierre Laffitte. Au sein de mon groupe, nous avons le sentiment que la majorité de nos concitoyens sont d'accord sur l'essentiel des principes de ce projet de loi, mais regrettent que la nécessaire professionnalisation qui en résulte s'accompagne d'une diminution potentielle des liens entre la nation et l'armée ; ils craignent que la formation civique à laquelle, avec toutes les insuffisances que l'on connaît, l'armée contribuait néanmoins fortement ne disparaisse, et que, parallèlement à cette loi de programmation, ne soit pas donné à notre nation et à notre jeunesse le signe fort - donnant l'élan, qu'elles sont prêtes à avoir, de générosité, de volonté civique, de contribution à la diminution de la fracture sociale - que représenterait toute forme de service national beaucoup plus largement étendue que la semaine, ou même les quelques semaines prévues.
Au sein de mon groupe, la majorité votera le projet de loi ; d'autres s'abstiendront ; d'autres encore voteront contre.
M. Henri de Raincourt. Très bien !
M. André Maman. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002, que nous venons d'examiner, me paraît témoigner de la volonté du Gouvernement de prendre en compte, d'une façon courageuse, les réalités de notre temps.
Réalité géopolitique, d'abord, puisque nous évoluons dans un environnement stratégique nouveau, depuis l'effondrement de l'Union soviétique et la dissolution du pacte de Varsovie, et que nous connaissons très bien les dangers possibles, comme l'a fait remarquer très justement notre collègue M. Hamel.
Réalité technologique, ensuite, puisque nous utilisons des armes de plus en plus complexes, lesquelles nécessitent la présence d'un personnel formé, éduqué, hautement qualifié, en un mot professionnel.
Réalité budgétaire, enfin, puisque notre objectif est, bien sûr, de bâtir un outil de défense rénové à un moindre coût.
Le débat de haut niveau auquel nous avons assisté - à cet égard, je remercie les rapporteurs, en particulier M. de Villepin - a été, je crois, à l'image des enjeux du texte que nous propose le Gouvernement. A la fois technique et passionnant, il a en tout cas pleinement convaincu les sénateurs non inscrits, dont je me fais l'interprète aujourd'hui. Ils voteront donc ce projet. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 116:

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 310
Majorité absolue des suffrages 156
Pour l'adoption 216
Contre 94

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Emmanuel Hamel. Hélas !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais en quelques mots vous remercier de la qualité des débats que nous venons de vivre et du vote que vous venez d'émettre. Ce faisant, vous avez permis que ce projet de loi relatif à la programmation soit voté conforme par le Sénat, tout en apportant un éclairage particulier et un certain nombre de remarques, qui sont tout à fait complémentaires de celles qui avaient été émises par l'Assemblée nationale. Ce vote est un point de départ.
J'ai bien entendu M. Hamel. Il sait bien que j'ai un sentiment patriotique fort, comme vous tous, et que je prends la mesure des menaces ou des dangers qui pèsent sur notre pays.
La réforme qui vient d'être votée est une réforme stratégique ; elle touche à l'Europe, à l'Union de l'Europe occidentale, à l'Alliance atlantique.
C'est une réforme budgétaire, comme le montrent certaines des décisions qui viennent d'être confirmées et qui concernent les autorisations de programmes les crédits de paiement, la pluriannualité, la garantie accordée par le Président de la République sur le montant de la programmation durant six années.
C'est une réforme industrielle - et M. de Villepin a, à juste titre, longuement insisté - sur l'évolution de notre industrie de défense.
Mais, surtout, cette réforme concerne la nation tout entière et exige un engagement humain. Si vous le permettez, c'est sur cet aspect que je voudrais insister car, demain, nous aurons l'occasion de débattre d'un projet de loi portant réforme du service national. Demain, il faudra que nous concevions ensemble le volontariat. Demain, il faudra que nous réfléchissions aux modes et aux moyens nécessaires pour renforcer le lien entre l'armée et la nation.
Tout cela a un seul objectif : démontrer, à l'évidence, qu'il n'y a pas pas de défense nationale sans engagement humain.
M. Hamel a cité Péguy. Je citerai, pour ma part, la phrase qu'il m'a apprise lorsque, en 1973, je faisais partie des militants qui lui ont permis d'aller siéger à l'Assemblée nationale : « Deux mille ans de labeur ont fait de cette terre un réservoir sans fond pour les âges nouveaux. » Ainsi, je suis sûr que la France est capable de lever des générations de volontaires permettant à la défense nationale française d'écarter les menaces qui peuvent peser sur elle.
Cependant, il est vrai qu'il n'y a pas d'engagement humain suffisant s'il n'y a pas en même temps volonté politique et esprit de défense.
Cette volonté politique, le Président de la République ne l'a jamais autant exprimée : on l'a vu lorsqu'il a fallu reprendre le pont de Vrbanja ; on l'a vu aussi lorsqu'il a fallu décider la reprise de la campagne d'essais nucléaires ; on le constate encore dans les négociations internationales, au cours desquelles on voit la France prendre toute sa place - je dis bien toute sa place - pour porter l'idée européenne de defense, défendre et faire valoir les spécificités françaises.
Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez participé à une grande réforme, une réforme de notre défense, mais aussi une réforme de notre société. Elle a une dimension humaine, je viens de le dire, une dimension politique et j'allais dire la dimension du quotidien, à savoir cet esprit de défense qui doit imprégner tout notre pays.
Je parle là non pas en tant que ministre de la défense, mais simplement en tant que responsable politique, car l'esprit de défense, ce n'est pas le ministre de la défense qui en a seul la charge. En ont la responsabilité tous les ministres, tous les responsables politiques. En effet, l'attachement à la patrie se manifeste, certes, à des moments exceptionnels, tels que ceux qui ont été vécus par certains d'entre vous en 1940-1945, mais aussi au quotidien, avec la prise en charge des intérêts, des idéaux et des valeurs de la France.
On le sait bien, la France ne se réduit pas à un ensemble d'individus défendant le développement économique : La France, ce sont aussi ces valeurs qui nous dépassent, une idée qui nous enveloppe, c'est tout ce que j'ai compris à l'occasion de ce débat auquel vous avez contribué, et je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. René Monory.)

PRÉSIDENCE DE M. RENÉ MONORY

M. le président. La séance est reprise.

4

QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT

M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, permettez-moi de vous rappeler la règle que nous nous sommes fixée : chaque sénateur dispose de deux minutes et demie pour poser sa question, et chaque ministre dispose du même temps pour y répondre.

GESTION DU PERSONNEL INAPTE AU TRAVAIL
DANS LES PETITES ENTREPRISES

M. le président. La parole est à M. Clouet.
M. Jean Clouet. Monsieur le ministre - en disant cela, je ne sais pas exactement à qui je m'adresse, mais je vais le savoir lorsque je verrai qui se lèvera pour me répondre - ...
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. A moi !
M. Jean Clouet. Ah ? Excusez-moi, madame le ministre. Vous voyez à quel point mon ignorance était complète ! (Exclamations amusées sur les travées socialistes.)
M. le président. Mais vous êtes flatté, monsieur Clouet !
M. Jean Clouet. Tout à fait, monsieur le président.
Madame le ministre, ma question n'aurait sans doute pas eu à être posée si l'administration compétente avait bien voulu répondre à une lettre que je lui ai adressée au mois d'avril.
Cette question intéresse un cas particulier, mais elle a une large portée générale, puisqu'elle concerne aussi bien les petites entreprises que le monde associatif, dont on connaît l'importance mais aussi la vulnérabilité.
Madame le ministre, je souhaiterais donc vous exposer le cas d'une association n'occupant que quelques salariés.
Cette association a engagé, voilà deux ans, un agent d'entretien qui a connu depuis lors treize arrêts de maladie.
M. René-Pierre Signé. C'est une question d'intérêt local !
M. Jean Clouet. La médecine du travail l'a déclaré inapte « à tout poste de travail ».
M. René-Pierre Signé. Ce n'est pas une question d'actualité !
M. Jean Clouet. L'agent a demandé soit sa réintégration, soit son licenciement.
Compte tenu de l'avis de la médecine du travail, il est impossible de le réintégrer. Mais la COTOREP, la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel, refuse de déterminer son taux d'invalidité s'il n'est pas, au préalable, licencié. (Murmures sur les travées socialistes.)
Je ne sais pas qui parasite mon propos ! (Rires sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. Josselin de Rohan. C'est, comme d'habitude, M. Signé !
M. Jean Clouet. Quoi qu'il en soit, la COTOREP s'appuie sur le code du travail et sur une jurisprudence selon laquelle, à défaut de possibilité de reclassement - c'est le cas - l'association doit licencier l'agent et lui verser des indemnités de licenciement.
Dans cette affaire, l'employeur n'est ni coupable ni responsable ; l'employé n'a rien à lui reprocher puisqu'il ne s'agit pas d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle.
M. le président. Pouvez-vous poser votre question, mon cher collègue ?
M. Jean Clouet. Oui, monsieur le président. Je vois que vous êtes très attentif à la durée de mon propos.
M. le président. Je le suis pour tous, et pas simplement pour vous.
M. Jean Clouet. Pas toujours !
Pourtant, cet employeur, ni coupable ni responsable, se voit en quelque sorte condamné à une véritable amende sociale dont le coût, difficilement supportable pour un petit employeur, devrait, plus légitimement me semble-t-il, être supporté par la sécurité sociale.
C'est la loi, me direz-vous. C'est la force injuste de la loi, a dit quelqu'un. Mais, quand une loi est injuste, on peut, on doit la changer.
Envisagez-vous de le faire, madame le ministre ?
M. le président. Monsieur Clouet, si je vous ai engagé, très gentiment, à poser votre question, c'est pour que chacun puisse intervenir alors que les débats sont encore télévisés. Il n'était aucunement dans mon intention de vous faire un reproche !
La parole est à Mme le ministre.
Mme Anne-Marie Couderc, ministre délégué pour l'emploi. Monsieur le sénateur, tout d'abord, je tiens à vous présenter les regrets de M. Jacques Barrot de ne pouvoir vous répondre personnellement.
Vous avez évoqué à l'instant la difficulté rencontrée par le responsable d'une petite association qui a été conduit à licencier un salarié déclaré inapte à l'emploi. Vous nous avez indiqué que l'association s'était trouvée dans l'obligation de verser des indemnités de licenciement à cette personne.
Bien entendu, comme vous l'avez indiqué, l'employeur ne peut être tenu pour responsable d'une telle situation, dont chacun, par ailleurs, mesure bien le caractère particulièrement douloureux.
Je ne méconnais pas, en outre, l'incidence financière que peut représenter pour l'employeur, notamment dans le cas d'une petite structure, le versement de ces indemnités.
Je voudrais cependant rappeler, comme vous l'avez fait, monsieur le sénateur, que la loi du 31 décembre 1992 a bien pour objet, d'une part, d'inciter au reclassement des personnes devenues inaptes et, d'autre part, d'assurer à ces salariés privés d'emploi, en l'absence de reclassement, le versement des indemnités de licenciement ou, à défaut, le maintien du salaire antérieur.
C'est pourquoi la modification de la loi que vous avez envisagée mérite d'être étudiée très soigneusement, car le texte actuel peut poser, en effet - comme dans le cas que vous avez évoqué - des problèmes d'application dans de petites structures. La modification de la loi devra tenir compte de l'ensemble des paramètres, qu'ils soient humains ou financiers.
En tout état de cause, rien n'empêche la COTOREP de se prononcer sur la qualité de travailleur handicapé et sur le niveau du handicap du salarié avant le licenciement pour inaptitude. Compte tenu de ce que vous avez indiqué, monsieur Clouet, dans le cas qui vous préoccupe, cela aurait dû, à coup sûr, faciliter la recherche d'une solution appropriée.
De manière générale, en effet, tout doit être mis en oeuvre pour parvenir à reclasser le salarié, de préférence lorsqu'il s'agit de plus grandes structures, dans la même entreprise. Des aménagements de poste peuvent et doivent être imaginés, éventuellement avec l'aide financière de l'association pour la gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées, l'AGEFIPH. L'exercice d'une activité est, aux yeux du Gouvernement, essentiel pour l'insertion des handicapés.
C'est bien là l'esprit de la loi que je rappelais tout à l'heure, sans en méconnaître les difficultés d'application. C'est la raison pour laquelle nous aurons à coeur d'examiner les propositions que vous avez formulées. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

DIFFICULTÉS DE LA SOCIÉTÉ EUROCOPTER

M. le président. La parole est à M. Vallet.
M. André Vallet. Monsieur le ministre de la défense, je souhaite revenir sur la difficile situation de la société Eurocopter, première entreprise de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur avec 5 444 employés, premier exportateur mondial, premier constructeur européen et deuxième constructeur mondial d'hélicoptères.
Cette société mène un parcours difficile, confrontée à la concurrence américaine, gênée par l'absence de solidarité européenne - la Grande-Bretagne et les Pays-Bas ont choisi l'hélicoptère américain Apache - et elle semble délaissée, aujourd'hui, par l'Etat français, qui semble ne pas vouloir honorer - suivi en cela, hélas ! par le gouvernement allemand - ses promesses quant à l'achat d'hélicoptères Tigre et NH 90, tout au moins pas avant 2003.
Il est à craindre, monsieur le ministre, que cette situation nouvelle n'amène l'entreprise à diminuer encore ses effectifs au-delà de la réduction de 800 à 1 000 personnes déjà prévue sur deux ans.
Il est à craindre, monsieur le ministre, qu'Eurocopter-France ne puisse passer ces années critiques et n'assure plus sa pérennité. Ce serait un coup considérable pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, qui, vous l'admettrez, n'a pas besoin de cela !
Mes collègues sénateurs MM. Laffitte et Vigouroux, élus de cette région, l'ensemble du groupe du Rassemblement démocratique et social européen vous demandent de redonner espoir au groupe Eurocopter, à ses employés, à ses milliers de sous-traitants, à l'économie de notre région en prenant, cet après-midi, des engagements quant au soutien que le Gouvernement apportera, au plus tôt, à l'industrie d'hélicoptères de notre pays.
Nous attendons, bien sûr, un soutien du ministre de la défense, mais aussi que le Gouvernement intervienne auprès des autres pays de la Communauté européenne. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu attirer une nouvelle fois mon attention sur la situation de la société Eurocopter.
Comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer ce matin lors du débat sur la loi de programmation militaire, croyez bien que le Gouvernement suit avec une extrême vigilance le développement de notre industrie aéronautique, les difficultés rencontrées par certaines entreprises et la nécessaire conquête des marchés qu'exige la conjoncture.
Vous l'avez rappelé, Eurocopter est l'une des premières entreprises mondiales dans ce secteur d'activité. Cette société a mis au point des équipements, des productions, des appareils de première qualité. Tous ceux qui ont assisté à des vols du Tigre et du NH 90 savent qu'Eurocopter est à la pointe du progrès technique et en position d'éventuelle conquête de marchés futurs.
Vous me demandez ce que le Gouvernement compte faire pour faire face à une situation qui est, j'en conviens, difficile.
Tout d'abord, je voudrais rappeler brièvement les raisons de la crise.
La première raison tient à la diminution de tous les budgets de la défense dans le monde, diminution qui a provoqué un rétrécissement du marché et une exacerbation de la concurrence.
Dès lors, des entreprises telles qu'Eurocopter, affectées de plein fouet dans leur activité, ont rencontré un certain nombre de difficultés.
La deuxième raison vient des contraintes financières subies par un certain nombre de pays, ce qui a amené ces derniers à étaler leurs commandes. C'est malheureusement le cas de la France.
Il n'empêche que le Gouvernement a retenu trois voies d'action, sur lesquelles je voudrais insister.
Nous avons d'abord la volonté de développer le marché à l'exportation. Nous savons que la société Eurocopter ne se développera, ne se pérennisera, ne créera des emplois, ne garantira les emplois actuels qu'à condition de développer les emplois à l'exportation.
C'est la raison pour laquelle, à la demande du Président de la République et du Premier ministre, avant la fin de l'année, je présenterai un plan de développement et de soutien aux entreprises exportatrices en matière aéronautique et d'armement, de façon à assurer à des sociétés telles que Eurocopter un soutien des pouvoirs publics qui leur permette de conquérir des marchés.
Par ailleurs, j'ai demandé au délégué général pour l'armement de réduire les coûts de 30 p. 100 dans les six ans qui viennent, et un plan a été engagé dans ce sens. Cela permettra de dégager des marges de productivité, donc des marges financières, qui nous permettront, à leur tour, d'accélérer nos commandes de Tigre, de NH 90 et de chars Leclerc, voire de faire avancer les études concernant le deuxième porte-avions.
M. le président. Monsieur le ministre, pourriez-vous conclure, je vous prie ?
M. Charles Millon, ministre de la défense. Puisque vous me priez d'être bref, monsieur le président, s'agissant de la troisième action, je demanderai à M. Vallet de se reporter aux déclarations que j'ai faites ce matin même devant la Haute Assemblée, lors de la discussion du projet de loi de programmation militaire : il saura ainsi de manière précise et détaillée combien d'hélicoptères seront commandés par la France durant les années à venir. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE
ET TRAITEMENT DU CANCER DU SEIN

M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Avant d'en venir à ma question, je tiens à évoquer l'attentat, destiné à tuer, dont le maire communiste de Sartène a été victime cette nuit.
En mon nom propre, au nom du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que - j'espère pouvoir le dire - au nom du Sénat tout entier, je veux apporter notre témoignage de solidarité à Dominique Bucchini et dire notre condamnation de tels actes.
M. Guy Penne. Très bien !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Nous exigeons du Gouvernement qu'il mette tout en oeuvre pour que soient immédiatement recherchés et arrêtés les criminels qui ont perpétré cet attentat. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes et sur certaines travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
J'en viens maintenant à ma question d'actualité.
Le cancer du sein est responsable, chaque année, de la mort de 200 000 femmes dans le monde, dont 10 000 femmes en France.
La qualité et la continuité des efforts de la recherche médicale dans ce domaine sont déterminantes pour combattre ce fléau.
La décision de Roussel-UCLAF d'abandonner les recherches sur une molécule identifiée par les chercheurs comme pouvant présenter une efficacité supérieure aux produits actuels dans le traitement de cette maladie suscite un grand émoi.
La raison invoquée par le groupe germano-franco-américain Hoechst-Marion-Roussel relève de la stricte logique financière. Il concentre en effet son activité sur quelques médicaments, les plus rentables, détruit des équipes de recherche de haut niveau scientifique, organise la suppression de 8 000 postes, sur 42 000 salariés, pour atteindre un taux de rentabilité de 20 p. 100 de son chiffre d'affaires, et envisage sa cotation sur le marché boursier.
Dans une grande unité, la quasi-totalité des personnels de Roussel-UCLAF conteste ces orientations. Il y a quelques heures, une nouvelle manifestation les réunissait, à Romainville, pour avancer des propositions. Refusant d'adopter l'argumentation unilatérale de leur direction, ils souhaitent un large débat contradictoire sur une chaîne publique de télévision.
Dans la réponse à une question d'un député communiste, vous vous êtes reconnu concerné par ce problème et vous avez mis l'accent sur la nécessaire préservation de la recherche-développement dans l'industrie pharmaceutique française.
Avec les salariés de l'entreprise, les chercheurs, les médecins, les malades et l'ensemble des femmes, nous ne pouvons nous contenter de simples déclarations : il faut des engagements concrets.
Comment comptez-vous obtenir de cette multinationale pharmaceutique privée, qui reçoit des fonds publics français, que ses choix ne reposent pas seulement sur des critères financiers mais intègrent pleinement les besoins de la santé publique ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur quelques travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord indiquer que le Gouvernement, unanime, condamne l'attentat auquel Mme Bidard-Reydet a fait allusion et ressent la même émotion.
S'agissant de votre question, madame le sénateur, il est clair que la lutte contre le cancer sous toutes ses formes est un combat de tous les instants et que c'est une priorité de santé publique du Gouvernement.
Cela étant dit, la présentation que vous faites de la recherche médicale est un peu partielle.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je n'avais que deux minutes !
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. La recherche médicale consiste en fait à « cribler » des molécules en fonction d'objectifs thérapeutiques. Après un certain nombre d'années, cela aboutit, le cas échéant, à des médicaments.
Ainsi, lorsque la recherche est simplement engagée, on ne peut pas dire qu'il y aura à coup sûr un nouveau médicament. Il faut, à l'évidence, que soient menés préalablement des études toxicologiques et des essais thérapeutiques, qui permettront éventuellement de déterminer qu'il y a promesse d'un médicament efficace.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Encore faut-il les mener, ces recherches et ces études !
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. En ce qui concerne la molécule à laquelle vous faites plus précisément allusion, en l'état de mes informations, elle n'a jamais été administrée à l'homme et les études toxicologiques ne sont pas terminées. Il n'est donc pas possible, aujourd'hui, de prédire une postérité thérapeutique à cette molécule.
Pour le reste, la politique du Gouvernement en matière de recherche pharmaceutique et d'industrie du médicament consiste, bien entendu, à mettre en oeuvre un cadre favorable aux progrès thérapeutiques et à préserver notre capacité de recherche et de développement. C'est tout le sens des conventions qui ont été légalisées dans le cadre du DMOSS voté ici même voilà quelques semaines. Il s'agit de disposer d'une industrie pharmaceutique dynamique et innovante, au bénéfice de la santé des Français. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

MESURES DE SOUTIEN EN FAVEUR DE LA FILIÈRE BOVINE

M. le président. La parole est à M. Besse.
M. Roger Besse. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans le Cantal, département que je représente ici, l'agriculture, qui est la première activité économique du département, se consacre exclusivement à l'élevage bovin, à partir d'herbages qui couvrent plus de 95 p. 100 du territoire agricole.
Cette région de naissage est aujourd'hui et sera surtout demain la plus touchée par la crise actuelle de la viande bovine.
La chute des prix constatée conduit à une perte nette de 250 millions de francs pour les éleveurs du département, et ce en seulement trois mois.
La situation de l'agriculture cantalienne est très représentative des problèmes agricoles que rencontrent nos départements du Massif central.
L'inquiétude des agriculteurs pour les mois à venir est profonde. En l'absence de mesures fortes, qui doivent être prises très rapidement et appliquées sans retard sur le terrain, nous pourrions connaître une situation très grave, avec des mouvements incontrôlables.
Lors du conseil des ministres du 19 juin dernier, M. le ministre de l'agriculture a annoncé un ensemble de mesures conjoncturelles et structurelles en faveur de la filière bovine. Il a clairement reconnu l'urgente nécessité de mettre en oeuvre une réforme de fond de l'organisation du marché de la viande bovine, notamment par un retour à des modes d'élevage traditionnels et plus extensifs, permettant le développement d'une production de qualité et l'occupation optimale des terres agricoles.
Loin des errements que nous constatons, déplorons et condamnons, ces pratiques doivent s'imposer sans attendre la sanction des consommateurs, trop longtemps abusés.
Avec nos éleveurs du Massif central, nous disons non aux farines carnées, oui à l'herbe et à la viande de qualité. (Très bien ! sur les travées du RPR.)
Afin de pouvoir rassurer nos agriculteurs, qui attendent une réponse efficade et rapide aux problèmes graves qu'ils rencontrent, je souhaiterais connaître, d'une part, les mesures concrètes qui seront prises pour la mise en oeuvre de ces dispositions, leur calendrier ainsi que les modalités financières dont elles seront assorties et, d'autre part, les dispositions qui sont arrêtées en vue de réorienter les actions de soutien des productions végétales vers les productions animales et des élevages intensifs vers les élevages extensifs, afin d'assurer le financement des indispensables compensations à apporter aux éleveurs. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - MM. Charasse et Signé applaudissent également.)
M. Michel Charasse. Vive l'Auvergne !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué au budget, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous réponds en l'absence de M. le ministre de l'agriculture, qui, en ce moment même, négocie avec nos partenaires européens sur ce problème très complexe.
Notre élevage bovin, en particulier dans le département du Cantal, est frappé par la crise de la « vache folle », qui vient s'ajouter à une crise plus structurelle, plus permanente, liée à une baisse de la consommation.
Nous devons donc agir à la fois à court terme, pour aider nos éleveurs à traverser la crise aiguë actuelle, et, de manière plus profonde, à long terme.
S'agissant du court terme, des mesures ont été prises au mois d'avril et sont en cours d'application ; je pense notamment au report d'échéances sociales et fiscales.
Le Gouvernement a annoncé hier une autre mesure en faveur des éleveurs les plus touchés : un report des échéances bancaires.
Par ailleurs, nous intervenons auprès de la Commission européenne et auprès de nos partenaires de manière que soient majorées fortement, à titre exceptionnel, la prime à la vache allaitante et la prime aux bovins mâles, pour soutenir le revenu des éleveurs.
Nous demandons une aide exceptionnelle de 850 millions d'écus, c'est-à-dire de plus de 5,5 milliards de francs, à nos partenaires pour l'ensemble des éleveurs de la Communauté.
Au-delà de ces mesures d'effet immédiat, il s'agit de réformer l'organisation commune des marchés de la viande bovine de façon à remodeler les structures de notre production, à encourager l'élevage extensif, comme vous le suggérez, monsieur Besse, et à inciter un certain nombre d'éleveurs âgés à céder leurs droits à produire à de plus jeunes.
Cela devra se faire, comme l'a déclaré le Président de la République, en mettant en jeu à la fois la solidarité européenne, la solidarité nationale et la solidarité professionnelle de tous les agriculteurs. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR.)

PROCESSUS DE PAIX EN BOSNIE

M. le président. La parole est à Mme Durrieu.
Mme Josette Durrieu. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
Les accords de Dayton ont mis fin à la guerre en Bosnie. C'est une réalité, mais la Bosnie est un pays anéanti : la quasi-totalité de son potentiel industriel est détruite et 2 700 000 personnes ont été déplacées.
Cette paix américaine imposée est réelle, mais elle est fragile. Elle se maintient depuis six mois, mais avec en toile de fond des ruines, des voisins peu coopérants, à Zagreb ou à Belgrade, des criminels de guerre qui nous narguent, Karadzic et Mladic pour ne citer qu'eux.
Ma première question, monsieur le ministre, porte sur ces criminels de guerre : doivent-ils être arrêtés et traduits devant le tribunal international tout de suite, c'est-à-dire avant les élections, avant notre départ, ou après ?
Cette paix, enfin, est assurée par les 60 000 hommes de l'IFOR, dont 8 000 Français, parmi lesquels on trouve 40 p. 100 d'appelés volontaires. Or la mission de l'IFOR expire le 20 décembre, dans six mois exactement. Les Américains l'ont décidé, les accords de Dayton le stipulent et Bill Clinton le confirme : ils partiront.
Ce pays ruiné et non reconstruit pourra-t-il se passer de la présence et de la protection des troupes étrangères ? La réponse est non ; la guerre reprendrait immédiatement.
Peut-on alors se contenter de dire, comme vous l'avez fait à Berlin, monsieur le ministre, que la prochaine échéance importante en Bosnie, ce sont les élections en septembre, que l'heure des responsabilités a sonné pour ce pays et que le calendrier est inexorable ?
Difficile d'imaginer pire logique ! Et la responsabilité des puissances européennes, monsieur le ministre ? C'est aussi de la paix dans les Balkans, en Europe, chez nous, qu'il est question.
Les Européens devront donc décider s'ils quittent la Bosnie et l'abandonnent à son sort ou s'ils restent, sans les Américains, pour garantir la paix, leur paix.
La décision n'est pas prise. Quelle est votre position à ce sujet, monsieur le ministre ? C'est ma deuxième question.
Si les puissances européennes décident de rester sans les Américains, serons-nous capables de mener seuls cette opération en termes d'hommes et de matériel ? C'est ma troisième question.
Le pilier européen dans l'OTAN est un projet. Permettez-moi de regretter que la France et l'Europe renoncent à une défense indépendante.
M. le président. C'est la dernière question ?...
Mme Josette Durrieu. La mise en oeuvre des accords de Berlin, avec la constitution de groupes de forces interarmées, prendra du temps. Or le défi est immédiat. Sommes-nous prêts ?
Pour conclure, comme vous m'y invitez, monsieur le président, je dirai que la guerre de Bosnie est une guerre régionale classique, et qu'elle en cache d'autres.
M. le président. Madame, je vous en prie, concluez !
Mme Josette Durrieu. Elle nous replace au coeur du débat sur la programmation militaire, que nous avons eu ce matin. Je suis élue des Hautes-Pyrénées et de Tarbes. On restructure l'armée et l'armement, on licencie dans les arsenaux, on supprime des garnisons, on supprime le service militaire...
M. le président. Ce n'est plus la même question !
Mme Josette Durrieu. ... mais on n'a pas répondu aux questions essentielles.
Bientôt, la Bosnie sera pour nous, pour vous, un moyen de tester toutes les volontés en Europe, mais aussi votre politique. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères. Monsieur le président, je devrais pouvoir disposer de dix minutes puisque Mme Durrieu a posé quatre questions (Sourires.) ...
M. Guy Penne. Nous sommes d'accord !
M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères. ... mais je vais m'efforcer d'être bref tout en apportant les éléments de réponse qui sont en ma possession.
La prochaine échéance vitale pour la Bosnie-Herzévogine est la tenue des élections. La France, avec l'ensemble de la communauté internationale, a exprimé le souhait, lors du sommet de Florence, que ces élections, dont la date sera fixée par le président de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE aient lieu le 14 septembre, c'est-à-dire à la date limite autorisée par les accords de Paris. Je vous rappelle à cet égard, madame Durrieu, que ces accords ont été signés dans notre capitale.
Faut-il arrêter M. Karadzic ? Bien évidemment, et le plus tôt sera le mieux : la place de M. Karadzic est devant le tribunal pénal international. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées socialistes et sur celles du RDSE.)
L'IFOR doit-elle rester après la fin du mandat qui lui a été confié par le Conseil de sécurité ? Au risque de ne pas être de votre avis, madame Durrieu, ce qui me ferait beaucoup de peine, je vous confirme que la position de la France est très claire et qu'elle ne changera pas : nous sommes tous arrivés ensemble, dans le cadre de l'Alliance atlantique, en Bosnie-Herzégovine, et nous repartirons ensemble. Il est hors de question que l'une des nations puisse, de son propre chef, décider que ses troupes partent et que les autres restent.
Quant à ce qui se passera à l'avenir, la question mérite de retenir toute notre attention. La France a proposé d'instituer une période de stabilisation de deux années d'ici à l'été 1998.
Dans ce laps de temps, devra être poursuivie la mise en oeuvre du processus civil de paix, dans lequel il est évident que, jour après jour, les responsables locaux devront prendre une responsabilité croissante.
Il est de notre devoir de dire qu'il faut passer, par étape mais de façon résolue, d'une situation d'assistance de la communauté internationale à une situation de responsabilité de la population et des dirigeants locaux.
Enfin, quant à savoir ce que fera l'IFOR, je crois que le moment n'est pas venu d'aborder cette question. Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir à la fin de l'année sur le fondement très précis du principe que je me suis permis de vous rappeler. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

MAINTIEN DE LA PROTECTION SOCIALE
DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER

M. le président. La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
En 1977, a été créé, au sein de ce ministère, un fonds d'action sociale dont les crédits devaient permettre aux Français âgés nécessiteux ou handicapés en résidence à l'étranger de bénéficier d'allocations comparables au minimum vieillesse ou à l'allocation aux adultes handicapés. Actuellement, ce système, mis en place depuis près de vingt ans, permet à environ 5 500 Français de percevoir des aides.
M. Guy Penne. Très juste !
M. Jean-Pierre Cantegrit. J'ai des inquiétudes, monsieur le ministre, sur l'importance des crédits affectés à ce fonds d'assistance. Certes, j'ai reconnu avec satisfaction, alors que M. Alain Juppé était ministre des affaires étrangères, que les crédits de 1994 et de 1995 avaient connu une hausse de quelque 7,5 p. 100, mais, compte tenu des rigueurs budgétaires, ce fonds n'a progressé en 1996 que de 0,7 p. 100, soit une diminution en francs constants.
Mon inquiétude porte sur les crédits affectés à ce fonds par le ministère des affaires étrangères en 1997. En effet, nous assistons à une rigueur plus grande dans l'attribution des crédits en faveur de ce fonds pour nos compatriotes expatriés. On tient compte, par exemple - et c'est nouveau - de la situation professionnelle des enfants résidant en France et de l'obligation alimentaire qu'ils ont vis-à-vis de leurs ascendants.
De plus, depuis la création de ce fonds, n'est toujours pas résolue la couverture maladie de certains de ses allocataires. Bref, le fossé s'élargit entre la situation présente et l'idée qu'avait eue en 1977 M. Raymond Barre, alors Premier ministre, de parvenir à une couverture équivalente entre les Français de métropole et les Français de l'étranger en matière de vieillesse et d'allocation aux handicapés.
C'est la raison pour laquelle je vous demande, monsieur le ministre - et je souhaiterais vous entendre sur ce point - que, en dépit des économies qui vous sont demandées, vous ne touchiez pas aux crédits de ce fonds d'assistance pour les Français de l'étranger, car c'est à l'égard des plus démunis, des plus âgés et des handicapés que vous diminueriez la capacité contributive de votre ministère, et cela je ne peux, monsieur le ministre, m'y résoudre quelle que soit la rigueur budgétaire qui vous est demandée et que je comprends. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE et sur plusieurs travées socialistes.)
M. Guy Penne. Bravo, monsieur Cantegrit !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, je sais l'intérêt personnel et constant que vous portez depuis de longues années à l'action sociale que nous menons à l'étranger en faveur des personnes en difficulté, des personnes âgées, des handicapés et des malades ; cette préoccupation est tout à votre honneur.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Elle est partagée !
M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères. Je n'en doute pas ! J'espère d'ailleurs que mon collègue M. Alain Lamassoure, ministre délégué au budget, vous aura écouté avec beaucoup d'attention et aura pris note de votre recommandation.
Vous avez cité des chiffres. Si je fais une moyenne sur les trois dernières années, qui relèvent de la responsabilité de la majorité à laquelle vous appartenez, je constate que ces crédits ont évolué de quelque 3 p. 100 par an. Ce rythme est, me semble-t-il, convenable. Il témoigne en tout cas - mais nul n'est parfait en cette matière - que le Gouvernement et la majorité qui le soutient ont, en ce domaine, fait preuve de détermination et fixé une orientation sociale.
Nous continuerons, soyez-en certain, d'oeuvrer en ce sens. Nous sommes en train de préparer le budget pour 1997, et je ne manquerai pas, monsieur le sénateur - et c'est pourquoi je vous en remercie - de me servir de vos propos forts et déterminés pour soutenir mes propres demandes. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

RESTRUCTURATIONS MILITAIRES
ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE

M. le président. La parole est à M. Trucy.
M. François Trucy. Ma question s'adresse à M. le ministre de la défense.
La majorité a voté, ici même, voilà quelques heures, une loi de programmation militaire, mais l'actualité n'est pas prête de se désintéresser des multiples aspects de la défense et de la réforme de nos armées. A ce titre, ma question concerne à la fois ce domaine et celui de la politique de la ville.
Cette dernière est un élément important de l'aménagement du territoire dans la mesure où une majorité de nos concitoyens vivent dans les villes et où c'est dans celles-ci que se manifestent les plus graves aspects de la fracture sociale. Or de nombreuses unités militaires seront dissoutes dans les villes, des sites seront reconvertis et le départ des militaires de ces villes s'ajoutera à d'autres départs, ce qui n'arrangera guère la situation.
Comment préserver au mieux ce lien nation-citoyen ? Comment maintenir au mieux la présence de l'armée dans la ville, lieu de rencontres et d'échanges par excellence ?
Vous m'objecterez sans doute que la gendarmerie sera toujours présente, et ses effectifs non réduits. Mais la présence et l'action de la gendarmerie se développent surtout en milieu rural. Même si son image est excellente dans tout le pays, elle est dans la ville plutôt synonyme d'actes d'autorité.
Monsieur le ministre, partagez-vous cette préoccupation quant à la présence des militaires dans la ville et à leur contact avec les civils ? Dans la réforme que vous entreprenez et qui n'en est qu'à son tout début, avez-vous déjà des projets en matière de stationnement et d'infrastructures ? M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Charles Millon, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, je serai relativement bref parce que j'aurai l'occasion, à la mi-juillet, de faire connaître les restructurations militaires qui affecteront les régiments et les établissements, ainsi que toutes les institutions concernées par la loi de programmation militaire.
M. Jacques Mahéas. Au mois d'août, ce serait encore mieux : il y a moins de monde !
M. Charles Millon, ministre de la défense. Je peux simplement vous dire, monsieur le sénateur, que chaque cas sera étudié individuellement en fonction des problèmes d'environnement immédiat, mais aussi de l'aménagement du territoire. Si ce dernier critère n'est pas le premier dans le domaine de la défense, il en sera néanmoins tenu compte pour évaluer les conséquences sociales, économiques et familiales que les restructurations peuvent entraîner.
J'ai bien noté, monsieur le sénateur, votre souci de concilier les restructurations militaires et l'aménagement du territoire. Croyez bien qu'il est au coeur de la réflexion du Gouvernement. C'est dans cet esprit que M. le Premier ministre a créé une délégation interministérielle aux restructurations, qui a pour objectif de veiller au respect des critères que vous venez d'indiquer. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

SOMMET EUROPÉEN DE FLORENCE

M. le président. La parole est à M. Gérard.
M. Alain Gérard. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et a trait au sommet européen de Florence.
Monsieur le ministre, comme habituellement à chaque fin de semestre, se tiendra le Conseil européen des chefs d'Etat et de Gouvernement.
Ce semestre, sous présidence italienne, a été l'occasion pour le Gouvernement de faire preuve de fermeté sur certains dossiers sensibles, en matière agricole notamment, mais aussi en ce qui concerne la défense du service public. Vous comprendrez, monsieur le ministre, l'intérêt que peut porter le Finistérien que je suis à ces questions.
Certains dossiers très importants pour l'avenir de l'Europe doivent être discutés lors du sommet de Florence. Il faut donc espérer que l'affaire de l'encéphalopathie spongiforme bovine, sur laquelle nous ne pouvons qu'approuver la fermeté du Gouvernement, notamment celle de M. Vasseur, ministre de l'agriculture, ne viendra pas bloquer les discussions en cours.
Je voudrais connaître à ce sujet la position du Gouvernement à l'égard de la stratégie britannique en matière de veto.
Pourriez-vous également nous préciser, monsieur le ministre, les perspectives du sommet européen pour les grands dossiers à l'ordre du jour en matière interne, tels que la conférence intergouvernementale ou l'Union économique et monétaire, mais aussi en politique extérieure ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé de Charette, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, la question que vous me posez justifierait, à elle seule, un débat. Mais je suis parfaitement disposé à en avoir un avec vous chaque fois que se tient un Conseil européen.
Quels seront les grands sujets qui seront abordés au sommet de Florence ?
Nous ferons tout d'abord le point sur la conférence intergouvernementale qui, c'est peu de le dire, tourne en rond. Il est donc très important que les chefs d'Etat et de gouvernement secouent le cocotier, si je puis me permettre cette expression, et fixent les objectifs très précis qui doivent être atteints avant le sommet de Dublin.
En effet, nous allons entrer dans une période cruciale puisque doit s'engager, enfin, la véritable négociation sur ce que nous voulons faire de l'Union européenne.
Le deuxième sujet qui sera abordé concerne la monnaie unique. Nous ferons le point sur la mise en place technique de la monnaie elle-même, et surtout sur les orientations du système monétaire européen associé à la monnaie unique pour les pays qui ne seront pas partie prenante à celle-ci. Ce point est très important, me semble-t-il, pour le succès de cette grande oeuvre que constitue la création de l'Europe.
Nous y parlerons également beaucoup d'emploi et nous y évoquerons, sur l'initiative de la France, le mémorandum social français, auquel nous attachons beaucoup de prix ; nous traiterons aussi de quelques éléments de politique internationale.
Je voudrais insister auprès du Sénat sur l'importance pour l'Union européenne de faire entendre sa voix sur ce que nous estimons devoir être l'avenir du Moyen-Orient au moment même où les chefs d'Etat et de Gouvernement du monde arabe seront réunis au Caire. Ceux-ci ne comprendraient pas, en effet, le silence de l'Europe à un moment aussi crucial pour le processus de paix.
Que se passera-t-il en cas de veto britannique ? Tout d'abord, je suis moins pessimiste que vous y paraissez. En réalité, nous devrions parvenir en la matière à une solution appropriée, puisque la délégation britannique a procédé, dans les discussions techniques en cours, à quelques avancées significatives.
Pour le reste, n'ayez pas de doute, il n'y a pas de marge. Nous ne nous rendons pas à Florence pour faire des concessions politiques sur un sujet qui ne relève que de la santé publique ni pour marchander la santé des Français et des Européens. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Nous nous rendons également à Florence avec le souci d'améliorer la situation et avec le désir de parvenir à nous entendre sur un plan d'éradication de la vache folle. Mais ce plan ne sera ni abordé ni bien évidemment débattu au niveau des chefs d'Etat, car il relève des experts vétérinaires et des techniciens de l'agriculture. Les ministres de l'agriculture se réunissent d'ailleurs le lundi 24 juin. Nous ne ferons par conséquent que manifester une intention. Il ne saurait, je le répète, être question de marchander la santé de nos concitoyens. (Applaudissement sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

CRISE DE L'ÉLEVAGE BOVIN

M. le président. La parole est à M. Raoult.
M. Paul Raoult. Ma question a trait au problème de l'élevage. Il est vrai que les épisodes successifs de ce qu'on a appelé « la vache folle » ont entraîné une très forte diminution de la consommation de viande et, par conséquent, des prix à la production. Voilà qui pose le problème de l'avenir de nos éleveurs et de nos agriculteurs, mais aussi de nombreuses régions agricoles - le Massif central n'est pas la seule région concernée - qui ne vivent que de l'élevage.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé un certain nombre de mesures d'urgence. Ainsi, premièrement, 5,5 milliards de francs sont demandés à l'Union européenne. C'est bien, mais encore insuffisant car, si mes calculs sont justes, cela représente une prime de 140 francs par bovin mâle et de 165 francs par vache allaitante. La mesure financière n'est donc pas en rapport avec la gravité de la situation.
De même, vous annoncez des mesures sur la politique structurelle de l'élevage. Il faut d'abord redéfinir, pour l'améliorer, le contrôle sanitaire de la production des aliments pour bétail. Trop d'actions malencontreuses ont été accomplies. Il faut prendre des dispositions concrètes dans ce domaine.
M. Jacques Mahéas. Tout à fait !
M. Paul Raoult Deuxièmement, il convient de contrôler beaucoup mieux l'élevage industriel hors-sol. On a laissé faire n'importe quoi dans certaines régions.
M. Michel Charasse. C'est vrai ! Bravo !
M. Paul Raoult. Aujourd'hui les nappes phréatiques sont polluées par les nitrates, parce que l'on ne sait que faire du lisier en surplus.
Des mesures draconiennes sont indispensables dans ce domaine.
Troisièmement, il faut revaloriser l'élevage traditionnel à l'herbe, qui est plus extensif et plus respectueux de l'environnement. Or, aujourd'hui, que se passe-t-il ? Nous avons une prime à l'herbe de 300 francs, contre une prime au maïs qui peut atteindre 3 000 francs. Le résultat des courses, c'est qu'on laboure n'importe quoi, qu'on plante du maïs n'importe où. Cela entraîne une pollution supplémentaire et contribue à l'érosion des sols et à la destruction de l'environnement.
M. Michel Charasse. Voilà !
M. Paul Raoult. Or il existe des politiques, notamment le label rouge, qui permettent de conforter l'élevage. Dans ma région, le Nord - Pas-de-Calais, les éleveurs qui veulent obtenir un label, le label bleu, doivent respecter un cahier des charges qui les oblige à nourrir leur bétail à l'herbe.
M. le président. Veuillez poser votre question, monsieur Raoult.
M. Paul Raoult. Enfin, quatrièmement, il faut maîtriser les quantités à produire. Je vous demande, mesdames et messieurs les ministres, de faire preuve du même courage que nous lorsque nous avons mis en place la politique des quotats laitiers. Maîtriser la production, c'est garantir les revenus et supprimer les excédents.
Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à prendre toutes ces mesures de fond qui permettraient aux éleveurs de faire face à leurs difficultés ? Ils attendent de vous des décisions importantes. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lamassoure, ministre délégué au budget, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, toutes ces mesures sont en cours.
M. Jacques Mahéas. Cela se saurait !
M. Alain Lamassoure, ministre délégué. Je l'ai dit tout à l'heure en réponse à M. Besse, les divers points sur lesquels le Gouvernement et nos partenaires européens agissent correspondent à la liste que vous avez établie.
En ce qui concerne le contrôle de l'alimentation, qu'il s'agisse de l'alimentation humaine ou de l'alimentation du bétail, et le contrôle de la fabrication de médicaments, toutes les mesures assurant la garantie et la protection contre la maladie en question ont été prises depuis maintenant longtemps.
Par ailleurs, en ce qui concerne le soutien à l'élevage, vous avez raison de le rappeler, monsieur le sénateur, le département du Nord est concerné comme le Massif central. Des mesures à court terme ont été prises. Nous avons aidé au dégagement du marché par ce que l'on appelle l'intervention publique, c'est-à-dire des achats financés par la Communauté européenne ou des aides à l'exportation sur pays tiers financées également par la Communauté européenne.
Nous avons également pris des mesures pour soulager la trésorerie des éleveurs. Nous demandons à la Communauté européenne de financer des aides exceptionnelles aux revenus. Au-delà, vous avez raison de le dire, - et c'est l'intention du Gouvernement -, nous devons encourager une autre forme d'élevage, en ce qui concerne, notamment, la production bovine, et inciter à l'élevage extensif, en améliorant les mécanismes de primes à l'herbe pour tenir compte des excès de l'élevage intensif, avec toutes leurs conséquences néfastes pour l'économie comme pour l'environnement. (Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

AMÉNAGEMENT DU PARC DE SAINT-CLOUD

M. le président. La parole est à M. Badré.
M. Denis Badré. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture. Je précise que je la pose aussi au nom de M. Fourcade.
Dimanche dernier, les sept maires des communes riveraines du parc de Saint-Cloud, dont les deux sénateurs auteurs de cette question, manifestaient contre la décision d'instaurer un péage pour les piétons accédant au parc.
Cette décision, prise sans concertation ni information préalables et dans des conditions de légalité assez discutables, est immédiatement apparue inapplicable.
M. Jacques Mahéas. C'est une question d'intérêt national ?
M. Denis Badré. Elle a provoqué un grand désordre à toutes les entrées du parc et suscité un profond mécontentement chez les très nombreux visiteurs. Certains étaient venus admirer le merveilleux spectacle populaire que constituent les jeux d'eau ; c'est d'ailleurs pour les toucher qu'avait été imaginée l'instauration d'un péage. D'autres étaient là simplement pour prendre l'air, se détendre ou faire du sport.
Cette décision était d'autant plus inopportune qu'elle intervenait quelques jours après la visite sur place de M. Douste-Blazy. A cette occasion, M. le ministre de la culture avait examiné le problème posé par l'alimentation de ces jeux d'eau par nos étangs de Ville-d'Avray. Nous lui avions indiqué qu'il nous semblait possible de mieux répondre à la forte attente du public en accroissant le débit d'eau, sans que cela se fasse au détriment des étangs de Corot. Il suffit pour cela, en effet, de mettre en oeuvre des techniques simples telles que le recyclage de l'eau. M. le ministre nous avait alors laissé entendre qu'il partageait le point de vue selon lequel de tels aménagements ne remettraient pas en cause la valeur patrimoniale de l'ensemble.
M. Guy Penne. On ne sait jamais !
M. Denis Badré. Pouvez-vous aujourd'hui me confirmer que les services du ministère de la culture prendront les décisions nécessaires en vue d'une réalisation rapide de ces aménagements ?
S'agissant de la malheureuse question du péage, pouvez-vous, par ailleurs, me dire comment ces mêmes services envisagent de sortir de l'impasse dans laquelle ils se sont engagés ?
La direction du patrimoine assume une mission importante et souvent difficile. Nous avons la faiblesse de penser qu'elle remplira mieux cette mission régalienne - c'est le mot qui convient, s'agissant de la résidence royale de Saint-Cloud - si elle accepte d'entamer avec nous un dialogue qui ne pourra qu'être constructif.
Comme M. le ministre de la culture, nous sommes attachés à la protection et à la valorisation de notre patrimoine. Pour progresser dans ce domaine, un peu de déconcentration, une association bien tempérée des collectivités locales et un dialogue ouvert ne devraient pas nuire ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser M. Douste-Blazy. (Exclamations amusées sur les travées socialistes.)
M. Guy Penne. Il s'est défilé pour ne pas répondre à cette question essentielle !
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Absolument pas ! Il participe aux assises européennes du disque !
M. Guy Penne. Il s'est défilé !
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Vous avez posé, monsieur le sénateur, deux questions auxquelles je vais m'efforcer de répondre.
La première concerne l'incidence du fonctionnement actuel des grandes eaux sur le niveau des étangs de Ville-d'Avray.
En effet, les étangs, qui appartiennent à l'Etat et sont affectés au ministère de la culture, ont été conçus comme une réserve d'eau. Il n'est donc pas étonnant qu'il y ait des conséquences sur cette réserve d'eau chaque fois que les grandes eaux sont en service.
Pour limiter ces inconvénients, M. Douste-Blazy a fait étudier une solution de restauration du réseau hydraulique qui date du XVIIe siècle et qui relie les étangs de Ville-d'Avray au parc de Saint-Cloud. Ces travaux permettraient de limiter considérablement les déperditions d'eau. Il envisage également de limiter, dans une proportion très importante, l'amplitude des variations grâce à ce système.
Il vous a fait cette proposition lorsqu'il est venu, il y a quelques jours, dans votre commune. Cette solution peut être mise en oeuvre très rapidement, puisqu'elle a été étudiée. Vous en envisagez une autre. M. Douste-Blazy m'a chargée de vous indiquer que cette autre solution n'était pas irréalisable (Ah ! sur les travées socialistes) mais qu'elle nécessitait des études et qu'il allait les entreprendre.
M. Jacques Mahéas. Qu'il se dépêche !
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Vous avez posé une seconde question, plus immédiate, qui est celle des recettes du domaine national de Saint-Cloud.
La Caisse nationale des monuments historiques et des sites est, comme vous le savez, un établissement public de l'Etat qui ne reçoit aucune subvention d'équilibre et ne pèse donc pas sur les finances publiques. C'est un avantage. (Sourires.)
M. Henri de Raincourt. Certes !
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Mais, comme, par ailleurs, la transformation du domaine national de Versailles en établissement public autonome l'a privé de recettes importantes, le ministre de la culture l'a invité à accroître substantiellement le niveau de ses recettes propres.
C'est donc dans cette double perspective budgétaire que s'inscrivent les efforts de la caisse pour revaloriser le produit de ces concessions. C'est également dans cette perspective que s'inscrit la tarification de l'accès au domaine national de Saint-Cloud, décidée par la caisse pendant les quelques jours d'été durant lesquels, effectivement, les grandes eaux sont mises en service.
Juridiquement, le conseil d'administration de la caisse est souverain pour fixer ce tarif. Néanmoins, M. Douste-Blazy reconnaît que, compte tenu de l'importance particulière du domaine national de Saint-Cloud pour les communes riveraines, il est regrettable que cette décision n'ait pas été précédée d'une concertation avec les collectivités locales intéressées.
M. Jean-Pierre Fourcade. Certes !
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Il a d'ailleurs donné des instructions pour qu'à l'avenir cela ne se reproduise pas.
M. Guy Penne. C'est encore Bercy qui a tort !
M. le président. Madame le ministre, pouvez-vous conclure, je vous prie ?
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Je termine, monsieur le président.
Dans l'immédiat, les services de la caisse ont proposé aux communes intéressées de délimiter, par la mise en place de barrières, un périmètre à l'intérieur duquel l'accès serait tarifé et qui réserverait un large espace dont l'accès resterait gratuit.
Cette proposition me paraît raisonnable. S'il apparaissait qu'elle ne pouvait être mise en oeuvre, en liaison et en concertation avec les collectivités locales, la caisse ne pourrait que supprimer, pour cette année, la présentation des grandes eaux de Saint-Cloud, ce qui serait particulièrement regrettable.
Telles sont les réponses que M. Douste-Blazy m'a chargée de vous apporter, monsieur le sénateur. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes.)

MOYENS ATTRIBUÉS AUX CENTRES DE LUTTE
CONTRE LA TOXICOMANIE

M. le président. La parole est à M. Darniche.
M. Philippe Darniche. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat, sur l'insuffisance des moyens financiers attribués par votre secrétariat d'Etat aux centres départementaux de soins et de prévention pour toxicomanes.
Vous avez fait, à juste titre, de la lutte contre la drogue et le sida une des priorités de votre département ministériel. Cependant, nous ne constatons pas les effets bénéfiques de ces mesures au niveau local, notamment en ce qui concerne la lutte contre la toxicomanie.
Je citerai l'exemple du centre de soins et de prévention de la toxicomanie de Vendée. L'an passé, il a reçu, pour son fonctionnement, une dotation de 580 000 francs. Or le budget prévisionnel de l'établissement, qui permet de couvrir uniquement les salaires et les charges des intervenants, est estimé à 1,4 million de francs pour l'année, soit plus du double des sommes attribuées.
Pour l'année en cours, alors que la demande de soins a augmenté de 66 p. 100, les moyens mis à disposition, eux, n'ont progressé que de 2,4 p. 100, ce qui est d'ailleurs la moyenne des augmentations annuelles observées depuis cinq ans.
Le département a dû, par le vote d'une subvention exceptionnelle, se substituer à l'Etat pour permettre au centre de fonctionner.
Vous le constatez, monsieur le secrétaire d'Etat, les centres agréés ne peuvent plus répondre à l'augmentation de la demande, faute de moyens.
M. Guy Penne. Très juste !
M. Philippe Darniche. Le désengagement de l'Etat laisse les centres de soins dans une situation qui devient ingérable. Alors qu'ils font tous les jours la preuve de leur compétence et de leur efficacité, nous craignons de les voir péricliter faute de moyens.
Vous le savez, monsieur le secrétaire d'Etat, la France compte actuellement 300 000 toxicomanes, et ce chiffre, hélas, ne cesse d'augmenter. Ce n'est plus seulement un mal qui ronge les grandes villes, il se développe aussi en milieu rural.
M. Guy Penne. Très bien !
M. Philippe Darniche. Alors, soyons plus que jamais déterminés pour intensifier la lutte contre la drogue, véritable fléau pour notre pays, qui touche directement ou indirectement de trop nombreuses familles.
Du fait de l'insuffisance des contrôles aux frontières, la drogue pénètre facilement en France, particulièrement en provenance des Pays-Bas. Ces conséquences graves nous mettent au pied du mur : il nous faut prévenir et soigner et, pour cela, dégager les moyens nécessaires. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
M. Emmanuel Hamel. Il faut appliquer les accords de Schengen !
M. Philippe Darniche. Pouvez-vous nous dire ce qui justifie l'insuffisance des moyens alloués, qui seraient pourtant nécessaires à la survie des centres de soins pour toxicomanes, et quelles mesures vous comptez prendre pour remédier à cet état de fait ? (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Monsieur le sénateur, la lutte contre la toxicomanie est tout à la fois une priorité de santé publique et un dossier traité à l'échelon interministériel.
Le 14 septembre dernier, le Premier ministre présentait un plan de mobilisation contre la toxicomanie et, voilà un mois, Mme Françoise de Veyrinas était nommée à la tête de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.
Sur le plan de la santé publique, plus d'un milliard de francs sont inscrits cette année au budget pour permettre la mise en oeuvre de politiques de réduction des risques et de substitution. C'est un domaine dans lequel notre pays n'a que trop tardé, puisque nous n'agissons en ce sens que depuis 1993 seulement.
Pour la première fois cette année, le budget s'élève à plus d'un milliard de francs, en augmentation de 9 p. 100, et je puis affirmer ici, comme je l'ai indiqué à Toulouse voilà trois semaines pour répondre aux inquiétudes des intervenants en toxicomanie, qu'il n'y aura pas de gel budgétaire.
Par ailleurs, dans le projet de budget pour 1997 - nous n'en sommes pas encore tout à fait là - l'augmentation des crédits au titre de la lutte contre la toxicomanie sera l'une de nos priorités.
S'agissant du cas particulier de la Vendée, je tiens à saluer ici le centre de La Métairie, auquel vous faisiez allusion, pour l'oeuvre qu'il accomplit, ainsi que sa directrice, Mme Katya Merlet. Sachez que, dans l'esprit de la circulaire du 3 avril dernier, qui permet la mise en place de crédits pour de tels centres, les demandes que vous formulez au nom du département de la Vendée seront examinées avec une particulière attention. Les dossiers sont actuellement en cours d'instruction. Je ne manquerai pas, le moment venu, de vous faire part de nos décisions.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments d'information que je voulais vous apporter. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Guy Penne. Ce n'est pas plus dramatique en Vendée qu'ailleurs !
M. le président. Mes chers collègues, grâce à votre discipline et à votre courtoisie, les onze questions qui figuraient à notre ordre du jour ont pu être traitées dans le temps qui nous était imparti. Je vous en remercie, comme je remercie les membres du Gouvernement.
Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix, sous la présidence de M. Yves Guéna.)

PRÉSIDENCE DE M. YVES GUÉNA
vice-président

M. le président. La séance est reprise.

5

MISE AU POINT AU SUJET D'UN VOTE

M. Raymond Soucaret. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Soucaret.
M. Raymond Soucaret. Monsieur le président, ce matin, lors du vote sur l'ensemble du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002, notre collègue M. Bernard Joly a été porté comme ayant voté contre, alors qu'il souhaitait s'abstenir. Il souhaiterait qu'il lui soit donné acte de cette mise au point.
M. le président. Monsieur Soucaret, je vous donne acte de votre déclaration.
M. Raymond Soucaret. Je vous remercie, monsieur le président.
M. Emmanuel Hamel. M. Joly aurait mieux fait de voter contre !

6

ATTENTAT CONTRE UN ÉLU CORSE

Mme Hélène Luc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette nuit, en Corse, mon ami Dominique Bucchini, maire communiste de Sartène, ainsi que sa famille ont été victimes d'un attentat destiné à tuer. Il faut savoir que le fils de M. Bucchini a été projeté hors de sa chambre par l'explosion de la bombe. C'est un attentat criminel !
Ainsi, le terrorisme poursuit son escalade en s'attaquant à un élu qui, avec courage et lucidité, refuse, avec les Sartenais, les Ajacciens, les Bastiais et la très grande majorité des habitants de l'île et de nombreux élus, de céder à l'intimidation, à la violence et aux pratiques mafieuses.
Le groupe communiste républicain et citoyen tient à exprimer au maire de Sartène toute sa solidarité et tout son soutien dans le combat exemplaire qu'il mène pour la démocratie et pour le développement économique de la Corse, car l'île est malade de l'austérité qui croît et qui engendre la violence.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous exigeons du Gouvernement qu'il mette tout en oeuvre pour que soient immédiatement recherchés et arrêtés les criminels de la nuit dernière.
Avec mes amis Jean-Claude Gayssot, député, Daniel Brunel, conseiller régional, et Charles Carressa, je viens de me rendre en Corse, après le débat qui a eu lieu au Sénat, pour écouter, consulter et apporter notre solidarité au peuple corse. Avec celui-ci, nous demandons au Gouvernement de faire appliquer l'Etat de droit dans l'île comme dans toutes les autres régions de France, de dissoudre les groupes armés et d'engager enfin une véritable politique économique et sociale, condition première de la démocratie, de la paix civile et du développement de la Corse.
A en croire la presse corse, M. le Premier ministre doit se rendre en Corse prochainement. La situation étant grave, il doit enfin prendre toutes les mesures qui s'imposent.
La solidarité que nous apportons au maire de Sartène, Dominique Bucchini, est, je l'espère, celle du Sénat tout entier et de tous les démocrates. Les applaudissements qui ont retenti tout à l'heure sur les travées de notre hémicycle montrent, je crois, que l'ensemble de notre assemblée apporte sa solidarité. (Applaudissements.)
M. le président. Madame Luc, il est clair que l'indignation que vous avez exprimée est celle du Sénat tout entier.
Pour le reste, vous vous êtes adressée au Gouvernement, qui vous a naturellement entendue. M. le secrétaire d'Etat ne manquera pas de faire part de vos propos à M. le Premier ministre, qui est sur le point de partir pour la Corse.
Mme Hélène Luc. Je vous remercie, monsieur le président.

7

LOIS DE FINANCEMENT
DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Adoption d'un projet de loi organique
en deuxième lecture

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture du projet de loi organique (n° 433, 1995-1996), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. - [Rapport n° 438 (1995-1996.)]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez examiner en deuxième lecture le projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.
Il est inutile d'insister auprès de vous sur l'importance de ce texte, qui se situe au coeur de la réforme de la sécurité sociale. Vous savez également à quel point il est nécessaire que la première des lois de financement de la sécurité sociale puisse être présentée au Parlement dès l'automne prochain.
Loin de remettre en cause la réforme, les chiffres récemment publiés par la commission des comptes de la sécurité sociale soulignent l'impérieuse nécessité de conduire le navire à bon port. Au-delà des aléas de la conjoncture, le redressement des comptes et la sauvegarde de notre système de sécurité sociale exigent courage, constance et persévérance.
Comme toute réforme de structure, la réforme de la sécurité sociale doit être jugée sur le long terme.
Mais aucune solution durable et réaliste n'est plus concevable en ce domaine sans que la représentation nationale soit mise en mesure d'effectuer régulièrement et solennellement les choix fondamentaux. Il appartiendra ensuite aux pouvoirs publics, aux partenaires sociaux, aux professions de santé et, en définitive, aux assurés sociaux de faire leurs les objectifs que vous voterez. En effet, seul le Parlement dispose de la légitimité qui permettra d'arbitrer sereinement entre les exigences de protection sociale de nos concitoyens et les contraintes économiques et financières qui s'imposent à tous.
Je tiens également à souligner d'emblée la qualité du travail accompli par les deux assemblées sur ce projet de loi organique. Les améliorations apportées par le Parlement, singulièrement par la Haute assemblée, au projet de loi organique sont indéniables et substantielles. Je tiens à vous en remercier, mesdames, messieurs les sénateurs.
J'y vois d'abord la marque personnelle des deux rapporteurs, qui ont su mettre en évidence les enjeux politiques, juridiques et économiques des lois de financement devant leur assemblée respective. Je crois aussi que la collaboration à laquelle ce texte a donné lieu au sein de chacune des deux chambres est pour beaucoup dans la qualité de vos travaux : une commission spéciale a été constituée à l'Assemblée nationale ; au Sénat, la commission des lois a accueilli des membres de la commission des affaires sociales et de la commission des finances.
A ce stade, je crois pouvoir dire que nous sommes parvenus à un consensus sur l'essentiel et à un accord sur la quasi-totalité du texte.
Les orientations de principe ne font plus débat. Il en va ainsi de la conception des lois de financement : il s'agira de lois courtes, qui comporteront une double dimension politique et financière. En effet, ces deux caractéristiques les distinguent des lois de finances.
Ce seront des lois courtes, tout d'abord.
Il n'est en effet pas question de retracer avec précision l'ensemble des comptes des organismes de sécurité sociale. Les dépenses de la sécurité sociale ne sont pas assimilables à des crédits limitatifs, et les objectifs votés par le législateur seront déclinés avec l'ensemble des acteurs de notre protection sociale.
C'est aussi pourquoi nous sommes d'accord pour conférer un champ exclusif, mais limité, aux lois de financement de la sécurité sociale, en prohibant les « cavaliers sociaux ».
Par ailleurs, la dimension politique des lois de financement est fondamentale.
Le Parlement doit être mis en mesure d'approuver les orientations politiques qui fondent les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses. Quel sens aurait le vote de prévisions de recettes et d'objectifs de dépenses si le Parlement n'était conduit à se prononcer au préalable sur les orientations et les objectifs de la politique de santé et de sécurité sociale qui les sous-tendent ?
Les modalités du vote sur les objectifs de dépenses et sur les prévisions de recettes constituent la seconde orientation de principe qui ne fait plus débat.
Le Sénat a marqué son accord sur les principes posés en première lecture par l'Assemblée nationale, à savoir un vote par branche plutôt qu'un vote par régime, un objectif d'assurance maladie exprimé soit en taux, soit en montant et, enfin, un vote par catégorie de recettes. Les deux assemblées partagent donc la même philosophie de ces lois de financement.
Les questions restant en discussion ont été très largement débattues, et un accord définitif, à la faveur de cette deuxième lecture, semble désormais très proche.
Sur plusieurs dispositions, l'Assemblée nationale a fait droit aux arguments du Sénat. Ainsi en a-t-il été à propos de la reconduction de l'objectif national d'assurance maladie de l'année précédente, dans les hypothèses où la disposition correspondante de la loi de financement ne pourrait entrer en vigueur au 1er janvier.
Le Sénat a également souhaité distinguer la rédaction du rapport de la Cour des comptes de sa transmission au Parlement, prévoir que les commissions parlementaires compétentes pourront saisir la Cour des comptes de toute question relative à l'exécution des lois de financement et, enfin, permettre l'adoption d'amendements améliorant le contrôle du Parlement sur l'application de ces lois.
Comme le Gouvernement, l'Assemblée nationale a considéré que ces dispositions allaient incontestablement dans le sens de l'amélioration du texte.
En revanche, bien qu'elle partage les mêmes objectifs que le Sénat, l'Assemblée nationale a fait valoir avec pertinence que la loi organique ne peut prévoir l'annexion à la loi de finances du rapport récapitulant l'ensemble des impositions et des crédits affectés aux organismes de sécurité sociale.
Certes, une telle mesure permettra au Parlement de s'assurer de la concordance entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. Mais la jurisprudence du Conseil constitutionnel interdit que les annexes aux lois de finances soient créées hors d'une loi de finances.
Il reste donc, finalement, trois questions en débat.
La première, qui vous préoccupe tout particulièrement, tient au calendrier de discussion des lois de financement annuelles.
Je veux d'abord rappeler que l'Assemblée nationale a opportunément complété le projet de loi organique sur ce point. Il était nécessaire de préciser les conditions dans lesquelles se déroulera habituellement la procédure, hors l'hypothèse exceptionnelle dans laquelle l'Assemblée nationale ne se prononcerait pas dans le délai qui lui est imparti. Pour l'essentiel, vous avez fait vôtres ces dispositions, mesdames, messieurs les sénateurs.
Il faut ajouter que l'Assemblée nationale a eu le souci de placer les deux assemblées sur un pied d'égalité en leur donnant le même délai d'examen en première lecture.
Vous avez cependant relevé que, dès lors que le projet de loi de financement doit être déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, les contraintes inhérentes à l'examen du projet de loi de finances au Sénat interdisent tout chevauchement entre les deux textes. Votre préférence va donc à un examen de la loi de financement préalable à celui de la loi de finances.
Compte tenu de la charge de travail du Parlement au mois de décembre, vous soulignez également les inconvénients que provoquerait, pour l'Assemblée nationale comme pour le Sénat, un dépôt trop tardif du projet de loi.
Tout en mesurant les contraintes propres à l'Assemblée nationale, le Gouvernement ne conteste pas la pertinence de ces préoccupations. Bien plus, malgré les importantes difficultés qu'un calendrier plus serré lui imposera, il s'est engagé par la voix de M. Jacques Barrot à respecter pour sa part la date que le Parlement retiendra, fût-elle celle du 15 octobre.
A cet égard, vous n'avez pas manqué de relever que le rapporteur du projet de loi organique à l'Assemblée nationale s'est déclaré à l'écoute des arguments du Sénat et que l'Assemblée nationale a accepté de s'engager dans la voie d'un compromis, en reliant cette question à celle de l'objet sur lequel portera le vote des assemblées, deuxième question à laquelle je viens maintenant.
En effet, la deuxième difficulté porte sur les modalités selon lesquelles le Parlement effectuera les choix qualitatifs, sans lesquels ces lois de financement constitueraient des lois purement comptables.
Nous sommes tous d'accord pour faire en sorte que les options financières des lois de financement s'articulent avec des choix et des orientations de politique de santé et de politique de sécurité sociale.
Le débat porte seulement sur l'instrument à travers lequel le Parlement s'exprimera sur ces choix et ces orientations politiques.
Fondamentalement, vous craignez que l'examen et le vote d'un rapport ne donnent lieu au dépôt d'une floraison d'amendements, ce qui allongerait exagérément la discussion des lois de financement.
Le Gouvernement considère pour sa part que l'obligation constitutionnelle de déterminer les conditions générales de l'équilibre financier rend nécessaire le vote du Parlement sur un document de synthèse permettant de confronter les orientations de la politique de santé et des politiques de sécurité sociale, d'une part, et les contraintes économiques et financières, d'autre part.
Un tel rapport, aussi concis que possible, offrira d'ailleurs au Parlement une vision politique d'ensemble, pluriannuelle, sur les choix et les orientations en matière de sécurité sociale, ainsi que sur les perspectives financières à moyen terme. Il évoquera des mesures aussi bien réglementaires que législatives.
Ce rapport tiendra compte des enseignements de la Conférence nationale de la santé et des avis des caisses. Il sera ainsi un instrument majeur de l'articulation entre la démocratie politique et la démocratie sociale.
Il faudra bien sûr, comme pour n'importe quel texte de loi, trouver un équilibre entre le droit d'amendement et une saine organisation des débats.
C'est pourquoi, sur cette question que l'Assemblée nationale considère comme la plus importante de celles qui restent en discussion, le Gouvernement continue de marquer sa préférence pour le vote sur un rapport.
La dernière question en débat concerne les ressources non permanentes des régimes de sécurité sociale et des organismes qui concourent à leur financement.
Nous avons tous la conviction que les prestations ne sauraient être financées par l'emprunt. Nul n'a jamais exprimé l'intention de permettre à la sécurité sociale de vivre à crédit et de reporter ainsi sur les générations futures la charge de notre couverture sociale.
Mais les rentrées et les dépenses n'étant pas, par construction, concomitantes, la sécurité sociale est, de toute éternité, évidemment contrainte de recourir à des lignes de trésorerie. Il faut également envisager l'équilibre des régimes dans une perspective pluriannuelle, les excédents d'une année couvrant les déficits d'une autre.
Le seul souci du Gouvernement a été de conférer un droit de regard au Parlement sur le recours aux avances de trésorerie. Pour le reste, l'emprunt est interdit aux organismes de sécurité sociale. Il n'appartiendrait en tout état de cause qu'au législateur de revenir sur la règle qui veut qu'aux dépenses permanentes doivent correspondre des ressources permanentes.
Quant à la loi organique, elle a pour objet, comme l'a justement souligné M. le rapporteur, de fixer le contenu des lois de financement et les règles de procédure qui présideront à leur examen, et non de trancher des questions de fond.
Aussi le Gouvernement souhaite-t-il sur ce point une rédaction qui soit la plus pédagogique possible. La précision selon laquelle les ressources non permanentes ne peuvent couvrir que les « besoins de trésorerie » lui paraît avoir un tel objet.
Je souhaite donc que, sur les quelques points qui restent en débat, nous parvenions très vite à des solutions qui soient satisfaisantes pour les deux assemblées comme pour le Gouvernement.
Je voudrais surtout, pour conclure, souligner à quel point la discussion de la loi constitutionnelle puis celle de la loi organique auront été riches et fructueuses. Comme M. Toubon puis M. Barrot ont déjà eu l'occasion de le souligner, le travail que l'Assemblée nationale et le Sénat ont accompli tout au long de ces six premiers mois de l'année a permis d'améliorer très considérablement le dispositif conçu dans le cadre du discours du Premier ministre des 15 et 16 novembre dernier.
Notre tâche était délicate. Nous avions d'abord à imaginer une nouvelle catégorie de lois. Nous devions également insérer la discussion de ces lois de financement dans un calendrier toujours chargé. En effet, contrairement à une idée trop répandue, les responsabilités du Parlement sont considérables, et les réformes passent, d'abord et avant tout, par la voie législative.
Enfin, nous avions l'obligation de rédiger un texte qui confère une cohérence d'ensemble à la réforme, puisque la loi organique a pour objet de relier la révision constitutionnelle, d'une part, et les dispositifs prévus par les ordonnances structurelles, d'autre part. En d'autres termes, cette loi articule la démocratie politique et la démocratie sociale selon un schéma sans précédent,...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ça, c'est sûr !
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. ... qui était depuis très longtemps appelé de ses voeux par l'ensemble des Français.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah non !
M. Hervé Gaymard, secrétaire d'Etat. Malgré sa difficulté - ou peut-être à cause d'elle - l'exercice au terme duquel nous arrivons a démontré la vitalité de nos institutions, l'importance du dialogue entre les assemblées et la qualité du travail parlementaire. Au nom de M. Jacques Barrot, qui n'a pu être présent aujourd'hui parmi vous, je voudrais vous en remercier. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Il a eu peur de moi !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture le projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.
Comme pour la première lecture, la commission des lois a jugé souhaitable d'associer, tout au long de ses travaux, à la fois la commission des affaires sociales et la commission des finances, et de faire en sorte que nos propositions soient le résultat de nos efforts conjoints.
Certes, l'Assemblée nationale a approuvé plusieurs des amendements que nous avions proposés en première lecture, en apportant parfois quelques modifications de détail qui, globalement, ont emporté l'adhésion de la commission des affaires sociales et de la commission des finances.
Néamoins, vous l'avez souligné, monsieur le secrétaire d'Etat, trois points importants séparent le Sénat de l'Assemblée nationale : il s'agit, d'abord, de la définition du contenu de la loi de financement ; ensuite, de la fixation des limites de couverture des besoins de financement des organismes de sécurité sociale par des ressources non permanentes ; enfin, du calendrier d'examen de la loi de financement. Contrairement à mon habitude, je commencerai par la fin, car il s'agit du point le plus important, sur lequel je souhaite insister ; je traiterai les deux autres sujets ensuite.
En ce qui concerne le calendrier d'examen du projet de loi de financement, l'Assemblée nationale proposait, dans le texte initial, le dépôt du projet de loi au plus tard le 30 octobre et nous accordait - nous l'en remercions vivement - vingt jours pour en discuter, au même titre que l'Assemblée nationale.
Les trois commissions de notre Haute Assemblée qui ont oeuvré sur ce texte ont fait, avec pertinence, me semble-t-il, la démonstration qu'un tel calendrier était, en tout état de cause, inacceptable.
En effet, dans l'hypothèse où le texte initial adopté par l'Assemblée nationale aurait été maintenu, le Sénat aurait dû examiner simultanément le projet de loi de finances et le projet de loi de financement entre le 20 novembre et le 10 décembre et, dans la bousculade, entre le 11 décembre et le 21 décembre, les deux assemblées, cette fois-ci, auraient dû réunir les deux commissions mixtes paritaires, procéder aux secondes lectures tant du projet de loi de finances de l'année que du projet de loi de financement de la sécurité sociale, sans oublier l'adoption du projet de loi de finances rectificative.
Ce carambolage était naturellement insupportable et il aurait eu des conséquences désastreuses sur l'organisation de l'ensemble du travail parlementaire.
C'est la raison pour laquelle, à l'unanimité des membres de notre Haute Assemblée, nous avons proposé de fixer la date limite de dépôt du projet de loi au 15 octobre et, corrélativement, nous avons accepté, non plus à l'unanimité, mais à la majorité, de réduire à quinze jours le délai d'examen du projet de loi de financement.
Certes, nous sommes conscients que la règle des « deux quinze » - surtout celle du 15 octobre - entraînera des contraintes extrêmement lourdes qui pèseront à la fois sur le Gouvernement et sur les partenaires sociaux. Toutefois, le Parlement a également ses contraintes. Il y va de sa crédibilité, de sa mission, du respect de ses prérogatives, tant législatives que de contrôle. Nous ne pouvons pas travailler dans la bousculade et dans la précipitation.
M. André Maman. Très bien !
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission des lois, la commission des affaires sociales et la commission des finances ont décidé, à l'unanimité, de rétablir le calendrier que nous avions élaboré lors de la première lecture. Pour nous, il est le seul permettant de faire face aux exigences d'un travail serein du Parlement et d'assurer le respect du calendrier, tant budgétaire que de financement de la sécurité sociale.
En ce qui concerne le deuxième point de désaccord, c'est avec l'appui du Gouvernement que nous avons décidé de rétablir la rédaction que nous avions adoptée lors de la première lecture pour le 1° de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale. En effet, la rédaction de l'Assemblée nationale ouvrait sans doute trop largement aux organismes concourant au financement de la sécurité sociale la possibilité de recourir à l'emprunt. Ainsi que M. le secrétaire d'Etat l'a indiqué tout à l'heure, nous souhaitons que cette possibilité soit limitée aux seuls besoins de trésorerie.
Le troisième désaccord est d'une autre nature : le contenu de la loi de financement de la sécurité sociale a été conçu de façon différente à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Pour l'Assemblée nationale, la discussion du rapport d'orientation présenté par le Gouvernement semble primordiale. D'ailleurs, ce n'est pas sans rappeler le processus d'adoption des lois de programmation ou d'orientation.
La démarche du Sénat a été différente : le rapport n'avait pour mission que d'informer et d'éclairer le Parlement. En fait, le Sénat avait une conception de la loi de financement de la sécurité sociale sans doute plus législative et moins politique que l'Assemblée nationale et le Gouvernement.
Tout en étant convaincus que la rédaction sénatoriale était la meilleure et correspondait, en fait, beaucoup plus aux dispositions de la Constitution que celle qui nous est proposée, dans un souci de conciliation et compte tenu des explications qui nous ont été données ainsi que de l'accord de la commission des affaires sociales, nous avons accepté de nous rallier à la rédaction de l'Assemblée nationale. Toutefois, comme l'a souligné M. Jacques Larché lors des débats au sein de la commission des lois, la pratique permettra d'affiner le contenu de ce qui n'est pour l'instant que la carte de l'Afrique avant les grandes explorations.
Je suis convaincu que la sagesse des parlementaires donnera progressivement vie à ces lois de financement de la sécurité sociale et permettra de répondre véritablement à la volonté du Constituant. Peut-être serons-nous d'ailleurs conduits, monsieur le secrétaire d'Etat, à affiner le texte de la loi organique pour la rendre plus conforme à ce que la pratique parlementaire en aura fait. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Mélenchon. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, on ne traiterait pas sérieusement du sujet qui nous occupe si on n'évoquait le contexte, c'est-à-dire la situation actuelle de la sécurité sociale, alors que le train des mesures de la réforme Juppé est lancé et que des projets sont annoncés en lien avec le financement de la sécurité sociale.
Nous croyons, nous socialistes, que le rôle du Parlement est de traiter ainsi politiquement des grands sujets qui viennent en débat. C'est donc la tâche que m'a confiée, au nom du groupe socialiste, mon ami Charles Metzinger.
Au reste, comme il serait étrange, ce débat - quand bien même nous avons affaire à un débat de deuxième lecture - si la tribune demeurait muette sur l'environnement, sur les annonces qui se succèdent et qui, à leur manière, établissent un premier bilan de ce qui a été entrepris et dont cette loi n'est qu'un des éléments !
Ce contexte, maintenant, chaque Français le connaît. Il l'a découvert avec surprise, stupeur et amertume. Ce contexte, c'est le déficit, encore et toujours !
Le 15 novembre dernier, M. Juppé avait annoncé que le déficit serait limité à 17 milliards de francs en 1996 et qu'un excédent pourrait être constaté en 1997. Or la commission des comptes de la sécurité sociale nous annonce à présent un déficit de 48,6 milliards de francs.
On comprend votre embarras ! On comprend que certains, qui ont accompagné ce processus avec l'enthousiasme dont on se souvient, veuillent à tout prix parler à cet instant d'autre chose !
Au mois de mars, le ministre de l'économie et des finances affirmait sur RTL qu'il savait qu'il y aurait 40 milliards de francs de déficit, et il ajoutait qu'il n'y avait pas matière à s'inquiéter.
Début avril, le Premier ministre et le ministre du travail et des affaires sociales expliquaient de leur côté que parler de 40 milliards de francs de déficit relevait de la désinformation. Ce n'était pas très agréable pour leurs collègues, mais on voit que, il y a encore deux mois, l'optimisme était de mise. Optimisme de commande !
Quelles explications nous fournit-on aujourd'hui, alors que l'on continue à mettre en route la machine à détruire la sécurité sociale, dont cette loi est l'un des instruments ?
La première explication, c'est que ce serait trop tôt pour juger de la valeur du dispositif et, la seconde, qui n'a pas manqué de nous procurer le sentiment d'une victoire, au moins morale, après coup, c'est que la conjoncture serait la cause profonde de la situation.
Ainsi donc, ce serait trop tôt ! Je veux entrer dans le détail. Qu'y aura-t-il de différent plus tard ?
Nous savons tous qu'aucune des causes structurelles du déficit comptable - nous nous souvenons tous que vous avez voulu continuellement vous situer sur un terrain comptable - que nous avions dénoncées n'est touchée par ce plan Juppé, rectifié depuis à la faveur de négociations qui n'ont pas toujours bénéficié de la publicité qui aurait été souhaitable pour en comprendre tous les aspects, rectifié par des tractations que je qualifie de maquignonnages et qui ont, depuis, modifié le visage de cette réforme et de la prétendue rigueur universelle dont elle était l'inspiratrice.
S'agissant de la médecine libérale, ce fameux chapitre de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé était, hier, après le premier moment de grande volonté de réforme, le drapeau autour duquel se groupaient, tandis que déferlaient les manifestations, d'un côté les tenants de la réforme et, de l'autre - je dois le dire à mon grand regret - une certaine gauche égarée, dont vous n'avez jamais manqué à l'époque de me jeter les arguments à la figure.
Aujourd'hui, cette gauche doit certainement méditer avec amertume l'appoint qu'elle est venue apporter à une bien mauvaise opération qui s'achève - si j'ai bien compris - par des tractations de présidences de caisses, en vérité fort éloignées des nobles et généreux objectifs affichés par les intéressés au moment où, au nom de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé, ils ralliaient votre bannière.
Où en sommes-nous ?
L'objectif fixé en novembre pour la progression des dépenses de santé était de 2,1 p. 100. D'ores et déjà, la progression est de 3 p. 100 et l'objectif de 2 p. 100 n'est tenable qu'à condition que les dépenses restent stables. Comme le resteraient-elles ? C'est donc impossible !
Des sanctions étaient prévues pour les médecins. Elles ont permis quelques effets d'annonce et quelques beaux mouvements de menton. Aujourd'hui, elles sont officiellement abandonnées ! La taxe de 1 franc sur la feuille de maladie est également abandonnée.
La Caisse nationale d'assurance maladie, qui devait récupérer 1,9 milliard de francs sur la hausse des cotisations sociales des médecins, ne récupérera rien. Le lobby médical a obtenu qu'elle soit affectée à l'informatisation des cabinets médicaux.
En bref, l'ensemble de ce volet du plan est, comme prévu et comme il était facile de le deviner, tombé à l'eau !
Les industries pharmaceutiques, grandes pourvoyeuses de déficits, vous les aviez mises à contribution ! A mon avis, cette ponction à l'égaré en cours de route n'était pas la bonne méthode. Peut-être une vision plus globale de leur place dans le dispositif de la santé ou une mise à contribution plus structurelle aurait-elle été préférable. Mais, au moins, c'était juste !
Vous l'aviez assez dit : tout le monde paiera ! On avait même agité la figure des affreux capitalistes de l'industrie pharmaceutique, qui seraient aussi mis à contribution. (M. le secrétaire d'Etat sourit.) . Pas vous, monsieur le secrétaire d'Etat, ce n'est pas dans vos habitudes et personne ne pourrait le croire un instant : quelques-uns, ici, à ce sujet, se sont repeints de vertus sociales que, d'habitude, on ne leur reconnaissait pas si facilement. Vous devez sans doute en garder le souvenir ! D'ailleurs, cette mesure devait également avoir un caractère dissuasif.
Où en sommes-nous ? Nulle part !
En effet, la contribution sera déductible de l'impôt sur les sociétés. Ils ont bien de la chance ! Nous, nous ne pouvons pas déduire de nos impôts ce que nous payons pour le RDS ! De plus, tandis que les contribuables devront acquitter une taxe pendant treize ans, et peut-être plus si vous décidez que, pour boucher le nouveau trou, la durée d'application du RDS sera rallongée - bref, nous en prenons pour treize ans ! - eh bien ! eux n'auront pas à la payer !
La dette ? Les laboratoires, qui ont déjà bien contribué, seront exonérés, dès 1997, des 2 milliards de francs qui ont été mis à leur charge. Peut-être ne sera-ce pas le cas, mais c'est en tout cas ce qu'a déclaré M. Barrot, le 5 juin dernier !
Tout le monde paie, en effet, mais certains paient plus, plus longtemps, plus souvent que d'autres.
Enfin, le reste : les exonérations de cotisations non compensées, dont j'avais, avec mes collègues, montré à plusieurs reprises le rôle qu'elles jouaient dans le déficit structurel de la sécurité sociale ; les dettes patronales impayées. Rien, absolument rien de neuf !
Bref, tout a changé, tout va changer encore après l'adoption de ce texte, pour que rien ne change.
Rappelons ce qu'il en coûtait, sur ces points, en 1994. Sur les 56 milliards de francs de déficit de 1994, 13 milliards de francs étaient imputables aux exonérations non compensées par l'Etat, que l'on distribuait, de loi en loi, fort généreusement - et peut-être la Haute Assemblée se souvient-elle de mon intervention sur ces sujets à l'occasion de la loi quinquennale sur l'emploi, où j'avais dit qu'à force d'exonérations nous creusions nous-mêmes le trou dans lequel la sécurité sociale finirait par tomber.
M. Emmanuel Hamel. Vos interventions sont toujours retenues !
M. Jean-Luc Mélenchon. Donc, 13 milliards de francs d'exonérations non compensées par l'Etat, 18 milliards de francs de dettes patronales impayées, 4,4 milliards de francs de frais financiers et 19 milliards de francs pour la compensation des autres régimes. Voilà le contexte !
Si bien que le « c'est trop tôt » pour juger de la valeur de vos dispositions ne signifie strictement rien. Les causes que nous avions pointées du doigt sont toujours là, et c'est à autre chose que vous vous attaquez avec art et méthode.
Le « c'est trop tôt » est un argument de propagande destiné à donner un petit deuxième souffle médiatique pendant la période au cours de laquelles, hélas ! les chiffres viennent cruellement démentir les professions de foi de l'hiver dernier.
Alors, vous évoquez la conjoncture, et je vous en félicite, car c'est le chemin de la raison et de la sagesse que de le comprendre. Naturellement, vous ne parcourez pas ce chemin jusqu'au bout, mais pourquoi ne pas saluer le pas que vous faites ?
C'est très exactement ce que nous avons passé notre temps à expliquer à cette tribune. Nous avons dit qu'il était impossible d'aborder avec sérieux et bonne foi la réorganisation de la sécurité sociale, en vue de son retour à l'équilibre, uniquement à partir de logiques comptables.
Nous vous l'avons dit : ces logiques ne vous conduisent nulle part ; c'est dans la conjoncture que se trouvent la clé de nos malheurs et la clé des remèdes à trouver.
Il ne peut pas en être autrement pour un système dont le financement est assis sur une cotisation liée à l'activité, et c'est particulièrement vrai pour l'assurance-maladie ; il ne peut pas en être autrement pour un système qui doit intégrer un paramètre inconnu, la santé publique inconnu dans ses développpements !
L'activité ! Eh bien ! tout est dit en deux chiffres : la masse salariale n'a augmenté que de 2,4 p. 100, au lieu des 3,5 p. 100 prévus.
C'est par rapport à l'activité que, en définitive, se réglera, ou plutôt aurait pu se régler ce problème, dans le cadre qui était celui de la gestion de la sécurité sociale jusque-là - il n'y avait aucun besoin de procéder à la révolution à laquelle vous avez procédé - dès lors que cette gestion était penséee en relation avec une politique de relance de ladite activité.
Or, c'est l'inverse que vous avez fait. L'activité, vous l'avez refroidie, glacée, pétrifiée avec des prélèvements massifs et incessants.
Au risque de vous lasser, peut-être, je voudrais vous en infliger le rappel.
Impôt sur les sociétés, en août 1995 : 13 milliards de francs. Ça, c'est à la charge des entreprises !
Hausse de deux points de la TVA : 56 milliards de francs. Ça, c'est pour les ménages !
Impôt de solidarité sur la fortune - c'est très bien : un petit milliard de francs sur quelques familles.
Suppression de la ristourne sur la CSG en septembre 1995 : 9 milliards de francs, pour tous les ménages !
Contribution sociale de solidarité des sociétés, en janvier 1995 : 5 milliards de francs pour les sociétés.
Remboursement de la dette sociale : 25 milliards de francs, à l'« usage » exclusif des ménages.
Augmentation de la cotisation maladie des retraités de 2,4 points en janvier 1996 et janvier 1997 : 15 milliards de francs sur les ménages.
Contribution des entreprises au titre de la prévoyance complémentaire : 2,5 milliards de francs.
La liste n'est pas complète - je n'ai pas abusé de votre temps. Inutile de s'étendre !
Ne figurent dans cette énumération ni les taxes sur les produits pétroliers, ni les taxes sur l'industrie pharmaceutique - mais vous comprenez pourquoi après m'avoir entendu tout à l'heure - ni aucune des recettes dites de poche auxquelles vous avez fait appel bien abondamment, car la poche en question, c'est celle des contribuables.
Il y en a malgré tout quand même pour 126 milliards de francs du fait du Gouvernement Juppé !
Voici le jugement que porte à ce sujet le journal la Tribune, qui, vous le savez tous, n'est ni une feuille gauchiste ni un journal socialiste : « Au hit-parade des hausses d'impôts, le Gouvernement Juppé l'emporte très largement sur son prédécesseur », qui était, nous le savons tous, fort doué en ces matières également ! « Pas moins de 126 milliards de prélèvements nouveaux en année pleine ont été décidés depuis juin 1995 et, pour la plupart, déjà mis en oeuvre. Ils ont porté à un record historique le taux des prélèvements obligatoires, qui atteint 45,7 p. 100 du produit intérieur brut cette année, selon le ministère des finances : 84 p. 100 de ces prélèvements nouveaux pèsent sur les ménages, dont ils représentent près de 2 p. 100 du revenu disponible brut. Ces alourdissements, qu'ils aient été décidés dans le but de réduire les déficits » - avec le succès que chacun peut constater ! - « ou pour financer des dépenses nouvelles, ont probablement pesé sur la conjoncture. Ils sont entrés en vigueur au moment où celle-ci se retournait,... », ce que nous vous avions annoncé, quoique n'étant pas aussi experts, sans doute, que les journalistes économiques de ce même journal, qui, lui, saluait ce qui avait été entrepris pour la sécurité sociale.
Je reprends ma lecture : « Ils sont entrés en vigueur au moment où celle-ci se retournait, faisant dire à M. Nicolas Sarkozy, ancien ministre des finances :... » - vous voyez que je n'ai pas emprunté non plus mes références aux mouvements socialistes ou communistes - « ... nous allons dans le mur tous freins serrés ». En ce qui concerne la sécurité sociale, nous n'en sommes pas loin !
Bref, l'argument de la conjoncture, qui, en définitive, vient alimenter nos thèses sur ce qu'il était nécessaire de faire pour le salut de la sécurité sociale, ne peut conduire, en cet instant, qu'à deux conclusions.
La première est, bien évidemment, que nous avions raison, que c'est bien comme cela que le problème aurait dû être posé, qu'on ne pouvait pas penser le problème de la sécurité sociale indépendamment du reste de la marche de l'économie et qu'il ne fallait pas casser sa dynamique interne, la dynamique de la démocratie sociale.
La seconde conclusion est que vous faites ce que vous faites de propos délibéré. Vous créez l'asphyxie. Tout le monde ne le pense pas, je veux bien en convenir à cette tribune. Certains jugent en effet que c'est « la faute à pas de chance » ou que vous seriez, par un malheureux retournement de situation, l'arroseur arrosé et que vous auriez fait, pour ce qui concerne la sécurité sociale, pour le mieux dans votre compartiment de responsabilité ministérielle.
Bref, M. Barrot serait amnistié de ce que fait, avec son soutien, dans le même temps, M. Juppé.
Ce n'est pas mon avis. Je pense qu'il y a une cohérence globale de ce qui est entrepris et, parlementaire assidu sur toutes les questions qui se rapportent à cette réorganisation de la vie de notre nation à laquelle il est procédé à grand fracas et avec grand remue-ménage depuis l'élection présidentielle, je dis que ce sont là autant de segments d'une seule et même stratégie, d'une certaine vision de la France, de la nécessité, que vous croyez ardente, de procéder contre elle à une révolution libérale.
J'ai dit à cette tribune - et chaque jour m'apporte la confirmation que j'avais raison - que, dans un premier temps, il s'agissait pour vous de sortir du paritarisme, et le Premier ministre en avait d'ailleurs fait l'aveu à cette tribune, dès le 16 novembre, en disant : « Nous allons faire ce que personne n'a osé faire depuis trente ans ».
Je vous avait dit : « Il y a trente ans, il n'y avait pas de déficit ».
Qu'est-ce qui vous gêne, en fait, depuis trente ans ? Ce qui vous gêne, c'est le paritarisme, c'est la démocratie sociale, c'est une vision de la sécurité sociale dans laquelle la cotisation est un salaire différé et non pas un impôt.
M. Charles Metzinger. Très bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il était essentiel que vous sortiez la sécurité sociale du paritarisme pour passer à la deuxième étape.
La deuxième étape consiste à faire entrer, par un biais ou par un autre, ce budget dans le budget global de la nation et, en même temps, pour faciliter la transition pour établir les passerelles, de fiscaliser progressivement toutes les recettes de la sécurité sociale.
Vous auriez alors atteint le palier à partir duquel, pour financer ce système de sécurité sociale, il faudrait recourir à un impôt, impôt qui, très vite, deviendrait confiscatoire.
Car, pour financer l'ensemble de ce système de sécurité sociale, vous n'auriez qu'un instrument, alors que la ressource globale de la sécurité sociale est équivalente au budget de la nation et que celui-ci est alimenté, vous le savez, par bien d'autres ressources que l'impôt sur le revenu : la TVA, l'impôt sur les sociétés, etc.
J'en ai fait la démonstration, au nom de mes amis socialistes, sans que jamais on puisse me faire la démonstration du contraire.
Et alors, lorsqu'on en serait parvenu à ce niveau, on pourrait dire : l'Etat garantit à chacun une assurance sociale minimum parce qu'il ne peut pas faire autrement et, pour le reste, voyez les assurances privées !
M. Robert Pagès. Absolument !
M. Charles Metzinger. Très bien !
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est cette mécanique qui est en route, et chaque jour qui passe la voit avancer.
Vous n'êtes donc pas pris par surprise ; vous désorganisez sciemment un système dont vous voulez la fin ; et vous en voulez la fin parce qu'il est une ressource financière considérable qui manque au capitalisme de notre pays pour disposer du booster dont il dispose dans les autres économies libérales.
M. Emmanuel Hamel. Parlez français !
M. Jean-Luc Mélenchon. Voilà le coeur de la réforme, voilà l'objectif qui est visé, et c'est faussement que vous affichez aujourd'hui des mines navrées en regardant le déficit se creuser. Le déficit vous sert !
La dernière de ces vérifications qui vient directement confirmer ce qui avait été annoncé par nous à cette tribune, c'est l'annonce de la création d'une cotisation universelle maladie, impôt qui pèsera, dites-vous, sur l'ensemble des contribuables, et j'entends d'avance ce qui va être dit à cette tribune : tout le monde paiera, c'est mieux que quand ne payaient que les travailleurs salariés au travers de leurs cotisations !
Et le cycle qui a commencé avec le RDS, on le recommencera pour cette cotisation, et, à la fin, vous aurez atteint votre but : avoir entièrement fiscalisé la ressource de la sécurité sociale et de l'assurance maladie. La voie sera ouverte pour que l'on passe à la dernière phase du schéma dont nous avons fait ici la démonstration.
Nous attendons qu'on nous démontre le contraire, et rien ne nous permet de penser que le contraire soit démontrable.
J'estimais, avec mes amis socialistes, qu'il fallait sans cesse le répéter, sûrement pas pour vous convaincre, monsieur le ministre, car nous pensons que, dans cette affaire, vous n'improvisez jamais, ni pour convaincre ceux de nos collègues dont les convictions à ce sujet sont anciennes et connues, mais pour qu'au moins de cette tribune passe quelque chose de la parole qui permettrait aux nôtres de comprendre ce qui est en cause et même de ne pas se laisser distraire dans leur vigilance, leurs analyses et leur capacité de réplique, par le spectacle navrant auquel nous assistons dans la répartition des présidences de caisses, et qui achève de folkloriser le déclin dans lequel est entrée la sécurité sociale du fait du cadre législatif dans lequel, dorénavant, elle se situe et qui transforme les uns ou les autres, à tour de rôle peut-être, en bons gérants loyaux d'un ordre qui, inéluctablement, brisera la machine dont nous avons tous tant besoin.
Au reste, pour ce qui concerne le contenu même du texte qui nous est soumis aujourd'hui, rien n'arrive qui vienne infirmer le pronostic que je viens de faire.
Le projet de loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale est le prolongement naturel de la réforme constitutionnelle que nous avons combattue en son temps. Vous savez que nous l'avons fait au nom de la démocratie sociale, sans jamais y opposer la démocratie parlementaire, comme c'était devenu la mode au moment où ces questions se débattaient dans nos enceintes et où, ici ou là, quelques-uns avaient jugé bon de créer artificiellement ce débat, avec l'espoir peut-être que les socialistes, sur ce sujet, les communistes également, en viendraient à disperser leur énergie dans une querelle qui n'avait pas lieu d'être.
Vous connaissez notre attachement à la démocratie sociale, parce qu'elle était, comme je l'ai dit, l'embryon d'une démocratie dont nous souhaitions qu'il soit ensuite étendu à d'autres comportements de notre société. C'était bien cela, le coeur battant de ce que représentait la sécurité sociale ancienne manière pour le reste de la société, c'est-à-dire une sécurité sociale assise sur le salaire différé. Nous n'avons jamais voulu accepter l'idée qu'une nouvelle fois le capitalisme puisse « externaliser » une partie de ses coûts sur le reste de la société en refusant que son financement et celui des conquêtes de civilisation qu'elle porte puisse être assis sur autre chose que le lieu de la production de la richesse, d'où l'ensemble de ces progrès, en définitive, sont issus et doivent être financés, je n'y reviens pas.
Mais le projet de loi que vous nous présentez contredit malgré tout, à nos yeux, point par point les arguments que vous aviez avancés lors du débat sur la révision constitutionnelle.
Selon vous, le plan Juppé devait permettre une gestion plus démocratique, une valorisation du rôle du Parlement et, sans que jamais la démonstration soit faite, le maintien du paritarisme, à moins que vous n'ayez du paritarisme une vision qui fait, dans ce type de contexte, de ceux qui viendraient à l'assumer sous cette autorité les harkis, en quelque sorte, d'une certaine politique.
Je défends, au contraire, l'idée selon laquelle, après avoir dépossédé d'abord les syndicats, vous allez déposséder le Parlement au profit de la technocratie. Au fond, nous sommes bien dans la logique de la Ve République !
Comme nous l'avions affirmé, quand on disait : « Ce sera le Parlement », il fallait entendre la rumeur ou le bruit annonciateur de l'article 49-3. Nous avions dit : « Ce seront les fonctionnaires de Bercy ». Nous y voilà !
Vous vous étiez engagés à maintenir les principes du paritarisme. Les principes sont toujours là, mais votre projet de loi les vide de tout contenu. Il ne définit aucun rôle pour les partenaires sociaux alors que l'article 3 du projet est dans son ensemble consacré à la place de la Cour des comptes dans le dispositif. Cela seul relève déjà à quel point vous êtes installés dans une logique de maîtrise comptable des dépenses de santé. Les partenaires sociaux ne seront plus que les fidèles exécutants de ce qui aura été décidé ailleurs et sans eux.
Cet « ailleurs » devait être officiellement le Parlement. Pourtant, les annexes prévues à l'article 2, dont chacun d'entre vous sait qu'elles seront déterminantes dans le choix du Parlement puisqu'elles évalueront les données de la situation sanitaire et sociale ainsi que l'évolution des dépenses et des recettes, seront rédigées par Bercy, dont on connaît les préoccupations premières, secondaires, tertiaires... et permanentes dans ces matières.
Vous n'avez d'ailleurs pas prévu, et c'est logique, la création de quelque commission parlementaire que ce soit chargée de travailler de façon spécifique sur la sécurité sociale dont le Parlement aura à connaître.
De plus, selon l'article 2, le vote du projet de loi de financement de la sécurité sociale sera concomitant à celui du projet de loi de finances, « voisinage » inquiétant. Evidemment, ce choix répond à un critère politique. Le débat sera organisé dans des conditions bâclées puisque contraint dans le temps. Dans l'opinion, c'est sûr, l'effet est garanti : l'annonce des déficits s'entendra cumulativement et l'impression qui en résultera à la sortie sera évidemment, elle aussi, cumulative.
La réduction des déficits publics et ceux de la sécurité sociale, dans des débats aussi voisins, finiront de tout brouiller et d'entretenir toutes les confusions. Au nom de l'équilibre des comptes de la nation, on substituera le débat sur l'équilibre à celui sur les besoins. D'ailleurs, le texte indique clairement que « les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions contribuant à assurer l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ».
Quelle marge de liberté reste-t-il au Parlement ? Je parle du point de vue des raisons que vous avez avancées, vous et non nous !
Comment débattre sereinement dans ces conditions des risques de pandémie ou de l'évolution de la demande de soins ? Nous voici tous transformés en experts-comptables et priés de garder pour nous et pour ailleurs nos réflexions sur cette situation générale qui, pourtant, parce qu'elle traite de la santé publique, relève complètement, pour le coup, de l'appréciation des parlementaires représentant l'intérêt général.
Enfin, le rapport écrit - excellent - de notre collègue M. Gélard parachève l'édifice à sa façon. Il indique, en effet, que l'exercice du droit d'amendement doit pouvoir s'exercer pleinement - on n'en attend pas moins d'un parlementaire ! - sans conduire à une « surcharge de la séance publique ». A bon entendeur, salut !
Nous savons comment on évite, notamment dans cette enceinte, la « surcharge de la séance publique »... Quel euphémisme exquis ! En langage courant, j'imagine que cela doit signifier que la commission propose de restreindre le droit d'amendement du Sénat. Elle ne le fera pas, et son rapporteur est un parlementaire trop au fait de ses pouvoirs pour le proposer. Mais la raison politique viendra, le moment venu, au secours de ce qui n'aura pas été officiellement dit.
Somme toute, si les données sont fournies par Bercy, si le Parlement ne peut discuter que de l'équilibre et si le droit d'amendement est restreint, qui donc, à part ceux qui auront préparé les documents - les fonctionnaires de Bercy - aura la capacité d'intervenir réellement sur la situation ? Au fond, on pourra dire, sans trop exagérer, que c'est eux qui gèreront la sécurité sociale. Vous connaissez la suite du raisonnement, que j'ajoute au constat de cet instant.
Le projet de loi qui nous est présenté permet au Gouvernement de réintroduire discrètement - je ne peux manquer de le relever - quelques-unes des mesures si nettement rejetées lors du mouvement de décembre dernier.
Les cheminots seront heureux d'apprendre que les compétences données au Parlement pour gérer les régimes obligatoires de plus de 20 000 cotisants reviennent à assimiler les régimes spéciaux au régime général, préparant ainsi - et on ne voit pas pourquoi il en serait autrement - leur remise en cause.
Les assurés sociaux seront heureux de constater que la loi de financement se place dans une logique strictement comptable. L'article 2 précise que la loi devra définir « l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie » - nous en avons discuté fort longuement lors de l'examen de cet article - et non pas des dépenses de santé. Autrement dit, et comme je l'ai démontré tout à l'heure, le Parlement se prononcera exclusivement sur les actes remboursables, c'est-à-dire sur cette partie de la santé qui figure, en cet instant, dans les comptes de la sécurité sociale. Mais, fort malheureusement, et malheureusement aussi sur le fond, la santé ne se limite pas aux actes remboursables. La tendance naturelle sera de rembourser de moins en moins d'actes afin de préserver l'équilibre. C'est, comme je l'ai dit tout à l'heure, la porte ouverte à une médecine à deux vitesses.
La tentation d'étatiser la sécurité sociale comme prélude à la privatisation des assurances santé sera alors d'autant plus forte que, si ce projet de loi organique était adopté, aucune révision constitutionnelle ne serait nécessaire pour cela.
Voilà, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le renouvellement d'arguments que vous avez déjà entendus, quelquefois en nous faisant le reproche d'aborder ces questions avec des a priori idéologiques - mais nous n'éprouvons, nous, aucune honte à juger des faits à partir de ce que nous inspirent nos principes et notre idéal - et souvent en faisant comme si, en définitive, les faits étaient, du coup, éloignés de nos raisonnements. Or les faits, aujourd'hui, rejoignent totalement ce qui a été annoncé à cette tribune par les groupes de gauche.
Je ne sais pas qui me répondra, ni même si on souhaitera me répondre au fond. Je n'admettrais pas qu'on ne le fasse pas, mais je le comprendrais.
Je pense que la réalité tourne à la confusion de vos prétentions comptables.
Je pense que la réalité, malheureusement, nous amène, avec une force et une vitesse que nous n'avions nous-mêmes peut-être pas prévues, vers le fatal écueil que je viens de décrire : fiscalisation, étatisation, privatisation.
Bien sûr, tout le monde regrettera - et moi le premier - d'avoir à revenir à cette tribune pour devoir le constater.
En définitive, nos espoirs sont dans le mouvement social. On ne voit pas qui d'autre aujourd'hui pourrait venir mettre le coup d'arrêt nécessaire, à moins qu'évidemment les élections de 1998 ne le rendent possible. (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne vais pas développer à nouveau ce que j'ai dit au cours de plusieurs interventions. Toutefois, depuis que notre assemblée a examiné en première lecture ce projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale, quelques éléments nouveaux nous permettent d'alimenter de manière intéressante notre débat et de juger notamment de l'efficacité de la politique de résorption des déficits de la sécurité sociale mise en oeuvre par le Gouvernement.
En effet, si la politique du Gouvernement ne visait, à l'évidence, ni à améliorer la justice sociale ni à apporter une meilleure réponse aux besoins sanitaires du pays, du moins nous assurait-on qu'elle permettrait de réduire le déficit financier du système de soins de notre pays.
Vous présentiez même votre plan comme le seul capable de sauver à long terme notre système de protection sociale de la faillite.
La crédibilité du plan Juppé se fondait avant tout sur un retour à l'équilibre financier. Cette crédibilité, déjà si fortement entamée par les mouvements sociaux du quatrième trimestre de l'année dernière, est aujourd'hui totalement anéantie.
Selon les chiffres publiés le 12 juin dernier par la commission des comptes de la sécurité sociale, dans la meilleure des hypothèses, le déficit de la sécurité sociale sera de plus de 48 milliards de francs en 1996. Certains spécialistes avancent même des chiffres encore plus élevés.
Nous sommes bien loin des prévisions du Premier ministre qui, le 15 novembre dernier, sous les applaudissements de la majorité, annonçait que le déficit du régime général serait ramené à 16,6 milliards de francs en 1996. Il espérait même un excédent de 12 milliards de francs l'année suivante !
Ce n'est pas la seule « inexactitude » de M. Juppé ; après qu'il a promis aux Français, non pas le bout du tunnel, mais l'arrivée du printemps, force est de constater que le printemps tarde à se manifester. La croissance reste faible, la consommation au plus bas.
Comment s'en étonner ? En réduisant les dépenses sociales utiles, en gelant les prestations familiales, en instaurant le RDS, en augmentant la TVA, le Gouvernement écrase le pouvoir d'achat et la consommation. Il contribue à faire croître le chômage, à diminuer les recettes et, au bout du compte, à creuser les déficits.
Les résultats financiers qui viennent d'être publiés montrent bien que la sécurité sociale est avant tout malade du chômage, de la précarité et de la baisse du pouvoir d'achat.
Alors, que propose le Gouvernement ? « Surtout ne pas changer de cap », déclare M. Barrot au Figaro.
En effet, mes chers collègues, pourquoi changer de politique quand elle prouve, encore et toujours, son inefficacité ?
Le Gouvernement poursuit donc dans la voie qu'il s'est tracée, soutenu par la majorité parlementaire - bien absente sur ces travées, d'ailleurs - c'est-à-dire dans celle d'une réduction des dépenses, au nom de la réduction apparente des déficits publics et de la satisfaction des critères de convergence imposés par le traité de Maastricht pour accéder à la monnaie unique.
Avec la loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement espère laisser le Parlement endosser la responsabilité du rationnement des dépenses de santé, d'une politique qui nie le droit à la santé, à la retraite, aux droits des familles.
Cette loi constitue, en quelque sorte, le sommet de l'édifice présenté par le Premier ministre pour « réformer » la sécurité sociale, pour conduire, selon nous, à une couverture sociale minimum, qui constituerait une étape vers une privatisation redoutable pour l'immense majorité des Français.
Mais les faits que j'ai évoqués nous montrent que l'édifice est déjà bien lézardé !
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen se sentent donc confortés dans l'opposition qu'ils ont exprimée en première lecture sur ce projet de loi.
Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des arguments développés alors par mon groupe, arguments qui nous avaient conduits à déposer une question préalable et à rejeter le texte voté par le Sénat.
Le deuxième passage à l'Assemblée nationale nous fait d'ailleurs discuter d'un texte assez semblable à celui qui a été examiné en première lecture par le Sénat.
Je souhaiterais concentrer mon intervention sur les problèmes de la démocratie, puisqu'il s'agit de l'argument essentiel pour défendre la mise en place de la loi de financement.
Le Parlement ne voit-il pas en effet ses prérogatives élargies ?
Pourtant, la gestion démocratique de l'ensemble du dossier de la réforme de la sécurité sociale fait que nous devons, pour le moins, nous interroger.
Je ne reviendrai pas sur l'attitude de la majorité sénatoriale, qui, souvent, transforme notre assemblée en chambre d'enregistrement. Nous l'avons vu au mois de décembre avec la procédure de la question préalable, chacun s'en souvient, et, plus récemment, sur plusieurs textes importants où elle a tout simplement renoncé à son droit d'amendement.
Je ne détaillerai pas non plus notre position sur la manière dont se déroule le débat sur le projet de loi de finances : on constate bien le peu d'influence des assemblées sur un projet ficelé qui n'autorise, au plus, que quelques ajustements.
Je rappellerai néanmoins à notre assemblée la façon dont, semble-t-il, se règlent maintenant les différends entre le Sénat et l'Assemblée nationale.
Ainsi, mardi matin, alors que notre commission des lois allait discuter du projet de loi organique, c'est à Matignon, je crois, en présence des présidents de groupe de la majorité, qu'a été conclu un compromis entre les deux assemblées.
C'est donc non plus en commission ou en commission mixte paritaire que sont finalisées les lois, mais au cours de discussions de couloir, dont est écarté, bien entendu, tout représentant de l'opposition.
Tout cela laisse mal augurer du progrès « démocratique » au nom duquel est instituée la loi de financement de la sécurité sociale !
Le Gouvernement fait donc fi des droits des parlementaires, comme il fait fi du mouvement social de décembre dernier, comme il évacue le mécontentement social persistant.
Néanmoins, il nous faut discuter du texte !
Le groupe communiste républicain et citoyen prend acte du fait que la commission des lois revient à la rédaction proposée par l'Assemblée nationale pour le paragraphe III de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.
Nous nous étions opposés, en première lecture, à la position du Sénat sur ce point. En effet, alors que le projet de loi écartait déjà toute disposition ne concernant pas la recherche de l'équilibre financier, la commission des lois du Sénat avait restreint encore le champ de ce dispositif, en introduisant, comme l'indiquait M. le rapporteur, « une finalité permettant d'exclure toutes dispositions qui n'auraient qu'accessoirement une incidence financière pour n'autoriser que celles qui tendraient principalement à assurer l'équilibre financier ».
Nous prenons acte également qu'en ce qui concerne le calendrier la proposition du Sénat a été retenue. J'ai déjà dit, le 28 mai, que nous approuvions la proposition de la commission des lois d'avancer la date du dépôt du projet de loi par le Gouvernement au 15 octobre, mais que, en revanche, nous désapprouvions la volonté de réduire le temps de discussion à quinze jours dans notre assemblée.
En tout cas, l'ensemble des modifications apportées au texte ne sont pas de nature à infléchir le jugement global que nous avions porté en première lecture.
Nous ne pouvons accepter un texte qui attaque les principes fondant notre protection sociale et n'offre aucune garantie quant au droit de regard du Parlement sur l'action du Gouvernement.
Le groupe communiste républicain et citoyen votera donc à nouveau contre ce projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen. - M. Mélenchon applaudit également.)
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je voudrais tout d'abord répondre à M. le rapporteur, qui a soulevé trois problèmes principaux.
En ce qui concerne tout d'abord le calendrier, le Gouvernement se rallie aux arguments du Sénat, mais cette date du 15 octobre imposera des contraintes réelles au Gouvernement, à l'Assemblée nationale et aux partenaires sociaux.
Cette date butoir ne sera pas facile à respecter, monsieur le rapporteur, mais le Gouvernement se rallie à vos arguments.
Vous avez ensuite abordé, monsieur le rapporteur, la question de l'utilisation des ressources non permanentes pour financer les seuls besoins de trésorerie. Le projet de loi initial comportait bien, en effet, une référence aux seuls besoins de trésorerie, et cela était nécessaire.
Vous avez enfin évoqué le contenu des lois de financement de la sécurité sociale, et je voudrais remercier à cette occasion la commission des lois du Sénat de s'être ralliée à la rédaction qui est issue des travaux de l'Assemblée nationale.
J'ajoute que c'est la pratique qui donnera tout son sens aux lois de financement.
Je répondrai maintenant à M. Mélenchon... (M. le ministre cherche du regard M. Mélenchon sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Je suis à ma place, monsieur le ministre !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je vous prie de m'excuser, monsieur Mélenchon, mais je vous avais vu à l'extrême gauche ! (Sourires.)
M. Robert Pagès. C'est une place de choix !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Puis-je employer les termes d'« extrême gauche », monsieur Pagès ?
M. Robert Pagès. C'est une notion républicaine !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je n'aurai donc pas droit à un procès !
M. Jean-Luc Mélenchon. Schoelcher disait : « Je siège et je vote à l'extrême gauche » ; pourtant, il occupait le fauteuil placé juste derrière votre banc, monsieur le ministre !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. C'est un honneur !
MM. Mélenchon et Pagès ont invoqué un peu les mêmes arguments que ceux qui avaient été largement utilisés lors de l'examen en première lecture du présent projet de loi organique, arguments qui ont trait au déficit de la sécurité sociale, qui atteint plus de 48 milliards de francs selon la commission des comptes de la sécurité sociale.
Je vous répondrai, messieurs les sénateurs, que c'est bien pour cela que la réforme de la sécurité sociale ne peut plus être différée !
J'ajoute que j'aurais cru que le renforcement des compétences du Parlement allait vous satisfaire et que vous en remercieriez le Gouvernement. C'est en effet le renforcement des compétences du Parlement en la matière qui constitue la clé de voûte de cette réforme de la sécurité sociale.
Vous dites l'un et l'autre que rien ne va changer. Messieurs les sénateurs, vous sous-estimez ainsi les conséquences de cette compétence nouvelle qui est donnée au Parlement et qui vous échoit du fait de la révision constitutionnelle !
Le rôle du Parlement sera renforcé, notamment grâce au vote d'un taux d'évolution des dépenses par branche, d'un objectif de dépenses d'assurance maladie.
Il convient de donner tout son sens à cette compétence nouvelle du Parlement.
En fait, mesdames, messieurs les sénateurs, l'enjeu qui nous réunit tous est le suivant : nous souhaitons sauvegarder notre système de protection sociale. Nous ne voulons pas, monsieur Mélenchon, l'étatiser dans une première étape, comme vous avez semblé le dire, pour le privatiser ensuite.
Je dirais même que nous nous attachons, nous, à faire tout ce qui est nécessaire pour éviter ce que vous annonciez, monsieur le sénateur. Et je vais vous en donner une preuve : nous faisons, nous, des propositions, nous présentons des projets au Parlement. Or, après avoir écouté attentivement votre discours ainsi que celui de M. Pagès, je vous défie d'y trouver une seule proposition.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est que vous avez mal écouté !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je vous ai bien écouté, monsieur Mélenchon : vous n'avez fait aucune proposition ; relisez donc votre discours !
C'est d'ailleurs là-dessus que je vous attendais, car, monsieur Mélenchon, nous connaissons votre tempérament.
Vous avez raison d'être fier de votre idéologie, mais, en l'occurrence, celle-ci vous conduit depuis très longtemps à critiquer, car vous avez une arrière-pensée finale. J'ai même pensé un moment que vous alliez terminer votre discours par une envolée, par une chanson...
M. Emmanuel Hamel. L'Internationale !
M. Roger Romani ministre des relations avec le Parlement. ... sur les lendemains qui chantent et que vous semblez, ainsi que M. Pagès, avoir oubliée depuis un certain temps.
M. Robert Pagès. Nous pensions que vous en connaissiez les paroles !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. J'en connais bien les paroles, monsieur Pagès !
M. Robert Pagès. Nous pensions que vous connaissiez aussi nos propositions !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Des propositions, vous n'en avez fait aucune aujourd'hui.
M. Robert Pagès. Voyons, monsieur le ministre !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Je dis bien aucune ; vous avez critiqué, et c'est tout !
M. Robert Pagès. Ne jouez pas sur les mots !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Non, je ne joue pas sur les mots ! Relisez votre discours, monsieur Pagès.
Le déficit prévu pour 1996 remet-il en cause la réforme ? Nous répondons non car, mesdames, messieurs les sénateurs, sans les ordonnances, selon la commission des comptes, le déficit aurait été de 80 milliards de francs et non de 48 milliards de francs.
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous ne pouvez pas le prouver !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. C'est un chiffre de la commission des comptes ! Monsieur Mélenchon, puisque vous vous référez à certains chiffres avancés par la commission des comptes, veuillez être logique avec vous-même, et acceptez les autres chiffres qu'elle a établis.
M. Jean-Luc Mélenchon. Acceptez la critique, monsieur le ministre !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. La critique est normale !
Les aléas de la conjoncture expliquent la dégradation que nous connaissons. Or nous le souhaitons ils ne devraient pas perdurer tout au long de l'année.
M. Emmanuel Hamel. Espérons-le !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Nous le pensons, et nous l'espérons. Une reprise économique pourrait assurer, au mieux, un retour spontané à l'équilibre et, au minimum, une réduction du déficit prévisionnel...
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est le père Noël que vous pourriez invoquer !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Vous, mais pas moi !
M. Henri de Raincourt. Moi, je préfère le petit Jésus ! (Sourires.)
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Il n'est pas question, monsieur Mélenchon, monsieur Pagès, de se reposer sur quelque prévision que ce soit. C'est d'ailleurs la différence entre vous et nous.
Nous, nous disons qu'il faut rester vigilant sur les dépenses, et donc mettre en oeuvre un certain nombre de propositions...
M. Jean-Luc Mélenchon. Le déficit était moins important avec nous !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. ... et mettre en oeuvre résolument la réforme de la sécurité sociale.
Il faut d'abord travailler au sein des conseils d'administration des caisses pour réfléchir aux moyens de contenir la dépense.
Les acteurs du système de santé doivent ensuite faire preuve d'esprit de responsabilité - et je suis persuadé qu'ils le feront - afin que l'inflexion du rythme des dépenses qui s'amorce ne se démente pas.
Enfin, il faut permettre au Parlement de jouer le rôle central qu'il a réclamé depuis longtemps et qui lui est imparti par la Constitution. C'est vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui déciderez désormais chaque année, et dès l'automne prochain, des mesures qui permettront d'assurer l'équilibre de la sécurité sociale.
MM. Pagès et Mélenchon se demandent si l'on peut tenir l'objectif de 2,1 p. 100 pour les dépenses d'assurance maladie.
Il faut se souvenir que, au cours de l'année 1995, l'accélération des dépenses a conduit au dépassement que l'on sait. Mais, depuis six mois, la progression des dépenses s'est ralentie, et ces dernières n'ont plus jamais atteint le niveau du mois de novembre 1995. A l'évidence, une inflexion s'est produite. Les dépenses de l'assurance maladie ont même baissé de 0,4 p. 100 au mois d'avril. Nous devrions tous nous en réjouir, et je suis persuadé que vous le faites avec nous.
Selon le Gouvernement, l'objectif n'est donc pas hors de portée. Il faut que chacun fasse preuve d'esprit de responsabilité. Il semblerait que les médecins et les patients en aient conscience et s'apprêtent à faire preuve de cet esprit de responsabilité.
Après avoir apporté ces réponses, je me dois de m'adresser à vous, messieurs Mélenchon et Pagès. Nous savons que vous êtes des parlementaires de qualité, des hommes attachés, comme nous, à la défense de la sécurité sociale. Mais, messieurs, de grâce ! si critiquer est votre droit et votre devoir, donnez-nous cependant l'occasion, ne serait-ce qu'une seule fois, d'entendre une seule proposition !
M. Robert Pagès. Quand vous voudrez, monsieur le ministre !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous avons même un programme de Gouvernement !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.

Question préalable

M. le président. Je suis saisi, par M. Metzinger et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n° 5, tendant à opposer la question préalable.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération du projet de loi organique, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 433, 1995-1996). »
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
La parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n'excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Metzinger, auteur de la motion.
M. Charles Metzinger. Monsieur le ministre, de qui se moque-t-on ? Vous parlez de renforcer les pouvoirs du Parlement. Or, au moment où nous discutons en deuxième lecture d'un texte important, le ministre du travail et des affaires sociales n'est pas présent et le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale a quitté l'hémicycle avant même d'avoir pu entendre tous les membres de l'opposition !
M. Emmanuel Hamel. M. Romani est le plus éminent des ministres et les représente tous !
M. Charles Metzinger. De qui vous moquez-vous quand vous dites que vous attendez une seule de nos propositions ? Tous les amendements qui ont été déposés par les membres du groupe socialiste comme par ceux du groupe communiste républicain et citoyen ont été repoussés. Alors n'affirmez pas que nous n'avons pas fait de propositions ! C'est inacceptable ! (M. Mélenchon applaudit.)
De toute manière, faut-il encore délibérer puisque tout est décidé ?
Il est extraordinaire de lire dans une publication de ce jour, intitulée Liaisons sociales, que « les députés de la majorité se sont rangés à la position du Sénat sur le calendrier d'examen à l'automne des projets de loi de financement » - avant même que le Sénat ait fait connaître sa position en deuxième lecture ! - et ce au cours d'une réunion, M. Pagès l'a déjà signalé, qui a eu lieu le 18 juin dernier, à l'hôtel Matignon, autour du Premier ministre. De qui se moque-t-on ?
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est le Gouvernement hôtelier !
M. Charles Metzinger. Mes chers collègues, il n'y a donc pas de raison que nous délibérions encore puisque tout a été décidé à Matignon !
Mais nous allons faire comme si l'Assemblée nationale n'était pas manipulée, car nous sommes respectueux des pouvoirs du Parlement. Nous proposons donc d'opposer à ce projet la question préalable, motion de procédure réglementaire, et nous allons argumenter, comme cela se doit.
Nous ne sommes pas, monsieur le ministre, opposés à une réforme de la sécurité sociale ; nous sommes opposés à votre réforme, qui n'est pas bonne dans l'ensemble.
M. Jean-Luc Mélenchon. Exactement !
M. Charles Metzinger. D'ailleurs, 51 p. 100 des Français la jugent inefficace.
M. Emmanuel Hamel. Ils sont mal informés !
M. Jean-Luc Mélenchon. Ils voient clair !
M. Charles Metzinger. Avec le déficit fleuve de 1996, pour rééquilibrer les comptes de la sécurité sociale, il faudra de nouvelles mesures.
Jusqu'à présent, le Parlement a délibéré pour renforcer les pouvoirs du Gouvernement afin de lui permettre de gouverner en la matière par ordonnances.
Le Gouvernement compte sur le Parlement pour proposer, à travers la loi de financement, le rééquilibrage des comptes de la sécurité sociale. Il n'a pas accepté qu'au préalable le Parlement définisse les objectifs de la sécurité sociale découlant des objectifs d'une politique sanitaire à mener.
Nous n'avons pas accepté la contribution au remboursement de la dette sociale, ou RDS ; nous n'avons pas voulu accorder des pouvoirs exorbitants au Gouvernement ; nous n'avons pas approuvé la réforme constitutionnelle, car nous doutions d'emblée que le renforcement des pouvoirs parlementaires mis en perspective aurait lieu et nous craignions dans le même temps l'affaiblissement de la démocratie sociale.
Nous n'avons pas adopté en première lecture un projet de loi organique qui, visiblement, met en place un carcan empêchant le Parlement de discuter dans de bonnes conditions des lois de financement.
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr !
M. Charles Metzinger. Votre réforme fait encore la une des journaux, elle n'a pas pris. « La sécurité sociale renoue avec son déficit chronique », « Le plan Juppé s'avère insuffisant », « La sécurité sociale sombre à nouveau, faute de recettes ». Voilà quelques-uns des gros titres de ces derniers jours, et j'en passe.
En revanche, je ne puis passer sous silence la réponse que M. Gaymard a faite le 25 avril dernier à ma question d'actualité, à l'occasion de laquelle je m'inquiétais de savoir si le déficit prévisible de la sécurité sociale pour 1996 serait de 46 milliards de francs. M. Gaymard affirmait alors : « Les chiffres qui circulent ici ou là n'ont rien de scientifique ; ils sont, la plupart du temps, fantaisistes ou résultent d'extrapolations. »
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah !
M. Charles Metzinger. Merci pour la commission des comptes de la sécurité sociale ! Elle a sans doute apprécié, comme j'ai apprécié moi-même le jugement que M. le ministre porte sur ces prévisions, qui, elles, en tout état de cause, étaient bonnes, contrairement à celles de M. le Premier ministre. Alors qu'il prévoyait 17 milliards de francs de déficit, presque trois fois plus ont été réalisés : 48,6 millards de francs, dont 32,3 milliards de francs pour la branche maladie, 11,4 milliards de francs pour la branche famille, et ce malgré une non-revalorisation des allocations familiales pour 1996.
En réalité, c'est parce que le Gouvernement, au moment où il annonçait son plan de réforme, refusait de tenir compte du ralentissement de l'activité économique que la prévision a été fausse.
Si le projet de loi organique est adopté, le Parlement devra, à l'automne, prévoir les mesures nécessaires pour ramener les comptes de la sécurité sociale à l'équilibre financier. Le déficit record de 48,6 milliards de francs en 1996, proche des déficits des années précédentes, ne pourra pas être effacé.
Curieusement, le Gouvernement a demandé que la commission des comptes s'abstienne de tout pronostic pour 1997. Pourquoi cette recommandation ?
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien sûr !
M. Charles Metzinger. Tout le monde sait, depuis, que les experts du ministère des affaires sociales avaient transmis à ladite commission des éléments qui laissaient penser qu'en 1997 le déficit serait encore, et au moins, de 35 milliards de francs.
Le taux de progression imposé aux dépenses des médecins libéraux et des hôpitaux publics, soit 2,1 p. 100, ne sera pas tenu. Il risque fort de dépasser la barre des 3 p. 100, ne vous en déplaise, monsieur le ministre.
Actuellement, pour 1996, nous en sommes à un taux de progression de 7,5 p. 100 pour les honoraires et de 6,1 p. 100 pour le médicament.
L'addition de tous ces facteurs aura le résultat suivant : au lieu de 48,6 milliards de francs, le déficit atteindra sans doute les 60 milliards de francs, élevant toujours plus la dette sociale totale jusqu'à la crête des 300 milliards de francs.
Si vous nous dites que ce dérapage est essentiellement dû au fait qu'il correspond à une partie de l'année où les ordonnances n'étaient pas encore publiées, je répondrai que vous tardez à prendre la plupart des décrets d'application des ordonnances. Combien en manque-t-il ? Quelques dizaines ? Qu'en sera-t-il des sanctions financières ? Qu'attendez-vous pour agir ?
Vous avez obtenu, contre la volonté de l'opposition au Parlement, la liberté de recourir aux ordonnances. Le soutien de votre majorité, en l'occurrence, n'a rien apporté au pays : les Français souffrent de devoir contribuer au RDS, craignent de nouveaux dérapages, redoutent votre cotisation maladie universelle. L'allongement de la période de remboursement de la dette sociale de treize ans à quinze ans - à plus, même, éventuellement est une perspective redoutable.
Et vous avez fait accroire au Parlement que, désormais, en vertu de fallacieux nouveaux pouvoirs que lui confère la Constitution en la matière, les problèmes se régleraient plus facilement.
Le Sénat a affirmé, à propos de l'article L.O. 113-1, que le Parlement déterminait les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale en fixant des choix et des orientations de santé. C'était, à mon sens, encore imparfait.
L'Assemblée nationale nous renvoie à un texte qui résulte d'ailleurs d'un amendement gouvernemental et dans lequel on se contente de dire que le Parlement « approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale ».
Dans ces conditions, le Parlement ne gagne pas en pouvoirs : il en donne davantage à l'Etat, puisque c'est le Gouvernement qui présente le rapport à approuver !
Nos collègues de l'Assemblée nationale me semblent bien optimistes lorsqu'ils considèrent qu'à l'occasion du vote sur ce rapport ils pourront opérer des choix et déterminer des orientations ! En tout état de cause, dans notre esprit, avant d'aborder la loi de financement, il faut définir et déterminer la politique de santé et de sécurité sociale que le Parlement souhaite pour le pays. Le Sénat, encore plus que l'Assemblée nationale - je regrette de devoir le constater - donne à la loi de financement une tournure trop comptable.
Dans son rapport à l'occasion de la première lecture, M. le rapporteur a rappelé les propos que M. Barrot a tenus, le 25 avril dernier à l'appui de cet amendement gouvernemental, à savoir que « les lois de financement doivent approuver l'explication des politiques qui est donnée dans le rapport du Gouvernement ». Et il craignait alors que, dans cette optique, le Gouvernement se contente de déposer un projet de loi de financement constitué d'un article unique rédigé de la sorte : « Le rapport annexé à la présente loi est approuvé ».
« La commission des lois ne saurait souscrire à une condition aussi restrictive », avait ajouté M. le rapporteur. Apparemment, cette crainte a disparu. C'est dommage !
Par ailleurs, l'Assemblée nationale reprend l'article L.O. 111-6 tel qu'elle l'avait rédigé en première lecture, sans tenir compte du dilemme exprimé par les sénateurs qui ne voient pas comment aborder dans des conditions convenables l'étude de la loi de financement. Cela prouve que M. le ministre n'a pas réussi à persuader sa majorité à l'Assemblée nationale du bien-fondé de la crainte des sénateurs en ce qui concerne le calendrier imposé !
C'est à Matignon, avant-hier, que l'accord aura été trouvé, loin du Parlement et en dehors de toute procédure réglementaire. Et vive les pouvoirs du Parlement, monsieur le ministre !
Rien que ces deux constats suffiraient à justifier notre question préalable : il n'y a vraiment pas lieu de délibérer sur un texte qui fait si peu de cas des droits du Parlement.
Mais, en plus de ces considérations, nous le redisons : changez de politique économique ! Vous avez tout fait pour gripper la machine de la consommation ; vous continuez à alourdir la dette publique. Fin 1995, estimée à 4 000 milliards par des experts, elle sera de 5 400 milliards en 1998 au rythme où vous allez.
Monsieur le ministre, dans ces conditions, le Gouvernement est censurable.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est exact !
M. Charles Metzinger. Ce n'est pas au Sénat que cela peut se faire institutionnellement, mais la Haute Assemblée peut donner des signaux de profond mécontentement en écho au désarroi de nos compatriotes en refusant de délibérer de ce projet de loi organique.
Vous n'avez pas réduit le déficit comme vous l'avez promis, vous avez alourdi les prélèvements en créant le RDS.
Les ordonnances n'ont pas eu les effets annoncés, mais votre maîtrise des dépenses s'avère bien comptable.
La démocratie politique n'a pas vraiment de pouvoir de contrôle accru, mais l'Etat, à coup sûr, se voit renforcé dans ses prérogatives et, en même temps, la démocratie sociale est affaiblie.
Non, vous n'êtes pas le sauveur de la sécurité sociale. Il ne suffit pas de dire que, « en l'absence » du plan Juppé, le déficit pour 1996 aurait encore été plus fort. Ces affirmations sont des conjectures.
Malgré des taux de croissance économique de 2,6 p. 100, 2,1 p. 100 et 1,3 p. 100, vous n'avez obtenu que des résultats catastrophiques depuis 1994 alors que les gouvernements socialistes avaient réussi à limiter le déficit de la sécurité sociale à 15 milliards de francs en 1991 et 1992 avec une croissance qui n'était que de 0,8 p. 100 et de 1 p. 100.
M. Jean-Luc Mélenchon. Et voilà !
M. Charles Metzinger. Le déterminant principal des recettes à propos duquel vous vous êtes leurrés et avez essayé de leurrer tout le monde, la masse salariale, a progressé non pas de 5,3 p. 100, comme vous l'aviez prévu voilà huit mois, mais de 2,4 p. 100 à peine.
Empêchez les licenciements, faites progresser la masse salariale, augmentez le pouvoir d'achat, alors la consommation redémarrera et la machine économique reprendra du souffle ! En effet 52 p. 100 des Français souhaitent une relance de la consommation. Pourtant, vous continuez à pratiquer une politique économique libérale anglo-saxonne enragée, nuisible surtout aux salariés.
Il n'y a pas lieu de vous approuver, il n'y a pas lieu de délibérer ce projet de loi organique, d'autant que tout se règle, apparemment, à l'Hôtel Matignon et non au Parlement.
C'est le sens de la question préalable que j'ai opposée et que je défends au nom du groupe socialiste. (Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Y a-t-il un orateur contre la motion ?
Quel est l'avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La présentation faite par notre excellent collègue M. Metzinger va exactement à l'encontre de ce qu'il voudrait démontrer, puisqu'il vient d'engager le débat sur la loi de financement de la sécurité sociale avec quelques mois d'avance,...
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Tout à fait !
M. Patrice Gélard, rapporteur. ... faisant ainsi la démonstration de l'utilité de cette loi de financement.
Au demeurant, comme la Constitution nous fait l'obligation d'en débattre, je vous propose, mes chers collègues, de rejeter la question préalable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Metzinger nous avait habitués à une meilleure connaissance de sa part des procédures parlementaires.
M. Emmanuel Hamel. Il ne l'a pas perdue, il peut se tromper !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Il vient de critiquer ma présence à ce banc en regrettant que ni le ministre des affaires sociales ni le secrétaire d'Etat à la santé ne soient présents.
Je voudrais simplement vous faire observer, monsieur le sénateur, qu'actuellement le Sénat examine un projet de loi organique, texte de procédure qui, selon les termes de la Constitution, doit organiser les conditions dans lesquelles le Parlement vote les projets de loi de financement de la sécurité sociale.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est mesquin !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Non, monsieur Mélenchon, ce qui est mesquin - et c'est la première fois que j'entends cela dans cette enceinte, où l'on a le respect de certaines convenances - c'est de reprocher la présence ou l'absence de tel ou tel ministre.
Au demeurant, monsieur Mélenchon, je tiens à dire qu'au même titre que mes deux collègues je suis très concerné par ce projet de loi, car le ministre des relations avec le Parlement est tout à fait compétent en matière de procédure parlementaire. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel. Votre compétence est inégalable, monsieur le ministre ! (Sourires.)
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Pour ce qui est de la question préalable, ou plutôt de ce qui est apparu au début comme une question préalable mais dont la discussion ensuite, comme l'a dit excellement M. le rapporteur, a pris le tour d'une discussion générale sur la prochaine loi de financement de la sécurité sociale, je dirai qu'elle est tout à fait inopportune dans la mesure où son adoption différerait la possibilité pour le Parlement d'intervenir dans la gestion et dans la régulation de notre régime de protection sociale.
Vous le savez, monsieur Metzinger, mais je le répète, cette réforme a pour objet d'impliquer et de responsabiliser chacun des acteurs, et le Parlement a un rôle important à jouer en la matière.
Je rappelle donc encore une fois que la loi organique vise à mettre en oeuvre la réforme constitutionnelle que les assemblées, réunies solennellement en Congrès, ont votée le 19 février 1996, et qu'il s'agit donc tout simplement d'appliquer la Constitution.
Je ne vais pas me lancer dans une polémique, ni répondre à ce que M. Metzinger a affirmé sur l'évolution des comptes sociaux et de la dette publique.
Toutefois, monsieur Metzinger, je dirai que, malgré votre talent, qui est grand, pendant au moins une décennie, les socialistes ont tellement alourdi la dette publique de notre pays - nous pourrions quasiment l'appeler la dette socialiste - (Protestations sur les travées socialistes.) que vous ne convaincrez personne !
M. Jean-Luc Mélenchon. Oh si !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Nous payons les dettes que les socialistes ont contractées. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
Utilisez donc n'importe quel argument, monsieur Metzinger, mais, je vous en prie, n'évoquez pas la dette publique, car vous et vos amis êtes responsables de l'ampleur des déficits publics. M. le Premier ministre en a rappelé hier, à juste titre, l'importance année après année ! Alors, ayez un peu de délicatesse - je ne dirai pas de décence - et n'évoquez pas certaines maladies qui sont chroniques chez les socialistes, qui font même partie de leur nature et qui, chaque fois qu'ils ont été au gouvernement,...
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est odieux !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. ... les ont toujours atteints, je veux parler de l'alourdissement de la dette publique et de l'alourdissement du déficit public. (Les protestations s'amplifient sur les travées socialistes.)
Je voulais quand même remettre les choses en place ! (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Je vais mettre aux voix la motion n° 5.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le ministre, nous vous avons connu plus convaincant, et nous avons toujours apprécié vos qualités de débatteur. Or ce que vous venez de dire sur les déficits ne peut tenir que dans une salle mal informée, mais pas au Parlement.
Sous le gouvernement Balladur, vous avez augmenté le déficit et la dette publique de 1 000 milliards de francs, soit, en l'espace d'un an, le total des déficits enregistrés pendant les quatre années précédentes, alors que nous avions connu, nous, la dépression.
M. Emmanuel Hamel. Delors a fait plus !
M. Jean-Luc Mélenchon. Aujourd'hui, c'est 1 milliard de francs par jour !
En ce qui concerne la sécurité sociale, vous n'êtes pas fondé à nous mettre au défi car, lorsque nous étions aux affaires, la moyenne des déficits courants était de 1 p. 100 par an. Vous en êtes à 4 p. 100 !
Depuis votre retour en 1993, le déficit a été multiplié par quatre pour l'ensemble du système et par six pour l'assurance maladie.
En outre, pour la première fois en 1995, et sous votre responsabilité, la branche familles est passée dans le « rouge », avec 13 milliards de francs de déficit.
Ces chiffres font justice de l'arrogance avec laquelle vous vous réfugiez derrière des arguments de tribune pour masquer le sérieux et la difficulté de la situation dans laquelle votre politique nous a plongés !
Monsieur le ministre, vous m'avez mis au défi tout à l'heure de faire une proposition.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Absolument !
M. Jean-Luc Mélenchon. Mais, monsieur le ministre, c'est que vous n'avez écouté ni mon discours, ni celui de M. Pagès, ni surtout celui de M. Metzinger, pas plus que vous n'avez écouté notre argumentation sur les amendements que nous avons présentés en première lecture !
Eh bien, si vous voulez des propositions, je vais vous en faire plusieurs.
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Allez-y !
M. Jean-Luc Mélenchon. Engagez la réduction du temps de travail sans perte de salaire, ce qui créera 1,5 million d'emplois, car, aujourd'hui, ce sont 150 milliards qui manquent en cotisations à la sécurité sociale du fait de l'existence de 3 millions de chômeurs.
Supprimez 80 milliards de francs d'exonérations que vous avez accordées.
Augmentez les salaires, car 1 p. 100 d'augmentation de salaire produit 8 milliards de francs de recettes supplémentaires dans les caisses de la sécurité sociale.
Faites verser les dettes impayées du patronat, qui s'élevaient à 8 milliards de francs en 1994 et dont le total atteint aujourd'hui plus de 90 milliards de francs, dont la moitié peut être d'ores et déjà récupérée.
Voilà mes propositions. En cinq minutes, j'en ai déjà fait cinq !
Ne prenez pas le risque, monsieur le ministre, de nous demander quelle politique alternative nous sommes capables de proposer aux Français, car bientôt ils sauront tout seuls faire la différence entre la gauche et la droite, et le genre de propos que vous avez tenus, sommaires et provocateurs, seront rejetés !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Oh !
M. Emmanuel Hamel. A la fin de la gestion socialiste, en mars 1993, il y avait déjà trois millions de chômeurs. C'est hélas vous, les chômeurs !
M. Robert Pagès. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Pagès. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, votre duo est quelque peu manichéen. Ce n'est plus, aujourd'hui, de bonne méthode.
Monsieur le ministre, vous nous avez reproché, dans un premier temps, de ne pas avoir fait de propositions. Puis, à M. Metzinger, M. le rapporteur a fait remarquer combien le débat était nécessaire puisque, déjà, il formulait des propositions. Alors, s'il vous plaît, harmonisez vos propos !
M. Patrice Gélard, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !
M. Robert Pagès. Je n'avais pas l'intention d'allonger ce débat de deuxième lecture. Je m'étais donc efforcé de ne pas répéter les arguments que j'avais déjà développés, avec mes amis, à cette tribune en d'autres temps. Mais, si M. le ministre veut des propositions, je lui rappellerai qu'avec ses amis du Gouvernement il a repoussé, de façon très sèche, celles que nous avions formulées. Je pensais qu'il les avait encore en mémoire ! Nous avions alors proposé de taxer les revenus du capital au même taux que les revenus du travail. On trouverait là quelques dizaines de milliards de francs qui, très rapidement, pourraient équilibrer les comptes de la sécurité sociale !
Je m'en tiendrai là, pour ne pas encourir de nouveau les reproches de M. le rapporteur d'avoir, déjà, entamé le débat, mais nous sommes disposés, mes amis et moi, à vous faire connaître mieux encore nos autres propositions. (M. Mélenchon applaudit.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix la motion n° 5, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je rappelle que son adoption entraînerait le rejet du projet de loi organique.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 117 ::

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 315
Majorité absolue des suffrages 158
Pour l'adoption 93
Contre 222

En conséquence, nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle qu'aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.

Article 2

M. le président. « Art. 2. - Il est inséré, après le chapitre premier du titre premier du livre premier du code de la sécurité sociale, un chapitre premier bis ainsi rédigé :

« Chapitre Ier bis

« Lois de financement de la sécurité sociale

« Art. L.O. 111-3. - I. - Chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale :
« 1° Approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale ;
« 2° Prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement ;
« 3° Fixe, par branche, les objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres ;
« 4° Fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ;
« 5° Fixe, pour chacun des régimes obligatoires de base visés au 3° ou des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement qui peuvent légalement recourir à des ressources non permanentes, les limites de ces ressources.
« II. - La loi de financement de l'année et les lois de financement rectificatives ont le caractère de lois de financement de la sécurité sociale.
« Seules des lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1° à 5° du I.
« III. - Outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale.
« Tout amendement doit être accompagné des justifications qui en permettent la mise en oeuvre.
« Les amendements non conformes aux dispositions du présent article sont irrecevables.
« Art. L.O. 111-4. - I. - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année est accompagné d'un rapport présentant les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale.
« II. - Sont jointes au projet de loi des annexes :
« a) Supprimé ;
« b) Présentant les données de la situation sanitaire et sociale de la population ;
« b bis) Rendant compte de la mise en oeuvre des dispositions des lois de financement de la sécurité sociale de l'exercice précédent ;
« c) Décrivant l'évolution prévisible, pour l'année en cours et l'année suivante, des recettes et des dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres et, le cas échéant, de leurs besoins de trésorerie en cours d'exercice, ainsi que les perspectives d'évolution de ces recettes et de ces dépenses pour les deux années postérieures ;
« d) Décrivant, pour l'année en cours et l'année suivante, par catégorie, les ressources des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ;
« d bis) Faisant apparaître, pour l'année en cours, les compensations financières entre régimes ;
« e) Décrivant, pour l'année en cours et l'année suivante, les comptes prévisionnels des organismes ayant pour mission de concourir au financement de ces mêmes régimes et, s'il y a lieu, à l'apurement de la dette ;
« f) Retraçant pour les trois années précédentes, d'une part, les comptes de la protection sociale qui regroupent l'ensemble des prestations sociales et les moyens de leur financement en mettant en évidence leur place dans les équilibres généraux économiques et financiers, d'autre part, l'effort social de la nation qui regroupe les prestations sociales et les charges qui en découlent pour l'Etat, les collectivités locales, les employeurs, les assurés et les contribuables.
« III. - Est également joint le rapport de la Cour des comptes prévu par l'article L.O. 132-3 du code des juridictions financières.
« IV. - Tous les trois ans, le Gouvernement adresse au Parlement, en même temps que le projet de loi de financement, un document présentant la liste des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et précisant le nombre de leurs cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres.
« Art. L.O. 111-5. - Non modifié.
« Art. L.O. 111-6. - Le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année, y compris le rapport et les annexes mentionnés aux I et II de l'article L.O. 111-4, est déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale trente jours au plus tard après l'ouverture de la session ordinaire.
« Art. L.O. 111-7. - L'Assemblée nationale doit se prononcer, en première lecture, dans le délai de vingt jours après le dépôt d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale.
« Le Sénat doit se prononcer, en première lecture, dans un délai de vingt jours après avoir été saisi.
« Si l'Assemblée nationale n'a pas émis un vote en première lecture sur l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale dans le délai prévu à l'article 47-1 de la Constitution, le Gouvernement saisit le Sénat du texte qu'il a initialement présenté, modifié le cas échéant par les amendements votés par l'Assemblée nationale et acceptés par lui. Le Sénat doit alors se prononcer dans un délai de quinze jours après avoir été saisi.
« Si le Sénat n'a pas émis un vote en première lecture sur l'ensemble du projet dans le délai imparti, le Gouvernement saisit à nouveau l'Assemblée nationale du texte soumis au Sénat modifié, le cas échéant, par les amendements votés par le Sénat et acceptés par lui.
« Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est ensuite examiné selon la procédure d'urgence dans les conditions prévues à l'article 45 de la Constitution.
« Art. L.O. 111-8. - Supprimé. »

ARTICLE L.O. 111-3 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

M. le président. Par amendement n° 1, M. Gélard, au nom de la commission, propose à la fin du sixième alinéa (5°) du premier paragraphe (I) du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 111-3 du code de la sécurite sociale, de remplacer les mots : « les limites de ces ressources » par les mots : « les limites dans lesquelles ses besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit de revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture qui vise à limiter les possibilités de recourir à l'emprunt uniquement aux besoins de trésorerie.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le président, le Gouvernement est favorable à cet amendement. Il juge cette précision nécessaire pour ne pas laisser accroire, si peu que ce soit, que la sécurité sociale pourrait financer les dépenses liées à la gestion des risques par des ressources d'emprunt.
L'occasion m'est donnée de répondre rapidement aux assertions de MM. Mélenchon et Pagès.
S'agissant des emprunts correspondant aux dettes socialistes, je rappellerai qu'ils ont été pris en charge par l'Etat. Ainsi, pour 1992 et 1993, lorsqu'on vous cite, mesdames, messieurs les sénateurs, un montant de déficit, on ne dit pas que 110 miliards de francs de dettes, en 1992 et en 1993, ont dû être repris par l'Etat.
M. Henri de Raincourt. Et l'année de onze mois !
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. C'était une précision utile et incontestable à communiquer au Sénat.
Par ailleurs, MM. Pagès et Mélenchon évoquent les dettes impayées du patronat. En vérité, il s'agit d'une dette accumulée sur plus de quarante ans, et les entreprises débitrices ont, pour la plupart, disparu.
Ce que nous avons entendu tout à l'heure, c'est l'histoire écrite à la mode socialiste !
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 1.
M. Charles Metzinger. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Metzinger.
M. Charles Metzinger. Pour toutes les raisons que nous avons évoquées tout à l'heure, nous ne pourrons évidemment pas voter cet amendement, et j'indique dès à présent que nous réserverons le même sort aux deux amendements suivants.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L.O. 111-4 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

M. le président. Sur le texte proposé pour l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix le texte proposé pour l'article L.O. 111-4 du code de la sécurité sociale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L.O. 111-6 DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

M. le président. Par amendement n° 2 rectifié, M. Gélard, au nom de la commission, propose, à la fin du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 111-6 du code de la sécurité sociale, de remplacer les mots : « trente jours au plus tard après l'ouverture de la session ordinaire. » par les mots : « au plus tard le 15 octobre ou, si cette date est un jour férié, le premier jour ouvrable qui suit. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit là du point sur lequel le Sénat ne peut pas composer.
Nous avons proposé la date du 15 octobre en démontrant que c'était celle au-delà de laquelle nous ne pourrions plus faire un travail correct.
Nous demandons par conséquent au Sénat de revenir au texte qu'il avait adopté en première lecture.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Le Gouvernement ne conteste pas la pertinence des préoccupations exprimées par le Sénat, mais il ne saurait oublier les impératifs de l'Assemblée nationale ni ses propres contraintes.
Malgré les difficultés réelles qu'un calendrier serré lui imposera, il s'est engagé à respecter la date que le Parlement retiendra, notamment celle du 15 octobre.
Par conséquent, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Larché, président de la commission. Cet amendement est, dans une certaine mesure, au coeur de ce débat.
Il ne s'agit pas, qu'on le comprenne bien, d'opposer systématiquement une thèse de l'Assemblée nationale et une thèse du Sénat, comme certains avaient cru devoir le faire.
Il s'agit d'obtenir du Gouvernement - et nous l'avons obtenu, ce dont nous le remercions - que certains délais soient imposés aux partenaires sociaux afin qu'ils fournissent en temps utile les informations nécessaires, comptables et autres, pour que le projet de loi de financement puisse être déposé.
Il s'agit surtout de parvenir à une organisation du travail parlementaire telle que le Sénat et l'Assemblée nationale y trouvent leur compte. En effet, si l'on s'en était tenu au premier système, c'est-à-dire celui qui avait été envisagé par l'Assemblée nationale, ce n'est pas seulement le Sénat qui aurait subi un encombrement : l'encombrement aurait affecté également les travaux de l'Assemblée nationale.
En l'occurrence, nous avons fait un peu plus que changer des virgules. (Sourires.) Nous avons considéré que ce changement, qui allait au-delà de quelques points de grammaire, était conforme à l'intérêt du Parlement tout entier.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?....
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 111-6 du code de la sécurité sociale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L.O. 111-7 DU CODE DE LA SECURITE SOCIALE

M. le président. Par amendement n° 3, M. Gélard, au nom de la commission, propose dans le deuxième alinéa du texte présenté par l'article 2 pour l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale, de remplacer les mots : « vingt jours » par les mots : « quinze jours ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Patrice Gélard, rapporteur. Il s'agit de ramener de vingt jours à quinze jours le délai d'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Roger Romani, ministre des relations avec le Parlement. Favorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, ainsi modifié, le texte proposé pour l'article L.O. 111-7 du code de la sécurité sociale.

(Ce texte est adopté.)

ARTICLE L.O. 111-8 DU CODE DE LA SECURITE SOCIALE

M. le président. L'article L.O. 111-8 du code de la sécurité sociale a été supprimé par l'Assemblée nationale.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 4

M. le président. « Art. 4. - I A, I, IIet II bis . - Non modifiés.
« III. - Le début du premier alinéa de l'article 33 de la loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95-885 du 4 août 1995) est ainsi rédigé : « Le Gouvernement présente chaque année un document récapitulant, pour les deux derniers exercices, les montants constatés ou estimés : ... (le reste sans changement). » - (Adopté.)
Les autres dispositions du projet de loi organique ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

Vote sur l'ensemble

M. le président. Avant de mettre l'ensemble du projet de loi organique, je donne la parole à M. Metzinger pour explication de vote.
M. Charles Metzinger. Nous avons essayé de démontrer que les pouvoirs du Parlement se trouvaient, à travers ce texte, confisqués.
Nous avons essayé de démontrer qu'il était faux de prétendre que nous n'avions pas fait de propositions.
Nous avons essayé de démontrer qu'il n'y avait pas lieu de délibérer.
On ne nous a pas entendus. Dès lors, pour nous, il n'y a pas lieu de voter ce texte.
Monsieur le ministre des relations avec le Parlement, sachez que je ne méconnais nullement votre rôle lorsque je regrette l'absence de M. le ministre des affaires sociales et de M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale. Mais il s'agit tout de même d'une réforme de la sécurité sociale, une réforme qui inquiète et mécontente nos concitoyens.
Enfin, que le Gouvernement cesse donc, une fois pour toutes, de charger les autres de ses propres faiblesses ! En tout cas, en ce qui concerne la dette publique, nous maintenons ce que nous avons affirmé.
M. le président. La parole est à M. Maman.
M. André Maman. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale, qui vient prolonger la révision constitutionnelle du 22 février dernier, marque une nouvelle étape dans le processus que le Gouvernement a engagé voilà quelques mois en matière de protection sociale.
Ce texte a donné lieu à un débat ouvert, souvent passionné, sur un sujet qui se trouve, très légitimement, au coeur des préoccupations de la société française.
Les sénateurs non inscrits, au nom desquels je m'exprime, le voteront sans hésitation.
Ils le voteront, d'abord, parce qu'ils en comprennent l'impérieuse nécessité.
Ils le voteront, ensuite, parce qu'il confère au Parlement des pouvoirs nouveaux, puisque nous serons désormais appelés, chaque année, à nous prononcer sur l'équilibre financier prévisionnel de la sécurité sociale.
Ils le voteront, enfin, parce que notre assemblée était confrontée au défi, en examinant ce texte, de mettre sur pied un système procédural qui soit compatible avec les diverses contraintes d'emploi du temps que nous connaissons traditionnellement au début de l'automne et que ce défi a été relevé.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du réglement.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 118 : :

Nombre de votants 316
Nombre de suffrages exprimés 316
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 223
Contre 93

8

SAISINE DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel une lettre par laquelle il informe le Sénat que le Conseil constitutionnel a été saisi le 20 juin 1996, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution de la loi tendant à renforcer la répression du terrorisme et des atteintes aux personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public et comportant des dispositions relatives à la police judiciaire.
Le texte de la saisine du Conseil constitutionnel est disponible au bureau de la distribution.

9

TRANSMISSION DE PROJETS DE LOI

M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du deuxième protocole en date du 6 octobre 1995 annexé à l'accord général sur le commerce des services (ensemble les listes d'engagements dont la traduction est annexée à la loi).
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 458, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation du troisième protocole en date du 6 octobre 1995 annexé à l'accord général sur le commerce des services (ensemble les listes d'engagements dont la traduction est annexée à la loi).
Le projet de loi sera imprimé sous le numéro 459, distribué et renvoyé à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

10

DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président. J'ai reçu de Mmes Hélène Luc, Marie-Claude Beaudeau, M. Jean-Luc Bécart, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. Claude Billard, Mmes Nicole Borvo, Michelle Demessine, M. Guy Fischer, Mme Jacqueline Fraysse-Cazalis, MM Félix Leyzour, Paul Loridant, Louis Minetti, Robert Pagès, Jack Ralite et Ivan Renar une proposition de résolution, présentée en application de l'article 73 bis du règlement, sur la recommandation de la Commission en vue d'une recommandation du Conseil visant à ce que soit mis un terme à la situation de déficit public excessif en France. Application de l'article 104 C, paragraphe 7, du traité instituant la Communauté européenne (n° E-648).
La proposition de résolution sera imprimée sous le numéro 460, distribuée et renvoyée à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.

11

DÉPÔT DE PROPOSITIONS
D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil sur la vente et les garanties des biens de consommation.
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-651 et distribuée.
J'ai reçu de M. le Premier ministre la proposition d'acte communautaire suivante, soumise au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de l'article 12 de la directive 77/780/CEE visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, des articles 2, 6, 7, 8 et des annexes II et III de la directive 89/647/CEE relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit, ainsi que de l'article 2 et de l'annexe II de la directive 96/6/CEE sur l'adéquation des fonds propres des entreprises d'investissement et des établissements de crédit ( Corrigendum au E-638).
Cette proposition d'acte communautaire sera imprimée sous le numéro E-652 et distribuée.

12

DEPO^T D'UN RAPPORT

M. le président. J'ai reçu de M. Pierre Hérisson, rapporteur pour le Sénat, un rapport fait au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat.
Le rapport sera imprimé sous le numéro 457 et distribué.

13

DÉPO^T D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président. J'ai reçu de M. Alain Lambert un rapport d'information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation sur l'évaluation de la fiscalité du logement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le numéro 456 et distribué.

14

ORDRE DU JOUR

M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au vendredi 21 juin 1996, à neuf heures trente :
1. - Discussion du projet de loi (n° 404, 1995-1996), adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 1994.
Rapport (n° 428, 1995-1996) de M. Alain Lambert, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Scrutin public ordinaire de droit sur l'ensemble.
2. - Discussion des conclusions du rapport (n° 455, 1995-1996) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales.
M. Jean-Jacques Robert, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.

Délai limite général pour le dépôt des amendements

Le délai limite pour le dépôt des amendements à tous les projets de loi et propositions de loi ou de résolution prévus jusqu'à la fin de la session ordinaire, à l'exception des textes de commissions mixtes paritaires et de ceux pour lesquels est déterminé un délai limite spécifique, est fixé, dans chaque cas, à dix-sept heures, la veille du jour où commence la discussion.

Délai limite pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements

1° Proposition de loi, adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à l'adoption (n° 396, 1995-1996).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 24 juin 1996, à onze heures.
2° Débat consécutif à la déclaration du Gouvernement sur la SNCF.
Délai limite pour les inscriptions de parole dans ce débat : lundi 24 juin 1996, à dix-sept heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quinze.)

Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON





QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)


Effets des annulations contentieuses
à l'encontre de décisions administratives relatives
à la réalisation de grands travaux d'utilité publique

429. - 20 juin 1996. - M. Jean-Louis Lorrain attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les effets d'annulations contentieuses prononcées au moyen de simples vices de forme, à l'encontre de décisions administratives prises en vue de la réalisation de grands travaux d'utilité publique. Il lui demande dans quelle mesure il serait possible d'ouvrir au juge la faculté de statuer, en offrant à l'autorité administrative un délai pour régulariser l'acte entaché d'irrégularité et ce, afin de ne pas différer l'exécution d'opérations présentant un caractère d'intérêt général et d'urgence. Cela reviendrait simplement à prendre en matière d'expropriation des dispositions analogues à celles introduites en matière d'urbanisme par la loi n° 94-112 du 9 février 1994 portant diverses dispositions en matière d'urbanisme et de constructions qui prévoient que l'illégalité pour vice de forme ou de procédure ne peut être invoquée par voie d'exécution après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet de la décision en cause (n° 429).



ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance du jeudi 20 juin 1996


SCRUTIN (n° 114)



sur la motion n° 7, présentée par Mme Hélène Luc et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002.

Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 313
Pour : 92
Contre : 221

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 4. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 18.
Abstentions : 2. _ MM. André Boyer et François Giacobbi.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 92.
Abstention : 1. _ M. Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73. - Dont M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Biilski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Hèsson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Abstentions


MM. André Boyer, François Giacobbi et Emmanuel Hamel.

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'a pas pris part au vote


M. René Monory, président du Sénat.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 115)



sur la motion n° 3, présentée par M. Claude Estier et les membres du groupe socialiste et apparentés, tendant à opposer la question préalable au projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002.

Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 314
Pour : 93
Contre : 221

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 4. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 18.
Abstentions : 2. _ MM. André Boyer et François Giacobbi.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Pour : 1. _ M. Emmanuel Hamel.
Contre : 92.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73. - Dont M. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Emmanuel Hamel
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Mars Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.

Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles inésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Abstentions


MM. André Boyer et François Giacobbi.

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'a pas pris part au vote


M. René Monory, président du Sénat.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 116)



sur l'ensemble du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002.

Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 309
Pour : 216
Contre : 93

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Contre : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 15.
Contre : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, Yvon Collin, Mme Joëlle Dusseau et M. Bernard Joly.
Abstentions : 4. _ MM. André Boyer, François Giacobbi, Paul Girod et André Vallet.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Pour : 92.
Contre : 1. _ M. Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Contre : 72.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance, et Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 56.
Abstentions : 2. _ MM. François Mathieu et Louis Mercier.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Pour : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Pour : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe Francois
Jean Francois-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Yves Guéna
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy


Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Emmanuel Hamel
Roland Huguet
Bernard Joly
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Abstentions


MM. André Boyer, François Giacobbi, Paul Girod, François Mathieu, Louis Mercier et André Vallet.

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Michel Dreyfus-Schmidt, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 310
Majorité absolue des suffrages exprimés : 156
Pour l'adoption : 216
Contre : 94

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.

SCRUTIN (n° 117)



sur la motion n° 5, présentée par M. Charles Metzinger et les membres du groupe socialiste et apparentés, tendant à opposer la question préalable au projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages exprimés : 315
Pour : 93
Contre : 222

Le Sénat n'a pas adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Pour : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.
Contre : 19.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Contre : 92
N'a pas pris part au vote : M. Yves Guéna, qui présidait la séance.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Pour : 73
N'a pas pris part au vote : 1

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Contre : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Contre : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Contre : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcel Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet


André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

Ont voté contre


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Emmanuel Hamel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

N'ont pas pris part au vote


MM. Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Yves Guéna, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance ont été reconnus, après vérification, conformes à la liste de scrutin ci-dessus.

SCRUTIN (n° 118)



sur l'ensemble du projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale, relatif aux lois de financement de la sécurité sociale.

Nombre de votants : 314
Nombre de suffrages exprimés : 314
Pour : 221
Contre : 93

Le Sénat a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN


GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (15) :
Contre : 15.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN (24) :

Pour : 19.
Contre : 5. _ MM. François Abadie, Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin et Mme Joëlle Dusseau.

GROUPE DU RASSEMBLEMENT POUR LA RÉPUBLIQUE (93) :

Pour : 91.
N'ont pas pris part au vote : 2. _ MM. Yves Guéna, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.

GROUPE SOCIALISTE (74) :

Contre : 73.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Claude Pradille.

GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (59) :

Pour : 58.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. René Monory, président du Sénat.

GROUPE DES RÉPUBLICAINS ET INDÉPENDANTS (44) :

Pour : 44.

SÉNATEURS NE FIGURANT SUR LA LISTE D'AUCUN GROUPE (10) :

Pour : 9.
N'a pas pris part au vote : 1. _ M. Paul Vergès.

Ont voté pour


Nicolas About
Philippe Adnot
Michel Alloncle
Louis Althapé
Jean-Paul Amoudry
Alphonse Arzel
Denis Badré
Honoré Bailet
José Balarello
René Ballayer
Bernard Barbier
Janine Bardou
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Henri Belcour
Claude Belot
Georges Berchet
Jean Bernadaux
Jean Bernard
Daniel Bernardet
Roger Besse
Jacques Bimbenet
François Blaizot
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
André Bohl
Christian Bonnet
James Bordas
Didier Borotra
Joël Bourdin
Yvon Bourges
Philippe de Bourgoing
Jean Boyer
Louis Boyer
Jacques Braconnier
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Guy Cabanel
Michel Caldaguès
Robert Calmejane
Jean-Pierre Camoin
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Auguste Cazalet
Charles Ceccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cleach
Jean Clouet
Jean Cluzel
Henri Collard
Charles-Henri de Cossé-Brissac
Jean-Patrick Courtois
Pierre Croze
Charles de Cuttoli
Philippe Darniche
Marcel Daunay
Désiré Debavelaere
Luc Dejoie
Jean Delaneau
Jean-Paul Delevoye
Jacques Delong
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Charles Descours
Georges Dessaigne
André Diligent
Jacques Dominati
Michel Doublet
Alain Dufaut
Xavier Dugoin
André Dulait
Ambroise Dupont
Hubert Durand-Chastel
Daniel Eckenspieller
André Egu
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Hubert Falco
Pierre Fauchon
Jean Faure
Jean-Pierre Fourcade
Alfred Foy
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yann Gaillard
Philippe de Gaulle
Patrice Gelard
Jacques Genton
Alain Gérard
François Gerbaud
François Giacobbi
Charles Ginésy
Jean-Marie Girault
Paul Girod
Daniel Goulet
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Jean Grandon
Francis Grignon
Georges Gruillot
Jacques Habert
Hubert Haenel
Anne Heinis
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Rémi Herment
Daniel Hoeffel
Jean Huchon
Bernard Hugo
Jean-Paul Hugot
Claude Huriet
Roger Husson
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jeambrun
Charles Jolibois
Bernard Joly
André Jourdain
Alain Joyandet
Christian de La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Lacour
Pierre Laffitte
Jean-Pierre Lafond
Pierre Lagourgue
Alain Lambert
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
Edmond Lauret
René-Georges Laurin
Henri Le Breton
Jean-François Le Grand
Edouard Le Jeune
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Guy Lemaire
Marcel Lesbros
François Lesein
Maurice Lombard
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Jacques Machet
Jean Madelain
Kléber Malécot
André Maman
Philippe Marini
René Marquès
Pierre Martin
Paul Masson
François Mathieu
Serge Mathieu
Jacques de Menou
Louis Mercier
Michel Mercier
Lucette Michaux-Chevry
Daniel Millaud
Louis Moinard
Georges Mouly
Philippe Nachbar
Lucien Neuwirth
Nelly Olin
Paul d'Ornano
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Sosefo Makapé Papilio
Charles Pasqua
Michel Pelchat
Jean Pépin
Alain Peyrefitte
Bernard Plasait
Régis Ploton
Alain Pluchet
Jean-Marie Poirier
Guy Poirieux
Christian Poncelet
Jean Pourchet
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Jean-Marie Rausch
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Philippe Richert
Roger Rigaudière
Guy Robert
Jean-Jacques Robert
Jacques Rocca Serra
Louis-Ferdinand de Rocca Serra
Josselin de Rohan
Michel Rufin
Jean-Pierre Schosteck
Maurice Schumann
Bernard Seillier
Raymond Soucaret
Michel Souplet
Jacques Sourdille
Louis Souvet
Martial Taugourdeau
Henri Torre
René Trégouët
François Trucy
Alex Türk


Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Alain Vasselle
Albert Vecten
Jean-Pierre Vial
Robert-Paul Vigouroux
Xavier de Villepin
Serge Vinçon

Ont voté contre


François Abadie
Guy Allouche
François Autain
Germain Authié
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Jean-Luc Bécart
Monique ben Guiga
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Jacques Bialski
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Claude Billard
Marcel Bony
Nicole Borvo
André Boyer
Jean-Louis Carrère
Robert Castaing
Francis Cavalier-Benezet
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Marcel Charmant
Michel Charzat
William Chervy
Yvon Collin
Raymond Courrière
Roland Courteau
Marcgl Debarge
Bertrand Delanoë
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Rodolphe Désiré
Marie-Madeleine Dieulangard
Michel Dreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Joëlle Dusseau
Claude Estier
Léon Fatous
Guy Fischer
Jacqueline Fraysse-Cazalis
Aubert Garcia
Gérard Gaud
Roland Huguet
Philippe Labeyrie
Dominique Larifla
Guy Lèguevaques
Félix Leyzour
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Michel Manet
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Pierre Mauroy
Georges Mazars
Jean-Luc Mélenchon
Charles Metzinger
Louis Minetti
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Robert Pagès
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean Peyrafitte
Jean-Claude Peyronnet
Louis Philibert
Danièle Pourtaud
Roger Quilliot
Jack Ralite
Paul Raoult
René Regnault
Ivan Renar
Alain Richard
Roger Rinchet
Michel Rocard
Gérard Roujas
René Rouquet
André Rouvière
Claude Saunier
Michel Sergent
Franck Sérusclat
René-Pierre Signé
Fernand Tardy
André Vezinhet
Marcel Vidal
Henri Weber

N'ont pas pris part au vote


MM. Emmanuel Hamel, Claude Pradille et Paul Vergès.

N'ont pas pris part au vote


MM. René Monory, président du Sénat, et Yves Guéna, qui présidait la séance.


Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 316
Nombre de suffrages exprimés : 316
Majorité absolue des suffrages exprimés : 159
Pour l'adoption : 223
Contre : 93

Mais, après vérification, ces nombres ont été rectifiés conformément à la liste ci-dessus.