C. LA NOUVELLE DÉFINITION INSEE ET LE ZONAGE EN AIRES URBAINES

Afin de dépasser les limites du concept de zone de peuplement industriel ou urbain, l'INSEE a élaboré, en 1996, une nouvelle grille statistique qui affine les critères caractérisant l'espace périurbain. En conséquence, la population retenue n'est plus que de 9 millions d'habitants.

1. Une grille statistique affinée

Le nouveau zonage en aires urbaines repose sur la distinction entre l'espace à dominante urbaine et l'espace à dominante rurale , d'une part, sur les concepts d'aires urbaines composées de pôles urbains, de couronnes périurbaines et de communes multipolarisées , d'autre part 5( * ) .

Pour l'INSEE, un pôle urbain est une unité urbaine offrant au moins 5.000 emplois sur son territoire. Il existe 361 pôles urbains en France. Les plus importants sont Paris, Lyon et Marseille avec respectivement 9,31 ; 1,26 et 1,23 million d'habitants .

Autour de chaque pôle urbain ont été recensées 7.900 communes appartenant aux couronnes périurbaines . Environ 40 % de la population active résidente ayant un emploi dans ces communes va travailler soit vers le pôle urbain, soit vers les autres communes de la couronne périurbaine.

A cela s'ajoutent 2.500 communes multipolarisées dans lesquelles la population travaille dans plusieurs aires urbaines. Elles sont disséminées au sein des grandes nébuleuses urbaines telles que celles du Nord-Pas-de-Calais ou de l'agglomération lyonnaise.

Les 10.400 communes périurbaines appartiennent donc soit aux couronnes périurbaines, soit aux communes multipolarisées.

L'intérêt de cette nouvelle nomenclature, qui se substitue à l'ancien concept de ZPIU -lequel était révisé lors de chaque recensement-, est de fournir une image plus précise de la réalité périurbaine française, et en particulier de quantifier de façon rigoureuse l'importance de la population établie dans ces zones.

La carte ci-dessous identifie les pôles périurbains et leurs couronnes périurbaines.

CARTE N°1

2. Une estimation démographique précise

La population qui réside dans les zones périurbaines est nombreuse : environ un français sur sept -15 % de la population totale- vit à proximité des villes. Sur ce point, les observations de l'INSEE rejoignent celles de l'étude précitée de la SEGESA.

Cette population est également diverse : les études statistiques -souvent trop globales- n'ont, selon votre rapporteur, pas suffisamment souligné la diversité de la population qui vit dans des espaces périurbains. Elle comprend, outre les familles d'agriculteurs installées de longue date, aussi bien des ménages disposant de revenus stables et relativement élevés qui ont volontairement quitté le centre-ville, que des populations menacées par l'exclusion et la pauvreté qui n'ont pas d'autre choix que d'habiter dans de " grands ensembles " excentrés.

a) Une population de neuf millions d'habitants

Selon l'INSEE, sur 57 millions d'habitants recensés en 1990 :

43 millions résident dans l'espace à dominante urbaine, dont notamment :

- 34 millions vivent dans les pôles urbains ;

- 9 millions vivent dans les espaces périurbains ;

13 millions d'habitants résident dans l'espace à dominante rurale qui représente 71 % de la superficie du territoire et 2/3 des communes.

L'accroissement démographique observé dans les espaces périurbains est spécialement remarquable . En effet, leur population, qui ne s'élevait qu'à 6 millions d'habitants en 1982, a augmenté de 50 % entre cette date et 1990 du fait d'un fort excédent naturel , auquel s'est ajoutée l'arrivée de nombreux ménages venus des centres-villes.

b) ... aux caractéristiques sociologiques très diverses

La population périurbaine est marquée par des contrastes tenant à la coexistence de personnes relativement aisées qui ont choisi de quitter la ville afin de vivre à la campagne, et de personnes victimes d'une réelle précarisation économique et sociale.

Des populations relativement aisées

La majorité des ménages établis en zone périurbaine résident dans des maisons individuelles (plus de 80 %), alors que ce chiffre ne s'élève qu'à environ 50 % en banlieue et à environ 25 % dans les villes-centres. Leurs logements ont pour près de 40 % été construits après 1974, et les occupants en sont très majoritairement propriétaires.

Selon l'INSEE : " Les communes périurbaines se sont révélées attractives pour les familles avec enfants. Le pourcentage des jeunes de moins de 20 ans y est largement supérieur à la moyenne nationale 6( * ) ". Le nombre moyen de personnes par ménage , trois environ, est nettement supérieur à celui des villes-centres . Il dépasse également celui des banlieues et de l'espace rural (2,5) ainsi que celui de la France métropolitaine

Les zones périurbaines sont, pour bon nombre d'entre elles, peuplées par des ménages jeunes qui ont des enfants, qui travaillent et ont souvent quitté le centre-ville pour pouvoir bénéficier de logements plus spacieux. Beaucoup d'entre eux ont fait construire leur résidence.

Outre ces habitants figurent également des personnes attirées par l'attrait " résidentiel " de l'environnement périurbain. C'est ainsi que dans l'ouest de Paris nombre de " néo-ruraux " ont bâti leurs maisons sur des terrains occupés par des vergers dont ils apprécient l'agrément. Zone de contraste, le monde périurbain réunit aussi bien des populations aisées que des personnes frappées par la pauvreté.

Des populations précarisées

Votre rapporteur constate que les populations qui vivent dans une situation de précarité -voire de pauvreté- dans les espaces périurbains ou à proximité de ceux-ci, sont nombreuses, même si elles ne sont pas majoritaires.

Cette situation très préoccupante résulte d'une politique du logement qui a sous-estimé la " qualité " pour répondre à la pénurie observée jusqu'à la fin des trente glorieuses. De ce fait, pour des raisons financières, les grands ensembles ont, trop souvent, été implantés aux abords des villes, aux confins du monde urbain et du monde rural. Les exemples des Mureaux ou de Mantes-la-Jolie montrent clairement que des populations parmi les plus menacées par l'exclusion ont été progressivement " reléguées " aux abords de surfaces qu'il faut bien qualifier de " no man's lands " agricoles, peu propices aux échanges culturels et au développement de la vie sociale. En ce sens, bien des quartiers en difficulté sont doublement exclus. La ville les rejette à sa périphérie , tandis que la campagne ou plutôt ce qu'il en reste vu la monotonie des cultures céréalières -souvent les seules possibles à proximité des villes- ne les accueille pas ou les ignore .

Au demeurant, la coexistence des quartiers en difficulté et de l'espace périurbain agricole ne semble pas meilleure dans les villes qui ont la chance de ne pas compter de grands ensembles. Votre rapporteur a constaté en se rendant à Valenciennes, ville-symbole d'une France industrielle profondément touchée par la crise économique, que les quartiers périphériques les plus pauvres, qui ne sont pas tous constitués de grands ensembles, n'entretiennent pas de relations avec l'espace rural qui les environne.

La conjonction de l'exclusion sociale et de l'exclusion spatiale se traduit par des tensions humaines, urbanistiques et environnementales.

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