Rapport d'information n° 534 (2021-2022) de MM. Thierry MEIGNEN et Jean-François RAPIN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 février 2022

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N° 534

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 février 2022

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur les Instituts hospitalo-universitaires et le financement de la recherche biomédicale en France ,

Par MM. Thierry MEIGNEN et Jean-François RAPIN,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .

L'ESSENTIEL

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » et M. Thierry Meignen, rapporteur spécial des crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 » ont présenté le mercredi 23 février 2022 devant la commission des finances les conclusions de leur contrôle budgétaire relatif aux Instituts hospitalo-universitaires et au financement de la recherche biomédicale en France.

I. LES IHU CONSTITUENT UN MODÈLE NOVATEUR, AYANT RÉUSSI À COMBLER CERTAINES DES LACUNES RELATIVES À L'ORGANISATION ET AU FINANCEMENT DE LA RECHERCHE BIOMÉDICALE EN FRANCE

A. UN PILOTAGE DÉFICIENT, DES FINANCEMENTS FRACTIONNÉS ET INSUFFISANTS : LA SANTÉ, PARENT PAUVRE DE LA RECHERCHE FRANÇAISE ?

1. Un déficit persistant de pilotage stratégique et de coordination des acteurs impliqués dans la recherche en santé

Le pilotage de la recherche biomédicale fait intervenir deux tutelles ministérielles , à savoir le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (Mesri) et le ministère des solidarités et de la santé (MSS).

Cette double tutelle se traduit par un clivage entre la recherche fondamentale et la recherche clinique, qui obère la continuité des projets académiques le long de la chaîne de l'innovation, avec pour conséquence un déficit de financement pour la recherche translationnelle, qui permet de préparer le premier essai clinique chez l'homme. Cette segmentation empêche par ailleurs les pouvoirs publics de disposer d'une vision globale des efforts de recherche en santé.

À ce pilotage défaillant s'ajoute un déficit de coordination entre les multiples acteurs qui prennent une part active à la recherche biomédicale . Ainsi, le rôle joué par l'alliance thématique de recherche dédiée à la santé, intitulée Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN) demeure en réalité très limité. En parallèle, les principaux guichets de financement sur projets fonctionnent en silos, leurs programmations restant parfaitement étanches. Enfin, la collaboration entre les universités et les organismes de recherche d'une part, et l'industrie d'autre part, se révèle encore malaisée.

2. Un budget globalement très insuffisant, associé à un émiettement des financements publics : la difficulté à dégager des fonds en faveur de la recherche translationnelle

Au cours de la dernière décennie, la recherche française en santé a fait l'objet d'un sous-investissement particulièrement marqué. Entre 2009 et 2021, le budget consacré par la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » à la recherche en biologie-santé a ainsi chuté de 21 % en euros constants. Cette tendance s'est par ailleurs accentuée sur la période récente, puisqu'entre 2015 et 2018, la dépense publique de recherche en santé a diminué de 15,7 % en France, tandis qu'elle augmentait de manière significative chez la plupart de nos partenaires européens.

Crédits publics de recherche et développement alloués à l'objectif socio-économique « Santé »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données de l'OCDE

Évolution de la dépense intérieure de recherche et développement des administrations (DIRDA) en santé

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, Jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances pour 2022

Le soutien public à la recherche biomédicale se révèle également très morcelé, avec la coexistence d'une multitude de canaux et d'agences de financement . Or, non seulement la diversité des règles afférentes aux appels à projets nuit à l'efficience des financements publics, mais en plus cet émiettement rend ardue toute tentative de consolidation des moyens publics alloués à ce secteur, et obère donc considérablement les capacités d'orientation stratégique des pouvoirs publics.

B. LES INSTITUTS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES : DES STRUCTURES VISIBLES, CAPABLES DE MOBILISER DES FINANCEMENTS CONSÉQUENTS AU SERVICE DE LA RECHERCHE TRANSLATIONNELLE

1. La création de sept IHU pour répondre à l'ambition de donner un nouveau souffle à la recherche biomédicale en France

Les Instituts hospitalo-universitaires (IHU) sont nés des travaux de la Commission sur l'avenir des centres hospitalo-universitaires (CHU) 1 ( * ) , présidée par le professeur Marescaux, en 2009. En pratique, le modèle proposé à travers les IHU était celui d'un rapprochement entre soins et recherche, assorti d'une relative autonomie par rapport aux CHU et aux organismes publics .

La création de ces structures devait permettre à la France de disposer de centres d'excellence au niveau des meilleures institutions internationales en matière de recherche, de soins et de formation, de stimuler durablement la compétitivité en France en favorisant le développement de la filière industrielle biomédicale et enfin de dynamiser la recherche au-delà du périmètre des IHU.

Un premier appel à projets, organisé par l'Agence nationale de la recherche (ANR) dans le cadre du premier programme d'investissements d'avenir (PIA 1) a permis de faire émerger six IHU, auxquels ont été attribués 349,3 millions d'euros pour une période de 8 ans. En 2017, dans le cadre du PIA 3, un second appel à projets a abouti à la sélection d'un 7 ème IHU, doté de 50 millions d'euros sur 10 ans.

Les sept Instituts hospitalo-universitaires

Acronyme

Domaines

Localisation

Membres fondateurs

Création en 2010 - 2011

Imagine

Maladies génétiques et maladies rares

Paris

Universités Paris Cité, Inserm, CHU Necker (AP-HP), Mairie de Paris, Fondation des hôpitaux, AFM-Téléthon

Mix Surg

Chirurgie-mini-invasive guidée par l'image

Strasbourg

Université de Strasbourg, Inria, Ircad, CHU de Strasbourg, Fondation ARC pour la recherche sur le cancer, Karl Storz, Crédit Mutuel

Méditerranée Infection

Maladies infectieuses

Marseille

Aix-Marseille Université, CHU de la Timone (AP-HM), Institut de recherche pour le développement (IRD), Centre de santé des armées, Institut Mérieux, Établissement français du sang (EFS)

ICAN

Maladies cardiométaboliques et nutrition

Paris

Sorbonne Université, Inserm, CHU Pitié Salpêtrière (AP-HP)

IHU-A-ICM

Maladies du système nerveux et neurosciences

Paris

Sorbonne Université, Inserm, CNRS, CHU Pitié Salpêtrière (AP-HP)

Liryc

Rythmologie et modélisation cardiaques

Bordeaux

Université de Bordeaux, Inserm, Inria, CNRS, CHU de Bordeaux

Création en 2018

FOReSIGHT

Ophtalmologie et des neurosciences de la vision

Paris

Institut de la Vision, Inserm, Sorbonne Université et Centre Hospitalier des Quinze-Vingts

Source : commission des finances, à partir des données du ministère de la santé

2. Un regroupement géographique d'acteurs permettant de rapprocher efficacement, autour d'une même thématique, recherche fondamentale et recherche clinique, structures publiques et partenaires privés

Si les IHU se caractérisent actuellement par une grande hétérogénéité, les rapporteurs spéciaux ont acquis la conviction que le succès de ce modèle repose sur le triptyque suivant : une structure autonome, un lieu unique réunissant tous les acteurs, une thématique de recherche .

Les IHU ont ainsi vocation à regrouper sur un même site les acteurs des activités de soin, de recherche, de valorisation et d'enseignement, afin de développer des actions synergiques dans un secteur donné.

Le sentiment, très largement partagé par les organismes de recherche et les tutelles ministérielles, d'un modèle original ayant fait la preuve de son efficacité, a été objectivé par le jury international des IHU dans sa dernière évaluation . Le bilan sur dix ans des données relatives au nombre de projets de recherche translationnelle, au nombre d'articles publiés ou encore à l'impact de ces publications s'avère ainsi extrêmement positif.

3. La dotation allouée aux IHU : un accélérateur vertueux, permettant de renforcer l'attractivité des structures et de diversifier leurs sources de financement

L'octroi du label et de la dotation IHU a considérablement renforcé la visibilité de ces structures, leur permettant de recruter les meilleurs talents internationaux et de mobiliser plus efficacement diverses sources de financement .

Le modèle économique des IHU repose ainsi en grande partie sur les recettes issues des contrats industriels ou de leurs activités de valorisation (dépôts de brevets, création de start-up). Étant donné la relative autonomie financière dont ils bénéficient, les instituts sont également en mesure de consacrer des ressources aux levées de fonds caritatives. Ils disposent enfin d'une forte capacité de coordination pour répondre à des appels à projets d'envergure, leur permettant d'obtenir des financements très compétitifs, à l'échelle régionale, nationale et internationale. Dans ce contexte, l'effet de levier global sur les financements extérieurs est de l'ordre de 86 % sur la période 2012-2020.

In fine , la création des IHU a permis de répondre efficacement à des carences bien identifiées s'agissant de l'organisation et du financement de la recherche biomédicale - à savoir le déficit de recherche translationnelle, le manque de coordination entre les acteurs concernés et la pénurie des financements.

II. À L'HEURE OÙ LE GOUVERNEMENT S'ENGAGE SUR LA VOIE D'UNE EXTENSION DE CE MODÈLE, IL IMPORTE DE RÉUNIR LES CONDITIONS DE RÉUSSITE DES INSTITUTS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES

A. LES SEPT IHU LABELLISÉS : DES STRUCTURES À CONFORTER AFIN D'EN MAXIMISER L'IMPACT SUR LA RECHERCHE ET LE SOIN

1. Un modèle économique encore fragile, rendant indispensable un soutien financier durable de l'État

Le modèle sur lequel reposaient initialement les IHU partait de l'hypothèse qu'avec un financement initial non pérenne, ces derniers pourraient générer des recettes substantielles par le biais de leurs activités de valorisation, leur permettant à terme de s'autofinancer.

Or, après plusieurs années de fonctionnement , force est de constater que ce postulat se révèle assez éloigné de la réalité : les contrats industriels ne permettent pas de générer des revenus réguliers, la montée en charge des plateformes technologiques est particulièrement lente, le potentiel d'incubation des IHU demeure par définition limité et les activités de prise de brevets sont rarement très lucratives.

Les différentes évaluations réalisées partagent ainsi le constat d'un modèle économique encore inabouti . Dans ce contexte, si les IHU ont vocation à atteindre une certaine viabilité économique sans le recours aux financements des PIA à moyen terme, les rapporteurs spéciaux estiment que l'État doit continuer à les soutenir par l'octroi, à compter de 2024, d'une dotation socle renouvelable à intervalles réguliers.

La stabilisation du modèle économique des IHU passe également par une clarification des modalités de partage des recettes issues de la valorisation . Les rapporteurs spéciaux sont ainsi favorables à la désignation, pour chaque IHU, d'un mandataire unique pour les opérations de valorisation. Afin d'inciter les établissements à s'accorder rapidement sur ce point, ce dernier pourrait être érigé en condition sine qua non pour bénéficier d'une dotation socle à compter de 2024.

Plus généralement, il serait opportun de clarifier les attendus des IHU en termes de valorisation , à l'aune de l'expérience accumulée au cours des dernières années.

2. Une gouvernance à aménager pour garantir davantage de synergie entre les parties prenantes

Les IHU ont été portés par des personnalités scientifiques charismatiques et restent très étroitement identifiés à leur fondateur . Dans ce contexte, et afin de garantir leur pérennité, il convient de garantir la mise en place, dans chaque structure, d'une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants.

En parallèle, les relations entre les IHU et leurs membres fondateurs demeurent parfois sources de tension , certains établissements publics regrettant la place limitée qu'ils occupent dans la gouvernance de ces structures. Les rapporteurs spéciaux estiment donc qu'il convient de renforcer le caractère collégial de la gouvernance des IHU, en associant plus étroitement les membres fondateurs aux prises de décisions relatives à la stratégie scientifique et aux choix d'investissement.

Enfin, la politique d'emploi menée par les IHU - avec une proportion très élevée de personnels recrutés en contrats à durée déterminée - soulève des difficultés en termes de ressources humaines, tout en faisant peser le risque employeur sur les membres fondateurs . Pour les rapporteurs spéciaux, les IHU doivent désormais s'attacher à mettre une oeuvre une politique d'emploi plus soutenable et à associer plus directement les membres fondateurs aux décisions de recrutement.

3. Un impact qui reste à concrétiser en termes de soin

La collaboration opérationnelle entre les IHU et les CHU demeure souvent malaisée et peu propice au développement d'actions synergiques . Partant, l'activité des IHU n'a pas toujours permis de rapprocher autant que souhaité les enjeux de recherche et de santé, ni d'améliorer significativement la prise en charge des patients.

La diffusion des innovations jusqu'au bout du continuum recherche-valorisation-amélioration du soin constitue donc un axe d'amélioration significatif pour les IHU . Dans cette perspective, l'implication de la DGOS dans le pilotage des IHU pourrait être significativement accrue.

B. UN MODÈLE À RÉPLIQUER EN TIRANT LES LEÇONS DE L'EXPÉRIENCE ACCUMULÉE AU COURS DES DIX DERNIÈRES ANNÉES

Le Gouvernement a annoncé, en juillet dernier, le lancement d'un appel à projets doté de 300 millions d'euros pour financer six nouveaux IHU. Si les rapporteurs spéciaux sont favorables à l'extension de ce modèle, ils estiment que les pouvoirs publics doivent s'attacher à créer les conditions de réussite des futurs IHU, en tirant les leçons des deux premières vagues et en préservant l'excellence de l'écosystème dans lequel ils ont vocation à prospérer.

1. Réunir les conditions de la réussite des six futurs IHU

Les rapporteurs spéciaux ont acquis la conviction, au cours de leurs travaux, que le succès des IHU tient notamment à l'autonomie que leur confère leur statut de fondation de coopération scientifique . Ce dernier constitue un gage de flexibilité dans les procédures, mais aussi de réactivité et de proximité pour les entreprises, tout en permettant d'attirer et de recruter de grands talents internationaux. Partant, et à rebours des choix qui ont été réalisés lors du lancement de la 2 ème vague de l'appel à projets, ils estiment qu'il faut à nouveau autoriser la création de structures juridiques dotées de la personnalité morale pour porter les IHU.

Il serait également souhaitable que les projets retenus lors de la 3 ème vague des IHU s'appuient sur des centres déjà bien établis , à la tête de réseaux structurés, afin de garantir un rayonnement significatif des structures labellisées . Ce critère de sélection serait à même de favoriser une bonne insertion des IHU dans leur écosystème et une diffusion large des innovations en santé.

Les rapporteurs spéciaux estiment par ailleurs que les IHU issus des deux premières vagues doivent être directement associés aux réflexions préalables au lancement du nouvel appel à projets . Enfin, l'implication des régions ayant constitué un élément déterminant dans la réussite de certains IHU, les rapporteurs spéciaux considèrent que ce facteur de succès gagnerait à être davantage pris en compte à l'avenir.

2. Préserver l'excellence de l'écosystème dans lequel ces structures ont vocation à s'insérer

Les IHU n'ont pas vocation à devenir le modèle prédominant d'organisation de la recherche biomédicale en France. Au contraire, ils doivent être appréhendés comme un outil complémentaire et accélérateur de l'écosystème existant, dont il convient donc de préserver la diversité et le caractère compétitif.

Partant , il est primordial de donner aux établissements nationaux des moyens à la hauteur des enjeux en matière de santé . Si un sursaut budgétaire semble à terme indispensable, la priorité doit être donnée dans l'immédiat à une simplification de la tuyauterie financière, afin de faciliter l'accès des chercheurs aux financements disponibles.

La mise en place de règles harmonisées entre les différents guichets d'appels à projets constituerait une première avancée notable. À plus long terme, il serait judicieux d'établir un mécanisme de coordination des appels à projets financés dans le champ de la santé, en garantissant une plus grande cohérence dans les programmations des différents guichets et en rendant possible la mobilisation conjointe, pour les porteurs de projets, des fonds du Mesri et du MSS.

LISTE DES PRINCIPALES RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1 : à compter de 2024, continuer à octroyer des moyens récurrents aux IHU, sur le modèle d'une dotation socle renouvelable à intervalles réguliers, de manière à conditionner le maintien du label et des financements aux résultats obtenus lors des évaluations (MSS, Mesri).

Recommandation n° 2 : ériger la désignation d'un mandataire unique au sein de chaque IHU en condition sine qua non pour bénéficier d'une dotation socle à compter de 2024 (SGPI, MSS, Mesri).

Recommandation n° 3 : clarifier les attendus des IHU en matière de valorisation et définir des lignes directrices applicables à l'ensemble des structures (SGPI).

Recommandation n° 4 : mettre en place, au sein de chaque IHU, une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants (IHU).

Recommandation n° 5 : renforcer le rôle accordé au conseil d'administration des IHU et associer plus étroitement les membres fondateurs aux décisions relatives à la stratégie scientifique et aux choix d'investissement (IHU).

Recommandation n° 6 : mettre en oeuvre une politique d'emploi plus soutenable et associer davantage les membres fondateurs aux décisions de recrutement (IHU).

Recommandation n° 7 : renforcer l'implication du ministère de la santé dans le pilotage des IHU, pour garantir une meilleure diffusion des innovations permettant d'améliorer la prise en charge des patients (MSS, SGPI).

Recommandation n° 8 : autoriser les projets d'IHU à se construire sur une fondation de coopération scientifique (SGPI, comité de pilotage des IHU).

Recommandation n° 9 : sélectionner prioritairement les projets d'IHU portés par des structures déjà bien établies, à la tête de réseaux structurés, afin de favoriser une diffusion large des innovations en santé (comité de pilotage des IHU).

Recommandation n° 10 : associer les sept IHU existants aux travaux préalables au lancement du nouvel appel à projets IHU (SGPI).

Recommandation n° 11 : réfléchir à des modalités normalisées d'association des régions au pilotage et au financement des IHU (SGPI, comité de pilotage des IHU).

Recommandation n° 12 : créer un portail unique de référencement des appels à projets dans le secteur de la santé, et harmoniser les règles entre les différents guichets (Mesri, MSS).

Recommandation n° 13 : établir un mécanisme de coordination des appels à projets financés dans le champ de la santé, pour garantir une plus grande cohérence dans les programmations des différents guichets (Mesri, MSS).

I. LES IHU CONSTITUENT UN MODÈLE NOVATEUR, AYANT RÉUSSI À COMBLER CERTAINES DES LACUNES RELATIVES À L'ORGANISATION ET AU FINANCEMENT DE LA RECHERCHE BIOMÉDICALE EN FRANCE

A. UN PILOTAGE DÉFICIENT, DES FINANCEMENTS FRACTIONNÉS ET INSUFFISANTS : LA SANTÉ, PARENT PAUVRE DE LA RECHERCHE FRANÇAISE ?

Ces dernières années, de nombreux rapports ont mis en exergue la perte de vitesse de notre pays en matière scientifique. Si la France fait toujours partie des pays les plus intensifs en recherche, l'Observatoire des sciences et techniques souligne que « sa position s'érode parmi ceux-ci, alors que certains pays émergents continuent de progresser rapidement » 2 ( * ) .

La France est ainsi le deuxième pays ayant enregistré le plus fort recul de sa part mondiale des publications scientifiques entre 2005 et 2018 (- 34 %). Après avoir été devancée par l'Inde en 2014, l'Italie en 2016 et la Corée du Sud en 2018, la France occupe désormais le 9 ème rang, avec 2,8 % des publications .

Si tous les domaines ont été affectés par ce recul , ce constat vaut particulièrement pour la recherche biomédicale . La crise du Covid-19 a ainsi mis en exergue non seulement le niveau insuffisant et la dispersion des moyens alloués à la recherche biomédicale, mais également le déficit de pilotage de cette politique publique.

1. Un déficit persistant de pilotage stratégique et de coordination des acteurs impliqués dans la recherche en santé

La recherche biomédicale constitue un vaste domaine disciplinaire allant de la biologie fondamentale (recherche amont, cognitive, expérimentale et technologique) à la recherche clinique (au lit du malade) et en santé publique.

Partant, la recherche en biologie-santé s'articule autour de cinq types de structures :

- les centres hospitalo-universitaires (CHU) ;

- les centres de lutte contre le cancer (CLCC), comme l'Institut Gustave Roussy ;

- les universités ;

- les organismes de recherche - au premier rang desquels le Centre national de recherche scientifique (CNRS) ou l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ;

- les établissements privés partiellement financés par l'État comme l'Institut Pasteur ou l'Institut Curie.

En dépit de la diversité de cet écosystème, de l'excellence des organismes de recherche ainsi que de la forte intégration des soins et de la recherche dans le cadre des CHU, la recherche biomédicale française pâtit d'une absence de stratégie globale permettant de définir des axes prioritaires de financement .

a) Une double tutelle ministérielle entrainant une scission entre recherche amont et clinique

Le pilotage de la recherche biomédicale fait intervenir deux tutelles ministérielles, à savoir le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (Mesri) et le ministère des solidarités et de la santé (MSS).

Selon une répartition qui n'a jamais été réellement formalisée, mais s'est de facto imposée, le Mesri pilote et finance la recherche fondamentale et préclinique, tandis que la recherche clinique relève du MSS . En pratique, le Mesri exerce la tutelle des organismes de recherche, des universités et des fondations de recherche, tandis que les centres hospitaliers, des centres universitaires hospitaliers (CHU), des centres de lutte contre le cancer (CLCC) sont placés sous la tutelle du MSS.

Les outils de pilotage du Mesri

Afin d'assurer la mise en oeuvre de sa stratégie, le Mesri dispose de plusieurs instruments :

- les contrats d'objectifs et de performance conclus avec les organismes de recherche ; chaque organisme de recherche organise la programmation annuelle de ses activités selon les orientations fixées dans ce contrat, en prenant en compte l'évolution des connaissances dans les domaines scientifiques relevant de son champ d'intervention, et les priorités scientifiques des grands sites avec lesquels il collabore ;

- les contrats de sites avec les regroupements d'établissements d'enseignement supérieur ;

- la programmation de l'Agence nationale de la recherche (ANR) , qui est proposée par la direction générale de l'Agence après une consultation des acteurs de la recherche. Depuis 2018, des comités de pilotage de la programmation (CPP), co-animés par l'ANR et la Direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI) du Mesri, associent notamment les alliances de recherche, le CNRS, les autres grands organismes de recherche, France Universités, et les directions générales des autres ministères concernés à l'élaboration de cette programmation. Cette dernière se traduit ensuite dans le plan d'action annuel de l'Agence , soumis au Mesri qui en assure la coordination interministérielle.

Source : Rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, Jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances pour 2022

Il ressort des travaux menés par les rapporteurs spéciaux que cette scission entre recherche amont et recherche aval présente deux inconvénients majeurs :

- elle obère la continuité des projets académiques le long de la chaîne de l'innovation, avec pour conséquence un déficit de financement pour la recherche translationnelle (qui permet de préparer le 1 er essai chez l'homme) ;

- elle empêche les pouvoirs publics de disposer d'une vision globale des efforts de recherche en santé , et nuit ainsi à la capacité stratégique de positionnement de notre pays .

La déconnexion entre les deux ministères était renforcée, jusqu'en mars 2020, par l'absence de structure de dialogue interministérielle permettant aux directions concernées - direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI), direction générale de l'offre de soins (DGOS), direction générale de la santé (DGS) - de coordonner leurs efforts dans le secteur de la recherche biomédicale.

La crise sanitaire ayant mis en exergue les difficultés posées par cette situation, une cellule interministérielle de recherche a finalement été créée pour rendre possible un pilotage interministériel des actions de recherche sur la Covid-19.

La Cellule Interministérielle de Recherche

La Cellule Interministérielle Recherche, créée en mars 2020, est composée à part égale de membres de la DGRI, rattachée au Mesri, ainsi que de la DGS et de la DGOS, rattachées au MSS. Elle assure le suivi de l'ensemble des actions de recherche biomédicale sur la Covid-19, en lien avec les acteurs du terrain et le Gouvernement.

Elle produit des notes hebdomadaires d'information au Gouvernement sur la recherche Covid-19, fournit aux cabinets des analyses et avis divers à la demande, et a contribué à l'installation du comité scientifique vaccin, auquel elle assiste.

À la suite du rapport du Professeur Rossignol, « Essais cliniques en contexte épidémique » 3 ( * ) , elle anime également le comité ad-hoc de pilotage national des essais thérapeutiques (CAPNET), ainsi que le comité mixte vaccin réunissant le comité scientifique vaccin, la plateforme d'essais vaccinaux Covireivac, la task-force vaccin animée par le MSS depuis l'automne, ainsi que l'ANSM et l'HAS.

Source : Rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, Jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances pour 2022

Dans ce contexte, comme l'a souligné l'ANR lors de son audition : « L'expérience de la crise sanitaire rappelle la nécessité d'une coordination opérationnelle renforcée afin d'assurer le transfert rapide des projets entre les différents opérateurs. Parmi les 234 projets de recherche soutenus par l'ANR dans le cadre des appels Flash et RA-Covid, plusieurs ont débouché sur des approches diagnostiques, thérapeutiques ou d'organisation de la prévention nécessitant un accompagnement rapide vers des phases de démonstration ou d'études cliniques. Un pilotage d'ensemble plus soutenu aurait sans doute permis d'accélérer la transition entre ces phases de recherche , soutenues par l'ANR, et les phases de transfert clinique ou industrielle relevant d'autres institutions » 4 ( * ) .

Enfin, il convient de relever que le pilotage de la recherche biomédicale est d'autant plus complexe qu'il implique également depuis quelques années le Secrétariat général pour l'investissement (SGPI) , les programmes d'investissement d'avenir successifs comportant divers appels à projets dédiés à la recherche en santé.

b) Une absence préjudiciable de stratégie nationale d'innovation en santé

Ce défaut de pilotage est d'autant plus problématique que jusque très récemment, notre pays n'était doté d'aucune stratégie nationale d'innovation en santé.

En application de la loi pour l'enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013 5 ( * ) , une stratégie nationale « France-Europe 2020 » a certes été élaborée en 2015, afin de fixer les orientations prioritaires de recherche de notre pays. Ce document définissait des programmes d'actions sur dix grands défis sociétaux, parmi lesquels figurait la santé, avec « la nécessité de développer une offre de soins toujours plus innovante et efficace » 6 ( * ) en associant recherche en laboratoire, recherche clinique et innovation privée pour le bénéfice des patients.

Néanmoins, alors que la loi pour l'enseignement supérieur et la recherche prévoyait une révision tous les cinq ans de la stratégie nationale de la recherche, cette dernière n'a en réalité jamais été renouvelée .

Dans ce contexte, plusieurs thématiques ont fait l'objet d'actions prioritaires - avec l'élaboration en novembre 2016 d'une feuille de route pour la maîtrise de l'antiobiorésistance, d'une stratégie pour l'autisme 2018-2022, d'un plan national « Maladies rares » 2018 - 2022, d'un Plan France Médecine Génomique 2025 ou encore des différents Plans Cancer.

Ces plans thématiques présentent indéniablement l'avantage de mettre en oeuvre une approche intégrée, liant recherche fondamentale, clinique et translationnelle, tout en sanctuarisant des moyens publics au service d'une finalité clairement identifiée . Ils demeurent cependant encore modestes en termes financiers - à titre d'exemple, le Plan Cancer 3 bénéficie d'une enveloppe de 40 millions d'euros par an pour le financement d'appels à projets dédiés - et constituent davantage une exception qu'un mode d'organisation généralisé.

c) Une coordination insuffisante entre les différents acteurs publics impliqués dans la recherche biomédicale

Le pilotage défaillant de la recherche en santé se traduit également par une absence de cohérence globale dans les actions menées par les différents acteurs impliqués. Les travaux menés par les rapporteurs spéciaux ont ainsi mis en exergue un manque de coordination entre :

- les établissements de santé entre eux ;

- les établissements de santé et les organes chargés de définir la programmation des appels à projets ;

- les organismes publics et les acteurs privés qui agissent dans le secteur de l'innovation en santé.

En premier lieu, une multitude d'établissements publics prennent une part active à la recherche biomédicale, sans que leurs actions fassent l'objet d'une réelle coordination. À cet égard, force est de constater que le rôle joué par l'alliance thématique de recherche dédiée à la santé, intitulée Alliance nationale pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN) demeure très limité.

Structures de coordination destinées à réunir les principaux acteurs publics de la recherche, les alliances avaient initialement vocation à participer à l'élaboration de la programmation nationale - et notamment la préparation du plan d'action annuel de l'ANR -, en faisant le lien entre les orientations du Gouvernement et les travaux menés par les organismes.

Créée par convention de coopération en 2009, et réunissant l'Inserm, le CNRS 7 ( * ) , le CEA 8 ( * ) , l'INRAE 9 ( * ) , l'INRIA 10 ( * ) , l'IRD 11 ( * ) , France Universités, la conférence des directeurs généraux de CHU et l'Institut Pasteur, AVIESAN devait ainsi résoudre la question du déficit de pilotage et de coordination au sein de la recherche biomédicale.

Néanmoins, AVIESAN compte peu d'organismes ou d'universités sous tutelle du MSS, si bien que son rôle se réduit aux établissements dépendants du Mesri . Par ailleurs, et comme l'a souligné l'Académie de médecine dans son rapport 12 ( * ) : « La force d'Aviesan, véritable « agence virtuelle », a été sa faiblesse : entité sans personnalité morale, son fonctionnement dépendait de la volonté politique des tutelles, du bon accord entre les responsables des principaux organismes et d'une direction volontariste, ce qui fut le cas pendant les premières années. Toutefois, à partir du moment où la pression politique s'est amoindrie et la volonté de coordination s'est moins affirmée, les organismes ont cherché à recouvrer leur indépendance . Cette dérive s'est concrétisée, au contraire, par une séparation encore plus forte des partenaires au détriment de la coordination au niveau des sites comme à celui des unités de recherche. »

Il existe également un manque patent de coordination, voire une réelle étanchéité entre les programmations des principaux guichets de financement sur projets , à savoir l'ANR pour le Mesri et la DGOS pour le MSS. Dans cette situation, les financements publics ne peuvent être orientés vers des objectifs prioritaires partagés, ce qui nuit considérablement à leur efficience.

Enfin, de nombreux rapports, dont notamment celui du Conseil d'analyse économique (CAE), « Innovation pharmaceutique : comment combler le retard français ? » 13 ( * ) , ont souligné le manque de collaboration entre les universités et les organismes de recherche, d'une part, et l'industrie d'autre part . Le CAE relève notamment que « la France connaît peu de collaborations entre universités et entreprises [et] se situe à la 32 ème position du classement Collaboration Université-Industrie en R&D de la Banque mondiale en 2016, lorsque la Suisse, les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne occupent respectivement les 1 ère , 4 ème , 6 ème et 8 ème positions » 14 ( * ) . Il en résulte un clivage encore très important entre la recherche amont (c'est-à-dire la recherche fondamentale et académique) et la recherche translationnelle et clinique, alors même que l'amélioration de la prise en charge médicale nécessite des allers-retours fréquents entre la paillasse et le lit du patient.

Ce constat a suscité le lancement, en juillet 2021, d'un plan Innovation Santé 2030 , doté de 7 milliards d'euros pour « faire de la France la première nation innovante en santé en Europe » 15 ( * ) .

Issu des travaux du Conseil stratégique des industriels de santé, et dévoilé en juillet 2021, ce plan ambitionne de répondre à l'absence de stratégie nationale et au déficit de coordination dans le secteur de la recherche biomédicale par la création d'une structure d'impulsion et de pilotage stratégique de l'innovation en santé, l'agence d'innovation en santé .

Cette dernière, qui devrait voir le jour au cours du premier semestre 2022, sera notamment chargée de « définir une stratégie nationale d'innovation en santé et assurer sa mise en oeuvre, incluant anticipation et réactivité à court terme et vision stratégique à horizon 2030, ceci en cohérence avec les défis de recherche sur lesquels la France veut investir ». Elle aura également vocation à constituer « le chef d'orchestre de l'innovation en santé en France », ainsi que « l'interlocuteur privilégié et connu des acteurs de l'innovation en santé », afin de renforcer la synergie entre ces derniers.

Les rapporteurs spéciaux se félicitent que le Gouvernement reconnaisse la nécessité de mieux orienter et coordonner les efforts en matière de recherche biomédicale ; ils regrettent néanmoins le caractère tardif de cette prise en compte qui, conjugué à l'insuffisance et à l'émiettement des financements, a contribué à accélérer le décrochage de notre pays dans ce domaine .

2. Un budget globalement très insuffisant, associé à un émiettement des financements publics : la difficulté à dégager des fonds en faveur de la recherche translationnelle
a) Un sous-investissement durable, conjugué à une attrition du budget alloué à la recherche en santé

La dépense intérieure de recherche et développement (DIRD) française a sensiblement diminué depuis 2014, passant de 2,28 % du PIB à 2,19 % du PIB en 2018. Cette érosion est essentiellement due à un recul de la dépense intérieure de recherche et développement des administrations (DIRDA) ; alors que cette dernière participait à hauteur de 36,4 % à la DIRD en 2014, elle n'en représente plus que 34,3 % en 2019.

Évolution de la dépense intérieure de recherche et développement

(en %)

Source : commission des finances, à partir des données du Mesri

Les performances de notre pays sont relativement faibles au regard des comparaisons internationales : la DIRDA représentait 0,76 % du PIB en France en 2018, soit un peu plus que la moyenne OCDE (0,70 %), mais nettement moins que l'Allemagne (0,97 %), la Finlande (0,95 %), la Suède (0,96 %) ou encore la Corée du Sud (0,93 %).

Dépense intérieure de R&D en pourcentage du PIB

(en %)

Commission des finances, à partir des données du Mesri

Bien évidemment, ce décrochage n'épargne pas le secteur de la recherche biomédicale . Entre 2015 et 2018, non seulement la dépense publique de recherche en santé a diminué de 15,7 % (- 195 millions d'euros), mais sa part dans les dépenses intérieures totales de recherche en santé a reculé de 2,4 points, passant de 26,3 % à 23,9 % - soit un niveau très inférieur à la part de la DIRDA dans la DIRD totale, de l'ordre de 34 %.

Évolution de la dépense intérieure de recherche et développement
des administrations (DIRDA) en santé

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, Jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances pour 2022

Ce recul est d'autant plus problématique que, dans le même temps, la plupart de nos partenaires européens ont accru leurs dépenses publiques de R&D dans le secteur de la santé, qu'il s'agisse de l'Allemagne (+ 34,7 %), du Royaume-Uni (+ 16,1 %), du Japon (+ 12,3 %) ou encore de la Corée du Sud (+ 13,9 %).

Crédits publics de recherche et développement
alloués à l'objectif socio-économique « Santé »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données de l'OCDE

In fine , la part de la DIRDA Santé dans la DIRDA totale a reculé de 1,33 point entre 2015 et 2018, témoignant d'un moindre investissement public dans la recherche biomédicale . Pour l'Académie de médecine, la recherche en biologie-santé constitue ainsi le « parent pauvre du budget de la recherche en France » 16 ( * ) .

Part de la DIRDA Santé dans la DIRDA totale

(en millions d'euros et en %)

2015

2016

2017

2018

DIRDA Santé

1 236

1 200

1 177

1 041

DIRDA totale

17 295

17 325

17 494

17 891

Part de la DIRDA Santé dans la DIRDA totale

7,14 %

6,92 %

6,72 %

5,81 %

Source : commission des finances, d'après les données du SIES

Traditionnellement, la recherche publique est financée suivant trois canaux principaux :

- l'approche contractuelle pour les moyens dits récurrents des équipes, des laboratoires et des installations et plateformes, hébergés et ou gérés par les universités ou les centres hospitaliers ;

- l'approche concurrentielle , par le biais des appels à projets nationaux européens, nationaux et régionaux ;

- les crédits propres aux organismes publics pour leurs centres de recherche ou des fondations, en partie financés par le caritatif.

Or, qu'il s'agisse de l'approche contractuelle ou de l'approche concurrentielle, force est de constater que la recherche en santé pâtit d'un sous-financement endémique.

L'Académie de médecine a ainsi relevé que la recherche en biologie-santé ne représentait plus que 18,3 % des crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », contre 20,3 % en 2009. En 12 ans, le budget de la recherche en biologie-santé a ainsi chuté de 21 % en euros constants (2019).

Budget total biologie-santé exécuté en euros constants

(en millions d'euros)

Source : Académie de médecine

Les travaux menés par les rapporteurs ont également montré que le budget de fonctionnement dont disposent les établissements pour mener les activités de recherche se situe très en-deçà de leurs besoins :

- les deux grands opérateurs couvrant le secteur des sciences de la vie, à savoir l'Inserm et le CNRS, disposent d'un budget d'environ 625,9 millions d'euros, dont environ 56 millions d'euros pour financer les laboratoires ;

- au niveau des universités, la part de budget de fonctionnement disponible pour la recherche demeure également modeste ;

- le taux de préciput 17 ( * ) alloué par l'ANR aux établissements pour soutenir les laboratoires et les unités de recherche, de l'ordre de 25 % en 2021, s'avère nettement plus faible que dans d'autres pays européens, même s'il est appelé à progresser dans les années à venir 18 ( * ) .

S'agissant des financements alloués par l'ANR, la proportion de projets financés relevant de la recherche biomédicale, de l'ordre de 36 %, est comparable aux ratios pratiqués dans les autres agences européennes : le secteur « Life sciences » représente 29 % des projets soutenus à l'European Research Council (ERC), 33 % pour la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DGF) allemande, 37 % pour le Fonds national Suisse et 37 % pour le Medical Research Council (MRC) et le Biotechnology and Biological Sciences Research Council (BBSRC) au Royaume-Uni 19 ( * ) .

Ces valeurs relatives doivent toutefois être rapportées aux budgets respectifs de ces agences : tandis que le budget d'intervention représente 2 milliards d'euros pour l'ERC, 3 milliards d'euros pour la DGF, 940 millions de francs suisses pour le Fonds national suisse ou encore 3 milliards de pounds pour le UK Research and Innovation , il n'atteignait que 750 millions d'euros pour l'ANR en 2020.

D'autres facteurs, plus indirects, expliquent également l'insuffisance des financements alloués à la recherche en santé . Il a ainsi été indiqué aux rapporteurs spéciaux que les dotations versées par le MSS aux CHU au titre des « missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation » (MERRI), qui représentent environ 1,6 milliard d'euros par an, étaient souvent utilisées par ces derniers pour répondre aux urgences budgétaires, et non pour renforcer la recherche médicale. En parallèle, si 130 millions d'euros sont programmés annuellement au titre des Programmes hospitaliers de recherche clinique (PHRC), seuls 30 millions d'euros sont en réalité engagés, en raison de la complexité inhérente au pilotage des essais cliniques.

Dans ce contexte, les structures qui portent les programmes scientifiques sont de plus en plus précaires ; elles manquent notamment de moyens récurrents pour financer les infrastructures matérielles et immatérielles (cohortes, collections d'échantillons biologiques, etc.) Ainsi, tandis que l'Inserm et le CNRS estiment que le besoin d'investissement dans les infrastructures de recherche en biologie et santé est de l'ordre de 50 à 100 millions d'euros par an, les établissements ne peuvent y consacrer qu'un montant annuel de l'ordre de 10 millions d'euros.

b) Un morcellement des financements particulièrement accusé, source de complexité pour les chercheurs

Étant donné son organisation spécifique, la recherche biomédicale publique est financée par deux sources principales, dont les budgets ne sont pas fongibles, puisqu'ils relèvent respectivement de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale.

En premier lieu, les organismes et fondations de recherche perçoivent des crédits récurrents sous la forme d'une dotation en provenance de l'action 15 « Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie et de la santé » du programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » de la MIRES.

En parallèle, une enveloppe spécifique, en provenance de l'action 17 « Recherche » du programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire » est fléchée vers les établissements d'enseignement supérieur, afin de financer la recherche universitaire. Essentiellement composée de crédits de masse salariale, cette dotation permet de rémunérer les personnels en charge de la recherche au sein des universités.

Financement récurrent des organismes et fondations de recherche
dans le secteur biomédical

CNRS

546,28

Inserm

501,56

CEA

103,04

Genopole

2,94

Institut Pasteur

70,7

Institut Curie

9,29

Centre d'étude du polymorphisme humain (CEPH, Fondation Jean Dausset)

1,9

Total

1 235,7

Source : projet annuel de performance pour 2022

En second lieu, les établissements de santé publics et privés perçoivent des dotations au titre des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation (MERRI), versées par le MSS. Ces MERRI comprennent une dotation socle, allouée sur la base d'indicateurs d'activité, de l'ordre de 1,5 milliard d'euros, et une part variable , équivalent à 86 millions d'euros.

Les MERRI

Depuis 2016, les MERRI sont composées de deux enveloppes :

- une dotation socle, dont l'objectif est de compenser les charges liées à la réalisation des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation . Cette dotation est répartie en fonction d'indicateurs d'activité (publications scientifiques, enseignement, recherche clinique) ;

- une part variable, qui finance des structures, des activités et des projets de recherche . Elle se compose de 5 catégories : appels à projets ministériels (PHRC, PRME, PREPS, PHRIP, PRT), structures de soutien à la recherche, enseignement et formation (stages, rémunération des internes), centres de référence (financement de centres de références, de recours, de formation, d'expertise et d'évaluation des soins relatifs à certaines pathologies et maladies spécifiques), soins expérimentaux ou non couverts (actes hors nomenclature, médicaments bénéficiant d'une autorisation temporaire d'utilisation).

Source : commission des finances, à partir des données de l'AP-HP

À ces financements récurrents s'ajoutent des crédits ponctuels , octroyés dans le cadre de plans thématiques nationaux , comme par exemple le plan cancer.

Les financements concurrentiels sont particulièrement diversifiés s'agissant de la recherche biomédicale . Le programme « Horizon 2020 » finance de nombreux projets dans le domaine de la recherche en santé, tandis qu'à l'échelle nationale, les principaux appels à projets relèvent de l'ANR et de la DGOS. L'ANR perçoit une dotation en provenance du Mesri (programme 172), tandis que les appels à projets de la DGOS sont financés par le biais d'une dotation de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), au titre de l'Ondam.

En parallèle, un certain nombre d'établissements et d'agences publics émettent des appels à projets thématiques , comme l'Institut national du cancer (Inca), l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) ou encore la très récente Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites - maladies infectieuses émergentes (ANRS-MIE).

L'ANRS-MIE

Au 1 er janvier 2021, le consortium REACTing a fusionné avec l'Agence nationale de recherche sur le sida (ANRS), pour former une nouvelle agence dédiée aux sida, hépatites mais également aux maladies infectieuses émergentes, intitulée ANRS-MIE. Cette nouvelle agence a été chargée de mettre en place un programme de surveillance et d'analyse fonctionnelle des variants de SARS-Cov-2.

Dans les années à venir, l'ANRS-MIE a vocation à devenir un des acteurs clés de la stratégie d'accélération « Maladies infectieuses émergentes et menaces NRBS », dont le Président de la République a annoncé le lancement lors du Conseil stratégique des industries de santé en juin 2021. Coordonnée par le Mesri et destinée à préparer l'État au risque d'émergence de nouvelles pandémies, cette stratégique comprendra un Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR) dédié à la caractérisation des maladies infectieuses émergentes, doté de 80 millions d'euros, opéré par l'ANRS-MIE et piloté par l'Inserm.

Source : Rapport sur les politiques nationales de recherche et de formations supérieures, Jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances pour 2022

Enfin, les PIA jouent un rôle clé dans le financement de la recherche contractuelle , puisque dans le cadre des PIA 1, 2 et 3, plus de 2,3 milliards d'euros de crédits ont été attribués, essentiellement sur appels à projets, à des actions relevant de la recherche en santé. Le PIA 4 comporte par ailleurs trois « stratégies d'accélération » (« Maladies infectieuses et émergentes », « Santé numérique » et « Biothérapies et bioproduction de produits innovants ») dans le domaine de la santé, pour un total de 2,2 milliards d'euros.

Si certaines actions du PIA ciblent précisément la recherche en santé, d'autres programmes plus génériques ont permis de financer des projets dans ce domaine, comme les « Laboratoires d'excellence », destinés à soutenir la recherche d'équipes sur une thématique scientifique donnée ou encore les « Équipements d'excellence », dont la vocation est d'améliorer les infrastructures scientifiques des laboratoires.

Actions financées par les PIA
dans le domaine de la recherche biomédicale

(en millions d'euros)

Nombre projets en bio-santé

Subvention

PPIA 1

Action « Santé biotechnologie »

Infrastructures nationales en bio-santé (INBS)

54

661

Cohortes

Bio-informatique

Nanobiotechnologies

Démonstrateurs pré-industriels en biotechnologie

Action « Instituts hospitalo-universitaires » (IHU)

14

478

Laboratoires d'excellence (Labex)

45

495

Équipements d'excellence (Equipex)

25

136

PIA 2

Action « Recherche hospitalo-universitaire » (RHU)

(appel à projets)

39

295

PIA 3

Action « Programmes prioritaires de recherche » (PPR)

Antibio-résistance

(en cours)

40

Maladies rares

(en cours)

20

Action « Instituts hospitalo-universitaires 2 »

4 IHU

65

Action « Recherche hospitalo-universitaire 2 »

(en cours)

147

Total PIA 1, 2 et 3

181

2 337

PIA 4 -France 2030

Stratégie d'accélération « maladies infectieuses émergentes »

752

Stratégie d'accélération « santé numérique »

650

Stratégie d'accélération « biothérapies et bioproduction de thérapies innovantes »

800

Total PIA 4

2 202

Total PIA

4 539

Source : commission des finances, à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Le plan France 2030 comporte également une enveloppe de 3 milliards d'euros destinée à « produire en France au moins 20 bio-médicaments, notamment contre les cancers, les maladies chroniques dont celles liées à l'âge et créer les dispositifs médicaux de demain » ; l'articulation entre le PIA 4 et France 2030 n'a toutefois pas encore été précisée à ce stade.

Enfin, les collectivités territoriales, et plus particulièrement les régions, jouent un rôle non négligeable dans le financement de la recherche, notamment en santé.

Financement public de la recherche biomédicale

Vecteur financier

Bénéficiaires

Budget de l'État

Mission « Recherche et enseignement supérieur »

Programme 172,
action 15

Organismes de recherche (CNRS, Inserm, CEA, Genopole)

Fondations de recherche biomédicale (Institut Pasteur, Institut Curie, Centre d'étude du polymorphisme humain)

Programme 172

Agences de financement de la recherche sur contrat (ANR, ANRS-MIE)

Programme 150,
action 17

Établissements d'enseignement supérieur (salaires des personnels titulaires en charge de la recherche)

Mission « Santé »

Programme 204

Agence de financement de la recherche sur contrat (Inca, Anses)

Mission « Investissements d'avenir »

Programmes spécifiques pour la santé

Cohortes, Infrastructures nationales en biologie santé (INBS), Instituts hospitalo-universitaires (IHU), Recherche hospitalo-universitaire (RHU), Programmes prioritaires de recherche (PPR) en en santé

Programmes génériques qui soutiennent toutes les sciences dont la santé et l'innovation

Labex, Equipex, Concours d'innovation, etc.

Budget de la sécurité sociale

Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), Missions d'intérêt général d'aide à la contractualisation (MIGAC)

MERRI
(part fixe)

Établissements de santé publics et privés

MERRI
(part variable)

Direction générale de l'offre de soins, pour le financement des différents appels à projets (PHRC, PRT, PRME, PREPS et PHRIP)

Source : commission des finances, à partir des réponses aux questionnaires

Si la multiplicité de ces canaux permet aux chercheurs de bénéficier de diverses sources de financement, elle présente également un caractère peu optimal, comme l'ont souligné la plupart des établissements auditionnés .

En effet, en raison de la double tutelle ministérielle, les financements sont scindés en deux : l'ANR finance la recherche amont et la DGOS la recherche avale. Cette scission se traduit par un déficit de financement particulièrement accusé pour la recherche translationnelle, qui se situe en aval des projets exploratoires soutenus par l'ANR et en amont des projets financés par le Programme hospitalier clinique (PHRC) de la DGOS.

Si, dans ce contexte, un programme de recherche translationnelle en santé (PRTS) a été lancé dès 2013 pour mobiliser conjointement des financements des deux ministères, la contribution du MSS demeure très modeste, de l'ordre de 5 millions d'euros par an.

Les différences de modalités de gestion entre les budgets relevant du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui ne sont pas fongibles, rendent par ailleurs difficile l'utilisation du budget délégué par la DGOS à l'ANR, si bien qu'en pratique, seuls un à deux millions d'euros sont engagés chaque année.

L'éclatement des financements contribue, par ailleurs, à complexifier l'organisation de la recherche , puisque la nécessité de coordonner les fonds en provenance du MSS et du Mesri a donné lieu à la création d'agences ou de structures spécialisées, comme l'Inca pour la recherche en cancérologie, ou l'ANRS-MIE pour le VIH, les hépatites et les maladies infectieuses émergentes. Or, comme l'a rappelé l'Académie de médecine, « l'origine de la dégradation continue de la recherche en biologie-santé dans notre pays (...) découle en grande partie d'un émiettement et d'une superposition des structures publiques qui ne font que s'accroître depuis plus d'une vingtaine d'années, chaque nouvelle maladie conduisant à créer en réaction une agence ou structure autonome spécialisée (...) accroissant à chaque fois les incohérences et gaspillages du dispositif » 20 ( * ) .

In fine , néanmoins, ce sont les chercheurs qui pâtissent le plus de ce morcellement . En effet, les différentes règles afférentes aux appels à projets (dépenses éligibles, modes de prise en compte de ces dernières, prise en charge intégrale ou exigence d'un co-financement, dates de début et de fin des financements), de même que les points d'étape associés, constituent une source de complexité certaine, obligeant les chercheurs à adapter leurs dépenses aux règles et au calendrier de chaque financeur. Les équipes sont ainsi contraintes de consacrer une part significative de leur temps et de leur énergie à la recherche de fonds, au détriment de leurs activités.

Les rapporteurs spéciaux regrettent également que la multiplicité des canaux de financement rende particulièrement complexe toute tentative de consolidation des moyens publics alloués à la recherche biomédicale ; dans ce contexte, les pouvoirs publics sont peu à même de disposer d'une vision d'ensemble des crédits budgétaires et extrabudgétaires consacrés à cette politique publique. Partant , l'émiettement des financements obère considérablement les capacités d'orientation stratégique de la recherche.

Dans ce contexte, il a été décidé en 2010 de créer un nouveau mode d'organisation et de financement de la recherche biomédicale, sous la forme d'instituts hospitalo-universitaires permettant de :

- combler le manque de financement de la recherche translationnelle ;

- renforcer la coordination entre les acteurs académiques et économiques ;

- concentrer des moyens publics conséquents sur des thématiques de recherche prioritaires, dans lequel notre pays fait preuve d'excellence.

B. LES INSTITUTS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES : DES STRUCTURES VISIBLES, CAPABLES DE MOBILISER DES FINANCEMENTS CONSÉQUENTS AU SERVICE DE LA RECHERCHE TRANSLATIONNELLE

1. La création des sept IHU pour répondre à l'ambition de donner un nouveau souffle à la recherche biomédicale en France

Les Instituts hospitalo-universitaires (IHU) sont nés de la réflexion sur les CHU, à l'occasion des 50 ans de l'ordonnance du 30 décembre 1958 qui instituait ces derniers. Initialement préconisée par la Commission sur l'avenir des CHU en 2010 21 ( * ) , présidée par le professeur Marescaux, la création des IHU avait vocation à « donner un nouveau souffle à la recherche biomédicale en France, tout particulièrement la recherche translationnelle et la recherche en amont qui l'enrichit ».

Dans un second rapport consacré exclusivement aux IHU 22 ( * ) , la Commission s'est attachée à définir l'ambition de ces structures, destinées à :

- permettre à la France de disposer de centres d'excellence au niveau des meilleures institutions internationales en matière de recherche, de soins et de formation ;

- stimuler durablement la compétitivité en France en favorisant le développement de la filière industrielle biomédicale ( i.e. apporter plus de visibilité à cette filière, irriguer le tissu économique, faire évoluer les cultures pour favoriser les partenariats, notamment public-privé) ;

- dynamiser la recherche au-delà du périmètre des IHU en incitant les efforts de recherche à se structurer autour de ces centres emblématiques.

En pratique, le modèle proposé à travers les IHU était celui d'un rapprochement entre soins et recherche, assorti d'une relative autonomie par rapport aux CHU et aux organismes publics . La Commission sur l'avenir des CHU a précisé les principes structurants de ces IHU :

- être en nombre limité et désignés après un appel à candidatures compétitif ;

- offrir un niveau d'excellence internationale en matière de soins, de recherche et d'enseignement ;

- être conçus autour de talents reconnus mondialement ;

- s'organiser autour d'un projet scientifique cohérent et monothématique ;

- être localisés au sein d'un CHU sur un site unique ou un périmètre géographique limité ;

- disposer d'un statut spécifique permettant d'attirer les meilleurs talents internationaux et de simplifier les collaborations entre la recherche et l'industrie ;

- intégrer un objectif de transfert de technologie et inclure des co-financements et partenariats avec le secteur privé, afin de développer la recherche « translationnelle » et partenariale.

À l'issue de ce rapport, les IHU entrant dans les priorités d'investissement identifiées par le rapport Juppé-Rocard 23 ( * ) , il a été décidé de financer ces structures dans le cadre du premier programme d'investissement d'avenir (PIA 1).

L'ANR, désignée comme opérateur du PIA sur l'action IHU, a organisé le premier appel à projets en 2010, la sélection des structures étant ensuite confiée au comité de pilotage des IHU.

Le comité de pilotage des IHU

Définie dans le cadre de la convention signée en juillet 2010 entre l'État et l'ANR s'agissant de l'action IHU, la composition du comité de pilotage a été modifiée en mars 2017. Désormais :

- le comité est coprésidé par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministre chargé de la santé ;

- il comprend le directeur général pour la recherche et l'innovation, le directeur général pour l'enseignement supérieur et l'insertion professionnelle, le directeur des affaires financières à l'administration centrale des ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche, le directeur général de la santé, le directeur général de l'organisation des soins ;

- le directeur général et le directeur de département chargé des investissements d'avenir de l'Agence nationale de la recherche ainsi qu'un membre du SGPI assistent de droit au comité de pilotage. Il en est de même du président du jury ;

- le directeur général de la compétitivité, de l'industrie et des services assiste aux travaux du comité de pilotage.

Le comité de pilotage fait appel aux représentants d'autres ministères lorsque les sujets traités les concernent.

Ce comité a également défini des indicateurs de suivi de l'avancement du projet, qui sont recueillis par l'ANR et donnent lieu à une restitution annuelle sous forme d'un « rapport évaluation d'impact » transmis au SGPI et d'une synthèse de suivi de l'action publiée sur internet. Il s'agit d'indicateurs :

- de recherche (nombre de projets de recherche translationnelle ou multidisciplinaire en cours, publications scientifiques) ;

- d'attractivité (nombre de chercheurs et d'enseignants-chercheurs internationaux accueillis) ;

- de formation (nombre d'étudiants en double cursus) ;

- de valorisation (nombre de brevets déposés ou actifs, nombre de start-up créées) ;

- et enfin de soin (nombre de recommandations de prévention ou de prises en charge s'appuyant sur des travaux de l'IHU, nombre d'essais cliniques observationnels et thérapeutiques).

Source : commission des finances, à partir des réponses au questionnaire

Ce premier appel à projets a permis de faire émerger six IHU, associant une université, un établissement de santé et des organismes de recherche.

En 2017, dans le cadre du troisième programme d'investissements d'avenir (PIA 3) un second appel à projets IHU a permis de sélectionner et financer un 7 ème IHU, labellisé en 2018.

Les sept Instituts hospitalo-universitaires

Acronyme

Domaines

Localisation

Porteurs du projet

Création en 2010 - 2011

Imagine

Maladies génétiques et maladies rares

Paris

Universités Paris Cité, Inserm, CHU Necker (AP-HP), Mairie de Paris, Fondation des hôpitaux, AFM-Téléthon

Mix Surg

Chirurgie mini-invasive guidée par l'image

Strasbourg

Université de Strasbourg, Inria, Ircad, CHU de Strasbourg, Fondation ARC pour la recherche sur le cancer, Karl Storz, Crédit Mutuel

Méditerranée Infection

Maladies infectieuses

Marseille

Aix-Marseille Université, CHU de la Timone (AP-HM), Institut de recherche pour le développement (IRD), Centre de santé des armées, Institut Mérieux, Établissement français du sang (EFS)

ICAN

Maladies cardiométaboliques et nutrition

Paris

Sorbonne Université, Inserm, CHU Pitié Salpêtrière (AP-HP)

IHU-A-ICM

Maladies du système nerveux et neurosciences

Paris

Sorbonne Université, Inserm, CNRS, CHU Pitié Salpêtrière (AP-HP)

Liryc

Rythmologie et modélisation cardiaques

Bordeaux

Université de Bordeaux, Inserm, Inria, CNRS, CHU de Bordeaux

Création en 2018

FOReSIGHT

Ophtalmologie et des neurosciences de la vision

Paris

Institut de la Vision, Inserm, Sorbonne Université et Centre Hospitalier des Quinze-Vingts

Source : commission des finances, à partir des données du ministère de la santé

Les IHU issus du PIA 1 ont été dotés de 349,3 millions d'euros , dont 134,9 millions d'euros de dotation consomptible et 214,4 millions d'euros d'intérêts générés par le placement d'une dotation non consomptible de 680 millions d'euros.

Le 7 ème IHU, issu du PIA 3, s'est vu attribuer 50 millions d'euros sur 10 ans , le financement étant assuré par une dotation décennale versée au rythme régulier de 5 millions d'euros par an.

Au printemps 2019, les six premiers IHU ont fait l'objet d'une évaluation organisée par l'ANR et menée par un jury international, à l'issue de laquelle il a été décidé de prolonger leurs financement jusqu'à la fin de l'année 2024, 5 IHU bénéficiant en parallèle d'un abondement complémentaire de 74 millions d'euros, provenant des intérêts d'une dotation non consommables d'environ 433 millions d'euros.

Financement des Instituts hospitalo-universitaires

(en millions d'euros)

Lancement

Fin de projet

Dotation 2011-2019

Dotation 2020-2025

ICAN

Institute of cardiometabolism and nutrition,

Paris (Pitié-Salpêtrière)

17 juin 2011

Initialement31 décembre 2019

Prolongé jusqu'au 31 décembre 2024

45

Conservation du label, mais pas de financement complémentaire

IHU-A-ICM

Institut du cerveau,
Paris (Pitié-Salpêtrière)

55

17

Imagine

Institut des maladies génétiques,

Paris (Necker - Enfants-Malades)

64,7

17

Lyric

L'Institut de rythmologie et modélisation cardiaque, Bordeaux

45

16

Méditerranée Infection

Institut de lutte contre les maladies infectieuses, Marseille

72,3

11

IHU Mix Surg

Institut de chirurgie guidée par l'image, Strasbourg

67,3

13

Total

349,3

74

FOReSIGHT, PREVISION- Permettre la Restauration de la VISION , Paris (Institut de la Vision/ Centre Hospitalier National d'Ophtalmologie CHNO)

15 novembre 2018

31 août 2028

Dotation 2018 - 2028

50

Source : commission des finances, à partir des réponses au questionnaire

En parallèle, six projets supplémentaires à l'issue du PIA 1 et trois projets additionnels à l'issue du PIA 2 se sont vus octroyer un financement moindre (de l'ordre de 4 à 8 millions d'euros sur 5 ans), sans toutefois bénéficier du label IHU. Sont également rattachés à l'action « IHU » du PIA 1 deux « pôles hospitalo-universitaires en cancérologie » (PHUC), non labellisés IHU mais sélectionnés en 2012 au terme d'un appel à projets spécifique.

Les différentes évaluations auxquels ont été soumis les IHU convergent pour souligner que ces derniers ont permis de combler, dans certains domaines précis, les principales lacunes de la recherche biomédicale française, à savoir le déficit de recherche translationnelle, le manque de coordination entre les acteurs concernés et la pénurie des financements .

2. Un regroupement géographique d'acteurs permettant de rapprocher efficacement, autour d'une même thématique, recherche fondamentale et recherche clinique, structures publiques et partenaires privés

Si les IHU se caractérisent par une grande hétérogénéité, tant du point de vue de leur fonctionnement que des résultats obtenus, les rapporteurs ont acquis la conviction que le succès de ce modèle repose sur le triptyque suivant : une structure autonome, un lieu unique réunissant tous les acteurs, une thématique de recherche .

En pratique, la plupart des IHU existaient sous une autre structure avant l'obtention du label - à l'exception d'ICAN et de LIRYC, qui ont été conçus de novo en réponse à l'appel à projets. Après leur labellisation, ils ont pris la forme juridique de fondations de coopération scientifique , adossées à un conseil d'administration garantissant une représentation de tous les membres fondateurs, en fonction du statut souhaité par ces derniers. En parallèle, un conseil d'orientation scientifique a systématiquement été instauré pour valider les orientations de recherche.

Ce mode de gouvernance avait vocation à rendre effective une collaboration équilibrée entre les différents membres fondateurs du projet, tout en accordant à la direction de l'IHU « une véritable autonomie de gestion en matière stratégique, financière et managériale » 24 ( * ) . Par ailleurs, la création d'une structure juridique autonome présentait l'intérêt de développer, entre les membres fondateurs, une responsabilité commune sur l'utilisation des financements alloués , tout en permettant de ne pas attribuer des fonds à un membre fondateur plutôt qu'à un autre.

Toujours dans cette optique, la direction générale a été confiée, dans la majorité des cas, à un scientifique reconnu et visible , assisté d'une structure administrative. Comme l'a souligné la mission conjointe de l'inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR) et l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) relative au modèle économique des six IHU créés dans le cadre du PIA 1, la gouvernance des IHU se caractérise « par une assez large autonomie laissée à la personnalité scientifique qui [la] porte » 25 ( * ) . Néanmoins, une part importante des personnels qui composent les IHU reste attachée aux membres fondateurs (université, CHU, organisme) et rémunérée par ces derniers.

Par ailleurs, tous les projets - à l'exception d'ICAN, dont les financements n'ont pas été renouvelés - se sont construits autour et à partir d'un projet immobilier . Pour la mission conjointe de l'IGAENR et de l'IGAS : « L'existence d'un nouveau bâtiment a été vue par les porteurs comme un facteur stratégique donnant de la visibilité et de l'attractivité au projet » 26 ( * ) .

À cet égard, les rapporteurs spéciaux notent que la capacité à disposer d'un parc immobilier abordable et attractif constitue un élément indispensable à la diversification des activités des IHU . La situation de l'IHU Foresight demeure de ce point de vue particulièrement problématique, le modèle économique retenu en 2005 imposant des conditions de redevances et de loyers désormais peu attractives pour les occupants de l'Institut de la Vision, et entraînant le départ d'un grand nombre d'équipes. Il importe donc que les pouvoirs publics se saisissent rapidement de ce sujet, qui menace à court terme l'équilibre économique de l'IHU.

En dépit de la diversité qui caractérise les IHU, cette unicité de lieu semble avoir facilité le développement de projets communs entre hôpital, université et organisme de recherche et donc favorisé la recherche translationnelle ; la localisation, au même endroit, de chercheurs, de scientifiques et de médecins a ainsi constitué une véritable valeur ajoutée, en offrant une traduction clinique aux découvertes scientifiques.

Des entreprises sont également souvent présentes sur site , certains IHU proposant des plateformes pour accueillir des industriels ou des start-up. Or, comme l'a signalé le professeur Sahel lors du déplacement des rapporteurs à l'IHU Foresight, les industriels sont des partenaires essentiels pour parvenir à valoriser les résultats de la recherche , que ce soit par leur capacité à faire émerger des projets à fort potentiel, ou à en faciliter le développement (avec, par exemple, la prise en charge du coût important des essais cliniques ou du travail réglementaire nécessaire pour contrôler l'absence de risque d'un traitement ou d'un outil diagnostic).

Enfin, les IHU se sont constitués autour de thématiques spécifiques , qu'il s'agisse du domaine des troubles cardiaques (Lyric), de la chirurgie mini-invasive (Mix Surg), des neurosciences (ICM), de la vision (Foresight) ou encore des maladies infectieuses (Méditerranée Infection), génétiques (Imagine) ou cardio-métaboliques (ICAN).

In fine , ces trois caractéristiques - structure autonome, co-localisation, thématique unique - ont rendu possible le développement d'actions synergiques . Pour le CNRS, le point fort des IHU réside ainsi dans la « forte collaboration entre la clinique et la recherche de haut niveau dans un lieu unique » 27 ( * ) . En parallèle, comme l'a souligné la direction de l'IHU Foresight, ce modèle permet d'irriguer l'hôpital avec une culture de la recherche qui n'existait pas nécessairement auparavant, dans le but d'améliorer la prise en charge des patients. Enfin, comme l'a résumé le professeur Jean-Yves Delattre, directeur de l'IHU-A-ICM, le lancement du programme IHU a permis de créer des liens entre des structures et des équipes qui agissaient auparavant de façon dispersée.

Le sentiment, très largement partagé par les organismes de recherche et les tutelles ministérielles, d'un modèle original ayant fait la preuve de son efficacité, a été objectivé par le jury international dans sa dernière évaluation des IHU : « bien que chaque IHU ait ses forces et faiblesses spécifiques, chacun d'eux fait clairement preuve d'impact translationnel, d'innovation et de science de qualité . Ils présentent une valeur ajoutée significative par rapport aux activités de recherche et de soins menées par les mêmes équipes avant la création de l'IHU ».

L'analyse de la synthèse annuelle publiée par l'ANR dans le cadre du suivi des actions du PIA est à cet égard emblématique. Ainsi, parmi les indicateurs de suivi de l'action IHU retenus par le comité de pilotage, figure le nombre de projets de recherche translationnelle ou multidisciplinaire. Or, entre 2012 et 2019, le nombre de projets en cours a été multiplié par trois, passant d'un peu plus de 400 à 1 353 - la baisse constatée en 2020 résultant essentiellement de la crise sanitaire.

Nombre de projets de recherche translationnelle ou multidisciplinaire

Source : ANR

Le bilan sur dix ans des données de bibliométrie se révèle également très positif : entre 2012 et 2020, 26 230 articles ont été publiés par les IHU. Par ailleurs, l'analyse des publications réalisées au cours des cinq dernières années (2016 - 2020) permet de conclure à une augmentation globale du nombre d'articles publiés (+ 26 % par rapport à la période 2011 - 2015) allant de pair avec une nette amélioration de l'impact des publications, puisque la proportion d'articles en catégorie A (10 % des revues ayant l'impact le plus élevé) a progressé de 13 %.

Évolution du nombre d'articles publiés par catégorie

Source : ANR

De manière générale, les données publiées par l'ANR démontrent que, dans les domaines de recherche concernés, non seulement les IHU produisent plus d'articles que la moyenne française, mais en plus, ces articles sont davantage repris . Le pourcentage d'articles parmi les 1 % et les 10 % les plus cités est ainsi globalement plus élevé au sein des IHU, comme le montrent les graphiques suivants.

Proportion d'articles cités

Source : ANR

Pour les rapporteurs, les IHU ont donc incontestablement réussi à pallier le déficit de recherche translationnelle dont souffre notre pays .

3. La dotation allouée aux IHU : un accélérateur vertueux, permettant de renforcer l'attractivité des structures et de diversifier leurs sources de financement

L'octroi du label et de la dotation afférente ont considérablement renforcé la visibilité des IHU, leur permettant de recruter des talents internationaux et de mobiliser plus efficacement diverses sources de financement.

a) Un label visible, permettant de renforcer l'attractivité nationale et internationale des structures bénéficiaires

Dotés d'équipements de pointe et de moyens financiers suffisants pour attirer des équipes qualifiées, les IHU ont pu progressivement renforcer leur rayonnement, notamment par le biais des publications internationales .

Comme l'a résumé l'Inserm, l'association des partenaires, des tutelles et des hôpitaux pour accélérer le transfert de la recherche vers les patients et vers l'industrie « favorise la visibilité thématique [...] cette visibilité accrue est un atout de notoriété pour le site hospitalier, propice à attirer de nouvelles compétences, hospitalières et scientifiques ».

Ainsi, l'indicateur de suivi relatif à l'attractivité des IHU, apprécié au regard du nombre de chercheurs et d'enseignants chercheurs internationaux accueillis durant un minimum de trois mois, a connu une progression notable depuis 2013, comme le montre le graphique infra . Depuis 2012, en cumulé, plus de 1 100 chercheurs internationaux ont été accueillis .

Nombre de chercheurs internationaux accueillis annuellement

Source : ANR

Il a par ailleurs été indiqué aux rapporteurs spéciaux lors de leur déplacement à l'IHU - A - ICM, que le label et les financements IHU avaient permis à des structures déjà existantes de recruter les scientifiques les plus brillants. Le modèle des IHU permet ainsi de concentrer des talents internationaux au sein de structures dédiées, donc de déployer des projets toujours plus ambitieux et visibles.

b) Une dotation générant un fort effet de levier sur les financements publics et privés

Les auditions et déplacements menés par les rapporteurs ont mis en exergue le fort effet de levier généré par l'octroi d'un financement IHU . L'ANR estime ainsi dans son évaluation annuelle que depuis le lancement des IHU, l'effet de levier global (rapport entre les cofinancements déclarés et le montant d'aide versé) est de l'ordre de 86 % en moyenne , l'ampleur de cet indicateur variant de 44 % à 276 % selon les IHU.

Un total de 301,7 millions d'euros de cofinancements a ainsi été déclaré entre 2014 et 2020, dont 44,4 millions d'euros pour la seule année 2020 - les 19,3 millions d'euros déclarés au titre d'autres projets des PIA (Labex, Equipex, RHU) n'étant pas comptabilisés dans ce total.

Aujourd'hui, les cofinancements d'origine publique (collectivités territoriales, agences nationales de financement) et privée (contrats avec des entreprises, mécénat, valorisation) représentent des montants relativement équivalent, de l'ordre de 18 millions d'euros, contre 8 millions d'euros pour les fonds issus d'appels à projets européens ou internationaux.

Répartition des cofinancements déclarés par nature

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir des données de l'ANR

(1) La mobilisation de fonds privés

En pratique, les financements alloués aux IHU ont permis à ces derniers de diversifier leurs ressources, en mobilisant des fonds privés. En effet, étant donné leur forme hybride publique-privée, les IHU constituent des objets particulièrement attractifs pour les entreprises. De part leur visibilité, de même que le caractère autonome et flexible de leur direction, ils constituent des partenaires de choix, permettant de créer des ponts avec l'industrie.

Ainsi, depuis 2010, les contrats de recherche partenariale conclus par les IHU représentent plus de 140 millions d'euros - soit un montant équivalent au tiers de la dotation globale allouée aux 6 IHU pour la période 2011 - 2019 au titre des investissements d'avenir .

Les IHU parviennent également à dégager des ressources additionnelles à travers leurs activités de valorisation, qu'il s'agisse :

- du dépôt de brevets , dans l'optique que l'un d'eux procure à terme des revenus substantiels ;

- de la création de start-up , parfois incubées au sein même des locaux, afin de mettre au point des inventions ou d'irriguer le tissu économique en répondant à des besoins de niche.

En 2020, 50 brevets et cinq nouvelles start-ups ont ainsi été déclarés par les IHU. Au total, depuis 2012, 415 brevets ont été déposés et 41 start-ups créées .

Indicateurs de suivi en termes de valorisation pour les IHU

Source : ANR

Ces résultats sont encourageants et témoignent d'une forte implication des IHU dans la valorisation de leurs travaux de recherche ; dans son évaluation de 2019, le jury international a ainsi relevé que les IHU avaient « considérablement amélioré leur engagement dans la valorisation » au cours des dernières années.

Les rapporteurs spéciaux notent cependant la persistance d'une grande hétérogénéité s'agissant des activités de valorisation des IHU, qu'il s'agisse des structures mobilisées, de l'organisation choisie, ou encore des conventions négociées avec les membres fondateurs pour garantir le partage de la propriété intellectuelle .

L'IHU-A-ICM présente ainsi des résultats particulièrement aboutis dans ce domaine, avec le lancement en 2012 d'IPEPS, un incubateur de start-up dédié aux maladies du système nerveux. À ce jour, les 25 start-ups hébergées ont réussi à lever 450 millions d'euros, à créer 900 emplois et à lancer 10 produits innovants sur le marché.

Cet IHU peut également compter sur plus de 300 partenariats de recherche et développement, tandis que 40 ingénieurs et jeunes chercheurs sont financés annuellement par l'industrie.

Enfin, la Fondation reconnue d'utilité publique ICM - qui préexistait à la création de l'IHU - dispose de sa propre cellule de valorisation . À cet égard, les rapporteurs spéciaux ont pris connaissance avec un grand intérêt de la convention partenariale négociée par l'ICM avec l'AP-HP, l'Inserm, l'UMPC et le CNRS, qui confère à cette cellule un mandat unique en termes de valorisation - qu'il s'agisse d'accords de prestation de services, de collaboration de recherche et d'exploitation -, le produit de ces activités étant réparti à parts égales entre les partenaires. Cette unicité d'interlocuteur constituerait un avantage comparatif indéniable du point de vue des entreprises, en offrant la garantie d'une réponse rapide.

(2) Les ressources issues de la générosité du public

Étant donné la relative autonomie financière dont ils bénéficient vis-à-vis des membres fondateurs, les IHU peuvent également consacrer des ressources à des missions éloignées de celles des organismes de recherche et des hôpitaux, comme les levées de fonds caritatives.

Partant, les ressources issues d'actions de philanthropie ou de mécénat se révèlent significatives pour les IHU , leur permettant de développer de nouvelles activités, tout en exerçant un rôle de médiation scientifique auprès du grand public.

Comme le montre le tableau infra , l'IHU-A-ICM se distingue ainsi par une très forte capacité à lever des fonds auprès du public : le budget 2022 repose ainsi à hauteur de plus d'un quart (26,3 %) sur la générosité publique, la collecte de fonds auprès des 250 000 donateurs devant générer 20,9 millions d'euros.

Part du mécénat et des dons dans les produits

(en millions d'euros et en %)

Mécénat et dons

Part des dons dans les produits totaux

ICAN

0,1

1,2 %

IHU-A-ICM

18,3

28,9 %

Imagine

3,7

13,7 %

Lyric

0,9

6,7 %

Méditerranée Infection

Nc

Nc

IHU Mix Surg

Nc

Nc

FOReSIGHT

1,0

4,5 %

Source : commission des finances à partir des rapports annuels d'activité.

Plus généralement, il a été indiqué aux rapporteurs qu'en augmentant la notoriété de la structure, les financements alloués au titre des IHU avaient généré un fort effet de levier sur la collecte réalisée auprès du public.

(3) La capacité à coordonner des réponses à des appels à projets

Les IHU disposent d'une forte capacité de coordination dans la réponse aux appels à projets, ce qui leur permet d'obtenir des financements très compétitifs à l'échelle nationale ou européenne. L'IHU-A-ICM a ainsi indiqué enregistrer des taux de succès aux appels à projets de l'ANR de l'ordre de 38 %, quand la moyenne nationale se situe à 23 %.

À l'échelle de la région Ile-de-France, l'IHU Imagine a par ailleurs réussi à devenir gestionnaire d'un Domaine d'Intérêt Majeur Thérapie Génique, rassemblant de nombreux partenaires hospitaliers, académiques, associatifs et industriels, pour accélérer le développement de la thérapie génique.

Pour les rapporteurs spéciaux, le financement des IHU obéit donc à une logique particulièrement vertueuse : les fonds publics alloués jouent un rôle d'accélérateur en renforçant la visibilité et l'attractivité de ces structures, ce qui leur permet, en retour, de diversifier leurs ressources en mobilisant plus efficacement d'autres vecteurs financiers .

In fine , la création des IHU a permis de répondre efficacement à des carences bien identifiées s'agissant de l'organisation et du financement de la recherche biomédicale . Alors que cette dernière souffre d'un émiettement des moyens qui lui sont consacrés, associé à un déficit de pilotage et de stratégie, les IHU présentent l'intérêt de mobiliser des financements conséquents au service de thématiques de recherche clairement identifiées comme prioritaires .

Les IHU demeurent néanmoins des structures encore jeunes et fragiles, dont le modèle doit être conforté ; par ailleurs, alors que le Gouvernement a annoncé le lancement d'un appel à projets destiné à labelliser six nouveaux IHU, les rapporteurs spéciaux estiment qu'il importe de tirer les leçons des dernières années pour réunir les conditions de réussite des structures qui seront sélectionnées.

II. À L'HEURE OÙ LE GOUVERNEMENT S'ENGAGE SUR LA VOIE D'UNE EXTENSION DE CE MODÈLE, IL IMPORTE DE RÉUNIR LES CONDITIONS DE RÉUSSITE DE CES STRUCTURES

A. LES SEPT IHU LABELLISÉS : DES STRUCTURES À CONFORTER AFIN D'EN MAXIMISER L'IMPACT SUR LA RECHERCHE ET LE SOIN

1. Un modèle économique encore fragile, rendant indispensable un soutien financier durable de l'État

Le modèle sur lequel reposaient initialement les IHU se fondait sur l'hypothèse qu'avec un financement initial non pérenne, ces derniers pourraient générer des recettes substantielles par le biais de leurs activités de valorisation, leur permettant à terme de s'autofinancer.

Or, après plusieurs années de fonctionnement, force est de constater que ce postulat se révèle assez éloigné de la réalité. Ainsi, les contrats ne permettent pas de générer des revenus réguliers. En parallèle, la montée en charge des plateformes technologiques s'est révélée particulièrement lente , en raison des délais incompressibles pour la création de bâtiments dédiés et la recherche de partenariats diversifiés, limitant à court terme les potentialités en termes de valorisation .

Par ailleurs, comme l'a relevé la mission conjointe de l'IGAS et l'IGAENR, « l'engagement résolu des IHU dans la voie du développement de start-up [...] donne lieu à des initiatives prometteuses, mais dont le potentiel d'incubation est forcément limité en nombre et en durée ». En pratique, après la phase d'amorçage, des relais de financement doivent être trouvés pour les entreprises créées.

Enfin, les activités de prise de brevets sont rarement très lucratives, les coûts de dépôt et de maintien en activité demeurant élevés . Dans ce contexte, alors que la mission conjointe de l'IGAS et l'IGAENR pointait dès 2016 une « absence générale de réflexion sur les politiques à conduire en matière de brevets » 28 ( * ) , il est regrettable qu'aucune avancée n'ait été réalisée à ce sujet .

Les rapporteurs spéciaux relèvent donc que les différentes évaluations réalisées partagent le constat d'un modèle économique encore inabouti . Le Comité de surveillance des investissements d'avenir a ainsi souligné qu'« au regard d'un objectif d'autonomie financière posé initialement, malgré des partenariats industriels porteurs et des efforts de valorisation auprès du tissu économique , les IHU n'ont pas encore atteint la stabilité en termes de modèle économique » 29 ( * ) .

De nombreuses parties prenantes considèrent au demeurant peu crédible l'hypothèse d'un autofinancement, à terme, des IHU . Tout d'abord, et pour les raisons évoquées supra , les ressources issues de la valorisation ne sont pas à même de garantir cette autonomie. Dans sa contribution à la préparation de loi de programmation pluriannuelle de la recherche 30 ( * ) , l'Académie des sciences souligne ainsi que « ce modèle, qui ne fonctionne dans aucun pays, n'est pas réaliste ».

De surcroît, les autres leviers de financement à disposition des IHU demeurent d'ampleur limitée . Si des marges de progression existent s'agissant du recours à la philanthropie ou du mécénat, notre pays progresse lentement sur ce sujet, pour des raisons culturelles. Par ailleurs, les établissements publics impliqués dans les IHU semblent peu enclins à consacrer à ces derniers une part plus importante de leur budget. Enfin, les IHU demeurent structurellement dépendants des financements publics, dans la mesure où ils prennent appui sur des unités mixtes de recherche et des établissements bénéficiant de dotations publiques pérennes.

Dans ce contexte, l'extinction des financements du PIA à l'issue de la période définie dans les conventions - à savoir 2024 pour les six instituts issus de la première vague et 2028 pour Foresight - pourrait mettre en difficulté les IHU , notamment lorsque ces derniers doivent assumer des charges de personnel ou des coûts de structure et d'entretien .

Finalement , les rapporteurs spéciaux ont acquis la conviction que le modèle des IHU demeure encore fragile sur le plan financier. Pour développer des stratégies de croissance ambitieuses et rester compétitifs à l'échelle internationale, ces derniers doivent pouvoir s'appuyer, à compter de 2024, sur un financement récurrent de l'État.

Ce soutien pourrait prendre la forme d'une dotation socle renouvelable à intervalles réguliers, de manière à conditionner le maintien du label et des financements aux résultats obtenus lors des évaluations et à conserver un pouvoir prescripteur sur le développement des IHU.

Recommandation n° 1 : à compter de 2024, continuer à octroyer des moyens récurrents aux IHU, sur le modèle d'une dotation socle renouvelable à intervalles réguliers, de manière à conditionner le maintien du label et des financements aux résultats obtenus lors des évaluations (MSS, Mesri).

Les rapporteurs estiment que la stabilisation du modèle économique des IHU passe également par une clarification des modalités de partage de la propriété intellectuelle - qu'il s'agisse d'assurer la protection des résultats de recherche, notamment par le biais d'un dépôt de brevet, ou de valoriser ces résultats, en assurant le transfert aux entreprises et en négociant les contrats de licence de la propriété intellectuelle.

Dans certains IHU, le partage des recettes est ainsi négocié lors de la signature de chaque contrat, au pro rata de l'apport de chaque partenaire. Or, comme l'a souligné la mission conjointe de l'IGAS et l'IGAENR, cette situation induit « des délais et parfois des blocages préjudiciables pour le développement des partenariats de l'IHU », si bien que « la valorisation des résultats demeure, pour certains IHU, un sujet important de tension entre les acteurs, qui peut avoir pour effet de décourager les partenariats potentiels » 31 ( * ) .

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux sont favorables à la désignation, pour chaque IHU, d'un mandataire unique pour les opérations de valorisation . Cette solution constitue un gage d'efficacité pour les entreprises , qui disposent ainsi d'un unique interlocuteur habilité à assurer la négociation et la gestion des contrats de recherche. Elle présente également l'avantage de la simplicité et de la lisibilité pour les établissements , en déterminant des règles durables pour le partage des droits de la propriété intellectuelle. En parallèle, comme l'a souligné la France Universités dans sa contribution écrite, le mandataire unique devrait s'engager à servir les intérêts premiers de l'IHU.

Afin d'inciter les établissements à s'accorder rapidement sur la désignation d'un mandataire unique, il serait possible d'ériger ce dernier point en condition sine qua non pour bénéficier d'une dotation socle de l'État à compter de 2024.

Recommandation n° 2 : ériger la désignation d'un mandataire unique au sein de chaque IHU en condition sine qua non pour bénéficier d'une dotation socle à compter de 2024 (SGPI, MSS, Mesri).

Plus généralement, les rapporteurs estiment que les attendus des IHU en termes de valorisation doivent être clarifiés , à l'aune de l'expérience accumulée au cours des dernières. Il serait ainsi opportun d'élaborer des lignes directrices applicables pour l'ensemble des IHU, s'attachant à définir une stratégie commune en matière de dépôt de brevets, de transfert de technologie, et de soutien aux start-up.

Recommandation n° 3 : clarifier les attendus des IHU en matière de valorisation et définir des lignes directrices applicables à l'ensemble des structures (SGPI).

2. Une gouvernance à aménager pour garantir davantage de synergie entre les parties prenantes

Les IHU ont été portés par des personnalités scientifiques charismatiques et restent très étroitement identifiés à leur fondateur . Cette situation soulève des enjeux de gouvernance - dans certains IHU, elle tend à devenir personnelle - mais également des problèmes de succession, la pérennité des IHU étant conditionné à leur capacité à recruter un nouveau dirigeant capable d'en assurer le rayonnement.

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux seraient favorables à la mise en place, au sein de chaque structure, d'une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants.

Recommandation n° 4 : mettre en place, au sein de chaque IHU, une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants (IHU).

En parallèle, les problèmes posés par l'insertion des IHU dans le paysage de l'enseignement et de la recherche n'ont pas tous été résolus.

Les relations entre les IHU et leurs membres fondateurs demeurent parfois sources de tension, certains établissements publics regrettant la place limitée qu'ils occupent dans la gouvernance de ces IHU , alors même que les décisions prises par ces derniers ont bien souvent un impact sur leur propre fonctionnement. Depuis 2016, l'Inserm plaide ainsi pour l'élaboration d'une stratégie « toujours plus concertée avec les fondateurs, pour s'assurer d'un parfait alignement des feuilles de route et anticiper les grandes étapes de la vie de ces projets ».

Plus généralement, le choix de créer des structures autonomes dotées de la personnalité morale - à savoir des fondations de coopération scientifique - continue aujourd'hui à susciter des réserves de la part des organismes de recherche . Pour ces derniers, ce modèle contribue à alourdir la gestion des projets et se traduit par un nouvel empilement administratif, dans un écosystème comprenant déjà une grande diversité de personnes morales. Pour l'Inserm, « la création de fondations qui s'appuient sur des unités mixtes de recherche (UMR) reste un modèle complexe » 32 ( * ) , qui impose notamment de maintenir une cohérence entre le projet scientifique de l'IHU et celui des UMR.

Sur la base de ce constat, partagé par la Cour des comptes dans son rapport au Sénat sur les CHU 33 ( * ) , il a été décidé de ne plus permettre la création de nouvelles structures juridiques lors de l'appel à projets de la 2 ème vague d'IHU en 2017 , de sorte que les membres fondateurs restent directement aux prises avec la direction. L'IHU Foresight, unique lauréat de cet appel à projets, est ainsi dépourvu de la personnalité juridique et se fonde sur un accord contractuel entre les différents partenaires.

Si les rapporteurs spéciaux demeurent réservés quant à la pertinence de cette dernière orientation (voir infra ), ils estiment primordial de renforcer le caractère collégial de la gouvernance pour les six IHU issus de la première vague, en associant plus étroitement les membres fondateurs aux prises de décisions relatives à la stratégie scientifique et aux choix d'investissement .

Recommandation n° 5 : renforcer le rôle accordé au conseil d'administration des IHU et associer plus étroitement les membres fondateurs aux décisions relatives à la stratégie scientifique et aux choix d'investissement (IHU).

Il a également été signalé aux rapporteurs spéciaux que la politique d'emploi menée par les IHU présentait actuellement un caractère peu soutenable, tout en faisant peser un risque sur les membres fondateurs.

Dotés de la personnalité morale, les IHU ont en effet la possibilité de recruter du personnel ; néanmoins, compte tenu des incertitudes pesant sur la poursuite de leurs financements, la plupart ont décidé de recourir à des contrats à durée déterminée. Or, comme l'a souligné la Cour des comptes dans son rapport sur les CHU : « L'importance de la part des personnels en CDD représente une difficulté importante pour la gestion des ressources humaines et fragilise la capacité de maintenir des compétences techniques très spécialisées au sein de l'institut » 34 ( * ) .

Par ailleurs, cette politique d'emploi n'est pas neutre pour les membres fondateurs ; en effet, en cas d'arrêt du projet d'un IHU, faute de rentabilité économique, se poserait inévitablement la question de l'intégration des personnels recrutés par ce dernier au sein des équipes des établissements fondateurs. Or, pour ces établissements, il est difficilement acceptable de devoir assumer le risque employeur, alors même que la politique de recrutement revient à la direction de l'IHU.

Si une pérennisation des soutiens financiers alloués aux IHU permettrait de résoudre cette question à moyen terme, en facilitant le recours aux contrats à durée indéterminée, les instituts doivent en parallèle s'attacher à mettre une oeuvre une politique d'emploi plus soutenable et à associer plus directement les membres fondateurs aux décisions de recrutement .

Recommandation n° 6 : mettre en oeuvre une politique d'emploi plus soutenable et associer davantage les membres fondateurs aux décisions de recrutement (IHU).

3. Un impact qui reste à concrétiser en termes de soin

Dans le cadre de leurs travaux, il a été indiqué aux rapporteurs spéciaux que la collaboration opérationnelle entre les IHU et les CHU demeurait souvent malaisée et peu propice au développement d'actions synergiques . Dès 2017, le comité de visite du jury international des IHU soulignait que « les défis budgétaires qu'ont à relever les CHU pèsent sur les relations qu'ils entretiennent avec les IHU [...] une partie du problème tient à ce qu'il existe des canaux de financements publics différents pour la recherche hospitalière et les soins cliniques, ce qui conduit à des ambiguïtés et des tensions, sinon à des jalousies » 35 ( * ) .

Ainsi, pour quatre IHU (ICM, ICAN, LIRYC, IMAGINE), les activités de soins restent du seul ressort du CHU, et n'entrent pas dans le périmètre de l'IHU . A contrario , les IHU directement impliqués dans la prise en charge de soins (comme celui de Strasbourg ou de Marseille) ne sont pas toujours perçus de manière positive par les CHU, pour qui cette organisation génère des démutualisations d'équipements et donc des surcoûts.

Dans ce contexte, force est de constater que l'activité des IHU n'a pas toujours permis de rapprocher autant que souhaité les enjeux de recherche et de santé . Le dernier rapport du jury international relève ainsi que parmi les défauts « présents dans tous les IHU de manière plus moins significative » figure la difficulté à « démontrer le caractère translationnel dans leurs recherche et l'impact pour le patient ». En pratique, s'il est incontestable que de nombreuses innovations ont vu le jour grâce aux IHU, ces dernières auraient pu davantage être mises au service des patients .

La diffusion des innovations jusqu'au bout du continuum recherche-valorisation-amélioration du soin constitue donc un axe d'amélioration significatif pour les IHU . À cet égard, les rapporteurs spéciaux notent qu'en dépit des recommandations du jury international, l'implication de la DGOS dans le pilotage des IHU demeure encore relativement faible et pourrait être significativement accrue.

Recommandation n° 7 : renforcer l'implication du ministère de la santé dans le pilotage des IHU, pour garantir une meilleure diffusion des innovations permettant d'améliorer la prise en charge des patients (MSS, SGPI).

B. UN MODÈLE À RÉPLIQUER EN TIRANT LES LEÇONS DE L'EXPÉRIENCE ACCUMULÉE AU COURS DES DIX DERNIÈRES ANNÉES

Le Gouvernement a annoncé, en juillet dernier, le lancement d'un appel à projets doté de 300 millions d'euros pour financer six nouveaux IHU.

Si les rapporteurs spéciaux sont favorables à l'extension de ce modèle, ils estiment que les pouvoirs publics doivent s'attacher à créer les conditions de réussite des futurs IHU, en tirant les leçons des deux premières vagues et en préservant l'excellence de l'écosystème dans lequel ils ont vocation à prospérer.

1. Réunir les conditions de la réussite des six futurs IHU

Les rapporteurs spéciaux ont acquis la conviction, au cours de leurs travaux, que le succès des IHU tient notamment à l'autonomie que leur confère leur statut de fondation de coopération scientifique .

En effet, les IHU créés sous cette forme ont chacun une gouvernance, un budget, et des services (financiers, de ressources humaines, etc.) qui leur sont propres. Cette caractéristique constitue un gage de flexibilité dans les procédures, mais aussi de réactivité et de proximité pour les entreprises ; selon les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, ce statut est très apprécié des industriels, qui seraient a contrario moins enclins à s'engager aux côtés des IHU si ces derniers étaient des structures d'État à 100 % publiques.

L'existence d'une personne morale constitue également un avantage compétitif au regard de la propriété intellectuelle, pour les raisons évoquées supra . Partant, ce modèle juridique semble le plus à même de permettre une coopération effective entre le public et le privé .

Enfin, le statut de fondation permet d'attirer de grands talents internationaux . En effet, les délais de recrutement et le niveau des rémunérations proposées dans le système classique demeurent peu incitatifs, tandis que du fait de leur statut, les établissements publics n'ont pas la possibilité de recruter directement. À l'inverse, une fondation correctement dotée est en mesure d'embaucher, qui plus est à un salaire attractif et compétitif.

Dans ce contexte, il convient de relever que le président du jury international des IHU, Richard Frackowiak, a fait part de son incompréhension, lors de la décision de modifier les règles de l'appel à projets pour la 2 ème vague des IHU. Remettant à cette occasion sa démission au Gouvernement, le président du jury international a regretté « qu'on veuille arrêter l'un des principes majeurs des projets IHU, qui est celui d'être basés sur des fondations, et que le jury trouvait excellent [...] c'est selon nous un élément absolument fondamental des IHU pour que, dans le continuum entre recherche fondamentale, recherche clinique et recherche translationnelle, ils fassent le lien entre les universités, les organismes, les hôpitaux et l'industrie » 36 ( * ) .

Pour les rapporteurs spéciaux, les futurs IHU ne doivent donc pas être intégrés à la gestion d'une université, d'un hôpital ou d'un organisme de recherche, afin de bénéficier d'une réelle autonomie leur conférant des avantages comparatifs . Partant, et à rebours des choix qui ont été réalisés lors du lancement de la 2 ème vague d'appels à projets, il importe d'autoriser à nouveau la création de structures juridiques dotées de la personnalité morale pour porter les IHU .

Recommandation n° 8 : autoriser les projets d'IHU à se construire sur une fondation de coopération scientifique (SGPI, comité de pilotage des IHU).

Les rapporteurs relèvent également que les IHU pour lesquels des fondations préexistaient (comme Imagine ou l'ICM), et qui pouvaient donc s'appuyer sur des fonds extérieurs et une visibilité internationale déjà bien ancrée, semblent fonctionner sur des bases plus solides que ceux pour lesquels la fondation a été créée de novo , grâce à la dotation de l'État.

Dans ce contexte, il serait souhaitable que les projets retenus lors de la 3 ème vague s'appuient sur des centres déjà bien établis , à la tête de réseaux structurés, de nature à garantir un rayonnement significatif des structures labellisées . Ce critère de sélection serait à même de favoriser une bonne insertion des IHU dans leur écosystème et une diffusion large des innovations en santé.

Recommandation n° 9 : sélectionner prioritairement les projets d'IHU portés par des structures déjà bien établies, à la tête de réseaux structurés, afin de favoriser une diffusion large des innovations en santé (comité de pilotage des IHU).

Enfin, de manière plus générale, les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur la grande diversité qui caractérise les IHU ; chaque structure a en effet des modalités de gouvernance, d'organisation et de fonctionnement qui lui sont propres, avec des résultats variables. L'expérience accumulée au cours des dix dernières est à cet égard précieuse, et pourrait être davantage mise à profit.

Les rapporteurs estiment donc que les IHU existants devraient être directement associés aux réflexions préalables au lancement du nouvel appel à projets , ou tout du moins consultés sur les fondamentaux à retenir dans la labellisation de nouvelles structures.

À cet égard, les rapporteurs notent que les IHU travaillent actuellement à l'élaboration d'un livre blanc permettant notamment d'identifier des axes d'amélioration pour l'avenir ; i l serait opportun que ce document s'attache à préciser le « modèle IHU », en s'accordant sur plusieurs points qui restent actuellement en suspens - qu'il s'agisse des objectifs assignés à ces structures, des attendus en termes de valorisation ou d'impact sur la prise en charge des patients, de la politique d'emploi, des modalités d'association des différents partenaires et de collaboration avec les CHU.

Recommandation n° 10 : associer les sept IHU existants aux travaux préalables au lancement du nouvel appel à projets IHU (SGPI).

Les rapporteurs spéciaux relèvent, enfin, l'intérêt et le soutien manifestés par les régions aux IHU . Ces derniers ont pu bénéficier, dans certains cas, d'un accompagnement financier conséquent, leur création étant appréhendée comme un élément de structuration de la recherche territoriale. Les IHU ont de facto permis de développer une très grande expertise à l'échelle locale et ainsi contribué au développement économique de leur territoire.

En tout état de cause, les régions ont vocation à jouer un rôle croissant dans la politique de recherche, comme l'a démontré le rapporteur spécial dans son rapport de septembre 2019, « Les régions, acteurs d'avenir de la recherche en France » 37 ( * ) . Très actives dans ce domaine, elles constituent souvent un partenaire de choix pour les équipes de recherche, avec lesquelles elles collaborent de façon souple et flexible, grâce à leur connaissance de l'écosystème local.

L'implication des régions ayant constitué un élément déterminant dans la réussite des IHU, les rapporteurs spéciaux estiment que ce facteur de succès gagnerait à être pris en compte dans le cadre du futur appel à projets .

Recommandation n° 11 : réfléchir à des modalités normalisées d'association des régions au pilotage et au financement des IHU (SGPI, comité de pilotage des IHU).

2. Préserver la diversité et l'excellence de l'écosystème dans lequel ces structures ont vocation à s'insérer

La forte visibilité des IHU ne doit pas conduire à surestimer leur poids dans la recherche biomédicale, tant d'un point de vue financier, qu'en termes de production bibliométrique.

En premier lieu, eu égard aux moyens dont ils disposent, l'impact transformant des IHU sur leur environnement est nécessairement limité ; à titre d'exemple, les sept IHU ont bénéficié de 28,2 millions d'euros au titre des PIA en 2019, tandis que les crédits MERRI versés aux hôpitaux la même année se sont élevées à environ 2,0 milliards d'euros.

Il existe par ailleurs plusieurs centres de recherche en sciences du vivant dont la productivité en termes de brevets et de publications se révèle comparable, en ordre de grandeur, à celle des IHU. En parallèle, d'autres modèles, comme celui de l'Institut Gustave Roussy ou de l'Institut Pasteur, ont également fait la preuve de leur capacité à lier recherche académique et recherche clinique.

In fine , les IHU n'ont pas vocation à devenir le modèle prédominant d'organisation de la recherche biomédicale en France ; ces objets doivent être appréhendés comme un outil complémentaire et accélérateur de l'écosystème existant, dont il convient donc de préserver la diversité et le caractère compétitif.

Par ailleurs, comme l'a souligné France Universités dans sa contribution écrite : « Si les IHU peuvent accélérer la recherche et l'innovation dans quelques domaines de pointe, où la France est susceptible d'exceller, ils ne pourront remplacer la nécessaire réorganisation de l'hôpital universitaire, dont le modèle construit en 1958 est jugé par beaucoup, depuis plusieurs années, comme étant à bout de souffle ».

Partant , il est primordial de donner aux établissements nationaux des moyens à la hauteur des enjeux en matière de santé . En effet, les IHU s'appuient très largement sur le personnel et les investissements consentis par les organismes de recherche et les universités ; la qualité de leurs travaux dépend donc in fine étroitement de la politique scientifique menée par leurs partenaires publics. Or, ces derniers sont confrontés à une attrition permanente de leurs moyens, résultant du sous-financement chronique dont souffre la recherche française.

Si un sursaut budgétaire semble à terme indispensable, la priorité doit être donnée dans l'immédiat à une simplification de la tuyauterie financière, afin de faciliter l'accès des chercheurs aux financements disponibles .

En premier lieu, la mise en place de règles harmonisées entre les différents guichets d'appels à projets du Mesri (ANR, Inca, ANRS-MIE), du MSS (PHRC) et du PIA 4 constituerait une première avancée notable, en réduisant la charge administrative pesant sur les équipes de chercheurs .

Les bénéfices de cette évolution seraient d'autant plus élevés qu'elle irait de pair avec la création d'un portail unique de référencement des appels à projets dans le secteur de la santé, permettant de mutualiser les catalogues.

Recommandation n° 12 : créer un portail unique de référencement des appels à projets dans le secteur de la santé, et harmoniser les règles entre les différents guichets (Mesri, MSS).

À plus long terme, il serait judicieux d'établir un mécanisme de coordination des appels à projets financés dans le champ de la santé, en garantissant une plus grande cohérence dans les programmations des différents guichets - sans pour autant dissocier les appels à projets de leur niche naturelle au sein des agences, afin d'éviter de rompre l'interdisciplinarité, essentielle pour la progression de la recherche biomédicale.

Il serait également souhaitable que les équipes puissent mobiliser de manière conjointe les fonds du Mesri ou du MSS , afin de mettre un terme à la scission entre recherche fondamentale et recherche appliquée.

Recommandation n° 13 : établir un mécanisme de coordination des appels à projets financés dans le champ de la santé, pour garantir une plus grande cohérence dans les programmations des différents guichets (Mesri, MSS).

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 23 février 2022 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de MM. Jean-François Rapin et Thierry Meignen, rapporteurs spéciaux, sur les Instituts hospitalo-universitaires et le financement de la recherche biomédicale en France.

M. Claude Raynal , président . - Les rapporteurs spéciaux Jean-François Rapin et Thierry Meignen, respectivement responsables du suivi des missions « Recherche et enseignement supérieur » et « Investissements d'avenir » - rebaptisée « Investir pour la France de 2030 » - ont conduit une mission de contrôle sur les Instituts hospitalo-universitaires et le financement de la recherche biomédicale en France.

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Le contrôle budgétaire dont nous vous présentons aujourd'hui les conclusions est né d'un double constat : d'une part, la crise sanitaire a révélé des failles béantes dans l'organisation de notre recherche en santé ; d'autre part, les Instituts hospitalo-universitaires (IHU) semblent avoir réussi au cours des dix dernières années à remédier à certains de ces défauts, quoiqu'à petite échelle.

L'objet de notre contrôle était ainsi de répondre à la question suivante : les IHU, qui constituent un mode dérogatoire d'organisation et de financement de la recherche biomédicale, ont-ils vocation à être pérennisés et généralisés ?

Nous nous sommes attachés, dans un premier temps, à dresser un état des lieux de l'organisation de la recherche en santé, afin de bien situer les IHU dans ce paysage. Les conclusions que nous tirons de cette étude se révèlent malheureusement peu reluisantes : la recherche française dans le secteur biomédical semble cumuler tous les maux, avec un pilotage déficient, des financements fractionnés et un budget global très insuffisant.

En premier lieu, le pilotage de la recherche biomédicale se caractérise par une double tutelle ministérielle : le ministère de la recherche est chargé de la recherche fondamentale, tandis que la recherche clinique relève du ministère de la santé. Il en découle un clivage très marqué entre la recherche académique et la recherche appliquée, avec pour conséquence un déficit de financement pour la recherche translationnelle, c'est-à-dire la recherche qui permet de préparer le 1 er essai clinique sur l'homme. Cette segmentation nuit par ailleurs à la capacité des pouvoirs publics de disposer d'une vision globale des efforts de recherche en santé.

À ce pilotage défaillant s'ajoute un déficit de coordination entre les multiples acteurs impliqués dans la recherche biomédicale. Pour ne prendre qu'un exemple, mais des plus parlants, les différents guichets de financement sur projets fonctionnent en silos, leurs programmations respectives se révélant parfaitement étanches. Comment, dans ce contexte, mettre en oeuvre une véritable stratégie nationale dans le domaine de la recherche en santé ? Nous avons également pu constater que la collaboration entre les différents établissements de recherche et les acteurs industriels demeurait très perfectible.

Cette situation est d'autant plus préoccupante qu'elle se double d'un budget global très insuffisant alloué à la recherche publique dans ce secteur. Le bilan chiffré de la dernière décennie est sans appel : notre recherche biomédicale a fait l'objet d'un sous-investissement incontestable. J'en veux pour preuve le fait qu'entre 2015 et 2018, la dépense publique de recherche en santé a diminué de 15,7 % en France, tandis qu'elle augmentait de manière significative chez la plupart de nos partenaires européens.

Le décrochage de notre pays s'explique également par le caractère extrêmement morcelé du soutien public à la recherche en santé, avec la coexistence d'une multitude de canaux et d'agences de financement : Agence nationale de la recherche, Institut national du Cancer, Agence nationale de recherche sur le sida, les hépatites virales et les maladies infectieuses émergentes, sans oublier les différents appels à projets financés directement par le ministère de la santé... L'environnement dans lequel nos chercheurs doivent naviguer pour obtenir des financements est d'une complexité inouïe, que l'absence de règles harmonisées en matière d'appels à projets vient aggraver.

Dans ce contexte, il a été décidé en 2010 de créer un nouveau mode d'organisation et de financement de la recherche biomédicale, sous la forme d'instituts hospitalo-universitaires. Nés des travaux de la Commission sur l'avenir des CHU, les IHU avaient vocation à réunir au sein d'une structure autonome, sur un lieu unique et autour d'une seule thématique, les acteurs des activités de soin, de recherche, de valorisation et d'enseignement, afin de développer des actions synergiques.

En pratique, en 2011, un premier appel à projets dans le cadre du PIA 1 a permis de faire émerger six IHU, auxquels ont été attribués 350 millions d'euros pour une période de huit ans. En 2017, dans le cadre du PIA 3, un second appel à projets a abouti à la sélection d'un 7 ème IHU, doté de 50 millions d'euros sur dix ans. J'attire votre attention sur le fait que les IHU ne sont pas soudainement sortis de terre : les PIA ont octroyé le label IHU à des structures ou des projets dont certains étaient déjà très avancés, et qui réunissaient les caractéristiques requises.

La création des IHU poursuivait trois finalités : combler le manque de financement de la recherche translationnelle, renforcer la coordination entre les acteurs académiques et économiques et concentrer des moyens publics conséquents sur des thématiques de recherche prioritaires, dans lesquelles notre pays fait preuve d'excellence.

Nos travaux ont montré que les IHU ont pleinement rempli ces différents objectifs.

Ce modèle original a fait la preuve de son efficacité au cours des dix dernières années, en rapprochant les structures de recherche et de soin, les acteurs privés et les acteurs publics, de manière à favoriser le développement de la recherche translationnelle. Il s'agit là du sentiment partagé par la plupart des organismes et tutelles que nous avons auditionnés, mais aussi du bilan objectif dressé par le jury international du PIA dans sa dernière évaluation en 2019.

Nous avons également acquis la conviction, au cours des auditions et déplacements réalisés, que la dotation publique allouée aux IHU a constitué un accélérateur vertueux, permettant de renforcer l'attractivité de ces structures tout en mobilisant plus efficacement diverses sources de financement, qu'il s'agisse de recettes issues des contrats industriels ou d'activités de valorisation, de levées de fonds caritatives, ou encore d'appels à projets régionaux, nationaux ou internationaux.

Nous sommes donc parvenus à la conclusion que la création des IHU a permis de répondre efficacement à des carences bien identifiées s'agissant de l'organisation et du financement de la recherche biomédicale. Dans ce contexte, nous avons centré notre réflexion sur l'avenir de ces structures ; en effet, les financements du PIA à destination des six premiers IHU ont vocation à s'éteindre en 2024. Par ailleurs, étant donné le succès de ce modèle, se pose la question de le répliquer à plus grande échelle. À cet égard, je voudrais souligner que quand nous nous sommes emparés de la question des IHU, nous avions l'intuition qu'il s'agissait d'un sujet d'avenir ; ces derniers mois nous ont donné raison, puisque le Gouvernement a fait part en juillet dernier de sa volonté de créer six nouveaux IHU.

M. Thierry Meignen , rapporteur spécial . - Nos préconisations prennent ainsi la forme de deux grandes orientations complémentaires. Premièrement, les IHU demeurent des structures jeunes et fragiles, qui doivent être confortées. Deuxièmement, il nous paraît nécessaire de tirer les leçons des dernières années pour réunir les conditions de réussite des six futurs IHU.

En premier lieu, nos travaux ont mis en exergue certaines des fragilités des IHU ; il nous semble indispensable d'y remédier, afin de maximiser l'impact de ces structures sur la recherche et le soin, tout en garantissant leur pérennité.

Ainsi, le modèle économique des IHU n'est pas encore abouti. Celui-ci reposait initialement sur l'hypothèse qu'avec un financement de base non pérenne, les IHU pourraient générer des recettes substantielles par le biais de leurs activités de valorisation, leur permettant à terme de s'autofinancer. Néanmoins, ce postulat se révèle assez éloigné de la réalité : les revenus générés par les contrats industriels demeurent irréguliers, le potentiel d'incubation des IHU est par définition limité, et les activités de prise de brevets sont rarement très lucratives. Dans ce contexte, nous estimons que l'État doit continuer à soutenir les IHU, même si ces derniers ont vocation à ne plus recourir aux financements du PIA à compter de 2024. Ce soutien pourrait prendre la forme d'une dotation socle, renouvelable à intervalles réguliers, à l'issue d'une évaluation indépendante de ces structures.

Il nous semble également que la stabilisation du modèle économique des IHU passe nécessairement par une clarification des modalités de partage des recettes issues de la valorisation ; à cet égard, nous sommes favorables à la désignation au sein de chaque IHU d'un mandataire unique pour les opérations de valorisation. Il nous a été indiqué que certaines structures peinaient à avancer sur ce sujet ; il pourrait donc être opportun de conditionner l'octroi de la dotation socle à compter de 2024 à la désignation d'un tel mandataire unique.

Plus généralement, les attendus des IHU en termes de valorisation gagneraient à être clarifiés et formalisés, à l'aune de l'expérience accumulée au cours des dernières années.

Nous avons également identifié certains problèmes de gouvernance, qui nuisent à l'efficacité des actions entreprises. Les IHU ont ainsi été portés par des personnalités scientifiques charismatiques, et restent très étroitement identifiés à leur fondateur ; pour garantir la pérennité des IHU, il nous paraît indispensable de mettre en place, dans chaque structure, une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants.

En parallèle, nous avons pu constater que les relations entre les IHU et leurs membres fondateurs demeurent dans certains cas sources de tension. Pour apaiser ces dernières, le caractère collégial de la gouvernance pourrait être renforcé, afin d'associer plus étroitement les membres fondateurs aux décisions relatives à la stratégie scientifique et aux choix d'investissement des IHU.

Enfin, il nous est apparu que la collaboration entre les IHU et les CHU demeure souvent malaisée, ce qui entrave le développement d'actions synergiques. Pour le dire clairement : l'activité des IHU n'a pas toujours eu l'effet escompté en termes d'amélioration de la prise en charge des patients. Afin de favoriser une diffusion des innovations jusqu'au lit des patients, l'implication du ministère de la santé dans le pilotage des IHU pourrait être accrue.

J'en viens à notre deuxième grande orientation, relative aux six futurs IHU. Si nous sommes favorables à l'extension de ce modèle, il nous semble primordial de tirer les leçons des deux premières vagues d'appels à projets, afin de créer les conditions de réussite des futurs IHU.

Tout d'abord, nous estimons que le succès des IHU tient en grande partie à l'autonomie que leur confère leur statut de fondation de coopération scientifique ; ce statut constitue un gage de flexibilité, de réactivité et de proximité pour les entreprises. Dans ce contexte, et à rebours des choix qui ont été réalisés lors du lancement de la 2ème vague de l'appel à projets, nous sommes convaincus qu'il faut à nouveau autoriser la création de structures juridiques dotées de la personnalité morale pour porter les IHU.

En parallèle, l'expérience a montré que les projets qui ont le mieux réussi s'appuyaient sur des centres déjà bien établis, à la tête de réseaux structurés. Ce critère de sélection doit être renforcé lors du prochain appel à projets, pour garantir un rayonnement large des IHU.

Il nous paraît également souhaitable que les IHU déjà labellisés soient directement associés aux réflexions préalables au lancement du nouvel appel à projets, afin de pouvoir bénéficier de leur retour d'expérience.

Enfin, nous avons pu constater que l'implication des régions a souvent constitué un élément déterminant dans la réussite des IHU. Ce facteur de succès gagnerait à être davantage pris en compte à l'avenir.

Pour conclure, je voudrais rappeler que les IHU n'ont pas vocation à devenir le modèle prédominant d'organisation de la recherche biomédicale en France ; ces structures doivent être appréhendées comme des outils complémentaires de l'écosystème existant, dont nous devons préserver la diversité et le caractère compétitif.

Soyons réalistes : la qualité des travaux réalisés par les IHU dépend in fine étroitement de la politique scientifique menée par leurs partenaires publiques. Par conséquent, il est primordial de donner aux établissements nationaux des moyens à la hauteur des enjeux en matière de santé. Dans l'immédiat, la priorité doit être donnée à une simplification de la tuyauterie financière, afin de faciliter l'accès des chercheurs aux financements disponibles. À cet égard, la mise en place de règles harmonisées entre les différents guichets d'appels à projets constituerait une première avancée notable.

Mme Laure Darcos , rapporteure pour avis . - Je vous remercie de m'avoir invitée. Le sujet des IHU a été abordé lors de l'examen de la loi de programmation de la recherche et avait à l'époque fait couler beaucoup d'encre.

Mme Sylvie Vermeillet . - Ma première question porte sur les sept IHU existants : pourquoi n'existe-t-il pas d'IHU dédié aux cancers ? Par ailleurs, je m'interroge sur le manque de collaboration entre les IHU et les CHU évoqué par les rapporteurs : pourriez-vous nous en dire davantage ? Enfin, vous avez évoqué l'implication des régions qui semble être un facteur de succès. Pour quelles raisons ?

M. Vincent Capo-Canellas . - Je m'interroge sur la recommandation n° 4 qui vise à mettre en place, au sein de chaque IHU, une procédure normalisée de renouvellement des dirigeants. Est-ce le fruit des circonstances du moment qui vous amène à vous interroger sur ce sujet ? Existe-t-il une particularité dans la gouvernance des IHU ? L'exemple du professeur Raoult témoigne-t-il d'une problématique singulière des dirigeants ?

M. Claude Raynal , président . - Je vous rappelle que les lignes directrices en matière de contrôle adoptées récemment par la Conférence des présidents nous invitent à nous prononcer sur les recommandations formulées par les rapporteurs spéciaux, en sus de l'autorisation de la publication de leur rapport d'information. Aujourd'hui, les rapporteurs spéciaux nous présentent treize recommandations. Nous pourrons revenir sur celles qui sont les plus emblématiques.

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Il existe déjà un organisme chargé de coordonner la recherche scientifique et la lutte contre le cancer ; il s'agit de l'Institut national du cancer (INCa). L'existence d'une telle structure de coordination, à l'échelle nationale, justifie l'absence d'IHU dans ce domaine.

S'agissant de la procédure de renouvellement des dirigeants, il s'agit d'une recommandation formulée de longue date afin de permettre une amélioration de la gouvernance des IHU. Cette proposition n'a donc pas de lien avec l'IHU de Marseille ; il s'agit d'une proposition d'amélioration régulièrement avancée, mais que nous continuons à porter, parce que des marges de progression existent encore.

M. Thierry Meignen , rapporteur spécial . - Pour répondre à la question de Sylvie Vermeillet, le déficit de collaboration entre les IHU et les CHU résulte notamment d'une faible implication du ministère de la santé dans le pilotage des IHU. Lors des auditions, il nous a ainsi été indiqué que la coopération opérationnelle entre ces structures était malaisée et était peu propice au déploiement de synergies. Dès 2017, le Comité de visite du jury international des IHU soulignait que « les défis budgétaires qu'ont à relever les CHU pèsent sur les relations qu'ils entretiennent avec les IHU. Une partie du problème tient à ce qu'il existe des canaux de financements publics différents pour la recherche hospitalière et les soins cliniques, ce qui conduit à des ambiguïtés et à des tensions, sinon à des jalousies parfois ».

C'est ainsi que pour quatre IHU, les activités de soins restent du seul ressort des CHU et ne rentrent pas dans le périmètre des IHU. A contrario , les IHU directement impliqués dans la prise en charge des soins, ne sont pas toujours perçus de manière positive par les CHU, tels que ceux de Strasbourg ou Marseille, pour lesquels cette organisation génère une démutualisation des équipements. Les activités de IHU n'ont pas toujours permis de rapprocher autant que souhaité les enjeux de recherche et de santé.

M. Claude Raynal , président . - Messieurs les rapporteurs, pourriez-vous nous indiquer quelles sont, selon vous, vos recommandations les plus importantes ?

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Le rapport présente les recommandations globalement dans l'ordre de priorité. La première d'entre elles est la continuité du financement des IHU, en maintenant une dotation socle. Initialement, il était prévu que les IHU puissent s'autofinancer par la valorisation de leurs travaux et le dépôt de brevets. Néanmoins, le soutien financier à la recherche se révèle essentiel pour maintenir un niveau d'activité compétitif. Il revêt également une portée symbolique : nous devons encourager les structures qui font preuve d'excellence et soutenir leurs efforts en ce sens. Notre dernier déplacement s'est fait au sein d'un IHU réussissant à mobiliser des fonds privés importants, par le biais des contrats avec les industriels et du mécénat. Néanmoins, il nous a été indiqué que le financement public demeurait indispensable pour équilibrer le budget global.

Notre deuxième recommandation porte sur la désignation d'un mandataire unique. Il nous paraît important de mettre en place un tel mandataire unique, afin que les acteurs privés soient en mesure d'identifier rapidement le bon interlocuteur.

M. Thierry Meignen , rapporteur spécial . - La troisième porte sur la clarification des attendus en termes de valorisation. Nous estimons qu'il faut désormais élaborer des lignes directrices applicables à l'ensemble des IHU.

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Nous souhaitons également insister sur la recommandation n°8 : nous pensons que la fondation de coopération scientifique constitue une structure adéquate pour porter les projets IHU. Les auditions nous ont confortés dans cette vision : la création d'une structure juridique autonome dotée de la personnalité morale permet de gagner en visibilité et d'encourager l'apport de financements privés.

Enfin, les régions jouent un rôle important dans le financement des IHU. La recherche biomédicale requiert des équipements onéreux tels que les imageries par résonance magnétique (IRM). Il faudrait réfléchir à des modalités normalisées d'association des régions au pilotage et au financement des IHU.

M. Claude Raynal , président . - Merci, messieurs les rapporteurs spéciaux. Je souhaiterais simplement revenir sur un point de votre propos : c'est la notion de « soutien symbolique de l'État »...

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - En effet, ce soutien n'est pas symbolique, puisqu'il s'agit de 50 millions d'euros par IHU ! C'est le symbole du soutien de l'État qui est essentiel.

M. Claude Raynal , président . - Je suis tout à fait d'accord, et pour avoir été longtemps chargé de valorisation entre l'université et le monde industriel, je ne connais pas en France de financements extérieurs qui seraient de nature à couvrir l'ensemble des frais d'une structure de recherche. Aux États-Unis par exemple, il existe des fondations financées par des milliardaires, mais c'est un modèle qui n'existe pas en France. En réalité, ceux qui financent ce type de travaux sont souvent ceux qui espèrent pouvoir en tirer, à un moment donné, un avantage, comme les laboratoires pharmaceutiques. Ce n'est pas du tout dans l'esprit des fondations que l'on peut connaître aux États-Unis. Il est donc important pour la recherche que demeure cette possibilité de soutien de l'État, ne fût-ce que pour que les instituts eux-mêmes aient une certaine liberté d'orientation de leurs recherches et ne soient pas dans un système totalement guidé.

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Le modèle financier n'est pas si simple et on a créé au sein des CHU - puisque les CHU avaient l'ambition de pouvoir organiser la recherche sur le territoire - un corps étranger qui a toute vocation à perdurer, à vivre à côté des CHU ou dans les CHU, mais qui nécessite un soutien financier de l'État.

Mme Laure Darcos , rapporteure pour avis . - Votre rapport est vraiment passionnant. Dans le cadre de mes activités en tant que rapporteure pour avis du budget de la recherche au sein de la commission de la culture, j'ai été très vite alertée par l'Inserm et par l'INCa, qui manquaient de financement sur certains programmes, ne serait-ce que pour créer des cohortes de malades sur des vaccins à venir. En effet, seul le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation finançait la recherche fondamentale. En 2019, j'ai donc rencontré des conseillers santé de l'Elysée et de Matignon qui m'ont indiqué qu'un fléchage spécial du ministère de la santé sur la recherche fondamentale n'était pas à l'ordre du jour.

Je crois avoir compris qu'il existait à l'époque des tensions entre l'Inserm et les IHU ; savez-vous si la situation s'est arrangée depuis ? Avez-vous entendu l'Inserm et l'INCa à ce sujet ?

M. Pascal Savoldelli . - Votre recommandation n° 2 porte sur la désignation obligatoire d'un mandataire unique pour la valorisation. Quelle est la situation actuelle pour les IHU ? Ce mandataire unique n'existe-t-il pas déjà ?

Par ailleurs, et même si je ne veux pas faire de sémantique, la recommandation n° 6 mentionne « une politique d'emploi plus soutenable ». Le manque de précision du mot « soutenable » soulève beaucoup d'interprétations. Cela m'amène à émettre une réserve sur cette formulation.

Enfin, je partage l'avis du Président Raynal sur les fondations. Je préside moi-même une fondation intervenant en matière d'aménagement, en coopération avec deux pays, le Mali et les Comores. C'est une structure adaptée dans ce cas, mais pas dans toutes les situations.

Enfin, lorsque je lis dans la recommandation n° 5 qu'il faudrait associer davantage les membres fondateurs aux décisions de recrutement, je suis réservé et aimerais connaître les limites de cette association.

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Il n'y a rien d'étonnant à ce que des tensions ponctuelles surgissent entre l'Inserm et les IHU : le premier constitue un acteur historique, tandis que les seconds sont plus récents et fonctionnent de manière autonome. De plus, les IHU ont bénéficié de financements importants, de l'ordre de 350 millions d'euros sur huit ans ; l'Inserm pourrait souhaiter que ces fonds lui soient directement versés. Néanmoins, la collaboration sur le terrain est tout à fait satisfaisante, et l'Inserm reconnaît que les IHU ont enregistré de très bons résultats.

Le sujet de l'autonomie stratégique revient de plus en plus dans le débat public ; or cette dernière ne se joue pas qu'au niveau industriel, mais possède une dimension sanitaire. Nous devons nous donner les moyens de conserver une autonomie stratégique dans le domaine de la recherche biomédicale.

Je reviens à présent sur la question du mandataire unique : actuellement, la situation varie selon les IHU. Si certains ont désigné un mandataire unique, tel n'est pas le cas d'autres structures, où chaque contrat conclu donne lieu à une renégociation entre les différents partenaires, ce qui se traduit par un allongement des délais. Nous estimons qu'il serait bien plus efficace qu'à l'échelle de chaque IHU, il y ait un seul mandataire, un même interlocuteur qui négocierait tous les contrats avec les acteurs industriels.

Concernant la recommandation n° 6 et la « politique d'emploi plus soutenable » à mettre en oeuvre, il faut savoir qu'actuellement, les IHU étant programmés pour une période déterminée de par leur financement, ils ne s'engagent pas dans des politiques d'emploi durable, parce que leur avenir n'est pas assuré. Par « plus soutenable », nous entendons donc « durable », avec des recrutements majoritairement en contrats à durée indéterminée.

M. Pascal Savoldelli . - C'est avec sincérité que le rapporteur spécial parle de la place que prend la politique contractuelle dans les IHU, mais « soutenable » possède un autre sens. Je ne veux créer aucune polémique, car je ne connais pas bien ce modèle financier et économique, et je me méfie des effets du « soutenable ».

L'autre point qui m'interpelle, dans la recommandation n° 6, est votre préconisation d'« associer davantage les membres fondateurs aux décisions de recrutement ».

M. Jean-François Rapin , rapporteur spécial . - Ce point est en effet important, car actuellement, c'est sur les membres fondateurs que repose en grande partie le « risque employeur », alors qu'ils n'ont pas leur mot à dire s'agissant des recrutements. Dans la logique du « qui paie décide », il n'est pas anormal que les membres fondateurs soient davantage associés à ces décisions.

La commission a adopté les recommandations des rapporteurs spéciaux et a autorisé la publication de leur communication sous la forme d'un rapport d'information.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale de la recherche et de l'innovation (DGRI)

- Mme Anne PAOLETTI, directrice scientifique du secteur Biologie Santé ;

- M. Sébastien CHEVALIER, chef du service de la coordination des stratégies de l'enseignement supérieur et de la recherche ;

- Mme Judith BEN YAMIN, coordinatrice au département de l'analyse des politiques d'organismes et des enjeux territoriaux ;

- M. Laurent RÉGNIER, chef du département de l'analyse des politiques d'organismes et des enjeux territoriaux.

Direction générale de l'offre de soin (DGOS)

- M. Harold ASTRE, chef du bureau Innovation et recherche clinique - PF4.

Secrétariat général pour l'investissement (SGPI)

- M. Jean-Christophe DANTONEL, directeur du programme santé.

Délégation ministérielle à l'innovation en santé

- M. Jean-Yves FAGON, ex-délégué ministériel à l'innovation en santé.

Agence nationale de la recherche (ANR)

- M. Thierry DAMERVAL, président ;

- M. Arnaud TORRES, directeur de la Direction des Grands Programmes d'Investissement de l'État ;

- Mme Cécile SCHOU, chargée de mission auprès de la direction générale de l'ANR.

Institut Gustave Roussy

- Professeur Fabrice ANDRÉ, directeur de la recherche.

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

- M. Antoine PETIT, président-directeur général ;

- M. André LE BIVIC, directeur de l'Institut des sciences biologiques.

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

- Docteur Gilles BLOCH, président-directeur général ;

- Mme Laurianne CRUZOL, directrice des affaires financières ;

- Mme Anne-Sophie ETZOL, chargée des relations institutionnelles.

Institut Pasteur

- Professeur Stewart COLE, directeur général ;

- M. François ROMANEIX, directeur général adjoint.

Académie nationale de médecine

- M. Patrick NETTER, professeur des universités - praticien hospitalier ;

- M. Arnold MIGUS, chercheur ;

- M. Christian BOITARD, professeur des universités.

Contribution écrite

France Universités


* 1 Rapport de la Commission sur l'avenir de Centres hospitalo-universitaires (CHU), mai 2009, https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/094000208.pdf .

* 2 Observatoire des sciences et techniques, La position scientifique de la France dans le monde et en Europe, 2005 - 2018, février 2021.

* 3 Professeur Patrick Rossignol, « Essais cliniques en contexte épidémique », 7 juin 2020.

* 4 Réponse écrite au questionnaire adressé à l'ANR.

* 5 Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.

* 6 Ibid.

* 7 Centre national de recherche scientifique.

* 8 Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives.

* 9 Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement.

* 10 Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique.

* 11 Institut de recherche pour le développement.

* 12 Académie de médecine, Réformer la recherche en sciences biologiques et en santé : partie I, le financement, juin 2021.

* 13 Conseil d'analyse économique, « Innovation pharmaceutique : comment combler le retard français ? », janvier 2021.

* 14 Ibid.

* 15 Innovation Santé 2030, 29 juin 2021, https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2021/12/sante_innov30.pdf

* 16 Académie de médecine, Réformer la recherche en sciences biologiques et en santé : partie I, le financement, juin 2021.

* 17 Le préciput consiste à réserver systématiquement une partie des crédits obtenus par une équipe de chercheurs au financement des frais de fonctionnement de l'organisme qui abritera leurs recherches, afin d'encourager les organismes de recherche à se porter candidat.

* 18 La loi de programmation pour la recherche, votée en 2020, prévoit un doublement du taux de préciput, de 19 % en 2020 à 40 % en 2027.

* 19 Source : réponse écrite au questionnaire adressé à l'ANR.

* 20 Académie de médecine, Réformer la recherche en sciences biologiques et en santé : partie I, le financement, juin 2021.

* 21 Rapport de la Commission sur l'avenir de Centres hospitalo-universitaires (CHU), mai 2009, https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/094000208.pdf .

* 22 Rapport de la Commission sur les Instituts hospitalo-universitaires(IHU), février 2010, https://media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2010/99/2/Rapport_Final_Commission_IHU_141992.pdf .

* 23 Le rapport Juppé-Rocard de 2009, publié au lendemain de la grande crise financière proposait, pour augmenter le potentiel de croissance de l'économie française, de mobiliser massivement l'investissement public en faveur de projets ciblés, principalement dans les domaines de la recherche, du numérique, de l'industrie et du développement durable.

* 24 Rapport de la Commission sur les Instituts hospitalo-universitaires(IHU), février 2010, https://media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2010/99/2/Rapport_Final_Commission_IHU_141992.pdf .

* 25 Rapport conjoint IGAS et IGAENR, Le modèle économique des IHU, décembre 2016.

* 26 Ibid.

* 27 Réponse écrite au questionnaire adressé au CNRS.

* 28 Rapport conjoint IGAS et IGAENR, Le modèle économique des IHU, décembre 2016.

* 29 Comité de surveillance des investissements d'avenir, Le programme d'investissements d'avenir, un outil à préserver, une ambition à refonder, novembre 2019.

* 30 Académie des sciences, Contribution à la préparation de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche, 15 mai 2019.

* 31 Rapport conjoint IGAS et IGAENR, Le modèle économique des IHU, décembre 2016.

* 32 Réponse écrite au questionnaire adressé à l'Inserm.

* 33 Cour des comptes, Le rôle des CHU dans l'enseignement supérieur et la recherche médicale, Communication à la commission des affaires sociales du Sénat, décembre 2017.

* 34 Cour des comptes, Le rôle des CHU dans l'enseignement supérieur et la recherche médicale, Communication à la commission des affaires sociales du Sénat, décembre 2017.

* 35 AEF info, « IHU : les relations avec le CNRS et l'Inserm sont "inexplicablement variées et complexes" », 9 juin 2021.

* 36 AEF Info, « IHU : Richard Frackowiak démissionne de la présidence du jury international et conteste les arguments du gouvernement », 6 octobre 2017.

* 37 Les régions, acteurs d'avenir de la recherche en France, Rapport d'information de M. Jean-François RAPIN, fait au nom de la commission des finances n° 740 (2018-2019) - 25 septembre 2019.

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