II. LES AIDES FINANCIÈRES INDIVIDUELLES : UN IMPACT LIMITÉ, DES MODALITÉS À RÉINTERROGER

Cible privilégiée par les pouvoirs publics pour attirer les professionnels de santé dans les zones sous-dotées, les aides financières individuelles prennent des formes très diverses, de l'aide forfaitaire à l'incitation fiscale ; elles émanent à la fois de l'Etat, de l'assurance maladie et d'initiatives plus ponctuelles des collectivités territoriales.

Ce levier financier ne semble pas décisif sur les choix d'installation.

Des évolutions pourraient être envisagées, d'abord pour mieux faire connaître les aides existantes, ensuite pour agir en parallèle sur les conditions d'exercice, en favorisant des modes d'exercice plus souples et diversifiés - susceptibles d'aider les jeunes professionnels à envisager une installation - et en améliorant la protection sociale des libéraux.

A. UNE CIBLE PRIVILÉGIÉE PAR LES POUVOIRS PUBLICS

1. Les aides contractuelles à l'installation sous la forme de garantie de revenu
a) Le contrat de praticien territorial de médecine générale (PTMG)

Introduit dans le code de la santé publique (article L. 1435-4-2) par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 38 ( * ) , le statut de praticien territorial de médecine générale répond directement à l'objectif de soutenir l'ancrage des jeunes omnipraticiens dans les zones sous-dotées.

Ce dispositif contractuel, géré par les ARS, vise principalement à aider les jeunes médecins à « sauter le pas » de l'installation libérale . Votre commission avait souscrit aux objectifs attachés à cette mesure : l'étude d'impact du projet de loi soulignait à cet égard que « la crainte de l'installation en libéral, en raison des formalités et des charges qui s'y attachent, est (...) l'un des freins qui empêche les jeunes médecins de s'installer spontanément dans cette forme d'exercice dès la fin de leurs études. La recherche quasi-systématique de formes d'exercices salariées ou de remplacement en début de carrière doit donc être prise en compte pour leur offrir un cadre d'exercice plus attractif en début de carrière. »

Le contrat de PTMG peut être conclu en cas de primo-installation ou si l'installation en cabinet libéral date de moins d'un an.

Il permet de bénéficier, pendant la durée du contrat - soit deux ans maximum - d'une double protection :

- d'une part, une garantie de revenu , à hauteur de 6 900 euros bruts mensuels pour une quotité de travail supérieure ou égale à neuf demi-journées par semaine 39 ( * ) (ce qui correspond à la rémunération de 300 consultations de médecine générale au tarif opposable) ;

- d'autre part, une protection sociale améliorée en cas de congé de maladie ou de maternité , par le maintien du versement d'une rémunération complémentaire forfaitaire :

en cas de congé de maladie de plus de huit jours , son montant est de 1 552,50 euros bruts par mois en cas d'exercice neuf demi-journées par semaine ou plus 40 ( * ) ; le bénéfice de ce versement est limité à une période de trois mois par arrêt de travail ;

en cas de congé de maternité , son montant est de 3 105 euros bruts par mois en cas d'exercice neuf demi-journées par semaine ou plus 41 ( * ) , pendant la période fixée par la législation de la sécurité sociale.

En contrepartie, le bénéficiaire s'engage :

- à exercer, pendant la durée du contrat, la médecine générale dans une zone caractérisée par une offre de soins insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins, en tant que médecin installé en cabinet libéral ou médecin collaborateur libéral ;

- à pratiquer des tarifs opposables ;

- à effectuer un minimum d'actes par mois.

b) Les déclinaisons du dispositif
(1) Le contrat de praticien territorial de médecine ambulatoire (PTMA)

Instauré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 42 ( * ) , le statut de praticien territorial de médecine ambulatoire (PTMA) élargit la garantie offerte en cas d'interruption de l'activité pour maladie ou maternité à l'ensemble des médecins libéraux (toutes spécialités médicales) et au cas de congé pour cause de paternité.

La rémunération forfaitaire complémentaire est, dans ces situations, équivalente à celle que perçoivent les médecins sous contrat PTMG. En contrepartie, les bénéficiaires du contrat s'engagent, pour une durée allant de trois à six ans :

- à maintenir une activité médicale libérale dans une zone caractérisée par une offre médicale insuffisante ou des difficultés dans l'accès aux soins ;

- à respecter les tarifs opposables ou à limiter les dépassements d'honoraires, dans le cadre du contrat d'accès aux soins ;

- à se faire remplacer pendant toute la période de cessation de son activité en cas d'interruption pour cause de maternité ou de paternité.

La même loi a instauré un dispositif similaire, celui de « praticien isolé à activité saisonnière » (PIAS), pour répondre à la problématique spécifique de certaines zones isolées, notamment en montagne.

(2) Le contrat de praticien territorial médical de remplacement (PTMR)

Les dispositifs précédents ont été complétés en loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 43 ( * ) par un nouveau contrat de praticien territorial médical de remplacement (PTMR), dans l'objectif de faciliter l'intervention des médecins remplaçants dans les zones sous-dotées.

Le bénéficiaire du contrat 44 ( * ) s'engage à exercer une activité libérale de remplacement, sur la base d'un volume minimum de consultations, dans un ou plusieurs cabinets médicaux implantés dans des zones sous-dotées, pour une durée allant de un à six ans.

Il bénéficie en contrepartie :

- d'une garantie minimale de rémunération pour couvrir les périodes d'interruption d'activité entre les remplacements, sous la forme d'une rémunération complémentaire forfaitaire (à hauteur de 200 consultations au tarif opposable pour une activité à temps plein, soit 4 600 euros), ou pour compenser, dans les mêmes conditions que les bénéficiaires d'un contrat de PTMG, les périodes de maladie, maternité et paternité ;

- d'un service d' appui administratif de la part des ARS pour la gestion des remplacements.

Votre commission avait donné un avis favorable à ce dispositif, susceptible de constituer un premier pas vers une installation dans ces zones, tout en offrant aux praticiens déjà installés une sécurisation de leurs remplacements en cas d'absence.

c) Des dispositifs de portée modeste


•Depuis son entrée en vigueur en août 2013, 795 contrats de PTMG ont été signés au 1 er mars 2017 et 389 sont actifs à cette date .

A la même date, seuls deux contrats de PTMA sont actifs, en région Auvergne-Rhône-Alpes.

Il en encore trop tôt pour disposer de données sur le contrat de PTMR, pour lequel un objectif initial - plutôt ambitieux - de 200 contrats par an a été retenu, ce qui correspond à environ 2 % des effectifs de médecins remplaçants en 2015.


• Une étude réalisée sur la base des données 30 juin 2015 a esquissé le profil des médecins « PTMG » :

- deux tiers sont des femmes ;

- 77 % exercent dans une zone rurale ;

- 30 % exercent en cabinet individuel, 32 % en structure d'exercice coordonné et 38 % en cabinet de groupe ;

- près de la moitié étaient remplaçants avant de devenir PTMG, un tiers n'étaient ni interne, ni remplaçant (médecins en provenance de l'étranger pour la plupart) ; la part d'anciens internes est inférieure à 20 % ;

- la grande majorité des contrats (72 %) sont signés pour des quotités de travail supérieures ou égales à neuf demi-journées par semaine.


• Le bilan du dispositif de PTMG, esquissé à vos rapporteurs par la DGOS, montre son impact économique limité :

- seuls 40 % des contrats donnent lieu à un versement de complément de rémunération dans le mois ;

- le coût moyen mensuel d'un contrat est d'environ 700 euros , soit un montant faible comparé au montant potentiel dont peut bénéficier le praticien en complément de rémunération (3 100 euros) ;

- le coût total des contrats PTMG s'est établi à 1,8 million d'euros en 2016 , pris en charge sur les crédits du FIR.

La garantie joue donc peu dans les faits, essentiellement les premiers mois du contrat, le temps que le praticien nouvellement installé constitue sa patientèle. Dans les zones en tension, le volume d'activité supérieur au minimum garanti est atteint assez rapidement : ce n'est pas tant le manque d'activité qui pose question que parfois son trop-plein.

2. Les aides conventionnelles : un impact limité sur le rééquilibrage de l'offre de soins

Des mécanismes en faveur d'un rééquilibrage de l'offre de soins sur le territoire ont été prévus dans le cadre des négociations conventionnelles des professionnels de santé avec la Cnamts.

Si, pour certaines de ces professions, des mesures contraignantes ont été mises en place, de façon parallèle, pour réguler les installations dans les zones sur-dotées, celles visant à favoriser l'installation ou le maintien de professionnels dans les zones sous-dotées relèvent exclusivement de l'incitation, au travers d'aides financières individuelles.

a) Les instruments des conventions médicales de 2011 et 2016


• Deux dispositifs incitatifs ont été intégrés dans la convention médicale entrée en vigueur le 26 septembre 2011 :

- l'option « démographie » , ouverte à tout médecin s'engageant à s'installer ou à demeurer installé dans une zone sous-dotée, ou à proximité immédiate, et y exerçant, pour une durée de trois ans, au moins deux tiers de son activité en groupe ou au sein d'un pôle de santé : cette option ouvrait droit à une aide forfaitaire à l'investissement (5 000 euros par an pour les médecins exerçant en groupe, 2 500 euros par an pour ceux membres d'un pôle de santé) et une aide à l'activité (selon le mode d'activité, 10 % des honoraires annuels dans la limite de 20 000 euros par an ou 5 % des honoraires dans la limite de 10 000 euros par an) ;

- l'option « santé solidarité territoriale » , ouverte à tout médecin s'engageant à exercer, pendant trois ans, au minimum 28 jours par an dans une zone déficitaire sous la forme de vacations ; cette option ouvrait droit à une aide à l'activité (10 % des honoraires annuels dans la limite de 20 000 euros par an) et une prise en charge des frais de déplacement.


• Au vu du bilan modeste de ces dispositifs ( cf. ci-après) et des limites identifiées, de nouvelles orientations ont été retenues dans la convention médicale de 2016 .

Celle-ci institue quatre types de contrats démographiques, dont les objectifs et les modalités sont présentés dans le tableau suivant.

Ces contrats tripartites, entre le médecin, l'assurance maladie et l'ARS, sont ouverts à l'ensemble des médecins conventionnés, quelle que soit leur spécialité. Les dispositifs ouvrent une possibilité de modulation des aides par les ARS , afin d'accorder une aide bonifiée dans des zones identifiées comme particulièrement fragiles, dans la limite de 20 % des médecins éligibles. Cela rejoint une recommandation de la Cour des comptes 45 ( * ) et donne une marge de souplesse aux ARS pour adapter la politique conventionnelle au contexte régional.

L'impact financier de ces mesures, qui marquent un renforcement assez substantiel des aides et leur diversification , est évalué par l'assurance maladie à 10 millions d'euros.

Les contrats issus de la nouvelle convention médicale

CAIM

Contrat d'aide
à l'installation des médecins

COSCOM

Contrat de stabilisation et de coordination pour les médecins

COTRAM

Contrat de transition
pour les médecins

CSTM

Contrat de solidarité territoriale médecin

Objet

Favoriser l'installation des médecins via une aide forfaitaire versée dès l'installation pour faire face aux frais d'investissement

Valoriser la pratique des médecins s'inscrivant dans une démarche de prise en charge coordonnée des patients

Soutenir les médecins préparant leur cessation d'exercice en accueillant un médecin nouvellement installé dans leur cabinet

Favoriser l'intervention ponctuelle de médecins dans les zones fragiles

Bénéficiaires

Médecin conventionné secteur 1 ou Optam, primo-installant ou installé depuis moins d'un an

Médecin conventionné,
toutes spécialités, tous secteurs d'exercice

Médecin conventionné,
toutes spécialités,
âgé de 60 ans et plus

Médecin conventionné,
toutes spécialités, tous secteurs d'exercice

Aides

- jusqu'à 50 000 € pour un exercice d'au moins 4 jours/semaine

- Majoration de 2 500 € en cas d'exercice partiel dans un hôpital de proximité

- 5 000 €/an

- Majoration de 1 250 €/an en cas
d'exercice partiel dans un hôpital de proximité

- Majoration de 300 €/mois en cas de maîtrise de stage et d'accueil de stagiaire

- Valorisation de + 10 % des honoraires conventionnés, plafonnée à 20 000 €/an

- Valorisation de + 10 % des honoraires conventionnés liés à l'activité en zone fragile, plafonnée à 20 000 €/an

- Prise en charge des frais de déplacement engagés

Engagements socles ou optionnels

- S'installer en zone fragile et y exercer en libéral pendant 5 ans

- Exercer au moins 2,5 jours/semaine

- Participer à la permanence des soins (PDSA)

- Réaliser une partie de l'activité au sein d'un hôpital de proximité ( optionnel )

- Être installé en zone fragile et y exercer une activité libérale conventionnée

- Exercer en groupe ou en communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) ou équipe de soins primaires (ESP)

- Réaliser une partie de l'activité
au sein d'un hôpital de proximité ( optionnel )

- Exercer des fonctions de maître de stage ( optionnel )

- Être installé en zone fragile

- Accueillir, au sein du cabinet, un médecin libéral conventionné âgé de moins de 50 ans qui s'installe dans la zone ou y est installé depuis moins d'un an et accompagner l'installation libérale de ce confrère

- Etre installé hors d'une zone fragile

- Exercer au minimum 10 jours par an en zone fragile (dans une ou plusieurs de ces zones) selon différentes modalités possibles

Durée

Contrat de 5 ans
non renouvelable

Contrat de 3 ans
renouvelable par tacite reconduction

Contrat de 3 ans renouvelable une fois

Contrat de 3 ans renouvelable par tacite reconduction

Source : Cnamts, convention médicale 2016

b) Les « contrats incitatifs » à adhésion individuelle pour les autres professions médicales ou paramédicales

Dans les négociations de l'assurance maladie avec les autres professionnels de santé libéraux, les aides individuelles à l'installation dans les zones les plus fragiles se sont développées via les « contrats incitatifs », instaurés soit en parallèle de mesures de conventionnement sélectif dans les zones sur-dotées, soit indépendamment de telles mesures.

D'abord applicable aux infirmiers libéraux, depuis le 18 avril 2009, ce contrat à adhésion individuelle a été étendu aux masseurs-kinésithérapeutes, à compter du 15 juillet 2012 46 ( * ) , puis aux sages-femmes à compter du 15 septembre 2012 47 ( * ) , aux orthophonistes à compter du 6 novembre 2012 48 ( * ) , et aux chirurgiens-dentistes le 1 er février 2013 49 ( * ) .

Si les modalités varient quelque peu selon les professions, le principe demeure identique : le contrat incitatif permet, en cas d'installation dans une zone « très sous-dotée », de percevoir une aide forfaitaire annuelle et de bénéficier d'une prise en charge des cotisations sociales dues au titre des allocations familiales.

Le montant de cette aide, destinée à l'équipement du cabinet ou d'autres investissements professionnels comme l'achat d'un véhicule, est par exemple d'un montant maximum de 3 000 euros par an, pendant trois ans, pour les infirmiers libéraux.

En contrepartie, plusieurs conditions s'imposent aux professionnels, notamment - là aussi selon des modalités qui varient d'une convention à l'autre - l'exercice d'au moins les deux tiers de l'activité dans la zone sous-dotée, pendant au moins la durée du contrat, le recours à un remplaçant pour garantir la continuité des soins, la télétransmission des actes ou encore la participation à des objectifs de santé publique.

Les dispositifs des infirmiers et chirurgiens-dentistes sont ouverts aux professionnels des centres de santé depuis le 1 er janvier 2016.

c) Un bilan contrasté

Les données fournies par la Cnamts à vos rapporteurs permettent de dresser un bilan plutôt modeste ou contrasté de ces dispositifs.


• Fin 2016 50 ( * ) , toutes professions concernées confondues, on recense 9 176 adhérents aux dispositifs incitatifs, parmi lesquels 8 243 sont éligibles à l'aide (soit 89,8 % des adhérents).

Bilan des dispositifs conventionnels incitatifs (fin 2016)

Profession

Nombre d'adhérents

Nombre d'éligibles aux aides (en % des adhérents)

Montant moyen par professionnel

Aide versée en 2017 au titre de 2016

% du montant total des aides versées

Médecins

Option démographie

2 376

2 157

(91 %)

14 866 €

32,07 M€

69,4

Option SST

31

16

(52 %)

3 036 €

0,49 M€

Chirurgiens-dentistes

575

494

(86 %)

15 000 €

0,78 M€

1,7

Infirmiers

2 381

2 074

(87 %)

2 780 €

5,77 M€

12,5

Masseurs-kinésithérapeutes

2 152

1 931

(90 %)

2 735 €

5,28 M€

11,4

Sages-femmes

649

600

(92 %)

2 749 €

1,65 M€

3,6

Orthophonistes

1 012

971

(96 %)

1 530 €

0,65 M€

1,4

Total

9 176

8 243

(90 %)

5 610

46,24 M€

100

Source : Cnamts - données prévisionnelles pour 2016

Le montant total des aides au titre de l'année 2016, hors prise en charge des cotisations sociales, s'établit à 46,2 millions d'euros (soit 5 610 euros en moyenne par adhérent éligible à l'aide). Ce montant est quasiment stable par rapport à 2015 mais de plus de 10 millions d'euros supérieur à celui versé au titre de l'année 2013.

Le nombre d'adhérents a progressé de 33 % depuis 2013 , avec des dynamiques néanmoins variables selon les professions.

Évolution du nombre d'adhérents et du coût
des dispositifs conventionnels incitatifs

2013

2014

2015

2016

Évolution 2013/2016

Nombre d'adhérents

6 891

7 925

8 773

9 176

+ 33 %

dont          médecins*

2 243

2 142

2 381

2 407

+ 7 %

chirurgiens-dentistes

159

461

565

575

+ 261 %

infirmiers

2 003

2 216

2 332

2 381

+ 19 %

masseurs-kiné

1 592

1 880

2 028

2 152

+ 35 %

sages-femmes

282

432

554

649

+ 30 %

orthophonistes

612

794

913

1 012

+ 65 %

Montant total des aides versées (en millions d'euros)

35,84

40,02

46,51

46,24

+ 29 %

Source : Cnamts

* Pour les médecins, sont comptabilisés, en 2013 et 2014, les derniers bénéficiaires du dispositif incitatif prévu par l'avenant n° 20 à la convention médicale de 2005, adoptée en 2007 (483 en 2013, 39 en 2014).


• Entre 2010 et 2016, la part des installations dans les zones « très sous-dotées » a augmenté de 1,3 point pour les infirmiers libéraux et de 6,2 points pour les sages-femmes .


• S'agissant des médecins , les données de l'assurance maladie (à fin 2014 à défaut de données plus récentes transmises à vos rapporteurs) montrent que l'option « démographie » a bénéficié principalement à des médecins déjà installés dans les zones sous-dotées : seuls 190 médecins nouvellement installés en 2013 et 2014 dans les zones concernées (dont 185 généralistes) ont adhéré au dispositif ; ces derniers ont perçu un montant moyen plus faible du fait de l'indexation des aides sur le volume d'activité (11 300 euros par an - dont 4 902 euros pour l'aide forfaitaire et 6 392 euros pour l'aide à l'activité - contre environ 15 600 euros pour les praticiens déjà installés). En moyenne, les nouveaux installés ont mis trois trimestres pour atteindre un niveau d'activité stable.

Le nombre de médecins nouvellement installés dans les zones fragiles ayant bénéficié de l'option « démographie » ne représentait en 2014 que 39 % des nouveaux installés dans les zones concernées, probablement en raison d'une méconnaissance du dispositif ou d'une aide trop tardive par rapport à l'installation (versée plusieurs mois après l'installation).

Au total, l'évolution des installations des médecins en zone fragile ou non fragile a évolué dans un sens favorable aux premières, mais de façon peu significative.

Évolution des installations des médecins libéraux
dans les zones fragiles entre 2010 et 2016

Nombre d'installations

Part des installations

Zone fragile

Zone non fragile

Total

Zone fragile

Zone non fragile

2010

246

2 320

2 566

9,6 %

90,4 %

2011

284

2 956

3 240

8,8 %

91,2 %

2012

436

3 884

4 320

10,1 %

89,9 %

2013

433

3 532

3 965

10,9 %

89,1 %

2014

419

3 622

4 041

10,4 %

89,6 %

2015

451

3 503

3 954

11,4 %

88,6 %

2016

425

3 797

4 222

10,1 %

89,9 %

+ 0,5 point

- 0,5 point

Source : Cnamts

3. Les mesures fiscales

Il n'existe, à proprement parler, qu'un seul dispositif fiscal bénéficiant aux médecins exerçant en zones sous-dotées . Les médecins peuvent cependant être éligibles à d'autres dispositifs, comme celui des zones de revitalisation rurale (ZRR), qui poursuivent d'autres objectifs avec un zonage différent.


• En application de l'article 109 de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, codifié à l'article 151 ter du code général des impôts, la rémunération perçue au titre de la permanence des soins ambulatoires (PDSA) exercée dans les zones sous-dotées est exonérée de l'impôt sur le revenu, à hauteur de soixante jours par an.

Cette rémunération se compose d'une rémunération forfaitaire et d'astreinte , versée et définie, pour la régulation et les astreintes, par chaque ARS dans le cadre du cahier des charges de la permanence des soins et qui varie en fonction des périodes de l'année ou de la semaine, des zones concernées et de la durée de l'astreinte et d'une majoration spécifique des actes effectués prévue par l'article 10 et définie par l'annexe 9 de la convention du 25 août 2016 entre l'assurance-maladie et les médecins libéraux. Celle-ci varie de 26,50 euros pour une consultation en cabinet le samedi à 59,50 euros pour une visite à domicile de milieu de nuit.

Exonération d'impôt sur le revenu de la rémunération perçue au titre
de la permanence des soins par les médecins ou leurs remplaçants installés dans certaines zones rurales ou urbaines

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016 (p)

2017 (p)

Assiette de la dépense fiscale

57

71

79

nd

nd

Coût de la dépense fiscale

16

18

19

19

19

Nombre de bénéficiaires

5 900

6 350

6 850

nd

nd

Source : DGFIP

La dépense fiscale associée à ce dispositif d'exonération était de 19 millions d'euros en 2015, pour un gain moyen de 2 773 euros par an et par professionnel de santé.

Ces montants étaient respectivement de 5 millions d'euros en 2011 et le conseil des prélèvements obligatoires, cité par le rapport de la Cour des comptes, en avait évalué le gain moyen à 1 500 euros par an et par professionnel de santé.

Bien qu'ayant connu une montée en puissance et atteignant une dépense globale significative, ces montants ne paraissent pas de nature à motiver une installation en zone sous-dense mais plutôt à fluidifier, pour les ARS, l'organisation de la PDSA. Les auditions de vos rapporteurs ont confirmé un fort attachement à ce dispositif.


• Les professionnels de santé peuvent également bénéficier du dispositif « ZRR » (zones de revitalisation rurale)
, dispositif ancien créé par la loi d'orientation du 4 février 1995 relative à l'aménagement et au développement du territoire, codifié aux articles 44 quindecies et 1465 A du code général des impôts, prolongé à plusieurs reprises et qui prévoit, pour les entreprises installées dans ces zones avant le 31 décembre 2020, une exonération fiscale totale pendant cinq ans, suivie, pour les trois années suivantes, d'une exonération de 75 %, 50 % et 25 %. Ce dispositif se conjugue avec des exonérations de cotisations sociales pour l'embauche de salariés.

D'après les informations fournies à vos rapporteurs, le recours à ce dispositif par les professionnels de santé a fortement progressé puisqu'il a pratiquement doublé entre 2013 et 2015 , pour une dépense multipliée par quatre.

Exonération d'impôt sur les bénéfices dans les zones de revitalisation rurale
pour les entreprises créées ou reprises
entre le 1 er janvier 2011 et le 31 décembre 2020

(en millions d'euros)

2013

2014

2015

2016 (p)

2017 (p)

Assiette de la dépense fiscale

28

69

141

nd

nd

dont assiette concernant
les professionnels de santé

18

34

49

nd

nd

Coût de la dépense fiscale

5

14

28

33

38

dont coût concernant
les professionnels de santé

4

8

12

nd

nd

Nombre de bénéficiaire
de la dépense fiscale

2 000

3 8000

6 400

nd

nd

dont nombre de bénéficiaires professionnels de santé

750

1 200

1 400

nd

nd

Source : DGFIP

Le rapport d'évaluation d'une mission conjointe d'inspections ministérielles, publié en juillet 2014, notait à propos du dispositif ZRR que « pour les professions libérales, en particulier dans le domaine médical, les perspectives de bénéfices dès les premières années sont importantes et rendent l'exonération attractive ; la décision de s'installer repose avant tout sur des critères tenant aux conditions d'exercice de leur métier (proximité d'un plateau technique et association avec des collègues pour ménager leur vie privée) mais l'exonération est connue et intervient dans les choix précis d'implantation

Ce dispositif est donc susceptible d'avoir un effet sur l'installation des médecins mais le zonage n'est pas établi en fonction des zones définies par les ARS mais sur des critères de fragilité économique.

A la comparaison des deux cartes, il apparaît que ces zones ne se recoupent que très partiellement. Le ciblage des dispositifs fiscaux devrait être amélioré en le concentrant sur les zones plus directement concernées par la désertification médicale.

Zones de revitalisation rurale bénéficiaires des effets du classement

Par ailleurs, il a été indiqué à vos rapporteurs au cours de leurs déplacements que ce dispositif n'était pas toujours appliqué de la même façon par les directions régionales des finances publiques, s'agissant, notamment des reprises d'activité. Il en résulte une incertitude préjudiciable aux choix d'installation qui devrait pouvoir être levée par les ARS en liaison avec les services fiscaux.


* 38 Loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012. Les modalités d'application ont été précisées par le décret n° 2013-736 du 14 août 2013 et l'arrêté du même jour relatif au contrat type de praticien territorial de médecine générale.

* 39 Le revenu garanti s'établit à 3 450 euros bruts mensuels pour une quotité de travail inférieure à neuf demi-journées par semaine.

* 40 Soit la moitié de la différence entre les montants du plafond d'honoraires et du seuil minimal d'activité. Ce montant est de 776,25 euros bruts lorsque le bénéficiaire du contrat de PTMG exerce moins de neuf demi-journées par semaine.

* 41 Soit la différence entre les montants du plafond d'honoraires et du seuil minimal d'activité. Ce montant est de 1 552,50 euros bruts lorsque le bénéficiaire du contrat de PTMG exerce moins de neuf demi-journées par semaine.

* 42 Loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 - article 54. Cf. article L 1435-4-3 du code de la santé publique.

* 43 Loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 - article 73. Cf. article L. 1435-4-5 du code de la santé publique.

* 44 Aux termes du décret n° 2017-703 du 2 mai 2017, ceux-ci doivent être autorisés à effectuer des remplacements en tant qu'interne ou avoir soutenu avec succès leur thèse en médecine depuis moins de trois ans à la date de signature ou de reconduction du contrat.

* 45 « Vingt ans de recomposition territoriale de l'offre de soins : un bilan décevant », Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, Cour des comptes, septembre 2015.

* 46 Avenant n° 3 à la convention nationale des masseurs-kinésithérapeutes libéraux du 30 novembre 2011.

* 47 Avenant n° 1 à la convention nationale des sages-femmes libérales du 9 janvier 2012.

* 48 Avenant n° 13 à la convention nationale des orthophonistes libéraux du 29 mars 2012.

* 49 Avenant n° 2 à la convention nationale des chirurgiens-dentistes libéraux du 16 avril 2012.

* 50 Données prévisionnelles.

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