III. LES LOIS RELATIVES AU DROIT DU TRAVAIL, À L'EMPLOI ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Une dizaine de lois appelant des mesures d'application sont intervenues dans les domaines du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle au cours de la législature. Une grande majorité d'entre elles sont applicables à 100 % . C'est le cas des lois ayant mis en place les nouveaux instruments de la politique de l'emploi souhaités par le Gouvernement (emplois d'avenir, contrat de génération), pour lesquelles les mesures d'application sont intervenues dans des délais très rapides, mais aussi de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, ou encore du volet « travail » de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

Dans le cadre de ce bilan d'ensemble, votre commission a centré ses observations sur les lois les plus récentes intéressant ces différents domaines, qui sont également celles marquant les évolutions législatives les plus significatives de la législature.

A. LE VOLET « TRAVAIL » DE LA LOI « MACRON »

S'agissant du volet relatif au droit du travail, à l'épargne salariale, à l'emploi et à la formation professionnelle, de la loi n°°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, toutes les mesures règlementaires ont été prises .

En effet, après plus de quinze mois d'attente, le décret du n° 2016-1581 du 23 novembre 2016 a défini le barème indicatif d'indemnisation par les prud'hommes en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Au regard de l'attente forte des entreprises, il s'agit toutefois d'une demi-mesure, alors que le Sénat a souhaité à plusieurs reprises un barème impératif, seul à même d'offrir une réelle prévisibilité aux employeurs.

B. LA LOI RELATIVE AU DIALOGUE SOCIAL ET À L'EMPLOI

La loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi a pour objet de réformer les relations collectives de travail , aux niveaux interprofessionnel, des branches et des entreprises, afin d'améliorer la représentation de tous les salariés, de rationaliser et d' améliorer la portée de la négociation obligatoire en entreprise et de simplifier le fonctionnement des institutions représentatives du personnel (IRP). Elle a également encouragé le maintien en activité des salariés avec la création de la prime d'activité, qui s'est substituée au RSA activité et à la prime pour l'emploi.

Un an et demi après sa publication, quasiment toutes les dispositions d'application de la loi ont été prises .

La mesure centrale de ce texte, destinée à développer le dialogue social en direction des salariés des très petites entreprises, était la création, par son article 1 er , de commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI). Leur entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2017.

Toutefois, à ce jour, aucune mesure réglementaire n'a été prise pour préciser leur périmètre, leurs modalités de fonctionnement ou encore les conditions de prise en charge de leurs frais d'activité par le fonds paritaire de financement du dialogue social. De plus, les organisations syndicales y disposent de sièges répartis proportionnellement à leur audience mesurée, dans la région, lors du scrutin national organisé auprès des salariés des TPE et peuvent, à cette occasion, indiquer l'identité des personnes qu'elles envisagent de désigner pour siéger à la CPRI. Lors de sa première édition, en décembre 2012, le taux de participation s'était élevé à 10,38 %. La nouvelle mesure, qui a eu lieu du 30 décembre 2016 au 13 janvier 2017, n'a pas davantage mobilisé les 4,5 millions de salariés concernés : la participation a été de 7,35 %, ce qui fragilise la légitimité de ces nouvelles instances.

Cette loi visait également à valoriser l'exercice de responsabilités syndicales en entreprise. Son article 5 a ainsi prévu l'établissement, par le Gouvernement, d'une liste des compétences acquises durant un mandat de représentant du personnel, afin de pouvoir obtenir au terme de celui-ci une certification correspondante dans le cadre d'une validation des acquis de l'expérience. À ce jour, elle n'a pas été publiée.

Dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, un décret en Conseil d'État, mentionné à l' article 21, mais toujours en attente de publication, devra prévoir les modalités de renouvellement, de révision et de dénonciation des accords d'entreprise ou d'établissement conclus par des salariés mandatés, ce sujet n'ayant pas été abordé par le décret du 20 décembre 2016 70 ( * ) . Le retard pris dans la publication de ce décret s'explique vraisemblablement par les modifications apportées par l'article 18 de la loi « Travail » du 8 août 2016 aux règles dérogatoires de conclusion d'un accord collectif en l'absence d'un délégué syndical.

A l' article 23 , l'habilitation dont bénéficiait le Gouvernement pour modifier par ordonnance les règles de répartition des crédits et de gouvernance du fonds paritaire de financement des partenaires sociaux est devenue caduque, la date butoir fixée au 18 août 2016 ayant été dépassée. Il convient à cet égard de rappeler que l'article 35 de la loi « Travail » du 8 août 2016 a modifié ces règles en leur ajoutant le critère lié au nombre de salariés pour apprécier la représentativité patronale.

L' article 24 prévoyait un aménagement spécifique des règles de représentativité syndicale de droit commun au profit des agents de direction des organismes de protection sociale comme la mutualité sociale agricole ( MSA ) et le régime social des indépendants ( RSI ), qui ne peuvent pas voter aux élections des représentants du personnel compte tenu de leur fonction hiérarchique, et ne disposent donc pas de représentants pour négocier la convention collective spéciale , mentionnée à l'article L. 123-2 du code de la sécurité sociale, qui leur est applicable. Pour répondre aux attentes de ces agents, la mesure de l'audience des représentants des agents de direction sera désormais appréciée au regard des suffrages exprimés lors de l'élection des membres représentant ce personnel aux commissions paritaires nationales . Votre commission regrette que le Gouvernement n'ait toujours pas pris le décret en Conseil d'Etat prévu à cet article, alors qu'il est issu d'un amendement adopté au Sénat et présenté par trois groupes politiques, de la majorité comme de l'opposition 71 ( * ) .

Par ailleurs, l' article 26 de la loi donnait une assise législative au conseil d'orientation des conditions de travail (Coct) et à ses comités régionaux, définissant leurs missions consultatives et d'appui à l'élaboration des politiques en la matière ainsi que les différents organismes qui y sont représentés. C'est finalement un décret du 22 décembre 2016 72 ( * ) qui est venu se substituer aux dispositions réglementaires existantes pour moderniser le fonctionnement du Coct. Il a notamment institué au niveau national un groupe permanent d'orientation, chargé plus particulièrement de participer à l'élaboration du plan santé au travail ou encore de contribuer à la définition des orientations de la politique de l'Etat en matière de santé et de sécurité au travail. Au niveau régional, des groupes permanents régionaux d'orientation des conditions de travail sont chargés, dans leur ressort territorial, de définir les orientations des politiques de santé au travail, d'amélioration des conditions de travail et de lutte contre les risques professionnels correspondant aux besoins spécifiques de leur région.

Malgré la publication de deux décrets importants le 30 décembre 2015 73 ( * ) pour rendre applicable le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), votre commission constate que le décret prévu à l'article 29 pour définir les conditions dans lesquelles l'employeur peut établir la déclaration d'exposition des salariés à des risques professionnels n'est toujours pas publié. Le Gouvernement semble considérer que ce décret n'est pas nécessaire.

A l' article 34 , le Gouvernement n'a toujours pas remis au Parlement le rapport sur la situation des artistes et techniciennes intermittentes du spectacle , que votre commission avait par ailleurs jugé inutile.

A l' article 39 , le Gouvernement a adopté avant le terme de son habilitation, fixé au 17 février 2016, l'ordonnance 74 ( * ) transformant l' Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) en un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic). Le projet de loi de ratification de l'ordonnance a quant à lui été enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 janvier dernier, respectant le délai de trois mois prévu par l'habilitation entre la publication de l'ordonnance et le dépôt du projet de loi de ratification devant le Parlement. Le Sénat examinera d'ailleurs ce texte en séance publique le 9 février prochain.


* 70 Décret n° 2016-1797 du 20 décembre 2016 relatif aux modalités d'approbation par consultation des salariés de certains accords d'entreprise.

* 71 Le groupe Les Républicains, le groupe socialiste et républicain, le groupe du Rassemblement démocratique et social européen.

* 72 Décret n° 2016-1834 du 22 décembre 2016 relatif à l'organisation, aux missions, à la composition et au fonctionnement du Conseil d'orientation des conditions de travail et des comités régionaux.

* 73 Décret n° 2015-1885 du 30 décembre 2015 relatif à la simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité et décret n° 2015-1888 du 30 décembre 2015 relatif à la simplification du compte personnel de prévention de la pénibilité et à la modification de certains facteurs et seuils de pénibilité.

* 74 Ordonnance n° 2016-1519 du 10 novembre 2016 portant création au sein du service public de l'emploi de l'établissement public chargé de la formation professionnelle des adultes.

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