B. LE CONTENU DE L'ARRÊT : UNE CONFIRMATION DE LA JURISPRUDENCE « MAASTRICHT »

La Cour constitutionnelle a rejeté les griefs concernant la loi d'approbation du traité de Lisbonne ; en revanche, elle a jugé inconstitutionnelle la législation d'accompagnement dans la mesure où certaines dispositions en étaient absentes.

1. Les raisons du rejet des griefs à l'encontre de la loi d'approbation

a) Les conditions à respecter par le traité

La Cour souligne que, si la loi fondamentale rend intangible le principe de démocratie, elle n'interdit pas pour autant la poursuite de la construction européenne, dès lors que certaines conditions sont réunies. En effet, la Loi fondamentale est ouverte à l'intégration européenne, et l'on ne peut exiger d'un groupement d'États qu'il respecte le principe de démocratie exactement de la même manière d'un de ses États membres. Ainsi, « il peut être dérogé aux principes d'organisation de la démocratie interne lorsque les exigences d'une Union européenne négociée par voie de traité international et fondée sur le principe de l'égalité entre États membres le rendent nécessaire » (6 ( * )).

Quelles sont les conditions à réunir pour concilier la protection du principe de démocratie tel que garanti par la Loi fondamentale avec la participation à la construction européenne ?

? Tout d'abord, tout en participant à la construction européenne, l'Allemagne doit rester un État souverain. Par cette affirmation, la Cour ne prend pas une position politique, mais tire les conséquences de la loi fondamentale qui affirme l'intangibilité des principes posés à son article 20. Pour que l'Allemagne perde sa qualité d'État souverain, il faudrait que le peuple allemand lui-même renonce librement et explicitement aux bases mêmes de la loi fondamentale, décide de sortir du cadre de celle-ci.

En conséquence, l'intégration européenne doit obéir au principe d'attribution : il n'est pas possible de transférer à l'Union la « compétence de la compétence ». Les États doivent demeurer les « maîtres des traités ». Dans le même sens, le transfert de compétences ne doit pas être conçu comme un « chèque en blanc » : les institutions de l'Union ne peuvent interpréter les traités à leur guise pour modifier l'étendue des compétences transférées.

C'est pourquoi la Cour constitutionnelle doit pouvoir, le cas échéant, exercer un contrôle ultra vires en cas d'empiètement sur les compétences non transférées.

Ainsi, la Loi fondamentale permet à l'Allemagne de participer au développement de l'Union européenne pour autant que celle-ci constitue un « groupement d'États (Staatenbund) », c'est-à-dire « une association étroite et durable entre États demeurant souverains » .

? Ensuite, « l'identité constitutionnelle » de l'Allemagne doit être préservée. Là également, il s'agit d'une conséquence directe de la Loi fondamentale, qui exclut expressément à son article 23 que la construction européenne porte atteinte au « noyau dur » de principes fondamentaux rendu intangible par l'article 79.

Sans citer la jurisprudence « Solange » , la Cour en conserve l'esprit, en précisant que la garantie du respect du « noyau intangible » s'exerce « conformément au principe d'ouverture de la Loi fondamentale vis-à-vis du droit européen » , mais que cela ne signifie pas que la Cour constitutionnelle renonce à sa responsabilité ultime dans la protection de l'« identité constitutionnelle » de la République fédérale. Elle doit pouvoir veiller « à ce que la primauté d'application du droit de l'Union ne vaille que sur la base et dans le cadre de l'habilitation de droit constitutionnel en vigueur ».

? Enfin, le Bundestag doit garder des missions et des compétences d'un poids politique substantiel, faute de quoi le droit fondamental de participer à son élection serait vidé de son contenu : « l'unification européenne par la voie de traités entre États souverains ne doit pas priver les États membres de la marge de manoeuvre politique nécessaire pour modeler les conditions de vie économiques, culturelles et sociales ».

La démocratie ne peut se définir uniquement par des caractéristiques formelles : elle repose sur une interaction entre une opinion publique vivante et des gouvernements responsables, interaction qui donne un sens à l'élection et fait de celle-ci le lieu de la formation d'une volonté politique. Pour que le principe de démocratie consacré par la loi fondamentale conserve sa portée, la vie démocratique allemande doit conserver des enjeux suffisants pour les citoyens.

L'arrêt souligne à cet égard que « les domaines particulièrement sensibles pour la capacité d'autodétermination démocratique d'un État constitutionnel incluent depuis toujours le droit pénal matériel et formel, le monopole de la force, policière à l'intérieur et militaire vers l'extérieur, les recettes fiscales et les dépenses publiques, surtout celles qui sont motivées par des considérations de politique sociale, l'aménagement des conditions de vie conformément au principe de l'État social ainsi que des décisions particulièrement importantes sur le plan culturel, par exemple en matière de droit de la famille, de système scolaire et de formation et de régime applicable aux confessions religieuses. »

? Le principe de démocratie tel qu'il résulte de la loi fondamentale n'a pas pour seule conséquence d'imposer que soient préservées les conditions d'une vie démocratique nationale. Il conduit également à imposer des exigences démocratiques à la construction européenne. Mais ces exigences ne peuvent être les mêmes pour l'Union européenne, groupement d'États doté d'une compétence d'attribution, et pour un État comme l'Allemagne. On ne peut exiger de l'Union européenne le même niveau de démocratie que pour un État. Cela reviendrait d'ailleurs à exclure aujourd'hui tout transfert de droits de souveraineté, alors que la loi fondamentale est ouverte à de tels transferts pour la construction d'une Europe unie et d'un ordre international de paix. Ainsi, les exigences démocratiques ne s'appliquent à l'Union que dans la mesure où ses caractéristiques et ses compétences le permettent, tandis qu'elles s'appliquent intégralement à l'échelon de l'État, ce qui suppose en retour que les domaines ayant un fort impact sur les conditions de vie des citoyens demeurent de compétence nationale.

? En résumé, la question de l'application du principe de démocratie à la participation de l'Allemagne à la construction européenne conduit à distinguer trois hypothèses :

- hypothèse A : l'Union européenne devient un État sans répondre aux exigences démocratiques applicables à un État ; la démocratie allemande est vidée de sa substance. C'est pour l'essentiel la vision des requérants : pour eux, le traité de Lisbonne aboutit à ce résultat. C'est évidemment le scenario de l'inacceptable et l'Allemagne est constitutionnellement tenue de s'y opposer.

- hypothèse B : l'Union devient un État pleinement démocratique, le peuple allemand se fond dans un « peuple européen » qui devient le sujet de la légitimation démocratique. D'un point de vue démocratique, ce scenario est théoriquement concevable, mais il impose de sortir du cadre de la Loi fondamentale puisque le sujet de la légitimation démocratique change ; dans ce cas, un referendum serait nécessaire, puisqu'il s'agirait d'une question existentielle pour le peuple allemand comme sujet politique.

- hypothèse C : l'Union demeure un groupement d'États auquel des compétences sont attribuées limitativement par un traité ; elle présente le niveau de démocratie approprié, qui ne peut être celui exigible d'un État ; les conditions d'une démocratie vivante à l'échelon national restent réunies. Ce scenario permet de concilier le principe de démocratie et la participation de l'Allemagne à la construction européenne.

Par son arrêt, la Cour a considéré que le traité de Lisbonne s'inscrivait dans l'hypothèse C, mais à condition que certaines précautions soient prises.

b) Le traité de Lisbonne remplit ces conditions sous certaines réserves

La Cour constitutionnelle déduit de la Loi fondamentale que le principe de démocratie ne doit pas être subordonné à la construction européenne, mais concilié avec elle.

Selon la Cour, le traité de Lisbonne réalise de manière acceptable cette conciliation, mais sous réserve que certaines précautions soient prises concernant son interprétation et les conditions nationales de sa mise en oeuvre. C'est ce qui l'a conduite à censurer la « loi d'accompagnement » de la loi d'approbation du traité.

? Le traité de Lisbonne n'entraîne pas l'abandon de la souveraineté étatique de l'Allemagne.

Il n'y a pas de changement du sujet de la légitimation démocratique : le traité de Lisbonne n'institue pas, au centre des institutions de l'Union, un organe de décision politique élu au suffrage égalitaire par tous les citoyens et qui soit capable de représenter la volonté du peuple ; « le Parlement européen n'est pas un organe représentatif d'un peuple européen souverain » , étant composé à partir de contingents nationaux de députés entre lesquels les inégalités de représentations sont considérables. Cette situation, qui serait inacceptable au regard du principe de démocratie dans le cas d'un État, ne l'est pas lorsqu'il s'agit de compléter la légitimation démocratique d'un groupement d'États doté d'une compétence d'attribution. Et l'Union, avec le traité de Lisbonne, reste de cette nature : les États membres demeurent les maîtres des traités, ils disposent d'un droit inconditionnel de se retirer de l'Union, la citoyenneté de l'Union ne remplace pas les citoyennetés nationales, et le principe d'attribution des compétences continue à s'appliquer.

Ainsi, « les dispositions du traité peuvent être interprétées de façon à préserver à la fois l'identité politique et constitutionnelle démocratique des États membres et leur responsabilité pour l'aménagement et l'orientation fondamentale de la politique de l'Union » .

Non seulement le traité de Lisbonne ne donne pas à l'Union la « compétence de la compétence », mais il traduit un effort de clarification des compétences de l'Union, et met en place un mécanisme de contrôle de l'application du principe de subsidiarité, même si la Cour note lucidement qu'il est difficile « de savoir dans quelle mesure les parlements nationaux pourront s'organiser pour en faire usage dans le bref délai de huit semaines qui leur est imparti pour cela » .

La procédure de révision ordinaire des traités continue à reposer sur un accord unanime des États membres et une ratification par l'ensemble d'entre eux « conformément à leurs règles constitutionnelles respectives » . La procédure de révision simplifiée applicable à certains domaines prévoit, quant à elle, une décision du Conseil européen entrant en vigueur après son approbation par les États membres « conformément à leurs règles constitutionnelles respectives » : concernant la ratification, les exigences sont les mêmes pour les deux procédures de révision et requièrent, pour l'Allemagne, l'approbation du Bundestag et du Bundesrat (à la majorité des deux tiers dans chaque Chambre si la révision affecte la Loi fondamentale).

Cependant, à côté des procédures de révision ordinaire et simplifiée, le traité de Lisbonne introduit des souplesses permettant de modifier les traités sans emprunter une procédure de révision.

C'est tout d'abord le cas des « clauses passerelles ».

Lorsque, dans le cadre des politiques communes, il est prévu que le Conseil des ministres décide à l'unanimité, le Conseil européen statuant à l'unanimité peut autoriser le passage au vote à la majorité qualifiée (sauf dans le cas des décisions ayant des implications militaires ou relevant du domaine de la défense). De même, lorsqu'une procédure législative spéciale est prévue (cas où le Parlement européen n'a pas le pouvoir de codécision), le Conseil européen statuant à l'unanimité peut décider que la procédure législative ordinaire (codécision) s'appliquera.

Le recours à une de ces « clauses passerelles » générales est notifié aux parlements nationaux. La décision ne peut entrer en vigueur que si aucun parlement national n'a fait connaître son opposition dans un délai de six mois.

En outre, dans certains domaines particuliers, le Conseil européen ou le Conseil des ministres peut, à l'unanimité, décider d'appliquer le vote à la majorité qualifiée ou la procédure législative ordinaire sans que, pour ces clauses passerelles spécifiques , les traités prévoient pour les parlements nationaux un droit d'objection. Ces domaines sont : le cadre financier pluriannuel de l'Union ; certaines mesures concernant la politique sociale, l'environnement, la coopération judiciaire en matière de droit de la famille ; certaines décisions de politique étrangère.

Enfin, une clause particulière s'applique au droit de la famille : les parlements nationaux ont un droit d'opposition (comme dans le cas des « clauses passerelles » générales ) lorsque le Conseil détermine la liste des aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontalière et sur lesquels l'Union est susceptible de légiférer selon la procédure législative ordinaire.

Les « clauses passerelles » générales posent un problème au regard de la Loi fondamentale, car elles ne permettent pas d'assumer complètement la responsabilité à l'égard de l'intégration européenne au moment de l'approbation du traité, et qu'elles peuvent concerner le domaine sensible de la justice et des affaires intérieures. Et le droit d'opposition reconnu aux parlements nationaux « ne saurait faire office de ratification » . C'est pourquoi le Gouvernement allemand ne pourra donner son accord à l'utilisation d'une de ces clauses passerelles qu'en vertu d'une loi, soit une loi approuvée par les deux Chambres, soit une loi approuvée à la majorité des deux tiers dans chaque Chambre si la Loi fondamentale se trouve affectée. Cette règle s'applique également à la clause particulière concernant le droit de la famille.

Les clauses passerelles spécifiques sont moins problématiques du fait de leur objet bien déterminé. Cependant, « le droit de veto au sein du Conseil ne doit pas être abandonné sans l'accord des organes législatifs compétents, même pour des objets matériellement définis dans les traités » , le Bundestag et le Bundesrat devant assumer leurs responsabilités en matière d'intégration. Le représentant de l'Allemagne ne pourra donc donner son accord pour l'utilisation d'une clause passerelle spécifique qu'avec l'aval du Bundestag et, si les compétences législatives des Länder sont concernées, du Bundesrat.

À côté des « clauses passerelles », une autre souplesse résulte de la clause de flexibilité pour l'étendue des compétences de l'Union. Selon cette clause, lorsque, dans le cadre d'une des politiques prévues par les traités, une mesure paraît nécessaire pour atteindre l'un des objectifs visés par les traités et que ceux-ci ne prévoient pas le pouvoir d'action correspondant, le Conseil statuant à l'unanimité peut prendre cette mesure en accord avec le Parlement européen. Une clause de ce type a toujours figuré dans les traités européens, mais son objet était limité aux « mesures nécessaires pour réaliser, dans le fonctionnement du marché commun, l'un des objets de la Communauté » .

Bien que l'emploi de la clause de flexibilité soit entouré de certaines garanties, elle porte atteinte à l'interdiction constitutionnelle de transférer la « compétence de la compétence », puisque son champ d'application est devenu très large et qu'elle permet à l'Union d'intervenir en dehors des compétences prévues par les traités sans approbation des parlements nationaux. C'est pourquoi, dans le cas de l'Allemagne, un accord ne pourra être donné à l'utilisation de cette clause que dans les mêmes conditions que pour l'emploi des « clauses passerelles » générales .

Ainsi, il est possible de concilier l'approbation du traité du traité de Lisbonne et le respect du principe de souveraineté étatique résultant de la Loi fondamentale, dès lors que l'exigence d'une approbation parlementaire est introduite dans un certain nombre de cas où, sans naturellement l'exclure, le traité de Lisbonne ne la prévoit pas : on voit d'ores et déjà pourquoi les objections de la Cour constitutionnelle concernent non pas la loi d'approbation du traité, mais la loi d'accompagnement, dans la mesure où celle-ci n'introduit pas cette exigence dans les cas mentionnés.

? Le respect de l'« identité constitutionnelle » de l'Allemagne n'est pas compromis par le traité de Lisbonne dès lors que la Cour constitutionnelle elle-même ne renonce pas à ses propres responsabilités.

La primauté du droit européen a sa source dans la Loi fondamentale et ne peut donc s'exercer à l'égard de l'identité constitutionnelle protégée par celle-ci. La Cour constitutionnelle ne saurait être privée de sa responsabilité dans cette protection.

Il suffit donc, pour que la condition de respect de l'identité constitutionnelle soit remplie, que la Cour constitutionnelle elle-même confirme qu'elle ne renonce pas à sa responsabilité ultime dans ce domaine, dans le cadre d'un « rapport de coopération » avec la Cour de justice de Luxembourg.

C'est ce qu'elle fait dans son arrêt en réaffirmant que, même après l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il ne sera pas exclu qu'elle puisse être amenée à « constater l'inapplicabilité » d'un acte européen en Allemagne. Bien sûr, cette possibilité ne devrait normalement pas avoir à jouer : la Cour de justice européenne doit assurer la protection des droits fondamentaux ainsi que le respect des traités, et le traité de Lisbonne garantit expressément le respect de l'identité constitutionnelle des États membres. Mais la Cour constitutionnelle se réserve le droit d'intervenir si d'aventure ce premier rempart était franchi.

Elle fait d'ailleurs malicieusement remarquer que, dans l'arrêt « Kadi » du 3 septembre 2008, la Cour de justice n'a pas hésité à faire passer le respect de la primauté d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies après l'exigence de garantir certains principes fondamentaux reconnus par le droit communautaire, mettant ainsi « l'affirmation d'une identité propre en tant que Communauté de droit au-dessus d'un engagement respecté par ailleurs ».

? Enfin, bien que le traité de Lisbonne accroisse sensiblement les compétences européennes, les compétences nouvelles « peuvent et doivent être exercées par les organes de l'Union européenne de manière à ce que les États membres gardent, tant en volume que dans la substance, des champs d'activité d'un poids suffisant, sans lesquels il n'y a juridiquement et pratiquement pas de démocratie vivante ».

Toutefois, cette affirmation générale doit être complétée par certaines réserves d'interprétation.

La Cour souligne l'importance centrale du droit pénal dans les responsabilités des États membres et précise que « en raison de l'impact particulier des normes pénales et de procédure pénale sur l'autodétermination démocratique, les dispositions conventionnelles correspondantes sont d'interprétation stricte - en aucun cas extensive - et leur utilisation requiert une justification particulière ».

Cette exigence d'interprétation particulièrement stricte des compétences pénales transférées s'accompagne d'exigences concernant le rôle du Parlement allemand dans leur mise en application :

- le représentant de l'Allemagne ne pourra donner son accord qu'en vertu d'une loi approuvée par les deux Chambres à l'utilisation de la disposition du traité de Lisbonne permettant d'étendre, au-delà des domaines explicitement visés par ce traité, la liste des domaines de criminalité particulièrement grave et revêtant une dimension transfrontalière pour lesquels l'Union est habilitée à légiférer ;

- l'utilisation de la « clause de frein » (saisine du Conseil européen par un État membre qui estime qu'un projet de directive porte atteinte aux aspects fondamentaux de son système de justice pénale) se fera sur instruction du Bundestag et, lorsque les règles en matière de compétence législative l'exigent, du Bundesrat.

La Cour constitutionnelle a également examiné si le traité de Lisbonne portait atteinte aux compétences du Bundestag en matière d'engagement des forces armées à l'étranger - grief soulevé spécifiquement par un des requérants - et a conclu par la négative. Les « clauses passerelles » générales ne s'appliquent pas aux décisions « ayant des implications militaires ou dans le domaine de la défense » ; celles-ci sont toujours prises à l'unanimité et le représentant de l'Allemagne au sein du Conseil sera constitutionnellement tenu de « rejeter toute proposition qui aboutirait à violer ou à contourner le domaine réservé du Parlement en matière de défense ».

De même, la Cour constitutionnelle a examiné les dispositions sociales du traité de Lisbonne, d'une part sous l'angle du grief spécifique de mise en cause du principe de l'État social, d'autre part sous l'angle du grief de réduction excessive des « nécessaires marges de manoeuvre démocratiques » dans ce domaine.

Elle a rejeté ces deux griefs : d'une part, « l'Union européenne n'est pas dépourvue de compétences sur le plan de la politique sociale et n'est pas inactive dans ce domaine », d'autre part « les États membres conservent un champ de compétences suffisant pour pouvoir adopter en toute autonomie des décisions essentielles sur le plan de la politique sociale ».

La Cour relève sur ce dernier point que les États membres disposent du mécanisme du « frein » (saisine du Conseil européen suspendant la procédure législative ordinaire) pour les mesures liées, dans le domaine de la sécurité sociale, à la libre circulation des travailleurs. Comme dans le cas du droit pénal, ce mécanisme devra être mis en oeuvre par le représentant de l'Allemagne sur instruction du Bundestag et, si les règles en matière de compétence législative l'exigent, du Bundesrat.

• Sous ces différentes réserves, le traité de Lisbonne ne peut être interprété comme vidant de sa substance la vie politique nationale au point que les conditions d'une réelle vie démocratique ne seraient plus réunies.

* (6) Les citations de l'arrêt « Lisbonne » sont empruntées à une traduction de courtoisie.

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