FICHE D'IMPACT BUDGÉTAIRE
RÉALISÉE PAR LA CHANCELLERIE

1 - Article 1er du projet de loi modifiant les articles 10 et 39 de la loi du 10 juillet 1991

La nouvelle rédaction de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1991 prévoyant la rétribution au titre de l'aide juridictionnelle de la transaction conclue avant toute introduction d'instance contentieuse ne devrait pas entraîner de charge budgétaire supplémentaire par rapport au droit actuel puisque toute affaire réglée par transaction est en principe une affaire contentieuse en moins. Il y a donc transfert de charge du contentieux vers le transactionnel.

Les second et troisième alinéas nouveaux de l'article 39 posent le principe que les pourparlers qui n'ont pas pu aboutir à la conclusion d'une transaction méritent rémunération au titre de l'aide juridictionnelle, le niveau de cette rémunération étant fixé par décret en Conseil dEtat.

Pour la commodité du raisonnement, il a été considéré dans la suite de la présente fiche que cette rémunération ferait l'objet d'un abattement de 50 % par rapport à celle versée au terme d'une procédure contentieuse, par référence aux dispositions du troisième alinéa de l'article 111 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi actuelle et traitant de la transaction en cours d'instance.

A périmètre d'affaires constant , les nouvelles dispositions ne devraient pas générer de charges budgétaires nouvelles. Deux hypothèses sont en effet possibles :

- la tentative de transaction débouche sur une action contentieuse et la rétribution versée par l'Etat au titre de la tentative s'impute sur la rétribution versée au terme du procès dans des conditions qui seront définies par décret en Conseil dEtat ;

- la tentative de transaction n'est pas suivie d'une action contentieuse et le coût pour l'Etat est inférieur de moitié à celui de la procédure contentieuse à laquelle la tentative de transaction s'est substituée.

La seule question qui doit être posée est donc celle de savoir si ces dispositions nouvelles vont avoir un effet "d'attrait" , c'est-à-dire si elles vont conduire des personnes concernées par un litige, à s'engager dans la voie de la transaction, puis le cas échéant dans celle du procès, alors qu'elles ne l'auraient pas fait à droit constant.

Pour tenter d'apprécier ce "risque" budgétaire, il faut dans un premier temps déterminer l'importance du domaine juridique concerné en utilisant les données contentieuses disponibles les plus récentes, à savoir celles de l'année 1996.

Il y a eu, au cours de cette année, 1.102.848 affaires nouvelles devant les tribunaux d'instance et de grande instance qui sont les juridictions les plus consommatrices d'aide juridictionnelle. 1( * )

Le contentieux de la famille et de l'état des personnes ainsi que celui de l'exécution peuvent être écartés de cette base, le premier parce qu'en droit il ne peut donner lieu à transaction hors saisine du juge que dans un nombre très limité de cas, le second parce qu'il est nécessairement contentieux s'agissant de demander au juge d'aménager les modalités d'exécution d'une décision de Justice ou d'en faciliter l'exécution. Ces deux contentieux représentaient en 1996, 649.746 affaires.

Le contentieux patrimonial général qui est donc celui qui peut donner lieu à transaction extra-judiciaire a représenté en 1996, 453.102 affaires.

Si l'on applique à cette base, les taux de couverture AJ observés au cours du même exercice dans ces deux catégories de juridiction (26,33 % devant les TGI, 13 % devant les TI) on obtient les résultats suivants :

Contentieux patrimonial général ayant donné lieu à aide juridictionnelle :

TGI 37.723 affaires

TI 40.380 affaires

78.103 affaires

Ce premier chiffre montre que le domaine susceptible de donner lieu à tentative de transaction rémunérée au titre de l'aide juridictionnelle reste un domaine relativement limité, le contentieux de l'aide juridictionnelle étant, en effet, un contentieux majoritairement familial (divorce, post-divorce, contentieux de la famille naturelle...).

L'hypothèse de travail retenue ici est que l'effet d'"attrait" n'excédera pas 10 % de ce volume, soit 7.800 affaires.

Un certain nombre de ces dossiers donneront lieu à la conclusion d'une transaction et donc à un paiement de l'AJ à taux plein, un certain nombre d'entre eux déboucheront sur une procédure contentieuse et donneront lieu également au paiement de l'AJ à taux plein, enfin un certain nombre se limiteront à la tentative de transaction et donneront donc lieu au paiement de PAJ au taux réduit de 50 %.

Il est proposé de considérer que la moitié de ces affaires nouvelles donnera lieu à paiement d'une AJ à taux plein et l'autre moitié au taux réduit.

Si l'on applique à l'hypothèse de 7.800 affaires supplémentaires les coûts moyens de rétribution au titre de l'aide juridictionnelle observé dans ces deux catégories de juridiction, les résultats suivants sont observés :

TGI

1.886 x 142.20 F 2( * ) x 20 3( * ) x 1,045

= 5,6 MF

TI

2.019 x 142,20 F 1 x 14 2 x 1,045

= 4,2 MF

TGI

1.886 x 50 % 4( * ) x 142,20 F 1 x 20 3 x 1,045 5( * )

= 2,8 MF

TI

2.019 x 50 % 3 x 142,20 F 1 x 14 2 x 1,045 4

= 2,1 MF

 

Risque de surcoût (base 1996)

14,7 MF

 

arrondi à

15 MF

(compte non tenu de l'économie résultant de la substitution de la simple tentative de transaction à une action contentieuse).

Il - Chapitre Il du projet de loi

Les principales dispositions de ce second chapitre précisent le contenu de l'accès au droit et modifient les règles de constitution et de composition des actuels conseils départementaux de l'aide juridique créés par la loi du 10 juillet 1991 qu'il est proposé de transformer en conseils départementaux de l'accès au droit et de la résolution amiable des litiges.

Ces dispositions qui ont pour but de favoriser et d'accélérer la mise en place de ces conseils sur l'ensemble du territoire, n'ont pas vocation à générer un surcoût budgétaire spécifique par rapport à la mise en oeuvre du dispositif des CDAJ organisé par la loi de 1991 relative à l'aide juridique.

Le projet de loi de finances pour 1999 contient deux mesures nouvelles destinées à accompagner la mise en oeuvre du volet "accès au droit" du présent projet de loi :

- la première de 5,5 MF sur le chapitre 46.01 permettant d'accroître fortement l'enveloppe de crédit d'intervention attribuée aux conseils départementaux ;

- la seconde de 6 MF sur le chapitre 37-92 permettant aux tribunaux de grande instance des chefs-lieux de département de disposer de moyens supplémentaires pour assurer le fonctionnement courant des conseils départementaux.

III - Articles 12, 13 et 14 du projet de loi (chapitre III)

Ces trois articles prévoient la rétribution au titre de l'aide juridictionnelle de l'avocat intervenant en matière de médiation pénale (mesure alternative aux poursuites devant la juridiction de jugement créée par l'article 41, 7ème alinéa du code de procédure pénale). L'avocat peut intervenir soit pour assister la personne mise en cause soit pour représenter la victime.

Le chiffrage ci-dessous a été établi sur les bases suivantes

- nombre de médiation pénales en 1996 : 38.918.

- proposition de mise en cause satisfaisant aux conditions de ressources de la loi de juillet 1991 et sollicitant l'assistance d'un conseil : 25 %

- proposition de victimes satisfaisant aux conditions de ressources de la loi de juillet 1991 et sollicitant l'assistance d'un conseil : 5 %

- rétribution de l'avocat : 2 unités de valeur

Calcul :

- mise en cause : 25 % de 38.918 = 9.729
arrondis à 10.000 x 285 F = 2.850.000 F

- victimes : 5 % de 38.918 = 1.945
arrondis à 2.000 x 285 F = 570.000 F

TOTAL = 3.420.000 F

TOTAL général (1 + 11) = 18.420.000 F


arrondis à 18,5 MF

IV - Titre II, article 17

Cet article a pour objectif de donner un fondement juridique à l'existence des maisons de la justice et du droit, dont les créations ont été, jusqu'à présent, purement prétoriennes. Il existe actuellement 30 maisons de la justice et du droit auxquelles s'ajoutent à Marseille 13 antennes (1 par arrondissement) et sur l'île de la Réunion, 20 antennes.

Le coût unitaire de création d'une MJID se décompose de la sorte :

- 0,6 emploi de magistrat 202.000F

- 1 emploi de greffier : 160.000F

- 1 emploi d'éducateur 165.000F

- crédit de fonctionnement lié à l'activité
de l'éducateur 35.000F

- 1 emploi-jeune 85.000F 6( * )

TOTAL 647.000F/an

auxquels s'ajoutent les crédits de premier équipement en matériel informatique (50.000F).

L'ouverture d'une MJD ne nécessite pas nécessairement de créations d'emploi dans tous les cas : les besoins ci-dessus énumérés peuvent être satisfaits, sur certains sites, par redéploiement.

V - Réduction de charges

Le rôle nouveau donné aux conseils départementaux de l'accès au droit de développement des modes non judiciaires de résolution des litiges ainsi que l'incitation financière résultant pour les avocats de l'octroi de l'aide juridictionnelle en matière de transaction avant contentieux permettent d'envisager une réduction de certaines catégories de contentieux. Cette réduction des flux d'entrée dégagera des équivalents temps pleins de magistrat et de fonctionnaire de greffe qui pourront être redéployés sur des activités de résorption des stocks entrainani une accélération des délais de jugement des affaires contentieuses et participant ainsi à la réalisation de l'un des objectifs principaux du plan de réforme pour la Justice, présenté le 29 octobre 1997 : mettre la justice au service des citoyens en la rendant plus accessible pour tous et plus rapide.

En outre, devant les dysfonctionnements persistants les plus choquants pour les citoyens (fort taux de classement, délais de jugement très longs), votre rapporteur insiste sur la nécessité de donner la priorité à l'amélioration du service offert aux justiciables avant de lancer toute autre réforme, sans préjuger de leur utilité.

I. L'EXÉCUTION DU PROGRAMME PLURIANNUEL POUR LA JUSTICE

Le 6 janvier 1995, la loi de programme n ° 95-9 relative à la justice a été publiée, qui visait à augmenter les moyens des juridictions de 8,1 milliards de francs sur cinq ans, répartis de la manière suivante :

- services judiciaires 4,5 milliards de francs

- administration judiciaire 3 milliards de francs

- protection judiciaire de la jeunesse 0,4 milliard de francs

- juridictions administratives 0,2 milliard de francs

Cette loi avait également prévu la création de 5.760 emplois budgétaires pendant la période 1995-1999 et devait permettre d'augmenter de 6.100 les effectifs disponibles :

- services judiciaires 1.400

dont :


• magistrats
300


• fonctionnaires
1.020


• magistrats exerçant à titre

temporaire (en équivalent temps plein)
80

-
Conseil d'Etat et juridictions administratives 380

dont :


• magistrats
180


• fonctionnaires
200

- Administration pénitentiaire 3.920

- Protection judiciaire de la jeunesse 400

En 1997, le Gouvernement a décidé d'étaler sur une année supplémentaire l'exécution de cette loi de programme.

Pourtant, le rattrapage opéré à partir de 1998 permet dès aujourd'hui de dresser un bilan de l'exécution de la loi de programme.

1. Les créations d'emplois

A la fin de l'année 1999, les quatre grands secteurs de la Justice auront connu, au titre du programme, 3.947créations d'emplois nets, soit 64,7 % de l'ensemble.

Cette moyenne cache cependant de fortes disparités par secteur.

- En ce qui concerne les services judiciaires, 1384 emplois ont été créés au titre de la loi de programme sur les 1.400 prévues au total, soit un taux de réalisation de 98,9 % ;

- La protection judiciaire de la jeunesse a bénéficié de la création de 400 emplois sur les 400 prévus au total, soit un taux de réalisation de 100 % ;

- Dans les juridictions administratives, 361 emplois sur les 380 prévus ont été créés, ce qui représente le taux de réalisation à 95 % ;

- En revanche, l'administration pénitentiaire a connu un taux de réalisation très bas , puisque seulement 1.802 emplois sur 3.920 ont été créés, soit 46 %. Ce résultat s'explique par les retards observés dans la mise en oeuvre du programme de construction "4.000" et des 1.200 places nouvelles en centres de semi-liberté.

2. Les équipements

S'agissant des équipements, la loi de programme a prévu une enveloppe de 8.100 millions de francs en autorisations de programme.

Entre 1995 et 1999, 7.961 millions de francs ont été inscrits dans les lois de finances successives, soit 98,3 % de l'ensemble des autorisations de programmes prévues initialement.

Les services ont été dotés de la manière suivante :

- services judiciaires : 4.500 millions de francs sur 4.500 millions prévus, soit une taux d'inscription de 100 % ;

- services pénitentiaires : 2.848 millions de francs sur 3.000 millions prévus, soit un taux d'inscription de 94,9 % ;

- protection judiciaire de la jeunesse : 400 millions de francs sur 400 millions prévus, soit un taux d'inscription de 100 % ;

- juridictions administratives : 213 millions de francs sur 200 millions prévus, soit une taux d'inscription de 106,5 %.

Votre rapporteur se félicite de la bonne exécution globale de la loi de programme pour la justice votée en 1994. Toutefois, il estime que si les crédits votés à cette époque ont permis de lancer le programme de réhabilitation du service public de la justice, l'effort financier doit être poursuivi pour permettre à la justice de répondre de manière satisfaisante aux attentes des justiciables. C'est pourquoi votre rapporteur plaide en faveur d'une nouvelle loi de programmation en pour la justice.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page