N° 88

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME III

COOPÉRATION

Par Mme Paulette BRISEPIERRE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet, François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton, vice-présidents ; Michel Alloncle, Jean-Luc Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë, secrétaires ; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart,  Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe de Gaulle, Daniel Goulet , Jacques Habert, Marcel Henry, Roger Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis Ploton, André Rouvière, André Vallet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 230 , 305 à 310 et T.A. 24 .

Sénat : 84 et 85 (annexe n° 2 ) (1997-1998).

Lois de finances.

Mesdames, Messieurs,

1,25 milliard d'habitants en 2025 : en trente ans, le nombre d'Africains aura doublé et représentera 18 % de la population mondiale.

Plus que les vicissitudes du quotidien, les perspectives démographiques à moyen terme doivent éclairer notre diplomatie en Afrique et notre politique de coopération.

Il y a là en effet pour la France un défi majeur mais aussi une chance qu'il faudra saisir. Notre pays devra apporter sa part au développement économique nécessaire aux besoins d'une population plus nombreuse. Mais en retour, l'influence dont il bénéficiera sur le continent africain lui assurera sur la scène internationale un rôle et un rayonnement conformes à sa tradition historique et à sa vocation.

Il importe que notre coopération soit résolument tournée vers l'avenir. L'Afrique change. Ces mutations requièrent une analyse lucide. Notre action doit s'adapter en conséquence et s'ouvrir en particulier aux nouvelles générations d'Africains dont dépendra bientôt le destin du continent.

Et il n'est pas sûr que le projet de budget de la coopération, en baisse de 3,5 % par rapport à l'an passé soit à la mesure des enjeux décisifs que représente notre présence en Afrique.

*

* *

I. L'AFRIQUE EN QUÊTE DE NOUVEAUX ÉQUILIBRES

Les événements récents en Afrique Centrale ne se réduisent pas aux péripéties familières au continent : révolutions de palais, coups d'Etat... Ils traduisent à l'échelle d'une région, des mutations plus profondes. A cet égard, leur analyse peut fournir un préalable utile à une réflexion sur la politique française en Afrique.

A. QUEL ÉQUILIBRE POLITIQUE POUR L'AFRIQUE CENTRALE ?

L'année politique s'achève en Afrique centrale par une large redistribution des cartes : effondrement du régime du Maréchal Mobutu Sese Seko au Zaïre, rebaptisé République démocratique du Congo (RDC), retour au pouvoir par la force au Congo-Brazzaville de l'ancien Président Sassou N'Guesso au terme d'un conflit sanglant. Au-delà de ces bouleversements, de nouvelles solidarités se dessinent, de nouveaux équilibres géopolitiques se cherchent. En toile de fond cependant ce sont toujours les mêmes scènes de désolation : l'odyssée tragique des réfugiés dans l'est zaïrois, les souffrances des populations civiles victimes de conflits fratricides et implacables.

Mais l'Afrique centrale ne résume pas toute l'Afrique. A l'ouest, la plupart des pays connaissent une stabilité favorable à la poursuite de la croissance économique. Au sud, Pretoria, malgré les difficultés intérieures, s'affirme comme une puissance continentale avec laquelle désormais il faudra compter.

1. Les mutations de la scène politique

a) La fin du Zaïre de Mobutu Sese Seko

Octobre 1996 : les troupes rwandaises appuyées par l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo de Laurent-Désiré Kabila pénètrent dans l'est du Zaïre où se trouvent réfugiés, dispersés dans des camps de fortune, plusieurs centaines de milliers de Rwandais d'origine hutue.

Quelques dizaines de milliers de réfugiés regagnent le Rwanda. D'autres -la majorité- fuient plus à l'ouest sous la pression des troupes rebelles de Kabila. Ces dernières, animées par la volonté de conquête du pouvoir de leur chef, mettent en déroute les troupes de l'armée régulière zaïroise. Après trente-deux ans d'un pouvoir sans partage ou presque, le Président Mobutu est contraint à l'exil.

Au-delà du fleuve Zaïre à Brazzaville, l'échéance présidentielle prévue pour le 27 juillet aiguise les ambitions et met aux prises l'ancien chef de l'Etat, le général Denis Sassou N'Guesso soutenu par sa milice (les " Cobras ") et son successeur élu en août 1992, Pascal Lissouba.

Après de longs combats qui ont débuté le 5 juin, le général Sassou N'Guesso s'assure, le 14 octobre dernier, le contrôle de Brazzaville et, le lendemain, de Pointe-Noire, capitale pétrolière et poumon économique du pays, ceci grâce au concours décisif des troupes et des blindés angolais venus de l'enclave de Cabinda.

b) Incertitudes en Centrafrique

Plus au nord, en Centrafrique, le Président Ange Félix Patassé, pourtant démocratiquement élu, s'est trouvé confronté à des mutineries à répétition dont la dernière en date, en novembre 1996, ébranla très sévèrement les fondements de son autorité. La mise en place d'une force interafricaine de 700 hommes détachés par six pays (Burkina Faso, Gabon, Mali, Sénégal, Tchad et Togo) à la suite des accords de paix signés à Bangui le 25 janvier 1( * ) , grâce au soutien financier et logistique de la France, n'a pas permis de mettre fin immédiatement aux troubles et aux violences.

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