B. LES RETARDS PRIS SUR LE PROJET SCAF COMPROMETTENT LA PRÉPARATION DES ARMÉES À LA GUERRE AÉRIENNE DU FUTUR

Les industriels français, allemands et espagnols poursuivent les travaux préparatoires du système de combat aérien du futur (SCAF). Ce projet ambitieux concentre de nombreux risques qui devront être pleinement maîtrisés dans les années à venir.

Sur la période 2022-2025, le financement du projet représente un coût de 1,7 milliard d'euros , les AE afférentes ayant été consommées en 2022 et 2023. En 2023, les CP demandés s'élèvent à 372,9 millions d'euros. Ces crédits sont prévus pour le financement d'études destinées à quantifier et échelonner les besoins pour garantir une première capacité opérationnelle en 2040.

Le système de combat aérien du futur (SCAF)

En 2017, la France et l'Allemagne sont convenues de développer un système de combat aérien européen pour remplacer leurs flottes actuelles d'avions de combat sur le long terme.

Le SCAF sera le système de combat aérien du XXI ème siècle. Il rassemblera autour d'un nouvel avion de combat polyvalent, adapté aux menaces aériennes de 2040 et exploitant le potentiel de l'intelligence artificielle, des moyens de combat travaillant en réseau, dont des drones de différents types. Il devrait être mis en service à l'horizon 2040.

Initiée lors du conseil des ministres franco-allemand en 2017, élargie puis renforcée en 2019 par un accord-cadre regroupant la France, l'Allemagne et l'Espagne, la coopération SCAF se structure. Ce projet tripartite est appelé « NGWS ( Next generation weapon system ) within a FCAS » qui remplira des missions plus ou moins spécifiques pour remplacer à terme les flottes d'avions de combat Rafale et Eurofighter. La France a été désignée leader de ce projet. L'accord cadre porte sur les activités de R&T et de démonstrations s'étendant jusqu'en 2030.

Deux types de travaux sont menés à court et moyen terme :

- des études d'architectures permettant d'établir les exigences du système de systèmes et des objets qui le composent et également la comparaison de différents concepts (contrat JCS lancé en janvier 2019) ;

- des études de R&T et le développement de démonstrateurs indispensables pour répondre aux évolutions nécessaires à venir dans le domaine de l'aéronautique de combat. La France a en effet identifié 7 piliers couvrant l'ensemble des invariants technologiques nécessaires au SCAF (système de systèmes, avion de nouvelle génération « NGF », très haute furtivité, capteurs, propulsion, « Remote Carriers », démonstrations des architectures au sol). Les premières offres industrielles ont été remises lors du salon du Bourget et les négociations sont en cours. Ces travaux préparatoires initient le lancement progressif à compter de 2020 du développement de démonstrations technologiques en vue de ruptures capacitaires dans le domaine de l'aviation de combat.

Source : ministère des armées

Le projet SCAF a fait l'objet d'un accord entre les états-majors des armées français, allemand et espagnol le 30 août 2021 relatif à l'expression du besoin opérationnel, qui constitue une avancée importante. Le rapporteur spécial estime toutefois que les risques demeurent, la signature du contrat principal (impliquant notamment Dassault Aviation et Airbus) ayant été reportée à la suite de désaccords entre les industriels (relatifs aux sous-traitants). Ce contrat - dit Statement of Work (SOW) - doit fixer le cahier des charges techniques pour le passage à la phase de démonstration, devant être lancée en 2023.

Alors que le premier vol du démonstrateur était prévu fin 2026, ce dernier devrait en réalité avoir lieu un an plus tard du fait des difficultés de la coopération franco-allemande, alors que le SOW n'est toujours pas signé.

Dans ces négociations, la France doit en effet rester ferme sur certains points d'intérêt national essentiel :

- premièrement, la capacité à fournir des équipements et systèmes d'armes répondant au degré d'autonomie dans l'action souhaitée par la France. Cela implique notamment que la forme du chasseur de nouvelle génération ( New Generation Fighter , NGF) permette d'assurer la composante aéroportée de la dissuasion nucléaire française ainsi que sa navalisation (la possibilité d'être lancés et réceptionnés sur un porte-avions) ;

- deuxièmement, le maintien sur la durée d'une industrie indépendante des règlementations étrangères, en termes de contrôle des exportations notamment.

Le rapporteur spécial insiste sur le fait que chaque jour de retard supplémentaire dans les négociations est un jour perdu pour la préparation des armées françaises à la guerre aérienne du futur.

Compte tenu du fait que le besoin opérationnel en faveur d'un chasseur de nouvelle génération a été exprimé avec la plus grande clarté par les états-majors, des exigences techniques particulières tenant à l'inscription de ce nouveau chasseur dans la stratégie globale de défense française, et enfin de la difficulté manifeste à poursuivre les négociations avec nos partenaires, on ne peut plus exclure de devoir envisager la possibilité d'une alternative « nationale » au SCAF.

C'est la raison pour laquelle, tout en considérant que le « plan A » demeure celui de la poursuite de la coopération engagée, le rapporteur spécial propose un amendement FINC.1 destiné à financer des études supplémentaires permettant d'explorer la faisabilité d'un tel « plan B national » afin d'anticiper une éventuelle impasse des négociations.

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