D. UN PILOTAGE DE LA GESTION DES RISQUES DE PLUS EN PLUS COMPLEXE

Les différentes auditions conduisent au constat d'une recrudescence des risques avec une intensité plus forte des aléas. Or le pilotage de la gestion de ces risques tend à se heurter aux limites inhérentes liées aux difficultés d'anticiper la survenance du risque, de le maîtriser, de restaurer l'éco-système et de mettre en oeuvre des moyens nécessaires aujourd'hui pour éradiquer le risque demain.

1. La mise en oeuvre de la réforme de l'assurance récolte en 2023

Alors que le dernier rapport du GIEC a alerté sur le fait que « dans les dix, vingt à trente prochaines années, le territoire européen connaîtra une hausse significative des sécheresses dont l'intensité, la fréquence et la durée vont augmenter » 35 ( * ) , le « Varenne agricole de l'eau » s'est achevé le 1 er février 2022, après plus de six mois de travaux.

Décliné autour de trois axes, le premier s'est traduit par l'adoption du projet de loi « Assurance récolte » 36 ( * ) visant à réformer l'assurance récolte afin de la rendre plus juste et plus transversale. La réforme de l'assurance récolte entrera en vigueur le 1 er janvier 2023. Elle crée un dispositif universel de couverture des risques partagé entre les agriculteurs, les entreprises d'assurance et l'État. Elle repose sur une architecture à trois étages, en fonction du niveau d'intensité de pertes :

- le premier étage se situe en-deçà de 20 % de pertes (correspondant au niveau de franchise) pour les dommages de faible intensité. L'agriculteur en supporte les conséquences (épargne de précaution...) ;

- le deuxième étage relève de l'assurance privée et se déclenche si les pertes sont comprises entre le taux de franchise et le taux de pertes exceptionnelles, déclenchant le Fonds de solidarité nationale (FSN). Le risque est mutualisé entre les territoires et les filières de risques d'intensité moyenne, par le biais de l'assurance multirisque climatique (AMCR) dont les primes font l'objet d'une subvention publique à hauteur de 70 % ;

- le troisième étage est celui de l'intervention du FSN pour l'indemnisation de la s urvenance de risques dits « catastrophiques » avec une prise en charge par l'État à hauteur de 90 % pour les assurés et de la moitié pour les non-assurés soit 45 %.

Pour chaque groupe de culture, l'agriculteur devra choisir entre :

- un contrat d'assurance récoltes ou d'assurance prairies subventionné ;

- ou le fonds de solidarité nationale (le FSN) porté par l'État.

Celui qui n'a pas souscrit de contrat n'aura recours qu'au FSN.

Au 1 er janvier 2023, chaque agriculteur doit avoir désigné un interlocuteur unique pour gérer, pour son compte, le dispositif de gestion des risques mis en place.

2. La traduction budgétaire du nouveau dispositif

Comme attendu, le PLF 2023 introduit le nouveau dispositif d'assurance récolte.

L'action 22 « Gestion des crises et des aléas de la production agricole » se voit dotée de crédits en AE et CP de 255,5 millions d'euros supplémentaires, ce qui représente une augmentation de 2 899,95 % en AE et 2 878,37 % en CP, par rapport aux montants de la LFI pour 2022.

Cette hausse résulte de la budgétisation, à hauteur du montant de 255,5 millions d'euros en AE et CP, du Fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA), afin de financer le nouveau dispositif de soutien à l'assurance récolte.

Le complément de financement provient également de :

- la taxe affectée au FNGRA de 120 millions d'euros issue de la contribution additionnelle aux primes, passant de 5,5 % à 11 % (article L. 361-2 du code rural et de la pêche maritime) avec corrélativement le doublement du plafond de la taxe de 60 à 120 millions d'euros ;

- un montant de 184,5 millions d'euros provenant du FEADER .

Le total de ces trois enveloppes permet d'atteindre un niveau de soutien public total de 560 millions d'euros en 2023 et de 600 millions - soit le maximum prévu pour le dispositif rénové d'assurance - à compter de 2025.

À l'issue de leur audition de la DGAL, les rapporteurs spéciaux s'interrogent sur le caractère suffisant des moyens financiers alloués au nouveau dispositif. Alors même que le texte de loi prévoit une enveloppe de 600 millions d'euros, les rapporteurs spéciaux contestent le montant total de 570 millions d'euros prévu, sachant que ce dernier couvre une part de subvention et une part d'indemnisation. En effet, le volet destiné à l'indemnisation est plus que probablement sous-dimensionné. Rappelons que l'étude d'impact mentionnait que « sur la base des paramètres proposés dans le rapport du groupe de travail présidé par le député Descrozaille, le coût estimé du nouveau dispositif à compter de 2023 serait de l'ordre de 600 M€ par an en moyenne (financements européens et nationaux compris), soit un surcoût de l'ordre de 300 M€ par rapport au coût global du dispositif actuel . »

3. Le Varenne agricole de l'eau
a) La maîtrise de la consommation d'eau

Les travaux du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique tendent à accompagner les agriculteurs dans le cadre de l'adaptation de leurs productions afin qu'ils consomment moins d'eau . Cette démarche rejoint celle de France 2030 qui vise notamment à accélérer la révolution agricole en finançant les nouvelles technologies numériques et robotiques, l'acquisition de matériel innovant tel que des stations météo, des outils d'aide à la décision pour l'irrigation, du matériel de télégestion, de pilotage automatique de l'irrigation, des capteurs.... Un financement est également prévu pour l'accompagnement de l'innovation pour construire des ouvrages innovants permettant de stocker l'eau de pluie, ou mettre en place, par exemple, de nouvelles techniques d'irrigation, ou de surveillance de l'état de la sécheresse des sols etc.

b) L'accès à la ressource d'eau

Un autre axe d'action porte sur l'accès à la ressource en eau avec la prise en compte des besoins des agriculteurs et des contraintes liées à la protection des milieux, tout en assurant le respect des usages de chacun des territoires et écosystèmes. Les projets de territoire pour la gestion de l'eau, ou PTGE, jouent à cet égard un rôle important.


* 35 Cf. premier volet de son 6 e rapport d'évaluation du GIEC du 9 août 2021.

* 36 Loi n° 2022-298 du 2 mars 2022 d'orientation relative à une meilleure diffusion de l'assurance récolte en agriculture et portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture.

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