C. UN DÉFICIT DE VISIBILITÉ SUR LES CRÉDITS DU PROGRAMME

1. Des annonces présidentielles en plein examen du projet de loi de finances qui nuisent à la lisibilité des crédits du programme

La temporalité des annonces présidentielles du 28 octobre 2022, qui ont donné lieu à l'ouverture de 150 millions d'euros en AE et en CP sur le programme , peut susciter des réserves dans la mesure où elles interviennent au coeur de l'examen par le Parlement du projet de loi de finances pour 2023.

Certaines de ces annonces n'ont en outre pas été traduites dans le budget pour 2023, que ce soit dans le projet de loi initialement déposé, ou dans le texte présenté au Sénat à la suite de l'engagement de la responsabilité du Gouvernement au titre de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution . C'est notamment le cas de l'annonce relative à l'achat de deux hélicoptères lourds bombardiers d'eau pour lesquels aucun crédit n'est prévu.

En outre, l'annonce du renouvellement intégral de la flotte de 12 Canadair entre en contradiction avec les informations transmises par le ministère de l'intérieur au rapporteur spécial, qui indiquait que, compte tenu des délais de production des appareils, la France ne pourrait espérer obtenir la livraison que de quatre appareils à l'horizon 2027.

Il en résulte en tout état de cause un défaut de lisibilité des informations budgétaires, nuisant à la bonne information du Parlement.

Les annonces du président de la République du 28 octobre 2022
en faveur de la sécurité civile

En réaction à la saison des feux exceptionnelle qu'a connue la France lors de l'été 2022, le président de la République a annoncé plusieurs mesures, dont certaines ne sont pas retranscrites dans le budget du PLF pour 2023,

Un premier volet de mesures concerne le soutien aux services d'incendie et de secours (SDIS), et se traduisent par :

- Une enveloppe de 150 millions d'euros destinée au financement des pactes capacitaires, au titre des mesures de compensation de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ;

- Des mesures visant à encourager le recrutement de sapeurs-pompiers volontaires, avec notamment une augmentation de la durée pendant laquelle les entreprises pourront libérer les sapeurs-pompiers volontaires, et ainsi qu'une meilleure indemnisation de ces entreprises en conséquence ;

- Un doublement des colonnes de renfort en 2023.

Le président de la République a par ailleurs indiqué qu'une enveloppe de 250 millions serait consacrée au renforcement des moyens aériens de la sécurité civile. Il a ainsi annoncé, sans toutefois préciser la ventilation précise de cette enveloppe et la temporalité dans laquelle elle sera consommée :

- le renouvellement intégral des Canadair actuels (12 appareils), couplé à une extension de la flotte (4 appareils supplémentaires) ;

- la location de dix hélicoptères bombardiers d'eau, et l'acquisition de deux appareils de ce type ;

- la mobilisation de moyens inédits, tel que l'Airbus A 400M, sur lequel l'avionneur français a annoncé avoir fait des essais en vue d'équiper ce modèle d'une capacité de largage d'eau, ou l'expérimentation de drones.

Source : commission des finances, d'après l'intervention du président de la République du 28 octobre 2022

2. La suppression du document de politique transversale l'année dernière a renforcé l'illisibilité des crédits bénéficiant effectivement à la sécurité civile

Par ailleurs, les crédits du budget de l'État qui bénéficient effectivement à la sécurité civile font l'objet, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises par le rapporteur spécial, d'un émiettement regrettable pour la visibilité de cette politique publique.

Le document de politique transversale relatif à la sécurité civile constituait à cet égard une réelle plus-value . Ce document avait toutefois été supprimé, pour les programmations budgétaires futures, par un amendement de Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2022.

Cet amendement était justifié, selon la commission des finances de l'Assemblée nationale, par le fait que le thème sécurité civile était déjà abordé dans le cadre de l'examen du programme 161, et faisait donc déjà l'objet d'un développement dans le PAP qui y est annexé. Cet argument faisait totalement abstraction du fait que les crédits du programme 161 ne contribuent en réalité que minoritairement aux dépenses de la sécurité civile.

Évolution des crédits affectés à la sécurité civile entre 2015 et 2022

(en millions d'euros)

Crédits de paiement

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

LFI 2020

LFI+LFR 2020

LFI 2021

LFI 2022

Programme 161

433,2

448,6

507,7

515,1

537,1

519,5

546,9

520,4

568,6

Montant consolidé - tous programmes confondus

883,9

894,4

946,5

979,5

1 024,3

975,1

1 013,2

1 196,9

1 297

Part du programme 161

49 %

50,2 %

53,6 %

52,6 %

52,4 %

53,3 %

54 %

43,5 %

43,8 %

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents de politique transversale relatifs à la sécurité civile)

Cette année encore, des crédits tels que les 3 millions de la mission « Plan de relance » affectés au nouveau volet mobile du système d'alerte et d'information des populations FR-Alert , ne sont pas retracés dans le projet annuel de performance du programme 161. La suppression du document de politique transversale a ainsi constitué une régression notable de la visibilité des crédits du budget de l'État bénéficiant effectivement à la sécurité, et de fait, à une dégradation de l'information du Parlement.

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