Rapport général n° 115 (2022-2023) de M. Philippe DOMINATI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022

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N° 115

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 29a

SÉCURITÉS
(Programmes 152 « Gendarmerie nationale », 176 « Police nationale »
et 207 « Sécurité et éducation routières »)
COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA CIRCULATION
ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS

Rapporteur spécial : M. Philippe DOMINATI

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean- Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273 , 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374 , 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

I. UN BUDGET DONT LA HAUSSE S'INSCRIT DANS LE CADRE DES OBJECTIFS PLURIANNUELS FIXÉS PAR LE PROJET DE « LOPMI »

Dans son discours de clôture du Beauvau de la sécurité, en septembre 2021, le président de la République avait annoncé avoir décidé de porter « une loi de programmation pour la sécurité intérieure et même pour les sécurités intérieures, car il s'agit de tout le champ d'action de la place Beauvau », dont le but était notamment « de penser la police et la gendarmerie de 2030 ». Une première version du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) a ainsi été présentée en Conseil des ministres le 16 mars 2022.

Ce texte n'a toutefois pas été examiné par le Parlement, ayant été déposé devant l'Assemblée nationale en toute fin de quinquennat. Une seconde version de ce projet de loi a ensuite été élaborée . Ce nouveau projet de loi, plus court, a été présenté en Conseil des ministres le mercredi 7 septembre 2022, et déposé le même jour devant le Sénat 1 ( * ) .

Le projet de LOPMI présente les orientations financières et stratégiques pour le ministère de l'Intérieur pour les années 2023 à 2027, notamment pour la police et la gendarmerie nationales. Le budget du ministère de l'Intérieur , qui porte sur plusieurs missions budgétaires 2 ( * ) , passerait, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions », de 20,78 milliards d'euros en CP en 2022 à 25,29 milliards d'euros en CP en 2027 (+ 4,51 milliards d'euros des crédits annuels, soit + 21,7 %). Au total, la hausse de budget cumulée sur les cinq années 2023-2027 atteindrait 15 milliards d'euros.

S'agissant des axes stratégiques, le rapport annexé au projet LOPMI présente différents objectifs et décisions pluriannuelles pour les forces de sécurité intérieures. Ils sont orientés par les trois objectifs principaux poursuivis par la loi tels que définis par le Gouvernement :

- « Être à la hauteur de la révolution numérique ;

- « Doubler la présence des forces de sécurité sur le terrain à l'horizon 2030 ;

- « Mieux anticiper les menaces et les crises ».

Les crédits demandés pour 2023 dans le cadre du projet de loi de finances pour la mission « Sécurités » s'inscrivent dans le cadre des annonces du projet de LOPMI. Pour l'ensemble de la mission « Sécurités », la hausse des crédits s'élève à 1,55 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE, + 6,8 %) et à 1,43 milliard d'euros en crédits de paiement (CP, + 6,7 %) 3 ( * ) .

En 2023, les AE sont de 24,2 milliards d'euros et les CP de 23,0 milliards d'euros. La hausse des AE et CP concerne l'ensemble des quatre programmes 4 ( * ) .

Pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale », les AE demandées sont en hausse de 5,2 % (+ 1 130 millions d'euros) , par rapport à 2022, tandis que les demandes de CP sont en hausse de 6,4 % (+1 337 millions d'euros).

Comparaison des crédits ouverts en 2022 et demandés en 2023
pour la police (gauche) et la gendarmerie nationales (droite)

(en millions d'euros, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES DÉPENSES DE PERSONNEL

Le présent projet de loi de finances poursuit et renforce, en 2023, la trajectoire de hausse des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, de 4,96 % pour la police nationale et de 6,91 % pour la gendarmerie nationale (en AE et en CP), et de 5,8 % en cumulant les deux programmes. Cette hausse s'explique, d'une part, par des mesures générales (recrutements et revalorisation du point d'indice) et, d'autre part, par des mesures catégorielles.

Évolution des dépenses de personnel de la police
et de la gendarmerie nationales (en AE et en CP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

L'année 2023 sera en effet de nouveau marquée par une hausse importante des effectifs de la police et de la gendarmerie nationales , conformément à la tendance constatée depuis 2013.

Pour mémoire, le Président de la République s'est engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018/2022 pour renforcer les forces de sécurité intérieure. Même si son bien-fondé pouvait être débattu, l' « esprit » de ce plan a été pleinement respecté , puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2083 emplois de gendarmes ont été créés. Alors que ce plan de création de postes avait pris fin, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé, le 6 septembre 2022, la création de 8 500 postes de policiers et gendarmes d'ici à 2027, poursuivant ainsi sur la lancée du quinquennat précédent.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit ainsi la création de 2 857 ETP pour les deux forces , dont 1 907 ETPT pour la police nationale et 950 ETPT pour la gendarmerie nationale.

L'année 2023 sera également marquée par le coût lié à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue au 1 er juillet 2022. Ce coût sera en 2023 de 98,3 millions d'euros pour la police et de 65,9 millions d'euros pour la gendarmerie, hors contribution au CAS « Pensions ».

Enfin, le poids des mesures catégorielles atteindra, en 2023, 84,7 millions d'euros pour la police nationale et 71,80 millions d'euros pour la gendarmerie nationale. Ce montant est en forte hausse du fait des premières conséquences budgétaires des deux protocoles conclus en mars 2022 au sein, pour l'un, de la police nationale et, pour l'autre, de la gendarmerie nationale.

III. UNE RELATIVE STABILISATION DE LA PART DES DÉPENSES DE PERSONNEL DANS L'ENSEMBLE DES DÉPENSES DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE EN 2023, QUI NE DOIT PAS REMETTRE EN CAUSE UNE TENDANCE BAISSIÈRE À MOYEN TERME

En dépit de la hausse concomitante des dépenses d'investissement et de fonctionnement, le dynamisme plus fort des dépenses de personnel en 2023 entraine une hausse de la part de ces dernières dépenses dans l'ensemble des dépenses des deux programmes en AE l'année prochaine . Cette part s'établit à 83,2 % en AE en 2023, contre 82,7 % en 2022.

La tendance est néanmoins inverse pour les CP , pour lesquels la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes baisse légèrement en 2023. Cette part s'établit à 86,1 % en 2023, contre 86,6 % en 2022.

En 2023 , l'évolution de la part des dépenses de personnel est inverse entre les deux forces . Pour la police nationale , leur part dans l'ensemble des dépenses est en baisse tandis qu'elle est en hausse pour la gendarmerie nationale .

Le rapporteur spécial regrette que la tendance ne soit pas clairement à la baisse cette année tant en AE qu'en CP pour les deux forces. Il reste en effet indispensable de redonner des marges de manoeuvre en matière de dépenses d'investissement et de fonctionnement.

Il constate néanmoins que la dynamique de la baisse du ratio des dépenses de personnel par rapport à l'ensemble des dépenses, amorcée en 2021 (et depuis 2020 en prenant en compte les crédits du plan de relance), devrait se poursuivre à l'horizon 2025 , en AE et en CP, selon le projet annuel de performance . Il faudra y être particulièrement vigilant.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux forces
(hors mission « Plan de relance ») en AE

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

IV. UN EFFORT EN DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT QUI DOIT ÊTRE MAINTENU DANS LA DURÉE

Dans le contexte de la fin de l'alimentation des crédits de fonctionnement et d'investissement par le plan de relance, ce sont les crédits de la mission « Sécurités » qui financent quasiment seuls ces dépenses.

En 2023, pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale », les dépenses hors titre 2 augmentent de 2,06 % en AE (+ 78,3 millions d'euros) et de 10,2 % en CP (+ 285,9 millions d'euros). Les dépenses de fonctionnement sont en hausse de + 0,46 % en AE et + 9,47 % en CP, soit respectivement + 13,15 millions d'euros et + 201,8 millions d'euros. Les dépenses d'investissement sont, quant à elles, en hausse de 7,2 % en AE et de 13,2 % en CP, soit respectivement + 65,1 millions d'euros et + 84,1 millions d'euros.

L'évolution de ces dépenses apparaît toutefois contrastée entre les deux programmes . Pour la police nationale, les crédits de fonctionnement augmentent en AE (+ 5,9 %) et en CP (+ 13,3 %), tout comme les crédits d'investissement (+ 22,2 % et + 30,7 %). Pour la gendarmerie nationale, les crédits de fonctionnement baissent en AE (- 2,7 %) et augmentent en CP (+ 6,6 %), tandis que les crédits d'investissement baissent tant en AE qu'en CP (- 20,5 % et - 8,4 %).

La dynamique des dépenses de fonctionnement et d'investissement, tout en étant globalement positive, apparaît trop modeste au regard de la hausse des dépenses de personnel , qui créent en outre des besoins additionnels en équipements et en matière d'immobilier, alors que les besoins existants n'étaient déjà pas entièrement satisfaits. Le rapporteur spécial attire en particulier l'attention sur une évolution des crédits hors titre 2 pas assez satisfaisante concernant la gendarmerie nationale pour 2023.

Il est en effet indispensable de poursuivre la dynamique constatée depuis 2020, notamment dans le cadre du plan de relance, pour améliorer la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure. C'est ce qu'annonce le projet annuel de performance de la mission, qui précise que les crédits annuels hors titre 2 en 2025 pour les deux programmes seraient supérieurs de 19,3 % en AE et de 21,9 % en CP à ceux de 2022. Il conviendra d'y être vigilant.

En 2023, les crédits demandés d'investissement et de fonctionnement de la police et de la gendarmerie nationales sont dédiés notamment à la modernisation numérique et de l'équipement et à l'immobilier des deux forces.

Conformément aux priorités fixées par le projet de « LOPMI », des crédits supplémentaires sont affectés en 2023 à la transformation numérique de la police et de la gendarmerie nationale. Sont ainsi prévus des efforts pour :

- développer les outils numériques des forces de sécurité intérieure afin d'améliorer leurs conditions de travail et favoriser leur présence et leur efficacité sur le terrain : déploiement d'outils de travail en mobilité, suite du développement du réseau radio du futur, etc . ;

- renforcer les moyens de lutte contre la cybercriminalité : augmentation du nombre de « cyber-patrouilleurs », création d'une Agence du numérique des forces de sécurité intérieure (ANFSI) et d'un centre national de formation cyber (CNF), etc . ;

- améliorer la relation numérique avec les citoyens : création d'applications et de sites internet dédiés (magendarmerie.fr, moncommissariat.fr, Ma Sécurité, THESEE, plainte en ligne, etc .), mise en place d'un 17 « cyber » pour signaler les cyberattaques et escroqueries en ligne, etc .

L'équipement des policiers et gendarmes fait également l'objet d'efforts pour assurer l'opérationnalité de nos forces et accompagner les hausses d'effectifs mais également pour faire face aux enjeux sécuritaires qui entoureront la Coupe du Monde de Rugby en 2023 et les Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024 . Sont notamment prévus en 2023 le renouvellement des équipements de protection, d'intervention et de maintien de l'ordre, de l'habillement, des outils technologiques de pointe (notamment les drones) et le durcissement des capacités de projection de la gendarmerie nationale face à la diversification des menaces (nouveaux hélicoptères, blindés, etc .).

Par ailleurs, l'immobilier de la police nationale semble rester une priorité pour le budget 2023, en dépit de l'extinction progressive du plan de relance. Les dépenses d'investissement atteindront 476,4 millions d'euros en AE (+ 74 millions d'euros) et 226,2 millions d'euros en CP (+ 56 millions d'euros). Ces montants sont un peu supérieurs à ceux de l'année dernière, y compris en incluant les crédits du plan de relance (458,4 millions d'euros en AE et 225,8 millions d'euros en CP).

S'agissant de la gendarmerie nationale , les crédits d'investissement d'immobilier portés par le programme budgétaire « Gendarmerie nationale » sont en baisse en AE (- 42,5 millions d'euros) mais en hausse en CP (+ 13,5 millions d'euros) par rapport à 2022 et s'établissent à 142,6 millions d'euros en AE et 126,7 millions d'euros en CP.

Le rapporteur spécial rappelle, s'agissant de l'immobilier, et en particulier concernant la gendarmerie nationale, que l'effort doit être maintenu sur la durée , d'autant plus dans le contexte des orientations portées par le projet de LOPMI en matière d'effectifs et de développement des implantations locales.

Concernant le parc automobile, les crédits dédiés à son renouvellement sont moins importants que l'année dernière . Même si l'effort fourni ces dernières années a été très important dans ce domaine, le rapporteur spécial insiste sur les besoins importants qui demeurent . Pour la police nationale, les crédits destinés au renouvellement du parc automobile de la police nationale s'établissent à 150,3 millions d'euros en AE et en CP pour le renouvellement de 2 800 véhicules légers et deux roues et 400 véhicules lourds et spécialisés. Pour la gendarmerie nationale, la dotation sera de 106 millions d'euros en AE et de 97,3 millions d'euros en CP, pour l'acquisition de 2 000 véhicules.

V. LE CAS « RADARS » ET LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE

L'accidentalité routière de l'année 2020 est restée très particulière du fait de l'impact de la pandémie et des mesures gouvernementales en découlant, visant notamment à réduire les déplacements des citoyens. 2 780 personnes avaient perdu la vie sur les routes de France en 2020 (- 20,1 % par rapport à 2019). En 2021 , année encore marquée par les restrictions de déplacements dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, la mortalité a augmenté par rapport à 2020 ; 3 219 personnes ont été tuées sur les routes de France, dont 2 944 en métropole et 275 dans les Outre-mer. Par rapport à 2019 cependant, année de référence avant la pandémie, la mortalité a diminué de 9,2 % et l'accidentalité de 4,4 %.

Le bilan sur les sept premiers mois 2022 présente une augmentation de la mortalité routière par rapport à 2019 . Le nombre de morts sur les routes au deuxième semestre 2019 ayant été particulièrement bas, il est attendu que le nombre de tués en 2022 soit plus élevé qu'en 2019.

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » est marqué par une hausse de ses crédits de 24,24 millions d'euros en AE et en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 . Cette augmentation par rapport à 2022 s'explique principalement par une hausse des dépenses d'études et de recherche (+ 4,7 millions d'euros) et de communication auprès du grand public (+ 6,4 millions d'euros) 5 ( * ) , de l'enveloppe consacrée au financement du « permis à un euro par jour » 6 ( * ) , par la poursuite de l'acquisition de kits de dépistage et de kits de vérification utilisés par les forces de l'ordre lors de contrôles routiers dans le cadre de la lutte contre l'usage de stupéfiants, et par le remboursement de la mise à disposition des agents de La Poste pour les examens du permis de conduire.

Les recettes et les crédits du CAS « Radars sont en hausse de 6,9 %. Les dépenses du CAS comprennent notamment 200 millions d'euros prévus pour la modernisation, la maintenance et le déploiement des radars automatiques . Le parc de radars était de 4 447 au 1 er septembre 2022 ; il devrait être de 4 600 fin 2023. Les crédits en faveur du programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » sont, au titre de 2023, d'un montant prévisionnel de 656,4 millions d'euros, en hausse de 9,3 % par rapport à 2022 .

Réunie le mardi 8 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ». Elle a également proposé d'adopter l'article 46 ter sans modification.

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses votes.

À la date du 10 octobre 2022 date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, le rapporteur spécial avait reçu 81 % des réponses.

PREMIÈRE PARTIE
LES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE »

I. UN BUDGET DONT LA HAUSSE S'INSCRIT DANS LE CADRE DES OBJECTIFS PLURIANNUELS FIXÉS PAR LE PROJET DE LOI D'ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION DU MINISTÈRE DE L'INTÉRIEUR (LOPMI)

A. UN PROJET DE LOI LOPMI QUI FIXE DES OBJECTIFS BUDGÉTAIRES ET OPÉRATIONNELS PLURIANNUELS

Le président de la République avait annoncé le 14 septembre 2021 avoir décidé, dans la continuité du Beauvau de la sécurité, de porter « une loi de programmation pour la sécurité intérieure et même pour les sécurités intérieures, car il s'agit de tout le champ d'action de la place Beauvau » , dont le but était « de penser la police et la gendarmerie de 2030. Une police qui doit faire face aux nouvelles formes de délinquance qui pullulent dans l'espace numérique : le deal par messageries cryptées et les escroqueries digitales, la cybercriminalité. Une police qui doit se saisir des technologies numériques pour aller plus vite, enquêter plus efficacement. Une police qui doit être formée, équipée en fonction des nouvelles menaces qui pèsent sur la société : le terrorisme, mais aussi la violence débridée et les manifestations sporadiques, l'internationalisation du crime. Le champ n'a jamais été si vaste. Nous devons y répondre en regardant le temps long et en prenant des choix qui dureront et l'assumons » 7 ( * ) .

Une première version du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) a ainsi été présentée en Conseil des ministres le 16 mars 2022 et déposée à l'Assemblée nationale. Ce texte n'a toutefois pas été examiné par le Parlement, ayant été déposé en toute fin de quinquennat, selon un calendrier plus que surprenant.

Ce dépôt tardif était d'autant plus regrettable que la commission sénatoriale d'enquête sur l'état des forces de sécurité intérieure proposait dès 2008 d'« élaborer un livre blanc de la sécurité intérieure puis adopter des lois de programmation des forces de sécurité intérieure permettant de fixer un cadre budgétaire, opérationnel et stratégique stable et crédible. Ces lois devraient notamment comprendre des cibles budgétaires obligatoires en matière d'immobilier et de renouvellement des flottes automobiles. » 8 ( * ) . Le rapporteur spécial a également formulé cette proposition à plusieurs reprises depuis lors.

Finalement, une seconde version de ce projet de LOPMI a été élaborée. Présenté en Conseil des ministres le mercredi 7 septembre 2022, ce projet de loi a été déposé le même jour devant le Sénat, qui l'a examiné et adopté, modifié, le 18 octobre 2022.

Le rapporteur spécial constate que cette seconde version du projet de loi comporte deux écueils principaux. Premièrement, ce texte est amputé de la moitié de ses articles par rapport à la première version, ce qui en réduit la portée. Deuxièmement, s'il présente bien une dimension programmatique d'un point de vue budgétaire, celle-ci est réduite à la portion congrue . Seul l'article 2 comporte des dispositions budgétaires, à savoir une trajectoire pluriannuelle pour les années 2023-2027. Le rapport annexé, dont l'adoption est proposée à l'article 1, comprend également diverses considérations comportant des effets budgétaires indirects, mais ceux-ci sont très rarement chiffrés. Surtout, le niveau de précision de la trajectoire budgétaire est faible, y compris dans les documents annexés au projet de loi, notamment l'évaluation préalable de l'article 2. La programmation budgétaire porte sur trois missions (« Sécurités », « Administration générale et territoriale de l'État », et « Immigration, asile et intégration »), le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et les taxes affectées à l'ANTS (Agence nationale des titres sécurisés) 9 ( * ) . La trajectoire budgétaire est présentée de façon consolidée pour l'ensemble, à l'échelle du ministère de l'Intérieur, sans que la ventilation par mission, et a fortiori par action, ou par titres de dépenses ne soit présentée.

Le rapporteur spécial estime néanmoins que le projet de loi LOPMI constitue, en ce début de quinquennat , un outil utile pour donner de la visibilité aux forces de sécurité intérieure et établir une trajectoire budgétaire conforme à la vision stratégique souhaitée. En réalité, ce type de dispositif n'est d'ailleurs pas nouveau, puisque des lois comparables, bien que sur des périmètres différents, ont été adoptées en 1995 10 ( * ) , en 2002 11 ( * ) et en 2011 12 ( * ) .

En outre, il se satisfait de la trajectoire financière proposée pour les années 2023 à 2027. Le budget du ministère de l'Intérieur 13 ( * ) passerait, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions », de 20,78 milliards d'euros en CP en 2022 à 25,29 milliards d'euros en CP en 2027 (+ 4,51 milliards d'euros des crédits annuels, soit + 21,7 %). L'effort le plus important (1,25 milliard d'euros) reposerait sur la loi de finances initiale pour 2023. Au total, la hausse de budget cumulée sur les cinq années 2023-2027 atteint 15 milliards d'euros.

Trajectoire budgétaire proposée par le projet de loi LOPMI pour le ministère de l'Intérieur pour les années 2023 à 2027 14 ( * )

(en millions d'euros)

CRÉDITS DE PAIEMENT ET PLAFONDS DES TAXES AFFECTÉES

hors compte d'affectation spéciale « Pensions »

2022 ( pour mémoire )

2023

2024

2025

2026

2027

Budget du ministère de l'intérieur, en millions d'euros (hors programme 232 « Vie politique », hors programmes outre-mer et hors programmes du CAS Radars n°754 et 755)

20 784

22 034

22 914

24 014

24 664

25 294

Évolution (N / N - 1), en millions d'euros

-

1 250

880

1 100

650

630

Taux d'évolution (N / N - 1)

-

6 %

4 %

4,8 %

2,7 %

2,6 %

L'article 12 du projet de loi initial de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 , déposé le 26 septembre 2022 à l'Assemblée nationale prévoit quant à lui une augmentation des crédits de paiement annuels, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions », de la mission « Sécurités » de 2,1 milliards d'euros, qui passeraient de 14,7 milliards d'euros en 2022 à 16,8 milliards d'euros en 2025.

Outre la trajectoire budgétaire, le projet de loi LOPMI prévoit, dans son rapport annexé dont l'approbation est prévue à l'article 1 er , différents objectifs et décisions pluriannuelles pour les forces de sécurité intérieures.

Ils sont orientés par les trois objectifs principaux poursuivis par la loi, selon le Gouvernement :

- « Être à la hauteur de la révolution numérique , pour ne plus avoir « un coup de retard » sur les délinquants et offrir à nos concitoyens des services en ligne avec ce que le numérique permet aujourd'hui ;

- « Doubler la présence des forces de sécurité sur le terrain à l'horizon 2030 , mais aussi garantir la transparence et l'exemplarité de leur action ;

- « Mieux anticiper les menaces et les crises ».

Il est notamment prévu, s'agissant des forces de sécurité :

- la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie et de onze unités de forces mobiles (4 pour la police nationale et 7 pour la gendarmerie) ;

- leur transformation numérique qui vise à la fois à développer les outils numériques des forces de sécurité intérieure, à développer les moyens de lutte contre la cybercriminalité et à renforcer la relation numérique avec les citoyens ; en outre une Agence du numérique des forces de sécurité sera instituée, ainsi qu'une école de formation cyber ;

- de doter les policiers et les gendarmes de matériels plus performants et innovants ;

- une réforme de la direction générale de la police nationale (DGPN) et de ses implantations départementales ;

- des mesures en faveur de la filière d'investigation et l'augmentation de ses effectifs, notamment s'agissant des spécialistes des violences intrafamiliales et des cyber-patrouilleurs ;

- un effort important sur la formation des forces de sécurité intérieure , avec une augmentation de 50 % du temps de formation initiale et un doublement de la formation continue ;

- des efforts pour favoriser l'exemplarité et la transparence dans l'action des forces de l'ordre ;

- une professionnalisation de la fonction immobilière du ministère ainsi que de la politique d'achats , avec de nouveaux outils ;

- de moderniser la gestion des ressources humaines de la police et de la gendarmerie nationale, notamment dans le cadre des protocoles signés avec les organisations syndicales en mars 2022 15 ( * ) .

En outre, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé, le 6 septembre 2022, la création de 8 500 postes de policiers et gendarmes d'ici à 2027 .

Une partie de ces mesures constitue une reprise des mesures annoncées dans le cadre du Beauvau de la Sécurité , clôturé en septembre 2021.

Mesures qui avaient été annoncées à l'issue du Beauvau de la sécurité
et ayant un effet budgétaire

- augmenter significativement la présence des policiers et gendarmes sur la voie publique (doubler sur 10 ans leur présence) ;

- assurer une meilleure prise en charge des victimes : formation de près de 90 000 policiers et gendarmes, mise en place de guichets dédiés, déploiement de 2 300 téléphones grand danger pour les victimes, création de 123 postes d'intervenants sociaux supplémentaires. La mise en place du dépôt de plainte en ligne pour 2023 était annoncée.

Pour accompagner ces objectifs, plusieurs mesures à court terme avaient aussi été annoncées, plébiscitées par l'ensemble des parties prenantes au cours du Beauvau de la Sécurité :

- investir dans l'humain et la formation : augmentation de 50 % de la durée de formation, rendre les métiers de la police judiciaire plus attractifs avec le lancement d'un plan pour l'investigation ;

- formation d'officier de police judiciaire (OPJ) intégrée à la formation initiale, dégager du temps aux enquêteurs ;

- création d'une réserve opérationnelle de police et de gendarmerie (30 000 pour la police et 20 000 supplémentaires en gendarmerie) ;

- mise à niveau des équipements de la police technique et scientifique (nouveaux uniformes, déploiement des caméras piétons (30 000 commandes) et de caméras embarquées dans les véhicules, inciter les collectivités locales à étendre le réseau de vidéo protection.

Source : ministère de l'intérieur

B. UN BUDGET POUR 2023 EN AUGMENTATION NETTE

Pour l'ensemble de la mission « Sécurités », la hausse des crédits s'élève à 1,55 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE, + 6,8 %) et à 1,43 milliard d'euros en crédits de paiement (CP, + 6,7 %). En 2023, les AE sont de 24,2 milliards d'euros et les CP de 23,0 milliards d'euros.

La hausse des AE et CP concerne l'ensemble des quatre programmes : programme 176 « Police nationale », programme 152 « Gendarmerie nationale », programme 207 « Sécurité et éducation routière » et programme 161 « Sécurité civile ». En valeur, elle bénéficie principalement au programme 176 « Police nationale » (+ 703,6 millions d'euros en AE et + 742,4 millions d'euros en CP, soit respectivement + 5,9 % et + 6,4 %) et au programme 152 « Gendarmerie nationale » (+ 426,3 millions d'euros en AE et + 595 millions d'euros en CP, soit respectivement + 4,3 % et + 6,4 %). En évolution en pourcentage, ce sont les programme 207 « Sécurité et éducation routière » (+ 24,2 millions d'euros en AE et en CP, soit environ + 48 %) et 161 « Sécurité civile » (+ 392,0 millions d'euros en AE et + 72,5 millions d'euros en CP, soit respectivement + 57,8 % et + 12,8 %) qui bénéficient le plus des hausses.

Concernant le cumul des programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale », les AE demandées sont en hausse de 5,2 % (+ 1 130 millions d'euros), par rapport à 2022, tandis que les CP demandés sont en hausse de 6,4 % (+ 1 337 millions d'euros).

Comparaison des crédits ouverts en 2022 et demandés en 2023

(en millions d'euros, en %)

Loi de finances initiale pour 2022

Crédits demandés en 2023

Évolution

Police nationale

AE

11 999,2

12 702,8

5,86%

CP

11 630,5

12 372,9

6,38%

Gendarmerie nationale

AE

9 941,2

10 367,4

4,29%

CP

9 315,0

9 910,1

6,39%

Total

AE

21 940,4

23 070,2

5,15%

CP

20 945,5

22 283,0

6,39%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comparaison des crédits ouverts en 2022 et demandés en 2023
pour la police nationale

(en millions d'euros, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Comparaison des crédits ouverts en 2022 et demandés en 2023
pour la gendarmerie nationale

(en millions d'euros, en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

II. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES DÉPENSES DE PERSONNEL, QUI DOIT IMPÉRATIVEMENT S'ACCOMPAGNER D'UNE AUGMENTATION AU MOINS PROPORTIONNELLE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT

A. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES DÉPENSES DE PERSONNEL EN 2023 EN LIEN AVEC LA POURSUITE DE LA HAUSSE DES EFFECTIFS ET LES NOUVELLES MESURES CATÉGORIELLES

Le présent projet de loi de finances poursuit et renforce la trajectoire de hausse des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, de 4,96 % pour la police nationale et de 6,91 % pour la gendarmerie nationale , en AE et en CP, et de 5,8% en cumulant les deux programmes.

La hausse des dépenses de personnel atteint, en AE et en CP, 511,9 millions d'euros pour la police nationale (dont environ 141 millions au titre de la contribution au CAS « Pensions ») et 539,7 millions d'euros pour la gendarmerie nationale (dont environ 247 millions d'euros au titre de la contribution au CAS « Pensions »).

Évolution des dépenses de personnel de la police
et de la gendarmerie nationales

(en AE/CP, contribution au CAS « Pensions » comprise)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette hausse s'explique, d'une part, par des mesures générales (poursuite des recrutements et revalorisation du point d'indice) et, d'autre part, par des mesures catégorielles .

1. La poursuite du renforcement des effectifs et la revalorisation du point d'indice contribuent à la hausse des dépenses de personnel

Les deux principales mesures générales expliquant la hausse des dépenses de personnel en 2023 sont la poursuite des recrutements et la revalorisation du point d'indice.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit la création de 2 857 ETP pour les deux forces , dont 1 907 ETPT pour la police nationale et 950 ETPT pour la gendarmerie nationale. Le coût direct en matière de dépenses de personnel de ces créations est de 39,2 millions d'euros pour la police nationale et de 39,55 millions d'euros pour la gendarmerie nationale, hors contribution au CAS « Pensions ». S'y ajoutent les effets des recrutements des années antérieures.

Pour mémoire, le Président de la République s'est engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018/2022 pour renforcer les forces de sécurité intérieure. Dans ce cadre, la police nationale devait bénéficier de 7 500 ETP et la gendarmerie nationale de 2 500 ETP. Le rapporteur spécial a d'ores et déjà rappelé, à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances du précédent quinquennat, que ce plan n'était pas de nature à résoudre les difficultés des deux institutions, davantage marquées par un retard en matière d'investissement et de fonctionnement que de personnel.

Même si son bien-fondé pouvait être débattu, l'« esprit » de ce plan avait été pleinement respecté, puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2 083 emplois de gendarmes auront été créés. En 2022, le nombre de créations de postes s'était élevé à + 185 ETP pour la gendarmerie nationale (bénéficiant en priorité aux brigades territoriales) et à + 761 pour la police nationale.

Alors que ce plan de création de postes avait pris fin, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé, le 6 septembre 2022, la création de 8 500 postes de policiers et gendarmes d'ici à 2027, poursuivant ainsi sur la lancée du quinquennat précédent. Le rapporteur spécial considère, en cohérence avec ce qu'il a déjà répété par le passé, que la création de postes ne constitue pas une solution miracle. Il sera attentif à ce que la hausse des dépenses de personnel qu'elle implique ne se fasse pas au détriment de l'amélioration des capacités opérationnelles des forces de l'ordre.

Schémas d'emploi successifs des deux programmes

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Par ailleurs, la revalorisation du point d'indice de la fonction publique intervenue au 1 er juillet 2022 représente un coût, en 2023, de 98,3 millions d'euros pour la police nationale et de 65,9 millions d'euros pour la gendarmerie nationale, hors contribution au CAS « Pensions ».

S'y ajoutent notamment le relèvement de l'enveloppe globale dédiée à la résorption du stock d'heures supplémentaires de la police nationale (+ 18,7 millions d'euros, pour atteindre 45,2 millions d'euros), l'augmentation de la prévision de dépenses liées à la réserve civile de la police nationale (+ 8,4 millions d'euros) et la hausse de l'enveloppe de la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale (+ 14 millions d'euros) 16 ( * ) .

2. Des mesures catégorielles ayant un impact renforcé sur les dépenses de personnel en 2023, en lien avec les protocoles signés en mars 2022

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit des mesures catégorielles à hauteur de 84,7 millions d'euros, hors CAS « Pensions », pour la police nationale , contre 37,52 millions d'euros en 2022, soit une hausse de 125,7 % en un an . Pour la gendarmerie nationale , la prévision est de 71,80 millions d'euros pour 2023, contre 32,64 millions d'euros en 2022, soit une augmentation de 120 % en un an .

Ces hausses très significatives résultent principalement de deux protocoles signés en mars 2022 au sein, pour l'un, de la police nationale et, pour l'autre, de la gendarmerie nationale.

Ils s'ajoutent aux précédents. En effet, les policiers et les gendarmes avaient obtenu, en avril 2016, la signature de deux protocoles leur accordant d'importantes mesures de revalorisation des carrières et des rémunérations 17 ( * ) . Ce dernier a été suivi d'un autre protocole, conclu le 19 décembre 2018 avec les syndicats de police nationale dans le contexte de la forte activité générée par le mouvement des « gilets jaunes ». Les coûts supplémentaires liés à ces protocoles étaient alors estimés par le ministère de l'intérieur à 475,3 millions d'euros en 2022, hors contribution au CAS « Pensions ». En outre, ainsi que le relevait la Cour des comptes 18 ( * ) , l'ensemble de ces mesures catégorielles a un coût annuel élevé et mal maîtrisé, puisqu'elles prévoyaient également des avancements massifs par repyramidage des corps, augmentant mécaniquement la part des gradés les plus élevés, et les dépenses de personnel associées.

Coût supplémentaire du protocole de 2018

(en millions d'euros, en AE/CP)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Coût cumulé

Gendarmerie nationale

3,5

64,1

27,2

51,3

54,9

3,6

1,4

206

Dont coûts hors PPCR

3,5

46,1

27,2

20,3

10,9

2,5

1,4

111,9

Dont coûts PPCR

/

18

/

31

44

1,1

/

94,1

Police nationale

2,8

70,9

28,1

60,3

79,9

18,6

8,7

269,3

Dont coûts hors PPCR

1,4

12,5

28,1

24

24,3

13,6

8,7

112,6

Dont coûts PPCR

1,4

58,4

/

36,3

55,6

5,1

/

156,7

Total

6,3

135

55,3

111,6

133,4

22,1

10,1

475,3

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

Le coût supplémentaire de ces anciens protocoles était en forte baisse en 2021 et 2022, puisqu'il devrait être d'environ 10 millions d'euros en 2022, alors qu'il a atteint plus de 100 millions d'euros en 2019 et 2020.

La signature des protocoles de mars 2022 dans la police nationale et dans la gendarmerie nationale a inversé cette dynamique.

Protocole pour la modernisation des ressources humaines
de la police nationale de mars 2022

Le protocole pour la modernisation des ressources humaines de la police nationale a été signé à l'unanimité des organisations syndicales représentatives le 2 mars 2022 . Il repose sur quatre piliers :

- revaloriser les fonctions les plus exposées ;

- responsabiliser et valoriser l'encadrement ;

- revoir les règles de mobilité pour faciliter l'affectation des policiers sur le terrain ;

- améliorer la qualité de vie au travail des policiers.

En outre, il a acté l'ouverture d'une discussion sur l'augmentation du temps de travail, afin d'accroître la présence sur la voie publique.

Parmi les principales mesures du protocole, l'on trouve :

- une revalorisation de la rémunération de ceux qui sont exposés aux difficultés de la voie publique , notamment avec la création d'une prime spécifique de 100 euros par mois et le triplement de l'indemnité de travail de nuit ;

- une valorisation des tâches des personnels administratifs et techniques de la police nationale , avec la création d'une indemnité de sujétion spécifique ;

- la création d'un statut dérogatoire pour les personnels de « police scientifique » pour permettre à ces derniers de bénéficier de mesures statutaires adaptées à la réalité de leur métier et de leurs missions ;

- la revalorisation de la filière investigation via notamment une augmentation de la prime officier de police judiciaire, qui passera de 1 300 à 1 500 euros par an et la création des fonctions d'assistant d'enquête, nouveau métier des personnels administratifs de la police, qui seront spécifiquement formés pour exercer leurs nouvelles attributions ;

- la valorisation de la prise de responsabilités en confortant les fonctions d'encadrement du corps d'encadrement et d'application et en revalorisant l'indemnité de responsabilité et de performance des officiers et des commissaires.

L'ensemble des mesures représentent un total de 783 millions d'euros sur 5 ans .

S'agissant de ce qui relève de mesures catégorielles, le coût est de 72,4 millions d'euros en 2023 et de 120 millions d'euros en année pleine à partir de 2024.

Protocole pour la modernisation des ressources humaines
de la gendarmerie nationale de mars 2022

Le protocole pour la modernisation des ressources humaines de la police nationale a été signé le 9 mars 2022 . Il repose sur trois axes :

- « Mieux protéger » par des mesures favorisant l'augmentation de la présence de voie publique ;

-  « Mieux encadrer » par des mesures soutenant la prise de responsabilité ;

- « Mieux accompagner » par des mesures liées à l'action sociale et à la qualité de vie au travail.

Parmi les principales mesures du protocole, l'on trouve :

- la valorisation de l'engagement des personnels impliqués au quotidien sur la voie publique , en rénovant les parcours de carrière et la grille indiciaire des sous-officiers et en revalorisant le traitement des gendarmes adjoints volontaires ;

- la mise en place d'une indemnité d'absence missionnelle et d'une indemnité de sujétion spécifique au profit des corps militaires de soutien ;

- le soutien à la prise de responsabilité , en augmentant le contingent de la prime de qualification supérieure et en redimensionnant l'indemnité de fonction et de responsabilités ;

- en développant l'action sociale et la qualité de vie au travail , en renforçant l'aide aux blessés et à leurs familles et en densifiant le réseau de psychologues cliniciens ;

- en améliorant les conditions de vie des gendarmes et de leurs familles en portant un effort substantiel sur l'entretien des logements et des locaux de service.

L'ensemble des mesures représentent un total de 700 millions d'euros sur 5 ans .

S'agissant de ce qui relève de mesures catégorielles, le coût est de 48,6 millions d'euros en 2023 et d'environ 100 millions d'euros en année pleine, à compter de 2024.

Si le rapporteur spécial souscrit à la volonté de moderniser la gestion des ressources humaines de la police et de la gendarmerie nationale et comprend le souhait de revaloriser certaines primes, il s'inquiète du coût total des mesures catégorielles, d'autant plus qu'il a vocation à augmenter . En effet, le coût des mesures catégorielles atteindra 136,4 millions d'euros en 2024 pour la police nationale et 121,8 millions d'euros pour la gendarmerie nationale. Le rapporteur spécial appelle à ne pas rajouter de mesures catégorielles d'un coût significatif dans les prochaines années.

En effet, il estime que la dérive des dépenses de personnel constituerait un obstacle important à l'amélioration des capacités opérationnelles des forces de l'ordre, puisqu'elle limite mécaniquement les marges de manoeuvre en matière d'investissement et de fonctionnement. Cette situation avait prévalu jusqu'à très récemment.

B. UNE RELATIVE STABILISATION DE LA PART DES DÉPENSES DE PERSONNEL DANS L'ENSEMBLE DES DÉPENSES EN 2023, QUI NE DOIT PAS REMETTRE EN CAUSE LA TENDANCE BAISSIÈRE À MOYEN TERME

En dépit de la hausse concomitante des dépenses d'investissement et de fonctionnement, le dynamisme plus fort des dépenses de personnel en 2023 entraine une hausse de la part de ces dernières dépenses dans l'ensemble des dépenses des deux programmes en AE l'année prochaine. En effet, si les dépenses hors titre 2 (dépenses de personnel) augmentent de 2,06 % en AE (+ 78,3 millions d'euros) pour les deux programmes, les dépenses de titre 2 augmentent de 5,8 %.

La tendance est néanmoins inverse pour les CP , pour lesquels la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes baisse légèrement en 2023.

À l'échelle des deux forces, les dépenses de personnel représenteront en AE 83,2 % de l'ensemble, contre 82,7 % en 2022, pour s'établir à un niveau qui demeure inférieur d'un peu moins de 3 points à celui de 2020.

À l'inverse, en crédits de paiement, le taux baisse de 86,6 % à 86,1 %, pour s'établir à un niveau qui est désormais inférieur de 2,6 points à celui de 2020.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses de la police et de la gendarmerie nationales en AE (à gauche) et en CP (à droite)
(hors crédits de la mission « Plan de relance »)

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

En 2023 , l'évolution de la part des dépenses de personnel est inverse entre les deux forces. Pour la police nationale , leur part dans l'ensemble des dépenses est en baisse tant en AE (pour s'établir à 85,3 % en 2023 contre 86,0 % en 2022) qu'en CP (87,6% en 2023 contre 88,8% en 2022). Pour la gendarmerie nationale , elle est en hausse tant en AE (80,6%, contre 78,6% en 2022, soit une hausse significative de deux points ) qu'en CP (84,3 %, contre 83,9 % en 2022).

Le rapporteur spécial regrette que l'évolution de la tendance ne soit pas clairement à la baisse cette année pour les deux forces. Il souligne l'évolution peu satisfaisante s'agissant de la gendarmerie nationale pour 2023.

Il constate néanmoins que la dynamique de la baisse du ratio des dépenses de personnel par rapport à l'ensemble des dépenses amorcée en 2020 (en incluant les crédits du plan de relance) devrait se poursuivre à l'horizon 2025 , en AE et en CP, selon le projet annuel de performance de la mission.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses de la police et de la gendarmerie nationales en AE (en haut) et en CP (en bas)
(hors crédits de la mission « Plan de relance »)

(en %)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

À l'horizon 2025, le ratio devrait s'établir à 81,6 % en AE et 85,4 % en CP selon le projet annuel de performance de la présente mission, soit respectivement 5,4 points et 3,3 points de moins qu'en 2021 . Une telle évolution est non seulement souhaitable mais elle est indispensable à l'efficacité des forces de sécurité intérieure.

Le rapporteur spécial rappelle que les données qui lui ont transmises par la direction de la coopération internationale du ministère de l'intérieur montrent que la France conserve en 2022 une part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses supérieure ou proche de celle constatée en Espagne, en Allemagne et au Royaume-Uni , même si ces données doivent être interprétées avec prudence en raison des différences de périmètres.

Ainsi, la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses s'élève à :

- 75,7 % pour les ministères de l'intérieur des différents Länder allemands ;

- entre 75 et 80 % au Royaume-Uni ;

- 85 % pour la police et la garde nationale espagnole.

Comparaisons internationales avec l'Allemagne, le Royaume-Uni et l'Espagne
en matière de structure des forces de sécurité intérieure

En Espagne , le ministre de l'Intérieur considère que la sécurité constitue un service public essentiel. Les budgets, pour 2019, du corps national de police et de la garde civile étaient respectivement de 3 195 millions d'euros et de 3 016 millions d'euros. En termes de structures de dépenses, pour l'ensemble du ministère, le personnel représente 79,34 % du budget (et environ 85 % pour la police et la garde civile qui sont des unités à très fort effectif). Les biens et services nécessaires au fonctionnement habituel du ministère constituent le deuxième poste de dépense (17,8 %). Les investissements ne représentent que 3,6 % du budget total (soit 301 millions d'euros).

L' Allemagne est une république fédérale dont les 16 États fédérés sont indépendants en matière de sécurité intérieure. Ainsi, les 16 ministères de l'Intérieur, décident, chacun en ce qui les concerne, des dépenses de recrutement, d'équipement... Leur budget respectif n'étant pas abondé par le budget fédéral, ils disposent d'une autonomie totale en la matière. Pour l'année 2020, les dépenses de personnels s'y élèvent à 75,7% du total des budgets des ministères de l'Intérieur.

Au Royaume-Uni (Angleterre, Pays de Galles, Écosse, Irlande du Nord), les forces de police regroupent 262 288 personnels, tous grades et statuts confondus, dont une grande majorité (236 800) est en service au sein des forces de police territoriales. Après une déflation des effectifs au début des années 2010, consécutive à la crise économique de 2008, une remise à niveau a été décidée en 2019, visant à recruter 20 000 policiers supplémentaires, dont 9 814 ont d'ores et déjà été recrutés.

Le budget annoncé du Home Office au titre de l'exercice mars 2021-mars 2022 s'élevait, pour traiter des champs d'action identiques au ministère de l'Intérieur français, à 16,4 milliards de livres sterling pour l'Angleterre et le Pays de Galles (4,4 milliards de livres sterling supplémentaires correspondent à la contribution des collectivités locales, soit environ 5 milliards d'euros). S'y ajoute, pour l'Écosse, un budget de 1,3 milliard de livres sterling ainsi qu'un budget de 1,125 milliard de livres sterling pour l'Irlande du Nord.

Ces budgets, pour un total de 23,225 milliards de livres sterling, ne concernent que les forces territoriales et ne prennent pas en compte les questions de renseignement, de lutte contre le terrorisme, de sûreté nucléaire et de police aux frontières ou encore des activités externalisées. La part des dépenses de personnel oscille entre 75 et 80 %.

Source : direction de la coopération internationale du ministère de l'intérieur

De même, hors crédits du plan de relance, le niveau atteint en 2022 est en réalité proche de celui de 2007 et supérieur à celui de 2006.

Ces comparaisons ne visent pas à minimiser les importants progrès permis par les efforts financiers effectués mais démontrent que ces niveaux ne sont pas « inédits » et que l'effort doit être poursuivi.

C. UNE HAUSSE DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT EN 2023, AU BÉNÉFICE NOTAMMENT DE LA NUMÉRISATION, DE L'ÉQUIPEMENT ET DE L'IMMOBILIER DES FORCES DE SÉCURITÉ

1. Des dépenses d'investissement et de fonctionnement qui ne bénéficient quasiment plus des crédits du plan de relance en 2023

Alors que les crédits hors dépenses de personnel de la gendarmerie et de la police nationales faisaient l'objet d'une contraction depuis 2009, les crédits du plan de relance (et du Beauvau de la sécurité) ont permis le maintien du niveau de fonctionnement, ainsi que l'acquisition de matériels jusqu'alors hors de portée (véhicules blindés, véhicules de maintien de l'ordre, hélicoptères, plan de rénovation thermique de l'immobilier, etc .).

En 2021, la gendarmerie nationale a bénéficié des crédits ouverts au titre du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance ». Ces derniers s'élevaient à 101,7 millions d'euros et ont financé :

- des investissements immobiliers (47,1 millions d'euros) ;

- le développement de moyens informatiques (17,4 millions d'euros) ;

- le maintien en condition des moyens aéronautiques (22,5 millions d'euros) ;

- l'achat de caméras piétons (5,4 millions d'euros) ;

- le financement de terminaux NEOGEND (3,7 millions d'euros) ;

- l'acquisition d'équipements spécialisés (5,6 millions d'euros).

Ils ont été complétés par l'achat de 650 véhicules verts sur le programme 362 « Écologie », à hauteur de 23,6 millions d'euros.

Enfin, suite à l'appel à projet conduit par la direction de l'immobilier de l'État, 451 opérations d'optimisation énergétique ont pu être programmées en 2021 au profit de la gendarmerie nationale pour un montant de 137 millions d'euros.

En 2022 , les crédits au titre du plan de relance se sont élevés à 67,6 millions d'euros sur le programme 363 « Compétitivité », répartis comme suit :

- 44,1 millions d'euros d'investissement immobilier ;

- 12,5 millions d'euros d'investissement grands événements (JOP 2024) ;

- 5 millions d'euros d'acquisition de caméras piétons ;

- 1 million d'euros de fonctionnement courant des unités de gendarmerie mobile.

Par ailleurs, comme en 2021, 650 véhicules verts supplémentaires ont été acquis sur le programme 362 « Écologie ».

Au total, la gendarmerie a bénéficié de plus de 353 millions d'euros sur 2021 et 2022 en CP.

La police nationale a quant à elle bénéficié au total sur les années 2020, 2021 et 2022 de crédits « plan de relance » à hauteur de 291,34 millions d'euros en AE et 282,74 millions d'euros en CP.

La police nationale a également bénéficié des crédits issus de l'appel à projets immobilier sur le programme 362 « Écologie » prévus à hauteur de 132,37 millions d'euros pour 170 projets retenus (hors installation de 166 bornes électriques pour 2,78 millions d'euros).

En 2023, dans le contexte de l'absence d'engagement nouveau porté par la mission « Plan de relance », les CP qui concernent la police nationale et la gendarmerie nationale sont très peu nombreux. Est néanmoins prévue notamment, au sein du programme 363 « Compétitivité » l'acquisition d'hélicoptères par la gendarmerie nationale afin de renforcer la capacité aérienne des forces, pour 36,5 millions d'euros de crédits de paiement.

2. Des dépenses d'investissement et de fonctionnement en hausse en 2023, qui doivent s'accélérer pour éviter un décrochage par rapport à la hausse des dépenses de personnel

Dans le contexte de la fin de l'alimentation des crédits de fonctionnement et d'investissement par le plan de relance, ce sont les crédits de la mission « Sécurités » qui alimentent la quasi-totalité de ces dépenses.

En 2023, pour les programmes 176 « Police nationale » et 152 « Gendarmerie nationale », les dépenses hors titre 2 de la mission augmentent de 2,06 % en AE (+ 78,3 millions d'euros) et de 10,2 % en CP (+ 285,9 millions d'euros). Ces dépenses hors titre 2 pour ces deux programmes se décomposent en :

- dépenses de fonctionnement , en hausse de + 0,46 % en AE et + 9,47 % en CP, soit respectivement + 13,15 millions d'euros et + 201,8 millions d'euros ;

- et en dépenses d'investissement , en hausse de 7,2 % en AE et de 13,2 % en CP, soit respectivement + 65,1 millions d'euros et + 84,1 millions d'euros.

L'évolution de ces dépenses apparaît contrastée entre les deux programmes :

- pour la police nationale , les crédits de fonctionnement augmentent en AE (+ 5,9 %) et en CP (+ 13,3 %), tout comme les crédits d'investissements (+ 22,2 % et + 30,7 %) ;

- pour la gendarmerie nationale , les crédits de fonctionnement baissent en AE (-2,7 %) et augmentent en CP (+ 6,6 %), tandis que les crédits d'investissement baissent tant en AE qu'en CP (- 20,5 % et - 8,4%).

La dynamique des dépenses de fonctionnement et d'investissement, tout en étant globalement favorable, apparaît trop modeste au regard de la hausse des dépenses de personnel.

Le rapporteur spécial attire en particulier l'attention sur une évolution des crédits hors titre 2 pas assez satisfaisante concernant la gendarmerie nationale. Il relève par ailleurs que l'année 2023 sera marquée par d'importantes dépenses en une fois (maintenance des véhicules par exemple) pour la gendarmerie, dépenses qui, si elles sont nécessaires, viendront en l'état des crédits demandés grever les dépenses de fonctionnement, déjà marquées par la hausse du coût de l'énergie et par l'inflation notamment.

Il est indispensable de poursuivre la dynamique portée par le plan de relance pour réellement rétablir la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure en prévoyant une hausse structurelle de la part des dépenses d'investissement et de fonctionnement dans l'ensemble des crédits.

S'ils ont été d'une ampleur moindre, les précédents plans d'équipement dont ont bénéficié la police et la gendarmerie nationales ont d'ailleurs été trop souvent marqués par l'effet « stop and go », écueil qu'il convient d'éviter en cette période de sortie du plan de relance.

En effet, afin de faire face à une activité opérationnelle soutenue, dans un contexte sécuritaire tendu, des plans gouvernementaux successifs (PLAT 19 ( * ) 1, PLAT 2, Plan migrants, PSP 20 ( * ) ) ont, depuis 2015, accru l'effort d'équipement, permettant de compenser le sous-investissement constaté au cours des exercices précédents.

Évolution des dépenses d'équipement 21 ( * ) de la police
et de la gendarmerie nationales

(en millions d'euros, en CP)

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2012/

2019

2017/

2019

Gendarmerie nationale

63,9*

85,1

92,7

128

184,7

178,2

148,1

136,4

113,50%

-23,50%

Police nationale

68,5*

85,2

108,3

121,9

192,6

195,2

191,6

196

186,10%

0,40%

Total

132,4

170,3

201

249,9

377,3

373,4

339,7

332,4

151,10%

-11,00%

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

Bien que les dépenses d'équipement de la gendarmerie et de la police nationales se soient maintenues à un niveau plus élevé à l'issue de ces plans, leur montant a amorcé une nouvelle baisse à compter de 2017, témoignant du risque que comportent ces « plans » ponctuels qui ne modifient pas structurellement la répartition des dépenses des forces de sécurité intérieure.

Part des dépenses d'équipement de la police et de la gendarmerie nationales
dans le total de leurs dépenses : le risque du « stop and go »

(en %, en CP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après la Cour des comptes)

Le rapporteur spécial estime que cet exemple témoigne du risque que comporte la sortie du plan de relance, a fortiori quand cette sortie s'inscrit dans un contexte d'augmentation des dépenses de personnel , sous le double effet des recrutements et des mesures indemnitaires en 2023.

La hausse notable des dépenses de personnel en 2023, qui sont difficilement pilotables, et comprennent un effet « cliquet », induit en effet un risque de poursuite de cette tendance à la hausse, qui génèrerait un effet d'éviction des dépenses d'investissement et de fonctionnement.

Il est donc primordial que, conformément aux prévisions du projet annuel de performance de la présente mission, les dépenses d'investissement et de fonctionnement augmentent plus vite que les dépenses de personnel en 2024 et 2025 .

Selon ce document, les crédits annuels hors titre 2 en 2025 pour les deux programmes seraient supérieurs de 19,3 % en AE et de 21,9 % en CP à ceux de 2022 tandis que les dépenses de personnel ne le seraient que de 10,65 % en AE et en CP. Le rapporteur spécial sera vigilant quant au respect de cette trajectoire prévisionnelle.

3. Des crédits supplémentaires tournés en 2023 en particulier vers la numérisation, l'amélioration de l'équipement et l'immobilier des forces de sécurité

En 2023, les crédits demandés d'investissement et de fonctionnement de la police et de la gendarmerie nationales sont dédiés notamment à la modernisation numérique et de l'équipement et à l'immobilier des deux forces.

Ces hausses de crédits accompagnent notamment, conformément aux priorités fixées par le projet de loi LOPMI, la hausse des effectifs et la création de nouvelles brigades et d'unités de forces mobiles, le renforcement de la réserve opérationnelle, l'extension des capacités de formation initiale et continue et la mise en oeuvre du protocole social, pour la partie qui ne relève pas du titre 2.

a) Des crédits visant à assurer la numérisation de la police et de la gendarmerie nationales et une augmentation de ses capacités de formation

Conformément aux priorités fixées par le projet de LOPMI, des crédits supplémentaires sont affectés en 2023 à la transformation numérique de la police et de la gendarmerie nationale. Il s'agit d'un axe majeur de la programmation pluriannuelle puisque, selon ce projet de loi, la moitié de la hausse de 15 milliards d'euros des crédits du ministère de l'Intérieur d'ici 2027 doit être dédiée au numérique.

En premier lieu, des efforts importants sont faits pour développer les outils numériques des forces de sécurité intérieure afin d'améliorer leurs conditions de travail et favoriser leur présence sur le terrain . En 2023, sont notamment prévus :

- l'amélioration de l'environnement numérique des agents via , notamment, le renouvellement du parc informatique de la police et de ses logiciels (+ 10 millions d'euros par rapport à 2022 pour la police nationale) et un nouveau marché de téléphonie mobile (+ 21 millions d'euros d'AE par rapport à 2022) ;

- la poursuite du déploiement d'outils de travail en mobilité, parmi lesquels les tablettes et smartphones NEO2 (25 000 unités supplémentaires seront déployés dans la police en 2023) et les ordinateurs Ubiquity ;

- l'extension de la solution PC STORM 22 ( * ) déjà employée par les forces de sécurité intérieure et, pour la gendarmerie, la montée en puissance du COMCYBERGEND 23 ( * ) ;

- la suite du développement du réseau-radio du futur (RRF), solution de télécommunication qui sera interopérable entre policiers et gendarmes, qui implique de renouveler le réseau et les équipements de télécommunication des policiers, avec une cible de 100 000 utilisateurs à l'horizon 2025 ;

- le développement d'applications métiers innovantes , à l'image de NEO DK dans la gendarmerie, qui généralisera à terme la prise d'empreintes digitales et palmaires en mobilité, et l'amélioration de l'application PVe sur NEO2, qui permet de relever les amendes forfaitaires délictuelles en mobilité.

En deuxième lieu, des efforts financiers sont fournis pour renforcer les moyens de lutte contre la cybercriminalité et la criminalité prenant appui sur le numérique . En effet, au-delà des attaques cyber visant des institutions, les atteintes aux personnes se développent également dans ce nouvel espace (pédopornographie, cyber-harcèlement, crimes de haine).

La filière cyber sera ainsi renforcée notamment par l'augmentation du nombre de gendarmes et policiers « cyber-patrouilleurs », avec un objectif pour la gendarmerie de 10 000 agents, associés à des recrutements scientifiques. En outre, d'un point vue organisationnel, sera créée la nouvelle Agence du numérique des forces de sécurité intérieure (ANFSI) , placée sous la responsabilité conjointe du DGGN et du DGPN. En matière de formation, va être mis en place un centre national de formation cyber (CNF), qui assurera la formation continue dans ce domaine des gendarmes, policiers et douaniers, tandis que la formation initiale sera renforcée s'agissant des enjeux du numérique.

En troisième lieu, la relation numérique avec les citoyens a vocation à être améliorée .

Sont ainsi déployés plusieurs sites internet et applications, parmi lesquels magendarmerie.fr et moncommissariat.fr et Ma Sécurité sont déjà disponibles. La plateforme de traitement harmonisé des enquêtes et signalements pour les e-escroqueries (THESEE) a quant à elle pour objectif de permettre aux usagers de déposer une plainte en ligne sans avoir à se déplacer dans un commissariat ou une brigade de gendarmerie ; la possibilité de dépôt de plainte en ligne concerne plusieurs e-escroqueries. En complément de la mise en place de la plainte hors les murs lancée mi-novembre 2021, un service complémentaire de prise de plainte en visioconférence est par ailleurs en cours de création au sein des services de la Police nationale. Ce dispositif fonctionnera grâce à un télé-service accessible aux usagers depuis France Connect. Il a vocation à être ouvert au public à la fin de l'année 2022 et déployé pleinement en 2023.

En outre, des équipes spécialisées dans le numérique sont mises en place, tant dans la gendarmerie que la police nationale. Pour réagir immédiatement aux cyberattaques et pour signaler les escroqueries en ligne, l'équivalent numérique de « l'appel 17 » sera créé avec le 17 « cyber ».

S'agissant de la formation, outre les enjeux liés au numérique 24 ( * ) , la formation initiale et continue des policiers et gendarmes est renforcée.

En 2023, la police nationale vise un renforcement du nombre de formateurs pour atteindre l'objectif d'augmenter de 50 % la formation continue et d'accompagner la dynamique de recrutement relancée à partir de 2023. En outre, la nouvelle formation initiale des gardiens de la paix d'une durée de 24 mois s'articule depuis 2022 autour de 12 mois en école (contre 8 mois depuis juillet 2020), intégrant 6 semaines de formation en alternance suivies de 12 mois de formation d'adaptation au premier emploi dans le service d'affectation et l'intégration de la formation initiale d'officier de police judiciaire . Par ailleurs, depuis août 2022, la durée de la scolarité des policiers adjoints a été portée à 4 mois. En outre, la formation de réservistes en plus grand nombre sera un chantier important pour le ministère de l'Intérieur, qui a déployé les premières formations en 2022.

La gendarmerie nationale augmentera, de même, en 2023, le temps de présence en école et intégrera la formation d'officier de police judiciaire dès la formation initiale . Parmi les 950 ETP créés en 2023, 80 seront dédiés au renforcement de la formation, dont 45 pour la formation initiale et 35 pour la formation continue.

b) Des crédits en faveur du renouvellement et de la modernisation de l'équipement des policiers et gendarmes

Le budget pour 2023 prévoit la poursuite du renouvellement des équipements (maintien de l'ordre, protection, habillement, outils technologiques de pointe, etc .) des policiers et gendarmes.

Il s'agit d'une nécessité pour assurer l'opérationnalité de nos forces et accompagner les hausses d'effectifs mais également pour faire face aux enjeux sécuritaires qui entoureront la Coupe du Monde de Rugby en 2023 et les Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.

S'agissant de la gendarmerie nationale, des crédits supplémentaires sont prévus en 2023 , notamment dans le cadre d'une « densification » des pelotons de surveillance et d'intervention :

- en 3 ans (de 2023 à 2025), 3 000 postes de gendarmes adjoints volontaires seront transformés en postes de sous-officiers ;

- les capacités de projection seront durcies face à la diversification des menaces, y compris contre les forces de l'ordre, notamment dans le cadre du plan de renouvellement du parc d'hélicoptères de la gendarmerie, notamment grâce aux crédits du plan de relance en 2023 25 ( * ) ; 10 nouveaux hélicoptères H160 pourront ainsi être livrés à partir de 2024. En outre, la gendarmerie disposera, à partir de 2024, de 90 véhicules blindés neufs, dont 10 dès 2022 et 44 livrés en 2023 ;

- les équipements de protection et d'intervention vont également être renouvelés (+ 10,3 millions d'euros de crédits par rapport à 2022), pour couvrir notamment les besoins liés à la montée en puissance de la réserve opérationnelle , la création de nouvelles brigades et d'escadrons de gendarmerie mobile, ainsi que l'acquisition de housses tactiques modulaires 4 en 1, de gilets pare-balles et de casques notamment ;

- les dépenses d'habillement bénéficient enfin d'une hausse de 66 millions d'euros en AE.

Concernant la police nationale , l'on peut notamment relever pour 2023 les évolutions suivantes :

- les crédits dédiés aux effets de maintien de l'ordre, de protection lourds et les matériels d'intervention augmentent également, de 7,5 millions d'euros en 2023 ;

- 6 millions d'euros supplémentaires sont fléchés vers l'achat de munitions et d'armements en 2023 ;

- des drones et des matériels de lutte anti-drones et d'autres équipements seront acquis en 2023 notamment en vue de la sécurité de la Coupe du monde de Rugby de 2023 et des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, pour un montant supplémentaire d'environ 16 millions d'euros ;

- enfin, le renouvellement des tenues des policiers fera l'objet d'un effort supplémentaire avec une hausse des crédits de 13,5 millions d'euros en 2023.

c) Un effort en matière de renouvellement et de rajeunissement du parc automobile des deux forces qui ne doit pas faiblir
(1) Le parc automobile de la police nationale a bénéficié d'un investissement important ces dernières années mais des besoins demeurent

Au 1 er août 2022, le parc automobile de la police nationale se compose de 32 889 véhicules , répartis entre les deux-roues (cyclomoteurs, scooters, motos), les véhicules utilitaires, les poids-lourds et les véhicules de transport en commun de personnes (hors remorques et moyens nautiques). Le nombre de véhicules du parc automobile de la police nationale est en hausse depuis 2017.

Nombre de véhicules de la police nationale et âge moyen 26 ( * ) (en années)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses aux questionnaires budgétaires)

L'âge moyen des véhicules légers est de cinq ans et dix mois en 2022.

Nombre et âge moyen des véhicules de la police nationale

Deux roues

Véhicules légers

Véhicules lourds et spécialisés

Total général

4 955

23 807

4 127

Âge moyen

8 ans et 10 mois

5 ans et 10 mois

9 ans et 7 mois

Source : DGPN

Cet âge reste largement trop élevé mais est en baisse sous l'effet des efforts déployés dans le cadre des crédits du plan de relance, dont les effets ont été très sensibles . Le kilométrage moyen des véhicules légers est en diminution puisqu'il atteint 77 737 kilomètres en 2022 contre 86 960 kilomètres en 2021 et 100 000 kilomètres en 2020.

Pour la police nationale, les critères de réforme d'un véhicule léger sont : 170 000 kilomètres ou 8 ans pour les véhicules particuliers et 220 000 kilomètres ou 11 ans pour les véhicules utilitaires. Actuellement 4 461 véhicules sont maintenus en service alors qu'ils ont atteint au moins un de ces critères. Dans les trois années à venir ce sont au moins 5 463 véhicules légers qui auront atteint les deux critères 27 ( * ) de réforme.

Pour les trois prochaines années au regard des chiffres annoncés plus haut, seraient nécessaires environ :

- 1 821 véhicules / an pour permettre le renouvellement des 5 463 véhicules répondant aux deux critères de réforme ;

- 3 000 véhicules / an pour rattraper le retard existant des 5 643 véhicules mentionné tout assurant le renouvellement courant.

À raison d'une moyenne de 35 000 euros par véhicule léger acquis 28 ( * ) , la dépense annuelle nécessaire pour assurer le renouvellement courant et pour rattraper le retard lié au non-remplacement des véhicules dépassant les critères de service par an s'élèverait à :

- rattrapage du retard : 35 000 euros x 1 821 = 63,74 millions d'euros annuels ;

- renouvellement courant et rattrapage du retard : 35 000 euros × 3 000 = 105 millions d'euros annuels.

Le rapporteur spécial formule deux observations. En premier lieu, dans les éléments qui lui ont été fournis 29 ( * ) et dans les développements supra , sont évoqués les seuls besoins en véhicules légers. Or, s'y ajoutent les besoins en véhicules lourds et en deux-roues . En outre, alors que la réforme d'un véhicule dépend en principe de critères alternatifs (âge ou kilométrage), leur cumul est souvent attendu pour procéder à la réformation (tant dans les faits que dans les calculs) : l'application de la règle du critère alternatif contribuerait à augmenter les besoins affichés en renouvellement.

Pour 2023, l'objectif affiché est de renouveler 2 800 véhicules légers et deux roues et 400 véhicules lourds et spécialisés . Le « verdissement » du parc automobile sera poursuivi grâce à l'acquisition de véhicules propres et à l'installation de bornes électriques.

Sur la période 2021-2022, la police nationale a bénéficié d'un investissement important qui a permis de procéder au renouvellement de près de 30 % du parc de ses véhicules , notamment grâce aux crédits du plan de relance. Cet effort est en baisse de 3 millions d'euros pour 2023 sur le périmètre de la mission : les crédits destinés au renouvellement du parc automobile de la police nationale s'établissent en effet à 150,3 millions d'euros en AE et en CP . En outre, alors que des crédits en provenance de la mission « Plan de relance » venaient alimenter le renouvellement, cette dynamique prend fin en 2023.

Si le rapporteur constate que l'effort d'investissement a été élevé les années précédentes et que, malgré une baisse, celui-ci resté élevé en 2023, il insiste sur le fait que cet effort doit être maintenu pour l'avenir. En effet, le parc automobile de la police nationale connaît encore d'importants besoins en renouvellement de l'ensemble des types de véhicules et un âge moyen assez élevé.

Nombre de véhicules réformés et achetés par la police nationale
et engagement financier annuel correspondant

Année

Nombre de véhicules réformés

Nombre de véhicules achetés

Engagement financier correspondant en M €

2010

2 272

1 320

-

2011

1 785

1 303

-

2012

2 741

2 165

44,0

2013

2 299

2 181

38,3

2014

1 834

2 498

38,9

2015

1 692

2 301

52,1

2016

1 963

2 519

53,9

2017

1 950

1 366

33,7

2018

1 743

3 077

74,0

2019

1 297

3 134

71,0

2020

2 095

4 036 dont 750 vélos électriques

77,4 (dont 1,3 pour

les vélos électriques)

2021

Donnée non encore disponible

4 415

126,7

2022

Donnée non encore disponible

3 222

150,32

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses aux questionnaires budgétaires)

(2) Le parc automobile de la gendarmerie nationale doit également continuer à bénéficier d'investissements importants

Au 1 er juillet 2022, le parc automobile de la GN était estimé à 31 879 véhicules (hors moyens nautiques, aériens, remorques et véhicules saisis).

État des lieux des véhicules de la gendarmerie nationale

Type

Quantité

Âge moyen

Kilométrage moyen

Deux roues

3 714

6,84 ans

45 656 Kms

Véhicules légers

27 564

6,19 ans

104 668 Kms

Véhicules lourds

603

13,05 ans

108 403 kms

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires budgétaires

Le rapporteur spécial relève que la situation de la gendarmerie nationale est donc plus défavorable que celle de la police nationale en termes d'âge moyen des véhicules, alors même que les véhicules constituent l'élément essentiel du travail des unités dans les territoires, la superficie d'une brigade de neuf gendarmes correspondant à celle de la ville de Paris.

Au regard des critères de mises en réforme des véhicules de la gendarmerie (8 ans/200 000 kilomètres), 2 000 à 3 000 véhicules doivent être acquis en moyenne chaque année pour maintenir le parc de véhicules en état.

Nombre de véhicules réformés et achetés par la gendarmerie nationale

Véhicules réformés

Véhicules acquis

2010

2149

2264

2011

1967

1273

2012

1906

865

2013

1309

1333

2014

841

1444

2015

1905

2099

2016

2178

3302

2017

2788

2829

2018

3102

2782

2019

2609

2541

2020

2596

3453

2021

3163

3716

2022

816

3592 (prévision)

Source : commission des finances, d'après les réponses aux questionnaires budgétaires

Sur la période 2017-2021, le parc de véhicules de la gendarmerie a bénéficié d'un effort inédit puisqu'en 5 ans, 50 % du parc de la gendarmerie a été renouvelé.

En 2022, 3 592 véhicules devaient être acquis. En 2023, la gendarmerie bénéficiera pour l'acquisition de véhicules de crédits sur le programme 152 d'une dotation en baisse de 106 millions d'euros en AE (- 26 millions d'euros) et de 97,3 millions d'euros en CP (- 55 millions d'euros). En outre, alors que des crédits en provenance de la mission « Plan de relance » venaient alimenter le renouvellement, cette dynamique prend fin en 2023. Ici encore, la dynamique constatée en 2023 pour la gendarmerie nationale apparaît moins bonne que pour la police nationale.

Les crédits permettront en 2023 le renouvellement de 2 000 véhicules, dont 1 200 véhicules sérigraphiés et banalisés légers, 200 motos et 600 véhicules spécifiques. Parmi eux, 600 véhicules seront de type hybride.

Le rapporteur spécial considère, comme pour la police nationale, que si l'effort observé en 2021 et 2022 ne peut pas être maintenu sur la durée à ce niveau, il doit demeurer à un niveau élevé.

d) Des crédits dédiés à l'immobilier qui doivent répondre aux enjeux liés aux conditions de travail et de vie des policiers et gendarmes et d'accueil des usagers
(1) Des crédits d'investissement pour l'immobilier en hausse pour la police nationale

Le parc des immeubles occupés par les services déconcentrés de la police nationale se compose de bâtiments tels que les commissariats ou hôtels de police, les écoles de formation, les cantonnements et casernements de compagnies républicaines de sécurité, les bâtiments des services départementaux et régionaux de la police aux frontières, de la police judiciaire et de services de la sécurité intérieure et les locaux annexes comme les stands de tir, les garages et les ateliers.

Au total, les services de police ainsi que leurs services de soutien sont répartis, en 2021, sur quelque 2 641 sites représentant 1 298 464 m² de SHON. Parmi ces surfaces, 144 904 m² composent le parc locatif, dont 73 225 m² en locatif public (BEA avec les communes) et 71 679 m² en locatif privé, pour 1 153 560 m² en domanial 30 ( * ) .

L'entretien du parc immobilier de la police nationale est effectué par le biais de deux enveloppes distinctes, l'une destinée à financer des travaux type « locataire », positionnée en crédits de fonctionnement, l'autre, destinée aux travaux d'entretien relevant du propriétaire, correspondant aux crédits d'investissement.

Les crédits d'investissement consacrés à l'immobilier couvrent les nouvelles constructions et la maintenance.

L'immobilier de la police nationale reste une priorité pour le budget 2023, en dépit de l'extinction progressive du plan de relance. Les dépenses d'investissement atteindront 476,4 millions d'euros en AE (+ 74 millions d'euros) et 226,2 millions d'euros en CP (+ 56 millions d'euros). Ces montants sont un peu supérieurs à ceux de l'année dernière, y compris en incluant les crédits du plan de relance (458,4 millions d'euros en AE et 225,8 millions d'euros en CP).

Cette hausse vise à améliorer, d'une part, les conditions d'accueil des usagers et, d'autre part, les conditions de travail des policiers. Les crédits sont répartis en 2023 pour 232,1 millions d'euros d'AE sur les nouvelles constructions et pour 244,26 millions d'euros d'AE sur la maintenance.

Le rapporteur spécial se félicite du maintien de la dynamique en faveur de l'immobilier de la police nationale au sortir du plan de relance. Celle-ci doit être maintenue dans le temps au regard des très importants besoins en la matière.

(2) Des crédits en baisse pour la gendarmerie nationale par rapport à 2022

Si le niveau général de vétusté de son immobilier apparaît moins défavorable que pour la police nationale , la question de l'état de l'immobilier de la gendarmerie nationale revêt une importance particulière, la caserne constituant non seulement le lieu de travail mais également le cadre de vie des gendarmes.

En 2023, les crédits d'investissement (acquisitions, constructions et maintenance/réhabilitation) portés par le programme budgétaire « Gendarmerie nationale » sont en baisse en AE (- 42,5 millions d'euros) mais en hausse en CP (+ 13,5 millions d'euros) par rapport à 2022. Par ailleurs, les crédits du plan de relance ne viennent plus abonder ces crédits (44,1 millions d'euros en 2022). Là encore, le rapporteur spécial ne peut que constater que la dynamique est moins favorable que pour la police nationale.

La dotation au titre du PLF 2023 s'élève à 142,6 millions d'euros en AE et 126,7 millions d'euros en CP. Cette dotation permettra notamment de couvrir les restes à payer des grandes opérations immobilières lancées les années précédentes et de financer de nouveaux grands projets prévus dans le cadre de la LOPMI, à l'image de la réhabilitation du centre national de formation des forces mobiles et de l'École des officiers de la gendarmerie nationale, de la création de nouvelles unités (brigades et forces mobiles) et du renforcement des capacités de formation des écoles.

Crédits d'investissement immobilier
de la gendarmerie nationale (hors plan de relance)

(en millions d'euros)

015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

PLF 2023

83,1

142,6

CP

76,6

82,5

82,9

45,9

79,6

87,0

103,2

99,7

95,1

89,7

112,8

126,7

Source : commission des finances du Sénat (d'après les réponses aux questionnaires budgétaires)

Le rapporteur spécial constate que si les crédits d'investissement immobiliers de la gendarmerie nationale baissent par rapport à 2022, ils restent néanmoins à un niveau relativement satisfaisant. L'effort doit toutefois être maintenu sur la durée, d'autant plus dans le contexte des orientations portées par le projet de LOPMI en matière d'effectifs et de développement des implantations locales.

III. UN OBJECTIF PRÉSIDENTIEL DE DOUBLEMENT DE LA PRÉSENCE SUR LA VOIE PUBLIQUE QUI NE DOIT PAS S'APPUYER À TITRE PRINCIPAL SUR DES CRÉATIONS D'EFFECTIFS ET DOIT MOBILISER D'AUTRES LEVIERS

A. UN OBJECTIF QUI NE PEUT PAS S'APPUYER À TITRE PRINCIPAL PRINCIPAL SUR LES CRÉATIONS D'EFFECTIFS, DONT L'OPPORTUNITÉ N'EST PAS ÉVIDENTE

En conclusion du Beauvau de la sécurité, le président de la République annonçait vouloir « doubler sous 10 ans la présence des policiers et gendarmes sur la voie publique » 31 ( * ) . Cet objectif est repris dans le cadre du projet de LOPMI, avec une échéance fixée à 2030 .

Le rapporteur spécial estime que si cet objectif est louable, il emporte par nature le danger de mobiliser trop fortement le levier des créations de postes . Or, le risque d'une telle stratégie est que celles-ci se sont souvent traduites par une réduction des marges de manoeuvre en matière de fonctionnement et d'investissement (effet ciseaux), réduisant en réalité l'opérationnalité des forces de police et de gendarmerie 32 ( * ) .

Dans le cadre du précédent quinquennat, le Président de la République s'était engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018/2022. Ce plan a d'ailleurs été respecté , comme le rapporteur spécial l'a indiqué supra , puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2 083 emplois de gendarmes auront été créés.

Si cet important renforcement des effectifs ne s'est pas effectué au détriment de la part des dépenses de fonctionnement et d'investissement de la police et de la gendarmerie nationale, c'est grâce à un effort budgétaire global important porté par la mission mais également par les crédits provenant du Plan de relance.

À l'occasion du début du présent quinquennat et en marge de la présentation du projet de LOPMI, la Première ministre Élisabeth Borne a annoncé, le 6 septembre 2022, la création de 8 500 postes de policiers et gendarmes supplémentaires d'ici à 2027.

Là encore, l'objectif est notamment d'atteindre l'objectif de doubler la présence des forces de police et de gendarmerie sur la voie publique. Le projet de loi de finances prévoit 33 ( * ) , dès 2023, la création de 2 857 ETP pour les deux forces , dont 1 907 ETPT pour la police nationale et 950 ETPT pour la gendarmerie nationale 34 ( * ) .

Les comparaisons internationales ne permettent pourtant pas de conclure à une sous-dotation de la France en matière d'effectifs des forces de sécurité intérieure. La France se situe en réalité, à l'échelle de ses voisins européens, dans une situation intermédiaire.

Surtout, aujourd'hui, cet effort en termes d'effectifs se fait alors que le plan de relance s'éteint. Ce sont donc les dépenses d'investissement et de fonctionnement de la mission « Sécurités » qui devront augmenter à un rythme au moins équivalent aux dépenses de personnel pour ne pas réduire la qualité des moyens de nos forces de sécurité intérieure.

Si cet objectif est atteignable, il implique d'être vigilant, annuellement, quant à la soutenabilité de l'augmentation des effectifs et à mobiliser parallèlement d'autres leviers pour atteindre le but louable d'un doublement de la présence des forces de police et de gendarmerie sur la voie publique.

B. UN OBJECTIF QUI DOIT MOBILISER D'AUTRES LEVIERS QUE LES CRÉATIONS D'EFFECTIFS

La poursuite de l'objectif de doubler la présence des forces de l'ordre sur la voie publique doit mobiliser plusieurs leviers :

- la lutte contre les tâches indues et la politique de substitution (remplacement des personnels actifs affectés à des tâches administratives par du personnel administratif) ;

- le renforcement réaliste des réserves opérationnelles de la gendarmerie et de la police nationales ;

- le paiement des heures supplémentaires (voir infra ) aux personnels de police ;

- les cycles horaires dans la police nationale.

1. La politique de substitution de personnels actifs affectés à des tâches administratives par des personnels dédiés et la lutte contre les tâches indues

Les personnes entendues par le rapporteur spécial ont souvent rappelé que l'augmentation du temps passé sur le terrain nécessite de faire en sorte que les personnels actifs consacrent moins de temps à des tâches qui pourraient être simplifiées ou confiées à des personnels dédiés. Le rapporteur spécial souscrit à ce constat : c'est dans la hausse du temps passé par chaque agent sur la voie publique que réside le principal facteur qui permettra d'atteindre l'objectif de doublement de la présence des forces de l'ordre sur la voie publique, sans réduire les marges de manoeuvre budgétaires en faveur du fonctionnement et de l'investissement.

Il constate d'ailleurs que cette nécessité, qu'il a souvent rappelée, est intégrée dans le projet de LOPMI. Le rapport annexé à celui-ci indique que l'effort sur 2023-2027 devra représenter une hausse de 50 % du nombre d'heures de présence sur la voie publique des policiers et des gendarmes.

Un mouvement de substitution des personnels actifs par des personnels administratifs est ainsi annoncé , notamment pour les missions de contrôle aux frontières (couplé à l'automatisation) ou pour certaines missions relatives au fonctionnement des centres de rétention administrative. Les futurs assistants d'enquête de police et de gendarmerie se verraient en outre confier des tâches actuellement exercées par les personnels actifs, afin de permettre à ces derniers de se concentrer sur leur coeur de mission, notamment les enquêteurs.

Par ailleurs, le rapport annexé au projet de LOPMI précise que les policiers et les gendarmes verront les missions dites « périphériques » être fortement réduites. Les extractions judiciaires devraient être transférées au ministère de la justice, les policiers et gendarmes devraient être libérés de la police des audiences ou encore de la garde des détenus hospitalisés. En outre, les missions d'escorte ou de garde de bâtiments officiels seront réétudiées et externalisées lorsque leur exercice peut être assuré par d'autres que les policiers ou les gendarmes. La télécommunication audiovisuelle serait privilégiée pour certains actes d'enquête (exemple : prise de plainte) ou pour les auditions (exemple : pour les auditions par le juge de la liberté et de la détention des étrangers placés en centre de rétention administrative afin d'éviter les transferts et gardes chronophages).

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit ainsi que sur la période 2023-2027, 2 500 postes de personnels actifs de la police nationale affectés à des fonctions administratives seraient pourvus par des personnels administratifs, techniques ou scientifiques, dont 500 en 2023. De même, s'agissant de la gendarmerie nationale, il est prévu une politique de substitution en transformant des postes de soutien encore tenus par des militaires en postes de personnels spécialisés, dont 400 ETP en 2023.

Le rapporteur spécial estime qu'il s'agirait là d'évolutions positives, dont il suivra la mise en place effective avec attention. Plus généralement, il rappelle que le maximum doit être fait pour simplifier le travail des policiers et gendarmes . Cela suppose notamment d'investir suffisamment et à bon escient dans des infrastructures et des logiciels numériques efficients afin de libérer du temps pour la présence sur le terrain et permettre l'accomplissement d'actes de procédure « hors les murs ». Les auditions ont été l'occasion de constater que le dispositif de la procédure pénale numérique, pourtant présentée comme une avancée importante par le ministère de l'Intérieur, monopolise aujourd'hui davantage de temps de nombreux policiers que l'ancienne procédure papier.

2. Le renforcement réaliste des réserves opérationnelles de la gendarmerie et de la police nationales

Le Beauvau de la sécurité avait permis d'acter la création d'une réserve opérationnelle de la police nationale, sur le modèle de celle existant pour la gendarmerie nationale. Contrairement aux recrutements de fonctionnaires à temps plein, le rapporteur estime que ce dispositif est pertinent puisqu'il n'entraine pas d'effet cliquet (puisqu'elle peut être réduite d'une année à l'autre) et offre un appoint utile et flexible aux forces de l'ordre , notamment pour faire face à des besoins ou des circonstances particulières, comme les Jeux Olympiques de Paris 2024, et pour apporter des compétences de pointe qui ne sont pas nécessairement présentes au sein des forces. L'expérience de la gendarmerie nationale montre que cet appui est précieux, notamment en période de forte activité.

L'emploi des réservistes de la gendarmerie nationale

L'emploi des réservistes de la gendarmerie nationale est privilégié pendant les temps de forte activité (période estivale, fêtes de fin d'année, grands événements).

Les réservistes sont employés pour assurer un large éventail de missions :

- le renfort des unités territoriales, avec notamment l'engagement durant la période estivale pour la sécurité publique dans les zones d'affluence saisonnière ;

- la sécurisation lors de grands événements nationaux et le renforcement de la protection des personnes lors d'événements de grande ampleur (Tour de France cycliste, 24 heures du Mans, Euro 2016, etc.) ;

- le renforcement des capacités de renseignement, notamment dans le domaine de l'intelligence économique territoriale ;

- le renfort lors de catastrophes naturelles (comme l'ouragan Irma) par le déploiement de compagnies de réserves territoriales.

Le gouvernement prévoyait, l'année dernière, pour la police nationale un recrutement de 1 000 à 2 000 réservistes en 2022. L'objectif fixé par le projet de LOPMI est d'atteindre 30 000 réservistes à l'horizon 2027, ce qui n'apparaît pas très crédible , compte tenu notamment des besoins de formation et de la nécessité de disposer d'assez de candidats et d'assez de formateurs et de personnels administratifs dédiés à la réserve. Une telle montée en puissance impliquerait d'atteindre le niveau auquel se place aujourd'hui la gendarmerie nationale, qui dispose d'une réserve opérationnelle depuis plusieurs décennies. Le PLF pour 2023 abonde de 8 millions d'euros supplémentaires les crédits en faveur de la réserve opérationnelle par rapport à 2022.

La réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale comprenait 31 500 effectifs au 31 décembre 2021 , ce qui correspond à un budget d'environ 70 millions d'euros hors CAS « Pensions », et a permis d'assurer la présence moyenne de 1 751 réservistes par jour en 2021 et une prévision de 1 883 réservistes par jour en 2022. Le projet de LOPMI fixe comme objectif d'atteindre 50 000 réservistes à l'horizon 2027.

Le PLF pour 2023 abonde de 14 millions d'euros supplémentaires les crédits en faveur de la réserve opérationnelle par rapport à 2022, afin de permettre le renforcement de ses effectifs de 6 000 réservistes.

S'il constate le manque de crédibilité de l'objectif de 30 000 effectifs dans la réserve opérationnelle de la police à l'horizon 2027, le rapporteur spécial souscrit à la volonté de renforcer la très récente réserve opérationnelle de la police nationale , permettant de renforcer sa présence sur la voie publique, de répondre aux besoins croissants alors que la France va accueillir la Coupe du Monde de Rugby et les Jeux Olympiques et paralympiques, et de favoriser le lien police-population. Il en va de même concernant l'élargissement de la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale, quant à elle déjà beaucoup plus fournie.

3. L'opportunité de la hausse de l'enveloppe dédiée à la résorption du stock d'heures supplémentaires de la police nationale

Contrairement aux gendarmes, les policiers bénéficient d'une compensation au titre des services supplémentaires effectués (dépassement horaire, permanences, rappels). Sauf pour les compagnies républicaines de sécurité (CRS), dont les heures supplémentaires peuvent être payées, ces services complémentaires sont en principe compensés par l'octroi d'heures récupérables 35 ( * ) .

Si l'utilisation des heures supplémentaires constitue une manière de répondre à la nécessité de renforcer la présence des policiers sur le terrain, l'accroissement de l'activité opérationnelle à compter de 2014 a entrainé l'augmentation sensible de leur stock.

Ce stock est constitué des heures accomplies et des majorations horaires prévues dans les textes (ces dernières représentent en moyenne 20 % du stock).

Pour la première fois depuis l'émergence de cette problématique, une mesure nouvelle de 26,5 millions d'euros a été inscrite en loi de finances pour 2020, pour indemniser un flux annuel de 2 millions d'heures environ , correspondant au volume identifié comme incompressible par la DGPN pour donner aux chefs de service les marges de manoeuvre opérationnelles nécessaires.

Deux nouvelles campagnes d'indemnisation, sur la base du volontariat, ont été réalisées au titre des heures acquises en 2020 et 2021. Il résulte de cette dernière une indemnisation d'environ 0,9 million d'heures pour un montant de 10,7 millions d'euros. En 2020, le stock d'heures supplémentaires avait ainsi été ramené à 19,4 millions.

Stock d'heures supplémentaires de la police nationale

(en millions d'heures)

Source : commission des finances du Sénat

La dotation de 26,5 millions d'euros inscrite en 2020 et 2021 avait été reconduite en 2022 pour indemniser un flux annuel de 2 millions d'heures environ, correspondant à un volume identifié comme incompressible pour donner aux chefs de service des marges de manoeuvre opérationnelles. Il en résulte que le stock d'heures supplémentaires à apurer avait été abaissé, au 31 décembre 2021, à 16,5 millions d'heures , soit un niveau inférieur de 28,3% à celui de 2018 et équivalent à celui de 2008.

Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit, en outre, le relèvement de l'enveloppe de crédits dédiés à la campagne d'indemnisation des heures supplémentaires de 18,7 millions d'euros, soit + 70,6 %, pour atteindre 45,2 millions d'euros .

Le rapporteur spécial estime que ce dispositif va dans le bon sens. Il invite toutefois à rester vigilant quant à la nécessité de ne pas laisser subsister un compte par agent d'heures supplémentaires non indemnisables trop important, au risque de déstabiliser fortement les services. En effet, les fonctionnaires peuvent liquider leurs heures supplémentaires avant leur départ à la retraite. Ces derniers étant juridiquement en congés et non en retraite, ils ne sont pas remplacés durant cette période, ce qui contribue à creuser un véritable « trou » opérationnel, particulièrement prégnant dans certains services 36 ( * ) .

Plus globalement, le rapporteur spécial considère que la mobilisation des policiers en heures supplémentaires, qui est un levier utile, implique l'attente légitime qu'une compensation soit effectivement octroyée.

4. L'enjeu des cycles horaires dans la police nationale

Lors de son discours de clôture du Beauvau de la Sécurité en date du 14 septembre 2021, le Président de la République avait annoncé qu'il convenait de réexaminer le temps de travail des policiers pour renforcer la capacité opérationnelle des unités de terrain et il avait demandé au ministre de l'intérieur de conduire des discussions sur les nouveaux cycles horaires, avec les représentants du personnel, qui devaient être finalisées avant le 1 er janvier 2022.

Le rapporteur spécial a d'ailleurs souvent rappelé les difficultés liées au cycle de travail, qui se sont amplifiées dès 2014 et n'ont jamais été réellement réglées au cours du précédent quinquennat, afin de trouver un équilibre entre les exigences opérationnelles et la qualité de vie des policiers.

La disparition progressive de la vacation forte depuis 2021, constitue une évolution satisfaisante bien que trop tardive. Elle contribuera à augmenter la présence des policiers sur la voie publique, à effectifs constants.

a) Un cycle de la vacation forte caractérisé par d'importants défauts

Une réforme des cycles de travail dans la police nationale a été engagée en 2014, avec pour objectif de mieux répondre aux attentes des personnels et de favoriser la prévention des risques psychosociaux, tout en garantissant la capacité opérationnelle dans les services. La diminution du nombre de week-end travaillés apparaissait alors comme un objectif important. Parallèlement à cet objectif, cette réforme était rendue nécessaire par les exigences de la directive européenne relative au temps de travail 37 ( * ) . Il en est résulté l'adoption du décret du 30 janvier 2017 38 ( * ) , reprenant l'ensemble des prescriptions de la directive, qui prévoit notamment que chaque agent dispose de 11 heures minimum d'interruption entre deux prises de service et de 35 heures de repos consécutif au minimum par semaine.

La modification en septembre 2016 des instructions générales relatives à l'organisation du travail des personnels actifs et des personnels administratifs, techniques et scientifiques (IGOT) du 18 octobre 2002 a ainsi intégré la possibilité, parmi d'autres, de mettre en oeuvre le cycle dit de la « vacation forte », qui avait la préférence des organisations syndicales, car il permet au fonctionnaire d'être en congés un week-end sur deux plutôt qu'un week-end sur six pour les autres cycles alors proposés.

Le rapporteur spécial pointait depuis 2016 les défauts d'une telle orientation 39 ( * ) . À l'automne 2017, les organisations représentatives du personnel ont toutefois opté pour l'extension de la vacation forte.

Afin de limiter les risques de perte en effectif, et conformément aux recommandations répétées du rapporteur spécial, le directeur général a néanmoins gelé les possibilités d'extension de la vacation forte et lancé une mission d'évaluation des différents cycles sur une année complète (2018) en décembre 2017, destinée à identifier objectivement leurs apports et leurs inconvénients et à sortir du dilemme opposant administration et personnels.

Ce rapport, rendu en mars 2019 par l'inspection générale de la police nationale (IGPN) a confirmé les défauts de la vacation forte , à savoir notamment :

- un coût en effectifs supplémentaires de 8,66 % pour une même quantité de travail, moyenne entre les unités spécialisées faiblement renforcées (+ 3,72%) et les unités d'intervention et de police secours (UIPS) qui l'ont été à hauteur de + 10 à + 11 % selon leur taille ;

- une activité plutôt soutenue le jour fort, mais un potentiel en baisse hors jour fort, avec pour conséquence une diminution constatée partout où il n'y a pas eu de renforts, du nombre d'équipages consacrés à la police-secours ou aux patrouilles ;

- localement un transfert de charges vers d'autres unités (GSP, BAC, etc .) pour suppléer les UIPS défaillantes ;

- une tension parfois très vive entre les unités en vacation forte et les unités en charge du judiciaire, en régime hebdomadaire, qui se disent saturées le lendemain du jour fort par les mises à disposition, d'autant plus mal acceptées lorsqu'elles se produisent sur leur week-end de permanence ;

- une augmentation du temps de pause au poste lors des chevauchements entre brigades, qui renvoie essentiellement à l'implication souvent faible et sûrement difficile de la hiérarchie intermédiaire, officiers et gradés 40 ( * ) .

Sur la base de ces éléments, pour la généralisation de ce régime de travail à l'ensemble des unités travaillant en régime cyclique, il aurait fallu, selon le ministère de l'Intérieur, envisager 4 542  ETP en plus, pour un coût financier d'environ 224 millions d'euros annuels, sans augmentation du nombre total d'heures travaillées.

b) L'abandon progressif opportun de la vacation forte

Tenant compte, d'une part, du coût en effectifs de la vacation forte pour maintenir le potentiel opérationnel des services et des limites de ce cycle relevées dans les conclusions de l'IGPN, le ministère de l'intérieur a décidé d'expérimenter une autre voie ; le cycle 2/2/3/2/2/3 ou cycle binaire , qui est neutre en effectifs. Ce dernier a pour principale caractéristique de comporter des vacations longues, mais de permettre aux agents d'être en repos un mercredi et un week-end de trois jours sur deux.

L'expérimentation du cycle 2/2/3/2/2/3

Ce cycle appelé binaire lorsqu'il fonctionne sur 24h (une vacation de 12h08 des unités de jour suivie d'une vacation de 12h08 des unités de nuit, comportant deux pauses de 20 minutes), ne nécessiterait aucun apport supplémentaire en effectifs et permettrait aux policiers travaillant sous ce régime de bénéficier d'un week-end de trois jours sur deux et d'un mercredi sur deux, pour un total de 140 vacations travaillées sur l'année.

Dès juin 2019, des discussions ont eu lieu avec la parité syndicale, permettant d'acter le principe d'une expérimentation dans certaines unités de la direction centrale de sécurité publique et de la direction centrale de la police aux frontières, sur la base du volontariat des personnels. Ces dernières se sont poursuivies jusqu'à l'été 2021.

Source : commission des finances d'après les informations transmises par la DGPN

Ce cycle, qui existait avant le début de l'expérimentation pour les unités n'étant pas sur la voie publique (dans les salles de commandement, par exemple), avait été écarté en raison de sa durée particulièrement longue. Le rapporteur spécial relève toutefois que malgré sa longueur, d'ailleurs comparable à certains cycles en vigueur dans le milieu hospitalier, ce cycle permet un meilleur équilibre avec la vie personnelle, et professionnelle répondant ainsi aux principales revendications des syndicats en la matière.

Pour encourager les travailleurs de nuit à adopter le 12h08, des mesures indemnitaires et sociales ont été créées. À ce titre, a été mise en place une indemnité spécifique pour le travail de nuit (ITN) complétée par une amélioration du suivi médical de ces personnels et un accompagnement social adapté.

Contrairement à la vacation forte, il ne comporte pas de jour « faible » au lendemain du jour « fort », qui entraine une baisse importante de la capacité opérationnelle.

À l'issue du Beauvau de la Sécurité et selon les orientations fixées par le président de la République concernant les cycles horaires et le doublement de la présence des forces de l'ordre sur la voie publique, le ministère de l'Intérieur a demandé aux chefs de service concernés par la vacation forte de réaliser de travaux préparatoires au choix d'autres cycles horaires, auxquels ont été associés leurs agents et les représentants des personnels. Les organisations du travail retenues doivent être moins consommatrices d'effectifs que la vacation forte et permettre d'améliorer la réponse aux besoins opérationnels et des tests devaient être organisés dès que possible au cours de l'année 2022 sur plusieurs mois. Par ailleurs, la DGPN a indiqué sa préférence pour les cycles binaires.

Au 30 juin 2022, un état issu des logiciels de suivi du temps de travail (GEOPOL et GesTT) confirme un recul de 63 % de la vacation forte comparativement au 30 juin 2021. Ce cycle concerne désormais seulement 1 853 agents, soit 1,5 % des effectifs totaux, tandis que le cycle binaire en 12 h 08 concerne 19 294 agents.

S'il est satisfait de cette évolution concertée avec les organisations représentatives des personnels, le rapporteur spécial regrette à nouveau que les difficultés prévisibles liées à la vacation forte aient fait perdre trois années à l'institution policière , cristallisant de nombreuses crispations et générant des tensions entre les unités se voyant appliquer cette dernière et les autres. Cette perte de temps apparaît d'autant plus regrettable que son caractère insoutenable, sur le plan opérationnel, condamnait la vacation forte avant même son expérimentation.

DEUXIÈME PARTIE
LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ROUTIÈRE »
ET LE CAS « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION
ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

I. OBSERVATIONS SUR LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES »

La crise sanitaire a eu un effet important sur les résultats en matière de sécurité routière.

L'accidentalité routière de l'année 2020 reste très particulière du fait de l'impact de la pandémie et des mesures gouvernementales en découlant, visant notamment à réduire les déplacements des citoyens. 2 780 personnes ont perdu la vie sur les routes de France en 2020 (- 20,1 % par rapport à 2019), dont 2 541 en France métropolitaine et 239 dans les Outre-mer. Un résultat aussi bas n'avait plus été atteint depuis 1925, époque à laquelle on estime que le nombre de véhicules en circulation était près de 50 fois inférieur à celui d'aujourd'hui.

En 2021, année encore marquée par les restrictions de déplacements dans le cadre de la gestion de la crise sanitaire, la mortalité a augmenté par rapport à 2020 ; 3 219 personnes ont été tuées sur les routes de France, dont 2 944 en métropole et 275 dans les Outre-mer. Par rapport à 2019 cependant, année de référence avant la pandémie, la mortalité a diminué de 9,2 % et l'accidentalité de 4,4 %.

Le bilan sur les sept premiers mois 2022 présente une augmentation de la mortalité routière par rapport à 2019 . Le nombre de morts sur les routes au deuxième semestre 2019 ayant été particulièrement bas, il est attendu que le nombre de tués en 2022 soit au final plus élevé qu'en 2019. Par ailleurs, près de la moitié des départements a décidé de relever la vitesse maximale autorisée à 90 km/h sur tout ou partie de leur réseau. Le bilan 2021 a permis d'identifier, selon la délégation à la sécurité routière, une augmentation des vitesses moyennes et une différence de tendance de la mortalité routière entre les départements restés à 80 km/h et ceux avec une vitesse maximale autorisée à 90 km/h. Avec un retour à la normale des déplacements, il est attendu que les vitesses moyennes en 2022 soient plus élevées qu'en 2019.

A. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE 24,2 MILLIONS D'EUROS

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » a été rattaché à la mission « Sécurités » en 2013 , à la suite du placement de la délégation à la sécurité et à la circulation routières (DSCR devenue ensuite DSR) sous la tutelle du ministère de l'Intérieur, alors qu'elle relevait précédemment du ministère de l'écologie au titre de l'équipement.

Après une évolution de son périmètre en 2015 (les emplois sont désormais inscrits au programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État »), puis en 2020 (les crédits permettant de développer et de maintenir les systèmes d'information de la DSR sont aussi transférés au programme 216), aucun changement n'est à noter pour 2023 .

Ces crédits, qui représentent environ 0,3 % de la mission « Sécurités », sont principalement consacrés aux actions de communication et à l'organisation du permis de conduire.

Évolution des crédits par action du programme 207

(en millions d'euros et en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution PLF 2023 / LFI 2022 (volume)

Évolution PLF 2023 / LFI 2022 (%)

FDC et ADP attendus en 2023

01 - Observation, prospective, réglementation et soutien au programme

AE

4,3

10,7

+ 6,5

+ 150,9 %

0,0

CP

4,3

10,7

+ 6,5

+ 150,9 %

0,0

02 - Démarches interministérielles et communication

AE

23,7

38,7

+ 15,0

+ 63,2 %

0,1

CP

23,7

38,7

+ 15,0

+ 63,2 %

0,1

03 - Éducation routière

AE

23,1

25,9

+ 2,8

+ 12,2 %

0,0

CP

22,2

25,0

+ 2,8

+ 12,7 %

0,0

Total programme 207

AE

51,0

75,3

+ 24,2

+ 47,5 %

0,1

CP

50,1

74,4

+ 24,2

+ 48,4 %

0,1

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » est marqué par une hausse de ses crédits de 24,24 millions d'euros en AE et  en CP par rapport à la loi de finances initiale pour 2022.

Cette nette augmentation par rapport à 2022 est liée principalement à une hausse des dépenses d'études et de recherche (+ 4,7 millions d'euros), de communication auprès du grand public (+ 6,4 millions d'euros), de l'enveloppe consacrée au financement du « permis à un euro par jour » en raison de la hausse anticipée des taux d'intérêt, à la poursuite de l'acquisition de kits de dépistage et de kits de vérification utilisés par les forces de l'ordre lors de contrôles routiers dans le cadre de la lutte contre l'usage de stupéfiants, et au remboursement de la mise à disposition des agents de La Poste pour les examens du permis de conduire (qui était en partie financée jusqu'ici par des crédits provenant du plan de relance, désormais intégrés au programme 207).

B. DES CRÉDITS EN HAUSSE POUR LES ÉTUDES ET LA COMMUNICATION AUPRÈS DU GRAND PUBLIC

Les crédits d'études et recherches augmentent, en 2023, de 4,7 millions d'euros par rapport à 2022, au sein de l'action n° 01 « Observation, prospective, réglementation et soutien au programme ». Il convient toutefois de noter que cette hausse est probablement à rapprocher de la baisse de 4,5 millions d'euros des crédits dédiés aux études au sein de l'action 3 du programme n° 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » 41 ( * ) .

Ces crédits permettent à la délégation à la sécurité routière de confier à des partenaires publics ou privés la conduite d'études permettant d'approfondir et de développer les connaissances en matière de sécurité routière sous différents aspects (économique, comportemental, sociologique, juridique, technologique, etc .). L'expertise des deux principaux acteurs du réseau scientifique et technique du ministère de la Transition écologique est surtout mobilisée : l'Université Gustave Eiffel et le Centre d'études et d'expertise pour les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA).

En outre, les crédits de communication auprès du grand public sont en hausse en 2023, au sein de l'action n° 02 « Démarches interministérielles et communication », de 6,4 millions d'euros par rapport à 2022. Ici aussi, cette hausse est probablement à rapprocher de la baisse des crédits dédiés à la communication au sein de l'action 3 du programme n° 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » de 6 millions d'euros.

Ces crédits permettent notamment de financer les campagnes de communication nationales. Depuis décembre 2019, la sécurité routière adopte une nouvelle signature de communication : « Vivre, ensemble » (de 2008 à 2019, cette signature était « Sécurité routière. Tous responsables »). En 2022, année marquée par le cinquantenaire de la Sécurité routière, avaient notamment été retenus les thèmes suivants :

- l'équipement nécessaire à la conduite en deux-roues motorisés ;

- l'incitation à ralentir dans le cadre d'une campagne multimédia (« la vie appartient à ceux qui lèvent le pied ») ;

- les dangers de l'alcool en conduisant ;

- les risques liés à l'utilisation d'un téléphone portable sur la route.

En 2023, les thèmes de campagne et les publics visés seront notamment définis au regard des facteurs de l'accidentalité analysés statistiquement. Tout au long de l'année, des communications dites « fil rouge » permettront également de traiter différents risques par l'intermédiaire de la radio (spots), de la presse et du numérique.

C. LA POURSUITE DE L'ACQUISITION DE KITS DE DÉPISTAGE CONTRE L'USAGE DE STUPÉFIANTS

Dans les accidents mortels, 13 % des conducteurs contrôlés sont positifs aux stupéfiants. 65 % de ces conducteurs ont entre 18 et 34 ans. Par ailleurs, selon les résultats de l'étude ACTUSAM menée en 2016, un conducteur alcoolisé et sous l'emprise de produits stupéfiants multiplierait par 29 le risque d'être responsable d'un accident mortel.

En 2020, les forces de sécurité intérieure ont pu réaliser 465 000 dépistages de stupéfiants et 90 000 prélèvements lors de contrôles routiers. À titre de comparaison, le volume des contrôles relatifs à l'alcoolémie dépasse 9,4 millions par an.

Afin d'accroitre le dépistage, un effort important supplémentaire est réalisé depuis 2022 pour procéder à l'achat de kits de dépistage de prise de produits stupéfiants et de kits de vérification.

En 2023, l'enveloppe qui finance leur achat 42 ( * ) , au sein de l'action n° 02 « Démarches interministérielles et communication » est en hausse de 4,5 millions d'euros.

Le rapporteur spécial approuve ces acquisitions, mais estime qu'il serait plus lisible de le placer sur les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale », comme les autres kits de dépistage (notamment les alcootests).

D. UN FINANCEMENT DE L'ÉDUCATION ROUTIÈRE EN HAUSSE

L'action n° 03 « Éducation routière » vise à financer la formation à la sécurité routière pour l'ensemble de la population et plus particulièrement pour les conducteurs novices, catégorie la plus exposée aux risques routiers. Elle permet :

- la mise en place d'épreuves théoriques et pratiques du permis de conduire ;

- le suivi du permis probatoire, ainsi que l'incitation au développement des formations post-permis, en partenariat avec les collectivités territoriales et les assureurs ;

- le renforcement, en lien avec l'éducation nationale, des enseignements en milieu scolaire préalables aux attestations délivrées : attestation de première éducation à la route (APER), attestation scolaire de sécurité routière (ASSR), brevet de sécurité routière (BSR) et attestation de sécurité routière (ASR).

En 2023, ses crédits augmentent de 2,8 millions d'euros (soit + 12,2% en AE et + 12,7% en CP).

Cette hausse permet notamment de financer la mise à disposition des agents de La Poste pour les examens du permis de conduire (qui était en partie financée par des crédits provenant du plan de relance, désormais intégrés au programme 207). En outre, l'enveloppe destinée au permis à « un euro par jour », destiné aux jeunes de 15 à 25 ans et mis en place en partenariat avec les établissements de crédits et les écoles de conduite, augmente de 1,1 million d'euros du fait d'une anticipation de la hausse des taux d'intérêt.

II. OBSERVATIONS SUR LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

A. UNE ARCHITECTURE COMPLEXE, QUI A PERDU DE VUE L'OBJECTIF INITIAL D'ACCEPTATION DE LA POLITIQUE DE CONTRÔLE AUTOMATISÉ DES INFRACTIONS ROUTIÈRES

L'article 49 de la loi de finances pour 2006 43 ( * ) a créé le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », habituellement appelé CAS « Radars » ou CAS « Amendes ». Conformément à l'article 21 de la LOLF, « les comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

1. Une architecture trop complexe

En 2023, les dépenses du compte resteront réparties en deux sections, elles-mêmes respectivement divisées en un et trois programmes.

Pour mémoire, depuis le 1 er janvier 2017, la section 1 « Contrôle automatisé » ne comprend plus qu'un seul programme, le programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » finançant :

- le déploiement et l'entretien des radars ;

- le traitement des messages d'infractions constatées par un dispositif de contrôle automatisé et à leur transformation en avis de contravention par l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) et son centre national de traitement (CNT) ;

- les charges de gestion du permis à points.

La section 2 « Circulation et stationnement routiers » comprend :

- le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers » qui gère le déploiement du « procès-verbal électronique », le « PVe ». L'objectif principal de cet outil était de moderniser substantiellement, au profit des forces de l'ordre et des polices municipales, la gestion des amendes en substituant au carnet à souche des outils nomades plus performants. Le PVe permet la verbalisation des infractions routières mais également d'infractions d'autres natures, notamment dans le cadre de l'amende forfaitaire délictuelle (AFD), qui s'applique par exemple à l'usage illicite de stupéfiants et aux délits d'installation illicite sur le terrain d'autrui et d'occupation illicite des parties communes d'immeubles d'habitation. Le projet de LOPMI propose de généraliser l'AFD à tous les délits punis d'une seule peine d'amende ou d'un an d'emprisonnement au plus ;

- le programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » transfère aux collectivités territoriales une partie des recettes des amendes ;

- le programme 755 « Désendettement de l'État » vient abonder le budget général au titre des recettes non fiscales.

Le « CAS Radars » a vocation à retracer les dépenses financées à partir du produit des amendes. Ses recettes se composent du produit :

- d'une part, des amendes non-majorées perçues par la voie de systèmes automatisés de contrôle-sanction, après retranchement des fractions de ce produit affectées à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF, 219 millions d'euros en 2023) et au Fonds pour la modernisation et l'investissement en santé (FMIS, anciennement FMESPP, 26 millions d'euros en 2023) ;

- d'autre part, des amendes issues de la police de circulation, hors radars mais y compris amendes forfaitaires majorées, après retranchement de la fraction de ce produit affectée au budget général (45 millions d'euros en 2023).

En 2023, le schéma d'affectation du produit des amendes de police de la circulation et du stationnement routiers envisagé par le projet de loi de finances reste inchangé et s'établit comme suit :

Schéma d'affectation du produit des amendes de police de la circulation
et du stationnement routiers en 2023

Source : projet annuel de performances 2023

Ses recettes étant en hausse de 6,9 % (+ 105,6 millions d'euros) par rapport à 2022, ses crédits le sont dans les mêmes proportions . Cette hausse s'opère en dépit de la décentralisation du stationnement payant, qui a réduit les recettes de ce point de vue.

S'agissant du programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière », les crédits du PLF pour 2023 sont stables et s'élèvent à 339,95 millions d'euros en AE et CP. De même, le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers », dont le montant des crédits est de 26,20 millions d'euros en AE et CP, ne connaît aucune variation par rapport à 2022.

Les dépenses du programme 754 « Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières » sont, au titre de 2023, d'un montant prévisionnel de 656,4 millions d'euros, en hausse de 9,3 % (+ 56,0 millions d'euros). Elles se décomposent comme suit :

- une contribution de 585,4 millions d'euros au titre du financement par les collectivités du bloc communal d'opérations destinées à améliorer les transports en commun et la circulation dans les conditions fixées par les articles L. 2334-24 et L. 2334-25 du code général des collectivités territoriales. Île-de-France-Mobilités et la région d'Île-de-France bénéficient également d'une part de cette enveloppe ;

- une fraction d'un montant maximal de 71 millions d'euros destinée :

o pour une part limitée à 7 millions d'euros : aux communes et aux EPCI ;

o pour une part limitée à 64 millions d'euros : aux départements, à la collectivité de Corse, à la métropole de Lyon, aux régions d'outre-mer et aux métropoles, afin de financer des opérations contribuant à la sécurisation de leur réseau routier dans les conditions définies par décret en Conseil d'État. Le montant de ces dépenses correspond au niveau estimé des recettes encaissées au titre des amendes de la police de la circulation (hors amendes forfaitaires du contrôle automatisé).

Le comité des finances locales répartit le produit des amendes entre les collectivités territoriales . Les modalités de répartition doivent assurer une redistribution équitable et une mutualisation entre collectivités disposant de ressources différentes.

Évolution des crédits de la mission « Contrôle de la circulation
et du stationnement routiers »

(en millions d'euros et en pourcentage)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution PLF 2023 / LFI 2022 (volume)

Évolution PLF 2023 / LFI 2022 (%)

FDC et ADP attendus en 2023

751 - Structures et dispositifs de sécurité routière

AE

340,0

340,0

0,0

0,0 %

0,0

CP

340,0

340,0

0,0

0,0 %

0,0

755 - Désendettement de l'État

AE

568,5

618,2

+ 49,6

+ 8,7 %

0,0

CP

568,5

618,2

+ 49,6

+ 8,7 %

0,0

754 - Contribution à l'équipement des collectivités territoriales pour l'amélioration des transports en commun, de la sécurité et de la circulation routières

AE

600,5

656,4

+ 56,0

+ 9,3 %

0,0

CP

600,5

656,4

+ 56,0

+ 9,3 %

0,0

753 - Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

AE

26,2

26,2

0,0

0,0 %

0,0

CP

26,2

26,2

0,0

0,0 %

0,0

Total CAS

AE

1 535,1

1 640,8

+ 105,6

+ 6,9 %

0,0

CP

1 535,1

1 640,8

+ 105,6

+ 6,9 %

0,0

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

2. Un CAS qui contrevient au principe de spécialité et qui ne participe plus assez à l'objectif d'acceptabilité de la politique de contrôle automatisé

Le rapporteur constate que le CAS contrevient au principe de spécialité puisque des recettes des amendes sont annuellement attribuées au programme 755 « Désendettement de l'État », qui ne concerne pas des dépenses de sécurité routière. En 2023, les crédits de ce programme augmentent de 8,7 % (+ 49,6 millions d'euros).

Par ailleurs, sa complexité le rend peu lisible et l'on peine à comprendre la destination des recettes des radars en première analyse.

Le principe d'un CAS pour la gestion des amendes, notamment celles des radars, permet de faciliter l'acceptabilité de la politique de sanction automatisée .

C'est pourquoi, il pourrait être pertinent de réformer le CAS en simplifiant le circuit budgétaire : fusion des programmes 751 et 753, suppression des enchevêtrements croisés de la répartition des recettes, réflexion à mener sur l'intérêt de conserver deux sections, ainsi que l'abondement au budget général, etc. La fusion de ces deux programmes, dont la délégation à la sécurité routière est responsable, permettrait d'accroitre la lisibilité du CAS.

Lors de son audition devant la commission des finances, le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics avait indiqué l'année dernière que si « la rebudgétisation de ce CAS n'est pas dans le PLF ; elle fait l'objet de travaux » 44 ( * ) . Le rapporteur spécial ne dispose, à ce stade, d'aucune information complémentaire et les réponses au questionnaire budgétaire laissent penser que cette option n'est plus sur la table.

B. LA POURSUITE DU DÉPLOIEMENT DU PARC DE RADARS AUTOMATIQUES

200,0 millions d'euros sont prévus en 2023 (+ 4,3 %, soit + 8,2 millions d'euros) pour la modernisation, la maintenance et le déploiement des radars automatiques sur le programme 751. Le parc de radars est de 4 447 au 1 er septembre 2022. Il devrait être de 4 600 au 31 décembre 2023, en restant sous la barre limite de 4 700 radars. S'y ajoutent 1 000 cabines leurres (cabine radar vide à un instant donné qui sert de leurre et permet de recevoir par intermittence un équipement actif).

Évolution du nombre de radars depuis 2020

Date

Nombre total de radars

Radars fixes vitesse

Radars embarqués

Radars feu rouge

Radars passage à niveau

Radars autonomes

Radars Tourelles (Vitesse et franchissement)

1 er janvier 2020

4 094

1 768

950

674

78

249

375

1 er janvier 2021

4 224

1 572

905

628

76

249

794

1 er août 2021

4 402

1 511

985

610

73

279

944

1 er janvier 2022

4 422

1 528

964

590

71

308

961

1 er septembre 2022

4 447

1 425

973

540

71

340

1 098

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2023, ces crédits vont notamment permettre de poursuivre la modernisation du parc de radars avec le déploiement des radars tourelles, des radars discriminants et du nouveau radar urbain . La part des anciens radars fixes a vocation à continuer de baisser au profit de ces radars plus modernes et déplaçables.

Le nouveau radar urbain remplacera des radars feux rouges, des radars fixes situés en agglomération et sur les itinéraires sécurisés, pour couvrir de nouveaux emplacements. L'expérimentation du radar urbain a débuté mi-2021 et sa généralisation a démarré en 2022. Elle se poursuivra en 2023, avec un objectif de déploiement de 700 cabines contenant 200 radars actifs.

Le parc de radars autonomes sera porté à 600 équipements fin 2023 (radars semi-fixes destinés à assurer un contrôle des vitesses dans les zones de chantier ou de danger temporaire). Enfin, le déploiement de l'externalisation de la conduite des voitures radars, lancée dans 8 régions devrait être étendu à 4 autres régions métropolitaines hors Corse (Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Île-de-France).

Par ailleurs, à compter de 2023, la Délégation à la sécurité routière préparera une rétrocession des radars pédagogiques aux collectivités territoriales ; à terme, le financement et la gestion de ces équipements dépendra de ces dernières.

C. UNE SUBVENTION À L'ANTAI STABLE

Conformément au décret du 29 mars 2011, la mission première de l'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) est d'agir en tant que prestataire de services dans le cadre de la politique de sécurité routière pour le traitement des infractions routières relevées par l'intermédiaire de dispositifs de contrôle automatisé , d'une part, ou via des dispositifs de verbalisation électronique , d'autre part.

Au titre de la subvention versée par le programme 751 « Structures et dispositifs de sécurité routière » (90 millions d'euros en 2023), l'ANTAI est chargée de l'exploitation du centre national de traitement (CNT) de Rennes et de son fonctionnement courant. L'Agence assure le traitement des messages d'infraction du système de contrôle automatisé (radars fixes et mobiles), mais également l'envoi, l'affranchissement des différents documents issus de la chaîne (avis de contraventions) ainsi que le traitement des courriers reçus au CNT (réclamations, désignations de tiers, etc .).

L'ANTAI assure également le déploiement du procès-verbal électronique (PVe) au sein des services de l'État et des collectivités ainsi que le traitement des messages d'infractions émis par ce biais. Elle est financée à cette fin par le programme 753 « Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers » (26 millions d'euros en 2023).

Le financement de l'ANTAI est ainsi assuré par les deux programmes 751 et 753 du compte d'affection spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ». Le budget demandé pour 2023 s'élève à 116 millions d'euros , comme en 2022.

Le présent projet de loi de finances prévoit de porter le plafond d'emplois de l'ANTAI à 51 ETPT, soit un relèvement de 4 ETPT . L'objectif de cette hausse des effectifs est de lui permettre d'assurer la prise en charge d'une charge d'activité augmentée par l'extension des cas d'applicabilité de l'amende forfaitaire délictuelle 45 ( * ) et de moderniser et sécuriser la chaine de traitement des infractions et son adaptation à de nouvelles natures d'infraction ou à de nouveaux équipements.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Les crédits des programmes « Police nationale », « Gendarmerie nationale » et « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » et ceux du compte d'affectation spéciale «  Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » n'ont pas été modifiés par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 46 ter (nouveau)

Intégration de la nouvelle indemnité de sujétion spécifique de certains personnels de la police et de la gendarmerie nationales dans le calcul de leur pension de retraite

Le présent article, introduit par amendement du Gouvernement et retenu par lui dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, vise à intégrer la nouvelle indemnité de sujétion spécifique de certains personnels de la police et de la gendarmerie nationales dans le calcul de leur pension de retraite.

Le protocole du 2 mars 2022 pour la modernisation des ressources humaines de la police nationale et le protocole du 9 mars 2022 pour la modernisation des ressources humaines de la gendarmerie nationale ont notamment prévu la création une indemnité de sujétion spécifique pour les personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale et les personnels civils et des corps militaires de soutien de la gendarmerie nationale. Cette indemnité s'appliquera à compter du 1 er juillet 2023.

Le présent article déroge aux articles L15 et L61 du code des pensions civiles et militaires de retraite, qui posent le principe de la seule prise en compte du traitement ou de la solde dans le calcul de la pension de retraite et dans son financement (cotisations retraite). Il prévoit que les personnels concernés admis à faire valoir leurs droits à la retraite à compter du 1 er juillet 2023 bénéficient d'un complément de retraite au titre de l'indemnité de sujétion spécifique qu'ils ont éventuellement perçue au cours de leur carrière. En outre, en conséquence, il prévoit que l'indemnité sera soumise à cotisation dans des conditions fixées par décret.

Cet article résulte directement des protocoles de mars 2022 et s'insère dans le cadre des financements annoncés par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (LOPMI), adoptée par le Sénat en première lecture en octobre 2022.

La commission des finances propose l'adoption de cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA MISE EN PLACE D'UNE INDEMNITÉ DE SUJÉTION SPÉCIFIQUE AU BÉNÉFICE DE CERTAINS PERSONNELS DE LA POLICE ET DE LA GENDARMERIE NATIONALES

Dans la continuité du Beauvau de la sécurité, et dans le cadre de la préparation de la présentation du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (LOPMI), ont été conclus :

- le 2 mars 2022, le protocole pour la modernisation des ressources humaines de la police nationale ;

- le 9 mars 2022, le protocole pour la modernisation des ressources humaines de la gendarmerie nationale.

Ces deux protocoles comportent de nombreuses mesures, dont une partie relève de mesures indemnitaires visant à valoriser certaines fonctions, notamment l'engagement sur la voie publique, la prise de responsabilité ou encore le travail en horaires décalés. Le coût global de ces protocoles est, de 2022 à 2027, de 783 millions d'euros pour la police nationale et de 700 millions d'euros pour la gendarmerie nationale.

Ces protocoles prévoient en particulier une indemnité de sujétion spécifique pour, d'une part, les personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale et, d'autre part, les personnels civils et des corps militaires de soutien de la gendarmerie nationale.

A. UNE INDEMNITÉ APPLICABLE À COMPTER DU 1ER JUILLET 2023, AU PROFIT DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS, TECHNIQUES ET SPÉCIALISÉS DE LA POLICE NATIONALE ET DES PERSONNELS CIVILS ET DES CORPS MILITAIRES DE SOUTIEN DE LA GENDARMERIE NATIONALE

La nouvelle indemnité s'appliquera à tous les personnels de ces corps, du seul fait de leur appartenance à la police ou à la gendarmerie nationales . Elle vise, selon le Gouvernement et les représentants syndicaux, à matérialiser l'appartenance à part entière de ces personnels à la police ou à la gendarmerie nationale . Elle rétribue, en outre, le risqué lié à l'exercice des fonctions . Plusieurs personnels des corps administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale ont en effet été blessés ou tués à l'occasion de l'exercice de leur fonction 46 ( * ) .

Cette indemnité sera mise en place à compter du 1 er juillet 2023 et verra son montant progressivement augmenter. Elle sera, pour chaque personnel, de 120 euros au 1 er juillet 2023 , de 160 euros au 1 er juillet 2025 et s'établira finalement à 200 euros à compter du 1 er juillet 2027 . Le protocole de la police nationale précise que « les travaux ayant été conduits sur une hypothèse de taux de cotisation au titre de la pension civile 47 ( * ) de 20 %, le montant du gain brut devra être ajusté en cas de modification à la hausse de ce taux pour que les agents ne soient pas perdants ».

B. UNE PRIME QUI, EN TANT QUE TELLE, N'EST À CE JOUR PAS INTÉGRÉE DANS LE CALCUL DES PENSIONS DE RETRAITE

Les protocoles conclus le 2 mars 2022 (police nationale) et le 9 mars 2022 (gendarmerie nationale) prévoient la prise en compte de cette nouvelle indemnité dans le calcul de la pension de retraite des personnels en bénéficiant.

Toutefois, en l'état du droit, une telle prise en compte n'est pas possible. L'article L15 du code des pensions civiles et militaires de retraite dispose en effet que le montant de la pension liquidée est calculé sur la base du « traitement ou [de] la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite (...) ». Par principe, les primes et indemnités ne sont donc pas prises en compte dans le calcul de la pension , sauf disposition législative contraire. De même, l'article L61 du même code prévoit que la couverture des charges résultant, pour l'État, de la constitution et du service des pensions est assurée par « 1° Une contribution employeur à la charge de l'État, assise sur les sommes payées aux agents visés à l'article L. 2 à titre de traitement ou de solde, à l'exclusion d'indemnités de toute nature (...) ; 2° Une cotisation à la charge des agents visés à l'article L. 2, assise sur les sommes payées à ces agents à titre de traitement ou de solde, à l'exclusion d'indemnités de toute nature (...) ».

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE : LA PRISE EN COMPTE DE L'INDEMNITÉ DE SUJÉTION SPÉCIFIQUE AU TITRE DU CALCUL DES PENSIONS DE RETRAITE

Conformément à ce qui indiqué dans les protocoles conclus le 2 mars 2022 (police nationale) et le 9 mars 2022 (gendarmerie nationale), le présent article, introduit par amendement du Gouvernement et retenu par lui dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, vise à assurer la prise en compte dans le calcul de la pension de retraite de l'indemnité de sujétion spécifique.

Le présent article déroge ainsi explicitement, en son premier alinéa, aux articles L15 et L61 du code des pensions civiles et militaires de retraite , qui posent le principe que seul le traitement ou la solde, à l'exclusion des primes et indemnités, sont pris en compte dans le calcul de la pension liquidée et dans les modalités de son financement (cotisations retraite) 48 ( * ) .

Il définit ensuite, toujours en son premier alinéa , les catégories de personnels concernés par cette prise en compte de l'indemnité dans le calcul de la pension de retraite ; elles correspondent à l'ensemble des bénéficiaires de cette indemnité. Sont ainsi concernés :

- d'une part, les personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale et personnels civils de la gendarmerie nationale ;

- d'autre part, les personnels militaires visés au 2° de l'article L. 4145-1 du code de la défense, à savoir les officiers du corps technique et administratif et les sous-officiers du corps de soutien technique et administratif de la gendarmerie nationale.

Il prévoit également que l'indemnité de sujétion spécifique est prise en compte dans le calcul de la pension de retraite à compter du 1 er juillet 2023, soit à la date de création de la prime.

Le présent article dispose ensuite, en son deuxième alinéa , que les personnels concernés admis à faire valoir leurs droits à la retraite à compter du 1 er juillet 2023 et titulaires d'une pension servie en application du code des pensions civiles et militaires de retraite bénéficient d'un complément de retraite au titre de l'indemnité de sujétion spécifique qu'ils ont éventuellement perçue au cours de leur carrière . Seules les années de services accomplies dans la police et la gendarmerie nationales entrent en compte pour le calcul de cette majoration de pension ( dernier alinéa de l'article ). Les conditions de jouissance et de réversion de ce complément sont identiques à celles de la pension elle-même ( troisième alinéa de l'article ).

Enfin, le présent article prévoit, en son premier alinéa , que l'indemnité de sujétion spécifique est soumise à cotisation dans des conditions fixées par décret , ce qui constitue la conséquence logique de sa prise en compte dans le calcul de la pension de retraite.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MESURE QUI S'INSCRIT DANS LE CADRE DE L'ENGAGEMENT PRIS PAR LE GOUVERNEMENT DANS LES PROTOCOLES DE MARS 2022 ET DES FINANCEMENTS DE LA LOPMI

Le rapporteur spécial comprend le souhait du Gouvernement et des représentants du personnel, manifestés dans le cadre des protocoles de mars 2022, de valoriser la fonction des personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale et des personnels civils et des corps militaires de soutien de la gendarmerie nationale. Plusieurs arguments justifient la création d'une indemnité de sujétion spécifique à leur bénéfice et sa prise en compte, via le présent article, dans le calcul de la pension de retraite.

En premier lieu, alors que plusieurs indemnités sont créées ou revalorisées au profit des personnels actifs des deux forces par les protocoles de mars 2022, cette mesure matérialise l'appartenance pleine et entière de ces personnels à la police ou à la gendarmerie nationale . En outre, les années passées ont montré qu'ils étaient exposés à un véritable risque dans l'exercice de leurs fonctions 49 ( * ) .

En deuxième lieu, ces personnels seront amenés dans les années à venir, conformément aux orientations de la LOPMI, à occuper davantage de postes administratifs et de soutien et à effectuer davantage de tâches de support afin de permettre aux personnels actifs qui en sont chargés aujourd'hui de retrouver leurs fonctions opérationnelles et d'être davantage présents sur la voie publique.

En dernier lieu, la création de l'indemnité et sa prise en compte dans le calcul de la pension liquidée résultent directement des protocoles de mars 2022, lesquels sont intégrés dans la future LOPMI, que le Sénat a adoptée en première lecture en octobre 2022.

Le rapporteur spécial tient néanmoins à rappeler , comme il l'a souvent fait, y compris dans le présent rapport, que ce type de mesures catégorielles présente un coût élevé . Pour mémoire, le coût des mesures catégorielles des deux protocoles atteindra 121 millions d'euros en 2023 pour les deux forces et environ 220 millions d'euros annuellement à compter de 2024. Il en résulte une hausse des dépenses de personnel qui, trop souvent, se fait au détriment des dépenses de fonctionnement et d'investissement , qui conditionnent pourtant le caractère opérationnel de la police et de la gendarmerie nationale.

En outre, le rapporteur spécial regrette que le coût exact de la mesure portée par le présent article, introduit par amendement du Gouvernement, ne soit pas évalué par ce dernier.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 8 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Dominati, rapporteur spécial, sur la mission « Sécurités » et le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » ainsi que l'article rattaché 46 ter .

M. Claude Raynal , président . - Nous examinons les crédits de la mission « Sécurités » et du compte d'affectation spéciale (CAS) « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial sur les programmes « Gendarmerie nationale », « Police nationale » et « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » et sur le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » . - Dans son discours de clôture du Beauvau de la sécurité, en septembre 2021, le Président de la République avait annoncé un projet de loi de programmation pour la sécurité intérieure, dont le but était notamment « de penser la police et la gendarmerie de 2030 ». Une première version du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) a ainsi été déposée en mars 2022, en toute fin de quinquennat, et n'a pu être examinée par le Parlement. Une seconde version allégée a ensuite été élaborée. C'est cette version que le Sénat a examinée en octobre 2022. La loi comporte trois objectifs principaux : « être à la hauteur de la révolution numérique » ; « doubler la présence des forces de sécurité sur le terrain à l'horizon 2030 » et enfin « mieux anticiper les menaces et les crises ».

Le budget du ministère de l'intérieur passerait ainsi, hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » et sans compter quelques programmes spécifiques, de 20,78 milliards d'euros en crédits de paiements (CP) annuels en 2022 à 25,29 milliards d'euros en 2027, soit une hausse significative de 4,51 milliards d'euros, en augmentation de 21,7 %. Au total, la hausse cumulée de budget du ministère de l'intérieur sur les cinq années 2023-2027 atteindrait 15 milliards d'euros.

Les crédits prévus pour 2023 pour la mission « Sécurités » s'inscrivent dans le prolongement de la Lopmi. Pour l'ensemble de la mission, la hausse des crédits s'élève à 1,55 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 1,43 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). La hausse concerne l'ensemble des quatre programmes de la mission. Nous avions voté les crédits de cette mission les deux dernières années, car la police et la gendarmerie nationales bénéficiaient du concours des crédits du plan de relance. On pouvait donc légitimement se demander si l'effort d'investissement allait être maintenu avec la fin du plan de relance. Force est toutefois de constater que le projet de loi de finances poursuit et renforce surtout, en 2023, la trajectoire de hausse des dépenses de personnel constatée sur les précédents budgets, avec une augmentation de 4,96 % pour la police nationale et de 6,91 % pour la gendarmerie nationale.

Cette hausse s'explique tout d'abord par l'engagement du Président de la République et du Gouvernement d'augmenter les effectifs : le projet de loi de finances prévoit ainsi la création de 2 857 équivalents temps plein (ETPT) pour les deux forces, dont 1 907  pour la police nationale et 950 pour la gendarmerie nationale. La hausse des crédits du titre 2 s'explique aussi par la revalorisation du point d'indice de la fonction publique, pour un coût de 164 millions pour les deux forces. Il faut enfin évoquer le poids des mesures catégorielles : 84,7 millions d'euros pour la police nationale et 71,80 millions d'euros pour la gendarmerie nationale. Ce montant est en forte hausse du fait des premières conséquences budgétaires des deux protocoles conclus en mars 2022 pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale. J'ai souvent déploré, lors de l'examen des budgets des années passées, la dégradation du ratio entre les crédits de personnels, d'une part, et ceux de fonctionnement et d'investissement, d'autre part : ce ratio se stabilise en 2023, autour de 86,1 % en CP, mais nous devrons être vigilants, car il reste élevé. Il est aussi supérieur à celui de nos voisins : il s'établit autour de 75 % en Allemagne, entre 75 % et 80 % au Royaume-Uni, où le système est différent, et à 85 % en Espagne.

Un mot sur les rythmes de travail. L'année 2023 sera marquée par l'abandon du système de la vacation forte, mis en place en 2016, et que j'avais eu l'occasion de critiquer à plusieurs reprises. Selon l'inspection générale de la police nationale (IGPN), pour compenser la généralisation de ce régime de travail à l'ensemble des unités travaillant en régime cyclique, il aurait fallu envisager le recrutement de 4 542 ETP supplémentaires pour maintenir le nombre total d'heures travaillées. Ce chiffre est à comparer aux 10 000 postes qui ont été créés dans les forces de sécurité durant le dernier quinquennat. Un nouveau cycle de travail, qui a la faveur des syndicats, se met en place, dans lequel les agents doivent effectuer 140 vacations dans l'année de 12 heures et 8 minutes de suite. Reste à savoir si les agents pourront tenir pendant une telle durée dans la mesure où leur travail est très exigeant.

Le stock d'heures supplémentaires à apurer se réduit peu à peu ; la dotation qui a été prévue en 2020, 2021 et 2022 permet d'indemniser un flux annuel de 2 millions d'heures environ, correspondant à un volume identifié comme incompressible pour donner aux chefs de service des marges de manoeuvre opérationnelles, et de réduire peu à peu le stock accumulé d'heures supplémentaires. En 2023, il est prévu le relèvement de cette enveloppe de crédits dédiés à la campagne d'indemnisation des heures supplémentaires de 18,7 millions d'euros, pour atteindre 45,2 millions d'euros. Nous devons rester vigilants quant à la nécessité de ne pas laisser subsister un compte par agent d'heures supplémentaires non indemnisables trop important, au risque de déstabiliser fortement les services. En effet, les fonctionnaires peuvent liquider leurs heures supplémentaires avant leur départ à la retraite. Ces derniers étant juridiquement en congés et non en retraite, ils ne sont pas remplacés durant cette période, ce qui contribue à creuser un « trou » opérationnel, particulièrement prégnant dans certains services.

Une réforme est par ailleurs engagée pour doter la police nationale d'une réserve opérationnelle de police de 30 000 hommes à l'horizon de 2027, comme il en existe dans la gendarmerie, qui est dotée de 31 500 hommes et dont la mobilisation représente environ 1 900 ETP par jour. L'objectif semble particulièrement ambitieux. Il est peu probable que la réserve de la police sera suffisamment opérationnelle pour contribuer significativement à la sécurisation de la Coupe du monde de rugby en 2023 et des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024.

Enfin, ce projet de loi de finances ne comporte aucune disposition quant à une réforme de la police nationale. Celle-ci avait pourtant été annoncée : elle devait entrer en vigueur le 1 er janvier 2023, mais le ministre a annoncé son report. Cette réforme aurait évidemment des conséquences financières.

Concernant le fonctionnement, nous pouvons dire que le principal effort qui est fait dans la Lopmi porte sur le numérique. Premièrement, il y a une explosion de la cybercriminalité - des rançons sont, par exemple, demandées à des citoyens ou à des entreprises. Le paradoxe est que les voyous se modernisent beaucoup plus rapidement que nos forces de police. Ce qui était simple avant devient plus compliqué pour ces dernières ; un investissement très significatif est donc effectué pour lutter contre la cybercriminalité. Deuxièmement, il y a une modernisation du numérique pour les agents de l'État, notamment dans les procédures et les outils informatiques. Enfin, nous faisons en sorte d'améliorer le fonctionnement des forces de sécurité vis-à-vis du citoyen, notamment en lui donnant la possibilité de porter plainte en ligne - pour les violences faites aux personnes, notamment.

Je constate par ailleurs que l'enjeu de la drogue reste particulièrement prégnant aujourd'hui. À titre d'exemple, via Cayenne, des mules viennent en nombre par avion pour importer de la cocaïne en provenance du continent sud-américain, le but étant de saturer nos services, puisqu'ils savent que nos forces de police ne peuvent arrêter que trois à quatre mules par vol, en raison des procédures médicales et policières associées. Pendant ce temps, les autres mules peuvent passer. Le procureur de Cayenne a pris des mesures, comme, par exemple, ne plus poursuivre une mule qui transporte une petite quantité, pour essayer d'arrêter ceux qui transportent le plus de drogue. Sur certains vols, il a été constaté que de 25 % à 30 % des passagers ne se présentaient pas lorsque la compagnie aérienne annonçait qu'un contrôle de police serait réalisé au départ.

S'agissant des véhicules, s'il y a une baisse des crédits de renouvellement pour 2023, il faut reconnaître que la police comme la gendarmerie ont bénéficié du plan de relance et ont donc été bien pourvues ces deux dernières années. Je suis toutefois méfiant sur l'effet stop and go : lorsqu'il y a eu une forte dotation, on a tendance à oublier ce poste dans les années qui suivent. Le parc est d'environ 32 000 véhicules pour chacune des deux forces. Le renouvellement est nécessaire : il maintient le parc et l'empêche de vieillir.

Un effort significatif a été effectué récemment pour la gendarmerie nationale, puisque 50 % des véhicules ont été renouvelés en cinq ans, entre 2017 et 2021. Pour autant, nous devons être vigilants, car il s'agit d'un outil essentiel pour la gendarmerie nationale. Une brigade de neuf gendarmes rayonne sur une surface comparable à la ville de Paris.

Toujours s'agissant du fonctionnement, deux autres points sont à noter. Un effort sera réalisé pour l'habillement compte tenu des deux événements internationaux que j'évoquais tout à l'heure. Par ailleurs, un changement est prévu sur la formation, puisqu'elle repasse progressivement à douze mois, contre huit aujourd'hui.

Concernant l'investissement dans l'immobilier de la police nationale - et cela contribue à m'inciter à donner un avis favorable à l'adoption des crédits- les crédits sont supérieurs à ceux de l'année dernière : 74 millions supplémentaires en AE et 56 millions en CP. Pour la police nationale, nous comptons 2 641 sites et 1,3 million de mètres carrés de surface. Le budget tient pour 2023 le rythme qui avait été donné dans le cadre du plan de relance.

Il y a un léger fléchissement pour la gendarmerie, mais elle avait été mieux dotée que la police ces dernières années. Néanmoins, une véritable interrogation politique peut se poser. La Lopmi a prévu la création de 200 nouvelles brigades - le territoire en compte actuellement 3 100. Il y a quelques années, le général Favier m'avait expliqué qu'il était difficile de rigidifier l'implantation des brigades au motif que, souvent, les collectivités territoriales payaient les bâtiments et qu'il n'était donc pas possible de supprimer des effectifs pour mieux les répartir sur le territoire. L'installation d'une brigade se faisait donc sur du long terme et grevait le budget. Ces 200 brigades supplémentaires sont bien accueillies par les territoires concernés et par la gendarmerie, mais en même temps l'immobilier existant se dégrade ; il ne bénéficie pas des crédits d'investissement qui étaient espérés au moment du plan de relance. Il convient donc d'être prudent, car créer des brigades, mais ne pas disposer de budgets d'investissement n'est sans doute pas une bonne orientation. Je vous rappelle en effet que les gendarmes sont logés dans les brigades ou les casernes. Telle est la réserve que j'émets.

Je vous propose donc de donner un avis favorable sur ces deux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ». Je tiens tout de même à souligner qu'il n'y a pas dans le budget de réserve pour une augmentation éventuelle des frais d'énergie. Sans doute cela fera-t-il l'objet d'un budget rectificatif.

S'agissant de la sécurité routière et du compte d'affectation spéciale « radars », je vous ferai part d'un point d'attention : le financement des kits de détection de drogues, notamment du cannabis. Dans 13 % des cas d'accidents mortels, il est constaté que les responsables ont consommé de la drogue. Pour l'instant, 500 000 dépistages de drogues sont effectués par an, contre plus de 9,4 millions pour l'alcool.

Par ailleurs, 200 millions d'euros seront investis en 2023 dans les radars, en particulier de nouvelle génération, faisant ainsi passer le nombre de 4 447 radars à 4 600 à fin 2023. Il s'agit d'une source de recettes supplémentaire pour l'État. L'État ne veut pas dépasser le seuil fatidique ou psychologique de 4 700 radars.

Je rappelle également que près de la moitié des départements sont repassés à une limitation de vitesse à 90 kilomètres par heure.

Mme Gisèle Jourda , rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères sur le programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités » . - Je saluerai tout d'abord l'augmentation globale des crédits, notamment les 120 millions d'euros dont bénéficieront les systèmes d'information et de communication de la gendarmerie. Cela permettra de poursuivre l'équipement des personnels en téléphone NEO2, qui est devenu un outil de travail essentiel pour l'ensemble de nos gendarmes.

Il faut ensuite se féliciter de l'augmentation des crédits destinés à la création de la future agence du numérique des forces de sécurité intérieure. À ce propos, nous avons été rassurés sur le fait que cette nouvelle agence sera bien construite à partir du service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure (Stsisi), qui a fait ses preuves par le passé. En réalité, c'est un véritable retour en arrière par rapport à la réforme de 2020, qui avait créé la direction du numérique du ministère de l'intérieur. Cependant, nous nous en félicitons, car nous avions exprimé de fortes réserves sur cette réforme en son temps.

Concernant l'immobilier domanial, qui est pour nous un sujet de préoccupation récurrent, je redirai ce que nous avons souligné lors de l'examen de la Lopmi : ce texte n'est pas vraiment une loi de programmation, puisqu'il ne présente toujours pas d'échéancier de crédits pour remettre le parc domanial à niveau. Avec 150 millions d'euros en 2023, ce sont environ 25 euros qui seront consacrés à l'État pour chaque mètre carré de caserne. Or, nous estimons qu'il en faudrait quelque 60 par mètre carré. Nous attendons à ce sujet que l'amendement que nous avons déposé, et qui a été adopté dans la Lopmi, prévoyant une remise à niveau pérenne des crédits d'investissement immobiliers, reçoive une traduction concrète de la part du Gouvernement.

M. Philippe Paul , rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur le programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités » . - D'abord, comme l'a dit le rapporteur spécial, ce sont 15 milliards d'euros supplémentaires qui seront attribués à nos forces de sécurité avec la LOPMI. Un effort considérable qui était très attendu, avec notamment la création de postes de policiers et de gendarmes - 950 postes de gendarmes sont prévus pour 2023, avec un montant de crédits supplémentaires de 349 millions d'euros. En outre, il est prévu, pour « mettre plus de bleus dans la rue », d'augmenter les forces de réserve, les faisant passer de 30 000 à 50 000 pour la gendarmerie nationale. Il faudra cependant être vigilants, car nous le savons, à partir du mois d'octobre - et de juillet dans certains départements -, il n'y a plus d'argent pour les financer. Je n'ai pas besoin de le rappeler, mais les gendarmes ont de plus en plus de mal à se loger, les loyers étant très chers, et l'explosion du prix du carburant met encore plus à mal les budgets alloués.

Concernant les 200 brigades qu'il est prévu de créer, je précise que deux tiers d'entre elles seront des brigades fixes et un tiers des brigades volantes. Beaucoup de territoires sont en attente de cette création, quelque 500 gendarmeries ayant été fermées il y a plusieurs années. C'est la raison pour laquelle nous avions voté un amendement lors de l'examen de la Lopmi visant à associer les élus des collectivités locales qui seront sollicitées pour construire les bâtiments. L'État a promis une dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) à un taux pouvant aller jusqu'à 30 % pour les communes de 20 000 habitants et plus.

Pour ce qui est de l'immobilier, nous avons beaucoup insisté sur le fait que, selon les estimations effectuées, le parc immobilier nécessiterait tous les ans 300 millions d'euros ; 100 millions pour l'entretien des casernes existantes et 200 millions d'euros pour la création de bâtiments neufs. Il conviendra également d'être vigilant sur ce point, même si dans l'ensemble ce programme est positif.

Mme Gisèle Jourda , rapporteure pour avis . - Je souhaiterais ajouter, concernant les 200 brigades, que les consultations sont déjà lancées sur les territoires par les préfets. Je vous demande donc d'être vigilants, et de vous assurer que les élus locaux y soient associés en amont, en étant à l'initiative des demandes. En effet, j'ai l'impression que les consultations avaient été lancées avant même que la Lopmi n'arrive devant le Sénat.

M. Jean Pierre Vogel , rapporteur spécial sur le programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » . - Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une dotation de près d'1,1 milliard d'euros en AE et de 640,6 millions d'euros en CP sur le programme « Sécurité civile », soit une augmentation substantielle de près de 58 % en AE et de 13 % en CP par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022. Cette hausse est particulièrement bienvenue, au lendemain d'un été marqué par les feux de forêt d'une ampleur exceptionnelle.

Par ailleurs, ces montants ne prennent pas en compte les annonces du Président de la République le 28 octobre dernier, lesquelles ont donné lieu au dépôt d'un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale, repris dans le texte transmis au Sénat, majorant de 150 millions d'euros en AE et de 37,5 millions d'euros en CP les crédits du programme.

Si les mesures annoncées constituent des avancées à certains égards, on peut toutefois regretter que ces annonces interviennent en plein examen du projet de loi de finances par le Parlement, ce qui nuit considérablement à la visibilité des crédits du programme, d'autant plus que certaines des mesures annoncées entrent en contradiction avec les informations transmises par le ministère de l'intérieur.

Je voudrais tout d'abord m'attarder sur l'enjeu du soutien de l'État en faveur des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), et plus particulièrement sur la concrétisation en 2023 des « pactes capacitaires » qui permettront, dans le cadre de cofinancement entre l'État et les collectivités locales, de porter des projets d'investissement dans des besoins opérationnels des Sdis, qui seront ensuite mutualisés au sein d'une même zone défense de sécurité.

La concrétisation de ces pactes capacitaires doit ainsi être saluée, et fait par ailleurs l'objet d'une attente très forte de la part des Sdis, comme j'ai pu le constater lors de mon déplacement dans les Bouches-du-Rhône.

Le montant initialement prévu pour ces pactes capacitaires, de 30 millions d'euros sur cinq ans pour 100 Sdis, dont seulement 8 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP pour 2023, apparaissait toutefois particulièrement faible au regard des besoins d'investissement des Sdis. L'enveloppe de 150 millions d'euros ajoutée par le Gouvernement à l'Assemblée nationale est à cet égard bienvenue, mais s'inscrit dans le cadre de la compensation de la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), sur laquelle l'État s'est déjà engagé. On peut donc difficilement présenter cette enveloppe comme un renforcement de l'effort financier de l'État en faveur des Sdis, puisqu'elle repose sur un procédé de budgétisation consistant en réalité à leur réaffecter une recette qui bénéficiait déjà dans les faits à leurs principaux financeurs, à savoir les collectivités locales.

J'en viens maintenant à l'enjeu du dimensionnement et du renouvellement de la flotte aérienne de la sécurité civile, qui a été au coeur de l'actualité lors de la saison des feux de cet été.

À cet égard, ce projet de loi de finances constitue une avancée, puisqu'il concrétise le renouvellement de la flotte des hélicoptères Dragons vieillissante, qui avait été amputée ces dernières années de plusieurs appareils, suite à des accidents. Ainsi, l'augmentation des autorisations d'engagement du programme en 2023 est en grande partie portée par la commande de 36 nouveaux hélicoptères, annoncée dans le cadre de la présentation du projet de la Lopmi, et concrétisée dans ce PLF pour 2023 par l'inscription de 471,6 millions d'euros en AE, soit environ 13 millions d'euros par appareil. Ces hélicoptères, contrairement à la flotte de Dragons actuelle, seront équipés d'une capacité de largage d'eau importante et pourraient dès lors utilement être mobilisés pour la lutte contre les feux de forêt.

La saison des feux en 2022 a également souligné la nécessité de compléter et de renouveler la flotte de Canadairs vieillissante. Notre flotte d'avions amphibies bombardiers d'eau devrait ainsi être portée à 16 appareils à l'horizon de 2027, grâce à l'acquisition de deux appareils financés à 90 % par l'Union européenne (UE), puis par l'achat de deux appareils sur fonds nationaux. Nous pouvons toutefois émettre des doutes sur la crédibilité de l'annonce du Président de la République d'un renouvellement intégral des 12 Canadairs existants à l'horizon de 2027. En effet, la chaîne de production des Canadairs vient seulement d'être relancée, et il ressort de mes auditions qu'il est très peu probable que la France puisse obtenir la livraison d'autant d'appareils dans un délai aussi court.

Je tiens enfin à attirer votre attention sur le fait que l'enjeu du renforcement des moyens aériens de la sécurité civile ne peut être envisagé sous le seul prisme capacitaire. Les problématiques de prévention du risque, de gestion des ressources humaines ou encore du dimensionnement des infrastructures nécessaires au fonctionnement opérationnel de la flotte doivent également être prises en considération.

J'ai notamment eu l'occasion de rencontrer, dans le cadre de mon déplacement à Nîmes le 13 octobre dernier, les services de la base aérienne de la sécurité civile (Basc), qui ont indiqué rencontrer des difficultés pour recruter et fidéliser des pilotes de la sécurité civile, dont la rémunération est en moyenne trois fois inférieure à celle des pilotes des compagnies aériennes commerciales. Ainsi, quel serait l'intérêt d'acquérir de nouveaux appareils, si nous ne disposons pas, par ailleurs, des ressources pour les piloter ?

Le présent projet de loi finances prévoit certes des mesures de revalorisation pour les personnels navigants, estimées à 1,5 million d'euros, mais celles-ci devront à l'avenir être doublées d'une véritable stratégie de valorisation du métier de pilote de la sécurité civile.

Je conclurai mon propos en évoquant le projet de mutualisation des systèmes d'information des SDIS, NexSIS 18-112. L'Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC), qui est chargée du projet, nous a fait part de difficultés, qui se sont traduites par des retards importants dans le déploiement effectif de NexSIS. Ces retards ont entamé la confiance des Sdis dans la concrétisation du projet, et ont de fait fragilisé la situation économique de l'agence, puisque les SDIS sont largement impliqués dans le financement de NexSIS par leurs contributions volontaires.

Si le déploiement effectif au sein du Sdis préfigurateur de Seine-et-Marne devrait permettre de rétablir cette confiance, il sera par ailleurs essentiel que les contributions des Sdis soient complétées par un soutien renforcé de l'État en faveur de l'agence, et notamment de ses moyens humains qui apparaissent aujourd'hui bien trop faibles.

M. Michel Canévet . - Je voudrais tout d'abord féliciter les deux rapporteurs spéciaux pour la qualité de leurs exposés qui nous permettent de bien appréhender la situation de deux missions importantes.

Monsieur Vogel, concernant la flotte aérienne, si des engagements ont été pris quant au renouvellement de la flotte d'hélicoptères, qu'en est-il de la flotte d'avions, qui est, elle aussi, vieillissante ? Quel est le facteur limitant à ce renouvellement ? Est-ce l'absence de modèle idéal ou faut-il attendre que l'usine de Canadairs se remette en route ?

J'interrogerai M. Dominati sur les questions liées à la gendarmerie. Les moyens affectés à la gendarmerie pour l'immobilier sont trois fois moins importants par rapport à ceux qui sont dévolus à la police. Cela veut-il dire qu'un effort avait été fait antérieurement ?

Par ailleurs, les écoles de gendarmerie sont-elles bien dimensionnées pour assurer la formation d'un grand nombre de gendarmes ?

Concernant le parc de véhicules, le renouvellement intègre-t-il les préoccupations environnementales ? D'autres modes de propulsion des véhicules sont-ils prévus ?

Mme Isabelle Briquet . - Je remercie les rapporteurs pour tous les éléments d'analyse qu'ils nous ont livrés.

Ma question concerne les gendarmeries, puisque la création de 200 brigades a été annoncée. Le plan de déploiement de ces gendarmeries est actuellement relayé par les préfets dans le cadre d'un appel à projets en direction des collectivités. Je partage l'inquiétude soulevée quant au financement desdites gendarmeries. Si nous ne pouvons que saluer cette annonce d'un plus grand maillage des forces de gendarmerie dans les territoires, les brigades actuelles - au-delà de la question des bâtiments - disposent-elles des moyens humains et matériels suffisants pour mener à bien leurs missions dans de bonnes conditions ?

M. Jean-François Rapin . - Ma question est relative aux effectifs de gendarmerie et de police. Vous avez indiqué, monsieur Dominati, que l'année 2024 sera spéciale, avec notamment les Jeux Olympiques, et elle sera particulièrement tendue pour les forces de sécurité en matière de congés. Vous le savez, en été, les forces de sécurité sont appelées en renfort, à la fois sur nos plages et au sein des pôles touristiques importants. Avez-vous des informations sur la façon dont tout cela sera organisé, sachant que les effectifs seront fortement mobilisés sur les grands événements.

M. Vogel a évoqué son déplacement à Nîmes ; or je pense que nous devons être exemplaires sur la question de la flotte. En effet, Nîmes a fait une demande au niveau européen pour être centre de référence sur la sécurité civile, mais aussi agence de référence au niveau européen pour la sécurité civile. De fait, le discours un peu négatif qui est porté n'est pas forcément bon. En êtes-vous conscient ?

M. Éric Jeansannetas . - Je remercie les rapporteurs spéciaux pour leurs exposés, ainsi que les rapporteurs pour avis de nous avoir éclairés de manière supplémentaire.

Si nous pouvons nous satisfaire des crédits de cette mission, il y a aussi des points de vigilance. Je reviendrai sur le volet immobilier : disposons-nous aujourd'hui d'un état des lieux en termes énergétiques des bâtiments de la gendarmerie nationale et des locaux de la police nationale, qui sont globalement des passoires thermiques ? Il est nécessaire d'avoir des crédits supplémentaires en vue d'investissements importants.

Par ailleurs, une question se pose pour le recrutement et la montée en charge des réserves. L'appareil de formation de la police et de la gendarmerie sera-t-il au rendez-vous ? Un effort budgétaire est-il réalisé en direction des outils de formation ? Avons-nous le personnel nécessaire pour former les gendarmes - nous passons de huit à douze mois de formation avec une ambition assez élevée pour la réserve ?

Enfin, s'agissant de la sécurité civile, vous avez noté que les déclarations du Président de la République sont venues percuter la discussion et la préparation budgétaires. Les Sdis vont être impactés. Le financement est largement assuré par les collectivités territoriales. Avons-nous une idée de l'impact financier sur ces dernières de la nouvelle organisation des Sdis ?

M. Marc Laménie . - Je remercie également nos rapporteurs spéciaux pour leurs exposés ainsi que nos deux rapporteurs pour avis pour leurs remarques judicieuses.

Nos collègues des commissions des affaires étrangères et de la défense ont évoqué le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, avec notamment des moyens financiers supplémentaires et la création de 200 brigades, alors qu'il y a quelques années des brigades ont été fermées dans plusieurs départements. Comment seront choisis les lieux d'implantation de ces brigades et surtout qui sera le maître d'ouvrage pour construire les casernes ? Cela vaut aussi pour la sécurité civile, car nous avons des difficultés à recruter et à fidéliser des sapeurs-pompiers. Comment s'articulera l'attractivité de ces métiers ?

M. Didier Rambaud . - Je souhaiterais également attirer l'attention des rapporteurs sur les conditions de financement des constructions des nouvelles brigades de gendarmerie. En l'espace de huit jours, j'ai rencontré deux maires qui m'ont fait part de leurs difficultés à concrétiser cette construction, alors qu'ils avaient obtenu l'accord de la direction de la gendarmerie.

Nous connaissons le principe : la commune met à disposition le foncier et trouve un bailleur qui construit. Mais il s'avère qu'aujourd'hui les bailleurs se font tirer l'oreille, parce qu'ils n'arrivent pas à équilibrer leur opération, en raison, paraît-il, d'un décret de décembre 2016, qui met en valeur deux points : d'une part, la durée du bail limitée à neuf ans et, d'autre part, le montant trop faible de la location par unité logement, notamment pour les brigades inférieures à vingt unités logement. Ce décret devrait, semble-t-il, être actualisé.

M. Christian Bilhac . - J'évoquerai également l'immobilier, car il reflète l'ambiance dans les casernes : lorsque l'on regroupe deux anciennes brigades, la moitié des gendarmes vit dans des bâtiments neufs, tandis que l'autre moitié vit dans des taudis. Tout l'immobilier que l'État a gardé est en ruines. C'est un constat d'échec. Et si les bâtiments transférés aux collectivités locales sont en bon état, celles-ci ne peuvent pas toujours en supporter le coût.

Les CP sont en baisse. Avons-nous une idée de la masse financière qui serait nécessaire pour arriver à loger dignement nos gendarmes ? Je vous assure que, dans mon département, certains vivent dans des logements indignes, et le fait que d'autres gendarmes vivent dans des logements neufs crée des tensions dans les compagnies.

S'agissant de la sécurité civile, le projet Antares a été un fiasco. Si NexSIS en est un aussi, je ne sais pas ce que feront demain les Sdis quand nous leur dirons que le nouveau modèle de communication ne fonctionne pas ; nous ne pouvons pas nous tromper.

Enfin, concernant la flotte aérienne, je m'interroge : connaissez-vous les raisons pour lesquelles l'Airbus A400M ne peut être utilisé pour lutter contre les feux de forêt ?

M. Jean Pierre Vogel , rapporteur spécial . - Tout d'abord, s'agissant de la flotte d'avions, nous avons appris que l'industriel ne pouvait relancer la fabrication des Canadairs que s'il avait une commande de plus de vingt appareils, le budget pour relancer la chaîne de fabrication étant de 850 millions d'euros. C'est pourquoi l'annonce qui a été faite d'acheter seize Canadairs d'ici à 2027 n'est pas raisonnable. Si nous nous en procurons deux, voire quatre, ce serait déjà bien.

Par ailleurs, de tels appareils doivent être livrés dans un délai relativement court, car les pilotes formés sur d'anciens Canadairs auraient des difficultés à piloter des avions qui ne seraient pas issus de la même fabrication.

En ce qui concerne la base aérienne de Nîmes, il a été rappelé et acté dans la Lopmi que ce serait bien un hub européen. A priori le ministère chargé de la sécurité civile est propriétaire de surfaces foncières relativement importantes, d'une quarantaine d'hectares. Par contre, nous avons pu constater qu'à certains endroits le tarmac était dégradé. Et la question se pose de savoir qui doit financer la remise en état du tarmac. Il faudrait, en cas d'augmentation du nombre de bombardiers d'eau ou d'avions de la sécurité civile qui seraient stationnés à Nîmes, bénéficier de remises en surface suffisamment importantes pour pouvoir abriter les avions et assurer la maintenance en conditions opérationnelles. C'est la raison pour laquelle il ne faut qu'une seule base de référence et qu'elle soit à Nîmes pour pouvoir assurer la maintenance dans des conditions satisfaisantes, car cela nécessite à la fois de la ressource humaine et des pièces détachées en nombre suffisant. D'ailleurs, un Canadair est resté cloué au sol l'été dernier en raison d'une problématique d'approvisionnement de pièces détachées.

En revanche, il faut soulever les véritables problèmes liés, d'une part, à la ressource humaine et aux pilotes et, d'autre part, à la concurrence qui existe avec la flotte commerciale qui a repris depuis l'apaisement de la crise sanitaire.

L'impact financier des colonnes de renfort sur les Sdis est difficile à évaluer, mais si nous prenons le pacte capacitaire des 150 millions d'euros sur cinq ans, cela fait une moyenne de 30 millions d'euros divisés par 100 Sdis, soit 300 000 euros chacun. L'État les financerait à hauteur de 50 %, et les Sdis prendraient en charge l'autre moitié, l'impact ne serait donc pas très significatif.

S'agissant de la difficulté de recruter des sapeurs-pompiers volontaires, le Président de la République a fait des annonces pour favoriser le volontariat et créer un statut spécifique de sapeurs-pompiers volontaires. Il a aussi fait des annonces sur les conventions de mise à disposition de sapeurs-pompiers volontaires par les employeurs privés qui pourraient être sur une durée plus longue avec une meilleure indemnisation, sachant que, en vérité, le recrutement se fait localement, notamment via les maires et les chefs de centre. Ce n'est donc pas forcément une meilleure indemnisation qui déciderait un employeur à libérer l'un de ses employés qui travaille sur une chaîne de production, si celle-ci devait s'arrêter. Cependant, il faut le dire, certaines annonces sont bien reçues par la fédération nationale des sapeurs-pompiers.

Il est vrai qu'Antares a été un vrai problème, mais ce n'est pas le cas de NexSIS. Le nouveau directeur nous a indiqué que NexSIS irait jusqu'au bout, car il n'y a pas d'autre choix ; NexSIS est un bon système, il doit aboutir et il aboutira. Des engagements de création de postes ont déjà été pris, même s'ils sont encore insuffisants, mais surtout l'État doit soutenir financièrement NexSIS. Ainsi, les Sdis reprendront confiance et accepteront de continuer à le financer sur leur budget - il existe notamment une procédure qui leur permet de participer via leur budget d'investissement, qui est plus souple que le budget de fonctionnement.

Je n'ai donc pas de crainte sur l'aboutissement de NexSIS, mais il ne faudrait pas que le projet prenne du retard, car cela nuirait à sa crédibilité et à la confiance que lui accorderaient les Sdis.

Concernant les Airbus A400M, une très bonne publicité a été faite avec l'atterrissage de l'un d'eux sur une plage bondée. Selon les professionnels, il est nécessaire de les voir en action et non pas uniquement sur des photos de synthèse ou de montage. Mais il semblerait que ces avions ne soient pas totalement au point, et vu les délais nécessaires pour obtenir un Canadair, je ne suis pas certain que ce type d'avion pourrait être, aujourd'hui, disponible et opérationnel pour les pilotes dans les trois ou quatre prochaines années. Sachant que le dernier Dash, le huitième, arrivera l'année prochaine.

Par ailleurs, nous ne pouvons pas compter que sur les Canadairs ; il faudrait ajouter les Dash, les hélicoptères légers et les hélicoptères lourds qui peuvent contenir une réserve d'eau dans une espèce de big bag important.

Pour revenir à l'A400M, les pilotes que nous avons rencontrés demandent à les piloter en réel pour pouvoir juger, mais il semblerait que, techniquement, ils ne soient pas prêts à servir en tant que bombardiers d'eau.

Je proposerai néanmoins de poursuivre les investigations sur la flotte avionique de bombardiers d'eau, car il semblerait que plusieurs constructeurs soient en capacité de proposer des appareils, alors qu'aujourd'hui nous ne parlons que des Canadairs et des Dash. Cela mériterait peut-être l'organisation de nouvelles auditions.

M. Claude Raynal , président . - Le coût de mise au point d'un avion comme l'A400M sur une application nouvelle est considérable. Et le temps de validation de l'avion dans sa nouvelle configuration est un programme en soi.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - D'abord, en ce qui concerne les véhicules, les questions d'écologie ne sont pas oubliées. Ainsi, dans le cadre du plan de relance, 2,8 millions d'euros ont été consacrés à l'installation de prises électriques pour la police nationale, par exemple. En outre, un effort important est consenti annuellement pour doter la police et la gendarmerie de véhicules électriques.

Par ailleurs, en matière de moyens humains et matériels, on peut s'interroger sur l'opportunité des créations de brigades. La question se pose depuis des années de revoir la carte des compétences territoriales de la police et de la gendarmerie. Cette dernière, dont les brigades sont souvent situées dans les périphéries de zones urbaines et qui sont de plus en plus confrontées à la criminalité, a besoin d'être renforcée. Cependant, la carte n'ayant pas évolué, nous avons recours à l'installation de brigades, financées par les collectivités territoriales. Le Gouvernement devrait commencer par arbitrer et revoir la carte dans un certain nombre de départements.

M. Claude Raynal , président . - Le ministre Darmanin a dit lui-même à Toulouse qu'il n'en avait pas l'intention.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - En effet, il a dit que c'était prématuré, comme l'ont fait ses prédécesseurs, alors que ce problème des périphéries est lancinant.

Ensuite, en termes d'investissement immobilier, l'effort fourni n'est pas le même pour la police et la gendarmerie. Certaines régions cherchent à investir dans l'immobilier de la police tandis que dans la gendarmerie, les collectivités territoriales investissent dans les brigades. J'aurais préféré que le budget consacré par la Lopmi à la création des brigades soit dédié à l'investissement, compte tenu de l'état de dégradation de nombreux locaux existants.

Pour donner une idée, en parallèle des 143 millions d'euros d'AE investis dans l'immobilier de la gendarmerie en 2023, le relèvement du point d'indice et les mesures catégorielles représentent à eux seuls un coût de 138 millions d'euros pour elle, sans compter le coût de l'augmentation des effectifs. Cette question des équilibres entre dépenses d'investissement et dépenses de personnel mériterait un vrai débat.

J'avais été frappé il y a quelques années par les arguments fondés du directeur général de la gendarmerie d'alors, le général Favier, expliquant que les petites brigades posaient problème parce qu'elles manquaient d'efficacité opérationnelle, mais qu'il n'était pas possible d'en réduire les effectifs puisque les communes avaient investi. Il aurait donc fallu développer une stratégie de long terme consistant à privilégier les brigades mobiles ou à restreindre le champ des brigades, mais nous avançons dans le sens inverse. Par ailleurs, comme il s'agit de créer 200 brigades, ce qui représente un objectif ambitieux, les difficultés liées au déploiement et aux appels d'offres devraient conduire à l'utilisation de brigades mobiles et à l'usage d'une certaine souplesse.

En 2021 et 2022, la gendarmerie nationale avait bénéficié au titre du plan de relance de 90 millions d'euros d'investissement supplémentaires dans l'immobilier. Cette année, la police rattrape donc un peu la gendarmerie en termes d'investissement immobilier. Le directeur général de la gendarmerie nationale m'assure d'ailleurs être satisfait de ce budget, les moyens étant présents en termes de véhicules, mais aussi de formation, tout en soulignant les enjeux en termes d'immobilier.

L'école des officiers est revenue au système antérieur quant au temps attribué à la formation. En effet, pour accélérer le recrutement et l'entrée en fonction après les attentats, les sessions avaient été raccourcies, et nous reprenons désormais progressivement un rythme plus raisonnable, sur 12 mois.

Pour conclure, j'invite les élus à réfléchir à l'opportunité de la création des brigades, qui est toujours très populaire sur un territoire. Cependant, si une partie de ce budget pouvait être transférée dans l'investissement, ce serait une bonne chose.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Sécurités ».

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

Article 46 ter

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Cet article vise à tirer les conséquences des négociations ayant conduit à l'intégration de mesures catégorielles dans les protocoles de mars 2022 dans la police et la gendarmerie nationale. Des primes ayant été prévues concernant les agents de terrain et opérationnels, les personnels de soutien se voient également attribuer une indemnité. Il s'agit d'une indemnité de sujétion spécifique pour les personnels administratifs, techniques et spécialisés de la police nationale et les personnels civils et des corps militaires de soutien de la gendarmerie nationale.

Le présent article prévoit, conformément à ce qu'annonçaient les protocoles, que les personnels concernés admis à faire valoir leurs droits à la retraite à compter du 1 er juillet 2023 bénéficient d'un complément de retraite au titre de l'indemnité de sujétion spécifique qu'ils ont perçue au cours de leur carrière.

Si les incidences financières précises de cette disposition n'ont pas été communiquées par le Gouvernement, mon avis est favorable.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 46 ter .

M. Claude Raynal , président . - En ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », quel est votre avis, monsieur le rapporteur ?

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Favorable, monsieur le président.

Mme Christine Lavarde . - De mon côté, je suis favorable à une suppression pour des raisons déjà évoquées devant le ministre. Des problèmes insolubles se posent en raison de l'existence de ce CAS.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses votes.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale de la police nationale (DGPN)

- M. Frédéric VEAUX, directeur général ;

- M. Stanislas CAZELLES, directeur des ressources et des compétences ;

- M. Hadrien HADDAK, conseiller budgétaire.

Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN)

- Général d'armée Christian RODRIGUEZ, directeur général de la gendarmerie nationale ;

- Colonel Alexandre MALO, sous-directeur de la police judiciaire ;

- Lieutenant-colonel Antoine LAGOUTTE, chef du bureau de la synthèse budgétaire ;

- M. François DESMADRYL, directeur des soutiens et des finances.

Syndicat Alliance Police nationale

- M. David-Olivier REVERDY, secrétaire national adjoint Province.

Unité SGP Police - FSMI-FO

- M. Franck FIEVEZ, secrétaire national ;

- M. Yann BASTIERE, délégué national.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 Le Sénat a examiné ce texte début octobre 2022 et l'a adopté, modifié, le 18 octobre 2022.

* 2 Il couvre trois missions (« Sécurités », « Administration générale et territoriale de l'État », et « Immigration, asile et intégration »), le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » et les taxes affectées à l'ANTS (Agence nationale des titres sécurisés). Sont toutefois exclus du périmètre de la LOPMI le programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », les programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et les programmes « Outre-mer ».

* 3 Y compris contribution au compte d'affectation spécial « Pensions ».

* 4 Programme 176 « Police nationale », programme 152 « Gendarmerie nationale », programme 207 « Sécurité et éducation routière » et programme 161 « Sécurité civile ».

* 5 Ces deux hausses semblent toutefois liées à des baisses concomitantes pour des actions similaires prises en charge par le CAS « Radars ».

* 6 En raison de la hausse anticipée des taux d'intérêt.

* 7 Emmanuel Macron, président de la République, le 14 septembre 2021 à Roubaix, discours de clôture du Beauvau de la sécurité.

* 8 Rapport n° 612 (2017-2018) de M. François Grosdidier, fait au nom de la commission d'enquête du Sénat sur l'état des forces de sécurité intérieure, déposé le 27 juin 2018.

* 9 Le périmètre de la programmation retient l'échelle du ministère de l'Intérieur, tout en excluant le programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », les programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », les programmes « Outre-mer », qui ont récemment été rattachés ministère de l'Intérieur et des Outre-mer. En outre, les montants sont calculés hors contribution au compte d'affectation spéciale « Pensions » , ce qui explique les différences de montants avec ceux qui figurent dans le projet de loi de finances pour 2023.

* 10 Loi n° 1995-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité.

* 11 Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.

* 12 Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure.

* 13 Hors programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et programmes « Outre-mer ».

* 14 Hors contributions au compte d'affectation spéciale « Pensions » et hors programme 232 « Vie politique » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », programmes 754 et 755 du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et programmes « Outre-mer ».

* 15 Voir infra .

* 16 Voir infra sur ces différents sujets.

* 17 Il s'agit, notamment, de la transposition pour la police et la gendarmerie nationale du protocole de modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR).

* 18 Cour des comptes, référé au Premier ministre du 13 mars 2018 sur les rémunérations et le temps de travail dans la police et la gendarmerie nationales.

* 19 Plan de lutte antiterroriste.

* 20 Pacte de sécurité publique.

* 21 Dépenses d'armes et munitions, d'habillement et de moyens de protection, qui relèvent toutes du titre 3, ainsi que l'acquisition et la maintenance des véhicules, inscrites en dépenses d'investissement.

* 22 Plateforme Convergée pour les Services Très haut débit Opérationnels Résilients et Mobiles, dont la généralisation est prévue à la fin de l'année 2022 et au début de l'année 2023 ; cette solution numérique permettra aux forces de sécurité intérieure de communiquer via un outil unique et sécurisé.

* 23 Commandement de la gendarmerie dans le cyberespace : créé en février 2021 et devenu opérationnel en août 2021, il est chargé de fédérer l'action de ses services spécialisés, dont le Centre de lutte contre les criminalités numériques et le réseau CyberGEND des enquêteurs numériques de la gendarmerie. Il intègre également la brigade numérique de la gendarmerie nationale chargée du site magendarmerie.fr et la plateforme Perceval chargée des signalements de fraude à la carte bancaire.

* 24 Voir supra .

* 25 Voir supra .

* 26 L'âge moyen est calculé pour les véhicules légers.

* 27 Ces critères sont en principe alternatifs.

* 28 Estimation du ministère de l'Intérieur dans les réponses au questionnaire budgétaire.

* 29 Réponses au questionnaire budgétaire.

* 30 Outil de recensement Chorus Re-fx.

* 31 Discours de clôture du Beauvau de la sécurité.

* 32 Voir supra .

* 33 Voir supra .

* 34 Voir supra .

* 35 Ces dernières correspondent au nombre d'heures supplémentaires, multiplié par un coefficient allant de 1 à 3 selon le moment où elles ont été effectuées.

* 36 Comme le service de protection des hautes personnalités (SPHP).

* 37 Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.

* 38 Décret n° 2017-109 du 30 janvier 2017 modifiant le décret n° 2002-1279 du 23 octobre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale.

* 39 Rapport général n° 140 (2016-2017) de M. Philippe Dominati, fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 novembre 2016.

* 40 Évaluation des cycles horaires de travail, inspection générale de la police nationale, mars 2019.

* 41 Voir infra .

* 42 Cette enveloppe finance toutefois également des actions locales.

* 43 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 44 Audition du 22 septembre 2021 sur le projet de loi de finances pour 2022.

* 45 Voir supra .

* 46 Notamment : double assassinat du 31 juin 2016 à Magnanville visant un couple de fonctionnaires de police, dont l'un était agent administratif de la police nationale ; attentat de la préfecture de police de Paris faisant quatre victimes, dont un agent administratif de la police nationale ; assassinat du 23 avril 2021 à Rambouillet d'un agent administratif de la police nationale.

* 47 Voir infra.

* 48 Voir supra.

* 49 Voir supra.

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