B. DES REMBOURSEMENTS D'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS EN HAUSSE DANS UN CONTEXTE DE CRISE ÉCONOMIQUE

1. Des remboursements liés aux bénéfices fiscaux des entreprises et, de fait, au contexte économique

Si la liquidation de l'impôt fait apparaître un impôt dû inférieur au montant des acomptes déjà versés, cet excédent est restitué aux entreprises concernées. En effet, malgré la possibilité offerte aux entreprises de moduler à la baisse le versement de leurs acomptes lorsqu'elles estiment que les sommes déjà acquittées dépassent l'impôt final calculé sur la base estimée de leur résultat (autolimitation), des situations d'excédent apparaissent fréquemment, notamment en période de diminution des résultats fiscaux.

Ainsi, du fait du mécanisme d'acomptes et de solde, ces restitutions augmentent fortement en cas de baisse des bénéfices taxés ou en cas d'évolution non uniforme des bénéfices fiscaux , certaines sociétés versant un solde important en mai, et d'autres se trouvant en situation d'excédent de versements. Les crises économiques ayant un impact sur les bénéfices des sociétés vont donc générer des hausses de remboursements . À l'inverse, les périodes de rebond et reprise économique vont se caractériser par une hausse des bénéfices et, partant, par une diminution des remboursements d'impôts sur les sociétés.

Il en résulte que ces remboursements sont volatiles car très sensibles à des conditions économiques exogènes. Les remboursements se faisant en année N+1, le système permet cependant des prévisions relativement fiables à tout le moins sur le sens de variation des crédits de cette action même si les volumes sont plus difficiles à estimer avec précision.

2. L'impact de la crise sanitaire et de l'inflation sur les résultats des entreprises

En PLF 2023, le niveau des remboursements d'impôts sur les sociétés est évalué à 14,2 milliards d'euros soit une hausse de 13,8 % par rapport à la LFI 2022 (12,5 milliards d'euros) mais en baisse par rapport au niveau exécuté en 2021 (14,7 milliards d'euros).

En 2022, le niveau attendu d'exécution s'élève à 13,1 milliards soit 0,6 milliard de plus que la prévision initiale mais 1,6 milliard de moins que l'exécution 2021.

La baisse constatée entre 2021 et 2022 s'explique par le rebond des bénéfices fiscaux des entreprises entre 2020 et 2021 (- 14,0 % en 2020 contre 11,5 % en 2021) en lien avec la reprise de la croissance en 2021 après les confinements stricts et l'arrêt de l'activité de nombre d'entreprises en 2020.

Le PLF 2023 prévoit, à l'inverse, une hausse des remboursements d'impôts sur les sociétés résultant d'une diminution attendue du bénéfice fiscal des entreprises en 2022 dans un contexte de crise inflationniste.

En effet, l'inflation engendre de nombreuses perturbations pour les entreprises et notamment :

- une incertitude au niveau des coûts d'approvisionnement et des prix de vente praticables à terme ;

- une difficulté à maintenir ses marges et donc ses bénéfices face à l'augmentation du coût des matières premières ou celles des salaires sur les prix de vente dans la mesure où le SMIC est indexé sur l'inflation ;

- un risque de réduction de la demande lié à la perte de confiance et de pouvoir d'achat des ménages à la suite de l'augmentation des prix ;

- un risque de défaillance accru de fournisseurs ou d'entreprises clientes. Ce risque est, par ailleurs, accru en raison des premiers remboursements de prêts garantis par l'État (PGE).

3. La situation particulière des entreprises du CAC 40

Cependant, les entreprises du CAC 40 sont, à ce stade et de manière générale, relativement épargnées par cette inflation et ont même pu, dans certains cas, voir leurs bénéfices augmenter . Elles cumulent, en effet, près de 73 milliards de bénéfices au premier semestre 2022 soit une hausse de 24 % par rapport au premier semestre 2021. Ce chiffre pourrait encore être revu à la hausse puisque seules 38 entreprises ont publié leurs chiffres, le constructeur ferroviaire Alstom et le spécialiste des spiritueux Pernod Ricard ayant un exercice financier décalé.

Cette situation s'explique de différentes manières en fonction du secteur des entreprises concernées. Ainsi, la hausse des prix de l'énergie et des produits pétroliers a eu un impact positif sur les résultats des entreprises du secteur. Ainsi, TotalEnergies a plus que doublé son bénéfice au deuxième trimestre et a réalisé le meilleur résultat net du CAC 40 sur le semestre, avec plus de 10,4 milliards d'euros.

Il en va de même pour ArcelorMittal, qui a profité de la hausse des prix de l'acier et a atteint près de 8 milliards d'euros de bénéfices. Engie, le principal fournisseur de gaz en France, a quant à lui, plus que doublé son bénéfice, à 5 milliards d'euros.

Le secteur du luxe a également été épargné malgré un ralentissement des ventes en Chine, l'un de ses principaux marchés, les ventes de marques étant peu sensibles à la hausse des prix. Les entreprises de ce secteur ont également profité du renforcement du dollar par rapport à l'euro , leurs coûts de production étant principalement en euros alors que l'essentiel des ventes est réalisé en dollars. LVMH, Kering et L'Oréal ont ainsi vu leurs bénéfices cumulés augmenter de plus de 36 % par rapport au premier semestre 2021.

Malgré ces résultats positifs, l'indice boursier CAC 40 a perdu environ 10 % depuis le début de l'année en raison de la méfiance des investisseurs et des pertes de certains groupes qui ont subi les conséquences de la guerre en Ukraine . C'est notamment le cas de Renault et de la Société Générale qui se sont retirés de Russie après le déclenchement du conflit.

Ce contexte incertain nécessite donc une vigilance accrue sur le niveau des remboursements d'impôts sur les sociétés en 2023 qui pourraient s'avérer supérieurs à la prévision.

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