TROISIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES »

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances pour 2023 s'élèvent à 124,8 milliards d'euros en AE et en CP soit une hausse de 8,6 % par rapport à la LFI 2022.

Évolution LFI 2022 / PLF 2023 des crédits de la mission « Avances aux collectivités territoriales »

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2023

Le compte de concours financiers retrace essentiellement le produit des impositions locales versé par douzième aux collectivités territoriales et, plus à la marge, le versement et remboursement d'avances de l'État aux collectivités. Il est composé de trois sections :

- une section relative au versement et au remboursement des avances de trésorerie aux collectivités, établissements publics et à la Nouvelle-Calédonie (programme 832) ;

- une section relative au versement des avances mensuelles sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes (programme 833).

Par ailleurs, dans le cadre de la réponse à la crise sanitaire, la troisième loi de finances rectificative pour 2020 a créé une section supplémentaire concernant les avances remboursables de droits de mutation à titre onéreux (DMTO) destinées à soutenir les départements, la métropole de Lyon et la Ville de Paris affectés par les conséquences économiques de l'épidémie de covid-19 (programme 834) 12 ( * ) .

Ce programme avait alors été doté de 2 milliards d'euros en AE et CP en 2020 et de 700 millions d'euros en 2021 à partir d'une estimation de baisse des DMTO de 25 %.

Ce programme temporaire visait à soutenir les départements et les autres collectivités, dont la Ville de Paris et la métropole de Lyon, confrontés à une perte de recettes des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) en raison du ralentissement de l'activité en 2020 lié aux mesures d'endiguement sanitaire mises en oeuvre afin de lutter contre l'épidémie de Covid-19.

Néanmoins, en raison de la baisse très limitée des DMTO en 2020, les départements ont peu sollicité ce dispositif et, ceux ayant bénéficié de ce mécanisme, ont souhaité anticiper le remboursement de ces avances en 2020 et 2021. La totalité des reprises a été effective dès la fin de l'année 2021.

Ce programme ne présente plus d'utilité et n'est pas crédité depuis 2022. Il demeure toutefois dans le projet annuel de performances 2023 .

Avec des recettes prévisionnelles pour 2023 de 122,7 milliards d'euros pour des dépenses estimées à 124,8 milliards d'euros, le déficit pour 2023 de ce compte d'avances s'établirait à 2 milliards d'euros.

Cette dégradation résulte essentiellement d'une baisse de 1,7 milliard d'euros de la TICFE en raison de la prolongation du « bouclier tarifaire » et de sa mise au plancher par l'article 6 du présent projet loi de finances. De surcroit, à compter du 1 er février 2023, les effets du bouclier tarifaire seront amplifiés par l'intégration de la taxe communale sur la consommation finale d'électricité (TCCFE) à l'accise sur l'électricité.

Évolution des recettes du compte d'avances entre 2022 et 2023

(en millions d'euros)

Ligne de recette

LFI 2022

PLF 2023

Variation
en valeur et en %

Recettes diverses : (TASCOM, TICPE sur RSA, frais de gestion)

11 850

11 283

- 567

- 4,8 %

TH et taxes annexes et TVA transférées dans le cadre de la réforme de la fiscalité locale (départements, intercommunalités et Ville de Paris) et dans le cadre de la réforme des impôts de production (compensation de la CVAE des régions et de la CVAE du bloc communal et du département)

38 007

51 338

+ 13 332

+ 35,1 %

TFPB, TFPNB et taxes annexes

45 401

49 409

+ 4 007

+ 8,8 %

CVAE

10 515

308

- 10 207

- 97,1 %

CFE et taxes annexes, IFER

9 729

10 427

+ 697

+ 7,2 %

Total compte d'avances

115 502

122 764

+ 7 262

+ 6,3 %

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

I. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS ALLOUÉS AU PROGRAMME 833 : L'IMPACT DES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE

Le programme 833 se compose de 4 actions ayant toutes pour objectif le versement, par douzième, des avances des produits issus de la fiscalité locale directe, des compensations ou des frais de gestion de certains impôts locaux.

En PLF 2023, les crédits du programme enregistrent une hausse de 8,7 % par rapport à la LFI 2022 soit 9,9 milliards d'euros et s'établissent à 124,9 milliards d'euros en AE et CP . Cette évolution résulte essentiellement de la hausse de l'action 1 à hauteur de 10,3 milliards d'euros et, dans une moindre mesure de l'action 2 à hauteur de 20,5 millions d'euros. Les actions 2 et 4 enregistrent, pour leur part, une baisse respective de 302 millions d'euros et 69,4 millions d'euros.

A. UNE AUGMENTATION DES AVANCES SUR LE MONTANT DES IMPOSITIONS LOCALES ET DES AVANCES AUX DÉPARTEMENTS SUR LES FRAIS DE GESTION DE LA TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BATIES EN RAISON DU DYNAMISME DE LA FISCALITÉ LOCALE ET DES COMPENSATIONS DE FISCALITÉ SUPPRIMÉE

1. Une évolution du périmètre de l'action 1 qui tient compte des nouvelles ressources des collectivités à la suite des différentes réformes de la fiscalité locale

L'action 1 du programme 833 permet de garantir aux collectivités territoriales le versement, par l'État, des avances sur le montant des impositions directes locales leur revenant . Il s'agit, pour les plus importantes, de :

- la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ;

- la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) ;

- la taxe d'habitation (TH) : depuis 2021, seule la taxe d'habitation sur les résidences secondaires transite par le compte d'avance consécutivement à la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales ;

- la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ;

- la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) ;

- la cotisation foncière des entreprises (CFE) ;

- l'imposition forfaitaire des entreprises de réseau (IFER) ;

- la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM).

Par ailleurs, depuis 2021, ces avances incluent également l'abondement de l'État du mécanisme correcteur 13 ( * ) ainsi que les fractions de TVA compensatrices des pertes :

- de taxe d'habitation sur les résidences principale pour les EPCI à fiscalité propre et la Ville de Paris découlant de la suppression de cette dernière ;

- de taxe foncière sur les propriétés bâties des établissements industriels découlant de la réforme des impôts de production pour les départements ;

- de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises pour les régions découlant également de la réforme des impôts de production.

À compter de 2022, ces avances intègrent également la part départementale de la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) conformément à la réforme des taxes locales sur l'électricité instituée par l'article 54 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

Enfin, à compter de 2023 , la suppression en deux temps de la CVAE sera compensée aux collectivités territoriales (communes, intercommunalités et départements) à travers l'affectation d'une fraction de TVA.

2. L'impact des réformes de la fiscalité locale sur les crédits du l'action 1

En PLF 2023, l'action 1 du programme est créditée de 118,2 milliards d'euros en AE et CP soit une augmentation de 9,5 % par rapport à la LFI 2022 représentant 10,3 milliards d'euros.

Cette hausse notable résulte des différentes réformes de la fiscalité locale. En effet, l'article 16 de la LFI pour 2020 a prévu la suppression totale de la taxe d'habitation sur les résidences principales à compter de 2021.

La disparition de la TH sur les résidences principales est compensée depuis 2021 aux communes par le transfert de la part départementale de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Aussi, afin de neutraliser les écarts de compensation entre les communes (divergence entre le montant de TH perdu et le produit de TFPB départementale affecté), est instauré un mécanisme de coefficient correcteur : prélèvement des communes « surcompensées » et reversement aux communes « sous compensées » avec un abondement de l'État afin d'équilibrer le dispositif.

Dans le cadre de ce mécanisme correcteur, les petites communes dont la « surcompensation » est inférieure à 10 000 euros ne seront pas prélevées, l'État se substituant à leurs contributions.

Les départements bénéficient, pour leur part, d'une affectation de fraction de TVA en remplacement de la TFPB transférée aux communes.

Enfin, les intercommunalités et la ville de Paris, en compensation de la perte de leur TH sur les résidences principales, bénéficient, à l'instar des départements, d'une fraction de TVA.

Par ailleurs, la baisse des impôts de production instituée par la LFI pour 2021 a entrainé :

- la suppression de la part régionale de CVAE et l'affectation d'une part de TVA au profit des régions ;

- la diminution de 50 % des montants de la CFE et de la TFPB pesant sur les locaux industriels.

La perte de recettes induite pour les communes et les intercommunalités est prise en charge par l'État via un prélèvement sur ses recettes.

Enfin, la suppression de la part communale et départementale de la CVAE prévue à l'article 5 du PLF sera également compensée par une fraction de TVA.

Aussi, en raison du dynamisme de ces différents mécanismes de compensation (à titre d'exemple, entre 2021 et 2022, le prélèvement sur les recettes de l'État au titre de la compensation de la réduction de 50 % des valeurs locatives de TFPB et de CFE des locaux industriels augmente de 352 millions d'euros soit plus de 10 % passant de 3 290 millions d'euros à 3 642 millions d'euros en raison du dynamisme des bases de ces impositions), de la prise en charge par l'État de l'absence de prélèvement sur les petites communes surcompensées ou encore du dynamisme des fractions de TVA affectée aux collectivités sur un périmètre de plus en plus étendu, notamment dans un contexte inflationniste, les avances par douzième aux collectivités locales ont augmenté en 2022 de 6,7 milliards d'euros et continuent mécaniquement leur croissance en 2023.

La hausse de 10 milliards enregistrée en PLF 2023 correspond donc au dynamisme de ces ressources fiscales et de leur compensation.

Cette action représente 95 % des crédits du programme 833.

3. Une hausse des avances aux départements sur les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) également due au dynamisme de la TFPB

Dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité conclu le 16 juillet 2013 entre l'État et les collectivités territoriales, la loi de finances pour 2014 a mis en place un dispositif de compensation péréquée (DCP) visant à contribuer au financement par les conseils départementaux des allocations individuelles de solidarité (AIS).

Alimenté chaque année par le transfert aux départements du montant correspondant aux frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) perçu l'année précédente par l'État , le DCP comprend une part « compensation » (70 %), répartie en fonction des restes à charges des départements en matière d'AIS, et une part « péréquation » (30 %), répartie en fonction d'un indice synthétique calculé sur la base de la proportion des bénéficiaires des AIS et du revenu par habitant de chaque département.

Le montant attribué à chaque département est ajusté proportionnellement au poids du revenu par habitant par rapport au revenu moyen.

L'action 3 retrace ainsi les avances aux départements sur les frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties conformément au dispositif de compensation défini à l'article L3334-16-3 du code général des collectivités territoriales permettant aux départements de financer les revalorisations exceptionnelles du RSA socle décidées par le Gouvernement.

En raison de l'évolution dynamique de la TFPB, les frais de gestion en découlant sont en hausse de 20 millions et s'établissent ainsi à 994,9 millions d'euros en 2023.


* 12 Article 25 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.

* 13 Mis en place dans le cadre de la suppression de la taxe d'habitation et bénéficiant aux communes dont la perte de recettes est supérieure aux recettes transférées.

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