EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 16 novembre 2022, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

M. Charles Guené , rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » . - Il convient d'abord d'apporter quelques précisions pour tenir compte, notamment, de certaines mesures de périmètre. Ainsi, dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023, les autorisations d'engagement (AE) de la mission diminuent de 636 millions d'euros à périmètre courant tandis que les crédits de paiement (CP) progressent de 20 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022.

Cette diminution en AE est la conséquence d'un effet de périmètre qui résulte en premier lieu de l'extinction en 2022 de dispositifs ponctuels. Ainsi, on observe une baisse de 159 millions d'euros liée à la compensation des frais de gestion des régions et à la diminution du dispositif de compensation péréquée des départements. Par ailleurs, cet effet de périmètre s'explique par la non-reconduction de certains abondements exceptionnels : 303 millions d'euros en 2022 au titre de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), 254 millions d'euros dédiés au plan Marseille et 20 millions d'euros consacrés à l'amélioration de l'attractivité de la Seine-Saint-Denis.

Retraitées de ces mesures exceptionnelles, les AE connaissent une hausse de 108 millions d'euros, qui s'explique essentiellement par la création de la dotation de compensation aux régions s'élevant à 91,3 millions d'euros, ainsi qu'aux gains relatifs aux frais de gestion de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), dont la suppression est prévue par l'article 5 du PLF 2023.

Cependant, cette hausse en euros courants et à périmètre constant révèle une contraction des crédits de la mission en volume, qui s'établissent en fait à 4 104,4 millions d'euros en AE et à 4 188,9 millions d'euros en CP, représentant une baisse de plus de 812 millions d'euros en AE et de 160 millions d'euros en CP.

À périmètre constant - après le retraitement des effets de périmètre susmentionnés -, les AE enregistrent donc une baisse de près de 176 millions d'euros et les CP diminuent de 140 millions d'euros.

Sans tenir compte de ces baisses intervenues en 2023, qui résultent de la hauteur exceptionnelle du niveau des crédits en 2022, les principales dotations restent stables depuis plusieurs années. Ainsi, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est maintenue à 1 milliard d'euros, la DSIL à 570 millions d'euros et la dotation politique de la ville (DPV) à 150 millions d'euros.

En revanche, la dotation pour les titres sécurisés (DTS) enregistre une légère hausse, qui permet de pérenniser le déploiement de nouvelles stations de recueil des titres sécurisés, en parallèle de l'abondement exceptionnel d'un montant de 10 millions d'euros, intervenu en première loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022.

En outre, la dotation de biodiversité enregistre une hausse puisqu'elle est portée à 30 millions d'euros en AE et CP, ce qui représente une augmentation de 5,7 millions d'euros par rapport à 2022. Cette nouvelle évolution permet de porter à 4 euros l'attribution estimée par habitant pour la part « parc naturels régionaux » et de renforcer les autres fractions de la dotation. Le texte transmis par l'Assemblée nationale prévoit une nouvelle hausse de 4,3 millions d'euros, pour tenir compte d'un assouplissement des critères d'éligibilité à la fraction « parc naturels régionaux ».

Si l'on tient compte des effets de l'inflation, cette baisse globale des crédits va peser sur les investissements des collectivités, qui sont par ailleurs confrontées à une hausse de leurs charges de fonctionnement due à ce contexte inflationniste. Ainsi, ce double effet sur leurs ressources d'investissement et sur leurs charges pourrait générer une contraction de l'investissement local, qu'il conviendra de surveiller durant l'année à venir.

Enfin, en ce qui concerne le programme 122 « Concours spécifiques et administration », les crédits alloués à la reconstruction à la suite de la tempête Alex diminuent en AE, mais augmentent en CP, afin de tenir compte des engagements antérieurs et du rythme d'avancement des travaux.

Comme les années précédentes, et malgré le constat d'une baisse des crédits en valeur, nous proposons d'adopter les crédits de la mission.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » . - Nous examinons également le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », qui voit notamment transiter le produit des impositions locales versées mensuellement par l'État aux collectivités territoriales. Ainsi, 124,8 milliards d'euros sont prévus à ce titre pour 2023, soit 10 milliards d'euros supplémentaires par rapport à la loi de finances initiale pour 2022, qui correspondent au dynamisme de ces ressources fiscales et de leur compensation.

En effet, les réformes successives touchant à la fiscalité locale et aux impôts de production ont été caractérisées par la suppression ou la diminution de plusieurs taxes et impôts.

Ainsi, la taxe d'habitation sur les résidences principales et la part régionale de la CVAE ont été supprimées. En ce qui concerne cette dernière, l'article 5 du PLF 2023 prévoit désormais la suppression des parts communale et départementale. Parallèlement, les montants de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pesant sur les locaux industriels ont été diminués de moitié. Ces pertes ont été compensées en grande partie par des fractions de TVA affectées aux collectivités. La TVA collectée enregistrant une hausse attendue en 2023, sous l'effet de l'inflation, les avances versées aux collectivités présentent également une tendance haussière.

Nous proposons de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de ce compte de concours financiers.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Nous en venons à présent à la présentation des articles rattachés. D'abord, l'article 45 propose diverses mesures en lien avec la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) et les fonds de péréquation horizontale. Je souhaiterais présenter les principales avancées qu'il entraine.

En premier lieu, nous observons une hausse de 320 millions d'euros des composantes péréquatrices de la DGF, dont 200 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité rurale (DSR). Un abondement complémentaire de la DGF d'un montant équivalent a été prévu en première partie, de façon que la progression des dotations de péréquation ne soit pas financée cette année par écrêtement des dotations forfaitaires. C'est une bonne chose, puisque cela marque un retour à l'esprit initial de la péréquation verticale, qui avait été quelque peu dévoyé.

L'article propose également une réforme de la DSR, prévoyant le remplacement du critère de longueur de voirie communale, utilisé dans le calcul des attributions versées au titre des fractions « péréquation » et « cible » de cette dotation, par un critère de superficie, pondéré par un coefficient de densité et un coefficient de population, conformément aux délibérations du Comité des finances locales (CFL).

De plus, il prévoit la neutralisation en 2023 des effets de la réforme des modalités de calcul de l'effort fiscal prévue par la loi de finances pour 2022. Ayant largement souligné l'an dernier le caractère inabouti de cette réforme, nous ne pouvons qu'approuver cette mesure. Cependant, la méthode qui consiste à adopter une réforme à l'aveugle avant d'en suspendre l'application deux ans de suite laisse dubitatif.

En outre, l'article prévoit deux évolutions liées aux modalités de répartition du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic), qui répondent à des recommandations que nous avions formulées dans notre rapport sur le dispositif. Ainsi, il est prévu d'étendre sur cinq ans le mécanisme de garantie de sortie en cas de perte d'éligibilité à un reversement, afin de renforcer la visibilité qu'ont les élus sur l'évolution de ces ressources et de supprimer le critère d'insuffisance d'effort fiscal agrégé, déterminant l'inéligibilité à un reversement.

Enfin, l'article vise à suspendre le mécanisme de garantie sur l'évolution des recettes des CVAE départementales, afin de tirer les conséquences de la suppression de cet impôt prévue à l'article 5 du présent PLF. Par souci de cohérence avec l'amendement déposé par la commission des finances sur ce même article, qui prévoit le décalage d'un an de cette réforme, l'amendement II-20 propose de supprimer cette disposition qui serait devenue sans objet.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'article 45 bis prévoit que les préfets tiennent compte du caractère écologique des projets pour la fixation des taux de subventions accordées au titre de la DETR et de la DSIL.

Ce dispositif n'a pas de réelle portée normative et relèverait davantage de la circulaire que de la loi. Néanmoins, nous ne pouvons que partager l'objectif poursuivi et proposons de l'adopter.

Nous proposons également trois amendements portant articles additionnels après l'article 45 bis , qui traduisent certaines recommandations que nous avions formulées dans le cadre de notre récent contrôle budgétaire sur les dotations d'investissement.

L'amendement II-21 prévoit une saisine pour avis des présidents de conseils départementaux avant toute attribution par le préfet de région de la dotation de soutien à l'investissement des départements (DSID), ce qui se fait déjà dans certaines régions. L'avis serait non contraignant, mais une telle évolution serait de nature à institutionnaliser le dialogue avec les présidents de conseils départementaux en la matière, ainsi qu'à favoriser la convergence des priorités nationales et locales.

Par ailleurs, l'amendement II-22 prévoit une communication à la commission DETR de l'ensemble des demandes de subvention dès lors que les dossiers sont reconnus éligibles, permettant ainsi d'accroître l'information des élus sur les choix opérés par le préfet en matière d'attribution de subventions. Cet amendement reprend d'ailleurs une disposition déjà adoptée par la commission dans le cadre de l'examen d'une proposition de loi d'Hervé Maurey, dont le rapporteur était Bernard Delcros.

Enfin, l'amendement II-23 vise à instituer une communication annuelle du préfet de département à la commission DETR sur l'emploi de la DSID dans le département, comme c'est déjà le cas pour la DSIL.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'article 45 ter prévoit le maintien de la dotation particulière « élu local » (DPEL) pour les communes nouvelles créées à compter du 1 er janvier 2023. L'attribution au titre de cette dotation serait égale à la somme des dotations particulières calculées sur le périmètre des communes déléguées.

En effet, à ce jour, la DPEL est perçue par les communes de moins de 1 000 habitants dont le potentiel financier par habitant est inférieur à 1,25 fois la moyenne des communes de cette strate, pour la première part. De surcroit, une majoration de 100 % de la première part est versée aux communes de moins de 200 habitants et une majoration de 50 % de la première part est versée aux communes de moins de 500 habitants aux mêmes conditions de potentiel financier.

Cependant, la fusion de communes dans le cadre de la création de communes nouvelles peut rendre inéligibles des communes qui percevaient cette dotation avant la fusion. Le dispositif proposé permettrait donc de ne pas décourager les initiatives de fusions.

Nous proposons d'adopter cet article sans modification.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'article 45 quater modifie la répartition de la DTS. Celle-ci est actuellement versée en deux fractions, une forfaitaire et une majorée, auxquelles s'ajoute éventuellement une deuxième majoration pour les dispositifs de recueil les plus utilisés. L'article 45 quater maintient le principe d'une dotation forfaitaire versée pour le dispositif de recueil, qui serait désormais complétée par une part variable en fonction du nombre de demandes de titres sécurisés effectuées l'année précédente. En outre, les communes ayant mis en place des plateformes de prise de rendez-vous interopérables devraient bénéficier d'une prime, afin de fluidifier la prise de rendez-vous et de limiter les doublons. Les montants en jeu et les communes concernées, qui devraient être définis par décret, font en ce moment l'objet de concertations avec les associations d'élus.

Nous proposons d'adopter cet article sans modification.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'article 46 prévoit d'augmenter la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité et pour la valorisation des aménités rurales, qui se décompose ainsi : une majoration de 1 million d'euros de la fraction « Natura 2000 » ; une majoration de 200 000 euros de la fraction « Parcs nationaux » ; et une majoration de 4,5 millions d'euros de la fraction « Parcs naturels régionaux ».

L'examen de l'article à l'Assemblée nationale a donné lieu à deux nouveaux apports. En premier lieu, les conditions d'éligibilité pour la fraction « parcs nationaux » sont assouplies, puisque la dotation pourrait désormais bénéficier aux communes dont le territoire est situé en tout ou partie dans un parc national et non plus aux seules communes dont le territoire terrestre est en tout ou partie compris dans un coeur de parc national. Cette extension de l'éligibilité concernerait environ 200 communes qui percevraient une part forfaitaire de 3 000 euros.

La deuxième modification vise à étendre l'éligibilité de la fraction « Parcs naturels régionaux » à l'ensemble des communes dont le potentiel financier par habitant est inférieur au double du potentiel financier moyen par habitant des communes de la même strate et non plus des seules communes dont le potentiel financier est inférieur à celui de la strate. Cette modification permettra d'assurer une harmonisation des critères financiers d'éligibilité pour toutes les fractions de la dotation.

Nous proposons d'adopter cet article sans modification.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Je précise que nombre des sujets majeurs rencontrés par les collectivités locales ne sont pas traités dans le cadre de cette mission. Ainsi, la question de la suppression de la CVAE relève de la première partie. De plus, on retrouve à l'article 40 quater , avec les articles non-rattachés, l'inscription de la trajectoire financière et des mesures d'encadrement des finances locales initialement prévues dans le projet de loi de programmation des finances publiques avant d'être supprimées par les deux assemblées. Mais nous pourrons aussi, bien sûr, aborder ces questions.

M. Loïc Hervé , rapporteur pour avis de la commission des lois sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » . - Comme vient de le dire Claude Raynal, cette mission représente aussi une occasion d'évoquer les grands sujets qui touchent aux finances des collectivités locales, tels que la réforme de la CVAE, le fonds vert ou la saison 2 des contrats de Cahors.

En ce qui concerne cette mission elle-même, les projets d'amendements présentés sont intéressants et vont dans la direction que nous privilégions de façon récurrente au Sénat, notamment en ce qui concerne l'information des élus sur les dotations ou les subventions d'investissement aux collectivités. En effet, la lisibilité de ces dispositifs doit être améliorée.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - La complexité des relations financières entre l'État et les collectivités locales est toujours grandissante. Dans le même temps, le paysage institutionnel s'est fragmenté, ce qui contribue à la complexité du système. En témoigne la multiplication des associations d'élus, représentant tantôt les communes tantôt les intercommunalités, tantôt les ruraux tantôt les urbains, ou encore les petites villes. On ne s'y retrouve plus.

Pourtant, nous aspirons tous à une plus grande lisibilité. En effet, un parlementaire qui ne serait pas spécialiste de ces questions éprouve les plus grandes difficultés à se retrouver dans le labyrinthe des dispositifs et encore plus à savoir comment les corriger ou les améliorer.

Dans les recommandations que vous formulez au sujet de la DETR, vous précisez que les élus doivent être mieux informés. J'irai pour ma part plus loin : les commissions DETR devraient être co-animées à trois parties, par le préfet, les élus locaux et les députés et sénateurs du département. Il faut renforcer le dialogue entre l'État et les élus locaux, en incluant les parlementaires qui étudient ces dispositifs lors de l'examen des textes financiers.

M. Marc Laménie . - Je souhaiterais revenir sur la manière dont s'articulent les crédits de cette mission avec les autres dotations relevant des concours financiers de l'État, parmi lesquelles la DGF, qui représente un total de plus de 50 milliards d'euros, issus principalement de prélèvements sur recettes. Les crédits de cette mission s'inscrivent dans un ensemble complexe, au sein duquel il devient de plus en plus difficile de se retrouver.

Dans le même esprit, je partage la position du rapporteur général quant à la composition de la commission DETR. Élus locaux et parlementaires devraient avoir accès à une meilleure lisibilité.

M. Christian Bilhac . - En ce qui concerne l'article 45, je voudrais d'abord me réjouir de l'augmentation de 200 millions d'euros au titre de la DSR. En effet, j'avais déposé un amendement l'an dernier prévoyant une hausse de 20 millions d'euros...

En revanche, je ne suis pas en accord avec le remplacement du critère de voirie par celui de la superficie et je déposerai un amendement en ce sens. En effet, la superficie ne coûte pas un centime à la commune alors que la voirie est onéreuse, comme l'eau et l'assainissement, mais celles-ci relèvent désormais de l'intercommunalité.

J'en viens à la DPEL. Des communes délibèrent pour fixer les indemnités des élus en début de mandat, qui ont droit à une dotation qu'ils perdent deux ans plus tard. Il faudrait soit supprimer le critère financier, soit le fixer pour les six ans de la mandature.

En ce qui concerne la DTS, on demande aux communes de mettre en place une plateforme numérique pour les prises de rendez-vous, mais l'État pourrait aussi développer un logiciel, afin que les Français puissent suivre l'évolution de leurs demandes de titres et ne soient plus dans le flou complet.

Enfin, je soutiens les amendements présentés par les rapporteurs.

M. Bernard Delcros . - Je commencerai par me réjouir que les crédits consacrés cette année à la péréquation soient pour la première fois constitués de crédits supplémentaires, qui n'affectent donc ni la dotation forfaitaire ni les collectivités ne profitant pas du mécanisme. Ces crédits s'élèvent à 320 millions d'euros, dont 200 millions d'euros sont consacrés à la DSR, ce qui va dans le bon sens.

En ce qui concerne le remplacement du critère voirie, j'émets aussi des doutes. J'alerte d'ailleurs les collègues dont les départements comptent des communes de montagne puisque l'Association nationale des élus de la montagne (Anem) avait obtenu que la longueur de voirie communale soit doublée dans les dotations consacrées à ces zones. Cette modification aura des incidences et les raisons avancées pour la justifier semblent discutables.

J'en viens à la DPEL, qui intégrera à partir de 2023 de manière forfaitaire les dotations votées dans la loi Engagement et proximité, pour assurer la protection fonctionnelle des élus et les frais de garde d'enfants dans les communes de moins de 3 500 habitants. Aujourd'hui, pour qu'une commune soit éligible à la DPEL, son potentiel financier par habitant doit être inférieur à 1,25 fois la moyenne des communes de la strate. Or dans le cas de ces remboursements, aucun critère financier ne semble mis en place. La question du potentiel financier se posera-t-elle seulement pour certaines parts de la DPEL ? Cette référence au potentiel financier reste-t-elle dès lors justifiée ?

Enfin, à la suite de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, il reste aux communes la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) et la TFPB ; ne serait-il pas utile de décorréler ces taux pour laisser aux élus la liberté de les fixer ?

M. Stéphane Sautarel . - D'abord, je me réjouis que les rapporteurs proposent de donner une traduction législative à certaines recommandations issues de leurs travaux de contrôle.

Par ailleurs, je voudrais revenir sur les critères d'attribution de la DSR, car je suis plutôt réservé quant aux modifications prévues. Il faudrait plutôt tenter de mieux répondre à la problématique de la voirie communale, en développant peut-être un programme spécifique. Les transferts qui seront ainsi opérés ont-ils été estimés ? J'ajoute que la lisibilité de la DSR n'est pas toujours aisée pour les communes.

Je voudrais aussi me féliciter de l'article 46 sur les aménités rurales. Il représente une évolution favorable, y compris dans le texte issu du 49-3.

J'en viens à la taxe d'habitation. Je partage la demande formulée par Bernard Delcros concernant la décorrélation entre la TFPB et la THRS. De plus, je m'interroge sur de possibles effets de bord. En effet, des habitants qui avaient décidé de déclarer leur résidence principale en milieu rural et de bénéficier d'une résidence secondaire en milieu urbain ont tendance à vouloir faire l'inverse à la suite de la réforme de la taxe, les taux étant souvent plus élevés dans les communes urbaines. Ces modifications pourraient avoir des incidences importantes pour la population de ces communes. Quel est votre regard sur ce phénomène ? Seriez-vous prêts à soutenir une demande d'information sur le sujet ?

M. Michel Canévet . - Le rapporteur général a eu raison d'évoquer l'extrême complexité des financements attribués aux collectivités locales, notamment des modes de calcul. On le voit bien : il faut les modifier avec beaucoup de précautions. Ainsi, nous l'avons fait pour le potentiel fiscal après la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales et nous en mesurons aujourd'hui les effets pervers pour un grand nombre de collectivités.

Par ailleurs, je partage les points de vue exprimés par les orateurs précédents sur les effets nocifs de la modification des critères de calcul de la DSR. L'argument avancé au CFL selon lequel les élus ne seraient pas capables de déterminer la longueur de voirie sur leurs territoires ne semble pas valable.

En ce qui concerne la DTS, j'ai lu avec attention les propositions de modification. La dotation forfaitaire sera-t-elle revalorisée ? En effet, on s'aperçoit que, même en l'absence d'une grande activité, cela représente un poste de dépenses élevé, a fortiori dans un contexte d'inflation.

Enfin, j'en viens aux amendements présentés par les rapporteurs. Je soutiens l'idée que la commission DETR soit informée de l'ensemble des demandes de subvention éligibles. Les choses se passent ainsi dans le Finistère, où toutes les demandes sont transmises. J'ignorais en revanche que cette obligation touchait aussi les octrois de DSIL. Je suggérerais donc de compléter l'amendement pour que la communication porte aussi sur l'ensemble des décisions liées à la DSIL, afin que nous puissions appréhender de manière globale - et peut-être faudra-t-il intégrer le fonds vert à l'avenir - le financement des projets présentés par les collectivités.

M. Jean-Claude Requier . - D'abord, il faut être prudent au sujet de la décorrélation de la THRS et de la TFPB. En effet, dans de nombreuses communes, des conseillers municipaux pourraient être tentés de trop augmenter la THRS, sachant que les propriétaires de résidences secondaires votent ailleurs.

Ensuite, je souhaiterais féliciter les rapporteurs pour l'amendement II-22 , qui obligerait les préfets à donner à l'ensemble des membres de la commission DETR les dossiers de subvention éligibles. Cela se fait dans certains départements, et c'est une bonne chose. À l'époque de l'ancienne « réserve parlementaire », nous avions accès à des remontées du terrain, les maires nous rendant visite pour obtenir des fonds. Ces informations données par le préfet pallieront cette absence.

Mme Isabelle Briquet . - Vous l'avez dit, l'essentiel concernant les collectivités ne se trouve pas dans la mission et nous aurons l'occasion d'en reparler au cours des débats sur le PLF.

Je concentrerai mon propos sur la DTS. Compte tenu des difficultés - largement relayées dans la presse - pour nombre de nos concitoyens d'obtenir des titres, l'abondement supplémentaire est le bienvenu. Pour autant, l'estimez-vous suffisant ou adapté par rapport au transfert de charges important vers les communes que représente la tenue des dispositifs de recueil ?

Mme Christine Lavarde . - Je souhaiterais vous interroger sur la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité : sur quels critères est-elle versée aux communes ? Comment cette dotation s'articule-t-elle avec les autres politiques menées par l'État en la matière, que nous avons évoquées dans le cadre de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » ?

M. Dominique de Legge , président . - Je partage les interrogations émises quant à l'évolution des critères utilisés pour le calcul de la DSR. Je trouve étonnant que l'on puisse avoir du mal à calculer la longueur de voirie et je ne comprends pas bien quel est l'objectif recherché par ce nouveau mode de calcul.

M. Jean-Marie Mizzon . - En ce qui concerne la DETR et la DSIL, les préfets doivent dorénavant tenir compte du caractère écologique des projets. Néanmoins, les membres des commissions départementales n'ont pas attendu que la loi les y incite et le verdissement des projets proposés était bien souvent une réalité. Il ne faudrait pas que cela devienne une exclusivité. En effet, certains équipements sont bien utiles au développement des transports verts ; je pense en particulier aux routes. En l'absence de subvention, le réseau routier se dégrade ; or il sera toujours nécessaire pour faire rouler un véhicule électrique, un véhicule à hydrogène ou un vélo.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - En ce qui concerne le verdissement, cet amendement intégré au texte considéré comme adopté par l'Assemblée nationale vise seulement à encourager le préfet à tenir compte des questions écologiques. Celui-ci conserve toutefois toute latitude pour fixer son taux dans les limites, s'agissant de la DETR, des taux planchers et plafonds fixés par la commission.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Je voudrais d'abord préciser que le critère de longueur de voirie communale, s'il a été soustrait du calcul de la DSR, reste toujours pris en compte, au sein de la DGF, au travers du montant historique « socle » de la dotation forfaitaire.

Il convient de rappeler que la DSR a vocation à tenir compte de l'ensemble des charges des collectivités concernées, dont la longueur de voirie était considérée comme un indicateur parmi d'autres, et non de compenser les charges d'entretien des routes. Cependant, l'utilisation de ce critère posait une difficulté dans la mesure où de nombreuses communes ont transféré la gestion de leur voirie aux intercommunalités, de sorte que celle-ci ne pouvait plus être prise en compte pour le calcul de la DSR. Ainsi, un critère tenant compte de la superficie, corrigée par un coefficient de densité et par un coefficient de population, a semblé plus pertinent. Je précise que des simulations ont été effectuées par le CFL.

Par ailleurs, les communes de montagne, qui se voyaient appliquer un doublement de leur longueur de voirie pour le calcul de la DSR, continueraient de bénéficier d'un avantage puisque leur superficie serait doublée. Au total, une large majorité de communes sont donc gagnantes selon les simulations présentées. L'impact sera relativement limité puisque 2 % de la masse seront déplacés pour la DSR « péréquation » et 6 % pour la DSR « cible ». Cet aspect de la réforme a sans doute été déterminant dans l'avis du CFL, qui est en général assez attentif à préserver les équilibres.

De plus, un « tunnel » d'évolution a été prévu, afin que les communes ne puissent pas perdre plus d'une certaine somme pendant plusieurs années. Grâce au tunnel, le montant perçu ne pourra être inférieur à 90 % ni supérieur à 120 % du montant perçu l'année précédente.

J'ajoute que la réforme de la DSR ne pénaliserait pas les communes les plus rurales, ce devrait même être le contraire, car le critère de longueur de la voirie communale aurait tendance à favoriser les communes les plus urbanisées parmi les communes éligibles à la DSR.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Nous sommes tous sollicités sur cette question par l'Association des maires ruraux de France, mais le CFL a voté à l'unanimité cette modification.

Mme Christine Lavarde . - Et il en a discuté longtemps ; la décision a été bien mûrie.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - En effet, cette décision a fait l'objet de deux réunions du CFL et elle n'a pas été prise à la légère. À ce titre, l'ajout de la population au critère de surface est apparu comme un correctif nécessaire, la surface seule ayant des effets de bord significatifs.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Le tunnel mis en place permet aux communes de ne pas perdre plus de 10 % de ce qu'elles percevaient auparavant. Néanmoins, il est toujours difficile de modifier les règles concernant l'ensemble des dotations aux collectivités ; on se heurte toujours à celles qui se considèrent perdantes.

J'en viens à la position du rapporteur général sur la composition de la commission DETR. On peut trouver localement des accords avec les préfets, qui négocient généralement les DETR avec les présidents des associations des maires. Il pourrait être intéressant d'ajouter un parlementaire, mais, dans certains départements, leur nombre est conséquent de sorte qu'il pourrait être difficile de se mettre d'accord.

Par ailleurs, la composition reste la même : une enveloppe générale de 100 millions d'euros pour la part essentielle toujours calculée sur la base du potentiel, même après modification ; une enveloppe de 3,5 millions d'euros pour les frais de garde, qui correspond à un forfait pour toutes les communes de moins de 3 500 habitants ; et une part de 3 millions d'euros pour assurer la protection fonctionnelle des élus au moyen d'un forfait pour l'ensemble des petites communes concernées. La nouvelle clause, prévue pour que les communes nouvelles ne perdent pas cette dotation, ne pose pas de difficulté particulière.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Je voudrais revenir à la remarque du rapporteur général, qui a évoqué la complexité due à une sédimentation. J'ajouterais que cela révèle aussi l'obsolescence des modalités de répartition des concours financiers aux collectivités territoriales, et en particulier de la DGF, qui sont illisibles et de moins en moins représentatives. C'est la raison pour laquelle l'indexation de la DGF sur l'inflation n'est pas souhaitable. Il reste préférable d'instituer des dispositifs nouveaux extérieurs à l'enveloppe de la DGF afin de pouvoir les attribuer selon des critères à peu près reconnus par chacun.

En outre, le rapporteur général a évoqué la possibilité d'une nouvelle gouvernance pour la commission DETR. Il me semble qu'un tel dispositif serait pertinent pour les finances locales prises dans leur globalité.

MM. Delcros, Sautarel et Requier nous ont interrogés sur l'opportunité d'une décorrélation entre les taux de la THRS et de la TFPB. Cette question d'ordre fiscal ne relève pas du périmètre de la mission, et il conviendrait d'interroger notre rapporteur général sur le sujet. Je suis plutôt favorable à la décorrélation à titre personnel. De nombreux élus ne souhaitent pas augmenter la fiscalité pesant sur leur population, mais Bercy craint que certains impôts n'augmentent trop. On pourrait envisager une décorrélation uniquement à la baisse, mais cela est très complexe sur le plan juridique ; de plus, qu'adviendra-t-il le jour où la commune décidera de remonter ses taux d'imposition ? Je sais que le rapporteur général réfléchit à cette question.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Certains propriétaires font passer leur résidence secondaire pour leur résidence principale. Ils déclarent qu'une maison de vacances est la résidence principale d'un de leurs enfants. Nous avions alerté sur cette dérive. En décorrélant les taux, on aggraverait encore ce phénomène. Plus qu'une décorrélation, je crois que les maires veulent avant tout davantage de ressources.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - J'ajoute qu'en 2023, les impôts locaux augmenteront fortement de manière mécanique en raison de la revalorisation des bases locatives au niveau de l'inflation.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Je ne recommanderais pas à un maire de baisser ses taux d'imposition, même si je comprends bien la volonté de protéger sa population face à la hausse des bases locatives.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Je partage la frustration de M. Laménie et de M. Hervé de constater que les crédits de la mission ne s'élèvent qu'à 4,4 milliards d'euros. C'est bien peu lorsque l'on sait que les transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales s'élèvent à 107,6 milliards d'euros !

Les crédits de la dotation de soutien pour la protection de la biodiversité et pour la valorisation des aménités rurales sont attribués en fonction du nombre d'habitants et du potentiel financier des communes situées dans des zones Natura 2000, dans des parcs nationaux ou des parcs naturels régionaux ou dans des parcs naturels marins. Les communes dont le territoire est situé en tout ou partie dans un parc national pourront désormais bénéficier de la dotation pour un montant forfaitaire de 3000 euros sans qu'il soit besoin que leur territoire soit situé en tout ou partie dans le coeur d'un parc national.. Cette évolution bénéficiera surtout aux petites communes.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - La part forfaitaire de la dotation pour les titres sécurisés ne sera pas réévaluée. Son montant ne sera d'ailleurs plus mentionné dans la loi, mais sera fixé dans un décret. Les crédits supplémentaires prévus devraient être attribués aux dispositifs de recueil les plus utilisés. Une commune touchera au maximum 14 000 euros, ce qui couvre environ le tiers du coût de fonctionnement d'un dispositif de recueil.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 45

L'amendement II-20 a été adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 45, sous réserve de l'adoption de son amendement.

Article 45 bis (nouveau)

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 45 bis .

Après l'article 45 bis (nouveau)

Les amendements II-21 , II-22 et II-23 portant articles additionnels ont été adoptés.

Article 45 ter (nouveau)

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 45 ter .

Article 45 quater (nouveau)

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 45 quater .

Article 46

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 46.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »

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Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé ces décisions.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF)

- M. Pierre BRETEAU, co-président de la commission des finances, maire de Saint-Grégoire et président des maires d'Ille-et-Vilaine ;

- Mme Claire GEKAS, conseillère finances ;

- Mme Charlotte de FONTAINES, chargée des relations avec le Parlement.

Association des maires ruraux de France (AMRF)

- M. Bertrand HAUCHECORNE, membre du conseil d'administration ;

- M. Denis DURAND, membre du conseil d'administration.

Assemblée des départements de France (ADF)

- M. Jean-Léonce DUPONT, président du département du Calvados.

Intercommunalités de France

- Mme Claire DELPECH, responsable du pôle finances et fiscalité ;

- Mme Montaine BLONSARD, responsable des relations avec le Parlement.

Régions de France

- M. Philippe BAILBÉ, délégué général ;

- M. William TISSANDIER, conseiller finances.

France urbaine

- M. Franck CLAEYS, délégué adjoint ;

- Mme Sarah BOU SADER, conseillère chargée des relations parlementaires ;

- M. Anselmo JALABERT, conseiller chargé des finances locales.

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