LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Les crédits de la mission « Pouvoirs publics » n'ont pas été modifiés par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 26 octobre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de M. Jean-Michel Arnaud rapporteur spécial, sur la mission « Pouvoirs publics ».

M. Claude Raynal , président . - Nous examinons les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

M. Jean-Michel Arnaud , rapporteur spécial de la mission « Pouvoirs publics » . - En vertu du principe d'autonomie financière des pouvoirs publics, qui découle du principe de séparation des pouvoirs, la mission « Pouvoirs publics » regroupe les crédits dédiés aux différents pouvoirs publics constitutionnels, c'est-à-dire la présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat - ainsi que les chaînes parlementaires -, le Conseil constitutionnel et la Cour de justice de la République.

Les montants associés à cette mission paraissent modestes, puisqu'ils représentent environ 0,2 % du budget général de l'État. Toutefois, les institutions relevant de la mission « Pouvoirs publics » sont aujourd'hui confrontées à des exigences croissantes des citoyens, d'efficacité, de transparence et d'exemplarité.

Les pouvoirs publics participent depuis plus de dix ans à l'effort de redressement des comptes publics, la dotation ayant progressé d'un montant bien inférieur à l'inflation constatée, ce qui, en réalité, signifie qu'il y a eu une baisse des moyens.

Pour le Sénat, le dernier rapport sur l'exécution 2021 de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne, de notre collègue Éric Jeansannetas, note que « depuis 2008, les dépenses de fonctionnement du Sénat ont diminué de 2,3 %, et même de 14,4 % une fois pris en compte les effets de l'inflation ».

Mais dans le contexte inflationniste actuel, et en raison de la volonté des pouvoirs publics de préserver un niveau élevé d'investissement, il est prévu, comme l'année dernière, une hausse des dotations. Pour autant, cette progression des crédits reste modérée puisque le montant total des dotations consacré aux pouvoirs publics en 2023 est en augmentation de 2,76 % par rapport à 2022, et s'établit à un peu plus d'un milliard d'euros.

Plus particulièrement, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une hausse des crédits de 4,90 % pour la présidence de la République, 3,35 % pour l'Assemblée nationale, 2,28 % pour le Sénat et 0,6 % pour La Chaîne parlementaire-Assemblée nationale (LCP-AN). Le Conseil constitutionnel voit certes son enveloppe se réduire de 16,71 %, mais cela fait suite à une forte augmentation l'année dernière en raison de l'élection présidentielle. Quant à la dotation de la Cour de justice de la République, elle est reconduite à l'identique. Je vous propose de regarder dans le détail chaque dotation.

Après trois années de stabilité, la dotation de la présidence de la République augmente de 4,9 % par rapport à 2022, s'élevant à 110,46 millions d'euros.

Parmi les faits notables, je signalerai que les dépenses de la présidence de la République font face à la reprise de l'activité internationale, à la suite de la période du covid, et, comme nous le verrons pour les autres institutions, à des dépenses de fonctionnement soumises à la forte inflation actuelle. Malgré cela, la présidence de la République souhaite maintenir ses investissements. C'est notamment le cas en matière de sécurité informatique et d'économies d'énergie puisqu'un projet de géothermie dans les jardins de l'Élysée est en cours de déploiement. D'un montant de 1,4 million d'euros, il devrait réduire de 80 % les émissions de CO 2 et générer des économies significatives de consommation de fluide, sans pour autant remettre en cause le réseau d'énergie à l'intérieur des bâtiments.

Concernant les dotations des assemblées parlementaires, rappelons qu'elles étaient gelées entre 2012 et 2021, ce qui a représenté un effort significatif d'économies et de rationalisation des moyens menés par les conseils de Questure. La hausse octroyée cette année reste modérée : 3,35 % pour l'Assemblée nationale et 2,28 % pour le Sénat. Les dotations s'élèvent ainsi respectivement à 571 millions d'euros et 346,3 millions d'euros.

J'évoquerai principalement le budget du Sénat dont la dotation connaît une augmentation de 2,28 % destinée à financer les conséquences de l'inflation et le renouvellement sénatorial de 2023, ainsi qu'à préserver un haut niveau d'investissement. Cette dotation couvre la quasi-totalité des dépenses de fonctionnement. Ces dernières augmentent de 6 %, une hausse provenant pour les deux tiers de l'inflation, et pour un tiers du renouvellement sénatorial. Par ailleurs, une baisse de 48 % des dépenses d'investissement est prévue en 2023, ce qui contient la hausse globale à 1,18 %. Le prélèvement sur les disponibilités, de 14,12 millions d'euros, est uniquement fléché vers le financement de l'investissement, signe d'une bonne gestion.

Cet effort d'investissement, après une année où il a été exceptionnellement élevé, à 33,19 millions d'euros, est ramené à 17,25 millions d'euros, soit une baisse de 48 %, mais le montant reste important et dans la moyenne des dernières années. Il servira à des projets d'envergure, tels que la restructuration des immeubles des 26 et 36 rue de Vaugirard ou la restauration des façades et couvertures des pavillons Est du palais. Il sera par ailleurs le prélude à l'ouverture d'un nouveau cycle d'investissement, caractérisé par les économies d'énergie et la transition énergétique de notre patrimoine.

Je conclus par le recours récurrent aux disponibilités : si la situation n'est pas inquiétante, ces dernières sont néanmoins susceptibles de s'amenuiser au fil des années, posant inévitablement la question du financement des programmes d'investissement à venir.

Le budget des chaînes parlementaires augmente légèrement, de 0,6 %. Celui de LCP-AN connaît une hausse de 1,24 % quand le budget de Public Sénat est reconduit à l'identique.

La dotation budgétaire demandée par le Conseil constitutionnel est en diminution de 16,71 % par rapport à 2022, pour s'établir à 13,3 millions d'euros. Parmi ses dépenses, les moyens consacrés au contrôle des normes représentent 62 % de la dotation, et sont en augmentation par rapport à l'année dernière, ce qui semble cohérent au moment où se déploie le portail de référence de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui nécessite des ressources dédiées à son bon fonctionnement.

L'activité du Conseil constitutionnel a changé d'échelle : les deux tiers des décisions rendues par le Conseil depuis sa création en 1958 l'ont été depuis 2010, année de mise en oeuvre de la QPC.

Enfin, la dotation de la Cour de justice de la République est identique à celle de l'an passé, à hauteur de 984 000 euros. L'été 2021 avait été marqué par un nombre de plaintes sans précédent, dépassant 20 000 à la fin de l'année 2021. Depuis 2022, le phénomène s'est nettement ralenti, le nombre de plaintes s'élève en effet à 349 depuis le 1 er janvier 2022.

En conclusion, je vous propose l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Hier, j'évoquais une dérive des dépenses de fonctionnement d'un certain nombre d'organismes. Je note là que tout le monde fait des efforts, avec un maintien des budgets. Sagesse, réalisme, efforts : je partage l'avis du rapporteur spécial.

M. Antoine Lefèvre . - Étant moi-même membre de la Cour de justice de la République, je m'étonne du maintien de ses crédits à l'identique. Le rapporteur spécial a évoqué le fort ralentissement des dépôts de plainte. Toutefois certaines plaintes donnent lieu à des contentieux. Ceux-ci n'engendrent-ils pas de surcoûts ?

M. Roger Karoutchi . - Nous sommes trop modestes, comme d'habitude. Le Sénat coûte cinq euros par an par habitant en France. Le Parlement coûte treize à quatorze euros par an par habitant. Ces chiffres tordent le cou à toute polémique.

Je voudrais évoquer les crédits de la présidence de la République. L'évolution de ces crédits est en réalité modeste après deux ans de stabilité. J'ai cru comprendre qu'entre 2007 et 2019-2020, l'Élysée a intégré dans ses comptes la totalité des traitements de ses employés, y compris ceux qui étaient mis à disposition par les ministères, soit environ la moitié, mais que la situation aurait changé. Quelle est la situation actuelle ? Le personnel mis à disposition est-il bien intégré dans le budget de l'Élysée ?

M. Vincent Delahaye . - L'augmentation du budget de l'Élysée n'est pas négligeable puisqu'elle est supérieure à l'inflation attendue. Le Président de la République devrait montrer l'exemple en réalisant des économies de fonctionnement, notamment sur les sondages. Quel est le budget consacré aux enquêtes d'opinion ?

Le Sénat est exemplaire : nous n'avons pas modifié notre dotation pendant des années. J'étais plutôt favorable à caler l'évolution du budget du Sénat sur l'évolution des dépenses moyennes de l'État. Pourquoi fournir plus d'efforts que l'État et ses ministères ?

Pourquoi le budget du Conseil constitutionnel augmente-t-il autant ? L'année 2022 a été exceptionnelle. Mais une hausse de 10 % par rapport à 2021 me paraît excessive. On aurait dû revenir au même niveau.

M. Marc Laménie . - Je note l'évolution positive des recettes des produits du Sénat, à 6 millions d'euros. En quoi ces produits consistent-ils ?

La progression des dépenses est modérée. Quels sont les effectifs du Sénat et quelle est la subvention à l'Association pour la gestion des assistants de sénateurs (Agas) ?

M. Vincent Capo-Canellas . - Je veux rassurer Vincent Delahaye. Il est vrai qu'au Sénat, nous gérons mieux que l'État, avec une progression des dépenses très largement inférieure. L'État est plus dispendieux que nous. Mais nous sommes regardés. Nous avons des critères de gestion et nous nous y tenons. L'année 2023 est atypique. En effet, chaque renouvellement sénatorial a un coût, d'environ 6 millions d'euros, notamment, malheureusement, pour faire face aux fins de contrats de collaborateurs.

Nos dépenses augmenteront en 2023 de 1,18 %, ce qui est un scénario optimiste si l'on considère l'évolution à la hausse des chiffres de l'inflation depuis l'élaboration du budget du Sénat en juillet.

Le coût des rémunérations augmente de 3,5 %, à 8,4 millions d'euros. Pour l'instant, il n'y a pas d'hypothèse de revalorisation. Il faudrait s'adapter, le cas échéant, si le point d'indice de la fonction publique connaissait une nouvelle revalorisation.

En 2022, en raison de l'élection présidentielle et des élections législatives, la session parlementaire a été un peu raccourcie. Nous avons donc pu réaliser davantage de travaux, pour 33 millions d'euros. Nous retomberons en 2023 à un étiage inférieur, de 17 millions d'euros. Nous devrons faire face, avec des travaux importants de mise aux normes du bâtiment qui accueille les salons de Boffrand et le restaurant du Sénat, à un nouveau pic d'investissements.

Nous veillons à ce que nos dépenses de fonctionnement ne dérapent pas.

M. Éric Bocquet . - Qu'est-ce qui explique la différence de budget de près d'un million d'euros entre LCP-AN et Public Sénat ?

M. Jean-Michel Arnaud , rapporteur spécial . - Les effectifs de l'Élysée sont conformes à la feuille de route : un peu moins de 800 personnes. Une partie d'entre elles sont détachées ou mis à disposition, mais dans ce cas leurs traitements sont remboursés à leur ministère d'origine.

Je ne dispose pas de chiffres précis sur les sondages, mais l'Élysée m'a fait savoir que la plupart des enquêtes d'opinion étaient dorénavant financées par les services du Premier ministre. Je peux demander plus de précisions.

Le Conseil constitutionnel a vu ses effectifs croître pour faire face à la montée en puissance des QPC. De 61 personnes employées en 2012, le Conseil est passé à 76 personnes en 2020 et à 85 aujourd'hui. Il a modifié sa politique de gestion immobilière en conséquence, en louant des locaux au 7 avenue de l'Opéra afin d'accueillir du personnel supplémentaire.

Les produits du Sénat sont composés essentiellement des redevances de gestion des caisses de retraite et de sécurité sociale qui sont le résultat du principe de transparence financière entre ces différentes entités mais aussi de recettes domaniales.

L'augmentation des crédits de l'Agas est de 9,47 %, avec une subvention de 71 millions d'euros. Elle est liée au renouvellement électoral. Sans la prise en compte de la hausse du point d'indice, les dépenses augmenteraient de 5,8 %. Le reste de l'augmentation proviendrait de la hausse du point d'indice de la fonction publique, sur lequel la rémunération des collaborateurs est indexée.

La différence de budget entre Public Sénat et LCP-AN est liée aux dépenses d'exploitation, notamment le coût d'antenne qui est un peu plus élevé du côté de Public Sénat.

M. Vincent Capo-Canellas . - Les recettes des produits du Sénat concernent effectivement les redevances des caisses de sécurité sociale et de retraite, les redevances domaniales sur une partie du jardin, mais aussi les redevances versées par Public Sénat pour l'occupation des locaux que nous mettons à sa disposition.

Historiquement, la subvention à Public Sénat est supérieure à celle de LCP-AN. Mais depuis plusieurs années, elle est gelée, et LCP-AN rejoint peu à peu Public Sénat.

M. Claude Raynal , président . - Je rappelle que les avis du rapporteur spécial et du rapporteur général sont favorables.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision.

Page mise à jour le

Partager cette page