EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 44 quater (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement établissant un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en outre-mer

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport établissant un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en outre-mer. Ce rapport présente de manière détaillée la pertinence du pilotage financier proposé aux collectivités signataires du dispositif.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA CRÉATION D'UN DISPOSITIF DE « CONTRATS DE REDRESSEMENT EN OUTRE-MER » EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2021

A. UN DISPOSITIF DESTINÉ À ASSAINIR LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS ULTRA MARINES EN DIFFICULTÉ

1. Les modalités de sélection des communes

Ce dispositif introduit par la loi de finances initiale pour 2021 vise à accompagner les communes ultra marines faisant face à des difficultés financières.

Sont susceptibles de bénéficier du dispositif les communes en grave difficulté financière, ayant occasionné des procédures de contrôle budgétaire et de règlement d'office du budget, et dont le retour à l'équilibre ne peut être raisonnablement envisagé que sur plusieurs exercices.

Ces dernières doivent alors adresser une demande qui sera instruite par les préfets. La sélection définitive est ensuite réalisée par le ministre des outre-mer sur la base des propositions motivées transmises par les préfets.

2. La signature d'un contrat

La signature d'un contrat d'accompagnement est subordonnée à l'établissement d'un diagnostic partagé sur l'état des dépenses et des recettes sur l'exercice en cours et s'inscrit dans une perspective à trois ans.

La trajectoire présentée par le maire au moment de sa candidature doit indiquer des montants cibles précis, en cohérence avec les préconisations de la chambre régionale des comptes. Elle est fondée sur une base de départ qui est celle des comptes de gestion 2019. Il s'agit de prendre en compte l'ensemble des budgets de la collectivité (budgets annexes, et le cas échéant, les liens avec les organismes périphériques).

En ce qui concerne la section d'investissement, un programme pluriannuel des investissements (PPI), réaliste au regard des capacités de financement de la commune, devra également être transmis.

Cette trajectoire pluriannuelle d'évolution de la section de fonctionnement et cette programmation pluriannuelle des investissements ont vocation à être annexées au contrat.

B. UN DISPOSITIF CARACTÉRISÉ PAR DES ENGAGEMENTS RÉCIPROQUES DES COMMUNES SÉLECTIONNÉES ET DE L'ÉTAT

1. Les engagements des communes, condition nécessaire pour percevoir une aide financière

Les engagements de la commune doivent être définis dans le contrat avec un suivi régulier de leur exécution.

Le contrat renvoie à un tableau de bord qui comporte des indicateurs financiers chiffrés précis (évolution des dépenses réelles de fonctionnement) et des objectifs d'optimisation de la gestion (délibération sur la révision du temps de travail ou du régime indemnitaire ; optimisation de la chaîne de la dépense ; respect des calendriers budgétaires et comptables ; travaux de fiabilisation de l'actif pour améliorer la qualité comptable etc...).

Un comité national évalue ensuite la démarche de redressement qui justifie l'octroi d'une dotation en fonction de différents indicateurs, notamment du respect de la trajectoire budgétaire pluriannuelle ainsi que des réformes structurelles déjà engagées la première année du contrat.

2. Les engagements de l'État

Le contrat prévoit la mise à disposition de la collectivité d'une assistance technique qui aura la charge :

- d'accompagner la collectivité dans l'établissement de son analyse financière rétrospective et prospective, dans l'élaboration du plan de redressement et dans les échanges avec l'État pour son adoption sur une base acceptée par les deux parties ;

- de proposer une feuille de route des chantiers prioritaires de la collectivité conformément aux objectifs du contrat. À chacun de ces chantiers doit être associé un gain budgétaire réparti sur chaque exercice du contrat ;

- de proposer le cadre d'une programmation pluriannuelle des investissements (PPI) qui sera suivie sur l'ensemble de la durée du contrat ;

- de fiabiliser, en lien avec cette feuille de route et la PPI, une trajectoire financière prospective portant sur la durée du contrat pour sa durée de validité initiale de 3 ans ;

- de suivre, au regard de la trajectoire financière prospective, l'exécution budgétaire et d'en présenter les caractéristiques lors de chacun des comités de suivi locaux ;

- de produire tous les outils de suivi et de gestion (tableaux de bord...) indispensables au pilotage de la collectivité comme à la supervision par l'État des actions mise en oeuvre.

Par ailleurs, l'État s'engage à verser à la collectivité un soutien budgétaire exceptionnel. En effet, les communes sélectionnées se caractérisant par le fait que le retour à l'équilibre n'est possible que sur plusieurs exercices, l'État pourra décider d'octroyer à la collectivité concernée une subvention budgétaire exceptionnelle.

Celle-ci est prévue au contrat initial et versée chaque année au plus tard en septembre de l'exercice concerné, après décision du comité de suivi national, qui peut en suspendre le versement ou mettre fin au contrat si les engagements de la collectivité ne sont pas respectés.

C. LES MONTANT INITIAUX PRÉVUS DANS LES COROM ET LA SÉLECTION DES COMMUNES CONTRACTANTES

1. Une enveloppe initiale de 30 millions d'euros

La loi de finances initiale pour 2021 a ouvert, sur l'action 6 du programme 123, 30 millions d'euros en AE pour le dispositif COROM, les CP étant ouverts à hauteur de 10 millions d'euros par an pendant trois ans.

Les derniers CP sont ouverts au titre de l'année 2023.

2. Les communes sélectionnées

À ce jour, neuf communes ont été sélectionnées pour intégrer ce dispositif de soutien expérimental.

Il s'agit de Sada à Mayotte, Saint-Benoit à la Réunion, Cayenne et Iracoubo en Guyane, Pointe-à-Pitre, Saint-François et Basse-Terre en Guadeloupe et Fort-de-France et Saint-Pierre à la Martinique.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA DEMANDE D'UN RAPPORT SUR LE DISPOSITIF COROM AFIN D'ÉTABLIR UN BILAN DE SES EFFETS

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Elie Califer et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement chaque année, avant le 1 er septembre, un rapport donnant lieu à un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en Outre-mer.

Ce rapport présente de manière détaillée la pertinence du pilotage financier proposé aux collectivités signataires du dispositif.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX SUIVRE LES EFFETS DES CONTRATS DE REDRESSEMENT SUR LA SITUATION FINANCIÈRE DES COMMUNES CONTRACTANTES

En l'état actuel du dispositif, les derniers CP seront engagés en 2023 et concernent les neufs communes sélectionnées.

Le rapport pourra utilement présenter les effets de ces contrats sur la situation financière de chacune des communes contractantes et le montant des soutiens exceptionnels perçus.

Cependant, un rapport annuel , au-delà de 2024, n'a de sens que si les crédits ouverts au titre du dispositif COROM sont reconduits.

C'est d'ailleurs le sens de l'amendement II-140, retenu dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, qui prévoit une ouverture de 30 millions d'euros en AE et CP supplémentaires.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 44 quinquies (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement sur l'évaluation des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport évaluant des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA CRÉATION D'UN PLAN EAU POUR LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER AFIN D'AMÉLIORER LES CONDITIONS D'ACCÈS À CE BIEN DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ

A. DES PROBLÉMATIQUES LIÉES À L'EAU ET À L'ASSAINISSEMENT EN OUTRE-MER PERSISTANTES MALGRÉ LA CRÉATION DU PLAN « EAU DOM »

1. La mise en place d'un plan d'action spécifique à l'eau

Par lettre conjointe en date du 14 mai 2014, les ministres de l'Écologie et des Outre-mer ont demandé aux vice-présidents du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et du conseil général de l'environnement et du développement durable et au chef de service de l'inspection générale de l'administration de constituer une mission conjointe pour conduire l'élaboration d'un plan d'actions pour l'eau dans les territoires d'outremer, dont la nécessité avait été actée lors de la Conférence environnementale de 2013.

Faisant suite à cette mission, un rapport détaillant les « Propositions pour un plan d'action pour l'eau dans les départements et régions d'outre-mer et à Saint-Martin » a ainsi été produit en juin 2015.

Établi sur ces bases, le plan d'action pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à la Réunion, Mayotte et Saint-Martin, dit plan "Eau DOM" a été lancé le 29 juin 2016 prévoyant que toutes les collectivités d'outre-mer compétentes pour la gestion de l'eau potable et de l'assainissement devaient signer un contrat de progrès avant le 31 décembre 2018, condition préalable au maintien des crédits d'investissement alloués par l'État.

2. Modalités de fonctionnement du plan « Eau DOM »

Prévu pour une durée de 10 ans, le plan d'actions est mis en oeuvre par période de contractualisation de 5 ans.

La Conférence régionale des acteurs lance tous les 4 mois des appels à candidatures auprès des collectivités compétentes en eau et assainissement. Les collectivités retenues se voient proposer un nouveau mode de contractualisation. Le contrat est élaboré à l'appui d'un diagnostic partagé entre la Conférence régionale et la collectivité. Il lie les investissements à des objectifs d'amélioration des performances techniques et financières évalués par des indicateurs.

3. Un retard structurel persistant en équipements nécessaire au traitement, à l'assainissement et à l'adduction d'eau.

La plupart des territoires d'outre-mer présentent un retard structurel en équipements nécessaires au traitement, à l'assainissement et à l'adduction d'eau . Malgré le plan « Eau Dom », la situation en 2020 était encore préoccupante dans de nombreux territoires outre-mer.

Ainsi, d'après le rapport du Conseil économique social et environnemental (CESE) relatif à « l'accès aux services publics dans les outre-mer » 45 ( * ) :

- à Mayotte 46 ( * ) et en Guyane, un quart de la population ne dispose pas d'eau potable à son domicile ou à proximité. Le traitement des eaux usées est parfois embryonnaire et toutes les communes ne sont pas dotées d'un réseau d'assainissement ;

- en Guyane , la contamination de l'eau des fleuves au mercure liée à l'orpaillage illégal est régulièrement constatée. Une étude de 2019 de l'institut de recherche pour le développement (IRD) fait état de l'imprégnation des poissons et des populations ;

- à La Réunion , 52 % de la population est alimentée par des réseaux dont la sécurité sanitaire est insuffisante ;

- en Martinique , le prix de l'eau par mètre cube est le plus élevé de France avec un prix d'environ 5,4 euros le mètre cube, en grande partie à cause des difficultés d'assainissement. En effet, le prix au mètre cube se compose d'une partie pour l'eau potable et d'une partie pour l'assainissement. En métropole, et selon les régions, les prix moyens totaux varient entre 2,2 et 4,8 euros 47 ( * ) ;

- en Guadeloupe , certaines localités ne sont pas raccordées à un réseau d'eau potable, des rotations dans la distribution d'eau étant alors mises en place pour réguler l'approvisionnement. 60 % de l'eau est perdue à cause d'un entretien lacunaire des réseaux de distribution. Les deux tiers des stations d'épuration ne sont pas conformes et seule la moitié des foyers vit dans une zone de raccordement au tout-à-l'égout. Les réseaux de collecte des eaux usées ne sont pas étanches avec des rejets sans traitement dans le milieu naturel.

B. LE FINANCEMENT DU PLAN « EAU DOM » : UNE MULTITUDE DE SOURCES DE FINANCEMENT QUI REND DIFFICILE UNE VISION EXHAUSTIVE

1. Des financements en provenance de la mission budgétaire « Outre-mer »

Le ministère chargé des outre-mer cofinance, dans le cadre du programme 123 , l'élaboration et la réalisation des contrats de progrès.

Ainsi, depuis 2016, le ministère a engagé 126 millions d'euros et consommé, au 31 juillet 2022, 72,5 millions d'euros à partir des crédits de la mission « Outre-mer » :

- FEI : 58 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 39 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022 ;

- CPER/CDEV : 43 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 28,5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022 ;

- CCT : 25 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

2. Des financements complémentaires sous forme de subventions ou de prêts

D'autres partenaires cofinancent des opérations d'investissement en eau et assainissement dans le cadre de ce plan :

- le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires (MTECT) : 5 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 3,1 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021 ;

- l'Office français de la biodiversité (OFB ) qui pilote le dispositif de solidarité interbassins (117 millions en AE sur la période 2016-2022 et 73 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) et les crédits du Plan de relance alloués au plan Eau (47 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 12 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- l'Agence française de développement (AFD) qui octroie des prêts long terme bonifiés par le ministère des outre-mer (173 millions d'euros depuis 2016, ayant mobilisé 11,9 millions d'euros de bonifications), des préfinancements de subventions via des prêts court terme (48 millions d'euros depuis 2016) et qui subventionne des études, en direct et via le fonds outre-mer à partir de 2020 (7,4 millions d'euros en AE pour la période 2016-2022 et 4,5 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- la Banque des territoires qui octroie des prêts pour un montant total de 114 millions d'euros depuis 2016.

Au total, depuis 2016 et à date, ce sont 625 millions d'euros se décomposant en 290 millions d'euros de subventions et 335 millions d'euros de prêts, qui ont été mis à disposition des collectivités ultra-marines par l'État ou ses opérateurs bancaires sur les thématiques de l'adduction en eau potable et de l'assainissement.

De surcroit, le projet de loi de finances pour 2023 a prévu un effort spécifique en faveur de l'alimentation en eau potable en Guadeloupe pour un montant de 10 millions d'euros en AE et CP. L'aide sera apportée au syndicat gestionnaire au vu de ses engagements d'amélioration de gestion.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA DEMANDE D'UN RAPPORT SUR LES CRÉDITS ALLOUÉS PAR L'ÉTAT À L'AIDE POUR LA DISTRIBUTION D'EAU POTABLE ET L'ENTRETIEN DES SYSTÈMES D'ASSAINISSEMENT

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1 er juillet 2023 un rapport sur l'évaluation des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX APPRÉHENDER L'EXHAUSTIVITÉ DES MOYENS FINANCIERS ALLOUÉS AUX PROBLÉMATIQUES DE L'EAU DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE--MER

Les financements du plan « Eau DOM » sont donc nombreux et de source variée. Il en résulte qu'il est difficile d'avoir une vision exhaustive de l'ensemble de ces financements et, surtout, de leur répartition par territoire.

De même, aucun document unique et centralisé n'existe, permettant de faire le bilan complet des opérations menées et des conséquences pour les populations.

Le rapport demandé par le présent article pourra donc utilement présenter les moyens alloués par l'État dans le cadre de ce plan et notamment une situation détaillée par territoire bénéficiaire.

Une telle évaluation apparait nécessaire pour juger de l'efficience de ce plan et de son devenir de son existence initialement prévue pour dix ans.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 44 sexies (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission « outre-mer »

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023, d'un rapport relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission « outre-mer ». Ce rapport doit notamment présenter une liste de solutions à mettre en oeuvre afin de faciliter l'accès à cette aide et permettre la consommation totale des crédits.

Cependant, ce délai de trois mois parait un peu court. il est donc proposé de le porter à six mois.

La commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE AIDE AU FRET AFIN DE SOUTENIR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE RÉGIONAL

A. UNE AIDE DESTINÉE AUX ENTREPRISES POUR FAIRE FACE AUX SURCOÛTS DES FRAIS DE TRANSPORT

1. L'instauration d'une aide au fret en 2009

L'article 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) a instauré une aide au fret destinée à couvrir les surcoûts de transport de marchandises au profit d'entreprises situées dans les DROM, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et Futuna.

En permettant la compensation de ces surcoûts liés à l'éloignement géographique des territoires ultramarins, l'aide au fret vise à encourager le développement endogène des collectivités concernées, favoriser la production locale et faire baisser les prix pour les consommateurs.

2. La base éligible pour le calcul des aides

Le décret n°2017-1476 du 16 octobre 2017 prévoit que l'État apporte aux entreprises situées dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Wallis-et-Futuna une aide ayant pour objectif de soutenir le développement économique régional en accordant une compensation au surcoût de transport de marchandises produites dans les DOM et à Saint-Martin à l'intérieur des frontières nationales, au surcoût de transport des produits primaires de leur lieu de production au lieu de transformation et aux coûts liés au transport de déchets dangereux qui ne peuvent être traités ou éliminés dans leurs territoires respectifs de production.

La base éligible de l'aide est égale au coût prévisionnel annuel hors taxes des dépenses de transport le plus économique, maritime ou aérien, incluant les assurances, les frais de manutention et de stockage temporaire avant enlèvement et, s'agissant des déchets, les coûts spécifiques de conditionnement et de contrôles de sécurité d'affrètement :

- des matières premières ou produits importés par l'entreprise depuis l'Union européenne ou les pays tiers ou acheminés depuis les collectivités territoriales mentionnées à l'article 1 er pour y entrer dans un cycle de production ;

- des matières premières ou produits issus de la production locale expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales ;

- des déchets importés de l'Union européenne, y compris depuis ces collectivités territoriales ou des pays tiers, aux fins de traitement ;

- des déchets expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales, aux fins de traitement.

3. Une aide plafonnée et versée sur pièces justificatives

Cette aide au fret finance une partie des dépenses de transport engagées par les entreprises sur justification de leurs frais effectifs.

Le montant de l'aide apportée par l'État ne peut dépasser 25 % de la base éligible, lorsque l'entreprise bénéficie d'une aide financière dans le cadre de l'allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques prévue par le Fonds européen de développement économique régional ou d'une aide des collectivités territoriales ou de leurs groupements.

En l'absence de ces aides, le montant de l'aide apportée par l'État peut être porté à 50 % de la base éligible.

L'ensemble de ces aides financières ne peut avoir pour effet de porter le niveau de compensation des coûts de transport au-delà de 100 % de la base éligible.

B. DES BESOINS ET UN NIVEAU DE CONSOMMATION DIFFICILES À ESTIMER

1. Une sous consommation constatée en 2021

En 2021, 4,1 millions en AE et 2,4 millions en CP ont été consacrés au financement de cette mesure pour des montants ouverts en LFI de 7,8 millions d'euros en AE et 6,5 millions d'euros en CP.

Plusieurs phénomènes expliquent cette situation :

- la crise sanitaire, qui a eu pour conséquence le dépôt tardif de dossiers de subventions voire leur report sur 2022 ;

- les mouvements sociaux majeurs dans plusieurs territoires conduisant à la fermeture de plusieurs services administratifs ;

- le processus d'instruction de l'aide au fret qui reste très largement assumé par les autorités de gestion du FEDER. En raison de sa longueur (2 ans et demi en moyenne) et de sa complexité, il est difficile à appréhender tant pour les entreprises que pour les autorités qui en ont la charge.

Toutefois, malgré ces aléas de gestion, 184 subventions ont été attribuées à 98 entreprises. La subvention moyenne s'est établie à 22 484 euros (contre 36 746 euros en 2019 et 32 233 euros en 2020), montant en diminution de 30 % par rapport à 2020.

Cependant, dans l'ensemble des territoires étudiés, seule une certaine typologie d'entreprises du tissu productif a accès à l'aide au fret. Les TPE-PME et les entreprises artisanales peinent à la mobiliser. En effet, les subventions versées en 2021 bénéficient toujours majoritairement aux entreprises de l'industrie manufacturière (66%), tant par le nombre d'établissements bénéficiaires du dispositif que par les montants consacrés. Les autres secteurs bénéficiaires sont, tout comme en 2020 la « production et distribution d'eau ; assainissement, gestion des déchets et dépollution » ainsi que la construction. Ces deux secteurs représentent au total 31 % des subventions octroyées.

Enfin, à noter que l'année 2021 a été marquée par l'étude commanditée par le ministère des outre-mer visant à évaluer la pertinence, la cohérence, l'utilité et l'efficience de l'aide au fret.

L'analyse a mis en évidence la pertinence globale du dispositif national d'aide au fret pour répondre aux besoins des tissus productifs ultramarins. Une meilleure articulation avec l'aide européenne et un meilleur pilotage de ce dispositif par les services déconcentrés de l'État est cependant nécessaire pour en maximiser les impacts.

2. Une volatilité des coûts des transports qui rend difficiles les prévisions de consommation en 2022 et 2023

Si les coûts des transports diminuent légèrement en 2022 par rapport à 2021, ils demeurent à un niveau exceptionnellement haut et leur évolution en 2023 reste difficile à estimer quant au point d'atterrissage de cette baisse.

Évolution de l'indice mondial du fret par conteneur
entre janvier 2017 et aout 2022

(en dollars)

Source : Freightos

En 2022, les crédits ouverts en LFI s'élèvent à 8,3 millions d'euros en AE et 7 millions d'euros en CP. La consommation constatée au 6 octobre 2022 s'établit déjà à 9,4 millions d'euros en AE mais à seulement 1,5 million d'euros en CP.

Pour 2023, les crédits ouverts en PLF sont évalués à 8,3 millions d'euros en AE et 5,85 millions d'euros en CP.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN RAPPORT SUR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DÉDIÉS À L'AIDE AU FRET

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Philippe Naillet et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023, un rapport relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission outre-mer.

Ce rapport devra présenter une liste de solutions à mettre en oeuvre afin de faciliter l'accès à cette aide, notamment en permettant une consommation totale des crédits.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX COMPRENDRE LA SOUS-CONSOMMATION DE L'AIDE AU FRET

L'aide au fret est un dispositif de guichet et intervient dans de nombreux territoires en complément d'aides européennes attribuées par la région. Les dépenses évoluent donc en fonction des dossiers déposés, des factures transmises et des évolutions des prix mondiaux des transports de marchandises.

Chaque année, des AE sont engagées mais non consommées et nécessite des retraitements ex-post d'engagements juridiques anciens non consommés.

Dans ce contexte, un rapport pourrait s'avérer pertinent afin de comprendre cette situation et les difficultés relatives à la consommation des CP, notamment dans un contexte où l'aide au fret peut constituer un soutien important pour les entreprises qui rencontrent des difficultés.

Cependant, un délai de trois mois pour réaliser un rapport parait un peu court. C'est pourquoi il est proposé de porter ce délai à six mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023 par l'amendement II-19 .

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.


* 45 Rapport de janvier 2020 de Michèle Chay et Sarah Mouhoussoune au nom de la délégation à l'outre-mer du CESE.

* 46 La gestion du Syndicat Intercommunal d'eau et d'assainissement de Mayotte (SIEAM) a fait l'objet de deux rapports de la Chambre régionale des comptes soulignant des investissements et un entretien des réseaux d'eau potable négligés pendant des années.

* 47 Données issues de l'observatoire des services publics de l'eau et de l'assainissement.

Page mise à jour le

Partager cette page