Rapport général n° 115 (2022-2023) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN , fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022

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N° 115

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 15a

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES - CRÉDITS
NON RÉPARTIS - TRANSFORMATION ET FONCTION PUBLIQUES

Rapporteurs spéciaux : MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean- Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273 , 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374 , 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

I. LA MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES » : UNE HAUSSE INÉDITE DES CRÉDITS DEMANDÉS EN 2023, ALORS QUE LES ADMINISTRATIONS POURSUIVENT LES RÉFORMES ENGAGÉES CES CINQ DERNIÈRES ANNÉES

La mission « Gestion des finances publiques » se compose de trois programmes, de poids inégal : les programmes 156 et 302 portent les crédits de la direction générale des finances publiques (DGFiP - 8 milliards d'euros en CP en 2023) et de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI - 1,6 milliard d'euros), les deux grandes administrations de réseau des ministères économiques et financiers. Le programme 218 retrace quant à lui les crédits du secrétariat général du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ainsi que d'une pluralité de structures, telles Tracfin ou la direction du budget (965 millions d'euros).

Évolution des crédits de la mission par titre de dépenses

(CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

A. UNE HAUSSE INÉDITE ET ÉLEVÉE DES CRÉDITS DE LA MISSION POUR 2023, PRINCIPALEMENT LIÉE AUX DÉPENSES INFORMATIQUES

1. Un budget pour 2023 qui s'inscrit à rebours de la trajectoire observée ces dernières années

Pour 2022, 10,9 milliards d'euros sont demandés en autorisations d'engagement (AE) et 10,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) pour la mission. À périmètre constant, les crédits de la mission connaissent ainsi une hausse significative et inédite en 2023, de 9,1 % en AE et de 5,4 % en CP .

Cette hausse des crédits est largement due à l'augmentation très significative des crédits informatiques et, dans une moindre mesure, des crédits immobiliers.

Les dépenses de personnel, qui représentent près de 80 % des dépenses de la mission, augmentent en effet moins vite que le volume global des crédits. Cette maîtrise des finances publiques s'explique par un schéma d'emplois qui serait une nouvelle fois négatif en 2023, avec la suppression de 680 équivalents temps plein (ETP). Le principal effort sur les emplois demeure porté par la DGFiP, à hauteur de 850 emplois, tandis que 181 emplois seraient créés sur le programme 218, au profit du secrétariat général du ministère mais aussi de Tracfin ou de l'Agence pour l'informatique financière de l'État.

2. Une hausse des crédits qui ne serait que temporaire, avant une nouvelle rationalisation des dépenses, en particulier dans un contexte d'inflation

La hausse des crédits en 2023 porterait le budget de la mission « Gestion des finances publiques » à un niveau inédit depuis 2018. Si les rapporteurs spéciaux s'en sont inquiétés, alors que la mission avait entamé une trajectoire de rationalisation de ses crédits et de ses emplois depuis plusieurs années, ce rebond ne devrait être que temporaire . La dépense se stabiliserait en 2024 et en 2025, avec probablement une baisse plus dynamique des emplois : le reflux en 2023 s'explique par l'impératif d'accroître les dépenses informatiques , tant pour résorber la dette technique que pour générer davantage de gains de productivité à moyen terme.

Évolution des crédits de la mission entre 2022 et 2025

(CP, en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Par ailleurs, il apparait nécessaire cette année, dans un contexte d'inflation élevée, d'intégrer une analyse des crédits en valeur et en volume. À moyen terme, les crédits de la mission baisseraient de 3 % en volume .

B. LES ADMINISTRATIONS DE LA MISSION POURSUIVENT LES RÉFORMES ENGAGÉES CES CINQ DERNIÈRES ANNÉES

1. L'adaptation du réseau de la DGFiP et de la DGDDI est en voie de finalisation

La réorganisation territoriale de la DGFiP s'organise autour de deux axes : la mise en place du « nouveau réseau de proximité » (NRP) et la « relocalisation » des services publics des métropoles vers les villes moyennes. Le Gouvernement cible ainsi une augmentation des « points de contact mobiles » de 30 %, la DGFiP visant une présence dans 2 570 communes en 2022, contre 1 977 en 2019. En tenant compte de la « relocalisation » des services publics vers les villes moyennes, la DGFiP est présente, en 2022 dans plus de 2 800 communes. La DGFiP continue également de déployer son réseau des « conseillers aux décideurs locaux » : plus de 1 000 seront en poste à la fin de l'année 2023 - les rapporteurs spéciaux insistant sur la nécessité d'une répartition équilibrée de ces conseillers sur le territoire.

Du côté de la DGDDI, la réorganisation des emprises a surtout tenu compte du Brexit , avec une bascule des emprises de l'est et du sud de la France vers la façade Manche/Mer du nord. Le prochain chantier est sans nul doute celui des logements des agents de la Douane, dont la gestion a fait l'objet d'importantes critiques de la part de la Cour des comptes (vétusté, taux de vacance élevé, localisation inadaptée aux besoins des agents).

2. Le transfert des missions fiscales de la Douane à la DGFiP se poursuit

Le transfert du recouvrement de certaines impositions de la DGFiP à la DGDDI a débuté en 2019 et devrait se poursuivre au moins jusqu'en 2025. Le processus de transfert est complexe et doit s'opérer sans pour autant fragiliser ni les recettes ni les procédures de contrôle propres à chaque imposition . En 2022, 198 ETP ont été transférés de la Douane à la DGFiP, ce qui ne veut pas pour autant dire que la Douane a supprimé des effectifs à due concurrence. Elle a notamment pu les réallouer sur d'autres missions.

3. L'informatique et la valorisation de la donnée sont deux priorités à la fois budgétaires et stratégiques pour la DGFiP et la Douane

Les enjeux informatiques de la DGFiP et de la DGDDI sont particulièrement élevés . Les deux directions assument des missions essentielles au bon fonctionnement de l'État, en assurant le recouvrement de ses ressources et la gestion d'une partie de ses dépenses. Depuis le projet de loi de finances pour 2020, les rapporteurs spéciaux relèvent un changement d'approche bienvenu sur les dépenses informatiques , qui avaient jusqu'ici eu tendance à servir de variable d'ajustement, dans un contexte financier contraint.

2023 marque un nouvel effort, avec un budget informatique s'élevant à plus de 400 millions d'euros pour la DGFiP et à 65 millions d'euros pour la Douane . Au-delà de ces soutiens budgétaires, l'enjeu est maintenant celui d'un meilleur pilotage des projets informatiques, qui connaissent chaque année de nouveaux dépassements de calendrier et de coûts.

4. Les résultats du contrôle fiscal connaissent un net rebond

Alors que les résultats du contrôle fiscal avaient été nettement affectés par la crise sanitaire, avec un montant recouvré de 7,8 milliards d'euros en 2020 , ils ont atteint 10,7 milliards d'euros en 2021 . 44 % des opérations de contrôle fiscal ont été programmées par datamining (intelligence artificielle) en 2021 et les résultats en termes de montants recouvrés progressent également, pour atteindre 1,2 milliard d'euros en 2021.

La DGFiP comme la DGDDI ont développé des techniques d'analyse de données de masse, par le datamining et l'intelligence artificielle, pour améliorer le ciblage de leurs contrôles et faciliter la détection des cas de fraude plus complexe et plus sophistiquée . Pour la Douane, il s'agit par exemple de créer une base de données lui permettant de mieux cibler les colis susceptibles soit de transporter des marchandises illicites, soit d'acheminer des marchandises sur lesquelles la TVA n'a pas été acquittée.

II. LA MISSION « CRÉDITS NON RÉPARTIS » : UNE OUVERTURE DE CRÉDITS SUR LES DEUX PROGRAMMES

Les crédits demandés sur le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » s'élèvent cette année à 80 millions d'euros en AE et en CP, pour financer l'extension du périmètre du « forfait mobilités durables » et des mesures de convergence des régimes indemnitaires et indiciaires résultant de la création du corps unique des administrateurs de l' É tat. Le recours désormais systématique à cette dotation, qui constitue une dérogation au principe de spécialité budgétaire, est particulièrement contestable dans la mesure où celle-ci permet de financer des mesures de rémunérations publiques pourtant décidées plusieurs mois avant la programmation budgétaire. En tout état de cause, il est souhaitable, pour la bonne information du Parlement, que ces crédits soient répartis au plus vite dans les différentes missions.

La programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » est doté cette année d'un montant particulièrement élevé au regard du montant conventionnel de cette dotation, puisqu'il s'élève à 1,774 milliard d'euros en CP contre 124 millions en 2022. Ce montant exceptionnel est simplement justifié par le Gouvernement par les incertitudes liées à la crise énergétique et au contexte international et macroéconomique. Il apparait en tout état de cause particulièrement excessif au regard de l'exécution budgétaire des dernières années. Les rapporteurs spéciaux proposent donc, dans une logique de sincérité budgétaire, et dans la droite ligne de la position constante de la commission des finances sur ce sujet, un amendement visant à minorer d'1 milliard d'euros le montant des crédits du programme.

III. LA MISSION « TRANSFORMATION ET FONCTION PUBLIQUES » : UNE HAUSSE DES CRÉDITS LIÉE À UN ÉLARGISSEMENT DES ACTIONS PORTÉES PAR LA MISSION

A. LA HAUSSE DES CRÉDITS CONSTATÉE EN 2022 S'EXPLIQUE EXCLUSIVEMENT PAR LA MODIFICATION DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE

La mission « Transformation et fonction publiques » se compose de six programmes à vocation interministérielle (immobilier, ressources humaines, numérique, fonction publique) . Les crédits demandés pour 2023 affichent une hausse très élevée, de 79 % en AE et de 43,8 % en CP, pour s'établir à 802 millions d'euros (AE) et 1,1 milliard d'euros (CP). Les principales dépenses portées sont des dépenses d'investissement (54,4 % en CP en 2023), par exemple pour la rénovation des bâtiments publics ou pour le cofinancement de projets permettant de réaliser des économies à moyen terme, en particulier dans le domaine informatique.

Cette hausse faciale très importante des crédits doit toutefois être immédiatement nuancée par la prise en compte de la modification de périmètre du programme 348, qui conduit à rehausser les crédits de la mission de 150 millions d'euros au titre d'une nouvelle action « Résilience », destinée à financer des actions dites « à gains rapides » pour la consommation énergétique des bâtiments publics. De plus, si la programmation a toujours été ambitieuse ces dernières années, l'exécution s'est rarement montrée à la hauteur des objectifs affichés, avec d'importants retards constatés sur le décaissement des crédits.

B. DES DIFFICULTÉS DE GESTION ENCORE IMPORTANTES

1. Le programme 348 devrait enfin monter en charge, avec une extension de son périmètre

Le programme 348, auparavant exclusivement dédié à la rénovation des cités administratives, porte désormais l'action « Résilience ». L'appel à projets pour répartir l'enveloppe de 150 millions d'euros devrait conduire à sélectionner des projets rapides à mettre en oeuvre , même si les rapporteurs spéciaux doutent, au regard des précédents, notamment sur le plan de relance, que la totalité des crédits soit décaissée en 2023.

Pour ce qui concerne les cités administratives, la totalité des travaux devrait enfin être lancée en 2023, près de cinq ans après le lancement du programme . Entretemps, les coûts des matières premières ont augmenté et ce différentiel n'est couvert que par l'abandon de la rénovation de deux cités administratives sur les 39 sélectionnées.

2. Le programme 349, dédié à la transformation publique, doit encore faire ses preuves

Le Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP), porté par le programme 349, est renouvelé pour une durée de trois ans , avec une enveloppe supplémentaire de 330 millions d'euros. Si les rapporteurs spéciaux partagent sa logique, à savoir financer l'amorçage de projets porteurs d'économie à moyen terme, en particulier dans le domaine numérique, ils sont plus critiques quant aux délais de contractualisation avec les porteurs de projet et au décaissement des crédits . Il est impératif qu'une évaluation de l'efficacité du fonds soit menée d'ici son extinction.

Réunie le mercredi 9 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Transformation et fonction publiques ». Elle a également proposé l'adoption des crédits de la mission « Crédits non répartis » tels que modifiés par son amendement et elle a décidé de réserver son vote sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions et elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Au 10 octobre, date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, les rapporteurs spéciaux avaient reçus 95 % des réponses pour la mission « Gestion des finances publiques », 100 % pour la mission « Crédits non répartis » et 75 % pour la mission « Transformation et fonction publiques ».

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES »

La mission « Gestion des finances publiques » , placée sous l'autorité du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, porte l'essentiel des crédits du pôle économique et financier de l'État.

Dotée de 10,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 10,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) dans le présent projet de loi de finances, elle se compose de trois programmes :

- les programmes 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du service public local » et 302 « Facilitation et sécurisation des échanges » sont les deux programmes opérationnels de la mission. Ils portent les crédits des deux grandes directions de réseau que sont la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Ils représentent près de 91 % des crédits de la mission ;

- le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » porte les crédits du secrétariat général du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ainsi que d'une pluralité de structures 1 ( * ) . Le secrétariat général n'interfère pas avec ces entités et n'agit pas à leur égard comme un donneur d'ordres. Il joue un rôle de fonction support et budgétaire, son objectif étant de permettre aux administrations du ministère, dans un contexte de ressources contraintes, de disposer des moyens nécessaires à leur fonctionnement.

Répartition des crédits de la mission
« Gestion des finances publiques » en 2023

(en pourcentage et en millions d'euros, en CP)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

À noter, depuis le 1 er janvier 2022, que les crédits et les emplois de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP) et du centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH) ont été transférés du programme 218 vers les programmes 368 « Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publiques » (titre 2, dépenses de personnel), 148 « Fonction publique » (crédits hors titre 2 du CISIRH) et 349 « Transformation publique » (crédits hors titre 2 de la DITP) de la mission « Transformation et fonction publiques ». Ce transfert avait été justifié par la volonté de regrouper sous une même mission les moyens d'action et les directions relevant du ministère éponyme .

I. I. UNE HAUSSE INÉDITE DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2023, AVANT UNE PROBABLE STABILISATION

Le premier constat dressé par les rapporteurs spéciaux pour ce projet de loi de finances est celui d'une hausse significative et inédite des crédits de la mission « Gestion des finances publiques » . Contrairement aux années précédentes, où la mission se distinguait dans le budget général de l'État par la stabilisation voire la diminution de ses crédits, l'année 2023 marque une rupture de tendance, avec une hausse des crédits de 9,1 % en autorisations d'engagement (AE) et de 5,4 % en crédits de paiement (CP) par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 , contre une baisse de respectivement 0,8 % et 0,3 % à périmètre constant entre le projet de loi de finances pour 2022 et la loi de finances initiale pour 2021.

Évolution des crédits de la mission
« Gestion des finances publiques »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Exécution 2021

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2023/2022

[156] Gestion fiscale et financière de l'État et du service public local

AE

7611,9

7 580,12

8 232,42

8,61 %

CP

7552,7

7 545,16

7 968,89

5,62 %

[218] Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

AE

903,6

857,89

1085,93

26,58 %

CP

916,3

884,96

965,56

9,11 %

[302] Facilitation et sécurisation des échanges

AE

1631,2

1 578,17

1 610,78

2,07 %

CP

1636,3

1 564,93

1 602,53

2,40 %

Total

AE

10 120,30

10 016,18

10 929,13

9,11 %

CP

10 027,75

9 995,04

10 536,97

5,42 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La hausse plus marquée des AE que des CP tient à l'engagement de plusieurs projets de grande ampleur, qu'ils soient informatiques ou immobiliers . Par exemple, sur le programme 218, la hausse de plus de 26 % des dépenses d'investissement est en grande partie liée au projet immobilier « Vincent Auriol » : 113,8 millions d'euros sont ouverts en AE, mais seulement 13 millions d'euros en CP sur l'année 2023 pour couvrir le lancement des travaux. L'objectif, tout en rénovant le bâtiment, est de doubler la superficie au sol pour pouvoir relocaliser les agents de plusieurs services, dont certains occupent des bâtiments loués par l'État.

A. UNE HAUSSE SIGNIFICATIVE DES CRÉDITS DE LA MISSION PRINCIPALEMENT LIÉE AUX DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT ET D'INVESTISSEMENT

1. La poursuite de la hausse des dépenses de fonctionnement et d'investissement, quasi-exclusivement pour des projets informatiques et immobiliers

La hausse des crédits de la mission s'explique très largement par la hausse des dépenses d'investissement et de fonctionnement. A contrario, les dépenses de personnel, qui représentent plus de 80 % des crédits, augmentent moins fortement que les dépenses totales de la mission (+ 2,6 %). C'est pour partie dû au fait que, à l'instar de ce qui est constaté chaque année, la mission « Gestion des finances publiques » est l'une des seules à prévoir un schéma d'emplois négatif pour son périmètre, - 680 équivalents temps plein [ETP] en 2023.

Évolution des crédits de la mission « Gestion
des finances publiques » par titre de dépenses

(CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'importance des crédits alloués aux projets informatiques de la mission, et en particulier pour la DGFiP et la Douane, s'explique aussi par un effet de rattrapage. Les sous-consommations observées sur les dépenses d'investissement ces dernières années ont en effet posé un problème de pilotage et de visibilité, en obligeant à des reports, et ce alors même que les dépenses d'informatique doivent parvenir à trouver un équilibre entre fonctionnement et investissement. Certes, la création de nouvelles applications permet d'améliorer les services proposés et l'efficacité de l'action publique, en dégageant des gains de productivité. Cependant, trop investir, c'est aussi prendre le risque de ne plus disposer de marges de manoeuvre pour entretenir l'existant et pour résorber la « dette technique » .

Les dépenses informatiques expliquent d'ailleurs la hausse significative des dépenses de fonctionnement de la DGFiP en 2023, de près de 22 %. Le budget informatique total de la DGFiP approcherait les 400 à 450 millions d'euros , alors qu'il était plus proche ces dernières années de 200 à 250 millions d'euros en moyenne. C'est donc un effort considérable qui est consenti sur le programme 156.

En réalité, comme l'a indiqué le directeur général des finances publiques lors de son audition, la DGFiP avait eu abondamment recours à la fongibilité asymétrique ces dernières années pour couvrir ses dépenses informatiques , en s'appuyant notamment sur la sous-exécution de ses dépenses de personnel. La direction pouvait également recourir à des financements externes, tels que ceux en provenance du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP, cf. infra ). Le budget informatique pour 2023 témoigne donc non seulement d'une hausse nette des crédits , mais aussi d'une volonté de sincérisation de la programmation .

La DGFiP et le Fonds pour
la transformation de l'action publique (FTAP)

La DGFiP, comme la Douane, a remporté plusieurs appels à projets sur le FTAP, porté par le programme 349 « Transformation publique » de la mission « Transformation et fonction publiques », et doté de 700 millions d'euros sur cinq ans, ainsi que d'une enveloppe complémentaire de 80 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2022.

Au total, la DGFiP a été lauréate à quatorze reprises du Fonds pour la transformation de l'action publique, pour un total de financement de 111,3 millions d'euros . Parmi les plus emblématiques figurent le projet de dématérialisation des déclarations foncières des propriétés bâties, le projet Ciblage de la fraude et valorisation des requêtes pour accroître le rôle du datamining dans la programmation des contrôles fiscaux ou encore le projet de modernisation de l'outil de gestion des implantations de la DGFiP sur le territoire, dans le cadre de la mise en place de son nouveau réseau de proximité.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Ainsi, comme l'a souligné la direction du budget en audition, la hausse des crédits d'investissement cette année, avant une forte diminution en 2024 et en 2025 en prévisionnel - à l'exception du programme 218 du fait du projet « Vincent Auriol » - s'explique par une « remise à niveau à l'échelle de la mission ». Les dépenses d'investissement ont en effet été les premières affectées par la stabilisation des crédits alloués aux administrations de la mission ces dernières années, puisqu'elles constituaient l'enveloppe la plus modulable à la main des administrations.

Il y a donc eu un vrai effort mené avec les administrations pour qu'elles consomment mieux leurs crédits informatiques. Dans le cadre de la négociation du contrat d'objectifs et de moyens de la Douane pour la période 2022-2025 par exemple, la direction du budget a insisté sur le renforcement du contrôle interne et du suivi de la consommation des crédits, pour répondre aux sous-exécutions récurrentes. La Douane disposerait en effet, pour la période, d'un budget informatique d'environ 65 millions d'euros par an, un montant inédit.

2. Les dépenses de personnel augmentent en 2023 alors que le rythme de réduction des effectifs ralentit

Alors qu'une baisse des dépenses de personnel de plus de 1,6 % était envisagée entre 2021 et 2022, du fait de la suppression de 1 392 équivalents temps plein (ETP), les dépenses de titre 2 progresseraient assez nettement en 2023, de l'ordre de + 2,6 % .

Cette hausse s'explique par des mesures catégorielles et générales, qui conduisent à une augmentation de la masse salariale , en dépit d'une diminution des emplois. La principale mesure est le déploiement en année pleine de la revalorisation de 3,5 % du point d'indice de la fonction publique 2 ( * ) . Sur le périmètre de la mission, cette mesure a un impact budgétaire de 161,2 millions d'euros, hors contributions au CAS « Pensions », et de 245,6 millions d'euros au total , dont 197,6 millions d'euros pour la DGFiP, 36,2 millions d'euros pour la Douane, 11,8 millions d'euros pour le programme 218 (secrétariat général et autres structures).

La DGFiP contribue également à la hausse des dépenses publiques au titre des mesures d'accompagnement des agents affectés par les transformations du réseau et des processus de l'administration fiscale . Ces primes, qui représenteraient 43,7 millions d'euros en 2023, étaient prévues dans le contrat d'objectifs et de moyens conclu entre la DGFiP et la direction du budget pour la période 2020-2022.

Le schéma d'emplois de la mission demeure négatif, même si le rythme de réduction des emplois ralentit nettement en 2023 , avec la suppression de 680 ETP au total, contre 1 392 prévus en 2022 et autour de 2 000 entre 2018 et 2020.

Évolution du schéma d'emplois de la mission
« Gestion des finances publiques »

(en équivalents temps plein)

Exécution 2018

Exécution 2019

Exécution 2020

Exécution 2021

LFI 2022

PLF 2023

Écart 2023/2022

Total 2018-2023

[156] Gestion fiscale et financière de l'État et du service public local

- 2 038

- 2 203

- 1 860

- 1 778

- 1 506

- 850

656

- 10 235

[218] Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

- 65

- 99

- 22

902

81

181

100

978

[302] Facilitation et sécurisation des échanges

201

220

- 168

595

33

- 11

- 44

870

Total

- 1 902

- 2 082

- 2 050

- 281

- 1 392

- 680

712

- 8 387

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le principal effort sur les emplois demeure porté par la direction générale des finances publiques , sur un volume toutefois deux fois moins important que celui constaté ces trois dernières années en moyenne. Il ressort des auditions qu'il y a vraisemblablement eu un problème de « lissage » au cours du temps : le ralentissement de la diminution des effectifs s'explique par le fait que la direction s'est rendue compte avoir besoin de redéployer certains emplois sur des métiers en déficit de personnel (lutte contre la fraude, recouvrement des amendes, contrôle interne).

Cet effet « volume » , de baisse des effectifs, est par ailleurs plus que compensé par un effet « valeur » , lié aux mesures salariales : les effectifs de la DGFiP baisseraient de 850 ETP mais sa masse salariale augmenterait de 170 millions d'euros, hors contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ».

Le même principe de redéploiement et de lissage justifie par ailleurs la quasi-stabilisation des effectifs de la Douane , avec une prévision conforme à celle inscrite dans le contrat d'objectifs et de moyens de la Douane pour la période 2022-2025. Toutes les suppressions de postes liées au transfert des missions fiscales de la Douane vers la DGFiP ne se traduiront pas par une suppression des effectifs , certains de ces postes seront redéployés sur les métiers en tension.

En revanche, le programme 218 , placé sous la responsabilité du secrétariat général du ministère de l'économie et des finances, connaitrait un important renfort de moyens en 2023 . Selon les informations transmises en audition, cette hausse est liée à la r éforme de l'encadrement supérieur de l'État , avec le recrutement de personnels notamment chargés de l'évaluation des cadres de la fonction publique 3 ( * ) et au pilotage des projets informatiques, avec un accent sur la cybersécurité . Sur ce dernier point, ce serait en tout 60 postes qui seraient créés pour renforcer Tracfin, la direction des achats de l'État ou encore l'Agence pour l'informatique financière de l'État, et ce afin de ré-internaliser certains emplois, notamment pour l'assistance à maitrise d'ouvrage.

Au total, la mission « Gestion des finances publiques » continue de participer à la rationalisation des emplois publics. Elle présente le taux d'effort le plus élevé , calculé en ramenant le schéma d'emplois au plafond d'emplois. Il est de - 0,6 %, un taux négatif impliquant une réduction des effectifs . A contrario, le taux d'effort de la justice s'établit à 2,5 %, celui du ministère du travail à 0,8 % et celui de la santé à 1,1 %.

B. UNE HAUSSE DES CRÉDITS QUI NE SERAIT QUE TEMPORAIRE, AVANT UNE NOUVELLE RATIONALISATION DES DÉPENSES, EN PARTICULIER DANS UN CONTEXTE D'INFLATION

1. Un triennal qui prévoit une stabilisation des crédits à moyen terme

Avec la hausse prévue de 5,4 % des crédits de paiement en 2023, la mission « Gestion des finances publiques » retrouverait un niveau de dépenses prévisionnel inédit depuis 2018 .

Évolution des crédits de la mission
« Gestion des finances publiques » depuis 2012

(CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le fait que la plus large partie de la hausse des crédits de la mission en 2023 soit due à l'informatique et à l'immobilier tend à atténuer les critiques qui auraient pu être faites à l'encontre de celle-ci. Les rapporteurs spéciaux estiment en effet que, dans un contexte de dépense publique contraint, chaque mission doit autant que possible contribuer à la rationalisation de la dépense et des emplois .

De ce point de vue, si les crédits demandés sur la mission « Gestion des finances publiques » s'inscrivent à rebours des efforts passés, ils devraient, d'après les éléments communiqués sur le triennal 2023-2025, retrouver dès 2024 une trajectoire de stabilisation, qui passera notamment par une maîtrise des dépenses de personnel et par un reflux des dépenses d'investissement. Les dépenses de fonctionnement seraient encore plutôt dynamiques, mais ce serait principalement dû aux dépenses informatiques.

Évolution des crédits de la mission entre 2022 et 2025

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le retour à « l'équilibre » , entendu ici comme la stabilisation des crédits et des personnels sur le périmètre de la mission, fera l'objet de la plus forte attention de la part des rapporteurs spéciaux, même si quelques ajustements pourront être apportés si l'inflation se révélait encore très élevée en 2024. Retrouver une trajectoire de stabilisation ne doit pas conduire, comme ce fut trop souvent le cas par le passé, à sacrifier les dépenses d'investissement ou la résorption de la dette technique.

2. La nécessité, cette année, de tenir compte de l'évolution des crédits en volume

Après plusieurs années d'inflation basse voire proche de zéro, le nouveau contexte macroéconomique, avec des niveaux d'inflation inédits depuis le début de l'année 2022, oblige à intégrer ce facteur dans l'analyse de la programmation . En euros constants ( euros de 2022 ), l'augmentation des crédits de la mission est bien moins forte en 2023, de l'ordre de 1,1 %, et il y aurait une baisse nette des crédits en prévisionnel sur la période 2023-2025, de l'ordre de 3 %, contre une augmentation de 6 % en volume . Cette trajectoire est plus proche de celle observée ces dernières années et que les rapporteurs spéciaux estiment tenables pour la mission.

Évolution des crédits de la mission entre 2022 et 2025

(en milliards d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Il est en effet certain qu'au-delà de la hausse des budgets informatiques et immobiliers, la programmation pour 2023 tient aussi compte des effets de l'inflation. Par exemple, sur le programme 156, la prise en compte de l'inflation s'est traduite par le fait que tous les gains de productivité attendus de la mise en place des réformes (numérisation, suppression de la taxe d'habitation et de la contribution à l'audiovisuel public) ne se sont pas traduits par une baisse des emplois et des crédits.

L'objectif est double : il s'agit, d'une part, de pouvoir redéployer des emplois vers des secteurs en tensions et, d'autre part, de plutôt réinvestir à court-terme ces gains de productivité dans l'investissement et dans le développement des systèmes et programmes qui seront à même de générer davantage de gains de productivité à moyen-terme . Il s'agit ici d'une mesure de bonne gestion, qui ne peut être qu'encouragée.

Le directeur général des finances publiques a par ailleurs indiqué qu'il souhaitait, dans le cadre de la négociation du nouveau contrat d'objectifs et de moyens avec la direction du budget, prévoir la possibilité de revenir sur la programmation en fonction du contexte inflationniste.

II. LES DIRECTIONS DE LA MISSION POURSUIVENT LES CHANTIERS ENTAMÉS SOUS LE QUINQUENNAT PRÉCÉDENT

Les rapporteurs spéciaux ont pu constater lors de leurs auditions que le principal mot d'ordre pour les administrations de la mission était de poursuivre les chantiers entamés ces cinq dernières années . Ces chantiers dits de transformation, s'ils ont pu être retardés par les effets de la crise sanitaire, n'ont pas été abandonnés et bénéficient, pour certains d'entre eux, notamment dans le domaine informatique, de crédits supplémentaires.

Dans l'ensemble, les rapporteurs spéciaux sont favorables aux réformes menées par ces directions : la plupart d'entre elles devraient aboutir entre 2023 et 2025. Au regard des gains de productivité attendus, les calendriers doivent impérativement être tenus pour faire des administrations du ministère de l'économie et des finances des administrations encore plus modernes et efficaces, au service des usagers. C'est d'ailleurs une fois ces chantiers terminés que la trajectoire des crédits et des emplois pourra être pleinement actualisée.

A. L'ADAPTATION DU RÉSEAU DE LA DGFIP ET DE LA DOUANE, DEUX CHANTIERS DISTINCTS QUI SE POURSUIVENT À DES RYTHMES DIFFÉRENTS

1. Pour la DGFiP, la poursuite d'une triple réforme de son réseau
a) Les trois volets du plan de réorganisation territoriale de la DGFiP

La transformation du réseau de la DGFiP fait partie des éléments jugés prioritaires dans le cadre du plan de transformation ministériel. Elle comprend la mise en place du « nouveau réseau de proximité » (NRP) et la délocalisation de certains services des métropoles vers les villes moyennes .

Le déploiement progressif, d'ici à 2022, du réseau des 1 200 conseillers aux décideurs locaux , qui ont vocation à devenir les interlocuteurs privilégiés des ordonnateurs des collectivités territoriales, s'inscrit en parallèle du NRP. La cible ne sera toutefois pas atteinte, après une montée en charge plus lente que prévue : 447 conseillers aux décideurs locaux sont entrés en fonction en 2021, ils devraient être environ 800 en 2022 et 1 013 à la fin de l'année 2023 4 ( * ) .

L'enquête menée par la DGFiP a démontré un haut niveau de satisfaction des élus locaux sur les prestations effectuées en 2021 par les conseillers aux décideurs locaux , avec un taux de satisfaction qui s'établirait à 87 %. Parmi les sollicitations de prestations en 2021, 82 % concernaient du conseil budgétaire et comptable, 52 % du conseil en matière de recettes, 44 % du conseil financier et du conseil en matière de dépenses, 37 % du conseil en réingénierie des processus, 34 % du conseil fiscal, 25 % du conseil économique et patrimonial et 19 % d'autres prestations 5 ( * ) .

Au-delà du niveau de satisfaction et de la progression du nombre de conseillers aux élus locaux, les rapporteurs spéciaux soulignent qu' une attention particulière doit être portée à leur répartition sur le territoire, afin que les communes rurales , souvent les moins à même de disposer d'une expertise technique en interne, puissent aisément recourir à ces conseillers.

b) Le nouveau réseau de proximité : un déploiement qui devrait finalement s'achever à la fin de l'année 2023, après un premier report

La rationalisation du réseau territorial de la DGFiP, par le biais de fusions ou de suppressions, est en oeuvre depuis plusieurs années : le réseau déconcentré de l'administration fiscale a connu une perte de ses emprises de près de 20 % entre 2015 et 2021 .

La méthode retenue a toutefois fait l'objet d'une inflexion en 2019, après plusieurs années de critiques de la part des élus locaux, des agents de l'administration, de la Cour des comptes et des parlementaires, notamment de la commission des finances. Ils estimaient que les suppressions et les fusions étaient faites « à vue », sans vision de long terme, au gré des résistances rencontrées sur place et sans projection sur les besoins et les effectifs.

Un processus de concertation a donc été lancé au début du mois de juin 2019 afin de définir, dans chaque département et par le biais d'une contractualisation, la nouvelle carte des implantations territoriales de la DGFiP. Réunissant les élus locaux, les directeurs départementaux des finances publiques et les préfets, il a mené à la mise en place du « nouveau réseau de proximité » (NRP), qui doit répondre à un double-objectif : poursuivre la rationalisation du réseau de la DGFiP, dont les métiers évoluent fortement, et renforcer la proximité de ces services publics. Le NRP ne se traduit pas pour autant par une interruption des fermetures de trésoreries ou de services d'impôt aux particuliers : le but n'est pas de préserver le réseau des sites permanents en l'état, mais de multiplier les points de contact à l'échelle d'un département .

Dans le cas du NRP, une charte est signée avec chaque département : elle décrit les services présents, y compris les conseillers aux décideurs locaux, les modalités de présence, l'offre de service, la contribution de la DGFiP au fonctionnement des accueils de proximité. Elle entérine également l' instauration d'un comité de suivi présidé par le directeur départemental des finances publiques et chargé de suivre la bonne application de ces dispositions.

Le déploiement du NRP, trois ans après le lancement de cette nouvelle approche, progresse, même s'il a fallu du temps pour que se concrétisent ses premiers apports et que le rythme est plus lent : au 13 juillet 2022, 47 chartes ont été signées avec des présidents de conseils départementaux , 617 avec des présidents d'établissements publics de coopération intercommunale et 72 avec des communes ou associations locales de maires 6 ( * ) . Ainsi, selon les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, la finalisation du NRP est désormais prévue pour la fin de l'année 2023 .

Le Gouvernement cible une augmentation des « points de contact mobiles » de 30 % , avec un accès à un accueil de proximité à moins de 30 minutes dans l'ensemble des cantons. Selon les données transmises aux rapporteurs spéciaux par le ministre de la transformation et de la fonction publiques, M. Stanislas Guérini, 92 % de la population française se situe désormais à moins de 20 minutes d'un accueil de proximité et 98 % à moins de 30 minutes .

D'après le sous-indicateur de performance dédié à cet objectif, la DGFiP devrait attendre, d'ici la fin de l'année 2023 , l'objectif qu'elle s'était fixée d'augmenter de 30 % le nombre de communes dans lesquelles elle dispose d'un accueil de proximité par rapport à 2019, soit 2 570 communes . En tenant compte des relocalisations de services (cf. infra ), la DGFiP serait même présente dans 2 844 communes à la fin de l'année 2022, sans compter la nouvelle vague de labellisation de maisons France Services qui devrait intervenir au mois d'octobre . Le déploiement des points de contact s'accompagne en outre de la mise à disposition, en ligne, d'une carte interactive , avec plus de 15 000 points de contact déjà géo-localisés.

Il faut toutefois bien distinguer ce que recouvrent ces points de contact, entre le passage d'un bus itinérant ou la tenue d'une permanence une demi-journée par semaine. Les rapporteurs spéciaux ont eu l'occasion ces dernières années de rappeler que les objectifs d'accueil ne pouvaient pas être seulement quantitatifs, en affichant des points sur la carte : la qualité du service doit être préservée, et conciliée à un maillage fin du territoire.

Certains de nos concitoyens sont en effet dans l'incapacité d'effectuer leurs démarches par internet et les services sont difficilement joignables par téléphone : dans ce contexte, il faut conserver un accueil physique des contribuables. Dans une étude commandée en octobre 2019 par le ministère de l'économie et des finances à BVA sur la perception du nouveau réseau de proximité par les habitants d'unités urbaines de moins de 35 000 habitants, les personnes de plus de 65 ans indiquaient ainsi que passer par internet était pour eux beaucoup plus difficile et ne constituait donc pas leur mode de contact privilégié.

De ce point de vue, il semble peut-être plus prometteur de garantir, y compris par un rehaussement de son effort humain et financier, la proximité des services publics par la participation de la DGFiP au réseau des Maisons France Services (MFS), que ce soit par une présence effective ou par des activités de formation à destination des animateurs de ces maisons, afin qu'ils puissent répondre aux interrogations les plus simples des contribuables, ou tout du moins les orienter. Comme le précise la Charte nationale d'engagement France Services, le rôle de ces maisons est d'assurer « une information de premier niveau en matière de fiscalité des particuliers » et d'orienter les usagers vers les interlocuteurs compétents, qui pourront ensuite recourir à des référents locaux, qui tiendront lieu de back office .

c) La relocalisation des services publics : un calendrier publié tardivement

Auparavant dénommée « démétropolisation », la relocalisation de certains services publics des métropoles vers les territoires périurbains et ruraux a été inscrite comme un objectif prioritaire à l'issue du quatrième comité interministériel de la transformation publique, le 15 novembre 2019 7 ( * ) . Si l'ensemble des administrations de l'État sont concernées, la DGFiP devrait être le contributeur le plus important à ce processus : 2 542 agents seront concernés, sur un objectif total de 6 000 emplois d'État transférés.

Après un appel à candidatures lancé au mois d'octobre 2019, 50 premières villes ont été choisies au mois de septembre 2020, puis 16 autres au mois de décembre , sur plus de 408 candidatures. Trois critères ont conduit à leur sélection : la capacité immobilière de la ville, l'existence de compétences métiers et la situation géographique (bassin d'emploi dynamique, proximité avec le service de la métropole dont l'activité est transférée) 8 ( * ) .

Le calendrier a donc finalement été publié et finalisé au début de l'année 2021 : les transferts sont effectués par étape et regroupements successifs, parfois sur deux à trois ans, et peuvent évoluer au cours du temps. Alors que, l'an dernier, la DGFiP annonçait le déménagement de 25 services et de 905 effectifs, en prévisionnel, ce sont finalement 1 200 personnels qui seraient concernés d'ici la fin de l'année 2022 , sur 47 nouveaux services créés et installés dans 44 communes . Après quelques délais dans la mise en oeuvre de la relocalisation des services publics, le déploiement s'avère finalement plus dynamique qu'anticipé - les efforts de la DGFiP en ce sens devant être salués.

Calendrier du programme de « relocalisation »
des services de la DGFiP

* le nombre de services concernés n'est pas définitif

** le nombre de services n'est pas encore connu

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux 9 ( * )

Par ailleurs, et contrairement aux inquiétudes qu'avait pu susciter la réforme, y compris de la part des rapporteurs spéciaux, il n'a pas encore été trop difficile de trouver les agents nécessaires pour occuper ces postes . Le taux de vacance serait de 8 %, la DGFiP pouvait s'appuyer sur des demandes de mutation, sur les sorties d'école et sur le recrutement de contractuels.

Les dispositifs visant à encourager la mobilité des agents

De nouveaux outils ont été développés au sein de l'administration pour encourager les mobilités et accompagner la transformation du réseau et des métiers.

Peuvent tout d'abord être distingués les dispositifs indemnitaires :

- la prise en charge des frais de changement de résidence (1986) ;

- l'accompagnement indemnitaire de la mobilité consécutive à une opération de restructuration (2019). Il vient en complément de la prime de restructuration (2008), de l'allocation d'aide à la mobilité du conjoint, fixé forfaitairement à 7 000 euros (2008) et du complément indemnitaire d'accompagnement (2014) ;

- l'indemnité d'accompagnement à la mobilité fonctionnelle (2019), versée à l'issue d'une formation professionnelle ;

- le bénéfice de l'ancien emploi (2019). Si un fonctionnaire perd son emploi fonctionnel du fait d'une nouvelle organisation des services et est nommé sur un nouvel emploi fonctionnel, il conserve, s'il y a intérêt et pendant cinq ans, le bénéfice des dispositions régissant leur ancien emploi et l'ensemble des primes et indemnités y afférant ;

- les indemnités de départ de la fonction publique : indemnité de départ volontaire (2008) ou rupture conventionnelle (2019) ;

- les indemnités visant à accompagner et encourager la mobilité des agents publics dans certains territoires ou pour pourvoir certains emplois : indemnité temporaire de mobilité (mobilité fonctionnelle ou géographique), primes d'attractivité et de fidélisation territoriales.

Parmi les autres dispositifs, se trouvent un accompagnement RH des agents touchés par les restructurations (priorité de mutation ou de détachement, droit à l'accompagnement personnalité, formation professionnelle, congé de transition professionnelle), ainsi qu'une amélioration de l'information des agents (amélioration de l'espace « Place de l'emploi public » pour donner davantage de visibilité à l'ensemble des offres à pourvoir dans la fonction publique).

Dans ce contexte, et de manière globale sur le projet NRP, la DGFiP a bénéficié d'un cofinancement à hauteur de 50 % du Fonds pour l'accompagnement interministériel RH, soit 10,3 millions d'euros en 2021 . Dans le cadre de la réintégration des crédits du Fonds au sein du programme 148, la DGFiP a continué à bénéficier d'un cofinancement, qui devrait s'élever à 12,7 millions d'euros en 2022 .

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Parmi les principaux services concernés par la relocalisation figurent la mise en place d'antennes de services d'impôt pour les entreprises, de centres d'appels mais également une vingtaine de services d'appui à la publicité foncière, qui traiteront à distance une partie de l'activité des services de publicité foncière des grandes villes afin de les désengorger. La création de centres d'accueil téléphonique est tout à fait bienvenue pour pallier les effets de la dématérialisation croissante des démarches sur certains publics vulnérables ou dont la situation ne correspond pas aux situations les plus communes.

2. Pour la Douane, au-delà de ses bureaux, une réflexion à mener sur ses emprises immobilières dédiées au logement des agents

Au sein de la DGDDI, la réorganisation du réseau se traduit d'abord par un basculement géographique : alors que des emprises régulières sont allégées dans les départements de l'est et du sud de la France, d'autres structures sont créées au nord de la France, afin d'adapter aux conséquences du Brexit le réseau douanier dans les Hauts-de-France, en Normandie et en Bretagne-Pays de la Loire. Pour citer la directrice des douanes lors de son audition, les Hauts-de-France sont devenus la nouvelle frontière « physique » de la France et, plus généralement, de l'Union européenne.

La Douane a également entamé une réflexion sur l'établissement public administratif de la « Masse des douanes » , qui a pour mission principale de pourvoir au logement des agents de la DGDDI. Il a fait l'objet d'importantes critiques de la Cour des comptes, qui a qualifié le parc immobilier de vétuste et de peu adapté aux besoins des agents, avec un taux de vacance bien plus élevé que dans le parc immobilier social national 10 ( * ) .

Or, comme le soulignaient les rapporteurs spéciaux dans leurs travaux de contrôle sur la Douane face au trafic de stupéfiants 11 ( * ) , une rationalisation des emprises de la Masse des douanes ainsi qu'une révision de la politique de logement de la Douane devraient permettre de dégager des économies supplémentaires sur le fonctionnement de la DGDDI , économies qui pourraient être redéployées au profit de l'acquisition de matériels de pointe et de la modernisation des systèmes d'information de la Douane. En effet, si la Douane veut s'affirmer pleinement comme l'administration de la frontière et des marchandises, comme elle le défend dans le cadre de sa stratégie 2022-2025, elle doit disposer d'équipements techniques performants et adaptés au contrôle de flux de plus en plus importants et d'une frontière qui est désormais autant terrestre que maritime, aérienne et numérique .

B. LE TRANSFERT DES MISSIONS FISCALES DE LA DOUANE À LA DGFIP SE POURSUIT, AVEC UN DIALOGUE CONSTANT ENTRE LES DIRECTIONS

Le transfert à la DGFiP de la gestion, du recouvrement et du contrôle de la plupart des taxes et produits relevant aujourd'hui de la DGDDI fait également partie des objectifs prioritaires de modernisation du ministère . L'article 184 de la loi de finances pour 2020 12 ( * ) a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures permettant d'assurer le transfert de diverses taxes sur les véhicules, de diverses taxes sur les produits énergétiques, des droits d'accises et des amendes de nature autre que fiscale. Depuis, le champ du périmètre des taxes et impositions transférées de la DGDDI à la DGFiP a été étendu et les modalités de transfert précisées.

En effet, le transfert du recouvrement vers la DGFiP ne doit pas s'appréhender comme une reprise « tels quels » des modes d'organisation de la Douane dans le domaine fiscal. L'administration fiscale entend ainsi intégrer les nouvelles taxes ou impositions qu'elle reçoit à sa propre organisation, en les rattachant à des « pôles » ou à des projets, avec l'objectif affiché d'obtenir des gains d'échelle et de temps. Pour conserver une expertise métier, la DGFiP a néanmoins indiqué qu'elle serait amenée à proposer à une partie des douaniers chargés de la gestion des impositions 13 ( * ) d'intégrer l'administration fiscale. Surtout, les agents de la Douane conserveraient certaines compétences de contrôle, par exemple sur les produits soumis à l'accise sur les carburants 14 ( * ) .

Le processus de transfert est complexe et doit s'opérer sans pour autant fragiliser ni les recettes ni les procédures de contrôle propres à chaque imposition. Pour chaque taxe, une série d'ateliers et de comités opérationnels est donc organisée, pour définir notamment les compétences en matière de gestion et de contrôle, et l'étude des raccordements des systèmes d'information. La question du transfert des restes à recouvrer, abordée par les rapporteurs spéciaux l'an dernier, a fait l'objet d'un premier dispositif adopté en loi de finances pour 2022 15 ( * ) , et d'ajustements dans le cadre du présent projet de loi 16 ( * ) .

Les documents budgétaires donnent désormais des informations plus précises sur les conséquences des transferts pour les effectifs, même s'il peut être difficile de les apprécier pour l'avenir. En 2022, ce sont 198 ETP qui seraient transférés de la Douane vers la DGFiP et vers la direction des affaires maritimes, contre une prévision de 144 ETP initialement. En 2023, le transfert est fixé à un niveau forfaitaire de 35 ETP mais devrait certainement évoluer.

Tous les emplois concernés par le transfert des missions fiscales de la Douane ne sont pas supprimés, certains sont redéployés vers des métiers ou des bureaux en tension, par exemple pour la surveillance ou pour des missions commerciales. Ce fut le cas pour les effectifs du bureau de Nice-port, dédié à la gestion de la taxe générale sur les activités polluantes. Plus généralement, sur les 191 agents de la Douane affectés par le transfert de missions fiscales à la DGFiP en 2022, 168 ont bénéficié d'une solution de reclassement au 22 juillet 2022 : 102 dans le cadre de bourses d'emploi, 26 en détachement, un en intégration directe, deux en promotion, 17 en mutation, 17 en retraite, 3 en rupture convention. Parmi eux, 16 agents sont accueillis par la DGFiP au titre des missions transférées en 2022 . Les 23 agents restants à reclasser ont été répartis dans 14 services.

C. L'INFORMATIQUE ET LA VALORISATION DE LA DONNÉE, DEUX PRIORITÉS À LA FOIS BUDGÉTAIRES ET STRATÉGIQUES

1. La valorisation de la donnée, un impératif pour renforcer l'efficacité de la lutte contre la fraude
a) Les résultats du contrôle fiscal marquent un net rebond en 2021

Si les rapporteurs spéciaux s'intéressent traditionnellement au résultat du contrôle fiscal, une mission qui implique pleinement l'administration fiscale mais aussi la Douane, ils feront ici écho aux travaux de la mission d'information de la commission des finances sur la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales 17 ( * ) .

Après plusieurs années de baisse inquiétante des résultats du contrôle fiscal, l'année 2019 a marqué un net rebond, les recettes du contrôle fiscal ayant atteint 11 milliards d'euros , auxquels s'ajoutaient 385 millions d'euros du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) et 550 millions d'euros générés par les conventions judiciaires d'intérêt public (CJIP), respectivement conclues par Google (500 millions d'euros) et Carmignac (50 millions d'euros). En 2018, la faiblesse des résultats (9,4 milliards d'euros) avait été très critiquée par les rapporteurs spéciaux, d'autant que les recettes étaient en baisse pour la troisième année consécutive.

Les résultats pour l'année 2020 ont, eux, mécaniquement été affectés par la crise sanitaire. Le rendement budgétaire du contrôle fiscal a atteint 7,8 milliards d'euros en 2020 : c'est certes inférieur de plus de 40 % au résultat observé en 2019 , mais c'est le même niveau que celui constaté en 2018 . Il est donc raisonnable de conclure que l'efficacité du contrôle fiscal s'est plutôt renforcée ces dernières années.

En 2021, les montants recouvrés au titre du contrôle fiscal ont atteint 10,7 milliards d'euros , retrouvant quasiment leur niveau de 2019.

Évolution des montants encaissés au titre du contrôle fiscal

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après le rapport de la mission d'information de la commission des finances sur la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales

b) La valorisation de la donnée, un enjeu majeur pour la lutte contre la fraude
(1) La mission requêtes et valorisation (DGFiP)

Le contrôle fiscal a connu ces dernières années une transformation profonde de ces outils, avec un recours accru à l'intelligence artificielle ainsi qu'à l' exploitation des données de masse ( datamining , text-mining ). Cet axe fait lui aussi partie des 26 chantiers inscrits dans le plan de transformation ministériel. Ces nouvelles techniques sont au coeur des objectifs affichés par le Gouvernement, qui entend mettre à profit ces outils pour poursuivre le redressement des résultats du contrôle fiscal . Ils doivent permettre de détecter des cas de fraude plus complexe et plus sophistiquée, tout en amélioration la programmation des contrôles 18 ( * ) .

À la fin de l'année 2021, 44,1 % des opérations de contrôle fiscal ont été programmées par le biais du datamining , soit une nette progression par rapport à 2020 (32,5 %) et 2019 (22 %), la cible de 50 % en 2023 étant plus qu'atteignable. Son efficacité progresse également : le montant des droits et pénalités rappelés sur l'année 2021 sur les contrôles ciblés par intelligence artificielle s'est élevé à 1,2 milliard d'euros, un montant nettement supérieur à celui encaissé en 2020 (794 millions d'euros) et en 2019 (785 millions d'euros).

Ces résultats sont positifs et illustrent ainsi la montée en puissance des nouvelles techniques d'analyse de la donnée, alors que les agents chargés du contrôle fiscal reçoivent des flux de données de plus en plus volumineux. L'information du Parlement sur le recours et l'efficacité du datamining demeure toutefois imparfaite. À l'instar de ce qui est inscrit dans les recommandations de la mission d'information de la commission relative à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales 19 ( * ) , les rapporteurs spéciaux souhaiteraient que soient prévus, dans les documents budgétaires, des sous indicateurs portant sur le taux de dossiers sélectionnés par la programmation centralisée ( datamining ) et ayant conduit, d'une part, au recouvrement de droits et pénalités et, d'autre part, à des contentieux à « enjeux » ou particulièrement complexes. Il existe en effet une incertitude quant à la capacité des traitements déployés à pouvoir déceler des schémas de fraude complexe, le plus souvent appuyés sur des montages transfrontaliers.

(2) Le service d'analyse de risque et de ciblage (DGDDI)

La Douane a également développé son propre service à compétence nationale dédié au traitement des données, le service d'analyse de risque et de ciblage (SARC).

Le service d'analyse de risque et de ciblage (SARC)

Le SARC, service à compétence nationale, a été créé par un arrêté du 29 février 2016. Entré en fonction en 2016, il est chargé de la production de l'intégralité des analyses de risque et études à vocation opérationnelle portant sur l'avant dédouanement, le dédouanement et la fiscalité. Il dispose également d'une cellule datascience chargée de valoriser les données douanières dans la lutte contre la fraude. Le SARC a une vocation directement opérationnelle : l'intégration des profils de ciblage dans l'outil Risk management system (RMS) ; l'orientation des contrôles ex-post 1et ex-post 2 grâce à l'attribution des dossiers aux services concernés par le type de risque préalablement identifié. Le SARC est composé de cinq cellules de travail spécialisées : sûreté-sécurité ; protection des intérêts financiers ; protection du consommateur et datamining et fiscalité.

Source : réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Ces outils seront plus que nécessaires pour la Douane, avec l'entrée en vigueur depuis le 1 er juillet 2021 du paquet européen relatif à la TVA sur le commerce électronique. La règlementation européenne a en effet mis fin à l'exonération de TVA sur les envois à valeur négligeable (EVN - inférieurs à 22 euros en France) au profit d'un dispositif de guichet unique pour les biens de moins de 150 euros importés de pays ou de territoires tiers. L'exonération sur les EVN constituait en effet un ressort important de fraude à la TVA, la Cour des comptes parlant de « fraudes sans doute massives pour les envois en provenance des pays extra-européens » 20 ( * ) , ce qu'Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier avaient déjà montré en 2013 21 ( * ) .

Conséquence néanmoins, la Douane doit faire face à un afflux massif de déclarations, accru par la très forte progression du commerce électronique depuis le début de l'épidémie de covid-19 et impossible à contrôler individuellement . Selon le ministère de l'économie, des finances et de la relance, ce sont plus de 450 millions de déclarations électroniques en douane qui pourraient être faites, contre 15 millions aujourd'hui 22 ( * ) .

Dans le cadre des travaux qu'elle mène sur son schéma directeur informatique, la Douane a identifié trois grandes priorités parmi l'ensemble des projets informatiques qu'elle mène : la refonte du dédouanement , la valorisation de la donnée et la lutte contre la fraude . L'ensemble du système d'information relatif à la lutte contre la fraude est en train d'être reconstruit afin d'améliorer la traçabilité des produits concernés et de pouvoir, par exemple, constituer une base de données et d'images des « positifs » , c'est-à-dire des colis dans lesquels ont été trouvées des marchandises illicites ou des colis par lesquels ont été expédiées des marchandises sans que les parties à la transaction ne se soient acquittées de la TVA.

2. Les projets informatiques, tout à la fois essentiels au regard des missions des administrations et très complexes à gérer et entretenir au quotidien

Les rapporteurs spéciaux l'ont rappelé, les enjeux informatiques de la DGFiP et de la DGDDI sont particulièrement élevés . Les deux directions assument des missions essentielles au bon fonctionnement de l'État , en assurant le recouvrement de ses ressources et la gestion d'une partie de ses dépenses. À cela s'ajoute pour la DGDDI la gestion d'un service de cloud au profit de plusieurs administrations, pour un coût d'hébergement d'environ 9 000 euros par baie.

Depuis le projet de loi de finances pour 2020, les rapporteurs spéciaux ont relevé un changement d'approche bienvenu sur les dépenses informatiques de la mission , qui avaient eu trop tendance à être considérées comme une variable d'ajustement, dans un contexte budgétaire contraint à l'échelle de la mission. Pourtant, ces dépenses, d'investissement comme de fonctionnement, sont destinées à soutenir et à améliorer des systèmes d'information primordiaux dans la vie quotidienne des citoyens et des agents économiques. Il en va ainsi du prélèvement à la source, des projets destinés à améliorer l'efficience du contrôle fiscal, de la préparation au Brexit via la mise en place du système de frontière intelligente (cf. supra ).

Une partie des crédits informatiques est également dédié à l'équipement des agents et au déploiement du travail, à la suite de l'accord intervenu avec les organisations syndicales au sein du ministère. Le secrétariat général du ministère de l'économie et des finances porte d'ailleurs, sur le programme 218, un nouveau fonds d'accompagnement du télétravail, qui comprendra un volet dédié à l'évaluation des conséquences du télétravail sur le fonctionnement des services .

L'effet est très net sur le ratio d'efficience bureautique 23 ( * ) , qui a connu une forte hausse en 2020 (921 euros, contre 750 euros en prévision) et se stabilise à un niveau élevé depuis 2021 (850 euros). Les matériels nomades sont plus coûteux et ont une durée d'amortissement moindre que les matériels fixes, conduisant de fait à accroître ce ratio. Certes, il est dommage que l'amélioration de l'équipement des agents se soit faite à « marche forcée », en réponse aux circonstances exceptionnelles liées à l'épidémie de covid-19, mais l'effort du secrétariat général en la matière doit être souligné : le taux d'équipement des agents s'élevait à 22 % seulement au début de l'année 2020 . Fin 2020, 82,1 % des agents en administration centrale étaient dotés d'un matériel nomade , 91,1 % à la fin de l'année 2021 et 96 % en prévisionnel pour la fin de l'année 2022 . Au sein de la DGFiP, le seuil d'équipement de 100 % des agents pouvant et souhaitant être en télétravail a été atteint à l'été 2021.

Pour autant, les rapporteurs spéciaux constatent, comme chaque année, la même difficulté de suivi des projets informatiques, avec des dépassements importants de calendrier et de coût . Ils continuent de demander chaque année si les schémas directeurs informatiques mis en place ou en cours de discussion intègrent suffisamment cette dimension et s'il ne serait pas opportun de mettre en place des mécanismes d'alerte en cas de dérapage avéré des coûts et des délais , actualisés à la hausse à chaque projet de loi de finances.

Évolution des coûts et des délais des principaux projets informatiques
portés par les programmes 156 et 218

(en euros et en mois)

GMBI - Gérer mes biens immobiliers : service en ligne pour les usagers particuliers comme professionnels et offrant une vision d'ensemble des propriétés bâties sur lesquelles l'usager détient un droit

Nouveau réseau de proximité : modernisation de l'outil de gestion des implantations de la DGFiP sur le territoire

PAYSAGE : consolidation de l'application de paye des agents de l'État

PILAT : pilotage du contrôle fiscal, afin de transformer le système d'information relatif à la chaîne du contrôle fiscal et « décloisonnés » les informations

RocSP : recouvrement optimisé des créances de la sphère publique, dans le but d'unifier progressivement le recouvrement forcé des différents types de créances de la sphère publique

SIRANO: rénovation du système d'information décisionnel de Tracfin

TNCP - commande publique : proposition d'une offre de services numériques permettant de dématérialiser de bout en bout la chaîne de la commande publique

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

En parallèle, et cette fois-ci dans une optique de contrôle a posteriori, les documents budgétaires pourraient chiffrer , ou à tout le moins quantifier, dans la mesure du possible, les gains de productivité liés à la mise en oeuvre de ces projets. Une partie de ces données est disponible puisqu'un tel exercice a été fait sur le portail commun de recouvrement fiscal, social et douanier dans le cadre du bilan des réformes de productivité de l'action publique 24 ( * ) publié au mois d'octobre 2021. Ce bilan présente à la fois les économies directes attendues à court terme (diminution des dépenses d'affranchissement), les économies indirectes (interruption d'autres projets sectoriels en faveur du projet commun) et les économies escomptées à long terme (amélioration des taux de recouvrement).

D. LE DÉVELOPPEMENT DE FONCTIONS ET DE DÉMARCHES SUPPORT SOUS L'ÉGIDE DU SECRÉTARIAT GÉNÉRAL

1. La politique d'achat de l'État

Sur la fonction achat, le ministère a adopté à la fin du mois de septembre 2020 le plan interministériel d'achats , qui vise à terme une économie d'un milliard d'euros sur les achats de l'État. Ce plan sera opéré par la direction des achats de l'État, sans cible prédéterminée d'économies par ministère.

La mutualisation des achats constitue en effet un gisement d'économies significatif , que ce soit sur la négociation des contrats d'entretien ou de nettoyage ou sur l'achat « en gros », à rebours de la logique d'achats par « petits blocs », plus coûteuse pour l'État.

En valeur absolue, le niveau des économies s'est avéré plutôt décevant jusqu'ici, avec une diminution entre 2019 (270 millions d'euros) et 2021 (216 millions d'euros), même si la crise sanitaire a pu ralentir les progrès constatés (133 millions d'euros en 2018).

Cette logique de mutualisation doit pourtant être maintenue : elle participe de surcroît de la professionnalisation de la fonction achat au sein de l'État, toutes les fonctions support ne pouvant présenter un bilan aussi encourageant. La gestion de l'immobilier de l'État par exemple continue de présenter des lacunes, avec un manque de compétences spécialisées et une absence de personnels dédiés et formés au sein de chacune des administrations.

2. Les ressources humaines

Quant au volet ressources humaines, le SG est chargé de la mise en oeuvre de la loi de transformation de la fonction publique 25 ( * ) au sein du ministère : la refonte des instances de dialogue social, la définition des modalités d'accompagnement des mobilités professionnelles ou encore la promotion de l'égalité hommes-femmes et des personnes en situation de handicap sont ainsi conduites sous l'égide du secrétariat général. Au regard du nombre d'emplois rattachés au ministère de l'économie et des finances, et du niveau des dépenses de personnel sur la mission, la gestion des ressources humaines est en effet un enjeu de premier plan.

C'est en s'appuyant sur ce cadre que le secrétariat général a conduit une réflexion sur le recrutement des compétences rares , afin d'harmoniser les procédures applicables à l'ensemble des administrations du ministère et à appliquer le référentiel mis en place par la direction interministérielle du numérique (Dinum) pour éviter la concurrence entre administrations. Si la grille des rémunérations est donc fixée par la Dinum, le secrétariat général demeure compétent pour travailler sur les autres volets de l'attractivité des métiers du ministère de l'économie et des finances : développement de la « marque employeur », perspective de carrières décloisonnées, facilitation des recrutements.

Rapidité du recrutement, salaires et carrières sont en effet les trois aspects sur lesquels la fonction publique est moins compétitive que le secteur privé . Ce sont les trois points mis en exergue par la Cour des comptes dans un chapitre de son rapport public annuel 2020 consacré au recrutement des personnels qualifiés pour réussir la transformation numérique 26 ( * ) . Elle relève que des marges de progrès demeurent pour que le ministère de l'économie, des finances et de la relance parvienne à s'assurer à long-terme un vivier de compétences. Un an après avoir attiré l'attention sur ce point, les rapporteurs spéciaux relèvent que les progrès sont encore limités, en dépit d'objectifs ambitieux . La DGFiP s'était ainsi fixé la cible de 100 contractuels détenant des compétences rares d'ici 2022 27 ( * ) .

3. La démarche « Bercy Vert », au service du plan d'action climat du ministère de l'économie et des finances

Le secrétariat général du ministère de l'économie et des finances poursuit enfin la démarche « Bercy Vert », débutée avant la guerre en Ukraine et la crise énergétique. Le portage par le secrétariat général fait ici sens, l'objectif étant de fédérer l'ensemble des administrations et des agents autour des sept objectifs que sont : 1) la réduction de la consommation énergétique des bâtiments ; 2) l'encouragement aux mobilités douces et alternatives aux énergies fossiles ; 3) le développement des achats responsables ; 4) le développement du numérique éco-responsable ; 5) l'application des principes de l'économie circulaire et le soutien à l'économie solidaire ; 6) le verdissement des espaces et la protection de la biodiversité ; 7) la formation et la sensibilité des agents aux éco-gestes 28 ( * ) .

Le secrétariat général peut s'appuyer, pour les soutenir, sur le Fonds pour la transformation ministériel (FTM) , pérennisé dans le cadre du présent projet de loi de finances. Lors du premier appel à projets, le secrétariat général a reçu 600 réponses , le plus souvent des propositions nécessitant des investissements modestes mais aux effets décuplés .

Le ministère a également répondu à l'appel de la direction de l'immobilier de l'État sur l'enveloppe « Résilience », dotée de 50 millions d'euros en 2022 (cf. infra ). Il avait obtenu une première tranche de six millions d'euros et entend bien présenter de nouveaux projets sur la seconde enveloppe, dotée de 150 millions d'euros dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023. Il sera également le premier à pouvoir établir son bilan d'émissions de gaz à effet de serre sur l'ensemble du périmètre ministériel.

Si ces actions ont parfois pu sembler un peu artificielles lors de leur présentation, en l'absence de données sur les processus d'évaluation mis en place, force est de constater de premiers effets visibles sur les administrations de la mission « Gestion des finances publiques » .

En dépit de son aspect hétéroclite, avec des actions publiques relevant davantage de déclarations d'intention aux niveaux national (utiliser le levier de la commande publique, protéger les consommateurs, orienter les soutiens à l'exportation, développer l'émission d'obligations vertes), européen (contribuer à la mise en place d'un mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, mettre en place le pacte vert pour l'Europe) et international (participer activement aux réflexions au niveau du Fonds monétaire international, mobiliser la finance climat en vue de la COP26), le plan d'action climat du ministère 29 ( * ) a donc conduit à la mise en oeuvre d' actions très concrètes. Internes au ministère, et sous la responsabilité du secrétariat général, ces actions se sont développées dans le cadre du plan « Bercy Vert », et pour répondre à la circulaire du Premier ministre sur les engagements de l'État pour des services publics écoresponsables 30 ( * ) . Le secrétariat général doit ainsi également veiller à l'avancement de chacune des 20 mesures de la circulaire du Premier ministre , par le biais d'un outil de suivi spécialement créé à cet effet, et animer des groupes de travail, afin de favoriser le partage des bonnes pratiques.

DEUXIÈME PARTIE
LA MISSION « CRÉDITS NON RÉPARTIS »

L'article 7 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) prévoit l'existence d'une mission, qui correspond à la mission « Crédits non répartis », composée de deux dotations. Aussi les programmes 551 et 552 de cette mission correspondent-ils respectivement à la dotation pour la « provision relative aux rémunérations publiques » et à la dotation pour « dépenses accidentelles et imprévisibles » . Les crédits de paiement de cette mission sont habituellement faibles, l'essentiel des dépenses de l'État devant être réparti par mission, en vertu du principe de spécialité budgétaire , établi par le même article 7 . Conformément à l'article 11 de la LOLF, ces dotations sont réparties dans les missions du budget général en cours de gestion et en tant que de besoin par voie réglementaire, sur le rapport du ministre chargé des finances. Si des crédits sont systématiquement inscrits pour le programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » , compte tenu de la nature particulière des dépenses qu'il est censé couvrir, le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques » fait en revanche plus rarement l'objet d'une ouverture de crédits. Toutefois, des crédits ont été demandés sur cette provision lors des six dernières discussions budgétaires.

Évolution des crédits de paiement par programme

(en millions d'euros)

Crédits de paiement ouverts en LFI / demandés en PLF

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques »

0*

52,75

16

198,5

423,7

80

Programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles »

124

124

124

124

124

1774

*En PLF 2018, les crédits initialement demandés avaient été répartis avant le vote final du texte

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

I. LA PROVISION RELATIVE AUX RÉMUNÉRATIONS PUBLIQUES

A. DES CRÉDITS DESTINÉS AU FINANCEMENT DU « FORFAIT MOBILITÉS DURABLES » ET À LA RÉFORME DE LA HAUTE FONCTION PUBLIQUE

De même que les PLF pour 2018 à 2022, le PLF pour 2023 prévoit une ouverture de crédits sur le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques ». Cette demande de crédits s'élève à 80 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement , contre 423,7 millions d'euros votés en LFI pour 2022, soit une baisse de 81,2 % .

1. Le financement de l'extension du « forfait mobilités durables »

Cette dotation vise tout d'abord à financer l'évolution du « forfait mobilités durables » (FMD) . Ce dispositif a été créé par la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019 31 ( * ) afin d'encourager le recours à des modes de transports alternatifs et durables. Les agents publics qui font le choix à ces modes de transport peuvent ainsi bénéficier d'un forfait de 200 euros par an.

Une extension du « forfait mobilité durable » a en effet été annoncée dans le cadre du rendez-vous salarial de la fonction publique du 28 juin 2022. Il pourra ainsi être cumulé avec le remboursement partiel d'un abonnement de transport en commun et sera par ailleurs accessible aux agents dont le nombre de déplacements annuels en vélo ou covoiturage est inférieur à 100 jours , contrairement à ce qui était prévu dans le dispositif précédent.

2. La réforme de la haute fonction publique nécessite des mesures de convergences indiciaires et indemnitaires financées par le programme

La provision relative aux rémunérations publiques aura par ailleurs vocation à financer les mesures de convergence des régimes indiciaires et indemnitaires résultant de la constitution du nouveau corps d'administrateurs de l'État , créé dans le cadre de la réforme de la fonction publique issue de l'ordonnance du 2 juin 2021 32 ( * ) .

Le corps des administrateurs de l'État comprend actuellement, et depuis sa création le 1 er janvier 2022, les corps des administrateurs civils et des conseillers économiques. Une seconde vague d'intégration doit avoir lieu le 1 er janvier 2023, pour l'ensemble des corps restant, à l'exception des corps juridictionnels, ce qui conduira à une évolution des régimes indiciaires et indemnitaires des fonctionnaires concernés.

B. UN RECOURS À CETTE DOTATION QUI INTERROGE DANS SON PRINCIPE, ET QUI S'ACCOMPAGNE D'UN MANQUE D'INFORMATION REGRETTABLE

1. Une dérogation au principe de spécialité budgétaire qui est aujourd'hui devenu systématique

Comme les années passées, l'ouverture de crédits sur le programme 551 pour financer des mesures de revalorisation indemnitaire peut interroger, alors même que celles-ci ont été décidées depuis plusieurs mois. Il semble désormais assez clair que le recours à cette dotation est aujourd'hui devenu systématique. Ce constat est confirmé par les prévisions indicatives pour les exercices 2024 et 2025, élaborées dans le cadre la présentation de la loi de programmation des finances publiques pour la période 2023-2027, et présentées dans le projet annuel de performance (PAP). Elles font état d'une estimation de 190 millions d'euros en AE et en CP, soit le double du montant demandé en 2023, sans toutefois donner la moindre indication sur la méthodologie ayant poussé à retenir ces montants.

Même si elle représente un montant infime par rapport aux dépenses totales de l'État, cette dotation déroge au principe de spécialisation des crédits , et il n'est jamais satisfaisant que l'affectation de crédits de titre 2 demeure ainsi inconnue jusqu'à la fin des débats parlementaires . Cette absence de répartition peut même se prolonger bien au-delà de la discussion parlementaire, puisque les crédits prévus pour l'année 2022 sur cette dotation n'ont pour l'instant fait l'objet que d'une répartition partielle et tardive , par l'arrêté du 25 octobre 2022 33 ( * ) , soit près de 10 mois après le vote de la LFI pour 2022, et pour un montant de 329,7 millions d'euros, contre 423,7 millions d'euros initialement ouverts en LFI.

Les rapporteurs spéciaux ne peuvent donc qu'inviter le Gouvernement à entreprendre au plus vite la répartition de ces crédits, afin de garantir une meilleure information du Parlement .

2. Une information sur l'estimation du montant des mesures financées qui demeure lacunaire

Il est par ailleurs regrettable, au regard de la systématisation du recours à cette dotation , de constater le caractère lacunaire des informations transmises par le Gouvernement au Parlement sur ces mesures. Il convient par exemple de souligner que les réponses au questionnaire budgétaire ne consistent en effet chaque année qu'à une reprise mot pour mot des éléments transmis dans le projet annuel de performances (PAP).

Ainsi, ni les documents budgétaires, ni les réponses au questionnaire budgétaire ne détaillent la ventilation des crédits entre les différentes mesures . En effet, et comme c'était déjà le cas l'an dernier, aucune de deux mesures financées au titre de ce programme ne fait l'objet d'une estimation précise de son coût.

Le Gouvernement a toutefois transmis des éléments permettant de justifier ces difficultés d'estimation , ce qui constitue une progression par rapport la budgétisation précédente.

Il serait en effet difficile d'estimer aujourd'hui le coût budgétaire du cumul du forfait mobilités durables et de l'indemnité liée aux frais de transport en commun, dans la mesure où il impliquera une augmentation du nombre de bénéficiaires dans des propositions difficiles à évaluer. Le Gouvernement s'est également efforcé de fournir un ordre de grandeur du coût du forfait mobilités durables au regard de son périmètre actuel, qui s'élève pour l'instant, pour l'année en cours 34 ( * ) , à 15,52 millions d'euros pour un total de près de 76 000 ETPT concernés .

S'agissant de la réforme de la haute fonction publique, la dotation ne peut être déterminée avec précision car les règles de reclassement de la seconde vague d'intégration dans le corps des administrateurs de l'État, et le nouveau régime indemnitaire qui en découlera, ne sont pas encore définitivement fixés.

En dépit de ces justifications, et bien que les montants en cause soient modestes à l'échelle du budget de l'État, il n'est pas satisfaisant que cette dérogation au principe de spécialité soit systématiquement doublée d'une information incomplète.

Il convient également de rappeler qu'en 2021, les crédits de la dotation ont été exécutés pour financer plusieurs mesures qui n'avaient pas de tout été annoncées dans la programmation initiale 35 ( * ) , ce qui constitue un contournement du principe selon lequel l'autorisation budgétaire est accordée par le Parlement au Gouvernement. Les rapporteurs spéciaux seront particulièrement vigilants à ce que cette situation ne se reproduise pas lors des prochains exercices budgétaires.

II. UNE HAUSSE CONSÉQUENTE DES CRÉDITS DE LA DOTATION POUR DÉPENSES ACCIDENTELLES ET IMPRÉVISIBLES

A. UNE HAUSSE CONSÉQUENTE QUI RÉSULTE, SELON LE GOUVERNEMENT, DES INCERTITUDES LIÉES À LA CRISE ÉNERGÉTIQUE ET AU CONTEXTE INTERNATIONAL ET MACROÉCONOMIQUE

Entre 2018 et 2022, le programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles » a bénéficié chaque année d'une ouverture de crédits de 424 millions d'euros en AE et en 124 millions d'euros en CP, récurrente depuis la loi de programmation des finances publiques pour la période 2018-2022.

L'écart de 300 millions d'euros entre les AE et les CP est fixé à titre conventionnel depuis 2012. Il s'explique par la nécessité de couvrir les éventuelles prises à bail privées, lesquelles peuvent durer « généralement 6 ou 9 ans, dans de rares cas 25 ans » 36 ( * ) .

Le présent projet de loi de finances pour 2023 prévoit cependant un montant largement supérieur à ceux ouverts ces dernières années sur la dotation « Dépenses imprévisibles et accidentelles », soit 2,074 milliards d'euros en AE et 1,774 milliard d'euros en CP , contre 424 millions d'euros en AE et 124 millions en CP en LFI pour 2022. Ce niveau de provision, qui est largement supérieur au montant conventionnel, est justifié par le Gouvernement par la forte incertitude liée au contexte international et macroéconomique.

B. LA BUDGÉTISATION DE LA DOTATION POUR DÉPENSES ACCIDENTELLES ET IMPRÉVISIBLES APPARAIT PARTICULIÈREMENT EXCESSIVE EN 2023

1. Une augmentation massive des crédits demandés, alors que les exercices précédents n'ont fait l'objet d'aucune mesure de répartition des crédits de cette dotation

Depuis 2020, le Gouvernement a systématiquement abondé la dotation pour dépenses imprévisibles et accidentelles pour anticiper les conséquences des différentes crises qui ont touché la France.

En 2020, un abondement exceptionnel de 1,62 milliard d'euros en AE et en CP sur le programme 552 avait été prévu par la loi de finances rectificative du 25 avril 2020 afin d'anticiper les dépenses supplémentaires causées par la crise sanitaire. Cet abondement n'avait pas fait l'objet de contestation de la part de la commission des finances dans la mesure où les conséquences budgétaires immédiates de cette crise sur les différents programmes du budget général étaient avérées.

Il semble que, depuis cet épisode, le Gouvernement ait pris l'habitude de constituer des réserves de budgétisation massives, soit disant justifiées par un contexte économique, sanitaire, voire international incertain.

En 2021, le programme a fait l'objet d'un abondement d'1,5 milliard d'euros en AE et CP par la loi du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 , qui avait également vocation à financer des dépenses imprévues résultant de la persistance de la crise sanitaire. La commission des finances du Sénat s'y était opposée, réduisant de 1 milliard d'euros cette enveloppe, finalement rétablis par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Cette ouverture exceptionnelle de crédits avait suscité le scepticisme du rapporteur général de la commission des finances, car elle avait été adoptée, contrairement à 2020, dans un contexte où les restrictions touchant les activités économiques étaient en grande partie levées.

Il s'avère que l'exécution budgétaire a finalement donné raison à la commission des finances, puisque qu'aucun crédit de cette enveloppe n'a finalement été consommé, et que le collectif budgétaire de fin d'année 2021 l'a annulée 37 ( * ) .

Le premier projet de loi de finances rectificative pour 2022 avait également sollicité l'ouverture de 2 milliards d'euros supplémentaires sur cette dotation, avec pour seule justification que ces crédits permettraient au Gouvernement de faire face à d'éventuelles dépenses imprévues, compte tenu des incertitudes pesant sur la gestion 2022. Un amendement de la commission des finances avait proposé de réduire de 1,5 milliard le montant de cette enveloppe. Finalement, 500 millions d'euros avaient été rétablis dans le texte issu de la commission mixte paritaire, portant l'enveloppe totale supplémentaire sur ce programme à 1 milliard d'euros en AE et en CP.

Or, l'exécution budgétaire au 31 octobre 2022 semble de nouveau donner raison à la commission des finances, puisque comme en 2021, aucun crédit de cette dotation n'a été consommé. Le projet de loi de finances rectificative de fin d'année prévoit en outre une annulation, laissant un solde prudentiel particulièrement élevé de 624 millions d'euros pour couvrir d'éventuelles dépenses d'ici la fin de l'année.

Évolution de la dotation pour dépenses accidentelles
au cours de l'année 2022

(en millions d'euros et en crédits de paiement)

Référence de la mesure

Programme de destination

Mouvements de crédits sur le programme 552

Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022

Programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles »

+ 124

Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022

Programme 552 « Dépenses accidentelles et imprévisibles »

+ 2 000

Source : commission des finances

En tout état de cause, les montants demandés en PLF pour 2023 apparaissent particulièrement excessifs au regard de l'exécution des crédits de ce programme sur les exercices précédents. Il convient par ailleurs de rappeler que la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles n'a pas vocation à devenir une solution de budgétisation de facilité pour le Gouvernement. Ainsi, dans une logique de sincérité budgétaire, et dans la droite ligne de la position constante de la commission des finances ces dernières années, les rapporteurs spéciaux proposent donc un amendement visant à minorer le montant de crédits budgétés sur le programme 552 d'1 milliard d'euros en AE et en CP.

La dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles conserverait un niveau très élevé, à hauteur de 1,074 milliard d'euros en AE et 774 millions d'euros en CP, ce qui paraît largement suffisant pour couvrir les aléas éventuels pouvant affecter la gestion budgétaire. Il convient par ailleurs de rappeler que, si toutes les marges de manoeuvre précitées étaient malgré tout épuisées, le Gouvernement aurait toujours la possibilité de prendre un décret d'avance ou de présenter un projet de loi de finances rectificative.

Il convient par ailleurs de souligner que les prévisions indicatives de budgétisation triennales, inscrites dans le PAP, anticipent le maintien de cette dotation à un niveau particulièrement élevé, pour les exercices 2024 et 2025. Ces prévisions ne s'accompagnent d'aucun élément d'information concernant les raisons justifiant une telle prévision. Ainsi, 974 millions d'euros en AE et 674 millions en CP sont prévus pour l'année 2024 . Il est en outre d'autant plus surprenant de constater que le Gouvernement table en 2025 sur une augmentation de 51,3 % des crédits demandés par rapport au montant prévisionnel de 202 4, puisque une budgétisation de 1,474 milliard d'euros en AE et 1,174 milliards en CP est évoquée .

2. Dans ce contexte, une vigilance particulière sera observée par les rapporteurs spéciaux en ce qui concerne l'information du Parlement, et le respect du principe du dernier recours

En tout état de cause, les rapporteurs spéciaux seront particulièrement vigilants quant au respect des règles encadrant l'utilisation de cette dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles. Cette dotation a en effet vocation à couvrir d'éventuelles dépenses liées à des événements aléatoires qui ne peuvent être financées par les mesures de régulation de droit commun, après application prioritaire du principe d'auto-assurance - par exemple, utilisation de la réserve de précaution, transfert entre programmes etc. Dès lors, le recours à la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles ne doit se faire qu'en dernier ressort .

Les rapporteurs spéciaux seront également vigilants sur l'information du Parlement sur la potentielle répartition des crédits. À cet égard, la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques a introduit 38 ( * ) , à l'initiative de la commission 39 ( * ) , une obligation d'information des commissions des finances du Parlement en cas d'utilisation de cette dotation au-delà d'un montant de 100 millions d'euros, au moins 3 jours avant la publication du décret de répartition .

TROISIÈME PARTIE
LA MISSION « TRANSFORMATION
ET FONCTION PUBLIQUES »

La maquette budgétaire de la mission « Transformation et fonction publiques » a fait l'objet de plusieurs modifications dans le cadre de la loi de finances pour 2022 : une mesure de périmètre, la création d'un nouveau programme 368 et le rattachement du fonds d'accompagnement interministériel RH (FAIRH - programme 351) au programme 148 « Fonction publique ». Certains de ces changements répondent aux souhaits et aux inquiétudes exprimés par les rapporteurs spéciaux depuis 2018 : l'absence de perspective de long terme sur le portage budgétaire des crédits annoncés en 2018 sur cinq ans, la nécessité de clarifier les objectifs de la mission et la suppression d'un programme dédié pour le FAIRH.

Les changements apportés en 2022 venaient finaliser l'inscription dans le long terme de la mission , originellement créée pour une période de cinq ans. La programmation des crédits dans le cadre du présent projet de loi, ainsi que les nouvelles mesures de périmètre adoptées sur les programmes 348 et 349 le confirment.

Pour autant, les responsables de programme n'ont pas encore remédié à toutes les difficultés de gestion rencontrées ces cinq dernières années et mises en exergue tout au long des travaux budgétaires : des sous-exécutions chroniques, des indicateurs de performance encore lacunaires, des crédits peu lisibles sur certaines thématiques. Des progrès ont été accomplis, il faut les poursuivre. C'est d'autant plus essentiel que le ministère de la transformation et de la fonction publiques est supposé porter des projets aussi ambitieux que ceux de la modernisation des administrations, de la numérisation des démarches administratives, de la réforme de la fonction publique ou encore de l'accessibilité des services publics.

I. I. UNE HAUSSE TRÈS ÉLEVÉE DES CRÉDITS DEMANDÉS SUR LA MISSION EN 2023

Depuis le 1 er janvier 2022, la mission « Transformation et fonction publiques » se compose de six programmes, dont un est modifié dans le cadre du présent projet de loi de finances :

- le programme 348, anciennement « Rénovation des cités administratives et autres sites domaniaux multi-occupants » et désormais renommé « Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs », a été créé dans le cadre du grand plan d'investissement 2018-2022. Il devait initialement financer la rénovation des sites occupés par plusieurs services de l'État et de ses opérateurs. L'État compte 56 cités administratives dans son réseau déconcentré dont 37 bénéficiaires 40 ( * ) du programme. Doté d'un milliard d'euros sur cinq ans , ce programme est placé sous la responsabilité de la direction de l'immobilier de l'État, rattachée au ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ;

- le programme 148 « Fonction publique » porte les crédits alloués à l'action sociale interministérielle, à l'action appui et innovation des ressources humaines ainsi qu'à la formation initiale des fonctionnaires. Il retrace en effet les subventions pour charges de service public versées à l'Institut national du service public (INSP - anciennement École nationale d'administration) et aux instituts régionaux d'administration (IRA). Placé sous la responsabilité de la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), ce programme intègre également, depuis 2022, les crédits hors dépenses de personnel du centre interministériel de services informatiques relatifs aux ressources humaines (CISIRH) ainsi que le Fonds d'accompagnement interministériel RH . Le FAIRH vise à cofinancer une partie des coûts de transition induits par la mise en oeuvre de réformes structurelles dans le domaine des ressources humaines ;

- le programme 349 , anciennement « Fonds pour la transformation de l'action publique » 41 ( * ) (FTAP) et désormais intitulé « Transformation publique » , soutient les réformes porteuses d'économies à moyen terme en finançant le coût supplémentaire que peut représenter une réforme dans sa phase initiale 42 ( * ) . Placé sous la responsabilité de la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), il était initialement doté de 700 millions d'euros sur cinq ans , ainsi que d'une enveloppe complémentaire de 80 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2022. Ce programme porte également, depuis le 1 er janvier 2022, les crédits hors titre 2 de la DITP ;

- le programme 352 « « Innovation et transformation numériques » , vise à financer l'émergence et le développement de produits et services numériques innovants pour moderniser l'État et les services publics . Il est placé sous la responsabilité de la direction interministérielle du numérique (Dinum) et participe au cofinancement des recrutements du programme « entrepreneurs d'intérêt général » ;

- le programme 368 « Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publique » est dédié aux projets à dimension interministérielle. Placé sous la responsabilité du secrétariat général du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, il porte les effectifs et les dépenses de personnel de la DGAFP, du CISIRH et de la DITP.

Évolution des crédits de la mission
« Transformation et fonction publiques »

(en millions d'euros et en %)

Exécution 2021

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2023/2022

[348] Performance et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs

AE

415,33

0,00

165,91

-

CP

90,33

266,43

552,72

107,45 %

[349] Transformation publique

AE

166,99

95,20

300,65

215,81 %

CP

133,92

183,94

249,45

35,61 %

[352] Innovation et transformation numériques

AE

13,03

10,60

10,60

0,00 %

CP

14,72

12,10

10,60

- 12,40 %

[148] Fonction publique

AE

226,07

303,25

280,52

- 7,50 %

CP

216,38

294,00

285,97

- 2,73 %

[368] Conduite et pilotage de la transformation et de la fonction publiques

AE

38,52

44,40

15,24 %

CP

38,52

44,40

15,24 %

Total

AE

821,41

447,58

802,08

79,20 %

CP

455,35

795,00

1 143,14

43,79 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

A. LA HAUSSE DES CRÉDITS SE CONCENTRE SUR LES DEUX PROGRAMMES LES PLUS IMPORTANTS BUDGÉTAIREMENT

1. Une accélération de la trajectoire budgétaire en 2023 qui doit être appréciée avec la plus grande précaution
a) Une hausse significative des crédits demandés en 2023

Les crédits demandés en 2023 au titre de la mission « Transformation et fonction publiques » affichent une hausse très élevée, de 79,2 % en autorisations d'engagement (802 millions d'euros) et de 43,8 % en crédits de paiement (1,1 milliard d'euros). Les crédits atteignent ainsi un niveau inédit depuis la création de la mission en 2018.

Ce premier constat doit toutefois être immédiatement nuancé par la prise en compte de la modification de périmètre du programme 348 , qui conduit à rehausser les crédits de 150 millions d'euros en AE et en CP. De plus, si la programmation a toujours été ambitieuse ces dernières années, l'exécution s'est rarement montrée à la hauteur des objectifs affichés, avec d'importants retards constatés sur le décaissement des crédits.

Ainsi, dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2022, 200,1 millions d'euros seraient annulés en AE et 38,8 millions d'euros en CP , dont 196 millions d'euros en AE et 33 millions d'euros en CP sur le programme 349.

Les rapporteurs spéciaux se contenteront de rappeler l'appréciation qu'ils avaient portée l'an dernier sur les crédits demandés sur ce programme : ils avaient estimé que l'enveloppe de 80 millions d'euros supplémentaire n'était pas nécessaire et que l'enveloppe globale allouée aux projets sélectionnés les années antérieures était trop élevée au regard des besoins exprimés au final par les porteurs de projets . Il est à craindre qu'ils ne doivent réitérer ce constat pour l'année 2023, avec une ouverture de crédits sur l'action dédiée au FTAP de 190 millions d'euros en CP.

Taux de consommation des crédits de la mission
« Transformation et fonction publiques »

(en millions d'euros et en pourcentage)

LFI 2022

Exécution constatée au 6 octobre 2022

Taux de consommation au 6 octobre 2022

Programme 348

AE

0,00

111,3

-

CP

266,43

144,8

54,4 %

Programme 349

AE

95,20

88,9

93,3 %

CP

183,94

105,4

57,3 %

Programme 352

AE

10,60

4,6

43,0 %

CP

12,10

4,0

33,3 %

Programme 148

AE

303,25

229,2

75,6 %

CP

294,00

164,1

55,8 %

Programme 368

AE

38,52

27,5

71,3 %

CP

38,52

27,5

71,3 %

Total

AE

447,58

461,36

103,1 %

CP

795,00

445,89

56,1 %

* Si la prévision en LFI était de 0 euros en AE sur le programme 348, ce dernier bénéficie de reports annuels. Le programme 349 a également bénéficié de ces reports

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Les rapporteurs spéciaux ont fait part à plusieurs reprises de leurs réserves quant à la capacité des directions responsables de programmes à mobiliser les crédits à un rythme aussi soutenu que celui qui était envisagé lors de la création de la mission en 2018 , interrogeant ainsi la sincérité de la budgétisation des programmes. Les directions responsables expliquent qu'une partie des sous-consommations provient d'un écart entre les besoins réels des porteurs de projets sur une année n et les besoins anticipés par les directions. Après cinq ans de fonctionnement, et alors même que la mission est supposée faire l'objet d'un suivi approfondi des projets qu'elle finance, il serait plus que temps de réduire ces écarts.

Il n'y a que peu d'informations sur la gestion concrète des crédits de la mission et sur le calendrier de leur déploiement , et encore moins de précision sur les raisons des délais de latence entre la sélection des projets, la contractualisation avec les porteurs, le déblocage des crédits et le lancement des projets. Des travaux complémentaires sont souvent requis pour respecter les enveloppes budgétaires initiales ou re-calibrer le montant du cofinancement. Résultat, la consommation des crédits n'est pas encore tout à fait satisfaisante.

b) Des dépenses d'investissement prépondérantes

Eu égard à la nature même des projets soutenus par les programmes les plus importants de la mission, les dépenses d'investissement représentent une part prépondérante des crédits de la mission et connaissent l'évolution la plus dynamique , suivis des dépenses de fonctionnement, portés notamment par le programme 148, avec les crédits dédiés à l'action sociale interministérielle.

Évolution des crédits de la mission
« Transformation et fonction publiques » par titre

(en millions d'euros et en %)

LFI 2022

PLF 2023

Évolution 2023/2022

Part dans le total des crédits

[Titre 2] Dépenses de personnel

AE

57,31

52,29

- 8,77 %

6,5 %

CP

57,31

52,29

- 8,77 %

4,6 %

[Titre 3] Dépenses de fonctionnement

AE

300,05

382,88

27,61%

47,7 %

CP

354,67

367,12

3,51 %

32,1 %

[Titre 5] Dépenses d'investissement

AE

60,41

256,00

323,79 %

31,9 %

CP

351,54

621,61

76,82 %

54,4 %

[Titre 6] Dépenses d'intervention

AE

29,8

110,9

272,09 %

13,8 %

CP

31,5

102,1

224,51 %

8,9 %

[Titre 7] Dépenses d'opérations financières

AE

0,00

0,00

CP

0,00

0,00

Total

AE

447,58

802,08

79,20 %

100,0 %

CP

795,00

1 143,14

43,79 %

100,0 %

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires

2. Sur la période 2023-2025, une trajectoire nettement orientée à la baisse

D'après les éléments transmis dans les documents budgétaires sur les éléments de programmation disponibles pour le triennal 2023-2025, les crédits demandés sur la mission diminueraient nettement à compter de 2024. La baisse serait d'autant plus forte qu'il serait tenu compte de l'inflation . Si les effets de la hausse de l'indice des prix à la consommation sont plus ou moins forts selon les administrations concernées et les projets financés, ils sont très visibles sur le coût des matières premières et de la construction . Des ajustements ont d'ailleurs été prévus en conséquence sur le programme 348 (cf. infra ).

Évolution des crédits de la mission « Transformation
et fonction publiques » en prévision sur la période 2023-2025

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Plusieurs raisons peuvent justifier cette trajectoire heurtée à moyen terme. Tout d'abord, s'il y a des programmes « stables » et peu soumis aux aléas de gestion, à l'instar du programme 148 « Fonction publique », d'autres dépendent beaucoup plus fortement d' éléments ponctuels , tels que le décaissement de crédits à l'occasion de l'engagement d'une nouvelle tranche de travaux sur une cité administrative (programme 348). Or, la phase la plus importante des travaux immobiliers est prévue en 2023.

Ensuite, cette trajectoire ne tient pas compte des reports de crédits, en AE comme en CP, qui ont lieu chaque année en raison des importants retards constatés sur la quasi-totalité des programmes fonctionnant sur appel à projets (immobilier, Fonds pour la transformation de l'action publique).

Enfin, certains dispositifs ont, pour le moment, vocation à s'éteindre : les cités administratives devraient toutes être livrées d'ici la fin de l'année 2024, et donc les crédits liés aux travaux décaissés avant, tandis que le Fonds pour la transformation publique n'a été prolongé que pour une durée de trois ans et sur une enveloppe moindre.

B. UNE HAUSSE DES CRÉDITS POUR PARTIE LIÉE À DES MESURES DE PÉRIMÈTRE

Par ailleurs, la très importante hausse des crédits demandés sur l'année 2023 s'explique en grande partie par un ajustement de périmètre, avec un élargissement des missions confiées aux responsables des programmes 348 et 349 .

Évolution des crédits de la mission

(en millions d'euros, en crédits de paiement)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

1. Le programme 348, un périmètre adapté pour accommoder une nouvelle action dénommée « Résilience »

Le programme 348, auparavant exclusivement dédié à la rénovation des cités administratives, porte désormais une nouvelle action, dénommée « Résilience » et dotée de 150 millions d'euros en 2023 .

Évolution des crédits ouverts sur le programme 348

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'action « Résilience » vise à réduire la dépendance aux énergies fossiles et à améliorer la performance environnementale du parc immobilier de l'État et de ses opérateurs . Au-delà des très fortes ambitions affichées dans les documents budgétaires, et qui relèvent sans doute davantage d'un effet de communication, les rapporteurs spéciaux considèrent que la création de cette enveloppe, qui fonctionnera par un appel à projet, est positive et relève de la bonne gestion .

L'effet de levier de la mise en oeuvre d'actions dites « à gains rapides » est très élevé : il s'agit d'actions se caractérisant par un fort retour sur investissement, avec d'importantes économies générées à moyen ou long terme 43 ( * ) . Le directeur de l'immobilier de l'État estime que le coût du mégawatheure économisé par la mise en place d'une action à gains rapides s'élève de 1 000 euros à 1 500 euros , à l'heure où l'État achète un mégawatheure pour environ 250 euros. Pour une rénovation globale, c'est de l'ordre de 7 000 euros le mégawatheure.

Toutefois, seules les rénovations globales peuvent permettre à l'État d'atteindre les objectifs fixés par le décret tertiaire 44 ( * ) et c'est aussi pour cette raison que l'enveloppe ouverte sur l'action « Résilience » est limitée, pour éviter que les actions à gains rapides ne viennent à supplanter les opérations plus structurantes dans les orientations et les décisions des ministères et des administrations bénéficiaires. Par ailleurs, le retour sur investissement d'une rénovation globale serait encore moins rentable si le bâtiment avait déjà fait l'objet, dans sa gestion, d'actions à gains rapides.

En revanche, et à l'instar de ce que les rapporteurs spéciaux ont pu souligner ces dernières années, la question de l'articulation entre le programme 348 et le compte d'affectation spéciale ( CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » se pose avec d'autant plus d'acuité désormais. Lancée en 2022, la première tranche de l'appel à projets, de 50 millions d'euros, s'est appuyée sur le CAS : le choix de la faire porter sur le programme 348 à partir de 2023 s'explique simplement par le fait que les crédits portés par le CAS ne peuvent financer que les opérations des administrations centrales. Or, l'appel à projets sera également ouvert aux administrations déconcentrées et aux opérateurs.

Au regard des précédentes expériences en matière d'opérations d'entretien, de rénovation et de financement d'actions à gains rapides, les rapporteurs spéciaux se sont interrogés sur le caractère peut-être trop optimiste des crédits inscrits sur cette action en 2023, à savoir 150 millions d'euros . Que ce soit les opérations de rénovation des cités administratives ou les actions d'entretien lourd ou à gains rapides financées par le biais du plan de relance, aucune n'a vraiment pu tenir le calendrier initial. Si le choix de vouloir ouvrir immédiatement l'ensemble des crédits s'explique par le souhait du Gouvernement de montrer sa volonté d'agir, cela n'aura au final que peu d'effets si les bénéficiaires de l'enveloppe n'ont pas la capacité d'engager rapidement leurs projets.

2. Le programme 349, un Fonds relancé et de nouveaux crédits alloués pour les conseillers numériques

Outre le fait que le Fonds pour la transformation de l'action publique est relancé pour une nouvelle période de trois ans, la hausse des crédits sur le programme 349 s'explique également par une mesure de périmètre, avec le rapatriement de crédits jusqu'ici portés par la mission « Plan de relance ». Le programme portera, à compter du 1 er janvier 2023, les crédits destinés à financer les conseillers numériques France Services, qui assurent des permanences, organisent des ateliers et proposent des formations afin de remédier à la fracture numérique (protection des données personnelles, démarche administrative en ligne, consulter un médecin). Ils auraient ainsi déjà accompagné près de 800 000 personnes.

44 millions d'euros sont ouverts pour les conseillers numériques . Selon le ministre de la transformation et de la fonction publiques, M. Stanislas Guérini, l'inscription des crédits dédiés aux 4 000 conseillers numériques sur le programme 349 vise à envoyer le signal d'une pérennisation de ces fonctions et leur financement, auparavant porté par le Plan de relance . Généralement mobiles, les conseillers du numérique fonctionnent sur un modèle très particulier : le ministère ne les emploie pas mais finance leur formation et la majeure partie de leur rémunération, par l'intermédiaire des demandes adressées aux préfectures. Un conseiller numérique peut dès lors être salarié d'une association ou agent d'une collectivité territoriale. Le changement de vecteur budgétaire ne doit toutefois pas se traduire par une baisse des moyens alloués par l'État aux conseillers du numérique et à leur structure d'origine, au risque sinon de nuire à l'attractivité de ces missions, pourtant essentielles.

Dans une bien moindre mesure, les actions du nouveau centre interministériel de la participation citoyenne, placé sous l'autorité du ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, M. Olivier Véran, seront également portées par le programme 349. La DITP est responsable de la mise en oeuvre du centre, par la mise à disposition d'une équipe d'experts publics de la participation citoyenne.

II. SI DES PROGRÈS ONT ÉTÉ ACCOMPLIS EN MATIÈRE DE GESTION, ILS DEMEURENT ENCORE INSUFFISANTS AU REGARD DES AMBITIONS AFFICHÉES PAR LE GOUVERNEMENT

La forte hausse des crédits demandée pour 2023, si elle se justifie au regard du calendrier des projets engagés, apparaît toutefois pour partie décorrélée des difficultés structurelles que connait la mission depuis sa création. Si certains progrès sont à relever, notamment sur le niveau de consommation des crédits, la mission se caractérise toujours par un niveau d'exécution très inférieur aux autres missions, par un manque de lisibilité budgétaire et par des lacunes dans son dispositif de performance. Ce sont autant d'éléments qui doivent être revus, alors que les objectifs de la mission, que ce soit au titre de la transition énergétique ou de la numérisation des administrations et des démarches administratives, sont ambitieux et méritent un suivi plus approfondi. Ils donneraient plus de sens à l'examen parlementaire de cette mission.

A. LE PROGRAMME 348, UN PROGRAMME QUI DEVRAIT ENFIN MONTER EN CHARGE, APRÈS UNE EXTENSION DE SON PÉRIMÈTRE

D'après les informations communiquées par le directeur de l'immobilier de l'État, le programme 348 devrait connaitre une nette accélération en 2023 : la DIE a en effet fixé pour objectif que tous les marchés de travaux soient notifiés d'ici la fin de l'année 2022. S'il s'agit incontestablement d'une avancée, les rapporteurs spéciaux notent qu'il a fallu près de cinq ans, depuis la création du programme, pour que l'ensemble des travaux puisse débuter.

Surtout, le calendrier de livraison des travaux ne cesse d'être reporté , même si d'importants chantiers devraient se terminer d'ici la fin de l'année 2023, avec notamment la livraison des travaux pour les cités administratives de Rouen (96 millions d'euros) et de Strasbourg (54,7 millions d'euros).

Répartition des projets de rénovation
des cités administratives par date prévisionnelle de livraison

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux

Entretemps cependant, le coût des matières premières a fortement augmenté . Les crédits des deux projets de rénovation annulés, ceux de Melun et de Brest, ne seront donc pas réemployés au bénéfice de la rénovation d'autres cités administratives, mais utilisés pour couvrir la hausse des coûts. Il est certainement dommage que cette contrainte sur les coûts, aggravée par le retard de mise en oeuvre des travaux, empêche la réallocation des crédits vers une autre cité administrative , 52 dossiers avaient été déposés par les préfets lors de l'appel à candidature, pour 39 sélectionnés.

Les délais ont néanmoins eu un effet positif celui de permettre à la DIE et aux acteurs impliqués de tenir compte des évolutions des modes de travail, avec un recours accru au télétravail. Le développement du travail hybride a notamment un impact sur la gestion des surfaces des bâtiments, sur le nombre de postes à prévoir en présentiel ou encore sur l'organisation des locaux.

En revanche, et en dépit de critiques réitérées chaque année par les rapporteurs spéciaux, le dispositif de performance du programme apparaît toujours aussi incomplet. Les indicateurs de performance du programme se contentent de retranscrire le niveau des économies d'énergie et de surface attendues, ainsi que le coût du kilowatt (kWh/EP) économisé . Les trois cibles sont définies à partir des données transmises dans les dossiers présentés par les préfets de département et les résultats ne seront donc constatés qu'une fois les travaux achevés : ils n'engagent que les gestionnaires du programme. Il n'y a donc pas de mesure en cours de projets ou de processus de suivi des travaux, pour une information par conséquent quasi-nulle du Parlement.

Les indicateurs ne répondent donc que très partiellement aux exigences organiques 45 ( * ) , aux termes desquelles les indicateurs de performance doivent permettre, en sus des résultats attendus, de mesurer les coûts associés à chacune des actions ainsi que les résultats obtenus .

Les responsables du programme se défendent en arguant que les indicateurs de performance n'ont pas à rendre compte du pilotage et de l'avancement du programme. Ce raisonnement est non seulement erroné, mais témoigne également de la faible attention portée aux solutions visant à remédier aux difficultés constatées en cours d'exécution et de gestion . Sur un programme pluriannuel doté de plus de 1 milliard d'euros, il semble tout à fait raisonnable de disposer d'informations sur les avancées des projets , en particulier quand la passation des marchés a duré plusieurs années et que les délais de livraison des travaux sont eux aussi d'ores et déjà dépassés de plusieurs années. Les rapporteurs spéciaux reprennent ici la première recommandation de leurs travaux de contrôle sur cette mission 46 ( * ) , et appellent de nouveau à réviser les indicateurs de performance du programme.

Quant à l'appréciation a posteriori, le comité d'évaluation du plan France Relance, dans son rapport intermédiaire sur l'exécution du plan de relance 47 ( * ) et, plus particulièrement, des crédits alloués à la rénovation des bâtiments publics (4,3 milliards d'euros) 48 ( * ) , propose plusieurs pistes pour mieux évaluer les effets de cette action, au-delà de la prévision du montant des économies d'énergie escomptées (235 000 kwH). Les rapporteurs spéciaux considèrent que la direction de l'immobilier de l'État, responsable du programme 348, pourrait s'en inspirer. Il s'agit notamment de :

- comparer la trajectoire de consommation d'énergie après les travaux de rénovation à celle qui aurait été réalisée sans l'intervention des travaux (trajectoire contrefactuelle) ;

- inclure dans les évaluations des travaux de rénovation des cités administratives les conséquences socio-économiques sur le bien-être des agents comme des usagers ;

- mesurer l'empreinte environnementale des projets, en estimant les coûts d'abattement 49 ( * ) pour la rénovation thermique des cités administratives en les comparant d'une part à ceux obtenus sur l'action 01 du programme 302 de la mission « Plan de relance » pour l'ensemble des bâtiments publics, et d'autre part, à ceux observés dans le cadre du soutien à la rénovation des bâtiments privés.

Enfin, il serait opportun d'assortir l'action « Résilience », dotée de 150 millions d'euros, d'indicateurs de performance distincts , permettant de suivre les projets financés. Pourraient par exemple être indiqués l'état d'avancement des projets, le coût moyen et médian des actions à gains rapides financées, le coût moyen du mégawatheure économisé, etc.

B. LE PROGRAMME 349, UN PROGRAMME DÉDIÉ À LA TRANSFORMATION DE L'ACTION PUBLIQUE QUI DOIT ENCORE FAIRE SES PREUVES

Lors de son audition, le ministre de la transformation et de la fonction publiques, a expliqué que si les moyens mis sur Fonds pour la transformation de l'État étaient reconduits pour trois ans , c'était dans une moindre ampleur, avec un changement de gouvernance destiné à conduire à une nouvelle approche, davantage centrée sur le retour sur investissement. L'enveloppe allouée au Fonds s'élèverait à 330 millions d'euros sur la période 2023-2025, avec un bilan en 2025 . Une première tranche de 120 millions d'euros est ouverte en 2023, avec des financements qui s'adressent autant aux administrations centrales qu'aux services déconcentrés.

Les rapporteurs spéciaux, sans remettre en doute les intentions du ministre, sont néanmoins sceptiques sur les implications réelles de ces ajustements. En témoignent les différentes évolutions qui avaient déjà été apportées au FTAP pour le « renforcer », sans effet visible : moindre sélectivité des projets, relâchement du critère d'un euro investi pour un euro économisé, ouverture aux administrations déconcentrées. Le bilan apparaît également tardif, alors que le FTAP apporte des co-financements aux administrations depuis 2018. Une première évaluation aurait pu être envisagée avant de rouvrir 330 millions d'euros , d'autant plus que l'enveloppe initiale augmentée en loi de finances pour 2022, de 780 millions d'euros, n'a pas entièrement été consommée.

Selon les informations transmises, le critère d'économie ferait toutefois toujours partie des critères d'appréciation et ce serait davantage les modalités de sélection qui auraient évolué, afin d'aller plus vite sur la contractualisation et d'apporter plus rapidement les fonds nécessaires aux porteurs de projets . Il s'agit en effet d'un point de critique récurrent : 5 % des projets bénéficiaires du FTAP étaient totalement achevés en 2021. La DITP visait 45 % en 2022, une cible que les rapporteurs spéciaux jugeaient trop ambitieuse : au final, le taux de projets achevés s'élèverait à 35 % en 2022, avec une prévision de nouveau très optimiste pour 2023, avec 60 % de projets achevés.

Il n'en demeure pas moins que les crédits du FTAP ont pu soutenir des projets absolument primordiaux pour les administrations , comme par exemple les projets portés par la DGFiP pour le contrôle fiscal ou la dématérialisation des déclarations, ainsi que le déploiement de la procédure pénale numérisée par le ministère de la justice. En tout, ce sont 14 nouveaux projets qui ont été sélectionnés par le FTAP en 2022 pour apporter 51,24 millions d'euros de financements , sur un total des coûts pour ces projets de 133,4 millions d'euros.

La création de ce fonds vise en effet à répondre à une préoccupation majeure, celle de la réticence à engager des réformes structurelles et porteuses de gains de productivité sous prétexte de leur coût immédiat . Cette réticence peut en effet constituer un véritable obstacle à la modernisation des administrations. La mobilisation de crédits dédiés à l'amorçage de ces projets, qui permettent aux administrations lauréates de contourner les contraintes de financement qui peuvent peser sur leur budget, est donc prometteuse. Toutefois, et afin de mieux suivre ces projets, il conviendrait d'indiquer plus clairement, dans les documents budgétaires de chacune des missions, les projets financés grâce à un abondement du FTAP, avec la prévision des économies attendues 50 ( * ) .

Sur le sujet plus large de l'accessibilité des services publics et de leur transformation, les rapporteurs spéciaux insistent une nouvelle fois sur la nécessité de ne pas laisser de côté ceux qui n'ont pas accès aux démarches administratives dématérialisées ou qui ont besoin d'un accompagnement spécifique . Alors que la monétisation des services publics tend à se développer, avec des sites qui proposent, moyennant rémunération, de trouver un rendez-vous pour refaire un passeport ou une carte grise, il est impératif que l'accent soit mis sur l'évaluation de l'accessibilité du service public .

C. UNE JUSTIFICATION PEU CONVAINCANTE DE LA HAUSSE DES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS ACCORDÉS À LA DÉLÉGATION INTERMINISTÉRIELLE DE LA TRANSFORMATION PUBLIQUE

Selon les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, 15 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires seraient recrutés au sein de la DITP pour « réinternaliser des compétences de conseil » et sept ETP pour le suivi des réformes de l'action publique. Le ministère explique qu'il s'agit d'une réponse aux travaux du Sénat sur le recours abusif aux cabinets de conseil 51 ( * ) . Des interrogations demeurent toutefois sur le rôle effectif de ces agents , tant sur leur place par rapport aux corps d'inspection que sur la capacité de sept d'entre eux à suivre l'ensemble des réformes mises en place par les ministères.

Il est également permis de douter que l'échelon le plus approprié sur ce point soit la DITP et non par exemple les secrétariats généraux des ministères, également responsables des fonctions support pour les administrations centrales . Il est vrai en revanche qu'il y a un réel besoin de retrouver des compétences techniques spécialisées en interne : à défaut, il est impossible de suivre les commandes, d'évaluer les productions du prestataire ou encore, de pérenniser et de gérer les projets une fois les prestataires externes partis.

Le nouvel accord-cadre sur le recours aux prestataires externes précise également que la DITP sera le point de contact unique pour les ministères souhaitant recourir à une prestation de conseil : elle a été chargée, dans le cadre de la circulaire du Premier ministre du 19 janvier 2022 52 ( * ) , de créer un pôle interministériel d'achat de prestations intellectuelles de conseil.

Si le ministère a indiqué avoir intégré la plus grande partie des recommandations de la commission d'enquête du Sénat, les rapporteurs spéciaux renvoient aux dispositions de la proposition de loi déposée par nos collègues Éliane Assassi et Arnaud Bazin le 21 juin 2022 et adoptée par le Sénat à l'unanimité le 18 octobre 2022, qui montrent qu'il demeure encore des marges de progrès 53 ( * ) .

Il sera crucial, lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, de demander des éléments de bilan sur ces créations de postes et sur leur activité, afin d'évaluer la pertinence de leur maintien.

D. DES ACTIONS EN MATIÈRE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES ENCORE PEU LISIBLES

Le ministre de la transformation et de la fonction publiques a déclaré devant les rapporteurs spéciaux que l'une des priorités de son ministère, avec l'accessibilité des services publics, était l'attractivité de la fonction publique . Il s'agit selon lui d'une « priorité absolue » alors que le nombre de candidats aux concours de la fonction publique a été divisé par deux en dix ans. Les chantiers sont nombreux : rémunération, révision des régimes statutaires et indemnitaires, formation professionnelle, santé au travail, réforme de la haute fonction publique et de la gestion des cadres supérieurs.

Or, les crédits déployés en matière de gestion des ressources humaines sont encore peu lisibles . Certes, et conformément à l'une des recommandations des rapporteurs spéciaux 54 ( * ) , le programme 351 « Fonds pour l'accompagnement interministériel RH » a été supprimé en loi de finances pour 2022 et rattaché au programme 148, mais les actions demeurent encore éclatées.

La direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), responsable du programme 148 « Fonction publique », est chargée de piloter de nombreux chantiers transversaux en matière de ressources humaines , dont les conférences de perspectives salariales, le développement de l'apprentissage ou encore la réforme de la haute fonction publique. Elle ne constitue toutefois pas encore, au regard des ambitions affichées, la « direction des ressources humaines » de l'État : les secrétariats généraux des ministères ainsi que les services de ressources humaines au sein même des administrations conservent un rôle de premier plan en la matière. De plus, les emplois et les dépenses de personnel de la DGAFP sont portés sur le programme 368, dédié à la conduite et au pilotage de la transformation et de la fonction publiques.

Le programme 148 porte seulement une partie des crédits dédiés à la formation, à la mobilité ou aux prestations d'actions sociales à destination des agents publics, le poids de ces actions dans la mission étant inégal. Il existe également deux subventions pour charges de service public au profit des opérateurs de la mission :

- celle allouée à l'Institut national du service public (INSP) 55 ( * ) devrait légèrement augmenter en 2023 , passant de 38,4 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2022 à 39,1 millions d'euros, pour un schéma d'emploi nul. Les rapporteurs spéciaux notent toutefois que le contrat d'objectifs et de performance qui devait accompagner les arbitrages finaux sur l'INSP 56 ( * ) n'a pas encore été finalisé ;

- celle allouée aux cinq instituts régionaux d'administration (IRA) augmenterait plus significativement, passant de 40,1 millions d'euros à 42 millions d'euros en 2023 . Le plafond d'emplois est stable, avec une augmentation de 5 ETP. Le contrat d'objectifs et de performance des IRA, qui couvrait la période 2020-2022, doit être prolongé d'une année, avant sa renégociation.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Le Gouvernement, dans le cadre du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, a retenu son amendement n° II-2843 , qui n'a fait l'objet ni d'un avis du rapporteur spécial, ni d'un examen en séance publique par l'Assemblée nationale.

L'amendement du Gouvernement majore de 15 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 148 « Fonction publique » de la mission « Transformation et fonction publiques ». Ces crédits sont destinés à porter la subvention de l'État au profit du financement de la formation des apprentis dans les collectivités locales .

L'article L. 451-11 du code général de la fonction publique prévoit en effet que le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) verse aux centres de formation d'apprentis les frais de formation des apprentis employés par les collectivités . Il bénéficie à ce titre, parmi d'autres ressources, d'une contribution de l'État , définie dans le cadre de la convention d'objectifs et de moyens conclue entre l'État et le CNFPT. La majoration des crédits prévue par le présent amendement est conforme à la trajectoire définie dans la convention d'objectifs et de moyens.

*

Les crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Crédits non répartis » n'ont pas été modifiés par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 9 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Albéric de Montgolfier et Claude Nougein, rapporteurs spéciaux, sur les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonction publiques », « Crédits non répartis » et sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

M. Claude Nougein , rapporteur spécial sur les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonctions publiques », « Crédits non répartis » . -Je vais vous présenter au nom de mon collègue Albéric de Montgolfier, qui n'a pu être présent ce matin, et moi-même, les crédits d'un bloc de trois missions assez différentes et d'ampleur budgétaire inégale, mais que nous avons l'habitude d'examiner ensemble : les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonction publiques » et « Crédits non répartis ». Je vous présenterai également le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », au nom d'Albéric de Montgolfier, car je ne suis pas le rapporteur spécial de ce compte.

Je commencerai par la mission « Crédits non répartis », dont les deux dotations sont prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

La « provision relative aux rémunérations publiques » fait de nouveau l'objet d'une ouverture de crédits, à hauteur de 80 millions d'euros cette année. Cette dotation vise à financer des dépenses du titre 2, dont la répartition exacte au sein des programmes du budget de l'État ne peut être déterminée au moment de la programmation budgétaire. Cette année encore, la dotation servira à financer des mesures pourtant décidées plusieurs mois à l'avance. Elle aura ainsi vocation à financer l'extension du « forfait mobilités durables » décidée dans le cadre du rendez-vous salarial de la fonction publique du 28 juin dernier, et des mesures de convergences indiciaires et indemnitaires s'inscrivant dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique, qui a pourtant été actée en 2021. Ce procédé n'est évidemment pas satisfaisant du point de vue de la bonne information du Parlement, c'est pourquoi il est souhaitable que la répartition de ces crédits intervienne au plus vite.

J'en viens maintenant à la « dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles », qui fait l'objet cette année d'une ouverture de crédits particulièrement élevée, à hauteur de près d'1,8 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). Pour mémoire, cette provision était systématiquement dotée depuis 2018 de 124 millions d'euros. Le Gouvernement sollicite donc cette année une enveloppe 14 fois supérieure au montant conventionnel, avec pour seule justification les incertitudes liées à la crise énergétique et au contexte international et macroéconomique. Ce montant nous semble particulièrement excessif au regard de l'exécution des deux exercices précédents. Pour les années 2021 et 2022 le Gouvernement avait sollicité en cours de gestion l'ouverture d'enveloppes supplémentaires sur ce programme, pour des montants et des motifs du même ordre, contre l'avis de notre rapporteur général. Il s'avère que l'exécution budgétaire a donné raison à notre commission, puisqu'aucun crédit n'a été consommé sur cette dotation lors de ces deux exercices. C'est pourquoi nous vous proposons, dans une logique de sincérité budgétaire, et dans la droite ligne de la position constante de notre commission, un amendement visant à minorer d' 1 milliard d'euros les crédits de ce programme.

Sous réserve de cet amendement, nous vous proposons d'adopter les crédits de cette mission.

J'en viens maintenant à la mission « Gestion des finances publiques », dotée de 10,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 10,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Elle porte les crédits des deux grandes administrations de réseau du ministère de l'économie et des finances, c'est-à-dire la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Elle porte également les crédits du secrétariat général du ministère.

Nous avons l'habitude de vous dire, avec Albéric de Montgolfier, que la mission est l'une des seules à contribuer à la maîtrise des dépenses publiques. Nous ne pourrons pas faire la même chose cette année : les crédits demandés sur la mission en 2023 connaissent une hausse inédite de 9 % en autorisations d'engagement et de 5,4 % en crédits de paiement.

Lors de nos auditions, nous avons cherché à comprendre les raisons de cette hausse très significative. Elle s'explique en large partie par la hausse des dépenses informatiques et, dans une moindre mesure, par l'engagement d'un grand projet immobilier pour le ministère.

Par ailleurs, les dépenses de personnel, qui représentent 80 % des dépenses de la mission, augmentent moins vite que le total des dépenses de la mission. Cela s'explique par le fait que le schéma d'emplois de la mission est une nouvelle fois négatif : 680 équivalents temps plein (ETP) seraient supprimés en 2023. Il faut noter que la DGFiP est l'administration qui participe le plus à cet effort, à hauteur de 850 ETP supprimés. À l'inverse, le programme 218, porté par le secrétariat général du ministère, verrait ses emplois augmenter de 181 ETP, notamment en faveur de Tracfin et de l'Agence pour l'informatique financière de l'État (AIFE).

Je rappelle que la mission est quasiment la seule à présenter une baisse de ses emplois. Il est vrai cependant que le rythme des suppressions d'effectifs ralentit de plus de moitié cette année : selon les personnes que nous avons entendues, c'est lié à des redéploiements sur des missions sous-dotées, dans l'attente de gains de productivité supplémentaires.

Les responsables de programme nous ont en effet indiqué que l'objectif était bien de retrouver une trajectoire de stabilisation voire de baisse des crédits à moyen terme. D'ailleurs, lorsque nous tenons compte de l'inflation, les crédits de la mission baisseraient en volume sur la période 2023-2025.

Voici donc pour ce qui a trait aux grands équilibres de la mission. Si nous comprenons les besoins en informatique pour cette année, nous serons vigilants au retour d'une trajectoire de stabilisation pour 2024. Celle-ci nous semble tout à fait envisageable, alors que les réformes engagées par les administrations de la mission devraient porter leurs fruits.

Les administrations poursuivent en effet les chantiers entamés ces cinq dernières années.

Le premier chantier, entamé de longue date par la DGFiP, est celui de la rationalisation de son réseau et de ses emprises territoriales. Vous le savez, il y a eu un changement de méthode en 2019 avec le lancement du « nouveau réseau de proximité », qui devrait être finalisé à la fin de l'année 2023. En comptant les services relocalisés dans les villes moyennes, la DGFiP est désormais présente dans 2 844 communes. C'est bien mais, attention, il ne s'agit pas toujours d'une présence permanente mais de points de contact et de présence dans les maisons France Services.

À côté de cette réforme, qui touche surtout les contribuables, il y a aussi la mise en oeuvre des conseillers aux décideurs locaux, pour les collectivités territoriales et surtout les communes. La cible de 1 200 conseillers installés en 2022 ne sera pas atteinte, après une montée en charge plus lente que prévue : 447 conseillers aux décideurs locaux sont entrés en fonction en 2021, ils devraient être environ 800 en 2022 et 1 013 à la fin de l'année 2023.

Selon la DGFiP, les élus locaux sont plutôt satisfaits des prestations effectuées par les conseillers aux décideurs locaux. Nous avons pour notre part toutefois insisté sur la répartition de ces conseillers sur les territoires. Il faut trouver un équilibre entre les grandes collectivités, aux enjeux financiers les plus importants, et les petites communes rurales, souvent les moins à même de disposer d'une expertise technique en interne.

Le deuxième chantier est le transfert à la DGFiP du recouvrement des impositions jusqu'ici gérées par la Douane. Ces transferts ont commencé en 2019 et devraient se poursuivre au moins jusqu'en 2025. Cette réforme peut générer des gains de productivité et des économies d'échelle. Elle doit surtout conduire la douane à s'interroger sur ses missions fondamentales et à se recentrer sur son coeur de métier, le contrôle des flux de marchandises et de passagers.

Troisième et avant-dernier axe prioritaire de développement pour la DGFiP et la douane, la valorisation de la donnée. Au départ, il s'agissait surtout de développer des techniques d'analyse de données de masse au service du contrôle fiscal pour la DGFiP et de la lutte contre les trafics de toute nature pour la douane. L'objectif est double : améliorer le ciblage des contrôles et parvenir à détecter les cas de fraude les plus complexes.

Le quatrième et dernier chantier est celui de l'informatique. Les dépenses informatiques ont trop longtemps servi de variables d'ajustement : cela ne fait que quelques années que les budgets ont été sanctuarisés. Ces dépenses sont pourtant extrêmement importantes, d'une part pour résorber la dette technique des applications et systèmes d'information des administrations, et, d'autre part, pour développer de nouvelles applications à même de générer des gains de productivité à moyen terme.

La gestion des chantiers informatiques souffre toutefois encore d'un problème majeur : ainsi, lors de chaque projet de loi de finances, nous constatons que les coûts et les délais des projets ont été réévalués à la hausse. Au fil du temps, certains doublent voire triplent de volume ! Il est grand temps que des indicateurs soient mis en place pour mieux suivre ces projets.

Au regard de ces constats, vous aurez compris que nous avons quelques réserves sur la programmation des crédits pour l'année 2023, même si nous comprenons une partie des hausses. Toutefois, compte tenu de la gestion des administrations et du retour à la stabilisation prévu dès 2024, avec une baisse des crédits en volume à moyen terme, nous vous proposons d'adopter les crédits de cette mission.

Je passe désormais à la mission « Transformation et fonction publiques », qui se compose désormais de six programmes à vocation interministérielle et qui concernent des sujets aussi variés que la rénovation des cités administratives de l'État, les projets porteurs d'économie à moyen terme, les ressources humaines ou encore les start-ups d'État. Pour 2022, elle est dotée de 800 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et d'1,1 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). C'est une très forte augmentation par rapport à 2022, de près de 44 % pour les crédits de paiement.

La hausse de ces crédits doit toutefois être nuancée. Elle résulte d'abord d'une mesure de périmètre sur le programme 348. Ce dernier, auparavant entièrement dédié à la rénovation des cités administratives de l'État, compte une nouvelle action en 2023, dénommée « Résilience ». Derrière ce titre ampoulé, se cache un appel à projets pour le financement d'actions dites à « gains rapides », avec une enveloppe dotée de 150 millions d'euros. Ce sont des actions à faible coût qui génèrent de très importantes économies d'énergie. Il s'agit pour nous d'une mesure de bonne gestion. Le directeur de l'immobilier de l'État nous a ainsi expliqué que le coût du mégawatheure économisé par la mise en place d'une action à gains rapides est de 1 000 à 1 500 euros. Pour une rénovation globale, c'est de l'ordre de 7 000 euros le mégawatheure.

L'année dernière, nous avions noté des progrès dans la gestion de la mission. Ces progrès se poursuivent, même s'il faut reconnaître qu'il existe encore des difficultés. Par exemple, la sous-consommation des crédits demeure importante sur certains programmes, comme celui portant le fonds pour la transformation de l'action publique. 190 millions d'euros sont encore annulés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2022. Pourtant, le Gouvernement propose de prolonger le fonds de trois ans, en le dotant de 330 millions d'euros.

Il est vrai que les objectifs de ce fonds doivent être soutenus : il s'agit d'apporter l'impulsion nécessaire à l'amorçage de projets ou de réformes porteurs d'économies à moyen terme, notamment dans le domaine numérique. Encore faut-il cependant que les délais de contractualisation soient raccourcis.

Autre exemple, sur le programme 348, avec la rénovation des cités administratives. Les retards pris dans les travaux ont conduit à décaler les délais de livraison de la plupart des projets de rénovation. Entretemps, le coût des matières premières a fortement augmenté et seule l'annulation de deux projets permet de couvrir l'augmentation de ces coûts.

Au final, si la mission porte des objectifs ambitieux, la réalisation n'est pas encore totalement au rendez-vous. Il est vrai cependant que la gestion s'améliore et que ces progrès doivent être encouragés. Nous vous proposons donc d'adopter les crédits de cette mission, en notant également qu'elle est l'un des vecteurs de l'investissement public.

Mme Christine Lavarde, présidente . - Merci pour cette présentation.

M. Claude Nougein, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial des crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » . - Il me revient de vous présenter, au nom de mon collègue Albéric de Montgolfier, les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Malgré des efforts notables, tant sur le volet dépenses que sur le volet recettes, la baisse tendancielle des recettes du CAS risque d'entamer sa soutenabilité financière.

Le CAS enregistre une baisse de 18,2 % de ses dépenses entre 2022 et 2023, passant de 415 à 340 millions d'euros. Cette diminution concerne surtout les opérations structurantes et les cessions tandis que les dépenses d'entretien du propriétaire augmentent. Il y a lieu de s'en réjouir, puisque l'entretien a longtemps été le parent pauvre de la politique immobilière de l'État. La marge de manoeuvre devrait encore s'élargir dans les années à venir, puisque les dépenses d'entretien devraient atteindre 200 millions d'euros en 2025. La sous-consommation des crédits hors période de crise doit toutefois conduire à la prudence.

Par ailleurs, la diminution de la programmation en 2023 vise aussi à reconstituer la trésorerie du CAS. Les recettes du compte connaissent en effet une baisse tendancielle, en dépit d'un rebond en 2023. Ainsi, par rapport à 2022, les produits de cessions immobilières augmenteraient de 90 millions d'euros avant de diminuer de 150 millions d'euros par la suite, tandis que les redevances domaniales augmenteraient de 20 millions d'euros en 2023 pour se stabiliser ensuite.

La répartition des recettes est préoccupante : en finançant aux deux tiers les dépenses du CAS par les produits de cession, une érosion excessive du patrimoine immobilier de l'État pourrait survenir, qui pourrait entraîner les recettes du CAS dans une spirale baissière.

La politique de redynamisation des redevances menée par la direction de l'immobilier de l'État est à cet égard louable, mais on peine encore à en percevoir les fruits dans les recettes du compte. De même, le recours au bail emphytéotique permet de concilier l'impératif de dégager des recettes et celui de conserver, pour l'État, ses biens emblématiques. Une réflexion stratégique sur la durée optimale des baux devrait toutefois être menée, faute de voire leur nombre diminuer.

Ces constats en demi-teinte s'ajoutent au fait que le CAS ne remplit pas le rôle d'impulsion stratégique qui devait être le sien.

Le compte demeure d'ailleurs contourné dans ses règles et concurrencé par d'autres vecteurs budgétaires. Les entités ou ministères occupants ne sont censés pouvoir exercer leurs droits de tirage sur le CAS qu'en contrepartie de la mutualisation de produits de cession. Or, certains ministères ou projets disposent de dérogations. D'autres bénéficient d'avances sur cession, dont le montant s'élèverait à 373 millions d'euros pour l'année 2022.

Enfin, compte tenu de l'insuffisance des recettes du CAS, d'autres vecteurs budgétaires reprennent ses objectifs, entraînant, selon les mots du directeur de l'immobilier de l'État, « un véritable éclatement qui nuit à la performance ». La rénovation des cités administratives est par exemple, cette année encore, portée par le programme 348 de la mission « Transformation et fonction publiques ».

Au total, si CAS n'est, dans son état actuel, pas suffisant pour porter les grands projets immobiliers de l'État, il n'est pas interdit d'envisager que son modèle fasse l'objet d'une réforme dans les années à venir. Le chemin est étroit, mais il existe.

C'est pourquoi Albéric de Montgolfier vous propose de réserver notre position sur les crédits du CAS.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - J'insiste sur l'importance de regarder de plus près les trajectoires à moyen terme des dépenses de l'État et de ses opérateurs, c'est ce qui nous permet d'avoir une vision plus juste des efforts engagés. Il semble par ailleurs possible, par une gestion rigoureuse et comme la DGFiP l'a démontré, d'améliorer l'efficacité des dépenses publiques, voire de réaliser des économies.

M. Marc Laménie . - Nos rapporteurs ont publié récemment un rapport très intéressant sur l'organisation et les moyens de la douane face au trafic de stupéfiants. Ils formulaient des recommandations et soulignaient les carences de moyens humains, en tout cas sur les missions de surveillance, ainsi que la nécessité d'investir dans des moyens techniques. Où en est-on sur ce sujet dans le projet de loi de finances ?

Les trésoreries de la DGFiP sont les interlocuteurs des élus. Or, beaucoup ont fermé et leurs effectifs se sont réduits. Pourriez-vous nous donner des précisions sur l'évolution des effectifs et du réseau, au niveau central comme local ?

Enfin, je m'interroge sur les défis de la gestion du patrimoine immobilier de l'État, le suivi des opérations de vente ou de rénovations. Certains ministères, comme celui de la défense, conservent encore un patrimoine important.

M. Thierry Cozic . - J'aimerais revenir sur le programme 156 de la mission « Gestion des finances publiques ». Globalement, ses crédits augmentent de plus de 9 % et représentent, cette année encore, la part la plus importante des moyens de la mission. C'est dans ce programme que figure la restructuration de la présence de proximité de la DGFiP. Le Gouvernement a annoncé pour 2023 l'achèvement de la couverture nationale du réseau France Services avec une présence à moins de 30 minutes des usagers. Les remontées de terrain dont nous disposons aujourd'hui font notamment état du caractère artificiel de cette présence, dans la mesure où les amplitudes horaires d'ouverture des services sont très réduites. Je m'interroge donc sur la faisabilité de ce dispositif.

Deuxième point, je reviens sur les cités administratives et leur plan de rénovation : en 2023, on aurait dû en livrer dix-huit, et dix-neuf sont prévues pour 2024. Or le programme 348 « Performances et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » est celui qui enregistre le plus de retard dans le décaissement des crédits et, par voie de conséquence, le plus de reports de crédits. Je m'interroge donc sur la sincérité des montants prévus dans le budget.

Enfin, les crédits du programme 552, « Dépenses accidentelles et imprévisibles », progressent de 389 % pour s'établir à 2,074 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,774 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). Or, il suffit au Gouvernement de les annuler en fin de gestion pour donner artificiellement l'impression de bien tenir les dépenses. Votre amendement visant à minorer les crédits du programme d'un milliard d'euros me semble donc pertinent.

M. Arnaud Bazin . - Je note la forte augmentation des crédits de la DGFiP, principalement motivée par la mise à jour de grands programmes informatiques. En général, quand on parle de grands programmes informatiques à la commission des finances, notre attention s'éveille assez vite. Nous avons en effet constaté à maintes reprises de regrettables et notables échecs. De plus, qui dit grand programme informatique dit souvent recours à des cabinets de consultants. Quels sont les objectifs principaux visant à améliorer notre efficacité en matière de gestion ? Fera-t-on appel aux services compétents de la fonction publique comme cela devrait être le cas ? La DGFiP recourt-elle fréquemment à des prestataires externes ?

M. Michel Canévet . - Je note deux bonnes nouvelles dans le rapport. D'abord, la poursuite de la baisse des effectifs, signe d'une volonté de maitriser les dépenses de personnel et de fonctionnement, et ensuite la réduction du patrimoine bâti de l'État qu'il importait de rationaliser. Il convient maintenant de le moderniser, mais les opérations semblent difficiles à concrétiser, par exemple sur la rénovation des administratives. Est-ce un problème lié à la longueur des procédures et des contrats ? à l'importance des délais de paiement ? Enfin, quelles sont les deux cités administratives dont la rénovation envisagée ne pourra être réalisée ?

M. Antoine Lefèvre . - Puisque nous évoquons les difficultés de rénovation des cités administratives, je témoigne qu'à Laon l'essentiel des travaux réalisés a consisté à refaire un parking et à en interdire l'accès au public... Les horaires de permanence se réduisent. Si les cités se transforment en bunkers, c'est un problème pour les usagers. Certes, la dématérialisation se développe, mais une partie de nos concitoyens a besoin d'une présence physique, de pouvoir venir se faire expliquer certaines démarches.

Quant à l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN), s'applique-t-il aussi à l'État dans ses opérations immobilières ? Le projet de l'Agence française de développement d'installer son nouveau siège du côté de la gare d'Austerlitz suscite par exemple des débats à cause de sa consommation du foncier.

M. Jérôme Bascher . - Parvient-on à recruter de nouveaux informaticiens à Bercy ? Le tarif « fonction publique » n'est pas très attractif. Les spécialistes de finance et de statistiques sont très recherchés : par exemple, à la Caisse des dépôts, les fonctionnaires disposant de ces compétences se font souvent débaucher avec des offres de salaires jusqu'à deux fois supérieures. Aurons-nous les moyens de nos ambitions sur ce sujet ?

M. Claude Nougein , rapporteur spécial. - M. Laménie revient sur l'organisation et les moyens de la douane face au trafic de stupéfiants. Les douanes réalisent 80 % des saisies de stupéfiants. On note une stabilité du nombre des agents de douane - 17 000 agents environ -, mais, comme nous le soulignions avec M. Albéric de Montgolfier dans notre rapport, ils manquent de matériel moderne, notamment de scanners - scanners corporels dans les aéroports et scanners pour les conteneurs arrivant par bateau dans les grands ports. Je salue l'effort réalisé à cet égard dans le budget 2023, avec par exemple l'acquisition de huit camions équipés d'un système de scanner à rayon X et de deux scanners fixes pour le contrôle du fret postal.

Les effectifs de la DGFiP connaissent une nouvelle baisse en 2023, mais moindre que celle des années antérieures, où jusqu'à 2 000 postes ont pu être supprimés. Le plafond de la mission s'établit à un peu plus de 93 000 équivalents temps plein, dont la très grande majorité, 76 000, sont dans les services départementaux. Plus de 2 700 sont en administration centrale. M. Cozic m'a interrogé sur la présence dans la DGFiP dans les territoires : je peux lui dire que le ministre de la transformation et de la fonction publiques, M. Guérini, a confirmé que 98 % des Français se situaient aujourd'hui à moins de 30 minutes d'un point d'accueil. Nous partageons toutefois son constat, il ne s'agit pas toujours d'un point fixe ouvert cinq jours dans la semaine...

À propos des cités administratives, le retard est incontestable. Pendant longtemps, le Gouvernement nous a dit qu'il fallait faire des choix, qu'on ne pouvait pas tout faire et il y a eu un très long processus de sélection puis de définition des projets. Bref, si je caricature un peu, on a eu beaucoup de réflexion, mais peu d'action ! Aujourd'hui, après avoir pris du retard, le Gouvernement semble enfin vouloir terminer son programme, certes en décalé puisque les dernières cités administratives ne seraient plus livrées en 2024 mais en 2025. Or, entretemps, le coût des matières premières a fortement augmenté et seule l'annulation de deux projets permet de couvrir l'augmentation de ces coûts. Les deux projets abandonnés sont ceux de Brest, arrêté par la direction de l'immobilier de l'État, et de Melun, sur décision du préfet dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État dans le département. M. Lefèvre a raison : ce n'est pas en transformant les cités administratives en « bunkers » que l'on répond aux attentes de nos concitoyens. Au contraire ! Le rapport humain reste primordial : certains de nos concitoyens n'ont pas du tout accès au numérique et ne pourront jamais faire leurs démarches administratives en ligne.

Les crédits demandés sur la dotation des « dépenses accidentelles et imprévisibles » sont quatorze fois plus élevés que ceux demandés chaque année depuis 2018 en loi de finances initiale. La hausse est impressionnante ! Notre amendement vise à les réduire d'1 milliard d'euros. Je rappelle que notre commission s'était déjà opposée à des hausses d'une ampleur comparable dans le cadre des projets de loi de finances rectificative en 2021 et en 2022 et que, finalement, les crédits n'avaient pas été utilisés. Le Gouvernement doit réviser son modus operandi, car la question de la sincérité de ce budget se pose.

À propos des grands programmes informatiques, j'ai posé la question des cabinets de conseil en audition à M. Jérôme Fournel, le directeur général de la DGFiP, qui a répondu qu'il se montrait « prudent » et que la DGFiP se distinguait parmi les administrations de l'État par un très fort degré d'internalisation de la maitrise à assistance d'ouvrage et, plus globalement, de la gestion des projets informatiques. Accordons-lui le bénéfice du doute.

Thierry Carcenac et moi-même avions, en 2019 déjà dans le cadre de notre rapport budgétaire, proposé l'instauration d'une grille de rémunération particulière aux informaticiens de l'État. Des progrès ont été réalisés, notamment sous l'égide de la direction interministérielle du numérique (Dinum), qui a mis en oeuvre et diffusé des grilles de rémunération dérogatoires pour certaines compétences rares et spécialisées.

La question de la baisse des effectifs de la DGFiP a enfin été abordée : c'est vrai qu'on est passé de plus de 100 000 agents il y a trois ou quatre ans à un peu plus de 94 000 aujourd'hui. Cette évolution s'explique notamment par l'instauration du prélèvement à la source, par la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle ainsi que par la dématérialisation de nombreuses procédures, source de gains de productivité. C'est de la bonne gestion : je suis toujours surpris quand j'entends parler de « dynamisme de la dépense publique », le vrai dynamisme devrait se traduire par une baisse des dépenses publiques, et non par une hausse !

La commission a décidé à l'unanimité de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques ».

Article 27

Mme Christine Lavarde , présidente . - Je soumets au vote l'amendement FINC.1 . qui vise à minorer d'1 milliard d'euros les crédits du programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles ».

M. Didier Rambaud . - Je m'abstiens.

L'amendement FINC.1 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Crédits non répartis », sous réserve de l'adoption de son amendement.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Transformation et fonction publiques ».

La commission a décidé de réserver son vote sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions. Enfin, elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Ministère de la Transformation et de la Fonction publiques

- M. Stanislas GUERINI, ministre de la Transformation et de
la Fonction publiques .

Direction de l'immobilier de l'État (DIE)

- M. Alain RESPLANDY-BERNARD, directeur.

Direction du Budget

- M. Jean-Marc OLÉRON, sous-directeur.

Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI)

- Mme Isabelle BRAUN-LEMAIRE, directrice générale.

Secrétariat général du ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

- M. Brice CANTIN, secrétaire général des ministères économiques et financiers par intérim ;

- Mme Isabelle PÉROZ, sous-directrice de la gestion financière et des achats ;

- Mme Sarah TAILLEBOIS, cheffe de bureau synthèse budgétaire, gestion des finances publiques.

Direction générale des finances publiques (DGFiP)

- M. Jérôme FOURNEL, directeur général ;

- M. Xavier MICHELET, sous-directeur du budget, de l'achat et de l'immobilier au sein du service stratégie, pilotage, budget (SPIB).

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 Il s'agit notamment des crédits de la direction du budget (DB), de la direction des achats de l'État (DAE), de la direction des affaires juridiques (DAJ), des cabinets des ministres et secrétaires d'État, de l'inspection générale des finances (IGF), du contrôle général économique et financier (CGEFI), de l'autorité nationale des jeux (ANJ), de l'agence pour l'informatique financière de l'État (AIFE), de l'agence française anti-corruption (AFA), de la cellule française de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (TRACFIN), de la mission interministérielle de coordination anti-fraude (Micaf), du service commun des laboratoires (SCL), des structures de médiation, de la commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC), de la commission de certification des comptes des organismes payeurs des dépenses financées par les fonds européens agricoles (CCOP), de la mission France Recouvrement ainsi que du secrétariat général au Plan de relance (SGPR).

* 2 Revalorisation actée dans le cadre de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022.

* 3 Aux termes de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, une évaluation des cadres supérieurs est obligatoirement prévue tous les six ans.

* 4 D'après les données transmises en réponse au questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 5 Ibid. Le total dépasse 100 puisqu'une demande de prestations peut porter sur plusieurs objets.

* 6 Selon les données transmises dans le questionnaire budgétaire des rapporteurs spéciaux.

* 7 Il reprenait un engagement du président de la République au mois d'avril 2019, à l'issue des conclusions du grand débat national.

* 8 Selon les informations transmises dans le dossier de presse du ministère de l'économie, des finances et de la relance sur la relocalisation des services des finances publiques dans les territoires , 30 septembre 2020.

* 9 Le nombre de services total indiqué sur le graphique est supérieur au nombre de villes sélectionnées puisque certaines d'entre elles accueillent plusieurs services.

* 10 Rapport de la Cour des comptes sur « La direction générale des douanes et des droits indirects. Exercices 2013-2019. Un recentrage nécessaire » (septembre 2020).

* 11 Rapport d'information de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, fait au nom de la commission des finances n° 45 (2022-2023) - 12 octobre 2022.

* 12 Article 184 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 . Pour une description détaillée de ces transferts, se reporter au commentaire de l'article 61 du projet de loi de finances pour 2020, dans le tome III du rapport général n° 140 (2019-2020) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 21 novembre 2019.

* 13 Potentiellement 700 équivalents temps plein selon les données communiquées par la directrice générale des douanes et des droits indirects, Mme Isabelle Braun Lemaire, lors de son audition par la commission des finances le 6 avril 2021 .

* 14 Article 10 du projet de loi de finances pour 2023.

* 15 Article 130 de la loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 16 Article 10 quindecies du projet de loi de finances pour 2023.

* 17 Mission d'information de la commission des finances relative à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales .

* 18 Pour plus de détails, les rapporteurs invitent à se reporter au rapport de la mission d'information de la commission des finances relative à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales .

* 19 Ibid.

* 20 Cour des comptes, La fraude aux prélèvements obligatoires , décembre 2019.

* 21 « Les douanes face au commerce en ligne : une fraude fiscale importante et ignorée », rapport d'information n° 93 (2013-2014) de MM. Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier, au nom de la commission des finances, déposé le 23 octobre 2013.

* 22 Selon des données reprises dans Les Échos, « TVA sur l'e-commerce : Bercy se prépare au big bang du 1 er juillet », 22 avril 2021.

* 23 En euros par poste informatique. Il mesure le coût direct annuel moyen d'un poste de travail bureautique.

* 24 Ministère de l'économie, des finances et de la relance, Bilan des réformes de productivité de l'action publique , octobre 2021.

* 25 Loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique .

* 26 Cour des Comptes, Rapport public annuel pour 2020 : « Disposer des personnels qualifiés pour réussir la transformation numérique : l'exemple des ministères économiques et financiers » , février 2020.

* 27 Direction générale des finances publiques, rapport d'activité pour l'année 2020 .

* 28 Secrétariat général du ministère de l'économie, des finances, de la souveraineté industrielle et numérique, « Bercy Vert en actions », mai 2022.

* 29 Ministère de l'économie, des finances et de la relance. Plan d'action climat du ministère , 29 avril 2021.

* 30 Circulaire du Premier ministre n°6145/SG du 25 février 2020 relative aux engagements de l'État pour des services publics écoresponsables .

* 31 Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités.

* 32 Ordonnance n° 2021-702 du 2 juin 2021 portant réforme de l'encadrement supérieur de la fonction publique de l'État.

* 33 Arrêté du 25 octobre 2022 portant répartition de crédits.

* 34 Au 31 août 2022.

* 35 Rapport n° 792 (2021-2022) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022.

* 36 Réponse du ministère au questionnaire budgétaire.

* 37 Rapport n° 792 (2021-2022) de MM. Albéric de Montgolfier et Claude Nougein, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022.

* 38 Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

* 39 Rapport n°831 (2020-2021) sur la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et sur la proposition de loi portant diverses dispositions relatives au Haut Conseil des finances publiques et à l'information du Parlement sur les finances publiques de MM. Jean-François Husson et Claude Raynal, fait au nom de la commission des finances, déposé le 15 septembre 2021.

* 40 39 à l'origine, mais le projet de Melun a été arrêté sur décision du préfet, et dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État à Melun, tandis que celui de Brest a été arrêté sur décision de la direction de l'immobilier de l'État.

* 41 Ce programme traduit l'une des préconisations de Jean Pisani Ferry dans le rapport qui a préfiguré le Grand plan d'investissement, l'initiative 20 recommandant en effet de créer un fonds pour la transformation de l'action publique.

* 42 Sur le principe qu'un euro investi doit conduire à au moins un euro d'économie pérenne au bout de trois ans.

* 43 Parmi les actions à gains rapides figurent par exemple le contrôle, le pilotage et la régulation des systèmes de chauffage ou encore la modernisation des systèmes d'éclairage ou de chauffage.

* 44 Décret n° 2019-771 du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire.

* 45 Article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1 août 2001 relative aux lois de finances .

* 46 Rapport n° 743, tome II, annexe 15, volume 1 (2020-2021) de MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN, déposé le 7 juillet 2021 : Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Crédits non répartis - Action et transformation publiques, dans le cadre de l'examen par la commission des finances de la loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020. Se reporter également à la communication en commission des rapporteurs spéciaux, en date du 7 juillet 2021.

* 47 Comité d'évaluation du plan France Relance, Premier rapport , octobre 2021.

* 48 Action 01 « Rénovation énergétique » du programme 302 « Écologie » de la mission « Plan de relance ».

* 49 Le coût d'abattement désigne, dans pour les différentes solutions de décarbonation, le rapport entre le coût du projet et le volume des émissions évités grâce à ce projet.

* 50 Recommandation n° 2 du rapport précité.

* 51 Commission d'enquête sur l'influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques .

* 52 Circulaire du Premier ministre n° 6329/SG du 19 janvier 2022.

* 53 Le dossier législatif de la proposition de loi est consultable en ligne .

* 54 Recommandation n° 4 des rapporteurs spéciaux dans le cadre du rapport précité sur le projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour l'année 2021.

* 55 Issu de la réforme de l'École nationale d'administration, effective au 1 er janvier 2022.

* 56 Une commission, présidée par M. Jean Bassères et installée le 16 juin 2021, a formulé des propositions au mois de novembre dernier afin de définir les futures missions de l'Institut national du service public.

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