C. UNE JUSTIFICATION PEU CONVAINCANTE DE LA HAUSSE DES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS ACCORDÉS À LA DÉLÉGATION INTERMINISTÉRIELLE DE LA TRANSFORMATION PUBLIQUE

Selon les informations transmises aux rapporteurs spéciaux, 15 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires seraient recrutés au sein de la DITP pour « réinternaliser des compétences de conseil » et sept ETP pour le suivi des réformes de l'action publique. Le ministère explique qu'il s'agit d'une réponse aux travaux du Sénat sur le recours abusif aux cabinets de conseil 51 ( * ) . Des interrogations demeurent toutefois sur le rôle effectif de ces agents , tant sur leur place par rapport aux corps d'inspection que sur la capacité de sept d'entre eux à suivre l'ensemble des réformes mises en place par les ministères.

Il est également permis de douter que l'échelon le plus approprié sur ce point soit la DITP et non par exemple les secrétariats généraux des ministères, également responsables des fonctions support pour les administrations centrales . Il est vrai en revanche qu'il y a un réel besoin de retrouver des compétences techniques spécialisées en interne : à défaut, il est impossible de suivre les commandes, d'évaluer les productions du prestataire ou encore, de pérenniser et de gérer les projets une fois les prestataires externes partis.

Le nouvel accord-cadre sur le recours aux prestataires externes précise également que la DITP sera le point de contact unique pour les ministères souhaitant recourir à une prestation de conseil : elle a été chargée, dans le cadre de la circulaire du Premier ministre du 19 janvier 2022 52 ( * ) , de créer un pôle interministériel d'achat de prestations intellectuelles de conseil.

Si le ministère a indiqué avoir intégré la plus grande partie des recommandations de la commission d'enquête du Sénat, les rapporteurs spéciaux renvoient aux dispositions de la proposition de loi déposée par nos collègues Éliane Assassi et Arnaud Bazin le 21 juin 2022 et adoptée par le Sénat à l'unanimité le 18 octobre 2022, qui montrent qu'il demeure encore des marges de progrès 53 ( * ) .

Il sera crucial, lors de l'examen du prochain projet de loi de finances, de demander des éléments de bilan sur ces créations de postes et sur leur activité, afin d'évaluer la pertinence de leur maintien.

D. DES ACTIONS EN MATIÈRE DE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES ENCORE PEU LISIBLES

Le ministre de la transformation et de la fonction publiques a déclaré devant les rapporteurs spéciaux que l'une des priorités de son ministère, avec l'accessibilité des services publics, était l'attractivité de la fonction publique . Il s'agit selon lui d'une « priorité absolue » alors que le nombre de candidats aux concours de la fonction publique a été divisé par deux en dix ans. Les chantiers sont nombreux : rémunération, révision des régimes statutaires et indemnitaires, formation professionnelle, santé au travail, réforme de la haute fonction publique et de la gestion des cadres supérieurs.

Or, les crédits déployés en matière de gestion des ressources humaines sont encore peu lisibles . Certes, et conformément à l'une des recommandations des rapporteurs spéciaux 54 ( * ) , le programme 351 « Fonds pour l'accompagnement interministériel RH » a été supprimé en loi de finances pour 2022 et rattaché au programme 148, mais les actions demeurent encore éclatées.

La direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), responsable du programme 148 « Fonction publique », est chargée de piloter de nombreux chantiers transversaux en matière de ressources humaines , dont les conférences de perspectives salariales, le développement de l'apprentissage ou encore la réforme de la haute fonction publique. Elle ne constitue toutefois pas encore, au regard des ambitions affichées, la « direction des ressources humaines » de l'État : les secrétariats généraux des ministères ainsi que les services de ressources humaines au sein même des administrations conservent un rôle de premier plan en la matière. De plus, les emplois et les dépenses de personnel de la DGAFP sont portés sur le programme 368, dédié à la conduite et au pilotage de la transformation et de la fonction publiques.

Le programme 148 porte seulement une partie des crédits dédiés à la formation, à la mobilité ou aux prestations d'actions sociales à destination des agents publics, le poids de ces actions dans la mission étant inégal. Il existe également deux subventions pour charges de service public au profit des opérateurs de la mission :

- celle allouée à l'Institut national du service public (INSP) 55 ( * ) devrait légèrement augmenter en 2023 , passant de 38,4 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2022 à 39,1 millions d'euros, pour un schéma d'emploi nul. Les rapporteurs spéciaux notent toutefois que le contrat d'objectifs et de performance qui devait accompagner les arbitrages finaux sur l'INSP 56 ( * ) n'a pas encore été finalisé ;

- celle allouée aux cinq instituts régionaux d'administration (IRA) augmenterait plus significativement, passant de 40,1 millions d'euros à 42 millions d'euros en 2023 . Le plafond d'emplois est stable, avec une augmentation de 5 ETP. Le contrat d'objectifs et de performance des IRA, qui couvrait la période 2020-2022, doit être prolongé d'une année, avant sa renégociation.


* 51 Commission d'enquête sur l'influence croissante des cabinets de conseil privés sur les politiques publiques .

* 52 Circulaire du Premier ministre n° 6329/SG du 19 janvier 2022.

* 53 Le dossier législatif de la proposition de loi est consultable en ligne .

* 54 Recommandation n° 4 des rapporteurs spéciaux dans le cadre du rapport précité sur le projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour l'année 2021.

* 55 Issu de la réforme de l'École nationale d'administration, effective au 1 er janvier 2022.

* 56 Une commission, présidée par M. Jean Bassères et installée le 16 juin 2021, a formulé des propositions au mois de novembre dernier afin de définir les futures missions de l'Institut national du service public.

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