B. L'IMPLANTATION D'UN CENTRE D'INNOVATION AU CoeUR DE LA CAPITALE ACCROÎT LA VISIBILITÉ DE LA PLACE FINANCIÈRE PARISIENNE

1. Un pôle d'innovation récent, au service des banques centrales

En 2019, la BRI a créé un pôle d'innovation ( BIS Innovation Hub , ou BISIH), dirigé depuis le siège de Bâle. Il est composé de centres d'innovation répartis dans le monde et hébergés par les banques centrales des pays concernés. Sa mission est de favoriser et de développer la coopération au sein de la communauté des banques centrales pour explorer les potentialités des nouvelles technologies dans le domaine bancaire et financier. À cet effet, le BISIH est chargé :

- d'identifier les évolutions technologiques pouvant concerner les missions des banques centrales et approfondir la connaissance de ces technologies, des risques et des avantages qu'elles portent pour le secteur financier et les utilisateurs de services financiers, dans l'objectif d'améliorer la prise en compte de ces effets par les banques centrales ;

- de mettre en relation les responsables d'innovation et d'exploration technologique des différentes banques centrales ;

- de conduire des projets techniques pour expérimenter dans le champ de ces nouvelles technologies ou, si un intérêt est identifié, de développer des outils utiles aux banques centrales que la BRI mettra gratuitement à leur disposition (« biens publics ») ;

- de porter à la connaissance du secteur financier et du public les actions des banques centrales dans le domaine de l'innovation, grâce à l'organisation de conférences, de hackathons 3 ( * ) et d'appels à projets. Le BISIH a ainsi lancé, en 2020, un concours sur le thème des technologies digitales appliquées aux missions de régulation et de supervision ( Regtech/Suptech ), et un appel à projets dans le domaine de la finance verte (travaux du G20).

2. Un réseau mondial qui s'implante au sein de la zone euro
a) Les travaux conduits par les implantations existantes

Le BISIH est actuellement composé de cinq centres situés en Suisse (à Bâle et à Zurich), à Londres, à Stockholm, à Hong Kong et à Singapour. Un sixième site ouvrira prochainement à Toronto, et un partenariat a été signé avec la Federal Reserve Bank of New York .

Lors de son audition, la Banque de France a présenté au rapporteur les domaines explorés par les centres existants et les travaux qu'ils conduisent :

- l'application de la technologie pour la régulation et la supervision (Regtech/Suptech) . Le centre suisse a conduit un projet en matière de surveillance des marchés en temps réel, et le centre singapourien en a mené un autre sur l'automatisation et la digitalisation des déclarations réglementaires des établissements ;

- la monnaie numérique de banque centrale (MNBC) . Deux expérimentations ont été conduites par le centre suisse : la première sur l'usage de la MNBC pour le règlement d'opérations sur titres, et la seconde, en partenariat avec la Banque de France, sur l'interopérabilité de deux MNBC pour des opérations financières transnationales. Le centre de Singapour a quant à lui mené une expérimentation portant sur la création d'une plateforme supportant des MNBC de différents pays pour des règlements transnationaux 4 ( * ) . Enfin, le centre de Hong Kong a conduit un projet sur l'interopérabilité de MNBC de quatre pays, et un autre sur une MNBC destinée aux paiements des particuliers ( retail MNBC ) ;

- les nouvelles infrastructures de marché . Un projet de construction de plateforme permettant des règlements instantanés entre pays a été mené par le centre singapourien ;

- la finance décentralisée . Le centre de Hong Kong a travaillé sur la digitalisation des identités d'entreprises pour faciliter leur accès au crédit ;

- la finance verte . Le centre de Hong Kong oeuvre à la construction d'une plateforme digitale de gestion de l'émission et du transfert d'obligations vertes, destinée à faciliter l'accès des investisseurs individuels à ce type d'instruments financiers.

b) Le futur centre franco-allemand et les projets qui lui seront confiés

La Banque de France, la Deutsche Bundesbank et la Banque centrale européenne (BCE) ont proposé à la BRI, au nom de l'Eurosystème, d'accueillir un nouveau centre au coeur de la zone euro, réparti sur deux sites : le premier installé à Francfort, où siège la BCE, et le second implanté à Paris qui, par ailleurs, accueille le siège de l'Autorité bancaire européenne et celui de l'Autorité européenne des marchés financiers.

D'après le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, la place centrale de Paris et de Francfort dans le réseau d'infrastructures de l'Eurozone (communications, énergie, datacenters ) a été essentielle dans cette candidature, de même que l'image des banques centrales française et allemande, reconnues comme particulièrement innovantes.

Lors de son audition, la Banque de France a présenté les trois projets qui seront confiés au centre Eurosystème :

- le projet « Gaia » dans le domaine de la finance verte . Alors que les banques centrales ont pris conscience des effets négatifs du changement climatique sur la stabilité financière, le projet Gaia aura pour objet d'analyser de façon optimale les rapports extrafinanciers afin d'automatiser la lecture de ces rapports grâce à l'apprentissage automatique ( Machine Learning ), et ainsi mieux appréhender les actions menées par les banques et les entreprises privées pour réduire leur empreinte carbone ;

- le projet « Leap » dans le domaine de la cybersécurité . Lorsqu'un ordinateur quantique universel sera mis au point, les protocoles de cryptographie actuellement utilisés dans toutes les communications internet seront obsolètes. Ce risque de cybersécurité peut d'ores et déjà être neutralisé par l'application d'algorithmes post-quantiques ; toutefois, l'utilisation de ces nouveaux protocoles cryptographiques - qui restent immatures - doit être testée avant une implémentation dans un environnement réel de travail ;

- le projet « Atlas » en matière d'application de la technologie pour la supervision . Le but est de créer une plateforme permettant de superviser les marchés de cryptomonnaies. En effet, le manque de transparence et l'accès difficile à la donnée compliquent aujourd'hui la mission du régulateur.


* 3 Ou « marathon de programmation » : événement durant lequel des groupes de développeurs volontaires se réunissent pour une période donnée afin de travailler sur des projets de programmation informatique de manière collaborative.

* 4 Cette expérimentation se prolongera en 2022 et associera deux autres centres du BISIH : le centre Eurosystème et le centre suisse.

Page mise à jour le

Partager cette page