Rapport n° 792 (2021-2022) de M. Éric JEANSANNETAS , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022

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N° 792

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
de
règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 31

Sport, jeunesse et vie associative

Rapporteur spécial : M. Éric JEANSANNETAS

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

10 , 16 et T.A. 2

Sénat :

787 (2021-2022)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. En 2021, les crédits consommés au titre de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » se sont élevés à 1 533,2 millions d'euros , soit un niveau supérieur au plafond fixé à 1 300 millions d'euros par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) et actualisé par la loi de finances pour 2020. L'exécution des crédits est supérieure de 12,8 % au montant des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2021 (1 359,6 millions d'euros).

2. L'augmentation importante des crédits du programme 2019 en cours de gestion s'explique par la mise en place du « Pass'sport » et du dispositif de compensation des pertes de billetterie .

Concernant le dispositif de compensation des pertes de billetterie, 100 millions d'euros ont été ouverts par décrets de transferts, et 107 millions proviennent d'un report de crédits de 2020. Ces sommes sont particulièrement importantes, et le rapporteur spécial regrette qu'elles n'aient pas pu faire l'objet d'un examen par le Parlement .

Le Pass'sport a été mis en oeuvre dans l'urgence, ce qui s'est traduit par une
sous-consommation de ses crédits
: sur 100 millions d'euros, 45,8 millions d'euros en crédits de paiement ont été exécutés. Les familles, les associations et les acteurs locaux n'ont pas été suffisamment mobilisés dans le déploiement du dispositif.

3 . Le nombre de jeunes ayant effectué une mission de service civique en 2021 (145 000) est nettement inférieur aux prévisions (245 000), malgré un budget très élevé (861,8 millions d'euros). Cette réalisation inférieure à la cible ne peut pas entièrement s'expliquer par la crise sanitaire, et elle montre que, au-delà des moyens financiers mobilisés, le développement du service civique nécessite une trajectoire budgétaire pluriannuelle stable et lisible .

4. Le coût par jeune du Service national universel (SNU) en 2021 (2 660 euros) reste élevé. La généralisation du dispositif à l'ensemble d'une classe d'âge (800 000 jeunes), en faisant l'hypothèse d'un coût par jeune similaire, aboutirait à un montant de 1,9 milliard d'euros, ce qui met en question sa soutenabilité budgétaire . En outre, les coûts du SNU présentent encore des zones d'ombre, que les expérimentations des années à venir devront impérativement clarifier.

5. La Société de livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) a confirmé une nouvelle fois que la crise sanitaire n'aura pas causé de retard significatif dans la préparation des infrastructures prévues pour l'accueil des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Toutefois, l'indicateur « Taux d'opérations ayant atteint un jalon essentiel dans le processus de livraison des ouvrages olympiques » montre que les réalisations sont inférieures aux objectifs de performance révisés en 2021 .

En outre, les tensions persistantes sur le prix des matières premières invitent à rester vigilant concernant l'évolution du coût de la construction des ouvrages olympiques.

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2021

1. Une mission dont les crédits ont été multipliés par près de trois depuis 2012

La mission « Sport, jeunesse et vie associative » est composée de trois programmes :

- le programme 219 « Sport », qui porte principalement sur le soutien aux fédérations sportives, sur l'ouverture à tous de la pratique sportive, et enfin le soutien aux opérateurs du sport ;

- le programme 163 « Jeunesse et vie associative » , qui concerne essentiellement le développement du service civique, par le biais de l'Agence du service civique (ASC), la préfiguration du service national universel (SNU) ainsi que le soutien à la vie associative, en particulier par le soutien au Fonds de coopération de la Jeunesse et de l'Éducation populaire (FONJEP) et le fonds pour le développement de la vie associative (FDVA) ;

- le programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques de 2024 », qui constitue le vecteur budgétaire du soutien financier de l'État à l'organisation des Olympiades de 2024.

Deux caractéristiques de la mission doivent être relevées :

- d'une part, son accroissement tendanciel au cours des dernières années, à la faveur de l'universalisation du service civique et de la création du programme dédié aux Olympiades de 2024 ;

- d'autre part, le niveau élevé de dépenses fiscales qui lui sont rattachées et représentent près de 3 milliards d'euros.

L'accroissement des crédits de la mission se poursuivra au cours des prochains exercices compte tenu de la montée en puissance des dépenses relatives aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, tandis que la généralisation annoncée du service national universel se traduira par un coût croissant.

2. Une exécution marquée par les suites de la crise sanitaire et la préparation des jeux olympiques

Exécution des crédits de la mission par programme en 2021

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés en 2020

Crédits votés LFI 2021

Crédits ouverts 2021

Crédits exécutés 2021

LFI 2021 / Exécution 2021

Exécution 2020 / Exécution 2021

219

AE

421,8

433,1

790,9

765,1

+ 76,7 %

+ 81,4 %

CP

426,3

432,2

790,0

685,8

+ 58,7 %

+ 60,9 %

163

AE

708,8

693,2

666,8

627,4

- 9,5 %

- 11,5 %

CP

708,1

693,3

668,5

611,8

- 11,8 %

- 13,6 %

350

AE

321,7

354,7

354,7

354,7

0 %

+ 10,3 %

CP

127,7

234,1

235,6

235,6

+ 0,6 %

+ 84,5 %

Total

AE

1 452,2

1 481,0

1 812

1 747,2

+ 18,0 %

+20,3 %

CP

1 262,1

1 359,6

1 694,1

1 533,2

+ 12,8 %

+ 21,5 %

NB : comme en 2020, les données sont retraitées d'erreurs techniques survenues sur les autorisations d'engagement du programme 350, pour un montant de 375,8 millions d'euros. Sans ce retraitement, les autorisations d'engagement ouvertes en 2021 pour l'ensemble de la mission sont de 2 187,8 millions d'euros, et les autorisations d'engagement exécutées sont de 2 123 millions d'euros.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

En 2021, les crédits consommés sur la mission s'élèvent à 1 533,2 millions d'euros, soit un niveau supérieur au plafond fixé à 1 300 millions d'euros par la loi de programmation des finances publiques (LPFP) 1 ( * ) et actualisé par la loi de finances pour 2020. L'exécution des crédits est supérieure de 12,8 % au montant des crédits ouverts en loi de finances initiales pour 2021 (1 359,6 millions d'euros). En comparaison, l'exécution en 2020 était supérieure de 4 % aux prévisions initiales.

Le programme 219, « Sport », et le programme 350, « Jeux olympiques et paralympiques de 2024 », ont connu une forte progression des dépenses entre 2020 et 2021, de respectivement 60,9 % et 84,5 % en consommation des crédits de paiement . Sur la même période, les dépenses de la mission 163, « Jeunesse et vie associative », diminuent de 13,6 %.

La progression des dépenses du programme 350 s'explique principalement par l'accélération de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques, à l'approche de l'échéance de 2024 . Le rythme des travaux s'est intensifié, et la Solidéo a renforcé sa fonction de supervision des maîtres d'ouvrage. En outre, pour la première fois des crédits destinés au financement du Comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques ont été ouverts en LFI et consommés, pour un montant de 25 millions d'euros. L'exécution du programme est conforme aux prévisions de la loi de finances initiale .

En revanche, pour le programme 219, il est constaté un écart important (+ 60,9 %) entre les crédits votés en loi de finances initiale (432,2 millions d'euros) et leur exécution (685,8 millions d'euros). L'écart est encore plus grand concernant les crédits ouverts : ils sont de 790 millions, soit une augmentation de 82,8 % par rapport aux crédits votés en LFI.

Plusieurs mouvements de crédits ont en effet contribué à augmenter les crédits disponibles du programme 219 :

- le programme a bénéficié de 130 millions d'euros de crédits supplémentaires par la loi de finances rectificative du 19 juillet 2021. 100 millions d'euros étaient consacrés à la mise en place du Pass'sport, et 30 millions étaient destinés à l'Agence nationale du sport ;

- le programme a été abondé de 207 millions d'euros de crédits supplémentaires au titre du dispositif de compensation des pertes de billetterie . Sur cette somme, 107 millions proviennent d'un report de crédits non consommés en 2020 2 ( * ) , et 100 millions proviennent d'un décret de transfert en provenance du programme 357, « Fonds de solidarité pour les entreprises à la suite de la crise sanitaire ».


Évolution des crédits en cours de gestion en 2021

(CP, en milliard d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

II. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Des dispositifs d'aide au monde du sport importants mais qui présentent des limites

L'exécution du programme 219, « Sport » a été marquée par la mise en place du Pass'sport, la mise en oeuvre du dispositif de compensation des pertes de billetterie (repoussée de 2020 à 2021), et l'octroi d'une compensation du manque à gagner de la « Contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives » (taxe Buffet) à l'Agence nationale du sport.

Le Pass'sport a été mis en place par le décret n°2021-1171 du 10 septembre 2021 , et il se traduit par une aide à la prise d'une licence sportive de 50 euros pour la saison 2021-2022. Contrairement au Pass culture, le Pass'sport est un dispositif ciblé : il s'adresse aux enfants entre 6 à 17 ans, qui bénéficient alternativement de l'allocation de rentrée scolaire, de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, ou de l'allocation aux adultes handicapés 3 ( * ) . Le dispositif était initialement ouvert jusqu'au 31 novembre 2021, mais il a fait l'objet d'une prolongation jusqu'au 28 février 2022.

L'exécution du dispositif est nettement inférieure aux prévisions. Sur les 100 millions d'euros prévus, ont été consommés 65,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 45,8 millions d'euros en crédits de paiement . Ces dépenses correspondent à environ 1,1 million de jeunes touchés par le dispositif, ce qui est un résultat inférieur de 55 % à l'objectif de 2 millions de jeunes.

L'exécution du Pass'sport pâtît de l'urgence dans laquelle le dispositif a été mis en oeuvre . La Cour des comptes souligne ainsi, dans sa note d'exécution budgétaire de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » de mai 2022, les limites que présente le dispositif : « une communication et une mobilisation des familles et des associations fragiles, une dématérialisation via le CompteAsso mal maîtrisée, des processus de paiement trop lourds et trop complexes, passant par des tiers payeurs, des données de pilotage peu qualitatives, une absence d'articulation avec les dispositifs locaux ayant le même objet, une mobilisation variable des acteurs locaux . »

Le dispositif de compensation des pertes de billetterie représente l'une des conséquences les plus visibles de la crise sanitaire sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Les crédits prévus en 2020
(107 millions d'euros) n'ont toutefois pas été consommés, et par conséquent, le dispositif n'a pu être véritablement mis en oeuvre qu'en 2021 .

Ce dispositif concernait à l'origine les manifestations sportives qui se sont tenues durant la seconde moitié de l'année 2020. Le décret n° 2021-1108 du 23 août 2021 a prolongé le dispositif pour la période du 1 er janvier 2021 au 29 juin 2021.

Le coût total s'établit à 207 millions d'euros en AE et en CP . 100 millions d'euros ont été ouverts par décrets de transferts, et 107 millions proviennent d'un report de crédits de 2020. Ces sommes sont particulièrement importantes, et le rapporteur spécial regrette qu'elles n'aient pas pu faire l'objet d'un examen par le Parlement .

La défaillance de Médiapro a eu pour conséquence une diminution des droits de la ligue 1 de football estimée à 575 millions d'euros . Le manque à gagner pour l'Agence nationale du sport via la « Contribution sur la cession à un service de télévision des droits de diffusion de manifestations ou de compétitions sportives » (taxe Buffet) est aujourd'hui évalué à 14,43 millions d'euros . Au regard de la situation, une compensation de 19,85 millions d'euros a été versé fin 2021 à l'Agence, et il est prévu que la dotation 2022 de l'ANS soit retranchée de 5,32 millions d'euros, pour prendre en compte le trop-perçu issu de la compensation . La Cour des comptes, dans sa note d'exécution budgétaire de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » de mai 2022, relève que « la direction des sports indique que le principe d'une compensation des pertes est retenu mais que le mécanisme précis est en cours de définition . »

Cette compensation montre les fragilités du financement de l'Agence nationale du sport. Elle est fortement dépendante des recettes des droits audiovisuels du football, qui sont soumis à des aléas significatifs de marché , comme la réduction du nombre de diffuseurs susceptibles de proposer une offre ou le dynamisme des championnats concurrents.

Le rapporteur spécial souligne le risque d'une systématisation de la compensation de la taxe Buffet en cas de recettes inférieures aux prévisions. La mise en place d'une compensation systématique reviendrait à transférer les risques financiers au budget de l'État. Or, les finances publiques n'ont pas vocation à supporter les aléas de la négociation des droits audiovisuels des retransmissions sportives .

2. La nécessité d'une clarification de la trajectoire budgétaire des politiques d'engagement de la jeunesse
a) Le service civique doit faire l'objet d'un soutien durable, à l'opposé d'une politique de « stop and go »

Après la crise sanitaire de 2020, les objectifs du service civique en 2021 étaient ambitieux : il s'agissait de permettre à 245 000 jeunes d'effectuer une mission de service civique . Pour l'atteindre, 363 millions d'euros ont été inscrits en loi de finances initiale au titre du plan de relance (programme 364, « Cohésion »), et 498,8 millions ont été ouverts dans le programme 163, « Jeunesse et vie associative », pour un total de 861,8 millions d'euros .

En 2021, environ 145 000 jeunes ont finalement effectué une mission de service civique, ce qui est bien inférieur à la cible retenue en loi de finances initiale . En conséquence, l'Agence du service civique s'est constituée une trésorerie d'un montant très élevé (288 millions d'euros), en augmentation par rapport à la fin 2020 (69,4 millions d'euros), qui était déjà exceptionnelle.

La participation inférieure aux prévisions s'explique en partie par la poursuite des mesures de restriction sanitaire. Cette explication n'est toutefois pas suffisante . En 2020, 131 120 jeunes ont effectué une mission de service civique, ce qui est un nombre relativement proche de celui de 2021, alors que pourtant les mesures de lutte contre la crise sanitaire étaient bien plus restrictives en 2020 .

Cette sous-exécution invite plus fondamentalement à se demander si le nombre de jeunes effectuant un service civique n'aurait pas atteint un « plafond », en l'état de l'organisation actuelle du dispositif .

Le nombre de missions agréées a atteint les 140 000, ce qui est un niveau inédit depuis le lancement du service civique, mais la gestion des missions ne peut pas être évaluée d'un point de vue seulement quantitatif : il est nécessaire dans le même temps de s'assurer de la qualité des missions, au risque sinon que le service civique se transforme en un traitement social du chômage des jeunes .

Le développement du service civique ne doit donc pas se faire uniquement par la création de nouvelles missions, mais aussi à travers un renforcement de l'accompagnement des jeunes et des organismes d'accueil, en s'appuyant sur une plus grande prévisibilité du budget accordé au service civique.

Pour ces raisons, la manière dont le service civique a été intégré au plan de relance est discutable. Le fonctionnement du service civique n'est pas adapté à une politique de « stop and go », mais doit faire l'objet d'un soutien durable .

b) La soutenabilité de la trajectoire budgétaire du service national universel n'est pas encore assurée

La crise sanitaire a bouleversé le calendrier initial du déploiement du Service national universel (SNU), qui visait à une généralisation pour l'ensemble d'une classe d'âge (800 000 jeunes) aux environs de 2023/2024. En effet, en 2020 aucun jeune n'a pu participer au séjour de cohésion 4 ( * ) , et l'objectif pour 2021 a été revu à 25 000 jeunes. La poursuite des mesures de restriction sanitaire a toutefois conduit à ce que seulement 15 000 jeunes participent au séjour de cohésion en 2021 .

L'exécution du SNU s'établit à 39,9 millions d'euros en 2021, ce qui est inférieur de 35 % à la programmation en loi de finances initiale (62,3 millions d'euros). Le coût par jeune (2 660 euros) est supérieur à celui prévu en loi de finances initiale (2 492 euros), mais il est cohérent au regard des coûts fixes du dispositif.

Le niveau global des dépenses consacrées au SNU en 2021 continue cependant de susciter des questions . La prévision de la loi de finances initiale pour 2020 était de 30 millions d'euros, pour une cible de 20 000 jeunes. Le coût par jeune estimé était donc de 1 500 euros, tandis que le coût par jeune effectif en 2021 est de 2 371 euros, pour le seul séjour de cohésion . La comparaison met en doute la sincérité de la prévision en 2020.

Plus généralement, la généralisation du dispositif à l'ensemble d'une classe d'âge, en faisant l'hypothèse d'un coût par jeune similaire à celui de 2021, aboutirait à un montant de 1,9 milliard d'euros, ce qui met en question sa soutenabilité budgétaire, et conduirait à une forte concentration des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

L'année 2021 est la première année où un nombre significatif de jeunes a pu effectuer le séjour de cohésion, ce qui permet de tirer un certain nombre d'enseignements. L'hébergement et la logistique ont été identifiés comme des enjeux majeurs et particulièrement complexes pour l'administration. En outre, les mesures de lutte contre la crise ont faussé en partie les estimations des coûts du SNU .

Par ailleurs, la Cour des comptes, dans sa note d'exécution budgétaire de 2021 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » relève que le SNU a connu des difficultés dans la gestion de ses personnels . La Cour note ainsi que : « au 8 septembre 2021, 27% d'entre eux n'avaient toujours pas été destinataires d'un versement partiel sous forme d'acomptes ou complet de leurs rémunérations . »

L'année 2022 est déterminante pour l'expérimentation du SNU . La cible retenue par la loi de finances initiale pour 2022 est celle de 55 000 jeunes effectuant le séjour de cohésion, ce qui suppose une organisation à grande échelle. Par ailleurs, contrairement à 2020 et 2021, les modalités d'organisation du Séjour de cohésion devraient être peu impactées par les mesures de restriction sanitaire, ce qui permettra d'avoir une meilleure vue d'ensemble des coûts du SNU.

3. Des interrogations qui persistent sur le calendrier de la réalisation des ouvrages olympiques

La Société de livraison des ouvrages olympiques (Solidéo) a confirmé une nouvelle fois que la crise sanitaire n'aura pas causé de retard significatif dans la préparation des infrastructures prévues pour l'accueil des Olympiades de 2024.

Cependant, l'indicateur « Taux d'opérations ayant atteint un jalon essentiel dans le processus de livraison des ouvrages olympiques » montre que les réalisations sont inférieures aux objectifs de performance révisés en 2021 :

- 82,3 % des opérations devaient atteindre le jalon de notification du marché (marchés globaux) ou de validation de l'avant-projet détaillé, ce qui n'est finalement le cas que de 72,6 % des projets ;

- 51,6 % des opérations devaient avoir atteint le jalon de lancement des travaux. En exécution, 38,7 % des opérations ont atteint ce stade .

Le rapport annuel de performance précise que « ces chiffres ne traduisent toutefois aucun risque sur la capacité de l'établissement à livrer l'ensemble des ouvrages olympiques et paralympiques dans les délais requis. » Si tel est le cas, ces éléments témoignent néanmoins d'une maquette de performance inappropriée, ce qui nuit aux pouvoirs de contrôle du Parlement .

Pour répondre à certaines de ces difficultés, deux nouveaux indicateurs ont été introduits dans la loi de finances initiale pour 2022 , regroupés dans la catégorie « Nombre d'ouvrages financés par le programme 350 dont l'équilibre budgétaire est préservé ». Ils ont vocation à retracer :

- la part d'ouvrages financés ou cofinancés par le programme 350 n'ayant pas nécessité de financements additionnels de ce programme par rapport à la maquette ;

- parmi les ouvrages ayant nécessité un financement complémentaire du programme 350, le nombre d'ouvrages avec un dépassement allant au-delà de 10 % du financement envisagé initialement pour ce qui concerne la contribution du programme 350 à cet ouvrage.

La mise en place de ces nouveaux indicateurs devrait permettre de suivre de manière plus fine les risques budgétaires associés à la réalisation des ouvrages olympiques .

Lors du conseil d'administration du 13 juillet 2021, la Solidéo a actualisé sa maquette financière, ce qui la porte à 1 553 millions d'euros . La contribution de l'État a été portée à 1 043,9 millions d'euros, et celle des collectivités territoriales a 509 millions d'euros. En prenant en compte l'exécution en 2021, l'État a déjà versé 91,5 % des autorisations d'engagement et 44,8 % des crédits de paiement de l'enveloppe de 1 043,9 millions d'euros désormais prévus .

Maquette financière de la Solidéo au moment de l'actualisation de juillet 2021

(en millions d'euros)

2018

2019

2020

2021

2022

2023-2025

Total

Financements de l'État

48,0

65,3

127,7

225,6

262,9

314,4

1 043,9

NB : jusqu'en 2020, il s'agit des sommes exécutées. À partir de 2021, il s'agit de prévisions.

Source : commission des finances du Sénat, à partir des documents budgétaires

L'actualisation de la maquette financière a permis de prendre en compte la tension sur les prix des matières premières, qui a accompagné la reprise économique à la sortie de la crise sanitaire.

Toutefois, l'inflation des prix des matières premières a encore fortement progressé après juillet 2021, renchérissant mécaniquement les coûts de construction, ce qui pose la question de l'opportunité d'une nouvelle actualisation de la trajectoire budgétaire pluriannuelle de la Solidéo . Dans ce contexte, le risque de dérive budgétaire des jeux est réel.


* 1 Loi n°2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

* 2 Le Gouvernement avait justifié cette non-consommation des crédits en raison du besoin d'attendre la validation de l'aide par la Commission européenne au titre du contrôle des aides d'État, qui n'est intervenue que le 25 janvier 2021.

* 3 Le décret n° 2021-1808 du 23 décembre 2021 étend le dispositif aux bénéficiaires de l'AAH jusqu'à 30 ans.

* 4 À l'exception de la Nouvelle-Calédonie.

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