Rapport n° 792 (2021-2022) de M. Philippe DOMINATI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022

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N° 792

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
de
règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 29a

Sécurités

(Programmes 152 « Gendarmerie nationale » et 176 « Police nationale » ;
Programme 207 « Sécurité et éducation routières »)

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS

Rapporteur spécial : M. Philippe DOMINATI

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

10 , 16 et T.A. 2

Sénat :

787 (2021-2022)

Les principales observations
du rapporteur spécial

1. Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent à 98,91 % en AE et 99,71 % en CP, ce qui constitue un niveau proche de l'année 2020 .

2. Malgré le retour à la normale de l'activité opérationnelle, l'année 2021 reste marquée par une sous consommation des crédits de personnels, à hauteur de 139,78 millions d'euros, soit un niveau similaire à 2020, alors même que la police et la gendarmerie ont poursuivi leurs plans de recrutement et que des mesures indemnitaires continuent à produire leurs effets. Cette sous-consommation s'explique par les difficultés de recrutement, qui ont connu davantage de sorties qu'anticipées, compensées tardivement par des recrutements.

3. L'année 2021 est marquée par la poursuite du plan présidentiel de recrutement de 10 000 policiers et gendarmes. Même si son bien-fondé est contestable, l'« esprit » de ce plan a été pleinement respecté, puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2 083 emplois de gendarmes auront été créés.

4. Les dépenses de personnel des deux programmes augmentent de 1,5 % par rapport à 2020 et atteignent un taux d'exécution de 99,5 %. Contrairement à l'année dernière, cette sous-exécution ne résulte pas directement de la crise sanitaire, qui avait contraint à décaler les incorporations à la suite du premier confinement, mais par la tension sur le recrutement.

5. La persistance d'un stock important d'heures supplémentaires demeure un risque pour la police nationale, tant sur le plan financier (leur coût est estimé à 651 millions d'euros par la Cour des comptes si elles ne sont pas indemnisées) qu'opérationnel (les heures supplémentaires encore à récupérer représentent l'équivalent de 10 255 ETP). En 2021, 3,5 millions d'heures ont été indemnisées, pour un montant total de 45,2 millions d'euros (26,5 millions d'euros initialement prévus en loi de finances initiale et 18,7 millions d'euros en gestion grâce à la sous-exécution de la masse salariale).

6. En prenant en compte les dépenses effectuées au titre du plan de relance, les dépenses de fonctionnement et d'investissement des deux programmes s'élèvent à 3,3 milliards d'euros, soit une progression de 12 %, ce qui amplifie le renversement de tendance qui s'était amorcé en 2020.

7. S'il permet d'apporter une amélioration salutaire dans certains domaines, comme l'immobilier ou le domaine des véhicules, le plan de relance pourrait ne pas suffire à assurer durablement l'équilibre financier des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ».

8. Sans prendre en compte le plan de relance, l'ensemble des dépenses de la mission « Sécurités » s'élève à 3,05 milliards d'euros en CP en 2021 contre 2,939 milliards d'euros en 2020, en progression de + 4 %. Cette évolution entraine une stabilité du ratio mesurant la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes, qui s'élève à 87,58 % en 2021. Les précédents plans d'équipement ont par ailleurs été marqués par un effet « stop and go » qui pourrait également caractériser le plan de relance actuel, dont l'extinction est prévue au plan budgétaire.

I. LES PROGRAMMES « POLICE NATIONALE » ET « GENDARMERIE NATIONALE »

A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2021

Les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » regroupent plus de 97 % des crédits de paiement (CP) consommés en 2021 au sein de la mission « Sécurités ».

Pour ces deux programmes, l'année 2021 est marquée par un retour à la normale après la crise sanitaire, dont les effets sur le budget des deux institutions avaient été particulièrement marqués.

Malgré le retour à la normale de l'activité opérationnelle, l'année 2021 reste marquée par une sous-consommation des crédits de personnels, à hauteur de 139,78 millions d'euros, soit un niveau similaire à 2020, alors même que la police et la gendarmerie ont poursuivi leurs plans de recrutement et que des mesures indemnitaires continuent à produire leurs effets. Cette sous-consommation s'explique par les difficultés de recrutement, qui ont connu davantage de sorties qu'anticipées, compensées tardivement par des recrutements.

Seule la gendarmerie nationale a dépassé les crédits de paiement (CP) ouverts en loi de finances initiale, à hauteur de 62,64 millions d'euros.

Cette évolution met fin au phénomène récurrent de surconsommation des crédits de ces deux programmes, qui s'expliquait par les fortes tensions dans l'exécution des dépenses de personnel.

Alors que les crédits des programmes exécutés avaient connu une baisse en 2021, ces derniers reprennent leur augmentation tendancielle et connaissent une hausse de 1,56 % en AE et 1,27 % en CP.

Exécution des crédits des programmes « Gendarmerie nationale »
et « Police nationale » en 2021

(en millions d'euros)

Programme

Crédits exécutés 2019

Crédits exécutés 2020

Crédits votés 2021

Crédits exécutés 2021

Évolution des crédits exécutés 2020-2021)

Exécution 2021 / LFI 2021

Police nationale

AE

11 073,78

10 895,20

11 240,96

11 102,49

1,90%

98,77%

CP

10 902,96

10 915,90

11 171,50

11 049,88

1,23%

98,91%

Gendarmerie nationale

AE

9 618,26

9 517,50

9 719,87

9 629,14

1,17%

99,07%

CP

8 977,38

9 100,30

9 157,03

9 219,67

1,31%

100,68%

Total

AE

20 692,04

20 412,70

20 960,83

20 731,63

1,56%

98,91%

CP

19 880,34

20 016,20

20 328,53

20 269,55

1,27%

99,71%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les taux d'exécution des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent ainsi à 98,91 % en AE et 99,71 % en CP, ce qui constitue un niveau proche de celui constaté en 2020. Pour rappel, ils s'établissaient respectivement à 101,05 % et 100,85 % en autorisations d'engagement (AE) et à 101,48 % en crédits de paiement (CP) en 2019 en raison des tensions importantes dans l'exécution des dépenses de personnel.

Les mouvements de crédits en lois de finances rectificatives ont été d'une ampleur très limitée, en comparaison à l'année 2020 où avaient été ouverts 328,5 millions d'euros d'AE et 150,7 millions d'euros de CP en hors titre 2 pour l'ensemble de la mission « Sécurités ». Pour 2021, 74,18 millions d'euros en AE et 63,45 millions d'euros en CP ont été ouverts sur le hors titre 2 tandis que 56,36 millions d'euros ont été annulés en crédits de personnels, correspondant principalement à la réserve de précaution.

Évolution des crédits des programmes « Police nationale »
et « Gendarmerie nationale »

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La sous-consommation des crédits des deux programmes a en outre permis de procéder à une opération de fongibilité asymétrique du titre 2 vers le hors titre 2 en, gestion, d'une ampleur supérieure à 2020.

Cette opération, d'un montant de 87 millions d'euros, a permis de faire face à un aléa de gestion (17,3 millions d'euros de pénalité au profit du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique) et mener diverses opérations d'investissement (achat de 5 000 caméras piétons, extension des locaux CRS de Vélizy).

Mouvements de crédits intervenus en gestion sur l'année 2020
sur la mission « Sécurités »

(en milliards d'euros)

* : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une poursuite du plan présidentiel de recrutement de 10 000 policiers et gendarmes

Pour mémoire, le Président de la République s'est engagé à créer 10 000 emplois sur la période 2018/2022 pour renforcer les forces de sécurité intérieure. Dans ce cadre, la police nationale devait bénéficier de 7 500 ETP et la gendarmerie nationale de 2 500 ETP.

Le rapporteur a d'ores et déjà rappelé, à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances du quinquennat en cours, que ce plan n'était pas de nature à résoudre les difficultés des deux institutions, davantage marquées par un retard en matière d'investissement et de fonctionnement que de personnel.

Même si son bien-fondé est contestable, l'« esprit » de ce plan a été pleinement respecté, puisqu'entre 2017 et 2022, 8 446 emplois de policiers et 2 083 emplois de gendarmes auront été créés.

Pour 2021, le schéma d'emploi était fixé à + 317 ETP pour le programme « Gendarmerie nationale » et +1 145 ETP pour le programme « Police nationale ».

Schéma d'emploi de la mission « Sécurités »

(en ETP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

La réalisation du schéma d'emplois est imputable à 75 % au programme « Police nationale » (1 145 ETP), qui a respecté son schéma d'emplois, et à 25 % au programme « Gendarmerie nationale » (370 ETP), qui a dépassé son schéma d'emplois de 34 ETP. Toutefois, les sorties en gestion se sont révélées sensiblement supérieures à la prévision initiale (+ 1 368 départs pour la gendarmerie nationale et + 1 893 départs pour la police nationale). Pour compenser cette hausse, les deux programmes ont accru leurs recrutements en cours d'année.

2. Une sous-consommation des dépenses de personnel de la police nationale due aux difficultés de recrutement

Les dépenses de personnel des deux programmes augmentent de 1,5 % par rapport à 2020 et atteignent un taux d'exécution de 99,5 %. Contrairement à l'année dernière, cette sous-exécution ne résulte pas directement de la crise sanitaire, qui avait contraint à décaler les incorporations à la suite du premier confinement. Cette sous-exécution s'explique en grande partie par la tension sur le recrutement . La gendarmerie et la police nationales ont fait face à des départs plus nombreux que prévus (respectivement de +1 348 et de +1 893).

Cette situation, qui se produit pour la deuxième année consécutive, constitue un point d'attention important et pourrait mettre en difficulté l'appareil de formation et de recrutement des policiers et des gendarmes.

Schéma d'emploi de la mission « Sécurités »

(en ETP)

Gendarmerie nationale

Police nationale

LFI

Exécution

LFI

Exécution

Sorties

11414

12 782

7 371

9 264

Entrées

11750

13 152

8 516

10 409

Schéma d'emplois

336

370

1145

1145

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les deux institutions sont parvenues à faire face à ces départs par des recrutements concentrés en fin d'année et le recrutement de vacataires, ce qui a entrainé cette sous-exécution des dépenses de personnel.

En conséquence, la réalisation du schéma d'emplois du programme « Police nationale » a eu un effet très faible sur les dépenses de personnels de 2021 (2,9 millions d'euros, alors que le ministère de gouvernement prévoyait un impact de 7,81 millions d'euros). Le dépassement du schéma d'emploi de la gendarmerie nationale a même eu un effet coût négatif (- 6,8 millions d'euros), ce qui engendrera un effet rebond en 2022. La police nationale est responsable de cette sous-exécution des dépenses de personnel, à hauteur de - 222,53 millions d'euros.

En revanche, la gendarmerie nationale connaît une sur-exécution des dépenses de personnel de 87,8 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale, qui s'explique par le report de charge lié à la forte mobilisation de la réserve opérationnelle en fin d'année 2020 à hauteur de 21 millions d'euros et par le lancement des opérations de lutte contre l'immigration clandestine et la sécurisation du référendum de Nouvelle-Calédonie (18 millions d'euros).

3. Une poursuite de l'indemnisation du stock d'heures supplémentaires de la police nationale, dans des proportions toujours limitées

La soutenabilité des dépenses de rémunération des deux forces est également obérée par la persistance d'un stock d'heures supplémentaires dans la police nationale . Au 30 juin 2020, le stock d'heures supplémentaires a ainsi été ramené à 19,4 millions 1 ( * ) .

Stock d'heures supplémentaires de la police nationale

(en millions d'heures)

Source : commission des finances du Sénat

Deux nouvelles campagnes d'indemnisation, sur la base du volontariat, ont été réalisées au titre des heures acquises en 2020 et 2021. En 2021, 3,5 millions d'heures ont été indemnisées, pour un montant total de 45,2 millions d'euros (26,5 millions d'euros initialement prévus en loi de finances initiale et 18,7 millions d'euros en gestion grâce à la sous-exécution de la masse salariale).

La dotation de 26,5 millions d'euros inscrite en 2020 et 2021 est reconduite en 2022 pour indemniser un flux annuel de 2 millions d'heures environ, correspondant à un volume identifié comme incompressible pour donner aux chefs de service des marges de manoeuvre opérationnelles.

Si ces campagnes vont dans le bon sens, il convient de rester vigilant quant à la nécessité de ne pas laisser subsister un compte par agent d'heures supplémentaires non indemnisables trop important, au risque de déstabiliser fortement les services. Le stock d'heures supplémentaires demeure un risque pour la police nationale, tant sur le plan financier (leur coût est estimé 651 millions d'euros par la Cour des comptes si elles ne sont pas indemnisées) qu'opérationnel (les heures supplémentaires encore à récupérer représentent l'équivalent de 10 255 ETP). En effet, les fonctionnaires peuvent liquider leurs heures supplémentaires avant leur départ à la retraite. Ces derniers étant juridiquement en congés et non en retraite, ils ne sont pas remplacés durant cette période, ce qui contribue à creuser un véritable « trou » opérationnel, particulièrement prégnant dans certains services 2 ( * ) . Le stock d'heures supplémentaires subsistant en-dessous de la limite de 120 heures par agents apparaît à cet égard toujours particulièrement pénalisant pour l'avenir et constitue à ce titre une véritable « épée de Damoclès » opérationnelle.

4. Un effort important en matière de dépenses de fonctionnement et d'investissement...

En prenant en compte les dépenses effectuées au titre du plan de relance, les dépenses de fonctionnement et d'investissement des deux programmes s'élèvent à 3,3 milliards d'euros, soit une progression de 12 %, ce qui amplifie le renversement de tendance qui s'était effectué en 2020.

Le plan de relance a permis de rattraper une partie de l'important retard en matière d'immobilier dont souffre la police nationale, et a porté sur 14 opérations prévues pour le triennal 2018-2020 ainsi que 4 opérations programmées initialement pour le triennal 2015-2017. Le coût actualisé de ces opérations se montent à 315,9 millions d'euros, ce qui représente 28 % des crédits ouverts en hors titre 2 sur le programme. S'agissant de la gendarmerie nationale, le plan de relance a permis d'assurer le renouvellement de 972 véhicules de maintien de l'ordre et 90 véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG).

51 % des dépenses d'investissement de la mission « Sécurités » ont en outre été consacrées aux acquisitions de véhicules (+ 39 % par rapport à 2020). 3 306 véhicules du parc léger et 366 véhicules lourds ont ainsi été commandés en 2021.

5. ... n'empêchant pas de voir réapparaître un risque d'éviction de ces dépenses

S'il permet d'apporter une amélioration salutaire dans certains domaines, comme l'immobilier ou le domaine des véhicules, le plan de relance pourrait ne pas suffire à assurer durablement l'équilibre financier des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale ».

Sans prendre en compte le plan de relance, l'ensemble des dépenses de la mission « Sécurités » s'élève à 3,05 milliards d'euros en CP en 2021 contre 2,939 milliards d'euros en 2020, en progression de + 4 %. Cette évolution entraine une stabilité du ratio mesurant la part des dépenses de personnel dans l'ensemble des dépenses des deux programmes, qui s'élève à 87,58 % en 2021.

Part des dépenses de personnel dans l'ensemble des crédits
de la « Police nationale » et de la « Gendarmerie nationale »

(en crédits de paiement)

2018

2019

2020

2021

Police nationale

Titre 2

9 400,80

9 743,94

9 789,27

9932,49

Total

10 595,74

10 902,96

10 915,89

11 049,88

Titre 2 / Total

88,72%

89,37%

89,68%

89,89%

Gendarmerie

Titre 2

7 346,69

7 633,47

7 701,59

7 819,81

Total

8 734,98

8 977,38

9 100,34

9 219,67

Titre 2 / Total

84,72%

84,13%

84,63%

84,82%

Total

Titre 2

16 747,49

17 377,41

17 490,86

17 752,30

Total

19 330,72

19 880,34

20 016,23

20 269,55

Titre 2 / Total

86,64%

87,41%

87,38%

87,58%

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les précédents plans d'équipement ont par ailleurs été marqués par un effet « stop and go » qui pourrait également caractériser le plan de relance actuel, dont l'extinction est prévue au plan budgétaire.

Afin de faire face à une activité opérationnelle soutenue, dans un contexte sécuritaire tendu, des plans gouvernementaux successifs (PLAT 3 ( * ) 1, PLAT 2, Plan migrants, PSP 4 ( * ) ) ont, depuis 2015, accru l'effort d'équipement, permettant de compenser le sous-investissement constaté au cours des exercices précédents.

Bien que les dépenses d'équipement de la gendarmerie et de la police nationales se soient maintenues à un niveau plus élevé à l'issue de ces plans, leur montant a amorcé une nouvelle baisse à compter de 2017, témoignant du risque que comportent ces « plans » ponctuels qui ne modifient pas structurellement la répartition des dépenses des forces de sécurité intérieure.

Part des dépenses d'équipement de la police et de la gendarmerie nationales
dans le total de leurs dépenses

(en %, en CP)

Source : commission des finances du Sénat (d'après le Cour des comptes)

Par ailleurs, les nouveaux moyens des forces de sécurité intérieure et les investissements immobiliers supposeront un accroissement des dépenses de fonctionnement qui devront faire l'objet d'une programmation particulière.

Surtout, la sous-consommation des dépenses de personnel constatée en 2021 pourrait ne pas durer, et les nouvelles mesures indemnitaires prévues par le ministère de l'intérieur pourraient venir limiter la marge de manoeuvre en matière de dépenses de fonctionnement et d'investissement. Le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieure prévoit ainsi une revalorisation des carrières des policiers (773 millions d'euros sur cinq ans) et des gendarmes (700 millions sur la même période), en vertu de deux protocoles signés en mars 2022 avec les syndicats de policiers et de gendarmes 5 ( * ) .

II. LE PROGRAMME 207 « SÉCURITÉ ET ÉDUCATION ROUTIÈRES »

Le programme 207 « Sécurité et éducation routières » retrace les dépenses réalisées par l'État pour réduire le nombre d'accidents de la route à travers des mesures de prévention, d'information et d'éducation routières. Les dépenses liées au volet répressif de la politique de sécurité routière (radars et gestion des points des permis de conduire) sont, quant à elles, financées par le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ».

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2021

En exécution, les dépenses hors personnel 6 ( * ) se sont élevées à 39,5 millions d'euros en crédits de paiement (AE), soit un montant inférieur à 2020 (- 5,57 %).

Récapitulation de l'exécution 2021 du programme 207

(en millions d'euros)

Type de crédit

Exécution 2017

Exécution 2018

Exécution 2019

Exécution 2020

LFI 2021

Exécution 2021

Évolution 2019/2020

Taux d'exécution 2020/LFI

AE

35,33

38,28

40,94

41,83

41,03

39,5

-5,57%

96,27%

CP

35,12

38,64

40,5

41,39

41,03

40,121

-3,07%

97,77%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances de la mission « Sécurités » annexé au projet de loi de règlement pour 2021

Les taux de consommation demeurent élevés sur le programme 207 « Sécurité et éducation routières », tant en autorisations d'engagement (AE) qu'en crédits de paiement (CP). Au regard des crédits votés en loi de finances initiale (LFI), le programme 207 fait l'objet d'une légère sous-exécution avec des taux qui s'établissent respectivement à 96,27 % et 97,77 %.

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Une hausse du « nombre de tués sur les routes » liée à la reprise du trafic routier

En 2020, la mortalité routière avait atteint un point bas historique et s'établissait à 2 780 tués sur les routes de France, en métropole ou en outre-mer, contre 3 498 en 2019 soit une baisse de 20 %.

En 2021, le nombre de tués sur les routes (3 221) a donc de nouveau connu une hausse par rapport à 2020, qui s'explique en partie par la reprise du trafic routier. Ce chiffre est toutefois en baisse par rapport à 2019, qui constitue la dernière année de référence.

2. Le permis de conduire : un délai d'attente en baisse de 10 jours mais encore très éloigné de celui d'avant-crise

Depuis la promulgation de la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019, le délai médian est désormais retenu à compter de 2020 comme indicateur de référence au lieu du délai moyen, ce qui devrait selon la Délégation à la sécurité routière avoir pour effet mécanique de diminuer l'impact des candidats qui tardent à se représenter.

Cette année la crise sanitaire a de nouveau contraint la délégation à la sécurité routière à annuler les examens pendant le premier confinement et à suspendre les leçons pendant le second, ce qui a dégradé de 21 jours le délai médian qui s'établit à 53 jours en 2021 par rapport à 2019 (contre 42 en 2019 et 63 en 2020).

III. LE COMPTE SPÉCIAL « CONTRÔLE DE LA CIRCULATION ET DU STATIONNEMENT ROUTIERS »

L'article 49 de la loi de finances pour 2006 7 ( * ) a créé le compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », habituellement appelé CAS « Radars ». Il a vocation à retracer les dépenses financées à partir du produit des amendes.

A. EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2021

1. Un compte spécial dont le solde est redevenu positif en 2021

En 2020, pour la troisième année consécutive, le compte spécial avait enregistré un solde négatif (- 182 millions d'euros), résultant de l'écart entre les dépenses en crédits de paiement, et les recettes affectées au compte.

Toutefois, le montant cumulé du solde du compte spécial , depuis son ouverture en 2006 , demeure très nettement positif et s'élève à 817 millions d'euros .

Le solde budgétaire est redevenu positif en 2021. Si les recettes sont plus importantes en 2021 que lors des deux années précédentes, c'est surtout la chute continue des dépenses qui est à l'origine du solde positif de 131 millions d'euros.

Évolution des recettes et dépenses du CAS depuis 2015

(en millions d'euros)

Année

Produit total des amendes

Recettes affectées au CAS

Dépenses en CP du CAS

Solde budgétaire du CAS

2015

1 607,70

1 329,60

1 285,60

44,00

2016

1 817,90

1 421,40

1 342,00

79,40

2017

1 978,20

1 527,70

1 362,30

165,40

2018

1 750,90

1 462,85

1 466,40

- 3,55

2019

1 649,00

1 346,68

1 387,08

- 40,40

2020

1 387,00

1 144,00

1 326,29

- 182,29

2021

1 326,30

1,364,00

1 232,90

131

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2020

2. Des recettes nettement inférieures aux prévisions

Le produit total des recettes issues des amendes de la circulation et du stationnement routiers (radars et hors radars) a, en 2021, été nettement sous-exécuté. Les recettes prévues en 2021 s'élevaient à 1 960 millions d'euros et ont finalement atteint 1 706 millions d'euros, soit une sous-exécution de 13 %.

Estimées à 809 millions d'euros par la LFI 2021, les recettes des amendes forfaitaires radars (section 1) se sont élevées à 655 millions d'euros soit une réalisation très en-dessous de la prévision (- 19%).

La baisse du trafic routier liée à la crise sanitaire , les périodes de confinement, le recours massif au télétravail ou encore le développement du transport cycliste, sont très certainement à l'origine de cette sous-réalisation, sans qu'il soit possible de déterminer avec certitude l'impact de ces différents facteurs. La délégation à la sécurité routière (DSR) a indiqué que les périodes de couvre-feu et de fermeture des établissements de nuit ont eu un effet très important sur les résultats de la sécurité routière.

Concernant la section 2 relative aux recettes des autres amendes de la circulation, ces dernières ont elles aussi été inférieures aux prévisions puisqu'elles s'élèvent à 1 054 millions d'euros alors qu'elles étaient estimées à 1 151 millions d'euros en LFI .

La loi de finances rectificative (LFR 2) du 1er décembre 2021 8 ( * ) a eu pour effet d'ajuster les montants de ressources des amendes forfaitaires adars majorées de 809 millions d'euros à 649 millions d'euros et des amendes forfaitaires hors radars et amendes forfaitaires majorées de 1151 millions d'euros à 1105 millions d'euros.

Dans son article 2, la loi de finances rectificative pour 2021 limite à 355 millions d'euros le produit des amendes forfaitaires perçues par la voie de systèmes automatiques de contrôle et sanction et affecte 316 millions d'euros à la première section « contrôle automatisé » et 39 millions d'euros à la deuxième section « circulation et stationnement routiers ».

B. LES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Des recettes de l'AFITF toujours fragiles

L'agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) ne fait pas partie du périmètre du compte spécial, pour autant elle bénéficie du solde des recettes des amendes radars non versées au programme 751 et à la section 2 et ces recettes ont pu constituer une ressource importante (400 millions d'euros en 2017).

Si l'écart entre le montant prévu et exécuté est en diminution, il reste en deçà de celui de 2017 (400 millions d'euros).

Évolution du montant des recettes des amendes forfaitaires des radars
versées à l'AFITF (2016-2021)

(en millions d'euros)

Source: commission des finances du Sénat, d'après les données du rapport annuel de performances « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » annexé au projet de loi de règlement pour 2021

Sans recours à une loi de finances rectificative, la diminution du versement de l'État de 96 millions d'euros sur le programme 755, de 35 millions d'euros sur le programme 754 et de 19 millions d'euros sur le programme 751, la subvention de l'AFITF se serait élevée à 124 millions d'euros au lieu des 273 millions d'euros dont elle a pu bénéficier.

Cette situation, récurrente source de complexité, n'est pas satisfaisante et plaide, à défaut d'une refonte ou suppression du CAS, pour l'intégration au sein de ce dernier des ressources versées à l'AFITF.

Un programme dédié pourrait être créé qui servirait de support budgétaire à l'instar du programme 754 tandis que le programme 753 d'un montant très faible (26 millions d'euros) serait fusionné avec le programme 751, schéma qui de plus simplifierait légèrement l'architecture d'ensemble.

2. Le CAS, devenu trop complexe, n'est plus lisible et ne reflète pas l'effort fourni au titre de la sécurité routière

L' article 21 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 dispose que les comptes d'affectation spéciale (CAS) « retracent (...) des opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

Le compte spécial contrevient à ce principe de spécialité puisque seulement 82% des recettes des amendes sont affectées au compte spécial, soit 1 611 millions d'euros sur 1960 millions d'euros. Certaines dépenses imputées sur le CAS n'ont aucun lien avec la sécurité routière. En loi de finances initiale pour 2021, seulement 62% des crédits sont destinés à des actions liées à la sécurité routière.


* 1 Les données postérieures ne sont pas disponibles.

* 2 Comme le service de protection des hautes personnalités (SPHP).

* 3 Plan de lutte antiterroriste.

* 4 Pacte de sécurité publique.

* 5 Projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, n° 5185, déposé le mercredi 16 mars 2022 au Bureau de l'Assemblée nationale.

* 6 Depuis le 1 er janvier 2015, les dépenses de titre 2 du programme 207 « Sécurité et éducation routières » ont été transférées au programme support 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieure », de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », afin d'en améliorer la gestion.

* 7 Loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.

* 8 Loi n° 2021-1549 du 1 er décembre 2021 de finances rectificative pour 2021.

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