Rapport n° 792 (2021-2022) de MM. Charles GUENÉ et Claude RAYNAL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 juillet 2022

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N° 792

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
de
règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 26

Relations avec les collectivités territoriales

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Rapporteurs spéciaux : MM. Charles GUENÉ et Claude RAYNAL

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

10 , 16 et T.A. 2

Sénat :

787 (2021-2022)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. En 2021, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ont été consommés à hauteur de 4,6 milliards d'euros en AE et 4,2 milliards d'euros en CP pour des ouvertures de 4,2 milliards en AE et 3,9 milliards d'euros en CP . Cette sur-exécution a été financée par des reports importants ainsi que par des ouvertures de crédits par les deux lois de finances rectificatives adoptées en 2021.

2. Cette sur-exécution s'explique, pour le programme 119, par les incidences persistantes de la crise sanitaire. En effet, cette dernière a généré une hausse des charges induites par le financement des allocations individuelles de solidarité. Par ailleurs, les dépenses relatives à l'achat de masque ont été supérieures à celles prévues en loi de finances initiale (LFI). Enfin, le dynamisme de l'investissement des collectivités s'est caractérisé par des taux de consommation des dotations d'investissement avoisinant les 100 % et parfois même au-delà concernant la consommation des CP de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) exceptionnelle.

3. Les rapporteurs spéciaux saluent l'effort du Gouvernement en matière de dotations d'investissement mais souhaitent rappeler la forte contrainte budgétaire qui pèse sur les collectivités territoriales depuis plusieurs années . Or, le prochain projet de LPFP prévoira assurément une nouvelle contribution des collectivités à l'effort de redressement des finances publiques. Si les modalités de cette contribution ne sont pas encore définies, elles s'inscriront, de fait, dans un contexte inflationniste qui coïncidera avec la fin des dispositifs exceptionnels de soutien à l'investissement mis en oeuvre dans le cadre du plan de relance.

4. Concernant le programme 122, la sur-exécution s'explique en large partie par les aides allouées aux collectivités à la suite de la tempête Alex notamment par le biais de la création d'un fonds exceptionnel d'un montant total de 150 millions d'euros en AE et CP qui fera donc l'objet d'ouvertures sur les exercices à venir en fonction du rythme des travaux de reconstruction programmés.

5. Enfin, les crédits consommés par la DGCL au titre de ses dépenses de fonctionnement ont été très largement supérieurs aux crédits ouverts en raison essentiellement du financement du déploiement de la nouvelle carte des maires et des adjoints aux maires . Les rapporteurs spéciaux s'étonnent cependant que cette mesure n'ait pas été budgétée en LFI 2021 au regard de son caractère prévisible.

6. En 2021, les recettes du compte d'avance se sont établies à 110,2 milliards d'euros pour des dépenses de 107,8 milliards d'euros dégageant un solde positif de 2,4 milliards d'euros (contre un solde négatif de 2,9 milliards d'euros en 2020). Au 31 décembre 2021, le solde cumulé du compte est bénéficiaire de 805,6 millions d'euros (contre un déficit de 1,6 milliard d'euros en 2020). Cette inversion de tendance s'explique par la reprise économique au cours de cet exercice.

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION ET DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS EN 2021

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » regroupe une partie des moyens budgétaires alloués aux collectivités territoriales. Elle se compose de deux programmes :

- le programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » retrace des dotations versées aux collectivités territoriales en compensation de transferts de compétences et les dotations versées par l'État aux collectivités territoriales sous la forme de subventions, notamment en vue de soutenir des projets d'investissement ;

- le programme 122 « Concours spécifiques et administration » porte les crédits destinés à soutenir les collectivités faisant face à des situations exceptionnelles (telles que des événements climatiques ou géologiques de grande ampleur) et les crédits attribués à la direction générale des collectivités locales (DGCL) pour la mise en oeuvre de ses missions au profit des collectivités territoriales 1 ( * ) .

La mission « Relations avec les collectivités territoriales» ne permet toutefois pas d'appréhender globalement la politique de l'État en faveur des collectivités.

En effet, les transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales représentent 104,2 milliards d'euros dans la loi de finances initiale 2021. Ils se composent de trois ensembles :

- les concours financiers de l'État aux collectivités s'élèvent à 51,7 milliards d'euros . Il s'agit des prélèvements sur recettes de l'État au profit des collectivités territoriales, des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », de la TVA affectée aux régions en substitution de la DGF depuis 2018 et aux départements au titre du fonds de sauvegarde depuis 2021 ;

- les transferts divers de l'État hors fiscalité transférée et hors apprentissage qui atteignent 14,3 milliards d'euros et comprennent les subventions aux collectivités des ministères autres que le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, les contreparties de dégrèvements d'impositions décidés par voie législative et le produit des amendes de police de la circulation et des radars ;

- la fiscalité transférée et le financement de la formation professionnelle, qui visent essentiellement à compenser les mesures de décentralisation et les transferts de compétences vers les collectivités territoriales, et s'élèvent à 38,2 milliards d'euros.

Décomposition des transferts financiers de l'État
aux collectivités territoriales en 2021

Source : direction du budget

En 2021, les crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales » représentent 8,1 % des concours financiers de l'État aux collectivités.

Le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » retrace essentiellement le produit des impositions locales versé par douzième aux collectivités territoriales et, plus à la marge, le versement et remboursement d'avances de l'État aux collectivités. Il est composé de trois sections :

- une section relative au versement et au remboursement des avances de trésorerie aux collectivités, établissements publics et à la Nouvelle-Calédonie (programme 832) ;

- une section relative au versement des avances mensuelles sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes (programme 833) ;

- une section relative au versement et remboursement d'avances remboursables des droits de mutation à titre onéreux destinées à soutenir les départements et d'autres collectivités territoriales (programme 834) .

A. LA CONSOMMATION DES CRÉDITS OUVERTS EN LFI

1. La consommation des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »

Les crédits consommés en 2021 augmentent de 5,9 % en AE et de 15,7 % en CP par rapport à l'année précédente.

Cependant, il faut mettre cette évolution en regard avec celle des crédits ouverts qui ont augmenté, entre la LFI 2020 et la LFI 2021, de 9 % en AE et de 13 % en CP.

Il en résulte un taux de consommation qui s'établit en 2021 à 111,2 % en AE (contre 115,2% en 2020) et à 106,9 % en CP (contre 104,2 % en 2020).

Ainsi, la sur-exécution totale sur la mission est de 468,9 millions d'euros en AE (contre 581,6 millions d'euros en 2020) et de 268,8 millions d'euros en CP (contre 149,9 millions d'euros en 2020).

Évolution de l'exécution des crédits de la mission
« Relations avec les collectivités territoriales » entre 2020 et 2021

(en euros et en pourcentage)

AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. LFI : données issues des lois de finances initiales, y compris fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans les projets de loi de règlement.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Évolution de l'exécution des crédits de la mission
« Relations avec les collectivités territoriales » entre 2020 et 2021

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Au cours de ces deux derniers exercices, il est donc constaté une augmentation des crédits ouverts en LFI et une sur-exécution de ces crédits.

Niveau des sur-consommations des crédits de la mission
« Relations avec les collectivités territoriales » en 2020 et 2021

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette sur-exécution concerne les deux programmes de la mission. Elle enregistre une baisse de 112,6 millions d'euros en AE (passant de 581,6 millions d'euros à 468,9 millions d'euros entre 2020 et 2021) mais augmente en CP de 118,8 millions d'euros (passant de 149,9 millions d'euros à 268,8 millions d'euros entre 2020 et 2021).

Elle s'explique essentiellement, sur le programme 119, par l'impact de la crise sanitaire, et sur le programme 122 par les aides exceptionnelles aux collectivités à la suite de la tempête Alex et dans une moindre mesure par la consommation des crédits alloués à la DGCL (cf. infra ).

2. La consommation du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »
a) Une consommation inférieure à la prévision en raison de la marge prudentielle...

Pour le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », les crédits consommés en 2021 sont stables en AE et en CP par rapport à l'année précédente.

L'exécution s'établit à 107,8 milliards d'euros en AE et CP contre 108,5 milliards d'euros en 2020.

Il en résulte des taux de consommation stables à 96 % en 2020 et 2021 du fait d'une légère contraction (-1,31 %) des crédits ouverts entre 2020 et 2021 (qui passent de 112,9 milliards d'euros à 112,2 milliards d'euros).

Évolution de l'exécution des crédits du compte
« Avances aux collectivités territoriales » entre 2020 et 2021

(en euros et en pourcentage)

AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. LFI : données issues des lois de finances initiales, y compris fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans les projets de loi de règlement.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Au cours de ces deux derniers exercices, il est donc constaté une baisse des crédits ouverts en LFI et une sous-exécution de ces crédits.

Niveau des sous consommations des crédits du compte
« Avances aux collectivités territoriales » en 2020 et 2021

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Cette sous exécution concerne les trois programmes de la mission 2 ( * ) et est équivalente à celle constatée en 2020 (environ 4,4 milliards d'euros en AE et CP).

L'écart de 4,4 milliards d'euros entre les crédits ouverts en LFI pour 2021 et les crédits consommés s'explique principalement par l'intégration de la marge prudentielle de 3 milliards d'euros en dépenses et recettes (sur le programme 833 3 ( * ) ) ayant pour objectif de disposer d'une marge de manoeuvre permettant de sécuriser l'obligation légale de versement des avances de fiscalité aux collectivités locales le 20 de chaque mois.

De surcroit, le programme 834 doté de 700 millions d'euros en LFI a enregistré une exécution de - 296,9 millions d'euros. Ce montant négatif en dépenses s'explique par le fait que les avances de DMTO concédées en 2021 pour un montant de 24,8 millions d'euros ont été contrebalancées par des rétablissements de crédits en 2021 de - 321,7 millions d'euros. En effet, la baisse des DMTO finalement constatée en 2020, plus limitée que prévue, a conduit à l'inéligibilité à ce dispositif d'une grande majorité des collectivités ayant bénéficié d'avances en 2020. Cette situation a entraîné la constatation d'indus, lesquels ont fait l'objet de remboursements spontanés conduisant à des rétablissements de crédits en 2021.

b) ... et une exécution inférieure aux recettes du compte qui génère un solde positif

Pour 2021, les recettes du compte se sont établies à 110,2 milliards d'euros pour des dépenses de 107,8 milliards dégageant un solde positif de 2,4 milliards d'euros (contre un solde négatif de 2,9 milliards d'euros en 2020).

Au 31 décembre 2021, le solde cumulé du compte est bénéficiaire de 805,6 millions d'euros (contre un déficit de 1,6 milliard d'euros en 2020).

Cette inversion du solde en 2021 s'explique par la reprise économique au cours de cet exercice.

B. LA CONSOMMATION DES CRÉDITS DISPONIBLES

1. La consommation des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »

Les programmes de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ont enregistré de nombreux mouvements en cours de gestion.

Mouvements intervenus en gestion sur les crédits de la mission
« Relations avec les collectivités territoriales » en 2021

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Ainsi , concernant le programme 119 , des ouvertures de crédits sont intervenues en gestion lors de la loi de finances rectificative du 1 er décembre 2021 4 ( * ) pour 42,9 millions d'euros en AE et 201,9 millions d'euros en CP.

De surcroît, des reports de crédits ainsi que des transferts (essentiellement sortants) ont porté le total des crédits disponibles du programme à 4,5 milliards d'euros en AE et 4 milliards d'euros en CP contre respectivement 3,9 milliards en AE et 3,7 milliards en CP en LFI.

La sous-consommation, par rapport aux crédits disponibles, s'établit, pour ce programme, à 152,8 millions d'euros en AE et 34,2 millions d'euros en CP.

Composition des crédits disponibles du programme 119

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Concernant le programme 122, des ouvertures de crédits sont intervenues en gestion lors de la loi de finances rectificative du 19 juillet 2021 5 ( * ) pour 43,3 millions d'euros en AE et 15 millions d'euros en CP.

De surcroît, des reports de crédits ainsi que des transferts (entrants) ont porté le total des crédits disponibles du programme à 397,1 millions d'euros en AE et 300,2 millions d'euros en CP contre respectivement 194,2 millions d'euros en AE et 192 millions d'euros en CP en LFI.

La sous-consommation, par rapport aux crédits disponibles, s'établit, pour ce programme, à 120,5 millions d'euros en AE et 99,6 millions d'euros en CP.

Composition des crédits disponibles du programme 122

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits disponibles totaux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s'établissent donc à 4,9 milliards d'euros en AE et 4,3 milliards en CP et ont été consommés respectivement à hauteur de 94,4 % et 96,9% laissant un solde de 273,3 millions d'euros en AE et 133,7 millions d'euros en CP par rapport aux crédits disponibles.

2. La consommation du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales »

Le programme 833 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » a enregistré des annulations en cours de gestion à hauteur de 929,2 millions d'euros en AE et CP par la loi de finances rectificative du 1 er décembre 2021.

Mouvements intervenus en gestion sur les crédits de la mission
« Relations avec les collectivités territoriales » en 2021

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Les crédits disponibles du compte de concours financiers se sont donc établis à 110,6 milliards d'euros (contre 112,2 milliards d'euros ouverts en LFI). La sous-consommation par rapport à ces crédits disponibles est donc de 3,5 milliards d'euros (contre 4,4 milliards par rapport aux crédits ouverts en LFI).

II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

A. UNE SUR-EXÉCUTION GLOBALE DU PROGRAMME 119 EXPLIQUÉE PAR LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE ET LES CHARGES INDUITES PAR LE FINANCEMENT DES ALLOCATIONS INDIVIDUELLES DE SOLIDARITÉ

L'exécution du programme 119 par rapport aux crédits ouverts en LFI s'établit à 4,4 milliards d'euros en AE (soit 109,7 % des crédits ouverts) et à 3,9 milliards d'euros en CP (soit 106,9 % des crédits ouverts).

Exécution des crédits du programme 119 en 2021

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

1. Un impact encore sensible de la crise sanitaire en 2021 générant de nombreux surcoûts non budgétés ou sous budgétés en LFI
a) La hausse des charges induites par le financement des allocations individuelles de solidarité

Le fonds de stabilisation des départements a nécessité un abondement de crédits en gestion à hauteur de 115 millions d'euros en AE et CP. Créé par la loi de finances initiale pour 2019, ce fonds est un dispositif de soutien aux départements connaissant une situation financière dégradée au regard des charges induites par le financement des allocations individuelles de solidarité (RSA 6 ( * ) , APA 7 ( * ) , PCH 8 ( * ) ). Doté de 115 millions par an depuis sa création, le fonds a été exceptionnellement abondé de 85 millions d'euros dans le cadre de l'accord de méthode conclu entre l'État et les départements le 14 décembre 2020 afin de le porter à 200 millions d'euros .

Pour autant, la LFI 2021 ne prévoyait aucun crédit pour le fonds de solidarité, seuls 85 millions d'euros en AE et CP étant prévus par report des crédits 2020 sur 2021 .

Le delta de 115 millions d'euros a donc été assuré, en AE, par un dégel de réserve à hauteur de 81,2 millions d'euros, une fongibilité interne pour 5,7 millions d'euros et par une ouverture par la loi de finances rectificative du 1 er décembre 2021 de 42,9 millions d'euros (dont 28,1 millions d'euros pour abonder le fonds) et en CP, par une ouverture de crédits par la même loi de finances rectificative pour 201,9 millions d'euros (dont 115 millions d'euros pour le fonds).

Ce surcoût de 85 millions d'euros en 2021, lié au contexte sanitaire, ne devrait pas se reproduire les années suivantes.

b) Des dépenses encore importantes pour l'achat de masques

La LFI 2021 a ouvert 80 millions d'euros d'AE mais aucun CP au titre du dispositif de prise en charge par l'État d'une partie du coût des achats de masques effectués par les collectivités territoriales, qui avait été institué en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire.

Or, la consommation s'est avérée encore importante en 2021 pour s'établir à 93,7 millions d'euros en AE et 98,8 millions d'euros en CP . En AE, les crédits manquants ont été financés par un dégel de réserve à hauteur de 3,7 millions d'euros ainsi que par une ouverture de 12,6 millions d'euros par la loi de finances rectificative du 1 er décembre 2021. En CP, le besoin a été intégralement couvert par des ouvertures par la même loi de finances rectificative à hauteur de 86,9 millions d'euros.

Au total, sur les exercices 2020 et 2021, 227,9 millions d'euros ont été consommés en AE et CP au titre de ce dispositif qui n'a pas vocation à être reconduit en 2022.

c) Une consommation dynamique de la DSIL exceptionnelle

En 2020, un milliard d'euros en AE de dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) a, à titre exceptionnel, été ouvert afin d'accompagner l'effort de relance. Cette enveloppe a été rapportée à 950 millions d'euros par le décret n°2021-84 du 28 janvier 2021. Fin 2020, 575 millions en AE avaient été consommées, le reliquat ayant été reporté sur 2021.

Après corrections d'erreurs d'imputation, 377,4 millions d'euros d'AE ont donc été reportés et intégralement consommés en 2021.

En CP, 100 millions d'euros ont été ouverts en LFI 2021 au titre de la part exceptionnelle de DSIL. Cette enveloppe a été minorée de 21 millions d'euros par le décret de transfert du 28 janvier 2021 et par la réserve de précaution à hauteur de 4,3 millions d'euros générant un montant total de crédits disponibles en début de gestion de 74,7 millions d'euros.

Cependant, au 31 décembre 2021, la consommation en CP s'est élevée à 158,2 millions d'euros, soit un taux de consommation de 190 % des crédits disponibles.

Le besoin complémentaire, de 83,5 millions d'euros, a été financé par un dégel intégral de la réserve de précaution pour 74,7 millions d'euros et par les redéploiements internes suivants : 3,5 millions d'euros de la dotation forfaitaire relative à la délivrance des titres sécurisés DTS et 5,3 millions d'euros de la DSID.

2. Des dotations d'investissement stables qui ont continué à jouer un rôle de relance de l'activité et de lutte contre les effets de la crise sanitaire

À l'exception de la consommation des CP de la DSID et de la DSIL qui est inférieure aux crédits ouverts en LFI (et aux crédits disponibles) l'ensemble des dotations a enregistré un niveau d'exécution conforme aux crédits ouverts en LFI.

En effet, concernant la DSID , si l'exécution a été conforme aux crédits ouverts en LFI tant pour la part « projets » que pour la part « péréquation » en AE, la consommation des CP a laissé un solde de 21,1 millions d'euros (par rapport aux crédits disponibles) qui a permis :

- d'abonder de 2,9 millions d'euros la DETR ;

- d'abonder de 5,3 millions d'euros la DSIL exceptionnelle.

Le reliquat au 31 décembre 2021 s'explique par des difficultés conjoncturelles liées à la crise sanitaire en raison notamment du manque de matières premières qui a ralenti l'avancement de certaines opérations.

De même, la DSIL laisse un solde de 10,6 millions d'euros en CP par rapport aux crédits disponibles en raison de la persistance des contraintes liées à la crise sanitaire.

Pour autant, il convient de souligner que les consommations 2021 de ces deux dotations sont supérieures à la consommation enregistrée en 2020.

À l'inverse, les autres dotations continuent d'enregistrer une consommation stable et conforme aux prévisions. Si l'exécution de l'action 1, en AE, est en apparence bien inférieure au niveau des crédits ouverts en LFI (1,62 milliard d'euros contre 1,83 milliard d'euros) ce delta s'explique exclusivement par :

- une réserve de précaution de 70,3 millions d'euros ;

- des minorations d'engagements juridiques d'exercices antérieurs pour un montant total de 133,4 millions d'euros en raison d'une diminution de coût final de certains projets ou de leur abandon.

Retraitement fait de ces minorations, la consommation réelle s'établit, au 31 décembre 2021, à 1,75 milliard d'euros pour les dotations portées par l'action 1.

Ainsi, pour les principales dotations d'investissement les taux de consommation des AE avoisinent les 100 % en 2020 et 2021 . Qu'il s'agisse des dotations classiques ou des dotations exceptionnelles, les niveaux d'engagement des AE et de consommation de CP mettent en exergue deux phénomènes :

- la bonne gestion par les collectivités des crédits alloués pour des opérations matures ;

- le besoin important de financement des investissements par les collectivités et subséquemment l'utilité de ces dotations.

Consommation des AE et CP des dotations d'investissement
entre 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires PAP/RAP

3. Des points de vigilance identifiés concernant l'évolution des dotations d'investissement aux collectivités territoriales

Comme évoqué supra les taux de consommation des dotations d'investissement sont proches de 100 % en raison des besoins importants des collectivités territoriales en termes d'investissement et les niveaux de crédits ouverts en 2020 et 2021 sont historiquement élevés en raison, notamment, de la mise en place de la DSIL exceptionnelle.

Cependant, si les rapporteurs spéciaux saluent l'effort du Gouvernement en matière de dotations d'investissement ils souhaitent rappeler la forte contrainte budgétaire qui pèse sur les collectivités territoriales depuis plusieurs années (d'abord par une diminution substantielle de la dotation globale de fonctionnement de l'ordre de 13 milliards d'euros entre 2014 et 2018, puis par un encadrement de l'évolution de leurs dépenses de fonctionnement via les contrats de Cahors). Cette forte contrainte sur les dépenses de fonctionnement des collectivités et leur capacité d'autofinancement a provoqué une contraction de l'investissement public local.

Or, le prochain projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP) prévoira assurément une nouvelle contribution des collectivités à l'effort de redressement des finances publiques. Si les modalités de cette contribution ne sont pas encore définies, elles s'inscriront, de fait, dans un contexte inflationniste qui coïncidera avec la fin des dispositifs exceptionnels mis en oeuvre dans le cadre du plan de relance.

D'autre part, les rapporteurs spéciaux ont mis en exergue dans leur rapport sur les dotations d'investissement de juillet 2021, le risque d'une forme de « captation » croissante des dotations d'investissement par les démarches contractuelles et partenariales initiées par l'État qui aboutirait à un financement des priorités définies par ce dernier au possible détriment des besoins et défis qui se posent aux territoires et que les élus de terrain restent les mieux à même de diagnostiquer.

B. UNE CONSOMMATION DU PROGRAMME 122 MARQUÉE PAR LES SUITES DE LA TEMPÊTE ALEX ET PAR UNE IMPORTANTE SOUS-BUDGÉTISATION DES DÉPENSES DE LA DGCL

L'exécution du programme 122 par rapport aux crédits ouverts en LFI s'établit à 276,6 millions d'euros en AE (soit 265 % des crédits ouverts) et à 56 millions d'euros en CP (soit 119,6 % des crédits ouverts).

Exécution des crédits du programme 122 en 2021

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

1. Une consommation importante dans le cadre des opérations de reconstruction à la suite de la tempête Alex qui se poursuivra dans les années à venir

En 2021, les crédits ouverts au titre des aides exceptionnelles aux collectivités territoriales (action 1 du programme 122) se sont élevés à 49 millions d'euros en AE et 46,9 millions d'euros en CP dont 40 millions d'euros en AE et 30 millions d'euros en CP pour la seule dotation de solidarité au titre des événements climatiques (DSEC).

Cependant, les dépenses générées par la tempête Alex ont finalement atteint 126 millions d'euros en AE et 40,2 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021.

Le delta entre prévision et consommation a été financé :

- par le report sur 2021 des crédits non consommés en 2020 à hauteur de 91,7 millions d'euros en AE et 25,2 millions d'euros en CP ;

- la création d'un fonds de concours en 2021 afin de rattacher la contribution financière du fonds de solidarité de l'Union européenne pour 59,3 millions d'euros en AE et CP ;

- des ouvertures par la loi de finances rectificative du 19 juillet 2021 pour abonder la dotation de solidarité d'une part (8,6 millions d'euros en AE et 4,5 millions d'euros en CP) et pour créer un fonds de reconstruction exceptionnel (34,7 millions d'euros en AE et 10,5 millions d'euros en CP).

Ce fonds exceptionnel, d'un montant total de 150 millions d'euros en AE et CP, fera donc l'objet d'ouvertures sur les exercices à venir en fonction du rythme des travaux de reconstruction programmés.

Le solde restant entre les ouvertures et reports intervenus en gestion 2021 et la consommation au 31 décembre fera l'objet de reports sur 2022.

2. Des dépenses non budgétées pour la DGCL

Les crédits ouverts en LFI 2021 au titre de l'action 2 et destinés à couvrir les dépenses de fonctionnement et d'informatique de la DGCL étaient de 0,71 million d'euros en AE et de 0,67 million d'euros en CP.

Parallèlement, l'exécution 2021 s'est établie à 3,4 millions d'euros en AE et 1,2 millions d'euros en CP soit des taux d'exécution de respectivement 473 % et 180 %.

Cette sur-exécution massive s'explique par le financement de deux mesures :

- le déploiement de la nouvelle carte des maires et des adjoints aux maires. En effet, la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale prévoit qu'à compter de leur désignation, les maires et les adjoints sont destinataires d'une carte d'identité tricolore attestant de leurs fonctions ;

- des projets informatiques structurants pour la DGCL en lien avec la direction du numérique du ministère de l'intérieur.

Les rapporteurs spéciaux s'étonnent cependant que ces mesures n'aient pas été budgétées en LFI 2021 au regard de leur caractère prévisible notamment concernant la nouvelle carte des maires.

ANNEXE

Exécution 2020 (pour mémoire)

Exécution des crédits des programmes 119 et 122 en 2020

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)

Exécution des crédits des programmes 832, 833 et 834 en 2020

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat (d'après les documents budgétaires)


* 1 Les crédits d'investissement pour les applications de la DGCL ayant été transférés sur le programme 216 au 1 er janvier 2020, à la suite de la création de la direction du numérique, l'action 2 retrace désormais, principalement, les coûts de fonctionnement courant, d'immobilier et d'informatique.

* 2 Aucun crédit n'a été consommé titre du programme 832 depuis 2013.

* 3 Pour mémoire, les crédits de compte 833 ne relèvent plus des seuls produits de la fiscalité locale à la suite de la suppression progressive de la taxe d'habitation et de la part régionale de la CVAE dans le cadre de la réforme des impôts de production. Ils comportent désormais une fraction de TVA versée aux collectivités impactées par ces réformes en remplacement des impositions supprimées.

* 4 Loi n° 2021-1549 du 1 er décembre 2021 de finances rectificative pour 2021.

* 5 Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

* 6 Revenu de solidarité active.

* 7 Allocation personnalisée d'autonomie.

* 8 Prestation de compensation du handicap.

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