II. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT ET ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS » A DE NOUVEAU ÉTÉ MOBILISÉ POUR SOUTENIR LES SECTEURS PARTICULIÈREMENT AFFECTÉS PAR LA CRISE SANITAIRE

A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS, PLUTÔT PROCHE DE LA PRÉVISION, MASQUE D'IMPORTANTS MOUVEMENTS DE CRÉDITS EN COURS DE GESTION

La direction générale du Trésor est responsable du compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » 17 ( * ) , l'Agence France Trésor en assurant la gestion. Les deux sont chargés d'examiner les demandes d'avances, le CCF retraçant en effet, par le biais de programmes spécifiques, les avances octroyées à divers organismes ainsi que leur remboursement. Longtemps composé de quatre programmes, le CCF a vu son périmètre s'élargir au cours de l'année 2020, pour soutenir des secteurs particulièrement affectés par la crise sanitaire .

Les quatre programmes « traditionnels » retracent les avances octroyées à :

- l'Agence de services et de paiement (ASP) au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (programme 821) . Avec cette avance, l'ASP couvre une partie de ses besoins en trésorerie au titre des aides agricoles versées le quatrième trimestre et dans l'attente de leur versement par l'Union européenne, qui intervient seulement au début de l'année suivante. Une marge de sécurité est toujours gardée sur ce programme, afin de ne pas pénaliser l'octroi des aides aux agriculteurs ;

- les organismes distincts de l'État gérant des services publics : établissements publics nationaux, services concédés, sociétés d'économie mixte, organismes divers de caractère social (programme 823 ). Ces organismes peuvent bénéficier des crédits du programme pour couvrir leurs besoins de financement lorsqu'ils ne peuvent recourir au marché bancaire. Quatre avances ont été octroyées en 2021 : deux à France Agrimer au titre du préfinancement d'aides européennes (86,6 millions d'euros au total), une à l'ASP pour le préfinancement des aides communautaires liées au Brexit (16,2 millions d'euros) et une à l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger dans le cadre du financement de travaux immobiliers dans des lycées à l'étranger (2,8 millions d'euros) ;

- d'autres services de l'État : budgets annexes, services autonomes (programme 824) . Aujourd'hui, ce programme ne bénéficie qu'au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ( BACEA) . Si la situation de trésorerie favorable du BACEA lui avait permis de poursuivre une trajectoire de désendettement de 2015 à 2019, la crise sanitaire, et son impact sur le trafic aérien, ont logiquement conduit à interrompre ces efforts. De nouvelles avances ont été octroyées au BACEA en 2020 et en 2021 pour près de 2,35 milliards d'euros et son niveau d'endettement est passé de 667 millions d'euros à la fin de l'année 2019 à 2,7 milliards d'euros à la fin de l'année 2021 18 ( * ) . Toutefois, pour ne pas pénaliser la gestion du budget annexe, les conventions signées au titre de ces nouvelles avances prévoient des durées d'amortissement flexibles et la possibilité de procéder à des remboursements anticipés ;

- l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex (programme 825) . Ce programme, destiné à verser une éventuelle avance aux victimes du « médiator » n'a fait l'objet d'aucun décaissement de crédit en 2021.

Pour répondre aux conséquences de la crise sanitaire et économique, trois programmes ont été créés et abondés par le biais des lois de finances rectificatives pour 2020 et 2021 :

- le programme 826 « Avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité » a été créé par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 19 ( * ) . Il est destiné à compenser la chute des recettes de la taxe d'aéroport, affectées au financement des dépenses de sûreté-sécurité. Ces premières avances, versées à 86 exploitants, ont une durée maximale de 10 ans, la première échéance de remboursement devant intervenir en 2024. Les crédits ouverts en 2021 et entièrement consommés ont permis d'octroyer 84 nouvelles avances, pour un montant total de 250 millions d'euros ;

- le programme 827 « Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 » a été créé par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 20 ( * ) . L'avance a été octroyée pour une durée maximale de 16 ans, avec une première échéance de remboursement en 2023. Aucun crédit supplémentaire n'était initialement prévu en 2021 ;

- le programme 828 21 ( * ) « Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19 » a également été créé par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020. Contrairement à ce qui était prévu, l'octroi de ces avances n'a pas eu lieu en 2020 mais a été reporté en 2021 . À la condition que la date de remboursement ne soit pas ultérieure au 1 er janvier 2031 et que la durée de remboursement ne soit pas inférieure à six ans 22 ( * ) , les AOM bénéficiaires peuvent choisir de ne commencer à rembourser les avances reçues qu'au moment où les recettes tarifaires et le versement mobilité seront revenus à leur niveau moyen pour les années 2017 à 2019 ( clause dite de « retour à meilleure fortune » ).

Exécution des dépenses et des recettes du CCF « Avances à divers services
de l'État ou organismes gérant des services publics » en 2021

( en millions d'euros )

Programme

Exécution 2020

LFI 2021

Exécution 2021

Exécution 2021 / Exécution 2020

Exécution 2021 / LFI 2021

[ 821 ] Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune

AE=CP

8 108,21

10 000,00

8 067,90

- 0,50 %

- 19,32 %

[ 823 ] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

AE

90,00

375,00

162,36

80,40 %

- 56,70 %

CP

90,00

358,00

105,60

17,33 %

- 70,50 %

[ 824 ] Avances à des services de l'État

AE=CP

1 250,00

1 060,58

1 100,58

3,77 %

[ 825 ] Avances à l'ONIAM au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex

AE=CP

0,00

15,00

0,00

- 100,00 %

[ 826 - nouveau] - Avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

AE=CP

299,76

250,00

249,95

- 0,02 %

[ 827 - nouveau ] - Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

AE=CP

1 175,00

0,00

800,00

[ 828 - nouveau ] - Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

AE=CP

0,00

0,00

647,31

TOTAL MISSION

AE

10 922,97

11 700,58

11 028,10

0,96 %

- 5,75 %

CP

10 922,97

11 683,58

10 971,33

0,44 %

- 6,10 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'exécution des crédits ouverts sur le CCF est plutôt satisfaisante , avec un écart de consommation des crédits par rapport à la prévision de - 5,8 % en autorisations d'engagement (AE) et de - 6,1 % en crédits de paiement (CP). Cet écart apparaît relativement modéré, d'autant plus si le programme 821, au fonctionnement particulier, est exclu (écart de + 3,1 % en CP).

Les crédits consommés sont également très stables entre 2020 et 2021 , avec une hausse des CP de seulement 0,4 % entre 2020 et 2021. Dans la trajectoire globale du CCF, le niveau de consommation atteint un point haut , qui s'explique par la mobilisation du dispositif des avances pour soutenir les secteurs particulièrement affectés par la crise sanitaire.

Ces constats masquent toutefois d' importants mouvements de gestion des crédits en cours d'exercice , dont le graphique ci-dessous ne peut donner une idée qu'à l'échelle de la mission, alors même que les programmes ont connu des divergences significatives sur ce point.

Mouvements de crédits intervenus en gestion
au cours de l'exercice 2021

(CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Les 750 millions d'euros prévus sur le programme 828 (AOM) en 2020 n'ont pas pu être consommés, le décret d'application et les instructions des demandes étant intervenus trop tardivement pour un décaissement en 2020. Les crédits ont donc fait l'objet d'un arrêté de report en 2021 . S'il avait alors été indiqué au rapporteur spécial que la totalité des crédits prévus serait bien consommée, ce n'est finalement pas le cas. La prévision reposait en effet sur une estimation maximaliste, à partir des pertes prévisionnelles des AOM en 2020, alors que ces dernières ont pu demander des avances d'un montant moindre à celui qui avait été anticipé. Chaque avance remboursable a par ailleurs fait l'objet d'une convention tripartite entre l'AOM, le préfet et le directeur départemental des finances publiques.

Par ailleurs, et contrairement à ce qui avait été annoncé lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2021, des crédits ont finalement été ouverts sur le programme 827 (Ile-de-France Mobilités), avec l'octroi d'une nouvelle avance de 800 millions d'euros et d'une durée de 15 ans, à la suite d'une décision du Premier ministre au mois d'octobre 2021.

Le BACEA a également bénéficié de 200 millions d'euros supplémentaires 23 ( * ) , après l'ouverture de plus d'un milliard d'euros en loi de finances initiale pour 2021. Cette enveloppe n'a pas été consommée en totalité.


* 17 À l'exception du programme 828, dont le responsable de programme est le directeur général des finances publiques.

* 18 L'endettement du BACEA ne s'est pas accru à hauteur du montant des nouvelles avances octroyées au budget annexe puisque le budget annexe a continué de procéder à des remboursements de précédentes échéances, certes dans une ampleur bien moindre que celle observée avant la crise sanitaire.

* 19 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 20 Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 21 Le programme 828 est le seul programme du compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État et organismes gérant des services publics » dont la responsabilité n'incombe pas au directeur général du Trésor mais au directeur général des finances publiques.

* 22 Sauf accord du bénéficiaire.

* 23 Ouvertures des crédits demandés, comme pour le programme 827, lors de l'examen de la deuxième loi de finances rectificative.

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